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Les Infortunes de l’imagination

Du fantasme

Des phantasms, peut-être ! Oui,


c’est bien cela, des phantasms !
Alphonse Allais
La vengeance de Magnum,
pantomimette pour le nouveau cirque

…et le microscope à la main


j’entre de plain-pied dans le royaume des rêves
Villiers de L’Isle Adam, Claire Lenoir

On croit pouvoir dater le moment –vers 1896-1897, disent les biographes et les
historiens– où le fantasme, ayant acquis dans la pensée de Freud « la consistance d’un
objet », a pu ambitionner de devenir son objet, « l’objet propre de la psychanalyse1.»
En allemand, toutefois, à la différence du français, cet objet nouveau n’a pas de
nom propre ; il est désigné par un mot ancien, et qui n’est jamais sorti de l’usage. Freud
le nomme Phantasie, qui est l’un des deux noms de l’imagination, l’autre étant
Einbildungskraft. De là, un léger flottement, une marge d’incertitude touchant l’identité
de l’objet (des objets ?) désigné(s) par ce nom chez Freud : objet ancien ? objet
nouveau ? De là l’embarras des traducteurs soucieux de rigueur terminologique. Les
éditeurs anglais des Œuvres complètes ont cru devoir distinguer, pour rendre la seule
Phantasie freudienne, entre phantasy et fantasy : le premier terme étant entendu dans le
sens technique de « phénomène intéressant le psychisme », le second devant être préféré
« dans certains cas appropriés »2. En France, les traducteurs de Gallimard ont choisi de
rendre le mot allemand tantôt par imagination ou les mots de même racine et tantôt par
fantasme, avant que ceux des PUF, par exemple, ne fassent d’autres choix. L’hésitation
autour du titre de la conférence de 1908 : « Der Dichter und das Phantasieren », dont il
existe au moins cinq traductions différentes3, dit assez que le travail d’élaboration
conceptuelle à quoi Freud s’est livré après avoir abandonné sa théorie de la séduction

1
Jean Laplanche, Jean-Bertrand Pontalis, Fantasme originaire. Fantasmes des origines. Origines du
fantasme. rééd. Paris, Hachette, « Les textes du XXe siècle », 1995, p. 38.
2
Sigmund Freud, Standard Edition, Londres, Hogarth Press, 1953, I, p. XXIV.
3
« Le poète et le fantasme » ; « La Création littéraire et le rêve éveillé », «Le poète et la création de
fantasmes » Fernand Cambon a traduit d’abord par « Le créateur littéraire et la fantaisie », puis dans l’édition
bilingue de la collection Folio (Sigmund Freud, L’Inquiétante étrangeté et autres textes, Paris, Gallimard, Folio,
2001), « Le créateur littéraire et l’activité imaginative ».
n’a pas rompu les adhérences du terme Phantasie ou de ses dérivés avec leurs
acceptions antérieures, et cela alors même que l’acception nouvelle contribuait
fortement à discréditer l’idée d’une « faculté » imaginante. Mais nous sommes
bien obligés, est-il écrit dans Au-delà du principe de plaisir, « de travailler avec les
termes scientifiques disponibles4.»
Un lecteur français cependant peut prêter attention à l’émergence (ou réémergence,
on va le voir) de fantasme –alors presque toujours orthographié phantasme– à la fin du
XIXe siècle, puis chez les traducteurs de Freud, bien avant que le mot ne se diffuse dans
l’ensemble du corps social.
Cette diffusion est récente. On peut être surpris de constater que le catalogue
Opale Plus de la BnF n’enregistre aucun titre contenant le mot fantasme avant 1964.
Début 2008, il en compte 135 (et 19 seulement sous la forme phantasme) parmi lesquels
beaucoup de critique littéraire, mais aussi Hard Fantasme dans la collection « Amateurs
à mater ». Ce qui indique suffisamment que le mot n’appartient plus au seul vocabulaire
technique et savant de la psychanalyse, et qu’il n’y a donc plus lieu d’en demander le
sens aux analystes seulement.

