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Ayant trouvé passionnant cet ouvrage de Daniel
Hameline, j'ai également éprouvé le besoin de
créer une "table des matières", une "carte" qui
reprenne les chapitres et nombreux sous-
chapitres des propos de l'auteur afin de mettre en
lumière la jubilante complexité de ses réflexions.
De fil en aiguille, au lieu de libeller un piètre
"résumé", j'ai repris, chaque fois, quelques
extraits du texte flamboyant d'origine (avec de
très infimes adaptations et sans expliciter les sauts
effectués ...) afin d'avoir à disposition des points
de repères dans le territoire défriché, déchiffré
par le professeur émérite de l'université
genevoise.

Accès direct aux présentations …


Pour rappel, ces considérations datent de 1985.
Cependant, à plusieurs reprises, elles nous
… de l'auteur semblent le miroir d'une certaine actualité, et
… de l'ouvrage parfois sur des thèmes autres que celui de la
pédagogie !
Aussi, je mets à disposition ce powerpoint en André Glardon
souhaitant recevoir en retour votre découverte
d'erreurs, de bugs ou de compléments à y apporter. andremichel.glardon@gmail.com
D'avance merci ! 1
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Daniel Hameline est né en 1931. Il a été directeur des études à l'Institut supérieur de
pédologie, puis professeur à l'Université de Paris-Dauphine. De 1982 à 1997, il a été
professeur ordinaire de philosophie de l'éducation et d'histoire des idées pédagogiques
a l'Université de Genève. Il est l'un des fondateurs des Archives de I'Institut Jean-
Jacques Rousseau et du groupe de travail sur l'histoire de l'école et de la pédagogie de
la Société suisse pour la recherche en éducation.
II a publié de très nombreux ouvrages traduits en plusieurs langues dont Les objectifs
pédagogiques en formation initiale et continue, aux éditions ESF qui en est à sa
douzième édition.

http://www.unige.ch/fapse/life/archives/livres/alpha/H/Hameline_2000_A.html

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Préambule Conclusion
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Commencemt
de la fin
"Les Lumières"
Courants et contre-courants ds ou
ou
la pédagogie contemporaine fin du
l'avènement de
commencemt ?
l'idée moderne Daniel Hameline L'éducation et
de l'éducation ESF - 2000 (texte de 1985)
la condition
post-moderne
2

L'heure des
sciences
humaines
ou
Cliquer sur cette plage
la pédagogie Cliquer sur cette plage
pour lire la présentation sous influence pour visualiser quelques
de Philippe Meirieu points de repères temporels

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1985 Philippe Meirieu - L'Ecole, mode d'emploi

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Epoque postmoderne
Commencement
de la fin
ou 1979 Neil Postman - Enseigner, c'est résister
fin du
commencement ? 3 1968 Roger Cousinet - L'Education nouvelle
L'éducation
et la condition
post-moderne
1966 Célestin Freinet - La méthode naturelle

L'heure des 1905 Edouard Claparède - Pédagogie et psychologie de l'enfant


sciences humaines
ou Mise en place des grands systèmes scolaires
2 1880
la pédagogie sous
sous le visage que nous leur connaissons encore aujourd'hui
influence

1861 Herbert Spencer - De l'éducation

Turgot, ministre de Louis XIV


1775 Mémoire réclamant une "éducation nationale"
"Les Lumières"
ou
l'avènement de 1 1769 James Watt - Machine à vapeur -> révolution industrielle
l'idée moderne de
l'éducation 1762 Jean-Jacques Rousseau - Emile / Contrat social

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Préambule

1.
"Courants et 4.
Contre-courants" La modernité

2. 3.
"Pédagogie" "Contemporaine"

Le titre qu'il a été convenu de donner à cet ouvrage n'est évident qu'à une lecture superficielle.
C'est donc faire preuve d'une prudence intellectuelle élémentaire que de s'attarder quelques instants sur
les termes qui le composent. On ne perd jamais son temps à essayer de lever un peu l'équivoque
"naturelle" des mots.

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Délire utopiste

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Petite théorie Les 3 lieux communs et pessimisme conservateur:
une objective convergence
préalable du "lieu de la modernité
commun" éducative Une synthèse
fictive ?

Relire le déroulement 1.2.3. La réussite


L'égalitarisme, est sélective
Relire l'origine Relire l'issue Préambules une songerie
dangereuse
1.1.1.
Progrès Le paradoxe
1 Jusqu'où faut-il
de l'homme
Instruire
La méthode à la recherche d'elle-même

et de la méthode
le peuple ?
L'instruction est nécessaire, 1.1.
elle est possible Le courant
"Les Lumières"
1.2.
progressiste ou Les contre- 1.2.2.
et ses 3 courants : L'éducation
1.1.2.
"lieux
l'avènement
une n'est pas
Educabilité
communs": de l'idée insistance toute-
progrès, anti- puissante
L'instruction doit devenir
éducabilité,
moderne de
le fait de tous progressiste
démocratie l'éducation Fatalité
de l'atavisme
"Vocation"
contre
formation
1.1.3.
Démocratie 1.2.1.
Intégration sociale et
Vous avez dit Les enfants
Du progrès aux progrès,
autonomie personnelle : du progressif au progressiste
"progrès", demeurent
même mouvement mais nous des êtres
lisons que l'on "corrige"
"menace"
La démocratie,
Passion de l'idée progressiste, L'instruction
idée combattue
passion de l'espérance ? ne fait pas de miracles
mais dominante
"Le Dernier Jour
Pro patria 1
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4 est commencé …"
et humanitate
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Primauté de la L'horticulture: Science

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science: réalité, modèle, et
"lieu commun" accepté métaphore totalitarisme
Effets paradoxaux
L'enfant moderne,
des sciences "sollicitées"
miroir de l'adulte moderne
"Orienter": A quoi ça sert ?
Préambules Cautionner des
améliorer rendement 2.3.5.
mœurs nouvelles
et bien-être 2.1.1. Des sciences
L'éducation, 2 prises dans
invest. utilitaire la dérive Lew
in ?
L'heure des culturelle

Fre
Exacerber les identités
sciences

ud
2.3.4.

?
Imiter les rivaux

humaines 2.3. Des "vérités"

Piaget ?
2.1.
2.1.2. La pédagogie salutaires
La
L'école proie des
scolarisation,
ou sous Mais en
nationalismes
affaire d'Etat la pédagogie influence pratique ?
Le
wi
L'éducation pour la concorde: sous influence n
force ou mollesse ? 2.3.3.
2.1.3. Contrôle de Les sciences

Freud
Des démocraties l'émancipation humaines,

"lieux communs"
indéniable

préposés et leurs
prétotalitaires ? Pasteurs

Les nouveaux
Les décideurs et
Des sciences,
miroir d'une

2.2. d'âmes stimulant


leurs experts
culture

L'essor des

2.2.3.
2.2.1.

t
ge
sciences Pia
humaines L'humain est
transformable
2.3.2.
L'école de la réussite
La singulière
persistante
Rhapsodie
2.2.2. du progrès
du singulier
Un nouvel art de vivre Une ère nouvelle
et ses ambiguïtés Education et société Education et psychologie 2.3.1.
Education et culture(s) Education et psychanalyse Un pluriel au
Un nouveau rapport
de l'école Education et langage demeurant
avec la famille 1
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4 singulier
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L'exemple de la

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pédagogie

itt
3.3.3.

qu
par objectif
La rationalité
Double perversion 3.1.1. Comment faire éducative et
du crédit de nouveau crédit le risque
aux autres ? d'effets
Entre utopiste
pervers
3.1.2. Le cercle du 3 et technocrate :
le bricoleur
crédit et son

de la rénovation des plans d'étude


Commencemt

Du bon usage et des nuisances


existence paradoxale
3.1. de la fin 3.3.
La révision 3.3.2.
Le mirage du planétaire La ou des "lieux Réorienter les
postmodernité :
La raison a partie liée
entre fin du communs" tâches de
avec la violence dans l'éducation
incrédulité et commencemt l'Education scolaire ?
crédulité
3.1.3. La rhapsodie du
? nouvelle
L'éducation et la Le retour
progrès a subi la
condition à la didactique :
passion de la violence un phénomène salutaire
postmoderne
mais ambigu
La collusion explosive 3.1.4. La véridique 3.3.1.
de la militance habitation du monde Pédagogie Un courant qui n'est
et du soupçon pas d'abord
3.2. et dérive
pédagogique
Contradictions culturelle
éducatives L'école active :
dans la une idée-force
3.2.1. L'autonomie 3.2.3. L'injonction et un malentendu
postmodernité
le
par l'intégration ub permissive
Do ction ire
on to
inj radic
3.2.2. L'injonction t
con
autoritariste
Les parents ont changé Le temps des "gagneurs" "Fichez-leur la paix"

L'école soumise au double blind L'école, vieille dame …


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"Bien dans sa peau"
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1 2 3 Concl Dernière dia Réhabilitation du pitre
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Conclusion

1. 4.
L'éducateur est un Comprendre la
insurgé malfaisance

2. 3.
Le réenchantement La cantique
païen haïssable

Il est temps, sans doute, de tirer de toutes ces considérations quelque morale provisoire.
Si, par ce dernier terme, je reprends à Descartes sa célèbre formule, ce n'est pas d'abord pour souligner
l'incertitude des temps, la fragilité de ses valeurs, la généralisation du doute et la fatalité de
l'indifférence. Je veux, au contraire, rappeler la primauté en éducation de la volonté bonne. L'adage est
alors sans doute plus kantien que cartésien. Mais la référence théorique ici n'est pas l'essentiel.

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Préambule

1.
"Courants et 4.
Contre-courants" La modernité

2. 3.
"Pédagogie" "Contemporaine"

Le titre qu'il a été convenu de donner à cet ouvrage n'est évident qu'à une lecture superficielle.
C'est donc faire preuve d'une prudence intellectuelle élémentaire que de s'attarder quelques instants sur
les termes qui le composent. On ne perd jamais son temps à essayer de lever un peu l'équivoque
"naturelle" des mots.

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Préambule p. 15
1. "Courants et contre-courants" p. 15

Mélange de sentiments et d'idées appelant souvent leur contraire, soir dans le choc de la polémique et
des débats, soit dans le jeu plus lent de la conscience commune et de ses phases successives, l'opinion
est marquée par deux phénomènes qui se développent l'un par l'autre:
la simplification des idées et, par le fait même, leur obsolescence, qui conduit à leur remplacement.
L'opinion vit de slogans, mais se trouve dans la nécessité d'en changer, tant les réalités, comme les
manières dont les voient les groupes sociaux antagonistes, ne peuvent se réduire à une expression par
trop simple des choses.
Le "contre-courant" évoque, soit l'échéance quasi horlogère du reflux, avec le balancement régulier
d'une opinion par son contraire, soit ces phénomènes marginaux que je jeu des courants provoque au
cours de la rencontre avec les berges et les obstacles: le flot dominant y engendre épisodiquement
l'inversion de son propre passage.
En parlant de "courants" et de "contre-courants", tout en mobilisant une imagerie latente qui s'est pas
sans effet de sens, je vous invite à une lecture de l'histoire dont la priorité est de constater et
comprendre, même si la chose est difficile et même si elle ne nous interdit pas, en un second temps, de
juger.

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Préambule p. 15
2. "Pédagogie" (1/2) p. 16

Ces courants et ces contre-courants, c'est dans la pédagogie que nous cherchons à en déceler l'existence.
L'emploi du terme "pédagogie", depuis qu'il s'est généralisé au XIXe siècle, est sujet à une constante
dérive. Le langage ordinaire tend à en faire le simple substitut du mot "éducation". Si nous voulons ici
nous montrer rigoureux et en tirer intellectuellement profit, il nous faut éviter la confusion de ces deux
termes.
Rappelons que parler de "pédagogie", c'est se référer au discours que toute société entretient sur
l'éducation, en particulier pour porter sur les pratiques d'élevage, d'instruction, de formation qui s'y
effectuent, les jugements de valeur à travers lesquels les pratiques sont appréciées comme plus ou moins
efficaces, plus ou moins légitimes, plus ou moins appropriées, plus ou moins conformes à des idéaux et à
des fins.
La pédagogie ne se borne pas à énoncer, même à décrire, les pratiques éducatives. Entre les faits
éducatifs et les normes pédagogiques, l'écart est constant. Il a parfois la dimension d'un fossé. Ce que
l'on fabrique effectivement ne correspond jamais, ni aux intentions déclarées à l'avance, ni aux propos
que l'on tient après coup pour dire -et indissociablement pour ne pas dire- ce qui s'est passé dans la
pratique éducative.
Retenons tout au moins ceci: il est inévitable, et même opportun, qu'une société, au vu de ce qu'elle
fabrique en prétendant éduquer, développe un "discours" où l'on tente d'exprimer cette activité
essentielle mais au demeurant énigmatique et ambivalente.

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Préambule p. 15
2. "Pédagogie" (2/2) p. 17

Distinguons, pour faire bref, deux modes principaux suivant lesquels la pédagogie s'institue dans la vie
sociale.
Il y a "pédagogie" dès lors qu'une démarche rationnelle s'élabore, destinée à penser l'éducation,
essayant d'empêcher, autant que faire se peut, qu'on se contente d'«avoir des idées», voire, ce qui est
pire de «se faire des idées» à son sujet. En rupture avec l'appréhension commune et habituelle des
choses, la pédagogie constitue alors un exercice de l'intelligence qui peut être qualifié de philosophique.
Mais la pensée de l'éducation rencontre effectivement comme obstacle majeur, non la carence, mais la
prolifération des idées concernant l'éducation. J'aime dire souvent, avec Bertrand Schwartz, que tout
praticien de l'éducation, même le plus ombrageux vis-à-vis du pouvoir des théoriciens, est lui-même,
sans qu'il en ait toujours une conscience claire, un "impénitent consommateur de théories".
Groupes et individus ne manquent pas d'avoir, de l'éducation, ne serait-ce qu'une «petite idée». Et la
«petite idée» -chacun le sait- est précisément celle dont on démord le plus difficilement. La pédagogie,
autant que la pensée de l'éducation et l'ascèse intellectuelle à quoi elle oblige, c'est cet ensemble flottant
et mal saisissable d'idées conformes ou anti-conformes auxquelles groupes et individus adhèrent avec
plus ou moins de détermination.
Les aventures de la pédagogie ne constituent pas un objet séparé de l'histoire tout court, même s'il est
commode de décerner à la généalogie des grands pédagogues et au cortège de leurs controverses,
comme une sorte d'autonomie au sein de cette histoire.

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3. "Contemporaine" (1/2) p. 18

De quoi et de qui sommes-nous contemporains ? La réponse à cette question dépend, on en conviendra,


de la conception que l'on se fait du temps humain et de l'image qui hante notre manière de lire le
déroulement de l'histoire. Or, deux lectures sont possibles.
Une image s'impose d'emblée, qui dicte une première lecture: le kaléidoscope du changement. L'histoire,
créditée d'une accélération impressionnante et vertigineuse, serait d'abord une succession de ruptures,
voire de fractures. Celles-ci sont, en un premier temps, imperceptibles, puis brusquement rendues
spectaculaires.
Un exemple parmi d'autres …
Les années vingt seront judicieusement qualifiées par Jean-François Saffrange d'«années folles de la
pédagogie». La déflagration semble entraîner les courants pédagogiques dans une véritable turbulence
intellectuelle, dans une activité novatrice, fébrile et généreuse, non sans susciter réserve et résistance.
Mais les années trente précisément verront la déflation des enthousiasmes et le désenchantement des
volontarismes. Les structures scolaires auront montré leur consistance, leur capacité de résister et de
survivre aux intentions de novateurs trop crédules, trop imbus d'une confiance naïve dans la force
spontanée de leur cause. Il leur faut apprendre que les institutions humaines déroulent une histoire plus
lente que celle des événements, et que les idées, fussent-elles justes, ne mènent pas le monde.
A l'histoire lue comme une série de ruptures fracassantes, se substitue une histoire lue comme une
évolution plus génétique. Les modifications y sont réelles et irréversibles, mais l'amplitude des
changements de fond ne saurait être perçue à l'échelle d'une génération.

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3. "Contemporaine" (2/2) p. 18

Il me semble, en conséquence, que nous coïnciderons mieux avec ce qui nous arrive -et même quand la
nouveauté nous en paraît troublante- en nous acceptant contemporains de tous ceux qui ont été les
agents mais aussi les acteurs de ces mouvements historiques dont dépendent aujourd'hui nos projets
et notre intelligence des choses.
Ainsi nous répondrons à deux questions légitimes quoique bien intimidantes :
- Qu'est-ce que nous voulons, et qui nous alimente en idées pour nos immanquables songeries ?
et
- Qu'est-ce que nous fabriquons effectivement, et qui nous a fourni les mots pour le dire ?

NB :
Ne pas oublier que le texte de Daniel Hameline date de 1985, d'où "l'arrêt" de sa réflexion au dernier
quart du vingtième siècle.
A relever que dans l'édition ESF datant de 2000, l'auteur a ajouté 2 textes qui prolongent celui de 1985 :
- La République éduquera-t-elle encore ? (1994)
- Instruction, prospérité, progrès (1997-1998)

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Préambule p. 15
4. La modernité (1/2)p. 20

Mon hypothèse de travail se présente alors de la manière suivante: nos entreprises éducatives actuelles
peuvent être largement tenues pour la poursuite de cette initiative "moderne" en laquelle le XIXe siècle
trouve sa qualité de siècle éducateur. Nous appartenons encore globalement à cette période de l'histoire
où les sociétés s'organisent dans la recherche d'une rationalité jusque-là inconnue, en véritables sociétés
éducatives sous le signe d'une scolarisation progressivement généralisée et irréversibles.
Et ce véritable tournant de l'histoire est localisé, il est daté. Il s'opère en Europe occidentale et aux Etats-
Unis. On admet communément que les sociétés modernes, avec l'image de l'homme moderne qu'elles
engendrent et dont elles s'alimentent, s'instaurent vraiment et généralisent leur "modèle" dans la
seconde moitié du XVIIIe siècle.
Si l'on se met, avec toutes les réserves indispensables, en quête d'une date symbolique qui permettrait
de fixer ce tournant dans l'imaginaire, nous pouvons, bien sûr, évoquer 1762, l'année où paraissent Emile
ou de l'éducation et le Contrat social de Jean-Jacques Rousseau. Mais ce pourrait être, et plus
judicieusement peut-être, 1769, date à laquelle James Watt met au point la machine à vapeur et en fait la
première machine-outil d'une révolution industrielle qui sera aussi, on le sait, une révolution sociale.
Je parle de "révolution". Il est admis que la modernité trouve aussi son origine dans cet immense
déclenchement, largement anticipé et annoncé d'ailleurs dans les temps qui le précèdent, que
constituent la Révolution française, l'expansion impérialiste de la "Grande nation" et le déferlement de
ses idées sur le reste de la planète. 1791 sera sans doute alors, avec une particulière puissance
métaphorique, la date où se consomme une rupture qui n'aura pas fini d'être parlante.

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Préambule p. 15
4. La modernité (2/2)p. 21
Le parricide royal consacre la société dans son statut d'orpheline volontaire et vouée désormais à la fuite
en avant d'une émancipation perpétrée sous ses yeux, une émancipation fascinante et effrayante tout à
la fois.
Je retiendrai pour ma part une autre date pour ce repérage symbolique. En 1775, Turgot, ministre de
Louis XVI, remet à ce dernier un mémoire où il réclame de manière pressante l'établissement d'une
"éducation nationale" couvrant l'ensemble du territoire et toutes les classes de la société:
"Je crois ne pouvoir rien vous proposer de plus avantageux pour votre peuple que de faire donner à tous
vos sujets une instruction qui leur manifeste bien les obligations qu'ils ont à la société et à votre pouvoir
qui les protège, les devoirs que ces obligations leur imposent, l'intérêt qu'ils ont à remplir ces devoirs pour
le bien public et le leur propre."
Le surcroît d'émancipation que les modernes vont passionnément et obstinément requérir, a partie liée
avec le surcroît d'encadrement dont ils se montreront les inlassables organisateurs.
Cette modernité éducative dont je vous presse de vous sentir les contemporains, je la perçois divisible en
trois âges, non sans grands risques d'arbitraire :
1. Le 1er âge va de la philosophie des Lumières et de la première révolution industrielle, jusque vers la fin
du XIXe siècle.
2. C'est autour de 1880, en effet, que s'effectue la mise en place des grands systèmes scolaires sous le
visage que nous leur connaissons encore aujourd'hui, et l'industrie connaît sa deuxième révolution.
3. Quant à nous, dans le dernier quart du XXe siècle, sommes-nous en train de prolonger ce 2 ème âge de la
modernité, ou, au contraire, entrons-nous, avec la société post-industrielle, dans une "condition post-
moderne".
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Tableau des "3 âges" TdM Pré


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Délire utopiste

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Petite théorie Les 3 lieux communs et pessimisme conservateur:
préalable du "lieu de la modernité une objective convergence
commun" éducative Une synthèse
fictive ?

1.2.3.
Relire le déroulement La réussite
L'égalitarisme, est sélective
Relire l'origine Relire l'issue Préambules une songerie
dangereuse
1.1.1.
Progrès
1 Jusqu'où faut-il
Le paradoxe
de l'homme
Instruire
La méthode à la recherche d'elle-même

et de la méthode
1.1. le peuple ?
L'instruction est nécessaire,
elle est possible Le courant
"Les Lumières"
1.2.
progressiste ou Les contre- 1.2.2.
et ses 3 courants : L'éducation
1.1.2.
"lieux
l'avènement
une n'est pas
Educabilité
communs": de l'idée insistance toute-
progrès, anti- puissante
L'instruction doit devenir éducabilité,
moderne de
progressiste
le fait de tous démocratie l'éducation Fatalité "Vocation"
de l'atavisme contre
formation
1.1.3.
Démocratie 1.2.1.
Vous avez dit
Intégration sociale et Du progrès aux progrès, Les enfants
"progrès", demeurent
autonomie personnelle : du progressif au progressiste
même mouvement mais nous des êtres
lisons que l'on "corrige"
"menace"
La démocratie,
Passion de l'idée progressiste, L'instruction
idée combattue
passion de l'espérance ? ne fait pas de miracles
mais dominante

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"Le Dernier Jour
Pro patria 1 4 1 2 1 3 1 3 1 4
est commencé …"
et humanitate TdM Pré
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1. "Les Lumières" ou l'avènement de l'idée moderne de l'éducation
Préambules

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"Les Lumières"
ou
l'avènement
de l'idée
moderne de
l'éducation

Préambules

Petite théorie Les 3 lieux communs


préalable du "lieu de la modernité
commun" éducative

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1. "Les Lumières" ou l'avènement de l'idée moderne de l'éducation p. 23
Préambule 1 - Petite théorie du "lieu commun" (1/2) p. 23

Pour tenter d'analyser les idées pédagogiques qui constituent aujourd'hui le vivant héritage du premier
âge de la modernité, je vais employer un concept sur lequel il est nécessaire de m'expliquer un peu. Je
vais dire que nous avons ainsi hérité de trois "lieux communs". Dans le langage courant, ce terme
résonne de manière péjorative. "Proférer des lieux communs", c'est dire des banalités et, parfois non
sans une suffisance imbécile.
Pour ma part, c'est en un sens technique que je prends ce terme de "lieu commun". J'y retrouve ces topoï
dont Aristote déjà proposait la théorie et qui jouent un grand rôle dans la rhétorique grecque et latine.
Disons, pour être simple, que lorsque nous exposons une idée, il va de soi que nous ne pouvons tout dire
de ce que cette idée implique et même de ce sur quoi cette idée se fonde pour qu'on la présente comme
juste.
Si j'écris, par exemple, une phrase comme "l'école a pour mission de permettre aux enfants l'expérience
de l'autonomie", je me donne au moins trois lieux communs de référence. Premièrement, que l'école
accomplit des missions. Deuxièmement, qu'elle offre des instances où des expériences sont possibles et
souhaitables. Troisièmement, que l'autonomie des individus représente une valeur humaine telle que
l'enfance ne saurait être privée.
Sans l'étayage implicite de ces trois propositions, ma phrase est inintelligible et illégitime. Nous dirons
que ces propos en assurent le "lieu commun". Ils relèvent en effet d'une espèce d'évidence partagée, non
offerte à la critique et qui survivra à cette dernière, si celle-ci tend à s'exercer. Car ces propositions sont
bien sûr critiquables.

