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Le réc lit comm e outll d 'autoréf le~dvlté,


d'a uitoco n sclentlsaUon
et d 'a uitoconstr u ct l o n

sop lHa L . Burns

8.1.. LIESPRÉMICES ID•UN T1RAVAIIL SUR UES RÉCITS

8.1.11. Un.e toUabora ,t ion de siens


Une interve nti on donné,e .a l'UQAW au Dêparte ment de dans e est à l'ori-
gine de ce texte. Cette intervention avait été préµarèe dans le cadre d'un
cours de mêtlllodollogie à l a maitrise dirigé par Monik llrnneau en 2002..

1.. Un,i,ve!Si,~ du QÉ bec à ntré.al

© 2007 - Presses die D'Un ive1Stlf d• Qu.&.x


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C-0 mme d'autres que nous avons réalisées dans le courant de l'annê-e2002
et 2003, e'l e résultait d'un travail ,que nous menions e,n collaborntion sur
les enjeux de la redl1erd1e créat ion et sur ta possilbilité d'élaborer des
outi s mêt hodologiques appropriés â ce type de rncherdhe. !Notre coUabo-
ration reposait !>Ur deux post ures, celle de Monik Bmneau, professeurn de
méth odologie à La maîtr ise en danse et au doctorat en études et pratiques
des a1rts, et la m' enne, en ta nt qu'étudiante au doctorat en études et p1rn-
ti ques des arts à !l'Universit é du Québec â Mont réal. Notre base commune
était ceUe d'avoir eu, ou d'avoir encoire, une prnt ique artist ique, la danse
pour e~le et Iles art.s plast iques. pour moi. Ensemble, nous réalisions le
manque de clarté de ce doctorat , de ses en1eux, de ses règles et de ses
objectifs, devant faire face rune et l'autr e quotidiennement, elle aux ques-
tions de ces étudiants da111sses cours de méthodologie, et moi aux pro-
blèmes quoti diens de ma irecherche création en ta nt qu'étudiante.
J e dirais aujourd'hui avec le recul que, pour préparer nos int erven-
tion s, nous nous reposfon s essentie Ule ment sur Les ant ériorit és de l'étu-
diant à la recherche créati on, l'expérience qu'avait eue celui-ci de sa
prati que a1rt is.tique, des processus et de ses façons de faire et d'agir. Pour
Monik Bruneau et moi, l'expéri ence de la créat ion et le vécu de la pra-
tiq ue artistique de L'étu diant, anté rieur à sa recherche à l'universit é,
pouvaient être comparés à une graine que nous. devions nous ,empresser
de ptant er pour faire germer une cohérence dans la recherche au docto-
rat, pour qu'à t erme, de ces deux postures., celle de chercheur et celle
d'artist e, puisse naitr e ce'lle de rart ist e-dlrnrcheur.
La propos.it ion avancée durant cette inte rvention prolongeait notr e
ligne de conduite; eUe induisa't que, si l'ét udiant prenait con science
des récit s prés.ent s dans sa pratiq ue art isti que anté rieure à La recherdhe
au doct orat , ou à la maitrise, il pourrait esquisseir pllus facHement un e
méthode, une approche, un paradigme, voire une écriture approprié,e à
sa re,cherche en cours. Cette idée éta it dans le prolongement d'un tr avail[
de recherche auto réfiexif et rétrospe ct if. Nous souhaitions que Les étu-
diant s développent des out ills à partir de lem s expériences et du vécu de
leur pratique art istique. Le processus. qu,e nous souhaitions mettre au
j our, pour l'étudiant, éta it celui d'une prise de consde nce de la nécessit é
de revenir sur les. enjeux de la reche1rc,he en art et de son incidence sur
le développement des connaissances.
Pourquoi avions-nous choisi le récit comme moyen d'aborder Iles
quest ions méthodologiques. et de recherche en thèse création pour cett e
i nte rventi on ? lai premiere réiPonse à c--ettequest ion vient d'un premier
constat qu,e nous avions fait , selon Lequel Iles arttst es avaient bien sou-
vent une approche d'écrit ure anté1deure â leur recherdhe doctora le
constitu ée de notes, de carnets de rout e, de j ournaux de bord, voire

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d'essais. Visiblement, la pl[upart des arti ste s écrivaient ou avaient écrit,


cert es de maniêre fort dive;rs,e, mais des t races subs.ista ient: de lem s t en-
t is.tes sembfaie1nt réfléchir à lem créa-
t at'ves dans lem s carnet s. l es a11
ti on ou, du moins, prendre en compte les réflexions faites paird'autres sur
cel e-ci. IEt,finalement:, cert ains arti stes avaient envie d'écrire pLus que
d'autr es et de poser des mots sur les choses qui 1[es entouraient, et certai -
nement ceux qui s,e présentaient au doct orat en étu des et prati ques des
art s. Pour ces artist es en recherche création, le récit , les. écr't s et récri-
ture devenai1ent t rois nouveaux outils et médiums à dêvelopper et à
approfondir, car la th èse créati on devait être constit uée par une création,
mais aussi par un écrit. Enta nt q,u'étudfante au doct orat, je ne c-onnais-
sais que.tro p bien cette angoisse de l'écriture et de récorit:. Car me s,ent ant
confiant e face à la oréat ion et à sa production, j e ne sentais qu'insêscurité
face à la perspect ive de devoi r liire, analyser, écrire, rédiger, compren dre
des écrits et des irécits d'autires pour en fah e un moi-même .. Lanotion de
récit et d'écrit était donc, nous sembllait-U, une étape importa nte dans La
con strud ion du cheminement de irecherche pom l'ét udiant .. Nous nous
devions d'aider ce'lui-d à reprendre confüince, et pourquoi ne pas le faim
par la compréhension d,e ses propres récits et de s,es propres écrit s piré-
sent s dans sa ciréation. Mais Le récit deve111a it aussi un sujet de p1rédilec-
ti on dans notre collaboration parce que ma propre rec,herche doctorale
prenait ses assises sur llanotion même de récit dans le milieu de l'art. Ces
intervent ions devenaient allors à t it re personnel un moyen d'étendre ma
connaissance sur le sujet et de trouver par ce biais toutes les réponses
nêscessaires à ma propre recherche oréat ion.

8.1.2. Les récits comme prémices à, ma 1 recberche


doctorale en t hèse crèation : enjeux de sens
Pouir comprendre mon int érêt pouirIles récits et la raison pour laqueULe ils
sont devenus prégnant s à mon tr:avail de recherche créati on et de mes
inte rventi ons en métho dologie, j' exposerai rnpideme11 t les enjeux de ma
recherche doctorale, aut our du plhénornène du récit .. Très t ôt , dans mon
parcours d'artiste en art visuel, j' ai eu La sensat ion d'êt1r~ amputée (pri-
vée) d'une histoire. de L'art à Laquelle j e pourrais adhérer. A ce moment- Là,
il exist e à ma conn aissance deux grands rédts prégnant s au milieu de
l'art français. Le premier est l'h'sto ire moderne, où les arti st es pour-
suivent ll'art en fonction d'une progression, d'un dépassement et d'une amé-
lioration continu e de l'histoire des idées et: des formes. Le second, en
ruJPture ou dans a cont inuité du premier, apparan dès les années 1960,
au moment où les artist es rompent avec L'idée moderne d'une êvol[ut'on
des formes et des idées par la parodie et la déconst:ructi on de ce qui
avait j usque-ilà construit l'histoire de rart .. Ce moment de rupt ure reçoit

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l'appe Lation de postmodemité, et p us prédsé rnent de post modernité


décons.tmctivmst e. IBien que ces deux approches semblent se contr edire,
e!llesj ouent sur le même pr' nd pe d'une conti nuati on de L'hi stoire de l 'art ,
et cela, à !l'intérieur d'un cercle sans fin, qui est celui de l'art pour rart.
En ta nt qu'arti ste en art visuel, j e ne me retrouv ais pas, concep-
tu eUeme.nt , dans ces deux apprnahes. de l'art. Même si le modernisme
avait nourri mon tra vail, j e ne souhaita is pas me poser en opposition à
cette approche ni dans son prolongement . Quant à déconst ruire ce qui
existait déjà, je n'en ressent ais pas Ile besoin. Cependant , en France, il ne
s,embLait pas existe r d'altern ative â ces deux voies. Du coup, une ques-
tion a lente ment émergé, dans a perspect ive d'un tr ava'l de reche.rche :
s.i aucun des deux grands récit s prégnants à 'art ne me convenait, com-
ment poursuivre l'histoire de l'art en ta nt qu'artiste ? Sur quel grand récit
ma oréation pouvait-elLer,epose1r? Et, enfin, comment allait -elle se légi-
ti mer, si ce n'eta it pas en fonction du grand récit moderne ou de ce!lui
postmoderne dèconstr uct ivis.t e? En y repensant, j' en viem à me dire que
j e souhait ais acquérir une forme d'aut onomie f ace à l'Hist ofre imposée
par Ile milieu de rart et trn uver une voie alternative à une de ces deux
histoires .. Projet ambitieux, mais qui m'a permis de définir Ile probllème au
départ de ma redherdl1e, le malai se à même ma pratique artist ique et sur-
t out !l'enjeu de ma thèse. lirouver ou écrire et déchiffrer une lùt oire, q,ui
ferait sens par rnpport à qui fê t ais et au monde dans LequeLj e vivais, et
dans Leque j e ressenta is Le besoin de me projete r.
Avec ce proj et en t ête , je t rouvai finalement une histoire, un grand
récit auque!lme raWer, celui esqu1is.sé par Suzi Gabllik dans son livre The
R'ee nchorrtment,of Art, ta postmodemité r,econstrnctiviste. CeUle-ci fai-
s.ait suite aux idées de la contre-rn Ltur e américaine, entr e autres du phi-
losophe Morris Berman et du t 1éologi,en Davi d Ray Griffin, et reposait sur
un para dogme holisti que, d'où émergeait une « est hétiq ue partidp at oire
d'inte rconnexion » à trav ers laquelle ri ndM du ret rouve, par sa pratiq ue
artist ique et de vie, Le corps, rinconsd ent, les formes arclhétypales et
s,on sens de l a communauté. l:'art n'était pLus en rupture, mais dans le
prolongement de ce qui avait ét é, voire de ce qu'avaient été les fonctions
de 'art avant l'ère chrétienne.. l:'art retrouvait une fonc-tion sod ale, spi-
rit uel e, polliti que et esthé tiq,ue, plus aucune séparation ne pouvant
existe r comme pendant le modernisme ent re ces différentes spheres de
la connaissance. À t ravers cette phillosophie et est héti qu,e reconstructi -
viste, j e t rouvais alors Les moyens de me projet er en tant qu'artist e et en
tan t que dilercheuse.
C'est avec cett e préoccupatio pom Le récit dans son acception la
plus Large que j'aborde mes inte rventions sur Le récit artis t' que pris
comme un moyen pom L'art ist e et futur che1raheur en recherche création

