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Pour une vraie justice

Options communautaires sûres destinées à réparer le tort


causé par la criminalité et à réduire le recours à
l’emprisonnement ou la durée des peines d’emprisonnement

Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie


Pour une vraie justice
Un répertoire d’initiatives, de programmes et de mesures législatives

Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie est une coalition nationale
d’Églises représentant onze confessions qui oeuvrent depuis 1974 dans le domaine
de la justice pénale, de la prévention du crime et du développement communautaire.

Le Conseil des Églises remercie le Service correctionnel du Canada d’avoir financé ce projet.

This document is also available in English

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Publié par le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie, mai 1996.
© 1996 Le Conseil des Églises du Canada

Données de catalogage avant publication (Canada)

Vedette principale au titre :


Pour une vraie justice : Options communautaires sûres destinées à réparer le tort causé par la
criminalité et à réduire le recours à l’emprisonnement ou la durée des peines d’emprisonnement

Comprend des références bibliographiques


Publ. aussi en anglais sous le titre: Satisfying justice.
Publ. en collaboration avec le Service correctionnel du Canada
ISBN 0-662-81151-8
No de catalogue JS82-76/1996F

1. Services correctionnels communautaires - Canada


2. Emprisonnement - Alternative - Canada
3. Criminels - Réhabilitation - Canada
I. Conseil des églises pour la justice et la criminologie (Canada).
II. Service correctionnel du Canada
III. Titre : Options communautaires sûres destinées à réparer le tort causé par la criminalité et à
réduire le recours à l’emprisonnement ou la durée des peines d’emprisonnement.

HV9308.S37 1996 364.6’8’0971 C96-980256-0

Conception et production: Phoenix Creative Services

Pour obtenir de plus amples renseignements ou d’autres exemplaires, prière de communiquer avec :

Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie


507, rue Bank
Ottawa (Ontario)
K2P 1Z5
Tél. : (613) 563-1688
Téléc. : (613) 237-6129

On peut aussi se procurer des exemplaires auprès du Service correctionnel du Canada en composant
le numéro sans frais 1-800-665-8948 ou le numéro de télécopieur (613) 545-8247.

Graphique de la page couverture: nous espérons que l’évolution amorcée vers une vraie justice, que
symbolise le cercle, l’emportera progressivement sur l’emprisonnement, représenté par les barreaux.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
À Joan Stothard,
décédée du cancer le 26 octobre 1995.
Elle croyait profondément à la nécessité d’une vraie justice.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Avant-propos
J’ai été extrêmement heureux d’apprendre que le Conseil des Églises
pour la justice et la criminologie avait accepté de relever le défi de
dresser une liste d’initiatives communautaires de lutte contre la
criminalité. Le Service correctionnel du Canada s’est fait un plaisir
d’aider à financer ce projet.

De nombreuses personnes, peut-être même la plupart, conviennent que


les délinquants non violents devraient en principe purger leur peine
dans la collectivité et non en prison. Toutefois, certains doutent qu’il soit
possible de concevoir et d’appliquer des sanctions communautaires
efficaces (ces mêmes sceptiques concluent courageusement que
l’emprisonnement est une sanction efficace pour ces délinquants qui
présentent de faibles risques!).

Ce répertoire devrait aider les gens à comprendre qu’il existe tout un


éventail de programmes dont certains donnent de meilleurs résultats
que d’autres. Il n’y a pas de formule magique qui puisse répondre aux
besoins de toutes les collectivités; cependant, si ce répertoire favorise
l’adoption de mesures innovatrices et qu’une bonne partie de ces
dernières permettent d’atteindre les objectifs fixés, nous aurons réalisé
certains progrès.

John Edwards
Le Commissaire du Service
correctionnel du Canada

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Table des matières

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .I

Qu’entendons-nous par «vraie justice»? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .IX

Organisation du répertoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .XXXII

Première section: Pour une vraie justice


Série d’initiatives destinées à réparer le tort causé par la criminalité, à répondre aux besoins connexes et à
prévenir ou à réduire sensiblement le recours à l’emprisonnement

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .1

Le cas de Kevin Hollinsky à Windsor . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .2


«Restorative Resolutions»- Winnipeg . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5
Justice communautaire de Kwanlin Dun - Détermination de la peine par le Cercle,
territoire du Yukon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .7
Services de médiation, Winnipeg . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .11
Programme du Cercle de guérison holistique communautaire - Première nation
de Hollow Water (Manitoba) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .16
Mike de Rosemary (Alberta) - Intervention communautaire dans le système de justice . . . . . . . . .19
Pro-Services, Québec . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .22
Atoskata - Projet d’indemnisation des victimes à l’intention des jeunes, Regina . . . . . . . . . . . . . . .23
La médiation réparatrice dans le cas de crime grave - Belgique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .24
Réaction communautaire au crime - Une utilisation plus créative de la probation, Minnesota . . .27
Réduction de la durée de la peine grâce à un programme de médiation post-
condamnation - Oklahoma . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .29
Conférences familiales - Réussir où la prison échoue, États-Unis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .31
Cercle de soutien et de responsabilisation pour un délinquant sexuel mis
en liberté - Le récit d’une collectivité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .34

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Deuxième partie: Pour une vraie justice
Série d’initiatives destinées à réparer le tort causé par la criminalité et à répondre à des besoins
connexes, et certaines incidences sur la réduction du recours à l’emprisonnement ou la durée
des peines d’emprisonnement

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .37

1. Médiation entre la victime et le délinquant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .40


Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .40
Un modèle de médiation avant procès, Canada . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .43
Programmes
(i) Centre pour la résolution des disputes d’Ottawa-Carleton . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .46
(ii) Le Programme de médiation entre la victime et le délinquant d’Edmonton . . . . . . . . . . .46
(iii) Le projet pilote de médiation présentencielle - MOVE Moncton (N-B.) . . . . . . . . . . . . . . .47
Programme de médiation entre la victime et le délinquant du comté de
Genesee - Genesee (New York) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .48
Services de médiation entre la victime et le délinquant dans le cas de crimes
violents et non violents
Initiatives de justice communautaire - Langley (C.-B.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .50
MOVE - Moncton . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .50

2. Détermination de la peine par le Cercle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .52


Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .52
Maison Cumberland, Saskatchewan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .57
Cercles urbains - Vol à main armée à Saskatoon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .58
La participation au Cercle de détermination de la peine - Une expérience
menant à un changement d’attitude, Prince Albert, Saskatchewan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .62
Cas d’homicide involontaire à Fort St. John (Colombie-Britannique) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .63

3. Conférences familiales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .66


Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .66
Conférences familiales - Nouvelle-Zélande . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .70
Conférences familiales - Wagga Wagga (Australie) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .74
Conférences familiales - Jeunes autochtones, Regina . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .77
Conférences familiales - États-Unis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .78
Projet de prise de décision lors d’une conférence familiale - Terre-Neuve et Labrador . . . . . . . . . .80

4. Comités communautaires de détermination de la peine et comités de justice pour la jeunesse . .81


Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .81
Projet de justice tribale de Teslin - Comité de détermination de la peine (Yukon) . . . . . . . . . . . . . .82
Comité de justice de Wabasca (Alberta) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .85
Comité de détermination de la peine du lac des Esclaves (Alberta) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .86
Comités de justice pour la jeunesse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .87
Comité de justice des Aînés - Fort Resolution (Territoires du Nord-Ouest) . . . . . . . . . . . . . . . . . . .88
Comité de justice communautaire de Russell Heights - Ottawa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .88

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Troisième partie: Pour une vraie justice
Série d’initiatives destinées à éviter le recours à l’emprisonnement, comportant ou
non certains éléments réparateurs

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .90

1. Déjudiciarisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .92
Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .92
Projet de déjudiciarisation des adultes de Nouvelle-Écosse - Dartmouth et Sydney Nord . . . . . . .93
Projet de déjudiciarisation du Conseil communautaire -
Services juridiques autochtones de Toronto . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .95
Projet d’approche de la cour - Aide aux délinquants malades mentaux - Ottawa . . . . . . . . . . . . . .97
Solution de rechange communautaire à l’emprisonnement pour infractions sexuelles,
Canim Lake (C.-B.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .99
Conseil de déjudiciarisation micmac de l’île Lennox - Île-du-Prince-Édouard . . . . . . . . . . . . . . . .101
E.V.E. (Entraide vol à l’étalage) - Montréal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .102
Projet de médiation et de déjudiciarisation à l’intention des jeunes - Shaunavon (Sask.) . . . . . . .105
Programmes de mesures de rechange à l’incarcération . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .106

2. Programme d’absolution pour suivre une cure de désintoxication - Yukon . . . . . . . . . . . . . .110

3. Ordonnances de service communautaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .113


Service communautaire en Nouvelle-Écosse - Exemples de réussite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .113
Youth Alternative Society - Halifax . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .114
Ordonnances de travaux communautaires - Québec . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .115
Ordonnances de service communautaire - Une perspective internationale . . . . . . . . . . . . . . . . . . .118
Peines de service communautaire - Minnesota . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .118
Service communautaire - Norvège . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .119
Service communautaire pour adultes et jeunes aux Pays-Bas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .120
Service communautaire - Zimbabwe et Swaziland . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .121

4. Probation sous surveillance intensive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .122


Projet de bureau d’aide juridique pour les jeunes - Edmonton et Calgary . . . . . . . . . . . . . . . . . . .122
Programme communautaire de probation réparatrice - Vermont . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .124
Projet Dos Pasos à l’intention des femmes enceintes et toxicomanes - Arizona . . . . . . . . . . . . . . .126
Solution de rechange au programme de placement sous garde des jeunes
- Kitchener-Waterloo (Ont.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .127
Second Chance - Programme de dédommagement Lloydminster - Alberta - Saskatchewan . . . . .129
Programme d’intervention intensive - St. John’s (T.-N.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .129
Programme d’intervention d’Eastwood - Edmonton (Alb.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .131
Programme de la rue Rideau pour la jeunesse - Ottawa (Ont.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .132
Sober Streets - Programme de lutte contre l’alcool au volant - Kitchener-Waterloo (Ont.) . . . . . .134
Projet à l’intention des récidivistes de la conduite avec facultés affaiblies
- Île-du-Prince-Édouard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .135
Programme à l’intention des adolescents toxicomanes - Île-du-Prince-Édouard . . . . . . . . . . . . . .135

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
MAPP - Programme de prévention axé sur la collaboration interorganismes
à l’intention des jeunes qui présentent des risques élevés - Brandon (Man.) . . . . . . . . . . . . .137
A.I.M. - Programme d’évaluation, d’intervention et de surveillance - Brandon . . . . . . . . . . . . . . .137

5. Modèle de préservation de la famille . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .138


La Ronge (Sask.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .138
Services de soutien communautaire - St. Lawrence Youth Association - Kingston . . . . . . . . . . . . .140
Programmes de préservation de la famille aux États-Unis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .141
Projet de préservation de la famille de Simpsonville, Caroline du Sud . . . . . . . . . . . . . . . . . . .142
Programme de liens familiaux «Family Ties» - ville de New York . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .142

6. Programmes résidentiels/de placement - solutions de rechange . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .143


Opportunities for Independence - Programme à l’intention des délinquants
ayant un handicap de développement - Winnipeg (Manitoba) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .143
Programme de résidences communautaires - Saskatchewan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .146
Expansion - Femmes de Québec, Québec . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .147
Maison Thérèse - Casgrain, Montréal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .148
Programme résidentiel pour jeunes délinquants sexuels - Ottawa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .149
Foyers d’accueil Maple Star - Colorado . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .150
Programme d’internat et d’externat «Youth Futures» - Vallée du bas Fraser (C.-B.) . . . . . . . . . . .152
Ranch El’dad pour hommes adultes ayant une déficience mentale - Steinbach (Man.) . . . . . . . . .154

7. Programmes de solutions de rechange au cautionnement et sanctions administratives . . . .155


Libération provisoire des jeunes par voie judiciaire - Saskatchewan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .155
Centre Ma Ma Wi Wi Chi Itata - Winnipeg . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .157
Programme de solutions de rechange à l’amende - Yukon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .157
Sanctions administratives - Yukon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .158

8. Planification axée sur le client . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .159


Services de défense des droits au moment de la détermination de la peine:
Centre national des établissements et des solutions de rechange des États-Unis . . . . . . . . . . .160
Planification axée sur le client - Caroline du Nord . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .161
Planification axée sur le client - Nouveau-Mexique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .161

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Quatrième section: Pour une vraie justice
Série d’initiatives destinées à réduire la durée du placement sous garde en allégeant
l’application de la peine d’emprisonnement

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .162

1. Programmes de surveillance communautaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .164


Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .164
Agression sexuelle - Un cas de guérison dans une communauté - Ontario . . . . . . . . . . . . . . . . . . .166
Protégeons les enfants - Les enfants et l’agression sexuelle - Yukon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .168
Services d’intervention judiciaire de Coverdale, Halifax . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .169
Surveillance communautaire des délinquants condamnés - Nouveau-Brunswick . . . . . . . . . . . . .170
Service communautaire : Délinquants occasionnels - Barrie (Ontario) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .172
Programme Stop and Think : Programme d’autorisation de sortie pour les jeunes - Halifax . . . .172
Autres variations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .173
La détermination de la peine et les programmes communautaires selon certains juges . . . . . . . .174

2. Préparation à la mise en liberté pour une réinsertion sociale réussie . . . . . . . . . . . . . . . . . . .175


Participation d’Aînés aux audiences de la Commission nationale des libérations
conditionnelles - région des Prairies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .175
Entraide détenu anonyme : Programme de mise en liberté anticipée - Québec . . . . . . . . . . . . . . .179
Groupes sentences-vie - Montréal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .181
Life Line - Windsor . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .181
Projet Another Chance - Kingston . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .181
Projet d’aide aux délinquants après la mise en liberté: Services juridiques autochtones
- Toronto . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .183
Programme Respect - Brandon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .183

3. Camps dans la nature . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .184

4. Détention à domicile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .186

5. Remarques sur la surveillance électronique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .187

Conclusions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .189

Annexe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .205

Références . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .208

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Introduction

Le système de justice au Canada indifféremment à


est en pleine crise. Les l’incarcération comme
populations carcérales montent principal moyen de
en flèche. Les coûts ne sont plus lutte contre la
abordables. Pourtant, les gens se criminalité n’est pas,
sentent de moins en moins en dans bien des cas, la
sécurité. Ce que les Canadiens mesure la plus efficace
veulent, ce dont ils ont besoin, et elle impose une
c’est d’une «vraie justice» - une fardeau financier»
réponse à la criminalité qui prend (Rethinking
les victimes au sérieux et qui aide Corrections : A
le processus de guérison, une discussion Paper
réponse qui tient les délinquants préparé par le Groupe
responsables de leurs actes et de revue du système
prend des mesures efficaces à leur correctionnel, 1995,
égard, une réponse qui s’attaque gouvernement du
résolument aux causes de la Canada, obtenu en
criminalité. Il est évident que vertu de la Loi sur
l’incarcération n’est pas la bonne l’accès à
solution. l’information).

D’ailleurs, un document de haut Au Conseil des Églises pour la


niveau a fait aux leaders du justice et la criminologie, nous
gouvernement la mise en garde nous posons depuis un certain
suivante : temps la question suivante :
quelles mesures autres que
[traduction] l’emprisonnement peuvent être
...«le maintien du prises pour répondre aux
statu quo accroîtra nombreuses exigences liées à la
inévitablement le justice?
surpeuplement et se
traduira par une Bien entendu, nous voulons tous
détérioration des une protection contre le
conditions dans les comportement violent. Par
prisons, de l’efficacité contre, lorsque nous lisons dans
des programmes et des ce même rapport que, selon les
mesures de sécurité... données recueillies :
La stratégie actuelle
qui consiste à avoir ... le recours à l’emprisonnement
recours trop souvent et comme châtiment réduit peu,
voire ne réduit pas du tout, le

I Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
risque global et que d’autres ... lorsqu’on nous dit que notre
moyens moins onéreux peuvent recours au placement sous garde
être tout aussi efficaces, sinon dans le cas de jeunes criminels est
plus; considérablement plus élevé que
la moyenne nationale dans
... lorsqu’on nous dit que 84 % d’autres pays comparables ... et
des détenus admis dans des que nos établissements carcéraux
établissements provinciaux et pour adultes sont surpeuplés au
37 % des détenus dans les point où nous devrons bientôt en
pénitenciers fédéraux sont construire d’autres, ce qui
incarcérés pour des infractions entraînera des frais considérables,
non violentes; si nous ne changeons pas notre
façon de faire régner la justice;
...lorsqu’on nous dit que le taux
d’incarcération au Canada est le ... lorsqu’on nous dit que les taux
plus élevé de tout pays d’incarcération et la durée des
démocratique de l’Ouest à peines d’incarcération non
l’exception des États-Unis; seulement ne réduisent pas les
taux de récidive et le taux de

1984-1995
Taux d'incarcération dans
les établissements fédéraux au Canada
Nombre %
d'admissions d'augmentation
1984 10 434
1985 10 980 5,23%

1986 11 225 2,23%

1987 10 785 -3,92%

1988 11 169 3,56%

1989 11 549 3,40%

1990 11 779 1,99%

1991 11 854 0,64%

1992 12 432 4,87%

1993 13 006 4,62%

1994 13 972 7,42%

1995 14 744 5,53%

Le Service correctionnel du Canada -


Système de la gestion des renseignements - Compte de fin d’année.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie II
criminalité en général, mais au réussi à freiner la tendance à la
contraire parfois les font hausse de ces chiffres, déjà élevés
augmenter; selon les normes internationales.
Nous ne pouvons plus nous
... et lorsqu’on nous dit que le permettre cet accroissement de la
coût de nos systèmes population carcérale, que ce soit
On peut avoir recours
correctionnels pour adultes était sur le plan financier ou sur le
aux programmes de
déjudiciarisation avant d’environ 2 milliards de dollars plan social. L’augmentation
ou après le dépôt d’une en 1992-1993 et qu’il en coûte annuelle moyenne qui s’est
accusation. Ces 52 953 $ par an pour garder un longtemps maintenue à 2,5 % est
programmes sont délinquant dans un pénitencier passée au cours des dernières
fondés sur la comparativement aux 10 951 $ années à plus de 4 %, tendance
conviction que, dans de qu’il en coûterait pour assurer sa qui, prévoit-on, s’accentuera, ce
nombreux cas, surveillance dans la collectivité, et qui aura pour effet de réduire
l’intervention sur toute que la population carcérale encore les ressources financières
la ligne du système de fédérale s’accroît à un taux qui disponibles pour d’autres
justice pénale, qui permet de prévoir une programmes essentiels dans les
entraîne des frais augmentation de 50 % au cours domaines de la santé ou de
considérables, n’est pas des dix prochaines années si nous l’éducation et, comme l’a signalé
nécessaire pour ne changeons pas notre façon de le document Rethinking
atteindre les objectifs de faire les choses;alors nous devons Corrections, aura de graves
la loi ou de la
nous demander : répercussions sur la qualité et les
collectivité. Les
valeurs de la société en général.
options en matière de
détermination de la Pourquoi agissons-nous de la
peine doivent tenir sorte? Pourtant, il existe au Canada et
compte des besoins des Ne pourrions-nous pas dépenser ailleurs des programmes
victimes et de la cet argent à MEILLEUR escient, communautaires efficaces.
sécurité du public. de manière à accroître notre Certaines sphères de compétence
Elles doivent aussi sécurité? de par le monde ont réussi à
permettre aux Comment pouvons-nous nous réduire le recours à
tribunaux de rendre attaquer aux problèmes de façon l’emprisonnement.
différentes décisions qui PLUS INTELLIGENTE?
n’incluent pas toujours Que pouvons-nous faire d’autre? Nous nous sommes donc donnés
une peine pour mandat de dépister et de
d’emprisonnement à De nombreux gouvernements au décrire un éventail de
moins que celle-ci ne Canada et ailleurs se posent des programmes qui selon nous sont
soit clairement justifiée. questions semblables. Ils veulent les plus efficaces. Nous voulions
diminuer la taille de leurs montrer aux victimes d’actes
Le solliciteur
populations carcérales et les coûts criminels, aux décideurs du
général Herb Gray
y afférents. Au Canada, système de justice et au public en
1er octobre 1995
cependant, tous les efforts général quelles mesures peuvent
déployés par les gouvernements être prises pour rendre une justice
jusqu’ici pour trouver des vraiment satisfaisante tout en
solutions de rechange à réduisant notre recours à
l’incarcération n’ont pas vraiment l’incarcération, dans tous les cas

III Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
où il s’est révélé que des individus ou des groupes se
l’emprisonnement n’était pas sont spontanément alliés à la
justifié et était en fait contre- suite d’un crime tragique pour
productif. Même si nous chercher ensemble des solutions
reconnaissons que les initiatives propres à assurer la protection de
de prévention du crime à long la collectivité et rendre une vrai
terme demeurent la meilleure justice qui ne se contente pas de
façon d’assurer la sécurité de nos recourir à l’incarcération.
collectivités, le présent répertoire
porte exclusivement sur des Plus important encore, nous
initiatives prises, des avons constaté que, dans
programmes mis en place et des certaines parties du monde y
mesures législatives adoptées en compris au Canada, certaines
réaction à des crimes déjà collectivités tâchent de créer une
commis. Nous voulions cerner différente sorte de partenariat
les options communautaires sûres avec leurs représentants locaux
qui s’offrent et qui visent à du système de justice. Dans
réparer le tort causé par la certains cas, il s’agit de
criminalité et à réduire le recours collectivités autochtones qui
à l’emprisonnement ou la durée veulent faire valoir leurs propres
des peines d’emprisonnement. traditions. Dans d’autres cas, il
s’agit de groupes urbains de
Nous avons constaté que de citoyens qui veulent prendre
nombreux organismes bénévoles davantage en main l’application
reconnaissent depuis des années de la justice dans leur collectivité
que les peines d’emprisonnement de manière à assurer la sécurité et
imposées comme solution au le bien-être de leurs quartiers,
problème de la criminalité sont à écoles et communautés.
la fois futiles et destructives. Ils
ont reconnu le besoin de veiller à À mesure que, dans le sillage de
prendre des mesures de lutte ce dernier mouvement, les
contre la criminalité d’ordre citoyens ordinaires s’attaquent
social aussi bien que juridique. aux problèmes concrets qui se
Bon nombre de ces organismes posent, ils commencent à
ont appuyé des mesures réclamer une approche
communautaires sûres, qui sont fondamentalement différente de
parfois satisfaisantes pour les la justice. Les gens qui sont au
victimes et auxquelles le système courant des faits dans divers cas
de justice pénale peut faire appel veulent qu’on trouve des
pour réduire le recours à solutions durables aux problèmes
l’emprisonnement ou la durée qu’ils découvrent; souvent, ils
des peines d’emprisonnement. veulent la guérison, tant de la
victime que du délinquant, et ils
Nous avons constaté par ailleurs veulent que la collectivité
que, dans certaines collectivités, retrouve sa confiance générale et

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie IV
son sentiment de bien-être. Ils la nature du programme ou
voient donc le rôle de service en question et comment il
l’incarcération dans une optique fonctionne. Nous voulons
tout à fait différente. Ils trouvent encourager une approche
cette mesure peu utile dans la novatrice de la justice et la mise à
lutte contre les aspects de la l’essai (avec enthousiasme mais
criminalité qui leur importent le aussi un sens des responsabilités)
plus. Nous avons constaté que de nouvelles solutions à un
les initiatives proposées par ces problème de longue date. Dans
personnes sont justement celles le cas de chaque programme ou
qui sont les plus susceptible service choisi, nous donnons le
d’aider à élaborer de nouveaux nom d’une personne-ressource
modèles propres à assurer la qui peut fournir plus de détails
«vraie justice» que nous sur les points forts et les limites
recherchons tous ultérieurement de chaque initiative ainsi que sur
et, par la même occasion, de les problèmes qui pourraient
réduire le gaspillage de survenir. En outre, certains des
ressources financières qu’entraîne renseignements fournis
le recours à l’emprisonnement. permettront inutilement de
déterminer si d’autres
Dans ce répertoire, nous programmes analogues existent
exposons certaines des «mille et déjà et où on pourrait s’adresser
une choses que nous pouvons pour obtenir des conseils avant
faire au lieu de mettre ou de de prendre une initiative
garder une personne en prison». semblable.
Nous nous sommes fondés sur
des renseignements que des Toutes les initiatives dont fait état
particuliers et des organisations le présent répertoire donnent des
nous ont fait parvenir après avoir résultats des plus positifs. Aux
entendu parler de nos travaux de personnes qui en bénéficient, elles
recherche. Ce répertoire ne évitent l’emprisonnement ou,
constitue nullement une liste souvent, réduisent la durée de la
exhaustive de tous les importants peine d’emprisonnement. Par
programmes et services offerts ailleurs, il est encourageant de
actuellement. Nous espérons constater que, selon les éléments
toutefois qu’il présente de façon de preuve les plus probants
équilibrée les initiatives les plus recueillis jusqu’ici, ces initiatives
créatrices, novatrices et n’ont pas eu pour effet d’accroître
satisfaisantes qui ont été portées à les taux de récidive ou le taux de
notre connaissance. Dans les cas criminalité global dans la
où nous avons trouvé plusieurs collectivité (voir, par exemple,
initiatives de nature analogue, Ekland-Olson et al., 1992; Lin
nous avons choisi les exemples Song, 1993; Julian Roberts, 1995).
qui, à notre avis, illustrent de la
façon la plus vivante et frappante

V Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Malheureusement, toutefois, dans examinés dans la rubrique
de nombreuses sphères de Conclusions.
compétence, y compris partout au
Canada, le recours à ces options Nous avons fait toutefois une
plus rentables n’a pas réussi à autre constatation tout aussi
réduire le recours à inquiétante : certaines de ces
l’emprisonnement en général. solutions de rechange et mesures
Ces options n’ont donc pas communautaires, si elles ne
réussi à freiner l’accroissement risquent pas d’accroître les taux
constant des populations de récidive ou de criminalité,
carcérales et des coûts y n’assurent pas aux victimes ou
afférents. Dans certains cas, elles aux collectivités ce que nous
n’ont même pas réussi à freiner appelons une justice «vraie»ou
l’escalade du surpeuplement «vraiment satisfaisante». Cela
dans les établissements carcéraux. peut aussi expliquer en partie
Selon le document du pourquoi ces mesures ne se
gouvernement intitulé traduisent pas par une
«Rethinking Corrections», le diminution du recours à
surpeuplement dans les l’incarcération et pourquoi les
pénitencier fédéraux a récemment gouvernements se sont montrés
doublé en l’espace d’une année, peu empressés de prendre des
situation au sujet de laquelle le mesures destinées à réduire plus
vérificateur général a exprimé des efficacement le recours à
inquiétudes en public. Toutes les l’incarcération.
sphères de compétence au
Canada gèrent maintenant des De plus, la façon dont bon
établissements qui hébergent le nombre de ces mesures sont
nombre maximal de délinquants structurées actuellement
prévus ou qui sont surpeuplés. n’encourage pas beaucoup la
Dans l’état actuel des choses, un perception selon laquelle il
changement est peu probable. convient davantage, ou bien il est
Entre-temps, il arrive parfois que plus efficace ou souhaitable
des options communautaires ne d’imposer dans le cas d’un
soient pas financées parce comportement criminel une peine
qu’elles viennent accroître autre qu’une peine
l’ensemble des coûts liés à la d’emprisonnement. Pour le
justice pénale. Pourtant, ces public et les décideurs du
options communautaires à elles système de justice,
seules seraient plus rentables, l’emprisonnement demeure la
surtout si les ressources pierre angulaire de la politique en
financières affectées aux prisons matière pénale. La notion est
étaient réaffectées aux enracinée dans notre psychologie
programmes communautaires. collective au point de l’emporter
Où est le problème? Certains des sur toute preuve rationnelle
facteurs qui entrent en cause sont contraire. Pourtant, sur le plan

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie VI
pratique, les établissements rend-elle pas une «vraie
carcéraux n’offrent pas une justice justice»?
vraiment satisfaisante aux • nous assure-t-elle une
victimes et aux collectivités, protection suffisante?
souvent nuisent à ceux qui y sont • pourrait-on y avoir recours
incarcérés ou qui y travaillent et, dans des cas plus graves?
de plus, ont des effets • si cette initiative prévoyait
dévastateurs à long terme sur les néanmoins une période
enfants des détenus (Conseil d’emprisonnement comme
d’Europe, 1991; Roberts, 1995). l’un des éléments de la
Comme symbole de la justice, peine, à quelle fin y a-t-on
l’incarcération n’est plus une eu recours? Était-ce
solution à laquelle nous pouvons réellement nécessaire? Ou
De façon générale, les nous permettre d’avoir recours. bien aurait-on pu atteindre
millions de dollars que ce but par un autre moyen
nous dépensons pour Nous devons prendre nos qui aurait été tout aussi
entretenir nos prisons décideurs à partie en ce qui efficace, sinon plus, moins
et en construire de concerne cette situation. Nous nuisible, moins coûteux?
nouvelles est un devons exiger des mesures de
gaspillage d’argent. lutte contre la criminalité et des Dans le présent répertoire, nous
Dans aucun autre
peines qui nous protègent établissons tout d’abord un cadre
domaine de dépense
effectivement lorsque cela conceptuel pour le débat sur ces
fiscale n’évalue-t-on
s’impose et qui garantiront nouvelles expressions «vraie
moins l’efficacité de
ces dépenses que l’affectation de nos ressources justice» ou «justice vraiment
dans le domaine de financières aux initiatives propres satisfaisante». À différents
la politique pénale. à satisfaire le mieux à nos besoins égards, l’incarcération comme
réels de justice et à répondre aux telle, n’assure pas une «justice
Michael J.A. Brown meilleurs intérêts à long terme de vraiment satisfaisante» et peut
Juge principal du nos collectivités. nuire à l’efficacité de certaines des
tribunal pour mesures auxiliaires auxquelles on
adolescents En présentant ce répertoire des a recours à l’occasion pour
Auckland, Nouvelle options qui s’offrent en matière de remédier à cette lacune. Cela
Zélande justice pour aider à réduire le nous amène à poser une question
recours à l’emprisonnement au logique : Pourquoi, alors, le
Canada, nous avons donc choisi Canada continue-t-il d’avoir
de mettre en évidence tout tellement recours à
particulièrement les initiatives qui l’incarcération? Dans la rubrique
répondent à ce critère tout en Conslusions, nous énumérons
offrant une «vraie justice» aux certaines des fins auxquelles
victimes et aux collectivités. Voici servent les peines
le type de questions que nous d’emprisonnement et les
avons posées à tous les intéressés : établissements carcéraux dans
notre société et nous signalons
• de quelles façons cette qu’il importe de trouver des
initiative rend-elle ou ne stratégies permettant de remplir

VII Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
toutes ces fonctions d’une
manière plus rentable. Les autres
«fins» auxquelles on a recours à «Un nombre surprenant de juges
l’emprisonnement neutraliseront sont d’avis que faire passer et
inévitablement les stratégies repasser les petits inadaptés
adoptées par le gouvernement sociaux par le système de justice
jusqu’ici pour limiter les coûts de pénale a peu d’effet sur la
l’incarcération et qui visent une prévention du crime ou la lutte
seule de ces fins, c.-à-d. la contre la criminalité», affirme le
protection de la société contre les juge David Cole de la Division
crimes de violence, ou à fournir provinciale de la Cour de
d’autres moyens de remplir une l’Ontario.
seule de ces fonctions, c.-à-d.
«Ils commencent à contester la
punir d’une manière plus
théorie et la pratique de la
rentable les délinquants non
détermination de la peine au
violents et présentant des risques
Canada aujourd’hui.»
faibles, qui sont pour la plupart
des auteurs d’infractions contre D’après le juge Cole, co-président
les biens, sans toutefois remettre d’une récente enquête provinciale
en cause les postulats de base. Il sur le racisme systémique dans le
faut trouver d’autres moyens. système de justice, la notion que
les peines d’emprisonnement ont
Comme nous le montrerons dans un effet dissuasif ou aident à la
le dernier chapitre, quelques réadaptation des délinquants est
autres pays ont trouvé la volonté particulièrement suspecte.
politique d’élaborer ces autres
moyens. Il cite à l’appui des extraits d’une
douzaine de décisions récentes
Nous espérons que ce répertoire dans lesquelles les juges ont
contesté l’utilité d’un recours à
contient des idées utiles et des
l’emprisonnement aussi important
outils qui inspireront et aideront
que celui fait au Canada depuis
le Canada à faire d’autres pas
toujours.
importants dans cette direction
prometteuse. Le public semble croire que le
système de justice pénale peut
prévenir et réduire la criminalité,
déclare le juge Cole. «Les attentes
du public, trop souvent alimentées
par des politiciens opportunistes,
sont généralement trop élevées à
cet égard.»

Le juge David Cole


Globe & Mail - 5 mars 1996

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie VIII
Qu’entendons-nous par
«vraie justice»?
(i) «Vraie justice» - Voyons donc!
La meilleure façon de arrêté les voleurs, la vie n’avait pas
comprendre ce que nous repris son cours normal. Le fait que
entendons par «vraie justice» ou la peur lui avait fait perdre le
«justice vraiment satisfaisante» contrôle de la vessie s’était su, et ses
est d’examiner tout d’abord en collègues ainsi que les clients
quoi consiste la justice non l’avaient taquinée ensuite sans merci.
satisfaisante. Voici donc un récit Non seulement se trouvait-elle aux
qui met en évidence certains des prises avec des sentiments de peur et
aspects de la criminalité qui sont de honte, mais d’anciens
actuellement négligés par notre traumatismes étaient revenus à la
système de justice pénale. Il surface. Elle était devenue
s’agit de l’histoire d’une femme boulimique et avait perdu 85 livres.
qui travaillait dans un dépanneur Elle ne dormait plus.
au moment où il y a eu un vol
par un homme brandissant un Ses amis et les membres de sa famille
couteau. Pour les tribunaux, ont bientôt perdu patience. «Écoute,
étant donné leur point de vue tu n’as pas été blessée. Oublie ce qui
strictement juridique, les s’est passé. Quel est ton problème?»
propriétaires absents du (Cette réaction impatiente à la
dépanneur étaient les seuls tourmente de la victime est typique.)
«victimes» dans cette affaire.
C’est Wendy Keats de MOVE Élisabeth elle-même ne pouvait
Inc., une initiative au Nouveau- comprendre pourquoi elle était
Brunswick, qui nous a raconté constamment tourmentée. Pourquoi
l’histoire de cette femme (voir la faisait-elle des cauchemars dès qu’elle
deuxième section du répertoire). fermait les yeux? Pourquoi ne
pouvait-elle pas reprendre le cours
Élisabeth avait été très traumatisée normal de sa vie? À mesure que sa
par le vol à main armée qui avait eu santé se détériorait, ses relations avec
lieu au dépanneur pendant qu’elle y son mari se sont dégradées et ses
travaillait. La situation avait été rapports avec ses enfants ont été
absolument chaotique. Les voleurs radicalement modifiés.
étaient masqués et avaient hurlé des
menaces de mort pendant qu’ils la Entre-temps, Charles, le délinquant
maintenaient en place, un couteau âgé de 21 ans, purgeait une peine de
sur la gorge. Elle avait mouillé sa cinq ans dans un établissement
culotte de terreur. fédéral. Il avait été élevé dans un
Même plusieurs mois après qu’on ait milieu violent par une famille de

IX Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
toxicomanes et d’alcooliques. Il avait Élisabeth a compris qu’elle devait
toute une ribambelle de pères de trouver le moyen «d’oublier». Elle
substitution qui pour la plupart s’est rendue compte que, pour ce faire,
étaient eux-mêmes d’anciens elle devait tâcher de trouver des
délinquants et des toxicomanes. Ses réponses aux questions qui la
soeurs et lui faisaient hantaient.
continuellement l’objet de mauvais
traitements et ils vivaient dans la Ainsi, le jour où l’audience de
pauvreté. libération conditionnelle de Charles
devait avoir lieu, elle a fait le trajet de
Il avait commis des infractions peu quatre heures par autobus pour se
graves dans l’adolescence, mais ce vol rendre à l’établissement... seule et
était son premier crime grave. Selon atteinte d’une pneumonie. Pendant
lui, il avait commis cette infraction l’audience, Charles s’est retourné et a
alors qu’il faisait un très mauvais voulu lui dire quelque chose, mais il
«trip», provoqué par l’absorption est interdit à la victime et au
d’un hallucinogène. Complètement délinquant de se parler durant
perdu dans son nuage d’alcool et de l’audience et on a coupé la parole à
drogue, Charles n’avait aucune idée Charles.
du traumatisme qu’il avait causé.
Dans l’autobus, sur le chemin du
Charles a d’abord pris connaissance retour, elle n’a cessé de se demander
de la situation d’Élisabeth lorsqu’il a «Que voulait-il me dire?»
su qu’elle insistait pour que le
tribunal lui permette de présenter Elle a alors présenté à la Commission
une déclaration de la victime. Elle nationale des libérations
n’y avait pas été invitée parce que, conditionnelles une demande de
dans le dossier, la victime n’était pas rencontre avec le délinquant et la
elle mais le dépanneur. Commission a renvoyé le dossier à
MOVE. J’étais la médiatrice affectée
À mesure qu’Élisabeth luttait pour à cette affaire.
faire valoir son droit de participer
d’une façon quelconque au processus, La première fois que j’ai rencontré
sa colère et ses sentiments de Élisabeth, je lui ai demandé pourquoi
frustration n’ont cessé de croître. elle voulait rencontrer l’auteur de
Elle avait terriblement peur que l’infraction dont elle avait été victime.
Charles et son complice reviendraient «Je ne peux plus continuer ainsi, a-t-
pour «l’avoir» comme ils avaient elle répondu. J’ai absolument besoin
menacé de le faire. Elle était alors d’obtenir des réponses à mes
isolée de sa famille et de ses amis. questions. Il faut que je sache s’il va
Elle avait peur et elle était revenir pour «m’avoir», moi ou ma
psychologiquement épuisée et famille. Il faut que je lui dise ce que je
physiquement malade. ressens. Il faut que je le regarde en
face et que je lui dise comment il a
Finalement, après deux ans et de changé ma vie.»
nombreuses séances de counseling,

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie X
C’étaient toutes de bonnes raisons de des doutes et des craintes. Lorsqu’ils
procéder à la médiation. Je suis donc se sont enfin trouvés l’un vis-à-vis de
allée voir le délinquant. l’autre, séparés par une table de
30 pouces de large, ils étaient tous
Charles a été stupéfait d’apprendre deux en proie à de vives émotions.
qu’Élisabeth avait peur de lui.
«Ce n’est pas possible, elle doit bien Toutefois, le processus de médiation,
savoir que j’ai absolument pas qui est structuré, a bientôt fait son
l’intention de lui faire de mal. Est-ce effet et on est passé à l’étape où chacun
que ces commis qui travaillent dans fait le récit de ce qu’il a vécu.
les dépanneurs ne reçoivent pas une Élisabeth a dit tout ce qu’elle pensait
formation où on leur dit que s’ils depuis deux ans. Charles a écouté
remettent simplement l’argent on ne attentivement et, lorsqu’il a parlé à
fait de mal à personne?» a-t-il son tour, il a répondu à la plupart de
demandé, une expression ses questions. Le dialogue s’est
d’incrédulité sur le visage. poursuivi et ils se sont mis à rire d’un
détail, ce qui a amené une certaine
«Ne sait-elle pas que tous les voleurs détente. C’est alors qu’ils ont
disent «n’appelle pas la police ou je vraiment commencé à communiquer,
reviendrai t’attraper»? C’est ce face à face et coeur à coeur. Ils avaient
qu’on dit toujours. Je suis désolé, je vécu ensemble une expérience violente,
n’avais aucune idée.» bien que chacun dans une perspective
totalement différente. Une relation
Sans hésitation, il a convenu de s’est créée ce soir-là, une situation
rencontrer Élisabeth pour voir ce jusqu’alors non résolue a été réglée.
qu’il pouvait faire pour réparer une
erreur commise lors de ce qui avait Élisabeth a obtenu des réponses à
été jusque-là pour lui simplement toutes les questions qui l’avaient
une mauvaise nuit... où il avait été hantée. Elle a appris que Charles
trop saoûl... trop drogué... et pour n’avait jamais eu l’intention de
laquelle il croyait être le seul à payer revenir pour lui faire du mal et qu’il
un gros prix. À ce moment-là, regrettait vraiment ce qu’il avait fait.
Charles purgeait sa peine Ils se sont entendus sur la façon dont
d’emprisonnement depuis deux ans ils se salueraient le jour où il serait
et ce n’était pas facile. Il dormait libéré et reviendrait dans la ville où
avec un couteau sous l’oreiller parce tous deux habitaient. Lorsqu’ils ont
qu’il y avait souvent des attaques à fini, ils se sont levés et se sont serrés
coups de couteau à l’établissement. la main. «Vous savez, a dit
Comme Élisabeth, il avait la peur Élisabeth, nous ne serons jamais
pour compagnon constant. amis, vous et moi - nous venons de
deux mondes différents; mais je veux
La séance de médiation devait avoir que vous sachiez que je vous souhaite
lieu dans une pièce de l’établissement beaucoup de chance et que lorsque je
carcéral. Ni Charles ni Élisabeth penserai à vous, j’espérerai que tout
n’ont fermé de l’oeil la nuit va bien pour vous. Je vous
précédente, tous deux aux prises avec pardonne.»

XI Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
En quittant la prison, je lui ai raison d’être de cet état des
demandé comment elle se sentait. choses et la façon dont il
«C’est fini. Le dossier est fermé. provoque des sentiments de
J’ai tourné la page.» mécontentement et de frustration
à l’égard du système de justice
Cinq moins plus tard, elle me dit pénale. Nous pourrons ainsi
qu’elle n’a plus jamais eu un seul peut-être comprendre les mesures
cauchemar. «Je ne suis plus la même qu’il y a lieu de prendre pour
personne. Je ne vis plus dans la permettre une expérience de la
peur. Elle a disparu.» justice plus «satisfaisante».

J’ai appris de l’agent de gestion des Les tribunaux de juridiction


cas chargé du dossier de Charles que criminelle ont longtemps
celui-ci fait des progrès. Le concentré leur attention presque
personnel est d’avis que sa rencontre exclusivement sur le
avec Élisabeth lui a permis de mûrir comportement de l’accusé. Ils ont
et qu’il a maintenant de meilleures cherché à prouver qu’une loi
chances de retirer les bienfaits voulus avait été enfreinte et à déterminer
des programmes de réadaptation et qui l’avait enfreint et quelle peine
de prendre la vie davantage au devrait être infligée. Ils ont
sérieux. Rien n’est garanti. Il a accordé très peu d’attention au
23 ans. Pour ma part, je crois qu’il tort causé - victimes (directes et
n’oubliera jamais cette expérience et indirectes), aux familles, aux
qu’elle influera profondément sur les quartiers et aux collectivités.
décisions qu’il prendra à l’avenir. Jusqu’à tout récemment encore, la
criminologie était essentiellement
Après la séance de médiation, une étude du comportement
Élisabeth a demandé qu’on envoie criminel qui nous a donnée des
une lettre à la Commission nationale «modèles explicatifs» destinés à
des libérations conditionnelles. Elle expliquer les facteurs
ne veut plus qu’on garde Charles en criminogènes. La description qui
prison à cause d’elle. «S’ils veulent suit des répercussions de cet état
le garder en prison, c’est leur affaire, des choses est fondée en partie
mais je ne veux pas que ce soit à sur un article de Tony Peters et
cause de moi. Moi, j’ai tourné la Ivo Aersten, deux criminologues
page. Je suis guérie.» belges contemporains dont
l’analyse est très compatible avec
Cadre conceptuel notre évaluation de la situation
permettant de comprendre au Canada ( Peters et al., 1995).
les lacunes du système
Voici comment la situation a
évolué. L’accent mis sur les
L’expérience qu’a faite Élisabeth
«modèles explicatifs» a donné
du système actuel de justice
lieu à d’autres recherches et
pénale est assez courante. Nous
abouti à l’élaboration d’autres
vous invitons à réfléchir sur la

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie XII
stratégies d’intervention qui se principalement à la suite d’une
sont aussi concentrées presque plainte de la victime et que
exclusivement sur le délinquant. l’information fournie par celle-ci
On a négligé la relation entre le est d’importance capitale pour
Selon les résultats d’études délinquant et la victime. Voilà l’enquête de la police. Le
effectuées en Alberta et au qui explique peut-être dans une délinquant doit faire face aux
Manitoba, qui viennent
confirmer ceux des grande mesure pourquoi les conséquences de son acte
recherches internationales, le recherches récentes portant sur strictement selon des définitions
public ne s’attend peut-être les victimes ont révélé que les juridiques qui pourraient en
pas à ce que des peines
sévères soient imposées aux contacts entre la victime et théorie soit le tirer d’affaire, soit
auteurs d’infractions contre l’administration de la justice l’incriminer davantage. Pendant
les biens, et des mesures pénale ont surtout abouti à une ce temps, on se préoccupe peu
telles que la médiation et le
nouvelle victimisation et donné des répercussions du crime sur la
dédommagement pourraient
jouir d’un appui lieu à des sentiments de victime.
considérable de la part du frustration, de déception et de
public et des victimes d’acte mécontentement plutôt qu’aidé à Les accusations déposées et le
criminels. En effet, d’après
les recherches de résoudre les problèmes de la procès qui suit dépendent de la
Burt Galaway, 90 % d’un victime. connaissance exacte des faits et
échantillon composé de des circonstances rapportés par la
1 238 personnes en Alberta
avec lesquelles ont a
«De façon générale, après coup victime. La peine infligée ensuite,
communiqué en 1994 ont (première victimisation), il y a une cependant, fait abstraction des
indiqué qu’on obtiendrait les deuxième victimisation au contact de besoins et des problèmes de la
meilleurs résultats sur le
la police et du système de justice. La victime; ainsi, on impose surtout
plan de la lutte contre la
criminalité en affectant des victime se trouve stigmatisée, des amendes et des peines
fonds supplémentaires à cantonnée dans le rôle de perdant et d’emprisonnement avec, parfois,
l’enseignement et à la de paria.» (Peters et al., 1995) certaines variations destinées à
formation professionnelle
plutôt qu’aux prisons. tenir compte de la situation
Soixante huit pour cent de L’administration de la justice vise particulière du délinquant. On
ces personnes ont indiqué surtout à signaler à l’accusé qu’il fait presque complètement
qu’elles préféraient le
remboursement à une peine
a enfreint à une norme sociale et abstraction de la possibilité de
d’emprisonnement de quatre qu’à la suite d’une audience qui tenir compte dans le processus de
mois pour une personne qui dégénère souvent en lutte entre détermination de la peine et dans
aurait cambriolé leur maison
les avocats au sujet de subtilités, le jugement lui-même des
et aurait volé des articles
d’une valeur de 1 100 $ (il s’il est reconnu coupable, il sera répercussions concrètes de
était précisé dans la question puni. l’infraction commise.
que le voleur avait déjà une
condamnation à son actif
pour une infraction Le processus oublie la Lorsque l’administration de la
semblable et qu’une période victime justice pénale se borne à
de quatre ans lui serait appliquer la loi sans reconnaître
imposée en plus de l’une des
comme élément central de son
peines ci-dessus). Les Les répercussions et
résultats au Manitoba mandat la nécessité d’assurer le
conséquences de l’infraction
étaient presque identiques. redressement voulu à la victime
retiennent à peine l’attention, ce
et à la collectivité, il faut
qui est curieux étant donné que le
vraiment se demander si elle
processus d’administration de la
contribue du tout à restaurer des
justice pénale s’enclenche

XIII Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
relations paisibles entre commis parce qu’on l’encourage
citoyens. La société a le droit de à réinterpréter la situation de
s’attendre à ce que le système de manière à se protéger contre toute
justice pénale cherche à atteindre la gamme des allégations. Le
cet objectif. Comme on peut le délinquant ne retrouve pas le
voir d’après le cas exposé ci- geste qu’il a posé dans cette
dessus, un système description juridique de
d’administration de la justice l’infraction commise, surtout s’il
pénale qui ne met pas l’accent sur est déjà dans une situation socio-
les responsabilités de Charles économique défavorisée par «La santé d’une
envers Élisabeth fait abstraction rapport à la victime, ou au reste collectivité s’améliore
des répercussions du crime tant de la société comme c’est souvent lorsque ses membres
sur le délinquant que sur la le cas de ceux qui comparaissent participent à la
victime, de sorte que, presque devant les tribunaux. résolution des conflits.
toujours, on ne saisit pas les Lorsqu’ils en laissent le
nombreuses possibilités qui En même temps, l’accusé a soin à d’autres, la
s’offrent de régler rapidement rarement à faire face aux besoins qualité de vie dans la
certains des problèmes avec et aux problèmes de la victime ou collectivité se détériore.
lesquels la victime se trouve aux aux émotions et aux craintes des Le sentiment collectif
prises, de répondre à certaines de membres de la collectivité qui de souci des autres, de
ses questions et de combler sont déçus par son comportement respect de valeurs
diverses et,
certains besoins, ce que seul le et qui s’inquiètent de son avenir.
ultérieurement, le
délinquant peut faire Dans notre système judiciaire
sentiment
initialement. accusatoire, le délinquant se d’appartenance
concentre sur sa défense et disparaissent, de même
Dans le processus de justice cherche à réduire sa que la capacité
pénale, la plainte portée contre responsabilité au minimum. naturelle de la
l’accusé prend la forme d’une collectivité de prévenir
accusation formulée dans les Le délinquant se trouve ainsi à le crime, de s’attaquer
termes prévus au Code criminel. lutter contre l’administration de aux causes profondes
Le comportement criminel en la justice pénale. Il veut «se tirer de la criminalité et de
question est ainsi «étiqueté» et d’affaire à bon compte» et reconstruire les vies et
décrit, souvent en termes recevoir la peine la plus légère les relations dévastées
généraux qui sous-entendent de possible. Bien sûr, cela ne par le crime.»
nombreuses allégations qui, du l’encourage guère à penser à la
point de vue du délinquant, sont situation de la victime ou à croire Le juge Barry Stuart
Territoires du Yukon
injustes. (Des expressions telles que s’il accepte l’entière
que «agression sexuelle» ou responsabilité de son acte, il sera
«fraude» peuvent s’appliquer à appuyé et accepté par la
toute une gamme d’infractions collectivité, il «réintégrera» la
dont le degré de gravité et de collectivité ou y trouvera sa place,
stigmatisation varie.) Dans le s’il l’a jamais eue. Lorsque le
cadre du système actuel, le délinquant se voit infliger une
délinquant bientôt ne se sent plus peine punitive, particulièrement
responsable de l’acte qu’il a une peine d’emprisonnement, il a

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie XIV
encore moins tendance à croire ultérieurement infligée au
qu’il a une obligation envers la délinquant.
victime; il trouve au contraire
qu’il a «payé sa dette» en Le processus oublie la
purgeant la peine qui lui a été collectivité
infligée.
En ce qui concerne la
Cette situation est exaspérante détermination de la peine, le
pour la victime, qui se trouve processus de justice pénale ne
ainsi doublement lésée et qui tien pas compte des sentiments
peut réclamer l’imposition d’une de la victime ni du contexte
peine plus sévère parce que c’est communautaire dans lequel
la seule satisfaction qu’elle peut l’infraction a été perpétrée. Ainsi,
retirer d’un tel système. il ne se penche pas sur les
Cependant, une politique plus mesures qui pourraient être
répressive ne réglera prises pour empêcher la
certainement pas ces problèmes. perpétration d’autres crimes à
Selon Peters et Aertsen, comme l’avenir. Pour rendre une justice
nous l’avons vu d’ailleurs dans le davantage satisfaisante, le
cas exposé ci-dessus, le plus processus doit décider non
grand problème pour de seulement à quelle personne
nombreuses victimes ne tient pas revient une part de
au fait que le délinquant n’a pas responsabilité, mais quels
été puni suffisamment. Les facteurs dans la société ou dans la
victimes se ressentent et souffrent collectivité ont contribué à la
beaucoup plus de l’absence perpétration de l’infraction, et il
complète d’intérêt et de doit se concentrer sur les mesures
sympathie pour le traumatisme à prendre pour éviter qu’une
qu’elles ont vécu de la part situation semblable ne se
notamment de services comme la reproduise (comme le font les
police et le système judiciaire. enquêtes des coroners).
Elles ont le droit de s’attendre à
ce que tous les fonctionnaires [traduction]
avec lesquels elles ont affaire «Infliger dans chaque cas une
soient attentifs à l’injustice et à la peine qui ne vise qu’à punir le
souffrance qu’elles ont subies, délinquant équivaut à prendre
qu’une procédure judiciaire soit des précautions après coup.»
engagée ou non. D’ailleurs, le (Waller, 1990)
traitement réservé aux victimes
par les fonctionnaires du système Ces mesures non seulement sont
de justice à chaque étape du insuffisantes et prises trop tard;
processus peut influer beaucoup elles ne visent que les crimes
plus sur les perceptions qu’a le signalés et faisant l’objet de
public du système de justice poursuites, qui ne représentent
pénale que la gravité de la peine qu’une infime proportion de tous

XV Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
les crimes perpétrés dans la faire confiance de nouveau?
collectivité. (Roberts, 1995). En Que lui arrivera-t-il, à lui et
outre, il est bien établi que les à sa famille, s’il est craint,
groupes opprimés ou défavorisés mis au ban de la société et
dans une société sont pris comme bouc émissaire
surreprésentés dans cette pour le restant de sa vie?
minorité de délinquants et que Quelles répercussions cela a-
l’actuel processus de t-il sur ses victimes, qui sont
détermination de la peine ne tient déjà traumatisées - sur la
pas compte des facteurs sous- personne à laquelle il tâché
jacents qui contribuent à cette d’infliger des coups de
situation. Or, il faut faire couteau, sur les étudiants
beaucoup plus pour assurer la qui ont été témoins de
sécurité de la collectivité. l’incident, sur tous les
parents et les voisins qui en
Les membres de la collectivité ont entendu parler, etc.?
aussi se trouvent aux prises avec Dans quelle mesure la
de nombreuses questions qui collectivité et l’école se
restent sans réponse et dont sentiront-elles en sécurité à
l’actuel processus de justice l’avenir, seront-elles
pénale ne s’occupe pas. En voici protégées contre lui?
un exemple : Quelles sont les
répercussions sur d’autres
Un jeune délinquant dans personnes qui pourraient
une ville de l’Ontario a peut-être aussi présenter un
participé à une tentative risque et qui vivent
d’attentat à coups de couteau maintenant dans une
dans l’école qu’il fréquentait. collectivité en proie à des
Il a fini de purger sa peine de sentiments de méfiance et de
garde en milieu fermé, il est peur et qui ne peut discuter
maintenant en période de ouvertement de ces
probation, et il poursuit son problèmes chez les jeunes.
traitement psychiatrique; Et s’il déménage : Sera-t-il
selon le système de justice, poursuivi par son passé toute
cela suffit pour que son sa vie? Peut-il jamais
retour dans la collectivité ne guérir? La collectivité qu’il
suscite ni crainte, ni colère : a quittée peut-elle jamais
il a payé sa dette, le dossier guérir? Oui, il a «payé sa
est fermé. Toutefois, dette», mais on ne peut
comment les membres de la certes pas dire que «justice a
collectivité sont-ils censés été rendue» - ni aux
s’adapter à sa présence, victimes, ni à la collectivité,
comment peuvent-ils savoir ni au délinquant et à sa
s’ils peuvent vivre en famille... du moins, pas une
sécurité, s’il éprouve des «justice vraiment
remords, s’ils peuvent lui satisfaisante».

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie XVI
Il faut donner aux membres de la délinquant. Un aveu ou un
collectivité l’occasion, dans le verdict de culpabilité peut
cadre d’un processus sûr, de éventuellement entraîner
À la conférence la Faculté discuter avec le délinquant de l’imposition d’une peine privative
de droit de Harvard qui a leurs sentiments et de leurs de certains droits et libertés aux
eu lieu le craintes, de l’entendre expliquer seules fins d’infliger un châtiment
19 novembre 1995 sur le ce qu’il a vécu, d’exprimer leurs ou une «peine». Or, la peine,
thème «La police, les
craintes et leurs espoirs, de selon la définition qui en est
avocats et la vérité», le
commissaire de la police réconforter ceux qui ont souffert, donnée dans les dictionnaires, est
de la ville de New York, de les compenser d’une certaine une sanction appliquée
William J. Bratton, a façon pour ce qu’ils ont souffert, délibérément comme punition ou
déclaré que le système de et d’empêcher qu’une situation représailles pour une action jugée
justice pénale met des semblable ne se produise à suffisamment répréhensible en
pressions extraordinaires
l’avenir. N’y aurait-il pas un rôle droit. De nombreuses personnes
sur la police en mettant
l’accent sur «le fait de que certains membres de la ne voient pas le châtiment dans
gagner ou de perdre collectivité pourraient jouer dans cette optique. Beaucoup pensent à
plutôt que sur la vérité et ce processus? Certains d’entre d’autre chose lorsqu’elles
la justice». eux pourraient être disposés à réclament des peines plus sévères.
aider. Mais il ne faut pas oublier que le
Comparant le système de
but visé est le châtiment. La seule
justice pénale à une
chaîne de production, [traduction] raison pour laquelle cela demeure
l’avocat spécialisé en «Qu’il s’agisse de prévenir les acceptable dans notre société
droits civils maladies du coeur chez les adultes moderne sensibilisée aux droits de
Michael Avery a déclaré ou la mort précoce de jeunes la personne, c’est qu’il s’agit pour
que la police se parjure Canadiens dans des accidents de nous d’un moyen employé à une
«pour les mêmes raisons
la route, la prévention fin positive. La possibilité d’une
que celles pour lesquelles
les travailleurs dans une aujourd’hui joue un rôle très peine d’emprisonnement ou d’un
industrie quelconque important. Aucun politicien ne casier judiciaire existe toujours.
coupent au plus vite croit plus que la solution au Par conséquent, notre pays civilisé
lorsque les demandes des problème est simplement s’est doté d’un processus
gestionnaires de la d’affecter des ressources aux accusatoire destiné à éliminer
production sont peu
unités de soins intensifs des dans la mesure du possible le
réalistes. L’extrant du
système de justice pénale hôpitaux.» (Waller, 1990) risque d’erreur, d’une violation
n’est pas la justice, la injustifiée des droits de la
sécurité du public ou la Un processus accusatoire personne. Aujourd’hui, notre
suppression du crime, système judiciaire transforme la
mais plutôt les recherche de la justice en un jeu
La nature accusatoire de l’actuel
arrestations et les
système de justice pénale où deux avocats rivalisent de
condamnations. Le
problème est de savoir empêche de rendre une vraie subtilités devant un tribunal.
comment changer les justice. Or, comme nous le Aujourd’hui, on encourage le
gestionnaires de la verrons, il est très difficile de délinquant à plaider non
production et le message contourner cette difficulté dans le coupable, à tout nier, à n’offrir
qu’ils transmettent.» aucune réparation à la victime, à
cadre d’un système dans lequel la
détermination de la peine a pour ne manifester aucun remords. Le
but principal de punir le système tout entier se préoccupe

XVII Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
des droits de l’accusé davantage ce système, c’est mentir, y compris
que du besoin de soutien et de par omission, pour l’éviter. Ce
réparation de la victime. Il ne peut système accusatoire va à l’encontre
en être autrement alors que les de tout ce que nous savons sur ce
objectifs visés comprennent que nous cherchons à réaliser : du
toujours l’imposition délibérée et développement de l’être humain,
justifiée sur le plan juridique d’une du changement sur le plan
peine à titre de représailles. personnel, de la responsabilité
D’autre part, la stigmatisation qui morale, des relations et du
en résulte isole les délinquants du renforcement de l’esprit
reste de la société, renforce leur communautaire. Il va à l’encontre
identité criminelle au sein d’une d’une protection du public
sous-culture et ne constitue même reposant sur des assises solides.
pas un moyen de dissuasion. Au contraire, il favorise le
(Mathiesen, 1990). Il est rare que développement de sentiments
l’on trouve les qualités positives et d’hostilité entre les gens; plus
les processus communautaires qui, particulièrement, il va à l’encontre
comme nous le constatons des besoins les plus pressants des
maintenant, sont nécessaires pour victimes.
nous permettre de poursuivre de
façon réaliste les objectifs que la En effet, notre système judiciaire
plupart des personnes visent de accusatoire nous empêche de
bonne foi lorsqu’elles parlent de la répondre à bon nombre des
nécessité d’infliger une peine, ou besoins les plus essentiels des
de l’emprisonnement comme la victimes et ce, en raison justement
peine qu’elles connaissent le mieux de sa nature accusatoire que vient
(des processus tels que celui qui renforcer la possibilité du recours à
consiste à «jeter l’opprobre sur le l’emprisonnement.
délinquant pour faciliter sa
réinsertion sociale», exposé dans La victime n’a donc aucun moyen
les première et deuxième sections d’exprimer ses sentiments et de
du présent répertoire). faire connaître ses besoins autre
que de dénoncer une peine qui ne
Oui, nous avons besoin parfois lui semble jamais assez sévère. De
d’exprimer nos sentiments de plus, le processus semble
répulsion, d’établir des limites et l’humilier.
d’exiger que les délinquants
subissent des conséquences Les collectivités sont aussi prises
pénibles, mais le recours à cette fin dans cette dynamique parce qu’il
à la peine punitive est impossible de savoir, d’après le
d’emprisonnement prévue par la prononcé de la sentence et la durée
loi ne saurait donner les résultats de la peine infligée, si on prend les
escomptés. Tout ce que le mesures voulues pour remédier
délinquant apprend d’une aux véritables sujets d’inquiétude
punition infligée dans le cadre de et de préoccupation.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie XVIII
(ii) La vraie justice : Vers une nouvelle
définition de la «justice»
L’accroissement de notre somme entre la gravité de la
de connaissances sur la façon dont mauvaise conduite et toute
le système de justice pénale mesure coercitive légale que
fonctionne en réalité a des la société peut être en droit
conséquences d’une portée de prendre.
considérable. Il ne s’agit pas
seulement de nouveaux éléments Comme nous l’avons vu, le
que nous pouvons ajouter à notre système actuel accorde davantage
«Dans mon travail, où
le comportement et la somme de connaissances; il faut d’attention à la violation d’une loi
situation de nos jeunes, «élargir» les «modèles explicatifs» que constitue un acte criminel
dont bon nombre sont axés sur le délinquant de manière qu’au tort causé à la victime.
sans emploi et ont un à inclure ces nouveaux éléments Pourtant, comme dans le cas
faible niveau d’information. Ils jettent une d’Élisabeth, ce que la victime veut
d’instruction, peuvent nouvelle lumière sur les le plus, outre le fait de se sentir en
avoir un effet négatif connaissances que nous possédons sécurité, n’a rien à voir avec la loi.
sur ma propre attitude déjà. Ils mettent en doute certains La victime, d’abord et avant tout,
face à la vie, je suis postulats fondamentaux. Ils veut trois choses :
constamment renforcée exigent un remaniement en
dans mon opinion que profondeur des théories au sujet • que les gens reconnaissent le
les gens sont de la criminalité et des choix qui traumatisme qu’elle a subi -
essentiellement bons s’offrent sur le plan des politiques elle a besoin de l’exprimer
par le sens commun, la
en matière de justice pénale. verbalement et qu’on le lui
compassion et l’attitude
exprime verbalement aussi;
coopérative des
Que cherche la victime furieuse et • de savoir quelle sorte de
victimes.»
effrayée ou la collectivité personne a pu commettre
Marie Sullivan, exaspérée qui réclame que justice pareil acte, et pourquoi elle-
Gestionnaire des soit faite? Elle cherche : même a été choisie comme
services aux jeunes, victime;
Auckland, • à créer un consensus sur ce • d’entendre le délinquant
Nouvelle-Zélande qui est bien et ce qui est mal; dire qu’il regrette ce qu’il a
• à tenir le délinquant fait ou, si possible,
responsable de ses actes; d’entendre quelqu’un
• à affirmer l’importance des d’autre lui présenter des
droits de la personne lésée; excuses au nom du
• à empêcher que d’autres délinquant.
torts ne soient causés;
• et, bien sûr, à faire respecter La crise dans laquelle nous nous
les droits des personnes trouvons en ce qui a trait aux
accusées et reconnues pratiques de détermination de la
coupables, et à établir une peine tient essentiellement au fait
certaine «correspondance» que le public ne comprend pas

XIX Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
comment le système fonctionne, de de «justice vraiment satisfaisante»,
sorte que les juges sont obligés il semble que la seule façon dont
d’employer des outils dont nous pouvons nous sortir de
certains savent qu’ils sont périmés. l’impasse actuelle pour réorienter
L’un des obstacles à le processus de détermination de
l’administration d’une justice la peine de manière à empêcher le
vraiment satisfaisante semble recours croissant et inutile à
tenir au fait que les gens ne l’incarcération est d’encourager la
voient pas d’autres moyens de mise à l’essai, en toute sécurité, de
satisfaire à leurs besoins très réels processus permettant aux victimes
et légitimes de «dénonciation». et aux autres membres de la
collectivité de participer à la prise
Pourtant, dans le système actuel, de décisions.
très peu de gens sont satisfaits de
toute façon, quelles que soient Certains nouveaux modèles
leurs allégeances. Nous devons s’orientent dans cette direction et
prendre des mesures pour nous certains des meilleurs exemples
sortir de ce étau [sévérité - que nous avons trouvés sont
légèreté de la peine] alors qu’il ne exposés dans les différentes
s’agit pas de cela du tout. Il s’agit sections du présent répertoire.
de tous les besoins humains ainsi
que des sentiments et des Bien sur, nous savons qu’il ne
inquiétudes que nous pouvons s’agit pas là d’une panacée mais
avoir lorsque nous sommes plutôt d’un défi très difficile à
touchés par le crime. Cependant, relever en raison des nombreux
nous sommes tellement figés dans intérêts conflictuels qui entrent en
l’approche actuelle de la cause et des nombreuses
détermination de la peine que embûches qui nous guettent. Il y
même ceux qui ne «croient pas à aura des problèmes et de nous
l’incarcération» peuvent trouver devrons veiller à ce que les droits
certaines peines trop légères - et ce, et les intérêts de tous soient
parce que nous n’avons pas protégés. Dans l’ensemble,
d’autre moyen de savoir si on toutefois, le processus de
répond aux besoins de la communication et les possibilités
collectivité et de la victime. de médiation communautaire
qu’offrent ces modèles permettent
Comment pouvons-nous aux victimes de trouver le soutien
accroître la possibilité dont elles ont besoin, aux
délinquants de recevoir certains
d’offrir aux Canadiens la
messages importants dans un
vraie justice qu’ils milieu sûr et aux membres de la
recherchent? collectivité de trouver des
solutions aux problèmes de la vie
D’après tout ce que nous avons en commun sur lesquels
appris de notre recherche l’infraction a jeté la lumière.
d’exemples de «vraie justice» ou

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie XX
Idéalement, ce processus pourrait de l’une des raisons pour
être instauré et encouragé à lesquelles ces solutions de
différentes étapes avant rechange se sont révélées peu
l’intervention du système de efficaces pour ce qui est de réduire
justice pénale comme tel, dans les le recours à l’emprisonnement en
écoles et par l’entremise des général et sont perçues comme des
différents services «ajouts» à une peine
communautaires et sociaux. Pour d’emprisonnement plutôt que de
les besoins du présent document, véritables solutions de rechange à
toutefois, nous avons choisi des l’incarcération. (D’autres raisons
exemples qui ont appliqué ses sont exposées à la rubrique
principes fondamentaux et prévu Conclusions dans la dernière
ses avantages à différentes étapes section de ce répertoire.)
du processus de justice pénale,
permettant éventuellement de Quelle que soit la peine imposée,
réduire le recours à l’incarcération. si le PROCESSUS d’application
Même lorsqu’ils ne se traduisent continue de stigmatiser et
pas par une réduction de la durée d’étiqueter le délinquant ainsi
de la peine d’emprisonnement, ils que de faire de lui un bouc
offrent, du moins jusqu’à un émissaire et s’il ne permet pas
certain point, une meilleure aux victimes et aux collectivités
expérience d’une «justice vraiment d’exprimer leurs vues, nous ne
satisfaisante». ferons qu’ajouter aux problèmes
en alourdissant la bureaucratie.
Nous ne pouvons trop souligner Si nous voulons vraiment que le
que nous ne croyons pas qu’une Canada trouve des moyens de
série de nouvelles «solutions de lutte contre la criminalité autres
rechange» amorcera à elle seule que son recours inefficace à
une réorientation importante du l’emprisonnement, nous devrons
système de manière à assurer aux favoriser l’élaboration d’autres
victimes, aux collectivités et aux approches qui permettront d’offrir
délinquants de façon générale une «vraie justice». À notre avis,
une expérience plus satisfaisante notre société devra dépasser
du système de justice. Nous l’optique actuelle dans laquelle elle
avons trouvé plusieurs exemples envisage la criminalité et se défaire
de bonnes mesures de rechange de la philosophie «négative» qui
auxquelles ont a souvent recours entrave actuellement le progrès.
mais qui n’ont pas eu pour effet de Le système de justice devra, à tout
changer le climat entourant le le moins, offrir aux gens la
système de justice ni la perception possibilité d’établir un lien entre
fondamentale de les mesures qu’ils prennent pour
l’emprisonnement comme la obtenir justice et notre âme
sentence normative, la seule qui collective. Même s’il en est déjà
montre qu’on prend vraiment ainsi dans certains cas, le
l’infraction au sérieux. Il s’agit là processus décisionnaire en place

XXI Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
généralement fait que tous se • Comment pouvons-nous
montrent sous leur jour le plus reconnaître le tort causé à la
mauvais et nous oblige à lutter victime?
désespérément chacun pour son • Comment pouvons-nous
propre bien au lieu de collaborer amener la victime à
pour le bien de tous. comprendre que ce qui s’est
«On considère qu’il
passé n’est pas de sa faute?
importe davantage de
Ce qui s’impose, ce n’est rien de • Comment la collectivité peut-
résoudre les problèmes
moins qu’une réorientation elle montrer qu’elle qui pourraient se poser
fondamentale qui changera notre désapprouve le comportement à l’avenir que de
perception de la justice. sans cependant faire du déterminer qui est à
délinquant un bouc émissaire blâmer pour le
Comme certaines collectivités le et un paria? comportement passé. Il
découvrent, il s’agit d’une • Comment la collectivité peut- importe moins de punir
nouvelle vision d’un système de elle participer au processus sévèrement les
justice pénale qui vise un but plus qui consiste à tenir le délinquants que de
positif, un but général de délinquant responsable de ses fournir des occasions
guérison, pour les victimes et les actes? d’aider les victimes à
collectivités ainsi que pour les • Comment pouvons-nous faire trouver le moyen de se
délinquants et leurs familles. participer la victime au remettre de leur
Cependant, il y a des milliers de processus qui consiste à expérience, de faire
déterminer le tort causé et les comprendre au
façons d’adopter cette approche
délinquant les
différente tout en gardant à mesures qui pourraient être
conséquences réelles
l’esprit ce que nous voulons prises pour le réparer?
sur la plan humain de
vraiment accomplir pour les • Comment pouvons-nous faire
son comportement et de
personnes qui sont touchées par participer le délinquant au promouvoir le
la criminalité, comme on peut le processus qui consiste à dédommagement de la
voir d’après les «repères» réparer le tort causé? victime. Au lieu de
suivants établis pour la • Comment pouvons-nous faire faire abstraction de la
«détermination de la peine au participer la collectivité au victime et de donner au
moyen d’une conférence processus qui consiste à délinquant un rôle
familiale», méthode adoptée en réparer le tort causé? passif, les principes de
Australie (voir la Deuxième justice réparatrice
section) et qui cherche à offrir ce Le message clé n’est pas qu’il ne donnent tant à la
qu’on appelle ici une justice faut jamais avoir recours à victime qu’au
«transformatrice» : l’incarcération, mais que le but délinquant un rôle actif
de celle-ci est d’assurer la dans le règlement de
• Comment pouvons-nous sécurité et non de punir, et qu’il problèmes
amener le délinquant à ne faut pas l’imposer à toutes les interpersonnels.»
comprendre les répercussions autres fins auxquelles le recours
de son infraction sur la Mark Umbreit
à cette mesure est à la fois
victime? inutile et coûteux. Cela ne veut
• Comment pouvons-nous pas dire non plus que l’activité
amener le délinquant à illégale ne doit pas entraîner de
reconnaître qu’il s’est mal conséquences et que celles-ci ne
comporté? seront pas parfois difficiles à

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie XXII
supporter. Toutefois, ces
conséquences doivent être
logiques et les mesures prises
doivent s’attaquer sérieusement
aux véritables problèmes qui se
posent.

Enfin, pour procéder à une


réorientation dynamique et utile
du régime de détermination de la
peine, il faut cesser de concentrer
toute l’attention sur le délinquant.
Tous les décideurs du système de
justice devraient veiller à ajouter
à leur liste des facteurs dont il
faut tenir compte dans chaque
case «quels sont les besoins de la
victime?», «Quels sont les
besoins de la collectivité?»,
«comment puis-je aider à y
répondre?». Cela nous
permettrait dans une large
mesure d’optimiser l’utilisation
des ressources financières et de
mieux assurer la sécurité et la
santé du public. À cette fin, nous
reproduisons ci-dessous le critère
de la justice réparatrice proposé
par Howard Zehr dans son livre
«Changing Lenses».
La violence ou la vie
Le Conseil des Église pour la justice
et la criminologie

XXIII Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Critère de la justice réparatrice
1. Rend-on justice aux victimes?

• Les victimes ont-elles suffisamment l’occasion d’exprimer leur vérité à des personnes compétentes?
• Les victimes reçoivent-elles un dédommagement ou une restitution?
• L’injustice est-elle suffisamment reconnue?
• Les victimes sont-elles suffisamment protégées contre d’autres violations de leurs droits?
• Le résultat reflète-t-il d’une manière adéquate la gravité de l’infraction?
• Les victimes reçoivent-elles suffisamment d’information sur le crime, le délinquant et le processus de justice?
• Les victimes ont-elles leur mot à dire dans le processus de justice?
• L’expérience de la justice est-elle suffisamment publique?
• Les victimes reçoivent-elles suffisamment de soutien d’autres personnes?
• Les familles des victimes reçoivent-elles suffisamment d’aide et de soutien?
• S’occupe-t-on de répondre à d’autres besoins - matériels, psychologiques et spirituels?

2. Rend-on justice aux délinquants?

• Encourage-t-on les délinquants à comprendre leurs actes et en assumer la responsabilité?


• Conteste-t-on l’attribution à tort de la responsabilité à une autre personne?
• Encourage-t-on les délinquants à arranger les choses et leur offre-t-on l’occasion de ce faire?
• Donne-t-on aux délinquants l’occasion de participer au processus?
• Encourage-t-on les délinquants à modifier leur comportement?
• Y a-t-il un mécanisme de surveillance ou de contrôle des changements?
• Prend-on des mesures pour répondre aux besoins des délinquants?
• Les familles des délinquants reçoivent-elles soutien et aide?

3. S’occupe-t-on des relations entre la victime et le délinquant?

• Offre-t-on aux victimes et aux délinquants la possibilité de se rencontrer, si la chose est appropriée?
• Offre-t-on aux victimes et aux délinquants la possibilité d’échanger des renseignements sur l’incident et
sur eux-mêmes?

4. Tient-on compte des préoccupations de la collectivité?

• Le processus et les résultats sont-ils suffisamment publics?


• Prend-on des mesures pour assurer la protection de la collectivité?
• Est-il nécessaire de dédommager la collectivité ou de poser un geste symbolique pour elle?
• La collectivité est-elle représentée d’une façon quelconque dans le processus de justice?

