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UE 363 : Esthétique et Histoire de l’art

UE 363A. Théories esthétiques


Intitulé du cours : L’Esthétique négro-
africaine

Séance 3

3. L’esthétique philosophique africaine

UNIVERSITÉ CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR


Faculté des Lettres et Sciences Humaines
Département de Philosophie
Année universitaire : 2019-2020
Licence 3
Enseignant : Babacar Mbaye DIOP Contact : babacarmbaye.diop@ucad.edu.sn
Propositions de lecture

► Konaté Y., La Biennale de Dakar. Pour une esthétique de la création


africaine contemporaine – tête à tête avec Adorno, Paris, L’Harmattan,
2009
► Senghor L. S., « L’esthétique négro-africaine », in revue Diogène, n°16,
Paris, Gallimard, 1956, Liberté 1, Paris, Seuil, 1964, pp.202-217
► Memel-Foté H., « La vision du beau dans la culture négro-africaine »,
in Fonction et signification de l’art nègre dans la vie du peuple et pour
le peuple, Actes du colloque du premier festival mondial des arts
“nègres”, Présence africaine, 1967
► Mveng E., « Problématique d’une esthétique négro-africaine », in
Éthiopiques, n°23, 1975. [En ligne]
► Ndaw A., « Conscience et communication esthétique négro-africaine »,
in Éthiopiques, n°23, 1975. [En ligne]
► Roger Somé, Art africain et esthétique occidentale. La statuaire lobi
et dagara au Burkina Faso, Paris, L'Harmattan, 1998.
On a souvent affirmé que le mot art n’existe pas dans les langues
africaines.

→ Mais Yacouba Konaté dans son ouvrage sur La Biennale de Dakar


montre que l’absence du mot art « ne signifie pas l’absence de la chose
qui va avec » le concept art.
Il donne l’exemple des Bambaras. Chez eux, dit-il, la notion d’art « tient de
l’activité spécifique qui produit l’objet. Les objets qui sont des effets de jeu
seront dits : foli ; la taille de bois du sculpteur sera dite : yiri schen, yiri
étant le bois, schen la taille ou l’acte de tailler. […] Tout comme le
sculpteur est « le tailleur de personnages en bois » (c’est-à-dire le yiri
mogoni shien la), le sculpteur de fer sera dit « le faiseur de personnages
en fer » (nègué mogoni dla la) ».

→ C’est dire donc que le mot art existe bel et bien dans les langues
africaines ; seulement les Africains « ne développent pas la même notion
d’art » que les Occidentaux ou les Asiatiques.

Konaté Y., La Biennale de Dakar. Pour une esthétique de la création


africaine contemporaine – tête à tête avec Adorno, Paris,
L’Harmattan, 2009, p.26.
► Puisque nous admettons avec Yacoubé Konaté
l’existence en Afrique d’une chose qui va avec le
concept art, il nous faut maintenant tenter
d’établir les conditions de possibilité d’une
esthétique africaine.
► Mais avant cela, il est indispensable de définir,
tout d’abord, ce qu’est l’Esthétique en
général. Ce n’est qu’après que nous pourrons
poser les bases d’une esthétique négro-
africaine.

► Voir le cours de L1 et L2 sur la définition de


l’Esthétique : Baumgarten, Hume, Kant, Hegel
► Envisager les arts traditionnels de l’Afrique noire à
l’intérieur d’une discipline qu’on appellera Esthétique
« négro-africaine » ou Philosophie de l’art « négro-
africain », suppose donc de redéfinir le terme «
esthétique ».

► En d’autres termes, il faudra préciser les conditions d’un


discours de type esthétique qui pourrait être formulé à
propos de ces arts ou, autrement dit, formuler des concepts
philosophiques dans leur approche. Trois thèses sont
soutenues :
- l’aspect formel
- l’aspect conceptuel
- la synthèse de la forme et du contenu ou l’ethno-esthétique
L’aspect formel