Phantômes
Le mot français vient du latin phantasma, lui-même emprunté au grec, et utilisé
notamment par les théologiens médiévaux pour désigner, à la suite d’Aristote et des
stoïciens, les images de l’imagination. Le terme s’introduit en français au XIIe ou XIIIe
siècle avec le sens d’illusion. Il désigne plus tard un fantôme : c’est en ce sens
qu’Antoine Arnauld, dit le Grand Arnauld, écrit puis publie à Cologne en 1686 un
Phantasme du Jansénisme, ou Justification des prétendus Jansénistes. (A la même
époque, Lully met en musique Atys, de Quinault, où paraît brièvement le personnage de
Phantase, fils du Sommeil, emblème des jeux bizarres de l’imagination. Plus tard,
Baudelaire, qui lui aussi a lu Ovide, cite « le bon Phantasus qui règne sur les songes5»).
Au début du XIXe siècle, phantasme est un terme médical ; il a le sens
d’hallucination6. En 1873 encore, Littré, dans le troisième volume de son Dictionnaire,
ne connaît que cette acception (et cette orthographe): « lésion du sens de la vue, ou
quelquefois des facultés mentales, dans laquelle les malades croient voir des objets
qu’ils n’ont réellement pas devant les yeux ». Ce sont donc bien des phantasmes au sens
de Littré qui assaillent saint Antoine dans sa Thébaïde. Mais le mot ne figure dans
aucune des trois versions du roman de Flaubert.
Dès ce moment toutefois, un fantasme est aussi, en un sens moins spécialisé, une
«production de l'imaginaire par laquelle le moi échappe à la réalité » (TLF). Est-ce ainsi
que l’entend Amiel en 1866, dans une page du Journal où il est question d’une leçon
donnée par lui, en sa qualité de professeur de philosophie à l’Académie de Genève, « sur
les Mythes, Légendes, Fables, Fantasmes et Rêves comme produits de l’imagination
créatrice7 »? C’est bien de cette manière en tout cas que Villiers prend le mot lorsqu’il
publie en 1886 « Les phantasmes de M. Redoux8», qui raconte la mésaventure d’un

4
Cité par Jean Starobinski, « Psychanalyse et connaissance littéraire », dans La Relation critique, Paris,
Gallimard, « Tel », 2001, p. 315.
5
Charles Baudelaire, Les Paradis artificiels, dans Charles Baudelaire, Œuvres complètes, Paris,
Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1976, I, p. 513. Phantasos est nommé dans les Métamorphoses
d’Ovide, XI, 642.
6
Pierre-Hubert Nysten, Dictionnaire de médecine, de chirurgie, de pharmacie, des sciences accessoires
et de l’art vétérinaire, Paris, Brosson, 1814.
7
Henri Frédéric Amiel, Journal intime de l’année 1866, éd. Léon Bopp, Paris, Gallimard, 1959, p. 266.
8
Auguste Villiers de l’Isle Adam, « Les phantasmes de M. Redoux » (1886) repris dans Histoires
insolites, voir Auguste Villiers de l’Isle Adam, Œuvres complètes, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la
bourgeois empoigné par le désir de s’allonger, chez Mme Tussaud, sous le couteau de la
guillotine qui a décapité Louis XVI. Même sens encore dans plusieurs romans de
Huysmans: Là-bas par exemple, ou En Route9, qui conservent quelque chose de la
coloration médicale du mot et des « fantaisies de la chair » qui tourmentaient saint
Antoine. A preuve ce croquis de Durtal en proie à ce qu’on aurait appelé autrefois l’Eros
mélancolique et que Huysmans désigne au moyen de ce mot de phantasme, à la fois très
ancien et tout neuf:

Il s'acagnardait des après-midi dans un fauteuil, s'essorait dans des songes ; c'était alors
surtout que des idées fixes se promenaient en lui ; elles finissaient par lui jouer derrière le rideau
baissé de ses yeux des féeries dont les actes ne variaient guère. Toujours des nudités lui dansaient
dans la cervelle, au chant des psaumes ; et il sortait de ces rêveries, haletant, énervé, capable, si un
prêtre s'était trouvé là, de se jeter en pleurant à ses pieds, de même qu'il se fût rué aux plus basses
ordures si une fille eût été près de lui, dans sa chambre. Chassons par le travail tous ces
phantasmes, se criait-il, mais travailler à quoi10?