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de t rouver son histoire personnelle, so11hlstoir,e et donc ses motivatio ns,


ses référents, ses point s de vue, ses parti s. pris, to ut ce qui en somme
définit l'individu et l'art iste face au monde. Dans le cadre des 1nterven-
toons nous pouvions explorer à lois.ir ceUe démarche chez les arti stes-
chercheurs. Car que fais aie1nt-:ils, s.1 ce n'était de ten te r d'écfir,e une
histoire qui soit prnpre à leur univers plast ique, visuet, arti st' que et es.thé-
ti que ? N'étaient-ils pas à poUJrça? Pour une fois., i s ne !laissaient Lesoin
à personne d'autre queux-mÊrnesde rédiger et de r:aconterl[eurs histoires
de la créati on .. Car, il est à noter que, mÊrnesi Iles artht es ont to ujou1rs plus
ou moins écrit, leurs écrits n'ont j amais acquis de sta t ut en dehors de leurs
propres prntiques art ist' ques. Mai1s la naissance de ce type de doctornt
illustre l a volonté de certains art istes d'acquérir u111autre statut parl'écri-
ture et la réflexion . !L'a rtiste prenant · nalement la parole dans un cadre
universitaire, pour s,e donner Les moyens de faire entendre la voix de l'art
par Iles faiseurs d'art eux-m,êmes, et non plus seullement par Ile oritique,
l'historien, le philosophe, le sémiologue ou !l'esthèt e.
ti1apropre démarche de recherche création sUirIle grand rédt est
prég nante à ma démarche de redherche mèthodoLogique, Ile rédt n'a
d'utilité que s'il[ rempllit une fonct ion construc-tive poUirl'individu qui
l'énonce... Par Ile récit, l'artiste peut se construire, car il trouve les moyens
de constrnire s.a prati que en La définissant et e11l'arrimant à une histoire
pl us Large que ta sienne et en la liant à d'autr ,es histoires d'arti stes ; mais
H constrnit aussi sa prati que dans la mesure où ce réd t qu'il énonce l[ui
permet d'artk ule,r ses intent ions à ses formes non plus. de manière
inconsciente mais cons.c·ente. Â travers ma propre expérience d'écrit ure
et de recherche, j e sais avoir regagné une confianc-:edans mon tr avail[
art isti que et dans mon parcours d'artoste que j e n'auiraisjamais pu obte-
nir par une rec-:o nnaissanc-: e exté 1riem e. Car cette voie autoréfllexive que
représernte un e th èse création se const ruit à travers les fond,ement s
mêmes de ce que ll'on est en tant qu'i dividu et artiste et s'étab tit donc
fermement en so· sans risque de disparaitr e. Et c-:e la n'est possible que si
l'a rtiste-che 1rdheur ac--cepte de revenir sur ce qui l'a construit .

8.1.3 . Reve.mri siursoi et sur lies récits présents à ma prat1iqiue


artistique: u11le néc.essitèmétllilodologique
Dans une perspectiv e reconst rucfvis te , Suzi Gablik envisage aussi que
l'individu eff ectue un « returnJorword», c'est-à-dire tittéra lement un
retour en avar1t2,pour être à même de comprendre solflpropr,e chemine-
ment art istique et de se sorti r des impasses du modernisme et de la

l. Tlilducfu n de 1ra,ute uire.

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postmodernlté déconstructiviste . . Cette impllicat ion de lla part même de


l'a rtiste , non plus seulement tlhéorique mais pratique, rejoignait mes
préocoupations d'artist e-chercheuse au début d,e mon parcours universi-
ta ire : â quoi pouvait me servir une tlhèse si ce n'était pour envisager
qu'elle me tran sforme en t ant qu'artist e et individu, et qu'eUeme peir-
meUe concrètement de me sortir de mon emban as 1110111seulement t l 1éo-
rique mais avant tout pratique? Je ne souhaitais pas réaLiser un e tlilèse
qui seralt une th èse histoirique, j'ét ais Il.à,présente â ce doctorat en t ant
que praticienne et a Us.t e et non historienne, et donc prête à participer
à l'écriture même de mon histoire, à la fabriquer par mon propre récit. H
ét ait donc ·mpératif que j e me donne les rnoye.nsde réécrire mon hist oire
dans ma pratique. J'ai ainsi façonné le projet d'écrire un récit qui me soit
propre, à tr avers ma pratique arh s.tiqu e, dam Ile prolongement de cett e
notion de ret ou1r en avant de Suzi Gablik. ILen naquit un procédé artis-
tiq ue et de création que je nommai la réécriture, et qui mnaètement
s.i,gnifiait réécrire dix années de oréation. Un retour en arrière, dans Iles
arnhives de ma oréation, qui permettr ait, dans un premier te mps, de
déchiffrer et de retrouver Les motivations. à l'origine de ma créati on
artistique et , dans un deuxième t emps, d'aller de l'avant dam la mesure
où cela me permettrait d'écriire un récit qui me soit personnel et donc
adapté à ma situation d'artiste et d'individu.
Cette notion de retour en avant de Gablik et Ile procédé de la réé-
criture prollongent le principe d'au oréflexivité , d'autoconsd entisation
et d'autoconstrnctio1n de ta recherche création, t eille que nous l'e nvisa-
.gions avec Monik Bruneau. Cart ourner son regard vers ce qui existe déjà
à mÊrne sa pratique, pour constr uire ce qui est à veniir, c'est accepte r
l'idée même de réfléchir sUJrsoi et sur ce qui nous a con struitjus qu'allors,
pour imaginer un futm. C'est envisager de prendre soi-même conscience,
à parti r des traces laissées préalablement, d'où l'on vient et ce ,qui nous
a conduit â être où nous en sommes et, surtout, queue direction nous
souhaitons prendr,e dans un avenir proche. Ramené sur Ile plan des t lhèses
création, ce prncédé nous semblait d'autant pllus adéquat que le regard
de l'étu diant ne pourrait que se prnjeter vers un futur, vers un ailleurs où
s.a pratique artistique serait ornnip1résent ,e à sa recherche en ,cours. Car
l'étud' ant parti rait d,e sa prati que d'artist e antérieme pour développer
une pratique de chercheur et, grâce à cett e nouvelle posture de cheir-
cheuir, il regarderait autrement sa pratique d'artiste. Par autrement,
j' enten ds cet ét at d'esprit particuLier,par lequel Ile cherdlrnur est amené
à observer sans apriori et sans. j ugement préalable ce qui se trn uve
devant lui. L'évidence de notre création et que ce que nous crnyons avoir
produit se tr ansforme lorsqu'i est abordé avec un œil neuf et un œil de
che.rcheur qui s'int en oge sur les fondements d'une pratique, Ile soi créa-
t eur devenant comme celui d'unautire, une schizophrénie volont air,e et
consciente qui amène Le doublle regaird du dhercheur-artist e.

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nmuction 261

Dans le tableau 8.l , folust1re ce que sen1ient les deux étapes du


tr avail[ en recherche création: un premier temps qui cons1iste à revenir en
arr' ère vers Ile passé ,et !l'Intérieur d,e l[a création, que nous albordons dans
ceil:teinterve ntion par l'a nalyse des rédts prése11ts à l[a prat ique d'artiste;
et un deuxième temps. oiii le cherchem fait des liens entre ce qu'H a
observé ,et la construction de sa thèse et de sa recherche proprement
dit e. ILà,dans ce deux· ème temps ,que nous ne ferons qu'effleurer, ill
dél:ermi11 1era son ty pe d'approche, Iles aut eurs de référence, Les formats
de t hèse, etc..
Pour revenir à l'objet de cette int erventi on, qui ,est de plonger au
cœur des récits de rarfste -chercheur qui constitu ent ce premier temps
de la recherdhe créati on, je précis.erai qtfau--0elà des quest io ns de
recherche â proprement parler et des questio ns soulevées par ma pra-
tiq ue artis tique, les manques au départ de ma recherche créati on ét ait
t e'ls sur Le plan méth odologique que j e fus constamment amenée, malgré
moi, à revenir sur ma prnpre pratique d'artiste pour y trouv er ta force et
l'inspiration de continuer. J 'ai senti i111tuitivement que pour sortir des
impasses et des angois.ses du docto rat , lié au comment faire, il me fallait
effect uer un retour sur ma pratique d'artiste, une sorte de marche arrière
~ans le passé, un regard jeté sur ce qui me construisait préalablement.
A nouveau, j' entrepris un processus équivalent à celui d'une rééoriture,
mais qui cette foi s-ci pLongeait au cœur des questions de méthodes
et d'apprnches associées à la recherdl1e. Comment savoir comment je
tr avafüai s et quelles étaient mes fa çom de procéder dans ma pra-
tiq ue artist ique? !Première quest ion de méthod e de travail s'il en est. IEt,
pour y répondre, quoi de plus commode que toutes ces t races, que toutes
ces Lignes d'éc1ritme dans ces camets amassés au fil des ans dans mon
atelier. Ne refièternient-iils pas l'essence de ce que ma recherche docto-
rale serait ? Et Lathèse création â venir ne s,erait-eUlepas comme 11'.icc u-
mulation, l a synthèse, le reflet, le résu ta t de toutes ces écritu res
pass.ées et de ces gest es porteurs du comment faire? Est -ce qu,e dansces
ê<:ritu1res pass.ées, je ne t rouverais pas les mécanismes de ma pensée et
la confirmation du chemin que j'adopt eirais en ta nt que cherdheuse? Ce
procédé de revenir en arrière prenait direct ement ses sources dans La
notion de réécrit ure que j'amenais par ma quest ion de recherche de
thè se, mais c'est grâ.ce à cet aller-:retour entr e pratiqu e et recherdhe
qu'un procédé mél:lhodo l ogique est né.
C'est ainsi que dans Ile cadre de ma redl1erche j e me suis effect ive-
ment servie de tous les camets présent s à ma prati que artisti que depuis
dix ans. Je Les ai rellus., annotés, j' ai te11t é d'en dégager Lesidées princi-
palles et les directi ons.. J'ai mené ce travail de deux manières, â La fois
pour la recherche et dans un sens artist i que. IEn Les exp orant , j'ai pu me

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262: T,raiiœr de ,œcllercllecœation e■ art