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Préambule 1 - Petite théorie préalable du "lieu commun" (2/2) p. 24

Mais celui qui s'attaque aux lieux communs d'une culture ou d'un groupe humain donné, apparaît
souvent comme un gêneur. On l'accusera de prendre un plaisir malsain à soulever des questions qui ne se
posent pas. Effectivement, ces questions "ne se posent pas". L'indicatif ici est un impératif déguisé.
Comment survivrait une société ou un groupe si l'on passait son temps à arpenter leurs lieux communs
pour en prendre impitoyablement la mesure ?
Toute société, pour le meilleur ou pour le pire, vit ses lieux communs. Prolongeons la métaphore du lieu,
et disons que ceux-ci constituent le "socle" des croyances nécessaires à l'action, la "plate-forme" invisible
sur laquelle peut s'établir un consensus au risque d'une méconnaissance de ce qui effectivement se
fabrique.
Le "lieu commun" fournit deux fondements à l'élaboration des idées:
- un principe d'intelligibilité, pré, para et postcritiques sous le signe de "ça va de soi que, etc.", et
- une hiérarchie des valeurs, à laquelle nous nous référons constamment, sans qu'il soit besoin d'être
explicite, ce qui nous arrive et ce que nous faisons.

Préambules

Petite théorie Les 3 lieux communs


préalable du "lieu de la modernité
commun" éducative

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Préambule 2 - Trois lieux communs de la modernité éducative p. 24

Trois lieux communs me paraissent dominer l'idée que les sociétés modernes se font de l'éducation
scolaire qu'elles entreprennent, peu à peu et irréversiblement, d'organiser. Ces sociétés croient
- au progrès,
- à l'éducabilité humaine,
- à la supériorité de la démocratie égalitaire.
Voilà, en quelque sorte, le trépied sur lequel s'établit l'idéologie progressiste de l'éducation et avec
laquelle, quelles que soient nos convictions personnelles, nous avons encore à composer aujourd'hui
sous peine de nous exclure du courant où nos entreprises éducatives cherchent leur bien-fondé.
Mais si ces trois lieux communs fondent une idéologie dont la célébration répétitive, tout au long du XIXe
siècle, montre bien qu'elle était dominante, tant s'en faut que l'adhésion à ce courant soir unanime et
dénuée de réticence.
Certains ressentent aujourd'hui fortement, douloureusement même, l'ambivalence du propos
pédagogique commun. Nous cherchons à redéfinir les missions prioritaires, comme on dit, de
l'instruction publique. Nous réexaminons la légitimité des grandes options méthodologiques par la
critique de leurs présupposés. Il est instructif de relever que la plupart de nos débats sont des débats
plus que centenaires.
Préambules

Petite théorie Les 3 lieux communs


préalable du "lieu de la modernité
commun" éducative

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1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie

1.1.
Le courant progressiste
et ses 3 "lieux communs":
progrès, éducabilité, démocratie

1.1.1. 1.1.2. 1.1.3.


Le lieu commun du Le lieu commun de Le lieu commun de
progrès l'éducabilité la démocratie

Relire l'origine Intégration sociale Du progrès


Relire l'issue L'instruction L'instruction
et aux progrès,
est nécessaire, doit devenir
autonomie personnelle : du progressif
elle est possible le fait de tous
même mouvement au progressiste
Relire le déroulement
La méthode
à la recherche La démocratie, Passion de
d'elle-même idée combattue l'idée progressiste,
mais dominante passion
de l'espérance ?

Pro patria
et humanitate

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1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie
1.1.1. Le lieu commun du progrès p. 25

Décrivons d'abord, pour chacun des 3 lieux communs du courant progressiste, le courant dominant
puis, de manière symétrique, la persistance et le développement de croyances inverses qui, dès le XIXe
siècle, en contrarient le triomphe.
Et tout d'abord, le XIXe siècle éducatif croit communément au progrès. Avec une constance admirable, ce
thème hante les discours officiels, les toasts de banquet et les éditoriaux des revues pédagogiques…

1.1.1.
Le lieu commun du
progrès

Relire l'issue Relire l'origine

Relire le déroulement

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1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie
1.1.1. Le lieu commun du progrès p. 25

1.1.1.1. Relire l'issue p. 25


Ce lieu commun du progrès fonde une triple croyance : l'issue, le déroulement, l'origine.
L'issue est magnifiée de manière inconditionnelle. Elle fait l'objet d'une sorte de crédulité messianique
dont la puissance est celle d'un sentiment. Ce qui vient "après", par ce seul fait, est meilleur que ce qui
est venu "avant" : l'histoire est une histoire qui monte.
Une société qui instruit -"cela va de soi"- ne peut être que supérieure à une société qui maintient ses
membres dans l'ignorance. Ce qu'accomplit la société éducatrice n'est pas autre chose que le salut de
l'espèce humaine.

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1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie
1.1.1. Le lieu commun du progrès p. 25

1.1.1.2. Relire le déroulement (1/2) p. 27


Ce lieu commun du progrès fonde une triple croyance : l'issue, le déroulement, l'origine.
La relecture de l'issue reçoit sa confirmation par une relecture du déroulement. Un faisceau de preuves
est disponible pour étayer la croyance. Les progrès viennent à l'appui du progrès. Et ils sont, de toute
évidence, spectaculaires, tout au long de ce premier âge de la modernité, tant dans le domaine des
inventions scientifiques et techniques que dans celui de la santé, du commerce, des communications. Les
sociétés industrielles ont le moyen d'assurer la continuité du progrès.
Les hommes du XIXe siècle peuvent amplifier et mettre en œuvre le dessein des émancipateurs du siècle
précédent. Ceux-ci leur ont transmis leur foi neuve et novatrice en la rationalité potentielle des choses
humaines. "ordre et progrès" sera la devise d'Auguste Comte et du positivisme. Réinterpréter, expliquer,
développer, produire, maîtriser : les miracles modernes sont non seulement possibles, ils sont là. Parmi
ces miracles : l'instruction.
On mesure difficilement aujourd'hui le capital de confiance qu'il a fallu aux sociétés occidentales pour
réaliser les énormes investissements budgétaires qu'appelait l'équipement scolaire des nations. En
France, au moment où l'enseignement élémentaire est institué en véritable service public, la loi de 1878
sur la construction des écoles entraîne en 5 ans, de la part des communes, des départements et de l'Etat,
une dépense globale de plus de 360 millions de francs.

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1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie
1.1.1. Le lieu commun du progrès p. 25

1.1.1.2. Relire le déroulement (2/2) p. 27

Mais, en même temps, la prise en charge rationnelle de l'instruction du peuple exigeait des changements
de mentalité qui nécessitèrent de vastes et opiniâtres campagnes pour convaincre, presser, obliger. Ainsi,
préparant les esprits à la loi de 1882 qui rend obligatoire la fréquentation de l'école, Jules Ferry évoque
l'inévitable menace du gendarme, des poursuites et des procès.
Et cette militance "va de soi". Les résultats ne sont-ils pas déjà tangibles ? Un peuple instruit n'est-il pas
un peuple plus libre, un peuple plus industrieux, un peuple plus heureux ? La conjonction des forces
motrices de l'instruction étaie la croyance au progrès en lui donnant le tour pragmatiste, utilitaire,
bientôt organisationnel, sinon managérial, qui l'assure en sa sécularité.

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1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie
1.1.1. Le lieu commun du progrès p. 25

1.1.1.3. Relire l'origine p. 28


Ce lieu commun du progrès fonde une triple croyance : l'issue, le déroulement, l'origine.
La troisième composante de cette croyance au progrès, c'est l'atténuation progressive du pessimisme que
le christianisme entretenait concernant les origines.
Relecture de l'origine : les hommes ne sont mauvais qu'artificiellement. Rendez-les à leur nature, et vous
les découvrirez fondamentalement aptes au bien, orientés spontanément et irréversiblement vers lui.
Certes, jusqu'ici, les choses ne se sont pas passées le mieux du monde. Mais ça n'est pas la faute aux
braves gens. Ce sont les sociétés humaines qui ne se sont montrées ni rationnelles ni raisonnables.
Ça n'est surtout pas la faute des enfants. Le XVIIIe siècle, avec Rousseau principalement, nous invente
l'enfance moderne. Mais le XIXe siècle réalise en quelque sorte le modèle. Les enfants ne sont plus
l'avatar, prolifique et menacé, destiné à renouveler l'espèce vaille que vaille. Bien précieux, miroir
d'adultes désormais plus inquiets de leur image, l'enfant bourgeois devient la référence, et l'enfance,
célébrée pour elle-même, s'inscrit dans l'ambivalence moderne : être le temps du bonheur mais en
même temps préparer le temps de la réussite.
Jean-Jacques Rousseau, quoiqu'il en soit sur les réserves qu'on pose sur le personnage et sur l'œuvre,
exerce une influence déterminante pour ériger en croyance commune l'image de l'enfant révélateur de la
nature humaine en son originelle bonté et, à ce titre, véritable instructeur des hommes.
Discat a puero magister -que le maître apprenne de son élève- et s'inaugure l'éducation nouvelle.

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1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie
1.1.2. Le lieu commun de l'éducabilité p. 29

Décrivons d'abord, pour chacun des 3 lieux communs du courant progressiste, le courant dominant
puis, de manière symétrique, la persistance et le développement de croyances inverses qui, dès le XIXe
siècle, en contrarient le triomphe.
L'homme-enfant, parce qu'il est bon, ne peut pas ne pas être perfectible. Son aptitude conjointe au
bonheur et à la bienfaisance, est d'abord effectivement une 2apitude" que les interactions humaines ont
la capacité de manifester et d'augmenter.
Les choses humaines ne sont jamais données qu'à titre de promesses. Affirmer le "lieu commun" de
l'éducabilité, tenir pour vérité fondatrice la toute-puissance de l'éducation, c'est professer en d'autres
mots que la dynamique du progrès est bien la règle du phénomène humain en quelque dimension qu'on
le prenne. "Deviens ce que tu es" : l'adage, attribué communément au poète grec Pindare, constitue l'un
des articles favoris de ce credo humaniste de l'éducabilité.

Le premier âge 1.1.2.


Le lieu commun de
de la modernité
l'éducabilité
nous a ainsi livré
une tripe conviction
L'instruction est nécessaire, L'instruction doit devenir
elle est possible le fait de tous

La méthode à la recherche d'elle-même

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1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie
1.1.2. Le lieu commun de l'éducabilité p. 29

1.1.2.1. L'instruction est nécessaire, elle est possible (2/2) p. 30


Que l'intervention éducative soit nécessaire, l'investissement économique et social dont elle est l'objet
suffirait à le démontrer. Les sociétés avancées, dès la première révolution industrielle, posent, comme
une leurs 2vérités", qu'elles ont, certes, besoin de bras mais tout autant besoin de cerveaux. A besoins
nouveaux, réponses nouvelles.. A la maîtrise diversifiée et rationnelle du monde doit correspondre une
panoplie de compétences jusque-là inconnues et vite menacées d'obsolescence. L'instruction devient un
des révélateurs de cet univers rigoureusement inouï des connaissances, un univers que seule rend
explorable l'incessante adaptation des instruments et de leurs usagers.
Mais cette adaptation des hommes par l'école aux exigences des sociétés industrielles modernes et aux
besoins que cette modernité suscite, n'est pas édictée par nos prédécesseurs sur le seul mode
pragmatique et mercantile de la rentabilité du potentiel humain. On l'a dit, un vaste propos humaniste
inscrit les perspectives utilitaires dans une inspirations plans ample. Eduquer constitue l'urgence de
l'époque parce que fondamentalement un homme nouveau est à faire. Le projet est démiurgique tant la
conscience est forte que les temps nouveaux sont commencés et que tout est désormais réalisable.
D'ailleurs, a-t-on le choix ? Déjà le philosophe Emmanuel Kant, en 1772, dans sa célèbre réponse à la
question "Qu'est-ce que les Lumières ?" posait les indicateurs de la modernité. L'homme doit désormais
"sortir de sa condition de mineur", là est sa vocation. Mais cette vocation, c'est lui-même qui se la donne,
et lui seul. Le voici à l'âge de sa majorité.

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1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie
1.1.2. Le lieu commun de l'éducabilité p. 29

1.1.2.1. L'instruction est nécessaire, elle est possible (2/2) p. 30


C'est bien d'une "mission" qu'on leur donne à remplir, et ne mérite pas le nom de "mission" la prosaïque
activité des marchands de participes quand ils s'y adonnent par nécessité alimentaire. Enseigner le
participe n'as pas d'intérêt, sauf si le participe "éduque".
Maîtriser les règles du participe constitue, certes, un savoir que l'on peut cultiver pour lui-même. Ce
savoir engendre des savoir-faire dont l'utilité peut être perçue et argumentée. Mais, fondamentalement,
maîtriser ces règles c'est exercer une prérogative civilisante, c'est acquérir un surcroît d'humanité par le
maniement et le respect de la langue. Qui est instruit des participes est un meilleur participant de la
société humaine.
L'instruction n'est concevable qu'éducative. Et c'est bien ainsi qu'on la conçoit. La distinction entre
éducation et instruction fait l'objet dans la littérature pédagogique du XIXe siècle d'un commentaire
obsédant à force d'être répété. Un schéma coutumier est le suivant : on pose d'abord l'irréductibilité des
deux fonctions, puis on prêche pour leur indispensable complémentarité, et l'on conclut par leur
coexistence si évidente que l'opposition entre les deux termes devient elle-même contestable.
C'est bien en effet à la jointure du XVIIIe et du XIXe siècles que l'on voit se mettre en place un diagnostic
qui sera ensuite réitéré à l'envi : les sociétés modernes n'ont plus d'autres choix que de produire une
nouvelle humanité et de préposer elles-mêmes à cette production.

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1.1.2. Le lieu commun de l'éducabilité p. 29

1.1.2.2. La méthode à la recherche d'elle-même (1/2) p. 31


Ce n'est pas d'un seul coup cependant que peut être mise au point la méthode qui permettra d'obtenir
les résultats escomptés. Le XIXe siècle est un siècle de tâtonnements. Des vérités seront formulées sans
que l'on en tire immédiatement les conséquences pratiques alors que ces dernières peuvent nous
paraître aujourd'hui relever de l'évidence. Ainsi rappelle-t-on le vieil aphorisme que "l'on a bien appris
que ce que l'on a appris par soi-même". Ainsi souligne-t-on que "l'on a bien compris que ce que l'on est
en mesure d'expliquer à un autre", que "l'esprit ne maîtrise que ce dont l'œil et la main ont pris au
préalable la mesure". Vieilles vérités que la pédagogie du XIXe siècle commençant répète avec Kant,
Pestalozzi ou Froebel, et après Comenius.
Mais ce sera très progressivement, par une évolution autant culturelle que méthodologique, que les
mœurs éducatives se décentreront du maître pour se centrer sur l'activité de celui qui apprend,
reconnaîtront la valeur de la coopération et de l'interaction entre les élèves, mettront en œuvre le
principe de la méthode intuitive et du contact manipulateur des objets de connaissance autrement
que par de bien abstraites "Leçons de choses".
Ainsi, en 1884, Octave Gréard, le "premier instituteur de France" selon la fameuse formule de Jules Ferry,
dans un article de l'officieuse Revue pédagogique, voit dans le pédagogue allemand Adolph Diesteweg
(1790-1866) le premier qui, dès 1835, ait "fait de l'élève le centre de la classe".

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1.1.2. Le lieu commun de l'éducabilité p. 29

1.1.2.2. La méthode à la recherche d'elle-même (2/2) p. 31


Ce qui marque le XIXe siècle éducateur c'est bien sa confiance dans le perfectionnement possible,
quasiment indéfini, de cd que Pestalozzi appelle pompeusement "La méthode". L'illustre instituteur de
Stans et d'Yverdon, est d'abord célébré, aujourd'hui encore, pour la générosité de son cœur maternel à
l'égard des enfants les plus démunis. Or, son rêve, à lui, était de laisser le souvenir d'un didacticien
rigoureux et efficace.
Paradoxalement, c'est sous son influence et d'après son modèle, que la sollicitude de ce que nous
appellerions aujourd'hui le professionnalisme vont être présentés comme les deux piliers de l'action
éducative.
Le tout début du XIXe siècle connaîtra avec Froebel ou surtout Herbart en Allemagne, Girard en Suisse,
Bain ou Spencer en Grande-Bretagne, de hardis constructeurs de systèmes, confiants dans le pouvoir de
la raison humaine d'élaborer une méthodologie générale de l'enseignement, elle-même susceptible
d'être enseignée, expérimentée et mis en pratique suivant des canons rigoureux. Ainsi s'impose l'idée
que l'enseignement est un métier qui s'apprend, autant et plus que le don spécifique fait par la nature à
une minorité de cœurs généreux et intuitifs.
Et c'est effectivement par leur professionnalisation progressive que, dans les différents pays d'Europe, les
corps enseignants laïcs passeront d'une condition de subalternes, de marginaux ou de bons-à-tout-faire,
à un statut de partenaires, puis de spécialistes, face aux politiques, aux notables ou aux universitaires,
détenteurs traditionnels de discours légitimes sur l'école, ses méthodes et ses fins.

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1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie
1.1.2. Le lieu commun de l'éducabilité p. 29

1.1.2.1. L'instruction doit devenir le fait de tous p. 33


Le caractère perfectible de l'action éducative, et particulièrement des méthodes d'enseignement, permet
de parier sur le bien-fondé et l'efficacité à terme d'une instructions généralisée : nul ne peut être réputé
irréductible à une éducation bien comprise et bien menée. Tout homme, fût-ce le plus taré, porte en lui
quelques potentialités dont un didacticien habile et dévoué saura en définitive tirer parti.
Par ailleurs, le principe de l'égalité entre les citoyens -et tout autant l'intérêt bien compris des Etats-
exige que dans la réserve de talents que constituent les sociétés, toutes classes sociales confondues, on
s'efforce de prospecter le palus largement possible, offrant à tous une chance que le mérite viendra
confirmer. Etendre l'instructions à tous, et aux couches populaires en particulier, est une opérations
tenue pour souhaitable. Elle est considérée comme possible.
Même quand l'égalitarisme politique, économique ou social, lié au grand soubresaut révolutionnaire,
aura fait long feu, il restera toujours difficile, sauf à se vouloir provocateur, de préconiser par trop
ouvertement que certaines classes sociales soient privées des "bienfaits de l'instruction", tant les
habitudes de l'homme instruit apparaissent désormais comme constitutives de l'humanité moderne. Il
faudrait d'ailleurs dire "institutives" si le mot existait.

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1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie
1.1.3. Le lieu commun de la démocratie égalitaire p. 33

Décrivons d'abord, pour chacun des 3 lieux communs du courant progressiste, le courant dominant
puis, de manière symétrique, la persistance et le développement de croyances inverses qui, dès le XIXe
siècle, en contrarient le triomphe.
Pour ce 3ème lieu commun où se fonde le propos dominant de notre modernité éducative, l'éducation est
clairement posée comme une entreprise d'insertion sociale et politique de la jeunesse. L'opération peut
nous paraître marquée de la plus grande absence de scrupules, mais, c'est qu'il n'y a pas lieu de masquer
cette fin assignée à l'éducation. Car l'idéologie progressiste, loin de faire percevoir celle-ci comme une
honteuse prise en main, y voit le creuset même de l'autonomie des personnes.

1.1.3.
Le lieu commun de
la démocratie
égalitaire

Intégration sociale et
Du progrès aux progrès,
autonomie personnelle :
du progressif au progressiste
même mouvement

La démocratie,
Passion de l'idée progressiste,
idée combattue
passion de l'espérance ?
mais dominante

Pro patria
et humanitate

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1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie
1.1.3. Le lieu commun de la démocratie égalitaire p. 33

1.1.3.1. Intégration sociale et autonomie personnelle : même mouvement p. 33


Cette autonomie ne peut être conçue, en effet, qu'en raison directe du corps social assurant la gestion de
ses propres affaires. Or, un régime politique est crédité de la capacité de réaliser cette injonction, la
démocratie. Idée dynamique, même pour ceux qui la combattent, l'idée démocratique fait de l'école sa
voie royale, le lieu privilégié où l'on apprend les règles du consensus national et social. Même dans les
Etats encore bien peu démocratiques -et ils sont nombreux en Europe à survivre et à prospérer, tout au
long du XIXe siècle- l'instauration des systèmes scolaires s'accompagne d'une croyance en le caractère
quasiment inéluctable du processus de démocratisation des sociétés.

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1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie
1.1.3. Le lieu commun de la démocratie égalitaire p. 33

1.1.3.2. La démocratie, idée combattue mais dominante p. 34


Certes, l'évolution peut être vue comme une menace. Mais, quand bien même les sociétés à fort clivages
hiérarchiques donnent, au cours du XIXe siècle, dans la réalité de l'histoire, les signes évidents de leur
résistance et de leur intacte capacité d'expansion, le "lieu commun" où réside le bien-fondé de leur
croyance s'affaiblit face au discours progressiste. Voici ce dernier crédité, y compris par des adversaires
sur le qui-vive, du statut de vérité dynamique aux vertus diablement mobilisantes.
Auxiliaire du progrès, appelée à de spectaculaires améliorations, l'école est abondamment présentée
comme le moyen de la démocratie, et cette dernière, aux yeux des modernes, assure l'émancipation des
peuples vis-à-vis des deux tyrannies antagonistes et complémentaires qui les menacent,
- d'abord le retour des despotismes, entraînant son cortège régressif d'injustices et d'intolérances,
- ensuite le débordement socialiste ou libertaire dont les sirènes ne laissent pas les masses insensibles
quand elles leur promettent, en un aujourd'hui bien peu satisfaisant, des "lendemains qui chantent".

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1. "Les Lumières" ou l'avènement de l'idée moderne de l'éducation p. 23
1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie
1.1.3. Le lieu commun de la démocratie égalitaire p. 33

1.1.3.3. Pro patria et humanitate p. 34


La démocratie égalitaire fournit ainsi à l'entreprise de scolarisation moderne la légitimité d'un grand
dessein social. Mais ce dessein exclut la lutte des classes. L'égalité civique n'y est pas confondue avec
l'égalité économique, et l'on fait confiance au consensus national entre les citoyens pour qu'il soit le
garant du consensus social. La société démocratique est censée être la plus juste, protectrice des droits
de l'homme-citoyen en échange du respect des devoirs, dans une réciprocité de bon aloi où l'égalité
fraternise avec la liberté.
Dès lors, il "va de soi" -c'est le lieu politique majeur- que le rôle de l'école est de réaliser l'intégration
sociale des jeunes. Là est son droit, là est son devoir. Il lui échoit de faire des citoyens. Et le citoyen,
heureux et miraculeux équilibre de l'émancipation audacieuse par l'adhésion réfléchie, constitue pour
l'éducation scolaire une origine et une fin décidément confondues.
La mauvaise conscience des éducateurs est encore l'exception en ces temps progressistes où l'on forme
des hommes pro patria et hamanitate. Si c'est pour la partie, c'est pour l'humanité. Et entendons par ce
dernier mot la communauté transnationale de l'espèce, mais, tout autant, en chaque individu instruit,
son appartenance inaliénable à l'humaine condition.