On a remarqué la série des synonymes, ou quasi synonymes : « songes », « idées


fixes », « féeries », « rêveries », qui explicitent par avance pour le lecteur nécessiteux le
mot rare encore : « ces phantasmes », qu’on rencontre de loin en loin à même époque
sous la plume de Catulle Mendès, Retté, Gourmont, Ghil, Moréas, Mirbeau… Celui-ci,
en 1907, dans La 628 E8 l’écrit fantasme à trois reprises. Apollinaire, en 1910,
présentera L’Hérésiarque et Cie comme un livre de « phantasmes » ; il sera annoncé
comme tel dans la presse, qui éprouve le besoin à cette date d’équiper le mot d’une paire
de guillemets11.
J’ignore quelle connaissance Huysmans et les autres pouvaient avoir de ce que
Giorgio Agamben appelle la phantasmologie médiévale. Mais le mot chez Huysmans
(comme d’ailleurs chez Gourmont qui en 1890, dans Sixtine, l’accompagne d’une
référence à saint Thomas, et comme chez Mirbeau dont le narrateur est assailli de
« fantasmes » près de la cathédrale de Cologne, et comme sans doute chez le catholique
Villiers ou l’hérésiarque Apollinaire ou le sulfureux Jean Lorrain12) est manifestement
coloré de réminiscences chrétiennes et même liturgiques. C’est ce que suggèrent dans
En Route le prêtre et les psaumes ; ce que confirme l’entrée relativement tardive (vers
1890, dans le contexte de la marche vers la conversion) de ce mot dans le lexique de
Huysmans13 ; ce qu’indique enfin plus précisément encore dans le même livre ce
fragment d’une hymne de complies –également citée par Gourmont ou Adolphe Retté14:

Pléiade », 1986, II, p. 262-268. Le texte du conte suggère comme synonymes, songerie, trouble, lubie, dada, et
même le trop oublié turlutaine. On y trouve également le mot « phantasmomanie ». Voir aussi, publié la même
année, le poème de Charles Cros, « Phantasma » (dans Le Collier de Griffes), description d’une vision en rêve.
9
Ainsi: « Il eut l'idée de rentrer chez lui, puis il se rendit compte qu'il ne travaillerait pas, qu'il
retomberait, tout seul, dans ses phantasmes » (Joris Karl Huysmans, Là-bas, dans Œuvres complètes, Genève,
Slatkine reprints, 1972, vol. XII, p. 155.)
10
Joris Karl Huysmans, En Route, Paris, Gallimard, « Folio », p. 79-80. Je souligne des noms ou
locutions équivalents.
11
Voir Marcel Adéma, Pierre Caizergues, Michel Decaudin, Victor Martin-Schmets, « Le Dossier de
presse de L'Hérésiarque et Cie » dans Que Vlo-Ve? Série 1 No 8 p. 3-22.
12
Dans Jean Lorrain, Fards et poisons, Ollendorf, 1903, p. 96 : « La visite à ces fantasmes de l'art
s'aggravait de musique religieuse et d'accompagnement d'orgues invisibles; des odeurs d'encens flottaient
dans.les pièces […] »
13
Jean-Marie Seillan a signalé ce point dans sa thèse, L'Empire du fantasme. Essai sur l'imaginaire
huysmansien, Université de Bordeaux III, 1994.
14
Adolphe Retté, Au pays des lys noirs, Téqui, 1913, p. 77, « Dès que j'eus entendu ce blasphème
gnostique, je fis, sans m'en cacher le moins du monde, un large signe de croix et je prononçai mentalement la
conjuration : In nomine Patris et Filï et Spiritus Sancti, procul recedant phantasmata. »
Procul recedant somnia
Et noctium phantasmata
Hostemque nostrum comprime
Ne polluantur corpora15

Dès ce moment, par conséquent, dans les années du symbolisme, en amont de


toute systématisation, le lien est bel et bien noué, même si c’est encore lâchement, entre
le rêve (le mauvais rêve), l’auto-érotisme (ne polluantur corpora) et le phantasme, perçu
comme suite obsédante d’images, réitération morbide.
En Route a été publié en 1895. C’est exactement le moment où Freud s’apprête à
entreprendre à Vienne l’élaboration de son concept de Phantasie.

