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Kareem El Hidjaazi

« Nè gres »
&
« islamistes »,
Les convergences d’une lutte
culturelle
Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous les procé dé s ré servé s
pour tous pays.

© É ditions Islamologues de France

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ISBN : 978-2-9602672-0-4
Quand vous voyez que vous avez des problèmes, tout ce que vous avez à
faire, c’est examiner la méthode historique utilisée dans le monde entier par
d’autres qui ont eu des problèmes similaires aux vôtres. Et une fois que
vous voyez comment ils ont obtenu leurs droits, alors vous savez comment
vous pouvez obtenir les vôtres.

Malcolm X, « Message to the Grassroots »


Pré face

H uit minutes et 46 secondes, c’était précisément le temps durant lequel un officier de police
dans le Minnesota avait maintenu son genou sur le cou d’un homme noir qui était menotté
et plaqué au sol. Dans les mois à venir, ces 8 longues minutes allaient embraser le pays le
plus puissant au monde, et le confronter aux profondeurs ténébreuses de son racisme.

Un peu partout aux États-Unis, le meurtre de George Floyd a très vite suscité le dégoût d’un grand
nombre de citoyens américains. Le poing levé, des milliers de manifestants sont sortis dans les
rues pour rappeler que la vie des Noirs avait aussi une importance. Leurs voix s’élevaient au point
qu’elles ont fini par toucher un nerf transatlantique. De l’Europe à Afrique en passant par le Levant,
des personnes qui n’ont jamais mis un pied en Amérique ont alors exprimé leur soutien à la cause
de la communauté afro-américaine. Les manifestations subséquentes qui se sont tenues dans les
métropoles européennes ont dès lors montré à quel point les communautés minoritaires se sentent
discriminées, maltraitées, marginalisées et déshumanisées.

Le mouvement Black Lives Matter a redonné du souffle à la lutte contre le racisme d’État et les
violences policières. Sa cause est devenue internationale, car aux deux rives de l’océan, des
personnes racisées meurent sous le poids d’agents qui étaient supposés les protéger.

En France, le cas le plus connu est celui d’Adama Traoré, mort étouffé après une banale
interpellation en juillet 2016. De l’autre côté de la frontière, au sud de l’Espagne, Ilias Tahiri, un
jeune Espagnol d’origine marocaine est décédé dans un centre pour mineurs — placé sous tutelle
de l’État — au sud de l’Espagne. Ilias n’a pas été asphyxié par une seule personne, précisait El País
en juin 2020, mais par six personnes ; un responsable du centre et cinq agents de sécurité1. Bien
que la mort du jeune Marocain fût filmée, la justice espagnole décide contre toute attente de

1
Patricia Ortega Dolz, « El vídeo de la muerte de un joven en un centro de menores no muestra que este opusiera
resistencia », El País, 09/06/2020.
blanchir les agents. Les médias, quant à eux, étouffent l’affaire et, par-là, le jeune Ilias pour une
seconde fois…2

Le racisme est de différents types, mais ses expressions sont souvent interreliées. Il est impossible
d’en analyser une partie sans l’étudier dans un contexte plus large. Les décès tragiques de Georges
Floyd, Adama Traoré et Ilias Tahiri font inévitablement revivre le passé. Le meurtre de Floyd
réveille les douloureux souvenirs des lynchages publics durant lesquels les esclaves noirs étaient
pendus aux arbres. La mort de Traoré ne peut qu’évoquer le passé de la barbarie coloniale des
Français menée sur le continent africain, alors que l’asphyxie d’Ilyes fait ressurgir les cris des
tortures infligées aux Morisques dans l’Andalousie du XIVe siècle.

En s’attaquant aux statues des grandes figures de la colonisation, les manifestants avaient identifié
la source des injustices qu’ils subissaient. Dans les médias, les adeptes de l’extrême droite
demandaient s’il était normal de voir des jeunes déboulonner des statues. Mais la vraie question
aurait dû être s’il était normal que des génocidaires avec le sang de millions d’innocents sur les
mains aient encore aujourd’hui leur signature dans les lieux publics.

Le passé influe toujours le présent. Les statues de Colomb, Léopold II, Edward Colston, etc. sont
les traces d’une histoire qui représentent et maintiennent l’idéologie raciste qui gangrène plusieurs
sociétés occidentales.

Le grand déni français

En Europe, la mort de Floyd a avant tout montré à quel point la France est dans le déni d’elle-
même. Après les manifestations contre les violences policières de juin 2020 à Paris, les polémistes
zemmouristes ont fustigé toute personne osant la moindre comparaison entre les Afro-Américains
et les minorités de France. Sur les plateaux de CNEWS et BFM, on pouvait les entendre dire que
« chez eux » les bavures policières étaient minimes comparés à celles des Américains. Dans leurs
longues tirades, ils avaient pris soin d’omettre que les personnes racisées aux États-Unis et en
France subissent des discriminations similaires : contrôles au faciès, violences policières, fouilles
disproportionnées, perquisitions abusives, usage excessif de la force, discriminations à l’emploi et
au logement, campagnes de propagande médiatique contre leur minorité… De New York à Paris,
les membres d’une génération perdue subissent quotidiennement des micro-agressions qui sont le
fruit d’une perception généralisée dans une société qui les considère comme une menace
perpétuelle.

Le déni de leur propre racisme explique pourquoi de nombreux journalistes français ont exprimé
plus de sympathie pour le membre d’une minorité à l’autre bout de l’océan qu’avec « leur »
Adama. Si le même crime qu’ils ont dénoncé aux États-Unis a été justifié chez eux, c’est parce
qu’en France, les « Nègres » et les « islamistes » y sont jusqu’à ce jour déshumanisés. Qu’on le
veuille ou non, la haine raciste de l’Afro-Américain reste identique à celle de l’Arabe ou l’Africain
en France.

