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PARIYATTI
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Dr Paul R. Fleischman
Traduit de l’américain
Rédacteur et coordinateur
de la traduction française :
Philippe Fromont
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Préface
II
karma & chaos
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préface
Les trois essais suivants de ce livre, écrits sur une période d’en-
viron quinze ans, portent sur les plateformes d’échange entre la
psychiatrie et la psychothérapie d’une part, et Vipassana d’autre
part. Les professions d’aide psychologique (psychiatrie, psycho-
logie, assistance sociale, soins médicaux, écoute spécialisée, etc.)
représentent sans doute la plus grande proportion parmi les métiers
pratiqués par les étudiants de Vipassana aux USA et au Canada. Ces
articles abordent la façon dont Vipassana intervient dans la santé,
ses relations avec la vie personnelle des praticiens, ses points com-
muns et ses frontières avec les démarches psychothérapeutiques,
et ce qui en fait la spécificité. J’espère que ces écrits inciteront un
nombre toujours plus grand de thérapeutes à pratiquer Vipassana,
et participeront non seulement au maintien de la communication
entre professionnalisme et méditation, mais aussi de la distinction à
conserver dans leurs particularités et finalement, de leur pureté. Ce
sont là des terrains fertiles où ces deux mondes se recoupent. Mais
ils occupent également des espaces radicalement divergents.
L’essai suivant, « L’Expérience de l’Impermanence », s’efforce de
dégager quelle est la prise de conscience à laquelle Vipassana donne
accès. Il décrit ce qu’on peut espérer expérimenter par la médita-
tion, et de la pertinence de celle-ci dans le monde d’aujourd’hui. La
méditation n’est pas juste faite pour les ermites qui ont pris racine
au pied d’un arbre. L’univers au-delà du Soi peut être appréhendé
directement et peut donner son sens à toute situation, que l’on soit
dans un bureau de Seattle ou dans une cuisine du Massachussetts,
que l’on soit en train de se marier ou qu’on soit en fin de vie.
Pour finir, l’essai « Karma & Chaos », écrit en collaboration avec
Forrest D. Fleischman, est le plus long de tous, le plus difficile, et
sans doute celui qui est le plus près du cœur de l’auteur. S’il n’est
pas nécessaire à tout un chacun de s’adonner à de telles cogita-
tions pour se développer dans Vipassana, il aborde néanmoins des
aspects qui auront été vitaux pour moi dans mon développement
spirituel, ce qui risque fort d’être également le cas pour nombre de
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III
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préface
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Prologue
Un lien sacré
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Pourquoi Je M’assois
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II
Je m’assois à cause de mon appréciation de la vie de chaque jour,
pour elle et avec elle. Les grands poètes chantent la chose ordinaire,
imprégnée de révélation ; mais je sais à quel point ma propre vie
cède avec facilité et trop souvent à la distraction, à l’irritation, à une
étroitesse de vue. Je ne veux pas manquer ma vie de la façon que j’ai
une fois manqué un avion à l’aéroport de New York. On pourra
trouver amusant, ridicule que j’aie besoin d’une technique, d’une
pratique, d’une discipline, tout simplement pour me libérer des
rêveries et des soucis… mais j’en ai besoin ; et je m’incline devant
cette ironie en faisant ce que je dois pour arracher de mon esprit les
préoccupations éphémères, pour m’éveiller à des aubes plus nom-
breuses, pour voir l’enfant en moi s’extraire de la mouvance de ses
transformations.
Cela peut paraître paradoxal que je doive travailler si intensé-
ment pour être en paix avec moi-même, mais c’est bien le cas. Et
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IV
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d’autres mots, ce n’est que parce que nous sommes à la fois sépa-
rés et unis que l’amour existe. Si nous n’avions pas d’existence
individuelle, pas de moteurs exclusifs, il n’y aurait qu’un monde
homogène et liquide, dénué d’émotion, inapte à la connaissance,
à la manière d’un doigt sur une main. À l’opposé, si nous étions
séparés de manière inéluctable il n’y aurait que de froides étoiles
fonctionnant en autonomie, coexistant dans un espace mort.
Il me semble que le sens à donner à l’amour est l’organisation des
émotions humaines en ces états complexes lors desquels, paradoxa-
lement, coexistent séparation et fusion, individualité et immersion,
être et non-être. Il n’y a que l’individu qui puisse aimer ; et il n’y a
que celui qui a cessé de l’être qui puisse aimer. S’asseoir m’a aidé
à développer ces deux pôles. S’asseoir m’ouvre comme une huître
quand je me retrouve bloqué ; et lorsque je chute, tel un morceau
détaché du tout, cela me recolle à la bonne place.
S’asseoir me repousse aux limites des efforts que j’oriente vers
moi-même ; cela mobilise mon orientation, entière et délibérée, et
pourtant cela sape toute manœuvre portant à me protéger ou sim-
plement à me définir. Cela construit mon « moi » en même temps
que cela le détruit. Tous les débris de mémoire, d’espoir, d’aspira-
tion, de peur s’engouffrent dans la brèche. Je ne peux plus préten-
dre m’identifier à un ensemble sélectionné de mes souvenirs ou de
mes traits de caractère.
Si l’on observe tous ces contenus mentaux, sans y réagir, ceux-
ci deviennent acceptables et peuvent être reconnus comme partie
intégrante de moi-même (car ils sont là, dans mon esprit, juste en
face de moi) ; mais en même temps ce sont des phénomènes-dans-
le-monde qui sont impersonnels, liés à une causalité, objectifs, qui
se déplacent sans interruption, sans repos, à travers l’écran de mon
existence, sans effort, sans contrôle, sans moi. Je peux alors aper-
cevoir, accepter d’avantage de ce qui compose ma vie intérieure, en
même temps que j’échappe partiellement à ces forces qui tentent
de me contrôler. À l’instar d’une tempête ou d’une colombe, elles
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que l’amour est concret, et abstrait. S’il ne s’agit que d’un senti-
ment général et sans forme distincte, cela reste une platitude, un
vœu pieux, un rempart érigé contre toute implication réelle. C’est
bien cela qui sonne creux dans l’« Amour ! », pieux et dévot que l’on
entend chez certaines églises, certains martyrs. Mais si l’amour se
limite au concret, à l’immédiat, au personnel, il reste du domaine de
la possession, de l’appartenance, du matérialisme, du narcissisme.