→ Carl Einstein dans La sculpture nègre


Il soutient l’idée qu'il existe dans l’art traditionnel de l’Afrique, des
œuvres qui correspondent à la théorie de « l’art pour l’art ». Pour lui, en
effet, la signification d’une œuvre n’est pas importante pour son
appréciation. Seule compte sa forme telle qu’elle nous affecte. Cette
thèse formaliste a été évoquée par plusieurs penseurs.
→ Fernandez J. W., dans « Principes of opposition and vitality in fang
aesthetics » in Arts and aesthetics in primitive societies, Carol F. Jopling,
New York, 1971, p. 205.
Il soutient que l’esthétique s’étend à toutes les formes de la vie et de la
culture que les Fangs ressentent esthétiquement et s’applique en
particulier aux gardiens de reliquaires que les Fangs nomment eyima byeri.
Ces statues sont des gardiennes ; leur usage est de « défendre les
reliquaires ». Mais aussi, une fois par an, au cours du cycle d’initiation au
culte des ancêtres, elles étaient enlevées des reliquaires et on les faisait
danser, comme des marionnettes, au-dessus d’une cloison de chaume :
« elles expriment, si elles sont bien faites, un principe fondamental de
vitalité ».
La vitalité est une propriété esthétique appréciée en particulier chez l’homme en sa
maturité. La vitalité des statues fang tiendrait à ce qu’elles représentent des
humains en leur pleine maturité. En les faisant danser, on met les statues en
mouvement, on leur donne la vie. Le mouvement manifeste ou exprime la vie.
Suzanne Vogel
(1985 : XII)
→ Elle parle de symétrie, de beauté, de délicatesse, de
richesse des matériaux tels que l'or et l'ivoire. Dans la
plupart des sociétés africaines, l'ajout d'un élément décoratif
est considéré comme donnant plus de valeur à la pièce
African aesthetics (1987a)

→ Vogel propose une « esthétique africaine ». Elle prend appui


sur les objets africains et les esthétiques particulières. Son
étude porte sur les Baoulés et les Yoruba et les « grandes
similitudes dans les résultats suggèrent qu’il existe une base
partagée par les jugements esthétiques ». Elle insiste sur ces
similitudes, parce qu’elles « indiquent, dit-elle, la voie vers
une définition de l’esthétique africaine ». Ainsi, ce seraient
les similitudes qui conduiraient les comparaisons vers une
définition de l’esthétique africaine en général.
 Crowley (1973 : 246-247) parle de double symétrie, de
polissage des surfaces, d'une maîtrise des outils, de la
préférence pour les pièces en pied et de la beauté. Cette
conception de l’art africain est purement occidentale. En le
considérant ainsi, les Occidentaux oblitèrent une part de son
contenu : les croyances qui s’y attachent, et au moins sa
fonction opératoire.

Remarque : Il est certain que les critères occidentaux ne sont pas


les mêmes que ceux des artistes africains. Pour les membres
d’une ethnie africaine, les Dogons par exemple, la « valeur »
d’une statue de culte est d’un ordre autre ; elle signifie autre
chose que ce qu’elle revêt aux yeux des Occidentaux. Le plaisir
esthétique qui se dégage d’un masque ou d’une statuette
importe moins pour un Dogon que sa fonction rituelle.
L’aspect conceptuel

Certains penseurs ont insisté sur l’aspect conceptuel pour établir une classification
des appréciations esthétiques en Afrique :

→ Senghor L. S., « L’esthétique négro-africaine », in revue Diogène, n°16, Paris,


Gallimard, 1956

Il nous rappelle que chez les Wolofs, les termes « târ » et « rafet », « beau » et «
beauté », désignent, de préférence, un homme ; tandis que « dyêka », « yèm » et
« mat », qu’il traduit par « qui convient », « qui est à la mesure de », « qui est
parfait », s’emploient pour l’œuvre d’art.

→ Michel Leiris, « Les nègres d’Afrique et les arts sculpturaux », in Originalité des
cultures : son rôle dans la compréhension internationale, UNESCO, Paris, 1954, pp.
336-373

Il souligne que pour les Bambara, le mot « nyi » désigne indifféremment bon ou beau
et que pour les Daza du Sahara Central, « gale » signifie bon, « ngala » : joli et
« genaso », laid. Il définit l’esthétique africaine en s’appuyant sur la mise en œuvre
d’enquêtes sur l’identité du sculpteur, les conditions de son travail et de sa formation,
sa situation dans la société, les jugements portés sur ses œuvres par ses acquéreurs
ou utilisateurs.
→ Memel-Foté H., « La vision du beau dans la culture négro-africaine », in
Fonction et signification de l’art nègre dans la vie du peuple et pour le peuple,
Actes du colloque du premier festival mondial des arts “nègres”, Présence
africaine, 1967.

