saggi 5
Architectures d’incertitudes
Lucien Kroll*
abstract
Puisque le modernisme est enfin tombé en pous-
sière sauf pour quelques nostalgiques, il est urgent
de se reconstruire un appareil de règles de com-
portement comme un psychotique se reconstruit la
totalité des appareils constituant sa personnalité: il
faut repartir de la base, toucher le sol et bien ob-
server le milieu tel qu'il a changé... La base, c'est
les habitants: jamais les techniques n'ont formé un
terreau vivant: on confond toujours l'outil et le ré-
el.
Reprendre les attitudes et les organisations de par-
ticipation de laïcs, ce sera la seule façon de « re-
toucher terre ».
parole chiave
Modernisme, postmodernisme, new urbanism, éco-
logie urbain.
* Architecte-urban designer.
Architetture di incertezze
abstract
Dal momento che il modernismo si è finalmente
dissolto in polvere, tranne che per qualche nostal-
gico, è urgente ricostruirsi un sistema di regole di
comportamento, come uno psicotico si ricostruisce
la totalità dei codici che costituiscono la sua perso-
nalità: occorre ripartire dalla base, toccare il suolo
ed osservare con attenzione come è cambiato
l'ambiente... La base sono gli abitanti: le tecniche
non hanno mai costituito un humus vivente e noi
confondiamo sempre lo strumento e la realtà.
Riappropriarsi delle attitudini e delle organizzazioni
di partecipazione laica, questo sarà l'unico modo di
"riprendere contatto con la terra".
key-words
Modernismo, postmodernismo, new urbanism,
ecologia urbana.
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Dottorato di Ricerca in Progettazione Paesistica I Facoltà di Architettura I Università degli Studi di Firenze
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 6 Architectures d’incertitudes
Parlons de paysage habité…
Nous sommes sortis de la période « fascisme-
croissance » après soubresauts et culpabilités ver-
tueuses mais précises de l’après guerre: jamais
plus, solidarité, ONG, mœurs, antipsychiatrie,
1968, subsidiarité, déconstruction, chaos créatif,
humanisme, anti technologies, décroissance, diver-
sités et complexités, l’observateur fait partie de
l’observé, etc.. C’était un grand mouvement non de
contestation mais de conquête d’une complexité de
la vie: le « fonctionnalisme » devenait maléfique, le
rationalisme une hypocrisie, la science une militari-
sation de toutes les manifestations psychosocia-
les…
Après ces années de casernements, de déperson-
nalisation pour des motifs de progrès ou de survie
(la guerre) la liberté devant les dogmes pouvait re-
fleurir dans toute son inventivité humaniste.
Gestion scientifique de l’humanité
Simultanément, c’est juste l’inverse que nous
avons adopté: davantage de guerres, un colonia-
lisme financier et commercial planétaire, esclavage
déguisé en contrats de marchés, aliénation par la
machinerie, automaticité, communications froides,
préfabrication illimitée, perte de l’échelle, abstrac-
tion des relations vivantes, puis malbouffe et enfin,
le « triomphe »: les « subprime mortgage » qui
dévoilent la monstruosité du marché appelé libéral:
même les banquiers commencent à se bouffer en-
tre eux.
Par exemple rappelons les souvenirs émus des é-
conomistes envers les « trente glorieuses », ce
sont celles qui ont construit les fondations de nos
économies triomphantes et rationnelles. C’étaient
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pourtant ces années-là qui étaient les plus noires
de l’humanité: nous y avons inventé les moyens les
plus efficaces à détruire la planète et nous les
avons adoptés tous sans honte.
Figura 1. Le désir de l'uniforme.
