Séance 6 - La responsabilité civile des commettants du fait de leur
préposé
Dirigeant de la société PROTECTOR spécialisée dans le gardiennage d’entrepôt
de stockage, Gaspard dispose d’un salarié qui a été chargé de surveiller des entrepôts notamment un de la société TOUROULE où étaient stockés des poids lourds. Le lendemain d’une fête de déconfinement, Balthazar particulièrement furieux décide de mettre le feu au hangar qu’il était censé de surveiller à l’issu d’une défaite d’une partie de Monopoly s’étant déroulée la veille. Malheureusement, dans l’entrepôt qui a pris feu, se trouvait Melchior, qui est entré en trompant la vigilance de Balthazar afin de siphonner le réservoir des camions et s’est retrouvé gravement brûlé.
Ainsi, quelles responsabilité civile Melchior peut-il engager afin d’obtenir
réparation ?
Conformément à l’article 1240 du Code civil, le législateur retient que tout
homme doit répondre du dommage qu’il a causé. Ensuite, et conformément à l’article 1241 du Code civil, la personne est aussi responsable dans le cadre de faits illicites involontaires. De plus, l’article 1242 alinéa 5 du même Code affirme que l’on peut engager la responsabilité civile du commettant en réunissant 3 conditions nécessaires, celle de l’existence d’un lien de préposition, en ce sens, l’arrêt de la Chambre civile de la Cour de cassation du 4 Mai 1937 a considéré que ce lien de préposition est caractérisé par l’autorité qu’exerce le commettant sur le préposé qui lui est subordonné, constituant le fait de donner des ordres et des instructions à celui-ci ; d’un acte dommageable ou un fait dommageable du préposé, en ce sens, la Chambre Criminelle de la Cour de cassation a considéré dans une décision du 7 avril 2004 qu’en cas d’infraction intentionnelle ou non-intentionnelle mais reposant sur une faute délibérée ou caractérisée commise dans le cadre des fonctions du préposé, l’immunité de ce dernier est exclue et engage sa responsabilité sur le fondement de l’article 1240 et engage la responsabilité du commettant sur le fondement de l’article 1242 alinéa 5 ; ainsi qu’un acte commis dans ses fonctions, en ce sens, l’arrêt d’Assemblée Plénière du 19 mai 1988 considère que le commettant ne s’exonère de sa responsabilité que lorsque son préposé a agi hors des fonctions pour lesquelles il est employé, sans autorisation du commettant et à des fins étrangères à ses attributions. Toutefois, peut s’ajouter les disposition de l’article 121-3 alinéa 3 du Code pénal qui précisent qu’en cas d’infraction intentionnelle ou non intentionnelle mais reposant sur une faute délibérée ou caractérisée commise dans le cadre des fonctions, l’immunité du préposé est exclue. En effet, dans un arrêt d’Assemblée Plénière de la Cour de cassation datée du 14 décembre 2001 intitulé « Cousin », selon la Cour de cassation, « le préposé condamné pénalement pour avoir intentionnellement commis, fut-ce sur l’ordre du commettant, une infraction portant préjudice à un tiers, engage sa responsabilité civile à l’égard de celui-ci ». De plus, l’arrêt d’Assemblée Plénière de la Cour de cassation du 19 Mai 1988 précise que « le commettant ne s’exonère de sa responsabilité que si son préposé agit hors des fonctions auxquelles il a été employé, sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions ». S’ensuit que, l’arrêt de la 2e Chambre civile de la Cour de cassation rendu le 11 juin 1992 affirme « qu’il doit s’agir en effet d’un acte étranger à ses fonctions sans rapport avec celles-ci et du coup l’employé qui détourne des fonds qui lui ont été remis à l’occasion de ses fonctions ne se placent pas hors de celle-ci. ». Enfin, un arrêt de la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation rendu le 2 février 1994 a considéré qu’une victime, qui a été blessé par un coup de feu tiré par un toxicomane qui ne lui était pas destiné, se trouvait dans une situation illégale du fait que celle-ci négociait l’achat de stupéfiant à ce moment-là, la Cour de cassation a retenu la décision d’appel qui précisait qu’il n’y avait pas de lien de causalité entre la faute de la victime et la réalisation de l’infraction pénale et que la victime avait droit à la réparation totale de son préjudice.