2
De manière plus générale, il y a aujourd’hui des peuples qui se font asphyxiés depuis des décennies, mais qui ne
bénéficieront jamais de la couverture médiatique de George Floyd. Quand les Ouïgours, les Rohingyas et les
Palestiniens disent ne plus pouvoir respirer, personne ne les entend…
Ce déni du racisme français est aussi palpable chez les politiques qui semblent être plus
préoccupées par le fait que leur gouvernement soit accusé de racisme que par le racisme lui-même.
L’Élysée a voulu à tout prix cesser toute comparaison entre le racisme institutionnalisé de la société
américaine et l’islamophobe d’État de la République française.

Le 5 juin 2020, la porte-parole du gouvernement français Sibeth Ndiaye avait déclaré sur les ondes
de Sud Radio que la situation américaine n’est « absolument pas comparable » à la situation en
France et qu’il était « hors de propos de faire la comparaison ». Ndiaye ne pouvait pas « laisser
dire qu’il y aurait un racisme d’État », car « la France n’est pas un pays raciste ». Selon elle, il
s’agirait « uniquement de brebis galeuses » et tous ceux qui déclaraient le contraire, jetteraient « de
l’huile sur le feu », tiendraient « des propos outranciers » et mentiraient « sur ce qui est la réalité
de la France ». Rien de mieux qu’une femme noire pour blanchir une arrogante élite qui s’est
construit sur la misère d’autrui en proclamant haut et fort que la France est le pays symbole des
droits de l’homme.

Une étude de l’Institut Montaigne a néanmoins montré que la porte-parole du gouvernement n’est
pas vraiment au courant de ce qu’il se passe dans l’hexagone. Dans une interview avec ARTE, son
directeur Laurent Bigorgne avait expliqué qu’il était « plus difficile de trouver du travail si on est
musulman en France que si on est Noir aux États-Unis ». Les testings3 de son institut avaient
démontré qu’une personne au nom de Mohammed avait cinq fois moins de chances de trouver un
emploi qu’une personne au nom de Michel4.

Issue d’une famille de la haute bourgeoisie sénégalaise, Ndiaye n’était évidemment pas la bonne
personne pour se prononcer sur le racisme. La native informant est incapable de comprendre ce
que vivent les banlieusards et encore moins ce que subissent les musulmans pratiquants. Et même
si c’était le cas, il faut rappeler qu’elle a avoué qu’elle accepterait de « mentir pour protéger le
président ».

Le discours de Ndiaye contraste fortement avec celui du candidat à la présidentielle américaine


Joe Biden qui, quelques jours après la mort de George Floyd, avait admis que l’esclavage entachait
toujours les États-Unis. « Aucun de nous », avait-il dit, « ne peut se détourner de cette blessure
ouverte du pays ». En France, ce type de discours est inimaginable. Dans le meilleur des cas, les
politiques se désintéresseront des crimes coloniaux et nieront leurs effets néfastes. Les plus
prétentieux vanteront « les bienfaits de la colonisation » pour rappeler aux nouveaux indigènes
l’immense dette de reconnaissance qu’ils devraient avoir envers la France. Plus le racisme est
structurel, plus il est difficile à cerner. C’est pourquoi en France, il est presque invisible.

3
Le système du testing consiste à envoyer des CV de candidats fictifs en réponse à des offres d’emploi réelles, et à
mesurer les taux de réponses en fonction des différents profils.
4
C.-à-d. que pour obtenir un entretien d’embauche, Mohamed devait envoyer vingt CV alors que Michel ne devait en
envoyer que quatre.
Une comparaison justifiée ?

Pour savoir si la situation des Afro-Américains est réellement comparable à celle des minorités
racisées en Europe, il faut revenir aux discours de certains porte-paroles du mouvement de
libération de la communauté noire en Amérique. À travers une analyse du discours de Malcolm X,
Stokely Carmichael (Black Panthers) et James Baldwin, cet ouvrage présente une série de
similitudes frappantes avec la situation des Noirs, Arabes et notamment des musulmans en France.
Les trois activistes en question avaient décrit les structures racistes des États-Unis en présentant
un modèle explicatif de leur société. Comme ce modèle correspond en bien de points à la structure
de l’islamophobie d’État en France, il est normal que beaucoup de musulmans s’inspirent de la
résistance intellectuelle de ces écrivains afro-américains.

Que l’analyse des deux structures soit tellement similaire n’a rien d’anormal. Les deux idéologies
(racisme et islamophobie) ont une base doctrinale commune qui repose sur le besoin d’affirmer la
supériorité (raciale ou culturelle) du Blanc américain ou du laïc français. Dans les deux cas de
figure, la propagande vise à nourrir une série de fantasmes en diabolisant respectivement le
« Nègre » et l’« islamiste ».

L’histoire des Afro-Américains diffère de celle des Arabo-Européens, mais cela ne change rien au
fait que leurs ennemis respectifs les ont combattus avec des méthodes identiques. Les réactions
des deux minorités à l’injustice sont ipso facto tout à fait comparables. En étudiant l’état d’esprit
de l’agresseur et les sentiments de l’agressé, les convergences d’une lutte culturelle se dessinent
entre deux communautés ostracisées…

Titre : « Nègres » & « islamistes », les convergences d’une lutte culturelle


Auteur : Kareem El Hidjaazi - Nombres de pages : 259 - Prix : 16 €

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