Il nous apprend que le beau chez les Agni se dit « Klamâ », chez
les N’Zema « klinmâ », chez les Baule « krêmâ » et chez les
Bete « guinanâ ».
Dans la communication qu’il a présentée au Premier Festival
Mondial des Arts Nègres à Dakar, il rend compte de l’enquête
linguistique à laquelle il s’est livré en Côte d’Ivoire, chez les
trois grands groupes culturels Akan, Krou et Mandé et montre
que ces peuples entretiennent le concept de la beauté en soi.
→Engelbert Mveng, « Problématique d’une esthétique
négro-africaine », in Éthiopiques, n°23, 1975

Il pense que le vocabulaire du « Kalos K’agathos »


grec trouve en Afrique d’étonnantes équivalences.
Ainsi, écrit-il : « en Ewondo, par exemple, le Beau
s’exprime par « Mben » et « Aben » qui traduisent
mot pour mot le grec (Kalos K’agathos). Créer une
œuvre d’art se dit : « Kom », et « Kom » signifie à la
fois fabriquer, mettre en ordre, orner, embellie ».
→ Alassane Ndaw, « Conscience et communication esthétique négro-
africaine », in Éthiopiques, n°23, 1975.
Il défend l’existence d’une esthétique négro-africaine et
cherche à analyser ses critères avec « le même sérieux » que
l’art occidental : contrairement aux précédents, il s’inscrit en
faux « contre la thèse selon laquelle l’expérience esthétique, en
Afrique, doit fonder totalement ses jugements sur la saisie des
significations révélatrices des cultures négro-africaines ».
Il écrit :
« la définition traditionnelle, selon laquelle l’expérience du beau est celle
d’une satisfaction désintéressée, ne saurait être complètement abandonnée. En
effet, lorsque nous adoptons une attitude, soit en face de la nature, soit en
face d’une œuvre d’art, nous mettons entre parenthèses nos besoins pratiques.
L’objet est goûté pour lui-même, indépendamment de ses relations à notre être
biologique ; il ne présente ni une utilité positive, ni une menace pour notre être
vital. Cette expérience implique la neutralisation de nos impulsions instinctives
et nous rend capables de jouir de la simple apparence phénoménale des êtres et
des objets. En ce sens, le plaisir que nous éprouvons est désintéressé » (p. 58).
 Remarque :
Les conceptions classiques de beauté, de contemplation de
ces penseurs sont généralement reprises pour justifier
l’existence d’une esthétique non pas africaine, mais
universelle. Ils citent leurs publications comme des dogmes
immuables. Or doit-on séparer des objets, qu’aujourd’hui
les Européens appellent « art africain », du cadre général
de leurs histoires et de leurs contraintes culturelles ? Peut-
on les considérer avec des critères qui n’ont jamais existé
dans l’esprit des artistes africains ?
S’il doit y avoir une esthétique africaine, nous dira
Alassane Ndaw, sa spécificité devra être l’appartenance de
ses auteurs au continent africain.
Comment qualifier alors les écrits des auteurs occidentaux
sur l’esthétique ou l’art africains ? Doit-on dire, parce
qu’ils n’appartiennent pas au continent africain, que leurs
écrits sur l’art africain ne peuvent pas être considérés
comme de l’esthétique africaine ? – Je ne le pense pas.
Conclusion du chapitre 1 :
Le jugement esthétique : entre raison
discursive et/ou raison intuitive

Il existe principalement deux démarches dans le


jugement esthétique :

→ Certains soutiennent l’idée que le jugement


d’une œuvre d’art relève d’une opération avant
tout intellectuelle
→ Pour d’autres le beau est lié au sentiment ou à
la sensation de plaisir physique
→ La pensée logique procède par déduction à partir d’un
certain nombre de principes. On pense que seules les
investigations scientifiques peuvent satisfaire notre sens
esthétique. Mais le corps sensoriel nous permet aussi de
former des jugements d’expérience reposant sur une
évidence non pas «intellectuelle » mais sensible, concrète
et palpable*

→ Dans une telle démarche, ce qui est important est moins


la pensée logique que l’intuition d’une réalité vécue et
sentie, qui s’exprime aussi bien dans la production
artistique que dans les métaphores, les allégories, les
proverbes, les contes et même les mythes.

