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Principes gouvernant les successions et les libéralités

Droit civil et droit fiscal


- droit fiscal : renvoi ; bibliographie élémentaire : F. Douet, Précis de droit
fiscal de la famille, 5e éd. Litec.

Droit positif
- le Code civil et les réformes récentes du droit des successions et des
libéralités : nécessités économiques (évolution des patrimoines), sociologiques
(évolution des rapports de famille et de la vie en couple : concubinage et
recomposition familiale) et démographiques (diminution de la natalité et
augmentation de l’espérance de vie) : C. civ., art. 720 et s. ;

- les objectifs généraux des lois du 3 décembre 2001 et 23 juin 2006 :


* 2001 = l’amélioration de la vocation successorale du conjoint survivant et
l’égalisation complète des filiations (conséquences pour la pratique de la
présence d’un enfant adultérin : risques de remises en cause) ;
* 2006 = précisions sur la vocation successorale du conjoint, faveurs pour
l’anticipation et libéralisation de la succession ;
* adde : L. 26 mai 2004 réformatrice du divorce (infra : libéralités
matrimoniales) ;

- l’entrée en vigueur de ces réformes :


* L. 3 déc. 2001 : elle est applicable en toutes ses dispositions aux successions
ouvertes depuis le 1er juillet 2002 et elle est en outre immédiatement applicable
à toutes les successions non partagées pour ce qui concerne la suppression du
statut différencié des enfants adultérins et pour le droit temporaire au logement
reconnu au conjoint survivant.
* Loi du 23 juin 2006 : son entrée en vigueur a été fixée au 1er janvier 2007
a) le principe est celui de son application aux successions ouvertes à compter du
1er janvier 2007 (L. art. 47, II, al. 3) => a contrario, elle n’est pas
immédiatement applicable aux successions antérieurement ouvertes et non encore
définitivement partagées lors de son entrée en vigueur.
- par exception, les nouvelles règles relatives à l’indivision et au partage sont
applicables à compter du 1er janvier 2007 aux indivisions existantes et aux
successions ouvertes mais non encore partagées à cette date (L., art. 47, II, al.
2). Et la loi comporte en outre des dispositions interprétatives qui sont
immédiatement applicables aux instances en cours (V. infra).
b) Le texte précise que l’application de la loi aux successions ouvertes à compter
de son entrée en vigueur (le 1er janvier 2007), s’impose « y compris si des
libéralités ont été consenties par le défunt antérieurement à celle-ci » (L. art
47, II, al. 3). Cela signifie que les règles nouvelles de la réserve, du rapport,
ou de l’imputation sur les droits du conjoint (voire de la révocation pour
survenance d’enfant) s’appliqueront dans les successions ouvertes à compter du 1er
janvier 2007, quelle que soit la date des libéralités concernées.

L’avant-projet du décret qui doit suivre est consultable sur le site internet du
ministère de la Justice.

Bibliographie
- les ouvrages généraux ;
- les revues ;
- les commentaires législatifs :
* A. Delfosse et J-F Peniguel, La réforme des successions et des libéralités,
Litec.
* N° spécial au Recueil Dalloz,

I.- Les principes gouvernant la dévolution des successions


=> on laisse de côté les régimes particuliers et notamment le cas de la propriété
littéraire et artistique : C. pr. intell., art. L. 121-2 et L. 123-1 et s.

=> on laisse aussi de côté les techniques qui permettent d’avantager sans
gratifier (il n’y a pas transmission à titre gratuit et donc en principe pas
d’application des droits de mutation à titre gratuit) :
* les avantages matrimoniaux en présence d’enfants qui sont tous communs aux deux
époux (C. civ., art. 1527 : V. les principes du droit des régimes matrimoniaux) ;
* la stipulation pour autrui (C. civ., art. 1121) : le bénéficiaire acquiert un
droit direct contre le promettant qui est censé n’avoir jamais transité par le
patrimoine du stipulant. Ex. classique l’assurance sur la vie en cas de décès :
plutôt que de disposer à cause de mort au profit d'un tiers ou d'un successible,
le de cujus souscrit une assurance garantissant le risque de son décès en
désignant comme bénéficiaire, celui qu'il veut gratifier. A son décès, celui-ci
recueille la rente ou le capital garanti des mains de l'assureur et ce capital ou
cette rente sont censés n'avoir jamais figuré dans le patrimoine du de cujus (le
bénéficiaire de l'assurance a un droit direct contre l'assureur qui a qualité de
promettant, le souscripteur étant le stipulant.
Traditionnellement, il en résultait que le bénéfice de l’assurance n’était pas
taxable et sur le terrain civil n’était pas rapportable à la succession ni
réductible pour atteinte à la réserve (cf. art. L. 132-13 c. ass.) ; quant aux
primes, il a été prévu qu’elles ne sont pas non plus réductibles ou rapportables à
moins qu'elles ne soient manifestement exagérées eu égard à la fortune du
souscripteur. Mais l’assurance ayant tendance à drainer des sommes considérables
qui échappent aux règles successorales, une réaction s’est fait jour. D’une part,
la fiscalité de l’assurance sur la vie a été organisée dans un sens de plus en
plus sévère. D’autre part, la jurisprudence s’était orientée vers la
requalification en libéralités de certaines assurances sur la vie (les assurances
mixtes ou assurances en cas de décès contre-assurées en cas de vie) qui sont moins
des opérations de prévoyance que des opérations de capitalisation. Mais par une
décision éminemment contestable, la Cour de cassation a (pour de très mauvaises
raisons) mis un frein à cette jurisprudence : Cass. ch. mixte, 23 nov. 2004, Bull.
civ. CM, n° 4, RTD civ. 2005.435, obs. M. Grimaldi. Et il en résulte que
l’assurance-vie est devenue une machine à contourner le droit des successions
(infra).

A.- La dévolution légale des successions


=> je ne reviens pas sur les conditions générales de successibilité : 1° Avoir la
personnalité au jour de l’ouverture de la succession (cas particulier de l’enfant
conçu : art. 725 et des codécédés : art. 725-1) ; 2° Ne pas être frappé
d’indignité (art. 726 s.).

1° Le principe de la dévolution par ordres et par degrés (art. 734 et 744)

Dans son principe, la dévolution légale au sein de la parenté repose sur une
double considération :
1° La première considération est la considération de l'ordre auquel appartient le
successible. La loi classe en effet les membres de la famille du de cujus en
plusieurs ordres successifs (art. 734). Le classement est hiérarchique, en ce sens
que les ressortissants du premier ordre ont vocation à succéder par priorité à
tous autres ; à défaut de successibles appartenant à cet ordre, ce sont les
successibles du deuxième ordre qui ont vocation à hériter, et ainsi de suite.

2° Lorsqu'un ordre est composé de plusieurs successibles, intervient la deuxième


considération : la considération du degré de parenté avec le de cujus (art. 744).
Les successibles au meilleur degré de parenté, ceux qui sont les plus proches
parents du de cujus, écartent en principe les autres ; si plusieurs successibles
du même ordre sont du même degré, ils viennent normalement à égalité (principe de
l'égalité successorale). Cette considération du degré est donc essentielle, mais
elle est seulement subsidiaire par rapport à la considération de l'ordre qui est
prioritaire. Il en résulte qu'un héritier au degré éloigné (ex. le petit-fils du
de cujus, héritier au deuxième degré) peut l'emporter sur un héritier de moindre
degré (ex. le père du de cujus, héritier au premier degré) s'il appartient à un
ordre préférable. Et c'est pourquoi, il convient d'accueillir avec prudence l'idée
que la dévolution légale est fonction de la proximité du lien de parenté.

a) Le classement hiérarchique des successibles


i. L’ordre des descendants
Les descendants du de cujus forment le premier ordre des successibles. Ils priment
donc tous les autres successibles qui appartiennent à des ordres subalternes. A
l’intérieur de l’ordre, les plus proches excluent en principe les plus éloignés et
les descendants de même degré viennent normalement à égalité à la succession
(règle du degré). Mais, ainsi qu’on le verra l’institution de la représentation
tempère ces deux solutions (infra).

Il n’y a naturellement pas de distinction à faire entre les descendants selon leur
sexe ou leur date de naissance (art. 735). A la suite de la loi du 3 janvier 1972
et de celle du 3 décembre 2001, il n’y a plus à distinguer non plus selon leur
filiation (art. 733) : désormais, l’enfant adultérin a, en règle générale, les
mêmes droits qu’un « enfant légitime » et, en tous cas, qu’un « enfant naturel »
simple. Quant à l'enfant adopté, pour lequel l’article 733 renvoie au titre de
l’adoption, il faut distinguer : a) l'adoption plénière (sauf le cas de l'adoption
de l'enfant du conjoint) confère à l'enfant une filiation qui se substitue à sa
filiation d'origine (cf. art. 356) : par conséquent, l’adopté acquiert dans la
famille de l'adoptant les mêmes droits, spécialement successoraux, qu'un enfant
par le sang (art. 358) ; corrélativement, il perd toute vocation successorale dans
sa famille par le sang, puisqu'il cesse d'appartenir à celle-ci (cf. art. 356) ;
b) l'adoption simple, en revanche, est seulement adjonctive : l’adopté simple
conserve donc sa vocation successorale dans sa famille d’origine (art. 364, al.
1er) ; mais il acquiert de plus dans la famille de l’adoptant les droits
successoraux d'un enfant par le sang, à ceci près toutefois qu'il n'a pas la
qualité d'héritier réservataire à l'égard des ascendants de l'adoptant (art. 368).

RQ : en droit fiscal, il est tenu compte de l’adoption plénière ; en revanche,


l’adoption simple est normalement ignorée pour le calcul des droits de succession,
mais il y a de nombreuses exceptions à ce principe (cf. CGI, art. 786).
ii.- L’ordre des ascendants et collatéraux privilégiés
Les ascendants et les collatéraux composent deux ordres de successibles
(respectivement le 3e et le 4e ordre). On s'attendrait donc à ce que ceux dont
l'ordre est préférable (les ascendants) empêchent les autres (les collatéraux) de
venir à la succession et c'est effectivement ce qui se passe en règle générale
(infra). Mais certains collatéraux à raison de la proximité de leur lien de
parenté avec le de cujus bénéficient d'une promotion dans le classement des
successibles. Il s'agit des collatéraux au deuxième degré c'est-à-dire des frères
et sœurs du de cujus ainsi que leurs descendants qui, en l'absence de descendants,
priment tous les successibles à l'exception toutefois des ascendants au premier
degré (les père et mère du de cujus) avec lesquels ils doivent, le cas échéant,
partager la succession (art. 734, 2°). Pour expliquer cette situation, il est
classique de dire que le second ordre est composite ou mixte et regroupe ceux que
l'on a désormais coutume de qualifier d'ascendants privilégiés (les père et mère)
et de collatéraux privilégiés (les frères et sœurs et leurs descendants qu'ils
viennent à la succession de leur propre chef ou par représentation : infra) par
opposition aux ascendants et collatéraux ordinaires (c'est-à-dire de degré
subalterne).
Pour régler le concours entre collatéraux privilégiés et ascendants privilégiés,
le Code ne s'en tient évidemment pas à la règle de la dévolution selon le degré de
parenté (car, à suivre la règle du degré les ascendants privilégiés excluraient
toujours les collatéraux privilégiés). Il fixe la vocation successorale de chaque
parent à une quotité invariable (1/4), le reste étant partagé (par têtes ou
souches : infra : représentation) entre les collatéraux privilégiés. Le tout, sous
réserve d’un droit de retour dont on verra qu’il a été reconnu par la loi du 23
juin 2006 aux ascendants privilégiés en compensation de la disparition de leur
réserve héréditaire (infra).

Si donc le de cujus laisse à sa succession, ses père et mère et un ou plusieurs


frères ou sœurs, les premiers se partageront une moitié de la succession (soit 1/4
chacun), l'autre ou les autres recueilleront la seconde moitié : art. 738, al.
1er. Si, en revanche, le de cujus ne laisse qu'un ascendant privilégié, celui-ci
recueillera un 1/4 de la succession, le ou les collatéraux privilégiés les 3/4
restants (ils recueillent le quart qui serait allé au parent décédé s'il avait
survécu au de cujus) : art. 738, al. 2. Si maintenant les père et mère sont tous
deux prédécédés, le ou les collatéraux auront droit à toute la succession : art.
737.

Que décider enfin dans le cas où le de cujus est mort en laissant son père et sa
mère ou bien l’un d’eux seulement, mais pas de collatéraux privilégiés ? La
considération de l’ordre pourrait paraître devoir conduire à leur attribuer
l’entière succession. Mais ce n’est pas la solution que retient classiquement le
droit français. En effet, la logique de l’ordre des ascendants et des collatéraux
privilégiés est, ainsi qu’il a été dit, d'assurer la promotion des collatéraux
privilégiés dans le classement des successibles. Dès lors, cet ordre n'a plus de
raison d'être si le de cujus meurt sans frère ou sœur (ou descendants de ceux-ci)
: aussi bien (quoi que puisse paraître signifier les articles 734 et 739) les
ascendants privilégiés sont traités dans ce cas comme de simples ascendants
ordinaires (cf. infra : on applique le principe de la fente successorale) ; c’est
ce que vient de rappeler (certains avaient douté de la permanence de la solution)
la loi du 23 juin 2006, par une disposition déclarée interprétative (et donc
immédiatement applicable) : art. 738-1 :

C / L’ordre des ascendants ordinaires


A défaut de représentant dans les ordres précédents, viennent à la succession les
ascendants ordinaires qui forment donc le troisième ordre successif (art. 739) :

La loi indique que cet ordre se compose des ascendants en ligne directe autres que
les père et mère, c’est-à-dire des ascendants à partir du deuxième degré (grands-
pères, grands-mères, autres aïeuls : cf. art. 734, 3° et 739). En vérité, on doit
leur assimiler les ascendants au premier degré lorsque le de cujus n’a pas laissé
à sa survivance de collatéraux privilégié (cf. supra).

A l'intérieur de cet ordre, s'applique la règle de la dévolution selon le degré de


parenté : les parents excluent les grands-parents et ainsi de suite, sans qu'il
n'y ait jamais matière à représentation (art. 752-1). Mais, ainsi que le texte le
laisse entendre, dans l'ordre des ascendants la priorité du degré ne s'applique en
réalité qu'à l'intérieur de chaque branche (paternelle et maternelle), à raison de
l'institution de la fente successorale (art. 747 et 748 ; infra).
D / L’ordre des collatéraux ordinaires
Les collatéraux ordinaires forment le quatrième ordre successif : ils n'héritent
qu'à défaut de représentants dans les ordres précédents (art. 734, 4° et 740).
Comme dans l’ordre des ascendants ordinaire, la règle de la dévolution en fonction
du degré de parenté ne fonctionne pleinement qu’au sein de chaque branche, car
joue à nouveau la fente (cf. art. 749 et 750 infra). Par ailleurs, la
successibilité est, dans cet ordre, limitée au sixième degré (cousins issus de
germains) : art. 745.

b) Les institutions correctrices

Ainsi qu’on l’a déjà laissé entendre, le principe sur lequel est fondé notre
système légal de dévolution est tempéré par deux techniques égalitaires qui
consistent à corriger dans certaines situations, les conséquences qui devraient
normalement s'attacher à la considération de l'ordre et du degré de parenté. Ces
deux techniques qui sont désormais toujours exclusives l’une de l’autre (elles ne
jouent plus jamais concomitamment) consistent dans la représentation et la fente
successorales (cf. art. 744, al. 3).

- la représentation successorale :

Cette technique que le code civil qualifie de fiction juridique (art. 751) permet
à un successible d'hériter en lieu et place de son auteur prédécédé ou indigne.
Initialement, elle visait à corriger l’aléa de l’ordre des décès ; aujourd’hui,
elle est instrumentalisée pour permettre en outre une transmission au-delà de la
première génération (c’est une manifestation de la faveur pour l’anticipation
successorale).

i. Domaine de la représentation
La représentation ne concerne que la succession ab intestat (en matière de legs,
c’est la substitution vulgaire qui remplir son office) et elle ne joue que dans
certaines configurations successorales :
1° Elle joue en premier lieu dans les successions descendantes en ligne directe.
Elle fonctionne donc dans l'ordre des descendants au profit des petits-enfants et
de leurs descendants (art. 752) :

DC
F1 F2 †

PF [1] : grâce à la représentation PF peut se hisser au


premier degré : ainsi un enfant du défunt (F1) est en concours avec le descendant
(PF) d’un autre enfant (F2) du défunt.

DC

F1 † F2 † F3 †

PF 1 FF2 PF3 PF4 †

APF [2] : tous les enfants


du de cujus étant prédécédés, du fait de la représentation, leurs descendants
viennent à la succession en degrés inégaux.

En revanche, si le de cujus avait un seul enfant prédécédé qui a laissé plusieurs


enfants (ils sont tous en vie), il n'y a normalement pas matière à représentation
(il faut réserver le cas de la renonciation de l’enfant : infra) : les petits-
enfants viennent à la succession de leur chef ; autrement dit, la dévolution se
règle par tête, ce qui peut être important, notamment pour la question de savoir
si les héritiers doivent rapporter à la succession les libéralités faites à leur
auteur (infra) :

DC

F1 † F2 †

PF1 PF2 DC

PF1 PF2

2° La représentation joue aussi dans l'ordre des ascendants et collatéraux


privilégiés, en faveur des enfants et descendants des frères et sœurs du de cujus
(art. 752-2)

Parents †

2 1 2

Frère DC Sœur †
3

Neveu
[1] : le neveu du de cujus vient à sa succession en concours avec son oncle.
Parents

2 1 2

Frère † DC Sœur †
3 3 3

Neveu 1 Neveu 2 Neveu 3


[2] : tous les frères et sœurs du de cujus étant prédécédé, sa succession passe à
leurs descendants (ici) en degrés égaux.

