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Droit des entreprises en difficulté

DROIT DES ENTREPRISES EN DIFFICULTE


Introduction

Procédure collective est une procédure dans laquelle le règlement des


dettes et la liquidation éventuelle des biens d’un débiteur qui serait mis en
redressement judiciaire ne sont pas abandonnés à l’initiative individuelle de
chaque créancier. La procédure est collective car elle est organisée de manière à
ce que tous les créanciers puissent faire valoir leur droit.

Les procédures collectives intéressant donc les commerçants s’opposaient


ainsi aux procédures civiles dans lesquelles le débiteur était soumis aux
poursuites individuelles de ses créanciers. Depuis une quarantaine d’années le
droit des procédures collectives a cédé la place au droit des entreprises en
difficulté car l’idée n’est plus exclusivement d’organiser la répartition de l’actif
entre les différents créanciers d’un commerçant, c’est désormais l’idée de
prévenir et d’anticiper les difficultés que pourrait rencontrer une entreprise.

Le dispositif légal qui repose en dernier lieu sur la loi du 26 juillet 2005
réformé par l’ordonnance du 18 décembre 2008 c’est alors progressivement
enrichi de plusieurs processus d’alerte (commissaire au compte) et de
mécanismes destinés à favoriser la prévention des difficultés (le mandat ad hoc et
la procédure de conciliation).

Dans ce prolongement on constate que la notion d’entreprise est


désormais au cœur de la matière. L’entreprise désigne une unité économique
créée par plusieurs personnes en vue de proposer des biens ou des prestations
de service à des clients. A la différence de la notion de société qui est un
habillage juridique, la notion d’entreprise reste une notion purement
économique en conséquence de quoi elle n’a aucune consistance juridique et n’a
donc pas, à la différence d’une société, la PM.

En réalité, le droit des entreprises en difficultés qui trouve son origine dans
le droit commercial s’est peu à peu étendu à de nouveaux secteurs : les artisans
sont désormais concernés tout comme les PM de droit privé, les agriculteurs
(certaines particularités) et depuis la réforme du 26 juillet 2005 les professions
libérales. Dès lors, tous les secteurs d’activité économique qu’ils soient
commerciaux, artisanaux, libéraux ou agricoles rentrent dans le champ
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Droit des entreprises en difficulté

d’application de la loi. Malgré tout, ce sont toujours les entreprises qui restent
visées par les textes (réforme de 2005 : sur la sauvegarde des entreprises).

En réalité, derrière l’entreprise (qui ne se voit pas appliqué la loi


puisqu’elle n’a pas la PM) c’est bien le débiteur lui-même quel qu’il soit qui est
visé par la loi. D’ailleurs dans certains textes, la notion d’entreprise laisse la place
à la notion de débiteur. Ex : L620-1 C.COM relatif à la procédure de sauvegarde
et L611-7 C.COM relatif à la procédure de conciliation.

Cette matière est réputée technique mais a un prolongement pratique


évident car derrière la législation étudiée, cette matière est révélatrice de
l’évolution du contexte économique. La crise économique et la crise de l’emploi
ont en effet modifié la vision première du droit des entreprises en difficulté. Si la
disparition d’une entreprise à des conséquences sur les créanciers impayés, le
droit des entreprises en difficultés apparait au de là de cette vision comme
soutien de l’activité économique. La sauvegarde et le redressement des
entreprises sont devenus un objectif prioritaire pour maintenir l’activité
économique du pays. On est donc passé d’un droit de l’exécution à un droit de
la prévention. Ceci justifie l’intervention des autorités publiques notamment par
l’octroi d’aides publiques aux entreprises en difficultés. Le droit des entreprises
en difficultés doit toutefois tenir compte de la liberté de la concurrence tant sur
le plan national que sur le plan communautaire.

Concrètement 93% des entreprises françaises emploient moins de 10


salariés, elles concentrent seulement 20% des emplois. On en déduit que les
entreprises relevant de la loi du 26 juillet 2005 modifiée par l’ordonnance de
2008 sont en réalité des petites structures (PME ou PMI) employant 10 à 50
salariés. On peut relever que la moitié de ces entreprises disparaissent après 5
ans d’activité d’où la progression constante du nombre de procédures ouvertes
et d’où la volonté clairement affichée à travers la législation de détecter le plus
rapidement possible les difficultés juridiques et financières que l’entreprise est
susceptible de rencontrer.

Durant la première année d’application de la loi du 26 juillet 2005 au plan


national, 500 procédures de sauvegarde ont été ouverte. La sauvegarde,
contrairement au redressement judiciaire, n’implique pas pour son ouverture la
cessation des paiements du débiteur, c’est une procédure éminemment
préventive. Cependant, cette première année d’application a montré les limites
de cette procédure car le nombre d’ouverture est de suite apparu très faible
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comparé aux 45 000 procédures collectives c'est-à-dire redressement ou


liquidation ouvertes la même année.

L’ordonnance du 18 décembre 2008 a donc une nouvelle fois réformé le


droit des entreprises en difficulté pour rendre la procédure de sauvegarde plus
attractive en assouplissant notamment ses conditions d’ouverture. Malgré tout, le
nombre de procédure collective augmente : à Bordeaux en 2009, 1399
procédures collectives ont été ouvertes (1299 en 2008 et 1070 en 2007), la
plupart débouche sur des liquidations judiciaires ; la sauvegarde a connu un peu
plus de succès mais aucune de ces procédures n’a débouché sur un plan
d’homologation d’apurement du passif. Le principal secteur concerné reste
toujours celui de l’industrie et du commerce et se sont les entreprises de moins
de 50 salariés qui ont sollicité, à Bordeaux, l’ouverture à leur profit d’une
procédure de sauvegarde.

La sauvegarde apparait comme une procédure originale qui marque


l’aboutissement d’une évolution qui a cherché au fil des années à dissocier le
sort de l’entreprise de celui de ses dirigeants.

Section 1 : L’évolution du droit des entreprises en difficulté

§1 : Avant le code 1807

Le droit français avait consacré un droit répressif spécifique aux


commerçants mis en faillite. Ce terme de faillite désignait les commerçants qui
avaient trompé la confiance de leurs créanciers et qui ne pouvait payer leurs
dettes. Le droit voulait incriminer des débiteurs en cessation de paiement qu’il
considérait comme de véritables délinquants.

La législation visait également à organiser la liquidation du patrimoine du


commerçant entre ses différents créanciers en leurs imposant une discipline
collective qui aboutissait à les payer à proportion de leurs créances.

§2 : Le code de commerce de 1807

C.COM a manifesté une très grande sévérité à l’égard des commerçants


faillis. En effet, la procédure de faillite était accompagnée d’une contrainte par
corps exercée sur la personne du commerçant qui était emprisonné. Son actif
était vendu pour apurer son passif, toujours selon une discipline collective.
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Droit des entreprises en difficulté

Par la suite, loi du 4 mars 1889 consacra à côté de la faillite une procédure
plus souple, la liquidation judiciaire. La faillite est dès lors réservée au
commerçant fautif ou malhonnête qui va être représenté dans le cadre de la
procédure par un syndic et dont l’actif va être vendu. La liquidation judiciaire
permet au contraire au commerçant honnête de sauver son commerce en
consentant des remises de dettes à ses créanciers, on parle alors de concordat
simple, ou des remises de dettes en cédant certains de ses biens, on parle de
concordat par abandon de passif.

L’évolution postérieure à cette loi a consisté à accroitre le pouvoir


judiciaire en la matière et à sanctionner par ailleurs les dirigeants de société qui
avaient tendance à se retrancher derrière le filtre sociétaire pour échapper à leur
responsabilité. En conséquence, les lois du 16 novembre 1940, 30 aout 1947 et
le décret-loi du 9 aout 1953 ont instauré les actions en comblement du passif
social c'est-à-dire des actions permettant de condamner le dirigeant à
reconstituer toute ou partie de l’actif de l’entreprise en cas de faute de gestion de
sa part.

Par la suite, les décrets du 20 mai 1955 réorganisent la matière en affinant


la distinction entre 2 procédures :
La faillite est présentée comme une mesure d’élimination appliquée au
commerçant qui a cessé ses paiements qui sera frappé par un certain
nombre de déchéances comme l’interdiction d’exercer le commerce.
Le règlement judiciaire qui se substitue à l’ancienne liquidation judiciaire
et qui doit au contraire permettre au commerçant de poursuivre son
activité après accord avec ses créanciers.
Toutefois, le sort du commerçant et de son entreprise reste toujours intimement
et étroitement lié ce qui s’avère parfois incohérent car certaines entreprises sont
vouées à disparaitre par la seule faute de ses dirigeants.

§3 : Loi du 13 juillet 1967 et ordonnance du 23 septembre 1967

La loi du 13 juillet 1967 a institué 2 procédures totalement novatrices :


Le règlement judiciaire
La liquidation judiciaire
C’est à partir de cette date que l’on voit apparaitre l’idée de prévention des
difficultés des entreprises. L’apport essentiel de cette loi est d’avoir
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définitivement dissocié le sort de l’entreprise de celui de son dirigeant. Dès lors,


les tribunaux doivent se livrer à une double analyse :
Vérifient que l’entreprise elle-même peut faire l’objet d’un règlement
judiciaire si les créanciers en sont d’accord et si l’entreprise apparait viable.
Dès l’ouverture de la procédure le débiteur va alors être assisté par un
syndic qui est à l’origine un mandataire de justice chargé de représenter la
masse des créanciers ainsi que le débiteur (jusqu’en 1985). Le débiteur
doit obtenir l’accord du syndic pour accomplir la plupart des actes sur son
patrimoine.
Si l’entreprise n’apparait pas viable ou qu’un accord ne peut pas être
obtenu avec les créanciers elle sera mise en liquidation judicaire. Dans ce
cas le débiteur est dessaisi de la gestion du patrimoine de l’entreprise et ce
patrimoine sera destiné à désintéresser les créanciers.
Envisagent de façon autonome le sort des dirigeants de l’entreprise.
Peuvent encourir des sanctions civiles au premier rang desquelles ont
trouve la faillite personnelle. Celle-ci sera prononcée lorsque le dirigeant a
commis des faits graves tels qu’un détournement de l’actif de la procédure,
un refus total de coopérer avec les organes de la procédure ou un
paiement après la cessation de paiement d’un créancier au détriment des
autres. La faillite personnelle emporte de graves conséquences pour le
dirigeant notamment l’interdiction de gérer ou d’administrer toute
entreprise commerciale, artisanale ou toute PM ayant une activité
économique.
Les dirigeants encourent également des sanctions pénales au nombre
desquelles on trouve la banqueroute. Celle-ci sanctionne pénalement un
dirigeant qui a tenu une comptabilité fictive ou qui a fait disparaitre un
document comptable.

S’agissant des créanciers, à partir du jugement d’ouverture de la procédure,


ils vont être regroupés au sein d’une masse. Cette masse des créanciers va exister
jusqu’en 1985. Ces créanciers vont subir l’évolution des procédures collectives
car ils ne constituent pas l’élément principal de préoccupation du législateur :
diminution des prérogatives qui engendrent crise des suretés notamment réelles
(ce qui conduit à l’ordonnance de 2006 sur les suretés). En effet, les créanciers
voient d’emblée leur droit de poursuite individuel suspendus pendant toute la
durée de la procédure et ils n’ont d’autre possibilité que de produire leur
créance auprès du syndic et de les faire admettre au passif. En cas de liquidation,
les créanciers munis de suretés seront toutefois payés prioritairement puis

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viendront les créanciers chirographaires qui seront payés de façon égalitaire (au
marre le franc).

Ce dispositif a été complété par ordonnance du 23 septembre 1967 qui a


eu pour but de mettre encore plus l’entreprise à l’abri des poursuites des
créanciers mais qui était somme toute réservée aux entreprises dont la
disparition était de nature à engendrer trouble grave dans l’économie nationale
ou régionale.

Le dispositif ainsi mis en place a rapidement montré ses limites : les


procédures consacrées étaient déclenchées trop tardivement alors que
l’entreprise était déjà dans une situation irrémédiablement compromise.
Seulement 2 à 3% des procédures aboutissent au réel sauvetage de l’entreprise.
De plus, comme la plupart des procédures se soldent par une liquidation
judiciaire, le règlement des créanciers s’avère lacunaire. De nombreux créanciers
chirographaires ne recouvrent alors jamais leur créance.

§4- Les lois du 1er mars 1984 et du 25 janvier 1985

Devant l’échec des dispositions issues de la loi de juillet 1967, un nouveau


dispositif a été mis en place. Ce dispositif se subdivisait en trois volets :
- 1er volet : loi du 1er mars 1984 relative à la prévention et au règlement
amiable des difficultés des entreprises
- 2e volet : loi du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la
liquidation judiciaire des entreprises
- 3e volet : loi du 25 janvier 1985 relative aux administrateurs judiciaires,
aux mandataires liquidateurs et aux experts en diagnostics d’entreprises
Ce dispositif a été abrogé par la loi du 26 juillet 2005 mais il est resté
applicable aux procédures ouvertes avant le 1er janvier 2006.

La loi de mars 1984 a consacré une procédure d’alerte, appelée règlement


amiable, qui pouvait être déclenchée par différents acteurs de la vie de
l’entreprise : les salariés, les associés, le président du tribunal de commerce.
Cette procédure totalement novatrice a constitué un élément essentiel du droit
des entreprises en difficulté.
La procédure concernait l’entreprise qui éprouvait une difficulté
économique, juridique ou financière. Le tribunal désignait alors un conciliateur
pour une période de trois mois afin notamment de rechercher la conclusion
d’un accord avec les créanciers, lesquels pouvaient consentir des délais de
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paiements ou des remises de dettes en contrepartie de certaines mesures de


restructuration de l’entreprise (les créanciers avait donc un certain droit de
regard sur l’entreprise et son fonctionnement). Ces créanciers étaient les
principaux créanciers de l’entreprise c.à.d. ceux qui faute de concession
pouvaient paralyser la poursuite de l’activité de l’entreprise (on pense en premier
lieu aux établissements de crédit).
Quant aux mesures de restructuration que les créanciers étaient en droit
d’exiger, il pouvait s’agir d’une réévaluation des moyens de production ou du
réexamen de la compétitivité des produits de l’entreprise par rapport au marché.
Les autres créanciers, c.à.d. ceux qui ne participaient pas à cet accord,
conservaient quant à eux l’intégralité de leurs droits.
L’accord ainsi obtenu avait une nature exclusivement contractuelle et il
entrainait certains effets légaux tels que la suspension des poursuites
individuelles des créanciers ce qui permettait à l’entreprise d’enrayer
l’aggravation de son passif. Dans la même lignée, les créanciers ne pouvaient
inscrire de nouvelles suretés pendant la période d’exécution de l’accord.
L’échec du règlement amiable était alors une cause d’ouverture d’une
procédure de redressement judiciaire.

S’agissant le deuxième volet issu de la loi de janvier 1985, l’objectif du


législateur a été de recentrer son attention sur le sort de l’entreprise. Cela signifie
que le sort des dirigeants est resté quant à lui régit par la loi du 13 juillet 1967.
Concernant l’entreprise, la loi de 1985 consacre une procédure nouvelle, la
procédure de redressement judiciaire qui se substitue à la procédure de
règlement judiciaire. L’objectif affiché de cette nouvelle procédure était de
sauver l’entreprise autant qu’il était permis de le faire. Le sort des créanciers
(chirographaires ou titulaires d’une sureté) n’intervenait qu’au second plan de
ces préoccupation légales (conséquence : non efficacité des suretés qui a donné
lieu à la réforme de 2006). L’art 1er de la loi de 1985 résumait d’ailleurs
parfaitement l’objectif de la nouvelle procédure puisque cette procédure de
redressement était destinée à permettre la sauvegarde de l’entreprise, le maintien
de l’activité et de l’emploi et l’apurement du passif.
Ce redressement judiciaire était assuré à l’issu d’une période d’observation
(6 mois) selon un plan de redressement arrêté par décision de justice. Ce plan
prévoyait soit la continuation de l’entreprise soit sa cession. Lorsqu’aucune de
ces options n’était possible, le tribunal prononçait alors la liquidation de
l’entreprise.
Cette procédure avait, par ailleurs, pour particularité d’accentuer
l’interventionnisme judiciaire. Cet aspect judiciaire reposait principalement sur le
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Droit des entreprises en difficulté

tribunal de commerce. Il ouvrait la procédure de redressement et qui nommait


tous les organes qui la composaient notamment le juge commissaire qui devient,
à partir de 1985, la pierre angulaire de la procédure dans laquelle il est chargé
d’assister le débiteur dans la préparation du plan (de cession ou de
continuation). C’est aussi lui qui autorise les actes les plus graves (ex. : actes de
disposition portant sur les immeubles). C’st aussi le tribunal qui détermine le
sort de l’entreprise puisque c’est lui qui arrête en dernier lieu le plan de
continuation ou le plan de cession. C’est encore lui qui prononcera la liquidation
de l’entreprise dans les ces extrêmes.
On mesure alors, en 1985, le recul du pouvoir des créanciers lesquels
décidaient jusqu’alors du sort de l’entreprise à travers le concordat. Leurs
prérogatives ont été transférées au tribunal de commerce.
Mais la compétence du tribunal se déterminera par rapport à la qualité du
débiteur : le tribunal de commerce sera compétent pour les commerçants et les
artisans, et le TGI devient compétent pour les agriculteurs ou pour les
personnes morales de droit privée non commerçantes telles que les SCI (en
2005, on rajoutera les professions libérales).
Quant aux créanciers, ils perdent toutes prérogatives sur le devenir de
l’entreprise et ils doivent, plus que jamais, se soumettre à la procédure. Plus
concrètement, ils sont soumis au principe de l’arrêt des poursuites individuelles
y compris pour ceux munis de suretés, lesquelles perdaient toutes efficacité. De
la même façon il leur était interdit d’inscrire de nouvelles suretés après
l’ouverture de la procédure. Les créanciers doivent par ailleurs déclarer leurs
créances à la procédure qui seront vérifiées et admises par le mandataire. Dans
ce système, le défaut de déclaration de la créance dans les temps emportait son
extinction. De plus, l’apport de la loi de 1985 a été de supprimer la masse des
créanciers qui n’existent donc plus dans leur aspect collectif.
Sur le plan des sanctions, le jugement qui prononçait le redressement
judiciaire emportait de pleins droits une seule déchéance : la cessation des
fonctions à compter de la date du jugement d’ouverture. Si le débiteur avait
commis des fautes, et en fonction de la gravité de ces fautes, le tribunal pouvait
prononcer contre lui soit la faillite personnelle (sur un plan civil) soit la
banqueroute (sur un plan pénal).

Malgré tous ces efforts accomplis, la loi de 1985 montra rapidement ses
faiblesses. D’abord, le nombre des liquidations judiciaires ne diminua pas
malgré le volet préventif (le tribunal était saisi trop tardivement de sorte que la
procédure ne pouvait déboucher que sur une liquidation judiciaire). Par ailleurs
l’interventionnisme judiciaire rajouta à la lenteur des procédures.
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Droit des entreprises en difficulté

Le premier volet (loi 1984) révéla lui aussi rapidement des faiblesses. Une
réforme intermédiaire fut alors assurée par la loi du 10 juin 1994. L’objectif de
cette loi était d’améliorer les procédures d’alerte, de renforcer les pouvoirs du
président du tribunal de commerce et d’améliorer le sort des créanciers et
notamment des créanciers chirographaires.

Cinq ans plus tard, une loi du 25 juin 1999 est venue aménager et adapter
le droit des procédures collectives au traitement des difficultés des
établissements de crédit (L613-25 CMF).

Malgré ces retouches ponctuelles, une réforme était nécessaire.

§5- La loi de sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005

Cette loi a misé sur la consécration d’une procédure préventive originale :


la sauvegarde. Ce faisant, elle a opéré une réforme en profondeur du droit des
entreprises en difficulté. Le but de la réforme de juillet 2005 était de renforcer le
traitement préventif des entreprises en difficulté, de renforcer la place des
créanciers, de redéfinir les prérogatives du débiteur et corrélativement de
réduire le pouvoir judiciaire. Le résultat de cette procédure, qui était tout à fait
novateur, est que le débiteur peut désormais sous la protection du tribunal avant
même toute cessation des paiements.

Avec cette réforme le droit des entreprises en difficulté va offrir plus que
jamais un panel varié de procédures qui correspondent aux différents degrés de
difficulté que peut rencontrer l’entreprise. La loi nouvelle consacre désormais
quatre procédures :
- La conciliation qui se substitue au règlement amiable. L’application de
cette procédure est possible avant toute cessation des paiements mais
aussi dans les 45 jours de la survenance de la cessation des paiements
dès lors que l’entreprise éprouve une difficulté juridique, économique
ou financière. Cette procédure n’est donc pas forcément préventive
puisque la cessation des paiements de l’entreprise peut être constatée,
elle n’est pas non plus judiciaire dans son principe, elle a un caractère
amiable. Elle a pour objectif de favoriser la conclusion d’un accord
amiable entre le débiteur et ses principaux créanciers afin de mettre un
terme aux difficultés rencontrées par l’entreprise. Cet accord peut rester
purement contractuel ou être homologué par le tribunal.

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Droit des entreprises en difficulté

- La sauvegarde (totalement novatrice) suppose une absence de cessation


des paiements. Elle est à la fois préventive et judiciaire. La procédure est
ouverte à la demande exclusive du débiteur le tribunal qui ouvre la
procédure va désigner les organes qui vont la piloter à savoir le juge
commissaire ainsi que les différents mandataires de justice. S’ouvre alors
une période d’observation d’une durée maximale de 6 mois pendant
laquelle l’entreprise poursuit son activité. Les différents intervenants
vont quant à eux dresser un bilan économique, social et
environnemental de l’entreprise. A l’issue de cette période
d’observation, un plan de sauvegarde est arrêté par le tribunal après
consultation des créanciers lorsqu’il existe une possibilité sérieuse pour
l’entreprise d’être sauvegardée. Concrètement, ce plan qui ne peut
excéder une durée de dix ans définit les modalités de règlement du
passif et décrit les conditions sociales envisagées pour la poursuite des
activités. On retrouve en matière de sauvegarde les principes jusqu’alors
applicables au redressement judiciaire à savoir l’arrêt des poursuites des
créanciers ou encore la déclaration et la vérification des créances. La
procédure de sauvegarde peut être convertie à n’importe quel moment
(y compris pendant la période d’observation) en redressement judiciaire
ou en liquidation judiciaire si l’entreprise est en cessation des paiements.
La loi de 2005 rétablit certaines prérogatives des créanciers à travers
notamment la consécration des comités de créanciers (ce n’est pas la
même chose que la masse des créanciers). Ces comités sont composés
de banquiers et de fournisseurs. Ils sont obligatoires dans les grandes
structures et facultatifs pour les PME.
- La loi de 2005 conserve le redressement judiciaire, mais on constate
d’emblée que les textes sur le redressement judiciaire procèdent
fréquemment par renvoi à la procédure de sauvegarde. La procédure de
sauvegarde apparait donc comme la procédure de droit commun avec
cette technique de renvoi. Les articles consacrés au redressement ne
faisant finalement apparaitre que les spécificités de cette procédure par
rapport à la procédure de sauvegarde. Ce redressement suppose, à la
différence de la sauvegarde, un état de cessation des paiements de la
part du débiteur lequel doit d’ailleurs solliciter l’ouverture de la
procédure de redressement au plus tard dans les 45 jours qui suivent
cette cessation des paiements. A l’issue d’une période d’observation, le
redressement peut déboucher sur un plan de redressement conçu sur le
modèle du plan de sauvegarde.

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Droit des entreprises en difficulté

- La liquidation judiciaire est maintenue par la loi de 2005 mais elle va se


décliner en une version ordinaire et en une version simplifiée.
→ La liquidation judiciaire ordinaire est ouverte à l’encontre d’un
débiteur en cessation des paiements dont le redressement est
manifestement impossible. La procédure est destinée à mettre fin
à l’activité de l’entreprise ou à réaliser (vendre) le patrimoine du
débiteur par une cession globale ou partielle de l’entreprise.
→ La liquidation judiciaire simplifiée est consacrée pour les
entreprises de taille modeste. Elle permet au débiteur d’obtenir la
clôture de la procédure dans l’année qui suit son dépôt de bilan
(dépôt de bilan = ouverture d’une procédure de redressement
judiciaire).

§6- L’ordonnance du 18 décembre 2008

Moins de trois ans après l’entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 2005, le


dispositif légal applicable aux entreprises en difficulté est à nouveau modifiée par
l’ordonnance de 2008 laquelle est complétée par le décret du 13 février 2009.
L’ensemble entrant en vigueur le 15 février 2009. La réforme s’est appliquée aux
procédures ouvertes à compter de cette date.
Cette ordonnance veut promouvoir la sauvegarde. L’objectif est donc de
rendre la procédure de sauvegarde plus accessible et plus attractive. A cette fin,
elle assouplie les conditions d’ouverture de cette procédure, elle incite les
dirigeants à y recourir plus souvent, elle améliore la réorganisation de
l’entreprise et notamment le fonctionnement des comités de créanciers, afin de
favoriser l’élaboration d’un plan de sauvegarde.
Des améliorations sont également apportées à la conciliation sans toutefois
porter atteinte à son caractère confidentiel qui en fait encore sa spécificité.
Le fonctionnement de la liquidation judiciaire est également améliorer,
notamment pour la liquidation judiciaire simplifiée.
Enfin des dispositions concernant les effets de certaines suretés,
notamment la fiducie consacrée en 2007 et le gage sans dépossession, ont été
introduites dans le code de commerce afin notamment de préciser les effets de
ces suretés dans le cadre d’une procédure collective.

Section 2 : la règlementation du droit des entreprises en difficulté

Les dispositions de la loi du 1er mars 1984 et du 25 juillet 1985 avaient été
intégrées dans le code de commerce après la refonte de celui-ci opérée par l’ord
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Droit des entreprises en difficulté

du 18 sept 2000. Elles formaient l’essentiel de la matière du lire 6 intitulé « des


difficultés des entreprises ». L’ensemble de se livre a été réformé par la loi du 26
juillet 2005 aux articles L611-1 à L670-8 C.com. ce dispositif vient à nouveau
d’être modifié par l’ord du 18 décembre 2008 qui contenait 174 articles
retouchant ou modifiant la plupart des articles issus de la loi de 2005.

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Droit des entreprises en difficulté

Partie 1 : La prévention et la détection des difficultés de l’entreprise

Était déjà l’objectif de la loi 1/03/84 laquelle avait consacré le règlement


amiable. Loi 26/07/05 a développé plus encore ce volet préventif puisque le
chapitre 1 du livre 4 est intitulé « de la prévention des difficultés des entreprises,
du mandat ad hoc et de la procédure de conciliation ». Les procédures visées
par ces textes sont préventives en ce sens qu’elles visent à anticiper le règlement
des difficultés avant que la situation du débiteur ne soit irréversible.

Le dispositif mis en place en 2005 avait mis l’accent sur la détection le plus
tôt possible des causes de défaillance de l’entreprise. Pour se faire, la loi de 2005
avait consacré des procédures d’alerte. Ces techniques se sont par ailleurs
accompagnées de modes conventionnels de règlement des difficultés tel que le
mandat ad hoc ou la conciliation.

L’ordonnance du 18/12/08 n’a pas véritablement bouleversé le dispositif


mis en place par la loi de sauvegarde. Elle a principalement apporté quelques
précisions à la procédure de conciliation.

Le dispositif légalement continu donc à prendre appui sur 3 séries de


dispositions : la prévention qui passe par des mécanismes d’alertes et les modes
consensuels de traitements des difficultés des entreprises.

Chapitre 1 : Les modes de détection des difficultés des entreprises

La prévention suppose pour être effective que les difficultés rencontrées


par une entreprise soient détectées suffisamment tôt. Certaines dispositions
légales ont donc pour objectif de faire apparaitre ces difficultés.

Il convient toutefois de remarquer au préalable que certaines informations


économiques et financières de l’entreprise qui doivent faire l’objet d’une
publicité vont déjà constituer en elles mêmes les supports d’une procédure
d’alerte.C.COM soumet en effet les commerçants à des exigences comptables
qui vont permettre de connaitre en permanence leur situation financière et
d’anticiper donc la dégradation de celle-ci.

Ces obligations sont précises et reposent notamment sur la tenue de


comptes annuels qui doivent être selon L123-14 C.COM réguliers, sincères et
donnant une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et des
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Droit des entreprises en difficulté

résultats de l’entreprise. Ces obligations sont renforcées pour les entreprises de


grande envergure faisant appel public à l’épargne, la loi L132-2 C.COM exige
une information comptable prévisionnelle.

Outre ces informations comptables, les commerçants personnes physiques


et les entreprises sont soumis à un certain nombre de déclaration auprès du RCS
dont les données juridiques fondamentales de l’entreprise telles que la forme
juridique adoptée, le capital social ou l’identité des associés et surtout de ceux
qui sont tenus indéfiniment et solidairement du passif social. Des règles
identiques existent pour les artisans ou pour les PM de droit privé non
commerçantes ayant une activité économique.

Les tiers peuvent également avoir accès à certaines informations


concernant la situation patrimoniale de leur débiteur grâce au dépôt obligatoire
de certains documents au greffe du tribunal de commerce. Ainsi, pour les SARL
ou société par actions, dépôt des comptes sociaux annuels, des rapports de
gestions et du rapport du commissaire aux comptes. De même, pour les groupes
de société, dépôt des comptes consolidés c'est-à-dire des comptes qui
récapitulent dans un même document les comptes de toutes les sociétés du
groupe. L123-5-1 C.COM prévoit qu’en cas de non dépôt de ces documents,
tout intéressé peut demander au président du tribunal de commerce d’enjoindre
aux dirigeants sociaux de procéder au dépôt de ces documents.

Indépendamment de ces documents, les modes de détection des difficultés


des entreprises passent par la consécration de procédure d’alerte mais également
par un droit de convocation reconnu au président du tribunal de commerce.

Section 1 : Les procédures d’alerte

Assez naturellement, la prévention est le souci des dirigeants de


l’entreprise mais bien avant la réforme de 2005, la loi avait élargi l’initiative de
ces procédures d’alerte. Ainsi, le commissaire aux comptes (CAC), les associés,
le comité d’entreprise peuvent également prendre l’initiative de cette procédure.
Ces différentes actions restent malgré tout attitrées afin d’éviter toute immixtion
abusive des tiers dans la gestion de l’entreprise.

§1 : La procédure déclenchée par le commissaire aux comptes

14
Droit des entreprises en difficulté

Vocation naturelle puisqu’il est chargé de certifier les comptes de


l’entreprise et est donc a même de connaitre la situation financière de celle-ci.
Dès lors, la procédure d’alerte qui lui est reconnue est très utile en pratique car
les CAC ont vu leur rôle considérablement évoluer pendant ces dernières
années.

Pendant très longtemps, ils n’intervenaient que dans les sociétés par actions
et les réformes successives ont étendu leur action aux SNC mais aussi aux
SARL. En étendant l’institution du commissariat aux comptes on accroit
corrélativement le domaine d’application de la procédure d’alerte.

Cette procédure d’alerte revêt pour le CAC un caractère obligatoire mais


elle diffère selon la nature juridique de l’entreprise concernée.

A. La procédure d’alerte dans les SA

4 étapes régies par art L234-1 & s C.COM :


Lorsqu’il relève des faits de nature à compromettre la continuité de
l’exploitation, le CAC doit informer sans délai les dirigeants de
l’entreprise.
Faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation est une
notion non définie donc vague qui impose toutefois de déceler une rupture
dans la stabilité de l’exploitation.
A défaut de réponse sous 15j le CAC invite par écrit les dirigeants à faire
délibérer le Conseil d’administration ou Conseil de surveillance et ce dans
les 8j suivants l’absence de réponse de leur part. il doit également adresser
copie du courrier au président du tribunal de commerce ce qui lui
permettra d’être informé de cette procédure.
Le président du Conseil d’administration ou du Directoire convoque dans
les 8j le Conseil d’administration ou de surveillance, leur délibération est
communiquée au comité d’entreprise ou aux délégués du personnel ainsi
qu’au président du tribunal de commerce et au CAC.
Si malgré les décisions prises par les dirigeants la continuité de
l’exploitation semble vraiment compromise, une assemblée générale doit
alors être convoquée.
Si à l’issu de la réunion de l’assemblée générale, le CAC constate que les
décisions prises ne permettent pas d’assurer la continuité de l’exploitation,
il en informe le président du tribunal de commerce qui peut alors
15
Droit des entreprises en difficulté

convoquer le dirigeant pour envisager des mesures propres au


redressement de l’entreprise.
Judiciaire s’insinue petit à petit dans entreprise.

B. La procédure d’alerte dans les autres sociétés commerciales

Est en principe simplifiée. Est toujours déclenchée par le CAC pour les
mêmes raisons que précédemment. Il adresse également une demande
d’explication au dirigeant qui doit répondre dans les 15j, dans cette réponse
celui-ci doit préciser les mesures envisagées pour permettre le redressement de
la situation de l’entreprise. CAC transmet cette réponse au Comité d’entreprise
et tient également informé le président du tribunal de commerce de l’existence
de cette procédure.