Traductions
Les traducteurs de Freud avaient-ils lu Huysmans et les autres? Ont-ils été guidés
par le voisinage de fantastique et de fantasmatique (« qui tient du fantôme », Littré) ou
par celui de fantasmagorie ? Mais peut-être savaient-ils également l’anglais ? Le mot
phantasm y est d’usage courant. Il y a le sens de fantôme, ou d’image mentale
fallacieuse. On le trouve par exemple dans les contes de Poe, dans « Le Masque de la
mort rouge », « Le Chat noir », « La Chute de la maison Usher »… Baudelaire (qui
ignore le fantasme bien qu’il connaisse fantasmagorie, et même fantasmatique, et même
le fantasmatique, j’y reviendrai) le traduit de manières très diverses : fantôme, image,
mais aussi le fantastique et même à l’occasion le visionnaire16.
On peut se souvenir encore, et sans quitter le domaine anglais, que Frederic Myers
(1843-1901), l’un des fondateurs de la Society for Psychical Research, a publié en 1886
un ouvrage intitulé Phantasms of the living17. Le livre, souvent cité, a été traduit
(partiellement) en français dès 1891, puis réimprimé en 1892 et 1899 pour répondre à la
demande, sous le titre Les Hallucinations télépathiques. Ces éditions comportent une
préface de Charles Richet (que nous avons déjà croisé dans un chapitre précédent)
prestigieux professeur à la faculté de médecine de Paris, directeur de la Revue
scientifique, co-directeur du Journal de Physiologie et de Pathologie Générale, futur
prix Nobel (en 1913) pour ses travaux sur l’anaphylaxie (nous dirions l’allergie) et
« métapsychiste » passionné comme tant d’autres savants de l’époque par des
phénomènes «désignés autrefois comme occultes et qui appartiennent à la science
spirite18.» Il n’est pas superflu de se souvenir de l’usage que Breton a fait de Myers, et
aussi de Richet19. Trois ouvrages de Richet, et deux de Myers figurent dans sa
bibliothèque. L’un est celui que j’ai mentionné. L’autre est : La Personnalité humaine,

15
Joris Karl Huysmans, En Route, op. cit., p. 310. Dante fait allusion à cette hymne (attribuée à Saint
Ambroise) dans le chant VIII du Purgatoire ; Pascal Quignard, qui la cite à son tour dans le XXVIe des Petits
traités, traduit , « Mets en fuite les vains songes, les fantasmes de la nuit, et contiens notre ennemi, afin que nos
corps ne soient pas pollués »
16
« Our books […] were in strict keeping with this character of phantasm », avait écrit Poe; Baudelaire
traduit : « Nos livres […] étaient en accord parfait avec ce caractère de visionnaire » (« La Chute de la maison
Usher », dans Edgar Poe, Nouvelles histoires extraordinaires, Le Livre de Poche, 1978, p. 122).
17
Edmund Gurney, Frederic W. H. Myers and Frank Podmore, Phantasms of the living, London, Rooms
of the Society for psychical research, Trübner and co., 1886.
18
Charles Richet cite par Eugène Osty sur http//www.metapsychique.org/IMG/pdf/charles_richet.pdf
19
Voir notamment Jean Starobinski, « Freud, Breton, Myers », dans La Relation critique, Paris,
Gallimard, »Tel », 2001, p. 398.
Sa survivance, ses manifestations supranormales20, traduit et adapté par le docteur
Samuel Jankélévitch, qu’on connaît aujourd’hui pour ses traductions de Freud.
Etrange carrefour, étrange échangeur, étrange chimère, décidément que ce
phantasme, passé en un siècle ou un demi-siècle du registre savant au lexique de tout un
chacun, signifiant à cheval sur la plupart des langues d’Europe, traversé de signifiés
fantômes, et fantôme lui-même (ou comme on l’a écrit : phantôme) revenant en français
après une longue latence, à la manière des Pathosformeln d’Aby Warburg, pour hanter
les confins improbables de la philosophie, de la théologie, de la psychanalyse, des
« ghost tales », du spiritisme et de la pornographie...

Dans le champ de la psychanalyse, le mot ne s’est pas imposé d’emblée.


C’est le Dr Jankélévitch justement qui, le premier ou l’un des premiers, semble-t-
il, utilise phantasme dans sa traduction (autorisée et revue par Freud) de La
Psychopathologie de la vie quotidienne, parue chez Payot en 1922. Mais ce choix à cette
date n’est pas exclusif ni systématique. Jankélévitch, et Yves Lelay dans les mêmes
années, emploient également fantaisie, rêverie, etc. A l’époque des Vases
communicants, le groupe surréaliste qui aime à se réclamer de Freud parle de
« fantaisies diurnes » pour désigner ce que nous appelons fantasmes21. Plus tard encore,
Daniel Lagache a plaidé en faveur de fantaisie, qui calque le mot allemand et qui au
cours du XIXe siècle a été employé dans une acception très proche de celle de notre
fantasme. Ainsi Hugo, dans Notre Dame de Paris:

