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J.-A. MILLER, Le Partenaire-Symptôme - Cours n° 9 28/1/98 page 136
ce qui est trompeur mais ce qui est à c’est ce qui nous donne la structure
proprement parler le symbolique, d’où profonde de l’Éthique de la
cette connexion étroite du libidinal et psychanalyse. Aussi bien le champ du
du symbolique que Lacan exprime en langage, le principe du plaisir, le plaisir
disant dans le séminaire de l’Éthique réalité, tous ces termes valent comme
de la psychanalyse que le principe du autant de défenses à l’endroit de l’au-
plaisir fait rechercher à l’homme le delà du principe du plaisir défini
retour d’un signe, et lui fait retrouver la comme le réel. Et donc la défense est
trace aux dépens de la piste, il préfère ici conçue comme primaire, existant
une image mnésique à la piste dans le avant même que puisse se formuler le
monde extérieur de l’objet réel. refoulement comme tel, dans la
La conséquence, que je vous mesure où le refoulement est affaire
présente ici d’une façon très formelle, de symbolique. C’est ce déplacement
ce déplacement du symbolique, le du symbolique du côté du libidinal qui
rappel du symbolique à sa racine de dégage la jouissance comme une
jouissance, à sa racine d’Encore, ce sorte de moteur immobile. Du côté du
déplacement laisse en effet avec un symbolique, il y a le refoulement, ses
point d’interrogation ce qui est l’au- déplacements, métaphore et
delà du principe du plaisir et oblige à métonymie, tandis que du côté de l’au-
une double scission. delà du principe du plaisir, se trouve
Là, nous avons de ce côté ci le comme unilatéralisé, en terme
plaisir-réalité Eh bien le déplacement aristotélicien, le moteur immobile de la
du symbolique du côté libidinal, au jouissance. C’est cette architecture qui
fond oblige à doubler plaisir et réalité permet à Lacan d’incarner la
d’un nouveau binaire qui est, dans les jouissance comme la Chose, c’est-à-
termes de Lacan, jouissance-réel et dire comme une substance invariable
c’est ce qui occupe l’au-delà du par rapport aux ombres qui passent
principe du plaisir une fois qu’on l’a dans la chaîne signifiante et qui sont,
nettoyé du symbolique. comme Freud dit lui-même, les
ombres du plaisir, les ombres de la
satisfaction qui a été éprouvée une
première fois.
lité C’est ce déplacement du symbolique
i r - réa -réel PP
is e vers le libidinal, qui isole la jouissance
Pla ssanc Au-delà du
i défense principe de
Jou comme la Chose avec toute ses
plaisir
connotations imaginaires, une
Symbolique substance invariable et qui permet
aussi de parler de la jouissance
comme d’une place qui a son identité
par rapport aux dérives, à la
Libidinal
dynamique qui est du côté du principe
réel
du plaisir et du symbolique. Avec la
Chose, on a à la fois un terme
immobile, qui ne répond pas vraiment
à la dichotomie du plaisir et du
Alors le terme majeur à ce moment déplaisir, tout ça c’est le côté du
là, le terme majeur c’est la défense, le principe du plaisir, là il y a plaisir ou
principe du plaisir gouvernant par le déplaisir, mais avec la jouissance,
symbolique le plaisir-réalité vaut avec la Chose on a un terme isolé de
comme défense par rapport au réel et cette dichotomie, dont on s’épuise à
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rappeler toujours que c’est tout à fait de la jouissance c’est absolu, c’est un
autre chose et c’est à ça que nous tout ou rien.
avons été formés et dont il va falloir se Deuxièmement ce sont des termes
défaire. dont le sujet est toujours amené à se
À partir de cette conception, qui est tenir à une certaine distance, jusqu’à
contradictoire avec la première mais cette distance du respect, comme dit
que, dans notre doxa, nous rattachons Kant. Et troisièmement ce sont des
d’une façon un peu équivoque à la termes qui reviennent toujours à la
première, la jouissance apparaît même place, et on peut dire même
comme dotée d’une place qui a son que la jouissance, comme dit Lacan,
identité, où on peut d’ailleurs loger das Ding, c’est l’essence de la même
l’objet perdu en tant qu’il ne peut être place, par ce que dans le symbolique,
retrouvé par exemple. Avec cette les places précisément sont faites pour
conceptualisation, on a une définition des substitutions et on court après les
de la jouissance qui est toujours en places. C’est emporté dans un jeu
terme de hors, h-o-r-s. C’est ainsi que d’équivalences, alors que précisément
Lacan la propose comme hors signifié, das Ding définit au fond l’absolue
voire hors symbolique, ou qu’il mêmeté de la place, c’est à partir de
représente sa place comme celle das Ding qu’on peut dire la même
d’une vacuole. Il introduit à une place.
formalisation de la jouissance à partir À partir de là s’ouvre une grande
de sa place et de ce fait s’ouvre la série, la série des termes qui peuvent
série des termes qui peuvent venir à nous représenter das Ding avec
cette place et l’Éthique de la toujours la réserve que ça n’est pas
psychanalyse est fait de ça, tout le das Ding même, mais le séminaire de
séminaire, parce que c’est d’emblée Lacan est fait tout entier d’une série de
que Lacan propose ce changement de termes qui ont ces traits de das Ding,
conception qui ramène le symbolique les traits d’absolu, de à distance et de
du côté du libidinal, qui identifie le constance de la place.
principe du plaisir au symbolique. Alors premièrement c’est quoi ? Je
Alors du seul fait de faire ça, de dis premièrement, c’est dans la
l’autre côté il y a la jouissance comme construction que je donne et c’est un
invariable et surtout sa place comme peu ça dans le séminaire aussi.
étant une place bien identifiée. Alors le Premièrement, c’est la loi morale selon
séminaire se passe à énumérer la Emmanuel Kant, c’est le principe de
série des termes pouvant venir à cette l’impératif catégorique, Lacan nous le
place. Alors qu’est-ce que ce doit être présente en effet comme valant das
ces termes ? Eh bien ce sont des Ding. D’une certaine façon, l’impératif
termes qui doivent avoir au moins les catégorique de Kant, c’est le comble
trois caractéristiques suivantes. Ce du symbolique, on ne peut justement
sont des termes qui se distinguent comprendre ça que par la connexion
premièrement par leur caractère du symbolique et du libidinal, c’est le
d’absolu, c’est-à-dire qu’ils sont au- comble du symbolique puisque c’est
delà du jeu du langage. Dans le un principe qui ne formule rien d’autre
langage, il y a toujours des que l’exigence de l’universel, « soumet
équivalences, on peut toujours mettre à l’exigence de l’universel toute action
un terme à la place d’un autre, on de ta part, ce que tu fais, il faut que
calcule, on substitue, on dérive à partir tous puissent le faire sans
d’un terme. Quand il s’agit du champ contradiction », donc c’est la pointe du
symbolique. En effet, c’est un principe
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