Dans les autres successions collatérales (ordinaires) et dans les successions en


ligne directe ascendante, la représentation est au contraire exclue : c’est la
fente qui joue alors éventuellement (infra).

ii.- Conditions de la représentation


a) Il faut que le successible représenté ne vienne pas personnellement à la
succession. Initialement, dans la logique originelle de l’institution, il fallait
que le représenté soit prédécédé (car il s’agissait de corriger l’ordre accidentel
des décès) : on ne pouvait donc représenter un successible vivant mais indigne ;
mais cette solution tournant à l’injustice (cf. supra) fut remise en cause par la
loi du 3 décembre 2001 (art. 729-1), en même temps que fut admise la
représentation du codécédé (art. 725-1).
Ex. 1 DC

F Indigne († ou non)

PF
Aujourd’hui comme hier, PF venant à la succession de DC de son propre chef, est
habile à succéder. Ex. 2 DC

F1 F2 Indigne †

PF
Avant la loi du 3 déc. 2001, PF qui a besoin du secours de la représentation pour
succéder était exclu par l’indignité de son père ; aujourd’hui il hérite (dans
notre ex. pour moitié).

P †

F1 F2 †

PF 1° Si F2 décède après P, PF peut venir à la succession de P en le


représentant, concurremment à F1 ;
2° Dans le cas où P et F2 sont décédés en même temps, si l’on s’en tenait à la
liquidation séparée des successions, seul F1 pourrait venir à la succession de P ;

3° C’est pourquoi la réserve de l’art. 725-1, al. 3 a été prévue.

Allant beaucoup plus loin, la loi du 23 juin 2006 a admis que le renonçant puisse
également être représenté, ce qu’indique maladroitement l’article 754, al. 1er.
Sur le terrain des principes, la solution tourne à l’absurde : le représentant
venant à la succession aux lieu et place du représenté, comment peut-il succéder
si le représenté à renoncer à la succession ? Mais, la fin a justifié les moyens :
le but poursuivi a été de permettre une renonciation per favorem : le père renonce
au profit de ses propres enfants de sorte que la succession leur advienne
directement, sans qu’il soit besoin pour cela d’une seconde transmission soumise
aux droits de mutation…

b) Il faut que le représentant soit un descendant du représenté. A ce propos, deux


précisions :
1° le représentant n'est pas nécessairement l'enfant du représenté (ce peut-être
un descendant plus éloigné : petit-fils, etc.) : la représentation a lieu à
l'infini, dès lors que les conditions sont remplies à l'égard de chaque représenté
(la représentation ne peut fonctionner per saltum et omissio medio) ;
2° Il n'est pas nécessaire non plus que le représentant ait vocation à succéder au
représenté : peu importe qu'il ait renoncé à sa succession (art. 754, al. 4) ou
bien soit indigne de lui succéder.

c) Il faut aussi que le représentant ait personnellement qualité pour succéder au


de cujus : il ne doit donc pas être frappé d'indignité à son égard. En revanche,
ainsi qu’on l’a dit, depuis la loi du 3 décembre 2001, le fait que le représenté
soit indigne de succéder au de cujus n’empêche plus son descendant de le
représenter utilement à la succession, peu important d’ailleurs qu’il soit
prédécédé ou en vie (supra).
3° Effets de la représentation
L'héritier qui vient à la succession par représentation est placé dans la
situation qui serait celle de son auteur si celui-ci n'était pas prédécédé,
indigne ou renonçant. La représentation corrige ainsi la dévolution successorale
par degrés pour assurer l'égalité des "souches" (art. 753 ; la souche désignant le
successible que représentent dans la succession le ou les personnes qui descendent
de lui) :
DC

F1 † F2 F3 † (ou indigne)

PF1 PF2 PF3 PF4 F1 et F3 constituent deux


souches : PF1, PF3 et PF4 viendront à la succession concurremment à F2. PF2 en
revanche est primé par son auteur (F2). A moins que celui-ci ne renonce pour le
laisser hériter à sa place.

C'est parce qu'elle assure l'égalité des souches que la représentation est une
technique égalitaire. Si l'on s'en tenait au principe, dans le cas d'un défunt
ayant eu plusieurs enfants ou frères et sœurs, mais dont l'un d'eux serait
prédécédé, la succession passerait au(x) survivant(s) entre lesquels elle se
partagerait, le cas échéant, par têtes. La dévolution de la succession serait donc
fonction des hasards de la nature (ordre des décès). Avec la représentation, il en
va tout différemment : la succession n'est pas dévolue par têtes en fonction du
degré de parenté : elle est répartie à égalité entre chacune des souches. La
représentation écarte donc la priorité d'après le degré ainsi que l'égalité des
droits à égalité de degré.

Dans l’exemple précédent, la succession se divise en trois (F2 et les souches F1


et F3) ; F2 recueille un tiers (à moins qu’il ne renonce pour laisser place à son
propre enfant) ; le tiers revenant à la souche 1 revient à PF1 (le seul
représentant de cette souche) ; le tiers revenant à la souche F3 se partage à
égalité (1/6e) entre ces deux représentants (PF3 et PF4). La priorité d’après le
degré est donc écarté (F2 ne vient pas seul à la succession), l’égalité des droits
à égalité de degré est aussi écarté : PF1 recueille un tiers, PF3 et PF4 qui sont
au même degré ne recueille qu’un sixième.

RQ 1 : Il peut y avoir a priori coïncidence entre les solutions de la dévolution


par têtes ou par souches, lorsque tous les enfants du de cujus étant prédécédés,
chaque souche comporte le même nombre de représentants et tous étant de même degré
:

DC
F1 † F2 †

PF1 PF2 PF3 PF4

Même en ce cas, il faut faire jouer la représentation et procéder à une


répartition par souche, parce que si l'un des héritiers (un des petits-enfants
dans notre ex.) venait à renoncer à la succession ou était déclaré indigne de
succéder (sans laisser de descendants pour le représenter), sa part accroîtrait
seulement à celle des autres membres de sa souche (son frère ou sa sœur dans notre
ex.).

RQ 2 : La loi (art. 753) précise qu’à l’intérieur de la souche, il peut y avoir


lieu à partage par subdivision, les membres de la même subdivision partageant
entre eux par têtes :

DC

F1 † F2 † F3 =
1/3

PF1 † PF2 = 1/6 PF3 = 1/6 PF4 = 1/6

AF1= 1/12 APF2 = 1/12 ; Rq. F1 = 1 souche ; APF1 = 1


subdivision de souche

Toutes les illustrations que l’on vient de prendre correspondent à l’hypothèse


classique de la représentation d’un successible prédécédé. Mais on a dit que,
depuis la loi du 3 décembre 2001, la représentation d’un indigne (vivant) est
possible et que, depuis la loi du 23 juin 2006, il est même possible de
représenter un renonçant. La logique classique de la représentation (placer le
représentant dans la situation successorale du représenté) est alors écartée, dans
le premier cas (indignité) pour que la peine encourue par un successible ne
retentisse pas injustement sur ses descendants (c’est la logique du caractère
personnel de l’indignité : supra) ; dans le second cas (renonciation) pour
permettre avec l’accord de la première génération la transmission directe de la
succession à la seconde génération (c’est la logique de l’anticipation
successorale).
RQ. Pratiquement, le résultat est peut-être opportun, mais juridiquement la voie
choisie est déplorable : la représentation n’a plus aucune cohérence logique et
l’on serait parvenu bien plus simplement au même résultat en posant que dans les
successions en ligne directe descendante et dans la ligne collatérale privilégiée,
la dévolution ne se fait plus à l’intérieur de l’ordre par têtes en fonction du
degré de la parenté (supra), mais toujours par souche.

RQ. Quoi qu’il en soit, cette possibilité de représenter des successibles vivants
(indignes ou renonçants) a obligé à poser une règle complémentaire dans cette
hypothèse ; il se peut en effet qu’après l’ouverture de la succession à laquelle
le représenté à renoncer ou a été déclaré indigne de succéder et qui a été
transmise en conséquence à ses enfants alors vivant et ayant personnellement
qualité pour succéder, lui survienne d’autres enfants. Ceux-ci n’existant pas à
l’ouverture de la succession (par hypothèse) n’ont pu hérité, mais il serait
injuste qu’ils ne touchent rien de cette succession, à la différence de leur
frères et sœurs qui étaient déjà nés. Car si l’on avait respecté la règle du
degré, ils auraient dû avoir exactement les mêmes droits. Et c’est pourquoi l’a
loi, s’est employée à corriger cette injustice : elle a posé que lorsque de
nouveaux enfants surviennent au représenté après l’ouverture de la succession, les
enfants nés ou conçus à ce jour et qui ont succédé à sa place devront rapporter à
sa propre succession, suivant les règles normalement applicables aux libéralités
en avancement d’hoirie (infra), ce qu’ils auront touché dans la succession à
laquelle ils ont été appelés en le représentant (art. 754, al. 2 et 755, al. 2,
rédac. L. 23 juin 2006).

- la fente successorale :
La fente est un autre correctif à la dévolution selon l'ordre et le degré ; elle a
deux applications :

i.- La fente mécanisme d'égalité entre les branches paternelle et maternelle


Mécanisme général. La fente consiste à diviser la succession en deux parts égales,
l’une revenant à la branche maternelle, l’autre à la branche paternelle (art. 747
pour les ascendants et art. 749 pour les collatéraux ordinaires). Ce n’est qu’à
l’intérieur de chaque branche que l’on suit la règle de la dévolution suivant le
degré de parenté : le parent le plus proche succède à l’exclusion des autres ;
lorsque plusieurs parents sont au même degré, ils succèdent par tête (art. 748,
al. 1 et 2 pour les ascendants, art. 750, al. 1 et 2 pour les collatéraux
ordinaires). Il s’ensuit que les parents de la branche maternelle peuvent succéder
à un degré différent des parents de la branche paternelle.

Branche maternelle Branche paternelle


AGM = ½ AGP

GM † GP † GM = 1/4 GP = ¼

M † P †

DC

Branche maternelle Branche paternelle

Grands-parents † Grands-parents †
3 2 2 3

Oncle = 1/2 M † P † Oncle †


Tante †
4 1 1 4
4 4

Cousin 0 DC Cousin 1 = 1/6 Cousin 2 = 1/6


Cousin 3 = 1/6

La fente constitue ainsi une dérogation au classement suivant le degré de parenté.


En revanche, elle ne déroge plus jamais au classement suivant l'ordre. Sauf à
considérer que le père ou la mère continue en l’absence de collatéraux
privilégiés, d’appartenir au deuxième ordre. Car lorsque le de cujus ne laisse
pour tout parent que son père ou sa mère et dans l’autre branche des ascendants
plus éloignés, la fente opère là encore division entre les deux branches (cf. art.
738-1, rédac. L. 23 juin 2006 ; adde, du reste : art. 747, qui vise
indistinctement « la succession dévolue à des ascendants ») ; et c’est pourquoi il
serait préférable de continuer à considérer qu’à défaut de collatéraux privilégiés
les père et mère réintègrent l’ordre des ascendants ordinaires (supra).

GM = 1/4 GP = 1/4 GM GP

M †
P = ½

DC

Fondement. L'idée qui sous-tend la fente est que le décès sans postérité du de
cujus brise le lien de famille qui existait en sa personne entre ses parents du
côté paternel et ses parents du côté maternel. L'unité de sa famille laisse place
à deux familles représentées l'une par la branche maternelle, l'autre par la
branche paternelle. Il est juste que la dévolution favorise l'égalité entre ces
deux branches plutôt que de s'en tenir à la considération du degré de parenté.

Domaine d'application. Cette considération explique que la fente joue dans les
successions dévolues à des ascendants ou à des collatéraux ordinaires (art. 747 et
749) : par hypothèse, les successibles n’appartiennent alors qu’à une branche.
Elle explique aussi que la fente soit exclue lorsque la succession est dévolue à
des descendants (quand même ils seraient issus de lits différents). Car les deux
branches (paternelle et maternelle) auxquelles appartenait le de cujus sont alors
continuées par tous les héritiers : les motifs de faire jouer la fente font donc
défaut. En revanche, le fondement de la fente aurait pu conduire à en faire
parfois application dans l’ordre des ascendants et des collatéraux privilégiés ;
et il pourrait en aller ainsi spécialement lorsque les collatéraux sont issus de
lits différents. Mais, avec la réforme du 3 décembre 2001, cette application de la
fente (que l’on qualifiait de privilège du double lien) a disparu. Désormais la
fente ne joue plus jamais dans l’ordre des ascendants et collatéraux privilégiés
(si l’on veut bien admettre qu’en l’absence de collatéraux les père et mère
appartiennent à l’ordre des ascendants ordinaires). Ainsi les choses sont
aujourd’hui très simples : les techniques de la représentation et de la fente
s’excluent l’une l’autre : la représentation joue au profit des descendants et des
collatéraux privilégiés à l’exclusion de la fente, la fente joue à l’exclusion de
la représentation au profit des ascendants et des collatéraux ordinaires.

ii.- La fente mécanisme d’égalité entre les familles d'origine et adoptive

C'est la loi du 11 juillet 1966 sur l'adoption qui a fait application de la fente
pour répartir la succession de l'adopté simple, mort sans postérité. On suppose
que le de cujus, adopté simple, ne laisse pas de descendants, mais des ascendants
ou des collatéraux dans sa famille d'origine et dans sa famille adoptive.
L'adoption simple étant adjonctive, à la mort de l'adopté sa famille d'origine et
sa famille d'adoption ont également vocation à lui succéder. On verra qu'un droit
de retour permet à chacune de reprendre les biens que l'adopté avaient reçus
d'elles à titre gratuit, sauf les droits du conjoint et le jeu du droit de retour
des collatéraux privilégiés (infra : successions anomales). La fente détermine la
dévolution des autres biens (art. 368-1).

A l'intérieur de chaque famille, la dévolution a lieu suivant les règles


habituelles, ce qui peut, par exception, donner lieu à deux fentes successives (ce
sera même fréquent puisque chaque famille ne comporte par hypothèse que des
ascendants et collatéraux).

Famille d’origine
Famille adoptive
Grand-Mère = ¼

Père † Mère = 1/4 Père


adoptif †

DC
Frère d’adoption = 1/4

Rq. Avant la loi du 23 juin 2006, l’articulation du droit de retour prévu en cas
d’adoption simple et de celui qui appartient aux collatéraux privilégiés évincés
par le conjoint survivant posait difficulté, parce qu’ils peuvent logiquement
jouer de concert et ne profitent pas aux mêmes personnes. La loi du 23 juin 2006 a
entendu mettre fin à ce conflit, en précisant que la présence du conjoint excluait
le premier de ces deux droits de retour, mais elle a aussi supprimé la disposition
finale de l’art. 368-1, al. 2 qui précisait que le surplus des biens de l’adopté
simple décédé sans postérité se divise par moitié entre la famille d’origine et la
famille de l’adoptant « sans préjudice des droits du conjoint sur l’ensemble de la
succession ». Si l’on applique littéralement le texte, il faut en conclure que
désormais le conjoint n’a, sauf le jeu du droit de retour prévu par l’art. 368-1,
al. 1er, aucune vocation légale sur la succession de l’adopté simple décédé sans
postérité, puisqu’il n’appartient ni à la famille d’origine ni à la famille de
l’adoptant… Mais cette conséquence absurde doit être rejetée : elle ne correspond
absolument pas à ce qu’on voulu les auteurs de la réforme. Il faut donc continuer
de décider qu’il peut prendre dans chaque moitié de la succession divisée par la
fente en fonction des héritiers en concours. Mais c’est déjà parler des droits du
conjoint successible.

2° Les droits du conjoint survivant

On rappelle que seul le conjoint survivant a une vocation successorale légale :


les concubins n’ont pas de vocation réciproque et la reconnaissance d’une telle
vocation est l’une des revendications politiques des concubins spécialement
homosexuels. Par la loi du 15 novembre 1999, qui a ajouté dans le Code civil un
titre relatif au Pacte civil de solidarité et au concubinage (art. 515-1 à 515-8),
le législateur a ouvert la voie à cette revendication et la réforme des
successions du 23 juin 2006 a été l’occasion d’un nouveau rapprochement du PACS et
du mariage (V. les nouveaux art. 515-1 et s.). Il reste qu’à ce jour, le PACS ne
crée pas de vocation successorale entre les partenaires, il fait seulement
bénéficier les transmissions à titre gratuit qu’ils se contentent d’avantages
fiscaux (abattement de 57 000 euros, taux de 40 % jusqu’à 15 000 euros, puis taux
de 50 %) et assure au survivant le même droit temporaire au logement qu’au
conjoint survivant (art. 515-6, al. 2). En outre les droits d’attribution
préférentielle qui profitent au conjoint (en particulier sur le logement indivis)
ont été étendus au concubin Pacsé.