* Jean Brun, L’Épicurisme, Q.S.J ? P.U.F. 1959


→ Un travail artistique n’est jamais sans émotion. La création suscite
toujours chez l’artiste une grande émotion. L’artiste réussit mieux
son œuvre lorsqu’il transmet l’écho de cette émotion initiale et de
son aventure intime. C’est dire que l’émotion est au fondement de
la création artistique. La pensée logique n’est pas donc le seul
mode de connaissance d’une œuvre d’art. L’émotion est aussi
crédible que la raison pour juger et comprendre une œuvre d’art.

→ Nelson Goodman l’exprime si bien quand il affirme que « les


émotions fonctionnent cognitivement », car celles que nous
éprouvons devant une œuvre nous permet de comprendre, de
manière rationnelle, l’objet esthétique. L’émotion est non
seulement rationnelle – en ce sens qu’elle constitue un mode de
compréhension –, mais elle est aussi un mode de connaissance. Par
conséquent, la pensée logique ne peut pas être le seul mode
privilégié de nos émotions.

→ L’émotion, lors de la réception symbolique des œuvres d’art, est


aussi une voie privilégiée de connaissance ; elle nous fournit, aussi
bien que la raison, une connaissance et une compréhension des
œuvres d’art. Et ceci est tellement vrai que le beau prend toujours
une forme sensible pour arriver à nous. C’est toujours sous une
forme sensible que nous connaissons une belle peinture.
→ Le premier caractère de l’émotion esthétique est d’être un plaisir.
Or, le plaisir est produit par l’action sur notre esprit d’un objet
conforme à sa nature. Nous ne connaissons que nous ; c’est par
comparaison dans leurs rapports avec nous que nous jugeons les
objets. Si donc l’émotion esthétique est un plaisir, c’est que le beau
est conforme à notre nature. Le beau doit avoir quelque chose de la
nature humaine. Ce que nous cherchons partout dans l’art, c’est
nous-mêmes. Un masque n’est pas beau par lui-même : ce qui fait sa
beauté, ce qui le rend capable de devenir objet d’une émotion
esthétique, ce sont les sentiments que ce masque éveille en nous.
→ De plus, l’émotion esthétique est le résultat d’un désir : on va voir
le porteur d’un masque qui va entrer dans une scène pour danser,
l’écouter parler, et l’attente est déjà en elle-même une émotion. Le
beau fait éprouver une émotion. L’émotion esthétique ne doit pas
être confondue avec la sensation. L’émotion est un sentiment
agréable composé de sympathie, de plaisir, de surprise qui peut se
ramener à l’admiration. Le sentiment est intéressé : l’Africain aime
un masque pour ce qu’il est, pour le profit, pour l’utilité.
→ Enfin le caractère de l’émotion esthétique est toujours
intéressé. Quand un africain aime une statue, il s’abandonne
tout entier à l’utilité qu’elle lui procure. Pourvu qu’il voie
l’objet utile, son amour du beau est satisfait.
Le masque africain n'est pas un objet d'art décoratif ou figuratif,
ni un objet d'art dans sa finalité, ni un objet inexpressif, ni un
objet de sorcellerie. Il est vivant et se fond dans un ensemble.
C'est une œuvre créée pour provoquer des sentiments de
respect, de crainte, de courage, de gaieté.
L’Africain porteur d’un masque est un être émotionnel. C’est ce
qu’on a reproché à tort à Senghor – nous y reviendrons dans le
cours. Il a mis au jour une ontologie existentielle de l’Africain
pour laquelle l’être est rythme et le rythme, l’âme de l’image,
se trouve au fondement des religions africaines. Les arts
africains constituaient, selon lui, le langage de cette ontologie.

C’est cette idée senghorienne de la méta-esthétique que


nous allons voir dans le chapitre suivant.

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