Si le dirigeant ne répond pas, le CAC établit un rapport spécial et invite à


faire délibérer une assemblée générale sur ces faits. Si à l’issu de l’assemblée, les
décisions prises paraissent insuffisantes, il en informe le président du tribunal de
commerce.

L234-4 C.COM précise que la procédure d’alerte n’a pas à être appliquée
lorsqu’une procédure de conciliation ou de sauvegarde a été engagée par les
dirigeants.

§2 : La procédure déclenchée par les institutions représentatives du personnel

L432-5 CT prévoit que le comité d’entreprise peut demander à


l’employeur de lui fournir des explications lorsqu’il a connaissance de faits de
nature à affecter la situation économique de l’entreprise. Si les explications de
l’employeur lui semble insuffisantes le comité établit un rapport transmis à
l’employeur et au CAC. Ce rapport conclu sur l’opportunité de saisir l’organe
d’administration de la société ou la possibilité de saisir les associés.

Ce droit d’alerte suppose que l’entreprise compte plus de 50 salariés. De


plus, le comité d’entreprise ne peut exercer ce droit d’alerte que si le chef
d’entreprise lui communique toues les informations sur celle-ci ce qui n’est pas
toujours le cas en pratique.

§3 : La procédure déclenchée par les associés

16
Droit des entreprises en difficulté

Ne dispose pas véritablement d’une procédure d’alerte néanmoins les


actionnaires, à condition de représenter 5% du capital, et de façon plus générale
les associés peuvent jouer un rôle dans le déclenchement de l’alerte à travers les
questions qu’ils ont le droit de poser aux dirigeants.

En effet, 2 fois par exercice, les associés ont la possibilité de poser des
questions écrites aux dirigeants sur tout fait de nature à compromettre la nature
de l’exploitation. Les dirigeants doivent y répondre par écrit dans un délai d’un
mois et dans tous les cas, les questions et leurs réponses doivent être adressées
au CAC.

Section 2 : Le droit de convocation du président du tribunal de commerce

L611-2 C.COM (inchangé en 2008) prévoit que lorsqu’il résulte de tout


acte, de tout document ou de toute procédure qu’une société commerciale, un
groupement industriel et économique, une entreprise industrielle, commerciale
ou artisanale connait des difficultés de nature à compromettre la continuité de
l’exploitation ses dirigeants peuvent être convoqués par le président du tribunal
de commerce pour que soit envisagées les mesures propres à redresser la
situation.

Cette convocation n’était pas une nouveauté en 2005 car elle avait été
précédemment consacrée par loi 1/03/84 qui avait simplement formalisé une
pratique judiciaire couramment suivie par les tribunaux de commerce.

L611-2 C.COM n’a pas d’équivalent pour le président du TGI à l’égard


des professionnels indépendants ou des PM de droit privé non commerciale.

Cette convocation est une simple faculté ouverte au président du tribunal


de commerce, n’est en aucun cas une obligation. Par ailleurs, ce président ne
dispose d’aucun pouvoir de coercition pour contraindre les dirigeants à
répondre à sa convocation. Malgré tout, il apparait en pratique que cette
convocation est très souvent suivie des faits.

Sur sa forme, la loi se contente d’indiquer que la convocation a lieu pour


que soit envisagée s les mesures propres à redresser la situation. Cette
convocation doit dès lors être adressée au moins un mois à l’avance au dirigeant
et le président doit indiquer à celui-ci les éléments de faits qui ont motivé son
initiative afin de lui permettre de s’expliquer sur ces différents points. En aucun
17
Droit des entreprises en difficulté

cas toutefois le président du tribunal de commerce ne peut s’immiscer dans la


gestion de l’entreprise.
Le formalisme de ce pouvoir de convocation a été renforcé en 2005
puisqu’au terme de l’entretien, il faut dresser un procès verbal qui mentionne la
date et l’identité des personnes présentes. Si le dirigeant ne s’est pas présenté à
l’entretien, un PV de carence est dressé. Loi 2005 a également apporté une
innovation en la matière puisque le président du tribunal de commerce peut
poursuivre ses investigations en obtenant la communication de toutes les
informations comptables et financière de l’entreprise même si le dirigeant ne
s’est pas rendu à la convocation. Si le dirigeant a répondu à cette convocation, le
président du tribunal peut au terme de l’entretien ne pas donner suite à la
procédure, il peut fixer une autre date afin que lui soit apporté des informations
complémentaires et peut dans certains cas suggérer aux dirigeants d’utiliser les
procédures de conciliation et de mandat ad hoc.

18
Droit des entreprises en difficulté

Chapitre 2 : Les modes consensuels de traitement des difficultés des entreprises

La détection des difficultés rencontrées par une entreprise devrait


normalement conduire au traitement judiciaire de celle-ci. Pourtant, la pratique
relayée en cela par les lois successives a consacré des procédés conventionnels
de traitement des difficultés bien avant l’ouverture d’une procédure de
redressement judiciaire voire même d’une procédure de sauvegarde.

Ces procédés reposent sur des mécanismes souvent confidentiels tels que
le mandat ad hoc ou la conciliation.

Section 1 : Le mandat ad hoc

Loi 10/06/94 prévoit le mandataire ad hoc concernant les difficultés des


entreprises. Consécration d’une pratique judiciaire entreprise par différents
tribunaux de commerce (Paris). N’est donc pas apparu comme une nouveauté
de la loi 26/07/05 mais cette réforme a développé sa place dans le dispositif
relatif au traitement préventif des difficultés des entreprises. Le mandat ad hoc a
été peu modifié par l’ordonnance de 2008.

L611-3 C.COM : président du tribunal de commerce ou TGI peut, à la


demande d’un débiteur, désigner un mandataire ad hoc dont il détermine la
mission. Le débiteur peut proposer le nom d’un mandataire (nouveauté de
2008). Le tribunal compétent est le tribunal de commerce si le débiteur exerce
une activité commerciale ou artisanale et le TGI dans les autres cas. L’article
précise donc la compétence d’attribution des juridictions, compétence qui sera la
même dans les procédures de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou
de liquidation.

Ce mandat s’inscrit dans un cadre légal peu contraignant car il constitue


simplement une mission spécifique délimitée par le président du tribunal via une
ordonnance. Cette mission peut consister à assister le dirigeant dans ses
négociations avec ses principaux créanciers, l’objectif étant alors d’obtenir une
remise ou un étalement des dettes au moyen d’un accord amiable tout en
permettant la poursuite de l’activité de l’entreprise.

En revanche, le texte ne précise pas qu’elle peut être la nature des


difficultés rencontrées par le débiteur à ce stade. On suppose unanimement que
19
Droit des entreprises en difficulté

l’entreprise doit rencontrer des difficultés juridiques, économiques ou


financières mais ne doit être en aucun cas en cessation de paiement.

§1 : La désignation du mandataire ad hoc

La désignation ne peut se faire qu’à la l’initiative du représentant légal de


PM ou du débiteur s’il s’agit d’une personne physique. L’initiative n’appartient
pas au CAC ni aux salariés ni au président du tribunal et encore moins au MP.

Sa désignation doit prendre la forme d’une demande adressée au président


du tribunal et déposée au greffe. Le contenu de cette requête n’est pas
précisément défini par la loi. R611-8 C.COM a simplement été modifié par le
décret 12/02/09 pour tenir compte de la désignation du mandataire par le
débiteur lui-même.

Le président convoque l’auteur de la demande afin de recueillir ses


observations. La principale innovation de l’ordonnance de 2008 est de
reconnaitre au débiteur la faculté de proposer la désignation d’une personne de
son choix comme cela été déjà possible en matière de conciliation.

Le plus souvent le président du tribunal désignera un administrateur


judiciaire mais en tout état de cause cette fonction ne peut être confiée à une
personne ayant au cours des 24 mois précédents perçus à quelque titre que se
soit une rémunération ou un paiement de la part du débiteur intéressé, de la
part de tout créancier du débiteur ou d’une personne qui en détient le contrôle.
Le président du tribunal n’est pas tenu de faire droit à la demande de
désignation d’un mandataire ad hoc qui lui est adressée.

R611-19 C.COM énonçait dans sa rédaction de 2005 que si la nomination


du mandataire ad hoc n’intervenait pas dans le délai d’un mois à compter de
l’entretien, la demande était réputée non admise. Cette disposition a été
supprimée par le décret 12/02/09, désormais le président du tribunal doit rendre
une décision explicite qu’elle soit positive ou négative. S’il n’est pas fait droit à sa
demande, le débiteur dispose d’un délai de 10j pour former appel à compter de
la notification de l’ordonnance.

§2 : La mission du mandataire ad hoc

20
Droit des entreprises en difficulté

La loi ne défini pas cette mission, c’est au président du tribunal d’en


déterminer l’objet. Le rôle du mandataire est néanmoins de servir
d’intermédiaire entre un débiteur en difficulté et ses créanciers pour tenter de
parvenir à un accord en vue du règlement du passif. Plus précisément l’idée est
d’aboutir à une solution négociée entre l’entreprise et ses créanciers et
notamment les banques. Il s’agit pour le débiteur de négocier des délais de
paiement sans être pour autant dessaisi de ses pouvoirs de gestion.

A la différence de la procédure de conciliation qui est enfermée dans une


durée maximale de 4 mois, la durée de la mission du mandataire ad hoc n’est
elle enfermée dans aucun délai. Ceci laisse aux différents protagonistes une très
grande liberté. On considère que la désignation d’un mandataire ad hoc peut
constituer un préalable à l’ouverture d’une procédure de sauvegarde.
Le mandat ad hoc ne comporte pas de publicité, c’est un procédé
éminemment confidentiel puisque la désignation du mandataire ad hoc n’est pas
communiquée au MP.
Enfin l’art R611-21 C.com prévoit quant à lui la possibilité pour le
demandeur de solliciter du président du tribunal la fin de la mission du
mandataire ad hoc. Le juge n’a alors aucun pouvoir d’appréciation. En
conséquence, on constate que le débiteur reste maitre du procédé ce qui en
pratique aurait dû encourager l’utilisation du mandata ad hoc. De même, si
l’entreprise est en cessation des paiements après la désignation du mandataire.
Le débiteur doit obligatoirement demander qu’il soit mis fin à la mission dudit
mandataire.

Conclusion : le procédé du mandat ad hoc présente de nombreux avantages :


- De la discrétion : il n’est pas soumis à une publicité
- De la souplesse : c’est le président du tribunal qui définit librement et la
mission du mandataire ne comporte pas de limitation de durée.
Le mandat ad hoc permet donc de trouver des solutions hors procédure et peut
même permettre de préparer une conciliation en cas de coopération avec les
créanciers.

§3- l’issue du mandat ad hoc

Tout d’abord, le mandat ad hoc peut aboutir à la signature d’un accord


entre l’entreprise et ceux de ses créanciers qui ont décidé de participer à cette
procédure amiable. Si accord il y a, cet accord ne produit alors ses effets qu’à

21
Droit des entreprises en difficulté

l’égard des signataires. Il ne fait par contre l’objet d’aucune homologation, ni


d’aucune publicité.

La négociation peut également ne pas aboutir. Si l’entreprise bascule en


cessation des paiements il appartiendra alors au débiteur de régulariser au plus
vite sa situation par une déclaration de cessation des paiements laquelle
entrainera vraisemblablement l’ouverture d’une procédure de redressement
judiciaire.

Section 2 : la conciliation

La volonté de résoudre les difficultés d’une entreprise par un accord


amiable n’est pas une idée nouvelle. Le droit des procédures collectives avait
couramment conservé la pratique des concordats reposant sur la recherche d’un
accord entre le débiteur et ses principaux créanciers. Il faudra toutefois attendre
la loi du 1er mars 1984 pour que soit consacrée une véritable procédure de
traitement amiable des difficultés des entreprises à travers ce fameux règlement
amiable.
La loi du 26 juillet 2005 a substitué à l’appellation de règlement amiable
celle de conciliation pour insister sur le caractère contractuel de la procédure.
Mais au-delà du changement terminologique le législateur a en réalité voulu
corriger les faiblesses du règlement amiable trop peu utilisé en pratique. Le
champ d’application a donc été élargi tant au regard des personnes pouvant
solliciter la mise en œuvre de la procédure mais également au regard des
difficultés suscitant cette procédure laquelle peut désormais être ou verte après la
cessation des paiements. Quant aux créanciers, la loi de 2005 décide d’accentuer
les garanties offertes à ceux qui accepteront de participer à l’accord amiable avec
le débiteur.

En pratique, la conciliation s’est révélée efficace car elle ne constitue pas à


proprement parlé une procédure judiciaire (donc elle n’effraie pas les créanciers
en tant que telle) et elle conserve un caractère confidentiel.
L’ord 18 déc 2008 a néanmoins apporté des aménagements au régime de
la conciliation. D’une manière générale, on peut dire que ces aménagements
portent sur la durée de la procédure, sur les voies de recours, sur les délais de
paiements des dettes qui ne sont pas incluses dans l’accord, sur le régime de
l’accord simplement constaté et ils portent aussi sur la protection des garants et
des coobligés.

22
Droit des entreprises en difficulté

La procédure de conciliation est régie par les articles L611-4 à L611-15


C.com et les articles R611-22 à R611-46 C.com.

§1- l’ouverture de la procédure de conciliation

A. L’initiative de la procédure

La procédure de conciliation repose sur la seule initiative du débiteur qui


peut ou non être en cessation des paiements.

1) La qualité du débiteur

Comme précédemment, et conformément aux art L611-4 et L611-5


C.com, la procédure de conciliation est ouverte à toute entreprise commerciale
ou artisanale. Dans cette catégorie figure les commerçants personnes physiques
et les sociétés commerciales par la forme (SA, SARL, SAS, SNC…). La
procédure s’applique aussi au personne morale de droit privé (type société
civile) ainsi qu’aux personnes physiques exerçant une activité professionnelle
indépendante y compris les professions libérales soumises à un statut législatif ou
règlementaire (du type architectes, avocat, médecin, expert comptable…).
La procédure de conciliation se démarque ainsi de l’ancien règlement
amiable dont la mise en œuvre était refusée aux particuliers exerçant une activité
libérale.
Quant aux agriculteurs, ils restent également dehors du champ
d’application de la loi car eux relèvent des articles L351-1 et s C.rural.

L’auteur de la demande étant le débiteur, il s’agira du chef d’entreprise


(pour les personnes physiques) ou de l’organe légal de représentation de la
personne morale (président du CA ou du directoire ou gérant). Par contre, le
droit de mettre en œuvre cette procédure de conciliation a été refusé au MP,
aux créanciers, mais également aux salariés. De la même façon, le président du
tribunal ne peut se saisir d’office.

Sur la forme, l’art L611-6 C.com énonce que le président du tribunal est
saisi par une requête écrite du débiteur exposant sa situation économique,
sociale et financière, exposant également ses besoins de financement ainsi que le
cas échéant les moyens d’y faire face. Le débiteur peut également proposer le
nom d’un conciliateur dans sa requête.

23
Droit des entreprises en difficulté

Conformément à R611-22 C.com cette requête doit être accompagnée de


certaines pièces destinées à renseigner le président du tribunal sur la situation
financière. On trouve parmi ces pièces, la liste des principaux créanciers, l’état
des créances et des dettes assortis d’un échéancier, la situation de l’actif
réalisable et du passif exigible des trois derniers exercices. On trouve également
une attestation sur l’honneur certifiant l’absence de procédures de conciliation
dans les trois mois qui précèdent la date de la demande.
La requête est adressée au président du tribunal de commerce si
l’entreprise est commerciale ou artisanale et au président du TGI dans les autres
cas.

Dès la réception de la demande, le président fait convoquer le débiteur


pour recueillir ses explications (art R611-23 C.com) et informe automatiquement
le MP. Cette étape est très vivement critiquée par les praticiens car elle suscite la
crainte que les chefs d’entreprise renoncent à recourir à la conciliation à cause
de cette information au MP. Paradoxalement aucune information des
représentants du personnel n’est prévue à ce stade. Cette absence d’information
est très étonnante car les représentants du personnel bénéficient d’un droit
d’alerte.
Au vu des différents éléments qui lui sont présentés, le président va
instruire la demande et décidera ou non du choix d’un conciliateur.

2) Les difficultés rencontrées par le débiteur

Le règlement amiable était réservé aux personnes éprouvant certaines


difficultés mais qui n’étaient pas encore en état de cessation des paiements (anc
L611-3 C.com). La loi du 26 juillet 2005 a modifié la formule concernant les
difficultés de nature à permettre le recours à la conciliation mais le changement
le plus notable par rapport au règlement amiable est d’avoir étendu le champ
d’application de cette procédure au débiteur qui se trouve en cessation des
paiements sans toutefois que celle-ci excède une durée 45 jours.

a) Le recours à la conciliation en cas de difficultés juridiques,


économiques ou financières avérées ou prévisibles

Selon l’anc art L611-3 C.com, le débiteur souhaitant demander l’ouverture


d’un règlement amiable devait éprouver une difficulté juridique, économique ou
financière ou des besoins ne pouvant être couverts par un financement adapté
aux possibilités de l’entreprise. La loi du 26 juillet 2005 a supprimé la référence
24
Droit des entreprises en difficulté

aux besoins de l’entreprise. Désormais, il suffit de faire état de difficultés


juridiques (ex. : conflits entre associés avec blocages au sein de la prise de
décision), économiques (liées à un secteur d’activité un peu en perte de vitesse,
liées à la perte d’un contrat ou d’un marché) ou financières (retard de paiements
de ces créanciers).
Ces difficultés doivent être avérées ou prévisibles. Cette référence à des
difficultés reviviscibles va permettre d’avoir recours à cette procédure le plus tôt
possible.

b) Le recours à la conciliation en cas de cessation des paiements

L’une des innovations les plus importantes de la loi de 2005, a été d’ouvrir
la procédure de conciliation au débiteur se trouvant en cessation des paiements
sans toutefois que celle-ci remonte à plus de 45 jours.
La cessation des paiements peut se définir comme l’impossibilité de faire
face au passif exigible avec son actif disponible (art L631-1 C.com). Sous cet
angle la procédure de conciliation n’est plus préventive mais le but de ce
changement est d’éviter encore à ce stade le recours à une procédure judiciaire
beaucoup plus lourde qu’une conciliation.
Désormais, durant les 45 jours qui suivent l’état de cessation des
paiements, le débiteur aura le choix entre recourir à une procédure de
conciliation ou à une procédure de redressement judiciaire (mais pas la
sauvegarde).
Mais l’ouverture d’une procédure de conciliation fait obstacle à l’ouverture
du redressement ou de la liquidation judiciaire. Le choix entre les deux options
tourne en pratique en faveur de la conciliation car la procédure est plus souple,
plus rapide et surtout elle est plus confidentielle. L’art L611-15 C.com précise
en effet que toute personne qui est appelée à la procédure de conciliation ou qui
par ses fonctions en a connaissance est tenue à la confidentialité (très important
pour le débiteur).

B. Le choix du conciliateur

Ce choix appartient en premier lieu au président du tribunal qui avant de


désigner le conciliateur va vérifier le sérieux de la requête qui lui est adressée.
Pour ce faire, il bénéficie d’un large pouvoir d’investigation qui repose en grande
partie sur l’art L611-6 C.com. Le président du tribunal a notamment le droit
d’obtenir des établissements bancaires et financiers tout renseignement de
nature à donner une exacte information sur la situation financière et
25
Droit des entreprises en difficulté

économique du débiteur. Si les établissements refusent de répondre, le


président ne dispose d’aucun pouvoir de coercition pour l’y contraindre.
A partir des informations obtenues, le président dispose d’une option. Il
peut d’abord rejeter la demande de désignation du conciliateur. Sa décision peut
être frappée d’appel par le débiteur et ce dans un délai de 10 jours à compter de
la notification de rejet. Le président peut également faire droit à la demande et
désigner un conciliateur pour une durée n’excédant pas 4 mois. Il peut
également par décision motivée proroger d’un mois au plus la demande du
débiteur.
Toutefois l’ord de 2008 a apporté une modification au déroulé de la
procédure. Il est désormais prévu que si une demande d’homologation de
l’accord a été formée avant l’expiration de cette période de 4 mois, la mission du
conciliateur et la procédure sont prolongés jusqu’à la décision du tribunal (art
L611-6 al 2 C.com). L’idée est de permettre que la durée légale de 4 mois soit
exclusivement consacrée à la négociation et à la conclusion de l’accord de
négociation. Il n’est par contre pas imparti de délai au tribunal pour statuer sur
la demande d’homologation. A la fin de la période légale, la mission du
conciliateur prend fin de plein droit. Il est désormais prévu qu’une nouvelle
conciliation ne peut pas être ouverte dans les 3 mois qui suivent. L’idée étant
d’éviter que la conciliation ne dure excessivement alors qu’une procédure
judiciaire serait plus appropriée.

Il convient de remarquer toutefois, que le choix du président du tribunal


quant à al désignation du conciliateur peut être orienté car depuis la loi du 26
juillet 2005, le débiteur lui même peut suggérer le nom d’un conciliateur.
Corrélativement, le débiteur a le droit de récuser le conciliateur choisi par le
président du tribunal. L’art R611-27 C.com, inchangé en 2008, prévoit 5 cas de
récusation parmi lesquels on trouve l’existence d’un lien direct ou indirect entre
le conciliateur et un créancier, ou encore l’hypothèse où le conciliateur aurait un
intérêt personnel direct ou indirect à la procédure. Pour récuser ce conciliateur
le débiteur bénéficie d’un délai de 15 jours à compter de la notification de la
décision de désignation. Le conciliateur désigné sera dans la plupart des cas un
administrateur judiciaire (comme pour le mandataire ad hoc) mais peuvent aussi
être désignés des experts comptables, des gestionnaires voire des avocats.
Comme pour le mandataire ad hoc, l’art L611-13 Com prévoit des
incompatibilités destinées à assurer l’indépendance du professionnel désigné.

Après la désignation du conciliateur, la décision ouvrant la procédure est


communique au MP. De plus, si le débiteur exerce une profession libérale, la
26
Droit des entreprises en difficulté

décision est également communiquée à l’ordre professionnel dont il relève car


cet ordre professionnel sera associé à la procédure. Cette décision ouvrant la
procédure peut désormais être susceptible d’appel de la part du MP (nouveauté
de 2008) notamment lorsque le débiteur sera considéré en état de cessation des
paiements depuis plus de 45 jours.

§2- l’élaboration de l’accord amiable

La conciliation est dirigée par le débiteur et ses créanciers. Les intervenants


judiciaires ont simplement pour rôle de faciliter la conclusion de l’accord. La
réussite de la procédure repose donc toujours sur la volonté des créanciers.

A. Le rôle des organes judiciaires

1) Le rôle du conciliateur

Le conciliateur n’est pas partie à la procédure, il ne représente absolument


pas le débiteur dans celle-ci. Sa mission a toutefois été étendue par la loi du 26
juillet 2005. L’art L611-7 C.com précise que la mission du conciliateur consiste à
favoriser la conclusion entre le débiteur et ses principaux créanciers ainsi que le
cas échéant ses contractants habituels d’un accord amiable destiné à mettre fin
aux difficultés de l’entreprise.
A la différence du règlement amiable, le conciliateur n’a pas à favoriser le
fonctionnement de l’entreprise et ne doit donc pas s’immiscer dans la gestion de
celle-ci. L’ouverture de la procédure ne modifie ni les pouvoirs du chef
d’entreprise ni ses obligations. Elle ouvre seulement la voie à une négociation
dans laquelle le conciliateur assiste le débiteur.
Pour mener à bien sa mission, il peut obtenir du débiteur tout
renseignement utile. Le président du tribunal lui aura communiqué, pour sa
part, tous les renseignements dont il disposait.

2) Le rôle du président du tribunal

La loi 26/07/05 a délibérément restreint les prérogatives du pouvoir


judiciaire. Dans le dispositif légal précédent (loi 1/043/84), le débiteur qui
sollicitait l’ouverture de la procédure pouvait demander au président du tribunal
la suspension des poursuites des créanciers. Cette faculté était en réalité peu
utilisée car si elle permettait au débiteur d’obtenir un répit dans le règlement de

27
Droit des entreprises en difficulté

son passif, elle était perçue comme accentuant le caractère judiciaire de la


procédure.

La loi de 2005 a donc supprimé la possibilité pour le débiteur d’obtenir la


suspension des poursuites de ses créanciers. Toutefois, L611-7 al 5 C.COM le
président du tribunal peut arrêter les poursuites d’un créancier en application du
droit commun c'est-à-dire conformément aux articles 1244-1 à -3 C.CIV. 1244-1
C.CIV prévoit que compte tenu de la situation du débiteur et en considération
des besoins du créancier, le juge peut dans la limite de 2 années reporter ou
échelonner le paiement des sommes dues. 1244-2 C.CIV prévoit que la décision
du juge prise en application de l’article précédent suspend les procédures
d’exécution qui auraient été engagées par le créancier.

Ce renvoi au droit commun appelle plusieurs observations :


Les articles du C.CIV sont applicables à la demande du débiteur et non du
conciliateur mais en pratique l’avis de ce dernier sera prépondérant. L611-
7 al 5 C.COM énonce en effet que le débiteur doit avoir été éclairé par le
conciliateur.
Les créanciers qui voudront participer à l’accord vont accorder un
moratoire au débiteur, ils n’exerceront donc pas de poursuites. Les
créanciers qui n’auront pas été sollicités seront eux payés à l’échéance ce
qui réduit l’application de ces textes.
Le recours à ces textes suppose que le débiteur soit poursuivi par un
créancier au cours de la procédure. La question s’est alors posé de savoir si
les textes étaient applicables lorsque des poursuites sont en cours au jour
de l’ouverture de la conciliation. CA Versailles (19/10/06) considère que le
fait que les poursuites aient été introduites avant l’ouverture de la
procédure ne fait pas obstacle à l’application de ces textes.

Sur la forme, le débiteur devra, s’il est poursuivi par un créancier ou


(nouveauté de 2008) s’il est simplement mis en demeure par un créancier saisir
le président du tribunal qui a ouvert la procédure de conciliation. Ce dernier
statuera sur les délais sous la forme d’un référé. Cette possibilité d’accorder des
délais de grâce empêche qu’un créancier neutralise l’accord de conciliation.
Pour autant, le président du tribunal ne peut plus adopter depuis 2005 une
mesure générale de suspension des poursuites.

B. La participation des créanciers à la négociation

28
Droit des entreprises en difficulté

La procédure de conciliation a un caractère contractuel puisqu’elle repose


sur des engagements réciproques des parties. La loi du 26/07/05 a d’ailleurs
élargi la qualité des intervenants à la procédure. L611-7 C.COM prévoit que la
conciliation consiste à favoriser un accord entre le débiteur et ses principaux
créanciers ainsi que le cas échéants ses contractants habituels.

Le texte ne vise donc pas la totalité des créanciers ce qui signifie que le
débiteur et le conciliateur doivent faire un choix parmi les créanciers afin de
sélectionner ceux qui participeront à la négociation c'est-à-dire ceux dont la
participation parait indispensable. Ces créanciers peuvent librement accorder
des délais de paiement ou des remises de dettes mais ils peuvent décider de
participer à l’accord que pour une partie seulement de leur créance. C.com
(13/10/98) rappelle ce principe.

Les négociations peuvent également inclurent les contractants habituels du


débiteur c'est-à-dire les grossistes ou sous traitants. Ces derniers ne sont pas
forcément créanciers au moment de l’ouverture de la procédure mais vont
participer à l’accord car ils ont souvent vocation à le devenir.
Les cautions du débiteur ne sont par contre pas visées par l’article. Leur
éviction de la négociation se justifie peut être par le fait qu’elles vont bénéficier
des délais et des remises accordés dans l’accord au débiteur que cet accord soit
simplement constaté ou qu’il soit homologué.

D’une manière générale, la participation des créanciers à l’accord amiable


reste toujours facultative. Elle peut ne pas être égalitaire, les créanciers ne
consentant pas tous les mêmes sacrifices. Toutefois les créanciers ont intérêt à ce
que la procédure de conciliation aboutisse. En effet, le risque d’ouverture d’une
procédure de sauvegarde entrainera l’interdiction des paiements des créanciers
antérieurs et l’arrêt des poursuites des mêmes créanciers.

Afin de favoriser l’aboutissement de l’accord, la loi du 26/07/05 reconnait


également aux créanciers publics la possibilité d’accorder au débiteur des
remises de dettes. L611-7 al 3 C.COM prévoit ainsi que les administrations
financières (direction générale des impôts, administration des douanes, organes
de la sécurité sociale, institutions régissant régime des allocations chômages)
peuvent accorder des remises de dettes dans les conditions prévues à L626-6
C.COM. Selon cet article ces remises sont accordées dans des conditions
similaires à celles qu’octroieraient dans les conditions normales du marché un
29
Droit des entreprises en difficulté

opérateur économique placé dans la même situation. L’avantage de cette mesure


est que désormais les créanciers institutionnelles pourront accordés des remise
de dettes concomitamment à celles qu’accorderont les créanciers privés.

§3 : L’issu de la conciliation

Comme précédemment pour le règlement amiable, la procédure de


conciliation a vocation à parvenir à l’élaboration d’un accord amiable qui peut
prévoir des remises de dettes, des délais de paiement mais aussi un
aménagement des suretés précédemment consenties.

La conciliation ne durera pas toujours jusqu’au terme qui lui a été assignée.
D’ailleurs 2 circonstances sont prévues par la loi, circonstances dans lesquelles la
conciliation prendra fin prématurément :
Lorsque le débiteur en fait la demande
Lorsque le conciliateur estime que les propositions qu’il a fait au débiteur
étaient indispensables et que celui-ci les a rejetées

En revanche, si la conciliation a été menée à son terme et a abouti à un


accord, celui-ci engage déjà tous ceux qui l’ont signé en vertu du droit commun
(1134 C.CIV). Toutefois, l’efficacité de l’accord peut être renforcée car cet
accord peut donner lieu soit à une constatation par ordonnance du président du
tribunal soit à une homologation du tribunal. Les effets de l’accord homologué
avaient été détaillés en 2005, ceux de l’accord simplement constaté ont été
précisés avec l’ordonnance de 2008.

A. La constatation de l’accord

Cette procédure trouve sa source dans L611-8 al 1 C.COM aux termes


duquel le président du tribunal, sur la requête conjointe des parties, constate
leur accord et donne à celui-ci force exécutoire. Il statue aux vues d’une
déclaration certifiée du débiteur attestant qu’il ne se trouvait pas en cessation de
paiement lors de conclusion de l’accord ou que ce dernier y met fin.

La décision constatant accord n’est pas soumise à publication et n’est pas


susceptible de recours. Elle met fin à la procédure de conciliation. Sur la forme,
elle résulte d’une ordonnance du président du tribunal lequel doit avoir été
obligatoirement saisi par une requête conjointe du débiteur et des créanciers

30
Droit des entreprises en difficulté

signataires. Il donne à l’accord force exécutoire dispensant dès lors les parties
qui voudraient en obtenir exécution d’avoir à recourir préalablement au tribunal.

Ces accords non homologués ne vont créer des obligations qu’à l’égard de
ceux qui les ont signé, ne produite pas d’effets à l’égard des tiers. La constatation
interrompt toute action en justice ou toute poursuite individuelle des créanciers
dans le but d’obtenir le paiement des créances qui en font l’objet.
B. L’homologation de l’accord

L611-8 al 2 C.COM dispose qu’à la demande du débiteur, le président du


tribunal homologue l’accord obtenu si les conditions suivantes sont remplies :
Si le débiteur n’est pas en cessation de paiement
Si les termes de l’accord sont de nature à assurer la pérennité de l’activité
de l’entreprise
Si l’accord ne porte pas atteinte aux intérêts des créanciers non signataires

1) Les conditions de l’homologation

a) Les conditions de forme

L’homologation repose sur une demande que seul le débiteur peut


accomplir. Cette démarche ne sera pas forcément spontanée, le débiteur
l’accomplira souvent sous la pression des créanciers lesquels font souvent en
pratique de cette homologation une condition de leur engagement.

b) Les conditions de fond

Il faut que soit exclue toute cessation de paiement. Plus précisément, soit le
débiteur n’était pas en cessation de paiement lors de l’ouverture de la procédure
soit il l’était et la conciliation y a alors mis un terme car le débiteur a obtenu de
ses créanciers un rééchelonnement de ses dettes ou des concours financiers
nouveaux lui permettant de faire face à son passif exigible.

Il faut que l’accord soit de nature à assurer la pérennité de l’entreprise. Le


tribunal va alors analyser le contenu de l’accord pour voir si les mesures
envisagées sont suffisantes pour assurer un rétablissement durable de l’entreprise
(droit de regard).