Tableau8.1
L!ES DEUX ÉTAPESIDEli.A Ill ECt-ERC!HECRÉATION
:r TEMPS

I.e rega nl ·se toume vers le !J<il ·ssé


Le re,g,n d se tourn e sur r ext élileur
,et l'hité ri e 111r
de- sa, i::réaUo,n

TravaU autoréfl ,exllf et rétr osp,ect lif Tra,vai I d' ext ~i o-li ·sat.1,on
et de mh ,e en pla ,ce de 1 -e ns
• Prise de conscience et élitboratioa
di! con,Ris.sanœ5
• Ut;ili,satiotl des acq uis.de lla pratiq,ue -
1
üe ,n à t rou'o'E!
r avec les ty pi!s d'ilppro::hes,
con nait re les en,je u~ d'e sa pratiq•ue artistiq.e de- métitodes et de fur■atsde ~
• Outi l: analyse des. œcirts.de 1 a pratiq~e
• PQ·llique arti5tiq1ue = ~t de sa peni!lée

voir et embrasser tout e la partie oulbliée de ma ciréation artistique pour


découvrir La partie cachée de l'iceberg, d'où j'ai pu faire émerger certaines
de mes questions de recherche, mais surtout le procédé de Laréêcriture
à même ma pratique. Grâce à ce travail d'introspection, fa i par exemple
pu, su1r le plan arfot i,que, réaliser que j'employais systématiquement un
procédé de rêêCJr iture dans mes carnet s de voyages rêa~isés au cours des
résidences d'artiste . Le processus prenait: la forme suivante : fécr iva·s un
carnet durant mon séj our, puis le rééniv ais entiê rement:dans un autre
carnet quand j,e rentrais. Je fais ais La m,ême chose déjà de tout es Iles
notes que j e prenais. de mes œuvres et des processus de création_; eUles
êtaient prises sur des carnets dive,s; puis j e Les réécrivais da s de nou-
veaux carnets en les collant, Les découpant, les insorivant autrement.
Maisj e c--0mta t ai, en re-regardant ma création, que j'allais même pLus
loin, j e Les corrigeais quelques années après. J'ét ais sans m'en rendre
compte déjà dans un processus de rééaiture. J'avais dans le déroulement
de ma redlrnrche doctora le commencé par Le deuxième te mps, celui du
regard to urné vers rextérieur.. J'avais fait émerger en amont:de la pra-
tiq ue le concept de ré-écriture par mes lecturest lhéoriques, ma's soudain,
là, dans ce temfPs rét rospectif, j e réalisais qu'H n'y avait: pas de asard à
l'orient ation de ma recherche. Elflfait, ce procêdè était déjà présent dans
ma création. Si je n'.avais1> as effect ué-un te l retour en an ' ère sur ce qui
caract érisait ma création, je ne me semis peut-être j amais rendu compte
que ce prncédé éta it prégnant à ma ,c,réation.Mais fa urnis certainement
gagné-du te mfPs si j'avais opéré ce retour sur Lapratiqu e avant d'aborder
les questi ons purement t héoriques, sans avoiirde projet de création pour
la th èse. D'ailleurs, à cause de cet oubf, j'ai Longtemps pensé que ma
the se ne serait pas. une the se créat' on, mais une the se de recherd1e

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o nmuct io n 263

th éorique, en l'occurrence de type historique. Carau-detà de La confüma-


tmondu concept de réécriture à même ma pratique, qui rejoi gnait Le cadre
postmoderne reconst ructlv ·st e de Gablik, je t rotNai un moyen de mettr e
en place un projet artmstique dans le cadre de La thè se création qui s'arti-
culait tan t sur Le plan th éorique que pratiq ue. Ce projet fut de réécrire,
comme j'avai1s pu Ile faire avant dans les carnet s de voyages, dix années
de création accumulées pour déchiffrer et écrire le récit de ma création .
Le concept de réécritu1re exista it alors non pLus seulement de manière
th éorique mais surtout de manière artisti que dans le présent de ma créa-
tion pour La tlhèse. J'appUiie sur cett ,e question de rartkuh1tlon th éorique
et pratique, sachant , pour l'avoir vécue, que c'est l'un e des plus grnndes
difficultés aux abords de la thè se créati on pour l'étudiant. En effet, soit
il arrive avec un projet arh stique qu1i manque d'articulation théoirique et
il peut alors se poser la questio n de sa raison d'être à runi1v e1rsité; soit
c'est l'inverse: il m ive avec des idées t héoriques et un projet de t hèse
de redherche qui n'a aucun conterm prati que, et Là se pose la question de
savoir en ,quoi sa th èse est une th èse ciréati on.

&.1.4. L'es1
pace pa"liimpseste de l'artiste.,t he:n::
,lleu r
Dam le cas des recherches création j'aimerais pouvofr considérer La t hèse
création à venir, c'est-à~dire l 'œuvre et Le text e comme une forme et une
chose en soi et, dans le prolongement des méta phores emplloyées dans
ma propre th èse, comme un pallimpseste pour parler de !l'espace de trav.aill
du cherc'heur en thèse crèati on. Thèse création qui, dans sa définit' on
première, est un « pardhemin manuscirit dont on a eff acé la premièrn
écriture pour pouvoir êcirfre un 110 1v1ea u t exte >,.Ne pouirraU-on pas
considérer que le chercheur est e.nt rain d'essayer de réécrire autrement
une question et une réponse à sa dérna1rdhe arti stique ? L'arti ste qui choi-
sit d'êt:re Là ne sernit-H pas en t rain de rnvenir sur ce qu'iIl est ou ce qu'' L
ét ait pour énfre un notNeau rédt de la oréatl on?
Imaginons un instant que respace enti er de !l'artist e e.nt hèse créa-
tion soit commeune immense feuiUe de papier sur laquelle il cherche.rait
à êcirire à partir de ce qu'il y a en dessous, c'est-à-dire à partir de sa
démarche et de sa pratique arti stique et donc de ses résidus, c'est-à-dire
de ses œuvres., de s,es carnet s, de ses not es, de ses croquis, de ses anno-
ta tfons dans les livres qui ont accompagné sa oréatfon, de ses j ournaux
intimes et de ses jo urnaux de travail...Imaginons un inst ant que cet
espace qu'il a devant lui, au seuil de sa rncherche, n'est pas vierge, mais
recouvert de signes et d'i111
dices du projet à venir. Reve.nir en arrière sup-
pos,erait que nous prenions conscience de ce qui nous a amenés jusqu'à
ce moment où nous avons décidé d'emprunter u1ra nouveau s,entier pour

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264 T,raiiœ r de ,œcllerclle cœatio n e ■ art

aborder Lacréati on.. Envisager que ce qui est déjà prése nt à cet espace de
la création n'est j amais t out a fait eff acé, mais plutôt riche de l'amal-
game et du mélange que produira la nouvelle éciriture.
À ce point- ci de not1re collaboration, MonilkBrun eau et moi-même,
consc·entes de ce qui nous constitu ait et de ce qui nous amenait â êtr e
sur cette exploration des récits de l'arti ste, débordions de questions.
Nous nous demandions comment faire pour que ces rédts émergeant de
l',espace de t ravail[ de ll'arti ste servent à sa recherche doctorale.. Comment
lem donner du sem? Comment faire bénéficier L'ét udiant de son e.xfPé-
rience d'art iste? Comment faire fr uctifi er cette expérience et comment
tr ansformer ses récits présent s à sa création en matériaux pour une
recherche doctoralle. Cette inte rvent ion ét ait encore une fois 1,e moyen
de t rouver cert aines des 1r~1l0 nses par L'élaborat ion de pl usieurs out ills
d'analyse qui pourra' ,ent reconnaître les récits présents à la prat ique de
l'art iste. C'est ce que nous allons développer dans La deuxième partie
de cette int ervention .
Nous en étion s ,encore, par cette inte rvention, à souhaiter une
révolution de la part de l['art iste- chercheiur, révolution dans Lesens d'un
mouvement sur lui-même. Qu'il part e de sa prati que d'arti ste pour ent a-
mer une recherche création et qu'il revienne après cette recherche siursa
posture infü ale d'artist e, mais qu'il aura t rnnsformée.

8.2. ÉLABORATI OH DES OUTIILSPOUR L~ANALYSEID'ES RIÉCITS


ET ID:ES ÉCRITSPRIÉS A SA PRATIQUE ARTISTIQUE
IEINITS

8.2 .1.. La, notion de réciit


Pour entrer de plain-pied dans le récit, ill faut d'abord définir ce'lui-d.
Car, qu'est- ce que le récit ~ Si l'on s'en ti ent à La définiti on du Petit Robert
(19% ), le réd t est une relation ora le ou écrite de faits vrais ou 1rnag1-
naires qui prend la forme de romans, de rapport s, d' his.t ohes, de fa biles,
de légendes et de myt hes. Le récit peut êt re aussi des mémoires, é est -à-
dire que l'on rapporte ou l'on raconte à trave1rs le récit ses commentaires,
sa vie et ses considéraUons. Le récit, nous dit encore le Petit Robert,est
une histoire faite de relations, il est le reflet des Iliens. que l'on crée entr e
des faits et des événement s .. Le récit est ce qui lie. Le récit est une
œuvre, le résult at d'une entre prise art isti que et humaine, un roman, un
rapport de recherche ou urnmémoire.. Le récit , c'est aussi u1r1mat ériau à
l'ai de duquel se construit La pensée ; il permet ainsi au ce.rveau de s'orga-
niser. Le récit, explique Doris l es.sing (dt é par Fullford, 2001, p .. 1.52), est
apprécié « parce que sa structure habite notr e cerveau [... ] Ce ui-d est
f açonné pour Ile narratif et Le séquent iel. >>Ainsi, Ile récit e.st utilisé

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o nmuct io n 265

comme mat ér' ail dans Les sciences humaines et social,es, en sociol[ogie,
en psychanalyse, en éducat ion, en a nt:hrnpofogie et en et molog·e. Les
récit s prend ront la forme d'erntr eti ens et d'11rit erviews avec Les habitant s
d'un e ville dans le cas d'une étu de sod ollogique, de récits personn els de
patients dans l[e cadre de la psychanalyse, et:c. Ces récit s apprnfondissent
notre compréhension et notire connaissance du monde. Ils éclafrent des
aspect s. et des objets de ce monde...
Dans to us les cas, un récit se constr uit:. Et pour IFulford (2001, IP· 30),
le oonstmire revient à {<com[Poser avec le caractère t er1r1blement fortuit
de ll'exist ence, dam l'espofr de le contenir au rnoins en [Partie >1. En
con struisant un récit , on donne ainsi du sens à nos expêriences. Ces
expériences. sont raconté,es et rnsseml:Jlées dans un cert ain ordre et dans
une cert aine forme. Cela donne un cert ain ty[Pe de récit selon ce qui est
raconté. Car le récit est finalement le reHet d'une cert aine réalit é que l'on
a choisi de dé!limite r en t ant que cherch eur, indovidu et arti ste, [Puis de
raconte r... Le récit raconte cett e réalit:é et déorit robj et de cette réalité,
qui reüe nt notr e atte ntion. Le récit, au-delà de ce qu'il est dans sa forme
et dans son contenu, refü~te raut:eur. Le récit, c'est l'expérience d'un indi-
vidu. Dans ce récit t rans,paraissent ll'opinion, 1a posture ~pistémologique
et l a sit:uat:ion sociale et cutturellle d'un individu [Parrnp[Portà un événe-
ment ou à un objet donné.. Le récit définira le chercheur par les choix qu'' L
a fa its dans le suj et qu'il[ a ret e.nu, dans Lamanière dont H va raconter
l'événement ,et par ce qu'il va faire de ce récit.

