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Table des matières

Partie 1 : Approche fondamentale

- Sensibilisation des nocicepteurs par l’inflammation


- Concept de l’auto-immunité dans la douleur
- Modulation psychophysiologique de la douleur par les émotions

Partie 2 : Démarche clinique

- Peau, douleur et inflammation


- Myalgies, déficit musculaire, augmentation des enzymes musculaires
- Douleurs dans les rhumatismes inflammatoires : les enthésiste sont souvent
méconnues
- Syndrome de l’intestin irritable : nouvelles pistes psysiopathologiques et
conséquences thérapeutiques
- Système nerveux sympathique et douleurs
- Douleurs, inflammation et maladies du système : approches pluridisciplinaires

Partie 3 : Exploration

- Explorations neurophysiologiques des maladies de système (connectivites et


vascularites)

Partie 4 : Démarche thérapeutique

- Pharmacologie de la douleur inflammatoire


- Les anesthésiques locaux sont-ils des anti-inflammatoires ?
- Techniques de radiologie interventionnelle dans le traitement de la douleur
aiguë et inflammatoire en pathologie ostéo-articulaire
- Place de la médecine physique et de la réadaptation dans la prise en charge
de pathologies rhumatismale inflammatoires…
- Abord par la sophrologie de la douleur chronique
- Le recours à l’hypnose en rhumatologie
Chapitre 1 Sensibilisation des Nocicepteurs Par L'inflammation

Nayef E. SAADÉ

Daniel LE BARS

Une synthèse des données récentes est proposée concernant les mécanismes |
cellulaires et moléculaires impliqués dans les manifestations cliniques
d'hyperalgésie et d'allodynie provoquées par l'inflammation. Sans oublier que
des mécanismes centraux, médullaires et cérébraux participent aussi à la
genèse et la pérennisation de ces processus douloureux, le propos est restreint
aux mécanismes périphériques. Le caractère polymodal de l'immense majorité
des nocicepteurs est souligné pour les considérer dans leur ensemble comme
un organe sensoriel qui, sans relâche, ausculte l'ensemble du corps. Parmi les
fibres amyéliniques nociceptives, il existe une classe particulière,
«peptidergique», qui est à l'origine de l'inflammation neurogène. Un certain
nombre de récepteurs élémentaires ont été localisés sur les nocicepteurs,
notamment des récepteurs ionotropiques sensibles à la température, à l'acidité,
à l' ATP et aux acides aminés excitateurs. Les fibres C possèdent, au sein de leurs
membranes, des canaux sodiques particuliers, insensibles à la tétrodotoxine. En
outre, de nombreux médiateurs activent, sensibilisent ou «réveillent» les
nocicepteurs. On peut citer les kinines, les cytokines, les prostanoïdes, les lipo-
oxygénases, les neurotrophines, les peptides, l'oxyde nitrique, l'histamine, la
sérotonine, les protéases, le médiateur central de la réponse immunitaire NF-κB,
les acides aminés excitateurs, les amines adrénergiques, les opioïdes et les
cannabinoïdes. Les effets à court et long termes des agents inflammatoires sont
résumés pour souligner la multiplicité des mécanismes modulateurs élémentaires
qui s'exercent dès la périphérie, les «cercles vicieux» potentiels qu'on y décèle et
l'intrication des mécanismes périphériques et centraux à l'origine des
phénomènes de sensibilisation.

▪ INTRODUCTION

Au début du siècle dernier, Sherrington a introduit le terme et élaboré le


concept de «nociception» (du latin nocere, nuire) dans la physiologie
sensorielle. Les stimuli «nociceptifs» apporté par l'environnement externe à
l'organisme lèsent les tissus et activent un ensemble discret de récepteurs1
sensoriels, les «nocicepteurs» qui, en fait, sont les terminaisons libres de fibres
nerveuses fines, amyéliniques (fibre C) ou faiblement myélinisées (fibres Aδ),
organisées en arborescence dans les tissus2. Le système nociceptif peut être
activé par diverses formes d'énergie (mécanique, électromagnétique,
électrique, calorifique, chimique…) dont le caractère commun semble a priori
la forte intensité qui menace l'intégrité corporelle de l'individu. Si le stimulus
nociceptif déclenche une perception de douleur, il est qualifié d'algogène3. S'il
est nocif, il provoque une lésion tissulaire qui s'accompagne d'une réaction
inflammatoire caractérisée par les signes cardinaux classiques : tumor, rubor,
calor, dolor. On observe alors une modification des caractéristiques de la
douleur qui est amplifiée («hyperalgésie») et déclenchée par un stimulus
habituellement indolore («allodynie») comme l'effleurement de la peau en
regard d'une arthrite inflammatoire. Elle peut même se manifester en l'absence
de stimulus physique («douleur spontanée»).
Seront envisagés les mécanismes cellulaires et moléculaires impliqués dans les
manifestations cliniques d'hyperalgésie et d'allodynie provoquées par
l'inflammation. Sans oublier que des mécanismes centraux, médullaires et
cérébraux participent aussi à la genèse et à la pérennisation de ces processus
douloureux, le propos sera restreint aux mécanismes périphériques qui ont
récemment fait l'objet de développements importants. Les fibres afférentes
primaires amyéliniques impliquées dans la nociception seront auparavant
décrites. Cette description permettra de présenter un certain nombre d'acteurs
biochimiques dont la fonction sera ensuite précisée.

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▪ LES NOCICEPTEURS POLYMODAUX «AUSCULTENT» NOTRE CORPS SANS RELÂCHE

Parmi les fibres C, qui constituent de 60 à 90 % de l'ensemble des fibres


afférentes cutanées et la quasi-totalité des fibres afférentes viscérales, le groupe
le plus important est sans conteste celui des nocicepteurs polymodaux [ 2 , 3
and 4 ]. On les désigne ainsi car ils répondent à des stimuli nociceptifs de
différentes natures, thermique, mécanique et chimique. En réalité, le caractère
«polymodal» de l'immense majorité de ces nocicepteurs est plus étendu car ils
sont également activés par des stimulations thermiques ou mécaniques qui ne
provoquent pas de douleur [ 2 ]. Leur seuil thermique moyen est d'environ 40 °C
et des stimuli puissants quoique non douloureux, comme le frottement d'une
corde de guitare ou la friction avec un gant de crin, les activent
énergiquement.

Le caractère primitif des fibres C polymodales, peu spécialisées et totipotentes,


a été souligné [ 4 ] et l'on peut remarquer que de tels récepteurs existent déjà
chez les invertébrés comme l'aplysie ou la sangsue [ 5 ]. Ces «nocicepteurs» ont
donc subi l'évolution des espèces sans perdre leurs principaux caractères, ce
qui leur confère une fonction essentielle à la survie des individus. On peut les
considérer dans leur ensemble comme un organe sensoriel qui, sans relâche,
ausculte l'ensemble du corps. Les terminaisons libres y sont en effet très denses
et se regroupent en fibres dont le champ périphérique est restreint (surface :
0,01-1 cm2). Le «maillage» est donc serré (600/cm2 dans la peau). Du fait de leur
abondance, ces champs périphériques se recouvrent très largement les uns les
autres, ce qui signifie que le moindre stimulus en active une vaste population.
Quant aux fibres nociceptives Aδ, elles sont bien moins nombreuses et, dans
l'ensemble, on peut aussi les considérer comme polymodales. Leur seuil
d'activation est cependant plus élevé que leurs homologues appartenant aux
fibres C (seuil thermique moyen ≈ 45 °C)4.

D'ordinaire, à l'état de «veille physiologique», ces récepteurs — que l'on pourrait


peut-être considérer comme un organe à part entière — peuvent se mobiliser
localement pour alerter avec efficacité et précision le système nerveux central
lorsqu'une menace plane sur l'organisme, système dont le fonctionnement
change alors radicalement de configuration dans l'aire concernée. Les
nocicepteurs peuvent ainsi nous rappeler leur existence, d'ordinaire plutôt
discrète, dans des conditions fort banales, par exemple sous la forme d'un
simple «coup de soleil» ou d'une minuscule piqûre d'insecte. Leur importance
dans la genèse, l'acquisition et le maintien des comportements dans un milieu
naturel n'a sans doute pas été estimée à sa juste valeur.

La fonction chémoréceptrice des nocicepteurs est à cet égard essentielle car


elle focalise «l'auscultation» sur un territoire corporel particulier, celui qui est
l'objet d'une agression. Toute lésion tissulaire déclenche une série d'événements
étroitement liés aux processus inflammatoires, qui vont prolonger l'activation des
nocicepteurs et, surtout, les sensibiliser. La «veille physiologique» est alors
remplacée par un état de mobilisation de l'organisme. Il convient de
mentionner ici qu'un contingent minoritaire (de 10 à 20 %) des fibres C issues de
la peau, des viscères et des articulations, les nocicepteurs «silencieux» ou
«dormants» [ 6 ], ne semblent pas participer à cette «veille physiologique». Ils
sont normalement insensibles aux stimuli nociceptifs aigus, mais peuvent le
devenir en présence d'inflammation : ils se «réveillent» alors pour participer aux
phénomènes d'hyperalgésie. En fait, les propriétés de ce groupe ne sont guère
distinctes de celles des nocicepteurs «spécifiques» uniquement activés par des
stimuli nociceptifs intenses mais dont les propriétés changent radicalement
pendant l'inflammation.

Les nocicepteurs polymodaux ne constituent donc pas une population


homogène dont les caractéristiques fonctionnelles seraient invariantes, par
exemple un seuil élevé. Leurs propriétés biochimiques et biophysiques sont
dynamiques, se modifiant sous l'influence de leur environnement et des besoins
de l'organisme. C'est la mosaïque de récepteurs biochimiques spécialisés
tapissant leur membrane qui est à l'origine de cette «plasticité» qui s'exprime
tout particulièrement au cours d'un épisode inflammatoire. En outre, les
terminaisons nerveuses des fibres sensorielles sont protégées par une barrière, le
périnèvre, qui isole le tissu endoneurial, ce qui a pour conséquence d'empêcher
le passage des grosses molécules et des molécules hydrophiles comme les
peptides. Lors d'une inflammation, la rupture de cette barrière facilite la
diffusion de ces molécules et, par conséquent, leurs effets sur leurs cibles
potentielles. Ces processus facilitent le «réveil» des récepteurs dormants et
confèrent aux nocicepteurs «spécifiques» des propriétés «polymodales».

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▪ ACTEURS BIOCHIMIQUES : LE CASTING

L'inflammation résulte de la libération de substances issues de trois sources : les


cellules lésées, les cellules de la lignée inflammatoire et les nocicepteurs
euxmêmes. La plupart d'entre elles sont neuroactives ( figure 1 ). Les ions
potassium, les ions hydrogène et l' adénosine triphosphate (ATP) issus des
cellules lésées ainsi que la bradykinine sont les seules substances endogènes
excitatrices à proprement parler, les autres étant avant tout «sensibilisatrices». La
bradykinine augmente en outre la perméabilité capillaire et joue le rôle de
«chef d'orchestre» de la sensibilisation des nocicepteurs. Les mastocytes libèrent
l'histamine — prurigineuse puis douloureuse quand sa concentration s'élève —
ainsi que la sérotonine, issues en outre des agrégats plaquettaires, et le facteur
de croissance nerveuse (NGF, nerve growth factor). Les prostaglandines et
probablement les leucotriènes sensibilisent également les nocicepteurs aux
stimuli physiques et à l'action d'autres substances. Quant aux macrophages, ils
libèrent des cytokines (TNF-α, IL-1-β, IL-6, IL-8) et des neurotrophines (NGF). Ces
substances peuvent être formées localement ou être circulantes, leur action
étant alors facilitée par la fréquente contiguïté des terminaisons libres des fibres
Aδ et C avec les artérioles et les veinules.

L'amplification du message est assurée non seulement par les substances


libérées au sein du foyer inflammatoire mais également par le biais d'un
recrutement supplémentaire de fibres adjacentes activées ou sensibilisées.
Lorsque l'on stimule l'extrémité périphérique d'une racine dorsale ou d'un nerf
sectionné, on déclenche une vasodilatation dite antidromique, résultant de la
libération d'agents vasodilatateurs — substance P (sP), peptide associé au gène
de la calcitonine (CGRP, calcitonin gene related peptide), neurokinine A —
qui augmentent la perméabilité vasculaire et la fuite plasmatique ( figure 2A ).
Après stimulation nociceptive périphérique, l'influx nerveux se propage non
seulement vers la moelle mais aussi, de façon antidromique, vers les autres
terminaisons libres de la même fibre (réflexe d'axone) ; ces terminaisons vont
libérer des peptides dont la substance P, ce qui entraîne une vasodilatation,
une dégranulation des mastocytes, elle-même à l'origine d'une libération
localisée d'histamine [ 7 , 8 ]. Cette cascade d'événements, appelée
inflammation neurogène, est à l'origine de l'hyperalgésie «en tache d'huile» (
figure 2B ) [ 9 ]. Le rôle des autres peptides présents dans les fibres afférentes
primaires fines — somatostatine, peptide intestinal vasoactif (VIP, vasoactive
intestinal peptide), galanine… — reste à ce jour plus obscur, mais il est probable
que ces peptides épicent également cette « soupe inflammatoire» décidément
bien complexe.
Figure 1 ▪ Récepteurs, nociception et inflammation.

Cette figure représente les facteurs susceptibles d'activer (→) et/ou de


sensibiliser (- ->) les nocicepteurs à la suite d'une lésion tissulaire. Trois groupes de
facteurs interviennent. Les premiers sont directement liés à la lésion tissulaire et
activent les nocicepteurs, déjà excités directement par le stimulus causal lui-
même. Il s'agit des ions hydrogène (H+) et de l'adénosine triphosphate (ATP) issus
des lésions tissulaires. Les ions hydrogène agissent sur le récepteur ASIC-1 et
sensibilisent le récepteur Trpvl. La liaison de ces deux récepteurs ainsi que celui
de l'ATP (P2X3) avec leurs ligands respectifs se traduit par l'ouverture de canaux
cationiques qui dépolarise la terminaison libre de la fibre. Les seconds sont liés
aux processus inflammatoires : il s'agit de la bradykinine qui, outre ses capacités
d'augmenter la perméabilité capillaire, est l'un des plus puissants agents
algogènes connus, ainsi que des prostaglandines, des leucotriènes, des
cytokines pro-inflammatoires et du NGF qui, outre leurs actions propres,
sensibilisent les récepteurs à l'action d'autres substances. Ils sont responsables de
l'hyperalgésie primaire. On peut y adjoindre la sérotonine (5-HT), issue de
l'agrégation des thrombocytes et de la dégranulation des mastocytes, et
l'histamine, prurigineuse puis douloureuse à concentration plus élevée, issue des
granules des mastocytes. Ces substances se lient à des récepteurs spécifiques
pour phosphoryler des protéines kinases (PKA, PKC) qui vont : (1) augmenter
l'efficacité de canaux sodiques insensibles à la tétrodotoxine (TTXr) et (2)
abaisser le seuil des récepteurs transducteurs comme Trpv1. Enfin, le NGF se lie
au récepteur à forte affinité TrkA pour constituer le complexe NGF/TrkA qui est
internalisé puis transporté vers le soma du neurone ganglionnaire rachidien pour
y modifier la synthèse protéique, notamment accroître celle des canaux
sodiques insensibles à la tétrodotoxine. Ces derniers empruntent alors le flux
axonal rétrograde pour enrichir les terminaisons libres. Les troisièmes sont
représentés par la substance P (sP) et le peptide associé au gène de la
calcitonine (CGRP). Il s'agit de substances libérées par les nocicepteurs eux-
mêmes, capables directement ou indirectement d'activer ou de sensibiliser ces
derniers. On imagine le cercle vicieux que représentent potentiellement ces
mécanismes.

Des influences noradrénergiques (et du neuropeptide Y, colocalisé) provenant


des fibres postganglionnaires sympathiques viennent s'ajouter à ces réactions
locales. Elles pourraient être favorisées par certaines cytokines, notamment l'IL-8,
et certains acides aminés excitateurs. Pour la clarté du schéma, elles ne sont
pas représentées ici. Les glucocorticoïdes bloquent la phospholipase A2 et, par
conséquent, le métabolisme des leucotriènes et des prostaglandines tandis que
les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ne bloquent que la cyclo-
oxygénase 2 (COX-2).
Figure 2 ▪ L'inflammation neurogène.

A. L'inflammation neurogène «artificielle». La stimulation du bout distal d'une


racine postérieure ou d'un nerf périphérique provoque une activation
antidromique des fibres dont une des conséquences est la libé ration de
substance P (sP) par les terminaisons libres amyéliniques. La sP est directement
responsable (1) d'une vasodilatation et d'une augmentation de la perméabilité
vasculaire et, par conséquent, d'une fuite plasmatique et (2) d'une
dégranulation des mastocytes. Cette dernière est à l'origine de la libération
d'histamine qui va amplifier les processus vasculaires et activer et sensibiliser les
nocicepteurs. Il est probable que le peptide lié au gène de la calcitonine
(CGRP) et la neurokinine A ont des propriétés analogues.

B. Inflammation neurogène liée à une lésion tissulaire. La partie gauche de la


figure résume les processus qui se développent au sein du tissu lésé à l'origine de
l'hyperalgésie primaire. L'ensemble de ces facteurs est à l'origine de l'activation
directe ou indirecte des nocicepteurs qui envoient leurs messages nociceptifs
non seulement vers le système nerveux central (SNC) mais également, via les
réflexes d'axone, vers la périphérie. Il résulte de cette activation antidromique
une libération de substance P par les terminaisons libres amyéliniques. Par
l'intermédiaire de son récepteur spécifique NK1, la substance P est directement
responsable non seulement d'une vasodilatation et d'une augmentation de la
perméabilité vasculaire — et par conséquent d'une fuite plasmatique — mais
aussi d'une dégranulation des mastocytes. Cette dernière est à l'origine de la
libération d'histamine qui va amplifier les processus vasculaires et activer et
sensibiliser les nocicepteurs. Il est probable que le peptide lié au gène de la
calcitonine (CGRP) et la neurokinine A aient des propriétés analogues. Ces
mécanismes concernent non seulement les territoires adjacents lésés, ce qui
crée un véritable cercle vicieux déjà évoqué dans la figure précédente, mais
aussi les territoires non lésés, à l'origine d'une hyperalgésie que certains auteurs
nomment secondaire ou «en tache d'huile» (par tie droite de la figure).

Nous avons souligné le large recouvrement des champs périphériques des


nocicepteurs dont découle la nécessité de les considérer en tant que
population. Au cours de l'inflammation, cette population s'agrandit par le biais
de l'inflammation neurogène. La mobilisation locale s'étend donc au proche
voisinage, la population de nocicepteurs supplémentaires ainsi recrutée étant
loin d'être négligeable car ce phénomène concerne un volume corporel
(variations à la puissance 3).

Ainsi, les fibres afférentes primaires contribuent, elles aussi, à cette «soupe
inflammatoire» en libérant des neuropeptides qui, à leur tour, provoquent la
sécrétion des cytokines pro-inflammatoires [ 10 ]. Cet ensemble d'interactions
neurochimiques subtiles fournit le substratum au phénomène d'hyperalgésie
qui concerne non seulement le tissu lésé (hyperalgésie primaire) mais aussi les
tissus sains qui l'entourent (hyperalgésie secondaire5). Il permet d'expliquer la
rougeur, l'œdème et l'hyperalgésie cutanée observés au cours des arthrites
inflammatoires, lorsqu'un simple effleurement de la peau est perçu comme
douloureux alors que le processus pathologique initial est intra-articulaire [ 11 ].

En résumé, le système nerveux est particulièrement bien outillé pour être informé
de la survenue d'un épisode inflammatoire sur un territoire corporel. En retour,
son implication dans les phénomènes inflammatoires permet d'envisager sa
participation à la genèse de certaines maladies. C'est ce que suggèrent
quelques observations cliniques et expérimentales. Ainsi, des pathologies
d'ordinaire bilatérales et symétriques comme la polyarthrite rhumatoïde se
développent de façon asymétrique chez des patients atteints de poliomyélite
ou d'hémiplégie, le côté où le membre dont l'innervation est endommagée
étant protégé [ 12 , 13 , 14 , 15 and 16 ]. Chez le rat rendu polyarthritique par
injection d'adjuvant de Freund, la section d'un des nerfs sciatiques retarde
l'apparition et réduit la sévérité de l'arthrite du côté correspondant [ 17 , 18 ].

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▪ NOCICEPTEURS «PEPTIDERGIQUES» ET «NON PEPTIDERGIQUES» [19-21]


Les fibres sensorielles amyéliniques nociceptives peuvent être classées en deux
sous-populations en fonction de leur profil neurochimique ( figure 3 ) [ 22 , 23
and 24 ]. Les premières, dites peptidergiques, synthétisent notamment la
substance P et le CGRP et sont sensibles au NGF dont elles expriment les
récepteurs spécifiques. Ce sont ces fibres qui sont à l'origine de l'inflammation
neurogène dont nous avons déjà fait état [ 25 , 26 ].

Les secondes, dites non peptidergiques car elles n'expriment ni la substance P ni


le CGRP, sont également définies par la présence du proto-oncogène tyrosine
kinase RET, récepteur d'une autre famille de facteurs de croissance, celle du
GDNF(glial derived neurotrophic factor) [ 27 ], et d'une sous-classe de
récepteurs purinergiques (P2X3). Elles se caractérisent en outre par une forte
densité de canaux sodiques insensibles à la tétrodotoxine Nav1.86 [ 28 ].

Figure 3 ▪ Les nocicepteurs «peptidergiques» et «non peptidergiques».

Les nocicepteurs non myélinisés peuvent se diviser en deux groupes. Le premier


qui exprime des peptides, notamment la substance P (sP+), est sensible au NGF
(origine : fibroblastes, kératinocytes, cellules de Schwann). Il est responsable de
l'inflammation neurogène déclenchée par les peptides vasoactifs soit
directement, soit indirectement en dégranulant les mastocytes, eux-mêmes
libérant de l'histamine (partie gauche de la figure). Ces fibres se projettent dans
les couches les plus superficielles I et IIo (outer) de la corne dorsale de la
moelle (partie droite de la figure).

Le deuxième groupe, dit non peptidergique car il n'exprime ni la substance P ni


le CGRP, est sensible à l'un des quatre GDNF (origine : cellules de Schwann) au
travers de leur récepteur spécifique commun, la tyrosine kinase RET (RET+), et se
caractérise par la présence d'une phosphatase particulière, la thiamine
monophosphatase, également dénommée fluoride-resistant acid phosphatase
(FRAP+). Ces fibres expriment en outre une sous-classe de récepteurs
purinergiques (P2X3) dont le ligand naturel est l'ATP. Elles se caractérisent en
outre par une forte densité de canaux sodiques insensibles à la tétrodotoxine
Nav1.8. Elles se projettent exclusivement dans la couche IIi (inner) de la corne
dorsale de la moelle (partie droite de la figure).

Le troisième groupe est myélinisé et, de ce fait, se caractérise par ses


neurofilaments (NF200) et contient des peptides, notamment du CGRP. Leur
membrane exprime des récepteurs aux neurotrophines de la famille du NGF
(TrkA, TrkB, TrkC) et probablement un récepteur aux températures élevées,
différent du récepteur Trpv I, dénommé VRL-1 (vanilloid receptor-like 1). Ces
fibres se projettent dans la couche I et des couches plus profondes de la corne
dorsale de la moelle (partie droite de la figure). Les couches I et IIo contiennent
des neurones qui expriment le récepteur de la substance P. La couche IIi ne
contient que des interneurones dont les caractéristiques principales sont de
répondre uniquement aux stimuli mécaniques non nociceptifs et d'exprimer la
protéine kinase C γ (PKC γ) dont la synthèse est augmentée par l'injection sous-
cutanée d'un agent inflammatoire.

Ces deux sous-populations de fibres C nociceptives cutanées se projettent


différemment dans la corne postérieure de la moelle : dans les couches les plus
superficielles I et IIo pour ce qui est des fibres peptidergiques et exclusivement
dans la couche IIi pour les fibres non peptidergiques [ 29 ]. Les couches I et IIo
contiennent des neurones qui expriment le récepteur NK1 à la substance P. La
couche IIi ne contient que des interneurones dont les caractéristiques
principales sont de ne répondre qu'aux stimuli mécaniques non nociceptifs et
d'exprimer la protéine kinase C γ (PKC γ). La synthèse de cette dernière est
augmentée par l'injection sous-cutanée d'un agent inflammatoire [ 30 ].

Les fibres nociceptives Aδ sont souvent peptidergiques, mais leur rôle dans
l'inflammation reste à préciser. Leurs projections spinales ne se restreignent pas
aux couches superficielles.

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▪ RÉCEPTEURS ÉLÉMENTAIRES LOCALISÉS SUR LES NOCICEPTEURS

Les progrès récents de la biologie moléculaire ont permis d'identifier, de cloner


puis d'étudier un certain nombre de récepteurs biochimiques qui sont présents
sur la membrane des fibres afférentes primaires. Certains d'entre eux sont des
transducteurs, c'est-à-dire qu'ils sont capables de transformer un stimulus
physique en un courant transmembranaire dépolarisant. C'est la mosaïque de
récepteurs biochimiques spécialisés tapissant leur membrane qui est à l'origine
de la «plasticité» des nocicepteurs polymodaux.

Récepteurs vanilloïdes (au piment) [31, 32]

Les vanilloïdes constituent une famille naturelle d'irritants, responsables de la


saveur «piquante» des épices, par exemple la capsaïcine, la pipérine ou le
zingerone extraits du piment, du poivre noir et du gingembre [ 33 ].
L'application de capsaïcine sur la peau provoque chez l'homme une sensation
de brûlure. Cette dernière est abolie par le refroidissement et exacerbée par le
réchauffement. Les propriétés sensibilisatrices de la capsaïcine sont puissantes [
34 ] : abaissement du seuil d'activation des nocicepteurs, augmentation de leur
réponse aux stimulations nociceptives, «réveil» des nocicepteurs «silencieux». La
capsaïcine est également capable de déclencher une inflammation
neurogène. En revanche, elle est inactive sur les mécanorécepteurs et les
récepteurs au froid [ 35 ]. Les vanilloïdes ont été utilisés pour leurs propriétés
rubéfiantes dans de nombreuses préparations populaires, voire médicales
comme le Dolpyc®. La capsaïcine, sous forme de préparation magistrale, est
actuellement utilisée dans certains syndromes douloureux chroniques localisés.
Des applications répétées permettent d'éliminer le stock de neurotransmetteurs
des fibres C et les rendent ainsi moins sensibles aux stimuli nociceptifs.

La capsaïcine active les fibres C polymodales par l'intermédiaire d'un récepteur


ionotropique spécifique que l'on a dénommé récepteur vanilloïde VR-1 dans un
premier temps puis Trpv1 (voir plus loin). Physiologiquement, le Trpv1 se
comporte comme un récepteur à la chaleur intense ( figure 4 ). C'est un canal
laissant passer tous les cations, avec cependant une préférence pour le
calcium [ 36 ]. Les protons ou la capsaïcine n'activent pas directement le Trpv1,
mais abaissent considérablement son seuil de déclenchement : il est alors
activé par la chaleur ambiante et participe au phénomène d'allodynie [ 37 , 38
]. Son seuil est également abaissé lorsque le récepteur est phosphorylé. La
phosphorylation est déclenchée par l'intermédiaire d'une protéine kinase A,
elle-même activée par les prostaglandines et la sérotonine, ou par
l'intermédiaire d'une protéine kinase C, elle-même activée par la bradykinine et
l'histamine [ 39 ]. L'activité du récepteur Trpv1 est donc réglée avec finesse par
son environnement biochimique, cette modulation se traduisant par exemple
par la baisse du seuil de déclenchement du signal d'alarme en cas
d'inflammation.
Figure 4 ▪ Le récepteur à la capsaïcine.

Il s'agit d'une protéine canal à 6 domaines transmembranaires qui s'ouvre sous


l'action de la chaleur. Le seuil de cette ouverture est déterminé par son
environnement biochimique. Le récepteur est directement sensibilisé par le pH
extracellulaire et les vanilloïdes, et indirectement par diverses substances
inflammatoires. «Sensibilisé», le récepteur peut ainsi répondre à la chaleur
ambiante. Cette propriété permet d'expliquer les effets bénéfiques du froid
pour soulager certaines douleurs. L'entrée de calcium provoque une chaîne de
réactions qui n'a rien de spécifique des nocicepteurs : (1) amplification du
phénomène par phosphorylation du récepteur au travers de protéine kinases,
(2) exocytose, notamment de peptides puis (3) inactivation par sa
déphosphorylation déclenchée par la calcineurine, elle-même sous la
dépendance du complexe Ca++-calmoduline. Une propriété est plus
caractéristique des nocicepteurs : le calcium cytosolique est essentiellement
d'origine extracellulaire, car il n'existe pas de réticulum endoplasmique dans les
terminaisons libres. Les protéines kinases C (PKC) sont activées par une
phospholipase C (PLC) (4), elle-même sous la dépendance d'un récepteur
métabotropique (partie supérieure droite de la figure) et de tyrosines kinases, tel
TrkA, récepteur à haute affinité du NGF (partie droite de la figure). Quant aux
protéines kinases A (PKA), elles sont activées par l'AMP cyclique qui résulte de
l'action d'une adénylate cyclase (AC) couplée à des récepteurs
métabotropiques liés à des protéines G stimulatrices (5) ou inhibitrices (6).

Il n'est pas impossible que les récepteurs vanilloïdes soient sensibles à des
éicosanoïdes endogènes encore mal identifiés à ce jour [ 34 ]. Ce pourrait être
des acides hydroxyperoxyéicosatétraénoïques (HPETE) [ 40 ], synthétisés à partir
de l'acide arachidonique sous l'action des lipo-oxygénases, ou bien
l'anandamide, un cannabinoïde qui aurait la particularité d'agir à la fois sur les
récepteurs Trpv1 et CB-1 (voir, ci-dessous, le paragraphe sur les cannabinoïdes)
et, ainsi, d'être pronociceptif ou antinociceptif [ 41 , 42 , 43 and 44 ].

Le récepteur à la capsaïcine appartient à une vaste famille de canaux ioniques


dénommés Trp(transient receptor potential) dont certains sont sensibles à la
température. Trois d'entre eux, clonés à ce jour, sont sensibles à la chaleur
intense [ 45 , 46 , 47 and 48 ]. Leur sensibilité exprimée en termes de seuil est la
suivante : Trpv3 > Trpv1 > Trpv2 ( figure 5 ). Le récepteur Trpv4 est sensible à la
chaleur modérée et les récepteurs Trpm8 et Trpa1 sont sensibles au froid. À
l'instar de l'activation de Trpv1 par la capsaïcine, certains d'entre eux sont
sensibles à des molécules spécifiques (par exemple Trpv3 au camphre, Trpm8
au menthol, Trpa1 à l'huile de moutarde), ce qui a permis de les identifier [ 52 ].

Figure 5 ▪ Les récepteurs sensibles à la température.

Représentation schématique de l'activité des récepteurs cutanés en fonction


de la température appliquée sur la peau [ 3 , 49 , 50 and 51 ]. Lorsqu'on
augmente progressivement la température depuis son niveau normal
(extrémités : autour de 30 °C pour une température extérieure de 20 °C environ)
jusqu'aux températures nociceptives, on active successivement les
thermorécepteurs, les nocicepteurs polymodaux C puis Aδ et, pour les plus
hautes températures, les mécanorécepteurs à haut seuil et les récepteurs au
froid.

La membrane de ces récepteurs sensoriels est tapissée de récepteurs


moléculaires, notamment des canaux ioniques sensibles à la température (Trp
pour temperature-activated transient receptor potential ion channels). Ils sont
activés dans des plages restreintes de température. Leur seuil est indiqué par
une flèche. Ils sont également sensibles à certaines substances qui ont permis
de les identifier, par exemple la capsaïcine pour le Trpv1 et le menthol pour le
Trpm8.

Récepteur à l'acidité

La superfamille des canaux sodiques bloqués par l'amiloride est dénommée


ASIC(acid sensing ionic channel). Six sous-types de récepteurs ASIC ont été
décrits, dont 5 sont exprimés dans les fibres afférentes primaires de petit
diamètre [ 53 ]. Ils sont activés dès que le pH atteint 6,9, valeur guère éloignée
du pH physiologique [ 54 , 55 ]. Le pH des tissus enflammés pouvant atteindre
5,5 [ 56 ], on conçoit que le moindre phénomène inflammatoire ou lésionnel
active ces récepteurs. Cette propriété est singulière car une baisse du pH
extracellulaire se traduit dans le reste du système nerveux par une réduction de
l'excitabilité neuronale.

Récepteurs purinergiques [57-61]

L'adénosine triphosphate se lie aux récepteurs P2 (récepteur purinergique 2),


ionotropiques (P2X) ou métabotropiques (P2Y). Parmi les 7 récepteurs
ionotropiques de l' ATP clonés, 6 au moins sont exprimés dans les neurones
sensoriels afférents. Le plus intéressant est sans doute le récepteur P2X3 qui n'est
exprimé que par les neurones «non peptidergiques» qu'il active (voir plus haut le
paragraphe sur les nocicepteurs «peptidergiques» et «non peptidergiques» et la
figure 3 ). L'ATP est rapidement hydrolisée et libère de l'adénosine, elle-même
capable d'agir en synergie en se fixant au récepteur P1 (récepteur purinergique
1) qui active les nocicepteurs. Sur le plan physiopathologique, la source
essentielle d'ATP est située dans les cellules endothéliales, les fibres sympathiques
et, le cas échéant, les cellules tumorales. Certains auteurs attribuent en outre à
l'ATP un rôle essentiel dans la sensibilité mécanique des organes viscéraux creux.

Récepteurs NMDA et AMPA/kaïnate [62-64]

On sait aujourd'hui que les membranes des fibres afférentes primaires et des
terminaisons sympathiques possèdent des récepteurs glutamatergiques,
essentiellement ionotropiques AMPA/kaïnate et NMDA. La densité de ces
récepteurs augmente au cours de l'inflammation. Au même titre que les
peptides, la source des acides aminés excitateurs est à rechercher dans les
fibres afférentes sensorielles elles-mêmes. Il s'agit d'un mécanisme local d'auto-
entretien de l'activité nociceptive.

Récepteurs adrénergiques

Dans les conditions normales, l'adrénaline et la noradrénaline n'activent pas les


nocicepteurs. Elles peuvent en revanche les sensibiliser dans certaines
circonstances, entraînant alors des effets hyperalgésiques. De tels effets
s'exercent probablement par l'intermédiaire de protéines kinases,
essentiellement la PKA et dans une moindre mesure la PKC, qui règlent l'activité
des canaux sodiques résistants à la tétrodotoxine [ 65 , 66 ]. On conçoit que le
stress, par exemple, soit ainsi un facteur d'amplification des messages
nociceptifs dès le niveau périphérique.
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▪ CANAUX SODIQUES DÉPENDANTS DU VOLTAGE [67-71]

Ces canaux revêtent en clinique une importance particulière puisqu'ils sont la


cible des anesthésiques locaux. Il en existe deux types qui diffèrent par leur
cinétique d'action et d'inactivation. Lorsque la membrane d'un neurone est
suffisamment dépolarisée, ses canaux sodiques dépendants du voltage
s'ouvrent brusquement : un potentiel d'action est déclenché. Il s'agit en général
de canaux à bas seuil dont la cinétique d'inactivation est rapide et que l'on
peut bloquer par la tétrodotoxine (tétrodotoxine sensibles, TTXs). Ils sont présents
sur la membrane des terminaisons des fibres afférentes primaires, qu'elles soient
ou non myélinisées.

Les fibres C possèdent aussi, au sein de leurs membranes, des canaux sodiques
insensibles à la tétrodotoxine (tétrodotoxine résistants, TTXr). Les deux principaux
sont dénommés Nav1.9 et Nav1.8 [ 72 , 73 , 74 , 75 and 76 ]7, le second étant
aussi exprimé sur certaines fibres myélinisées de grand diamètre [ 77 ]. À la
différence des canaux TTXs, leur seuil est élevé et leur cinétique d'inactivation
est lente, de sorte que leur ouverture déclenche des potentiels d'action peu
nombreux mais de plus longue durée. Ces propriétés augmentent l'efficacité
synaptique des nocicepteurs. Cette dernière devient redoutable lorsque le seuil
de ces canaux est abaissé par la phosphorylation que déclenchent plusieurs
médiateurs «hyperalgésiques» par l'intermédiaire de protéines kinases A
(prostaglandine, sérotonine) ou de protéines kinases C (bradykinine, histamine) [
78 ]. L'augmentation de la synthèse des canaux TTXr au cours de l'inflammation
aggrave ces mécanismes [ 79 ].

Les antiarythmiques, les anticonvulsivants et les anesthésiques locaux comme la


lidocaïne bloquent essentiellement les canaux sodiques TTXs responsables du
déclenchement du potentiel d'action [ 80 , 81 ]. La mise au point
d'antagonistes spécifiques des canaux TTXr représente une voie de recherche
prometteuse pour soulager la douleur.

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▪ MOLÉCULES DE L'INFLAMMATION

La plupart des molécules impliquées dans l'inflammation interfèrent avec les


fibres nociceptives et sont responsables des phénomènes d'allodynie et
d'hyperalgésie rencontrés au cours des pathologies inflammatoires chroniques.
Leur interaction ne semble cependant pas se limiter au phénotype douleur sans
que l'on puisse actuellement mesurer l'importance des conséquences de cette
interaction sur l'évolution des processus inflammatoires.

Kinines [82-84]

La bradykinine et la kallidine sont des peptides formés à partir d'α2-globulines


(les «kininogènes») sous l'action enzymatique des kallikréines plasmatique ou
tissulaire. Elles présentent une grande affinité pour le récepteur B2, le récepteur
B1 étant activé de façon préférentielle par leurs métabolites respectifs. Le
récepteur B2, constitutif, est responsable des effets à court terme de la
bradykinine ( figures 4 et 6 ):

 stimulation de la production de cytokines pro-inflammatoires (TNF-α, IL-6,


IL-1β, IL-8);
 stimulation de la libération d'acide arachidonique, ce qui a pour
conséquence de favoriser la formation des prostaglandines;

Figure 6 ▪ Les kinines et la chaîne des cytokines.


Les cytokines sont avant tout pro-inflammatoires et hyperalgésiques,
notamment par la chaîne TNF-α → IL-6 → IL-1 β à l'origine de l'induction
de la synthèse de COX-2 et donc de la libération de prostaglandines. Par
l'intermédiaire de l'IL-8, le TNF-α est en outre à l'origine d'une libération
d'aminés sympathomimétiques. Ces mécanismes sont freinés par des
cytokines anti-inflammatoires, notamment l'IL-1ra, l'IL-4, l'IL-10 et l'IL-13.
C'est la bradykinine (ou la kallidine chez l'homme) qui déclenche la
chaîne des cytokines pro-inflammatoires (TNF-α, IL-6, IL-1β, IL-8) (1) mais
aussi qui stimule la libération d'acide arachidonique (2), ce qui a pour
conséquence de favoriser la formation des prostaglandines. Elle
déclenche la libération de peptides (neurokinines, CGRP) par les
terminaisons libres des fibres afférentes primaires (3) et stimule la synthèse
d'oxyde nitrique (4). Elle provoque la dégranulation des mastocytes (5),
ce qui a pour conséquence de libérer histamine et sérotonine. (3) (4) et
(5) concourent à provoquer vasodilatation et augmentation de la
perméabilité vasculaire. Enfin, la bradykinine est à l'origine de la
phosphorylation du récepteur Trpv1 (6), ce qui a pour conséquence de le
rendre sensible à la température ambiante.
Bradykinine et kallidine présentent une grande affinité pour le récepteur
B2, constitutif, le récepteur B1 étant activé de façon préférentielle par
leurs métabolites respectifs. La synthèse du récepteur B1, quasiment
inexistant dans les tissus normaux, est déclenchée par le facteur nucléaire
NF-κB. Ce dernier est lui-même activé par de nombreux facteurs
endogènes, notamment la bradykinine, le TNF-α et le NGF (voir figure 8).
 stimulation de peptides (neurokinines, CGRP) par les terminaisons libres
des fibres afférentes primaires ;
 stimulation d'oxyde nitrique (NO) ;
 dégranulation des mastocytes avec libération d'histamine et de
sérotonine ;
 phosphorylation du récepteur Trpv1 par l'intermédiaire d'une isoforme de
la protéine kinase C [ 43 , 85 ], ce qui le rend sensible à la température
ambiante.

Certains auteurs n'ont pas hésité à estimer essentiel ce cercle vicieux dans
l'entretien des inflammations chroniques et à considérer comme primordial le
rôle des kininogènes dans l'entretien des inflammations chroniques [ 83 , 86 ].

Quant au récepteur B1, il est quasiment absent des tissus normaux, mais son
expression est déclenchée par des agents inflammatoires (polysaccharides,
cytokines), par le NGF et par la bradykinine elle-même en se liant au récepteur
B1. Ces effets font intervenir le facteur nucléaire NF kappa-B (NF-κB, nuclear
factor-kappa B) dont le rôle est d'ailleurs plus ubiquitaire (voir ci-dessous) [ 87 ,
88 ]. Le récepteur B1, inductible et peu sujet au phénomène de désensibilisation
[ 89 ], est donc responsable des effets à long terme de la bradykinine et
pourrait prendre le relais du récepteur B2 désensibilisé.

Par ses nombreuses cibles, la bradykinine joue le rôle de «chef d'orchestre» de


l'inflammation et de la douleur qui en résulte. Elle est considérée comme une
cible thérapeutique de choix. Malheureusement, la plupart des antagonistes de
ses récepteurs étaient, jusqu'à récemment, de nature peptidique, ce qui limite
leur diffusion vers les cibles thérapeutiques. On peut espérer que la mise au
point d'antagonistes non peptidiques débouchera sur une vaste palette
thérapeutique (inflammation, asthme, douleur) [ 90 ].

Cytokines [91-93]

Les cytokines sont de petites protéines initialement libérées par les lymphocytes,
les monocytes et les macrophages, mais qui peuvent être sécrétées par toutes
les cellules, y compris les neurones, durant l'inflammation. Certaines d'entre elles
sont proinflammatoires — TNF-α, interleukine (IL) 1β, IL-8 -, d'autres en revanche
sont anti-inflammatoires — IL-4, IL-10, IL-13, IL-1ra — et les dernières cumulent les
deux propriétés. Libérée dans la circulation, l'IL-6 peut en outre déclencher une
hyperthermie en réponse à une inflammation locale [ 94 ]. Les cytokines pro-
inflammatoires sont à l'origine de la libération de prostaglandines et des amines
sympathomimétiques. La puissance de leurs effets hyperalgésiques peut être
classée de la façon suivante : IL-1β > TNF-α >> IL-8 >> IL-6. Il convient d'y
adjoindre, dans certains cas, l'intervention du système sympathique mis en jeu
par l'interleukine IL-8.

Avec la bradykinine, les cytokines forment par conséquent le lien entre lésions
tissulaires et réponses inflammatoires. On connaît le rôle primordial joué par des
cytokines comme l'IL-1 ou le TNF-α dans les destructions tissulaires observées au
cours de maladies inflammatoires chroniques telles que la polyarthrite
rhumatoïde ou la maladie de Crohn [ 95 ]. La mise au point d'anticytokines
représente probablement l'avancée thérapeutique majeure de ces dernières
années dans le traitement des maladies inflammatoires. Il existe également des
récepteurs à certaines cytokines sur les nocicepteurs. C'est ainsi que le TNF-α
pourrait exercer une action sensibilisatrice des nocicepteurs. De tels
mécanismes permettent d'expliquer la précocité de l'efficacité des anti-TNF-α
sur la douleur des patients, survenant parfois dès les premières 24 heures de
traitement [ 96 ], bien que la réaction inflammatoire locale ne soit pas encore
contrôlée.

Prostanoïdes

La synthèse des prostaglandines à partir de l'acide arachidonique est


déclenchée dans les cellules exposées à des agents pro-inflammatoires —
cytokines, mitogènes, endotoxines — par l'induction de la cyclo-oxygénase 2
(COX-2). Les prostanoïdes interagissent avec des protéines G au travers de 8
récepteurs spécifiques. Trois d'entre eux nous intéressent plus particulièrement
dans la mesure où ils sensibilisent les fibres afférentes primaires : les récepteurs
EP1 et EP2 de la prostaglandine E2 (PGE2) et le récepteur IP de la
prostaglandine I2 (PGI2) aussi dénommée prostacycline. Ces phénomènes de
sensibilisation s'exercent par l'intermédiaire des protéines kinases : protéine
kinase A couplée aux récepteurs EP2 et IP et protéine kinase C couplée aux
récepteurs EP1 et IP [ 97 ]. La chaîne biochimique se traduit in fine par la
phosphorylation de certaines protéines membranaires, ce qui entraîne
l'ouverture (récepteurs Trpv1, canaux sodiques TTXr, canaux calciques) ou la
fermeture (canaux potassiques) de canaux ( figure 7 ) [ 98 , 99 , 100 and 101
]. En outre, l'oxyde nitrique pourrait faciliter ces mécanismes [ 102 , 103 ].

À cette étape, il faut mentionner une caractéristique de COX-2 qui n'a pas reçu
l'attention qu'elle méritait, peut-être du fait de son aspect a priori paradoxal :
ses propriétés anti-inflammatoires [ 104 , 105 , 106 and 107 ]. Celles-ci ont été
décrites au cours de la phase de résorption spontanée qui suit toute réaction
inflammatoire aiguë. Au cours de cette phase tardive, la synthèse de COX-2
dans le réticulum endoplasmique diminue, ce qui limite la formation de PGE2
pro-inflammatoire. Au contraire, la synthèse de la COX-2 juxtanucléaire s'accroît
fortement dans les monocytes et les macrophages, entraînant la formation de
prostaglandine pentacyclique (PGD2) et de son métabolite (15d-PGJ2). Ce
dernier se lie au récepteur nucléaire PPAR γ (peroxisome proliferator activated
receptor γ), qu'il active. L'activation du PPAR γs'oppose à celle de la kinase IKK
et, donc, à celle du NF-κB («médiateur central de la réponse immunitaire»), et
limite ainsi la synthèse des protéines responsables de l'inflammation (voir le
paragraphe suivant et le cartouche de la figure 8 ). A contrario, ce
mécanisme explique aussi certains effets pro-inflammatoires des inhibiteurs de
COX-2 et, peut-être, l'effet «plafond» caractéristique des anti-inflammatoires
non stéroïdiens (AINS).

À l'évidence, la résorption physiologique disparaît lorsque l'inflammation évolue


vers la chronicité. L'élucidation des déterminants et des mécanismes par
lesquels une voie métabolique, pro-inflammatoire, est progressivement
remplacée par une autre, anti-inflammatoire, sera probablement riche de
développements cliniques. Il s'agit sans doute de l'une des clés de l'évolution
des processus aigus vers des processus chroniques ainsi que des phases plus ou
moins cycliques de rémission inexpliquée qui les caractérisent. Si ces
phénomènes étaient confirmés chez l'homme, on pourrait même envisager
d'exploiter sur le plan clinique les mécanismes anti-inflammatoires endogènes,
en les renforçant.

Figure 7 ▪ Résumé des effets des prostaglandines sur les nocicepteurs.

Les prostaglandines (PGE2, PGI2) agissent au niveau de récepteurs spécifiques


(EP1, EP2, IP) pour phosphoryler des canaux ioniques, ce qui les rend plus
sensibles à d'autres agents. La phosphorylation est déclenchée par
l'intermédiaire d'une protéine kinase A, elle-même activée par l'adénylate
cyclase (à gauche) ou par l'intermédiaire d'une protéine kinase C, elle-même
activée par une phospholipase (à droite). Elle favorise l'ouverture du récepteur
vanilloïde Trpv1, des canaux calciques (notamment N et P/Q) et des canaux
sodiques voltage dépendants (TTXr) et la fermeture des canaux potassiques
(représentés au centre de haut en bas). Tous ces effets sensibilisent la
membrane aux dépolarisations.

Facteurs de croissance [111, 112]

Normalement sécrétées par les tissus ou éléments annexes au tissu nerveux, les
neurotrophines sont libérées par les macrophages et les autres cellules
immunitaires durant l'inflammation. On connaît avant tout ces dernières pour
leur rôle de facteur de croissance dans le développement du système nerveux.
Cependant, leurs effets perdurent bien au-delà de la période de
développement, leurs fonctions se modifiant radicalement. En ce qui concerne
la nociception, le NGF et le BDNF(brain-derivated neurotrophic factor)
déclenchent des phénomènes d'hyperalgésie en se liant avec une haute
affinité à leurs récepteurs spécifiques. Ainsi, la fonction périphérique du NGF
évolue-t-elle vers celle de co-adjuvant de l'inflammation [ 113 ].
L'augmentation de la synthèse de NGF est secondaire à la libération de
cytokines, plus particulièrement du TNF-α et des interleukines libérés par les
cellules inflammatoires. À la suite de la liaison du NGF avec son récepteur à
haute affinité trkA (voir partie inférieure droite de la figure 1 ), le complexe
NGF/trkA est internalisé et transporté vers le corps cellulaire du neurone situé
dans le ganglion rachidien pour y modifier la transcription des précurseurs de
différents peptides (augmentation : substance P, CGRP ; diminution : peptide
vasoactif intestinal, cholécystokinine, neuropeptide Y, galanine), de certains
facteurs trophiques (GDNF, BDNF) et des canaux sodiques insensibles à la
tétrodotoxine Nav1.9 [ 114 ]. Ce mécanisme contribue très certainement à
entretenir à long terme certains effets hyperalgésiques.

Sous l'influence du NGF, c'est au tour du BDNF d'être surexprimé au niveau des
fibres C peptidergiques [ 115 , 116 ]. Libéré au niveau de la corne postérieure
de la moelle, il se lie à son récepteur à forte affinité TrkB pour phosphoryler le
récepteur NMDA par l'intermédiaire d'une protéine kinase C. Aussi, doit-on sans
doute considérer le BDNF comme un élément clé du déclenchement des
phénomènes de «sensibilisation centrale» par les phénomènes inflammatoires [
117 ].

Protéases [118, 119]

Les protéases exercent leurs effets en se liant à des récepteurs spécifiques de


surface couplés aux protéines G, les récepteurs activés par les protéases (PAR,
protease-activated receptors), dont on connaît 4 représentants (PAR1-4)
initialisés par activité protéolytique d'enzymes comme la thrombine ou la
trypsine. Elles sont présentes sur l'endothélium vasculaire, les cellules
inflammatoires, les plaquettes et les terminaisons des fibres afférentes primaires.
Leur activation déclenche l'ensemble des signes classiques de l'inflammation. En
outre, PAR1 et PAR2, coexprimés dans les neurones afférents primaires avec le
CGRP et la substance P, provoquent la libération de ces derniers par un
mécanisme dépendant du calcium. On peut donc aussi les considérer comme
des médiateurs de l'inflammation neurogène. En résumé, elles participent aux
mécanismes responsables de l'hyperalgésie d'origine inflammatoire.

«Médiateur central de la réponse immunitaire» (NF-κB)


Le facteur de transcription NF-κB est présent dans de nombreux types cellulaires.
Il est souvent désigné comme le «médiateur central de la réponse immunitaire»
car on connaît, à ce jour, environ 150 inducteurs exogènes (notamment viraux
et bactériens) et endogènes de son activité qui, à son tour, concerne un
nombre équivalent de cibles [ 120 , 121 and 122 ]. Si l'on restreint son attention
aux activateurs qui concernent les fibres afférentes primaires nociceptives, on
doit au moins compter parmi eux la bradykinine, mais aussi les ions K+, le facteur
d'activation plaquettaire (PAF, platelet activating factor), les facteurs de
croissance (du moins le TNF-α), les prostanoïdes (du moins LTB4), et le glutamate
( figure 8 ). Parmi les gènes cibles du NF-κB, on notera ceux dont l'activation
provoque la synthèse de récepteurs (B1, mais aussi PAF1, NPY1 et P1), d'enzymes
de synthèse des prostanoïdes (phospholipase A2, 5-lipo-oxygénase, COX-2), de
cytokines (TNF-α, IL-1β, IL-6, IL-8) et de l'enzyme inductible de synthèse de
l'oxyde nitrique (iNOS). On ne sera pas surpris de constater que l'expression de
NF-κB est exacerbée au cours de l'inflammation [ 123 ].

Figure 8 ▪ Le facteur de transcription NF-κB.

La forme inactive de NF-κB, présente dans le cytosol, est constituée d'un


complexe de 3 sousunités dont 2 (p50 et p65), qui forment le dimère actif de
transcription proprement dit, sont inhibées par la troisième (IκB). Les multiples
voies d'activation du NF-κB aboutissent in fine à la phosphorylation de la
protéine inhibitrice IκB par des kinases spécifiques (IKK), dont il résulte la
libération du dimère p50-p65. Ce dernier subit alors une translocation vers le
noyau où il se fixe sur les séquences réceptrices ad hoc de l'ADN. Dans le
noyau, le dimère provoque la synthèse des transcrits qui vont déclencher celle
de nombreuses protéines. Celles qui intéressent les fibres afférentes primaires
nociceptives sont indiquées dans la partie supérieure droite de la figure.

Les inducteurs endogènes des kinases IKK qui intéressent les fibres afférentes
primaires nociceptives sont indiqués dans la partie supérieure gauche de la
figure. En outre, l'activité des kinases IKK est modulée par le récepteur PPAR γ,
lui-même pouvant être activé par des métabolites de l'acide arachidonique,
leucotriènes (15-HPETE) ou prostaglandines (15dPGJ2). Les AINS possèdent la
propriété d'inhiber directement, ou indirectement en activant PPAR γ, les
kinases IKK et, par conséquent, l'ensemble des effets attribués au facteur de
transcription NF-κB [ 108 , 109 ]. Il s'agit là du second mécanisme anti-
inflammatoire des AINS.

Le 15-HPETE est synthétisé sous l'action enzymatique d'une 15-lipo-oxygénase qui


peut être activée par l'IL-4 [ 110 ]. Quant à la prostaglandine pentacyclique
15dPGJ2, elle est synthétisée sous l'action enzymatique de COX-2a , notamment
au moment de la rémission d'une inflammation aiguë (cartouche blanc).
L'inhibition de l'enzyme se traduit alors par un effet pro-inflammatoire qui
contrecarre les effets attendus des AINS.

Neuropeptides [8, 124, 125]

À la suite de ses observations de la vasodilatation cutanée déclenchée par les


stimuli nociceptifs, Lewis [ 126 ] a formulé l'hypothèse de l'existence d'un
système nerveux cutané de défense. Ce système serait capable de jouer un
rôle effecteur en sécrétant des substances actives qui produisent une réaction
locale inflammatoire. C'est l'origine du concept d'inflammation neurogène (voir
plus haut le paragraphe sur les nocicepteurs «peptidergiques» et «non
peptidergiques») et du rôle effecteur des fibres sensibles à la capsaïcine [ 127 ,
128 ]. La substance P fut la première d'une série de peptides identifiés dans les
fibres afférentes [ 129 ]. Le rôle des peptides, notamment de la substance P et
du CGRP, dans le déclenchement de l'inflammation neurogène et dans
l'entretien et la pérennisation de la cascade inflammatoire est aujourd'hui bien
établi [ 10 , 130 ]. Celui des autres peptides (VIP, bombésine, somatostatine…)
dans la signalisation de la douleur est plus obscur. Des indices tendent toutefois
à attribuer un rôle analgésique et anti-inflammatoire à la somatostatine [ 131 ,
132 ].

Opioïdes

Le lecteur sera peut-être surpris de trouver les opioïdes ici, tant la notion d'une
action cérébrale de la morphine est ancrée dans les mémoires. On connaît
pourtant son effet antidiarrhéique. Mais des récepteurs opioïdes sont également
présents sur les terminaisons périphériques des fibres sensorielles : un tiers environ
des fibres C sont pourvues de récepteurs µ et/ou δ. Ces récepteurs pourraient
contribuer à l'action antinociceptive périphérique des opioïdes, cette dernière
ne s'exprimant significativement qu'en cas d'inflammation [ 133 , 134 and 135
]. Les récepteurs opioïdes peuvent être activés par des agonistes exogènes —
les ligands µ apparaissant les plus efficaces à cet égard — ou par des peptides
opioïdes endogènes libérés localement par des cellules immunitaires
(lymphocytes, monocytes). Ces dernières ne sont pas les seules sources
d'opioïdes endogènes périphériques puisqu'un nombre non négligeable de
fibres afférentes primaires contient de la met-enképhaline.

Chez le rat polyarthritique, on constate une quasi-extinction de l'expression de


la pro-enképhaline A, précurseur des enképhalines, dans les ganglions
rachidiens. La surexpression de la met-enképhaline à l'aide d'un vecteur
recombinant chez ces animaux se traduit par:

 un effet anti-inflammatoire ;
 une rémission de la polyarthrite ;
 une réduction des comportements «douloureux» [ 136 ].

Ces résultats suggèrent non seulement l'implication des neurones sensoriels


enképhalinergiques dans le contrôle périphérique de la douleur mais aussi leur
probable implication dans la modulation de la réponse inflammatoire et
immunitaire.

Chez l'animal, les opioïdes administrés localement présentent une activité


antiinflammatoire et analgésique [ 133 ]. Chez l'homme, l'injection intra-
articulaire de morphine après arthroscopie semble avoir des effets modestes et
comparables à ceux des anesthésiques locaux [ 137 ] ; en revanche, ces effets
sont plus marqués en cas d'inflammation chronique [ 138 ].

Cannabinoïdes [139-141]

À la fin des années 1980, 2 récepteurs cannabinoïdes ont été identifiés : CB1,
localisé essentiellement au niveau du système nerveux central, et CB2, présent
uniquement dans les tissus périphériques, en particulier dans les terminaisons
nerveuses des fibres afférentes. L'action anti-inflammatoire des agonistes du
récepteur CB2 résulte de la diminution de la sécrétion d'histamine et de
sérotonine via l'inhibition de la dégranulation mastocytaire. Les effets
antinociceptifs des cannabinoïdes sur le récepteur CB1 sont principalement
centraux bien que, au niveau périphérique, ils réduisent la perméabilité
vasculaire et la fuite plasmatique [ 142 ]. Des cannabinoïdes de synthèse
dépourvus d'effets psychoactifs sont en cours d'étude chez l'homme.

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▪ EFFETS À COURT ET LONG TERMES DES AGENTS INFLAMMATOIRES

Certains agents pro-inflammatoires activent directement les fibres afférentes


primaires en dépolarisant les terminaisons libres. C'est le cas des protons et de
l'ATP. C'est aussi celui de la chaleur, l'un des signes cardinaux de l'inflammation.
Les autres vont sensibiliser ces terminaisons en les rendant plus réactives aux
agents dépolarisants, qu'ils soient chimiques ou physiques. Cette sensibilisation
peut s'effectuer par deux types de mécanismes ( figure 9 ). Le premier consiste
en une amplification du potentiel générateur déclenché au niveau des
récepteurs canaux par le stimulus. Le second consiste en une modification de
l'excitabilité de la membrane via l'abaissement du seuil d'ouverture des
canaux sodiques dépendants du voltage, donc du seuil de déclenchement des
potentiels d'action. Ces mécanismes, parfois directs (sensibilisation du récepteur
Trpv1 par les protons lorsque le pH devient acide), sont le plus souvent sous la
dépendance d'une chaîne de seconds messagers dont les plus notables sont
des kinases. C'est le cas du récepteur Trpv1, mais aussi des canaux sodiques
dépendants du voltage. Ainsi, le seuil d'ouverture du canal sodium résistant à la
tétrodotoxine Nav1.8 estil abaissé par phosphorylation. Cette dernière est
déclenchée par l'intermédiaire d'une protéine kinase A activée par les
prostaglandines et la sérotonine, ou par l'intermédiaire d'une protéine kinase C
elle-même activée par la bradykinine et l'histamine. La phosphorylation se
traduit par une augmentation des courants sodiques entrant dans la
terminaison, donc par un abaissement du seuil d'activation de cette dernière.

Nous sommes là confrontés à un système de réglage très sophistiqué, asservi à


de nombreuses variables de l'environnement physique et chimique de la
terminaison libre du récepteur sensoriel, elle-même tapissée, rappelons-le, d'une
mosaïque de récepteurs biochimiques et de seconds messagers.

Figure 9 ▪ Genèse et modulation du message nociceptif.

Le potentiel générateur est engendré par des récepteurs canaux spécifiques


(1). Tant qu'elle n'a pas atteint le seuil de déclenchement des potentiels
d'action, cette dépolarisation reste locale. Lorsque ce seuil est atteint (2), la
dépolarisation s'accélère brusquement par l'ouverture de canaux sodiques
voltage dépendante pour déclencher le potentiel d'action, qui est la seule
information transmise au système nerveux central. Chacun de ces deux
mécanismes de base est réglé par des kinases en amplifiant le potentiel
générateur (3) ou en abaissant le seuil de déclenchement des potentiels
d'action (4). Un dernier élément est caractéristique des potentiels d'action : leur
largeur (5) qui est notamment dépendante de la cinétique d'inactivation des
canaux sodiques, plus lente pour les TTXr que pour les TTXs.

Parallèlement à cette activation «directe», un certain nombre de molécules


sont capables, depuis la périphérie, de modifier la synthèse protéique dans le
corps cellulaire des neurones sensoriels primaires, situés dans les ganglions
rachidiens [ 143 ]. Ainsi en est-il du NGF qui, une fois libéré, se lie aux récepteurs
de haute affinité TrkA. Le complexe NGF-TrkA est ensuite internalisé et transporté
jusqu'au corps cellulaire du neurone pour y modifier la transcription de certaines
protéines, ces dernières étant transportées de façon rétrograde vers les
terminaisons périphériques et/ou de façon orthograde vers les terminaisons
centrales. Ainsi pourra-t-on observer in fine une augmentation du nombre de
certains canaux ioniques (Trpv1, canaux sodiques TTXr) à la périphérie. Sous
l'influence du NGF, c'est au tour du BDNF d'être surexprimé au niveau des fibres
C peptidergiques pour être libéré au niveau de la corne postérieure de la
moelle. En modifiant le phénotype, ces mécanismes vont contribuer à
pérenniser à long terme l'inflammation et l'hyperalgésie primaire et secondaire.
Les protéines kinases A, qui semblent alors se libérer de la nécessité d'être
activées par l'adénosine monophosphate cyclique (AMPc), jouent un rôle
complémentaire du même ordre [ 144 ].

Le facteur de transcription NF-κB représente sans doute un second pôle de


responsabilité des modifications à long terme, notamment en déclenchant la
synthèse du récepteur B1 de la bradykinine et en modifiant la synthèse des
prostanoïdes, des cytokines et de l'oxyde nitrique synthétase (iNOS). Il convient
de rappeler que ces changements de synthèse protéique n'impliquent pas les
seuls neurones sensoriels mais concernent l'ensemble du tissu enflammé.

C'est l'ensemble de ces mécanismes qui contribue très certainement à rendre


chroniques certains effets hyperalgésiques.

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▪ CONCLUSION

Notre propos est resté centré sur l'état actuel des connaissances concernant la
biologie de l'extrémité distale du «premier neurone» reliant le foyer douloureux
au système nerveux central. S'il est un constat qui saute aux yeux, c'est la
multiplicité des mécanismes modulateurs élémentaires qui s'y exercent. Lors d'un
traumatisme tissulaire, les nocicepteurs sont activés et sensibilisés non seulement
par les substances libérées au sein du foyer inflammatoire, mais également par
le biais d'un recrutement supplémentaire de fibres adjacentes, notamment par
le phénomène du réflexe d'axone. Cet ensemble d'interactions neurochimiques
subtiles fournit le substratum au phénomène d'hyperalgésie. Cependant, les
«cercles vicieux» ne sont pas cantonnés à la périphérie. Les rétrocontrôles
positifs exercés par les récepteurs NMDA, les prostaglandines et l'oxyde nitrique
sur les terminaisons centrales présynaptiques de la corne postérieure de la
moelle en sont quelques exemples. Bien que ces mécanismes n'aient pas été
abordés ici, on ne doit pas pour autant les ignorer. Leur existence invite en outre
à relativiser l'origine «périphérique» ou «centrale» des phénomènes de
sensibilisation qui, en réalité, intriquent des mécanismes périphériques et
centraux [ 145 ].
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▪ REMERCIEMENTS

Les auteurs remercient le Dr Jean-Michel Benoist pour sa lecture attentive du


manuscrit et ses conseils.

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Chapitre 2 Concept de L'auto-Immunité Dans la Douleur

Encarnita MARIOTTI-FERRANDIZ

Adrien SIX

Le présent chapitre propose une analyse bibliographique sur le concept de


l'auto-immunité dans la douleur. Dans un premier temps, les bases du
développement et de la sélection du système immunitaire adaptatif,
caractérisé par les lymphocytes B et T, sont rappelées suivies d'une présentation
de la notion d'auto-immunité. Suit la description d'une série d'observations
publiées établissant un lien, direct ou indirect, entre auto-immunité et douleur.
Cette partie décrit les raisons et les mécanismes permettant d'expliquer
l'existence d'une corrélation entre la sélection de réactivités auto-immunes et
les phénomènes douloureux. Enfin, la troisième partie expose une vision
nouvelle, et a priori paradoxale, de l'auto-immunité et discute comment ce
concept original, dit d'auto-immunité protectrice, peut être pertinent pour
expliquer certains phénomènes douloureux. En effet, il propose un rôle actif du
système immunitaire adaptatif dans l'homéostasie des fonctions neurologiques.
La dérégulation de cette interface, lors de processus pathologiques, peut alors
expliquer certains épisodes douloureux.

▪ INTRODUCTION

Dans le cadre de la 4e journée de Formation douleur organisée par l'association


Antalgo sur le thème «Douleur et auto-immunité», le Dr Marc Sorel nous a
demandé de faire une revue bibliographique sur le concept de l'auto-immunité
dans la douleur. Après une brève introduction du système immunitaire
adaptatif, caractérisé par les lymphocytes B et T, et une présentation du
concept d'autoimmunité, la présente revue résume les observations de la
littérature qui font un lien, parfois lointain, entre auto-immunité et douleur. Est
exposée, dans une troisième partie, une vision récemment avancée et a priori
paradoxale de l'autoimmunité, puis une discussion a lieu sur la façon dont ce
nouveau concept peut être pertinent pour expliquer certains phénomènes
douloureux. Nous ne prétendons pas être spécialistes de la douleur, encore
moins posséder la formation médicale requise pour maîtriser les implications de
la douleur dans le domaine clinique ; le lecteur voudra bien nous excuser par
avance si, parfois, nous manquons de précision dans notre description des
phénomènes douloureux.

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▪ GÉNÉRALITÉS SUR LE SYSTÈME IMMUNITAIRE

Émergence de l'immunologie

L'immunologie émerge à la fin du XIXe siècle, à partir des découvertes et


applications de Louis Pasteur sur la vaccination, en particulier contre le choléra,
l'anthrax et la rage. Deux théories de l'immunité vont apparaître à peu près en
même temps : d'une part la théorie de l'immunité naturelle, à base cellulaire,
mise en avant par Élie Metchnikoff à la suite de ses découvertes sur la
phagocytose des micro-organismes par les macrophages et, d'autre part, la
théorie de l'immunité acquise, à base humorale, mise en avant suite à la
découverte des anticorps ou immunoglobulines sériques par von Behring et
Kitasato. Cette dernière théorie, qui va prédominer pendant près de 60 ans,
apparaît la plus satisfaisante car elle rend compte à la fois de la spécificité et
de la mémoire de la réponse anticorps à la suite d'une immunisation. La
réponse immunitaire acquise est donc le résultat des anticorps sécrétés qui
neutralisent les micro-organismes ; ces anticorps spécifiques peuvent être induits
contre un nombre très vaste d'antigènes.