Le petit peuple
Par ailleurs, les bénévoles se sont multipliés: il n’y
a jamais eu autant d’associations non-lucratives,
de volontaires, d’ONG, de militants de la société
civile (comme si elle pouvait être autre chose que
civile) contre les grands suzerains mondialisés nés
pour imposer l’inégalité et le profit illicite… Et ja-
mais on n’a vu autant d’architectes frigides armés
de prétextes rationnels voués à abstraire
l’urbanisme et à uniformiser l’habitat. Comme si
l’habitat était un problème à résoudre et non une
liturgie écologique… Herbert Simon et son acolyte
Marvin Minski ont pratiqué le GPS (General Pro-
blem Solving) qui imposait un cheminement (pseu-
do) rationnel et monodimensionnel basé sur les
syllogismes d’équilibriste ou de faussaires et qui
interdisait à aucune action de se retourner vers son
origine pour en corriger les fautes . Et nobélisé…
Historiens
Mêmes les historiens de l’architecture se sont vite
ridiculisés dans leurs abstractions: Nicholas Pevs-
ner, (et parfois même Kenneth Frampton), Sieg-
fried Giedion « Mechanization takes command »
(qui restent sourdes à l’humanisme de Louis Mum-
ford qu'il faut relire d’urgence ou bien à celui
d’Ebenezer Howard). Ils ont tordu leur logique pour
défendre leurs copains du MoMo, Il est d’autant
plus important de donner la parole aux analyses
décapantes du modernisme (à Peter Sloterdijk, par
exemple…).
Quelques survivants de nos amis les rationalistes
(Manfredo Tafuri, Aldo Rossi, Rayner Banham,
Christian Norberg-Schulz, Leonardo Benevolo, etc.)
s'essoufflent encore depuis quelques dizaines d'an-
nées, dans des redites modernistes juste un peu
cosmétiquées mais sans motif plus fondamental
que de séduire ou d'étonner...
En effet, les jeux formels, les gesticulations et les
frigidités n'ont jamais suscité l'enthousiasme, mê-
me chez leurs confrères qui sont leurs premiers et
souvent leurs seuls spectateurs.
Les écriveurs sur l'architecture butinent autour de
quelques frivolités. Les solides convictions des his-
toriens du Mouvement Moderne malgré leurs dis-

torsions de plus en plus apparentes ratent l'histoire
contemporaine de l'architecture: celle-ci doit être
réécrite d'urgence et de préférence, pas par les
mêmes...
Il n’y a pas de formation d’urbanistes (politiques:
voici encore un pléonasme): il n’y a que des dessi-
nateurs en urbanisme…
Figura 2. Saint Louis Pruitt & Igoe: implosion d'un sys-
tème social (architecte Minoru Yamasaki).
New urbanism
Sans une analyse institutionnelle lucide, nous ne
posséderons aucun outil apte à résister à cette in-
vasion. Celle-ci est très mêlée car elle est faite de
marchandisation (mais si cet objet s'achète, nous
pouvons raisonnablement croire qu'il répond mieux
aux souhaits des « gens » que les préfabriqués so-
ciaux que personne n'avait demandés), son image
est rassurante, elle vise la petite bourgeoisie plutôt
que la population ordinaire avec sa créativité, sa
diversité, son sens profond de l'habiter et ses com-
plicités locales. Elle plaît… Pourtant, elle veut igno-
rer les cultures existantes, pour imposer une nou-
velle passivité par le modèle correct d'un passé de
saggi 7
rêve (fin XIXème). Même si elle s'accompagne de décidées innocentes. Ils étaient aussi victimes du
déclarations enflammées sur ce qu'elle n'est pas... même angélisme psychosocial que celui qui avait
Ses premiers modèles-esquisses étaient surtout é- motivé la modernité... Et ils se sont mis à le cons-
tanches aux problèmes contemporains de densité, truire très joliment (prince Charles, Floride, Cali-
de communication, d'écologie, de culture, etc. Elle fornie, etc...)
pose souvent de vraies questions et en proposent
souvent de bonne réponses mais toujours artificiel-
les. Les arrivages américains ont déjà pas mal cor-
rigé ce point en acceptant la réalité mais sans souci
politique, sans projet créateur: juste une réponse à
une demande précise et le déclenchement d'un
achat.
