Madame Barbara POMPILI

Ministre de la Transition écologique

HÔTEL DE ROQUELAURE
246, BD SAINT-GERMAIN
75007 PARIS

Wittelsheim, le 15 janvier 2021,

Objet : Lettre ouverte pour en finir avec Stocamine en Alsace

Madame la Ministre,
Le mardi 5 janvier, vous êtes descendue dans les galeries de StocaMine à Wittelsheim en
Alsace, ce qui fait de vous la première ministre de l’écologie qui soit venu constater la réalité du
terrain. Saluant votre volontarisme mais sachant l’imminence de votre décision sur l’avenir des
déchets du site, nous souhaitons rappeler à votre connaissance certains éléments indissociable d’une
bonne connaissance du dossier et qui viendront compléter les échanges que nous avons eu ce jour-là,
notamment sur la protection des travailleurs et les conséquences sur la nappe phréatique rhénane du
choix du confinement.
1. En ce qui concerne la protection des travailleurs sur site, il est essentiel de préciser que le
métier de « mineur », consiste à creuser et à entretenir des galeries et ne peut être confondu avec
celui de « déstockeur » qui relève d’entreprises spécialisées dans la manipulation des déchets
entreposés. Les premiers sont naturellement d’une expertise précieuse pour les seconds quant à
l’analyse des galeries, leur état de dégradation et les risques qui en découlent en cas de
manipulation de ces déchets. Il n’est toutefois pas question d’engager directement la santé des
mineurs dans un chantier de déstockage.
Quant aux entreprises spécialisées, elles semblent en mesure d’apporter les garanties sécuritaires
optimales. C’est très clairement ce que nous enseigne le retour d'expérience résultant du
déstockage réalisé sur place des déchets mercuriels entre 2015 et 2017 par l’entreprise Saarmontan
qui d’ailleurs considère que la poursuite du déstockage est parfaitement réalisable.
Par ailleurs, le recours à la technologie robotique pour suppléer à l’humain en première ligne dans
la mine est une option qui doit être mieux étudiée. La France est à la pointe sur le secteur, à tel
point que c’est la technologie robotique française qui a été à l’œuvre pour agir sur le site de
Fukushima dans les conditions extrêmes et avec le degré d’anticipation que l’on connaît.
À l’heure du plan de relance et d’une prise de conscience partagée de l’importance de recouvrer
une autonomie stratégique sur les secteurs clefs de notre avenir industriel et technologique, il y a
dans le chantier de déstockage de ce site une opportunité pour investir et capitaliser tant sur le
savoir-faire technologique français que sur la dynamique d’innovation dans un secteur de pointe.
Enfin, il s’agit, précisément dans ce dossier StocaMine, d’élargir notre champ de vision en
élaborant les solutions à ce problème emblématique à l’échelle européenne, dans le cadre d’une
coopération transfrontalière. Qui de mieux placée que la Haute-Alsace pour faire appel aux
spécialistes allemands et aux experts suisses, d’ailleurs déjà largement investis dans ce dossier,
pour mutualiser leurs efficacités, leurs connaissances et leurs ambitions réputées dans le domaine
sensible de la gestion rigoureuse des déchets ultimes et/ou hautement toxiques. Voilà tout désigné
un chantier et un enjeu de dimension transfrontalière et européenne de nature à concrétiser aux
yeux de tous la pertinence de l’Union européenne et la force de sa synergie au service d’un bien
commun hors normes pour ne pas dire sacré : L’eau potable de la plus grande nappe phréatique
d’Europe, justement !
2. En ce qui concerne les conséquences à terme pour cette nappe phréatique rhénane, au-delà
chiffrages précis avancés par les experts, il apparaît important de rappeler l’imprévisibilité de la