8.2.2. Les d'eux fo·nnes de 1


réc.it.s de 1,art
Certains des auteurs qui ont nourri ma recherche doct:orale abordent La
questio n du récit. ILeurs idées et leurs réflexions sur Ile sujet m'ont permis
d'éüiborer, fPOUr les besoins de cet t e int ervent ion sur Les récits dans un
cadre méth odollogique, ce que je considè re comme éta nt deux possil:J les
formes de récits caractéristiq ues. de l'art .
Les deux premiers aut eurs, Lyot ard (1979') et Beardslee (1990 ),
tr ait ent de ta questio n des récit s dans une perspective historique. Le
récit se définit alors comme un grand récit qui englohe et stiructure une co:m-
munauté Oil une société à un certa·n moment donné de l'l-llistoir e. Ile récit
auquel les deux aut eurs font alLusion est Ile grand récit moderne. Encontire-
pied de ce grand récit modeime émerge, avec La [POSt modernit é, a not'on
de micmrécit de llipovet sky (1:983) . Pour ce dernier, ce ne sont p us Iles
grands récits qui nous ,gouvernent , ma·s au cont raire les récit s int imes
et individuels de chacun de nous. La [Profus.i on de récit s de chacun ne
forme [Plus une seule llistoiire, un seuil et unique grand récit , mais des
miUliers d'hist oires et par conséquent des miLLi ons de récit s. Cette not'on

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des microrécits trn uve son prnllongement dans les écrit s de HouLe (2000)
sur te rédt de pratique. t e récit de prati que, comme Le microrécit, est le
récit de l'individu, mais cette fois-ci il désigne aussi ce!lui qui est fait par
le chercheur dans un contex te univers:itaire et de recherche et celui du
pratici en dans un context e artist ique par exempLe.l ,es récits de pratiq ue
pe:uvent aussi prendre Laforme d'interviews et de données recueHLiespar
un chBrcheur e111 anthropologie, par exemple, qui souhaite faire l'étude
d'une communauté donnée.
C'est avec ces deux, voire aes trois 111oti onis en tê te , que j' élabore
deux formes de récits de l'art (t ableau 8..2).. le premier, que je nomme
réât de pratique (Hloule, :t999) ou microrécit,serait L'histoire de vie de
l'artiste ou !l'histoire du trnvaH artistique. Ce récit n'est pas nécessaire-
ment écirntpar l'artiste, il peut êt re raconté par Ile criti qu,e., l 'histori e111
de
l'art ou le pub k. Mais ces tie rs trouve nt et fabriquer1t leurs récits, même
s'Hs sont extéri eurs, à partir des œuvres et de l'artiste qui Iles a conçues.
l..acarnctêiristique de ce récit est qu'il est ogique; ill suit une nairrativit é
liée à la vie même de L'artiste (une forme de bio,giraphie) et la conti111ui té
formelle ou de conte u des œuvres. Ce récit n'aborde pas de question
historique de li1ens entre la vie de l'artist e et son époque, par exemple,
ou entre deux art istes. Si c'est l'art iste qui écrit ces récits de prati que ou
ces m' crorécits., fü prennent Laforme Le plus souvent de j oumaux et de
carnet s et sont rédigés pendant le processus de création en aval ou en
amont parrois. Ces microrécits sont présents à l'inté rieu1r du t ravail de
création de L'a1rl:iste, qui Les fabriq ue lui-même. Ces récits sont en fait
composés d'un e multitu de d'écrit s qui vier1nent nourrir ta formation et
l'élaborat ion de l'œuvre. Ces réd t s rejoignent la deuxième définitio111 du
Petit Robert,dans ta mesure ou ils sont comme Ile cumul des rnêimoires de
l'artiste et de son œuvre.. Ils contie111nen t la t rac,e de ses gestes., de ses
visions, de ses préoccupat' ons, de s,es intérêts , de ses rejets .. . C'est une
visiolflintérieure de la prati que artist i que. l'artis te peul: écrire suir son
propre t ravail[, sur une exposition ou sur sa vie personn eUe. Que ce soit
l'artiste ou un tie rs qui écrit ces récits , ils ont la particularité de rendre
compte de l'individu, de L'artiste, du faire, de l'intime et des processus à
même Lacréat ·on ..
Le deuxième type de récit est le récit .structurantou .englobant.
J 'Bnte ds par à un récit qui eogitobe et qui st ruct UJrele rédt même de
l'artiste. Les artistes et Les indi1vidus ressentent Ile besoin d'inscrire Leur
propre récit dans un récit !PlusLarge, un e forme de grand récit, qui êmane
d'artiste s, d'histo riens, d'écrivains auxquels ils font référence. Ce récit
est le résultat d'un e collectivit é, qui peut allors se transform er en mani-
feste Lorsqu'il est décidé par Les artist es eux-mêmes (manifeste srnrréa-
liste, manifeste dada).Ce peu être aussi le récit engLobanl: d'un cirntique
d'art , ml les œuvres sont liées à une façon de faire et à une ceirl:aine

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ré!Et i•ti~ . d'a• tocon,scieati,satillll et 1r aw11X
o nmuct io n 267

philosophie, que synthétis e le crit ique (ll'artis t e n'étall'lt pas forcément


consentan t ou consd ent de ce que Le crit ique fait émeirger du t rava'l).
L'exemple du critique d'art CLeme nt Green berg est exemplaiire au regard
du t ravail de peinture des expressionnistes abstrait s. Ce récit erigllobant
peut êtr e de nature religieuse, sociale, est hétiqu e, eu tur ellle, hist orique
ou référent ie Le. Ici, Ile posit io11111
ement de celui qui écrit Ile iréeit est
exté rieur à ta prat'q ue à la vie et à l'-œuv1re de rart iste ..

&.2.3. Les ëc.rits en art


En contrepar ti e des récits, 'l exist e l'écr't . t'écrit qui serait Ile document,
le manuscrit et Le support du irécit . Lorsque j 'abordai rét rospect ivement
les écrits pirés.ent s à ma créat ion, j e réalisai que les formes de ces écdts
ét aient variables, j ournaux de bord, poésies, notes ... et que l e:urcontenu
variait l[ui aussi selon la forme. Je les classai, m'appuyant sur Ile tex t e
d'Anne Cauqueilin (1:999) sur Iles t héories de rart , en tro is formes dist inctes
(ta blleau 8.3).

8.2.3.1. Écrit th ~ori sé mr la piratiqu e artistique


Tous les arti stes écrivent à un moment donné de l[e:ur canrièîre.. léo nard
de Vinci le fit, et il y a de cela six siedes . .Anne Cauqueilin (1'999) appelle
ce proces.sus d'éciriture des artistes ta pratique théorisée. Pour l'aut euire,
c'est une prnt' que d'écritu re int erne où Les essais ponct uent l[a irecherche.
Ces écrits, nous dit l 'aut e:ure, <rna·ssent en même t emps que Les -œuvres
qu'elles souti ennent et sont si l[iés à l'objet ,qui les provoque à l'exis-
tence qu'eUes ne sauraient avoir aucune sort e de prét ention à ll'auto-
nomie, ni même une quelc-onque validit é sans ce support. Œuvres et
discours se produis,ent sur la scèn e d'un mffile t enant » (p. 92).. Ce ty pe
d'écrit fait l'objet de publicati ons par Ile milieu de rart du vivant de
l'artist e. Ce peut êt re des manifestes, des essais, des t rait és, des artides
dans les journaux spéc' alisés, et c. L'art iste che.rche à analyser sa pra-
tiq ue ou à l[a th éoriser, il est dans !l'att itu de du chercheur qui consi ste à
t endre vers la thé orisation d'un e prat ique... Il part de sa prati que, t ente
d'en comprendre L- es rouages ou la dynamique pour l'éte ndre par exemple
â d'autres principes plus Larges de l'art ou de !l' histoi re ou de Lareligion
ou de La science, ou pour l'exp~icite r à l'a utre (spectat eur). n pren d du
recul face à sa pratique et se posit ionne exté rieurement à elle. !.:'a rti st e
et poète Julien Blaine ( 1:997) iUl ustre ce ty pe de positio nnement dans un
art icllepour ta revue Art/Présence, où il explicite son exposit ion à venir.
Il donne Iles dès au spectat eur de s.a Lecture à venir. ILa effect ué ce t rn-
vai sur plusieurs mois dans une série de chapitires qui êtaient t ous pubtiés
par La r,evue.

