Accidents
vasculaires cérébraux
Thérapeutique
Coordinateurs : Jean-Louis Mas, Didier Leys
Collection Traité de Neurologie
Pathologie médullaire,
Frédéric Dubas
Neuro-oncologie,
Jerzy Hildebrand
Neuro-infectiologie,
Christian Sindic
Démences,
Charles Duyckaerts, Florence Pasquier
Migraine et céphalées,
Marie-Germaine Bousser,Anne Ducros, Hélène Massiou
Épilepsies,
Pierre Jallon
Neurogénétique,
Christel Depienne, Cyril Goizet, Alexis Brice
Démences,
Bruno Dubois, Agnès Michon
Sclérose en plaques
Thibault Moreau, Renaud Du Pasquier
II /
DOIN ÉDITEURS
Éditions John Libbey Eurotext
127, avenue de la République
92120 Montrouge
e-mail : contact@jle.com
http://www.jle.com
ISBN 978-2-7040-1583-2
ISSN 1296-4409
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obtenue auprès du Centre français du copyright, 20, rue des Grands-Augustins – 75006 Paris, auquel
l’éditeur a donné mandat pour le représenter auprès des utilisateurs.
■
Pierre Amarenco, Service de neurologie et Centre d’accueil et de traitement de l’attaque cérébrale, Hôpital
Bichat, Université Paris-Diderot, Sorbonne-Paris-Cité, Inserm LVTS 1148, Paris
Mélanie Barbay, Service de neurologie et Laboratoire de neurosciences fonctionnelles (EA 4559), CHU
d’Amiens-Picardie ; Université Picardie Jules Verne, Amiens
Yannick Béjot, Unité de soins intensifs neurovasculaires et Unité de télé-AVC, CHU Dijon-Bourgogne, Dijon
Wagih Ben Hassen, Département de neuroradiologie, Centre hospitalier Sainte-Anne, Université Paris-
Descartes, Inserm U894, IMABRAIN, Paris
Valérie Biousse, Service d’ophtalmologie, neuro-ophtalmologie, Emory Eye Center, Emory University School
of Medicine, Atlanta, Georgia, États-Unis
Christelle Blanc-Labarre, Service de neurologie générale, vasculaire et dégénérative, Registre dijonnais des
AVC, CHU Dijon-Bourgogne, Dijon
Régis Bordet, Département de pharmacologie médicale, Faculté de médecine, Inserm U1171, Lille
Benjamin Bouamra, Unité de soins intensifs neurovasculaires, Département de neurologie, Réseau AVC
Franche-Comté, CHRU, Besançon
Marion Boulanger, Service de neurologie, CHU Caen Normandie, UNICAEN, Inserm U1237, Caen
/V
Accidents vasculaires cérébraux – Thérapeutique
David Calvet, Service de neurologie, Centre hospitalier Sainte-Anne, Université Paris-Descartes, Département
hospitalo-universitaire (DHU) Neurovasc Sorbonne – Paris-Cité, Inserm U894, Paris
Hugues Chabriat, Département de neurologie, Hôpital Lariboisière ; DHU NeuroVasc, Université Paris-7 Denis-
Diderot, Paris
Stéphane Chabrier, Service de médecine physique et de réadaptation pédiatrique, Centre national de référence
de l’AVC de l’enfant, CHU Saint-Étienne ; CIC1408 et Inserm U1090 Sainbiose, Saint-Étienne
James Charanton, Centre ressource francilien du traumatisme crânien, Pavillon Leriche, Paris
Gilles Chatellier, Unité d’épidémiologie et de recherche clinique, Hôpital européen Georges-Pompidou, CIC
Inserm 1418, Paris
Charlotte Cordonnier, Service de neurologie et pathologie neurovasculaire, CHRU, Inserm U1171, Troubles
cognitifs dégénératifs et vasculaires, Lille
Isabelle Crassard, Service de neurologie, Hôpital Lariboisière, Paris ; Agence régionale de santé, Paris
Benoît Delpont, Unité de soins intensifs neurovasculaires ; Unité de télé-AVC, CHU Dijon-Bourgogne, Dijon
Christian Denier, Service de neurologie, Hôpital de Bicêtre, Faculté de médecine Paris-Sud, Le Kremin-Bicêtre ;
Université Paris-Saclay, Inserm U1195
Dominique Deplanque, Département de pharmacologie médicale, Faculté de médecine, Inserm U1171, Lille
Geneviève Derumeaux, Services de cardiologie et physiologie, Hôpital Henri-Mondor, Inserm U955, IMRB,
DHU A-TVB, Créteil
Olivier Detante, Unité neurovasculaire, CHU Grenoble Alpes, Inserm U1216, GIN, Grenoble
VI /
Liste des auteurs
Xavier Duval, Université Paris-7 – Denis-Diderot, Paris ; CIC Inserm 1425, Hôpital Bichat ; IAME UMR 1138
José M. Ferro, Department of Neurosciences and Mental Health, Serviço de Neurologia, Centro Hospitalar
Lisboa Norte, and Instituto de Medicina Molecular, University of Lisbon, Lisbon, Portugal
Benoît Funalot, Département de génétique, Université Paris-Est-Créteil, Inserm U955, Institut Mondor
de recherche biomédicale, Créteil
Marie Girot, Clinique et service des urgences adultes, Pôle de l’urgence, CHRU, Lille
Maurice Giroud, Unité de soins intensifs neurovasculaires ; Unité de télé-AVC, CHU Dijon-Bourgogne, Dijon
Olivier Godefroy, Service de neurologie et Laboratoire de neurosciences fonctionnelles (EA 4559), CHU
d’Amiens-Picardie, Université Picardie Jules-Verne, Amiens
Marie Hervieu-Bègue, Unité de soins intensifs neurovasculaires ; Unité de télé-AVC, CHU Dijon-Bourgogne,
Dijon
Manoëlle Kossorotoff, Service de neuropédiatrie, Centre national de référence de l’AVC de l’enfant, Hôpital
universitaire Necker-Enfants-Malades, Paris
Catherine Lamy, Service de neurologie, Centre hospitalier Sainte-Anne, Paris ; Université Paris-Descartes, DHU
NeuroVasc Sorbonne-Paris-Cité, Inserm UMR S894, Paris
Vincent Larrue, Département de neurologie, Hôpital Pierre-Paul-Riquet, CHU, Inserm U1048, Toulouse
/ VII
Accidents vasculaires cérébraux – Thérapeutique
Philippa Lavallée, Service de neurologie et Centre d’accueil et de traitement de l’attaque cérébrale, Hôpital
Bichat, Paris ; Université Paris-Diderot, Sorbonne-Paris-Cité, Paris ; Inserm LVTS 1148, Paris
Jean-Paul Lejeune, Service de neurochirurgie, Hôpital Roger-Salengro, Lille ; Université de Lille, Inserm
UMR 1189, CHU de Lille
Didier Leys, Service de neurologie et pathologie neurovasculaire, Hôpital Roger-Salengro, Lille ; Université
de Lille, Inserm UMR 1171, CHU de Lille
Jacques Luauté, Service de MPR, Hôpital Henri Gabrielle, Lyon ; équipe IMPACT, Inserm U1028, CNRS UMR
5292, Centre de recherche en neuroscience de Lyon (CRNL), plateforme mouvement et handicap, Lyon
Jean-Louis Mas, Service de neurologie, Centre hospitalier Sainte-Anne, Paris ; Université Paris-Descartes, DHU
NeuroVasc Sorbonne Paris-Cité, Inserm UMR S894, Paris
Mikael Mazighi, Service de neuroradiologie, Fondation Rothschild, Paris ; Service de neurologie, Hôpital
Lariboisière, Paris ; Université Denis-Diderot, Paris ; Inserm U1148, Laboratory for Vascular Translational Science
(LVTS), Hôpital Bichat, Paris
Elisabeth Medeiros De Bustos, Unité de soins intensifs neurovasculaires, Département de neurologie, Réseau
AVC Franche-Comté, CHRU, Besançon
Patrick Mismetti, Pharmacologie clinique, Inserm U1059 Sainbiose, Université Jean-Monnet, CHU,
Saint-Étienne
Thierry Moulin, Unité de soins intensifs neurovasculaires, Département de neurologie, Réseau AVC
Franche-Comté, CHRU, Besançon
Nathalie Nasr, Département de neurologie, Hôpital Pierre-Paul-Riquet, Toulouse ; Inserm U1048, CHU
de Toulouse
Élodie Ong, Unité neurovasculaire, Service de neurologie, Hôpital neurologique Pierre-Wertheimer, Hospices
civils de Lyon, Bron
VIII /
Liste des auteurs
Guy-Victor Osseby, Unité de soins intensifs neurovasculaires ; Unité de télé-AVC, CHU Dijon-Bourgogne, Dijon
Jérémie Papassin, Unité neurovasculaire, Inserm U1216, CHU Grenoble Alpes, GIN, Grenoble
Thomas Papo, Service de médecine interne, Hôpital Bichat, Université Paris-Diderot, Paris
Jean-Luc Pasquié, Département de cardiologie, CHU, PhyMedExp Université Montpellier, Inserm, CNRS, Montpellier
Martine Roussel, Service de neurologie et Laboratoire de neurosciences fonctionnelles (EA 4559), CHU
d’Amiens-Picardie et Université Picardie – Jules-Verne, Amiens
Pierre Seners, Service de neurologie, Centre hospitalier Sainte-Anne, Inserm U894, Paris
Julien Ternacle, Services de cardiologie et physiologie, Hôpital Henri-Mondor, Inserm U955, IMRB, DHU
A-TVB, Créteil
Romain Tortuyaux, Service de neurologie et pathologie neurovasculaire, CHRU, Inserm U1171, Troubles
cognitifs dégénératifs et vasculaires, Lille
/ IX
Accidents vasculaires cérébraux – Thérapeutique
Emmanuel Touzé, Unité neurovasculaire, Service de neurologie, Université Normandie, UNICAEN, Inserm
U1237, Caen
Guillaume Turc, Service de neurologie, Hôpital Sainte-Anne, Paris ; Université Paris-Descartes, DHU Neuro-
Vasc Sorbonne Paris-Cité, Inserm UMR S894, Paris
Jean-Jacques Weiss, Centre ressource francilien du traumatisme crânien, Pavillon Leriche, Paris
Éric Wiel, Clinique et service des urgences adultes, Pôle de l’urgence, CHRU, Samu du Nord, Lille
France Woimant, Service de neurologie, Hôpital Lariboisière, Paris ; Agence régionale de santé, Paris
Alain Yelnik, Service de médecine physique et de réadaptation, Groupe hospitalier Saint-Louis – Lariboisière
– Fernand-Widal, Université Paris-Diderot, UMR 8257, Paris
X/
■
Préface
]
C
e livre, consacré entièrement à la thérapeutique des accidents vasculaires cérébraux
(AVC) et de leurs causes, a été rédigé sous la direction de deux éminents neurologues
vasculaires français, les Professeurs Jean-Louis Mas et Didier Leys. Il démontre s’il en
était besoin, que le nihilisme n’est plus acceptable dans la prise en charge des AVC et
décrit comment les stratégies thérapeutiques de phase aiguë améliorent le devenir des
patients en termes de mortalité et de handicap résiduel, et comment les mesures préventives
permettent de réduire l’incidence des AVC. Ces derniers restent néanmoins très fréquents, en raison
du vieillissement des populations et de l’augmentation du nombre des personnes âgées, qui sont
les plus touchées. En phase aiguë, il ne faut pas perdre de vue que la base de la prise en charge
est l’unité neurovasculaire qui, à elle seule, réduit la mortalité et augmente la proportion de patients
vivant à domicile sans dépendance un an après l’AVC, tant dans les infarctus cérébraux que dans
les hémorragies cérébrales. Cette prise en charge rapide en unité neurovasculaire est aussi le meil-
leur garant d’un accès rapide à l’arsenal thérapeutique disponible dans les infarctus cérébraux, avec
la thrombolyse, la thrombectomie, les antithrombotiques et l’hémicrâniectomie dans les infarctus
étendus. La thrombectomie a été un progrès majeur de ces dernières années amenant à réorganiser
la filière de prise en charge des patients. Les études récentes démontrent que certains patients,
sélectionnés sur la base de critères clinico-radiologiques, peuvent encore tirer bénéfice de techni-
ques de reperfusion au-delà de 6 h, nous obligeant à les prendre en charge comme des urgences
jusqu’à 24 h. Dans les hémorragies, l’unité neurovasculaire apporte le même bénéfice et permet
d’entreprendre au plus vite les mesures de correction d’un éventuel trouble de coagulation et de
contrôle de la pression artérielle, tout en identifiant précocement les rares malades relevant de la
chirurgie. La prévention a aussi fait des progrès importants avec un meilleur contrôle des facteurs
de risque vasculaire, de nouvelles stratégies antithrombotiques et le développement des techniques
endovasculaires. La prise en charge urgente des accidents ischémiques transitoires, qui sont le
meilleur signe avant-coureur d’un infarctus cérébral, est un exemple de l’efficacité des mesures de
prévention secondaire.
Cet ouvrage est un guide précieux pour tous les praticiens impliqués dans la prise en charge des
patients présentant un AVC, car il met en lumière comment prendre au mieux les décisions face
à une situation clinique donnée, que ce soit en phase aiguë ou en prévention, y compris dans des
sous-groupes particuliers de patients ou dans des pathologies rares.
/ XI
■
Sommaire
]
Liste des auteurs V
Préface XI
/ XIII
Accidents vasculaires cérébraux – Thérapeutique
Partie 3 ] Prévention
XIV /
Sommaire
Chapitre 27/ Prise en charge des anévrismes artériels cérébraux non rompus 383
Laurent Pierot, Matthias Gawlitza, Sébastien Soize
/ XV
Accidents vasculaires cérébraux – Thérapeutique
XVI /
■
1
En raison de leur fréquence, de leur gravité et de leur coût, les accidents vasculaires cérébraux
(AVC) constituent un des problèmes de santé les plus préoccupants actuellement et pour les
prochaines décennies. L’organisation de leur parcours de santé est un véritable challenge qui ne
se conçoit que dans le cadre d’une filière coordonnée et animée intégrant prévention, soins
hospitaliers, retour et maintien au domicile. Il s’agit d’assurer la prise en charge d’une pathologie
à la fois extrêmement urgente et chronique, et qui touche tous les âges ; en effet, si l’âge moyen
est de 73 ans, l’AVC n’épargne pas les enfants. Aussi, la notion de soins intégrés au sein de
réseaux coordonnées sanitaires et sociaux se développe dans de nombreux pays, en France où
cette notion de parcours de santé est décrite dans le cadre du plan AVC 2010-2014, mais aussi,
et cette liste n’est pas exhaustive, aux Pays-Bas [1], en Allemagne [2], aux États-Unis (Caroline
du Nord [3] et Michigan [4]) ou au Canada [5].
/3
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
4/
Filières de prise en charge
fonctionnelle et le maintien au domicile. Ces quelques chiffres montrent la sévérité de l’AVC qui
reste la première cause de handicap acquis de l’adulte.
Toutes les recommandations concernant la prise en charge des AVC publiées en France [17, 18],
en Europe [19] et aux États-Unis [20-22] rappellent qu’une amélioration du pronostic des AVC est
possible à condition que les soins soient organisés dans une filière spécialisée et structurée depuis
le lieu de survenue de l’accident jusqu’au retour au domicile. Cela implique d’une part la création
d’unités neurovasculaires et d’autre part l’organisation de toute la filière d’amont et d’aval. Le
concept d’UNV est apparu dans les années 1970, l’hypothèse étant qu’une prise en charge spéci-
fique en UNV pourrait améliorer le pronostic des patients victimes d’AVC, non seulement en
diminuant la mortalité, mais aussi en réduisant le handicap et le risque d’institutionnalisation. En
France, le plan d’actions national AVC (2010-2014) a encouragé et renforcé l’ensemble du parcours
depuis la prévention, la prise en charge à la phase aiguë et le retour au domicile [23]. Grâce à ce
plan, les Agences régionales de santé se sont mobilisées en lien avec les professionnels et les
patients pour créer les filières de soins et améliorer la coordination entre les acteurs.
/5
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
Mais les délais sont encore plus courts, avec en outre un passage obligatoire en radiologie pour
réaliser une exploration du parenchyme cérébral et des vaisseaux (par scanner ou résonnance
magnétique). De plus, quelques caractéristiques de la pathologie neurovasculaire compliquent
cette prise en charge rapide : le caractère indolore de la plupart des AVC, les troubles cognitifs
et moteurs de l’AVC et l’âge des patients AVC, vivant souvent seuls, d’où l’importance des
campagnes médiatiques d’information du grand public et des professionnels de santé. Leur
objectif est de permettre de reconnaître immédiatement les symptômes de l’AVC, de prendre
conscience de l’urgence à instituer un traitement pour déclencher, sans attendre, l’appel du
centre 15. Celui-ci coordonne les modalités de transport (véhicule médicalisé ou non, hélicoptère)
et d’admission dans les délais les plus brefs vers une structure hospitalière à même de prendre
en charge le patient, c’est-à-dire une structure identifiée dans la filière de soins. La prise en
charge dans des ambulances ayant une équipe médicale spécialisée et disposant d’un scanner
embarqué permettant une thrombolyse préhospitalière [24] est encore à évaluer en France. Elle
permettrait également de sélectionner les patients éligibles à la thrombectomie nécessitant une
admission directe dans les centres appropriés. Cette organisation sera à adapter dans chaque
territoire de santé en fonction des structures présentes.
En France, le nombre d’UNV a augmenté ces dernières années de 77 en 2009 à quasiment 140
en 2017. Parmi ces UNV, presque 40 (appelées UNV de recours) sont situées dans des établis-
sements disposant de services de neurochirurgie et de neuroradiologie interventionnelle et peu-
vent conformément aux décrets ministériels réaliser les actes de thrombectomie (décret
no 2007-366 du 19 mars 2007 relatif aux conditions d’implantation applicables aux activités
interventionnelles par voie endovasculaire en neuroradiologie). Il n’est pas envisageable
d’adresser tous les AVC dans ces centres dits de recours. Aussi, des algorithmes doivent être
élaborés, prenant en compte les résultats des différentes études cliniques, pour préciser quels
patients vont directement vers un centre de recours, quels patients vont vers un centre de
proximité. Bien sûr, tous ces centres doivent être reliés par la télémédecine. De plus, les UNV
ne sont pas toujours situées à moins de 30 minutes du lieu de survenue de l’AVC (Figure 1).
Aussi, la prise en charge initiale des AVC doit pouvoir être réalisée dans des établissements
disposant de services d’urgences, de personnels formés à l’AVC au sein des services d’urgences
et de radiologie, d’un plateau de neuro-imagerie disponible en urgence 24 h/24 et 7 j/7 et d’outils
de télémédecine adaptés [25]. Dans ces établissements disposant de services d’urgences mais
n’ayant pas d’UNV, le traitement initial est décidé par l’urgentiste et le neurologue après une
visioconsultation et transfert de la neuro-imagerie. Une fois le traitement initié, le patient est
transféré en UNV de proximité ou de recours.
Le taux de patients admis en UNV qui a presque doublé entre 2009 et 2015 passant de 25,9 %
[26] à 50 % en 2015 [27]. Ce chiffre atteint 55 % si on prend en compte les patients très graves
admis en réanimation dans les hôpitaux disposant d’UNV. Presque un patient sur deux en France
n’a toujours pas accès à une UNV ; ce chiffre est bien inférieur à celui d’autres pays européens
comme l’Angleterre (96 % en 2016) [28], la Suède (87 % en 2009) [29], l’Écosse (80 % en 2014)
[30] ou l’Allemagne (60 % aux débuts des années 2010) [31]. De plus, d’importantes disparités
6/
Filières de prise en charge
régionales existent en France en rapport avec la densité de neurologues et les capacités en lits
dans les UNV (Figure 2) ; le ratio national est de 3,5 lits pour 100 000 habitants ; il est bas dans
les régions Pays-de-Loire (1,7), Bourgogne - Franche-Comté (1,9), Provence - Alpes - Côte-d’Azur
(2,0) et même égal à 0 en Guyane et à Mayotte. Il est élevé dans les Hauts-de-France (5,5) [27].
FIGURE 1 Temps d’accès aux UNV en France (Source Atlas Santé – Mise à jour 2016).
L’accès aux soins de suite et réadaptation (SSR) en milieu hospitalier après un AVC est très
variable en fonction des pays. Dans le travail de Lynch et al. portant sur 14 pays, l’accès à la
réadaptation en milieu hospitalier varie de 13 % en Suède à 57 % en Israël. Les taux sont de
14,1 % en Corée, 15,1 % en Pologne, 18,5 % en Irlande, 21,5 % aux États-Unis, 30,5 % en Aus-
tralie, 31,5 % en Nouvelle-Zélande, 32,8 % en Suisse, 34 % en France, 40,8 % en Allemagne,
44,3 % au Danemark, 52 % en Italie, 55 % au Canada (Ontario) [32]. Ces différences s’expliquent
en partie par les possibilités d’accès aux prises en charge soutenues à domicile (early supported
discharge) et aux programmes de réadaptation organisés en ville, très variables en fonction des
pays. De plus, les recommandations diffèrent en fonction des pays ; si la majorité recommande
que tous les patients avec un AVC modéré ou sévère puissent avoir accès à la réadaptation en
milieu hospitalier, d’autres ne le recommandent que pour les patients ne pouvant pas regagner
leur domicile.
Pour que la prise en charge en SSR des AVC soit la plus performante possible, il faut que les
patients puissent être accueillis sans délai important, dans des services inclus dans la filière AVC
et situés dans la mesure du possible à proximité de leur domicile ou de celui de leur entourage ;
ces services doivent avoir une parfaite connaissance des ressources médico-sociales et sociales
locales, et permettre un retour au domicile appuyé si nécessaire sur une hospitalisation de jour.
/7
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
FIGURE 2 Taux de séjours AVC en filière UNV ou réanimation au sein d’établissements ayant
une UNV (Données PMSI – MCO 2015 – Diagnostics principaux I 61, I 63 et I 64).
En France, en 2015, 39 % des patients vivants à la fin de la prise en charge en aigu ont été
transférés en soins en soins de suite et de réadaptation : 16 % en SSR spécialisés pour les
affections du système nerveux, 9 % en SSR pour les affections de la personne âgée polypatho-
logique dépendante ou à risque de dépendance, 12 % en SSR polyvalents et 2 % dans d’autres
SSR spécialisés [33] ; le taux de patients transférés en SSR augmente avec la gravité de l’AVC
atteignant 88 % pour les AVC sévères. Des disparités régionales sont également observées pour
l’admission en SSR, avec des taux particulièrement faibles pour les résidents de Mayotte et de
la Guyane (6 et 12 %), contre 39 % à la Réunion et 49 % à la Guadeloupe. En métropole, les
taux les plus bas sont observés en Corse (33 %), Normandie (37 %), dans les Hauts-de-France
(37 %) et en Nouvelle-Aquitaine (38 %). Une admission initiale en UNV et un haut ratio de lits
de SSR neurologiques augmentent les chances d’être admis en SSR neurologiques [27].
8/
Filières de prise en charge
La prise en charge des AVC ne s’arrête pas à la sortie de l’hôpital, mais doit aussi prendre en compte
le retour et le maintien du patient au domicile ce qui amène à considérer la coordination ville-hôpital.
Le retour au domicile est un moment difficile pour le patient et son entourage, qui réalisent le
bouleversement qu’a entraîné l’AVC dans la vie quotidienne, dans la vie familiale et professionnelle.
De nombreux éléments vont conditionner le maintien au domicile des patients. Parmi eux :
■ le degré de handicap physique et cognitif ;
■ la survenue de complications ;
■ la participation de l’entourage ;
■ la formation des aidants ;
■ le soutien psychologique du patient et des différents intervenants.
/9
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
Les publications décrivant ce système intégré de soins post-AVC offrant à tout patient et à son
entourage (famille, aidants), des services d’évaluation, de suivi dans toutes ses composantes
sanitaires (médicales et non médicales) et sociale restent peu nombreuses [1, 5]. De plus, l’orga-
nisation des soins et leurs prises en charge financières varient beaucoup en fonction des pays.
En Angleterre, 49 % des patients victimes d’AVC quittent l’hôpital dans le cadre d’un programme
de rééducation avec une équipe de spécialistes incluant « Early support discharge » ou équipes
de rééducation multidisciplinaire [28].
10 /
Filières de prise en charge
Ces évaluations s’adressent donc à tous les patients, y compris ceux n’ayant pas ou peu de
séquelles afin de repérer des déficiences passées jusqu’alors inaperçues, mais pouvant être sources
de handicaps et d’une désadaptation professionnelle et/ou sociale.
Les équipes mobiles de soins de suite et réadaptation AVC réalisent des évaluations au domicile,
dans des situations où les difficultés rencontrées peuvent compromettre le maintien au domicile.
Elles sont composées de médecins, d’ergothérapeutes et d’assistantes sociales. Leurs missions
sont d’améliorer le maintien au domicile (évaluation des patients et des aidants), d’éviter des
hospitalisations inutiles ou de préparer si nécessaire les hospitalisations en prévoyant ensuite le
retour à domicile. Les évaluations sont réalisées en lien avec les professionnels libéraux et les
structures médico-sociales. Ces équipes interviennent également au sein des établissements
médico-sociaux.
/ 11
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
L’organisation des parcours de soins des patients victimes d’AVC doit également tenir compte :
■ de l’âge du patient. Pour un enfant, le parcours de soins ne sera pas le même si l’AVC
survient avant la naissance, au cours de premiers jours de vie, chez un enfant ou chez un
adolescent. Le suivi de ces enfants lorsqu’ils deviennent adultes est également à organiser.
Pour les personnes âgées, on estime qu’en 2020, environ 30 % des personnes hospitalisées,
en France, pour AVC auront plus de 85 ans ; les parcours doivent donc s’organiser en lien
avec les filières gériatriques ;
■ de la sévérité des AVC. L’organisation de la prise en charge des accidents ischémiques
transitoires (AIT) est bien différente de celle des AVC sévères. La prise en charge des AIT
doit s’appuyer sur les structures neurovasculaires existantes où sont présents les experts et
le plateau technique. Les explorations cérébrales, vasculaires, cardiaques doivent être réa-
lisées très rapidement pour débuter immédiatement le traitement de prévention. Pour les
AVC sévères admis initialement en réanimation, peuvent se discuter des décisions de limi-
tation de soins, de prélèvement d’organes (l’AVC est la cause principale de décès « en mort
encéphalique »), d’admissions en services de soins palliatifs, en services de rééducation post-
réanimation, en unités de soins de longue durée, en hébergements permanents ou tempo-
raires en structures médicosociales : maison d’accueil spécialisé (MAS), foyer d’accueil médi-
calisé (FAM), en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).
La filière AVC doit donc inclure ces structures et assurer la formation de leurs personnels [38].
Les infirmières « coordinatrices » dans le parcours des AVC sont encore trop peu nombreuses
en France. Pourtant, leur rôle est primordial lors du retour au domicile des patients victimes
d’AVC. Leurs principales missions sont d’améliorer l’observance au traitement (médicamenteux
et de rééducation), d’apprendre aux patients et à leur entourage les symptômes évocateurs de
complications, qui lorsqu’elles surviennent, majorent encore le handicap. Ces infirmières appel-
lent les patients après leur retour au domicile et/ou participent à la consultation pluri-
professionnelles de suivi. Elles sont un lien entre les professionnels de ville et de l’hôpital [39].
En cohérence avec le plan AVC 2010-2014, les animateurs de filières AVC contribuent à construire
un parcours de santé de qualité pour les victimes d’AVC. Leurs principales missions sont de :
■ développer, animer et coordonner la filière AVC autour des UNV, afin d’assurer la conti-
nuité des soins, en améliorant les circuits hospitaliers et en organisant les liens avec la ville,
le secteur médico-social et les associations de patients ;
■ accroître la formation de l’ensemble des professionnels intervenant dans la filière ;
■ mener, sur chaque territoire, des actions d’information pour le grand public.
12 /
Filières de prise en charge
La prise en charge du patient atteint d’accident vasculaire cérébral ne se limite pas à l’hospita-
lisation en phase aiguë en unité neurovasculaire puis, si nécessaire, en service de soins de suite
et de réadaptation. C’est l’ensemble du parcours de santé du patient victime d’un AVC qu’il faut
organiser et planifier avec le malade, son entourage et de nombreux professionnels. Ce parcours
doit pouvoir s’organiser dans la proximité au mieux sur le territoire de santé. Structurer l’orga-
nisation territoriale de la prise en charge des AVC permet d’éviter des « ruptures » dans le
parcours de santé des personnes victimes d’AVC, ruptures qui se soldent trop souvent par une
hospitalisation en urgence dans un établissement peu adapté pour prendre en charge le problème.
Les prises en charge coordonnées post-AVC offrant à tout patient et à son entourage (famille,
aidants), des services d’évaluation, de suivi dans toutes ses composantes sanitaires (médicales
et non médicales) et sociales se développent. De nouvelles organisations se mettent en place
au domicile ou en institution, dont l’enjeu est d’augmenter le nombre de patients admis dans
les filières post-AVC, en lien avec les professionnels libéraux, afin de réduire le handicap post-AVC
et d’améliorer la qualité de vie des patients et de leur entourage.
Sans oublier la prévention, qui reste la meilleure stratégie pour réduire le handicap lié aux AVC.
■ Références
[1] Vat LE, Middelkoop I, Buijck BI, et al. The Development [8] Tibæk M, Dehlendorff C, Jørgensen HS, et al. Increasing
of Integrated Stroke Care in the Netherlands a Benchmark incidence of hospitalization for stroke and transient
Study. Int J Integr Care 2016 ; 16 : 1-10. ischemic attack in young adults: A Registry-Based Study.
[2] Bodechtel U, Barlinn K, Helbig U, et al. The stroke east J Am Heart Assoc 2016 ; 5. pii : e003158.
Saxony pilot project for organized post-stroke care: a [9] Medin J, Nordlund A, Ekberg K, et al. Increasing stroke
case-control study. Brain Behav 2016 ; 6 : e00455. incidence in Sweden between 1989 and 2000 among per-
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14 /
2
Régulation téléphonique
Il est recommandé d’appeler le Samu-Centre 15 en cas de symptômes pouvant faire évoquer un
AVC, qui peuvent être identifiés par le patient ou ses proches en utilisant l’acronyme VITE
(« Visage paralysé, Inertie d’un membre, Trouble de la parole, En urgence appelez le 15 »), dérivé
de l’échelle anglo-saxonne FAST (« Face Arm Speech Time ») [9]. Cependant, une proportion
importante des suspicions d’AVC diagnostiquées à l’issue de la régulation correspond initialement
à un appel pour un autre motif. La prise d’appel est effectuée par un assistant de régulation
médicale qui doit considérer tout déficit neurologique brutal comme une urgence absolue et
/ 15
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
recueillir l’heure précise de survenue des symptômes, ou à défaut la dernière heure à laquelle le
patient a été vu dans son état habituel [10]. La recherche des 5 signes d’alerte suivants, proposés
par l’American Stroke Association [11], peut être réalisée par téléphone auprès du patient lui-
même ou de ses proches :
■ faiblesse ou engourdissement de la face, du bras et/ou de la jambe ;
■ perte de la vision unilatérale ou bilatérale ;
■ troubles de la compréhension ou du langage ;
■ perte de l’équilibre ou instabilité, si associée à l’un des signes précédents ;
■ céphalée intense d’installation brutale.
16 /
TABLEAU I ▼ Échelles préhospitalières d’identification des accidents vasculaires cérébraux.
FAST CPSS LAPSS
À partir de cet examen, est-ce que le patient a une faiblesse uniquement d’un seul côté
(et non des deux côtés) ? * Oui * Non
/ 17
Prise en charge préhospitalière et admission
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
Dans le cas particulier d’une prise en charge médicalisée, une voie veineuse périphérique est
posée en privilégiant le sérum salé isotonique [11]. Un soluté glucosé ne sera utilisé qu’en cas
d’hypoglycémie ou de décompensation cardiaque. Un électrocardiogramme sera systématique-
ment réalisé [10]. Des prélèvements sanguins comportant notamment hémogramme, bilan
d’hémostase, créatininémie, et ionogramme sont réalisés par certaines équipes, mais la compa-
tibilité des tubes avec le laboratoire du service d’accueil n’est pas constante.
18 /
Prise en charge préhospitalière et admission
Deux stratégies de prise en charge ont été proposées quand l’UNV la plus proche du lieu de
l’AVC ne dispose pas d’un plateau de thrombectomie. La première, appelée « drip and ship »,
consiste à adresser tous les patients vers l’UNV de proximité, où la thrombolyse intraveineuse
est débutée lorsqu’elle est indiquée. Seuls les patients présentant une occlusion artérielle proxi-
male objectivée en IRM ou en angioscanner sont secondairement transférés vers l’UNV de recours
pour une thrombectomie complémentaire. La seconde stratégie, appelée « mothership », consiste
à adresser directement tous les patients vers l’UNV de recours, au sein de laquelle la thrombolyse
puis la thrombectomie sont réalisées si indiquées. Par rapport au drip and ship, le mothership a
pour avantages de débuter la thrombectomie plus rapidement et de limiter le nombre de trans-
ferts secondaires, qui mobilisent souvent des ressources paramédicales ou médicales du fait de
la présence d’une seringue électrique d’alteplase et de la nécessité d’un contrôle strict des pres-
sions artérielles pendant la thrombolyse. Le drip and ship a pour avantages de débuter la throm-
bolyse plus rapidement et d’éviter de surcharger l’UNV de recours avec des patients qui n’ont
pas besoin de thrombectomie.
/ 19
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
ship, contre 6 % dans le groupe mothership. Chez les patients traités par thrombectomie du fait
d’une occlusion persistante malgré la thrombolyse, la stratégie drip and ship conduisait à une
recanalisation retardée d’une heure (délai médian symptômes-recanalisation : 297 contre
240 minutes, p < 0,001). Cependant, la proportion de patients indépendants à 3 mois n’était pas
différente entre les deux groupes (61 % en drip and ship contre 51 % en mothership, p = 0,26).
Les données du registre prospectif multicentrique américain STRATIS permettent également une
comparaison de ces deux stratégies [35]. Entre 2014 et 2016, 984 patients présentant un IC avec
une occlusion proximale de la circulation antérieure et un déficit neurologique assez important
(score NIHSS 6 8) ont été inclus. Contrairement à l’étude précédente, seuls les patients ayant
bénéficié d’une thrombectomie étaient inclus, ce qui représente un biais de sélection en faveur
du mothership, car environ 20 % des patients avec occlusion proximale thrombolysés en drip
and ship ont eu une recanalisation complète au moment de l’artériographie d’évaluation [34].