E-U
Ces modèles peuvent sembler logiques mais ne
peuvent se réduire à une séduction commerciale:
déjà aux USA, ils sont regardés comme un empê-
chement de liberté et d'espace... Ils ignorent les
essais d'urbanisme démocratique américains : Cla-
rence Stein et Henri Wright, les neighbourhood u-
nits, Reston, Radburn, ou même, Frederick Law
Olmsted (le seul architecte héroïque qui a réussi
aux Etats-Unis à dessiner du paysage non-
orthogonal (the « grid ») . Les Européens les ont
effacés de leur culture et de leurs préoccupations,
tout occupées qu'ils étaient à rationaliser leurs pa-
ysages.
Des parrains
Maurice Culot et Léon Krier s'étaient fait les pro-
phètes (intelligents) de ce qui est devenu plus tard
ce New Urbanism, par deux actions: la détestation
aveugle de la modernité et puis la nostalgie des
images de périodes juste assez reculées pour être Figura 3. Minoru Yamasaki et ses Twin Towers.
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 8 Architectures d’incertitudes
Le pouvoir
Il semble que nous atteignons un stade économi-
que identique à celui de la France en 1788: moins
de 3 % de la population maîtrisaient l'économie
des 97 % restants... Peut-être essayera-t-on mê-
me d’adoucir plus tard ces 3 % par des moyens
postmodernes, c'est à dire non-violents: Thoreau,
Gandhi, l’’anarchie aimable, la désobéissance civile,
les réseaux marginaux, le devoir d'ingérence,
etc. Et non suivant les méthodes moyenâgeuses
trop vite décidées par les Américains: violence et
technique aveugle. Il est toujours permis de rê-
ver...
Un exemple: gérer le lugubre
J'ai un jour, entendu un discours intelligent sur
l’opération de la Rive Gauche à Paris (Thérèse Cor-
nil, préfet Carrère). La préparation de
l’infrastructure avait été tellement compliquée qu’il
ne restait plus à personne, l’énergie ni l’intérêt
pour respecter les habitants. Les organisateurs
s’étaient enfermés dans l’obligation de gérer le
« lugubre ».
Les immeubles parisiens de la rue Chevaleret a-
vaient gagné une patine, une usure d’habitants. Ils
devaient recevoir une nouvelle façade en vis-à-vis:
bizarrement, celle-ci a été demandée à Paul An-
dreu, merveilleux organisateur d’aérogares mais
dont la méthodique ne pouvait prendre en compte
aucune diversité, ni aucune échelle compatible
avec celle des habitants. Il a joliment dessiné des
grandes vitrines comme pour vendre des camions
sur un boulevard un peu militaire.
Un conflit avait éclaté avec les artistes qui avaient
squatté le « Frigo », un entrepôt désaffecté. J’avais
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été contacté pour imaginer des pistes de coopéra-
tion: je proposais évidemment de lancer les artis-
tes sur les froideurs des ingénieurs, d’en faire les
intermédiaires amicaux des habitants et d’animer
ainsi les lieux mieux que des constructions stériles
le feraient. Chacun retrouvait là un rôle digne et
risquait d’ajouter de la vie à cette nécropole bril-
lante. On avait dit alors que les artistes étaient im-
possibles à cause de leur idéologie. Pourtant il ne
s'agissait pas de la leur mais de celle de
l’organisation: son pouvoir absolu et inconscient
gèlait toute initiative.
Mais j’étais déjà devenu incompréhensible donc i-
nutilisable et entre-temps, le conflit avait atteint le
point de non retour. Christian Portzamparc a été
condamné à projeter un quartier d’habitations bien
quadrillé mais, malgré sa sensibilité et par conta-
gion avec l’organisation, il a frileusement clôturé
ses rez-de-chaussée aveugles et pratiqué une œu-
vre de commande tout à fait homogène.