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268 T,raiœr de ,œcllerclle cœatio n e ■ art

Tableau8.2
LES DEUX FORMES DE RÉCITS DE L'AIi T

Ré d t de pira:ti qiu e, Réd t: ~bu ctu ra,irut


ml rrorédt et eng 1lo ba-nt
Ré d t de la cré ati on

A IIJJl:e
urs • Artisœ!;. éc rirai ,ns, criti q1
ues • Plii,~ lh is.torie ■s,
d'art, ID9Bncieis, •ïsto riell5 9:X:ÎOioglll!S,.
QIIOUIJ!E5
de l 'art, p■ bli c drartiste5

Partk u Latit é du r,éd t • Biograph,iq ue.,JX)é tiq,ue. ■ lli ,stnriq1ue, politiqi ue.
soiwen,il!!;. m2ITDile!;, réflexions, manifeste koaomiqu e,
com lTilE!
1ta1 iRS,. 1notes 9:X:iologi(j ue

Po-sitl 0 n n em e nt ■ ~anl exté.rie-ur ■ P.ega


RI extérie ur
du ré d t p.1r- rappo ,rt à • ~ami row~ ver; l'i ■té , r;ie, u r
la prati q u e a rt1 stl q u e

Tableau8.3
LES lROIS TIIPES !D'ÉCRITS

Type s d' éui b Écli it:s tlil éorh és Écrl b die tra ,vaU Éctits - -œuv res

A IIJJl:
eurs Artld es Arti ste~ A rtl lstes

IRéalisaticm ■ lents e ■ v ue 11·■ .e .• belils i ,ntimes ■ Écri,ts pœna ■t


,ul)tication d a ■s réallsk avec ou 'formes ll'CMV1 œ
une revue d'art sa ■s.vdl::mté de (compœnne1nt
spéciali ,sée . llan.s un publati:l n les d'e,ux 'formes Ile-
catalog1u.e ou !ilall5 l'krit tltéo!Mé et
,u,n 'Üé\'11!d'alti -sœ de t él:rit de travai 1l)

■ \olb nté de t héoriser


etm'ana'~r
. Les éc1rntssont te
œ~t dlu processas
■ Vdlan,té de tltéoriser
et d'a1natyser ou
e ■ cours: noliion, de les écrits son,t lie
pœn ie rje t œlilet du pnxessus
en c:ou115

formes lles;,.l!'!l5i3
• Allllic is • Carnet de lio rol ■ I..N,resdraitiste
• Carnets i,ntillll!S • ] ,ns.tallations
• Carnets de voyag,es ■ Textes las par des
artisœs pe1rfi>rme,u,rs
l'l:Jsljoa.e ment ■ ll'Bgard exté rie ■ r • Regard de uis ■ P.egaRI extérie ur
Ile l'artiste : SU lia rati q ■e l'i,ntérie •ur su1r sur rapratiq ue
tyi;e de Œ!J:a rd la pratiqiue ow œgardl d'e uis
sur lil pratiq 1ue lrï~térie ur sur
rapratiq1ue

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Le !kit comnneouti l 1raw1Dré!Eti•ti~. d'a•tocon,scieati ,sat illll et 1raw11Xo
nmuction 26'9·

8.2.3.2. Écriit de travai l dam la prat 1ique artisti que


L'écrit qui résulte d'une pratique t héorisêe est diffêrent de ce que je
nomme Les écrits de travail de !l'artiste . Les écrits de trnvail sont plus de
l'ordre de ll'intirnité, fü ne servent a l'artiste que dans l'e nceinte de son
a ,eLier et pour l'élaboration de son œuvre. Ces êcrit s ne sont pas forcé-
ment publiés et ne sont pas élaborês dans cet objectif.. Ils peuvent pren-
dre la forme d'uinjo urnal[ d,e bord, de notes, de croquis, etc. Ce qui
distingue ces écrit s de recherche de l'écrit d'une pratique th éorisée, c'est
que dans leur cas il n'y a pas de trnvail d'obj ectivation de réflexion ou
d'analyse ; les êcrits naissent d'un prem·er je t , ils se posent sur Ile papier
pour ponctuer Lacréation.. Ces écrits sont une donnée en soi, ils font
partie intégrnnte du processus de crêation. !L'a rtiste porte de ll'nntêrieur
un regard sur sa prntique ; il n'a pas de recul sur celle-ci, il ne fait que
noter ce qui se produit, ce qui Lumvient et solflressenti. Dans le catalogue
Phaîdon sur Ile sculpteur anglais Anthony Gorrnley se trn uvent des écdts
d'ordre poétique qui dêcrivent son trnvail; ces écrit s solflt vraisemblable-
ment issus de ses j ournaux de bord.

8.2.3.3. L'~crit-œuvr e
Le tromsiême type est .assimilé à un e -œuvre; ee serait l'écrit-œuvre. Ile
plus simplle serait de penser à ta poésie, mais cert ains artiste s en art
visuel peuvent décider de fafre d'un écrit thé orisé ou même d'un éorit de
travail[, une œuvre. L'arti ste française Soph'e Calle nous donne un aperçu
de ce genre d'écrit dans tout es les œuvres qu'elle compos.e apartiirde ses
textes et de ses photographies. Dans Le cas des Suites vénitiennes, elle
met en conte xte son action artistiqu e qui consiste a suivre â Venise
l'écrivain Jean Baudrillard.. Ile texte de ses péirégrinations. devient une
œuvre â part entière, les photos n'existant pas sans l'écrit .
Ces deux classifications que L'on t rouve dans les t ableaux 8.J et 8...2
permettent au chercheur en th èse création de revoir ses écrits sous t rois
formes distincte s et de prendre conscience des diHé.rences qui existe nt
entre Iles deux enje ux du rédt . Les 1notions de récit et d'êcrit sont
proches et coexistent .. La différence e.ntr e les deux ta bleaux réside dans
le fait que, pour Iles rêcits, j'ai ind us des personnes ext érieures, comme
les oritiques ou Les historiens. Dans le t ableau suir Iles écrits, j'insiste sur
la notion d'artiste comme seul auteur. Cependant, les écoritsth éorisés
peuvent rej oindre Lanotion de grand récit dam Lamesure où ll'objedif de
l'artiste est de rendre cohêrent s une pensée ou un travail, parfois en fai-
sant un Ilien avec une période donnée de l'histoi re. Ile recul[ que cela
demande peut faire penser au recul que re,quiert la conscience de
participer â un grand récit . Les écrit s de tr avail[ sont assimilables aux

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270 T,raiiœr de ,œcllercllecœation e■ art

mk rorécits et aux réc.'ts de pratique; illsproviennent de rartiste, depuis


l'intérieur de sa praHque.. les écrits-œuvres, commenous le verrons plus
loin, pourront aussi être considérés comme étant de l['ordre de Lapra-
tiq ue, car ills reflètent l[a pensée inte rne de l['artist:e,voire sa démarche.
Conc,rètement, le tab leau 8.2 permet au chercheur en th èse créa-
tion de 1réparti1r en trois piles distinctes ses propres écrits. Ces écrits
vont lui permett re de faire tra nsparaît re Les niveaux de réd t présents à
s.a création. Ses écrits vont devenir un out' Lde r,echerdhe, dans la mesure
où ils seront les s.upports pour ident ifier différents niveaux de récit (dif-
férents des deux formes de récits du tablea u 8. 1). fous 1,es écrit s
peuvent Lui se.rvir, que ce soient ceux de La p1ratique théori sée ou ceux
qui accompagnent notre création dans sa f abrication . Nous aillons main-
t enant décontextuaUs,er ces écr'ts de notre piratique arti stique, et donc
du milieu de ll'art, pour Les intégrer à notre recherche. De ces éorits nous
aillonsfaire émerger des réd t s qui auront une spécificit é et des caract é-
ristiques particullières selon lem contenu .. Ces contenus nous guideront
dans L'élaboration de la méthode et de l'approche de not1re recherche.
Mais déj à, à cette étape- d de son classement, Ile chercheur en
reche1rdhe création peut se dire que, s1i ces écriits. ne sont que des écrits
thé orisés, la forme de son travail théo rique portera sans doute sur des
questions historiques et esthét iques. Vraisemblablement, il a déj à cuttivé
une vision analytique de s,on travail ou de ceLui d'un autre. IL a une
f aculté de mettre en perspective son propre travail[ ou ceLui d'un autre
et , surtout, il a été dans une forme de démarche professionneUe quant à
son écriture qu'il a ou non pubLiée, mais qu'il a certainement soul! ait é
partager. IBien que l['enjeu de ses écdts par rapport à une thès e ne soit
pas nouveau, n devra mettre l'accent sur l'artk u ation pratique de sa
thè se pour ne pas tomber dans une démarc-he qui ne soit qu'orientée vers
la recherche t héorique.
Si dans l'autre cas le chercheur se rend compte que tous ces écrits
ne sont que Les desoriptions de son processus de t ravail et de création,
il comprendra qu'il[ n'ajamais cherd é à prendre de distance de son t ra-
vail de création par l'écrit UJ
re.. Sans doutes .a recherdlle portera-t:--.ell,e
sur
l'intérieur de sa création. Il lui faudra prnbal:ilement envisager de cher-
che.rune approche qui prolongera cette intimité avec l['œuvre et ses pro-
cessus. es ,enjeux d'une thès e, comme celui1 de l'ana yse, Lui seront
nouveaux et il sera important pour lui de rester LepLus fidèle possiblle à
ses propres te ndances, pour ne pas vivre Le contact: à récriture, à l'ana-
lyse et à Laméthodologie comme une source d'angoisse. C'est s.ur l'arti-
culation théo rique avec sa pratiqu e que son attention devra se porter.
Si le chercheur en recherche création n'avatl:que des éaits-œuv res, il

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Le !k it comnneo util 1raw1Dré!Eti•ti~. d'a • tocon,scieati,sat illll et 1raw11Xo
nmuct io n 271

pourrait se dire qu'H s'int éresse à la forme: forme de l',œuvre, forme de


l'e.xposition, vofre de l'écrnt final de sa t hêse à ta quelle il accordera peut-
êtr e une grande importa nce.

&.2 .4 . Partir de ses acquis : 1ide,ntW cation


des trois rniveauix de 1 'étit de la pratiq ue artistique
Le tableau 8.4 est divisé en trois colonnes qui font ét at de trnis niveaux
de rêdt, chacun devant nous permettr e de définir cert ains des aspect s de
notr e recherche à venfr. Ces niveaux correspondent a1JXécrits de la créa-
ti on, qu'ills soient théo risés, de travail ou qu'nls'agisse des êcrits-œuvr es.
l)ans un premi er temps, nous aUlons. chercher à faire émerger ce que
j e nomme le récit ,de i'awvre, c'est-à-•tfre la part icularit é et la spécifid t é
de otre prati,que artist i que. Ce travail pourra être mené à partir des
écrits théo risés de ti ers ou d,es nôtres; à partir de nos écrit s-œuvres (et
œuvres) et:, enfin, de nos é-ciritsde tr avail[. Ce que nous voulons vo·r
émerger de to us ces t ext es, c'est l'histoire (avec un petit h) de notre
œuvre et de notre prat' que. Cett e histoire se raconte prnbabllement: en
quelques mots. Mots dés de notre prnt ique qui pourront devenir pour
certains des concepts dés pour la recherche.. Voici quelques quest ions
qui pourraient nous aider: lorsque j e regarde une de mes œuvres, ou que
j e lis Le t exte de queitqu'un d'autr e sur maprat' que, ou mes t extes , qu'est -
ce qui s'en dégage, quels mots 'aute ur a-t-il employés, quels sont mes
propres mots? Quels sont ceux qu· revienn ent le plus souvent? Pourrais-
j e résumer en quelques mots ma pratique et ma dêmarnhe artist ique? Est-
ce ,que, tout au Long des années, j'ai eu une même préoccupatio n formelle
dans le choix de mes mat ériaux et du suj et de mon t ravail ? Quels sont
les mat ériaux que j'emplloie? Quellle est La particularit é formelle de mon
t ravail[ art isti que? Y en a-t:-ill une?
Au~deLà des conceiPts et des t ermes qui reviennent pour définir
notre pratique, un sens de !l'e nsemble de notre pratiq ue a rüst i que va se
dégager et nous pourrons. commencer à donner un semblant de cadre
théorique à not re rech erche doctoralle, et même â définir Les enj eux et Les
obj ect'f s auxquels aspire not re création. Quels objectifs. poursuit ma
création ? Est-ce que ce sont des enje ux de forme ou de sens~ Prenons
quelques exemples. Si j e sens que ma pe1intm e se préoccupe essent ielle-
ment de couleur, je pourrais. me dire que je parti cipe peut-êt re d'une his-
toire de ta coulleur en peinture. Mais quelle Hlistoire ? Celle de Goethe ou
cet e de Itten? Quels sont mes obj ectifs dans la recherche sur la coulleur?
Réalisant que ma pratiq ue port e essentieUlement sur La couleur, je pourrai
d'ores et déjà poser en concept e ter me couleur, ,et ce à quoi il renvoie
dans ma pratiq ue. Si je perço·s que La question autobiographique occupe