5. Prend-on des mesures pour régler les problèmes qui ont mené à cet incident?

• Prévoit-on des mesures pour régler les problèmes liés à cet incident?
• S’est-on penché sur les intentions dont on a fait état pour l’avenir?
• A-t-on pris des mesures pour assurer la surveillance et le contrôle des résultats et le règlement des problèmes?
Source : Howard Zehr, Changing Lenses, Scottsdale, Pennsylvanie : Herald Press, 1990)

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie XXIV
(iii) Réduction du recours à
l’emprisonnement et vraie justice : deux
objectifs qui se chevauchent
Dans notre recherche de mesures jeunes contrevenants, la
qui contribuent à réduire le possibilité d’éviter une
recours à l’emprisonnement, nous peine d’emprisonnement en
nous sommes bientôt trouvés en suivant un traitement
face d’un dilemme difficile : destiné à régler les
d’une part, nous avons trouvé problèmes financiers, de
jusqu’ici peu de mesures ayant santé, d’ordre social ou liés
réduit la population carcérale au niveau d’instruction qui
dans la plupart des sphères de
sous-tendent ou qui
compétence qui les ont adoptées;
expliquent leur
d’autre part, nous avons trouvé
comportement criminel.
de nombreuses initiatives
susceptibles de produire ce Ces interventions sont
résultat. Cependant, pour axées tout particulièrement
différentes raisons, elles ne sur le délinquant, bien que
donnent pas les résultats voulus certaines portent également
sur le plan de la qualité de sur des questions
l’intervention ou de l’expérience intéressant la victime et la
de la justice. Par exemple : collectivité. Toutefois, ces
initiatives n’ont pas non
• Nous avons trouvé des plus réussi à réduire l’usage
programmes qui font appel fait de la capacité d’accueil
à des «solutions de actuelle des établissement
rechange» principalement et elles n’ont pas empêché
pour réduire le problème les jeunes contrevenants au
du surpeuplement dans les Canada, de recevoir de
prisons et pour éviter façon générale des peines
d’avoir à construire de de placement sous garde
nouveaux établissements plus longues que celles
carcéraux. Ces mesures, infligées aux délinquants
toutefois, ne réduisent pas adultes pour le même type
l’usage qui est fait de la d’infraction. Et maintenant,
capacité d’accueil actuelle ironie du sort, à mesure que
des établissements. les ressources financières
affectées aux collectivités
• Nous avons trouvé des sont réduites en raison de
initiatives ou des l’accroissement des budgets
programmes complets qui des établissements
offrent à certaines carcéraux, il est tentant et
personnes, souvent de assez courant pour les

XXV Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
travailleurs sociaux de les plus efficaces pour ce
préconiser un recours accru qui est de réduire le recours
au placement sous garde à l’emprisonnement ou la
comme principal moyen durée d’une peine
permettant aux jeunes d’emprisonnement infligée
d’avoir accès aux services essentiellement par égards
dont ils ont besoin. pour la victime ou pour
satisfaire la collectivité
• Nous avons trouvé d’autres quelle que soit la pertinence
initiatives qui comprennent, sur le plan pratique de la
en plus ou à la place des peine d’emprisonnement
mesures mentionnées ci- réclamée par rapport aux
dessus, un ou plusieurs objectifs visés. (Comme l’a
éléments «réparateurs» et dit Élisabeth : «S’ils veulent
qui mettent l’accent sur la le garder en prison, c’est leur
nécessité de «réparer» le affaire, mais je ne veux pas
tort causé à la victime ou à que ce soit à cause de moi.»)
la collectivité. Certaines de Néanmoins, si bon nombre
ces mesures offrent de ces éléments ont été
également la possibilité de acceptés comme constituant
répondre à des «besoins des éléments utiles du
auxiliaires», c.-à-d. aux système de justice, ils n’ont
divers besoins sur le plan pas réussi à amorcer une
psychologique et social de réorientation, de sorte que
certaines ou de bon nombre l’incarcération demeure la
des personnes impliquées pierre angulaire du régime
dans l’acte criminel ou de détermination de la
touchées par lui, y compris peine. Au contraire, ils sont
les personnes qui ne sont devenus des «ajouts» au
touchées qu’indirectement, régime plutôt que des
par l’entremise du solutions de remplacement
délinquant, de la victime ou qui suffisent en elles-
de la collectivité. Ces mêmes à «rendre la justice».
mesures permettent aussi
parfois de s’occuper de En organisant ce répertoire de
certains problèmes sociaux mesures pouvant aider à réduire
connexes dans la le recours à l’emprisonnement ou
collectivité. Comme nous la durée des peines, nous nous
l’avons vu, ces types de sommes rendus compte que
mesures semblent être certains des facteurs qui en
essentiels pour que la neutralisent actuellement
justice soit perçue comme l’incidence doivent être portés à
vraiment satisfaisante. l’attention des dirigeants
Pour cette raison, nous gouvernementaux. Il faut
sommes d’avis qu’elles sont exhorter ces derniers à adopter

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie XXVI
des mesures législatives et les illusions au sujet de
politiques plus directives. On l’emprisonnement sont dissipées.
examine cette question à la D’autre part, le recours à
rubrique Que faut-il faire de la l’incarcération ne contribue pas
section Conclusions. Toutefois, en soi, dans la plupart des cas, à
nous nous sommes rendus rendre une justice vraiment
compte aussi que bon nombre des satisfaisante. Par conséquent, il
initiatives recensées comprennent perpétue les forces et les facteurs
seulement certains des éléments qui entravent les efforts déployés
nécessaires pour rendre une vraie pour le réduire.
justice et donc pour réduire
ultérieurement notre recours à Il n’y a là rien de nouveau pour
l’emprisonnement à des fins qu’il ceux qui connaissent les
ne peut permettre d’atteindre recherches faites dans ce
efficacement. Les mesures domaine. Toutefois, d’autres
recensées seraient beaucoup plus collectivités ont tiré des
utiles si elles portaient aussi sur conclusions analogues de leur
ces autres aspects du problème. propre expérience au fil des ans,
comme l’explique la collectivité
Nous avons conclu à l’existence de Hollow Water (Manitoba) dans
d’un lien entre la réduction du sa déclaration ci-dessous sur son
recours à l’emprisonnement et la recours à l’incarcération dans les
vraie justice. D’une part, on cas d’abus sexuel grave. Nous
réclamera l’emprisonnement trouvons à propos de l’insérer ici,
moins souvent seulement si la à la fin de notre examen de la
justice rendue est véritablement question de ce qui constitue une
satisfaisante et si en même temps vraie justice.

XXVII Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Programme du Cercle de grave» et un autre, «pas trop
guérison holistique grave» (c.-à-d. «seulement» des
attouchements ou relations
communautaire - sexuelles; la victime est la fille ou le
Première nation de neveu; une victime ou quatre
Hollow Water victimes) simplifiaient chaque cas à
Exposé de position sur l’extrême et n’étaient certainement
l’incarcération pas valides du point de vue
expérienciel; (2) notre promotion du
«Dans les efforts que nous avons recours à l’incarcération s’inspirait
déployés initialement pour rompre de différents sentiments de notre
le cercle vicieux de violence dans part (colère, désir de vengeance,
notre collectivité, nous avons adopté culpabilité et honte) et de notre
la position selon laquelle il est expérience personnelle de la
nécessaire pour nous de promouvoir victimisation au lieu de s’inspirer
le recours à l’incarcération dans les du désir de trouver une solution
cas «trop graves». Après un certain valable à la victimisation.
temps, toutefois, nous avons conclu
que cette position venait compliquer Ainsi, notre position sur le recours
encore le traitement des cas, déjà un à l’incarcération a évolué. En même
travail complexe. temps, nous comprenons comment
le système de justice continue
En réglant les problèmes concrets d’utiliser et de percevoir
découlant de cette position, nous l’incarcération - un châtiment et un
nous sommes rendus compte de moyen de dissuasion dans le cas de
deux choses : (1) à mesure que nous l’agresseur (le délinquant) et, dans
avons raconté nos propres le cas de la victime et de la
expériences de victimisation et que collectivité, un moyen d’assurer
nous avons appris en aidant leur protection et leur sécurité. Ce
d’autres personnes à faire face à la que le système de justice semble ne
souffrance liée à leur victimisation, pas comprendre parfois, c’est la
il est devenu très difficile de complexité des problèmes auxquels
déterminer quels cas étaient «trop il faut s’attaquer pour briser le cycle
graves». Il ne semblait pas y avoir de violence qui existe dans notre
un lien direct entre la quantité ou la collectivité.
qualité de la souffrance ressentie par
la victime, la ou les familles et la ...Le système de justice soutient le
collectivité et un ou plusieurs actes point de vue que le recours à
de victimisation particuliers. Par l’emprisonnement, comme
exemple, les mesures prises par les châtiment et moyen de dissuasion,
tribunaux - et jusqu’à un certain brisera ce cycle et assurera la
point par nous-mêmes - pour sécurité de notre collectivité. À
déterminer qu’un cas de notre avis, toutefois, cela n’a pas -
victimisation donné était «trop et ne saurait - donner les résultats
escomptés.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie XXVIII
En ce qui concerne les notions de Qui plus est, depuis toujours, les
jugement et de châtiment, notre membres de la collectivité qui sont
tradition, notre culture sont accusés d’actes de violence restent
formelles. Le jugement et le dans la collectivité, souvent pendant
châtiment sont l’apanage du des mois, en attendant de
Créateur. Ils ne nous appartiennent comparaître devant le tribunal. Le
pas. Par conséquent, ils n’ont pas système de justice présume qu’ils
de place dans nos rapports les uns sont innocents jusqu’à ce qu’il soit
avec les autres. Nous devons prouvé qu’ils sont coupables.
considérer les gens qui sont Pendant cette période, ils n’ont
coupables d’agression contre autrui aucun compte à rendre à la
(les agresseurs) comme des collectivité et ils récidivent souvent
personnes qui ne sont plus en sans que cela se sache à l’extérieur.
harmonie avec elles-mêmes, leur
famille, leur collectivité et leur S’ils sont incarcérés, ils ne
Créateur. La meilleure façon pour reçoivent, semble-t-il, aucune aide
elles de retrouver l’équilibre, c’est pendant leur séjour loin de la
par l’entremise d’un processus de collectivité. Lorsqu’ils sortent de
reddition de comptes qui comprend prison, ils sont encore plus
un soutien communautaire assuré déséquilibrés et, en outre, se font
sous forme d’enseignement et qui dire par les préposés aux services de
vise la guérison. Le jugement et le probation et de libération
châtiment entravent le processus de conditionnelle - de sorte qu’ils le
guérison. Une personne déjà croient jusqu’à un certain point -
déséquilibrée le devient encore plus. qu’ils ont «payé pour leur crime».
Par conséquent, ils présentent un
Le recours du système de justice à risque encore plus élevé pour la
l’incarcération comme moyen de collectivité qu’avant leur séjour en
dissuasion général et particulier nous prison.
semble inefficace lorsqu’il s’agit de
briser le cycle de la violence. La Nous sommes d’avis que, pour
victimisation est devenue si briser le cycle, l’agresseur doit avoir
profondément ancrée dans les moeurs des comptes à rendre aux personnes
de notre nation et de notre collectivité qui ont été le plus touchées par
que la menace d’emprisonnement, l’acte de victimisation - c.-à-d. la
tout simplement, n’a plus d’effet victime, la ou les familles, la
dissuasif. Elle ne fait qu’empêcher collectivité - et ce sont eux qui
les gens d’assumer la responsabilité doivent assurer à l’agresseur le
du tort qu’ils infligent. Elle renforce soutien nécessaire. Éloigner
le silence et, partant, maintient au l’agresseur de ceux qui doivent le
lieu de briser le cycle actuel de la tenir responsable de ses actes et lui
violence. En réalité, au lieu offrir leur soutien, et qui sont le
d’accroître la sécurité de la mieux en mesure de ce faire, accroît
collectivité, la menace la complexité de la dynamique de
d’emprisonnement accroît le risque. déni, de culpabilité et de honte avec

XXIX Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
laquelle les intéressés se trouvent arguments de la défense. Parce
déjà aux prises, ce qui a pour effet qu’ils se sentent très vulnérables et
de ralentir le processus de guérison parce qu’on leur a toujours dit
de toutes les parties et le plus qu’ils doivent faire confiance aux
souvent même de l’arrêter. avocats pour protéger leurs intérêts,
il est très difficile pour les
Dans notre optique, le système de agresseurs d’aller à l’encontre de ces
justice fondé sur les principes du conseils. En même temps, les
châtiment et de la dissuasion ne procureurs de la Couronne
donne tout simplement pas les appellent les victimes - qui sont
résultats voulus. Nous ne souvent des enfants - à la barre des
comprenons pas comment il se fait témoins et s’attendent à ce qu’elles
que le système ne voit pas. participent à un processus qui à
Lorsqu’ils retournent d’un séjour en bien des égards, d’après nous, les
prison, les membres de notre victimise encore davantage. La salle
collectivité semblent toujours être d’audience dans laquelle se déroule
plus mal en point qu’avant. le processus n’est tout simplement
pas un lieu sûr où la victime peut
...nous tâchons de promouvoir un parler de la victimisation dont elle a
processus que nous croyons plus fait l’objet, ni un lieu sûr où
conforme à l’approche traditionnelle l’agresseur peut reconnaître ses
de notre collectivité des questions de torts.
justice. L’approche du système de
justice actuel qui consiste à se En outre, l’approche accusatoire
concentrer sur un incident donné oppose la victime à la collectivité ce
doit, à notre avis, être remplacé par qui, à notre avis, va à l’encontre du
l’approche plus holistique nécessaire processus de guérison. Pour nous,
pour permettre à toutes les parties à la guérison (briser le cycle de la
la victimisation de retrouver leur violence) exige que (1) l’agresseur
équilibre. Il faut s’occuper de assume l’entière responsabilité de
l’agresseur sur tous les plans - ses actes, (2) la victime le
physique, mental, psychologique, comprenne et intègre ce fait dans sa
spirituel - et en tenant compte de vie de tous les jours et (3) la
toutes ses relations passées, COLLECTIVITÉ puisse appuyer et
présentes et futures avec sa famille, tenir responsables toutes les parties
la collectivité et le Créateur. Or, à la victimisation. Jusqu’à ce que
l’approche accusatoire du système cela soit possible, et tant et aussi
de justice ne le permet pas. longtemps que l’emprisonnement
est perçu comme la solution, la
En effet, l’approche accusatoire collectivité ne sera pas un lieu sûr.
oppose la victime à son agresseur.
Les avocats de la défense conseillent D’après nous, notre position
à leurs clients de ne rien dire et de actuelle sur la question du recours à
n’assumer aucune responsabilité l’incarcération ne vise ni à fournir
sous peine «d’affaiblir» les une échappatoire à l’agresseur, ni à

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie XXX
lui permettre de «s’en tirer ...Nous avons commencé à briser le
facilement». Plutôt, elle établit un cycle de la violence et de l’agression
lien de responsabilisation très clair dans notre collectivité, mais il n’est
entre l’agresseur et sa collectivité. pas facile de déterminer quel est le
Il en découle un processus qui, à lieu sûr où l’agresseur peut
notre avis, est non seulement (1) reconnaître ses torts et (2) en
beaucoup plus difficile pour assumer la responsabilité.
l’agresseur, mais aussi beaucoup L’incarcération n’est appropriée
plus susceptible de guérir les plaies [dans les cas de violence grave -
résultant de la victimisation que ne note de l’éditeur] que lorsque
saurait jamais le faire une peine l’agresseur ne veut ou ne peut pas
d’emprisonnement. assumer la responsabilité de son
comportement, ou la collectivité ne
Nos enfants et la collectivité ne peut exiger de toutes les parties à la
peuvent plus se permettre de payer victimisation qu’elles assument leur
le prix des mesures prises par le part de responsabilité et leur offrir
système de justice pour tâcher de le soutien voulu. Sans ces éléments,
rendre la justice dans notre le processus de guérison ne peut
collectivité. Il ne faut plus parler de commencer.
châtiment et de dissuasion. Il s’agit
de BRISER LE CYCLE - L’incarcération, toutefois, ne
MAINTENANT! À notre avis, la contribuera jamais à la
responsabilité, visiblement, revient à GUÉRISON de nous-mêmes ou de
la collectivité plutôt qu’au système notre collectivité.»
de justice.

XXXI Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Organisation du répertoire
Comme on peut le constater dans Par conséquent, les initiatives
le chapitre précédent sur le sens énumérées ont été regroupées en
de l’expression «vraie justice», quatre sections selon les critères
l’organisation du répertoire a posé suivants :
à la fois un dilemme et tout un
défi au Conseil des Églises. Nous 1. Série d’initiatives destinées à
voulions présenter les différentes réparer le tort causé par la
mesures selon un ordre de priorité criminalité, à répondre aux
utile et ce, malgré les nombreux besoins connexes et à prévenir
critères dont nous avons dû tenir ou à réduire sensiblement le
compte et l’éventail d’initiatives recours à l’emprisonnement.
auxquelles nous nous sommes
trouvés confrontés en raison de la 2. Série d’initiatives destinées à
complexité des questions réparer le tort causé par la
recensées. criminalité et à répondre à des
besoins connexes, et certaines
Il importait de mettre en lumière incidences sur la réduction du
les aspects des différentes recours à l’emprisonnement
initiatives qui offrent des éléments ou la durée des peines
utiles à une stratégie destinée à d’emprisonnement.
réduire les populations carcérales
à l’avenir, tout en reconnaissant 3. Série d’initiatives destinées à
l’absence d’autres éléments éviter le recours à
également importants. En nous l’emprisonnement, comportant
fondant sur notre analyse, nous ou non certains éléments
avons pris en considération non réparateurs.
seulement la mesure dans laquelle
une initiative donnée réduit 4. Série d’initiatives destinées à
actuellement le recours à réduire la durée du placement
l’emprisonnement, mais sous garde en allégeant
également si elle répond à des l’application de la peine
besoins connexes quant à la d’emprisonnement.
sécurité et à l’intervention sur les
plans biologique, sociologique et En outre, nous avons jugé qu’il
économique, et si elle répond en serait utile pour le lecteur qui
même temps aux besoins sur le cherche des programmes,
plan de la «justice» : c.-à-d., vise-t- initiatives et cas qui se rattachent à
elle à réparer le tort causé à la son domaine de travail ou
victime et à la collectivité, d’intérêt de fournir une annexe
s’occupe-t-elle des répercussions dans laquelle de nombreuses
connexes d’ordre social, initiatives seraient regroupées
psychologique et pratique sur les selon le type d’infraction ou le
autres personnes affectées, offre-t- groupe visé par un programme
elle la possibilité de rendre une donné.
«vraie justice»?

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie XXXII
Première section :
Pour une vraie justice
Série d’initiatives destinées à réparer le tort causé par
la criminalité, à répondre aux besoins connexes et à
prévenir ou à réduire sensiblement le recours à
l’emprisonnement

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Table des matières
Série d’initiatives destinées à réparer le tort causé par la criminalité, à répondre aux besoins connexes et à
prévenir ou à réduire sensiblement le recours à l’emprisonnement

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .1

Le cas de Kevin Hollinsky à Windsor . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .2

«Restorative Resolutions» - Winnipeg . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5

Justice communautaire de Kwanlin Dun - Détermination de la peine par le Cercle,


Territoire du Yukon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .7

Services de médiation, Winnipeg . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .11

Programme du Cercle de guérison holistique communautaire - Première nation de


Hollow Water (Manitoba) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .16

Mike de Rosemary (Alberta) - Intervention communautaire dans le système de


justice . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .19

Pro-Services, Québec . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .22

Atoskata - Projet d’indemnisation des victimes à l’intention des jeunes, Regina . . . . . . . . . . . . . . .23

La médiation réparatrice dans les cas de crime grave - Belgique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .24

Réaction communautaire au crime - Une utilisation plus créative de la probation, Minnesota . . .27

Réduction de la durée de la peine grâce à un programme de médiation


postcondamnation - Oklahoma . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .29

Conférences familiales - Réussir où la prison échoue, États-Unis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .31

Cercle de soutien et de responsabilisation pour un délinquant sexuel mis en liberté -


Le récit d’une collectivité, Ontario . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .34

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Introduction

Dans la présente section, nous souvent? Et enfin, certaines sont


décrivons treize initiatives qui, à des initiatives mises de l’avant
notre avis, conjuguent le mieux, à spontanément par des membres
des degrés variables, les éléments de la collectivité qui tenaient à
fondamentaux d’une «vraie favoriser l’issue la plus juste
justice». Ces initiatives tiennent possible pour des personnes qui
compte de la sécurité de la
leur étaient chères. Quand les
collectivité. Elles sont destinées à
gens sont touchés par des
corriger le préjudice causé par
des actes criminels. Elles circonstances particulières, ils
répondent à d’autres besoins s’aperçoivent souvent qu’ils n’ont
périphériques reliés à l’infraction pas besoin de «permission» pour
et elles visent à atteindre ces intervenir et que rien ne les
objectifs tout en prévenant ou en empêche vraiment d’agir selon
réduisant considérablement le leurs convictions. Ces
recours à l’incarcération dans les interventions communautaires
cas graves normalement peuvent se révéler des plus
punissables d’emprisonnement. efficaces puisqu’elles peuvent
s’adapter de manière créative à
Comme nous venons de le toutes les circonstances : chaque
mentionner, ces initiatives cas qui pose problème est unique
n’englobent pas toute la gamme en son genre et la façon d’y réagir
des éléments au même degré. doit l’être aussi, compte tenu de
Certaines regroupent tous ces toutes les personnes touchées et
principes de base dans un de la multitude d’éléments de
programme intégré offert à solution qui s’offrent, quand les
l’ensemble de la collectivité. gens sont prêts à mettre le temps
D’autres appliquent nécessaire pour régler le
particulièrement bien certaines problème ensemble.
caractéristiques clés d’un
processus vraiment satisfaisant et Dans cette première section, nous
font intervenir l’appareil avons tâché de vous présenter
judiciaire, à différents stades, de des récits qui illustrent de façon
manière à s’étendre à des cas de poignante quelques-unes des
gravité croissante. Certaines initiatives les plus novatrices qui
représentent une solution de aient été portées à notre
rechange acceptée dans un cas connaissance et qui sont
qui n’aurait normalement pas été susceptibles d’assurer aux
envisagé en raison de sa gravité. victimes et aux collectivités une
Les résultats sont remarquables et justice vraiment plus
suscitent la question suivante : satisfaisante. Par ailleurs, nous
pourquoi ne pas y recourir plus

1 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
avons également voulu décrire dangereuse causant la mort. À des
tout l’éventail des efforts fins de dissuasion générale, la
déployés pour mettre en Couronne a demandé une peine
application les principes d’une d’emprisonnement de huit à 14 mois
vraie justice, peu importe l’étape qui serve de leçon aux autres jeunes
du processus à laquelle se conducteurs. Selon un agent de
trouvent les gens appelés à police communautaire ayant travaillé
intervenir. C’est pourquoi nous au cas : «Nous savions que nous
avons inclus ici deux initiatives se avions lancé un message très clair :
déroulant en prison et une Si vous tuez quelqu’un pour cause
initiative qui illustre ce qui peut d’ivresse au volant, c’est la prison.»
se produire entre une collectivité Les cours d’appel ont établi qu’une
et un délinquant à risque élevé peine d’emprisonnement constitue
même une fois qu’il a purgé sa une sentence appropriée dans presque
peine d’emprisonnement : ces tous les cas de décès découlant d’un
initiatives représentent un bel accident de la route causé par une
effort de guérison et de négligence grave.
prévention dans l’espoir d’éviter
toute nouvelle incarcération. Cependant, Kevin n’est pas allé en
prison, d’une part grâce à
Ordonnances de services l’intervention extraordinaire des
parents des deux garçons tués, et
communautaires pour les
d’autre part grâce à un juge
adultes - Le cas de Kevin courageux et innovateur qui a pris le
Hollinsky à Windsor risque d’imposer une peine
communautaire de rechange. C’est
Un soir de juillet 1994, Kevin Dale Thompson, le père d’Andrew,
Hollinsky et quatre de ses copains se qui a le mieux exprimé ce qui s’est
sont rendus dans un bar du centre- passé ce jour-là dans le système
ville de Windsor. Plusieurs heures judiciaire de Windsor. Voici les
plus tard, Kevin prenait le volant de propos qu’il a tenus à la cour :
sa Firebird 1985. Sur le chemin du
retour, ses copains et lui essayaient «Puisque la société exige que
d’attirer l’attention d’un groupe de Kevin paie pour son erreur,
filles à bord d’une autre voiture. j’aimerais croire que le prix à
Kevin conduisait trop vite lorsqu’il a payer puisse être beaucoup plus
perdu le contrôle de son véhicule constructif que l’incarcération...
dans une courbe dangereuse. Nous discutons avec le service de
Joe Camlis, le meilleur ami de Kevin police de Windsor de la
depuis l’âge de quatre ans, et un possibilité de mettre sur pied un
autre ami intime, programme en collaboration avec
Andrew Thompson, ont tous deux les écoles de la région. En vertu
trouvé la mort. Kevin s’en est sorti de ce programme, Kevin ferait la
indemne. Les deux autres ont été tournée des écoles, avec ce qui lui
blessés. Kevin a plaidé coupable à reste de sa voiture, pour parler
deux chefs d’accusation de conduite aux élèves des événements

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 2
survenus lors de cette soirée récemment, était d’abord
tragique. Les deux familles ont mécontent que Kevin n’aille pas
déjà offert d’aider les Hollinsky en prison. «Le cas de Kevin m’a
et Kevin à tâcher de faire maintenant convaincu de
comprendre aux jeunes l’efficacité des peines de
conducteurs l’importance d’une rechange... Personne ne pourrait
conduite responsable. C’est ce me persuader aujourd’hui que
qu’Andrew voudrait, j’en suis l’emprisonnement aurait été la
sûr.» meilleure solution. Une peine de
cinq ans de prison n’aurait jamais
Kevin Hollinsky a reçu une peine de été un châtiment aussi sévère que
750 heures de services celui qu’il a subi dans le cadre de
communautaires et a rencontré plus ce programme.
de 8 300 élèves dans le cadre d’un
programme extraordinaire qui «Cet homme a été contraint
transmet des messages bien sentis de d’assumer les conséquences de
la part de la police, de Kevin, de son irresponsabilité jour après
M. Thompson et d’un autre ami qui jour après jour. Il a revécu
se trouvait dans la voiture. l’incident à chaque école visitée.
Il a touché une foule de jeunes
Les auditoires des écoles gens de cette ville d’une façon
secondaires sont profondément que nous ne pourrions le faire.
émus par la présentation ayant C’est difficile de communiquer
découlé de l’ordonnance de avec les adolescents. Kevin l’a
services communautaires fait. Il leur a montré qu’ils
d’Hollinsky. L’été dernier, pour la n’étaient pas invulnérables.»
première fois depuis bien des
années, aucun élève du secondaire La Couronne en a appelé de cette
n’a été impliqué dans une collision peine non privative de liberté,
d’automobile grave ou fatale dans sans doute en partie parce qu’elle
les comtés de Windsor et d’Essex. remettait carrément en question
Un directeur d’école secondaire de la mentalité actuelle de l’appareil
Windsor a mentionné à la police judiciaire. En novembre 1995,
qu’il était convaincu que cette après une demi-heure de
initiative allait sauver des vies. délibérations, trois juges de la
«Au cours de mes 30 ans dans Cour d’appel ont confirmé la
l’enseignement, je n’ai jamais sentence initiale. «Le juge
entendu une présentation qui ait Nosanchuk a fait preuve d’un
eu un effet aussi percutant sur les grand courage en ne condamnant
élèves.» pas M. Hollinsky à la prison.
C’était un jugement merveilleux»,
Lloyd Grahame, sergent d’état- a déclaré Edward Greenspan,
major de la police de Windsor qui l’avocat ayant représenté
s’occupait de la police de quartier Hollinsky lors de l’appel. «Les
avant de prendre sa retraite gens présents dans la salle

3 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
d’audience se sont levés et ont dissuasion générale qu’en parlant
applaudi. Les parents qui ont à 8 200 élèves des effets tragiques
perdu leurs fils se sont levés et de la conduite en état d’ébriété?
ont applaudi, et tout le monde se
donnait l’accolade, y compris Dans bien des cas, les victimes et
Kevin.» les délinquants ne se connaissent
pas, du moins pas aussi
Mme Camlis, mère d’une des intimement que Kevin et ses amis.
victimes, abonde dans le même C’est pourquoi certaines
sens. Elle s’est rendue à plusieurs personnes considèrent ce cas
des présentations d’Hollinsky. comme «exceptionnel» et donc
«Ce n’était pas facile pour Kevin. non pertinent. Toutefois, bien que
Il a revécu le cauchemar chaque les victimes et les délinquants ne
fois qu’il en parlait. Je pense que soient souvent pas amis, et qu’on
ses deux amis peuvent être très ne s’attende pas à ce qu’ils le
fiers de ce qu’il a fait de sa vie deviennent, l’actuel système
pour eux depuis l’accident. Il m’a accusatoire maintient entre eux un
souvent dit : «Je l’ai fait pour eux. gouffre qui mine des peines
C’est la seule façon de leur dire constructives comme celle
que je suis désolé.»» d’Hollinsky. D’autres pratiques
judiciaires réparatrices telles que
la médiation, les cercles de
Commentaire
détermination de la peine et les
conférences familiales peuvent
De toute évidence, une peine de
humaniser le processus judiciaire
ce genre est non seulement sévère,
en favorisant des peines
mais elle est beaucoup plus
significatives semblables.
significative, efficace et
économique pour les
Il y a bien des gens comme Kevin
contribuables que
qui ont commis de graves crimes
l’emprisonnement. Quand on
pour lesquels une peine
pense que les gens réclament des
d’emprisonnement n’est pas
peines d’emprisonnement plus
nécessaire, et pourrait même être
longues, il est ironique de
inefficace, non seulement pour le
constater que la sanction imposée
délinquant, mais aussi pour les
à Kevin est, à bien des égards,
besoins réels de la collectivité.
plus dure que la prison. Kevin a
Des peines de rechange créatives
souffert du syndrome de la
sont certainement appropriées
culpabilité du survivant et de
dans le cas de crimes moins
névrose post-traumatique. À
graves qui représentent la
maintes reprises, il a fait face aux
majorité des actes criminels.
conséquences de ses actes et en
Lorsque la sécurité de la
assumé la responsabilité. Comme
collectivité n’est pas compromise,
l’un des juges de la Cour d’appel
ces peines semblent également
l’a fait observer, comment peut-on
convenir à des crimes plus graves.
mieux servir le principe de la

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 4
Personne-ressource : «Restorative Resolutions»
Winnipeg (Manitoba)
Conseil des Églises pour la
justice et la criminologie
507, rue Bank Ce projet est basé sur la
Ottawa (Ont.) prémisse selon laquelle la
K2P 1Z5 participation communautaire
Tél. : (613) 563-1688 favorise la responsabilité sociale
Téléc. : (613) 237-6129 et la responsabilisation. Le but
du programme «Restorative
Resolutions» est d’offrir à
certains délinquants l’occasion
de regagner la confiance et
l’acceptation des personnes et de
la collectivité auxquelles ils ont
causé du tort. Parallèlement, ce
«... il n’est pas nécessaire (dans ce projet vise à habiliter les
cas) d’imposer une peine membres de la collectivité à
d’emprisonnement afin de réagir de manière appropriée et
produire l’effet de dissuasion responsable face à des personnes
général voulu. L’arrestation de marginalisées.
l’accusé, les poursuites dont il a
fait l’objet devant le tribunal, le Un cas
fait qu’il a maintenant un dossier
de condamnation pour deux Un homme de 32 ans ayant commis
infractions graves au Code de nombreuses agressions et
criminel du Canada, qu’il perdra introductions par effraction durant
son permis de conduire pour une
sa jeunesse et à l’âge adulte est
période prolongée, qu’il sera appelé
inculpé en vertu de quatre nouveaux
à exécuter de nombreux travaux
chefs d’accusation d’introduction par
communautaires utiles à titre de
mesure de rechange à effraction et de vol. Le procureur de
l’emprisonnement, se présentant la Couronne réclame une peine
en personne tel que requis de d’emprisonnement. «Restorative
manière à transmettre le message Resolutions», un projet
voulu à d’autres jeunes, tout cela communautaire de détermination de
répond au besoin dans cette la peine, a préparé un plan de
collectivité de mesures de rechange recommandant : une
dissuasion générales relativement condamnation avec sursis assortie
aux infractions dont le tribunal d’une période de surveillance assurée
est saisi. par «Restorative Resolutions»; un
cours complet axé sur l’acquisition
Le juge Nosanchuk, d’aptitudes à la communication
déterminant la peine dans le interpersonnelle; une évaluation
cas de Kevin Hollinsky complète par la Fondation de
l’alcoolisme du Manitoba et une
présence assidue à des réunions des

5 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
AA; le respect de toutes les conditions répercussions du crime forment
énoncées dans l’accord de médiation; une partie importante des
ainsi que des cours d’alphabétisation. rapports que les responsables du
projet déposent auprès du juge
Ce plan a été accepté par le juge. qui prononce la peine.
«Restorative Resolutions»
Description du programme considère que le crime cause des
préjudices aux victimes et à la
«Restorative Resolutions» collectivité et que les solutions au
prépare (après un plaidoyer de crime doivent tenir compte des
culpabilité) des plans de gestion besoins des victimes et de la
de cas individuels qui sont collectivité.
présentés au juge au moment du
prononcé de la sentence. Ces Un plan communautaire expose
plans proposent une peine en détail les antécédents sociaux et
communautaire pour des criminels du délinquant et fait état «Au Manitoba, comme
délinquants qui seraient des mesures qui ont été et qui dans d’autres sphères
normalement condamnés à au seront prises compte tenu des de compétence, il est
moins neuf mois besoins du client. Le plan généralement reconnu
d’emprisonnement. contient, à l’intention du juge qui que de nombreuses
prononce la peine, une personnes continuent
Cette caractéristique innovatrice recommandation particulière qui d’être incarcérées alors
réduit le risque que ce projet ne permet au délinquant d’assumer qu’on peut offrir aux
constitue qu’une autre mesure de la responsabilité de l’infraction tribunaux des solutions
rechange qui, dans les faits, ne fait qu’il a commise dans la de rechange
pas baisser le taux d’incarcération. collectivité. Dans quelques cas, il communautaires
est arrivé que le juge ajoute une novatrices et sensées.»
En adoptant comme critère de ne
traiter que les infractions qui peine d’emprisonnement, quoique
Résumé de projet,
entraîneraient une peine minimale de durée réduite.
«Restorative
de neuf mois, on vise à réduire Resolutions»
l’élargissement du filet, et toute «Restorative Resolutions», un
détermination à cet égard est prise projet de la Société John Howard
en consultation avec le bureau des du Manitoba, est chargé de
avocats de la Couronne. (Il y a superviser tous les plans
élargissement du filet lorsqu’on communautaires. Il vise à
applique des mesures de rechange habiliter les membres de la
sans pour autant réduire le collectivité à prendre une part
recours à l’incarcération. La plus active au processus de justice
rubrique Conclusions renferme pénale, notamment grâce à la
une analyse de cette situation.) formation d’un vaste réseau
communautaire de collaborateurs
Chaque plan prévoit un certain bénévoles. Ces bénévoles offrent
apport de la victime. Les accords des services d’extension, exercent
de médiation postplaidoyer ou les une surveillance auprès des clients
déclarations de la victime sur les et participent à l’exploitation d’un

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 6
centre de ressources Personne-ressource :
communautaires. «Restorative Russell Loewen
John Howard Society of
Resolutions» accepte les cas
Brandon
renvoyés par la Direction des 220 - 8th Street
services correctionnels Brandon, Manitoba
communautaires et pour R7A 3X3
Tél. : (204) 727-1696
adolescents, la Couronne, Téléc. : (204) 728-4344
l’appareil judiciaire, les
organismes communautaires, de
même que les personnes qui se
présentent d’elles-mêmes.
«Restorative Resolutions» traite
Justice communautaire de
les infractions contre les biens et Kwanlin Dun -
les crimes de nature personnelle, Détermination de la peine
mais pas les agressions sexuelles, par le Cercle
la violence familiale ou les Territoire du Yukon
infractions en matière de drogue.
Voici le récit d’un homme dont le
Un rapport d’évaluation indique cas a été renvoyé à un Cercle de
que 80 % du budget des services détermination de la peine. Il a
correctionnels du gouvernement reçu une peine communautaire
du Manitoba est consacré aux plutôt que de passer trois ans en
établissements carcéraux, alors prison pour plusieurs vols et
que seulement 18 % sert à infractions relatives à la conduite
financer les programmes automobile.
communautaires. On y conclut
que, dans le contexte de la
Un cas
réduction des ressources
publiques, les programmes
Jean Untel, 42 ans, a été inculpé de
communautaires ne recevront de
plusieurs infractions relatives à la
fonds supplémentaires qu’au
conduite automobile, de possession de
détriment du budget des
biens volés et de diverses infractions
établissements.
mineures. Partiellement en raison de
son casier judiciaire chargé et de ses
Personne-ressource :
Yvonne Lesage
nombreuses infractions antérieures du
Restorative Resolutions même genre, le bureau des avocats de
583 Ellice Avenue la Couronne réclamait une peine de
Winnipeg, Manitoba trois ans.
R3B 1Z7
Tél. : (204) 775-1514
Téléc. : (204) 775-1670 Pendant qu’il était en prison en
attendant son procès, Jean a entendu
La Société John Howard de parler du programme de détermination
Brandon offre un programme de la peine par le Cercle et il pensait
semblable. que cette initiative pourrait l’aider à
renoncer à la boisson.

7 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Jean a présenté une demande au (programme auquel elle participait
programme de justice communautaire déjà), elle s’est montrée très
de Kwanlin Dun en répondant à enthousiaste et s’est rendue à de
quelques questions - quel genre de nombreuses réunions avec lui.
démarches il a entreprises vers la
sobriété, les mesures qu’il souhaiterait À la première réunion, on a discuté
prendre pour demeurer sobre et du genre d’aide dont Jean avait
poursuivre son processus de guérison, besoin. Il a accepté d’entrer dans un
et ce que la collectivité peut faire pour centre de traitement résidentiel, de
l’aider à cette fin. Jean a éprouvé de s’évertuer à rester sobre et de s’affairer
la difficulté à remplir convenablement à des travaux communautaires. C’est
le questionnaire car il ne savait pas au alors qu’il s’est aperçu à quel point les
juste ce qu’il voulait ou ce dont il membres de sa famille et de la
avait besoin. collectivité étaient disposés à
l’appuyer. Par après, il a assisté de
Il savait simplement qu’il en avait façon assez assidue à des réunions au
assez de souffrir et qu’il voulait cours desquelles il a parlé de lui-
commencer à vivre pour lui-même et même, de ses activités et de l’aide dont
pour ses deux enfants. Il connaissait il avait besoin dans le cadre de son
à peine ses enfants parce qu’il buvait processus de guérison.
toujours et n’était jamais là pour
s’occuper d’eux. Au cours des deux Lorsque ses accusations criminelles
années précédentes, il avait essayé de ont été soumises au Cercle, de
cesser de boire à plusieurs reprises, nombreux membres de la collectivité
mais il n’avait jamais tenu le coup étaient là pour l’appuyer, dont sa
bien longtemps. famille et ses amis. La plupart des
participants au Cercle ont parlé de
Il a commencé à boire à l’âge de Jean, des liens qu’ils entretenaient
14 ans, et sa consommation est avec lui et des choses qu’ils savaient
devenue excessive lorsqu’il a de lui, bonnes ou mauvaises. Toutes
commencé à fréquenter les bars. Au ces interventions ont révélé qui Jean
fil des ans, sa consommation et son était vraiment et ce dont sa famille et
comportement criminel se sont ses pairs le savaient capable.
constamment accentués, ce qui lui a
valu d’être incarcéré pendant une Au terme des interventions, le Cercle,
dizaine d’années. La consommation fort de l’appui de la collectivité, a
et la prison étaient une bonne façon demandé au tribunal d’accorder une
de ne jamais être obligé de faire face à autre chance à Jean. Après avoir
la réalité et à la douleur. Il ne se entendu Jean expliquer à quel point il
sentait plus comme un membre à part souhaitait faire peau neuve, le Cercle
entière de sa collectivité et ne savait était persuadé qu’il pouvait accomplir
pas ce que les autres pensaient de lui. exactement ce qu’il se proposait de
faire.
Quand il a mentionné à sa mère qu’il
comptait présenter une demande de Jean a été condamné à une peine de
détermination de la peine par le Cercle trois ans avec sursis, assortie d’une

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 8
très longue période de probation. On communautaire. Comme le
lui a aussi ordonné de faire 200 heures système judiciaire officiel traitait
de services communautaires, de un nombre considérable de cas qui
participer à un programme mettaient en cause la première
d’évaluation, de counseling et de nation de Kwanlin Dun, il était
traitement pour son alcoolisme, de devenu manifeste que de
suivre un cours d’apprentissage de nombreux membres de la bande
l’autonomie fonctionnelle, de parfaire récidivaient et qu’il n’existait pas
son éducation et de respecter un ou presque pas de soutien
couvre-feu de 22 h à 7 h. communautaire pour les
délinquants ni les victimes. C’est
Jean est sobre depuis trois ans. Il pourquoi les dirigeants de la
travaille depuis un an et demi comme première nation de Kwanlin Dun
agent de soutien communautaire dans ont amorcé un processus de
le cadre du programme de justice. Il consultation avec des
siège au comité de justice représentants du ministère de la
communautaire et est un membre bien Justice afin d’examiner des
respecté de sa collectivité. solutions de rechange au système
judiciaire officiel. La collectivité
Jean affirme que le Cercle lui a permis jugeait important de mettre en
de tourner la page et l’a aidé à oeuvre des mesures de rechange
comprendre et à adopter un mode de axées sur la guérison et le bien-
vie sain. Aujourd’hui, il fait part des être, de même que la motivation
leçons qu’il a tirées aux gens à qui il du délinquant à apporter une
vient en aide dans sa collectivité. Son contribution positive à la
travail bénévole l’a amené à connaître collectivité. Ces solutions de
ses pairs, à apporter une contribution rechange doivent permettre
à sa collectivité et à aider des gens à d’éliminer les problèmes, et non
qui il a pu causer indirectement du seulement les symptômes, afin
tort par le passé. d’assurer une meilleure qualité de
vie communautaire et de réduire
Le dépliant du programme de le nombre de membres de la
justice communautaire de bande aux prises avec la loi.
Kwanlin Dun contient les
renseignements supplémentaires Le premier Cercle judiciaire
suivants sur le processus de territorial de Kwanlin Dun s’est
détermination de la peine par le réuni dans le village de Kwanlin
Cercle. Dun le 31 mars 1992. Les
procédures judiciaires se sont
Détermination de la peine déroulées en cercle (formé du
par le Cercle - Ses origines juge, du procureur de la
Couronne, de l’avocat de la
En janvier 1992, Kwanlin Dun défense, d’un travailleur auprès
s’est penché de plus près sur les des tribunaux, de l’agent de
questions de justice probation, d’un travailleur du

9 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
programme de lutte contre Le gardien du Cercle souhaite la
l’alcoolisme et les toxicomanies, bienvenue aux participants et leur
du coordonnateur de la explique le but et les lignes
prévention des crimes, des directrices du processus (le
membres de la famille, des Aînés gardien du Cercle, nommé par le
et de membres de l’ensemble de la comité de justice communautaire,
collectivité). En l’espace d’un an, joue le rôle d’hôte et de
entre le 31 mars 1992 et le facilitateur). Après la présentation
31 mars 1993, il y a eu onze de tous les participants, on «Il faut disposer d’une
Cercles judiciaires ordinaires et procède à la lecture des chefs somme assez
quatre Cercles judiciaires d’accusation, puis le procureur de importante de
extraordinaires à Kwanlin Dun. la Couronne et l’avocat de la renseignements et d’un
certain temps pour
La fréquence des Cercles défense exposent leur
déterminer la peine à
communautaires de détermination argumentation préliminaire.
imposer compte tenu
de la peine a augmenté en raison Ensuite, le gardien du Cercle
non seulement des
du volume de cas. Plus invite les membres de la circonstances
récemment, étant donné le délai collectivité à prendre la parole, entourant l’infraction
de traitement nécessaire de chaque dont la victime ou une personne et de la situation du
cas et le nombre croissant de qui parle en son nom. Les Aînés délinquant mais des
demandes d’audition de cas, des apportent leurs connaissances et besoins de la victime et
Cercles judiciaires territoriaux de leur soutien au Cercle. de la collectivité, et ce,
détermination de la peine se L’honnêteté est un aspect très dans les délais et à
tiennent habituellement toutes les important du processus. Il est l’aide des ressources
deux semaines. essentiel de discuter des facteurs disponibles. Il faut
positifs et négatifs afin de surmonter la tentation
Cercle judiciaire de répondre aux besoins de la d’imposer des peines
victime et du délinquant et de normalisées pour éviter
Kwanlin Dun de gaspiller des
trouver des solutions aux facteurs
sous-jacents du comportement ressources déjà rares et
Les procédures du Cercle se pour permettre au
déroulent au Potlatch House de la criminel. Il est entendu que les
processus de
première nation de Kwanlin Dun, décisions prises par le Cercle
détermination de la
et tous les membres de la auront une incidence sur peine de donner toute
collectivité sont encouragés à y l’ensemble de la collectivité. sa mesure aux fins de
assister et à y participer. Les l’atteinte de ses
chaises sont disposées en cercle, et Une fois que tout le monde a eu objectifs.»
le juge, dépourvu de la l’occasion de s’exprimer, le
traditionnelle toge, est assis dans gardien du Cercle, le juge de paix Le juge Barry Stuart,
le cercle aux côtés de l’avocat de la ou le juge demande au Cercle s’il Territoire du Yukon
défense, du procureur de la en est arrivé à un consensus sur
Couronne, du délinquant, de la un plan de peine. Lorsque le
victime, des représentants du processus du Cercle est terminé, le
système judiciaire officiel et du plan de peine est imposé.
système de justice Toutefois, si le délinquant n’a pas
communautaire, ainsi que des suivi le plan d’action et (ou)
membres de la collectivité. rencontré le comité directeur de

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 10
la justice, le Cercle peut renvoyer Services de médiation
le cas en ville pour que la peine Winnipeg (Manitoba)
soit déterminée par le système
judiciaire officiel, ou encore le
juge peut prononcer la sentence
Un cas
dans le Cercle même en tenant
Ce cas, renvoyé aux Services de
compte du manque de motivation
médiation de Winnipeg par la
du délinquant.
Direction des procureurs, a trait à
une agression à coups de couteau
...Ce processus prévoit des
dont a été victime un élève du
contacts suivis avec la victime et
secondaire de 17 ans et aux
le comité de justice, sans doute
accusations subséquentes de
pour les tenir au fait des résultats
tentative de meurtre et
du processus et (ou) des
d’agression grave.
ressources qui continuent d’y être
affectées. On surveille de près le
Les jeunes en cause se trouvaient à
délinquant pour l’aider à
une soirée. La plupart avaient
respecter les conditions de sa
consommé beaucoup d’alcool. Une
probation et (ou) à poursuivre
dispute a éclaté entre plusieurs
son programme de guérison. En
personnes. Lorsque la victime a quitté
cas de dérogation au plan de
les lieux, les accusés l’ont suivie. La
peine, le Cercle pourrait
victime, Stan, a été battue, puis
réexaminer le cas, et une nouvelle
poignardée à plusieurs reprises. Stan
peine pourrait être déterminée
est un jeune de 17 ans qui s’exprime
par le tribunal.
plutôt bien, qui fréquente l’école et qui
travaille à temps partiel. Cet incident
À noter: pour des mises en garde
l’a profondément traumatisé.
quant à cette approche, voir la
Deuxième section.
Les accusés étaient : Terry, âgé de
14 ans, inculpé de tentative de
Personne-ressource :
meurtre et de possession d’une arme
Rosemary Couch ou Rose
Wilson dangereuse pour la paix publique; il
Kwanlin Dun Community fréquente la soeur de la victime. Kelly,
Justice âgé de 13 ans, inculpé de voies de fait
Box 1217
Whitehorse, Y.T.
simples. Larry, âgé de 14 ans, inculpé
Y1A 5A5 de tentative de meurtre. Debbie, âgée
Tél. : (403) 667-4803 de 19 ans, inculpée de tentative de
Téléc. : (403) 668-5057
meurtre, d’agression grave et de
possession d’une arme dangereuse
pour la paix publique. Elle a une fille
de deux ans qu’elle élève seule.

Au départ, seuls les chefs d’accusation


déposés contre Terry ont été renvoyés
par le procureur de la Couronne aux

11 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Services de médiation. Stan et sa mère Les autres jeunes ont accepté de
ont bien voulu prendre part à une prendre part à la rencontre. Bien
séance de médiation avec Terry. Stan qu’on ait encouragé leurs parents à
a fait savoir qu’il se posait de participer au processus, ils ne se sont
nombreuses questions au sujet de ce pas présentés.
qui s’était produit.
La médiation
Terry et sa mère ont aussi accepté de
participer à cette rencontre. Le soir de la rencontre, les deux
Cependant, Terry s’est présenté seul et médiateurs se demandaient bien si
a mentionné que sa mère avait décidé tout le monde allait venir. La vie de ces
de ne pas venir. jeunes était très instable, et le soutien
offert par leur famille respective était
Lors de cette rencontre initiale, Stan a limité. Les chaises ont été disposées en
dit qu’il voulait que toutes les forme de cercle allongé, et les
personnes en cause soient présentes médiateurs étaient placés à une
afin que les détails obscurs puissent extrémité. Les trois jeunes inculpés
être éclaircis. Parce que tout le monde sont arrivés sans leurs parents; la
avait consommé beaucoup d’alcool, de jeune femme de 19 ans s’est présentée
nombreux détails semblaient flous... Il avec son enfant de deux ans. La
était très important pour Stan que les victime est venue seule, elle aussi.
personnes responsables de l’attaque
rendent des comptes. Quoique plutôt Stan a commencé par relater les
évasif au sujet de son rôle, Terry a événements... Il se trouvait à une
accepté de se présenter à une deuxième soirée. Une dispute s’est transformée
séance. en bagarre. Tout le monde s’est mis à
le frapper. Il a essayé de se sauver,
L’organisation de cette deuxième mais on l’a poursuivi dans la rue et
rencontre a été tout un défi. Le plusieurs personnes l’ont attrapé. Il
procureur de la Couronne était ne se rappelait pas très bien ce qui
quelque peu réticent à recommander s’était produit par la suite. Il se
Debbie (l’adulte) aux fins du souvenait de s’être rendu chez lui en
programme étant donné la gravité du courant et d’avoir constaté que sa
chef d’accusation qui pesait contre elle. chemise était ensanglantée. Il n’a pu
Parce que la victime a demandé une entrer dans la maison et s’est écroulé
médiation avec elle, la Couronne a sur la galerie. Très tôt le lendemain
consenti à la recommandation, en matin, sa copine l’a trouvé gisant par
indiquant qu’aucune suspension terre... Il avait alors perdu beaucoup
d’instance ne serait inscrite. de sang et son état était critique. Il
avait été poignardé quatre fois. Il a
... Debbie était une femme fallu lui faire 16 points de suture et
extrêmement timide et introvertie qui lui insérer un tube de drainage dans
avait beaucoup de difficulté à le bras droit.
s’exprimer. Parfois, on était en droit
de se demander si elle comprenait le Peu après cet incident, sa copine l’a
processus. laissé. Il a perdu son emploi d’été

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 12
parce qu’il a été incapable de implication de quelque façon que ce
travailler pendant plusieurs soit.
semaines. De plus, il avait reçu des
menaces de la part des amis des Terry était très silencieux. Il se
accusés, qui le tenaient responsable montrait essentiellement d’accord
des procédures judiciaires et qui avec ce que les autres répétaient. Il
voulaient le lui faire payer. n’a pas exprimé verbalement ses
sentiments et n’a affiché aucun
Les autres ont éprouvé de la difficulté remords pour ses actes.
à raconter de nouveau les
événements. L’exactitude des faits Debbie a eu énormément de difficulté
constituait un problème important. à s’exprimer. Elle a parlé seule avec
L’alcool avait joué un rôle Stan deux fois au cours de la soirée.
prépondérant dans l’incident. Dans La tête basse, elle a pleuré pendant
certains cas, il était difficile de savoir presque toute la réunion. Sa
si leurs trous de mémoire étaient un communication était limitée. À un
faux-fuyant ou s’ils étaient moment donné, elle a dit beaucoup
légitimement attribuables à leur état regretter ce qui était arrivé. Ce fut
d’ébriété. un point tournant de la rencontre
avec Stan. Il a accepté ses excuses, et
Kelly a eu beaucoup de mal à parler. les deux se sont sentis soulagés
Il a demandé à s’adresser à Stan seul. d’avoir pu exprimer ces sentiments.
Il a exprimé beaucoup de regret pour C’était particulièrement important
son implication dans cette affaire. compte tenu du fait que les amis de
Parce qu’il n’avait été présent que Debbie se montraient très hostiles
pendant une partie de l’incident, il envers Stan et le harcelaient.
était véritablement incertain de ce
qui s’était passé. Il a dit qu’il voulait Le règlement
faire tout en son pouvoir pour régler
les choses avec Stan. De toute évidence, Terry, Larry,
Kelly et Debbie souhaitaient régler
Larry se rappelait un plus grand cette situation avec Stan, mais ils ne
nombre de détails. Il a dit que Stan savaient pas vraiment quoi faire.
se disputait avec une fille lors de la Stan a dit qu’il avait des frais
soirée et qu’il la poussait. Plusieurs d’ambulance à payer, que ses
témoins ont voulu intervenir et ont vêtements avaient été endommagés et
commencé à le battre. Lorsque Stan qu’il avait subi un manque à gagner
a quitté les lieux, ils l’ont suivi. Ils par suite de l’incident. Il considérait
l’ont attrapé au moment où il sautait que ses agresseurs devaient assumer
par-dessus une clôture. Armé d’un la responsabilité de ces coûts.
couteau, Terry l’a poignardé. Debby Les médiateurs ont demandé à toutes
a alors pris le couteau et l’a les parties de mettre par écrit ce
poignardé à trois autres reprises. qu’ils aimeraient inclure dans un
Larry a mentionné qu’il avait été un accord. À en juger par leur
observateur, mais qu’il était prêt à hésitation, il était manifeste que
assumer la responsabilité de son certains d’entre eux ne savaient pas

13 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
bien écrire. (Deux d’entre eux ont en vertu d’un chef d’accusation de
inscrit leur nom en caractères gravité réduite et a reçu une
d’imprimerie sur le formulaire absolution sous condition assortie
d’accord.) d’une période de probation sous
surveillance de deux ans. Sa
Kelly, dont l’implication dans participation à la médiation a influé
l’incident n’était que minime, a sur la peine qu’elle a reçue.
suggéré qu’ils partagent tous les
coûts à parts égales. C’était un Bien que ce cas ait posé un défi de
moment touchant. Stan était tout à taille, les médiateurs le considèrent
fait prêt à accepter cette offre, et tout comme un exemple particulièrement
le monde s’est mis d’accord. Stan a significatif de l’efficacité de la
dit qu’il aurait la preuve de leur médiation dans le cheminement vers
repentir s’ils donnaient suite à cet la responsabilisation et le
engagement de le rembourser de ses rétablissement des relations.
frais. Debbie lui a également promis
qu’il n’y aurait plus de menaces Description du programme
envers lui ou sa famille et qu’elle s’en
assurerait auprès de ses amis. Les Services de médiation
travaillent en collaboration avec
Tous les accusés avaient des moyens le bureau du procureur de la
financiers limités. Debbie était Couronne pour assurer la
bénéficiaire de l’aide sociale. Chacun médiation entre les victimes et les
d’entre eux a versé les paiements délinquants. Un agent chargé du
comme il avait été convenu, à cas communique avec les
l’exception de Kelly, dont le paiement personnes en cause pour discuter
a été en retard de plusieurs mois. de leurs préoccupations et
évaluer si la médiation est une
D’après les discussions de suivi mesure appropriée. Si les gens en
tenues avec Stan, il était évident que question sont disposés à se
la médiation avait été significative rencontrer, une séance de
pour lui. Les paiements étaient un médiation est prévue à un
geste symbolique mais concret qui moment convenable à tous. En
indiquait que les accusés assumaient outre, il est possible de tenir des
la responsabilité de leurs actes. Stan séances en soirée. À la rencontre,
voyait un conseiller à l’école parce des médiateurs bénévoles
que l’incident avait été très qualifiés aident les parties à
traumatisant pour lui. La médiation communiquer les unes avec les
a été une partie intégrante de son autres. Les médiateurs ne
processus de guérison. prennent pas de décisions pour
Le tribunal a été informé des les parties, mais les aident plutôt
résultats de la médiation. Après que à en arriver à une solution
les jeunes eurent effectué leurs qu’elles jugent équitable et qui
paiements, les chefs d’accusation qui répond à leurs besoins. Si un
pesaient contre eux ont été accord est conclu, les modalités
suspendus. Debbie a plaidé coupable

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 14
sont mises par écrit et le contribue à la paix
document est signé par toutes les communautaire en aidant les
parties. Si aucun accord n’est gens à régler les problèmes qui
conclu, le cas est renvoyé au sont à l’origine du conflit.
tribunal.
Personne-ressource
Les Services de médiation font le Greg Barrett
Mediation Services
suivi des accords pour en
583 Ellice Avenue, 3rd Floor
contrôler l’exécution. Certains Winnipeg, Manitoba
accords prévoient du counseling, R3B 1Z7
un dédommagement ou des Tél. : (204) 774-2469
Téléc. : (204) 772-4776
services communautaires. Une
fois qu’un accord conclu par
Pour plus de renseignements sur
médiation est exécuté, on
les programmes de réconciliation
recommande d’abandonner les
ou de médiation entre les
accusations criminelles. Dans les
victimes et les délinquants au
cas postplaidoyer, l’accord conclu
Canada, s’adresser à :
par médiation est pris en
considération au moment du The Network: Interaction for
prononcé de la sentence. Conflict Resolution/
Le réseau : Interaction pour le
règlement des conflits
La médiation comporte de
Conrad Grebel College
nombreux avantages. C’est un Waterloo, Ontario
processus qui permet au N2L 3G6
délinquant d’assumer Tél. : : (519) 885-0880
Téléc. : (519) 885-0806
directement et personnellement la
responsabilité d’actes ayant
entraîné une accusation
criminelle. La victime a la
possibilité de faire part de son
point de vue directement au
délinquant et d’obtenir un
dédommagement réaliste des
pertes subies par suite de
l’incident. Pour sa part, le
délinquant a la possibilité de
prendre conscience des
conséquences de ses actes, de
s’excuser, d’exprimer son regret
et de faire réparation directement
à la victime. La médiation
permet au délinquant de prendre
part à un processus qui peut lui
éviter l’opprobre du casier
judiciaire. La médiation

15 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Programme du Cercle de individuelle et participe à des séances
guérison holistique de thérapie de groupe pour jeunes et
pour femmes.
communautaire -
Première nation de L’agresseur est né et a toujours vécu
Hollow Water à Hollow Water. Il a fréquenté l’école
de l’endroit jusqu’à la quatrième
Ce programme démontre année, puis a commencé à travailler
comment une collectivité entière au pressage de la pâte avec son père.
a choisi des mesures de rechange Il a également travaillé comme
pour traiter un grave cas pompier, trappeur, pêcheur sur la
d’agression physique et sexuelle glace et concierge avant de prendre sa
avec lequel elle se trouvait aux retraite il y a trois ans.
prises. L’homme inculpé
d’agression sexuelle aurait Il a été marié pendant 36 ans et est
normalement fait face à une devenu veuf en 1986. Il a un fils
peine d’emprisonnement. adoptif âgé maintenant de 22 ans.
Sur l’avis du travailleur chargé de
Un cas son cas, il a commencé à assister à
des séances hebdomadaires de thérapie
En décembre 1988, un homme de de groupe pour agresseurs. De plus,
62 ans a été inculpé d’agression il a participé à une séance de cercle de
sexuelle à l’endroit d’une jeune fille partage avec l’équipe d’évaluation.
de 11 ans. Il n’avait aucun
antécédent d’activité criminelle. Cette séance de cercle devait
permettre aux membres de l’équipe
Depuis que la victime a divulgué d’entendre la version de l’agresseur et
l’incident au mois de novembre de de fournir des renseignements qui
cette année-là, ses rapports avec les aideraient le groupe à évaluer à fond
membres de sa famille sont difficiles. les progrès accomplis au niveau de sa
Dans la famille, l’agresseur est guérison personnelle.
considéré comme un grand-père.
Comme il était veuf depuis peu, la L’équipe a fait l’évaluation suivante :
victime l’aidait à faire le ménage et il «Nous croyons que l’agresseur désire
lui était arrivé de passer la nuit chez sincèrement assumer la responsabilité
lui, avant que l’incident ne soit de ses actes, mais nous ne croyons
divulgué. Les travailleurs ont pas qu’il l’assume pleinement et
constaté que la victime avait effectivement.»
beaucoup d’amis et réussissait assez
bien à l’école avant l’incident, mais «Nous reconnaissons qu’il a entrepris
qu’elle a depuis décroché et est des démarches en vue de sa guérison.
devenue solitaire. En février 1990, Il commence à comprendre et à
elle a suivi un cours de connaissance accepter le tort qu’il a causé. Il
de soi et a décidé de refaire le cours en accepte et croit que cette approche
mars 1990. Elle suit une thérapie communautaire est indispensable à sa
guérison.»

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 16
«Nous croyons que l’agresseur a • qu’il soit tenu d’effectuer de
besoin d’aide intensive de la part de nombreuses heures de
la collectivité et de ressources services communautaires
professionnelles extérieures. Il bénévoles pour le programme
éprouve beaucoup de difficulté à être d’entretien domiciliaire et des
à l’écoute de ses sentiments et n’est travaux publics de Hollow
pas très sensibilisé à la question de la Water, le programme
victimisation et à ses répercussions à d’entretien de l’école de
long terme.» Wanipigow et le service des
pompiers volontaires de
«Il fait preuve de collaboration et est Hollow Water;
résolu à travailler à sa guérison • que tout contact entre
personnelle. Nous croyons qu’il en (l’agresseur) et (la victime)
est aux étapes préliminaires de ce soit assujetti au contrôle et à
processus. Nous sommes persuadés la réglementation de l’équipe
qu’il en viendra à comprendre qu’il d’évaluation et qu’il ne soit
devra poursuivre sa guérison toute pas autorisé à se trouver au
sa vie durant.» même endroit que la victime;
• qu’il parfasse son éducation
Par suite de cette évaluation, l’équipe et suive une formation
a recommandé au tribunal professionnelle.
d’assujettir l’agresseur à la plus
longue période de probation possible, L’agresseur est actuellement en
assortie des conditions suivantes : probation et il respecte les diverses
conditions imposées. La victime est
• Que l’agresseur se plie aux récemment retournée à l’école et fait
exigences du Cercle de guérison des progrès.
holistique communautaire, à savoir :
• qu’il suive les étapes du Le programme
processus de guérison;
• qu’il participe à un cours de Hollow Water est une collectivité
connaissance de soi, à des ojibway de 600 habitants située
séances de thérapie au bord du lac Winnipeg, à deux
individuelle et familiale, à cents kilomètres au nord de
des séances hebdomadaires de Winnipeg. Les chefs
cercle pour agresseurs, à des communautaires estiment que
cercles de partage et à des 75 % de la population se compose
ateliers sur l’agression de victimes d’agressions
sexuelle; sexuelles, tandis que 35 % sont
• qu’il subisse une évaluation des «agresseurs». Le juge en chef
psychologique adjoint du Manitoba,
immédiatement et dans les Murray Sinclair, a loué
deux mois précédant l’«exemple remarquable» que
l’expiration de la période de donnent les habitants de la
probation sous surveillance; première nation de Hollow Water

17 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
en s’attaquant ainsi à la Étape 5 : Aider la famille/la
délinquance sexuelle après que la collectivité
collectivité eut décidé que le Étape 6 : Rencontre de
système de justice pénale était l’équipe
inefficace. d’évaluation, de la
GRC, de la
«La collectivité a pris l’initiative Couronne
de mettre sur pied un programme Étape 7 : L’agresseur doit
qui réunit la victime, le passer aux aveux
délinquant, la collectivité et le et reconnaître sa
système de justice de sorte que responsabilité
l’appareil judiciaire doive changer Étape 8 : Préparation de
sa façon d’agir avec ces genres de l’agresseur
délinquants en pareilles Étape 9 : Préparation de la
circonstances», a indiqué le juge victime
Sinclair, un Ojibway qui a Étape 10 : Préparation de
coprésidé l’Enquête publique sur toutes les familles
l’administration de la justice et les Étape 11 : La rencontre
populations autochtones. spéciale
Étape 12 : Mise en oeuvre du
Les délinquants sexuels qui contrat de guérison
plaident coupables sont mis en Étape 13 : Cérémonie
probation pendant trois ans. Des d’épuration
membres de la collectivité ayant
reçu une formation spéciale ont Personne-ressource :
recours à une méthode holistique Cercle de guérison
holistique communautaire
intensive pour aider le
Première nation de
délinquant, la victime et leur Hollow Water
famille respective à panser leurs Boîte postale 2561
plaies. Il en découle une Wanipigow, Manitoba
R0E 2E0
réduction marquée du taux de (204) 363-7278
récidive.

Voici, en bref, les treize étapes du


processus que suivent les
agresseurs, les victimes et leur
famille respective :

Étape 1 : Divulgation
Étape 2 : Protéger la
victime/l’enfant
Étape 3 : Confronter
l’agresseur
Étape 4 : Aider le conjoint

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 18
Intervention ...Mike lui-même frémit aujourd’hui
communautaire dans le à la pensée de cette horrible nuit.
Une consommation d’alcool excessive
système de justice - lors d’un tournoi de curling, une
Mike de Rosemary dispute avec sa femme, une colère
(Alberta) refoulée à la suite d’un problème
familial non résolu, quelques
Voici le récit d’une prise consommations encore et ce fut le
d’otages par une personne déclenchement du crime.
armée, passible d’une peine
d’emprisonnement de 10 à ...Il ne s’agit pourtant pas du récit
12 ans. d’un bon garçon qui a mal tourné ou
d’un jeune homme perdu dans le
...L’affaire remonte au système carcéral. Malheureusement,
17 janvier 1993. Richard Wiens, il y a suffisamment d’histoires ce
agriculteur de Rosemary, et genre pour que le cas de Mike soit
Peter Plett, résident de la localité relativement banal.
voisine de Gem, venaient à peine de
se lever quand ils ont entendu à la Selon Darrel Heidebrecht, directeur
radio une nouvelle bouleversante au des Community Justice Ministries au
sujet d’un crime qui avait été Mennonite Central Committee
commis la veille au soir à Brooks. (MCC) Alberta, «c’est plutôt le récit
Un jeune homme avait pris en otages d’une intervention communautaire et
des membres de sa famille et les avait d’une approche différente de la
forcés à monter dans son camion, justice. C’est le récit d’une façon
puis il avait abouti à l’hôpital de plus biblique et réparatrice d’exercer
Brooks à la recherche de sa femme, la justice.»
arme automatique à la main.
...Avec l’aide de Heidebrecht au
Des membres du personnel médical MCC, une assemblée communautaire
avaient été tenus en otages jusqu’à ce a été convoquée afin qu’on en
qu’un agent de la GRC ait persuadé apprenne le plus possible au sujet du
l’individu de se rendre. Armes crime et de la procédure de
automatiques, tentative détermination de la peine.
d’enlèvement, agression... cette petite
ville endormie de l’Alberta n’était «Nous estimions que notre rôle était
pas habituée à ce genre d’histoire! d’implorer la clémence du juge,
explique Richard. Il aurait été
Puis, ce fut tout un choc : un jeune insensé de demander un non-lieu -
homme du nom de Michael Gallup après tout, Mike était coupable.
était détenu relativement à ce crime. Nous voulions néanmoins que le juge
sache que les membres de la
«Michael voyageait à bord de mon collectivité étaient d’avis que la
autobus scolaire, de dire Peter. Je meilleure option possible pour Mike
n’arrivais pas à y croire.» était de sortir de prison et de revenir
chez lui le plus tôt possible.»

19 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
En l’espace de quelques jours, plus de «Pourtant, «le peuple», c’étaient
80 personnes de toutes les sphères de nous, nous qui faisions valoir qu’une
la vie avaient signé une lettre longue peine d’emprisonnement dans
décrivant le point de vue de la un établissement fédéral n’était pas
collectivité à l’intention du juge. la solution.»

L’assemblée a également permis à la Le témoignage même de Mike et le


mère de Mike, Allison, et à son soutien inhabituel des membres de la
épouse Carla d’avoir une franche collectivité ont eu une grande
discussion avec les membres de la influence sur le juge. Au lieu de la
collectivité. L’histoire faisait déjà peine maximale de 10 à 12 ans, il a
sensation et était la proie de toutes condamné Mike à cinq ans et demi de
sortes de rumeurs, et c’était prison. Sa première audience
l’occasion pour elles de raconter leur d’admissibilité à la libération
version des faits et de parler de la conditionnelle a lieu en juillet de
douleur que Mike avait causée. cette année.

Le fait que l’assemblée et la lettre «Il est tout à fait essentiel


aient découlé de l’initiative de la maintenant,, explique Heidebrecht,
localité a été un facteur clé, selon que Mike conserve ses liens avec son
Heidebrecht. «Ce n’est pas comme si milieu d’ici à sa libération
le MCC ou un autre organisme était conditionnelle. Autrement, c’est un
venu dire aux gens quoi faire. Le autre milieu qui va l’accueillir à bras
système de justice pénale n’a pas ouverts.»
besoin d’un autre programme.
...Même le psychiatre de la prison a
«Ce dont le système a besoin, c’est de déclaré qu’il est inutile que Mike
gens comme Peter et Richard et tous demeure incarcéré. Mike a tiré sa
les autres signataires de la lettre qui «leçon» punitive au cours des six ou
sont disposés à mettre en oeuvre une sept premières semaines
nouvelle vision.» d’emprisonnement. Tout
prolongement de sa détention ne fait
...«Nous n’avions toutefois pas que le pousser davantage vers la
compté sur la présence d’un culture criminelle.
procureur aussi agressif, ajoute Peter.
Mike était un délinquant primaire, ...«L’idée n’est pas très compliquée
un jeune homme qui aurait pu être le ou révolutionnaire. Il s’agit
fils de n’importe qui... simplement de vivre en accord avec
qui l’on dit être.»
«Mais le pardon ou la clémence ne
faisaient pas partie du vocabulaire du (Traduction d’un extrait de «A
procureur de la Couronne. Il a community takes on the justice system»,
par Doris Daley, Mennonite Reporter,
réclamé la pénalité la plus sévère
16 mai 1994)
possible, semble-t-il au nom des
intérêts du «peuple».

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 20
Mike profite maintenant d’une de médiation plutôt que de suivre
libération conditionnelle totale le processus traditionnel de
dans sa ville natale, où il a depuis détermination de la peine. Dans
participé, sous la supervision le cadre de ce programme, des
d’un médiateur, à une rencontre médiateurs qualifiés aident les
avec l’une de ses victimes, ce qui parties à une infraction à
s’est révélé être un pas très s’entendre sur une façon de régler
important dans son processus de le problème, notamment par la
guérison et celui de sa victime. présentation d’excuses, un
dédommagement ou une autre
L’action communautaire forme d’indemnisation.

«Il ne s’agissait pas L’initiative communautaire «La médiation humanise le crime,


dans ce cas du MCC ou décrite dans ce récit est l’oeuvre de dire Heidebrecht. Dans un
d’un autre organisme de personnes bienveillantes qui sens, elle permet aux gens de
arrivant en ville et considéraient que la prison n’était créer leurs propres solutions.»
disant aux gens quoi pas la meilleure réponse au
faire. Le secteur de la comportement criminel qui avait Bien que la médiation remplace
justice pénale n’a pas souvent l’incarcération, on peut
eu lieu. La vision qu’elles
besoin d’un autre aussi y recourir pendant ou
prônaient et les buts qu’elles
programme.» suivant l’emprisonnement afin de
recherchaient bénéficiaient de
l’appui de Community Justice satisfaire aux nombreux besoins
«Il faut des gens
Initiatives (CJI), un programme de la victime, du délinquant, de
comme Peter et
du Mennonite Central Committee leur famille respective et de la
Richard et tous les
autres qui ont signé la Alberta. collectivité environnante, besoins
lettre et qui sont qu’une peine d’emprisonnement
disposés à concrétiser Community Justice Initiatives, ne permet pas de combler.
une nouvelle vision.» qui est exploité à l’échelle de
l’Alberta à partir de bureaux Personne-ressource :
Darrel Heidebrecht, établis à Calgary et à Edmonton, Darrel Heidebrecht
MCC, ministères de Community Justice Ministries
offre un certain nombre de 76 Skyline Cres. N.E.
la justice programmes et de services, dont Calgary, Alberta
communautaire de l’aide aux victimes, la médiation, T2K 5X7
l’Alberta Tél. : (403) 275-6935
la visite de détenus, l’éducation Téléc. : (403) 275-3711
publique, des services de
transport pour la famille du
détenu et une aumônerie
communautaire.