C’est l’amour paternaliste qu’on ressent pour sa maison, ses voi
tures, sa famille. Ce que je comprends est que l’amour pour être
vrai doit se répandre dans les deux sphères. S’il chevauche les ailes
de l’idéal, il s’élance pour emporter avec lui tous ceux qu’il croise
sur sa route.
Je m’assois pour mieux aimer ma femme, ces amis et ces cama-
rades en compagnie de qui je fais route ne serait-ce qu’une seule
journée lors d’un vol nous menant de l’inconnu vers l’inconnu. Il
est difficile d’aimer celle avec qui mon destin est emmêlé au plus
près, dans ces moments où je ne voudrais rien d’autre que mettre
en pièce les corridors de ce destin. Mais il est facile de l’aimer quand
nous rajoutons mutuellement du sucre dans notre tasse de thé. Il
est facile de ressentir de l’affection pour ces amis que je rencontre
lors de week-ends consacrés à la vie familiale et aux activités de
plein-air. Il est difficile de laisser nos vies, notre santé, nos finances
se confondre. Une telle amplitude menace la sécurité de chacun.
Et il est encore plus difficile de placer cette manière d’être en tout
premier lieu, pour me mettre en jeu et en danger encore et encore.
Vais-je garder tout mon argent ou puis-je le mettre en risque en
tablant sur de généreux principes ? Vais-je étudier le texte approuvé
par les autorités, ou dois-je chanter par cœur ? Quand je m’assois,
l’argent ne m’est pas d’une grande utilité. Les louanges s’évaporent.
Mais le ton donné par les cordes de mon cœur, pour le meilleur et
pour le pire, je ne peux y échapper. Je m’assois pour me ligoter au
mât, afin d’écouter plus avant la chanson de l’amour insaisissable et
inévitable.
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confrontation délibérée avec tout ce qui m’a été imposé, m’a poussé
à réagir, et par réaction, à me modeler.
La vie commence dans un chaos de conditions. Simplement réagir
à ces conditions construit des limitations ; la conscience attentive
aux conditions, et la réponse consciente qu’on leur oppose, pro-
duisent la liberté. Cette limpidité dans mes choix me permet, après
l’assise, de revenir à l’action avec plus de netteté dans le regard, plus
de concentration, vecteur d’une vie de connaissance, plus empathi-
que.
S’asseoir, en soi, transforme mes motivations à m’asseoir. Ayant
commencé mon périple aux circonstances historiques qui me sont
propres, j’ai reçu le don d’une technique utile en des millions de
circonstances au long de milliers d’années. Ayant commencé mon
périple sur des bases individuelles, il m’a été donné d’apercevoir des
perspectives intemporelles pour élargir mon point de vue. Ma quête
est individuelle, mais pas unique. La transmission de cet outil a
rendu mon travail possible. Parce que d’autres ont aussi commencé
leur quête en vue d’une vie humaine plus pleine, parce que d’autre
suivront ces traces, ma propre fragilité, mes propres turpitudes,
peuvent acquérir un sens puisqu’elles sont le terreau que je dois
utiliser pour grandir. Et mes propres efforts, pour grands qu’ils me
paraissent, restent dans l’ombre d’autres efforts, bien plus grands
que les miens.
Je peux fleurir tel un buisson dans une forêt infinie, pendant un
cycle de vie sans fin. Fleurir, pour un être humain, c’est dévelop-
per la science de l’observation honnête qui rend possible une image
authentique de l’humanité à naître. Même issu du conditionnement
nihiliste et d’effroi qui est le mien, sans le confort que confèrent
de simples croyances, conscient de la méchanceté et de la haine
phénoménales que porte en soi l’âme humaine, de ses guerres qui
peuvent causer le massacre de dizaines de millions de personnes,
je peux être, je serai, une expression de foi insatisfaite. Je ne peux
faire beaucoup, mais je peux lancer mes racines profondément dans
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est un tout petit prix à payer pour entendre cette musique inté-
rieure, cette musique fertile du cœur de la vie-même.
Ce fut ma chance, en cheminant, de trouver et de suivre de nom-
breux amis qui, tels des champignons dont on a trop longtemps
négligé l’observation, résistent à toute tentative de les arracher de
la souche qu’ils occupent : leurs racines ont pénétré jusqu’au bois
de cœur. Au contact de ceux-ci, j’ai aperçu la lueur de deux lam-
pes : dévotion et intégrité. Et voici un plaisir à ajouter au reste, je
pense que ce fut même parfois une nécessité : pouvoir s’asseoir avec
mon épouse à mes côtés. Même les étoiles se déplacent en constel-
lations.
XI
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karma & chaos
XII
Je médite pour ancrer et organiser ma vie autour de mon cœur et
de mon esprit et les laisser irradier mes découvertes vers ceux qui
m’entourent. Les grands vents ont beau m’ébranler, je reviens tou-
jours vers ce mode de vie fondamental. Je ne peux jeter aux orties
mes idéaux de jeune garçon et mon sourire de vieil homme. Le
confort plaisant, lénifiant et la profonde détente qui accompagnent
l’attention silencieuse, intense dans l’immobilité du corps, pèlent
ma vie comme un oignon jusqu’en des couches plus profondes
où la vérité s’épure et se détend jusqu’à ce que la couche suivante
s’ouvre à son tour. Je médite pour apporter à ma vie la discipline
de ce qui est clair, simple, jubilatoire et universel dans mon cœur.
C’est une tâche sans fin. Bien des jours de ma vie se sont passés sans
que je les vive vraiment, mais je me replonge encore et encore dans
les évidentes directives de la maîtrise de soi et de la recette d’amour.
