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I. La communauté villageoise
Nous commencerons par définir ce qu’est une communauté villageoise avant d’évoquer ses
caractéristiques.
La permanence dans l’installation est une des caractéristiques du village. Cela signifie que les
habitants s’y installent et y mènent leur vie toute entière. Ils héritent du village, des terres et
des coutumes de leurs ancêtres qui peuvent avoir fondé ce lieu depuis des siècles. Les vivants
actuels comptent léguer leur patrimoine à leurs enfants qui, ils espèrent en feront de même
pour les générations futures. Dans un village, on y vit et on y meurt. On n’envisage pas une
vie permanente ailleurs en dehors de cette aire géographique où l’on a vu le jour. Cela ne
signifie pas que les habitants du village ne voyagent pas. Bien au contraire, ils se déplacent
mais quel que soit le temps qu’ils mettent en dehors de leur territoire, ils y reviennent
toujours. L’attachement à cette terre fait que même mort, on y convoie parfois et dans la
mesure du possible ses restes mortels.
D’un point de vue général, une société rurale se caractérise par l'isolement. Par conséquent,
les caractéristiques économiques de la société rurale se développent autour de son
autosuffisance régionale.
L'unité de production qui est la famille essaie de produire une grande partie de ses propres
biens. Ce qu'elle ne peut produire est fait par des artisans résidant dans les mêmes
communautés ou à proximité. Il existe un degré moindre de concurrence sur les biens, le
pouvoir et le statut social. L'agriculture et l'industrie sont étroitement liées et se caractérisent
principalement par l'environnement local. La culture, de même, tend à être régionale et se
développe à partir de l'environnement local.
La société rurale développe certains traits sélectifs, c’est-à-dire la simplicité de la vie et les
rituels sociaux, les langages codés, les normes morales rigides, le folklore coutumier,
l'adaptation et la philosophie du travail non-lucratif etc. L'art rural est exprimé dans la
construction de maisons, les articles domestiques, les images religieuses et les festivités,
comme les danses, les chansons et les jeux. Tout ceci fait la distinction entre la société rurale
et la société urbaine.
De même, un homme ne donne sa fille en mariage qu’à quelqu’un qui est reconnu pour son
travail dans les champs. Parfois, la dot même est payée en heures de travail dans le champ du
futur beau père en présence de la fiancée et de la belle-mère.
La femme vit sa vie quotidienne non pas selon le modèle de « la femme au foyer », mais
selon les normes traditionnelles de « la femme de maison », la maison étant à la fois l'unité de
famille et d'exploitation. Elle s'identifie à cette « maison » où son rôle est primordial, pendant
ce temps l'homme se réserve les relations avec l'extérieur et les responsabilités sociales.
Aucune femme ne participe aux conseils municipaux ; les réunions politiques ou techniques,
les discussions de groupe ne sont pas de son ressort. Seules deux activités externes lui sont
propres parce qu'elles prolongent l'existence familiale : les réunions cultuelles et les marchés.
1.6 L’héritage
La plupart des familles vivent dans le même village depuis la création du village. Les
générations qui sont présentes ont hérité de leurs parents et ancêtres des terres et des
coutumes qu’ils vont léguer à d’autres générations. L’héritage du patrimoine s’accompagne
de celui de la culture, de l’économie, de l’éducation etc.
Beaucoup parmi eux sont des agriculteurs dont certains ont un droit foncier permanent. Leurs
ancêtres ont été les chefs de terre et ils ont hérité de ces droits qui restent permanents.
Dans certaines communautés, les familles cultivent toutes les terres qu'elles possèdent. Celles
qui possèdent des parcelles plus grandes peuvent en prêter à d’autres avec un cahier charges
précis. Au plus bas niveau économique et social sont les ouvriers agricoles appartenant
surtout à des castes faibles. Certains d'entre eux ont acquis de petits terrains soit en
permanence, soit en location, et rarement ont le droit de propriété. Mais la plupart d'entre eux
ne sont que des travailleurs agricoles occasionnels. Entre les propriétaires fonciers et les
ouvriers de l'échelle économique, il y a les artisans qui occupent une place plus ou moins
importante. Par exemple, les forgerons fournissent l’outil de travail aux agriculteurs. Ces
derniers en général, pratiquent l'agriculture comme une profession à temps partiel. La
stratification sociale et économique est plutôt rigide et le choix de l'occupation, la nature et la
portée de l'activité économique et le comportement social, etc., sont principalement
déterminés par la tradition et la coutume.
2.1.1 La Famille
La famille qui est un groupe de personnes apparentée ou unis par alliance est une institution
forte en milieu rural. C’est à partir de la famille que s’organise la vie sociale et économique
des membres. Le chef de famille qui est différent de la notion de chef de ménage, assure une
veille stratégique sur les ressources qu’il distribue aux membres. Ces derniers ont une
obligation morale de lui rendre compte. En milieu rural, ce sont des groupes de familles qui
constituent le village d’où s’organise la vie communautaire. Dans l’exploitation des champs,
ce sont les membres de la famille qui constitue la main d’œuvre. Le travail individuel n’est
pas quantifié et n’est pas facilement intégrable dans le calcul des coûts de production. La
survie et la valorisation d’une famille dépend donc de son travail collectif et non individuel.
L’individu qui naît s’insère de facto dans une famille dans laquelle il évolue et épouse ses
valeurs. Les enfants de forgeron seront des forgerons dans le village et ceux des cultivateurs
seront aussi cultivateurs etc. Les activités économiques sont, on peut le dire, distribuées à
priori à partir de la famille.