On précise que cette vocation est subordonnée aux conditions habituelles (survie
et dignité) et à la permanence du mariage : le divorce y fait obstacle. En
revanche, la séparation de corps ne prive plus le conjoint de sa vocation
successorale : art. 301 et 732. Mais dans le cas de la séparation de corps par
consentement mutuel, les époux peuvent prévoir dans la convention liquidative une
renonciation à leurs droits légaux dans la succession du conjoint (art. 301).

RQ 1. Ce maintien de la vocation successorale du conjoint séparé de corps résulte


d’une disposition de la loi du 23 juin 2006 qui a mis l’article 732 en conformité
des solutions issues de la loi du 26 mai 2004. Pour le passé, on demeure dans le
doute.

RQ 2. Cette solution est très dangereuse, car le conjoint même séparé de corps se
voit reconnaître désormais une réserve héréditaire en l’absence de descendants…

On n’insiste pas sur la vocation alimentaire du conjoint qui ne devrait pas se


rencontrer souvent : art. 767.

a) La vocation successorale générale

- détermination : d’exceptionnelle qu’elle était en 1804, la vocation successorale


du conjoint est devenue systématique ; dès lors qu’il est en vit le conjoint
succède quels que soient les parents en présence : le conjoint prime certains
parents, il vient en concours avec d’autres ; c’est dire que c’est un héritier à
part : il est en dehors des ordres de successibilité (art. 756 s.).

i.- Les droits du conjoint en présence de collatéraux


Depuis 1957, le conjoint successible prime les collatéraux ordinaires ; depuis la
loi du 3 décembre 2001 il prime également les collatéraux privilégiés qui
l’excluaient auparavant (art. 757-2). Mais, ainsi qu’on le redira, cette solution
ne vaut que sous réserve du droit de retour qui appartient le cas échéant aux
frères et sœurs du défunt sur les biens qu’il a reçu à titre gratuit de ses
parents (infra).

ii.- Les droits du conjoint en présence d’ascendants

Une autre innovation de la loi du 3 décembre 2001 tient à ce que le conjoint


survivant prime désormais également les ascendants autres que les père et mère du
défunt, tandis que ces derniers continuent au contraire de l’emporter sur le
conjoint survivant (art. 757-1).

Ainsi, la présence du conjoint survivant rend en toute hypothèse la condition


successorale des père et mère originale :
- en présence de frères et sœurs du de cujus, elle brise l’ordre des ascendants et
collatéraux privilégiés : les père et mère conservent en toute hypothèse leur
vocation légale qui est toujours de un quart de la succession pour chacun ; mais
la part des collatéraux privilégiés va au conjoint survivant.

Père = ¼ Mère = ¼

Frère = ½ DC
Père = ¼ Mère = ¼

Frère DC Conjoint = ½

- en l’absence de collatéraux privilégiés, si seul le père ou la mère a


survécu, le prédécédé laissant des ascendants plus éloignés, la présence du
conjoint contrarie l’assimilation des père et mère aux ascendants ordinaires. En
effet, le père ou la mère qui a survécu continue de venir à la succession, mais
pour une part diminuée, car il ne peut plus prétendre qu’à son quart, tandis qu’en
l’absence du conjoint, il aurait recueilli la moitié de la succession par
application de la fente ; quant aux autres ascendants ils sont au contraire primés
par le conjoint.

Grand-mère = ½

Père † Mère = ½

DC Grand-mère

Père † Mère = ¼

DC Conjoint = ¾

Trois précisions s’imposent toutefois pour rendre un compte exact de la vocation


du conjoint survivant en présence d’ascendants :

1° Pour éviter que la primauté du conjoint survivant sur les ascendants ordinaires
ne heurte l’équité, il a toutefois été prévu que les ascendants du défunt, autres
que les père et mère, peuvent dans le délai d’un an réclamer à la succession des
aliments s’ils sont dans le besoin, lorsque le conjoint recueille la totalité ou
les trois-quarts de la succession (art. 758). Cette créance alimentaire est
prélevée sur la succession et supportée par tous les héritiers et, en cas
d’insuffisance, par tous les légataires à titre particulier proportionnellement à
leur émolument (sauf le respect des legs prioritaires).
Rq. Il est à remarquer que cette créance n’existe que lorsque le conjoint
recueille la totalité ou les trois quarts des biens (ou plutôt lorsqu’il a
vocation à recueillir cette totalité ou ces trois quarts) : elle n’existe donc pas
quand ses père et mère succèdent au de cujus puisqu’alors le conjoint n’a vocation
qu’à la moitié de la succession ; l’idée est que la créance alimentaire est une
compensation à l’éviction des ascendants ordinaires par le conjoint, elle n’a donc
pas lieu d’être lorsque les ascendants ordinaires auraient de toute manière été
primés par les ascendants privilégiés : dans ce cas, ils ont d’ailleurs les uns et
les autres une créance alimentaire personnels contre les ascendants privilégiés
qui sont leurs descendants. Il reste que lorsque l’idée n’est pas poussée au bout
de sa logique, puisque lorsque le conjoint recueille les trois-quarts de la
succession, les aliments sont dus par celle-ci (faute de distinction dans la loi)
non seulement aux ascendants ordinaires évincés par le conjoint mais aussi le cas
échéant à ceux qui sont évincés par leur propre descendant (l’ascendant privilégié
qui a survécu).

2° La vocation en pleine propriété du conjoint survivant n’est pas déterminée de


la même manière que celle des autres héritiers : suivant un mode de calcul que
l’on retrouvera en étudiant les droits du conjoint en présence de descendants,
elle se détermine en deux étapes (infra).

3° La concurrence ainsi établie par la loi du 3 décembre 2001 entre le conjoint


survivant et les ascendants privilégiés a changé de sens et en tout cas de portée
avec la réforme du 23 juin 2006. Jusque-là en effet, les ascendants étaient
réservataires (à hauteur d’un quart) lorsqu’ils venaient à la succession et leur
réserve excluait celle (également du quart) que la loi du 3 décembre 2001 a
reconnu au conjoint survivant. La loi du 23 juin 2006 a renversé la solution :
désormais, les ascendants ne sont plus jamais réservataires et puisqu’il en est
ainsi le conjoint a droit quant à lui à sa réserve en leur présence. En
conséquence, les libéralités qui se faisaient auparavant au détriment du conjoint
se font désormais au préjudice des ascendants.

iii.- Les droits du conjoint en présence de descendants


α) L’option entre des droits en propriété et en usufruit
En présence de descendants le Code civil offre désormais en principe au conjoint
le choix entre un usufruit universel ou des droits en propriété d’une quotité
limitée (art. 757). En logique, des droits en usufruit auraient pu paraître
suffisants et mieux adaptés à la condition du conjoint (c’est un simple passant
dans la succession). Toutefois, en considération du phénomène de la recomposition
familiale (il faut éviter les usufruits explosifs) et surtout pour complaire à
l’opinion publique et aux groupes de pression, le législateur a cru devoir
reconnaître au conjoint des droits alternatifs en propriété.

Les termes de l’option n’ont rien de fortuit : si l’on a retenu que les droits en
propriété seraient limités au quart, c'est pour qu’ils demeurent en toute
hypothèse dans les limites du disponible, la part que la loi réserve aux enfants
pouvant représenter jusqu’aux trois quarts de la succession (infra) ; si l’on a
retenu que l’usufruit légal serait désormais universel (il était auparavant d’un
quart), c’est parce que cela correspond à ce que les époux se consentaient le plus
souvent par voie de libéralité (on retrouve l’idée que la vocation ab intestat
correspond au plerumque fit). Cet usufruit étant universel porte aussi bien sur la
quotité disponible que sur la réserve des enfants qui est donc ramenée à de la nue
propriété. Mais ainsi que le texte le précise (à la suite d’une initiative de P.
Catala), il ne porte que sur les biens existants ; c’est dire qu’il ne porte pas
sur les libéralités rapportables, non plus d’ailleurs que sur les legs (à
l’exception toutefois des legs d’attribution dans la mesure où ils s’imputent sur
la réserve).
Ainsi que l’article 757 le signale clairement, cette option est ouverte au
conjoint lorsque les descendants en concours sont tous issus des deux époux ; en
revanche, elle est fermée lorsqu’un ou plusieurs enfants ne sont pas ceux du
survivant (c’est évidemment ainsi qu’il faut comprendre l’expression « enfants qui
ne sont pas issus des deux époux »), soit qu’il s’agisse d’enfants d’un précédent
lit du de cujus, soit qu’il s’agisse d’enfants adultérins, soit encore qu’il
s’agisse d’enfants adoptés par le seul défunt (au contraire, il n’y a évidemment
pas lieu d’écarter en principe la vocation en usufruit lorsque le ou les enfants
non communs sont issus du seul conjoint survivant). Dans ce cas, le conjoint ne
peut prétendre qu’au quart en propriété. La solution s’explique aisément : on a
voulu éviter les tensions entre le conjoint et les descendants du de cujus qui
risquent de résulter de l’usufruit du premier. Mais elle n’en introduit pas moins
une discrimination indirecte entre les enfants du couple lorsqu’ils sont issus de
lits différents, ce qui est fréquent : le quart en propriété du conjoint est perdu
pour les enfants du seul de cujus, tandis que les enfants communs le recueilleront
à terme dans la succession du conjoint survivant (il est d’ailleurs à remarquer
que contre ce genre d’injustice, l’article 1098 – dont la réforme du 23 juin 2006
a d’ailleurs élargi le domaine – prévoit un mécanisme égalisateur en cas de
libéralité en propriété faite au second conjoint). Un enfant d’un premier lit ne
risque-t-il pas un jour de s’en offusquer devant la Cour de Strasbourg… ?

Lorsqu’elle existe, l’option appartient au seul conjoint : ses droits sont


incessibles (et donc aussi insaisissables) tant qu’il n’a pas opté (art. 758-1) ;
s’il décède sans avoir pris parti, il est réputé avoir opté pour l’usufruit (art.
758-4) ce qui a l’avantage d’affranchir la succession de ses droits puisque
l’usufruit est viager. Cette option peut être exercée par une manifestation de
volonté quelconque ; elle se prouve par tous moyens (art. 758-2).

La loi n’a pas prévu de délai particulier pour l’exercice de cette option (comme
d’ailleurs pour l’option successorale qui appartient à tout héritier) ; elle se
prescrit donc théoriquement par dix ans (ce qui est le nouveau délai pour l’option
successorale). Mais les autres héritiers ont une action interrogatoire pour forcer
le conjoint à prendre parti. Curieusement, alors que désormais les héritiers ne
peuvent être contraints de prendre parti avant 4 mois (art. 771), la loi ne laisse
que trois mois au conjoint pour exercer son choix entre l’usufruit et la pleine
propriété : art. 758-3…

β) La conversion de l’usufruit en rente viagère

Lorsque le conjoint opte pour l’usufruit universel, sa jouissance n’est pas


forcément irréversible ; l’article 759 c. civ. prévoit en effet une faculté de
conversion de l’usufruit en rente viagère. Cette conversion, le de cujus ne peut
l’interdire et il n’est pas non plus permis au conjoint d’y renoncer (art. 759-1).
Elle requiert en principe l’accord du conjoint et des autres héritiers. Mais, à
défaut, elle peut encore être décidée par le juge à la demande de l’un d’eux.
Lorsque les parties s’entendent, elles fixent librement les termes de la
conversion et peuvent même décider que celle-ci aura lieu en un capital. Lorsque
le juge la prononce, elle ne peut avoir lieu qu’en rente viagère et moyennant
indexation et fourniture de sûretés par les débirentiers (art. 760, al. 2) ; en
outre le juge ne peut imposer au conjoint la conversion de son usufruit quant au
logement qu’il occupe à titre de résidence principale et quant au mobilier
garnissant ce logement (art. 760, al. 3). Il faut admettre que cette conversion ne
change pas la qualité d’héritier du conjoint et notamment son obligation au
passif. Rq. : on enseignait généralement, avant la réforme, que la conversion ne
pouvait être partielle (ie n'affecter que certains biens compris dans l'assiette
de l'usufruit), mais un arrêt avait paru contredire cette solution (Civ. 1re, 9
janv. 1979, Defrénois 1979.957, obs. G. Champenois). La loi nouvelle ne fait
aucune allusion à cette conversion simplement partielle.
- liquidation des droits en propriété : on suppose que le conjoint succède en
vertu de la loi à une quotité de la succession en propriété, ce qui suppose qu’il
est en concours avec des descendants ou des ascendants privilégiés. Comment
chiffrer dans ce cas ses droits ?
La situation successorale particulière du conjoint survivant a obligé à organiser
une méthode spécifique de liquidation de ses droits en propriété. On n’a pas voulu
en effet que ses droits portent atteinte à la réserve héréditaire ainsi qu'à la
liberté de disposition du de cujus, et en particulier qu’ils puissent s’exercer
sur des donations que le de cujus a pu faire des années auparavant à ses enfants.
Et, de là, un mode de calcul en deux étapes (art. 758-5) qui est la reprise de la
méthode de calcul de l’usufruit légal du conjoint survivant de l’ancien article
767. A ces deux étapes, la loi du 23 juin 2006 est venue ajouter une troisième
étape possible : renouant avec une solution qui avait cours au sujet du calcul de
l’ancien usufruit légal du conjoint survivant, elle a posé que lorsque des
libéralités ont été adressées par le de cujus elles doivent s’imputer sur ses
droits légaux (art. 758-6).

RQ. Cette précision n’a pas été dotée d’une application immédiate dans le temps
(dans l’idée qu’elle serait simplement interprétative du droit préexistant, ce qui
était difficilement soutenable) => elle ne vaudra (à moins que la jurisprudence ne
l’impose que pour le passé) que pour les successions ouvertes à compter du 1er
janvier 2007.

On va reprendre méthodiquement ces trois étapes :


a) La première étape, envisagée à l’article 758-5, al. 1, consiste à chiffrer le
quart en propriété auquel le conjoint a théoriquement droit en appliquant ce quart
à une masse dite calcul. Cette masse de calcul représente globalement l'ensemble
de la succession. Plus précisément, elle comprend :
1° Les biens existants au décès : il faut entendre par là tous les biens qui
se retrouvent au jour de l’ouverture de la succession dans le patrimoine du de
cujus à l’exception de ceux qui font l’objet de retour. Il faut donc exclure tous
les biens qui, ayant fait l’objet d’une libéralité (entre vifs ou bien à cause de
mort) sont sortis du patrimoine du de cujus. Rq. ainsi les biens existants au sens
de l’art. 758-5 ne s’entendent pas de la même manière que les biens existants au
sens de l’art. 922 (au sens de ce texte les biens existants intègrent les
libéralités à cause de mort).
2° Les libéralités rapportables consenties par le de cujus, c’est-à-dire (la
rédaction légale est particulièrement maladroite à cet égard) : les donations
faites sans dispense de rapport et les legs stipulés rapportables consentis aux
héritiers (ie aux enfants [ou père et mère dans le cas de l’art. 757-1] venant à
la succession mais aussi au conjoint) ; la solution est logique, car les
libéralités rapportables font d'une certaine manière partie de la succession : au
mieux, elles n'ont été délivrées qu'à titre d'anticipation successorale).
3° Les libéralités adressées au conjoint à ce qu’il semble, encore que le
texte ne le précise pas.
S’agissant de l’ancien usufruit légal, la jurisprudence avait ainsi décidé qu’il
convenait d’ajouter aux biens existants et aux libéralités rapportables faites aux
autres héritiers, toutes celles qui avaient pu être faites au conjoint y compris à
titre préciputaire (Civ. 8 févr. 1898, DP 99.1.153, n. Sarrut). La solution
s’expliquait par le caractère subsidiaire de l’ancien usufruit légal par rapport
aux libéralités adressées au conjoint (que traduisait la nécessité d’imputer ces
libéralités sur cet usufruit). Cette subsidiarité ayant été écartée par la loi du
3 décembre 2001, on pouvait à la suite de cette loi poser avec assurance qu’il n’y
a pas lieu de comprendre dans la masse de calcul les libéralités faites préciput
et hors part au conjoint. Mais la loi du 23 juin 2006 a renoué avec l’imputation
sur les droits légaux en propriété du conjoint des libéralités qui lui ont été
adressées (infra). Logiquement, il faut donc, semble-t-il, renouer également avec
la prise en compte de ses libéralités dans la masse de calcul. La solution est du
reste difficilement pour les libéralités faites hors part au conjoint : dans la
mesure où elles visent à ajouter à ses droits légaux, on ne comprendrait pas
qu’elles soient imputées sur ceux-ci (ie les diminuent concrètement) sans y avoir
été préalablement ajoutées ; quant aux libéralités rapportables (si on admet que
des libéralités au conjoint puissent être rapportables), le texte ne distinguant
pas, il n’y a pas de raison d’écarter de la masse de calcul celles qui ont été
adressées au conjoint.