Je médite pour découvrir et exprimer l’amour humain dans sa sim-
plicité et la décence fondamentale.
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L’Action Thérapeutique
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Connaissance de Soi
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Confiance Fondamentale
Intégration du Passé
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Le Futur et la Volonté
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Responsabilité
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teint son point focal que lorsque les actions du quotidien s’orien-
tent dans la même direction. Pour que la concentration soit juste, il
faut donc une stimulation légère et subtile, car la concentration qui
résulte de bruyantes exigences ne fait qu’obscurcir le bric-à-brac
hétérogène intérieur. Tenter de se concentrer sur ce-sur-quoi-il-est-
difficile-de-se-concentrer engendre inévitablement et précisément
l’observation de ce qui nous distrait. La méditation nous amène
donc non seulement à s’observer, à participer de manière exclusive,
à intégrer et accepter notre passé, à appréhender clairement la cause
de notre futur, à endosser la responsabilité de notre vie, mais éga-
lement à gérer la connaissance pragmatique des bases de l’éthique.
Pour connaître la paix, nous devons être à la paix.
Les distractions qui troublent la concentration, quand on ne les
laisse pas nous envahir ni ne les supprime, que l’on se contente
de les appréhender, sont généralement faites de désir et de peur
concernant le passé ou l’avenir. Pour parvenir à la concentration
subtile, il nous faut nous reposer sur le présent et abandonner la
multitude de manœuvres de renforcement ou de protection du soi,
manœuvres qui constituent cette perpétuelle pression psychologi-
que à fantasmer. C’est alors que les qualités naturelles d’un esprit
capable de faire face à la réalité deviennent évidentes.
Contrôle de Soi
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Histoire et Communauté
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Temps et Changement
Replacer l’étudiant dans la transmission des générations n’est
pas la seule façon pour Vipassana de lui ouvrir les yeux à la réalité
du temps et du changement. Améliorer la capacité de l’étudiant à
contempler directement la réalité de l’impermanence, du flux, du
vide et de la mort, tel est le cœur de la pratique. La technique impli-
que de voir la réalité pleinement, à la condition d’une préparation
adéquate. La confrontation avec la souffrance et la dissolution est,
toutefois, une expérience humaine universelle ; Vipassana permet
à cette rencontre de se faire avec équanimité. La technique intègre
là quelque chose d’ironique : plus intense est notre confrontation
avec la réalité, plus profonde est notre équanimité ; plus notre équa-
nimité est profonde, plus rapidement nos désirs et peurs superfi-
ciels disparaissent couche après couche, à la façon des pelures d’un
oignon et plus nous nous rapprochons des anxiétés qui forment le
cœur de l’existence humaine.
L’immobilité physique est une peur fondamentale de l’être
humain (nous avons tous rêvé que nous étions paralysés, incapables
de courir, incapables de parler) ; Vipassana nous prépare à faire face
à cette peur. La peur de la douleur est également une peur fonda-
mentale (certains psychiatres considèrent qu’elle est la roche-mère
de toutes les peurs) ; Vipassana nous y plonge et nous en extrait.
La solitude est une peur fondamentale ; Vipassana nous guide vers
la confiance, la communauté, l’engagement, mais aussi vers la pro-
fonde solitude du silence, et nous pourrons apprendre à transfor-
mer cette glace en une boisson qui rafraîchira nos esprits échauffés.
Les théories anciennes et modernes sur le cœur humain, indiquent
souvent la mort comme le nœud, le point où se forme le caractère,
où la connaissance se révèle, et où s’enracinent les anxiétés les plus
profondes. Socrate bien sûr considérait que la philosophie était l’art
de mourir ; un vaste corpus de théories psychiatriques contempo-
raines lui fait l’écho, et il en va de même pour la technique de médi-
tation Vipassana.
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Intégration Physique
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Les Relations
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La Vérité
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L’Amour Humain
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James, Carl Jung, Paul Tillich, Erik Erikson, Jerome Frank, Mircea
Eliade, etc.
Mais lorsque nous nous ouvrons pour recevoir le Tout, une
grande obscurité s’engouffre en même temps. Notre vieille lampe
électrique sélective ne peut, seule, tout éclairer dans son maigre
faisceau. Nous ne pouvons plus exclure les bouches dévoreuses
du temps, les époques Hitlériennes annihilant des éléments de
vie pour des siècles, des civilisations, des peuples tout entiers ; les
craintes que nous avons pour nous-mêmes et pour tous ceux que
nous aimons ressemblent à des embruns s’élevant de l’écume pour
être à nouveau absorbés dans l’océan illimité, pour l’éternité. La
culture humaine elle-même, avec ses génies religieux, artistique
et scientifique, nous a fourni les bougies, les torches, les soleils,
même, qui nous révèlent miraculeusement la terre ferme enclose
par les mers. Vipassana est de ceux-ci. C’est une technique qui
nous fait entendre la sagesse de la vie elle-même contenue en notre
organisme, au même titre que la sagesse de la faim, nous révélant
le puits pénétrant de la vision, de la détermination, d’avantage de
talent farouche et de douceur, au service de la vie que nous vivons.
En nous et autour de nous est le créateur qui nous importe. Vipas-
sana est un moyen d’activer un amour durable et porteur dans le
réseau de tous contacts.
Les étudiants qui entreprennent de se former dans cette disci-
pline se trouveront en train de pénétrer dans un grand hall obscur
à 4h30 du matin. Ils seront entourés de nombreux compagnons de
route assis en silence, bien droits, des hommes, des femmes, des
professeurs et des voyageurs sans emploi, des juristes et des mères
de famille, à leur poste tous les matins, jour après jour, pendant dix
jours. L’obscurité pâlira, les étoiles se feront rares, seul un crois-
sant de lune luira encore, les oiseaux dérouleront un rideau de vie
à l’orée du jour nouveau, puis disparaîtront. Le hall sera baigné de
lumière, mais encore immobile et plongé dans le silence ; un chant
se fera entendre, dont les mots vieux de deux mille cinq cents ans
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La méditation Vipassana :
guérir celui qui guérit
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reconnue par tous ceux dont les diverses professions ont pour but
de soigner.