En vertu du projet de médiation


entre les victimes et les
délinquants, les personnes
inculpées d’agression mineure ou
de délit mineur contre les biens
sont dirigées vers un programme

21 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Pro-Services Outre le règlement des conflits, ce
Québec (Québec) programme prévoit :
• un important volet de
sensibilisation des gens
Pro-Services est un projet de la
d’affaires, des fournisseurs de
ville de Québec dont l’objectif
services et des membres de la
consiste à créer un partenariat
collectivité aux avantages de
communautaire pour corriger le
remédier aux crimes mineurs
préjudice causé par le crime et
contre les biens dans le cadre
prévenir la récidive. Bien qu’ils se
d’un processus
concentrent d’abord sur la
communautaire de résolution
criminalité chez les jeunes et le
des problèmes;
crime contre les biens, les
responsables du projet ont
• la prévention du crime
l’intention d’établir des conseils de
situationnel grâce à des agents
quartier qui pourront un jour
formés et payés par des
servir à déjudiciariser de
employeurs du milieu des
nombreux genres de crimes, à les
affaires pour faire échec aux
traiter à l’échelle locale et à éviter
crimes commis par les jeunes
l’incarcération dans la mesure du
dans les magasins et d’autres
possible. Par exemple, lorsqu’un
commerces;
crime se produit, Pro-Services
assure un processus de règlement
• un réseau de soutien
du conflit et de réparation afin de
communautaire pour les
soustraire les infractions au
jeunes, à raison d’un adulte
système de justice pénale et de
bénévole et d’un jeune
s’attaquer aux facteurs ayant
bénévole pour 20 maisons
contribué au crime. Ce projet
dans un quartier donné. Ce
réunit les jeunes contrevenants, les
réseau fournit des
victimes du crime, leur famille
renseignements, apporte du
respective, les voisins et d’autres
soutien et organise des
membres de la collectivité touchés
groupes de discussion pour
pour qu’ils trouvent des solutions
aider les membres de la
durables au problème de la
collectivité à partager la
criminalité. Ce projet a vu le jour
responsabilité de la prévention
grâce à un apport financier
du crime.
important du milieu des affaires,
lequel est sensibilisé au fait que les
Personnes-ressources :
obstacles structurels liés au
Luc Landry, Adrien Pichette
système de justice pénale Centre de services
accusatoire et punitif ne favorisent communautaires Justice et Foi
pas la justice, la prévention du 369, St-Jean
Québec (Québec)
crime, les relations publiques ou G1R 1N8
les intérêts économiques du Tél. : (418) 529-2727
monde des affaires.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 22
Atoskata - Projet communautaires. Grâce à ce revenu,
d’indemnisation des l’accusé peut ensuite payer les frais
d’assurance de la victime ou d’autres
victimes à l’intention des réparations.
«Un système de justice
pénale ne peut seul jeunes
donner les résultats Regina (Saskatchewan) Les parents de l’adolescent ont
voulus. Il ne peut à lui approuvé cette peine, en indiquant
seul assurer la sécurité de Atoskata, expression crie qui que leur fils avait fait peau neuve
la société. Cela tient à ce
qu’il s’occupe des effets et
signifie de «travailler à un but», depuis sa dernière arrestation.
non des causes de la est le nom donné au projet «Nous voulons le garder à la maison
criminalité. Le système d’indemnisation des victimes et nous sommes d’accord pour dire
de justice pénale mis en oeuvre au Centre qu’il devrait faire du travail
intervient seulement d’accueil de Regina. communautaire», a expliqué le père
lorsque les gens ont des
du contrevenant.
ennuis, c’est-à-dire
lorsque le tort a été causé Un cas
et les accusations ont été
déposées. Un adolescent de Regina a été mis en Description du programme
probation pendant 18 mois plutôt
D’aucuns croient que que d’aller en prison pour avoir volé L’accroissement du nombre de
nous pouvons améliorer
la situation, rendre nos
une voiture et entraîné la police dans vols d’auto à Regina a capté
rues plus sûres tout une poursuite à grande vitesse. Un l’attention du public et a incité la
simplement en imposant an auparavant, le même jeune avait police et l’appareil judiciaire à
des peines, mais cela ne reçu une peine de 18 mois de réagir initialement d’une manière
suffira pas pour régler le probation et de 100 heures de punitive à des fins de dissuasion.
problème. Incarcérer plus services communautaires pour six On s’est mis à imposer de plus en
de jeunes n’est pas une
vols d’auto. Cette nouvelle plus aux jeunes contrevenants
solution. Elle n’accroîtra
pas la sécurité du public. infraction aurait pu lui valoir une une peine de placement sous
Monsieur le président, période de mise sous garde, surtout garde en milieu fermé, dont la
faisons le travail et les que les membres de la collectivité durée a augmenté d’environ deux
choix difficiles qui militaient en faveur de mois au cours de chacune des
s’imposent et veillons à l’emprisonnement des jeunes dernières années.
prendre des décisions
criminels en raison de
judicieuses, car l’adoption
d’un plus grand nombre l’augmentation marquée du nombre En réponse à la criminalité chez
de mesures législatives ou de vols de voiture. les jeunes, la Saskatchewan a
même de meilleures recours au placement sous garde
mesures législatives ne Cependant, le juge a refusé dans une proportion bien
saurait jamais tout régler. d’ordonner un placement sous garde, supérieure à la moyenne
À long terme, la meilleure
en invoquant l’approche différente nationale ou à celle d’autres pays.
protection, c’est la
prévention du crime.» que préconisait le programme Selon les données pour la période
Atoskata. Ce programme, allant de 1979 à 1994, cette
Le ministre de la expressément conçu pour les jeunes province place sous garde
Justice Allan Rock voleurs d’auto, consiste à trouver des 1 712 jeunes par 100 000,
20 novembre 1995 entreprises qui sont disposées à comparativement à une moyenne
verser un salaire à l’accusé en nationale d’à peu près 1 000. Aux
contrepartie de ses services États-Unis, ce taux s’établit à 724.

23 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Les préoccupations du public et Bien que ce programme comporte
de l’appareil judiciaire certains volets sociaux et
relativement à l’utilisation éducatifs, il s’adresse
croissante du placement sous principalement aux jeunes qui
garde ont incité le ministère des veulent travailler, tout
Services sociaux de la particulièrement les voleurs
Saskatchewan à envisager des d’auto âgés de 12 à 17 ans qui
solutions communautaires de sont assujettis à une ordonnance
rechange. L’objectif était de du tribunal. Le nombre maximal
formuler des options de de jeunes faisant l’objet d’une
détermination de la peine qui surveillance directe en vertu de ce
permettent aux jeunes de programme est de 12.
participer à des programmes de
justice réparatrice. Personne-ressource :
Denis Losie
Youth Service Program Director
Par conséquent, un certain
Department of Social Services
nombre d’organismes de services 3rd Floor
sociaux ont conjugué leurs efforts 2045 Broad St.
pour mettre sur pied un projet Regina, Saskatchewan
Tél. : (306) 787-3695
pilote dans le cadre duquel des Téléc. : (306) 787-4940
jeunes condamnés pourraient
gagner un revenu ou offrir des
services personnels afin de
dédommager les victimes de
certains frais qu’elles ont subis. La médiation réparatrice
dans les cas de crime
Voici les buts de ce projet : grave
permettre aux jeunes voleurs Leuven, Belgique
d’auto de dédommager les
victimes de leurs actes criminels, Il existe actuellement en Belgique
au moyen du revenu qu’ils un projet de médiation entre les
gagnent ou des services victimes et les auteurs de crimes
personnels qu’ils leur offrent; graves qui a pour objectif de
permettre à des jeunes d’être démontrer qu’il est possible de
encadrés par des Aînés préconiser une approche
autochtones dans le cadre d’un réparatrice au sein même du
processus traditionnel de système de justice pénale. Le
guérison et d’apprentissage qui projet de médiation réparatrice
est pertinent au comportement s’occupe exclusivement de
criminel; démontrer que les délinquants adultes, plus
partenariats communautaires particulièrement les récidivistes.
peuvent offrir des solutions
efficaces à l’égard des jeunes qui Tous les genres de crimes sont
sont aux prises avec la loi. admissibles à des fins de
médiation, malgré certaines

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 24
réserves dans les cas de violence sur la victimologie de l’université
intrafamiliale. Une étude de concert avec le bureau du
préliminaire de 30 cas renvoyés procureur chef, qui collaborent à
“Les parties à la au projet a permis de constater la sélection des cas particuliers à
médiation font qu’un accord a été conclu dans la soumettre à la médiation. Le
l’expérience d’une moitié des 20 cas actuellement procureur invite le délinquant et
«justice» différente de réglés : «Il s’agit de crimes d’une la victime à rencontrer le
celle à laquelle elles
certaine gravité, mais ce ne sont médiateur et à collaborer de façon
s’attendaient. Elles se
sentent beaucoup plus certainement pas les plus graves volontaire à la recherche d’une
engagées dans le ni les plus violents», a-t-on conclu solution à leur problème. Voici
processus et ont dans le rapport. Parmi les cas un extrait des constatations
l’impression de rendre ayant fait l’objet d’une médiation, préliminaires du projet :
elles-mêmes la «justice» il y avait de nombreuses [traduction]
au lieu de la subir
infractions où les victimes ont été «Le délinquant et la victime
passivement. Dans ce
type d’intervention, les hospitalisées ou sont autrement comprennent plus qu’on ne le
deux parties ont un plus devenues incapables de travailler. prévoyait la situation l’un de
grand sens de leurs Il y avait aussi des vols et l’autre. Cela n’empêche pas
responsabilités et se quelques cas de viol et de que certaines victimes
départissent des violence sexuelle. Les maintiennent une attitude
stéréotypes traditionnels
constatations préliminaires plutôt sévère et rétributive,
dans leur façon de
penser... il semble que la indiquent que les victimes jusqu’à la signature du
destruction de «mythes» privilégient la médiation contrat. Au départ, le
soit l’un des plus légèrement plus que ne le font les délinquant est sur la
importants effets du délinquants. En général, les défensive, se montre
processus de médiation... victimes ne prônent pas une indifférent ou hésitant ou tend
le système de justice
peine d’emprisonnement, mais à réduire l’importance de son
pénale conventionnel
renforce les mythes qui ont beaucoup plus à coeur geste. Parce qu’il sait qu’il
existent au sujet du d’empêcher le délinquant de sera poursuivi et qu’il devra
présumé criminel puisque récidiver. comparaître en cour, il se
les renseignements méfie du processus de
disponibles sont choisis Le procureur doit déjà avoir médiation. Le délinquant,
aux seules fins de la
décidé d’entamer une poursuite tout comme la victime,
poursuite et de la
détermination de la peine. compte tenu de la gravité du entretient beaucoup de
Dans le processus de crime et (ou) du casier judiciaire stéréotypes. Il reproche à la
médiation, par contre, on du suspect. Le fait que le juge victime de le provoquer ou
a recours à d’autres types soit saisi du cas a ceci son statut socio-économique
de renseignements pour d’avantageux que l’on disposera supérieur. La victime est
aider les parties à en
du temps nécessaire au processus perçue comme une personne
arriver à une entente.”
de médiation, à la rédaction d’un qui veut exploiter le
Tony Peters et contrat écrit entre les parties, délinquant. Les délinquants
Ivo Aertsen, ainsi qu’à sa mise en oeuvre et à cherchent à aller au-devant de
Mediation for son évaluation. la décision judiciaire de deux
Reparation façons : certains se plaignent
Le projet de recherche-action est du fait qu’on ne leur
mené par l’équipe de recherche accordera pas de chance

25 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
réelle; d’autres comprennent l’administration de la justice
qu’ils ont tout intérêt à pénale».
collaborer. Le fait que le
médiateur et la victime soient Le projet de médiation réparatrice
disposés à écouter le favorise l’établissement le plus
délinquant et à tenir compte prompt possible d’un lien entre le
de ses circonstances délinquant et la victime. Il
personnelles a un effet importe essentiellement d’inciter
stimulant et peut inciter ce chacun d’eux à prendre une part
dernier à afficher une volonté active à la recherche d’une
plus sincère de faire quelque solution. Le médiateur met
chose pour sa victime.» graduellement le problème entre
les mains des deux parties. En
Dans le cadre du projet, un bout de ligne, le délinquant et la
organisme local de services victime doivent être convaincus
sociaux offre une aide au qu’ils sont les créateurs d’une
délinquant et à la victime par le solution juste.
truchement d’équipes distinctes.
L’organisme joue un rôle des plus Personnes-ressources :
importants dans les cas où l’une Tony Peters ou Ivo Aertsen
Katholiche Universiteil Leuven
des parties ou même les deux ont
Faculteit Rechtsgeleerdheid
besoin d’une aide particulière et Afdellng Strafrecht,
(ou) plus soutenue. Comme on Strafvordering en criminologie
l’a déjà constaté, ce genre de Hooverplein 10
B-3000
médiation nécessite beaucoup de Leuven, Belgique
ressources, le processus dure de
deux à trois mois, et il faut de
nombreuses rencontres
préliminaires et distinctes avec les
deux parties.

Ce projet a pour objectif de


réorienter la façon dont la société
et ses institutions officielles
réagissent à la criminalité. Il
s’agit de délaisser la notion
bipolaire exclusive de «l’État
contre le délinquant» et de se
concentrer sur la structure
triangulaire que forment le
délinquant, la victime et la
collectivité. On encourage la
médiation pour remédier à
«l’absence systématique de
dédommagement dans

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 26
Réaction communautaire probation traditionnelle en ce sens
LE GOUVERNEUR
au crime - Une utilisation que des représentants de la
REFUSE UN DON EN
collectivité sont appelés à
ESPÈCES D’UN GROUPE
DE SOLUTIONS DE
plus créative de la intervenir auprès des délinquants
RECHANGE À
L’EMPRISONNEMENT
probation pour les tenir responsables de leur
Le gouverneur de l’Arizona,
Minnesota comportement. Avant que la
Fife Symington, a refusé un négociation d’un plaidoyer ne soit
don en espèces d’une
fondation de la ville de New Le programme de réaction terminée, un agent de probation
York qui préconise des
solutions de rechange à
communautaire au crime découle évalue les délinquants aux fins de
l’emprisonnement, déclarant de la préoccupation selon laquelle leur éventuelle participation au
qu’il n’a aucune intention
d’aider à laisser dans la les mesures de probation programme. Les délinquants qui
collectivité ceux qui ne
respectent pas la loi.
traditionnelles ne dissuadaient acceptent d’y prendre part
pas la récidive aussi efficacement bénéficient d’une réduction de
Dans sa lettre du mois de
mars, M. Symington a qu’on l’aurait souhaité. Bien que leur peine d’emprisonnement. Il
déclaré qu’il refuse de
participer aux efforts destinés
l’activité criminelle du client ait est encore trop tôt pour évaluer ce
à laisser un plus nombre de été enrayée pendant la période de programme, mais les rapports
criminels en liberté dans la
collectivité de l’Arizona et probation, elle reprenait souvent préliminaires indiquent
qu’il a au contraire l’intention
de combattre de tels efforts
une fois la surveillance terminée. qu’environ la moitié des
vigoureusement. «Le but du programme de participants évitent la prison;
La Fondation Edna réaction communautaire au crime certains juges hésitent à éliminer
McConnell Clark, groupe est de faire en sorte que les
privé portant le nom d’une
entièrement la peine
héritière décédée de la délinquants puissent se défaire de d’emprisonnement bien que ce
fortune de l’entreprise
d’articles de toilette Avon, leur sentiment de culpabilité soit le but du projet. Dans les
fortune de 485 millions de envers la collectivité et se sentir
dollars, préconise des
30 jours suivant la détermination
solutions de rechange à graduellement acceptés et de la peine, le délinquant
l’emprisonnement telles que
l’assignation à domicile et la récompensés par la collectivité rencontre le comité, qui comprend
probation sous surveillance pour leurs efforts positifs. En
intensive.
des représentants de groupes
utilisant les ressources confessionnels, des ex-
Le groupe a contribué pour
des millions de dollars à des communautaires d’une manière délinquants, des fournisseurs de
programmes de réforme plus directe et personnelle auprès
pénitentiaire en Alabama, au
services sociaux, des groupes
Delaware et en des délinquants, nous espérons d’intérêts culturels particuliers,
Pennsylvanie.
remettre en question plusieurs des des citoyens, des représentants du
Plus de 20 juges, législateurs croyances qu’entretiennent les
et responsables de
milieu de l’enseignement, des
l’application de la loi de membres de la collectivité. Ceux- policiers, des gens d’affaires, des
l’Arizona qui ont participé à
une retraite de deux jours à ci pourraient en venir à considérer groupes de victimes, des membres
Mesa, les 8 et 9 juin, ont dit la criminalité et sa résolution
qu’ils souhaitent que le
de la famille du délinquant et des
gouverneur repense sa comme une responsabilité fonctionnaires. D’autres séances
décision.
communautaire plutôt que de ont lieu 60 jours, 120 jours et un
Selon le juge s’attendre à ce que d’autres
Ronald Reinstein, juge
an après la détermination de la
présidant les audiences au entités, dont l’État, les services peine. Ensuite, les délinquants
criminel de la Cour
supérieure du comté de correctionnels ou les tribunaux sont conviés à une cérémonie de
Maricipa, «il n’est pas règlent le problème pour eux.»
nécessaire d’être un génie
fin de programme et sont mis en
pour voir que nous devons probation sans surveillance
essayer différentes choses et
élargir notre champ de Le programme est un modèle de pendant deux autres années.
réflexion». surveillance qui ajoute à la

27 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Avant la première rencontre, les peine d’emprisonnement initiale
membres du comité et le qu’ils auraient normalement dû
délinquant reçoivent une purger. Si le délinquant ne réussit
formation dans le domaine de la pas le programme, le tribunal
justice réparatrice, processus reçoit un rapport dans lequel on
orienté par un agent d’intervention recommande la révocation de
qualifié. Le processus l’ordonnance de probation et
d’intervention sert à «inonder le l’exécution de la peine
délinquant» d’information sur les d’emprisonnement qui a été
effets négatifs de sa conduite suspendue de façon
criminelle sur la collectivité. Avant conditionnelle.
cette intervention, la victime
directe du délinquant est invitée à Parmi les aspects positifs de cette
participer à une rencontre de approche, mentionnons qu’elle
médiation avec ce dernier. La s’apparente beaucoup au modèle
confrontation initiale fait place à où le délinquant fait l’objet d’un
des efforts de collaboration entre le opprobre destiné à faciliter sa
délinquant et la collectivité en vue réinsertion sociale (voir Deuxième
d’en arriver à un règlement positif. section). Dans le cadre de ce
Ce processus prévoit des processus où interviennent la
conditions rigoureuses de victime et le public, on tient le
probation pour le délinquant, de délinquant responsable de ses
même que l’application des actes, puis on l’accueille à nouveau
recommandations formulées par dans la collectivité. Cela a pour
les membres de la collectivité à la effet de réduire l’incarcération et
réunion d’intervention. Le d’éduquer la collectivité au sujet
délinquant doit rendre compte au d’un certain nombre de questions,
comité communautaire des efforts de croyances et de stéréotypes de
déployés pour s’amender. Le longue date en ce qui a trait aux
processus d’intervention offre aux services correctionnels.
membres de la collectivité
l’occasion d’exprimer leurs Parmi les aspects négatifs de cette
frustrations relatives au approche, il convient de noter
comportement criminel et d’unir qu’elle ne remet pas du tout en
leurs efforts pour améliorer les question la nécessité d’une peine
circonstances du délinquant et, par d’emprisonnement pour ce groupe
le fait même, la qualité de la vie de délinquants. Il pourrait en
communautaire. résulter un élargissement du filet
et l’incarcération de personnes
Ce modèle est conçu pour offrir ayant échoué au programme qui
des incitations aux délinquants qui ne se seraient jamais retrouvées en
font des progrès satisfaisants prison n’eût été de leur
pendant leur période de probation, participation au programme.
notamment une suspension
conditionnelle d’une partie de la

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 28
Personne-ressource : Grâce à la médiation, alors qu’il était
Lyn Schroeder sous garde, Joseph et un représentant
Department of Corrections
de l’entreprise victime se sont
P.O. Box 397
Bemidji, Minnesota 56619 entendus sur un calendrier de
Tél. : (218) 755-4092 paiement qui tenait compte des besoins
Téléc. : (218) 755-4186 de la victime aussi bien que de la
capacité de payer du délinquant. En
outre, Joseph a accepté de plein gré de
suivre des cours sur le crédit à la
Réduction de la durée de consommation pour apprendre à gérer
la peine grâce à un son argent et à établir un budget. De
programme de médiation plus, il a consenti à effectuer huit
postcondamnation heures de services communautaires
par semaine pendant six semaines.
Oklahoma
Bien que la victime ait souhaité que le
Ce programme qui allie la
délinquant soit libéré le plus tôt
médiation et une surveillance
possible, le Département a
intensive a ceci d’innovateur que
recommandé une peine modifiée de
l’accord conclu par médiation
cinq mois d’incarcération suivie d’une
peut mener à une réduction de la
surveillance intensive pendant les
peine d’emprisonnement initiale.
quatre autres années. La victime s’est
également montrée disposée à ce que
Un cas Joseph acquitte une partie du
dédommagement en travaillant pour
Le délinquant, Joseph (nom fictif), a elle (le délinquant est menuisier de son
été trouvé coupable de détournement métier), proposition qui sera évaluée
de fonds pour une deuxième fois. au bout d’un an dans la mesure où
Joseph a déclaré qu’il avait besoin de Joseph a respecté les autres
l’argent pour subvenir aux besoins de dispositions de l’accord.
sa famille de plus en plus nombreuse
et qu’il ne semblait jamais capable
Description du programme
d’accumuler des épargnes ou de
joindre les deux bouts. Le tribunal lui
Le programme de médiation entre
a ordonné de verser quelque 15 000 $
les victimes et les délinquants du
en dédommagement et a suspendu sa
Département des services
peine d’emprisonnement. En raison
correctionnels de l’Oklahoma a
de problèmes familiaux et de travail et
débuté en 1984. Les premiers cas
d’un calendrier de paiement irréaliste
renvoyés au programme
imposé par le tribunal, Joseph n’a pu
découlaient de la loi de
effectuer ses versements, ce qui a
l’Oklahoma sur le contrôle
provoqué la révocation de la sentence
judiciaire. Cette loi permet au juge
initiale. Il a été condamné à quatre
qui impose la peine au délinquant
ans d’emprisonnement et à une année
de modifier cette dernière dans les
supplémentaire de probation.
120 jours suivant la date de

29 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
détermination de la peine si le l’avis des parties, répondraient à
délinquant en question n’a pas été leurs besoins.
incarcéré au cours des dix
dernières années. En modifiant la peine imposée
Le Département des services initialement, le juge prend en
correctionnels tient des audiences considération l’accord conclu, ainsi
de médiation afin de que toute recommandation de
recommander des modifications réduction de la période
de peine, ou afin de proposer une d’incarcération.
peine appropriée dans le cadre
d’une enquête présentencielle. Le Département des services
correctionnels dispense une
Le Département n’exclut formation poussée au personnel et
automatiquement aucun genre de à des bénévoles à la grandeur de
cas à des fins de médiation. Le l’État sur les techniques d’entrevue
facteur le plus important qui entre avec les victimes et la tenue de
en ligne de compte est la séances de médiation.
disposition des deux parties à L’expérience démontre qu’environ
participer à la médiation. Par 95 % des audiences de médiation
conséquent, les cas renvoyés au donnent lieu à des accords
programme vont des infractions satisfaisants pour la victime. En
contre les biens aux homicides. fait, il arrive souvent que les deux
parties à cette expérience en
Le processus de médiation ressortent plus satisfaits du
encourage et aide la victime à système de justice pénale. Les
exprimer ses sentiments au sujet délinquants ayant pris part à la
de l’incident criminel et de ses médiation seraient des
répercussions, tout en insistant sur probationnaires «exemplaires»
la responsabilité du délinquant et pendant leur période de
son obligation de rendre des surveillance, et moins de 8 %
comptes. Les accords de d’entre eux violent l’accord conclu
médiation portent généralement ou commettent un nouveau crime.
sur : la durée de la période
d’incarcération ou de surveillance, Personne-ressource :
les services communautaires, les Mike Oakley
Oklahoma Department of
programmes de réadaptation de
Corrections
l’une ou l’autre des parties, de 3400 Martin Luther King Ave.
même que le dédommagement de Oklahoma City, Oklahoma 73136
la victime. Par exemple, certains Tél. : (405) 425-2666
Téléc. : (405) 425-2680
accords prévoient des modalités de
dédommagement, des soins, un
emploi pour le délinquant, des
réparations matérielles, des visites
supervisées, une éducation, ainsi
que d’autres modalités qui, de

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 30
Conférences familiales - clairement qu’une peine
Réussir où la prison d’emprisonnement n’assure pas
une justice vraiment
échoue satisfaisante.

Nous avons inclus dans la


Première section ce compte
Un cas - Nouvel espoir
rendu d’une conférence familiale pour les victimes d’une
remarquable, même si elle n’a bombe incendiaire
pas permis d’éviter ou de réduire
considérablement le recours à la Lors d’un récent voyage à
détention. Nous estimions Philadelphie, Terry O’Connell
néanmoins que cette histoire d’Australie a été invité par un
méritait d’être racontée ici psychologue à animer une
surtout parce qu’elle démontre conférence familiale à la suite
que les conférences familiales d’une affaire grave qui avait déjà
offrent des possibilités été réglée en cour. Terry, de
extraordinaires de réparation et même que quatre autres
de guérison au sein d’une Australiens dispensant une
collectivité. En effet, même formation aux policiers et aux
lorsque le tribunal règle une enseignants en matière de
affaire criminelle, les conférences familiales (voir
conférences familiales peuvent Deuxième section) ont accepté
faire beaucoup pour répondre l’invitation.
aux nombreux besoins non
comblés de la victime, du «Quand j’ai su la gravité et la
délinquant et de la collectivité. complexité de l’affaire, de dire
Ainsi, une conférence familiale O’Connell, j’ai compris que c’était
tenue à Philadelphie a permis une occasion en or de démontrer
d’obtenir des résultats à quel point le processus de la
remarquables à la suite d’un conférence pouvait être efficace,
incident mettant en cause deux même dans le pire des scénarios.
jeunes Asiatiques de 17 ans qui Bien sûr, j’ai accepté de
avaient détruit une maison au coordonner la conférence.»
moyen d’une bombe incendiaire. L’incident mettait en cause deux
Les quatre victimes, prises au délinquants d’origine asiatique de
premier étage, avaient dû sauter 17 ans qui avaient détruit une
par la fenêtre pour échapper aux maison au moyen d’une bombe
flammes. Les auteurs de ce incendiaire. Les quatre victimes,
crime avaient été condamnés à prises au premier étage, avaient
un minimum de deux ans de dû sauter par la fenêtre pour
détention. Le récit qui suit échapper aux flammes. La
illustre les possibilités qu’offrent maison et son contenu ont été
les conférences familiales dans complètement démolis, et l’une
les milieux communautaires et des victimes (la mère) s’est brisé
correctionnels et démontre le dos dans sa chute.

31 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
L’événement ayant conduit à ce gens tenaient en si haute estime,
crime était une allégation selon qui comptait deux champions de
laquelle l’une des victimes avait basket-ball et l’entraîneur de
proféré des injures à caractère basket-ball régional du coin, était
racial à l’endroit des délinquants. complètement démolie à cause de
L’affaire a été entendue à la cour ce crime. Les deux garçons
du comté, où l’on a tenté en vain avaient toujours peur, ils ne
de faire en sorte que les dormaient presque pas depuis
délinquants soient jugés comme l’incident, et ils avaient perdu
adultes. Ces derniers ont été tout intérêt à l’école et au basket-
condamnés à un minimum de ball. Leur mère portait un gros
deux ans de détention. support orthopédique et avait
besoin d’un déambulateur en
«Le plus difficile, d’expliquer acier pour se déplacer. Le père
O’Connell, a été de surmonter les pleurait constamment et n’avait
obstacles bureaucratiques. J’ai rien de l’enseignant engageant et
trouvé beaucoup plus dur de populaire qu’il était avant. Plus
négocier avec le personnel de rien ne lui importait. Malgré ses
probation, les organismes de réserves, la famille a accepté de
soutien aux victimes, la police et participer au processus.»
les avocats que de m’occuper des
victimes et des délinquants. On Après des pourparlers tenus à la
n’a cessé de m’invoquer le bien- prison locale avec les deux
être des victimes, mais je les délinquants et leur famille
soupçonnais de ne surtout pas respective, O’Connell a organisé
vouloir être tenus responsables si une conférence familiale un
les choses tournaient mal. On n’a dimanche après-midi à l’hôtel de
cessé de me dire que les victimes comté (situé au-dessus de la
ne voudraient rien à voir là- station de police). La conférence,
dedans. La raison? Elles étaient d’une durée de trois heures, a
trop traumatisées, ou elles avaient réuni 30 participants (les
besoin de plus de temps pour se victimes, les délinquants, leur
rétablir car il ne s’était écoulé que famille, leurs amis et des voisins).
trois mois depuis l’incident. Selon O’Connell, ce fut la
Évidemment, personne ne conférence la plus émouvante
pouvait me dire combien de qu’il ait jamais coordonnée. «Il a
temps serait approprié.» été douloureux pour tout le
monde d’écouter les victimes
O’Connell a finalement eu raconter leur angoisse pendant
l’occasion de rendre visite aux environ 90 minutes. Cela a eu un
victimes dans leur maison louée effet considérable sur les
pendant environ 90 minutes. «Je délinquants et les autres.
n’avais jamais rien vu d’aussi Pourtant, au terme de la
lamentable, s’est rappelé conférence, l’état d’esprit et
O’Connell. Cette famille que les l’attitude générale des victimes

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 32
s’étaient complètement Justice, Pipersville, Pennsylvanie. Pour
métamorphosés. C’était une des renseignements au sujet des
personnes-ressources, voir la deuxième
expérience incroyable de voir les
section du répertoire, qui porte sur les
deux jeunes victimes sourire et conférences familiales.)
serrer les gens dans leurs bras,
alors qu’ils avaient peine à lever Une autre conférence réparatrice
les yeux deux heures à la suite d’une agression grave
auparavant.»
Voici un autre exemple de
La conférence a été des plus conférence postérieure à la
bénéfiques puisqu’elle a permis décision judiciaire qui a permis
aux victimes de voir à certains de de satisfaire à de nombreux
leurs besoins émotifs. Les besoins non comblés des
victimes avaient l’impression que personnes touchées par une
la conférence leur avait donné de affaire d’agression grave
l’espoir en l’avenir, quelque chose survenue en Pennsylvanie.
que la cour n’avait pu accomplir. Quatre jeunes avaient battu un
Quant à eux, les délinquants et garçon, qui a subi un grave
leur famille ont eu l’occasion de traumatisme crânien et des
mieux comprendre la situation et dommages qui risquent d’être
de rétablir une certaine confiance permanents. Ils ont été placés
entre les membres de la sous garde pendant plusieurs
collectivité et eux. mois, mais, avant leur libération,
on a recommandé qu’ils
Un certain nombre de participent à une conférence qui
professionnels de la santé les mettrait sur la voie de la
mentale ont assisté à la guérison et leur permettrait de
conférence en tant tourner la page. La cour y a
qu’observateurs. Après la consenti, et la conférence a donné
conférence, un psychiatre a fait des résultats remarquables : les
part à O’Connell de ses réflexions délinquants se sont rendu compte
sur la très grande efficacité du pour la première fois de
processus. «Ce sont ses l’ampleur du tort qu’ils avaient
commentaires, a mentionné causé. À l’issue de la conférence,
O’Connell, qui m’ont convaincu la victime et ses parents ont
de la nécessité d’offrir des pardonné aux délinquants ce qui
possibilités semblables pour toute s’était passé.
affaire criminelle grave. Il s’est
dit d’opinion que l’intervention
était susceptible d’atténuer les
répercussions de la névrose post-
traumatique sur les victimes.»

(Cet article est d’abord paru dans Real


Justice Forum, un bulletin sur les
conférences familiales publié par Real

33 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Cercle de soutien et de lui, est allé frapper à la vitre d’une des
responsabilisation pour voitures et a invité les agents à venir
prendre le café. Comme dans «Les
un délinquant sexuel mis Flics de Beverly Hills», les détectives
en liberté ne l’ont pas trouvé drôle!
Le récit d’une
communauté Avant qu’il ne sorte de prison, nous
avions décidé de former un petit
Un cas «Cercle de soutien» pour Sam parce
(de Harry Nigh) qu’il n’avait pas de famille. Nous
l’avons aidé à trouver un appartement
En juin dernier, un vieil ami est sorti et des meubles et à se faire des amis.
de prison après avoir purgé une peine
de sept ans et il est venu s’établir Devions-nous inviter Sam à devenir
dans notre ville. membre de notre église? J’avais déjà
fait la manchette avec Sam, mais
Bien des membres de notre collectivité qu’en dirait notre communauté?
auraient souhaité qu’il reste en prison.
Les membres de l’église se sont réunis
Lorsque la police a rendu publique la deux fois, sont convenus à
nouvelle de sa libération, Sam a fait la l’unanimité d’inviter Sam à en faire
une de notre journal local (Sam est un partie et ont établi certaines lignes
nom fictif). Le conseil scolaire a directrices.
distribué un exemplaire de l’article à
chaque écolier de la région. Quand Chacun a eu l’occasion de s’exprimer,
notre enfant de neuf ans a reçu la et je me rappelle seulement le
photo de Sam à l’école, il a reconnu commentaire d’une bénéficiaire de
mon ami et n’a pu s’empêcher de l’aide sociale qui n’avait pas la vie
s’écrier : «Je le connais - il est venu facile : «Où en serions-nous si Jésus
dîner chez nous hier soir.» ne nous avait pas acceptés?
Comment pouvons-nous refuser
Quelqu’un a divulgué à la presse le d’accueillir Sam parmi nous?»
nom de la rue où habitait Sam et, en
l’espace de quelques heures, une Un dimanche soir, peu après l’arrivée
photocopie de sa photo était placardée de Sam, sous le regard des médias et
sur tous les lampadaires. de la police, plus d’une vingtaine de
membres de notre communauté se
La police a mis sur pied une coûteuse sont rendus chez Sam en apportant
opération de surveillance clandestine nourriture, guitares et cadeaux. Nous
jour et nuit des allées et venues de lui avons fait une fête pour lui
Sam, et il y avait deux, souvent trois souhaiter la bienvenue et lui dire, en
agents spéciaux à l’avant et à l’arrière toute simplicité :
de sa demeure. Peu après la mise en Loin d’être indésirable,
oeuvre de leur opération, Sam, qui a le exclu ou banni tu es l’un
coeur sur la main, est sorti de chez des nôtres, notre voisin,
notre ami.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 34
Je crois que ce fut un point tournant dimanche suivant avec ses deux
sur le plan de l’acceptation de Sam. enfants. Deux semaines plus tard,
La police tenait de fréquentes j’ai vu John et Sam se serrer la main
réunions pour trouver un motif et faire la paix.
quelconque de renvoyer Sam derrière
les barreaux, mais ce simple geste et Pouvez-vous imaginer l’effet que cette
les efforts de notre petit groupe de réconciliation a eu sur notre église?
soutien ont semblé lui donner une Une jeune mère est venue me dire
deuxième chance. après la messe : «J’ai du mal à croire
que cet homme est venu à l’église
Un dimanche matin après la messe, cette semaine» Elle n’était pas la
la décision de notre groupe a été seule.
remise en question lorsqu’un voisin
en état d’ébriété s’est mis à vilipender Toute cette expérience et les craintes
Sam à sa sortie d’église. Il a vociféré qu’elle inspirait se sont transformées
des menaces de mort, lui a dit qu’il en une expérience de grâce. La venue
n’était pas le bienvenu dans le de Sam parmi nous fut un don à bien
«J’ai vu que, malgré le quartier et que, s’il osait revenir, il des égards.
budget, les effectifs et la prendrait un fusil de chasse et lui
force physique de notre tirerait dessus. D’autres voisins sont J’ai pu saisir la puissance de cet
service de police, le venus voir ce qui causait tout ce amour lors de la soirée organisée par
véritable pouvoir, le tapage. Sam. Sam, un homme généreux, a
pouvoir libérateur, était invité tout le monde qu’il connaissait,
entre les mains d’une Notre petit groupe était ébranlé. même les agents qui le surveillaient.
petite collectivité qui a Mon dieu, que faire maintenant? Il était déçu que ceux-ci ne soient pas
tout simplement tendu venus. Puis, à 22 h 30, un agent a
la main de l’amitié.» Comment peut-on tirer quelque chose timidement monté l’escalier arrière
de positif d’un tel incident? qui menait à la cuisine et s’est
Harry Nigh excusé. «Nous craignions qu’il n’y
Le lendemain matin, notre voisin ait des journalistes...»
coléreux a demandé à me voir. Il s’est
excusé des propos qu’il avait tenus, a J’ai constaté que, malgré le budget,
présenté des excuses à notre église et les effectifs et la force physique de
a dit : «Dites à cet homme qu’il n’a notre corps policier, le vrai pouvoir de
rien à craindre de moi». Au cours de libération appartenait à une petite
notre entretien, il m’a parlé de son collectivité qui avait simplement fait
passé. un geste d’amour.

Il m’a montré des documents qui Description du programme


révélaient qu’il avait été victime
d’agression lorsqu’il était en centre Par suite d’initiatives
d’éducation surveillée. De toute communautaires de la sorte, on a
évidence, cet homme qui élevait deux proposé un projet de
jeunes enfants par lui-même était réintégration communautaire
seul et effrayé. Quand je l’ai invité à destiné à réduire le risque de
venir à notre église, il s’est présenté le

35 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
récidive chez les individus réinsertion sociale de l’ex-
reconnus coupables d’infractions délinquant.
sexuelles et à faciliter la
réinsertion de l’ex-délinquant Personnes-ressources :
dans la collectivité. Evan Heise
Community Justice Ministries
Conflict Mediation Services of
Ce projet fait intervenir des Downsview
bénévoles de la collectivité qui 95 Eddystone Avenue
forment des groupes de soutien North York, Ontario
M3N 1H6
ou des «cercles de soutien et de Tél. : (416) 740-2522
reddition de comptes» pour des Téléc. : (416) 740-8036
délinquants sexuels qui
Reverend Hugh Kirkegaard
réintègrent la collectivité à leur
Toronto Community Chaplaincy
sortie de prison et dont le cas Correctional Service Canada
retient ou risque de retenir 330 Keele Street - Main Floor
l’attention du public. Dans le Toronto, Ontario
M6P 2K7
cadre de ce processus, l’ex- Tél. : (416) 604-4391
délinquant doit s’engager à Téléc. : (416) 973-9723
entretenir des rapports avec le
cercle de soutien, à accepter son
aide et ses conseils, à suivre un
plan de traitement préétabli, et à
se comporter de manière
responsable au sein de la
collectivité. Le cercle de soutien
offre un appui intensif à l’ex-
délinquant en assurant la
médiation entre la police, les
médias et l’ensemble de la
collectivité de sorte à favoriser
une réadaptation sécuritaire et
ordonnée à la vie quotidienne
dans la collectivité.

Ce projet est parrainé par le


Comité central mennonite de
l’Ontario (CCMO) en
collaboration avec l’aumônerie
communautaire de Toronto.

Bien qu’il ne réduise pas


directement l’utilisation ou la
durée de l’incarcération, ce projet
a pour objectif de faire échec à la
récidive en favorisant la

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 36
Deuxième section :
Pour une vraie justice

Série d’initiatives destinées à réparer le tort causé par


la criminalité et à répondre à des besoins connexes, et
certaines incidences sur la réduction du recours à
l’emprisonnement ou la durée des peines
d’emprisonnement

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Table des matières
Série d’initiatives destinées à réparer le tort causé par la criminalité et à répondre à des besoins connexes, et
certaines incidences sur la réduction du recours à l’emprisonnement ou la durée des peines d’emprisonnement

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .37

1. Médiation entre la victime et le délinquant: Une invention canadienne . . . . . . . . . . . . . . . . . .40


Un modèle de médiation avant procès, Canada . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .40
Programmes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .43
(i) Centre pour la résolution des disputes d’Ottawa-Carleton . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .46
(ii) Programme de médiation entre la victime et le délinquant d’Edmonton . . . . . . . . . . . . . . .46
(iii) Projet pilote de médiation présentenciel - MOVE, Moncton (N-B.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . .47
Programme de médiation entre la victime et le délinquant du comté de Genesee -
Genesee (New York) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .48
Services de médiation entre la victime et le délinquant
dans le cas de crimes violents et non violents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .50
Initiatives de justice communautaire - Langley (C.-B.)
MOVE - Moncton

2. Détermination de la peine par le cercle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .52


Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .52
Maison Cumberland, Saskatchewan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .57
Cercles urbains - Vol à main armée à Saskatoon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .58
Participation au cercle de détermination de la peine - Une expérience menant à un changement
d’attitude, Prince Albert, Sask. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .62
Cas d’homicide involontaire à Fort St. John (Colombie-Britannique) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .63

3. Conférences familiales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .66


Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .66
Conférences familiales - Nouvelle-Zélande . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .70
Conférences familiales - Wagga Wagga (Australie) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .74
Conférences familiales - Jeunes Autochtones, Regina . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .77
Conférences familiales - États-Unis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .78
Projet de prise de décision à l’occasion d’une conférence familiale -
Terre-Neuve et Labrador . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .80

4. Comités communautaires de détermination de la peine et comités


de justice pour la jeunesse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .81
Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .81
Projet de justice tribale de Teslin - Comité de détermination de la peine (Yukon) . . . . . . . . . . . . . .82
Comité de justice de Wabasca - Alberta . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .85
Comité de détermination de la peine du lac des Esclaves - Alberta . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .86
Comités de justice pour la jeunesse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .87
Comité de justice des Aînés - Fort Resolution (Territoires du Nord-Ouest) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .88
Comité de justice communautaire de Russell Heights - Ottawa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .88

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Introduction

Cette section porte sur quatre également divers autres risques.


nouveaux types d’initiatives qui Dans l’ensemble, toutefois, les
sont particulièrement efficaces évaluations montrent qu’il s’agit
pour ce qui est de rendre une d’une option satisfaisante qui
justice vraiment satisfaisante aide à apaiser les craintes des
parce qu’elles permettent de victimes et qui, loin d’être
réparer le tort causé par la «indulgente envers le criminel»,
criminalité. Ce faisant, elles exige qu’il assume la
aident à réduire le recours à responsabilité de ses actes et qu’il
l’emprisonnement ou la durée répare le tort causé. Elle offre en
des peines d’emprisonnement, outre des avantages évidents,
bien que pas dans tous les cas. même lorsqu’elle n’est pas
intrinsèquement liée aux mesures
Le premier cas de médiation de déjudiciarisation qui
entre la victime et le délinquant permettent d’éviter les poursuites
au Canada date de 1974 lorsque ou l’emprisonnement.
deux individus ont
audacieusement entrepris de La détermination de la peine par
persuader un juge de s’y prendre le Cercle est aussi une initiative
différemment avec deux jeunes canadienne, le résultat des efforts
qui avaient vandalisé des biens déployés par un nombre croissant
appartenant à 22 victimes à de juges pour contrer la futilité de
Elmira (Ontario). Depuis, on a l’actuel processus de
mis sur pied un modèle de détermination de la peine et pour
programme permettant aux respecter la façon autochtone
délinquants de rencontrer leurs traditionnelle de traiter avec les
victimes en personne qui a été membres de la collectivité qui
adopté non seulement en enfreignent la loi. Il s’agit de
Amérique du Nord, mais en l’une des percées les plus
Europe, en Australie, en prometteuses dans notre système
Nouvelle-Zélande et en Afrique de justice occidental : un
du Sud. Comme dans le cas de processus consultatif
toute approche valable dont on communautaire préalable à
encourage l’adoption en l’imposition de la peine qui offre
l’intégrant au système, ce modèle aux participants une occasion
risque d’être appliqué saine d’exprimer leur douleur et
«automatiquement», ce qui leur colère et de fournir le soutien
pourrait compromettre sa voulu et qui met l’accent tout
capacité d’encourager une grande particulièrement sur l’obligation
créativité dans l’administration de rendre compte, la réparation et
de la justice. On examine la restauration de relations

37 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
paisibles et équitables dans la délinquant et autant de membres
collectivité. Ce processus peut de leur famille et de leur réseau
aussi avoir des incidences sur la de soutien que possible. On fait
prévention du crime en général appel aussi aux spécialistes ou
en raison du nombre de aux travailleurs communautaires
personnes qui se chargent de pertinents. Les conférences
régler les problèmes qui offrent un meilleur moyen de
émergent. Il a toutefois des rendre une vraie justice parce
limites et n’est pas sans risque; il qu’elles permettent de se pencher
faut être d’autant plus attentif sur les questions restées sans
aux abus éventuels découlant réponse, les sentiments
d’un déséquilibre des pouvoirs douloureux, l’obligation de
dans les relations officielles et rendre compte et la question de la
officieuses entre les membres de restitution ou de la réparation.
la collectivité que le processus En criminologie, les conférences
peut facilement donner l’illusion familiales ont permis de voir
que les principes démocratiques dans une autre optique la façon
de participation à la prise de dont le sentiment humain de
décision sont respectés. On «honte» peut modifier le
s’intéresse de plus en plus à la comportement, mais seulement à
question de savoir quels éléments la condition que le délinquant
de ce processus pourraient être ne soit pas traité comme un
adaptés aux collectivités urbaines paria. Les conférences familiales
non autochtones. Même si cherchent à atteindre ce but en
détermination de la peine par le mobilisant les mécanismes
Cercle n’a pas pour but communautaires officieux qui à la
d’empêcher le délinquant d’être fois permettent de réprouver la
mis en prison, c’est néanmoins le conduite du délinquant et
résultat lorsque le juge et la d’accepter son retour dans la
collectivité veulent que le collectivité en tant que citoyen
processus mène à l’imposition respectueux de la loi. L’intérêt
d’une peine sensée. pour cette approche s’accroît aux
États-Unis et au Canada. Il est
Les conférences familiales évident que le meilleur moyen de
auxquelles ont recours les réduire le risque d’un
autochtones de Nouvelle-Zélande comportement dangereux à
et d’Australie représentent une l’avenir est de rétablir des liens
autre option fiable et réparatrice sains entre, d’une part, le
pour les collectivités aux prises délinquant et, d’autre part, sa
avec la criminalité. Par rapport famille et la collectivité. En
au cercle de détermination de la Nouvelle-Zélande, la loi veut que
peine, la conférence familiale chaque affaire impliquant un
réunit généralement un plus petit jeune, à l’exception des cas de
nombre de membres de la meurtre et d’homicide
collectivité, c.-à-d. la victime, le involontaire coupable, fasse

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 38
l’objet d’une «conférence» de ce peine à imposer ou les mesures à
genre qui aboutit à la appliquer; souvent, ils ont recours
présentation d’une à des mesures réparatrices
recommandation. On commence comme la médiation, la
à demander la tenue de participation de la victime, la
conférences de ce genre dans le restitution et la réparation. Ils se
cas d’adultes, les juges constatant penchent également parfois sur
qu’il est beaucoup plus productif les conditions sociales locales qui
de consulter ainsi la collectivité et contribuent au crime. Ces
d’obtenir son aide concrète en ce comités sont mis sur pied dans
qui concerne les questions des collectivités autochtones et
cernées et les problèmes relevés. non autochtones et peuvent
Bien que dans certaines sphères s’occuper d’adultes ou de jeunes,
de compétence les conférences selon leur mandat.
puissent aboutir à une
recommandation d’imposer une Les initiatives ci-dessus diffèrent
peine d’emprisonnement, en de celles exposées dans la
réalité c’est rarement le cas. troisième section en ce qu’elles
L’incidence des conférences sont fondées, de façon générale,
familiales sur les taux sur une approche de la
d’incarcération devrait augmenter criminalité plus holistique et
à mesure qu’on y a recours davantage axée sur la collectivité
relativement à des infractions et comprennent des éléments
plus graves. Les conférences réparateurs plus importants; par
familiales ne constituent pas une contre, elles ne visent pas aussi
panacée mais, de façon générale, précisément, à court terme, à
les spécialistes du système de réduire le recours à
justice et le public en sont l’emprisonnement. À long terme,
beaucoup plus satisfaits qu’ils ne toutefois, elles pourraient avoir
le sont des tribunaux. une incidence plus importante
sur les taux d’incarcération.
Les comités de justice pour la
jeunesse et les comités de
détermination de la peine sont
également exposés dans cette
section à titre d’initiatives qui
visent à réparer le tort causé par
la criminalité et à répondre à des
besoins connexes, et qui sont
susceptibles de réduire le recours
au placement sous garde ou la
durée de celui-ci. Ces comités
sont composés de citoyens
bénévoles ou d’Aînés qui
déterminent ou recommandent la

39 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
1. Médiation entre la victime et le
délinquant : une invention canadienne

Introduction personne, en la présence d’un


médiateur ayant reçu la
Le premier projet de formation voulue. Les parties ont
«réconciliation de la victime et du ainsi l’occasion de parler de
délinquant» a été mis sur pied l’infraction, d’exprimer leurs
dans la ville d’Elmira (Ontario) sentiments et leurs inquiétudes,
près de Kitchener en 1974. Des d’obtenir des réponses à leurs
représentants de l’Église questions et de négocier un
mennonite, de concert avec un règlement. Le médiateur
juge et un agent de probation, ont n’impose pas un règlement. Le
pris l’initiative de renvoyer en processus est censé favoriser la
médiation une affaire impliquant communication à cette fin entre
deux jeunes qui avaient vandalisé les deux parties.
des biens appartenant à
22 victimes. Le juge, comme Dans de nombreux cas, la
l’avait suggéré l’agent de médiation est une solution de
probation, a ordonné aux deux rechange aux poursuites devant
adolescents de rencontrer
chacune des victimes et de Élaboration à l’échelle internationale
prendre des mesures pour de programmes de médiation entre
l’indemniser. Cette approche a la victime et le délinquant
plu aux victimes et à la
PAYS Nombre de programmes
collectivité. Cette décision a de médiation entre la
marqué le début de l’élaboration victime et le délinquant

d’un nombre croissant de Australie 5


programmes de réconciliation de Autriche Disponibles dans toutes les
la victime et du délinquant, sphères de compétence
d’abord sur le continent nord- Belgique 8
américain, mais plus tard aussi en Canada 26
Europe, en Australie, en Angleterre 20
Nouvelle-Zélande et en Afrique Finlande 130
du Sud. France 40

Allemagne 293

Points forts Nouvelle-Zélande Disponibles dans toutes les


sphères de compétence

Les programmes de médiation Norvège 54

entre la victime et le délinquant Afrique du Sud 1

offrent aux délinquants une Écosse 2

occasion exceptionnelle de États-Unis 15

rencontrer leurs victimes en Source: The Network Interaction Spring 1996

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 40
les tribunaux et à au moment de la détermination
l’emprisonnement à laquelle on de la peine après la
peut avoir recours pour résoudre condamnation et, dans le cas des
les questions et répondre aux jeunes, le plus souvent comme
besoins qui découlent du solution de rechange à des
comportement criminel. poursuites judiciaires.
Souvent, elle s’avère une
solution plus satisfaisante, plus La médiation peut aider à
inclusive et plus pertinente que changer la façon dont la société et
l’emprisonnement. Toutefois, on ses institutions réagissent à la
Même si le Programme a aussi recours à la médiation criminalité, les amener à
de réconciliation de la pendant ou après l’incarcération, abandonner l’approche
victime et du afin de répondre aux besoins des traditionnelle de «la Couronne
délinquant peut servir personnes touchées par le crime contre l’accusé» au profit d’une
de solution de rechange qui ne sont pas satisfaits par approche qui tient compte de la
partielle ou totale à l’emprisonnement de l’auteur du victime, du délinquant et de la
l’emprisonnement dans crime. Parfois (p. ex., dans le cas collectivité. Les participants
le cas de nombreux des projets de médiation entre la souvent considèrent la médiation
délinquants, elle ne victime et le délinquant au comme une expérience positive,
constitue pas une Nouveau-Brunswick et en notamment parce qu’elle
solution au Colombie-Britannique), il n’y a humanise beaucoup le système
surpeuplement dans les pas de lien direct entre la de justice. De nombreuses
prisons et les médiation et la réduction du victimes ont reconnu qu’une
pénitenciers. Tout au recours à l’incarcération ou de la rencontre avec leur agresseur
plus, ce programme
durée des peines dans le cadre d’un processus de
peut venir s’ajouter
d’emprisonnement. D’ailleurs, médiation peut réduire leurs
utilement aux efforts
déployés sur le plan des d’aucuns ont exprimé la crainte sentiments de vulnérabilité et
politiques que la possibilité d’une telle d’anxiété. Ce qui importe, c’est
gouvernementales réduction n’amène les que la victime et le délinquant
destinées à limiter le délinquants à participer à la ont alors l’occasion de rendre la
recours à médiation pour de mauvaises justice plutôt que de la subir
l’incarcération. raisons. La médiation utile qui passivement.
donne les résultats escomptés
Crime and peut effectivement réduire le Mises en garde
Reconciliation, risque de récidive de la part du
Mark Umbreit délinquant et éliminer la Néanmoins, la médiation soulève
demande d’imposition d’une à de nombreuses questions sur le
peine punitive de la part de la plan pratique. Ses partisans les
victime; toutefois, il importe de plus enthousiastes craignent
signaler qu’il s’agit là souvent des qu’on n’encourage le recours à la
conséquences de la médiation médiation pour des raisons de
plutôt que des objectifs de convenance et liées aux coûts
certains programmes. plutôt que pour améliorer la
On a recours à la médiation qualité de la justice rendue. À
comme solution de rechange dans mesure qu’on a davantage
le cas d’adultes principalement

41 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
recours à la médiation entre la L’une des principales sources
victime et le délinquant et que ce d’inquiétude est la question du
processus risque de devenir plus choix et de la façon de procéder
institutionnalisé, il est à craindre pour éviter une revictimisation de
qu’il ne s’adapte de plus en plus la victime à laquelle il faut au
au «système prédominant de contraire offrir différentes options
justice rétributive au lieu lui permettant de reprendre le
d’influer sur le système actuel contrôle de sa vie. Cela est
pour qu’il s’aligne davantage sur important quel que soit l’âge des
le concept de justice réparatrice intéressés, mais tout
qui sous-tend la médiation entre particulièrement dans le cas des
la victime et le délinquant.» programmes de médiation
(Umbreit, Coates, Picard) auxquels participent de jeunes
contrevenants; dans certains cas,

Comparaison des études effectuées en Angleterre,


au Canada et aux États-Unis sur les victimes et
les délinquants participant au processus de médiation

Ensemble des Ensemble des Ensemble des


sites en sites en sites aux
Angleterre(2) Canada(4) États-Unis (4)

Saatifaction de la victime à l’égard de 62% 78% 79%


l’intervention du système de justice
pénale dans son cas : renvoi en médiation

Satisfaction du délinquant en ce qui a trait 79% 74% 87%


à l’intervention du systèmede justice pénale
dans son cas : renvoi en médiation

Satisfaction de la victime en ce qui a trait 84% 89% 90%


au résultat de la médiation

Satisfaction du délinquant en ce qui a trait 100% 91% 91%


au résultat de la médiation

Crainte de la victime de revictimisation 16% 11% 10%


par la même délinquant après la médiation (50% de moins (64% de moins (56% de moins
que les victimes que les victimes qu’avant la
qui n’ont pas qui n’ont pas participation au
participé au participé au processus de
processus de processus de médiation, pour les
médiation) médiation) mêmes victimes)

Perceptions de la victime de l’équité de 59% 80% 83%


l’intervention du système de justice pénale
dans son cas : renvoi en médiation

Perceptions de la victime de l’équité de 89% 80% 89%


l’intervention du système de justice pénale
dans son cas : renvoi en médiation

Source: Interaction, printemps 1996 (The Network Interaction for Conflict Resolution)

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 42
en effet, on n’a tenu compte des Il y a un certain nombre de
droits des jeunes à l’application programmes de médiation
régulière de la loi. semblables au pays qui
prévoient une rencontre en
Bien que le recours à la médiation personne entre la victime et le
soit devenu beaucoup plus délinquant. Pour montrer au
fréquent au cours des lecteur comment fonctionne le
20 dernières années, il continue processus de médiation, nous
d’avoir une incidence marginale ferons d’abord le récit d’un cas
sur le système de justice dans de qui nous a été soumis par le
nombreuses sphères de Centre pour la résolution des
compétence où trop peu de cas disputes d’Ottawa. Nous
sont renvoyés aux nombreux donnerons ensuite une brève
programmes en place. Umbreidt description des programmes de
et d’autres préconisent un médiation en place à Ottawa, à
processus de renvoi proactif et Moncton et à Edmonton.
dynamique destiné à surmonter
cet obstacle. Un modèle de médiation
avant procès
Voici quelques exemples des
différentes façons dont on a Un cas
recours à la médiation pour
rendre une justice plus Nous raconterons ici l’histoire d’un
satisfaisante. homme âgé de 49 ans appelé Arthur
était accusé de nombreux chefs
d’introduction par effraction. Il
avait déjà purgé quatre ans et demi
en prison au cours des huit dernières
années, ayant de longs antécédents
criminels faisant état de nombreuses
accusations de possession de
stupéfiants, de trafic de drogue et de
vol. Après avoir été accusé des
infractions actuelles, Arthur a avoué
avoir commis au moins 75 autres
introductions par effraction au cours
d’une période de quatre mois dans la
même région. La Couronne voulait
que l’accusé, s’il plaidait coupable,
reçoive une peine d’emprisonnement
de neuf à douze mois.

43 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Les victimes de cette dernière médiation avant procès devant
introduction par effraction, Chris et les tribunaux de juridiction
Debbie, ont constaté en rentrant chez criminelle administré par le Centre
eux qu’on avait tourné les lumières à de résolution des disputes
l’extérieur de manière à laisser le d’Ottawa-Carleton examinent cette
devant de la maison dans l’obscurité possibilité «étant donné les mesures
et qu’on avait forcé leur porte prises par l’accusé pour se
d’entrée. La police a été envoyée sur réadapter».
les lieux, accompagnée d’un chien
des services de police. On a suivi la Chris était tout à fait disposé à avoir
piste des suspects jusqu’à une recours à la médiation parce qu’il
résidence voisine dont la porte arrière avait déjà été «sensibilisé» à ce
avait été défoncée. On a trouvé processus : il avait eu un problème
Arthur dans la maison. Lorsqu’on d’alcool grave et avait même vécu un
l’a arrêté, il était en possession de certain temps dans la rue avant de
certains biens volés chez Chris et régler son problème de drogue et de
Debbie. Il semblait être sous l’effet devenir un homme d’affaires prospère.
de drogues utilisées à des fins non Sa femme Debbie, toutefois, avait été
médicales. On n’a jamais retrouvé le trop traumatisée par l’infraction pour
deuxième suspect qui avait participer au processus. L’un des
vraisemblablement en sa possession articles qu’on n’avait pas retrouvé
les autres biens, d’une valeur de était un pendentif qui avait une
1 800 $, volés chez Chris et Debbie. grande valeur sentimentale pour elle
Arthur a été traité à l’hôpital pour parce qu’il lui avait été donné au nom
des morsures de chien, puis placé de sa petite-fille (il portait
sous garde en attendant une enquête l’inscription «Grand-mère
sur le cautionnement. 1re classe»; la petite-fille était décédée
depuis et ce décès avait rappelé à
Lorsque l’avocat de la défense a Debbie le souvenir douloureux d’un
rencontré l’avocat-conseil adjoint de enfant qu’elle avait elle-même perdu
la Couronne, Arthur avait pris des années auparavant.
plusieurs initiatives destinées à
l’aider à surmonter son problème Pendant la médiation, Chris a
d’alcool et de drogue et à l’aider à interrogé Arthur de près pour voir
changer sa vie. Il était sous la s’il voulait sincèrement changer sa
surveillance de personnel médical et vie; il a été à l’affût de tout indice
il obtenait de bons résultats dans un permettant de déterminer que celui-ci
cours de gestion d’organismes à but ne faisait que jouer la comédie. Par
non lucratif. Lorsque l’avocat de la contre, il a montré à Arthur qu’il est
défense a demandé qu’on rédige un possible pour une personne de
rapport présentenciel, l’avocat- changer sa vie. Chris a en outre su
conseil adjoint de la Couronne a faire comprendre à Arthur que son
pensé qu’il conviendrait peut-être infraction avait causé beaucoup plus
dans ce cas d’avoir recours à la de tort à Debbie qu’Arthur ne
médiation. Il a demandé que les l’aurait jamais cru. Pour Arthur, de
préposés au Programme de toute évidence, il était beaucoup plus

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 44
difficile de rencontrer le plaignant au 6. Chris et Arthur conviennent que
cours du processus de médiation que la restitution ne servirait à
de simplement subir le châtiment que aucune fin utile étant donné que
lui infligerait le système de justice les articles qui ont une valeur
pénale. Cependant, il avait décidé de sentimentale ne peuvent jamais
participer au processus de médiation être remplacés.
dans le cadre des efforts qu’il
déployait pour changer sa vie. 7. Chris convient de présenter à sa
femme les excuses d’Arthur pour
Accord de médiation (entre Chris la perte des articles irremplaçables
et Arthur) d’une valeur sentimentale.

1. Arthur et Chris sont contents 8. Arthur et Chris conviennent que,


d’avoir eu l’occasion de se lorsqu’ils assisteront aux
rencontrer dans le cadre du réunions de 24 heures des AA à
processus de médiation et l’occasion de Noël et du Nouvel
trouvent tous deux que la An, leur rencontre sera amicale.
médiation est une étape positive En outre, s’ils se rencontrent par
du processus de réadaptation. hasard à l’avenir, ils se serreront
la main.
2. Chris a informé Arthur qu’il
n’avait plus de sentiments de 9. Chris a souhaité à Arthur bonne
rancune ni d’animosité à son chance et succès à l’avenir. De
égard. plus, il souhaite faire savoir à
l’avocat de la Couronne qu’il
3. Arthur a informé Chris qu’il espère qu’on tiendra compte de
ressentait de la honte, de la cet accord en rendant une
culpabilité et du remords des décision relativement à toutes les
conséquences de son geste. Chris accusations portées contre
a accepté les excuses d’Arthur Arthur.
comme étant sincères.

4. Les deux parties reconnaissent


qu’elles ont des antécédents
semblables.

5. Chris a déclaré qu’il est content


qu’Arthur soit en réadaptation et
que s’il continue, cela profitera
non seulement à lui-même mais à
d’autres.

45 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Décision questions visées par la médiation.
De façon générale, les critères pris
La Couronne a inscrit une mention en compte pour déterminer l’à-
au dossier à l’effet que «la médiation a propos du recours à la médiation
été couronnée de succès». La dans les affaires criminelles
Couronne, qui avait initialement comprennent la différence d’âge
demandé une peine d’emprisonnement entre l’accusé et le plaignant
maximale d’un an, a demandé plutôt lorsque ce dernier a moins de
une condamnation avec sursis assortie 18 ans, la nature de l’infraction - le
de deux années de probation et de la Centre n’assure pas la médiation
condition de s’abstenir de consommer dans les cas de manquement aux
de la drogue et de l’alcool. C’est conditions, dans les cas
effectivement la peine qui a été d’infractions d’ordre sexuel, si des
imposée. accusations semblables ont déjà
été déposées auparavant ou s’il y
Description des a eu une condamnation pour une
infraction semblable auparavant - «Le processus de
programmes
la mesure dans laquelle la victime médiation entre la
craint l’accusé, le recours à la victime et le délinquant
(i) Centre pour la apprend aux jeunes que
violence excessive, des blessures
résolution des disputes graves infligées au cours de la l’acte qu’ils ont commis
d’Ottawa-Carleton a eu des répercussions
perpétration de l’infraction ou
sur de vraies
l’usage d’une arme à feu, lorsqu’il
personnes... Verser un
En septembre 1989, le Centre pour y a une déficience d’ordre
dédommagement pour
la résolution des disputes psychiatrique dûment compenser leur
d’Ottawa-Carleton a mis sur pied diagnostiquée, et dans les cas de conduite fait partie de
à l’intention des adulte un relations conjugales «abusives». l’apprentissage du
programme de médiation après la comportement adulte.»
mise en accusation et avant le Personne-ressource :
procès, l’un des premiers Centre pour la résolution des Un juge d’Oakland
programmes de ce genre en disputes d’Ottawa-Carleton
161, rue Elgin
Ontario. En 1993, le Centre a mis Pièce 3107
sur pied le même type de Ottawa (Ontario)
programme de médiation pour les K2P 2K1
jeunes qui ne sont pas admissibles Tél. : (613) 239-1501
Téléc. : (613) 239-1214
à des mesures de déjudiciarisation
selon l’option prévoyant des
(ii) Le Programme de
solutions de rechange à
l’incarcération. médiation entre la victime
et le délinquant
La médiation est un processus d’Edmonton
confidentiel. Le procureur de la
Couronne a garanti au Centre Le Programme de médiation
pour la résolution des disputes entre la victime et le délinquant
que celui-ci ne sera pas obligé de d’Edmonton est un projet-pilote
fournir de renseignements sur les

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 46
d’un an qu’on évalue criminalité plutôt que de
actuellement. Il visait à chercher de simples palliatifs.»
démontrer l’utilité du recours à la
médiation pour parvenir à un Le projet de médiation a été
règlement dans certains cas où parrainé par le secteur privé, c.-à-
des accusations au criminel d. par la Société Elizabeth Fry, la
étaient déposées contre des Société John Howard et leurs
adultes. La police et la Couronne partenaires dans la collectivité.
ont renvoyé au programme, avant
et après le dépôt des accusations, Personne-ressource :
des cas dans lesquels il était Maureen Collins
Executive Director
question d’infractions peu graves,
Edmonton John Howard Society
c.-à-d. vols de moins de 1 000 $, Suite 301- 10526 Jasper Avenue
possession de biens volés, méfaits Edmonton, Alberta
ou voies de fait peu graves. T5J 1Z7
Tél. (403) 428-7590
Selon un rapport provisoire, Téléc. : (403) 425-1549
environ 40 à 50 % des cas sont
effectivement soumis à la (iii) Le projet pilote de
médiation, puisque cela dépend
de l’approbation de la Couronne
médiation
et de la participation volontaire présentencielle - MOVE
des deux parties. Au cours de la Moncton (Nouveau-
période évaluée, cependant, Brunswick)
20 médiations ont abouti à une
entente. Généralement, les En 1993, MOVE Inc. a mené un
programmes de médiation entre projet pilote de médiation
la victime et le délinquant présentencielle de concert avec le
aboutissent à une entente dans 85 ministère de la Justice du
à 95 % des cas. Nouveau-Brunswick. MOVE a
offert des services de médiation
Selon Jeff Sermet, un étudiant en dans 30 cas choisis par les
troisième de droit qui a participé tribunaux de Moncton. Grâce à
au projet, les tribunaux n’ont pas un processus axé sur le dialogue,
pour mandat de se pencher sur la compréhension et l’interaction
les circonstances entourant les entre la victime et le délinquant,
événements qui mènent au dépôt on est parvenu à des ententes de
d’accusations au criminel. «Les restitution mutuellement
tribunaux sont des mécanismes acceptables dans les 25 cas qui
punitifs qui ont pour mandat ont été soumis à la médiation.
d’infliger une peine, non de Les juges dans sept de ces 25 cas
déterminer les causes profondes ont déclaré explicitement qu’une
de la criminalité. En tant peine d’emprisonnement aurait
qu’avocats au criminel, nous été «appropriée» si le délinquant
devrons accorder la priorité à la n’avait pas participé à la
lutte contre les causes de la médiation.

47 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Le ministère de la Justice a Programme de médiation
réservé un accueil favorable au entre la victime et le
projet pilote, reconnaissant qu’il
permettait de remplacer dans un
délinquant du comté de
certain nombre de cas le Genesee
processus accusatoire auquel on a Genesee (New York)
recours actuellement par un
processus de médiation qui Un cas
permet de réconcilier la victime et
le délinquant. Selon le ministère Il s’agit dans ce cas de la famille
de la Justice, le projet avait réussi d’un homme tué par un
à atteindre ses objectifs, c.-à-d. conducteur en état d’ébriété qui
aider les victimes et les a reçu une peine
délinquants à parvenir à une d’emprisonnement de six mois
entente et à se réconcilier, aider suivie d’une période de
les victimes et les délinquants à probation de cinq ans.
parvenir à une entente
concernant la réparation, amener L’histoire de Connie Whittier
les membres de la collectivité à ...montre bien tout l’effet du
tâcher de régler les problèmes qui programme de service
aboutissent normalement à des communautaire/droits des victimes et
démêlés avec le système de du programme de réconciliation de la
justice pénale et cerner les types victime et du délinquant du comté de
d’affaires criminelles qui peuvent Genesee.
être réglées au niveau de la
collectivité. ...David Whittier, un shérif adjoint
du comté d’Orleans, a été coïncé
Personne-ressource : entre sa voiture de patrouille et un
Wendy Keats véhicule abandonné par un
MOVE, Inc
conducteur qui était en état
C.P. 457
Salisbury (Nouveau-Brunswick) d’ébriété... Il est mort neuf mois plus
E0A 3E0 tard sans jamais avoir eu l’occasion
tél. : (506) 372-4522 de rencontrer le conducteur, John,
téléc. : (506) 372-8013
qui s’est vu infliger une peine
d’emprisonnement de six mois suivie
d’une période de probation de cinq
ans. La femme de David Whittier,
pour sa part, a pu rencontrer John
dans le cadre du programme de
réconciliation de la victime et du
délinquant du comté de Genesee
offert dans le comté d’Orleans.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 48
«Lorsque David est mort, je ne C’est là une étape du processus de
savais toujours pas de quoi cet guérison.
homme avait l’air,» a dit
Mme Whittier aux fonctionnaires du Notre système de justice tâche
Texas venus dans la région pour voir d’établir une équivalence entre la
comment on pourrait mettre sur pied souffrance humaine et la durée de la
un programme semblable dans leur peine d’emprisonnement. Pendant
État. «Je ne savais pas s’il était combien longtemps et combien
peut-être derrière moi dans la queue sévèrement faut-il punir une
à l’épicerie. Je ne savais pas s’il était personne qui a infligé de la
l’homme auquel j’avais dit Bonjour souffrance à autrui? La seule façon
dans la rue.» pour une société civilisée de punir le
mal, c’est de l’envisager dans une
David Whittier avait voulu dire à optique purement objective, de
John qu’il lui pardonnait et il a séparer sentiments et raison. Sinon,
demandé à sa femme de le faire pour nous serions tous à la merci de ceux
lui. Mais elle ne croyait pas pouvoir qui veulent venger un tort réel ou
le faire. Elle voulait plutôt dire à imaginé. Cependant, lorsqu’on
John qu’elle le détestait, qu’il avait considère la souffrance uniquement
ruiné sa vie. sur le plan objectif, on déshumanise
la victime. Le programme de
Mme Whittier et ses enfants ont réconciliation de la victime et du
rencontré John pendant deux heures délinquant aide à soulager les
en 1990, sans que des avocats, des souffrances...
policiers ou d’autres membres du (Extrait de l’éditorial Recognizing the
système de justice pénale assistent à Pain, publié dans le numéro du
10 janvier 1994 du quotidien The Daily
leur rencontre. Elle a pu lui dire
News)
toute la douleur et la colère qu’elle
ressentait. John était obligé de rester
assis à l’écouter. Lorsqu’elle est
Description du programme
partie à la fin de leur rencontre,
Mme Whittier était encore en colère, Le programme du comté de
mais pas de la même façon. Genesee a ceci de particulier qu’il
met habituellement la victime et
«Je lui en veux de ce qu’il a fait... il a le délinquant en présence l’un de
tué mon mari. Mais je sais l’autre quelques heures à peine
maintenant, après l’avoir rencontré, après la perpétration de
que John devra vivre le reste de ses l’infraction et qu’il accorde la
jours en sachant qu’il a tué un priorité aux soins prodigués aux
homme.» victimes qui ont été traumatisées.
Les bénévoles et le personnel
Au cours de cette rencontre, John a offrent aux victimes une aide
dû assumer la responsabilité d’avoir concrète et intensive - ils vont
causé cette souffrance et cette colère jusqu’à nettoyer les lieux du
comme il n’avait jamais eu à le faire crime. Les médiateurs rédigent
en salle d’audience. une déclaration de la victime

49 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
détaillée, puis réunissent tous les Services de médiation
intéressés, y compris le procureur entre la victime et le
du gouvernement. Ils procèdent
ensuite à la détermination de la
délinquant dans le cas de
peine, processus auquel crimes violents et non
participent la victime, le violents
délinquant et la collectivité. Langley (Colombie-
Britannique) et Moncton
Le comté de Genesee dispose au
(Nouveau-Brunswick)
total de 42 cellules de prison,
alors qu’un comté avoisinant qui
a adopté une approche plus Description du programme
classique du crime et du
Le programme décrit ici est le
châtiment a construit et vite
Programme de médiation entre la
rempli quelque 300 cellules de
victime et le délinquant
prison.
administré par la Fraser Region
Community Justice Initiatives
Les habitants du comté de
Association; il ressemble au
Genesee trouvent que leur
service de médiation entre la
collectivité n’a pas besoin de
victime et le délinquant dans le
300 cellules parce qu’on y vit en
cas de crimes graves avec et sans
plus grande sécurité que dans la
violence administrés par MOVE
collectivité avoisinante et ce, du
au Nouveau-Brunswick. En
fait que les membres de la
raison de la gravité des crimes en
collectivité participent au
question, ce programme ne
processus à pratiquement tous les
constitue pas une mesure de
niveaux. Le placement
déjudiciarisation, c.-à-d. qu’il ne
communautaire des délinquants
soustrait pas le délinquant à
est très évident. On respecte au
l’application du système de
plus haut point l’obligation de
justice pénale traditionnel ni à
rendre compte à la collectivité.
l’emprisonnement. Il vise plutôt
à répondre aux divers besoins
Personne-ressource :
Dennis Whitman
importants qui découlent d’une
Director infraction et dont le système
Community Services - Victims traditionnel ne s’occupe pas. (Voir
Assistance Programs
le cas exposé pour illustrer ces
County Building I
Batavia, N.Y. 14020 programmes dans la section
Tél. : (716) 344-2550 (ext. 226) intitulée Qu’entendons-nous par
Téléc. : (716) 344-2442 «vraie justice»?)

Le Programme de médiation
entre la victime et le délinquant
est un programme novateur conçu
pour répondre au besoin des
auteurs ou des victimes des

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 50
infractions les plus graves prévues Selon les victimes et les
dans le Code criminel du Canada délinquants qui participent à ce
de mener à bien le processus de programme, celui-ci répond à
guérison et de tourner la page. Le leurs besoins et à leurs
programme a donné de bons préoccupations de telle sorte
résultats dans le cas des victimes qu’une justice vraiment
et des auteurs de crimes aussi satisfaisante est rendue et qu’ils
graves que les viols en série, les peuvent tourner la page, et ce, au-
voies de fait graves, le vol à main delà de la mesure dans laquelle le
armée et (dans le cas des familles système de justice pénale parvient
des victimes) la négligence à atteindre ces objectifs. Lorsqu’ils
criminelle causant la mort, décrivent leur participation au
l’homicide involontaire coupable programme, les participants
et le meurtre. emploient constamment le mot
«guérison».
Le programme vise à aider les
intéressés en : La participation du délinquant au
Programme de médiation entre la
• répondant aux questions et victime et le délinquant est
aux inquiétudes exprimées importante parce que le
concernant la mise en délinquant est le seul à pouvoir
liberté éventuelle du répondre à bon nombre des
délinquant dans la questions que se pose la victime;
collectivité; seul le délinquant peut assumer la
• permettant aux participants responsabilité du crime qu’il a
de s’occuper des questions commis d’une manière propre à
et des préoccupations satisfaire la victime; le délinquant
concernant l’infraction et a besoin de voir que son crime a
ses conséquences; eu des répercussions sur des
• offrant aux parties un personnes, non seulement sur
processus qui peut leur «l’État», et que le tort causé
permet de mieux percevoir demeure; dans le cas où le
et comprendre la situation, délinquant doit être libéré dans la
de manière à apaiser leurs collectivité, il est d’importance
sentiments de crainte et capitale qu’il prenne conscience de
d’anxiété; la souffrance de la victime. De
• leur offrant les services nombreux délinquants expliquent
d’un personnel sensibilisé à qu’ils prennent conscience de la
ces questions et qui se souffrance de la personne
consacre à aider les victimisée surtout lorsque celle-ci
personnes touchées par la leur explique le tort qu’elle a subi.
criminalité à amorcer un
processus de guérison et à Les initiatives visant à faciliter le
obtenir réparation du tort contact entre les victimes et les
subi. délinquants dans le cas de crimes

51 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
graves et de crimes de violence Personnes-ressources :
sont une chose nouvelle et il reste Dave Gustafson
Fraser Region Community
un certain nombre d’importantes
Justice Initiatives Assoc.
questions auxquelles il faut 101 - 20678 Eastleigh Crescent
trouver des réponses et des Langley, British Columbia
problèmes qu’il faut régler. V3A 4C4
tél. : (604) 534-5515
Toutefois, ces initiatives téléc. : (604) 534-6989
appliquent les principes de justice
réparatrice à nos crimes les plus Wendy Keats
MOVE, Inc
graves et laissent envisager des
C.P. 457
mesures d’intervention plus utiles, Salisbury (Nouveau-Brunswick)
entraînant une plus grande E0A 3E0
participation de la collectivité et tél. : (506) 372-4522
ayant une plus grande incidence
sur les taux d’incarcération que ce
n’est le cas du système de justice
pénale actuellement.