Pour connaître le montant des droits en propriété auxquels le conjoint survivant a


vocation, on chiffre donc cette masse de calcul en additionnant les biens
existants aux libéralités rapportables ou adressées au conjoint et on multiplie le
chiffre obtenu par la quotité du quart. Mais le droit ainsi déterminé correspond à
une simple vocation théorique. Il faut encore vérifier que ces droits peuvent
effectivement s’exercer sans nuire à d'autres intérêts tenus pour prioritaires par
la loi. Cela explique l'étape suivante.

b) Cette seconde étape, envisagée à l’article 758-5, al. 2, consiste à constituer


la masse d'exercice des droits en propriété du conjoint survivant. Le texte
précise en effet que les droits du conjoint ne pourront s’exercer effectivement
sur certains biens : ceux dont le de cujus aura disposé par voie de libéralité et
ceux qui constituent la réserve héréditaire ou font l’objet d’un droit de retour.
On doit ainsi exclure de l'assiette des droits en propriété du conjoint :
- outre les biens qui font l’objet d’un droit de retour (hypothèse qui ne se
conçoit du reste que dans le cas du concours entre le conjoint et les ascendants),
- les biens constitutifs de la réserve héréditaire,
- les biens qui ont fait l'objet de libéralités, dans la mesure où ces libéralités
ne s’imputent pas sur la réserve héréditaire mais sont prises sur le disponible.
C’est-à-dire qu’il faut exclure les libéralités préciputaires et les libéralités
rapportables dans la mesure où elles excèdent la part de réserve du gratifié.

La masse d'exercice ainsi établie peut être sensiblement inférieure à la masse de


calcul, de sorte que les droits en propriété du conjoint survivant risquent de ne
pas trouver à s'appliquer en tout ou partie. Et cela, comme on l'a dit, parce que
les droits ab intestat du conjoint doivent respecter les droits de toutes les
autres catégories de successeurs, spécialement les droits des réservataires et des
gratifiés. Il suffit donc que le conjoint ait disposé de toute la quotité
disponible au profit de tiers pour que le conjoint soit privé de tout émolument
(c’est une infériorité de la vocation en propriété par rapport à la vocation en
usufruit, puisqu’il ne peut jamais être disposé de l’usufruit de la réserve au
profit d’un tiers).

Reste à lever deux difficultés :


- la première interrogation a trait au passif successoral : dans le silence de la
loi convient-il de déduire des biens existants le passif successoral, lorsque l’on
établit la masse de calcul, comme on le fait lorsqu’il s’agit de calculer la
réserve héréditaire ? On peut le penser (cf. par ex. par P. Catala). Mais il ne
faut pas se méprendre sur la solution : il ne s’agit pas alors de fixer le montant
du passif qui doit être supporté par le conjoint (ce serait au demeurant absurde,
car cela conduirait à faire supporter au conjoint une fraction du passif en toute
hypothèse égale au quart, alors que ses droits peuvent être finalement très
inférieurs à cela) : le passif sera réparti proportionnellement entre les
héritiers dans le partage après avoir calculé les droits bruts du conjoint
survivant en suivant la méthode de l’article 758-5.

- la deuxième interrogation concerne la date d’évaluation à retenir pour la masse


de calcul et la masse d’exercice. En effet, entre la date d’ouverture de la
succession et la date du partage, les biens peuvent varier très sensiblement de
valeur, il est donc essentiel de s’entendre sur une date d’évaluation. Au sujet de
l’ancien article 767 la date de l’ouverture de la succession et la date du partage
avaient chacune des partisans et un auteur avait soutenu à la dernière époque
qu’il fallait distinguer : la masse de calcul aurait dû être évaluée au jour de
l’ouverture de la succession, la masse d’exercice au jour du partage. Il a été
proposé d’appliquer cette distinction aux droits nouveaux en propriété du conjoint
survivant. En réalité, on ne peut à mon avis l’admettre. En effet, le but de cette
distinction est d’associer le conjoint aux plus et moins-values qui peuvent
advenir aux biens entre l’ouverture de la succession et le partage. Or, la
distinction préconisée est incapable de faire profiter des plus-values pour cette
simple raison que le montant qui résulte de l’application du quart à la masse de
calcul constitue en toute hypothèse un maximum. L’erreur serait en effet de croire
que la masse d’exercice détermine ce que le conjoint recevra effectivement dans le
partage : en vérité l’article 759-5 n’intéresse que la dévolution de la succession
et la masse d’exercice, comme la masse de calcul doit être évaluée par conséquent
au jour de l’ouverture de la succession. C’est donc ensuite, au stade du partage,
que les droits du conjoint devront être réévalués pour tenir compte de l’évolution
de la valeur des biens composant la masse d’exercice.
Il faut cependant convenir que cette opinion est loin d’être partagée par tous.
Par exemple, P. Catala estime que les libéralités rapportables qui sont contenues
dans la masse d’exercice sont évaluées pour leur valeur au partage, ce qui
implique que la masse de calcul le soit aussi.

c) la troisième étape, qui est simplement éventuelle consiste dans l’imputation


des libéralités reçues par le conjoint survivant sur ses droits légaux en
propriété. Une imputation de ce type existait au sujet de l’ancien usufruit légal
que formulait avant la loi du 3 décembre 2001 l’article 767 du Code civil. Elle
répondait à l’idée que les droits légaux étaient seulement subsidiaires par
rapport à la dévolution volontaire de la succession. En 2001, cette imputation
avait été écartée, certainement de propos délibéré, mais le silence gardé par les
textes avait soulevé de nombreuses hésitations et il avait été soutenu que le
conjoint survivant qui vient en pleine propriété à la succession légale peut
conserver en outre les libéralités qui lui ont été adressées, ce qui lui aurait
permis finalement de toucher des droits plus étendus que le disponible spécial
dans l’hypothèse où le de cujus laisserait deux enfants au plus. Cette solution
apparaissait cependant très excessive et l’on en venait à regretter que
l’imputation légale des libéralités sur les droits légaux du conjoint n’ait pas
été reconduite par le législateur ; peut-être d’ailleurs, pouvait-on la retenir
dans le silence même de la loi pour les libéralités rapportables (à supposer que
le conjoint puisse être tenu du rapport). Finalement, le législateur a profité de
la réforme du 23 juin 2006 pour imposer l’imputation, ce qui marque
incontestablement un retour en arrière.

Cette imputation signifie qu’il faut déduire du montant des droits légaux du
conjoint tels que chiffrés au terme des deux étapes précédentes, le montant des
libéralités adressées au conjoint par le de cujus. L’article 758-6 ne faisant
aucune distinction à cet égard doivent être imputées, les libéralités entre vifs
comme les libéralités à cause de mort, les libéralités rapportables comme les
libéralités hors part (à supposer cette distinction applicable au conjoint). Mais
comment procéder lorsque les libéralités faites au conjoint ne seront pas en
pleine propriété, mais simplement en usufruit comme c’est souvent le cas.
L’article 767 avait soulevé la même difficulté et l’on admettait en général qu’il
fallait procéder à une conversion pour ramener les droits légaux et la libéralité
à imputer au même dénominateur (cf. non sans ambiguïtés : Cass. 1re civ., 6 févr.
2001, Bull. civ. I, n° 28, RTD civ. 2001.637, obs. Patarin). La même analyse
s’impose pour l’application du nouvel article 758-6. Mais les mêmes difficultés
techniques ne vont alors pas manquer de se poser : comment ramener de l’usufruit à
de la pleine propriété ou inversement ? On peut bien sûr utiliser le barème fiscal
de l’article 669, I, CGI (anc. art. 762) et cela paraît d’autant plus admissible
que ce barème a été récemment réformé pour tenir compte de l’accroissement de
l’espérance de vie.

Age de l’usufruitier Valeur de l’usufruit Valeur de la nue propriété


Moins de 21 ans révolus 90% 10%
Moins de 31 ans révolus 80 % 20 %
Moins de 41 ans révolus 70 % 30 %
Moins de 51 ans révolus 60 % 40 %
Moins de 61 ans révolus 50 % 50 %
Moins de 71 ans révolus 40 % 60 %
Moins de 81 ans révolus 30 % 70 %
Moins de 91 ans révolus 20 % 80 %
Plus de 91 ans révolus 10 % 90 %

Mais en dépit de cette rénovation, le barème fiscal conserve l’inconvénient de


manquer de nuances (il comporte toujours des effets de seuil et ne distingue pas
suivant les biens qui sont l’assiette de l’usufruit). Dans ces conditions, il peut
paraître plus indiqué de procéder à une évaluation économique de l’usufruit (idée
que la valeur de l'usufruit correspond à la capitalisation de revenus futurs) et
si un héritier le demande, cela sera effectivement nécessaire parce que
l’évaluation fiscale ne s’impose que pour le calcul des droits de mutation (cf.
Cass. 1re civ. 25 fév. 1997, JCP 97, éd.N., p.1320, avec la chron. de Mme Micha-
Goudet). On risque alors de tomber dans des expertises et contre-expertises qui
compliqueront et retarderont gravement les opérations de liquidation, car on ne
s’accorde pas sur la mise en œuvre concrète de cette méthode…

Quoi qu’il en soit, au terme de cette imputation, deux hypothèses sont possibles :
soit les libéralités que le conjoint a reçues sont inférieures au montant de ses
droits légaux en pleine propriété : dans ce cas, il peut prendre le complément sur
les biens existants, sans jamais pouvoir recevoir une portion de biens supérieure
à la quotité disponible spéciale (art. 758-6) ; soit, les libéralités reçues sont
supérieures au montant des droits légaux en pleine propriété : dans ce cas, le
conjoint ne peut plus prétendre à rien.

Illustrations :
I.- Le de cujus laisse son conjoint et trois enfants A, B et C. De son vivant, il
a fait donation préciputaire à A d’un bien valant 200 au jour de la donation et
(dans le même état) 500 au jour du partage. Plus tard, il a fait donation
rapportable à B d’un bien valant 300 au jour de la donation et (dans le même état)
400 au jour du partage. Plus tard encore, il a fait donation rapportable à C d’un
bien de 300 qui vaut (dans le même état) 500 au jour du partage. Figurent dans le
patrimoine successoral, une maison, des comptes bancaires créditeurs, des
placements et des œuvres d’art pour un montant respectif, au jour de l’ouverture
de la succession, de 1000, 200, 400 et 200. Ces mêmes biens valent respectivement
au jour du partage 1200, 250, 350, 300. Le passif successoral s’élève à 200. Un
testament a été retrouvé dans lequel il est fait legs des œuvres d’art à un tiers.
Le conjoint survivant a opté pour le quart en pleine propriété.

1° Masse de calcul des droits en propriété du conjoint survivant :


a) Biens existants (sans le legs) : 1000 + 200 + 400 = 1600
b) Passif : 200
c) Libéralités rapportables : 300 + 300 = 600
d) Total : 2000 x ¼ => 500 = la valeur théorique des droits en propriété du
conjoint survivant

2° Masse d’exercice des droits en propriété du conjoint survivant (ie la quotité


disponible après imputations des libéralités) :
a) Calcul de la réserve héréditaire
- Masse de calcul de la réserve (art. 922) :
• Biens existants (y compris les legs) : 1600 + 200 (œuvres) = 1800
• Déduction du passif : - 200
• Réunion fictive des donations (y compris les préciputaires) : 200 + 300 +
300 = 800
• Total : 2400
- Taux de la réserve (art. 913) : 3/4
- Réserve globale = 1800
- Parts de réserve individuelle et quotité disponible = 600
b) Imputation des libéralités (art. 923) :
- Donation préciputaire à A : elle s’impute sur le disponible qui est ramené à
400 (600 – 200) ;
- Donation rapportable à B : elle s’impute prioritairement sur sa part de
réserve qui est ramenée à 300 (600 – 300) ;
- Donation rapportable à C : elle s’impute prioritairement sur sa part de
réserve qui est ramenée à 300 (600 – 300) ;
- Legs des œuvres au tiers : il s’impute sur le disponible qui est ramené à
200 (400 – 200).

Finalement, le reliquat du disponible, après imputation des libéralités s’élève à


200 : le conjoint survivant ne pourra prétendre exercer ses droits que sur 200 ;
mais il faut réévaluer ces droits au jour du partage :
- à l’ouverture de la succession, les droits en propriété du conjoint sont donc de
200 ; ils doivent évoluer proportionnellement à l’évolution de valeur des biens
qui en forment l’assiette (ie des biens existants) ; les droits du conjoint au
jour du partage s’élèveront donc à :

valeur des droits en propriété du conjoint


au jour de l’ouverture de la succession
______________________________________________ x valeur des biens existants au
partage
valeur des biens existants au jour de
l’ouverture de la succession

soit : 200 / 1600 (soit 1/8) x 1800 = 225

Pour connaître l’émolument des autres héritiers, il suffit alors de soustraire ses
droits de la masse et de partager le reliquat entre les ayants droit (sauf à tenir
éventuellement compte du droit viager au logement si le conjoint prétend l’exercer
sur la maison : infra), soit :
Biens existants au jour du partage : 1800
- droits du conjoints : 225
Masse partageable :
solde : 1575
rapports dus par les copartageants : 400 + 500
Total : 2475
A répartir à égalité entre A, B et C, soit pour chacun 825 (2475/3)
On connaît alors les droits bruts de chaque héritier. Reste à répartir le passif
successoral entre eux, proportionnellement à leurs droits respectifs (cf. infra) ;
le total à partager est de 2700 (addition des droits des 3 enfants et du conjoint,
ce qui correspond à la valeur des biens existants et des rapports au jour du
partage, exclusion faite des biens légués). Il en résulte que A, B et C devront
respectivement supporter le passif à hauteur de 825/2700 x 200 (montant du passif)
soit 61, 10 ; le conjoint devra pour sa part le supporter à hauteur de 225/2700 x
200 = 16, 70.
Finalement, A, B et C, ont droit chacun (droits nets) à 763, 90 (825 – 61, 10) ;
le conjoint a droit à 208, 30 (225 – 16, 70).
II.- Même exemple que précédemment ; simplement, au lieu d’une donation de 300 à
C, le de cujus a fait à celui-ci une donation rapportable de 200 (valant 300 au
jour du partage) et il a fait en outre à son conjoint une donation de 100 (valant
200 au jour du partage).

1° Masse de calcul des droits en propriété du conjoint survivant :


a) Biens existants (sans le legs) : 1000 + 200 + 400 = 1600
b) Passif : 200
c) Libéralités rapportables ou adressées au conjoint : 300 + 200 + 100 = 600
d) Total : 2000 x ¼ => 500 = la valeur théorique des droits en propriété du
conjoint survivant

2° Masse d’exercice des droits en propriété du conjoint survivant (ie la quotité


disponible après imputations des libéralités) :
a ) Calcul de la réserve héréditaire
- Masse de calcul de la réserve (art. 922) :
• Biens existants (y compris les legs) : 1600 + 200 (œuvres) = 1800
• Déduction du passif : - 200
• Réunion fictive des donations (y compris les préciputaires) : 200 + 300 +
200 + 100 = 800
• Total : 2400
- Taux de la réserve (art. 913) : 3/4
- Réserve globale = 1800
- Parts de réserve individuelle et quotité disponible = 600
b) Imputation des libéralités (art. 923) :
- Donation préciputaire à A : elle s’impute sur le disponible qui est ramené à
400 (600 – 200) ;
- Donation rapportable à B : elle s’impute prioritairement sur sa part de
réserve qui est ramenée à 300 (600 – 300) ;
- Donation rapportable à C : elle s’impute prioritairement sur sa part de
réserve qui est ramenée à 400 (600 – 200) ;
- Donation au conjoint : elle ne peut en toute hypothèse s’imputer que sur la
quotité disponible (il n’est pas réservataire en présence de descendants),
laquelle est donc ramenée à 300 (400-100).
- Legs des œuvres au tiers : il s’impute sur le disponible qui est ramené à
100 (300 – 200).

Après imputation de toutes les libéralités, le disponible subsistant (qui


correspond dans l’hypothèse habituelle à la vocation effective du conjoint) serait
donc de 100. C’est le montant de la masse d’exercice des droits légaux en
propriété du conjoint. Mais il faut encore imputer sur ces droits les libéralités
que le conjoint a reçues : en l’occurrence, il a reçu précisément 100 par
donation. Il ne peut donc prétendre à rien de plus que cette donation qu’il
conservera pour être rempli de ses droits.

b) Les droits spécifiques au logement


L’une des aspirations premières des veufs et des veuves est de pouvoir conserver
leur cadre de vie après le décès de leur conjoint. Pour satisfaire à cette
revendication, la loi du 3 décembre 2001 a accordé au conjoint survivant une sorte
de maintenance c’est-à-dire un droit viager au logement ; pour éviter toute
solution de continuité, elle a en outre garanti au conjoint survivant un droit
temporaire sur ce même logement (art. 763), dont on rappelle qu’il a été voulu
d’application immédiate aux successions non partagées.