Nous devons être capables de nous percevoir en profondeur,
de confronter nos peurs et nos préjugés, nos conventions et nos
opinions, pour faire face intelligemment et lucidement à la réalité.
Nous devons être capables de faire la différence entre, d’un côté les
accidents de notre naissance et notre culture, et de l’autre les condi-
tionnements spécifiques aux vérités universelles et hors du temps.
Nous nous devons de vivre une vie équilibrée et pleine qui balaye
au large ce qui fait notre potentiel en tant qu’être humain ; nous
nous devons cependant de maintenir notre attention avec discipline,
détermination, endurance et persévérance sur ce qui est essentiel,
central et crucial. Nous nous devons d’aimer, non seulement ceux
qui, par choix ou accident, sont nos compagnons de route, mais
également le potentiel d’éveil qui frémit dans toute forme de vie,
de façon à percevoir une possibilité d’évolution dans l’agitation
qui nous entoure. Nous nous devons d’accepter que la mort nous
emportera un jour, chacun de nous et chacun de nos patients. Nous
nous devons de reconnaître, d’accepter cette issue, nous incliner
devant elle, mais nous devons cependant bouter l’étincelle de l’es-
poir et de la confiance en la luminosité des moments imminents,
en ceux qui sont dans la douleur, la défaite, la sécheresse et le
cynisme.
Nous devons réfréner nos instincts sensuels, nos impulsions, nos
besoins et cependant veiller à nous nourrir, de sorte que le contrôle
que nous avons de nous-mêmes ne se traduise pas sous forme de
dureté, mais laisse jaillir la force de notre vie intérieure.
Nous devons parcourir le chemin qui mène de l’ignorance à la
sagesse, du doute à la clarté, de la conviction à la découverte. Nous
devons vivre chaque jour comme un nouveau commencement, sans
accumuler doctrines ou conclusions, tels des oisillons au printemps
de la connaissance.
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la méditation vipassana : guérir celui qui guérit
centres où l’on enseigne Vipassana ne sont gérés que par des dona-
tions volontaires.
Les longues heures silencieuses d’un cours de méditation Vipas-
sana font remonter à la surface de l’esprit ses contenus cachés et
longtemps refoulés. Le résultat est une rencontre en profondeur
avec notre histoire personnelle, notre vie intérieure. Le praticien
en retirera un approfondissement de la connaissance de soi et une
compassion plus profonde face à la souffrance des autres. Je ne
connais rien de plus humanisant qu’une bonne confrontation avec
une version non expurgée de l’histoire de notre propre vie ! Un autre
bienfait pour le praticien de santé est un plus grand respect pour la
multiplicité des modalités de guérison. Au lieu de devoir défen-
dre sa propre discipline par rapport à d’autres : la psychiatrie, c’est
bien, l’acupuncture, non ; la chiropraxie a de la valeur, mais pas le
yoga…, on devient capable d’apprécier que la pensée, le sentiment,
le jugement, le choix et l’action sont les dénominateurs communs
de nos souffrances, mais aussi de l’élimination de celles-ci. Nous
bâtissons les murs de notre monde par nos pensées, nos actions,
notre façon de donner. Les modes de guérison varient selon leur
façon d’intervenir. Pour être efficaces, ils dépendent de l’intégra-
tion de ces variables de base, universelles. Ils seront décevants s’ils
obscurcissent une ou plusieurs de ces variables qui constituent leur
champ d’opération.
Par exemple, une nutrition correcte, engendrant une énergie
transmissible à nos actions sociales, se démarque clairement de
la gloutonnerie et de l’épicurisme. Des exercices physiques ayant
pour but un développement de la conscience et de la vitalité se
démarquent clairement de la vanité du bodybuilding ou de l’agres-
sivité d’une compétitivité aveugle. On préfèrera les traitements qui
augmentent l’autonomie, la responsabilité, à ceux qui induisent la
dépendance. Vipassana nous permet de transcender le dualisme
corps-esprit, ou même Orient/Occident, nous permettant de ten-
dre la main à l’enracinement dans l’éthique, à l’installation d’un état
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La Méditation Vipassana :
Une Contribution Unique
à la Santé Mentale
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la méditation vipassana : une contribution unique à la santé mentale
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la méditation vipassana : une contribution unique à la santé mentale
donne forme à notre relation avec notre corps, nos émotions, nos
voisins et le monde. Nous devenons des voyageurs sur la Voie, de
ceux qui vivent avec l’intention consciente (plus ou moins couron-
née de succès) de charger chaque moment de sagesse.
Vipassana est unique en tant que chemin de purification totale ;
c’est la méthode du Bouddha, la source de ses accomplissements,
d’où est issue sa réalisation ; c’est en même temps une psycholo-
gie de chaque moment, éthique, comportementale, émotionnelle,
cognitive et spirituelle. Toutefois, « unique » ne veut pas dire exclu-
sive. Il existe des moments où tout le monde pratique spontané-
ment la même chose : on observe alors comment on réagit aux petits
signaux du confort physique qui infléchissent trop facilement nos
choix de vie et qui font obstacles à nos efforts de distanciation vis-à-
vis de ces tiraillement mesquins, une distance permettant à la vie de
s’écouler plus harmonieusement, avec de plus fortes et plus grandes
énergies spirituelles telles que la gratitude, le service donné et la joie.
De même que l’exercice physique est une partie inhérente de la vie
humaine, encore qu’il ne soit pratiqué par certains que par hasard
et avec désinvolture, de même Vipassana est-il le terme donné par
le Bouddha à une capacité naturelle de notre esprit. Nombreux sont
ceux qui le manient sans lui donner consciemment un nom et bon
nombre de cultures en enseignent certains aspects sous différents
vocables. Tous les êtres purs, sans s’inquiéter du terme employé,
sont parvenus là où ils sont en se détachant de leurs préoccupations
narcissiques à l’égard de leurs sensations corporelles.