Théorie de la sélection clonale

À la fin des années 1950, un retour vers une théorie cellulaire de l'immunité va
être effectué de façon à prendre en compte les cellules qui produisent les
anticorps mais, surtout, à expliquer les phénomènes de tolérance aux antigènes
du soi qui ont été mis en évidence, en particulier au travers des travaux de
Medawar et Owen. En 1957, Burnet expose son hypothèse de la sélection
clonale, comme schématisé sur la figure 1 :

 chaque lymphocyte exprime un type unique de récepteur spécifique


d'antigène ;
 les lymphocytes exprimant un récepteur dirigé contre un antigène du soi
sont éliminés lors de la différenciation ;
 la liaison avec une bonne affinité d'une molécule étrangère et d'un
récepteur entraîne l'activation du lymphocyte ;
 les cellules effectrices différenciées à partir d'un lymphocyte activé
donné expriment des récepteurs de même spécificité.

Cette hypothèse, maintenant largement admise, va être confirmée


expérimentalement et trouver sa meilleure démonstration par la caractérisation
de la différenciation des lymphocytes T et B.
Figure 1 ▪ Les cellules souches lymphocytaires se différencient dans les organes
lymphoïdes primaires (OLP) en lymphocytes B (dans la moelle osseuse) ou en
lymphocytes T (dans le thymus). À l'issue de cette différenciation, chaque
lymphocyte exprime, au hasard, un récepteur spécifique d'antigène à sa
surface (Ig pour les lymphocytes B et TCR pour les lymphocytes T). La
différenciation lymphocytaire se termine par des processus de sélection. En
particulier, les lymphocytes exprimant un récepteur fortement spécifique d'un
antigène du soi exprimé à ce stade sont généralement éliminés par délétion
(cas des 2 cellules de gauche sur la figure), correspondant au phénomène de
tolérance centrale. Les autres cellules terminent leur maturation dans l'OLP et
migrent vers les organes lymphoïdes secondaires (OLS).

Au niveau des OLS, en fonction de la réactivité du récepteur spécifique


d'antigène et de l'antigène présent, les lymphocytes vont être soumis à l'un des
deux processus suivants : (4a) les lymphocytes rencontrant un antigène
«étranger» pourront être activés et contribuer à la réponse immune protectrice ;
(4b) certains lymphocytes autoréactifs peuvent atteindre les OLS, en dépit du
processus de tolérance centrale. Au contact d'antigènes du soi, ils vont être
soumis à un processus de tolérance périphérique qui se traduit par trois effets
possibles : la délétion, l'anergie ou la suppression via l'activité des lymphocytes
T régulateurs (Treg).

L'auto-immunité peut être induite en périphérie : (5a) l'antigène étranger peut


présenter des motifs proches, voire identiques, à ceux des antigènes du soi. En
cas d'exposition de ces derniers, les lymphocytes peuvent être activés et
s'engager dans une réponse immune autoréactive dirigée contre l'hôte ; (5b)
en cas de rupture de la tolérance périphérique, les cellules anergiques ou
supprimées par les Treg peuvent être réactivées en présence de l'antigène du
soi et s'engager dans une réponse immune autoréactive. Ces phénomènes sont
à l'origine de l'autoimmunité.

Les processus auto-immuns peuvent conduire à des situations pathologiques.


Néanmoins, il a été récemment montré un rôle protecteur de l'auto-immunité
dans certains cas d'atteintes cérébrales. Les situations illustrées en (4a) et (6)
peuvent être source de médiateurs nociceptifs participant à l'induction de
douleur.

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▪ SÉLECTION, TOLÉRANCE ET AUTO-IMMUNITÉ

Différenciation lymphocytaire

Les lymphocytes T et B sont donc les acteurs principaux de la réponse


immunitaire spécifique ou adaptative. Ils sont impliqués dans la régulation des
réactions immunitaires qui contribuent à la protection et jouent ainsi un rôle
principal dans l'immunité protectrice contre les maladies infectieuses. Ils sont
caractérisés par l'expression d'un récepteur spécifique d'antigène : les
lymphocytes B expriment une immunoglobuline (Ig) ou anticorps alors que les
lymphocytes T expriment le TCR(T cell receptor). Immunoglobulines et TCR sont
formés de 2 chaînes : les chaînes lourdes et légères pour les immunoglobulines ;
les chaînes TCR-α et TCR-β (ou TCR-γ et TCR-δ) pour les lymphocytes T.

Ces récepteurs sont produits lors de la différenciation lymphocytaire dans les


organes lymphoïdes centraux (la moelle osseuse pour les lymphocytes B, le
thymus pour les lymphocytes T) par réarrangements somatiques aléatoires à
partir de segments de gène V, D et J localisés sur les loci codant ces chaînes.
Le produit de jonction V (D) J, appelé région CDR3, correspond à la région de
contact avec l'antigène et à la signature du réarrangement [ 1 ].

Sélection clonale

Étant donné que ce processus de réarrangements est aléatoire, le nombre de


spécificités possibles est très grand (de l'ordre de 1012 à 1015) et la spécificité du
récepteur d'antigène produit n'est pas prédictible. Par conséquent, la
spécificité produite peut, par hasard, être dirigée contre un antigène du soi —
on parle alors d'autoréactivité — qui, si elle est conservée dans l'organisme,
peut, par activation et prolifération du lymphocyte qui l'exprime, induire un
processus auto-immun pathogène.

Ainsi, en accord avec l'hypothèse de la sélection clonale de Burnet, des


processus de sélection sont mis en place pendant la différenciation
lymphocytaire de façon à éliminer les clones autoréactifs. Ces processus de
sélection assurent le phénomène de tolérance au soi. Les lymphocytes ainsi
sélectionnés acquièrent alors leur phénotype mature et migrent vers les organes
lymphoïdes secondaires dans l'attente d'une rencontre éventuelle — peu
probable — avec un antigène.

Tolérance centrale et tolérance périphérique

On distingue deux niveaux de tolérance ( figure 1 ) :

 la tolérance centrale qui agit pendant la différenciation lymphocytaire a


pour mécanisme principal l'élimination physique du clone autoréactif ; on
parle de délétion clonale ou sélection négative. Un autre mécanisme
peut également agir à ce stade : le clone autoréactif est
fonctionnellement inactivé (sans être éliminé) ; on parle d'anergie ou
d'inactivation fonctionnelle ;
 la tolérance périphérique qui agit au-delà de la différenciation
lymphocytaire. Il a été montré que de nombreux clones autoréactifs
échappent à la sélection clonale pendant leur différenciation, par
exemple parce que l'antigène du soi contre lequel ils sont réactifs n'est
pas exprimé au niveau de la moelle osseuse ou du thymus. Un
phénomène de sélection peut agir en périphérie via des mécanismes
similaires à ceux décrits précédemment relevant de la tolérance dite
«passive». Un mécanisme supplémentaire de tolérance «active» joue un
rôle important : il s'agit de la fonction suppressive des lymphocytes T
régulateurs qui ont la capacité d'inhiber l'activation, la prolifération et la
fonction des lymphocytes T conventionnels, éventuellement autoréactifs.

La tolérance n'est donc plus considérée comme la simple élimination ou


l'absence de cellules autoréactives, bien que la sélection négative au niveau
du thymus soit clairement un mécanisme important pour réduire la population
périphérique de cellules T potentiellement autoréactives ; il est maintenant
reconnu que la tolérance fonctionnelle peut impliquer l'ignorance, l'anergie, la
délétion clonale, la déviation immunitaire et la tolérance cellulaire active (ou
suppression) (revues dans [ 2 , 3 ]). On sait par ailleurs que les
micro-environnements locaux jouent un rôle clé dans le maintien de la
tolérance et que les réponses immunitaires peuvent radicalement différer d'un
tissu à l'autre en termes d'intensité ou de caractère. La compréhension des
processus de régulation des réponses immunitaires par ces différents
mécanismes de tolérance ouvre ainsi des perspectives de stratégies de
manipulation pour atténuer ou contrôler les processus auto-immuns, le cancer
et le rejet de greffes ainsi que les maladies infectieuses.

Auto-immunité

Une conséquence directe de la description des processus de tolérance et de


sélection est le constat que les répertoires lymphocytaires matures sont loin
d'être exempts de spécificités autoréactives. Comme on l'a vu, il existe plusieurs
mécanismes de régulation qui peuvent agir, indépendamment les uns des
autres ou en synergie, pour un contrôle optimal de la réponse immunitaire tout
en assurant le maintien de la tolérance au soi. Le système immunitaire est donc
en perpétuel équilibre. Ainsi, un défaut de sélection mais aussi les réponses
immunitaires contre des pathogènes elles-mêmes peuvent avoir des
conséquences auto-immunes directes ou indirectes.

La tolérance immunitaire est définie comme un état de non-réactivité


immunologique vis-à-vis d'un antigène donné. On a vu qu'il s'agissait d'un
processus actif en particulier des lymphocytes T et B. L'auto-immunité
correspond en quelque sorte à un échappement ou à la rupture de la
tolérance au soi. Elle est caractérisée par l'induction d'une réponse contre des
composants du soi entraînant éventuellement une pathologie spécifique
d'organe (par exemple, le diabète auto-immun) ou systémique (par exemple, le
lupus érythémateux) ; on parle alors de maladie auto-immune.

Les mécanismes possibles d'induction d'un processus auto-immun sont multiples


comme sont multiples les mécanismes de tolérance : induction d'une réponse
spécifique d'un antigène du soi, activation/réactivation de clones autoréactifs,
baisse de l'activité des cellules régulatrices, réactivité antigénique croisée entre
un antigène microbien et un antigène du soi. Ces différents mécanismes sont
illustrés sur la figure 1 .

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▪ AUTO-IMMUNITÉ ET DOULEUR

Comme on l'aura compris, la présence d'autoréactivité est normale et


inhérente aux processus de différenciation et de sélection lymphocytaires.
L'auto-immunité qui en découle peut être régulée et contenue, sans
manifestation pathologique, ou au contraire entraîner une pathologie auto-
immune. Pour le sujet qui nous intéresse plus particulièrement, à savoir la relation
éventuelle entre douleur et autoimmunité, nous avons a priori envisagé trois
axes théoriques :

 un lien indirect, lorsque les conséquences d'une manifestation auto-


immune ou de son traitement activent un processus douloureux ;
 un lien direct, lorsqu'une manifestation auto-immune est dirigée contre
des composants moléculaires et cellulaires impliqués dans les processus
douloureux ;
 un lien mixte, lorsque l'auto-immunité, sans qu'elle soit nécessairement
pathogène comme on l'a vu plus haut, entre en jeu dans la régulation du
processus douloureux.

Comme indiqué, il s'agit d'axes de réflexion théorique pour lesquels nous avons
effectué une recherche bibliographique dans la base de données
bibliographiques biomédicales afin d'en trouver des illustrations. En préambule
de la présentation des résultats de notre recherche, il faut indiquer que nous
avons, de manière surprenante, trouvé peu de références répondant à nos
critères de recherche à savoir douleur (pain, neuropathy, hyperalgesia) et
auto-immunité (autoimmunity, autoimmune). Dans les sections suivantes, nous
rapportons quelques exemples d'études répondant à ces critères sans préjuger
de leur généralisation.

Lien indirect

Nous avons considéré comme lien indirect le fait qu'une manifestation


autoimmune ou son traitement a pour conséquence l'induction d'un processus
douloureux. À l'évidence, c'est ce qui se produit le plus souvent étant donné
que la plupart des processus auto-immuns sont associés à un processus
inflammatoire et que l'inflammation est génératrice de douleur (cf. le classique
«tumor, rubor, calor, dolor»).

Sans entrer dans les détails, on trouvera, dans les références suivantes, plusieurs
exemples de douleurs associant inflammation et neuropathies, en notant que
ces études n'établissent pas de lien direct avec un processus auto-immun mais
qu'il est clair qu'inflammation est étroitement associée à auto-immunité [ 4 , 5 ,
6 , 7 and 8 ].

Un deuxième exemple de lien indirect est celui d'un traitement


s'accompagnant de douleurs iatrogènes, plus directement attribuables à une
réactivité autoimmune. Nous avons trouvé un exemple dans le cas d'un
traitement anticorps induisant des douleurs neuropathiques : il y a 10 ans, à
l'Université de Californie de San Diego (UCSD), des enfants atteints de
neuroblastome ont reçu un traitement anticorps expérimental (anticorps
chimérique homme/souris ch14.18 antiganglioside GD2). Quoiqu'il ait traité les
tumeurs avec succès, cet anticorps dirigé contre un antigène du soi a induit des
douleurs intenses chez les enfants devenus hypersensibles à tout contact même
léger. Afin de comprendre le mécanisme d'induction de cette douleur en vue
de la supprimer, un modèle expérimental chez le rat a été établi et a permis de
reproduire le phénomène douloureux avec une cinétique similaire. Ce n'est que
récemment que les chercheurs ont pu montrer que l'anticorps anti-ganglioside,
pourtant non dirigé contre les nocirécepteurs, induit rapidement une forte
réponse pro-inflammatoire du TNF qui entretient une activation spontanée du
nerf et génère la douleur [ 9 , 10 ].

Lien direct
Dans cette section, nous nous intéresserons aux liens directs que l'on peut
trouver entre un processus auto-immun et un phénomène douloureux. Cela
peut être le cas lorsque le processus auto-immun est dirigé contre un
composant du système de régulation de la douleur : nocirécepteur, médiateur,
terminaison nerveuse… Dans ce cas, la destruction de la cible induit
potentiellement directement la douleur. Il faut néanmoins noter que la plupart
des études en référence rapportent une corrélation entre la présence de
spécificités autoréactives et un processus douloureux sans qu'il soit formellement
possible d'établir un rapport de causalité.

Un premier exemple concerne l'auto-immunité paranéoplasique. Dans cette


étude, les chercheurs ont criblé une sérothèque de 120 000 patients présentant
des atteintes neurologiques pour la présence d'auto-anticorps anti-
amphiphysine, une protéine de la vésicule synaptique. Sur 63 patients identifiés,
50 présentaient une pathologie tumorale et 75 % présentaient des auto-
anticorps d'autres spécificités et une infiltration lymphocytaire T CD8+ associés à
des phénomènes neurologiques. Cette étude suggère qu'une réponse contre
plusieurs auto-antigènes, provenant de composants nerveux multiples, peut être
responsable de manifestations neurologiques, en particulier douloureuses [ 11 ].

Un autre exemple concerne les neuropathies autonomiques, un groupe de


pathologies responsables de lésions nerveuses régulant les fonctions internes
(pression sanguine, rythme cardiaque, transit intestinal et digestion). Dans
l'étude suivante, des auto-anticorps dirigés contre les nerfs autonomiques
(AnAb, antineural antibodies) ont été détectés chez 23/41 patients diabétiques
de type 1, ils étaient accompagnés d'anomalies des nerfs autonomiques
cardiaques chez les patients AnAb+ montrant un risque relatif de survenue
d'anomalies de 7,5 [ 12 ]. Cette étude suggère que les atteintes neurologiques
sont d'origine auto-immune et conséquentes au déclenchement du diabète.
Une autre étude récente a également proposé une étiologie auto-immune
dans le cas du syndrome douloureux régional complexe (SDRC) [ 13 ]. Ses
auteurs rapportent la caractérisation d'auto-anticorps dirigés contre des
structures des neurones autonomiques périphériques chez des patients atteints
de SDRC.

Dans une autre étude, une relation a été établie entre neuropathie et
thymome. Les auteurs ont recherché la présence d'auto-anticorps dans une
collection de sérums de 201 patients atteints de thymome, 145 patients
présentant des atteintes neurologiques (dont 103 myasthenia gravis [MG]). Des
auto-anticorps de muscle, en particulier dirigés contre le récepteur pour
l'acétylcholine, sont détectés chez tous les patients MG et chez 59 % des
patients sans désordre neurologique. Des autoanticorps neuronaux sont
détectés chez 41 % des patients sans désordre neurologique, 43 % des patients
MG et 78 % des patients avec d'autres désordres neurologiques. Cette étude
suggère que la présence d'auto-anticorps neuronaux, en plus des anticorps de
muscle, évoque une origine paranéoplasique associée au thymome [ 14 ]. Il est
à noter que les mêmes auteurs, grâce à un modèle expérimental chez la souris,
avancent l'hypothèse que les réactions immunitaires contre différents types du
récepteur pour l'acétylcholine exprimés dans des carcinomes pulmonaires à
petites cellules rendent compte de désordres paranéoplasiques, y compris des
neuropathies autonomiques auto-immunes [ 15 ].

Pour terminer, le phénomène de mimétisme moléculaire, potentiellement


inducteur d'auto-immunité, peut être source de processus douloureux. Par
exemple, on sait que la maladie de Lyme peut entraîner des séquelles
neurologiques (encéphalopathie, myélopathie et neuropathie périphérique)
généralement attribuées à l'infection persistante ou à une auto-immunité
induite par le pathogène. Dans l'étude présentée ici, les auteurs ont recherché
des homologies entre les protéines humaines exprimées dans le système nerveux
et la protéine OspA exprimée par Borrelia burgdorferi, agent étiologique de la
maladie de Lyme. Trois séquences d'homologie potentielle ont été identifiées
après criblage d'une banque d'ADNc. Des anticorps spécifiques, obtenus après
immunisation de lapins avec les peptides correspondants, ont permis d'identifier
par immunohistochimie des protéines réactives exprimées dans le cerveau et la
moelle épinière. Cette observation suggère un rôle possible, par réactivité
croisée, de la réponse immunitaire dirigée contre la protéine OspA de B.
burgdorferi dans l'établissement de la pathogenèse des syndromes
neurologiques associés à l'infection [ 16 ]. Sorkin et al. [ 9 ] rapportent
également deux exemples de mimétismes moléculaires, lors d'une réponse
antitumorale ou anti-infectieuse, responsables de neuropathie paranéoplasique
ou de polyneuropathie inflammatoire. Le lecteur trouvera d'autres exemples de
lien direct entre autoimmunité et neuropathies dans Staines [ 17 ] et DeLeo et
al. [ 18 ].

Lien mixte

Comme on le verra dans la partie suivante, l'auto-immunité, en particulier au


niveau du cerveau, n'est pas forcément pathogène et, au contraire, peut être
nécessaire et bénéfique. En effet, il existe un lien fonctionnel étroit entre système
immunitaire et système nerveux. Dans chacun d'eux, on trouve des systèmes
d'alerte qui partagent largement les mêmes médiateurs : l'inflammation pour ce
qui concerne le système immunitaire et la douleur pour ce qui concerne le
système nerveux. On reconnaît désormais qu'il existe un équilibre physiologique
entre ces deux systèmes. Ainsi, une cible thérapeutique prometteuse pour le
traitement et la prévention de douleur chronique concerne la modulation de la
réponse immunologique du système nerveux central (SNC) induite après lésion.
L'activation neuro-immune centrale impliquant l'activation de cellules à
l'interface avec le système nerveux et le sang, comme les cellules de la
microglie parenchymateuse et les astrocytes, entraîne la production de
cytokines, de molécules d'adhésion et de chimiokines. Cette réponse peut
induire la production des nombreux médiateurs de la douleur qui peuvent
sensibiliser et abaisser le seuil d'activation neuronal. Il s'agira néanmoins de
savoir maîtriser la perturbation neuro-immune induite par le traitement pour
contrôler le processus douloureux sans pour autant inhiber l'auto-immunité
bénéfique au niveau du SNC qui favorise notamment les processus de
réparation après lésion.

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▪ QUAND L'AUTO-IMMUNITÉ EST PROTECTRICE


Comme cela a été exposé précédemment, les processus auto-immuns sont
souvent associés à des pathologies qui affectent soit des tissus en particulier (le
pancréas dans le diabète auto-immun, les gaines de myélines dans le cas de la
sclérose en plaques, les muscles pour la myasthénie), soit différents tissus et
organes (lupus érythémateux). Les antigènes reconnus sont très divers et sont
des auto-antigènes ne devant normalement pas conduire à une réponse
immune. L'étiologie de ces maladies est peu connue, mais vraisemblablement
multifactorielle.

Relations entre système immunitaire et système nerveux central

Le cerveau a longtemps été considéré comme un organe «privilégié» face au


système immunitaire. Au tournant du XXe siècle, différentes équipes ont mis en
évidence l'existence d'une séparation entre les compartiments sanguins et
cérébraux, appelée barrière hématoencéphalique. Plus tard, il a été observé
une faible expression de molécules de classe II du complexe majeur
d'histocompatibilité (CMH II), impliquées dans la présentation des peptides
antigéniques aux cellules T auxiliaires (T CD4+) et une faible incidence des rejets
de greffes au niveau du cerveau. Ces observations ont conclu à une absence
du système immunitaire dans le compartiment cérébral. Les pathologies
cérébrales (sclérose en plaques, lésions neuronales, rupture d'anévrisme), de
plus en plus répandues, font l'objet de nombreuses études. L'implication des
réponses immunitaires dans ces pathologies est désormais admise, accordant
un rôle aux différents acteurs du système immunitaire, inné et adaptatif.

Les cellules microgliales ont des propriétés phagocytaires, comme les


macrophages périphériques, et sont les premières cellules immunitaires à avoir
été décrites au niveau du SNC. Leur rôle phagocytaire a été initialement décrit
dans les stades de développement fœtal du SNC. Plus tard, leur implication en
tant qu'acteurs du système immunitaire a été révélée par l'observation de leur
capacité à exprimer des cytokines. Les astrocytes contribuent à la formation de
la barrière hématoencéphalique et présentent également un potentiel immun.
Différentes études ont montré la dualité de réponse de ces cellules. Dans
certains cas, les cellules microgliales sont capables de promouvoir une réponse
réparatrice alors que d'autres études montrent qu'elles participent à la réponse
inflammatoire pathologique. Généralement, les patients atteints de maladies
neurodégénératives présentent un défaut de réponse immunitaire protectrice,
dont l'origine semble être associée à l'inefficacité des cellules immunitaires du
SNC à promouvoir ce type de réponse. Les macrophages du cerveau ne
circulent pas de façon naturelle et les propriétés imperméabilisantes de la
barrière hématoencéphalique, notamment dues à l'existence des jonctions
serrées, limitent considérablement la circulation des cellules du sang vers les
structures cérébrales internes et séparent les cellules immunitaires périphériques
de celles du parenchyme cérébral.

Changement de perspective sur le rôle de l'auto-immunité

Néanmoins, il a récemment été démontré que les lymphocytes T activés


circulent dans le cerveau via le liquide céphalorachidien et le sang, et
traversent naturellement la barrière hématoencéphalique en l'absence
d'atteinte pathologique [ 19 , 20 ]. Leur faible représentativité associée à
l'importance de l'intégrité du cerveau suggère donc que ces cellules peuvent
avoir un rôle bénéfique d'immuno-surveillance centrale. Par ailleurs, des
lymphocytes T spécifiques de la MBP(myelin basic protein) ont été identifiés
chez les patients atteints de sclérose en plaques tout comme chez les patients
sains, suggérant que les lymphocytes T activés et autoréactifs ne sont pas
nécessairement pathogènes [ 21 , 22 ].

Récemment, Moalem et al. [ 23 ] ont montré que la dégénérescence


neuronale secondaire résultant d'une lésion axonale est réduite en présence de
lymphocytes T au le site de la lésion. Une accumulation de lymphocytes
indépendante de la spécificité antigénique est observée bien que seuls les
lymphocytes T spécifiques de la MBP paraissent contribuer à la protection. Ce
phénomène a été également observé dans des études ciblant d'autres
autoantigènes exprimés dans le cerveau. Par la suite, Kipnis et al. [ 24 ] ont
évalué l'effet des lymphocytes T naturellement présents dans le cerveau en
immunisant des rats à l'aide d'un polymère, l'acétate de glutiramère, présentant
des homologies avec la MBP. L'immunisation conduit à la réduction des lésions
axonales via un mécanisme qui module l'activité des lymphocytes T
autoréactifs en les rendant protecteurs.

Ces résultats originaux, confortés par plusieurs études convergentes, sont à


l'origine du concept d'auto-immunité naturelle protectrice : des lymphocytes T
autoréactifs naturels sont activés par un antigène présent sur le site de la lésion
et exercent une activité pro-inflammatoire bénéfique [ 25 , 26 ]. Ce concept
revisite la vision de la discrimination soi/non-soi par le système immunitaire ;
comme ces auteurs l'ont proposé, la perception du soi/non-soi apparaît
nécessaire pour l'établissement d'un répertoire auto-immun protecteur
physiologique, dont l'activité est notamment régulée par l'action des
lymphocytes T régulateurs [ 26 , 27 and 28 ].

Ces travaux ouvrent de nouvelles perspectives de stratégies thérapeutiques.


Actuellement, les stratégies immunosuppressives visent couramment à activer
des lymphocytes T régulateurs pour contrôler les atteintes auto-immunes. Or,
l'effet suppresseur des lymphocytes T régulateurs abroge l'auto-immunité
protectrice, au moins au regard des atteintes cérébrales. Les données
présentées plus haut incitent à proposer des stratégies immunomodulatrices plus
fines, favorisant la réponse auto-immune protectrice tout en stimulant
suffisamment la réponse régulatrice visant à contrôler les dérives auto-immunes
pathologiques [ 26 ].

Rôle dans la douleur ?

Même s'il est clair, comme on l'a vu plus haut, que des réponses auto-immunes
excessives sont pathogènes et généralement douloureuses, l'auto-immunité
protectrice caractérisée dans le cerveau peut elle-même contribuer à moduler
certains phénomènes douloureux. Il est désormais acquis, bien que peu
documenté, que les facteurs humoraux de la réponse immune (les cytokines, les
chimiokines…) sont associés au phénomène de nociception. Plus précisément,
la réponse immune inflammatoire, via l'expression de TNF, d'IL-1 et d'interféron
(IFN), est observée dans les processus douloureux, bien que la causalité ne soit
pas clairement établie [ 29 , 30 ]. La réponse auto-immune protectrice,
bénéfique pour le maintien de l'intégrité du SNC, semble être associée à une
réponse pro-inflammatoire (IFN γ), potentiellement génératrice de douleur. Il est
à noter que cette réponse inflammatoire protectrice ne semble pas restreinte
aux lymphocytes T autoréactifs, les cellules gliales pourraient également y
participer (pour revue, voir [ 31 ]). Ainsi, la douleur apparaît bien comme un mal
nécessaire, à l'instar des phénomènes de fièvre et d'inflammation ; s'il est
nécessaire de soulager les phénomènes douloureux excessifs, il est
probablement délétère de les supprimer totalement. Il s'agit là d'une
extrapolation dans la mesure où les études sur le sujet ne prennent pas en
compte la douleur associée à la lésion ni à la réparation de la lésion.

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▪ CONCLUSION

Comme cela a été précisé en introduction, nous ne prétendons aucunement


être experts en matière de douleur. Aussi l'accent a été porté sur les
connaissances en termes de réponse auto-immune et de son lien, peu
documenté, avec les processus douloureux. Il s'avère que ce champ de
réflexion est important d'un point de vue fondamental, concernant le dialogue
entre système nerveux et système immunitaire, mais également d'un point de
vue clinique, pour l'assistance des patients atteints de maladies auto-immunes
et la prise en charge adéquate de leur traitement, contrôlant à la fois les
dérives immunitaires et les effets nociceptifs associés à la pathologie et au
traitement.

Il est maintenant bien établi qu'il existe une auto-immunité physiologique et


bénéfique, au moins au niveau du cerveau. Ce concept soulève de nouvelles
pistes thérapeutiques, favorisant l'immunomodulation (modulation du niveau
d'activation du système immunitaire) plutôt que l'immunosuppression (inhibition
des acteurs du système immunitaire), récemment discutées par del Barco et al.
[ 32 ]. Aucun mécanisme ni acteur spécifique du cerveau n'a été identifié à ce
jour. Une telle réponse est donc envisageable dans les organes et tissus
périphériques. Ce processus ne résout néanmoins pas la génération de douleur
associée à la réponse autoimmune, apparaissant, à l'instar de l'inflammation et
la fièvre, comme un processus inévitable, physiologique et nécessaire, même
en cas de réponse immune bénéfique. Cette hypothèse devra également être
testée au niveau d'autres tissus.

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Chapitre 3 Modulation Psychophysiologique de la Douleur Par les Émotions

Stéphanie CORMIER

Pierre RAINVILLE

Les observations cliniques et scientifiques fournissent de plus en plus de preuves


tangibles d'une forte interaction entre les émotions et la douleur. Dans
l'ensemble, les résultats des études portant sur la modulation de la douleur par
les émotions suggèrent que les affects négatifs ont un effet hyperalgésique,
tandis que les affects positifs ont un effet analgésique. La nature de cette
relation demeure toutefois mal comprise et cette lacune découle en partie
d'une méconnaissance des mécanismes qui sous-tendent cette association. Il
apparaît cependant plausible que la régulation de la douleur par les émotions
soit au moins en partie attribuable à l'activation des mécanismes cérébro-
spinaux, dont les effets modulateurs sont décelés à l'aide des évaluations
subjectives de douleur ainsi que des mesures physiologiques de l'activation
autonomique et de réflexe nociceptif spinal de retrait. Par ailleurs, il semble que
l'effet des émotions sur la douleur fasse intervenir des médiateurs
neurophysiologiques et neuro-hormonaux associés au stress et aux fonctions
immunes. Parmi ces médiateurs potentiels, la substance P jouerait un rôle clé
non seulement dans la régulation de la douleur mais également dans les
émotions et la réponse au stress. L'identification de liens plausibles entre les
variables psychologiques et les systèmes physiologiques de la douleur contribue
à renforcer la nécessité de prendre en compte les émotions dans l'évaluation
de la douleur et appuie les approches biopsychosociales pour la prise en
charge des patients douloureux.

▪ INTRODUCTION

On estime qu'environ 22 % de la population souffre de douleur chronique [ 1 ].


De toute évidence, la douleur a des répercussions majeures sur la qualité de vie
de l'individu qui en est atteint, tout en ayant des conséquences socio-
économiques considérables. Bien que son traitement demeure un défi majeur,
de nombreuses études ont mis en évidence l'efficacité de diverses approches
non pharmacologiques pour la prise en charge des patients. Par conséquent, la
poursuite des recherches qui tentent d'affiner la compréhension des
mécanismes psychophysiologiques impliqués dans la régulation des réponses
nociceptives est essentielle.

L'effet des émotions sur la douleur a été exploré autant dans les études
expérimentales que dans les études cliniques. Dans l'ensemble, ces recherches
suggèrent que les émotions positives l'atténuent tandis que les émotions
négatives ont l'effet inverse. Quoique l'influence des émotions sur l'expérience
douloureuse soit généralement admise, la nature de cette relation demeure
mal comprise. Cette lacune découle en partie d'une méconnaissance des
mécanismes psychologiques et physiologiques qui sous-tendent cette
association. Ce chapitre décrit les études examinant l'effet modulateur des
émotions sur la douleur à l'aide de méthodes électrophysiologiques non
invasives tout en considérant divers facteurs psychologiques pouvant contribuer
à cet effet. L'interaction entre les émotions et le stress ainsi que le rôle du
système immunitaire dans la réponse inflammatoire sont également explorés. Il
est suggéré que les émotions et le stress produisent une activation des circuits
cérébraux impliquant les mécanismes cérébro-spinaux de régulation de la
douleur et influencent potentiellement la douleur et l'inflammation par la
modulation systémique des réponses immunitaires.

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▪ DOULEUR : UNE EXPÉRIENCE MULTIDIMENSIONNELLE

L'International Association for the Study of Pain (IASP) défini la douleur comme :
«une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, associée à une lésion
tissulaire réelle ou potentielle ou décrite en termes évoquant une telle lésion» [ 2
]. Cette définition tient compte du caractère multidimensionnel de la douleur,
qui comprend à la fois l'expérience d'une sensation et d'une émotion [ 3 ]. Ces
deux principales dimensions interagissent étroitement avec les processus
cognitifs. L'expérience douloureuse est également caractérisée par des
réponses comportementales et autonomiques spontanées.

La dimension sensori-discriminative concerne la perception des caractéristiques


sensorielles de la douleur, soit l'intensité, la localisation et la nature du stimulus
nociceptif. Quant à la dimension motivo-affective, elle traduit le caractère
fondamentalement aversif et désagréable de l'expérience douloureuse, de
même que la tendance et la motivation à vouloir l'interrompre. Bien que ces
dimensions soient étroitement liées, leur séparation a été mise en évidence dans
le cadre d'études cliniques [ 4 , 5 ] et expérimentales [ 6 , 7 and 8 ].

Dimension affective de la douleur

La dimension affective est composée des affects primaires et secondaires, deux


éléments clés du processus de traitement de la douleur [ 9 ]. Les affects
primaires correspondent au caractère menaçant de la douleur ou à la peur
d'un dommage physique. Cette composante reflète l'expérience immédiate de
désagrément en lien avec la sensation douloureuse. Ainsi, le désagrément
ressenti en réponse à un stimulus douloureux est souvent étroitement lié à
l'intensité de la stimulation ainsi qu'aux caractéristiques sensorielles qui lui sont
attribuées.

Le désagrément que cause la douleur entraîne fréquemment des émotions qui


sont fortement influencées par les processus cognitifs. Ces émotions, qui sont
associées à la signification de la douleur et à l'évaluation de ses conséquences
potentielles, correspondent aux affects secondaires. La souffrance qui
caractérise les affects secondaires résulte donc en grande partie de la
compréhension qu'une personne a de sa propre douleur (cause) et des
implications que cette dernière peut engendrer (conséquences). Par
conséquent, le contexte dans lequel survient la douleur ainsi que l'attitude et les
attentes de l'individu contribuent étroitement à la dimension émotionnelle de
l'expérience douloureuse.

Les mesures subjectives du désagrément immédiat de la douleur ne reflètent


donc pas l'ensemble des déterminants de la dimension affective de la douleur.
Plus précisément, contrairement aux affects secondaires, le désagrément
n'intègre pas l'impact de la douleur dans un contexte plus général et à long
terme. Les affects secondaires reflètent des processus de second ordre qui
concordent avec les théories modernes des émotions qui confèrent une part de
l'expérience affective aux processus cognitifs et évaluatifs [ 10 ]. Ce niveau de
traitement de la douleur correspond également à certaines théories des
émotions, dont le modèle expérientiel qui a démontré son utilité pour expliquer
les émotions qui surviennent dans l'expérience douloureuse.

Le modèle expérientiel, proposé par Price [ 9 , 11 ], identifie les déterminants


des émotions et spécifie les relations entre ces déterminants et l'intensité de
l'expérience émotionnelle subjective. Plus précisément, cette théorie soutient
que l'expérience émotionnelle dépend de la nature du but que se donne un
individu, combiné au désir et à la probabilité subjective d'atteindre ce but. Le
but identifié par le sujet peut être d'approche ou d'évitement. L'approche vise à
atteindre ou à maintenir un état bénéfique (par exemple la guérison) tandis
que l'évitement vise plutôt à prévenir ou à se soustraire d'un état défavorable
ou aversif (par exemple éviter que la douleur persiste). Les relations
mathématiques entre ces variables sont illustrées à la figure 1 .

Les différentes combinaisons des variables du modèle expérientiel ont été


associées à des expériences émotionnelles qui se distinguent non seulement sur
le plan de l'intensité mais aussi sur celui de la nature et de la qualité de
l'expérience. Ainsi, le désir de soulagement parvient à induire des émotions ou,
du moins, à les influencer considérablement [ 11 , 12 , 13 and 14 ]. La figure 2
illustre les différentes caractéristiques de l'expérience émotionnelle que des
sujets normaux ont rapportée en fonction des buts et des probabilités
subjectives de les atteindre.

Figure 1 ▪ Modèle expérientiel des émotions.

L'intensité (i) de l'émotion varie en fonction de l'objectif d'approche (A) ou


d'évitement (B) que le sujet se donne, du niveau de désirabilité du but à
atteindre (d) et de la probabilité perçue d'atteindre ce but (p). Les objectifs
d'approche (A) donnent généralement lieu à une émotion positive (i > 0)
d'autant plus intense que la probabilité subjective d'atteindre cet objectif
augmente. Les objectifs d'évitement (B) donnent généralement lieu à une
émotion négative (i < 0) d'autant plus intense que la probabilité subjective
d'atteindre cet objectif diminue. Notons toutefois que l'approche peut
s'accompagner d'un sentiment émotionnel négatif si la probabilité subjective
d'atteindre ce but est très faible (par exemple frustration). Réciproquement,
l'évitement peut s'accompagner d'un sentiment émotionnel positif si la
probabilité subjective d'atteindre ce but est très élevée (par exemple
soulagement) (d'après Price et Barrell [ 11 ]).

Figure 2 ▪ Expériences émotionnelles ressenties en fonction des buts.

Description qualitative des expériences émotionnelles ressenties en fonction des


objectifs d'approche (ligne pleine) et d'évitement (ligne en pointillé) et de la
probabilité subjective d'atteindre ces buts (d'après Price et al. [ 13 ]).

Les facteurs du modèle expérientiel semblent donc jouer un rôle déterminant


dans la dimension affective de la douleur clinique et expérimentale. En effet,
l'étude de Price et al. [ 12 ] indique que cette théorie des émotions détient
une valeur prédictive des variations du désagrément de la douleur et non de
son intensité. De plus, le désir et les attentes de soulagement ont montré leur
efficacité et leur pertinence dans des études expérimentales [ 12 , 15 ] et
cliniques [ 16 , 17 ] sur la douleur. Pour ces raisons, la mesure des dimensions
expérientielles s'avère pertinente pour l'atteinte d'une compréhension
approfondie de l'effet modulateur des émotions sur la douleur.

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▪ EFFETS DES ÉMOTIONS SUR LA DOULEUR

L'influence des émotions sur la douleur a été abordée autant dans les études
expérimentales que cliniques. Ces recherches démontrent que les affects
positifs ont pour effet de la diminuer, tandis que les affects négatifs ont
généralement l'effet inverse et entraînent son augmentation. Les études
cliniques notent également l'influence des émotions sur d'autres facteurs
rattachés à la douleur, tels l'invalidité ou les comportements de douleur.

Modulation affective de la douleur : études expérimentales

L'influence des émotions sur la perception de la douleur a été abordée dans


plusieurs études expérimentales. Il importe toutefois de distinguer les émotions
liées à la douleur de celles sans lien avec l'expérience douloureuse. Tandis que
l'induction d'émotions non liées à la douleur peut constituer une source de
distraction considérable, les émotions qui y sont associées représentent plutôt
les affects secondaires de l'expérience douloureuse.

Émotions non liées à la douleur

Dans le cadre des études menées en laboratoire, nombreuses sont les


manipulations qui visent l'induction d'un état affectif. En vue de susciter un état
émotionnel particulier, certaines études optent pour la présentation de phrases
à caractère affectif, de films, ou de musiques, tandis que d'autres misent plutôt
sur les saveurs et les odeurs ou sur la présentation d'images.

Des recherches ont permis de démontrer que la lecture de phrases à valence


affective positive a pour effet d'augmenter la tolérance à la douleur lors de
l'immersion de la main dans l'eau glacée (cold-pressor test) tandis que les
phrases négatives ont l'effet contraire [ 18 ]. Des états dépressifs et anxieux
induits à l'aide de cette méthode diminuent la tolérance à une pression
douloureuse [ 19 ]. Le visionnement de comédies humoristiques ou de films
érotiques permet également de réduire la sensibilité à la douleur produite par
l'application d'une pression au niveau du bras [ 20 ] ou par l'immersion de la
main et de l'avant-bras dans de l'eau glacée [ 21 ]. Les films à caractère
affectif négatif (par exemple un film violent) entraînent quant à eux une
augmentation non significative de la douleur.

Quelques études ont fait l'usage de la musique en vue d'induire des états
affectifs particuliers. Elles ont permis de constater que la musique apaisante a
pour effet d'augmenter la tolérance à la douleur, tandis que la musique
stimulante résulte plutôt en une augmentation de la douleur et du seuil tactile [
22 ]. Une étude récente a par ailleurs noté que la musique plaisante diminue la
douleur produite par une stimulation thermique chaude appliquée au niveau
de l'avant-bras, sans toutefois altérer les sensations thermiques non douloureuses
[ 23 ]. Les odeurs agréables parviennent également à atténuer la douleur
produite par une stimulation thermique chaude [ 24 ] ou froide dans le cas des
femmes [ 25 ]. Une étude a également démontré que les odeurs agréables
sucrées inhalées pendant l'immersion de la main dans de l'eau glacée résultent
en une augmentation de la tolérance face à la douleur, tandis que des odeurs
non sucrées n'entraînent aucune modification significative [ 26 ]. Les saveurs
sucrées ont également pour effet de diminuer la douleur thermique chaude
chez certains individus [ 27 ]. Malgré la diversité des méthodes d'induction des
émotions, la plus couramment utilisée demeure la présentation d'images,
généralement issues de l'international affective picture system (IAPS) [ 28 ].
Dans le cadre de ces études, des images qui suscitent la peur (par exemple un
animal qui montre ses crocs), le dégoût (par exemple des membres mutilés) ou
des émotions positives (par exemple des images érotiques) sont présentées aux
sujets. Grâce à cette technique d'induction, il a été démontré que les images
négatives entraînent une diminution de la tolérance face à la douleur produite
par l'immersion de la main et de l'avant-bras dans un bain d'eau glacée [ 29 ],
tandis que les images positives diminuent la douleur induite par la pression [ 30 ]
et que les images positives à caractère érotique entraînent une augmentation
du seuil de douleur chez les hommes [ 31 ]. Des effets similaires sont constatés
dans les études utilisant des chocs électriques [ 32 ].

Distinction entre émotions et attention

Bien qu'il soit généralement admis que les émotions et l'attention exercent une
influence sur l'expérience douloureuse, peu d'études considèrent l'interaction
de ces variables dans la modulation de la douleur. Par conséquent, il est
souvent suggéré que l'attention agisse comme variable confondante dans
l'étude de l'effet modulateur des émotions. En effet, l'absence de contrôle
attentionnel rend difficile l'attribution des variations au niveau de la douleur
exclusivement aux émotions [ 33 ].

L'induction d'émotions par l'entremise de sources externes entraîne une


compétition pour les ressources attentionnelles, ce qui explique l'influence
possible de l'attention sur l'effet modulateur des émotions [ 34 , 35 and 36 ].
L'orientation de l'attention vers l'inducteur affectif aux dépens du stimulus
douloureux pourrait donc expliquer la diminution de la douleur [ 29 ]. Cela est
congruent avec le fait que les émotions positives diminuent la douleur et que les
émotions négatives, bien qu'elles l'augmentent, atteignent rarement le seuil de
signification. Ce détournement de l'attention entraînerait donc une diminution
de la douleur, sans quoi l'effet isolé des émotions serait sûrement plus important.

Plusieurs études suggèrent tout de même que les mécanismes qui sous-tendent
ces deux variables psychologiques sont en partie distincts [ 24 , 30 ]. Dans
l'étude menée par Villemure et al. [ 24 ], l'attention a été manipulée
indépendamment de l'état affectif en la dirigeant soit sur le stimulus olfactif
(odeurs agréables ou désagréables) soit sur le stimulus thermique douloureux.
Tandis que l'attention accordée à un ou l'autre des stimuli n'a eu aucun effet
sur l'humeur, celle accordée à la douleur s'est traduite par une augmentation
de l'intensité douloureuse perçue. En revanche, la valence affective de l'odeur
est parvenue à influencer l'humeur, le niveau d'anxiété et le désagrément de la
douleur, sans toutefois altérer l'intensité de celle-ci. Ces résultats démontrent
que les émotions et l'attention altèrent différemment la perception de la
douleur.

Tout compte fait, les états affectifs influencent davantage le désagrément face
à la douleur que son intensité, tandis que l'attention altère plus particulièrement
la dimension sensorielle de l'expérience douloureuse. À la lumière de ces
résultats, il est juste de croire que des mécanismes modulateurs partiellement
distincts sont en cause dans la modulation affective et attentionnelle de la
douleur. Toutefois, comme ces variables ne sont pas entièrement
indépendantes, il demeure important de minimiser l'influence de la variable
attentionnelle dans les études portant sur les émotions. À cette fin, il est possible
d'étudier les émotions liées à la douleur, ce qui ne requiert pas que l'attention
soit dirigée vers une cible externe et entièrement indépendante de l'expérience
douloureuse.

Émotions liées à la douleur

Rainville et al. [ 15 ] ont utilisé des suggestions hypnotiques dans le cadre d'une
série d'études ayant pour but d'élucider l'effet des émotions liées à la douleur
sur l'expérience douloureuse. Contrairement aux autres méthodes d'induction
des émotions, l'hypnose permet d'exercer un certain contrôle sur l'inducteur et
la nature de l'émotion ainsi que sur l'intensité affective éprouvée, qui demeure
en relation directe avec la susceptibilité hypnotique. De plus, cette méthode est
couramment utilisée dans les études expérimentales [ 37 , 38 , 39 , 40 and 41
].

Dans le cadre d'une première expérimentation menée par Rainville et al. [ 15


], des suggestions hypnotiques ont été présentées en vue de susciter des
émotions liées à la douleur pendant l'immersion de la main dans de l'eau
chaude. Par rapport à un niveau pré-hypnotique de base et à une condition de
relaxation hypnotique, une diminution des évaluations de l'intensité et du
désagrément de la douleur a été notée pour les émotions positives, tandis que
ces mêmes évaluations se sont vues augmenter pour les émotions négatives.
Bien que l'intensité et le désagrément aient tous deux été modulés, les émotions
négatives ont davantage influencé le désagrément de la douleur.

Une seconde expérience menée par ces mêmes auteurs s'est attardée plus
particulièrement sur la tristesse et la colère en lien aux réponses autonomiques. Il
a été noté que le rythme cardiaque augmentait davantage pour les émotions
négatives que pour les conditions hypnotiques de contrôle. De plus, les
changements dans l'évaluation du désagrément face à la douleur étaient
positivement corrélés aux changements dans la réponse cardiaque. Les
résultats de ces études confirment que les émotions négatives entraînent une
augmentation significativement plus importante du désagrément, par rapport à
l'intensité de la douleur et que ces changements se répercutent sur les réponses
autonomiques périphériques évoquées par le stimulus douloureux.

Les variables du modèle expérientiel des émotions ont également été explorées
dans ces études. Il a été observé que les émotions négatives étaient associées
à une augmentation significative du désir de soulagement ainsi qu'à une
diminution des attentes de soulagement. Dans une troisième expérimentation,
des suggestions hypnotiques ont spécialement été conçues pour induire un
niveau faible ou élevé de désir de soulagement. Cette étude a permis de
constater que le désir de soulagement influence principalement le
désagrément de la douleur, indépendamment de son intensité. Ces résultats
confirment que les variables du modèle expérientiel sont des facteurs
médiateurs de l'effet hyperalgésique des émotions négatives.

Modulation affective de la douleur : études cliniques

En concordance avec les études expérimentales, les études cliniques ont


confirmé l'existence d'une relation significative entre l'état affectif et la douleur
chez des patients souffrants de douleur chronique [ 42 , 43 ]. Une étude
d'envergure menée par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a
également démontré que les patients qui souffrent de douleur chronique sont
plus enclins à souffrir de troubles de l'humeur et de troubles anxieux que les
autres [ 1 , 44 ]. Une telle comorbidité prédirait négativement les résultats de
différentes interventions axées sur la douleur, dont les programmes de
traitements multidisciplinaires [ 45 ] et les thérapies traditionnelles [ 46 ].

On note également que les émotions négatives résultent en une augmentation


de la douleur clinique, particulièrement du désagrément qui lui est associé, et
sont des prédicteurs fiables des comportements de douleur et de l'invalidité [ 47
, 48 , 49 and 50 ]. De plus, un état affectif négatif prolongé entraîne une
élévation de la douleur chez les patients qui souffrent de douleur persistance [
51 , 52 , 53 and 54 ]. Le désagrément causé par la douleur est
significativement relié à l'humeur dépressive, à l'anxiété, à la frustration, à la
peur et, dans certains cas, à la colère chez les douloureux chroniques [ 5 , 55 ].

Au cours des dernières années, la catastrophisation face à la douleur a suscité


beaucoup d'intérêt. Ce construit est caractérisé par une tendance à amplifier
la gravité de la douleur, une centration excessive sur celle-ci et une perception
d'être incapable d'y faire face adéquatement. Des études ont démontré que la
catastrophisation contribue à la sévérité de la douleur ainsi qu'à la détresse et à
l'invalidité qui lui sont associées [ 48 , 49 , 56 , 57 and 58 ]. Tout compte fait,
une compréhension approfondie de l'influence des émotions sur l'expérience
douloureuse, en plus d'être un sujet de recherche intéressant, demeure
particulièrement importante pour le milieu clinique.

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▪ PHYSIOLOGIE DE LA DOULEUR

Afin que la douleur soit perçue, l'information nociceptive doit d'abord être
transmise de la périphérie à la moelle épinière pour ensuite être acheminée
jusqu'aux centres supérieurs du système nerveux central (SNC). Tout au long de
ce trajet, des mécanismes peuvent être activés, ce qui se traduit par une
facilitation ou une inhibition de la douleur. La présente section offrira un bref
aperçu des différentes étapes de la transmission et de la modulation de
l'information nociceptive, telles que décrites par Marchand [ 59 ].

Transmission du message nociceptif


Le processus de transmission du message nociceptif est enclenché par
l'activation des nocicepteurs périphériques, qui se retrouvent autant au niveau
de la peau, des muscles et des tendons que dans les viscères. Par suite d'une
stimulation douloureuse suffisamment importante, l'activation des nocicepteurs
entraîne un potentiel d'action qui déclenche la transmission de l'information
nociceptive jusqu'à l'échelon spinal par l'entremise des neurones primaires.
Ceux-ci sont composés de fibres nerveuses nociceptives, soit les fibres Aδ et C.

Le premier contact synaptique a alors lieu au niveau des cornes postérieures de


la moelle épinière. À ce niveau se trouvent les neurones secondaires, qui sont
soit des neurones nociceptifs spécifiques qui répondent exclusivement aux
stimulations provenant des fibres Aδ et C, soit des neurones non spécifiques, qui
répondent également aux stimulations mécaniques non douloureuses (fibres
Aβ). Une fois le contact synaptique établi, l'information nociceptive est
acheminée vers les centres supérieurs via le faisceau latéral de la voie spino-
thalamique et le faisceau médian de la voie spino-réticulaire, où un second
contact synaptique a lieu.

Le réseau spino-thalamique projette alors directement l'information vers les


noyaux thalamiques latéraux pour ensuite l'acheminer jusqu'au cortex
somatosensoriel primaire et secondaire. Cette voie permet donc la perception
de la composante sensorielle de l'expérience douloureuse. Le réseau spino-
réticulaire projette quant à lui l'information vers les noyaux thalamiques médians
ainsi que vers certaines régions du tronc cérébral, dont la substance grise péri-
aqueducale et les noyaux du raphé. L'information est alors acheminée vers
différentes parties du système limbique, ce qui permet de ressentir le
désagrément associé à la douleur.

Contrôles endogènes de la douleur

Tout au long de son trajet, le message nociceptif fait l'objet de modulations soit
excitatrices soit inhibitrices, ce qui influence l'expérience de la douleur. Les
contrôles inhibiteurs endogènes s'effectuent à plusieurs niveaux de la
transmission de l'influx douloureux dans le système nerveux, mais la corne
postérieure de la moelle épinière demeure un lieu de convergence important
de ces mécanismes modulateurs. Parmi les mécanismes qui regroupent ces
systèmes inhibiteurs de modulation, on note le contrôle inhibiteur diffus et le
contrôle exercé par les centres supérieurs du SNC.

Au niveau du tronc cérébral, certaines structures projettent des efférences


inhibitrices descendantes diffuses. Cette activité analgésique est connue sous le
nom de contrôle inhibiteur diffus nociceptif, ou CIDN. Ces mécanismes
physiologiques modulent le traitement de la nociception au niveau de la corne
dorsale de la moelle épinière. Toutefois, les mécanismes à l'origine des CIDN ne
sont pas confinés à la moelle, ce qui implique que certaines structures
supraspinales contribuent à l'effet analgésique attribuable aux CIDN [ 60 ].

Les centres supérieurs du SNC jouent un rôle prédominant dans la modulation


de la douleur. Plusieurs régions du cerveau interviennent dans la perception de
la douleur, dont le cortex somato-sensoriel et les structures corticales limbiques.
Ces régions sont également importantes pour la modulation de la douleur.
Toutes les méthodes analgésiques qui font appel à un exercice cognitif (par
exemple relaxation, biofeedback, hypnose) réfèrent à ces mécanismes
puisqu'ils modifient l'activité des structures corticales responsables de la
perception de la douleur.

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▪ NOCICEPTION SPINALE CHEZ L'HUMAIN

Quoique l'importance des émotions dans l'expérience de la douleur clinique et


expérimentale soit généralement reconnue, les mécanismes psychologiques et
physiologiques qui sous-tendent leur impact sur l'expérience douloureuse
demeurent peu compris. Cependant, depuis les travaux de Melzack et Wall [ 61
], l'activation des mécanismes de contrôle descendants est proposé comme
l'une des voies responsables de la modulation psychologique de la douleur [ 62
, 63 , 64 , 65 and 66 ]. Il est donc possible que les émotions modulent la
douleur par l'entremise de l'activation des circuits descendants. Ainsi, les circuits
neuronaux associés aux émotions pourraient activer les circuits endogènes de
modulation de la douleur qui se trouvent au niveau du SNC, résultant en une
modification de la nociception au niveau spinal [ 67 , 68 and 69 ]. Certaines
études ainsi que des évidences neuro-anatomiques soutiennent cette notion [
70 , 71 and 72 ]. Toutefois, ces propositions étant principalement fondées sur
les recherches animales, l'interaction entre la douleur et les émotions aux
niveaux cérébral et spinal demeure mal comprise chez l'humain.

Mesure de la nociception spinale

Les études qui portent sur les réponses physiologiques de la douleur chez
l'humain ont souvent recours à des méthodes qui impliquent le réflexe spinal de
retrait. Ce réflexe nociceptif de flexion (RIII) est un réflexe polysynaptique qui
consiste en un mouvement rapide de retrait d'un membre mesuré par
l'entremise de la réponse électromyographique (EMG) du biceps fémoral [ 73 ].
L'usage du réflexe RIII a été recommandé en 2004 par l'European Federation of
Neurological Societies comme technique efficace pour l'évaluation des
traitements et des interventions contre la douleur, ce qui témoigne de sa
reconnaissance internationale [ 74 ].

Plusieurs études ont démontré qu'en plus de correspondre au seuil de douleur


chez l'humain, l'augmentation de l'amplitude du réflexe RIII correspond
normalement à un accroissement de la douleur perçue [ 75 , 76 , 77 and 78 ].
Pour ces raisons, ce réflexe est considéré comme une mesure «objective» de la
douleur chez l'humain et un indice fiable de la nociception spinale [ 73 ] qui
accompagne bien les évaluations subjectives de la douleur.

Influence des mécanismes de contrôle descendants

La notion de mécanismes de contrôle descendants s'applique aux influences


facilitatrices ou inhibitrices destinées à l'échelon spinal. Ces circuits, qui sont
impliqués dans les CIDN, peuvent être activés expérimentalement et moduler la
transmission de la nociception spinale chez l'humain grâce à la technique de
contreirritation [ 79 ]. Cette méthode consiste à masquer une douleur par
l'induction d'une seconde douleur. Pour ce faire, des stimulations électriques
sont habituellement administrées au niveau du nerf sural et le réflexe RIII est
mesuré. Les CIDN sont alors déclenchés par l'application d'une stimulation
hétérotopique nociceptive [ 80 ].

Des études électrophysiologiques ainsi que d'autres portant sur les lésions chez
les animaux et les humains ont démontré que le système d'inhibition
descendant est essentiel à l'analgésie produite par la contre-irritation [ 81 , 82
and 83 ]. Par conséquent, l'activité des centres supérieurs du cerveau, qui
impliquerait des mécanismes neurophysiologiques similaires, serait en mesure
d'augmenter ou de diminuer le processus de nociception spinal ainsi que la
perception de la douleur. L'usage de la contre-irritation permet donc
l'évaluation expérimentale des mécanismes de contrôle descendants de la
douleur.

Modulation par les facteurs psychologiques

De nombreuses études ont démontré que la réponse du réflexe RIII covarie


avec le niveau de douleur à la suite de manipulations pharmacologiques,
physiologiques et psychologiques qui sont reconnues pour leur effet sur la
sensibilité à la douleur [ 77 , 84 , 85 , 86 , 87 and 88 ]. Parmi les variables ou
interventions psychologiques qui ont démontré leur effet sur le réflexe RIII, on
note l'attention, l'anxiété/stress et l'hypnose. Une seule étude [ 32 ] a exploré
l'effet des émotions sur la nociception spinale.

Les résultats d'une étude de Bathien et Hugelin [ 89 ] ont démontré que


l'attention dirigée sur l'exécution d'un test inhibe le réflexe RIII, ce qui suggère
une augmentation des mécanismes inhibiteurs descendants. En effet, d'autres
études sont venues confirmer que la distraction attribuable à une tâche
cognitive diminue la douleur et l'amplitude du réflexe RIII [ 90 , 91 ]. Le
détournement de l'attention vers un stimulus visuel ou auditif pendant
l'expérience de douleur a également pour effet de réduire la perception de
douleur [ 36 , 92 ].

Le stress et l'anxiété semblent également avoir un effet sur le réflexe RIII. Dans
une série d'études menées par Willer [ 93 , 94 ], il a été démontré que
l'anticipation de stimulations électriques extrêmement intenses, soit 7 ou 8 fois
plus élevées que le seuil de douleur, était associée à une diminution importante
de l'amplitude du réflexe RIII. Une étude récente a plutôt suggéré que l'anxiété
n'influençait pas de manière significative le seuil de ce réflexe [ 95 ].
Cependant, il est suggéré que les émotions négatives peuvent avoir des effets
différents sur la douleur en fonction, entre autres, de leur intensité [ 68 , 96 ].
Cela pourrait expliquer en partie pourquoi ces études, qui confondent le stress
(intense et analgésique) et l'anxiété (moins intense et hyperalgésique),
obtiennent des résultats non congruents.

L'analgésie hypnotique entraîne également des variations au niveau spinal.


Dans une étude de Kiernan et al. [ 97 ], des suggestions analgésiques ont
résulté en une réduction de l'amplitude du réflexe RIII et en une diminution des
évaluations subjectives de l'intensité et du désagrément de la douleur. Des
résultats non congruents avec cette dernière étude ont néanmoins été
observés par Danziger et al. [ 98 ], qui ont noté que chez la moitié des
participants ayant pris part à leur étude, une augmentation du réflexe était
constatée lors de l'analgésie hypnotique, tandis que sa diminution était
constatée chez l'autre moitié.

Dans l'ensemble, ces résultats suggèrent que les facteurs psychologiques


peuvent non seulement moduler la perception de la douleur mais sont
également capables d'exercer une influence sur une réponse réflexe de niveau
spinal. Cela suggère que les émotions pourraient également entraîner de telles
modifications physiologiques. Toutefois, cette hypothèse demeure encore peu
explorée puisque la majorité des recherches s'est attardée aux modifications
subjectives de la douleur estimées par l'entremise d'évaluations conscientes des
sujets.

Une équipe a tout de même tenté d'explorer l'effet des émotions sur le réflexe
RIII. Les recherches menées par Rhudy et al. [ 32 , 99 ] suggèrent que l'état
affectif parvient à moduler la nociception spinale. Dans le cadre de ces études,
des images à valence émotionnelle désagréable, agréable ou neutre ont été
présentées à des sujets pendant que des stimulations électriques leur étaient
administrées au niveau du nerf sural. Les résultats obtenus démontrent que le
visionnement d'images désagréables augmente l'amplitude du réflexe RIII et la
douleur perçue, tandis que le visionnement d'images agréables entraîne une
inhibition du réflexe et des évaluations subjectives de douleur.

Cependant, comme c'est le cas pour la vaste majorité des recherches sur le
sujet, l'induction d'états affectifs par l'entremise d'images laisse place à la
possibilité que la variable attentionnelle ait eu un rôle à jouer dans les résultats
obtenus. Bien que la variable attentionnelle demeure difficile à contrôler, il est
possible d'explorer l'effet des émotions liées à la douleur sur le réflexe RIII, ce qui
évite d'inciter l'individu à orienter son attention sur une cible externe et
indépendante de la douleur. Une telle étude permettrait d'en savoir davantage
sur l'effet psychophysiologique des émotions sur la douleur.

De récents travaux ont également démontré que les facteurs psychologiques,


plus précisément les attentes, sont capables d'altérer les mécanismes de CIDN.
Une étude menée par Goffaux et al. [ 100 ] indique que l'influence des
mécanismes descendants contribuerait à réduire la force de l'activation
nociceptive spinale ainsi que la transmission spino-thalamo-corticale. Dans le
cadre de cette étude, des stimulations électriques étaient administrées au
niveau du nerf sural tandis que les CIDN étaient activés par la contre-irritation à
l'aide de l'immersion de la main dans un bain d'eau froide. La moitié des
participants anticipaient le fait que l'immersion de la main dans l'eau réduirait la
sensation de douleur attribuable aux stimulations électriques, tandis que le reste
des sujets anticipait plutôt le fait que l'immersion entraînerait une augmentation
de la douleur.

Dans le groupe qui anticipait l'analgésie, le réflexe RIII et la perception de la


douleur ont été réduits lors de la contre-irritation, et ce contrairement au groupe
qui anticipait l'hyperalgésie. De plus, le potentiel cortical a été significativement
modulé par l'immersion de la main dans l'eau, particulièrement chez les sujets
qui anticipaient l'analgésie. Cela signifie qu'une part de l'effet des attentes est
attribuable aux changements des aires corticales du cerveau. Dans l'ensemble,
ces résultats suggèrent que les attentes modulent l'activation des mécanismes
endogènes d'inhibition de la douleur qui influencent les réponses nociceptives
spinales et corticales.

Les résultats de cette étude concordent avec la possibilité que certains facteurs
psychologiques capables de moduler la douleur impliquent les CIDN, qui
réduisent l'activité nociceptive au niveau des circuits cérébro-spinaux, ce qui
entraîne une diminution de la douleur ressentie. De plus, cela vient confirmer les
résultats d'études en neuro-imagerie qui suggèrent que les facteurs
psychologiques influencent l'activité neuronale des régions du cerveau
impliquées dans l'inhibition descendante de la douleur [ 65 , 66 , 101 , 102 ]. À
la lumière de ces résultats, il est juste de croire que d'autres facteurs
psychologiques, telles les émotions, pourraient exercer un effet similaire sur les
circuits cérébro-spinaux.

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▪ STRESS, IMMUNITÉ ET DOULEUR

Au cours des dernières décennies, plusieurs études ont démontré que le système
nerveux et le système immunitaire étaient interreliés par l'entremise de circuits
biochimiques complexes [ 103 ]. Il est désormais reconnu que ces systèmes,
auparavant conçus comme indépendants, partagent certains
neurotransmetteurs, neuropeptides, hormones et cytokines [ 104 ].
Parallèlement, plusieurs études sont venues confirmer l'hypothèse voulant que
les facteurs psychologiques parviennent à influencer les processus immunitaires
et inflammatoires de l'organisme.

Stress, émotions et immunité

De nombreux chercheurs se sont penchés sur les effets du stress aigu et du stress
chronique sur les fonctions immunitaires. Il a été démontré que le stress
transitoire attribuable à une présentation orale, à un examen ou encore à
l'exécution d'un calcul arithmétique est suffisant pour entraîner des altérations
au niveau des fonctions immunitaires de l'organisme [ 105 , 106 , 107 , 108 and
109 ]. De plus, un stress aigu de nature physique, tel que la douleur
expérimentale induite par l'entremise de l'immersion de la main dans un bain
d'eau froide, est également capable d'altérer la réponse inflammatoire [ 110 ].
Dans cette veine, le stress académique a amplement été étudié afin de
démontrer les effets de ces altérations immunologiques sur l'état de santé de
groupes d'étudiants en bonne santé [ 111 , 112 ]. Dans le cadre d'une étude
menée auprès d'étudiants ayant été vaccinés à trois reprises contre l'hépatite B,
ceux qui développaient une immunisation à la suite de la première dose du
vaccin étaient significativement moins stressés et anxieux que ceux pour qui la
production d'anticorps ne prenait place qu'après la deuxième dose [ 113 ]. Il a
également été démontré que le stress attribuable aux examens freine la
guérison d'une blessure et diminue le niveau d'interleukine 1 [ 114 ].

Par ailleurs, l'élévation du niveau d'hormones et la tension attribuée à la


répétition, à la fréquence ou à l'exposition soutenue à un stress entraînent une
réactivité émotionnelle marquée ainsi qu'une immunosuppression [ 115 , 116 ].
Par exemple, on constate que les personnes qui fournissent des soins à un
membre de leur famille atteint de maladie d' Alzheimer rapportent un niveau
de stress élevé associé à une irrégularité prolongée du système endocrinien et
du système immunitaire, une altération de l'efficacité de la réponse à un vaccin
ainsi qu'un ralentissement de la guérison d'une blessure [ 117 , 118 , 119 , 120
and 121 ]. D'autres éléments associés à un stress chronique, soit un épuisement
professionnel, un milieu de travail tendu, l'isolement et l'exposition constante à
un climat hostile, peuvent également altérer la réponse immunitaire [ 122 , 123
and 124 ].

Des études suggèrent que le stress chronique est un élément clé du


développement de certaines maladies et de certains déficits du système
immunitaire. Plus précisément, le stress augmente les risques de souffrir d'une
infection respiratoire [ 125 , 126 ], accélère la progression des maladies
coronariennes [ 127 ] et exacerbe les maladies auto-immunes [ 128 , 129 ]. De
plus, les maladies chroniques qui se traduisent par un dérèglement de la
réponse inflammatoire sont particulièrement susceptibles d'être aggravées par
les facteurs psychologiques. En effet, plusieurs études démontrent que les
symptômes propres à ces maladies sont exacerbés par le stress et les émotions [
130 , 131 , 132 and 133 ].

Les émotions négatives sont elles aussi liées à certaines irrégularités


immunologiques [ 134 , 135 ]. On note un lien entre le système immunitaire, la
dépression et l'anxiété [ 134 , 136 ]. D'ailleurs, on constate un taux d'incidence
considérablement plus élevé de troubles anxieux et de troubles de l'humeur
chez les individus qui souffrent de syndrome douloureux et d'asthme que chez
ceux qui n'en souffrent pas [ 137 ]. Par ailleurs, Stone et al. [ 138 ] ont observé
une diminution de la production d'anticorps lorsque des participants exposés à
un antigène rapportaient une humeur négative marquée au cours de la
journée. Une étude a également démontré qu'une humeur négative notée au
cours d'une journée était associée à une diminution du compte des cellules
NK(natural killers) chez les femmes [ 139 ]. Ainsi, les émotions négatives
pourraient avoir un effet sur les fonctions immunitaires qui serait comparable à
celui du stress transitoire.

Bien qu'un nombre plus restreint d'études se soit intéressé aux émotions positives,
l'association de ces dernières avec les fonctions immunitaires a été suggérée [
140 ]. En guise d'exemple, on note une augmentation marquée de l'activité des
cellules NK chez les individus ayant visionné un film humoristique les ayant fait
rire [ 141 , 142 ]. Il semble également que regarder un film présentant un
personnage apprécié entraîne une augmentation de l'activité des cellules NK
et du niveau de dopamine [ 143 ]. Par ailleurs, la quantité de cellules NK
augmente chez les hommes à la suite de l'expérience d'émotions positives
associées à l'excitation sexuelle [ 144 ]. Finalement, certaines études ont noté
que les individus qui ont tendance à être heureux et joyeux sont moins portés
que les autres à développer des infections virales [ 145 , 146 and 147 ].