31
Droit des entreprises en difficulté

Il faut enfin que l’accord dont l’homologation est demandée ne porte pas
atteinte aux intérêts des créanciers non signataires. L’ordonnance 18/12/08 a
supprimé l’indication selon laquelle il en était ainsi sans préjudice de
l’application 1244-1 à -4 C.CIV. De tels délais ne peuvent donc plus être
accordés au débiteur au stade de l’homologation. L’accord qui ne créé
d’obligations qu’à l’égard des signataires va toutefois, du fait de l’homologation,
être opposable à tous les créanciers. Le tribunal devra donc vérifier que les
garanties éventuellement prises par les signataires ne sont pas disproportionnées
par rapport aux efforts qu’ils ont consenti ce qui aurait pour conséquence de
rendre inefficaces les suretés prises par les créanciers non signataires.

2) La procédure d’homologation

L611-9 et -10 C.COM. Le tribunal afin de procéder à cette homologation


doit convoquer en Chambre du conseil, le débiteur, les créanciers partis à
l’accord, les représentants du Comité d’entreprise, le conciliateur, le MP et
l’ordre professionnel dont relève le débiteur lorsque celui-ci exerce une activité
libérale.

Lorsque l’homologation est accordée, un avis du jugement est inséré au


BODAC (??) et également publié dans un journal d’annonces légales du
domicile du débiteur ce qui fait perdre à la procédure son caractère confidentiel.

Quant aux voies de recours :


Si la demande d’homologation est rejetée, le jugement est susceptible
d’appel conformément à L611-10 al 2 C.COM
Si l’homologation est prononcée, le jugement est alors susceptible de tierce
opposition mais également d’un appel du MP (nouveauté 2008)
En cas de contestation relative au privilège de conciliation, un appel est
également possible de la part des parties à l’accord

3) Les effets de l’homologation

a) Les effets immédiats

Ils sont définis par L611-10-1 C.COM et consistent en une suspension des
poursuites contre le débiteur en vue d’obtenir le paiement des créances qui en
sont l’objet et ce pendant toute la durée de l’exécution de l’accord. La situation

32
Droit des entreprises en difficulté

des créanciers est donc neutralisée car il leur est interdit non seulement de
poursuivre le débiteur en paiement de leurs créances mais il leur est également
interdit de prendre de nouvelles garanties sur les biens du débiteur.

En revanche, échappent à la suspension des poursuites les inscriptions de


suretés effectuées postérieurement au jugement d’homologation pour garantir le
paiement des créances incluses dans l’accord. Sur la forme, peu importe que les
poursuites aient porté sur les meubles ou immeubles du débiteur.

Par contre, il existe 2 limites :


L611-10-1 C.COM n’arrête que les actions en paiement des créances.
Échappent donc à l’application de cet article les actions en résolutions, en
nullité ou en garantie des vices cachés.
Les créanciers demeurés en dehors de l’accord, soit parce qu’ils n’en sont
pas partie soit parce qu’ils ont limité leur participation à certaines créances,
conservent leur droit de poursuite individuelle et ne peuvent désormais
plus se voir imposer les délais de 1244-1 C.CIV.

Par ailleurs, L611-10-2 al 2 C.COM prévoit également une mesure


favorable au débiteur puisqu’il énonce que l’accord homologué entraine la levée
de plein droit de toute interdiction d’émettre des chèques conformément à
L131-73 CMF, interdiction qui est souvent mise en œuvre à l’occasion d’un rejet
d’un chèque émis avant l’ouverture de la procédure de conciliation.

b) Les effets différés

Pour les créanciers, ces effets résultent de L611-11 C.COM qui consacre le
privilège de conciliation (privilège du new monney). Cet article énonce qu’en cas
d’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation
judiciaire, les personnes qui avaient consenti dans l’accord homologué un nouvel
apport en trésorerie au débiteur en vue d’assurer la poursuite de l’activité de
l’entreprise sont payées pour le montant de cet apport par privilège, avant toute
créance née antérieurement à l’ouverture de la conciliation.

Ce privilège était initialement réservé aux concours bancaires mais le texte


prévoit également que les personnes qui fournissent dans l’accord homologué
un nouveau bien ou un nouveau service en vue d’assurer la poursuite de
l’activité de l’entreprise seront payées pour le prix de ce bien ou de ce service
avant toute créance née avant l’ouverture de la conciliation. La différence avec le
33
Droit des entreprises en difficulté

système antérieur est notable car dans l’ancien règlement amiable ces créanciers
étaient assimilés aux autres créanciers antérieurs et venaient en concours avec
eux ce qui diminuait leurs garanties de paiement. Cette situation avait des
conséquences sur le débiteur qui avait des plus grandes difficultés à trouver de
nouveaux crédits en ayant corrélativement épuisé ses possibilités de fournir de
nouvelles garanties à ces créanciers.

Les créanciers signataires de l’accord ne peuvent par contre pas bénéficier


de cette disposition au titre de leur concours antérieur à l’ouverture de la
conciliation. Elle ne s’applique pas non plus aux apports consentis par les
actionnaires et les associés dans le cadre d’une augmentation de capital.

Cette disposition instituant le privilège de conciliation est essentielle car


elle incite les créanciers à jouer le jeu de la conciliation en leur donnant une
priorité de paiement mais seul le débiteur pouvant demander l’homologation de
l’accord, i peut bénéficier d’un instrument de pression sur ces créanciers pour
que ceux-ci participent à la négociation.

S’agissant des cautions, L111-10 C.COM : les coobligés et les personnes


ayant consenti un cautionnement ou une garantie autonome peuvent se prévaloir
des dispositions de l’accord que ces garants soient PP ou PM. Jusqu’en 2008,
cette règle supposait que l’accord soit homologué, depuis l’ordonnance du
18/12/08 cette règle est désormais applicable à l’accord simplement constaté. Par
ailleurs, la liste des garants a également été élargie en 2008 à toute personne
ayant consenti une sureté personnelle quelle que soit la forme et à toute
personne ayant affecté ou cédé un bien en garantie (cautionnement réel).

L’étude des effets de l’homologation permet de constater qu’elle présente


de nombreux avantages qui se sont somme toute atténués depuis 2008 par
rapport à l’accord simplement constaté. Objectivement, l’homologation accroit
la sécurité de l’accord obtenu. Du côté des créanciers, c’est avantageux puisqu’ils
bénéficient du privilège de conciliation ; pour le débiteur, c’est avantageux
puisque cela lui permet de se mettre à l’abri des poursuites des créanciers
signataires de l’accord. En revanche, l’homologation fait perdre à la procédure
de conciliation toute confidentialité puisque le jugement est publié. En pratique,
il apparait que c’est l’accord simplement constaté par le président du tribunal qui
est en réalité le plus utilisé : il est moins attractif pour les créanciers mais toute
publicité est alors évitée.

34
Droit des entreprises en difficulté

C. L’échec de l’accord constaté ou homologué

Si l’accord amiable n’est pas exécuté, 2 hypothèses peuvent être


distinguées :
La première repose sur L611-10-3 C.COM : saisit par l’une des parties à
l’accord constaté, le tribunal, s’il constate l’inexécution des engagements
résultant de cet accord, prononce la résolution de celui-ci. Dans les
mêmes conditions, il prononce la résolution de l’accord homologué.
Cette résolution peut être indifféremment demandée par le débiteur, par
ses créanciers et voire par ses contractants. Par ailleurs, à la différence de
l’ancienne disposition applicable avant 2005 qui visait l’inexécution des
seuls engagements financiers ; L611-10-3 C.COM évoque des engagements
sans autres précisions. Ceci permet alors la résolution de l’accord quelque
soit la nature de l’engagement inexécuté. Le tribunal n’a alors aucun
pouvoir d’appréciation.
L’accord de conciliation est anéanti par la résolution mais C.COM précise
également que la résolution emporte la déchéance de tout délai de
paiement accordé (tout devient exigible). Pour certains auteurs, il
semblerait que certaines stipulations de l’accord puissent demeurées
malgré la résolution, cela serait le cas des remises de dettes.
La seconde repose sur L611-12 C.COM : l’ouverture d’une procédure de
sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire met fin
à l’accord homologué. Les créanciers recouvrent alors l’intégralité de leurs
créances, déduction faite des sommes perçues.
Malgré les discussions de la doctrine, l’article s’apparente à une résolution
de la conciliation.

35
Droit des entreprises en difficulté

Partie 2 : Le traitement judiciaire des difficultés des entreprises

A la différence de la procédure de conciliation, les procédures de


sauvegarde, de redressement et de liquidation judiciaires sont des procédures
collectives. La différence marquée entre ces 3 procédures est que la première
d’entre elles s’analyse malgré tout en une procédure d’anticipation des difficultés
qui sera mise en œuvre alors que l’entreprise n’est pas encore en cessation des
paiements. La procédure de sauvegarde est apparue comme la procédure phare
de la réforme du 26/07/05, le livre 6 du C.COM contient donc désormais un
titre 2 spécifiquement consacré à cette procédure. Ce titre réunit toutes les règles
générales communes à toutes les procédures. Le titre 3 du même livre, relatif au
redressement judiciaire, ne contient qu’une vingtaine d’articles de sorte que la
sauvegarde a été vraiment présentée comme constituant une sorte de Droit
commun des procédures collectives.

Toutefois, la procédure de sauvegarde n’a pas rencontré le succès


escompté. Cette procédure, bien que réservée à des débiteurs n’étant pas en
cessation des paiements, n’en est pas moins publique puisque les créanciers y
sont appelés. Par ailleurs, la sauvegarde est une procédure judiciaire ; l’ouverture
de la procédure ôte au chef d’entreprise tout contrôle sur son déroulement et
surtout sur l’issue de celle-ci. Qui plus est, au faible nombre de sauvegarde
ouverte, c’est ajoutée l’idée selon laquelle la sauvegarde n’était pas forcément
adaptée à toutes les entreprises. L’ordonnance de 18/12/08 a donc pour objectif
pour consacrer des mesures destinées à rendre la sauvegarde plus attractive. Ce
faisant, elle n’a toutefois pas modifiée l’option existante entre la procédure de
sauvegarde, le redressement judiciaire et la liquidation judiciaire.

Titre 1 : La sauvegarde de l’entreprise

Est une procédure somme toute nouvelle dans l’histoire des procédures
collectives puisque consacrée par la réforme du 26/07/05 aux articles L620-1 à
L627-4 C.COM. Il s’agit bien d’une procédure collective, certains auteurs ayant
mêmes parlé de redressement judiciaire anticipé puisque cette sauvegarde doit
intervenir avant toute cessation des paiements.

L620-1 C.COM : est instituée une procédure de sauvegarde ouverte sur


demande du débiteur mentionnée à L620-2 C.COM qui sans être en cessation
des paiements justifie de difficultés qu’il n’est pas en mesure de surmonter. Cette
procédure est destinée à faciliter la réorganisation de l’entreprise afin de
36
Droit des entreprises en difficulté

permettre la poursuite de l’activité économique, le maintien de l’emploi et


l’apurement du passif. La procédure de sauvegarde donne lieu à un plan arrêté
par un jugement à l’issue d’une période d’observation et le cas échéant, elle
donne lieu à la constitution de 2 comités de créanciers conformément à L626-29
et -30 C.COM.

Sous-titre 1 : L’ouverture de la procédure de sauvegarde

La procédure de sauvegarde est une procédure volontariste qui repose sur


l’initiative du seul débiteur. A l’inverse, le redressement judiciaire peut être mis
en œuvre par d’autres protagonistes lorsque le débiteur est en cessation des
paiements, il peut donc lui être imposé.

Les conditions d’ouverture de cette sauvegarde présentent des spécificités


qui se prolongent sur le terrain procédural.

Chapitre 1 : Les conditions d’ouverture de la procédure de sauvegarde

La spécificité de la procédure de sauvegarde est double par rapport au


redressement judiciaire :
est ouverte alors que le débiteur ne se trouve pas en cessation des
paiements
est mise en œuvre uniquement par le débiteur

Section 1 : La situation financière de l’entreprise, critère d’ouverture de la


procédure de sauvegarde

La procédure de sauvegarde intervient alors que le débiteur est encore in


bonis. La cessation des paiements qui reste une notion clé du droit des
procédures collectives reste un élément déterminant en la matière puisque c’est
elle qui reste un élément de répartition des champs d’application de la
sauvegarde et du redressement.

Si le débiteur n’est pas en cessation des paiements il doit malgré tout


justifier de difficultés qu’il n’est pas en mesure de surmonter. La sauvegarde est
donc subordonnée à la fois à une condition négative : l’absence de cessation des

37
Droit des entreprises en difficulté

paiements et à une condition positive : l’existence de difficultés qu’il ne peut


surmonter.

§1 : Une condition négative, l’absence de cessation des paiements

L620-1 C.COM : le débiteur ne doit pas être en cessation des paiements.


D’ailleurs, s’il apparait après l’ouverture de la procédure de sauvegarde que le
débiteur était déjà en cessation des paiements au moment du prononcé du
jugement, le tribunal la constate et converti automatiquement la procédure en
redressement judiciaire. Le tribunal peut être saisi à cet effet par
l’administrateur, le mandataire judiciaire ou le MP. Il peut également se saisir
d’office mais dans tous les cas de figure, il doit avoir appelé et entendu le
débiteur.

A. La définition de cessation des paiements

L631-1 al 1 C.COM, inchangé en 2008, définit la cessation des paiements


comme l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible.
La formulation n’est pas nouvelle, elle retient à la fois des éléments juridiques et
comptables.

Toutefois, l’ordonnance de 2008 a complété cet article qui dans son al 2


précise que le débiteur qui établi que les réserves de crédits ou les moratoires
dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face à son
passif exigible avec son actif disponible n’est pas en cessation des paiements.

1) L’existence d’un passif exigible

Se définit comme l’ensemble des dettes certaines, liquides et exigibles.

Sont exigibles au sens juridique du terme les dettes échues au jour du


jugement qui ouvre la procédure. Se pose la question de savoir si le passif en
plus d’être exigible doit également être exigé. La controverse a subsistée pendant
très longtemps en doctrine ; pour certains auteurs, le passif exigible s’entendait
de l’ensemble des dettes du débiteur venues à échéances ; pour d’autres, le
passif exigible ne visait que les dettes effectivement réclamées car en ne
réclamant pas sa créance, ces auteurs considéraient que le créancier avait pu
consentir un moratoire au débiteur.

38
Droit des entreprises en difficulté

En JP, l’incertitude était également de mise : C.com (17/06/97) penchait


plutôt pour la conception du passif exigible mais C.com (28/04/98) semblait
alors pencher pour la thèse du passif exigé. C.com (27/02/07) a fini par trancher
dans un arrêt de principe. En l’espèce, une société initialement mise en
liquidation judiciaire puis miraculeusement sauvée par une procédure de
redressement judiciaire contestait l’arrêt CA qui avait fixé la date de cessation
des paiements sans retenir que les dettes déclarées à la procédure n’avaient fait
l’objet d’aucune poursuite. C.cass rejette le pourvoi en retenant que le passif à
prendre en compte pour établir la cessation des paiements s’entend du passif
exigible et non du passif exigé. En retenant cette conception élargie la C.com
conforte déjà l’initiative légale d’appréhender le plus tôt possible les difficultés
rencontrées par l’entreprise.

Cette JP a été consacrée par l’ordonnance du 18/12/08 qui modifie L631-1


C.COM en tenant compte des réserves de crédits ou des moratoires dont le
débiteur pourrait bénéficier de la part de ses créanciers. Dès lors que L631-1
C.COM impose au débiteur d’établir qu’il bénéficie d’un moratoire de la part
d’un créancier, ne pourra être pris en compte qu’un accord formel du créancier
constituant un véritable report volontaire d’échéance. Le débiteur doit établir
qu’il bénéficie d’un moratoire de la part de son créancier, la simple inertie de
celui-ci ne suffira pas pour exclure une créance du passif exigible. CA Paris
(12/03/09) a d’ailleurs précisé cette exigence en considérant que les affirmations
du débiteur selon lesquelles il disposait d’une réserve de crédit tant auprès d’une
banque qu’auprès de sa famille, dès lors qu’elles ne sont pas étayées par les
documents émanant des personnes concernées, ne peuvent être considérés
comme entrant dans l’actif disponible.

Par dettes certaines on entend une dette qui ne connait pas d’obstacle à
une réclamation judiciaire. A contrario, les dettes litigieuses ne seront pas prises
en compte pour établir la consistance du passif exigible puisqu’elles ne sont pas
certaines.

Par ailleurs, le passif échu et payé peut également être pris en compte pour
établir la cessation des paiements. En effet, au non paiement des dettes échues,
la JP assimile le paiement par des moyens frauduleux (ex : par le biais d’un
emprunt souscrit avec un taux d’intérêt excessif, avance anormale en compte
courant consentie par un dirigeant). L’idée est que sans ces procédés artificiels,
le débiteur n’aurait pas pu payer ses dettes exigibles et exigées.

39
Droit des entreprises en difficulté

2) L’insuffisance de l’actif disponible

Peut se définir comme l’actif réalisable à court terme. C.com (13/02/07)


précise que la consistance de l’actif disponible doit être établie lors de
l’ouverture de la procédure. Globalement, l’actif disponible comprend les
liquidités c'est-à-dire les soldes créditeurs des comptes bancaires, les effets de
commerce échus.

Par contre, il ne comprend pas l’actif immobilisé c'est-à-dire les biens qui
ont vocation à être utilisés d’une manière durable par l’entreprise comme moyen
d’exploitation ou comme instrument de travail ; il en est ainsi même si les
immobilisations sont réalisables à court terme : C.com (22/01/02) est alors
hostile à la prise en compte d’actifs mobiliers non encore cédés. Cet actif ne
comprend pas non plus les stocks et il ne comprend pas non plus les immeubles
non encore vendus comme l’a rappelé la C.Com (27/02/07) confirmant en cela
la JP antérieure. Le fait que les immeubles aient fait l’objet d’un droit de
préemption ne modifie en rien exclusion.

Pour certains auteurs, l’actif disponible ne se réduit pas aux seules


composantes comptables mais doit également prendre en compte d’autres
données de l’entreprise laquelle peut disposer d’une réserve de crédits telle que
l’avance en compte courant consentie par un associé à sa société. C.com
(12/05/09) s’est prononcée dans ce sens et considère qu’une avance en compte
courant consentie à une société par l’un de ses associés constitue bien un actif
disponible si elle n’est pas bloquée ou si son remboursement n’a pas été
demandé.

3) L’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible

La comparaison qui doit se faire entre ces 2 masses passive et active va


permettre de distinguer la cessation des paiements de notion très proches.

La cessation des paiements va d’abord se distinguer de l’incident de


paiement isolé. La C.com (25/02/97) considère en effet que le défaut de
règlement d’une seule créance est insuffisant en lui-même pour établir l’état de
cessation des paiements du débiteur.

Par ailleurs, la cessation des paiements se distingue de l’insolvabilité. Une


entreprise peut en effet être solvable c'est-à-dire avoir un actif supérieur à son
40
Droit des entreprises en difficulté

passif tout en étant en cessation des paiements car cet actif ne sera pas
rapidement réalisable (actif immobilisé).

B. La preuve de l’absence de cessation des paiements

C’est au débiteur de rapporter la preuve de l’absence de cessation des


paiements. Concrètement cette preuve est double puisque le débiteur devra faire
état de la consistance de son actif disponible et état de son passif exigible. Le
tribunal s’assura de la véracité des informations fournies par le débiteur en
auditionnant notamment les représentants du comité d’entreprise ou toute autre
personne dont l’audition lui parait utile (commissaire aux comptes).

§2 : Une condition positive, des difficultés que le débiteur n’est pas en mesure
de surmonter

Dans sa rédaction issue de la loi du 26/07/05, L620-1 C.COM exigeait que


le débiteur établisse qu’il était confronté à des difficultés qu’il n’était pas en
mesure de surmonter et qui devaient le conduire à la cessation des paiements.
En pratique, cette preuve étant très difficile à rapporter, l’ordonnance de 2008 a
choisi de modifier les conditions d’ouverture de la procédure afin de favoriser
une fois de plus l’anticipation des difficultés. Il n’est donc plus fait mention de
difficultés devant conduire à la cessation des paiements. Les auteurs, assez
unanimement, doutent toutefois que la suppression de la condition d’un risque
de cessation des paiements permette d’ouvrir d’avantage de sauvegardes.

L620-1 C.COM contient désormais 2 éléments cumulatifs :


difficultés rencontrées par le débiteur :
difficultés insurmontables

Quant à la nature des difficultés, le problème est alors que le code fait état
de difficultés insurmontables sans pour autant préciser leur nature. Celle-ci sera
donc naturellement laissée à l’appréciation des tribunaux. Il peut s’agir
indifféremment de difficultés financières (problèmes de trésorerie), de difficultés
économiques (perte marché), de difficultés sociales (grève qui s’éternise) ou
difficultés juridiques (difficulté de recouvrement de créance).CA Lyon
(31/05/06) a pris en compte pour justifier l’ouverture d’une procédure de
sauvegarde au bénéfice d’une entreprise spécialisée dans la production de textile
de la dégradation du chiffre d’affaire (moins 50% en 5 ans), de la mise en

41
Droit des entreprises en difficulté

liquidation judiciaire de 2 filiales et de la mise en œuvre d’une procédure


d’alerte par le commissaire aux comptes.

Quant à l’intensité de ces difficultés : les dispositions légales précisent que


le débiteur ne doit pas pouvoir les surmonter lui-même, il doit concrètement
indiquer au tribunal pourquoi il ne peut pas les surmonter. Le tribunal doit alors
se livrer à une appréciation in concreto. C.com (26/06/07) a indiqué que la
situation de la société visée devait être appréciée en elle-même sans que soit
prise en compte les capacités financières du groupe auquel elle appartient à
moins que la société mère n’ait pris des engagements de soutien à l’égard de sa
filiale (pas le cas en l’espèce).

Lorsque le débiteur prend l’initiative de la demande, ses conditions


doivent être remplies au moment où il présente la demande. Le tribunal doit
donc se situer au jour où il statue sur les conditions d’ouverture de la
sauvegarde. Pb : qu’en est il en cas de recours formé contre l’ouverture de la
procédure de sauvegarde. C.com (1/10/97) : lorsqu’un recours est formé contre
l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire, la CA apprécie l’état de
cessation des paiements au jour où elle statue. Par contre, en ce qui concerne la
procédure de sauvegarde, la C.cass (26/06/07) a considéré que la CA doit se
situer au jour du jugement d’ouverture pris par le juge de 1ère instance et non la
date à laquelle le juge statue sur le recours formé. Cependant, comme on a pu le
souligner en doctrine, la situation de l’entreprise a pu évoluer entre le jugement
de 1ère instance et le jour où la CA est appelée à statuer. Il parait dès lors difficile
de ne pas prendre en compte la situation du débiteur surtout s’il est depuis en
état de cessation des paiements.

Section 2 : La qualité du débiteur sollicitant l’ouverture de la procédure de


sauvegarde

Initialement, seuls les commerçants relevaient du droit des procédures


collectives. Les évolutions successives ont élargies le champ d’application de ces
procédures. La loi du 13 juillet 1967 a appliqué le droit des procédures
collectives aux PM privées non commerçantes. La loi du 25 janvier 1985 y a
soumis les artisans. La loi du 30 décembre 1988 y a soumis les agriculteurs. La
loi du 26 juillet 2005 a admis au bénéfice des procédures collectives les
professions indépendantes.

42
Droit des entreprises en difficulté

Ce champ d’application a été légèrement modifié par l’ordonnance de


décembre 2008. Jusqu’alors, la procédure était ouverte à tout commerçant et à
toute personne inscrite au répertoire des métiers ; désormais elle est applicable à
toute personne exerçant une activité commerciale ou artisanale. L620-2 C.COM,
dans sa nouvelle rédaction, énonce donc que la procédure de sauvegarde est
applicable à toute personne exerçant une activité commerciale ou artisanale, à
tout agriculteur, à tout autre personne physique exerçant profession
indépendante y compris une personne exerçant une activité libérale ainsi qu’à
toute personne PM de droit privée à savoir les société, les GIE, les associations
de la loi de 1901 et les sociétés dissoutes en cours de liquidation puisque la
personnalité morale perdure pour les besoins de la liquidation.

L621-2 al 2 C.COM précise que la procédure peut être étendue à plusieurs


autres personnes en cas de confusion de patrimoine avec celui du débiteur ou en
cas de fictivité de la personne morale.

§1 : Les personnes principalement soumises à la procédure de sauvegarde

A. Les personnes physiques

1) Les personnes exerçant une activité commerciale

La législation relative aux procédures collectives a toujours fait référence à


la qualification de commerçant, jamais à l’immatriculation au RCS. Sont
commerçants conformément à L121-1 C.COM ceux qui exercent des actes de
commerces et en font leur profession habituelle. L’ordonnance de 2008 a
abandonné la notion de commerçant pour y substituer celle de personne
exerçant une activité commerciale. A priori, la modification est sans grande
conséquence.

Depuis longtemps en effet, la doctrine considère que c’est la réalité de la


profession commerciale qui doit être prise en compte. L’immatriculation au
RCS n’est pas une condition requise au regard du droit des procédures
collectives. Par conséquent, il était parfaitement envisageable d’ouvrir une
procédure collective à l’encontre d’un commerçant de fait mais la question
essentielle était de savoir si le commerçant de fait pouvait lui-même demander à
être admis au bénéfice d’une procédure collective. Jusqu’ici C.com (25/03/97)
s’y était opposée. Si l’on avait maintenu cette JP sous l’empire de la loi de 2005
cela aboutissait à exclure le commerçant de fait de la procédure de sauvegarde
43
Droit des entreprises en difficulté

puisqu’elle repose précisément sur la seule initiative du débiteur. En ne faisant


plus référence au commerçant, l’ordonnance de 2008 permettra sans doute (pas
de JP) l’ouverture d’une sauvegarde à la demande d’un débiteur sans que l’on ait
à se soucier d’une immatriculation au RCS.

L’application de la procédure de sauvegarde aux personnes exerçant une


activité commerciale appelle une observation concernant le conjoint qui
collabore à l’activité professionnelle de l’autre. R121-1 C.COM énonce qu’est
considéré comme conjoint collaborateur le conjoint du chef d’une entreprise
commerciale, artisanale ou libérale qui exerce une activité professionnelle
régulière dans l’entreprise sans percevoir de rémunération et sans avoir la qualité
d’associé au sens de 1832 C.CIV. Si le conjoint exerçant une activité
commerciale est soumis à l’ouverture d’une procédure collective, le conjoint
collaborateur ne peut se voir étendre le bénéfice de la procédure car il n’est pas
commerçant au sens C.COM. Il n’exerce pas la profession de façon
indépendante et pour son compte personnel, il est simplement présumé avoir
reçu mandat du commerçant sur le fondement L121-6 C.COM. C.com
(11/03/04), dans un arrêt de principe, énonce qu’une personne mentionnée au
RCS en qualité de conjoint collaborateur ne peut être admise au bénéfice d’une
liquidation judiciaire donc a fortiori pour le reste des procédures collectives. En
revanche, si le conjoint est immatriculé en tant que collaborateur au RCS, il
pourrait éventuellement invoquer le dépassement du mandat pour faire tomber
la notion de collaborateur et pour se voir conférer la qualité de coexploitant.
Cependant, en raison de l’ampleur du mandat qu’il est sensé avoir reçu, le
conjoint collaborateur ne peut qu’à de très rares occasions accomplir des actes
de dépassement. La JP considère par exemple qu’entre dans le cadre du mandat
de collaborateur, le fait que certaines opérations bancaires aient transité par son
compte, considère également que les retraits et versements effectués sur les
comptes bancaires du fond rentrent dans le cadre du mandat et de même, entre
dans le cadre de ce mandat la prise en charge quotidienne du fond. 1 seul arrêt
admet le dépassement du mandat (nom sur publicité).

S’il n’est pas admis au bénéfice d’une procédure collective, le conjoint


collaborateur peut par contre être éligible à la procédure de surendettement des
particuliers consacrée par la loi du 1 aout 2003 à la condition d’être de bonne foi
et de faire état de dettes n’ayant pas un caractère professionnel. Le principal
problème va concerner la qualité des dettes du conjoint collaborateur. 2ème C.civ
(27/05/04) considère que la dette d’emprunt pour l’acquisition d’un fond de
commerce ne présente pas un caractère professionnel pour le conjoint
44
Droit des entreprises en difficulté

collaborateur du commerçant alors même qu’il aurait la qualité de


coemprunteur ; comme il n’est pas rémunéré, les dettes contractées n’ont pas un
caractère professionnel. 2ème C.civ (14/09/06) énonce que les exclusions du
bénéfice de la procédure de traitement visée par L333-3 C.CONSO ne
concernent pas le conjoint collaborateur du commerçant. 2ème C.civ (24/05/07)
énonce que le fait d’être marié avec un commerçant n’est pas à lui seul une
cause d’exclusion des procédures de surendettement.

2) Les personnes exerçant une activité artisanale

L’artisan est une personne qui tire l’essentiel de ses revenus de son travail
manuel. La différence entre commerçant et artisan s’est atténuée puisque les 2
sont soumis à des procédures identiques (depuis 1985) et ils relèvent tout 2 de la
compétence du tribunal de commerce. Par contre, l’ordonnance du 18
septembre 2000 avait substitué au mot artisan la formule « personne inscrite au
répertoire des métiers ». Question de savoir si les artisans de fait non inscrit au
répertoire des métiers relevaient du droit des procédures collectives. Loi du 26
juillet 2005 avait semble-t-il apporter une réponse positive puisqu’on pouvait
considérer que les artisans de fait exerçaient une activité professionnelle
indépendante. L’ordonnance de 2008 semble conforter cette position puisque
sont visées les personnes exerçant une activité artisanale sans autre référence à
une inscription au répertoire des métiers.

3) Les agriculteurs

Depuis loi du 30 décembre 1988, les procédures de redressement est de


liquidation judiciaire avaient été consacrées au profit des agriculteurs. La loi de
2005 leurs a ouvert le bénéfice de la procédure de sauvegarde à la condition
toutefois qu’ils exercent cette profession agricole de manière habituelle.

Par contre, une différence existe entre l’ouverture de la sauvegarde et


l’ouverture d’un redressement ou d’une liquidation. En effet, dans ces 2 derniers
cas, L631-5 al 3 C.COM dispose que la procédure ne peut être ouverte que si le
président du TGI a été saisi préalablement d’une demande tendant à la
désignation d’un conciliateur présenté en application de L351-2 C.RURAL (sur
règlement amiable agricole). Cette spécificité n’est pas reprise pour la procédure
de sauvegarde qui peut don être demandée par un agriculteur qui n’aura pas à
solliciter au préalable un règlement amiable.

45
Droit des entreprises en difficulté

4) Les personnes exerçant une activité libérale

C’est la nouveauté de la loi du 26 juillet 2005 d’avoir admis au bénéfice de


la procédure de sauvegarde les personnes physiques exerçant une activité
professionnelle indépendante y compris une profession libérale soumise à statut
législatif ou règlementaire ou dont le titre est protégé. La formule vise
indistinctement les avocats, les médecins, les architectes, les experts-comptables,
les vétérinaires, les officiers ministériels, les commissaires priseurs. Avant la
réforme, certains libéraux relevaient du droit des procédures collectives
lorsqu’ils exerçaient leur activité sous forme de société. Dès qu’une procédure
est ouverte à l’encontre de l’une de ces personnes, l’ordre professionnel ou
l’autorité compétente doit être informé et consulté pour les décisions
importantes. L’ouverture de la procédure sera obligatoirement communiquée à
cet ordre professionnel.

C.com (9/02/10) : avocat qui a cessé son activité à titre individuel pour
devenir associé n’exerce plus une activité indépendante, il peut toutefois être
assigné en redressement judiciaire dans le délai d’un an à compter de la
cessation de l’activité individuelle pour l’apurement du passif provenant de
l’activité antérieure.

B. Les personnes morales

Depuis la loi du 13 juillet 1967, les PM de droit privé relèvent du droit des
procédures collectives quelle que soit la nature de leur activité commerciale ou
civile. C’est donc naturellement que la loi du 26 juillet 2005 les a maintenues
dans le champ d’application de la procédure de sauvegarde. Sont visées les
sociétés commerciales, les sociétés civiles notamment les SCI, les sociétés
agricoles, les associations déclarées ou encore des clubs sportifs.

Tous ces groupements ne seront toutefois admis au bénéfice de la


procédure qu’autant qu’ils seront dotés de la personnalité morale. Les sociétés
commerciales doivent donc être immatriculées au RCS, par contre et
corrélativement, une société en formation ne peut pas faire l’objet d’une
sauvegarde mais ses associés pris individuellement le pourraient. De même, ne
peuvent faire l’objet d’une sauvegarde une SEP ou une société créée de fait.

Enfin, la procédure de sauvegarde ne s’applique pas au PM de droit public


à savoir les collectivités territoriales ou les établissements publics. Si la situation
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Droit des entreprises en difficulté

de ces organismes était en danger, c’est l’Etat qui prendrait en charge leurs
dettes.