Toutes les vies engagées, aimantes, généreuses ont la même base
psychologique : la pratique de l’équanimité vis-à-vis des sensations
de notre propre vie. Vipassana est unique, non pas dans le sens où
c’est une voie meilleure qu’une autre, mais parce qu’elle repose et se
développe dès le départ comme partie intégrante de tout enseigne-
ment d’entraide, de refus de nuire et d’amour du prochain. L’eau, le
solvant qui procure la vie aux cellules et aux tissus, est un composé
clair et omniprésent. Plus que la rareté, c’est son côté universel qui
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la méditation vipassana : une contribution unique à la santé mentale
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une vie, vous choisissez une nourriture plus saine et des modes
de détente plus salubres, vous allez devenir un autre animal. Nos
tissus ont la capacité de se remodeler jusqu’à un certain point, en
réponse aux soins amicaux qu’on leur prodigue. On expérimente
l’harmonisation avec son corps automatiquement, sitôt qu’on le
nourrit de façon juste.
c) Vipassana a un effet remarquable au niveau psychologique. Les
vieux complexes disparaissent, de nouvelles attitudes et vertus
se font jour, des souvenirs refont surface, nos relations apparais-
sent et se développent sous de nouvelles perspectives, l’avenir
se déconstruit et s’ouvre à de nouveaux chemins, on reconnaît
à l’histoire, à la communauté humaines, un potentiel différent
de ce que nous croyions, les événements de la vie font l’objet de
nouvelles expériences et sont réexaminés sous un nouvel angle.
C’est là la contribution la plus spectaculaire et la plus flagrante
de la méditation, et la raison qui sous-tend son attirance pour
beaucoup d’entre nous.
d) Vipassana est une éducation du sens des valeurs. Le but de Vipas-
sana est la manifestation des vertus d’amour, de compassion, de
joie et d’équanimité et, en tant que psychologie, on peut recon-
naître que cela englobe l’apprentissage direct. La vertu se cultive
dans l’intimité ; elle peut être également introjection à partir de
l’exemple donné par les enseignants, lequel peut résider dans
l’esprit de leurs étudiants sous forme de noyaux d’inspiration.
Vipassana, dans ce sens, incorpore une psychologie cognitive
et comportementale, qui encourage une pratique active des
moyens idéaux de résoudre des problèmes, d’interaction avec les
autres, de prendre place dans la société. Vipassana est également
quelque chose que l’on fait. La vénération, le respect, la gratitude,
le service sont des façons de se comporter dans le monde qui
peuvent s’apprendre comme on apprend à rouler en bicyclette ;
la méditation est également la démarche du disciple vers l’action
juste. Construire son caractère est une question de répétition et
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d’effort ; il ne suffit pas de rester assis, les yeux fermés, sur son
coussin. Vipassana est un entraînement à la culture psychologi-
que.
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Tous ceux qui ne peuvent pas suivre ces cours de dix jours de
Vipassana peuvent malgré tout retirer des bienfaits de cet ensei-
gnement, mais sans l’intensité impliquée par un silence de dix
jours et l’observation ininterrompue des sensations physiques. À
tout moment, d’anciennes habitudes de colère, envie et peur peu-
vent se manifester à des degrés divers ; de même que peuvent se
développer la générosité, la tolérance, l’honnêteté et la sobriété.
La pratique de ces dernières manières d’être, bénéfiques, fait par-
tie intégrante de la voie. «¾n±p±na», la forme de méditation qui
permet d’induire la concentration par l’attention exclusive à la
respiration, sur des durées plus courtes que les dix jours, a peu
de chances de faire remonter d’anciennes et profondes réactions ;
elle peut produire une détente et constituer une bonne préparation
à une retraite de dix jours. Chaque mot prononcé avec considé-
ration, chaque souvenir chargé de gratitude peuvent également
renforcer la base d’une pratique future de Vipassana. Même si un
étudiant potentiel ne se trouve pas prêt dans le présent à faire face
au surgissement de ses anciens schémas réactionnels, il peut mal-
gré tout pratiquer les vertus caractéristiques telles que gratitude et
compassion, qui pourront peu à peu lui procurer le contrôle et la
force d’entreprendre un cours de méditation avec confiance et suc-
cès. Après une telle période de patience attentive et de préparation
bien pesée, les anciens schémas réactionnels pourront remonter à
la surface en toute sécurité lors d’un cours futur de Vipassana. La
façon dont on vit pendant que l’on attend de pouvoir participer
à un cours de Vipassana constitue certainement le meilleur usage
de son temps et l’exercice le plus sage pour s’aguerrir. Certains
bénéficieront d’avoir attendu longtemps avant de se lancer dans un
cours de dix jours – un moratoire qui peut durer des mois ou des
années – et de trouver la force de se passer de cigarettes ou d’avoir
meilleur contrôle sur de vieux accès de panique ou de dépression.
Cette attente ne constitue pas un exil, mais au contraire la prépa-
ration à une expérience plus profonde.
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4) Exemples
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I) Participation
La demande d’inscription à un cours de Vipassana implique un
examen de soi honnête, en même temps qu’une réflexion de la part
des organisateurs du cours. Cependant, il arrive qu’ un étudiant
s’engage dans un cours de dix jours sans en être capable, par égare-
ment involontaire ou par choix délibéré de cacher ses faiblesses.
Un héroïnomane de la banlieue de New York dissimula son
accoutumance sur son bulletin d’inscription et sous-estima son
intoxication à la cigarette, si bien que, dès le début, il se trouva
submergé par un brutal et double sevrage chimique. Tout en res-
tant poli et capable de dialogue, il refusa tout net de rester plus
longtemps que deux jours, manifestement déchiré entre son sou-
hait de trouver une voie de sortie à sa double dépendance chimique
et le pouvoir qu’elle conservait sur lui, qui rendait l’immobilité et
l’auto-observation impossibles, confronté qu’il était à ses besoins
pressants et à l’agitation.