Beyrouth
C'est en lisant les annexes du programme du
concours pour la reconstruction des souks de
Beyrouth, que nous avions décidé d'y participer: en
effet, avec émotion, des poètes, des littérateurs,
des citoyens, des civilisés libanais avaient dit leur
nostalgie des souks anciens mais surtout la néces-
sité de retrouver des paysages de même attrait et
non des artifices « fonctionnels »modernes, faciles
et rentables. Ils avaient rêvé de la fontaine et des
cafés qui l'entouraient: ces lieux sont éternels mal-
gré les destructions mais non après des reconstruc-
tions meurtrières.
Nous avions accepté ces conditions comme priori-
taires: l'ancien tracé, l'organique de la construc-
tion (sinon rien n'est plausible), la symbolique des
objets urbains, l'interdiction de "se répéter", etc...
Nos intentions sont passées totalement inaperçues:
les mécaniciens ont vite gagné avec un financier
devenu un ministre « réalisateur »... Nous avions
même trouvé la façon d'exorciser la régularité des
trames de colonnes obéissant aux parkings des
sous-sols: une différence de vingt centimètres dans
l'aplomb des colonnes est toujours tolérable. Elle
aurait suffi à donner cette légère impression d'irré-
gulier: je crois bien que personne ne l'ait même
remarqué...
J'ignore ce qui a été construit mais je suis sûr que
cela ressemble à un monstrueux parking: tout le
Liban avait applaudi sauf quelques écrivains rê-
veurs, jetés après l'emploi puis oubliés.
Retournement
Dans sa jeunesse, la modernité (indispensable a-
lors) avait établi des canons impératifs. Tout dou-
cement, la tradition dont elle voulait se libérer s’est
adoucie et est devenue un choix libre. Quant au
modernisme, il est devenu fanatique: il ne pouvait
tolérer aucune technique, image qui soient une al-
lusion à un monde ancien. Celui qui s’y laissait aller
était « exclu »… En retournement, c’est la tradition
qui était devenue aimable et coopérante et permet-
tait un choix libre… C’est seulement plus tard que
le postmodernisme a permis de puiser dans le ca-
talogue des formes existantes, celles qui convien-
nent raisonnablement au projet ou même à son
image, sans fanatisme et à la seule condition
d’aider l’habitant, non de le séduire…

Figura 4. Le projet de réhabilitation pour un quartier...
Américanismes
A ce propos, il faut se résoudre un jour à exorciser
les anti-américanismes parfois primaires assénés
par certains européens: ce ne sont, tout compte
fait, que nos modernismes personnels dévoyés
dont nous nous défaussons sur des américains my-
thiques: ils sont utiles à masquer nos propres tur-
pitudes... Mieux vaut s'associer à de véritables
américains: ils sont aussi efficaces dans leur
contestation raisonnée que dans leur blocage mul-
tinational ! J’y ai des amis…
Les difficultés françaises, face à l'UE et à ses lois
bizarres, sont un conflit franco-français masqué:
les délégués français (lobbyisés par qui ?) échan-
gent des avions contre des paysans... Encore faut-
il sévèrement se rappeler que l'Union Européenne
ne possède apparemment aucun philosophe ni au-
cun gastronome et qu'elle n'est pas prête à en en-
saggi
gager aucun pour les écouter: ceci est d'ailleurs un
comportement plus américain qu'européen...
Reconstruire une psychologie contemporaine
Puisque le modernisme est enfin tombé en pous-
sière sauf pour quelques nostalgiques, il est urgent
de se reconstruire un appareil de règles de com-
portement comme un psychotique se reconstruit la
totalité des appareils constituant sa personnalité: il
faut repartir de la base, toucher le sol et bien ob-
server le milieu tel qu'il a changé... La base, c'est
les habitants: jamais les techniques n'ont formé un
terreau vivant: on confond toujours l'outil et le ré-
el. Reprendre les attitudes et les organisations de
participation de laïcs, ce sera la seule façon de
« retoucher terre ».