2. Détermination de la peine
par le Cercle

Introduction Le recours au processus de


détermination de la peine par le
L’expression «détermination de Cercle ne vise pas nécessairement
la peine par le Cercle» est entrée à empêcher l’imposition d’une
dans notre langage juridique en peine d’emprisonnement;
1992 lorsque le juge Barry Stuart néanmoins, c’est là le résultat
du territoire du Yukon a rendu dans de nombreux cas, surtout
sa décision dans l’affaire lorsqu’il s’agit de crimes contre
Phillip Moses. Le juge Stuart a les biens et même de certaines
fait appel à une méthode infractions plus graves. La peine
autochtone traditionnelle de s’y d’emprisonnement est remplacée
prendre avec les membres de la par une peine sévère non
collectivité qui violent la loi. privative de liberté à purger dans
La détermination de la peine par la collectivité.
le Cercle, option à laquelle le
système de justice pénale Il y a différents types de cercles
occidental commence seulement de détermination de la peine
à avoir recours, est dans différentes régions du
habituellement un processus Canada, y compris des comités
consultatif communautaire et consultatifs de détermination de
présentenciel axé la peine, des groupes d’Aînés ou
principalement sur la réparation. des comités communautaires de

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 52
détermination de la peine et des présentent leurs observations
comités de médiation liminaires. De nombreux cercles
communautaire. Par exemple, à la durent entre trois et quatre heures,
Maison Cumberland car tous les participants ont
(Saskatchewan), il y a des cercles l’occasion de prendre la parole, le
de détermination de la peine but visé étant d’en arriver à un
préalablement à l’inculpation; la consensus ou à un règlement.
GRC leur envoie environ six cas
par mois sans avoir à faire appel Jusqu’ici, on a eu recours aux
aux tribunaux. Les cercles surtout dans les
recommandations de ces cercles collectivités autochtones et dans le
sont ensuite communiquées au cas d’adultes plutôt que de jeunes
tribunal. contrevenants. Comme le
montrent les cas exposés dans
Dans les cercles de détermination cette section, ces cercles peuvent
de la peine après le procès, une s’occuper même de cas
fois qu’il y a eu un verdict ou un d’infractions criminelles graves
aveu de culpabilité, les membres comme l’homicide involontaire
de la collectivité s’assoient en coupable ou le vol à main armée
cercle avec le juge, le procureur, dans lesquels une peine
l’avocat de la défense, la police et d’emprisonnement peut être
d’autres fournisseurs de services imposée; toutefois, le cercle offre à
pour discuter des options qui la collectivité l’occasion de se
s’offrent en matière de pencher sur les problèmes sociaux
détermination de la peine et des et autres formes de préjudice liés
plans pour la réinsertion sociale au crime commis. En outre, on
du délinquant. Les membres de la adapte les cercles et on les met à
collectivité comprennent l’essai dans des milieux urbains
généralement l’accusé, la victime, non autochtones.
leurs familles, des Aînés et
d’autres citoyens intéressés. Il n’y Les cercles de détermination de la
a pas de règles en ce qui concerne peine visent à offrir restitution à la
la structure ou le mode de victime et réparation à la
fonctionnement du cercle; le collectivité, à amener le délinquant
recours à un cercle et à reconnaître ses torts, à amener si
l’organisation ainsi que le mode possible la réconciliation de la
de fonctionnement de celui-ci victime, du délinquant et des
varient d’une communauté à membres de la collectivité, à
l’autre et d’un juge à l’autre. assurer la réinsertion du
Généralement, tous sont les délinquant dans la collectivité et à
bienvenus, on offre une prière, les prévenir la récidive.
participants se présentent à tour
de rôle, on expose les faits de Différents juges ont dressé des
l’espèce et les avocats de la listes des critères à prendre en
Couronne et de la défense compte pour déterminer si un cas

53 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
doit être soumis à un cercle de Si les conditions établies pour le
détermination de la peine. On recours au cercle ne sont pas
retrouve sur la plupart des listes respectées, la peine peut être
les critères suivants : renvoyée au juge pour qu’il la
modifie. «Manifestement, nous
• l’initiative d’avoir recours à n’avons rien à perdre
des solutions de rechange à Points forts en l’essayant. Le
l’incarcération doit être prise système n’a pas
par la collectivité, bien que De l’avis du juge Bria Hucaluk de jusqu’ici donné les
dans certains cas le juge résultats escomptés. Il
la Saskatchewan, le système de
décide d’avoir recours à un n’a pas résolu les
justice traditionnel n’a pas réussi
cercle ou bien on y a recours à problèmes et réinséré
à rendre une «vraie justice»
la demande du délinquant ou les délinquants dans la
puisque les taux de récidive sont collectivité.
de l’avocat; élevés et qu’il ne prévoit pas de Normalement, dans le
• le délinquant doit accepter de moyens pour s’attaquer aux cas d’une personne
participer au cercle, causes profondes de la accusée de voies de fait,
reconnaître avoir commis criminalité. la barrière entre la
l’infraction en question et victime et l’accusé ne
avoir le désir de se réadapter; La détermination de la peine par peut être éliminée dans
• la collectivité doit être prête à le Cercle constitue un moyen le cadre du processus
fournir l’aide et le soutien d’obtenir l’engagement de la judiciaire traditionnel
voulus au délinquant pendant collectivité à venir en aide au parce que ce dernier ne
et après la peine; délinquant et à la victime; par comporte aucun
• des Aînés ou des dirigeants exemple, plus d’un agent de mécanisme auquel on
non politiques de la probation vérifie que le peut avoir recours à
collectivité doivent être cette fin.
délinquant se conforme au plan
disposés à participer au cercle; L’intervention de la
établi par le cercle. Des
• la victime doit accepter d’y collectivité, toutefois,
ressources communautaires
participer sans y être peut avoir un effet très
inexploitées viennent aider les positif en permettant
contrainte (dans les cas spécialistes du système de justice aux intéressés de
d’agression physique ou pénale. Souvent, les collectivités pardonner et de se
sexuelle, y compris dans le cas et les familles se sentent plus réconcilier de sorte que
des conjointes battues, il faut fortes après avoir parlé de leurs tous peuvent ensuite
fournir un service de problèmes et tâché de les reprendre le cours
counseling et la victime résoudre. Les cercles contribuent normal de leur vie.
devrait être accompagnée ainsi à la santé, au processus de Dans les petites
d’une équipe qui lui assure le guérison et à l’harmonie dans la collectivités, il s’agit là
soutien voulu); collectivité. d’un résultat
• le juge saisi d’une affaire dans d’importance capitale.»
laquelle on a recours à des Les délinquants qui participent à
mesures de rechange à un cercle sont confrontés aux Le juge Bria Hucaluk
l’incarcération ne peut déroger Saskatchewan
conséquences de leurs crimes et
aux principes judiciaires se rendent davantage compte des
fondamentaux. souffrances qu’ils ont infligées et
de la réprobation de leurs

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 54
familles, de leurs amis et de la notamment assurer à la victime
collectivité. Cal Albright de la sécurité et égalité; il faut aussi
Federation of Saskatchewan déterminer quels cas peuvent être
Indians parle à cet égard de la soumis à ce processus et à quelle
«bonne souffrance» infligée par collectivité il appartient de
les cercles de guérison par s’occuper de l’infraction en
opposition à la «mauvaise question.
souffrance» infligée par les
tribunaux qui stigmatisent Il y a eu quelques cas d’agression
l’accusé, ce qui a pour seul effet sexuelle soumis à des cercles dans
de renforcer les sentiments de petites collectivités qui n’ont
destructeurs. pas tenu compte de l’influence
dominante des hommes dans la
D’aucuns croient que certains collectivité ou qui n’ont pas
délinquants demanderont de assuré le soutien voulu à la
comparaître devant un cercle de victime.
détermination de la peine croyant
qu’il leur permettra de s’en tirer à On craint que les cercles
bon compte. Le processus devrait composés majoritairement de
cependant révéler leur manque spécialistes du système de justice
de sincérité. pénale ou d’autres spécialistes ne
permettent pas la participation
Certains participants disent qu’ils communautaire qui est le
apprécient particulièrement principal avantage qu’offrent le
pouvoir exprimer librement des processus. Il faut constamment
sentiments douloureux dans un veiller à ce que les cercles soient
milieu officieux où le langage effectivement composés de
juridique est moins employé et membres de la collectivité et à
les gens peuvent s’appeler par réduire à la fois le nombre de
leurs prénoms. Comme un juge spécialistes et l’ampleur de leur
l’a signalé, «souvent, nous rôle.
voyons le délinquant sous deux
jours différents. Nous voyons Les plans de détermination de la
l’auteur de l’infraction mais aussi peine peuvent ne pas tenir
la personne qui ne se résume pas compte d’un déséquilibre des
simplement à l’infraction forces et se ressentir de
commise. Le cercle tire parti des l’infrastructure faible de la
points forts du délinquant et de la collectivité ou d’une pénurie de
victime.» ressources.

Mises en garde En outre, les pionniers des cercles


de détermination de la peine ont
Le processus de détermination de recommandé aux autres
la peine par le Cercle est appelé à collectivités de ne pas adopter
relever plusieurs défis, tels quels les modèles employés

55 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
par les collectivités autochtones et de détermination de la peine avec
dans le nord, mais d’adapter cette ceux obtenus par les tribunaux et
approche de la justice à leur non avec la perfection. Le
propre réalité. D’autre part, la recours aux cercles de
philosophie et la spiritualité des détermination de la peine exigera
cercles sont essentielles à leur qu’on procède à des consultations
succès. auprès de la collectivité, qu’on
assure la formation voulue, qu’on
L’évolution du recours au obtienne la participation de tous
processus de détermination de la les membres de la collectivité et
peine par le Cercle a été liée à des qu’on évalue minutieusement le
questions concernant l’autonomie processus et les résultats obtenus.
gouvernementale des Pour l’instant, les résultats
autochtones. En outre, elle positifs obtenus sur le plan de la
soulève des questions concernant guérison et de la prise en charge
l’indépendance de la de soi semblent plus importants
magistrature. Ces questions que les problèmes liés au recours
doivent être examinées avec soin accru aux cercles de
lors de toute adaptation des détermination de la peine.
cercles à un autre milieu.

Conclusion

Il serait prématuré de tirer des


conclusions fermes au sujet des
incidences du recours aux cercles
de détermination de la peine.
Certes, au cours de l’évolution de
ce mécanisme, il se commettra
des erreurs et il en ressortira une
mauvaise jurisprudence, comme
parfois dans le cas des tribunaux.
En outre, l’absence d’un ensemble
concret de règles et de lignes
directrices régissant le recours à
ces cercles engendrera des
sentiments de frustration chez
certains avocats. Il n’y a pas de
solution miracle à la criminalité
mais, étant donné les nombreux
avantages signalés par les
collectivités, il est peut-être bon
de rappeler ce qu’à dit le juge
Barry Stuart. Il a conseillé de
comparer les résultats des cercles

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 56
Cercles de détermination une certaine crédibilité à la Maison
de la peine Cumberland et qu’on a appris à faire
confiance au processus, cependant,
Maison Cumberland les intéressés ont commencé à parler
(Saskatchewan) plus librement. «Ils étaient moins
intimidés. Nous pouvions
Le premier cas de recours à un communiquer dans notre propre
cercle de détermination de la langue et comme tous connaissaient
peine est exposé à la première les antécédents familiaux du
section du présent répertoire. Il délinquant et de la victime, on
s’agit du projet de justice pouvait placer les faits dans leur
communautaire de Kwanlin contexte. Parfois, aucune peine
Dun. Ici, le coordonnateur n’était imposée au délinquant parce
communautaire de la Maison que le cercle avait abouti à une
Cumberland, Don McKay, décrit réconciliation et à un engagement de
comment le processus la part du délinquant de dédommager
d’administration de la justice la victime. En outre, comme des
par les cercles de détermination conseillers en alcoolisme et en
de la peine a évolué dans sa toxicomanie ainsi que d’autres
collectivité au fil des ans. conseillers participent au cercle, si le
délinquant doit suivre un traitement,
«... les premiers cercles de tout le monde le sait. Dans le cas de
détermination de la peine ont jeunes contrevenants, les parents
démarré lentement parce que tous les participent toujours au cercle de
intéressés étaient encore intimidés détermination de la peine.»
par le processus. C’était comme une
comparution devant le tribunal. Il y Personne-ressource :
avait un juge, des avocats, des Don McKay
policiers en uniforme. On a démarré Cumberland House Cree
vraiment lentement. Tous étaient Nations
Box 220
tellement habitués au système Cumberland House,
judiciaire en vigueur à l’époque - le Saskatchewan
juge et les avocats arrivaient par Tél. : (306) 888-2226
Téléc. : (306) 888-2084
avion, tenaient une audience et
repartaient, une ou deux fois par
mois. Ni la victime ni le délinquant
ne voulaient dire franchement ce
qu’ils pensaient parce qu’ils étaient
intimidés. Le délinquant, voulant
que l’audience prenne fin au plus tôt,
plaidait coupable tout de suite. Ce
n’est qu’après le procès et une fois
que le juge avait prononcé la peine
qu’il commençaient à poser des
questions. Lorsque les cercles de
détermination de la peine ont acquis

57 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Cercles urbains - Vol à mais il a ensuite changé son
main armée à Saskatoon plaidoyer et, parce qu’il est Métis, il
a demandé que son cas soit soumis à
un cercle de détermination de la
Il s’agit dans le cas ci-dessous de
peine. Le juge J.D. Milliken a
l’expérience d’une victime qui a
accédé à sa demande. On a
été étranglée au cours d’un vol à
entrepris ce processus novateur le
main armée. Le suspect avait
15 avril. À l’issue d’une journée
des chances de se voir infliger
complète d’examen de la question
une peine d’emprisonnement de
sous tous les angles, le juge Milliken
neuf à douze ans. Ce cercle de
a déclaré qu’il donnerait suite aux
détermination de la peine
recommandations du Cercle s’il les
organisé dans une ville, montre
jugeait raisonnables.
les attentes parfois conflictuelles
qu’on a à l’égard de la
....La détermination de la peine
détermination de la peine.
n’est pas une fin en soi mais un
moyen de parvenir à une fin, qui
Un cas est de rétablir l’équilibre du
délinquant et l’harmonie dans la
En avril dernier, Dee-Anna Bryson a collectivité; par conséquent, toutes
participé à Saskatoon à un processus les personnes touchées par l’affaire
judiciaire expérimental et unique en ou qui s’en occupent de quelle que
son genre - le Cercle de façon que ce soit participent au
détermination de la peine. C’était la Cercle. Comme Dee-Anna était la
première fois qu’on avait recours à ce victime de l’infraction commise -
processus en milieu urbain au Ivan Morin l’avait étranglée - sa
Canada. mère et elles ont accepté de participer
au Cercle. Le juge Milliken a fait
Il y a près d’un an, Ivan Morin et fonction de médiateur...
Brian Janzen ont volé 131 $ dans
une station-service et ont agressé les Les participants au processus
deux préposés qui étaient de service. examinent l’accusé et déterminent
Parce que Dee-Anna a composé le s’il est susceptible de se réadapter.
911 pendant le vol, la police a vite On évalue aussi le contexte
arrêté les délinquants, contre lesquels communautaire et familial du
elle a déposé une accusation de «vol délinquant pour déterminer si les
qualifié accompagné de violence». personnes dans ces milieux sont
Janzen a plaidé coupable et a reçu disposées à aider à la réadaptation du
une peine de trois ans. Ivan Morin délinquant. Enfin, le groupe
avait passé 18 de ses 34 ans en détermine par voie de consensus la
prison, où il a notamment purgé une peine à imposer.
peine de neuf ans pour vol à main
armée. La Couronne voulait qu’on Le juge Milliken a tout d’abord a
lui impose une peine se situant entre demandé à tous d’être francs et
neuf et douze ans. Morin sincères et de faire preuve de respect
initialement a plaidé non coupable, les uns à l’égard des autres tout au

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 58
long du processus. Le Cercle lui- colère mais sympathisait plutôt avec
même est un symbole d’harmonie et la vie difficile des Métis. En ce qui
de l’égalité de tous les participants et concerne Ivan, Dee-Anna a déclaré
tous visent un même but. Pour qu’il était intelligent, qu’il avait
commencer, le procureur a exposé les travaillé comme journaliste. Elle a
faits de l’espèce. Ensuite, l’avocat de dit aussi qu’il semblait éprouver du
la défense a raconté la vie d’Ivan, remords. Il semblait avoir un
montrant que celui-ci avait été lui- problème avec l’autorité et craindre
même victimisé. Ensuite, Ivan a pris de comparaître devant un tribunal
la parole. Il a présenté ses excuses à composé de Blancs. Il était évident
Dee-Anna, il a parlé de sa vie et de qu’il avait un problème d’alcool
son désir de s’amender. Les quatre grave; pendant les périodes de sa vie
représentants de la communauté où il assistait aux réunions des AA
métisse et l’Ancien métis ont décrit et ne buvait pas, il avait connu le
les souffrances des enfants et des succès, il avait été productif et
adultes métis dans notre société heureux. Selon Dee-Anna, il évitait
raciste. Ils ont déclaré qu’ils étaient de prendre des mesures et de
disposés à aider Ivan à s’amender. À reconnaître la réalité de son crime.
leur avis, l’incarcération ne l’aiderait Pour ce qui est de sa réadaptation,
pas à changer sa vie. L’Aîné métis selon Dee-Anna c’était merveilleux
était disposé à lui offrir un emploi que la collectivité soit disposée à lui
parce qu’il avait connu Ivan alors fournir le soutien voulu, mais lui-
que celui-ci traversait des périodes même devait prendre l’engagement
difficiles et qu’il était convaincu de s’amender. À un certain moment,
qu’Ivan était un bon garçon qui, elle a été en proie à des sentiments de
comme d’autres, avait eu beaucoup frustration parce que les
de problèmes liés à l’alcool. Bon représentants métis n’offraient
nombre des participants au Cercle, aucune solution de rechange à
particulièrement les fonctionnaires l’incarcération. En outre, elle a
du système de justice pénale, reconnu le risque pour la collectivité
trouvaient qu’Ivan devrait purger métisse. La réputation de ce
une certaine peine processus et le recours aux cercles de
d’emprisonnement. Le fonctionnaire détermination de la peine à l’avenir
métis a demandé à Ivan ce que ce dépendront du succès de cette
dernier entendait faire pour première expérience. Dee-Anna elle-
s’amender. Le propriétaire de la même n’a pas participé au travail de
station-service était d’avis qu’Ivan détermination de la peine comme tel.
avait commis un méfait et qu’il Sa mère a pu dire à Ivan Morin à
devait être incarcéré. quel point elle était en colère contre
lui à cause du tort qu’il avait causé à
Pour Dee-Anna, la journée a été sa fille. D’après Dee-Anna, le
difficile et fatiguante. Les nombreux processus était probablement
sentiments et points de vue exposés thérapeutique pour sa mère.
ont exigé d’elle une attention de tous
les instants qui l’a laissée épuisée. Pour sa part, Dee-Anna a apprécié le
Elle ne ressentait aucun sentiment de caractère non limitatif du processus.

59 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Les participants pouvaient parler liberté anticipée, il serait mis sous
sans contrainte et donner libre cours surveillance électronique ou en
à leurs émotions. Certains ont détention à domicile pour le reste
interpellé le délinquant et celui-ci a de la période à purger. En outre,
été mis en présence de ses victimes et il serait tenu de participer à un
a dû faire face aux conséquences de programme de traitement de la
ses actes. Le processus a donné les toxicomanie et de l’alcoolisme
résultats escomptés et, selon Dee- après sa sortie de prison, il serait
Anna, il serait souhaitable d’y avoir en probation pendant un an et il
recours à nouveau dans des devrait accomplir 140 heures de
circonstances analogues; cependant, service communautaire, y
selon elle, certains crimes seraient compris 100 heures au Centre
trop graves pour qu’on puisse communautaire métis et
procéder de cette façon. 40 heures de travail pour le
propriétaire de la station-service.
Le processus a été long et intensif et Le 15 juin, le juge Milliken a
tous ont dû écouter attentivement; accepté toutes les
cependant, le groupe a fini par recommandations formulées, à
parvenir à un consensus. L’élément l’exception de celle voulant qu’il
essentiellement prudent consistant à prolonge la période de probation
tâcher d’assurer la réadaptation du de Morin jusqu’à 18 mois.
délinquant était d’importance
capitale; ce but pratique réduit le La Couronne a porté la décision
risque de récidive. Lorsqu’on lui a en appel et la Cour d’appel de la
demandé si elle avait confiance en la Saskatchewan a ajouté 15 mois à
réadaptation d’Ivan Morin, Dee- la peine infligée à Morin. La
Anna a déclaré qu’elle ne pouvait pas défense a maintenant interjeté
«savoir ce qu’il pensait en son fort appel de cette décision auprès la
intérieur». Ne sachant pas s’il était Cour suprême du Canada.
vraiment motivé par le désir de
s’amender, elle a dit qu’elle ne L’avocat de la défense
pouvait en être sûre, mais qu’elle Kearney Healy a trouvé le cercle
espérait vivement qu’il réussirait à «infiniment supérieur» à tout ce
changer sa vie. qu’il avait connu en 15 ans de
(extrait du Bulletin STM, St. Thomas travail dans le domaine juridique.
More College & Newman Alumniae)
Au début, les opinions étaient
«polarisées», certains participants
La fin de l’histoire : la au cercle voulant que Morin aille
peine imposée et l’appel en prison et d’autres, ne le
voulant pas. «Cependant, le
Le cercle de détermination de la processus a fini par donner de
peine a recommandé que Morin bons résultats, a-t-il précisé. En
purge une peine définitive, il s’agissait que le
d’emprisonnement de 18 mois; délinquant paye pour le crime
s’il bénéficiait d’une mise en qu’il avait commis, notion

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 60
traditionnel énoncée par la police. Kearney Healy
Saskatchewan Legal Aid
De nombreux participants
Commission
communautaires ne voulaient pas 10th Floor - Sturdy Stone Centre
qu’on impose une peine 122- 3rd Avenue North
d’emprisonnement.» Saskatoon, Saskatchewan
S7K 2H6
Tél. : (306) 933-7820
M. Healey a fait remarquer que, Téléc. : (306) 933-7827
pour qu’un cercle donne de bons
résultats, il faut d’abord
déterminer le milieu où se situent
le délinquant et le crime. Dans le
cas de Morin, ce pourrait être sa
communauté métisse, le lieu
géographique où il a vécu, les
personnes ayant un pouvoir de
«Il me faut trois persuasion morale sur lui ou
minutes pour imposer ayant de l’affection pour lui, ou
une peine, de sorte que encore les personnes touchées par
si je n’étais pas le crime.
convaincu de l’utilité
des cercles de Un autre cercle urbain
détermination de la
peine pour la M. Healey a participé à un autre
collectivité et pour le cercle urbain chargé du cas d’un
processus de justice, je homme qui n’avait pas
ne consacrerais pas
d’antécédents criminels et qui
quatre heures chaque
était accusé de vol à main armée.
fois à y participer.»
La Couronne a demandé qu’on
Le juge Bria Hucaluk impose une peine
Saskatchewan d’emprisonnement de trois ans.
Le cercle a convenu d’imposer
une condamnation de trois ans
avec sursis assortie d’une période
de surveillance électronique de
six mois et d’autres conditions.
Dès le début, le juge chargé de
cette affaire a voulu qu’on lui
garantisse que le cercle
réserverait à la victime le
traitement voulu, que le
délinquant serait tenu
responsable de son crime, qu’il
ressentait du remords et qu’il
avait le soutien de la collectivité.
Personne-ressource :

61 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
La participation au Cercle de détermination de la peine - une expérience
menant à un changement d’attitude
par Kenneth Nosklye

La semaine dernière, j’ai fait l’une voiture. L’homme a noté le numéro nombreuses critiques. J’avoue avoir
des expériences les plus de sa plaque d’immatriculation. aussi eu des doutes. Toutefois, cette
extraordinaires de ma vie. On m’a Bientôt, la police est venue frapper à expérience m’a redonné confiance. Il
demandé de déterminer la peine à sa porte. Il a avoué immédiatement n’y a pas de meilleure forme de
imposer à un homme qui avait et a voulu plaider coupable à tous justice que celle rendue par le
commis un vol à main armée. les chefs d’accusation. Son avocat a public.
suggéré qu’on ait recours à un
Le cercle de détermination de la cercle de détermination de la peine Après tout, il ne s’agissait dans cette
peine était composé de plus de et la Couronne a accepté.
affaire d’un homme comparaissant
30 personnes. Il regroupait des
devant un juge, défendu par un
policiers, des membres de la famille, Comme l’a signalé la Couronne au
avocat et poursuivi par un
des professeurs d’université, des cercle de détermination de la peine,
procureur. L’intéressé a dû
Aînés autochtones et même un «si jamais il y a eu lieu de recourir à
comparaître devant un grand
capitaine des Forces armées. Bien un cercle de détermination de la
nombre de personnes, y compris sa
sûr, il y avait aussi l’accusé, la peine, c’est bien dans ce cas». La
victime, le juge, l’avocat, les Couronne a exposé son point de victime. On n’a pas employé toute
représentants des services de vue, réclamant une peine sorte de jargon juridique. Il y avait
probation et le procureur de la d’emprisonnement. La victime a seulement un homme et sa victime.
Couronne. exposé le sien et donné son appui Même les agents qui ont arrêté
au cercle. La famille de l’intéressé a l’intéressé ne voulaient pas qu’on
Il s’agissait d’un homme autochtone pris sa défense avec ferveur, nous l’envoie en prison - fait qui ne serait
âgée de 27 ans, marié et père d’un demandant de ne pas l’envoyer en pas ressorti en salle d’audience
enfant. Il n’avait jamais eu de prison. L’avocat a présenté ses ordinaire.
démêlés avec la justice. Il était arguments. L’accusé, à son tour, a
diplômé de l’Université de la pris la parole de même que chacun Un tribunal normal aurait appris
Saskatchewan. C’était un homme des autres participants au cercle. quel avait le passé de cet homme
qui avait fait des milliers d’heures d’après un rapport présentenciel
de service communautaire à titre de Ensuite est venu le moment décisif. généralement entaché de préjugés.
bénévole. Il venait d’une famille Le juge a soupesé tous les faits, pris Dans ce cas, nous l’avons appris
stable et unie. Alors, qu’est-ce qui en considération tous les exposés et directement de ses parents, de sa
s’était passé? prononcé la sentence. L’intéressé a famille et de nombreuses autres
reçu une condamnation de trois ans
personnes.
Un an plus tôt, cet homme était avec sursis assortie de la condition
devenu un fanatique des terminaux de porter un dispositif de
Je crois maintenant que les cercles
de pari vidéo (TPV). Il a dépensé surveillance électronique pendant
de détermination de la peine
tout l’argent de sa famille, même six mois. La peine était assortie
représentent une évolution par
leur argent de Noël. Désespéré, il a d’un certain nombre d’autres
conditions : participer à un rapport à un système qui ne visait
décidé de commettre un vol dans
une entreprise. Armé d’un couteau, programme à l’intention de ceux qui qu’à se protéger lui-même sans tenir
le visage caché, il est entré dans une ont la passion du jeu, travailler avec compte de l’aspect humain. Les
station-service de Saskatoon. Il a des Aînés autochtones et fournir cercles de détermination de la peine
réclamé de l’argent; le préposé lui a 400 heures de service adoptent une approche humaine.
remis 68 $. Il a voulu s’enfuir sans communautaire. Cette approche a pour effet
être vu, mais un homme l’a vu alors d’humaniser un système qui en a
qu’il sortait en courant de la station- Les cercles de détermination de la bien besoin.
service et se dirigeait vers sa peine ont récemment fait l’objet de (Prince Albert Daily Herald)

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 62
Cas d’homicide La collectivité s’est préparée à
involontaire à participer à ce cercle d’après un
document photocopié rédigé par le
Fort St. John (Colombie- juge Barry Stuart du Territoire du
«On ne peut décrire ce cercle
que partiellement; il faut y Britannique) Yukon, qui lui a été remis par le
participer pour comprendre Programme de réconciliation de la
son importance sur le plan Le cas ci-dessous montre les
spirituel et son effet... la victime et du délinquant de Langley
famille et les amis de la infractions graves qui sont (C.-B.). Le tribunal a demandé à
personne décédée ont eu renvoyées aux cercles de Martin Goerzin, un conseiller-
l’occasion d’exprimer (au détermination de la peine; même
délinquant) leurs sentiments
clinicien qui avait procuré le
de colère, leur peine et leur
dans les cas où une peine document du juge Stuart,
douleur. Un délinquant d’emprisonnement est infligée, d’organiser le cercle. Goerzin
peut-il demander davantage un processus de guérison est raconte ce qui s’est passé :
que d’avoir l’occasion de amorcé.
formuler des observations au
sujet d’une peine proposée «Le tribunal a convenu qu’il serait
qui doit lui être infligée et y Le 8 février 1994, après avoir appris utile d’organiser à l’intention des
consentir ou, quelques que son meilleur ami était mort dans
minutes avant d’être conduit participants des séances
en prison, de voir le juge
un accident de la route, d’information et des ateliers
l’encourager à parler aux Saviour Stoney s’est mis à boire. préparatoires. Malheureusement, on
personnes qu’il a blessées de Beaucoup plus tard, il a pris un fusil, n’a pas songé au financement du
nombreux mois auparavant
tiré un coup et tué sa belle-soeur, processus de recours au cercle de
alors qu’il était en état
d’ébriété et tout à fait égaré. Molly Apassin. (Molly était la soeur détermination de la peine.
Si dans nos autres tribunaux de la femme de Stoney, laquelle était
les victimes de voies de fait morte dans un accident de la route
ou de conduite avec facultés Il y a eu plusieurs rencontres avec le
affaiblies avaient cette 20 ans plus tôt.) juge Stuart. On a prévu d’organiser
occasion de participer à un un atelier et des séances
cercle et se trouver en Le 8 juin, le juge de la Cour suprême
présence de l’accusé, elles
d’information en août et de procéder
pourraient peut-être se
de la Colombie-Britannique à des consultations préliminaires sur
remettre plus facilement. La P.J. Millward a convenu avec les le programme auprès de membres de
collectivité toute entière a avocats de la Couronne et de la la famille de la victime, du chef de la
participé à ce processus.... à défense de permettre à l’accusé de
la fin de la journée, les bande indienne, du coordonnateur
membres de la collectivité et plaider coupable à un chef des rôles du tribunal, de l’avocat de
les familles brouillées se sont d’accusation moins grave, celui la Couronne, de l’avocat de la défense
assises pour manger d’homicide involontaire coupable, et
ensemble. Puissent les et des représentants des services de
tribunaux trouver le courage
il a renvoyé le jury. probation. L’atelier a été animé par
d’instituer dans nos des travailleurs communautaires de
collectivités ce mécanisme La famille de la victime et celle de la Première nation Kwanlin Dun et
d’importance capitale pour
l’accusé étaient toutes deux bien de la bande Carcross au Yukon. On
la réconciliation et la
réadaptation des victimes et disposées au recours à un cercle de a invité des représentants de toutes
des délinquants.» détermination de la peine. Le juge les Premières nations assujettis au
Millward a annoncé que la peine traité no 8, des travailleurs auprès du
Martin Goerzen
Conseiller-clinicien, Fort serait prononcée le 16 août, après les tribunal, des membres de la GRC,
St. John audiences du cercle de détermination des représentants des bureaux
de la peine qui auraient lieu le 14 et d’avocat et des membres du grand
le 15 août, au besoin. public.

63 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Saviour s’inquiétait de ce qu’il dirait C’était une occasion de les préparer à
dans le cercle aux personnes qu’il participer au cercle le lendemain.
avait offensées. Nous lui avons
recommandé de dire ce qu’il avait à Tard dans l’après-midi et au cours de
dire clairement et sincèrement; on ne la soirée du dimanche, les familles de
saurait lui en demander plus. Il a dit l’accusé et de la victime se sont
qu’il regrettait énormément les actes rencontrées dans l’ancienne maison de
qu’il avait commis. la victime sur la réserve de la bande
indienne de Doig River. Le but de la
De nombreux membres de la bande rencontre était de manger ensemble et
indienne de Doig River pleuraient la de donner aux personnes qui devaient
mort de Molly Apassin qui leur avait participer au cercle le lendemain le
enseigné les pratiques autochtones et temps d’élaborer des lignes directrices
qui avait été leur chef spirituel. sur le déroulement du processus. On
a mis un certain accent sur la
Les participants se sont tous donnés préparation des participants à
la main et Harold a prié le Créateur rencontrer le délinquant en personne
de les éclairer... On a fait passer une et à exprimer leurs idées sur le type de
plume d’une personne à l’autre dans peine qui devrait lui être imposée.
le sens des aiguilles d’une montre;
tous étaient alors prêts à se présenter Lundi, les organisateurs ont expliqué
et à expliquer brièvement la raison de aux représentants du tribunal, y
leur présence. Passer une plume compris au juge, ce à quoi ils
d’une personne à l’autre est une pouvaient s’attendre et quel serait
coutume autochtone qui signifie que leur rôle. On a discuté des
chaque personne est respectée et arrangements matériels, de la
accueillie par tous parce que ce que disposition des sièges, des personnes
chacune a à dire est important pour la qui seraient autorisées à entrer ou à
personne elle-même et pour les autres. sortir et de la possibilité de prononcer
Le cercle était un endroit sûr où nous la sentence si on parvenait à un
pouvions exprimer librement nos consensus.
sentiments puisque nous ne devions
pas parler à l’extérieur de ce que nous Quarante-six personnes ont participé
avions entendu dans le cercle. Les au cercle qui a duré six heures. Le
30 personnes qui ont participé au juge Millward a reconnu le risque
cercle ont, selon le cas, exprimé leur qu’il avait pris en ayant recours à un
tristesse ainsi que des sentiments de cercle de détermination de la peine.
peine, de culpabilité, de frustration, de «J’étais inquiet parce qu’il s’agissait
colère et de vengeance et qu’elles pour moi d’un nouveau processus. Il
réprimaient depuis longtemps et elles m’est venu à l’esprit que si les
ont déclaré qu’elles pardonnaient. participants penchaient vers une
peine contraire à celle qui me semblait
Dimanche matin, les chefs de la bande juste et au type de peines qui ont été
Kwanlin Dun et Ben Cardinal ont recommandées aux tribunaux au
rencontré le délinquant, cours des dernières années, je serais
Saviour Stoney, et le fils de celui-ci. pris dans un dilemme. Cela ne s’est

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 64
pas produit. J’ai été très soulagé.» Le souffrance qu’elles avaient vécue
juge avait même apporté avec lui une pendant les dix-huit mois écoulés.
enveloppe contenant des exemples de On leur avait enlevé un énorme
peines infligées dans des cas fardeau. La guérison et la
similaires. Sans ouvrir l’enveloppe, il réconciliation vécues au cours des
a invité les participants lors du cinq derniers jours ont été une
troisième tour de table à donner leur véritable expérience spirituelle.
«Nous voulions
avis sur la peine à imposer. Puis, le
procéder selon nos
propres usages. Elle juge a ouvert l’enveloppe et déclaré Personne-ressource :
était la seule à faire ce que les peines proposées étaient Martin Goerzen
Clinical Counsellor
qu’elle faisait - elle était semblables à celles infligées par les
Room 108, Execuplace
tout pour nous, notre juges dans d’autres affaires. 10142 - 101 Avenue
enseignante, notre Fort St. John, B.C.
conteuse. Elle était au Le cercle est parvenu à un consensus V1J 2B3
Tél. : (604) 787-9622
centre même de toute la et le délinquant Stoney a reçu une
famille. Nous avons peine d’emprisonnement de deux ans
De nombreuses autres collectivités
toujours procédé de suivie d’une période de probation de
autochtones, principalement dans
l’autre façon selon trois ans pendant laquelle il était tenu
laquelle ils n’ont jamais l’Ouest du Canada et dans les
de prendre des mesures pour régler ses
à faire face à leurs territoires, ont soit eu recours aux
problèmes de colère et d’alcoolisme. Il
victimes ou à la cercles de détermination de la
devait vivre hors de la réserve
réalité. De cette façon, peine à titre d’essai ou les ont
pendant cinq ans. La collectivité
ce sont eux qui parlent maintenant intégrés à leur
avait exprimé le désir que Stoney soit
et non leur avocat.» système de justice
placé dans un endroit où il pourrait
communautaire. Dans le cas de
être productif au lieu d’être
Lillian Apsassin Kwanlin Dun mentionné au
La fille de Molly constamment parmi eux.
chapitre précédent, diverses
mesures avaient été prises qui, à
«Ce processus a On a permis au délinquant de passer
notre avis, permettaient de rendre
beaucoup contribué à la quelques moments avec sa famille.
une vraie justice. Certaines des
guérison de notre Lorsque la plupart des participants
collectivités non autochtones
famille. Il nous a aidé sont partis, un certain nombre de
songeraient à adapter les cercles
à communiquer les uns membres de la famille du délinquant
de détermination de la peine à
avec les autres, à se sont rassemblés autour de lui pour
leurs propres collectivités.
réconcilier nos familles un dernier adieu. On ne saurait
qui seront maintenant trouver les mots pour décrire les
plus fortes, du moins expressions de souffrance, les mots de
faut-il l’espérer.» pardon, les poignées de main, les
larmes et les étreintes, ni la façon dont
Linda Sark le délinquant, en retour, a demandé
La fille de Stoney
qu’on lui pardonne d’avoir tiré sur la
victime alors qu’il était en état
d’ébriété, déprimé et en colère. En
partant ensemble pour aller souper,
les familles ont déclaré qu’elles se
sentaient en paix et qu’elles étaient
soulagées d’une grande partie de la

65 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
3. Conférences familiales

Introduction cela se produit rarement.


L’incidence des conférences
Au cours des dernières années, la familiales sur les taux
conférence familiale a évolué par d’incarcération, relativement
rapport à ses débuts en Nouvelle- faible à l’heure actuelle, pourrait
Zélande (il s’agissait d’une s’accroître si des infractions de
initiative maorie); il s’agit plus en plus graves sont soumises
maintenant d’un processus à ce processus relativement
crédible de justice réparatrice nouveau. De façon générale, les
auquel font appel les collectivités spécialistes du système de justice
qui se trouvent aux prises avec la pénale et le public préfèrent de
criminalité. Ce processus, auquel beaucoup ce mécanisme à la
on a principalement recours procédure judiciaire.
jusqu’ici dans le cas de jeunes,
réunit dans un cercle la victime, Selon David Moore, éducateur
le délinquant et le plus grand australien qui a lancé ce
nombre de membres de leurs mécanisme dans son pays, les
familles et de leurs membres de conférences familiales sont
leur réseau de soutien, ainsi que fondées sur les postulats suivants:
des professionnels compétents ou (voir Moore, Facing the Consequences:
Conferences and Juvenile Justice)
des travailleurs communautaires.
La conférence familiale permet de
• la définition de «communauté»
se pencher sur les questions
ou «collectivité» est restreinte
restées sans réponse, les
aux seules personnes qui ont
sentiments pénibles, la question
un lien particulier avec le
de l’obligation de rendre compte
délinquant et la victime;
et la question du
• c’est le comportement du
dédommagement ou de la
délinquant et non le
réparation. À notre avis, les
délinquant lui-même qui est
conférences familiales offrent un
rejeté;
excellent moyen de rendre une
• l’expression des sentiments fait
vraie justice.
partie du processus;
• le processus permet la
Le nombre de cas de
réinsertion du délinquant dans
déjudiciarisation semble être
son milieu immédiat (p. ex., sa
assez important dans de
famille) ainsi que dans la
nombreuses sphères de
collectivité (p. ex., la localité
compétence; même si, dans un
géographique);
petit nombre de pays, la
• se sont les personnes
conférence familiale peut aboutir
directement visées qui sont
à la recommandation d’imposer
appelées à résoudre le conflit;
une peine d’emprisonnement,

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 66
• les règles de base sont celles de de la loi, dans le cadre d’une
la justice sociale et du respect conférence familiale, ce sont les
de la collectivité plutôt que du personnes le plus directement
système de justice comme tel; touchées qui sont chargées de
• la conférence est le moyen le résoudre le conflit et qui, de ce fait,
plus efficace de cerner les partagent la responsabilité de
causes d’un échec dans la trouver le moyen de réparer le tort
famille et sur le plan du causé. En général, les spécialistes
contrôle communautaire et ne jouent pas le même rôle
d’amorcer le processus dominant qu’en salle d’audience;
complexe qui consiste à on constate qu’il existe de
rétablir les liens sociaux; nombreuses ressources
• les mécanismes non structurés communautaires auparavant
du système de justice inconnues et auxquelles on n’avait
traditionnel peuvent aboutir au pas recours. Certains modèles de
dédommagement de la victime conférence familiale se penchent
sur le plan matériel mais ne davantage sur les conditions dans
sont pas conçus pour réparer le la famille et dans la collectivité qui
tort subi sur le plan ont mené au crime et sur la tâche
symbolique et psychologique; complexe qui consiste à rétablir les
• les coordonnateurs agissent liens sociaux.
pour le compte du système de
justice sociale, mais à titre La conférence familiale vise
d’arbitres et non de surtout à réinsérer le délinquant
participants; dans la collectivité plutôt que de
• la conférence doit encourager stigmatiser et de «l’étiqueter».
le délinquant à faire face aux Avec l’aide d’un coordonnateur
conséquences de sa conduite; ayant reçu la formation voulue, les
• la conférence offre à la victime participants suivent un processus
l’occasion d’exprimer son selon lequel ils prennent la parole
ressentiment et sa colère; dans un ordre donné pour faciliter
• les droits des délinquants la réinsertion sociale du
continueront d’être protégés. délinquant. Les participants
encouragent le délinquant à faire
Points forts face aux conséquences de sa
conduite; ils dénoncent et
La conférence familiale est fondée réprouvent l’acte commis et non la
sur les principes communs de personne qui l’a commis. Les
justice réparatrice et offre au moins droits du délinquant sont une
la possibilité de rendre une «justice considération primordiale pour les
vraiment satisfaisante». Comme la organisateurs d’une conférence
criminalité est envisagée familiale.
davantage du point de vue du tort
causé à des personnes plutôt que La victime participe au processus
comme un simple cas de violation à part entière. Elle a l’occasion

67 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
d’exprimer différents sentiments, Mises en garde
par exemple le ressentiment ou la
colère. Il y a pour elle la Les premières conférences
probabilité d’un familiales montrent les défis que
dédommagement matériel ou cette nouvelle approche de la
symbolique. justice est appelée à relever. Bien
que les victimes participent
Au cours d’une conférence beaucoup plus à ce processus et
familiale, particulièrement selon le préfèrent de loin à la procédure
le modèle australien fondé sur judiciaire, il exige une vigilance
l’intervention de la police, le constante. Tous ces processus de «C’est souvent la
délinquant fait l’objet d’un justice novateurs visent à victime qui éclate
opprobre destiné à faciliter sa accorder la priorité aux besoins et d’abord», déclare le
réinsertion sociale, comme aux droits de la victime. Dans juge Michael Brown en
l’explique Carol LaPrairie : «La tout consensus réalisé et tout décrivant la dynamique
conférence familiale donne à accord conclu lors d’une d’une conférence
l’ensemble des personnes qui ont conférence, il faut accorder autant familiale. Toutefois,
été le plus touchées par le crime après avoir eu
de poids aux besoins de guérison
commis l’occasion de chercher à l’occasion d’exprimer
de la victime qu’à ceux du
résoudre le conflit sans faire du une partie de leur
délinquant.
souffrance et de leur
délinquant un paria. À cette fin,
colère, les victimes «
on a recours à des mécanismes Le choix des participants les plus peuvent être
communautaires officieux qui efficaces, ceux qui sont extraordinairement
permettent aux participants à la importants pour la victime et généreuses.»
fois d’exprimer leur réprobation à pour le délinquant, constitue tout
l’égard de la conduite du un défi. Lorsque la famille «Assurément, ils
délinquant et de montrer par des n’exerce plus une grande peuvent dire : «Nous
gestes qu’ils acceptent son retour influence sur un jeune, il faut ne voulons pas qu’il
dans la collectivité en tant que trouver une personne qui aille en prison, mais
citoyen respectueux de la loi. s’intéresse à celui-ci aujourd’hui nous voulons que notre
C’est la deuxième partie de la ou qui s’intéressait à lui autrefois, voiture nous soit
cérémonie, c.-à-d. la réacceptation peut-être une tante, ou encore un rendue». Ce qui mène
fondée sur la théorie de entraîneur sportif ou un à une discussion
John Braithwaite de l’opprobre réaliste au sujet de la
enseignant apprécié.
destiné à faire faciliter la réparation du tort
réinsertion sociale qui distingue causé.»
Il existe un risque que les
les mécanismes dégradants (du conférences familiales ne créent
système de justice pénale un jour leur propre «industrie de
traditionnel) de ceux propres à la justice», autant régie par des
favoriser la réinsertion sociale du règles et dominée par des
délinquant.» spécialistes que le système de
justice actuel.

Sur le plan pratique, les résultats


d’une première évaluation sont

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 68
positifs mais révèlent certaines d’emprisonnement imposée n’a
sources de préoccupation : pas tenu compte d’une grande
l’application des accords partie du tort causé par
intervenus à l’issue des l’infraction commise alors que ces
conférences, le respect du droit à conférences peuvent permettre
l’application régulière de la loi, la aux personnes touchées par le
possibilité d’un élargissement du crime de se remettre du
filet, les guerres de territoire entre traumatisme subi et de tourner la
la police, les tribunaux et les page. En pareils cas, on voit bien
spécialistes du système de justice l’utilité d’avoir recours à ce
pénale, et la mesure limitée dans mécanisme aux étapes initiales du
laquelle les conférences peuvent processus de justice pénale et du
s’attaquer aux causes profondes processus correctionnel; dans les
de la délinquance telles que le cas où la justice rendue a été
chômage, la pauvreté et vraiment satisfaisante et où l’on
l’effritement du soutien du réseau considère que le délinquant ne
familial. Toutefois, comme l’a dit présente pas de risque pour la
l’écrivain américain dans le collectivité, il faut se demander
domaine de la justice pénale pourquoi on l’a incarcéré du tout.
Russ Immarigeon, cette
évaluation préliminaire montre
qu’il y a lieu de remédier aux
lacunes de ce mécanisme et non
de le rejeter.

Conclusion

Plusieurs autres pays ont


maintenant recours aux
conférences familiales, dont le
Canada qui a mis sur pied
plusieurs projets pilotes et de
nombreuses sphères de
compétence aux États-Unis qui
s’occupent de jeunes
contrevenants.
Remarquablement, comme le
montrent les derniers cas exposés
dans la présente section, on a
recours à cette approche dans les
prisons et dans la collectivité,
dans certains cas, même après
que le délinquant ait purgé une
peine d’emprisonnement. Il est
évident ans ces cas que la peine

69 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Conférences familiales - un libéral au grand coeur. «C’est un
Nouvelle-Zélande bon système.»

Doug Small
Un cas (Justice Down Under, National, /
L’Association du Barreau canadien novembre-
Un jeune contrevenant âgé de 16 ans décembre 1995)
a volé et démoli une voiture d’une
valeur de 1 700 $. Ce n’était pas «La victime peut exprimer sa colère et
exactement une Rolls-Royce mais, son ressentiment directement à son
pour la mère seule aux faibles moyens agresseur; la victime a commencé à
dont c’était la voiture, celle-ci était reprendre le contrôle de sa vie, à
essentielle et elle est presque retrouver un certain pouvoir que lui
impossible à remplacer. Bien que avait enlevé l’infraction. C’est la
jeune, le voleur n’en est pas à sa première étape du processus de
première infraction. S’il comparait guérison. Toutes les personnes
devant un tribunal de juridiction présentes peuvent voir la réaction du
criminelle, il ira probablement en délinquant. Le plus souvent, on peut
prison. voir d’après son comportement qu’il a
honte et qu’il a des remords. Lorsque
Tout cela sort lors de la conférence la victime cesse de parler, il y a
familiale au cours de laquelle un presque toujours un silence profond,
grand-parent convient de prêter les une immobilité alors que tous
1 700 $ nécessaires pour l’achat d’une regardent le jeune et concentrent leurs
nouvelle voiture et le jeune accepte de pensées sur lui. À l’occasion, il donne
prendre un emploi difficile dans une spontanément une réponse verbale;
entreprise de conditionnement pour plus souvent, je lui demande après
rembourser l’argent. une courte pause ce qu’il ressent au
sujet de ce qu’il a entendu. Le jeune
L’officier supérieur Ross Stewart montre qu’il a honte - même celui qui
énumère les gagnants. a le plus difficulté à s’exprimer avoue
qu’il se sent comme «un salaud». Je
«La victime est contente - elle a lui demande parfois s’il veut dire
l’argent dont elle avait besoin pour quelque chose à la victime. Dans la
acheter une voiture. La police est majorité des cas, le jeune présente
contente - elle a résolu un crime. Le alors ses excuses. La victime peut
délinquant est content - il n’a pas été accepter les excuses et, souvent, elle
condamné. Sa famille? Eh bien, ils montre alors pour la première fois
sont contrariés, mais ils se sont qu’elle ressent de la compassion et
intéressés à l’affaire et ils sont qu’elle pourrait pardonner.
intéressés à ce que le jeune rembourse
l’argent.» Souvent, la victime dit que ce qu’elle
veut du délinquant, ce n’est pas un
«Justice a été rendue» déclare dédommagement sur le plan financier,
Stewart, un grand gaillard de 40 ans mais ce qu’il faut pour «arranger les
en bonne santé et qui est loin d’être choses» entre eux. Lorsque la victime

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 70
a subi un dommage physique ou qu’il Le juge Heino Lillies de la Cour
lui reste une certaine peur, elle a territoriale du Yukon au Canada
besoin d’être rassurée qu’elle n’a rien résume ainsi les différents facteurs
à craindre du délinquant à l’avenir et qui ont motivé les réformes
elle a besoin de temps pour reprendre apportées en Nouvelle-Zélande :
confiance. Si la victime le veut, on [traduction] ... trop de jeunes
peut organiser à cette fin d’autres étaient accusés et traduits devant
rencontres avec le jeune contrevenant, les tribunaux, souvent pour des
on peut l’informer des progrès réalisés infractions qui n’étaient pas
par celui-ci ou on peut prévoir une particulièrement graves. Des
nouvelle rencontre lorsque plus de ressources insuffisantes étaient
temps se sera écoulé. fournies aux tribunaux pour leur
permettre de régler les questions
S’ils comprennent le besoin de la dont ils étaient saisis et, en outre,
victime de se remettre du traumatisme les tribunaux n’étaient pas faits
subi, de retrouver le sentiment d’avoir pour s’attaquer aux problèmes
à nouveau le contrôle de sa vie, de sociaux et familiaux. Le modèle
retrouver un certain pouvoir et une de «justice» était considéré comme
certaine liberté d’action, le jeune et sa inefficace en ce qui concerne la
famille peuvent proposer un plan qui prévention de la délinquance.
contient des solutions créatives et D’autres personnes s’inquiétaient
constructives. La meilleure solution de la tendance à confondre les
est celle proposée par le jeune questions de bien-être social et les
contrevenant, par l’entremise de sa questions de justice et de ce que
famille, et qui tient compte des besoins les interventions étaient de ce fait
de la victime... peu appropriées et, peut-être, trop
peu sévères. Les groupes de
Marie Sullivan, défense des intérêts des victimes
Gestionnaire des services aux jeunes,
ont signalé que les victimes en
Auckland
(cité dans Restorative Justice - Four
général n’avaient pas leur mot à
Community Models. Bulletin des services dire dans le processus judiciaire et
de médiation communautaire de qu’on accordait très peu
Saskatoon) d’attention aux questions de
réparation et de dédommagement.
Les conférences En outre, la procédure accusatoire
familiales - leurs débuts en était mal adaptée à la culture de la
population autochtone maorie qui
Nouvelle-Zélande
était surreprésentée dans le
système de justice pénale. (Les
En 1989, la Nouvelle-Zélande a
familles maories représentent 12 %
adopté le Children, Young Persons
de la population de 3,5 millions
and their Families Act, (loi sur les
d’habitants du pays mais 43 % de
enfants, les jeune et leurs familles)
la population de jeunes
qui a beaucoup changé la façon
délinquants connus.)»
dont le pays traite les jeunes
contrevenants.

71 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Entre-temps, le ministère du Bien- • la participation de la famille,
être social examinait les aux fins de la réinsertion du
programmes de médiation entre la jeune dans la collectivité;
victime et le délinquant mis sur • la participation de la victime
pied ailleurs et s’orientait vers une au processus de prise de
approche des politiques et de la décision et la prise de mesures
justice mettant l’accent sur la destinées à l’aider à se
nécessité de tenir les jeunes remettre du traumatisme subi;
responsables de leurs crimes. En • prise de décision par voie de
se fondant sur la tradition maorie consensus;
et les autres traditions • adaptation sur le plan
polynésiennes, on a décidé culturel, c’est-à-dire trouver
d’appliquer les principes de la différentes façons de résoudre
La nouvelle législation
justice réparatrice à l’échelle du les incidents selon la culture
sur les crimes commis
pays. Les initiatives idéologiques des participants.
par les jeunes a aidé à
du gouvernement travailliste arrêter cette valse
visant à privatiser les services et à Résultats obtenus insensée. De plus, les
couper dans les dépenses sociales agents de police comme
ont appuyé cette réorientation. Selon Joe Hornick de l’Université Stewart sont
de Calgary, il ressort des travaux de maintenant animés
Objectifs de la nouvelle recherche que les conférences ont d’une nouvelle
législation sensiblement réduit le nombre résolution.
d’affaires dont les tribunaux sont
saisis et diminué de moitié le «Dans les années à
Les objectifs de la nouvelle
recours à l’emprisonnement. Il faut venir, affirme-t-il, on
législation comprenaient, entre
envisager les conférences familiales parlera d’une percée
autres : analogue à la loi qui a
• la déjudiciarisation, y compris dans le contexte plus vaste du
donné le vote aux
les mesures destinées à faire système de justice pour les jeunes
femmes et à la
en sorte que les jeunes ne dans le cadre duquel 71 % de tous
législation sociale des
soient pas traduits devant les les jeunes contrevenants reçoivent années 30.»
tribunaux et à prévenir la soit une mise en garde officielle,
stigmatisation; soit un avertissement officieux et le Doug Small, Justice
• l’obligation de rendre reste sont traduits devant les Down Under
compte, en mettant l’accent tribunaux ou participent à une
sur le dédommagement; conférence familiale. Seulement
• le mieux-être et le 20 % de tous les jeunes
renforcement des familles; contrevenants comparaissent
• la diligence, c’est-à-dire tenir devant un tribunal pour adolescent,
une conférence dans les comparativement à 80 % avant les
21 jours qui suivent l’incident; modifications apportées à la loi en
• l’application régulière de la 1989. Même si tribunaux sont saisis
loi de manière à protéger les d’une affaire, après un verdict de
droits des intéressés; culpabilité, une conférence familiale
est tenue et chargée de faire des
recommandations.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 72
Déroulement de la initiale où chacun donne sa
conférence familiale version des faits permet aux
intéressés d’exprimer leurs
En général, un travailleur social sentiments, d’aborder les
ayant reçu la formation voulue fait questions restées sans réponse,
fonction de coordonnateur de la d’exposer et d’examiner les
conférence et y prépare la victime, besoins de la victime, et de
le délinquant et leurs familles. En déterminer les faits de l’espèce.
Nouvelle-Zélande, les conférences
Lors d’une autre Dans le cadre d’une deuxième
conférence familiale, familiales examinent beaucoup
plus en profondeur les causes étape, les personnes qui
convoquée pour soutiennent le délinquant
régler le cas d’un sociales de la criminalité et font
appel de façon importante à la délibèrent à part en vue d’élaborer
jeune qui avait volé
famille étendue du jeune et de proposer un plan. Les
plusieurs voitures, la
contrevenant. familles semblent discuter de
confrontation du
questions personnelles et privées
jeune et d’un de ses
oncles a abouti à Une conférence familiale ne peut plus librement lors de cette
l’éclat suivant : avoir lieu que si le jeune avoue deuxième étape.
avoir commis l’infraction. S’il le
«Voler des voitures. nie au cours de la conférence, Enfin, tous les participants à la
C’est idiot, ce que tu as celle-ci est suspendue pour conférence se réunissent avec les
fais là.... mais j’ai du permettre au coordonnateur de spécialistes, la victime et les
respect pour toi. J’ai discuter de la situation avec le personnes qui assurent le soutien
un faible pour toi. Je à cette dernière pour voir si tous
jeune et il est entendu que, si
suis allé te voir jouer souscrivent aux recommandations.
celui-ci continue de nier avoir
au football. J’y suis Un travailleur social de Youth
allé parce que je t’aime commis l’infraction, l’affaire sera
renvoyée devant les tribunaux. Justice (service de justice aux
bien. Tu est un jeunes) surveille l’exécution du
excellent footballeur, Comme une conférence est tenue
en vertu de la loi, une décision plan : s’il est exécuté, les
mon garçon. Cela
prise par voie de consensus est accusations sont généralement
montre que tu es
exécutoire. retirées; sinon, un juge d’un
capable de t’y mettre et
tribunal pour adolescents rend
de faire quelque chose
de mieux que voler des La conférence familiale se déroule une décision.
voitures... C’est en trois étapes. Après la première
pourquoi nous refusons étape, au cours de laquelle les Personne-ressource :
d’abandonner la Marie Sullivan
participants se présentent et sont Youth Justice
partie.» accueillis et qui comprend parfois New Zealand Children and
une prière, la police décrit Young Person Services
Private Bag 78-901 Grey Lynn
l’infraction perpétrée. Peu après
Auckland, New Zealand
le début de cette première étape, le Tél. : (011) 649-376-1164
jeune contrevenant, en présence Téléc. : (011) 649-376-5770
de sa famille et des membres de
son réseau de soutien, est mis en
présence des personnes qui ont été
touchées par ses actes. Cette étape

73 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Conférences familiales - soeur; la jeune contrevenante, sa
Wagga Wagga, Australie mère, sa soeur, son petit ami et deux
autres amis; la victime, sa fille et sa
petite-fille.
Un cas
Les deux jeunes contrevenants ont
Un jeune de 15 ans et une adolescente
exposé les circonstances dans
de 16 ans sont entrés par effraction
lesquelles ils ont commis l’infraction.
dans l’appartement d’une femme âgée
La victime a expliqué qu’elle avait
et habitant seule. Ils ont volé
déjà été victime de deux autres
différents articles, y compris un
cambriolages et qu’elle vivait dans la
téléviseur, des bijoux et de la
peur depuis environ deux mois. Elle
nourriture (la valeur des biens volés
était bouleversée d’avoir perdu une
s’élevait à environ 5 000 $). Les deux
boîte en bois que son frère lui avait
jeunes contrevenants habitaient dans
donnée lorsqu’elle avait 14 ans. La
un parc à caravane voisin et avaient
fille de la victime a fait état de ses
vu la victime sortir de la maison. La
inquiétudes au sujet de sa mère au
fille de la victime soupçonnait les
cours des derniers mois.
délinquants parce que l’appartement
avait déjà été cambriolé auparavant.
La mère de la jeune contrevenante a
signalé que sa fille avait quitté la
La police est intervenue; elle a
maison depuis environ deux ans. Bon
interrogé les jeunes contrevenants et
nombre des questions soulevées entre
retrouvé la plupart des biens volés.
la jeune contrevenante, sa soeur et sa
Elle a aussi arrêté un autre
mère étaient chargées d’émotion. La
délinquant adulte qui a été accusé et
détresse de la victime âgée a ému les
traduit devant les tribunaux. Ce
participants. La discussion
délinquant a été envoyé en prison
concernant les 400 $ d’indemnisation
parce qu’il avait des antécédents
a abouti à un arrangement selon
criminels. La police a longuement
lequel les deux jeunes contrevenants
examiné la possibilité du recours à
rembourseraient toutes les deux
une conférence familiale au lieu d’une
semaines une certaine somme qu’ils
audience devant le tribunal. Comme
verseraient dans un compte en banque
le délinquant adulte avait comparu
dont le numéro serait fourni par la
devant le tribunal et reçu une peine
fille de la victime. Les deux jeunes
d’emprisonnement, la police était tout
contrevenants ont convenu en outre
d’abord d’avis qu’il y avait lieu de
de fournir chacun 20 heures de service
déposer des accusations également
communautaire. L’adolescente devait
contre les jeunes contrevenants, étant
travailler aux côtés de sa mère avec
donné ce fait ainsi que la gravité de
un groupe local de scouts (sa mère
l’affaire. Toutefois, on a décidé d’avoir
faisait un certain nombre d’heures de
recours à une conférence familiale.
service communautaire après avoir
comparu devant les tribunaux pour
Les personnes suivantes ont participé
fraude en matière d’assistance
à la conférence : le jeune
sociale). Le jeune devait travailler
contrevenant, sa mère, son frère et sa
pour la Société Saint-Vincent de Paul.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 74
En partant, la victime a demandé à avec la justice. Il connaissait bien
parler au sergent et lui a dit : la procédure typique en salle
«Merci, maintenant je me sens en d’audience, le jeune assis à côté
sécurité.» de son conseiller juridique et le
seul dialogue ayant lieu entre le
Voici les résultats de la conférence : juge et les avocats de la Couronne
les jeunes contrevenants ont présenté et de la défense. Dans la plupart
des excuses aux victimes; ils ont des cas, l’audience durait en
convenu de les indemniser; ils ont moyenne 15 minutes et le seul
convenu d’exécuter 20 heures de moment où le jeune y participait
service communautaire; la victime a directement était celui où le juge
déclaré qu’elle n’avait plus peur; la lui demandait de se lever pour
fille de la victime était soulagée de s’entendre dire qu’il avait enfreint
savoir que sa mère pourrait la loi. «Comment cette
maintenant reprendre sa vie normale; intervention aide-t-elle à
la conférence a permis à la jeune empêcher le jeune de récidiver?
contrevenante et à sa mère de régler s’est demandé le sergent.
un certain nombre de questions est Comment peut-on s’attendre à ce
restée en suspens. que ces jeunes assument la
responsabilité de leur conduite
Il aurait été impossible à un tribunal alors qu’en général ils n’ont
de répondre aux préoccupations de la aucune idée des conséquences,
victime. En salle d’audience, les sachant seulement qu’ils se
deux jeunes contrevenants trouvent en salle d’audience à
n’auraient pas été obligés de faire cause de l’acte qu’ils ont
face à bon nombre de questions qui commis?»
ont été abordées au cours de la
conférence. En outre, cette dernière a Résultats obtenus
permis de réunir les membres des
familles des deux jeunes Il existe des données statistiques
contrevenants qui avaient eu un qui permettent de mesurer
passé difficile et leur a permis de jusqu’à un certain point quelques-
s’attaquer à un certain nombre de uns des résultats plus concrets du
problèmes d’une manière positive et recours aux conférences
constructive. familiales. Ainsi, on constate une
réduction de près de 50 % du
Les conférences nombre de jeunes contrevenants
familiales - leurs débuts qui sont traduits devant les
en Australie tribunaux. Le taux de récidive
des délinquants qui participent à
Le sergent Terry O’Connell, entre une conférence familiale à Wagga
autres, voulait qu’on trouve un Wagga est inférieur à 5 %. Entre
moyen différent et plus 70 % et 85 % des jeunes qui font
satisfaisant d’intervenir auprès l’objet d’une mise en garde n’ont
des jeunes ayant des démêlés pas d’autres démêlés avec la

75 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
police. Plus de 90 % de toutes les participera à une conférence ou
ententes intervenues à l’issue sera traduit devant les tribunaux.
d’une conférence sont exécutées. Ces décisions sont prises par un
Le degré de satisfaction du comité d’examen composé
délinquant, de la victime et de la d’agents de police supérieurs.
police est élevé et, en outre, on Cet arrangement a joué un rôle
constate une baisse considérable important dans l’obtention du
de la charge de travail des soutien de la police pour le
préposés à la justice applicable programme. Les conférences sont
aux jeunes. coordonnées par la police et ont
lieu dans différents endroits, y
Les pionniers du recours aux compris aux postes de police.
conférences familiales en
Australie énumèrent d’autres Les Australiens ont différents
Les programmes de
avantages qui ne peuvent être modèles de conférences familiales
déjudiciarisation
mesurés. Entre autres, les jeunes dans au moins cinq États; dans auxquels on peut avoir
contrevenants comprennent qu’il certaines régions, ils ont recours à recours aux étapes
y a des personnes qui se ce mécanisme dans le cas de initiales du processus,
préoccupent de leur bien-être, les délinquants adultes également. comme les conférences,
parents et d’autres intervenants De façon générale, leur modèle peuvent donner des
ont l’occasion d’assumer est axé davantage sur le résultats spectaculaires.
collectivement la responsabilité et règlement d’un conflit particulier, Alors qu’au Canada le
d’en rendre compte, et les bien qu’il soit sous-entendu que taux moyen de jeunes
victimes se voient offrir l’occasion la collectivité en général peut qui comparaissent
de jouer un rôle positif de aussi y trouver son compte. devant les tribunaux
manière à aider les jeunes Contrairement à celui employé en pour adolescents est de
contrevenants et leurs familles à Nouvelle-Zélande, ce modèle ne 53,1 pour 1 000 jeunes,
faire face aux conséquences des comprend pas d’étape à laquelle ces taux dans les quatre
États les plus peuplés
crimes commis. les membres du réseau de soutien
d’Australie vont de
du délinquant se réunissent pour
14,8 (à Victoria) à 23,7
Déroulement de la recommander un plan.
(dans la Nouvelle-
conférence familiale Galles du Sud).
Les récits des participants sont au
On considère les conférences centre même de la conférence
comme un mécanisme plus familiale. Le délinquant donne
officiel et beaucoup plus efficace d’abord sa propre version des
de mise en garde qu’un simple faits; le coordonnateur l’aide
avertissement donné par la parfois en posant des questions
police. Dans ce type de utiles. Vient ensuite le tour de la
conférence, la police joue un rôle victime. Le coordonnateur pose
plus central que dans le modèle la première série des questions
employé en Nouvelle-Zélande. après chaque récit, puis les autres
En effet, c’est la police qui participants à la conférence
détermine si un délinquant donné posent des questions à leur tour.
recevra un avertissement, Les questions posées au

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 76
délinquant ont pour but de Selon les études effectuées par le
l’amener à reconnaître les gouvernement et le secteur privé,
conséquences de sa conduite, les jeunes autochtones sont
alors que les questions posées à surreprésentés le système de
victime visent à déterminer le tort justice pénale. En effet, même si
causé. les enfants et les jeunes
autochtones ne représentent
Personne-ressource : qu’entre 15 % et 20 % de la
Sgt. Terry O’Connell population de la province, ils
Police Association of New South
représentent 72 % des jeunes
Wales
Level 4, 154 Elizabeth Street placés sous garde et 45 % des cas
Sydney, N.S.W. 2000 dont s’occupent les services
Tél. : (02) 283-5567 communautaires pour
Téléc. : (02) 283-5589
adolescents; par contre,
seulement 35 % des jeunes
autochtones bénéficient de
solutions de rechange à
Conférences familiales - l’incarcération. Si le taux actuel
Jeunes autochtones de la demande se maintient, les
Regina (Saskatchewan) services sociaux de la
Saskatchewan calculent qu’il
Kwêskohtê, mot cri qui signifie faudra 105 lits dans les
plus ou moins «marcher en ligne établissements de placement sous
droite», offre aux jeunes garde des jeunes d’ici 1999. Cela
autochtones à Regina une option équivaut à un grand nouvel
préalable à la mise en accusation, établissement coûtant 8 millions
soit la participation à une de dollars.
conférence familiale.; il s’agit d’une
mesure de déjudiciarisation des Kwêskohtê voulait adopter une
jeunes ayant commis des approche autre que le placement
«infractions graves moins sous garde. Dans le cadre de ce
importantes». Ce programme programme, les coordonnateurs
pilote du projet de et des Aînés autochtones facilitent
déjudiciarisation des jeunes la réconciliation et la réparation.
contrevenants est particulièrement Le programme peut s’occuper de
novateur en ce qu’il vise des jusqu’à 15 jeunes à la fois, la
infractions plus graves que celles condition essentielle étant que le
qui font généralement l’objet de jeune soit disposé à accepter la
mesures de déjudiciarisation. On a responsabilité de l’infraction qu’il
recours aux conférences familiales a commise.
dans les cas d’accusation de
prostitution ou de sollicitation, de La conférence familiale est un
vol de plus de 1 000 $, mécanisme qui vise à conférer
d’introduction par effraction et de plus de pouvoir tout, d’abord aux
voies de fait simples. jeunes et à leurs familles pour

77 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
leur permettre d’assumer la portées contre eux et d’avoir à
responsabilité des infractions comparaître devant les tribunaux.
commises. Ce mécanisme permet
aussi aux victimes de se prendre Personne-ressource :
en charge et de tourner la page Kwêskohtê
Regina Friendship Centre
après un incident qui les ont
Corporation
laissées en proie à des sentiments 1440 Scarth Street
d’impuissance. Il permet aux Regina, Saskatchewan
victimes de raconter ce qu’elles S4R 2E9
Tél. : (306)525-5459
ont vécu et de recommander les Téléc. (306) 525-3005
mesures de réparation qu’elles
jugent convenables étant donné
leur situation à la suite de
l’infraction. Différentes options
s’offrent aux victimes, y compris Conférences familiales -
des excuses présentées en États-Unis
personne ou par écrit, des
services personnels à la victime Les pionniers australiens de la
ou des services communautaires conférence familiale animée par
exécutés au nom de cette la police ont déjà formé des
dernière, l’indemnisation, le centaines de policiers, de
remplacement ou le travailleurs des services sociaux
dédommagement, ou encore un et d’éducateurs américains et
don de charité. En outre, la canadiens au cours de quatre
conférence familiale permet à la séances de formation données en
collectivité de participer à des Amérique du Nord. Initialement,
processus de justice qui visent la on recommande d’avoir recours à
réinsertion sociale du jeune en ces conférences dans le cas
tant que membre utile de la d’infractions mineures. À mesure
société. que la police, la Couronne et le
public apprennent à faire
Les jeunes contrevenants, pour confiance à ce mécanisme, il y a
leur part, acceptent de suivre des de bonnes raisons de croire que
séances de counseling, de mener les autorités y auront recours à
des activités culturelles avec des titre de mesure de
Aînés, et de mener certaines déjudiciarisation dans le cas
activités structurées à la maison, à d’infractions plus graves qui
l’école ou dans la collectivité. Ils normalement aboutiraient à une
acceptent de participer à des peine d’emprisonnement. Nous
programmes et d’avoir recours à donnons à titre d’exemple ci-
des services qui répondent à leurs dessous une conférence familiale
besoins. Ils se conforment à tenue au Vermont, ainsi que
l’entente intervenue afin d’éviter l’adresse de Real Justice, un
que des accusations soient programme qui vise à implanter
le modèle australien de

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 78
conférence familiale en Amérique Le jeune contrevenant a été exclus de
du Nord, et l’adresse d’un agent l’école temporairement et on a
de police du Minnesota qui a recommandé qu’il soit renvoyé. En
participé à plus de 23 conférences outre, la famille de la victime
portant sur des incidents allant s’apprêtait à le poursuivre au
du vol à l’étalage aux infractions criminel.
liées au racisme.
Les personnes suivantes ont participé
Voies de fait dans une à la conférence familiale organisée
école secondaire au dans ce cas : la victime et ses parents,
le jeune contrevenant, sa mère
Vermont adoptive, un travailleur social, un
conseiller scolaire, un enseignant de
Un étudiant âgé de 17 ans a agressé
l’école et la secrétaire du bureau de
un autre étudiant dans le couloir
l’orienteur.
près du bureau d’orientation de notre
école secondaire. L’enquête a révélé
Le principal résultat de cette
que le délinquant était fâché à cause
conférence est qu’elle a mis le jeune
d’une question qui n’avait rien à voir
contrevenant en présence des
avec l’école. Il était sorti d’une salle
personnes qui avaient été touchées
de classe et, apparemment, avait
par ses actes. Elle a donné à chacune
trouvé la victime, un garçon âgé de
des victimes et aux personnes venues
15 ans, dans le couloir près du
pour la soutenir de dire au jeune
bureau de l’orienteur. Les deux
contrevenant ce qu’elles ressentaient.
garçons ne se connaissaient pas.
Le jeune a présenté ses excuses et a
L’aîné a simplement agressé le plus
eu l’occasion de dire à tous les
jeune parce qu’il se trouvait sur son
participants qu’il reconnaissait qu’il
chemin. Le jeune garçon n’a pas eu
avait besoin d’aide professionnelle,
besoin de soins médicaux mais il
qu’il avait compris qu’il s’était mal
avait été visiblement malmené et il
conduit et qu’on ne lui permettrait
était secoué par ce qui lui était
pas de retourner à l’école. Les
arrivé. L’autre l’avait jeté à terre et
victimes ont exprimé leur
lui avait infligé des meurtrissures.
satisfaction de ce que le processus
Surtout, la jeune victime est restée
leur avait permis d’aider à cerner les
aux prises avec des sentiments de
conséquences qui étaient importantes
peur, comme d’ailleurs d’autres
pour tous. Surtout, à la fin de la
personnes, y compris ses parents. La
conférence, le jeune qui avait été
secrétaire dans le bureau de
agressé, ses parents, la secrétaire du
l’orienteur a été témoin de l’incident.
bureau de l’orienteur et les autres
Elle a signalé l’agression. Elle aussi
participants avaient à nouveau
a eu peur, surtout lorsqu’elle a appris
confiance que leur école était un
que l’agression était sans
endroit sûr.
provocation. Elle était d’autant plus
inquiète qu’elle craignait pour sa
La conférence a permis d’éviter que
propre sécurité et celle de tout le
des accusations au criminel ne soient
monde à l’école.

79 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
déposées. Le jeune a été exclu agresseurs ont continué d’être
temporairement au lieu d’être traduits devant les tribunaux et de
renvoyé et on a mis en place un se voir infliger parfois une peine
programme de tutorat. d’emprisonnement. Toutefois, un
juge du circuit de Nain s’est
intéressé à cette approche qu’il a
Personne-ressource : jugée pertinente aux fins de la
Rick Ebel détermination de la peine. Dans
Assistant Principal
certains cas, après qu’on se fut
South Burlington High School
550 Dorset Street penché sur les questions de
South Burlington, Vermont sécurité et les désirs de la famille,
05403 le prisonnier assistait à la
Tél. : (802) 658-9001
Téléc. : (802) 658-9029 conférence familiale sous escorte.
La conférence permettait
REAL JUSTICE d’examiner une grande partie du
P.O. Box 500
Pipersville, Pa. 18947
tort infligé et bon nombre des
Tél. : (215) 340-9922 besoins sur lesquels il était
Téléc. : (215) 348-1563 impossible de se pencher en salle
d’audience. Voici certaines
Al Campbell
Anoka Police Department constatations tirées du rapport
2015 1st Ave. No., final du projet : «Il est difficile de
Anoka, Minnesota 55303 continuer à nier lorsqu’on vous
Tél. : (612) 421-6632
Téléc. : (612) 422-2092
présente des éléments de preuve
absolument probants et que toute
votre famille est assise autour de
vous et écoute le récit de ce que
vous avez fait... Pendant les
Projet de prise de conférences, la plupart des
décision lors d’une agresseurs n’ont pas nié ou n’ont
conférence familiale - pu nier avoir commis les actes de
Terre-Neuve et Labrador violence en question... En la
présence de tous les membres de
Nain, une communauté inuit au leur famille et des principaux
Labrador, ainsi que la péninsule membres de leur réseau de
Port au Port et la région de soutien, les délinquants ne
St. John’s à Terre-Neuve, ont mis à pouvaient monter un groupe
l’essai un modèle non judiciaire de contre l’autre. En outre, il ne faut
conférence familiale dans le cas pas supposer que les agresseurs
d’un projet novateur de lutte ne veulent pas de l’aide; dans un
contre la violence familiale. cas donné, par exemple,
l’agresseur non seulement a avoué
Le Projet de prise de décision lors avoir commis les actes de violence
d’une conférence familiale n’a en question, mais c’était lui qui
pas eu d’incidence directe sur les avait demandé que son cas soit
taux d’incarcération car les renvoyé au projet.»