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aba, œ 11\JUl'd u ,a ïla ili1t:iœ b u i~\ ~
272: T,raiiœr de ,œcllerclle cœat io n e ■ art

lableau 8.4
IDENTilFilCAlilON
IDES Nl1
VEAUX DE RÉCIT DANS LA PiRAlilQUE

f y p es RÉCfT IJE L'IHIVRE RÉCfT S1l!IUCTURA.N7f RÉ!CfT IJE PRA.TIQUE


de ré cit s

sourt:es • Iles œav,res • Ile s é.cnis th~n\~s ■ Les é.cnt-Œ11/\'


1res
• Iles é.cnt-œtW1res • Ile s é.cnis dietr.wa il • Les é.cnis !ile ~ravail
• Iles é.cnis th~ri~s • Les é.cnis t h~ri~s
• Iles é.cnis die ~ravail

ce que • oête,rmlne,r la • oêter mlner !!l'o~ l' on • oêter mlner comment


tra n part1u 1.ar1ité de sa vte ■ t et q ■ e l modèle o n raconte q u e lq ■ e
chen: he pratt q ue artl sùq ue o n ~ un-5lu111: chose et oiHermlner
le conteH !!le ce q ■I
est raconté

Q,uertloRs
ii se poser
. (luel.leest la
~i fici té dieS3
. (lue lies Sll9t !es . (lue raco ntent 1111!'5
1référenœs" é.crils'
pralliq ■e a1rtilSl:iq
Se préocrnpe- t-<111
1ue? . À quellJe périooe
lhi storiq ue est-ce q,ue
1
. (luel.le est ,me
pro;pen5ion nat wrelle
!ile-q1uestioti famelle'.5
j e-rais œféreace ? lklliSIJ
1ue je raconte
(espace; corps;
forme; coulewr) . À q1uel Lieu ~~ra phiq,ue
.
I1a,création >
IEsHe que je décris
ou est- une est-ce que fâ:Ji\partien5 !
p ralliq ■e conœphle lle . À q1uellle straœ sociale !
,mesexpêriences de
(conœ.n,u et !e ■s ) >
. À q1ueI1Jedisci pij ■e est-
ce q ■e fappartie ns et
I1a,création se ■ len!n1t
o u est- que je décris
aUBS i1mes expêriences
q ■elle est sa spl!cirficitiP i ■ti 1mes?'
. À quel[ oo■ lil nt
phillasop~iq1ue.
. Co1111D! n,t est- qIue
je- les d~cris >
ps,fC holk:giq ■e.
lhi storiqm~.. sociologiqIue
. (lw'est-c.e qwi rait
l a, pall:ic Ularité
,me pratiq1ue rai,t -el!E
lie mes 1réci1s?
1référenœ?
. !Est-ce que je cnitiqu.e ou
est-ce que je décris?

Apport . o nœpts clés . ,[adre tihêo11q ue et . 1Mêt• ode et approclte


pour la . f ■ Je uic et o bteict1rrs
para1!1
1gme !!le recherche !!le reU eK• e
. (type
rechJen::~e
. ,[adre tllêo 11q u:e
(_modèlede pensée)
Te r rat ■
1!1'1
1n-.est1g:a
de i:êclb pou
,t.10n

la p:nse !!le l!lon ■ êe s),

une grande place dans mon œuvre visuellle et dans mes êcr1t s, j e pourrai
légitimement me dire que je suis peut-être da11sune logique de t ,ravaH
qui int erroge l'autobiographie en peintu re et plus lairgement dam l'airt. À
nouveau les concept s véhkulês seront issus de ce cadre autobiographique.
Ce tr avail cfanallysed'écrit s permet de prendre conscience des
a5peds les plus vh füles de notre pratique artist ique et forme le récit de
l'œ uvre. Celui-d nous échappe bien souvent, car nous poursuivons inotire

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ré!Et i•ti~ . d'a•tocon,scieati,satillll et 1r aw11Xo
nmuction 273

avent ure artistiqu e de rebond en rebond sans forcément avoiirbesoin d'en


définfr Les enjeux, les concepts, ou le cadre. ILimportan
' t étant dans une
carrière artist ique de se préoccuper plus de L'œuvre en ta nt que résult at
que de ce que nous pourrioinsavofr à en dire. Mais, dans le contexte d'une
thèse crêatmon, le conte nu et la forme doivent être 6és. Il s vont même
devoir s'a1rtncuLer ·ntellec:-tuellernent à travers un certain nomin e de
concepts clés, qui eux-mêmes renvoient .â un certain cadre..
Dans le prolongement du récit de ll'œuvre, se t rouvent les récits
st ructurants, c'est-à-<lire ces auteurs et ces autres artistes auxquels je me
suis toujours. rêfê,rée, sans peut-être m'en rendre compte , ou ces concepts
clés, que j' ai fait êrnerger dans Lerécit de l'œuvre, qui renvoi ent nécessai-
rement à un cadre th éori,que pa1rtncu~ie,r. Ici, le chercheur peut faire le ien
entre Ile récit de l'œuvre et Ile récit structurant, Iles concepts et les mots
clés qu'il aura dêgagês pouvant lui fournir rnrta ines pis.tes. Cela fonc-
ti onne aussi dans l'autre sens dans la mesure où, selon Iles aut eurs qu'il a
lus, il peut revenir voir sa création dans la lumiere des èorits qu'il a abor-
dés et avec lesquets il n'avait pas forcément f ait de liens.
le chercheur en recherche création esquisse ici d'où il vient et queil
modèle il suit . les questi ons auxquelles iL répond pour s'aider sont Iles
suivantes: À quell,e période historique est -ce que j e fais référence dans
mon t iravail de peintur e? Est-ce une peintu re contemporaine? Est- ce une
peintur e ,qui aborde Les thème s et les principes de ceUe de La Renais-
sance, parexemple, ou est-ce que j e suis plus. proche des expressionnistes
abstr ait s~ Quels sont les aute urs que j e lis dans ma pratiq ue artistique,
mais aussi en tan t ,qu'individu? Quelles sont les philosophies auxquellles
j e prête de l'import ance même dam mavie de to us les j ours ~ Existe- t:-·L
des liens entre ce que j'ai pu füe et écouter durant toutes ces années à
l'ate lier et mon œuvre v·suelle? Suis-je inté ressé par des questions his-
toriques et Les,queUes? Toutes Les réponses apporté es par nos !lectu res
successives au fil des ans et qui ont accompagné notre prat ique artis-
tiq ue et notire vie quotidienne vont pouvoir nous renseigner sur un cadre
théo rique potentiel pour notre reeherche, voire un paradigme de reeherche.
Car ces auteurs, c-es lhistorienis vont nous éclairer sur notre modèlle de
pemé e ; ils vont dêjâ dessiner une trame théo rique et hist orique à notr e
recherche création et Lasit uer en contexte .
finalement , aUlonsencore plus Loin dans l'utiLisatio n de ces écrits
de travail présents â notr e création et cherchons â en faire émerger
notre prnpension naturel le pour l'écritu1re.. Comment est -ce que f éai s. et
sur quoi ? QueUle est la part icularité de mon récit? Qu'est-ce que j1e
raconte dans ces te xtes? Comment ,est- ce que je Ile racont e? Est-ce que
f ai une prnpens.1on naturelle à décrire mes œuvres ou est -ce que j e suis

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2H- T,raiiœ r de ,œcllercllecœatio n e ■ art

en t rain de racont er mon e.xpèrience de Lacrèati on ? Es.t-Œ que j,e racont e


plus souvent mes ét at s émotionnels par rapport à Lacréat ion ou est -ce
qu,e je raconte mes exta ses devant la couleur? Su's-je const amment en
tr ain d'écrire des notes sur les prochaines expositions à venir et leur ins-
ta llat' on pote nti eUe, ou est- ce que j' écris sur Les autr es arti st es? Ici
rèsmde peut-être ce qu'il[y a de pllus. difficile à raire, c'est-à-dfre dégager
notre rapport int ime à la créat ion, vofr ce qui nous caractérise dans
notre li en à celle-ci et ce qui nous int éiresse face à eUe .. Qu'est -ce qu'on
s,e raconte dans ll'int imité de l'at elier et comment ? Grâce à cet e.xe,rcice
cert es ardu, nous pourroirn s pllus. facil ement dégager notre méth ode et
notre possible approche à l[a recherche doc1or:a e. Nous pourrons même
déte rminer not re poss."ib e t errain d'irnvestigaUon, et même Ile ty pe de
récits qui nous servira peut-être pour une prise de données . Car la ques-
tion de a méthode et de rapproche à la recherche est avant t out une
quest' on personneUe ,qui renvoie l'étu diant à ce ,qu'i l[ a de plus inti me,
c'est-à-dir,e sa manière à l ui d'approcti er le monde et de l'interro,ger. Ce
récit de pirat ique nous. donne des indices ,quant au Lieu où le chercheur
en reche, ch e création va aller chercher ses réponses.. Car si, pairexemple,
il se rend compt e que ce qui l'intê,resse avant t out est La question de
l'individu confronté à sa oréation, il est probable qu'il ira che,rcher ses
réponses dans Le sujet (homm,e ou fomrne) et non dans ll'œuvre se ule-
ment. Si, à l'opposé, il a t endance à dècrüe l'œ uv1re et à ne pas se préoc-
cuper de raute ur de L'œuvre, sa ciblle deviendra le résultat du processus
de oréatfon, c'est-à-dire l'œ uvre d'art .
A cette ét ape-ci, nous ne cherchons qu'à clarifier certaines choses
dans ce qui existe déjà à l'intérieur de ta prati que art isti que. Nous ne
faisons. que-poser des question s auxquelles nous.ne répondons pas encore
entiè rement, devant des choses qui nous surprenn ent et qui nous ouvrent
les horizons d'un e recherche dont 'assise est not re prati que-artistique.
Nous aUlons maint enant approfon dir cette analyse des écrits de tra vail
dans la créat ion pour aller encore plus. loin dans l'élaboration de La
recherch e doctor ale et d'une possible const ruct ion de not re méthod e et
de not re approche de recherche..