§2 : L’extension de la procédure de sauvegarde

L620-2 C.COM, modifié par ordonnance 2008, prévoit qu’à la demande


de l’administrateur, du mandataire judiciaire, du MP ou d’office, la procédure
de sauvegarde peut être étendue à une ou plusieurs autres personnes en cas de
confusion de leur patrimoine avec celui du débiteur ou en cas de fictivité de la
PM. A cette fin, le C.COM précise que le tribunal ayant ouvert la procédure
initiale reste compétent.

L’extension, si elle est prononcée, aboutie à rétablir le gage des créanciers


en englobant dans une procédure unique le patrimoine du débiteur mais aussi
celui de la PP ou PM qui va faire l’objet de l’extension.

A. Les cas d’extension de la procédure

Loi de 2005, tout en consacrant 2 causes d’extension n’a donné aucune


définition de ces notions. Les critères qui avaient été précédemment dégagés par
la JP doivent donc être repris sous l’empire de cette loi.

1) La confusion des patrimoines

Cette confusion va autoriser l’extension de la procédure à un autre


débiteur et pour se faire elle est subordonnée à la constatation de 2 critères
alternatifs :
Présence d’éléments d’actif et de passif mélangés de sorte que l’on ne peut
les rattacher précisément à l’un des patrimoines. Les 2 personnes se sont
comportées comme s’il n’y avait qu’un seul patrimoine.
Concrètement, cette confusion va très souvent se manifester par une
imbrication des comptabilités de sorte que l’on ne va pas pouvoir
précisément pouvoir répartir les opérations entre les personnes.
On peut également penser à 2 PP qui exploitent ensemble un fond de
commerce et qui sont mariés sous le régime de la communauté légale.
Contre toute attente, pour les tribunaux, il apparait que l’imbrication des
patrimoines ne peut résulter des règles régissant la composition active ou
passive de la communauté ou encore des pouvoirs reconnus aux époux sur
la masse commune. Ainsi, en cas de coexploitation d’un fond de
47
Droit des entreprises en difficulté

commerce par 2 conjoints, c’est bien 2 procédures distinctes qui devront


être ouvertes. C.com (15/03/05) rend arrêt de principe et énonce que les
personnes qui exploitent en commun un fond de commerce et qui
remplissent les conditions exigées par L620-2 C.COM peuvent faire
chacune l’objet d’une procédure de redressement ou de liquidation
judiciaire ; en l’absence de confusion des patrimoines, le tribunal doit,
après avoir constaté l’état de cessation des paiements de chacune d’elles,
ouvrir autant de procédures distinctes que de personnes.
Par contre, si la procédure ouverte à l’encontre d’un conjoint commerçant
ne peut être étendue à l’autre conjoint en l’absence de confusion des
patrimoines, on doit tenir compte de L624-6 C.COM qui énonce que le
mandataire judiciaire ou l’administrateur peut, en prouvant par tous les
moyens que les biens acquis par le conjoint du débiteur l’ont été avec des
valeurs fournies par celui-ci, demander que les acquisitions ainsi faites
soient réunies à l’actif.
Présence de flux financiers anormaux constatés entre 2 entités juridiques
mais depuis 2 arrêts, C.com (5/03/02) a rajouté comme critère d’extension
l’existence de relations financières anormales. Les flux financiers
sembleraient induire une réciprocité dans les 2 entités alors que les
relations financières sont unilatérales.
Ce critère est traditionnellement réservé aux PM. Ces flux financiers
anormaux peuvent résulter de versement de fonds sans contrepartie ou
encore d’une renonciation à percevoir un loyer, c’est également le cas
lorsqu’une entité paiera les dettes de l’autre. C.com (20/01/09) énonce que
l’extension de procédure pour confusion des patrimoines est justifiée dès
lors que la société bailleresse a négligée de procéder à l’encaissement des
loyers et qu’elle a pris à sa charge des dépenses normalement dues par la
société locataire (en l’espèce : abandon de loyers de 200 000€).
Il faut toutefois composer avec la spécificité des groupes de société et
l’application de la confusion des patrimoines au sein d’un tel groupe s’est
posée dans l’arrêt Metal Europe, C.com (19/04/05). En l’espèce, la SAS
Metal Europe qui avait une activité polluante de traitements des métaux et
avait été mise en redressement judiciaire. La procédure avait été étendue à
la société mère, une SA, en considérant que celle-ci avait fait face aux
besoins de trésorerie de sa filiale ou encore qu’il y avait eu entre elles
échange de salariés. La confusion des patrimoines avait été retenue par la
CA, C.com casse cet arrêt en considérant que la Cour n’avait pas
caractérisé des relations financières anormales constitutives d’une
confusion de patrimoines de la société mère avec sa filiale.
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Droit des entreprises en difficulté

2) La fictivité des sociétés

Pour qu’il y ait fictivité de la PM et donc extension de la procédure à un


autre débiteur, il faut que l’un des éléments requis pour la validité du contrat de
société fasse défaut (le plus souvent : affectio soietatis). 2 hypothèses de fictivité
peuvent être envisagées :
Dirigeant de fait ou de droit d’une PM qui en réalité exploite le fond à titre
individuel et non pas réellement par l’intermédiaire de la personne
morale. Rare car preuve difficile.
2 sociétés qui tout en étant juridiquement autonomes forment en réalité
une seule entité.

En cas de fictivité, la société à laquelle est étendue la procédure est en


réalité privée de toute personnalité morale.

B. L’application de l’extension de la procédure de sauvegarde

La sauvegarde concernant le débiteur in bonis il a été surprenant d’étendre


la procédure à un autre débiteur alors que le premier n’est pas en cessation des
paiements. La justification de cette application à la sauvegarde se trouve en
réalité dans la protection des droits des créanciers puisque l’objectif de
l’extension est de reconstituer la réalité du patrimoine du débiteur. On
considère dès lors que le seul constat de l’absence de cessation des paiements ne
doit pas aboutir à l’éviction d’une partie du patrimoine du débiteur de la
procédure.

Ceci étant les risques d’extension de la procédure de sauvegarde resteront


rares en pratique car le tribunal devra vérifier que la corrélation entre l’actif et le
passif, appréciée au regard des 2 débiteurs, ne caractérise pas un état de
cessation de paiements.

C. Le titulaire de l’action en extension dans la procédure de sauvegarde

Il était traditionnellement convenu que le débiteur ne pouvait pas


demander l’extension de la procédure (ex : C.com, 28/05/02) pas plus d’ailleurs
que ne le pouvaient les créanciers. En réalité, seul le mandataire judiciaire voire
l’administrateur pouvait demander cette extension.

49
Droit des entreprises en difficulté

Ces 2 possibilités ont été reconduites par l’ordonnance de 2008 qui y a


ajouté le MP. Par contre, la procédure de sauvegarde reposant sur l’initiative du
débiteur, il est étonnant pour certains auteurs que l’ordonnance ait autorisé le
tribunal de prononcer d’office à cette procédure.

D. Les conséquences de l’extension de la procédure

L’extension va entrainer l’ouverture d’une procédure unique qui va


reconstituer et donc unifier l’actif et le passif entre le débiteur et la personne qui
fait l’objet de l’extension. 2 conséquences :
Les créanciers de la personne en difficulté voient leur gage étendu à la
totalité du patrimoine commun
Les créanciers de la personne à qui la procédure est étendue vont subir le
concours des créanciers du débiteur en difficulté.
Toutefois, pour les créanciers munis de suretés, ces derniers conservent ces
suretés sur les biens confondus lorsqu’ils sont titulaires de suretés spéciales type
hypothèque puisqu’elles portent sur un bien déterminé. S’agissant des suretés
personnelles, elles restent cantonnées à la couverture de la dette initiale. Ainsi, si
un cautionnement garanti les dettes d’une société mère, il ne pourra pas être
étendu aux filiales.

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Droit des entreprises en difficulté

Chapitre 2 : Les modalités d’ouverture de la procédure de sauvegarde

La procédure de sauvegarde est soumise à une intervention judiciaire qu’il


s’agisse du tribunal de grande instance ou du tribunal de commerce.

Section 1 : Le rôle du tribunal

§1 : L’initiative de la saisine du tribunal

La saisine du tribunal en matière de sauvegarde est abandonnée à la seule


initiative du débiteur et ce conformément à L620-1 al 1 C.COM. La demande
d’ouverture de la procédure est déposée par le représentant légal de la PM ou
par le débiteur PP au greffe du tribunal.

La demande d’ouverture de la sauvegarde doit exposer la nature des


difficultés rencontrées et doit être accompagnée d’un certain nombre de
documents qui sont destinés à renseigner le tribunal. Dans cette liste de
documents on trouve une situation de trésorerie de moins de 8 jours, l’état
chiffré des créances et des dettes avec l’indication des noms et domiciles des
créanciers, on peut également y trouver un inventaire sommaire des biens du
débiteur.

§2 : L’information du tribunal

Le tribunal saisi de la demande doit auditionner un certain nombre de


personnes. Conformément à L621-1 C.com, doivent être entendus en chambre
du conseil le débiteur lui-même, les représentants du personnel, et si la
personne susceptible de faire l’objet de la procédure de sauvegarde est un
professionnel indépendant sera alors auditionné un membre de son ordre
professionnel ou de l’autorité compétente par rapport à sa profession.
Concernant le débiteur, son audition est d’ordre public de sorte que
l’omission de cette audition par le tribunal peut entrainer la nullité du jugement
d’ouverture de la procédure.
Quant à l’audition des représentants du personnel, elle est également
essentielle, le tribunal ne pouvant à peine de nullité du jugement d’ouverture,
ouvrir la procédure sans avoir recueilli l’avis des salariés. Sur la forme, le greffier
du tribunal doit aviser le débiteur de son obligation de réunir le Comité
d’entreprise ou les délégués du personnel pour que soient désignées les
personnes qui seront entendues par le tribunal.
51
Droit des entreprises en difficulté

A coté de ces auditions obligatoires, l’art L621-1 C.com prévoit que le


tribunal peut entendre toute personne dont l’audition lui parait utile. Certaines
personnes seront potentiellement plus appelées que d’autres, telles que les
commissaires aux comptes ou plus généralement les experts comptables.

Afin de compléter son information, le tribunal peut également commettre


un juge enquêteur qui va recueillir tous les renseignements possibles sur la
situation financière, économique ou encore sociale de l’entreprise et ce
notamment afin de vérifier que le débiteur n’est pas en cessation des paiements.

Lorsque la procédure de sauvegarde est demandée par un débiteur qui a


bénéficié d’une procédure de conciliation dans les 18 mois qui ont précédés
cette demande, cette demande de sauvegarde sera alors examinée en présence
du ministère public.

§3- les prérogatives du tribunal

Comme avant l’ord 2008, le tribunal est seul compétent pour déterminer le
sort de l’entreprise. C’est lui qui va permettre et autoriser la poursuite de
l’exploitation, il va arrêter le plan de sauvegarde, il va désigner les intervenants, il
va fixer la date de cessation des paiements, il va prononcer la nullité des actes de
disposition effectués après le jugement d’ouverture et qui seraient étrangers à la
gestion courante de l’entreprise.
Il y a toutefois une différence notable depuis l’ordonnance de 2008. En
effet précédemment le tribunal pouvait d’office ordonner la cessation partielle
de l’activité de l’entreprise au cours de la période d’observation or depuis l’ord
2008, seul le débiteur peut demander au tribunal de prononcer cette cessation
d’activité. Par ailleurs, le tribunal ne peut plus subordonner l’adoption du plan
de sauvegarde au remplacement d’un ou de plusieurs dirigeants à la tête de
l’entreprise (ce qui était possible avant 2008).

Section 2 : les organes de la procédure

L’ouverture de la procédure de sauvegarde va entrainer la nomination de


plusieurs organes, ce sont les articles L621-4 et s C.com qui détaillent la
désignation ainsi que la mission des différents organes de la procédure.
Quelques changements ont été opérés par l’ord 2008 à des textes qui vont
s’appliquer à al fois à la sauvegarde et au redressement judiciaire.
52
Droit des entreprises en difficulté

Après l’ouverture de la procédure de sauvegarde, si l’entreprise bascule en


redressement judiciaire suite à la constatation de la cessation des paiements, ce
sera le tribunal initialement saisi qui restera compétent.

Certains organes sont désignés dès le jugement d’ouverture, d’autres le


seront postérieurement.

§1- les désignations initiales

A. Le juge commissaire

Il est désigné dans le jugement d’ouverture par le tribunal et il est choisi


parmi les membres du tribunal (TC ou TGI selon la procédure) ayant au moins
deux ans d’ancienneté. L’art L621-4 prévoit toutefois qu’en cas de nécessité le
tribunal peut désigner plusieurs juges commissaires.
Avec l’ord 2008, en cas d’empêchement du juge commissaire, c’est le
président du tribunal qui le remplacera dans l’exercice de ses fonctions (art
L621-9 al 3).
Le rôle du juge commissaire est de veiller au déroulement rapide de la
procédure ainsi qu’à la protection des différents intérêts en présence (art L621-9
al 1). Tout d’abord, le juge commissaire a un droit d’information tout au long de
la procédure qui av se manifester par le fait que l’administrateur et le mandataire
doivent l’informer du déroulé de la procédure mais aussi de la situation de
l’entreprise. Il peut également obtenir la communication auprès des tiers de tout
renseignement de nature à l’éclairer sur la situation financière et sociale de
l’entreprise. Il peut agir auprès des commissaires aux comptes, auprès des
représentants du personnel, auprès des organismes publics, auprès des
organismes de prévoyances, mais surtout auprès des établissements de crédit.
Quant à sa mission elle est double. D’une part, il prend les décisions
importantes pendant la période d’observation (du jour de l’ouverture de la
procédure jusqu’une durée maximale de 18 mois). Son autorisation est ainsi
requise en cas d’actes étrangers à la gestion courante de l’exploitation. Elle est
aussi requise pour consentir une hypothèque, pour transiger, pour payer une
créance antérieure au jugement, et pour lever l’option d’achat d’un contrat de
crédit-bail. De la même façon, les décisions d’admission ou de rejet des créances
relèvent également de sa compétence (L624-2 C.com). D’autre part, il a
également pour fonction de coordonner l’action des mandataires de justice
(administrateur et mandataire). Pour ce faire, il transmet à l’administrateur tous
53
Droit des entreprises en difficulté

les renseignements et tous les documents utiles à l’accomplissement de sa


mission. C’est aussi lui qui va contrôler la situation des intervenants à la
procédure et peut proposer le remplacement de l’administrateur au tribunal.
C’est également lui qui va désigner parmi les créanciers qui en font la demande
les contrôleurs qui vont veiller à ses cotés au bon déroulement de la procédure.
Au plan procédural, il statue par voie d’ordonnance sur les demandes, sur
les revendications relevant de sa compétence, mais aussi contre les réclamations
formulées contre les actes de l’administrateur ou du mandataire. Ces
ordonnances peuvent faire l’objet d’un recours devant le tribunal dans les dix
jours de leur communication ou de leur notification.

B. Les mandataires de justice

L’art L621-4 al 3 C.com prévoit que le tribunal, dans le jugement


d’ouverture, doit désigner deux mandataires de justice à savoir l’administrateur
judiciaire (coté débiteur) et le mandataire judiciaire (coté créancier). Leur rôle
respectif découle de l’éclatement des fonctions des syndics opéré par la loi du 25
jan 1985. Le principe est que ces mandataires judiciaires sont des professionnels
inscrits sur des listes nationales. Mais à titre exceptionnel, il était prévu que le
tribunal pouvait par décision motivée désigner une autre personne physique
(que celles inscrites sur les listes nationales) justifiant d’une compétence
particulière par rapport à la nature de l’affaire. L’ordonnance 2008 a simplement
supprimé l’exigence de ce caractère exceptionnel. Désormais, on considère que
le tribunal devra seulement motiver sa décision au regard de l’expérience ou de
la qualification particulière de la personne désignée.
Indépendamment de cette modification l’ord 2008 n’a pas apporté de
modifications fondamentales au statut des mandataires de justice. Toutefois, la
modification des prérogatives du débiteur a eu incidence indirecte sur les
pouvoirs des mandataires de justice. Par exemple, le débiteur peut désormais lui
proposer au tribunal un administrateur, il peut demande au JC d’effectuer un
acte de disposition étranger à la gestion courante (et non plu l’administrateur), il
va demander la cessation partielle de l’activité et enfin, c’est aussi el débiteur qui
peut demander la conversion de la sauvegarde en redressement si l’adoption du
plan de sauvegarde est manifestement impossible.

1) L’administrateur judiciaire

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Droit des entreprises en difficulté

Il intervient aux cotés du débiteur notamment dans l’établissement du


bilan économique, social et environnemental de l’entreprise. La désignation
d’un administrateur n’est pas obligatoire dans tous les cas. En effet elle n’est
imposée que si le nombre de salariés est supérieur à 20 et si le chiffre d’affaire
hors taxe du débiteur est supérieur à 3 millions €. En dessous de ces seuils, la
désignation d’un administrateur est facultative pour le tribunal et laissé
entièrement à son appréciation.

L’administrateur a en sauvegarde une mission de surveillance du débiteur


dans la gestion de l’entreprise (car le débiteur n’est pas dessaisi de la gestion)
ainsi qu’une mission d’assistance pour les actes de gestions mais le débiteur
continue à exercer sur son patrimoine tous les actes d’administration voire de
disposition ainsi que les droits et les actions qui ne sont pas compris dans la
mission de l’administrateur. La mission de ce dernier va être déterminée par le
tribunal. D’une façon générale on peut dire que l’administrateur va disposer du
pouvoir d’exiger la poursuite des contrats en cours. Il a aussi le pouvoir
d’effectuer tous les actes nécessaires à la conservation des droits de l’entreprise
contre les débiteurs. Il va aussi recevoir la liste des créanciers, la liste des
principaux contrats en cours, et il doit être informé par le débiteur des instances
en cours auxquelles le débiteur est partie. L’ordonnance de 2008 apporté une
modification puisque l’administrateur n’est plus habilité à faire un acte de
disposition étranger à la gestion courante de l’entreprise (c’est le juge
commissaire désormais) ou à consentir une hypothèque.

2) Le mandataire judiciaire

Quelle que soit la taille de l’entreprise, le jugement d’ouverture de


sauvegarde doit obligatoirement désigner un mandataire judiciaire (L621-4 al 3
C.com). En cours de procédure le tribunal peut décider d’adjoindre des
mandataires à celui ou à ceux initialement désignés. En principe le choix du
mandataire relève de la compétence exclusive du tribunal mais l’ord 2008
permet désormais au MP de proposer un mandataire judiciaire.
Il est chargé de représenter les créanciers tout au long de la procédure. Il
doit établir dans le délai fixé par le tribunal la liste des créances qui lui ont été
déclarées. Il doit transmettre cette liste au juge commissaire. Au cours de la
période d’observation, il sera régulièrement consulté après l’administrateur
lequel l’informera des solutions qu’il envisage de proposer au tribunal par
rapport à la préparation du plan.

55
Droit des entreprises en difficulté

En l’absence de constitution de comité de créancier, ce qui sera souvent le


cas car ils sont réservés aux grosses structures, c’est le mandataire qui interrogera
les créanciers individuellement ou collectivement sur les remises de dettes et les
délais qui leur sont proposés afin de recueillir leur accord.
D’une manière générale, le mandataire est chargé de défendre les intérêts
des créanciers et d’agir au nom et dans l’intérêt collectif de ceux-ci. Il peut par
exemple à cette fin, exercer des voies de recours contre des jugements statuant
sur l’extension de la procédure de sauvegarde (notamment quand elle est
refusée) ou encore contre les jugements statuant sur la conversion de la
sauvegarde en redressement judiciaire.

C. Les experts et les techniciens

Le tribunal peut désigner un ou plusieurs experts dont il déterminera la


mission. Ces experts ont globalement pour mission d’établir un rapport sur la
situation économique et financière de l’entreprise. Cette désignation est
facultative en sauvegarde, mais obligatoire en redressement judiciaire si
l’entreprise emploie plus de 20 salariés et si son chiffre d’affaire est supérieur à 3
Millions €.

§2- les désignations ultérieures

A. Le représentant des salariés

L’art L621-4 al 2 C.com prévoit que le tribunal doit inviter le comité


d’entreprise ou à défaut les délégués du personnel à désigner un représentant.
En l’absence de comité d’entreprise ou de délégués du personnel ce
représentant est élu par les salariés. Quand aucun représentant ne peut être
désigné, un PV de carence doit être dressé par le débiteur, qui devra être
transmis au tribunal. Le représentant des salariés va bénéficier d’une protection
particulière contre le risque de licenciement compte tenu du rôle important qui
va lui être dévolu durant la procédure. En effet tout au long de la procédure de
sauvegarde le représentant des salariés va assister le mandataire judiciaire afin de
vérifier les créances salariales.

B. Les contrôleurs

Conformément à L621-10 C.com, le juge commissaire désigne un à cinq


contrôleurs parmi les créanciers du débiteur qui en font la demande par une
56
Droit des entreprises en difficulté

déclaration au greffe du tribunal. L’un de ces contrôleurs doit être choisi parmi
les créanciers titulaires d’une sureté, un autre parmi les créanciers
chirographaires.
Il existe des particularités concernant les contrôleurs. Lorsque le débiteur
est un professionnel libéral, l’ordre professionnel ou l’autorité compétente est
nommé d’office contrôleur. Dans ce cas le juge commissaire ne pourra nommer
que quatre autres contrôleurs.
Les contrôleurs restent en fonction pendant toute la durée de la procédure
mais ils peuvent également être révoqués à la demande du MP par décision du
tribunal.
Leur désignation était initialement facultative mais la loi de 2005 a voulu
renforcer leurs prérogatives. Selon L621-11 c.com, les contrôleurs assistent le
mandataire judiciaire dans ses fonctions et le juge commissaire dans sa fonction
de surveillance. A cette fin, ils peuvent prendre connaissance de tous les
documents transmis à l’administrateur et au mandataire judiciaire. Ils vont aussi
surveiller la gestion de l’administration ou de la gestion du débiteur. Ces
contrôleurs peuvent corriger l’inaction du mandataire judiciaire et peuvent
intervenir au nom des créanciers tout au long de la procédure.ils peuvent
notamment saisir le tribunal lorsque le mandataire n’aura pas engagé les actions
nécessaires.

57
Droit des entreprises en difficulté

Sous-titre 2 : Les effets de la procédure de sauvegarde

L’ouverture d’une procédure de sauvegarde produit les effets de toute


procédure collective. Conformément à L621-3 C.com, le jugement de
sauvegarde ouvre une période d’observation d’une durée maximale de six mois.
C’est le tribunal qui fixera cette durée qui peut donc être inférieure à 6 mois (ce
qui est rarement le cas). Cette période peut être renouvelée une fois par une
décision motivée à al demande de l’administrateur, du débiteur ou du MP. Ce
dernier et lui seul peut également demander au tribunal une nouvelle
prorogation pour une durée maximum de 6 mois. Donc au maximum cette
période d’observation durera 18 mois.
Par ailleurs, seul le MP peut faire appel des jugements statuant sur la durée
de la période d’observation.
A la fin de chaque période, le débiteur doit informer le juge commissaire
ou le MP de l’état de la trésorerie et des résultats de l’exploitation.
Pendant cette période d’observation, le point essentiel va être le maintien
de l’activité de l’entreprise. Toutefois, pendant cette période, l’entreprise va être
protégée des poursuites de ses créanciers et ce afin d’éviter la cessation des
paiements. Par ailleurs, pendant cette période d’observation, le patrimoine du
débiteur va précisément être reconstitué afin d’une part de préserver les droits
de ses créanciers, et afin d’autre part de favoriser l’efficacité du plan de
sauvegarde.

Chapitre 1 : La protection de l’entreprise

Cette protection passe par la mise en œuvre de deux principes


complémentaires destinés à assurer la pérennité de l’entreprise et
corrélativement la réussite du plan de sauvegarde. Ces deux principes sont d’une
part la poursuite de l’exploitation (section 1) et d’autre part la protection du
débiteur contre les initiatives du créancier (section 2).

Section 1 : La poursuite de l’exploitation

Cette poursuite passe par lé définition précise des pouvoirs régissant la


gestion de l’entreprise pendant la période d’observation (§1) et par la continuité
des contrats en cours (§2) et enfin par la reconnaissance d’un privilège
garantissant le paiement des créances nées postérieurement à l’ouverture de la
procédure de sauvegarde (§3).

58
Droit des entreprises en difficulté

§1 : La gestion de l’entreprise

Dans la loi du 13 juillet 1967, dès l’ouverture de la procédure, le débiteur


était dessaisi de la gestion de son entreprise au profit du syndic. La loi du 25 jan
1985 avait modifié le dispositif légal en prévoyant un dessaisissement variable du
débiteur. La loi du 26 juill 2005 a rompu avec cette tendance, et énonce que
l’administration de l’entreprise est assurée par son dirigeant. L’ord déc 2008 a
quant à elle accrue les pouvoirs du débiteur au cours de la période
d’observation. Ces dernières mesures s’inscrivent dans la logique qui anime la
nouvelle procédure de sauvegarde laquelle sera d’autant plus facilement
déclenchée par le débiteur qu’il est certain de ne pas perdre le contrôle de son
entreprise.
Dans certains cas cependant, le tribunal nommera un administrateur afin
de surveiller et d’assister le débiteur dans sa gestion de l’entreprise. Cette
désignation n’est obligatoire pour le tribunal que si l’entreprise emploi plus de
20 salariés et qu’elle a un chiffre d’affaire supérieur à 3 millions d’€.
Parce que la procédure de sauvegarde reste une procédure judiciaire, le
juge commissaire peut également intervenir pendant cette période d’observation
afin d’autoriser la conclusion de certains actes.

A. Le principe : l’administration de l’entreprise par le débiteur

Conformément à L622-1 C.com le débiteur en sauvegarde assure


l’administration de son entreprise. il n’en est donc pas dessaisi. Ce principe, qui
n’est pas repris pour le redressement judiciaire, est conforté par des mesures
complémentaires (par exemple : les rémunérations des dirigeants sont
maintenues en l’état alors qu’en matière de redressement judiciaire, c’est le juge
commissaire qui fixera la rémunération afférente aux fonctions exercées par le
débiteur).

Comme précédemment donc le débiteur continue à gérer son patrimoine


sauf pour les actes entrant dans la mission de l’administrateur définie par le
tribunal. Le débiteur va donc accomplir les actes de gestion courante sur
l’entreprise. L’art L622-3 al 2 C.com prévoit d’ailleurs que les actes de gestion
courante qu’accompli seul le débiteur sont réputés valables à l’égard des tiers de
bonne foi et ils sont donc opposables à la procédure. Pour certains auteurs, un
acte de gestion courante est « une opération banale, de portée limitée et
n’intéressant que le court terme ». Pour d’autres, ces actes se définissent comme
des opérations de type courant compte tenu des activités de l’entreprise mais
59
Droit des entreprises en difficulté

surtout des opérations d’un faible montant. D’une manière plus concrète on
pourrait dire qu’on identifie ces actes de gestion courante par leur caractère
répétitif et habituel pour l’entreprise. Par exemple, il pourra s’agir de la vente de
produits fabriqués par l’entreprise aux conditions habituelles ; on peut également
inclure des ventes d’appartements pour une société civile immobilière si ces
ventes rentrent dans son activité courante. On fait donc une appréciation in
concreto.
Mais ne rentre pas dans cette catégorie, le paiement des dettes nées
antérieurement à l’ouverture de la procédure ainsi que les actes concernant la
poursuite ou l’arrêt des contrats en cours.
L’ord dec 2008 a par ailleurs accordé au débiteur de nouveaux pouvoirs
propres qui jusqu’alors faisaient l’objet d’un partage de compétence avec
l’administrateur. Outre le fait que le débiteur peut désormais proposer au
tribunal lors de l’ouverture de la procédure la désignation de l’administrateur de
son choix, le débiteur peut désormais procéder lui même à l’inventaire de son
patrimoine. L’art L622-6 al 1 C.com énonce en effet que dès l’ouverture de la
procédure, il est dressé un inventaire du patrimoine du débiteur ainsi que des
garanties qui le grèvent. Cet inventaire remis à l’administrateur ou au mandataire
judiciaire est complété par le débiteur par la mention des biens qu’il détient et
qui sont susceptibles d’être revendiqués par un tiers. Cette obligation
d’inventaire avait déjà été consacrée par la loi du 10 juin 1994. Il est destiné à
protéger les droits des créanciers et surtout à permettre l’établissement d’un plan
de sauvegarde sérieux en toute connaissance de l’état du patrimoine du débiteur.
Pour réaliser cet inventaire l’art L621-4 C.com prévoit que le tribunal désigne un
commissaire priseur judiciaire, un huissier, un notaire ou un courtier en
marchandises assermenté. Depuis l’ord dec 2008, ce n’est qu’à la demande du
débiteur que l’un de ces officiers publics sera désigné par le tribunal. En effet,
s’il en fait la demande, le débiteur peut désormais lui même procédé à cet
inventaire. Dans cette hypothèse, le décret d’application du 12 fev 2009 de l’ord
2008 encadre de manière rigide la rédaction de cet inventaire. C’est inventaire
établi par le débiteur devra être certifié par un commissaire aux comptes ou un
expert comptable. Il doit être établi dans un certain délai, en effet si le débiteur
n’engage pas les opérations dans un délai de 8 jours à compter du jugement
d’ouverture ou s’il ne les achève pas dans le fixé par le tribunal, le juge
commissaire désignera pour y procéder un commissaire priseur judiciaire, un
huissier, un notaire ou un courtier en marchandises assermenté. L’inventaire
doit être déposé au greffe du tribunal par le débiteur qui en remet copie à
l’administrateur.

60
Droit des entreprises en difficulté

L’ord dec 2008 a supprimé la prisée des biens du débiteur (estimation de


la valeur des biens) introduite en 2005. Car cette prisée était considérée comme
peu conciliable avec la finalité de la procédure de sauvegarde. Cette prisée qui
accompagnait l’inventaire est toutefois maintenue en cas de conversion de la
sauvegarde en redressement judiciaire.

L’apport le plus notable de l’ord de 2008 a été de supprimer les


hypothèses de gestion concurrente entre le débiteur et l’administrateur.
Désormais, au cours de la période d’observation, seul le débiteur pourra
solliciter du juge commissaire l’autorisation de procéder à des actes de
disposition étrangers à la gestion courante de l’entreprise. Lui seul pourra lui
demander l’autorisation de payer les créances antérieures pour retirer un bien
remis en gage ou transféré à titre de garantie dans un patrimoine fiduciaire. Il
devra également, et lui seul le pourra désormais, s’adresser au juge commissaire
pour lever l’option d’achat d’un contrat de crédit-bail (L622-7 II C.com).
Par ailleurs, seul le débiteur peut proposer au créancier une substitution de
garantie (L622-8 al 2 c.com). Aussi, seul le débiteur peut saisir le tribunal afin
qu’il ordonne la cessation partielle de l’activité de l’entreprise (L622-10 C.com).
Enfin, toujours à la demande du seul débiteur, le tribunal peut mettre un terme
à la procédure de sauvegarde lorsque les difficultés ayant justifié cette ouverture
ont disparues.
Le rôle du débiteur a été également réaffirmé dans la préparation du projet
de plan de sauvegarde et dans la proposition de celui-ci aux créanciers. En
conséquence, l’administrateur ne peut donc plus proposer seul de plan de
sauvegarde, il pourra être assisté par le débiteur.
Indépendamment de ces prérogatives, le débiteur doit collaborer avec les
différents organes de la procédure. Par exemple, on peut citer l’obligation pour
le débiteur de remettre au mandataire la liste de ses créanciers, le montant de ses
dettes, ainsi que la liste des ses principaux contrats en cours. Il doit également
l’informer des instances auxquelles il est partie. Si le débiteur ne coopère pas et
s’il ne remet pas ces documents au mandataire dans le mois d’ouverture, il
encourt une interdiction de gérer (L653-5 5°).

B. L’exception : l’assistance du débiteur par l’administrateur

Conformément à L622-1 II C.com, lorsque le tribunal désigne un ou


plusieurs administrateurs, il les charge ensemble ou séparément de surveiller le
débiteur dans la gestion ou de l’assister pour tous les actes de gestion ou pour
certains d’entre eux.
61
Droit des entreprises en difficulté

Ainsi, si la loi rend obligatoire la désignation d’un administrateur, celui-ci


ne peut en aucun cas déposséder le débiteur de la gestion de son entreprise.
C’est le tribunal qui définira lors de la désignation le contenu de la mission de
l’administrateur et l’étendue de son contrôle.
En ce qui concerne la mission de surveillance, l’administrateur intervient a
posteriori pour contrôler la gestion de l’entreprise accomplie par le débiteur.
Cela signifie que le débiteur n’a pas à obtenir une autorisation préalable de
l’administrateur et celui-ci n’a corrélativement aucun moyen de bloquer une
décision prise par le débiteur. Il peut seulement saisir le tribunal afin d’obtenir
un élargissement de sa mission.
Concernant la mission d’assistance de l’administrateur, quant à l’étendue
de cette intervention, il apparait que l’administrateur n’a pas à contresigner les
actes accomplis par le débiteur. Donc à défaut de précision par le tribunal, l’acte
passé par le débiteur seul est valable. Par contre, si le tribunal avait subordonné
la validité d’un acte à la double signature, le débiteur ne pourra donc pas
valablement l’accomplir seul.
Se pose également de la sanction de la mission impartie de l’administrateur
c.à.d. l’acte accompli par le débiteur seul alors qu’il aurait dû être contresigné
par l’administrateur est-il simplement inopposable à la procédure ou est-il nul.
Pour certains auteurs, l’acte est entaché de nullité absolue mais c’est la thèse de
l’inopposabilité qui a été retenue par la cour de cassation (com 23 mai 1995).
Elle énonce que les actes accomplis par le débiteur, en violation de la mission
d’assistance confiée à l’administrateur sont inopposables à la procédure.