Au sein de STRATIS, la stratégie drip and ship conduisait à une recanalisation retardée de deux
heures (délai médian symptômes-recanalisation 311 contre 202 minutes, p < 0,001), et une plus
faible proportion de patients indépendants à 3 mois (52 % contre 60 %, p = 0,02). Ce plus
mauvais pronostic pour les patients drip and ship semblait exclusivement expliqué par le facteur
temporel, sans effet « UNV de recours » indépendant, ni facteur de confusion manifeste. Les
auteurs ont par ailleurs modélisé que pour les patients situés à moins de 32 km d’une UNV de
recours, le mothership correspondrait à retarder la thrombolyse intraveineuse de 7 minutes par
rapport au drip and ship, mais permettrait de réaliser une thrombectomie 94 minutes plus
tôt [35].
Bien qu’il ne s’agisse pas d’une étude randomisée, ces données semblent plaider fortement en
faveur du mothership. Cependant, adresser en pratique courante tous les patients avec suspicion
d’AVC vers une UNV de recours semble actuellement difficilement envisageable, du fait d’un
risque important de surcharge de ces unités, et du retard au traitement que cela entraînerait
pour tous les patients qui ont une indication à la thrombolyse mais pas à la thrombectomie.
20 /
Prise en charge préhospitalière et admission
/ 21
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
22 /
TABLEAU II ▼ Échelles préhospitalières d’identification des patients présentant une occlusion artérielle proximale.
RACE PASS G-FAST
/ 23
Prise en charge préhospitalière et admission
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
permettre de déterminer formellement si l’envoi direct en UNV de recours des patients avec un
score RACE 6 4 permet d’améliorer le pronostic fonctionnel des patients présentant une suspi-
cion d’infarctus cérébral de moins de 8 h. D’autres essais randomisés sont planifiés, notamment
avec l’échelle PASS au Danemark. En attendant les résultats de ces études, les recommandations
divergent quant à l’emploi de ces échelles pour le triage préhospitalier [52-54].
Autres paramètres
Plusieurs autres éléments peuvent influencer le triage préhospitalier. Si l’âge avancé ne justifie
pas en lui-même de récuser un patient pour un traitement de reperfusion [4, 6], la présence de
comorbidités importantes ou d’un important handicap préexistant est à prendre en compte car
ces éléments faisaient partie des critères d’exclusion de la plupart des essais de thrombectomie
[27, 30, 57-59]. Par ailleurs, la prise d’un anticoagulant incite certaines équipes à adresser le
patient directement en UNV de recours, car une anticoagulation efficace contre-indique la throm-
bolyse intraveineuse mais pas la thrombectomie [25], et certains patients ayant une hémorragie
cérébrale importante sous anticoagulants peuvent relever d’un traitement neurochirurgical. Enfin,
certaines équipes ont récemment décidé d’adresser directement en UNV de recours tous les
patients pour lesquels l’horaire de début des symptômes est inconnu, du fait de la démonstration
récente d’un bénéfice majeur de la thrombectomie au sein de l’étude DAWN [27] tandis qu’aucun
essai randomisé n’a pour l’instant démontré de bénéfice de la thrombolyse dans cette indication.
Cependant, il faut rappeler que les patients de l’étude DAWN étaient extrêmement sélectionnés,
sur la base d’une occlusion proximale associée à un important mismatch clinico-radiologique
(déficit neurologique sévère et cœur nécrotique de faible taille). En outre, la thrombolyse intra-
veineuse chez les patients présentant une ischémie cérébrale d’horaire inconnu est réalisée en
pratique courante au sein de nombreuses UNV sur la base d’un mismatch FLAIR-Diffusion
(ischémie visible en séquence de diffusion mais pas en séquence FLAIR, suggérant un début de
moins de 4 h 30 [60]). Cette approche a fait l’objet d’un essai randomisé, WAKE-UP Stroke, dont
24 /
Prise en charge préhospitalière et admission
les résultats devraient être prochainement révélés [61]. Dans l’intervalle, il paraît essentiel
d’orienter les patients pour lesquels le début des symptômes est inconnu vers une UNV habituée
à réaliser une imagerie multimodale en urgence (IRM cérébrale, ou bien angioscanner associé à
un scanner de perfusion).
L’admission du patient suspect d’AVC aigu doit être anticipée dès l’appel téléphonique du
médecin régulateur du Samu, ce qui permet de réduire significativement le door-to-needle time
et le délai entre apparition des symptômes et traitement de reperfusion [8, 63, 64]. Le neurologue
doit prévenir sans délai le radiologue de garde, ainsi que l’équipe soignante. Le neuroradiologue
interventionnel doit également être informé en cas de suspicion d’occlusion artérielle proximale.
L’accueil du patient doit être effectué directement en imagerie afin de réduire au maximum les
délais de prise en charge [65]. Il est préférable que le scanner ou l’IRM soient libres au moment
de l’arrivée du patient. L’accueil d’un patient arrivant en alerte AVC est généralement réalisé par
le neurologue, qui va recueillir les éléments médicaux fournis par le secouriste ou le médecin
ayant assuré le transport, interroger rapidement le patient et si besoin son entourage pour
obtenir des précisions sur l’horaire de début des symptômes, le traitement médicamenteux en
cours, et rechercher une contre-indication aux traitements de reperfusion [18]. Le neurologue
va effectuer un examen clinique très bref, qui se limite généralement à la réalisation de l’échelle
NIHSS et à un examen cardiopulmonaire. Parallèlement, l’infirmier va mesurer la pression arté-
rielle aux deux bras, la fréquence cardiaque, la glycémie capillaire, prélever un bilan sanguin (au
minimum : NFS, plaquettes, ionogramme sanguin, créatininémie, TP, TCA) et poser une voie
veineuse périphérique. Le manipulateur d’électroradiologie va rechercher une contre-indication
à l’IRM ou à l’angioscanner. Le prélèvement sanguin doit être immédiatement envoyé au labo-
ratoire par coursier. Idéalement, l’ensemble de ces étapes doit durer moins de 20 minutes, pour
permettre un door-to-needle time de moins de 45 minutes (et dans tous les cas strictement
inférieur à 60 minutes) à l’issue de l’imagerie et de la préparation du thrombolytique [11, 28,
56].
Dans certains centres, l’accueil des patients suspects d’AVC aigu avec une forte probabilité
d’occlusion artérielle proximale est effectué directement en salle de neuroradiologie interven-
tionnelle, où la réalisation d’un scanner permet d’écarter une hémorragie cérébrale [66, 67]. Ce
type de prise en charge, actuellement marginal, est critiquable compte tenu de la faible propor-
tion des alertes thrombolyse/thrombectomie qui auront réellement une indication à la throm-
bectomie (Figure 1) et de l’importance de l’expertise clinique dans la prise en charge aiguë des
AVC et des stroke mimics.
/ 25
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
UNV mobiles
Deux essais randomisés allemands, réalisés avant la démonstration du bénéfice de la thrombec-
tomie, ont évalué la stratégie de « transporter l’hôpital vers le patient », en utilisant une UNV
mobile. Les investigateurs ont ainsi conçu une ambulance équipée d’un scanner, d’un laboratoire
de première nécessité et d’une solution de télémédecine, afin de pouvoir réaliser une thrombolyse
intraveineuse directement sur le lieu de prise en charge du patient suspect d’IC. La première
étude, conduite en milieu semi-rural chez 100 patients, a montré que comparé à la prise en charge
habituelle, le déploiement d’une UNV mobile avec un médecin formé à la prise en charge des
AVC, un neuroradiologue et un infirmier, permettait une réduction absolue de 41 minutes du délai
médian entre appel des secours et décision thérapeutique concernant la thrombolyse [70]. La
deuxième étude, conduite à Berlin et impliquant une équipe dédiée composée d’un neurologue
vasculaire, un manipulateur radio et un chauffeur-conducteur ambulancier, a démontré une réduc-
tion de 25 minutes du délai moyen entre appel aux secours et thrombolyse intraveineuse grâce
à l’UNV mobile [71]. L’UNV mobile a par ailleurs permis une augmentation importante de la
proportion de patients bénéficiant d’une thrombolyse intraveineuse pour un IC (33 % contre 21 %,
soit une augmentation relative de 57 %) [71]. Bien que ces études ne permettent pas, en raison
de leur effectif ou de données manquantes, de conclure quant au bénéfice concernant le pronostic
fonctionnel, l’utilisation d’une UNV mobile est internationalement considérée comme une stra-
tégie prometteuse [72-74]. Outre la réalisation d’une thrombolyse préhospitalière, elle peut per-
mettre, grâce à l’angioscanner embarqué, l’identification précoce des patients nécessitant une
thrombectomie, et d’organiser leur transfert directement en salle de cathétérisme [75, 76]. Les
essais randomisés en cours ou à venir devraient permettre de déterminer formellement si l’uti-
lisation d’une UNV mobile entraîne une réduction du handicap fonctionnel à l’ère du traitement
combiné thrombolyse intraveineuse-thrombectomie, et si le rapport coût/utilité de cette innova-
tion est acceptable [73]. L’UNV mobile pourrait également être intéressante pour la prise en
charge des hémorragies cérébrales, permettant de débuter très précocement un traitement anti-
hypertenseur, et d’antagoniser un traitement anticoagulant si nécessaire.
La régulation médicale téléphonique des patients présentant une suspicion d’AVC aigu est réa-
lisée par le Samu-Centre 15, selon un arbre décisionnel pouvant inclure une échelle simple d’iden-
tification de l’AVC. Dans la plupart des cas, un transport médicalisé n’est pas nécessaire, et le
26 /
Prise en charge préhospitalière et admission
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/ 29
3
Les premières unités neurovasculaires (UNV) ont vu le jour dans les années 1980. Elles repré-
sentent le cœur de l’organisation de la filière neurovasculaire. Aujourd’hui encore, l’UNV est la
structure de prise en charge qui permet d’apporter un bénéfice démontré pour le plus grand
nombre de patients.
Aux États-Unis, en 2000, la Brain Attack Coalition a proposé de définir deux types d’UNV [1] :
d’une part les UNV primaires ou Primary Stroke Center (PSC), et d’autre part les unités que l’on
pourrait qualifier de référence, les Comprehensive Stroke Centers (CSC). Selon leur définition, Les
UNV primaires ont le personnel suffisant, l’infrastructure et la formation pour stabiliser et traiter
la plupart des accidents vasculaires cérébraux (AVC) à la phase aiguë. Les unités de référence
(CSC) [2] sont, elles, définies comme un service (ou une organisation) avec le personnel médical
et paramédical adéquat, l’infrastructure, l’expertise et la formation pour diagnostiquer et traiter
des patients sévères ou complexes qui nécessitent des soins médicaux ou chirurgicaux, des exa-
mens très spécialisés ou des thérapies interventionnelles. Les patients qui peuvent bénéficier de
ces centres comprennent ceux qui ont un infarctus étendu, une hémorragie cérébrale, une cause
rare ou ceux ayant besoin d’un examen ou d’une thérapie spécialisée, ou ceux nécessitant une
prise en charge multidisciplinaire. Une autre fonction des centres de références serait aussi de
servir de recours aux UNV primaires. Une étude de 2007 [3], faisant un état des lieux des hôpitaux
ayant un CSC ou PSC en Europe, montrait que seulement 4,9 % d’entre eux remplissaient les
critères pour un CSC et 3,6 % pour un PSC. La situation a énormément évolué en 10 ans. Ces
notions d’UNV primaires et de référence sont toutefois peu utilisées en France ; on parle plutôt
d’UNV de territoire et d’UNV de recours qui recoupent en partie les notions précédentes. Elles
prennent néanmoins tout leur sens depuis le développement de la thrombectomie après les
grandes études cliniques randomisées montrant son efficacité et leur intégration dans un système
de soin gradué. De nombreuses questions restent toutefois en suspens : 1) faut-il envoyer le
patient à un PSC pour réaliser au plus vite la thrombolyse avec le risque d’allonger les délais de
thrombectomie ? (stratégie appelée drip and ship) ; 2) faut-il envoyer directement le patient à
un CSC qui pourra pratiquer à la fois la thrombolyse et la thrombectomie sans perdre le temps
/ 31
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
d’un 2e transfert mais retardant la mise en œuvre de la thrombolyse si le centre est plus éloigné
que le PSC ? (stratégie appelée mothership). Ces questions devraient être résolues dans les années
à venir. À ce jour, on dénombre 135 UNV fonctionnelles en France métropolitaine et outre-mer,
le plan AVC 2010-2014 en prévoyait 140 pour l’ensemble du territoire. Le nombre de centres
réalisant la thrombectomie et dont les UNV peuvent être assimilées à un CSC était de 37 (source
Société française de neuroradiologie – SFNR) en 2017.
Que l’UNV soit dite « de territoire » ou « de recours », elle doit, pour sa reconnaissance, res-
pecter un cahier des charges. Tout d’abord, l’UNV est un des éléments de la filière AVC intégrant
prévention, soins aigus, réadaptation et soutien médico-social. Elle doit correspondre à une unité
fonctionnelle constituée de lits de soins intensifs neurovasculaires et de lits d’hospitalisation
« classiques » dédiés. Ces lits doivent être regroupés géographiquement. En effet, afin d’opti-
miser la qualité des soins et l’utilisation des ressources hospitalières, l’organisation interne de
l’établissement doit éviter de fractionner la prise en charge des AVC en court séjour entre
plusieurs structures ou pôles médicaux ou médico-techniques. Par ailleurs, l’UNV doit faire partie
du pôle ou de la structure médicale prenant en charge les pathologies neurologiques. L’établis-
sement siège d’une UNV doit assurer l’accès sur place aux spécialités suivantes : urgences, neu-
rologie, radiologie, réanimation, cardiologie, et, sur place ou par convention avec un autre éta-
blissement : médecine physique et réadaptation, gériatrie, chirurgie vasculaire, neurochirurgie,
neuroradiologie diagnostique, neuroradiologie interventionnelle, soins palliatifs. Cette UNV est,
par ailleurs, située dans un territoire pour lequel le Schéma régional d’organisation sanitaire
(SROS) préconise l’implantation d’une ou plusieurs unités.
L’UNV vise à réduire la fréquence et la sévérité des séquelles fonctionnelles associées aux AVC.
Elle doit réaliser un véritable maillage du territoire qui l’entoure afin de réduire les délais de
prise en charge des patients AVC/AIT (accident ischémique transitoire), avec un objectif de prise
en charge par un établissement de la filière dans les 30 minutes suivant le déficit neurologique.
L’UNV doit être placée sous la responsabilité d’un médecin neurologue à la formation et
l’expérience en pathologie neurovasculaire reconnues, par exemple par la possession du DIU
de pathologie neurovasculaire, ou un équivalent européen, ou la validation des acquis de l’expé-
rience par le Conseil national pédagogique du DIU de pathologie neurovasculaire. Sur le plan
quantitatif, l’UNV doit assurer la prise en charge, à la phase initiale de leur maladie, d’au moins
300 patients par an, sans discrimination d’âge, de gravité ou de nature (accident ischémique
ou hémorragique).
32 /
Unités neurovasculaires
/ 33
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
libéraux, en association éventuelle avec les services de soins infirmiers à domicile (SSIAD),
les services de soins à domicile, les hospitalisations à domicile (HAD), les structures et
services pour personnes handicapées (services d’accompagnement médico-social – SAMSAH,
services d’accompagnement à la vie sociale – SAVS, maisons départementales des personnes
handicapées – MDPH), les structures et services pour personnes âgées (réseaux géronto-
logiques, missions d’accueil et d’information des associations – MAIA), centres locaux d’infor-
mation et de coordination (CLIC), etc. ;
■ une mission d’expertise et de formation pour l’ensemble des professionnels impliqués
dans la prise en charge des AVC, sans oublier les médecins généralistes qui ont un rôle
essentiel dans l’AVC, que ce soit en prévention primaire (tabac, hypertension artérielle,
diabète, cholestérol, etc.) ou secondaire.
Pour la réalisation de ces missions, les modalités du recours au plateau technique, à l’intervention
et à l’expertise des médecins spécialistes (notamment les neuroradiologues et les neuro-
chirurgiens) et des personnels paramédicaux impliqués dans la prise en charge des AVC, au sein
et en dehors de l’établissement, doivent être formalisées dans un protocole ou une convention.
Ce document doit être validé et cosigné par l’ensemble des acteurs concernés.
Capacité
Il convient de distinguer la capacité de l’unité de soins intensifs neurovasculaires (USINV) de
celle de l’unité de lits classiques dédiés (UNV-non soins intensifs – UNV-nonSI). Le calcul de la
capacité en lits d’une UNV repose sur un certain nombre de données :
■ l’incidence annuelle des AVC et AIT dans l’aire géographique considérée (environ
140 000 AVC ou AIT en France en 2009 pour une population d’environ 65 millions d’habi-
tants [4]) ;
■le coefficient moyen d’occupation optimal, qui est de 90 % en USINV et de 95 % en
UNV-nonSI ;
■ la durée moyenne de séjour idéale qui est de 3 jours en USINV et de 7 jours en UNV-nonSI ;
■le pourcentage de patients ne souffrant pas d’une pathologie vasculaire pris en charge en
USINV ou UNV-nonSI (environ 5 % pour chaque structure).
À partir de ces données, la capacité en lits nécessaires à la prise en charge de l’ensemble des
patients AVC/AIT est d’environ 2,1 lits de soins intensifs pour 100 000 habitants et d’environ
4,6 lits traditionnels dédiés pour 100 000 habitants. Notons, que selon les établissements, et
notamment selon le nombre de médecins de l’UNV pouvant assurer la permanence des soins,
les lits de soins intensifs neurovasculaires peuvent être implantés soit à proximité des lits clas-
siques dédiés AVC dans le service de neurologie, soit à proximité immédiate d’une unité de
spécialité différente disposant d’une permanence médicale (réanimation, unité de soins intensifs
cardiologiques, etc.). Dans ce dernier cas, une astreinte opérationnelle est assurée par l’équipe
de l’UNV. Le médecin d’astreinte doit alors pouvoir répondre immédiatement à tout appel télé-
phonique ou via la télémédecine et se rendre dans l’UNV en moins d’une heure, si nécessaire.
Il se déplace notamment pour tout AVC pouvant justifier d’une surveillance médicale rapprochée,
pour les traitements fibrinolytiques. Il sera également consulté pour les décisions concernant les
patients déjà hospitalisés. Remarquons que des UNV proches géographiquement peuvent mettre
en place une astreinte commune. Les lits classiques dédiés sont le plus souvent localisés dans
le service de neurologie ou, à défaut, dans une unité individualisée et dédiée à la prise en charge
des pathologies neurologiques au sein d’un service de médecine.
34 /
Unités neurovasculaires
Cette équipe pluridisciplinaire doit être en nombre suffisant pour prendre en charge 24 h/24
tous les jours de l’année des patients atteints d’AVC.
L’équipe de l’UNV peut être constituée de personnels exerçant à titre principal au sein de l’éta-
blissement ou en dehors de celui-ci ; les modalités de leur intervention sont formalisées dans
un protocole ou une convention validés et cosignés par l’ensemble des acteurs concernés.
Le personnel de l’UNV est formé et encadré par un cadre soignant au mieux titulaire du DIU
paramédical neurovasculaire.
Personnel médical
Les textes réglementaires n’apportent pas de précision concernant le nombre de médecins néces-
saires dans une UNV par rapport à la capacité de cette dernière si ce n’est que ces médecins
doivent être en nombre suffisant. Toutefois, un minimum de 4 neurologues équivalents temps
plein nous paraît nécessaire au bon fonctionnement d’une unité de 27 lits comprenant 8 lits de
soins intensifs et 19 lits « traditionnels » dédiés.
Personnel paramédical
■ Infirmiers et aides-soignants
Comme nous l’avons évoqué ci-dessus, le nombre d’infirmiers et d’aides-soignants doit être au
moins équivalent à ceux présents dans une unité de soins intensifs cardiologiques dans la mesure
où plus de malades dépendants sont pris en charge dans les unités de soins intensifs
neurologiques.
Sous la responsabilité d’un cadre infirmier, l’équipe paramédicale de l’unité de soins intensifs
cardiologiques comprend :
1. De jour, un infirmier ou une infirmière et un aide-soignant pour 4 patients.
2. De nuit, au moins un infirmier ou une infirmière pour 8 patients.
Lorsque, pour 8 patients présents la nuit, un seul infirmier ou une seule infirmière est affecté à
l’unité, est en outre prévue la présence d’un aide-soignant.
/ 35
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
■ Kinésithérapeutes
Une demi-heure de rééducation est nécessaire, dès l’admission, chaque jour, pour presque tous
les patients ayant présenté un AVC constitué, soit environ 2 kinésithérapeutes pour une unité
de 27 lits comprenant 8 lits de soins intensifs et 19 lits « traditionnels » dédiés.
■ Orthophonistes
Une demi-heure de rééducation orthophonique est nécessaire, dès l’admission, chaque jour, pour
environ 30 à 50 % des patients ayant présenté un AVC, soit environ un orthophoniste pour une
unité de 27 lits comprenant 8 lits de soins intensifs et 19 lits « traditionnels » dédiés.
■ Psychologues
Un bilan de troubles cognitifs d’une durée d’une demi-journée est nécessaire chez 30 % des
patients hospitalisés pour AVC.
Par ailleurs, 50 % des patients développent une dépression dans les suites d’un AVC. D’autre
part, les familles ont besoin d’un soutien psychologique.
Les besoins ont été évalués à un neuropsychologue et un psychologue pour une unité de 27 lits
comprenant 8 lits de soins intensifs et 19 lits « traditionnels » dédiés.
■ Assistantes sociales
Leur rôle est double : orienter les patients vers une structure d’aval adaptée et permettre l’obten-
tion d’aides financières. Au minimum, une assitante sociale à mi-temps est nécessaire pour une
unité de 27 lits comprenant 8 lits de soins intensifs et 19 lits « traditionnels » dédiés.
■ Secrétariat
Un secrétariat dédié à l’UNV chargé de l’accueil et des problèmes administratifs doit être effectif.
36 /
Unités neurovasculaires
Évaluation
Une fois crée et reconnue, l’UNV fera l’objet d’une évaluation reposant sur différents indicateurs :
Le concept d’UNV ou de Stroke Unit (SU) des Anglo-Saxons date d’environ 40 ans. Leur objectif
est de diminuer non seulement la mortalité mais aussi de réduire le handicap moteur ou cognitif
et le risque d’institutionnalisation à court, moyen et long termes. Ces UNV, composée d’une
équipe multidisciplinaire, médicale et soignante, dédiée, compétente et spécialisée peut se
décomposer en UNV géographiquement déterminée mais aussi en unités mobiles d’intervention
qui peuvent se déplacer au sein d’une structure hospitalière, mais aussi au domicile du patient
[6], voire, plus récemment, intervenir du lieu de l’AVC jusqu’à l’hospitalisation du patient dans
la structure hospitalière appropriée d’accueil (phase préhospitalière)
Ces UNV sont généralement définies comme des entités géographiquement distinctes au sein
d’un hôpital, composées de lits spécifiquement dédiés aux patients atteints d’AVC (ou suspects
d’AVC). Elles disposent d’une équipe multidisciplinaire ayant un intérêt et une expertise pour la
/ 37
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
prise en charge des AVC. L’efficacité de ces UNV a ainsi été évaluée par de nombreuses études
randomisées contrôlées et par des études observationnelles de cohortes réalisées dans plusieurs
pays, notamment anglo-saxons et européens.
Les résultats de ces essais randomisés contrôlés ont été inclus dans 4 revues systématiques
Cochrane réalisées par la Stroke Unit Trialists’ Collaboration qui ont démontré l’efficacité de
l’hospitalisation des patients dans les UNV en comparaison avec les prises en charge
alternatives [6-10].
En réalité, déjà en 1993, une méta-analyse des essais randomisés contrôlés publiés à partir de
1962, incluant 8 études nord-américaines et européennes, pour un total de 1 586 patients, dont
766 avait été pris en charge dans une UNV et 820 dans un service non dédié spécifiquement
aux AVC, avait montré une diminution significative de la mortalité de 28 % dans les 4 premiers
mois pour les patients hospitalisés dans les UNV (OR 0,72 ; IC95 % : 0,56-0,92 ; p < 0,01) [11].
Cette diminution de mortalité, de l’ordre de 20 %, était confirmée à 12 mois (OR 0,79 ; IC95 % :
0,63-0,99 ; p < 0,05).
En 1997, une méta-analyse de 18 essais cliniques comportant 3 249 patients dont l’admission
était randomisée entre une unité spécialisée dans la prise en charge des AVC et une autre unité
de soins (unité standard de neurologie, de médecine interne ou de gériatrie) avait également
démontré, sur un suivi médian d’un an, une diminution significative de la mortalité de 17 % (OR
0,83 ; IC95 % : 0,69-0,98 ; p < 0,05), de la mortalité ou du handicap de 31 % (OR 0,69 ; IC95 % :
0,59-0,82 ; p < 0,0001) et de la mortalité ou d’une institutionnalisation de 25 % (OR 0,75 ;
IC95 % : 0,65-0,87 ; p < 0,0001) [12].
Les quatre méta-analyses Cochrane ont confirmé que les patients victimes d’AVC pris en charge
dans les UNV ont une probabilité accrue de survie, d’indépendance fonctionnelle et de retour
au domicile à un an [7-10] par rapport à une prise en charge non spécialisée.
La méta-analyse la plus récente a inclus 28 études cliniques pour un total de 5 855 patients [10].
Sur 3 994 patients, inclus dans 21 essais, la mortalité des victimes d’un AVC, à une médiane d’un
an de suivi, était significativement diminuée de 19 % (OR 0,81 ; IC95 % : 0,69-0,94 ; p = 0,005)
chez ceux initialement pris en charge en UNV par rapport aux patients hospitalisés dans des
unités ou services non dédiés [5]. De plus, la probabilité d’être indépendant (score de Rankin
modifié ^ 2 ou index de Barthel > 90) et de retour au domicile était significativement plus élevée
chez les patients traités dans les services dédiés aux victimes d’AVC. Cette méta-analyse objec-
tivait également une diminution significative des critères combinés mortalité ou institutionnali-
sation au long cours de 22 % (OR 0,78 ; IC95 % : 0,68-0,89 ; p = 0,0003) et de mortalité ou
dépendance de 21 % (OR 0,79 ; IC95 % : 0,68-0,90 ; p = 0,0007) démontrant ainsi le bénéfice des
UNV, bien que la durée d’hospitalisation ne soit pas significativement différente [10].
Par rapport à la reproductibilité de ces essais cliniques dans la pratique quotidienne, plusieurs
études observationnelles ont été menées. Une étude observationnelle italienne (Research Project
on Stroke services in Italy, PROSIT), conduite de 2000 à 2004 dans 260 hôpitaux, a comparé le
devenir à long terme de 11 572 patients victimes d’un AVC aigu et hospitalisés dans les 48 h
suivant le début des symptômes, soit en UNV (n = 4 936), soit dans un service conventionnel
(n = 6 636) [13]. Dans cette étude, les UNV étaient définies comme des services hospitaliers
ayant des lits dédiés aux patients victimes d’AVC composés d’une équipe experte, dédiée aux
AVC et constituée d’au moins un médecin et un infirmier ; le service conventionnel étant carac-
térisé par l’absence de lit et d’équipe médicale et paramédicale dédiés à la prise en charge des
AVC. Il s’agissait d’un service hospitalier où les patients victimes d’AVC étaient pris en charge
avec les autres patients (par exemple neurologiques, cardiologiques ou de médecine interne).
L’étude a confirmé que l’hospitalisation en UNV était associée à une réduction significative du
risque de la mortalité intrahospitalière de 22 % (OR : 0,78 ; IC95 % : 0,64-0,95), et à la fin du
38 /
Unités neurovasculaires
Le bénéfice potentiel restait significatif pour tous les patients, quel que soit l’âge de début, le
type de présentation clinique, à l’exception des patients présentant à la phase aiguë des troubles
de la conscience [13].
Une troisième étude observationnelle multicentrique suédoise incluant 14 308 patients présen-
tant un infarctus cérébral ou une hémorragie intraparenchymateuse pris en charge à la phase
aiguë dans 80 hôpitaux a montré (chez les patients indépendants au domicile avant l’AVC et
sans trouble de la vigilance à l’admission aux urgences) une diminution de la mortalité intra-
hospitalière (RR : 0,87 ; IC95 % : 0,79-0,96) et à 3 mois (RR : 0,91 ; IC95 % : 0,85-0,98) des
patients pris en charge en UNV par rapport aux services non dédiés [10]. La probabilité de retour
au domicile était plus élevée (RR : 1,06 ; IC95 % : 1,03-1,10) et l’institutionnalisation moins
/ 39
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
fréquente (RR : 0,94 ; IC95 % : 0,89-0,99). Cependant, l’amplitude du bénéfice était inférieure à
celle observée dans les méta-analyses d’essais randomisés, et aucun bénéfice n’était observé
pour les patients ayant des troubles de la vigilance à l’admission [15].
Enfin, une étude issue des données collectées sur l’année 2001 de 240 hôpitaux au Royaume-Uni
a montré des résultats similaires aux méta-analyses des études randomisées avec une diminution
de la mortalité d’environ 25 % à 30 jours pour les patients hospitalisés dans les UNV [16].
Ainsi, une revue systématique des études observationnelles, dont trois ont été menées en Europe,
a montré que, malgré la présence de possibles biais et d’une hétérogénéité, l’hospitalisation dans
les Stroke Units ou UNV était associée à un bénéfice similaire à celui démontré par les études
randomisées avec une diminution de la mortalité de 21 % (OR 0,79 ; IC95 % : 0,73-0,86 ;
p = < 0,00001) et du critère combiné de mortalité, d’institutionnalisation ou de dépendance de
23 % (OR 0,87 ; IC95 % : 0,80-0,95 ; p = 0,002) à un an [17].
De plus, le bénéfice initial et à moyen termes de la prise en charge des AVC en UNV persistait
à long terme, au-delà de 5 ans et même 10 ans, en termes de survie, d’autonomie fonctionnelle
et de probabilité de retour au domicile [10, 18, 19].
Les analyses en sous-groupes confirmaient que le bénéfice des UNV existait quels que soient
l’âge, le sexe, la sévérité de l’AVC (basée sur le score NIHSS) ou le type d’AVC (ischémique vs
hémorragique), démontrant que ces différents paramètres ne doivent pas entraîner de limitation
d’accès aux UNV.
Cependant, pour les AVC légers (index de Barthel > 50), il n’a pas été démontré de différence
significative pour la mortalité (OR 0,92 ; IC95 % : 0,64-1,31), la mortalité ou institutionnalisation
(OR 0,80 ; IC95 % : 0,59-1,08) ; mais une réduction significative de 25 % (OR 0,75 ; IC95 % :
0,58-0,96) de la dépendance [9].
À l’inverse, les patients non autonomes avant l’AVC ne semblent pas tirer bénéfice d’un séjour
en UNV sur une durée de suivi de 2 ans [20].
Les patients ayant une détérioration intellectuelle préexistante semblent moins souvent admis
en UNV que les patients cognitivement indemnes [21], mais l’absence de bénéfice d’une prise
en charge en UNV reste à prouver [22, 23].
Le bénéfice des UNV dans la prise en charge des patients victimes d’hémorragies cérébrales a
également été démontré dans des études prospectives randomisées [24] de suivi de cohortes
[25] et confirmé une méta-analyse récente [26] avec une diminution significative de la mortalité
de 21 % (RR : 0,79 ; IC95 % : 0,64-0,97) et de la mortalité et de la dépendance de 19 % (RR :
0,81 ; IC95 % : 0,471-0,92) avec une efficacité comparable à celle de la prise en charge des
infarctus cérébraux [26].
Unités mobiles intrahospitalières : ces équipes multidisciplinaires mobiles sont spécialisées dans
la prise en charge des AVC et se déplacent en général dans les différents services de l’hôpital
où se situe l’UNV géographiquement localisée mais dont la capacité s’avère insuffisante pour
accueillir l’ensemble des AVC admis aux urgences de cet hôpital. Peu d’études ont été consacrées
à leur évaluation, mais, sur des données anciennes, leur efficacité sur le décès, la dépendance
ou le risque d’institutionnalisation apparait significativement moindre que lors d’une prise en
charge initiale en UNV [27, 28].
40 /
Unités neurovasculaires
Les UNV représentent le traitement le plus efficace des AVC à l’échelon de la population et
assurent une meilleure prise en charge des patients atteints par rapport aux services non dédiés,
comme le montre la diminution de la mortalité à court, moyen et long termes, du handicap et
du risque d’institutionnalisation [36]. Par conséquent, l’hospitalisation des AVC dans les UNV
est mentionnée avec un niveau de preuve maximal dans les recommandations de l’European
Stroke Organisation (ESO) [37] et de l’American Heart Association, y compris pour les hémorragies
intraparenchymateuses [38, 39] et les thromboses veineuses cérébrales [40].
■ Références
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42 /
4
L’hôpital est entré, au XXIe siècle, dans l’ère des innovations thérapeutiques et technologiques.
Les biotechnologies, les « big data », les sciences cognitives et la télémédecine (TLM) sont quatre
domaines à l’origine de l’essor fulgurant qui transforme notre système de santé et décuple son
efficacité.
La TLM permet un accès équitable aux soins « de partout et à tout moment », de l’urgence
vitale aux soins chroniques. C’est un outil décisif pour améliorer l’accès aux compétences et
combattre la désertification médicale, elle devient progressivement la principale porte d’entrée
du parcours de soins, elle permet le partage sécurisé et traçable de l’information avec respect
de la confidentialité, elle assure le partage des connaissances et des bonnes pratiques à l’ensemble
des professionnels de santé.
S’appuyant en France sur les cinq priorités nationales de déploiement de la TLM définies par
le Plan TLM de 2011-2015 [1] (imagerie, prise en charge de l’accident vasculaire cérébral
– AVC –, maladies chroniques, santé des détenus et soins dans les structures médico-sociales),
les hôpitaux se sont rapprochés les uns des autres grâce au lien construit par la TLM pour
répondre au premier défi lancé par l’entrée de l’AVC dans l’ère thérapeutique curative dont
l’efficacité est amplement démontrée depuis les années 2000. Ces traitements curatifs impo-
sent des contraintes de temps (une fenêtre thérapeutique courte) et de compétences (une
expertise neurovasculaire voire neuroradiologique interventionnelle). L’AVC s’est imposé
comme le modèle qui a réussi un maillage performant grâce à la TLM pour répondre à la
complexité de sa prise en charge.
/ 43
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
Plusieurs critères font de l’AVC une maladie emblématique car conjuguant soins en urgence et
prise en charge chronique [2].
– Il est de plus en plus fréquent : 140 000 AVC surviennent en France chaque année, et le nombre
continue d’augmenter (13 % entre 2008 et 2015) malgré une prévention efficace [3], à cause
du vieillissement de la population et surtout à cause de l’augmentation de l’incidence des AVC
chez les jeunes de moins de 55 ans [4].