Mécanismes potentiels en lien avec la douleur

En vue d'expliquer l'effet du stress sur le système immunitaire, il a été suggéré


que les affects pouvaient agir comme variable médiatrice [ 148 , 149 ]. Ainsi,
l'impact d'une situation impliquant du stress dépendra de la réponse
émotionnelle de l'individu. Quelques études se sont attardées sur l'effet de la
valence affective sur les fonctions immunitaires, mais il semble que l'activation
physiologique (ou activation cérébrale, dite arousal) pourrait être un facteur de
plus grande importance pour expliquer la modulation des fonctions
immunitaires, et ce surtout dans les cas des stress aigu [ 150 , 151 and 152 ].

Il est également possible que les processus cognitifs et motivationnels (facteurs


comparables aux déterminants du modèle expérientiel) jouent un rôle dans
l'association entre les émotions et le système immunitaire. Malgré ces possibilités,
les résultats des études ayant tenté d'expliquer les variations des fonctions
immunes attribuables aux expériences quotidiennes et au stress en considérant
uniquement l'état affectif demeurent peu concluants [ 112 , 153 , 154 ].

Davantage de recherches se sont attardées sur les mécanismes biologiques afin


d'expliquer l'effet des facteurs psychologiques sur l'immunité. Dans un article
récent de Rosenkranz [ 137 ], il est suggéré que les maladies chroniques
inflammatoires ainsi que les troubles anxieux et de l'humeur puissent partager un
mécanisme neuropathologique commun, soit le dérèglement de la substance
P, un neuropeptide impliqué dans l'inflammation et dans le signalement de la
présence de stimuli nocifs autant physiques (douleur) que psychologiques
(stress). Le rôle de la substance P a également été suggéré dans la régulation
de l'humeur et dans la dépression et l'anxiété induites par le stress chronique [
155 ]. Ce neuropeptide pourrait ainsi jouer un rôle clé dans l'interaction entre le
stress, les émotions et la douleur au niveau du système nerveux central.

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▪ CONCLUSION

L'impact des émotions sur la douleur est généralement admis mais les
mécanismes expliquant ces effets demeurent encore trop peu étudiés. Sur le
plan clinique, il est clair que la douleur peut être un déclencheur d'émotion et
que, réciproquement, l'état émotif des patients peut avoir un impact sur la
douleur. Les études expérimentales démontrent par ailleurs de façon
convaincante que les émotions négatives auront un effet hyperalgésique alors
que les émotions positives auront généralement un effet analgésique. Toutefois,
dans ce dernier cas, il est souvent difficile de distinguer si l'analgésie est due à
un effet émotionnel ou simplement distractif des conditions utilisées pour induire
des émotions positives. Néanmoins, lorsque les conditions expérimentales
permettent de dissocier les effets des émotions et de l'attention, on observe des
effets modulateurs des émotions, en particulier sur la dimension affective de la
douleur (désagrément), qui ne s'expliquent pas simplement par la distraction.
Par ailleurs, la douleur elle-même est fréquemment le déclencheur d'émotions
négatives qui auront un effet amplificateur se répercutant sur les réponses
physiologiques associées à la douleur. Ces interactions font vraisemblablement
intervenir des mécanismes neurophysiologiques dont les effets modulateurs
peuvent être détectés non seulement par les évaluations subjectives de la
douleur mais également par des mesures de l'activation autonomique ou par
des mesures du réflexe nociceptif spinal de retrait. Ces réponses témoignent
d'une activation de mécanismes cérébro-spinaux de régulation de la douleur
par les émotions. L'interaction entre les émotions et la douleur pourrait
également faire intervenir des médiateurs neurophysiologiques et neuro-
hormonaux associés au stress et aux fonctions immunes. Dans cette relation, la
réaction émotive individuelle aux conditions de stress pourrait s'avérer être un
facteur important à considérer. Sur le plan neurophysiologique, les mécanismes
de neuromodulation par la substance P apparaissent présentement comme l'un
des lieux de convergence de la régulation de la douleur, de la réponse au stress
et des émotions. Le stress et les émotions transitoires qui en découlent
affecteraient les mécanismes neurophysiologiques de régulation de la douleur
alors que le stress et les émotions négatives persistantes pourraient affecter les
fonctions neuromodulatrices de la substance P et modifier les processus
nociceptifs tout en induisant des états anxieux ou dépressifs.

Les observations cliniques et scientifiques fournissent de plus en plus de preuves


tangibles d'une forte interaction entre les émotions et la douleur. Les
mécanismes proposés par ces études ne sont sans doute pas les seuls en jeu
mais la possibilité de proposer des liens plausibles entre les interprétations
psychologiques et neurobiologiques constitue un avancement considérable qui
permet un décloisonnement entre les disciplines. Ces découvertes devraient
contribuer à renforcer les approches biopsychosociales et appuyer les équipes
multidisciplinaires d'intervention auprès de patients douloureux.

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RÉFÉRENCES
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Chapitre 4 Peau, Douleur et Inflammation

Laurent MISERY

La peau est plutôt la cible du prurit qui n'est pas une «petite douleur» car de
nature différente. Mais il existe des circonstances, traumatiques ou non, où la
peau peut être douloureuse. La douleur cutanée n'est alors pas différente de la
douleur en général, pour sa physiopathologie et ses voies de conduction.
Certains traitements, appliqués par voie topique, sont spécifiques de la douleur
cutanée. Au cours de certaines maladies, l'absence de douleur cutanée, qui
est en fait liée à l'absence de sensibilité cutanée (toucher), peut conduire à la
mort, le signal d'alarme manquant. L'inflammation cutanée ne peut se
concevoir qu'en relation avec le système nerveux, une part neurogène étant
indispensable pour amplifier la réaction inflammatoire. Les interactions entre les
cellules cutanées, immunitaires et nerveuses sont tellement importantes qu'il faut
concevoir toutes ces cellules dans un seul système : le système neuro-immuno-
cutané (SNIC).

Points clés

 Différence avec le prurit.


 La douleur cutanée n'est pas uniquement un problème cutané.
 Très grande importance du cerveau dans la conscience et le vécu de la
douleur.
 Nécessité d'une prise en charge globale.
 Quelques spécificités du traitement de la douleur cutanée.
 Modulation de l'inflammation et de l'immunité par le système nerveux.

L'IASP (International Association for Studies on Pain) définit la douleur comme


une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à des lésions
tissulaires présentes ou potentielles ou décrites en termes de lésions [ 1 ]. Elle se
distingue de la nociception, qui n'est que la composante sensorielle de la
douleur (sans composantes affective et cognitive).

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▪ CIRCONSTANCES DOULOUREUSES EN DERMATOLOGIE

Les douleurs cutanées les plus fréquentes sont bien entendu liées aux plaies. Il
peut s'agir de plaies chroniques comme les ulcères de la jambe ou les escarres.
Les brûlures sont aussi à l'origine de douleurs qui peuvent être très vives. Mais les
douleurs ne sont pas présentes si une neuropathie (diabétique en particulier) est
associée ou si les brûlures sont au 3e degré.

Les douleurs cutanées sont fréquemment iatrogènes : prise de sang, curetage


de molluscum contagiosum, cryothérapie, biopsie cutanée, soins de plaies ou
de brûlures, etc. Citons aussi les douleurs post-PUVA, phénomène assez rare
mais difficile à traiter.

Certaines maladies peuvent être douloureuses : le zona (avant, pendant et


après les lésions cutanées), le syndrome de Lyell (signe caractéristique mais
aussi avantcoureur), les neuropathies (dont la maladie de Fabry et
l'érythermalgie familiale, qui se traduisent par des douleurs des extrémités), la
notalgie paresthésique (douleurs situées dans une zone précise du dos), etc.

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▪ DOULEUR ET PRURIT

La peau peut être douloureuse, comme tous les organes (ou presque). Mais la
spécificité de la peau est le prurit. Celui-ci se définit comme une sensation
déplaisante conduisant au besoin de se gratter [ 2 ]. Ce n'est pas une «petite
douleur». Il s'agit d'une sensation différente, et même opposée sur bien des
points ( tableau 1 ). Il existe néanmoins des sensations intermédiaires entre le
prurit et la douleur, comme les paresthésies. Le prurit peut survenir au cours de
nombreuses circonstances : maladies cutanées inflammatoires, accumulation
de toxines (prurit cholestatique ou urémique), maladies générales
(hémopathies, maladies endocriniennes, etc.). Il peut être induit par des agents
exogènes (produits chimiques, médicaments). Il peut être uniquement
neurogénique ou psychogénique. Au même titre que la douleur ou l'asphyxie, il
peut être à l'origine d'une souffrance importante.

Il existe probablement des récepteurs communs à la douleur et au prurit mais


des récepteurs spécifiques de l'un et de l'autre ont été décrits ( tableau 2 ). Si
les nocicepteurs sont assez bien connus (voir chapitre 1 ), les pruricepteurs sont
de description récente [ 3 ] : «Les pruricepteurs expriment des récepteurs à
l'histamine et à l'interleukine 31 ainsi que le récepteur PAR-2. Il existe ensuite des
voies de transmission propres. Ils sont présents uniquement dans la peau. Ils ont
un fonctionnement similaire à celui de la nociception mais ne transduisent pas
la même sensation.»

Tableau 1 ▪ Douleur et prurit.

Douleur Prurit

Réaction Retrait Grattage

Aggravation Froid Chaud

Traitement Antalgiques Antiprurigineux

Localisation Ubiquitaire Peau

Seuil Stimuli moyens Stimuli minimes

Tableau 2 ▪ Nocicepteurs (récepteurs de la douleur) et pruricepteurs


(récepteurs du prurit).

Récepteurs Prurit Douleur

Fibres C + +
VR-1 + +

Canaux Na+, Ca++, K+ + +

Protéines kinases A et C + +

Histamine R ++++ +

PGE 2R +++ +

Bradykinine R + ++++

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▪ PHYSIOPATHOLOGIE DE LA DOULEUR CUTANÉE

La sensibilité cutanée [ 4 ] est liée aux fibres C et Aδ du système nerveux dit


sensitif ou somatique. Au niveau cellulaire, elle est liée à l'activation des
neurones en réponse à des stimuli extérieurs de toute nature. Les cellules
activées connaissent des modifications des champs électriques de leur
membrane et produisent des neuromédiateurs (substance P et autres).
L'information est reçue au niveau d'un récepteur puis elle est transmise aux
ganglions sensitifs et enfin à la moelle épinière. Elle remonte par les faisceaux
spino-thalamiques jusqu'au thalamus grâce à un deuxième neurone. Un
troisième neurone conduit alors l'information jusqu'au cortex temporal. À tous les
niveaux, il existe un contrôle dit «de porte» par des interneurones et un
autocontrôle.

Par rapport à la sensibilité viscérale, on note quelques spécificités de la


sensibilité cutanée :

 rôle des fibres Aδ (et non Aβ) ;


 discrimination nettement meilleure ;
 organisation métamérique ;
 répartition différente des seconds neurones et des zones de projection
cérébrales ;
 pas de rôle du nerf vagal.

La physiopathologie de la douleur cutanée n'est pas très différente de la


physiopathologie générale (voir chapitre 1 ). La douleur est déclenchée par un
excès de sensations (chaud, froid, pression, caustiques, anoxie…) en quantité
mais aussi dans le temps ou dans l'espace ou par des médiateurs biochimiques
de la douleur et de l'inflammation. Il existe donc une notion de seuil. Dans les
douleurs neurogènes ou psychogènes, c'est ce seuil qui est abaissé.

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▪ TRAITEMENT DE LA DOULEUR CUTANÉE

Rappelons tout d'abord qu'il a fallu une loi en France pour obliger les médecins
à apaiser la douleur ! C'est la loi Neuwirth (article L. 1110-5 du Code de la santé
publique).

Le moyen le plus performant d'évaluer la douleur reste l'échelle visuelle


analogique (EVA) graduée de 0 à 100. Le traitement doit être adapté en
fonction de l'intensité de la douleur. Tout cela est bien décrit dans les
recommandations de l'ANAES (de mars 2000). Il existe toutefois quelques
spécificités dans le traitement des douleurs cutanées.

La capsaïcine n'est malheureusement pas disponible en France. Des


préparations magistrales sont possibles. Elles permettent de traiter les douleurs
post-zostériennes des neuropathies diabétiques ou de la notalgie paresthésique.
Les anesthésiques locaux [ 5 ] (xylocaïne essentiellement) sont indiqués pour
prévenir les douleurs iatrogènes.

Le mélange équimolaire d'oxygène et de protoxyde d'azote (MEOPA) est aussi


d'un apport considérable dans ces circonstances. Son activité est analgésique
et anxiolytique. Il est surtout utilisé chez les enfants de plus de 2 ans [ 6 ], mais il
peut l'être à tous les âges de la vie. Même après 80 ans, il est utile et bien toléré,
pour des soins d'escarre par exemple.

Les antalgiques usuels ont toute leur place, qu'ils soient de niveau 1 (aspirine,
paracétamol, AINS), de niveau 2 (dextropropoxyphène, codéine, tramadol) ou
de niveau 3 (morphiniques). La gabapentine est indiquée dans les douleurs
neurogènes. La neurostimulation implantable ou la chirurgie sont réservées à
des cas graves.

Le placebo a parfois un intérêt, de mieux en mieux compris [ 7 ]. Chaque


antalgique a d'ailleurs une part de placebo (mais aussi de nocebo !).
L'acupuncture, qui n'est pas un placebo, est souvent intéressante.

Les antidépresseurs et les anxiolytiques sont indiqués dans les douleurs


psychogènes, certaines douleurs neurogènes et, surtout, dans le traitement d'un
retentissement psychique pathologique de la douleur. N'oublions d'ailleurs
jamais que douleur et nociception ne sont pas équivalentes. Le travail
d'intégration (processing) cérébral de la nociception est incontournable dans
la genèse de la douleur [ 8 ]. La perception que chacun a des sensations
douloureuses est variable d'un individu à l'autre et peut varier au cours du temps
et en fonction des circonstances. Cette dimension de la douleur doit être prise
en compte par le soignant. Elle ne peut être comprise que par l'entretien avec
le malade. Cet échange n'est d'ailleurs pas à sens unique. Rappelons qu'une
mauvaise information du patient diminue nettement son seuil douloureux [ 9 ,
10 ] !

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▪ ET L'ABSENCE DE DOULEUR CUTANÉE ?

L'absence de douleur cutanée peut conduire assez rapidement à la survenue


de plaies et de brûlures. C'est en particulier le cas dans les neuropathies
acquises comme la neuropathie diabétique ou la neuropathie alcoolique. C'est
aussi le cas dans des neuropathies héréditaires comme la neuropathie
radiculaire sensitive héréditaire, la neuropathie sensitive congénitale ou la
dysautonomie familiale. Certaines neuropathies sont même la cause d'une mort
très précoce, par hyperthermie ou hypothermie par exemple : insensibilité
congénitale à la douleur avec anhidrose et syndrome de Lesch-Nyhan. Il en va
de même dans l'indifférence à la douleur, qui correspond à un trouble cérébral.

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▪ LE SYSTÈME NEURO-IMMUNO-CUTANÉ (SNIC)

Il existe de mutiples connexions neuro-cutanées, de cellule à cellule, évoquant


des synapses [ 11 ]. En effet, des terminaisons nerveuses ont un renflement
terminal contenant des vésicules neuro-sécrétoires et l'espace intercellulaire est
inférieur à 300 nm, comme dans les connexions entre cellules nerveuses. Nous
verrons plus loin que des échanges de médiateurs sont probables entre types
cellulaires différents et que certains échanges électriques ont été décrits avec
les cellules de Merkel puis avec d'autres cellules. Ces synapses cutanées ont été
décrites avec les cellules de Merkel, cellules neuro-endocrine, puis avec les
cellules de Langerhans, cellules immunitaires épidermiques, les kératinocytes, les
mélanocytes, les mastocytes, les cellules dendritiques dermiques et les cellules
endothéliales.

Parmi les deux centaines de neuromédiateurs actuellement connus, environ 25


ont été retrouvés dans la peau. La quantité de neuromédiateurs varie selon
l'individu, selon la localisation et selon les circonstances physiologiques ou
pathologiques et, bien entendu, selon le neuromédiateur.

Les facteurs de croissance nerveuse interviennent un peu en amont, en


contrôlant non seulement la croissance neuronale mais aussi la sécrétion de
neuromédiateurs. Le plus connu d'entre eux est le facteur de croissance
nerveuse (NGF, nerve growth factor).

Les neurones synthétisent puis sécrètent neuromédiateurs (neurotransmetteurs)


et facteurs de croissance nerveuse et expriment à leur surface des récepteurs.
On s'aperçoit désormais que les cellules cutanées et/ou immunitaires peuvent
avoir des propriétés. La seule différence (cellules de Merkel mises à part) est
l'absence de granules neuro-sécrétoires. On estime que la production de
neuromédiateurs par les cellules immunitaires est équivalente à celle du système
nerveux.

Le système nerveux peut moduler toutes les fonctions de la peau en modifiant


les propriétés des cellules après activation par les neuromédiateurs de leurs
récepteurs spécifiques, qui sont généralement couplés à la protéine G.
L'immunité est étroitement contrôlée par le système nerveux, que ce soit par
voie endocrine (dans le sang ou la lymphe) ou paracrine. En effet, ce que nous
avons décrit dans la peau est vrai dans tous les organes, dont les ganglions
lymphatiques et la moelle osseuse.

Les connexions anatomiques ou fonctionnelles entre système nerveux, peau et


immunités sont donc très étroites. Les cellules cutanées, immunitaires et
nerveuses utilisent les mêmes médiateurs (qui peuvent être des
neuromédiateurs). Les cellules cutanées et immunitaires sont capables de
synthétiser les neurotransmetteurs et expriment leurs récepteurs spécifiques. Le
système nerveux contrôle les nombreuses propriétés de la peau. Dès lors, la
séparation traditionnelle de la peau et des systèmes immunitaire et nerveux
comme s'ils étaient étrangers apparaît artificielle. Nous proposons le concept de
système neuro-immuno-cutané (SNIC) [ 12 ] puisqu'un système est constitué par
un ensemble de cellules concourant aux mêmes fonctions.

Au cours des maladies dermatologiques, l'équilibre entre les différents


neuromédiateurs et leurs différents récepteurs est fortement perturbé. En effet,
l'inflammation est amplifiée par certains neuromédiateurs et les fonctions de
cellules telles que les cellules de Langerhans ou les lymphocytes, comme toutes
les cellules immunes, sont étroitement sous la dépendance des
neuromédiateurs. Ces phénomènes peuvent aussi expliquer comment le
psychisme module la peau normale ou pathologique. Nous ne détaillerons pas
les très nombreux déséquilibres décrits à l'intérieur du SNIC au cours des
maladies dermatologiques ou désordres cosmétiques. Nous prendrons quelques
exemples illustrant le rôle du système nerveux dans la peau au cours de
circonstances physiologiques ou physiopathologiques.

Les effets du stress sur la barrière cutanée commencent à être connus. Le stress
psychologique induit une moins bonne réparation de la barrière cutanée, et ce
d'autant plus qu'il est mal vécu. Une étude plus fine montre que le stress
psychologique altère plus fortement la barrière cutanée que la privation de
sommeil alors que l'exercice physique n'a pas d'effet. Les effets du stress sur la
peau sont probablement véhiculés par les catécholamines et les
glucocorticoïdes, mais aussi par les neuromédiateurs cutanés [ 13 ].

Le SNIC est fortement modifié par le rayonnement ultraviolet et les


neuromédiateurs permettent d'expliquer en partie les effets des ultraviolets. La
mélanocortine (MSH, melanocyte-stimulating hormone) le CGRP et le NGF sont
particulièrement impliqués. L'atteinte des propriétés des cellules de Langerhans
s'explique en grande partie par les altérations du SNIC [ 14 ].

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▪ CONCLUSION

Les médiateurs de l'inflammation sont donc fondamentaux dans la nociception.


Leur rôle ne se limite pas à la périphérie mais ils participent aussi à la
chronicisation de la douleur en agissant sur le système nerveux [ 15 ]. La douleur
ressentie a fait l'objet d'un travail d'intégration cérébrale complexe. Dans l'autre
sens, l'inflammation cutanée est sous le contrôle étroit du système nerveux.

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RÉFÉRENCES
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Chapitre 5 Myalgies, Déficit Musculaire, Augmentation des Enzymes Musculaires

Patrick CHERIN

La survenue d'une douleur musculaire (myalgie) oriente d'emblée vers une


affection musculaire soit exclusive (myopathie), soit dans le cadre d'une
polypathologie (affection systémique ou pathologie non organique).
Actuellement, une cinquantaine de maladies musculaires ont été identifiées sur
des bases cliniques, histopathologiques et moléculaires pour certaines d'entre
elles. Les principales affections musculaires sont classées selon leur
physiopathologie :

 dystrophie musculaire, caractérisée par une altération primaire des fibres


musculaires (ou de leur composant) et une disparition progressive de
celles-ci (myopathie de Duchenne : liée à l'absence d'une protéine
appelée dystrophine) ;
 myopathies congénitales, où le développement de la fibre musculaire au
cours de la période fœtale est perturbé, conduisant à des altérations de
la structure interne des fibres ;
 myopathies métaboliques car secondaires à un dysfonctionnement de la
voie de dégradation des sucres (glycogénose), du métabolisme des
graisses (lipidose) ou de la chaîne respiratoire mitochondriale (myopathies
mitochondriales) ;
 affections musculaires dues à une anomalie de l'excitabilité membranaire
(syndromes myotoniques, paralysies périodiques) ;
 affections musculaires acquises, d'origine inflammatoire, toxique et
iatrogène, endocrinienne ;
 syndromes myasthéniques dus à une perturbation de la transmission
neuromusculaire.

▪ INTRODUCTION

Les douleurs musculaires (myalgies) constituent un motif très fréquent de


consultation. La démarche diagnostique est clinique, les explorations étant
guidées par un interrogatoire quasi policier et un examen clinique complet.

La description sémiologique des myalgies est diverse et polymorphe. Leur


survenue oriente d'emblée vers une affection musculaire soit exclusive
(myopathie), soit dans le cadre d'une polypathologie (affection systémique ou
pathologie non organique). Leur origine «fonctionnelle» constitue néanmoins la
majorité des étiologies. Pour le clinicien, il s'agit d'un véritable défi car il s'agit de
diagnostics d'exclusion et il sera nécessaire de rester vigilant quant à l'attitude
diagnostique et aux explorations complémentaires à proposer afin de ne pas
laisser passer une maladie musculaire organique définie. La réalisation de ces
examens complémentaires devra être graduée selon la suspicion du clinicien,
et c'est bien là toute la difficulté à laquelle est confronté le médecin face au
problème diagnostique posé par ces myalgies diffuses.

Actuellement, plus d'une cinquantaine de myopathies ont été identifiées sur des
bases cliniques, histopathologiques et moléculaires pour certaines d'entre elles,
et regroupées selon leur physiopathologie :
 dystrophie musculaire, caractérisée par une altération primaire des fibres
musculaires (ou de leur composant) et une disparition progressive de
celles-ci (myopathie de Duchenne et absence de dystrophine) ;
 myopathies congénitales où le développement de la fibre musculaire au
cours de la période fœtale est perturbé, conduisant à des altérations de
la structure interne des fibres ;
 myopathies métaboliques car secondaires à un dysfonctionnement de la
voie de dégradation des sucres (glycogénose), du métabolisme des
graisses (lipidose) ou de la chaîne respiratoire mitochondriale (myopathie
mitochondriale) ;
 affections musculaires dues à une anomalie de l'excitabilité membranaire
(syndromes myotoniques, paralysies périodiques) ;
 affections musculaires acquises, d'origine toxique et iatrogène,
endocrinienne, infectieuse ou inflammatoire (myosite résultant d'une
activation anormale et/ou excessive du système immunitaire).

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▪ DÉMARCHE DIAGNOSTIQUE

Les myalgies se définissent comme des douleurs musculaires chroniques ou


aiguës, diffuses ou focales dont l'intensité est extrêmement variable d'un patient
à l'autre. Par ailleurs, on différencie les myalgies spontanées (ou de repos),
essentiellement présentes au repos et parfois augmentées à l'effort, des
myalgies déclenchées exclusivement par l'effort et rentrant alors dans le cadre
du «syndrome d'intolérance musculaire à l'exercice» orientant d'emblée vers
certaines étiologies ( tableaux 1 et 2 ).

Tableau 1 ▪ Myalgies focalisées.

Avec augmentation de volume ou induration Sans modification de


volume ni induration

Néoplasie Myalgies à l'exercice :

 sujets normaux
 artériopathie
chronique
(claudication
intermittente)
 myopathies
métaboliques

Traumatisme (hématome) Neuropathies et


radiculalgies cervico-
brachiales

Rupture tendineuse Mononeuropathie


ischémique

Rupture Kyste de Baker Syndrome crampes-


fasciculations
Thrombophlébite Syndrome de Parkinson

Infection : Syndrome des jambes sans


repos
 myosite streptococcique
 gangrène gazeuse
 pyomyosite
 trichinose, kyste hydatique, Spargonosis
 virus influenzae

Inflammation :

 myosite nodulaire localisée


 myosite proliférative
 myosite ossifiante pseudo-tumorale
 fasciite éosinophilique
 sarcoïdose nodulaire

Ischémie :

 nécrose musculaire après occlusion


artérielle
 diabète (infarctus quadricipital)
 embolie artérielle (endocardite)
 hyperparathyroïdie (nécrose
cutanéomusculaire)

Désordres métaboliques et toxiques :

 myopathie alcoolique aiguë


 myoglobinurie après coma toxique

Myolyse induite par l'exercice :

 sujets normaux (exercice sévère,


marathon)
 myopathies métaboliques
 dystrophie musculaire de Becker

États d'hyperactivité de l'unité motrice :

 syndrome de l'homme raide


 tétanos
 intoxication à la strychnine

Déscription sémiologique

Myalgies spontanées

Les myalgies spontanées se caractérisent par une sensation douloureuse


ressentie au niveau du muscle lui-même à distance de tout exercice, le plus
souvent dans les gros muscles proximaux. Elles sont parfois migratrices mais ne
sont jamais irradiantes. Leur intensité peut être extrêmement variable. Elles
surviennent au repos, sans facteur déclenchant et sont volontiers aggravées par
l'effort. Il peut s'y associer des douleurs articulaires, association qui fait parler d'
«arthromyalgies».

Tableau 2 ▪ Étiologies des myalgies généralisées.

Avec déficit moteur Sans déficit moteur

Myopathies inflammatoires : Pseudo-polyarthrite rhizomélique

 polymyosite
 dermatomyosite
 myosite à inclusions
 myosites granulomateuses
 myosites au cours des
connectivites

Infections : Syndrome éosinophilie-myalgie

 toxoplasmose
 trichinose
 virus influenzae et apparentés,
coxsackie, rétrovirus
 poliomyélite
 leptospirose, Lyme, bactéries à
Gram négatif, toxic shock
syndrome, syndrome de Kawasaki

Désordres métaboliques et toxiques : Syndrome myalgies-


fasciculations
 myopathie alcoolique aiguë
 hypophosphatémie
 kaliopénie avec ou sans
hypokaliémie
 nutrition parentérale totale (déficit
en acides gras essentiels)
 myopathie nécrosante
paranéoplasique
 myopathie dysthyroïdienne
 drogues
 déficit en carnitine
palmitoyltransférase

Myopathies enzymatiques et Myalgies au cours d'épisodes


congénitales fébriles et infections aiguës

Amylose Collagénoses

Avec douleurs osseuses : Hypothyroïdie

 ostéomalacie
 hyperparathyroïdie

Polyneuropathie : Autres endocrinopathies

 syndrome de Guillain-Barré
 porphyrie

Myofasciite à macrophages

Fibromyalgie

Maladie de Fabry

Syndromes parkinsoniens

Hypophosphorémie, diabète
phosphoré

Infection Maladies génétiques

Virus (grippe, coxsackie, rétrovirus…) Dystrophies musculaires :

 maladie de Duchenne-
Boulogne
 maladie de Becker
 autres dystrophinopathies

Mononucléose infectieuse Glycogénoses :

 maladie de McArdle
 phosphofructokinase
 phosphoglycérate kinase
 phosphoglycérate mutase
 lactate déshydrogénase
 maltase acide

Rickettsioses Anomalie du métabolisme


lipidique :

 carnitine
 carnitine
palmitoyltransférase

Toxoplasmose Anomalies du métabolisme des


purines : myoadénilate
déaminase

Trichinose Myopathies mitochondriales

Schistosomiases

Toxines bactériennes : staphylocoque, streptocoque, Clostridium…

Toxiques Anomalies métaboliques


Alcool Urémie

Chloroquine/hydroxy-chloroquine Insuffisance hépatique

Clofibrate Hypercalcémie

Cocaïne Hypocalcémie

Colchicine Hyperkaliémie

Cromolyne Hypokaliémie

Cyclosporine Hypernatrémie

Émétine Hyponatrémie

Gemfibrozil Hypophosphatémie

L-tryptophane Hypomagnésémie

Lovastatine Carence en vitamine D

D-pénicillamine Carence en vitamine E

Zidovudine et analogues

Maladies systémiques Maladies neurologiques

Polymyosite Dénervation

Dermatomyosite Sclérose latérale amyotrophique

Myosite à inclusions Maladie de la jonction


neuromusculaire (myasthénie,
Lambert-Eaton)

Myofasciite à macrophages Syndrome de Guillain-Barré

Pseudo-polyarthrite rhizomélique Porphyries

Lupus érythémateux systémique

Périartérite noueuse

Sclérodermie

Sarcoïdose

Maladie de Still de l'adulte…

Cancers et syndromes paranéoplasiques Endocrinopathies

Neuropathies Diabète

Neuromyosites (?) Hypothyroïdie

Myosites Hyperthyroïdie
Micro-embolies Hyperaldostéronisme

Syndrome de Lambert-Eaton Hyperparathyroïdie

Hypocalcémie

Maladie de Cushing

Maladie d'Addison

Divers

Syndrome hyperéosinophilique

Syndrome de Shulman

Syndrome de fatigue chronique

Paralysie périodique

Rhabdomyolyse

Fibromyalgie

Syndrome de Münchausen

Hystérie

Malabsorptions

Ces myalgies constituent un motif très fréquent de consultation. Les


caractéristiques sémiologiques de la douleur, du type dysesthésies, brûlures,
broiements…, orientent d'emblée vers une origine psychogène ou un syndrome
fibromyalgique, surtout s'il s'y associe un état anxio-dépressif et des troubles du
sommeil.

Crampes et contractures

La crampe est une contraction involontaire, intense, brutale, transitoire et


douloureuse de tout ou partie d'un muscle, s'accompagnant d'un déplacement
segmentaire incontrôlable. Elle survient essentiellement sur un muscle en
raccourcissement. Sa durée est variable mais toujours spontanément résolutive,
en quelques minutes en général.

La crampe serait liée à une activité réflexe médullaire anormale secondaire à


une fatigue du muscle, en position de raccourcissement, et/ou à une
sommation des potentiels d'action par décharge à haute fréquence des
motoneurones. Elle est favorisée par la fatigue, la déshydratation, les troubles
hydroélectrolytiques et certaines pathologies, notamment neurogènes
périphériques ou lors d'atteinte du motoneurone (corne antérieure au cours de
la sclérose latérale amyotrophique par exemple). Elles doivent être distinguées
des myotonies (contracture indolore) dont l'activité électrique caractéristique
provient de la fibre musculaire elle-même (maladie de Steinert).

Dans certains cas, on n'enregistre aucune activité électrique et on parle alors


de «crampes silencieuses» ou contractures musculaires vraies. Elles s'observent
volontiers au cours des myopathies métaboliques.

Enfin, il existe des contractures musculaires indolores induites par la percussion,


au cours de l'hypothyroïdie notamment.

Intolérance musculaire à l'exercice

Il faut distinguer les myalgies localisées survenant à l'effort (syndrome des loges,
phénomènes ischémiques, origine non musculaire) des myalgies diffuses d'effort.

Ces myalgies apparaissent exclusivement après un effort plus ou moins intense


et plus ou moins prolongé. Il peut s'y associer une rhabdomyolyse plus ou moins
sévère, pouvant se compliquer alors d'insuffisance rénale par myoglobulinurie. Il
est essentiel de définir les modalités d'apparition de ces douleurs par rapport à
l'intensité et à la durée de l'exercice.

On distingue schématiquement l'intolérance musculaire à l'exercice


apparaissant après un effort bref et soutenu (course de 100 m) évoquant, en
cas de myopathie organique, une pathologie liée aux différentes voies de
dégradation ou de synthèse du glycogène (glycogénose). On recherchera
l'existence d'un phénomène dit de second souffle, évocateur de certaines
glycogénoses et qui se caractérise par la disparition de ces sensations
douloureuses lors de la prolongation de l'effort initial intense. L'intolérance
musculaire à l'exercice peut également apparaître au cours d'efforts beaucoup
plus prolongés (course de plusieurs kilomètres), qui orientera plutôt vers un
trouble du métabolisme des lipides (lipidose). Parfois, cette distinction est
cependant impossible à préciser.

Antécédents personnels et familiaux

L'interrogatoire doit rechercher l'existence d'antécédents familiaux en faveur


d'une myopathie génétique. On recherchera également la survenue
d'événements dans la période périnatale (hypotonie, antécédent de mort
fœtale dans la famille…) ou la petite enfance (hypoglycémie ou
hépatomégalie évocatrice de glycogénose), des antécédents personnels ou
familiaux d'hyperthermie maligne et la prise de médicaments éventuellement
myotoxiques.

Signes associés

Les signes associés à des myalgies sont nombreux et justifient une recherche
systématique car ils argumentent d'emblée en faveur de certaines affections
musculaires organiques.

Myoglobinurie

Au cours de l'interrogatoire, il faut toujours rechercher une myoglobinurie par la


présence d'urines rouge foncé après un exercice, traduisant en règle générale
une rhabdomyolyse.
Déficit musculaire

La recherche d'un déficit moteur de type myogène (essentiellement proximal)


est fondamentale. Ce déficit peut se résumer à une simple fatigabilité
musculaire : après quelques accroupissements, le patient ne peut plus se
relever, il ne peut tendre les bras durablement (délai normal supérieur à 2
minutes et demie) ou garder les jambes fléchies (délai normal supérieur à 75
secondes).

Ce déficit peut être très discret, dépisté uniquement par un examen méticuleux
et attentif, voire absent, notamment dans certaines myopathies métaboliques.
Les pathologies musculaires primitives ne s'accompagnent pas de troubles
sensitifs ou d'anomalies des réflexes ostéo-tendineux.

Certaines maladies musculaires sont facilement identifiables par leur


topographie. Il faut donc préciser la topographie de ce déficit (et/ou de
l'amyotrophie) car certaines présentations auront une forte orientation
diagnostique (myopathie fascioscapulo-humérale, myopathie distale).

Modification du volume musculaire : amyotrophie ou hypertrophie

L'amyotrophie pose les mêmes problèmes et les mêmes orientations qu'un


déficit moteur. Beaucoup plus rare, une hypertrophie musculaire, notamment
des mollets, constitue un indice essentiel en faveur de certaines dystrophies
musculaires, notamment une myopathie de Becker et des dystrophinopathies.

Atteinte des muscles cardio-respiratoires

La recherche d'une atteinte associée du muscle cardiaque ou des muscles


respiratoires est essentielle sur les plans pronostique et diagnostique, car elle
oriente d'emblée certaines affections (atteinte respiratoire précoce des déficits
en maltase acide).

Myotonie

Une myotonie est définie par une lenteur à la décontraction musculaire,


facilement mise en évidence en demandant au sujet de serrer et desserrer un
objet. Elle est le plus souvent active et spontanée ou peut apparaître après
certains efforts comme le fait de serrer la main, cette dernière restant agrippée
à celle de l'examinateur. Elle est fréquemment augmentée par le froid. Sa
recherche doit être systématique car sa présence constitue un argument
diagnostique déterminant en faveur de certaines pathologies musculaires
dénommées myotonies congénitales (maladie de Steinert, myopathie
myotonique proximale [PROMM]…).

Autres signes associés

La recherche de signes cutanés peut orienter vers certaines pathologies


(œdème érythémateux péri-orbitaire et/ou hyperhémie péri-unguéale des
dermatomyosites, vascularite cutanée). Une altération de l'état général est aussi
un indice déterminant en faveur d'une affection systémique.

Une atteinte du système nerveux central peut se rencontrer au cours de


certaines myopathies comme les mitochondriopathies.

Une pathologie ophtalmologique constitue également un indice important,


comme une atteinte rétinienne (maladie mitochondriale) ou une cataracte
(certaines myotonies).

L'existence d'un état dépressif ou de troubles du sommeil oriente le clinicien vers


une étiologie musculaire non organique ou «fonctionnelle».

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▪ EXAMENS COMPLÉMENTAIRES

Cependant, malgré un interrogatoire précis et méticuleux et un examen


clinique bien conduit, il est parfois difficile de différencier pathologie organique
ou fonctionnelle ou de s'orienter vers une myopathie précise. Le clinicien devra
alors affiner l'enquête diagnostique par la réalisation d'examens
complémentaires.

Bilan hydroélectrolytique, inflammatoire et recherche d'une dysthyroïdie

Une anomalie hydroélectrolytique (dyskaliémie au moment d'un accès


paralytique) ou du métabolisme phosphocalcique doit être systématique.
L'existence d'un syndrome inflammatoire biologique argumente en faveur d'une
myopathie inflammatoire de type dermatomyosite ou polymyosite, d'une
connectivite ou d'une vascularite.

Le bilan thyroïdien est également systématique car les dysthyroïdies peuvent se


révéler par une atteinte musculaire initiale.

Dosage des CPK sériques

L'élévation des CPK sériques, inconstante, traduit une altération de la


membrane musculaire en regard de zones nécrotiques, mais elle est
indépendante de l'étiologie de l'affection musculaire. Il en est de même pour
une autre enzyme musculaire, l'aldolase, dont l'élévation peut être
indépendante de celle des CPK. Le dosage des autres enzymes (LDH, ASAT,
ALAT) est de valeur plus relative. Il faut se rappeler que tout traumatisme
musculaire ou tout effort physique fait augmenter le taux des enzymes
musculaires.

À l'opposé, toute élévation franche des CPK, c'est-à-dire supérieure à 3-5 N,


reproductible sur au moins 2 dosages constituera un argument diagnostique
important en faveur de l'organicité et mènera alors le clinicien à la réalisation
d'explorations plus invasives, notamment une biopsie musculaire.

Des enzymes musculaires normales n'excluent pas une maladie musculaire


organique.

On peut compléter ces examens par un dosage de la myoglobinémie et de la


myoglobinurie.

Anticorps
La présence d'auto-anticorps oriente d'emblée vers une pathologie musculaire
autoimmune, de type polymyosite (PM), dermatomyosite (DM) ou myosite
associée à une autre connectivite. Les facteurs rhumatoïdes sont positifs dans 20
% des PM/DM. Les facteurs antinucléaires et anticytoplasmiques sont présents
dans 30 à 50 % des cas. Il peut s'agir d'anticorps dirigés contre les protéines
musculaires ou d'autres protéines nucléaires non spécifiques des PM/DM
(anticorps anti-RNP, anti-PM-Scl, anti-SSA/Ro et anti-SSB/La, anti-Ku), également
présents dans d'autres affections auto-immunes. Il existe des anticorps plus
spécifiques des myosites :

 des anticorps anticytoplasmiques dirigés contre les enzymes aminoacyl-t-


RNA-synthétases qui permettent de fixer chaque acide aminé à son t-RNA
lors de la synthèse protidique. Il s'agit des anticorps anti-JO1 (histidyl-RNA),
PL7 (thréonyl t-RNA), PL12 (alanine t-RNA), OJ (isoleucil t-RNA), EJ (glycyl t-
RNA) et KS (asparaginyl-t-RNA). Ces anticorps sont retrouvés dans 10 à 30
% des PM, constituant le syndrome anti-JO1 ou des antisynthétases,
souvent associés à une pneumopathie spécifique interstitielle ;
 les anticorps anticytoplasmiques anti-SRP. Ils sont notés dans 5 % des
myosites caractérisées par un déficit sévère, des taux de CPK
extrêmement élevés, la fréquente association à une myocardite, la
résistance aux traitements corticoïdes et immunosuppresseurs responsable
d'un mauvais pronostic (25 % de survie à 5 ans) ;
 il peut aussi s'agir d'anticorps antinucléaires beaucoup plus spécifiques
des DM appelés anti-Mi-1 et anti-Mi-2. Ils s'observeraient dans 5 à 10 % des
DM classiques très cortico-sensibles et d'un excellent pronostic.

Électromyogramme (EMG)

L'EMG fait partie des explorations complémentaires systématiques en


pathologie musculaire. Cependant, sa rentabilité est assez faible devant des
myalgies de repos ou d'effort si l'examen neurologique est rigoureusement
normal, comme c'est souvent le cas au cours des myopathies métaboliques.
L'EMG recherche des éléments traduisant un processus de dénervation-
réinnervation, la mise en évidence d'une myotonie et d'un bloc
neuromusculaire. Dans la plupart des affections musculaires, il n'existe pas
d'activité électrique au repos. Deux types d'anomalies peuvent être enregistrés :
des salves myotoniques, caractéristiques des myotonies (maladie de Steinert…)
et des salves pseudo-myotoniques rencontrées notamment dans les dystrophies
(maladie de Duchenne, dystrophie des ceintures), les polymyosites et les
polyneuropathies chroniques (maladie de Charcot-Marie-Tooth). Enfin, l'EMG est
également intéressant pour rechercher l'existence d'une neuropathie sous-
jacente associée.

Imagerie musculaire

Le scanner musculaire permet une cartographie précise des anomalies


volumétriques des muscles atteints (qui apparaissent hypodenses), dévoilant
une sélectivité non appréciable cliniquement : ainsi, dans la myopathie de
Duchenne et de Becker, le respect électif de la loge interne de la cuisse est très
caractéristique.
L'IRM musculaire est réalisée en cas de suspicion de myosite, à la recherche
d'hypersignaux musculaires en relation avec l'inflammation focale
intraparenchymateuse. On réalise des coupes avec analyse en T1-T2 et surtout
séquences STIR afin de différencier ces hypersignaux de ceux observés au cours
des dégénérescences graisseuses du muscle. L'IRM musculaire est utile dès lors
que l'on évoque une myopathie inflammatoire dans le cadre du diagnostic
positif et du suivi évolutif.

Épreuve d'effort sur bicyclette ergométrique (ou grip test de l'avant-bras)

Il s'agit d'une évaluation métabolique avec dosage sanguin des lactates,


pyruvates, ammoniémie au repos et au cours de l'effort musculaire. Cette
épreuve d'effort confirme un tableau d'intolérance à l'effort (réduction de la
puissance et de la consommation d'oxygène, élévation des CPK en fin
d'exercice) et précise le mécanisme : absence d'élévation de l'acide lactique
après l'effort, évocatrice d'une glycogénose (en particulier une maladie de
McArdle), hyperlactatémie orientant vers un dysfonctionnement mitochondrial
(lipolyse ou chaîne respiratoire).

Spectro-résonance magnétique nucléaire d'effort du phosphore 31

Cet examen permet d'étudier différentes constantes métaboliques au cours de


l'effort musculaire et oriente soit vers une glycogénose, soit vers une maladie
mitochondriale. Elle ne permet toutefois jamais, à elle seule, de porter un
diagnostic formel, nécessitant la réalisation d'une biopsie musculaire dans la
majorité des cas.

Biopsie musculaire

Il s'agit de l'examen clé du diagnostic dans la plupart des maladies musculaires


à condition d'en respecter les règles et d'en connaître les possibilités et les
limites. Tout le problème est de poser les bonnes indications. Il est en effet hors
de question de réaliser une biopsie musculaire chez tous les patients présentant
des myalgies. Devant celles-ci, les arguments les plus pertinents en faveur de la
réalisation d'une biopsie musculaire sont :

 des antécédents familiaux de myopathie ;


 une intolérance musculaire à l'exercice sans notion de troubles de
l'adaptation à l'effort ;
 un déficit myogène à l'examen clinique témoignant d'une atteinte
«myopathique» sous-jacente ;
 l'existence d'une amyotrophie ou d'une hypertrophie musculaire ;
 une altération de l'état général ;
 une neuropathie associée (souvent dans le cadre d'une vascularite) :
réalisation possible d'une biopsie neuromusculaire ;
 une élévation franche des CPK (d'au moins 3 à 5 fois la normale) ;
 un syndrome inflammatoire biologique persistant ;
 un EMG myogène ;
 une spectro-IRM ou un test d'effort pathologique.

Les conditions de prélèvement et d'analyse de la biopsie doivent être strictes :


l'interprétation est impossible lorsque le muscle biopsié est trop atteint (remplacé
par du tissu conjonctif) ou que la biopsie est réalisée au niveau du site d'un EMG
responsable d'une nécrose focale des fibres.

La biopsie doit être réalisée de manière chirurgicale, en règle général dans un


muscle proximal, et étudiée par des spécialistes des pathologies musculaires,
avec des techniques morphologiques, histo-enzymologiques, immunologiques
(immunomarquage sur coupe, immunoprécipitation sur gel) et ultrastructurales
(laboratoire spécialisé).

Dans certains cas, les anomalies de structure sont caractéristiques d'une


étiologie précise :

 atrophie périfasciculaire dans une dermatomyosite ;


 surcharge marquée en glycogène et en lipides, accumulation majeure
de mitochondries dans les myopathies métaboliques (pas de biopsie au
décours immédiat d'une myolyse) ;
 altération de structure caractéristique de certaines myopathies
congénitales (à bâtonnets, à central core, myotubulaire).

Examens complémentaires

Les examens complémentaires ont pour objectif de :

 préciser une éventuelle atteinte plurisystémique (cœur, cataracte, etc.) ;


 rechercher un contexte inflammatoire (vitesse de sédimentation, bilan
immunologique) et endocrinien (dosage de l'hormone thyroïdienne, du
cortisol, etc.), une anomalie du bilan phosphocalcique ;
 apprécier la gravité de la maladie (insuffisance respiratoire,
cardiomyopathie) ;
 caractériser l'anomalie génique pour les affections musculaires
génétiques (localisation, connaissance des mutations), permettant un
dépistage néonatal (par exemple pour la maladie de Duchenne ou de
Steinert), et déduire, grâce à la génétique inverse, les caractéristiques
(structure, fonction) de la protéine musculaire défaillante ou absente.

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▪ DIAGNOSTIC DES PRINCIPALES MYOPATHIES

Myopathie héréditaire à début très précoce, néonatal

Diagnostic : expression clinique (hypotonie néonatale), antécédents familiaux,


cardiomyopathie, contexte métabolique (acidose lactique, acidurie
organique), EMG, biopsie musculaire.

Principales entités :

 Steinert néonatal ;
 myopathies congénitales (à bâtonnets, central core, multi-minicore,
myotubulaire, centro-nucléaire…) (diagnostic possible à l'âge adulte pour
les formes légères) ;
 affections métaboliques : anomalies de la chaîne respiratoire, de
l'oxydation des graisses, déficit en maltase acide (dosage) ;
 dystrophie musculaire congénitale ;
 amyotrophie spinale infantile.

Myopathie héréditaire, lentement progressive

Diagnostic : transmission, répartition du déficit, myotonie, cardiopathie, biopsie


musculaire (dystrophie, anomalies de la dystrophine, de l'adhaline ou autre
protéine apparentée).

Principales entités :

 récessive liée à l'X (garçon atteint, mère transmettrice) :


 Duchenne (précoce et sévère),
 Becker (plus tardive et moins sévère), autres dystrophinopathies en
commun : pas d'atteinte faciale, gros mollets, cardiopathie,
anomalies de la dystrophine ou protéines apparentées,
 Emery-Dreifuss : rétractions bicipitales, maladie de l'oreillette ;
 autosomique dominante :
 myopathie facio-scapulo-humérale (face, ceinture scapulaire,
atteinte asymétrique),
 Steinert (face, myotonie, déficit distal et symétrique, cataracte,
bloc de conduction cardiaque) ;
 autosomique récessive :

 dystrophie des ceintures,


 dystrophie maghrébine (déficit en adhaline),
 myopathie distale.

Syndromes myotoniques

Diagnostic : antécédents familiaux, myotonie (retard à la décontraction


musculaire), paramyotonie, atteinte plurisystémique, étude de l'ADN, biopsie
musculaire caractéristique.

Principales entités :

 maladie de Steinert, étiologie la plus fréquente, topographie évocatrice ;


 les myotonies congénitales dominantes (Thomsen) ou récessives (Becker),
au début précoce, sans atteinte plurisystémique ;
 paramyotonie de Von Eulenburg (transmission dominante, aggravation
de la myotonie à la répétition du mouvement et au froid, mutation du
gène du canal sodium) ;
 syndrome de Schwartz-Jampel (dysmorphie, chondrodysplasie).

Ophtalmoplégie avec plus ou moins troubles bulbaires et/ou déficit ou


fatigabilité des membres

Diagnostic : profil évolutif, notion familiale, atteinte plurisystémique, test au


Tensilon, bloc neuromusculaire à l'EMG, dosage d'anticorps anti-RACh, biopsie
musculaire.

Principales entités :
 myasthénie : clinique, test au Tensilon +, bloc neuromusculaire à l'EMG,
anticorps anti-RACh, thymus ;
 myopathie mitochondriale : antécédents familiaux, myalgies à l'effort,
cardiopathie, surdité, rétinite pigmentaire, atteinte cérébelleuse,
hyperlactatémie, biopsie musculaire (fibres rouges déchiquetées, ragged
red fibers) ;
 myopathie oculo-pharyngée : autosomique dominante, clinique, biopsie
musculaire (vacuoles bordées).

Épisodes paralytiques récidivants

Diagnostic : kaliémie au cours de la crise, antécédents familiaux, myotonie,


biopsie musculaire, étude de l'ADN.

Principales entités :

 héréditaires à transmission dominante :


 paralysie familiale hypokaliémique,
 paralysie familiale hyperkaliémique (myotonie, mutation gène
canal sodium),
 dans les 2 cas : vacuoles et agrégats tubulaires à la biopsie
musculaire ;
 acquises :

 hypokaliémique (diarrhée, vomissements, diurétiques, thyrotoxicose,


hyperaldostéronisme),
 hyperkaliémie (insuffisance rénale, insuffisance surrénale, apport
exogène excessif…).

Myolyse et/ou intolérance à l'effort

Diagnostic : recherche d'épisodes de nécrose musculaire aiguë (myolyse),


épreuve d'effort (production d'acide lactique), biopsie musculaire
(accumulation de glycogène ou de lipides, dosages enzymatiques).

Principales entités :

 glycogénoses : déficit en phosphorylase (McArdle), phosphorylase kinase


:
 enzymes de la glycolyse,
 myolyse, intolérance à l'effort bref, absence d'élévation des
lactates à l'effort,
 surcharge en glycogène à la biopsie musculaire ;
 lipidoses : déficit en carnitine palmityl transférase :
 myolyse après jeûne et/ou effort prolongé,
 biopsie musculaire normale ou surcharge discrète en lipides,
 activité enzymatique diminuée (lymphocytes et muscle) ;
 myopathies mitochondriales : pas de myolyse, hyperlactacidémie,
atteinte plurisystémique, biopsie musculaire (fibres rouges déchiquetées,
ragged red febers) ;
 autres déficits enzymatiques : myoadénylate déaminase, bêta-oxydation,
autres.
Myopathie acquise, rapidement évolutive

Diagnostic : contexte inflammatoire, plurisystémique, toxique, iatrogène,


endocrinien, biopsie musculaire.

Principales entités :

 inflammatoires : myosites, sarcoïdose, périartérite noueuse (mutinévrite) ;


 toxiques et iatrogènes : alcool + médicaments myotoxiques ;
 endocriniennes : hyperthyroïdie, hypothyroïdie, Cushing,
hyperparathyroïdie.

Myalgies focalisées

Ces myalgies sont résumées dans le tableau 1 .

Étiologies des myalgies généralisées

Les étiologies des myalgies généralisées sont présentées dans le tableau 2 .

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RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
[1] Brooke M.H. A clinician's view of neuromuscular diseases. Baltimore : Williams
and Wilkins, 1986.
[2] Cherin P. Muscle, fatigue, sport et infection. Rev Med Interne 1999 ; 20 : 794-
803.
[3] Dubowitz V. Muscle biopsy. A practical approach. Londres : Bailliere-Tindall,
1985.
[4] Engel A, Franzini-Armstrong C. Myology. New-York : McGraw-Hill Book
Company, 1994.
[5] Mastaglia FL, Walton J. Skeletal muscle pathology. Édimbourgh : Churchill
Livingstone, 1992.
[6] Serratrice G, Pelissier JF, Pouget J. Les maladies neuromusculaires. Paris :
Masson, 1993.
Chapitre 6 Douleurs dans les Rhumatismes Inflammatoires: les Enthésites Sont
Souvent Méconnues

Jean-Marie BERTHELOT

Les douleurs sont le motif essentiel de consultation dans les rhumatismes


inflammatoires. Il faut aussi prévenir la dégradation des articulations et des
tendons (surtout dans les polyarthrites rhumatoïdes), ce qui requiert très souvent
un traitement «de fond» et, parfois, une «biothérapie» (anti-TNF-α notamment)
qui sont aussi les meilleurs «antalgiques» à moyen terme. Le soulagement
durable passe par un diagnostic juste (ne pas méconnaître une goutte
atypique, une maladie de système grave), qui n'est toutefois pas facile à poser
au début, surtout quand le rhumatisme appartient au groupe des
spondylarthrites. En effet, la présentation clinique peut mimer celle des
fibromyalgies. Les traitements symptomatiques les plus efficaces de la douleur
des rhumatismes inflammatoires varient selon les diagnostics : une
corticothérapie à faible dose (moins de 8 mg/j) est souvent rapidement
efficace dans les polyarthrites rhumatoïdes mais expose à une
corticodépendance. Les AINS sont recommandés en première intention dans
les spondylarthrites et la colchicine à 1 mg/j sert à prévenir les accès d'arthrite
microcristalline. Les morphiniques sont souvent peu efficaces, du moins dans les
arthrites, les récepteurs Mu. n'étant guère exprimés dans les synoviales, mais les
antalgiques de classes II aident beaucoup de patients. Les infiltrations sont
surtout efficaces, et rapidement, dans les arthrites et bursites, notamment
quand le geste est guidé (radiographie, échographie).

▪ INTRODUCTION

Les douleurs sont le motif essentiel de consultation dans les rhumatismes


inflammatoires. Il ne faut toutefois pas perdre de vue :

 que ceux-ci peuvent induire aussi des déformations/destructions (parfois


aussi rapides que sournoises) des structures articulaires et péri-articulaires,
source de handicaps ultérieurs marqués [ 1 ] ;
 que l'inflammation non contrôlée induit aussi une surmortalité précoce
par pathologie cardio-vasculaire. Ainsi, si le traitement de la douleur des
rhumatismes inflammatoires est essentiel, il est encore plus important
d'instituer dès que possible un traitement permettant de bloquer, le plus
efficacement possible, à la fois l'inflammation systémique et la progression
éventuelle des anomalies structurales. Il s'agissait seulement, par le passé,
de «traitements de fond» (comme le méthotrexate) dont l'efficacité peut
être bonne ou très bonne dans les polyarthrites rhumatoïdes dans près
des deux tiers des cas. Depuis plus de 5 ans, on dispose aussi en routine
de traitements encore plus efficaces (les «biothérapies», comme les anti-
TNF-α) capables par exemple de bloquer la progression des lésions
radiologiques de la majorité des polyarthrites rhumatoïdes, surtout s'ils sont
combinés au traitement de fond. Il est désormais bien établi que le retard
à l'introduction d'un traitement de fond efficace aggrave le pronostic à
moyen et long termes de la polyarthrite rhumatoïde [ 2 ] et il pourrait en
être de même pour les biothérapies dans le traitement des
spondylarthrites [ 3 ].
Par conséquent, les traitements les plus efficaces de ces rhumatismes
inflammatoires passent par un diagnostic approprié, ce qui vaut aussi pour le
traitement de leurs douleurs :

 même s'ils n'agissent pas rapidement (en quelques semaines à 3 mois), les
traitements de fond (associés parfois à des biothérapies) améliorent la
douleur bien plus que les traitements antalgiques ;
 les douleurs en rapport avec les rhumatismes inflammatoires ne
répondent souvent que mal ou très mal aux antalgiques classiques, y
compris la morphine. Cette résistance à la morphine s'explique sans
doute en bonne partie par le fait que l'inflammation régule à la baisse
l'expression des divers récepteurs à la morphine au sein des articulations [
4 ];
 les traitements anti-inflammatoires ou corticoïdes par voie générale
n'améliorent les douleurs inflammatoires que de manière incomplète (et
très variable selon les patients) ; par ailleurs, leur usage au long cours va
être de plus en plus réfléchi car, depuis la mise en évidence d'un excès
d'événements thrombotiques lors de traitements au long cours par le
rofécoxib [ 5 ] puis le célécoxib [ 6 ], plusieurs études transversales
suggèrent que ce risque soit, à des degrés divers, aussi partagé par les
AINS «classiques» [ 7 ], les corticoïdes ayant aussi des effets secondaires
parfois sérieux à long terme.

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▪ DIAGNOSTIC DES RHUMATISMES INFLAMMATOIRES

Il n'est toutefois pas toujours facile de faire le diagnostic précoce des


rhumatismes inflammatoires et, quand ces derniers sont repérés, d'en faire un
diagnostic plus précis [ 8 ]. Si l'on met à part les formes aiguës de goutte et de
chondrocalcinose, qui toucheraient respectivement de 5 [ 9 ] à 20 % de tous les
individus au moins une fois dans leur existence, on peut estimer que les
rhumatismes inflammatoires chroniques concernent près de 2 % de la
population [ 8 ] ( figure 1 ). Environ 30 % sont des polyarthrites rhumatoïdes, 30
% des spondylarthropathies (dont les formes les plus sévères aboutissent au fil
des ans à une spondylarthrite ankylosante), 30 % restent durablement
inclassables (même si une minorité des patients ainsi atteints évoluent au fil des
années vers un tableau plus typique, qui est bien plus souvent une
spondylarthropathie qu'une polyarthrite rhumatoïde). Restent environ 10 %
d'autres causes, dominées par des pathologies microcristallines chroniques
(goutte surtout chez l'homme et chrondrocalcinose surtout chez les sujets âgés)
(5 % au moins), les connectivites étant nettement plus rares (lupus, syndrome de
Sjögren, dermatomyosite, sclérodermies, sarcoïdose, polychondrite, etc.) de
même que les vascularites (périartérites noueuses) (de 1 à 2 % chacune) [ 8 ] (
figure 1 ). Sont également rares, voire très rares, les cas de polyarthrite révélant
un cancer ou une infection grave (comme le VIH). Il est toutefois nécessaire
d'éliminer cette possibilité au moindre doute, d'autant que les polyarthrites
infectieuses ou paranéoplasiques ne répondent souvent que peu ou pas aux
traitements par anti-inflammatoires ou corticoïdes et aux traitements de fond, et
que le traitement des douleurs souvent intenses de ces patients passe par la
reconnaissance de la pathologie sous-jacente. Par exemple, dans les formes
typiques de polyarthrite paranéoplasique, l'exérèse de la tumeur (ou son
traitement médical efficace) entraîne une amélioration spectaculaire des
douleurs et des gonflements. Il faut savoir évoquer ce rare diagnostic :

Figure 1 ▪ Rhumatismes inflammatoires chroniques (2 %).

 quand la polyarthrite est très évolutive et associée cliniquement à des


œdèmes des extrémités mal expliqués et/ou à l'apparition d'un
hippocratisme digital ;
 quand coexiste une altération de l'état général et que la polyarthrite
répond mal à la corticothérapie, par exemple à une posologie de 20 mg
de prednisolone (Cortancyl®).

Ce diagnostic peut être conforté par la mise en évidence, sur les radiographies,
des extrémités d'une périostite, c'est-à-dire d'un épaississement du périoste
parfois vu d'abord sur la scintigraphie osseuse.

La classification des patients dans un de ces cadres nosologiques relève surtout


de la compétence du spécialiste, d'autant qu'elle requiert souvent un
interrogatoire et un examen clinique assez longs ainsi que la pratique
d'examens complémentaires d'interprétation parfois subtile.

En revanche, le diagnostic de rhumatisme inflammatoire doit être fait en amont


et est assez souvent bien moins simple qu'il n'y paraît. Il peut s'agir d'erreur par
excès, certaines pathologies qui ne sont pas des rhumatismes inflammatoires
étant prises comme tels ; par exemple, il n'est pas rare que des diagnostics de
rhumatisme inflammatoire soient corrigés pour celui de polyarthrose,
notamment quand celle-ci commence, sur un mode assez aigu chez une
femme en période périménopausique, en touchant les doigts [ 8 ].

Toutefois, il peut aussi s'agir d'erreurs par défaut, certains rhumatismes


inflammatoires étant confondus, et parfois pendant longtemps, avec d'autres
étiologies de douleurs chroniques comme les syndromes douloureux régionaux
complexes de type 1 (du fait des gonflements parfois associés à ces
rhumatismes inflammatoires et de l'hyperpathie fréquente dans les arthrites mal
traitées) et surtout (pour les spondylarthropathies) en raison de diagnostic
erroné de lombalgie chronique ou de fibromyalgie. En effet, les
spondylarthropathies engendrent des douleurs rachidiennes et des douleurs
périphériques aux mêmes points que ceux servant au diagnostic de cette
entité. Le diagnostic différentiel entre rhumatismes inflammatoires et ces trois
pathologies est souvent d'autant plus difficile qu'elles peuvent s'intriquer. Ainsi,
de 20 à 30 % des cas de rhumatisme inflammatoire sont associés à un tableau
de fibromyalgie, alors baptisée de «secondaire» [ 10 ], qui peut brouiller
l'analyse du rhumatisme inflammatoire et en faire différer la reconnaissance.

Certaines idées reçues doivent donc être combattues pour éviter des
diagnostics par défaut des rhumatismes inflammatoires :

 les gonflements des articulations sont soit très tardifs ou inconstants


(polyarthrite rhumatoïde), soit absents (formes axiales ou
polyenthésitiques des spondylarthropathies). Il n'y a par ailleurs presque
jamais de rougeur (seulement dans les arthrites suraiguës dues à une
infection ou à la libération de microcristaux) et la chaleur est également
inconstante ;
 la douleur inflammatoire typique (réveillant le patient la nuit et induisant
une raideur matinale prolongée) est certes fréquente et très évocatrice,
mais elle peut manquer, notamment dans les formes «vieillies» de
rhumatismes inflammatoires ou durant les phases de rémission. Lorsque les
douleurs ne sont présentes que durant la journée, leur amélioration par le
mouvement peut mettre la puce à l'oreille, car il est exceptionnel que les
efforts améliorent nettement les fibromyalgies (ce qui vaut aussi pour les
lombalgies chroniques ou les syndromes douloureux régionaux
complexes) ;
 les tests thérapeutiques aux anti-inflammatoires, voire aux corticoïdes, ne
sont pas toujours discriminants : ces traitements peuvent en effet
améliorer aussi des pathologies dégénératives (arthrose) et, à l'inverse,
rester tout à fait inefficaces dans certaines polyarthrites rhumatoïdes ou
spondylarthropathies ;
 enfin, la présence d'une inflammation biologique peut manquer
durablement : si cela est assez rare dans les polyarthrites rhumatoïdes (de
10 à 20 % des patients seulement ont à la fois une vitesse de
sédimentation et une CRP normale ou subnormale), ce phénomène est
très fréquent, voire la règle, dans les spondylarthropathies, notamment
dans les formes débutantes où le diagnostic n'est pas encore fait et où les
douleurs des patients ne sont associées à aucun signe «objectif».
Toutefois, même en ayant conscience de ces écueils, le diagnostic positif d'un
rhumatisme inflammatoire peut encore être difficile, voire manqué, si l'on ne
s'attache qu'à l'examen des articulations stricto sensu (synoviale, cartilage).

En effet, d'une part, les rhumatismes inflammatoires peuvent aussi induire des
douleurs par l'atteinte de tissus autres que l'articulation (compression nerveuse
comme celle du nerf médian au canal carpien ou de la moelle en regard d'une
luxation des vertèbres C1 sur C2, induction de fissures osseuses de voisinage,
etc.) et, d'autre part et surtout, les articulations doivent être examinées au sens
«large» du terme : outre le cartilage (non innervé) et la synoviale (plus ou moins
innervée selon les patients et les pathologies), beaucoup d'autres structures
peuvent être à l'origine de douleurs :

 la capsule articulaire, structure la plus innervée et dont la distension par


un épanchement articulaire explique en bonne part les douleurs des
arthrites ;
 l'os sous-chondral et le périoste adjacents à l'articulation, également très
innervés ;
 les gaines synoviales entourant les tendons dans certains sites (poignets,
doigts, arrière-pieds, tendon du long biceps à l'épaule), qui
communiquent parfois avec l'articulation ;
 les très nombreuses bourses synoviales séparant soit les articulations ou les
os de la peau, soit les tendons des articulations ou des autres tendons (les
bourses sont en effet des espaces de glissement) : de petites bursites
peuvent induire des douleurs très intenses et d'autant plus durables
qu'elles ne peuvent assez souvent être affirmées que par l'imagerie
(échographie, IRM) ;
 enfin, et non des moindres, les enthèses ( figures 2 , 3 , 4 , 5 , 6 , 7
, 8 , 9 , 10 , 11 and 12 ).
Figure 2 ▪ Enthésite du talon.
Figure 3 ▪ Passage progressif tendon/cartilage/os.

Figure 4 ▪ Rôle des enthèses : dissiper les stress de traction (comme le cordage
qui tire, mais aussi «ripe» sur la coque).
Figure 5 ▪ Rôle des enthèses : dissiper les stress de traction.
Figure 6 ▪ Sont assimilées aux enthèses les zones où un fibrocartilage protège
des tractions, comme le fibrocartilage des sésamoïdes.

Figure 7 ▪ Sont assimilées aux enthèses les zones où un fibrocartilage protège


des frottements latéraux : périoste recouvert de cartilage.
Figure 8 ▪ Aspect de doigts et d'orteils en «saucisse».

Figure 9 ▪ Syndesmophytes rachidiens : ossification partant des enthèses.

Figure 10 ▪ Inflammation de l'os partant des enthèses.


Figure 11 ▪ Enthésites rotuliennes (tendon du quadriceps).

Figure 12 ▪ Enthésites des pieds et des talons.

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▪ QU'EST-CE QU'UNE ENTHÈSE ?

La majorité des douleurs des spondylarthropathies sont en rapport avec une


inflammation des enthèses (très présentes au niveau du rachis-spondyl ( figures
9 et 10 ), mais aussi autour des articulations-arthropathies). Les enthèses
peuvent toutefois devenir douloureuses dans d'autres contextes que les
spondylarthropathies : certaines connectivites comme le syndrome de Sjögren,
certains rhumatismes microcristallins (goutte, chondrocalcinose) ainsi que
certaines pathologies non inflammatoires des enthèses (tractions excessives,
etc.).