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1. "Les Lumières" ou l'avènement de l'idée moderne de l'éducation p. 23
1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie
1.1.3. Le lieu commun de la démocratie égalitaire p. 33

1.1.3.4. Passion de l'idée progressiste, passion de l'espérance ? p. 35


On redira plus longuement combien notre époque s'interroge sur les trois lieux communs de la scolarité
moderne. Nous sommes alertés sur les nuisances graves et multiples que cause à la nature l'expansion
paradoxalement sauvage de la civilisation industrielle. Nous savons le péril qui menace l'espèce humaine
elle-même. Et, à l'heure où nous avons peur pour les arbres, par exemple, il nous serait difficile
d'entonner sans restriction mentale l'hymne de gratitude des instituteurs romands au pylône électrique,
bienfaiteur inconditionnel des villes et des campagnes. Pour l'instituteur-poète que publie L'Educateur
(1890), le pylône se révèle le plus humain des arbres en nos paysages par trop prosaïquement naturels.
Il n'empêche que l'idée progressiste garde une grande capacité mobilisatrice. Elle fournit à l'espérance, et
même au simple espoir, une imagerie qui demeure sans rivale. Et l'écologiste le plus critique à l'égard
d'une idéologie du progrès stupidement triomphaliste, reconnaîtra que réapprendre un rapport
équilibrant à la nature n'est pas, pour une civilisation, une régression folklorique mais un progrès par le
dépassement des contradictions. Et ce nouvel état à venir étant jugé meilleur, voici le militant assuré
dans la légitimité de son combat pour la cause.
Or, espérer est un sentiment constitutif de l'acte d'enseignement …
L'enseignant n'enseignerait plus s'il n'escomptait pas que quelque chose advienne qui ne soit pas
n'importe quoi. Et ce résultat il ne peut, sous peine de se condamner lui-même, se le proposer comme
un amoindrissement de ceux qu'il forme.

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1.1. Le courant progressiste et ses 3 "lieux communs": progrès, éducabilité, démocratie
1.1.3. Le lieu commun de la démocratie égalitaire p. 33
1.1.3.5. Du progrès aux progrès, du progressif au progressiste p. 35
Le langage quotidien lève à ce sujet l'équivoque, c'est en termes de progrès qu'il dit ce qui arrive et
déplore ce qui n'arrive pas. L'éducation est chose "progressive", pour reprendre le titre du célèbre
ouvrage de la genevoise Albertine Necker de Saussure dont les tomes paraissent entre 1828 et 1838.
Parler en termes de "progressivité", c'est signifier qu'un développement est perceptible, dont il convient
de respecter les étapes. Mais Madame Necker donne comme sous-titre à son ouvrage "Etude du cours
de la vie", car aux yeux de cette éducatrice très religieuse, la vie mène quelque part, et cet itinéraire
appelle à chaque moment des ressources et un ressort nouveau.
Je m'interroge sur ce qu'il en est aujourd'hui de ce lieu commun, alors qu'une certaine pudeur le rend
d'emblée moins avouable. J'ai sous les yeux la longue notice consacrée à Madame Necker par le
Dictionnaire de pédagogie de Ferdinand Buisson dans son édition de 1881. Quand l'auteur de la notice en
vient à évoquer les finalités surnaturelles que la très chrétienne Albertine assigne aux progrès de
l'éducation, il n'éprouve aucune peine à les laïciser. Il écrit: "Le principe de Madame Necker n'est au fond
que le principe qui assigne à la vie un idéal". Et avouons qu'il est extrêmement laborieux d'imaginer -je
ne dis pas de concevoir- un "idéal" comme une chose vers laquelle on régresse.
L'imagerie religieuse du progrès est encore largement active après qu'elle ait connu sa transposition
séculière. Le courant progressiste peut être réexplicité comme chrétien. Il met au fin mot du progrès le
retour d'un juste juge consacrant toute montée humaine dont son incarnation le rend à jamais solidaire.
Mais ce progressisme peut, tout aussi bien, être pressenti comme l'aspiration, implicite et sécularisée, à
un "je ne sais quoi", capable de remuer et de mettre en chemin les inertes.

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1.2. Les contre-courants : une insistance antiprogressiste p. 36
Les contre-courants sont présents via les adversaires des "progrès" annoncés, les "jusqu'au-boutistes"
provoquant le vertige extrémiste, les éducateurs progressistes eux-mêmes prêts à modérer, voire
édulcorer leurs propos, les progressistes survivants des Lumières, interloqués comment le progrès,
attendu comme une harmonieuse et linéaire évolution, prend les allures inquiétantes d'une fuite en
avant.

1.2.
Les contre-courants :
une insistance antiprogressiste

1.2.1. 1.2.3.
1.2.2.
Vous avez dit L'égalitarisme,
L'éducation n'est
"progrès", une songerie
pas toute-
mais nous lisons dangereuse de
puissante
"menace" la démocratie

"Le Dernier Jour Les enfants Fatalité Jusqu'où faut-il La réussite Délire utopiste
est commencé …" demeurent de l'atavisme Instruire est sélective et pessimisme
des êtres le peuple ? conservateur:
que l'on "corrige" une objective
convergence
L'instruction "Vocation" Le paradoxe Une synthèse
ne fait pas de miracles contre de l'homme fictive ?
formation et de la méthode

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1.2. Les contre-courants : une insistance antiprogressiste p. 36
1.2.1. Vous avez dit "progrès", mais nous lisons "menace" p. 37

C'est alors l'idée même de progrès qui révèle sa fragilité. L'onde de choc de la grande Révolution
entraîne, en effet, tout au long du siècle, des bouleversements, transitoires ou durables, qui n'épargnent
aucune nation de l'Europe : révolutions et répressions, ébranlements et consolidations, expansions et
crises, cette histoire, perçue comme brusquement accélérée, est interprétée par beaucoup sous le signe
d'un catastrophisme latent. Loin d'être inconditionnellement meilleur, ce qui vient est d'abord menace :
voilà l'autre lieu commun, où certes, se revigorent les peurs mais où tentent de s'étayer les analyses.

1.2.1.
Vous avez dit
"progrès",
mais nous lisons
"menace"

"Le Dernier Jour Les enfants


est commencé …" demeurent
des êtres
que l'on "corrige"

L'instruction
ne fait pas de miracles

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1.2. Les contre-courants : une insistance antiprogressiste p. 36
1.2.1. Vous avez dit "progrès", mais nous lisons "menace" p. 37

1.2.1.1. "Le Dernier Jour est commencé …" p. 37


L'historiographie de la Révolution française compte par dizaines, et déjà entre 1789 et 1815, les auteurs
de "Considérations" et de "Réflexions" interprétant l'événement à travers l'imagerie de la transgression,
de la régression sauvage, de la chute, du châtiment. Les derniers temps sont commencés : Apocalypse
now, dirait-on déjà, et l'on nous assure que ce qui s'ensuivra ne sera pas beau à voir.
L'idéologie du progrès faisait de la mobilité inventive une de ses valeurs positives, la voici perçue comme
une instabilité inquiétante. Il en découle une relecture de la fonction éducative de la société. Temple de
la liberté où les candidats à une légitime émancipation viennent s'enquérir de leurs droits, l'école sera,
autant et plus, célébrée comme l'enclos où d'éventuels agents de la subversion se voient rappelés à leurs
devoirs.
"Pas de devoirs sans droits, pas de droits sans devoirs" : le contre-balancement habilement rhétorique de
la phrase ne résiste pas longtemps aux appréhensions des politiques. Ils ne reviendront bientôt plus dans
leurs discours que la seconde proposition : stabiliser, conserver, faire adhérer, reproduire, voilà les
finalités avouées de la scolarisation des peuples et des individus.

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1.2. Les contre-courants : une insistance antiprogressiste p. 36
1.2.1. Vous avez dit "progrès", mais nous lisons "menace" p. 37

1.2.1.2. L'instruction ne fait pas de miracles (1/2) p. 38


Mais ce siècle connaît aussi un début plus proprement pédagogique où se trouve contestée la confiance
dont le progressisme a investi l'instruction. De cette dernière, il est vain d'attendre des miracles, et, en
particulier, contrairement à la croyance issue des Lumières, l'instruction ne rend pas les humains
meilleurs.
C'est particulièrement la formation des enseignants, au fur et à mesure qu'elle se généralise et se
systématise au cours du siècle, qui donne lieu à ce diagnostic pessimiste. Qu'est-ce qu'il est opportun, se
demandera-t-on, que ces jeunes gens, à peine plus âgés que certains de leurs élèves, sachent pour faire
de "bons enseignants". Mais qu'est-ce qu'un bon enseignant ? Non l'érudit, ni le savant, mais le modeste
dispensateur de connaissances. Et l'utilité de ces dernières n'est pas fonction directe de leur importance
comme branche du savoir mais de leur efficacité comme "discipline" de l'esprit et comme régulateur des
conduites.
Or que constate-t-on souvent ? Imbus de leurs pouvoirs tout neufs sur le peuple enfant, ces paysans, à
peine dégrossis, deviennent d'insupportables pédants, des demi-savants, ridiculement ignorants de leur
ignorance, ou, à l'inverse, se révélant incapables dune démarche personnelle, intimidés par la conscience
de leurs manques.
Le XIXe siècle ne nous a pas légué un stat clair de l'ignorance qui constitue soit un fléau à combattre soit
une pratique de la "docte ignorance" à poursuivre pour parvenir au sommet de la sagesse.

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1.2.1. Vous avez dit "progrès", mais nous lisons "menace" p. 37

1.2.1.2. L'instruction ne fait pas de miracles (2/2) p. 38


Mais c'est particulièrement le débat sur les fondements de l'éducation morale qui sert de révélateur à
cette incrédulité vis-à-vis de l'instruction. Les instituteurs, devenus dans certains pays d'Europe un
véritable corps, au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, sont appelés, en conséquence de la
laïcisation de l'école, à se substituer aux religieux et aux prêtres pour assurer l'éducation morale des
enfants du peuple. Un grief revient fréquemment à leur égard tant sous la plume de laïques que dans le
propos des opposants. La forme idéale de l'enseignement moral est présenté sous les apparences de
libres entretiens à partir de ce que les enfants voient, ressentent et comprennent. Or les enseignants, par
facilité ou par inintelligence, transforment ces moments éducatifs privilégiés en exposés dogmatiques,
assommants, et surtout inefficaces.

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1.2.1. Vous avez dit "progrès", mais nous lisons "menace" p. 37

1.2.1.3. Les enfants demeurent des êtres que l'on "corrige" p. 39


Ecoutons un pédagogue comme Henri Marion. Il est, à la Sorbonne, l'un des défenseurs de la méthode
active et l'un des théoriciens de ce qu'il appelle "l'éducation libérale". C'est ce même Marion qui émet
des doutes sur la trop grande liberté accordée à l'expression spontanée de leur jugement par les enfants.
Que ce soient le maître ou les élèves qui parlent, l'insuffisance du discours est dénoncée dès lors qu'il
s'agit de susciter des habitudes, d'éveiller des sentiments, de provoquer des résolutions qui font la
moralité. Il faudrait pour cela, dit-on, que l'on prêchât l'exemple, car l'exemple seul est réputé
contagieux. Mais l'exemple n'instruit pas, il éduque, ajoute-t-on. Et voilà le second terme de notre
désolant binôme idéologique célébré comme le dernier mot de l'école au détriment de l'instruction,
suspecte de confectionner des vaniteux, des contestataires et des aigris.
Ce rappel de la priorité d'une éducation-conformation, qui revient de façon obsédante dans le propos
pédagogique de la fin du siècle, est fonction d'un autre lieu commun où se trouve récusée une fois
encore la croyance progressiste. L'éducation est première parce qu'en définitive la fonction correctrice de
l'école est encore amplement considérée comme essentielle. Les doutes persistent sur l'aptitude
naturelle au bien dont tout enfant serait porteur. Comme l'écrit en substance un instituteur romand vers
1870, "on ne peut pas pratiquer chaque jour les enfants et professer les idées rousseauistes."
Loin de tabler sur leur hypothétique bon fond, l'école doit s'efforcer de leur faire perdre les habitudes, le
plus souvent fâcheuses, contractées dans la petite enfance. Elle doit séparer les enfants de leur enfance
et les engager, non sans forcer autoritairement le cours des choses, sur la voie de la civilité, de la raison.

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1.2. Les contre-courants : une insistance antiprogressiste p. 36
1.2.2. L'éducation n'est pas toute-puissante p. 40

Ce constat pessimiste conduit à réviser à la baisse, après les espoirs placés dans l'instruction, la confiance
même en la toute-puissance de l'éducation. Principale limite à la plasticité humaine, le spectre de
l'atavisme hante le XIXe siècle. Enquêtes, témoignages, analyses convergent pour affirmer que
l'éducation trouve son obstacle le plus déterminant dans l'engrenage fatal entre une hérédité chargée et
un milieu familial défavorable.

1.2.2.
L'éducation n'est
pas toute-
puissante

Jusqu'où faut-il
Fatalité
Instruire
de l'atavisme
le peuple ?

"Vocation" Le paradoxe
contre de l'homme
formation et de la méthode

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1.2. Les contre-courants : une insistance antiprogressiste p. 36
1.2.2. L'éducation n'est pas toute-puissante p. 40

1.2.2.1. Finalité de l'atavisme p. 40


On prédit que le développement de l'instruction se heurtera à l'incapacité de bien des familles rurales, et
surtout ouvrières, à conduire l'éducation de leur progéniture. La misère, autant physique que morale, est
décrite e termes souvent saisissants, mais certains congrès d'instituteurs adoptent, au-delà du constat, le
ton du réquisitoire, et ce dernier conclut bientôt par le verdict de la "fatalité".
On n'attend pas d'ailleurs, en effet, que des théoriciens aient démontré, preuves à l'appui, le pouvoir de
l'hérédité sur les conduites. La croyance est d'ordre intuitive comme si l'évidence s'en imposait avec la
même force que l'évidence contraire.
La généralisation de la scolarité repose, pour une grande part, sur le lieu commun du caractère
inépuisable de a ressource éducative. Néanmoins, l'obligation scolaire, imposée progressivement dans
l'ensemble des nations, va paradoxalement contribuer à asseoir le fatalisme des dons. Et la fonction de ce
constat est d'0abord de confirmer que ces "dons" manquent à une grande proportion d'élèves.
A tout le moins c'est un certain scepticisme que l'expérience impose. L'école, en effet, constitue une
extraordinaire entreprise de normalisation de l'enfance. Ce sont les conduites de l'élève qui vont
désormais fournir le standard implicite, auquel rapporter les capacités des enfants. "Suivre à l'école"
pourrait à bon droit, dans un autre contexte, être considéré comme une manifestation parmi bien
d'autres de ce qu'un enfant est capable de faire. Mais cette activité se voit créditée de la fonction de
norme à partir de laquelle c'est sur la nature même de l'individu que l'on va se prononcer.

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1.2.2. L'éducation n'est pas toute-puissante p. 40

1.2.2.1. Finalité de l'atavisme p. 40


C'est par l'école, parce qu'effectivement ils y posent problèmes, que l'on commence à dépister les
enfants anormaux, caractériel, débiles ou vicieux. Doit-on aller jusqu'à dire que l'école moderne invente
l'enfant anormal ? Cette conception de l'enfance en est effectivement le produit. Mais le concept
d'anormalité se trouve dès l'origine surchargé par les idées que l'on se fait et les images qu'elles
mobilisent.
La pratique enseignante, généralisée à toute l'enfance, vient confirmer deux convictions que la croyance
à l'éducation n'avait guère ébranlées. D'une part, on est persuadé qu'il existe des seuils en deçà
desquels la nature viciée n'est plus amendable. D'autre part, on est sûr que l'intelligence est la chose
du monde la plus inégalement répartie, alors même qu'on l'érige en critères déterminants de la
supériorité.
Le débat entre tenants de la liberté et tenants du déterminisme acquiert au XIXe siècle son statut de
question de cours dont on ne saurait faire l'économie. Bien des matérialistes, qui partagent l'idéologie du
progrès en ce qu'elle a d'émancipateur à l'égard des croyances religieuses traditionnelles, trouvent aussi
dans le lieu commun du déterminisme le moyen de contrecarrer l'idéologie spiritualiste dont ils craignent
endémiquement la renaissance.
Eduquer c'est faire venir au jour les différences à la lumière desquelles groupes et individus apprennent à
quelle destinée on les assigne. Le XIXe siècle, tout évolutionniste qu'il paraisse, garde de puissantes
nostalgies fixistes.
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1.2.2. L'éducation n'est pas toute-puissante p. 40

1.2.2.2. "Vocation" contre formation p. 42


Mais cette croyance à la part déterminante du don, on la retrouve dans l'idée persistante que le
perfectionnement des méthodes d'enseignement trouve à la fois sa limite et son dépassement dans le
rôle que jouent l'intuition, l'équation personnelle, les capacités humaines. Si l'on concède que certaines
capacités professionnelles sont susceptibles d'être apprises, améliorées et évaluées, la réussite d'un
individu dans l'activité éducative scolaire est pour l'essentiel rapportée à ce qui manifeste qu'il a bien ce
qu'on appelle "la vocation".
Les manuels de pédagogie tout au long du siècle, alors qu'on y insiste parfois très fort sur l'importance de
la formation didactique et de l'acquisition des connaissances, décroche, in fine, de ce discours.
En des termes souvent très voisins, s'y manifestent alors le don, l'indicible, l'étincelle d'humanité
irréductible à tout apprentissage et qui font que l'un "a ça dans le sang" alors que l'autre se révèle un
incorrigible besogneux, voué à toutes les avanies d'un métier que l'on répugne à définir comme tel.
La notion de "vocation", avec son fort relent de religion, confirme cette répugnance, du moins dans le
français puisque l'anglais, la tirant loin de son origine, appelle "vocation" ce que nous qualifions nous de
"professionnel".
Le "principal " tient aux bonnes qualités du maître. Et ces qualités, si elles se cultivent, font partie du
bagage initial. Au siècle où s'élaborent les normes de la rationalité éducative, l'incrédulité dans la science
de l'éducation demeure un sentiment entretenu et partagé.

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1.2.2.3. Le paradoxe de l'homme et de la méthode p. 43


A Burgdorf (1800-1804) comme à Yverdon (1804-1825), Pestalozzi n'a de cesse de concevoir une
méthode "qui doive ses résultats à la nature de ses procédés et non à l'habileté de celui qui la pratique".
En d'autres termes, la personnalité du maître ne doit compter pour rien dans la mise en œuvre et son
résultat. Or, l'image qui s'impose de Pestalozzi est bien celle d'un personnage charismatique et singulier,
d'un messie pédagogique malheureux, aux prises avec son démon intérieur qui le pousse irrésistiblement
à sa dramatique vocation d'éducateur. Et son entreprise, magnifiée comme exemplaire, est néanmoins
réputée inimitable.
Peut-être est-ce Albertine Necker de Saussure qui exprime le paradoxe avec le plus de justesse:
"Il est possible de se passer de maîtres à qu'on dit; possible peut-être, mais facile, mais praticable à
volonté, non assurément. Je crois même si difficile d'en avoir de bons, qu'on formera plus aisément des
disciples que des maîtres dans cette marche interrogatoire où rien n'est tracé (la recherche de la "bonne
méthode", ndlr). Là, il faut plus que de l'instruction, il faut de l'adresse; et pourtant une méthode est un
mécanisme au moyen duquel un esprit médiocre doit pouvoir développer tous les esprits." *

* Albertine Necker de Saussure, L'Education progressive, tome premier, Paris, Garnier, 3e éd. 1856, p. 317

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1.2.2.4. Jusqu'où faut-il instruire le peuple ? p. 44


J'ai évoqué déjà une autre limite au triomphe du "lieu commun" de l'éducabilité. "Jusqu'où faut-il
instruire le peuple ?" demandaient déjà Voltaire et Rousseau, mais aussi, avant eux, le cardinal Richelieu.
Pa au-delà des rudiments, répondaient-ils, unanimes, entraînant l'approbation générale. Le XIXe siècle
éducateur, s'il se targue de développer l'instruction comme jamais l'entreprise n'en fut tentée, ne leur
donne pas particulièrement tort.
En dépit de leurs déclarations, les intentions de ceux qui contrôlent les pouvoirs chargés de mettre en
œuvre la politique éducative sont fondamentalement inégalitaires. La montée des masses obsède ceux
qui dirigent. Face à ce qu'ils appellent la "question sociale", si les uns se raidissent et conçoivent
l'affrontement des classes en termes de répression, d'autres, parmi les libéraux ou les chrétiens sociaux
de l'époque, pressentent que l'instruction ne peut manquer de jouer un rôle dans le conflit. Elle y
constitue l'un des enjeux parce qu'elle en est l'un des moyens.
"Ne refusez pas l'instruction aux masses, il vaut mieux partager à temps les privilèges que de se les voir
arracher par la force. Mais une éducation scolaire bien comprise, c'est-à-dire proportionnée aux besoins
des classes sociales, loin d'être un danger pour l'ordre, ne peut que le consolider et instaurer la paix
civile." Tel était déjà le propos que tenait dès le tout début du siècle Philippe-Albert Stapfer, le ministre
de l'instruction publique de l'éphémère République helvétique, quand il entendait confier à Pestalozzi la
rénovation de l'enseignement populaire. L'un et l'autre sont d'accord : il faut élever le peuple, tout en
faisant que chacun demeure dans sa condition.

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1. "Les Lumières" ou l'avènement de l'idée moderne de l'éducation p. 23
1.2. Les contre-courants : une insistance antiprogressiste p. 36
1.2.3. L'égalitarisme, une songerie dangereuse de la démocratie p. 44

Partager, oui, mais sans pour autant préconiser l'égalitarisme que l'on dénonce comme une songerie
dangereuse. En définitive, peut-être faut-il écrire avec Arno Mayer que la principale caractéristique du
XIXe siècle fut la persistance de l'Ancien Régime. Le hiatus est grand entre les vérités généreusement
solidaires, que l'on se fait un devoir de professer parce qu'elles entretiennent une croyance dilatante, et
les réalités marquées par la reconstitution des hiérarchies sociales. A la fin du siècle "aristocratie" et
"ploutocratie" n'ont pratiquement pas perdu l'exclusivité dont elles jouissent dans l'accès aux études
longues.
En témoigne la persistance, en France, de deux enseignements élémentaires parallèles: l'école primaire
populaire, qui devient gratuite en 1882, et les classes élémentaires des lycées, qui demeurent payantes.
1.2.3.
L'égalitarisme,
une songerie
dangereuse de
la démocratie

La réussite Délire utopiste


est sélective et pessimisme
conservateur:
une objective
convergence
Une synthèse
fictive ?