– Il reste grave : 10 % de décès à 1 mois ; 40 % de handicap à 1 mois ; 20 % d’évolution vers
une démence.
– Les traitements efficaces existent et ils ont fait baisser la mortalité de 20 % et augmenter le
taux de guérison totale de 20 % [2-5].
Ces constats expliquent pourquoi l’AVC est reconnu depuis 2010 par le Plan national AVC comme
une nouvelle urgence médicale [5] dont les contraintes servent de starter et de modèle à l’appli-
cation de la TLM dans la prise en charge des urgences médicales en général et de leur suivi.
La prise en charge de l’AVC est passée d’une ère contemplative à une ère de prise en charge
très active avec plusieurs étapes clé [5, 6].
– Mise en place en 2010 du Plan national AVC avec comme objectif le développement, dans
chaque région sanitaire d’Unités de soins intensifs neurovasculaires (USINV) et d’Unités neuro-
vasculaires (UNV), permettant l’admission et la prise en charge de tous les patients atteints d’un
AVC.
– Hospitalisation en urgence de tout patient suspect d’AVC après appel au centre 15, pour
détermination du type d’AVC avec la réalisation d’une imagerie en urgence, de préférence une
IRM en première intention ou à défaut un scanner cérébral [6].
– Autorisation en France en 2002 de la fibrinolyse intraveineuse par rt-PA effectuée par un
neurologue dans les 4 h 30 suivant l’installation d’un AVC ischémique avant 80 ans et dans les
3 h après 80 ans, évitant un décès ou un handicap majeur pour 4 patients traités [5, 6].
– Contrôle de la pression artérielle en cas d’AVC hémorragique et réversion des anti-
coagulants [5, 7].
– Depuis 2015 : nécessité de diagnostiquer, dès la 1re imagerie cérébrovasculaire, les occlusions
des gros troncs artériels accessibles dans les 6 h à la thrombectomie mécanique (TM) [8].
– Mise en place du Plan TLM dès 2011 avec une priorité accordée au télé-AVC afin qu’un
maximum de patients puisse accéder aux avancées thérapeutiques, notamment à la fibrinolyse,
quel que soit l’hôpital d’admission initial [1, 9-11].
44 /
Télémédecine et accident vasculaire cérébral
Scénario A : le malade est fibrinolysé à distance (« téléfibrinolyse ») sur le site d’urgence, puis il
est transféré, par ambulance médicalisée, pendant la perfusion de rt-PA ou après la fin de la
perfusion, vers l’USINV pour une surveillance au moins pendant 48 h permettant de prévenir et
de traiter les risques de fluctuation des déficits et les complications (hémorragie, arythmie car-
diaque, phlébite et embolie pulmonaire, fausses routes alimentaires, hyperthermie, épilepsie) et
pour effectuer le bilan étiologique et mettre en route la prévention secondaire.
Scénario B : le séjour en USINV est plus bref, et le malade repart vers le site requérant pour y
terminer le bilan étiologique et la prévention secondaire en fonction de ses moyens humains et
logistiques.
Scénario C : après la téléfibrinolyse, le patient reste sur le site requérant à condition que ce
dernier possède une structure permettant une surveillance intensive, un bilan étiologique et la
mise en route de la prévention secondaire. Cette situation doit être évitée car le passage en
UNV a bien démontré son efficacité (cf. infra).
Scénario D : quand l’infarctus n’est éligible ni à la fibrinolyse ni à la TM, si le malade est jeune,
il doit être transféré en USINV au cas où une indication de l’hémicrâniectomie soit nécessaire.
Si le malade est stable, il peut être laissé sur site à condition que le malade soit pris en charge
en soins intensifs et télésurveillé.
/ 45
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
De nombreuses études ont démontré que le télé-AVC était aussi efficace dans la prise en charge
des hémorragies cérébrales, en particulier grâce à un diagnostic précoce, la baisse immédiate de
l’hypertension artérielle, au transfert rapide vers une USINV qui diminue les complications [5]
et répond aux éventuelles indications neurochirurgicales, comme l’évacuation de l’hématome, la
dérivation ventriculaire en cas d’hémorragie de la fosse postérieure, ou l’hémicrâniectomie [7].
Selon le modèle de TEMPIS [9], le télé-AVC permet d’adapter la prise en charge des patients
tout au long de leur séjour hospitalier avec la création de véritables unités de neurologie avec
télémédecine en lien avec l’UNV de territoire [14, 19]. Le télé-AVC s’applique aussi parfaitement
à la consultation pluridisciplinaire obligatoire du 6e mois en permettant de généraliser cet acte
dans n’importe quel hôpital connecté, même dépourvu de neurologie ou de médecin neuro-
rééducateur, avec un duo composé de l’expert neurologique de l’USINV, téléconsultant un malade
à distance en présence d’un médecin, d’une infirmière ou d’un kinésithérapeute. Le télé-AVC
permet aussi de donner un avis à distance pour un patient suspect de complications survenant
à distance d’un AVC (spasticité, épilepsie, démence, dépression, fatigue des aidants), à partir
d’un hôpital, d’une EHPAD ou d’une maison de santé [19].
Le Télé-AVC est parfaitement adapté à la prise en charge des autres déficits focaux mimant un
AVC comme la migraine, l’épilepsie, les comas aigus, les paraplégies aiguës, les mouvements
anormaux, réalisant d’autres urgences neurologiques bénéficiant de l’expertise immédiate
46 /
Télémédecine et accident vasculaire cérébral
Le télé-AVC n’est pas un processus figé et doit être perçu comme adaptable aux organisations
et aux avancées des connaissances mises au service des patients.
Le télé-AVC a été précurseur par le maillage territorial qui en découle dans la mise en place des
groupements hospitaliers de territoire (GHT) [26]. Ce maillage pourra être étendu vers les EHPAD
et les maisons de santé, conjuguant ainsi activités de proximité et de premier recours.
Enfin, le télé-AVC se prête parfaitement à des projets de recherche ciblés sur son impact médical,
sur les flux de patients, sur le rôle des différentes structures hospitalières et sur l’attractivité des
hôpitaux vis-à-vis des jeunes médecins [27].
Cette nouvelle pratique médicale a été évaluée à de nombreuses reprises avec des résultats concor-
dants, démontrant à la fois un taux d’efficacité mesuré par le score de Rankin, un taux de compli-
cations hémorragiques et un taux de décès à 3 mois similaires aux résultats obtenus dans une USINV
[28-33]. De plus, le télé-AVC a permis de multiplier par 3 l’accès à la fibrinolyse dans les petits
hôpitaux [9]. Cinq paramètres permettent d’évaluer le service rendu aux patients [9, 11, 33] : 1) le
taux de guérison ; 2) le taux de handicap ; 3) le taux de complications hémorragiques et le taux de
décès à 3 mois ; 4) le taux d’accès à la fibrinolyse, à la TM ; 5) le taux de prise en charge en USINV.
En fonction des résultats, la recherche des phases du parcours défaillantes doit être effectuée.
La TLM ne nécessite pas la création de nouveaux droits. Les grands principes classiques du droit
de la santé, comme celui des droits de la personne malade, s’appliquent dans le cadre de cette
nouvelle pratique médicale à distance. Néanmoins, la TLM implique une adaptation des règles
de droit afin de répondre à de nouvelles situations comme l’exercice collaboratif de la médecine,
car le clinicien n’est plus seul, et la relation singulière est partagée à plusieurs.
La mise en œuvre d’un projet de TLM en France est strictement encadrée par le Code de la santé
publique, le Code de déontologie et les normes professionnelles. La TLM, support de l’organisation du
circuit patients, est un acte médical et non une simple prestation de type e-service. Elle s’inscrit ainsi
dans la structuration de l’offre de soins encadrée par les Agences régionales de santé (ARS), et doit
s’articuler avec les projets professionnels, et avec les programmes institutionnels [34].
/ 47
Partie 1 – Organisation de la prise en charge
48 /
Télémédecine et accident vasculaire cérébral
■ en faire un outil du quotidien et non une exception ; ne pas considérer la TLM uniquement
sous l’angle d’une solution aux déserts médicaux qui doivent être vécus au contraire comme
un creuset d’intelligence et d’imagination, et une nouvelle pratique médicale complémen-
taire aux consultations en présentiel ; l’humain doit rester prioritaire avant la technique.
Ainsi, les UNV ont entraîné leur région sanitaire dans une véritable révolution des pratiques
médicales. Elles ont su convertir par la TLM les difficultés d’accès aux soins d’urgences liés à la
grande étendue des régions et aux problèmes de démographie médicale, en une réussite orga-
nisationnelle, en évitant les pertes de chance, en libérant la coopération, le transfert de compé-
tences vers les hôpitaux généraux et en décloisonnant les relations entre professionnels de santé.
Le télé-AVC est bien plus qu’un enjeu technologique car il participe à l’égalité à l’accès aux soins,
à la coordination des soins, à une meilleure utilisation des ressources, à l’amélioration de l’effi-
cacité du système de soins, à l’aménagement du territoire et à la vie économique. Le télé-AVC
est une réponse à une raréfaction des ressources médicales mais aussi une aide face à l’aug-
mentation de la demande et la technicité de prise en charge des patients AVC. Le télé-AVC nous
oblige à repenser une nouvelle organisation du temps médical, du parcours du malade ainsi que
des modalités du financement de la TLM.
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50 /
■
5
L’accident vasculaire cérébral (AVC), plus particulièrement l’infarctus cérébral (IC), est habituel-
lement reconnu comme une pathologie essentiellement aiguë pour laquelle les études physio-
pathologiques ou pharmacologiques se sont focalisées de longue date sur les heures ou les jours
qui en suivent la survenue. Néanmoins, tant l’IC que les hémorragies ne peuvent se résumer à
cette fenêtre physiopathologique ou thérapeutique étroite dans la mesure où ils sont précédés
d’une phase prémorbide qui peut en influencer les conséquences à court et long termes. Par
ailleurs, l’accident aigu est, quant à lui, suivi d’une phase post-AVC dont on peut observer
aujourd’hui l’allongement en lien avec l’augmentation de l’espérance de vie des patients. Dans
le contexte d’une pathologie qui apparaît ainsi chronique, il est nécessaire, au-delà des traite-
ments classiques, d’envisager de nouvelles approches plus intégratives associant prévention pri-
maire et secondaire, traitement de la phase aiguë, facilitation de la réparation et de la récupé-
ration fonctionnelle ainsi que prévention des complications à long terme, en particulier cognitives.
Phase prémorbide
L’IC, de même que les hémorragies cérébrales, ne surviennent pas, le plus souvent, sur un terrain
neutre, compte tenu notamment de l’âge habituel de leur survenue. La phase prémorbide est
ainsi marquée par l’existence de nombreux facteurs de risque qui, au-delà de leur rôle dans la
survenue d’un AVC, peuvent également en influencer la physiopathologie et le pronostic [1, 2].
Les facteurs de risque comme l’hypertension artérielle, le diabète ou l’hypercholestérolémie
créent un contexte oxydatif et inflammatoire systémique. Les effets délétères de ces voies par
ailleurs amplifiés à la phase aiguë contribuent largement à la mort neuronale (Figure 1) [2].
/ 53
Partie 2 – Phase aiguë
À l’inverse, comme nous le détaillons dans l’un des paragraphes suivants, des mécanismes pro-
tecteurs qui limitent la sévérité de l’accident peuvent aussi se mettre en place au cours de cette
phase prémorbide. Ces mécanismes ont notamment été décrits dans le cadre des expériences
de préconditionnement ischémique qui consiste à provoquer des ischémies brèves et sans consé-
quences lésionnelles qui préparent le cerveau à subir une ischémie prolongée dont les consé-
quences sont alors moindres [3, 4]. Comme détaillé ci-dessous, certains de ces mécanismes
pouvant être mis en jeu sous l’effet de traitements médicamenteux, des approches de neuro-
protection préventive sont actuellement discutées (Figure 1).
Un autre impact de cette phase prémorbide concerne le risque cognitif associé aux AVC. En
effet, au moment où survient l’IC, 15 à 20 % des patients ne sont pas indemnes au plan
cognitif [5]. Deux mécanismes, qui peuvent se combiner, ont été mis en évidence : i) l’existence
de lésions vasculaires préexistantes (anomalies de substance blanche, micro-ischémies, micro-
hémorragies), en particulier associées aux facteurs de risque vasculaire comme l’hypertension
artérielle ; ii) l’existence d’un processus dégénératif, du même type que celui observé dans la
maladie d’Alzheimer, dont l’évolution peut être influencée par la survenue d’un AVC. Ainsi, en
matière de pronostic cognitif, l’existence de ces anomalies fonctionnelles et lésionnelles influence
la sévérité de l’AVC ainsi que la survenue d’une démence ultérieure [5].
La phase post-AVC
L’AVC, plus particulièrement l’IC, ne s’arrête pas aux premiers jours ou aux premières semaines
d’évolution, mais devient une véritable maladie chronique du fait du risque de récidive et de
nombreuses autres conséquences à long terme. Le cerveau qui a fait l’objet d’une ischémie reste
ainsi en perpétuel remaniement, ce qui permet à la fois une récupération progressive des fonc-
tions déficitaires mais aussi la genèse d’autres troubles. Les mois et années qui suivent l’accident
aigu sont ainsi marqués par un subtil équilibre entre récupération fonctionnelle et survenue de
complications (épilepsie, dépression, troubles cognitifs), l’ensemble impliquant des mécanismes
cellulaires et moléculaires en lien avec la plasticité cérébrale [6]. Dans ce contexte, le tableau
54 /
Physiopathologie de l’ischémie cérébrale et cibles thérapeutiques
déficitaire est loin d’être figé puisque l’amélioration fonctionnelle peut être observée bien à
distance de la phase aiguë. Des travaux expérimentaux montrent qu’une mobilisation spontanée
de cellules souches issues du tissu cérébral ou de la moelle osseuse, est capable d’assurer une
colonisation cellulaire du foyer ischémique et la différenciation en nouveaux neurones assortie
de l’établissement de nouvelles connexions. La libération de facteurs attractants et neuro-
trophiques, comme le Brain Derived Neurotrophic Factor (BDNF), sous-tendent ces mécanismes
cellulaires. Ces phénomènes de plasticité cérébrale permettent également la mise en place de
suppléance par d’autres régions cérébrales qui viennent ainsi compenser la perte de fonction [6,
7].
À l’inverse, des anomalies de ces mécanismes de plasticité, en lien ou non avec la persistance
de phénomènes inflammatoires, peuvent conduire au développement de troubles de l’humeur
ou de troubles cognitifs. Ces derniers surviennent dans les mois ou années qui suivent l’AVC,
sur un terrain préexistant ou non comme le montre la phase prémorbide. La physiopathologie
de ces troubles cognitifs reste néanmoins complexe [5]. Il peut s’agir de l’aggravation ou de
l’accélération d’un processus dégénératif ou vasculaire déjà en cours par sommation ou synergie
lésionnelle. L’ischémie en elle-même peut aussi induire des lésions cellulaires à distance, notam-
ment au niveau du complexe temporal médian, comme le montrent des atrophies localisées ou
des modifications morphologiques des neurones hippocampiques. Des processus de déafféren-
tation, des modifications neurotrophiques et des phénomènes inflammatoires expliquent aussi
ces modifications tissulaires et fonctionnelles [8].
/ 55
Partie 2 – Phase aiguë
Calcium et excito-toxicité :
déterminants initiaux de la mort cellulaire
L’une des principales et des plus rapides conséquences de l’ischémie au sein du tissu cérébral est
l’augmentation de la concentration intracellulaire du calcium, conduisant rapidement à la nécrose [2,
9, 10]. Cette destruction cellulaire s’effectue par l’intermédiaire de la mise en jeu de divers systèmes
enzymatiques (protéines kinases, protéases, NO synthétase) responsables d’une inhibition de la syn-
thèse protéique, de la production de radicaux libres ou encore de l’altération des protéines du cyto-
squelette. Si l’invasion calcique est déclenchée par la déplétion énergétique cellulaire et par l’anoxie,
elle est entretenue par la libération massive d’acides aminés excitateurs, en particulier de glutamate.
Cette cascade d’événements va être complétée par la mise en jeu d’autres mécanismes délétères, mais
aussi protecteurs, en rapport notamment avec la synthèse de monoxyde d’azote (NO) (Figures 2 et 3).
56 /
Physiopathologie de l’ischémie cérébrale et cibles thérapeutiques
/ 57
Partie 2 – Phase aiguë
A contrario, les nombreux travaux, tant expérimentaux que cliniques relatifs aux effets poten-
tiellement favorables de l’hypothermie, semblent quant à eux indiquer une interaction avec de
nombreux mécanismes délétères tels que la déplétion énergétique, l’excitotoxicité, le stress oxy-
dant, les processus inflammatoires ou encore l’acidose intracellulaire. En dépit du caractère pro-
metteur d’une telle approche thérapeutique, de nombreuses limitations existent, notamment
celles liées à sa mise en œuvre et à ses complications [20]. Dans ce contexte, l’étude multi-
centrique européenne EUROHYP ne permettra malheureusement sans doute pas de trancher
définitivement la question de l’intérêt de l’hypothermie contrôlée comme traitement à la phase
aiguë de l’ischémie cérébrale [21].
L’étude des effets de la glycémie sur le tissu cérébral au cours de l’ischémie est d’approche tout
aussi difficile. Si l’on dispose de quelques études cliniques aux résultats discordants, les données
expérimentales apportent des arguments en faveur des effets délétères de l’hyperglycémie, en
soulignant notamment le rôle des astrocytes [19]. Les astrocytes contiennent en effet des réserves
en glycogène qui permettent, à la condition que soit préservé le fonctionnement mitochondrial,
la fourniture de glucose pour assurer le métabolisme neuronal. En revanche, lorsque l’ischémie est
sévère, le glycogène astrocytaire est transformé en acide lactique en raison du blocage de la chaîne
58 /
Physiopathologie de l’ischémie cérébrale et cibles thérapeutiques
La reperfusion des vaisseaux cérébraux va aussi altérer le fonctionnement d’un canal potassique,
le canal Kir 2.1, un canal situé sur les cellules musculaires lisses vasculaires qui joue un rôle
essentiel dans les capacités de vasodilatation des artères cérébrales ainsi que dans le couplage
entre le métabolisme et le débit sanguin cérébral [11]. En dehors des aspects hémodynamiques,
l’altération fonctionnelle de ce canal ionique lors de la reperfusion est corrélée à l’aggravation
des lésions du tissu cérébral, apportant des arguments en faveur de l’existence d’une interaction
entre les capacités fonctionnelles du vaisseau cérébral et le développement des lésions du paren-
chyme au décours de l’ischémie à travers la possible augmentation des processus oxydatifs ou
inflammatoires, le développement de lésions de la barrière hémato-encéphalique, la genèse d’un
œdème voire de lésions hémorragiques [11].
/ 59
Partie 2 – Phase aiguë
Ces dernières années, l’évolution des différentes techniques permettent d’aller encore plus loin.
De nouveaux traceurs en TEP ou plus encore des séquences en IRM évaluant le métabolisme de
l’oxygène et permettant de cartographier l’hypoxie constituent des outils utiles au dévelop-
pement des connaissances physiopathologiques et à la détermination d’éventuelles nouvelles
cibles thérapeutiques [29]. De même, de nombreuses séquences IRM ont été développées ces
dernières années qui permettent d’une part l’évaluation et le suivi de l’inflammation, de l’atteinte
mitochondriale, de l’activation microgliale et, in fine, de la mort neuronale ainsi que le suivi des
processus de réparation et de récupération fonctionnelle [29-31].
60 /
Physiopathologie de l’ischémie cérébrale et cibles thérapeutiques
Cette neuroprotection que l’on peut qualifier de préventive serait ainsi la résultante d’un trai-
tement qui permet de limiter les conséquences d’une ischémie, tant sur le plan lésionnel que
fonctionnel, lorsque celle-ci survient en dépit des traitements de prévention usuels [39]. À la
différence de la neuroprotection conventionnelle, la neuroprotection préventive peut être
observée en clinique. En effet, si un antécédent d’accident ischémique transitoire et l’activité
/ 61
Partie 2 – Phase aiguë
physique régulière permettent de réduire la sévérité d’un IC, plusieurs études ont montré par
ailleurs l’effet potentiellement protecteur de diverses molécules, notamment de la prise préalable
à la survenue de l’IC de statines ou de fibrates [38, 40, 41].
TABLEAU I ▼ Principales voies moléculaires impliquées dans la résistance à l’ischémie. D’après [3].
Inducteurs Capteurs Transducteurs Effecteurs
62 /
Physiopathologie de l’ischémie cérébrale et cibles thérapeutiques
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L’imagerie est une étape indispensable dans la prise en charge des patients victimes d’un accident
vasculaire cérébral pour : i) faire le diagnostic ; ii) guider la prise en charge thérapeutique urgente ;
mais aussi iii) apporter des informations étiologiques ; et iv) pronostiques [1]. Ainsi, l’imagerie
du parenchyme couplée à l’imagerie des vaisseaux va permettre rapidement de différencier les
déficits brutaux en lien avec un infarctus cérébral ou une hémorragie cérébrale, d’éliminer cer-
tains diagnostics différentiels non vasculaires [2], et d’apporter des éléments essentiels à l’ins-
tauration d’un traitement. Dans tous les cas, l’imagerie doit être en urgence [3] pour réduire le
délai de début du traitement et améliorer l’évolution à long terme [4, 5].
L’imagerie des infarctus en phase aiguë peut se faire en scanner ou en IRM en fonction du plateau
technique disponible. L’exploration en scanner est de plus en plus multimodale en couplant : i)
scanner sans injection ; ii) angioscanner des troncs supra-aortiques et du polygone de Willis ; et
iii) scanner de perfusion. La disponibilité du scanner, son coût, et la rapidité des informations
obtenues permettant de réduire le délai entre l’arrivée du patient et le début du traitement
thrombolytique [6], ont fait du scanner la méthode la plus utilisée à travers le monde à la phase
aiguë de l’AVC. L’IRM est néanmoins de plus en plus utilisée en première intention à la phase
aiguë essentiellement du fait des performances de l’imagerie de diffusion [7]. Le protocole est
également multimodal avec : i) une imagerie du parenchyme (diffusion, FLAIR, T2*) ; ii) une
angio-IRM des troncs supra-aortiques et du polygone de Willis ; et iii) une imagerie de perfusion.
Les améliorations techniques (echo-planar, imagerie parallèle) permettent maintenant d’obtenir
ces informations en moins de 6 minutes [8] et l’optimisation des organisations permet un tri
efficace et rapide des patients en IRM [9]. Ainsi l’American Academy of Neurology (AAN) indique
dans ses recommandations « qu’une IRM de diffusion devrait être réalisée pour un meilleur
diagnostic d’infarctus en phase aiguë » [10], et la Haute Autorité de santé (HAS) indique aussi
que l’imagerie doit se faire en « privilégiant autant que possible l’IRM » [11].
/ 65
Partie 1 – Phase aiguë
Physiopathologie
Le développement progressif de différentes formes d’œdèmes au cours de l’ischémie conditionne
la visibilité des lésions précoces en imagerie. Dès les premières minutes de l’ischémie, le dys-
fonctionnement de pompes ioniques conduit à une accumulation de sodium et d’eau en intra-
cellulaire dans une phase initiale d’œdème cytotoxique [12]. Il s’ensuit une entrée de sodium
vasculaire pour remplir le compartiment extracellulaire déficient. Ces mouvements ioniques
s’accompagnent de l’entrée d’eau par phénomène osmotique à travers une barrière hémato-
encéphalique encore intacte et imperméable aux protéines plasmatiques. Il s’agit d’une phase
d’œdème ionique qui apparaît suite à une baisse plus prolongée et/ou plus sévère du débit
sanguin cérébral [12]. Plus tardivement la souffrance ischémique de la barrière hémato-
encéphalique induit l’extravasation de protéines plasmatiques dans l’espace extracellulaire qui
aggrave massivement l’entrée d’eau par phénomène de gradient osmotique et hydrostatique : il
s’agit de la phase d’œdème vasogénique [12].
IRM
L’imagerie de diffusion, en quantifiant les mouvements microscopiques de l’eau, est sensible à
l’œdème cytotoxique qui apparait précocement et réduit les mouvements Browniens de l’eau
du fait de la ballonisation cellulaire [13]. L’imagerie de diffusion permet donc de confirmer le
diagnostic d’infarctus très précocement en identifiant des plages systématisées hyperintenses
sur les images de diffusion isotropiques avec des valeurs de coefficient apparent de diffusion
(ADC) abaissées (Figure 1). La distribution des lésions oriente sur l’étiologie, par exemple vers
un mécanisme cardio embolique devant des lésions multiples dans des territoires différents.
La sensibilité de l’IRM de diffusion pour confirmer le diagnostic d’infarctus cérébral est très bonne
(88 % à 100 %) [14, 15] et les lésions d’infarctus sont très spécifiques en diffusion (proche de
100 %) ce qui fait de la diffusion une séquence capitale pour éliminer les diagnostics différentiels
(stroke mimics) [2]. Les faux négatifs en IRM de diffusion sont néanmoins possibles et rapportés
en moyenne dans environ 7 % des cas dans une méta-analyse [16], et jusqu’à 17 % dans une
série [7]), particulièrement dans les infarctus de la circulation postérieure, de petite taille ou très
récents [16].
Le signal en IRM de diffusion est dynamique. L’ADC diminue très précocement pour atteindre
un nadir 24 h-48 h après le début des symptômes [17]. L’ADC ré-augmente ensuite progressi-
vement en rapport avec l’augmentation du contenu en eau d’origine vasculaire et la lyse cellulaire
pour aboutir à un pseudo-normalisation en moyenne 10 jours après le début des symptômes
[17]. Cette dynamique du signal en diffusion peut varier en fonction du mécanisme, de la topo-
graphie de l’infarctus [18] mais aussi de la recanalisation [19]. En revanche, l’imagerie T2/FLAIR
ne se positive que lorsque le contenu net en eau est augmenté (œdème ionique et vasogénique).
Ainsi, en l’absence d’heure précise sur le début des symptômes (AVC du réveil par exemple), un
infarctus en restriction de diffusion mais non visible sur le FLAIR (concept de « mismatch FLAIR-
diffusion ») peut être considéré comme dans les délais de traitement avec une forte spécificité
(88 %) et une forte valeur prédictive positive (95 %) [20].
66 /
Imagerie de l’infarctus cérébral aigu
Même si une partie des lésions en diffusion peut être récupérée en cas de reperfusion pré-
coce [21], les anomalies en restriction de diffusion à la phase aiguë sont classiquement consi-
dérées comme irréversibles. Ainsi, l’étendue des anomalies en diffusion est simplifiée comme
étant le « cœur » de l’infarctus, et l’utilisation d’un seuil à partir duquel l’ADC est considéré
comme significativement abaissé (généralement ADC < 600 × 10-6 mm2.s) limite la possibilité de
réversibilité des lésions [22]. L’étendue de ces anomalies peut être estimée via ASPECTS (Alberta
Stroke Program Early CT Score) qui consiste à retirer 1 point dès qu’une des 10 régions cibles
est touchée [23]. Le score ASPECT appliqué à l’IRM de diffusion est un outil simple et reproduc-
tible [23], mais un même score peut correspondre à des volumes très différents en fonction de
la localisation de l’infarctus car plus de points peuvent être perdus sur un petit territoire en
profondeur par rapport à la superficie [24]. Ainsi, les mesures directes de volume avec un ADC
significativement abaissé, qui sont maintenant possibles en temps réel avec différents logiciels
[25], sont de plus en plus utilisées pour la sélection des patients à recanaliser (Figure 1).
Scanner
Le scanner sans injection peut détecter des signes précoces en rapport avec l’augmentation du
contenu net en eau (stade d’œdème ionique et vasogénique) [12] : plages hypodenses débutantes
particulièrement au niveau du ruban insulaire ou du noyau lenticulaire, perte de la différentiation
substance blanche/substance grise [1]. Ces anomalies qui traduisent des lésions irréversibles
apparaissent de façon moins précoce qu’en IRM de diffusion et de façon beaucoup moins sen-
sible [7]. La détection de ces anomalies est difficile, et leur étendue mesurée selon le score
ASPECT est très variable d’un observateur à l’autre [26].
/ 67
Partie 1 – Phase aiguë
Compte tenu de ces limites, une acquisition en scanner de perfusion est de plus en plus pratiquée
(Figure 2) pour améliorer la sensibilité et la spécificité diagnostiques et permettre une meilleure
estimation du cœur de l’infarctus (mais aussi de la pénombre ; voir plus bas) [27]. La technique
souffre encore de manque de standardisation des paramètres d’acquisition, des méthodes de
post-traitements, des outils logiciels et de valeurs seuils pour différencier le cœur et la pénombre
[27]. Néanmoins, après optimisation, un centre donné peut générer de façon reproductible des
cartes de débit sanguin cérébral (cerebral blood flow : CBF), de volume sanguin cérébral (cerebral
blood volume : CBV), de temps de transit moyen (mean transit time : MTT) et de temps jusqu’au
maximum (Tmax). Le cœur de l’infarctus est défini comme les régions avec un CBV absolu
inférieur à 2,0-2,2 mL/100 g (ce qui traduit la perte de capacité de vasodilatation reflexe du tissu
infarci) [28] ou, le plus souvent, et avec de meilleurs résultats, comme les régions avec un CBF
diminué de 30 % à 50 % par rapport au controlatéral [28]. Un CBF < 30 % par rapport au côté
controlatéral à la phase aiguë a été identifié dans plusieurs travaux comme un très bon prédicteur
des lésions irréversibles même en cas de recanalisation [22, 29, 30]. Cette approche automatique
donne une meilleure évaluation du cœur de l’infarctus que l’évaluation en ASPECTS sur le scanner
sans injection [31].
68 /
Imagerie de l’infarctus cérébral aigu
Physiopathologie
La pénombre correspond à une zone dans laquelle la baisse du débit sanguin est suffisamment
marquée pour entraîner une altération de la transmission électrique neuronale et donc des signes
cliniques déficitaires, mais pas suffisamment pour entrainer un déficit énergétique massif ni la
perte de l’homéostasie cellulaire [32]. Il s’agit donc de tissu souffrant de l’ischémie mais poten-
tiellement viable et récupérable en cas de reperfusion, par opposition au cœur de l’infarctus où
l’ischémie est déjà irréversible [32]. La pénombre se développe typiquement autour du cœur de
l’infarctus. En l’absence de recanalisation, le cœur de l’infarctus remplacera progressivement la
pénombre [32]. Le maintien plus ou moins prolongé de la pénombre dépend du site de l’occlusion
et de la collatéralité. Il s’agit de la cible des traitements visant à recanaliser l’artère occluse [5].
Imagerie de perfusion
En IRM, le mismatch diffusion/perfusion est la méthode la plus utilisée pour estimer l’étendue
de la pénombre [1] selon un paradigme simple (Figure 1). Schématiquement, la diffusion repré-
sente les lésions irréversibles (cœur de l’infarctus), et la zone hypoperfusée mais normale en
diffusion correspond à la pénombre. L’IRM de perfusion est basée sur l’analyse des courbes de
chute de signal en T2* lors du premier passage d’un bolus de chélate de gadolinium. L’analyse
point par point de ces séries dynamiques permet de calculer des cartes de CBF, CBV, MTT et
Tmax après déconvolution par une fonction d’entrée artérielle. Les cartes de Tmax > 6 s sont
actuellement les plus utilisées pour identifier l’étendue de la pénombre [33]. Cette définition
reste néanmoins imparfaite et peut surestimer la pénombre en incluant du tissu oligémique
(tissu modérément hypoperfusé sans risque d’évolution vers l’infarctus) [34]. Des efforts de
standardisation (des paramètres d’acquisition, de post-traitement et des seuils identifiant les
anomalies significatives) sont menés pour harmoniser les pratiques entre les sites.
La perfusion sans injection de gadolinium par marquage de spins artériels (ASL) est une alter-
native à la perfusion injectée mais encore peu utilisée du fait d’un faible rapport signal/bruit en
dessous de 3 Tesla et de temps d’acquisition plus longs qu’en perfusion injectée [35].
Plusieurs travaux ont défini une pénombre cible (« target mimatch ») comme étant le profil qui
pourrait le plus bénéficier de la recanalisation, y compris au-delà de 6 h. Ce concept reste à être
validé prospectivement, et la définition de la pénombre cible reste à unifier. Une des définitions
inclut un cœur d’infarctus (diffusion ou CBF < 30 %) < 70 mL, un volume de pénombre
(Tmax > 6 s) > 15 mL, un ratio entre volume hypoperfusé et cœur > 1,8 et un volume de lésions
sévèrement hypoperfusées (Tmax > 10 s) < 100 mL [29, 36].
/ 69
Partie 1 – Phase aiguë
Site de l’occlusion
Visualiser le site de l’occlusion est capital en termes de choix thérapeutiques notamment pour
le recours à la thrombectomie mécanique en cas d’occlusion proximale [5]. L’étude de l’arbre
artériel se fait en angioscanner ou en angio-IRM en fonction des habitudes du centre et de l’accès
au plateau technique. Grâce aux scanners actuels multidétecteurs, l’angioscanner permet une
acquisition très rapide à très haute résolution spatiale qui a plus de 95 % de sensibilité et de
spécificité par rapport à l’angiographie conventionnelle pour identifier le site de l’occlusion [14]
(Figure 2). La sensibilité de l’angio-IRM avec injection de gadolinium est un peu moins bonne,
estimée à 84 %-87 % avec une spécificité de 85 %-95 % [14] (Figure 1). L’angio-IRM en temps
de vol (TOF) est moins performante car les spins circulant sont encodés en fonction de leur
vitesse, et le défaut de visualisation d’une artère peut donc aussi traduire le ralentissement du
flux dans une artère partiellement recanalisée.
Imagerie du thrombus
Le thrombus peut apparaître sous la forme d’une hyperdensité spontanée au sein de l’artère sur
le scanner sans injection (artère blanche) dans environ 40 %-50 % des cas d’infarctus sylviens [1]
(Figure 2). En IRM, le thrombus peut être vu sous la forme d’un hyposignal en T2* (susceptibility
vessel sign). L’hyposignal induit par le caillot est encore plus fréquent et plus marqué en imagerie
de susceptibilité. Ces aspects en scanner ou en IRM ont été associés à la présence de thrombi
70 /
Imagerie de l’infarctus cérébral aigu
riches en globules rouges par opposition aux thrombi riches en fibrine où ce signe est moins
observé [42]. Cette visibilité du thrombus, particulièrement sa largeur en IRM lorsqu’elle dépasse
de façon importante les limites anatomiques du vaisseau par effet de susceptibilité (blooming
artéfact marqué), traduit plus souvent un infarctus d’origine cardioembolique qui induit généra-
lement des caillots plus larges et plus riches en globules rouges [43, 44]. Cette information est
également importante pour la stratégie thérapeutique puisqu’un caillot plus étendu en T2* est
associé à un risque plus élevé de non recanalisation après thrombolyse intraveineuse [45, 46].