Malgré l’élargissement des prérogatives accordées au débiteur,


l’administrateur conserve des prérogatives propres. Il peut acquiescer aux
demandes de restitutions ou aux demandes en revendication de biens
appartenant à des tiers (L624-17 C.com). Il peut demander la réunion à l’actif
des biens du conjoint du débiteur. Il peut également faire fonctionner sous sa
signature les comptes bancaires en cas d’interdiction bancaire du débiteur. Et
c’est aussi lui qui statue sur le sort des contrats en cours (L622-13). Il peut
également se substituer au débiteur négligent pour inscrire des suretés ou pour
lui demander de faire les actes nécessaires à la conservation des biens de
l’entreprise. Si le débiteur, personne physique et marié sous le régime de la
communauté, la mission de l’administrateur s’étend aux biens communs (art
1413 C.civ) à l’exception des gains et salaires du conjoint (art 1414 C.civ).
Toutefois, le débiteur conserve l’exercice de tous les droits et actions à caractère
personnel tels que les actions d’Etat (type divorce), ou les actions en réparation
d’un préjudice moral.
62
Droit des entreprises en difficulté

C. Les autorisations du juge commissaire

Le débiteur et l’administrateur, s’il a été désigné par le tribunal, n’ont pas


une totale liberté dans la gestion de l’entreprise. En effet, le juge commissaire
interviendra obligatoirement afin d’autoriser la conclusion de certains actes. L’art
L622-7 II C.com prévoit en effet que le juge commissaire peut autoriser le
débiteur à faire un acte de disposition étranger à la gestion courante de
l’entreprise, à consentir une hypothèque ou un nantissement, à compromettre
ou à transiger.

1) Les actes de disposition étrangers à la gestion courante de l’entreprise

Cela concerne la vente de biens immobiliers peu importe le caractère


professionnel ou familial de l’usage qui en est fait, dans ce dernier cas si
l’immeuble est le logement familial il faudra obtenir le consentement du conjoint
(en cas de refus on pourra recourir à 217 civ). Sont également visés, les cessions
d’actions ou encore les engagements de caution. Si un acte est accompli au
mépris de cette autorisation, il est entaché de nullité absolue, la demande
pouvant émanée de tout intéressé ou du ministère public.
L’autorisation du juge commissaire trouve cependant une limite dans
l’obligation de respecter l’intérêt de l’entreprise. Ainsi l’autorisation de céder des
biens de l’entreprise ne doit pas conduire à une cession partielle de celle-ci. On
considère donc que les ventes effectuées pendant la période d’observation ne
peuvent en principe porter que sur des éléments secondaires de l’entreprise.
Enfin, une place particulière doit être réservée à la vente d’un bien grevé
d’une sureté. Cette vente est souvent nécessaire au cours de la période
d’observation afin d’éviter une immobilisation inutile mais il faut aussi tenir
compte de la situation et de la protection des créanciers titulaires de la sureté.
En effet, ces créanciers ne peuvent être payés pendant la période d’observation.
L’art L622-8 C.com prévoit à cet effet une procédure particulière : pour réaliser
la vente d’un bien grevé d’un privilège spécial, d’un gage, d’un nantissement ou
d’une hypothèque, il faut une autorisation du juge commissaire mais la quotepart
du prix correspondant aux créances garanties par ces suretés doit être versée sur
un compte ouvert à la caisse des dépôts et consignations. Ces fonds sont
indisponibles pendant la période d’observation mais ils pourront être répartis
entre les créanciers après l’adoption du plan de sauvegarde. Toutefois, l’art
63
Droit des entreprises en difficulté

L622-8 al 2 Com prévoit que pour éviter l’immobilisation des fonds le juge
commissaire peut ordonner le paiement provisionnel de toute ou partie de leur
créance aux créanciers titulaires de sureté qui en auront fait la demande. Le
solde du prix sera utilisé pour assurer le financement de la continuation de
l’exploitation.
Conformément à L622-8 al 3, le débiteur peut proposer au créancier
titulaire d’un privilège spécial, d’un gage, d’un nantissement ou d’une
hypothèque, une substitution de garantie. En l’absence d’accord entre le
créancier et le débiteur c’est le juge commissaire qui procédera à cette
substitution. Le bien libéré de toute sureté pourra alors être vendu.

2) La constitution d’une hypothèque, d’un nantissement, le compromis et la


transaction

Ces actes requièrent également l’autorisation du juge commissaire à peine


de nullité (L622-7 II).
En ce qui concerne les suretés, elles ne peuvent être constituées que pour
garantir le paiement des dettes nées de la poursuite de l’exploitation car pour les
dettes antérieures, le principe est celui de l’arrêt des inscriptions de sureté.
En ce qui concerne le compromis par lequel le litige sera tranché par un
arbitre, ou la transaction qui met fin au procès par une renonciation à des droits,
ils sont également soumis à autorisation car ils sont susceptibles d’avoir de graves
conséquences sur le patrimoine de l’entreprise.

3) Le paiement du créancier gagiste ou du rétenteur

L622-7 II C.com autorise l’administrateur ou le débiteur à effectuer le


paiement du gagiste ou du rétenteur. Il faut présenter une requête au juge
commissaire. Mais cette autorisation de paiement est subordonnée à deux
conditions :
La chose doit être donnée en gage ou doit être légitimement retenue c.à.d.
que le rétenteur doit se prévaloir d’une créance certaine, liquide et
exigible.
Le bien doit être nécessaire à la continuation de l’activité de l’entreprise
(marchandise, machine, camion, voiture…).

Cette autorisation a été étendue aux droits de retour des biens transférés à
titre de garantie dans un patrimoine fiduciaire.

64
Droit des entreprises en difficulté

§2 : La continuation des contrats en cours

Le premier risque rencontré par un débiteur soumis à une procédure


collective est celui de la rupture de ses relations contractuelles. Les créanciers
peuvent en effet, pour mettre un terme à leur relation contractuelle avec le
débiteur, utiliser deux procédés :
Une clause résolutoire contenue dans le contrat
Invoquer l’inexécution de leur prestation par le jeu de l’exception d’inexécution.

La rupture de ces relations contractuelles est particulièrement préjudiciable


en matière de sauvegarde car elle peut conduire le débiteur à la cessation des
paiements.
La loi impose donc au contractant du débiteur le maintien des contrats qui
étaient en cours au jour du jugement d’ouverture de la procédure et ce malgré
l’inexécution de la part du débiteur de ses prestations avant l’ouverture de la
procédure.

La continuation des contrats en cours est prévue par l’article L622-13.


Cette mesure n’était pas une nouveauté de la loi du 26 juillet 2005. Le principe
était déjà contenu dans l’article L621-28 issu de la loi de 1985.
Quant à l’ordonnance de décembre 2008 : elle a réécrit la plupart des
dispositions consacrées à la continuation des contrats en cours. Les principes
demeurent mais cette réécriture a été faite dans l’optique d’une meilleure
lisibilité de l’ensemble.
Le principe du maintien des contrats en cours connait par ailleurs un
aménagement concernant le contrat de bail de l’immeuble affecté à l’activité de
l’entreprise. Le régime de ce contrat est quant à lui prévu par L622-14.

A. Le principe du maintien des contrats en cours

1) Les contrats concernés par ce maintien

De part la généralité des termes employés, le principe de la continuation


des contrats en cours s’applique à tout contrat quelque soit sa nature c'est-à-dire
qu’il s’appliquera aussi bien à un contrat instantané qu’à un contrat à exécution
successive.

65
Droit des entreprises en difficulté

Le principe a vocation à s’appliquer quelque soit l’objet du contrat : crédit bail,


location gérance…
Les contrats administratifs : électricité, eau, gaz…rentrent dans le champ de
l’article.

Question : qu’en est-il des contrats conclus intuitu personae ?


Ex : une ouverture de crédit consentie par un établissement bancaire.
Cour de cassation.8 décembre 1987 : le principe de continuation des contrats en
cours leur était également applicable.
Une exception à ce principe est toutefois prévue par la loi. En effet, les contrats
de travail ne sont pas soumis à L622-13 donc le débiteur reste l’employeur en
cas de procédure de sauvegarde et les licenciements restent soumis au droit
commun. Le débiteur peut licencier en toute liberté ses salariés. Toutefois, en
matière de sauvegarde ces licenciements doivent demeurer exceptionnels afin de
poursuivre au mieux l’activité de l’entreprise.
Par ailleurs, en ce qui concerne les contrats d’assurance, leur régime avait été
modifié par la loi du 26 juillet 2005 et ce à compter du 1er janvier 2006.
Avant cette date, l’assureur avait en effet le droit de résilier les contrats
d’assurance en cours au jour du jugement d’ouverture, et ce sans avoir à justifier
sa décision.
A compter du 1er janvier 2006, le contrat d’assurance a été soumis au régime du
droit commun gouvernant la continuation des contrats en cours.

Avant d’imposer la continuation du contrat, l’administrateur devra


s’assurer que le contrat n’a pas fait l’objet d’un jugement définitif d’annulation ou
de résolution. Il devra également s’assurer qu’une clause résolutoire de plein
droit n’a pas produit ses effets. Tous les contrats sont visés à condition que le
contrat est en cours au jour de l’ouverture de la procédure.

2) L’exercice du droit d’option

En principe, conformément à l’article L622-13 II l’administrateur a seul la


faculté d’exiger la continuation des contrats en cours mais la désignation d’un
administrateur n’est pas obligatoire dans tous les cas. Dès lors c’est le débiteur
qui décidera de la continuité des contrats.

a) La continuation des contrats en présence de l’administrateur

66
Droit des entreprises en difficulté

C’est l’administrateur seul lorsqu’il est nommé qui exerce l’option entre la
continuation du contrat ou sa rupture. C’est une compétence exclusive même s’il
n’est investi que d’une mission de surveillance. Son choix parmi les contrats
maintenus ou rompus n’est soumis à aucune condition de forme ou même de
délai.
Ce choix peut être express ou tacite, et dans ce dernier cas résulter de la
continuation sans manifestation particulière de rupture.
L’administrateur engagera toutefois sa responsabilité s’il ne poursuit pas un
contrat indispensable au maintien de l’activité.
Il peut par contre poursuivre tous les contrats puisque l’article L622-13 II
prévoit que nonobstant toute disposition légale ou toute stipulation contractuelle
aucune indivisibilité, résiliation ou résolution ne peut résulter du seul fait de
l’ouverture de la procédure de sauvegarde. Cette règle est d’ordre public, toute
clause contraire étant réputée non écrite.

Pour avoir une idée plus précise de la décision de l’administrateur, le créancier


peut toutefois le mettre en demeure de lui faire connaitre son choix. L’absence
de réponse de l’administrateur dans le mois qui suit emporte résiliation de plein
droit du contrat.
Ce délai d’un mois peut être prolongé de deux mois par décision du juge
commissaire donc le créancier devra attendre au plus 3 mois avant d’être fixé sur
le sort de son contrat.

Toutefois, la chambre commerciale dans un arrêt de principe : ch.com.19 mai


2004 considère qu’en l’absence de mise en demeure d’opter par le contractant la
renonciation de l’administrateur à la poursuite du contrat en cours n’emportait
pas résiliation de plein droit de ce contrat mais conféré au contractant et à lui
seul le droit d’en demander la résiliation judiciaire. Le contractant a pu ainsi
apparaitre comme le « maitre du contrat ».
En effet :
Soit une mise en demeure était adressée à l’administrateur et à défaut de
réponse le contrat pouvait être résilié de plein droit
Soit en l’absence de mise en demeure la décision de l’administrateur ne pouvait
aboutir à la résiliation puisque seul le contractant pouvait la demander.
Dans certains cas, on aboutissait à ce paradoxe que le contrat pouvait n’être ni
exécuté ni résilié. Dans cette optique le nouvel article L622-13 IV introduit par
l’ordonnance de 2008 dispose qu’à la demande de l’administrateur la résiliation
du contrat est prononcée par le juge commissaire si elle est nécessaire à la

67
Droit des entreprises en difficulté

sauvegarde du débiteur et si elle ne porte pas atteinte excessive aux intérêts du


contractant.
Il en résulte que l’administrateur peut désormais, même en l’absence de mise en
demeure, demander la résiliation du contrat, les dommages et intérêts résultant
de cette résiliation devant être inscrit au passif.

Cette mesure nouvelle met fin au débat lorsque l’administrateur décide de ne


pas poursuivre le contrat en l’absence de mise en demeure du contractant, ce
qui va simplifier la situation.

b) La continuation des contrats en cours en l’absence d’administrateur

Si aucun administrateur n’est désigné par le tribunal l’article L627-2, inchangé


par l’ordonnance, prévoit que le débiteur exerce la faculté ouverte à
l’administrateur de poursuivre les contrats en cours après avis du mandataire
judiciaire.
Il peut également demander la résiliation du bail en vertu des articles 622-13 et
L622-14.
Peut-il alors résilier tous les contrats ? Selon les auteurs oui. Faut-il alors l’avis du
mandataire judiciaire ?

3) Les conséquences du choix de l’administrateur

a) Les effets de la continuation

Si l’administrateur a opté pour la continuation du contrat le cocontractant doit


remplir toutes ses obligations même si le débiteur n’a pas exécuté ses
engagements antérieurs au jugement d’ouverture.
Le cocontractant bénéficie de certaines garanties :
Le contrat doit être exécuté tel quel c'est-à-dire sans que l’on puisse modifier ou
écarter l’une de ses clauses puisque L622-13 prévoit que l’administrateur doit
fournir la prestation promise au contractant du débiteur.
L622-13 : au vu des documents prévisionnels dont il dispose l’administrateur
s’assure au moment où il demande l’exécution du contrat qu’il disposera des
fonds nécessaires à cet effet. Si tel n’est pas le cas à défaut d’accord du
contractant pour maintenir les relations contractuelles le contrat est résilié de
plein droit.
L622-13 : lorsque la prestation porte sur le paiement d’une somme d’argent ce
paiement doit se faire au comptant sauf pour l’administrateur à obtenir
68
Droit des entreprises en difficulté

l’acceptation par le contractant de délais de paiement. Le cocontractant ne fera


crédit au débiteur que s’il y consent, cela peut porter atteinte à la poursuite de
l’activité de l’entreprise.
En cas de défaillance du contractant ou du débiteur dans le cadre de la poursuite
du contrat le droit commun des contrats s’applique, l’une des parties pouvant
alors se prévaloir d’une clause résolutoire.

b) Les effets de la renonciation

Si l’administrateur renonce à la continuation le contrat est résilié (L622-13 3°).


Ce principe s’applique si la renonciation intervient après la mise en demeure
adressée par un créancier à l’administrateur.
Depuis l’ordonnance de 2008, l’administrateur peut désormais demander au
juge commissaire la résiliation judiciaire du contrat. Cette dernière est
subordonnée à deux conditions :
La résiliation du contrat doit être nécessaire à la sauvegarde du débiteur c'est-à-
dire qu’elle doit s’inscrire dans l’intérêt de l’entreprise et dans la recherche de la
sauvegarde. L’administrateur ne bénéficie pas en la matière d’un pouvoir
discrétionnaire.
Le juge commissaire devra également vérifier que la résiliation demandée ne
porte pas une atteinte excessive aux intérêts du contractant.

Ces deux conditions sont cumulatives mais elles doivent être appréciées par le
juge commissaire, indépendamment l’une de l’autre.

B. Le régime particulier du contrat de bail

La loi du 26 juillet 2005 reprenant en cela les dispositions antérieures avait


consacré un régime spécifique applicable à certains contrats, au premier rang
desquels on trouve le contrat de bail des immeubles affectés à l’activité de
l’entreprise. Le plus souvent il s’agit d’un bail commercial. Le maintien du
débiteur où il développe son activité est essentielle, tat en matière de sauvegarde
qu’en matière de redressement.
L’ordonnance du 18 décembre 2008 a apporté quelques changements à ce
régime spécifique, notamment pendant la période d’observation.

Ce régime spécifique est régi par l’article L622-14 qui prévoit deux hypothèses :

69
Droit des entreprises en difficulté

Soit l’administrateur informe le bailleur de sa décision de ne pas poursuivre le


bail. Dans ce cas l’inexécution du contrat pourra donner lieu à des dommages et
intérêts au bénéfice du bailleur. Ils seront inscrit au passif de la procédure.
Soit le bailleur va demander la résiliation du bail pour défaut de paiement des
loyers pour la période postérieure au jugement d’ouverture.

1) Le non paiement des loyers

L’article L622-14 renvoie au grand I de l’article L622-13. Il en résulte que la


résiliation ou la résolution du bail ne peut résulter du seul fait de l’ouverture de
la procédure de sauvegarde.
Il résulte implicitement de l’article L622-14 que le non paiement des loyers
antérieurs à l’ouverture de la procédure ne justifie pas non plus la résiliation du
bail.
La résiliation envisagée par L622-14 ne concerne que le non paiement des loyers
et des charges afférents à une obligation postérieure à l’ouverture de la
procédure.
Il n’y a dès lors pas de véritable spécificité par rapport au régime régissant la
continuation des contrats en cours. Le bailleur doit remplir ses obligations
indépendamment du défaut d’exécution des engagements du preneur. Il pourra
seulement déclarer sa créance au passif.

Par contre, il convient d’articuler ce principe avec le jeu très fréquent en matière
de bail d’une clause résolutoire. Cette clause se définit comme la clause par
laquelle les parties conviennent dans un contrat que celui-ci sera de plein droit
résolu du fait de l’inexécution par l’une des parties de son obligation, sans qu’il
soit nécessaire de la demander au juge et sans que celui-ci s’il est saisi dispose
d’un pouvoir d’appréciation.

En cas de non paiement des loyers pour la période précédent l’ouverture de la


procédure, le bailleur a pu faire jouer la clause résolutoire. Le régime de cette
clause est régi par L145-41.
Sur la forme : le bailleur doit adresser au preneur un commandement de payer.
Si celui-ci est resté infructueux pendant un mois la résiliation est acquise. Mais
l’alinéa 2 précise peut accorder des délais de grâce au preneur tant que la

70
Droit des entreprises en difficulté

réalisation de la clause n’est pas prononcée par une décision ayant acquis force
de chose jugée.
La chambre commerciale s’est prononcée dans ce sens : ch.com.3 juillet 2007 :
en l’espèce les preneurs s’étaient vus délivrer un commandement de payer visant
la clause résolutoire en octobre 2002 et la résiliation du contrat avait été constaté
par le juge des référés en mars 2003. Les preneurs avaient fait appel de cette
ordonnance et au cours de la procédure d’appel ils avaient été placés en
redressement judiciaire. La CA confirma la résiliation.
Cour de cassation : casse l’arrêt de la CA car si le jeu de la clause avait bien été
constaté judiciairement avant l’ouverture de la procédure collective cette
décision n’avait toutefois pas acquis force de chose jugée avant cette date.
Cette position a été confirmée par la chambre commerciale : ch.com.28 octobre
2008 : l’ordonnance de référé constatant l’acquisition de la clause résolutoire
étant frappé d’appel au jour de l’ouverture du redressement judiciaire du
preneur l’acquisition de cette clause n’avait pas été constatée par une décision
constatée en force de chose jugée, de sorte que le bailleur ne peut plus
poursuivre l’action antérieurement engagée.

Soi le contrat de bail est résilié avant l’ouverture par une décision définitive et le
contrat n’a pas la qualité de contrat en cours, soit ce n’est pas le cas (voie de
recours possible) et il relèvera des articles L622-13 et L622-14.

Le problème se double de la prise en compte de l’interruption des poursuites


individuelles des créanciers lors de l’ouverture de la procédure de sauvegarde.
En effet, le principe est celui de l’interruption des instances tendant à la
résolution d’un contrat pour défaut de paiement. Si la résiliation n’a pas été
constatée par une décision ayant acquis force de chose jugée, le bailleur ne peut
plus obtenir cette résiliation après l’ouverture de la procédure pour non
paiement des loyers antérieurs.

2) La continuation du contrat pendant la période d’observation

Sous l’empire de la loi de janvier 1985 le bailleur pouvait demander la résiliation


du bail pour défaut de paiement des loyers ou des charges afférents à une
occupation postérieure à ce jugement.
Avec la loi de 2005 si une procédure collective est ouverte à l’encontre du
preneur l’administrateur judiciaire peut demander la résiliation du bail sans avoir
à attendre la mise en demeure du bailleur. Cette résiliation intervient au jour où

71
Droit des entreprises en difficulté

le bailleur est informé de la décision de l’administrateur de ne pas continuer le


contrat.
Mais de la combinaison des articles L622-13 et L622-14 on déduit l’impossibilité
pour le bailleur de mettre en demeure l’administrateur de prendre partie sur la
continuation du contrat de bail puis de se prévaloir de la résiliation de plein
droit du bail à défaut de réponse de l’administrateur dans les conditions de
l’article L622-13 III dont l’application est écartée en matière de bail.

L’ouverture de la procédure n’emporte pas résiliation du contrat puisque


art L622-13 1 s’applique au contrat de bail. L’administrateur peut exiger la
continuation du contrat en fournissant la prestation promise (ici le paiement des
loyers). S’il décide de résilier le contrat la résiliation intervient au jour où le
bailleur est informé de la décision de l’administrateur.
Mais, le bailleur n’a pas la possibilité comme les autres contractants de
mettre l’administrateur en demeure de prendre partie sur la continuation du
contrat puis de se prévaloir de la résiliation de plein droit à défaut de réponse de
l’administrateur. Si celui-ci décide de poursuivre le contrat les dispositions
antérieures s’appliquent. Concernant le paiement des loyers postérieurs à
l’ouverture de la procédure, ils doivent être payés à l’échéance car ces loyers
relèvent du privilège consacré par l’art L622-17 C.com. Par contre, en cas de
non paiement des loyers postérieurs l’art L622-14 2° prévoit que le bailleur peut
demander la résiliation judiciaire du contrat ou al résiliation de plein droit, par le
jeu d’une clause résolutoire, lorsque le bail concernait un immeuble affecté à
l’activité de l’entreprise. Cette action n’est toutefois possible qu’au terme d’un
délai de trois mois à compter du jugement d’ouverture de la procédure.
Par ailleurs l’article précise que si le paiement des sommes dues intervient
avant l’expiration de ce délai, il n’y a pas lieu à résiliation.
L’art L622-13 al 4 prévoit que le défaut d’exploitation pendant la période
d’observation n’entraine pas la résiliation du bail et ce même en présence d’une
clause contraire insérée dans le contrat.

En l’absence d’administrateur, l’art L627-2 C.com dispose que le débiteur


exerce la faculté ouverte à l’administrateur de poursuivre les contrats en cours. Il
pourra donc demander la résiliation du bail en application de L622-13 et 14
C.com.

§3 : Le privilège accordé aux créanciers postérieurs

72
Droit des entreprises en difficulté

Les créanciers dont la créance est née après le jugement d’ouverture


bénéficient d’un privilège de paiement sur tous les créanciers antérieurs. Cette
mesure a voulu favoriser la poursuite d’activité en s’assurant du soutien de
certains créanciers qui vont pouvoir bénéficier de cette disposition avantageuse.
Ce privilège n’était pas une nouveauté de la loi du 26 juill 2005 et avait déjà
été consacré par la loi du 25 jan 1985. Ce principe est contenu à L622-17 C.com
qui énonce que les créances nées régulièrement après le jugement d’ouverture
pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d’observation
ou en contrepartie d’une prestation fournie au débiteur pendant cette période
sont payés à leur échéance. Lorsqu’elles ne sont pas payées à l’échéance, ces
créances sont payées par privilège avant toutes les autres créances assorties ou
non de privilège ou de sureté à l’exception des créances de salaires, des frais de
justice nés régulièrement après le jugement d’ouverture pour les besoins du
déroulement de la procédure, et après les créances garanties par L611-11 C.com
(privilège de conciliation).
Si ce privilège n‘a pas donné lieu à une modification substantielle par l’ord
2008, forcé de constater que tous les créanciers postérieurs ne pourront pas
forcément y prétendre. Il convient donc de déterminer ce passif privilégié, de
voir dans quelle mesure il peut être conservé, et concrètement comment il
s’exerce.

A. Détermination du passif privilégié

Sous l’empire de la loi du 25 jan 1985, pour bénéficier du privilège, une


créance devait être née après le jugement d’ouverture. Le critère alors retenu
était chronologique. Mais certains créanciers bénéficiaient du privilège sans pour
autant participer au redressement de l’entreprise.
La loi du 26 juill 2005 a donc voulu effectuer un tri parmi les créanciers
postérieurs. La formule employée par L622-17 aboutit à sélectionner parmi les
créanciers postérieurs ceux qui vont pouvoir bénéficier de ce privilège. Trois
conditions sont alors requises.

D’abord, il faut l’existence d’une créance postérieurement au jugement


d’ouverture. Le critère chronologique subsiste dans cette perspective et la
jurisprudence dégagée antérieurement a vocation à être maintenue. Le critère de
la naissance de la créance étant donc toujours pris en compte, il convient de
rechercher précisément le fait générateur de la créance c.à.d. l’évènement qui
l’engendre. Pour que la créance soit considérée comme postérieure il faut que

73
Droit des entreprises en difficulté

l’acte générateur de ladite créance ait acquis date certaine après le jugement
d’ouverture.
Pour les dettes contractuelles, il n’y a pas de difficultés car elles naissent au
jour de la conclusion du contrat. Un problème peut toutefois se poser quand la
créance est née avant mais qu’elle est exécutée après le jugement d’ouverture,
cela concerne les contrats de fourniture, les contrats de travail et plus
généralement les contrats a exécution successive. Il est injuste de considérer que
la créance dans son entier entre dans la catégorie des créances antérieures qui
subissent l’interdiction de paiement et l’arrêt des poursuites individuelles (art
L622-7 et L622-21 Com).
La loi de 2005 est donc revenue au principe initialement consacré par les
tribunaux c.à.d. que les créances naissent au moment de l’exécution de la
prestation, donc on aboutit à une ventilation entre les prestations antérieures au
jugement d’ouverture qui font naitre des créances devant être déclarées à la
procédure et les prestations postérieures qui seront privilégiées et qui sont
d’ailleurs liées au principe de la poursuite des contrats par l’administrateur.
Celui-ci peut exiger la continuation du contrat en cours mais en fournissant la
prestation promise au cocontractant du débiteur. L’origine de la créance cède
donc la place à l’exécution de la prestation (Cass. Com. 15 fév 2000 : elle retient
la date de livraison des marchandises au débiteur et non celle de leur
commande).
Ex. : Com. 23 nov 2004 et 3e civ 28 mars 2007 : la créance de restitution
consécutive à une annualisation nait au jour du jugement d’annulation (donc elle
est postérieure et sera privilégiée).
Ex. : la créance de garantie d’un vice caché, qui trouve son origine dans le
contrat de vente, pourrait être considérée comme née au jour de la découverte
du vice.
Ex. : Com. 11 fév 2004 : si l’origine de la créance du préteur réside dans
l’acceptation de l’offre du prêt, la créance du remboursement du prêt nait plutôt
à compter du versement des fonds.

Pour les dettes extracontractuelles, la difficulté s’est concentrée sur


certaines catégories de dettes notamment les créances sociales : une discussion a
eu lieu pour les indemnités de licenciement, on considère qu’elles sont garanties
par le privilège de L622-17 si le licenciement est prononcé après le jugement
d’ouverture.
Une autre discussion a concerné les créances résultant d’une
condamnation, quid des amendes prononcées après le jugement d’ouverture
mais sanctionnant des faits antérieurs : la jurisprudence considère que la date de
74
Droit des entreprises en difficulté

naissance de la créance est celle de la décision qui la constate peu importe si les
faits sont antérieurs.

Il faut aussi l’existence d’une créance née régulièrement après le jugement


d’ouverture de la procédure. La régularité de la créance dépend des principes
régissant la répartition des pouvoirs entre le débiteur et les différents organes de
la procédure.
Sont donc exclues du privilège, les créances résultant d’actes passés par le
débiteur alors qu’il ressortait de la seule compétence de l’administrateur (ex. : la
continuation des contrats en cours), ainsi que la créance qui nécessité
l’autorisation du juge commissaire. Sera aussi exclue la créance résultant d’un
acte passé par l’administrateur en dépassement de sa mission fixée par le
tribunal.
La notion de créance régulière concerne généralement des créances
d’origine contractuelle, qu’elles soient issues de nouveaux contrats ou de la
continuation des contrats en cours.

Enfin, la troisième condition est relative à la finalité de la créance. L’art


L622-17 précise que la créance bénéficiant du privilège doit être née pour les
besoins du déroulement de la procédure ou de la période d’observation, ou en
contrepartie d’une prestation fournie au débiteur pendant cette période.

D’une part, concernant les créances nées pour les besoins du déroulement
de la procédure ou de la période d’observation, l’ord 2008 n’a pas apporté de
précision sur la nature de ces créances. Concrètement, il faut rechercher un lien
d’utilité entre la créance et la poursuite de la procédure. Dès lors, entrent dans
cette catégorie, les frais de justice mais surtout les frais résultant de l’exécution
des contrats en cours. Si la poursuite du contrat se traduit par le versement d’une
prestation, la créance bénéficiera de ce régime. En définitive, tout dépendra de
la conception large ou étroite que la cour de cassation retiendra pour fixer le
critère d’utilité de la créance. Si on retient une conception étroite, seules les
créances procurant un avantage à la procédure serait privilégiées (ex. : impôts ou
charges sociales). Une conception large du critère, privilégiée par les auteurs,
permettrait de retenir les créances qui sont la conséquence de la procédure ou
de la poursuite de l’activité.

D’autre part, concernant les créances en contrepartie d’une prestation


fournie au débiteur. Ce critère pose en pratique moins de difficultés et il va
permettre d’appréhender la plupart des créances postérieures sans avoir besoin
75
Droit des entreprises en difficulté

de vérifier si elles sont conformes au critère d’utilité. Comme précédemment ces


créances doivent être nées en contrepartie d’une prestation fournie au débiteur.
Sont par exemple visées, les livraisons de biens ou de services, la mise à
disposition d’une somme d’argent, et plus généralement les créances
postérieures nées de l’exécution d’un contrat en cours lorsqu’elles se traduisent
par la fourniture d’une prestation. Dans un souci de simplification, l’ord 2008 a
supprimé concernant ces créances, l’exigence d’une prestation fournie au
débiteur pour son activité professionnelle. Cela signifie que les créances
postérieures nées en raison d’une prestation fournie au débiteur personne
physique pour ses besoins personnels sont désormais privilégiées. Désormais, il
n’y a plus besoin de distinguer entre les créances de la vie courante et les
créances professionnelles.

Lorsque les créances postérieures sont régulières mais n’ont pas la finalité
requise, elles ne sont pas privilégiées de sorte qu’elles doivent être déclarées à la
procédure.

B. La conservation du privilège

Avant l’ord de 2008, sous peine de perdre le bénéfice de ce privilège, les


créanciers privilégiés devaient se signaler à l’administrateur et au mandataire.
L’ord 2008 a un peu allégé les formalités imposées au créancier pour conserver
ce privilège. Désormais, les créances doivent être portées à al connaissance de
l’administrateur et à défaut au mandataire judiciaire. Mais on ne connait pas les
modalités de cette information. On considère que cette information demeure
libre mais il est conseillé au créancier d’utiliser un procédé permettant de faire la
preuve de l’exécution de cette formalité (signification par un huissier, ou une
LRAR).
Comme auparavant, le délai est d’un an à compter de la fin de la période
d’observation.

C. L’exercice du privilège

L’art L622-17 C.com prévoit que les dettes précédemment visées sont
payées à l’échéance alors que les créanciers antérieurs sont touchés par
l’interdiction des paiements prévues par l’art L622-7. L’article consacre donc un
droit de priorité instituant un ordre des paiements.

1) Le paiement de la créance à l’échéance


76
Droit des entreprises en difficulté

Le droit de priorité s’exerce sur la totalité du patrimoine du débiteur. Les


créanciers postérieurs sont donc payés sur les fonds disponibles au fur et à
mesure que les échéances sont échues. Ce paiement aura lieu même si les fonds
sont par la suite insuffisants à acquitter des dettes de meilleur rang mais non
encore exigibles. Cela ressort d’une décision de la cour de cassation (com. 13
nov 2001) qui a précisé que le créancier qui a exercé le premier son droit de
poursuite est le premier payé peu important l’ordre des paiements établis par
L622-17, de même les créances postérieures seront payées avant les créances
antérieures même si celles-ci bénéficient de suretés.