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 80
Dans tout cas renvoyé au projet, solutions; cependant, ces
les membres de la famille du «anciens» partenaires - famille,
délinquant ont été réunis avec les proches, amis, collectivité et
membres de leur famille étendue services de protection - devaient
et d’autres personnes assurant un maintenant jouer de nouveaux
«Il est difficile pour le
soutien social important pour rôles, trouver de nouveaux
délinquant de
leur permettre d’élaborer un plan moyens de travailler ensemble.»
continuer à nier
destiné à mettre fin à la violence
lorsqu’il est confronté à
des preuves probantes ou à la négligence.... «Le projet Personnes-ressources :
de prise de décision en famille Gale Burford et Joan Pennell
et que toute sa famille Memorial University of
est assise en cercle visait à réduire la violence en
Newfoundland
autour de lui et écoute amenant «d’anciens» partenaires School of Social Work
le récit de ce qu’il a à collaborer à la recherche de St. John’s, Newfoundland
fait.... pendant les A1C 5S7
Tél. : (709) 737-8165
conférences, la plupart Téléc. : (709) 737-2408
des personnes qui ont
commis des actes de
violence n’ont pas ou
n’ont pas pu le nier... 4. Comités communautaires de
en présence de toute
leur famille et des détermination de la peine et comités de
membres de leur réseau justice pour la jeunesse
de soutien les plus
proches, les délinquants
ne peuvent opposer un
groupe à l’autre. En Introduction victime. Ils peuvent se pencher
aussi sur les causes sociales de la
outre, il ne faut pas
Bon nombre des initiatives criminalité. Ces comités de justice
supposer que les
agresseurs ne veulent communautaires de détermination communautaires oeuvrent dans les
pas obtenir de l’aide; de la peine dans notre pays offrent collectivités autochtones et non
dans un cas donné, le la possibilité de rendre une justice autochtones et assurent des
délinquant a non plus «vraie», plus «satisfaisante». services aux adultes et aux jeunes,
seulement avoué avoir Ces initiatives prennent diverses selon leur mandat.
commis les actes de formes; il s’agit, entre autres, de
violence en question, comités communautaires ou de Un résumé de la création des
mais c’était lui qui comités de justice pour la jeunesse
comités de justice pour la jeunesse,
avait demandé de au Manitoba montre l’évolution et
de comités de surveillance, de
participer au projet.» le potentiel de ces différentes
comités correctionnels, de comités
de détermination de la peine, etc. initiatives.
Projet de prise de «Normalement, les comités de
décision en famille - Quel que soit le type de comité,
dans la plupart des cas ils justice évoluent lentement,
Rapport du
comprennent des bénévoles ou des prenant de l’ampleur avec
programme
Aînés qui, souvent, font appel à l’expérience et le temps. Au
des mesures réparatrices comme le début, souvent, il s’agit d’une ou
dédommagement, la réparation, la de quelques personnes qui
médiation et la participation de la reconnaissent que la collectivité
elle-même a la capacité de

81 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
résoudre les problèmes. Winnipeg et a assisté à un «cercle
L’expérience montre que, lorsque d’enseignement» organisé
cette petite perception est soutenue hebdomadairement par la collectivité.
par une certaine résolution et, Au moment de la détermination de la
peut-être, un sentiment de peine, la Couronne était la seule partie
responsabilité civique, elle peut qui réclamait une peine
donner des résultats. Les gens d’emprisonnement, alors que le comité
s’engagent. Ils assument des de détermination de la peine
responsabilités. Les questions sont recommandait une sanction
examinées et analysées à la communautaire. Le juge Heino Lilles
lumière des connaissances locales. présidait la Cour de circuit à ce
Les résultats dépassent ceux moment-là. L’épouse de cet homme,
obtenus par le système de justice une victime d’agression sexuelle,
traditionnel. Les comportements d’abord aux prises avec des sentiments
changent. Il y a une réconciliation de colère, de trahison et de culpabilité
avec la collectivité. Celle-ci se sent mais, au moment de la détermination
davantage en sécurité. de la peine, son attitude avait changé.
Visiblement, les comités de justice Selon le juge Lilles :
permettent à la collectivité de
croire qu’elle a vraiment quelque [traduction]
chose à contribuer. On peut «Mme P. a expliqué dans son
soutenir que c’est sur cela même témoignage comment elle
que repose la santé de l’individu, avait réagi en apprenant ce
de la famille et de la collectivité.» que son mari avait fait, mais
(Roger Bates, Comités de justice elle a aussi décrit les
du Manitoba) changements qu’elle avait
observés dans son mari au
Projet de justice tribale de cours de l’année écoulée. Ils
ont parlé ouvertement du
Teslin - Comité de
problème, y compris de la
détermination de la peine nécessité pour l’un et l’autre
de se faire traiter pour leurs
Un cas problèmes d’alcool. Ils sont
allés subir un traitement
En 1991, un homme âgé de 42 ans a ensemble et tous deux,
plaidé coupable d’agression sexuelle accompagnés de leur fille
contre sa fille de 13 ans, d’attentat à la aînée, participent au «cercle
pudeur d’une autre fille et de rapports de guérison» chaque semaine.
sexuels avec un enfant adoptif de Elle a décrit les changements
13 ans. Il se serait normalement vu positifs survenus dans leur
infliger une peine d’emprisonnement. relation depuis la
Après avoir plaidé coupable, l’homme divulgation, y compris la
a suivi un traitement pour ses communication libre, la
problèmes d’alcool, s’est inscrit à des sincérité et la vérité dans
séances de sensibilisation aux leurs rapports et le courage
agressions sexuelles données à de la part de son mari de

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 82
reconnaître et d’avouer sa type d’infraction, le juge Lilles a dit
délinquance. La mère et la ceci dans sa décision :
fille appuient toutes deux la
décision ne comportant pas le [traduction]
placement sous garde «Il est intéressant de noter
recommandé par le plan, que les psychologues
l’une trouvant que professionnels et les
«l’emprisonnement arrêtera travailleurs sociaux n’ont
le processus de guérison en commencé qu’assez
cour» et l’autre, que le père récemment à comprendre
fait «partie intégrante de son tout l’effet dévastateur de ce
processus de guérison à elle». cycle de violence. Vu les
coutumes et les traditions
La collectivité de même que le comité tlingites, ce peuple le
de détermination de la peine ont aussi reconnaît de toute évidence
recommandé une sanction depuis des siècles. En outre,
communautaire, comme l’a rapporté le comme notre droit pénal est
juge Lilles : axé tout particulièrement sur
le délinquant, il ne peut
[traduction] s’occuper efficacement de la
«Le chef Keenan a souligné victime, de la famille ou de la
que l’attitude tlingite des collectivité du délinquant....
abus sexuels à l’égard des Dans l’affaire qui nous
enfants est qu’une telle intéresse, ils ont demandé
conduite n’est pas tolérée. Il une décision adaptée sur le
a affirmé qu’il n’y a pas de plan culturel, destinée à
place dans leur société pour promouvoir la guérison de la
ce genre d’activité. Il a famille, qui réprouverait les
déclaré dans son témoignage abus sexuels à l’égard des
que l’approche tlingite vise enfants dans la collectivité et
principalement non pas à qui encouragerait d’autres
retirer le délinquant de la victimes et délinquants à
collectivité mais à demander à suivre un
promouvoir la guérison de la traitement à faire l’objet et de
victime et de l’agresseur au mesures de réadaptation.»
sein de la collectivité... Le (on trouvera dans les
délinquant, les victimes et le observations sur les cercles de
reste de la famille doivent se détermination de la peine à la
réunir dans le «cercle de page - des mises en garde
guérison» afin de «briser le concernant le recours à ces
cycle d’abus» qui autrement processus pour les femmes
se perpétuera de génération qui risquent d’être
en génération.» victimisées encore davantage
par ce type de justice
Après avoir appris quelle était communautaire à moins que
l’attitude de la collectivité face à ce

83 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
des mesures de protection région du sud du Yukon le long de
adéquates ne soient prévues.) la route de l’Alaska. La
population est surtout autochtone
En prononçant la peine, le juge Lilles a et la bande tlingite de Teslin
souscrit aux recommandations du compte environ 700 membres. Un
comité et formulé les observations Aîné de chacune des cinq bandes
suivantes : tinglites siège au côté du juge de la
cour territoriale et le conseille sur
[«Dans cette affaire, j’ai les décisions qui touchent
entendu des témoignages au directement un membre de la
sujet de l’humiliation qui collectivité. Outre qu’ils
accompagne la divulgation participent aux procédures, les
d’une infraction comme celle- Aînés jouent un rôle important
ci dans une collectivité de la dans l’élaboration de solutions
taille de Teslin. D’abord, il y communautaires et de solutions de
a le choc, puis l’expression de rechange à l’incarcération auquel
consternation sur le visage la cour peut avoir recours. Selon
des voisins. Il faut s’habituer un dirigeant communautaire,
à l’humiliation quotidienne et «notre système de justice tribale
en même temps chercher à se permet à nos Aînés, qui
faire pardonner non connaissent bien le délinquant, de
seulement par la victime, s’attaquer aux causes profondes
mais par la collectivité dans des problèmes de comportement
son ensemble. Car, dans une du délinquant et d’infliger ensuite
culture autochtone, un une peine qui en tient compte».
véritable tort a été infligé à Ce projet permet aux intéressés de
tous. Une sanction retrouver leurs coutumes et usages
communautaire fait durer traditionnels et aide à élaborer un
l’humiliation au moins système de justice plus efficace et
jusqu’à ce que tous aient plus sensibilisé aux besoins et aux
pleinement pardonné. Une aspirations de la collectivité.
peine d’emprisonnement
soustrait le délinquant à cette Dans ce projet, la cour fait partie
obligation quotidienne de intégrante d’un processus
rendre compte, n’aide peut- communautaire et le délinquant est
être en rien à sa réadaptation tenu responsable de ses actes
et, souvent, est plus facile à devant la cour et devant la
purger que rester dans la collectivité dans son ensemble.
collectivité.» Comme l’a expliqué un membre
du conseil de la bande, «ce
Description du projet processus donne au délinquant le
sentiment qu’il fait partie
Le projet de justice de Teslin a été intégrante de la collectivité, qu’il a
mis en place en 1991 dans la des responsabilités et qu’il a une
collectivité de Teslin, située dans la obligation envers la collectivité».

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 84
Tous les habitants de la collectivité personne, y compris du
peuvent s’adresser au projet de délinquant.
justice tribale de Teslin et aucun
type d’infraction n’est exclu. Les Le projet de justice tribule de
Aînés connaissent bien le Teslin comprend aussi le cercle de
délinquant et peuvent discuter guérison, une initiative
avec les membres de leur clan des communautaire dans le cadre de
types de décisions qui seront laquelle les habitants se réunissent
recommandées à la cour; ainsi, volontairement pour discuter de
presque tous les membres de la leurs problèmes. Les victimes, les
collectivités sont mis au courant de délinquants, leurs familles et
la conduite du délinquant. Après d’autres membres de la collectivité
avoir écouté les remarques finales participent en formant un cercle au
du juge, les Aînés se retirent pour sein duquel ils discutent
discuter de leurs franchement de leurs inquiétudes
recommandations, lesquelles et expriment leurs sentiments; il
doivent être adoptées par voie de s’agit d’un processus analogue à la
consensus. Ce processus permet thérapie de groupe. Ces cercles
aux Aînés de reprendre leur rôle fonctionnent de façon officieuse;
traditionnel pour ce qui est du les seules ressources sont les
règlement des différends dans la participants eux-mêmes. En
collectivité et de démontrer à celle- général, ils sont organisés de façon
ci leur sagesse et leur esprit éclairé, spontanée et les gens apprennent
ce qui aide à rétablir le respect des leur tenue de bouche à oreille.
coutumes et usages traditionnels.
Personne-ressource :
Les décisions recommandées par Georgina Sydney
C.P. 133
les chefs du clan sont censées tenir
Teslin (Yukon)
compte des préoccupations et des Y0A 1B0
valeurs culturelles de la collectivité Tél. : (403) 390-2532
et favoriser la réadaptation du Téléc. : (403) 390-2204
délinquant; il s’agit généralement
d’une ordonnance de probation
assortie des conditions
recommandées. Cette décision Comité de justice de
s’inscrit dans l’optique autochtone Wabasca
selon laquelle une mauvaise action (Alberta)
est comme une maladie dans la
collectivité qu’il faut guérir au sein
de celle-ci par un processus de
Un cas
guérison holistique. Selon un
L’audience a commencé avec une
membre du conseil de la bande,
prière et s’est déroulée en cri,
«la collectivité tlingite ne peut se
première langue de tous les
passer d’aucun de ses membres»;
participants à l’exception de l’agent
on reconnaît la valeur de chaque
de police qui a lu un rapport de

85 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
police sur l’infraction. Il s’agissait Comité de détermination
de conduite avec facultés affaiblies et de la peine du lac des
l’agent a assisté au reste de
l’audience. Le travailleur auprès du
Esclaves
tribunal a lu l’information fournie (Alberta)
par les services de probation, pris des
notes et fourni divers renseignements Un cas
juridiques. Les membres du comité
de détermination de la peine, qui Le jeune contrevenant n’était pas
connaissaient assez bien le autochtone et la procédure s’est
délinquant et sa famille, ont décrit déroulée en anglais. le comité de
les efforts déployés par d’autres détermination de la peine se
membres de la famille pour ne pas composait de trois membres, dont
boire, parlé du rôle important du l’un était autochtone et les deux
jeune homme sur le plan des finances autres, non-autochtones. Chaque
dans sa famille et de sa mauvaise membre s’est présenté au jeune
conduite dans le passé, et ont dit au contrevenant, qui était accusé d’une
délinquant que sa conduite infraction contre les biens et d’une
automobile faisait peur à de infraction contre la personne. Un
nombreux membres de la collectivité. agent de la GRC a fourni des
Son respect pour les membres du renseignements et est parti peu
comité de détermination de la peine après. D’autres renseignements ont
était évident tout au long de été reçus par télécopieur des services
l’audience. On lui a posé différentes de probation (ils ont été lus par le
questions et, ultérieurement, on lui a travailleur auprès du tribunal). On
demandé ce qu’il pensait de la peine a demandé au jeune contrevenant de
recommandée. Il semblait très donner sa version des faits et on l’a
soulagé et a dit qu’il la trouvait à interrogé au sujet de certains
propos. À la fin de l’audience, renseignements fournis dans le
chaque membre du comité a serré le rapport de police. On a ensuite
délinquant dans ses bras. Le jeune demandé à son père de venir et on lui
homme était visiblement ému. a posé des questions au sujet de la
façon dont le jeune contrevenant
Personne-ressource : avait été élevé. Les membres du
Native Counselling Services of comité de détermination de la peine
Alberta ont adressé de vives réprimandes
800 Highfield Place
10010 - 106iè rue tant au jeune contrevenant qu’à son
Edmonton, Alberta père. Après avoir discuté avec l’un
T5J 3L8 et l’autre, ils sont parvenus à un
Tél: (403) 423-2141
Télec: (403) 424-1173
consensus. Ils ont ordonné au jeune
contrevenant de dédommager la
victime, de lui présenter ses excuses
et de fréquenter l’école assidûment
ou bien de trouver un emploi. Le
père du jeune contrevenant a
remercié le comité de détermination

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 86
de la peine, déclarant que son fils se sont moins portés à commettre des
remettrait dans le droit chemin grâce infractions s’ils doivent rendre des
à leur aide. comptes aux membres de leur
propre collectivité.
Comités de justice pour
la jeunesse Les comités de justice pour la
jeunesse sont des groupes de huit
Les comités de justice pour la à quinze bénévoles qui se
jeunesse existent au Manitoba réunissent pour se pencher sur les
depuis 1975 et en Alberta depuis questions sociales et de justice
1990. D’autres provinces les dans la collectivité. Généralement,
mettent sur pied également. Ces il s’agit d’enseignants, de policiers,
comités administrent par exemple de parents, de jeunes, de citoyens
le programme de solutions de du troisième âge, d’autres
rechange à l’incarcération à Terre- spécialistes, de gens d’affaires,
Neuve. d’hommes de métier, de membres
de divers groupes culturels ou
Ils servent à rappeler que de ethniques et d’autres citoyens
nombreuses collectivités se intéressés. Dans la plupart des cas,
chargent encore de remettre dans le comité dessert une localité
le droit chemin ceux de leurs géographique donnée, c.-à-d. une
membres qui ont des problèmes. réserve, une petite collectivité
Selon les fonctionnaires du rurale ou un district urbain.
Manitoba, les comités de justice
pour la jeunesse ont réussi à Les comités de justice pour la
rétablir les liens entre les jeunesse sont créés en vertu de la
délinquants et leur famille, leur Loi sur les jeunes contrevenants selon
école, leurs pairs ou la collectivité laquelle ils peuvent «prêter leur
elle-même. Ce sont les membres concours, à titre bénévole, à la
de la collectivité qui peuvent mise en oeuvre de la présente loi
surveiller les autres pendant leurs ainsi qu’à tout service ou
activités courantes, les aider avec programme pour jeunes
leurs problèmes et faire pression contrevenants». Les deux modèles
sur les malfaiteurs pour les amener les plus courants sont chargés soit
à changer de comportement. Bon de la détermination de la peine,
nombre de ces collectivités sont soit de la déjudiciarisation avant
d’avis que l’emprisonnement n’est procès. Lorsqu’ils font fonction de
pas la bonne réponse pour ces comités de détermination de la
jeunes qui ont des démêlés avec la peine, ils interrogent les personnes
justice et qu’au contraire, ils y concernées, puis formulent une
apprendraient d’autres recommandation à l’intention du
comportements criminels. La juge. La déjudiciarisation avant
collectivité préférerait que les procès, d’autre part, permet
jeunes restent à la maison et dans d’éviter de saisir un juge de
la collectivité, persuadée qu’ils l’affaire et de créer un casier de

87 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
jeune contrevenant. Les comités paix. Cette initiative donne de
de justice pour la jeunesse peuvent bons résultats et on espère créer
aussi participer à la surveillance un comité de justice pour la
des progrès des jeunes jeunesse à l’avenir.
contrevenants et entreprendre
des projets d’éducation Personne-ressource :
communautaire dans le domaine Danny Beaulieu
P.O. Box 1899
de la prévention du crime.
Fort Resolution, NT
X0E 0M0
Personnes-ressources : Tél. : (403) 394-4335
Roger Bates
Coordonnateur
Conseil provincial de justice pour
la jeunesse
Justice Manitoba Comité de justice
8e étage, 405 Broadway
Winnipeg (Manitoba) communautaire de
Tél. : (204) 945-0973 Russell Heights
Téléc. : (204) 945-5537
Ottawa (Ontario)
Wanda Penney
Division des services
correctionnels pour la jeunesse
Les habitants d’un quartier
Ministère des services sociaux d’Ottawa ont créé un comité de
pour la jeunesse justice communautaire pour
C.P. 8700 promouvoir une réponse
St-John’s, Terre-Neuve
A1B 4J6 communautaire plus utile, plus
Tél: (709) 729-2480 efficace et plus rapide à la
Téléc: (709) 729-0583 criminalité, à commencer par les
jeunes qui ont des démêlés avec
la justice. Le comité de justice
communautaire de Russell
Comité de justice des Heights entend mener son
Aînés activité selon les principes de
justice réparatrice et non le
Fort Resolution principe du châtiment. Encore à
(Territoires du Nord- l’étape de la mise en oeuvre, il
Ouest) s’occupera des cas qui lui seront
envoyés, le souhaite-t-il, par la
La collectivité de Fort Resolution, police ou la Couronne et,
sous l’autorité du sous-chef ultérieurement, peut-être aussi
Danny Beaulieu, a créé en d’adultes. Le comité se compose
janvier 1995 un comité de justice de sept membres, y compris trois
des Aînés composé de six résidents, un membre des
membres. Le comité assiste à Services juridiques
toutes les audiences du juge de communautaires d’Ottawa-sud,
paix dans la collectivité et un membre du Centre du sud-est
conseille le tribunal. d’Ottawa pour une communauté
Danny Beaulieu est aussi juge de en santé, d’un représentant du

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 88
procureur de la Couronne et d’un 500 jeunes âgés de moins de
représentant des Services de 21 ans. Tous sans exception
probation (jeunes). touchent des prestations
d’assistance sociale ou sont de
Le comité veut obtenir la petits salariés. Dans la majorité
participation au processus de des cas, il s’agit de familles
détermination de la peine de monoparentales dont le chef est
personnes qui ont certains liens généralement une femme, et plus
avec le délinquant, afin que tous de la moitié des résidents sont de
puissent collectivement nouveaux Canadiens qui ont
recommander la peine la plus à émigré au pays au cours des dix
propos dans le cas donné. Selon dernières années.
la peine recommandée, le comité
en surveillera l’application et Personne-ressource :
fournira au délinquant le soutien Douglas Henderson
Centre du sud-est d’Ottawa
voulu.
pour une communauté en santé
225 - 1743, boul. Saint-Laurent
La collectivité de Russell Heights Ottawa (Ontario)
est un ensemble de logements K1G 3V4
Tél. : (613) 521-9100
subventionnés pour personnes à Téléc. : (613) 521-2354
faible revenu qui compte quelque
700 résidents, y compris

89 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Troisième section :
Pour une vraie justice
- +

Série d’initiatives destinées à éviter le recours à


l’emprisonnement, comportant ou ne comportant pas
certains éléments réparateurs.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Table des matières
Série d’initiatives destinées à éviter le recours à l’emprisonnement, comportant ou ne comportant pas
certains éléments réparateurs.

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .90

1. Déjudiciarisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .92
Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .92
Projet de déjudiciarisation des adultes de Nouvelle-Écosse -
Dartmouth et Sydney Nord . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .93
Projet de déjudiciarisation du Conseil communautaire -
Services juridiques autochtones de Toronto . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .95
Projet d’approche de la cour - Aide aux délinquants malades mentaux - Ottawa . . . . . . . . . . . . . .97
Solution de rechange communautaire à l’emprisonnement
pour infractions sexuelles, Canim Lake (C.-B.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .99
Conseil de déjudiciarisation micmac de l’île Lennox - Île-du-Prince-Édouard . . . . . . . . . . . . . . . . .101
Entraide vol à l’étalage, Montréal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .102
Projet de médiation et de déjudiciarisation à l’intention des jeunes -
Shaunavon (Saskatchewan) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .105
Programmes de mesures de rechange à l’incarcération . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .106

2. Programme d’absolution pour suivre une cure de désintoxication - Yukon . . . . . . . . . . . . . . .110

3. Ordonnances de service communautaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .113


Service communautaire en Nouvelle-Écosse - Exemples de réussite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .113
Youth Alternative Society - Halifax . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .114
Ordonnances de service communautaire - Québec . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .115
Ordonnances de service communautaire - une perspective internationale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .118
Peines de service communautaire - Minnesota . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .118
Service communautaire - Norvège . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .119
Service communautaire pour adultes et jeunes aux Pays-Bas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .120
Service communautaire - Zimbabwe et Swaziland . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .121

4. Probation sous surveillance intensive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .122


Projet de bureau d’aide juridique pour les jeunes - Edmonton et Calgary . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .122
Programme communautaire de probation réparatrice - Vermont . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .124
Projet Dos Pasos à l’intention des femmes enceintes et toxicomanes - Arizona . . . . . . . . . . . . . . . .126
Solution de rechange au programme de placement sous garde des jeunes -
Kitchener-Waterloo (Ont.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .127
Second Chance - Restitution, Lloydminster, Alberta and Saskatchewan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .129
Programme d’intervention intensive - St. John’s (T.-N.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .129
Programme d’intervention communautaire d’Eastwood - Edmonton (Alb.) . . . . . . . . . . . . . . . . . .131
Programme de la rue Rideau pour la jeunesse - Ottawa (Ont.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .132
Sober Streets - Programme de lutte contre l’alcool au volant - Kitchener-Waterloo (Ont.) . . . . . . .134

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Projet à l’intention des récidivistes de la conduite avec facultés affaiblies -
Île-du-Prince-Édouard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .135
Programme à l’intention des adolescents toxicomanes - Île-du-Prince-Édouard . . . . . . . . . . . . . . .135
MAPP - Programme de prévention axée sur la collaboration interorganismes à l’intention
des jeunes qui présentent des risques élevés - Brandon (Man.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .137
A.I.M. - Programme d’évaluation d’intervention et de surveillance - Brandon . . . . . . . . . . . . . . . .137

5. Modèle de préservation de la famille . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .138


La Ronge (Sask.) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .138
Services de soutien communautaire, St. Lawrence Youth Association - Kingston . . . . . . . . . . . . . .140
Programmes de préservation de la famille aux États-Unis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .141
Projet de préservation de la famille de Simpsonville, Caroline du Sud . . . . . . . . . . . . . . . . . .142
Programme de liens familiaux «Family Ties» - ville de New York . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .142

6. Programmes résidentiels/de placement - solutions de rechange . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .143


Opportunities for Independence: Programme à l’intention des délinquants
ayant un handicap de développement - Winipeg (Manitoba) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .143
Programme de maisons communautaires - Saskatchewan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .146
Expansion - Femmes de Québec, Québec . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .147
Maison Thérèse - Casgrain, Montréal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .148
Programme résidentiel pour jeunes délinquants sexuels - Ottawa . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .149
Foyers d’accueil Maple Star - Colorado . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .150
Programme d’internat et d’externat «Youth Futures» - vallée du bas Fraser (C.-B.) . . . . . . . . . . . .152
Ran El’dad pour hommes adultes ayant une déficience mentale - Steinbach (Man.) . . . . . . . . . . . .154

7. Programme de solutions de rechange au cautionnement et sanctions administratives . . . . . .155


Libération provisoire des jeunes par voie judiciaire - Saskatchewan . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .155
Centre Ma Ma Wi Wi Chi Itata - Winnipeg . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .157
Programme de solutions de rechange à l’amende - Yukon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .157
Sanctions administratives - Yukon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .158

8. Planification axée sur le client . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .159


Services de défense des droits au moment de la détermination de la peine:
Centre national des établissements et des solutions de rechange des États-Unis . . . . . . . . . . .160
Planification axée sur le client - Caroline du Nord . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .161
Planification axée sur le client - Nouveau-Mexique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .161

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Introduction

On trouvera dans cette section un davantage axée sur la «justice


plus vaste éventail d’initiatives réparatrice»; cette approche
dont la plupart visent pourrait accroître sensiblement la
principalement à permettre de capacité de ces mesures de rendre
prendre des décisions en matière une justice que le public percevrait
de détermination de la peine qui comme davantage satisfaisante.
sont davantage dans l’intérêt du
délinquant ou de la victime Bien que ces initiatives aident
qu’une peine d’emprisonnement. dans certains cas à éviter le
Ces initiatives ont tendance à être placement sous garde, elles n’ont
axées sur le délinquant et à pas réduit le recours à
faciliter un meilleur accès aux l’incarcération de façon générale.
services sociaux et de santé requis. En outre, elles «élargissent le filet»
Certaines mettent l’accent sur le de deux façons. On peut y avoir
milieu familial et social. Peu recours pour exercer une plus
d’entre elles cependant portent grande coercition et un plus grand
également sur la communication contrôle sur des personnes qui
entre la victime et le délinquant ou autrement feraient l’objet
sur la question de la réparation. d’accusations moins graves ou
Quelques-unes seulement recevraient une peine moins
prévoient la participation de la sévère. Certaines de ces mesures,
collectivité comme telle; ces au lieu de remplacer les peines
activités sont généralement d’emprisonnement, viennent s’y
menées par des organismes qui se ajouter; elles constituent des
substituent à la collectivité (bien décisions beaucoup plus
que certaines fassent appel à des «valables» que l’imposition d’une
réserves importantes de bénévoles peine d’emprisonnement, mais les
dans la collectivité). fonctionnaires du système de
justice pénale n’arrivent pas à se
Par ailleurs, bon nombre de ces défaire de leur engouement pour
organismes et services ont une l’emprisonnement comme
charge de travail trop lourde et un symbole de la lutte acharnée
personnel insuffisant, ce qui peut menée contre le crime. Par
réduire sensiblement leur capacité conséquent, le recours à ces
de porter l’attention nécessaire mesures a malheureusement eu
pour qu’une décision soit valable pour effet d’accroître la
et pour que le public la considère bureaucratie et les coûts liés à la
comme une solution de rechange lutte contre la criminalité plus
viable à l’emprisonnement. qu’il n’a permis d’atteindre
Certaines initiatives très l’objectif visé qui était de réduire
innovatrices, toutefois, sont le recours à l’incarcération.
fondées sur une approche

90 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
On peut changer cet état des qu’une peine d’emprisonnement
choses. Nous exposons dans cette parce qu’ils ne sont pas encore
section les cas qui, à notre avis, prêts à apporter dans leur vie les
illustrent le mieux le recours changements exigés par certaines
efficace à ces mesures comme de ces interventions; par exemple,
véritables solutions de rechange à ils préfèrent aller en prison et se
l’emprisonnement dans le cas remettre ensuite à boire.
d’infractions plus graves. À
chaque fois, il faut se demander La gamme des initiatives exposées
pourquoi on n’a pas recours à ces dans cette section comporte
mesures plus souvent. En outre, certaines interventions excellentes
chaque fois qu’on a recours à et nécessaires qui auraient une
l’emprisonnement, il convient de incidence plus importante sur le
se demander à quelle fin cette système de justice pénale si elles
mesure est nécessaire. Sur qui a-t- comprenaient plus d’éléments
elle l’effet souhaité? Justifie-t-elle réparateurs et si on y avait recours
vraiment les coûts plus élevés qui plus hardiment comme solutions
y sont liés, ou pourrait-on obtenir de rechange à l’incarcération.
les mêmes résultats d’une autre Elles diffèrent des initiatives
façon? présentées dans la quatrième
section en ce qu’elles sont en
Bien entendu, la sous-utilisation général plus clairement axées sur
de certaines de ces mesures de les particularités de chaque cas et
rechange tient aussi à d’autres le souci de remplacer
facteurs. Curieusement, alors que l’incarcération par une mesure
certains membres du public propre à mieux répondre aux
croient que le système de justice objectifs de justice visés, au lieu
est «trop indulgent» à l’égard des d’être axées surtout sur le besoin
criminels, certains délinquants de réduire le surpeuplement des
trouvent les mesures de rechange établissements carcéraux.
à l’incarcération plus difficiles

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 91
1. Déjudiciarisation

Introduction donne lieu à d’importantes


économies d’argent. Elle permet
La déjudiciarisation permet aux aussi de réaffecter une partie des
intéressés d’assumer la ressources limitées dont dispose
responsabilité et d’accepter les le système de justice pénale aux
conséquences de leur mauvaise poursuites intentées dans les cas
conduite tout en les soustrayant, d’infractions graves.
entièrement ou en partie, aux
aspects du système de justice Toutefois, les programmes de
pénale pouvant avoir pour effet à déjudiciarisation font l’objet de
long terme de les stigmatiser et critiques lorsque, d’une part, ils
de les marginaliser. Au Canada, se traduisent par des procédures
toute une gamme de mesures de plus complexes et, d’autre part,
déjudiciarisation avant et après la augmentent le nombre des
mise en accusation s’offrent dans personnes assujetties à des
le cas des jeunes, de même qu’un sanctions et accroissent l’intensité
nombre croissant de mesures du contrôle exercé dans la société.
applicables aux adultes. Il Parfois, les mesures proposées
appartient à la police ou à la par les programmes de
Couronne, ou aux deux, de déjudiciarisation sont jugées
décider s’il y a lieu ou non «indulgentes» ou non pertinentes,
d’avoir recours à la bien que certains délinquants
déjudiciarisation dans un cas trouvent le processus beaucoup
donné. plus difficile que la comparution
devant un tribunal impersonnel.
Le délinquant reconnaît avoir Plus elles sont adaptées aux
commis l’infraction alléguée, puis besoins du délinquant et de la
rencontre un préposé au victime et aux circonstances de
programme de déjudiciarisation l’infraction, plus ces mesures
pour préparer la réponse permettront de rendre une «vraie
appropriée, par exemple, des justice».
excuses présentées verbalement
ou par écrit, la restitution ou le
service communautaire.

Comme on ne crée pas un casier


judiciaire, le risque de récidive est
moins élevé. La déjudiciarisation
représente une économie de
temps pour les tribunaux et

92 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Projet de déjudiciarisation, l’affaire sera
déjudiciarisation des renvoyée à la police qui engagera des
poursuites judiciaires.
adultes de Nouvelle-
Écosse - La victime et la délinquante sont
Dartmouth et North toutes deux satisfaites de l’entente
Sydney intervenue. Selon un agent de
probation du ministère de la Justice,
Un cas ce type de mesure de
déjudiciarisation «favorisera
La délinquante est une divorcée âgée l’adoption d’approches fondées sur
de 38 ans et mère de deux enfants les principes de justice réparatrice au
qui touche des prestations sein du système de justice pénale».
d’assistance sociale. Elle a été
accusée d’avoir fraudé le système de Description du programme
14 000 $. La victime et la
délinquante ont convenu que la Le projet pilote de
restitution serait une solution déjudiciarisation des adultes à
acceptable. Conformément à la Dartmouth et à North Sydney en
procédure établie pour notre Nouvelle-Écosse a plusieurs
programme, la police a déposé objectifs clés :
l’accusation mais ne l’a pas versée au • offrir des moyens d’accroître
registre de la Cour, puis elle a l’efficacité et l’efficience du
renvoyé le cas directement à notre traitement des cas;
personnel. On a communiqué avec • offrir au système de justice
la victime pour connaître ses désirs pénale une option concrète, axée
et inquiétudes et on a demandé à la sur l’obligation de rendre compte
délinquante si elle souhaitait et accessible au délinquant, à la
participer au programme de victime et à la collectivité;
déjudiciarisation. À la suite d’une • donner à la victime l’occasion
entrevue d’évaluation menée par de participer activement à un
l’agent de probation préposé au processus qui vise à régler
programme de déjudiciarisation au l’affaire à la satisfaction des
sujet de l’infraction et du règlement parties;
proposé, la cliente a signé une • élaborer des initiatives
entente écrite par laquelle elle destinées à promouvoir un
s’engageait à faire des versements de comportement responsable et
100 $ au bureau d’assistance sociale. prosocial chez le délinquant
adulte et qui soient compatibles
La délinquante travaille à temps avec les objectifs de protection de
partiel, mais elle cherche assidûment la société;
un meilleur emploi et espère • réduire le risque de récidive.
rembourser toute la somme plus
rapidement. Si elle ne respecte pas la Les tribunaux se trouvent aux
condition de l’entente de prises avec un important arriéré

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 93
d’affaires relativement peu libellé de cet article est similaire à
graves, ce qui entraîne de coûteux celui des dispositions de la Loi sur
délais dans le traitement des les jeunes contrevenants qui
Toutefois, le droit pénal affaires où il est question semblent exiger que le renvoi soit
n’est pas le seul moyen de
d’infractions plus graves et de fait par les procureurs de la
soutenir les valeurs, ni
nécessairement toujours violence. D’après une analyse Couronne ou les représentants du
le meilleur. En réalité, le des causes devant les tribunaux procureur général. La police peut
droit pénal est un outil en 1993, le ministère de la Justice agir à titre de représentant du
dur et coûteux - dur de la Nouvelle-Écosse a calculé procureur général, mais d’autres
parce qu’il n’a pas la qu’on pouvait avoir recours à ce intervenants dans le système
sensibilité humaine de la
projet pour déjudiciariser jusqu’à craignent que les mesures de
famille, de l’école, de
l’église ou de la 600 affaires dont le tribunal de protection dont bénéficie le
collectivité, et coûteux Dartmouth était saisi. Selon une délinquant ne soient réduites si la
parce qu’il inflige la évaluation préliminaire des sept Couronne ne participe pas à
souffrance, impose la premiers mois du projet, 180 cas l’examen des cas renvoyés.
perte de la liberté et ont effectivement été
entraîne des frais élevés.
déjudiciarisés. La différence entre Les préposés au projet de
Ainsi, il faut avoir le nombre prévu et le nombre réel déjudiciarisation tâchent
recours au droit de renvois s’explique en partie d’élaborer, de concert avec le
pénal en dernier par la baisse des taux de crimes ministère public, un protocole qui
ressort et le moins signalés et les modifications permettrait à la police de
possible. Il ne faut apportées aux politiques de la renvoyer directement les cas
pas diluer le message
police régissant les mises en impliquant certains types
en le répétant trop
souvent - trop de lois, accusation dans le cas de d’infractions et aux procureurs de
d’infractions, plusieurs infractions peu graves. la Couronne, peut-être, de
d’accusations, de renvoyer les cas d’infractions plus
procès et de peines Les cas sont renvoyés par la graves. Notre système de renvoi
d’emprisonnement. police aux agents de probation a donné d’excellents résultats
L’arme ultime de la
préposés au projet de jusqu’ici et rien ne permet de
société doit rester
dans sa gaine le plus déjudiciarisation. La police croire à un «élargissement du
longtemps possible. renvoie les cas directement et ne filet» ou à une violation des
Le mot d’ordre, c’est consulte le procureur de la droits des délinquants.
la retenue - en ce qui Couronne que lorsqu’elle le juge
concerne la portée du souhaitable ou que les préposés Les différentes options qui
droit pénal, le sens
au programme de s’offrent en matière de règlement
donné à la culpabilité
criminelle, le recours déjudiciarisation le jugent comprennent la restitution, les
aux procès criminels nécessaire. lettres d’excuse, le service
et l’imposition d’une communautaire bénévole, le
peine au criminel. Le renvoi de cas au programme service personnel à la victime ou
par la police soulève une question les dons de charité. Si le
Commission de
concernant les dispositions de délinquant ne se conforme pas à
réforme du droit du
Canada, Notre droit l’article 717 (sur les mesures de l’entente, l’affaire est renvoyée
pénal rechange à l’incarcération) du devant le tribunal.
projet de loi C-41 adopté
récemment par le Parlement. Le

94 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Selon une évaluation préliminaire Projet de
du programme, dans la plupart déjudiciarisation du
des cas renvoyés il s’agit de vol à
l’étalage et de voies de fait
Conseil communautaire -
simples; cependant, l’affaire de Services juridiques
fraude mentionnée ci-dessus autochtones
montre qu’on peut avoir recours Toronto (Ontario)
au processus de déjudiciarisation
dans le cas d’infractions beaucoup Le projet du Conseil
plus graves. À mesure qu’il communautaire des Services
devient évident que la juridiques autochtones de
déjudiciarisation permet de Toronto permet à la collectivité
rendre une justice vraiment autochtone de la plus grande ville
satisfaisante, le public et les au Canada d’exercer un certain
spécialistes feront sûrement contrôle sur le traitement réservé
davantage confiance au processus. par le système de justice pénale
aux délinquants autochtones.
Personne-ressource : Plutôt que d’être traduit devant
Ms. Janis Aitken,
Senior Probation Officer
un tribunal et d’avoir un casier
Suite 112 - 277 Pleasant Street judiciaire, un accusé qui reconnaît
Dartmouth Professional Centre avoir commis l’infraction en
Dartmouth, Nova Scotia question fait l’objet d’une mesure
B2Y 4B7
Tél. : (902) 424-5350 de rechange telle que la
Téléc. : (902) 424-0705 restitution, le service
communautaire, le counseling ou
En Colombie-Britannique, un le traitement. Les personnes qui
projet de déjudiciarisation des procèdent à une audience du
adultes sur l’île de Vancouver et le Conseil au cours de laquelle
Lower Mainland est en place s’amorce le processus de guérison
depuis les années 1970; le nécessaire à la réinsertion du
programme a été élargi délinquant dans la collectivité
récemment de manière à inclure peuvent avoir recours à n’importe
toute la province. quelle option sauf
l’emprisonnement. La plupart
Personne-ressource : des personnes déjudiciarisées
Barry Lynden par l’entremise du projet ont
Analyst - Adult Community
Services
déjà purgé une peine
B.C. Corrections Branch. d’emprisonnement auparavant.
7th floor, 1001 Douglas Street Dans la plupart des cas de
Victoria, B.C.
déjudiciarisation, il s’agit
V8V 1X4
Té. : (604) 356-7521 d’accusations de voies de fait, de
Téléc. : (604) 387-5698 sollicitation, d’infractions
mineures contre les biens et de
fraudes peu graves.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 95
Selon une description du reconnaissent que l’imposition de
programme, «Le concept du peines réalistes et valables
Conseil communautaire n’a rien dépend de la présence de
de nouveau. Les collectivités ressources adéquates dans la
autochtones du Centre et de l’Est collectivité. Comme de
du Canada avaient recours à ce nombreux organismes ont déjà
mécanisme pour rendre justice une charge de travail maximale,
pendant des siècles avant toute expansion du projet
l’arrivée des Européens en dépendra nécessairement des
Amérique du Nord. C’est encore ressources disponibles.
le mécanisme officieux auquel on
a recours dans de nombreuses Lorsqu’une personne ne se
réserves pour régler les conforme pas à une décision du
différends.... Nous savons que, Conseil, on lui demande de
dans le cas de la plupart des comparaître de nouveau devant
accusés autochtones, le système celui-ci pour s’expliquer. La
actuel ne fait que perpétuer le personne qui ne se conforme pas
syndrome de la porte tournante». à la décision rendue ne peut avoir
recours à cette option une
Le renvoi à ce projet de deuxième fois. Toutefois, les
déjudiciarisation a lieu à l’étape accusations ne sont pas déposées
initiale du système de justice de nouveau lorsqu’une personne
pénale. L’approche autochtone ne se conforme pas à une
recommandée est semblable aux ordonnance, sauf dans des
cercles, aux comités circonstances exceptionnelles.
communautaires ou aux comités Elles peuvent être remises en
des Anciens pour ce qui est de la vigueur, cependant, si l’intéressé
détermination de la peine. Une ne se présente pas à l’audience du
fois que la Couronne a consenti à Conseil.
la déjudiciarisation, l’intéressé
doit consulter l’avocat de la Personne-ressource :
défense ou l’avocat de service Patti McDonald
Coordonnatrice du Conseil
pour qu’il lui explique le
communautaire
processus, y compris les Services juridiques autochtones
différentes peines qui pourraient de Toronto
lui être infligées et les 97, avenue Spadina
Toronto (Ont.)
conséquences pour lui s’il ne M5T 2C8
remplit pas les conditions qui lui Tél. : (416) 408-3967
sont imposées. On recommande Téléc. : (416) 408-4268
à ceux qui estiment qu’ils ne sont
pas coupables de subir leur
procès. Si l’accusé accepte la
déjudiciarisation, la Couronne
suspend ou retire les accusations.
Les préposés au projet

96 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Le projet d’approche de développement et la schizophrénie. Il
la cour - Aide aux habite dans un centre d’hébergement
local pour hommes depuis près de
délinquants malades huit ans et le sergent Taylor craint
mentaux que d’autres habitants ne
Ottawa (Ontario) l’exploitent. En outre, il connaît
suffisamment bien John pour croire
Quelques cas que celui-ci s’arrangera pour avoir
bientôt des démêlés avec la justice
À Toronto, un homme assez âgé qui a afin d’obtenir de l’attention et de
été arrêté pour «vol de moins de l’aide. Il l’a déjà fait dans le passé et
1 000 $» est manifestement dans un la police a déposé des accusations
état de confusion d’esprit lors de sa contre lui. Grâce à l’initiative du
première comparution devant le sergent Taylor, un intervenant
tribunal pour mise en accusation. communautaire préposé à un projet
L’audience est ajournée brièvement pilote parrainé par les tribunaux a
pour permettre à un thérapeute rencontré John et l’a aidé à trouver
communautaire de faire une un nouveau logement et à y
évaluation rapide; il détermine que déménager. Il paraît que John
l’homme en question montre des s’adapte bien à son nouveau milieu.
signe de démence. L’audience est
ajournée pour plus longtemps et le Description du programme
thérapeute s’occupe de l’homme, lui
trouve un lit dans une maison de Le Projet d’approche de la cour
soins infirmiers et un psychologue. offre aux personnes ayant un
À la reprise de l’audience, la handicap psychiatrique, sans abri
Couronne suspend l’accusation ou qui risquent fort de se
portée, reconnaissant que retrouver sans abri et qui en
l’imposition d’une peine et la même temps ont des démêlés peu
création d’un casier judiciaire ne graves avec la justice un service
seront d’aucune utilité à la société ou de soutien ponctuel dont elles ont
à l’intéressé. Le travailleur grandement besoin.
communautaire garde le contact avec
l’homme en question. Jusqu’ici, seules les personnes
accusées d’infractions peu graves
À Ottawa, le sergent Paul Taylor, un y sont admissibles. Ces
agent de police chargé d’assurer la infractions comprennent les voies
liaison avec les tribunaux et qui s’est de fait simples, le vandalisme, le
déjà occupé de délinquants atteints fait de ne pas régler sa note au
de maladie mentale, voit qu’un restaurant ou le fait d’avoir
problème couve dans la vie de John allumé un feu pour se réchauffer.
qui pourrait aboutir à des démêlés La Couronne engage néanmoins
avec la justice. John est un homme des poursuites lorsqu’il s’agit
âgé de 42 ans chez lequel on a d’une infraction grave comme un
diagnostiqué un retard de homicide ou une agression à

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 97
main armée, ou si on croit que la solution de rechange à celle
personne présente un risque pour d’avoir à subir son procès ou
la collectivité. d’attendre de subir une
évaluation psychiatrique au
«Il s’agit de personnes qui ont des Centre régional de détention.
démêlés avec le système de Dans le passé, des accusations
justice pénale à cause de leur mineures pouvaient être retirées,
maladie, fait remarquer le mais seulement après plusieurs
procureur de la Couronne comparutions devant le tribunal.
Andrejs Berzins. ... Les sanctions De plus, en raison d’une pénurie
pénales habituelles n’ont pas de lits à l’hôpital psychiatrique
vraiment beaucoup de sens pour local, certaines personnes
elles.» passaient jusqu’à quatre semaines
en prison en attendant d’être
Berzins a remarqué que le évaluées. Souvent, elles étaient là
nombre de personnes atteintes de parce qu’elles étaient trop
maladie mentale qui étaient désorientées pour réclamer un
traduites en justice augmentait; il avocat et une audience de
s’agit actuellement d’environ cautionnement.
10 cas par semaine, chiffre qui a
triplé par rapport à celui d’il y a «Il ne suffit pas de retirer
trois ans. Selon lui, leur nombre simplement l’accusation sans
continuera d’augmenter à mesure prévoir un filet de secours,
que la province fermera d’autres explique Andrejs Berzins. Nous
lits dans les hôpitaux tâchons d’offrir une sorte de filet
psychiatriques. Ces personnes, de secours à ces gens.»
dont bon nombre sont des sans-
abri, tâchent de se tirer d’affaire Personne-ressource :
malgré le peu de soutien Bureau du procureur de la
communautaire structuré; Couronne
3e étage - 161, rue Elgin
certaines cessent de prendre leurs
Ottawa (Ont.)
médicaments. K2P 2K1
Tél. : (613) 239-1200
Deux intervenants Téléc. : (613) 239-1214
communautaires renvoient le
Les modifications apportées au
malade mental au projet et
système de soins de santé
tâchent de lui trouver un lieu
mentale ont eu pour
d’hébergement, puis un logement
conséquence, entre autres, de
permanent. Ils s’occupent aussi
transférer les malades mentaux
des visites chez le médecin, de
des établissements de ce système
l’évaluation psychiatrique et du
aux prisons. Certaines sphères de
traitement nécessaires et
compétence et certains
communiquent avec les
fournisseurs de services se
travailleurs en santé mentale.
penchent sur ce problème ainsi
Pour l’accusé, il s’agit d’une
que sur d’autres problèmes

98 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
connexes qu’ont les délinquants psychosociaux qui ont des
atteints de maladie mentale. démêlés avec le système de
(Voir le programme justice pénale; notamment, il les
Opportunities for Independence aide à retourner dans la
(occasions d’indépendance) de collectivité et à améliorer leur
Winnipeg exposé vers la fin de la qualité de vie en réduisant le
présente section.) En Colombie- nombre de séjours à l’hôpital et
Britannique, comme suivi de de réincarcérations.
l’Initiative pour la santé mentale
de 1987, un comité
interministériel a examiné les cas
des personnes souffrant de
Solution de rechange
troubles mentaux qui avaient déjà
eu des démêlés avec le système communautaire à
de justice pénale. L’enquête a l’emprisonnement
révélé que ces personnes passent pour infractions sexuelles
d’un système à l’autre; bon Canim Lake (Colombie-
nombre d’entre elles récidivent
Britannique)
une fois dans la collectivité et un
certain nombre sont réincarcérées.
Ce programme de
L’absence de soutien
déjudiciarisation a été mis sur
communautaire vient aggraver
pied principalement à l’intention
encore le problème. Deux projets
des délinquants accusés
visant à répondre à ces besoins
d’agression sexuelle et
ont été mis sur pied. Dans le
d’infractions connexes. Canim
cadre de l’initiative portant sur
Lake est une réserve autochtone
les Protocoles régissant les
dans le nord de la Colombie-
délinquants atteints de maladie
Britannique qui s’est trouvée aux
mentale de 1992, on a élaboré des
prises avec un problème d’abus
lignes directrices et déterminé les
sexuels. Comme l’a dit l’un des
domaines dans lesquels il y avait
dirigeants, si on emprisonnait
lieu d’établir des protocoles pour
tous les responsables, il ne
améliorer la coordination des
resterait presque plus d’hommes
services de traitement des
dans la collectivité. La solution
personnes souffrant de troubles
de rechange à l’incarcération
mentaux qui ont des démêlés
consistant à obliger les
avec la justice. Le but visé était
délinquants à subir un traitement
de mettre au point à l’échelle de
et d’assumer les conséquences de
la province un régime
leurs actes au sein de la
d’intervention uniforme, efficace,
collectivité elle-même a rallié
coordonné et humanitaire. Le
l’appui général. En outre, comme
Projet interministériel vient en
l’a expliqué un procureur de la
aide aux personnes ayant des
Couronne, la collectivité s’était
problèmes psychiatriques,
«tournée vers la déjudiciarisation
comportementaux, ou
parce que la protection des forces

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 99
policières à laquelle on s’attendait La police et la Couronne se sont
initialement s’était révélée un filet interrogées sur les mesures à
de sécurité plein de trous». Le prendre dans le cas d’individus
recours aux seules forces de qui avouent avoir perpétré des
l’ordre était une solution trop infractions graves avec violence
coûteuse et inefficace, qui n’ont aucun lien avec
particulièrement dans les l’infraction en question et qui
collectivités isolées. normalement feraient l’objet de
poursuites. Il est entendu
À la suite d’une étude qui a maintenant que les délinquants
révélé un taux d’abus sexuels qui avouent avoir commis des
élevé, la bande autochtone a infractions graves dans d’autres
retenu les services de consultants sphères de compétence à
qui ont recommandé le recours à l’extérieur de la réserve peuvent
la fois à des tests polygraphiques être poursuivis.
et à la thérapie pour aider à
surveiller et à traiter les L’intervention auprès des
délinquants sexuels. victimes fait partie intégrante du
projet pilote de deux ans mis sur
Les tests polygraphiques sont un pied à Canim Lake.
aspect controversé de ce
programme innovateur. La Personne-ressource :
victime, le délinquant et la Canim Lake Band
Charlene Blue, William Boyce
Couronne doivent s’entendre sur
100 Mile House, B.C.
le recours à cette solution de B0K 2E0
rechange. Les délinquants Tél. : (604) 397-2227
signent une renonciation par Téléc. : (604) 397-2769
laquelle ils acceptent de subir un
test polygraphique dans le cadre
de leur traitement. Ils doivent se
soumettre à ce test qui leur est
administré par la police lorsqu’ils
avouent les infractions qu’ils ont
commises dans le passé ainsi que
l’infraction actuelle. Il s’agit là
d’une «purification» qui constitue
l’étape initiale du processus de
réconciliation avec la collectivité.
La première personne dont le cas
a été renvoyé au programme en
janvier 1994 a avoué au cours de
ce test avoir commis 21 autres
agressions sexuelles. On a pu
déterminer que cet homme avait
agressé environ 45 victimes.

100 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Conseil de système de justice pénale. Grâce
déjudiciarisation micmac au conseil de déjudiciarisation, la
collectivité est mise au courant du
de l’île Lennox crime commis et participe au
Île-du-Prince-Édouard règlement de l’affaire. Ce projet a
été mis sur pied il y a plus de
Ce projet est fondé sur les quatre ans et s’occupe surtout
principes de «l’opprobre destiné à d’infractions mineures comme le
faciliter la réinsertion sociale» et vandalisme et autres infractions
la participation de la collectivité contre les biens. Les récidivistes
pour empêcher la récidive. sont admis à ce programme
«L’opprobre destiné à faciliter la moyennant l’approbation de la
réinsertion sociale du délinquant» police. Initialement, le projet s’est
est une phrase inventée par le trouvé aux prises avec des
criminologue australien problèmes liés au fait que les
John Braithwaite pour décrire le jeunes dans la réserve ne
processus positif qui consiste à voulaient pas entendre parler de
dénoncer le comportement d’une justice communautaire. Ils
personne sans toutefois rejeter la préféraient l’anonymat d’une
personne elle-même et en évitant comparution devant les tribunaux
de la stigmatiser. pour adolescents de la ville, qui
siégeaient assez loin des
L’île Lennox est située au large de personnes qui les connaissaient.
la côte nord de l’île-du-Prince- Selon une description du projet,
Édouard et compte environ «les autochtones trouvent
300 autochtones. La personne qui honteux pour une personne de
commet un crime et qui l’avoue comparaître devant ses pairs, qui
comparaît devant un comité de la connaissent et connaissent sa
justice local composé d’un famille, et d’être jugée par eux; de
Ancien, d’un jeune, d’un membre façon générale, ils craignent cette
d’une famille monoparentale et possibilité davantage que le fait
d’un membre d’une famille d’être jugés par un système de
biparentale. Ensemble, ils justice pénale aliénant et qui les
décident de la sanction qui sera dépersonnalise.» Il faut se
imposée. Les membres du rappeler, d’une part, que la
conseil connaissent le délinquant véritable justice communautaire
et veulent infliger une peine qui doit tenir compte de ces questions
pourra aider ce dernier et en et, d’autre part, qu’elle est perçue
même temps satisfaire la victime. par certaines personnes comme
«plus sévère» dans la mesure où
À nouveau, comme dans le cas elle exige davantage du
du projet autochtone de Toronto délinquant.
décrit ci-dessus, le projet de
justice micmac est une initiative Cette solution de rechange au
de déjudiciarisation à laquelle on système de justice traditionnel
a recours aux étapes initiales du

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 101
vise à favoriser l’évolution d’un l’étalage de biens d’une valeur de
système plus efficace qui tiendra 180 $ et elle a demandé à son avocat
compte des besoins et des quelle peine elle pouvait s’attendre à
aspirations sur les plans culturel recevoir si elle plaidait coupable.
et social des autochtones de l’île Lorsqu’elle a appris que la Couronne
Lennox. entendait demander une peine
d’emprisonnement de six mois,
Personne-ressource : Manon a été bouleversée. Elle élève
Diversion Council seule son fils de deux ans et ne
Lennox Island voulait pas être séparée de lui. Elle a
Box 134
Lennox Island, P.E.I. insisté pour que son avocat examine
Tél. : (902) 831-2493 la possibilité d’avoir recours à des
Téléc. : (902) 831-3153 solutions de rechange à
l’incarcération, ce que l’avocat a
promis de faire.

E.V.E. (Entraide vol à Le matin de la première comparution


l’étalage) de Manon devant la Cour, l’agent de
liaison pour le programme E.V.E.
Montréal (Québec) était de service comme d’habitude
pour informer toutes les accusées
Un cas dans la salle d’audience no 1 de la
Cour municipale de Montréal de
Il s’agit dans ce cas d’une femme l’existence de ce programme. Manon
âgée de 33 ans accusée de vol à a écouté avec intérêt l’agent
l’étalage qui pouvait écoper d’une expliquer que :
peine d’emprisonnement de six mois
parce qu’elle avait déjà à son actif • le programme est une solution de
neuf condamnations pour vol à rechange à l’incarcération dans
l’étalage et une condamnation pour les cas de vol à l’étalage;
conduite avec facultés affaiblies. • il a été conçu à l’intention des
femmes âgées d’au moins 18 ans
Manon a eu très peur lorsqu’elle a qui sont accusées de vol à
été surprise en train de commettre l’étalage et qui avouent avoir
un vol à l’étalage dans la pharmacie commis l’infraction;
Jean Coutu; elle a pleuré et supplié • il comprend 12 séances de groupe
les agents de sécurité de ne pas hebdomadaires, chacune d’une
appeler la police. Ce n’était pas sa durée de deux heures;
première arrestation, elle connaissait • du point de vue clinique,
bien le système de justice pénale et l’intervention vise à empêcher la
elle savait que, malheureusement, les récidive.
fonctionnaires du système (les juges
et les procureurs de la Couronne) Manon a demandé à participer au
commençaient à la connaître très programme, son avocat a donné son
bien.... Malgré ses supplications, adhésion à cette proposition et le juge
toutefois, elle a été accusée de vol à a consenti à attendre jusqu’à la fin

102 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
du programme avant de prononcer la Avant le programme, je ne savais
sentence. Manon a rencontré l’un même pas que cette banque existait.»
des préposés au programme qui a
confirmé qu’elle y était admissible et Description du programme
elle suivi le programme du
5 septembre au 21 novembre 1995. Ce programme de
déjudiciarisation à l’intention des
Au cours du programme, Manon a auteurs de vol à l’étalage est
trouvé particulièrement intéressants offert par la Société Elizabeth Fry
les exercices en groupe et les de Québec; il est modelé sur des
discussions. Elle a beaucoup pensé programmes analogues offerts
aux conséquences de sa conduite, sur par les sociétés Elizabeth Fry de
les plans tant personnel que social, Calgary et de Toronto.
elle a dressé le bilan des avantages et
des coûts du vol à l’étalage et elle a Initialement, différents
cerné un certain nombre de moyens organismes sociaux adressaient
efficaces auxquels elle pouvait avoir au programme Entraide vol à
recours pour s’empêcher de récidiver. l’étalage des cas de femmes qui
À la fin du programme, le travailleur faisaient du vol à l’étalage mais
préposé à son groupe a pu informer qui n’avaient pas nécessairement
la Couronne et l’avocat de la défense de démêlés avec la justice. Un an
que Manon avait mené à bien le après sa mise en oeuvre, le
programme. programme a commencé à se
spécialiser, offrant une solution
À l’audience de détermination de la de rechange aux femmes
peine, le juge a souligné qu’en récidivistes qui avaient déjà été
participant au programme E.V.E., traduites devant les tribunaux.
Manon avait évité une peine En l’espace de sept ans, les
d’emprisonnement de six mois; il lui préposés au programme se sont
a infligé une condamnation de deux occupés des cas de plus de
ans avec sursis. 1 100 femmes renvoyés par les
27 cours municipales avec
Dans sa propre évaluation du lesquelles le programme a une
programme, Manon a expliqué que le entente de prestation de services.
fait d’avoir rencontré une femme Il a pu assurer des services à
dans son groupe qui avait déjà purgé 72 groupes grâce dans une large
une peine d’emprisonnement lui a mesure aux nombreux
fait comprendre à quel point cela spécialistes qui y ont consacré de
aurait été terrible pour elle et pour leur temps à titre bénévole.
son enfant. Le travailleur l’avait
aidée à trouver différentes solutions Le programme varie selon les
pratiques qui l’empêchaient de besoins des participantes mais a
récidiver. «Par exemple, maintenant tendance à mettre l’accent sur
je vais souvent à la banque l’obligation de rendre compte et
d’alimentation dans mon quartier. la «thérapie de la réalité» vis-à-

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 103
vis leurs activités illégales. avocat au cours de laquelle on
Certains thèmes communs examine le dossier
portent sur les mécanismes de minutieusement et on explique à
maîtrise de soi, les différentes l’intéressée quelle peine sera
causes du vol à l’étalage et les recommandée au juge si elle
différents effets du comportement répond à toutes les conditions.
sur l’entreprise et ses employés, En général, la recommandation
le système de justice pénale, la est présentée conjointement avec
famille et le conjoint. Quatre- la défense et la Cour l’a presque
vingt-dix-sept pour cent des toujours acceptée dans le passé.
participantes mènent à bien le Le traitement de tous ces cas de
programme. vol à l’étalage a été rationalisé et
on a pu réaliser d’importantes
Le programme a révélé que la économies sur le plan des frais
majorité des femmes qui ont fait juridiques du fait que 9 %
du vol à l’étalage sont dans une seulement de tous les cas
situation financière très difficile. renvoyés au programme
En 1994-1995, 85,7 % de ces aboutissent devant la Cour.
femmes étaient sans emploi et
51,9 % d’entre elles touchaient Selon les fonctionnaires de la
des prestations d’assistance Cour, il s’agit d’un bon exemple
sociale ou d’assurance-chômage. de solution de rechange à
Plus de 59 % habitent seules et l’emprisonnement. D’après le
30,6 % élèvent seules leurs procureur Me Suzanne Béchard,
enfants. Bien que 39 % de ces on peut mieux adapter les peines
femmes soient des délinquantes à l’individu et on n’a pas à tâcher
primaires, au moins 26 % avaient d’exercer un effet dissuasif
un casier judiciaire attestant de puisque le programme lui-même
plus de six à dix infractions. On réduit le risque de récidive.
a constaté que certaines de ces
femmes souffrent de dépression Personne-ressource :
ou sont toxicomanes, auquel cas Chantal Demers
Agente de liaison
le programme permet de les
Programme E.V.E.
renvoyer à d’autres services ainsi 5105, chemin de la Côte St-
que de s’attaquer aux problèmes Antoine
sous-jacents ou connexes. Société Elizabeth Fry du Québec
Montréal (Québec)
H4A 1N8
À la Cour municipale de Tél (514) 489-2116
Montréal, un procureur est tout Téléc. : (514) 489-2598
spécialement chargé d’assurer la
liaison avec le programme
Entraide vol à l’étalage.
Lorsqu’une femme est acceptée
dans le programme, on tient une
réunion avec elle et avec son

104 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Projet de médiation et de étapes initiales du processus leur
déjudiciarisation à permettent de jouer auprès de leur
enfant pour tâcher de régler ses
l’intention des jeunes problèmes. Ils apprécient aussi la
Shaunavon meilleure communication qui en
(Saskatchewan) résulte entre les travailleurs sociaux,
les écoles et la police.
Un cas
Une femme dont le fils a comparu
Un groupe de parents dans le sud- devant un tribunal et devant un
ouest de la Saskatchewan, en proie à cercle de détermination de la peine
des sentiments de frustration et l’an dernier pour répondre à deux
d’impuissance face à leurs adolescents accusations distinctes d’introduction
«qui faisaient les quatre cents coups» par effraction est au nombre des
ont mis sur pied un programme parents qui sont convaincus de la
d’action communautaire imaginatif supériorité du cercle sur le plan de la
destiné à régler les problèmes. justice rendue. L’adolescent en
question avait 12 ans à l’époque. Le
Shaunavon est une petite collectivité tribunal lui a imposé une amende de
d’environ 2 500 personnes. Onze 70 $. Le cercle de détermination de la
adolescents ont été accusés peine lui a donné une dissertation à
d’infractions en 1993, y compris ceux rédiger et imposé 50 heures de service
qui ont été impliqués dans un communautaire. Selon la mère du
incident survenu lors d’une soirée jeune : «Si on entreprend le jeune tout
dans une résidence privée qui s’est de suite, je crois que le cercle donne
mal terminée. Leslie Goldstein est au des résultats bien supérieurs. Il
nombre des parents qui voulaient permet une plus grande interaction
recenser d’autres initiatives, avec la collectivité. Il oblige le jeune à
notamment un processus de réfléchir et à voir ce qu’il a fait. Un
détermination de la peine qui plus grand nombre de personnes dans
constituerait une solution de rechange la collectivité le connaissent et
à l’incarcération. Le programme mis peuvent veiller sur lui. Tandis que
sur pied repose sur une approche devant le tribunal, qui était présidé
semblable à celle du cercle autochtone par un juge d’une autre ville, c’était
de détermination de la peine, soit un voici ta peine, au revoir.» Avec le
programme de médiation et de recul, l’agent de la GRC a reconnu
déjudiciarisation pour les jeunes. que la deuxième accusation
Selon Mme Goldstein, ce programme d’introduction par effraction aurait pu
favorise une plus grande prise de aussi être soumise à un cercle.
conscience chez le jeune contrevenant
de ses obligations envers la victime, ce Description du programme
qui est bénéfique pour la collectivité
dans son ensemble. Les parents Le comité de médiation a été créé
apprécient le rôle plus important que par le Groupe de soutien aux
l’intervention et la médiation aux parents de concert avec les

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 105
Services sociaux de la fusion de la médiation et du cercle
Saskatchewan, le ministère de la de détermination de la peine
Justice et le détachement local de montre qu’il est possible d’avoir
la GRC. Il était composé de recours à ce processus de justice
l’adolescent, de ses parents, d’un dans la collectivité relativement à
représentant de la GRC et de trois des infractions plus graves.
membres de la collectivité.
Personne-ressource :
Lorsque le jeune avoue avoir Sgt. J.D. Lang
RCMP
commis l’infraction en question,
690 Center St.
un groupe de médiation plutôt Shaunavon, Sask.
qu’un juge siégeant en salle S0N 2M0
d’audience détermine la peine à Tél. : (306) 297-5550
Téléc. : (306) 297-5554
imposer. Le jeune, sa famille et la
victime doivent convenir d’avoir
recours au processus de
médiation. Aucune accusation au
criminel n’est portée contre le Programmes de mesures
jeune contrevenant. On peut de rechange à
choisir l’une d’un vaste éventail l’incarcération
de peines allant du
dédommagement à une période
Quelques cas
de probation sous surveillance
dans la collectivité.
Un adolescent âgé de 14 ans accusé
de «vol de moins de 1 000 $» s’est
Tous participent de façon égale au
adressé au programme de mesures de
processus qui vise à cerner le
rechange à l’incarcération,
problème et à trouver des
accompagné de sa mère, pour choisir
solutions. Le processus permet de
des tâches destinées à l’aider à faire
respecter le caractère confidentiel
des choix plus responsables à
des renseignements, la protection
l’avenir. Son comportement général
de la vie privée et le droit de
à l’école et à la maison au cours des
consulter un avocat. Les affaires
trois ou quatre derniers mois s’était
qui pourraient attendre jusqu’à six
encore dégradé. Il avait été exclu
mois d’être instruites par un
temporairement de l’école une fois
tribunal sont réglées dans le mois
pour s’être battu avec d’autres élèves,
qui suit la perpétration de
il avait eu plusieurs retenues et il
l’infraction.
commençait aussi à sécher parfois ses
cours. Il ne lisait pas très bien mais
Bien que les accusations
ne semblait pas être atteint d’une
d’introduction par effraction dans
déficience.
ce cas soient relativement peu
graves, le processus de
La Société John Howard de
déjudiciarisation auquel on a eu
Waterloo - Wellington, persuadée
recours et qui représente une
que la cause profonde de certains

106 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
types de mauvaise conduite pourrait démêlés avec le système de justice
être une faible estime de soi résultant pénale pouvait amener à se laisser
de l’analphabétisme, venait de mettre prendre dans ce filet et qui, grâce à
au point un programme coopératif l’aide individuelle de jeunes
d’alphabétisme de concert avec le étudiants bénévoles à l’attitude
Collège Frontière. Le Groupe des positive, a réussi à acquérir une
étudiantes et des étudiants - meilleure idée de lui-même et de son
alphabétiseurs à l’Université Wilfrid avenir.»
Laurier ont élaboré un programme de
formation individuelle à l’intention À Windsor, il y a quelques années, la
des jeunes âgés de 12 à 15 ans non veille du Nouvel an, 27 jeunes ont
admissibles à d’autres cercles de vandalisé une école locale. Certains
lecteurs. Le programme ne visait pas avaient un casier judiciaire.
à instruire les jeunes mais plutôt à D’autres n’en avaient pas. Des
ranimer en eux le désir de lire, de lire accusations d’introduction par
n’importe quoi - des bandes effraction devaient être portées contre
dessinées, des revues, les affiches tous. Au lieu de cela, le Projet
dans les rues, les panneaux, etc. intervention, un programme de
mesures de rechange avant la mise en
Le jeune s’est inscrit au groupe accusation, a facilité un processus
Partenaires de lecture et s’est engagé dans le cadre duquel les jeunes, le
à faire des travaux communautaires. personnel de l’école et les parents se
L’étudiant de l’Université Wilfrid sont rencontrés et qui a abouti à
Laurier l’a rencontré cinq ou six fois l’engagement de fournir 30 heures de
et les résultats de ses visites ont été service communautaire et au
tout à fait remarquables. Sa mère a paiement par chaque jeune d’une
remarqué que son attitude à la partie des dommages-intérêts.
maison avait changée. Il était plus
heureux, plus disposé à faire ce Description du programme
qu’elle lui demandait, prêt à aider.
Elle a reçu des téléphones de ses Les solutions de rechange à
enseignants à l’école lui demandant l’incarcération offrent d’autres
qu’est-ce qui s’était passé à la maison moyens de régler les différends et
parce que le comportement de son fils de prendre les mesures voulues
à l’école s’était amélioré de façon dans le cas de certaines
tellement spectaculaire. Le directeur infractions que le recours inutile à
d’école a reconnu ce changement une procédure judiciaire
positif et a récompensé le jeune en lui coûteuse. Un projet de loi adopté
offrant des billets pour un match de par le Parlement en 1996 permet
la Ligue majeure de baseball. d’avoir recours à des solutions de
rechange pour les adultes en
Selon un directeur de la Société John autorisant chaque province à
Howard, il s’agissait dans ce cas établir et à administrer son
«d’un jeune que le vol, peut-être propre programme, semblable à
l’absentéisme, la fréquentation celui mis sur pied dans
d’autres criminels, peut-être, et les

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 107
différentes sphères de ressources déjà rares qui peuvent
compétence à l’intention des alors être affectées à des cas plus
jeunes contrevenants. Une étude graves.
menée récemment dans l’Île-du-
Prince-Édouard a fait état de Observations
différentes raisons pour lesquelles
les mesures de rechange à Lorsque les programmes donnent
l’incarcération sont utiles dans le les résultats escomptés, les jeunes
cas d’adultes : elles aident la apprennent à assumer la
personne qui a peut-être commis responsabilité de leurs actes après
une erreur qui va à l’encontre de avoir compris que ceux-ci ont une
son mode de vie habituel; elles incidence sur de nombreuses
reconnaissent qu’il y a peu de autres personnes. Les solutions
différence entre une personne qui de rechange peuvent leur montrer
a presque 18 ans et une personne comment regagner la confiance
qui a à peine plus de 18 ans; elles des autres et rétablir la bonne
aident à prendre les mesures entente, parfois par des mesures
voulues dans le cas des personnes de restitution ou de réparation.
qui ont un handicap mental; elles Le jeune évite le processus
permettent d’exercer un certain judiciaire qui est beaucoup plus
pouvoir discrétionnaire dans le lent et structuré et il n’a pas de
cas du délinquant qui se trouve casier judiciaire.
dans des circonstances difficiles;
elles sont plus rapides que le Il y a de nombreux exemples de
système judiciaire; et elles tels programmes au Canada. Les
obligent le délinquant à assumer 22 programmes de mesures de
la responsabilité de ses actes. rechange à Terre-Neuve sont
administrés par des bénévoles de
Les dispositions régissant le la collectivité qui siègent au sein
programme pour les jeunes des comités de justice pour la
permettent de déterminer si un jeunesse; ils encouragent les
cas renvoyé par la police sera victimes à participer avec les
soumis aux tribunaux, si le jeunes aux séances de médiation.
dossier sera classé sans qu’on y Le Projet Intervention a été mis
donne d’autres suites ou si sur pied à Windsor en 1978
l’affaire sera réglée par le recours comme programme de solutions
à une mesure de rechange. Les de rechange avant la mise en
mesures de rechange visent à accusation; la police réduit le
faire participer la collectivité au nombre d’accusations qu’elle
processus, à mettre davantage dépose mais augmente le nombre
l’accent sur la réconciliation de la de cas de jeunes ayant des
victime et du délinquant, à problèmes et leurs familles
réduire les incidences négatives qu’elle renvoie aux services
de l’incarcération dans les cas sociaux. Un examen approfondi
moins graves et à libérer des du programme en place dans

108 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
l’Île-du-Prince-Édouard a révélé • récompensent les groupes
un degré élevé de satisfaction, et organismes d’aide
ainsi que l’appui général pour la sociale qui ne contestent
proposition de les appliquer aux pas le système en place en
adultes; ces mesures étaient leur accordant des contrats
appliquées beaucoup plus de gestion des
rapidement et avec plus de succès programmes de mesures
et les taux de récidive étaient de rechange;
moins élevés que dans le cas des • réduisent au lieu d’élargir
affaires portées devant les la gamme des
tribunaux. programmes
communautaires qui
Toutefois, une série de aident à la réinsertion
consultations menées à l’échelle sociale des jeunes en
du pays par le Conseil national de coupant les fonds affectés J’ai vu des gens qui
prévention du crime a révélé un aux programmes n’avaient presque rien
certain nombre de lacunes communautaires qui ne acheter au lieu de voler.
troublantes dans la mise en sont pas choisis comme Quant à moi, j’ai tout
oeuvre des mesures de rechange à programmes de mesure de et, au lieu de travailler
l’incarcération. Dans certains rechange à l’incarcération; pour obtenir ce que je
• réduisent le nombre voulais, je me suis mis
endroits, on y a recours seulement
à voler. Grâce à mon
de façon limitée et trop rarement d’options qui s’offrent
service communautaire,
de manière à promouvoir les dans le cadre de ces
j’a appris à rendre
principes fondamentaux de la LJC programmes à des quelque chose à la
de participation communautaire, mesures, telles que la collectivité et à ne pas
réinsertion sociale des jeunes et rédaction d’une tout prendre pour
réduction de l’intervention du dissertation ou d’une lettre acquis...»
système de justice lorsque la d’excuses, qui ne
chose est appropriée. Les correspondent pas aux Programme pour
participants aux consultations ont besoins particuliers et à la jeunes bénéficiant
dit au Conseil de prévention du réalité de nombreux jeunes de mesures de
crime que les programmes de et qui font peu pour rechange
mesures de rechange à réparer le tort commis ou
l’incarcération : pour faciliter la réinsertion
sociale du jeune;
• élargissent le filet de la • excluent les jeunes
justice pénale du fait autochtones et membres
qu’on y a recours surtout de groupes minoritaires,
dans le cas de jeunes qui qui ne sont pas perçus
autrement n’auraient pas comme ayant les
de démêlés avec le compétences ou le soutien
système de justice pénale familial nécessaires pour
mais recevraient tirer avantage de tels
simplement un programmes.
avertissement;

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 109
Personnes-ressources : Phil Arbing
Société John Howard de Provincial Advisor - Criminal
Waterloo-Wellington Justice and Corrections
289, rue Frederick 4 Sydney St.
Kitchener (Ontario) P.O. Box 2000
N2H 2N3 Charlottetown, P.E.I.
Tél. : (519) 743-6071 C1A 7N8
Téléc. : (519) 743-9632 Tél. : (902) 368-6619 (6620)
Téléc. : (902) 368-6136
Projet Intervention
Chris Donovan Pour de plus amples
Directeur administratif
renseignements sur les
Bureau 201
880, avenue Ouellette programmes de mesures de
Windsor (Ont.) rechange au Québec :
N9A 1C7 Serge Charbonneau
Tél. : (519) 253-3340 Coordonnateur
Fax. (519) 253-6476 Regroupement des Organismes
Orienteurs du Québec
Wanda Penney 4205, rue Saint-Denis
Division of Youth Corrections Bureau 320-A
Department of Social Services Montréal (Québec)
P.O. Box 8700 H2J 2K9
St. John’s Newfoundland Tél. : (514) 281-1858
A1B 4J6 Téléc. : (514) 281-1859
Tél. : (709) 729-2480
Téléc. : (709) 729-0583

2. Programme d’absolution pour suivre


une cure de désintoxication -
Territoire du Yukon

Un cas Whitehorse déposent un plus grand


nombre d’accusations pour conduite
Il s’agit ici d’une solution avec facultés affaiblies que pour tout
innovatrice de rechange à autre type de crime. Bon nombre des
l’incarcération à laquelle on a eu accusés sont des récidivistes. Ils sont
recours dans le cas d’un homme généralement envoyés en prison mais
qui risquait une peine reprennent le volant une fois mis en
d’emprisonnement de deux ans liberté et continuent de représenter
pour sa cinquième condamnation un danger pour le public. Il y a
pour conduite avec facultés toutefois quelques exemples de
affaiblies. réussite, des gens qui arrivent à régler
(tiré de la transcription d’un programme leur problème d’alcool et à redevenir
diffusé un matin sur le réseau des citoyens respectueux de la loi.
radiophonique anglais de Radio-Canada) Certaines de ces personnes ont eu
l’avantage de participer à un
JANET PATTERSON : Les membres programme peu connu auquel peut
du détachement de la GRC de avoir accès la personne à laquelle le

110 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
tribunal accorde une absolution pour affaiblies portée contre lui et il
suivre une cure de désintoxication. risquait de recevoir une longue peine
Becky Streigler, animatrice du d’emprisonnement. C’est alors qu’il a
programme Yukon Morning, nous entendu parler du programme
raconte l’histoire d’un homme qui a d’absolution pour suivre une cure de
mené à bien le programme et qui a désintoxication.
réussi à changer sa vie.
JACK : C’est mon avocat qui m’en a
BECKY : La conduite automobile est parlé. Il m’a expliqué que je pouvais
un privilège que bon nombre d’entre soit purger une peine de deux ans ou
nous tiennent pour acquis. Dans le plus, soit opter pour cette solution de
cas de Jack Simpson (ce n’est pas son rechange. Je n’aurai pas à purger une
vrai nom), cependant, il s’agit d’un peine d’emprisonnement tant que je
privilège qu’on lui a retiré à maintes suivrai le programme à la lettre sans
reprises pour conduite avec facultés commettre de bévue.
affaiblies. Il a aussi été incarcéré. En
1993, âgé de 39 ans, ce citoyen de BECKY : Jack voulait que la cour
Whitehorse risquait de se voir infliger territoriale lui accorde une absolution
une peine d’emprisonnement de deux pour suivre une cure de
ans pour sa cinquième condamnation désintoxication. Il éviterait ainsi
pour conduite avec facultés affaiblies. d’aller en prison, mais il devait
Déjà très angoissé, il a eu une autre prouver qu’il était résolu à ne plus
expérience qui l’a amené à se rendre boire. Il l’avait déjà fait en partie en
compte qu’il avait un problème menant à bien le programme de
d’alcool qu’il ne maîtrisait plus. traitement pour alcooliques.
Toutefois, il avait encore une autre
JACK : J’ai eu un trou de mémoire de chose à faire, d’importance capitale
près de 14 jours. Je ne me rappelle de pour le programme. Il devait se
rien. À un moment donné, quand j’ai soumettre à des analyses du sang tous
repris mes esprits, j’étais dans ma les deux mois pendant deux ans pour
cabine et je me suis rendu compte que prouver qu’il ne se remettait pas à
j’avais perdu deux semaines. J’ai boire.
trouvé dans ma poche une note d’un
ami qui était passé par là 14 ans plus JACK : Ce n’était pas un problème
tôt, me disant d’aller le voir quand je pour moi parce que je n’avais rien à
serais prêt à parler. C’est là que tout cacher. Le seul problème, c’était mon
a commencé. emploi qui fait que je m’absente
souvent de la ville et chaque fois
BECKY : Jack a cessé de boire et s’est pendant plusieurs semaines.
inscrit au programme résidentiel de Cependant, je pouvais toujours
traitement des alcooliques au prendre d’autres arrangements et me
Crossroad Centre à Whitehorse. Il présenter pour les prises de sang à
devait quand même comparaître mon retour ou avant de partir.
devant le tribunal pour répondre à
l’accusation de conduite avec facultés

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 111
BECKY : Deux ans plus tard, Jack a déceler les rechutes et d’en
terminé le programme et il ne boit informer le tribunal pour qu’il
plus.... prenne des mesures pour protéger
le public contre la possibilité que
Description du programme l’intéressé ne se mette au volant
alors que ses facultés sont
Le processus de demande d’une affaiblies. Du point de vue du
absolution pour suivre une cure de traitement, il est plus facile de
désintoxication commence remettre la personne dans le droit
généralement par un avocat de la chemin au début de la rechute. On
défense qui demande une opinion considère que les rechutes font
médico-légale. Un médecin doit partie du processus de guérison.
démontrer que l’accusé est un
alcoolique, qu’il a subi un Commentaires
traitement satisfaisant ou qu’il est
à la veille de le subir et qu’il y a Le juge Heino Lilles estime que
une chance raisonnable de succès. seule une poignée de cas de
Le médecin fait parvenir son conduite avec facultés affaiblies
évaluation à l’avocat de la défense aboutissent à l’octroi d’une
et au bureau du procureur de la absolution pour suivre une cure de
Couronne parce qu’il veut être désintoxication, bien que
considéré comme le témoin expert 240 accusations de conduite avec
du tribunal plutôt que celui d’un facultés affaiblies aient été
avocat donné. déposées l’année précédente. Les
gens ne sont pas toujours prêts à
Si le tribunal accorde une changer et certains s’opposent à la
absolution pour suivre une cure de période de surveillance de trois
désintoxication, il l’assortit ans. «Il est beaucoup plus facile,
généralement d’une période de comme certaines personnes me
probation de deux à trois ans et l’ont dit, de purger les trois mois,
impose à l’intéressé comme six mois ou neuf mois en prison,
condition de suivre des séances de puis sortir et se remettre à boire.»
counseling en alcoolisme et Le taux de succès élevé du
toxicomanie et de visiter programme tient dans une large
régulièrement le médecin pour mesure à ce que les personnes qui
subir un examen médical et une y participent ont décidé de
analyse du sang. L’intéressé doit changer. Ce taux de succès nous
s’abstenir complètement de rappelle que la nature humaine et
consommer de l’alcool. Il voit le l’aspect humain de la criminalité
docteur une fois par mois pendant jouent un rôle capital dans le
les trois premiers mois, trois fois succès de ces mesures de rechange
par mois pendant les six prochains à l’incarcération.
mois, puis six fois par mois jusqu’à
la fin de la période de probation.
Cette façon de procéder permet de

112 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Personne-ressource :
Service de probation pour
adultes
William Sim - gestionnaire
Ministère de la Justice
J-5
C.P. 2703
Whitehorse (Yukon)
Y1A 2C6
Tél. : (403) 667-5231
Téléc. : (403) 667-3446

3. Ordonnances de service communautaire

Les ordonnances de service d’heures de travail soit pour la


communautaire sont victime, soit pour la collectivité.
généralement accompagnées
d’une ordonnance de probation «Les histoires à succès sont légion,
et font partie de la peine affirme-t-il. Deux retiennent
infligée. Elles obligent les particulièrement l’attention. Dans le
délinquants à fournir un certain premier cas, un délinquant
nombre d’heures de service condamné à 250 heures de travaux
communautaire à titre bénévole communautaires a fait une peinture
pour remplir les conditions de la murale du Christ sur la façade
peine en «réparant» le tort causé devant de l’Église unie à Pleasant
à la collectivité. On trouvera River, dans le comté de Queen’s.
une excellent exemple de C’était un artiste plein de talent.
l’efficacité de ce genre de Dans le deuxième cas, il s’agit d’un
mesure dans Le cas de Kevin jeune et du gardien, âgé de 77 ans,
Hollinsky à Windsor exposé à la du service incendie de Bridgewater.
première section de ce Un jour, lorsqu’on lui a demandé
répertoire. ce qu’il faisait de ces jeunes, le
gardien a répondu «Vous voyez ce
Service communautaire camion là-bas? Eh bien, nous
en Nouvelle-Écosse l’avons lavé. Vous voyez ce
plancher? Eh bien, nous l’avons
peint. Vous voyez ce banc? Eh
Exemples de réussite bien, parfois nous nous asseyons
dessus et nous parlons». Avez-
Un juge en Nouvelle-Écosse a écrit vous remarqué que, chaque fois, il
pour encourager un plus grand a dit «nous» et non «il»? Ce sont
recours aux ordonnances de service des hommes comme lui qu’il nous
communautaire imposant au faudrait, et en grande quantité!»
délinquant un certain nombre

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 113
Le juge a signalé que les En 1994, la Youth Alternative
programmes de service Society s’est occupée de 770 jeunes
communautaire donnent les âgés de 12 à 15 ans. Maintenant
résultats escomptés dans environ qu’elle intervient aussi auprès de
93 % à 95 % des cas et qu’ils ont ceux âgés de 16 et de 17 ans, le
un très faible taux de récidive. nombre de cas dont elle s’occupe
Depuis le début du programme, ne manquera pas d’augmenter.
plus de 115 000 heures de service
communautaire ont été fournies En outre, la Youth Alternative
dans les comtés de Lunenburg et Society élabore une solution de
de Queens. «Multipliez ce chiffre rechange communautaire à
par 5 $ l’heure, et plus de trois l’intention des jeunes qui risquent
quart d’un million de dollars ont de récidiver. Le programme
été remboursés à la collectivité,» comprend des volets art, loisirs et
de faire remarquer le juge. auto-assistance.