L’imagerie diagnostique est capitale dans la prise en charge thérapeutique urgente de l’infarctus
cérébral. Un simple scanner sans injection peut être suffisant pour initier un traitement par
thrombolyse intraveineuse si le délai est inférieur à 4 h 30. Il est néanmoins impératif de
compléter l’évaluation par une imagerie vasculaire pour orienter les patients avec une occlusion
proximale (carotide interne, sylvienne portion M1 ou M2) vers un geste de thrombectomie
mécanique qui est maintenant recommandée par la haute autorité de santé si le délai de survenu
des symptômes est < 6 h (https://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_2624413/fr/evaluation-de-
thrombectomie-des-arteres-intracraniennes-par-voie-endovasculaire). L’évaluation plus précise
des lésions irréversibles et potentiellement réversibles telle que décrite plus haut permet de
discuter au cas par cas le recours à la thrombectomie au-delà du délai de 6 h. Les études les
plus récentes apportent un fort niveau de preuve pour valider ce concept d’un élargissement de
la fenêtre thérapeutique pour le recours à la thrombectomie chez des patients sélectionnés sur
la base d’un mismatch en imagerie (étude DEFUSE 3, bénéfice jusqu’à 16 h [52]) ou d’un mis-
match radioclinique (étude DAWN, bénéfice jusqu’à 24 h).
/ 71
Partie 1 – Phase aiguë
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/ 73
7
L’enjeu clé de l’imagerie pour l’HIC est le diagnostic étiologique et l’évaluation pronostique qui
déterminent la hiérarchisation thérapeutique, le diagnostic positif étant relativement aisé par
les outils d’imagerie modernes. L’imagerie vasculaire occupe une place clé dans la stratégie
diagnostique et l’orientation thérapeutique.
Nous discuterons ici de la sémiologie scanographique et IRM des HIC, des éléments pronostiques
d’imagerie ainsi que des principales étiologies et de la démarche diagnostique d’imagerie pour
les identifier, pour guider la prise en charge thérapeutique.
Scanner
L’aspect en scanner d’une HIC aiguë dépend notamment de l’hématocrite et la concentration
protéinique intra-hématome. Elle est quasi invariablement caractérisée par la présence d’une
région spontanément hyperdense, expliquée par la plus grande atténuation du sang fraîchement
extravasé par comparaison au tissu cérébral adjacent (en raison de la présence d’hémoglobine
(Hb) au sein des hématies piégées dans l’hématome) [1, 2] (Figure 1).
/ 75
Partie 2 – Phase aiguë
IRM
Les variations du signal au sein des HIC dépendent de plusieurs facteurs, liés aux modifications
dynamiques des composants de l’hématome influencés par les processus catalytiques cellulaires
et moléculaires. À ceux-ci s’ajoutent des modifications osmotiques aiguës, et secondairement
des mécanismes de réparation tissulaire [4].
76 /
Imagerie de l’hémorragie cérébrale
L’analyse du signal sur les séquences T1 et T2 spin-echo est la plupart du temps inutile (l’appa-
rition des symptômes datant le début de l’hémorragie). Celle-ci découle de la modification du
temps de relaxation induite par la cascade de dégradation de l’oxy-Hb et de la variation du
contenu en eau et en protéines au sein de l’hématome. Elle est résumée dans la figure 2. Il est
important de noter qu’un hématome aigu est hypo-intense en T1, l’hyperintensité n’apparaissant
qu’au stade subaigu.
La séquence T2* ou ses dérivés (SWAN, SWI, VenoBold) sensibles aux artéfacts de susceptibilité
magnétiques permettent, la plupart du temps, d’établir le diagnostic d’HIC sans équivoque dès
la phase aiguë [5, 7]. Les produits de dégradation de l’oxy-Hb (qui est, elle, diamagnétique) sont
paramagnétiques, et induisent une variation locale du champ magnétique qui résulte en un
hyposignal franc et d’étendue disproportionnée (blooming artifact) permettant de repérer très
tôt les résidus hémorragiques sous la forme d’une couronne autour de l’hématome (puis l’emplis-
sant au stade aigu tardif et subaigu précoce). À la phase chronique, cet hyposignal traduit le
dépôt permanent de ferritine dans les parois de la séquelle de cavité hématique (« tatouage »
hémosidérinique).
/ 77
Partie 2 – Phase aiguë
La séquence « Fluid Attenuated Inversion Recovery » (FLAIR) est particulièrement utile pour la détec-
tion d’une rupture intraventriculaire, sous-arachnoïdienne ou plus rarement sous durale de l’HIC,
difficilement visible sur les autres séquences, surtout lorsque celle-ci est de faible abondance.
Les séquences vasculaires doivent au minimum inclure une ARM sans injection type Time of
Flight. L’acquisition d’une ARM dynamique permettra d’analyser le passage du bolus gadoliné de
l’espace artériel au secteur veineux, et permet de rechercher des anomalies structurelles et/ou
un shunt artérioveineux. Celle-ci sera complétée par une séquence volumique pondérée T1 avec
injection de produit de contraste.
Une grande partie des éléments pronostiques de l’hémorragie cérébrale sont cliniques (âge, comorbi-
dités, traitement antithrombotique, survenue précoce de troubles de conscience, coma, signes d’hyper-
tension intracrânienne sévères et/ou déficit neurologique sévère). L’imagerie apporte cependant des
éléments pronostiques clés dès la phase aiguë, en identifiant les patients à risque de dégradation
neurologique et/ou susceptibles de nécessiter une prise en charge réanimatoire ou neurochirurgicale.
L’imagerie joue donc un rôle clé dans la stratification de la prise en charge de phase aiguë.
78 /
Imagerie de l’hémorragie cérébrale
Extension intraventriculaire/hydrocéphalie
La présence d’une inondation hémorragique intraventriculaire est un facteur de mauvais pro-
nostic, notamment lorsque celle-ci est associée à une hydrocéphalie communicante [8]. Une
dégradation neurologique doit motiver la réalisation d’un contrôle scanographique pour ne pas
retarder la pose d’une dérivation ventriculaire le cas échéant.
Spot sign
Il correspond à l’extravasation de produit de contraste, dès la phase artérielle, en angioscanner
ou IRM injectée et signe la présence d’une hémorragie active au moment de l’examen [10]
(Figure 3B). C’est l’un des facteurs de risque majeur de croissance secondaire et de mauvais
pronostic des hémorragies intracrâniennes spontanées.
Hétérogénéité/irrégularité
De nombreuses études ont récemment démontré l’importance de l’aspect morphologique de
l’hématome à la phase aiguë [11]. Ainsi, un hématome très hétérogène et/ou très irrégulier est
plus à risque de croissance secondaire qu’un hématome homogène à marges régulières (Figure 3,
A et C). Récemment, il a été montré que la simple présence d’hypodensités au sein de l’hématome
était suffisante pour prédire la croissance secondaire ainsi que le risque de mauvaise issue clinique
[11]. La signification précise des hypodensités/irrégularité est toujours mal comprise, mais pour-
rait refléter la cascade de ruptures vasculaires périphériques déclenchées par le saignement initial
et contribuant à la croissance de l’hématome.
/ 79
Partie 2 – Phase aiguë
Diagnostic positif
Tout déficit neurologique focal et brutal impose la réalisation d’une imagerie en coupes sans
délai. Le protocole d’exploration de première ligne, peut donc être en IRM ou en scanner en
fonction des spécificités locales et de l’état clinique du patient (AHA/ASA classe I, niveau A) [12].
Le scanner sera acquis sans injection, puis après diagnostic positif, complété par une angioscanner
(phase artérielle, détection des anomalies vasculaires et des extravasations actives) et éventuel-
lement un scanner au temps tardif (phase veineuse, détection des prises de contraste tumorales).
L’IRM comprendra une séquence de diffusion (ischémie ? lésion hypercelluaire ? abcès ?), T1, T2*
(résidus sanguins ?), FLAIR (œdème, hémorragie intraventriculaire ou sous-arachnoïdienne), une
angiographie intracrânienne sans injection (Time of Flight, anomalie macrovasculaire ?) et idéa-
lement une angiographie dynamique injectée (shunt artérioveineux ?) complétée par une
séquence volumique T1 après injection de produit de contraste (prises de contraste tumorales ?
spot sign ?).
Bilan étiologique
L’étiologie des HIC non traumatiques est largement dominée par la maladie des petits vaisseaux
et notamment par l’angiopathie amyloïde cérébrale [13] et la microangiopathie hypertensive
[14] qui sont les causes les plus fréquentes d’HIC dans des proportions variables en fonction des
régions géographiques et influences ethnogénétiques [15]. La maladie des petites artères, bien
que très largement prépondérante, représente un diagnostic d’élimination lors de la phase
d’exploration d’une HIC. Cette phase, capitale pour la hiérarchisation thérapeutique et la prise
en charge adaptée d’une éventuelle lésion sous-jacente, aura 2 axes principaux : éliminer sans
délai une lésion macrovasculaire (imagerie vasculaire) à risque de resaignement, identifier le cas
échéant une cible thérapeutique urgente (ectasie, anévrisme) et éliminer une lésion tumorale
sous-jacente potentiellement traitable (imagerie injectée).
Lorsqu’un scanner a été réalisé en première ligne, la réalisation d’une IRM à la phase subaiguë
permet : i) de rechercher la présence d’autres marqueurs de microangiopathie (stigmates de
microsaignements, leucopathie, atrophie cortico-sous corticale, lacunes), renforçant, le cas
échéant, l’orientation diagnostique vers une hémorragie sur maladie des petites artères ; et ii) de
rechercher une cause macrovasculaire ou tumorale sous-jacente, notamment par la possibilité
d’acquisitions vasculaires dynamiques et de séquences tridimensionelles avec injection.
80 /
Imagerie de l’hémorragie cérébrale
/ 81
Partie 2 – Phase aiguë
Cavernomes
Les cavernomes sont des lésions capillaires non circulantes mêlées à du tissu conjonctif. Le risque
annualisé de récurrence de saignement est d’environ 5 %. Il n’y a pas de données fiables d’inci-
dence brute. Il existe des formes familiales responsables de multiples cavernomes sus- et sous-
tentoriels. Souvent masquée à la phase aiguë, la présence d’une anomalie veineuse de dévelop-
pement ou d’une telangiectasie capillaire au contact fait évoquer le diagnostic. Les HIC
intracavernomateuses peuvent être symptomatiques, et le diagnostic lésionnel sera fait sur la
présence de logettes arrondies siège de saignements d’âge différents (« en poivre et sel ») [17].
Lésions macrovasculaires
Malformations et fistules artérioveineuses
Ces lésions correspondent à des connexions anormales entres des artères et des veines, réalisant
un shunt artérioveineux, entraînant un hyperdébit artériel et une surpression veineuse pouvant
être responsables d’HIC, par rupture de zones de faiblesse vasculaire. Les malformations arté-
rioveineuses sont alimentées par des artères piales tandis que les fistules durales le sont par des
rameaux artériels duraux. L’ARM dynamique permet de détecter le shunt artérioveineux, visualisé
sous la forme d’une opacification précoce du réseau veineux.
Anévrismes intracrâniens
Les anévrismes artériels peuvent rarement être responsables d’hémorragie intraparen-
chymateuse, dans l’immense majorité des cas accompagnée d’une hémorragie sous-
arachnoïdienne qui oriente le diagnostic. L’hématome a dans ces situations une valeur localisa-
trice (hématome frontal dans les anévrismes communicants antérieurs par exemple).
Vascularites
Les vascularites cérébrales, primitives ou secondaires, bien que rares, sont l’un des diagnostics à
éliminer lors du bilan d’une HIC. L’atteinte vasculaire peut être mal évaluée en imagerie, notam-
ment lorsque celle-ci est microvasculaire [18] et dominée par des anomalies parenchymateuses.
Le contexte clinique est clé.
82 /
Imagerie de l’hémorragie cérébrale
Le scanner au temps veineux identifie le site de la thrombose qui peut apparaître sous la forme
d’un delta vide avec une prise de contraste limitée aux parois du sinus thrombosé. L’IRM a une
meilleure sensibilité que le scanner pour le diagnostic de thrombophlébite (Figure 5). Les lésions
FIGURE 5 Thrombose veineuse cérébrale.
IRM en coupes axiales (ligne supérieure) et coronale (ligne inférieure) démontrant une lésion en
hypersignal FLAIR hétérogène, avec hyposignal T2* témoignant de la présence d’éléments san-
guins extravasés (hémorragie). En diffusion, l’hémorragie est cerclée d’une plage en hypersignal,
correspondant à l’œdème vasogénique résultant de la gêne au retour veineux.
Après injection de gadolinium, on visualise un défaut d’opacification du sinus longitudinal supérieur et
des veines corticales adjacentes (têtes de flèches), occupés par du matériel hypodense (thrombus).
/ 83
Partie 2 – Phase aiguë
Le diagnostic est confirmé par le défaut de signal du sinus en angio-IRM sans injection (contraste
de phase), ou le défaut de remplissage avec injection (angio-IRM dynamique) ou encore sur les
séquences T13D-écho de gradient après injection de gadolinium. Certaines localisations comme
les thromboses du sinus caverneux peuvent être de diagnostic plus difficile [19]. L’aspect ne doit
pas être confondu avec un sinus hypoplasique ou un défaut d’opacification lié à une granulation
de Pacchioni hypertrophique. Les thromboses isolées de veines corticales peuvent n’apparaître
que sous la forme d’un cordon hypointense en T2*. Le recours à l’angiographie conventionnelle
ne concerne que certains cas difficiles ou pour le recours à une désobstruction
endovasculaire [19].
Tumeurs hémorragiques
En plus du contexte clinique, l’IRM injectée permet, la plupart du temps, le diagnostic de lésion
tumorale sous-jacente. Lorsque la suspicion clinique (contexte néoplasique, installation progressive
de symptômes neurologiques avec dégradation brutale, etc.) ou radiologique (œdème périlésionnel
disproportionné, hématome lobaire, atypies de signal) est importante, l’IRM devra être répétée
après résorption au moins partielle de l’hématome, classiquement à 3 mois. Les mécanismes hémor-
ragiques des tumeurs sont complexes et impliquent notamment un envahissement des vaisseaux
parenchymateux adjacents à la lésion et des phénomènes de nécrose lésionnelle rapide.
84 /
Imagerie de l’hémorragie cérébrale
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/ 85
8
Les traitements de l’infarctus cérébral (IC) en phase hyperaiguë visent à recanaliser l’artère
occluse afin de limiter la transformation de la zone de pénombre en infarctus. Parmi les traite-
ments de recanalisation aiguë, la thrombolyse intraveineuse (IV) reste le traitement de référence,
avec pour seul produit thrombolytique approuvé actuellement, le rtPA ou activateur tissulaire
du plasminogène. La fenêtre thérapeutique actuelle est de 4 h 30.
Il existe une occlusion artérielle dans 80 % des infarctus cérébraux à la phase aiguë. Le principe
du traitement fibrinolytique est de lyser le thrombus afin de restaurer le débit sanguin cérébral
et de sauver la pénombre ischémique de l’infarcissement. Le seul traitement fibrinolytique intra-
veineux qui a l’AMM à ce jour est le rtPA.
/ 87
Partie 2 – Phase aiguë
L’étude princeps ayant permis l’obtention de l’AMM en 2002 est l’étude NINDS (1995), ayant
comparé l’administration de rtPA (dose : 0,9 mg/kg) à un placebo pour les accidents ischémiques
cérébraux dans les moins de 3 h du début des symptômes (Tableau I, Annexes 1 et 2) [3]. Les
essais suivants (ECASS I et II, ATLANTIS) étaient négatifs sur le critère de jugement principal
[4-6]. L’étude ECASS I avait un taux de violations de protocole élevé, dû à l’inclusion de patients
ayant des signes d’ischémie déjà étendus sur la tomodensitométrie (TDM) cérébrale, avec une
surmortalité dans le groupe traité. De plus, la dose de rtPA était supérieure à celle utilisée dans
les autres essais (1,1 vs 0,9 mg/kg). Dans les autres études, la mortalité à 3 et 6 mois n’était
pas significativement augmentée. La méta-analyse publiée dans le Lancet en 2004 [7] sur
2 775 patients a permis de mettre en évidence : i) que l’effet du rtPA sur le pronostic fonctionnel
à 3 mois (patients sans handicap avec un modified Rankin Scale – mRS – 0-1) était favorable
chez les patients traités jusqu’à 4 h 30 ; et que ii) malgré cette possible extension de la fenêtre
thérapeutique, l’odds ratio (OR) pour le bon pronostic dans les premières 90 minutes est deux
fois plus élevé que dans la fenêtre thérapeutique 1 h 30-3 h (Figure 2). L’effet du délai d’admi-
nistration du traitement est capital, et ces données reflètent l’existence d’une « golden hour ».
En France, l’AMM pour le rtPa n’a été donnée qu’en 2002 avec deux conditions : la première était
que celle-ci soit temporaire (3 ans) avec obligation de tenir un registre (SITS-MOST) [8] permettant
de vérifier que la thrombolyse en « vie réelle » était aussi sûre et efficace que dans les essais
randomisées. La deuxième, suite aux données de précédentes méta-analyses, était de réaliser un
essai (ECASS III) démontrant que la thrombolyse pouvait être efficace dans la fenêtre thérapeutique
3 h-4 h 30. L’étude ECASS III [9] a confirmé un bénéfice sur le pronostic fonctionnel (sur l’autonomie
mRS 0-2, et l’absence de handicap mRS 0-1), ce qui a permis l’extension de l’AMM à la fenêtre
thérapeutique 3-4 h 30 en 2012. Concernant les registres, les résultats de SITS-MOST
88 /
Thrombolyse intraveineuse
TABLEAU I ▼ Caractéristiques et devenir fonctionnel à 3 mois dans les 5 premiers essais randomisés
rtPA vs placebo, et le registre européen SITS-MOST.
NINDS
ECASS I ECASS II ATLANTIS B ECASS III SITS Most
Part B
Âge* (ans) 67 65 66 66 65 68
Dose
0,9 1,1 0,9 0,9 0,9 0,9
(mg/kg)
NIHSS* 15 12 12 11 10 12
mRS 01 39 % 36 % 40 % 42 % 45 % 39 %
mRS 02 50 % 45 % 54 % 54 % 59 % 55 %
mRS 03 60 % 58 % 69 % 67 % 69 % 70 %
Mortalité 17 % 22 % 10 % 17 % 6% 11 %
* Groupe traité par rtPA. Âge et NIHSS sont des moyennes.
FIGURE 2 Odds ratio (OR) pour l’absence de handicap à 3 mois en fonction du délai IC-rtPA dans
la méta-analyse du Lancet.
ont montré des résultats comparables à ceux des essais. SITS-ISTR [10] est un registre avec
11 865 patients traités 3 h à 4 h 30 suivant l’apparition des symptômes (478 centres dans
31 pays dans le monde). La proportion de patients autonomes (scores mRS combinés de 0, 1 et
2) à 90 jours était de 56,3 % (IC95 % : 55,3–57,2 %) chez les patients traités par rtPA, compa-
rables au taux de résultat favorable chez les patients traités dans les 3 h dans les essais
randomisés.
/ 89
Partie 2 – Phase aiguë
ANNEXES 1 ET 2 Pronostic fonctionnel à 3 mois présenté avec le score de Rankin en barres ordi-
nales des études NINDS, ECASS I ECASS II ECASS III ATLANTIS et registre SITS MOST.
Les flèches pointillées montrent les résultats positifs dans les études.
90 /
Thrombolyse intraveineuse
Contre-indications
Avec plus de 15 ans d’expérience dans l’administration de fibrinolytique dans un infarctus céré-
bral ischémique aigu, plusieurs groupes ont rapporté leurs résultats dans le traitement des
patients « off-label », c’est-à-dire de patients présentant certaines contre-indications reportées
dans les essais randomisés. Citons comme exemple l’utilisation de rtPA chez les patients âgés
(> 80 ans) [12], chez des patients avec un infarctus cérébral mineur, ou ceux qui se sont améliorés
avant l’administration du produit. Dans l’ensemble, les résultats chez les patients traités avec
ces contre-indications étaient meilleurs que chez les patients non traités à partir des données
rapportées. Cela vient à nous interroger sur cinq des critères jusqu’alors inscrits dans les contre-
indications : la crise d’épilepsie lors de l’installation de l’infarctus cérébral ; les sujets de plus de
80 ans ; un NIHSS > 25 ; des symptômes s’améliorant rapidement avant l’injection du produit
et les infarctus étendus.
– Les crises d’épilepsie lors de l’installation de l’IC posent plutôt le problème du diagnostic
différentiel qu’une réelle contre-indication. Dans ces cas, il est recommandé de visualiser
l’ischémie (IRM cérébrale, TDM de perfusion) avant d’administrer le produit.
– L’âge : la thrombolyse IV peut être envisagée après 80 ans. En dessous de 18 ans, les indica-
tions de thrombolyse doivent être discutées au cas par cas avec un neurologue d’une UNV
(accord professionnel). L’essai randomisé IST-3 (rtPA vs placebo) a inclus 3 035 patients dans les
6 h [12]. S’il n’a pas été possible, en raison d’un manque de puissance de l’étude, de préciser
l’éventuel bénéfice clinique du rtPA entre 4 h 30 et 6 h, IST-3 a confirmé que jusqu’à 3 h après
le début des symptômes, les patients de plus de 80 ans, qui représentaient environ la moitié de
l’effectif de l’étude, tiraient profit de la thombolyse dans les mêmes proportions que les patients
plus jeunes (cf. plus bas).
/ 91
Partie 2 – Phase aiguë
– Les patients très sévères (NIHSS > 25). Le bénéfice n’est pas démontré par les études rando-
misées (patients non inclus), mais l’imagerie cérébrale initiale peut aider à prendre une décision
au cas par cas. L’exemple du patient ci-dessous, avec un NIHSS à 26, un infarctus en séquence
de diffusion de petite taille, une occlusion proximale est un cas caractéristique en faveur du
traitement thrombolytique (cf. plus bas) (Figure 3).
– Les patients s’améliorant rapidement avant l’administration du produit : ces patients sont à
considérer au cas par cas, notamment si leur NIHSS reste au-dessus de 4, et/ou s’ils présentent
une occlusion persistante.
– Les infarctus étendus : les données disponibles suggèrent que le risque d’hémorragie cérébrale
grave est particulièrement élevé chez les patients dont le scanner montre des signes étendus
d’ischémie (atténuation de densité ou effet de masse dans plus du tiers du territoire de l’artère
cérébrale moyenne). En attendant des données plus précises sur ce point, nous estimons plus
prudent de considérer ces patients au cas par cas.
Le traitement de l’accident ischémique cérébral par le rtPA, moins de 4 h 30 après le début des
symptômes, accroît les chances des patients de regagner leur indépendance, sans augmenter
leur mortalité. La posologie est de 0,9 mg/kg, sans dépasser la dose totale de 90 mg. Le traite-
ment est administré par voie intraveineuse, 10 % de la dose totale en bolus, le reste en perfusion
d’une heure (Rapport HAS. https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/
pdf/2009-07/avc_prise_en_charge_precoce_-_recommandations.pdf).
92 /
Thrombolyse intraveineuse
Les traitements antihypertenseurs doivent être utilisés avec prudence dans un contexte
d’ischémie cérébrale aiguë. Toutefois, deux des essais cliniques du rtPA (NINDS et ECASS II)
comportaient un protocole de traitement de l’hypertension artérielle pendant l’administration
du traitement et les 24 h suivantes, ce qui pourrait expliquer la plus faible incidence des hémor-
ragies cérébrales graves dans ces essais. Le traitement de la pression artérielle est donc recom-
mandé pour un objectif de pression artérielle en dessous de 185/110 mmHg au moment de
l’injection de rtPA.
Les résultats obtenus dans le cadre des essais cliniques n’ont été reproduits, en pratique courante,
que dans les centres spécialisés dans la prise en charge des accidents vasculaires cérébraux. La
prescription de rtPA dans le traitement de l’infarctus cérébral est actuellement réservée aux
neurologues dont la compétence neurovasculaire est reconnue (AMM) et/ou un médecin titulaire
du DIU de pathologie neurovasculaire (hors AMM). Les établissements recevant des AVC et ne
disposant pas d’UNV doivent structurer une filière de prise en charge des patients suspects
d’AVC en coordination avec une UNV (accord professionnel). Le patient doit être surveillé au
sein de l’UNV (accord professionnel).
La surveillance est rapprochée pendant les 24 premières heures avec prise des constantes toutes
les 15 minutes pendant 1 h puis horaires /24 h, HGT/4 h, surveillance neurologique horaire. Toute
aggravation neurologique pendant l’administration du rtPA impose son arrêt immédiat et la
pratique d’un scanner cérébral.
Aucune étude n’a à ce jour identifié de sous-groupe de patients bénéficiant d’une dose de
0,6 mg/kg.
Dans la méta-analyse de Wardlaw et al. [13], l’incidence d’une complication hémorragique symp-
tomatique intracrânienne dans le groupe des patients thrombolysés était de 9,6 % contre 2,6 %
dans le groupe des patients témoins. Ainsi, on peut conclure à une augmentation de 7 % d’hémor-
ragie intracrânienne symptomatique dans le groupe des patients thrombolysés.
Pour illustrer les variations du taux de THS dans les différentes études, voici quelques définitions
utilisées dans la littérature. Elles varient selon le délai d’apparition de l’hémorragie, selon le
critère d’imagerie et celui utilisé pour l’aggravation neurologique.
– Étude NINDS [3] : hémorragie cérébrale associée à une détérioration neurologique (aggravation
du NIHSS 6 1 point) dans les 7 jours. Le taux de THS est de 6 %.
– Étude ECASS II [5] : hémorragie cérébrale associée à une détérioration neurologique (aggrava-
tion NIHSS 6 4 points par rapport à la valeur à l’inclusion ou par rapport au meilleur état
neurologique des 7 premiers jours). La proportion dans l’étude est de 9 %.
/ 93
Partie 2 – Phase aiguë
– Étude ECASS III [9] : hémorragie cérébrale associée à une détérioration neurologique (augmen-
tation sur l’échelle NIHSS d’au moins 4 points par rapport à la valeur à l’inclusion) visualisée sur
le scanner (ou IRM) effectué entre 22 et 36 heures post-thrombolyse. Le taux est de 2,4 %.
– Étude SITS-MOST [8] : hémorragie parenchymateuse de type 2 (hématome intra-infarctus
occupant plus de 30 % de son volume) visualisée au scanner cérébral effectué entre 22 et 36 h
post-thrombolyse, associée à une détérioration neurologique (augmentation sur l’échelle NIHSS
d’au moins 4 points par rapport à la valeur à l’inclusion ou par rapport au meilleur état neuro-
logique des 24 premières heures). Le taux est de 1,9 %.
Œdème angioneurotique
La survenue d’un œdème angioneurotique (OAN), caractérisé par un œdème extensif de l’oro-
pharynx en association avec une urticaire, est identifiée par un examen de la langue et des
téguments. L’OAN aigu est un phénomène transitoire qui peut survenir au cours d’une throm-
bolyse intraveineuse par rtPA dans le traitement d’un AVC à la phase aiguë. C’est un phénomène
rare mais qui met en jeu le pronostic vital. L’analyse de la littérature faite par l’équipe de Lille
a permis d’identifier 18 articles sur le sujet [14]. La prévalence de l’OAN aigu était de 1,8 %, et
le seul facteur prédictif était la prise d’inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC). La localisation
insulaire de l’accident apparait comme un facteur inconstant. Ces risques obligent à disposer de
procédures de dépistage précoce d’un OAN aigu et de procédures de prise en charge préétablies.
Cette situation justifie l’arrêt immédiat de la perfusion et l’injection de corticoïdes et d’antihis-
taminiques.
La recherche sur les biomarqueurs de réponse au traitement fibrinolytique est un sujet extrê-
mement vaste, dont nous donnerons seulement un aperçu ici.
■ Facteurs cliniques
– Les deux grands facteurs cliniques sont l’âge et la sévérité clinique évaluée par le score NIHSS.
Un des premiers modèles prédictifs a été établi par l’équipe de Weimar et al. [15]. La combinaison
des deux variables prédisait la mortalité avec 87 % de précision et le pronostic fonctionnel avec
74 %.
– Le délai d’administration du rtPA est aussi, comme nous l’avons vu, un facteur majeur sur le
devenir fonctionnel.
■ Facteurs biologiques
94 /
Thrombolyse intraveineuse
■ Facteurs radiologiques
Transformation hémorragique
De nombreux essais, registres ou cohortes se sont attachés à trouver les facteurs de risque
(cliniques, biologiques et radiologiques) de THS au décours d’une thrombolyse.
■ Paramètres cliniques
■ Paramètres biologiques
– L’hyperglycémie, dont le mécanisme d’action reste encore mal connu. Elle semble favoriser
les THS en augmentant l’expression des métalloprotéases (MMP), et accélérant la destruction
de la barrière hémato-encéphalique. Elle est également incriminée dans les lésions de reperfusion
(œdémateuses et hémorragiques) par dysfonction endothéliale.
/ 95
Partie 2 – Phase aiguë
– Un taux bas de LDL cholestérol a été rapporté dans plusieurs études comme facteur de risque
indépendant. Les mécanismes sous-jacents sont là encore mal connus ; néanmoins, il semble que
ce dernier joue un rôle clé dans l’intégrité des microvaisseaux.
– Enfin, un taux bas d’inhibiteur du plasminogène activé ainsi qu’un taux élevé de MMP-9.
■ Paramètres radiologiques
– Signes précoces sur le scanner : un score ASPECT inférieur à 7 a été retrouvé comme facteur
prédictif de manière significativement indépendante dans deux études.
– Volume lésionnel (> 100 cm3) témoin de la sévérité de l’ischémie avec la profondeur de la
baisse du coefficient apparent de diffusion (ADC).
– Leucoaraioise de grade 3 (score de Fazekas et Schmidt).
– Microbleeds : leur présence a été récemment associée à un mauvais pronostic et au risque de
saignement, mais pas spécifiquement au risque de THS.
En 2007, Lansberg et al. [18] ont réalisé une méta-analyse dans le but de déterminer les facteurs
de risque indépendants de transformation hémorragique après traitement fibrinolytique. Aucun
de ces facteurs pris isolément ou même de façon combinée n’est actuellement utilisé comme
contre-indication formelle à une thrombolyse. Certains auteurs ont suggéré des scores prédictifs
à partir de paramètres combinés. La valeur prédictive des différents facteurs de risque combinés
reste modeste, et nécessite d’être amélioré avec d’autres paramètres, et validé sur des cohortes
indépendantes.
96 /
Thrombolyse intraveineuse
Aucune des études princeps ayant évalué le bénéfice de la TIV n’a exclu les patients sous aspirine
ou clopidogrel, ces deux thérapeutiques ne constituent donc pas une contre-indication à la
thrombolyse. Une large méta-analyse incluant 19 études et 108 588 patients dont plus de 46 000
prenaient un traitement AAP avant la TIV a confirmé, après ajustement sur les facteurs confon-
dants, l’augmentation modérée du risque d’hémorragie intracrânienne symptomatique dans le
groupe prétraité par AAP (OR = 1,21 ; IC95 % : 1,02–1,44). Cette étude n’a en revanche démontré
aucune relation significative entre le traitement AAP antérieur et une évolution clinique défa-
vorable ou une augmentation de la mortalité [20]. Le risque de complications hémorragiques
sous clopidogrel ou dans le cadre de l’association aspirine-clopidogrel est majoré par rapport à
l’aspirine (OR ajusté = 1,88 ; IC95 % : 1,18–3,00), sans pour autant influencer négativement le
pronostic fonctionnel [21].
Paradoxalement, il a été rapporté de meilleurs résultats fonctionnels chez les patients recevant
de l’aspirine avant la TIV (mRS 0-2 ajusté OR = 1,11 ; IC95 % : 1,00–1,24 ; NNT = 43) [21], un
résultat attribué à un moindre risque de réocclusion artérielle post-TIV. De ce constat est né
l’essai thérapeutique ARTIS ayant pour objectif d’évaluer le bénéfice de l’association thrombolyse
et aspirine [22]. Néanmoins, celui-ci a dû être interrompu en raison d’une augmentation de la
fréquence de transformations hémorragiques responsables d’une détérioration neurologique pré-
coce dans le groupe recevant l’association TIV-aspirine.
Au total, l’exposition pré-TIV à un AAP ne doit pas contre-indiquer la TIV. Toutefois, l’augmen-
tation du risque hémorragique chez les patients sous association d’AAP peut amener à discuter
la réalisation d’une TIV à dose réduite (0,6 mg/kg). Une analyse de sous-groupe de l’étude
ENCHANTED suggère que le rtPA administré à faible dose chez les patients prétraités par AAP
pourrait être associé à de meilleurs résultats fonctionnels qu’après administration d’une dose de
0,9 mg/kg [23]. Ces données devront être confirmées par un essai randomisé.
Thrombolyse et anticoagulants
Xian et al. rapportent que 21,1 % des patients présentant un IC sont traités par AVK à leur
admission et que 8,8 % reçoivent un anticoagulant oral direct (AOD) [19]. D’autres études indi-
quent que, parmi les patients éligibles à la TIV, environ 10 % sont sous AC à leur admission.
L’exposition à un traitement AC est fréquemment responsable d’un allongement des délais de
prise en charge intra hospitaliers justifiant le développement de méthodologies d’évaluation
rapide de l’efficacité biologique des différents AC.
Parmi ces patients, il faut distinguer ceux ayant un INR supérieur à 1,7, qui ont une contre-
indication formelle à la TIV, de ceux ayant un INR inférieur à 1,7 qui représentent plus de 65 %
des patients et pour lesquels la TIV peut être effectuée [24]. Une méta-analyse de 7 études
ayant inclus plus de 3 600 patients suggère que le risque d’hémorragie intracérébrale est aug-
menté chez les patients ayant un INR < 1,7 (OR = 2,6 ; IC95 % : 1,1–5,9) mais que cela n’altère
pas le pronostic fonctionnel ni augmente la mortalité [25].
/ 97
Partie 2 – Phase aiguë
Malgré leur utilisation exponentielle, le nombre d’observations de patients ayant reçu une TIV
alors qu’ils étaient sous AOD est encore limité. Parmi les 251 patients du registre GW-GSP sous
AOD au moment de la TIV, aucune augmentation de risque hémorragique cérébral ou systé-
mique, de mortalité hospitalière ou d’altération du pronostic fonctionnel ne fut observée par
rapport aux patients ne recevant pas d’AC [26]. Cette étude ne fait cependant pas état d’éléments
clés de la décision thérapeutique que sont le moment de la dernière prise, les résultats des bilans
de coagulation standards et spécifiques ainsi que l’usage d’éventuelles stratégies de réversion.