Toutefois, en cas d’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire,


on doit tenir compte des créances garanties par le super privilège des salaires.
Dans cette hypothèse, la loi accorde aux salariés une garantie supplémentaire, en
effet les rémunérations de toute nature dues au salarié pour les 60 derniers jours
sont garanties par un super privilège qui doit être payé en priorité sur les fonds
disponibles (idem pour la sauvegarde). Si le débiteur n’a pas suffisamment d’actif
pour payer les salariés, l’AGS (assurance nationale pour la gestion du régime
d’assurance des salaires) verse au représentant des créanciers les sommes
manquantes afin de régler notamment, les sommes dues postérieurement au
jugement d’ouverture. Ces créances doivent être payées en priorité absolue
même face à un créancier de l’art L622-17.

2) L’ordre des paiements

En cas d’insuffisance des fonds disponibles, il faut opérer un classement


parmi les créanciers privilégiés avant de répartir les fonds. En cas de sauvegarde
et de redressement, l’ordre de paiement est le suivant :
Les créances couvertes par le super privilège des salariés (visées par art
L3253-3 CT)
Les frais de justice nés régulièrement après le jugement d’ouverture pour
les besoins du déroulement de la procédure.
Les créances des apporteurs d’argent frais dans le cadre de la conciliation,
qui vont bénéficier du privilège de conciliation prévu à l’art L611-11.
Les créances postérieures au jugement d’ouverture qui sont soumises au
privilège de L622-17 dans l’ordre suivant :

77
Droit des entreprises en difficulté

o Les créances de salaires dont le montant n’a pas été avancé par
l’AGS en application des art L3253-6 et 8 CT
o Les prêts consentis ainsi que les créances résultant de l’exécution des
contrats poursuivis conformément à L622-13 et dont le contractant
accepte de recevoir un paiement différé.
o Seront payées les autres créances selon leur rang.

Section 2 : La protection contre les créanciers

L’objectif de la procédure de sauvegarde est d’accorder une période de


répits au débiteur. La protection ainsi mise en place va se réalisée au détriment
des créanciers antérieurs du débiteur. A cet effet deux principes sont consacrés :
L’arrêt des poursuites individuelles et des procédures d’exécution contre le
débiteur ;
L’interdiction du paiement des créanciers antérieurs.

§1 : L’arrêt des poursuites individuelles

Le propre d’une procédure collective est de placée les créanciers


antérieurs du débiteur sur un pied d’égalité en les soumettant à une discipline
collective. L622-21 C.COM énonce que le jugement d’ouverture de la
sauvegarde interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les
créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de L622-17 C.COM et
tendant à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent ou à
la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent. Sont
pareillement arrêtées ou interdites toute procédure d’exécution de la part des
créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure
de distribution n’ayant pas produit un effet attributif avant le jugement
d’ouverture. Cet article pose donc le principe de l’arrêt des poursuites et des
procédures d’exécution à l’égard des créances nées avant le jugement
d’ouverture.

Toutefois, en opérant une distinction entre les créanciers postérieurs qui


ne pourront pas tous bénéficier du privilège de L622-17 C.COM, la loi du 26
juillet 2005 soumet également à ce principe les créances postérieures non
privilégiées.

A. Le principe de l’arrêt des poursuites et des procédures d’exécution

78
Droit des entreprises en difficulté

La règle posée par L622-21 C.COM vise toutes les poursuites et


procédures d’exécution qui ont trait au recouvrement des créances ayant leurs
origines avant l’ouverture de la procédure mais aussi celles qui, nées
postérieurement au jugement, ne sont pas visée par le privilège de L622-17.
Dans cette optique, peu importe que la créance soit chirographaire ou assortie
de suretés.

Quant aux actions visées, L622-21 C.COM concerne en premier lieu les
actions qui tendent au paiement d’une somme d’argent. Le principe signifie
qu’un créancier ne peut entamer une nouvelle action tendant au paiement d’une
somme d’argent et qu’il est obligé le cas échéant de suspendre l’action qui est en
cours. Il n’a alors d’autre possibilité que de déclarer sa créance au passif. Par
exemple : action d’un vendeur en paiement du prix de vente d’un bien, action
du bailleur en recouvrement des loyers impayés, action du Trésor pour le
recouvrement des impôts.

De plus, ce principe également les actions en résolution pour défaut de


paiement d’une somme d’argent. Ainsi, un vendeur impayé ne peut plus
demander après le jugement d’ouverture la résolution de la vente pour
inexécution et ne peut plus obtenir la restitution du bien vendu. De même, le
bailleur ne peut plus demander la résolution du bail pour non paiement des
loyers antérieurs. Si une action en résolution avait été introduite avant
l’ouverture de la procédure celle-ci ne peut plus être poursuivie après le
jugement d’ouverture. En revanche, si l’action introduite avant le jugement
d’ouverture ne tendait pas à la résolution du contrat mais avait par exemple pour
objet le remplacement d’un matériel défectueux, cette action pourra être
poursuivie après l’ouverture de la procédure.

D’une manière générale, la JP considère que les actions tendant à


l’exécution d’une obligation de faire ne rentrent pas dans le champ d’application
de l’article à moins qu’elles ne dissimulent en réalité le paiement d’une somme
d’argent. Ex : C.com 17 juin 1997 sur une action dirigée contre un constructeur
de maisons individuelles pour lui imposer la destruction d’une maison, ce
constructeur est mis en redressement et la C.com a considéré que L622-21
C.COM était applicable car l’obligation de faire était en réalité sanctionnée par
l’octroi de d&i en cas d’inexécution. En réalité, on aboutissait donc au paiement
d’une somme d’argent postérieurement à l’ouverture de la procédure mais pour
une cause antérieure.

79
Droit des entreprises en difficulté

Le principe s’applique également aux procédures d’exécutions tant sur les


meubles que sur les immeubles du débiteur. Ainsi, aucune procédure
d’exécution ne peut être entreprise après le jugement d’ouverture et celles qui
l’ont été avant sont arrêtées. Le principe s’applique indifféremment aux saisies
mobilières ou immobilières opérées à des fins conservatoires ou d’exécution.
Sont donc visées indifféremment les saisies-attributions les saisies-ventes mais
aussi les avis à tiers détenteur émis par le Trésor public.

Enfin, l’ordonnance de décembre de 2008 a également interdit toute


procédure de distribution n’ayant pas produit un effet attributif avant le jugement
d’ouverture. L’interdiction vise aussi bien la distribution du prix de vente d’un
immeuble que d’un meuble.

De plus, lorsque le débiteur qui bénéficie de la procédure de sauvegarde


est marié sous le régime de la communauté légale, les créanciers du conjoint in
bonis ne peuvent exercer des poursuites sur les biens communs en dehors des
cas où les créanciers du débiteur soumis à la procédure peuvent eux-mêmes agir.
Ce principe a été posé par l’A.plen le 23 décembre 1994.

B. L’aménagement du principe

Le principe posé par L622-21 C.COM connait certaines limites :


Il ne s’applique pas aux situations acquises avant le jugement d’ouverture.
En ce qui concerne les clauses résolutoires, celles-ci doivent donc avoir
produit leurs effets avant l’ouverture de la procédure pour échapper à ce
principe. C.com (25 novembre 1997) énonce en effet que L622-21
C.COM n’empêche pas la résolution d’un contrat de vente d’un fond de
commerce dès lors que la clause résolutoire a produit ses effets avant
l’ouverture de la procédure.
Sont recevables les actions intentées par les créanciers contre les tiers
étrangers à la procédure.
Un sous traitant peut ainsi exercer une action contre le maitre d’ouvrage
malgré l’ouverture de la procédure contre l’entrepreneur. Dans la même
optique, la victime d’un accident peut exercer son droit contre la
compagnie d’assurance alors qu’ne procédure est ouverte à l’encontre de
l’assuré.

Dans cette optique, un créancier pourrait exercer un recours contre un


codébiteur solidaire ou même contre une caution. Toutefois, parce que les
80
Droit des entreprises en difficulté

engagements de caution sont très souvent donnés en pratique par des personnes
physique et souvent par des dirigeants de société, la loi du 10 juin 1994 leur avait
étendu le bénéfice de l’arrêt des poursuites individuelles. Pour contourner cette
protection, les banques ont alors eu recours à d’autres suretés telles que les
garanties autonomes. Pour combattre ce détournement, L622-28 C.COM issu
de la réforme de 2005 a étendu le bénéfice de la suspension des poursuites
individuelles à toutes les personnes physiques cautions, coobligées ou ayant
consenties une garantie autonome. Sont donc visés à la fois les garanties
autonomes mais également les lettres d’intention. L’ordonnance de décembre
2008 a étendu le domaine des suretés concernées aux suretés réelles en visant
désormais les personnes coobligées ou ayant consenties une sureté personnelle
ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie.

Les suretés personnelles incluent donc le cautionnement, la garantie


autonome et la lettre d’intention et l’affectation d’un bien en garantie vise les
suretés réelles classiques type gage, nantissement, hypothèque ou antichrèse. La
loi inclut désormais le cautionnement réel qui est une sureté réelle consentie
pour garantir la dette d’un tiers. Le changement est notable car le cautionnement
réel avait été considéré comme une sureté réelle n’impliquant aucun
engagement personnel par la C.mixte (2 décembre 2005). Suite à cet arrêt le
bénéficiaire de ce type d’engagement pouvait donc en demander la réalisation
pendant la période d’observation à partir du moment où sa dette était exigible.
Désormais, ce ne sera plus le cas. Enfin, la cession d’un bien en garantie inclut la
fiducie sureté qui a été introduite par la loi du 19 février 2007 (2011 & s C.CIV)
et qui permet de transférer temporairement à un créancier la propriété d’un bien
appartenant au débiteur ou à un tiers tant que ce débiteur ne s’est pas acquitté
de sa dette. La loi de modernisation de l’économie du 4 aout 2008 et
l’ordonnance du 30 Janvier 2009 ont complété le régime de la fiducie en
autorisant notamment les personnes physiques à constituer une fiducie à des fins
de garantie. Toutes ces garanties sont alors touchées par l’interruption des
poursuites individuelles. Ce régime particulier réservé aux garants bénéficie
essentiellement aux garants personnes physiques et non aux PM.

Cette suspension des poursuites intervient de plein droit et ce du jugement


d’ouverture au jugement arrêtant le plan. Cette disposition est particulièrement
bienvenue en matière de sauvegarde car elle reçoit un prolongement via L626-11
C.COM qui prévoit que les cautions peuvent se prévaloir des dispositions du
plan de sauvegarde alors qu’elles ne peuvent pas se prévaloir du plan de
redressement. Par ailleurs, si les actions nouvelles intentées par les créanciers
81
Droit des entreprises en difficulté

contre le débiteur sont interdites, en ce qui concerne les instances en cours c’est
une simple interruption qui est prévu par C.COM. en effet, L622-22 C.COM
prévoit que les instances en cours ne sont interrompues que jusqu’à ce que le
créancier poursuivant est déclaré sa créance. L’instance sera considérée comme
en cours lorsque le débiteur a été assigné avant le jugement d’ouverture.
Toutefois, même si elles sont interrompues, L622-22 C.COM précise que ces
actions ne peuvent plus tendre, en cas de reprise, qu’à la constatation des
créances et à la fixation de leur montant. Concrètement, elles ne permettent
donc pas au créancier d’obtenir un titre exécutoire.

Si le principe de l’arrêt des poursuites individuelles s’impose devant toutes


les juridictions, les instances en court devant les conseils des prud’hommes
se poursuivent de plein droit. Elles se poursuivent néanmoins en présence
du mandataire judiciaire ou de l’administrateur (2208) lorsqu’il a une
mission d’assistance. Le mandataire doit informer dans les 10 jours de
l’ouverture de la sauvegarde la juridiction saisie et les salariés partie à
l’instance.

§2 : L’interdiction des paiements

L622-7 al 1 C.COM prévoit que le jugement ouvrant la procédure emporte


de plein droit interdiction de payer toute créance née antérieurement au
jugement d’ouverture à l’exception du paiement par compensation des dettes
connexes. Il emporte également de plein droit interdiction de payer toute
créance née après le jugement d’ouverture si n’est pas mentionnée comme étant
privilégiée selon le I de L622-17 C.COM. ces interdictions ne sont toutefois pas
applicables au paiement des créances alimentaires.

A. Le principe de l’interdiction des paiements

Cette interdiction est automatique car elle est attachée de plein droit au
prononcé du jugement d’ouverture. Elle est par ailleurs générale car elle
s’applique à tous les créanciers antérieurs et depuis la loi du 26 juillet 2005, elle
concerne également les créanciers postérieurs non privilégiés.

Cette interdiction signifie concrètement que tant les créanciers antérieurs


que les créanciers postérieurs non privilégiés ne seront payés que dans le cadre
du plan de sauvegarde. Cette règle particulièrement judicieuse en matière de

82
Droit des entreprises en difficulté

sauvegarde va permettre de différer le passif et va permettre au débiteur de


prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer son redressement.

Cette règle est assortie de plusieurs prolongements destinés à assoir sa


portée. Ainsi, tout paiement effectué en violation de l’interdiction est annulé. La
demande en annulation peut être formée par tout intéressé dans les 3 ans du
paiement illicite. En conséquent, si un débiteur paie un créancier antérieur, la
somme devra être restituée à l’entreprise sans que l’on est à tenir compte de la
bonne ou mauvaise foi de celui qui a reçu le paiement. De plus, L624-8
C.COM prévoit que le débiteur qui paie un créancier peut être condamné
pénalement à une peine d’emprisonnement de 2 ans et à une amende de
30 000€.

Cette interdiction des paiements prend naissance dès le jugement


d’ouverture indépendamment d’ailleurs de toute publicité de ce jugement. Les
créances antérieures et les créances postérieures non privilégiées ne peuvent
donc pas en vertu de ce principe être payées. Peu importe la date d’échéance et
peu importe également leur nature chirographaire ou privilégiée. Toutes ces
créances vont faire l’objet d’une déclaration au passif alors que les créances
postérieures privilégiées seront payées à échéance.

Concrètement, la question de la date de naissance de la créance sera


également, sur ce terrain, déterminante. Cette date de naissance va en effet servir
à la fois à déterminer le domaine de l’interdiction des paiements, le domaine de
l’arrêt des poursuites individuelles et le domaine des créances privilégiées.

B. Les exceptions au principe

Certains créanciers antérieurs ou postérieurs non privilégiés peuvent être


payés malgré l’ouverture de la procédure :
Créances alimentaires
Cas particuliers des créances liées aux besoins de la vie courante au
débiteur personne physique : ne sont plus depuis l’ordonnance de 2008
écartées du principe et seront donc interdites de paiement. Elles peuvent
toutefois être payées sur le fondement de L622-17 C.COM si elles sont
nées en contre partie d’une prestation fournie au débiteur.
Salariés seront payés immédiatement sur ordonnance du juge commissaire
sur les fonds disponibles. A défaut, L625-8 C.COM prévoit qu’ils doivent

83
Droit des entreprises en difficulté

être payés par l’AGS dans les 10 jours du jugement d’ouverture pour leur
créance super-privilégiée.
Paiement d’un créancier antérieur pour retirer le gage ou une chose
légitimement retenue à condition d’une part d’avoir une autorisation du
juge commissaire et d’autre part que le bien soit nécessaire à la continuité
de l’exploitation. Dans les deux cas, il faut que le paiement du créancier
soit le seul moyen de retirer le bien.
Si un pacte commissoire (permettant au créancier de devenir propriétaire
du bien en cas de défaut du remboursement de sa dette par le débiteur,
aboutissant donc au paiement d’un créancier) a été conclu lors de la
constitution du gage, l’ouverture de la procédure va avoir une incidence sur
sa réalisation. En effet, ces pactes ont été interdits jusqu’à l’ordonnance du
23 mars 2006 et sont désormais autorisés par 2278 C.CIV et suite à
l’entrée en vigueur de cette ordonnance, L622-7 C.COM a été complété et
prévoit désormais que le jugement ouvrant la procédure collective fait
obstacle à la conclusion ou à la réalisation d’un tel pacte.
Avec l’ordonnance de décembre 2008, l’autorisation de paiement est
également possible pour obtenir le retour des biens et des droits transférés
à titre de garantie dans un patrimoine fiduciaire. Elle est également
possible pour lever l’option d’un contrat de crédit-bail si le paiement à
intervenir est d’un montant inférieur à la valeur vénale du bien objet du
contrat. Cette faculté, de pouvoir lever l’option et de pouvoir payer le
bailleur, avait été préconisée après qu’un arrêt de la cour de cassation
(Com. 19 juin 2007) avait décidé que le liquidateur ne pouvait s’opposer à
la demande de restitution du crédit-bailleur en levant l’option d’achat et en
ayant les créances antérieures. Toutefois l’exigence relative à la valeur du
bien risque considérablement en pratique de compliquer la situation.
Peuvent également être payés les créanciers bénéficiaires d’une clause de
réserve de propriété et ce pour éviter qu’ils exercent leurs revendications
sur les biens touchés par cette clause. L’art L624-16 al 4 C.com énonce en
effet qu’il n’y a pas lieu à revendication si sur décision du juge commissaire
le prix est payé immédiatement.
Le législateur a assorti ce principe d’interdiction des paiements d’une
dernière exception qui a une très grande portée pratique : il s’agit du
paiement par compensation de créances connexes.
La compensation peut se définir comme l’extinction totale ou partielle de
deux obligations réciproques entre les mêmes personnes, elle a pour objet
une somme d’argent ou une certaine quantité de choses fongibles. La

84
Droit des entreprises en difficulté

compensation n’est possible que si les dettes (qui vont se compensées) sont
liquides, exigibles et certaines. En matière de procédures collectives, la
compensation sera possible même si l’une des créances est soumise à la
procédure de vérification et d’admission par le juge commissaire puisqu’il
rend la créance vraisemblable. En cas d’ouverture d’une procédure
collective, pour pouvoir bénéficier de la compensation, il faudra que la
créance soit déclarée à la procédure. La compensation ne devrait
normalement pas jouer après l’ouverture d’une procédure collective car
étant considérée comme une forme de paiement (paiement par extinction
d’obligation) son admission reviendrait à reconnaitre un traitement à l’un
des créanciers par préférence aux autres. La cour de cassation (Com. 19
mars 1991) puis le législateur (réforme 26 juillet 2005) ont toutefois admis
cette compensation en cas de connexité des créances réciproques. La
connexité est traditionnellement définie comme un lien étroit qui unit deux
créances réciproques nées d’un même contrat ou d’un ensemble
contractuel. Cette connexité va donc permettre d’écarter la règle de
l’interdiction des paiements et de faire jouer la compensation entre une
créance déclarée à la procédure et une créance dont serait titulaire le
débiteur défaillant sur son créancier. La loi consacre ainsi une mesure de
faveur au créancier du débiteur qui bénéficie dès lors d’un paiement
préférentiel par extinction de sa propre dette. Il reste alors à déterminer à
quelle condition des dettes réciproques peuvent-être considérées comme
connexes. La jurisprudence retient une interprétation large de la notion de
connexité et elle retient trois cas principaux de connexité :
 La compensation est possible après le jugement d’ouverture entre
des créances et des dettes qui se trouvent inscrites sur un même
compte (Ex. : com. 1er mars 2005, via un compte courant)
 En cas de créance résultant de l’exécution ou de l’inexécution d’un
même contrat. Ex. : il y aura connexité entre des primes dues par
l’assuré (le débiteur défaillant) et l’indemnité due par la compagnie
d’assurance (le créancier). Il y aura aussi connexité entre la dette de
loyer du locataire et la dette du bailleur en restitution d’ »un dépôt de
garantie.
 La jurisprudence admet la compensation et la connexité entre des
créances résultant de conventions distinctes mais appartenant à un
ensemble contractuel unique servant de cadre général aux relations
des parties. Elle prend alors en compte l’unité économique de
l’opération et considère que les contrats forment un tout indivisible.
Il en est ainsi des contrats-cadres suivis de contrats d’application
85
Droit des entreprises en difficulté

comme ceux qui peuvent lier une coopérative et un agriculteur. Ex. :


Com. 19 mars 1991 précité dit « arrêt des porcelets » par les
praticiens, la chambre commerciale retient la connexité entre d’un
côté la créance de livraison d’aliments par la coopérative à un
agriculteur, livraison qui était antérieure au redressement judiciaire
de celui-ci, et de l’autre coté la créance de livraison de porcs
charcutiers par cet agriculteur à la coopérative, livraison qui était
postérieure à l’ouverture du redressement judiciaire. Par contre en ce
qui concerne le trésor public, la chambre commerciale a considéré
qu’il n’y avait pas compensation entre une dette de TVA antérieure
au jugement d’ouverture et un crédit de TVA né postérieurement car
ces créances sont nées d’opérations distinctes (com. 19 jan 1999).

En complément de ces mesures l’art L622-28 dispose que le jugement


d’ouverture arrête le cours des intérêts légaux ou conventionnels ainsi que tous
les intérêts de retard, à moins qu’il ne s’agisse d’intérêts résultant de contrat de
prêt conclu pour une durée égale ou supérieure à un an. Les personnes
physiques, cautions ou coobligées, peuvent également se prévaloir de ces
dispositions.
De plus, pour favoriser la poursuite de l’activité de l’entreprise, il est
également prévu que les hypothèques, nantissements et privilèges ne peuvent
plus être inscrits postérieurement au jugement d’ouverture (L622-30 C.com).
Cela signifie que les créanciers qui n’ont pas pu inscrire leur sureté avant le
jugement d’ouverture ne peuvent être admis à la procédure qu’en qualité de
créanciers chirographaires. Cela signifie aussi que les biens, sur lesquels portait
la sureté, peuvent librement être affectés en garantie d’une dette née après el
jugement d’ouverture. Pour cela il faudra l’autorisation du juge commissaire.

86
Droit des entreprises en difficulté

Chapitre 2 : La détermination du patrimoine du débiteur

La période d’observation a permis de cristalliser les relations juridiques du


débiteur avec ses principaux partenaires commerciaux et financiers. Il va alors
être possible d’approfondir l’analyse de la situation économique et financière de
l’entreprise en comptabilisant les éléments d’actif et de passif.
La recherche du passif va permettre de clarifier le bilan en ne conservant
que les créances certaines et déclarées à al procédure. D’autre part, la
reconstitution de certaines obligations accomplies par le débiteur va permettre
de déterminer avec précision son actif.

Section 1 : La détermination du passif du débiteur

Le passif est constitué de toutes les dettes du débiteur or les créanciers qui
ne relèvent pas du bénéfice de L622-17 C.com, sont assujettis à des démarches
précises s’ils veulent participer à la distribution des fonds dans le cadre du plan
de sauvegarde. Ils doivent ainsi déclarer leurs créances qui feront l’objet d’une
vérification. Indépendamment de cette démarche, la loi réserve une place
particulière aux créances salariales (protégées par le super privilège notamment).

§1 : La déclaration des créances

Cette déclaration est une étape décisive dans la procédure collective. Elle
vise d’abord à assurer l’égalité entre les créanciers puisque tous y sont soumis.
Elle vise aussi à recenser les créanciers qui voudront bien se manifester. Elle
permet enfin de vérifier la valeur respective de leur créance. Cette déclaration
des créances na été que peu modifiée par l’ord de 2008. L’art L622-24 al 1er
C.com prévoit qu’à partir de la publication du jugement d’ouverture, tous les
créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d’ouverture, à
l’exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire
judiciaire. Cette déclaration est assortie d’un délai puisqu’ils doivent l’adresser
dans les deux mois qui suivent la publication du jugement d’ouverture au
BODACC. Depuis la loi du 26 juillet 2005, cette obligation de déclaration pèse
également sur les créanciers postérieurs non privilégiés. Dans ce cas, le délai
pour procéder à cette formalité court à compter de la date d’exigibilité de la
créance.
Juridiquement, cette déclaration s’apparente à une demande en justice en
paiement dirigée contre le débiteur. En conséquence, la décision du juge

87
Droit des entreprises en difficulté

commissaire qui va se prononcer sur la demande, est donc revêtue de l’autorité


de la chose jugée.

A. Les créanciers soumis à déclaration

Conformément à L622-24 sont principalement visés par cette obligation de


déclaration, les créanciers dont la créance est antérieure au jugement
d’ouverture, et les créanciers postérieurs non privilégiés. La loi ne distingue donc
pas selon que la créance est chirographaire ou assortie d’une sureté. Le domaine
de déclaration des créances recoupe celui de l’arrêt des poursuites individuelles.

Les créanciers titulaires d’une sureté publiée sont toutefois avertis


personnellement par le mandataire. Le délai de déclaration court à l’égard de
ces créanciers à compter de la notification de cet avertissement.

L’obligation de déclaration est également imposée aux créanciers du


conjoint du débiteur (com. 14 mai 1996, cet arrêt doit être articulé avec Ass.
Plén. 23 dec 1994, de sorte que l’obligation de déclaration concerne aussi les
conjoints in bonis). Cette obligation de déclaration n’est par contre pas imposée
au conjoint marié sous la séparation de biens puisque les créanciers personnels
du conjoint in bonis ne sont pas en concurrence avec les créanciers du débiteur
sur la part indivise du conjoint in bonis.

La caution est également admise à déclarer la créance qu’elle détient


contre l’entreprise débiteur principal et ce même si le créancier a déclaré sa
créance. Il s’agit d’une déclaration préventive qui est l’application de l’art 2309
C.civ au terme duquel, la caution même avant d’avoir désintéresser le créancier,
peut agir contre le débiteur pour être indemnisée par lui lorsqu’il fait l’objet
d’une procédure collective.

Sont dispensés de déclaration, certaines catégories de créances antérieures.


D’abord, les salariés ne sont pas contraints de déclarer leur créance, résultat de
contrat d’un travail, car la vérification des créances salariales fait l’objet d’une
procédure particulière.
Aussi, sont dispensées de déclaration les créances qui peuvent être
recouvrées auprès d’un tiers qui n’est pas soumis à la procédure de sauvegarde
(ex. : un recours contre l’assureur).
S’agissant des créances alimentaires, l’ordonnance de 2008 a apporté des
éclaircissements puisque précédemment échappaient à cette obligation de
88
Droit des entreprises en difficulté

déclaration, les créances alimentaires postérieures au jugement d’ouverture. Rien


n’était indiqué pour les créances alimentaires antérieures. L’ordonnance 2008 a
modifié l’art L622-24 al 7 C.com qui prévoit désormais que les créances
alimentaires ne sont pas soumises à déclaration qu’elles soient postérieures ou
antérieures. Par ailleurs, l’ordonnance a repris la règle selon laquelle
l’interdiction faite au débiteur de procéder à certains paiements de créances
antérieures ne s’applique pas aux créances alimentaires. Par contre, les créances
alimentaires ne bénéficient toujours pas du privilège de l’art L622-17
puisqu’elles ne sont pas nées en contrepartie d’une prestation fournie au
débiteur. En pratique, les créances alimentaires doivent être payées durant la
procédure grâce aux revenus dont le débiteur dispose et peuvent également être
recouvrées par la procédure de paiement direct (com. 8 oct 2003, deux arrêts).
Concernant les créances postérieures ont doit également opérer une
distinction. Les créances postérieures privilégiées sont en principe dispensées de
l’obligation de déclaration car elles bénéficient d’un droit de priorité et en
principe elles sont payées à échéance. Les créances postérieures régulières (ne
sont pas privilégiées) doivent également être déclarées. Enfin, les créances
postérieures irrégulières ne doivent pas être déclarées car elles sont hors
procédure et seront payées en dehors du plan.

B. La procédure de déclaration

Le régime juridique de cette déclaration est commun à la procédure de


sauvegarde et au redressement judiciaire.

1) L’information de certains créanciers d’avoir à déclarer leur créance

Certains créanciers sont prévenus de la procédure ce qui va leur permettre


de déclarer leur créance dans le délai imparti. Le mandataire judiciaire, dans le
délai de 15 jours à compter du jugement d’ouverture, avertit les créanciers
connus d’avoir à lui déclarer leur créance dans les deux mois qui suivent la
publication du jugement d’ouverture au BODACC. Cette prérogative est le
prolongement de L622-6 qui prévoit que le débiteur doit remettre la liste de ses
créanciers et les principaux contrats en cours à l’administrateur et au mandataire
judiciaire.
Par ailleurs, L622-24 prévoit que les créanciers titulaires d’une sureté
publiée ou qui sont liés au débiteur par un contrat publié (contrat de crédit-bail)
sont personnellement avertis par le mandataire d’avoir à déclarer leur créance.

89
Droit des entreprises en difficulté

2) Les délais pour déclarer

Le délai pour déclarer les créances est de deux mois à compter de la


publication du jugement d’ouverture au BODACC. La déclaration est adressée
au mandataire judiciaire puisque c’est lui qui représente les créanciers. Ce délai
de 2 mois est doublé pour les créanciers qui ne demeurent pas en métropole.
Par ailleurs, L622-13 énonce que si l’administrateur n’use pas de la faculté
de poursuivre le contrat ou qu’il y met fin, l’inexécution peut donner lieu à des
dommages et intérêts dont le montant doit également être déclaré au passif. Ces
déclarations complémentaires portant sur des indemnités de résiliation doivent
être déclarées dans le délai d’un mois à compter de la notification de la décision
prononçant la résiliation.

3) Le contenu de la déclaration

La déclaration porte sur le montant de la créance due au jour du jugement


d’ouverture avec indication des sommes à échoir et de leur créance. Les
créanciers antérieurs doivent déclarer le montant principal de leur créance
augmenté des intérêts échus au moment du jugement d’ouverture.
Les créanciers postérieurs déclarent le montant du à la date d’exigibilité.
La déclaration, dans les deux cas, précise le cas échéant la nature du
privilège ou de la sureté dont la créance est éventuellement assortie.
Les créances dont le montant n’est pas encore définitivement fixé sont
déclarées sur la base d’une évaluation. En pratique il s’agira notamment des
créances du trésor public et des organismes de sécurité sociale.

4) Les conséquences du défaut de déclaration

Les créanciers qui n’ont pas procédé à la déclaration de leur créance dans
les délais peuvent demander au juge commissaire de les relever de leur
forclusion. En effet, L622-26 C.COM prévoit qu’à défaut de déclaration, les
créanciers ne sont pas admis dans les répartitions et dividendes à moins que le
juge commissaire ne les relève de leur forclusion s’ils établissent que leur
défaillance n’est pas due à leurs faits ou qu’elle est due à une omission volontaire
du débiteur lors de l’établissement de sa liste des créanciers.

90
Droit des entreprises en difficulté

Concernant la 1ère hypothèse, le créancier doit établir qu’il ne pouvait pas


connaitre l’existence de la procédure à cause du fait d’un tiers ou d’un cas de
force majeure. S’agissant de la 2nde hypothèse, elle a été ajoutée par la loi du 26
juillet 2005 mais est peu rencontrée car le créancier devra apporter la preuve du
caractère volontaire de l’omission par le débiteur.

L’action en relevé de forclusion ne peut être exercée que dans le délai de 6


mois à compter de la publication du jugement d’ouverture. Pour les créanciers
titulaires d’une sureté publiée ou lié au débiteur par un contrat publié, le délai
court à compter de la réception de l’avis qui leur est donné. Par exception, le
délai peut être porté à un an pour les créanciers placés dans l’impossibilité de
connaitre l’existence de leur créance avant l’expiration du délai de 6 mois (ex :
ignorance du vice caché).

Si le créancier est relevé de sa forclusion, il est considéré comme ayant


effectué une déclaration régulière et il n’est donc pas utile qu’il procède à une
seconde déclaration de créance.

Par ailleurs, l’apport essentiel de la loi du 26 juillet 2005 est d’avoir


modifié la règle jusqu’alors retenue en droit des procédures collectives
concernant les conséquences de la non-déclaration de créance. En effet, sous
l’empire de la loi de janvier 1985, en l’absence de déclaration de créance, celle-ci
était purement et simplement éteinte. Le créancier était irrecevable à reprendre
ses poursuites après la clôture de la procédure. Ce principe a donc été modifié
en 2005, la créance non-déclarée n’est plus éteinte désormais. L’absence de
déclaration a seulement pour effet de priver le créancier des distributions
prévues par le plan de sauvegarde. Concrètement, il va conserver une chance
minime de recouvrer sa créance. Cette règle est appelée par la majorité auteurs
l’inopposabilité à la procédure.

L’ordonnance de 2008 a apporté une précision en la matière puisque les


créances non déclarées régulièrement dans les délais sont désormais
inopposables au débiteur pendant l’exécution du plan et après cette exécution,
lorsque les engagements énoncés dans le plan ou énoncés par le tribunal ont été
tenu. De cette disposition il découle que l’exécution du plan par le débiteur le
libérera à l’égard du créancier négligent. En revanche, si le plan n’est pas
correctement exécuté par le débiteur, le créancier dont la créance n’est pas
éteinte pourra s’en prévaloir à nouveau.