Youth Alternative Society Personne-ressource :


Youth Alternative Society
Halifax (Nouvelle-Écosse) P.O. Box 8988
Station A
La Youth Alternative Society est Halifax, Nova Scotia
B3K 5M6
une organisation à but non lucratif
Tél. : (902) 424-5473
qui intervient auprès des jeunes Téléc. : (902) 424-0562
ayant des démêlés avec la justice
pénale et qui se voient imposer
des ordonnances de service
communautaire. Elle offre en
outre des solutions de rechange et
un programme à l’intention de
ceux qui s’adonnent au vol à
l’étalage.

Il s’agit de programmes à
l’intention des jeunes dans les
centres urbains et dans les régions
rurales. Dans chaque collectivité,
le jeune, les familles, les victimes
et les bénévoles qui facilitent les
programmes établissent les
modalités des ententes résultant
des séances de médiation et
communiquent avec les personnes
intéressées dans la collectivité.
Plus de 130 bénévoles ayant reçu
la formation voulue facilitent ces
programmes.

114 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Ordonnances de travaux Ce plan a donné d’excellents résultats.
communautaires Le fait de rencontrer des personnes qui
vivaient elles aussi des moments
Québec difficiles l’a encouragé à moins se
concentrer et s’apitoyer sur lui-même
Un cas et l’a sensibilisé davantage à ce que
vivaient les autres. Le travail lui a
Il s’agit du cas d’un homme dans procuré une très grande satisfaction et
la trentaine reconnu coupable son placement a été couronné de
d’avoir infligé des abus sexuels succès; ayant fourni toutes les heures
à sa fille âgée de six ans. de travail requises, il a continué à faire
du bénévolat et a été choisi comme le
À la suite de son arrestation, Paul a «bénévole de l’année» du centre. En
perdu son emploi de technicien outre, il est retourné à l’école pour
judiciaire. Son mariage s’est brisé et il poursuivre d’autres études.
lui a été interdit de communiquer avec
ses trois enfants (deux fils et une fille), Description du programme
sauf pour les visites auxquelles il avait
droit tous les deux samedis. Selon
Au Québec, les ordonnances de
l’agente de probation qui a rédigé le
travaux communautaires sont
rapport présentenciel, cet homme
administrées par les Services de
ressentait beaucoup de remords et il
probation auxquels le juge renvoie
voulait suivre une thérapie qui
certains cas pour qu’ils rédigent un
l’empêcherait de récidiver. Elle
rapport avant la détermination de
trouvait en outre qu’il souffrait de
la peine, surtout si l’on envisage de
dépression et d’isolement et que la
rendre une ordonnance de travaux
confiance en soit serait un facteur
communautaires. Ce genre
déterminant dans sa réadaptation.
d’ordonnance n’est jamais rendue
Pour toutes ces raisons, on a proposé
sans procéder à une évaluation
un plan et accepté d’adapter la peine
pour déterminer l’admissibilité de
de manière à permettre de relever ces
l’intéressé. Outre les cas renvoyés
défis. Au lieu d’envoyer l’homme en
par les juges à cette fin en
prison, on lui a imposé 120 heures de
particulier, les agents de probation
travaux communautaires dans un
qui procèdent à des évaluations
important organisme communautaire
présentencielles sont à l’affût de
qui offre des programmes de
cas dans lesquels un juge pourrait
réadaptation aux personnes souffrant
envisager d’avoir recours à cette
d’incapacités physiques à la suite d’un
solution de rechange alors qu’il n’y
accident ou d’une maladie. Ce
a peut-être pas songé avant de
placement a été choisi tout
recevoir ces renseignements. Les
particulièrement pour permettre à
agents de probation cherchent à
l’intéressé d’avoir des contacts sociaux
déterminer si l’intéressé a la
qui l’aideraient à accroître son estime
fiabilité, la motivation, l’attitude
de soi, en même temps qu’il était tenu
ainsi que la capacité physique et
d’assister à des séances de thérapie de
mentale nécessaires pour lui
groupe et aux séances des A.A.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 115
permettre de contribuer en tant Au moment en question, toutefois,
que bénévole. Ils déterminent en l’agent de police qui l’a arrêtée lui a
outre s’il reste des accusations en parlé d’une manière qui lui a
suspens susceptibles de donner vraiment donné envie de changer sa
lieu à une peine vie. Au moment de la rédaction du
d’emprisonnement et si les rapport prosentenciel, elle avait déjà
travaux communautaires pris certaines mesures pour changer
semblent indiqués comme moyen son mode de vie et suivait une
de promouvoir la réinsertion thérapie. Au lieu d’être envoyée en
sociale de l’intéressé. prison, elle a été condamnée à une
période de probation de trois ans et à
L’agent de probation discute avec 100 heures de travaux
l’intéressé du genre de placement communautaires dans un organisme
qui intéresse le plus ce dernier et où elle avait de nombreux contacts
lui donne le répertoire de tous les avec de jeunes familles et était
organismes locaux à but non particulièrement exposée à la vie de
lucratif, afin qu’il puisse choisir famille; le but visé était de lui donner
celui pour lequel il désire l’occasion d’intervenir auprès de
travailler et prendre lui-même gens d’une manière qui lui
l’initiative du premier contact. permettrait d’accroître son estime de
soi et de s’intégrer à un milieu social
Le taux de réussite est très élevé. et de travail. Le placement a donné
La plupart des clients auxquels d’excellents résultats. L’organisme a
on en fait la proposition sont très beaucoup apprécié ses services. En
désireux de participer au outre, elle s’est inscrite dans un cour
programme qu’ils voient comme spécial de préparation à l’emploi et,
une véritable solution de l’ayant mené à bien, elle a été
rechange à l’emprisonnement. engagée comme travailleur de la
ligne de front dans un milieu
Deux autres cas dans la thérapeutique.
province :
Il s’agit dans le deuxième cas
d’un jeune homme âgé de 20 ans
Il s’agit dans le premier cas
accusé de vol à main armée qui
d’une femme âgée de 36 ans
avait tiré en l’air dans le
accusée de trafic de drogue et
dépanneur pendant l’incident
qui risquait de se voir infliger
mais qui n’avait directement
une peine d’emprisonnement
attaqué personne. Tout l’agent
parce qu’elle avait déjà été
volé a été restitué.
condamnée pour conduite avec
facultés affaiblies et que c’était
Antoine n’avait pas de casier
sa deuxième arrestation pour judiciaire et ne donnait pas
possession de drogue. l’impression d’avoir une
«personnalité antisociale». Au
Cette femme avait un problème de contraire, il semblait avoir toujours
cocaïne grave depuis l’âge de 18 ans. été travailleur, un citoyen

116 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
respectueux de la loi qui s’était magasin dans les six mois suivants
trouvé dans une situation critique à et d’exécuter 180 heures de service
laquelle il ne voyait pas de solution : communautaire dans une résidence
il souffrait d’épuisement pour personnes âgées où il serait
psychologique, ayant mené de front chargé de tâches d’entretien qui lui
deux emplois et des études; après permettraient d’appliquer les
avoir quitté l’un de ses emplois, il connaissances acquises lors de sa
avait malheureusement été mis à pied formation professionnelle et de mettre
dans son autre lieu de travail; il ses compétences au profit de la
n’avait pas réussi dans sa carrière de société, en réparation du tort qu’il
joueur de hockey; il avait des avait causé.
problèmes d’argent parce que ses
chèques d’assurance-chômage ne Personne-ressource :
rentraient pas; et il avait tâché de Services conseils au réseau
Direction du partenariat et
cacher ses problèmes à ses parents
conseil en services
qui, déjà, ne se sentaient pas à la correctionnels
hauteur du fait qu’ils n’avaient pas 2525, boul. Laurier
eu suffisamment d’argent pour Sainte-Foy (Québec)
subventionner l’entraînement de leur G1V 2L2
fils au hockey. Antoine se sentait Tél. : (418) 528-0287
Téléc. : (418) 644-5645
dépassé par sa situation et avait
consommé de la drogue; il en voulait
à la société et était en proie à des
sentiments de culpabilité face aux
attentes de ses parents.

Selon l’agent de probation, il


s’agissait dans ce cas d’un crime
circonstanciel. Même si Antoine ne
savait pas extérioriser ses sentiments,
il était capable de comprendre
certains des facteurs entrant en cause
dans son comportement. La réaction
de ses parents l’a amené à réfléchir
sur les nombreux problèmes avec
lesquels il s’était trouvé aux prises.
Au moment où le tribunal a été saisi
de l’affaire, il avait terminé le cours
qu’il suivait et avait fait
70 demandes d’emploi. Il s’attendait
à recevoir une peine
d’emprisonnement mais il espérait
qu’on lui permettrait de la purger les
fins de semaine, de manière à ne pas
perdre un emploi de nouveau. Au
lieu de lui imposer une peine
d’emprisonnement, toutefois, on l’a
condamné à verser 250 $
d’indemnisation au propriétaire du

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 117
Ordonnances de service comté, l’État et le fédéral. Sur le
communautaire - plan politique, les shérifs et les
commissaires de comté affirment
Une perspective que le public appuie l’idée de faire
internationale travailler les délinquants et
apprécie les travaux qu’ils
Peines de service exécutent.
«La grande majorité communautaire -
des réformes apportées Minnesota Une évaluation initiale montre
récemment au régime qu’il y a lieu d’élaborer des
de détermination de la Sentencing to Service (peines de normes uniformes à l’échelle de
peine n’ont pas abouti service communautaire) est un l’État étant donné les modalités
au recours à des programme de réduction du selon lesquelles ce programme est
solutions de rechange à recours à l’incarcération conçu intégré au système de justice. En
l’égard des délinquants pour répondre aux besoins très effet, certains délinquants
qui auparavant différents du Département des reçoivent une réduction d’un jour
auraient été incarcérés. de peine pour chaque trois jours
services correctionnels et du
Plutôt, ce sont les de participation au programme
Département des ressources
sanctions telles que le alors que d’autres reçoivent un
dédommagement et les naturelles du Minnesota. Les
Services correctionnels jour pour un jour. Certains juges
services permettent à un délinquant de
communautaires qui s’inquiétaient de l’augmentation
de la population carcérale. Les sortir de prison pour travailler
semblent être acceptées
Ressources naturelles n’avaient afin de payer une amende mais
de plus en plus à
pas suffisamment de personnel, de n’inscrivent pas à son actif le
l’échelle du système de
justice pénale, mais fonds et de temps pour s’occuper temps passé en prison, alors que
presque toujours des millions d’âcres de terre, d’autres cependant le font. Le
comme conditions d’eau, de forêt et de sentiers personnel préposé au programme
supplémentaires récréatifs qu’elles étaient appelées veut qu’on procède à une
imposées aux à gérer. Le programme de peines évaluation en bonne et due forme
délinquants qui, de service communautaire visait à pour déterminer quelles
autrement, auraient leur donner accès à une main- économies sont effectivement
fait l’objet des d’oeuvre qui leur permettrait de réalisées sur le plan des coûts liés
ordonnances de à l’emprisonnement, quel
mieux gérer les ressources
probation imposées pourcentage de délinquants
naturelles de l’État, à accroître
habituellement.» mènent à bien le programme et
l’éventail des solutions de
rechange à l’emprisonnement quels types de délinquants
Le professeur obtiennent les meilleurs résultats.
Alan Harland auxquels pouvaient avoir recours
Université Temple les tribunaux et à réduire le
recours à l’incarcération dans le Mises en garde
cas de délinquants non dangereux.
Comme dans le cas d’autres
Des fondations privées ont financé mesures de rechange à
les étapes initiales; plus tard, l’incarcération, la peine de service
l’envergure du programme a été communautaire peut venir
élargie et il a été financé par le s’ajouter aux autres peines

118 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
imposées et avoir simplement Service communautaire -
pour effet d’élargir le filet. On Norvège
craint aussi que l’on n’adopte une
approche selon laquelle les
En 1991, le code pénal de la
participants seraient perçus
Norvège a été modifié de manière
comme des «condamnés à la
à inclure l’ordonnance de service
chaîne», ce qui donnerait à ce
communautaire comme peine
programme une orientation
distincte. Une ordonnance de
punitive plutôt que réparatrice. Il
service communautaire de
y aurait peut-être aussi un risque
jusqu’à 360 heures peut être
pour les employés syndiqués. «Si
rendue à l’égard d’une infraction
on cesse de tenir compte de la
qui autrement aurait entraîné une
sphère de compétence des
peine d’emprisonnement de
employés syndiqués, le
jusqu’à un an. (Dans certaines
programme prendra fin. Il n’a pas
circonstances exceptionnelles, on
été conçu pour remplacer des
peut demander une ordonnance
personnes qui sont actuellement
de service communautaire même
en poste et ne devrait pas les
dans le cas d’infractions plus
remplacer», déclare le directeur de
graves). L’ordonnance de service
projet John McLagan. Par ailleurs,
communautaire rendue à titre de
un projet entrepris dans le cadre
peine prévoit une période
du programme entraîne des
d’emprisonnement qui peut être
dépenses. Dans les régions
imposée en cas de défaut de se
rurales du Minnesota, on calcule
conformer à l’ordonnance. Une
qu’une équipe coûte environ
ordonnance de service
43 000 $ par an. On réalise des
communautaire ne peut être
économies sur le plan de la main-
rendue que lorsque le délinquant
d’oeuvre et des jours
est d’accord et qu’il est jugé être
d’emprisonnement mais, comme
un candidat approprié.
le signale M. McLagan, «à moins
que les prisons ne soient
Le service de probation peut
surpeuplées au point où des lits
prendre les arrangements voulus
doivent être achetés ailleurs, les
en ce qui a trait au service
véritables économies de coût
communautaire à fournir en
réalisées restent à déterminer.»
s’adressant aux institutions
officielles et municipales et aux
Personne-ressource :
organismes privés ou de
John McLagan
Director bénévolat, par exemple, à des
Sentencing to Service Program hôpitaux, des foyers de soins
300 Bigelow Building infirmiers, des clubs sportifs, des
450 N. Syndicate Street
St. Paul, Minnesota 55104
organisations religieuses, etc.
Tél. : (612) 642-0335
En 1994, 1 026 ordonnances de
service communautaire ont été
rendues, ce qui représente une

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 119
augmentation par rapport aux procureur ou par le juge pour
944 ordonnances rendues en 1993. toutes sortes d’infraction (contre
Le taux de non-conformité était les biens, accompagnées de
de 29 %. violence, d’ordre sexuel et liées à
la drogue); elles sont censées
remplacer toutes les peines
traditionnelles, y compris le
placement sous garde, les
Service communautaire amendes et les condamnations
pour adultes et jeunes - avec sursis. Les jeunes peuvent
Pays-Bas se voir imposer jusqu’à
150 heures de service
Les Pays-Bas ont toujours eu une communautaire et, dans le cas
attitude de tolérance en général à d’infraction très grave, jusqu’à
l’égard de la criminalité et, par 200 heures.
conséquent, le nombre des
délinquants qui se voient infliger Selon Peter H. van der Laan, les
une peine de placement sous jeunes qui font l’objet de mesures
garde est petit et il est rarement de rechange à l’incarcération
nécessaire d’avoir recours à des doivent assumer la responsabilité
mesures de rechange à de leurs actes; ils doivent
l’incarcération. Cependant, un exécuter des tâches qui sont utiles
taux de criminalité à la hausse et à d’autres. Chaque fois que la
les pressions exercées sur le chose est possible, on les met en
système carcéral ont fait qu’on a présence du tort ou du dommage
plus souvent maintenant recours qu’ils ont causé. Ils doivent
aux Pays-Bas aux solutions de réparer ce dommage ou faire un
rechange à l’incarcération. geste symbolique dont bénéficie
la collectivité.
En 1981, on a mis à l’essai le
service communautaire et Mises en garde
d’autres mesures comme
solutions de rechange à Selon les évaluations de ces
l’emprisonnement à court terme mesures, certaines ont pour effet
pour adultes (six mois ou moins). d’élargir le filet. Initialement, on
Quelques années plus tard, on a a cerné certains problèmes liés au
mis sur pied des projets de travail fait qu’on avait trop peu souvent
auxquels les jeunes étaient recours aux mesures de rechange
affectés à titre de service à l’incarcération lorsqu’il
communautaire. On considère les s’agissait de filles et de jeunes
ordonnances de service appartenant à des minorités
communautaire comme des ethniques. Ces mesures de
mesures de rechange à rechange remplaçaient plus
l’incarcération qui peuvent être souvent les amendes et les
imposées aux jeunes par le condamnations avec sursis

120 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
qu’elles ne remplaçaient les peines de trois mois au moins.
peines de placement sous garde. Entre janvier 1993 et octobre 1995,
Déçus des répercussions des environ 6 000 personnes ont
mesures de rechange sur le commencé à exécuter leurs
recours au placement sous garde, ordonnances de service
les Pays-Bas ont mis sur pied le communautaire dans des foyers
Cours trimestriel, programme de pour enfants et pour personnes
jour de trois mois comparable au âgées, dans des hôpitaux et dans
programme intensif de traitement le cadre de projets
intermédiaire mis sur pied en environnementaux. Le service
Angleterre. communautaire imposé à la place
d’une peine d’emprisonnement
Personne-ressource : permet aux personnes
Ministerie van Justitie condamnées qui avaient un
Mr. A. Doeser
emploi de continuer de travailler
Policymaker, Alternative
sanctions et de gagner un revenu, ce qui
Bezoekadres aide à empêcher les autres
Schedeldoekshaven 100 membres de la famille de se
2511 EX den Haag
Tél. : (070) 3 70 79 11
tourner vers le crime.
Téléc. : (070) 3 70 79 31
L’organisme Penal Reform
International a aidé à établir ce
projet et a trouvé les fonds
nécessaires. Des bénévoles de
Service communautaire -
Prison Fellowship Zimbabwe ont
Zimbabwe et Swaziland aidé à réduire la charge de travail
des magistrats en se chargeant de
Les ordonnances de service la gestion des programmes de
communautaire ont aidé à mettre service communautaire. En
fin à la montée en flèche récente outre, on a mené une campagne
de la population carcérale au de sensibilisation du public au
Zimbabwe. but et aux modalités du service
communautaire et on assuré aux
On avait attribué à la faiblesse de intéressés la formation voulue.
l’économie la croissance du
nombre de petits malfaiteurs et Au Swaziland, dans le cadre d’un
des personnes incapables de programme de service
payer leurs amendes. Cherchant communautaire plus ancien mais
une solution de rechange à d’envergure plus modeste, les
l’emprisonnement autre que prisonniers sont mis en liberté
l’amende, le gouvernement a après avoir purgé une partie de
commencé à promouvoir le leur peine. L’Association pour la
recours au service prévention du crime et la
communautaire; en 1992, 60 % réadaptation des délinquants du
des membres de la population Swaziland administre ce
carcérale du pays purgeaient des

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 121
programme à l’aide de fonds
étrangers.

Personne-ressource :
Penal Reform International
169 Clapham Rd.
London SW9 0PU
United Kingdom
Tél. : (44) 171 582-6500
Téléc. : (44) 171 735-4666

4. Probation sous surveillance intensive

La probation sous surveillance Projet de bureau d’aide


intensive prend généralement la
juridique pour les jeunes
forme d’une ordonnance de
probation assortie de Edmonton et Calgary
nombreuses conditions très (Alberta)
rigoureuses qui sont adaptées à
différents degrés au client. Ces Un cas
conditions peuvent comprendre
l’imposition d’heures de rentrée, Selon l’avocat Jim Robb, il s’agissait
des restrictions quant aux d’une «laissée-pour-compte», une
déplacements, des exigences sur adolescente condamnée à deux ans de
le plan des études ou de garde en milieu fermé pour les
l’emploi, des programmes de infractions qu’elle avait commises,
traitement , et ainsi de suite. sans doute, mais aussi parce que le
Malheureusement, les système de justice et les service
conditions imposées sont sociaux l’avaient abandonnée. Cette
parfois trop rigoureuses pour adolescente était typique des enfants
qu’il soit réaliste de s’attendre à de la rue qui ont peut-être
ce que les clients les effectivement un «problème avec la
remplissent, ce qui aboutit à justice» devant les tribunaux mais
l’incarcération de l’intéressé aussi «un problème de logement, un
même s’il n’a pas commis de problème de toxicomanie et un
nouvelle infraction criminelle. problème de manque d’instruction».
En outre, le peu d’ordonnances Le projet de bureau d’aide juridique
de probation sont de nature pour les jeunes mis sur pied par
réparatrice, et toutes ne sont pas Jim Robb a convenu de la représenter
liées de façon valable à la nature en appel. Les préposés au projet ont
de l’infraction ou aux objectifs à mis au point un plan de gestion du
atteindre dans chaque cas. cas prévoyant la participation de

122 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
l’adolescente à cinq programmes d’autres accusations ont été
distincts offerts dans différentes portées contre lui, de sorte qu’on
sphères de compétence provinciale et met beaucoup l’accent sur la
territoriale; les préposés au projet prévention, la réadaptation et le
s’engageaient à coordonner le plan. traitement. Le personnel cherche
Lorsque le juge a pris connaissance les programmes dans la
de la proposition, il a réduit la peine collectivité qui pourraient
infligée à l’adolescente de deux ans constituer une solution de
aux trois mois et demi déjà purgés rechange à l’incarcération. En
par elle sous garde, afin qu’elle soit outre, il fournit de l’aide aux
mise en liberté pour lui permettre jeunes qui ont été acquittés ou «À notre avis, il est
d’entreprendre le premier de ses dans le cas desquels les insensé de réclamer
programmes. accusations ont été retirées. On un plus grand recours
encourage les jeunes à s’adresser à l’emprisonnement et
Description du programme au bureau n’importe quand pour l’imposition de peines
obtenir de l’aide plutôt que d’emprisonnement
Ce projet pilot a été mis sur pied d’attendre d’être en situation de plus longues. Nous
il y a plus de deux ans dans les crise ou que de nouvelles ne regroupons pas les
accusations soient portées contre jeunes par catégories;
tribunaux pour adolescents de
eux. pour nous, il s’agit
deux grands centres urbains en
d’individus dont
Alberta, Edmonton et Calgary.
chacun a des
Même si le projet n’était pas Robb explique le «dépassement
problèmes personnels
conçu comme un projet de lutte de frontières» qui exige ce type
dont il faut s’occuper.
contre la criminalité chez les d’intervention auprès des jeunes. Nous avons obtenu
jeunes - il s’agit plutôt de Un préposé aux services de bien- certains de nos plus
comparer le coût et la qualité du être à l’enfance peut recenser les éclatants succès
modèle de prestation d’aide ressources disponibles à auprès de jeunes âgés
juridique axé sur le personnel au Edmonton et faire savoir qu’il n’y de 16 et de 17 ans, au
modèle traditionnel d’assistance a rien qui réponde aux besoins casier judiciaire
juridique - on a pu en tirer un d’un jeune donné. «Toutefois, le chargé et aux longs
enseignement important en ce qui meilleur programme pour ce antécédents
a trait aux solutions de rechange jeune peut être offert dans le d’incarcération.»
à l’incarcération. nord, à Uranium City, explique
Jim Robb. Nous chercherons Jim Robb
partout.» Le projet d’aide Projet d’aide
L’intervention auprès des jeunes
juridique passe en revue les juridique
comprend beaucoup plus que le
travail juridique proprement dit, ressources des différentes
même s’il s’agit là du principal provinces et des divers systèmes
objectif visé. Le projet emploie pour trouver les programmes qui
au total 14 avocats et trois seront les plus utiles à ses clients
travailleurs auprès des jeunes qui et inscrire ceux-ci à ces
travaillent en collaboration programmes. À Edmonton, le
étroite. Le but est d’empêcher le personnel renvoie des clients à
client d’avoir à s’adresser de plus de 70 organismes en Alberta,
nouveau au projet parce que en Colombie-Britannique, en

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 123
Saskatchewan et dans les Personne-ressource :
Territoires du Nord-Ouest. James C. Robb, Q.C.
Senior Counsel
L’examen d’un échantillon récent
Legal Aid Youth Office
d’environ 140 jeunes pour 3rd Floor
lesquels on avait établi des plans Macdonald Place
d’intervention a révélé qu’on 9939 Jasper Ave.
Edmonton, Alberta
avait procédé à 800 renvois. Les TAJ 2W8
plans d’intervention, bien sûr, Tél. : (403) 427-8355
comprennent de nombreux Téléc. : (403) 427-9367
éléments et visent à régler les
problèmes de pauvreté, d’absence
de logement, de toxicomanie et
de santé mentale. Dans le cas des Programme
dix de ces 140 jeunes seulement
communautaire de
les tribunaux ont-ils rejeté le plan
de gestion du cas. Comme le
probation réparatrice
montre l’exemple ci-dessus, les Vermont
tribunaux ont aussi réduit la
durée de la peine, principalement En 1994 et 1995, l’État du
dans le cas de jeunes autochtones Vermont a adopté une nouvelle
dans les régions rurales. approche des services
correctionnels fondée sur la
Ce projet a été appelé à relever de conviction que les prisons
nombreux défis. L’un des souvent ne répondent pas aux
principaux problèmes tient au besoins de la société et que les
grand nombre de clients - plus de peines imposées au criminel ne
2 000 jeunes par an. Il y a aussi la tiennent pas compte d’un
pénurie de ressources élément capital, soit la
communautaires, problème qui collectivité. Le Reparative
est pire dans le cas des jeunes Probation Program, programme
âgés de 12 à 14 ans. En outre, il communautaire de probation
est fatiguant de «remonter sans réparatrice qui met le délinquant
cesse le courant de l’opinion en présence de la collectivité dans
gouvernementale et publique, ce le cadre d’une rencontre au cours
qui crée de nombreux conflits.... de laquelle on négocie une
Nous avons des groupes de entente précisant les différentes
délinquants qui sont très façons dont le délinquant
surreprésentés dans le système - réparera le tort qu’il a causé à la
par exemple, les jeunes victime et à la collectivité. Le but
autochtones. En outre, il y a visé est d’imposer une peine de
généralement moins de probation qui correspond à
ressources disponibles pour les l’infraction sans avoir recours
adolescentes, particulièrement indûment aux tribunaux, aux
celles qui vivent dans la rue.» services correctionnels et aux
autres partenaires du système de
justice pénale. La probation

124 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
réparatrice est une solution de le tort qu’il lui a causé; faire
rechange à la probation réparation à la collectivité; voir et
traditionnelle en ce que le comprendre les répercussions de
programme se concentre son crime sur la victime et la
principalement sur les questions collectivité; apprendre comment
liées à l’infraction commise et sur éviter de récidiver. Le délinquant
la réparation du tort causé à la en probation réparatrice ne fait
victime et à la collectivité. En pas l’objet de la surveillance
outre, il offre à la victime et aux traditionnelle. C’est à lui qu’il
membres de la collectivité appartient de se conformer à
l’occasion de confronter le l’entente et aux conditions qui lui
délinquant afin de promouvoir ont été imposées. Une fois que le
chez lui un sentiment d’empathie comité a convenu de la peine et
à l’égard de la victime. l’a imposée, le délinquant a
90 jours pour exécuter l’entente et
Contrairement à la peine de mener à bien le programme. Une
probation traditionnelle qui est fois celui-ci achevé, le comité
assortie de 12 conditions peut recommander qu’il soit mis
normalisées, l’ordonnance de fin à la période de probation.
probation administrative rendue
dans le cadre de ce programme Personne-ressource :
est assortie d’une seule condition Michael Dooley
Program Director - Reparative
normalisée interdisant à
Probation Program
l’intéressé de mener des activités Vermont Department of
criminelles à l’avenir, ainsi que de Corrections
toute autre condition particulière 103 South Main Street
Waterbury, Vermont 05671-1001
nécessaire dans le cas donné. Tél. : (802) 241-2796
Dans le cadre de ce programme,
le délinquant comparaît devant
un comité de mesures
réparatrices composé de cinq
citoyens de la collectivité du
délinquant. Au cours de la
réunion, les membres du comité
et le délinquant discutent des
détails et des répercussions de la
conduite de celui-ci. La réunion
aboutit à une entente entre le
comité et le délinquant quant aux
activités qu’exécutera ce dernier
pour mener à bien le programme.
L’entente prévoit des activités
liées aux quatre objectifs suivants
établis pour le délinquant :
indemniser la victime et réparer

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 125
Projet Dos Pasos à de la grossesse leur procure des
l’intention des femmes soins prénataux, garantit une
meilleure santé à l’enfant et au
enceintes et toxicomanes foetus, permet à la mère
Arizona d’accoucher d’un enfant non
toxicomane et accroît les chances
Des observateurs aux États-Unis de réussite du traitement de
ont constaté que le nombre de l’alcoolisme ou de la toxicomanie.
femmes qui sont envoyées en Cette initiative a mené
prison dans ce pays, souvent ultérieurement à la création du
pour vol mineur, crimes moins Projet Dos Pasos qui a pour but
graves et prostitution, est plus de fournir des solutions de
élevé qu’il ne l’a jamais été. rechange à l’incarcération à
«Dos Pasos croit que le (C’est aussi de plus en plus le cas l’intention des femmes
projet permettra non au Canada.) toxicomanes qui sont enceintes
seulement de réaliser
des économies de coût à ou qui risquent fort de le devenir.
Bon nombre de ces femmes sont
court terme, mais
des toxicomanes qui ont des Le projet est doté d’un
d’éliminer les coûts
problèmes d’alcool ou de drogue. coordonnateur chargé de la
«cachés» pour nos
systèmes de santé liaison qui veille à ce que le
publique. On ne peut En outre, de nombreuses tribunal soit au courant de toutes
que supputer les autres délinquantes sont enceintes ou les options qui s’offrent avant de
avantages qui en ont des enfants en bas âge. Il rendre sa décision. Les activités
découleront sous forme semble aussi que l’usage de de liaison comprennent la
d’interruption des drogue pendant la grossesse médiation des différends entre le
répercussions de la s’accroît. personnel des différents systèmes
toxicomanie ou organismes. Le projet permet
intergénérationnelle et Chacun de ces facteurs est déjà d’intervenir aux étapes de
du comportement grave en soi; ensemble, ils l’arrestation, de la mise en
criminel.» témoignent d’une situation détention, de la décision et du
d’urgence. En Arizona, les gens prononcé de la sentence. Les
Elaine Calco-Gray ont commencé à se rendre compte
Surveillante, Dos clientes sont évaluées par les
de la gravité de ce problème gestionnaires des cas du projet
Pasos
national croissant et de ses Dos Pasos qui, souvent, se
répercussions à l’échelle locale. rendent à la prison pour
Les dispensateurs de soins aux interviewer la femme avant sa
toxicomanes, les services sociaux comparution initiale devant le
et certains représentants du tribunal. On a mis en place une
système de justice pénale se sont procédure complète d’admission
réunis pour élaborer des et d’évaluation. Les femmes qui
stratégies destinées à prévenir, participent au programme sont
décourager et traiter l’usage de souvent en probation.
drogue chez les femmes Lorsqu’elles sont mises en liberté,
enceintes. L’intervention auprès elles communiquent avec Dos
des femmes enceintes et Pasos pour avoir accès aux
toxicomanes aux premières étapes

126 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
services de gestion des cas et Programme de solutions
pour se faire renvoyer à d’autres de rechange au placement
services susceptibles de répondre
à leurs autres besoins, qui
sous garde des jeunes
peuvent comprendre des Kitchener-Waterloo
programmes de traitement, des (Ontario)
groupes de soutien, d’autres
groupes de prévention et La Société John Howard de
d’éducation, des services des Waterloo-Wellington offre un «Actuellement, sur
soins prénataux et des services Programme de solutions de chaque dix dollars que
d’aide pour trouver un logement rechange au placement sous nous versons aux
et obtenir de la nourriture, des garde destiné à aider les jeunes provinces (pour les
meubles et des articles ménagers. contrevenants à trouver de services correctionnels
pour les jeunes), huit
meilleures façons de faire face
servent à défrayer les
Selon une évaluation préliminaire aux problèmes et aux stress de
coûts de garde. En un
des ressources, il n’existait tous les jours. Le nouveau
sens, c’est la solution
pratiquement aucun programme programme accepte tous les cas facile. C’est de la
répondant aux besoins spéciaux qui lui sont renvoyés par les paresse. Tout ce que
des femmes enceintes. Grâce à tribunaux pour évaluation mais cela donne comme
des efforts concertés et au tâche de restreindre le nombre de résultat, c’est que nous
financement fédéral, Tucson a mis jeunes acceptés dans le construisons plus
sur pied d’autres programmes programme afin que celui-ci d’établissements dont
résidentiels et de traitement de continue de présenter une les portes sont munies
jour à l’intention des femmes véritable solution de rechange au de verrous.
enceintes et toxicomanes. placement sous garde;
l’évaluation du programme visera Je préférerais... et c’est
Les subventions fédérales au notamment à déterminer si et ce que j’essaierai
projet Dos Pasos ont pris fin en dans quelle mesure il a atteint cet d’obtenir si j’ai
février 1996 et il n’était pas clair objectif. l’occasion de voir... que
cet argent soit dépensé
qu’on puisse obtenir d’autres
en proportion inverse
fonds pour maintenir le projet. Le programme est fondé sur les
au cours des prochaines
travaux de recherche de pointe
années, c’est-à-dire que
du Dr Alan Leschied qui a cerné 80 % soit affecté aux
un certain nombre de facteurs qui mesures de rechange à
augmentent le risque d’un l’incarcération.»
comportement délinquant :
Le ministre de la
• comportement impulsif Justice Allan Rock
• manque de maturité sur le
plan moral
• capacité de
communication sous-
développée
• absence d’empathie
• absence de conscience

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 127
• vie familiale instable activités communautaires et à
• égocentrisme l’encourager à continuer de
• faible niveau de participer à des activités
supervision prosociales. On assure pendant
• groupe affinitaire peu un an un suivi trimestriel pour
recommandable surveiller les progrès accomplis et
• manifestations d’anxiété évaluer le succès du programme.
• loisirs occupés n’importe Ce programme est financé par le
comment ministère des Services
• manifestations de communautaires et sociaux,
sentiments de frustration lequel appuie les programmes de
• absence d’intérêt pour les solutions de rechange
études et l’avenir et de communautaires au placement
colère. sous garde qui assurent des
services d’une grande fréquence
Les participants apprennent à et intensité. Le programme est
réfléchir aux conséquences de offert à Kitchener, à Cambridge et
leur comportement et à les à Guelph.
évaluer, et surtout à en évaluer
les répercussions sur eux-mêmes Personne-ressource :
et sur autrui. Ils s’exercent à Société John Howard de
Waterloo-Wellington
acquérir un esprit critique. Ils
289, rue Frederick
apprennent aussi à reconnaître les Kitchener (Ontario)
solutions de rechange qui N2H 2N3
s’offrent tout en évaluant leurs Tél. : (519) 743-6071
Téléc. : (519) 743-9632
propres processus de prise de
décision.

Le Programme de solutions de
rechange au placement sous
garde accepte les jeunes âgés de
12 à 15 ans qui lui sont envoyés
par les services de probation et
les juges des tribunaux pour
adolescents, mais se concentre sur
les jeunes plus âgés qui ont
commis des infractions plus
graves. Le programme se
compose de trois étapes qui
durent d’environ quatre à six
mois. Les clients et les
coordonnateurs élaborent et
mettent en oeuvre un plan de
mise en liberté destiné à accroître
la participation du jeune aux

128 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Second Chance - l’introduction par effraction, le
Programme de vandalisme et des infractions au
code de la route sont admissibles
dédommagement au programme Second Chance.
Lloydminster, Alberta, Le programme est offert aux
Saskatchewan jeunes autochtones et non
autochtones dans cette région
Les juges sont parfois peu située près de la frontière entre la
disposés à imposer une amende à Saskatchewan et l’Alberta; il s’agit
un jeune parce qu’il est difficile à d’une entreprise conjointe du
celui-ci de gagner de l’argent pour Programme de solutions de
la payer, de sorte qu’il finit en rechange des Services sociaux de
prison de toute façon. Le la Saskatchewan et du Centre
programme Second Chance offre d’accueil autochtone de
aux tribunaux une solution Lloydminster.
intermédiaire entre le placement
sous garde et le service Personne-ressource :
communautaire en aidant les Neil Harris
jeunes à trouver un emploi pour Youth Project Coordinator
Lloydminster Native Friendship
leur permettre de payer l’amende Centre
ou de verser le dédommagement 5010 - 41 Street
requis. Le programme tâche Lloydminster (Alberta)
T9V 1B7
d’encourager les jeunes à assumer Tél. : (403) 875-6558
la responsabilité de leurs actes et à Téléc. : (403) 875-3812
indemniser les victimes de leurs
pertes.

L’argent que le jeune gagne par


Programme
son travail est versé directement
dans un compte par l’entremise d’intervention intensive
des tribunaux de la Saskatchewan. St. John’s (Terre-Neuve)
Dès que la somme à verser en
dédommagement à la victime est Le ministère des Services sociaux
réunie, elle lui est envoyée. On de Terre-Neuve a mis sur pied
remet à l’adolescent une petite récemment un Programme
partie de son salaire pour ses d’intervention intensive auprès
menues dépenses, afin de des jeunes financé en partie par
l’empêcher de commettre de petits une réaffectation de certains des
vols, de lui apprendre qu’il peut fonds affectés actuellement aux
gagner de l’argent et de lui programmes communautaires de
permettre de voir les avantages garde. À Terre-Neuve, il en coûte
d’avoir un travail. 120 000 $ par an pour un jeune
qui purge une peine de quatre
Les jeunes déclarés coupables ans en milieu fermé et 70 000 $
d’infractions telles que le vol, pour un jeune qui purge une
peine de garde en milieu ouvert.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 129
Il est intéressant de noter qu’une qu’il doit aussi comparaître
semaine après que ces chiffres, devant le tribunal pour que celui-
ayant été mentionnés lors d’une ci rende une nouvelle décision ou
conférence, ont été publiés dans pour examen de la décision de
un journal, un juge d’un tribunal placement sous garde, le plan
provincial instruisant une affaire d’intervention intensive sera
a refusé d’imposer la peine de présenté au tribunal. Celui-ci
placement sous garde pourra alors rendre une décision
recommandée par un travailleur de service communautaire qui
social, mentionnant les chiffres peut être assortie de conditions
«Il en coûte 120 000 $ publiés dans l’article de journal. qui reflètent et appuient le plan
par an, seulement en d’intervention. Le plan d’action
salaires et en frais On espère que le programme du travailleur social repose sur de
d’entretien, pour d’intervention intensive réduira à nombreuses stratégies
garder un jeune au la fois le recours aux peines de d’intervention, y compris le
centre pour jeunes de placement sous garde et le temps soutien familial, le counseling
Whitbourne. Cette passé sous garde. Dix autres individuel et de groupe, la
somme ne comprend travailleurs sociaux et deux planification en cas d’urgence
pas les honoraires des préposés aux services prévoyant une intervention
avocats, les frais de communautaires ont été coordonnée et concertée de
counseling, les frais de plusieurs organismes,
embauchés pour assurer des
transport et les autres
services à un nombre limité de l’intégration communautaire, la
coûts connexes...
familles et de jeunes dont on juge promotion de services de soutien
qu’ils présentent un risque élevé et l’organisation de programmes
Malgré le coût, «il n’y
a pas la moindre preuve de se voir infliger une peine de de jour, la surveillance et la
que les jeunes qui y placement sous garde. Les gestion du comportement.
font un séjour se services sociaux déterminent qui
conduisent mieux participera au programme, Pour faire diminuer les taux de
lorsqu’ils en sortent»... choisissant des jeunes qui sont recours au placement sous garde,
déjà en probation. Si de le programme d’intervention
Gale Burford nouvelles accusations sont en intensive doit à la fois offrir une
Université instance contre eux, le juge peut solution de rechange légitime à
Memorial, Terre- prendre en compte le Programme ceux qui autrement seraient
Neuve, cité dans le d’intervention intensive. placés sous garde et chercher à
St. John’s réduire le risque de récidive.
Telegraph Le choix des jeunes qui seront
adressés au programme est fait L’intervention intensive se
par le surveillant des services poursuit tant et aussi longtemps
correctionnels pour les jeunes au qu’on peut s’attendre à ce qu’elle
ministère des Services sociaux ait une incidence positive. On y
plutôt que par le tribunal et en met fin en fonction de plusieurs
tant que solution de rechange à facteurs, y compris l’expiration
l’incarcération. Toutefois, d’une ordonnance du tribunal, la
lorsqu’un jeune est choisi pour réduction du risque, la
participer au programme mais disponibilité d’autres options en

130 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
matière de prestation de services tranquille pendant environ un an
ou une décision à l’effet que le puis, en 1993, j’ai donné un coup de
maintien de l’intervention ne sera pied à un garçon à la bouche et je lui
pas productif. ai cassé les deux dents de devant. En
1993, je cassais les fenêtres de l’école
Personne-ressource : et en 1995 j’ai été arrêté trois fois
Paul Ludlow pour avoir volé une voiture, mais j’ai
Department of Social Services appris ma leçon quand on m’a envoyé
Confederation Building - West
Block en prison. J’en suis sorti le 31 octobre
P.O. Box 8700 et je suis venu participer au
St. John’s, Terre-Neuve programme et il m’a changé pour
A1B 4J6
Tél. : (709) 729-2794
longtemps.»
Téléc. : (709 729-0583
Sa mère nous a écrit aussi, confirmant
Nous avons aussi les coordonnées ce que son fils avait dit et ajoutant
du Programme de surveillance qu’elle avait essentiellement renoncé à
des jeunes de la vallée du Fraser l’aider parce qu’elle n’arrivait pas à
en Colombie-Britannique : obtenir qu’il cesse de fréquenter un
groupe de jeunes qui avaient
Personne-ressource : continuellement des démêlés avec la
Fraser Valley Youth Supervision justice.
Program
P.O. Box 3444
Langley, B.C. Description du programme
V3A 4R8
Tél. : (604) 532-1268
Environ 20 des étudiants
Téléc. : (604) 532-1269
d’Eastwood sont de jeunes
«endurcis» qui ont de longs
casiers judiciaires. Ils viennent à
Eastwood alors qu’ils sont en
Programme période de probation, soit d’une
d’intervention installation pour jeunes, soit
d’Eastwood directement après avoir comparu
Edmonton (Alberta) devant les tribunaux. Le
programme est installé dans un
petit bureau de quartier et il est
Un cas conçu à l’intention d’élèves qui
ont des problèmes personnels ou
Voici un extrait d’une lettre que
scolaires et qui risquent de
nous a fait parvenir un jeune
décrocher. Les enseignants
participant au Programme
tâchent de leur inculquer des
d’intervention communautaire
attitudes et des normes de
d’Eastwood. Nous ne l’avons pas
comportement destinées à leur
corrigée.
assurer le succès. La salle de
classe est ouverte 90 minutes
«En 1990, je me bagarrais, je volais, y
avant le cours. Pendant cette
compris des voitures. Je me suis tenu

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 131
période, les élèves discutent avec été accusé de possession d’un
l’enseignant de leurs problèmes à stupéfiant pour en faire le trafic; il a
la maison ou à l’école, d’abord été reconnu coupable et s’est vu
individuellement, puis en groupe. imposer une peine de probation de
Les exercices du matin 18 mois et un certain nombre d’heures
comprennent l’acquisition de de service communautaire.
compétences scolaires,
professionnelles et sociales. À l’époque, il n’avait pas de travail,
L’après-midi, ils se concentrent sur pas d’adresse fixe et touchait des
des activités de bénévolat et prestations de bien-être. Par la suite,
d’observation au poste de travail. il a été accusé de manquement à trois
conditions de sa probation, y compris
Personne-ressource : défaut de fournir les heures de service
Dennis Koch communautaire exigées et brûler un
Eastwood Outreach Program feu rouge à bicyclette. Conseillé par
Eastwood School
12023 81 Street un ami, Don s’est adressé au
Edmonton (Alberta) Programme de la rue Rideau pour la
T5B 2S9 jeunesse alors qu’il attendait de subir
Tél. : (403) 477-2752
Téléc. : (403) 474-7693
son procès relativement à l’accusation
ci-dessus. En février 1995, il a
travaillé comme journalier occasionnel
du côté Initiatives (banque d’emplois)
du programme et, en juillet, il a été
Programme de la rue accepté dans le programme de
Rideau pour la jeunesse recyclage sans tri du PRRJ. En
Ottawa (Ontario) octobre, il a comparu devant le
tribunal pour le prononcé de la
Il s’agit d’un programme intensif sentence relativement aux trois
visant à aider et à former les accusations de manquement aux
jeunes qui ont des démêlés avec conditions de la probation. Le
la justice afin d’éviter directeur du programme a écrit au
ultérieurement leur placement juge pour lui expliquer le programme
sous garde. et l’informer que Don était devenu
plus stable, qu’il avait trouvé un
Un cas appartement et qu’il suivait des cours
de secondaire par correspondance. Au
Don a déménagé d’une petite ville à moment du prononcé de la sentence,
Ottawa avec sa famille alors qu’il était le juge a dit à Don qu’il avait
en onzième année. Inscrit à l’école initialement prévu lui imposer une
secondaire Rideau, comme il l’a peine de placement sous garde mais
expliqué lui-même, il «s’est trop qu’il avait changé d’avis pour que
amusé». Bientôt, il fumait de la Don puisse continuer de participer au
marijuana et buvait régulièrement. programme. Il lui a imposé une
L’école a refusé de l’accepter l’année période de probation de trois mois.
suivante. À l’âge de 17 ans, Don a Actuellement, Don est âgé de 20 ans
et il lui manque un crédit pour

132 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
obtenir sa douzième année, après quoi ou qu’ils reprennent leurs études.
il veut soit entrer dans l’armée comme Ils ont un an pour toucher le bon. Les sanctions punitives
ingénieur de campagne, soit faire des Ce programme réduit le recours à sont des mesures
études supérieures en dessin l’incarcération en ce que, au désespérées. Elles
technique. Il est résolu à continuer à moment de la détermination de la reflètent nos
sentiments de
améliorer sa situation. Don peine, le juge reçoit un rapport
frustration à l’égard
recommanderait certainement le attestant de la participation du
des jeunes et une
programme à d’autres parce qu’il leur jeune à ce programme et, souvent, population vieillissante
assure un emploi, les aide à obtenir n’inflige pas une peine de qui les craint de plus
des papiers d’identité s’ils n’en n’ont placement sous garde afin de en plus et les tolère de
pas, leur permet de reprendre leurs permettre au jeune de poursuivre moins en moins bien.
études, leur donne de l’argent de le programme. Toutefois, les mesures
poche et contribue à rehausser leur désespérées ne nous
moral et leur estime de soi. Il le Les participants assistent au encouragent pas à faire
recommande tout particulièrement Programme de la rue Rideau du confiance au système
pour ceux qui ont des démêlés avec la lundi au vendredi de 9 h à 16 h. de justice et n’aident
justice. Ils acquièrent des aptitudes pas non plus à réduire
professionnelles, prennent des la criminalité. Elles
Description du programme cours par correspondance, accentuent encore
assistent à des réunions l’écart entre les
hebdomadaires obligatoires avec génération et
Le Programme de la rue Rideau
permettent à celle plus
pour la jeunesse est un un conseiller en planification de
âgée de ne pas tenir
programme de formation qui carrière et rencontrent l’employé
compte de la
assure des services aux jeunes de soutien de Service jeunesse conjoncture
adultes âgés de 18 à 24 ans dont Canada qui les aide à venir à bout économique de plus en
bon nombre ont eu des démêlés de problèmes de logement, de plus difficile, des
avec la justice, qui souvent toxicomanie, etc. Ils gagnent 200 $ emplois de plus en plus
attendent de comparaître de par semaine. Pour être accepté rares et des autres
nouveau devant le tribunal et dans le programme, le candidat situations très
auxquels il est difficile d’assurer doit, au moment où il présente sa stressantes dans
des services. Les préposés au demande, ne pas avoir un emploi, lesquelles nos enfants
programme exploitent une poursuivre des études ou vivre grandissent
entreprise de «recyclage sans tri». dans un milieu stable. Le aujourd’hui... Nos
Ils passent des contrats avec de programme accueille environ dix jeunes sont trop
jeunes tous les neuf mois bien vulnérables et trop
petites entreprises selon lesquelles
qu’il reçoive environ 50 demandes importants pour que
ils ramassent leurs produits
pour la même période. nous nous en servions
recyclables qu’ils transportent à
pas apaiser l’anxiété du
l’entrepôt où ils les trient pour les public qui est sans
vendre ensuite à des Le programme a été mis sur pied
rapport avec eux.
camionneurs/ transformateurs. en mai 1994. Il était financé par le
Les revenus sont réinvestis dans le gouvernement fédéral. Service Sociétés
programme. Lorsque les clients jeunesse Canada a continué de John Howard du
terminent le programme, ils ont financer le programme jusqu’en Canada, Alberta et
droit à un bon de 2 000 $ à la mars 1996; on espèrait alors Ontario
condition qu’ils aient un emploi s’adresser au secteur privé et aux 20 novembre 1995

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 133
entreprises pour trouver les fonds Bon nombre des participants au
nécessaires. Le financement programme Sober Streets y sont
demeure le principal problème renvoyés par les services de
auquel le programme se trouve probation. La plupart ont en
confronté, outre celui d’employer moyenne cinq accusations de
des personnes qui ont peu conduite avec facultés affaiblies à
d’expérience professionnelle ou leur actif. Lors des réunions de
n’en ont pas du tout et dont la groupe tenues dans le cadre de ce
formation prend donc beaucoup programme de dix semaines, on
de temps. demande aux participants
d’examiner les justifications qu’ils
Personne-ressource : ont employées pour continuer de
Programme de la rue Rideau conduire après avoir bu malgré
pour la jeunesse
l’opprobre du public. Ils
Shelley Vincent
112, rue Nelson - Bureau 101A examinent les répercussions de leur
Ottawa (Ont.) comportement, tant du point de
K1N 7R5 vue de la victime que de leur
Tél. : (613) 562-3864
Téléc. : (613) 562-0773
propre état psychologique et
situation financière. Un
conférencier invité de MADD
(Mothers Against Drunk Driving)
vient leur faire un exposé qui,
Sober Streets - Programme souvent, les amène à ressentir de
de lutte contre l’alcool au véritables remords et les motive à
volant changer. «Tous disent que ce sont
Kitchener-Waterloo des sentiments qu’ils n’avaient
pas jusque-là, un changement que
(Ontario)
le temps passé sous garde ou
d’autres méthodes punitives ne
Sober Streets est un programme
pouvaient amorcer», explique le
de la Société John Howard qui vise
coordonnateur du programme
à changer la façon de penser des
Alex Smart.
personnes qui conduisent avec
facultés affaiblies et qui sont des
Personne-ressource :
récidivistes endurcis, grâce à une Alex Smart
«approche non punitive axée sur la Coordonnateur - Sober Streets
confrontation». Environ Société John Howard de
Waterloo-Wellington
1 100 accusations de conduite avec
289, rue Frederick
facultés affaiblies ont été déposées Kitchener (Ontario)
dans la région de Kitchener- N2H 2N3
Waterloo en 1994; d’après les Tél. : (519) 743-6071
Téléc. : (519) 743-9632
études effectuées, environ 60 % de
ces conducteurs avaient déjà été
accusés de conduite avec facultés
affaiblies.

134 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Projet à l’intention des en attendant que des
récidivistes de la conduite modifications soient apportées au
Code criminel en 1996 (soit les
avec facultés affaiblies dispositions du projet de loi C-41;
Île-du-Prince-Édouard dans le cas d’une sentence
conditionnelle, il y a toujours le
Le Projet à l’intention des risque que l’intéressé ne soit
récidivistes de la conduite avec incarcéré à l’avenir en raison du
facultés affaiblies est un projet nombre excessif ou peu réaliste de
pilote qui vise à réduire les conditions qui lui ont été
dommages sur les plans social et imposées, même s’il n’a pas
personnel causés par la conduite commis de nouvelle infraction La conduite avec
avec facultés affaiblies en offrant criminelle). facultés affaiblies a des
une gamme de services plus répercussions énormes
intensifs aux personnes reconnues sur le système de
Personne-ressource :
coupables de cette infraction. justice. Dans les cinq
Isabel Christian - Coordinator
Repeat Impaired Driving Project sphères de compétence
Highway Safety où des statistiques
Dans l’Île-du-Prince-Édouard,
MacMillan Building juridiques ont été
dans environ le tiers des cas de Box 2000 recueillies (le Québec,
condamnation pour conduite avec Charlottetown, PEI
la Saskatchewan, la
facultés affaiblies, il s’agit de C1A 7N8
Tél. : (902) 368-4237 Nouvelle-Écosse, l’Île-
récidivistes - et d’environ Téléc. : (902) 368-5236 du-Prince-Édouard et
200 condamnations par an. Le le Yukon), la conduite
taux de condamnation dans la avec facultés affaiblies
province est plus élevé que le taux était l’infraction dont
moyen national. On calcule que les tribunaux étaient
chaque conducteur qu’on Programme à l’intention saisis le plus souvent -
surprend sur le fait a déjà conduit des adolescents ces cas étaient presque
avec facultés affaiblies de 900 à toxicomanes deux fois plus
2 000 fois. Plus de 80 % de ces nombreux que ceux de
Île-du-Prince-Édouard
personnes se remettent au volant tout autre type
après qu’il leur a été interdit de d’infraction.
Il s’agit ici du cas d’un jeune
conduire. reconnu coupable de «vol de Rapport de
moins de 1 000 $» qui a fait Statistique Canada,
Le projet vise, dans l’immédiat, la l’objet d’une intervention 4 décembre 1995
gestion des cas, le traitement et le intensive destinée à régler son
suivi plus intensif de ses clients. problème de toxicomanie alors
Les premiers participants au qu’il était en période de
projet ont vu leurs amendes probation.
rajustées mais n’ont pas reçu de
peine d’emprisonnement. Le Un cas
modèle du projet permettra
d’examiner le recours éventuel à
Carl (ce n’est pas son vrai nom), âgé
l’ajournement, à l’ordonnance de
de 17 ans, est l’un de trois frères,
probation dans le cas de récidive
celui du milieu. Ses parents se sont
et à une sentence conditionnelle,

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 135
mariés jeunes; ils n’avaient eux- Carl a de bonnes relations avec son
mêmes que 17 ans lorsque leur frère aîné et ses grands-parents
premier enfant est né. paternels. Il se dispute avec son jeune
frère quand «il a les nerfs à fleur de
Carl semble avoir été élevé dans un peau» mais moins qu’avant. Carl est
«D’ailleurs, en 1991,
milieu qui accordait de l’importance retombé dans ses anciennes habitudes
notre taux de
au travail honnête et à la famille. En à deux reprises, le 1er juillet 1995 et à
placement sous garde
même temps, toutefois, son père lui nouveau en octobre. Il s’est réinscrit
des jeunes était 447
pour 100 000 jeunes. faisait passer un double message. En au programme de 12 semaines et
En Angleterre et au effet, tout au long de son enfance, poursuit ses études à l’école
Pays-de-Galles, ce taux Carl savait que son père prenait de la secondaire.
est 69 et en Écosse, 86. drogue. Carl affirme qu’il a de bons
Collectivement, les souvenirs de son enfance, mais il se Description du programme
gouvernements rappelle qu’il y avait des problèmes à
canadiens dépensent la maison avant que ses parents ne se Ce programme de lutte contre la
annuellement plus de séparent en 1991. Ses parents se sont toxicomanie chez les adolescents
250 millions de dollars séparés le jour de son treizième comprend des volets prévention,
pour mettre en prison anniversaire. Leur séparation éducation, désintoxication,
des jeunes continue de lui poser des problèmes. Il traitement et postcure, selon un
contrevenants dont a commencé à prendre de la drogue à modèle de prestation de services
l’infraction la plus 14 ans. Il a réussi à le cacher à sa intégrés. Ce programme est offert
grave était non mère pendant près de trois ans,
violente. Cinq jeunes grâce à un partenariat entre les
jusqu’au jour où le directeur de son Services aux toxicomanes du
sur six qui purgent une
école a téléphoné à celle-ci pour lui comté de Prince, les Programmes
peine
dire qu’on avait surpris son fils en de placement sous garde des
d’emprisonnement ont
commis une infraction train de consommer de la drogue. jeunes et le Conseil scolaire de
sans violence. l’ouest de l’Île. Il fait partie d’un
Il a été renvoyé de l’école en plan général qui vise à accroître
... il en coûte plus de novembre 1994. l’accessibilité aux services
100 000 $ par an pour cliniques à tous les jeunes qui en
un jeune placé sous Plus tard, Carl a été accusé de «vol de ont besoin.
garde en milieu fermé moins de 1 000 $»; sa participation au
dans sept sphères de programme externe de désintoxication Personne-ressource :
compétence au Canada à l’intention des adolescents était East Prince County Addiction
et jusqu’à 300 000 $ l’une des conditions de sa probation. Services
dans les territoires. S’il ne s’était pas engagé à remplir 216 Schurman Avenue
C’est un montant Summerside, Prince Edward
cette condition, on lui aurait imposé Island
scandaleux.» une peine de placement sous garde. C1N 4W6
Au début du programme, son test de Tél. : (902) 888-8380
Le ministre de la Téléc. : (902) 888-8393
dépistage de drogue était positif; à la
Justice Allan Rock
fin du programme, il était négatif.
20 novembre 1995
Carl a été accepté dans un programme
scolaire de rechange. Il a fini son
année avec succès et s’est inscrit à
l’école secondaire de deuxième cycle.

136 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
MAPP - Programme de de suivi des dix jeunes qui
prévention axé sur la présentent les risques les plus
élevés et qui sont en période de
collaboration probation. On tâchera de
interorganismes à déterminer si la surveillance
l’intention des jeunes qui intensive de ces jeunes réduit
présentent des risques effectivement les problèmes de
élevés comportement susceptibles de
donner lieu à une peine de
Brandon (Manitoba)
placement sous garde à l’avenir.
Le Comité des services pour
La stratégie globale adoptée aux
jeunes de Brandon, qui regroupe
fins du programme comprend
22 organismes, a établi le
des ateliers sur les compétences
Programme de prévention axé
parentales et des groupes de
sur la collaboration
soutien à l’intention des parents.
interorganismes (MAPP) dans le
Les organismes participants
cadre d’une série d’initiatives à
comprennent les écoles, les
l’intention des jeunes qui
services de police, les services de
présentent des risques élevés. Le
probation, les procureurs, les
programme MAPP, reconnaissant
services de santé mentale, les
qu’un jeune fait partie d’une
services de protection de
famille et d’une collectivité,
l’enfance, les organismes sociaux,
préconise une approche
les services de traitement de la
holistique qui vise à modifier de
toxicomanie et les groupes
façon permanente le
autochtones.
comportement du jeune et à
accroître la sécurité de la
Par ailleurs, le Programme
collectivité. Dans le cadre de ce
d’évaluation, d’intervention et
projet, les représentants des
de surveillance (A.I.M.) est un
principaux organismes se
nouveau programme de
réunissent chaque mois pour
surveillance des jeunes en
élaborer des plans de gestion des
probation dans la région de
cas coordonnés et surveiller
Brandon qui met l’accent sur la
l’application de stratégies qui
surveillance intensive. Selon la
comprennent le soutien
description qui en est donnée, ce
communautaire et familial.
programme assure une
surveillance stricte, oblige le
Les préposés au programme
jeune à rendre compte de ses
MAPP s’occuperont
actes et comprend des
principalement des quarante
mécanismes de stabilisation qui
jeunes à Brandon qui présentent
sont plus ou moins restrictifs
les risques les plus élevés. Plus
selon le comportement du jeune;
particulièrement, trois personnes
les règles et les attentes sont
ont été embauchées pour élaborer
exposées clairement et on met
et mettre à l’essai des stratégies

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 137
tout en oeuvre pour rétablir la Personne-ressource :
situation avant de déclarer un Dennis Provenski
Chairperson
manquement aux conditions de la
MAPP for High-Risk Youth
probation. Le programme a été Community and Youth
approuvé par les juges locaux Corrections
ainsi que par les représentants du 603 Princess Avenue
Brandon, MB
bureau du procureur de la R7A 0P2
Couronne et de l’avocat de la Tél. : (204) 726-6469
défense. Téléc. : (204) 726-6531

5. Modèle de préservation de la famille

Le Programme de préservation Allan Leschied et d’autres


de la famille est un service à personnes considèrent cette
domicile intensif offert à titre approche comme une mesure de
facultatif aux familles qui ont rechange efficace au placement
des jeunes âgés de 12 à 17 ans sous garde. «Nous offrons le
qui sont placés sous garde ou qui traitement nécessaire à la famille,
risquent fort de l’être. Le explique le thérapeute
Programme de préservation de la Scott Henggeler. Nous n’avons
famille est axé non sur «l’enfant pas inventé un nouveau
à problèmes», mais sur la famille traitement. Nous avons recensé
et cherche par tous les moyens à les meilleurs traitements offerts,
laisser l’enfant dans sa famille nous les avons intégrés
lorsque la chose est possible. Le efficacement, puis nous avons
programme tâche de trouver une surmonté les obstacles au
solution fondée sur les points changement.»
forts de la famille et, en même
temps, de déterminer comment la Programme de
dynamique de la famille ainsi préservation de la famille
que les valeurs et croyances de
cette dernière peuvent contribuer
La Ronge (Saskatchewan)
au comportement illégal du
jeune. Le programme cherche Un cas
aussi à amorcer un changement
dans la collectivité. Il tâche de En mai 1995, un travailleur auprès
réduire les fréquentations peu des jeunes de l’Unité des jeunes
recommandables du jeune dans contrevenants a renvoyé un
la collectivité, à trouver des adolescent âgé de 15 ans appelé Jeff au
mécanismes de soutien officiels Programme de préservation de la
et officieux suffisants et à établir famille. Dans le renvoi, il était
des liens avec d’autres précisé que Jeff devait comparaître
fournisseurs de service qu’il met devant le tribunal pour adolescents
à contribution. pour répondre à trois accusations

138 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
d’introduction par effraction et de intensive assuré par les services de
vol. Comme Jeff avait déjà soutien du Programme de
auparavant été reconnu coupable à préservation de la famille.
deux reprises d’infraction contre les
biens, il risquait fort de se voir Jeff, sa mère et le travailleur ont
infliger une peine de placement sous ensuite comparu devant le tribunal
garde. et ont présenté ce plan de gestion du
cas. Le juge du tribunal pour
Inscrits au Programme de adolescents a imposé à Jeff une
préservation de la famille, Jeff et sa période de probation d’un an assortie
famille ont tout d’abord participé à de conditions. On pense avoir évité
une évaluation du risque, des besoins ainsi une peine d’emprisonnement de
et des points forts. Cette évaluation quatre mois.
visait à déterminer quels facteurs
influaient sur le comportement de Description du programme
Jeff et quelles ressources seraient
nécessaires pour l’amener à changer En général, les familles
de comportement. En outre, elle participent au programme
visait à cerner tout point fort dans la pendant trois à cinq mois. Les
famille et tout soutien éventuel dans travailleurs sont chargés d’un
la famille étendue. petit nombre de cas seulement
afin de pouvoir communiquer
Le processus d’évaluation a révélé ce avec les intéressés fréquemment
qui suit : Jeff n’était pas inscrit à et d’être disponibles vingt-quatre
l’école et ne l’avait pas fréquentée heures sur vingt-quatre en cas
depuis un certain temps. Il d’urgence. Les travailleurs
consommait de la drogue assez peuvent aider les jeunes et les
souvent; il était constamment en familles à acquérir des
conflit avec sa mère. Il n’y avait pas compétences efficaces de
de règles ni de limites claires résolution de conflits ainsi que
imposées à la maison. des façons efficaces de combattre
le stress, à évaluer le rôle des
Compte tenu de ces facteurs, Jeff, sa camarades dans les démêlés du
mère et le préposé au Programme de jeune avec la justice, à trouver un
préservation de la famille ont élaboré logement, ainsi qu’à accroître
un plan selon lequel Jeff s’inscrirait à leurs compétences parentales; ils
un programme scolaire de rechange peuvent aussi assurer la liaison
et assisterait aux cours, participerait entre, d’une part, les jeunes et
à un programme de traitement leurs familles, et, d’autre part, les
externe des alcooliques et des écoles et les organismes.
toxicomanes, participerait à des
séances de counseling en maîtrise de Selon les Services sociaux de la
la colère, aiderait sa mère à établir Saskatchewan, le Programme de
des règles de comportement à la préservation de la famille
maison et remplirait les conditions empêche chaque jour 22 jeunes de
d’un programme de surveillance

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 139
recevoir une peine de placement escomptés : intervention auprès
sous garde en milieu fermé et 15 d’un adolescent plus âgé;
de recevoir une peine de antécédents de placement qui ont
placement sous garde en milieu renforcé le sentiment de rejet et le
ouvert. Le programme a permis risque de délinquance; absence de
de réaliser des économies de motivation de la part de la famille
quelque 500 000 $ par rapport en ce qui a trait aux services
aux dépenses liées au maintien offerts; nombreux problèmes
du même nombre de jeunes dans graves, surtout de nature
des établissements de placement psychiatrique; problèmes de
sous garde et des foyers toxicomanie; famille nombreuse;
communautaires. La Ronge est cote élevée obtenue sur
l’un des six endroits dans la l’évaluation du risque en ce qui a
province où le programme a été trait à la protection de l’enfance;
mis sur pied. mauvaise dynamique parents-
enfant, de nature chronique.
Selon un rapport sur le
programme à La Ronge, le plus Personne-ressource :
important facteur qui contribue à John Labatt
Director - Community Youth
la délinquance, ce sont «les
Services
mauvaises relations familiales Saskatchewan Social Services
marquées par la négativité, les 1920 Broad Street
critiques excessives, le conflit et, Regina, Saskatchewan
S4P 3V6
surtout, le rejet. Les services Tél. : (306) 787-4702
assurés doivent viser à accroître Téléc. : (306) 787-0925
l’estime de soi de l’enfant ou du
jeune.»