Les recommandations actuelles, uniquement sur la base d’avis d’experts, considèrent que la TIV
est contre-indiquée chez les patients prenant des AOD, à moins que le temps écoulé depuis la
dernière prise soit > 48 h chez un patient non insuffisant rénal ou que les tests de laboratoire
spécifiques ou non spécifiques soient normaux (Figure 4).
AD : antidote ; AOD : anticoagulant oral direct ; tPA : thrombolyse IV ; TM : thrombectomie mécanique ; Clcr : clairance de la
créatinine ; NRI : neuroradiologie interventionnelle ; UNV : unité neurovasculaire.
■ Stratégies de réversion
La réversion d’un AC doit répondre à deux impératifs majeurs : d’une part, avoir une efficacité
rapide et d’autre part, ne pas s’accompagner d’un effet rebond ou d’une apparition d’un état
prothrombotique susceptible de contribuer à une récidive ischémique qu’elle soit cérébrale ou
systémique. Concernant les AVK, l’administration du concentré de complexe de prothrombine
et de la vitamine K peut permettre une réversion rapide et prolongée de l’hypocoagulabilité mais
l’innocuité en termes de risque prothrombotique est encore incertaine. Ainsi, malgré quelques
cas rapportés isolément de TIV post-réversion des AVK, cette stratégie n’est pas aujourd’hui
recommandée. Concernant les AOD, à ce jour, seul le dabigatran peut bénéficier d’une réversion
de son activité par l’idarucizumab [27]. De nombreux cas de TIV après réversion ont été publiés
au cours des dernières années ; dans une étude rétrospective menée chez 19 patients ayant
98 /
Thrombolyse intraveineuse
bénéficié de cette stratégie, 79 % ont eu une amélioration médiane de 5 points dans NIHSS sans
qu’aucune complication hémorragique significative ne soit survenue [28]. La SFNV propose
aujourd’hui cette stratégie après discussion collégiale (Figure 5).
Thrombolyse de l’enfant
L’incidence annuelle des AVC de l’enfant est estimée entre 2,3 à 13 pour 100 000 enfants. Le
retard diagnostique reste malheureusement encore très fréquent dans cette population. À ce
jour, aucun essai thérapeutique n’a pu être finalisé permettant de valider la TIV chez l’enfant
[29]. L’absence de maturité du système fibrinolytique, la différence du volume de distribution
par rapport à l’adulte et la clairance hépatique plus rapide de l’altéplase sont autant de sources
d’incertitudes de l’efficacité et de la sécurité d’emploi de la TIV dans cette population. Cela rend
compte du fait que moins de 2 % des enfants souffrant d’IC grave sont traités par TIV aux
États-Unis. Néanmoins, de nombreuses études de registres semblent confirmer le bénéfice poten-
tiel de la TIV. Cette prise en charge devrait toutefois s’organiser en collaboration étroite avec
des centres de références capables d’apporter la meilleure stratégie de prise en charge et décider
de l’indication d’une TIV au même titre que de la thrombectomie mécanique. Les suivis de
cohortes et la standardisation des prises en charge restent nécessaires dans cette population.
/ 99
Partie 2 – Phase aiguë
environ 30 % des patients atteints d’AVC ont plus de 80 ans. Il est largement admis que les
patients les plus âgés ont une moindre probabilité de résultat fonctionnel favorable et une
mortalité accrue post-AVC, la probabilité de bons résultats diminuant de 25 % tous les 10 ans
alors que la mortalité à 3 mois augmente de 72 %. Ce plus mauvais résultat fonctionnel n’est
pas la conséquence d’un risque accru de transformation hémorragique mais est lié à un état de
santé précaire avant l’AVC, à une plus grande sévérité clinique à la phase initiale et des compli-
cations aigues post-AVC plus fréquentes (infection pulmonaire, insuffisance cardiaque). Ces don-
nées pronostiques ont longtemps amené à exclure les patients les plus âgés de la filière throm-
bolyse. Les résultats de l’étude IST-3 qui a inclus plus de 1 600 patients âgés de plus de 80 ans
et des différents registres ont permis de modifier les indications. En effet, le bénéfice de la TIV
dans cette population semble supérieur à celui observé dans la population plus jeune contraire-
ment à ce qui avait été précédemment évoqué [30]. Les différentes méta-analyses confortent
ce résultat et suggèrent qu’aucune limite d’âge ne devrait être proposée. Par ailleurs, longtemps
limité à une administration au cours des 3 premières heures suivant le début des symptômes, il
est aujourd’hui admis que le bénéfice persiste jusqu’à 4 h 30 et ce même si le réseau de colla-
téralité est souvent plus précaire chez ces patients âgés et que le risque hémorragique intracé-
rébral peut être majoré dans cette population. Certains scores tels que le SPAN-100 permettent
d’établir une évaluation du rapport bénéfice/risque de la TIV chez les sujets âgés. Ainsi, la somme
d’un score NIHSS et de l’âge du patient supérieur à 100 constituerait un facteur de mauvais
pronostic fonctionnel et de surrisque hémorragique [31]. Pour autant, aucune recommandation
ne préconise à ce jour de ne pas administrer une TIV sur la base de ce critère. Outre l’âge, la
présence de troubles cognitifs est un frein fréquent à l’administration de la TIV dans cette
population. L’étude Ophelie-Cog a confirmé que la présence de troubles cognitifs antérieurs à
l’IC ne modifie pas la probabilité de bon pronostic fonctionnel après TIV et ne doit donc pas
constituer un facteur d’exclusion des patients de la filière de thrombolyse [32]. Une contre-
indication absolue à la TIV chez les sujets âgés pourrait être l’existence d’une angiopathie amy-
loïde. Dans ce contexte, l’IRM à la recherche de multiples microbleeds lobaires ou d’hémorragies
sous arachnoïdiennes focales devrait être privilégiée chez ces patients. Pour autant, l’absence
d’accès à l’IRM dans la phase aiguë ne doit pas conduire à une non-réalisation de la TIV, pas
plus qu’à différer la réalisation de l’examen radiologique dans l’attente de l’IRM car l’influence
du délai « symptôme-traitement » semble encore plus significatif dans cette population.
100 /
Thrombolyse intraveineuse
est le plus souvent la conséquence d’une extension de la zone ischémiée en raison de l’existence
d’un thrombus proximal, rapporté dans 20 à 30 % des patients avec NIHSS bas. La proportion
significative de patients atteints d’un IC mineur et d’une occlusion artérielle proximale soulève
la question de l’indication potentielle du traitement intra-artériel dans cette situation.
Si la TIV ne doit pas être contre-indiquée chez ces patients sévères, le bénéfice notable de la
thrombectomie mécanique associé à la TIV chez ces patients ayant fréquemment une occlusion
proximale justifie une optimisation de l’accès à la filière endovasculaire pour ces patients.
/ 101
Partie 2 – Phase aiguë
contre-indique pas la TIV. Il restera toutefois important de ne pas différer l’accès à la throm-
bectomie mécanique par la mise en œuvre de la TIV, qui constitue aujourd’hui le traitement de
référence dans cette indication. En outre, certaines données suggèrent le bénéfice potentiel de
l’administration de l’altéplase dans le potentiel de recanalisation par thrombectomie mécanique.
Les futures études évaluant le bénéfice de l’association thrombectomie mécanique – TIV par
rapport à une thrombectomie mécanique isolée dans cette indication – permettront de mieux
préciser la place de la TIV dans ce cas particulier.
102 /
Thrombolyse intraveineuse
Ces travaux ont permis de définir plusieurs profils de mismatch cible caractérisés par leur volume
(> 10 mL) ; le ratio entre le volume de la zone d’hypoperfusion critique et la zone de nécrose de
1,2 à 1,8 et une taille de la zone de nécrose limitée (< 50 ou 70 mL).
TABLEAU III ▼ Essais évaluant le rtPA vs Placebo en dehors de la fenêtre thérapeutique admise
des 4 h 30 en utilisant une sélection en imagerie. Mismatch Cible (ECASS-4 et ExTEND) ; Mis-
match DWI/FLAIR (Wake-Up).
Étude Critères d’inclusion Résultats
EXTEND
4,5-9 h
ECASS-4 En cours
Mismatch Cible en CTP ou IRM
rtPA 0,9 mg/kg vs placebo
/ 103
Partie 2 – Phase aiguë
l’œdème vasogénique. Chez les patients victimes d’un IC dont l’heure de début est connue, la
présence d’un hypersignal en diffusion non visible en FLAIR permet de prédire avec une sensibilité
d’environ 60 % et une spécificité de 80 %, une heure de début des symptômes compatible avec
l’administration d’un traitement thrombolytique (4 h 30) [46]. Le taux de détection d’un hyper-
signal en séquence FLAIR augmente avec les performances de l’IRM (1,5 T vs 3 T), et d’autres
paramètres tels que la sévérité de l’hypoperfusion [47, 48].
L’heure de début des symptômes retenue chez les patients victimes d’un IC du réveil est celle
de leur coucher ou à défaut celle ou une absence de déficit a pu être constatée. En conséquence,
la plupart des patients victimes d’un AVC du réveil ne sont pas éligibles à un traitement par
thrombolyse IV. La présence d’un mismatch FLAIR-/DWI a donc été proposée comme critère de
sélection à un essai évaluant le rapport bénéfice risque du rtPA chez des patients victimes d’un
AVC du réveil (Tableau III). Cet essai prospectif multicentrique randomisé europeen est appelé
« multicenter, randomized, doubleblind, placebo-controlled trial to test efficacy and safety of
magnetic resonance imaging-based thrombolysis in wake-up stroke » (Wake-Up) et vient de
s’arrêter après l’inclusion de plus de 500 patients [49].
En 2012, Parsons et al. ont comparé, dans un essai de phase IIB, l’efficacité de la TNK administré aux
doses de 0,1 mg/kg ; 0,25 mg/kg à celle du rtPA (0,9 mg/kg) dans les 6 h suivant l’installation d’un IC
[50]. Cette étude a été conduite chez des patients dont l’IC compliquait l’occlusion d’une artère intra-
crânienne (ACM, ACP ou ACA) documentée en angioscanner et dont le CTP révélait la présence d’un
mismatch cible (ou « target mismatch »). Le traitement par TNK (0,1 mg/kg, n = 25 et 0,25 mg/kg n
= 25) était, par rapport à l’altéplase (n = 25), associé à une augmentation significative de :
■ taux de reperfusion (56 % vs 79 %, p = 0,04) ;
■ taux de régression du déficit neurologique mesuré par la variation du score NIHSS entre
0 et 24 h (amélioration du score NIHSS à 24 h [3 vs 8, p < 0,001]) ;
■ du taux de récupération neurologique à 3 mois, définie par un score mRS 0-2 (44 vs 72 %,
p = 0,02).
104 /
Thrombolyse intraveineuse
Enfin, la comparaison des 2 groupes de patients traités par TNK montrait une augmentation du
taux de récupération neurologique à 24 h avec la dose 0,25 mg/kg vs 0,1 mg/kg sans surrisque
hémorragique. Les résultats de cette étude ont permis de lancer l’essai international randomisé
Tenecteplase vs Alteplase for Stroke Thrombolysis Evaluation (TASTE), comparant la TNK
0,25 mg/kg vs rtPA 0,9 mg/kg 4 h 30 après l’installation des symptômes. À nouveau, les patients
seront sélectionnés sur la présence d’un mismatch cible en CT de perfusion ou IRM DWI/PWI.
Le critère de jugement principal est le taux de récupération neurologique (mRS 0-1) à 3 mois.
La méta-analyse des 2 études de phase II ATTEST 2 et TASTE a confirmé le bénéfice de la TNK chez
les patients dont l’imagerie initiale documentait une occlusion vasculaire et un mismatch cible tel
que défini dans l’étude australienne, confirmant ainsi dans une population sélectionnée la supériorité
de l’effet biologique observé avec la TNK vs rtPA [52, 53]. En octobre 2016, les investigateurs
d’ATTEST ont débuté une étude de phase III (ATTEST-3), comparant le bénéfice du traitement par
rtPA 0,9 mg/kg vs tenecteplase 0,25 mg/kg administré dans les 4 h 30 suivant l’installation des
symptômes sur la base d’un scanner cérébral SPC avec pour objectif l’inclusion de 1 870 patients.
Enfin, l’étude Norwegian tenecteplase stroke trial (NOR-TEST), terminée en 2017, a comparé,
dans le cadre d’un essai randomisé multicentrique, le taux de récupération neurologique à 3 mois
chez des patients traités dans les 4 h 30 après l’installation de leurs symptômes par rtPA vs
tenecteplase 0,4 mg/kg chez 1 107 patients [54]. La présentation des premiers résultats lors du
congrès de l’ESOC en 2017 a montré l’absence de bénéfice associé à la TNK (Tableau IV, synthèse
des essais de phase II et III évaluant la TNK).
L’utilisation d’un traitement par thrombolyse IV est souvent débattue en cas de déficit neuro-
logique mineur ou rapidement régressif. Ces 2 situations constituent une contre-indication rela-
tive à son administration. Cependant, il a été démontré qu’une proportion non négligeable de
ces patients, dont l’imagerie révélait la persistance d’une occlusion artérielle, avait un risque de
détérioration de l’ordre de 20 à 30 % en l’absence de traitement. L’étude de phase II, Tenecte-
plase-tissue-type-plasminogen activator evaluation for minor stroke with proven occlusion
(TEMPO-1), a évalué, chez 50 patients victimes d’un IC mineur (NIHSS ^ 5) avec une occlusion
vasculaire documentée ou une zone d’hypoperfusion focale compatible avec les symptômes du
patients, la sécurité de l’administration de TNK à la dose de 0,25 mg/kg (n = 25) et 0,1 mg/kg
(n = 25) dans les 12 h suivant l’installation des symptômes. Le taux de THS était de 2 % (1 patient
ayant reçu 0,25 mg/kg), les taux de recanalisation complète de 52 % après 0,25 mg/kg et 39 %
après 0,1 mg/kg. Enfin l’obtention d’une recanalisation partielle ou complète était associée avec
une augmentation significative du taux de récupération neurologique (RR : 1,65, p = 0,026) [55].
Les résultats de cette étude ont permis de lancer l’étude TEMPO-2, comparant l’administration
du TNK à la dose de 0,25 mg/kg dans les 12 h vs placebo chez le même type de patient. Cette
étude multicentrique internationale (Canada, Europe, Asie, Australie, etc.) a débuté en 2016,
avec pour objectif l’inclusion de 1 300 patients.
/ 105
Partie 2 – Phase aiguë
TABLEAU IV ▼ Essais randomisés de phase IIb et phase III comparant TNK vs rtPA.
Étude Critères d’inclusion Résultats (rtPA vs TNK)
TASTE-phase 2 Reperfusion 56 % vs 79 %,
TNK 0,25 et 0,1 mg/kg IC < 6 h p = 0,004
rtPA 0,9 mg/kg Occlusion artère intracrânienne Amélioration NIHSS à 24 h
<6h Mismatch cible en CTP (3 vs 8, p < 0,001)
N 25/groupe THS 3 % vs 2 %, p = 0,33
Thrombolyse en association
■ rtPA + anti-GpIIbIIIa
L’eptifibatide est un inhibiteur du récepteur plaquettaire GpIIbIIIa. En 2015, les investigateurs
ont proposé une méta-analyse des 3 essais de phase II ayant comparé au rtPA les associations
suivantes : 75 μg/kg d’eptifibatide + rtPA 0,3 mg/kg et 0,45 mg/kg (n = 69) ; 75 μg/kg d’eptifi-
batide + rtPA 0,6 mg/kg (n = 126) ; 75 μg/kg d’eptifibatide + rtPA 0,9 mg/kg (n = 27) [56]. Les
taux d’hémorragie symptomatique dans les groupes de patients traités par eptifibatide et rtPA
étaient respectivement de 1,4 %, 2 % et 3,7 %. Le taux de récupération neurologique défini par
la proportion de patient avec un score mRS 0-1 à 3 mois était respectivement de 30 %, 49,5 %
et 63 %. D’autres analyses sont en cours afin de définir la dose optimale de rtPA à associer
l’eptifibatide dans le cadre d’un essai de phase III.
■ rtPA + anticoagulants
L’argatroban est un heparinoïde habituellement proposé dans le traitement des thrombopénies
induites par l’héparine. Des travaux menés chez l’animal suggèrent que son association avec le rtPA
pourrait améliorer le taux de recanalisation, prévenir la réocclusion et prévenir le no-reflow. Ce
traitement a donc été testé dans un essai randomisé (phase IIb, Argatroban with Recombinant Tissue
Plasminogen Activator for Acute Stroke – ARTSS-2), comparant un traitement par rtPA conventionnel
à son association avec une faible (1 μg/kg/min après bolus) et une forte dose (3 μg/kg/min après
bolus) d’argatroban [57]. Cette étude a inclus 30 patients dans chaque bras. Elle n’a pas documenté
de surrisque hémorragique associé à l’argatroban (10 % rtPA seul vs 13 % faible dose vs 7 % forte
dose), et l’analyse estime à 79 % la possibilité d’une supériorité de l’association rtPA + argatroban
vs rtPA seul. Ces résultats doivent donc être validés par un essai prospectif de phase III.
106 /
Thrombolyse intraveineuse
thérapeutique persistait chez les patients n’ayant pas reçu de traitement par thrombolyse IV
avant la thrombectomie et que le taux de THS était similaire dans les 2 bras des essais rando-
misés [37]. D’autres études de cohorte ont retrouvé les mêmes résultats [58]. Ces deux résultats
questionnent donc sur la nécessité de réaliser une thrombolyse avant un traitement par throm-
bectomie chez les patients éligibles. Cette hypothèse va être testée dans des essais de non
infériorité tels que Swift Direct (Solitaire with the Intention for Thrombectomy Plus Intravenous
t-PA vs DIRECT solitaire Stent-retriever thrombectomy in Acute Anterior Circulation Stroke)
comparant, chez des patients éligibles à la thrombectomie, le rapport bénéfice/risque d’un trai-
tement par thrombolyse IV vs placebo avant une thrombolyse.
Pendant 20 ans, la thrombolyse IV par rtPA est restée le seul traitement de revascularisation
validé à la phase aiguë de l’IC. L’avènement de la thrombectomie, en 2015 a révolutionné la
prise en charge des infarctus cérébraux au point de remettre en cause l’indication de la throm-
bolyse IV chez les patients éligibles à un traitement endovasculaire. Cependant, l’accès à la
thrombectomie reste limité à quelques pays. Le remplacement du rtPA par la TNK d’une utili-
sation plus simple et l’élargissement de la fenêtre thérapeutique grâce à l’imagerie multimodale
à des IC mineurs et/ou d’arrivée tardive semblent être les voies d’évolution les plus prometteuses
pour ce traitement.
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Sur 8 essais randomisés publiés à partir de 2015, 6 ont apporté la preuve du bénéfice de la TM
dans le traitement de reperfusion des AVCi consécutif à une occlusion des artères de large calibre
de la circulation antérieure. L’effet positif de la TM est majeur avec un nombre de patient
nécessaire à traiter (NNT) de 2,5 [11]. Le score NIHSS médian a été de 17, soulignant que les
patients traités dans les études étaient sévères. Toutefois, la majorité des patients inclus n’avaient
pas des gros volumes d’AVCi [2, 5, 7, 11]. Il convient de noter que ce bénéfice a été observé
pour les différents sous-groupes de patients et notamment pour les patients de plus de 80 ans.
/ 111
Partie 2 – Phase aiguë
TABLEAU I ▼ Résumé des principales caractéristiques des études MR CLEAN, ESCAPE, EXTEND
IA, REVASCAT, THRACE, SWIFT – PRIME.
MR CLEAN ESCAPE EXTEND IA REVASCAT THRACE SWIFT-PRIME
Site
d’occlusion, % 26/64/8 27/70/3 31/53/5 26/64/8 15,5/82,5/0,5 17/72/10
(ICA, M1/M2)
TT 6h 12 h 8h 8h 6h 6h
Temps TIV
87/85 125/110 127/145 117/105 150/153 110/117
(TM/C)
Reperfusion, % 59 72 89 66 69 83
mRS 0-2
33/19 53/29 7140 44/28 53/42 60/35
(TM/C), %
Hém.
(TM/C), 3,6/2,7 0/2 1,9/1,9 2/2 0/3
%v7,7/6,4
Mortalité
21/22 10/19 9/20 18/16 12/13 9/12
(TM/C), %
N : nombre de patients inclus dans les études ; TM : thrombectomie mécanique ; C : groupe contrôle ; Site d’occlusion exprimé
en % (artère carotide interne : ICA, segments proximaux de l’artère cérébrale moyenne = M1/M2) ; TIV : % de patients ayant
reçus la thrombolyse IV ; TT : fenêtre thérapeutique en heures ; Temps TM : temps de réouverture de l’artère, ** : temps du
premier déploiement du stent retriever ; Reperfusion : taux de TICI 2b/3. *, NIHSS median ; Hém. : % hémorragies intracrâ-
niennes symptomatiques
La première étude publiée à montrer le bénéfice de la TM dans les 6 h a été MR CLEAN (Multi-
center Randomized Clinical trial of Endovascular Treatment in the Netherlands) [3]. Sur
500 patients randomisés avec un AVCi par occlusion proximale de la circulation antérieure et
un score NIHSS 6 2, 233 ont été traités par thrombolyse IV associée à la TM versus 267 traités
par thrombolyse IV seule. Dans MR CLEAN 89 %, des patients ont été traité par thrombolyse IV,
et le stent retriever (SR) a été le dispositif utilisé dans 81,5 %. Sur le critère de jugement principal
à 3 mois (score de Rankin modifié-mRS-0-2), 32,6 % des patients du groupe thrombolyse IV
associée à la TM ont eu une évolution favorable versus 19,1 % dans le groupe thrombolyse IV
seule (OR : 1,67 ; IC95 % : 1,2-2,3).
L’étude ESCAPE (Endovascular treatment for Small Core and Anterior circulation Proximal occlu-
sion with Emphasis on minimizing CT to recanalization times) [6] a été arrêtée prématurément
après l’inclusion de 316 patients à la suite d’une analyse intermédiaire. Les patients randomisés
qui ont été inclus dans les 12 h, devaient avaient avoir un NIHSS > 5, une occlusion confirmée
à l’angioscanner de la terminaison carotide, de l’ACM (M1 et/ou M2), une bonne collatéralité
sur l’angioscanner multiphase et un score Alberta Stroke Program Early CT Score (ASPECTS) > 5.
L’évolution favorable (mRS 0-2) à 90 jours a été de 53 % dans le bras TM et 29,3 % dans le bras
contrôle (OR : 2,6 ; IC95 % : 2,0-4,7), avec un NNT de 4. À noter, qu’il s’agit de la seule étude
avec un effet significatif sur la mortalité (10,4 % versus 19 %, p = 0,04). Trois quarts des patients
ont reçu la thrombolyse IV, et les SR ont été utilisés dans 86,1 % des cas.
L’étude SWIFT PRIME trial (SolitaireTM With the Intention For Thrombectomy as PRIMary treat-
ment for acute ischemic strokE) [5] a également été arrêtée prématurément après l’inclusion de
196 patients. Les patients randomisés devaient avoir reçu la thrombolyse IV dans les 4 h 30, un
112 /
Thrombectomie mécanique
NIHSS entre 8 et 29, un angioscanner ou une ARM montrant une occlusion de l’ACI ou de l’ACM
(segment M1), l’absence d’occlusion de la carotide extracrânienne, un ASPECTS > 6, et une TM
dans les 6 h. L’évolution favorable (mRS 0-2) à 90 jours a été de 60,2 % dans le bras TM et
35,5 % pour les contrôles (p < 0,001) avec un NNT de 4. Il n’y avait pas d’effet significatif sur
la mortalité.
Comme les études précédentes, EXTEND-IA trial (EXtending the time for Thrombolysis in Emer-
gency Neurological Deficits with Intra-Arterial therapy) [7] a été arrêtée avant terme sur la base
d’une analyse intermédiaire et après la randomisation de 70 patients. Tous les patients dans
EXTEND-IA ont reçu la thrombolyse IV dans les 4 h 30, un angioscanner ou ARM montrant une
occlusion de carotide ou de l’ACM (M1 ou M2), un mismatch sur l’IRM ou le scanner de perfusion
(utilisation du logiciel RAPID), et une TM réalisable dans les 6 h. À 90 jours, le taux de mRS 0-2
a été de 71 % dans le bras TM et 40 % pour les contrôles (p < 0,01), avec un NNT de 3. Là
encore, pas de réduction significative de mortalité même s’il existe une tendance.
REVASCAT (Randomized Trial of Revascularization with Solitaire FR Device versus Best Medical
Therapy in the Treatment of Acute Stroke Due to Anterior Circulation Large Vessel Occlusion
Presenting within Eight Hours of Symptom Onset) [4], a été impactée directement par la publi-
cation des études précédentes avec une perte d’« équipoise ». Sur 690 patients initialement
prévus, 206 âgés de 18 à 80 ans, avec un NIHSS 6 6, pouvant être traités dans les 8 h, ont été
inclus avec une occlusion documentée de la circulation antérieure et un AVCi dont les critères
en imagerie devaient répondre aux critères suivants : score ASPECTS 6 7 sur scanner cérébral
et 6 6 sur l’IRM cérébrale. Au total, 68 % des patients ont été traités par thrombolyse IV dans
le bras TM et 78 % pour les contrôles. À 90 jours, 43,7 % dans le bras TM ont eu une évolution
favorable (mRS 0-2) versus 28,2 % pour les contrôles (OR : 2,1 ; IC95 % : 1,1-4,0).
Dans l’étude française THRACE (Trial and Cost Effectiveness Evaluation of Intra-arterial Throm-
bectomy in Acute Ischemic Stroke) [2], la thrombolyse IV devait débuter dans les 4 h et la TM
dans les 5 h, en utilisant les dispositifs autorisés en France. L’étude a été arrêtée après l’inclusion
de 414 patients suite à une deuxième analyse intermédiaire. Les résultats de THRACE ont montré
un taux d’évolution favorable (mRS 0-2) de 54,2 % dans le bras TM et 42,1 % dans le bras
thrombolyse IV (OR : 1,55 ; IC95 % : 1,05-2,30).
L’étude THERAPY (THE Randomized, concurrent controlled trial to Assess the Penumbra sYstem’s
safety and effectiveness in the treatment of acute stroke) [12], a évalué le système d’aspiration
PenumbraTM en association à la thrombolyse IV versus la thrombolyse IV seule dans les 6 h.
THERAPY a été arrêtée après l’inclusion de 108 patients (55 dans le bras TM et 53 thrombo-
lyse IV) sur 692 patients prévus en raison de la perte d’« équipoise » à la suite des publications
précédentes. L’analyse en intention de traiter a été en faveur du bras TM sans atteindre la
significativité (OR : 1,76 ; IC95 % : 0,86-3,59).
PISTE (Pragmatic Ischaemic Thrombectomy Evaluation) [13] est une étude britannique pragma-
tique qui a évalué la thrombolyse IV dans les 4 h 30 seule versus la thrombolyse IV associée à
la TM chez les patients avec une occlusion documentée de la circulation antérieure sur l’angio-
scanner. Cette étude a également été arrêtée prématurément après l’inclusion de 65 patients.
Probablement en raison du faible nombre de patient inclus, il n’y a pas eu différence significative
entre les deux groupes concernant le taux de critère de jugement principal (mRS 0-2) a été de
51 % versus 40 % à 90 jours (OR : 2,12 ; IC95 % : 0,65-6,94, p = 0,204).
/ 113
Partie 2 – Phase aiguë
L’évolution rapide des dispositifs de TM a impacté les résultats des études, expliquant en partie
les résultats de celles publiées en 2013. En effet, alors que le recrutement des études IMS 3,
SYNTHESIS, MR RESCUE se poursuivait, deux études SWIFT (Solitaire flow restoration device
versus the Merci Retriever in patients with acute ischaemic stroke) [14] et TREVO-2 (Trevo
versus Merci retrievers for thrombectomy REvascularisation of large Vessel Occlusions) [15],
qui ont comparé les ST SOLITAIRE™ et TREVO™ au MERCI™ (dispositif d’ancienne génération),
ont montré une supériorité de la recanalisation (critère de jugement principal) avec les deux
SR ainsi qu’une réduction du handicap (critère de jugement secondaire) par rapport aux dis-
positifs d’ancienne génération comme le MERCI™. Les recommandations soulignent l’utilisa-
tion en première intention des SR, car ces dispositifs ont été le plus souvent utilisés dans les
études publiées à partir de 2015. Les données issues de méta-analyses sont clairement en
faveur de l’utilisation des SR et suggèrent de ne plus utiliser de dispositif d’ancienne génération
comme le dispositif MERCI™. Parmi les dernières évolutions, les systèmes d’aspiration de TM
sont actuellement utilisés en pratique courante. L’étude française ASTER [16], récemment
publiée, évaluant l’approche par aspiration versus l’utilisation d’un SR n’a pas montré de supé-
riorité de l’aspiration avec comme critère de jugement principal la reperfusion. L’aspiration est
devenue une technique couramment utilisée au cours des procédures de TM en association
avec les SR.
Le rôle du délai est clairement souligné dans les recommandations, qui précisent notamment
que la thrombolyse IV ne doit pas retarder la TM. L’effet bénéfique de la TM a été temps-
dépendant dans MR CLEAN avec un OR diminuant de 3,0 (IC95 % = 1,6-5,6) à 3 h 30, à 1,5
(IC95 % : 1,1-2,2) à 6 h. Des résultats similaires avaient déjà été rapportés dans IMS 3, où le
temps de reperfusion avait eu un impact sur le pronostic [17]. Les patients avec le meilleur taux
d’évolution favorable (mRS 0-2 à 3 mois) ont été ceux pour lesquels le temps de reperfusion
était inférieur à 4h30 comme dans les études SWIFT PRIME, EXTEND IA, et ESCAPE [18]. Les
dernières données suggèrent qu’un bénéfice de TM reste envisageable jusqu’à plus de 7 h après
le début des symptômes. Sur des populations très sélectionnées (sur l’âge, le score NIHSS et en
imagerie de perfusion), une étude plus récente (Diffusion Weighted Imaging – DWI – or Compu-
terized Tomography Perfusion – CTP – Assessment With Clinical Mismatch in the Triage of Wake
Up and Late Presenting Strokes Undergoing Neurointervention – DAWN) montre un effet positif
de la TM sur le handicap jusqu’à 24 h après le début des symptômes [19]. DAWN a étudié
l’efficacité et la tolérance de la TM entre 6 et 24 h après le début des symptômes. Cette étude
a été arrêtée après une analyse intermédiaire suivant l’inclusion de 206 patients avec une occlu-
sion d’une artère intracrânienne de large calibre de la circulation antérieure. Il faut noter que la
population a été sélectionnée sur l’âge et le volume de l’AVCi (calculé sur l’IRM en diffusion ou
le scanner de perfusion). Les patients éligibles devaient remplir les conditions suivantes : un
âge 6 80 ans et un score NIHSS 6 10 et un volume inférieur à 21 cc ; un âge inférieur à 80 ans
et un score NIHSS 6 10 et un volume inférieur à 31 cc ; ou encore un âge inférieur à 80 ans et
un score NIHSS 6 20 et un volume inférieur à 51 cc. Le taux d’évolution favorable (mRS 0-2) à
3 mois a été de 49 % dans le bras TM versus 13 % dans le bras contrôle. Il s’agit là de l’effet
plus important observé avec la TM par rapport aux études précédentes. Une autre étude DEFUSE 3
114 /
Thrombectomie mécanique
Si la fenêtre thérapeutique actuelle reste limitée à 6 h dans les recommandations, c’est parce
que la majorité (> 80 %) des patients inclus dans les essais l’ont été dans les 6 h. Les études
comme ESCAPE [6] ou REVASCAT [7] incluant des patients jusqu’à 8 h et 12 h respectivement,
n’ont inclus qu’une minorité de patients au-delà des 6 h (22,5 % pour REVASCAT et 15,5 % pour
ESCAPE). Avec les résultats récents de l’étude DAWN, la fenêtre thérapeutique va devoir évoluer.
Le bénéfice de la TM est d’autant plus important que l’occlusion est proximale. L’effet de la TM est
clairement établi pour les occlusions de l’ACI et de l’ACM dans son segment M1, avec un impact
de la TM supérieur pour les occlusions de la carotide par rapport à celles du segment M1 isolées
[11]. Le bénéfice pour les occlusions plus distales, comme les segments M2 de l’ACM n’apparaît pas
de façon significative. Des études randomisées sont donc nécessaires dans ces situations pour
confirmer le rapport bénéfice-favorable dans les procédures de revascularisation dans ces situations.
D’autres topographies d’occlusion artérielle font l’objet de débats. Les occlusions en tandem
(occlusion extracrânienne associée à une occlusion intracrânienne) ont été faiblement représen-
tées dans les études. Dans MR CLEAN, 29 % des patients avaient une occlusion en tandem avec
un effet de la TM non significatif. Les occlusions en tandem posent, par ailleurs, la problématique
du traitement de la lésion extracrânienne qui peut justifier l’implantation d’un stent et donc
d’un traitement antithrombotique supplémentaire associé à un sur risque hémorragique. La prise
en charge endovasculaire et pharmacologique de ces lésions extracrâniennes n’est actuellement
pas établie.
Certaines topographies d’occlusion artérielle ont été exclues des études. Par exemple, aucune
étude n’a inclus de patients avec une occlusion artérielle du tronc basilaire, en dehors de THRACE
[2] avec 4 patients. Même si les occlusions du tronc basilaire sont éligibles à la TM [1], il n’est
pas possible d’extrapoler les résultats obtenus dans la circulation antérieure à ceux de la circu-
lation postérieure. En effet, sur les anciennes données du registre BASICS [20] où plus de
500 patients ont été inclus, il n’y avait pas de différence entre les approches thérapeutiques
évaluées (traitement antithrombotique, thrombolyse IV, traitement endovasculaire). Il importe
de souligner ici que, au-delà des limites inhérentes aux registres, les patients dans le groupe
endovasculaire étaient les plus graves, et que la majorité avaient été traité avec des dispositifs
de dernière génération. À noter également que tous les patients traités au-delà de 9 h, ont eu
un pronostic défavorable. Une étude dédiée pour évaluer la TM dans les occlusions du TB est
actuellement en cours (Basilar artery international cooperation study – BASICS) [21].