Quoi de neuf?
Le postmodernisme n’’est pas un projet: il est sim-
plement une libération des obligations (devenues
policières) de la rationalité (la tradition elle, était
devenue spontanée), de la géométrie abstraite, de
l’absence de relations entre tout et chacun
(l’aliénation…), de l’habitude distraite, de la mé-
thode et de la règle. Nous nous mettons à adopter
plutôt d’autres moyens de connaissance et de déci-
sions: l’observation naïve du milieu (qui contient
aussi l’observateur…), l’intuition, l’écoute silen-
cieuse, l’empathie, la différence (rien n’est pareil,
ni surtout personne), l’humanisme (ne normalisez
jamais…), la complexité (sans jamais vouloir la
maîtriser), l’habitude (une autre, celle de compor-
tements ouverts), le désordre (il permet la vie),
parfois l’absurde (plus créatif de vie), le respect de
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9
l’avenir encore fermé (une part d’inconnaissable
nuance nos projets), le « laisser-se-faire » (never
design, just follow), etc.
L’écologie
La simple science des relations (Ernst Haeckel
1866) est l’inverse du calcul rationnel qui assigne à
des séries d’être composées d’identiques et d’obéir
à des injonctions abstraites et géométriques. Le
GPS (General Problem Solving) est une invention
barbare dont les coupables sont Herbert Simon et
son acolyte Marvin Minski: ils forcent des évène-
ments complexes et indéfinissables à se comman-
der dans un planning PERT irrespirable fait de syl-
logismes et ils définissent les actions successives
sans aucune autorisation de jeter un œil par dessus
son épaule pour corriger le mouvement d’après ce
que le passé nous dit. On a nobélisé le personnage
principal…
C’est devenu une règle de design urbain… Artificia-
liser et figer l’avenir en font un endroit abstrait in-
humain que les habitants mettent des générations
à « civiliser »… Les quelques expositions qui mon-
trent des plans d’urbanisme depuis la renaissance
sont frigides: il n’y a que des villes militaires (très
jolies lorsqu’il s’agit d’Alberti, Palladio, Sangallo,
etc.) ou concentrationnaires, des tracés d’autorités
marquées sur le paysage, des géométries discipli-
naires, ou bien l’imitation de camps militaires de la
dernière guerre: l’exemple le plus abouti est celui
que dessinaient Ludwig Hilbersheimer ou Mies van
der Rohe… Pas une poussière…
L’organisation spatiale de ces expositions frigides
d’urbanismes est, en soi, une ville nouvelle. Il veu-
lent parfois l’appeler « rue ». Ce n’est jamais vrai:
une rue est habitable et elle offre des bancs et des
 10
services urbains à la personne. Celle-ci ne concer-
ne que les véhicules… Elle ne montrent jamais, en
parallèle, des agglomérations spontanées moder-
nes, anciennes, de vacanciers-bâtisseurs ou enco-
re, des instincts de création urbaine vivante par a-
jouts respectueux de l’existant.
Un conglomérat
La difficulté actuelle consiste à se transformer en
éponge, à absorber les informations complexes,
sans essayer de les classer en aucune façon, de les
comprendre (de les aimer…) et, moyennant notre
art de l’architecture d’en « laisser se faire » le con-
glomérat assemblant tous objets différents et ainsi
à les rendre paisibles entre voisins. Il faut se dé-
barrasser de notre éducation « activiste » qui tou-
jours maltraite les « envies de se réunir » d’une fa-
çon autonome. De leur côté, les psycho-
sociologues et les pédagogues ont du vivre cette
mutation pour enfin voir les gens comme des êtres
et non comme des problèmes. Ceci peut alors at-
teindre une texture urbaine « naturelle » qui per-
met à la vie d’évoluer: Il n’y a pas d’autres moyen.
Cela s’appelle la participation mais de nouveau, ce
n’est pas l’action de « faire participer » de « don-
ner la parole » (donc nous l’avions confisquée ?),
d’agir, de commander, de conseiller, etc...