- droit temporaire (art. 763) :

Pendant toute l’année qui suit l’ouverture de la succession, le conjoint survivant


a droit à la jouissance gratuite du logement qu’il occupait effectivement au décès
à titre d’habitation principale et aussi du mobilier qui garnissait le logement
(rq les conditions sont les mêmes que pour l’attribution préférentielle et ce
n’est pas un hasard : il s’agit de faire la transition jusqu’au partage et donc à
l’attribution à laquelle le conjoint pourra prétendre). Ce droit appartient de
plein droit au conjoint, sans donc qu’il ait à former une demande en justice pour
pouvoir l’exercer.
Si le logement est la propriété du couple, soit qu’il appartenait aux deux époux
(c’était un bien commun ou indivis) soit qu’il était la propriété propre ou
personnelle du de cujus, exclusive ou en indivision avec des tiers, le conjoint
pourra continuer d’en jouir pendant l’année sans être redevable d’aucune indemnité
à la succession.
Si le logement était assuré par un bail, il pourra continuer de l’occuper en vertu
de l’article 1751 du Code civil et la succession devra lui rembourser les loyers
de l’année au fur et à mesure de leur acquittement (ce qui signifie qu’il doit
tout de même en faire l’avance). Solution à laquelle, la loi du 23 juin 2006,
consacrant une suggestion doctrinale (P. Catala) a assimilé le cas du logement
indivis entre le défunt et des tiers : dans ce cas, le conjoint peut encore rester
dans les lieux, à charge pour la succession d’acquitter l’indemnité d’occupation.
Rq. : en disant que le remboursement est dû par la succession et non par les
héritiers, la loi signifie que le remboursement des loyers ou de l’indemnité
d’occupation de l’année n’est dû que dans la limite des forces de la succession.

Le Code précise que le droit au logement temporaire n’est pas un droit


successoral, mais un effet direct du mariage. Cela signifie qu’il n’y a pas lieu
d’imputer ce droit au logement sur les droits successoraux du conjoint et que
l’exhérédation du conjoint le laisse subsister. C’est un nouvel exemple de
prolongement des effets du mariage après sa dissolution (cf la présomption
bancaire de l’art. 221 c. civ.) ; au fond cela prolonge le dispositif de l’art.
215 c. civ. Aussi bien le droit au logement temporaire a un caractère d’ordre
public, en ce sens que le conjoint ne pourrait en être privé par le de cujus. Mais
il peut naturellement y renoncer : ce serait d’ailleurs le cas, s’il changeait de
logement, puisqu’aucun transport du droit temporaire sur un nouveau logement n'a
été prévu, contrairement au cas du droit viager (cela risque d’être source
d’injustice en cas de résiliation du bail à l’initiative du bailleur).

- droit viager (art. 764 à 766) :

Contrairement au cas du droit temporaire, la loi a précisé la nature du droit


viager : c’est un droit d’habitation sur le logement et un droit d’usage du
mobilier, c’est-à-dire un diminutif de l’usufruit qui interdit la location ; la
jouissance doit donc être personnelle, ce qu’explique suffisamment la finalité de
ce droit. De sa nature, ce droit est viager (il vaut toute la vie durant du
conjoint). Il s’exerce mutatis mutandis dans les termes du droit commun (cf. art.
627, 631 et 634 et 635 C. civ. auxquels il est renvoyé). Toutefois, par exception,
la possibilité de location (à usage d’habitation) a été reconnue au conjoint,
lorsque le logement n’est plus adapté à ses besoins (ex. appartement à l’étage
pour un grabataire, nécessité d’une assistance médicalisée, etc.). Cela permettra
de dégager les « ressources nécessaires à de nouvelles conditions d’hébergement ».
Egalement, par exception à l’article 626, la caution de jouir en bon père de
famille n’est pas requise et l’état et l’inventaire ne sont pas automatiques, ils
doivent être requis par le conjoint ou un héritier s’il le juge utile (pour
établir la preuve de la consistance du logement et du mobilier à l’entrée en
jouissance).

Comme le droit temporaire, le droit viager au logement porte d’une part sur le
local d’habitation effectivement occupé au décès par le conjoint et appartenant
aux époux ou dépendant totalement de la succession du de cujus, et d’autre part
sur le mobilier garnissant le logement et compris dans la succession du de cujus.
Il faut donc un immeuble propriété des deux époux ou du de cujus ; si le logement
était assuré par un bail, le droit viager se réduit à l’usage du mobilier (765-2).
Mais il y a alors lieu de faire application de l’article 1751.

Une différence considérable entre les droits temporaire et viager tient à ce que
le droit viager est un droit successoral (et non plus un effet direct du mariage).
Il en résulte que sa valeur s’impute sur les droits du conjoint survivant ;
autrement dit, elle vient en déduction de sa vocation successorale (art. 765, al.
1). Naturellement, la question ne se pose que lorsque le conjoint succède en
propriété. Parce que s’il opte pour l’usufruit de toute la succession, le droit
d’usage et d’habitation qui n’est qu’un diminutif de l’usufruit se trouvera
nécessairement absorbé dans la vocation successorale. On suppose donc que le
conjoint succède en propriété et, dès lors, de deux choses l’une. Soit la valeur
du droit viager au logement est inférieure à celle des droits successoraux du
conjoint, auquel cas il peut réclamer le complément de ses droits sur les biens
existants (art. 765, al. 2). Soit la valeur du droit viager au logement est
supérieure à celle de ses droits successoraux, et dans ce cas il a été prévu que
le conjoint ne serait tenu à aucune indemnité à l’égard de la succession pour
l’excédent (art. 765, al. 3).

Mais comment évaluer concrètement le droit viager au logement ? Il est précisé que
pour la liquidation des droits de mutation à titre gratuit le droit d’usage et
d’habitation est chiffré à 60 % de la valeur de l’usufruit en application de
l’art. 669 CGI (V. supra ce texte). Mais on rappelle que l’application de ce
barème n’est obligatoire que pour le calcul des droits de mutation. Pour
l’évaluation civile de l’usufruit, la méthode économique peut être utilisée, mais
elle est difficilement transposable à l’évaluation d’un simple droit d’usage et
d’habitation, puisque par hypothèse ce droit ne donne pas accès aux revenus du
bien (alors qu’elle repose sur l’idée de capitalisation des revenus). L’évaluation
civile des droits d’usage et d’habitation risque donc de soulever de graves
difficultés en cas de mésentente.

Il reste, qu’à la différence du droit temporaire, le droit viager au logement


n’est pas d’ordre public : c’est dire que le de cujus peut en priver le conjoint.
A priori, cela paraît contraire au bon sens : si l’on voulait que le veuvage ne
modifie pas quant au logement la condition que le conjoint tient du mariage, il
fallait décider que le de cujus ne peut pas priver le survivant de son droit au
logement. Mais d’un autre côté, cela aurait risqué de priver de facto le de cujus
de toute liberté testamentaire. Aussi a-t-on préféré permettre la dérogation, mais
en éclairant au maximum la volonté du de cujus : et de là, la nécessité d’une
volonté contraire exprimée dans les conditions de l’article 971, c’est-à-dire en
la forme du testament authentique (V. infra ; rq. plus pragmatiquement, la
disposition est aussi une compensation donnée au notariat pour la baisse d’intérêt
des donations au dernier vivant...).

Une autre différence avec le droit au logement temporaire tient à ce que le droit
viager n’est pas automatique ; il doit être réclamé par le conjoint survivant qui
dispose d’un an à partir du décès pour manifester sa volonté d’en bénéficier (art.
765-1). Pour libérer le logement, le conjoint et les héritiers peuvent convenir de
convertir ce droit en une rente viagère ou même en capital (art. 766).

3° Les droits de retour


On envisage ici les droits de retour légaux (à ne pas confondre avec les droits de
retour conventionnels qui sont des stipulations fréquentes dans les actes de
donation) : ce sont des hypothèses où par exception aux principes la dévolution de
la succession se fait en fonction non pas des personnes, mais des biens =>
certains biens que le de cujus a reçus à titre gratuit (par voie de donation ou de
succession) vont faire retour à celui qui les a transmis ou à ses descendants par
un mécanisme successoral : c’est une succession, mais une succession anormale (on
dit anomale) : d’une part parce qu’elle déroge au principe de la dévolution par
ordre et par degré, mais aussi parce qu’elle déroge au principe de l’unité de la
succession (on est en présence de deux successions (donc des transmissions à titre
universel) qui se transmettent séparément (activement et passivement). Si on
laisse de côté, l’ancien droit de retour légal de l’ascendant donateur qui ne vaut
plus que pour les donations consenties avant le 1er août 1972, on en dénombre
aujourd’hui trois hypothèses :

a) Dans la succession de l’adopté simple (art. 368-1, al. 1er)

Ainsi qu’il a déjà été indiqué, l'ascendant adoptif ou par le sang d’un adopté
simple s’est vu reconnaître par la loi du 11 juillet 1966, qui a réformé
l’adoption, un droit de retour sur les biens transmis à titre gratuit à l’adopté,
lorsque celui-ci est décédé sans postérité (art. 368-1, al. 1er).

Il faut donc supposer qu'un adopté simple soit décédé sans postérité (sans laissé
de descendants). En outre, il ne faut pas que l’adopté simple laisse à sa
survivance son conjoint. En effet, on a déjà dit qu’à la suite de la loi du 3
décembre 2001 ce droit de retour pouvait entrer en collision avec le droit de
retour institué par cette loi au profit des collatéraux privilégiés évincés par le
conjoint survivant. Pour éviter ce télescopage, la loi du 23 juin 2006 est venu
préciser que ce droit de retour ne vaut qu’à défaut de descendant « et de conjoint
survivant ». Dans ce cas, le droit de retour légal est établi au profit de la
famille adoptive comme de la famille d'origine. Dans chaque famille, il bénéficie
aux ascendants au premier degré (adoptant, père et mère par le sang) et, en cas de
prédécès de ceux-ci, à leurs descendants (frères et sœurs d'adoption ou par le
sang).

Quant à l'objet du droit de retour, il consiste dans les biens que l'adopté a
reçus à titre gratuit, entre vifs ou à cause de mort (par voie de succession ou
libéralités), de ses parents par le sang ou adoptifs. Ainsi dans la famille
adoptive, le droit de retour porte sur les biens donnés par l'adoptant à l'adopté
ou recueillis dans sa succession s'il est prédécédé. Et il en va de même dans la
famille d'origine de l'adopté. En tous les cas, il faut que ces biens reçus à
titre gratuit par l'adopté existent encore en nature lors de son décès : il n'en
va pas ainsi s'ils ont été détruits ou si l’adopté en a disposé à titre onéreux ou
gratuit, entre vifs ou même à cause de mort.

b) Au profit des collatéraux privilégiés évincés par le conjoint (art. 757-3)

La loi du 3 décembre 2001 a institué une autre hypothèse de succession anomale


pour le cas où le de cujus serait décédé sans laissé de descendance et ses père et
mère étant prédécédé. On sait que dans ce cas, le conjoint successible a désormais
vocation à recueillir la succession par priorité aux collatéraux (ordinaires ou
privilégiés) et aux ascendants ordinaires en vertu de l’article 757-2. La solution
a paru excessive. Aussi par souci de compromis, il a été prévu que, dans ce cas,
les biens que le défunt a reçus à titre gratuit de ses père et mère et qui se
retrouvent en nature dans sa succession seraient dévolus pour moitié aux frères et
sœurs du défunt ou à leurs descendants dans la mesure où ils sont eux-mêmes
descendants du ou des parents à l’origine de la transmission. Et la loi du 23 juin
2006 est venu élargir l’hypothèse à l’ensemble des biens que le de cujus a reçu de
ses ascendants, et non plus seulement de ses père et mère (art. 757-3).

Encore que ce soit discuté (notamment parce que les biens en question ne font pas
« retour » aux ascendants, mais à des collatéraux), l’hypothèse consiste en un
droit de retour légal au même titre que les deux précédents cas envisagés (V. cep.
Goubeaux, Defrénois 2002, p. 427). Si ses conditions ne font pas de difficulté, en
revanche la mise en œuvre de ce droit de retour risque de poser de sérieux
problèmes, du fait que ce droit constitue en vérité une cote mal taillée.

Encore que cela ne soit pas précisé, il va de soi que les bénéficiaires du droit
de retour pour en profiter effectivement doivent remplir toutes les qualités
requises pour hériter et en particulier ne pas être frappés d’indignité. Ces
bénéficiaires, ce sont les frères et sœurs du défunt et leurs descendants,
autrement dit les collatéraux privilégiés, dont la vocation respective, s’ils sont
plusieurs, sera fixée par application des principes habituels (ie : règle du degré
corrigée par la représentation). A une précision près toutefois : seuls les frères
et sœurs issus de l’ascendant à l’origine de la transmission à titre gratuit
peuvent y prétendre, ce que l’on serait tenté d’expliquer par le fondement
apparent de l’institution : sa raison d’être semble résider dans le principe de la
conservation des biens dans la famille ; par conséquent, seuls les représentant de
la famille peuvent logiquement y prétendre. Si donc le bien a été reçu du père
seuls les frères et sœurs germains et consanguins du de cujus ou leurs descendants
pourront y prétendre ; si le bien a été reçu de la mère, seuls les germains et les
utérins ainsi que leurs descendants en profiteront, le cas échéant.

L’objet du droit de retour de l’article 757-3 montre toutefois que cette


justification tirée du principe de la conservation des biens dans la famille est
vicieuse. Certes, l’objet du droit de retour consiste dans les biens qui ont été
reçus à titre gratuit par le de cujus de ses ascendants, par voie de libéralité
(entre vifs ou à cause de mort) ou bien de succession. Et il faut (comme au sujet
de l’art. 368-1) que ces biens se retrouvent en nature dans la succession du de
cujus pour que le droit de retour puisse jouer. Mais, solution extraordinaire,
lorsque ces conditions sont réunies, le droit de retour ne vaut pas pour
l’intégralité des biens ainsi reçus à titre gratuit de ses parents par le de
cujus, il ne vaut que pour la moitié de ces biens, l’autre moitié restant acquise
au conjoint suivant les principes de la dévolution ordinaire. Du moins à ce qu’il
semble, puisque le texte ne détermine pas spécialement la dévolution de cette
seconde moitié. Dans ces conditions, on le voit, le droit de retour remplit
d’autant moins bien la fonction de conservation des biens dans la famille, que
d’une part la moitié de ces biens y échappe, et que d’autre part, une licitation
risque de devoir être nécessaire si les biens en question ne sont pas commodément
partageables en nature. Se manifeste ainsi l’ambiguïté congénitale de
l’institution qui vise en même temps et contradictoirement à assurer la
conservation des biens dans la famille et à éviter que les collatéraux privilégiés
ne soient entièrement exclus de la succession par la présence du conjoint
survivant (or cette dernière finalité impliquerait que le droit profite à tous les
collatéraux privilégiés et non seulement aux descendants de l’ascendant à
l’origine de la transmission).

c) Au profit des père et mère ayant fait donation à leur enfant décédé sans
postérité (art. 738-2)

Ces difficultés d’application de l’article 757-3 nées de son caractère hybride


n’ont manifestement pas rebutés les parlementaires. A l’occasion de la réforme du
23 juin 2006, ils ont en effet créé un nouveau droit de retour au profit des père
et mère de l’enfant décédé sans postérité pour compenser la suppression de la
réserve des ascendants réalisée par cette loi (art. 738-2). Mais l’organisation de
ce droit de retour est si extravagante qu’il pourrait soulever encore plus de
difficulté que le précédent si la pratique notariale ne le stérilise pas, ce qui
est probable. Aussi bien les conditions que l’objet et la mise en œuvre de ce
droit de retour montrent qu’il s’agit de tout autre chose qu’une succession
anomale classique : en vérité, c’est du pur bricolage sans égard pour les
principes successoraux.
Conditions du droit de retour. Pour que ce droit de retour joue :
- Il faut tout d’abord que le de cujus soit décédé sans postérité et qu’il laisse
ses père et mère ou l’un d’eux (peu importe en revanche la présence ou non de
collatéraux privilégiés et du conjoint survivant) : en somme, ce droit de retour
jouera à chaque fois que la réserve des ascendants aurait auparavant eu vocation à
s’appliquer au profit de l’un ou des deux ascendants privilégiés. Mais
précisément, ce droit de retour ne jouera jamais qu’au profit des père et mère :
les ascendants ordinaires, dont la réserve étaient déjà perdue depuis la loi du 3
décembre 2001 en présence de collatéraux privilégiés ou du conjoint survivant
(mais non pas de collatéraux ordinaires) n’en profitent pas.
- Il faut ensuite que le de cujus ait reçu de ses père et mère ou de l’un d’eux
une donation (simple ou partage).
RQ La loi ne précise pas l’objet de cette donation : meuble, immeuble, bien
corporel ou incorporel peu importe évidemment ; mais cela vaut-il aussi pour la
donation d’une somme d’argent ou d’un bien fongible ? Tout dépendra de
l’interprétation que l’on donnera de la possibilité d’exercer le droit de retour
en valeur (cf. infra).