Les préposés au Programme de


Services de soutien
préservation de la famille
signalent qu’il est difficile parfois communautaire -
de convaincre les procureurs de St. Lawrence Youth
la Couronne ou la police Association
d’intervenir de cette façon auprès Kingston (Ontario)
des familles «dysfonctionnelles».
«Parfois, ils veulent simplement Les Services de soutien
les sortir de la collectivité pour communautaire de la
une longue période de temps», St. Lawrence Youth Association
d’expliquer un travailleur. offrent des services axés sur la
préservation de la famille aux
Une évaluation du programme a jeunes contrevenants en période
permis de cerner plusieurs de probation et qui risquent
facteurs susceptibles d’empêcher d’être placés à l’extérieur. En
l’intervention auprès d’une outre, cette organisation oeuvre
famille de donner les résultats en vue de la réintégration dans la

140 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
famille et de la réunion avec leur cours des dix dernières années;
famille des jeunes qui purgent cette tendance est inquiétante
une peine sous garde en milieu étant donné que, selon une étude
fermé ou en milieu ouvert. menée en Ontario, les deux tiers
Depuis 1989, les Services de des 456 jeunes libérés ont encore
soutien communautaire ont des démêlés avec le système de
assuré un soutien intensif, souple justice pénale (en raison d’un
et à cour terme à 174 jeunes afin manquement aux conditions qui
d’éviter le placement en résidence leur sont imposées ou
des jeunes âgés de 12 à 15 ans qui d’infractions au Code criminel)
présentent des risques élevés aux dans les six mois qui suivent leur
«étapes initiales» du système de mise en liberté.
prestation des services et d’aider
les jeunes qui présentent des Personne-ressource :
risques élevés aux «étapes Dr. Gary Bernfeld
St. Lawrence Youth Association
finales» du système à réintégrer
845, rue Division
la collectivité. Kingston (Ontario)
K7K 4C4
Selon une analyse des coûts, Tél. : (613) 542-9634
Téléc. : (613) 542-5420
chaque dollar affecté aux Services
de soutien communautaire
représente une économie
d’environ 1,48 $ en frais de
résidence. Il s’agit même Programmes de
probablement d’une sous- préservation de la famille
estimation, car ce chiffre ne reflète aux États-Unis
pas les économies réalisées dans
d’autres secteurs d’aide à De nombreux programmes axés
l’enfance et ne tient pas compte sur la famille ont été mis en
de la mesure dans laquelle le oeuvre au cours des années 1970
programme aide à prévenir les et 1980 à l’intention de clients
problèmes chez les frères et qui leur sont renvoyés par les
soeurs des jeunes en question. organismes d’aide sociale à
Pourtant, les Services de soutien l’enfance, les services de santé
communautaire, comme d’autres mentale, les services
programmes au pays, sont dans correctionnels pour les jeunes et
une situation financière difficile et d’autres organismes. Voici deux
pourraient voir disparaître leurs exemples.
subventions gouvernementales.

En outre, des études effectuées en


Ontario témoignent d’un recours
accru au placement sous garde et
d’augmentations importantes des
taux de renvoi sous garde au

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 141
Projet de préservation de placement en établissement en
la famille de Caroline du Sud.
Simpsonville, Caroline
Programme de liens
du Sud
familiaux «Family
Selon cette approche de Ties» -
«traitement multi-systémique» ville de New York
élaborée par Scott Henggeler, les
thérapeutes s’occupent de quatre Fondé sur l’approche
familles à la fois seulement, «Homebuilders» axée sur la
intervenant auprès de chacune en préservation de la famille du
moyenne pendant quatre mois. système d’aide sociale à l’enfance,
Le jeune et sa famille peuvent ce programme permet aux juges
recevoir une visite tous les jours, de suspendre une ordonnance de
généralement à domicile, et des placement résidentiel pendant
thérapeutes sont disponibles nuit jusqu’à huit semaines. On
et jour. détermine les besoins de chaque
enfant et on fournit l’aide
Les recherches sur le projet nécessaire à la famille pour
portaient notamment sur permettre à l’adolescent de
84 jeunes contrevenants violents continuer de vivre à la maison.
et chroniques qui risquaient Le programme Family Ties met
d’être placés à l’extérieur. Selon l’accent sur les besoins spéciaux
les résultats obtenus, un an après des adolescents. On aide les
le renvoi au Programme de jeunes à résister aux pressions de
préservation de la famille, on a leurs camarades et à apprendre à
constaté d’importantes différentes maîtriser leur colère. On se
positives dans les taux penche sur les relations entre les
d’incarcération, les taux parents et l’enfant et sur le rôle
d’arrestation et le nombre de l’autorité. Les jeunes doivent
d’infractions signalées par fréquenter l’école et respecter les
l’auteur. Deux ans après le heures de rentrée qui leur sont
renvoi au programme, les taux de imposées. Le programme Family
récidive d’un groupe bénéficiant Ties offre des services concrets,
d’un traitement multi-systémique par exemple de garde d’enfant et
étaient nettement inférieurs à d’aide ménagère, pour aider à
ceux d’un autre groupe qui diminuer les pressions qui
recevait des services mènent aux conflits. Selon une
traditionnels. évaluation indépendante
effectuée récemment, une période
Le coût du traitement axé sur la de probation était recommandée
préservation de la famille à la fin de la suspension de huit
s’élevait en moyenne à 2 800 $ semaines dans 65 % des cas et,
par client par rapport au coût dans les autres, il était
moyen de 17 769 $ pour le recommandé qu’on continue

142 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
d’examiner différentes options de Personne-ressource :
placement. On a calculé que la Sandra Welsh
Director
ville et l’État de New York
Family Ties Program
réalisaient des économies de Department of Juvenile Justice
2,7 millions de dollars par an, soit 365 Broadway
environ 3 $ au titre des frais New York, N.Y. 10013
Tél. : (212) 925-7779
résidentiels pour chaque dollar Téléc. : (212) 226-8545
affecté au programme.

6. Programmes résidentiels/de placement -


solutions de rechange

Plusieurs sphères de risquait de se voir imposer une


compétence offrent différents peine d’emprisonnement de
programmes de placement 18 mois.
résidentiel dans la collectivité
qui constituent des solutions de Pour des raisons de confidentialité,
rechange novatrices permettant Jim (il s’agit d’un faux nom) est une
de garder les jeunes dans leur personne hypothétique, de même que
collectivité au lieu de les placer les circonstances exposées ci-après.
dans des installations ou Il s’agit d’un scénario typique fondé
établissements plus sur des années d’expérience concrète.
traditionnels. Certaines sphères
de compétence offrent des En raison de l’éclatement de la
services spécialisés à certains famille et parce qu’on soupçonnait
groupes de délinquants. qu’il faisait l’objet de mauvais
traitements, Jim, alors qu’il était un
Opportunities for enfant en bas âge, a été placé dans
Independence - différents foyers nourriciers.
Ultérieurement, il a été incarcéré
Programme à l’intention
dans un établissement correctionnel
des délinquants ayant un pour adolescents. Il y est resté
handicap de jusqu’à l’âge de 33 ans, quand il a
développement été élargi pour s’occuper de sa mère
Winnipeg (Manitoba) qui se trouvait seule.

Adulte et habitant dans la


Un cas
collectivité, Jim était sans emploi et
commettait souvent de petites
Il s’agit dans ce cas d’une
infractions - vandalisme, petits vols
condamnation pour agression
et bagarres - alors qu’il était sous
sexuelle contre une fillette dix
l’effet de l’alcool. La mère de Jim ne
ans, pour laquelle le délinquant
pouvait aider son fils et leur relation

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 143
s’était détériorée au point où la mère psychosociales et de formation
souhaitait qu’on le sorte de la professionnelle et récréative, et a reçu
maison. (Lorsque Jim commet de des traitements individuels et en
petites infractions, le service de police groupe. Grâce à sa participation à
local l’avertit mais ne l’arrête pas des groupes de résolution de
parce qu’il souffre d’une déficience problèmes fondés sur la participation
mentale et que, par conséquent, il est de pairs, et au relèvement de ses
difficile de porter des accusations capacités de lecture et d’écriture et de
contre lui.) À l’âge de 36 ans, Jim a ses compétences de travail, Jim a peu
été arrêté pour avoir apparemment à peu trouvé un sentiment de
agressé sexuellement une enfant de satisfaction et eut l’impression
dix ans dans son quartier. Il a été d’exercer un contrôle sur sa vie.
placé sous garde, où il a été suivi par Dans le cadre de son traitement, il
un psychiatre qui a posé un double s’est penché sur ses sentiments de
diagnostic. (D’une part, Jim est un rejet et d’abandon ainsi que sur les
déficient mental, ayant une aptitude nombreuses distorsions qui entraient
intellectuelle générale nettement en cause dans son comportement
inférieure à la moyenne et, d’autre criminel. Au cours des deux années
part, il souffre d’une maladie du programme, on a aidé Jim à
mentale.) Jim a été déclaré coupable trouver un emploi, à améliorer sa
de l’infraction en question et, aux relation avec sa mère, à examiner son
termes de l’ordonnance de probation cycle de fantaisies déviantes et à se
rendue à son égard, il était tenu de faire de nouveaux amis. Il a appris
participer à un programme de un mode de vie libre de toute activité
traitement. On craignait que, si on criminelle en suivant un plan de
lui avait imposé la peine contrôle de son comportement
d’emprisonnement de 18 mois qu’il criminel selon lequel il recevait l’aide
aurait pu recevoir, Jim aurait été de plusieurs personnes clés, il n’allait
vulnérable en prison et n’aurait pas que dans des endroits sûrs, menait
tiré profit des programmes de des activités et fréquentait des
traitement correctionnels. Au personnes recommandables et se
contraire, son état aurait tenait à l’affût des pensées,
probablement empiré. Jim a été sentiments et actions pouvant mener
renvoyé au programme à une récidive. Après deux ans, Jim
Opportunities for Independence et a entrepris une période de transition
accepté pour évaluation et visant à l’insérer dans un
traitement. environnement moins restrictif dans
la collectivité Il a été présenté à un
Jim a habité dans l’établissement de préposé au soutien communautaire
soins résidentiels de la première affecté au programme de soutien aux
phase du programme, en compagnie personnes habitant en appartement
de trois autres individus aux dans le cadre du programme
circonstances semblables, où il était Oppotunities for Independence. Au
surveillé nuit et jour. Jim a participé cours des six mois qui ont suivi, il a
à une vaste gamme de programmes acheté les choses nécessaires à la vie
d’acquisition de compétences en appartement et a trouvé un

144 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
appartement dans un quartier éloigné ont ou risquent d’avoir des
des écoles et des bars où il avait démêlés avec le système de justice
tendance à avoir des problèmes. pénale en raison de leur
comportement peu approprié. Il
Grâce à dix heures de soutien tâche de défendre leurs droits
individuel par semaine, Jim a d’être membres à part entière de la
continué à acquérir les compétences société tout en empêchant qu’ils
nécessaires pour mener une vie ne soient incarcérés dans des
autonome, tout en assistant aux établissements correctionnels qui
réunions de groupes de traitement ne sont pas conçus pour répondre
postcure une fois par mois. Deux à leurs besoins particuliers.
années se sont écoulées et, malgré un
seul cas de récidive (petit vol), Jim Opportunities for Independence a
continue d’habiter dans la collectivité, été mis sur pied en 1976 par un
de travailler à temps plein et d’habiter groupe de professionnels qui
dans son propre appartement; il ne voyaient le besoin de ce genre
reçoit plus que cinq heures par d’intervention. Le ministère des
semaine de soutien du travailleur Services à la famille l’a autorisé à
affecté à son cas. Jusqu’ici, il n’a pas exploiter le premier établissement
récidivé sur le plan sexuel. résidentiel dans l’ouest du Canada
spécifiquement conçu pour
Voici le coût total du traitement et du répondre aux besoins de ce
soutien fournis à ce client : environ groupe particulier.
40 423,75 $ par an pour les deux
années de la première phase du Pour être accepté dans le
programme; 7 280 $ par an pour les programme, le client doit subir
dix heures par semaine de soutien une évaluation qui détermine qu’il
pendant les deux années de a des difficultés d’apprentissage,
participation au programme de qu’il peut subir un traitement,
soutien communautaire; et 3 640 $ qu’il est en probation, bénéficie
par an pour le soutien à long terme d’une libération conditionnelle ou
assuré conformément au Programme présente un risque et qu’il peut
de soutien communautaire. être placé dans la collectivité.

Description du programme Personne-ressource :


Rick Rennphert
Executive Director
Le cas ci-dessus illustre bien la Opportunities for Independence
manière dont le programme 3rd floor - 26 Edmonton Street,
Opportunities for Independence Winnipeg, Manitoba
aide une personne donnée. Le R3C 1P7
Tél. : (204) 957-5118
projet vise à élaborer et à exécuter Fax. (204) 956-1671
des programmes communautaires
axés tout particulièrement sur les
besoins des adultes ayant un
handicap de développement qui

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 145
Programme de résidences participe au programme plutôt
communautaires que dans un établissement
collectif où ils peuvent être douze.
Saskatchewan
Le coût du placement dans l’une
Le programme de résidences
des 30 résidences
communautaires en
communautaires de garde à Terre-
Saskatchewan offre une solution
Neuve est de 800 $ environ par
de rechange permettant de placer
mois comparativement à près de
les jeunes dans leur collectivité et
6 000 $ en frais fixes mensuels
hors des établissements plus
pour chaque lit dans un foyer
traditionnels. Les peines sont
collectif. Les jeunes de l’Île-du-
purgées dans environ
Prince-Édouard peuvent habiter
70 résidences de garde en milieu
de deux à six mois en moyenne en
ouvert qui fournissent
foyer d’accueil, en milieu
l’hébergement, les soins et la
d’hébergement surveillé, en foyer
surveillance. Chaque résidence
d’accueil collectif ou chez des
est autorisée à héberger un jeune
parents.
ou deux résidant à proximité de la
famille, de l’école et des occasions
Personnes-ressources :
d’emploi. En Saskatchewan, la Community Homes Program
famille naturelle du jeune Family and Youth Services
participe lorsque c’est possible à Division
Saskatchewan Social Services
des conférences de cas, lui rend
1920 Broad Street
visite et l’accueille à la maison Regina, Saskatchewan
lors d’une sortie autorisée. S4P 3V6
Tél. : (306) 787-3892
Un tribunal peut envoyer Wanda Penney
directement un jeune dans l’une Provincial Coordinator
de ces familles ou il peut être Division of Youth Corrections
Department of Social Services
transféré d’un établissement de P.O. Box 8700
garde en milieu ouvert ou fermé. St. John’s, Newfoundland
Le placement en résidence fait A1B 4J6
partie d’une peine à purger, Tél. : (709) 729-2480
Téléc. : (709) 729-0583
résulte d’une ordonnance de
probation ou se fait Co-ordinator, Community
volontairement, donnant ainsi Custody Programs
Community and Correctional
davantage de choix aux juges et Services Division
aux fournisseurs de services Department of Justice and
lorsqu’ils refusent d’envoyer un Attorney General
P.O. Box 2000
jeune à la maison, mais
Charlottetown, P.E.I.
considèrent que le placement en C1A 7N8
établissement est inutile. De Tél. : (902) 368-4582
nombreux jeunes obtiennent aussi
de meilleurs résultats dans une
résidence où un seul autre jeune

146 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Expansion-Femmes de Une femme a été inculpée d’avoir
Québec commis une fraude de 76 000 $
contre un comité de l’église locale.
Québec (Québec) Elle tâchait d’aider son père à régler
les dettes de son frère, un toxicomane
Deux cas invétéré. En même temps, son mari
se mourait d’un cancer. Le
Une femme risquait une peine procureur a suggéré qu’elle consulte
d’emprisonnement pour avoir Expansion-Femmes. On a accepté le
commis une fraude de 84 000 $ placement à ce centre comme
contre la Société protectrice des solution de rechange.
animaux. Une agente de liaison
judiciaire du Centre Expansion- Description du programme
Femmes l’a abordée à la cour et lui a
expliqué en termes généraux que le
Expansion-Femmes de Québec
Centre pouvait l’aider. La femme
est un centre résidentiel
affirmait qu’elle n’avait pas subtilisé
communautaire pour femmes qui
autant d’argent qu’on le prétendait
a ouvert ses portes en 1983. Il
et s’indignait parce que la victime
offre proactivement ses services
avait profité de la situation. Le rôle
aux tribunaux et aux femmes
d’Expansion-Femmes à ce moment-là
ayant des démêlés avec la justice
était simplement de la soutenir au
afin d’offrir à celles-ci le
cours de la procédure judiciaire. Un
placement résidentiel comme
peu plus tard, le procureur a examiné
solution de rechange de manière
la possibilité de faire appel aussi aux
à leur permettre de rester dans la
services résidentiels d’Expansion-
collectivité au lieu d’être
Femmes comme alternative à
condamnées à une peine
l’emprisonnement parce que, même si
d’emprisonnement.
des données irréfutables révélaient la
disparition d’un montant de
Un agent de liaison surveille
25 000 $ à 35 000 $, prouver qu’elle
étroitement le cas des femmes qui
avait volé le reste prendrait beaucoup
comparaissent en cour lorsqu’il
de temps. Il y a eu un processus de
est probable que la Couronne
négociation de plaidoyer avec
demandera une peine
l’avocat de la défense. La femme a
d’emprisonnement. On
admis avoir subtilisé toute la somme
communique avec ces femmes
et accepté de plaider coupable afin
afin de leur fournir un soutien et
d’être condamnée à une période de
de les informer des ressources
probation à la condition d’habiter au
disponibles. On fait plusieurs
Centre Expansion-Femmes. Elle y a
démarches en ce sens auprès du
assisté à des séances intensives de
procureur et on insiste même
counseling et on y a suivi un plan
lorsque la possibilité semble
destiné à l’aider à apporter certains
susciter très peu d’intérêt au
changements à son mode de vie, avec
départ. Une communication
l’aide d’autres ressources
étroite avec la défense est
communautaires.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 147
maintenue afin de veiller aux sociale de 80 000 $. Elle a été
meilleurs intérêts de la cliente sur condamnée à purger directement une
«Au fil des ans, la le plan juridique si cette initiative peine dans cette résidence. Elle a pu
tendance, alimentée par est choisie et afin d’essayer de éviter l’emprisonnement, continuer
l’opinion publique, a minimiser l’effet d’élargissement de bénéficier de tout son réseau de
été de mettre toutes les du filet (c.-à-d. le risque de soutien social et, grâce au service
personnes condamnées soumettre inutilement à une plus communautaire, dédommager la
d’un crime quelconque grande contrainte en les aiguillant société du tort causé.
en prison et de les y vers cette ressource les femmes
oublier, à la condition qui peuvent éviter une Une autre mère célibataire alcoolique
que cela ne fasse pas de condamnation ou une peine et toxicomane de 25 ans a eu accès à
tort à un membre de sa d’emprisonnement). cette solution de rechange. Elle
famille ou à un ami. vivait des prestations du bien-être et
L’organisme considère que son son enfant était en foyer d’accueil.
Les juges ont souscrit à
principal mandat est d’offrir des Elle avait des antécédents de violence
ce principe sans s’y
services afin d’empêcher la familiale, de voies de fait et était un
opposer, ce qui explique
récidive. La surveillance et le «cas limite» de déficience
aujourd’hui la double
occupation des cellules contrôle sont les premiers psychiatrique. Elle a été condamnée
et le surpeuplement de éléments qui lui permettent de pour avoir gravement blessé son bébé
nos prisons au point fournir un cadre de stratégique pendant qu’elle était intoxiquée et
où, pour emprisonner pertinent. aurait pu recevoir une peine de deux
un délinquant, il faut ans. La gravité de cette perte de
en libérer un autre sans Personne-ressource : contrôle la préoccupait, ainsi que les
pouvoir accorder toute Expansion-Femmes de Québec répercussions terribles sur son
l’attention voulue à sa 2189, Place des Colibris enfant. Un plan a été élaboré selon
Charlesbourg (Québec)
réadaptation ou à la lequel elle a été condamnée à six mois
G1G 2B4
protection du public.... Tél. : (418) 623-3801 de prison, suivi d’un an en foyer de
Nous aurions dû Téléc. : (418) 623-9559 transition et de deux ans de
envisager des solutions probation sous surveillance étroite.
de rechange il y a La peine de six mois de prison semble
longtemps. avoir été imposée strictement pour
Maintenant, nous
Maison Thérèse-Casgrain son effet symbolique, étant donné que
sommes en situation
le plan prévoyait sa mise en liberté
d’urgence. Si nous Montréal (Québec)
après un mois pour qu’elle habite au
prenons des mesures à
l’heure actuelle, ce foyer de transition.
La Société Elizabeth Fry du
n’est pas parce qu’elles Québec met à la disposition des
sont bonnes, mais parce Les infractions des femmes qui
femmes de Montréal une
que nous devons ont tiré avantage de cette solution
solution semblable de rechange
évoluer.» de rechange comprenaient le vol
à l’emprisonnement. Les exemples
à main armée, l’incendie criminel,
comprennent une mère célibataire de
Le juge le vol à l’étalage et la fraude.
50 ans ayant un emploi à un niveau
Hiram Carver Certaines des peines à purger au
de rémunération de 20 000 $. Elle a
Cour suprême de foyer de transition sont de très
Nouvelle-Écosse été condamnée pour avoir, au cours
courte durée ou purgées en fin de
d’une période de plusieurs années,
semaine. Les peines s’ajoutent
fraudé les services d’assistance

148 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
souvent à une ordonnance de habitant dans ces diverses
service communautaire. résidences. Ce programme de
traitement résidentiel
Même si cette solution de communautaire est conçu afin
rechange est disponible à d’aider jusqu’à six jeunes âgés de
Montréal depuis 17 ans, les 12 à 17 ans qui représentent un
juges et les procureurs «risque de récidive sexuelle de
l’acceptent rarement en faible à moyen». Depuis trois ans
remplacement de la peine maintenant, la résidence est
d’emprisonnement. désignée comme un établissement
de placement sous garde en
Personne-ressource : milieu ouvert et accepte les cas
Société Elizabeth Fry du Québec aiguillés par les services de
5105, chemin de la Côte
St-Antoine
probation. Le séjour moyen des
Montréal (Québec) jeunes est d’un an.
H4A 1N8
Tél. : (514) 489-2116 Le programme a d’abord pour
Téléc. : (514) 489-2598
but de faire comprendre aux
jeunes leur comportement sexuel,
de leur permettre d’acquérir le
contrôle approprié et d’améliorer
Programme résidentiel leur capacité de prendre soin des
pour jeunes délinquants autres. L’aspect résidentiel du
sexuels programme aide à faire face à la
Ottawa (Ontario) dénégation, minimise l’évitement
du traitement et permet une
évaluation approfondie de la
En 1990, lorsque la Société de
réaction au traitement.
l’aide à l’enfance d’Ottawa-
Carleton s’occupait de
Comme nombre de jeunes
23 résidences collectives, le
délinquants sexuels ont un large
personnel a remarqué un
éventail d’autres problèmes, le
nouveau problème lié aux
programme n’examine pas
adolescents qui révélaient un
uniquement le comportement
comportement sexuel agressif.
sexuel des jeunes. Ils ont souvent
Un directeur a dit que ces jeunes
des difficultés à établir des
commençaient à acquérir des
relations et on les aide donc à
tendances permanentes
traiter de questions liées au
dangereuses et inquiétantes.
contrôle, à la domination, au
respect des autres, à l’empathie, à
On a décidé d’ouvrir une
la mutualité et à la bienveillance.
résidence exclusivement réservée
à ces individus afin d’élaborer un
Le programme est offert dans
programme de traitement intensif
une perspective clinique plutôt
et de réduire le risque de
que juridique. Le personnel
revictimisation de d’autres jeunes

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 149
relève donc les demandes organismes, dont Maple Star, pour
contradictoires faites au jeune et placer une métisse de 15 ans. Après
à sa famille lorsque les avoir passé huit mois au Centre de
accusations sont en instance et justice pénale local, l’adolescente a
qu’un avocat de la défense peut été envoyée dans un centre de
leur conseiller de garder le placement sous garde pour les jeunes
silence et de n’admettre aucune où elle a passé les trois dernières
responsabilité. Selon un semaines en attendant d’être placée
membre du personnel du en foyer d’accueil, en foyer collectif
programme, «Il s’agit en fait de ou dans un établissement résidentiel
connaître la vérité, ce qui n’est de garde d’enfants.
pas toujours ce que fait un
système judiciaire accusatoire. L’adolescente a été inculpée comme
Nous avons modifié la situation adulte et condamnée pour les
et demandé à chacun ce qui est infractions graves de tentative de
dans le meilleur intérêt de meurtre, voies de fait contre une
l’enfant à long terme.» personne âgée et vol. Des
12 organismes, 11 ont décidé de
Personne-ressource : rejeter le cas, compte tenu de la
Monsieur Bob Sauer gravité des accusations. Un
Superviseur du programme
Société de l’aide à l’enfance
travailleur social de Maple Star a
d’Ottawa-Carleton accepté de passer une entrevue avec
1602, Cour Télésat l’adolescente et l’agent chargé du cas
Gloucester (Ontario)
afin de déterminer s’il était possible
K1B 1B1
Tél. : (613) 748-0670 pour l’organisme de trouver un foyer
Téléc. : (613) 747-4456 d’accueil approprié.

Au cours de l’entrevue, l’adolescente


a dit qu’elle avait l’impression
Foyers d’accueil Maple d’avoir payé sa dette à la société et
qu’elle voulait continuer sa vie. Elle
Star voulait retourner à l’école, obtenir un
Colorado diplôme en deux ans et aller au
collège. Elle a aussi dit qu’elle
Voici le cas d’une adolescente de voulait retourner habiter chez sa
15 ans placée en foyer d’accueil mère, mais comprenait que le
dans la collectivité après avoir tribunal avait ordonné le placement
été condamnée pour tentative de hors de sa famille parce qu’il
meurtre, voies de fait contre une considérait que les parents n’étaient
personne âgée et vol. pas en mesure de se charger d’elle et
ne le voulaient pas non plus. Elle ne
Un cas considérait pas que son crime était
une infraction grave et c’est
Ce cas a été renvoyé par un agent de probablement pourquoi les autres
comté chevronné le 1er mai 1995. organismes ne voulaient pas la
On a communiqué avec douze placer.

150 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
L’adolescente a été placée sous garde Description du programme Le vérificateur général
dans un foyer d’accueil Maple Star le de la Pennsylvanie
10 mai 1995. Le plan était de lui Maple Star dirige des rappelle les
répercussions
assurer toute la surveillance possible programmes de traitement et de financières du
en milieu familial. L’adolescente soins en famille d’accueil au surpeuplement des
pouvait obtenir un emploi après prisons
Colorado et au Nevada. La
s’être révélée responsable au foyer. clientèle de Maple Star compte Malgré un programme de
construction
des jeunes en conflit avec la loi d’établissements
L’équipe de service dirigée par les qui représentent un risque élevé. carcéraux qui coûte aux
parents du foyer d’accueil a élaboré Un jeune ou deux habitent avec contribuables américains
environ 760 millions de
un plan créatif. L’arrondissement chaque famille. Ils peuvent dollars, le vérificateur
scolaire a refusé l’admission à s’adresser à Maple Star sur général de la
l’adolescente aux termes d’une loi du ordonnance de probation ou Pennsylvanie,
Barbara Hafer, affirme
Colorado stipulant que les écoles ne lorsque les accusations sont en qu’il «nous est tout
sont pas tenues d’accepter dans instance, le programme simplement impossible de
construire des prisons
réseau scolaire des criminels intervenant en leur nom. assez rapidement pour
condamnés ou des jeunes repris de éliminer le problème
justice. Les parents du foyer chronique du
Les spécialistes ou les préposés surpeuplement des
d’accueil ont pris la défense de au traitement et aux soins en établissements
l’adolescente pour qu’elle soit admise famille d’accueil s’efforcent carcéraux.»
à l’école secondaire locale. Après une d’apporter la stabilité aux jeunes Se reportant aux
entrevue avec l’adolescente et les dans des collectivités et des prévisions selon
parents du foyer d’accueil, le lesquelles la population
familles de soutien. Certaines carcérale de la
conseiller scolaire a accordé son études révèlent que les soins en Pennsylvanie atteindra
soutien et accepté d’aider les parents famille d’accueil sont une 33 000 détenus d’ici
l’an 2000, Mme Hafer a
du foyer d’accueil à élaborer pour solution de rechange responsable dit qu’à son avis, malgré
l’adolescente un programme scolaire et rentable au placement en la construction de huit
au foyer. L’école a accepté de nouvelles prisons en cinq
établissement. Les jeunes ans, le surpeuplement
reconnaître les crédits obtenus par contrevenants en famille d’accueil sera de 41 %.
l’intermédiaire du programme avaient amélioré leur Pour réduire un budget
scolaire au foyer. L’adolescente sera comportement et présentaient correctionnel qui, selon
évaluée à la fin de cette année moins de risque récidive que ceux ses calculs, atteindra un
milliard de dollars d’ici
scolaire et, si elle a de bons résultats, placés en milieu plus restrictif. l’an 2000, Mme Hafer a
elle sera admise à l’école comme élève proposé de mettre en
de cycle supérieur au semestre place une vaste gamme
Chaque programme de soins de peines autres que
d’automne. Il semble jusqu’à familiaux fonctionne selon des l’emprisonnement et,
maintenant qu’elle ira à l’école principes particuliers : notamment, d’élaborer
des programmes moins
secondaire locale au mois d’août. coûteux pour les
équipes de service - elles se délinquants non violents.
Cette adolescente sera en probation On pourrait ainsi, a-t-elle
chargent d’élaborer et de souligné, affecter plus de
comme adulte pendant quatre ans et surveiller des plans pour chaque ressources aux
demi. Voilà un exemple de ce que la personne qui obtient des soins;
programmes pour les
délinquants violents ou
société peut faire si nous sommes dangereux et pour les
assez créatifs et engagés pour aider normalisation - les plans visent à multirécidivistes ainsi
les gens à changer leur vie. qu’aux programmes de
créer un milieu dans lequel la prévention du crime.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 151
personne qui obtient des soins Programme d’internat et
peut vivre aussi normalement d’externat «Youth
que possible et acquérir de
nouvelles aptitudes;
Futures»
Vallée du bas Fraser
réseaux de soutien (Colombie-Britannique)
communautaire - les activités
permettent d’établir et de Le Programme d’internat et
renforcer des réseaux de soutien d’externat «Youth Futures»
communautaire; constitue une solution de
rechange pour les jeunes lorsque
réduire l’opprobre - on évite la surveillance en probation est
d’étiqueter l’individu ou de jeter insuffisante mais que
l’opprobre sur lui tout en faisant l’incarcération n’est pas
des efforts afin de réduire les nécessaire.
répercussions nuisibles de
l’opprobre infligé auparavant; Le programme de 16 semaines se
déroule dans la vallée du bas
soins inclusifs - on essaie Fraser, vise à la fois les jeunes et
d’inciter les membres de la leur famille, et la plupart des
famille, y compris les parents jeunes continuent d’habiter à la
naturels, à participer activement maison ou dans d’autres
au programme. résidences approuvées pendant
qu’ils vont à l’école le jour et
Personne-ressource : assistent à des programmes en
Maple Star Associates soirée et en fin de semaine. On
Karla Galaway
aide les familles en leur
P.O. Box 306
Lake George, Co. 80827 fournissant le soutien pratique à
Tél. : (719) 748-3928, 748-3981 la maison et elles sont invitées à
Téléc. : (719) 748-3942 devenir partenaires du
programme en travaillant avec
l’enfant. Une surveillance directe
et hautement structurée est
réservée à chaque jeune et, dans
la plupart des cas, l’heure de
rentrée est vérifiée au téléphone
ou en personne.

Le personnel observe les jeunes


dans leur famille au cours des
premières semaines et relève les
points forts et les points faibles
(règles, routine, genre de
réinstallation), ainsi que les
expériences antérieures à l’école

152 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
et dans la collectivité. Le jeune des changements positifs sont
est ensuite placé pendant deux à apportés dans le vécu du jeune et
quatre semaines dans une son milieu, le jeune commence à
«famille d’accueil» choisie se départir du comportement
d’avance et le personnel, négatif qui a mené au
l’exposant ainsi à un milieu comportement criminel ou
familial sain, peut l’observer antisocial. L’approche minimise
davantage en terrain neutre. Un l’intervention et le déplacement
programme individualisé est des jeunes hors de leur
ensuite conçu et couvre la collectivité tout en intégrant la
période complète de participation surveillance et le soutien.
de quatre mois. Les travailleurs
rencontrent une fois par semaine Le programme scolaire de jour
le jeune et la famille afin consacre quatre des cinq jours par
d’examiner le calendrier des semaine aux activités
activités des sept jours suivants. d’apprentissage assistées par
ordinateur qu’a élaboré le Centre
Ce programme, selon un dépliant de technologie pédagogique à
d’information, est axé surtout sur l’Université Simon Fraser. Le
les jeunes qui peuvent être à un programme en soirée, offert trois
pas de la prison. Il s’agit des fois par semaine, met l’accent sur
jeunes qui ne souffrent pas de les aptitudes émotionnelles,
perturbations graves du sociales et techniques, par
comportement, mais qui peuvent exemple, l’art oratoire,
avoir acquis des aptitudes l’automarketing, la maîtrise de la
sociales médiocres et avoir des colère et les aptitudes à la
problèmes, par exemple, une négociation. Les jeunes
légère toxicomanie, des apprécient aussi le large éventail
modifications du comportement d’activités culturelles et de loisir
ou une déficience de l’attention. offert plus d’une fin de semaine
Une famille dysfonctionnelle, par mois.
l’échec de l’éducation, des liens
communautaires médiocres et des Personne-ressource :
relations négatives avec les pairs Youth Futures Program
Bob Kissner, Executive Director
aggravent souvent ces problèmes.
P.O. Box 3444
Les responsables ont précisé que Langley, B.C.
le programme ne convient pas à V3A 4R8
certains jeunes, y compris les Tél. : (604) 532-1268
Téléc. : (604) 532-1269
contrevenants violents, les
délinquants sexuels et ceux qui
ont des problèmes de
toxicomanie graves.

Le programme se fonde sur la


prémisse selon laquelle lorsque

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 153
Ranch El’dad pour les d’adultes déficients mentaux qui
adultes déficients ont des démêlés avec la justice.
On demande aux individus
mentaux inculpés ou qui subissent déjà
Steinbach (Manitoba) leur procès de songer à accepter
cette solution de rechange à
Voici le cas d’un adulte l’incarcération. Les résidents y
handicapé mental qui, après passent en moyenne deux ans.
avoir purgé des peines
d’emprisonnement, a été placé Organisme du Comité central
dans un autre milieu. Mennonite (CCM) du Manitoba,
de Ranch El’dad offre un cours
Un cas d’acquisition de compétences
psychosociales, ainsi que le
«Dans le cas des jeunes «Ma vie a été très dure. J’ai été dans counseling dans les domaines de
qui pourraient six foyers d’accueil jusqu’à l’emploi, de l’établissement d’un
autrement se voir maintenant. Dans l’un deux, j’étais budget et du perfectionnement
infliger une peine de
toujours battu. Quand je personnel. On insiste
placement sous garde,
déménageais, je ne faisais pas énormément sur le travail, y
il faut offrir aux juges
une plus vaste gamme vraiment confiance aux parents du compris le travail dans le boisé, le
d’options permettant foyer d’accueil. J’avais peur d’eux. jardinage, le montage des cadres
une supervision et une Je pensais toujours que j’allais être de ruche et l’entretien de la cour.
intervention plus battu. J’ai eu des ennuis à 18 ans.
efficaces que ne le J’ai commencé à consommer de El’dad a certains objectifs, par
permet le nombre de l’alcool et des drogues à 19 ans. Je exemple, le counseling contre la
cas habituellement me suis finalement retrouvé en toxicomanie et la surveillance
confiés aux délégués à prison. Quand je suis arrivé à ainsi que des services résidentiels
la jeunesse ou aux El’dad, c’était une nouvelle en harmonie avec un milieu
agents de probation.» expérience. Je pensais que ce serait familial chrétien. Les services
l’enfer. Après un certain temps, j’ai communautaires autorisent
Le ministre de la
commencé à en apprendre davantage El’dad à fournir l’hébergement à
Justice Allan Rock
20 novembre 1995 et les gens s’occupaient vraiment de six résidents et il obtient des
moi, mais ce sont surtout les fonds de la province et du CCM
membres du personnel qui ont le plus du Manitoba.
de mérite. Ils m’ont toujours aidé
quand j’étais déprimé. J’espère que Personnes-ressources :
mon séjour ici m’aidera à mieux Brendan ou Jewel Reimer
vivre, à avoir un bon emploi et à Directeurs - El’dad Ranch
C.P. 9, G. 3, R.R. 1
devenir une meilleure personne...»
Steinbach (Manitoba)
R0A 2A0
Description du programme Tél. : (204) 326-1050

Le Ranch El’dad est un centre de


traitement résidentiel situé près
de Steinbach pour les cas limites

154 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
7. Programmes de solutions de rechange au
cautionnement et sanctions administratives

De nombreux délinquants n’ont l’application de la peine


pas les moyens de verser la d’emprisonnement, même si des
caution et doivent donc attendre études ont révélé qu’il peut
en prison de subir leur procès, aussi avoir des répercussions
c.-à-d. qu’ils sont punis positives sur la peine éventuelle.
d’avance. La recherche a révélé
que cette situation peut aussi Un cas
accroître la possibilité d’être
condamné et de se voir imposer Un jeune de 16 ans a été arrêté et
une autre peine accusé de voies de fait causant des
d’emprisonnement. Les lésions corporelles et d’avoir manqué
programmes de solutions de aux conditions de sa probation. Ce
rechange au cautionnement jeune a déjà des démêlés avec le
permettent de libérer le système de justice pour les jeunes. Il
délinquant dans la collectivité a été condamné à l’été de 1995 pour
sous la surveillance d’un d’autres accusations et un travailleur
responsable. Les programmes auprès des jeunes à l’emploi du
de solutions de rechange à ministère des Services sociaux s’est
l’amende permettent d’imposer chargé de son cas et l’a surveillé. À
des sanctions administratives et la suite de son arrestation actuelle, le
d’autres mesures de rechange à jeune a été envoyé dans un
l’emprisonnement lorsque le établissement de détention provisoire
délinquant ne peut verser afin de comparaître devant le
l’amende. tribunal au cours de la matinée
suivante. Lors de sa comparution, la
Couronne s’est opposée à sa
Libération provisoire des libération et le tribunal pour
jeunes par voie judiciaire adolescents a envoyé une demande
Saskatchewan d’examen de la possibilité d’une
libération provisoire par voie
Les jeunes appréhendés mais judiciaire. L’enquête a compris des
qui n’ont pas encore été entrevues avec le jeune et des
condamnés peuvent éviter le personnes de soutien, ainsi qu’un
placement sous garde en examen des données officielles. Le
attendant la détermination de la jeune habite chez une tutrice légale
peine en obtenant une libération qui entretient une relation avec le
provisoire par voie judiciaire père. Le jeune ne communique pas
dans la collectivité où ils sont avec sa mère. Il a déjà été mis en
surveillés de près. Il s’agit d’un liberté provisoire par voie judiciaire
allégement à court terme de en décembre 1995 et en a respecté les

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 155
conditions. Il est actuellement quotidiennes sans trop
suspendu de l’établissement collégial d’interruption et discuter en
Cochrane à cause de son attitude famille des raisons possibles de
négative, provoquante, belligérante et leur comportement et de la façon
vulgaire, mais il sera réadmis à la pour eux d’éviter d’autres
suite d’un séjour de deux semaines démêlés avec la justice.
en résidence dans un établissement
de prévention de l’alcoolisme et de la Le juge rend sa décision surtout
toxicomanie. Le directeur a souligné après avoir déterminé si le jeune
qu’il a eu un bon rendement avant la comparaîtra de nouveau devant
suspension lorsqu’il a participé au le tribunal et s’il présente un
programme d’activités accélérées en risque pour la collectivité. Le
classe. Il a accepté de suivre les préposé à la libération provisoire
directives de sa tutrice légale et de par voie judiciaire examine si le
son père s’il est libéré. La tutrice jeune a des antécédents
accepte de le reprendre chez elle et de judiciaires, vérifie sa situation
lui fournir la surveillance et personnelle et familiale actuelle,
l’orientation nécessaires pour qu’il se si une résidence appropriée est
comporte bien. La libération disponible, s’il est impliqué dans
provisoire par voie judiciaire lui a été des affaires de drogue, d’alcool
octroyée à condition qu’il garde la ou d’autres substances, si un
paix, se comporte bien, respecte les adulte responsable peut et veut le
conditions de résidence, rentre à surveiller, et il fait ensuite une
21 h, participe à des programmes recommandation afin d’aider le
éducatifs, de perfectionnement juge. Un jeune libéré doit
professionnel et (ou) de loisirs, ne accepter de garder la paix, bien se
communique pas avec certaines comporter, comparaître devant le
personnes, s’abstienne de consommer tribunal au besoin et respecter
de l’alcool et de la drogue et, d’autres conditions.
conformément aux directives de
l’intervenant, obtienne un traitement Personne-ressource :
de prévention de l’alcoolisme et de la Bob Kary
toxicomanie. Saskatchewan Social Services
1920 Broad St. - 12th Floor
Regina, Saskatchewan
Description du programme S4P 3V6
Tél. : (306) 787-1394
Téléc. : (306) 787-0925
En permettant aux jeunes de
rester dans la collectivité en
attendant qu’une décision soit
rendue dans leur cas, on leur
fournit l’occasion de prouver
qu’ils peuvent avoir un
comportement responsable dans
la collectivité. On espère qu’ils
peuvent continuer leurs activités

156 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Centre Ma Ma Wi Wi Chi programmes sensibilisés à la
Itata culture. Ce Centre animait aussi
des conférences familiales pour
Winnipeg (Manitoba) les jeunes. Ma Ma Wi Wi Chi
Itata et de nombreuses autres
Le Centre Ma Ma Wi Wi Chi
initiatives communautaires
Itata permettait la libération
pourraient utiliser les fonds qui
provisoire par voie judiciaire de
servent maintenant à entasser des
jeunes Autochtones grâce à un
individus dans nos prisons.
contrat passé avec les Services
correctionnels communautaires et
Personne-ressource :
pour adolescents du Manitoba. Ma Ma Wi Wi Chi Itata Centre
Ce programme a été interrompu 305-338 Broadway
par manque de financement. La Winnipeg, Manitoba
R3C 0T3
libération provisoire par voie
Tel.: (204) 925-0300
judiciaire fonctionne Téléc.: (204) 946-5042
passablement de la même façon
que le programme de la
Saskatchewan mentionné
auparavant. Des statistiques
révèlent que les personnes en
Programme de
liberté provisoire par voie substitution d’amende
judiciaire, comparativement à Territoire du Yukon
d’autres qui sont en placement
sous garde provisoire, se verront Les amendes imposées par les
probablement moins souvent tribunaux sont toujours assorties
imposer une peine d’un nombre de jours
d’emprisonnement après leur d’emprisonnement à défaut de
procès. paiement. C’est pourquoi de
nombreuses personnes doivent
Le Centre non seulement purger une peine
fournissait des programmes de d’emprisonnement pour une
libération provisoire par voie infraction mineure qui n’aurait
judiciaire (solution de rechange jamais mérité l’emprisonnement
au cautionnement), mais assurait en premier lieu. Les solutions de
de l’aide juridique, des sorties rechange à l’amende leur
autorisées et la surveillance de permettent de travailler
près des personnes libérées sur bénévolement dans la collectivité
probation. Cette surveillance pour un organisme sans but
touche en particulier les jeunes lucratif au lieu de payer
Autochtones à risque élevé qui l’amende.
devraient autrement purger une
peine d’emprisonnement. Le Service des centres
L’initiative visait à réduire la correctionnels communautaires
récidive parce qu’elle comprenait administre le Programme de
une surveillance et des solutions de rechange à

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 157
l’amende qui fournit aux Coordonnatrice des
programmes correctionnels
délinquants l’occasion de rendre
communautaires
un service communautaire au lieu C.P. 2703
ou en plus de payer l’amende. Whitehorse (Yukon)
Ce type d’initiative a été lancé Y1A 2C6
Tél. : (403) 667-8293
parce qu’un très grand nombre de Téléc. : (403) 667-6826
personnes purgeaient de brèves
peines d’emprisonnement parce L’Île-du-Prince-Édouard a un
elles n’avaient pas payé l’amende programme de solutions de
pour un certain nombre de rechange à l’amende semblable à
raisons. Dans les établissements celui du Yukon.
provinciaux canadiens en 1992-
1993, 35 % des détenus ont été Personne-ressource :
admis pour défaut de paiement Phil Arbing
«Envoyer quelqu’un en d’une amende. Les participants Provincial Advisor - Criminal
prison pour non Justice and Corrections
s’entendent sur le travail à faire
Health and Community Services
paiement d’une amende dans un organisme de Agency
ne rime à rien, puisque bienfaisance ou sans but lucratif 4 Sydney St.,
cette personne est et sur le nombre d’heures de P.O. Box 2000
immédiatement Charlottetown, P.E.I.
travail qui permettra de régler Tél. : (902) 368-6619
renvoyée chez elle. Le
l’amende. Depuis le lancement Téléc. : (902) 368-6136
pire, c’est que la
du programme, mois de 1 % de
nouvelle circule vite, de
ceux qui se sont vus imposer une
sorte que les gens
viennent se rendre, amende ont été emprisonnés
pour défaut de paiement et ceux
sachant qu’on ne leur Sanctions administratives
demandera jamais de qui l’ont été devaient déjà, en
général, purger une peine
Territoire du Yukon
purger leur peine ou du
moins pas de la purger d’emprisonnement pour une
en entier.» autre infraction. Un délinquant Le 1er octobre 1995, des sanctions
peut toujours en principe choisir administratives sont entrées en
Le juge l’emprisonnement au lieu de vigueur contre les conducteurs ou
Hiram Carver payer l’amende ou de rendre un les propriétaires de véhicule qui
service communautaire, mais n’ont pas payé les amendes
aucun ne le fait. Si un délinquant imposées en vertu de la Loi sur les
ne respecte pas le Programme de véhicules automobiles ou de la Loi
solutions de rechange à l’amende sur la voirie. Les conducteurs
s’il ne paie pas l’amende, il peut peuvent se voir refuser le
se voir imposer des sanctions renouvellement de leur permis de
administratives décrites dans la conduire ou l’enregistrement de
prochaine section. leur véhicule automobile. Leur
permis de conduire peut même
Personne-ressource : être suspendu.
Joy Waters
Directrice des services Au cours de l’été précédent, la
correctionnels et
communautaires
publicité dans les médias et une

158 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
campagne d’information ont Dans le contexte d’un
encouragé les gens en défaut à changement de politique
payer les amendes imposées par important visant à réduire le
le tribunal avant l’entrée en recours à l’incarcération, le
vigueur des sanctions le Québec prévoit aussi avoir
1er octobre. Plus de 6 000 lettres largement recours aux sanctions
et relevés de compte pour des administratives.
amendes dues sur un véhicule
automobile ont été envoyés par la Personne-ressource :
Maître Paul Monty
poste aux gens en défaut de
Substitut en chef et directeur
paiement. À compter du des Affaires criminelles
1er août 1995, les amendes dues à Ministère de la Justice du
Québec
la suite d’infractions à la Loi sur 1200, route de l’Église
les véhicules automobiles et à la Sainte-Foy (Québec)
Loi sur la voirie atteignaient G1V 4M1
Tél. : (418) 643-9059
530 000 $. Ce montant avait Téléc. : (418) 646-5412
diminué de 130 000 $ environ en
octobre.

Personne-ressource :
Joy Waters
Directrice des services
correctionnels et
communautaires
C.P. 2703
Whitehorse (Yukon)
Y1A 2C6
Tél. : (403) 667-8293
Téléc. : (403) 667-6826

8. Planification axée sur le client

La planification axée sur le client La prémisse de cette approche est


est davantage un processus résumée dans un rapport du
distinct qu’une solution de Solliciteur général du Canada
rechange à l’emprisonnement et dont l’auteur est
nous avons donc pensé qu’il était Matthew Yeager : [traduction] La
approprié de s’y reporter à la fin planification axée sur le client
de cette section du répertoire qui pose d’abord la question
met en lumière les initiatives suivante : Y a-t-il un moyen de
visant à éviter le recours à gérer ce défendeur ou de le punir
l’emprisonnement, pour qu’il ne présente pas un
accompagnées ou non de certains risque trop élevé pour la société?
éléments de réparation. Cette mesure s’éloigne de la
grande majorité des décisions

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 159
rendues en Amérique du Nord Nous concluons cette section avec
qui ont recours à l’incarcération quelques exemples de projets de
comme point de référence à partir planification axée sur le client.
duquel on évalue les délinquants
et leur crime afin de déterminer
la peine. On examine en fait Services de défense des
chaque cas en présumant droits au moment de la
d’abord - mais ce n’est cependant
pas toujours vrai - qu’il est
détermination de la
possible de rendre une forme de peine : Centre national des
condamnation avec sursis ou une établissements et des
ordonnance de probation. solutions de rechange des
É.-U.
On a eu recours à la planification
axée sur le client afin de fermer
La planification axée sur le client
des centres d’éducation surveillée
est souvent une forme de défense
pour les jeunes, ainsi qu’à l’étape
des droits au moment de la
«Chaque dollar affecté de la détermination de la peine
détermination de la peine conçue
à un détenu devrait pour les jeunes et les adultes, au
principalement à l’intention des
suivre celui-ci dans la cours des négociations précédant
collectivité et ce, avocats de la défense et qui offre
le procès avant d’adopter un
pendant au moins toute des solutions de rechange à
plaidoyer de culpabilité et lors de
la période que le détenu l’incarcération. Il s’agit d’une
la libération conditionnelle.
aurait passée en Yeager remarque que, affirmation du Dr Jerome Miller
établissement.» théoriquement, le modèle de la qui a fermé le réseau
PAC peut aussi servir à réduire la d’établissements d’éducation
Jerome Miller surveillée au Massachusetts. Il a
population carcérale adulte.
National Centre on aidé à ouvrir en 1979 le Centre
Institutions and
Il y a le risque d’élargir le filet national des établissements et des
Alternatives
autant dans le cas de la solutions de rechange des É.-U. qui
planification axée sur le client a lancé un projet afin de fournir
que dans celui d’autres initiatives des services d’intervention contre
judiciaires. Les plans l’incarcération aux avocats de la
recommandant des solutions de défense grâce à la création de
rechange à l’incarcération plans de solutions de rechange
peuvent en fait être ajoutés à une adaptés selon le contexte et les
peine d’emprisonnement. Il est antécédents criminels du
possible d’éliminer cette tendance délinquant.
en choisissant de fermer un
établissement ou en restreignant
le nombre de délinquants admis à
la planification axée sur le client
aux auteurs d’infractions graves
qui risquent fortement d’être
emprisonnés.

160 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Planification axée sur le Les plans de solutions de
client - Caroline du Nord rechange à l’emprisonnement
mettent l’accent sur une
Les programmes mettent l’accent combinaison appropriée de
sur le choix des cas afin de veiller à traitement de l’alcoolisme et de la
ce que les défendeurs qui reçoivent toxicomanie, de surveillance du
les services soient réellement sur le délinquant, de services de
point de se voir imposer une peine réadaptation et de
d’emprisonnement. L’Institut dédommagement de la victime
gouvernemental de l’Université de ou de la collectivité.
la Caroline du Nord a élaboré un
barème d’évaluation du risque Personne-ressource :
The Sentencing Project
utilisé pour déterminer la 1156 15th St. NW
possibilité d’une peine Suite 520
d’emprisonnement dans le cas de Washington, DC 20005
Tél. : (202) 463-8348
certaines infractions et lorsque le
délinquant présente certaines
caractéristiques. On a aussi
recours à l’opinion de l’avocat de
la défense et aux opinions sur
l’évolution du cas pour modifier
ces évaluations.

Planification axée sur le


client - Nouveau-
Mexique

Le Nouveau-Mexique a engagé
des fonds dans un programme de
solutions de rechange à
l’emprisonnement dans tout
l’État. Un ou deux des
travailleurs sociaux ou agents
chargés des cas sont détachés
auprès du bureau du défenseur
public. On encourage les
procureurs à remettre les dossiers
des cas de forfaits au personnel
chargé des solutions de rechange
à l’emprisonnement au début de
la procédure judiciaire s’ils ont
l’impression qu’une peine
d’emprisonnement est probable.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 161
Quatrième section :
Pour une vraie justice

Série d’initiatives destinées à réduire la durée du


placement sous garde en allégeant l’application de la
peine d’emprisonnement

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Table des matières
Série d’initiatives destinées à réduire la durée du placement sous garde en allégeant l’application de la peine
d’emprisonnement

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .162

1. Programmes de surveillance communautaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .164


Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .164
Agression sexuelle - Un cas de guérison dans une communauté, Ontario . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .166
Protégeons les enfants - Les enfants et l’agression sexuelle - Yukon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .168
Services d’intervention judiciaire de Coverdale - Halifax . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .169
Surveillance communautaire des délinquants condamnés - Nouveau-Brunswick . . . . . . . . . . . . . .170
Service communautaire : Délinquants occasionnels - Barrie (Ontario) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .172
Programme Stop and Think : Programme d’autorisation de sortie pour les jeunes - Halifax . . . . .172
Autres variations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .173

La détermination de la peine et des programmes communautaires selon certains juges . . . . . . . . .174

2. Préparation à la mise en liberté pour une réinsertion sociale réussie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .175


Participation d’Aînés aux audiences de la Commission nationale
des libérations conditionnelles - région des Prairies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .175
Entraide détenu anonyme : Programme de mise en liberté anticipée - Québec . . . . . . . . . . . . . . . .179
Groupes sentences-vie - Montréal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .181
Life Line - Windsor . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .181
Projet Another Chance - Kingston . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .181
Projet d’aide aux délinquants après la mise en liberté :
Services juridiques autochtones - Toronto . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .183
Programme Respect - Brandon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .183

3. Camps dans la nature . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .184

4. Détention à domicile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .186

5. Remarques sur la surveillance électronique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .187

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Introduction

Cette section décrit les initiatives parrainés par la collectivité qui


visant à réduire le recours à préparent les détenus à mener à
l’incarcération en diminuant la bien leur réinsertion sociale et qui
période d’application de la peine, augmentent la possibilité d’une
c.-à-d. la peine effectivement mise en liberté anticipée.
purgée en prison.
La liberté sous ces diverses
Dans un certain nombre de formes, surtout très tôt au début
sphères de compétence, le juge de la peine, est parfois surveillée,
peut déclarer au moment de la entièrement ou en partie, à l’aide
condamnation que la personne de la surveillance électronique.
sera incarcérée seulement
pendant les fins de semaine et On considère aussi dans certaines
mise en liberté les autres jours. sphères de compétence que les
Voici une autre pratique camps dans la nature sont une
populaire : le juge détermine une solution de rechange qui allège
peine d’emprisonnement et la l’application de la peine dans un
personne condamnée est établissement carcéral plus
emprisonnée mais, à un certain officiel.
moment au cours de l’imposition
de la peine, elle peut bénéficier Nombre de ces initiatives
d’une mise en liberté anticipée. peuvent sembler très
Un éventail de mécanismes ont intéressantes en théorie et elles
été créés à cette fin dans de réussissent en fait à tenir de
nombreuses sphères de nombreux individus hors de
compétence dans le monde, y prison sans accroître le risque
compris divers degrés de pour la collectivité.
surveillance : programmes Contrairement à la crainte du
d’autorisation de sortie, semi- grand public, des données
liberté, mise en liberté dans la probantes révèlent que, jusqu’à
collectivité au cours de la journée maintenant, les crimes dangereux
seulement ou, au contraire, et violents ne sont presque jamais
uniquement en soirée et présence liés aux permissions de sortir, aux
à la prison pour accomplir des congés d’ancienneté ou à d’autres
tâches ou d’autres activités au mises en liberté anticipée du
cours de la journée, mise en genre (Mathiesen, 1995).
liberté (ou mise en liberté Lorsqu’une rare tragédie de la
partielle) dans un établissement sorte se produit, cependant, elle
spécialisé ou de surveillance, ou attire irrésistiblement l’attention
simplement à la maison. Il y a des médias. On voudrait avoir pu
aussi certaines initiatives empêcher l’incident en
importantes de programmes appliquant une politique ou une

162 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
loi différente. Nous savons sans avoir commis une autre
toutefois, grâce à un large infraction criminelle, de sorte que
éventail d’études de prévisions la population carcérale augmente
empiriques, qu’il est à peu près encore.
impossible de prévoir ce genre
d’incidents. Pour garantir qu’ils Aucune de ces mesures ne réduit
ne se produisent jamais, il les coûts parce que la manière de
faudrait interdire un nombre les administrer reste très
incalculable de mises en liberté dispendieuse, lourde et inefficace,
anticipée accordées avec succès, du moins dans certaines sphères
engendrant ainsi des sentiments de compétence, comme nous le
de frustration et d’amertume chez constaterons plus loin. On ne
un grand nombre de personnes. peut non plus prévoir des
Il y aurait aussi d’autres économies à l’avenir à moins de
répercussions sur les coûts des prendre délibérément une
prisons et la situation créerait décision politique de réduire
probablement des problèmes l’espace carcéral, ce qu’annonce
sociaux encore plus graves à maintenant le Québec et le
l’avenir. Nouveau-Brunswick. Sans cela,
les administrateurs des prisons ne
Ces programmes de mise en sont pas portés à favoriser la mise
liberté anticipée présentent un en liberté anticipée puisqu’il y a
autre aspect positif : il n’y a pas des lits inoccupés dans les
eu de répercussions sur les taux prisons. Il reste cependant que
de récidive dans l’ensemble; au des données probantes révèlent le
contraire, pour certains taux de succès comparatif de ces
délinquants, l’incarcération et une mesures communautaires
période d’isolement plus longue lorsqu’elles sont appliquées, et là
semblent accroître le risque de où elles le sont, ainsi que leur
récidive! (Lin Song, 1993.) énorme potentiel économique si
elles ne sont pas liées à
Par contre, ces mesures ne l’incarcération et à la capacité
réduisent pas la population carcérale.
carcérale globale. Elles réduisent
le surpeuplement, mais l’espace Il faut poser des questions plus
actuel reste occupé et la capacité fondamentales sur l’objectif que
carcérale totale continue visent certaines de ces mesures
d’augmenter. En outre, il s’agit lorsqu’elles sont appliquées à une
d’une solution de rechange à population en particulier et sur la
l’emprisonnement et des nécessité dans nombre de ces cas
conditions strictes peuvent être d’imposer une peine
imposées, y compris la tolérance d’emprisonnement, ensuite si
zéro si ces conditions ne sont pas dispendieuse à administrer. On
respectées. Une personne peut peut déterminer des mesures plus
donc être incarcérée de nouveau rentables afin de rendre une

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 163
justice vraiment satisfaisante dans peuvent aider plus efficacement à
le cas de la plupart des personnes diminuer dans l’ensemble le
maintenant considérées recours à l’incarcération dans ce
admissibles à ces programmes. pays.
C’est pire la fin de
Certaines de ces initiatives
semaine
appliquées ensuite avec soin à un
Jusqu’à 30 personnes
purgeant des peines plus large éventail de prisonniers
discontinues imposées
pour voies de fait et
conduite avec facultés
affaiblies ont été 1. Programmes de surveillance
renvoyées chez elles
lorsqu’elles se sont communautaire
présentées au Centre de
détention de la région
(Permissions de sortir, semi-liberté, peines
Ottawa-Carleton
vendredi dernier pour
discontinues)
purger leur peine en fin
de semaine («prison
renvoie les détenus de
week-end pour cause de
Introduction a mentionné que les délinquants
purgeant des peines discontinues
grève», 5 mars).
Nombre de ces programmes ont au cours des fins de semaine sont
Selon le surintendant été conçus en théorie afin de envoyés dans un motel, une école
Ashraf Aial, «Aucun
fournir l’accès à des programmes vide, un foyer de transition afin
d’entre eux ne présentait de «faire leur temps», ou sont
un risque pour la sécurité
dans la collectivité ou de
perturber le moins possible une même renvoyés à la maison.
du public». Le gardien
personne en mesure d’occuper un Ceux que ce mode d’imposition
en grève Rob Jones,
toutefois, a déclaré qu’on emploi ou d’assumer ses de la peine avantage le plus sont
avait effectivement mis en responsabilités familiales. En les entreprises de location de
danger la sécurité du
pratique, cependant, le recours à vidéocassettes parce que c’est
public. Qui devons-nous ainsi que l’on occupe nombre de
croire? Les personnes qui ces programmes est motivé dans
de nombreuses sphères de ces prisonniers au cours de leur
purgent leur peine en fin
compétence par la nécessité de journée sous surveillance dans
de semaine sont
généralement en liberté réduire le surpeuplement dans une salle d’attente
pendant les jours de les établissements carcéraux. Des (L’Association des services de
semaine. Présentent-elles
pressions se sont ensuite exercées réhabilitation sociale, 1993).
alors un risque? Ou bien
ne sont-elles dangereuses afin d’appliquer les dispositions
de façon plutôt chaotique et Certains s’inquiètent de ce que
que pendant les fins de
parfois, compte tenu de la l’imposition de peines plus
semaine où la SEEFPO
est en grève? pénurie grave d’espace carcéral, courtes puisse modifier la
sans tenir compte des plans ou de perception qu’ont les délinquants
Don Hale, Nepean
la situation de l’individu. de l’inévitabilité et de la sévérité
The Ottawa Citizen, de la peine. Cette inquiétude ne
6 mars 1996 semble cependant pas fondée,
Citant un exemple dans un
rapport de 1993 sur ce genre compte tenu de l’absence de
d’emprisonnement au Québec, on répercussions dans l’ensemble
sur les incidents violents ou la

164 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
récidive accrue. La situation tendance était d’octroyer la mise
soulève cependant des questions en liberté dans la collectivité de
graves sur la nécessité de cette plus en plus tôt, étant donné le
sanction, compte tenu des coûts. surpeuplement des
La nécessité d’envoyer «un établissements carcéraux. La
message» à la collectivité la situation confirme en fait qu’on
justifie habituellement. (Par reconnaît largement, même chez
exemple, les parents regardaient les administrateurs
la télévision lorsque leur fils en correctionnels, que l’incarcération
bas âge s’est noyé dans la est inutile dans un grand nombre
baignoire. Il fallait leur imposer de cas. Même si la durée
une peine sévère afin d’envoyer moyenne des peines a augmenté
un message ferme aux parents et de 20 % l’an dernier, la durée
c’est, selon les journaux, ce qu’un moyenne de la peine purgée en
juge a dit en Ontario... même s’il réalité en prison a diminué de
a aussi dit croire que le couple 11 % (ASRSQ, 1993). Il faut
éprouvait un remords et un remarquer que le gouvernement
chagrin profonds et n’avait pas du Québec a par la suite annoncé
l’intention de blesser l’enfant... des plans de fermeture de
(La Presse canadienne, Ottawa plusieurs prisons et l’adoption
Citizen, le 8 novembre 1995). La d’une politique ferme de
mère s’est vue imposer une peine déjudiciarisation et de sanctions
de 60 jours à purger pendant les administratives.
fins de semaine. Selon les
meilleures recherches disponibles De même, au Canada dans
sur la dissuasion, il ne s’agit l’ensemble, 66 % de tous les
pourtant pas d’un moyen efficace. détenus incarcérés dans des
Le simple fait d’apprendre le établissements provinciaux
décès du bébé n’a-t-il pas de purgent une peine de moins de
répercussions réelles sur les trois mois (Statistique Canada),
parents? En pareil cas, une seulement 8 % purgent une peine
personne est-elle vraiment allant de un à deux ans moins un
dissuadée par la simple crainte jour et 88 % des détenus
ou menace d’une peine provinciaux sont incarcérés pour
d’emprisonnement? des infractions non
accompagnées de violence. Il
Dans le même rapport sur le s’agit en général de détenus qui
Québec, on a aussi remarqué qu’à se voient accorder en nombre
l’époque, 38,4 % de la population croissant les diverses formes de
carcérale provinciale avait été libération sous surveillance
condamnée à une journée ou communautaire, après qu’un juge
moins, 68 %, à 30 jours ou moins, ait dit, sachant pertinemment que
que le séjour moyen d’un dans bien des cas cela se
prisonnier condamné était de produira, qu’il faut néanmoins
33 jours environ et que la «les condamner à une peine

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 165
d’emprisonnement». À nouveau, Un cas
ces personnes sont condamnées à
cause du message ainsi véhiculé et Au cours d’un vendredi de juin 1990,
non parce qu’on considère un membre de l’équipe pastorale de
nécessaire l’expérience de l’Église Mennonite d’Oakview a
l’incarcération comme telle. appris que Rob, un membre de la
communauté, avait été appréhendé et
Malheureusement, cela accroît accusé d’agression sexuelle contre sa
l’opprobre qui leur est infligé et le fille Sandra (tous les noms ont été
coût des services qui leur sont changés).
parfois disponibles dans la
collectivité lorsqu’ils sont libérés. L’équipe pastorale a informé la
D’autre part, certains de ces communauté qui a entrepris l’étape
programmes sont très utiles et difficile d’élaboration d’un processus
efficaces, même s’ils ne règlent pas afin de traiter des questions que
nécessairement toutes les l’agression avait soulevées et de
questions de réparation fournir le soutien aux membres de la
permettant de rendre une justice famille et à d’autres personnes. On
vraiment satisfaisante. Parmi les était convaincu dans ce processus que
exemples ci-dessous, le premier l’Église est pour tout le monde et qu’il
cas révèle ce qui peut se produire fallait faire appel à la communauté
lorsque les membres d’une d’Oakview afin de prendre soin de
collectivité se chargent de traiter toutes les personnes touchées : le
de toutes les questions connexes délinquant Rob, la victime Sandra, les
oubliées lorsque sont imposées les autres membres de la famille et
peines prévues par le système de d’autres survivants d’agression.
justice pénale.
Puisqu’il n’y avait aucun modèle à
suivre ou à adapter à la situation,
Agression sexuelle - un l’équipe pastorale, en collaboration
cas de guérison dans une avec plusieurs membres qui avaient de
l’expertise dans des domaines
communauté
pertinents, a élaboré son processus
une étape à la fois, sans jamais savoir
Voici le cas d’un homme accusé
vraiment ce qui viendrait ensuite.
d’agression sexuelle contre sa
fille. Il a été condamné à 30 jours
Le travail a été accompli à plusieurs
de prison à purger pendant les
niveaux. Au cours des deux
fins de semaine et il s’est vu
premières semaines, des groupes
imposer un certain nombre de
de soutien distincts ont été formés
conditions intégrées à un plan
afin d’aider Rob, son épouse
qu’ont élaboré des membres de la
communauté religieuse dont sa Caroline et leur fille Sandra. À un
famille et lui-même sont autre niveau, l’équipe a essayé de
membres. prendre soin d’autres survivants
d’agression sexuelle ou de violence
familiale dans la communauté en

166 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
organisant des réunions de soutien, en cas. Deux ans et demi après les
réglant les frais de counseling et en accusations, cependant, les membres
fournissant d’autres ressources et du de la communauté se sont réunis pour
soutien. un service spécial de guérison qui
représentait une conclusion officielle
En ce qui a trait aux accusations du traitement public de l’inculpation
portées contre Rob, la communauté a par la communauté.
pris des dispositions pour que des
personnes soient présentes lorsque La guérison suit son cours et les
Rob a comparu devant le tribunal et membres de l’Église soulignent les
lors de la détermination de la peine. avantages personnels et généraux
Les membres de la communauté ont qu’ils ont tirés de leur volonté de
contribué à l’élaboration et à la prendre position et d’intervenir
présentation au tribunal d’un plan auprès des personnes qui souffrent -
d’application de la peine pour Rob qui autant l’agresseur que la victime.
comprenait le service communautaire
dans un centre local de traitement des Tiré de : “A congregation responds to
victimes d’agression sexuelle et qui lui both sexual abuser and abused”,
Mennonite Reporter, le 19 avril 1993.
permettait de garder son travail et de
respecter son engagement envers les
Personne-ressource :
membres de la collectivité.
Dave Worth
MCC Ontario
Le soutien de la communauté et la 54 Kent Ave.
participation à la préparation et à la Kitchener, Ont.
N2G 3R1
surveillance du plan d’application de Tél. : (519) 745-8458
la peine ont influé sur le tribunal qui Téléc. : (519) 745-0064
a imposé une peine d’emprisonnement
beaucoup plus courte que d’habitude.

Les membres de la communauté ont


ensuite aidé Rob à emménager dans
son appartement et ont fourni le
transport entre son appartement et le
centre de détention, où il a purgé sa
peine de 30 jours pendant les fins de
semaine.

L’expérience a été difficile, mais


importante pour la communauté. Un
large éventail d’opinions et
d’impressions ont été exprimées au
sujet de Rob et du rôle approprié de la
communauté dans ce cas. Il y avait
des opinions divergentes au sujet de la
rapidité de la démarche de la
communauté en vue de résoudre le

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 167
Protégeons les enfants - partie de leur peine en prison.
les enfants et l’agression Les équipes de gestion du risque
sont formées d’individus et de
sexuelle personnes-ressources officielles
Territoire du Yukon qui font partie de la famille ou du
milieu social du délinquant. Ils
Protégeons les enfants est un se réunissent avec le délinquant
programme du Yukon qui fait la en probation afin de déterminer
promotion d’une approche d’abord les éléments qui le
holistique de la protection des poussent à récidiver. Ils
enfants contre l’agression choisissent et appliquent ensuite
sexuelle. Même si ce programme des conditions et surveillent s’il
n’est pas une solution de les respecte, afin de diminuer le
rechange à l’incarcération en soi, risque.
nous l’ajoutons à ce répertoire
parce qu’il adopte plusieurs Cette approche donne aux
éléments clés dans une approche familles qui ont un délinquant à
communautaire plus efficace du la maison, dans leur milieu social
problème des infractions ou dans le quartier, les aptitudes
sexuelles dans notre milieu. Une nécessaires pour protéger au
description du programme mieux les enfants. Ils apprennent
reconnaît que ni la prison, ni le à éliminer les occasions de
traitement des délinquants récidive, p. ex., ne jamais confier
uniquement ne permet de à un délinquant connu la garde
protéger les enfants. Les des enfants.
délinquants sexuels - ceux qui ont
purgé une peine et ceux qui n’ont Sous l’aspect sécurité
jamais été arrêtés - continueront communautaire du programme,
de vivre dans nos collectivités. on a conçu des ateliers afin
Tous les adultes qui travaillent ou d’aider les adultes à comprendre
qui vivent avec des enfants les mauvais traitements infligés
doivent partager la responsabilité aux enfants, à les reconnaître, à y
de les protéger. Les collectivités réagir et à les empêcher. Ils
doivent donc aider à contrôler et enseignent comment créer des
à diminuer le risque que milieux sécuritaires pour les
représentent pour les enfants enfants.
ceux qui commettent des
infractions sexuelles. Lancée il y a trois ans, Protégeons
les enfants est une entreprise du
Douze délinquants dans cinq gouvernement du Territoire du
collectivités du Yukon collaborent Yukon en collaboration avec
actuellement avec des équipes de Santé Canada et le Conseil des
gestion du risque du programme Premières nations du Yukon.
qui les surveille pendant qu’ils
vivent et travaillent dans une
collectivité. Ils purgent tous une

168 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Personne-ressource : comprendre que si elle ne voulait pas
Joy Waters aller en prison, elle devrait
Directrice des services
comprendre un certain nombre de
correctionnels et
communautaires choses. On lui a aussi fait
C.P. 2703 comprendre que l’intervenante de
Whitehorse (Yukon) Coverdale se donnait la peine de
Y1A 2C6
Tél. : (403) 667-8293
comparaître à la barre des témoins
Téléc. : (403) 667-6826 afin de proposer une solution de
rechange à la peine
d’emprisonnement demandée. Le
juge a condamné la femme à six fins
de semaine en prison et lui a imposé
Services d’intervention
une condamnation avec sursis afin
judiciaire de Coverdale qu’elle se présente à l’intervenante de
Halifax (Nouvelle-Écosse) Coverdale qui devait informer l’agent
de probation si des signes de
Un cas manquement aux conditions
devenaient imminents. Il n’y a eu
Une femme a été accusée de 52 vols à aucun autre incident pendant plus de
l’étalage. Elle avait des antécédents deux ans.
d’infractions du même genre, avait
été condamnée auparavant à purger Description du programme
une peine d’une semaine en prison et
la Couronne voulait cette fois qu’on Les services d’intervention
la retire de la collectivité pendant judiciaire de Coverdale sont un
plus longtemps. organisme communautaire pour
les femmes ayant des démêlés
Coverdale a offert des services à cette avec la justice qui a été financé à
femme afin d’examiner la possibilité l’origine grâce au soutien des
d’élaborer un plan de rechange qui églises et les fonds ont été
conviendrait au tribunal. Ses choix recueillis à la suite de la
négatifs la portaient à commettre des fermeture et de la vente d’une
vols à l’étalage afin de couvrir ses prison à sécurité minimale pour
enfants de cadeaux. Le travail les femmes. Coverdale embauche
accompli auprès de cette femme visait des intervenants à la cour à Saint
à élaborer des suggestions afin John au Nouveau-Brunswick et à
d’imposer une peine composée de Halifax en Nouvelle-Écosse afin
«mesures de réparation» qui lui de soutenir les femmes inculpées
permettraient de rester avec sa et de servir d’intermédiaire
famille. Son époux soutenait auprès des organismes d’aide.
l’imposition d’un dédommagement. Cet organisme fournit aussi les
On était d’avis que cette femme avait services d’intervention et de
besoin d’un «bain de réalité» au sujet counseling personnel d’un
de certains aspects de sa vie qu’elle aumônier communautaire à
ne maîtrisait pas. On lui a fait Halifax afin de traiter de certaines

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 169
questions comme les mauvais où sont commis des actes
traitements, le chagrin, la perte et illégaux. Il y a un manque de
la maîtrise de la colère. soutien immédiat à la libération.
Il faut un groupe de bénévoles
Lorsqu’il s’agit de fournir une bien préparés qui peuvent aller
solution de rechange à en automobile rencontrer la
l’incarcération qui convient au personne à la sortie et l’aider au
tribunal, les éléments clés, selon cours des premiers 48 heures
leur expérience, sont l’élaboration grâce à un réseau de camarades
d’un plan définitif et la volonté qui la soutiendra pendant une
de la cliente de plaider coupable. période assez longue.
Ces mesures ont été efficaces
dans un certain nombre de cas, y Personnes-ressources :
compris celui d’une femme Kathleen Jennex, Mary Haylock
Coverdale
inculpée de trafic de drogue qui
Suite 306
avait un casier judiciaire et qui 5670 Spring Garden Road
risquait une peine d’au moins Halifax, N.S.
deux ans de pénitencier. Le plan B3J 1H6
Tél. : (902) 422-6417
de rechange comprend souvent le Téléc. : (902) 425-3160
counseling ou la thérapie, un
processus d’éducation de la
cliente, des liens à nouer entre
elle et d’autres organismes
communautaires afin de l’aider à Surveillance
rencontrer divers groupes de communautaire des
soutien et le rapport à l’agent de délinquants condamnés
probation. Nouveau-Brunswick
Même les plans de rechange bien La Société John Howard du
élaborés, cependant, n’ont pas Nouveau-Brunswick a élaboré la
toujours convenu aux juges. Le surveillance communautaire des
cas récent d’une femme accusée délinquants condamnés (SCD)
de fraude et de vol à l’étalage qui afin de travailler avec les
a quand même été condamnée à délinquants condamnés à des
l’emprisonnement en est un peines continues - discontinues
exemple. dans le cadre d’un programme
d’autorisation de sortie amélioré.
Le personnel de Coverdale a Il fournit aux délinquants non
observé que les peines violents et à faible risque la
d’incarcération ne permettent pas surveillance améliorée à la
la réadaptation à long terme des maison, la participation à des
femmes. La récidive est un ateliers spécialisés et comprend
énorme problème parce que, dès un élément de service
la libération, les femmes ont les communautaire.
moyens de vivre uniquement là

170 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Un cas Les établissements correctionnels
choisissent des délinquants
John Doe a participé deux fois au admissibles qui ont déjà purgé le «L’incarcération de
programme de surveillance tiers de leur peine. Le personnel 15 000 détenus
communautaire. Il a été reconnu du programme examine ensuite condamnés à une peine
coupable de voies de fait simples leur cas. Si un délinquant est d’emprisonnement dans
inculpé de voies de fait ou de les provinces et les
contre sa petite amie la première fois
territoires (et la mise sous
et a été condamné à 30 jours de mauvais traitements, on
garde d’environ
prison. Il a purgé le tiers obligatoire communique avec la victime qui 4 000 personnes) absorbe
de sa peine en prison, a ensuite été doit approuver le plan de jusqu’à 80 % d’un budget
libéré et a participé au programme de libération. Les délinquants annuel d’environ
surveillance communautaire pendant acceptés sont envoyés à la maison 1 milliard de dollars.
afin de purger leur peine dans la Pourquoi dépenser des
le deuxième tiers de sa peine afin de
sommes si astronomiques
suivre des cours et une thérapie de collectivité sous la surveillance
pour l’admission et
maîtrise de la colère. Il y a eu plus d’un préposé au téléphone qui l’incarcération de ces
tard récidive de comportement communique avec les participants délinquants alors qu’il
agressif lorsqu’il a proféré en public à chaque jour. La politique de n’est pas nécessaire
des menaces contre sa petite amie. tolérance zéro s’applique à toutes d’incarcérer la plupart
les conditions de la libération. d’entre eux pour assurer
John Doe a été reconnu coupable
la protection du public?
sous deux chefs d’accusation de voies Tous les participants doivent
Pourquoi ne pas songer
de fait et a été condamné à une peine avoir un téléphone et être sérieusement à adopter
de sept mois et à une autre de deux disponibles afin de prendre des solutions de rechange
mois de prison à purger personnellement tous les appels moins coûteuses et
consécutivement. Il a été libéré sous du préposé au téléphone. beaucoup plus efficaces?»
surveillance communautaire après
... Nous devons
avoir purgé le tiers de sa peine. Au La plupart des accusations
collectivement adopter la
cours de cette période, il s’est inscrit portent sur le manquement aux notion selon laquelle une
à un programme de formation conditions de probation, le défaut peine effective et efficace,
professionnelle en mécanique, a de paiement d’une amende, les dans le cas de la plupart
choisi un milieu de vie plus stable et fraudes, les voies de fait comme de ces délinquants, n’est
les batailles dans les bars, mais il pas une peine
a obtenu deux emplois à temps
d’emprisonnement. Pour
partiel qui ne l’empêchaient pas de y a aussi eu certaines infractions
eux, les sanctions
suivre ses études. Il a terminé le sexuelles. La période moyenne communautaires doivent
programme après avoir purgé les de la peine pour ceux qui devenir la norme et
deux tiers de sa peine, au moment de participent au programme est de l’incarcération doit être
sa libération d’office. Les préposés à sept jours dans le cas des peines une mesure de rechange à
purgées à plein temps et de trois laquelle on a recours
la surveillance communautaire ont
lorsque nécessaire, plutôt
dit qu’il était devenu autonome, jours dans celui des peines
que vice versa.»
pouvait accepter des responsabilités, discontinues et toute personne
avait acquis un comportement plus condamnée à une peine dans un Willie Gibbs
approprié et s’était taillé une place établissement provincial est Président,
plus solide dans la collectivité. admissible. Commission nationale
des libérations
conditionnelles

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 171
Personne-ressource : Personne-ressource :
Brian Saunders Major David Thorburne
Directeur exécutif The Salvation Army
La Société John Howard du Simcoe County Correctional and
Nouveau-Brunswick Inc. Justice Services
618, rue Queen, bureau 5 14 High Street, Suite 203
Fredericton (N.-B.) Barrie, Ontario
E3B 1C2 L4N 1W1
Tél. : (506) 457-9810 Tél. : (705) 737-4140
Téléc. : (705) 737-1009

Service communautaire -
délinquants occasionnels Programme Stop and
Barrie (Ontario) Think - Programme
d’autorisation sortie pour
À Barrie en Ontario, l’Armée du les jeunes
salut offre aux délinquants qui Halifax (Nouvelle-Écosse)
doivent respecter les conditions
d’une peine discontinue à la prison Le YMCA a élaboré à Halifax le
de Barrie l’occasion de faire du programme «Stop and Think» à
service communautaire. Ce l’intention des jeunes qui purgent
programme permet d’utiliser une peine dans un établissement
efficacement les ressources provincial. Il fournit une solution
physiques limitées de la prison en de rechange au placement sous
offrant des programmes de garde grâce à une permission de
rechange communautaires créatifs sortir au cours des trois derniers
qui aident les délinquants à mieux mois de leur peine. Le
fonctionner au travail et dans la programme, qui est disponible aux
collectivité. Les délinquants garçons et aux filles, comprend le
acceptés passent une fin de counseling d’aventure,
semaine en prison, se présentent à l’acquisition de compétences
la prison le vendredi soir psychosociales, le développement
uniquement et ensuite à des aptitudes cognitives et le
l’établissement de l’Armée du service communautaire.
salut pour le transport aux lieux de L’engagement des parents reste un
travail où ils aident à l’entretien et élément clé.
au nettoyage des parcs. Par
mauvais temps, on donne de la Personne-ressource :
formation en lutte contre Roger Peters
l’alcoolisme et la toxicomanie, The Greater Halifax/Dartmouth
Community YMCA
emploi, éducation, santé, etc. 2269 Gottingen Street
Halifax, Nova Scotia
B3K 3B7
Tél. : (902) 422-9622
Téléc. : (902) 423-8530

172 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Autres Variations communautaire ou en d’autres
types de permissions immédiates
Le Québec continue d’appliquer de purger la peine dans la
très souvent les dispositions de la collectivité. L’Italie a lancé une
«libération anticipée» par forme de détention à domicile
l’intermédiaire d’un éventail afin d’offrir aux délinquants la
d’activités de formation et de possibilité de purger une peine
travaux communautaires lancés pouvant atteindre deux ans à
dans les prisons (Programme domicile, dans une autre
d’Encadrement en Milieu Ouvert) résidence privée ou dans un
ou de l’aiguillage vers des centre de traitement. Elle peut
ressources communautaires. s’appliquer aux personnes
Certaines ressources sont condamnées dans certaines
davantage novatrices parce circonstances sociales : par
qu’elles offrent une solution de exemple, les femmes enceintes ou
rechange à l’incarcération à des les mères qui allaitent, les mères
groupes de délinquants en ayant des enfants de moins de
particulier, par exemple, les trois ans, les personnes âgées ou
femmes (Expansion-Femmes de ayant une incapacité, les jeunes
Québec (Québec), Maison de moins de 21 ans qui doivent
Thérèse-Casgrain (Montréal) ou aller à l’école, travailler ou qui
aux délinquants des Premières ont des obligations familiales et
nations (Maison Waseskun les gens de santé frêle. (Alternative
House (Montréal)). Measures to Imprisonment, Conseil de
l’Europe, 1991.)
Diverses sphères de compétence
cherchent des moyens de réduire
les frais administratifs de ces
solutions de rechange qui
continuent de nécessiter le
processus d’admission et
d’incarcération. Le Québec
élabore des stratégies afin de se
retirer de l’hébergement des
délinquants et de consacrer les
ressources financières à des
tâches cliniques, sociales et de
réparation qu’il faut faciliter.