8 .2 .5. Analyse -des écrits de t1ravaill 1


prèse.rrits
à la 1 que pou1r écllaire r
pratiq ue artiist-i
le type d'a p,proche ,en reche rche tré a,t io n
A cette phase-de tra vail, l'étu diant se retrouve-dans ce qu'Anne Cauquelin
(1999 ) nomme 1 at héorisatio n se,condaire, qui est ce moment où le cher-
chernrint ervient sur les œuvres « et après elles, chercha nt à en êluci der
l'énigme, à en dégager Les structures, ou à e.n suivr,e la récept ion avec
des illlst rument s conceptu els déj à prêts et qu'il s'agit d'éprouver, voire

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i•ti~. d'a• tocon,scieati,satillll et 1raw11Xo
nmuction 275

d'affiner sur un te n a1n ll'IOuveau )>(p. 66), qui dans le cas qui nous préoc-
cupe est celui de a recherdlrn en thêse ou en maîtrise. Les écrit s pré-
sents à l a prati que art ist ique vont être lus puis. analysés en fonctio n de
l'axe herméneutique (tableaux 8...5a et 8.5b), ce qui équivaudrait pouir
Anne Cauquelin (1999} à comprendre comme1nt on comprend. L'. œuvre est
appréhendée avec la certitu de que nos sens se «trnuv ,ent cachés au-
dedans et qu'il faut ailller Les y cherche;r» (p. 66). l'œuvre ouvre un monde.
Le premi,er enj eu d'une te lle approche est « le souci de comprendre» Iles
inte nti ons et les réalisations d'un auteur. Pour ce type de chercheur dans
l'axe herméneutique, Le sens est « la saisie d'une unlf:é entre int ention et
résult at» (1999, p. 67) et ill est construit par le chercheur, lequel ten t e
d'éta blir un contenu qui n'est pas donné du premier coup. L'.a xe lherrné-
neuti que comprend !l'interp rétat ion herméneut ique, l'int erprét at ion phé-
noménologique, !l'interprétatio n poiéti que et, enfin, les inte rprétations
analyti que et histo rique (psyc,hanalyse et hist oire de 'art).
Le ta blleau 8.5a comprend Les t roi s approches phénoménollogique,
poïeti que et herméneutique et le second, 8.5b, les approches. psychanally-
t ique et historique. Chaque ta blleau va nous renvoyer aux objectifs, à
l'obj et d'ét ude et à la question prindpal e de t elle ou te lle approche, mais
surto ut va nom indiquer ce qui peut être présent aux récits de la prat ique
artistique pour nous guider vers t elle ou tell e approche. Si nous prenons
la colonne portant sm l'approche phénoménologique, les premières choses
â nous demander sur nos écirits sont: est-c e que j'ai ten dance à décriire
l'expérience vêcue de ma pratique dans mes journaux de bord? ai-j1e
l'impression de me poser continuellement la question du pou1rquoi face à
mes peintures ou mes sculptures? dans une approche phénoménollog1que,
le chercheur diallogue avec l'œuvre ju squ'à lui donner une existence
propre. L'interp rétation phénoménologique devirot parolle et entente avec
l'œuvre. Le chercheur te nte d'<caller aux choses mêmes» par Le langage
es-sentie Lement. ILa phénoménologie accompagne un mouvement de pen-
sée à prnpos.de L'art ptutôt qu'elle ne prend en charge Iles œuvres concrètes.
Elle se préoccupe du vêcu danscet aller...,retourentr e !l'artiste et son œuvire
ou le chercheuiret ce qu'il observe. Si le chercheur prend consd ence dans
ses récits de ce genre d'approche, il peut être irenvoyé à des auteurs
comme Merleau-Ponty, Husserl et Chantal Deschampspar exemple; il peut
aussi trnuve r des descriptions de type phénoménolo,gique dans le roman
de Sartre intitu lé ln nausée. Si le cherd1eur se rend compte que ses écrits
le renvoient essentie!llernent à des questions de l'ordre du «fa ire», il peut
se demander s.i ce in'est pas vers une approche poïétique que sa recherche
devirase to um er. Les questions sont de l'ordre du pourquoi mais, cette
fois-ci, elles ne sont pas to urnées vers le vécu de !l'artiste , mais vers Les
gest es et Les actions qui amênent l'œuvre à son existe nce. Les mat ériaux,

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276 T,raiiœr de ,œcllerclle cœat io n e ■ art

la bleau 8.Sa
L'AXE HERUÊtEUT11QU
IE COMMEPOSSIBL!EAPPROCHEDE RECHE!RCHE
(PHÈNOMÈNOLOGIQUE,IIHEII
MÊ.NEUTIQIJE, POÏÉTIQUE)
Qu e lle -Mt ·vohe ■ lend'a ■c eà décri œ • Te ■da.nce à ■ Te1ndanœ
prope n si 011 n at ur elle irexpéliienœ •técue œ,gardet à dkri re à i ■te , rp réte , r
dans VO·S éc rl b die, b a,...aH de-sa pcatique et à obseNer sa ptallique
sa pratiq ue
t.r-ou vés dans le-s
avec •u1ne voloa té
Jo-111ma ux die bord ? de to ut ranli! ■e r
a••d ai,œ~

Type de rec he rche , • Approclle • APfllllClhe • A pmx:he


p -o ·sslble da,ns te c.adre phé ■on!n o lbgiq ■e ~ïe lliq ■e herméne •tiq ■e
d' u ne · ma-it .rlse ou
d' u n do-ctorat

Qu est1 o n s eHe n ti elle s • Fi:Ju:i uoi ? • l?ou1rq.a i,~


des éajts de travail

0 bJed lf s die c;e type , • Connpll! ndIl! • (~ J)œndreu,ne • Corrnpll! ■d~


0

d'a,pprnc h e u,ne pratiq ue en,


0 pratiq ■e e.n isdti nt les i,nœn,tion s
décriva■t le ,•éc• 1Dti les.gestes de fa• teu,r
de-son expéliienœ d u «rai re» qiui
1 et ses
dans la pratiq•ue !Dnt à, ll'ori;ii 1ne de réali-sa tio■s..
1101rap~rt à !Dn élirbo ral:io■ .
,u,n phé ~ ■e
110rtic•ulier.

Sur q u o-t porte ce t ype ■ Suir l'~~t • Su robjet ■ S ur ll'o~j,et


1

d'a,ppro-che ? (la pcatiqu.e et (la pral:i~ ■e ('la réce io n


lk euvre) à lira\•eris et l'Œ!WIII!') de f œuvre)
lie vécu, du s uje-t

Sur q u e l t ,em ps ■ l~ ndan,t • Fenda■t ■ F'e ■da. nt


de l' œ-uv re p-o rte sa réalisa tio■ sa œ.ili;satio n sa œa lisafu n
la rec h en:he ,?

les g,estes mais aussi l[a présentation de rœuvre, son exposit ion seront
objets de l'êtude de la recherche créat ion. Des aute urs comme Pass,eron
et Anzieu pourront être consu tés pour saisir une te'lle démarche.
[)ans rapproche hermén euti que, c'est une inte rprétation i111
finie qui
est en jeu. Est--ceque j'ai t endance à int erpréter mon trnvail loirsque
j' écris dans mes journaux de bord~ Es.t-ce que je sUJiscons.tamment en
t ra111de faire êmerge1r mes intentio ns et ceUes de mes réalisations arti s-
ti ques. Une approche herméneutique peut se résumer à « comprendire,
comment on compren d)>(Cauqu,elin, 1999, p. 68) ... Comme la phénoméno-
lo,gie, l'herméneutiqu,e accompagneun mouvement de pens,ée à propos de
l'art pLutôt qu'elle ne pre111d en c,harge les œuvres c-oncrèt es. C'est une
rech erche infinie, ta nt Les questions et les réponses p,euvent to urner sur
eUes-mêmes. l'œuvre est sacral.is,ée, elle es.t le foye1r virtuel d'une vérit é
qu,i se dèrobe. « Le se111
s est au-d,elà de rœuvre dans une sphè;reSU[Pèrieuire

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Tableau8.5b
L'AXE HERUÊJEUTDJ IE ·COMUE POSSIBL!EAPPiROC:
HE DE RECHBICHE
jlPSYCHAN:AIUTICill
E, HISTORIQUE)
Q u e ll.e ,e :s.t votr e • i endaace à décrire ■ Tellda.nce à h,istorici !ll!r
p rn pe n si on nat ur ell e• ses éta ts IJS)'Clho'logiq ues sa pratÏ(lue et à ta
da ns les mi cr oré db mans sa plirtÎlj ue alfti~tiq •ue c:on,text uafü;er par r.a,~port
à des évh ements ~ri e.. s
trn uvés dan~ le•s
j 0-1,rna
11 ux d e bo rd !

yp e de r ec he rc he • I\PfllDClhe h,istoi;iqae
pos si bl e• dans le ,c-adre
d' u 1111
e- ma,i trl se • ou
d' un do-ctorat

Q u est1 o n s ess -enti el le s • l'l:mRJ


1uoï' ■ lb1111q
u.o i '
d es rrnkra ré cits face
à la p ratiq u e
0 bj ect lfs cle c,e type • Cormpll!' ndre He prat iq•ue • Com,prendlre et i ■te,rpié te,
d' a,pprnc h e et ll'iinte rpœte r e n fbn cllioa une pcatiqlle e ■ foactio n
mecorl'es et mete -s m'é~ -mts lhisto riq•ues,.
issus d,u mom0i,ne me la soci all!Xou c ult ureis.
psifCha na~se (la q uestioe
me ua nsfert ; menévrœe; de
symplÏlrœs ; de ,remlewnemt,.
mera~ rt à l a mère..eoc.) .
S1111r
quo ,i p orte ■ Slllr ~ s.11je
t ( l'artiste}. ■ Su t objet ou su1r le sujet,.
la, reche rche ? l 'œuvre mévoillant le s.11je
t les deax pouvant eœ uai ~
(l'a rti~œ) i 1nlilisti 1ncteme1nt Ollf e nsermble