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situation, qui doit faire jouer pleinement le principe de précaution dans la décision qui sera
prise.
Le scénario du confinement du site, consiste à disposer un « bouchon » de béton pour isoler le site.
A ce jour, cette technique n’a fait ses preuves nulle part et ne bénéficie en conséquence d’aucun
retour d’expérience.
N’oublions surtout pas ce qu’ont affirmé par écrit les experts du COPIL (comité de pilotage), à
savoir que les études menées par l’INERIS soulignent que « la quasi-totalité de l’eau entrée dans
la mine sera expulsée vers la surface par fermeture des vides ». Ces mêmes études montrent sans
ambiguïté, qu’avec des hypothèses raisonnablement pessimistes, on peut calculer que la
concentration en mercure aurait dépassé le seuil de potabilité actuellement en vigueur dans la
nappe. Les mêmes experts du COPIL précisent aussi que le devenir des autres polluants tels que
l’antimoine ou les métaux lourds toxiques doit être évalué.
De manière globale n’oublions surtout pas le principe de l’effet cocktail, qui dans le cas de
StocaMine constitue une menace d’ampleur potentiellement très grave. Correspondant à l’addition
des effets de la toxicité intrinsèque à chaque polluant chimique, ce paramètre n’a été pris en
considération dans aucune des nombreuses expertises.
Chaque substance toxique a été évaluée individuellement en fonction des normes en cours
aujourd’hui (ex. le mercure). L’estimation des effets synergétiques, voire antagonistes, des
différents polluants n’a jamais été faite. Ainsi l’effet cocktail et le degré de solubilité dans la
saumure de 23000 tonnes de refioms, non stabilisés, composés de nombreux ETM (éléments-
traces métalliques) tels le mercure, le plomb, l’arsenic, l’antimoine, le cadmium et autre chrome,
n’ont jamais été pris en considération pour mesurer l’impact de ces polluants sur la qualité de la
nappe phréatique.
Et pourtant, le grand désastre écologique de contamination de la nappe à venir, réside aussi dans
cet effet cocktail combiné qui par nature échappe à la plupart des modélisations et donc des
prévisions, montrant clairement les limites du principe même des études et expertises en pareille
situation. Rien que cela devrait vous amener à écarter ce scénario du confinement total et
immédiat qui pourrait s’apparenter à une terrible logique « d’apprenti sorcier ».
En outre, les conditions géologiques dans lesquelles il est projeté d’y procéder en l’espèce nous
font douter très sérieusement de la capacité du site à servir de terrain d’expérimentation en la
matière. La plaine rhénane est traversée depuis des millénaires par une faille sismique qui l’a
façonnée par son perpétuel mouvement. C’est pourquoi, raisonner pour l’avenir sur la base de
l’état présent des couches géologiques n’a pas de sens étant donné qu’aucune projection ne peut
garantir avec la moindre certitude leur évolution, leur devenir.
Par ailleurs, l’action de l’humain sur ce sous-sol, déjà par nature instable, n’a fait que renforcer
cette réalité. Au cours du siècle d’exploitation minière qu’à connu l’Alsace ce sont plus de 500
millions de tonnes de potasse qui ont été remontées à la surface et qui rendent la couche
géologique en question aussi compacte qu’« un gruyère » pour reprendre votre propre métaphore.
Pire que cela, les vingt-quatre puits de mines existants ainsi que les trois cents vingt sept trous de
sondages qui furent creusés à travers le bassin potassique sont autant de voies possibles pour que
l’eau douce de la nappe phréatique passe à travers les couches et communique un jour avec les
déchets entreposés au fond.
Au regard de ces éléments, on peut affirmer que toute certitude sur la vitesse et le niveau de
diffusion des déchets dans la nappe phréatique est impossible. La seule réelle certitude qui
demeure est que l’eau passera à un moment ou à un autre et que les barrières de béton ne pourront
résister à l’action combinée des saumures, de la pression et du temps qui passe.
Dans ce champ d’incertitudes qui entoure l’option du confinement définitif du site, le
principe de précaution et le bénéfice du doute doivent vous faire choisir de l’écarter. Des
déchets ultimes ramenés à la surface, c’est la garantie offerte aux générations futures de pouvoir
maîtriser des risques qu’ils vont encourir inéluctablement. Des déchets ultimes confinés à des
centaines de mètres sous terre reviennent à priver nos enfants de la capacité d’agir sur leurs
conséquences futures et les condamner à les subir. Nous n’avons aucun droit moral à faire encourir
une telle menace sur le capital environnemental de la plaine rhénane: son eau sans laquelle
l’Alsace deviendrait un espace d’insécurité sanitaire de grande ampleur.

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 Vous avez dit être consciente que l’État avait donné son engagement à la réversibilité il y a
plusieurs décennies et que vous vous engagez à ce que les leçons de l’Histoire soient tirées de ces
errements. Vous pouvez le faire dès à présent en appliquant les recommandations exprimées par le
Président de la République, lui-même, en 2019 : à savoir d’extraire tous les déchets qui pourront l’être
et sécuriser l’enfouissement des déchets inextractibles.
Vous avez confirmé sur place que 96% des déchets encore stockés peuvent être techniquement
retirés et que les galeries resteront praticables jusqu’en 2025. Alors ne perdons pas un instant et
démarrons dès maintenant !
Vous avez dit être consciente que vous laisserez votre nom sur la décision qui sera prise, alors
ne le laissez pas sur une décision qui irait à l’encontre de votre parcours et de votre conviction
écologiste.
Nous partageons pleinement votre préoccupation clairement exprimée d’agir pour résorber
tous les points noirs en surface, sources actuelles de pollution de l’eau (anciennes décharges enfouies,
anciens sites classés non conformes, etc…). Mais en aucun cas, il ne faut dissocier la résorption de
ces nuisances de surface de la grande menace des profondeurs que représente StocaMine. En surface
tout restera toujours possible, alors que pour StocaMine, le confinement définitif, irréversible par
nature, livrerait l’Alsace à un désastre écologique que nous n’imaginons pas compatible avec votre
nom.
Dans l’attente d’une réponse aussi prompte qu’engagée de votre part, nous vous prions
d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de nos sentiments respectueux.