Un étudiant en fin d’études universitaires omit d’indiquer sur
son bulletin d’inscription un passé clinique de pensées délirantes
et de bouffées psychotiques. Il avait cessé de prendre ses médica-
ments et de voir son psychiatre, à cause de son désir poignant d’ef-
facer tout ce passé par la méditation. Lors d’un cours de Vipassana,
il fit des efforts pendant toute une semaine, son état se détério-
rant progressivement. Lorsque les organisateurs remarquèrent des
comportements bizarres, des difficultés à suivre le programme et
qu’il avait entamé un jeûne, l’enseignant l’interrogea et comprit,
aux réponses qu’il donnait à ses questions, que l’étudiant avait éla-
boré des déviations personnelles à la pratique correcte de Vipas-
sana, était très perturbé et totalement perdu. On appela sa famille
et avec l’aide de sa femme, les organisateurs le remirent entre les
mains de son médecin.
Ces deux exemples illustrent le fait qu’une retraite de méditation
ne peut venir en aide à quelqu’un qui dès le départ use du mensonge
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II) Observation
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fois par jour et à suivre des cours de dix jours. Il se sentait satis-
fait des sensations agréables de flux libre dans son corps pendant la
méditation et il commença à considérer ces expériences de dissolu-
tion extatique comme une preuve de sainteté et de « réalisation ». Au
lieu de voir en Vipassana un chemin d’auto-observation objective, il
en fit un chemin d’auto-absorption sensuelle ; au lieu d’un chemin
de compassion, il fit de Vipassana une forteresse de rigidité. Tout
en méditant, il se complaisait à imaginer ses vies passées et futu-
res, au détriment de sa vie présente. Lorsque sa femme l’exhorta
finalement à l’accompagner chez son psychiatre pour des séances
de thérapie de couple, le mari californien rejeta avec hauteur les
suggestions du psychiatre de suivre lui-même une psychothérapie
et de prendre des médicaments pour réduire son délire mégalomane
de compensation.
Le couple californien finit par se séparer. La femme se considérait
maintenant comme un cas proprement médical, prenant des médi-
caments psychotropes et quelques préparations phytothérapiques.
L’arrogance défensive du mari transforma son refus de médication
psychiatrique en témoignage de pureté spirituelle.
S’abaisser à jamais recourir à la psychothérapie ou la médication ?
Il était bien au-dessus de cela !... il en fit la pierre angulaire de son
estime de soi. Il entama une procédure en divorce agressive, pleine
d’amertume, de ressentiment et de justification de soi. Comme
les enseignants de Vipassana refusèrent de cautionner son agressi-
vité procédurière sur fond de rationalisation de la réincarnation, il
abandonna la méditation et jeta son dévolu sur un groupe de Los
Angeles qui prônait « l’illumination instantanée ».
Pour que la méditation porte ses fruits, il est besoin d’un dis-
cernement raisonnable qui permet de faire la différence entre la
voie d’un Bouddha d’un côté, les tendances, les effets de modes et
les engouements de l’autre. De même, recourir à la médecine est
une fort bonne chose pour autant que le consommateur conserve
un minimum d’esprit critique. L’histoire de l’épouse californienne
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ceux-ci, mais leur route allait prendre une toute autre direction. Ils
allaient devoir de toute évidence parcourir un trajet plus difficile, et
cependant ils découvrirent la contribution unique de Vipassana à la
santé mentale.
Le mari était né dans une famille au passé marqué depuis des
générations du sceau de la pauvreté et de l’oppression. Il avait
grandi dans une atmosphère d’exil, de terreur et d’inimitié et,
durant son développement, son système nerveux avait été impré-
gné de réactions de peur et de désespoir. Bien des années plus
tard, il allait comprendre qu’il présentait tous les symptômes d’un
état anxieux et dépressif. Mais sa rencontre initiale avec Vipassana
lui permit de s’enraciner profondément dans la pratique. Il était
déterminé à utiliser sa détresse comme d’un catalyseur toujours
présent pour faire face à sa réalité intérieure d’une façon aussi
objective et équanime que possible. Son exploration n’était pas
celle d’un simple stoïque. Il avait compris que la Voie est un art
de vivre et non pas seulement une tactique ; il cultivait les relations
interpersonnelles et la générosité avec autant d’assiduité que quand
il « s’asseyait ». Il pansa ses blessures à l’aide du calme purificateur
qui accompagne un style de vie sobre et empreint de moralité. Il
avait toute la vie pour aller de l’avant, sans les limites de temps
que se fixerait un impatient. En dépit – et à cause – de la mémoire
interne de sa profonde souffrance, il s’épanouit progressivement
comme professeur de musique et chef d’une chorale scolaire. Son
mariage, pénétré de respect, de dévotion et d’affection mutuels,
était une source de réconfort et de joie dans une vie qui conti-
nuait d’avoir sa part de vulnérabilités. En compagnie de sa femme,
il donnait du temps et de l’énergie pour rendre Vipassana plus
accessible aux autres. Vipassana ne constituait pas un traitement
pour son état dépressif et anxieux, mais lui permettait d’y puiser
une source de détermination et un sens.
L’épouse de la côte Est avait eu un parcours psychiatrique débi-
litant dans sa prime jeunesse. Le suicide de son père, les terribles
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Résumé
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Faire L’Expérience
De L’Impermanence
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II
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III
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quand les écoliers que nous fûmes apprirent à lire et à écrire. Ce qui
semble terrifiant et impossible vu dans sa globalité, devient un défi
à relever, à notre portée, lorsqu’on l’envisage étape par étape.
Le barreau de l’échelle de développement où nous nous tenons
en ce moment est l’expérience de ce qu’on pourrait appeler « anicca-
malgré-nous ». L’expérience d’anicca s’accompagne toujours de
souffrance ; à cause de la grande résistance que nous portons au fond
du cœur à son encontre, à cause de la grande tristesse représentée
par la perte de l’image que nous nous faisons de nous-mêmes, une
image dont nous sommes épris de façon narcissique et que nous
souhaitons préserver et défendre par le pouvoir de la volonté – à
cause de notre recherche effrénée de sécurité et de satisfaction dans
notre vie, par le biais d’une projection plus grande que nature d’un
Moi idéalisé, que nous imaginons être éternel.