Objet du droit de retour. Ce droit de retour n’a en effet été prévu que pour les
biens donnés par les père et mère au de cujus (et semble-t-il seulement sur ce que
chacun a donné personnellement ou conjointement avec l’autre) ; à la différence
des précédents, il est inapplicable aux biens reçus d’eux par voie de succession,
sans que l’on s’explique bien cette exclusion. Et c’est pourquoi ce droit de
retour risque de ne présenter qu’un faible intérêt pratique : les notaires ne
manquent pas en effet de stipuler dans les donations pour lesquelles ils
instrumentent un droit de retour conventionnel pour le cas de prédécès du
donataire avec ou sans postérité. Or ce droit de retour conventionnel joue à la
manière d’une condition résolutoire (et non pas d’une transmission successorale
comme c’est le cas pour le retour légal) : il prive donc le droit de retour légal
d’assiette en faisant rétroactivement sortir le bien donné de la succession du
donataire. Ainsi le droit de retour légal ne devrait-il pratiquement jouer que
pour les donations non solennelles (à condition d’ailleurs qu’elles soient
prouvées) et c’est très bien ainsi, tant le dispositif nouveau est complexe et
décevant. Contrairement, à ce qu’on aurait pu penser ce droit ne porte pas sur
tout le bien donné mais d’après la loi « sur les biens que le de cujus avait reçus
[de ses père et mère] », « à concurrence des quotes-parts fixées au premier alinéa
de l’article 738 », c’est-à-dire à concurrence de la quote-part que la loi leur
reconnaît dans la succession ordinaire lorsqu’ils sont en concours avec des frères
et sœurs du défunt : autrement dit à concurrence du quart chacun. Mais toute la
difficulté est de préciser à quoi se rapporte dans l’esprit du législateur ce
quart auquel le père et la mère ont droit chacun, lorsqu’ils sont en situation
d’exercer leur droit de retour légal. Faut-il comprendre qu’ils peuvent exercer
leur droit de retour à concurrence du quart de la valeur des biens compris dans la
succession ordinaire ou à hauteur du quart des biens qui font l’objet du droit de
retour (si ces biens sont de très forte valeur et dépassent le quart de la
succession ordinaire ce sera avantageux, s’ils sont inférieurs à ce quart, cela
réduira le droit de retour à très peu de chose) ? L’hésitation vient des termes
ambigus de la loi : l’alinéa 2 de l’article 738-2 parle en effet de la « valeur de
la portion des biens soumise au droit de retour » et cela laisse entendre que le
quart s’applique aux biens qui sont l’objet du droit de retour. De même on verra
que le texte permet une exécution en valeur du droit de retour mais il précise en
ce cas, que le droit de retour ne peut s’exercer que dans la limite de l’actif
successoral (al. 3) : pourquoi cette précision si le droit de retour ne peut
jamais s’exercer qu’à hauteur du quart des forces successorales ? Cette
interprétation doit cependant être écartée : pas tellement parce que les travaux
préparatoires sont plutôt en sens contraire, mais parce que l’objectif de ce droit
de retour a été de compenser la disparition de la réserve (qui était du quart des
biens successoraux) ; si l’on veut que cette compensation ne soit pas un marché de
dupe, il faut retenir que le quart qui fixe la limite du droit de retour prenne
également pour assiette la succession légale. Et si l’on veut bien raisonner
ainsi, on admettra que le bien donné objet du droit de retour soit lui-même
comptabilisé avec les autres biens successoraux, ce qui montre suffisamment qu’il
ne s’agit pas d’une vrai succession anomale (faute d’autonomie de son assiette).

Une autre particularité tient à ce que ce droit de retour peut s’exercer non
seulement en nature mais aussi en valeur dans la limite de l’actif successoral
précise l’article 738-2, al. 3. On peut en effet imaginer que le bien donné soit
d’une valeur telle que le droit de retour qui est limité au quart de la succession
(supra) ne puisse s’exercer par la reprise du bien et que celui-ci ne soit pas
divisible. Dans ce cas, le texte implique que le droit de retour s’exercera par
équivalent sans que les cohéritiers ne puissent jamais être recherchés sur leurs
biens personnels (l’exécution en valeur du droit de retour est en effet limité à
l’actif successoral dit le texte : sur les incertitudes que font naître cette
précision : supra). Mais dans l’esprit des parlementaires, cela visait aussi
l’hypothèse où le donataire aurait aliéné le bien de son vivant. Et si l’on
accepte cette interprétation, cela signifie que le droit de retour pourrait
devenir extrêmement fréquent (il pourrait même porter sur une donation de somme
d’argent ou un bien fongible) et sources de comptes (sur quelle base : la valeur
au jour de l’aliénation avec subrogation liquidative ?) et de contestations
multiples. Il faut espérer que la jurisprudence s’en tienne à la première
hypothèse.

Quoi qu’il en soit, une dernière limitation du droit de retour qui confirme qu’il
ne s’agit pas d’une succession anomale mais d’une absurdité juridique résulte de
la précision que la valeur du droit de retour s’impute en priorité sur les droits
successoraux des père et mère : il faut comprendre que ce droit les remplit
prioritairement de leur vocation légale ordinaire et ce n’est que si il ne suffit
pas à les remplir de leurs droits ordinaires qu’ils pourront prendre le complément
sur l’actif successoral. En somme, le cumul qu’impliquerait l’analyse du droit de
retour en une succession anomale est écarté.

Mise en œuvre. Dernière précision : on se demande si ce droit est d’ordre public ;


en indiquant que, lorsque les conditions en sont réunies, les père et mère peuvent
« en tous les cas exercer un droit de retour… », le texte paraît bien écarter
toute exclusion volontaire du droit de retour par disposition testamentaire du de
cujus et il est bien évident que toute renonciation ou exclusion anticipée serait
constitutive d’un pacte sur succession future prohibée ; mais il est clair aussi
que la stipulation d’un retour conventionnel dans la donation tiendrait en échec
le droit de retour légal et il en irait de même de l’aliénation du bien donné par
le donataire si l’on veut bien admettre que le droit de retour ne doit pas jouer
en valeur dans ce cas.

Conclusion : les droits de l’Etat. Vocation civile aux succession en déshérence ;


mais en toute hypothèse, perception de droits.
A titre de rappel que l'Etat prélève des droits de mutation élevés sur les
transmissions à titre gratuit (dévolution légale ou libéralités) : CGI art. 777 et
779 :
En ligne directe le taux de 5 à 40 % selon la tranche imposable (jusqu’à 7.600 €
pour la première tranche et au delà de 1.700.000 € pour la dernière tranche).
Abattement de 50.000 €.
Entre époux, le taux est également de 5 à 40 % selon la tranche imposable.
Abattement de 76.000 €.
Entre partenaires à un Pacs, le taux est de 40 % jusqu’à 15.000 € et de 50 % au
delà. Abattement de 57.000 €.
Entre frères et sœurs, le taux est de 35 % jusqu’à 23.000 € et de 45 % au delà.
Abattement de 5.000 €.
Entre collatéraux aux 3e et 4e degrés, le taux est de 55 %.
Entre collatéraux plus éloignés et entre étrangers : taux de 60 %. Abattement de
1.500 €.

B.- La dévolution volontaire des successions


1° Conditions communes aux libéralités
a) Conditions de validité générale de l’acte juridique

- Consentement : la volonté doit être saine et non viciée : cf. art. 901 ;
particularisme : par exception (cf. art. 489-1), il n'est pas besoin, pour que
l'insanité d'esprit puisse être invoquée après le décès du disposant, que l'acte
porte en lui-même la preuve du trouble mental ou bien que son auteur ait été placé
sous sauvegarde de justice : en toute hypothèse, cette preuve peut être
intrinsèque, mais aussi extrinsèque et être administrée par tous moyens ; les
vices du consentement sont admis plus facilement.

- Objet et cause : La libéralité doit évidemment avoir un objet qui appartienne au


disposant (tempérament pour les biens communs : donation avec autorisation du
conjoint et legs efficace en valeur) et soit dans le commerce et une cause
(l’intention libérale qui a tendance à glisser vers les mobiles, les motifs
déterminants) ; signalons que l’objet des libéralités peut être très divers : tous
les droits patrimoniaux disponibles peuvent en faire l’objet et la disposition
peut se faire en démembrement de la propriété (intérêt civil et intérêt fiscal :
la pleine propriété se reconstitue sur la tête du nu-propriétaire en franchise de
droits) ; l’objet et la cause de la libéralité doivent êtres licites et non
contraires aux bonnes mœurs : en conséquence une jurisprudence classique jugeait
constamment nulle la donation consentie pour inaugurer, maintenir ou reprendre des
relations sexuelles hors mariage. Et il importe de bien souligner que, selon cette
jurisprudence fort raisonnable, ce ne sont pas les relations sexuelles hors
mariage elles-mêmes qui étaient jugées immorales, mais le fait de les "rémunérer"
par des cadeaux. A preuve, un courant jurisprudentiel bien établi maintenait les
libéralités à la maîtresse lorsqu’il s’était agi, pour le disposant d’assouvir un
devoir de conscience, en réparant le dommage causé par la rupture des relations
fautives, en assurant la subsistance de sa maîtresse, en lui donnant les moyens
d’élever les enfants issus de la relation adultère ou bien en récompensant les
soins et l’affection continue prodiguée par elle dans des circonstances
difficiles. Or, cette jurisprudence classique, pleine de mesure, puisqu’elle
fustigeait un rapport étroit entre le sexe et l’argent, sans pour le reste
contredire la liberté sexuelle des individus, a récemment fait l’objet d’un
revirement au terme duquel la Cour de cassation en est venue à affirmer en
assemblée plénière que « n’est pas nulle, comme ayant une cause contraire aux
bonnes mœurs, la libéralité consentie à l’occasion d’une relation adultère
» (Cass. ass. plén., 29 oct. 2004, Bull. ass. plén., n° 12 ; adde : Cass. 1re
civ., 25 janv. 2005, RTD civ. 2005, p. 439, obs. M. Grimaldi). Or, dans le premier
cas, la relation des faits établissait de manière édifiante la parfaite vénalité
de la maîtresse qui s’était fait consentir la libéralité litigieuse au moyen d’un
véritable chantage sexuel, raison pour laquelle les juges du fond en avaient
prononcé la nullité pour immoralité de la cause, et dans le second cas, cette
nullité avait été retenue au motif que les donations consenties ne l’avaient été
que pour poursuivre et maintenir une liaison adultère. La cassation prononcée par
ces deux arrêts ne peut donc avoir d’autre signification qu’un abandon de la
jurisprudence classique. Ce qui est extrêmement contestable, car on ne voit pas au
nom de quelle évolution sociologique, le fait de monnayer des relations sexuelles
par des dispositions à titre gratuit aurait cessé de heurter la morale. Quoi qu’il
en soit, aujourd’hui la licéité et la moralité intéressent surtout les conditions
et charges qui sont en principe possibles mais révisables en justice (cf. art. 900
s. ; intérêt notamment de la clause d’inaliénabilité).

- Capacité : ici comme ailleurs la capacité est le principe et l’incapacité


l’exception, du moins pour les personnes physiques (pour les PM, c’est le
contraire). Mais, par souci de protéger le disposant, sa famille ou l'ordre
public, la loi a multiplié les cas d'incapacité. Outre des incapacités d'exercice
existent des incapacités de jouissance.
- les incapacités d’exercice :
a) incapacités générales : le mineur non émancipé et le majeur sous tutelle sont
soumis à un régime très comparable : ils doivent être représentés pour accepter
des libéralités (en recevoir) et une autorisation de l’organe de suveillance (le
conjoint ou le juge dans l’administration judiciaire, le conseil de famille dans
la tutelle est nécessaire lorsque la libéralité est assortie de charge) :
simplement, tous les ascendants, même non chargés de la représentation d’un
mineur, peuvent accepter pour son compte des libéralités sans charge (art. 935) ;
la représentation s’impose à plus forte raison lorsqu’il s’agit pour eux de faire
une libéralité et cette représentation ne peut intervenir que dans un cadre étroit
: la loi limite en effet les possibilités pour les mineurs et majeurs sous tutelle
de faire des libéralités : en principe, les mineurs non émancipés peuvent
seulement disposer de la moitié de la moitié des biens dont la loi permet au
majeur de disposer (art. 904 ; rq. la réserve des ascendants ayant disparu, cela
signifie qu’ils peuvent disposer par testament de la moitié de leur patrimoine) ;
quant aux majeurs en tutelle, ils ne peuvent en principe faire eux-mêmes de
libéralité (cf. pour le testament : art. 504, qui pose que le testament rédigé
avant l'ouverture de la tutelle peut même être annulé si la cause déterminante du
testament a disparu depuis l'ouverture de la tutelle : la solution est
remarquable, elle établit une sorte de substitut à la révocation du testament dont
on pouvait penser que l'incapable est dans l'impossibilité de la faire et sans
doute aussi le tuteur, eu égard au caractère personnel de la révocation : v. cep.
ci-après). Mais on sait que le juge des tutelles peut moduler l'incapacité du
majeur en tutelle en l'autorisant spécialement à accomplir certains actes, soit
seul soit avec l'assistance de son tuteur (art. 501). A ce titre, le juge pourrait
autoriser certaines libéralités (donations ou legs ; cf. pour l’autorisation
donnée à un majeur sous tutelle de faire son testament sur le fondement de l’art.
501 : Civ. 1re, 29 mai 2001, Defrénois 2001.1358, obs. J. Massip). Mais les
organes de la tutelle peuvent également faire certaines libéralités au nom du
majeur : ainsi l’art. 505 autorise traditionnellement le tuteur à faire avec
l’autorisation du conseil de famille des donations au nom du majeur, mais
seulement en faveur de ses enfants en avance de part et en faveur de son conjoint,
à quoi la réforme du 23 juin 2006 a ajouté : « au profit de ses frères et sœurs ou
de leurs descendants ». En revanche, le testament étant un acte éminemment
personnel il a toujours été entendu que le tuteur ne pouvait le faire au nom du
majeur en tutelle même avec l’autorisation du conseil de famille, ce que l’art.
504 précise désormais ; en revanche, la loi du 23 juin 2006 a prévu (ce qui est
une révolution) que le conseil de famille peut désormais autoriser le majeur à
faire son testament avec l’assistance du tuteur. Mais le même texte (art. 504)
précise que le majeur est seul à pouvoir révoquer le testament fait avant comme
après l’ouverture de la tutelle, ce qui contredit la justification de la nullité
du testament antérieur à la tutelle dont la cause a disparu et ce qui ne manquera
pas de faire problème (car la lucidité de l’incapable pourra être facilement
contestée).
Le majeur en curatelle, en revanche, peut librement accepter une libéralité (du
moins sans charge), car c’est un acte d’administration (cf. art. 510). Il doit au
contraire se faire assister pour consentir des donations, car les libéralités sont
des actes de disposition. Toutefois, sous réserve de discerner la portée de
l'acte, il peut librement tester (art. 513).
b) incapacités spéciales (ce sont des exceptions à la capacité de principe de la
personne) : le mineur émancipé doit se faire assister par les personnes dont le
consentement est nécessaire à son mariage pour consentir à son futur conjoint des
libéralités par contrat de mariage (art. 1398, al. 1) ; les personnes morales
publiques ou d’utilité publique devaient traditionnellement obtenir une
autorisation administrative pour accepter les libéralités qui leur sont adressées
(art. 910 et 937). Mais cette nécessité d’une autorisation préalable était gênante
en pratique à raison des lenteurs de l’administration à s’en acquitter. Aussi une
ordonnance n° 2005-856 du 28 juillet 2005 (entrée en vigueur le 1er janvier 2006)
a-t-elle renversé le principe pour les libéralités adressées aux fondations,
congrégations et associations ayant la capacité de recevoir des libéralités :
elles peuvent accepter désormais librement les libéralités qui leur sont adressées
(sans autorisation préalable) sauf opposition (devant l’autorité administrative)
motivée par l’inaptitude de l’organisme légataire ou donataire à utiliser la
libéralité conformément à son objet statutaire.
- les incapacités de jouissance : elles sont forcément spéciales (c'est-à-dire
qu'elles privent seulement de l'aptitude à réaliser certains actes juridique, en
l'occurrence les libéralités), car une incapacité générale de jouissance
équivaudrait à une absence de personnalité juridique. On distingue des incapacités
absolues qui interdisent de disposer ou de recevoir à l'égard de quiconque et des
incapacités relatives, qui ne jouent qu'entre personnes déterminées.
- a) Incapacités absolues : certaines personnes se voient interdire de disposer à
titre gratuit (faire une libéralité), d'autres de recevoir à titre gratuit (être
bénéficiaire d'une libéralité). Mais ces incapacités sont tout à fait
exceptionnelles. Il n'y a pas lieu de revenir sur les incapacités absolues de
disposer à titre gratuit : ce sont celles qui frappent le mineur non émancipé et
les majeurs incapables dans la mesure où leur incapacité d'exercice ne comporte ni
exception ni remède. Quant aux incapacités absolues de recevoir à titre gratuit,
elles sont depuis le code pénal de 1994 sans véritable application aux personnes
physiques (auparavant, elles frappaient les condamnées à certaines peines
criminelles). Elles sont, en revanche, courantes pour les personnes morales. Les
personnes morales de droit public ont une pleine capacité de jouissance (mais non
d'exercice : supra) pour recevoir à titre gratuit, sous réserve du principe de
spécialité. Parmi les personnes morales de droit privé, les sociétés ont également
cette capacité. Mais les associations même déclarées (à défaut elles n'ont même
pas la personnalité juridique) ne peuvent en principe recevoir de libéralités ; il
leur faut, pour cela, à peine de nullité absolue, là aussi, être reconnues
d'utilité publique.
- b) Les incapacités relatives : ces incapacités de jouissance sont dites
relatives parce qu'elles ne jouent qu'entre un disposant et un bénéficiaire
déterminé. Elles consistent donc sous un rapport une incapacité de recevoir et
sous l'autre une incapacité de disposer. 1re hypothèse : le pupille et son tuteur
(art. 907) ; 2ème hypothèse : le malade, le médecin et le ministre du culte. Rq.
Font exception à l'incapacité les dispositions rémunératoires faites à titre
particulier, eu égard aux facultés du disposant et au service rendu.
NB. L’art. L. 331-4 du Code de l’action sociale et des familles prévoit une
incapacité similaire entre les propriétaires, administrateurs et agents des
établissements hospitalier d'une part et les pensionnaires d'autre part.
RQ. Dans les deux hypothèses, la nullité est renforcée et élargie par des
présomptions d’interposition de personne qu’édicte l’art. 906 (réécrit par la loi
du 23 juin 2006).