En l’espèce, il semblerait que Balthazar manifestement énervé d’une défaite qu’il
a subi la veille, ait volontairement et par énervement mis le feu à l’entrepôt qu’il devait surveiller. Cette faute commise par Balthazar est intentionnelle du fait qu’il ait volontairement mis en feu l’entrepôt et de commission. Ainsi, s’agissant du dommage, Melchior, à la suite de l’incendie causé par Balthazar, souffre de grave brûlure. Le lien de causalité entre la faute de Balthazar et le dommage subi par Melchior se concrétise par le fait que ce premier ait mis volontairement l’entrepôt qu’il était chargé de surveiller alors que Melchior se trouvait, illégalement présent dans l’entrepôt. Ainsi, il est tout à fait possible de qualifier une atteinte à son intégrité physique, un préjudice corporel. Ici, le dommage a engendré un préjudice corporel qui porte atteinte personnellement à Melchior du fait que cela lui a causé des blessures manifestement grave, certain car ce préjudice est indubitable et est avéré et direct du fait que l’incendie engendré par Balthazar ait causé les blessures de Melchior. S’ensuit de ce préjudice, un préjudice d’agrément, qui porte atteinte personnellement à Melchior du fait qu’il ressente des troubles dans ses conditions d’existence à cause e ses blessures qui ne l’ont jamais quitté, et il ne pourra plus pratiquer l’escalade, direct du fait que l’incendie ait causé la persistance de ses blessures et certain car ces douleurs sont indubitables. Enfin, de ses marques de brûlures Melchior subit un préjudice esthétique qui porte atteinte personnellement et directement l’intéressé puisqu’il en résulte du dommage corporel une atteinte à l’apparence certaine du fait que cela ne peut que se voir. Ainsi, se pose la question de quelles responsabilité retenir pour réparer le fait dommageable, si c’est celle de la société PROTECTOR qui engage le salarié ou celle de Balthazar sur le fondement du fait personnel. Dans le cas présent, il existe un lien de préposition dans le sens où le commettant, la société PROTECTOR exerce une autorité, elle dispose de la faculté à donner des ordres et des instructions au préposé Balthazar grâce au fait qu’il soit salarié de la société, ce qui implique nécessairement un contrat de travail, élément de source de cette faculté. Enfin, le lien de préposition est unique du fait que le seul commettant auquel Balthazar est subordonné est la société PROTECTOR. Il existe ensuite un fait du préposé qui a causé le dommage qui manifestement se caractérise comme étant une faute intentionnelle et pénalement condamnée pour avoir été commise. Ainsi, la faute manifestement commise par le préposé semble permettre au commettant de s’exonérer des réparations des préjudices en question. Effectivement, Balthazar a été engagé dans le but de surveiller l’entrepôt de la société TOUROULE, et en mettant le feu audit entrepôt, il agit en dehors des fonctions pour lesquelles il a été engagé, a cela s’ajoute qu’il a agit du fait qu’il était particulièrement énervé d’avoir parti au MONOPOLY la veille, donc un agissement à des fins personnelles et étrangères à ses attributions et bien évidemment sans autorisation du commettant. La responsabilité du fait personnel de Balthazar sera engagée, bien que Melchior se trouvait manifestement dans une situation illégale, la faute de celui-ci d’être entré illégalement dans l’entrepôt et la réalisation de l’incendie par Balthazar ne présentent aucun lien de causalité, dès lors, Melchior peut obtenir la réparation de son préjudice selon l’arrêt de la Cour de cassation du 2 février 1994.
Par conséquent, la responsabilité de la société PROTECTOR sur le fondement
de l’article 1242 alinéa 5 relatif à la responsabilité du commettant sur le fait de son préposé est écartée du fait qu’il ait agi en dehors de ses attributions, sans autorisation de son commettant et qui plus est, à des fins personnelles. Melchior pourra donc engager la responsabilité civile de Balthazar sur le fait personnel, sur le fondement de l’article 1240 du Code civil en réparation de ses préjudices pour l’avoir blessé à cause de la mise en feu de l’entrepôt sous sa charge, et le juge, en conséquence de quoi, serait même susceptible de retenir la responsabilité pénale du préposé pour avoir intentionnellement faire prendre feu l’entrepôt sur le fondement de l’article 121-3 du Code pénal, et cela à l’appréciation du juge.