S1111r
qu el te mps ■ E■ iJ\'al de l'œwvre
de l'œ uvre p•orte
la, rec herche ?

dornt t'entrêe n'est pas donnée sans peine [.. .] seuil l'he,rméne:ute en
dét,ieint es clefs» (Cauquelin, 19'99, p. 66). Les auteuirs auxquels nous
pouvons renrvoyer le chercheur en herméneutique sont Hans Georg Gad.amer
et PaulRko eUJrentre autr es.
Toujours sur e même axe herméneut.iqu,e se t rouvent encor,e deux
approches possibles, l'apprnche psychanalytique et l'approche hist o-
rique. Si, dans ses récit s, Le chercheur dèd ile une t endance à déeirire ses
êtat s psychologiques et à inte rprét er des ,gestes, des paroles, des s.ymp-
tô mes d'ordre psychologique, il pourra peut-êtrn se t:oumer vers Ullle
approche de ce t ype. k i l'obj et d'ét ude porte sur Le sujet , l'indiv'du
auteur des œuvres, et sur les œuvres comme étant révêLatrk es du suj et
qui les a réalisées. Le chercheur rvaaller aux sources des.a prnduction et
comprendre l'acte qut a mis l'œuvre au monde. C'est le prnces.sus. de créa-
ti on e1n soi qui intéresse ll'anallyst e, qui cherche en aval de La producti on
de 'œuvre dans ce qui s'est peut-être passé avant . Comment cett e œuvre
est-elle venue au monde? Qu'est-ce qui s',est passê pour que Le sujet ait

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278 T,raiiœ r de ,œcllercllecœation e■ art

besoin de sortir de lui une te ille image ? La recherche est sout erraine.
L'auteur de l'œuvre devient le premier sujet d'anallyse, et Ile t ravail artis -
tiq ue est regardé à trave rs le co1nscient et l'inconscient de son auteur. Le
chercheur utrnsera Iles codes de la psychanalyse pour donner sens à ses
gestes qui se concrét isent dans l'œuvre (consdents ou inconscients;
visiblles ou invi1sibles}. Les auteurs de référence sont nombreux: Freud,
Lacan, Anzieu...
Oans le deuxième cas de figure, Ile cherdheur observera que Iles
récit s présents. à sa création ont t endance à historiciser, à contextualiser
et à situer dans Le t emps des œuvres et des moments. de a créati on. H
sentir a qu'il a eu te ndance à tisser des li enisave,cd'autres époques, qu'H
a fait des analogies. et des comparaisons ave,c son trava'l ou sa posture
avec d'autres personnages de l'Histoi1re ou d'autres œuvres. La part· cula-
rit é de ce typ e de recherche est que Ile t ravail se fait en aval de l'.œuv1re;
il v a un effort de eontextua~sati on et la mise en place d'une iconologie
(dérive de figures ayant un th ème commun). t'lf-Hsto ire dessine une
généalogie qui permet d,e comprendre l'œ uvre dans sa complexité en
dessinant une généalogie. L'œuvireest re-sit uée dans des déterminatio ns
extrn-artistiq ues et il existe un ti ssage de connexions entr e des œuvres.
Dansune ire.cherche de typ e historique, Le dh,ercheu,r enveloppe les œuvres
d'un savoiiret L'art est le fruit d'un ensemble de paramèt res soda ux po~-
tiq ues et rullture ls. .es. auteurs vers Lesquels le ,chercheu,r peut se to urner
sont , entre autres, Élie Faure, Erwin Panofsky et Hans Betting.
Pour Les deux approches, la psychanalyse et l'lhistofre, l'a rt est un
domaine commeun autre; pour Anne Cauquelin (1:999), ill v a une volonté
d'exploration eontextu elle ({dest inée à percer l'e nveloppe d'êvé,nements
tan t individue s que publics qui entourent les œuvres de l'art comme un
monde )>(p.. 74).

co:N:C~USIIO'N
I
L'aventu re dans Laquelle m'a entrainée MonikBruneau, celte de faire de la
recllerd1e en mêth odoLogie pour les t hèses création, a été déterminante
dans mon parcours de chercheus,e et d'artiste. Cest enta tives de mettre sur
papier et en ta blleau des ,réflexions et des expériences personneUes de la
recherdhe n'ont pu qu'enrichir et approfondir ma propre recherche docto-
rale et ma démarche d'a1rt 'ste. Cetravail méthodo ogique est indispensable
à La thèse création, commeil l'est pour n'importe queue autre disdpline en
science humaine. Par aiUeurs, la reche;rche création est une disdpline
récent,e et a besoin de cet apport pour prngress,er.. Les nouveaux cher-
cheurs en t hèse créat'o n sont Iles mieux pllacès pour apporter et façonner
les outils en méth odologie, puisqu'ils les ont eux-mÊrnes expérimentés.

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Ce que j'énonce dans cette inte rvention est ju ste ment né de mes
propres impasses en redrnrche création .. Le fait de revenir en arrière en
était une, l'a ngoisse que suscite le doctorat ne pouvant que re111voyer au
confort de sa prntique, et c'est un mieux finalement . Cependant, j'ai
aussi passê beaucoup de temps durant la premiere année du doctorat ii
me nourrir d,e ce qui émanait de mes débats intêrieu1rs th éoriques, pen-
sant y trnuver des réponses. ii mes maux. Malheureusement , cella 1ù fait
que me décaler encore pLusau re·gard de ma pratiq ue, et ma recherche
s'éloignait de plus en plus de mes propres préoccupat ions, j usqu'au jour
où un de mes professs.eurs au doctorat m'a cons,eiUé de revenir sur ma
prati que pour t rouver Les questions et les ré[Ponses que j e cherchais. À
partir de là, j e n'ai pas cessê de faire des liens ent re les deux, à t ell point
que pratique et recherche ont formé un même corps et que ma tlhèse a
êté un moyen d'éd aircir mon parcours ,et m,es. objectifs d'artiste en art
visuel. Ma question de th èse et de redherche s.uirta notion de grand récit
êtait si fondamentale ii ma personne et à ma pratique qu'en y apportant
des rêponses je suis sort ie d'une impasse qui, je crois, n'aurait pu se
résoudre autrement. J'aimerais parfois pouvoir comparer la recherche
création à une forme de th êrapie pour artist es en manque de sens. Pour
moi, elle fut cela.
L'un des aspects les pllus frappant s de mon parcours en recherche
création a été de constat,er ii quel point ce ret our sur mon parcours artis-
tiq ue m'a permis de définir l'ensemble des object'fs de ma th èse et de
donner du serns ii t ous les gestes de la reche1rdhe dans le prolongement
de ma prati que. Revenir en arriè1re m'a permis d'embrasser l'ensemblle de
ma créat ion et d'ernfaire émerger Ile récit de l'œ uvre, le rècit structurant
et le récit de pratiq ue qui erndécoulait (voir le ta bleau 8.4}. J'ai men-
ti onné Ile récit st ructu rant auquel j'ai étê renvoyée, la post modernit é
reconstrnct'vist e ; pour Le récit de l 'œuvre, j'ai étê renvoyée aux œuvres
de t ype autobiographique en art visuel, qui faisaient écho à ma démarche
artisti que intrnspective et à mon goût pour les carnets photographiques
ou Iles re[Présentat' ons en peint ure de mes propres. état s du corps. Pour
ce qui est du rédt de pratique, j'ai pris conscience, ,grâce à La Lecture de
mes écrit s, de ma propemi on natureUe ii décrire Les état s du créateur et,
en l'ocmrrence, des miens.
Grâce à l'ide11t1ification de ces trois récits qui émergeaient de mes
écrits de t rnvail, j'ai pu concilier mon récit struct urant, et donc mon
cadre th éorique, avec cet int érêt pour Iles œuvres de t ype autobiogra-
phique, Ile récit de mo1r1œuvre, et cons.t ruiire un projet de création qui
soit d'écrire moi-même un grand récit. Une immersion personnelle dans
ma recherche, qui s'articulait merveiUeusemernt bien avec Lanoti on parti-
cipatoire de Gablik pour la pos.t modernit é reconstrnctiviste.

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280 T,raiiœr de ,œcllercllecœation e■ art

Ce retour en arrière méthodologique, que j e prône [Par a relecture


des écrits de t ravaH, est aussi deveiflupour moi un projet artis.tique en
soi, [Puis.que ces résidus de l'ateilier, carnets et œuv1res, ont été réécrits
sous La forme d,e quatre livres et d'une insta llation.. Finalement, de ces
écdts de trnvail j'ai pu faiire surgir ma propension nature lle à déa ire mes
états et j' ai ainsi choisi d'adopter une apprnahe phénoménologique pour
conduiire ma recherche. Lâ encore, l'utilisation du journal de bord plléno-
ménollog1que renvoyait dfrecternent au support employé dans ma pra-
tiq ue artistiqu e et me faisait deven· r le propre sujet de ma thèse , qui
concouna1t â faire s,e rej oindre Les notloll'lsautobiographiques de mon
travail de oréaüo n et de ceLui de l a recherche.
D'une cert aine manière Laboude était bouclée, la forme et Lesens
de ma t 1èse création rejoi gnaient le sens et la forme de mon œuvre
d'artist e.. Je ne me trah issais pas et rest ai s fidèle âmes convicti ons que
j' avais décotNertes , ironiquement , par la recherche créatio n.
En t erminant , j' ose espérer que cette déambutation à trave rs cer--
ta ins aspects. de ma recherdl e et l'élaboration d'un certain nombre
d'outfü par les récits présents à la créatio n serviront à êclahe 1r la mute
de futurs chercheurs en th èse création. L'. enj eu de te lles recherches est
essentiel à la progression des ques.ti ons artistiques, et pllus la route
méthodologique sera dégagée et claire, plus les chercheurs pourront
avancer au cœur des questions essentieUes de il'art et de la aéaho 1n par
la voie de la pratique et du faire, et par leur voi.x d'artiste.

RÉFÉRIEIN:CESIBIBL!IOGRA
1PHIQUES
Anzie 11, D. (1981)• .Le· corps de l'œuvœ; ena is p~ycm:iootytiques sur le tnn~i{ créatetlr,
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Ne.-, Yor~ Pre ss.
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pratiqu e art istiqu e, Qué bec , Presses de W11riM!l rsi1té d u Québec.
Calle, S. (1g83). Suite vénitienne, Paris, Ëdlitions de l'Etoüe, ro ll.« rcr vts sur l'i,rnage ».
Postfa ce de Jea 11Ba nd ri ll.a,rd, ,4: Please Follow Me....».

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