Qu'est-ce qu'une enthèse ? Stricto sensu, l'enthèse est la zone de l'os où s'insère
soit un tendon, soit un ligament, soit une capsule articulaire. Autrement dit, c'est
une zone d'ancrage où on passe progressivement d'une structure tendineuse
ou ligamentaire à un cartilage fibreux non calcifié, puis à un cartilage calcifié
et, enfin, à l'os au sein duquel se trouvent les cellules de la moelle osseuse (avec
les cellules de la réponse immune) ( figure 3 ). Le rôle physiologique de
l'enthèse stricto sensu est donc de soutenir les stress de traction. Deux exemples
typiques d'enthèses stricto sensu sont, d'une part, l'insertion du tendon rotulien
sur la tubérosité tibiale antérieure à 2 ou 3 cm sous le genou et, d'autre part,
l'insertion du tendon d'Achille sur le calcanéum ( figure 4 ). Les parties
périphériques des disques intervertébraux qui s'ancrent très fortement dans les
plateaux vertébraux sus-jacents et sous-jacents sont également assimilables à
des enthèses ( figure 10 ), de même que les insertions des très nombreux
ligaments de l'organisme y compris (voire surtout) au niveau du rachis ( figure 9
). Les spondylarthropathies touchent électivement les enthèses, ce qui explique
bien la distribution des douleurs : rachis lombaire, dorsal, cervical, mais aussi
toutes les zones du corps riches en enthèses, des talons aux genoux, en passant
par les grands trochanters. L'atteinte très fréquente des sacro-iliaques
(s'exprimant par des douleurs fessières à bascule, parfois associées à des
sciatalgies) s'explique d'une part par la présence de puissantes enthèses de
part et d'autre de l'articulation et, d'autre part, par la nature du cartilage
présent sur le versant iliaque de l'articulation (car il s'agit d'un fibrocartilage,
cible probable de la réaction immunologique favorisant les spondylarthrites).

Le concept d'enthèse a été étendu récemment à des zones proches de


l'articulation où les tendons ou les ligaments coulissent ou dérapent ( figures 4
et 5 ), comme la face latérale des doigts et des orteils ( figures 6 , 7 and 8
) [ 11 , 12 ]. En effet, on retrouve dans ces sites les mêmes structures
histologiques que dans les zones d'insertion : fibrocartilage à la surface de l'os et
petites masses graisseuses (souvent très innervées) servant à amortir les stress qui
sont toujours des stress de traction, mais couplés cette fois à une friction [ 11 , 12
]. La principale raison à cette extension du concept (enthèses lato sensu ou
«organe enthésitique») tient au fait que ces zones sont également électivement
touchées lors des spondylarthropathies, leur atteinte diffuse pouvant induire
l'aspect caractéristique de doigts ou orteils en «saucisse» ( figure 8 ).

La situation en «profondeur» des enthèses d'insertion fait que les douleurs


induites restent souvent nues, sans gonflements ni douleurs à la mobilisation
douce des articulations. Pour réveiller les douleurs d'enthésite, il faut soit tirer sur
le tendon ou le ligament correspondant à cette insertion (mais cette
manœuvre réveille aussi des douleurs de tendinite), soit surtout percuter avec le
doigt la zone d'insertion. Celle-ci peut toutefois être douloureuse dans d'autres
contextes, dont encore les tendinopathies et, surtout, les fibromyalgies : en effet,
les enthèses sont naturellement assez richement innervées [ 11 ] et la baisse du
seuil de la douleur dans les fibromyalgies «parle» prioritairement dans ces zones,
soumises par ailleurs à des stress de traction physiologique comme le simple fait
de se tenir debout.

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▪ DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL ENTRE FIBROMYALGIES ET POLYENTHÉSITES

Le diagnostic différentiel entre fibromyalgie et polyenthésite est donc souvent


assez subtil, comme cela a déjà été évoqué, d'autant qu'une fatigue intense
peut accompagner les deux affections. Néanmoins, un faisceau d'arguments
permet souvent de démarquer les deux entités sans aller jusqu'à un test
thérapeutique avec les produits les plus efficaces, mais aussi les plus toxiques et
les plus onéreux récemment mis à la disposition des rhumatologues [ 13 ]. Il
s'agit :

 du contexte génétique. La majorité des personnes souffrant de


spondylarthropathie sont porteuses de l'antigène HLA-B27 (qui peut
toutefois être aussi possédé «par hasard» par 7 % des fibromyalgiques,
puisque la fréquence moyenne en France des personnes HLA-B27+ est
d'environ 7 %) ;
 du rythme des douleurs. Les patients souffrant de spondylarthrite ont
fréquemment mal, notamment la nuit et le matin au réveil, et surtout
voient le plus souvent leurs douleurs diminuer pendant la journée lors de
l'accomplissement d'efforts, pour se réveiller le soir lorsqu'ils commencent
à se reposer. Cette rythmicité n'est presque jamais rencontrée dans les
fibromyalgies, qui s'aggravent le plus souvent à l'effort ;
 de l'efficacité des traitements anti-inflammatoires. S'ils sont loin d'être
toujours efficaces dans les spondylarthropathies, ils peuvent tout de
même soulager de manière franche au moins 50 % des patients, ce qui
est un assez bon argument en faveur d'une spondylarthrite, de même
bien sûr que la présence dans le bilan sanguin d'une inflammation (vitesse
de sédimentation, CRP), même si celle-ci est plus l'exception que la règle ;
 de la présence de signes extra-articulaires, qui peut fortement orienter
vers une spondylarthropathie s'il s'agit de la survenue d'une uvéite
(encore appelée iritis), d'un psoriasis étendu, d'une maladie de Crohn ou
d'une rectocolite hémorragique. De simples douleurs abdominales ou des
troubles du transit n'ont en revanche presque aucune valeur, car des
troubles fonctionnels intestinaux accompagnent beaucoup de
fibromyalgies ;
 enfin, de la fréquente variation des douleurs des spondylarthrites dans
l'espace et le temps (atteinte d'un doigt et non des autres, atteinte à
bascule des sacroiliaques, poussées de quelques semaines entrecoupées
de périodes de quasirémission) alors que les douleurs de fibromyalgie sont
souvent assez symétriques et constantes dans le temps.

Une meilleure connaissance de cette séméiologie peut aider à repérer, dans les
2 à 5 % de patients de la population, les 0,5 à 1 % de ceux qui présentent en fait
non pas une fibromyalgie primitive mais une réelle polyenthésite, en rapport le
plus souvent avec une spondylarthropathie non encore affirmée mais qui mérite
un avis spécialisé.

Le diagnostic définitif peut souvent être porté de manière formelle quand


apparaissent (mais avec un délai de plusieurs mois ou années) les signes
d'imagerie. Les anomalies radiographiques classiques sont en général les plus
tardives : érosions en regard des enthèses dans les formes très aiguës, suivies
d'une condensation de l'enthèse et d'une ossification du ligament ou du tendon
à son insertion réalisant au rachis l'aspect de syndesmophyte ( figure 9 ) ;
sacro-iliite unilatérale ou bilatérale.

La scintigraphie n'est le plus souvent parlante qu'après plusieurs mois d'évolution


et en cas d'enthésite durable : elle montre des spots d'hyperfixation ( figure 12
) qui, lorsqu'ils sont nombreux/confluents ou que l'enthèse est volumineuse (par
exemple rotule), peuvent faire croire à tort à une «algodystrophie» ( figure 11 ),
d'autant qu'une hyperfixation précoce peut aussi se voir dans les enthésites. Le
grand avantage de la scintigraphie est de permettre une vue d'ensemble du
corps même si, pour bien visualiser certaines enthésites, il faut aussi demander
des clichés centrés sur la zone la plus suspecte.

Les autres examens pouvant attester d'une inflammation des enthèses sont,
d'une part, l'IRM ( figure 12 ) [ 14 ] (qui connaît aussi de 30 à 70 % de faux
négatifs selon les séries et les moments où l'examen a été fait : période
douloureuse ou non) et, d'autre part, l'échographie [ 15 ]. Cette dernière
montre fréquemment des signes d'inflammation et permet même parfois de
détecter de minimes collections liquidiennes. Cela pourrait paraître surprenant,
compte tenu de la définition donnée plus haut des enthèses («ancrage» dans
l'os des ligaments ou tendons). En fait, les enthèses lato sensu (zones de
friction/réflexion des ligaments/tendons autour des os) sont assez souvent
protégées soit par de petites bourses de glissement, soit par de fins
prolongements en provenance des articulations toutes proches, si bien que de
petits épanchements liquidiens peuvent effectivement être mis en évidence par
l'échographie mais qui, en revanche, ne peuvent pas être détectés par
l'examen clinique. C'est surtout dans ce contexte que des infiltrations
(notamment des infiltrations guidées par échographie) peuvent s'avérer
efficaces, les gestes faits à l'aveugle ou en regard d'enthèses dépourvues de
telles structures liquidiennes restant le plus souvent inopérants.

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▪ CONCLUSION

Grâce à une bonne connaissance des structures anatomiques d'où naissent les
douleurs des rhumatismes inflammatoires, le diagnostic positif de ceux-ci peut
être grandement facilité. En découle une prise en charge thérapeutique
précoce, permettant le plus souvent non seulement un soulagement bien plus
net des douleurs mais aussi une amélioration du pronostic à long terme. Cela est
déjà amplement démontré dans le contexte des polyarthrites rhumatoïdes qui
devraient toutes être traitées efficacement dès les premiers mois d'évolution [ 2
], mais pourrait aussi valoir pour les spondylarthropathies. Le pronostic spontané
des spondylarthrites n'est en effet pas meilleur en termes de gêne fonctionnelle
à long terme que celui des polyarthrites [ 16 ], l'enraidissement progressif des
patients en cyphose étant à combattre le plus précocement possible par une
kinésithérapie persévérante.

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RÉFÉRENCES
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Chapitre 7 Syndrome de L'intestin Irritable: Nouvelles Pistes Physiopathologiques
et Conséquences Thérapeutiques

Benoît COFFIN

Le syndrome de l'intestin irritable (SII) est sans doute le syndrome fonctionnel


digestif le plus fréquent. Plusieurs études épidémiologiques ont montré qu'un SII
pouvait apparaître au décours d'épisodes de gastro-entérites aiguës
bactériennes. Chez ces patients, la présence d'un état micro-inflammatoire
chronique, muqueux et circulant a été rapportée dans plusieurs études. D'autres
travaux ont montré que ces anomalies étaient également retrouvées dans une
proportion importante de patients ayant un SII, indépendamment de l'origine
infectieuse. Cependant, des anomalies dans certains mécanismes de contrôle
de la douleur viscérale au niveau non seulement spinal mais aussi central ont
été rapportées. Leurs relations avec la présence de cet état micro-
inflammatoire ne sont pas encore connues. Ces données récentes suggèrent
qu'il existe non pas un SII mais plusieurs syndromes différents se manifestant par
une même symptomatologie. La mise au point de modèles animaux devrait
permettre l'élaboration de molécules ciblées et actives dans le traitement du SII
qui font encore cruellement défaut.

▪ INTRODUCTION

Le syndrome de l'intestin irritable (SII) est l'un des syndromes fonctionnels digestifs
les plus fréquents auquel se trouve confronté tout praticien dans sa pratique
clinique quotidienne. Le diagnostic repose sur des critères cliniques standards,
les critères de Rome II ( tableau 1 ) [ 1 ] qui ont été remplacés récemment par
les critères de Rome III [ 2 ], dont le principal apport est la modification de la
durée évolutive (6 mois contre 12 mois antérieurement). En France, la
prévalence du SII selon les critères de Rome II est d'environ 5 % avec, comme
dans toutes les études épidémiologiques, un sex ratio femme/homme de
l'ordre de 2/1 [ 3 ]. Ces symptômes chroniques, récurrents et invalidants sont
régulièrement la source d'une incompréhension entre le praticien et son patient
qui a du mal à admettre qu'une douleur abdominale soit si difficile à traiter.

Tableau 1 ▪ Définition du

Critères principaux

Douleur abdominale (gêne, inconfort) :

- présente au moins 12 semaines l'année précédente

- associée au moins à 2 des caractéristiques suivantes (2 critères sur 3) :

• amélioration par la défécation

• survenue associée à une modification de la fréquence des selles

• survenue associée à une modification de la consistance des selles

Critères annexes (permettant de classer en sous-type en fonction du transit)


1. < 3 selles/semaine 6. Impériosité

2. > 3 selles/jour 7. Sensation d'évacuation


rectale incomplète

3. Selles dures 8. Émission de mucus

4. Selles molles ou diarrhée 9. Ballonnements, plénitude,


gaz

5. Efforts de poussée

SII avec diarrhée prédominante

S'il existe au moins un des critères n° 2, 4, 6

Avec absence des critères n° 1, 3 et 5

SII avec constipation prédominante

S'il existe au moins un des critères n° 1, 3, 5

Avec absence des critères n° 2, 4, 6

SII avec alternance diarrhée et


constipation

À la fin du siècle dernier, de nombreuses études ont montré qu'il existait au


cours du SII, comme au cours des autres troubles fonctionnels digestifs, une
hypersensibilité viscérale à la distension. Ce trouble de la sensibilité n'est pas lié
à une anomalie des capacités élastiques du tube digestif (compliance) ni à un
profil psychologique particulier et n'est pas associé à une hypersensibilité
somatique [ 4 , 5 ]. Pour certains, cette hypersensibilité à la distension serait
même le marqueur biologique du SII qui faisait cruellement défaut [ 5 ]. Sur la
base de données expérimentales montrant l'implication de la sérotonine dans la
régulation des phénomènes moteurs et sensitifs au niveau digestif, plusieurs
firmes pharmaceutiques se sont lancées dans la mise au point de molécules
agissant sur certains récepteurs à la sérotonine (5-HT) en tant qu'antagonistes,
comme l'alosétron, un antagoniste des récepteurs 5-HT3 [ 6 ], ou qu'agonistes,
comme le tégasérod, un agoniste partiel des récepteurs 5-HT4 (Evans BW et al,
2004), chez des patients ayant un SII. Outre la douleur, le critère d'inclusion était
un phénotype spécifique, les troubles du transit associés tels les formes à
diarrhée prédominante pour les antagonistes 5-HT3 ou les formes à constipation
prédominante pour les agonistes 5-HT4, et non le mécanisme supposé de la
douleur. Bien que de nombreuses études de phase III rigoureuses aient
démontré une efficacité de ces molécules significativement supérieure à celle
du placebo, elles n'ont pas obtenu les autorisations de mise sur le marché dans
l'Union européenne. Outre certains effets secondaires apparus lors des études
de phase IV en Amérique du Nord, le principal motif de refus était que le delta
d'efficacité par rapport au placebo (compris entre 12 et 18 % selon les études)
était jugé insuffisant par les autorités régulatrices. Une des hypothèses pouvant
éclaircir ces résultats mitigés serait que la douleur au cours du SII répondrait à
différents mécanismes expliquant qu'une molécule donnée ne serait pas active
pour tous les patients mais pour un sous-groupe particulier.

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▪ L'HYPERSENSIBILITÉ EST-ELLE D'ORIGINE PÉRIPHÉRIQUE ?

L'absence d'anomalies structurelles ou biologiques lors des examens standard


au cours du SII (endoscopies digestives, biologie, morphologie et histologie) ne
plaide a priori pas en faveur d'une anomalie (sensibilisation) périphérique à
l'origine de la douleur abdominale. Plusieurs études épidémiologiques récentes
ont néanmoins permis d'isoler un sous-groupe de patients, identifié sous le terme
SII postinfectieux (SII-PI), dont les symptômes apparaissent au décours d'un
épisode de gastro-entérite aiguë [ 7 ], remettant au goût du jour la «colite
postamibienne» du colonial. Ainsi, entre 15 et 20 % des sujets ayant une gastro-
entérite aiguë d'origine bactérienne vont développer un SII typique dans les 6 à
12 mois qui suivent. Les facteurs prédictifs identifiés sont la durée de l'épisode
aigu (> 5 jours), le sexe féminin et l'existence d'un stress au cours de cet épisode,
mais le germe responsable n'est pas un facteur prédictif. Au décours d'une
gastro-entérite virale, étiologie la plus fréquente des gastro-entérites aiguës, ce
risque semble plus faible, voire négligeable [ 8 ]. Les patients atteints du SII-PI
présentent des anomalies de la motricité digestive et une hypersensibilité
rectale à la distension, confirmant qu'ils rentrent bien dans le phénotype
classique du SII. Dans ce cadre particulier, l'analyse fine de biopsies iléales et
coliques a montré une augmentation de la densité des cellules
entérochromaffines et sécrétant divers neuropeptides, dont la sérotonine, et de
mastocytes à proximité des terminaisons nerveuses, suggérant un lien étroit
entre cette anomalie et la douleur [ 9 ] confirmée par le fait que les substances
libérées par les mastocytes stimulaient les terminaisons nerveuses aussi bien au
niveau mésentérique qu'au niveau des neurones des ganglions de la racine
postérieure de la moelle [ 10 ].

Ce nouveau mécanisme a permis de mettre au point des modèles animaux de


douleur abdominale fonctionnelle postinflammatoire [ 11 ] qui devraient
permettre de faire rapidement progresser les connaissances. Ainsi, il a été
montré que la libération de cytokines impliquées dans les réponses de type Th2 [
12 ] serait augmentée sur un modèle animal de SII-PI. Chez l'homme, une étude
vient de montrer que les concentrations sériques de certaines cytokines pro-
inflammatoires comme l'interleukine (IL) 6 et l'IL-8 sont plus élevées chez les
patients que chez les contrôles alors que la concentration d'IL-10, une cytokine
anti-inflammatoire, était normale [ 13 ]. Bien que le chevauchement avec les
concentrations mesurées chez les sujets sains contrôles soit important, ces
résultats confirment l'hypothèse d'un état pro-inflammatoire au moins chez
certains patients atteints de SII.

Dans cette situation, la douleur chronique serait, pour l'essentiel, la


conséquence de la sensibilisation des afférences sensitives primaires, dont
témoignerait notamment la diminution du seuil de stimulation des
mécanorécepteurs digestifs. Cette hypersensibilité périphérique, initiée lors de
l'épisode aigu, serait ensuite autoentretenue par des processus classiques
d'inflammation neurogène faisant intervenir un réflexe d'axone et la libération
périphérique de différents neuromédiateurs algogènes, en particulier la
substance P et le peptide associé au gène de la calcitonine (CGRP, calcitonin
gene related peptide). Il est possible que cette réponse anormale à un
phénomène infectieux soit sous-tendue par un terrain génétique particulier. En
effet, Van der Veek et al. [ 14 ] ont montré que les sujets porteurs de la
combinaison de deux polymorphismes génétiques fréquents, associant à la fois
une forte production de TNF-α (pro-inflammatoire) et une faible production d'IL-
10 (anti-inflammatoire), avaient plus souvent des symptômes de SII que le
groupe contrôle.

Comme dans tout état inflammatoire digestif, les corticoïdes ont été testés à la
dose de 40 mg/j pendant 4 semaines (dose standard utilisée par les Anglo-
Saxons dans le traitement des poussées de maladies inflammatoires intestinales)
mais n'ont pas montré une efficacité sur les symptômes [ 15 ]. Les probiotiques,
par leur action immunomodulatrice, pourraient avoir une efficacité dans cette
situation. Ainsi, il a été montré que la souche Bifidobacterium infantis 35624
diminuait l'intensité des symptômes et modifiait le profil des cytokines circulantes
chez des patients ayant un SII [ 16 ]. Il existe un effet dose et, surtout, ce
probiotique était efficace indépendamment du trouble du transit associé [ 17 ].
D'autres probiotiques n'ont pas montré d'efficacité chez l'homme [ 18 ] mais de
nombreuses souches sont en cours d'évaluation sur différents modèles animaux [
19 , 20 ]. Bien que cela n'ait pas été démontré, il est possible qu'un traitement
maximal, à définir, de l'épisode infectieux aigu initial puisse empêcher
l'apparition de ces phénomènes de sensibilisation.

Cependant, bien que ce concept soit intéressant sur le plan


physiopathologique, les données épidémiologiques suggèrent qu'il ne
s'appliquerait qu'à un sous-groupe minoritaire de patients.

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▪ EXISTE-T-IL UNE ANOMALIE DANS L'INTÉGRATION CORTICALE DE LA DOULEUR AU


COURS DU SII ?

Longtemps méconnues, les zones cérébrales impliquées dans l'intégration


corticale de la douleur digestive ont été mieux précisées depuis l'apparition des
techniques d'imagerie cérébrale fonctionnelle, le PET-scan et l'IRM fonctionnelle
[ 21 ]. Au cours du SII, une distension rectale entraîne l'activation de différentes
zones cérébrales dont le cortex préfrontal, le cortex orbito-frontal, le cortex
cingulaire antérieur et la région insulaire [ 22 ]. Ces zones sont impliquées dans
le contrôle de la douleur en général, en particulier le cortex insulaire et le cortex
cingulaire, mais font également partie des structures impliquées dans le contrôle
des émotions et du système nerveux autonome. Les éventuelles connexions
entre ces différentes zones cérébrales ne sont pas connues. Plusieurs problèmes
méthodologiques n'ont pas permis de progresser aussi rapidement qu'espéré et
de nombreuses inconnues quant à la signification des modifications du signal
enregistré persistent encore.

Sur un plan thérapeutique, il a été montré que l'alosétron améliorait les


symptômes digestifs et diminuait les niveaux d'activation des zones cérébrales
impliquées dans le contrôle émotionnel sans modifier ceux des zones corticales
davantage impliquées dans le contrôle de la douleur [ 23 ]. Ainsi, l'effet
bénéfique obtenu avec cette molécule ne serait pas uniquement dû à une
action antinociceptive périphérique mais pourrait également impliquer une
action centrale de cette molécule. L'hypnose, approfondie par l'équipe de
Whorwell à Manchester [ 24 , 25 ], pourrait agir en modulant les seuils d'activité
de certains centres cérébraux. Une étude randomisée ancienne avait montré
que l'hypnose permettait d'améliorer le SII dans sa globalité, et le symptôme
douleur en particulier, et corrigeait en partie l'hypersensibilité rectale à la
distension [ 26 ]. Plusieurs travaux émanant de cette même équipe avaient
confirmé les résultats initiaux avec cependant un certain scepticisme de la
communauté médicale [ 27 ]. Plus récemment, une autre étude randomisée a
confirmé l'efficacité de l'hypnose au cours d'autres troubles fonctionnels
digestifs comme la dyspepsie chronique idiopathique [ 28 ]. Les modes d'action
de l'hypnose restent mal connus. Des études en IRM fonctionnelle chez le
volontaire sain ont montré qu'elle permettait de moduler le seuil d'activation des
zones cérébrales impliquées dans le contrôle de la douleur somatique, en
particulier le cortex cingulaire [ 29 ]. À ce jour, on ne dispose d'aucune donnée
permettant de confirmer cet effet sur les zones impliquées dans le contrôle de la
douleur viscérale.

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▪ UNE HYPERSENSIBILITÉ MÉDULLAIRE AU COURS DU SII ?

De nombreux arguments suggèrent qu'il existerait des anomalies dans


l'intégration spinale de la douleur ou dans les mécanismes régulateurs situés à
ce niveau au cours du SII. La convergence des afférences sensitives d'origine
viscérale et somatique vers des neurones nociceptifs de la corne postérieure de
la moelle qui véhiculent ensuite les informations vers des structures cérébrales
sus-jacentes est un phénomène établi chez l'animal [ 30 ] et chez l'homme [ 31
]. Ce mécanisme de convergence viscéro-somatique représente
vraisemblablement le substrat neurophysiologique du phénomène de
projection des douleurs d'origine viscérale vers un territoire cutané dont la
douleur scapulaire de la colique hépatique est un exemple classique. Un
ensemble de données récentes suggère que des modifications du territoire des
douleurs projetées, observées dans diverses situations pathologiques dont le SII [
32 , 33 and 34 ], pourraient témoigner d'une hyperexcitabilité des neurones
nociceptifs de la moelle. Ces phénomènes de sensibilisation centrale, similaires
à ceux décrits dans les douleurs d'origine somatique, font intervenir des
récepteurs N-méthyl-D-aspartate (NMDA), contribuent à amplifier la douleur et
jouent vraisemblablement un rôle capital dans les processus de chronicisation [
35 ]. Mais ces mécanismes physiopathologiques médullaires ne sont
vraisemblablement pas seuls en cause. Chez l'animal et chez l'homme, plusieurs
systèmes descendant modulant la transmission spinale de la douleur, somatique
et viscérale, ont été décrits [ 36 , 37 ]. Un des moyens d'analyser ces contrôles
descendants repose sur le principe ancien de la contre-irritation, c'est-à-dire
qu'une douleur inhibe une autre douleur. Chez l'homme, nous avons montré,
dans plusieurs travaux successifs [ 31 , 38 , 39 and 40 ], que les variations d'un
réflexe nociceptif médullaire stimulé par des stimulations électriques cutanées
répétées, le réflexe RIII, permettaient d'explorer certains de ces mécanismes de
contrôle, dont les contrôles inhibiteurs diffus nociceptifs (CIDN).
Schématiquement, chez le volontaire sain, une distension rectale progressive
entraîne une inhibition du réflexe RIII ( figure 1A ). Cette inhibition est en partie
liée à une activation des CIDN qui dépendent de la mise en jeu d'une boucle
anatomique spino-bulbo-spinale [ 41 , 42 ]. Au cours du SII, nous avons montré
que la distension rectale, au lieu de provoquer, comme chez le volontaire sain,
une inhibition du RIII, entraînait à l'inverse une augmentation de l'amplitude du
réflexe (facilitation) ( figure 1B ) [ 43 ]. En réalité, cette facilitation du réflexe
RIII, témoignant vraisemblablement d'une altération des systèmes de contrôle
segmentaires et descendants, a été observée chez environ les deux tiers des
patients. En outre, seuls les patients ayant une réponse RIII anormale
présentaient également une baisse du seuil de douleur viscérale (c'est-à-dire
une hypersensibilité) à la distension rectale. Malheureusement, aucun
phénotype particulier (durée, type ou intensité de la douleur, trouble du transit
associé) ne permet d'identifier les patients ayant une hyperexcitabilité
médullaire. Ces données, ainsi que celles obtenues récemment par d'autres
groupes [ 44 ], indiquent que les douleurs du SII peuvent être liées, au moins
dans un sous-groupe de patients, à des anomalies centrales de la modulation
de la transmission nociceptive. Ce concept d'hyperexcitabilité centrale à
l'origine de la douleur chez certains patients ayant des troubles fonctionnels
digestifs a également été démontré au niveau de l'œsophage dans différents
modèles expérimentaux, en l'absence de lésion identifiable [ 45 ] ou avec une
inflammation modérée [ 46 ]. Ainsi, ces phénomènes de sensibilisation centrale,
comme au cours de nombreuses douleurs neuropathiques, seraient un
mécanisme physiopathologique majeur au cours du SII et des troubles
fonctionnels digestifs au sens large [ 47 ].

Cette analogie avec les douleurs neuropathiques somatiques conforte


l'utilisation de molécules ayant une action régulatrice sur ces mécanismes
supposés. Pendant longtemps, la prescription empirique de certains
antiépileptiques, ou assimilés, ne reposait sur aucune étude validée mais
donnait parfois de bons résultats en pratique clinique quotidienne. Houghton et
al. [ 48 ] viennent de montrer, sur un effectif réduit de 26 patients atteints de SII,
que par rapport au placebo, la prégabaline (un ligand α2δ de seconde
génération) améliorait l'hypersensibilité rectale à la distension et il existait une
tendance pour une amélioration des symptômes spontanés. Les antidépresseurs
tricycliques utilisés à des doses moindres que lors des syndromes dépressifs [ 49 ]
et, plus récemment, les inhibiteurs de recapture de la sérotonine [ 50 , 51 ] ont
également montré une efficacité significative par rapport au placebo,
indépendamment des troubles de l'humeur associés. Dans tous les cas, il est
important de débuter par des doses relativement faibles avec augmentation
progressive et d'appliquer des traitements d'au moins 3 mois avant de conclure
à une efficacité ou à un échec. L'acceptation par le patient est souvent bonne
à la condition que les finalités du traitement lui soient patiemment expliquées,
mais il n'est pas possible de prédire de manière simple si un patient sera
répondeur ou non au traitement. Dans un travail récent utilisant la technique du
réflexe RIII détaillée ci-dessus, nous avons pu montrer que le tégasérod avait
une action dans le sousgroupe de patients ayant une facilitation du réflexe,
alors qu'aucun effet n'était retrouvé dans le groupe de patients ayant une
réponse identique à celle notée chez des volontaires sains [ 39 ]. Ainsi, cette
méthode d'exploration pourrait être utile pour chercher à mettre en évidence
l'action d'une molécule avant de réaliser des études de phase III.
Figure 1 ▪ Variations du réflexe RIII lors de distensions rectales lentes chez le
volontaire sain (A) et chez des patients ayant un syndrome de l'intestin irritable
(B). L'inhibition de ce réflexe lors de distensions rectales chez le volontaire sain
témoigne de l'activation de mécanismes de contrôle de la douleur, son
augmentation du chez les patients témoigne d'une hyperexcitabilité spinale.

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▪ DOULEURS ET DÉFINITION DU SYNDROME DE L'INTESTIN IRRITABLE (SII) SELON LES
CRITÈRES DE ROME II

L'ensemble de ces données récentes suggère qu'au cours du SII, comme sans
doute au cours de tous les troubles fonctionnels digestifs, il n'y a pas un mais
plusieurs mécanismes physiopathologiques s'exprimant par un même
phénotype, la douleur abdominale ( figure 2 ). Il n'y aurait pas un SII mais des
SII et donc pas un traitement standard mais des traitements différents visant des
cibles spécifiques. À l'heure actuelle, à l'exception des rares patients pour
lesquels un facteur infectieux clairement identifié peut être mis en évidence,
aucune caractéristique sémiologique ni aucun examen complémentaire
standard ne permettent d'émettre une hypothèse physiopathologique donnée
et donc de prescrire le traitement supposé le mieux adapté. Une stratégie
thérapeutique fondée sur une escalade progressive des traitements est le seul
moyen d'espérer soulager ces patients souvent lassés de discours niant leur
douleur. Comme nous l'ont appris nos collègues algologues, il est également
primordial d'établir une relation médecin-patient stable et durable pour espérer
obtenir une réponse prolongée et une diminution des recours aux soins. Cela
passe par une diffusion et une vulgarisation des mécanismes
physiopathologiques supposés dans un premier temps et la proposition
d'objectifs thérapeutiques réalistes — la diminution de la douleur mais sûrement
pas sa disparition totale — dans un second temps. Une étude randomisée
présentée en 2006 lors du congrès de l'American Gastroenterological
Association a validé cette approche [ 52 ]. Ainsi, la recherche sur le SII avance
lentement mais sûrement dans de multiples voies parallèles et, on l'espère,
devrait permettre d'aboutir à une meilleure prise en charge des patients.
Figure 2 ▪ Origines possibles de la douleur au cours du syndrome de l'intestin
irritable. 1. Origine périphérique, SII- postinfectieux. 2. Origine cérébrale :
intégration de la douleur. 3. Origine médullaire : sensibilisation médullaire et/ou
perte des contrôles inhibiteurs.

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À lire : Evans BW, Clark WK, Moore DJ, Whorwell PJ. Tegaserod for the treatment
of irritable bowel syndrome. Cochrane Database Syst Rev 2004 ; 1 : CD003960.
Chapitre 8 Système Nerveux Sympathique et Douleurs

Pierre CESARO

Le système nerveux sympathique interfère avec la nociception par ses


afférences vers la zone viscéro-sensible juxta-épendymaire de la moelle et des
efférences via les ganglions prévertébraux et paravertébraux, permettant des
réponses sympathiques et parasympathiques. La complexité du réseau
sympathique en forme de plexus et les convergences viscéro-somatiques
rendent compte du caractère mal localisé, vague et diffus des douleurs
viscérales. Le couplage système nerveux sympathique-système nerveux
périphérique contrôle les seuils nociceptifs après lésion nerveuse. Il peut
s'exercer sur les terminaisons afférentes soit directement par une connexion
avec une fibre sympathique, soit indirectement par diffusion locale au niveau
des lésions via les vaisseaux sanguins. En outre, un couplage peut apparaître
entre les axones ou encore au niveau du ganglion sensitif. Un état douloureux
chronique va modifier le fonctionnement du système nerveux autonome dans le
cerveau et la moelle épinière, aboutissant à une modification de l'activité
sympathique efférente et entraînant des modifications profondes au niveau de
neurones sensitifs nociceptifs. Le syndrome douloureux régional complexe de
type I s'observe fréquemment après un traumatisme et correspond au tableau
clinique de l'algodystrophie. Le syndrome douloureux régional complexe de
type II s'observe à la suite d'une lésion nerveuse partielle et se rapproche de la
classique «causalgie». La réponse douloureuse varie aussi selon les individus et,
notamment, leurs gènes.

▪ INTRODUCTION

Le système nerveux sympathique est impliqué dans la biologie végétative de


l'organisme. Il interfère avec la nociception car il comporte des afférents et des
efférents périphériques modifiant le fonctionnement nerveux avec différents
modes de couplage. Il intervient dans les douleurs «sympathiques» appelées
algodystrophie ou syndrome douloureux régional complexe (SRDC). Après un
rappel anatomique, nous envisagerons les différents niveaux d'intégration et
modes de couplage ainsi que la physiopathologie de certaines douleurs
chroniques.

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▪ RAPPEL ANATOMIQUE [1]

Système efférent

La partie périphérique efférente du système nerveux sympathique est


composée de neurones préganglionnaires et postganglionnaires. Ces neurones
constituent des voies fonctionnellement distinctes innervant différents organes.
L'activité des neurones préganglionnaires est transmise par le ganglion
sympathique aux neurones postganglionnaires. Chaque groupe fonctionnel de
neurones préganglionnaires fait synapse avec un groupe particulier de
neurones postganglionnaires. L'activité de ces derniers est transmise par
connexions restreintes aux organes cibles (vaisseaux, glandes, muscles lisses non
vasculaires, neurones entériques, muscle cardiaque). Les ganglions
paravertébraux agissent sans doute essentiellement comme de simples relais,
tandis que certains neurones des ganglions prévertébraux intègrent des signaux
afférents provenant des viscères. Chaque voie motrice sympathique est
associée à une structure distincte dans la moelle, le tronc cérébral et
l'hypothalamus. À l'état normal, ce système organisé produit des réactions
spécifiques d'adaptation à la douleur.

Système afférent

Les événements périphériques qui menacent ou lèsent les tissus sont codés par
des neurones nociceptifs afférents. L'influx nociceptif, transformé dans la moelle,
est fidèlement transmis, via le thalamus, au cortex et aux autres centres
supraspinaux. Ce circuit aboutit à la perception douloureuse et aux réactions
motrices, autonomes et endocriniennes appropriées. Dans ce contexte, les
différents systèmes autonomes fonctionnels donnent des réponses d'adaptation
«normales». Les fibres qui rejoignent le centre médullaire intéroceptif traversent
successivement et sans relais les ganglions préviscéraux, la chaîne latéro-
vertébrale, le rameau communicant blanc, le nerf rachidien, la racine
postérieure de la moelle et, enfin, la zone intermédio-médiale (zone viscéro-
sensible) juxta-épendymaire. Les afférences sympathiques transportent des
influx à l'origine de nombreux réflexes. Cette sensibilité intéroceptive viscérale,
ou cénesthésie, est inconsciente et ne devient consciente que lorsqu'elle est
douloureuse.

Les douleurs viscérales, à l'inverse des douleurs somatiques, sont mal localisées,
vagues, diffuses. Plusieurs éléments peuvent expliquer cette particularité
comme la complexité du réseau sympathique en forme de plexus et comme le
trajet parfois complexe de l'influx centripète pouvant pénétrer par le biais de la
chaîne latérale à des niveaux segmentaires différents. Les fibres transportant la
sensibilité des viscères, des téguments et des séreuses (plèvre, péritoine)
convergent au niveau médullaire. Cette convergence rend compte des
douleurs viscérales projetées et des mécanismes réflexes en particulier
sympathiques à la douleur ( figure 1 ).
Figure 1 ▪ Les afférences viscérales : quelle que soit la trajectoire traversant les
rameaux communicants gris (RG) ou blancs (RB), les fibres afférentes rejoignent
le ganglion rachidien via la racine postérieure (GDR : ganglion donal root).

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▪ DES MODIFICATIONS SYMPATHIQUES CHANGENT LES SEUILS NOCICEPTIFS

L'activité nerveuse sympathique peut modifier les seuils nociceptifs comme le


démontre l'expérience de l'habit thermique chez l'homme. Cette expérience a
été réalisée chez 13 patients souffrants de douleurs sympathiques au niveau de
la main [ 2 ]. Vêtu d'un habit thermique, l'ensemble du corps a pu être
réchauffé ou refroidi afin de modifier le débit sanguin cutané. On peut observer
les modifications du débit sanguin, tout à fait parallèles du côté normal et du
côté atteint par les douleurs algodystrophiques chez ces patients. Pendant ces
phases de refroidissement et de réchauffement, on peut contrôler la
température cutanée par un système d'irradiation avec une lampe thermique
du côté de la main douloureuse ( figure 2 ). On peut alors examiner les zones
cutanées qui présentent une hyperalgésie mécanique. Cette hyperalgésie est
plus étendue lorsque le membre à un faible débit sanguin pendant la phase de
refroidissement que lorsqu'il a un débit sanguin augmenté pendant la phase de
réchauffement. Ces changements semblent indépendants de la température
cutanée restant stable à plus de 34 °C. Cette expérience documente le
contrôle du système nerveux sympathique sur les seuils nociceptifs par le biais
du débit sanguin et non pas uniquement par le biais de la température.

Figure 2 ▪ Expérience de l'habit thermique. A. La température est contrôlée par


une lampe infrarouge, les variations de débit sont similaires des deux côtés. B.
La température cutanée du côté atteint, est contrôlée par une lampe
infrarouge. C. Variation de l'étendue de l'hyperalgésie mécanique, qui est
accrue par l'activité sympathique (d'après Jänig, 2000).

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▪ LES COUPLAGES — SYSTÈME NERVEUX SYMPATHIQUE-SYSTÈME NERVEUX


PÉRIPHÉRIQUE-CONTRÔLENT LES SEUILS NOCICEPTIFS APRÈS LÉSION NERVEUSE
À la suite d'une dénervation totale ou partielle, les axones noradrénergiques
périvasculaires vont envoyer des rameaux dans les ganglions des racines
dorsales et vont enchâsser les neurones sensoriels lésés [ 4 , 5 ]. Une stimulation
sympathique répétée ou des catécholamines circulantes peuvent alors activer
les neurones exprimant les récepteurs noradrénergiques. De plus, les axones des
neurones sensitifs lésés peuvent bourgeonner dans l'extrémité spinale pour
atteindre les voies nociceptives centrales [ 6 ]. Plusieurs niveaux de couplage
entre système noradrénergique et système nerveux afférent peuvent être mis en
jeu à la suite de modifications nerveuses sensitives [ 2 , 3 ]. Le couplage peut
s'exercer sur le bout sensitif des axones afférents, soit directement par une
connexion avec une fibre sympathique, soit de façon indirecte par diffusion
locale au niveau des lésions via les vaisseaux sanguins. Un couplage peut
apparaître également au niveau des axones et, enfin, il peut être exercé au
niveau du ganglion sensitif comme précisé ci-dessus ( figure 3 ). L'activation
des récepteurs noradrénergiques peut entraîner la libération de médiateurs de
l'inflammation comme les interleukines. Cette libération peut être facilitée par
l'action de substances algogènes telle la bradykinine ou de substances pro-
algogènes comme le facteur de croissance nerveuse (NGR, nerve growth
factor). On conçoit ainsi qu'une dénervation puisse entraîner une allodynie et
une hyperalgésie locale par des phénomènes périphériques. Cet effet est
néanmoins complété par un effet central intervenant au niveau de la moelle
épinière. Les phénomènes d'interaction entre le système nerveux sympathique
et le système nerveux afférent périphérique ont fait l'objet de recherches sur des
modèles de dénervation partielle ou totale. Dans ces deux situations, des
modifications plastiques du système nerveux sympathique semblent majeures [ 7
].
Figure 3 ▪ Les couplages peuvent être axo-somatique (e), axo-axonal (d ?),
direct/indirect (b) ou vasculaire (c).

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▪ LA DOULEUR CHRONIQUE CHANGE LES REPRÉSENTATIONS CENTRALES AU


NIVEAU DE LA MOELLE ÉPINIÈRE ET DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL

Au niveau de la moelle épinière, on peut schématiser les modifications


secondaires à une douleur chronique. Des connexions pro-algogènes peuvent
être établies, d'une part, entre des mécanos récepteurs et les voies
nociceptives, facilitant la perception douloureuse à l'origine d'une allodynie (ce
mécanisme ne relève pas de l'intervention sympathique) et, d'autre part, entre
des efférences sympathiques et les voies nociceptives, facilitant la perception
douloureuse. La figure 4 [ 7 ] illustre la voix afférente sympathique et les
couplages signalés dans le paragraphe précédent qui aggravent les
phénomènes d'allodynie et l'abaissement des seuils nociceptifs. L'interaction
spinale suppose d'autres niveaux d'intégration tout en sachant que le système
nerveux sympathique exerce ces contrôles à différents niveaux du système
nerveux central. Dans le tronc cérébral, les neurones de la formation dite
réticulée des voies descendantes dont les médiateurs chimiques sont la
sérotonine, la noradrénaline et d'autres amines provoquent une interaction
avec des neurones locaux à médiation morphinique (substance opioïde
endogène comme les enképhalines). Ces voies réticulées sont également
connectées au centre hémisphérique, notamment à l'hypothalamus, à certains
noyaux du thalamus dont les noyaux de relais nociceptifs, au système limbique
et au cortex cérébral. En outre, les états douloureux chroniques pourraient
intéresser l'ensemble des structures relevant du système nerveux autonome, les
systèmes sensitif et moteur, et pourraient modifier le comportement et les
perceptions ( figure 4 ).

Figure 4 ▪ A. Nociception «normale» avec des voies somesthésiques et


végétatives indépendantes. B. nociception «pathologique» en cas de douleur
chronique et interactions pronociceptives. (SNC : système nerveux central. SNP :
système nerveux périphérique).

Pour résumer, les altérations induites par un état douloureux chronique vont
interférer de façon majeure avec le fonctionnement du système nerveux
autonome dans le cerveau et la moelle épinière, aboutissant à une
modification de l'activité sympathique efférente et entraînant des modifications
profondes au niveau de neurones sensitifs nociceptifs ( figure 5 ).
Figure 5. Le système nerveux sympathique modifie l'activité afférente. (SNC :
système nerveux central. SNP : système nerveux périphérique).

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▪ LA CLASSIFICATION DES PHÉNOMÈNES DOULOUREUX ENTRETENUS PAR LE


SYSTÈME NERVEUX SYMPATHIQUE N'EST PEUT-ÊTRE PAS DÉFINITIVE [8, 9]

Le tableau 1 illustre les caractéristiques propres aux deux grandes catégories


de douleurs chroniques associées à une des modifications du système nerveux
végétatif [ 7 , 10 ]. Le syndrome douloureux régional complexe de type I
s'observe fréquemment après un traumatisme. La lésion neurologique est
inconstante, l'hyperalgésie est fréquente alors que les modifications du débit
sanguin sont plus rares, voire absentes. Ce syndrome correspond au tableau
clinique de l'algodystrophie. Le syndrome douloureux régional complexe de
type II s'observe fréquemment à la suite d'une lésion nerveuse partielle et se
rapproche de la description de la causalgie. Dans ce syndrome, environ la
moitié des patients développent une diminution des perceptions sensitives
douloureuses sur la moitié du corps. Ces changements de perception ont été
expliqués par des modifications thalamo-corticales visualisées en tomographie
par émission de positons. Le diagnostic de douleurs sympathiques est validé
lorsque l'on observe une amélioration par un bloc sympathique. De multiples
observations supportent l'idée que les douleurs d'origine sympathique sont
associées à des changements fonctionnels importants dans le système nerveux
central, par exemple le phénomène d'amélioration des œdèmes à la suite d'un
bloc sympathique, les changements des réflexes végétatifs, l'allodynie
mécanique observée du côté douloureux avec hypoesthésie globale ainsi que
les phénomènes de dystonie et de troubles moteurs [ 11 , 12 and 13 ]. Cette
classification actuelle en deux syndromes est établie sur des séries limitées de
sujets, avec des critères diagnostiques flous. Selon Janig [ 7 ], il conviendrait
d'étudier des cohortes de patients très bien définies sur le plan clinique afin de
réaliser de meilleurs modèles animaux, de rechercher des caractéristiques
physiopathologiques spécifiques et, enfin, une éventuelle prédisposition
génétique. Le gène DQ1 du complexe majeur d'histocompatibilité est en effet
omniprésent parmi les patients atteints de syndrome douloureux régional
complexe [ 14 , 15 ]. N'importe qui ne fera pas une algodystrophie et nous
sommes dans ce domaine, comme dans d'autres, à l'émergence d'analyses
génétiques dont l'importance pourrait s'avérer majeure en termes de diagnostic
mais également de prise en charge.

Tableau 1 ▪ Deux catégories de douleurs chroniques avec participation


sympathique.

Symptômes SRDC I SRDC II

Douleur Spontanée (parfois Spontanée


absente)

Hyperalgésie Hyperalgésie

Allodynie peu fréquente Allodynie fréquente

Altérations du débit Fréquentes Rares ou absentes


sanguin cutané et
profond et de la Dépendantes de la lésion
sudation nerveuse

œème Présent Rare

Troubles trophiques Présents (environ 30 %) Rares

Troubles moteurs Fréquents Absents ou en rapport


avec la lésion nerveuse

Territoire Distal Souvent limité au territoire


du nerf atteint

Global

Indépendant du siège du
traumatisme

Étiologie Traumatisme sans lésion Lésion nerveuse partielle


nerveuse

Survenue Fréquente Rare

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RÉFÉRENCES
[1] Jänig W, Häbler HJ. Organization of the autonomic nervous system : structure
and function. In : Vinken PJ, Bruyn GW (eds). Handbook of clinical neurology.
Amsterdam : Elsevier, 1999 : 1-52.
[2] Baron R, Schattschneider J, Binder A, Siebrecht D, Wasner G. Relation
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complex regional pain syndromes : a case-control study. Lancet 2002 ; 359 :
1655-60. Cité ici

[3] Jänig W, Häbler HJ. Sympathetic nervous system : contribution to chronic


pain. Prog Brain Res 2000 ; 129 : 451-68. Cité ici

[4] Jänig W, Koltzenburg M (a). Plasticity of sympathetic reflex organization


following crossunion of inappropriate nerves in the adult cat. J Physiol 1991 ; 436
: 309-23. Cité ici

[5] Jänig W, Koltzenburg M (b). What is the interaction between the sympathetic
terminal and the primary afferent fiber ? In : Basbaum AI, Besson JM (eds).
Towards a new pharmacotherapy of pain, Dahlem Workshop Reports.
Chichester : John Wiley and Sons, 1991 : 331-52. Cité ici

[6] Wasner G, Heckmann K, Maier C, Baron R. Sympathetic and primary afferent


neurons following nerve injury and tissue trauma. Prog Brain Res 1996 ; 113 : 161-
84. Cité ici

[7] Jänig W, Baron R. Complex regional pain syndrome : mystery explained ?


Lancet Neurol 2003 ; 2 : 687-97. Cité ici

[8] Jänig W, Baron R. Complex regional pain syndrome is a disease of the central
nervous system. Clin Auton Res 2002 ; 12 : 150-64.
[9] Merskey H, Bogduk N. Classification of chronic pain : descriptions of chronic
pain syndromes and definition of terms. Seattle : IASP Press, 1994.
[10] Ribbers GM, Mulder T, Geurts AC, den Otter RA. Reflex sympathetic
dystrophy of the left hand and motor impairments of the unaffected right hand :
impaired central motor processing ? Arch Phys Med Rehabil 2002 ; 83 : 81-5. Cité
ici

[11] Bhatia KP, Bhatt MH, Marsden CD. The causalgiadystonia syndrome. Brain
1993 ; 116 : 843-51. Cité ici

[12] Galer BS, Butler S, Jensen MP. Case reports and hypothesis : a neglect-like
syndrome may be responsible for the motor disturbance in reflex sympathetic
dystrophy (complex regional pain syndrome-1). J Pain Symptom Manage 1995 ;
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[13] Baron R. Kinematic analysis of the upper extremity in CRPS. In : Harden RN,
Baron R, Jänig W (eds). Complex regional pain syndrome. Seattle : IASP Press,
2001 : 119-28. Cité ici

[14] Kemler MA, Van de Vusse AC, Van den Berg-Loonen EM, Barendse GA, Van
Kleef M, Weber WE. HLADQ1 associated with reflex sympathetic dystrophy.
Neurology 1999 ; 53 : 1350-1. Cité ici

[15] Van Hilten JJ, Van de Beek WJ, Roep BO. Multifocal or generalized tonic
dystonia of complex regional pain syndrome : a distinct clinical entity
associatedwith HLA-DR13. Ann Neurol 2000 ; 48 : 113-6. Cité ici
Chapitre 9 Douleurs, Inflammation et Maladies de Système: Approches
Pluridisciplinaires

Marc SOREL

Les patients atteints de maladies auto-immunes, troisième cause de morbidité


dans les pays développés, représentent environ 1 % de la population. Le sex
ratio, bien que dépendant de la pathologie suspectée, penche plutôt en
faveur de la population féminine. La douleur est un symptôme fréquent dans les
maladies de système, de fréquence variable et fonction des étiologies. Elle peut
être prépondérante. Elle dépend de la localisation tissulaire, de la spécificité
d'un ou des organes atteints et de son évolution temporo-spatiale. Son
mécanisme peut être nociceptif (inflammatoire et/ou mécanique) et/ou
neuropathique (système nerveux central, périphérique et/ou autonome). La
douleur peut être consécutive à la diminution ou à la perte d'une fonction et
participer à la perte d'autonomie. Son retentissement cognitif et
comportemental sera évalué dans le cadre de la démarche pluridisciplinaire de
la douleur chronique. La gestion des examens cliniques et complémentaires
sera fonction des critères qualificatifs de la douleur, de son intensité, de sa
topographie, renvoyant à l'atteinte d'un ou des organes. Cette gestion sera
associée à celle menant au diagnostic de la maladie autoimmune. Le système
immunitaire et surtout son homéostasie s'appliquent aussi bien à la défense
contre toute agression, infectieuse ou non, qu'à la neuromodulation au sein du
système nerveux central et périphérique. De même, les neuromédiateurs, en
dehors du système nerveux, sont identifiés et sont actifs au sein d'autres
structures tissulaires. L'interpénétration de ces deux systèmes doit nous mener
vers une nouvelle perception clinique, pharmacologique, fonctionnelle et
cognitivo-comportementale. C'est cette double approche sémiologique qui
permettra d'organiser les différents axes pharmacologiques et leurs synergies, et
d'en diminuer les effets délétères. Ainsi, la mise en place d'un projet de vie ne
dépend pas seulement de l'axe pharmacologique et fonctionnel mais
également du retentissement émotionnel, environnemental et professionnel.

▪ INTRODUCTION

Les patients atteints de maladies auto-immunes, troisième cause de morbidité


dans les pays développés, représentent environ 1 % de la population soit, en
France, 600 000 cas par an. Le sex ratio, bien que dépendant de la pathologie
suspectée, penche plutôt en faveur de la population féminine. La douleur est
un symptôme fréquent dans les maladies de système. Sa fréquence, variable,
est fonction des étiologies (par exemple, de 20 à 90 % pour la polyarthrite
rhumatoïde, la périartérite noueuse et la spondylarthrite ankylosante). Elle peut
être prépondérante ou se mêler aux autres symptômes menant aux différentes
étiologies auto-immunes. Elle est également fonction de la localisation tissulaire,
de la spécificité du ou des organes atteints (peau, muscles, articulations,
viscères, système nerveux…) et de son évolution temporelle et spatiale. Son
mécanisme peut être nociceptif et/ou neuropathique. L'analyse du mécanisme
nociceptif peut évoquer, par l'étude de la rythmicité des douleurs, une
symptomatologie inflammatoire et/ou mécanique. La symptomatologie
neurogène peut révéler une atteinte périphérique ou centrale, voire du système
nerveux autonome. Elle peut être la conséquence de la diminution ou de la
perte d'une fonction et participer à la perte d'autonomie.

Le retentissement cognitif et comportemental sera évalué non seulement dans


le cadre de la démarche pluridisciplinaire de la douleur chronique rebelle et
mais également dans celui de l'évaluation clinique de l'impact lésionnel de la
maladie elle-même sur le système nerveux central, périphérique et autonome.

La gestion des examens cliniques et paracliniques sera fonction des critères


qualificatifs de la douleur, de son intensité et de sa topographie, renvoyant à
l'atteinte d'un ou de plusieurs organes. Ces examens issus de la sémiologie
douloureuse doivent s'intégrer à ceux nécessaires à la démarche étiologique
menant au diagnostic de la maladie auto-immune.

Le système immunitaire et surtout son homéostasie s'appliquent aussi bien à la


défense contre toute agression, infectieuse ou non, qu'à la neuromodulation au
sein du système nerveux central et périphérique. De même que les
neuromédiateurs ne sont pas cantonnés au système nerveux mais ils peuvent
être identifiés au sein de structures tissulaires telles que l'os et être indispensables
à leur homéostasie (par exemple, communication entre ostéocytes).
L'interpénétration de ces deux systèmes doit nous amener vers une nouvelle
perception clinique, pharmacologique, fonctionnelle et cognitivo-
comportementale.

La prise en charge thérapeutique dépendra de l'étiologie de la maladie


immunitaire et du mécanisme de la douleur mis en jeu, en rapport ou non avec
les lésions tissulaires qui accentuent la perte de fonction (cardio-vasculaire,
ventilatoire, neurosensorielle, locomotrice…) et, par voie de conséquence,
modifient l'autonomie du patient. C'est cette double approche sémiologique
qui permettra d'organiser les différents axes pharmacologiques et leurs
synergies, et d'en diminuer les effets délétères.

Le projet de vie ne dépend pas seulement de l'axe pharmacologique et


fonctionnel mais également du retentissement émotionnel, environnemental et
professionnel.

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▪ CLASSIFICATION DES DOULEURS

Au cours de notre parcours professionnel, nous avons souvent évoqué le


mécanisme douloureux nociceptif lié aux tissus lésés par son rythme mécanique
ou inflammatoire, mais avons peu évoqué la douleur neuropathique. Pourtant,
ces deux types de douleurs peuvent être diversement associés dans le temps et
l'espace et c'est généralement l'histoire naturelle de la maladie, sa sémiologie,
qui va nous aider à appréhender toutes leurs dimensions.

La douleur nociceptive — qui correspond à l'excès de stimulation (mécanique,


thermique, chimique) des nocicepteurs (spécifiques, polymodaux ou silencieux)
— va attirer l'attention du clinicien par sa localisation cutanée, musculaire,
ostéoarticulaire, neuro-méningée ou viscérale. Si l'atteinte ostéo-articulaire est
évoquée, l'interrogatoire cherchera à préciser son rythme nycthéméral diurne
ou nocturne (seconde partie de nuit notamment), son intensité évaluée par des
échelles globales EVA (échelle visuelle analogique), EN (échelle numérique) ou
EVS (échelle verbale simple), son rapport à des lésions (apparentes ou non), son
retentissement sur la fonction locomotrice (avec ou sans déformation), sa durée
(en heures, jours ou mois) ainsi que son caractère récurrent, voire permanent.

Quant à la douleur neuropathique, elle relève d'une lésion du système nerveux


périphérique et/ou central. Elle sera évoquée devant certains symptômes, tels
que sensations de brûlure, de piqûre, de décharge électrique, d'écrasement et
d'étau… (questionnaires DN4, NPSI, Mac Gill Pain ou QDSA…), et confirmée par
des tests cliniques permettant d'évoquer les sensations par pression au doigt,
poil de von Frey, brosse, piqûre, chaud et froid. Nous définirons ainsi l'allodynie
(perception douloureuse d'une stimulation sensitive non douloureuse)
mécanique statique ou dynamique, l'hyperpathie (perception douloureuse
exacerbée issue d'une stimulation sensitive déjà douloureuse), notamment à
l'aiguille, associées ou non à des phénomènes de sommation (stimulation
douloureuse répétée avec une fréquence définie donnant lieu à une réponse
douloureuse exponentielle avec diffusion dans le temps et l'espace).

Ces deux entités sémiologiques sont diversement intriquées, mais le diagnostic


demeure essentiellement clinique. L'exploration neurosensorielle n'est à
envisager que devant une difficulté diagnostique, une expertise ou une
démarche scientifique (voir chapitre correspondant).

Tous les tissus ne sont pas innervés, il s'agit essentiellement de :

 la peau ;
 le muscle ;
 les vaisseaux et les voies urinaires ;
 la capsule articulaire et le périoste des os ;
 certaines enveloppes telles la plèvre, le péricarde, le péritoine, le méso,
les méninges et périnèvres, les capsules ou enveloppes d'organes y
compris les organes génitaux.

L'implication du système nerveux autonome (SNA) dans le renforcement de la


pathologie douloureuse chronique n'est pas à négliger, même si de nombreuses
ombres demeurent.

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▪ ALTÉRATIONS TISSULAIRES, HIÉRARCHISATION DU SYMPTÔME DOULEUR DANS LA


MALADIE DE SYSTÈME ET DIAGNOSTICS

Peau

La peau, structure tissulaire en trois parties (épiderme, derme et hypoderme),


innervée et vascularisée, non seulement assure une protection physique,
thermique, chimique et immunitaire mais fournit également des informations
sensorielles précieuses. Parmi ces informations, la perception des variations et
de l'amplitude des stimuli fait l'objet d'analyses et d'interprétations conscientes
et inconscientes dont une des finalités est d'assurer notre intégrité corporelle. La
perception douloureuse est détectée à partir de seuils de déclenchement dits
nociceptifs, seuils variables aussi bien d'un individu à l'autre qu'au sein du même
individu dans certaines conditions. Elle est sous la dépendance des fibres de
faible calibre, les fibres Aδ (faiblement myélinisées) et C (amyéliniques). Dans
des conditions particulières, des fibres sensitives de moyen calibre Aβ peuvent
également véhiculer des informations qui seront perçues comme douloureuses.

La densité des champs récepteurs de ces fibres et leur chevauchement


expliquent le nombre impressionnant d'informations transmises dès l'apparition
d'une lésion élémentaire qui concerne l'un des trois plans : épidermique
superficiel (excoriation, macule, squame, croûte) ou profond (papule, vésicule,
bulle, pustule), dermique (bulle, pustule, kyste) et hypodermique (nodule, bulle).
Certaines lésions peuvent traverser plusieurs plans (fissure, nodule, kyste, bulle,
ulcération, atrophie, lichénification). Par leur intensité, leur persistance et leur
extension, toutes ces manifestations cutanées peuvent donner lieu à des
douleurs chroniques.

La production de molécules algogènes (H+, K+, ATP, histamine…) ou pro-


algogènes (kinines, prostaglandines…) issues de ces lésions stimule le
nocicepteur (récepteurs vallinoïdes ASIC, purinergiques P2X3…) et/ou en
abaisse le seuil localement. Ce nocicepteur libère des acides aminés
excitateurs et des peptides (substance P, CGRP, CCK…), assurant ainsi une
diffusion spatiale. L'histamine est une molécule non seulement prurigineuse mais
également algogène, libérée par les mastocytes, les histiocytes ou
macrophages dans le derme ( figure 1 ).

La «soupe inflammatoire», locale et/ou systémique, justifie le regard porté sur


l'incidence des maladies inflammatoires chroniques, à caractère immunitaire ou
non, dans le développement de la pathologie douloureuse chronique.

Certaines cytokines, telles que l'IL-6, l'IL-1β, l'INF-γ, le TNF-α, font l'objet d'une
attention particulière. En effet, ces molécules pro-inflammatoires ou anti-
inflammatoires ont fait l'objet, en dehors de la recherche fondamentale,
d'applications cliniques et thérapeutiques dans la gestion des maladies auto-
immunes (par exemple les anticorps monoclonaux anti-TNF-α ou anti-IL-6).
Figure 1 ▪ Topographie des fibres de faibles calibres AS et C (d'après Gary et
Matthews [ 1 ]).

Récemment, il a été mis en évidence, dans les cellules épithéliales de la peau


et également dans celles de la muqueuse digestive, la présence d'une nouvelle
cytokine, l'IL-33, appartenant à la famille IL-1, et de son récepteur ST-2 [ 2 ], qui
serait responsable d'une hyperalgésie cutanée et articulaire par l'engagement
d'une longue cascade d'activations successives (TNF-α, IL-1β, INF-γ, ET-1 et des
prostaglandines PGE2) [ 3 ]. Cette cytokine peut être produite via une
stimulation antigénique cutanée. Ces antigènes sont produits par les cellules de
Langerhans de l'épiderme et les cellules dendritiques du derme.

Ces cellules dendritiques peuvent présenter deux profils : celui de cellules


dendritiques immatures ou celui de cellules macrophagiques [ 5 ]. L'histamine
et les PGE2 produites par les mastocytes activés rendent matures les cellules
dendritiques cutanées et modulent la production de cytokines pro-
inflammatoires et anti-inflammatoires ( figure 2 , 3 , 4 ). L'histamine amplifie
la production d'IL-6, d'IL-8, d'IL-10 et de la protéine 1 chimio-attractante
monocytaire par les cellules myéloïdes, d'IL-6 et d'IL-8 par les cellules
endothéliales et, enfin, d'INF-γ par les cellules T [ 6 , 7 and 8 ]. Les PGE2
inhibent la production des chémokines pro-inflammatoires (CCL-3 et CCL-4)
issues de cellules dendritiques activées [ 9 , 10 ] et des kératinocytes (CCL-27)
par leurs récepteurs EP2 et EP3 [ 11 ]. Elles exercent ainsi un contrôle négatif qui
protège d'une exacerbation de la réponse inflammatoire mais ces mécanismes
restent complexes. En effet, lors d'un processus inflammatoire,
expérimentalement induit dans le pannicule cutané chez l'animal, on assiste à
une mobilisation des polynucléaires neutrophiles durant les 24 premières heures
suivie d'une modification de la population cellulaire dominée par les
macrophages durant les 48 à 72 heures suivantes. Les cellules fibroblastiques et
les cellules endothéliales «ferment la marche» dans ce processus granulomateux
jusqu'à résolution complète dans les mois ultérieurs. Il est observé, au cours de
ce processus, des modifications des profils évolutifs des isoformes inductibles de
COX (cyclo-oxygénase) et de NOS (nitric oxyd synthase, monoxyde d'azote
synthétase).

Figure 2 ▪ Mécanismes de déclenchement de la réaction allergique. LT :


lymphocyte T (d'après Staquet et al. [ 4 ]).
Figure 3 ▪ Influence des mastocytes sur la balance cytokinique et la maturation
des cellules dendritiques cutanées. Schéma des différents mécanismes
cellulaires impliqués dans la migration des cellules de Langerhans (d'après
Staquet et al. [ 4 ]).

CL : cellules de Langerhans ; ICE : IL-1 β converting enzyme ; IL-1 β* :


interleukine-1 bêta active ; KC : kératinocytes ; MMP : métalloprotéases
matricielles ; PKC : protéine kinase C ; TNF-a* : tumor necrosis factor aipha actif.
Figure 4 ▪ Initiation et régulation des cellules dendritiques. Le TNF-α et l'IL—1β,
deux médiateurs clés de la signalisation entre les cellules de Langerhans et les
kératinocytes, responsables du déclenchement et de la régulation de la
migration des cellules dendritiques. Action collective de l'IL-Iβ et du TNF-α sur les
cellules de Langerhans, facilitant leur migration vers les ganglions lymphatiques.
CL : cellules de Langerhans ; KC : kératinocytes ; IL-1 β : interleukine-1 bêta ; IL-1-
RI : récepteur à l'IL-1 de type I ; TNF-α : tumor necrosis factor alpha ; TNF-R2 :
récepteur au TNF de type 2 (d'après Staquet et al. [ 4 ]).

L'activité de NOS, d'origine endothéliale, s'élève dès la 6e heure et se maintient


à la 24e heure, alors que l'activité COX, issue des autres populations cellulaires,
est retardée pour être maximale à la 24e heure. Ces molécules interviennent
aussi bien dans la libération des prostaglandines (PGI2, PGF2-α et PGE2) que
dans leur fonction de médiatrices de l'inflammation à la phase aiguë du
processus. Pourtant l'évolution dans le temps n'est pas aussi simple. Ainsi, NOS
activateur intervient dans la vasodilatation, la perméabilité vasculaire (induction
de la libération de substance P) et contribue à la formation de l'œdème aussi
bien à la phase inflammatoire aiguë que chronique [ 12 , 13 and 14 ]. Mais,
NOS inhibiteur exerce un rétrocontrôle négatif sur NOS activateur au niveau de
la population lymphocytaire et/ou macrophagique [ 15 ] en diminuant
notamment l'adhésion des plaquettes et des leucocytes ainsi que l'agrégation
plaquettaire, mais ce phénomène reste transitoire au cours d'une inflammation
chronique.

Le profil évolutif de COX reste, quant à lui, élevé tout au long de ce processus
inflammatoire chronique. L'induction de COX-2, issue de diverses populations
cellulaires, est sous le contrôle positif de nombreux facteurs, le facteur de
croissance épidermique (EGF, epidermal growth factor), le basic fibroblast
growth factor (BFGF), le platelet derived growth factor (PDGF) et, en
particulier, l'IL-1, le TNF-α et le facteur de croissance transformant bêta (TGF-β,
transforming growth factor beta). Le TNF-α augmente non seulement la COX
mais également, en association à l'IL-1, il stimule la production des
prostaglandines. Concernant l'activité NOS, si le TNF-α et l'IL-1 en stimulent la
production, il n'en est pas de même du TGF-β qui, au contraire, l'inhibe.
Autrement dit, en phase aiguë de l'inflammation, les activités COX et NOS se
conjuguent et a contrario, en phase chronique de l'inflammation, sous semble-
t-il le TGF-β, l'activité COX est poursuivie tandis que celle de NOS est inhibée [ 16
], ce qui se traduit par le maintien d'une élévation de PGE2. Toutefois, iNOS (NOS
inductible) est susceptible d'inhiber la COX et ses métabolites, ce qui introduit,
dans un modèle d'étude animal, un facteur de régulation supplémentaire aussi
bien durant les 24 premières heures de l'inflammation aiguë qu'au cours des
premiers jours du processus inflammatoire chronique ou, enfin, dans la période
tardive.

Les manifestations cliniques rencontrées à la phase aiguë de l'inflammation


telles que rougeur, chaleur, œdème et douleur sont bien sous le contrôle de
PGE2 mais l'action, ici, des COX est difficile à identifier. Par contre, au cours du
processus inflammatoire chronique, sous l'action dominante de la population
macrophagique majoritaire (producteur de COX-2), COX-2 (inducteur de PGE2)
participe à l'angiogenèse nécessaire au maintien du granulome inflammatoire
chronique par son activité pro-inflammatoire.