Les co-signataires :

Yann FLORY, Porte parole du collectif Destocamine

Bruno FUCHS, Député
Yves HEMEDINGER, Député
Frédérique TUFFNELL, Députée
Michèle CROUZET, Députée
Marguerite DEPREZ-AUDEBERT, Députée
Guy BENARROCHE, Sénateur
Esther BENBASSA, Sénatrice
David CORMAND, Député européen
Thomas DOSSUS, Sénateur
Jacques FERNIQUE, Sénateur
Raymonde PONCET MONGE, Sénatrice
Sophie TAILLÉ-POLIAN, Sénatrice
Marie TOUSSAINT, Députée européenne
Caroline ROOSE, Députée européenne
Christophe GRUDLER, Député européen
Jean-Paul OMEYER, Vice président de la région Grand Est
François HORNY, Président de la Communauté de communes Thann-Cernay, Maire d'Aspach-Michelbach
Marcello ROTOLO, Président de la Communauté de communes de la Région de Guebwiller, Maire de Soultz
Matthieu ERMEL, Maire de Wattwiller et Président SM4
(Syndicat Mixte à Vocation Multiple pour le Traitement des Déchets Ménagers du secteur IV)
Hubert OTT, Conseiller municipal de Rouffach, Président de Rouffach Incitation Nature,
Délégué fédéral du Mouvement Démocrate d’Alsace
Marie-Pierre HARTZ, Conseiller municipal de Wittelsheim
Christian REBERT, Maire d’Andolsheim
Marie-Paule GAY, Maire, Vice-présidente des Maires ruraux du Haut-Rhin
Franck DUDT, Maire du Haut-Soultzbach
Claudine FRANCOIS WILSER, Adjointe au Maire de THANN
Sybille GAERTNER, Adjointe au Maire de Baldersheim
Léonard REYMANN, Maire de Munwiller
Loïc MINERY, Vice-président de Mulhouse Alsace agglomération, conseiller municipal de Mulhouse
Flavien ANCELY-FREY, Conseiller municipal et communautaire de Colmar
Philippe HECKY, Maire de Lautenbach