b) Prohibition des pactes sur succession future


C’est une prohibition traditionnelle que réaffirment en principe les textes (art.
722, 1130, al. 2), mais qui est en très nette régression devant le volontarisme
juridique : on veut laisser de plus en plus de liberté aux volontés pour organiser
à l’avance la transmission et le règlement des successions et par conséquent on
prévoit de plus en plus d’exceptions au principe de prohibition.
Le principe n’en demeure pas moins celui de la prohibition (pour des raisons de
morale et de protection des individus) et cette prohibition ne concerne pas
seulement les « pactes » (ie les conventions), mais aussi des actes unilatéraux.
Il n’y a pas non plus à distinguer suivant que l’acte a pour objet sa propre
succession ou celle d’un tiers, qu’il est à titre gratuit ou à titre onéreux. Elle
signifie d’après la jurisprudence qu’est nul (d’une nullité absolue) l'acte
juridique qui a pour objet un droit successoral qui est encore à l'état de simple
éventualité. Mais, comme on l’a souvent relevé, cette manière d’appréhender la
prohibition des pactes sur succession future est peu satisfaisante. Elle conduit
en effet à déclarer valable l'acte qui a pour objet de constituer un droit né et
actuel (par ex. une promesse de vente, une donation de somme d’argent) en
reportant seulement son exécution post mortem. Or, la distinction du droit
purement éventuel et du droit actuel mais dont l'exécution est reportée après la
mort est loin d'être toujours évidente. Et les hésitations que la jurisprudence a
naguère manifesté au sujet de la promesse unilatérale de vente dont l'option ne
pouvait être levée qu'après le décès du promettant (sa licéité est aujourd'hui
acquise) en témoignent suffisamment. Et il est encore plus difficile de tracer la
frontière entre le PSSF prohibé et le pacte conditionnel valable (condition
suspensive du prédécès d'une partie). C’est ce qu’illustre assez bien la question
de la tontine dont la jurisprudence a fini par admettre la validité à condition
qu’elle soit correctement rédigée = acquisition d'un bien (généralement un
immeuble) faite par deux personnes ensemble (généralement des époux séparés de
biens ou concubins, mais pas seulement : frères et sœurs...) avec clause selon
laquelle au décès de l'un des coacquéreurs le bien sera la propriété exclusive du
survivant et sera censé l'avoir toujours été (autrement dit, il n'a jamais figuré
même en partie seulement dans le patrimoine du prédécédé).
L'opération repose sur la technique de la condition : il y a deux acquisitions
intégrales faites sous condition suspensive de survie et sous condition
résolutoire de prédécès. Conséquences : 1° pendente conditione, le bien ne peut
être saisi par les créanciers personnels de l'un des coacquéreurs : Civ. 1re, 18
nov. 1997, JCP.1998.II.10051, n. Du Rusquec ; 2° au décès d'un coacquéreur, il n'y
a pas transmission à l'autre d'une partie du bien et donc taxation ; l'acquisition
intégrale a eu lieu ab initio et à titre onéreux. Fiscalement, cependant
l'opération n'est pas regardée ainsi, ce que d'aucuns regrettent. Aux termes de
l'art. 754 A CGI, les biens recueillis en vertu de la clause d'accroissement, sont
réputés transmis à titre gratuit à chacun des bénéficiaires, à moins que l'objet
de l'acquisition soit l'habitation principale commune aux acquéreurs et que sa
valeur n'excède pas 76 000 € au décès du prémourant. Rq. on s'est demandé s'il
était possible d'acquérir un logement en indivision pour la nue-propriété et en
tontine pour l'usufruit seulement (intérêt : maintenir un cadre de vie au
concubin) ; une réponse du ministère de la justice (n° 14585) très critiquée a
condamné ce montage.
De même les libéralités résiduelles sont valables parce qu’elles reposent sur la
technique de la condition. La manifestation la plus classique des libéralités
résiduelles consiste dans le legs de residuo : le testateur dispose par legs en
faveur d’une première personne. Mais, il est prévu que ce qui restera dans le
patrimoine du légataire au décès de celui-ci (ie ce dont il n’aura pas disposé
entre vifs ainsi qu’il lui sera recueilli par un second légataire également
désigné par le disposant (c’est aussi l’ayant cause du disposant et non du premier
légataire)

- exceptions (on laisse de côté l’institution contractuelle et les donations-
partage : V. infra) :
• clause commerciale (1390), renonciation dans la séparation de corps (301),
• cas particulier des libéralités graduelles ;
• cas particulier de la renonciation anticipée à agir en réduction :

a) Protection de la réserve héréditaire


- disparition de la réserve des ascendants => droit de retour en compensation
(supra) + extension de la réserve du conjoint survivant (infra) ;
- la réserve des descendants : sans changement particulier quant à la quotité
(présenter les quotients) ; mais :
* changement dans la prise en compte des héritiers renonçants : jusqu’à présent on
ne tenait compte pour calculer la réserve globale que des enfants au premier degré
peu important qu’ils soient renonçants (l’idée était de ne pas déjouer les
prévisions du de cujus) : désormais l’enfant qui renonce à la succession n’est
compris dans le nombre d’enfants laissés par le défunt que s’il est représenté ou
s’il est tenu au rapport d’une libéralité en application de l’article 845.

* généralisation de la réduction en valeur


* possibilité de la renonciation anticipée à l’action en réduction : supra.
- la réserve du conjoint survivant
* extension du domaine : en présence d’ascendants aussi
* renonciation anticipée à l’action en réduction : supra
2° Conditions propres aux différentes libéralités ordinaires
a) Conditions propres aux donations
- objet
- formes
question de l’assurance sur la vie : CM 23 nov. 2004
- révocation
b) Conditions propres aux legs
- formes
- objet
- révocation et caducité
3° Régime spécifique aux libéralités matrimoniales
a) Extension de la quotité disponible
b) Validité de l’institution contractuelle
c) Organisation spécifique de la révocation

II.- Les principes gouvernant la transmission et le partage des successions

A.- La transmission de la succession


=> Principe de la continuation de la personne du défunt
1° Les mécanismes de la continuation
a) L’option successorale :
art. 768 s. => caractères classiques : indivisible, rétroactive, irrévocable sauf
les témpéraments classiques ; pas possible avant le décès ; après délai de 4 mois
(au lieu de 3 mois et 40 jours). ; mais aujourd’hui action interrogatoire non
seulement au profit des créanciers mais aussi des héritiers subséquents (art. 771)
; à l’expiration de la sommation de prendre parti, l’héritier dispose de deux mois
pour opter (art. 772) ; s’il n’a pas pris dans le délai, il est réputé acceptant.
Mais aujourd’hui prescription par dix ans (780)

- acceptation pure et simple (782 s) :


forme : expresse (782) ou tacite : par acte de disposition (art. 783) ; mais pas
par acte conservatoire, de surveillance ou d’administration provisoire = notion
extensive de ces actes (art. 784)
effets : continuation du défunt => obligation indéfinie au passif (785) et
irrévocabilité sous réserve de la décharge du passif inconnu (art. 785)

- acceptation à concurrence de l’actif net : (787 s.)


- remplacement du bénéfice d’inventaire ; effets gaux inchangés (cf. art. 791) ;
obligation classique d’administration (800) mais innovation intéressante : faculté
de conserver en nature des biens (793 et 794) ; mais organisation nouvelle et très
contestable, qui ne répondra pas aux objectifs (déclaration des créances dans les
quinze mois) : c’est une procédure collective, avec suspension des voies
d’exécution (792-1) ; paiement au prix de la course ;
- renonciation :
essentiellement inchangée : simplement, le principe est désormais que la
renonciation profite aux représentants, à défaut seulement, elle accroît la part
des cohéritiers

b) La saisine héréditaire

La loi investit de la saisine les héritiers dont le titre est particulièrement


digne de confiance, à tout le moins a priori vraisemblable et qui viennent en rang
utile à la succession. La saisine est individuelle et successive : si les
héritiers en rang utile sont défaillants (renonciation ou indignité), la saisine
passe de plein droit aux héritiers subséquents. Dans tous les cas, les héritiers
saisis sont censés l'avoir toujours été depuis l'ouverture de la succession. Mais
quels sont ces héritiers ?
- Lorsqu'ils viennent à la succession, les héritiers légaux bénéficient de la
saisine sans qu'il y ait lieu aujourd'hui de distinguer suivant la nature de leur
filiation : descendants, ascendants et collatéraux privilégiés ou ordinaires ont
vocation à la saisine. Depuis l'ordonnance du 23 décembre 1958, le conjoint
survivant a lui-même la saisine : c'est désormais un héritier régulier. Même les
successeurs anomaux se voient reconnaître la saisine. Finalement, seul l'Etat en
est dépourvu et cela se comprend : ce n'est pas un héritier véritable.

- Alors que la saisine est de principe pour les successeurs légaux, elle
n'appartient qu'exceptionnellement aux successeurs testamentaires. Seul le
légataire universel qui n'est pas en concours avec des héritiers réservataires (en
ce cas, la saisine appartiendrait à ceux-ci : art. 1004) bénéficie de la saisine
(art. 1006). Encore cette saisine ne produit-elle son plein effet que si le
légataire universel a été institué par un testament authentique. Dans le cas
contraire (testament olographe ou mystique) il doit en effet "se faire envoyer en
possession", c'est-à-dire se soumettre à une vérification judiciaire sommaire de
son titre en justice (art. 1008). Quant aux légataires à titre particulier ou à
titre universel, ils n'ont jamais la saisine.

Cela dit, quels sont les effets de la saisine ? Elle confère à son titulaire la
faculté d'entrer en possession de l'hérédité et d'exercer les actions du défunt
sans formalités préalables. L'héritier pourra donc exercer les actes matériels et
juridiques de possession dont les biens successoraux sont susceptibles :
appréhension, perception des fruits, actes d'administration, exercice ou défense
dans des actions en justice, etc.

Lorsque plusieurs héritiers saisis viennent concurremment à la succession, chaque


héritier est saisi pour le tout. En effet, la saisine est indivisible. Dès lors,
chacun est investi des prérogatives attachées à la possession sur l'ensemble de la
succession et peut exercer seul toutes les actions successorales que la saisine
autorise à mettre en oeuvre. Cela permettra à l'héritier diligent de ne pas pâtir
du manque d'empressement de ses consorts.

A l’inverse, les héritiers qui ne sont pas investis de la saisine ne peuvent


appréhender directement les biens successoraux, même si la propriété des biens
successoraux est censée leur être acquise au jour du décès du de cujus. Leur titre
successoral étant considéré comme n'étant pas suffisamment digne de confiance, ils
doivent encore, pour pouvoir entrer en possession, se soumettre à certaines
formalités : les uns doivent demander la délivrance de leur legs, les autres se
faire envoyer en possession.

Le légataire à titre particulier ou à titre universel doivent toujours demander la


délivrance de leur legs : suivant les cas, aux héritiers réservataires, au
légataire universel ou aux héritiers ab instestat appelés à la succession (art.
1011). La demande en délivrance n'est soumise à aucune formalité. Spontanément les
héritiers saisis peuvent remettrent les biens légués ; s'ils refusent les
légataires devront agir en justice.

Lorsque légataire universel est en concours avec des héritiers réservataires, il


doit également leur demander la délivrance de son legs, car il n'a pas alors la
saisine (art. 1004). Si cette demande intervient dans l'année du décès, la
jouissance du légataire sera censée remonter à l'ouverture de la succession (il
aura droit aux fruits depuis cette date), sinon elle ne commencera que du jour où
la demande aura été formée en justice ou du jour de la délivrance volontaire (art.
1005). Cette solution est étendue par la jurisprudence au légataire à titre
universel, mais non au légataire à titre particulier qui ne fait les fruits siens
qu'à compter de sa demande en délivrance.

Par ailleurs, la jurisprudence décide que le légataire (universel, à titre


universel ou à titre particulier) qui est en même temps appelé à la succession en
qualité d'héritier ab intestat, peut se prévaloir de la saisine qui s'attache à ce
dernier titre pour se dispenser de demander la délivrance de son legs.

Tempérament : le mandat judiciaire (art. 813-1 et s.) : Jusqu’alors il était


douteux que l’on puisse désigner un mandataire judiciaire en dehors du jeu de
l’article 815-6 à une succession en indivision acceptée purement et simplement. La
loi du 23 juin 2006 balaie ces doutes : un mandat judiciaire pourra désormais être
imposé aux cohéritiers, non seulement par l’un d’eux ou un créancier, mais par
toute personne intéressée, et même par le ministère public. Les circonstances
justifiant cette administration judiciaire sont conçues de la manière la plus
large qui soit : inertie, carence, faute d'un ou plusieurs héritiers dans
l’administration, mésentente, opposition d'intérêts, ou même simplement complexité
de la situation successorale, ce qui rejoint certaines affirmations
jurisprudentielles anciennes demeurées à vrai dire isolées. Les pouvoirs qu’il est
possible de confier à l’administrateur sont également très larges, puisqu’ils
recouvrent l’ensemble des actes d’administration et peuvent même être étendus aux
actes de disposition nécessaires à la bonne administration de la succession (C.
civ., art. 814 nouveau préc.). Une administration dans l’intérêt de tous en somme.

Mais, précisément, l’article 815-6 permet déjà la désignation d’un administrateur


judiciaire dans l’intérêt commun à l’initiative d’un indivisaire, et les
dispositions nouvelles imposent au demeurant le respect des pouvoirs
éventuellement confiés sur ce fondement (C. civ., 813-2 nouveau) ; elles prévoient
en outre que la convention d’indivision entre les héritiers met fin de plein droit
au pouvoir de l’administrateur judiciaire (C. civ., art. 813-9). Dans ces
conditions, il aurait certainement été préférable de renvoyer purement et
simplement à l’application de ce texte en cas d’indivision en autorisant les tiers
intéressés à s’en prévaloir, plutôt que de créer sans nécessité véritable un mode
de dessaisissement supplémentaire qui risque finalement de favoriser les conflits.
Aussi bien la même tendance à la complication tenant à la volonté de dynamiser à
tout prix l’administration et la liquidation de la succession sans trop se soucier
de l’existant, se constate au sujet du mandat conventionnel que les cohéritiers
sont invités à souscrire et qui est organisé par référence aux articles 1984 à
2010 du Code civil (C. civ., art. 813 nouveau), alors que la référence naturelle
paraissait devoir être recherchée dans l’article 815-3 qui envisage déjà
spécialement le mandat donné à un indivisaire.

Exception : le mandat posthume : art. 812 et s.


C’est l’une des innovations les plus médiatiques, mais aussi les plus discutables,
de la réforme du 23 juin 2006. Censé agir dans l’intérêt et pour le compte des
héritiers ou de certains d’entre eux (C. civ., art. 812 nouveau), le mandataire
posthume que le de cujus pourra désormais désigner pour gérer sa succession porte
en effet directement atteinte à la saisine et à la réserve des successeurs
concernés. Car le recours au mandat posthume n’est nullement limité à l’hypothèse
où le de cujus ne laisserait pas d’héritiers réservataires, ce qui est une
nouvelle atteinte au principe que la réserve doit être attribuée à ses
bénéficiaires franche de toute charge ou limitation imposée par le de cujus (comp.
C. civ., art. 912 nouveau). Aussi bien, la faculté de confier la saisine de la
succession à un légataire universel chargé de délivrer les diverses dispositions
testamentaires consenties par le testateur existait déjà et elle était bien connue
des notaires, mais elle ne valait qu’en l’absence d’héritiers réservataires. Avec
la réforme, cette limite au pouvoir de la volonté individuelle tombe.

On s’attendrait alors à ce que ce mandat posthume requière des conditions très


particulières et ne puisse être imposé que dans des circonstances exceptionnelles.
Pour être fort heureusement plus sévère que le projet initial, la loi se contente
pourtant en général, sous réserve d’une suffisante motivation, d’un intérêt
sérieux et légitime (C. civ., art. 812-1-1) ; ce n’est que lorsque le mandat est
prévu pour une durée supérieure à deux ans et pouvant aller jusqu’à cinq ans qu’il
exige des raisons particulières tenant à l’inaptitude ou à l’âge des héritiers, ou
bien à la nécessité de gérer des biens professionnels. Aussi bien, la protection
des héritiers contre une dépossession trop systématique de leur droit
d’administration a été recherchée dans d’autres directions : en amont, dans la
forme authentique qui est imposée pour la validité du mandat (même texte) ; en
aval dans le contrôle judiciaire de l’existence et de la permanence de l’intérêt
légitime et sérieux qui fonde la validité et le maintien du mandat (C. civ., art.
812-1-1 et 812-4).