Toutefois, PGE2 et d'autres prostaglandines solubles semblent exercer une


action anti-inflammatoire. In vitro, on a pu observer une action anticytokinique
(blocage direct de sa production et/ou inhibition de la prolifération des
populations cellulaires productrices de ces cytokines). En revanche, in vivo, la
mise en évidence de cette action complexe est plus difficile [ 16 ]. Les travaux
menés chez la souris semblent bien, par le biais de la modulation de réponse au
sein des cellules dendritiques activées, conforter cette hypothèse [ 9 , 10 ]. Tout
cela explique la difficulté à évaluer vraiment l'action des anti-inflammatoires
non stéroïdiens au long cours dans un processus inflammatoire chronique.
Il a été récemment montré que le nombre de récepteurs ionotropiques NMDA,
AMPA et kaïnate augmente lors d'une inflammation cutanée persistante chez
l'homme [ 17 ]. Aussi bien chez lui que chez le rat, ces récepteurs ionotropiques
cutanés et, en particulier, ceux du NMDA ont été identifiés sur les fibres
cutanées nociceptives myélinisées ou non (axones et cellule de Schawn) en
dehors de toute inflammation à une faible concentration. Ils sont fortement
augmentés en cas d'inflammation persistante [ 18 , 19 and 20 ]. De plus, chez
le rat, ils ont été également identifiés au niveau des fibres sympathiques
postganglionnaires en dehors de toute inflammation. Le nombre de ces fibres
semble augmenter ainsi que le nombre de récepteurs ionotropiques au cours
d'une inflammation périphérique et pourrait concourir à la persistance de cette
inflammation [ 21 ]. Enfin, l'analyse en immunohistochimie et en microscopie
électronique a permis d'identifier ces récepteurs au niveau des fibres situées à la
jonction dermo-hypodermique [ 20 ]. Ce mécanisme pourrait intervenir dans
l'hyperalgésie primaire de l'inflammation cutanée persistante, lors de maladies
de système à expression cutanée ou de pathologies allergiques persistantes
(par exemple érythème, prurit et lupus systémique ; vésicules et dermatite
herpétiforme ; nodules hypodermiques et périartérite noueuse ; bulles et
pemphigoïde bulleuse ; squames et rhumatisme psoriasique).

C'est bien le caractère infiltré de l'inflammation du derme et/ou de l'hypoderme


qui fera le terrain de la pathologie douloureuse chronique par le biais de
l'implication des populations cellulaires identifiées au sein de ces granulomes
(lymphocytes, macrophages, histiocytes, polynucléaires et cellules
polynucléées, altérés ou non) qui sont responsables de la libération des
substances pro-algogènes (prostaglandines et/ou cytokines) ou algogènes (H+,
K+, ATP…). De plus, l'altération de la paroi vasculaire elle-même et l'apparition
d'un thrombus (agrégat plaquettaire) sont également susceptibles de
provoquer la libération de substances algogènes. Tous ces éléments
concourent à la persistance du symptôme douloureux chronique.

Muscles

Les fonctions du muscle strié et du muscle lisse sont différentes :

 le muscle strié permet d'effectuer un mouvement. C'est également un


organe sensoriel (récepteur de tension et de longueur) qui permet à
chaque instant de percevoir et d'organiser les déplacements et d'en
informer le système nerveux central ;
 le muscle lisse assure, quant à lui, l'activité automatique des viscères (à
l'exception du muscle cardiaque qui est strié).

La symptomatologie douloureuse du muscle strié résulte soit de l'altération


directe de nocicepteurs (terminaisons libres des fibres afférentes primaires du
système nerveux périphérique), soit de l'atteinte indirecte de récepteurs
spécifiques (fuseaux neuromusculaires et/ou organes tendineux de Golgi) ou
non (mécanorécepteurs). La sémiologie douloureuse musculaire résulte ainsi
d'une palette de causes qui s'étage des troubles posturaux par
dysfonctionnement aux lésions musculaires proprement dites, avec ou sans
déformation. Elle peut, en outre, refléter un dysfonctionnement du système
nerveux central et/ou périphérique (moteur, sensitif ou douloureux).
La sémiologie douloureuse viscérale peut se traduire par des symptômes tels
que le spasme ou la contracture mais également la distension (par exemple le
spasme dans le syndrome de la vessie irritable et la dilatation que l'on rencontre
dans le syndrome du côlon irritable). Dans ce contexte, le lien avec le système
nerveux autonome, principalement sympathique, est essentiel.

Un certain nombre d'items orientent vers le diagnostic étiologique :

 sémiologie qualitative des atteintes musculaires (atonie,


hypotonie/hypertonie ou dystonie, contractures, crampes ou
fasciculations) ;
 intensité de la douleur (EVA, EN, EVS) ;
 caractère continu ou discontinu des symptômes ;
 leur variabilité dans le temps et l'espace ;
 leur relevé topographique segmentaire axial (rachis, ceinture, thorax)
et/ou périphérique (racines ou extrémités des membres), voire diffus ;
 la morphologie du muscle (normale, hypotrophique ou hypertrophique,
dystrophique).

La recherche des signes généraux associés aidera au diagnostic. Sur le plan


symptomatique, seules contractures et crampes semblent appartenir au
vocabulaire de la douleur.

L'électrophysiologie affirme l'atteinte myogène et en précise les caractères. Elle


affirme ou infirme l'atteinte neurogène surtout sensitivo-motrice. Concernant
l'exploration neurosensorielle de la nociception centrale et/ou périphérique, elle
ne peut actuellement qu'être approchée et relève d'équipes spécialisées plutôt
en recherche (voir chapitre 10 ). L'atteinte de la plaque motrice sera affinée par
un test thérapeutique de sensibilisation. L'histologie classe la lésion initiale. La
biologie moléculaire ainsi que l'étude génétique mèneront au diagnostic
définitif. Le retentissement fonctionnel est également essentiel (fatigabilité,
ralentissement ou disparition de fonction).

Il est souhaitable d'analyser la lésion générée par l'inflammation chronique


et/ou auto-immune à diverses échelles, du myocyte au tissu musculaire. C'est
ainsi que des myosites inflammatoires chroniques, telles la dermatomyosite
(DM), la polymyosite (PM) ou la myosite à inclusion (MI), diffèrent sur les plans
histopathologiques (vasculaires, interstitiels et musculaires) et
immunohistochimiques (expression périfasciculaire dans la DM et membranaire
diffuse de HLA-I, dépôt membranaire du complexe d'attaque C5b-9 surtout
dans la PM). En dehors des thrombus plaquettaires libérateurs de sérotonine, on
constate une libération préférentielle de cytokines dans la dermatomyosite (IL-4,
IL-1β et TNF-α) et la polymyosite (INF-γ) [ 22 , 23 ]. L'IL-4 histaminolibératrice,
d'une part, le TNF-α et l'IL-1β, d'autre part, sont reconnus comme
respectivement algogènes et pro-algogènes. Dans le cas de la
dermatomyosite, on observe une lésion de la paroi endothéliale par dépôt de
compléments et une surexpression de chémokines CXCL12-β et CCL2 dans le
vaisseau lésé. A contrario, aucune lésion nécrotique musculaire n'est observée
dans la polymyosite et la myosite à inclusion, mais on constate une surexpression
des chémokines CXCL10 et CCL2 dans les cellules inflammatoires
intramusculaires (lymphocytes T cytotoxiques et macrophages) [ 24 , 25 ].
L'altération du tissu musculaire peut se traduire par une nécrose qui implique la
libération d'ions H+, K+ et d'ATP qui, par engagement des récepteurs ASIC et
P2X3 (ces derniers étant activés par l'adénosine issue de la dégradation de l'ATP
en provenance de l'endothélium ou de la fibre sympathique), sont à l'origine de
l'excitation du nocicepteur.

Les myosites inflammatoires, comme les myosites virales (vacuolaire dans le VIH,
HTLV-1), parasitaires (toxoplasmose ou trichinose) ou lupiques peuvent être
confondues avec la polymyosite ou la dermatomyosite mais les autres atteintes
et les signes généraux, voire l'histologie et l'immunohistochimie, permettent de
redresser le diagnostic. Les myosites nodulaires sont également observées dans
la sarcoïdose, la maladie de Crohn ou les thymomes [ 26 ].

Nous relevons une particularité, celle de la myosite focale des muscles jambiers
(notamment du jumeau interne) en rapport avec une radiculalgie S1 pour
laquelle les explorations radiologiques (hypersignal d'allure inflammatoire en
IRM) et histologiques (biopsie montrant un infiltrat non spécifique) permettront
d'affirmer le diagnostic [ 26 ].

La spécificité de l'atteinte de la plaque motrice, dont les deux étiologies sont la


myasthénie et le syndrome de Lambert-Eaton, est illustrée par une fatigabilité
variable dans le temps et, parfois, une perte de fonction sans douleur. Si la
douleur y est associée, on doit rechercher une myosite granulomateuse liée à la
myasthénie. Le thymome est dans ce cas systématiquement recherché.

On peut aussi aborder la relation entre l'inflammation chronique et la


pathologie musculaire sous l'angle des répercussions de la persistance de cette
inflammation sur la maladie musculaire. En effet, en dehors de la libération dans
le micro-environnement de cytokines (IL-1β, TNF-α ou IL-6), leur diffusion
systémique peut être responsable de manifestations musculaires douloureuses
(par exemple des contractures) sans pour autant que le tissu soit altéré stricto
sensu. Cette étiologie peut même rendre compte de localisations intra-
articulaires multiples, notamment axiales, et de leur retentissement postural.
Enfin, la symptomatologie musculaire peut être le reflet de l'atteinte neurogène
centrale ou périphérique en rapport avec l'inflammation neurogène, voire le
retentissement créé par l'altération du cycle du sommeil. En effet, le syndrome
des jambes sans repos ou le syndrome des mouvements périodiques sont liés à
la perturbation des cycles du sommeil où l'on observe des micro-éveils fréquents
et/ou une diminution du sommeil lent profond (phase IV) au profit de la phase
légère (phase I et/ou II) associés ou non à l'altération de la durée du sommeil.
Ces perturbations seraient liées à l'altération fonctionnelle du circuit
dopaminergique du système nerveux central et/ou au métabolisme du fer.
Parmi les étiologies, les maladies inflammatoires chroniques systémiques telles
que les arthrites rhumatoïdes, le syndrome de Gougerot-Sjögren [ 27 ] ou
l'amyloïdose primitive [ 28 ] ou du système nerveux central telles que la sclérose
en plaques [ 29 , 30 ] sont également décrites.

Os et articulations

Comme le rappelle le Dr Berthelot (voir chapitre 6 ), la douleur est fonction du


degré d'innervation des structures ostéo-articulaires que sont l'os sous-chondral,
le périoste adjacent à l'articulation, la capsule articulaire (structure la plus
innervée) et le tissu synovial (± innervé) entourant tendons, bourses ou enthèses.
Quant au cartilage, il n'est pas innervé.

La symptomatologie va dépendre de l'engagement des facteurs micro-


environnementaux locaux ou systémiques dans l'inflammation. Dans le premier
cas, il peut s'agir de molécules de l'inflammation libérées localement par le
secteur vasculaire à la suite d'une hémolyse intravasculaire, par altération
membranaire autoimmune (anémie hémolytique auto-immune, AHAI). Dans le
second cas, il s'agit de la libération de molécules de l'inflammation d'origine
systémique. Facteurs algogènes ou pro-algogènes, ces molécules sont
également génératrices d'inflammation neurogène. Le micro-environnement
osseux fait également interagir les cellules impliquées dans l'ostéogenèse avec
les cellules auto-immunes impliquées dans la maladie de système, comme
déclencheur ou cofacteur d'entretien de l'inflammation intra-osseuse.

Le type de structures lésées, leur topographie, le caractère destructeur associé


aux signes généraux ou aux autres lésions tissulaires aideront au diagnostic.

L'os et le périoste sont des structures très innervées et vascularisées. On y trouve


des fibres efférentes sympathiques [ 31 ] et des fibres afférentes sensitives. Leur
densité est importante, notamment au niveau du périoste du tibia, de la
mandibule ou de la calotte crânienne. La vascularisation se termine pour partie
en varicosités à l'interface os-périoste ; elle pénètre dans le tissu osseux par les
canaux de Havers ou de Volkmann pour d'autres. Les troncs nerveux passent
par le canal médullaire pour atteindre la diaphyse et par les canaux artériels et
veineux pour atteindre l'épiphyse. Une forte densité nerveuse est surtout notée
au niveau des plaques de croissance apophysaires et dans la métaphyse
osseuse formant un réseau parallèle proche de la vascularisation adjacente aux
travées osseuses. Certains prolongements nerveux vont même au contact des
cellules hématopoïétiques et osseuses sans toutefois y établir de véritables
synapses. Les fibres sensitives libèrent de la substance P et du CGRP [ 32 ] et les
fibres sympathiques libèrent du peptide intestinal vasoactif (VIP, vasoactive
intestinal peptide) et du neuropeptide Y (NPY), toutes molécules qui
interviennent dans la nociception.

La notion d'homéostasie osseuse s'appuie sur le lien étroit entre système nerveux
périphérique, cellules hématopoïétiques et cellules osseuses ainsi que sur la
connaissance de la vascularisation intra-osseuse et du remodelage osseux
permanent. On constate alors sa relation étroite avec la nociception.

La vascularisation intra-osseuse joue un rôle majeur dans la modulation du


remodelage osseux. Elle assure l'apport de minéraux nécessaire à la structure
(anastomoses artérielles épiphysaires, métaphysaires et diaphysaires puis
artérioles et capillaires). Elle est également une voie de drainage des cellules
hématopoïétiques (capillaires veineux puis nombreux sinusoïdes veineux ou gros
sinus central). Il existe un rapport étroit entre la distribution vasculaire et le
remodelage osseux. Un bouquet de capillaires artériels au niveau des lacunes
de résorption ostéoclastique et un sinus veineux trabéculaire au niveau de la
formation ostéoclastique sont observés en histologie. On constate une plasticité
dynamique entre cette vascularisation et le remodelage osseux par le contrôle,
concomitant et local, de l'angiogenèse (augmentation de la
néovascularisation) et du débit sanguin intra-osseux (vasodilatation et ouverture
des sphincters précapillaires). Cela nécessite l'intervention et le contrôle du
système nerveux sympathique par la libération de catécholamines
(adrénergiques et/ou noradrénergiques). L'altération de cette vascularisation
lors de lésions dégénératives (artériosclérose), inflammatoires ou thrombotiques
peut avoir des conséquences considérables sur la structuration osseuse.

Depuis quelques années, de nombreux travaux font état de l'implication du


système nerveux central dans l'homéostasie osseuse, notamment au travers de
la leptine et du système nerveux sympathique.

L'homéostasie osseuse fait appel à la notion de remodelage permanent. Deux


lignées cellulaires y sont particulièrement impliquées, les ostéoclastes, issus de la
lignée monocytaire, et les ostéoblastes, provenant de la lignée
mésenchymateuse. Elles constituent un front mobile de renouvellement, celui
des ostéoclastes suivi de celui des ostéoblastes (canaux de Havers). Ces unités
de remodelage assurent la sécrétion de substances dites vaso-attractives
permettant ainsi leur irrigation vasculaire tout au long de leur déplacement.
Ainsi, nous observons que la vascularisation joue un rôle clé dans le
renouvellement des ostéoclastes, de durée de vie courte (12 jours), en regard
de la durée de vie de l'unité de remodelage, qui est essentiellement de 200
jours. Au cours de ce remodelage, les ostéoblastes deviennent des ostéocytes
lorsque certains d'entre eux s'isolent dans la masse osseuse. Ces ostéocytes
(intra-osseux) maintiennent entre eux une communication indispensable à cette
homéostasie. En effet, c'est à partir de leur expansion cytoplasmique, par une
connexion pseudosynaptique glutamatergique, qu'ils assurent la transduction
intra-osseuse de ce signal [ 33 , 34 and 35 ]. C'est également l'entrée en
apoptose de ces ostéocytes, par rupture du maintien de ce signal, qui assure le
remodelage osseux permanent. Il permet, de ce fait, la réparation dès la
microfissure. La perturbation de cette homéostasie par défaut ou par excès
peut entraîner respectivement une ostéopénie ou une ostéopétrose.

La leptine, d'origine adipocytaire, intervient dans l'homéostasie par régulation


positive de la sécrétion d'hormones sexuelles, notamment l'œstradiol, ce qui
provoque une augmentation de la masse osseuse, conséquence de la
diminution de l'activité des ostéoclastes. La leptine exerce également un
contrôle négatif sur la sécrétion du cortisol.

Nous nous intéresserons surtout au rôle du système nerveux dans l'homéostasie


osseuse. Les voies afférentes sensitives, consacrées à la proprioception et à la
nociception, sont présentes dans l'os et semblent jouer un rôle non négligeable
dans l'homéostasie osseuse [ 36 , 37 ]. Les voies efférentes motrices et, surtout,
les voies végétatives sympathiques vont interagir avec la trame osseuse. Ces
voies, aussi bien afférentes qu'efférentes, ont bien été identifiées dans l'os et le
périoste [ 35 ]. Il existe une relation dynamique entre l'homéostasie de l'os et le
système nerveux. Dans un os adulte métaboliquement peu actif, on observe
que l'innervation est plutôt centrée sur la zone de remodelage et les zones
inflammatoires, arthritiques par exemple [ 35 ], et, de manière générale, dans
des zones de forte activité ostéogénique. Cette activité locale du système
nerveux, notamment la croissance de ces fibres, semble déclenchée par des
molécules de guidage issues de la sécrétion continue des cellules
ostéoblastiques et ostéoclastiques. Aucune synapse n'a cependant pu y être
mise en évidence [ 38 , 39 ]. Enfin, des travaux menés sur des modèles animaux
entre 1999 et 2003 ont montré une résorption osseuse à la suite de
sympathectomies chimiques ou chirurgicales [ 40 , 41 , 42 and 43 ]. Certains
travaux évoquent le rôle du système nerveux sympathique sur la différenciation
des cellules hématopoïétiques lors de la réponse du système immunitaire [ 44 ].
Or, les ostéoclastes sont issus des lignées monocytaires. Certains y voient un lien
indirect sur la résorption osseuse. Il ferait intervenir la sécrétion des
catécholamines et l'augmentation de la leptine plasmatique. Le rôle de
l'hypothalamus ventro-médian a été évoqué [ 45 , 46 ]. L'observation de souris
déficientes en dopamine-β-hydroxylase a permis de montrer l'intervention du
système sympathique dans la gestion de la résorption de la masse osseuse.

Le fait essentiel, dans l'homéostasie osseuse, est la découverte de


neuropeptides dans l'os et surtout de glutamate. Des récepteurs ionotropiques
(NMDA, AMPA, kaïnate) et métabotropique (mGluR) ont été mis en évidence [
47 , 48 , 49 and 50 ]. L'électrophysiologie montre que les récepteurs NMDA et
mGluR sont fonctionnels [ 48 , 51 ].

L'origine du glutamate est donc double, fibres afférentes nociceptives et


cellules ostéoblastiques [ 52 ]. Le glutamate joue un rôle aussi bien sur la
différenciation que sur la production des ostéoblastes [ 53 , 54 ]. In vitro, le
blocage des récepteurs NMDA inhibe la résorption osseuse [ 55 ]. Les
récepteurs ionotropiques et métabotropiques pourraient être impliqués dans la
fonction de mémorisation de ces cellules osseuses lors de stimulations répétées
(win up like).

Les cellules ostéocytiques sont maillées en réseau ou syncytium fonctionnel par


des jonctions communicantes (gap junctions) qui dépendent des récepteurs
glutamatergiques. Les observations de sensibilisations osseuses pourraient
s'expliquer par l'existence de potentiel d'action de longue durée en réponse à
des stimuli douloureux répétitifs, comme cela est observé pour les neurones de
second ordre au niveau de la moelle épinière [ 56 , 57 ]. La mécanosensation,
intervenant dans l'analyse des contraintes mécaniques, semble sous la
dépendance de ce système de jonction communicante [ 58 ].

La sérotonine semble également intervenir dans cette homéostasie [ 59 , 60


and 61 ].

Le CGRP, sécrété par le système sensitif, est pro-ostéogénique sur les fibres
trabéculaires et semble équilibrer l'action anti-ostéogénique du système
sympathique dans les conditions physiologiques [ 35 , 62 , 63 ].

À l'inverse, la substance P stimule la résorption osseuse en agissant sur les


ostéoclastes [ 35 ]. Comme les sympathectomies (chimiques et physiques)
induisent une sécrétion accrue de substance P et de CGRP, il a été suggéré
que le système sympathique exerçait un contrôle négatif sur le système sensitif [
40 , 41 ]. Les terminaisons des fibres sympathiques sont proches des
ostéoblastes et des ostéoclastes [ 64 , 65 ] dont la surface possède des
récepteurs α et β catécholaminergiques [ 66 , 67 ]. L'action des
catécholamines est bien connue comme en témoigne l'ancienne utilisation des
β-bloquants dans le traitement de l'ostéoporose. Notons que la noradrénaline,
par son récepteur α1, exerce un pouvoir mitogène sur les cellules
ostéoblastiques.

Le neuropeptide de transmission postganglionnaire des cellules nerveuses


sympathiques [ 68 ], le VIP, participe également au remodelage osseux, en
particulier lors de la différenciation des pré-ostéoclastes [ 40 , 69 , 70 ]. En
définitive, l'activation sympathique via le VIP semble plutôt favoriser l'ostéolyse
au niveau du remodelage osseux.

Il existe de nombreux arguments cliniques en faveur de la modulation neuronale


des réponses inflammatoires et de la propagation des atteintes articulaires chez
beaucoup de patients atteints d'une maladie arthrosique ou d'une polyarthrite
rhumatoïde. Au cours du processus arthrosique, on observe une augmentation
de la densité des fibres nerveuses sensitives et autonomes et une libération de
substance P et de glutamate par les fibres nociceptives. Un lien entre cytokines
et neurotransmetteurs a en outre été mis en évidence dans la physiopathologie
des processus inflammatoires.

Le remodelage osseux fait interagir étroitement les cellules ostéoblastiques issues


des cellules mésenchymateuses sous le contrôle d'un facteur transcriptionnel
transitoire Cbfa1/runx2 avec les cellules ostéoclastiques issues de cellules
monocytaires. L'activation de la lignée ostéoclastique est sous le contrôle de
molécules régulatrices solubles (ostéoprotégérine ou OPG, receptor activator
of nuclear factor κB ligand ou RANK-L) et de cytokines (M-CSF, TNF-α, IL-1, IL-6 et
IL-11). L'inhibition de cette voie est contrôlée par des cytokines IL-4 et IL-13 en
association avec l'augmentation des concentrations de l'OPG et la diminution
de celles de RANK et RANK-Lvia la voie STAT-6 [ 71 ]. Ces molécules sont
produites par la cellule ostéoblastique et son précurseur, le pré-ostéoblaste [ 72
]. Les différents facteurs solubles mis en évidence dans la différenciation des
ostéoclastes le sont également dans les cascades fonctionnelles de cellules du
système immunitaire telles que les macrophages, les cellules dendritiques et les
cellules lymphocytaires B et T [ 73 , 74 ].

Au total, la genèse et le maintien de la douleur au long cours des maladies de


système s'expliquent par les interactions étroites entre système immunitaire,
remodelage osseux et système nerveux sensitif et autonome.

Séreuses

L'atteinte des séreuses est recherchée lors du bilan initial et oriente l'étiologie par
un faisceau d'arguments cliniques et paracliniques, ou elle est observée à la
phase d'extension de la pathologie identifiée. Parmi les symptômes qui y sont
rattachés, les douleurs peuvent se trouver au premier plan. Elles peuvent
présenter une ou deux composantes, être associées à des signes
neurovégétatifs et développer topographiquement une sémiologie profonde
et/ou projetée.

La sémiologie douloureuse peut refléter la structure tissulaire elle-même ou être


la conséquence de son innervation ou de sa vascularisation, normale ou
anormale (néovascularisation). L'exemple le plus probant semble être la plèvre.
En effet celle-ci, enveloppe du parenchyme pulmonaire, présente un feuillet
viscéral et un feuillet pariétal assurant ainsi une expansion mécanique passive. Il
existe une vascularisation (sanguine et lymphatique) et une innervation sensitive
(fibres myélinisées Aβ et Aδ et non myélinisées C) issue de la distribution
métamérique thoracique ainsi qu'une innervation neurovégétative (thoracique
essentiellement de D3 à D6 pour les fibres sympathiques postganglionnaires de
type C noradrénergique et les branches du nerf vague à destination du
poumon). Ce paquet vasculo-nerveux chemine dans l'espace conjonctival de
la paroi pleurale qui est constitué, de l'intérieur vers l'extérieur, de la
monocouche mésothéliale s'appuyant sur la membrane basale, du tissu
élastique, du tissu conjonctival lâche et de la couche fibreuse. Le volume
pleural, inférieur à un 1 ml, est constitué de 1 à 2 g de protéines pour 100 ml et
de 1 500 à 4 500 cellules à majorité mononucléées ; la population lymphocytaire
y très faible. Le tissu mésothélial est organisé en microvillosités dont la densité est
supérieure au niveau de la face viscérale qu'à celui de la face pariétale. Elles
assurent l'homéostasie du liquide pleural par la diminution de la pression
hydrostatique et de la pression oncotique, la dépression de l'espace pleural et,
enfin, elles assurent la diminution du volume lymphatique dans cette espace.
Cette homéostasie peut être modifiée dans des conditions inflammatoires
d'origine multiple, ce qui se traduit par une perméabilité d'abord endothéliale
par suite de la libération du VEGF(vascular endothelial growth factor) par les
cellules mésothéliales [ 75 ].

Lors d'une affection inflammatoire pleurale, il est décrit non seulement une
infiltration de cellules immunes telles que les polynucléaires neutrophiles,
éosinophiles et des lymphocytes dans des proportions variables mais également
une activation des cellules mésothéliales. En effet, dans ces infiltrats cellulaires
immuns en provenance des secteurs vasculaires pleuraux aussi bien pariétal
que viscéral, les polynucléaires neutrophiles sont sous le contrôle de l'IL-8 et du
C5a, les éosinophiles le sont sous le contrôle de l'IL-3 et de l'IL-5 et les
lymphocytes sont, quant à eux, sous celui du LCF(lymphocytic chemotactic
factor), du MCP-1(monocyte chemotactic peptide) et de l'IL-8. Les cellules
macrophagiques (monocytes et macrophages) sont recrutées par le MCP-1 et
libèrent de l'IL-1β et du TNF-α au cours de ce processus [ 76 ]. Enfin, les cellules
mésothéliales, sous le contrôle du PDGF(platelet-derived growth factor),
produisent de l'IL-8, responsable du recrutement des polynucléaires
neutrophiles, et du MCP-1, responsable des monocytes [ 77 ]. L'IL-1β et le TNF-α
modulent à la hausse la production de l'IL-8 tandis que l'interleukine 1 récepteur
antagoniste (IL-1ra) la module à la baisse. Dans certaines conditions et sous le
contrôle positif de ces deux cytokines, on observe la production de NO (nitric
oxyd, oxyde nitrique), de collagène et, a contrario, la diminution de ces
molécules est observée sous INF-γ. Enfin, sous TGF-β, ces cellules mésothéliales
sécrètent de l'inhibiteur de l'activateur du plasminogène (PAI, plasminogen
activation inhibitor), isoformes 1 et 2, qui intervient dans le processus
inflammatoire exsudatif. Il semblerait que les cellules macrophagiques et
monocytaires constituent la deuxième ligne d'activation immunitaire comme on
peut l'observer dans le lupus érythémateux disséminé [ 75 , 76 , 78 ].
Les signes neurovégétatifs (tachycardie ou bradycardie, hypotension, troubles
cutanés vasomoteurs) sont fréquemment associés à la douleur et semblent
jouer un rôle dans la persistance douloureuse et l'hyperalgésie.

Quant au péricarde, c'est le caractère compressif de l'épanchement qui


constitue le signal d'alarme avec son retentissement hémodynamique pouvant
mettre en jeu le pronostic vital. La douleur péricardique n'est probablement
identifiable qu'au début de l'inflammation tissulaire et entre dans le cadre de la
recherche d'une étiologie d'une douleur thoracique.

Les autres séreuses telles que les mésos, la capsule de Glisson, la capsule rénale
et le péritoine semblent répondre selon les mêmes processus.

Mais, actuellement, bien peu de données, en dehors de la plèvre, sont


disponibles.

Viscères

Les viscères pleins ne sont pas sensibles à la douleur, à l'exception du pancréas.


La douleur pancréatique est décrite comme profonde, transfixiante, en «coup
de poignard» en rapport avec la nécrose d'origine enzymatique (amylase et
lipase). Il est à noter que l'insulite, à l'origine du diabète insulinodépendant, ne
présente pas de sémiologie douloureuse. Il en est de même des hépatopathies
auto-immunes idiopathiques ou secondaires.

Les organes creux (voies urinaires, canal cystique ou cholédocien, voies


aériennes et digestives) sont sensibles à la distension, à l'inflammation et à
l'ischémie aiguë et/ou chronique. L'ischémie (hypoxie, libération d'H+ et de K+)
est le plus souvent le reflet d'une pathologie artérielle plutôt que veineuse.
Celle-ci peut être en rapport avec une vascularite touchant les vaisseaux de
moyens et petits calibres (périartérite noueuse [PAN], polyangéite
microscopique) ou la conséquence d'une thrombose en rapport avec une
pathologie prothrombogène (syndrome des antiphospholipides,
hémoglobinurie paroxystique nocturne…).

L'inflammation met également en jeu des nocicepteurs silencieux qui


deviennent dès lors sensibles à divers stimuli par abaissement de leur seuil
douloureux. Cette baisse résulte de la présence de molécules de l'inflammation
systémique comme les prostaglandines (PGE2) et/ou du micro-environnement
inflammatoire, ou «soupe inflammatoire» locale.

La perception de la distension des viscères est déclenchée par des


mécanorécepteurs dont 70 % présentent des seuils bas et répondent à des
distensions faibles. Les 30 % restant présentent des seuils élevés et ne codent
que pour des stimuli douloureux [ 79 , 80 ]. Cependant, ce seuil peut être
diminué dans des conditions particulières comme l'inflammation. C'est le cas
des maladies inflammatoires chroniques de l'intestin (MICI) comprenant la
maladie de Crohn, la rectocolite hémorragique et les colites microscopiques
(collagène et lymphocytaire), les cystites ou gastrites interstitielles chroniques
(infiltrations lymphocytaires dans la musculature lisse ou striée). Elles sont
sensibles à l'inflammation mais également à la nécrose ischémique et peuvent
être accompagnées de contractures ou de spasmes musculaires violents.
Si l'on se réfère à la physiopathologie des MICI, on observe une dysrégulation
innée ou adaptative du système immunitaire au sein de la muqueuse de
l'intestin. La réponse innée se caractérise dans la muqueuse intestinale par une
stimulation anormale de cellules résidantes, responsable de la production de
médiateurs de l'inflammation tels que cytokines (TNF-α, IL-6, IL-1β et IL-8) et de
chimiokines (CC et CXC). Elle aboutit au recrutement de cellules inflammatoires
systémiques via la surexpression locale de molécules d'adhésions (VCAM-1,
ICAM-1, E et P sélectines). On observe localement un infiltrat de cellules pro-
inflammatoires activées dont la durée de vie est augmentée par inhibition des
mécanismes d'apoptose. En rajoutant la rupture de la tolérance vis-à-vis de la
flore intestinale et une restriction du répertoire immunogénétique (par exemple
Nod2/CARD15 pour la maladie de Crohn), on obtient un environnement
favorable à l'émergence et au développement de la maladie dysimmunitaire
digestive. Le caractère aigu ou chronique de l'inflammation intestinale semble
sous le contrôle des macrophages résidant dans la lamina propria. Ces
derniers, par la production d'IL-12 et d'IL-18, induisent un profil TH1 aux dépens
des TH2 qui est responsable de la forme chronique de cette inflammation [ 81 ,
82 and 83 ]. Il est actuellement acquis que certaines de ces cytokines (TNF-α,
IL-6, IL-1β en particulier), d'origine macrophagique, jouent un rôle significatif
dans la modification des seuils nociceptifs des fibres sensitives périphériques (il
en est de même au sein du système nerveux central, voir plus bas).

Le CRF(corticotrophin-releasing factor) et le NGF(nerve growth factor) agissent


sur les terminaisons nerveuses, les cellules épithéliales et les cellules immunitaires
via la médiation périphérique des effets du stress et l'action locale sur les
mastocytes activés (libération de protéases, notamment la tryptase, qui
activent les récepteurs activés par les protéases [PAR, protease-activated
receptors]). Cette interaction entre les mastocytes et les afférences primaires
intervient dans la sensibilisation douloureuse viscérale.

Les cellules urothéliales, vésicales et, par extension, celles de l'ensemble des
voies urinaires présentent les caractéristiques communes aux afférences
nociceptives. En effet, elles possèdent en leur sein certains éléments comme les
bradykinines, des neurotrophines, TRVP1 et des canaux sodiques [ 84 , 85 , 86
and 87 ]. Elles libèrent de nombreuses substances après stimulation mécanique
et/ou thermique dont l'ATP, l'oxyde nitrique, la substance P, les cytokines et les
prostanoïdes. Ainsi, tous les facteurs susceptibles d'entretenir une inflammation
chronique, notamment d'origine auto-immune (comme dans la maladie de
Sjögren ou le lupus), peuvent mener à une douleur chronique, dont certaines
caractéristiques peuvent emprunter à la sémiologie neuropathique.

Vaisseaux

L'altération d'un vaisseau peut être en rapport avec le contenant ou le contenu


( figure 6 ).

Lorsque l'on aborde le contenu, on peut évoquer les anomalies des éléments
figurés du sang (plaquettes, hématies et leucocytes) et leurs conséquences en
termes de rhéologie ou de viscosité. Seule sera abordée ici l'implication de
l'inflammation chronique et/ou des maladies de système dans cette altération.
Le contenant véhicule les produits de l'inflammation, acteurs pro-inflammatoires
et anti-inflammatoires, pro-algogènes ou non, participe à leur diffusion et
propage les cascades d'événements associées (vasodilatation, chimiotactisme,
diapédèse et extravasation).

Figure 5 ▪ Implication vasculaire de la douleur.

Parmi les molécules véhiculées, on retiendra la bradykinine issue d'α2-globuline


(les kininogènes), le TNF-α, l'IL-6 responsable de l'hyperthermie, sensibilisant les
nocicepteurs polymodaux et, surtout, les récepteurs appartenant à la famille
des Trp (Trp1 et 3 surtout). C'est le cas de la maladie de Still où l'on observe une
activation marquée des macrophages responsables de la production des
cytokines IL-6, IL-8, IL-18 et TNF-α, ce qui explique la fièvre associée en particulier
aux douleurs articulaires et musculaires. Ces douleurs, hyperalgésie mécanique,
semblent en grande partie due à la production d'IL-18 induite par l'INF-γ,
l'endothéline et les prostanoïdes (PGE2) en agissant sur les récepteurs ET-1 [ 88 ,
89 ]. Sera évoquée l'altération des plaquettes, responsable de la formation de
thrombus mais également de la libération de sérotonine et de substance P.
Cette libération de substance algogène peut être observée au cours des
anémies et thrombopénies auto-immunes. Les maladies auto-immunes
prothrombogènes artérielles et/ou veineuses, en particulier le syndrome des
antiphospholipides, le lupus érythémateux aigu disséminé (LEAD) ou les déficits
auto-immuns de la coagulation voire la sclérodermie, peuvent s'exprimer par
une symptomatologie douloureuse aussi bien nociceptive que neurogène en
raison de la lésion vasculaire nécrotique et inflammatoire, touchant aussi bien le
tissu nerveux (voir plus bas) que le tissu conjonctif, qu'ils sont susceptibles
d'engendrer (Konttinen YT, 2003).

L'altération du contenant concerne la lésion de l'endothélium, dans l'intima, la


média, voire l'adventice. Les métalloprotéinases de la matrice (MMP-2, MMP-7
et MMP-9) semblent jouer un rôle non négligeable dans la genèse de la lésion
vasculaire. Les MMP-2 et MMP-9 ont été identifiées dans les macrophages et les
cellules géantes — à proximité de la limitante élastique interne -, les cellules
musculaires lisses et les myofibroblastes de la média et de l'adventice ; en
revanche, seuls les MMP-9 ont été identifiées dans les vasa vasorum [ 90 ]. Les
MMP-2 et MMP-9 semblent refléter l'activité vasculaire de la maladie [ 90 , 91 ,
92 and 93 ]. Il a été observé un lien entre la lésion vasculaire du type
vascularite, la neuropathie périphérique, la cryoglobulinémie mixte et l'hépatite
C à travers l'engagement des métalloprotéines 1, 7, 9 et l'IL-1β [ 94 ] qui modifie
la qualité de la barrière vasculo-nerveuse habituellement imperméable. En
particulier, l'augmentation notamment des MMP-9 est corrélée à l'infiltration
inflammatoire périvasculaire lésionnelle des fibres nerveuses périphériques, en
particulier des lymphocytes CD8 (profil immunitaire de type TH-1) [ 95 ]. De
même, au cours de cette cryoglobulinémie secondaire à l'hépatite C, les taux
du TNF-α et de CXCL-10 (IP-10), reflet de l'activité macrophagique, sont
particulièrement élevés et semblent fortement refléter la forme active de
vascularite [ 96 ]. L'altération peut toucher préférentiellement les gros vaisseaux
(maladie de Takayashu, artérite à cellules géantes de Horton), les vaisseaux de
moyen calibre (périartérite noueuse, syndrome de Churg et Strauss) et les
vaisseaux de petit calibre (polyangéites microscopiques, purpura rhumatoïde et
vascularite leucocytoclasique). La lésion endothéliale signe, par sa
dégradation, une activation de la thrombinoformation par la mise à nu du
sousendothélium et par l'inversion de polarité de la membrane plasmique.

Les lésions immunohistochimiques sont principalement des infiltrats


inflammatoires polymorphes périvasculaires, une nécrose fibrinoïde avec un
granulome important pour les vaisseaux de gros et moyens calibres (maladie de
Horton, granulomatose de Wegener), de faible importance pour les artères de
moyen et faible calibres (périartérite noueuse) et absent pour les artères de
petit calibre (polyangéite microscopique). L'existence de ce granulome peu
organisé signe en général la présence d'une activité macrophagique menée
par les polynucléaires neutrophiles, les plasmocytes, les histiocytes et les cellules
géantes polynucléées.

Le relevé topographique et surtout neuro-anatomique joue un rôle non


négligeable dans l'analyse de la sémiologie douloureuse, compte tenu
notamment des rapports étroits entre vaisseaux et système nerveux. L'atteinte
du système nerveux périphérique est d'autant plus distale que le diamètre des
vaisseaux atteints est faible. Les fibres nerveuses sont alors de faible calibre,
myélinisées ou non. La démarche clinique vise à apprécier et à distinguer les
caractères neuropathiques ou nociceptifs de la douleur, en plus de la
recherche de l'étiologie, car cela aura une forte incidence sur la stratégie
thérapeutique.

Système nerveux central et périphérique

La sémiologie douloureuse en rapport avec le système nerveux central se réfère


à la topographie lésionnelle, que ce soit sur le trajet des voies nociceptives
spinothalamo-corticales, directes ou indirectes, ou au niveau des enveloppes
méningées via le système trigémino-vasculaire. En effet, au niveau
encéphalique, seules sont innervées les enveloppes, et cette innervation est liée
à la présence d'afférences primaires nociceptives (fibre Aδ et C) au voisinage
de sa vascularisation ( figures 5 et 6 ). Concernant le trajet ascendant des
voies nociceptives ainsi que leur projection somatotopique, il s'agit, le plus
souvent d'une rupture et/ou d'une obstruction vasculaire, et plus rarement d'une
pathologie inflammatoire chronique démyélinisante, quelle qu'en soit la nature.

Figure 6 ▪ Présence des récepteurs NMDA et canaux calciques sur les fibres
afférentes primaires et sympathiques (schéma modifié d'après Janig W).

Maladies inflammatoires chroniques ou auto-immunes d'ordre vasculaire

Il est observé, lors d'une atteinte du système nerveux central (SNC), soit une
action prothrombosante, responsable de l'altération des vaisseaux quelle qu'en
soit leur taille (par exemple, tous les vaisseaux sont atteints dans le syndrome des
antiphospholipides, les petits vaisseaux sont préférentiellement atteints dans les
cryoglobulinémies), soit une maladie inflammatoire vasculaire, telle que les
vascularites caractérisées par l'infiltration périvasculaire. Ces lésions se traduisent
cliniquement par une douleur neuropathique centrale ou une céphalée dite
secondaire. Dans certains cas, une céphalée secondaire peut être associée à
une douleur neuropathique périphérique, comme dans la maladie de Horton
(hyperesthésie et allodynie du cuir chevelu en regard de la lésion vasculaire
temporale).

En ce qui concerne les localisations médullaires, peu de maladies de système


sont décrites. Les étiologies principalement évoquées sont le lupus, le syndrome
des antiphospholipides, le syndrome de Gougerot-Sjögren, la sarcoïdose, la
maladie de Behçet, la sclérodermie, la colite ulcéreuse, la maladie de Crohn, la
thyroïdite de Hashimoto et les vascularites (maladies de Horton, de Takayashu
et de Wegener ainsi que la PAN et l'angéite isolée du SNC). Ces maladies se
traduisent par des douleurs dorsales essentiellement. Dans le cas des
vascularites, le mécanisme lésionnel semble exclusivement centré autour du
vaisseau artériel, ce qui se traduit par l'implication de l'artère spinale antérieure
et de ses branches et aboutit à l'ischémie médullaire aiguë ou subaiguë et/ou à
des hémorragies sous-arachnoïdiennes. Dans le cas de la maladie de Behçet, la
lésion vasculaire est essentiellement veineuse et se traduit le plus souvent par
une myélopathie chronique menant à une atrophie extensive de la moelle. À
l'examen histologique, on constate de manière prédominante un
épaississement des méninges avec infiltrat lymphocytaire et, quelquefois, des
démyélinisations médullaires associées à des réactions gliales. Dans la
sclérodermie systémique où est décrit un infiltrat périvasculaire majoritairement
de lymphocytes T et de collagène [ 98 ], on observe de rares complications
neurologiques telles que céphalées, atteintes des nerfs crâniens, neuropathies
périphériques et myélopathies, surtout cervicales [ 99 ]. La lésion médullaire
peut être d'origine ischémique subaiguë ou chronique, d'origine carentielle par
malabsorption digestive de la vitamine B12 (associée à des atteintes digestives
haute de type gastrite atrophique), ou encore issue d'une compression
médullaire extrinsèque fibreuse.

À propos du système nerveux périphérique, il sera évoqué les douleurs


neuropathiques dans les vascularites surtout lorsque les petites artères des
périmysiums sont atteintes comme dans la PAN, ou devant des maladies
inflammatoires granulomateuses chroniques (syndrome de Gougerot-Sjögren,
colite ulcéreuse, maladie de Crohn, polyarthrite rhumatoïde). La structure
nerveuse périphérique présente en son sein, en particulier dans l'endonèvre, à
côté des fibroblastes et des mastocytes, des macrophages résidants, qui
sécrètent nombre de cytokines dont l'IL-1, le TNF-α et l'IL-12 [ 100 ]. La
vascularisation de ces structures nerveuses périphériques (les vasa nervorum)
comprend un axe artériel qui suit intimement les troncs nerveux, se divise en
artérioles de plus en plus petites et se termine en trame artériolo-capillaire
endoneurale orientée dans le sens des fascicules, et un retour veineux structuré
de façon similaire (Hugon, 2003). Il existe également, à ce niveau, une barrière
sang-nerf identique à la barrière hémato-encéphalique [ 101 ]. Ces vasa
nervorum sont innervés par de fins plexus de fibres amyéliniques sympathiques
vasoconstrictrices et parasympathiques vasodilatatrices [ 102 , 103 ]. On peut
observer des douleurs neuropathiques en cas d'activation des macrophages
résidants, d'infiltrations cellulaires, de lésions vasculaires notamment de petits
vaisseaux (cryoglobulines, vascularites ou maladies prothrombotiques de type
antiphospholipides), de dépôts lipidiques, d'immunoglobulines ou de substance
amyloïde.

De fait, 15 % de ces neuropathies périphériques sont liées à des


cryoglobulinémies (de type I et surtout II) et le même pourcentage est lié à des
gammapathies monoclonales. Ces dernières sont le plus souvent secondaires à
des hémopathies malignes (myélome multiple, syndrome POEMS, maladie de
Waldenström et syndrome lymphoprolifératif du type leucémie lymphoïde
chronique, dont le lien de causalité est par ailleurs difficile à établir). Elles sont en
majorité à IgM. D'autres, plus rares, seraient dues aux IgG et IgA avec une
évolution maligne plus affirmée. Le lien avec l'amylose AL serait également plus
étroit [ 104 , 105 and 106 ]. La neurotoxicité neuronale est consécutive, en
dehors de l'infiltration cellulaire lympho-plasmocytaire, à la pathogénicité de
l'immunoglobuline elle-même lors de dépôts endoneuraux. En effet, ces
anticorps peuvent s'attaquer à certains antigènes de la myéline ou directement
à l'axone. L'IgM monoclonale anti-MAG(myelin associated glycoprotein) est
source d'une pathologie démyélinisante sensitive. L'IgM anti-gangiosides est
responsable d'une polyneuropathie démyélinisante sensitivo-motrice au cours
de la leucémie lymphoïde chronique (LLC) [ 107 , 108 ]. Dans ces deux cas, la
douleur neuropathique n'est pas le symptôme principal, sauf en cas de dépôts
de chaînes légères kappa ou lambda ou de dépôts amyloïdes responsables
d'une neuropathie sensitive axonale associée à une dysautonomie. C'est
l'activité cryoglobuline des immunoglobulines, responsables de la lésion
inflammatoire endoneurale, qui semble constituer le lien entre l'inflammation
chronique et la douleur neuropathique. Cela pourrait constituer un lien entre
neuropathie distale, éventuellement douloureuse, et présence de MGUS (ou
gammapathie de signification indéterminée) dont la fréquence s'élève avec
l'âge à partir de 50 ans (6 % au-delà de 80 ans).

Troubles de l'homéostasie cytokinique lors d'affections immunitaires

Hormis les étiologies lésionnelles morphologiquement documentées, peuvent


être également évoquées les modifications des seuils nociceptifs, via la
libération systémique de cytokines pro-inflammatoires telles que l'on peut en
rencontrer dans la forme adulte de la maladie de Still : libération de cytokines IL-
8, IL-6, IL-18 et TNF-α, l'IL-6 et le TNF-α appartenant au groupe des cytokines pro-
inflammatoires [ 109 , 110 ] et production d'IL-18 responsable de l'hyperalgésie
mécanique d'origine inflammatoire [ 88 , 89 ]. Ainsi, l'homéostasie des cytokines
au sein du système nerveux joue un rôle essentiel. En effet, elle répond à une
double fonction dans le système nerveux central :

 régulation du processus inflammatoire, équilibre entre effets pro-


inflammatoires (TNF-α, IL-1, IL-6…) et anti-inflammatoires (TGF-β, IL-4, IL-
10…) ;
 contrôle des activités proprement neuronales [ 111 , 112 , 113 , 114 , 115
and 116 ].

Il faut tenir compte du lieu de production des cytokines, soit à distance du


système nerveux central par diffusion systémique issue du passage
transvasculaire (perméabilité vasculaire constitutive hypothalamique ou
lésionnelle), soit production locale issue de populations cellulaires immunitaires
importées dans le SNC ou de cellules gliales. Tant les monocytes issus de la
circulation sanguine que les cellules microgliales et astrocytaires du SNC sont
capables de produire les deux formes d'IL-1, le TNF-α, l'IL-6 et le TGF-α1.

L'expression intracérébrale de ces cytokines a été également observée dans de


grandes pathologies inflammatoires du système nerveux chez l'homme,
notamment la sclérose en plaques [ 117 , 118 and 119 ]. En effet, au cours de
cette maladie, on observe, en plus d'une accumulation d'IL-1 et de TNF-α dans
le liquide céphalorachidien surtout lors de poussées ou dans des formes
chroniques progressives [ 120 ], la présence du TNF-α dans les astrocytes et les
macrophages localisés au niveau des plaques de démyélinisation. Chez les
rongeurs, on constate une expression neuronale constitutive des récepteurs d'IL-
1, d'IL-6 et de TGF-α [ 117 , 121 , 122 , 123 , 124 and 125 ]. Certains récepteurs
ont également été observés à la surface des cellules gliales, épendymaires ou
endothéliales. Bien que peu de travaux aient été menés chez l'homme, le rôle
de ces récepteurs est évoqué dans la régulation des états fébriles et du
sommeil, ainsi que dans la gestion du stress et de l'immunité. Sur des cellules en
culture, la synthèse du TNF-α a été obtenue à partir de cellules gliales,
astrocytaires et surtout microgliales [ 147 ]. L'expression de ces cytokines peut
déclencher une réaction en chaîne, le TNF-α induisant la production du CSF-1
par les astrocytes et leur multiplication, celui-ci déclenchant la prolifération de
la microglie qui, elle-même, est source de production d'IL-1 et de TNF-α. Certains
récepteurs des cytokines (IL-6, TNF-α) ont été identifiés sur l'hypothalamus,
l'hippocampe, le gyrus dentelé, le cortex et les noyaux de la base [ 113 , 114 ,
124 ]. L'axe hypothlamo-hypophyso-surrénalien est sensible aux actions des
cytokines. Le noyau paraventriculaire de l'hypothalamus, siège de la production
de la CRH(corticotrophin releasing hormone), est sensible à l'IL-1β et à son
antagoniste l'IL-1ra [ 127 , 128 ]. La libération de la CRH est stimulée par les
cytokines proinflammatoires IL-1 β, IL-6 et INF-α et inhibée par la cytokine anti-
inflammatoire TGF-α. L'IL-1 stimule le métabolisme de la noradrénaline et de la
sérotonine dans l'hypothalamus. Il existe également, au niveau du cortex
surrénalien, une production de cytokines pro-inflammatoires et anti-
inflammatoires et, parmi de nombreuses molécules régulant cet équilibre, les
glucocorticoïdes issus de ces tissus assurent un contrôle négatif sur la réponse
inflammatoire et permettent de contenir la réponse immunitaire. Les surrénales
constituent un site d'interactions entre les cytokines et l'axe hypothalamo-
hypophyso-surrénalien [ 129 , 130 ] ( figures 7 , 8 and 9 ).

Figure 7 ▪ Mise en commun des mécanismes cérébraux afin de coordonner le


système nerveux et immunitaire.
Figure 8 ▪ A. Corps calleux. B. Voie olfactive. C. Corps mammilaire. D. Fornix. E.
Noyaux antérieur du thalamus. F. Amygdale. G. Hippocampe. H. Gyrus
parahippocampique. I. Circonvolution cingulaire. J. Noyaux hypothalamiques.
Figure 9 ▪ Représentation schématique des interventions des cytokines dans le
fonctionnement de l'axe du stress. Les neurones parvocellulaires du noyau
paraventriculaire de l'hypothalamus produisent la CRH, hormone également
abondante dans l'amygdale. Cet autre site joue un rôle crucial dans la
perception de peur et d'anxiété et la production de noradrénaline qui stimule
les neurones du noyau paraventriculaire de l'hypothalamus. Dans des conditions
normales, l'action de la CRH sur les cellules corticotrophiques de l'hypophyse
induit et règle la sécrétion de l'ACTH soit en l'augmentant à la suite d'un stress,
soit en la réduisant en fonction de la concentration élevée de corticoïdes. Les
effets de la CRH sont eux-mêmes modulés en particulier par certaines cytokines.
Véhiculé par la circulation sanguine, l'ACTH agit sur les corticosurrénales qui, en
réponse, produisent le cortisol. Ce dernier, utilisant également la voie sanguine,
agit notamment sur l'hypothalamus, sur l'hippocampe et sur l'amygdale et
participe à la régulation de l'immunité (d'après Claude Jacque [ 147 ]).

Trouble de l'homéostasie du fer et de la ferritine

En dehors de l'implication de la libération systémique de cytokines sur le SNC, on


observe également le rôle de l'hyperferritinémie. Celle-ci est observée au cours
de la maladie de Still et est également rapportée au cours du lupus systémique,
de la polyarthrite rhumatoïde, de la dermatomyosite, de la polymyosite, des
MICI et de la sclérose en plaques ; elle serait en partie responsable de la
modification de la qualité du sommeil en plus des algies articulaires et
musculaires. Cette hyperferritinémie combinée aux maladies auto-immunes
semble associée aux douleurs en raison du lien étroit observé avec les cytokines
TNF-α et IL-1 β. En effet, la synthèse de la ferritine est sous le contrôle de ces
dernières. Son augmentation est liée à la leur et, en particulier, à celle du TNF-α.
Ce dernier présente deux expressions alléliques différentes TNF-1 et TNF-2. La
surexpression de la forme allélique TNF-2 est liée à la susceptibilité et à la sévérité
de certaines maladies inflammatoires telles que la polyarthrite rhumatoïde, le
lupus systémique et les MICI [ 131 ]. La symptomatologie douloureuse est, dans
ce cas, plus le reflet de l'augmentation du TNF-α que de la ferritinémie
proprement dite, car des deux structures qui composent la ferritinémie, seule
l'élévation de la forme lourde, ou H-ferritin, est corrélée à la pathologie
inflammatoire, alors que celle de la forme légère, ou L-ferritin, est plutôt
corrélée au transport sanguin du fer (hémochromatose héréditaire) [ 132 ]. De
plus, la forme lourde est la seule à pouvoir se lier à la chaîne légère du segment
lourd du kininogène, ou H-kininogen, ce qui provoque par encombrement
stérique un blocage de l'activité enzymatique de la kallikréine et induit la
diminution de la production de la bradykinine, algogène [ 133 ]. On est donc
devant un paradoxe apparent. Par ailleurs, la ferritine diminue l'activité
cellulaire lymphocytaire B et T ainsi que l'activité phagocytaire des
granulocytes, ce qui modifie l'efficacité du système immunitaire. Son rôle et,
d'une façon plus générale, celui de l'homéostasie du fer sont également
évoqués dans de nombreuses pathologies neurologiques (dont le syndrome des
jambes sans repos) et endocriniennes, en particulier les dysthyroïdies et le
diabète. Certaines mutations génétiques donnent lieu à l'hémochromatose et à
la neuroferritinopathie [ 134 , 135 ].

OElig;il

Au cours des maladies inflammatoires auto-immunes, la localisation oculaire


demeure une spécificité immunologique. En effet, cette localisation est peu
fréquente et rattachée à quelques maladies de système. Il s'agit principalement
de la spondylarthrite ankylosante (SPA), surtout si le HLA B27 est positif, du
syndrome de Fiessenger-Leroy-Reiter, de l'arthrite juvénile, de la maladie de Still,
de la maladie de Behçet et de la sarcoïdose, quand elle est une expression de
la maladie systémique. Elle peut être primitive et ne concerner que l'organe.
Toutes les localisations inflammatoires chroniques ne sont pas douloureuses.
Cela tient à l'innervation observée. L'œil est innervé par le système trigéminal, les
fibres afférentes primaires se distribuant vers la cornée, la sclérotique et les
muscles iriens. Ces afférences sont réparties dans la branche ophtalmique du
trijumeau (V-1) (zone cornéenne) ou parmi les fibres sympathiques du nerf
oculomoteur commun (III). Les nocicepteurs principaux sont vraisemblablement
des mécanorécepteurs ou des récepteurs polymodaux. Le tissu histologique le
plus intéressant est le limbe, au sein duquel la vascularisation terminale des
artères ciliaires longues en réseau capillaire et la présence du nerf du même
nom peuvent faire l'objet de stimulations nociceptives via la diffusion
systémique de cytokines pro-inflammatoires ( figures 11 et 12 ).

Les localisations douloureuses, du type pesanteur d'intensité modérée, sont


notées dans les uvéites antérieures au cours desquelles l'œil est rouge et
douloureux et l'acuité visuelle baisse. La symptomatologie se renforce
considérablement en cas d'hyperpression intra-oculaire (segment antérieur)
dans les formes compliquées (œdème secondaire de la cornée).
L'inflammation, en rapport avec l'humeur aqueuse dans la chambre antérieure
de l'œil observée dans les uvéites antérieures aiguës, est sous la dépendance
de cytokines et de chémokines. Les concentrations de ces molécules, en
particulier de l'IL-6, de l'IL-8, de l'IL-10 et du MCP-1, sont fortement corrélées à
l'activité inflammatoire de l'uvéite. Il en est de même, mais à un moindre degré,
de MIP-1β et de RANTES [ 137 , 138 and 139 ]. Les cytokines peuvent être à
l'origine d'hypertension intra-oculaire et de néovascularisation. Celle-ci est sous
le contrôle de l'IL-1, du TNF-α, du facteur de croissance fibroblastique (FGF,
fibroblast growth factor), du facteur de croissance épidermique (EGF,
epidermal growth factor), du TGF-β, du facteur de stimulation des colonies de
granulocytes/macrophages (GM-CSF, granulocyte macrophage-colony
stimulating factor) et du PDGF. L'IL-1β et/ou le TNF-α injecté expérimentalement
dans l'œil du lapin présentant une uvéite induite par l'injection de
lyposaccharides (LPS) provoque une rupture de la barrière hémato-aqueuse
avec augmentation des polynucléaires neutrophiles et une fuite de protéines [
140 ]. L'INF-γ in vitro inhibe l'organisation du cytosquelette des cellules
phagocytaires, ce qui réduit la résorption de l'humeur aqueuse et augmente la
pression intra-oculaire [ 141 ]. Par ailleurs, cette pression intra-oculaire peut
également être le fruit secondaire de la fermeture de l'angle irido-cornéen.
Celle-ci peut résulter de la production de synéchies ou de la rotation en avant
du corps ciliaire. Les synéchies postérieures sont le plus souvent rencontrées
dans les uvéites granulomateuses et la sévérité du glaucome par fermeture
secondaire de l'angle est consécutive à leur étendue et aux récurrences de
l'uvéite [ 142 ]. L'étiologie granulomateuse prédomine dans les synéchies
antérieures périphériques pour lesquelles on évoque, comme mécanisme, le
bombement irien secondaire et la néovascularisation de l'angle irido-cornéen
au cours des processus inflammatoires chroniques [ 142 ]. Les lésions vasculaires
rétiniennes sont liées à la libération de MMP-9, molécule à l'origine de la
perméabilité capillaire au début de l'angiogenèse, qui se trouve sous le contrôle
du TGF-β produit par les cellules gliales [ 143 ]. Cependant, aucune sémiologie
douloureuse attachée à la lésion vasculaire rétinienne n'est décrite. Seules les
lésions vasculaires en rapport avec la sclère, la cornée ou le limbe (et, en
dehors du globe oculaire, la zone cutanée temporale) sont susceptibles de se
traduire par une symptomatologie douloureuse. Cela tient au rapport
anatomique entre vascularisation et innervation nociceptive comme cela est
observé dans l'artérite à cellules géantes de la maladie de Horton, dans les
vascularites à traduction oculaire et, en particulier, dans la maladie de
Wegener.
Figure 10 ▪ L'œil humain (d'après Deschambeault, modifié de Stevens 1993. Site
consulté : archimede.bibl.ulaval.ca).
Figure 11 ▪ Les différents critères histologiques pour l'identification du limbe sont
représentés sur cette figure. L'épithélium limbique possède environ 10 couches
de cellules. Les vaisseaux sanguins commencent à apparaître dans le stroma
sous-jacent. La fin des membranes de Bowman et de Descemet borne la
jonction cornéo-limbale, tandis que le point d'attachement de l'iris délimite la
jonction limbo-sclérale (d'après Hogan [ 136 ]).

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▪ BILAN FONCTIONNEL, ÉVALUATION DU HANDICAP ET DU RETENTISSEMENT


ÉMOTIONNEL

Le lien entre affections immunitaires et troubles psychiques est évoqué depuis


fort longtemps (polyarthrite, lupus et asthme par exemple). Ce n'est que depuis
une décennie qu'on évoque les effets immunologiques et neurobiologiques du
stress physiologique. Celui-ci est analysé à travers ses caractères subjectifs et
objectifs, interpersonnels ou non, sa durée ainsi que le contexte dans lequel il
s'inscrit [ 144 ]. Un traumatisme antérieur et l'insécurité de la première enfance
sont des facteurs essentiels dans la genèse de troubles psychiques [ 145 , 146 ].
Les interactions stress-SNC-système immunitaire ont mis au premier plan le rôle
de médiateurs des cytokines (Calgani E, Elenhou I, 2006). À des taux
anormalement élevés, ces neuromédiateurs peuvent induire des troubles
psychiques tels qu'asthénie, perturbations du sommeil, modification des
comportements adaptatifs, troubles de la mémoire et dépression ( figure 10 ).

Lors d'un stress pathologique, 4 substances susceptibles de modifier le psychisme


et le comportement participent aux interactions entre l'axe hypothalamo-
hypophyso-surrénalien, le système sympathique et le système immunitaire : la
CRH, le cortisol, les cytokines et la sérotonine. Ainsi, en cas de fortes
concentrations locales de glucocorticoïdes, les neurones hippocampiques,
riches en récepteurs aux corticoïdes, peuvent-ils subir un processus dégénératif,
vraisemblablement par induction d'apoptose consécutive à la forte libération
d'acides aminés excitateurs et à la surexpression de leurs récepteurs [ 148 , 149
]. Or, l'hippocampe joue un rôle clé dans les processus d'apprentissage et de
mémorisation. De même l'amygdale, également riche en récepteurs stéroïdiens
et fortement impliquée dans la gestion de l'émotion, peut, dans les mêmes
conditions, voir sa population neuronale se dégrader. Parmi les cytokines
inflammatoires, deux retiennent l'attention l'IL-1 et le TNF-α. Celui-ci est sécrété
par les cellules gliales, les astrocytes et la microglie [ 113 , 114 , 147 , 150 ]
tandis que l'IL-1 est surtout sécrété par la microglie. Le TNF-α induit la
prolifération de la microglie qui, elle-même, provoque la sécrétion (du moins in
vitro) du CSF-1 qui est responsable de la prolifération des astrocytes. Au niveau
des structures cérébrales, les récepteurs du TNF-α sont présents dans de
nombreuses populations neuronales et les oligodendrocytes [ 113 , 114 ]. Cela
concerne diverses régions comme le cortex, l'hippocampe, les noyaux de la
base et l'hypothalamus [ 124 ]. Lors d'expériences réalisées au sein de cohortes
d'étudiants, les plus anxieux ont présenté une modification de l'équilibre
cytokinique en faveur des cytokines pro-inflammatoires (TNF-α, INF-γ et IL-6) au
détriment des cytokines anti-inflammatoires (IL-4 et IL-10). Il est apparu que les
examens universitaires stimulaient la production de TNF-α, d'INF-γ, d'IL-6 et d'IL-10
[ 151 ]. Ces observations suggèrent l'influence de facteurs environnementaux
dans la régulation de l'homéostasie cytokinique ( figures 7 , 8 and 9 ).
Figure 12. Représentation schématique des relations entre cytokines
intracérébrales et pathologies nerveuses et/ou psychologiques (d'après Jacque
et Thurin [ 147 ]).

En cas de stress psychologique aigu, on peut imaginer que certaines techniques


comportementales puissent jouer un rôle modulateur via l'homéostasie
cytokinique. Enfin, la régulation du sommeil est également soumise à l'équilibre
entre cytokines pro-inflammatoires et anti-inflammatoires. En effet, les premières
(IL-1β et TNF-α) sont plutôt activatrices et les secondes (IL-4 et IL-10) plutôt
inhibitrices du sommeil lent profond, notamment en période infectieuse [ 152 ,
153 ]. De plus, l'élévation de l'IL-18, membre de la famille de l'IL-1, augmente
non seulement le sommeil lent profond mais provoque également une
élévation de la température cérébrale notamment en période infectieuse [ 154
].

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▪ EXAMENS COMPLÉMENTAIRES

Les examens biologiques peuvent se décomposer en trois catégories qui


reflètent trois niveaux d'analyse clinique.

La fièvre et l'hyperthermie prolongée modifient les seuils douloureux : leur


contrôle devient donc essentiel. Les perturbations hémodynamiques en rapport
soit avec les éléments figurés du sang (hémoglobine, hématies, leucocytes et
plaquettes), soit avec le système cardio-vasculaire sont à prendre en compte
dans la gestion de l'hypoxie, de l'acidose ou de l'hyperkaliémie. Ces trois
dernières données modifient les seuils et les déclenchements de la réponse
algogène et participent à l'hyperalgésie primaire et secondaire périphérique
dans un territoire donné.

Le dosage du fer sérique et de la ferritinémie permet de rechercher une


hémochromatose primaire ou secondaire, source d'asthénie, de myalgie,
d'arthralgie, de troubles du sommeil, de neuropathie périphérique douloureuse
issue essentiellement du diabète secondaire.

Le suivi de l'inflammation chronique, surtout à travers l'hyper-α2-globulinémie (à


laquelle appartient le kininogène), permet d'apprécier l'engagement de la
bradykinine dans la «soupe inflammatoire». Les hypergammaglobulinémies
observées lors de l'électrophorèse des protéines doivent attirer l'attention afin
de procéder à la recherche non seulement d'une étiologie inflammatoire
(maladie inflammatoire chronique et/ou auto-immune) mais également d'une
cryoglobulinémie de type I ou II et/ou d'une gammapathie monoclonale plus
ou moins associées aux hémopathies, et ce afin d'établir un lien avec une
polyneuropathie périphérique douloureuse. Les dosages des marqueurs
spécifiques des maladies autoimmunes ne sont pas des indicateurs biologiques
de la douleur chronique.

Les dosages cytokiniques issus de la biologie moléculaire ne sont d'aucune


utilité en pratique courante dans l'évaluation des seuils et des caractères
sémiologiques de la douleur. L'enzymologie musculaire — créatine
phosphokinase (CPK), lactate déshydrogénase (LDH), glutamate oxaloacétique
transaminase (SGOT), aldolase -, y compris cardiaque (troponine et
myoglobine), témoigne de l'état des muscles mais ne constitue pas un
paramètre spécifique d'évaluation de la sémiologie douloureuse chronique.

L'imagerie sert le diagnostic étiologique, l'IRMf n'étant utilisé qu'à visée de


recherche sur l'intégration corticale du signal nociceptif.

Quelques explorations neurosensorielles, peu pratiquées, telles que l'analyse des


fibres Aδ et C par le QST(Quantitative Sensory Tests), le potentiel évoqué laser
ou le CHEPS(Contact Heat-Evoked Potential Stimulator), la polysomnographie
(recherche de microéveils ou d'altération de la phase de sommeil lent profond,
ou phase IV, principalement) et l'électromyogramme peuvent approcher
indirectement la nociception. Toutefois, la pertinence de ces examens est faible
surtout en pratique clinique.

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▪ STRATÉGIES THÉRAPEUTIQUES ET FONCTIONNELLES

Ce paragraphe est divisé en deux parties, complémentaires et synergiques. La


stratégie pharmacologique ne peut, à elle seule, améliorer la qualité de vie et
développer l'autonomie. Il faut rétablir des fonctions. Cette stratégie s'appuie,
d'une part, sur l'analyse posturale et la rééducation fonctionnelle et, d'autre
part, sur la réhabilitation cognitivo-comportementale, à travers des techniques
comme la relaxation, la sophrologie ou l'hypnose ericsonnienne. Il est même
souhaitable d'anticiper par l'analyse initiale du comportement et des fonctions
cognitives, la capacité d'adaptation aux phénomènes douloureux tant sur les
plans psychologique, sociologique que culturel. L'approche pharmacologique
est à la fois spécifique et non spécifique de la maladie.

La pharmacopée non spécifique à pour objet :

 de gérer l'hyperthermie (reflet de la production d'IL-6) ;


 d'assurer une bonne hématose (pH = 6,9 + log [CO2 dissous]/[CO2 gaz],
pH reflet d'H+, le CO2 dissous reflet de HCO3 et de fonction rénale et CO2
gaz reflet de la ventilation pulmonaire ou PCO2) ;
 de maintenir le taux d'hémoglobine et la PO2 ainsi que l'hémodynamique
(pouls et tension artérielle) reflet indirect de l'ischémie lorsqu'ils sont
dégradés.

La chélation du fer ou les saignées peuvent modifier considérablement les


myalgies, l'asthénie et autres troubles du sommeil sans améliorer
significativement les arthralgies.

Les distensions abdominales, source de douleurs digestives, font l'objet de


traitements symptomatiques, notamment les modulateurs du transit.

La pharmacopée spécifique doit être scindée en deux parties, la première


relative à l'inflammation chronique et la seconde relative à l'étiologie de la
maladie systémique.