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1. "Les Lumières" ou l'avènement de l'idée moderne de l'éducation p. 23
1.2. Les contre-courants : une insistance antiprogressiste p. 36
1.2.3. L'égalitarisme, une songerie dangereuse de la démocratie p. 44

1.2.3.1. La réussite est sélectivep. 45


Quoiqu'il en soit l'égalité civique ne saurait induire l'égalité économique comme son corollaire obligé.
Quand, avec l'abolition du suffrage censitaire (1848), le revenu ne détermine plus la limite entre citoyens
authentiques et citoyens de second rang, il reste le critère protégé de la réussite sociale. Et celle-ci est
posée comme "allant de soi" qu'elle ne saurait être que sélective. L'entrée dans l'élite demeure
contingentée, et d'abord par l'argent. La promotion de quelques méritants, dont on monte le cas en
épingle, ne change pas cette réalité, sauf à donner bonne conscience aux possédants affligés d'états
d'âme.
Le XIXe siècle voit l'affrontement progressif de deux cynismes.
D'un côté l'analyse scientifique d'un Taine (Les Origines de la France contemporaine, 1875-1893) qui
établit les bases rationnelles de l'inégalité.
D'un autre l'analyse non moins scientifique d'un Marx (v.g. La guerre civile en France, 1871), celui-ci
n'ayant que mépris pour le roman, à ses yeux irrémédiablement sentimental, du socialisme humanitaire
à la française, tout empreint de christianisme, instaure une "praxis" de lutte qui conduira nécessairement
à une substitution des exploiteurs par les exploités. Nous savons aujourd'hui le risque que ceux-ci
deviennent exploiteurs à leur tour.

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1. "Les Lumières" ou l'avènement de l'idée moderne de l'éducation p. 23
1.2. Les contre-courants : une insistance antiprogressiste p. 36
1.2.3. L'égalitarisme, une songerie dangereuse de la démocratie p. 44

1.2.3.2. Une synthèse fictive ? p. 46


Ainsi se retrouvera brisée, en fin de siècle, la synthèse précaire qui permettait de surmonter la
contradiction entre émancipation libertaire et intégration solidaire. La tâche d'émanciper que la société
moderne confie à l'école a de moins en moins de rapport avec une quelconque remise en question de
l'ordre, si tant est qu'elle en ait jamais eu. Or, la tâche d'intégration n'était pas négociable qu'au sein
d'une société évolutive, prompte à se transformer afin de réaliser les idéaux reçus des Lumières et de la
Révolution.
Quand la radicalité édulcore chez les responsables, les extrêmes, eux, se radicalisent. Un "homme
nouveau" est-il effectivement à inventer ? L'éducation "libérale" n'est pas à la hauteur de cette œuvre
démiurgique. Dans le sillage d'un Pestalozzi, dont elle édulcore le message, elle préconise le respect de
l'enfant, la priorité de son activité autonome, le refus des manières autoritaires à son égard.
Peut-être est-ce en effet Pestalozzi, comme le montre Michel Soëtard qui, dès l'origine, a le mieux perçu,
parce qu'il s'y est perdu quasiment corps et biens, la contradiction où s'instituait l'éducation moderne.
Réaliser le développement de sa nature en chaque enfant ne peut se faire qu'au sein d'un
développement social dont l'iniquité est plus que jamais la règle. "Se faire une œuvre de soi-même"
(Selbstkraft) demeure l'impératif. Mais réaliser cette tâche impose de "faire avec" l'iniquité.

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1. "Les Lumières" ou l'avènement de l'idée moderne de l'éducation p. 23
1.2. Les contre-courants : une insistance antiprogressiste p. 36
1.2.3. L'égalitarisme, une songerie dangereuse de la démocratie p. 44

1.2.3.3. Délire utopiste et pessimisme conservateur : une objective convergence p. 46


D'autres pédagogues n'auront pas ces scrupules, à commencer bien sûr par les courants conservateurs
qui conçoivent l'éducation d'abord comme un redressement. Mais les utopies seront imaginées par des
éducateurs qui voudront pousser jusqu'au bout la logique de l'émancipation. Car, à vouloir libérer le
peuple de ses chaînes, on aboutira à vouloir le délivrer de lui-même, au nom de la science, et, fût-ce
contre son gré. Renan, dès 1848, apôtre de la nouvelle religion de la science, pressent que le peuple n'ira
jamais vers elle de son propre chef. Le savoir libérateur ne sera jamais aimé que d'un petit nombre, car
"la vérité est triste". Que faire, se demande-t-il, pour élever le peuple quand on est sans illusion sur ce
que le peuple désire ?
A la fin du siècle, des tentatives comme celles de Paul Robin à l'Orphelinat de Cempuis constituent une
réponse. Sous le mode scientifique d'une éducation "intégrale", et en rupture avec cette éducation
"libérale" que préconisent Buisson, Marion ou Compayré, on aboutit, en vue de la formation
"harmonieuse" de 'enfant, à une prise en main vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Modélisation et
endoctrinement, certes au nom de la meilleure des causes, font de l'orphelinat rationaliste de Robin de
symétrique du petit séminaire de Dupanloup. On y forme des adhérents, heureux de l'être.
Peut-on se donner comme projet de façonner un homme nouveau sans s'ériger en contrôleur totalitaires
des conduites ? Force nous est de constater avec Jean-Jacques Wunenburger, que le délire utopiste
rejoint le pessimisme conservateur en prônant la nécessité d0ecadrer rudement les hommes, et d'abord
les enfants.

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Primauté de la L'horticulture: Science

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science: réalité, modèle, et
"lieu commun" accepté métaphore totalitarisme
Effets paradoxaux
L'enfant moderne, des sciences "sollicitées"
miroir de l'adulte moderne
"Orienter": A quoi ça sert ? Préambules Cautionner des
améliorer rendement 2.3.5. mœurs nouvelles
et bien-être 2.1.1. Des sciences
L'éducation, 2 prises dans
invest. utilitaire la dérive Lew
L'heure des culturelle
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Exacerber les identités

Fr
sciences

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2.3.4.

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Imiter les rivaux

2.1. humaines 2.3. Des "vérités"

Piaget ?
2.1.2. La pédagogie salutaires
La
L'école proie des
scolarisation,
ou sous Mais en
nationalismes
affaire d'Etat la pédagogie influence pratique ?
Le
wi
L'éducation pour la concorde: sous influence n
force ou mollesse ? 2.3.3.
2.1.3. Contrôle de Les sciences

Freud
Des démocraties
l'émancipation humaines,

"lieux communs"
indéniable

préposés et leurs
Les décideurs et prétotalitaires ? Pasteurs

Les nouveaux
Des sciences,
miroir d'une

leurs experts
2.2. d'âmes stimulant
culture

L'essor des

2.2.3.
2.2.1.

t
ge
sciences Pia
humaines L'humain est
L'école de la réussite transformable 2.3.2.
La singulière
persistante
Rhapsodie
2.2.2. du progrès du singulier
Un nouvel art de vivre Une ère nouvelle
et ses ambiguïtés Education et société Education et psychologie 2.3.1.
Education et culture(s) Education et psychanalyse Un pluriel au
Un nouveau rapport
de l'école Education et langage demeurant
avec la famille 1
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2. L'heure des sciences humaines ou la pédagogie sous influence
Préambules p. 48

Et peut-être avons-nous la transition qui nous permet d'entrer dans le "deuxième âge" de la modernité, à
l'heure des sciences humaines et de la pédagogie sous influence. Les tenants de l'éducation intégrale
sont épris d'un idéal scientifique. Je viens d'évoquer le risque totalitaire, peut-on légitimement
rapprocher les deux qualificatifs ? 

Préambules

Primauté de la L'horticulture: Science


science: réalité, modèle, et
"lieu commun" accepté métaphore totalitarisme

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2. L'heure des sciences humaines ou la pédagogie sous influence
Préambule 1 : Primauté de la science : "lieu commun" reçu et accepté p. 48

L'approche scientifique de l'éducation est réclamée par beaucoup de bons esprits au cours du XIXe siècle,
et d'abord parce que la confiance dans la science est une des manifestations de la croyance en la
supériorité de l'approche rationnelle des choses.
En 1861, le philosophe Herbert Spencer réunit une série d'articles sous le titre De l'éducation. Ce sera un
maître-livre, apologie d'une approche de l'éducation fondée sur la science.

D'une part les sciences, et particulièrement les sciences humaines naissantes, vont fournir aux
pédagogues les raisons autorisant des entreprises à prétention façonnante.

D'autre part, la contribution des sciences sera aussi marquée par la croyance des savants, naturalistes,
physiologistes, psychologues et même sociologues, à l'autonomie des lois de la nature vis-à-vis du
volontarisme humain. Toute entreprise éducative, de ces lois doit respecter le processus.
 

Préambules

Primauté de la L'horticulture: Science


science: réalité, modèle, et
lieu commun" accepté métaphore totalitarisme

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2. L'heure des sciences humaines ou la pédagogie sous influence
Préambule 2 : L'horticulture : réalité, modèle, métaphore p. 49

Nous savons que la métaphore horticole revient obsessionnellement en ce début du XXe siècle, mais elle
est préposée à la célébration du miracle de l'enfance, dès lors que celui-ci se déroule au naturel. On
charge la métaphore de "donner à voir" le petit être qui se développe de lui-même, selon un plan qu'il
porte en lui et qui ne saurait être dicté de l'extérieur, à l'instar de la plante autour de laquelle le bon
jardinier pédagogue se contente de préparer et d'entretenir le terrain.

mais la métaphore horticole de l'éducation ne peut exprimer ce romantisme de la non-intervention qu'en


faisant abstraction, dans l'imagerie, de la réalité de l'horticulture scientifique, bientôt industrielle. Les
exigences de l'industrialisation des produits de la terre, sous la pression d'une société qui va bientôt se
spécifier comme société consommatrice, montre qu'entre artifice et respect de la nature les choix n'en
seront bientôt plus.
 

Préambules

Primauté de la L'horticulture: Science


science: réalité, modèle, et
"lieu commun" accepté métaphore totalitarisme

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2. L'heure des sciences humaines ou la pédagogie sous influence
Préambule 3 : Science et totalitarismep. 50

Ernest Renan publiant en 1890 L'avenir de la science, dépeint cet avenir comme une mainmise d'un petit
nombre de connaisseurs sur le gouvernement du monde. Un constat s'impose. La société moderne qui,
vers la jointure des deux siècles, voit naître en son sein les sciences humaines est aussi la société qui
succombera aux tentations totalitaires. Et la force de séduction des totalitarismes viendra pour une
grande part de leur prétention à fonder comme scientifique le modèle qu'ils proposent et qu'ils
imposeront à force ouverte. Je suis donc tenté de ne pas séparer ces deux phénomènes.
Je voudrais développer dans ce chapitre second 3 séries de considérations.
Dans un 1er temps, de vais tâcher de montrer combien, dans cette période de vastes instaurations
institutionnelles et sociales, la scolarisation prend définitivement son caractère d'affaire d'Etat.
Dans un 2ème moment, je reviendrai sur l'essor des sciences humaines qui me semble pour la pensée de
l'éducation l'une des clefs de cette période, et sur lequel nous vivons encore très largement.
Enfin, dans un 3ème temps, j'essaierai de caractériser le destin de la pédagogie, de typer les courants qui la
traversent, de repérer les contradictions qu'il lui faut assumer et qui sont à la mesure de ses espoirs dans
cette conjoncture ouverte par le deuxième âge de la modernité.

Préambules

Primauté de la L'horticulture: Science


science: réalité, modèle, et
"lieu commun" accepté métaphore totalitarisme

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2. L'heure des sciences humaines ou la pédagogie sous influence
2.1. La scolarisation, affaire d'Etat p. 50

Indéniablement, quels que soient les souhaits, quelles que soient les réticences, l'accroissance des
prérogatives de l'Etat constitue l'un des faits dominants de cette seconde période de la modernité. Je
voudrais en souligner la triple portée, économique, politique, culturelle.
L'école reçoit toujours pour mission de former des citoyens, mais on est conscient que sa fonction est
aussi de fournir à la société industrielle la panoplie diversifiée, mobile et perfectible de ses producteurs
et de ses consommateurs.
2.1.
La scolarisation,
affaire d'Etat

2.1.1. 2.1.2. 2.1.3.


L'éducation, invest. L'école proie des Des démocraties
utilitaire nationalismes prétotalitaires ?

A quoi ça sert ? "Orienter": Exacerber L'éducation Les décideurs Un nouveau rapport


améliorer les identités pour la concorde: et leurs experts de l'école
rendement force ou mollesse ? avec la famille
et bien-être
Un nouvel
L'enfant moderne, L'école
Imiter les rivaux art de vivre
miroir de l'adulte moderne de la réussite
et ses ambiguïtés

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2. L'heure des sciences humaines ou la pédagogie sous influence
2.1. La scolarisation, affaire d'Etat p. 50
2.1.1. L'éducation est un investissement utilitaire p. 51

A partir de 1880 environ, le propos utilitariste se banalise, assignant la priorité de ses fins: l'école doit
répondre aux besoins de l'époque et y répondre le plus rationnellement possible.
On révise les programmes et c'est la grande époque de la lutte entre partisans de l'enseignement
moderne et partisans des humanités classiques.
"A quoi sert l'école ?" interrogent les premiers, alors que la tactique des seconds consiste à dénoncer la
question comme inconvenante. Courants et contre-courants mêlent leur antagonisme, et c'est bien le
problème de la culture, bientôt le problème de la culture de masses, qui est posé.
2.1.
La scolarisation,
affaire d'Etat

2.1.1. 2.1.2. 2.1.3.


L'éducation, invest. L'école proie des Des démocraties
utilitaire nationalismes prétotalitaires ?

A quoi ça sert ? "Orienter": Exacerber L'éducation Les décideurs Un nouveau rapport


améliorer les identités pour la concorde: et leurs experts de l'école
rendement force ou mollesse ? avec la famille
et bien-être
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L'enfant moderne, L'école
Imiter les rivaux art de vivre
miroir de l'adulte moderne de la réussite
et ses ambiguïtés

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2.1. La scolarisation, affaire d'Etat p. 50
2.1.1. L'éducation est un investissement utilitaire p. 51

2.1.1.1. A quoi ça sert ? P. 51


Le problème se pose très ouvertement désormais à ceux qui doivent penser les études longues. En
créant, dès 1863-1865, un enseignement "spécial" au sein même de l'enseignement secondaire, Victor
Duruy, en France, a remis en cause l'assimilation de ce dernier aux seules humanités classiques. Mais les
lettrés résistent. Et l'opinion est partagée. Elle adhère au projet d'une voie "moderne" où les sciences et
les techniques prennent le pas sur le latin et le grec. Mais elle demeure fascinée par le prestige de la voie
"classique" qui symbolise la "véritable" instruction. En 1902, on révise à nouveau les programmes. La
lutte entre partisans de l'enseignement moderne et partisans des humanités classiques semble tourner
au profit des premiers. Face à la question qu'ils posent: "A quoi sert l'école ?", la tactique des seconds
consiste à dénoncer cette interrogation comme inconvenante.
Courants et contre-courants mêlent leur antagonisme, et c'est bien le problème de la culture, bientôt le
problème de la culture des masses, qui est posé. Mais, comme l'a montré Antoine Prost, la victoire des
modernes est paradoxale. En principe, les sections avec et sans latin sont d'égale valeur. En réalité, les
sections modernes sont tenues pour inférieures: leur destination utilitaire affichée leur interdit de
revendiquer une culture qui leur serait propre. Pour être reconnues "culturelles", il leur faut se saborder
comme "spéciales". L'instruction publique consacre ainsi un malentendu qui va durer: la voie "classique"
demeure la gardienne de "la" culture. Tous, en droit, y sont appelés. Mais, en fait, peu sont élus. Elle
fournit le modèle. Mais c'est un modèle inimitable par le plus grand nombre.
Pendant ce temps, le double modèle de l'homme adulte et de l'homme enfant modernes se charge,
dans les mentalités, d'une valeur quasi inconditionnellement positive…

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2.1. La scolarisation, affaire d'Etat p. 50
2.1.1. L'éducation est un investissement utilitaire p. 51

2.1.1.2. L'enfant moderne, miroir de l'adulte moderne p. 52


On considère certes comme établi que l'on ne saurait les confondre: le petit homme n'est pas, on le
répète, un adulte en réduction. L'enfance existe pour elle-même et par elle-même, reconnue, saluée et
bientôt idolâtrée. Mais en même temps, les valeurs que l'on attribue à l'un comme à l'autre sont les
valeurs mêmes de cette nouvelle société économique dont l'un et l'autre, à leur mesure, renvoient
l'image parlante. A l'homme moderne industriel et industrieux, capable d'initiative et d'organisation, apte
au changement, candidat au bien-être, correspond trait-pour-trait l'enfant scolaire actif, autonome,
solidaire et ingénieux dans la construction de son propre savoir.
L'Education Nouvelle, ce vaste ensemble flou qui se met en place à la fin du XIXe siècle, adopte ce
portrait et contribuera puissamment à en faire le standard de l'élève idéal.
Ce courant charrie certes tout un romantisme de l'enfance. On y pratique le culte de la nature, on
préconise la transformation de l'école par le plein-air, la vie simple et frugale, les activités artistiques et
manuelles spontanées, le gouvernement du peuple enfant par lui-même. Le tout baigne souvent dans un
halo de religiosité humaniste et cosmique à la fois.
Mais cet aspect ne doit pas faire oublier que le même courant, et souvent à travers les mêmes
éducateurs, est pénétré de l'importance de la rationalité. On y est préoccupé au premier chef du
rendement de l'école et de celui des élèves; on y expérimente des méthodes autant qu'on pratique
l'aventure.
Evoquons, à titre d'exemple, trois novateurs :
es genevois Edouard Claparède, Adolphe Ferrière et Robert Dottrens.

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2.1. La scolarisation, affaire d'Etat p. 50
2.1.1. L'éducation est un investissement utilitaire p. 51

2.1.1.3. "Orienter" : améliorer rendement et bien-être p. 53


Prenons l'idée exprimée et mise en œuvre par Edouard Claparède, que l'orientation scolaire et
professionnelle peut s'effectuer de manière moins hasardeuse et moins erronée. Cette idée peut être
amenée à confirmer d'abord une véritable opportunité sociale. Pour parler le langage du management
de cette fin de siècle, on dira: que ne soit plus laissée au hasard, mais que soit soumise à une évaluation
et à une organisation rationnelles, la gestion prévisionnelles des ressources humaines. Certes
l'orientation est conçue pour être au service du jeune, de sa promotion, de son bien-être, mais cela ne
semble plus pouvoir être pensé en dehors de cette gestion globale.
L'école est donc l'objet d'un investissement dont le caractère économique est de plus en plus nettement
perçu et admis, et les courants pédagogiques ne peuvent pas ne pas en être infléchis.
La culture "désintéressée" elle-même, celle que les humanistes pensent à l'abri de ces transactions
utilitaires, dès lors qu'elle est cotée à cette bourse des valeurs, et comme un bien particulièrement rare,
attractif et certifié, participe à part entière de ce nouvel état d'esprit. Avoir appris le latin est un
placement économique dont la bourgeoisie a perçu la rentabilité.

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2.1. La scolarisation, affaire d'Etat p. 50
2.1.2. L'école en proie aux nationalismes p. 54

L'éducation est affaire d'Etat parce que l'Etat est érigé en sûr garant de la nation, de son intégrité, de son
identité, de son progrès.

2.1.
La scolarisation,
affaire d'Etat

2.1.1. 2.1.2. 2.1.3.


L'éducation, invest. L'école proie des Des démocraties
utilitaire nationalismes prétotalitaires ?

A quoi ça sert ? "Orienter": Exacerber L'éducation Les décideurs Un nouveau rapport


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rendement force ou mollesse ? avec la famille
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2.1. La scolarisation, affaire d'Etat p. 50
2.1.2. L'école en proie aux nationalismes p. 54

2.1.2.1. Exacerber les identités p. 54


Certes, dès après la défaite de 1870 et le cauchemar de la Commune, bien des français culpabilisés et dès
lors poussés à quelque diagnostic, s'étaient laissés convaincre d'une vérité simple: c'était l'instituteur
prussien qui avait gagné la guerre. Affirmer le nationalisme de l'ennemi permettait à une nation
revancharde de donner au sien la respectabilité d'un grand dessein collectif. On construirait l'école
républicaine et laïque, l'oeil humide et fixé sur la ligne bleue des Vosges. L'instituteur était moralement
mobilisé.
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2.1. La scolarisation, affaire d'Etat p. 50
2.1.2. L'école en proie aux nationalismes p. 54

2.1.2.2. Imiter les rivauxp. 55


En 1898 paraît en France, immédiatement commenté dans tous les pays d'Europe et aux Etats-Unis,
l'ouvrage du sociologue Edmond Demolins, A quoi tient la supériorité des anglo-saxons ? Ce titre en
forme de question induit évidemment l'importance du message qui tient lieu de réponse.
Le livre est bâclé, malgré sa prétention à la rigueur scientifique, mais la démonstration impressionne.
L'instruction a fait du prussien le premier guerrier du monde; c'est aussi l'instruction qui fait du
britannique ou de l'américain les premiers commerçants du globe. Demolins annonce que le XXe siècle
sera le siècle de l'affrontement inéluctable des impérialismes. A ses yeux les vainqueurs en sont déjà
connus. Grâce su self-up qui fournit son principe moteur à l'éducation anglo-saxonne, les "races"
britanniques ou américaines fourniront les "particuliers" capables d'entreprendre, de risquer, d'impulser
le changement, de contrôler efficacement la marche du monde. Une solution dans cette lutte inexpiable:
"adoptons leurs méthodes éducatives".
En 1899 il publie L'éducation nouvelle et, toujours dans la hâte et l'improvisation, il fonde l'Ecole des
Roches à l'image des écoles nouvelles anglaises et allemandes.
Dans la première moitié du XXe siècle, les expositions universelles, mais aussi les jeux mondiaux, après la
restauration de l'olympisme, deviendront progressivement de véritables machines où s'exaspèrent les
rivalités nationales. On sait le parti que les régimes totalitaires tireront de ces manifestations entre les
deux guerres, entraînant les sociétés démocratiques à tenter de surenchérir alors qu'elles n'en ont
aucunement, ni le vouloir, ni les moyens.
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2. L'heure des sciences humaines ou la pédagogie sous influence
2.1. La scolarisation, affaire d'Etat p. 50
2.1.2. L'école en proie aux nationalismes p. 54

2.1.2.3. L'éducation pour la concorde: force ou mollesse ? p. 56


Un des thèmes les plus chers aux novateurs des années vingt, au sein de la Ligue internationale pour
l'éducation nouvelle, particulièrement, c'est de requérir de l'éducation scolaire qu'elle contribue
efficacement à persuader les esprits de l'absurdité de la guerre. On attend de l'école qu'elle contribue à
abolir les frontières mentales, qu'elle empêche le retour de l'horreur. On presse les éducateurs de mettre
en oeuvre une éducation pour la paix.
Quand l'heure reviendra, au rapport à force ouverte, et que monteront les hommes de fer suivis des
cortèges fascinés de leurs troupes, quand des millions de braves gens se retrouveront bottés, casqués et
au demeurant assez satisfaits de l'être, certains chercheront à mieux éclairer cette zone crépusculaire où
l'éducation pour la paix, dynamique prosélytisme du bien supérieur des hommes, de fait, sans qu'on y
prenne garde, le prosaïque fourrier d'un pacifisme naïf, timoré, proie facile à toutes les manipulations, ils
feront grief aux novateurs d'avoir contribué à démobiliser les esprits, d'avoir substitué à la fierté des
racines, à l'amour du terroir et à la conscience du patrimoine, un cosmopolitisme mou de l'errance et de
la concorde, incapable d'appeler au sursaut contre la force, parce que dépourvu de ce qui fait la force de
la force, la violence sublimée en projet dont la singularité vaille plus que vie ou mort.
Ainsi, l'éducation pour la paix ne représentait qu'une parade modeste face à l'exacerbation des
nationalismes entre les deux guerres. Mais aussi dérisoire que se présente son bilan, ce projet
pédagogique ne pouvait pas ne pas être contesté sur le fond (???) à cause de son incertitude politique
même. L'occasion nous est ainsi fournie de souligner, une fois encore, combien les courants
pédagogiques et leurs contre-courants ne sont pas dissociables de ce qui se trame dans la culture.