91
Droit des entreprises en difficulté

En pratique, la différence entre l’inopposabilité et l’extinction de la créance


semble mince. En réalité, cette différence va malgré tout avoir des conséquences
à l’égard de la caution car la suppression d’extinction des créances non déclarées
qui avantage les créanciers négligents a de lourdes conséquences pour les
cautions qui garantissent la dette d’un débiteur faisant l’objet d’une procédure
collective. En principe, la caution ne peut invoquer l’ouverture d’une procédure
collective au titre des exceptions qu’elle peut opposer au créancier, par
conséquent, son engagement de caution est maintenu. Auparavant, l’extinction
de la créance liée à sa non-déclaration avait pour conséquence de libérer la
caution ce qui paraissait illogique car c’est au moment où le débiteur est
défaillant que le créancier doit pouvoir se tourner vers la caution. Cette règle
avait été critiquée c’est pourquoi avant la réforme de 2005 la C.com ne
l’appliquait déjà plus ni aux codébiteurs solidaires ni aux garants professionnels.
Avec la réforme de 2005, la caution ne se trouvait plus libérée si le créancier
omettait de déclarer sa créance puisque celle-ci n’était plus éteinte.
L’ordonnance de 2008 a rajouté un alinéa à L222-26 C.COM au terme duquel
pendant l’exécution du plan, les créances non déclarées son également
inopposables aux personnes physiques coobligées ou ayant consenties une sureté
personnelle ou ayant affecté (sureté réelle) ou cédé (fiducie) bien en garantie.
Ainsi, toutes les créances non-déclarées sont inopposables aux personnes
physiques pendant toute la durée d’exécution du plan mais pas au-delà.

§2 : La vérification et l’admission des créances

2 étapes.

A. La vérification des créances par le mandataire judiciaire

Les créances déclarées sont vérifiées par le mandataire judiciaire en


présence du débiteur et des contrôleurs. Il s’agit pour le mandataire, de dresser
une liste des créances déclarées avec des propositions d’admission ou de rejet, le
tout complété par les observations du débiteur.

Si le mandataire judiciaire conteste une créance, il doit en aviser le


créancier concerné par LRAR. Si celui-ci ne donne aucune explication dans un
délai de 30 jours, toute action ultérieure en contestation lui sera interdite.

La liste arrêtée par le mandataire est déposée au greffe du tribunal et remis


au juge commissaire et à l’administrateur le cas échéant.
92
Droit des entreprises en difficulté

Cette vérification doit intervenir dans un délai expressément fixé par le


tribunal.

Les créances faisant l’objet d’une instance judiciaire en cours échappent à


la vérification du mandataire car est interrompue jusqu’à la déclaration de la
créance.

B. La décision du juge commissaire

L622-24 C.COM énonce qu’aux vues des propositions du mandataire


judiciaire, le juge commissaire décide de l’admission ou du rejet de chaque
créance déclarée. Si le juge commissaire admet une créance non contestée, il
l’apporte sur l’état des créances et fait notifier sa décision au créancier lequel
reçoit un certificat de vérification de créance. Si le juge commissaire statue sur
une créance contestée et la rejette, il doit au préalable convoquer le créancier, le
débiteur, l’administrateur et le mandataire pour un débat contradictoire. Si la
créance est rejetée, le débiteur est libéré de même que la caution.

Un recours contre les décisions du juge commissaire est ouvert au


créancier mais également au débiteur ou au mandataire. Le délai est de 10 jours
à compter de la notification de la décision.

L’ordonnance de décembre 2008 a ajouté L624-3-1 C.COM au terme


duquel les décisions d’admission ou de rejet des créances prononcées par le juge
commissaire sont portées sur un état qui est déposé au greffe du tribunal de
sorte que toute personne intéressée autre que les créanciers dont la créance est
discutée peuvent former réclamation devant le juge commissaire.

§3 : Le cas du passif salarial

Les salariés doivent être payés le plus rapidement possible en cas de


défaillance de leur employeur. En revanche, ne peuvent être payées que les
créances salariales incluses après vérifications dans un document spécifique : le
relevé de créances salariales. Un acompte est cependant immédiatement versé
par l’administrateur à titre prévisionnel sur la base du dernier bulletin de salaire

93
Droit des entreprises en difficulté

et ce conformément à L625-8 al 2 C.COM. Ce paiement se fera sur les fonds


disponibles et avec l’autorisation du juge commissaire.

Ces relevés de créances salariales sont établis par le mandataire judiciaire


mais, à la différence des autres créanciers, les salariés sont dispensés de
déclaration, ils n’encourent donc pas un risque de forclusion. Les délais impartis
pour établir ces relevés de créances salariales sont très courts : dans les 10 jours
suivants l’ouverture de la procédure.

Section 2 : La détermination de l’actif

En principe, l’entreprise connait son actif par le biais de son bilan.


Pourtant, la détermination de l’actif est moins évidente qu’il n’y parait. L622-6
C.COM prévoit que dès l’ouverture de la procédure, il est dressé un inventaire
du patrimoine du débiteur ainsi que des garanties qui le grève. Le débiteur doit
également mentionner les biens qu’il détient et qui sont susceptibles d’être
revendiqué par un tiers.

La reconstitution du patrimoine du débiteur va donc être confrontée aux


droits des tiers et plus spécifiquement aux droits du conjoint.

§1 : La reconstitution confrontée aux droits des tiers

Le débiteur soumis à une procédure collective peut du fait de son activité


se trouver en possession de biens meubles qui ne lui appartiennent pas. En
pratique, il s’agira de biens loués en crédit-bail ou encore de marchandises
destinées à être vendues ou encore de biens vendus avec une clause de réserve
de propriété. Le débiteur peut dans ces hypothèses n’être qu’un détenteur
précaire ; or, cette apparence de propriété est contraire à ses intérêts car elle
contredit sa situation réelle.

La loi oblige donc les propriétaires à faire reconnaitre leur droit de


propriété dans le cadre de la procédure.

A. Les biens pouvant faire l’objet d’une revendication

L624-16 C.COM énonce que peuvent être revendiqués à condition qu’ils


se retrouvent en nature les biens meubles remis à titre précaire au débiteur ou

94
Droit des entreprises en difficulté

ceux transférés dans un patrimoine fiduciaire dont le débiteur conserve l’usage


ou la jouissance en qualité de constituant.

Peuvent également être revendiqués s’ils se retrouvent en nature au


moment de l’ouverture de la procédure les biens vendus avec clause de réserve
de propriété.

La revendication peut enfin s’exercer sur les biens mobiliers incorporés


dans un autre bien lorsque la séparation de ses biens peut être effectuée sans
qu’ils en subissent un dommage.

Liste appelant des précisions :


L624-16 C.COM de 2005 énonçait que pouvaient être revendiquées les
marchandises consignées au débiteur soit à titre de dépôt soit pour être
vendues pour le compte du propriétaire.
En visant désormais les biens meubles remis à titre précaire au débiteur,
C.COM modifié en 2008 laisse une plus grande marge d’appréciation aux
tribunaux.
L’ordonnance de 2008 a surtout complété cet article pour prendre en
considération la fiducie.
Aux termes de 2011 C.CIV, la fiducie est une opération par laquelle un ou
plusieurs constituants transfèrent des biens, des droits ou des suretés à un
ou plusieurs fiduciaires qui les tenant séparés de leurs patrimoines propres
agissent dans un but déterminé au profit d’un ou de plusieurs bénéficiaires.
Introduite par la loi du 19 février 2007, réformée par la loi LME du 4 aout
2008 puis par ordonnance du 18 décembre 2008 puis ordonnance du 30
janvier 2009 qui a réglementé de façon spécifique la fiducie sureté à 2372
& s C.CIV.
Ces textes permettent de constituer une fiducie sureté sur n’importe quel
bien présent ou futur. Le constituant peut être une PM mais depuis loi
2008 il peut également s’agir d’une PP. La qualité de fiduciaire est
attribuée aux établissements de crédits, aux entreprises d’investissement et
aux compagnies d’assurance. Depuis décret 1 février 2009 la possibilité
d’être fiduciaire aux avocats.
Avant l’échéance de la créance garantie, la fiducie donne lieu à un transfert
temporaire de la propriété d’un bien. La propriété sera transférée au
bénéficiaire de la fiducie aux termes du contrat ce qui suppose que les
créanciers personnels du fiduciaire ne peuvent pas appréhender le bien. A
défaut de paiement de la créance garantie, 2 hypothèses :
95
Droit des entreprises en difficulté

o Si le créancier du débiteur a la qualité de fiduciaire parce qu’il s’agit


par exemple d’un établissement de crédit, la défaillance de son
débiteur à échéance n’a pas pour effet de lui conférer la propriété du
bien (l’a déjà) mais de lui faire recouvrer la libre disponibilité de son
bien.
o Si le créancier est bénéficiaire de la fiducie sans avoir la qualité de
fiduciaire, la défaillance du débiteur a pour effet de lui conférer la
propriété du bien donné en garantie. Il peut donc en exiger la remise
de la part du fiduciaire.
Toutefois, comme il est possible de prévoir qu’un pacte commissoire ne
sera pas automatiquement mis en œuvre en matière de gage, le contrat de
fiducie peut donner au créancier la possibilité de ne pas devenir
propriétaire de ce bien et d’exiger à la place la vente du bien par le
fiduciaire (qui en est propriétaire) et la remise de tout ou partie du prix de
vente.
Comme en matière de gage, la fiducie sureté peut se réaliser avec ou sans
dépossession :
o En cas de dépossession : le fiduciaire dispose d’un droit de rétention
effectif sur les biens.
o En cas de non-dépossession : il sera prévu une convention entre le
constituant et le fiduciaire en exécution de laquelle le débiteur
conserve l’usage ou la jouissance des biens ou des droits transférés
dans le patrimoine fiduciaire. C’est cette hypothèse qui est visée par
L624-16 C.COM.
La revendication peut également porter sur un bien assortie d’une clause
de réserve de propriété.
La loi du 26 juillet 2005 n’avait pas modifiée les règles applicables aux
contrats assortis d’une clause de réserve de propriété mais la réforme des
suretés par l’ordonnance du 23 mars 2006 a inséré 2367 à 2372 C.CIV
une section spécifique consacrée aux dispositions relatives à la propriété
retenue à titre de garantie.
En conséquence, L624-16 à -18 C.COM ont été modifié par cette
ordonnance pour les rendre cohérents par apport au C.CIV.
2367 C.CIV énonce désormais que la propriété d’un bien peut être
retenue en garantie par l’effet d’une clause de réserve de propriété qui
suspend l’effet translatif d’un contrat jusqu’au complet paiement de
l’obligation qui en constitue la contrepartie. La propriété ainsi réservée est
l’accessoire de la créance dont elle garantie le paiement. Ces clauses de

96
Droit des entreprises en difficulté

réserve de propriété sont donc désormais considérées comme de véritables


suretés. 2 hypothèses :
o Vendeur n’a pas inséré dans le contrat de clause de réserve de
propriété : s’il n’a pas été payé par le débiteur, il est créancier
antérieur, il doit déclarer sa créance et est soumis à l’arrêt des
poursuites individuelles.
o Vendeur a inséré une clause de réserve de propriété : peut obtenir la
restitution des biens livrés au débiteur s’ils se retrouvent en nature au
moment de l’ouverture de la procédure. Toutefois, la validité de
cette clause est subordonnée à certaines conditions. Elle doit avoir
été convenue entre les parties dans un écrit au plus tard au moment
de la livraison des biens, peut également être prévue dans un écrit
régissant un ensemble de relations commerciales convenues entre les
parties.
La revendication peut porter sur des biens mobiliers incorporés à d’autres
biens quand la séparation de ces biens peut se faire sans dommage.
La revendication peut s’exercer sur des biens fongibles lorsque des biens
de même nature et de même quantité se trouvent entre les mains du
débiteur ou de toute personne qui les détient pour son compte.
Les revendications ont pour conséquence d’extraire certains biens du
patrimoine du débiteur. A l’inverse, les créanciers peuvent détenir des biens qui
appartiennent au débiteur mais qui ont été affectée en garantie d’une créance
(ex : gage). Le juge commissaire peut autoriser le débiteur à payer le créancier
gagiste pour obtenir le retour des biens qui serait justifié par la poursuite de
l’activité. Jusqu’à l’ordonnance du 23 mars 2006, le gage entrainait
automatiquement la dépossession du débiteur, désormais, le gage peut
également être constitué sans dépossession. Par la suite, la loi LME du 4 aout
2008 a créé au sein de 2286 C.CIV un nouveau cas de droit de rétention attaché
à tout gage sans dépossession. Dans cette hypothèse, le créancier n’a aucun
pouvoir de blocage sur le bien puisqu’il ne peut pas empêcher le débiteur de se
servir du bien. Le droit des procédures collectives a tenu compte de ce droit de
rétention fictif et L622-7 C.COM prévoit que le jugement ouvrant la procédure
emporte de plein droit inopposabilité du droit de rétention conféré par le 4° de
2286 C.CIV pendant la période d’observation et d’exécution du plan sauf si le
bien objet du gage est compris dans une cession d’activité. L’ouverture de la
procédure fait également obstacle à la conclusion mais aussi à la réalisation d’un
pacte commissoire.

B. Les personnes pouvant revendiquer


97
Droit des entreprises en difficulté

En principe, seul le propriétaire du bien peut le revendiquer. Concernant


les propriétaires de biens dont les droits sont publiés, ils sont en principe
dispensés de faire connaitre leur droit de propriété puisque les tiers connaissent
déjà par la publicité leur droit sur le bien (ex : organisme de crédit-bail à
condition que le contrat ait été publié avant le jugement d’ouverture).

§2 : La reconstitution de l’actif confrontée aux droits du conjoint

Le conjoint in bonis va immanquablement être affecté par la procédure


ouverte à l’encontre de son conjoint. L624-5 à L624-8 C.COM lui consacrent
alors des mesures spécifiques. Ces règles s’appliquent aux 3 procédures
collectives.

A. La reprise de ses biens personnels

Même si une procédure est ouverte à l’encontre de son conjoint, un époux


peut toujours disposer de ses biens personnels. Ainsi, le droit de gage des
créanciers s’étend aux biens propres du débiteur et à toute la communauté si le
couple est marié sous le régime légal. Si le couple est marié sous la séparation de
biens, le droit de gage des créanciers va s’étendre sur la part personnelle du
débiteur ainsi que sur sa part indivise des biens acquis en commun.

Quoi qu’il en soit, le conjoint va devoir établir la consistance de son


patrimoine personnet et ce conformément aux règles des RM. Il devra alors
combattre 2 présomptions :
La présomption d’acquêts de 1402 C.CIV
La présomption d’indivision de 1530 C.CIV

B. La restitution des biens acquis avec des valeurs fournies par le débiteur

L624-6 C.COM prévoit que l’administrateur ou le mandataire peut


demander que des acquisitions faites par le conjoint du débiteur soient
réintégrées à l’actif de la procédure en prouvant que les biens ont été acquis avec
des valeurs fournies par le débiteur. Cela permet de contourner la possible
fraude aux droits des créanciers. Si la preuve de cette acquisition est établie, c’est
le bien lui-même qui sera réintégré à la procédure et non sa valeur.

98
Droit des entreprises en difficulté

C. La perte des avantages matrimoniaux consentis dans le contrat de mariage


ou pendant le mariage

L624-8 C.COM interdit au conjoint du débiteur de réclamer l’exécution


des donations qui lui ont été faites pendant le mariage ainsi que les avantages
matrimoniaux qui lui avaient été consentis dans le contrat de mariage. Le
débiteur doit avoir eu la qualité de commerçant lors de son mariage où qu’il l’ait
acquise dans l’année suivante.
Sous-titre 3 : Le plan de sauvegarde

L620-1 C.COM prévoit que la sauvegarde donne lieu à un plan arrêté par
jugement à l’issu de la période d’observation et le cas échéant à la constitution de
2 comités de créanciers (L626-29 et -30 C.COM). L626-1 C.COM précise que
ce plan est adopté lorsqu’il existe une possibilité sérieuse pour l’entreprise d’être
sauvegardée.

Ce plan appelle 3 phases distinctes lesquelles vont se succéder dans le


temps.

Chapitre 1 : L’élaboration du plan de sauvegarde

Le débiteur doit mettre à profit la période d’observation pour élaborer le


plan de sauvegarde avec le concours des différents organes de la procédure et en
concertation avec les créanciers. Dans la préparation du projet de plan, 2
régimes distincts ont été consacrés par la loi : un régime de droit commun et un
régime réservé aux entreprises d’une certaines taille qui fera alors intervenir les
comités de créanciers.

Section 1 : La procédure de droit commun

§1 : L’auteur du projet de plan

La loi de juillet 2005 avait donné à l’administrateur la mission d’élaborer le


projet de plan de sauvegarde avec le concours du débiteur. Dans un souci de
rendre la procédure plus attractive pour les chefs d’entreprise et de conforter
leur rôle dans l’élaboration du projet de réorganisation de leur entreprise,
l’ordonnance de 2008 a abrogé cette disposition et a inversé les rôles.

99
Droit des entreprises en difficulté

L626-2 al 1 C.COM prévoit que le projet de plan est désormais proposé


par le débiteur avec le concours de l’administrateur. Comme auparavant, en
l’absence de désignation d’un administrateur, le débiteur établi le projet de plan
avec l’assistance éventuelle d’un expert nommé par le tribunal (L627-3 al 1
C.COM). En principe, le débiteur élabore le projet de plan au cours de la
période d’observation mais à tout moment il peut demander d’ordonner la
cessation partielle de l’activité.

Depuis l’ordonnance de 2008, le débiteur et lui seul peut demander la


conversion de la sauvegarde en redressement pour d’autres raisons que la
cessation des paiements. Ce sera le cas si l’adoption d’un plan de sauvegarde est
manifestement impossible.

Par ailleurs, L626-2 al 5 C.COM reconnait au tiers la faculté de présenter


des offres d’acquisition portant sur une ou plusieurs activités de l’entreprise,
offres qui seront recensées et analysées dans le projet de plan.

S’il n’est pas présenté de projet de plan avant l’expiration de la période


d’observation, le tribunal peut clôturer la procédure après avoir été saisi par le
MP, tout créancier ou les mandataires de justice et après avoir obligatoirement
entendu le débiteur.

§2 : Le contenu du projet de plan

Le projet de plan est établi aux vues du bilan économique et social dressé
par l’administrateur, le contenu du projet de plan stricto sensu n’a pas été
modifié en 2008.

A. Le bilan économique, social et environnemental de l’entreprise

Conformément à L623-1 al 1 C.COM, l’administrateur judiciaire, avec le


concours du débiteur et l’assistance éventuelle d’un ou de plusieurs experts, est
chargé de dresser pendant la période d’observation le bilan économique et social
de l’entreprise. Il devra préciser dans ce rapport l’origine, l’importance et la
nature des difficultés rencontrées par l’entreprise.

Le bilan économique et social porte tant sur le passé que sur la période
d’observation. Concrètement, c’est une synthèse des informations recueillies par
l’administrateur et des difficultés rencontrées par l’entreprise.
100
Droit des entreprises en difficulté

Par ailleurs, si l’entreprise exploite une ou plusieurs installations classées,


le bilan économique et social doit être complété par un bilan environnemental.
L’administrateur doit le faire réaliser par le débiteur lui-même soit par un
technicien désigné par le juge commissaire. Ce bilan porte sur l’identification des
sites où sont exploitées les installations classées, sur l’existence de pollution
potentielle et sur les mesures prises ou qui sont à prendre afin de surveiller
l’impact de l’exploitation sur l’environnement.

B. Les mesures contenues dans le projet de plan

L626-2 C.COM prévoit que le projet de plan doit :


Définir les modalités de règlement du passif et les garanties éventuelles que
le débiteur doit souscrire pour en assurer l’exécution
Déterminer les perspectives de redressement en fonction des possibilités et
des modalités d’activité, de l’état du marché et en fonction des moyens de
financement disponibles
Exposer et justifier le niveau et les perspectives d’emploi ainsi que les
conditions sociales envisagées pour la poursuite de l’activité

1) Les propositions de délais ou de remises de dettes

Les propositions faites aux créanciers doivent tenir compte de paramètres


généraux :
Durée du plan : ne peut excéder 10 ans, 15 ans si la personne qui
bénéficie de la procédure est un agriculteur
Premier paiement : ne peut intervenir au-delà de 1 an ; au-delà de la
deuxième année, le montant de chacune des annuités prévues par le plan
ne peut être inférieure à 5% du passif admis. Par ailleurs, certaines
créances sont remboursables sans délai et sans remise (créances super-
privilégiées et petites créances dont montant unitaire n’excède pas 300€).
Choix possible pour les créanciers comportant un paiement dans des
délais plus brefs mais assorti d’une réduction proportionnelle.

Les créanciers sont invités par l’administrateur ou le débiteur à consentir


des remises de dettes ou des délais de paiement. Les propositions sont au fur et
à mesure de leur élaboration communiquées par l’administrateur au mandataire
judiciaire. L626-5 al 2 C.COM prévoit que le mandataire judiciaire recueille
101
Droit des entreprises en difficulté

individuellement ou collectivement l’accord de chaque créancier qui a déclaré sa


créance sur les délais et les remises qui lui sont proposées. Ils peuvent
expressément les accepter ou refuser mais quelque soit le mode de consultation
prévu, le mandataire transmettra ces propositions par LRAR. Le défaut de
réponse dans le délai de 30 jours à compter de la réception vaut acceptation.

Si le mandataire décide d’une consultation collective, il va convoquer les


créanciers par la LRAR mais un avis peut être inséré dans un journal d’annonces
légales. Le mandataire fait alors aux créanciers un rapport sur l’état de la
procédure de sauvegarde ainsi que sur les conditions de la poursuite de l’activité
du débiteur. L’accord de chaque créancier sur les propositions de règlement du
passif est recueilli par écrit. Le mandataire dresse un état des réponses faites par
les créanciers, il l’adresse au débiteur, à l’administrateur ainsi qu’aux contrôleurs.

Parmi les créanciers, auront une place particulière les créanciers publics
car le régime des dettes qu’ils consentent est particulier. Ainsi, le régime des
remises susceptibles d’être accordée par ces créanciers publics est encadré par
décret 5 février 2007 et loi 17 février 2009. L626-6 C.COM énonce que sont
concernés les organismes sociaux (organismes sécu, institutions de prévoyance,
institutions gérant l’assurance chômage), les administrations financières (Trésor
public, douanes). La demande de remise est faite par l’administrateur auprès
d’une commission réunissant les chefs des services financiers et les représentants
des organismes de sécu et de l’assurance chômage (CCFS). La demande est faite
dans un délai de 2 mois à compter de l’ouverture de la procédure.

Dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005, l’article L626-6 C.com


précisait que les créanciers publics pouvaient accepter concomitamment à
l’effort consenti par les autres créanciers de remettre toute ou partie de leur
dette au débiteur. Depuis la loi du 17 février 2009 il n’est plus exigé que les
remises consenties par les créanciers publics le soient concomitamment à celles
consenties par d’autres créanciers. Cela signifie que les remises de dettes
publiques sont désormais possibles, même en l’absence de remise de dette
privée.

2) Les mesures de redressement

Outre les remises et les délais de paiement, le projet de plan doit prévoir
des mesures permettant à l’entreprise de sortir durablement de sa situation.
Parmi ces mesures de redressement on peut trouver la cessation ou l’adjonction
102
Droit des entreprises en difficulté

d’activité, on peut également trouver une modification du capital en vue par


exemple de faire rentrer dans ce capital de nouveaux associés. Comme sous
l’origine de la loi de 2005, si une modification du capital est prévue par le projet
de plan, l’AGE (assemblée générale extraordinaire) doit être convoquée pour
permettre l’opération.
Par contre, le remplacement des dirigeants ne peut plus être imposé par le
tribunal par plus d’ailleurs que la cession forcée de ses droits sociaux.

Section 2 : la procédure en cas de constitution des comités de créanciers (CC)

La loi du 26 juillet 2005 avait créé, à coté des autres organes de la


procédure, deux CC dont le rôle consistait à examiner et à discuter les
propositions qui étaient formulées et présentées par le débiteur. A ces
propositions s’joutaient celles destinées aux créanciers qui ne faisaient pas partie
de ces comités, l’ensemble formant donc l’offre de plan du débiteur qui sera
ensuite soumise au tribunal.
L’ordonnance de 2008 a conservé ces comités de créanciers.
Conformément à L626-29, des CC doivent obligatoirement être constitués
lorsque la procédure concerne des débiteurs dont les comptes ont été certifiés
par un CAC ou un expert comptable et dont le nombre de salariés est supérieur
à 150 ou dont le chiffre d’affaire dépasse 20 millions d’€uros (ces deux seuils
étant alternatifs).

§1 : la constitution des CC

Il existe deux CC, comme le précise L626-29 :


Le comité des établissements de crédit (et établissements assimilés dont la
banque de France, la Banque Postale, la Caisse des dépôts et
consignations) ;
Le comité des principaux fournisseurs de biens ou de services.

L626-30 al 1 précise expressément que la composition des comités est


déterminée aux vues des créances nées antérieurement au jugement d’ouverture.
Pour les créanciers bénéficiaires d’une fiducie, seuls sont pris en compte leurs
créances non assorties de cette sureté.
Par ailleurs, chaque fournisseur de biens ou de services est membre de
droit du Comité des principaux fournisseurs lorsque sa créance représente plus
de 3% du total des créances des fournisseurs. Par contre, il semble exclu que les
fournisseurs se regroupent pour atteindre ce seuil de 3%.
103
Droit des entreprises en difficulté

L’un des apports de l’ordonnance de 2008 a été de prévoir les effets de la


perte de la qualité de créancier après le jugement d’ouverture de la procédure, et
notamment en cas de cession de créances. L626-30 prévoit dans cette optique
que la faculté de faire partie d’un CC constitue un accessoire de la créance née
antérieurement au jugement d’ouverture et se transmet dès lors de plein droit à
ses titulaires successifs nonobstant toute clause contraire.

§2 : la consultation des CC

En vue d’élaborer le projet de plan de sauvegarde, le débiteur avec le


concours de l’administrateur présente au CC des propositions (L626-30-2).
Alors que la loi de 2005 réservait cette possibilité de faire des propositions au
seul débiteur, l’ordonnance de 2008 reconnait désormais la possibilité à tout
créancier membre d’un comité de soumettre également es propositions au
débiteur et à l’administrateur.

Sous l’empire de la loi de 2005, ces propositions devaient par ailleurs


intervenir dans le délai de 2 mois à compter de la constitution des CC. Ce délai
était renouvelable une fois par le juge commissaire à la demande du débiteur ou
de l’administrateur. Ce délai a été supprimé par l’ordonnance de 2008.
Désormais, la procédure est enfermée dans un délai de 6 mois à compté de la
constitution des comités (L626-34).

Sur le fond la loi n’impose pas de contenu minimal mais elle donne
désormais, depuis 2008, une liste indicative. Par exemple les propositions dont il
est question peuvent prévoir une durée de remboursement supérieure à 10 ans.
Ces propositions peuvent aussi prévoir des délais de paiement et de remise de
dettes différents entre les créanciers si des différences de situations le justifient.

Ces différentes propositions font ensuite l’objet de discussions entre les


comités, le débiteur et l’administrateur et peuvent bien sur être modifiées. Puis,
chacun des deux comités entend le mandataire ainsi que les représentants du
Comité d’entreprise. Les comités se prononcent enfin, après ces auditions, sur
ce projet de plan au plus tard dans un délai allant de 20 à 30 jours après la
transmission des propositions au débiteur. Ce délai d‘acceptation du projet peut
être réduit ou augmenté par le juge commissaire sans toutefois que sa durée ne
puisse être inférieure à 15 jours.
104
Droit des entreprises en difficulté

105
Droit des entreprises en difficulté

Chapitre 2 : L’arrêté du plan de sauvegarde

L626-9 C.com prévoit que la décision d’arrêter le plan de sauvegarde


incombe au tribunal lequel doit se prononcer avant la fin de la période
d’observation.

Section 1 : la décision du tribunal

Le plan est arrêté par le tribunal et ce, que le projet ait été élaboré avec ou
sans l’aide des CC. Ce n’est toutefois qu’après avoir entendu ou dument appelé
le débiteur, l’administrateur judiciaire, le mandataire judiciaire, les contrôleurs,
ainsi que les représentants du CE et après avoir recueilli l’avis du MP, que le
tribunal va statuer aux vues du projet de plan et du bilan économique et social.
Au-delà d’un certain seuil, à savoir 20 salariés et 3 millions d’Euros de chiffre
d’affaire, les débats doivent obligatoirement lieu en présence du MP.

Sur le fond, L626-1 précise que le tribunal peut arrêter le plan de


sauvegarde qui lui est proposé lorsqu’il existe une possibilité sérieuse pour
l’entreprise d’être sauvegardée.

Lorsque le projet de plan a été adopté par les CC, le tribunal arrête le plan
conformément à ce projet adopté après s’être toutefois assuré que les intérêts de
tous les créanciers sont protégés.

Si le plan est arrêté, la période d’observation prend évidemment fin et une


nouvelle phase va s’ouvrir dans cette procédure à savoir la phase de l’exécution
du plan qui va se dérouler sous la surveillance d’un organe spécifique, le
commissaire à l’exécution du plan.

Une fois arrêté, le plan est opposable à tous les créanciers. Il en résulte que
pour le plan issu de la consultation des CC les propositions acceptées par
chaque comité sont applicables à tous les membres de ces comités y compris à
ceux qui ne les ont pas votées. Pour les créanciers qui ne seraient pas membre
d’un comité, le tribunal leur donnera acte des délais et es remises qu’ils ont
acceptés tout en ayant la possibilité de les réduire. Pour les créanciers qui ont
refusé les propositions le tribunal ne peut leur imposer des remises de dettes
mais il peut par contre leur imposer des délais uniformes de paiement dans la
limite de 10 ans.

106
Droit des entreprises en difficulté

Le jugement arrêtant le plan est communiqué par le greffier au mandataire


de justice, au procureur de la république. Il est également retranscrit au RCS, au
registre des métiers et pour les libéraux, au registre tenu à cet effet par le greffe
du TGI.

Depuis le décret du 12 février 2009, le débiteur peut demander la


radiation sur ces différents registres des mentions relatives à al procédure et à
l’exécution du plan si le plan est toujours en cours à l’expiration d’un délai de 2
ans à compté de son arrêté. Cette radiation fait obstacle à toute nouvelle
mention relative à l’exécution du plan.

Enfin, le jugement est notifié au débiteur ainsi qu’aux représentants du CE,


dans les 8 jours de son prononcé.

Le tribunal qui rejette le plan peut clôturer la procédure de sauvegarde


après audition des parties en chambre du conseil mais à la condition que le
débiteur ne soit pas en cessation des paiements, si c’est la cas il converti la
sauvegarde en redressement judiciaire ou prononce la liquidation judiciaire si le
redressement est manifestement impossible.

Section 2 : le contenu du plan

Le tribunal arrête la durée du plan, laquelle ne peut excéder 10 ans.


Toutefois les mesures acceptées par les créanciers membres du CC peuvent ne
pas accepter cette limite.

Le contenu du plan de sauvegarde varie en fonction de chaque espèce


mais de manière générale, le plan doit tout d’abord désigner les personnes
tenues de l’exécuter et il doit mentionner l’ensemble des engagements qui ont
été souscrits par ces personnes et qui sont nécessaires à la sauvegarde de
l’entreprise.
Les personnes qui exécuteront le plan ne peuvent pas se voir imposer des
charges autres que les engagements qu’elles ont souscrits au cours de sa
préparation. Le plan doit donc désigner les personnes tenues de l’exécuter. A
cet effet, le tribunal nomme pour la durée du plan un commissaire à l’exécution
du plan qui peut être soit l’administrateur judiciaire, soit le mandataire judiciaire.
La mission principale de ce CEP (commissaire à l’exécution du plan) est de
veiller à l’exécution du plan en établissant un rapport annuel sur l’exécution des
engagements du débiteur et sur les paiements auxquels il a procédé. Ce rapport
107
Droit des entreprises en difficulté

est déposé au greffe du tribunal, il est communiqué au MP et il est tenu à la


disposition de tout créancier.
Ce CEP doit rendre compte au président du tribunal et au MP des défauts
d’exécution du plan et il doit également en informer le CE.
Concrètement, c’est le Cep qui va poursuivre les actions introduites avant
le jugement d’adoption du plan auxquelles l’administrateur judiciaire ou le
mandataire était partie. Il poursuit également les instances qui étaient en cours à
l’ouverture de la procédure et qui ont été reprises en vue de la constatation des
créances et de la fixation de leur montant.
Le CEP est également habilité à engager des actions dans l’intérêt collectif
des créanciers.