La pharmacopée de l'inflammation via les cyclo-oxygénases permet d'user de


la classe des anti-inflammatoires non stéroïdiens aussi bien spécifique (COX-2)
que non spécifique (COX 1 et COX 2). Leur emploi est conditionné par les
contre-indications, les effets secondaires et les interactions mais leur durée
d'utilisation est dépendante de l'effet pro-infectieux qu'ils peuvent engendrer
surtout pour les anti-COX-2. De plus, cette dernière classe thérapeutique incite à
la prudence lorsque l'on évoque les pathologies prothrombosantes car elle n'a
pas vocation à être antiagrégantes. Les anti-inflammatoires stéroïdiens
présentent une activité anti-inflammatoire indirecte par le biais de l'inhibition de
la transcription des cytokines pro-inflammatoires et de l'acide arachidonique
(activité antiphospholipase A2), ce qui explique son action antalgique retardée,
la nécessité de posologies élevées et une longue durée de prescription. Il
convient d'évaluer les autres effets pharmacologiques de manière
concomitante (effets réducteur, pro-infectieux et immunosuppresseur).

Hormis cette classe, largement utilisée dans la gestion de la plupart des


maladies auto-immunes notamment à caractère articulaire, il existe de
nouvelles classes thérapeutiques. Ainsi en est-il des anti-TNF-α qui présentent la
particularité d'être anti-algogène tout en ayant une action principale à visée
étiologique immunomodulatrice. L'utilisation des anticorps monoclonaux anti-IL-
6, notamment dans la maladie de Still, peut également faire partie d'un arsenal
thérapeutique prometteur [ 155 , 156 ] à condition que tous les aspects de la
thérapeutique soient pesés et des synergies à visée analgésique soient intégrées
dès leur instauration. Ce n'est pas le cas des immunosuppresseurs
habituellement utilisés tels que, par exemple, les cyclophosphamides, l'Imurel,
etc.

Quant aux traitements à visée neurogène, ils concernent les antidépresseurs


tricycliques (amitriptyline, clomipramine, imipramine…), certains inhibiteurs de la
recapture de la sérotonine (doluxétine, venlafaxine), également
noradrénergique, les antiépileptiques (prégabaline, gabapentine, lamotrigine),
les anesthésiques locaux (xylocaïne, lidocaïne, bupivacaïne, ropivacaïne),
certains antiarythmiques (méxilétine, peu utilisée en pratique courante) et,
enfin, les bloqueurs des récepteurs GABAergiques, AMPA ou NMDA
(kétamine…). On peut les classer en bloqueurs des canaux sodiques, calciques
et GABAergique, des récepteurs NMDA, et α2-noradrénergiques. Leur efficacité
sera fonction de critères tels que le NNT (number need to treat) et le NNH
(number need to harm) au-delà de la classification pharmacologique citée ci-
dessus [ 157 , 158 and 159 ].

Il est vrai que l'algorithme décisionnel thérapeutique concernant la sémiologie


douloureuse neuropathique est fondé avant tout sur des études validées de
haut niveau de preuve à partir de deux modèles reproductibles de douleurs
neuropathiques, postzostérienne et diabétique. Il serait également
envisageable de définir une stratégie fondée sur la nature des tissus lésés, les
surexpressions de familles de récepteurs prostanoïdes et cytokiniques au niveau
de ces tissus, d'une part, et, d'autre part, sur l'évaluation qualitative de la
douleur, autrement dit sur la symptomatologie douloureuse elle-même. Relever
le seuil nociceptif de la douleur est indispensable, mais pas suffisant. Si la
surexpression des récepteurs reflétait les symptômes douloureux observés, il
serait souhaitable de la diminuer. En voici quelques exemples : décharges
électriques reflet de la surexpression de canaux sodiques TTX résistants et
récepteurs AMPA ; hyperalgésie secondaire et allodynie reflet de la
surexpression de canaux calciques et récepteurs NMDA. Lorsqu'elle est d'origine
périphérique, l'hyperalgésie primaire reflète l'abaissement du seuil par la «soupe
inflammatoire» locale ou systémique.

De plus, il est également souhaitable d'évoquer les actions focales lorsqu'il existe
un accès aigu inflammatoire en particulier articulaire et/ou une composante
neuropathique focale (atteintes tronculaires superficielles). L'utilisation de
technique d'analgésie locorégionale usant de produits anti-inflammatoires
stéroïdiens et d'anesthésiques locaux injectables peut être un apport significatif.
Ils permettent, sur le plan topographique, non seulement de traiter une ou
quelques articulations douloureuses mais également de mieux maîtriser
localement la composante neuropathique notamment.

Le choix thérapeutique peut être élaboré dès l'analyse sémiologique si l'on


prend en compte l'histoire naturelle de la maladie de système ainsi que celle de
la pathologie douloureuse chronique. En effet, le choix des molécules pourrait
être fait non seulement pour contrôler l'évolution de la maladie auto-immune
et/ou inflammatoire chronique mais également pour relever le seuil nociceptif,
ce qui diminuerait vraisemblablement l'engagement dans la chronicité de la
douleur avec toutes les conséquences que cela entraîne. Les associations de
molécules à visée aussi bien étiologique qu'analgésiant sont envisageables non
seulement pour le confort du patient mais également, voire surtout, le meilleur
contrôle de l'ensemble de la pathologie observée.

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▪ CONCLUSION

L'approche pluridisciplinaire constitue le cœur de la démarche aussi bien en


médecine interne que dans le cadre de la prise en charge de la douleur
chronique proprement dite. Si l'on se réfère au modèle biopsychosocial de la
douleur, on peut suivre le même parcours dès l'apparition des mécanismes
générateurs. Les deux démarches, aussi bien étiologique inflammatoire et
immunitaire que sémiologique douloureuse, peuvent être au moins en partie
superposées. Après bien des démarches adaptatives tant physiques que
comportementales, le développement de la maladie inflammatoire modifie
l'évolution de l'autonomie des patients. Le phénomène douloureux, après avoir
joué son rôle d'alerte, s'organise à partir de sa persistance, de sa fluctuation au
cours du temps et de sa durée. Il évolue pour son propre compte et développe
sa propre histoire naturelle. Le prendre en compte devient indispensable car il
modifie l'issue de la maladie, ce qui se traduit par une perte d'autonomie et de
qualité de vie. Il peut également constituer un filtre dans la communication
(verbale ou non), ce qui constitue une difficulté supplémentaire de prise en
charge.

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▪ REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier tout particulièrement les Pr Pierre Godeau et Daniel Lebars,


les Dr Alp Alantar, Jacques-Christian Béatrix, Sandrine et Vincent Soriot ainsi
qu'Hélène Vrolik-Vergeron pour leur relecture critique et amicale.

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Chapitre 10 Explorations Neurophysiologiques des Maladies de Système
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Naaman ZREK

Marc SOREL

Les explorations neurophysiologiques occupent une place importante dans la


prise en charge diagnostique et thérapeutique des complications
neurologiques douloureuses des maladies systémiques.

Certaines d'entre elles, à visée mécanistique (électro-neuro-myogramme,


potentiel évoqué somesthésique…), permettent de faire le diagnostic d'une
complication survenue dans le cadre d'une maladie déjà connue ou, à
l'inverse, oriente le bilan vers une maladie spécifique en mettant en évidence
une affection connue pour son association avec celle-ci (par exemple
mononeuropathie multiple et périartérite noueuse).

D'autres examens, à visée plutôt physiopathologique (test thermique, potentiel


laser), explorent spécifiquement les petites fibres de la douleur Aδ et C pour
lesquelles la mise en évidence de leur dysfonctionnement confirme la nature
neuropathique de la douleur, déjà suspectée par la clinique, et oriente vers un
traitement différent de celui de la douleur nociceptive. L'exploration du
sommeil, qui prend de plus en plus d'importance chez les patients douloureux
chroniques vu les rapports réciproques mis en évidence récemment entre la
qualité du sommeil et la douleur, est abordée à la fin du chapitre.

▪ INTRODUCTION

Les complications neurologiques des maladies systémiques sont fréquentes et


très diverses, elles peuvent révéler la maladie ou survenir au cours de son
évolution, elles en constituent les critères de gravité vu leur pronostic
potentiellement grave, leur diagnostic doit être précoce pour instaurer un
traitement avant la constitution des lésions irréversibles.

Si certaines de ces complications ne sont pas douloureuses (paralysie, épilepsie,


troubles psychiques et intellectuels…), d'autres, comme les neuropathies
périphériques, peuvent s'exprimer principalement par des phénomènes
douloureux souvent du type douleur neuropathique.

Les explorations neurophysiologiques sont considérées comme le complément


indispensable de l'étude clinique, la majorité des explorations, réalisées en
pratique courante (électro-neuro-myogramme [ENMG], potentiel évoqué
somesthésique [PES]), visent à faire un diagnostic mécanistique de l'affection
responsable de la douleur.

Des nouvelles techniques (QST[quantitative sensory tests], potentiels laser,


potentiels thermiques) proposent une approche plus physiopathologique en
explorant plus spécifiquement les petites fibres nerveuses (Aδ et C) qui
véhiculent les sensations douloureuses. Leur intérêt dans le diagnostic de
certaines neuropathies, par exemple le diabète, est déjà validé, elles sont en
cours de mise au point et d'évaluation pour les autres affections.
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▪ ÉLECTRO-NEURO-MYOGRAMME

La principale exploration neurophysiologique des grosses fibres nerveuses à


conduction rapide et des fibres musculaires permet d'affirmer l'atteinte nerveuse
périphérique, d'en préciser la nature, la topographie, d'évaluer sa sévérité et
d'en déterminer le mécanisme (axonal, myélinique, neuronal ou mixte) et
d'orienter ainsi la recherche étiologique [ 1 , 2 ].

Technique

L'examen comporte deux parties :

 la stimulo-détection consiste en la stimulation électrique des nerfs moteurs


et sensitifs avec mesure du temps de conduction, de l'amplitude des
réponses et des vitesses de conduction nerveuse sensitive et motrice,
souvent à l'aide d'électrodes de surface fixées sur la peau ( figures 1 et
2 ):
 l'atteinte d'un seul tronc nerveux signe une mononeuropathie,
 l'atteinte asymétrique de plusieurs troncs nerveux révèle une
mononeuropathie multiple,
 l'atteinte symétrique de plusieurs troncs nerveux révèle une
polyneuropathie,
 les réflexes F-H-Blink permettent d étudier la conduction proximale
des nerfs ;
 la détection musculaire est réalisée à l'aide d'une électrode-aiguille
insérée dans un muscle avec étude de l'activité au repos et à la
contraction volontaire ( figure 3 ).

Principales anomalies de l'ENMG

Anomalies traduisant une atteinte plutôt axonale :

 diminution d'amplitude des réponses motrices et/ou des potentiels


sensitifs, avec des vitesses de conduction nerveuse relativement
respectées ;

Figure 1 ▪ Vitesses de conduction du médian et de l'ulnaire (photo :


médian).
Figure 2 ▪ Vitesses de conduction motrice du médian.

Figure 3 ▪ Tracé volontaire interférentiel normal.


 activités spontanées de dénervation, fibrillations et/ou potentiels lents ;
 tracé pauvre accéléré lors de la contraction volontaire maximale ( figure
4 ).

Anomalies traduisant une atteinte plutôt démyélinisante :

 allongement des latences distales et des réponses tardives ;


 ralentissement des vitesses de conduction nerveuse ;
 présence de blocs de conduction ;
 tracé souvent pauvre non accéléré lors de la contraction maximale.
Figure 4 ▪ Tracé neurogène pauvre, ample et accéléré (d'après Fournier [ 1 ]).

Anomalies traduisant plutôt une atteint musculaire :

 blocs de la transmission neuromusculaire ;


 vitesses de conduction nerveuse normales ;
 activité spontanée, fibrillations, potentiels lents et décharges ;
 tracé de contraction volontaire d'amplitude diminuée et très riche même
pour les faibles contractions ( figure 5 ).

Figure 5 ▪ Tracé myogène riche, polyphasique et peu ample (d'après Fournier [


1 ]).

Ces anomalies peuvent s'associer, rendant la distinction entre les différentes


atteintes mal aisée dans la pratique courante.
La réalisation de l'ENMG nécessite une grande rigueur technique et une
interprétation des résultats en étroite relation avec la clinique, en évitant les
nombreux pièges dus aux anomalies d'origine technique ou sans rapport avec
le contexte clinique.

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▪ POTENTIELS ÉVOQUÉS SOMESTHÉSIQUES

Technique

Le principe de l'examen est de stimuler les fibres sensitives de gros diamètre d'un
nerf périphérique et de recueillir la volée induite (potentiel évoqué
somesthésique) tout au long de la voie sensitive au niveau du plexus, des
cordons postérieurs de la moelle, du lemnisque médian, du thalamus et du
cortex sensitif primaire ( figure 6 ).

Figure 6 ▪ Potentiel évoqué somesthésique du nerf médian et du sciatique


poplité interne.

Cela permet d'étudier la conduction périphérique proximale et, surtout, la


conduction centrale, mais pas les voies spino-thalamiques.

La technique comporte une stimulation électrique transcutanée d'un nerf mixte


généralement, surtout le médian aux membres supérieurs et le nerf sciatique
poplité interne aux membres inférieurs, et un enregistrement de plusieurs
centaines de réponses moyennées à l'aide d'électrodes de surface ou
d'électrodesaiguilles sous-cutanées [ 2 , 3 ].

Anomalies détectées
L'altération des réponses rachidiennes indique généralement une atteinte
plexique ou radiculaire.

La normalité des réponses rachidiennes avec altération de la réponse corticale


indique une atteinte centrale (voies somesthésiques médullaires ou cortex
cérébral).

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▪ EXPLORATIONS NEUROPHYSIOLOGIQUES DES PETITES FIBRES DE LA DOULEUR

Ces explorations visent une évaluation quantitative des troubles de la sensibilité


observés en clinique avec, comme principe général, une comparaison entre
une zone douloureuse et une zone saine chez un même individu ou une
comparaison des résultats à ceux obtenus chez des témoins.

Test quantitatif de la sensibilité thermique ou QST

Technique

Il s'agit d'une méthode semi-objective simple non invasive qui permet la


détermination des différents seuils thermiques (seuil de détection des sensations
thermiques non douloureuses, seuil des sensibilités douloureuses aux stimulations
chaude et froide, hyperalgésie, allodynie) à l'aide d'un appareil fonctionnant
sur le principe de l'effet Peltier avec une sonde thermique fixée sur la peau de la
zone explorée.

Anomalies détectées

La mesure des seuils de détection au froid renseigne sur la fonction des fibres
myélinisées fines (Aδ) et celle de détection au chaud sur la fonction des fibres
amyéliniques C. Les seuils de douleur au chaud et au froid explorent la fonction
des fibres C et, à un moindre degré, des fibres Aδ [ 4 ] ( figure 7 ).

Figure 7 ▪ QST avant-bras, altération du seuil de sensibilité et allodynie


thermique.

La méthode permet de révéler l'altération de la sensibilité thermique et de


mettre en évidence des phénomènes d'allodynie et d'hyperalgésie indiquant
un dysfonctionnement des petites fibres. Ces signes sont caractéristiques des
lésions nerveuses périphériques ou centrales à l'origine des douleurs
neuropathiques. L'anomalie la plus évocatrice serait une altération du seuil de
sensibilité avec phénomène d'allodynie aux stimulations chaudes (d'après Dyck
[ 5 ]).

Cet examen nécessite la compréhension et la coopération du patient et ne


permet pas de localiser le niveau de la lésion périphérique ou centrale.

Potentiels évoqués par laser (CO2 ou thulium : YAG, ou neodinium : YAP)

Technique

Il s'agit d'une méthode utilisant des stimulations thermiques cutanées


permettant d'explorer sélectivement les réponses corticales aux afflux afférents
transmis par les fibres myélinisées de petit calibre Aδ et les fibres amyéliniques C
et empruntant les voies spino-thalamiques.

À ce jour, seule la réponse corticale peut être enregistrée, les réponses


segmentaires spinales étant de trop faible amplitude.

Sur le plan technique, l'examen est réalisé à l'aide d'un rayon laser produisant
une stimulation thermique de très courte durée appliquée sur la zone
douloureuse avec enregistrement de la réponse au niveau du cortex cérébral
en la comparant au côté controlatéral. La réponse obtenue relève en général
de la transmission dans les fibres Aδ mais des modifications de la densité
d'énergie et/ou de la surface stimulée permettent de stimuler sélectivement les
fibres C [ 6 , 7 ].

Anomalies détectées

L'altération ou l'absence de la réponse indique un défaut de la transmission


dans les fibres fines en périphérie ou les voies spino-thalamo-corticales
véhiculant les sensations douloureuses. L'examen est préconisé pour
l'exploration des douleurs neuropathiques, en particulier en cas de lésion
médullaire associée à des troubles de la sensibilité thermo-algique.

Cet examen, des plus objectifs, serait toujours anormal en cas d'atteinte des
petites fibres [ 8 , 9 ]. Il permet également d'éliminer les syndromes pseudo-
neuropathiques [ 10 ] et de détecter des anomalies infracliniques dans des
territoires asymptomatiques [ 11 ] ( figure 8 ).

Il ne nécessite pas la coopération active du patient mais, comme le QST, il ne


permet pas de localiser le niveau exact de la lésion nerveuse.
Figure 8 ▪ Potentiel laser : réponse après stimulation du côté sain (à droite),
réponse après stimulation côté atteint (à gauche) (d'après Garcia-Larrea [ 9 ]).

Potentiels évoqués thermiques

Technique

Le CHEPS(contact heat-evoked potential stimulator) est le seul système


disponible actuellement sur le marché. D'apparition récente, son principe est le
même que pour les potentiels évoqués au laser ; en revanche, les courtes
stimulations thermiques sont produites par une sonde cutanée combinant une
double technique de chauffe et de refroidissement rapides ( figure 9 ).
Figure 9 ▪ Thermode de CHEPS (Medoc).

Anomalies détectées

Selon les fabricants, le CHEPS permettrait une stimulation encore plus sélective
des fibres C et/ou Aδ avec un enregistrement systématique de la réponse
corticale transmise par les voies spino-thalamiques ( figures 10 et 11 ).
Figure 10 ▪ Réponse cortical e à l'activation des petites fibres Aδ (Medoc).

Figure 11 ▪ Réponse corticale à l'activation des petites fibres C (Medoc).

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▪ POLYSOMNOGRAPHIE
À première vue, l'exploration du sommeil ne semble pas avoir sa place dans le
diagnostic des complications neurologiques douloureuses des maladies
systémiques. Pourtant, la prise en charge des troubles du sommeil chez les
patients douloureux chroniques prend de plus en plus d'importance dans les
centres de traitement de la douleur.

En effet, de nombreuses études [ 12 , 13 ] montrent qu'il existe une relation


bidirectionnelle entre la douleur et le sommeil. D'une part, la douleur chronique
peut perturber la qualité et la continuité du sommeil, soit directement par les
douleurs nocturnes, soit par l'anxiété et la dépression très souvent retrouvées
chez ces patients [ 14 ]. D'autre part, la privation ou la mauvaise qualité du
sommeil abaisse le seuil de perception de la douleur et exacerbe les sensations
douloureuses diurnes [ 15 ].

Technique

La technique comporte un enregistrement de plusieurs paramètres pendant


une nuit à l'hôpital :

 les capteurs électroencéphalographiques permettent d'établir un


hypnogramme montrant la latence de l'endormissement, la durée totale
du sommeil, l'architecture et la durée de chaque stade, le nombre de
cycles, le nombre d'éveils et de micro-éveils, les manifestations
pathologiques comme les crises d'épilepsie… ;
 les capteurs respiratoires (flux nasal, mouvements thoraciques et
abdominaux) permettent de détecter les apnées et les hypopnées, d'en
déterminer leur nature obstructive, centrale ou mixte et d'en calculer leur
indice par heure ;
 les capteurs musculaires :
 mentonniers aident à déterminer les stades du sommeil et les éveils,
 des jambes aident à détecter les contractions à caractère
périodique ou les autres mouvements spontanés en rapport ou non
avec d'autres pathologies ;
 la saturation en oxygène détecte les épisodes de désaturation, en
particulier dans le cadre d'un syndrome d'apnée du sommeil.

En outre, sont enregistrés :

 le rythme cardiaque ;
 les ronflements ;
 la position corporelle ;
 les mouvements oculaires, qui aident à classer les stades du sommeil ;
 des options comme la pression œsophagienne ou le temps de transit de
Pouls (PTT) qui aident à déterminer l'origine centrale ou obstructive des
événements respiratoires ;
 la vidéo avec enregistrement des événements moteurs pouvant survenir
pendant le sommeil comme les mouvements périodiques des membres
inférieurs, les crises d'épilepsie et les parasomnies (somniloquie,
somnabulisme, troubles de comportement de sommeil paradoxal…).

Anomalies détectées
Au terme de ce bilan, on peut apprécier la qualité et la quantité du sommeil.
On peut identifier la présence de syndromes tels qu'apnées du sommeil,
mouvements périodiques… ou des perturbations des stades du sommeil lent,
profond, réparateur et des éveils évoquant plutôt une origine psychologique
(anxiété, dépression…) [ 16 ] ( figure 12 ).

Figure 12 ▪ Mouvements périodiques des membres inférieurs.

La notion de réciprocité sommeil-douleur [ 17 ] montre l'importance de la prise


en charge de ces troubles afin d'espérer un résultat fonctionnel optimal, et ce
quels que soient les moyens utilisés : appareillage pour l'apnée du sommeil,
médication pour les mouvements périodiques des membres inférieurs, prise en
charge médicamenteuse et/ou comportementale et cognitive pour la
dépression et l'anxiété [ 15 ]…

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▪ COMPLICATIONS NEUROMUSCULAIRES DES MALADIES SYSTÉMIQUES POUVANT


ÊTRE À L'ORIGINE DE MANIFESTATIONS DOULOUREUSES

Neuropathies périphériques [18, 19]

Polyneuropathies sensitivo-motrices axonales

Il s'agit d'une symptomatologie sensitive des extrémités du type douleur ou


paresthésies.

Ces polyneuropathies sont observées surtout au cours du lupus érythémateux


disséminé, de la maladie de Gougerot-Sjögren, plus rarement de la
sclérodermie, des connectivites mixtes, de la polyarthrite rhumatoïde ou de la
sarcoïdose.

L'ENMG montre une polyneuropathie sensitivo-motrice axonale symétrique


dépendante de la longueur des grosses fibres.
L'exploration des petites fibres peut mettre en évidence leur dysfonctionnement
avec une altération des seuils de sensibilité, un phénomène d'allodynie
thermique plus ou moins présent et une altération des potentiels évoqués
thermiques ou laser. Les anomalies seraient plutôt à prédominance distale et
symétrique.

Mononeuropathie multiple

Il s'agit d'une symptomatologie subaiguë particulièrement douloureuse,


asymétrique et multifocale suivie d'une atteinte motrice évoluant par poussées
consécutives touchant surtout les nerfs péronier, tibial, ulnaire et médian.

La mononeuropathie multiple est observée au cours de la périartérite noueuse,


de la maladie de Churg-Strauss, associée à la vascularite, de la polyarthrite
rhumatoïde, de la sarcoïdose, de la maladie de Horton et du lupus
érythémateux disséminé.

L'ENMG montre une polyneuropathie sensitivo-motrice axonale asymétrique des


grosses fibres et permet d'évaluer l'extension de la neuropathie et sa
prédominance sur certains nerfs.

L'exploration des petites fibres peut également montrer leur dysfonctionnement


avec une altération asymétrique des seuils de sensibilité thermique et l'altération
des potentiels évoqués thermiques ou laser lors des stimulations des zones
douloureuses alors qu'ils restent généralement normaux lors des stimulations des
zones indemnes.

Neuropathie sensitive ataxiante

Il s'agit d'une symptomatologie volontiers asymétrique, parfois douloureuse,


associant des paresthésies, des dysesthésies touchant la face, le tronc et les
membres et, surtout, une ataxie proprioceptive avec une marche instable et
des tremblements des membres.

Cette neuropathie est caractéristique de la neuropathie paranéoplasique de


Denny-Brown mais se rencontre aussi au cours de la maladie de Gougerot-
Sjögren.

L'ENMG montre une polyneuropathie sensitive axonale des grosses fibres ne


dépendant pas de la longueur et épargnant les fibres motrices.

L'exploration des petites fibres ne devrait pas montrer d'anomalies significatives


puisqu'il s'agit d'une atteinte des fibres sensitives de gros diamètre.

Neuropathie sensitive des petites fibres

Symptomatologie douloureuse de type douleur neuropathique distale, la


neuropathie sensitive des petites fibres peut être associée à des troubles
dysautonomiques et à un déficit de la sensibilité thermo-algique, parfois difficile
à mettre en évidence par le seul examen clinique.

On la rencontre surtout au cours de l'amylose familiale, des dysglobulinémies,


de la maladie de Gougerot-Sjögren et de la sarcoïdose.
L'ENMG peut rester normale ou montrer une neuropathie sensitive axonale des
grosses fibres associées.

L'exploration des petites fibres s'avère ici d'un grand intérêt, surtout devant un
tableau symptomatique subjectif souvent très douloureux, associé à la pauvreté
de signes objectifs à l'examen clinique. Elle montre une importante altération du
seuil de sensibilité et un phénomène d'allodynie thermique distale
prédominante.

Le potentiel laser et le potentiel thermique peuvent montrer une altération de la


conduction voire une absence des réponses corticales lors des stimulations des
petites fibres C et Aδ.

Polyradiculonévrites aiguës ou chroniques

Il s'agit d'une symptomatologie sensitive du type paresthésies avec déficit


moteur. Parfois la douleur peut être intense dans la phase aiguë, mais elle est
beaucoup moins fréquente dans les formes chroniques qui, par ailleurs, restent
rares au cours des maladies de système.

Ces polyradiculonévrites se voient surtout au cours du lupus érythémateux


disséminé, de la maladie de Gougerot-Sjögren et des connectivites mixtes.
L'ENMG montre des signes d'une polyneuropathie démyélinisante distale et
proximale.

L'exploration des petites fibres peut rester normale ou montrer une altération des
seuils de sensibilité thermique dans les formes douloureuses.

Le potentiel évoqué somesthésique, quand on arrive à obtenir des réponses,


confirme le ralentissement de la conduction périphérique distale et proximale.

Neuropathie trigéminale

Il s'agit d'une symptomatologie de la névralgie faciale. Elle peut s'observer dans


toutes les connectivites, surtout dans la sclérodermie et la maladie de
Gougerot-Sjögren.

L'ENMG montre une altération du réflexe de clignement.

L'exploration des petites fibres montre une altération du seuil de sensibilité,


localisé dans les territoires du trijumeau atteint alors qu'il reste normal du côté
opposé.

Le potentiel évoqué somesthésique peut également montrer une altération de


la réponse corticale après stimulation des territoires atteints.

Syndromes canalaires

La symptomatologie est de type paresthésie accompagnée parfois de douleur


et de déficit moteur. Le syndrome du canal carpien est le plus fréquent des
syndromes canalaires. Ces derniers se rencontrent surtout au cours de la
polyarthrite rhumatoïde et de la sclérodermie.

L'ENMG reste l'examen de référence. Il montre un ralentissement et/ou un bloc


de la conduction nerveuse, localisé au site de compression. Il permet de
préciser la sévérité de l'atteinte, en particulier la perte axonale, et de poser
l'indication chirurgicale.

L'exploration des petites fibres peut montrer une altération localisée des seuils
thermiques dans le territoire sensitif en amont du site de compression du nerf
concerné.

Atteintes médullaires [20]

L'atteinte médullaire concerne surtout les myélites aiguës, subaiguës, voire


chroniques, qui restent généralement rares, voire exceptionnelles.

La symptomatologie est douloureuse, dorsale, paresthésiante, avec un niveau


sensitif souvent thoracique et un déficit moteur des membres supérieurs et/ou
inférieures.

Les atteintes médullaires s'observent au cours du lupus érythémateux disséminé,


du syndrome des antiphospholipides, de la maladie de Gougerot-Sjögren, de la
sarcoïdose, de la maladie de Behçet, de la sclérodermie, de la colite ulcéreuse,
de la maladie de Crohn, de la thyroïdite de Hashimoto et des vascularites
touchant les vaisseaux de petit et moyen calibres (périartérite noueuse,
Wegener…), ainsi que les vaisseaux de gros calibre (Horton, Takayasu…).

L'ENMG a peu d'intérêt, il permet toutefois d'éliminer une atteinte périphérique.

L'exploration des petites fibres peut montrer une altération des seuils thermiques
dans les territoires douloureux ainsi qu'au niveau sous-lésionnel.

Le potentiel évoqué somesthésique est plus intéressant, montrant l'intégrité de la


conduction périphérique et une altération, voire une interruption, de la
conduction sensitive médullaire.

Atteintes musculaires

La symptomatologie est douloureuse, de type myalgie inflammatoire avec


déficit moteur et elle est parfois accompagnée de signes cutanés.

Les atteintes musculaires sont vues au cours de la dermatomyosite, de la


polymyosite et de la sarcoïdose.

L'ENMG montre des signes d'une atteinte myogène et aide à les différencier des
myopathies cortisoniques dues aux traitements.

L'exploration des petites fibres ne semble pas avoir d'intérêt puisque les douleurs
sont de type nociceptif.

Le potentiel évoqué somesthésique n'a pas d'indication.

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▪ CONCLUSION

Les explorations neurophysiologiques sont considérées comme le complément


indispensable de l'étude clinique. La majorité des explorations standard
réalisées (ENMG, potentiel évoqué somesthésique) visent à faire un diagnostic
étiologique de l'affection responsable de la douleur ; elles peuvent orienter vers
une origine neurologique de celle-ci dans le cadre d'une maladie de système
connue ou, à l'inverse, à évoquer le diagnostic devant certains tableaux
spécifiques comme la mononeuropathie multiple dans les vascularites.

De nouvelles techniques (QST, potentiels laser, potentiels thermiques) proposent


une approche plus physiopathologique, en explorant plus spécifiquement les
petites fibres nerveuses (Aδ et C) qui véhiculent les sensations douloureuses. Elles
complètent très utilement les autres examens classiques surtout en cas de
normalité de ceux-ci et/ou en présence de douleurs de type neuropathique.
Leur intérêt dans le diagnostic de certaines neuropathies, par exemple le
diabète, est déjà validé et elles sont en cours de mise au point et d'évaluation
pour de nombreuses autres affections.

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▪ REMERCIEMENTS

Nous tenons à remercier tout particulièrement le Pr Luis Garcia-Larrea pour son


soutien appuyé et ses conseils éclairés pour la relecture critique de ce chapitre.

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RÉFÉRENCES
[1] Fournier E. Examen électromyographique et étude de la conduction
nerveuse. Cachan : EM Inter, 1998. Cité ici

[2] Léger JM, Baron JC, Cros D, Mauguière F, Meder JF, Bracard S et al.
Interprétation des examens complémentaire en neurologie. Rueil-Malmaison :
Doin, 2000. Cité ici

[3] Chéliout-Héraut F. Les potentiels évoqués. Cachan : EM Inter, 2000. Cité ici

[4] Bouhassira D. Douleur neuropathique : quelle évaluation clinique ?


Neurologies 2002 ; 5 (suppl. 2) ; 17-22. Cité ici

[5] Dyck PJ. Quantitative sensation testing in research and clinical practice.
Abstracts of the second international Congress on Neuropathic Pain. Eur J Pain
2007 ; 11 (suppl. 1). Cité ici

[6] Cruccu G, Garcia-Larrea L. Clinical use of laser-evoked potentials. Suppl Clin


Neurophysiol 2004 ; 57 : 101-10. Cité ici

[7] Garcia-Larrea L. Pain evoked potentials. In : Jenssen T, Cerveró F (eds).


Handbook of neurology. Vol. 81, 3rd series, vol. 2 : Pain. Amsterdam : Elsevier,
2006 : 439-62. Cité ici
[8] Lefaucheur JP, Brusa A, Creange A, Drouot X, Jarry G. Clinical application of
laser potentials using the Nd : YAG laser. Neurophysiol Clin 2002 ; 32 : 91-8. Cité
ici

[9] Garcia-Larrea L, Convers P, Magnin M, André-Obadia N, Peyron R, Laurent B


et al. Laser-evoked potential abnormalities in central pain patients : the
influence of spontaneous and provoked pain. Brain 2002 ; 125 : 2766-81. Cité ici

[10] Larrea-Garcia L. Diagnostic role of laser evoked potentials in central


neuropathic pain. Abstracts of the second international Congress on
Neuropathic Pain. Eur J Pain 2007 ; 11 (suppl. 1). Cité ici

[11] Lauria G. Small fibre neuropathies. Curr Opin Neurol 2005 ; 18 : 591-7. Cité ici

[12] Roehrs T, Roth T. Sleep and pain : interaction of two vital functions. Semin
Neurol 2005 ; 25 : 106-16. Cité ici

[13] Stiefel F, Stagno D. Magement of insomnia in patients with chronic pain


conditions. CNS Drugs 2004 ; 18 : 285-96. Cité ici

[14] Moffitt PF, Kalucy EC, Kalucy RS, Baum FE, Cooke RD. Sleep difficulties, pain
and other correlates. J Intern Med 1991 ; 230 : 245-9. Cité ici

[15] Nicholson B, Verma S. Comorbidities in chronic neuropathic pain. Pain Med


2004 ; 5 (suppl. 1) : S9-27. Cité ici

[16] Rains JC, Penzien DB. Sleep and chronic pain : challenges to the alpha-EEG
sleep pattern as a pain specific sleep anomaly. J Psychosom Res 2003 ; 54 : 77-
83. Cité ici

[17] Smith MT, Haythornthwaite JA. How do sleep disturbance and chronic pain
interrelate ? Insights from the longitudinal and cognitive-behavioral clinical trials
literature. Sleep Med Rev 2004 ; 8 : 119-32. Cité ici

[18] Attarian S. Neurophysiologie des maladies de système. Rev Med Liege 2004
; 59 : 108-11.
[19] Bouche P, Léger JM, Vallat JM. Neuropathies périphériques. Rueil-
Malmaison : Doin, 2003.
[20] Dubas F, Bogousslavsky J, Léger JM, Mas -L. Pathologie médullaire. Rueil-
Malmaison : Doin, 2001.

À lire :

Truini A, Romaniello A, Galeotti F, Iannetti GD, Cruccu G. Laser evoked


potentials for assessing sensory neuropathy in human patients. Neurosci Lett
2004 ; 361 : 25-8.
Chapitre 11 Pharmacologie de la Douleur Inflammatoire

Jean BUSSEROLLES

Alain ESCHALIER

L'objectif de ce chapitre est de traiter la pharmacologie des douleurs


inflammatoires. Il est présenté selon l'a priori d'une distinction nosographique
entre les produits de type «symptomatique» (opioïdes, paracétamol)
susceptibles de réduire la transmission du message douloureux de façon non
spécifique, même si l'on ne peut pas formellement exclure un effet de ces
produits sur l'inflammation, et des produits de type «pathogénique» (anti-
inflammatoires, méthotrexate, «anticytokines») dont l'impact sur la douleur passe
par l'inhibition des processus inflammatoires responsables de l'hypersensibilité,
même si un effet direct ne peut être exclu pour certains. L'analyse des effets sur
la douleur et des mécanismes d'action justifiant cette classification constituent
le cœur de l'article. Cette classification indépendante du site d'action, central
ou périphérique, remet en cause la classification usuelle (et désuète) des
antalgiques en fonction de leur prétendu site d'action. Elle se rapproche d'une
classification qui distinguerait les antalgiques (de type symptomatique) des
antihyperalgiques (de type pathogénique). Nous pensons que cette distinction
nosographique peut aider le thérapeute dans la prise en charge des patients
en intégrant les avantages et limites des produits en fonction de leur classe et
de leur mode d'action.

▪ INTRODUCTION

La pharmacologie de la douleur inflammatoire stricto sensu recrute, parmi les


anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), le paracétamol et les opioïdes. Ces
deux derniers représentent essentiellement une approche symptomatique par
leur capacité à inhiber la transmission de l'influx nociceptif. Les AINS possèdent
plutôt une action que l'on pourrait qualifier sinon d'étiologique, du moins de
pathogénique dans la mesure où ils sont susceptibles de réduire l'intensité de la
réaction inflammatoire source de la douleur. Ces deux groupes pourraient
également être distingués par leur capacité à modifier les seuils de la douleur :
les premiers seraient alors des antalgiques (augmentation des seuils de la
douleur, y compris chez un sujet sain, c'est-à-dire en dehors de toute atteinte
pathologique), les seconds des produits antihyperalgiques (rétablissement d'un
seuil normal dans une situation pathologique, telle que l'inflammation, ayant
conduit à un abaissement de ce seuil). Ces deux distinctions nosographiques
ont une justification commune : la capacité des AINS à intervenir sur les
mécanismes physiopathologiques à l'origine de la douleur inflammatoire alors
que paracétamol et opioïdes interfèrent prioritairement avec les mécanismes
«généraux» de transmission de la douleur par excès de nociception et peuvent
donc modifier la sensibilité à la douleur. Cette distinction tient également au site
prioritaire d'action de ces antalgiques (action périphérique des AINS et action
centrale des opioïdes et du paracétamol), même si des arguments
pharmacologiques (par exemple existence de récepteurs opioïdes
périphériques [ 1 , 2 ], capacité des AINS à exercer un effet central [ 3 ]) et
physiopathologiques (modifications du fonctionnement neuronal et glial
secondaires à une réaction inflammatoire) tendent à remettre en cause cette
dichotomie.

Sans vouloir entrer dans la physiopathologie de la douleur inflammatoire traitée


par ailleurs, il convient de bien intégrer la complexité des phénomènes
périphériques et de leur retentissement central. Nous retiendrons les éléments
généraux suivants : la multitude des acteurs, le rôle important que peuvent jouer
les cytokines et les neurotrophines au-delà des médiateurs «classiques», la notion
essentielle d'inflammation neurogène et de réflexe d'axone, l'existence de
cibles moléculaires, désormais clonées, senseurs de stimuli élémentaires
(thermiques, mécaniques, chimiques), la part jouée dans les mécanismes de
transduction du signal par les canaux ioniques dépolarisants ou hyperpolarisants
et l'impact de ces changements sur la sensibilisation du système nerveux central
à laquelle participent les cellules gliales. Ils constituent des cibles pour une
action spécifique visà-vis de la douleur inflammatoire. Mais la complexité de ces
phénomènes limite l'intérêt d'une action focalisée sur une cible précise.

L'objectif de cet article sera d'évoquer prioritairement les médicaments


susceptibles d'entrer, comme les AINS, dans la classe des thérapeutiques que
nous avons qualifiées de pathogéniques : corticoïdes, «antirhumatismaux»,
«anticytokines». Nous chercherons à déterminer si leur intérêt thérapeutique
dans la prise en charge de la douleur inflammatoire relève de cette action ou si
se surajoute une capacité à moduler la neurotransmission de la douleur
indépendamment des mécanismes en cause. Néanmoins, une partie sur les
traitements dits symptomatiques sera d'abord proposée. Elle s'appliquera à
évaluer leur capacité à modifier le degré de la réaction inflammatoire et, donc,
leur éventuelle action de type pathogénique.

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▪ MÉDICAMENTS À ACTION SYMPTOMATIQUE

Opioïdes

L'utilisation des opioïdes est en progression en pratique médicale pour le


traitement des douleurs chroniques non cancéreuses (inflammatoires,
neuropathiques…) [ 4 , 5 ]. Dans sa récente revue, Breivik [ 6 ] souligne les
avantages et les inconvénients de l'utilisation des opioïdes dans ces
pathologies. Il rappelle les recommandations adoptées dans plusieurs pays
européens, en particulier la nécessité de vérifier, pendant une période d'essai, si
2 objectifs sont atteints, à savoir diminuer la douleur et améliorer la qualité de
vie du patient, recommandations proposées également par Kalso et al. [ 7 ]. Il
insiste sur les problèmes d'une large utilisation des opioïdes pour le traitement
des douleurs chroniques non cancéreuses, tels que vécus au Danemark, qui ont
conduit à l'apparition d'un nombre important de patients dépendants (de 3 à
19 %) [ 8 ].

Des études contrôlées ont montré l'efficacité et la tolérabilité de divers opioïdes


dans le traitement de pathologies chroniques telles que l'arthrite rhumatoïde [ 9
, 10 and 11 ]. Le tramadol a démontré une activité antalgique dans des cas de
douleur inflammatoire faible à modérée lorsque les AINS et le paracétamol n'y
étaient pas parvenus [ 12 ]. D'autres molécules telles que l'oxycodone (associée
ou non au paracétamol) ou la méthadone (qui a le bénéfice supplémentaire
d'agir comme antagoniste de récepteur au NMDA) pourraient être utiles dans le
traitement de douleurs chroniques non cancéreuses.

L'action des opioïdes dans ces douleurs est classiquement considérée comme
dépendante de leur capacité à inhiber la transmission centrale du message
nociceptif, comme ils le font pour toute douleur par excès de nociception.
Cependant, les travaux de Stein et al. [ 1 ] ont ouvert la voie à une possible
action périphérique des opioïdes. Ces auteurs ont en effet montré que
l'inflammation s'accompagnait d'une surexpression des récepteurs opioïdes sur
les nocicepteurs. Il a également été démontré que l'inflammation provoquait,
via les cytokines, une libération de peptides opioïdes (endorphine,
enképhaline, dynorphine, endomorphine 1,2) susceptibles d'activer les
récepteurs opioïdes [ 13 , 14 and 15 ]. Ainsi, des phénomènes périphériques
observés au cours de l'inflammation peuvent «offrir» les bases d'une action
périphérique aux médicaments opioïdes. Cette action permettrait d'attribuer à
ces produits le qualificatif «pathogénique» dans la mesure où elle est très
dépendante de la physiopathologie de la réaction inflammatoire. Cependant,
se pose la question de l'importance de cet effet par rapport à l'effet central et,
surtout, de sa pertinence en clinique. De nombreuses études contrôlées ont
évalué l'effet analgésique de l'administration intra-articulaire d'opioïdes. La
majorité d'entre elles concluent positivement [ 16 ]. Une méta-analyse incluant
des études cliniques randomisées et contrôlées dans la douleur postopératoire [
17 ] a montré que la morphine exerçait une action périphérique après
administration intra-articulaire mais pas après administration le long du nerf, ce
qui plaide pour une action liée à l'état inflammatoire. Cela a été confirmé par
l'absence d'effet dans des études animales et cliniques réalisées en dehors d'un
état inflammatoire [ 1 ]. Une efficacité a également été retrouvée dans
l'arthrose et la polyarthrite rhumatoïde avec une possible action anti-
inflammatoire [ 1 ].

Paracétamol

Le paracétamol possède des propriétés antalgiques utilisées pour le traitement


des douleurs d'intensité faible à modérée ainsi que des propriétés antipyrétiques
[ 18 ]. Dans le domaine de la rhumatologie, il a une place de choix puisque
c'est le traitement de première intention recommandé par l'European League
Against Rheumatism (EULAR) en 2000 pour l'arthrose du genou [ 19 ] et par
l'American College of Rheumatology (ACR) pour la douleur de l'arthrose du
genou et de la hanche [ 20 ]. Cependant, l'étude de Boureau et al. [ 21 ]
tend à relativiser cette conclusion, démontrant que dans ces deux types de
douleurs, l'ibuprofène en dose unique ou répétée a une meilleure efficacité que
le paracétamol sans induire plus d'effets indésirables. Par ailleurs, même si
l'empirisme clinique permet difficilement de considérer le paracétamol comme
un produit à activité anti-inflammatoire, des travaux cliniques un peu anciens lui
prêtent une action anti-œdémateuse [ 22 , 23 and 24 ]. Ce constat et son
interaction avec les cyclo-oxygénases (COX), objet de nombreuses discussions,
peuvent-ils conduire à considérer que le paracétamol possède une action
pathogénique responsable pour une partie de son activité antalgique dans des
douleurs inflammatoires ?
Le débat sur les capacités du paracétamol à inhiber les COX justifie cette
interrogation. Son profil clinique, en termes d'efficacité et d'effets indésirables, le
distingue clairement des AINS classiques (mais moins des coxibs) et tendrait
donc à exclure une telle influence, au moins sur les COX périphériques, en
clinique. La démonstration de sa capacité à inhiber in vitro ces dernières
dépend d'ailleurs des conditions expérimentales utilisées [ 25 ] et est
classiquement considérée comme limitée dans l'inflammation. On doit souligner
que des travaux réalisés chez l'animal ont montré l'incapacité du paracétamol
à réduire les taux périphériques de prostaglandines [ 26 ] et, que chez l'homme
atteint de polyarthrite rhumatoïde, il n'induit pas de modification du taux de
prostaglandines dans le liquide synovial [ 27 , 28 ] ou le plasma [ 29 ].
Cependant, deux études récentes reviennent sur ces données et tendent à
démontrer qu'il a une action sur les COX périphériques chez l'homme [ 30 , 31 ].
Hinz et al. [ 30 ] ont montré, à partir du sang total de 5 volontaires recevant 1
000 mg (per os) de paracétamol, une inhibition de 83 % de l'activité des COX-2
sans modification de son expression et une bien plus faible inhibition sur la COX-
1. Lee et al. [ 31 ] montrent une réduction des taux de PGE2, mais pas de
thromboxane A2 (COX-1 dépendante), dans l'exsudat inflammatoire recueilli
par microdialyse chez des patients ayant subi une ablation de molaires. Cette
inhibition est comparable à celle observée avec le rofécoxib, inférieure à celle
due au kétorolac lui-même plus efficace sur la douleur postopératoire. Ces
deux études relancent le débat d'une action périphérique du paracétamol via
l'inhibition de la synthèse des prostaglandines, même si elles ne permettent pas
d'établir un lien de causalité avec son activité analgésique. C'est en particulier
le cas de l'étude d'Hinz et al. [ 30 ] réalisée chez le volontaire sain, en dehors
de toute douleur et réaction inflammatoire.

L'objet n'est pas ici d'entrer plus avant dans le débat sur l'interaction
paracétamol/COX. Il convient néanmoins d'évoquer que plusieurs études, dont
celle princeps de Flower et Vane [ 32 ], ont démontré une capacité du
paracétamol à inhiber préférentiellement les COX centrales et à réduire les taux
spinaux de prostaglandines [ 26 , 33 , 34 ] dans un contexte de douleur
inflammatoire. Ainsi, le paracétamol (ou ses métabolites actifs, voir Hogestatt et
al. [ 35 ]) interférerait avec les COX centrales mobilisées par la réaction
inflammatoire.

L'ensemble de ces données conduit à considérer que le mécanisme d'action


du paracétamol pourrait dépendre, au moins pour une part, des mécanismes
physiopathologiques de l'inflammation. Le paracétamol se comporterait alors,
selon notre concept, comme un antalgique à effet pour partie pathogénique.
Mais on ne peut oublier que d'autres travaux, animaux et humains, démontrent
qu'il a une action centrale dans des douleurs non inflammatoires, liée à une
implication du système sérotoninergique, voire à d'autres mécanismes [ 25 , 36 ,
37 ].

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▪ MÉDICAMENTS À ACTION PATHOGÉNIQUE

L'impact direct sur la pathogénie et les mécanismes physiopathologiques d'un


symptôme ou d'une maladie est idéal pour toute thérapeutique
médicamenteuse. Vis-à-vis de la douleur inflammatoire, le bénéfice
thérapeutique peut venir, nous l'avons déjà évoqué, d'une action inhibitrice des
mécanismes de transmission de la douleur mais également d'un impact sur les
mécanismes physiopathologiques en cause, qu'ils soient périphériques ou
centraux. Ainsi, la réduction de la douleur pourra être obtenue par des produits
susceptibles de réduire l'état inflammatoire quel que soit le mécanisme de cette
réduction. Il est donc légitime d'étudier ici les anti-inflammatoires et les
traitements de fond des rhumatismes inflammatoires.

Médicaments anti-inflammatoires

AINS

L'action analgésique des AINS est classiquement attribuée à une inhibition


périphérique de la synthèse des prostaglandines élaborées localement au
niveau des sites lésés et enflammés et connues pour y sensibiliser les
nocicepteurs. Cependant, plusieurs arguments plaident en faveur d'une action
centrale : évoquée, pour les salicylés, dès 1926 par Hazlick (cité dans [ 38 ]) puis
en 1965 par Woodbury et Ahmad [ 39 ], elle a été confirmée par Ferreira et al.
[ 40 ] qui ont démontré, chez l'animal, l'efficacité antihyperalgique de l'aspirine
et de l'indométacine après administration centrale, en utilisant un modèle de
douleur inflammatoire périphérique due à la carragénine. Depuis, de
nombreuses études ont confirmé cette action dans des modèles
d'inflammation, ce qui laisse supposer qu'elle est liée à la physiopathologie, fût-
elle centrale, de la douleur inflammatoire. Plusieurs éléments supportent un tel
mécanisme central dans un contexte de douleur inflammatoire périphérique :
présence de COX et de prostaglandines dans le système nerveux central,
surexpression de COX spinales, existence d'une cascade phospholipases A2-
COX-prostaglandines dans la corne postérieure de la moelle épinière activée
par une inflammation périphérique et sensible aux AINS [ 3 , 41 ]. Ainsi, que ce
soit par leur effet anti-inflammatoire périphérique, source de réduction de la
douleur, ou par leur impact sur la genèse et la transmission centrale du message
douloureux, via la réduction de synthèse des prostaglandines (et l'inhibition du
facteur de transcription NF-κB dont l'expression est accrue par l'inflammation),
les AINS exercent une action inhibitrice sur la pathogénie de la douleur
inflammatoire. Cette action, considérée comme prioritaire et de site mixte,
justifie leur classification dans ce paragraphe des médicaments à action
pathogénique.

Cependant, certaines données publiées suggèrent que les AINS puissent réduire
le message douloureux en dehors de tout état inflammatoire. Chez l'animal, des
études ont montré que les décharges neuronales thalamiques induites par
l'application de stimuli électriques sur les fibres C étaient inhibées après
administration systémique d'AINS [ 42 , 43 ]. Chez l'homme volontaire sain, une
dose de 1 g d'aspirine per os diminue les potentiels cérébraux à la suite de
l'application d'un stimulus nociceptif non inflammatoire (chocs électriques
sous-cutanés) [ 44 , 45 ]. Chez le volontaire sain encore, le kétoprofène (par
voie intraveineuse) [ 46 ] et l'ibuprofène (per os) [ 47 ] augmentent le seuil du
réflexe RIII. Ces données démontrent une dissociation entre l'activité anti-
inflammatoire et antinociceptive des AINS.

Les mécanismes par lesquels les AINS exerceraient un effet antalgique en


dehors de tout état inflammatoire pourraient être de différentes natures, même
s'ils n'ont pas fait l'objet d'études aussi poussées que pour l'interaction avec la
synthèse des prostaglandines. Nous ne ferons que citer ces hypothèses :
implication des endocannabinoïdes, interaction avec les systèmes opioïdes,
sérotoninergiques ou les canaux ASIC, l'oxyde nitrique, le GABA et la glycine [ 3
]. Quelle que soit la part jouée par ces différents mécanismes, ils démontrent
que les AINS peuvent moduler la transmission du message douloureux
indépendamment de leur inhibition des COX et de leur action anti-
inflammatoire. À ce titre, ils peuvent être considérés comme des produits à
action symptomatique. Il n'en demeure pas moins que leur intérêt
thérapeutique relève sans doute prioritairement de leur action «pathogénique»
et de l'impact de celle-ci en périphérie [ 3 ].

Mais la reconnaissance d'une action centrale des AINS ouvre des perspectives
de progrès intéressantes. En effet, une meilleure connaissance des mécanismes
par lesquels les AINS inhibent la sensibilisation centrale secondaire à un état
inflammatoire pourrait permettre de concevoir des antalgiques
«pathogéniques» utilisables dans la douleur inflammatoire et dénués d'effets
périphériques, dont les effets indésirables des AINS.

Corticoïdes

Ces médicaments ont à la fois des propriétés anti-inflammatoires [ 48 ] et


immunosuppressives [ 49 ]. Les premières peuvent réduire la cause de la
douleur et leur conférer, selon notre classification, un effet antalgique
«pathogénique».

Les effets anti-inflammatoires des glucocorticoïdes (GC) impliquent des


mécanismes d'action directs et indirects. Par exemple, la diminution de
l'éosinophilie après traitement aux GC chez des sujets asthmatiques est le fait
d'une action directe favorisant l'apoptose des éosinophiles et d'une action
indirecte de l'inhibition de l'expression de récepteurs et de la production de
cytokines et de facteurs de croissance [ 50 ]. Il est admis que les GC sont des
inhibiteurs puissants de l'activité de facteurs de transcription, en particulier AP-1
et NF-κB, qui sont impliqués dans l'activation de gènes pro-inflammatoires [ 51 ].
Les GC suppriment également la production et les effets de facteurs humoraux
impliqués dans la réponse inflammatoire, ils inhibent la migration leucocytaire
au site inflammatoire, et interfèrent avec les fonctions des cellules endothéliales,
des leucocytes et des fibroblastes [ 51 ]. Leurs mécanismes d'action impliquent
la liaison du GC à son récepteur (GR) dans le cytoplasme. Le complexe GC-GR
peut directement lier NF-κB et inhiber son action, augmenter la synthèse d'I-κB
qui lie NF-κB et inhiber ainsi sa translocation nucléaire [ 52 ]. Le complexe peut
également migrer vers le noyau de la cellule et lier GC-responsive genes (GRE),
inhibant la production de cytokines pro-inflammatoires (TNF et IL-1) et affectant
leur transport [ 52 ].

Des réponses nociceptives à des injections intraplantaires de carragénine, de


TNF-α, d'IL-1, d'IL-6 (mais pas d'IL-8, de PGE2, de dopamine) sont inhibées par
prétraitement à la dexaméthasone [ 53 ]. In vitro, celle-ci inhibe aussi la
libération de TNF-α par des macrophages stimulés au lipopolysaccharide (LPS) [
53 ]. Il existe aussi des preuves qui associent à son effet «antinociceptif» son
action via l'annexine-1 [ 53 ]. Elle inhibe non seulement l'expression de
médiateurs inflammatoires mais aussi celle de récepteurs tel celui de la
bradykinine, qui est surexprimé lors de réponses hyperalgiques induites par le
formol [ 54 ]. Ces mécanismes expliquent la capacité des GC à réduire la
réaction inflammatoire et à exercer ainsi une action antalgique de type
«pathogénique» avec une composante périphérique dominante mais
possiblement une action centrale via, par exemple, une réduction de
l'expression des cytokines spinales activées par l'inflammation.

Mais les GC peuvent-ils exercer une action antalgique non spécifique,


symptomatique ? Il a été démontré que les corticoïdes endogènes et exogènes
pouvaient inhiber à la fois l'hyperalgie périphérique et l'expression spinale du
messager du gène codant la préprodynorphine, induit lors d'une inflammation
persistante, modification susceptible d'expliquer au moins partiellement la
suppression de l'hyperalgie [ 55 ]. Mais on reste ici dans un effet
vraisemblablement secondaire à l'action antiinflammatoire. La bêtaméthasone
inhibe également l'hyperalgie thermique et mécanique induite dans un modèle
de neuropathie traumatique élaboré par Xie et al. [ 56 ]. Ces auteurs
suggèrent que cette action puisse impliquer un effet inhibiteur vis-à-vis de
l'expression de cytokines pro-inflammatoires et un effet stimulateur de
l'expression de cytokines anti-inflammatoires au niveau supraspinal. Un travail
publié en 1994 par Abram et al. [ 57 ] ne retrouvait pas d'effet
d'administrations intrathécales de différents GC sur un test de douleur aiguë et
un léger effet lorsque le stimulus douloureux (inflammatoire) était maintenu.
Cela était confirmé par une seconde étude montrant l'absence d'effet
antinociceptif de GC endogènes [ 58 ]. Il a même été montré que la
dexaméthasone réduisait l'analgésie induite par la clonidine [ 59 ] et, chez
certaines espèces, par la morphine [ 60 ]. Sans prétendre à l'exhaustivité, ces
données suggèrent fortement que l'effet de soulagement de la douleur exercé
par les corticoïdes soit la conséquence de leur action anti-inflammatoire, sans
impact direct sur la transmission du message douloureux.

Traitement de fond des rhumatismes inflammatoires

Nous limiterons notre étude au méthotrexate — famille des DMARD (disease


modifying anti-rheumatic drugs) avec l'hydroxychloroquine, la sulfasalazine et
le néflunomide — et aux «anticytokines» disponibles.

Méthotrexate

Le méthotrexate (MTX) est un antagoniste classique des folates ayant des


propriétés immunomodulatrices, antiprolifératives et anti-inflammatoires. Il a été
utilisé pour la première fois en 1985 à faibles doses dans le traitement de la
polyarthrite rhumatoïde [ 61 ]. Chez des patients atteints de cette affection,
l'administration de méthotrexate ou d'autres produits (sulfasalazine, abatacept)
s'accompagne d'une amélioration globale de la qualité de vie et, en
particulier, d'une diminution des symptômes douloureux [ 62 , 63 , 64 and 65 ].
Ce bénéfice, retrouvé également dans la pseudopolyarthrite rhizomélique [ 66
], n'apparaît pas, dans les études actuellement disponibles, pour la
spondylarthrite ankylosante [ 67 ].

L'action pharmacologique du méthotrexate implique plusieurs mécanismes


incluant l'inhibition de la synthèse des purines, de la prolifération lymphocytaire,
du chimiotactisme et de l'adhérence des neutrophiles, l'induction de l'apoptose
de certaines cellules immunitaires/inflammatoires et la modulation de la voie de
l'adénosine. Cependant, les mécanismes de l'action anti-inflammatoire du
méthotrexate ne sont qu'incomplètement connus. Riksen et al. [ 68 ] ont
récemment montré que les effets véhiculés par l'adénosine pourraient jouer un
rôle central dans cette action chez des patients arthritiques. L'augmentation
des taux d'adénosine induite par le méthotrexate favorise l'augmentation des
taux d'AMPc qui est ellemême responsable d'un certain nombre d'effets anti-
inflammatoires tels que la diminution de la sécrétion de TNF-α, d'INF-γ, d'IL-2 et
d'IL-6. Les agonistes des récepteurs A3 à l'adénosine exercent une action anti-
inflammatoire dans des modèles animaux et lors d'études cliniques préliminaires
chez des patients atteints de polyarthrite rhumatoïde ; par ailleurs le
méthotrexate, qui provoque une surexpression de ces récepteurs, renforce
l'effet des agonistes [ 69 ]. L'adénosine est également capable de réduire la
transmission du message nociceptif au niveau périphérique et spinal ; la
morphine et la sérotonine en augmentent les taux médullaires alors que les
antagonistes des récepteurs à l'adénosine inhibent l'effet antalgique de ces
produits [ 70 ]. Cependant, le méthotrexate ne modifie pas les seuils de
réaction à des stimuli nociceptifs d'animaux sains [ 71 , 72 ], suggérant
l'absence d'effet strictement antinociceptif de type symptomatique. Mais,
administré par voie intrathécale, il exerce un effet anti-allodynique préventif et
curatif dans un modèle de douleur neuropathique par ligature de la racine L5 [
72 ]. Ce modèle peut néanmoins comporter une part inflammatoire et ce
résultat pourrait être dû à l'effet anti-inflammatoire du méthotrexate. Outre sa
capacité à moduler l'inflammation, il a été récemment évoqué que
l'administration prolongée, à faibles doses, de méthotrexate dans un modèle
animal d'arthrite pouvait prévenir le développement de la douleur chronique [
73 ].

«Anticytokines»

Il est clairement démontré que les médiateurs inflammatoires provenant des


cellules immunitaires, particulièrement le TNF-α, l'IL-1, le NGF et la PGE2, sont des
substances algogènes [ 74 ]. La plupart de ces médiateurs agissent soit
directement au niveau des nocicepteurs, soit indirectement via la sécrétion
d'autres médiateurs, essentiellement les prostaglandines. Les neurones
expriment des récepteurs pour des médiateurs «classiques» (par exemple
l'histamine, la bradykinine, les prostaglandines) mais également des récepteurs
pour le TNF-α, l'IL-1β et le NGF. Des agents inhibant l'effet de ces médiateurs,
principalement du TNF-α et de l'IL-1β, ont prouvé leur activité dans le traitement
de la polyarthrite rhumatoïde, de la spondylarthrite ankylosante, de la maladie
de Crohn, etc. Le recours aux critères de l'ACR dans les études chez les patients
atteints de polyarthrite rhumatoïde confirme l'impact positif des anti-TNF-α et de
l'antagoniste du récepteur à l'IL-1β sur le symptôme douleur [ 75 , 76 , 77 and
78 ]. Cet impact est lié à la capacité des produits à inhiber l'action périphérique
des cytokines dans la physiopathologie de l'inflammation et de la douleur
inflammatoire. Mais il convient de noter que les cytokines présentes dans le
système nerveux central, en particulier dans la corne postérieure de la moelle
épinière, sont impliquées non seulement dans la physiopathologie de ce type
de douleur mais également dans celle des douleurs neuropathiques. Cela
pourrait conférer aux inhibiteurs des cytokines des propriétés antalgiques hors
du contexte de la douleur inflammatoire. Dès lors, ces produits conserveraient
une activité de type «pathogénique» mais non limitée au seul contexte de la
douleur inflammatoire.

Anti-TNF-α

Il existe à l'heure actuelle 3 molécules ciblant le TNF-α utilisées dans le traitement


des patients atteints de polyarthrite rhumatoïde (mais également dans d'autres
indications : spondylarthrite ankylosante, rhumatisme psoriasique, etc.) : 2
anticorps monoclonaux contre le TNF-α (l' infliximab et l'adalimumab) et 1
récepteur soluble (protéine de fusion avec les récepteurs p75 du TNF-α),
l'étanercept. Ces 3 agents ont prouvé leur efficacité (amélioration de la qualité
de vie, ralentissement de la progression des atteintes articulaires) dans des
essais contrôlés contre placebo qui incluaient des patients ayant une
pathologie établie ou débutante [ 78 , 79 , 80 , 81 , 82 and 83 ]. D'autres
molécules ciblant le TNF-α, les molécules PEGylated (CDP870 ou certolizumab),
sont également en train d'être mises au point.

Le TNF-α joue un rôle important dans la douleur inflammatoire persistante. Il a


été suggéré qu'il sensibilisait indirectement les neurones nociceptifs, via
l'induction d'une cascade de cytokines pro-inflammatoires impliquant IL-1β, l'IL-6
et l'IL-8, résultant en la sécrétion par les cellules immunitaires de prostaglandines
et d'autres médiateurs algogènes [ 84 , 85 and 86 ]. Des études
électrophysiologiques ont révélé de manière plus directe que des injections
sous-cutanées de faibles doses de TNF-α induisaient très rapidement (2 minutes)
des décharges ectopiques dans des neurones nociceptifs et que des doses plus
élevées produisaient une hyperalgie thermique et mécanique en 15 minutes [
87 , 88 and 89 ]. De plus, sur des neurones de DRG en culture, l'application de
TNF-α augmente les courants calciques et la sensibilité des neurones à la
capsaïcine [ 90 , 91 ]. Mais l'action pronociceptive du TNF-α peut également
s'exercer au niveau spinal. En effet, comme d'autres cytokines (IL-1β, IL6) mais
aussi comme le NO, les prostaglandines et l'ATP, il est libéré par les cellules
microgliales dans un contexte d'inflammation périphérique [ 92 ]. Ces
médiateurs participent à la sensibilisation centrale en activant la libération de
neuromédiateurs à partir des afférences primaires, en activant les neurones de
projection et en exerçant un rétrocontrôle positif sur leur synthèse par la
microglie [ 92 ]. Les différents anti-TNF-α (infliximab, étanercept, adalimumab)
ont montré un effet protecteur vis-à-vis des douleurs inflammatoires,
particulièrement dans l'arthrite rhumatoïde [ 93 , 94 ]. Mais, comme le montre le
travail d'Inglis et al. [ 95 ] réalisé chez l'animal avec l'étanercept, l'inhibition du
TNF-α ne modifie pas les seuils de réaction chez l'animal sain (absence d'effet
antinociceptif intrinsèque) mais seulement l'hyperalgésie inflammatoire.

Cette implication du TNF-α a également été décrite dans le contexte des


douleurs neuropathiques. Il s'agit souvent d'études précliniques réalisées sur des
modèles post-traumatiques qui ont, au moins initialement, une composante
mixte neuropathique postlésionnelle mais également inflammatoire [ 96 ]. Mais
le travail de Ledeboer et al. [ 97 ] montre que dans un modèle de neuropathie
induite par le paclitaxel, et donc a priori sans composante inflammatoire, on
observe une surexpression de TNF-α dans le DRG. Un travail récent a montré que
des patients neuropathiques douloureux avaient des taux d'expression de
cytokines pro-inflammatoires circulantes (IL-2, TNF-α) bien supérieurs à ceux de
patients neuropathiques non douloureux ou de sujets sains [ 98 ]. Des études
animales suggèrent que l'infliximab aurait un intérêt vis-à-vis de la douleur
spontanée et/ou provoquée secondaire à des hernies discales avec conflit
nerveux [ 99 , 100 and 101 ] et que l'étanercept réduit l'hyperalgésie [ 102 ] et
l'allodynie [ 103 ] mécaniques dans des modèles de neuropathie post-
traumatique.

Ainsi, comme c'est logique avec ce type de produits, les inhibiteurs du TNF-α
n'exercent un effet bénéfique sur la douleur que dans des situations dont la
physiopathologie implique la cytokine. Un effet de type symptomatique n'est
donc pas probable.

Anti-IL-1

L'IL-1ra est un antagoniste endogène spécifique du récepteur IL-1 qui a une


action protectrice lors de processus inflammatoires [ 104 ]. L'anakinra, seul
médicament disponible de cette famille, est un recombinant d'IL-1ra qui a
prouvé son efficacité dans le traitement de patients atteints de polyarthrite
rhumatoïde, ralentissant les dégâts articulaires et améliorant leur état
fonctionnel [ 75 ].

La famille de l'IL-1 comprend 3 polypeptides, l'IL-1α, l'IL-1β et l'IL-1ra. Les IL-1α et


IL-1β sont des agonistes du récepteur à l'IL-1. Administrée chez le rat, l'IL-1
(particulièrement l'IL-1β) a généralement un effet hyperalgique puissant que ce
soit au niveau périphérique [ 89 , 105 , 106 ] ou central [ 107 , 108 ], bien que
dans certaines circonstances, son administration puisse provoquer une action
antalgique [ 109 , 110 ]. L'IL-1 a également un rôle important dans les effets
hyperalgiques de stimuli inflammatoires variés (endotoxine, carragénine,
bradykinine) [ 111 , 112 ]. Après injection intrathécale d'IL-1, il y a augmentation
du messager de COX-2 et d'iNOS dans la moelle [ 108 ]. Cet effet central passe
par les prostanoïdes et le CRF, les chimiokines et le NGF [ 113 ]. Il a également
été montré que les MAP kinases (p38) étaient impliquées dans l'hyperalgie
thermique induite par injection intrathécale d'IL-1β [ 114 ]. Des études
expérimentales sur animaux ont révélé l'importance de l'IL-1β dans la destruction
du cartilage articulaire dans des modèles d'arthrite rhumatoïde [ 115 , 116 ].
C'est la forme périphérique prédominante lors des processus inflammatoires,
mais ses taux sont également augmentés dans la moelle épinière de rats
modèles d'inflammation [ 117 ].

L'IL-1 est aussi impliquée dans la genèse de douleurs neuropathiques [ 118 ] ; les
taux d'IL-1α et d'IL-1β sont augmentés dans les modèles de neuropathie
périphérique post-traumatique [ 119 , 120 and 121 ], ainsi que dans les
ganglions spinaux d'animaux traités par le paclitaxel afin d'induire une
neuropathie chimio-induite [ 97 ].