Y a-t-il quelque part une ville subsidiaire ?
Non, sauf toutes les villes anciennes, les sponta-
nées, les bidonvilles, etc. On a parlé de subsidiarité
vers l’époque de Maastricht où l’Union Européenne
cherchait à flatter les Européens pour obtenir leurs
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Architectures d’incertitudes
signatures. Passé cet instant, plus jamais on n’en a
parlé.
Figure 5-6. Ce batîment obéit à une loi d'électromagné-
tisme urbain de répulsion maximale. Juste vis-à-vis il ya
ce petit et agréable batîment d'ècole en briques: je n'ai
jamais vus les deux ensemble sur la même page.
La créations de la forme de la ville est définitive-
ment hiérarchique: au sommet sont assis les
« Services Techniques », peuplés de braves techni-
ciens qui deviennent des fauves lorsqu’ils sont en
groupe, puissants et chargés de défendre leur sys-
tème de pensée… Curieusement, en dehors de leur
« fonction » ils peuvent être civilisés, poètes,
gourmets et pères de famille…
Des desseins de villes écologiques ?
Y a-t-il des formes écologiques de ville. Non, sans
doute, mais sûrement, il y en a qui sont « éco-
incompatibles »: ce sont tous les tracés mécanis-
tes, bureaucratiques ou narcissiques.
La première qualité écologique d’une disposition
urbaine est d’affirmer l’humanisme, les différences,
la complexité et l’auto-organisation vivante d’un
voisinage aimable et non la technologie ni
l’économie, même environnementale: cela peut a-
lors devenir une architecture caractéristique de
l’écologie. Les performances énergétiques ou tech-
nologiques sont secondaires: elles se contentent
d’aider cette qualité de voisinage, de l’élargir à la
planète.
Certains projets récents de quartiers soutenables
s’appuient uniquement sur cette « fabrication » de
boîtes à se loger: au mieux, elles ressemblent à
1984 et l’architecte en serait Georges Orwell…
Les délais
Depuis vingt ans, les experts, unanimes, fixent la
date du « non-retour » des dégâts climatiques à 10
ans et il y a 2 ans qu’ils le disent… Le climat entre-
ra alors dans une ère de comportement erratique…
 saggi 11

Ils calculent un budget de 1 pourcent du PIB mon-

dial: si seulement les riches (20% de la population
qui avalent 80% des ressources) y cotisent, chacun
devrait dépenser € 227 par an mais ils n’y arrivent
pas. Ne nous coûtons-nous pas trop cher ? Si ja-
mais l’humanité en vaut la peine, il faudrait s’y
prendre sans délai. Déjà, une opération soutenable
imaginée aujourd’hui prendra normalement 3 ans
avant d’être habitée…
Mais nous ne savons pas précisément comment fai-
re ! Dans ce cas, il vaut mieux « Apprendre à mar-
cher en marchant » et non dans les livres. Com-
mencer aussitôt en rassemblant toutes les connais-
sances que nous possédons, donc dans toutes les
directions. Les « ratés » seront aussi instructifs que
les « réussis », et, déjà bien avant la fin de
l’opération, nous pourrons en apprendre beaucoup.
Mais, cela ne démarre pas… Nous attendons sans
doute de voir défiler violemment les affamés, as-
soiffés, noyés, désertifiés, empoisonnés, étouffés,
cancéreux, blessés dans les guerres et sur les rou-
tes ou désespérés et ceux-ci réclameront aux 20 %
de riches de la pollution, de partager… Il y a telle-
ment à faire que nous ne serons pas de trop à 6,6
milliards à réparer la planète.
Mais il faut croire fermement au sursaut positif plu-
tôt qu’à ces atmosphères Titanic ou Mad Max qui
rampent…

Text reçu par la redaction dan le mois de mai 2008.

© Copyright de l’auteur. L’emploi est permis, si la source
est correctement citée.

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