Le type d’anesthésie pour les procédures de TM est également discuté. Sur la base des données
des études randomisées, les patients sous anesthésie générale ont été ceux avec le moins bon
pronostic. Dans une analyse post-hoc de MR CLEAN, les patients avaient un meilleur pronostic
/ 115
Partie 2 – Phase aiguë
en cas de sédation consciente. Plusieurs essais thérapeutiques sont actuellement en cours pour
répondre cette question. Les premiers résultats apportés par l’étude SIESTA [22] comparant
l’anesthésie générale versus la sédation vigile chez les patients éligibles à la TM ne montre pas
de différence sur le critère clinique, score NIHSS, à 24 h. Le type d’anesthésie est donc à adapter
à chaque situation clinique avec pour objectif de ne pas retarder la procédure de TM. Certaines
sociétés savantes [23] proposent actuellement, une sédation consciente en première intention
en dehors de situations spécifiques comme l’agitation, les troubles de la vigilance (avec un score
de Glasgow < 8), une détresse respiratoire aiguë.
Les conclusions d’une méta-analyse sur les 7 études ayant montré le bénéfice de la TM menée
par le groupe HERMES [24], suggèrent que l’anesthésie générale, telle qu’elle est pratiquée dans
les centres experts, ayant participé aux essais randomisés, est associée à un mauvais pronostic,
indépendamment des comorbidités présentées par les patients. Sous anesthésie générale, les
patients bénéficient toutefois de la TM. Par conséquent, la réalisation d’une anesthésie générale
pour une détresse respiratoire ou une agitation, ne doit pas être empêchée la mise en œuvre
d’une TM. L’anesthésie générale doit être conduite en minimisant les délais pour commencer la
procédure de TM au plus vite, avec un contrôle des paramètres physiologiques comme la pression
artérielle, pour limiter les variations tensionnelles potentiellement délétères.
L’imagerie parenchymateuse, utilisée dans les études décrites précédemment, pour éliminer une
hémorragie cérébrale a été principalement le scanner. À noter qu’il n’y a pas eu de comparaison
systématique entre le scanner et l’IRM dans les études. En dehors de MR CLEAN, toutes les
116 /
Thrombectomie mécanique
études avaient un critère d’exclusion pour les scores ASPECTS les plus bas. Dans EXTEND IA, les
patients avec des anomalies sur plus tiers du territoire de l’ACM ont été exclus. Dans ESCAPE
et SWIFT PRIME, des ASPECTS plus pas ont été utilisés pour l’IRM, avec des scores de 5 et 6
respectivement. Des critères d’imagerie supplémentaires ont été utilisés dans certaines études
comme l’imagerie de perfusion pour SWIFT Prime et EXTEND IA, ou une imagerie des collatérales
dans ESCAPE, alors que REVASCAT a utilisé l’imagerie de perfusion pour les patients inclus à
plus de 4 h 30 après le début des symptômes. À noter que dans toutes les études, une occlusion
des artères de large calibre de la circulation antérieure devait être documentée avant toute
randomisation.
Les patients avec une occlusion du segment M1 de l’ACM étaient inclus dans toutes les études,
ce qui n’était pas le cas pour les patients avec des occlusions plus distales (M2), ou des occlusions
carotides. Trois études (ESCAPE, EXTEND IA et SWIFT prime) ont utilisé de l’imagerie multi-
modale pour déterminer la présence de tissu cérébral à sauver défini par des cœurs ischémiques
de petites tailles (SWIFT PRIME et EXTEND IA) et/ou une collatéralité adéquate comme dans
l’étude ESCAPE. Dans EXTEND IA et SWIFT PRIME, la détection du tissu cérébral à sauver a été
effectuée en utilisant un logiciel dédié dans respectivement 100 % et 81 % des cas. Dans
REVASCAT, le même logiciel a été utilisé pour les premiers 71 patients avant de passer au score
ASPECT pour les centres n’ayant pas l’imagerie de perfusion. Dans ESCAPE, l’angioscanner mul-
tiphase a été utilisé pour sélectionner les patients avec une collatéralité bonne à modérée (définie
par un remplissage d’au moins 50 % du territoire de l’ACM). Une sous-analyse du scanner de
perfusion à partir des données de MR CLEAN a montré que cette méthode pouvait être utile
pour prédire le pronostic fonctionnel mais pas pour identifier les patients pouvant bénéficier de
la TM. Les conclusions du groupe HERMES précisent d’ailleurs qu’il n’est pas possible d’exclure
des patients sur la seule base des données de l’imagerie.
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118 /
10
Les premières heures suivant la survenue d’un accident vasculaire cérébral (AVC) sont détermi-
nantes pour le pronostic fonctionnel neurologique final, car la sévérité du déficit neurologique
peut fluctuer de manière très rapide et significative au cours de cette période, que ce soit vers
une amélioration ou une dégradation [1]. Ainsi, la prise en charge thérapeutique à la phase aiguë
de l’AVC doit combiner tous les moyens thérapeutiques disponibles pour permettre une amé-
lioration de l’état neurologique, éviter une aggravation clinique et la survenue de complications.
En cas d’ischémie cérébrale (IC), l’objectif thérapeutique est de sauver la zone de pénombre (à
savoir, le tissus sévèrement hypoperfusé mais dont l’évolution vers l’infarctus n’est pas irrémé-
diable), afin de limiter la taille de la nécrose cérébrale finale (l’infarctus) et ainsi d’améliorer le
pronostic fonctionnel. Si les traitements de reperfusion cérébrale (thrombolyse et/ou thrombec-
tomie mécanique) sont la pierre angulaire de la prise en charge visant cet objectif, la prise en
charge de facteurs systémiques (hyper/hypotension artérielle, hyper/hypoglycémie, hyperthermie
et hypoxie) est importante car ces facteurs sont associés à un mauvais pronostic fonctionnel.
En cas d’hémorragie cérébrale (HC), la prise en charge des facteurs systémiques (principalement
l’hypertension) font actuellement partie des principales armes thérapeutiques pour limiter
l’expansion de l’hémorragie et ainsi améliorer le pronostic des patients.
Dans ce chapitre, nous détaillerons les données disponibles et les recommandations de prise en
charge à la phase aiguë des AVC des principaux facteurs systémiques pouvant influer sur le
pronostic neurologique.
/ 119
Partie 2 – Phase aiguë
Ischémie cérébrale
Hyperglycémie : un facteur de mauvais pronostic à la phase aiguë
L’hyperglycémie est constatée chez près de 50 % des patients à la phase aiguë de l’IC, que ce
soit chez des sujets diabétiques ou non [2, 3]. Des anomalies préexistantes du métabolisme du
glucose et l’hyperglycémie dite « de stress » dont les mécanismes sont complexes expliquent
l’hyperglycémie chez les sujets non diabétiques [4]. L’hyperglycémie est associée de manière
indépendante à un plus volumineux infarctus final, un plus mauvais pronostic neurologique et
un risque accru de mortalité [4]. À noter cependant que ces associations ne reflètent pas néces-
sairement son rôle causal sur le pronostic neurologique, car il est possible qu’elle soit simplement
le reflet de la sévérité d’une ischémie. En cas de traitement de reperfusion (thrombolyse et/ou
thrombectomie), l’hyperglycémie est également un facteur de mauvais pronostic fonctionnel et
un facteur prédictif indépendant de transformation hémorragique [5, 6]. Les mécanismes de la
toxicité de l’hyperglycémie sur l’ischémie cérébrale ne sont que très partiellement élucidés et
restent encore débattus [4, 7]. Les principales données expérimentales et chez l’homme suggèrent
que l’hyperglycémie i) limiterait la recanalisation artérielle et la reperfusion cérébrale [4, 8] ;
ii) accélèrerait la transformation de la zone de pénombre vers l’infarctus cérébral en favorisant
l’accumulation de lactates au sein du tissu cérébral ischémié [9] ; et iii) favoriserait la survenue
de lésions de reperfusion cérébrale [10].
Aucun des essais réalisés n’a montré de bénéfice clinique de l’insulinothérapie intensive, que ce
soit en terme de handicap neurologique à 3 mois ou de décès, ce que confirme une méta-analyse
récente [17]. Toutes ces études ne comportaient qu’un faible effectif, à l’exception de GIST-UK
(N = 933) mais qui incluait une population très hétérogène (mélange d’infarctus et d’hémorragies
cérébrales notamment), et il reste ainsi envisageable qu’un faible bénéfice de l’insulinothérapie
intensive existe, nécessitant d’être étudié sur une très large population. La plupart des essais
sont critiquables car les patients étaient inclus jusqu’à 24 h après l’apparition des symptômes.
Ainsi, l’effet potentiel du traitement de l’hyperglycémie sur la protection de la zone de pénombre
– et donc le bénéfice clinique – aurait pu être manqué dans ces études car la pénombre ne survit
que quelques heures chez une majorité de patients. L’étude INSULINFARCT menée à la Pitié-
Salpêtrière arrive néanmoins aux mêmes conclusions, malgré une inclusion des patients dans les
6 h suivant l’installation des symptômes [15].
120 /
Pression artérielle, glycémie et constantes biologiques
TABLEAU I ▼
Principaux essais randomisés étudiant l’effet de l’insulinothérapie intensive à la
phase aiguë de l’accident vasculaire cérébral.
Nombre de sujets
Étude Intervention Résultats principaux
et critères d’inclusion
Insuline IV pendant 24 h
N = 933
(objectif glycémie Pas de différence
IC (70 %)/HC (14 %)
Gray 2007 [12] 4-7mmol/L) pour mortalité
< 24 h
GIST-UK Vs NaCl (insuline possible ou handicap
Glycémie
si glycémie à 3 mois
6,0-17,0 mmol/L
> 17 mmol/L)
Insuline IV (objectif
glycémie < 7,2 mmol/L)
Pas de différence
N = 46 pendant 72 h
Bruno 2008 [11] pour mortalité
IC < 12 h vs insuline SC toutes les
THIS ou handicap
Glycémie 6 8,3 mmol/L 2 h selon protocole
à 3 mois
gradué (objectif
< 11,1 mmol/L)
Insuline IV (objectif
glycémie 3,8-6 mmol/L)
pendant 72 h
vs insuline IV (objectif Pas de différence
N = 74
Johnston 2009 [13] glycémie 3,8-11 mmol/L) pour mortalité
IC < 24 h
GRASP pendant 72 h ou handicap
Glycémie > 6 mmol/L
vs pas d’insuline IV à 3 mois
(objectif glycémie
3,8-16,5 mmol/L)
pendant 72 h
Pas de différence
pour mortalité
Insuline IV (objectif ou handicap
N = 40
McCormick 2010 [14] glycémie < 7 mmol/L) à 3 mois
IC < 24 h
SELESTIAL pendant 24 h-72 h
Glycémie > 7 mmol/L
vs NaCl Pas de différence
pour la croissance
de l’infarctus*
Insuline IV (objectif
glycémie 4,5-7 mmol/L)
N = 50 pendant 24 h Pas de différence
IC < 12 h vs insuline SC/4 h selon pour mortalité
Staszewski 2011 [16]
Glycémie 6 7 mmol/L protocole gradué ou handicap
et < 10 mmol/L (objectif glycémie à 1 mois
< 10 mmol/L) pendant
24 h
Pas de différence
pour mortalité
Insuline IV (objectif
ou handicap
glycémie 5,5-7 mmol/L)
N = 180 à 3 mois
Rosso 2012 [15] pendant 24 h
IC < 6 h, quelle que soit
INSULINFARCT vs insuline SC/4 h selon
la glycémie initiale Croissance
protocole gradué
de l’infarctus
(objectif < 7 mmol/L)
plus importante
dans le groupe insuline IV
* Une sous-analyse du groupe de patients avec occlusion artérielle persistante montrait une croissance plus importante de
l’infarctus dans le groupe traité par insulinothérapie intensive.
N : nombre de patients inclus ; IV : intraveineuse ; SC : sous-cutanée ; IC : infarctus cérébral ; HC : hémorragie cérébrale.
/ 121
Partie 2 – Phase aiguë
Enfin, toutes les études montrent un risque majoré d’épisodes d’hypoglycémies, y compris symp-
tomatiques, chez les patients traités par insulinothérapie intensive, malgré une surveillance très
rapprochée dans le cadre d’essais thérapeutiques [17].
Hémorragie cérébrale
Plusieurs études prospectives observationnelles ou des analyses post-hoc d’essais thérapeutiques
sur la prise en charge de l’hypertension ont montré une association entre l’hyperglycémie à la
phase aiguë de l’HC et un mauvais pronostic fonctionnel ou un décès [17, 19].
Un seul essai randomisé apporte des données sur l’intérêt d’une insulinothérapie intraveineuse
à la phase aiguë de l’hémorragie, sur un très faible effectif (18 patients avec hématomes intra-
parenchymateux et 7 avec hémorragie sous-arachnoïdienne), chez des patients admis en réani-
mation [20]. Aucune différence n’était constatée sur le pronostic neurologique à 3 mois ou le
décès.
Ischémie cérébrale
Épidémiologie et physiopathologie
La réponse aiguë hypertensive (définie par une pression artérielle systolique (PAS) > 140 mmHg
et une pression artérielle diastolique (PAD) > 90 mmHg) est très fréquente à la phase aiguë de
l’IC, constatée chez près de 70 % admis aux urgences pour IC [21]. Cette réponse hypertensive
a tendance à diminuer spontanément (sans intervention pharmacologique) durant les jours sui-
vants l’IC, une diminution de 20 mmHg pour la PAS et de 10 mmHg pour la PAD étant décrite
pour les AVC à 10 jours du l’ictus [22]. Cette diminution est d’autant plus importante que le
traitement permet la recanalisation artérielle [23], faisant évoquer le caractère physiologique de
la réponse aiguë hypertensive face à l’occlusion artérielle.
122 /
Pression artérielle, glycémie et constantes biologiques
Pronostic
De nombreuses études ont pu montrer une association en U entre la pression artérielle (PA) à
l’admission et le mauvais pronostic fonctionnel des patients à 3 mois ou la mortalité, à savoir
un moins bon pronostic fonctionnel pour des PA basses et élevées [24, 25]. Le seuil optimal de
PAS à l’admission associé à un bon pronostic fonctionnel est aux alentours de 140-160 mmHg
dans la plupart de ces études. Cependant, ces travaux sont limités par l’inclusion de populations
assez hétérogènes : statut d’occlusion artérielle inconnu (à l’admission et post-traitement de
reperfusion si réalisé), étiologies d’IC variables, mélange dans certaines études d’IC et d’hémor-
ragies cérébrales, et il est ainsi possible que les relations décrites soit différentes dans certaines
situations. En cas d’IC traité par thrombolyse intraveineuse, l’HTA à la phase aiguë est également
associée à une augmentation du risque de transformation hémorragique symptomatique [25].
Peu de données sont actuellement disponibles chez les patients traités par traitement endo-
vasculaire, recommandé depuis 2015 en cas d’occlusion artérielle proximale. Les données sur la
PA à l’admission vont dans le même sens que les études précédemment décrites, avec une
relation en U entre la PA et le handicap à 3 mois ou la mortalité [26, 27]. Le seuil optimal de
PAS à l’admission associé à un bon pronostic est cependant variable selon les études. Dans les
24 h post-thrombectomie, chez les patients pour lesquels une reperfusion cérébrale a été
obtenue, l’HTA est associée de manière indépendante à un mauvais pronostic fonctionnel, et
une PA < 160/90 mmHg est associée à une meilleure évolution clinique [28].
Il est important de rappeler que les associations décrites ci-dessus ne reflètent pas nécessaire-
ment le rôle causal de la PA sur le pronostic neurologique. En effet, il est possible que l’HTA
sévère (ou l’hypotension) soit le reflet de la sévérité de l’IC ou des comorbidités du patient.
Une analyse post-hoc de l’essai randomisé ENOS testant le bénéfice de l’introduction d’un trai-
tement hypotenseur par donneur de monoxyde d’azote (trinitrate de glycéryl par voie trans-
dermique) s’est intéressée au sous-groupe de patients inclus dans les 6 h suivant l’installation
/ 123
Partie 2 – Phase aiguë
En cas de traitement de reperfusion, aucune étude n’a testé l’intérêt d’un traitement anti-
hypertenseur à la phase aiguë. Un large essai randomisé international est actuellement en cours,
étudiant l’effet d’une réduction de la PA par un traitement intraveineux chez les patients traités
par thrombolyse intraveineuse (objectif de PAS 130-140 mmHg dans l’heure suivant la rando-
misation vs < 180 mmHg dans le groupe contrôle) sur le pronostic fonctionnel à 3 mois et la
transformation hémorragique à 24 h (Enhanced Control of Hypertension and Thrombolysis Stroke
Study, ENCHANTED, NCT01422616). Chez les patients traités par thrombectomie mécanique,
l’essai français BP-TARGET (Blood Pressure Target in Acute Stroke to Reduce hemorrhaGe After
Endovascular Therapy, NCT 03160677) teste actuellement l’effet d’un traitement antihyperten-
seur intraveineux débuté une fois la reperfusion cérébrale obtenue (objectif de PAS < 130 mmHg
vs < 185 mmHg dans le groupe contrôle), sur le risque de transformation hémorragique cérébrale
à 24 h.
Les patients éligibles à une thrombolyse intraveineuse et présentant une PA élevée doivent
bénéficier d’un traitement antihypertenseur prudent afin d’atteindre l’objectif d’une PAS
< 185 mmHg et PAD < 110 mmHg (classe I). Il est recommandé de ne pas administrer de throm-
bolyse intraveineuse si la PA reste au dessus de ces objectifs malgré un traitement anti-
hypertenseur. Une PA < 180/105 mmHg doit être maintenue pendant 24 h après la thrombolyse.
Les options pharmacologiques proposées sont le labétalol IV, la nicardipine IV, la clévidipine IV,
et d’autres agents potentiels tels que l’hydralazine ou l’enalaprilat (classe IIb). Une surveillance
rapprochée de la PA est recommandée les 24 premières heures : toutes les 15 minutes les 2
premières heures, puis toutes les 30 minutes les 6 heures suivantes et toutes les heures pour les
16 heures restantes.
124 /
Pression artérielle, glycémie et constantes biologiques
critères d’inclusion des principaux essais thérapeutiques ayant démontrés la supériorité de l’asso-
ciation de la thrombectomie mécanique après la thrombolyse intraveineuse vs thrombolyse intra-
veineuse seule. Très peu d’études se sont intéressées à la PA pendant et après thrombectomie
mécanique. Les recommandations proposent donc une PA inférieure à 180/105 mmHg pendant le
geste endovasculaire et les 24 premières heures suivant le geste (classe IIa), surtout en cas de
recanalisation artérielle (classe IIb). Des recommandations européennes (European Recommenda-
tions on Organisation of Interventional Care in Acute Stroke – EROICAS –), proposent de maintenir
la PA pendant la thrombectomie mécanique inférieure à 180/110 mmHg et d’éviter toute chute
brutale de PA pendant le geste endovasculaire [33]. Ces dernières recommandations sont basées
sur 2 études observationnelles ayant respectivement montré qu’une chute de plus de 10 % et
40 % de la PA moyenne était un prédicteur indépendant de mauvais pronostic à 3 mois [34, 35].
Chez les patients ne recevant aucun traitement de reperfusion, présentant une PA < 220/120 mmHg
et ne présentant aucune condition associée urgente pouvant nécessité l’introduction d’un traite-
ment de la PA (syndrome coronarien aigu, dissection aortique, etc.), l’introduction ou la reprise
d’un traitement antihypertenseur dans les 48 à 72 premières heures suivant l’IC ne diminue pas
le handicap ou la mortalité et n’est donc pas recommandé (classe III). La mise en place d’un
traitement antihypertenseur durant les 48 à 72 premières heures pour les patients présentant une
PA 6 220/120 mmHg et ne recevant aucun traitement de reperfusion est incertaine et il est
considéré comme raisonnable de diminuer de 15 % la PA durant les 24 premières heures (classe IIb).
/ 125
Partie 2 – Phase aiguë
Hémorragie cérébrale
L’hypertension artérielle est extrêmement fréquente à la phase aiguë de l’HC, et associée de
manière indépendante à un risque d’expansion de l’hémorragie et un mauvais pronostic neuro-
logique [36].
La prise en charge de l’HTA à la phase aiguë de l’HC n’est pas détaillée ici, un chapitre spécifique
de cet ouvrage présentant la prise en charge médicale des HC. Les recommandations européennes
[37] et américaines [38] préconisent une réduction intensive de la PA en cas d’HC de moins de
6 h, avec un objectif de pression artérielle systolique inférieure à 140 mmHg obtenu en 1 h.
L’hyperthermie : un facteur
de mauvais pronostic à la phase aiguë
L’hyperthermie à la phase aiguë de l’AVC est fréquente, une température supérieure à 37,5 oC
étant constatée chez près d’un quart des patients admis dans les 6 h suivant l’ictus et chez un
tiers des patients dans les 24 premières heures suivant l’installation des symptômes [39, 40].
Cette hyperthermie peut être la conséquence directe des lésions cérébrales ou être secondaire
à une infection associée. Des données expérimentales chez l’animal suggèrent que l’élévation de
la température a des effets délétères sur la pénombre ischémique et majore les lésions isché-
miques via une augmentation des besoins métaboliques, un relargage de neurotransmetteurs, la
production de radicaux libres et une rupture de la barrière hémato-encéphalique [41]. Chez
l’homme, l’hyperthermie à l’admission [39] ou l’élévation de la température dans les 24 h [42]
suivant l’admission est associée de manière indépendante à un mauvais pronostic fonctionnel,
que ce soit après une HC ou un IC. Ici encore, cette association ne témoigne pas nécessairement
du rôle causal de l’hyperthermie sur le pronostic fonctionnel.
La prévention de l’hyperthermie
à la phase aiguë est-elle utile ?
Compte tenu des éléments présentés ci-dessus, plusieurs essais thérapeutiques ont testé l’intérêt
d’un traitement préventif de l’hyperthermie par paracétamol à la phase aiguë de l’AVC. L’étude
PAIS (Paracetamol [Acetaminophen] In Stroke) a randomisé 1 400 AVC dans les 12 h suivant la
survenue des symptômes (88 % d’IC et 12 % d’hémorragies) présentant une température à
l’admission entre 36,0 et 39,0 oC, pour recevoir du paracétamol 1 g 6 fois par jour pendant 3 jours
ou du placebo [43]. Il n’existait aucune différence sur le pronostic fonctionnel à 3 mois entre les
deux groupes. Les analyses de sous-groupe montraient des résultats similaires selon le type
d’AVC (IC ou HC) ou le délai d’inclusion (< 6 h ou 6-12 h), mais suggéraient un bénéfice du
paracétamol chez les patients présentant une température à l’admission entre 37,0 et 39,0 oC
[43]. Ce dernier résultat a conduit les auteurs à la réalisation d’une seconde étude (PAIS-2),
n’incluant cette fois que les patients avec une température supérieure à 36,5 oC à l’admission
(critères d’inclusion et intervention par ailleurs similaires à PAIS) [44]. L’étude a été arrêtée
précocement faute de financement disponible (250 patients/1 500 prévus), et ne montre aucune
différence entre les 2 bras de traitement. Les méta-analyses sur les essais ayant étudiés l’intérêt
126 /
Pression artérielle, glycémie et constantes biologiques
L’hypothermie thérapeutique
améliore-t-elle le pronostic ?
Plusieurs essais thérapeutiques ont étudié l’intérêt de l’induction d’une hypothermie à la phase
aiguë de l’IC, compte tenu de résultats très encourageant des études chez l’animal que ce soit
en cas d’HC ou d’IC. Globalement, tous ces essais vont dans le même sens en ne montrant pas
de bénéfice clinique, mais un surrisque d’événements indésirables, et notamment de pneumo-
pathies d’inhalations [45, 46]. Cependant, ces essais comportaient des effectifs faibles (entre 20
et 120 patients), et de plus larges études sont attendues. Aucune étude n’a étudié le bénéfice
de l’hypothermie à la phase aiguë de l’hémorragie cérébrale, un essai est actuellement en cours
(Safety and Feasibility Study of Targeted Temperature Management After ICH [TTM-ICH],
NCT01607151).
Compte-tenu des données sur l’hypothermie thérapeutiques présentées plus haut, les recom-
mandations européennes et américaines stipulent de ne pas la réaliser à la phase aiguë de l’AVC
[18, 45]. Celle-ci doit être proposée uniquement dans le cadre d’essais thérapeutiques [18].
/ 127
Partie 2 – Phase aiguë
128 /
Pression artérielle, glycémie et constantes biologiques
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Partie 2 – Phase aiguë
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130 /
11
Les patients qui développent un infarctus étendu du territoire de l’artère cérébrale moyenne (ACM)
ont généralement une présentation clinique initiale sévère avec hémiplégie massive, déviation de
la tête et des yeux, et négligence visuospatiale ou aphasie globale selon le côté atteint [1-3]. Le
terme d’infarctus malin a été introduit en 1996 par Hacke et al. [4] pour décrire l’évolution ultime
chez la plupart des patients qui ont un infarctus étendu du territoire de l’ACM, avec un tableau
clinique sévère évoluant secondairement vers une hernie temporale en 2 à 5 jours. Toutefois, il n’y
a pas de définition claire de l’infarctus malin avant que la hernie survienne. Non traités, les patients
développent une altération de la vigilance dans les 24 à 72 premières heures, et nécessitent pré-
cocement le recours à une ventilation mécanique en raison d’un trouble de la commande respi-
ratoire [4]. Le traitement de l’infarctus malin a fait débat pendant longtemps, en raison de l’absence
de preuve d’un bénéfice clinique des approches pharmacologiques visant à diminuer la formation
de l’œdème, et aussi de considérations éthiques concernant les traitements invasifs [2, 5-7]. Trois
essais randomisés européens [1, 7, 8] et leur méta-analyse [9] ont mis en évidence une réduction
majeure de la mortalité chez les patients traités par chirurgie décompressive (hémicrâniectomie),
au prix parfois de séquelles importantes chez certains survivants, et ont entraîné une modification
majeure dans la prise en charge des infarctus étendus de l’ACM.
Comme dans tout infarctus cérébral, la cascade ischémique comprend une phase d’excitotoxicité,
suivie d’une dépolarisation péri-ischémique, d’un phénomène inflammatoire favorisant l’apop-
tose et la formation d’un œdème extracellulaire [10]. En raison du volume important de l’infarctus
et de l’œdème, la zone infarcie se comporte comme un processus occupant de l’espace et refoule
rapidement les structures de voisinage. La compression secondaire des artères cérébrales anté-
rieures et postérieures sur les structures intracrâniennes fixes (faux du cerveau, tente du cervelet)
contribue à l’extension de l’ischémie au-delà du territoire de l’ACM. La compression des veines
corticales auto-entretient l’œdème. Finalement, le décès survient par compression du tronc céré-
bral sur la tente du cervelet en général entre le 2e et le 5e jour, dans plus de 70 % des cas [9].
/ 131
Partie 1 – Phase aiguë
En comparaison aux autres patients ayant un infarctus cérébral, les patients qui développent un
infarctus malin du territoire de l’ACM ont plus rarement déjà eu un premier épisode ischémique
et sont plus fréquemment des femmes [2]. Ils sont également plus jeunes et ont plus souvent
un infarctus qui englobe le territoire de l’artère choroïdienne antérieure [11]. La survenue d’un
infarctus malin est plus fréquente chez les patients qui présentent des variantes anatomiques
telles qu’une hypoplasie ou une atrésie d’une partie du polygone de Willis, ou en l’absence de
collatérales leptomeningées [11, 12]. C’est néanmoins le volume d’infarctus qui est le meilleur
prédicteur de l’évolution maligne, la plupart des patients ayant un infarctus touchant à la fois
les territoires superficiels et profonds de l’ACM et mesurant plus de 145 cm3.
Les infarctus du territoire de l’ACM suffisamment graves pour évoluer vers la malignité sont
responsables d’un déficit neurologique sévère dès l’admission, avec un score au National Institute
of Health Stroke Scale (NIHSS) supérieur à 15 [13]. Dans un délai de 24 à 48 h, pouvant excep-
tionnellement s’étendre jusqu’au 5e jour après le début des signes, s’installe une détérioration
rapide de la vigilance en rapport avec l’œdème cérébral [13]. Des phénomènes d’autorégulation
permettent pendant longtemps le maintien d’une pression intracrânienne normale, mais la
décompensation est ensuite rapide, voire brutale. Cela explique que la prise de pression intra-
crânienne comme outil de dépistage de l’infarctus malin soit inutile [4], car son élévation est
trop tardive et brutale. Par ailleurs, contrairement à une croyance très répandue, la survenue
d’un œdème extensif peut être responsable d’un effet de masse majeur, sans pour autant
s’accompagner d’une augmentation importante de pression intracrânienne [4]. La destruction
secondaire de structures cérébrales initialement épargnées par l’infarctus définit l’infarctus malin
(Figure 1). Le pronostic est mauvais avec plus de 70 % de mortalité en dehors de tout traitement
[9, 14]. C’est l’imagerie cérébrale qui est le meilleur prédicteur d’évolution vers un infarctus
malin. Un volume d’anomalie de diffusion > 145 cm dans les 24 à 48 premières heures (Figure 2)
est associé à un risque élevé d’évolution maligne [15, 16]. L’absence ou la rareté des collatérales
est également associée à un risque plus élevé d’infarctus malin [15]. Lorsque l’exploration par
IRM n’est pas possible, le scanner cérébral permet aussi de prédire l’évolution maligne : les
scanners répétés montrent un infarctus d’au moins les deux tiers du territoire de l’ACM concer-
nant à la fois les territoires superficiels et profonds.
Ainsi, de nos jours, la présentation classique est-elle celle d’un sujet jeune, qui présente un
tableau clinique initial sévère avec un score NIHSS > 15, dont l’infarctus cérébral est étendu, et
en rapport avec une occlusion de la terminaison de la carotide interne ou du territoire proximal
de M1. Ce patient peut soit avoir reçu, sans succès, tout l’arsenal thérapeutique disponible en
phase aiguë (thrombolyse, thrombectomie), soit avoir été admis hors délai pour toute mesure
de recanalisation.
132 /
Infarctus étendus du territoire de l’artère cérébrale moyenne
FIGURE 1 Infarctus cérébral malin survenu au 3e jour après l’installation des signes chez un patient
jeune ayant une occlusion en T de la terminaison de l’artère carotide interne sur dissection, n’ayant
eu ni thrombolyse intraveineuse ni thrombectomie mécanique (dossier de 1996).
FIGURE 2 Séquences de diffusion en IRM montrant des signes d’ischémie étendus du territoire
superficiel et profond de l’artère cérébrale moyenne, et dans une moindre mesure de l’artère
cérébrale antérieure. Volume d’anomalies de diffusion mesuré à 188 cm3 16 h après l’installation
des signes, malgré thrombolyse intraveineuse et thrombectomie mécanique.
Études animales
Plusieurs études menées chez l’animal ont montré que la crâniectomie décompressive précoce
est corrélée avec une meilleure reperfusion et une taille finale d’infarctus réduite [17], mais ce
/ 133
Partie 1 – Phase aiguë
bénéfice n’existe pas lorsque la crâniectomie est tardive après l’occlusion artérielle [18]. Une
hypothermie modérée en plus de la crâniectomie apporte un bénéfice supplémentaire chez le
rat [19]. Le bénéfice observé pourrait être en rapport avec 4 mécanismes : (i) un effet neuro-
protecteur global ; (ii) une amélioration du retour veineux, compromis lors d’une hypertension
intracrânienne et aggravant l’œdème ; (iii) une amélioration de la microcirculation artérielle,
artériolaire et veineuse ; et surtout (iv) un effet préventif sur la compression secondaire de
structures saines comme l’hémisphère controlatéral, et les artères cérébrales antérieures et pos-
térieures ipsilatérales.
134 /
Infarctus étendus du territoire de l’artère cérébrale moyenne
L’hémicrâniectomie peut être faite après une thrombolyse intraveineuse sans excès de compli-
cations [25]. En revanche, sans représenter pour autant une contre-indication, un traitement
antiplaquettaire en cours est associé à un excès de risque hémorragique [26].
Études observationnelles
Les études observationnelles sont pour la plupart rétrospectives. Elles ont toutefois eu le mérite
de montrer que l’hémicrâniectomie décompressive est réalisable en pratique courante, et
s’accompagne d’une diminution nette de la mortalité, avec un pronostic fonctionnel acceptable
chez la plupart des survivants [27-29]. Les résultats de la plupart de ces études ont été comparés
à des témoins mal appariés, souvent plus âgés, avec plus de comorbidités, ou à des témoins
historiques pris en charge plusieurs mois ou années auparavant.
Les études observationnelles ont identifié plusieurs facteurs prédictifs de mortalité et de mauvais
pronostic fonctionnel : l’âge est le prédicteur de mauvais pronostic le plus important, suivi par
l’altération de la vigilance, l’atteinte d’autres territoires que celui de l’ACM, une anisocorie, une
détérioration neurologique rapide, une occlusion de la carotide interne, ou une pathologie coro-
naire associée [30-33]. Peu d’études ont évalué le devenir fonctionnel à long terme des patients
traités par hémicrâniectomie. Elles suggèrent toutefois une qualité de vie acceptable et un accord
rétrospectif pour le geste à la fois chez les patients et leur entourage [1]. En revanche, la dépres-
sion est fréquente chez les survivants [28]. Cette constatation, dans l’étude HAMLET, était tou-
tefois aussi fréquente chez les patients non opérés [1].
L’originalité des essais cliniques évaluant l’hémicrâniectomie décompressive pour infarctus malin
est que la première publication démontrant l’efficacité du traitement a d’emblée été celle de la
méta-analyse des patients inclus dans DESTINY, DECIMAL et HAMLET qui ont été randomisés
dans les 48 h. La réduction absolue de risque de décès à 1 an était de 49,9 % avec la chirurgie,
ce qui donne un survivant de plus pour 2 patients traités. La réduction absolue de risque de
décès ou Rankin 5 à 1 an était de 41,9 % avec la chirurgie, ce qui donne un survivant de plus
pour un peu plus de 2 patients traités. Il y avait aussi une tendance vers un bénéfice de la
chirurgie pour les Rankin 0 à 3, avec une réduction absolue de 16,3 % (de - 0,1 à + 33,1 %, soit
1 patient sur 6).
Les essais randomisés et leurs méta-analyses ont ainsi démontré un bénéfice important de l’hémi-
crâniectomie décompressive sur la survie et sur ce que l’on qualifie d’évolution catastrophique,
c’est-à-dire « mort ou Rankin 5 ». Ces résultats ont été une avancée majeure dans la prise en
charge des infarctus étendus du territoire de l’ACM. Toutefois, il convient d’avoir une analyse
plus nuancée concernant le bénéfice fonctionnel. En effet, un Rankin modifié à 4, considéré
/ 135
Partie 1 – Phase aiguë
comme un résultat favorable dans les essais, est néanmoins le témoin d’un handicap sévère et
d’une dépendance fonctionnelle majeure, avec une incapacité à marcher sans aide, et à gérer
seul les besoins personnels essentiels (se laver, aller aux toilettes, s’alimenter, etc.). Les études
sur la qualité de vie sont insuffisantes et difficilement interprétables.