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 Christian VOLTZ, Maire de Fortschwihr
Pernelle RICHARDOT, Conseillère de la région Grand-Est
Jean ENDERLIN, Adjoint au Maire de Lautenbach
Jean-Claude MENSCH, Maire d’Ungersheim
Nina CORMIER, Conseillère municipale de Mulhouse
Bernadette BRENDER, Adjointe au Maire
Rodolphe METZ, Adjoint au Maire d’Appenwihr
Emmanuel RECHT, Conseiller de la région Grand-Est
Marc PARENT, Maire de Saint-Ulrich
Philippe KNIBIELY, Adjoint au Maire de Saint-Louis
Danièle ARNOLD, Conseillère municipale
Véronique MATTLINGER WUCHER, Conseillère municipale à Colmar
Patrick MAUCHAND, Conseiller municipal délégué
Jean-Marc MAYER, Conseiller municipal
Christian MICHEL, Conseiller municipal
Patricia HILD, Conseillère municipale de Bennwihr
Bertrand MORGENTHALER, Adjoint au Maire de Bollwiller
Karine OLLAGNIER, Conseillère municipale
Maelle PAUGAM, Conseillère municipale à Mulhouse
Sylvie PÉPIN, Conseillère communautaire Colmar Agglomération
Mélanie RESSEL, Conseillère municipale
Laurent ROTH, Conseiller municipal de Kingersheim
Marie-Laure BECK, Conseillère municipale de Rouffach
Sandrine BELIER, Directrice de l'association Humanité et Biodiversité
Suzanne ROUSSELOT, Conseillère municipale
Patrice SCHOEPFF, Conseiller municipal de la ville de Strasbourg, conseiller eurométropolitain
Véronique SPINDLER, Conseillère municipale à Colmar
Jean-Luc THOMAS, Conseiller municipal de Labaroche
Perrine TORRENT, Conseillère municipale
Régis ABSOLU, Secretaire Association ACCES
Eidenchenck MICHEL, Secrétaire Général CGT Mineurs de Potasse
Olivier DELACOURT, Secrétaire Général de l'Union Mines Métaux Alace CFDT
Marie BAILEN, Ex-présidente PAC, ex-conseillère municipale cernay
Joseph BAUMANN, Administrateur Alsace-Nature
André HATZ, Président de l'association Stop Fessenheim
Michel BOURGUET, Ancien conseiller municipal de Mulhouse, membre actif d’Alsace Nature
Jean-Jacques RETTIG, Président du Comité pour la Sauvegarde de Fessenheim et de la plaine du Rhin
Maurice BRUPPACHER, Militant syndical
Laurent ROTH, Président du Lions Club Wittenheim Bassin Potassique
Noëlle CASANOVA, Collectif citoyen de défense du Sprickelsberg
Françoise CHANTEUX, Présidente de l'Association NatuRhena
Olivier CLAUDÉ, President ADDES
Bruno DALPRA, Membre d'Alsace Nature et des Amis de la Confédération Paysanne d'Alsace
Daniel REININGER, Président d’honneur Alsace Nature
Salvatore DI ROSA, Secrétaire de la CFDT des Mineurs de potasse
Alain DIOT, Président d’Alternatiba Soultz
Serge DUMONT, Maître de conférences Université de Strasbourg, Président de l’association Ried Bleu
Jean-Louis ECUER, Comité Bure en Retz
Annette SCHINDLER, Présidente de l'association CAPS 68 (Collectif Agir pour le Pays de Sierentz)
André FABIAN, Membre du conseil de développement du pays Thur Doller
Raymond SCHIRMER, Comité d’Administration d’Alsace Nature,
ex-élu régional et municipal, Ingénieur écologue
Nadine FORESTIER, Ecologue
Daniel WALTER, Président de THUR ECOLOGIE & TRANSPORTS
Christian UHRWEILLER, Vice président d‘Alsace Nature en charge de la coordination du Haut-Rhin
Bernard SCHMITT, Responsable du collectif Eau 88

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 Marie-Laurence EGMANN, Alsace Nature
Isabelle FABIAN, Alsace Nature
Michel KNOERR, Ancien Président du SM4
Marie-Paule MORIN, Présidente du SMTC
Fabien LUTZ, Vice-Président du Mouvement Démocrate d’Alsace
Véronique SCIUS-TURLOT, Conservateur bénévole au Conservatoire des Sites Alsaciens (CSA)
Auguste OTT, Président national des Jeunes Démocrates
Jules PASQUIER, Secrétaire général adjoint des Jeunes Démocrates
Renée Lise ROTHIOT, L'eau qui mord (défenseuse de l'eau - Vittel - Vosges)
Mireille MEYER, Vigneronne
Frédérick GUYON, Universitaire
Solange HUSSER, Membre du CA du CSFR
Arnaud KNECHT, Association Eau en Danger
Claude SCHMITT, Président association
Albert GASSER, Citoyen
Christiane GASSER, Citoyen
Nicole KUENTZ, ex-déléguée des VMF
Pascal GERRER, Citoyen
Michel GUYON, Citoyen
Amandine HARTZ, Citoyenne
Brigitte INHOFER, Citoyenne
Philippe KIRSCHER, Citoyen
Dominique KLEIN, Citoyen
Pierre KNOPF, Citoyen
François KOCH, Citoyen
Sylvie KUENTZ, Citoyenne
Philippe LECLERE, Citoyen
Mathieu WINTER, Citoyen
Baptiste GASSER, Citoyen
Martine LECLERE, Citoyenne
Nicolas MINERY, Citoyen
Valerie LUTHRINGER, Citoyenne
Melissa MANGOLD, Citoyenne
Dominique WEBER, Citoyen
Alain ALTHUSER, Citoyen
Francis ROHMER, Citoyen
Georges Yoram FEDERMANN, Citoyenne
Daniel EHRHARD, Citoyenne
Marie JAEGLE, Citoyenne
Francis SCHIRCK, Citoyen
Jean BRUCKERT, Citoyen
Elisabeth SCHULTHESS, Citoyenne
Colette MANTEL, Citoyenne
Michel SOENSER, Citoyen
Huguette SPECHT, Citoyenne
Jeannine SZOT, Citoyen
Michèle VISIELOFF, Citoyenne
Annette WALTER, Citoyenne
Roger WINTERHALTER, Citoyen
Jean-Marie ZIPPER, Citoyenne
Yves CHASSAGNON, Citoyen
Gérard BOHLER, Citoyen
Marie-Reine HAUG, Citoyenne
Arnaud DEMANGEAT, Citoyen
Claude FINCK, Citoyenne

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