Eu égard à la gravité de ce dessaisissement imposé aux héritiers, il faut espérer


que ce contrôle judiciaire sera rigoureux. D’autant que contrairement à ce qu’on
aurait pu imaginer les pouvoirs du mandataire n’ont été strictement encadrés ni
dans leur durée ni dans leur intensité. Sans doute, la durée initiale du mandat
est limitée à cinq ou deux ans, selon que l’on se trouve ou non en présence des
circonstances particulières que l’on a dites, mais cette durée peut être prorogée
sans que les textes ne prévoient à cela une quelconque limitation (C. civ., art.
812-1-1). Quant aux prérogatives qui peuvent être confiées à l’administrateur,
mise à part l’hypothèse d’une succession non encore acceptée (cf. C. civ., art.
812-1-3), elles ne sont nulle part limitées à telle ou telle catégorie d’actes
juridiques, le texte se bornant à renvoyer aux articles 1984 à 2010 du Code civil
(C. civ., art. 812-1-4). Cela signifie que tous les actes d’administration et même
les actes de disposition qui entrent dans la gestion normale du patrimoine sont a
priori permis à l’administrateur posthume.

D’un point de vue pratique, l’institution du mandat posthume pourra ainsi rendre
d’importants services. En particulier, elle pourra utilement remplir le rôle que
la fiducie joue dans d’autres systèmes juridiques et cela sera particulièrement
appréciable en cas d’incapacité d’un héritier ou de transmission d’une entreprise.
Mais, on l’a dit, le domaine du mandat posthume est bien plus large et il n’est
pas insignifiant que ce mandat puisse être fondé sur un intérêt légitime et
sérieux au regard de la personne de l’héritier ou du patrimoine successoral (C.
civ., art. 812-1-1). Sous couvert de protection de l’intérêt des héritiers,
l’institution glisse déjà dans les textes en direction d’une conception sociale de
la propriété par amputation de l’abusus. Aussi bien, il est précisé que les actes
réalisés par le mandataire dans le cadre de sa mission sont sans effet sur
l’option héréditaire (C. civ., art. 812-1-2), ce qui, hors l’hypothèse du
dépassement de pouvoirs, est difficilement concevable de la part d’une personne
réputée agir au nom et pour le compte des héritiers. Et il n’est pas non plus
indifférent que les seuls moyens des héritiers de se soustraire à cette
administration imposée soient d’en contester la validité ou la bonne exécution,
d’aliéner les biens qui en sont l’objet, ou de conclure un mandat
d’administration, non pas avec un tiers quelconque, mais avec le mandataire
posthume choisi par le testateur (C. civ., art. 812-4).

Autre limite à la saisine des héritiers : l’exécution testamentaire : (C. civ.,


art. 1025 et suivants). Le vent libéral qui souffle actuellement sur le droit des
successions a tout naturellement conduit à favoriser ce mode de dessaisissement
des héritiers par la volonté du de cujus, ce que l’on constate en particulier à la
primauté de principe qui lui est reconnue sur l’administration judiciaire des
nouveaux articles 813-1 et suivants (C. civ., art. 813-2 nouveau) et à la
disparition de la faculté qui appartenait auparavant aux héritiers de mettre fin à
la saisine de l’exécuteur testamentaire en lui remettant une somme suffisante pour
le payement des legs mobiliers (C. civ., anc. art. 1027). Au titre des
simplifications qui ont été apportées au fonctionnement de l’institution, on doit
signaler que l’obligation de procéder à l’inventaire et éventuellement d’apposer
les scellés laisse opportunément place à l’obligation générale de prendre les
mesures conservatoires utiles à l’exécution du testament (C. civ., art. 1029
nouveau). Surtout, la distinction assez obscure et artificielle de l’exécuteur non
saisi, de l’exécuteur saisi du mobilier et de l’exécuteur saisi et aux pouvoirs
renforcés par le testateur disparaît des textes au profit d’une meilleure
distinction des pouvoirs de simple surveillance et de ceux d’exécution pouvant
appartenir à l’exécuteur testamentaire sur décision spéciale du testateur (C.
civ., art. 1030 et 1030-1 nouveaux). En même temps, la limitation de la saisine à
un an un jour à compter du décès est heureusement repoussée à deux ans
prorogeables une année par le juge (C. civ., art. 1031 nouveau).

Mais, précisément, quels pouvoirs l’exécuteur testamentaire pourra-t-il recevoir


sur habilitation spéciale du testateur ? Désormais cette habilitation sera requise
pour la vente du mobilier à fin d’exécution des legs particuliers (C. civ., art.
1030), ce qui est logique. Mais, dans l’ensemble, la tendance est à l’extension
des pouvoirs de l’exécuteur testamentaire : en l’absence d’héritier réservataire
acceptant, il pourra en effet être habilité à disposer en tout ou partie des
immeubles de la succession (C. civ., art. 1030-1), le pouvoir de vendre le
mobilier pour l’acquittement des dettes urgentes lui étant reconnu en toute
hypothèse (C. civ., art. 1029). Toujours en l’absence de réservataire, il pourra
être habilité à recevoir et placer les capitaux, à payer les dettes et les
charges, ce qui rejoint les solutions auxquelles était parvenue la jurisprudence,
mais aussi à procéder à l'attribution ou au partage des biens subsistants entre
les héritiers et les légataires (C. civ., art. 1030-1), ce qui va bien au-delà des
possibilités actuelles. L’extension de pouvoirs qui résulte de cette dernière
solution est à vrai dire considérable ; elle donne un intérêt démultiplié à
l’exécution testamentaire en l’absence d’héritier réservataire (ce qui donne au
demeurant un relief particulier à la réserve bien légèrement accordée au conjoint
survivant par la loi du 3 décembre 2001 et à la suppression inopinée de celles des
ascendants : L. 23 juin 2006, art. 12). Au-delà de l’hypothèse, ce qu’il faut
retenir, c’est que la nouvelle exécution testamentaire se veut systématiquement
respectueuse de la réserve héréditaire, qui constitue ici comme ailleurs la limite
naturelle au pouvoir de la volonté du de cujus. Ainsi, la vente du mobilier pour
l’exécution des legs demeure naturellement cantonnée à la quotité disponible (C.
civ., art. 1030). De même, les habilitations spéciales que le testateur peut
conférer à l’exécuteur testamentaire requièrent très justement l’envoi en
possession de l’article 1008 lorsque le testament n’est pas authentique (C. civ.,
art. 1030-2), ce qui est l’exacte reconnaissance des limites que le caractère
d’ordre public de la saisine légale impose à la volonté du testateur. A cet égard,
il est tout à fait notable que la vente des immeubles à l’initiative de
l’exécuteur testamentaire ne soit permise qu’en l’absence d’héritiers
réservataires acceptants (C. civ., art. 1030-1) : du moment que les héritiers
mêmes réservataires ne peuvent plus prétendre qu’à des droits successoraux en
valeur, seul le caractère d’ordre public de leur saisine peut en effet fonder la
solution.
TITRE 2ème : LES CONSEQUENCES DE LA CONTINUATION
Il faut distinguer suivant que cette continuation est le fait d'un héritier unique
ou de plusieurs héritiers, suivant que le de cujus laisse à sa survivance un ou
plusieurs héritiers censés continués sa personne.

2° Les conséquences de la continuation


a) En présence d’un héritier unique
- Appropriation de l’actif : illimitation des pouvoirs et entrée en possession
favorisée par la saisine
- Obligation au passif : principe obligation indéfinie qd titre universel ou à
titre universel (y compris le successeur anomal) (art 785) ; exceptions : les
dettes alimentaires à la charge de la succession et les legs de sommes d’argent
(ibid) : obligation intra vires ; la possibilité de décharge d’une partie du
passif inconnu (art. 786).
b) En présence d’une pluralité d’héritiers
- Le régime de l’indivision : Une autre ambition de la loi du 23 juin 2006 a été
de rénover l’administration des successions indivises dans le sens du dynamisme.
Et de là plusieurs innovations majeures : on n’insiste pas sur l’élargissement des
mesures conservatoires (815-2) ; deux autres innovation sont plus importantes : la
première a déjà été signalée : c’est la rénovation des mandats judiciaires, la
seconde qui est proprement révolutionnaire, consiste dans le passage de la règle
de l’unanimité à la règle de la majorité des deux tiers des droits indivis pour
les actes d’administration (C. civ., art. 815-3 nouveau). Destinée à fournir
remède aux dissensions paralysantes que les notaires constatent souvent dans la
gestion des indivisions, la solution insufflera une dynamique considérable,
puisqu’elle concernera tous les actes d’administration qui ressortissent à
l’exploitation normale des biens indivis et même la conclusion et le
renouvellement des baux d’habitation. Mais elle ne s’imposera pas sans d’épineuses
querelles de délimitation et elle réalise, en tout cas, un dessaisissement
extrêmement préoccupant des indivisaires minoritaires. Car la majorité des deux
tiers pourra aller jusqu’à leur imposer un mandat général d’administration au
profit d’un tiers ou de l’un d’entre eux, et elle pourra décider de la vente des
meubles pour payer les dettes et charges de l’indivision (même texte), ce qui lui
permettra de dégager les moyens de sa politique de gestion. Dans ces conditions,
on ne pourra pas faire l’économie d’une réflexion sur la compatibilité de cette
innovation avec la garantie du droit fondamental de propriété et la transformation
de la conception de l’indivision qu’elle induit, sans omettre d’ailleurs de se
demander si la règle majoritaire ne réalise pas une discrimination entre les
indivisaires, ne serait-ce que parce qu’elle sera inapplicable dans les
indivisions égalitaire à deux.

La distinction de l’obligation et de la contribution au passif : c’est une


nécessité ; chacun est tenu indéfiniment, mais sans solidarité : il y a division
au prorata des parts actives (au stade de l’obligation, cela suppose la saisine) ;
celui qui paie plus que sa part dispose d’un recours, la division au prorata
s’imposant aussi pour la contribution.

B.- Le partage de la succession


1° Le droit commun du partage
Droit au partage et tempéraments (maintien judiciaire dans l’indivision ;
conventions d’indivision).
a) La composition de la masse partageable
- les biens existants
- les rapports : 843 s. nveaux textes, mais solutions stables :
* débiteurs et créanciers ; rq. Le renonçant conserve la libéralité rapportable à
concurrence du disponible, sauf stipulation contraire précise désormais la loi
(art. 845) ; autre nouveauté : celui qui n’était pas successible lors de la
donation ne doit pas le rapport, sauf exigence expresse (art. 846)
* objet : distinction des libéralités rapportables et préciputaires ; précision
que les donations de fruits sont rapportables sauf dispense expresse (art. 851) ;
exclusion des frais d’entretien… sf clause contraire (art. 852)

* exécution du rapport en valeur ; montant du rapport : distinction valeur/état ;


précision : on ne tient pas compte de la dépréciation si elle était inéluctable :
art. 860

b) Les formes du partage


- le partage volontaire : tous les indivisaires présents, d’accords et capables
(art. 835) + possibilité de désigner en justice un représentant à l’indivisaire
taisant (art. 837) : si le partage porte sur des droits immobiliers, la forme
notariée est-elle nécessaire ? (V. 835, al. 2)
- le partage judiciaire : désormais l’égalité est en valeur (art. 826) ; mais
attributions préférentielles : art. 832 s.
; valeurs fixées à la jouissance divise (art. 829)

Dans tous les cas : garantie, privilège et sanction de la lésion : mais complément
de part (art. 889 s.)

2° Les libéralités-partages
a) Domaine et régime des libéralités-partages
- donations-partages au profit des héritiers présomptifs
- donations-partages hors du cercle des héritiers présomptifs
b) Liquidation en présence d’une donation-partage
Cas n° 1 : Un père de famille laisse à son décès des biens valant 50. De son
vivant, il a fait donation rapportable à son fils A d'un tableau évalué à 50 au
jour de l'acte et 100 à l'ouverture de la succession. Plus tard, il a fait une
donation-partage entre ses deux autres enfants B et C qui ont reçu chacun un
immeuble valant l'un 100 et l'autre 200 au jour de l'acte, 300 et 350 au jour de
l'ouverture de la succession. Les biens laissés par le de cujus sont évalués à 50.
Liquidez la succession.
Variante : la donation adressée à A a été incorporée telle quelle à la donation-
partage.

Cas n° 2 : Soit une donation-partage consentie par un père de famille à ses deux
enfants A et B : A reçoit un lot évalué à 260 au jour de l'ouverture de la
succession et 330 au jour de son règlement, B reçoit un lot valant 240 et 310 à
ces mêmes dates. Quelques années plus tard, l'ascendant consent une donation
préciputaire à son fils A : le bien donné vaut 150 à l'ouverture de la succession
et 210 au jour de la liquidation. Survient ensuite un nouvel enfant, C, qui est
gratifié par donation rapportable d'un bien d'une valeur de 110 au décès du
disposant et de 130 à l'époque du règlement. Au décès de l'ascendant les seuls
biens existants valent 40 ; ils sont évalués à 60 lors de la liquidation. Procédez
à celle-ci.

Solution du cas n° 1 : La masse de calcul de la réserve est de 800 (50 + 100 + 300
+ 350) ; les parts de réserve et la quotité disponible sont donc de 200. B et C
ont été pourvus de leur réserve dans la donation-partage. A qui n'y a pas
participé compose la sienne à hauteur de 150 au moyen de l'avancement d'hoirie
reçu (qui cesse ainsi d'être rapportable) et des biens existants. Pour le surplus,
c'est-à-dire les 50 manquants, il doit poursuivre la réduction de la donation-
partage ; les lots de B et C excèdent leur réserve de 100 et 150, soit 250. La
réduction étant proportionnelle, il convient de réduire de 20 le lot de B (50 x
100 / 250) et de 30 le lot de C (50 x 150 / 250). Si le règlement de la succession
est différé à une époque où le lot de B vaut 360 et celui de C 420, les indemnités
de réduction devront être réévaluées en conséquence : B devra 24 (360 x 20 / 300)
et C 36 (420 x 30 / 350).

Variante : Si la donation rapportable adressée à A avait été incorporée à la


donation-partage, tous les enfants du de cujus ayant participé à celle-ci, les
biens partagés par anticipation devraient être évalués au jour de l'acte pour
l'imputation et le calcul de la réserve. En conséquence, la masse de calcul serait
de 400 (50 + 50 + 100 + 200) et la quotité disponible ainsi que les parts
individuelles de réserve de 100. À nouveau, seul A n'aurait pas été pourvu de sa
réserve dans la donation-partage. Mais il pourrait cette fois compléter ses droits
avec les biens existants sans qu'il soit nécessaire de réduire les lots de B et C.

Solution du cas n° 2 : La part de réserve de chaque enfant se chiffre, ainsi que


la quotité disponible, à 200 : (260 + 240 + 150 + 110 + 40) / 4 ; C n'ayant, par
hypothèse, reçu sa réserve dans la donation-partage va la composer à l'aide de la
donation rapportable à lui faite et des biens existants : il est ainsi rempli de
ses droits à hauteur de 150 (110 + 40). Pour obtenir les 50 manquants, il agit en
réduction. Les lots de A et B dans la donation-partage s'imputent sur leur part de
réserve et pour le surplus (60 et 40) sur le disponible qui est ainsi ramené à 100
; la donation préciputaire adressée à A absorbe ce reliquat de disponible et est
réductible pour le surplus (50 / 150) ; l'indemnité de réduction due à C au jour
de la liquidation est de 70 (50 / 150 x 210).
Si C avait été sciemment omis de la donation-partage, A aurait finalement
recueilli 470 (son lot évalué à 330 et le préciput qui a trouvé à s'imputer,
c'est-à-dire 140), B 310 (valeur actuelle de son lot) et C 260 correspondant à ses
droits à réserve (60 + 130 + 70). Mais n'ayant pas été conçu à l'époque, il peut
encore réclamer sa part dans le disponible. Si le partage n'avait pas été réalisé
par anticipation, sa part héréditaire serait de 900 (60 + 330 + 310 + 130 + 70) /
3 = 300. Il peut donc agir en réduction de la donation-partage pour obtenir les 40
qui viendront compléter les 260 auxquels il peut prétendre au titre de sa réserve.
Cette somme est due par A à hauteur de 30 et B à hauteur de 10, sommes
représentant la valeur de leur lot qui dépasse leur part héréditaire. Au total A a
droit à 440 (330 - 30 + 140) ; B à 300 (310 - 10) et C à 300 (60 + 130 + 70 + 30 +
10) .

Conclusion : Méthodologie liquidative.


LIQUIDATION CIVILE
Observations générales
Régime matrimonial
Succession
Liquidation du régime matrimonial
Qualification des biens et récompenses
Aperçu liquidatif
a) Reprises et récompenses
1° de Mme ou de sa succession
solde dû à ou par la communauté
2° de M. ou de sa succession
solde dû à ou par la communauté
b) Liquidation de la communauté
Actif
Passif
Actif net
Dont la moitié pour chacun des époux ou sa succession est de
Liquidation de la succession
Dévolution de la succession
Calcul de la quotité disponible
Imputation des libéralités
Réductions éventuelles
Droits du conjoint
Masse partageable
Droits des parties
Attributions éventuellement

LIQUIDATION FISCALE
Règles d’imposition applicables

1° Donations
2° Récompenses
3° Actif taxable
4° Passif déductible
5° Abattements
6° Barème
7° Réductions de droits
DECLARATION DE SUCCESSION
a) Récompenses
b) Communauté
Actif
Passif
Actif net
Dont la moitié pour la succession

c) Succession
d) Détermination des parts imposables
e) Calcul des droits de mutation exigibles

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