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2. L'heure des sciences humaines ou la pédagogie sous influence
2.1. La scolarisation, affaire d'Etat p. 50
2.1.3. Des démocraties pré-totalitaires ? p. 57

Jean-Jacques Wunenberger, dans L'utopie ou la crise de l'imaginaire (Paris – Delarge – 1979), a esquissé
le tableau de ce qu'il appelle la démocratie pré-totalitaire. Il la caractérise en 3 traits.

2.1.
La scolarisation,
affaire d'Etat

2.1.1. 2.1.2. 2.1.3.


L'éducation, invest. L'école proie des Des démocraties
utilitaire nationalismes prétotalitaires ?

A quoi ça sert ? "Orienter": Exacerber L'éducation Les décideurs Un nouveau rapport


améliorer les identités pour la concorde: et leurs experts de l'école
rendement force ou mollesse ? avec la famille
et bien-être
Un nouvel
L'enfant moderne, L'école
Imiter les rivaux art de vivre
miroir de l'adulte moderne de la réussite
et ses ambiguïtés

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2. L'heure des sciences humaines ou la pédagogie sous influence
2.1. La scolarisation, affaire d'Etat p. 50
2.1.3. Des démocraties pré-totalitaires ? p. 57

2.1.3.1. Les décideurs et leurs experts p. 57


Tout d'abord, une classe politique se trouve légitimée; elle fait de la rationalité l'un des critères de sa
fiabilité, la marque de sa compétence. Aux côtés du politique apparaissent les experts. Ainsi Raymond
Buyse, l'un de ses grands théoriciens européens de la pédagogie expérimentale, réclamera en 1974 que
les problèmes de l'éducation soient réglés par des bureaux d'étude à la disposition permanente des
décideurs.

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2.1. La scolarisation, affaire d'Etat p. 50
2.1.3. Des démocraties pré-totalitaires ? p. 57

2.1.3.2. L'école de la réussite p. 58


Cette nouvelle société est marquée, en second lieu, par la tendance au décloisonnement des structures
sociales, l'accession au bien-être se généralise, malgré d'importantes disparités dans les revenus.
La scolarisation est censée constituer la voie normale de la promotion. La réussite passe désormais par
l'école: la réussite, ce bien convoité, auxquels beaucoup de gens sont prêts à sacrifier d'autres valeurs qui
bénéficiaient jusque-là d'une priorité de convictions et d'habitudes.

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2.1. La scolarisation, affaire d'Etat p. 50
2.1.3. Des démocraties pré-totalitaires ? p. 57

2.1.3.3. Un nouvel art de vivre et ses ambiguïtés p. 58


Cette quête de la réussite coïncide avec une prise de conscience qui va aussi s'élargissant: le bonheur
individuel est l'un des biens les plus précieux qui soit, à la mesure de sa précarité. Les stratégies
indispensables pour l'acquérir et s'y maintenir comptent parmi les opérations importantes auxquelles
consacrer ses forces.
Dès la fin du XIXe siècle, le sociologue Emile Durkheim saluait l'époque comme celle où, après
l'effondrement général des valeurs de tradition, subsisterait le culte collectif de l'individu.
Mais ce nouvel art de vivre, modèle culturel imposant à l'éducation scolaire des dérives qu'elle ne
contrôle pas, recèle bien des ambiguïtés. Car cette vigilance soupçonneuse vis-à-vis des prérogatives
individuelles appelle comme son corollaire à la fois paradoxal et obligé, le renforcement d'un Etat-
providence autoritaire. L'émancipable se réveille assisté et ne s'en trouve pas si mal somme toute.
"Deus nobis haec otia fecit": c'est un dieu qui nous a donné le temps de nos loisirs. J'ai un très grand
faible pour ce propos tenu par Léon Ollé-Laprune, dans son cours à l'école normale de Paris en 1894.

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2.1. La scolarisation, affaire d'Etat p. 50
2.1.3. Des démocraties pré-totalitaires ? p. 57

2.1.3.4. Un nouveau rapport de l'école avec la famille p. 59


Mais l'activité d'éducation scolaire doit compter avec cette mentalité moderne. Le rapport entre les
enseignants et les familles il y a cent ans est un rapport largement conflictuel. Dans les zones rurales de
nos différents pays, la pomme de discorde est certes constitué principalement encore par le taux élevé
d'une abstention scolaire toujours endémique.
Mais les congrès d'instituteurs font déjà apparaître, dès la fin du XIXe siècle, ce qu'on pourrait appeler les
2nouveaux griefs", ceux qui, cent ans après, garniraient nos propres cahiers de doléances: parents
idolâtrant une progéniture dont les caprices font la loi et les soutenant avec violence ou lâcheté contre
l'instituteur; ou –autre cas de la même figure- parents démissionnaires se déchargeant sur ce dernier de
la fonction coercitive et attendant de l'éducation scolaire les remises au pas salutaires dont on se sent
soi-même incapable.
L'école exigeait beaucoup, c'est à elle maintenant que les usagers tendent à en demander trop, tout en
gardant à son égard une archaïque ambivalence.

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2.2. L'essor des sciences humaines p. 60

2.2.
L'essor des
sciences
humaines

2.2.1. 2.2.3.
Des sciences, 2.2.2. Les nouveaux
miroir d'une Une ère nouvelle préposés et leurs
culture "lieux communs"

Rhapsodie Contrôle de
Education Education du progrès l'émancipation
et société et psychologie
Education Education
et culture(s) et psychanalyse
L'humain est Pasteurs
Education transformable d'âmes
et langage

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2. L'heure des sciences humaines ou la pédagogie sous influence
2.2. L'essor des sciences humaines p. 60
2.2.1. Des sciences, miroir d'une culture p. 60

Les sciences humaines, psychologie, psychanalyse, sociologie, ethnologie, économie vont fasciner les
sociétés modernes, à ce point qu'elles leur procurent l'une des marques de leur identité. Des sciences qui
deviennent le miroir d'une culture ne peuvent être que des sciences bien vues. Mais est-ce vraiment elles
que l'on regarde ou le reflet qu'on leur demande de renvoyer ?
$entre la nouvelle cité savante et la nouvelle cité mondaine s'établit un lien singulier, écart et proximité
dans le même mouvement, appelant à la fois l'autonomie de la pensée scientifique et l'amalgame
constant des idées dans la culture. Il conviendra de ne pas perdre de vue cette contradiction si l'on veut
comprendre le statut des sciences humaines au cours de ce deuxième âge de la modernité et le rôle
qu'elles jouent dans les courants pédagogiques.

2.2.
L'essor des sciences humaines

2.2.1. 2.2.3.
Des sciences, 2.2.2. Les nouveaux
miroir d'une Une ère nouvelle préposés et leurs
culture "lieux communs"
Education et Education et
Contrôle
société psychologie Rhapsodie
Pas de sous-chapitre émancipation
Education et Education et du progrès
culture(s) psychanalyse L'humain est Pasteurs
Education et langage transformable d'âmes

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2.2. L'essor des sciences humaines p. 60
2.2.2. Une ère effectivement nouvelle p. 60

Certes, on entend bien résoudre des problèmes, mais on pose qu'il est indispensable de commencer par
"déconstruire" et reconstruire les "problématiques", comme on aimera à le dire. L'approche par les faits
et leur collationnement est réputée la seule fiable au détriment de l'approche par les idées et leur
enchaînement rhétorique. Cela n'empêche pas qu'on ait des idées, et même des idées sur tout, mais
l'exigence de validation objective des données amène à multiplier les recherches dont les objets tendent
à devenir de plus en plus "pointus" et les langages de plus en plus hermétiques par surcroît de technicité.
Comme le dit plaisamment Raymond Buyse de l'un de ses prédécesseurs, pionnier belge de la pédagogie
expérimentale au début du siècle, voici l'heure des "spécialistes spécialement spécialisés". Ce découpage
des phénomènes humain en un véritable kaléidoscope de vues partielles se trouve compensé par la
hardiesse de très grands esprits à proposer des hypothèses explicatives ou interprétatives globales. Les
entreprises monumentales d'un Sigmund Freud, d'un Jean Piaget et d'un Kurt Lewin, pour ne citer
qu'eux, sont là pour le rappeler.
C'est vraiment autour de 1900 que se réalise ce virage.
2.2.1. 2.2.3.
Des sciences, 2.2.2. Les nouveaux
miroir d'une Une ère nouvelle préposés et leurs
culture "lieux communs"
Education et Education et
Contrôle
société psychologie Rhapsodie
émancipation
Education et Education et du progrès
culture(s) psychanalyse L'humain est Pasteurs
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2.2. L'essor des sciences humaines p. 60
2.2.2. Une ère effectivement nouvelle p. 60

2.2.2.1. Education et société : le contrôle du sociologue p. 61


En 1895, Emile Durkheim publie Les règles de la méthode sociologique, équivalent pour les sciences de
l'homme de L'introduction à la médecine expérimentale de Claude Bernard. Durkheim commence par
prononcer la disqualification de l'expérience ordinaire. La sociologie spontanée est faite de pré-notions
auxquelles le chercheur doit suspendre son adhésion, s'il veut dans un second temps construire une
science des faits sociaux. Et il ne peut réaliser ce dessein qu'en "traitant ces faits comme des choses",
c'est-à-dire en les observant objectivement de l'extérieur.
Voilà l'éducation, fait social s'il en est, saisie par la science. Voilà l'éducateur, et sa sociologie spontanée,
sous le contrôle du sociologue.

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2.2. L'essor des sciences humaines p. 60
2.2.2. Une ère effectivement nouvelle p. 60

2.2.2.2. Education et culture(s) : du singulier au pluriel p. 62


C'est vers les mêmes années que le mot "civilisation" et le mot "culture" passent décidément du singulier
au pluriel. Entre 1890, date de la parution du célèbre Rameau d'or de James Fraser et la "grand guerre",
ce n'est pas moins d'une cinquantaine d'ouvrages, aujourd'hui classiques, qui permettent à
l'anthropologie et à l'ethnologie de présenter leur nouveau visage de science comparatiste de la
différence entre les sociétés.
Le lieu commun pédagogique de la valeur universelle, et donc de la supériorité en soi, de la culture
humaniste occidentale s'en trouve durablement ébranlé.

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2.2.2.3. Education et langage : la langue par elle-même et pour elle-même p. 62


C'est dans les mêmes années nonante qu'un homme encore assez seul et se situant très à l'écart des
courants, donne à Genève un enseignement qui deviendra après sa mort, l'un des cours les plus célèbres
du monde: Le cours de linguistique générale de Ferdinand de Saussure. Rompant avec la philologie basée
sur la comparaison et l'érudition historique, de Saussure ne préconise rien moins qu'une nouvelle
intelligence de la langue, étudiée par elle-même et pour elle-même. La langue est dotée d'un principe
d'organisation qui ne se réduit pas aux règles logiques qui préexisteraient dans une pensée avant le
langage.
L'enseignement des langues, et de la langue maternelle en particulier, allait durablement passer sous
contrôle d'une science linguistique dont l'ascendant et la prolifération sont parmi les phénomènes les
plus impressionnants du siècle.

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2.2. L'essor des sciences humaines p. 60
2.2.2. Une ère effectivement nouvelle p. 60

2.2.2.4. Education et psychanalyse : les nouveaux territoires de l'humain p. 62


1899 est l'année où paraît Die Traumdentung, la science des rêves, de Sigmund Freud. L'idée de
l'inconscient, jusque-là encore impressionniste et romantique, acquiert le statut d'une hypothèse de
travail. Le psychisme sera appréhendé comme ce qui, d'abord et essentiellement, échappe. Et les deux
expressions étant susceptibles d'être entendues dans leur amphibologie parlante, on nous offrira ce
nouveau "lieu commun" que "ce qui échappe fait la loi".
Or la conception de l'éducation scolaire reçue jusque-là, repose sur le "lieu commun" contraire: ne peut
"faire loi" dans les choses humaines que le maîtrisable et le maîtrisé, le "reste" n'étant que force aveugle,
énergie captable, retour du refoulé, comme disent les mondains.

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2.2. L'essor des sciences humaines p. 60
2.2.2. Une ère effectivement nouvelle p. 60

2.2.2.5. Education et psychologie : mesurer les différences p. 63


Cette même année 1899, dans leur laboratoire de la rue Granges-aux-Belles à Paris, Alfred Binet et
Théodore Simon ignorent encore que leurs deux noms accolés deviendront mondialement célèbres.
L'obsession du retard a, dès cette époque, inscrit sa loi dans la mentalité enseignante. Il existe certes des
retards qui tiennent aux circonstances, remédiables, et sans gravité pour le long terme, Il en est d'autres
que l'on ne pense pas pouvoir attribuer à autre chose qu'à une carence des sujets eux-mêmes, à une
intelligence qui ne "suit" pas, et qui appelle dès lors diagnostic, pronostic et traitement adéquat.
L'Echelle métrique de l'intelligence fut bricolée dans une salle annexe d'une modeste école d'un quartier
populaire parisien. Elle inaugure pourtant la série des grands instruments de mesure des capacités, à
prétention quantitative. Le quotient intellectuel, ce célèbre Q.I., cette approximation dont Binet lui-
même savait mieux que quiconque les notoires insuffisances, allait être érigé en une information
scientifique, d'autant plus redoutable et redoutée que la science s'y présentait sous l'image terriblement
simple d'un verdict chiffré appelant la comparaison, le jugement, le classement, l'exclusion.
La psychologie prenait son essor comme science de la mesure des différences entre les individus, comme
instrument social de leur placement.
Un homme comme Claparède, à Genève, à la même époque que Binet en France, estime que
l'orientation des écoliers, la sélection des cadres, l'évaluation des programmes scolaires et l'organisation
du travail peuvent désormais s'effectuer par des méthodes scientifiques d'une psychologie dont il
n'hésite pas à déclarer qu'elle disqualifie définitivement les praticiens et leurs vues empiriques sur les
réalités de l'école et de la production industrielle: place aux experts.

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2.2. L'essor des sciences humaines p. 60
2.2.3. Les nouveaux présupposés et leurs "lieux communs" p. 64

Cette ère nouvelle des sciences humaines est marquée par un triomphalisme dont la décence n'est pas
toujours la qualité première.
Paradoxe de la science, ses tenants prêchent ad intra la modestie dans la démarche expérimentale,
soucieux que chacun administre, avec probité et rigueur, la preuve de ce qu'il avance.
Mais en même temps, ad extra, ils annoncent sans forfanterie, non sans naïveté, que l'humanité grâce à
la science est en passe de voir guérir ses maux les plus criants. Il y a bien scientisme, dès que la passion
réformatrice vient fournir à la recherche son mobile le plus impérieux.
Trois traits semblent caractériser la mentalité qui se développe dans ce nouveau personnel des préposés
modernes aux affaires humanitaires.
2.2.
L'essor des sciences humaines

2.2.1. 2.2.3.
Des sciences, 2.2.2. Les nouveaux
miroir d'une Une ère nouvelle préposés et leurs
culture "lieux communs"
Education et Education et
Contrôle
société psychologie Rhapsodie
émancipation
Education et Education et du progrès
culture(s) psychanalyse L'humain est Pasteurs
Education et langage transformable d'âmes

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2.2. L'essor des sciences humaines p. 60
2.2.3. Les nouveaux présupposés et leurs "lieux communs" p. 64

2.2.3.1. Un air nouveau pour la rhapsodie du Progrès : soupçonnée et confirmée p. 64


En premier lieu, la rhapsodie progressiste est à la fois soupçonnée et confirmée.
Elle est soupçonnée dans la mesure où la démarche scientifique, appliquée aux choses humaines,
généralise une double priorité. Ce qui est premier désormais, c'est la prise factuelle, ombrageusement
méthodique et quantitative; c'est l'interprétation systématique récusatrice du discours "spontané" que
les institutions, les groupes et les individus tiennent sur eux-mêmes, leurs entreprises et la signification
de ce qui arrive.
Le "grand récit" du progrès prolonge par trop, malgré tout, la rhapsodie religieuse et son incontinence
lyrique.
Mais, en même temps, jamais la conviction progressiste ne s'est trouvée aussi puissamment confirmée
que par la génération fondatrice des sciences humaines. Car ces fondateurs demeurent, de quelque
façon, des militants. L'action sur les hommes, et particulièrement sur les hommes au cours de leur
enfance, est consacrée dans son ampleur et dans son projet.

L'humain est transformable: il est à transformer.

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2.2.3. Les nouveaux présupposés et leurs "lieux communs" p. 64

2.2.3.2. L'humain est transformable, il est à transformerp. 64


Les sciences nouvelles ne donnent pas seulement à connaître les choses humaines sous un jour nouveau.
Elles sont mobilisatrices, offrant motifs et moyens d'action, et ces moyens sont inouïs dont le siècle sera
convié à mesurer l'ampleur. Ainsi la révolution qu'instaure la psychologie dans la connaissance de l'enfant
est, aux yeux de Claparède, un tournant qu'il n'hésite pas à qualifier de "copernicien" (1905). Et, de son
côté, Emile Durkheim voit, dans la généralisation de la connaissance sociologique, le levier qui, par une
meilleure appréhension de ce qui détermine une société à produire ce qu'elle est, permettra de dégager
le projet qui la transforme.
Par ailleurs, chacun sait que les lendemains qui chantent, dont le marxisme se fait le prophète au
tournant du siècle dans la préparation d'imminentes révolutions prolétariennes, emprunte sans vergogne
aux registres religieux eschatologiques, pour dire cette société communiste future qui connaîtra la
transparence des rapports humains, enfin délivrés de l'oppression étatique bourgeoise.

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2.2.3. Les nouveaux présupposés et leurs "lieux communs" p. 64

2.2.3.3. Les modernes pasteurs d'âmes (1/2) p. 65


Ainsi, et c'est la seconde remarque, on n'a jamais autant proclamé le principe de la séparation des fins et
des constats, des jugements de faits et des jugements de valeurs, et on n'a jamais autant réalisé leur
amalgame.
Le projet de ces sciences nouvelles n'est pas tant, comme on le voit affirmer souvent et par des gens
naïvement sincères, d'élaborer des connaissances objectives, que d'abolir un mode de connaissances et
d'actions jugées nocives et rétrogrades au nom des valeurs mêmes de la modernité. Les sciences
humaines sont résolument contestataires d'un ordre ancien des choses; elles sont émancipatrices. De ce
fait, elles mettent en place, sous le discours du constat, un nouveau régime de la prescription, et d'une
prescription d'autant plus intimidante qu'elle s'y pare des prestiges de la science.
Et la psychologie piagétienne à ses débuts, est-elle autre chose qu'une psycho-morale ? Certes, Piaget,
entamant avec ses étudiantes de l'Institut Rousseau, une étude clinique du jugement moral de l'enfant,
prétend bien effectuer un collationnement objectif des données. Il confirme ainsi l'existence chez les
écoliers d'une double morale, celle de la classe où l'autorité hétéronome du maître fait la loi, appelant
soumission et duplicité, celle de la cour de récréation où les rapports égalitaires entre les enfants les
conduit à produire eux-mêmes leurs propres lois, véritable école de l'autonomie sous le signe de la lutte
pour le pouvoir mais aussi de la solidarité inventive.

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2.2.3. Les nouveaux présupposés et leurs "lieux communs" p. 64

2.2.3.3. Les modernes pasteurs d'âmes (2/2) p. 65

il "va de soi" que cette morale de l'enfance active et solidaire, née de l'autonomie et la favorisant, ne
peut être que supérieure à celle qu'engendre la dépendance à l'adulte et à l'institution qu'il représente.
Constat de psychologue ? Sans doute. mais en même temps, confirmation des thèses que, dans ces
mêmes années vingt, les pédagogues de l'Institut Rousseau tentent d'accréditer, non sans prosélytisme
et propagande, comme étant tout à la fois conclusions vérifiables de la science de l'enfant ET
prescriptions légitimes d'une morale basée sur la prise en compte de la nature humaine justement
estimée à la constance de ses normes.
La vulgarisation des sciences humaines et, principalement, les manifestations multiples de ce que l'on a
appelé, de nos jours, le pouvoir "psy" dans la culture, aboutiront à une véritable restauration de la
dépendance et de la direction spirituelle, au profit de ces nouveaux pasteurs d'âmes.
Beaucoup de ces "élucidateurs" n'interrogeront qu'avec réticence en leur propre conduite la persistance
de ce désir d'aide. Au nom de quoi céder au désir de se mêler de la vie et des problèmes des autres ? La
réponse est souvent embarrassée ou étonnamment triviale. Elle va de l'énoncé d'un quasi-fatalisme du
penchant –ce qui ne fait que différer la légitimation-, à l'aveu d'un militantisme honteux d'avoir à se dire
tel: "écoute de l'autre", "respect de la différence", "expression du désir", "épanouissement du potentiel
personnel"... Quelle différence avec un discours de moraliste chez ces gens dont la hantise est de se
garder comme de la peste de se révéler moralisant ?

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2.2.3. Les nouveaux présupposés et leurs "lieux communs" p. 64

2.2.3.4. La rivalité pour le contrôle de l'émancipation p. 67


Le troisième trait que je veux relever dans cet essor des sciences humaines, c'est leurs apparitions et
leurs développements concurrentiels.
Chacune d'entre elles sera présentée par ses tenants comme la voie unique, susceptible d'effectuer le
passage de la conscience faussée à la conscience juste, les autres voies étant dès lors dénoncées comme
insuffisantes, ou pire, complices de l'idéologie dominante.
Exemple -> cf. en fin de texte

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2. L'heure des sciences humaines ou la pédagogie sous influence
2.3. La pédagogie sous influence p. 68

Dans cette nouvelle donne de connaissances, on dira que la pédagogie devient une discipline "sous
influence". L'expression est d'emblée péjorative. Elle décrit non seulement une condition subalterne,
mais elle évoque la privation de ce minimum d'autonomie qui permettrait que, sous ce nom, puisse
figurer un corps de connaissances et de pratiques, susceptibles de développer une spécificité
intellectuelle autre que fragile.