La délétion combinée des gènes codant IL-1α et IL-1β prévient l'hyperalgie et


l'allodynie lors d'une inflammation chez l'animal [ 122 ]. Plusieurs études ont
démontré l'effet antihyperalgique de l'anakinra dans des modèles animaux
d'inflammation [ 106 , 123 ]. Cette molécule exerce également un effet
antihyperalgique dans un modèle de cancer osseux avec prédominance d'une
action périphérique plutôt que centrale [ 117 ]. Des inhibiteurs de l'IL-1β ou du
TNF-α administrés seuls ou en association ont des effets antihyperalgiques dans
des modèles de douleur neuropathique [ 124 , 125 ]. L'ensemble de ces
données plaide en faveur d'un effet de nature purement pathogénique de
l'anakinra sur les douleurs inflammatoires ou neuropathiques. Cependant,
l'étude de Wolf et al. [ 126 ] suggère une implication de l'IL-1 dans la sensibilité
à la douleur en dehors de tout contexte inflammatoire. La délétion du gène
pour le récepteur à l'IL-1 rend les animaux moins sensibles à des stimuli
nociceptifs thermiques ou mécaniques. Le traitement par l'antagoniste de ce
récepteur fait de même. Les conditions expérimentales utilisées par ces auteurs
les conduisent à conclure que l'IL-1 affecte la sensibilité à la douleur en
influençant le développement des circuits neuronaux impliqués dans la
transmission du message nociceptif et en modifiant leur fonctionnement. Cela
conférerait un impact de type symptomatique aux antagonistes de son
récepteur, comme l'anakinra, mais également un rôle physiologique et
physiopathologique potentiellement complexe de l'IL-1β (voir les travaux
évoquant son action antinociceptive [ 110 ]). Notons cependant que, selon
Baamonde et al. [ 117 ], l'anakinra n'aurait aucun effet sur les réponses
nociceptives d'animaux sains.

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▪ CONCLUSION

L'analyse ainsi faite des propriétés antalgiques des produits habituellement


prescrits dans les douleurs inflammatoires permet de distinguer, dans l'état
actuel des connaissances, deux familles : les produits à composante
«pathogénique» stricte (corticoïdes, méthotrexate, anti-TNF-α), dont l'impact sur
la douleur passe par l'inhibition des processus inflammatoires, et les produits de
type «symptomatique» susceptibles de réduire la transmission du message
douloureux de façon non spécifique (opioïdes, paracétamol), même si l'on ne
peut pas formellement exclure un effet sur l'inflammation de ces deux produits.
Les AINS occupent sans doute plus que tous les autres une position mixte à
prédominance pathogénique mais avec une composante symptomatique non
négligeable secondaire à des effets centraux indépendants de l'état
inflammatoire. La qualification de mixte pourrait être partagée par les
antagonistes du récepteur à l'IL-1. Cette classification est indépendante du site
d'action, central ou périphérique, de ces produits tant les mêmes produits
peuvent exercer des effets sur les deux sites. En revanche, nous pensons que la
distinction nosographique établie dans ce chapitre peut aider le thérapeute
dans la prise en charge des patients en intégrant les avantages et les limites des
produits en fonction de leur classe et donc de leur mode d'action.
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Chapitre 12 Les Anesthésiques Locaux Sont-Ils des Anti-Inflammatoires?

Denis BAYLOT

Malou NAVEZ

Les anesthésiques locaux ont des propriétés modulatrices des phénomènes


inflammatoires au-delà de leur action sur le potentiel d'action. La finalité des
mécanismes inflammatoires est de mettre en route des processus de détersion
et de cicatrisation en réponse à une agression tissulaire. Ils interviennent
également dans la physiologie de la douleur, notamment dans l'inflammation
neurogène avec l'objectif d'amplifier le signal nociceptif pour alerter le système
nerveux central et entraîner une réponse comportementale adaptée.
L'entretien et la prolongation en condition extraphysiologique participent à la
sensibilisation centrale, génératrice de douleur chronique. Différentes données
expérimentales montrent que les anesthésiques locaux ont des propriétés de
modulation du processus inflammatoire aussi bien au niveau humoral que
cellulaire. La prévention de la sensibilisation centrale est un objectif prioritaire à
atteindre pour limiter la chronicisation de la douleur et les propriétés anti-
inflammatoires des anesthésiques locaux y participent pour une part non
négligeable.

▪ INTRODUCTION

Les anesthésiques locaux (AL) sont surtout connus pour leur action bloquante
des canaux sodiques (mais aussi potassiques et calciques) responsable du
ralentissement de la conduction nerveuse. Ils ont donc une indication très large
en anesthésie locorégionale et dans le traitement de la douleur par excès de
nociception.

D'autres actions ont été mises en évidence — comme les propriétés


antiarythmiques (classe de Vogan…), l'effet antalgique spécifique dans la
pancréatite, l'action antithrombotique, les actions sur les processus de
cicatrisation, sur le fonctionnement cérébral et la protection de l'ischémie, la
réactivité bronchique — et certaines ont débouché sur des implications
cliniques et thérapeutiques [ 1 ].

Le très large développement des techniques d'anesthésie locorégionale et la


constatation d'un effet antalgique prolongé après l'injection d'anesthésiques
locaux (intra-articulaire notamment) ont fait discuter la possible efficacité de
ces molécules sur les processus inflammatoires. Cela a fait l'objet de plusieurs
revues [ 2 , 3 ].

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▪ MÉCANISMES INFLAMMATOIRES

L'inflammation correspond aux réactions de défense de l'organisme à


différentes agressions qu'elles soient internes (tissus lésés, postchirurgie) ou
externe (infection…). Une cascade d'événements se déclenche, associant des
éléments cellulaires et humoraux aboutissant à la classique triade œdème,
douleur, chaleur.
Lors de ces mécanismes inflammatoires, des agents vasoactifs sont libérés par
les cellules mastocytaires (histamine, leucotriènes) et les plaquettes
(bradykinines). Une réponse systémique s'organise, se traduisant par une
augmentation plasmatique des protéines inflammatoires (protéines C et C3,
fibrinogène et sérum albumine). Les cytokines libérées sur site de la lésion (IL-1,
IL-8, TNF) jouent un rôle dans la modulation de l'inflammation, en particulier sur le
chimiotactisme neutrophile et le développement de l'hyperalgésie liée à
l'inflammation. Elles modulent la réponse systémique. Les mécanismes cellulaires
impliquent initialement les polynucléaires neutrophiles et les monocytes
macrophages. Ces cellules sensibilisées par les cytokines pénètrent dans le
milieu tissulaire par un mécanisme d'adhésion d'opsonisation. Le but ultime est la
phagocytose des éléments générateurs de l'inflammation et l'induction d'une
réparation cellulaire. Ces mécanismes inflammatoires sont donc indispensables
pour les processus de cicatrisation. En excès, ils sont à l'origine d'une
aggravation des lésions tissulaires. Leur modulation par les anesthésiques locaux
peut constituer une prévention de l'inflammation [ 4 ].

En situation de douleur nociceptive, les fibres Aδ et C stimulées vont sécréter des


substances pro-inflammatoires comme la substance P, le CGRP, la neurokinine
A, et ce de manière rétrograde. Ces agents participent au développement de
l'inflammation périphérique dite neurogène [ 5 ]. Expérimentalement,
l'activation directe des fibres C induit une inflammation périphérique cutanée [
6 ] et, a contrario, la destruction des fibres C par la capsaïcine diminue
l'œdème inflammatoire d'une arthrite expérimentale [ 7 ].

Cette hyperalgésie périphérique ou primaire implique des médiateurs


algogènes plasmatiques ou cellulaires ou d'origine neuronale par libération
rétrograde à partir des fibres afférentes primaires. Ces derniers sont synthétisés
dans le ganglion spinal des fibres C (substance P, neurokinine A, CGRP) et sont
véhiculés vers la corne postérieure de la moelle épinière (transmission
nociceptive) ou, dans le cas d'une douleur inflammatoire, vers la périphérie
(inflammation neurogène). La substance P provoque ainsi vasodilatation,
extravasion plasmatique, production de cytokines, dégranulation mastocytaire
et activation sympathique pérennisant l'inflammation et la douleur. Cela se
traduit par des phénomènes de sensibilisation des nocicepteurs qui vont
répondre pour des seuils d'activation plus bas qu'habituellement. Leur taux de
réponses est plus élevé à des stimulations supraliminaires. Les nocicepteurs
silencieux, non fonctionnels en dehors des situations inflammatoires, sont activés
et répondent à des niveaux de stimulation intenses, et ce de manière
prolongée après l'arrêt des stimulations. L'activation de neurotransmetteurs
comme le facteur de croissance nerveuse (NGF, nerve growth factor) participe
à la synthèse de récepteurs et canaux sodiques résistants à la tétrodotoxine [ 8
]. Cette sensibilisation périphérique des nocicepteurs et la transmission par les
fibres afférentes primaires Aδ et C vers la corne postérieure médullaire
entraînent secondairement des mécanismes de sensibilisation centrale où l'on
assiste à une hyperexcitabilité des neurones convergents de la corne
postérieure de la moelle (wide dynamic range), à une augmentation de leur
champ récepteur mais aussi à une destruction de certains interneurones
inhibiteurs. Ce phénomène de sensibilisation centrale amplifie le phénomène
purement périphérique par une hyperalgésie dite secondaire et participe à la
douleur inflammatoire.

Les AL, par leur action bloquante de la transmission nerveuse, pourraient donc
avoir un impact sur le développement de l'inflammation neurogène.

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▪ MODE D'ACTION DES AL SUR LES PROCESSUS INFLAMMATOIRES

Les anesthésiques locaux ont une action sur les processus humoraux et
cellulaires à différents stades de l'inflammation. Les leucotriènes, et tout
particulièrement les LTB4, jouent un rôle important dans la phase précoce de
l'inflammation, notamment dans la stimulation des polynucléaires neutrophiles.
Ils participent, en association avec les PGE2, à la formation de l'œdème
tissulaire. La lidocaïne et la bupivacaïne inhibent la libération des LTB4 et
d'autres agents médiateurs de l'inflammation comme l'IL-1α [ 9 ]. In vitro, la
lidocaïne inhibe le relargage d'histamine par les leucocytes. L'action des AL sur
les fonctions des polynucléaires neutrophiles et des macrophages explique en
grande partie leur effet anti-inflammatoire [ 1 ].

Les AL agissent sur la fonction des polynucléaires en diminuant leur capacité


d'adhésion sur l'endothélium vasculaire. Des études in vitro montrent une
diminution de l'expression, induite par le TNF-α, de récepteurs de surface
CD11b-CD18 favorisant l'adhésion et la diapédèse des polynucléaires [ 10 ].
L'un des mécanismes évoqués serait l'inhibition de l'augmentation du Ca++
intracellulaire à l'origine d'une activation cellulaire. Les AL empêchent la
déformation cellulaire indispensable à l'adhésion et la diapédèse. Des études in
vivo retrouvent une diminution des propriétés d'adhésion des polynucléaires lors
d'infusion continue d'AL [ 11 ]. Par leur action sur la capacité d'adhérence des
polynucléaires, les AL vont diminuer leur concentration au site de l'inflammation.

Kawasaki et al. [ 12 ] ont étudié, sur du sang total de sujets sains, l'effet de
différentes concentrations d'AL (lidocaïne, mépivacaïne, bupivacaïne) sur la
production de TNF-α induite par une stimulation inflammatoire par des
lipopolysaccharides et de l'entérotoxique staphylococcique, et sur l'expression
monocytaire des antigènes HLA-mCD14 et HLA-DR, qui jouent un rôle dans la
signalisation intracellulaire et intercellulaire. Ils ont noté l'absence d'effet de ces
trois AL sur la production de TNF-α induite par ces deux modes de stimulation et
l'absence de modification de l'expression de l'antigène CD4. En revanche, ils
ont constaté que les AL inhibaient l'expression de l'antigène HLA-DR de manière
dose dépendante. Cet antigène est indispensable pour l'activation des cellules
T et joue donc un rôle essentiel dans la réponse immunitaire. Il a par ailleurs été
montré une corrélation entre l'expression de cet antigène et le pouvoir
phagocytaire [ 13 ]. Des résultats similaires sont retrouvés avec une diminution
des récepteurs de surface, de la phagocytose et de la production oxydative de
manière temps et concentration dépendante [ 14 ]. Les AL, en altérant la
réponse immunitaire à des doses sériques compatibles avec une analgésie
péridurale, pourraient ainsi favoriser les processus infectieux.

Les AL réduisent la production des radicaux libres par les polynucléaires


neutrophiles [ 1 ], ainsi que la production d'oxyde nitrique (NO). Au cours du
choc septique, la surproduction de NO explique en partie les lésions tissulaires
rencontrées (multi-organ failure). La lidocaïne diminue la production de NO,
de manière dose dépendante, par dépression de la NO synthétase inductible
(iNOS) [ 2 ].

Les anesthésiques locaux administrés en infiltration ou en topique peuvent


réduire les processus inflammatoires. L'équipe de Mazoit a montré, sur un
modèle de douleur inflammatoire à la carragénine chez le rat, qu'un bloc
sciatique prolongé (6 h) avec la bupivacaïne diminue l'œdème et l'allodynie
mécanique, alors qu'un bloc de plus courte durée (90 min) n'a pas d'effet ; seul
un bloc de durée prolongée est capable de limiter l'inflammation neurogène [
15 ]. De même, chez l'animal, un bloc neurolytique prolongé diminue les effets
systémiques d'une inflammation localisée [ 5 ].

Cette même équipe étudie la réactivité cellulaire des polynucléaires


neutrophiles au lipopolysaccharide (LPS) et à Staphylococcus aureus Cowan
(SAC) induite par une inflammation cutanée à la carragénine. L'inflammation
augmente la production cellulaire de TNF-α et d'IL-1. L'administration préalable
de bupivacaïne encapsulée annule la production des cytokines dans le cas
d'une stimulation cellulaire par le LPS et partiellement par le SAC, alors
qu'injectée isolément, elle n'a aucune action sur la réactivité cellulaire. La
bupivacaïne a donc des propriétés anti-inflammatoires systémiques [ 16 ] dont
le mécanisme est l'inhibition du stress oxydatif responsable de la réponse
inflammatoire. Les propriétés anti-inflammatoires des AL découleraient de leur
effet antioxydant.

Dans un modèle expérimental d'œdème pulmonaire lésionnel, la ropivacaïne,


administrée par voie intratrachéale, diminue de manière significative la réponse
inflammatoire par un effet direct sur l'expression des cellules épithéliales
alvéolaires et endothéliales et sur les polynucléaires [ 17 ].

D'autres études ont retrouvé cet effet protecteur sur le développement du


poumon lésionnel mais l'application en clinique humaine reste à préciser [ 18 ].

L'efficacité des AL dans la rectocolite hémorragique a été démontrée sur les


plans expérimental et clinique. Un gel de ropivacaïne administré 2 fois par jour
pendant 15 jours a permis de diminuer les phénomènes inflammatoires et les
symptômes lors d'une colite [ 19 ].

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▪ QUELLES SONT LES IMPLICATIONS CLINIQUES DES PROPRIÉTÉS ANTI-


INFLAMMATOIRES DES AL ?

Même si de nombreuses données expérimentales sont en faveur de l'effet


antiinflammatoire des anesthésiques locaux, leur implication clinique est encore
difficile à préciser.

Le risque infectieux théoriquement accru du fait de la diminution de la


sensibilisation des polynucléaires et l'effet antibactérien rapporté uniquement
pour des concentrations élevées de produit anesthésique local sont difficiles à
mettre en évidence en clinique.
Les phénomènes inflammatoires sont des mécanismes naturels de défense mais
leur exacerbation peut être responsable de modifications tissulaires délétères.
Les anesthésiques locaux, en limitant cette réaction, peuvent avoir un effet
bénéfique intéressant en clinique.

La meilleure application est sans doute représentée par les processus


inflammatoires au cours de la douleur nociceptive et le rôle que jouent les
anesthésiques locaux sur les mécanismes d'hyperalgésie à la fois périphérique et
centrale.

Ainsi, les blocs nerveux périphériques pourraient contrôler l'hyperalgésie


périphérique et l'inflammation en empêchant la survenue d'une sensibilisation
secondaire [ 20 ]. En pratique clinique, les résultats sont contradictoires, fonction
du mode d'administration ainsi que du moment et de la durée du bloc
anesthésique. Dans tous les cas, il semble difficile de trancher, au vu des
données expérimentales et cliniques, sur la part de l'effet bloqueur anesthésique
et de l'effet anti-inflammatoire.

L'administration d'AL au niveau du site inflammatoire (plaie opératoire) ou


périlésionnelle a été proposée en raison de sa simplicité [ 20 ]. Ses effets sur la
douleur immédiate sont reconnus mais son efficacité à long terme (prévention)
n'a pas été confirmée. Chez le volontaire sain, la lidocaïne prévient la survenue
de l'hyperalgésie primaire induite par une incision cutanée [ 21 ]. L'infiltration
prélésionnelle de lidocaïne (incision cutanée sur la face antérieure du bras)
supprime quasiment le développement des mécanismes inflammatoires liés à
l'hyperalgésie primaire et secondaire, la vasodilatation et les phénomènes
inflammatoires liés au réflexe d'axone post-traumatique, alors que l'infiltration
secondaire ne supprime pas l'extension de cette zone, qui est comparable à
celle apparaissant après injection du sérum salé.

Les topiques locaux anesthésiques appliqués autour de la zone opératoire de


thoracotomie en préopératoire et en fin d'intervention ne modifient pas le
niveau de douleur postopératoire par rapport au placebo mais le délai de la
première demande d'antalgiques est plus long, la consommation d'analgésique
moindre et la douleur au bout de 3 mois moins fréquente (43 % contre 91 %) [ 22
]. Le rôle de ces topiques sur le blocage de l'hyperalgésie et du réflexe d'axone
est discuté. Le blocage par l'anesthésique local réalisé avant la stimulation
nociceptive n'a qu'un effet transitoire, joue un rôle sur la douleur postopératoire
immédiate, mais n' a pas d'effet, semble-t-il, à long terme sur le développement
d'une douleur chronique [ 23 ]. Cependant, la durée du blocage pourrait
intervenir. Les AL qui ont la plus longue durée d'action procurent l'analgésie la
plus prolongée. Les AL administrés chez l'homme par voie locorégionale et de
manière prolongée (supérieure à 2 ou 3 jours) après une chirurgie orthopédique
[ 24 ] ou digestive [ 25 ] améliorent la douleur et la qualité des suites
opératoires. Dans une série de patientes ayant subi une hystérectomie sous
anesthésie péridurale, on note une diminution de la douleur, mesurée à 24, 48
et 72 heures, ainsi que des taux plasmatiques de cytokines dans le groupe qui a
bénéficié d'une analgésie péridurale préopératoire par rapport au groupe
péridural postopératoire [ 26 ]. Les anesthésiques locaux utilisés en
préadministration par voie péridurale et par infiltration ont une action
préventive de la douleur pendant les 24 premières heures en termes d'EVA et
de demande d'antalgiques [ 27 ]. Leur effet à plus long terme sur la douleur
tardive n'est vraiment bien documenté que dans les blocs spinaux pour la
chirurgie thoracique [ 28 ], colique [ 29 ] et dans les amputations [ 30 ] avec,
cependant, quelques études négatives. Des études en chirurgie thoracique ont
montré l'intérêt de l'analgésie péridurale péri-opératoire à long terme sur la
réduction de la douleur résiduelle à 6 mois et 1 an [ 31 ].

L'analgésie péridurale débutée en préopératoire pourrait réduire les cytokines


proinflammatoires et maintenir les cytokines anti-inflammatoires [ 26 ]. Cette
modulation des cytokines par les anesthésiques locaux viendrait en
complément de l'action sur les canaux sodiques et participerait au blocage de
l'influx nociceptif et du réflexe d'axone réduisant l'inflammation neurogène et les
mécanismes d'hyperalgésie.

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▪ CONCLUSION

Les anesthésiques locaux très largement utilisés en anesthésie locorégionale


pendant la période péri-opératoire ont des propriétés multiples à la fois
anesthésiques et analgésiques à plus ou moins long terme en interagissant sur
les mécanismes d'hyperalgésie périphérique et centrale. La part de l'effet
anesthésique et de l'effet anti-inflammatoire propre dans cette indication reste
encore obscure. La mise au point en topique des AL, plus accessible à la
pratique thérapeutique, permettra peut-être de découvrir de nouvelles
indications dans la douleur chronique. L'intérêt de leurs propriétés anti-
inflammatoires dans les états de choc, les défaillances multiviscérales et les
syndromes d'ischémie-perfusion reste encore à déterminer.

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À lire :

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undergoing major digestive surgery. Anesthesiology 2005 ; 103 : 81 3-20.
Chapitre 13 Techniques de Radiologie Interventionnelle Dans le Traitement de la
Douleur Aiguë et Inflammatoire en Pathologie Ostéo-Articulaire

Henri GUERINI

Jean-Luc DRAPÉ

Gérard MORVAN

Jacques BUSSON

Antoine FEYDY

Alain CHEVROT

L'imagerie médicale a permis de grandes avancées diagnostiques. Elle a égale


ment permis de guider les gestes thérapeutiques. L'imagerie interventionnelle
est actuellement incontournable, en particulier en pathologie ostéo-articulaire.
Elle permet une plus grande précision du geste, ce qui limite les complications.
Elle possède des voies d'abord et des techniques actuellement bien codifiées
qui vont être décrites ici. Seront abordés essentiellement les gestes les plus
fréquemment utilisés dans le traitement des douleurs aiguës. La première partie
concerne les conflits disco-radiculaires à l'étage lombaire et décrit les
techniques d'infiltration foraminale et épidurale. La deuxième décrit les
techniques d'infiltration foraminale cervicale. La troisième concerne les
ponctions-aspirations des calcifications de l'épaule sous radioscopie et sous
échoscopie. Seront évoquées ensuite la technique de capsulo-distension dans
la capsulite rétractile et, pour terminer, les infiltrations articulaires dans le cadre
des douleurs d'origine synoviale.

▪ INTRODUCTION

La douleur aiguë en pathologie rachidienne et ostéo-articulaire est la plupart


du temps prise en charge par un traitement anti-inflammatoire ou antalgique
général.

Il existe certaines pathologies pour lesquelles le traitement par injection percuta


née de dérivés cortisonés peut permettre de passer la crise, de faciliter la reprise
des activités et/ou éventuellement de commencer une rééducation.

Nous avons choisi 5 pathologies responsables d'une crise douloureuse aiguë : la


lombosciatique et la névralgie cervico-brachiale sur hernie discale, la
périarthrite calcifiante scapulo-humérale, la capsulite rétractile et la douleur
d'origine synoviale.

Pour ces 5 indications, le traitement percutané peut être guidé par l'imagerie.

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▪ LOMBOSCIATIQUE AIGUË

La douleur est secondaire au conflit disco-radiculaire dû à la hernie discale et à


la composante chimique irritant la racine nerveuse.
En cas de hernie discale médiane ou paramédiane, il est fréquent de réaliser
des injections épidurales, la plupart du temps non guidées par l'imagerie, qui
permettent de passer le cap douloureux des premières semaines. L'injection
épidurale radioguidée offre l'avantage d'obtenir une certitude quant à la
bonne position de l'aiguille grâce à l'injection de produit de contraste iodé non
neurotoxique au niveau de l'espace où siège le conflit [ 1 ]. Il faut, pour réaliser
cette infiltration, disposer d'une imagerie préalable. Celle-ci permet de choisir
l'étage à infiltrer sachant qu'il paraît logique d'injecter le dérivé cortisoné
(acétate de prednisolone, — 75 mg) au plus près du conflit disco-radiculaire.
Ces injections épidurales sont donc réservées aux conflits disco-radiculaires
intracanalaires.

Le geste s'effectue en procubitus en repérant l'espace interlamaire. L'aiguille à


ponction lombaire (PL) est positionnée du côté du conflit, contre la lame
supérieure. Une fois le contact osseux obtenu, l'aiguille à PL glisse sous cette
lame et traverse le ligament jaune. On utilise alors une seringue de produit de
contraste iodé non neurotoxique dont l'injection est impossible au sein des
ligaments jaunes. On avance millimètre par millimètre jusqu'à une perte brutale
de la résistance à l'injection signant a priori la position de l'aiguille dans
l'espace épidural postérieur. La vérification sous scopie de l'épidurographie
permet d'obtenir la certitude du bon positionnement de l'aiguille ( figure 1 ),
autorisant alors l'injection du dérivé cortisoné [ 2 ].

Cette méthode d'injection peut être réalisée sous scanner [ 2 ] avec une voie
d'abord directe de l'espace épidural postérieur et une injection test qui peut se
faire soit avec du produit de contraste iodé non neurotoxique, soit à l'air.

En l'absence de contre-indication (allergie au produit de contraste iodée,


troubles de la coagulation), il existe peu de risques dus à cette injection. Il faut
prévenir le patient de la possibilité d'un syndrome méningé «post-PL» dont la
fréquence est rare. L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de
santé (AFSSAPS) a toutefois récemment recommandé (2008) la prudence en
raison de la survenue de 4 cas de paraplégie/tétraplégie qui ont été notifiés
aux centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV) à la suite d'infiltration de
prednisolone dans le rachis lombaire (3 cas de paraplégie) et le rachis cervical
(1 cas de tétraplégie).
Figure 1 ▪ Infiltration épidurale sous radioscopie (voie interlamaire).

Dans l'attente de résultats et d'informations plus détaillées par les sociétés


savantes de rhumatologie et de radiologie, l' AFSSAPS recommande :

 d'utiliser les glucocorticoïdes injectables dans le respect strict de


l'autorisation de mise sur le marché (AMM) ;
 de prendre en compte, tout particulièrement dans des pathologies
bénignes, la survenue exceptionnelle de paraplégie/tétraplégie dans les
indications d'injections radioguidées des rachis lombaire et cervical.

Il faut toutefois être rassurant car les infiltrations foraminales et épidurales


lombaires sont très largement utilisées depuis de nombreuses années et il ne
faudrait pas remettre en cause une technique qui était jusqu'à maintenant
reconnue pour son innocuité tant que le risque n'a pas été scientifiquement
estimé.

En cas de hernie discale foraminale, il est préférable d'injecter le dérivé


cortisoné dans le foramen, au contact du conflit. Cette injection peut
également être réalisée sous radioscopie ou sous scanner [ 3 ]. L'abord
radioscopique, plus fréquent, peut se faire par voie postérieure stricte ( figure 2
) ou par voie postéro-latérale, en particulier à l'étage L5-S1 ( figure 3 ).
L'aiguille est avancée sous radioscopie jusqu'au foramen, millimètre par
millimètre. Son bon positionnement est ensuite vérifié par une radiculographie
grâce à l'injection de produit de contraste iodé non neurotoxique.
L'authentification d'une radiculographie, voire souvent d'une épidurographie,
par communication intracanalaire certifie le bon positionnement de l'aiguille.
On injecte ensuite 75 mg d'Hydrocortancyl® au contact du conflit disco-
radiculaire.
Figure 2 ▪ Infiltration foraminale droite par voie postérieure : radiculographie
(flèche) et épidurographie (tête de flèche).
Figure 3 ▪ Infiltration foraminale gauche par voie postéro-latérale :
radiculographie (flèche).

Pour résumé, on privilégie les injections épidurales en cas de hernie


paramédiane ou médiane, en infiltrant au niveau de l'étage conflictuel, et on
privilégie les injections foraminales en cas de hernie foraminale également au
niveau du conflit disco-radiculaire.

Pour réaliser une injection épidurale, il est également possible d'infiltrer le hiatus
sacro-coccygien qui communique avec l'espace épidural. Cette injection peut
se faire cliniquement, mais elle est parfois difficile. On peut donc la réaliser de
façon radioguidée [ 4 ]. La voie sacro-coccygienne ( figure 4 ) offre
l'avantage de réaliser une injection épidurale sans possibilité de syndrome post-
PL. Aucun cas de paraplégie n'a pour l'instant été décrit par cette voie. Mais
elle présente deux inconvénients : la douleur déclenchée par l'épidurographie
est plus importante en raison d'une opacification large de tous les espaces
épiduraux. L'autre inconvénient est la possibilité de fuite de l'injection par les
trous sacrés, ce qui limite la diffusion du dérivé cortisoné à l'étage conflictuel.
L'injection est effectuée avec 125 mg d'Hydrocortancyl®, 10 cm3 de produit de
contraste iodé non neurotoxique et 10 cm3 de sérum physiologique.
Figure 4 ▪ Épidurographie (tête de flèche) après injection par l'hiatus sacro-
coccygien (flèche).

L'efficacité de ces traitements percutanée sur la douleur est le plus souvent


décalée de quelques jours. Il semble admis, dans la littérature médicale, que
l'efficacité de ces infiltrations ne soit qu'à court ou moyen terme sans supériorité
par rapport au placebo à long terme. Elles permettent uniquement de passer le
cap des premières semaines douloureuses.

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▪ NÉVRALGIE CERVICO-BRACHIALE PAR HERNIE DISCALE

Le traitement médical des névralgies cervico-brachiales (NCB) bien conduit


permet la plupart du temps de passer le cap douloureux et d'éviter ainsi tout
geste invasif. En effet, l'injection d'un foramen cervical est plus délicate qu'à
l'étage lombaire en raison de la présence de l'artère vertébrale à proximité du
trou de conjugaison [ 5 ]. Elle n'est donc pas dénuée de risque et le rapport
bénéfice/risque doit être évalué. Rappelons également à ce sujet la toute
récente recommandation de l'AFSSAPS précédemment citée qui faisait
également référence aux infiltrations foraminales cervicales. Il convient donc de
ne réaliser ce traitement qu'en cas de résistance prolongée à un traitement
médical bien conduit et uniquement comme alternative première au
traitement chirurgical en prévenant le patient des risques possibles (quelques
cas de d'ischémie médullaire ont été décrits). Pour cette raison, ces injections
foraminales cervicales doivent être effectuées sous scanner qui permet de
visualiser directement les structures sur des coupes axiales.

Une imagerie exhaustive doit être réalisée avant le geste [ 6 ]. On utilise une
voie d'abord latérale ou antéro-latérale. On peut ainsi réaliser une infiltration à
proximité des hernies paramédianes ( figure 5a ) ou, au mieux, des hernies
foraminales. L'aiguille est positionnée contre l'articulation interapophysaire
postérieure puis glissée de 1 à 2 mm, sous contrôle scannographique, dans le
foramen, du côté où siège le conflit ( figure 5b ). On authentifie sa bonne
position par l'injection de quelques gouttes de produit de contraste iodé non
neurotoxique ( figure 5c ). Cela permet également de s'assurer de l'absence
d'injection dans une structure vasculaire. On réalise ainsi une radiculographie et,
parfois également, une épidurographie permettant d'injecter 50 mg
d'Hydrocortancyl®. Le port du collier cervical est recommandé durant tout le
reste de la période thérapeutique. Récemment, ces injections foraminales ont
été remplacées par des injections sous scanner des articulations
zygapophysaires ou par des injections au contact du massif articulaire qui
permettent une diffusion épidurale et foraminale. Ces injections restent à
évaluer dans le cadre de la NCB mais auraient l'avantage de limiter les risques
de ponction artérielle.

Elles peuvent également être réalisées sous radioscopie [ 5 ] en se fiant aux


repères osseux articulaires postérieurs pour éviter la ponction de l'artère
vertébrale.
Figure 5 ▪ a. Scanner d'une hernie discale paramédiane gauche (flèche). b.
Positionnement de l'aiguille (flèche) dans le foramen gauche sous scanner, à
distance de l'artère vertébrale (tête de flèche). c. Infiltration du foramen par
du produit de contraste iodé (flèche blanche) avec diffusion épidurale (flèche
noire).

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▪ PÉRIARTHRITE CALCIFIANTE SCAPULO-HUMÉRALE

La périarthrite calcifiante est responsable d'une douleur aiguë de l'épaule


s'accompagnant souvent de douleurs nocturnes, secondaires à des dépôts
d'hydroxyapatite dans les tendons de la coiffe des rotateurs. Les tendons le plus
souvent atteints sont le supra-épineux et l'infra-épineux. Les calcifications du
tendon sous-scapulaire ne sont pas rares. Le diagnostic est confirmé par la
présence de calcifications sur les radiographies de face (3 rotations) et de profil.
La plupart du temps, la crise douloureuse peut être gérée par une médication
orale jusqu'à l'évacuation «naturelle» de la calcification.

Parfois, la calcification ne s'évacue pas ou que partiellement et les douleurs


persistent. Il s'agit donc d'une indication à une ponction-évacuation de la
calcification. Celle-ci peut se faire sous guidage radioscopique [ 7 , 8 ] et,
maintenant, sous guidage échographique. Son objectif n'est pas, bien sûr, de
retirer la calcification mais, simplement, de réaliser une fragmentation grâce au
piston de la seringue et, ainsi, d'enclencher une réaction d'évacuation. Ce
geste s'effectue sous anesthésie locale, en positionnant l'aiguille au sein de la
calcification. Ensuite, l'évacuation de la calcification est effectuée par de
multiples petits mouvements de piston dans une seringue remplie de Xylocaïne®
à 0,5 %. Parfois, il est possible d'observer la remontée de «lait calcique» au sein
de l'aiguille et dans la seringue. Une fois la ponction effectuée, on injecte une
ampoule de dérivé cortisoné dans la bourse sous-acromiale en se retirant de la
calcification.

La méthode échographique [ 9 , 10 ] est également extrêmement efficace


avec l'avantage d'être non irradiante ( figure 6 ).

Le contrôle radiologique au bout de 1 mois n'est pas obligatoire mais permet, la


plupart du temps, d'observer l'évacuation de la calcification ( figure 7 ). Dans
notre expérience, il existe 90 % d'excellents résultats cliniques à 1 mois.

Figure 6 ▪ Ponction sous échographie d'une volumineuse calcification du supra-


épineux.
Figure 7 ▪ Volumineuse calcification du supra-épineux (flèche) avant (A) et 3
mois après ponction-évacuation (B) : la volumineuse calcification a quasi
complètement disparu.

On notera que cette méthode de ponction-aspiration de calcification peut


s'appliquer à d'autres localisations tendineuses (tendinopathie calcifiante du
grand glutéal, du moyen glutéal, du grand pectoral…).

La morphologie de la calcification est importante car il est impossible de réaliser


ce geste sur des calcifications poussiéreuses ou de trop petite taille.

La faisabilité du geste est déterminée par le radiologue en fonction de l'aspect


échographique ou radiologique des calcifications tendineuses [ 11 ]. Les
calcifications les plus accessibles sont les volumineux amas calciques visibles sur
les radiographies.

En cas de calcifications poussiéreuses ou d'évacuation partielle de la


calcification dans la bourse sous-acromio-deltoïdienne (BSAD), la ponction de
cette bourse peut s'effectuer sous radioscopie ou sous échoscopie avec une
injection de dérivé cortisoné en intrabursal.

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▪ DOULEUR D'ORIGINE SYNOVIALE

Certaines articulations comme le genou sont facilement infiltrées cliniquement,


d'autres sont plus difficiles d'accès (gléno-humérale, coxo-fémorale). Plusieurs
publications ont démontré la supériorité des ponctions radioguidées ou
échoguidées [ 12 ] par rapport aux infiltrations cliniques lorsqu'il s'agit d'injecter
en intraarticulaire. Les voies d'abord articulaires sont bien connues des
radiologues ( figure 8 ). Les mesures d'asepsie sont très strictes et les
complications graves sont peu nombreuses. La position intra-articulaire de
l'aiguille est authentifiée par injection de produit de contraste iodé en
fluoroscopie et par la bonne position de l'aiguille en échoscopie. Le principe de
ces infiltrations est l'injection intra-articulaire d'un dérivé cortisoné pour réduire
l'inflammation (synovite, hydarthrose). Il est également possible d'infiltrer les
bourses périarticulaires ( figure 9 ), surtout en cas de conflit (par exemple
bourse sous-acromiale à l'épaule) [ 13 ]. Un test anesthésique (xylocaïne à 0,5
ou 1 %) peu être effectué en même temps que l'infiltration de dérivé cortisoné
afin de démontrer l'origine articulaire de la douleur. Ce test anesthésique est
particulièrement utile pour différencier, par exemple, une douleur crurale d'une
douleur sur coxarthrose lorsque la clinique est douteuse.

Figure 8 ▪ Infiltration sous radioscopie d'une articulation tibio-talienne


douloureuse.
Figure 9 ▪ Infiltration sous échographie d'une bourse sous-acromiale.

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▪ CAPSULITE RÉTRACTILE

La capsulite rétractile scapulo-humérale suit une chronologie assez fixe avec les
3 phases classiques :

 phase de début, caractérisée par une douleur intense et durant de 1 à 3


mois ;
 phase intermédiaire, avec installation d'une raideur sans rapport avec la
douleur qui, au contraire, régresse. Cette phase dure de 2 à 6 mois ;
 phase de régression, où la raideur est quasiment le seul symptôme. La
durée globale précédant la restitution d'une indolence et d'une mobilité
normales varie entre 12 et 30 mois. Cette évolution spontanée totalement
favorable n'est pas constante et un faible pourcentage de patients ne
récupère jamais une épaule normale. De plus, le délai de récupération
peut apparemment dépasser 30 mois, surtout dans les cas de diabète
associé.

En fait, la chronologie en 3 phases (phase de début, phase intermédiaire, phase


de régression) est un peu académique et il semble plus pratique pour le
rééducateur de distinguer 2 périodes au cours desquelles la prédominance
relative des paramètres «douleur» et «raideur» guide la stratégie thérapeutique :

 la douleur est au premier plan, permanente, exacerbée la nuit, irradiant


le long du membre supérieur. À ce stade, il faut se limiter à son traitement
symptomatique avec des antalgiques de classe I et II, des anti-
inflammatoires non stéroïdiens, la pose d'une vessie de glace protégée,
voire un coussin d'abduction pendant la nuit. Il faut tenter 1 ou 2
infiltrations de corticoïdes en intra-articulaire en s'assurant d'être
strictement dans la cavité. La kinésithérapie n'a ici pas d'intérêt ;
 après quelques semaines d'évolution, la douleur est toujours la plainte
princi pale mais elle disparaît au repos et ne se manifeste que lors des
mouvements. C'est à partir de ce stade que l'arthro-distension sous
radioscopie présente un intérêt majeur. L'arthro-distension sous
fluoroscopie [ 14 , 15 and 16 ] a pour but de dis tendre la capsule
articulaire, à l'aide d'infiltrations d'analgésique (Xylocaïne® 0,5 %) avec
dérivé cortisoné.

La technique est identique à celle d'une infiltration gléno-humérale simple, sous


scopie :

 une fois l'aiguille en position intra-articulaire (vérification par l'injection de


quelques millilitres de produit de contraste iodé), on injecte très lentement
de 2 à 3 ml de Xylocaïne® 0,5 % puis on relâche le piston, ce qui permet
au liquide de remonter généralement dans la seringue. On répète cette
opération régulièrement 5 ou 6 fois, puis on termine par l'injection du
dérivé cortisoné. Au total, la distension peut aller jusqu'à 15-20 cm3. On
peut répéter le geste jusqu'à 3 distensions à la demande du clinicien,
sachant que la multiplication des injections n'a pas démontré une plus
grande efficacité qu'une seule ;
 si la raideur prédomine et tant que la douleur persiste, l'injection intra-
articulaire de dérivé cortisoné avec distension capsulaire et rééducation
intensive est encore utile. Si la douleur a totalement disparu ou qu'elle
n'apparaît qu'en forçant sur les derniers degrés de mobilisation passive,
l'arthro-distension n'a plus d'intérêt et l'indication d'une mobilisation sous
anesthésie générale peut être discutée. C'est le handicap induit par la
limitation de mouvements qui est alors le facteur essentiel de la décision,
après avoir bien expliqué au patient la lourdeur de la méthode et la forte
probabilité d'une restitution fonctionnelle totale spontanée à condition
d'attendre patiemment de 6 à 12 mois en adaptant les gestes de la vie
quotidienne.

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▪ CONCLUSION

La radiologie interventionnelle peut avoir une place importante dans le


traitement des crises douloureuses aiguës en rhumatologie. Les pathologies
concernées sont essentiellement la hernie discale à l'étage lombaire et à
l'étage cervical.

À l'étage lombaire, les injections sont largement utilisées car elles comportent
peu de risques et permettent une résolution rapide des douleurs à court terme.
À l'étage cervical, l'injection doit être posée avec une extrême prudence en
raison de la proximité des structures vasculaires cervicales.

Les gestes doivent être effectués par un radiologue entraîné pour une
approche précise grâce à la radioscopie et, plus récemment, grâce au
scanner en particulier à l'étage cervical.

Concernant l'épaule, les ponctions des calcifications permettent également de


soulager très rapidement les patients en cas de périarthrite calcifiante. Le geste
peut s'effectuer sous radioscopie et, maintenant, sous échographie avec
d'excellents résultats et une technique peu invasive. La capsulo-distension sera
réalisée sous fluoroscopie en cas de capsulite rétractile et après la phase initiale
uniquement douloureuse (ou l'infiltration gléno-humérale simple et sous guidage
fluoroscopique peut suffire).

Enfin, les infiltrations articulaires ou des bourses périarticulaires qui sont difficiles
d'accès sans guidage seront idéalement réalisées à l'aide de la fluoroscopie et,
depuis peu, de l'«échoscopie».

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RÉFÉRENCES
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Chapitre 14 Place de la Médecine Physique et de la Réadaptation Dans la Prise
en Charge des Pathologies Rhumatismales Inflammatoires

Sandrine SORIOT-THOMAS

Marc SOREL

Vincent SORIOT

Hélène VROLYK

Éric SERRA

Pierre-Louis DOUTRELLOT

Le suivi d'une pathologie rhumatologique inflammatoire, évolutive et entraînant


|une dégradation fonctionnelle, relève d'une prise en charge pluridisciplinaire.
La médecine physique et de réadaptation (MPR) apporte les compétences
d'intervenants multiples tels que le médecin de MPR, les infirmiers de
rééducation, les aides-soignants, les kinésithérapeutes, les ergothérapeutes, les
orthophonistes, les psychomotriciens, les neuropsychologues, les psychologues,
les orthoprothésistes, les podologues, les professeurs de sports APA (activités
physiques adaptées), les diététiciens, les travailleurs sociaux…, amenant
chacun une vision du problème et un savoir-faire.

La place de chacun des intervenants va être définie, ainsi que


l'interdisciplinarité qui en découle pour accompagner le patient tout au long de
sa prise en charge, du diagnostic aux suppléances des déficits.

▪ INTRODUCTION

Le suivi d'une pathologie rhumatologique inflammatoire, évolutive et entraînant


une dégradation fonctionnelle, relève d'une prise en charge pluridisciplinaire.

Du fait de la complexité du diagnostic et de la variété de signes cliniques de


ces pathologies, les patients ont bien souvent eu recours à plusieurs médecins
de spécialités différentes dont les interventions ont été coordonnées par le
médecin traitant référent. L'évolutivité peut aussi nécessiter le recours à la
chirurgie fonctionnelle ou prothétique.

La médecine physique et de réadaptation (MPR) apporte les compétences


d'intervenants multiples, tels que le médecin de MPR, les infirmiers de
rééducation, les aides soignants, les kinésithérapeutes, les ergothérapeutes, les
orthophonistes, les psychomotriciens, les neuropsychologues, les psychologues,
les orthoprothésistes, les podologues, les professeurs de sports APA, les
diététiciens, les travailleurs sociaux…, chacun amenant une vision du problème
et un savoir-faire.

Il est nécessaire d'avoir une conception commune et de mettre en place une


continuité des soins pour les patients et leur famille, au sein d'un centre de
rééducation ou dans des réseaux organisés. L'interdisciplinarité représente la
base de la prise en charge en médecine physique et de réadaptation. Elle
repose sur l'écoute et la compréhension, par l'ensemble des intervenants, de la
signification d'une expérience de vie selon le point de vue du patient [ 1 ]. La
connaissance par tous des déficits, des capacités et incapacités ainsi que des
situations de handicaps permet l'élaboration d'un programme cohérent en
accord avec le projet de vie du patient et, donc, avec ses objectifs.

L'intégration de cette prise en charge dans le cadre le plus large de la


thérapeutique est indispensable. Il faut expliquer au patient qu'il y a
complémentarité et que, tout comme le traitement médical, la prise en charge
rééducative doit s'adapter aux conditions du moment.

Notre propos est ici de présenter les apports de la médecine physique et de


réadaptation dans la prise en charge de ces patients ; il n'est pas de proposer
une «prise en charge type» pathologie par pathologie. Cette prise en charge
doit s'adapter au stade et à l'évolutivité du rhumatisme inflammatoire, prendre
en compte non seulement les douleurs — inflammatoires ou mécaniques -, les
limitations des amplitudes articulaires, les déformations et désaxations
segmentaires, les éventuels troubles sensitivo-moteurs mais aussi les habitudes
gestuelles du patient pour repérer les «mauvais» gestes et dépister les exclusions
fonctionnelles ou le sousemploi qui ont pu progressivement s'installer.

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▪ BILAN INITIAL

Au début de toute prise en charge, un «état des lieux» est nécessaire.

Le travail du médecin est de faire le bilan des déficiences, c'est-à-dire des


atteintes des organes ou de l'altération d'une fonction ou d'une structure
psychologique, physiologique ou anatomique selon la définition de l'OMS [ 2 ]. Il
est important que le patient soit en mesure d'expliquer ses déficits afin de
s'approprier sa pathologie et, donc, de participer activement à sa prise en
charge.

La deuxième étape est de déterminer quelles sont les capacités et les


incapacités résultant des déficiences sus-décrites, c'est-à-dire les limitations
susceptibles d'être rencontrées dans la réalisation des activités de la vie
quotidienne considérées comme normales chez un être humain. Il faut pour
cela reprendre avec le patient la description d'une journée type et des activités
qu'il effectue. Parfois difficile à réaliser après plusieurs semaines d'hospitalisation
et quand le patient arrive en service de MPR, cette étape peut être un peu
retardée pour lui laisser reprendre confiance en soi et se rendre compte, avec
le soutien de l'équipe, de ses capacités (ce qu'il peut faire seul) et de ses
incapacités (ce pourquoi il a besoin d'aide).

Ce constat étant fait, il va falloir ensuite identifier les désavantages ou les


situations de handicap. Ce sont les préjudices qui résultent, dans la situation
réelle propre au patient, des déficiences et des incapacités, et qui limitent ou
interdisent l'accomplissement d'un rôle considéré comme normal compte tenu
de l'âge, du sexe et des facteurs socioculturels. Il est donc nécessaire de
s'informer sur l'entourage, les activités habituelles (domestiques, professionnelles
et de loisirs) et le logement du patient.
Il est important, lors de cette phase de la prise en charge, d'évaluer le
retentissement psychologique d'un tel constat. Le psychologue a ici une place
très importante afin d'évaluer le ressenti du patient face à la mise en évidence
des déficiences, des incapacités mais surtout des situations de handicap qui
jusqu'alors auraient été évitées. Le constat fait par l'équipe pluridisciplinaire
constitue bien souvent une annonce, une «officialisation» du handicap. Le
psychologue va permettre au patient de verbaliser. Il va percevoir les réactions
à ce moment (pouvant aller du déni à la dépression réactionnelle), puis
observer les modifications de comportement. Il sert de relais entre le patient et
les thérapeutes afin d'éviter les incompréhensions (ou les divergences de vue)
et amener à l'équipe la perception du patient.

Le psychologue est là aussi pour amener le patient à envisager l'avenir en dépit


de la possibilité d'aggravation des déficits. Il a également un rôle majeur dans
son accompagnement au travers des différentes étapes de la rééducation. Un
soutien psychologique des membres de sa famille peut s'avérer nécessaire [ 3 ].

Le bilan initial va permettre de centrer le patient au cœur de la prise en charge


et d'élaborer avec lui le programme en fonction des déficiences et des
incapacités qu'il faudra prendre en charge en tenant compte de l'ordre
d'importance qu'il ressent et du retentissement sur sa qualité de vie.

Chaque thérapeute intervenant auprès du patient va également réaliser un


bilan initial standardisé lui permettant d'adapter sa prise en charge en fonction
des objectifs à atteindre. Ce bilan, répété tout au long de la prise en charge,
évalue l'efficacité de celle-ci afin de l'adapter. Les résultats des bilans seront
expliqués au patient et communiqués au reste de l'équipe lors de réunions
pluridisciplinaires et serviront à l'élaboration puis au réajustement du projet
thérapeutique.

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▪ TYPES DE LÉSIONS

Atteintes rhumatismales axiales

Les atteintes du rachis se retrouvent dans les pathologies inflammatoires des


enthèses. Celles-ci sont les zones d'insertion sur l'os des tendons, des ligaments et
des capsules articulaires. Leur atteinte se déroule en trois phases : l'inflammation
puis l'érosion et, enfin, l'ossification (Simon L et al., 1986, 1998).

L'inflammation va se traduire par une poussée douloureuse. La description de


cette douleur va orienter le diagnostic. Classiquement, elle est présente dès la
fin de nuit, s'améliore après un dérouillage matinal pour réapparaître en fin de
journée avec la fatigue. Elle est présente au coucher, avec des recrudescences
nocturnes.

La douleur est le premier symptôme qui amène le patient à consulter. Au stade


précoce, elle est soulagée par les anti-inflammatoires (test diagnostique et
thérapeutique) et les antalgiques. Les poussées inflammatoires sévères contre-
indiquent la prise en charge en kinésithérapie. Le repos transitoire est
souhaitable.
L'enraidissement est secondaire à l'inflammation ; il est dû à l'infiltrat local, au
sous-emploi des muscles puis à leur rétraction. Dans un premier temps, il est
surtout matinal, au lever, et diminue peu à peu dans la journée lors de la
mobilisation. Cliniquement, on retrouve à l'inspection une modification des
courbures rachidiennes physiologiques ; la colonne lombaire est droite et rigide,
la perte de la souplesse rachidienne limite ou empêche les mouvements de
flexion (distance doigt-sol, indice de Schober) et d'inclinaison. On peut souvent
retrouver une cyphose thoracique. À la palpation, les muscles se tendent,
réalisant le signe de la corde de l'arc.

L'apparition d'un enraidissement est habituellement le motif de la première prise


en charge chez le kinésithérapeute, bien souvent avant de rencontrer un
médecin MPR. La douleur, pudiquement dénommée inconfort, est un problème
habituel en MPR et justifie que le kinésithérapeute commence souvent la prise
en charge par de la physiothérapie antalgique. Toutefois, la prise en charge ne
doit pas se limiter à cet aspect passif.

Les techniques de massage à disposition du kinésithérapeute sont très variées [


4 , 5 ]. Elles présentent des propriétés sédatives, décontracturantes et
circulatoires :

 les effleurages et les pressions glissées superficielles à rythme lent sont


ressentis comme apaisants par les patients. Ils ont un effet hypoesthésiant
mais peuvent être douloureux sur certaines cellulalgies ;
 les pressions statiques sont utilisées sur les points de contracture musculaire
afin de relâcher le muscle, ou en regard des troncs veineux pour favoriser
la circulation de retour.
 les pétrissages sont les plus connus. Ils sont plus profonds et lents. Réalisés
en transversal ou en longitudinal par rapport aux fibres musculaires, ils
favorisent la détente des muscles contracturés. Les massages transverses
profonds de Cyriax sont un moyen efficace de lutter contre certaines
tendinites et douleurs ligamentaires. Bien que la technique soit souvent
douloureuse dans son application, l'effet antalgique est obtenu en
quelques minutes et la technique sera modulée selon les réactions du
patient ;
 le décordage correspond bien à ce que son nom évoque. Il va permettre
de travailler sur des contractures très localisées ;
 le palper-rouler est souvent utilisé. Il permet de travailler sur les tissus
adhérents mais il est facilement douloureux et, mal pratiqué, il peut
provoquer des lésions des fibres de collagène ou des capillaires sur des
tissus fragilisés.

Les indications de la kinési-balnéothérapie sont très larges [ 5 , 6 , 7 , 8 and 9 ].


Ses contre-indications se résument à la poussée fluxionnaire, aux déficiences
cardio-respiratoires mal équilibrées, aux déficiences sphinctériennes, aux lésions
cutanées et à l'hydrophobie. Les effets recherchés au niveau musculo-
squelettique sont :

 l'effet décontracturant lié à la température de l'eau ;


 l'effet circulatoire musculo-ligamentaire, par vasodilatation,
augmentation de l'apport d'oxygène et amélioration de l'évacuation des
déchets métaboliques ;
 la diminution de l'œdème ;
 la tonification musculaire modulable ;
 la diminution des contraintes articulaires par un travail en décharge
partielle ;
 l'immersion graduelle pour une mise en charge progressive.

En balnéothérapie, on proposera des exercices de contrôle postural, un


entretien de la souplesse articulaire globale, des postures d'étirement avec prise
de conscience du positionnement du bassin, un renforcement musculaire avec
travail de la chaîne dorsale et du bassin.

Une fois les muscles «relâchés», il faut les entretenir et maintenir la souplesse
articulaire. Le kinésithérapeute va alors enseigner à son patient un programme
d'exercices «d'entretien» adaptés à son évolutivité, qu'il devra poursuivre à
domicile. Ce programme, qui ne doit pas déclencher de douleur, a pour
objectif l'assouplissement, le renforcement musculaire et la correction posturale,
sans oublier la gymnastique respiratoire (notamment spirométrie incitative),
compte tenu du risque d'enraidissement de la cage thoracique [ 10 , 11 and
12 ].

La correction posturale est aussi prise en charge par les ergothérapeutes, qui
adapteront avec le patient la posture en fonction des actes de la vie
quotidienne ou professionnelle, et par les psychomotriciens qui travailleront sur
la composante sensorielle et l'adaptation de posture en fonction du ressenti [ 13
].

L'ossification est responsable des déformations fixées. Typiquement, on retrouve


à l'examen une cyphose thoracique non réductible. L'expansion thoracique est
limitée, responsable avec la cyphose d'un syndrome respiratoire restrictif.

Avant que les déformations ne soient fixées par cette ossification (aboutissant à
la «colonne bambou»), le recours à un corset est envisagé, permettant de
contrôler les courbures, parfois d'obtenir une réduction partielle, pour obtenir
une ankylose en «bonne position» [ 10 , 11 , 14 ].

La mise en place d'une orthèse ne se réalise qu'après explication et


acceptation par le patient car les corsets ne sont pas conçus pour être
confortables. Les appuis recherchent un dégagement actif par le patient lors
des mouvements (respirer, manger, parler.), induisant ainsi un redressement. La
correction maximale sera obtenue en 6 à 12 mois.

La mise en place d'une orthèse ne dispense pas du programme d'exercices


«d'entretien».

Au terme d'une longue évolution, l'indication chirurgicale peut être discutée en


fonction du degré de cyphose et de la gêne fonctionnelle. Mais elle est
exceptionnelle.

Atteintes rhumatismales périphériques

Les atteintes des articulations périphériques sont liées aux pathologies


inflammatoires de la synoviale et à des destructions cartilagineuses, notamment
dans la polyarthrite rhumatoïde. Elles se rencontrent aussi dans les lésions des
pathologies inflammatoires axiales avec atteinte des enthèses du calcanéum,
de la tubérosité antérieure du tibia, de la rotule…

L'atteinte de la synoviale va entraîner une distension de la capsule par


l'épanchement et la synovite : les ligaments, l'articulation et les gaines
tendineuses sont altérés [ 11 , 15 ].

Lors de la poussée aiguë, l'inflammation locale entraîne des douleurs et une


impotence fonctionnelle. À un stade plus évolué, les destructions articulaires
et/ou périarticulaires (rupture tendineuse par exemple) conduisent à une
instabilité ou à un enraidissement responsables d'une impotence fonctionnelle
invalidante.

Les règles d'hygiène articulaire doivent être enseignées le plus tôt possible. Il faut
prévenir le surmenage articulaire. À tous les stades, un entretien fonctionnel de
l'articulation peut être assuré.

Lors des poussées, le traitement est celui de l'inflammation : par voie générale
et/ou par infiltration locale. L'articulation peut être mise au repos à l'aide d'une
orthèse statique en position dite fonctionnelle pour diminuer les risques de
déformation. Si les déformations sont déjà importantes, les orthèses seront
réalisées pour lutter contre cette tendance à la déformation. L'information du
patient sur les indications et les objectifs est indispensable pour obtenir son
accord et donc son adhésion au traitement. Cette immobilisation est limitée
dans le temps, afin de ne pas favoriser d'enraidissement, mais régulière,
notamment en période de poussées [ 14 ]. L'éducation du patient à la mise en
place des orthèses, à leur surveillance et à l'hygiène cutanée est primordiale.
L'état cutané est à surveiller tout particulièrement en cas de troubles de la
sensibilité et de corticothérapie associée.

Dès que cela est possible, on a recours à la kinésithérapie. En dehors des


poussées inflammatoires sévères, les massages ont une action sédative,
décontracturante et circulatoire. On évite les manœuvres agressives pour la
peau ou les structures périarticulaires, notamment les techniques du type
massage transverse profond qui risquent d'entraîner des lésions tendineuses [ 4
].

La physiothérapie telle que l'application de froid trouve sa place en phase


aiguë. La thermothérapie, avec typiquement les enveloppements de paraffine
dans la polyarthrite rhumatoïde, possède un effet sédatif, antalgique et
décontracturant mais elle est responsable d'une vasodilatation qui pourrait
renforcer l'œdème dû à l'inflammation.

La mobilisation articulaire est passive en deçà du seuil douloureux. L'entretien


musculaire se fait par contraction isométrique, sans mobilisation articulaire [ 11 ,
15 ].

On peut rapprocher de cette phase la rééducation après intervention


chirurgicale. La chirurgie peut être proposée pour prévenir une désaxation
évolutive et prévenir une rupture tendineuse, au contact d'une saillie osseuse
(extenseurs sur l'extrémité de l'ulna, par exemple) ou en raison d'une synovite
restant active (indication d'une synovectomie après échec des infiltrations).
L'acte chirurgical peut également être une arthroplastie (métacarpo-
phalangienne, mais aussi des grosses articulations des membres inférieurs)
lorsque l'arthrite est évoluée. Dans ces cas, la première phase de la rééducation
est surtout axée sur la lutte contre la douleur et la récupération progressive
d'amplitudes fonctionnelles (sauf en cas d'arthrodèse), en s'aidant d'orthèses de
repos et d'un appareillage dynamique (pour la main). Une fois passée la phase
initiale, la rééducation reprend les principes d'économie articulaire et le
développement de compensations s'il persiste une limitation d'amplitude. La
rééducation après arthroplastie de hanche ou de genou est «classique», en
tenant compte des atteintes articulaires des membres supérieurs (pour
l'utilisation des aides à la marche notamment).

Entre les poussées, la prise en charge va se concentrer sur le maintien d'une


bonne trophicité musculaire.

Le renforcement musculaire prend des formes variables. En effet, l'atrophie de


sous-utilisation, les atteintes neuromusculaires inflammatoires ou iatrogènes
viennent ici provoquer des déséquilibres entre muscles agonistes et
antagonistes, des rétractions, voire des lésions tendineuses pouvant entraîner
des déformations ostéo-articulaires.

Les contractions isométriques, qui ne génèrent pas de mobilisation articulaire,


sont les mieux adaptées à l'entretien ou au renforcement musculaire. Elles
peuvent donc être proposées assez précocement après une poussée mais ne
doivent pas déclencher de douleurs. L'intensité du travail est alors modulée par
le kinésithérapeute.

L'intérêt ici est de travailler en chaînes musculaires et de faciliter la globalité du


mouvement et les facilitations gestuelles.

L'électromyostimulation peut trouver une place lors des immobilisations


articulaires pour entretenir la trophicité musculaire.

On peut aussi avoir recours aux orthèses dynamiques afin de corriger les
déformations ou, après intervention sur la main, favoriser la récupération plus
rapide d'amplitudes fonctionnelles.

Le travail sur les amplitudes articulaires varie selon le stade de la pathologie. Lors
des premières poussées, il semble possible de récupérer des amplitudes
répondant aux normes arthrologiques mais, la maladie évoluant, le projet sera
de restaurer des amplitudes fonctionnelles utilisées dans la vie quotidienne. La
prise en charge se fera en mobilisation passive, puis active aidée, puis active
avec élaboration d'un programme d'autorééducation à mettre en place au
domicile.

Immédiatement après une poussée, il faudra privilégier les techniques de


«contracter-relâcher» (impliquant la participation du patient) avec gain très
progressif d'amplitude, plutôt que les étirements passifs, souvent douloureux et
mal supportés.
La kinési-balnéothérapie trouve ici aussi sa place. Le patient peut également
s'immerger dans l'eau tiède au moins un quart d'heure dès le lever pour
diminuer le temps de dérouillage matinal.

L'ergothérapie va permettre d'utiliser les préférences et les habiletés du patient


à des fins rééducatives : le travail doit être exécuté en position correcte, sans
geste douloureux ni surmenage articulaire, et participe à l'apprentissage et à
l'automatisation de gestes adaptés [ 12 ].

Les actes de la vie quotidienne sont évalués. Les mesures préventives visant à
diminuer les contraintes articulaires sont enseignées avec éducation gestuelle,
adaptation du milieu et aides techniques [ 16 ].

Au stade de la destruction articulaire, l'articulation perd sa fonctionnalité. De


multiples techniques chirurgicales peuvent être envisagées en équipe
pluridisciplinaire. Les atteintes sont multiples et la chirurgie doit souvent être
itérative. On commence par les «interventions gagnantes», apportant d'emblée
le plus d'antalgie et de gain fonctionnel au patient. On évite ainsi l'abandon du
programme chirurgical tel que cela peut se produire après un geste utile mais
ressenti comme peu efficace sur les douleurs et la fonction.

La rééducation fonctionnelle encadre nécessairement chacune des


interventions chirurgicales. En préopératoire, la kinésithérapie s'applique à
maintenir une bonne trophicité musculaire, à lutter contre les rétractions afin de
faciliter la rééducation postopératoire. En postopératoire, la prise en charge
dépendra du geste réalisé pour restaurer les fonctions altérées.

La chirurgie conservatrice permet l'élimination des tissus pathologiques


(synovectomie après échec des synoviorthèses) ou la réaxation (main et pied
+++). La rééducation postopératoire va permettre en quelques semaines de
rechercher la mobilité articulaire initiale.

La chirurgie prothétique a transformé le pronostic fonctionnel. Au niveau des


membres inférieurs, les prothèses de hanche et de genou permettent au patient
de retrouver une autonomie. La rééducation postopératoire n'a pas de
particularité si le patient a été bien préparé ; en effet, si les muscles ont retrouvé
une bonne trophicité, il n'y a pas d'augmentation du risque de luxation de
prothèse de hanche. À long terme, il existe un risque de descellement du fait de
l'ostéoporose corticoinduite. La rééducation est un temps qui doit permettre
également une éducation alimentaire et l'enseignement des règles d'activité
régulière.

Au niveau des membres supérieurs, les prothèses d'épaule donnent des résultats
de plus en plus satisfaisants. Les prothèses de coude et de poignet, en cours
d'évolution, semblent avoir un avenir prometteur. Les implants en Silastic sont
encore utilisés au niveau des métacarpo-phalangiennes et des
interphalangiennes proximales des doigts mais tendent à être remplacés par
des prothèses [ 15 , 17 , 18 ].

La chirurgie comprend aussi les arthrodèses, permettant de restaurer indolence


et stabilité sur une articulation, au prix d'une perte de mobilité ; elles sont surtout
réalisées au niveau des pieds et des articulations distales des doigts, mais aussi
des poignets.

Après un certain temps d'immobilisation, il faut ensuite apprendre au patient à


marcher avec un pied fixe. L'indication de la chirurgie ne sera retenue qu'après
échec du traitement orthopédique et l'adaptation de chaussure orthopédique.

Pour les interventions sur la main, les ergothérapeutes travaillent les actes de la
vie quotidienne avec des articulations fixées (développement des
compensations).

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▪ DÉFICITS FONCTIONNELS

Les déficits fonctionnels relèvent des difficultés à effectuer des gestes dans leur
globalité, secondaires aux atteintes articulaires, musculaires…

Chez les patients atteints de pathologie évolutive dégénérative, le maître mot


est l'économie articulaire. Il est de notre mission d'éduquer les patients à
l'ensemble des mesures visant à réduire les contraintes subies par l'appareil
locomoteur au cours des activités. Le but thérapeutique est prophylactique ou
palliatif.

L'évolution de la maladie avec l'aggravation des déficits fonctionnels rend


visible la maladie. La mise à disposition d'aides techniques nécessite de
consacrer du temps pour présenter puis faire essayer ces aides afin d'éviter un
investissement sur du matériel qui ne sera ensuite pas utilisé car ressenti comme
un «stigmate» de la maladie.

Troubles de la déambulation

La marche bipodale est la manière «normale» de se déplacer de l'être humain


adulte. Les anomalies de la marche sont nombreuses. Elles ne sont pas
uniquement dues à l'atteinte des membres inférieurs même si, bien souvent,
elles sont en cause.

Les perturbations du schéma de la marche entraînent des compensations


motrices et posturales anormales et nécessitent parfois l'utilisation d'aides à la
marche. Dans les affections rhumatoïdes, douleur et attitudes vicieuses sont les
causes principales de l'altération de la marche [ 19 , 20 ].

Les aides techniques sont fort utiles pour les déplacements à l'intérieur comme à
l'extérieur car elles permettent de décharger tout ou partie du poids du corps.
Elles doivent être bien réglées, adaptées à la morphologie du patient et à son
degré de handicap, en particulier aux atteintes des membres supérieurs. Elles
nécessitent un minimum d'apprentissage en vue de leur utilisation. Elles ne
doivent pas être remises au patient sans apprentissage.

Il n'y a pas de hiérarchie entre ces aides et leur utilisation dépend des déficits
lors de la mise en place [ 16 ] :

 les attelles et les chaussures orthopédiques vont aider au positionnement


des membres. Il existe des modèles standardisés dans le commerce mais,
bien souvent, nous avons recours au «sur-mesure» ;
 les attelles de genou peuvent aider au maintien en position fonctionnelle
et à la stabilisation ;
 les chaussures orthopédiques sont fabriquées de manières artisanales par
les podo-orthésistes. Chaque chaussure est faite sur mesure et adaptée
au pied du patient ; elle propose donc une réponse adaptée,
individuelle. La prescription doit être détaillée, fondée sur l'examen
clinique et des essais seront réalisés en cours de fabrication. Ces
chaussures sont prises en charge par la Sécurité sociale dans la catégorie
du «grand appareillage» [ 21 ].

L'importance de l'appareil de marche est souvent proportionnelle au déficit et


un appareil trop complexe donne rarement un bon bénéfice fonctionnel :

 la canne simple et la canne tripode. Ces cannes sont peu encombrantes


et leur efficacité est liée à la force de préhension manuelle. Elles
permettent une meilleure stabilité de la marche par élargissement du
polygone de sustentation et une réduction de la charge sur les membres
inférieurs ;
 les béquilles. La béquille est au contact du corps en 2 endroits (canne
anglaise, canne à appui axillaire, canne à appui anté-brachial). Ce
double appui permet un meilleur contrôle et génère une force d'appui au
sol plus importante. Les schémas de marche sont variables en fonction
des déficiences et des capacités (ou des incapacités) des membres
supérieurs ;
 les déambulateurs cadre, fixe et à roulettes (rollator). Ils procurent au
patient un appui au sol quadrangulaire avec un appui le plus souvent par
les mains, plus rarement par les avant-bras ou les aisselles. La marche se
fait avec une modification de la ligne de gravité le plus souvent vers
l'avant. Ils sont proposés, parfois de façon transitoire, dans les cas de plus
grande instabilité, quand les autres aides à la marche apparaissent
insuffisantes ou inadaptées ;
 le fauteuil roulant manuel ou électrique. On a recours au fauteuil quand
la marche n'est plus possible ou trop fatigante. Le choix du fauteuil se fera
après évaluation par des ergothérapeutes et des essais seront au mieux
réalisés en centre de rééducation. Le fauteuil électrique sera proposé
lorsque le patient est incapable d'assurer lui-même sa propulsion ou pour
préserver des membres supérieurs douloureux. Il sera prescrit par un
médecin MPR après évaluation et essais concluants.

