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2012/3 n° 55 | pages 7 à 13
ISSN 1293-6146
ISBN 9782352400691
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-l-economie-politique-2012-3-page-7.htm
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d’après-crise ?
p. 7
« L’économie
n’est pas une science »
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Juillet-août-septembre 2012
Quelle théorie économique
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François Bourguignon
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[1] Inside Job, Si l’on suit la démonstration du film Inside Job ou l’enquête de
documentaire de Charles
Ferguson ; Laurent
Laurent Mauduit [1], ne peut-on dire que certains économistes
Mauduit, Les Imposteurs avaient également un intérêt, y compris personnel pour certains,
de l’économie,
Paris, Jean-Claude à défendre ces idées ?
Gawsewitch, 2012. FB : Je crois qu’il y avait surtout un intérêt collectif, de la part des
intermédiaires financiers bien plus que des économistes, à sou-
tenir les discours qui justifiaient leur efficacité, leur capacité à
bien faire fonctionner l’économie, à allouer les ressources finan-
cières disponibles de manière efficace au niveau mondial, etc.
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ses faiblesses. Une partie d’entre eux vivaient dans une sorte p. 9
de bulle théorique, sans s’interroger sur toutes ses propriétés.
La théorie leur disait que, sous certaines hypothèses qu’ils ne
cherchaient pas à remettre en question, les marchés financiers
étaient efficaces et devaient être libres d’agir à leur guise. Cela
semblait être le cas puisque tout fonctionnait apparemment
bien, et c’est devenu un discours dominant.
Je ne crois pas que ces gens étaient de mauvaise foi, pas
plus qu’ils n’obéissaient à des donneurs d’ordre qui leur deman-
daient de propager ce discours. On n’est pas dans le cas de l’in-
dustrie du tabac qui payait des chercheurs pour développer un
propos scientifique destiné à montrer l’absence de nocivité de la
cigarette ! L’industrie de la finance
n’a pas « acheté » la communauté
des économistes pour dissimuler On voudrait que l’économie
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p. 10 tion : les vertus absolues des libres marchés pour les uns ou du
contrôle de l’Etat pour les autres. Pour dénoncer sans se tromper
un discours trop empreint d’idéologie, il faudrait pouvoir dire et
expliquer comment fonctionnent effectivement l’économie et la
finance par rapport à des modèles trop simplistes. Il n’est pas
sûr qu’une telle connaissance existe, de la même façon que les
physiciens sont incapables d’expliquer l’ensemble de l’univers.
La connaissance s’arrête souvent à un niveau de complexité trop
faible pour pouvoir écarter l’idéologie, surtout lorsque celle-ci
sert certains intérêts, économiques mais aussi politiques. On
voudrait que l’économie soit une science, avec des réponses
uniques et indiscutables, mais ce n’est pas le cas.
[2] « La théorie Sur ce point, Alan Kirman avance : « Nous avons été piégés par
économique dans la
la vieille ambition des économistes de développer une théorie
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politique économique demande une approche nécessairement p. 11
plus simpliste, dans des livres ou des discours grand public.
Peu d’économistes peuvent faire les deux. Stiglitz est un de
ceux-là. Il a la capacité de marier des discussions de haut niveau
avec ses collègues et la publication d’ouvrages et la tenue de
discours que certains qualifient de simplistes mais qui essaient
d’influencer le cours des choses.
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science politique, de la sociologie, etc. L’avenir de l’économie se p. 13
trouve-t-il dans des approches multidisciplinaires ?
FB : Au cours de ces dernières années, l’économie a connu
une ouverture croissante et bienvenue vers les autres sciences
sociales. Il ne s’agit heureusement plus de tout expliquer, du
mariage au suicide, par le comportement de l’homo oeconomi-
cus, mais de s’ouvrir à la psychologie, la sociologie, l’histoire,
etc. Cette ouverture ne peut qu’être bénéfique. D’un côté, l’appa-
reil analytique des économistes est souvent plus solide que celui
dont disposent d’autres sciences sociales. D’un autre côté, les
autres disciplines ont accumulé une connaissance factuelle qui
manque aux économistes.
Nous avons par exemple beaucoup à apprendre des histo-
riens : quand certains économistes, comme Daron Acemoglu,
construisent des modèles visant à expliquer les évolutions de
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