2.3.
La pédagogie
2.3.5.
2.3.1. sous influence
Des sciences
Un pluriel au
prises dans
demeurant
la dérive
singulier
culturelle
2.3.2. 2.3.4.
La singulière Des "vérités"
persistante salutaires Cautionner Effets
des paradoxaux
du singulier 2.3.3. Mais en mœurs des sciences
Les sciences pratique ? nouvelles "sollicitées"
humaines,
indéniable Le sujet Le groupe-
stimulant épistémique classe
La classe
piagétien n'est pas n'est pas un
Lewin est une le divan "groupe-
Piaget abstraction diagnostic"
Freud freudien
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2.3. La pédagogie sous influence p. 68
2.3.1. Un pluriel au demeurant singulier p. 68

On a beaucoup épilogué sur l'apparition, au cours des années soixante de ce siècle, des sciences de
l'éducation. L'apparition de ce pluriel ne pouvait passer inaperçue et être jugée futile. Il signifie bien
qu'un projet avait vécu. Celui que des hommes comme Herbert Spencer, Alexandre Bain ou Henri Marion
pouvaient concevoir au XIXe siècle: élaborer, avec les instruments de la science moderne, une
connaissance unitaire des phénomènes éducatifs.
L'éducation devenait l'enjeu d'une puissante émulation entre approches spécifiques et rivales. Elle se
diffractait bientôt en autant d'objets que de sciences attachées à son étude.
Dans le même temps, le propos proprement éducationnel marquait son évidente désuétude. Ou bien on
l'avait trop tiré du côté de la morale au point qu'il se confonde avec elle et se trouve entraîné dans sa
disgrâce intellectuelle, ou bien on l'avait construit sur des systématiques par trop fermées sur elles-
mêmes et dépassées par les nouvelles connaissances: je pense à l'immense édifice de la pédagogie
d'Herbart dans les pays germaniques ou en Suisse romande. Ou bien encore on l'avait réduit à
l'inventaire utilitaire et prosaïque des mille et une recettes pour bien faire la classe ou pour élever
convenablement ses enfants.
Dans une chronique qui fit du bruit à l'époque en France, le psycho-sociologue de l'éducation, Gilles
Ferry, constatait que l'ère des sciences de l'éducation annonçait la "mort de la pédagogie". Juste vue des
choses, chacune de ces sciences n'étant en définitive, le plus souvent, que le développement, dans le
champ éducatif, de ce que leurs tenants pourraient élaborer sous le label propre de leur discipline
d'origine.
Pas de sous-chapitre
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2.3. La pédagogie sous influence p. 68
2.3.2. La singulière persistance du singulier p. 69

On doit cependant, avec Philippe Perrenoud, sociologue genevois, nuancer ce diagnostic et en contester
le caractère trop unilatéral.. La pédagogie, sans doute, est morte. Mais le souci pragmatique qu'elle
portait n'a pas manqué de contaminer les sciences qui se sont peu à peu redistribué son propos unitaire.
Tentacules, dans le champ éducatif, de la psychanalyse, de la psychologie, de la sociologie, de la
linguistique ou de l'économie, elles y sont peut-être plus fortement sollicitées qu'ailleurs de contribuer à
prescrire ce qui est le mieux.
Sous influence, la pédagogie se trouve à la fois stimulée et anesthésiée par les sciences humaines. Ces
dernières, à son égard, ont l'ambivalence des antidépresseurs. Agents d'un surcroît de tonus, la sédation
qu'ils entraînent peut engendrer cette somnolences contre laquelle les notices pharmaceutiques mettent
en garde les "automobilistes et autres conducteurs d'engins".
Prolongeons la métaphore puisque c'est bien de "conducteurs" qu'il s'agit, et demandons-nous si les
sciences humaines ne condamnent pas les conducteurs d'enfants au risque de l'anesthésie.
 

Pas de sous-chapitre
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2. L'heure des sciences humaines ou la pédagogie sous influence
2.3. La pédagogie sous influence p. 68
2.3.3. Les sciences humaines sont à l'éducation un indéniable stimulant p. 70

2.3.
La pédagogie
2.3.5.
2.3.1. sous influence
Des sciences
Un pluriel au
prises dans
demeurant
la dérive
singulier
culturelle
2.3.2. 2.3.4.
La singulière Des "vérités"
persistante salutaires Cautionner Effets
des paradoxaux
du singulier 2.3.3. Mais en mœurs des sciences
Les sciences pratique ? nouvelles "sollicitées"
humaines,
indéniable
Le sujet Le groupe-
stimulant épistémique classe
La classe
piagétien n'est pas n'est pas un
Lewin est une "groupe-
Piaget le divan
abstraction diagnostic"
Freud freudien
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2.3. La pédagogie sous influence p. 68
2.3.3. Les sciences humaines sont à l'éducation un indéniable stimulant p. 70

2.2.3.1. Jean Piaget : tout connaisseur est un constructeur p. 70


C'est à une obsession de jeunesse que l'on doit l'entreprise piagétienne. Celle-ci part d'une question
simple et déjà mille fois traitée: comment un être vivant parvient-il à connaître le monde ? La question
n'est simple qu'en apparence et, surtout, dès qu'on essaie de rendre compte de la connaissance
proprement humaine.
Une chose est acquise dès avant Piaget, c'est que cette connaissance vient par degrés, connaît des
étapes, ce que l'on appellera un développement. Piaget veut explorer cette genèse du sujet connaissant.
Et la conclusion possède d'emblée une résonnance pédagogique dont nous n'avons pas fini de mesurer
les retombées: tout connaisseur est un constructeur, un opérateur. Connaître est toujours une
opération du sujet connaissant. Plus encore, diront les piagétiens, c'est une interaction avec les autres,
surtout quand un conflit oblige à expliciter la construction mentale de l'objet. Et voilà validée l'école
active et, en son sein, les méthodes interactives sous la caution de Piaget, excusez du peu.

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2.3.3. Les sciences humaines sont à l'éducation un indéniable stimulant p. 70

2.2.3.2. Sigmund Freud : toute demande est une demande d'amour p. 71


Autre obsédé auquel nous devons le renouvellement de notre vision de la classe, de la relation maître-
élève, du rapport que chacun tisse avec le savoir, avec le plaisir de sa détention ou le déplaisir de sa
perte, Sigmund Freud pose que toute demande est une demande d'amour.
"Apprenez les mathématiques" prescrit le maître. L'élève apprend, mais le critère, à ses yeux, quand il en
parle sans contraintes, c'est qu'il "aime" ou qu'il "n'aime pas". "Apprenez" dit le maître. "Aimez !",
voulez-vous dire et, de surcroît, "aimez-moi car c'est moi qui suis à apprendre ou à laisser".
Faire apprendre, faire aimer, même combat. Faire apprendre, faire détester, mêmes risques. Faire
apprendre la mathématique, c'est faire aimer ou détester le mathématicien ou la mathématicienne.
Sous les apparences bienséantes ou mal contenues d'une classe sans histoires, Freud nous apprend à
subodorer l'histoire sans cesse en mouvement des désirs et des peurs, des lectures imaginaires, des
dérives passionnelles, vie et mort, en perpétuels débats, en perpétuels ébats. Rien n'est anodin, tout est
message, capté toujours, sans que pour autant que se ride forcément la face de l'eau qui dort. C'est en-
deçà que l'essentiel se passe, inconscient. Une clef est là qui, répondant à cent et une questions banales,
les débanalise pour qu'elles ne soient pas drame.

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2.3. La pédagogie sous influence p. 68
2.3.3. Les sciences humaines sont à l'éducation un indéniable stimulant p. 70

2.2.3.3. Kurt Lewin : dans un groupe, il se passe toujours quelque chose p. 71


Certes moins monumental que Piaget ou Freud, ce psychologue est l'inventeur de la "dynamique des
groupes", et c'est de lui que nous tenons cette vérité, aujourd'hui si élémentaire, mais hier si mal
connue, que toute classe est un groupe, c'est-à-dire un lieu d'interactions à multiple sens, un réseau de
communication avec ses canaux majeurs, ses écarts, ses impasses, un champ de force où entrent en
conflits les jeux de l'influence et du pouvoir, un véritable laboratoire des modalités du maniement
humain.
Une lumière décisive est ainsi jetée sur le groupe-classe, sur les manières du maître, sur l'art de modeler
l'autorité, sur la cohésion et la production des groupes de travail, etc.

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2.3.4. Des "vérités" salutaires, mais peu monnayables en pratique p. 72

Une fois la trompette théoricienne posée, quand le dithyrambe a fait entendre sa note finale, il reste aux
enseignants, prosaïquement établis sur les bases de leur pratique quotidienne, à s'interroger, à
interroger, sur le statut réel de ces "vérités", même quand ils ne nient pas qu'elles aient permis une
vision mieux ajustée des choses de l'éducation.
Salutaires, certes, ces vérités le sont, mais pas aussi facilement monnayables qu'on pourrait l'escompter
en termes de changements pratiques à longue échéance et à portée décisive.

2.3. 2.3.5.
2.3.1.
La pédagogie Des sciences
Un pluriel au
sous influence prises dans
demeurant
la dérive
singulier
culturelle
2.3.4.
2.3.2.
Des "vérités"
La singulière Cautionner Effets
salutaires
persistante des paradoxaux
2.3.3. Mais en mœurs des sciences
du singulier
Les sciences pratique ? nouvelles "sollicitées"
humaines,
indéniable Le sujet Le groupe-
stimulant épistémique classe
La classe
piagétien n'est pas n'est pas un
Lewin est une le divan "groupe-
Piaget abstraction diagnostic"
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2.3. La pédagogie sous influence p. 68
2.3.4. Des "vérités" salutaires, mais peu monnayables en pratique p. 72

2.3.4.1. Le sujet épistémique piagétien est une abstraction p. 72


Ainsi Piaget a toujours gardé la préoccupation de contrôler le monde éducatif, ne serait-ce qu'en
occupant pendant près de cinquante ans la direction du Bureau international d'éducation. Il a pourtant
tenu à faire accréditer par ses disciples la tenace réputation d'un homme qui n'entendait rien à
l'éducation scolaire et recommandait qu'on ne transposât qu'avec d'infinies précautions sa traque du
sujet épistémique en programmes d'apprentissage. Beaucoup ont constaté en effet combien dans la
pratique, les conclusions de ces recherches fondamentales se résolvent difficilement en directives
d'action. C'est ainsi qu'un piagétien, aussi orthodoxe de formation que libre de paroles à l'égard du
maître, Rémy Droz, professeur à l'Université de Lausanne, concluait naguère un article retentissant par la
nécessité et l'impossibilité conjointes d'exploiter les travaux de Piaget en pédagogie.
C'est que le sujet épistémique, constructeur interactif et progressif de la connaissance, est une
abstraction indispensable à l'approche scientifique des processus cognitifs chez les petits d'homme, mais
ce n'est pas lui qui peuple nos classes. Le peuple écolier concret est fait, autant et plus, de ces paquets de
nerfs et de désirs, de ces creusets de joie et de tristesse, de ces îlots de tendresse et de cruauté, de ces
bouffées de curiosité et de ces plages d'inertie à travers quoi se révèlent des histoires de vie dont aucune
ne tisse avec la connaissance un lien réductibles aux schémas piagétiens.
L'histoire du rapport d'un être humain avec le savoir, tout cognitif qu'il puisse être décrit, est l'histoire
d'une aventure où chacun, sous les pressions conformantes et déformantes de son environnement social,
construit et détruit son identité dans un jeu de miroir sans cesse relancé avec l'identité des autres, avec
les modèles qu'ils imposent et ceux qu'ils interdisent.

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2.3. La pédagogie sous influence p. 68
2.3.4. Des "vérités" salutaires, mais peu monnayables en pratique p. 72

2.3.4.2. La classe n'est pas le divan freudien p. 73


Les débats récemment et heureusement traduits par Mireille Cifali et Jeanne Moll, d'une importante
revue de psychanalyse écrite en langue allemande dans les décennies vingt et trente, montrent la grande
hésitation des freudiens, à l'image de l'ambivalence de Freud lui-même. Ils montrent aussi leur progressif
désenchantement. La classe n'est pas le divan, l'éducation n'est pas la thérapie, l'enseignant n'a pas à
jouer les apprentis sorciers, l'analysant n'est pas l'analyste.
Doit-on aller en définitive jusqu'à dire que dans ce domaine, aujourd'hui, l'éducateur en sait trop ou trop
peu, hormis des cas particuliers comme l'illustrent certains groupes français de la Pédagogie
Institutionnelle ?

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2.3.4. Des "vérités" salutaires, mais peu monnayables en pratique p. 72

2.3.4.3. Le groupe-classe n'est pas un "groupe de diagnostic" lewinien p. 74


Et sur la dynamique des groupes lewinienne, comment ne pas porter le même diagnostic. J'ai eu la
chance d'être parmi les premiers européens formé dans les années cinquante à cette approche alors
toute nouvelle. Des pans entiers de ma fonction d'enseignant se trouvaient ainsi éclairés.
La liberté d'apprendre, publié en 1967, décrit mon enthousiasme, non sans quelques réserves.
La liberté d'apprendre, situation II, publié en 1977, ne renie rien sur le fond des choses mais décrit sans
complaisance les limites de l'opération instituante. Car celle-ci s'inscrit dans les conditions réelles d'une
éducation scolaire. Et la charpente en est constituée par des objectifs et des évaluations dont le contrôle
reste institué en des habitudes mentales, des espaces et des échéances temporelles qui, en définitive,
font la loi.

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2.3. La pédagogie sous influence p. 68
2.3.5. Des sciences prises elles-mêmes dans la dérive culturelle où se meut l'éducation p. 74

C'est, en l'occurrence, hors du champ scolaire que les nouvelles pratiques de groupe, aux frontières
imprécises du développement personnel, de la thérapie ambulatoire et de la secte d'initiés, vont fleurir à
soixante du XXe siècle.

2.3.
La pédagogie
2.3.5.
2.3.1. sous influence
Des sciences
Un pluriel au
prises dans
demeurant
la dérive
singulier
culturelle
2.3.2. 2.3.4.
La singulière Des "vérités"
persistante salutaires Cautionner Effets
des paradoxaux
du singulier 2.3.3. Mais en mœurs des sciences
Les sciences pratique ? nouvelles "sollicitées"
humaines,
indéniable Le sujet Le groupe-
stimulant épistémique classe
La classe
piagétien n'est pas n'est pas un
Lewin est une le divan "groupe-
Piaget abstraction diagnostic"
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2.3.5. Des sciences prises elles-mêmes dans la dérive culturelle où se meut l'éducation p. 74

2.3.5.1. Cautionner des mœurs nouvelles p. 75


Bien des espoirs sont permis à des milliers de nos contemporains en peine de civilisation. Ils trouvent là
une expérience humaine riche et validante, une stimulation cordiale et conviviale, un art de vivre
débarrassé des impératifs par trop rigides auxquels furent soumises les générations précédentes.
Mais tout ce mouvement ravive en même temps les contradictions contre lesquelles il s'insurge. S'il est
"courant", il est, dans le même temps même, "contre-courant". Pour les uns les sciences humaines
seront appréhendées à travers l'offre démultipliée des pratiques et de la littérature psychologiques. mais
tout autant, pour d'autres, ce sera la confection d'une sociologie réduite à un catéchisme, marxisant
rudimentaire. Pour d'autres encore, ce sera la célébration anthropologique de la différence invoquées
d'abord par des occidentaux pour se culpabiliser eux-mêmes des prétentions où les conduit leur propre
patrimoine identitaire.

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2.3. La pédagogie sous influence p. 68
2.3.5. Des sciences prises elles-mêmes dans la dérive culturelle où se meut l'éducation p. 74

2.3.5.2. Effets paradoxaux de sciences "sollicitées" (1/2) p. 75


Cette puissant sollicitation culturelle de la science a pour résultat, alors que pourtant on appelle à
l'émancipation, de consolider le pouvoir des "spécialistes spécialement spécialisés", gourous près des
nouveaux fidèles, experts près des nouveaux responsables. Car la demande adressée aux sciences
humaines est une demande proprement insensée qui les érige en véritables substituts de la religion et de
la morale: "Dites-nous ce que nous sommes." La figure de l'expert y fortifie son éminence, incarnation du
nouveau confesseur des temps modernes, indispensable "sujet supposé savoir", préposé à la rationalité
des décisions et des conduites.
Mais dans le même temps où l'expert est ainsi consacré, comme être mis à part du fait même de sa
science, s'exerce sur lui la plus insidieuse des pressions: "Dites-nous ce que nous nous complaisons à
nous entendre dire." Sollicitées, exténuées par des interprétations simplificatrices et une vulgarisation
que les scientifiques ne contrôlent ni de près ni de loin, trop révérées pour être vraiment comprises, les
sciences humaines offrent un spectacle étonnant.
D'une part, elles annoncent de façon dominatrice le savoir sur les choses humaines, favorisant les
oligarques de la nouvelle cité savante.
D'autre part, les sciences humaines sont serves de naissance, congénitalement destinées à voir leurs
vérités travesties, biaisées, désamorcées par une cité mondaine où les usagers cherchent de nouvelles
vérités simples, de nouvelles fables.

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2.3. La pédagogie sous influence p. 68
2.3.5. Des sciences prises elles-mêmes dans la dérive culturelle où se meut l'éducation p. 74

2.3.5.2. Effets paradoxaux de sciences "sollicitées" (2/2) p. 75


Pour parler par métaphore, faut-il dire que l'aventure des sciences humaines dans la culture se résume
au paradoxe du "noyau dur" et du "ventre mou" ?
Cette situation singulière –on le conçoit sans peine-, ne peut que retenir sur le propos pédagogique dont
le propre est de s'interposer par destination sociale entre les experts et les usagers, à la jointure de la cité
savante et de la cité mondaine, mixte d'idées en faveur (???) et de concepts opératoires
professionnalisés que l'on parvient avec plus ou moins de bonheur à soustraire à l'usage commun.

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L'exemple de la

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pédagogie

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3.3.3.

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par objectif
La rationalité
3.1.1. Comment faire éducative et
Double perversion
du crédit de nouveau crédit le risque
aux autres ? d'effets
pervers Entre utopiste
3.1.2. Le cercle du 3 et technocrate :
le bricoleur
crédit et son Commencemt

de la rénovation des plans d'étude


Du bon usage et des nuisances
existence paradoxale
3.1. de la fin 3.3.
La révision 3.3.2.
Le mirage du planétaire La ou des "lieux Réorienter les
postmodernité :
La raison a partie liée entre fin du communs" tâches de
avec la violence dans l'éducation
incrédulité et commencemt l'Education scolaire ?
crédulité
3.1.3. La rhapsodie du
? nouvelle
L'éducation et la Le retour
progrès a subi la
condition à la didactique :
passion de la violence
postmoderne un phénomène salutaire
mais ambigu
La collusion explosive 3.1.4. La véridique 3.3.1.
de la militance
habitation du monde Pédagogie Un courant qui n'est
et du soupçon
3.2. et dérive pas d'abord
pédagogique
Contradictions culturelle
éducatives L'école active :
dans la une idée-force
3.2.1. L'autonomie postmodernité 3.2.3. L'injonction et un malentendu
le
par l'intégration ub permissive
Do ction ire
on to
inj radic
3.2.2. L'injonction t
con
autoritariste "Fichez-leur la paix"
Les parents ont changé Le temps des "gagneurs"
L'école, vieille dame …
L'école soumise au double blind
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"Bien dans sa peau"
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3. Commencement de la fin ou fin du commencement ? p. 77
Cette situation des connaissances sur l'humain que je viens de décrier à grands traits, plus que la marque
du triomphe de l'ère progressiste et de ses courants, est peut-être tout au contraire l'un des indices de
sa décomposition, l'un des signes que nous sommes entrés pour de bon dans "la condition post-
moderne". Mais on sait mieux, grâce à la sociologie de la connaissance, que le savoir ne peut,
qu'arbitrairement et non sans illusions pour l'esprit, être séparé des conditions de sa production et de sa
circulation dans la culture.
3
Commencement de la
fin
ou
fin du commencement ?
L'éducation et la condition
postmoderne

3.3.
3.1. La révision des
3.2.
La "lieux
Contradictions
postmodernité : communs"
éducatives
entre dans
dans la
incrédulité et l'Education
postmodernité
crédulité nouvelle

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3. Commencement de la fin ou fin du commencement ? p. 77
3.1. La post-modernité : entre incrédulité et crédulité p. 77

3.1.
La
postmodernité :
entre
3.1.1. incrédulité et
crédulité 3.1.4.
Comment faire
La véridique
de nouveau crédit
habitation du monde
aux autres ?

3.1.2. 3.1.3.
Le cercle du crédit La rhapsodie du
et son existence progrès a subi la
paradoxale passion de la violence

Double perversion Le mirage La raison a partie liée La collusion explosive


du crédit du planétaire avec la violence de la militance
et du soupçon

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3. Commencement de la fin ou fin du commencement ? p. 77
3.1. La post-modernité : entre incrédulité et crédulité p. 77
3.1.1. Comment faire de nouveau crédit aux autres ? p. 77

Peut-être est-ce le rapport au savoir et principalement aux connaissances, à leur élaboration, à leur
vérification, à leur circulation, qui marque la nouvelle condition de la culture humaine. Ainsi que Judith
Schlanger l'a montré, toute culture est d'abord mémoire. Et se souvenir, tant par la remémoration que
par la commémoration, c'est entretenir avec autrui un "cercle de crédit" dont nous donnons l'ardente
sereine obligation.

3.1.
La
postmodernité :
entre
3.1.1. incrédulité et
crédulité 3.1.4.
Comment faire
La véridique
de nouveau crédit
habitation du monde
aux autres ?

3.1.2. 3.1.3.
Le cercle du crédit La rhapsodie du
et son existence progrès a subi la
paradoxale passion de la violence

Double perversion Le mirage La raison a partie liée La collusion explosive


du crédit du planétaire avec la violence de la militance
et du soupçon

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3. Commencement de la fin ou fin du commencement ? p. 77
3.1. La post-modernité : entre incrédulité et crédulité p. 77
3.1.2. Le cercle du crédit et son existence paradoxale p. 78
L'originalité de la pensée de Judith Schlanger, c'est de nous montrer que "faire crédit", autant que
"s'emparer", est constitutif d'un rapport au savoir capable de se faire créateur d'une culture. Créditer nos
informateurs, nos formateurs, d'un pouvoir sur la vérité, avec lequel notre propre pouvoir fait cause
commune, tel est bien le cercle du crédit. Son existence est paradoxale. Car "faire crédit", c'est à la fois
admettre* et contester** les différences. "Créditer" est donc perpétuer du paradoxe et en entretenir la
tension,
* Les admettre: 3.1. ** Les contester et les assumer
il n'y a pas lieu en effet de "faire crédit" La sous une évidence commune : faire crédit.
à ce qui nous est identique …
postmodernité :
entre
3.1.1. incrédulité et
crédulité 3.1.4.
Comment faire
La véridique
de nouveau crédit
habitation du monde
aux autres ?

3.1.2. 3.1.3.
Le cercle du crédit La rhapsodie du
et son existence progrès a subi la
paradoxale passion de la violence

Double perversion Le mirage La raison a partie liée La collusion explosive


du crédit du planétaire avec la violence de la militance
et du soupçon

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3.1. La post-modernité : entre incrédulité et crédulité p. 77
3.1.2. Le cercle du crédit et son existence paradoxale p. 78

3.1.2.1. Double perversion du crédit p. 78


Avec nos devanciers, la solidité de ce cercle du crédit tenait à l'évidence progressiste communément
partagée. Doit-on dire alors aujourd'hui que ce cercle est rompu ? Le crédit est un phénomène fragile et
comme suspendu à un certain "état de grâce" de l'entendement culturel. Cet état de grâce tient d'abord
à ce que le paradoxe est assumé et devient, alors, accès possible à la vérité. Quand le crédit se
décompose, l'ensemble de forces dont il retenait et recentrait l'énergie, se redistribue dans le champ des
extrêmes. Et ces extrêmes vont former ce que je propose d'appeler l'anticercle du crédit, par l'alliance
pernicieuse de l'excès de la crédulité et de l'insistance dans l'incrédulité.
La postmodernité, c'est peut-être le passage par cette double perversion du crédit, passage transitoire en
une conjonction qui n'est plus paradoxale. Le "paradoxe" qui tenait ensemble différence et universalité,
fait place à une double "doxa". A la "doxa" comme rumeur de la connaissance appelant le surcroît de la
crédulité, s'oppose, en une fiction symétrique, la "doxa" comme tentative doctrinale de résistance
incrédule en quête de nouveaux "lieux communs" pour la pensée.