Existe-t-il un-e étudiant-e de Vipassana qui ne se soit jamais
levé-e à la fin d’une heure de méditation de ferme détermination
sans avoir sur les joues au moins deux petits ruisseaux de la rivière
de vie en train de couler librement ?
Anicca est ce qui nous fait fuir ; anicca est ce que nous craignons ;
c’est ce contre quoi nous regimbons et que nous tentons d’écraser.
Anicca est la destruction de notre pouvoir personnel, la perte de
notre univers tel que nous le connaissons. Anicca est ce qui plonge
le monde dans la démence. Mais l’expérience d’anicca, cette oppor-
tunité précieuse et génératrice de félicité en laquelle cela prend tant
de temps pour se développer (des vies entières, dit-on) la vérita-
ble expérience directe, loin de notre cinéma, de nos blablas, de nos
regards de travers – l’expérience d’anicca est aussi simple et claire
que le vent.
C’est un soulagement, comme un plongeon dans la fraîcheur
d’une rivière. Je suis maintenant emporté par la rivière ; après tant
de complications, le courant m’arrache et je suis seul. Mais je peux
nager, ou flotter plutôt. Le moi auquel je tenais, je l’ai laissé sur
le rivage avec ma serviette de bain, mais je suis toujours vivant ;
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faire l’expérience de l’impermanence
IV
Le point de départ de cette voie est si simple qu’il peut être
expliqué en une seule phrase : c’est transcender la souffrance liée
à l’attachement au soi (à l’esprit, au corps et au monde qui y est
associé) en observant paisiblement et avec objectivité l’apparition
et la disparition de tout ce qui compose ces derniers, et ce faisant,
en cultivant une vision pénétrante de leur état fondamentalement
transitoire. Dans ma propre expérience, je suis conscient de chemi-
ner vers cette vérité cruciale et d’en revenir, çà et là, un million de
fois. J’ai bien des vies à vivre, bien des peurs à surmonter, bien des
mains en devenir à guider, bien des compagnons à rencontrer ; bien
des lacs encore inconnus dans leurs lointaines cachettes perdues au
bout du monde, m’appellent à contempler leurs animaux et respirer
leurs brumes, avant que je puisse m’asseoir et fixer mon attention
finale et sans faille sur anicca. J’ai beaucoup à apprendre sur cette
vérité, mais chaque moment de cette prise de connaissance me sai-
sit sans possibilité de volte-face.
131
Karma et Chaos
Par le Dr Paul R. Fleischman et Forrest D. Fleischman
I. Science et Karma
Cet essai traite de l’une des difficultés rencontrées par les étu-
diants de méditation dont les racines sont issues de la tradition
scientifique et que l’incompatibilité apparente entre la science et les
anciennes descriptions orientales de la réalité peut troubler. L’ob-
jectif est ici de construire une passerelle intellectuelle entre des
visions du monde différentes, que pourront emprunter quelques
étudiants pour s’acheminer vers la pratique de la méditation dans
un climat de moindre confusion ou de conflit. Les pages ci-après
ne reprennent pas une description complète de la science ou des
enseignements du Bouddha, mais cherchent à rendre visibles des
couloirs entre les deux mondes qu’un penseur moderne vivant en
Occident peut aisément suivre pour se lancer dans un monde nou-
veau sans avoir le sentiment de vivre une situation de compromis
intellectuel.
L’enseignement du Bouddha se fonde sur la compréhension du
phénomène du karma. « Karma » est le terme sanskrit le plus sou-
vent utilisé dans les langues occidentales, mais dans le cadre du pré-
sent essai, j’utiliserai le terme « kamma », le mot même de l’ancien
langage P±li que le Bouddha utilisait dans ses discours.
La chaîne de causalité à douze composantes (« Paµicca Samupp±da »,
appelée traditionnellement « Chaîne de Causalités Interdépendantes »
dans la littérature française traitant du sujet, ndt), dont le Bouddha
disait qu’elle était essentielle à sa prise de conscience, est fondée
sur l’existence de la renaissance. Le kamma est le mécanisme causal
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II. Le Chaos
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Attracteur de Lorenz
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valeur stable
de pa
n = 2,5
région
n = 3,0 de chaos
pa converge
vers une limite
pa oscille
entre valeurs
pa+1 = npa (I – pa)
n = 2,5
valeur de n
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nous l’avons déjà vu, la science qui envisage le monde comme une
table de billard, avec ses limites spatiales et ses finalités temporelles,
est un archaïsme, avantageusement remplacé par des continuités qui
relient à d’autres tout segment spatiotemporel. Dans cet univers
infiniment intriqué, communicant, intégré et causal, l’agrégation,
la désagrégation et la réagrégation sont des phénomènes ordinaire-
ment récurrents, liés entre eux. Les agrégats du corps et de l’esprit
sont des expressions de forces, de lois et d’équations qui ont vrai-
semblablement modelé d’autres corps par le passé et pourront se
cristalliser de nouveau dans les corps du futur. La science du Chaos
et les mathématiques des équations non linéaires nous suggèrent
que nos corps sont des conglomérats scintillants de particules qui
se sont agrégés en respectant les lois, qu’ils se dissoudront confor-
mément aux lois et qu’ils peuvent s’agréger de nouveau selon les
lois que nous activons et que nous mettons en mouvement, ou bien
pas du tout.
À chaque instant, nous cheminons sur la voie tracée par nos voli-
tions dans un univers à texture dense et astreint à des lois. Nous
sommes nous-mêmes les miroirs et les conséquences des antécé-
dents dont les origines remontent loin dans un passé immémorial.