Le plan de sauvegarde va également comporter des indications concernant


les engagements relatifs à l’avenir de l’activité, aux modalités du maintien et du
financement de l’entreprise, au règlement du passif soumis à déclaration, et aux
garanties fournies par le débiteur pour assurer l’exécution du plan (notamment
par le biais de sûreté qui pourront être prises).
L620-1 C.com prévoit que la procédure de sauvegarde est destinée à
faciliter la réorganisation de l’entreprise afin de permettre la poursuite de
l’activité. L’activité qui s’est déroulée pendant la période d’observation va se
poursuivre pendant la période d’exécution du plan.
Avant l’ordonnance de 2008, le tribunal pouvait ordonner d’office la
cessation partielle de l’activité au cours de la période d’observation, à la
demande de l’administrateur. Depuis l’ordonnance de 2008, seul el débiteur
peut demander au tribunal cette cessation. Donc, l’activité se poursuit, mais
comme précédemment l’arrêt, l’adjonction ou la cession d’une ou de plusieurs
activités peut être ordonnée dans le plan par le tribunal.

Le débiteur, par l’effet de l’adoption du plan, recouvre ses pouvoirs


normaux de gestion mais il ne peut apporter aucune modification substantielle
au plan sans l’autorisation du tribunal. Si le débiteur faisait l’objet d’une
interdiction bancaire, pour une cause antérieure au jugement, l’arrêté du plan
entraine la levée de plaine droit de l’interdiction d’émettre des chèques.

Le plan de sauvegarde doit exposer les perspectives d’emploi ainsi que les
conditions sociales envisagées pour la poursuite de l’activité. Lorsque le plan est
arrêté les contrats de travail des salariés sont poursuivis. Toutefois, le projet de
plan a pu prévoir des licenciements économiques, dans ce cas le plan doit

108
Droit des entreprises en difficulté

définir les actions à entreprendre en vue de faciliter le replacement et


l’indemnisation des salariés dont l’emploi est menacé.

Le plan de sauvegarde détermine les délais et les remises accordés par les
créanciers. Les créances concernées et inscrites au plan de sauvegarde sont celles
qui auront été déclarées. Le plan distinguera selon que les créanciers ont été ou
non réunis en CC. Deux catégories de créances ne pourront faire l’objet
d’aucune remise ou délai : les créances salariales résultant d’un contrat de travail
lorsque leur montant n’a pas été avancé par l’AGS, et les créances les plus
faibles.

Le tribunal peut enfin, dans le cadre du plan, décider l’inaliénabilité des


biens qu’il estime indispensables à la continuation de l’entreprise.

109
Droit des entreprises en difficulté

Chapitre 3 : L’exécution du plan

Section 1 : l’achèvement de l’exécution du plan

Quand il apparait que les engagements du plan ont été tenus, le tribunal à
la requête du CEP, du débiteur ou de tout intéressé, constate que l’exécution du
plan est achevée. Il statue aux vues du rapport établi par le CEP par voie de
jugement communiqué au MP.

Dans les deux mois qui suivent l’achèvement de sa mission, le CEP dépose
au greffe un compte-rendu de fin de mission que tout intéressé peut consulter.
Lorsque les comptes-rendus de fin de missions ont été approuvés, la procédure
de sauvegarde fait l’objet d’une ordonnance de clôture prononcée par le
président du tribunal. Cette décision non susceptible de recours est reportée au
RCS et au registre des métiers, ou au registre tenu au greffe du TGI pour les
libéraux.

Il ne put être ouvert une nouvelle procédure de sauvegarde à l’égard d’une


personne déjà soumise à une telle procédure tant qu’il n’a pas été mis fin aux
opérations du plan c.à.d. tant que l’ordonnance de clôture n’a pas été
prononcée.

Section 2 : la modification du plan

Au cours de la durée d’exécution du plan, des adaptations peuvent


d’avérer nécessaires par rapport aux dispositions qui ont été arrêtées par le plan.
A la demande du débiteur, et aux vues du rapport du CEP, une modification
substantielle dans els objectifs ou dans les moyens du plan est possible. Cela
signifie que de nouvelles remises peuvent solliciter auprès des créanciers publics.
Le tribunal statue après avoir recueilli l’avis du MP et après avoir appelé et
entendu le débiteur.

Section 3 : l’inexécution du plan de sauvegarde

Deux hypothèses sont à distinguer :


Soit le plan n’est pas correctement exécuté, on peut alors aboutir à sa
résolution
Soit le débiteur bascule sur un état de cessation des paiements, le tribunal
pourra alors prononcer un redressement ou une liquidation judiciaire.
110
Droit des entreprises en difficulté

§1 : L’inexécution des engagements prévus par le plan de sauvegarde

L626-27 C.COM prévoit que la résolution du plan peut être demandée si


le débiteur n’exécute pas ses engagements dans les délais fixés par le plan. Sont
visés indifféremment ses engagements financiers, économiques ou sociaux.

La résolution du plan suppose néanmoins une décision judiciaire. Peuvent


à cette fin saisir le tribunal les créanciers impayés et ce quelque soit le montant
de leur créance, le commissaire à l’exécution du plan et le MP. Le tribunal
dispose d’un pouvoir d’appréciation, il peut alors prononcer la résolution mais
aussi la rejeter s’il considère qu’elle constituerait une sanction disproportionnée
pour le débiteur.

Quant aux effets du plan, C.COM prévoit que la résolution du plan met fin
aux opérations et emporte déchéance de tout délai de paiement accordés au
débiteur. Cette résolution ne remet évidemment pas en cause les actes effectués
pendant la période d’exécution du plan mais a, inévitablement, une incidence
sur la situation des créanciers puisqu’elle entraine la déchéance des délais de
paiement. Ainsi, les créanciers peuvent recouvrer immédiatement leurs
créances.

§2 : Le prononcé du redressement ou de la liquidation judiciaire

Si le débiteur bascule en cessation de paiement pendant la phase


d’exécution du plan, le tribunal qui a arrêté le plan peut décider après avis du
MP d’ouvrir une procédure de redressement judiciaire ou si ce redressement est
manifestement impossible une liquidation judiciaire. Le tribunal initialement
saisi restera compétent et devra alors fixé la date de cessation des paiements.

Dans une telle perspective, les créanciers soumis au plan sont dispensés de
déclarer leurs créances dans la procédure de redressement ou de liquidation.
Ces créances seront admises de plein droit dans la nouvelle procédure
déduction faite des sommes déjà perçue. Par contre, les créances nées au cours
de la phase d’exécution du plan doivent être déclarées car elles ne sont pas
considérées eu égard à la nouvelle procédure comme des créances postérieures
privilégiées.
111
Droit des entreprises en difficulté

112
Droit des entreprises en difficulté

Titre 2 : Le redressement judiciaire

Le redressement judiciaire était la procédure traditionnelle de sauvetage de


l’entreprise avant la loi du 26 juillet 2005. Cette procédure conservée en 2005 a
pour objectif de permettre la poursuite de l’activité de l’entreprise, le maintien
de l’emploi et l’apurement du passif. Cette procédure donne également lieu à un
plan arrêté par un jugement à l’issu d’une période d’observation. A la différence
de la sauvegarde, le redressement suppose une cessation des paiements.

Le titre III du livre IV du C.COM prévoit ce redressement et ne


comprend que 26 articles à partir de L631-1 C.COM. En réalité, la procédure
de sauvegarde est devenue depuis la réforme de 2005 la procédure de droit
commun ; dès lors, on constate que l’essentiel des dispositions qu’elle contient
sont applicables au redressement, la loi de 2005 ayant choisi de procéder par un
système de renvoi de la sauvegarde vers le redressement.

Ces deux procédures sont étroitement liées en pratique. En effet, le


première constat quant à la portée de la sauvegarde laisse penser qu’en pratique
les débiteurs ne saisissent que tardivement le tribunal de sorte que les
dispositions relatives au redressement judiciaire continueront à s’appliquer
malgré la sauvegarde. Par ailleurs, après l’ouverture d’une procédure de
sauvegarde, la conversion vers le redressement judiciaire sera toujours possible si
le débiteur bascule en cessation des paiements.

Ainsi, l’étude du redressement judiciaire revient à ne relever que ses


spécificités par rapport à la sauvegarde.

Chapitre 1 : Les conditions d’ouverture du redressement judiciaire

Ces conditions d’ouverture sont plus larges que pour la sauvegarde ce qui
aura des conséquences sur la persistance de cette procédure en pratique.

Section 1 : Les conditions de fond

§1 : Les conditions tenant au débiteur

Assez naturellement L631-2 C.COM reprend les dispositions de L620-2


C.COM qui prévoit que la procédure de redressement judiciaire est applicable à
toute personne exerçant une activité commerciale ou artisanale, à tout
113
Droit des entreprises en difficulté

agriculteur, à toute personne physique exerçant une activité professionnelle


indépendante y compris une profession libérale ainsi qu’à toute PM de droit
privé. L’identité du champ d’application des 2 procédures est logique par
rapport à la conversion possible à tout stade de la procédure de la sauvegarde en
redressement.

Toutefois, le redressement judiciaire présente par rapport à la sauvegarde


une spécificité contenue à L631-3 C.COM. En effet, lorsqu’une personne
physique qui exerçait une activité commerciale ou artisanale, lorsqu’un
agriculteur ou lorsqu’une personne physique qui exerçait une activité
professionnelle indépendante cesse ses activités ou décède en état de cessation
des paiements, une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire peut
être ouverte pour apurer son passif. Cette disposition ne se retrouve
évidemment pas en matière de sauvegarde puisqu’il n’y a pas de cessation des
paiements.

Dans cette hypothèse, le tribunal peut être saisi dans le délai d’un an à
compter de la date du décès en cas d’assignation par un créancier, en cas de
saisine par le MP ou en cas de saisine d’office. Il peut également être saisi par
l’héritier mais sans condition de délai.

C.com (9 février 2010, 3 arrêts) a confirmé que l’avocat qui a cessé son
activité à titre individuel pour devenir associé n’agit plus en son nom propre et
cesse dès lors d’exercer une activité indépendante. Il peut toutefois être assigné
en redressement judiciaire ou en liquidation judiciaire dans le délai d’un an à
compter de la cessation de l’activité individuelle pour l’apurement du passif
provenant de son activité antérieure.

§2 : Les conditions tenant à la situation financière

La procédure de redressement judicaire est ouverte à tout débiteur qui est


dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible et qui
est dès lors en cessation des paiements. Comme pour la sauvegarde, le débiteur
qui établi qu’il bénéficie d’un moratoire de la part de ses créanciers lui
permettant de faire face à son passif exigible avec son actif disponible n’est pas
en cessation des paiements.

La cessation doit être prouvée par celui qui demande l’ouverture de la


procédure. Cette preuve est totalement libre mais est toutefois facilitée lorsque le
114
Droit des entreprises en difficulté

débiteur dépose son bilan au greffe du tribunal, dépôt qui s’accompagne de la


production de certaines pièces comptables notamment la situation de trésorerie.

C’est le tribunal qui fixe la date de cessation des paiements. A défaut de


détermination de cette date, la cessation des paiements est réputée être
intervenue non plus à la date du jugement qui la constate (avant 2008) mais à la
date du jugement d’ouverture de la procédure. La date de cassation des
paiements peut être reportée une ou plusieurs fois sans pouvoir être antérieure
de plus de 18 mois à la date du jugement d’ouverture de la procédure.

La période qui va s’écouler entre la date de cessation des paiements et la


date du jugement d’ouverture est dite période suspecte. Pendant cette période,
certains actes frauduleux ou à tout le moins anormaux pourront être annulés.

Section 2 : Les conditions de formes

La plupart des règles relatives à la sauvegarde est transposable au


redressement judiciaire.

Conformément à L631-4 C.COM l’ouverture de la procédure peut être


demandée par le débiteur au plus tard dans les 45 jours qui suivent la cessation
des paiements.

En cas d’échec de la procédure conciliation, lorsqu’il ressort du rapport du


conciliateur que le débiteur est en cessation des paiements, le tribunal se saisit
d’office afin de statuer sur l’ouverture d’une procédure de redressement
judiciaire. Par contre, lorsqu’il n’y a pas de conciliation en cours, le tribunal peut
également se saisir d’office ou être saisi sur requête du MP. Depuis
l’ordonnance de 2008, le MP dispose également de la possibilité d’étendre la
procédure à d’autres personnes que le débiteur en cas de confusion du
patrimoine ou de fictivité de la personne morale.

Enfin, la procédure de redressement judiciaire peut également être ouverte


sur l’assignation d’un créancier quelle que soit la nature de sa créance.
Toutefois, ce créancier devra préciser la nature de sa créance et donner des
éléments de preuve de nature à caractériser la cessation des paiements.

115
Droit des entreprises en difficulté

Comme en matière de sauvegarde, le jugement ouvrant la procédure de


redressement désigne les différents organes de la procédure à savoir le juge
commissaire, l’administrateur, le mandataire, les contrôleurs et les experts.

Les règles applicables à la sauvegarde sont transposables au redressement


avec cette particularité : le tribunal a la possibilité de prononcer directement la
liquidation judiciaire si le redressement est manifestement impossible. Ces
liquidations judiciaires d’office sont très fréquentes en pratique.

116
Droit des entreprises en difficulté

Chapitre 2 : La période d’observation

L621-1, -2 et -3 C.COM sont applicables à la procédure de redressement


judiciaire. Conformément à ces articles, le jugement d’ouverture ouvre aussi une
période d’observation de 6 mois qui peut être renouvelée une fois par décision
motivée à la demande de l’administrateur, du débiteur ou du MP et une fois
encore à la demande du Procureur de la République, peut donc s’étendre sur 18
mois.

Par ailleurs, L631-14 C.COM prévoit que L622-3 à -9 et L622-13 à -33


C.COM sont applicables à la procédure de redressement judiciaire. Les mesures
relatives à l’administration de l’entreprise pendant la période d’observation, à la
poursuite des contrats en cours, à l’arrêt des poursuites individuelles ou encore à
l’interdiction des paiements sont donc transposables et applicables à la
procédure de redressement judiciaire.

L631-14 al 2 C.COM précise simplement que la prisée des actifs du


débiteur (supprimée en matière de sauvegarde) est réalisée dans le cadre du
redressement concomitamment à l’inventaire des biens prévu par L622-6
C.COM.

Malgré cette technique de transposition, certaines spécificités apparaissent.

Section 1 : La restriction des pouvoirs du débiteur

Conformément à L631-12 C.COM, la mission de l’administrateur est fixée


par le tribunal. Par ailleurs, le débiteur ne peut pas proposer au tribunal un
administrateur comme il peut le faire en matière de sauvegarde.

De plus, la compétence de principe du débiteur pour l’administration de


l’entreprise qui est affirmée en matière de sauvegarde n’est pas reprise en
matière de redressement judiciaire. Dès lors, l’ouverture du redressement
judiciaire va bien donner lieu à la désignation d’un ou de plusieurs
administrateurs judiciaires chargés d’assister le débiteur ou chargés d’assurer
seuls entièrement ou en partie seulement l’administration de l’entreprise. Dans
cette seconde hypothèse, le débiteur est dessaisi de toute ou partie de la gestion
de l’entreprise au profit de l’administrateur. Le tribunal conserve tout de même
de la possibilité de panacher la mission de l’administrateur en déterminant une
117
Droit des entreprises en difficulté

mission d’assistance pour certains actes et une mission de substitution pour


d’autres actes.

Comme auparavant, l’administrateur doit avec le concours du débiteur


élaborer le projet de plan.

Section 2 : La reconstitution de l’actif du débiteur ou les actions en nullité de la


période suspecte

La période qui s’ouvre et qui s’écoule entre la date de cessation des


paiements et celle du jugement d’ouverture du redressement est dite période
suspecte. On suppose en effet pendant cette période que le débiteur a pu
augmenter son insolvabilité en accomplissant des actes frauduleux avec le
concours de ses créanciers et ceci pour tenter de faire échapper certains biens à
la procédure.

Le principe d’égalité entre les créanciers justifie que certains actes soient
remis en cause. Avant la loi de 2005, étaient visés par le texte les actes faits par le
débiteur ; depuis cette loi sont désormais visés les actes intervenus depuis la
cessation des paiements. Désormais, la possibilité existe donc de faire annuler
des actes accomplis par des tiers et notamment par le conjoint du débiteur.

L’ordonnance de 2008 n’a apportée que très peu de changement à ses


nullités et a simplement reproduit les modifications apportées à la fiducie par
l’ordonnance d’aout 2008.

L632-1 C.COM prévoit 2 types de nullités :


Nullités de droit
Nullités facultative laissées à l’appréciation du tribunal qui pourra ou non
les constater

§1 : Les nullités de droit

L632-1 C.COM énumère un certain nombre d’acte qui seront nuls s’ils
sont intervenus depuis la date de la cessation des paiements :
Actes à titre gratuit : peuvent être remis en cause s’ils ont été accomplis
depuis la date de la cessation des paiements :

118
Droit des entreprises en difficulté

o les actes à titre gratuit translatifs de propriété mobilière ou


immobilière,
o toutes les libéralités car ont pour conséquence évidente d’amoindrir
l’actif de l’entreprise,
o les remises de dettes
Echappent à cette nullité les contrats d’assurance-vie.
La preuve de l’existence d’un tel acte peut être rapportée par tout moyen.
Contrat commutatif déséquilibré : contrat commutatif dans lequel les
obligations du débiteur excèdent notablement celles de l’autre partie.
Il peut s’agir d’une vente à un prix inférieur à la valeur réelle du bien ou
d’un partage déséquilibré à la suite d’un divorce.
Paiement des dettes non échues : nullité de tout paiement quel qu’en soit
le mode pour une dette non échue au jour du dit paiement. Est visé le
paiement avant terme car il relève l’intention du débiteur d’avantager un
créancier afin de faire échapper une dette à l’interdiction des paiements.
Paiement non communément admis dans les relations d’affaires :
paiement pour une dette échue mais qui serait fait autrement qu’en espèce,
qu’en virement ou qu’en effet de commerce. L’idée est que le mode de
paiement utilisé sera annulé dès lors qu’il ne constituera pas un mode de
paiement communément admis dans les relations d’affaires entre le
débiteur et le créancier.
Ex : dation en paiement par laquelle le créancier reçoit en paiement une
chose différente de celle contractuellement prévue ; remise d’une chose à
la place d’espèces ; résolution amiable entrainant la restitution d’un bien
qui avait été vendu au créancier.
C.cass (13 février 2007) se prononce sur l’hypothèse d’une compensation
intervenue entre le débiteur mis en redressement judiciaire et l’un de ses
créanciers, cette compensation c’était traduite par la vente de tous les
véhicules de la société débitrice en compensation des dettes contractées ;
estime que l’opération diminue de façon importante l’actif du débiteur en
vue de payer un seul de ses créanciers pour la totalité de sa créance avant
l’ouverture de la procédure.
Dépôts et consignations : nullité de tout dépôt et de toute consignation de
sommes effectuées à titre de garantie et ce à défaut d’une décision de
justice ayant acquis force de chose jugée. En effet, par l’effet de la
consignation ces sommes sont spécialement affectées au créancier qui est
dès lors titulaire sur elles d’un privilège. Cette consignation ne sera valable

119
Droit des entreprises en difficulté

que si elle est effectuée en exécution d’une décision de justice ayant acquis
force de chose jugée avant la cessation des paiements.
Mesures conservatoires : est frappée de nullité toute mesure conservatoire
à moins que l’inscription ou l’acte de saisie ne soit antérieur à la date de
cessation des paiements.
Sont visés les saisies conservatoires qui rendent indisponibles les biens
saisis mais y échappent les avis à tiers détenteur délivrés par le Trésor
public ainsi que les saisies-ventes qui ne sont pas des mesures
conservatoires.
Constitution de sureté en garantie des dettes antérieures : sont frappées de
nullité toute hypothèque conventionnelle ou judiciaire, tout nantissement
ou gage constitué sur les biens du débiteur pour des dettes antérieurement
contractées.
Est ici sanctionné est le décalage entre la naissance de la dette et la
constitution de la sureté qui avantage le créancier. La nécessité de
préserver l’égalité des créanciers passe par le fait d’éviter qu’un créancier
chirographaire obtienne une garantie sur l’actif de son débiteur.
Si toute fois une sureté garantie une dette antérieure et une dette
concomitante, elle n’est nulle que dans la garantie de la dette antérieure.
La date à prendre en considération est celle de la constitution de la sureté
et non celle de sa publication à la conservation des hypothèques.
Opérations sur les options de souscription ou d’achat d’actions : cas
introduit par réforme 26 juillet 2005, est nulle quand elle est intervenue
pendant la période suspecte toute autorisation, levée ou revente d’option
définie à L225-177 C.COM.
Sont en réalité visées les options de souscription et d’achat d’actions par les
salariés dans les SA qui constituent une forme de rémunération
complémentaire différée. L’idée est que le débiteur n’organise pas une
spéculation ou un profit sur les titres de sa société en difficulté.
Opérations de transfert de biens dans un patrimoine fiduciaire : la loi du
19 février 2007 a ajouté à la liste des actes dont L632-1 prévoit la nullité de
plein droit, tout transfert de biens ou de droits dans un patrimoine
fiduciaire. L’idée est alors d’éviter que la fiducie permette au débiteur,
personne morale, de transférer des biens ou des droits pendant la période
suspecte pour les faire échapper à ses créanciers. La loi de 2008 a assoupli
cette règle en prévoyant que le transfert intervenu à titre de garantie d’une
dette concomitamment contractée échappe à la nullité de plein droit. Cela
signifie que désormais, seule la fiducie intervenue en garantie d’une dette
120
Droit des entreprises en difficulté

antérieurement contractée (avant la date de cessation des paiements)


tombe sous le coup des nullités de la période suspecte. Par ailleurs, la loi
de 2008 a procédé à un deuxième ajout à L632-1 en prévoyant « qu’est nul
tout avenant à un contrat de fiducie affectant des droits ou des biens déjà
transférés dans un patrimoine fiduciaire à la garantie de dettes contractées
antérieurement à cet avenant ».

§2 : Les nullités facultatives

Certaines opérations échappent aux nullités de plein droit mais pourront


néanmoins être annulées par le tribunal si ceux qui ont traité avec le débiteur
avaient connaissance de la cessation des paiements.
Sont visés les actes à titre gratuit faits dans les 6 mois précédent la date de
cessation des paiements. Il en est également du paiement volontaire de dettes
échues, ainsi que les actes à titre onéreux accomplis depuis la cessation des
paiements. En l’absence de précision, on pense que peuvent être visés par cette
dernière hypothèse, le paiement des cotisations sociales ou encore la
constitution de baux préjudiciable à l’entreprise.
Traditionnellement la jurisprudence considérait que ces actes pouvaient
être annulés s’ils avaient causés un préjudice à l’entreprise. En réalité cette
exigence de préjudice n’est plus reprise par la cour de cassation qui rappelle
qu’en réalité le but principal de l’action en nullité est la reconstitution de l’actif
du débiteur.

La nullité facultative ne peut être prononcée que si le tiers contractant avait


connaissance de la cessation des paiements. La chambre commerciale a rappelé
cette exigence dans un arrêt rendu le 16 juin 2009. Cette connaissance de la
cessation des paiements doit exister au moment de la conclusion de l’acte, et
peut être prouvée par tout moyen, la charge de la preuve incombant au
mandataire. Cette preuve sera facilitée lorsque l’acte est intervenu dans un cadre
familiale ou dans le cadre de relations d’affaires.

Quant à l’action en nullité elle peut être intentée par l’administrateur, le


mandataire judiciaire voire le commissaire à l’exécution du plan. Aucun délai
n’est prévu par la loi, l’action semble donc possible tant que le mandataire
demeure en fonction. Pour la cour de cassation, l’action ne serait plus possible
après l’admission définitive des créances. Concrètement, la nullité si elle est
prononcée anéanti l’acte ce qui va permettre la reconstitution de l’actif du
débiteur. Les sommes obtenues peuvent être affectées à la continuation de
121
Droit des entreprises en difficulté

l’exploitation ou à l’apurement du passif à travers le plan. Quant au tiers, la


nullité lui est opposable, c.à.d. qu’il doit restituer le bien ou le paiement reçu. Si
la restitution est impossible en nature, la cour de cassation exige logiquement le
remboursement d’une somme d’argent équivalent à la valeur du bien.

Ces nullités de la période suspecte n’excluent pas la possibilité pour un


créancier d’exercer l’action paulienne si l’acte critiqué a été commis en dehors
de la période suspecte, ou s’il a été effectué depuis la cessation des paiements
mais qu’il n’entre pas dans l’énumération légale. Le créancier devra alors
prouver une fraude. Si l’action est exercée par un créancier tout seul, la nullité
de l’acte ne profitera qu’à lui. Si elle est exercée par le mandataire (qui
représente les créanciers), la nullité profitera à tous les créanciers.

122
Droit des entreprises en difficulté

Chapitre 3 : Le plan de redressement

Comme en matière de sauvegarde, le jugement d’ouverture ouvre une


période durant laquelle l’activité de l’entreprise est poursuivie, période qui va
permettre de préparée la solution aux difficultés rencontrées soumise au
tribunal. Le redressement judiciaire donne lieu à un plan de redressement par
continuation, arrêté par un jugement à l’issue de la période d’observation.

Si le débiteur est dans l’impossibilité d’assurer lui même le redressement


de l’entreprise, le tribunal peut alors ordonner la cession totale ou partielle de
l’entreprise.

Dans le régime issu de la loi de 1985, à l’issue de la période d’observation,


le tribunal arrêtait un plan de continuation ou un plan de cession qui impliquait
le sauvetage de l’entreprise par un tiers.
Lors de la réforme de 2005, le projet initial avait modifié cette vision en
considérant que le plan de cession devait apparaitre comme une technique
liquidative. La cession n’était donc plus envisageable ni dans la sauvegarde ni
dans le redressement judiciaire. Lors du vote de la loi, la possibilité de proposer
un plan de cession fut réintroduite uniquement pour le redressement judiciaire.
L631-13 C.com prévoit que dès l’ouverture de la procédure de
redressement, les tiers sont autorisés à soumettre à l’administrateur des offres
tendant au maintien de l’activité par une cession totale ou partielle de celle-ci.
Dès l’ouverture de la procédure, l’entreprise est donc à vendre et toute personne
intéressée peut faire une offre d’acquisition. Selon L631-22, ce sera le cas
lorsque le débiteur est dans l’impossibilité d’assurer lui même le redressement
de son entreprise. Les candidats à la reprise pourront émettre des offres de
cession qui seront examinées par le tribunal. Si le tribunal prononce la cession,
c’est l’administrateur qui reste en fonction pour passer les actes nécessaires à sa
réalisation. Ce la signifie que la cession de l’entreprise est possible dans le cadre
de la procédure de redressement sans qu’il soit nécessaire d’ouvrir une
procédure de liquidation.

Cette procédure liée à l’élaboration du plan obéit à plusieurs phases :

Section 1 : La préparation du plan

La loi de 2005 a créé, comme en matière de sauvegarde, deux régimes :

123
Droit des entreprises en difficulté

Un régime incluant les comités des créanciers réservé en principe aux


entreprises d’une certaine taille puisque le seuil est fixé à 150 salariés ou 20
millions d’€uros de chiffres d’affaires (alternatifs). Les comités de
créanciers interviennent essentiellement dans la phase de préparation du
plan durant laquelle l’administrateur va leur transmettre ses propositions et
va négocier avec eux sans qu’aucun minimum légal soit imposé.
Concomitamment, des propositions seront soumises aux autres créanciers,
et c’est l’ensemble de ces propositions qui formeront l’offre de plan du
redressement du débiteur.

Un régime de droit commun : offre de plan élaboré par l’administrateur et


fait l’objet d‘une consultation par le mandataire judiciaire auprès des
créanciers. L’administrateur judiciaire va établir un projet de plan aux vues
du bilan économique et sociale, voire environnemental, aux vues des
réponses faites par les créanciers. Ce projet de plan détermine les
perspectives de redressement, définit les modalités de règlement du passif
(cf. sauvegarde), il expose également les perspectives d’emploi et peut
recenser les offres d’acquisition portant sur une ou plusieurs activités de
l’entreprise qui ont été présentées par des tiers (L631-19).

Après différentes consultations, le projet de plan est soumis au tribunal qui


se prononcera après l’audition du débiteur et différents organes de la procédure.

Section 2 : L’arrêté du plan de redressement

A l’issue de l’élaboration du projet de plan, le tribunal peut retenir deux


solutions :

§1 : Le redressement

C’est l’objectif principal affiché par la loi.

Lorsque le plan de redressement a été préparé avec le concours des


comités de créanciers, et que les propositions du débiteur ont été votées par les
deux comités, le tribunal arrête le plan de redressement après s’être assuré,
comme en matière de sauvegarde, les intérêts de tous les créanciers sont
suffisamment protégés. Le projet voté par les Comités s’applique alors à tous les
membres de ces comités, même à ceux qui ne les ont pas votés. Les créanciers

124
Droit des entreprises en difficulté

qui ne sont pas membre d’un comité, le tribunal leur donne acte des délais et
des remises qu’ils ont consentis.

Lorsque le projet a été élaboré sans les CC, le tribunal arrête un plan de
redressement lorsqu’il existe « une possibilité sérieuse pour l’entreprise d’être
sauvegardée ».

Quel que soit le régime applicable, l’arrêté du plan met fin à la période
d’observation. Le débiteur poursuit alors sont activité avec l’obligation de
respecter tous les engagements qu’il a souscrit dans le cadre de l’élaboration du
plan et notamment l’obligation de régler le passif.

Mais à la différence de la sauvegarde, les coobligés ou les personnes ayant


consenti une sureté réelle ou ayant affecté un bien en garantie (cautionnement
réel) ne peuvent se prévaloir des dispositions du plan.

Dans son jugement, le tribunal désignera enfin un commissaire à


l’exécution du plan dont la mission de veiller à la bonne exécution du plan.

§2 : La cession totale ou partielle

Elle peut être ordonnée si le débiteur est dans l’impossibilité d’assurer lui
même le redressement.

A la demande de l’administrateur, le tribunal peut ordonner la cession


totale ou partielle de l’entreprise. L’offre de cession est retenue par le tribunal
lorsqu’elle permet dans les meilleures conditions d’assurer le plus durablement
l’emploi attaché à l’ensemble cédé, lorsqu’elle permet el paiement des
créanciers et lorsqu’elle présente les meilleures garanties d’exécution.

Cette cession peut être totale ou partielle c.à.d. ne porter que sur une ou
plusieurs branches d’activité susceptibles d’une exploitation autonome.

Le paiement du prix apparait comme l’engagement principal du


cessionnaire. Dès lors, le paiement du prix de cession doit être versé entre les
mains du mandataire judiciaire et il est interdit au cessionnaire de vendre les
actifs qu’il vient d’acquérir pour payer le prix de cession. Tant qu’il n’a pas
intégralement versé le prix de cession, le cessionnaire ne peut pas vendre ou

125
Droit des entreprises en difficulté

donner en location-gérance les biens corporels ou incorporels qu’il a acquis à


l’exception des stocks qui peuvent être vendus.

Section 3 : L’exécution du plan de redressement

2 hypothèses :
En cas d’adoption d’un plan de redressement, le débiteur doit exécuter le
plan, et notamment le règlement du passif, sous la surveillance du
commissaire à l’exécution du plan. Mais le tribunal reste juge de cette
bonne exécution du plan et il est notamment compétence pour statuer sur
les demande de modifications substantielles du plan, voire sur une
demande de résolution du plan en cas d’inexécution de ses engagements
par le débiteur.

Si el tribunal a décidé la cession de l’entreprise, celle-ci doit être


régularisée par la signature des actes de cession en exécution du jugement
prononcé. Il appartient à l’administrateur judiciaire de passer ces actes. Le
tribunal se prononcera favorablement sur cette cession si l’offre du
cessionnaire a comporté les indications prévues par L642-2 C.com. parmi
ces indications on trouve les prévisions d’activité et de financement, le prix
offert, les modalités de règlement ou encore le niveau et les perspectives
d’emploi justifiées par l’activité. Lorsque la cession est réalisée, les biens
visés entrent dans le patrimoine du cessionnaire sans que celui-ci n’ait à
supporter le passif du débiteur. Cette cession met un terme à la procédure
à l’égard du débiteur principal.

Section 4 : Les autres issues

S’il apparait au cours de la période d’observation que le débiteur dispose


de sommes suffisantes pour désintéresser les créanciers, le tribunal peut mettre
un terme à la procédure de redressement judiciaire (L631-16 C.com), nouveauté
de 2005 qui permet la clôture de la procédure sans qu’il soit nécessaire d’arrêter
un plan.
Le tribunal ne peut statuer qu’à la demande du débiteur et après avoir
entendu l’administrateur, le mandataire et les représentants du Comité
d’entreprise.

Si un plan de cession ne peut pas être arrêté, le tribunal prononcera la


liquidation judiciaire de l’entreprise et mettra fin à la période d’observation.
126
Droit des entreprises en difficulté

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