18-75 ans
NIHSS > 17
NIHSS item 1a < 2
mRS 0-5 vs 6
HeADDFIRST [45] 2000-2003 > 1/2 du territoire de 0-96 h 24
(6 mois)
l’ACM < 5 h
ou tout le territoire
< 48 h
18-60 ans
NIHSS > 18 (hémisphère
mRS 0-3 vs 4-6
DESTINY [46] 2004-2005 non dominant) ou > 20 0-36 h 32
(12 mois)
(hémisphère dominant)
NIHSS item 1a > 0
18-55 ans
NIHSS > 15
mRS 0-3 vs 4-6
DECIMAL [8] 2000-2005 NIHSS item 1a > 0 0-43 h 38
(6 mois)
> 1/2 territoire ACM et
DWI > 145 mL
18-60 ans
NIHSS > 15 (hémisphère
non dominant) ou > 20
(hémisphère dominant) mRS 0-3 vs 4-6
HAMLET [1] 2002-2007 0-100 h 64
GCS < 14 (hémisphère (12 mois)
non dominant) ou < 10
(hémisphère dominant)
> 2/3 territoire de l’ACM
Méta-analyse [9]
Inclusion dans une des mRS 0-4 vs 5-6
DECIMAL/HAMLET/ 2007 0-48 h 93
3 études dans les 48 h (12 mois)
DESTINY
18-80 ans
Zhao et al. 2012 GCS < 10 mRS 0-4 vs 5-6
2008-2011 0-48 h 47
[47] > 2/3 territoire ACM (12 mois)
et œdème en formation
> 60 ans
NIHSS > 15 (hémisphère
mRS 0-4 vs 5-6
DESTINY II [48] 2009-2012 non dominant) ou > 20 0-48 h 112
(6 mois)
(hémisphère dominant)
> 2/3 territoire ACM
Les familles doivent être prévenues avant la chirurgie que l’amélioration majeure du pronostic
vital a pour prix une augmentation du risque de handicap. Elles doivent aussi être prévenues que
les récupérations de bonne qualité (Rankin modifié 0 à 2) sont rares, mais quand même 3 fois
plus fréquentes après chirurgie.
136 /
Infarctus étendus du territoire de l’artère cérébrale moyenne
Traite-
Traitement RAR
Nom de l’essai Hémicrâniectomie ment RAR (%) Hémicrâniectomie
conservateur (%)
conservateur
HeADDFIRST [45] 79 60 19
DESTINY [46] 47 27 20 18 53 36
DECIMAL [8] 25 6 19 25 78 53
HAMLET [1] 25 25 ?0 22 60 38
Méta-analyse [9]
DECIMAL/ 75 24 51 22 71 50
HAMLET/DESTINY
DESTINY II [48] 38 18 20 43 76 33
Ils n’ont pas beaucoup d’intérêt, d’une part parce qu’ils n’ont jamais été démontrés efficaces ou
n’ont pas été évalués dans des essais randomisés, et d’autre part, parce que de nos jours, la
stratégie de première intention est l’hémicrâniectomie dès que les critères de prédiction d’évo-
lution vers la malignité sont présents.
Approches pharmacologiques
De nombreuses approches pharmacologiques ont été proposées afin de limiter le développement
de l’œdème [6] : mannitol, glycérol, sérum salé hypertonique semblent diminuer un peu l’œdème
sans apporter de bénéfice clinique au patient dans des essais randomisés [6, 7]. Les autres appro-
ches telles que les barbituriques, l’hyperventilation, l’alcalinisation, l’indométacine, les stéroïdes,
et les diurétiques n’ont pas permis de montrer un bénéfice clinique des traitements testés, mais
au contraire un effet délétère, sans doute en raison de leur effet sur l’hémisphère sain [6, 35-37].
Hypothermie
L’association entre une fièvre et un mauvais pronostic au cours d’une ischémie cérébrale [38]
a permis de générer l’hypothèse selon laquelle une hypothermie modérée entre 33 et 35 oC
serait bénéfique [39]. L’hypothermie réduit le métabolisme cérébral et stabilise la barrière
/ 137
Partie 1 – Phase aiguë
Les recommandations les plus récentes sur la prise en charge des infarctus malins sont les
recommandations conjointes des Sociétés allemandes de neurologie intensive et de médecine
d’urgence, publiées en 2015 [43]. Elles sont résumées ci-dessous :
– Nous recommandons d’utiliser la survenue de signes précoces d’ischémie sur le scanner ou
l’IRM comme critère de prédiction d’infarctus malin (recommandation forte ; niveau d’évidence
faible). À noter que dans la recommandation à proprement parler, il n’est pas fait état d’un
volume seuil au-delà duquel la crâniectomie est indiquée, mais il est indiqué que le seuil de
145 cm3 est en général celui qui déclenche l’hémicrâniectomie.
– Nous recommandons l’hémicrâniectomie décompressive pour améliorer la survie dans les
infarctus étendus du territoire de l’artère cérébrale moyenne, indépendamment de l’âge du
patient (recommandation forte ; haut niveau d’évidence).
– Chez les patients de plus de 60 ans, nous recommandons de prendre en considération le
souhait de la famille et du patient, en prenant en compte le fait qu’à cet âge l’hémicrâniectomie
décompressive réduit la mortalité, mais au prix d’une probabilité élevée de handicap sévère
(recommandation forte ; niveau d’évidence modéré).
– Il n’y a aucune raison valable récuser l’hémicrâniectomie décompressive sur la base du côté
atteint (recommandation forte ; niveau d’évidence modéré).
– Nous recommandons une taille minimale de volet de 12 cm de diamètre. Les volets plus larges,
de 14 à 16 cm semblent associés à une évolution plus favorable (recommandation forte ; niveau
d’évidence modéré).
– Nous recommandons de ne pratiquer de lobectomie ou de plastie durale que sur la base
d’options individuelles (recommandation faible ; niveau d’évidence faible).
– Nous recommandons de ne réséquer le muscle temporal que sur la base d’options individuelles
(recommandation faible ; niveau d’évidence faible).
– Nous recommandons de ne pas utiliser les corticoïdes (recommandation forte ; niveau d’évi-
dence faible).
– Nous recommandons de ne pas utiliser les barbituriques (recommandation forte ; niveau d’évi-
dence faible).
– Nous suggérons de considérer la possibilité d’un traitement par hypothermie chez les patients
non éligibles pour l’hémicrâniectomie (recommandation faible ; niveau d’évidence faible).
– Si l’hypothermie est utilisée, nous recommandons une température cible entre 33 oC et 36 oC
pendant 24 à 72 h (recommandation faible ; niveau d’évidence faible).
– Nous recommandons la position horizontale pour la plupart des patients, et une surélévation
de la tête à 30o en cas d’hypertension intracrânienne (recommandation faible ; niveau d’évidence
très faible).
138 /
Infarctus étendus du territoire de l’artère cérébrale moyenne
– Nous recommandons le mannitol et le sérum salé hypertonique pour réduire un œdème céré-
bral patent (recommandation forte ; niveau d’évidence faible).
– La quantité de sérum salé hypertonique administrée doit être guidée par l’osmolalité et la
natrémie (recommandation forte ; niveau d’évidence faible).
– Le mannitol doit être utilisé prudemment chez l’insuffisant rénal (recommandation forte ;
niveau d’évidence modéré).
Les trois essais européens ont totalement changé les modalités de prise en charge des infarctus
étendus du territoire de l’artère cérébrale moyenne. Le dépistage précoce des patients à risque
d’infarctus malin sur des critères radiologiques liés au volume d’infarctus permet la réalisation
/ 139
Partie 1 – Phase aiguë
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/ 141
12
L’hémorragie intracérébrale (HIC) représente 15 % des accidents vasculaires cérébraux (AVC) [1].
La mortalité à un mois reste stable avec une médiane à 40,4 % (intervalle interquatile
13,1-61,0 %) [2] contrairement à celle de l’infarctus cérébral qui diminue [3]. La proportion de
patients avec un handicap fonctionnel sévère est importante : seulement un patient sur 4 ayant
eu une HIC redevient indépendant à terme [2].
Contrairement à l’infarctus cérébral, l’hémorragie cérébrale n’a pas connu de révolution théra-
peutique. Elle a bénéficié, dans la continuité des infarctus, de la qualité de la prise en charge
spécialisée des unités neurovasculaires.
Son traitement est axé sur la lutte contre l’expansion de l’hémorragie cérébrale. La neutralisation
d’un traitement antithrombotique doit être réalisée en urgence, imposant une parfaite connais-
sance de leurs mécanismes d’action et des possibilités thérapeutiques à disposition. Au sein des
unités neurovasculaires, les patients bénéficient d’une expertise diagnostique et étiologique, d’un
dépistage précoce des complications neurologiques et extraneurologiques ainsi que d’un contrôle
intensif et strict de leur pression artérielle.
Surveillance en unité
de soins intensifs neurovasculaires
Les unités de soins intensifs neurovasculaires réduisent le risque de mortalité et de dépendance
chez les patients présentant une hémorragie cérébrale. En effet, une méta-analyse de 13 essais
contrôlés, regroupant 3 570 patients, a permis de mettre en évidence une réduction du risque
de mortalité et de dépendance secondaire aux accidents vasculaires cérébraux (risque relatif [RR]
/ 143
Partie 2 – Phase aiguë
0,81 ; IC95 % : 0,47-0,92) [4]. À noter que, dans l’analyse en sous-groupe, le bénéfice était
comparable pour les hémorragies cérébrales (RR 0,79 ; IC95 % : 0,61-1,00) et les infarctus céré-
braux (RR 0,82 ; IC95 % : 0,70-0,97).
Les patients admis en unité de soins intensifs neurovasculaires bénéficient d’une surveillance
rapprochée par une équipe multidisciplinaire spécialisée dans la prise en charge des AVC. Les
agressions cérébrales secondaires d’origine systémique (ACSOS) comme l’hyperthermie et les
dysglycémies sont surveillées et prises en charge précocement. Une attention particulière est
assurée concernant le dépistage précoce d’une détérioration neurologique et des complications
secondaires à la défaillance neurologique aiguë.
Initialement conçu pour évaluer l’efficacité des traitements dans des essais cliniques, le score
NIHSS (National Institutes of Health Stroke Scale) permet une évaluation régulière, standardisée
et simplifiée de l’examen neurologique [5]. Ce score, à travers ses 15 items, est adapté aux AVC
hémisphériques avec une sous-estimation de la sévérité des AVC de fosse cérébrale postérieure.
Bien qu’aucun seuil n’ait été formellement validé, une aggravation du score de 4 points ne peut
pas être expliquée par la variabilité intra et interobservateur et justifie la réalisation d’une ima-
gerie encéphalique en urgence. L’utilisation de ce score comme outil de surveillance clinique ne
dispense pas d’un raisonnement sémiologique au lit du malade, car une aggravation de 4 points
n’a pas la même signification selon que l’on passe de 1 à 5 ou de 22 à 26. L’expansion de
l’hémorragie s’accompagne le plus souvent d’une détérioration clinique, elle est à redouter par-
ticulièrement au cours des 4 heures suivant le début des symptômes [6]. Utilisés pour lutter
contre la composante œdémateuse et l’augmentation de la pression intracrânienne, les cortico-
stéroïdes (dexaméthasone) n’ont pas permis de mettre en évidence de différence significative
versus placebo concernant le pronostic fonctionnel et la mortalité à 1 mois [7]. De même, le
mannitol n’influence pas la mortalité à 1 mois et le pronostic fonctionnel à 3 mois [8]. L’utilisa-
tion des corticostéroïdes et du mannitol n’est donc pas recommandée [9, 10].
Concernant les crises convulsives, leur survenue précoce (dans les 7 jours) est fréquente et est
observée dans 14 % des cas (IC : 11-17 %) [11]. La localisation corticale de l’HIC est l’unique
facteur de risque de crise précoce (odds ratio [OR] 2,06 ; IC95 % : 1,28-3,31) [11]. Leur présence
n’influence pas le pronostic fonctionnel et la mortalité à 6 mois [11]. Les recommandations
internationales actuelles déconseillent l’usage d’antiépileptique à visée prophylactique, et ce
quelle que soit la localisation de l’HIC [9, 10, 12].
144 /
Traitement médical des hémorragies cérébrales
Au moindre doute sur la prise d’un traitement par AVK, l’International Normalized Ratio (INR) doit
être mesuré en urgence. Devant un INR supérieur à 1,5, le Groupe d’étude sur l’hémostase et la
thrombose (GEHT) et la Haute Autorité de santé (HAS) recommandent l’administration de 10 mg
de vitamine K par voie intraveineuse, sans dépasser 1 mg par minute devant le risque de choc
anaphylactique [19]. Cependant, la vitamine K a une efficacité différée car elle permet la synthèse
de nouveaux facteurs vitamine K dépendants (II, VII, IX et X), sans pallier immédiatement ce déficit.
Ainsi, doivent être administrés également des facteurs vitamine K dépendants présents au sein
d’un concentré de complexe prothrombinique (CCP) non activé ou activé. Ils permettent la nor-
malisation de l’INR dans les 10 minutes [20]. L’administration de plasma frais congelé (PFC) n’est
pas recommandée car le CCP corrige plus rapidement l’INR (^ 1,3) à 30 minutes (62,2 % du
groupe CCP versus 9,6 % pour le groupe PFC) [21]. Un délai d’obtention (délai médian entre le
diagnostic et l’administration du PFC : 3,0 h [1,5-4,5]) est nécessaire du fait d’une compatibilité
ABO requise et d’un volume important à délivrer, ce qui est difficilement envisageable en phase
aiguë d’une hémorragie cérébrale [22]. Par ailleurs, son administration expose à un risque de compli-
cations circulatoires, pulmonaires (Transfusion-Related Acute Lung Injury, TRALI), allergiques et
infectieuses [21, 22]. Les habitudes de réversion diffèrent d’un pays à l’autre [23].
Inconnu 25
> 3,5 32
/ 145
Partie 2 – Phase aiguë
une activité anti-thrombine (anti-IIa) comme le dabigatran (Pradaxa®) et les « xaban » avec une
activité anti-Xa, comme le rivaroxaban (Xarelto®), l’apixaban (Eliquis®) et l’edoxaban (Lixiana®).
Les anticoagulants oraux directs présentent certaines spécificités. La première est liée à leur sur-
veillance. Leur effet anticoagulant n’est pas surveillé. Celui-ci peut être évalué par le dosage de leur
concentration plasmatique mais n’est pas disponible en routine dans tous les centres accueillant
des hémorragies cérébrales. Leur métabolisme est essentiellement rénal, en particulier pour le dabi-
gatran dont l’élimination est rénale à 85 %. Il existe un antidote spécifique pour le dabigatran
(idarucizumab, Praxbind®) avec une autorisation de mise sur le marché pour le traitement des
hémorragies menaçant le pronostic vital et/ou fonctionnel d’un organe et la prévention des saigne-
ments avant un acte invasif urgent (ne pouvant pas être différé plus de 8 h) [24, 25]. Deux antidotes
des xabans (andexanet alpha et ciraparantag) sont en phase clinique de développement [26, 27].
Dans leur attente, l’utilisation de CCP non activé ou activé est la seule alternative disponible.
TABLEAU II ▼ Modifications des tests de la coagulation par les anticoagulants directs, d’après
[29, 30].
Test de coagulation Dabigatran Apixaban Edoxaban Rivaroxaban
TCA FF Rr F RràF
TP f Rr f fàff
TT ffff Rr Rr Rr
Xaban ou dabigatran si idarucizumab CCP non activé : 50 UI/kg en IV lente OU CCP activé 30
non disponible à 50 UI/kg en IV lente
146 /
Traitement médical des hémorragies cérébrales
Il convient d’optimiser la fonction rénale en corrigeant une éventuelle insuffisance rénale aiguë,
qui contribuera à l’élimination de l’anticoagulant oral. La surveillance est clinique et morpholo-
gique avec discussion de la répétition de l’algorithme thérapeutique selon l’évolution.
Héparine
Le sulfate de protamine permet de former avec l’héparine un complexe inactif stable. Son uti-
lisation est recommandée [9, 10] en urgence dans le cadre des hémorragies cérébrales survenant
sous héparinothérapie. Son utilisation n’est pas dénuée de risque et est contre-indiquée en cas
d’hypersensibilité connue à la protamine. Elle nécessite une estimation rigoureuse de la balance
bénéfice/risque.
En dehors des recommandations de 2012 de l’American College of Chest Physicians [31], il existe
peu de données concernant la dose précise en fonction du délai entre l’injection d’héparine et
l’utilisation de sulfate de protamine ou en cas d’administration continue d’héparine non frac-
tionnée (HNF), ni sur la surveillance biologique de leur efficacité. Il est cependant nécessaire de
tenir compte de la pharmacocinétique des héparines.
Il doit être administré à la dose de 1 mg (100 unités anti-héparine [UAH]) pour 100 UI d’héparine
à réverser [31, 32]. L’administration doit être lente, sur 10 minutes, sans dépasser 50 mg devant
le risque de réaction anaphylactique et d’hypertension artérielle pulmonaire [31-33]. Les patients
traités par insuline combinée à de la protamine, présentant une « allergie au poisson » ou un
antécédent de vasectomie – souvent associée au développement d’anticorps antiprotéines du
sperme dont la protamine – seraient davantage exposés au risque anaphylactique et pourraient
bénéficier d’une prémédication par antihistaminique [31, 33]. Concernant l’administration intra-
veineuse continue d’HNF, la quantité d’UI d’HNF à considérer varie selon les protocoles de la
dose horaire à la dose administrée dans les 4 dernières heures [34]. Considérer la quantité admi-
nistrée dans les 2,5 dernières heures paraît être un bon compromis [31]. Elle est à diviser par 2
si l’administration intraveineuse est arrêtée depuis 1 h et par 4 si depuis 2 h [32]. Du fait d’un
risque hémorragique en cas de surdosage (anti-agrégation plaquettaire, consommation), il est
conseillé de ne pas avoir tendance à surdoser et de surveiller l’efficacité entre 10 et 15 minutes
avant éventuelle réinjection (TCA, activité anti-Xa, temps de thrombine) [32].
Concernant les héparines de bas poids moléculaire (HBPM), l’efficacité est plus discutée. Des doses
similaires sont recommandées [10] avec une réversion pouvant être incomplète, en particulier liée
à la persistance d’une activité anti-Xa [35]. Dans les 8 h, il faut considérer la dose injectée avec
une dose de sulfate de protamine de 100 UAH pour 100 UI d’HBPM [31]. Une seconde injection,
à demi-dose, peut être nécessaire si persistance du saignement. Au-delà de 8 h, la dose doit être
plus faible [31], par exemple de l’ordre de la demi-dose de sulfate de protamine [34], sans délai
maximal précisé [31] mais probablement inférieur à 12 h depuis l’injection [34]. La demi-vie plus
longue des HBPM peut faire discuter une réinjection de sulfate de protamine avec nécessité d’un
contrôle à 1 heure et à 3 heures (activité anti-Xa, temps de thrombine) [32, 34].
À noter que le sulfate de protamine ne forme pas de complexe avec le fondaparinux et qu’une
réversion par facteur VII activé recombinant peut être discutée [31, 36].
Antiagrégant plaquettaire
La gestion d’un traitement par antiagrégant plaquettaire chez un patient présentant une hémorragie
cérébrale se pose dès la phase aiguë. Dans les pays développés, environ un quart des patients
présentant une hémorragie cérébrale sont traités par un antiagrégant plaquettaire [37, 38].
/ 147
Partie 2 – Phase aiguë
148 /
Traitement médical des hémorragies cérébrales
les hémorragies lobaires par rapport aux non-lobaires [44-46], à rapporter à l’angiopathie amy-
loïde cérébrale [47]. Dans cette population de patients avec de nombreux facteurs de risque
vasculaire [37, 42], le risque ischémique cérébral et extracérébral n’est pas négligeable mais reste
mal connu [43].
/ 149
Partie 2 – Phase aiguë
à l’étiologie de l’HIC avec un risque de récidive plus important dans les hémorragies lobaires
attribuées à l’angiopathie amyloïde cérébrale que dans les HIC reliée à la maladie des petites
artères [12, 51]. Ainsi, une analyse par modélisation théorique de Markov suggère que l’arrêt des
statines doit être considéré chez les patients atteints d’une angiopathie amyloïde cérébrale [52].
Dans tous les cas, il est nécessaire d’évaluer l’indication de la statine et d’estimer la balance
bénéfice/risque.
Cependant, ces thérapeutiques n’ont pas permis de diminuer la mortalité précoce survenant dans
les 48 premières heures, avec une fréquence stable autour de 14,9 % (IC95 % : 11,8-17,9 %)
[55]. La réaction inflammatoire secondaire à cette irruption de sang dans le parenchyme cérébral
est de plus en plus étudiée avec l’émergence de nouvelles pistes thérapeutiques. La souffrance
de la barrière hémato-encéphalique serait un événement majeur, contribuant à la promotion de
la réponse inflammatoire par recrutement de cellules pro-inflammatoires et à la formation d’un
œdème vasogénique [56]. L’exposition au complément plasmatique mais aussi au fer issu de la
dégradation de l’hémoglobine pourrait contribuer à intensifier la réponse inflammatoire [57].
Le traitement médical des hémorragies cérébrales se base sur une gestion de l’urgence qu’est la
baisse de la pression artérielle, la neutralisation d’un éventuel traitement antithrombotique ainsi
qu’une hospitalisation en unité de soins intensifs neurovasculaires afin d’apporter au patient une
150 /
Traitement médical des hémorragies cérébrales
prise en charge globale visant à la fois à limiter l’extension de l’hémorragie cérébrale et des
lésions cérébrales mais aussi à comprendre l’origine de ce saignement. Il nous manque aujourd’hui
un traitement spécifique efficace.
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152 /
13
L’hémorragie cérébrale (HIC) non traumatique est un une irruption spontanée de sang dans le
parenchyme cérébral compliquée parfois de diffusion dans les espaces ventriculaires et plus
rarement en sous-arachnoïdien [1-3]. L’HIC représente 10-30 % des accidents vasculaires céré-
braux (AVC) hospitalisés dont la mortalité est estimée entre 30 et 50 % à 6 mois. En outre, l’HIC
induirait une perte d’autonomie de 80 % des patients à 6 mois [1, 4], responsable d’un coût
socio-économique majeur.
L’HIC survient essentiellement dans les noyaux gris centraux, le thalamus, les lobes cérébraux,
le tronc cérébral et le cervelet. Elle détermine des lésions primaires par la destruction neuronale
et la désorganisation de la connectique intercellulaire, par son effet de masse et les anomalies
locorégionales de microperfusion [5]. Elle détermine aussi des lésions cérébrales secondaires en
lien avec la réaction inflammatoire, la neurotoxicité des produits de dégradation du caillot (hémo-
globine et fer).
Le traitement chirurgical de l’HIC sera guidé par le syndrome d’hypertension intracrânienne, les
caractéristiques de l’HIC, la vasculopathie responsable de sa survenue, l’encéphalopathie vascu-
laire sous-jacente et enfin la comorbidité systémique dans le cadre d’une stratégie multi-
disciplinaire impliquant neurochirurgiens, neurologues vasculaires, neuroradiologues et
neuroréanimateurs.
/ 153
Partie 2 – Phase aiguë
Les cibles du traitement chirurgical de l’HIC sont doubles. La première, l’ablation du caillot,
impacte sur les mécanismes primaires et secondaires de lésions cérébrales liées à l’HIC. La seconde
est le traitement de la cause de l’HIC, parfois nécessaire en cas de lésion vasculaire qui expose
au resaignement ou lors de tumeur cérébrale sous-jacente dont le pronostic oncologique dépend
de la résection microchirurgicale.
Ablation du caillot
L’ablation du caillot a un effet sur les mécanismes primaires de la présence de l’HIC. La levée
de l’effet de masse, quel que soit le procédé, microchirurgical, endoscopique ou stéréotactiques,
résous l’hypertension intracrânienne [6-8]. Malgré des résultats controversés, l’ischémie péri-
hématique serait diminuée après ablation par amélioration de la microperfusion cérébrale régio-
nale, par amélioration du métabolisme d’extraction d’oxygène en réduisant les dommages mito-
chondriaux [9, 10]. Enfin, lutter contre une expansion précoce volumétrique de l’HIC serait
souhaitable car elle est observée chez 1/3 des patients lorsque la TDM crânio-encéphalique
initiale était pratiquée dans les 3 h du saignement initial. Cette expansion volumétrique précoce
est un facteur indépendant de détérioration fonctionnelle et de mortalité [11]. De multiples
microvaisseaux seraient impliqués selon un mécanisme d’étirement des structures vasculaires
lié à la présence de l’HIC dont témoigne le « spot sign » (extravasation de produit de contraste
révélé par l’angioscanner). D’autres mécanismes de cette expansion sont discutés dans la litté-
rature : hyperhémie régionale, rupture de barrière hémato-encéphalique (BHE), et coagulopathie
locale transitoire.
L’effet sur les mécanismes secondaires de l’ablation du caillot est plus complexe. La thrombine,
rôle central dans l’hémostase, aurait des effets variables selon la concentration : à basse concen-
tration, elle serait neuroprotectrice, et, à haute concentration, responsable de lésions cérébrales.
Ainsi, l’effet de la thrombine dépendrait du volume de l’hématome [12]. En outre, cette ablation
interromprait l’effet indésirable des produits de la dégradation de la fibrine sur le parenchyme
périhématique matérialisé par l’œdème cérébral [5]. Une réaction inflammatoire – sous la dépen-
dance de la microglie, d’un afflux de leucocytes par rupture de la BHE, et la production de
médiateurs inflammatoires [5] – aurait un important rôle dans le déterminisme de lésions céré-
brales mais aussi dans la récupération. Ainsi, réduire l’œdème cérébral secondaire périhématique
par l’ablation du caillot serait un objectif du traitement chirurgical [13].
Parmi les différentes causes responsables d’HIC, certaines seront l’objet d’un traitement chirur-
gical en raison d’un risque de resaignement de certaines malformations vasculaires, ou en raison
d’un pronostic oncologique. Détaillé dans le Tableau I, les angiopathies sont les plus fréquemment
responsables d’HIC, suivies des transformations hémorragiques d’occlusion artérielle ou veineuse,
puis des malformations vasculaires et, rarement des tumeurs cérébrales.
154 /
Traitement chirurgical des hémorragies cérébrales
Vasculopathies
Inflammatoires
Vascularite 0,3-0,8 mm
Syndrome de vasoconstriction
Céphalée, vasospasme cortical
réversible
Transformation hémorragique
infarctus
Malformations vasculaires
Néoplasie
Coagulopathie acquise
Antiagrégants, anticoagulants
ou constitutionnelle*
HIC : hématome intracérébral ; HSA : hémorragie sous-arachnoïdienne ; mbds : microbleeds.
* Les coagulopathies acquises ou constitutionnelles sont classiquement considérées comme des causes mais elles n’en sont
pas à proprement parler. Ce sont des facteurs de prédisposition et des facteurs d’aggravation. Leur existence ne dispense pas
de la recherche approfondie d’une autre cause.
Analyser la vasculopathie en cause est adapté à la réflexion thérapeutique [14]. Celle-ci concerne
des vaisseaux de calibre divers : de 50 μm jusqu’à plusieurs mm [2]. La vasculopathie des artères
perforantes profondes liée à l’hypertension artérielle et l’angiopathie amyloïde cérébrale totali-
sent 70 % des causes d’HIC [15]. Dans l’hypertension artérielle, les artères perforantes
(50-700 μm) provenant des artères du cercle de Willis sont mis en causes, sièges de lésions
pariétales de la limitante élastique (fractures), de la média (atrophie, dégénérescence granulaire
ou vésiculaire), de l’endothélium (nécrose fibrinoïde) [16] et responsable d’HIC profond associé
à des micro saignements profonds. À l’inverse, l’angiopathie amyloïde est caractérisée par le
dépôt de peptides β-amyloïdes (microanévrismes, dissection concentrique, infiltrats inflamma-
toires, nécrose fibrinoïde) dans la paroi de capillaires, artérioles et artères corticales lobaires ou
du cervelet [17] responsable d’HIC lobaire « en nappe » associé à des microsaignements et
/ 155
Partie 2 – Phase aiguë
micro-infarctus lobaires. Plus rares sont les HIC liées à des malformations vasculaires (caver-
nomes, malformations artérioveineuses, fistules durales artérioveineuses), à des vascularites
inflammatoires ou infectieuses, à un syndrome de vasoconstriction réversible, à une tumeur
cérébrale sous-jacente, à une transformation hémorragique d’une ischémie secondaire à une
obstruction artérielle ou une thrombophlébite [2].
Cette revue concerne uniquement les HIC « spontanées » sans cause dite figurée comme l’ané-
vrisme cérébral ou les malformations vasculaires. Nous envisageons les procédures indiquées
pour uniquement une ablation de l’HIC sans avoir à intervenir sur une étiologie. Depuis l’avè-
nement de l’imagerie parenchymateuse, les procédures chirurgicales d’ablation d’HIC se sont
sophistiquées sans qu’aucune d’entre elles n’apparaisse déterminante sur l’évolution clinique des
patients.
Malgré sa simplicité d’exécution, son efficacité clinique reste controversée. Fernandes et al. [18],
dans sa méta-analyse groupant des essais randomisés, rapportaient une tendance de réduction
de la mortalité et dépendance après traitement chirurgical [OR 0,63 ; IC95 % : 0,35–1,14]. Ces
résultats discordants ont conduit au développement de l’étude STICH [19]. En 2005, l’essai
randomisé STICH I représente une étude centrale l’HIC spontané à cause de la taille de l’échan-
tillon (n = 1 033) et une méthode originale d’évaluation du résultat en tenant compte des pos-
sibilités pronostiques propres à chaque patient inclus. Aucune différence significative n’était
observée puisque la proportion de survie à 6 mois était identique et l’évolution favorable chez
26 % du groupe chirurgical vs 24 % du bras médical. L’unique sous-groupe favorable à un trai-
tement chirurgical était celui avec HIC situé à moins de 1 cm du cortex. Fort de ces résultats,
l’essai STICH II avait pour objectif d’évaluer l’intérêt de l’ablation précoce de l’HIC lobaire 10 à
100 mm3 situé à 1 cm de la surface corticale chez un patient conscient. Cet essai a permis de
randomiser 307 patients dans un bras de chirurgie précoce d’HIC lobaire (12 h de randomisation),
et 286 dans un bras de traitement conservateur [7]. L’évolution défavorable à 6 mois était sans
différence significative entre les 2 bras (OR : 0,86, p = 0,36), respectivement 59 % et 62 %.
156 /
Traitement chirurgical des hémorragies cérébrales
Cependant, dans ces 2 essais internationaux, le critère d’inclusion essentiel était l’indécision du
neurochirurgien quant au bénéfice d’une évacuation de l’HIC, car les patients pour lesquels
l’indication chirurgicale ne posait pas de doute étaient exclus de l’étude. Ainsi, les résultats sont
valides pour ce groupe de patient après avoir exclu ceux dont l’évidence du syndrome d’hyper-
tension intracrânienne faisait retenir une indication. Ainsi, après traitement chirurgical 40 % des
patients présentent une évolution favorable à long terme [20]. Actuellement, l’intérêt de la
crâniectomie décompressive sans ablation de l’HIC est en cours d’étude [21].
HIC infratentoriel
Dans cet espace infratentoriel, les HIC cérébelleux sont à distinguer des HIC du tronc cérébral
car ces derniers ne sont pas évidemment pas du recours d’un traitement chirurgical hormis les
exceptionnelles indications à la dérivation externe du liquide cérébrospinales (LCS). En revanche,
les HIC cérébelleux doivent être l’objet d’une réflexion soigneuse en raison d’un pronostic ouvert
malgré une détérioration neurologique rapide liée à la compression du tronc cérébral. D’une
revue de littérature [22], les 8 études rétrospectives concernant l’HIC infratentoriel ne permet-
tent pas d’en tirer des règles d’application ; cependant, les patients ayant une ablation du caillot
combiné à un drainage ventriculaire externe semblent présenter une évolution favorable.
Les objectifs du traitement chirurgical d’un HIC cérébelleux est triple : l’ablation de l’HIC, la
résolution de l’hydrocéphalie obstructive liée à la compression des voies d’écoulement et l’obten-
tion d’une détente cérébrale de la fosse postérieure.
Par implantation initiale d’un drain de dérivation ventriculaire externe en corne frontale droite,
l’hypertension intracrânienne de l’étage supratentoriel liée à l’hydrocéphalie obstructive est
résolue ; cependant l’hypertension de l’étage infratentoriel demeure. L’efficacité de cette procé-
dure isolée n’est pas démontrée pour ces HIC de fosse postérieure [23] et expose à processus
de hernie cérébelleuse paradoxale. Pour ces raisons, l’association d’une ablation de l’HIC est
recommandée.
■ Crâniotomie sous-occipitale
Par une approche sous-occipitale médiane sous anesthésie générale, une large crâniotomie
permet sous magnification optique une ablation du caillot et l’obtention d’une détente de la
fosse postérieure. Le choix de l’approche transgyrale est décidé selon la taille et la topographie
de l’HIC, mais classiquement une approche paravermienne. Si la minicrâniotomie est proposée
par certains [24] sans différence avec un débridement large chirurgical, l’essentiel étant d’obtenir
une détente pérenne de la fosse postérieure.
Cependant, des critères morphologiques d’indication chirurgicale semblent se dégager lors de dégra-
dation neurologique secondaire que sont une taille d’HICS de plus de 3 cm, un effet de masse sur
le 4e ventricule et l’apparition d’une hydrocéphalie triventriculaire obstructive. L’évolution serait
favorable chez 70-88 % des patients dans le cas de citernes quadrigeminales peu comprimées [25].
/ 157
Partie 2 – Phase aiguë
Différentes études de faisabilité ont montré l’efficacité de cette procédure pour réduire signifi-
cativement le volume de l’HC limitant les conséquences de l’effet de masse initial par le volume
de l’HC mais aussi secondaire lié à l’œdème périhématique réactionnel. Si les premières tenta-
tives de cette procédure peu invasive consistaient en une aspiration simple, l’instillation de
substances liquéfiant l’HC a amélioré son efficacité sans majorer les effets adverses. L’usage de
thrombolytique comme l’urokinase est rapporté depuis les années 1990 [29, 30]. Montes et
al. [30], sur une série prospective monocentrique de 12 patients avec HC profond ou lobaire,
observaient une réduction de 57 % du volume après instillation d’urokinase suivie d’une aspira-
tion lavage. D’autres auteurs [31] proposaient l’instillation d’un activateur du plasminogène (rtPA)
avant l’aspiration-lavage de l’HC, ils rapportaient un volume prétraitement de 52 mL chez
27 patients traités d’HC profond et un volume post-traitement de 17 mL. Une autre méthode
d’optimisation de l’aspiration-lavage à l’aiguille sous stéréotaxie serait de la précéder d’une
fragmentation du caillot à l’aide d’ultrasons focalisés guidés en IRM [32].