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3.1. La post-modernité : entre incrédulité et crédulité p. 77
3.1.2. Le cercle du crédit et son existence paradoxale p. 78

3.1.2.2. Le mirage du planétairep. 79


Ainsi, nous dit-on, la nouvelle conscience est planétaire. Ce qui n'est pas du tout restaurer la croyance en
l'universalité de la conscience.
La diffusion instantanée de l'information par les mass-média semble, à première vue, favoriser une
conscience collective jusque-là inconnue. Mais la vocation d'universalisme, réduite à la dimension
étroitement spatiale du "planétaire" s'inscrit désormais dans l'ordre de la nécessité et non plus dans
l'ordre de l'obligation. Ce n'est plus un devoir d'être solidaire des petits Chinois, c'est un fait qu'ils
peuplent nos images où se réfracte désormais la potentielle véracité du monde. "Vu à la télé" : tel est le
critérium. Nous voici, quoi que nous en pensions, "planétaires", mais planétaires en fauteuil et par écrans
interposés. La solidarité peut n'être qu'un voyeurisme, faisant un objet du regardé mais tout aussi bien
du regardant.
L'universalisme moral progressiste, qui sous-tendait le zèle missionnaire de l'occident et légitimait son
expansionnisme économique, fait place désormais à un cosmopolitisme du regard voyageur par quoi les
identités se tangentent ou se nient. Le planétaire n'est humanisant que sur le fond de la puissante saga
d'un progrès collectif commun et de l'inscription en son développement de la progression de nos
propres destinées. Hors de quoi, il n'est qu'un sort subi, que renforce la crédulité dans le spectacle
idolâtré du monde, mélange étonnant de béatitude spectatrice et de fascination terrorisée par une
apocalypse déjà là.

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3.1. La post-modernité : entre incrédulité et crédulité p. 77
3.1.3. La rhapsodie du progrès a subi la passion de la violence p. 79

Mais la rhapsodie du progrès, sur laquelle s'était édifiée la croyance laïque où se légitimaient la validité
universelle de l'école et la généralisation de ses bienfaits, cette rhapsodie a subi la passion de la violence,
et nos contemporains se sont, à son égard, réveillés incrédules.

3.1.
La
postmodernité :
entre
3.1.1. incrédulité et
crédulité 3.1.4.
Comment faire
La véridique
de nouveau crédit
habitation du monde
aux autres ?

3.1.2. 3.1.3.
Le cercle du crédit La rhapsodie du
et son existence progrès a subi la
paradoxale passion de la violence

Double perversion Le mirage La raison a partie liée La collusion explosive


du crédit du planétaire avec la violence de la militance
et du soupçon

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3.1. La post-modernité : entre incrédulité et crédulité p. 77
3.1.3. La rhapsodie du progrès a subi la passion de la violence p. 79

3.1.3.1. La raison a partie liée avec la violence p. 79


Je vois plusieurs manifestations de cette incrédulité. Et tout d'abord l'œuvre de raison, en nos
entreprises, a révélé son extrême fragilité, prise au piège du feu, du fer, de la guerre et des larmes, car
-précisons-le bien de nouveau- la raison n'est pas tant la victime de la violence irrationnelle aveugle et
imbécile, qu'elle n'a composé avec elle. Et c'est leur liaison qui instaure le visage moderne du monde.
Les nuisances ne sont-elles pas filles de la rationalisation comme des tortures prolongent la dialectique ?
Après tout, la "question, ce mot, qui véhicule l'inquiétude vive de l'esprit, désigne aussi la déduction des
corps et des âmes à la seule dimension de leurs souffrances imposées et légitimables. Que seront les
lendemains de cette espèce nuisible à laquelle nous appartenons ? Quelle rhapsodie peut, sans trembler,
entonner encore les chants dont la saga du progrès pourvoyait nos lendemains sans vergogne ?
L'espérance joue, de ce temps, les lanternes sourdes, et c'est bien fait pour elle, qui se confondait par
trop avec la certitude et censurait l'instant quand nous avions, nous, à la vivre.

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3.1. La post-modernité : entre incrédulité et crédulité p. 77
3.1.3. La rhapsodie du progrès a subi la passion de la violence p. 79

3.1.3.2. La collusion explosive de la militance et du soupçon p. 80


La seconde manifestation de l'incrédulité post-moderne, je la vois dans la collusion explosive de la
militance et du soupçon où se sont instaurés les sciences qui, dans la modernité, nous ont proposé de
nouvelles lectures du phénomène humain. Rupture permanente du cercle de crédit, au nom d'une
objectivité positiviste, impérialiste, inquisitoriale, la militance scientiste s'est enfermée dans une
contradiction dont on peut supposer qu'elle intriguera passablement nos successeurs.
User de l'arme nihiliste du soupçon, c'était faire appel au seul instrument susceptible de récuser les
croyances contraires toujours présentées comme dominantes et donc persécutrices. Mais dans cette
perspective, militer appelait à proposer une alternative croyante, incapable d'instaurer un véritable
cercle du crédit, prise qu'elle était dans l'engrenage fatal du soupçon érigé en fin de mot de la
connaissance. Or c'est bien dans le seul cercle du crédit que le jeu de l'incrédulité pourrait échapper aussi
bien à la complaisance à soi, larvée en toute pratique du soupçon, qu'au nouveau conformisme de
l'anticonforme. Au cercle du crédit a été substitué le cercle du mépris; et la pratique de l'aveuglement sur
soi s'est trouvée érigée en règle de fonctionnement de maints discours des tenants des sciences
humaines quand ils inscrivaient leurs pratiques dans le champ du politique.
Proposant précisément une exceptionnelle critique de la raison politique, Régis Debray, avec une ironie
superbe, n'a pas de peine à mesurer l'inconséquence de ceux qui n'ont voulu prendre en compte les
phénomènes de croyance, d'adhésion, de conviction, de représentation collective mythique qu'à titre
d'idéologie imputable à la carence ou à la débilité des "autres".

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3. Commencement de la fin ou fin du commencement ? p. 77
3.1. La post-modernité : entre incrédulité et crédulité p. 77
3.1.4. La véridique habitation du monde p. 79
""Comment faire légitimement crédit ?" demeure bien la question essentielle à laquelle les praticiens des
sciences humaines à venir se trouveront affrontés, s'il en reste. Ma conviction est que la véridique
habitation humaine du monde réside dans le cercle de crédit en lequel, mystérieusement tracé pour
d'invisibles territoires, se tisse le réseau de la créance mutuelle, confiance offerte, mémoire entretenue,
projet fiable.

3.1.
La post-
modernité :
entre
3.1.1. incrédulité et
crédulité 3.1.4.
Comment faire
La véridique
de nouveau crédit
habitation du monde
aux autres ?

3.1.2. 3.1.3.
Le cercle du crédit La rhapsodie du
et son existence progrès a subi la
paradoxale passion de la violence

Double perversion Le mirage La raison a partie liée La collusion explosive


du crédit du planétaire avec la violence de la militance
et du soupçon

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3.2. Contradictions éducatives dans la post-modernité p. 81
Pour l'heure ce sont davantage sans doute les contradictions de la situation éducative qui sont
perceptibles, douloureusement ressenties parfois par des enseignants qui en sont encore, dans l'arène
de leurs débats personnels, à s'interroger sur les rapports de la modernité et de la tradition.
Je voudrais évoquer ici, à titre d'exemple, deux contradictions où semble enfermée l'école moderne à
l'heure de la postmodernité, et dégager les courants et contre-courants qui s'y rencontrent non sans
parfois traverser la mentalité même de chacun. -> 3.2.1 et 3.2.2/3

3.2.
Contradictions
éducatives
dans la
post-modernité
on
cati n
3.2.1. u o 3.2.3.
d 'éd ncti
L'autonomie par e jo L'injonction
nd e in ire
l'intégration ema ubl dicto permissive
d o
La sa d ontra
et c
3.2.2.
Réhabilitation "Fichez-leur
L'injonction la paix"
autoritariste du pitre

"Bien dans L'école,


sa peau" vieille dame …
Les parents Le temps
ont changé des "gagneurs"
L'école soumise
au double blind

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3.2. Contradictions éducatives dans la post-modernité p. 81
3.2.1. L'autonomie par l'intégration p. 82

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3.2.
Contradictions
éducatives
dans la
post-modernité
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3.2.1. u o 3.2.3.
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L'autonomie par e jo L'injonction
nd e in ire
l'intégration ema ubl dicto permissive
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3.2.2.
Réhabilitation "Fichez-leur
L'injonction la paix"
autoritariste du pitre

"Bien dans L'école,


sa peau" vieille dame …
Les parents Le temps
ont changé des "gagneurs"
L'école soumise
au double blind

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3.2. Contradictions éducatives dans la post-modernité p. 81
3.2.1. L'autonomie par l'intégration p. 82

J'ai émis précédemment des doutes sur la valeur de cette conscience planétaire. Je ne nie pas qu'on
puisse légitimement nous la vanter comme le dernier mot de la solidarité humaine. J'y entrevois, pour
ma part, la paralysie menaçante de la fascination spectatrice. Les élèves de nos classes, grâce à
l'uniformisation médiatique, participent déjà, et participeront de plus en plus, de cette culture commune.
Un grand nombre y pressentent la voie de leur émancipation à l'égard des générations qui les forment.
Mais cette émancipation, à ^l'âge des foules façonnables, plonge dans un imaginaire collectif modélisant.
Il s'y cultive de nouvelles idoles au pieds desquelles l'autonomie, ombrageusement revendiquée comme
le bien suprême, risque de n'être plus qu'une croyance naïve, une nostalgie dont on ne veut pas voir
qu'elle est sans cesse contrariée. Confondue avec l'absence de contraintes et habitée par la "peur d'être
eu" qui taraude beaucoup de nos contemporains, l'autonomie ressemble à un pathétique et vain
surgissement de dupes, tous tenus par le même discours hétéronome, plus qu'aucun d'entre eux ne le
tient véritablement. Alors que seule cette dernière attitude établirait les bases d'une autonomie
véritable.

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3.2. Contradictions éducatives dans la post-modernité p. 81
3.2.2. L'injonction autoritaire p. 82
Autre contradiction où se débat l'éducation aujourd'hui : le premier âge de la modernité fut l'âge de la
prise de conscience, par une minorité éclairée, du bienfait de l'instruction pour les masses. Et l'on sait
que les populations résistèrent, percevant contrainte matérielle et menace morale dans ces dispositions.
Au second âge de la modernité, les assujettis à l'obligation scolaire s'y soumettaient, mais voici qu'ils en
redemandaient ! La conscience que la promotion s'effectue par l'itinéraire scolaire s'imposait.

3.2.
Contradictions
éducatives
dans la
post-modernité
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L'autonomie par e jo L'injonction
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Réhabilitation "Fichez-leur
L'injonction la paix"
autoritariste du pitre

"Bien dans L'école,


sa peau" vieille dame …
Les parents Le temps
ont changé des "gagneurs"
L'école soumise
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3.2.2. L'injonction autoritaire p. 82

3.2.2.1. Les parents ont changé p. 83


La demande sociale d'instruction demeure très forte dans la postmodernité, mais elle est plus
ambivalente. L'école, en proie aux parents post-modernes, ressemble encore à l'école du XIXe siècle,
alors que ces parents, eux, ont changé.
L'éducation familiale, marquée de plus en plus inéluctablement par le fait culturel majeur de
l'émancipation des femmes, s'est sensiblement transformée.
La mauvaise volonté parentale que déploraient les instituteurs romands à la fin du XIXe siècle s'est muée
chez les plus évolués en un désir de se mêler des choses de l'école, non sans une grande ambivalence de
sentiments à l'égard de cette dernière et de ses agents.

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3.2. Contradictions éducatives dans la post-modernité p. 81
3.2.2. L'injonction autoritaire p. 82
3.2.2.2. L'école soumise au double-blind p. 83
Cette ambivalence, au sein des classes moyennes urbaines en particulier, apparaît dans le rapport que les
parents entretiennent avec la réussite de leurs enfants. Dans le même temps, l'institution scolaire est
sommée d'assurer la réussite scolaire, mais sans nuire pour autant à la réussite tout court que
beaucoup de post-modernes opposent à la première. L'ampleur de la crise économique, sa durée,
l'angoisse qu'elle suscite chez beaucoup, devant l'incertitude des débouchés et les reconversions
déchirantes imposées par les nouvelles technologies, ont certes pour effet de dramatiser la requête de la
réussite proprement scolaire.
"Faites-le travailler !" L'institution scolaire reçoit cette injonction qui sous-entend deux choses, d'abord :
"Soyez exigeants pour nos rejetons : discipline, rigueur, régularité. Chargez-vous de la mise en œuvre de
ces idéaux ascétiques qu'imposent les circonstances, et déchargez de leur poids nos épaules trop
faibles.". Mais l'injonction est, en même temps, menace larvée, soupçon, enquête. L'école -et
particulièrement l'école publique- fournit-elle vraiment les moyens de cette réussite ? Que valent les
méthodes, que valent les enseignants, que valent tels enseignants ? Et déjà l'on compare, l'on conteste, à
bon droit d'ailleurs : au nom de quelle raison d'Etat l'enjeu d'un avenir déjà si menacé devrait être remis
sans appel entre les mains de gens dont certains étalent une incapacité notoire, mais que leur
appartenance à la fonction publique rend inamovibles ?
Mais la mise en accusation peut soudain faire "déraper" l'argumentaire et révéler, sous la revendication
un autre "lieu commun" que celui de l'équité éducative : l'avenir est aux jeunes loups et il leur faut
prématurément aiguiser leurs dents longues !

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3.2. Contradictions éducatives dans la post-modernité p. 81
3.2.2. L'injonction autoritaire p. 82

3.2.2.3. Le temps des "gagneurs" p. 84


Toute une propagande, relayée par la publicité et les shows de personnalités médiatiques, louent ainsi les
"battants", les "gagneurs" prêts à payer le prix du succès, mais à le faire aussi payer aux autres puisque
désormais les places sont rares et chères. De la rigueur : et qu'enfin délivrés de toute velléité égalitariste,
les meilleurs gagnent. Voici un discoure novateur que la postmodernité, dans le concert discordant des
propos sur l'éducation, fait entendre non sans une certaine insistance.
La bienveillance égalitariste est en accusation. On lui fait grief de sa mollesse démagogique, de son
romantisme à la fois mythiquement révolutionnaire et effectivement rétrograde. Et le plaidoyer, par
contre, tente une véritable réhabilitation de la malveillance. Mais comme les survivances du
christianisme ou celles, tout aussi prégnantes, du stoïcisme, empêchent encore de célébrer trop
ouvertement cette dernière comme une vertu, on va chercher dans l'ordre de la nécessité, dans l'ordre
des déterminations biologiques voire sociobiologiques, les raisons de ce mauvais vouloir à l'égard
d'autrui, adversaire fatal, et dont il convient de limiter les ambitions si l'on veut promouvoir les nôtres
dans le struggle for life. Ce courant de pensée est certes souvent d'origine réactionnaire. Il fait parfois
cause commune avec les attitudes racistes et xénophobes. Et, en un paradoxe qui n'est qu'apparent, il
rencontre une certaine faveur dans les milieux populaires dont il recoupe une partie des traditions et
confirme bien les expériences.

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3.2. Contradictions éducatives dans la post-modernité p. 81
3.2.3. L'injonction permissive p. 84
Un contre-courant peut être repéré où se manifeste davantage la mentalité des classes moyennes
urbaines, imprégnées de ce qu'il est convenu d'appeler la culture "psys". On peut y mettre à jour une de
leurs contradictions à l'égard de l'éducation scolaire. Dans le même temps où l'on conforme ses valeurs à
l'échelle de l'excellence scolaire, on reste sensible au discours qui les conteste.

3.2.
Contradictions
éducatives
dans la
post-modernité
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3.2.1. u o 3.2.3.
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L'autonomie par e jo L'injonction
nd e in ire
l'intégration ema ubl dicto permissive
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3.2.2.
Réhabilitation "Fichez-leur
L'injonction la paix"
autoritariste du pitre

"Bien dans L'école,


sa peau" vieille dame …
Les parents Le temps
ont changé des "gagneurs"
L'école soumise
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3.2. Contradictions éducatives dans la post-modernité p. 81
3.2.3. L'injonction permissive p. 84

3.2.3.1. Réhabilitation du pitre p. 85


On est "branché", par exemple, quand Françoise Dolto déclare haut et fort que le bon élève ne peut être
qu'un névrosé, un malheureux sous-homme qui a intériorisé, aux dépens de son équilibre physique et
mental, les conventions arbitraires et déshumanisantes de la compétition scolaire. Reconnaissons que
Françoise Dolto, qui fait de la psychanalyse freudienne l'un des référents de sa haute morale, est un
prédicateur convaincant, très écouté et très lu. Elle ne fait point mystère d'avoir donné le jour à un
rejeton pas très sérieux, le fantaisiste et amuseur Carlos. Et en Carlos, cette réussite humaine, par le
truchement de la consécration mass-médiatique de la pitrerie, peut se révéler une réussite sociale. Il
n'est pas seulement réussi, cet enfant. Il a réussi.
Mais de cette réussite, ce n'est pas l'école, cette triste maîtresse, qui pourra se prévaloir : son rôle n'est-il
pas de sanctionner les pitres, les créatifs, les marginaux, les inclassables de tout acabit ?

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3.2. Contradictions éducatives dans la post-modernité p. 81
3.2.3. L'injonction permissive p. 84

3.2.3.2. "Bien dans sa peau" p. 85


Certes, la revendication libertaire, face à une école trop hâtivement condamnée comme répressive et
reproductrice, a perdu sa virulence dans ces milieux urbains, aisés et cultivés, davantage soucieux
d'augmenter leur bien-être concret, que de voir rendre justice, en leur destinée singulière, aux potentiels
d'humanité que l'école moderne laisse en friche.
Mais le bien-être passe par le "bien dans sa peau" qui, au hit-parade des valeurs de l'individualisme post-
moderne, occupe une place éminente. A mi-chemin entre la revendication hédoniste d'un surcroît de
jouissance corporelle, et l'aspiration eudémoniste à un certain équilibre du bonheur, la "peau"
métaphorise à souhait ce lieu où s'enveloppe et de développe un paisible et harmonieux amour de soi.
Mais, comme l'exprime la formule, "avoir quelqu'un dans la peau", elle est aussi ce lieu d'adhérence au
monde où s'opère l'incrustation tenace de la passion délicieuse et insupportable qu'autrui est susceptible
de nous faire subir. Cette "peau", beaucoup de nos contemporains sont paradoxalement prêts à lui
sacrifier concrètement d'autres bien possibles pour obtenir la grâce tout humaine de s'y trouver bien :
"bien dans sa peau".
C'est qu'en opposition à la pesanteur charnelle, centrale et viscérale du besoin, elle matérialise et
immatérialise à la fois cette pellicule souple et ferme, protectrice et poreuse à la fois, qu'est le désir dont
l'essence se dit dans les jeux de la surface et du point, du contact, de l'échange, de l'exposition ou du
voilage, du soleil et des bruines, de l'accroche et de l'esquive.

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3.2. Contradictions éducatives dans la post-modernité p. 81
3.2.3. L'injonction permissive p. 84

3.2.3.3. L'école, cette vieille dame trop digne datant de la modernité p. 86


L'école moderne a été pensée au XIXe siècle par les uns comme le substitut des Eglises, évincées à force
ouverte ou peu à peu objet de la désaffection des cœurs. Elle a été pensée par les autres comme le
prolongement même de l'Eglise. Mais dans l'un et l'autre cas, elle emprunte à la respectabilité
ecclésiastique, et, pour tout dire, en rajoute. Le culte qu'elle développe va à l'intellect. Il va aussi au cœur.
Mais les fantaisies de l'imaginaire y sont vite suspectes et tenues en lisière.
Quant au corps, sa culture est physique. Il lui faut apprendre à "se tenir" et à satisfaire hygiéniquement
aux besoins de sa santé. Culture n'est pas culte, tant s'en faut. Le corps, en tant que lieu de transit et
frontière du désir des humains les uns pour les autres, en tant que façon de soi sous le regard des autres,
en tant que façon d'autrui sous nos propres regards, laisse l'école moderne interdite. Elle ne connaît pas
cet autre physique-là, qui, aux yeux de bien des post-modernes, est tout autant le "moral", car s'il est un
dualisme que le post-moderne souhaite abolir, c'est bien celui "du physique et du moral".

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3. Commencement de la fin ou fin du commencement ? p. 77
3.2. Contradictions éducatives dans la postmodernité p. 81
3.2.3. L'injonction permissive p. 84
3.2.3.4. "Fichez-leur la paix" p. 86
La libéralisation des mœurs, et la charge d'émancipation individuelle et collective, dont, à tort ou raison,
on la crédite, conduit à une puissante ambivalence des nouveaux parents vis-à-vis de l'école. Les mêmes
qui ont difficilement et tardivement réalisé leur propre émancipation, non sans meurtrissures durables,
non sans fractures dramatiques parfois, souhaitent épargner à leurs enfants à la fois l'éducation qu'ils
estiment avoir subie, et le désarroi où les plonge leur propre déracinement.
Les mêmes qui demandent à l'école d'être le parcours d'une réussite sociale forcément ascétique,
solliciteront d'elle qu'elle se transforme en un havre paradoxal où, à la fois offerts aux orages et abrités
de leurs turbulences, les "jeunes" puissent exercer hic et nunc, sans délai ni atermoiement, leur droit à
"réussir leur vie". L'injonction "faites-le travailler" se transforme alors en un "fichez-lui la paix" ambigu,
"laissez-leur faire leurs expériences, laissez-les être eux-mêmes, n'empêchez pas la vie, la création, la
fantaisie, l'initiative, le plaisir, le bonheur". Pathétique litanie, dont chacun, dans le temps même où il la
déroule, perçoit, s'il est lucide, le caractère dérisoire.
Scolariser, pour les modernes, revenait à assurer le long terme d'une destinée intégrable dans une
société laïque émancipée, créatrice heureuse de ses valeurs. La foi en l'invention d'une société , sinon
paradisiaque, du moins libératrice, était la condition mentale du report que ce long terme exigeait,
entraînant la frustration obligée dans l'instant. Freud ne voit pas autrement la civilisation que basée sur
cette aptitude individuelle et collective à différer la jouissance pour la réinventer, la requalifier,
l'accroître, la sublimer. L'individualisme post-moderne subit désormais cette "aptitude" comme une
malédiction.

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3. Commencement de la fin ou fin du commencement ? p. 77
3.3. La révision des "lieux communs" dans l'Education nouvelle p. 87

Ecrire cela, est-ce prononcer la déchéance de ce courant qui fut le plus porteur d'espoirs dans la
pédagogie depuis cent ans et dont l'on tente de cerner l'ensemble flou sous l'appellation d'Education
nouvelles ?