Le recours à la chirurgie doit se faire avant la perte complète de la fonction.

La mise en place d'une prothèse sera bien évidemment suivie d'une prise en
charge en centre de rééducation afin de corriger les «mauvaises habitudes»
mais aussi d'éviter la surutilisation des autres articulations et d'adapter les aides
en fonction des progrès.

Troubles de la préhension

La préhension est la faculté de fixer puis de mouvoir volontairement un objet


par rapport au corps et à l'environnement [ 22 ]. Elle met en œuvre l'ensemble
du membre supérieur avant, pendant et après la prise en main.

Les atteintes de la préhension sont lourdes de conséquences sur le plan de la


vie courante et socioprofessionnelle mais aussi sur le vécu du patient.

Rares au cours des rhumatismes axiaux, les perturbations de la préhension sont


fréquentes dans la polyarthrite rhumatoïde. Elles sont dues aux douleurs, aux
déformations classiques (doigt en boutonnière, col-de-cygne, pouce en Z,
déviation radiale du carpe…), parfois aux troubles de la sensibilité par
compression du nerf médian ou dans le cadre d'une myélopathie compliquant
une instabilité occipito-cervicale.

Les formes prises par la main et les structures anatomiques mises en jeu au cours
de la préhension ont donné lieu à de nombreuses classifications.
Schématiquement, il existe plusieurs types de prises [ 23 ] :

 les prises bidigitales (pouce-index, pouce-médius, interdigitales). Chacune


de ces prises peut être terminale (précise : aiguille), pulpaire (ferme :
crayon) ou latérale (forte) ;
 les prises polydigitales (pinces tridigitales, tétradigitales ou pentadigitales
utilisées pour prendre des objets volumineux à tenir fermement) ;
 les prises proximales du type digito-palmaire ou en pince-crochet
permettant de prendre des objets volumineux et en force (sac, valise…).

Les mains déficitaires peuvent aussi servir en prises d'appoint, en assurant un


contre-appui.

Les ergothérapeutes évaluent chacune de ces prises et, en cas de déficit, ils
peuvent mettre à la disposition des patients des aides techniques ou des aides
à la préhension (grossissement de manche, bracelet métacarpien, poignée,
attelles, pince à long manche, aimant…). On peut aussi utiliser un dispositif de
stabilisation du type tapis antidérapant, butée, planche à clous, ventouse, serre-
joint… ou des dispositifs de transfert de force et de prolongation (long manche,
crochet, clé…). Le but de ces adaptations est d'améliorer la tenue ou la
manipulation de l'objet tout en respectant les règles d'économie articulaire,
notamment en évitant les pinces termino-latérales (prise d'une clé) et les prises à
pleine main en déviation radiale des doigts (ouverture d'un bocal, par
exemple), qui favorisent les désaxations métacarpo-phalangiennes [ 24 ].

L'appareillage peut-être réalisé dans un contexte de prévention, de


rééducation ou de réadaptation.

Les orthèses fixes permettent de maintenir une articulation au repos (antalgie,


cicatrisation…), de la stabiliser (empêcher l'installation d'un déséquilibre
articulaire ou suppléer une fonction défaillante) ou de la posturer (correction
d'une position vicieuse, positionnement pour faire face à une séquelle
définitive).

L'utilisation d'orthèses dynamiques va aider au positionnement articulaire en


étirant progressivement l'articulation considérée ; moins douloureux que le
positionnement en orthèse fixe, cet appareillage permet d'adapter
progressivement les contraintes en fonction de l'évolution et du but fixé. En
revanche, sa mise en place est souvent plus délicate et les orthèses les plus
encombrantes ne sont pas utilisables dans la vie courante.

On retrouve aussi les orthèses de substitution de fonction.

Tout appareillage nécessite un suivi régulier avec vérification de l'efficacité et


une adaptation à l'évolutivité [ 11 ].

Les préhensions interviennent dans différentes capacités :

 porter la main à la bouche est un bon indicateur de la capacité à


s'alimenter ;
 couper la viande, tartiner ou remplir un verre en sont d'autres ;
 porter la main au-dessus de la tête permet d'évaluer la capacité à se
coiffer ;
 faire sa toilette ou s'habiller nécessite de porter la main dans le dos, sur
tout le corps et d'effectuer des préhensions en dehors du champ visuel ;
 écrire…

Ces gestes fonctionnels complexes sont altérés non seulement par les arthrites
digitales mais aussi lors d'atteintes de l'épaule ou du coude [ 23 ].

Ces activités sont rééduquées en fonction des besoins, des possibilités et des
priorités du patient.

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▪ ADAPTATION D'ENVIRONNEMENT

L'adaptation du domicile est un objectif primordial lors de la prise en charge


d'un patient handicapé. L'objectif est de faire en sorte qu'il ne soit pas en
situation de handicap dans son environnement.

Les ergothérapeutes sont les thérapeutes de l'adaptation : choix des aides


techniques, adaptation du domicile et du matériel utilisé au cours des activités
de la vie quotidienne, du véhicule, du poste de travail [ 13 ]…

Dès l'arrivée dans le service, les ergothérapeutes viennent installer le patient au


lit puis au fauteuil. Leur rôle est d'adapter le matériel à ses besoins : sonnette,
télécommande, téléphone, voire commande de l'éclairage…, de choisir le
matelas du lit et les coussins de positionnement, d'adapter le fauteuil : coussin,
dossier, roues, propulsion manuelle ou électrique (joystick manuel).

Les aides techniques évolueront pour s'adapter à l'évolution des déficits et de la


maladie (avec un caractère d'«officialisation» de l'aggravation et de possibles
conséquences psychologiques, qui seront évaluées par les psychologues).
Cette évolution doit donc être précédée d'explications au patient.

Le temps venu, il faut préparer au centre de rééducation ce que pourra être la


vie au domicile (alors qu'il y aura moins d'aides et de soutien). La première
étape est la visite à domicile qu'effectuent l'ergothérapeute et l'assistante
sociale avec le patient, en présence de son entourage. Une connaissance du
lieu de vie permet de proposer des adaptations réalistes en plus d'être
fonctionnelles ; l'assistante sociale monte avec le patient et son entourage le
dossier à la recherche d'aides financières appropriées au projet.

Quand cela est possible, on réfléchit avec les médecins du travail à


l'adaptation du poste de travail. C'est une étape parfois bien compliquée
(malgré les lois…) qui nécessite une réelle volonté de l'employeur d'intégrer le
patient dans son entreprise. Cette reprise du travail est évaluée non seulement
en fonction d'un poste de travail mais aussi en tenant compte des
déplacements et des capacités du patient à conduire son véhicule par
exemple. Dans les cas difficiles, une réinsertion progressive passera par un «mi-
temps thérapeutique», permettant d'évaluer les problèmes encore rencontrés
et d'envisager les solutions à y apporter. Toutefois, la mise en invalidité ne peut
parfois pas être évitée, à un stade évolué de la maladie. Un dossier sera
adressé, avec l'accord du patient, à la Maison départementale de la personne
handicapée (ex-Cotorep) pour instruire les demandes d'allocations éventuelles
(allocation aux adultes handicapés [AAH] notamment selon le taux d'invalidité,
tierce personne) et de reconnaissance comme travailleur handicapé. La reprise
professionnelle s'avère parfois difficile ou s'accompagne d'une modification de
l'activité avec perte de salaire.

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▪ CONCLUSION

La prise en charge des patients présentant une pathologie rhumatologique


inflammatoire, évolutive et entraînant une dégradation fonctionnelle relève de
la pluridisciplinarité. Le rôle de l'équipe thérapeutique est de les accompagner
afin qu'ils vivent la vie qu'ils auront choisie en mettant à leur disposition les
moyens existants. Il est aussi de les guider en leur expliquant les moyens
thérapeutiques, mais aussi l'évolutivité de leur maladie, en évitant les
informations inappropriées ou prématurées.

La prise en charge pluridisciplinaire permet l'élaboration d'un programme


thérapeutique plurimodal selon les différents axes thérapeutiques en MPR :
corporel, psycho-comportemental, social et médicamenteux [ 3 ].

Les associations de malades, de plus en plus présentes, sont un relais utile dans
l'information délivrée au patient. Comme les groupes d'éducation, elles
permettent aux patients de se connaître, de rompre leur isolement et d'assurer
entre eux la transmission des recommandations et la connaissance des filières
de soins.

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RÉFÉRENCES
[1] Boulanger YL, Staltari G, Proulx P, Zander K, Feyz M, Tinawi S. Rééducation-
réadapta tion et interdisciplinarité. Encycl Med Chir (Elsevier, Paris)
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[2] OMS. Classification internationale des handicaps : déficiences, incapacités
et désavantages. Un manuel de classification des conséquences des maladies.
Paris : CTNERHI-INSERM, 1988. Cité ici

[3] Serra E, Soriot-Thomas S, Aquaviva C. Approche comportementale de la


douleur. In : Pelissier J, Viel E (eds). Douleur et soins en médecine physique et
réadaptation. Montpellier : Sauramps Médical, 2006 : 44-50. Cité ici

[4] Dolto B. Le corps entre les mains. Paris : Maloine, 1981. Cité ici

[5] Dufour M. Massages. Encyl Med Chir (Elsevier, Paris) Kinésithérapie-Médecine


physique-Réadaptation 1996 ; 26-100-A-10 : 32 p. Cité ici

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Chir (Elsevier, Paris) Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation 1998 ; 26-
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[7] Brun V, Hérisson C, Codin P. L'hydrothérapie en médecine de rééducation :


pourquoi, comment ? In : Hérisson C, Simon L (eds). Hydrothérapie et
kinésithérapie. Paris : Masson, 1987 : 1-12. Cité ici

[8] Enjalbert M, Hérisson C. Hydrothérapie et spondylarthrite ankylosante In :


Hérisson C, Simon L (eds). Hydrothérapie et kinésithérapie. Paris : Masson, 1987 :
112-114 Cité ici

[9] Esnault M. Rééducation dans l'eau, étirements et renforcement musculaire


du tronc et des membres. Paris : Masson, 1991. Cité ici

[10] Revel M, Poiraudeau S, Lefevre-Colau MM, Rabourdin JP, Ghanem N,


Mayoux-Benhamou MA et al. Rééducation dans la pelvispondylite
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physique-Réadaptation 2002 ; 26-291-A-10 : 12 p. Cité ici

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[12] Falenbach A, Tripathi R, Minne F, Stepan E, Wigand R. Analyse du


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[14] Sautreuil P, Fodé P Orthèses. In : Held JP, Dizien O (eds). Traité de médecine
physique et de réadaptation. Paris : Flammarion, 1998 : 279-310. Cité ici

[15] Courtillon A, Fourastier J, Noel D, Perdriger A. Polyarthrite rhumatoïde de


l'adulte. Rééducation fonctionnelle et stratégie de réadaptation. Encyl Med
Chir (Elsevier, Paris) Kinésithérapie-Rééducation fonctionnelle 1993 ; 26-290-A-10 :
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[16] Joseph PA, Daverat P. Indépendance et activités de la vie quotidienne. In :


Held JP, Dizien O (eds). Traité de médecine physique et de réadaptation. Paris :
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traumatiques de la main Encycl Med Chir (Elsevier, Paris) Kinésithérapie-
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[20] Gras P, Casillas JM, Dulieu V, Didier JP. La marche. Encyl Med Chir (Elsevier,
Paris) Kinésithérapie-Rééducation fonctionnelle 1996 ; 26-013-A-10, 18 p. Cité ici

[21] Brunon A, Maitre M, Petiot S, Romain M, Pélissier J. Chaussures


orthopédiques. Encycl Med Chir (Elsevier, Paris). Kinésithérapie-Médecine
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[22] André JM, Martinet N. Préhension. In : Held JP, Dizien O (eds). Traité de
médecine physique et de réadaptation. Paris : Flammarion, 1998 : 110-8. Cité ici

[23] Delpart J, Ehrler S, Romain M, Xenard J. Bilan de la préhension. Encycl Med


Chir (Elsevier, Paris) Kinésithérapie-Médecine physique-Réadaptation 2002 ; 26-
008-D-20 : 16 p. Cité ici

[24] Xénard J, Gable C, Galas JM, Pétry D, Gavillot-Boulangé C, Beltramo F et al.


Orthèses de main. Encyl Med Chir (Elsevier, Paris) Kinésithérapie-Rééducation
fonctionnelle 1994 ; 26-161-C-10 : 11 p. Cité ici

À lire :

Simon L, Hérisson C. Polyarthrite rhumatoïde. Traitements locaux et


réadaptation. Paris : Masson, 1986.

Simon L, Hérisson C. Spondylarthrite ankylosante (pelvispondylite rhumatismale).


In : Held JP, Dizien O (eds). Traité de médecine physique et de réadaptation.
Paris : Flammarion, 1998 : 506-14.
Chapitre 15 Abord Par la Sophrologie de la Douleur Chronique

Carole IRIS

Marc SOREL

▪ AVANT-PROPOS (PAR LE DR JEAN-PIERRE HUBERT)

Qu'est ce que la douleur ? Peut-on prétendre encore aujourd'hui avoir répondu


à la question ?

Elle nécessite au moins trois relais : la moelle épinière, le thalamus et le cortex.


Mais elle ne peut pas être que physique car elle met aussi en question le
psychisme et l'affectivité. C'est ainsi que tout concorde pour dire que c'est un
système vital de réaction dont l'existence est fondamentalement nécessaire à
la survie, à la conservation de l'être et de l'espèce. La préparation et la
résolution de toute conduite entraînent l'ombre de la douleur : l'émotion. Le
jumelage émotion-douleur participe de tout le système nerveux central, le
message étant toujours le même dans le cadre de la sensation perception
définie particulièrement par Maurice Merleau-Ponty.

C'est dire que la sophrologie s'inscrit dans cet ensemble car la douleur, n'ayant
pas d'excitants communs, n'est pas spécifique.

La douleur s'apprend.

Un sujet trop élevé dans un système de protection n'a pu acquérir d'expérience


au cours de sa vie et ne peut appréhender justement la condition humaine et
celle qui lui est propre. Si bien que l'intensité de la douleur est chose totalement
personnelle sans possibilité d'établir un critère moyen.

Une contracture, par exemple, augmentera la douleur qui se trouvera elle-


même accrue par la peur qui l'accompagne.

On pourra en même temps remarquer que la distraction la dévie en fonction du


terrain mental d'accueil et que la névrose peut la transformer. Toujours en
rapport avec le terrain psychosomatique de chacun, la volonté sollicitée par un
protocole pourra aussi aider à supporter telle ou telle intensité douloureuse.

Simultanément, interviennent l'ethnie et sa culture, la réception à la suggestion


(comme en hypnose), l'imagination plus forte encore que la volonté, le sexe,
l'éducation, le facteur social et l'âge.

La réception-sensation emploie le circuit message → thalamus → cerveau →


réflexe → enregistrement conscient → inconscient.

L'avantage de la sophrologie est d'abord de laisser passer un message, tous les


réflexes s'inscrivent normalement dans l'espace de la sensation, la
déconnexiontransformation se réalisant entre le thalamus et le cortex.

Par ses protocoles et son «entraînement corps-esprit», la sophrologie traite la


douleur soit comme seul moyen, soit comme moyen adjoint à l'allopathie, à la
chimiothérapie comme à la naturothérapie.
Ce qui n'est pas négligeable est qu'elle permet de considérer l'anxiété,
l'angoisse et les manifestations neurovégétatives associées. Elle agit ainsi en
prévention dans le tableau classique douleur-anxiété-dépression. Et
inversement, grâce à la sophrologie, la douleur paradoxalement n'est plus utile
pour juguler une partie de l'angoisse.

J'ai le plaisir de cautionner l'excellent chapitre de Carole IRIS qui nous enrichit
de toutes ses connaissances en la matière nées d'une longue expérience.

Je l'en remercie et souligne tout le succès qu'elle mérite.

La douleur est un phénomène complexe qui fait intervenir tous les aspects de
l'individu depuis le neurophysiologique jusqu'au socioculturel en passant par le
psychologique et le spirituel.

Le sophrologue s'intéresse plus au malade qu'à la maladie et dès le départ,


grâce à la collaboration des différentes disciplines proposées au sein de
l'équipe du Centre d'évaluation et de traitement de la douleur, il va pouvoir
installer un climat de confiance et de franchise avec son patient.

Le travail en sophrologie va consister à donner rapidement au patient des outils


fondés sur l'apprentissage de la respiration et de la sophronisation de base qui
vont lui permettre de s'entraîner et, déjà, de stabiliser voire d'améliorer sa
symptomatologie.

Cette «sophrothérapie» peut être associée avec d'autres thérapeutiques y


compris médicamenteuses, ce qui permet de renforcer les processus
physiologiques de guérison.

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▪ INTRODUCTION

La douleur fait partie des éléments qui, dans la vie d'un homme, vont jouer un
rôle important dans le développement de sa personnalité. On ne peut résumer
aujourd'hui la douleur au simple message nociceptif. Elle fait intervenir, en tant
que construction neurologique et mentale, tous les aspects de l'individu du
neurophysiologique jusqu'au socioculturel en passant par le psychologique et le
spirituel.

Au-delà de la démarche thérapeutique classique qui considère comme


guérison l'absence de symptôme, émerge donc la nécessité d'aborder le
douloureux chronique dans toutes ses dimensions à l'écoute du langage qu'est
l'expression de sa souffrance physique, physiologique, verbale.

Le traitement par les techniques de sophrologie va permettre à l'individu de ne


plus se vivre comme «malade qui subit», mais d'entrer dans une démarche
active avec le médecin qui lui donne des outils pour une rééquilibration de son
corps physique et mental.

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▪ DÉFINITION DE LA SOPHROLOGIE ET SON ORIGINE


Étymologiquement, le mot sophrologie a une triple racine :

 «sos», harmonie, sain, équilibre ;


 «phren», esprit, enveloppe du cœur, conscience ;
 «logos», étude, science, discours.

C'est donc la science de l'harmonie de la conscience de l'être dans un but de


sérénité. Elle définit tout à la fois une science, une philosophie, une
thérapeutique et un art.

Son propos est l'étude phénoménologique théorique et pratique de tous les


moyens psychologiques, physiques, chimiques et physiologiques capables
d'agir sur la conscience humaine et de la modifier.

L'école sophrologique instaurée dès 1960 par le professeur Alfonso Caycedo,


neuropsychiatre espagnol d'origine colombienne, a su jeter un pont entre
l'Occident et l'Orient en intégrant aussi bien des techniques issues du yoga et du
bouddhisme zen et tibétain que les données psycho-pharmacologiques
modernes ainsi que les travaux sur l'hypnose et la phénoménologie
psychiatrique.

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▪ OBJECTIFS DE LA SOPHROLOGIE

Les méthodes sophroniques peuvent s'appliquer dans trois champs principaux,


selon l'objectif poursuivi avec le patient :

 thérapeutique, en abordant les thèmes suivants :


 les phobies, attaques de panique,
 les troubles du sommeil,
 les troubles du comportement (abus médicamenteux, tabac,
toxicomanie, alcool, boulimie, anorexie…),
 la gestion du stress, de la fatigue, de la dépression,
 les pathologies respiratoires (asthme, dyspnée…),
 la gestion de la douleur,
 les soins palliatifs divers,
 l'accompagnement fin de vie, les deuils ;
 pédagogique, par :
 l'entraînement sportif et la récupération après l'effort,
 la préparation aux examens, aux épreuves,
 la préparation à l'accouchement en gynéco-obstétrique,
 les échanges sociorelationnels dans l'environnement professionnel ;
 analytique. La méthode consiste à faire un cursus analytique didactique
ou thé rapeutique en bénéficiant de la voie sophronique qui sert dans ce
cas de départ et de support à l'analyse. Cette technique ne peut être
utilisée que par des thé rapeutes rompus à l'analyse classique et à la
psychologie des profondeurs.

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▪ MODE D'ACTION
Le processus qui mène à la modification des niveaux de la conscience humaine
afin d'obtenir un état particulier, dit sophroliminal, se nomme «sophronisation de
base» (SB). Celle-ci n'est pas une thérapie en elle-même ( figure 1 ). Elle est
l'état de détente, état sophroliminal nécessaire pour agir sur la conscience par
«activation intrasophronique». Cette activation intrasophronique est un espace
de travail, processus clé où l'on place la suggestion appropriée, la technique
proprement sophrologique.

Figure 1 ▪ Comment ça marche ? La sophronisation de base (d'après Hubert et


Abrezol [ 1 ]).

Soulignons le fait que la sophrothérapie peut être combinée avec n'importe


quelle thérapeutique médicamenteuse ou non puisqu'elle peut être utilisée
pour renforcer l'action pharmacologique en dynamisant les processus
endogènes physiologiques participant à la guérison.

Pour amener le patient à cet état de détente sophroliminal, le praticien utilise


différents types d'induction :

 induction anatomique, on évoque le relâchement d'une partie du corps :


«Vous relâchez votre front…» ;
 induction dans la sensation-perception :
 respiration : «Prenez conscience de l'air qui entre et qui sort du
corps»,
 sensation : «Accueillez les sensations de pesanteur ou de légèreté,
de chaleur ou fraîcheur» ;
 induction imagée : «Votre cerveau se met au repos, se détend comme
une éponge qui s'épanouit».
Ces indications sont toujours émaillées de «peut-être» ou complétées par : «Ou
bien vous avez une tout autre sensation» afin que le sujet vive une détente la
plus personnelle possible, la moins normalisée, car nous pouvons déjà, à ce
stade, constater des difficultés pour certains à lâcher prise.

Il est important aussi de laisser des temps de silence dans notre discours
d'accompagnement afin que le sujet ait «le temps de vivre la situation».

En effet, le niveau sophroliminal (NSL) est cette situation privilégiée particulière


où s'engage un dialogue entre esprit et corps, où l'esprit, la conscience, se met
à l'écoute du corps.

Dans l'entraînement sophrologique :

 le corps est nommé partie par partie par le praticien pendant la partie
physique de la sophronisation de base, puis le patient situe ces parties, les
reconnaît et les rassemble pour vivre son corps dans son unité ;
 le corps est perçu, senti. Cette conscience des sensations nous permet de
construire notre schéma corporel, c'est-à-dire la représentation mentale
de notre corps et, en sophrologie, on privilégiera les sensations positives ;
 le corps est vécu, c'est la mémoire historique du corps perçu avec ses
efforts, ses incidents, maladies, douleurs, accouchement ;
 le corps est exprimé ; la corporalité, c'est le phénomène de la conscience
en train de se vivre au niveau du corps.

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▪ MÉTHODES ET TECHNIQUES SOPHROLOGIQUES (figure 2)

On distingue en gros deux groupes de techniques :

 les techniques recouvrantes, qui vont tenter de s'adresser au symptôme ;


 les techniques découvrantes, qui tendent à rechercher les causes
profondes.
Figure 2 ▪ Organigramme des technques (d'après Hubert et Abrezol [ 1 ]).

Nous citerons, sans les développer pour l'instant, pour le propos présent,
quelques noms de techniques de relaxation dites de descente pour atteindre le
NSL :

 la sophronisation de base ;
 le training autogène (TA) de Schultz ;
 la relaxation dynamique (RD).

Puis, en phase d'activation intrasophronique, il y a les techniques recouvrantes


adaptées au besoin de notre patient :

 la sophro-acceptation progressive (SAP) ;


 la technique conditionnée (TC) ;
 la technique de focalisation (TF) ;
 la sophro-substitution sensorielle (SSS) ;
 la psychoplastie sophronique (PS).

Toutes ces techniques nécessitent au préalable un éveil et une prise de


conscience de la respiration.

Respiration

La fonction respiratoire est à la base de la faculté de modification de nos états


de conscience et à la base du développement de nos capacités
psychologiques.

Il n'y a pas d'état de relaxation sans pédagogie de la relaxation.

L'oxygène est indispensable à la vie. Notre capacité pulmonaire se situe entre


3,5 et 5 litres et l'homme civilisé n'en utilise que 0,5.

Le cerveau accapare plus de 30 % de l'oxygène inspiré et le cerveau est sollicité


à 8 % seulement de ses capacités.

La respiration, c'est la vie, énergie de vie, et elle possède donc un pouvoir


régénérant immédiat. ( figure 3 ).

Figure 3 ▪ La respiration.

L'apprentissage de la respiration s'effectue au niveau abdominal, puis


thoracique et, enfin, cérébral. Cet apprentissage est très progressif et dissocie
au début chaque étage du corps pour arriver à une bonne détente du
diaphragme. Puis vient l'acquisition de la respiration complète réunissant les trois
niveaux.

Les techniques de respiration peuvent être développées :

 selon que l'on recherche un effet apaisant ou dynamisant de la


respiration ;
 dans l'exercice de gestes respiratoires durant la relaxation dynamique
essentiellement.

Relaxation dynamique
C'est une méthode d'entraînement souvent utilisée en groupe à titre
prophylactique mais aussi thérapeutique, qui condense en une synthèse
originale certains procédés d'activation psychophysiques issus de pratiques
orientales.

Il y a un axe d'entraînement propre à la sophrologie avec plusieurs degrés


d'évolution qui visent à un renforcement des structures de l'être, d'où la notion
d'homme «total» dans sa dimension corporelle, dans sa dimension affective et
dans sa dimension mentale, spirituelle, existentielle ( figure 4 ). A. Caycedo a
présenté cette méthode comme étant fondée sur l'éveil de trois fonctions
neurophysiologiques éprouvées expérimentalement :

 la respiration et ses modulations :


 lente ou rapide,
 avec temps de rétention poumons pleins ou vides ;
 l'alternance de tension et de détente des muscles et des articulations qui
amène un éveil des récepteurs sensitifs ;
 le schéma corporel.

Figure 4 ▪ Relaxation dynamique : l'homme «total» (d'après Hubert et Abrezol [ 1


]).

La relaxation dynamique du premier degré réveille la sensation de corps global


surtout pendant les périodes de récupération où la conscience peut goûter
l'écho de l'activité musculaire dans le corps.

Il y a une mise en évidence des zones de tension ou de blocage qui cèdent ou


qui résistent.
Il s'agit de suivre un protocole bien défini de postures et gestes respiratoires dans
un apprentissage très progressif respectant le rythme de chaque individu.

Dans son premier degré d'évolution, la relaxation dynamique (RD) s'attache à


restructurer l'étage physique de l'être. On fait l'expérience, en état sophronique,
de pratiques issues du yoga hindou. Il s'opère une intégration douce et
progressive du schéma corporel interne tout en mobilisant les capacités de
concentration.

Le passage au deuxième degré de la relaxation dynamique ne peut se faire


que si l'étage physique est stabilisé. Il s'agit là d'un travail à l'étage affectif,
émotionnel avec une intégration du schéma corporel externe et de l'image du
corps. La posture est assise avec une approche sophronique de techniques
bouddhistes tibétaines.

Dans le troisième degré de la RD, l'objectif poursuivi est l'intégration la plus


harmonieuse possible de l'individu dans cette totalité indivisible qu'est le cosmos
en reprenant un postulat fondamental du zen japonais : le cosmos forme un
tout indivisible. Cela à l'aide de la méditation qui tend à amener l'individu à
faire l'expérience, la recherche de fusion entre soi et l'environnement.

Le troisième degré est à un niveau post-thérapeutique et n'est donc que


rarement proposé en centre de soins. D'un point de vue didactique, pour
obtenir cette «fusion», il est indispensable d'avoir dépassé les problèmes de mise
en ordre physique et affective.

La seule pratique des premier et deuxième degrés peut déjà ramener l'individu
sur un chemin d'harmonie.

Nous n'entrerons pas dans le détail de ces différentes relaxations dynamiques


dans un souci de synthèse.

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▪ LA DOULEUR ET SON EXPRESSION

La douleur est une construction neurophysiologique et mentale qui fait intervenir


tous les aspects de l'individu depuis le neurophysiologique, l'affectif, le
psychologique et le socioculturel jusqu'aux confins du spirituel. Il est important
de différencier :

 la nociception, qui est la sensation neurophysiologique d'une agression


tissulaire ;
 la douleur, qui est la perception consciente d'une agression physique ou
psychique qu'elle soit réelle ou vécue comme réelle ;
 la souffrance, qui est l'aspect passionnel avec l'émotion engendrée par
cette douleur.

La douleur est donc la réalité vécue par le patient et son entourage sur les plans
physique, psychologique, comportemental et social et non un phénomène
nociceptif isolé.

Il est important aussi de distinguer :


 la douleur aiguë, qui est un signal d'alarme, un syndrome ;
 la douleur chronique, qui est maladie, voire un comportement dans
lequel le sujet s'installe.

Le terme chronique, en effet, appelle une certaine continuité.

Il s'agit donc de traiter le patient dans son intégralité, d'établir, à l'aide de tests,
un diagnostic des facteurs psychologiques de toute douleur afin d'évaluer la
part organique et non organique ainsi que les répercussions de cette douleur
sur la vie du sujet. Car toute la difficulté de l'abord des personnes qui souffrent
est dans l'appréciation du rapport entre l'intensité de la douleur (stimulus) et
l'importance de la douleur (plainte du sujet). Cela étant, cette distinction ne
correspond pas toujours à la réalité car l'investissement psychologique et la
symbolisation inconsciente attachés à une douleur existent, que celle-ci soit
aiguë ou chronique. Seuls changent la charge donnée par le sujet au
phénomène, l'envahissement de son vécu ainsi, bien entendu, que la
chronologie de la manifestation.

On comprend qu'il faille donc prendre en compte les facteurs socioculturels,


ethniques, voire religieux et spirituels dans le vécu douloureux du patient car leur
action est indéniable sur ce vécu plus encore que sur la perception de la
douleur.

Tout cela nous amène à souligner la nécessité, pour le thérapeute confronté au


patient douloureux, d'être attentif à ne pas laisser ses propres critères et valeurs
morales envahir et fausser son jugement de la douleur d'autrui.

Nous évoquerons donc l'intérêt d'instaurer une relation thérapeutique


soignantsoigné de qualité.

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▪ LA RELATION THÉRAPEUTIQUE

Le moment de la première consultation détermine la tonalité de cette relation


qui, pour s'établir entre le soignant et le soigné, est fondée sur :

 la confiance tant dans les hommes que dans leur qualité professionnelle ;
 la nécessité d'un contrat de traitement entre le thérapeute, le patient et
son entourage.

L'abord sophrologique du patient douloureux prendra en compte une


anamnèse approfondie recueillant des éléments sur les composants somatiques
de l'expression de sa maladie et les troubles fonctionnels.

Presque systématiquement est proposée une sophronisation de base qui peut


venir souvent compléter l'anamnèse et va donner rapidement au patient les
outils nécessaires à la suite de l'entraînement.

Comme nous l'avons précisé précédemment, la douleur, au-delà du symptôme,


est un langage que le sujet utilise pour se parler à lui-même. Le thérapeute se
doit d'être ouvert à toutes les dimensions de l'être et à travers aussi ses
interrogations silencieuses :
 pourquoi cette douleur, cette maladie, à ce moment de ma vie ;
 quel sens a-t-elle pour ma personne ;
 quel sens a-t-elle pour ma relation à l'entourage ?

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▪ LA SOPHROLOGIE AU SEIN D'UNE STRUCTURE HOSPITALIÈRE DE TRAITEMENT DE LA


DOULEUR

L'équipe médicale constituée de médecins (neurologue, algologue, interniste,


rhumatologue, anesthésiste, psychiatre, chirurgien-dentiste, kinésithérapeute,
psychologue) est présente pour prendre en charge des personnes souffrant de
douleurs chroniques souvent déjà anciennes.

Les symptômes rencontrés au cours des maladies inflammatoires chroniques


et/ou auto-immunes sont des céphalées chroniques migraineuses ou non, des
douleurs articulaires, des douleurs musculaires, des algoneurodystrophies, des
séquelles postinterventionnelles diverses, des douleurs osseuses, des douleurs de
la sphère oro-faciale, et cette liste n'est pas exhaustive.

Pour certains cas cliniques, l'indication d'une prise en charge sophrologique


peut être posée lorsque le facteur anxio-dépressif est tel que les répercussions
sur l'évolution favorable du traitement sont importantes et lorsqu'une prise de
conscience du corps s'impose.

Le patient douloureux chronique est inconfortable dans son corps et dans sa


tête. Il ne se reconnaît pas dans son corps, en est souvent dissocié ; il n'est plus
incarné. Parfois il est déjà pris au piège du cercle vicieux de la douleur ( figure 5
). Il s'agit de l'aider à sortir de ce cercle vicieux. De plus, il est assez
fréquemment dans une attitude de refus, de non-acceptation face à la
difficulté. L'entraînement sophrologique va l'aider à apprendre à accueillir ce
qui est, à accepter la réalité, ce qui ne signifie pas se résigner mais adopter une
attitude positive d'affirmation de soi afin d'élaborer sa propre réponse. Il
mobilisera alors ses ressources pour une réponse efficace et choisie.
Figure 5 ▪ Le cercle vicieux de la douleur.

Cet entraînement sophrologique associe le corps et la dynamique respiratoire à


l'énergie du mouvement, à la préparation et à la mise en œuvre de la pensée
positive en redécouvrant les sensations corporelles et ses capacités propres
positives. Le patient se réapproprie ses sensations et la douleur prend une autre
signification : il relativise.

Avant de décrire les techniques proprement sophrologiques proposées aux


patients, rappelons qu'elles ne sont amenées chez ces derniers qu'après qu'ont
été faits un bilan médical et psychologique, un apprentissage des techniques
de respiration et de la sophronisation de base et que le patient est capable de
visualiser une image agréable et positive.

Techniques en individuel

Ces techniques s'adressent essentiellement au symptôme douloureux pour


l'atténuer sans chercher forcément à en traiter les causes profondes. Voici
quelques descriptions de celles utilisées de façon ponctuelle ou plus
systématique lors du parcours thérapeutique du sujet.

Sophro-substitution sensorielle

La technique vise à substituer un symptôme à un autre : remplacer, par


exemple, une douleur, sensation désagréable, par une sensation agréable ou
supportable ; le symptôme reste en place mais va se trouver transformé.

Hors d'un cadre de neuropathie douloureuse thermique, on peut, dans


l'inflammation articulaire par exemple, proposer la substitution douleur-chaleur
ou douleurfroid : le patient visualise sur son articulation une bouillotte chaude ou
une vessie de glace, il laisse venir les sensations de chaleur ou de froid ; la
vasodilatation ou la vasoconstriction qui se produit va analgésier cette partie
du corps.

Technique conditionnée

Elle utilise le réflexe conditionné selon les données pavloviennes et se traduit par
un geste convenu avec le patient. Il s'agit de substituer au symptôme un geste ;
le symptôme ne disparaît pas véritablement mais sa substitution gestuelle
apporte un soulagement à certains troubles que l'on se réserve de traiter
ultérieurement.

Technique de focalisation

Cette méthode permet d'agir sur un organe déficient. En état sophronique, le


patient visualise par exemple sa glande thyroïde, son cœur et peut stimuler ou
ralentir sa fonction ou modifier sa tension artérielle, ou il visualise les
mouvements de son intestin.

Technique de Simonton

Mise au point initialement par le Dr Simonton pour la lutte contre le cancer,


cette technique peut aussi être appliquée dans la gestion des maladies auto-
immunes.

Le principe consiste à stimuler le système immunitaire du patient contre les


cellules cancéreuses : il apprend, par exemple, à considérer ses lymphocytes
comme une armée entraînée, forte, capable de détruire toutes les cellules
cancéreuses (ou étrangères) considérées comme étant de faibles parasites
sans résistance.

Psychoplastie sophronique

Cette méthode consiste à stimuler le processus naturel de réparation corporelle


par une action de la conscience sur la cellule et sur certains fonctionnements
métaboliques localisés ; elle donne de bons résultats lorsque l'on vise une
réparation tissulaire après une fracture, un choc traumatique ou opératoire, une
mauvaise cicatrisation, des lésions organiques (ulcères).

Elle est utilisée en parallèle avec le traitement pharmacologique et, pour qu'elle
fonctionne, il est important que le patient soit entraîné à s'imprégner de l'image
de l'organe guéri et de lui dans sa totalité guéri.

Techniques en séance de groupe

Les patients participants ont tous au préalable été reçus individuellement deux
ou trois fois. Est proposée une reprise commune des apprentissages de base
(respiration, sophronisation de base, visualisation d'une image agréable,
renforcement des sensations agréables et positives). Les techniques proposées
sont :

 le training autogène de Schultz (cycle inférieur). Mise au point au début


du siècle par le Pr Schultz à Berlin, c'est une méthode autosuggestive
fondée sur l'autodécontraction par une autoconcentration ; son action
est puissante sur les muscles, les vaisseaux et la circulation générale, le
cœur et la respiration ;
 la relaxation progressive de Jacobbon. C'est une méthode de relaxation
non suggestive fondée sur la recherche physiologique des états de
tension. Le point de départ de la détente mentale est la maîtrise de la
détente musculaire à partir de la mise en œuvre du «contracter-relâcher»
des différents segments corporels afin de les intégrer dans le schéma
cérébral et le conscient ;
 la relaxation dynamique, méthode d'entraînement proprement
sophrologique à base de mouvements respiratoires (déjà décrite
précédemment).

Ainsi, nous constatons que le traitement de la douleur chronique va au-delà du


simple soulagement. Il s'agit d'un traitement global complexe qui propose de
rééquilibrer le patient tel qu'en lui-même en évitant la suppression du symptôme
pour lui-même. Car le symptôme, outre le sens qu'il représente, joue un rôle pour
le patient dans la gestion qu'il a de ses tensions intérieures. Un rôle de soupape
dont la disparition pourrait avoir des conséquences graves (anxiété, bouffées
d'angoisse, aggravation de la pathologie, déplacement du symptôme). Pour le
sujet, l'important dans son rapport à la douleur, qu'elle soit une menace réelle
ou imaginaire, c'est la perception qu'il en a.

Dans l'approche pluridisciplinaire de la prise en charge du douloureux


chronique, le champ de la sophrothérapie s'inscrit comme une stratégie propre
dont le but est de mettre le patient au clair avec sa maladie, de faire émerger
sa position par rapport à ses troubles, sa motivation profonde par rapport à la
guérison. D'où l'importance de l'anamnèse de départ très orientée sur la
recherche des fondements conscients et inconscients qui sous-tendent la
maladie.

Le travail se fait ensuite presque systématiquement avec l'apprentissage pour le


patient de la sophronisation de base afin de lui donner les outils nécessaires à la
poursuite de son traitement. À ce stade, il s'agit déjà pour le sujet de s'impliquer
dans une démarche personnelle et autonome. Lorsqu'il est rompu à cet
entraînement, on constate souvent déjà une amélioration de la
symptomatologie.

En fonction de l'individu, de sa réaction aux techniques de base et de la


pathologie, la sophrothérapie s'orientera dans diverses directions :

 une voie classique sophronique avec une efficacité sur le stress


permettant de comprendre et de travailler sur l'ancrage de la maladie
dans le corps ;
 une voie comportementale permettant de travailler sur le vécu des
troubles, le monde des sensations et des émotions, les relations avec le
mental et le corps ;
 une voie analytique par le biais de l'analyse en état sophronique (voir la
partie sur les objectifs).
Il est admis que les pathologies psychiatriques graves comme les psychoses
schizophréniques ou paranoïaques ne sont pas du ressort d'un tel protocole.

Ainsi, il n'y a pas de schéma thérapeutique rigide mais, au contraire, une


grande adaptabilité nécessaire du sophrologue à son patient et aux méthodes.

La résolution des conflits intérieurs doit être le premier travail du patient car
l'énergie libérée par la résolution du conflit sera mise à profit pour le processus
de guérison.

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▪ APPROCHE FONDAMENTALE : DONNÉES SCIENTIFIQUES SUR LES ÉTATS MODIFIÉS


DE CONSCIENCE

Le jeu des images, l'intention du geste et la pratique régulière du geste


permettent un réaménagement des structures neurophysiologiques de
l'organisme ainsi que celui des structures cérébrales en créant de nouvelles
interactions cellulaires neuronales.

Les scientifiques européens, canadiens et américains sont de plus en plus


intrigués par les vertus thérapeutiques des états modifiés de conscience (EMC).

Aux États-Unis, l'Institut national de la santé consacre plus de 10 millions de


dollars par an à ces recherches. Les neurosciences cherchent à étudier les
mécanismes cérébraux et harmonieux qui sous-tendent les relations entre esprit
et corps. Pour l'instant, on est à l'aube de ces recherches et des hypothèses sont
émises.

À l'université de Liège, en Belgique, le neurologue Steven Laureys a cherché à


comprendre ce qui se passe dans la tête d'un patient conduit par la parole du
praticien à se relaxer en utilisant un PET-scan (imagerie fonctionnelle cérébrale).
Il a été surpris de constater que loin de se réduire, l'activité du cerveau
augmentait, notamment celle du cortex cingulaire antérieur (CCA) impliqué
dans l'attention. Or, dans la perception de la douleur, le CCA est corrélé à la
suractivité de plusieurs autres zones cérébrales impliquées également dans
l'expression de la douleur. Pour Laureys, l'activation de ce réseau permet de
modifier la perception des messages douloureux en provenance des zones
sensibles du corps.

Toujours grâce à l'imagerie cérébrale fonctionnelle, les études de P. Raimville de


la faculté de médecine de Montréal (Département de stomatologie) apportent
quelques nuances supplémentaires intéressantes : les études sur l'analgésie en
état modifié de conscience (sophronique ou hypnotique) démontrent que
l'activité du cortex somato-sensoriel primaire S1 est associée à l'aspect intensité
de la douleur alors que le cortex cingulaire antérieur est plus spécifiquement
impliqué dans la composante affective de la douleur. De plus, l'analgésie
cognitive impliquerait des mécanismes de contrôle descendants en mesure
d'affecter la transmission du message nociceptif dès son entrée dans la moelle
épinière.

En ce qui concerne les mécanismes neurochimiques qui sous-tendent le


phénomène douloureux, on sait depuis longtemps que lors d'une suggestion
antidouleur que le patient reçoit du praticien ou se formule à lui-même, il y a
une libération d'une quantité suffisante de dopamine, neurotransmetteur
impliqué dans la motricité, le plaisir, le désir. En effet, depuis les années 1980, Jon
Stoessl, du Pacific Parkinson's Research Center, a mis en lumière le fait que les
neurones secrétant la dopamine communiquent avec ceux qui produisent des
endorphines, l'activité des uns modulant celles des autres.

Une autre étude d'imagerie rapportée par P. Raimville documente le fait que la
sensibilité à la douleur dépend de l'activation des circuits endogènes de
régulation de la douleur par les endorphines.

Par ailleurs, George Stephano, de l'École de médecine de Harvard à Boston, a


montré que parmi les molécules qui participent à ce processus, les enképhalines
et leur précurseur chimique sont capables de renforcer les réactions du système
immunitaire. Ainsi, un stress immunitaire peut provoquer un stress émotionnel et
inversement, mais cela reste encore difficile à démontrer.

Toutefois, une expérience menée en 2004 par le Pr Andersem au Centre


d'étude sur le cancer dans l'Ohio a montré que la réduction du stress par les
techniques cognitivo-comportementales améliorait bel et bien la réponse
immunitaire des femmes atteintes d'un cancer du sein.

Ainsi, les avancées en matière d'IRMf vont contribuer à améliorer l'analyse


neurophénoménologique non seulement de la douleur mais aussi de l'effet
cortical et somatique des techniques de modification des états de conscience.

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▪ CONCLUSION

Le domaine de la douleur est passionnant car il nous oblige à parcourir des


chemins forts divers dans le monde de l'humain. Les interventions des
spécialistes en algologie abordent des sujets aussi variés que la microbiologie, la
neurophysiologie, la neurochirurgie microscopique, la cancérologie, l'imagerie
radiologique et fonctionnelle, la pharmacodynamique sans oublier la thérapie
comportementale, la psychiatrie et l'interrogation sur la motivation du soignant
dans la relation thérapeutique.

Cela est dû au fait que la douleur est un symptôme dont les racines plongent en
profondeur dans la vie de l'individu : origine génétique, de civilisation (effet
rédempteur de la souffrance), familiale («Un homme, ça ne pleure pas !»).
Racines aussi dans le passé personnel de l'individu, dans sa relation à
l'entourage, dans sa relation à lui-même, au spirituel…

La douleur est le résumé de toute une vie, de tout un être, c'est aussi un mode
d'expérience, un langage qui doit être entendu et respecté.

La finalité de tout ce travail sophrologique au sein d'une structure de soins est


d'élaborer une stratégie participant à la thérapeutique de la douleur chronique,
stratégie permettant l'émergence, chez l'être souffrant, de nouvelles
perspectives d'évolution afin qu'il puisse acquérir une meilleure tolérance de sa
pathologie inflammatoire et/ou auto-immune.

C'est en retrouvant équilibre et harmonie que le sujet peut s'autoriser à


cheminer de façon autonome vers l'autoguérison. Le thérapeute sophrologue
est là pour l'aider à prendre conscience de la réalité de son propre corps, de sa
condition d'être humain. Le patient conserve sa liberté dans le choix d'une
évolution ou d'une nonévolution, le praticien se doit de respecter ce choix,
même s'il est persuadé du bien-fondé de la nécessité de cheminer.

Ensuite, le patient percevra sa maladie comme une expérience enrichissante,


une ouverture aux moyens de se dépasser soi-même. Il peut, à terme,
transformer sa maladie et sa souffrance en les transcendant, en transformant
une fatalité négative en épreuve valorisante sur la voie d'un accomplissement
personnel. Pour cela, il faut dépasser l'expression de la maladie censée avoir
engendré la douleur pour considérer l'individu dans son ensemble, réunion de
ses aspects corporel, émotionnel, psychique et spirituel.

Tel est le rôle du thérapeute sophrologue habitué à se situer aux confins du


corps et de la conscience.

À mesure que progresse la connaissance des relations corps-esprit, c'est une


nouvelle image de l'humain que se dessine à travers le regard scientifique. En
fait, cette image est à la fois neuve et très ancienne. Avant le XVIe siècle et la
pensée cartésienne qui s'est efforcée de réduire les choses en éléments séparés
pour les comprendre, la pensée occidentale avait déjà cette image globale
intégrée de l'être humain, comme la pensée orientale au demeurant. Les traités
de médecine antique l'attestent. Il est étonnant de voir ressurgir avec les
sciences cette image globale.

Médecine et psychologie, au-delà des préjugés, allient force et raison pour


enfin mieux prendre en charge les souffrances humaines et combattre les
maladies.

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RÉFÉRENCE
[1] Hubert JP, Abrezol R. Traité de sophrologie. Tome 2. Méthodes et techniques.
Paris : Le courrier du Livre, 1985. Cité ici
Chapitre 16 Le Recours à L'hypnose en Rhumatologie

Jean-Marc BENHAIEM

L'annonce ou l'apparition d'un handicap physique ou d'une maladie


rhumatismale invalidante peut induire chez toute personne une perte de
motivation pour vivre et agir. La souffrance, la douleur et la perte d'autonomie
déstabilisent souvent l'individu qui ne se reconnaît plus dans cette évolution. Des
plaintes et des griefs sont dirigés vers un corps qui trahit, qui n'est plus fiable.
L'existence d'un être se réduit. La réduction est en premier lieu celle du
mouvement physique, articulaire, puis, rapidement, elle atteint la pensée.
L'avenir paraît sombre, le tissu relationnel s'est rétréci. Que peut proposer un
thérapeute confronté à un tel tableau ? Comment aborder ces patients et les
faire se replacer dans un espace de vie confortable ? C'est ce point de vue qui
est visité dans les pages qui vont suivre. Elles parlent d'une thérapie qui s'appelle
l'hypnose médicale et qui présente la particularité de pouvoir s'appliquer à tous
les aspects de la douleur humaine.

▪ INTRODUCTION

Le but de ce travail est de préciser l'action et la place de l'hypnose dans les


pathologies rhumatismales inflammatoires ainsi que les particularités du soin par
l'hypnose médicale.

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▪ LA PRATIQUE ET LES ÉTAPES DE L'HYPNOSE

L'hypnose est un processus composé de trois phases. L'induction, la dissociation


et la perceptude ou veille paradoxale.

L'induction

L'induction utilise différents procédés pour inciter une personne à quitter l'état
de veille ordinaire dans lequel elle se trouve au début de l'expérience.

Cet état de veille est caractérisé par l'exercice de la logique, de la raison, de


l'intellect et se nourrit également des informations transmises par les sens (la vue,
l'ouïe, le toucher, etc.). Il sert à contrôler son espace. Cette maîtrise permet à
l'individu de se sentir en sécurité dans les lieux où il se trouve. L'exercice de la
critique, du raisonnement est une prise de pouvoir sur les éléments extérieurs qui
sont ainsi décryptés, analysés et avec lesquels on se familiarise. Cette activité
libère l'individu en le rendant rationnel avec la sensation de maîtriser le monde
qui l'environne. Cette composante cognitive s'acquiert peu à peu par le
nourrisson puis de l'enfant au cours de son développement et lui permet de
s'adapter au monde.

Cet état n'est jamais présent seul, il est imbriqué avec celui qui existe dès la
naissance et que l'on peut nommer la «vitalité naturelle qui ressent» [ 1 ] ou la
perceptude [ 3 ] qui nous met en relation directe avec le corps et son espace
de vie.

À l'étape de la veille ordinaire, l'intellect, le contrôle, recouvre et prend


avantage sur la perceptude qui reste sous-jacente.

Les exercices qui provoquent l'induction d'hypnose sont des exercices de


focalisation d'attention. On demande à la personne de fixer longuement un seul
petit élément visuel ou auditif ou tactile. La fixation prolongée devient difficile à
tenir et provoque une confusion des sens perceptifs qui dissocie la personne de
ses informations sensorielles habituelles.

La dissociation

La fameuse dissociation observée au cours de l'hypnose provient de la


séparation provoquée, artificielle de ces deux sensorialités. L'intellect est mis en
sommeil au profit de la perceptude qui occupe provisoirement le champ.

En pratique, il est demandé au patient de faire abstraction du monde


environnant et d'être centré sur la voix du thérapeute. Ce premier exercice est
à l'image de ce qui sera demandé plus tard : mettre de la distance entre le
patient et «autre chose» ; cet autre chose pourra être la douleur. Le patient
ressent son corps s'engourdir. Il se dissocie progressivement de ses perceptions
sensorielles. Il entend moins, il voit moins, il ressent moins. Il se sent «dans les
nuages». Il perd la notion du temps et de l'espace. L'exercice de la dissociation
le défait de la perception de son corps mais également de ses croyances, de
ses peurs et de ses rituels.

Cette phase d'hypnose se caractérise par une plus grande suggestibilité. Les
mots, les images proposées, les émotions ont, sous hypnose, un plus grand
impact sur l'activité cérébrale. Il devient donc possible d'agir sur des acquis
cognitifs et de modifier des perceptions mentales et/ou physiques comme la
douleur et son vécu.

Pour les douleurs aiguës, il est parfois possible de stationner à cette étape de
dissociation qui met le corps à distance, ce qui le rend peu sensible pour des
soins infirmiers, endoscopique ou de chirurgie non invasive.

Tous les êtres humains sont hypnotisables mais présentent, sous hypnose, des
comportements différents, selon leur personnalité. Des tests permettent
d'explorer le profil des sujets et des échelles évaluent leur niveau et leur mode
d'hypnotisabilité. Les informations recueillies servent à rester proche de leurs
attentes et d'établir une bonne relation de communication qui tiendra compte
de leurs possibilités propres et des expériences positives antérieures. Le succès
de la cure dépendra en particulier de l'aspect gratifiant des séances et de
l'objectif visé.

La perceptude

Autant la dissociation est la phase d'absence où le patient n'est nulle part,


autant la perceptude, ou veille paradoxale, est la phase où il est de toutes
parts. Il n'y a plus de limitations causées par la logique et la raison ; la personne
est libre d'entrer en relation avec tout son corps et pas seulement avec l'organe
qui souffre. Son mouvement lui permet de revisiter ses ressources.

Il faut rappeler les caractéristiques de la personne malade pour mieux


comprendre l'action de l'hypnose. La personne est immobilisée et fixe
obsessionnellement un seul élément de sa vie : ses douleurs et ce qui gravite
autour. De plus, les zones corporelles atteintes sont mises à l'écart, montrées du
doigt et ne participent plus à la vitalité naturelle du corps. Elles sont isolées et
exclues.

La phase de perceptude est celle de l'ouverture qui tente de réassocier ce qui


était dissocié. Il est proposé au patient des séries d'exercices qui le font voyager
dans tous ses savoirs et dans toutes ses expériences passées pour retrouver les
gestes et les postures d'équilibre. Il retrouve une sorte d'intuition sans les limites
de la cognition, qui lui permet d'être en relation, en accordage avec tout ce
qui compose son monde.

En pratique, spécifiquement pour le contrôle de la douleur, cet état permet de


modifier la relation au corps en le rendant indifférent aux soins, au scalpel, à
l'aiguille ou au passé. Sont explorées et modifiées si besoin toutes les relations
que l'individu entretient avec son handicap, les événements de sa vie, ses
douleurs passées, ses soignants, son traitement, sa famille, son travail. Il y a chez
tout individu une potentialité à modifier tous les liens et toutes ses perceptions
corporelles. Et ces changements ne peuvent se faire qu'en état hypnotique qui
est une disposition qui nous est propre pour opérer lesdits changements.

Toutes ces étapes du processus hypnotique se sont déroulées dans un contexte


de soins empreint de bienveillance. Cela contraste avec traumatismes et
douleurs qui peuvent également induire une fascination hypnoïde mais dans un
contexte pénible et violent. On parle alors d'une sidération, qui immobilise la
personne.

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▪ L'HYPNOSE APPLIQUÉE AUX MALADIES OSTÉO-ARTICULAIRES

Quels sont les problèmes qui peuvent se présenter aux patients souffrant de
problèmes ostéo-articulaires ?

L'examen clinique, l'interrogatoire et l'écoute des patients mettent en évidence


la complexité du tableau qu'ils présentent. La plainte porte fréquemment sur
des articulations douloureuses et sur les handicaps qui en découlent. Un certain
nombre de personnes s'inquiètent de présenter une pathologie chronique qui
ne peut que s'aggraver. Quel va être leur avenir ? Comment accepter un
traitement au long cours ? Des éléments de leur personnalité apparaissent sous
la forme de culpabilité, de dramatisation autour du diagnostic.

Nous allons passer en revue la façon dont ces problèmes sont abordés et traités
par l'hypnose.

La douleur : la relation au corps

La douleur présente de multiples composantes et implications que l'on peut


isoler pour mieux les analyser et les comprendre mais, pour soigner, il est
vraiment artificiel de les séparer. Par exemple, telle personne voit sa douleur
diminuer parce que le diagnostic posé a enfin été bien accepté. La réduction
de la douleur s'est produite de manière indirecte en traitant une façon de
penser sa maladie. Pour aider ces patients, il faut donc envisager d'aborder et
de traiter tous les aspects d'une personne confrontée au syndrome douloureux.

L'utilisation de l'hypnose est validée par de nombreuses études [ 4 ] qui ont


montré que les suggestions pouvaient modifier et réduire la perception de la
douleur. Il est probable que les endorphines soient impliquées dans ces
contrôles corticaux. Denko et al. [ 5 ] ont montré que les sujets arthritiques
chroniques (343 patients) avaient en moyenne un dosage sérique de la bêta-
endorphine de 54 pg/ml contre 78 pg/ml pour les sujets sains. Domangue et al.
[ 6 ] ont étudié les variations de cette bêta-endorphine après des séances
d'hypno-analgésie et ont montré une élévation de ce dosage qui est passé de
53,79 à 88, 00 pg/ml. Il est noté une corrélation positive entre la réduction de la
douleur, de l'anxiété, de la dépression et l'augmentation du dosage de la bêta-
endorphine et de la norépinéphrine. L'hypnose est antalgique chez ces patients
douloureux chroniques mais il serait trop simple d'attribuer cette analgésie à la
seule augmentation de la bêta-endorphine.

Les techniques utilisant l'hypnose sont bien développées par Erickson [ 7 ]. Ce


sont des jeux mentaux et des exercices d'imagination. À titre d'exemple, citons :

 la réduction de la douleur, en confiant au patient le contrôle d'un


variateur d'intensité qu'il imagine et manipule mentalement ;
 le déplacement de la douleur, qui cherche à mobiliser le siège de la
douleur de quelques centimètres ou sur une autre zone corporelle afin de
sortir d'une situation figée. Le patient fait l'expérience d'agir lui-même sur
la perception ou la réduction de la sensation douloureuse ;
 d'autres exercices qui tentent de substituer des fourmillements intenses à
une sensation de brûlure ;
 l'apprentissage par l'expérience du contrôle de la douleur. Il est possible
de montrer puis d'apprendre aux patients comment moduler leurs
douleurs, à l'instar de Crawford et al. [ 8 ] qui ont utilisé l'hypnose pour
apprendre à 15 lombalgiques chroniques à calmer une douleur aiguë
expérimentale (pression au froid). L'analgésie sous hypnose a permis de
diminuer la sensation douloureuse et l'anxiété. Puis les auteurs ont proposé
aux patients de transférer cet apprentissage à leur propre douleur
chronique lombaire. Il a été observé une réduction de la douleur ainsi
qu'une amélioration de l'humeur et du sommeil significatives. Devant ces
résultats, les auteurs suggèrent d'utiliser précocement de telles techniques
devant une douleur récente pour éviter le passage à la chronicité.

L'action thérapeutique repose sur les dires du patient qui évoque volontiers par
des métaphores les symptômes dont il souffre. Le thérapeute peut utiliser ces
métaphores au cours de la séance d'hypnose pour les modifier, voire en
proposer d'autres plus adaptées au soulagement.

L'imagerie cérébrale (PET-scan) a apporté une illustration de l'action de


l'hypnose au niveau cérébral. Il semble que l'effort demandé sous hypnose pour
modifier la sensation désagréable de la douleur provoque une augmentation
du flux sanguin cortical régional [ 9 ]. Les régions en cause semblent situées
spécifiquement dans le cortex cingulaire antérieur [ 10 ] et le cortex temporal
antérieur.

La limitation articulaire : la relation au handicap

La douleur et la peur de la douleur provoquent une diminution de l'amplitude


articulaire. Il est alors possible de pratiquer d'autres exercices sous hypnose. Les
plus efficaces sont la visualisation de mouvements corporels. Le patient,
pendant l'hypnose, crée ou retrouve les images et les sensations de
mouvements liés à la marche, au vélo ou à la danse. En visualisant ces films, il
active les zones corticales sensori-motrices qui sont liées aux mouvements. Une
étude récente [ 11 ] a montré l'efficacité de cette technique comparée à la
simple relaxation. Cinquante pour cent de la douleur ostéo-articulaire a été
réduite après 4 semaines d'entraînement à la visualisation hypnotique de
mobilisation articulaire pendant la marche, la course, les jeux et le vélo.

Ces techniques sont des confrontations d'une personne à ce qui lui pose un
problème. Le jeu consiste à visualiser les difficultés et à modifier son attitude
jusqu'à ce que le conflit disparaisse ou s'atténue. À cause de la douleur et du
handicap, la personne est «fâchée» avec ses articulations qui ne fonctionnent
plus comme avant. Pour obtenir un soulagement, le patient doit se «réconcilier»
avec les zones corporelles atteintes. On pourrait résumer l'objectif thérapeutique
par les formules «accepter la réalité», «s'entendre avec le corps tel qu'il est». Le
soulagement et la récupération d'une meilleure amplitude articulaire ne
pourront apparaître qu'à cette condition.

Le diagnostic de pathologie chronique : la relation au diagnostic

Le diagnostic annoncé d'une pathologie chronique oblige le patient à


s'adapter seul et rapidement pour vivre le mieux possible cette modification du
fonctionnement du corps. La détérioration de ses articulations, la présence
d'une inflammation évoluant par poussées aléatoires, intermittentes et
invalidantes modifient considérablement la relation qu'il avait à son corps. Il est
passé de l'insouciance à l'inquiétude. Son système ostéo-articulaire quasi muet
auparavant est devenu bavard en plaintes et en réclamations.

Les séances d'hypnose pourront aborder cet aspect de la relation que le


patient entretient avec sa maladie. Il peut tirer profit d'une meilleure adaptation
à la réalité d'un corps qui lui échappe lors de poussées douloureuses
inflammatoires. On peut imaginer qu'une personne qui a besoin de tout
contrôler au quotidien aura des difficultés à s'adapter à une pathologie qui
semble évoluer de manière imprévisible, irrégulière, voire inéluctable. Les
séances d'hypnose viseront à faire mieux accepter ces aspects pénibles et
aléatoires de la pathologie rhumatismale chronique.

Les traitements : la relation aux soins

Lors de l'interrogatoire du patient, il peut apparaître certaines difficultés à


accepter le diagnostic mais également les traitements proposés par le
rhumatologue. Les médicaments au long cours, la kinésithérapie régulière, la
pratique du sport, la nutrition sont des éléments essentiels pour freiner l'évolution
de la maladie. Si le patient le souhaite, il est d'un grand profit d'aborder la
relation qu'il entretient avec les démarches thérapeutiques. Les séances auront
pour objectif de le faire participer activement à ses thérapies pour améliorer le
pronostic de sa maladie.

L'évolution de la pathologie : la relation au futur

Selon la pathologie, la question de l'avenir du patient est posée. Dans le cas


d'une guérison possible sans séquelles, il n'y a pas trop de difficultés à envisager
l'avenir. Mais dans le cas de pathologies comme les polyarthrites chroniques
évolutives, se pose parfois le problème de l'activité professionnelle à
reconsidérer et même de la vie affective, amoureuse, qui devra s'adapter au
handicap. Là également, les séances d'hypnose pourront, par des exercices de
visualisation, améliorer la vision qu'a le patient de son avenir.

Le catastrophisme, la «frontitude» : la relation à la pensée

Le catastrophisme est la tendance à exagérer et à dramatiser la maladie et son


contexte. Seuls les éléments négatifs sont évoqués. Cette façon de «noircir» la
situation met en relief un mode de pensée pessimiste. Les éléments rapportés
par le patient ne sont pas faux, ils sont simplement triés et sélectionnés ; seuls les
plus pénibles sont conservés, ce qui entraîne un sentiment d'angoisse et de
détresse fort logique. Ce mode de penser sa maladie apparaît comme un frein
à la capacité antalgique propre de l'individu. L'action possible de l'hypnose
portera sur la réduction de ce «catastrophisme» qui aggrave la composante
émotionnelle de la douleur. L'hypnose avec suggestions cognitives de coping
(ou le pouvoir d'affronter) s'est montrée plus efficace que le placebo [ 12 ].

Spanos et al. [ 13 ] confirment que réduire la douleur nécessite dans tous les
cas d'apprendre à pouvoir affronter et résoudre et, pour cela, à réduire le
catastrophisme et la dramatisation.

Chez des patients soufrant de fibromyalgie [ 14 ], l'hypnose a été utile


essentiellement en réduisant l'anxiété. Les scores de la douleur n'ont pas varié
mais, en modifiant l'humeur, le vécu a été considérablement amélioré.

Je propose de substituer le terme «frontitude» à coping : ce terme contient une


partie du mot affronter et une autre du mot attitude et définit le comportement
actif et déterminé du patient qui est résolu à surmonter les difficultés qui se
présentent à lui.

L'influence du thérapeute : la relation au thérapeute

La personnalité du thérapeute a souvent fait l'objet d'observations évoquant le


«charisme» [ 15 ]. Il s'agirait d'un mélange d'assurance, de convivialité et de
confiance dans le traitement et dans les ressources du patient. La relation est
faite du désir du patient de guérir, de la confiance dans la «méthode» et du
désir du thérapeute d'aider à la guérison. Cependant, il apparaît que des
thérapeutes non charismatiques peuvent, par leur engagement volontaire,
obtenir aussi des effets thérapeutiques spécifiques.

Bien que ces particularités soient générales à l'activité de soins, il semble que la
pratique de l'hypnose amplifie ces éléments de communication. Cela tient
peutêtre à l'engagement personnel du thérapeute qui guide activement son
patient.

L'implication du patient : la relation à soi, la confiance

Il est possible de proposer aux patients de poursuivre leur thérapie en écoutant


l'enregistrement d'une séance précédente d'hypnose. Toutefois, l'induction
verbale avec présence du thérapeute produit significativement plus d'effet que
l'utilisation de cassettes audio préenregistrées [ 16 ].

Combinant une séance d'hypnose et de l'autohypnose à domicile, Spinhoven


et al. [ 17 ] ont constaté une efficacité semblable entre la pratique de
l'autohypnose (avec cassette audio) et l'information éducative sur la douleur
chez des lombalgiques chroniques. Dans cette même pathologie, McCauley et
al. [ 18 ] ont montré que l'autohypnose était plus efficace que de simples
informations même associées à un exercice de rétroaction biologique
(biofeedback), mais pas supérieure à la relaxation. Il est difficile de comparer
hypnose et relaxation puisqu'il y a de l'hypnose dans la relaxation et vice-versa.

En l'absence du thérapeute, lorsque le patient s'exerce à la pratique de


l'hypnose, nous pouvons considérer qu'il a franchi un pas vers la confiance en
soi, en ses ressources pour surmonter lui-même ses problèmes de santé.

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▪ EST-CE QUE L'HYPNOSE EST UNE THÉRAPIE BRÈVE ?

L'hypnose est souvent présentée comme une thérapie brève. Cette


dénomination provient de la démarche thérapeutique qui s'oriente vers la
résolution immédiate des symptômes sans une investigation méthodique du
passé. Il n'y a pas de détours systématiques qui seraient imposés par une théorie
exigeante. Le patient est immobilisé par des problèmes difficiles qu'il ne peut
résoudre ; il demande une aide, un conseil ou un guide pour sortir de cette
impasse. Le thérapeute rejoint son patient sur le lieu même de l'obstacle et, par
différents exercices comme le recadrage, ouvre le champ des possibles. La
brièveté de la cure peut provenir du temps gagné à ne pas chercher les causes
de la maladie pour se consacrer à la façon de résoudre au mieux et sans
attendre la souffrance qu'elle entraîne.

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▪ CONCLUSION

Nous pouvons nous risquer à une définition de l'hypnose dans le contrôle de la


douleur : «L'hypnose thérapeutique est une expérience relationnelle mettant en
jeu des mécanismes physiologiques et psychologiques permettant à l'individu
de mieux vivre, d'atténuer ou de supprimer une pathologie douloureuse aiguë
ou chronique.» La pratique de l'hypnose montre et confirme que tout ce qui est
vivant est en lien. L'articulation est liée aux muscles, aux tendons, aux nerfs, au
cerveau, aux artères, à la pensée, aux fonctions d'équilibre, etc. C'est une
maladie ou un organe que l'on soigne mais également le terrain composé de
tout l'être en relation avec ses croyances, ses sensations, en résumé tout son
espace intérieur et extérieur.
Pour les patients souffrant de pathologies ostéo-articulaires qui n'ont pas fait
spontanément leur travail d'adaptation à l'ensemble des problèmes rencontrés
par un corps malade, l'action thérapeutique par l'hypnose sera centrée sur les
différents aspects de la douleur et de la souffrance tels qu'ils sont rapportés par
les patients eux-mêmes.

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