Quoiqu’il en soit, cette procédure peu invasive est efficace sur le volume de l’HIC et l’effet de
masse sur le parenchyme, mais aucun de ces travaux ne démontraient une efficacité clinique
fonctionnelle. Ces résultats non concluants déterminaient le développement d’essais randomisés
comparant procédure stéréotaxique et traitement médical.
Zucarello et al. [33], en randomisant précocement (2 h) 20 patients avec HC, observaient aucune
différence significative de morbidité et mortalité entre un groupe de patient traité médicalement
et un autre par aspiration-lavage stéréotaxique réalisée en moyenne 8 h après le saignement.
Teernstra et al. [34], en randomisant 70 patients en groupe médical ou groupe aspiration-lavage
après instillation d’un activateur du plasminogène, confirmaient l’absence de différence de la
mortalité entre les 2 groupes et l’inexistence de facteurs pronostiques péjoratifs. Ainsi, malgré
une réduction du volume de l’hématome, aucun bénéfice fonctionnel n’est démontré à propos
de l’aspiration-lavage en condition stéréotaxique.
L’essai randomisé MISTIE [35], incluant 96 patients sur 7 ans, permettait de confirmer l’efficacité
de la procédure stéréotaxique associé à l’alteplase par comparaison à un traitement médical
conventionnel malgré la majoration des resaignements asymptomatiques.
Cette technique est attrayante par son caractère peu invasif. Cependant, plusieurs problèmes la
concernant sont à souligner. L’efficacité sur la réduction du volume de l’HC est évidente, mais
elle reste partielle et les résidus d’HC sont importants. Le problème majeur est celui de la
précocité de l’aspiration-lavage. La mise en route de cette procédure impose une disponibilité
de la tomodensitométrie, une utilisation du cadre de stéréotaxie, un contrôle par imagerie de la
bonne situation du cathéter et un délai pour activité de la substance instillée. Cette procédure
est donc peu compatible avec une intervention précoce, voire ultra-précoce, à l’instar de ce qui
est recommandé dans l’accident vasculaire cérébral ischémique du sujet jeune.
158 /
Traitement chirurgical des hémorragies cérébrales
Une seule étude randomisée analysait l’endoscopie vs le traitement médical. Auer et al. [36], en
comparant 50 patients traités dans les 48 h par approche endoscopique à un autre groupe de
50 patients traités médicalement, observaient une réduction significative de la mortalité à 6 mois
après chirurgie mais une qualité de vie similaire dans les 2 groupes. Ces résultats concernaient
une série consécutive de patients traités dans les 48 h.
En résumé
Les procédures mini-invasives aidées d’artifices de plus en plus sophistiqués, certes séduisantes,
réduisent probablement le coût du traitement chirurgical en raccourcissant la durée d’hospita-
lisation uniquement en milieu neurochirurgical mais aujourd’hui n’apportent pas de bénéfice
clinique à moyen et long termes par comparaison avec un traitement médical. Néanmoins, deux
essais randomisés d’évaluation des procédures mini-invasives sont en cours.
/ 159
Partie 2 – Phase aiguë
En résumé, le traitement chirurgical doit s’appliquer en théorie le plus tôt possible car cet effort
améliore l’évolution des patients. Cependant, le risque de resaignement secondaire à une ablation
du caillot trop précoce devrait nous orienter vers l’utilisation de méthodes médicales associées
réduisant le risque hémorragique.
La difficulté du traitement chirurgical de l’HIC reste l’indication, car les résultats de nos procédures
sont finalement à ce jour peu convaincantes malgré des protocoles techniques sûrs. Cette indication
doit être l’objet multidisciplinaire à mener avec nos collègues neurologues vasculaires et adapté à
chaque patient. C’est par l’analyse de quelques éléments comme l’hypertension intracrânienne, les
caractéristiques de l’HIC, la cause, l’existence d’une encéphalopathie vasculaire sous-jacente et d’une
vasculopathie systémique que sera prise la décision d’évacuer cette HIC sans que l’on puisse fixer
des recommandations avec critères. Nous détaillons ces différents éléments décisionnels.
Hypertension intracrânienne
Sa part de responsabilité dans la présentation clinique doit être déterminée à côté du syndrome
de destruction cortico-sous-cortical lié au développement de l’HIC. En effet, sa résolution chi-
rurgicale permettra une amélioration (conscience par exemple) et surtout d’éviter les consé-
quences hémodynamiques axiales d’une hypertension intracrânienne non résolue.
Caractéristiques de l’HIC
Les caractéristiques morphologiques de l’HIC en imagerie sont un élément décisionnel crucial.
Topographie
Par comparaison avec les HIC profonds ou thalamo-striés, les hématomes lobaires, capsulaires
extrêmes ou externes sont des indications chirurgicales soldées d’un meilleur pronostic [7, 19].
La distance de 1 cm de la surface corticale de l’HIC en fait une indication pertinente du traitement
chirurgical avec amélioration significative de l’évolution clinique à long terme. L’efficacité des
procédures mini-invasives pour les HIC profonds est significative sur le volume de l’HIC sans
majoration de la morbidité.
160 /
Traitement chirurgical des hémorragies cérébrales
Volume
Si les HIC de petite taille n’ont aucune indication chirurgicale, un diamètre supérieur à 3 cm
d’HIC doit faire discuter l’indication pour améliorer l’altération de la microperfusion péri-
hématique. Dans l’espace confiné infratentoriel, ce seuil de 3 cm est un des critères d’indication
affiché dans les recommandations (Stroke, 2015). En supratentoriel, l’effet de masse sur la ligne
médiane, l’existence d’un œdème périhématique, et le respect des zones éloquentes doivent
emmener vers des propositions d’ablation afin d’améliorer les conditions de perfusion loco-
régionales du parenchyme.
Cause
Certaines causes sont à traiter en urgence afin d’éviter des processus de resaignement comme
les anévrismes et les fistules durales. Leur traitement se fait « en passant ». Les autres malfor-
mations vasculaires (malformation artérioveineuse, cavernome) exposent rarement au re-
saignement. D’autres seront à traiter secondairement comme une tumeur cérébrale sous-jacente
traitée dès que le diagnostic est suspecté. Quoi qu’il en soit, cette éventualité impose de pra-
tiquer des biopsies de paroi de la cavité d’HIC lors d’approche chirurgicale.
Comorbidité
La comorbidité sera déterminante dans les capacités de récupération du patient chez lequel un
handicap fonctionnel se greffe, source de décompensation d’appareils. En particulier, la vascu-
lopathie systémique, fréquente dans ce contexte, devra être évaluée soigneusement.
Les procédures chirurgicales utilisées pour traiter l’HIC sont efficaces sur le volume de l’héma-
tome, qu’elles soient microchirurgicales ou mini-invasives. Cependant, l’ablation du caillot dis-
cuté à partir d’essais cliniques randomisés semble améliorer l’évolution des patients lorsque ce
geste est réalisé dans les 8 h du saignement initial malgré la majoration du risque hémorragique.
Cette indication difficile à poser doit être évaluée pour chaque patient dans le cadre d’une
réflexion multidisciplinaire.
/ 161
Partie 2 – Phase aiguë
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14
L’HSA est définie par l’irruption de sang dans les espaces sous-arachnoïdiens, due dans la majorité
des cas à la fissuration d’une paroi artérielle anormale. Spontanée, elle est majoritairement liée
à une rupture anévrismale. Les anévrismes sont localisés au niveau des gros vaisseaux (artères)
intracrâniens de la base du crâne, et plus particulièrement au niveau de leurs bifurcations
(Tableau I). Dans 80 % des cas environs, ils concernent la circulation cérébrale antérieure : artère
communicante antérieure, artère communicante postérieure, terminaison de l’artère carotide
interne, artère péricalleuse, artère cérébrale moyenne. On décrit classiquement l’anévrisme céré-
bral par un sac et un collet (base d’implantation sur l’artère porteuse) (Figure 1). Les localisations
multiples sont observées dans 20 à 30 % des cas. Lors de la rupture anévrismale, l’issue brutale
de sang entraîne une augmentation rapide de la pression intracrânienne à l’origine d’un ralen-
tissement, voire d’une interruption brève du flux sanguin. La rupture anévrismale entraîne la
formation d’un caillot intra-anévrismal, qui empêche la poursuite du saignement. La diminution
/ 165
Partie 2 – Phase aiguë
Tronc basilaire 7%
Artère péricalleuse 4%
Autres 4%
166 /
Traitement médical des hémorragies sous-arachnoïdiennes
considérablement augmenté [3]. Le niveau de pression intracrânienne est corrélé au grade cli-
nique du patient : normal ou légèrement élevé chez les patients en grade I et II et habituellement
élevé chez les patients en grade IV et V. Au contact du liquide céphalorachidien (LCR), les
éléments figurés du sang et principalement les globules rouges et les plaquettes subissent l’effet
d’une hémolyse qui libère leur contenu. L’hémoglobine contenue dans les hématies se dégrade
progressivement pour donner l’oxyhémoglobine, substance toxique pour les vaisseaux, puis des
pigments biliaires qui vont colorer en jaune le LCR. On dit alors que le liquide est devenu
xanthochromique. Discrète à la première heure, cette hémolyse est visible dès la 6e h et atteint
son maximum au 3e jour pour durer encore 8 à 10 jours. La libération de l’oxyhémoglobine et
d’autres produits de dégradation des éléments figurés du sang est responsable d’une agression
de la paroi des vaisseaux. Elle est présente et entretenue durant toute la durée de l’hémolyse,
soit du 3e au 12-15e jour.
1 15 Absent
2 13-14 Absent
3 13-14 Présent
Dans le même temps, une fibrinolyse spontanée va dégrader la fibrine. Plus l’hémorragie aura
été abondante, plus il y aura présence de fibrine dans les espaces sous-arachnoïdiens, et plus il
y aura risque de blocage des voies d’écoulement du LCR. Ce phénomène est présent dès la 3e h
après le début de l’hémorragie. Dans les jours suivants, ce risque diminue théoriquement du fait
de l’action de la fibrinolyse, mais sans disparaître du fait de l’installation d’une l’inflammation
cicatricielle de l’arachnoïde entretenue par la présence de débris fibrineux et de restes des héma-
ties hémolysées.
Le tableau clinique est souvent évocateur : la céphalée brutale est le signe cardinal, elle survient
le plus souvent au cours d’un effort (coït, défécation, activité sportive), fréquemment accompa-
gnée de nausées, de vomissements et d’un syndrome méningé apyrétique. Les troubles de la
conscience sont variables, allant d’une conscience normale au coma profond. L’apparition brutale
de ce tableau chez un sujet jeune, auparavant en bonne santé, est très évocatrice d’hémorragie
méningée anévrismale. Les signes neurologiques focaux et les crises convulsives ne sont pas
rares. Ils peuvent être présents d’emblée, évocateurs d’un hématome intracérébral associé, ou
apparaître secondairement, et dans ce cas, être plus évocateurs d’un vasospasme. L’hémiplégie
est de diagnostic facile mais il faut s’attacher à retrouver également une aphasie, une hémia-
nopsie, des troubles sensitifs, dont le diagnostic est difficile chez les patients confus. Une para-
lysie de la 3e paire crânienne (diplopie, mydriase unilatérale) doit aussi être recherchée car elle
est évocatrice d’une rupture d’un anévrisme localisé sur l’artère communicante postérieure ou,
/ 167
Partie 2 – Phase aiguë
plus rarement sur l’artère cérébelleuse supérieure. Des formes graves d’emblée peuvent exister
avec coma voire mort subite par inondation massive des espaces sous-arachnoïdiens. Des ano-
malies du fond d’œil peuvent aider au diagnostic : hémorragies rétiniennes ou vitréennes (syn-
drome de Terson) ou un œdème papillaire témoin de l’hypertension intracrânienne.
Scanner cérébral
Le scanner cérébral sans injection de produit de contraste reste le premier examen à réaliser en
urgence devant toute suspicion d’hémorragie méningée (Figure 1). Il permet d’établir le dia-
gnostic positif en mettant en évidence une hyperdensité spontanée des espaces sous-
arachnoïdiens. Il offre également la possibilité d’évaluer l’importance de cette hémorragie que
l’on peut apprécier par la classification de Fisher (Tableau II), prenant en compte la quantité de
sang présent dans les espaces sous-arachnoidiens, les citernes et les ventricules. Enfin, son inter-
prétation s’attachera également à rechercher une complication cérébrale initiale : hydrocéphalie
aiguë, hématome intracérébral, infarctus cérébral associé. En cas de doute d’interprétation, les
images doivent faire l’objet d’une télétransmission vers un centre de référence. Le scanner se
normalise en quelques jours par effet de lavage des espaces sous-arachnoïdiens. Ainsi, plus le
scanner est réalisé précocement, plus il est sensible. Un scanner normal n’élimine pas le diag-
nostic d’hémorragie méningée. Le scanner peut être négatif à la phase aiguë, notamment lors
des HSA de faible abondance. Certains auteurs envisagent une angio-TDM pour les patients ayant
un scanner cérébral sans injection normal et un tableau clinique typique, des facteurs de risque
(crise comitiale, déficit neurologique, antécédent de MAV, HSA), une maladie génétique (type
Marfan ou polykystose ou consommation de cocaïne) ou en s’aidant du score d’Ottawa (âge
> 40 ans, douleur ou rigidité nucale, syncope, céphalée à l’effort, flexion nucale limitée, céphalée
en coup de tonnerre) afin de limiter l’utilisation des ponctions lombaires. Cette démarche est
en cours d’évaluation.
Ponction lombaire
Un tableau clinique évocateur avec un scanner normal impose la réalisation d’une ponction
lombaire (PL) atraumatique, par un opérateur entraîné. Le recueil de LCR clair élimine définiti-
vement le diagnostic. À l’inverse, la présence de LCR xanthochromique et incoagulable témoigne
d’une hémorragie méningée. Toute nouvelle dégradation neurologique dans les heures suivant
la PL impose la réalisation d’un nouveau scanner à la recherche d’un resaignement.
168 /
Traitement médical des hémorragies sous-arachnoïdiennes
Angioscanner
L’angioscanner avec reconstruction tridimensionnelle prend une place croissante, pour préciser
la taille, la forme du sac et du collet et les rapports de l’anévrisme avec les structures vasculaires
adjacentes (Figure 1). Il permet de visualiser les anévrismes de plus de 2 à 3 mm avec une
sensibilité et une spécificité satisfaisantes, de les mesurer même s’ils sont partiellement throm-
bosés, et d’évaluer leurs rapports anatomiques en obtenant des données tridimensionnelles. En
revanche, sa nature opérateur dépendant, rend parfois nécessaire le transfert des images natives
au neuroradiologue référent pour une relecture voire une nouvelle reconstruction.
Angiographie cérébrale
Une fois le diagnostic d’HSA établi, son étiologie sera précisée grâce à la réalisation, en urgence,
d’une angiographie cérébrale (Figure 1). Elle sera alors réalisée dans le premier temps du traite-
ment endovasculaire. Elle comporte une étude de quatre axes nourriciers du polygone de Willis
(artères carotides et vertébrales + tronc basilaire) avec des incidences multiples. Elle met en
évidence l’anévrisme artériel (image d’addition opacifiée au temps artériel précoce), précise son
volume, ses rapports avec les axes vasculaires, sa forme et le siège du collet.
Les facteurs de mauvais pronostic sont : un âge supérieur à 60 ans, un haut grade clinique à la
prise en charge, établi selon la classification de la WFNS (Tableau II), un score tomodensitomé-
trique de Fisher élevé (Tableau III), un resaignement, la taille et la localisation de l’anévrisme [4].
L’âge et l’hydrocéphalie à l’admission sont des critères pronostics associés [5].
1 Pas de sang
La protéine S100 bêta est sécrétée par le système nerveux central et peut être retrouvée dans
le plasma après lésion de la barrière hémato-encéphalique. Sa concentration est corrélée à la
gravité de l’atteinte cérébrale au cours des hémorragies méningées anévrismales. Son dosage
quotidien permet un dépistage des lésions ischémiques secondaires et fait partie des outils du
monitorage multimodal dédié aux patients souffrant d’une hémorragie méningée anévrismale [6].
/ 169
Partie 2 – Phase aiguë
Tout patient présentant une hémorragie méningée anévrismale doit être hospitalisé dans un
centre de référence comprenant des neurochirurgiens, des neuroréanimateurs et des neuro-
radiologues. Il doit être pris en charge en neuroréanimation ou dans une réanimation polyvalente
ayant une compétence spécifique en neuroréanimation. La prise en charge pluridisciplinaire a
pour but de prévenir et/ou de traiter les complications précoces, de surveiller et de traiter le
vasospasme. Le traitement précoce dans les 72 premières heures du sac anévrismal s’impose. Il
a pour objectifs d’éviter le resaignement et de permettre d’optimiser la pression de perfusion
cérébrale (PPC) ainsi que de prévenir les conséquences ischémiques de l’hypertension intra-
crânienne (HTIC).
Traitement endovasculaire
Depuis l’étude ISAT [8], le traitement endovasculaire est la technique recommandée lorsqu’elle est
possible. Son objectif est d’occlure l’anévrisme par des coils à détachement contrôlé, introduits par
voie endovasculaire, dans le sac anévrismal. Il se déroule en deux phases : microcathétérisme du
sac anévrismal et occlusion de la poche anévrismale (Figure 2). Les limites du traitement endovas-
culaire tiennent avant tout à la taille du collet surtout lorsqu’il est large. Néanmoins, la technique
de « remodeling », consistant à gonfler de façon temporaire un ballonnet en regard du collet
anévrismal lors du déploiement des coils, permet de traiter la plupart des anévrismes présentant
un collet large. La survenue d’une thrombose en cours d’embolisation doit faire envisager un
traitement par un fibrinolytique in situ ou par un agent antiplaquettaire. En cas de déficit neuro-
logique apparaissant dans les suites de la procédure, une exploration tomodensitométrique sera
impérativement réalisée afin d’éliminer un resaignement. Une thrombolyse peut se discuter dans
les 6 h suivant la constitution de la thrombose. Une dérivation ventriculaire externe (DVE) peut
être mise en place après l’embolisation. La pose se fera soit après l’arrêt et élimination de l’héparine
circulante, soit après antagonisation par protamine, ce qui n’est pas sans danger. Cela explique
pourquoi il est particulièrement indiqué de poser la DVE avant l’embolisation.
Traitement neurochirurgical
En cas d’engagement cérébral sur hématome, la réalisation d’une artériographie ne peut être
envisagée. Un angioscanner de qualité suffisante autorise, sans attendre, la prise en charge de
l’anévrisme. Dans ces formes graves, le pronostic dépend de la précocité du traitement chirurgical
qui consiste en la pose d’un clip sur le collet de l’anévrisme, précédée d’une évacuation de
l’hématome. Lorsque les malades présentent des signes cliniques (trouble de vigilance) ou para-
cliniques (scanner, doppler transcrânien) évocateurs d’œdème cérébral, la chirurgie devra être
évitée tant que possible car le risque de lésions liées aux écarteurs est trop important. En
revanche, la localisation sylvienne chez un malade classé WFNS 1 reste une indication intéres-
sante de chirurgie (Figure 2). Si le malade est pris en charge tardivement entre le 4e et le 8e jour
170 /
Traitement médical des hémorragies sous-arachnoïdiennes
Traitement différé
Lorsque les constantes vitales ne sont pas stabilisées dans les suites d’une cardiomyopathie
adrénergique ou bien d’un œdème pulmonaire neurogénique sévère, l’exclusion anévrismale sera
repoussée. Parfois, une abstention thérapeutique sera choisie si les lésions cérébrales initiales
consécutives à la rupture anévrismale sont trop importantes ou si le patient présente des signes
de gravité extrêmes (engagement cérébral) dans un contexte de coma profond.
/ 171
Partie 2 – Phase aiguë
Le doppler transcrânien (DTC) permet d’objectiver des signes suggérant une HTIC. En effet, la
technique a été décrite au début des années 1980. En utilisant l’effet doppler, on peut mesurer
la vélocité des globules rouges dans certains gros troncs artériels cérébraux. Le DTC est l’outil
de choix pour dépister les patients à risque d’ischémie cérébrale par HTIC et cibler les théra-
peutiques. Il n’y a pas vraiment de valeur seuil de vélocité ou d’index de pulsatilité [IP = (VS-
VD)/VM] définies dans la littérature ; cependant, certains travaux montrent qu’une vitesse dias-
tolique inférieure à 20 cm/s à l’arrivée à l’hôpital prévoit une évolution défavorable avec une
bonne sensibilité et spécificité. La diminution globale des vélocités intracérébrales et l’augmen-
tation de l’IP sont corrélées aux grades cliniques élevés et donc à une baisse de la perfusion
cérébrale [9]
L’hypertension artérielle (HTA), qui s’inscrit dans le cadre d’un réflexe de Cushing (hypertension
artérielle avec bradycardie et ataxie respiratoire) contribue au maintien d’un niveau minimal de
la pression de perfusion cérébrale (PPC) lors du saignement. Dans ces conditions, le traitement
de cette HTA relève d’un nécessaire compromis entre le risque de resaignement et celui d’hypo-
perfusion cérébrale.
172 /
Traitement médical des hémorragies sous-arachnoïdiennes
Resaignement précoce
L’objectif premier du traitement de l’anévrisme est d’éviter la récidive hémorragique par une
exclusion précoce. Le resaignement s’accompagne d’une mortalité de plus de 70 %. C’est la
raison pour laquelle les anévrismes doivent être traités, autant que faire se peut, dans les 48
premières heures. Le pronostic est considérablement aggravé par la survenue d’un resaignement.
Ce risque est maximal durant les 24 premières heures et concerne 5 à 22 % des patients selon
les études. Il existe un pic d’incidence durant les 2 premières heures de la prise en charge et
près d’un tiers des resaignements se produisent en préhospitalier. La fissuration anévrismale est
favorisée par les variations de pression transmurale définie par la différence entre la pression
régnant à l’intérieur du sac et la pression entourant l’anévrisme. À la phase initiale de la prise
en charge, le but de la réanimation est donc d’éviter les variations importantes de cette pression
transmurale, dont les deux déterminants sont la pression artérielle systolique et la pression
intracrânienne. Ainsi le drainage excessif d’une hydrocéphalie aiguë peut occasionner un resai-
gnement en diminuant rapidement la PIC, et le risque existe également lors d’une poussée
hypertensive. Mais la prévention du resaignement repose surtout sur l’exclusion précoce du sac
anévrismal.
Diagnostic du vasospasme
Le diagnostic de vasospasme est suspecté devant l’apparition d’une fièvre, de troubles de la
conscience, d’un déficit moteur ou sensitif, associés à une accélération des vélocités moyennes
du réseau vasculaire cérébral au doppler transcrânien [16]. Les valeurs seuils dépendent de chaque
territoire vasculaire, et la valeur seuil retenue pour l’artère cérébrale moyenne est de 120 cm.s-1
/ 173
Partie 2 – Phase aiguë
Prise en charge
Sa prévention repose sur l’utilisation de la « H thérapie » et d’un traitement anticalcique à
tropisme cérébral. La « H thérapie » associe hypertension artérielle, en conservant une normo-
volémie, avec un débit cardiaque normalisé. Le traitement vasoconstricteur par noradrénaline
est administré en réanimation, sous monitorage continu approprié, comportant au minimum la
mesure invasive de la pression artérielle. La triple « H » thérapie anciennement préconisée, qui
associe l’hémodilution, l’hypervolémie et l’hypertension artérielle n’a pas fait la preuve de son
efficacité et n’est ainsi plus considérée comme une stratégie adéquate [18]. L’administration
d’un anticalcique à tropisme cérébral, la nimodipine, est systématique pendant 21 jours, per os
et par voie intraveineuse au moindre doute sur le transit et l’absorption gastrique. Il s’agit d’un
inhibiteur calcique voltage-dépendant doté d’un effet vasodilatateur sur la microcirculation, qui
favorise le développement de la circulation collatérale et également d’un possible effet protec-
teur sur le parenchyme cérébral [19]. Un traitement par des faibles doses quotidiennes de statine
a aussi été proposé en prévention du vasospasme avec des diminutions significatives de concen-
tration de PS100 beta mais aucune preuve statistique d’amélioration du pronostic [20, 21].
Convulsions
Des crises convulsives peuvent survenir à divers moments après l’hémorragie méningée. Elles
sont dites précoces ou tardives selon leur apparition avant ou après les 12 à 24 premières heures.
Les convulsions précoces, présentes dans 6 à 25 % des cas, peuvent résulter de l’hypoperfusion
cérébrale lors du saignement initial et sont associées à un mauvais pronostic. Les convulsions
tardives peuvent apparaître suite à un resaignement [27]. Enfin, une maladie épileptique s’installe
chez 7 à 12 % des patients avec, comme facteurs prédictifs indépendants retrouvés, la présence
d’un hématome sous-dural ou d’un infarctus cérébral.
Répercussions cardiovasculaires
L’hyperstimulation du système sympathique lors de la rupture d’anévrisme responsable d’un
« orage » adrénergique, entraîne souvent des perturbations cardiovasculaires et respiratoires
avec parfois des conséquences majeures du point de vue pronostique. Des troubles du rythme
174 /
Traitement médical des hémorragies sous-arachnoïdiennes
FIGURE 3 Artériographie effectuée 6 jours après une hémorragie sous-arachnoïdienne par rupture
d’anévrisme, présentant une accélération franche des vitesses au Doppler transcrânien et mettant
en évidence un vasospasme avant (photo de gauche) et après le traitement par nimodipine in
situ (photo de droite).
cardiaque sont présents dans 50 % des cas au décours d’une HSA [28, 29]. Des anomalies du
rythme et de la conduction à l’étage supraventriculaire et ventriculaire sont fréquemment obser-
vées. Les anomalies intéressant le segment ST, l’onde T et l’intervalle QT sont les plus fréquentes.
Néanmoins, ces modifications sont rarement symptomatiques et souvent spontanément réso-
lutives. L’apparition d’un bloc auriculo-ventriculaire ou sino-auriculaire est exceptionnelle. Ces
troubles peuvent mettre en jeu le pronostic vital et justifier parfois la pose d’un stimulateur
endocavitaire (pacemaker). Les anomalies ECG ne sont pas prédictives de survenue d’ischémie
cérébrale ou de mauvais devenir neurologique [30]. L’« orage catécholaminergique » lors de la
rupture anévrismale et de la montée brutale et sévère de la PIC se caractérise, au niveau car-
diaque, par un relargage massif de catécholamines dans la paroi myocardique à partir des ter-
minaisons nerveuses sympathiques. Il en résulte une sidération myocardique responsable d’une
insuffisance ventriculaire gauche connue sous le nom de « myocardite adrénergique ». Le tableau
clinique est celui d’un état de choc cardiogénique d’origine centrale ou neurogène, accompagné
de modifications électrocardiographiques non-spécifiques à type de troubles de la repolarisation
d’une surcharge pulmonaire à la radiographie, d’une élévation de la troponine Ic et du BNP
(peptide natriurétique). Les données de l’échocardiographie confirment le diagnostic en objec-
tivant une altération segmentaire ou globale de la fonction ventriculaire gauche. L’insuffisance
cardiaque aiguë aggrave souvent le pronostic neurologique des patients et complique leur prise
en charge. La durée de l’insuffisance cardiaque est très variable : de quelques heures à 5 jours.
Son évolution est le plus souvent favorable sous traitement tonicardiaque avec récupération ad
integrum de la fonction myocardique. L’augmentation de la troponine Ic est fréquente au cours
de l’HSA. Elle ne s’accompagne pas toujours d’une défaillance ventriculaire gauche. Elle ne résulte
pas d’une insuffisance coronaire mais d’une atteinte directe des cellules myocardiques par la
vidange massive in situ des catécholamines. Aucune exploration radiologique cérébrale ou geste
sur l’anévrisme (hormis TDM ou DVE) ne peuvent être autorisés avant stabilisation
hémodynamique.
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Partie 2 – Phase aiguë
Répercussions pulmonaires
L’atteinte respiratoire est double. La première composante est l’altération de la mécanique ven-
tilatoire qui associe des troubles de la commande centrale de la respiration à l’obstruction
possible et inopinée des voies aériennes supérieures avec chute de langue et régurgitation-
inhalation, caractéristiques des états comateux. Cette situation est plus fréquente chez les
patients en grade neurologique élevé (IV et V). Cette situation nécessite de recourir à l’intubation
et à la mise sous ventilation mécanique.
La seconde composante est l’atteinte alvéolo-capillaire qui se manifeste par un œdème aigu
pulmonaire lésionnel dit neurogénique qui résulte de la rupture de la membrane alvéolo-capillaire
et de processus inflammatoires. Les alvéoles sont alors inondées d’un liquide riche en protéines.
L’œdème aigu pulmonaire neurogénique peut parfois s’associer à l’œdème aigu pulmonaire car-
diogénique. S’il est plus fréquent chez les patients en grade élevé de la WFNS, il peut toutefois
s’observer chez les bas grades [29]. Bien que corrélées au risque de survenue d’un vasospasme,
ces complications n’influencent pas le devenir neurologique des patients [31].
Hypovolémie
Le jeûne prolongé, les nausées, les vomissements, l’altération de la vigilance, le « Cerebral Salt
Wasting Syndrome », ou CSWS (syndrome de perte de sel d’origine centrale) sont responsables
d’une hypovolémie. L’usage de produits de contraste lors des examens radiologiques, de même
que le recours à l’osmothérapie, en particulier le mannitol, pour traiter l’hypertension intra-
crânienne et/ou l’engagement, responsables d’une polyurie osmotique, est une cause iatrogène
d’hypovolémie.
Dysnatrémie
L’incidence de l’hyponatrémie se situe entre 30 et 40 %. Elle est le plus souvent due à un CSWS.
Ce syndrome décrit en 1950 [32] est caractérisé par une fuite importante d’eau et sodium dans
les urines. Ce syndrome est la conséquence d’une hypersécrétion centrale de peptide natriu-
rétique, analogue du peptide natriurétique atrial. Il associe une hyponatrémie de déplétion et
une hypovolémie. Ces conditions augmentent la vulnérabilité cérébrale, surtout en cas de vaso-
spasme, pouvant générer ou étendre les lésions ischémiques. Longtemps considéré comme la
cause principale d’hyponatrémie, le syndrome de sécrétion inappropriée d’hormone antidiuré-
tique (SIADH), décrit pour la première fois en 1957, est en réalité nettement moins fréquent
que le CSWS lors de l’HSA. Le SIADH associe une hyponatrémie de dilution et un état d’hyper-
volémie. L’hyponatrémie, quel qu’en soit le mécanisme, peut aggraver l’état neurologique en
majorant l’œdème cérébral. Ces différences entre ces deux syndromes ne sont pas toujours
faciles à mettre en évidence, l’évaluation de la volémie pouvant être difficile dans un contexte
de réanimation. Néanmoins, les prises en charges s’opposent diamétralement. La surveillance au
moins quotidienne du bilan hydro-sodé et l’appréciation permanente de la volémie conditionnent
l’équipement du malade.
En cas de CSWS, le traitement consiste à restaurer le volume circulant avec des cristalloïdes et
la natrémie avec du NaCl iso-ou hypertonique de façon progressivement croissante. La perte de
sel persiste longtemps imposant des apports adaptés pendant plusieurs jours. On pourra utiliser
de la fludrocortisone ou de l’hemi-succinate d’hydrocortisone. Quant au traitement du SIADH,
il est basé sur la restriction hydrique qui peut avoir des répercussions catastrophiques en cas
d’erreur diagnostique.
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Traitement médical des hémorragies sous-arachnoïdiennes
Une insuffisance corticotrope par atteinte de l’axe hypothalamo-hypophysaire peut, dans cer-
tains cas, être une cause d’hyponatrémie. Elle doit être recherchée par un dosage du cortisol
plasmatique.
L’hypernatrémie peut être secondaire à un diabète insipide compliquant une atteinte de l’axe
hypothalamo-hypophysaire. Un dérèglement des osmorécepteurs centraux avec modification des
seuils de régulation pourrait aussi expliquer une partie des hypernatrémies observées. Un apport
massif de solutions riches en sodium est une cause iatrogène fréquente d’hypernatrémie s’accom-
pagnant dans ce cas d’une hyperchlorémie. Le diabète insipide se caractérise par une polyurie
hypo-osmolaire (densité urinaire proche de celle de l’eau), une hypernatrémie et une hypona-
triurèse à l’origine d’une déshydratation intracellulaire et d’un état d’hypovolémie. Il se traite
par compensation des pertes hydriques par des solutés hypotoniques, voire de l’eau lorsque c’est
possible et par l’administration de l’hormone antidiurétique (Minirin®).
Hydrocéphalie chronique
Une hydrocéphalie peut persister dans les semaines qui suivent la rupture anévrismale. Elle est
liée à la fibrose des espaces sous-arachnoïdiens et à une prolifération inflammatoire des cellules
des villosités arachnoïdiennes. Elle est plus fréquente chez les patients en grade élevé (WFNS).
Au plan clinique, les troubles de la conscience et les troubles psychiatriques organiques dominent.
C’est une hydrocéphalie communicante qui nécessitera la mise en place d’une dérivation
ventriculo-atriale ou ventriculo-péritonéale et peut transitoirement être traitée par la réalisation
de ponctions lombaires évacuatrices.
Reperméabilisation du collet
Une recirculation de l’anévrisme peut survenir au niveau de son collet dans les mois suivant le
traitement. Son incidence est devenue faible avec les nouveaux matériaux d’embolisation. Néan-
moins, sa recherche impose la réalisation de contrôles répétés (la plupart du temps en ARM)
chez les patients embolisés. La fréquence de ces examens ira en décroissant avec le temps en
cas de normalité.
La sédation des patients présentant une HSA grave gêne la surveillance clinique et impose un
monitorage continu des paramètres hémodynamiques, respiratoires (dont le CO2 expiré) et la
mesure continue de la pression intracrânienne et de la pression de perfusion cérébrale (PPC). Un
vasospasme sera recherché sur le DTC quotidien et au moindre doute, on réalisera un angio-
scanner, voire une angiographie (réalisée à titre systématique quelles que soient les données du
DTC à J7). Le traitement hémodynamique à haut niveau de PAM du vasospasme peut être un
facteur favorisant le développement d’un œdème cérébral vasogénique dans les zones saines, et
il est à noter que le traitement pharmacologique du vasospasme peut compromettre la PPC en
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Partie 2 – Phase aiguë