Et aujourd’hui, nous sommes à notre tour des émetteurs à micro-
ondes, transmettant vers le futur nos propres radiations kammiques.
Il n’y a, aux angles de la table de billard de l’univers, aucune blouse
qui puisse capter, stopper l’élan que nous avons mis en œuvre avec
notre queue de billard.
Le monde que nous voyons, que nous touchons, auquel nous
croyons n’est pas la limite du monde. Il y a, dans toute chose autour
de nous, formation et flux, connu et inconnu. Les horizons y sont
nombreux, peut-être, mais ici, pas de finalité. Au-delà de cet hori-
zon, pour autant que nous allions aussi loin, se trouve un autre
horizon. Au-delà de la frontière du monde se trouvent d’autres
mondes intégrés à d’autres mondes et existant au-delà de tous les
autres mondes. Et pourtant, aucun de ces mondes n’est fixe, pas
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À propos des auteurs
Forrest D. Fleischman rédigea la première version de l’essai
« Karma & Chaos » dans le cadre d’un cours de mathématique lors
de sa première année au collège Amherst Regional High School. Il
obtint son diplôme de l’Université de Stanford en tant que mem-
bre du « Goldman Honors Program in Earth Systems » et reçut sa
maîtrise à Stanford. Il travaille maintenant pour le « Forest Service
Employees for Environmental Ethics » à Eugene, Oregon.
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Le Dr Paul R. Fleischman a pratiqué la psychiatrie durant plus de
trente ans. L’Association Américaine de Psychiatrie lui a décerné le
Prix Oskar Pfister en 1993 pour son « importante contribution aux
perspectives humanistes et spirituelles relatives à la psychiatrie »,
telles qu’il les a présentées dans le livre « The Healing Spirit » (Para-
gon House, New York, 1989, non publié en traduction française).
Il est également l’auteur de « Cultivating Inner Peace’ (1997, 2004,
non publié en traduction française), « The Buddha Taught Nonvio-
lence, Not Pacifism » (2002, non publié en traduction française), et
une collection de poèmes, « You Can Never Speak Up Too Often for
the Love of All Things » (2005, non publié en traduction française),
tous publiés par Pariyatti Press. Avec sa femme, Susan, il suivit son
premier cours de Vipassana sous la conduite de S.N. Goenka en
Inde en 1974. S.N. Goenka les nomma Assistants-Enseignants de
Vipassana en 1987, puis Enseignants en 1998. Ils vivent à Amherst,
Massachussetts.
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Contacts et infos concernant les Centres
de Méditation Vipassana
Des cours de méditation Vipassana dans la tradition de Sayagyi
U Ba Khin telle que l’enseigne S.N.Goenka sont organisés réguliè-
rement dans de nombreux pays du monde.
Le calendrier mondial des cours et le bulletin d’inscription sont
disponibles sur le site Internet Vipassana www.dhamma.org ou
www.french.dhamma.org
On peut également obtenir des informations en contactant les
centres mentionnés ci-dessous.
Europe
ALLEMAGNE
Vipassana Meditation Zentrum Dhamma Dvara
08606 Triebel, Alte Straße 6
Tél : +49 (0) 37434 – 79770
E-mail : info@dvara.dhamma.org
Site Internet : www.dvara.dhamma.org
BELGIQUE
Centre de Méditation Vipassana Dhamma Pajjota
Dilsen Stokkem B-3650, Driepaal 3
Tél : +32 (0) 89 51 82 30
E-mail : info@pajjota.dhamma.org
Site Internet : www.pajjota.dhamma.org
FRANCE
Centre Vipassana Dhamma Mahi
89350 Louesme, Le Bois Planté
Tél : +33 (0) 3.86.45.75.14
E-mail : info@mahi.dhamma.org
Site Internet : www.french.dhamma.org
173
ITALIE
Centro Vipassana Dhamma Atala
Strada prov. Orezzi Obolo
I-29025 Gropparello (PC)
Tél : + 39 0523 857215
E-mail : info@atala.dhamma.org
Site Internet : www.atala.dhamma.org/pub
ESPAGNE
Centro de Meditación Vipassana Dhamma Neru
08460 Barcelona, Apartado Postal 29
Tél : + 34 93 848 26 95
E-mail : info@neru.dhamma.org
Site Internet : www.neru.dhamma.org
ROYAUME-UNI
United Kingdom Vipassana Meditation Centre Dhamma Dipa
Hereford HR2 8JS, Harewood End
Tél : + 41 (0) 1989 730234
E-mail : info@dipa.dhamma.org
Site internet : www.dipa.dhamma.org
SUISSE
Centre Vipassana Dhamma Sumeru
CH-2610 Mont-Soleil No 140
Tél : + 41 (0) 32 941 16 70
E-mail : info@sumeru.dhamma.org
Site Internet : www.sumeru.dhamma.org
CANADA
CANADA
Ontario Vipassana Centre Dhamma Torana
6486 Simcoe County Rd. 56, Egbert, ON LOL 1N0
Tél : + 1 (705) 434-9851
E-mail : info@torana.dhamma.org
Site Internet : www.torana.dhamma.org
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Centre de méditation Vipassana Dhamma Suttama
Fondation Vipassana
C.P. 1055, Sutton (Québec) JOE 2K0
Tél : +1 (514) 481-3504 répondeur
E-mail : info@suttama.dhamma.org
Site Internet : www.suttama.dhamma.org
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À PROPOS DE PARIYATTI
Pariyatti a pour mission de rendre accessible les
enseignements authentiques du Bouddha, sur la théorie
du Dhamma (pariyatti) et la pratique (paµipatti) de la
méditation Vipassana. Organisation américaine caritative
à but non lucratif de type 501 (c) (3), créée en 2002,
Pariyatti est financée par les contributions de particuliers
qui connaissent la valeur incommensurable des
enseignements du Dhamma et veulent la partager. Nous
vous invitons à vous rendre sur le site www.pariyatti.org
pour en savoir plus sur nos programmes et services, et
apprendre comment soutenir nos publications et autres
projets.