[Claude] tourna le dos pour ne plus voir, et s'éloigna à grands pas de l'effroyable vision […].
Quand il rentra dans les rues, les passants qui se coudoyaient aux lueurs des devantures de
boutiques lui faisaient l'effet d'une éternelle allée et venue de spectres autour de lui. Il avait des
fracas étranges dans l'oreille. Des fantaisies extraordinaires lui troublaient l'esprit.22

ou Flaubert, dans la Tentation :

La Voix : Le long de ses jambes sa robe remonte, elle la lève des deux doigts, comme les
courtisanes des carrefours.
Antoine : Oh ! Il me vient aux entrailles des fantaisies monstrueuses, feux de l'enfer plus
terribles que la réalité.
La Voix : C'est la réalité. Oui, approche, essaie !
Antoine : Non. Malheur à qui touche à sa tentation, il y laisse les mains... de par le seigneur,
va-t-en, vision de l'enfer !
à ces mots la vierge disparaît.
Antoine : Ah ! J'en étais sûr ! Le nom du seigneur le met en fuite...23

Laplanche et Pontalis notaient dans leur Vocabulaire que la conscience


linguistique contemporaine, qui attache à la fantaisie des nuances de caprice, d’absence

20
Frederic W. H. Myers, La Personnalité humaine, Sa survivance, ses manifestations supranormales,
Paris, Félix Alcan, 1905.
21
Voir par exemple le « rapport » du 12 mai 1931, cité dans André Breton, Œuvres complètes, Paris,
Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », II, p. 1355.
22
Victor Hugo, Notre Dame de Paris, Paris Garnier, 1961, p. 411. Sur l’histoire du mot fantaisie, voir la
synthèse de Bernard Vouilloux, « Eléments pour l’archéologie d’une notion », dans Jean-Louis Cabanès, Jean-
Pierre Saidah : La Fantaisie post-romantique, Toulouse, Presses Universitaires du Mirail, 2003, pp. 19 et suiv.
23
Gustave Flaubert, La Tentation de St Antoine, version de 1849, Paris, éd. Conard, 1910, p. 216. Voir
aussi dans la version de 1856 « la fantaisie de ta chair », expression mise dans la bouche de la Luxure, et qui
répond bien au sens aujourd’hui courant de « fantasme ».
de sérieux, etc. empêchait de retenir ce mot. Dans les deux exemples ci-dessus, des
épithètes emphatiques: extraordinaires, monstrueux… ont été employées pour écarter et
corriger ces valeurs. (Laplanche, toutefois, semble avoir changé d’avis sur ce point24.)
D’autres termes comparables (la chimère; la divagation chère à Mallarmé…)
devaient être écartés pour des raisons semblables. La psychanalyse entend être une
science, une « théorie générale du fantasme25.» Mais peut-il y avoir une science des
fantaisies ? une « théorie générale des mirages » (comme le suggère Gérard Macé, qui
pour sa part rangerait volontiers toute la théorie littéraire sous cet intitulé26) ? C’est
uniquement lorsque certains voudront ouvrir « le carcan de pseudo-scientificité » qui,
disent-ils, s’est refermé sur la psychanalyse que le mot Chimères pourra servir de titre à
une revue faite pour accueillir les travaux se réclamant de la schizoanalyse, « science
des chimères27.»

That’s not all, folks…

Ce texte est extrait de : Claude-Pierre Pérez : Les Infortunes de l’imagination,


aventures et avatars d’un personnage conceptuel de Baudelaire aux postmodernes,
« L’imaginaire du texte », Paris, Presses Universitaires de Vincennes, 2010

24
Il est le directeur scientifique de la traduction des Œuvres complètes de Freud en cours de parution aux
PUF. Or, dans le volume consacré à la Traumdeutung, l’index comporte plus de 30 références à fantaisie, mais
ignore entièrement imagination et presque entièrement fantasme…
25
Giorgio Agamben, Stanze. Parole et fantasme dans la culture occidentale, Paris, Rivages, 1998, p. 54.
26
Gérard Macé, « Fata morgana », dans Colportages, I, Le Promeneur, 1998, p. 142.
27
Revue fondée en 1987 par Gilles Deleuze et Félix Guattari. La citation est extraite de l’éditorial de
Guattari, paru dans le numéro 1.

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