3.3.
La révision des
"lieux
communs"
dans
l'Education
nouvelle 3.3.3.
3.3.1.
La rationalité
Pédagogie
éducative et le risque
et dérive culturelle
d'effets pervers
3.3.2.
L'école active : Un courant qui n'est Réorienter les tâches
une idée-force pas d'abord de l'éducation L'exemple de la
et un malentendu pédagogique scolaire ? pédagogie
par objectif
Le retour Entre utopiste
à la didactique : et technocrate :
un phénomène salutaire Du bon usage le bricoleur
mais ambigu et des nuisances
de la rénovation des plans d'étude

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3.3. La révision des "lieux communs" dans l'Education nouvelle p. 87

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3.3.
La révision des
"lieux
communs"
dans
l'Education
nouvelle 3.3.3.
3.3.1.
La rationalité
Pédagogie
éducative et le risque
et dérive culturelle
d'effets pervers
3.3.2.
L'école active : Un courant qui n'est Réorienter les tâches
une idée-force pas d'abord de l'éducation L'exemple de la
et un malentendu pédagogique scolaire ? pédagogie
par objectif
Le retour Entre utopiste
à la didactique : et technocrate :
un phénomène salutaire Du bon usage le bricoleur
mais ambigu et des nuisances
de la rénovation des plans d'étude

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3.3. La révision des "lieux communs" dans l'Education nouvelle p. 87
3.3.1. Pédagogie et dérive culturelle p. 87

Le mouvement de l'Education nouvelle fut le véritable melting pot des idées modernes sur l'éducation.
Son "nouvellisme" était un mélange de certitude "scientifique" et de sollicitude militante, mais la
notion était destinée à la vocation d'attrape-tout. Elle apparaissait puissante, grâce à l'impression
d'évidence et au sentiment du bon droit qu'elle confortait par l'audace convenue de ses "lieux
communs". Elle se révélait notamment faible dès qu'on en exigeait à la fois des définitions conceptuelles
et des pratiques méthodiques susceptibles qu'on les différenciât sans équivoque.
En réalité, autant et plus qu'il constituait un courant proprement pédagogique, le mouvement
d'Education nouvelle se révèle avoir été l'une des manifestations de cette lente mais irréversible dérive
culturelle que personne ne gouverne en définitive et dont nous sommes tous, à un moment donné ou à
un autre, les agents et les assujettis.

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3.3.1.
Pédagogie
et dérive culturelle

L'école active : Un courant qui n'est


une idée-force pas d'abord
et un malentendu pédagogique

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3. Commencement de la fin ou fin du commencement ? p. 77
3.3. La révision des "lieux communs" dans l'Education nouvelle p. 87
3.3.1. Pédagogie et dérive culturelle p. 87

3.3.1.1. L'école active : une idée-force et un malentendu p. 88


Quand, dès 1905, puis encore en 1919, Edouard Claparède plaidait pour la révolution copernicienne qui
ferait désormais tourner le programme autour de l'enfant et non s'exténuer l'enfant autour du
programme, il entendait rendre l'instruction des petits d'hommes aux exigences fonctionnelles des lois
de la psychologie. Un être humain efficace ne peut être le satellite d'une logique qu'on a construite pour
lui, en dehors de lui. Il lui faut, pour la faire sienne, en être lui-même le constructeur.
Et il s'ensuivra, en 1923, sous la plume du même Claparède, une lumineuse mise au point sur l'écolier
actif que c psychologue prend bien soin de distinguer de l'enfant simplement mobile, a fortiori de l'enfant
agité ou errant d'une tâche à l'autre au nom d'un bon plaisir dont le maître devient l'obséquieux
serviteur. Le fondateur de l'éducation fonctionnelle prend bien soin de dénoncer haut et fort ces
déviations perverses de la psycho-pédagogie.
Il n'empêche. Dès les années vingt, les contre-sens s'accumulent, et les procès d'intention deviennent
lassants à force de faire bégayer l'histoire. Les détracteurs crient à la facilité, à l'illusion de l'apprentissage
"comme en se jouant". Ils dénoncent la démission des éducateurs, leur renoncement à l'effort, l'abandon
de l'instruction systématique au profit de pseudo-centres d'intérêts occasionnels, fantasques et
désorganisateurs de la pensée. A lire Decroly, Ferrière, Claparède, Cousinet, Freinet: rien de tout cela
dans leurs doctrines, au contraire.

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3.3. La révision des "lieux communs" dans l'Education nouvelle p. 87
3.3.1. Pédagogie et dérive culturelle p. 87

3.3.1.2. Un courant qui n'est pas d'abord pédagogique p. 89


Et pourtant les détracteurs ont de bonnes raisons de s'élever contre ce mouvement. Car son essence est
de n'être pas pédagogique. Il échappe aux tentatives des pédagogues pour le contrôler. Le vrai "courant",
qui mène autant et plus l'éducation, c'est ce changement dans la culture et les mœurs que marquent
l'affaissement des modèles d'autorité, la permissivité endémique, mal vécue souvent, difficile à légitimer
en raison, mais s'insinuant à leur grand désarroi, jusque dans les conduites pratiques concrètes, à l'égard
de leur propre progéniture, de ceux qui prêchaient, l'instant d'avant, le retour pur et dur aux valeurs de
tradition.
Autant que la confirmation d'une stratégie éducative concertée, en quête d'une autonomie de
responsabilité personnelle, le mouvement d'Education nouvelle, devenu carrefour des lieux communs de
la culture, se révèle la médiocre couverture théorique d'une autonomie de complaisance à soi. Et le fruit
n'en est même plus le fruit défendu savouré dans la delectatio morosa d'une transgression qui, au moins,
subvertissait les conformismes.

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3. Commencement de la fin ou fin du commencement ? p. 77
3.3. La révision des "lieux communs" dans l'Education nouvelle p. 87
3.3.2. Réorienter les tâches de l'éducation scolaire ? p. 89
On définissait l'efficacité pédagogique ? Comme le résultat d'une interaction éducative entre des être
consistants, contraints de bâtir leur identité dans un affrontement salutaire. La pédagogie "permissive"
est-elle alors plus qu'un symptôme, conséquence subie d'une complicité peu glorieuse, dans le ventre
mou d'une civilisation devenue incivile ? Sans doute est-ce en réaction contre cette dilution culturelle du
courant moderne de la pédagogie, que les années 1970/80 ont été marquées par de nombreux appels à
une reconsidération des finalités de l'éducation scolaire.
3.3.
La révision des
"lieux
communs"
dans
l'Education 3.3.3.
3.3.1.
nouvelle La rationalité
Pédagogie
éducative et le risque
et dérive culturelle
d'effets pervers
3.3.2.
L'école active : Un courant qui n'est Réorienter les tâches
une idée-force pas d'abord de l'éducation L'exemple de la
et un malentendu pédagogique scolaire ? pédagogie
par objectif
Le retour Entre utopiste
à la didactique : et technocrate :
un phénomène salutaire Du bon usage le bricoleur
mais ambigu et des nuisances
de la rénovation des plans d'étude

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3.3. La révision des "lieux communs" dans l'Education nouvelle p. 87
3.3.2. Réorienter les tâches de l'éducation scolaire ? p. 89

3.3.2.1. Le retour à la didactique : un phénomène salutaire mais ambigu p. 89


Ainsi, en 1979, l'américain Neil Postman annonçait la fin de la surchauffe utopiste : l'école, écrit-il en
substance, n'est pas la bonne à tout faire de la culture.
On demande trop aux enseignants; on ne leur demande pas assez. On leur demande trop, quand dans
l'ambiance de la libéralisation générale des mœurs et des mentalités, on exige d'eux qu'ils assurent
l'animation socioculturelle, l'émancipation affective, la liberté d'expression mais aussi l'assistance sociale
de la jeunesse. On leur demande trop peu, car leur t'ache est d'abord de mettre en place, de conduire,
de rendre optimales les conditions pour que des apprenants apprennent, ainsi que le montre à son tour
Philippe Meirieu.
Au cours de ces dix dernières années, la didactique est ainsi revenue au premier plan des préoccupations
de maints éducateurs scolaires. Mais ce retour est d'interprétation ambiguë. Il intervient souvent chez les
pédagogues qui furent, dans les années soixante, les zélotes du caractère subversif de l'activité
enseignante.
Mais quand les novateurs mesurent les impasses où ils se sont fourvoyés en célébrant de manière trop
excessive la relation maître-élève, aux dépens du rapport aux connaissances et aux contenus des
branches, d'autres, qui n'ont pas franchi les mêmes stades du parcours, en sont encore à découvrir
qu'aucun "prof de maths" ne peut, autrement que par songerie, se croire d'abord en tête-à-tête avec la
mathématique.

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3.3. La révision des "lieux communs" dans l'Education nouvelle p. 87
3.3.2. Réorienter les tâches de l'éducation scolaire ? p. 89

3.3.2.2. Du bon usage et des nuisances de la rénovation des plans d'étude p. 90


Les écarts, les changements de vitesse dans les évolutions mentales ajoutent ainsi à la confusion
contemporaine. Cette confusion ne fait qu'augmenter au moment même où (par le fait même que ?) la
rationalité se fait plus rassurante. De vastes plans de rénovations didactiques, en particulier dans les
branches fondamentales de l'enseignement primaire, ont été, au début des années quatre-vingts,
présentés aux enseignants romands comme les vérités de référence d'une pédagogie enfin adaptée à son
objet. Mais la troupe ne suit pas toujours.
A la révérence aux anciens clercs qui régentaient par mandat d'une autorité traditionnelle reconnue, tend
à se substituer la révérence aux nouveaux clercs. Ces derniers, appuyant leur prestige sur le caractère
scientifique des recherches pédagogiques entreprises, régentent à leur tour le peuple enseignant, non
sans parfois quelque suffisance imitées des clercs qui les ont précédés. La réticence silencieuse et larvée,
que provoquait le cléricalisme conservateur des premiers, risque bien de se réveiller, face aux opération
impulsées techno-cratiquement d'en haut par les seconds.

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3.3. La révision des "lieux communs" dans l'Education nouvelle p. 87
3.3.2. Réorienter les tâches de l'éducation scolaire ? p. 89

3.3.2.3. Entre utopiste et technocrate : le bricoleur p. 91


Le retour de la didactique, comme on dit, met sans doute heureusement fin à une conception trop
romantique et trop spontanéiste de l'aventure scolaire. Les "saltimbanques" de la pédagogie ont
provisoirement perdu leur bataille face aux "géomètres". Mais sans doute avaient-ils des alliés par trop
turbulents et, en définitive, plus pressés de les doubler dès que l'occasion s'en présenterait. La logique
d'émancipation, qu'elle soi sexuelle, culturelle ou cosmopolite, requiert le cynisme des militants,
conscients de la priorité de leur cause. Bien des mouvements pédagogiques récents se sont trouvés
paralysés par l'utopisme. Ils ont contracté la radicalité rigide que ce dernier porte en lui, empêchant
l'imagination de s'incarner dans sa forme utile, le bricolage, cette heureuse et ingénieuse transformation
de réelles contraintes en réelles ressources.

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3.3. La révision des "lieux communs" dans l'Education nouvelle p. 87
3.3.3. La rationalité éducative et le risque d'effets pervers? p. 91

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3.3.
La révision des
"lieux
communs"
dans
l'Education
nouvelle 3.3.3.
3.3.1.
La rationalité
Pédagogie
éducative et le risque
et dérive culturelle
d'effets pervers
3.3.2.
L'école active : Un courant qui n'est Réorienter les tâches
une idée-force pas d'abord de l'éducation L'exemple de la
et un malentendu pédagogique scolaire ? pédagogie
par objectif
Le retour Entre utopiste
à la didactique : et technocrate :
un phénomène salutaire Du bon usage le bricoleur
mais ambigu et des nuisances
de la rénovation des plans d'étude

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3.3. La révision des "lieux communs" dans l'Education nouvelle p. 87
3.3.3. La rationalité éducative et le risque d'effets pervers? p. 91

Passée la surchauffe utopiste, resterait à bricoler. Mais il est à craindre que l'attaché-case de l'expert n'ait
pris le dessus dans la symbolique de l'éducation scolaire, sur l'établi du bricoleur et, a fortiori, des
cerveaux du jongleur. Pourtant aucun plan de rénovation didactique, fût-il pensé par les meilleures
experts et décidé par le pouvoir le plus volontariste et le plus éclairé, n'a de chance de réaliser les projets
qu'on attend de sa démultiplication, si les enseignants continuent à être traités comme une population
d'exécutants acculés à la résistance passive ou à la mise en application stupide d'une rationalité dont la
logique leur échappe, ou pire, leur semble de pure apparence.
Toute rationalité didactique ou autre, dont le plus clair des effets est d'accentuer l'écart entre décideurs
et exécutants, révèle tôt ou tard qu'elle est une perversion de la raison, qu'elle ruine toute chance
d'instaurer un nouveau "cercle de crédit".

3.3.3.
La rationalité
éducative et le risque
d'effets pervers

L'exemple de la
pédagogie
par objectif

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3.3. La révision des "lieux communs" dans l'Education nouvelle p. 87
3.3.3. La rationalité éducative et le risque d'effets pervers? p. 91

3.3.3.1. L'exemple de la pédagogie par objectifs p. 92


Entrer dans la pédagogie par objectifs, c'est se demander ce que les élèves seront capables de faire à
l'issue d'une formation, question de bon sens au demeurant. L'intérêt de la méthode est de permettre
d'élaborer une réponse systématique et, jusqu'à un certain point, mesurable. Instrument de formation, la
méthode de formulation des objectifs pédagogiques me semble constituer une excellente école
d'imagination bricoleuse, d'auto-évaluation à la fois sérieuse et amusée.
Mais, comme le l'ai signalé dès 1979, devenue instrument de prescription autoritaire, elle pervertit les
effets qu'on en attendait. Le carcan dans lequel elle enferme maîtres et élèves, se révèle, en définitive,
pire que le plus rigide énoncé d'un programme en la forme traditionnelle et sibylline d'une liste de
contenus de connaissances.
La postmodernité rêve de saltimbanque. Elle envie la liberté de ses entrechats : "Enfants, la vie est
quelque chose qui se danse, et je vous le dirai en musique." Bienheureuse alternative dont quelques
signes disent qu'elle n'est pas impossible. Mais ce rêve est pourtant et d'abord nostalgie. La
postmodernité reste, plus encore, fascinée par le géomètre, quand, s'appliquant à mesurer, sans
vergogne, l'humain et son efficience, il réaccouple la violence et la raison, les réunit pour
l'asservissement réel des hommes, tandis que la rhapsodie continue à chanter leur émancipation à gorge
déployée.

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Conclusion

1. 4.
L'éducateur est un Comprendre la
insurgé malfaisance

2. 3.
Le réenchantement La cantique
païen haïssable

Il est temps, sans doute, de tirer de toutes ces considérations quelque morale provisoire.
Si, par ce dernier terme, je reprends à Descartes sa célèbre formule, ce n'est pas d'abord pour souligner
l'incertitude des temps, la fragilité de ses valeurs, la généralisation du doute et la fatalité de
l'indifférence. Je veux, au contraire, rappeler la primauté en éducation de la volonté bonne. L'adage est
alors sans doute plus kantien que cartésien. Mais la référence théorique ici n'est pas l'essentiel.

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Conclusion p. 93
1. L'éducateur est un insurgé p. 93

J'entends dire, en reprenant la formule de Descartes, que le temps du provisoire ne dispense pas de se
donner une morale. Disons plutôt : il en rend urgent l'établissement, même si nous n'avons de notre
situation qu'une intelligence précaire.
Car éduquer, en définitive, et quel que soit notre soin à en différer l'échéance, c'est trancher du mieux et
du moins bon, c'est s'insurger contre ce qui est, au nom de ce qui devrait être. Certes, chacun mesure
aujourd'hui l'impuissance latente et le ridicule de ce conditionnel. Ne soyons pas mégalomanes. Sans
doute le XIXe siècle éducateur le fût-il un peu trop.
Pourtant, je l'ai écrit ailleurs, une vertu fondamentale de l'éducateur, s'il lui faut se concevoir vertueux,
est bien l'indignation. Il est impossible d'éduquer sans croire, sans espérer, c'est-à-dire sans s'indigner de
l'état dans lequel se trouve aujourd'hui le bien le plus précieux de l'humanité, son enfance, vouée aux
nuisances de toutes sortes, à la stupidité, à l'incurie de l'espèce malfaisante que nous sommes.
Mais comment croire encore, sans se découvrir crédule ? Comment instaurer le nouveau "cercle du
crédit" ? Comment s'indigner sans se laisser leurrer par la véhémence futile des émotions et de leur
flatus vocis ? La rhapsodie du progrès est aujourd'hui moribonde. Peut-être était-elle idolâtre. A sa place,
je vois monter tous les signes d'un autre récit, ou plus exactement, je pressens la dissémination du grand
récit en une récitation démultipliée d'idolâtries proprement polythéiste.

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Conclusion p. 93
2. Le réenchantement païen p. 94

Je ne crois pas que nous vivons aujourd'hui le retour possible du réenchantement païen, car les valeurs
de modernité : progrès, éducabilité, universalité, étaient des valeurs chrétiennes désacralisées, laïcisées
et réputés, en ce nouvel état, légitimement exportables à toutes races, nations et langues qui sont sous
le ciel.
Grande est la tentation -et sous couvert de tradition, voire pire, avec les oripeaux même de la cause
chrétienne- de restaurer le génie du paganisme. Pas d'ambition prosélyte, aucun impérialisme assuré à
quelque vision prioritaire du monde que ce soit, pas de visées missionnaires émancipatrices. Dans ce
fatalisme d'un destin sans providence, que la joie soit la joie, saisie et célébrée pour elle-même dans le
prix unique de l'instant, et qu'aucun relent d'espérance ne vienne en ternir la pure et ascétique
exaltation.
Ce nouvel épicurisme a de la grandeur. Il ne se contente pas de s'exténuer dans les sex-shops. Il nous
signifie, dans l'indispensable et aristocratique solitude de l'homme, que la joie et le courage ne font
qu'une seule et même vertu. Mais j'ai dit "aristocratique". La restauration du génie du paganisme, c'est le
coup d'arrêt à la frénésie égalitariste, uniformisante, héritage de la révolution chrétienne et de son
exaltation des faibles.

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3. Le cantique haïssable p. 94

Le Magnificat, même renié en apparence par des milliers de progressistes, demeure la charte de la
reconnaissance du "faible", de la supériorité du "petit", de sa promotion précieuse aux yeux d'un Dieu
unique qui se mêle corps et biens aux affaires de sa création. Cantique haïssable pour tous ceux qui,
aujourd'hui, proclament le fatalisme du destin, la restriction nécessaire, et de nécessité biologique, de la
culture à une élite, au prix de l'esclavage ou de l'exclusion des autres.
Le Magnificat demeure pour moi, en ce temps à la fois mass-médiatique et crépusculaire du
christianisme, l'un des poèmes fondateurs de ma conviction pédagogique. Certes, je ne l'entends pas
sans un certain romantisme populiste dû à mes origines et à certaines expériences de jeunesse.. Pourtant
mon penchant d'intellectuel, de déclassé, de solitaire, à bien l'ausculter, me pousse tout autant, et plus, à
la misanthropie, au mépris de cette espèce où s'étire à longueur d'histoire le cortège sans cesse réitéré
de la médiocrité, de la sottise, de la suffisance, cette espèce où survivent des crédulités multiples et
invétérées même quand changent les objets, cette espèce marquée par la fascination de la force violente
sur des masses qui, à peine délivrées des despotes, se font pires despotes à leur tour. Quelle dérision de
croire à l'éducabilité de cette espèce pour le bien !

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4. Comprendre la malfaisance p. 95

J'ai encore, pour ma part, grand besoin de faire appel à la proclamation égalitaire du christianisme, de
retracer le cercle chrétien du crédit, si je ne veux pas céder au plaisir mortifère de cracher sur les tombes
et de mépriser mes semblables. Je ne me sens plus du tout disposé à entonner la rhapsodie de
l'éducation et de ses lendemains, qui, par nécessité, érigée enfin par la science en vertu, chanteraient
dans les clartés d'une ère nouvelle. Apocalypse now. Mais, même en anglais, c'est là une banalité, voire
une constante de l'histoire. L'espèce est malfaisante et, principalement, vis-à-vis de ses enfants. Il nous
faut accoucher de ce ventre indigne, des candidats au sein d'Abraham. Cette malfaisance demeure pour
moi un mystère, et le récit mythique d'une chute ne me paraît pas, du fait même de la puissance
métaphorique de l'approximation, la plus mauvaise façon de dire ce qu'il en est. C'est bien sur le fond de
ce mystère, que l'énigme de l'éducation inscrit son questionnement fondamental. Tout homme est
éducable sous le signe de la malfaisance, de la malfaçon et du malheur.
Chercherons-nous donc, sans vergogne, les traces, pour aujourd'hui, d'une modeste alternative ?
Transformé en hymne laïque au progrès, le Magnificat se fige en une langue de bois désormais
insupportable. Il n'y a pas de revanche sur la malfaisance, sinon par une malfaisance pire. Toute revanche
est de l'ordre de la compétition pour la gloire : rien de glorieux dans l'éducation. Celle-ci est une tâche.
Pas de miracle : elle est une obstination. Et contre la fatalité, celle des dons, celle des favorisés, celle des
violents, elle est une indignation tranquille. Au nom du juste juge. Et, perplexe devant le bégaiement
insensé de toute cette histoire, elle a pour compagne une intense curiosité de ce qui va venir, forme
modeste et humoriste d'un amour des hommes, aujourd'hui assigné -et c'est sa grande chance- à faire
l'apprentissage de sa pudeur.
Sion, 21 août 1985

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PRESENTATION DE L'OUVRAGE
Philippe Meirieu
Les débats sur l'école battent leur plein. On peut imaginer, si l'on ignore l'histoire de la réflexion
éducative, qu'ils sont complétement nouveaux et que l'opposition entre les tenants du "savoir" et ceux
de la "pédagogie" est apparue ces dernières années, à l'occasion de récents projets de réforme. Il n'en
est rien. Aussi, Daniel Hameline a-t-il choisi de nous apporter un éclairage, tout à la fois distancié et
impliqué, qui permet de comprendre les enjeux et de penser les oppositions que nous rencontrons
aujourd'hui. Il quitte, provisoirement, l'actualité directe pour montrer comment, depuis les Lumières,
l'idée moderne d'éducation a été traversée par des "courants" et des "contre-courants" : le progrès des
sociétés, l'éducabilité des hommes et des peuples, la demande toujours plus grande de "démocratie"...
Tout cela, ce sont des "lieux communs" qui ont fait naître, très tôt, des inquiétudes : l'instruction ne fait
pas de miracles et ne nous délivre pas de tous les maux de la terre ; l'éducation se heurte à la "fatalité de
l'atavisme" et la "démocratie" peut n'être qu'une dangereuse illusion. La question du rôle de l'Etat,
l'évolution des rapports entre l'école et la famille, l'impact des sciences humaines ont aussi soulevé de
nombreuses polémiques dans lesquelles il convient de tenter d'y voir clair... A partir de ces analyses,
Daniel Hameline en vient à une "révision des lieux communs de l'éducation moderne" : il ouvre des
perspectives pour agir aujourd'hui, avec obstination, modestie et pudeur pour "l'éducation des
hommes".
Homme d'archives et enseignant d'histoire des idées, l'auteur est aussi quelqu'un de profondément
engagé. Il s'efforce de penser ce qui nous arrive et ce que nous fabriquons en éducation. Son livre est
indispensable pour qui veut se dégager des polémiques à courte vue. Il est essentiel pour qui veut
comprendre ce qui s'est passé en matière éducative depuis deux siècles. Il est déterminant pour qui veut
agir aujourd'hui de manière sensée dans un domaine où le tumulte des passions l'emporte trop souvent.
Sa clarté, son humour, la vigueur de sa pensée en font un ouvrage auquel il faudra sans cesse revenir...
http://www.unige.ch/fapse/life/archives/livres/alpha/H/Hameline_2000_A.html

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