2.1.2. Le Mariage
Le mariage consacre l’union primaire entre une femme et un homme. Mais le mariage en
milieu rural est loin d’être une banale rencontre entre les deux conjoints. C’est une affaire qui
préoccupe au haut degré les membres de la famille. Car c’est par le mariage que se perpétue
la famille et la communauté. C’est par le mariage aussi que se forme la main-d’œuvre à
travers les enfants qui y naitront. C’est la raison pour laquelle, le mariage requiert le regard
du chef de famille, qui dans bien des cas demande la main d’une jeune fille pour son fils alors
que les deux sont encore mineurs. Ce sont, dit-on, deux familles qui se marient. En
témoignent d’ailleurs les cérémonies qui rassemblent alors toute la communauté villageoise.
Des valeurs recherchées chez l’homme et aussi chez la femme dans le mariage sont entre
autres le courage et l’amour du travail. En effet, c’est à partir du travail que va se construire
les activités socioéconomiques du groupe pour défendre l’honneur de la famille.
2.1.3. La Religion
Dans la communauté rurale, l’individu adopte d’abord la religion de ses ancêtres. Ce lien qui
unie l’individu et la communauté à un être suprême joue un rôle dans leur organisation
sociale et dans l’organisation des ressources productives. Ceux qui adoptent les religions
traditionnelles croient par exemple que les ancêtres même morts ont un contrôle sur la vie et
la structure sociale familiale. Cette forme de croyance est souvent à la base d’un statu quo
dans la manière de cultiver et dans les spéculations pratiquées. On pratique ce que les parents
et les ancêtres ont pratiqué. Cela justifie par exemple des cérémonies comme la fête des
ignames pratiquées à l’Est et au Nord Est de la Côte d’Ivoire où la nouvelle igname doit être
offerte d’abord aux ancêtres pour demander leur « bénédiction » ou leur permission. Mais
d’une façon plus générale, la religion guide la production et règle le mode de consommation
de ses adeptes. Puisque l’aire où se déroule la vie quotidienne est réduite, le contrôle des
interdits devient alors communautaire et l’individu se voit contraint de respecter les coutumes
ou les prescriptions religieuses de la famille ou de la communauté.
Les villages sont en contact avec les villes et le monde extérieur aussi. La spécialisation et la
commercialisation des produits agricoles accroissent les superficies et déterminent le type de
spéculation à produire, cultures vivrières ou cultures de rente. Les valeurs sociales changent
également. Les castes dites inférieures évoluent par leur situation économique et parfois aussi
dans l'échelle sociale. Il y a aussi une certaine conscience politique. Les nouvelles forces
économiques, sociales et politiques sont au travail. Ils rompent l'organisation existante. Mais
puisque toutes les communautés agricoles sont très conservatrices, ces changements ne
peuvent avoir lieu que très lentement.
L’influence de l’urbain peut aller jusqu’à transformer le village en ville. En Côte d’Ivoire par
exemple, la population urbaine est supérieure à la population rurale depuis 2009. Avant, les
ruraux ont toujours été les plus nombreux.
Figure 1 Evolution des populations rurale et urbaine en Côte d'Ivoire de 1960 à 2016
12000000
10000000
8000000
6000000 Population urbaine
4000000 Population rurale
2000000
0
1960
1984
2008
1963
1966
1969
1972
1975
1978
1981
1987
1990
1993
1996
1999
2002
2005
2011
2014
confond dans une autre imperceptiblement. Par conséquent, les différences caractéristiques
entre les deux étapes ne sont pas distinguées. Mais, pendant de longues périodes, même les
changements lents s'accumulent dans une mesure où les conditions économiques,
l'organisation et les institutions deviennent fondamentalement différentes, et les deux
périodes semblent être beaucoup, sinon absolument, différentes de l'un pour l'autre de
manière à être qualifié de différentes étapes économiques. La transition économique du
milieu rural suit également ce processus.
Dans son évolution économique, le monde aurait traversé cinq étapes: la chasse, le
pastoralisme, l'agriculture, l'artisanat et l'industrie. Mais en économie, le terme «transition
économique» est généralement utilisé dans un contexte spécifique pour désigner le passage
de l'ancien système économique médiéval au système économique nouveau ou moderne qui a
vu le jour après la révolution industrielle. La révolution industrielle a commencé en
Angleterre au milieu du dix-huitième siècle, puis se répand à d'autres pays. Elle a transformé
l'ensemble de l'organisation économique, les systèmes de production, d'échange et de
distribution, la mesure des valeurs, l'échelle des préférences, les idées et les idéaux, le mode
de vie et toutes les relations économiques.
Au total, la société rurale a un pouvoir et une influence sur l’individu qui naît et évolue dans
une communauté. C’est à partir de cet environnement que se construit aussi l’organisation
sociale et économique du groupe. Les caractéristiques étudiées ne sont pas statiques. Elles
évoluent et certaines sociétés traditionnelles ont fini par perdre leurs valeurs pour épouser
celles des villes.
Bibliographie de base
Rambaud Placide. Le travail agraire et l'évolution de la société rurale. In: Études rurales,
n°22-24, 1966. pp. 135-173; doi : 10.3406/rural.1966.1287 en ligne
http://www.persee.fr/doc/rural_0014-2182_1966_num_22_1_1287
Canévet Corentin. Les mutations de l'espace rural. In: Norois, n°105, Janvier-Mars 1980.
pp. 5-18;