Dans plusieurs sphères de


compétence en Europe, on
encourage les juges à convertir les
peines d’emprisonnement
pouvant atteindre six mois en
ordonnances de service

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 173
La détermination de la peine et les programmes communautaires selon
certains juges
Un certain nombre de juges canadiens nous ont mentionné qu’ils constatent la nécessité de déterminer
de nouveaux moyens créatifs d’approcher la tâche de la détermination de la peine afin de réduire le
surpeuplement dans le établissements carcéraux qui atteint des proportions critiques, de chercher
diverses solutions de rechange à l’incarcération et de répondre à certaines collectivités et organismes
communautaires qui veulent prendre davantage de responsabilités à cet égard.

Un juge qui a eu recours à la détention à domicile est d’avis qu’il faut l’imposer davantage au lieu de
l’emprisonnement.

Un juge a déclaré craindre que, si le système judiciaire donne trop de responsabilités à la collectivité, il ne
soit impossible de fournir les services nécessaires, par exemple, les programmes de lutte contre l’alcool et la
drogue, ainsi que le counseling sur la maîtrise de la colère. Voilà pourquoi il continue, dans les cas
d’agression sexuelle par exemple (lorsque la peine serait habituellement d’au moins deux ans
d’emprisonnement), d’imposer une peine purgée par le délinquant dans la collectivité, mais qui permet,
comme position de repli, de l’incarcérer en cas d’échec des plans communautaires. À cette fin, il veille à ce
que des dispositions soient prises pour accorder au délinquant une permission de sortir dès son
incarcération (c.-à-d. plus tôt que d’habitude) dans la mesure où des programmes permettant sa
réadaptation sont disponibles dans la collectivité. Les administrateurs correctionnels locaux assistent à
l’audience de détermination de la peine dans ces cas et consentent à la permission de sortir, et l’ordonnance
de probation à exécuter lors de la mise en liberté éventuelle est rédigée de façon à refléter cette entente.

[traduction]
«Essentiellement, j’ai essayé de mettre au point un système qui permet à la collectivité d’avoir l’entière
responsabilité d’un détenu lorsqu’il a recours aux programmes disponibles dans la collectivité, tout en
maintenant un certain contrôle en lui imposant une peine d’incarcération afin que le service
correctionnel en ait la charge lorsqu’il ne participe pas à un programme qui favorise sa réadaptation.
J’ai l’impression de répondre ainsi aux demandes de la collectivité qui veut s’engager envers l’accusé
tout en satisfaisant le public parce que l’accusé qui ne participe pas à un tel programme est sous le
contrôle de l’établissement correctionnel.»

Un autre juge a cependant souligné un autre élément qui entre en cause dans la détermination de la peine,
c.-à-d. que la société demande une période d’incarcération pour certains types de crimes, peu importe la
possibilité de récidive, parce qu’elle veut que la peine exprime le châtiment et l’aversion.

[traduction]
«... il est possible que seul un programme d’avantages communautaires directs et mesurables en ce qu’ils
représentent un service communautaire important puisse convaincre le public qu’il en tire dans l’ensemble un
avantage plus appréciable que celui que lui procurerait l’incarcération, dit-il. Je doute que la société ait
actuellement les ressources nécessaires pour établir et surveiller de tels programmes comme solutions de rechange
courantes à l’emprisonnement.
... De plus, compte tenu de la conjoncture économique actuelle et du coût lié à l’application de mesures de
perception des sommes, il est probablement impossible de concevoir un programme imposant des amendes
suffisamment élevées pour avoir des répercussions positives réalistes sur les frais du système judiciaire. ... Il me
semble que la demande actuelle voulant que le système judiciaire impose aux délinquants des peines plus strictes
et plus sévères à chaque niveau changera uniquement si des exemples significatifs persuadent la société que le
counseling, le service communautaire ou la réadaptation permettront de réduire davantage à l’avenir le crime ou
le risque que ne le permet le système actuel, et à un coût moindre.»

174 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
2. Préparation à la mise en liberté pour une
réinsertion sociale réussie

La disponibilité de la libération présence de ces derniers constitue


conditionnelle et les initiatives une ressource pour les décideurs
destinées à mieux préparer les et une inspiration pour le
prisonniers à la libération sont prisonnier.
aussi des considérations
importantes dans tout effort On reconnaît dans cette initiative
visant à réduire le recours à que les membres du comité qui
l’incarcération. La recherche a ne connaissent pas les besoins et
révélé que plus une personne est la culture en question peuvent
éloignée de la société pendant profiter de la sagesse de
longtemps, plus s’amenuisent quelqu’un qui les connaît très
ses liens sociaux avec d’autres bien. Cette intervention permet à
personnes, la famille, le travail la Commission d’examiner le rôle
et l’économie. Des liens sociaux des éléments ethnoculturels en
ténus à la suite de l’incarcération regard des attitudes, de la langue
accentueront probablement la et des valeurs, de déterminer les
tendance du délinquant à sanctions et le soutien d’une
récidiver après la libération. collectivité culturelle en
Des difficultés d’adaptation particulier, d’évaluer ses
lorsque le délinquant est libéré répercussions quant au risque de
de prison, par exemple, le rejet récidive, la possibilité de
social, peuvent aussi avoir des réinsertion sociale du prisonnier
répercussions sur le plan de la et la gestion du risque lors de la
récidive (source : Lin Song, libération.
1993).
Dans les collectivités autochtones,
Participation d’Aînés aux les Aînés sont les chefs spirituels
audiences de la qui ont acquis le respect grâce à
Commission nationale la sagesse personnelle, la
persévérance morale, le sacrifice,
des libérations
le dévouement, l’apprentissage et
conditionnelles, l’approche holistique des
région des Prairies problèmes. À l’audience, les
Aînés représentent les valeurs de
La bureau de la région des la collectivité. Ils ne sont pas liés
Prairies de la Commission fermement à la prison. Ils
nationale des libérations apportent des connaissances aux
conditionnelles a entrepris de décideurs, mais ne sont pas des
tenir des audiences auxquelles experts de la libération
participent des Aînés et la conditionnelle. Ils contribuent

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 175
une certaine sensibilité et tendance à considérer le
rappellent la spiritualité des êtres processus plus satisfaisant et
humains. On offre une prière afin l’audience semble moins
d’ouvrir la porte au Créateur, épuisante pour le personnel et les
demandant ainsi le respect et membres de la Commission.
l’honnêteté de la part de tous les
intéressés, la protection des La participation des Aînés aux
membres de la Commission, du audiences
délinquant et des autres, ainsi
que la prise de la bonne décision. 1. Le greffier d’audience
vérifie auprès du
Lorsque les Aînés collaborent délinquant à l’extérieur de
avec les membres du comité, les la salle d’audience s’il
questions et le style de l’entrevue veut assister à la prière
diffèrent aussi légèrement des (sinon, le délinquant entre
examens habituels par voie dans la salle après la
d’audience. L’entrevue doit être prière).
dépourvue d’agressivité ou de
confrontation et les questions 2. Dans la salle d’audience,
portent sur les efforts du le greffier ou un membre
délinquant en vue de sa guérison, de la Commission donne à
sur la victime et la collectivité. l’Aîné un bref résumé du
On s’intéresse moins au passé ou dossier du délinquant.
à l’expression de remords et
davantage à la situation actuelle, 3. Le délinquant, l’agent de
à la participation à des gestion du cas et d’autres
programmes et à leurs avantages, personnes sont invités à
ainsi qu’au plans d’avenir. entrer dans la salle.
Chaque comité a cependant
l’intention de traiter des 4. Le greffier d’audience se
politiques d’évaluation du risque charge de l’introduction et
afin de prendre des décisions sur veille à ce que soient
la libération conditionnelle. respectés les droits du
délinquant en ce qui a
La rétroaction en général a été trait au processus.
très positive de la part du
personnel, des observateurs et 5. Si le délinquant le
des délinquants, peu importe si le demande, l’Aîné offre une
comité octroie ou rejette la prière.
libération. On a l’impression que
la présence de l’Aîné crée un 6. L’agent de gestion du cas
climat de respect qui manque à fait une mise à jour du
d’autres audiences. Les décisions dossier du délinquant.
sont acceptées sans rancoeur
évidente, les délinquants ont

176 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
7. Les membres de la Le cas suivant illustre le genre de
Commission procèdent à cas et de personnes qui tirent
l’entrevue. avantage des audiences
auxquelles participent des Aînés
8. Au choix de l’Aîné :
précision des points de vue Antécédents criminels
exprimés, particulièrement
ceux qui touchent la Le délinquant, un homme de 34 ans,
culture autochtone. purge le reste d’une peine globale de
cinq ans, six mois et deux jours pour
9. L’assistant du délinquant a possession à des fins illicites, voies de
l’occasion de s’exprimer en fait, possession de biens obtenus à la
son nom devant les suite d’un acte criminel et possession
membres de la de stupéfiants, ainsi que pour trois
Commission. accusations d’introduction par
effraction dans l’intention de
10. Au choix : pause pour les commettre un acte criminel. La peine
délibérations de la actuelle a commencé en 1991 par une
Commission. Au cours de peine de trois ans pour possession à
la pause, seuls les membres des fins illicites et par une autre peine
de la Commission, le concurrente de 60 jours pour voies de
greffier d’audience et fait.
l’Aîné sont présents dans la
salle. Les membres de la Il avait agressé sa conjointe de fait à
Commission se chargent de l’époque. Ils auraient eu une
la prise de décision et altercation à propos de certaines
doivent en rendre compte, drogues. Il lui avait infligé, entre
mais ils peuvent obtenir de autres blessures, une légère contusion
l’Aîné des conseils oculaire, une tuméfaction et une
culturels en particulier. ecchymose à la joue.

11. Les membres de la Il a été libéré sous condition une fois


Commission informent le auparavant. Il s’agissait d’une semi-
délinquant de leur liberté octroyée en avril 1992 et
décision. Tous les suspendue en août 1992. La
participants sont alors suspension de la semi-liberté a été
présents. annulée en octobre 1992 et la semi-
liberté a été suspendue une autre fois
12. Au choix pour l’Aîné : il et révoquée en janvier 1993. Lorsqu’il
exprime sa sagesse - donne était en liberté conditionnelle dans la
des conseils aux collectivité, le délinquant a commis les
délinquants. infractions suivantes : possession de
biens volés - peine consécutive de
13. Levée de la séance. 30 jours, possession de stupéfiants
(résine de cannabis) - peine
consécutive de 60 jours, introduction

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 177
par effraction dans l’intention de pétrolière à 18 ans. Il s’agit d’un
commettre un acte criminel - peine travail saisonnier et il a par la suite
consécutive de 30 mois. touché des prestations d’assurance-
chômage.
Les démêlés du délinquant avec la
justice ont commencé à 18 ans Il a noué une relation avec sa première
lorsqu’il a été condamné à 400 $ conjointe de fait à l’âge de 18 ans.
d’amende et à un an de probation pour Cette relation a duré sept ans et ils ont
introduction par effraction dans eu deux enfants dont un est décédé à
l’intention de commettre un acte quatre ans. Au moment de purger sa
criminel. Ses antécédents criminels peine, il avait une relation avec une
comptent six condamnations pour deuxième conjointe de fait. Sa
possession de stupéfiants, une conjointe a deux enfants d’une
introduction par effraction dans relation précédente et elle état enceinte
l’intention de commettre un vol, un lorsqu’il a été inculpé.
vol de moins de 1 000 $, ainsi qu’une
introduction par effraction dans Même s’il a été condamné pour voies
l’intention de commettre un acte de fait, le délinquant n’est ni agressif,
criminel. Il s’agit de sa première peine ni violent, selon les renseignements
fédérale. Il a été condamné des agents de police et des agents de
auparavant à une peine de 60 jours, à gestion du cas.
une autre de neuf mois, à des amendes
et à des périodes de probation. Il a Antécédents de toxicomanie
passé, avant cette peine, toutes les
périodes de probation et de Le délinquant dit avoir fumé de la
surveillance sans incident. marijuana pour la première fois à neuf
ans. Il a fumé du haschisch et de la
Profil personnel marijuana et consommé de la cocaïne.
Juste avant de purger sa peine
Le délinquant, cadet des deux garçons actuelle, il se considérait comme un
de la famille, a vécu sa jeunesse dans ivrogne mais il dit qu’il consomme
la région de l’intérieur de la C.-B. Son maintenant de l’alcool seulement une
frère n’avait aucun antécédent fois par semaine environ. Avant
criminel. Son père est maintenant à la l’incarcération actuelle, il n’a jamais
retraite. Il semble avoir eu une suivi de traitement pour alcoolisme ou
éducation très normale. Il dit se toxicomanie.
souvenir d’une occasion seulement où
son père l’a frappé. Il a quitté l’école L’évaluation correctionnelle doit
et la maison à 15 ans parce qu’il ne déterminer les principaux risques
voulait pas respecter l’heure de rentrée et besoins suivants :
ou les règlements de ses parents. Il
n’a jamais terminé la huitième année. • counseling - traitement pour
Il a travaillé à plein temps depuis qu’il toxicomanie,
a quitté l’école et la maison. Il a • stabilité affective ou des relations,
d’abord accompli des petits travaux • caractéristiques d’emploi.
avant de travailler dans l’industrie

178 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Personne-ressource : Entraide détenu anonyme
Irene Fraser
National Parole Board - Prairies
- programme de mise en
601, 229-4th Avenue S. liberté anticipée
Saskatoon, Saskatchewan
S7K 4K3 Québec
Tél. : (306) 975-5286
Téléc. : (306) 975-5892 Un organisme communautaire a
lancé au Québec un programme
En outre, la région des Prairies du novateur en collaboration avec la
Service correctionnel du Canada prison locale afin d’aider les
prépare un projet-pilote qui récidivistes invétérés qui purgent
donnera l’occasion à entre 40 et une peine d’emprisonnement. Ce
70 prisonniers de participer à un programme leur permet d’être mis
«processus du Cercle» avec des en liberté anticipée afin de vivre
membres de la collectivité par eux-mêmes dans la collectivité
importants pour eux, y compris la au lieu d’être envoyés au foyer de
ou les victimes de leur infraction. transition de l’organisme.
Le processus du Cercle vise à
contribuer à l’élaboration du plan Entraide détenu anonyme est axé
correctionnel, ainsi qu’à plusieurs tout particulièrement sur les
points du processus menant aux
décisions à prendre au sujet de la Quel a été, pour chaque niveau de
libération. sécurité, le coût annuel moyen de
l’incarcération dans un établissement
fédéral en 1993-1994?
Personne-ressource :
Rémi Gobeil Niveau de sécurité Coût annuel
Deputy Commissioner moyen par
CSC - Prairies détenu
Box 9223
Sécurité maximale 65 371 $
Saskatoon, Sask.
S7K 3X5 Prison des femmes 78 221 $
Tél. : (306) 975-4850
Sécurité moyenne 40 008 $
Téléc. : (306) 975-5476
Sécurité minimale et
fermes correctionnelles 39 171 $

Centres correctionnels
communautaires 27 001 $*

Coût annuel moyen 45 753 $**

* Les centres correctionnels communautaires (CCC)


logent principalement des délinquants bénéficiant
d’une semi-liberté et ils sont désignés comme
établissements à sécurité minimale.

** Le coût annuel moyen par détenu comprend


seulement les coûts liés au fonctionnement des
établissements et non les coûts relatifs à la
libération conditionnelle, les paiements de
transfert, les frais des administrations et les
dépenses en capital, il exclut également le fonds
renouvelable de CORCAN.

Source : Faits et chiffres sur les services correctionnels


au Canada, édition 1994. - SCC

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 179
prisonniers qui ont besoin de Personne-ressource :
soutien à cause de leurs difficultés Guy Dalphond
Maison Radisson
comportementales, par exemple, la
962, Sainte-Geneviève
timidité, l’impulsivité ou C.P. 1075
l’agressivité. Le programme, qui Trois- Rivières (Québec)
dure 14 semaines, commence par G9A 5K4
Tél. : (819) 379-3623
un programme de jour de dix Téléc. : (819) 379-3464
semaines au foyer de transition et
comprend des approches
d’apprentissage tirées de
l’éducation des adultes dans un
On a mis sur pied en France un
groupe de cinq personnes. On y
nouveau programme offrant de
applique un processus holistique
l’information et des conseils aux
afin d’orienter doucement les
prisonniers récemment libérés
énergies et la volonté des
dans la région de Paris. Ce
participants à l’aide des principes
nouveau service est original
et techniques de la
parce qu’il réunit en un seul
psychosynthèse. Il fournit de
endroit une équipe de
simples outils et des moyens
travailleurs sociaux et un certain
conviviaux qui favorisent l’étude
nombre de représentants
et la réflexion personnelles afin
d’établissements et
d’aider chaque participant à
d’associations chargés de
déterminer ses aspirations et ses
l’hébergement d’urgence, de la
objectifs personnels et à élaborer
sécurité sociale, de l’emploi, de
comme «projet» personnel certains
la santé, etc. Il s’agit de
plans réalistes afin d’atteindre
proposer des moyens de
certains buts. La dynamique du
favoriser la réinsertion sociale
petit groupe en est une d’entraide
de l’intéressé et de lui permettre
parce que les membres échangent
ainsi de retrouver son identité
de l’information quotidienne sur
personnelle, professionnelle et
les défis qu’ils relèvent lorsqu’ils
sociale (Alternative Measures to
réintègrent la collectivité. Au
Imprisonment, Conseil de l’Europe,
cours des quatre dernières 1991).
semaines, chaque personne obtient
le soutien individuel dont elle a D’autres sphères de
besoin pour réaliser ses plans. compétence, des membres de la
Cette initiative a obtenu jusqu’ici collectivité qui sont d’anciens
une réaction très enthousiaste de la prisonniers, d’autres membres
part de tous les intéressés. Son de la collectivité et des
approche holistique semble organismes spécialisés ont
particulièrement utile lorsqu’il adopté des initiatives
s’agit d’engager dynamiquement intéressantes d’offre de
les délinquants à participer de leur ressources pour aider les
propre volonté à un mode de vie prisonniers lors de leur mise en
positif dans la collectivité. liberté.

180 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Groupes sentences-vie conditionnelle. La majorité des
Montréal (Québec) condamnés à perpétuité (75 %)
n’ont jamais été au pénitencier
auparavant. Dans de nombreux
Le Conseil des Églises pour la
cas, leur premier crime est un
justice et la criminologie
homicide. Ils affichent le taux le
coordonne les bénévoles de la
plus élevé (98,4 %) de délinquants
collectivité qui tendent la main aux
qui s’abstiennent de récidiver. Le
prisonniers condamnés à perpétuité
but est de leur fournir le soutien
en assistant aux réunions des
communautaire et l’occasion de
Groupes sentences-vie. Ils les
retourner graduellement et sous
aident à maintenir et à resserrer
surveillance dans la collectivité en
leurs liens avec la famille et la
tenant compte d’abord de la
collectivité et les préparent
sécurité du public. Ils s’efforcent
activement à la révision judiciaire
aussi d’encourager d’autres
au besoin.
collectivités à en faire autant et de
rendre possible l’échange national
Personne-ressource :
Huguette Sauvé de ressources pour les condamnés à
CEJC perpétuité au pays.
2715, chemin de la Côte Sainte-
Catherine,
Personne-ressource :
Bureau 322
Montréal (Québec) Skip Graham
H3T 1B6 St. Leonard’s House
Tél. : (514) 738-5075 491 Victoria Avenue
Téléc. : (514) 731-0676 Windsor, Ontario
N9A 4N1
Tél. : (519) 256-1878
Téléc. : (519) 256-4142

Life Line
Windsor (Ontario)
Projet Another Chance
Le projet Life Line de la maison St- Kingston (Ontario)
Léonard à Windsor a été conçu en
particulier pour communiquer avec Le projet Another Chance (P.A.C.)
tous les hommes et les femmes est un nouvel organisme sans but
condamnés à perpétuité en Ontario lucratif à Kingston qui fournit un
et de faciliter l’établissement d’un éventail de services et de ressources
plan de libération individuel et aux femmes qui ont ou qui ont eu
structuré. On communique des démêlés avec la justice. Le
d’abord avec les condamnés à projet essaie d’aider les femmes à
perpétuité afin de les aider à répondre à leurs besoins physiques,
prendre en main le déroulement de émotionnels, intellectuels et sociaux
leur peine lorsqu’ils sont incarcérés, d’une façon attentive qui favorise
de les préparer à leur révision l’évolution personnelle.
judiciaire et (ou) à la libération

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 181
PAC compte un personnel réduit Des ex-délinquantes participent
et plus de 40 bénévoles bien au projet et offrent ainsi un lien
formées, y compris plusieurs ex- particulier aux délinquantes en
délinquantes. Le projet permet de liberté conditionnelle qui ont des
nouer un lien communautaire difficultés à réussir leur
pour les détenues à la Prison des réinsertion sociale. La fondatrice
femmes et les ex-délinquantes du PAC, Melissa Stewart, raconte
grâce au maintien d’une banque l’histoire d’une femme à qui elle a
de données à jour sur les donné des conseils entre pairs lors
ressources communautaires, à un de sa libération conditionnelle.
bulletin de la prison et à un centre «Marge» avait perdu beaucoup de
d’appels téléphoniques en cas ses compétences psychosociales
d’urgence. Le préposées à la ligne au cours de ses seize années en
«Right-On Line» prendront les prison. La douleur, la confusion
appels téléphoniques locaux et et le manque d’estime de soi de
«Une peine
d’emprisonnement à écouteront attentivement les Marge à son retour dans la société
perpétuité condamne le détenues qui pourront exprimer évoquait pour Melissa nombre de
prisonnier et sa famille leurs sentiments de rage, de ses réactions au début de sa
à toute une vie crainte, de colère et de confusion. liberté conditionnelle. Pendant de
marquée par l’attente et Les bénévoles sont formées en nombreux mois, Melissa a écouté
la douleur. Je vois dans prévention du suicide et aux Marge attentivement et lui a
le regard sans espoir de techniques d’écoute active et de donné des renseignements
nombreux prisonniers, soutien, et elles ont l’information pratiques sur la cuisine
y compris celui de pour les utilisatrices du service élémentaire, ainsi que sur
(mon fils) Peter, tout le qui ont besoin davantage l’acquisition de connaissances
mal que fait le système d’aiguillage lorsque nécessaire. élémentaires en mathématiques et
de justice.» Des ateliers à venir formeront les en anglais. Marge a
bénévoles dans des domaines graduellement acquis de la
Joan Stothard
comme la colère, l’automutilation, confiance, elle a fait des progrès à
The fight of her life,
l’agression sexuelle, le chagrin et l’école et a finalement été en
The Globe and Mail
le deuil. mesure de se sentir à l’aise à titre
de membre de la collectivité.
Conscient des problèmes
particuliers des détenues La décision d’obtenir un résultat
autochtones, le projet Another positif à la suite de la libération
Chance offre une sensibilisation conditionnelle exige un
particulière à la culture et aux changement important du mode
questions autochtones dans le de vie et cette décision, comme
cadre de son orientation des toute autre, demande courage et
bénévoles. engagement. L’amour
inconditionnel et les conseils
pratiques de Melissa et des
bénévoles du projet Another
Chance permettent à Marge et à
ses pairs de faire ce choix.

182 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Personne-ressource : Programme Respect
Melissa Stuart,
Projet Another Chance
Brandon (Manitoba)
P.O. Box 1801
Kingston, Ontario La Société John Howard de
K7L 5J6
Tél. : (613) 544-9100
Brandon parraine le programme
Téléc. : (613) 544-4181 Respect (Release & Employment
Support Planning Effecting
Constructive Tomorrow) -
planification de la libération et du
soutien à l’emploi en vue d’un
Projet d’aide aux
lendemain positif) afin de
délinquants après la soutenir lors de la libération les Les arguments que le
mise en liberté - détenus provinciaux qui risquent psychiatre
Thomas Szasz avance
Services juridiques de récidiver parce que leurs
contre l’internement
autochtones antécédents comptent des
involontaire dans un
périodes irrégulières d’emploi.
Toronto (Ontario) hôpital psychiatrique
Le cours de planification de la
s’appliquent également
libération donne aussi l’occasion à l’incarcération
Les Services juridiques
à des personnes-ressources de la involontaire des
autochtones de Toronto
collectivité de faire connaître délinquants - la nature
cherchent à établir un projet
leurs solutions à divers politique du processus,
d’aide aux délinquants après la
problèmes. À la suite de ce cours, la violation des droits
libération afin d’intégrer dans la
de nombreux détenus ont civils, l’inévitabilité
collectivité autochtone de Toronto
demandé la libération anticipée d’abus dans des
les nombreux délinquants
parce que la collectivité leur offre endroits cachés du
autochtones qui n’ont pas regard du public et
de nouveaux choix.
vraiment d’autre choix que celui l’effet destructeur de la
d’y retourner. On croit que le routine de
Personne-ressource :
retour à l’héritage spirituel l’établissement sur tous
Russell Loewen
autochtone est un moyen de Société John Howard de ceux qui sont touchés
guérison et de réduction de la Brandon par elle.
récidive. 220, 8e rue
Brandon (Manitoba)
R7A 3X3 The End of
Personne-ressource : Tél. : (204) 727-1696 Imprisonment,
Patti Mcdonald Téléc. : (204) 728-4344 Robert Sommer
Aboriginal Legal Services of
Toronto
197 Spadina Avenue
Toronto, Ontario
M5T 2C8
Tél. : (416) 408-3967
Téléc. : (416) 408-4268

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 183
3. Camps dans la nature

Les camps dans la nature offrent La recherche révèle que la


des programmes résidentiels en surveillance intensive de suivi
milieu naturel aux jeunes permettant aux jeunes d’étudier,
contrevenants dont certains sont d’assister à des séances de
actuellement sous garde en milieu formation, de traitement et de
ouvert ou en probation. counseling de retour à la maison
est l’élément clé qui permet de
Certaines sphères de compétence déterminer si une expérience au
considèrent que cette peine est à camp aura ou non des
«un niveau au-dessous du répercussions positives durables
placement sous garde». On est (Conseil national de prévention du
d’avis que ces camps permettent crime, 1995).
de diminuer le nombre des jeunes
qui seraient autrement placés sous Il existe malheureusement un large
garde. Le camp de piégeage éventail de camps, à partir du
(Camp Trapping) en Colombie- modèle dans la nature décrit ci-
Britannique et le projet défi dessus jusqu’aux camps de plus en
(Project Dare) en Ontario sont plus centrés sur la discipline et de
deux exemples de camps dans la type militaire. Il est regrettable
nature qui ajoutent le défi de la que le climat politique qui suscite
survie en plein air à une actuellement un nouvel intérêt
expérience de vie et de favorisant un nombre accru de
collaboration comprenant le «camps» pour les jeunes
counseling en groupe qui vise à contrevenants soit particulièrement
renforcer la conscience de soi, ainsi animé par la volonté d’accentuer la
qu’à acquérir la confiance en soi et dimension punitive de la réaction
l’estime de soi. à la criminalité chez les jeunes.
Les politiciens recommandant cette
Les camps dans la nature sont des mesure mettent l’accent sur la
expériences positives pour certains souffrance et les travaux pénibles
jeunes. Même si en théorie ce afin de lancer un message sur la
programme peut se révéler une dissuasion et la punition qui, croit-
évolution positive pour certains on, réduira la criminalité à l’avenir.
jeunes qui ont quand même un Les données disponibles les plus
mode de vie et un milieu stables à probantes révèlent cependant qu’il
la maison, les avantages à court ne s’agit pas d’un outil efficace à
terme peuvent diminuer cette fin. Malheureusement, ce
rapidement si le jeune est plongé message risque maintenant de
de nouveau dans la même saper profondément les éléments
situation communautaire difficile positifs des camps dans la nature
qui a contribué à son décrits ci-dessus.
comportement criminel au départ.

184 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Il est compréhensible que le d’une solution de rechange
système judiciaire frustre les communautaire au lieu d’être
gens. Ils savent que ce que nous emprisonnés. La mise en oeuvre
faisons ne fonctionne pas. Ils des camps de type militaire peut
veulent qu’on prenne des donc en réalité accroître les frais
mesures plus sévères envers les correctionnels pendant que la
criminels et ils croient, parce que population carcérale reste
les politiciens ne les contredisent relativement constante ou même
pas, qu’il faut à cette fin augmente (Parent, 1995).
emprisonner plus de personnes Certains camps de type militaire
plus pendant plus longtemps. de l’État coûtent autant, sinon
Les politiciens qui
plus, par jour que les prisons
veulent économiser
Compte tenu des pressions ordinaires (Cronin, 1994). Les
en diminuant la
exercées pour qu’on ouvre services correctionnels de
population carcérale
davantage de camps punitifs, il l’Arizona abandonnent cette
et les frais
importe de ne pas oublier que, mesure parce qu’elle ne constitue
d’emprisonnement
selon les recherches américaines pas une utilisation efficace des
essaient de trouver
portant sur plus de 65 camps de fonds ou du temps du personnel
des solutions de
type militaire aux É.-U., ceux-ci carcéral. Les camps dans la
rechange
ne réduisent pas le taux de nature en Colombie-Britannique
intéressantes du fait
récidive (MacKenzie et Souryal, ont été suspendus récemment et
qu’elles accroîtront
1995). Une autre étude de huit feront l’objet d’une enquête.
la souffrance au
camps de type prison militaire a
cours de la peine. Ce
révélé que les programmes qui Lorsque le système frustre les
n’est pas un moyen
fournissent uniquement gens, ils cherchent souvent des
intelligent de devenir
l’entraînement physique, les mesures qui constituent un
plus sévère ou
travaux forcés et la discipline traitement plus efficace des
d’économiser. Cette
peuvent en fait accroître ces taux délinquants, ainsi que des
solution accroît
(MacKenzie et Souryal). D’après mesures qui s’attaquent plus
simplement le
certaines données probantes, ils sévèrement aux causes
gaspillage de l’argent
ne réduisent le surpeuplement profondes de la criminalité. Les
des contribuables
dans les établissements carcéraux camps dans la nature peuvent
parce qu’elle ne
que si les admissions au aider quelques personnes, mais
s’attaque pas aux
programme sont strictement ils ne constituent pas une
véritables problèmes.
contrôlées, de sorte que les places solution de rechange qui répond
sont fournies uniquement aux à ces besoins et ne rendent pas
délinquants incarcérés. une justice vraiment
Cependant, ce n’est souvent pas satisfaisante.
le cas. Les camps de type
militaire admettent typiquement
à leur programme des
délinquants non violents sans
antécédents carcéraux, soit ceux
qui pourraient autrement avoir
bénéficié d’une probation ou

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 185
4. Détention à domicile

Quelques cas Le juge nous a écrit afin de


recommander la détention à
Un septuagénaire a été condamné domicile plus souvent au lieu de
pour avoir commis une fraude ayant l’incarcération. Il a mentionné le
trait aux cigarettes évaluée à cas d’un homme accusé d’une
10 000 $ environ. Le juge l’a agression sexuelle qui, sans être
condamné à deux ans de probation, à grave, n’en était pas moins une
une amende de 10 000 $ et à purger agression sexuelle. Il était
les trois premiers mois de sa peine en considéré comme un citoyen
détention à domicile. Deux autres modèle avant son arrestation. Sa
hommes ont été condamnés à une femme était décédée de mort
peine d’emprisonnement pour la violente le laissant seul pour
même infraction. s’occuper de sa fille de 16 ans. Il
a commencé à boire et à commis
Pendant les trois premiers mois, le l’infraction sous l’effet de l’alcool.
septuagénaire ne devait pas «J’avais le choix de l’envoyer en
s’éloigner à plus de 500 pieds de son prison, mais il aurait perdu un
domicile et pouvait quitter sa emploi bien rémunéré et laissé sa
propriété uniquement pour suivre un fille vulnérable. Tout le monde
traitement médical autorisé. Il ne voulait l’envoyer en prison, mais
devait pas consommer d’alcool, j’ai plutôt choisi la détention à
devait restreindre les visites aux domicile. J’ai suspendu sa peine
membres de la famille, deux à la fois pour un an, je l’ai placé en
uniquement, le dimanche entre 14 h probation et j’ai imposé les
et 16 h (le juge a aussi nommé trois conditions suivantes : il pouvait
membres de la famille qui ne quitter son domicile à 6 h 30
pouvaient le visiter ensemble). chaque matin et se rendre en
automobile de la rive sud à son
Lorsque le juge a expliqué qu’il ne travail dans le secteur riverain de
condamnait pas cet homme à Halifax puis, revenir à la maison
l’emprisonnement à cause de son âge à 18 h 30. Il devait aussi suivre
et de sa santé, l’agent de probation a un traitement. Il devait rester à
déclaré que la peine était excellente domicile, mais il pouvait se
et serait logique pour d’autres rendre seul au travail et aux
personnes plus jeunes et en meilleure séances de counseling et en
santé. L’agent de probation a dit que revenir. Sa fille devait
l’homme considérait que la sentence l’accompagner à l’épicerie. Un
était très pénible. Il a été soulagé agent de probation était chargé
lorsque la détention à domicile a pris de lui téléphoner à l’improviste
fin. afin de le surveiller.»

186 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Cet homme a purgé sa peine sans Le juge était d’avis qu’il faudrait
problème, sans frais ajouter un bracelet de surveillance
d’emprisonnement, sans perte électronique à la détention à
d’emploi, il a suivi un traitement domicile. Nous allons maintenant
pour son mauvais comportement examiner cette possibilité.
sexuel et alcoolique et, le plus
important, la famille est restée
unie.

5. Remarques sur la surveillance


électronique

La surveillance électronique est États-Unis seulement, son


une mesure correctionnelle qui utilisation a triplé chaque année
consiste à vérifier la présence (Schmidt, 1985). On peut en
d’une personne condamnée à un attribuer la popularité au
endroit donné au moyen de surpeuplement dans les
matériel de technologie de établissements carcéraux, à la crise
pointe. La surveillance est faite économique et au désabusement
par vérification téléphonique vis-à-vis du nombre de cas en
(surveillance passive) ou bien les probation qui, craint-on, rendent la
individus sont surveillés supervision fort inefficace
continuellement parce qu’ils (Latulippe, ASRSQ, 1994).
portent un bracelet qui émet des Selon une récente étude de
signaux (surveillance active). l’Institut national des services
C’est le système actif qui a été correctionnels des É.-U., il est de
employé le plus souvent, mais les plus en plus évident qu’il faut
deux méthodes sont aussi réexaminer le système : la
combinées. technologie et les méthodes sont
loin d’être parfaites et les
Il est universellement reconnu que délinquants disparaissent souvent
les objectifs de la surveillance de leur domicile. On ne peut se fier
électronique sont de réduire la à une telle technologie pour assurer
population carcérale et de protéger la sécurité du public. Les
effectivement la société à des coûts dispositifs de la surveillance
sociaux et économiques électronique ne tiennent pas
minimaux. Elle a été inventée aux compte non plus des nombreuses
États-Unis et y a été mise à l’essai, autres conditions socio-
partout au pays, ainsi qu’en économiques et des questions de
Angleterre et dans plusieurs pays réparation liées à la justice et à la
d’Europe et provinces prévention du crime. La Société
canadiennes. De 1987 à 1991, aux John Howard de Terre-Neuve

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 187
applique le seul programme de prison qu’il aurait mieux valu
«bracelets» qui comprend un aiguiller vers d’autres ressources en
élément réadaptation. Dans de place. Cette mesure s’est en fait
nombreux programmes, les révélée plus dispendieuse que
délinquants doivent régler eux- prévu et n’a permis de réduire ni la
mêmes les frais du programme, ou population carcérale ni les frais
une partie. Les délinquants dans la plupart des sphères de
pauvres n’ont souvent pas les compétence.
moyens, n’ont pas de logement
décent où ils peuvent purger leur Les entreprises de technologie de
peine ou ils n’ont pas le téléphone pointe ont énergiquement mis en
et n’ont donc pas un accès égal à marché le matériel de surveillance
cette solution de rechange à électronique et il y a certainement
l’incarcération. un profit à tirer non seulement de
ce matériel, mais aussi de toutes les
Même s’il est reconnu que la dispositifs secondaires qui font
surveillance électronique exerce surface afin de «neutraliser» le
une pression supplémentaire sur matériel, de «repérer» le matériel
certaines familles, de nombreuses neutralisant, etc. Il faut aussi une
personnes considèrent ce genre de population minimale à servir, ce
peines plus humaines que qui a incité au moins deux sphères
l’incarcération. Il ne semblerait que de compétence canadiennes à
cette solution ne présente pas un élargir le filet en ajoutant les
risque plus grand que délinquants à faible risque afin
l’incarcération pour la société : le d’atteindre le quota (source :
taux de récidive est presque nul Latulippe, ASRSQ, 1994).
selon toute la documentation qu’a
examinée Latulippe. Il est tout de Il s’agit d’une technologie dont la
même fort probable qu’on puisse clientèle a été artificiellement créée
attribuer ce résultat aux cas choisis et gonflée plutôt que d’une
soigneusement qui peuvent en technologie utilisée rationnellement
bénéficier, plutôt qu’au programme au service des besoins réels de la
lui-même. La recherche indique collectivité. Sa principale fonction
qu’on applique souvent cette est strictement de «rassurer le
solution aux gens en probation qui public» et elle fournit actuellement
n’auraient pas été autrement un réconfort illusoire et inutilement
incarcérés ou à des gens libérés de dispendieux.

188 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Conclusions

Nous avons été stupéfaits de inconditionnel qui sont


découvrir que les nombreuses maintenant plus longues et la
initiatives décrites dans ce demande de capacité carcérale
répertoire n’ont pas diminué n’a donc pas diminué
dans l’ensemble le recours à relativement au niveau de
l’emprisonnement au Canada. criminalité (Conseil de l’Europe,
Malgré de nombreuses bonnes 1991). La situation devrait de
intentions, elles sont trop plus s’aggraver ici à moins
souvent, selon Irvin Waller, d’appliquer d’autres politiques
«prometteuses à court terme mais éducatives, législatives et
désastreuses à long terme». administratives. (Certaines
Presque tous les pays d’Europe sphères de compétence ont
ont aussi appliqué certaines commencé à le faire et ont obtenu
«solutions de rechange» ayant de meilleurs résultats que nous
plus ou moins d’ampleur et les jusqu’à maintenant. Nous en
résultats ont été semblables : elles discuterons dans la section Que
n’ont absolument pas remplacé faut-il faire? des Conclusions).
les peines d’emprisonnement

Taux prévu
prévu d'incarcération
d’incarcérationdans
dans
les établissementsfédérux
les établissements fédérauxau au Canada
Canada
Nombre %
d'admissions d'augmentation
1996 14 500 - 1,66%

1997 14 937 3,01%

1998 15 374 2,93%

1999 15 810 2,84%

2000 16 247 2,76%

2001 16 684 2,69%

2002 17 121 2,62%

2003 17 558 2,55%

2004 17 995 2,49%

2005 18 433 2,43%

Le Service correctionnel du Canada -


Système de la gestion des renseignements - Compte de fin d’année.

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 189
Signes d’une situation qui Pourquoi continuons-nous
se détériore d’imposer
l’emprisonnement
La demande d’une capacité inconditionnel?
carcérale accrue au Canada
devrait augmenter en partie parce Les données sur les répercussions
que la croissance énorme du sur la sécurité de la collectivité, le
nombre de jeunes actuellement taux de criminalité dans
inculpés au criminel exercera une l’ensemble ou la nécessité en
pression supplémentaire sur le particulier de l’imposer
réseau des adultes. Il est bien strictement afin de contenir les
connu que l’emprisonnement comportements violents ne
punitif accroît souvent le risque justifie pas le recours accru à
de récidive et que même une l’emprisonnement. La majorité
courte période d’emprisonnement des crimes sont encore des crimes
en fera probablement des contre les biens. Plus de la moitié
criminels (Conseil de l’Europe, des crimes violents sont des voies
1991). On prévoit aussi que les de fait sans caractère sexuel et ne
modifications apportées à la comprennent aucune arme ou
législation et les initiatives blessure physique grave. Les
connexes imposeront une charge Canadiens ont tendance à
supplémentaire au réseau, c.-à-d. surestimer énormément l’ampleur
Loi sur les jeunes contrevenants, de la criminalité et des crimes
Groupe de travail sur les violents en particulier. La
délinquants violents, contrôle des proportion de Canadiens
armes à feu, modifications de la déclarant avoir été victimes d’un
Loi sur le système correctionnel et crime est restée sensiblement la
la mise en liberté sous condition, même entre 1988 et 1993
détermination de la peine et (gouvernement du Canada, 1995).
modifications de la Loi sur
l’immigration (gouvernement du Il semble que, selon ce qu’on dit
Canada, 1995). Ces mesures de leur application en Europe,
gouvernementales renforcent l’efficacité des peines
aussi chez les Canadiens l’idée d’emprisonnement est due, entre
que l’incarcération est la réponse autres, à l’accent mis sur la
appropriée et efficace à la fonction symbolique ou
criminalité. expressive de la punition (Conseil
de l’Europe, 1991). Il s’agit
néanmoins d’un symbole
dispendieux lorsqu’on considère
ses répercussions sur le plan
pratique.

Les recherches ont révélé, par


exemple, que les fonds consacrés

190 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
à un programme très ambitieux et Il ne s’agit absolument pas de
dispendieux de construction de réfuter que ces délinquants
prisons entrepris en Californie au doivent quand même rendre des
cours des années 1980 n’ont eu comptes et qu’il faut traiter des
aucun effet à la baisse sur le taux questions de sécurité, de justice,
de crimes violents (Ekland-Olsen de réparation et de guérison.
et al., 1992). Ce taux a en fait Aucune donnée probante ne
commencé à augmenter en 1986 justifie cependant le recours à des
et a continué depuis (Doob, 1995, mesures dispendieuses
Guardian Weekly, 10 avril 1994). d’emprisonnement punitif au
Cette constatation s’aligne sur motif qu’elles empêcheront
d’autres conclusions obtenues d’autres personnes de commettre
ailleurs auparavant sur les ce genre de crimes violents. Bien
répercussions de la neutralisation sûr, comme Doob l’a signalé,
des délinquants condamnés pour lorsqu’ils sont en prison, ils ne
meurtre, viol, vol et voies de fait sont pas dans la rue en train de
graves. commettre un crime. La
question, selon lui, n’est donc pas «Ce sont les juges qui
[traduction] de savoir si une certaine stratégie imposent les
Nombre de ces individus ont de neutralisation permettra sentences... mais il va
probablement commis leurs d’éviter un crime. Les questions de soi que ces derniers
modifieront leur
infractions en réaction impulsive sont : Combien? et Une autre
approche si l’on réduit
à une situation de défi, parfois stratégie d’utilisation des maigres
le nombre de places
sous l’influence de l’alcool et de ressources sera-t-elle plus efficace disponibles en milieu
la drogue, parfois à la suite d’une pour sauver des vies? (Doob, carcéral.»
perte de contrôle temporaire 1995). La stratégie actuelle a non
parce qu’ils avaient peur ou seulement peu de répercussions Lysiane Gagnon
étaient en colère. Aucune sur le taux de criminalité dans La Presse
politique de neutralisation l’ensemble, mais des études ont 22 avril 1995
n’empêchera les nombreux révélé qu’elle a aussi
crimes commis dans ces l’inconvénient d’être peu efficace :
circonstances. L’expérience du de nombreux délinquants qui
groupe que nous avons étudié est n’auraient pas récidivé après la
sans doute raisonnablement libération seront néanmoins
représentative d’autres emprisonnés plus longtemps
expériences vécues ailleurs et un (Roberts, 1995) à un coût social et
grand nombre de crimes violents financier élevé.
que la police a résolus sont sans
doute de cette nature - une La Californie a dépensé
première infraction commise en 14 milliards de dollars pour
situation de stress et à cause construire des prisons entre 1982
d’autres influences inaccessibles et 1993. La population carcérale a
aux processus préventifs de la loi augmenté de 500 % et le taux de
(Van Dine et al., 1979) criminalité dans l’ensemble a
augmenté de 75 % («Real Answer

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 191
to Stopping Crime», Guardian Qu’a-t-on fait de la
Weekly, le 10 avril 1994). On a dissuasion?
comparé en 1992 la situation avec
celle au Texas qui a réagi très Ces données sur la dissuasion
différemment aux pressions sont bien entendu tout à fait
exercées sur son système carcéral contraires à l’idée que se fait le
au cours des années 1980. En public et il faut donc élucider la
récession économique, le Texas a question. Même si la dissuasion
choisi de construire moins de peut être efficace auprès de
prisons et de recourir davantage à certaines personnes qui craignent
la libération conditionnelle. La une contravention de
seule différence remarquée entre stationnement ou une amende,
les deux taux de criminalité a été par exemple, les conditions
un certain accroissement des rigoureuses nécessaires à
caractéristiques répétitives des l’efficacité de la dissuasion ne
«Les taux de infractions contre les biens, mais s’appliquent pas dans le domaine
criminalité augmentent certaines indications permettent de la criminalité. Doob explique :
et baissent selon les lois aussi de les attribuer aux taux
et une dynamique qui élevés de chômage au Texas au [traduction]
leur est propre et les cours de ces années (Ekland- «L’idée sous-jacente à la
politiques en matière de Olsen, 1992). Selon les dissuasion... tient pour acquis
sanctions s’élaborent et renseignements disponibles, il n’y que les gens examineront la
changent également a simplement aucune preuve probabilité d’être appréhendés à
selon une dynamique probante que le recours à la suite de leur acte et
qui leur est propre : ces l’incarcération ou à diverses détermineront qu’elle est
deux systèmes n’ont périodes d’incarcération ait un relativement élevée. On présume
pas grand chose à voir plus grand effet dissuasif, même qu’ils savent quelle peine sera
l’un avec l’autre.» pour les infractions contre les probablement imposée et qu’ils
biens (Song, 1993, Ekland-Olsen, croient que, s’ils sont
Patrik Törnudd appréhendés, elle leur sera
1992, Roberts, 1995, Doob, 1995).
Finlande, 1993 effectivement imposée. Enfin,
Comme on l’a mentionné
auparavant, il y a même certaines dans le cas des peines plus
raisons de croire le contraire : les sévères imposées afin de
dissuader les gens, on présume
taux de récidive des délinquants
que les gens commettraient
emprisonnés sont plus élevés que
l’infraction et accepteraient la
ceux des individus à qui on peine prévue actuellement, mais
impose des peines non privatives qu’ils ne commettraient pas
de liberté (Roberts, 1995) et les l’infraction si la peine était plus
peines sévères peuvent en fait sévère.
accroître les taux de criminalité
(Liiles, 1995). Les gens ne pensent cependant
pas à l’arrestation... Ils
réfléchissent peut-être à ce qu’ils
peuvent faire pour éviter d’être
appréhendés, mais peu de gens

192 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
commettent des infractions en se imposera probablement une
disant qu’ils seront fort peine - souvent les défavorisés et
probablement appréhendés» les marginaux - le «message»
(Doob, 1995). préventif qu’on tente de véhiculer
à l’aide de l’élément punitif de la
Il y a un autre problème. Dans le peine est biaisé par un certain
cas de nombreux crimes, si les nombre d’éléments économiques,
délinquants calculaient froidement psychologiques et sociaux bien
et rationnellement la peine qui documentés, y compris la façon
leur serait probablement imposée, dont la peine elle-même est vécue.
ils se rendraient compte qu’il est Une certaine menace ou pression
peu probable qu’on les sociale peut forcer les gens à
appréhende, sans parler de les respecter la loi mais, passé un
condamner - dans le cas du vol certain point, la sévérité de la
qualifié, par exemple, le risque est peine, compte tenu du contexte,
de 10 % environ. La recherche est considérée comme une
révèle que les personnes injustice, un rejet, une recherche
condamnées reçoivent en fait une de boucs émissaires (tous les
peine beaucoup plus sévère que experts disent que la peine limite
ne le pensent la plupart des au-delà de laquelle le message est
Canadiens (presque toujours une inefficace est bien inférieure à
peine d’emprisonnement et celles habituellement imposées au
souvent de deux à trois ans de Canada). L’étiquetage et la
pénitencier). Rien ne prouve que ségrégation, nous le savons
les délinquants éventuels décident maintenant, favorisent
si le crime vaut la peine prévue l’appartenance à une contre-
actuellement, mais ne vaudrait pas culture et non une plus grande
une peine de quatre ou cinq ans, conformité à la culture
par exemple (Doob, 1995). dominante : les gens le plus
souvent emprisonnés viennent
Mathiesen donne une autre raison habituellement de groupes
expliquant pourquoi sociaux qui savent très bien que,
l’emprisonnement punitif n’a pas même s’ils n’enfreignent pas la
d’effet «dissuasif» ou «préventif loi, ils ne réussiront quand même
en général» dans le cas de la pas dans notre société
plupart des crimes. La recherche (Mathiesen, 1990).
en communication, selon lui,
suggère que l’effet dissuasif, s’il Même s’il y avait un léger effet de
existe, se trouve surtout chez ceux dissuasion, de sérieuses questions
qui n’en ont pas besoin au départ se posent. Non seulement nous
parce qu’ils partagent déjà des n’avons plus les moyens
valeurs et une allégeance avec les financiers, mais l’injustice et le
autres membres du groupe dommage social énormes
dominant de la société. Dans le qu’imposent les prisons à un
cas cependant de ceux à qui l’on nombre disproportionné de Noirs

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 193
et d’Autochtones, par exemple, peuvent être réglées à l’aide d’un
ont maintenant beaucoup plus de large éventail de moyens
poids que toute autre beaucoup plus humains et
considération, en particulier civilisés que le recours exclusif à
lorsque tout avantage qui la procédure accusatoire et à
pourrait découler reste incertain l’incarcération punitive. On
et négligeable. Si les Canadiens laisserait ainsi la place aux
connaissaient les faits, ne interventions qui répondent tout
préféreraient-ils pas que les particulièrement aux besoins et
fonds soient consacrés à des tiennent compte des circonstances
programmes essentiels comme la dans chaque situation. Ce
santé et l’éducation et, Galaway répertoire en a présenté un
l’a découvert en Alberta et au certain nombre d’exemples.
Manitoba, à l’affectation des
ressources à la formation Pourquoi ces solutions de
professionnelle et aux rechange n’ont-elles pas
programmes communautaires
plutôt qu’aux prisons? (Galaway,
diminué le recours à
1994). l’emprisonnement?

Il n’est pas nécessaire, bien Essentiellement, parce que la


entendu, de cesser de dissuader «prison» est toujours la norme
les gens de commettre des crimes que les gens associent à la
ou de dénoncer les «justice».
comportements qui enfreignent
les droits des citoyens et les De plus, ces «solutions de
normes communautaires. Il n’est rechange» ne rendent pas toutes
pas nécessaire non plus de cesser une «vraie justice».
de nous protéger ou de
rechercher la justice et la guérison On constate souvent, bien
lorsque nous avons subi des entendu, que l’emprisonnement
dommages. Le fait est que est insuffisant à cet égard. On a
l’emprisonnement est rarement cependant continué de l’imposer
un moyen efficace d’arriver à ces en partie parce que jusqu’à
fins. D’autres moyens qui récemment les victimes ou la
peuvent être moins collectivité n’avaient pas d’autre
dommageables et moins choix et en partie parce qu’on n’a
dispendieux sont souvent plus pas remis en question de
efficaces. nombreuses hypothèses sur
l’efficacité de la valeur
Il y a beaucoup d’autres façons symbolique de la peine
d’aborder le genre de situations d’emprisonnement comme
qui sont criminalisées condamnation morale
actuellement et mènent souvent à absolument destructive qui porte
l’emprisonnement. Ces situations en soi un caractère de catastrophe
plus profond que toute autre

194 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
«solution de rechange», peu là où on a beaucoup recours à
importe à quel point elle a été l’emprisonnement, de sorte qu’on
«L’une des difficultés
appliquée. Nous constatons a eu tendance à leur accorder un auxquelles le système
maintenant que «l’emprise caractère beaucoup plus punitif correctionnel canadien est
négative» de cette peine a été un que nécessaire pour leur efficacité confronté actuellement
échec pour la société et qu’elle réelle. Toutes sortes de tient à ce qu’il n’a pas un
aboutira à l’élimination de «sanctions de sévérité moyenne» but clair. Bien que les
ministères chargés des
l’emprisonnement punitif comme contiennent divers éléments de
services correctionnels
réponse rationnellement contrainte et de contrôle destinés affirment réadapter les
défendable ou justifiable à la à en accroître le caractère punitif délinquants et les
criminalité. Visiblement, nous et la perception qu’a le public du réinsérer dans la
devrons bien réfléchir à la façon niveau de souffrance ou collectivité, en raison de
d’appliquer d’autres options afin d’épreuve, quels que soient la contraintes budgétaires et
des pressions exercées par
d’éviter de retomber dans une nature de l’infraction, les
le public, ils négligent
situation tout aussi destructive problèmes ou les besoins de la souvent ces fonctions et
pour les uns et les autres. victime, du délinquant ou des se contentent d’assurer la
collectivités environnantes. garde des délinquants.
Autre élément important : des Les fonctionnaires du
milliards de dollars restent Presque tous les types de peines secteur correctionnel,
différents segments de la
investis dans l’industrie carcérale sont inévitablement liées à
société et le grand public
et il n’y a eu aucun effort visant à l’emprisonnement. La ont chacun une idée
réaffecter ces ressources à des renonciation à l’emprisonnement, différente du but du
activités plus positives. Cette total ou partiel, est liée à tant de régime correctionnel,
situation a créé une dynamique facteurs que manquer aux c’est-à-dire pour ce qui
extrêmement contreproductive de conditions, même sans récidive est de qui devrait être
incarcéré et pour combien
droits acquis visant à tenir criminelle, peut quand même
de temps. Il est essentiel
occupés à un taux «rentable» tous souvent mener à l’incarcération. d’éduquer le public à cet
les lits actuels dans les prisons : il De nouvelles dispositions visant égard.
vaut mieux utiliser ce qui est déjà «l’imposition d’une peine assortie
payé au lieu de dépenser des de conditions» au Canada On ne devrait infliger
sommes «supplémentaires» pour peuvent, pour ces raisons, une peine d’incarcération
qu’en tout dernier
des solutions de rechange accroître la population carcérale
recours. En effet, le
pendant que certains lits sont malgré l’intention contraire : le recours à l’incarcération
inutilisés. message symbolique de sa «force comme solution miracle
de frappe» dans les cas où l’on alors que nous devrions
La politique pénale, de toute pense qu’il est peu probable trouver des solutions plus
évidence, est dans une impasse. qu’elle sera imposée, de sorte que innovatrices et plus
rentables est un
des personnes qui auraient
gaspillage terrible de
Le problème, semble-t-il, et nous auparavant purgé une peine non ressources humaines et
avons fait une mise en garde ici et privative de liberté seront financières...»
là en présentant les différentes éventuellement incarcérés.
initiatives, tient au fait qu’on a eu Association
recours à nombre de ces solutions L’imposition de peines assorties canadienne de justice
pénale Congrès 1995 -
de rechange pour réduire le de conditions crée un «cercle
brochure
surpeuplement dans les prisons vicieux» : une peine

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 195
d’emprisonnement est ajoutée à Que faut-il faire?
une solution de rechange, de la
même façon que les solutions de Un examen des initiatives
rechange sont ajoutées à la peine internationales visant à réduire les
d’emprisonnement. populations carcérales révèle que
quelques pays ont appliqué de
C’est le triste phénomène de nouvelles politiques nationales
«l’élargissement du filet», un avec un certain succès. Les plus
problème maintenant bien connu remarquables sont, et de loin, la
et documenté, mais pas encore Finlande et l’ancienne Allemagne
résolu. On le retrouve de l’Ouest.
inopinément dans la plupart de
nos meilleures initiatives (mais pas La Finlande a réussi à réduire sa
dans toutes). Peters et Aertsen ont population carcérale qui atteignait
signalé que la plupart des peines 250 personnes pour 100 000 au
autres que l’emprisonnement n’ont cours des années de pointe (le
pu s’en dissocier. Quiconque n’est Canada affiche actuellement
pas directement condamné à 154 personnes pour 100 000).
l’emprisonnement sera au moins Depuis le milieu des années 1960,
conduit à la salle d’attente de la un certain nombre d’éléments ont
prison. permis une diminution constante
pendant 30 ans jusqu’au niveau
Le recours actuel aux solutions de actuel de 60 personnes environ
rechange à l’emprisonnement pour 100 000. Selon Matti Joutsen,
facilite l’incarcération en directeur de l’Institut d’Helsinki
assouplissant les critères régissant pour la prévention du crime et la
l’emprisonnement. lutte contre la délinquance affilié à
l’Organisation des Nations Unies,
La situation ne changera pas à peu des éléments essentiels
moins que les collectivités ne peuvent être décrits comme «un
deviennent davantage attentives, programme, un projet ou une
proactives, et mieux informées, et initiative» dans le sens strict du
que les gouvernements appliquent terme. La stratégie a été améliorée
des politiques éducatives, grâce à des conditions moins
législatives et administratives qui difficiles à faciliter dans une sphère
ouvrent de nouvelles voies, de compétence plus restreinte, par
véhiculent des messages positifs et exemple, un lien étroit entre la
préconisent des valeurs favorisant recherche et la politique, ainsi que
la collectivité dans l’administration par une collaboration étroite entre
de la justice au Canada. Que les personnes clés qui élaborent les
pouvons-nous apprendre d’autres politiques, procèdent aux
sphères de compétence qui tâchent recherches et s’occupent des
elles aussi de réduire le recours de applications pratiques. D’abord et
l’incarcération? avant tout, cependant, la politique
pénale a échappé à la politisation.

196 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
[traduction] prisonniers, le personnel carcéral
«Toutefois, n’importe quel pays et la société dans son ensemble.
pourrait faire sien l’élément Sans une entente générale à ce Un certain nombre de
fondamental : reconnaître qu’une sujet, les tentatives de pratiques et de
population carcérale élevée n’est réforme de la justice pénale programmes applicables
aux jeunes contrevenants
pas une solution, mais en fait, un auront vraisemblablement et aux délinquants
problème. Les personnes clés pour effet de biaiser l’objectif adultes reflètent des
notions et des principes
doivent s’entendre sur deux des nouvelles mesures non de la justice réparatrice;
principes : 1) la prison permet privatives de liberté, des par exemple :
rarement la réadaptation, exerce nouvelles tentatives de
- Un fonds d’aide aux
rarement un effet dissuasif et médiation, des nouvelles victimes a été créé
accroît souvent le risque de tentatives visant à abréger les pour financer les
services assurés aux
récidive, et 2) une approche peines, etc.» (Joutsen). victimes d’actes
fortement punitive, fondée sur le criminels.
respect de la loi et le maintien de Les Finlandais ont adopté une - De mesures de
rechange (de
l’ordre dans le cas des problèmes stratégie globale de modification déjudiciarisation)
de justice pénale complexes, de leurs politiques et de leurs sont maintenant
disponibles pour les
brutalise généralement les textes législatifs de manière à jeunes contrevenants.
On a aussi entrepris
de mettre sur pied un
certains nombre de
Nombre de détenus pour 100 000 habitants projets à l’intention
des adultes. La
médiation entre la
victime et le
délinquant est l’une
États-Unis 529,0 de plusieurs
Lituanie 275,0 méthodes de
résolution de conflits
Roumanie 200,0 qui s’offrent. Deux
République Tchèque 165,0 projets pour les
jeunes, l’un à
Pologne 160,0 Shaunavon et l’autre,
Hongrie 132,0 à Regina, sont des
projets pilotes de
CANADA 130,1 modèles prévoyant
Écosse 115,0 une plus grande
participation de la
Espagne 114.9 collectivité.
Portugal 111.0 - Les tribunaux ont eu
recours à des cercles
Autriche 91,0 de détermination de
Italie 89,0 la peine dans le cas
d’un certain nombre
France 86,3 de délinquants
Belgique 72,1 autochtones.
- On communique
Suède 66,0 automatiquement
Finlande 61,8 avec les victimes pour
les consulter aux fins
Turquie 51,6 de la rédaction de
rapport présententiels
et prédécisionnels.
Source: Faits et chiffres sur les services correctionnels au Canada
édition 1994

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 197
décriminaliser certaines possible de diminuer
infractions (par exemple, l’ivresse énormément le recours à
en public) de sorte que le nombre l’emprisonnement sans
de personnes emprisonnées pour répercussions dans d’autres
défaut de paiement d’amende secteurs du système. Le
diminue et on insiste moins sur faible nombre d’autres
l’emprisonnement. Les peines peines prévues et les
pour vol, autres infractions contre pressions exercées à cause
les biens et conduite en état des taux croissants de
d’ébriété sont aussi réduites, de criminalité ont eu moins de
- Le tribunal peut
décider d’ordonner même que la période de temps poids que la volonté
aux délinquants de minimale purgée avant manifeste de créer un
fournir des services
communautaires ou l’admissibilité à la libération système de sanctions plus
des services conditionnelle. Les Finlandais civilisé» (Tornudd, 1993).
personnels. Ils
réparent ainsi une ont davantage recours à la
partie du tort qu’ils condamnation avec sursis et aux L’ancienne Allemagne de l’Ouest
ont causé à la services communautaires en a aussi montré que la population
collectivité dans son
ensemble. remplacement des peines carcérale peut être fortement
- Les programmes de d’emprisonnement allant jusqu’à réduite sans accroissement
préservation de la apparent du risque pour le
famille offerts aux huit mois. Ils ont aussi assoupli
jeunes contrevenants les conditions auparavant strictes public. La plus importante
constituent un liées au recours aux peines réduction proportionnelle du
exemple d’un modèle
de services axés sur assorties de conditions. Il n’y a recours au placement sous garde
la famille et qui vise à pas de surveillance des adultes, a été chez les jeunes
promouvoir la
prestation pendant mais uniquement la menace contrevenants. La plus évidente
une période donnée d’avoir à purger la peine si le explication de la diminution est
de services intégrés le changement de comportement
destinés à entretenir délinquant récidive au cours de
et à renforcer les liens la période de probation qui peut des procureurs et des juges.
familiaux et à mettre atteindre trois ans. Moins de personnes condamnées
les familles en
communication avec sont placées sous garde. Les
d’autres ressources Les représentants finlandais sont poursuites ont diminué dans la
dans leur collectivité. mesure où les procureurs ont
d’avis que l’élément décisif
Document permettant d’atteindre ce but a acquis un large pouvoir
d’orientation du été la volonté des fonctionnaires, discrétionnaire leur permettant
ministère de la Justice
de la Saskatchewan du pouvoir judiciaire et des de rejeter des cas et aussi
Avril 1996 autorités carcérales d’avoir d’imposer eux-mêmes des
recours à tous les moyens sanctions. Comme en Finlande,
disponibles pour réduire le on est d’avis que ces
nombre de prisonniers. changements ont été réalisés
moins par l’application de
[traduction] mesures législatives et
«Peu importe ce qui se passe davantage grâce à la
à l’avenir, une leçon collaboration étroite entre les
importante est apprise. Les avocats, le pouvoir judiciaire et
faits prouvent qu’il est les procureurs.

198 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Beaucoup d’autres sphères de délinquants, au lieu du
compétence reconnaissent le recours à la procédure
besoin pressant de réduire leur judiciaire, pour s’occuper Le Québec entreprend
population carcérale. Certaines des causes sociales et liées une réforme
pénitentiaire
appliquent les mesures actuelles à la santé et, parfois,
d’une manière plus radicale. participation de la victime par Rhéal Séguin
(Globe and Mail,
Voici simplement quelques (Royaume-Uni, Nouvelle- 3 avril 1996)
exemples d’initiatives qui sont Zélande);
prises : Le gouvernement du
Québec a entrepris une
• fermeture des prisons et importante réforme du
• imposition de sanctions imposition de limites aux réseau de prisons de la
province, fermant
administratives, par peines d’emprisonnement jusqu’à six
exemple, confiscation des qui peuvent être infligées établissements et
permis de conduire, des (Québec, certaines sphères demandant qu’on
réduise le recours à
permis de port d’armes ou de compétence l’emprisonnement dans
des passeports au lieu de américaines), ou le cas des criminels non
violents.
peines d’emprisonnement imposition d’une exigence
(Italie), ou ajout à l’impôt selon laquelle il faut Ces mesures, qui visent
sur le revenu des amendes prévoir un nombre de à réduire les coûts,
devraient permettre au
non payées au lieu de mesures communautaires gouvernement de
l’imposition d’une peine équivalant au nombre de réaliser des économies
annuelles de 16 millions
d’emprisonnement cellules (Ohio). de dollars. Plus
(Québec); important encore,
cependant, le Québec va
ainsi à l’encontre de la
• réduction des restrictions D’autres personnes, ayant tendance en Amérique
applicables selon la repensé les besoins dans le du Nord d’infliger des
peines plus sévères aux
gravité de l’infraction domaine de la justice, adoptent criminels.
commise aux délinquants de nouvelles mesures et
admissibles à des approches destinées à : Selon un rapport publié
hier par le ministère de
solutions de rechange à la Sécurité publique, «Il
l’emprisonnement • amener le processus n’est pas facile
d’adopter une approche
(Autriche, Écosse, judiciaire à adopter une
moins répressive de la
Irlande); approche prospective criminalité. À cette
offrant des solutions de égard, le Québec va à
l’encontre de la tendance
• interruption ou report des rechange sociales et conservatrice qui se
procédures aux fins de reconnaissant le besoin manifeste sur tout le
d’«insertion» au lieu de continent nord-
l’application d’autres américain. Nous
solutions sociales ou liées «réinsertion», étant donné sommes obligés de
à la santé (Pays-Bas, qu’un très grand nombre reconnaître que
l’approche répressive
Portugal, Japon); de délinquants mènent adoptée aux États-Unis
une existence marginale l’a été également dans
au départ (France), et les provinces de l’Ouest.
• établissement d’un Le Québec, quant à lui,
système de mesures reconnaître que les refuse d’emboîter le
officielles et officieuses de services sociaux sont la pas.»
«mise en garde» des pierre angulaire de

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 199
l’application de la importantes de la
politique pénale politique sociale en ce qui
Quatre prisons (Portugal); a trait à la prestation de
fermeront leurs services judiciaires dans
portes • donner aux mesures quatre secteurs clés :
actuelles de nouvelles services préventifs, de
FREDERICTON - dimensions sociales et surveillance, de solution
Le Nouveau- familiales (Belgique, de problèmes et
Brunswick prévoit Nouvelle-Zélande, d’application de la loi;
fermer quatre de Écosse);
ses 10 prisons • remplacer le modèle
provinciales au • faire en sorte que le correctionnel de justice
cours des trois système de justice pénale rétributitive par un
prochaines années soit davantage axé sur la système à deux volets
parce que réparation, en veillant à ce pour les «services de
l’emprisonnement que les ordonnances de gestion du risque» et les
des auteurs service communautaire «services de réparation»
d’infractions non soient plus logiques, (Vermont). Le volet
violentes n’a pas compte tenu de l’infraction services de réparation
l’effet dissuasif (Suède, France), ou fournit aux délinquants
attendu, déclare le encourager les processus des occasions de racheter
solliciteur général de médiation (Norvège, leur faute et de réparer les
Jane Barry. Belgique, Portugal, torts causés aux victimes
«Nous sommes en Autriche). La Belgique a et aux collectivités où les
présence du renforcé sa politique axée crimes ont été commis.
syndrome de la sur les besoins de la Les membres de la
porte tournante», a- victime en embauchant collectivité négocient les
t-elle déclaré hier en des travailleurs sociaux, détails et les activités qui
annonçant une des criminologues et des permettront au délinquant
réforme en médiateurs qui travaillent de réparer le préjudice
profondeur du directement dans les causé à la victime et à la
système. Elle a bureaux des procureurs; collectivité. Les rôles du
ajouté que 87 % personnel professionnel
des détenus dans • élaborer un «modèle de sont redéfinis et, de
les prisons du prestation de services surveillants des
Nouveau-Brunswick judiciaires intégrés» interventions, ils
sont des permettant de repenser la deviennent spécialistes
récidivistes : justice dans le contexte des ressources
«L’incarcération ne d’une politique sociale communautaires,
leur apprend (Nouveau-Brunswick). Le organisateurs et
rien.» - PC but est de travailler en animateurs;
collaboration plus étroite
Globe and Mail avec d’autres organismes • créer le poste de
11 avril 1996 et secteurs de la société sur «planificateur de la justice
les répercussions plus réparatrice» afin

200 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
d’imposer dans tout l’État qu’ils seraient davantage
des peines de réparation satisfaits des peines individuelles si
(Vermont, Minnesota). les juges les informaient mieux de
la façon dont elles sont
Il est trop tôt pour connaître les déterminées et des types de cas
résultats de nombre de ces dont il s’agit. Les décideurs de
initiatives quant à la réduction à politiques dans l’ensemble sont
long terme du recours à peut-être mal informés du soutien
l’emprisonnement ou à la que les citoyens accordent aux «... À mon avis, nous
satisfaction de la collectivité à réformes de la justice pénale. devons nous aussi
l’égard de l’expérience de la Une grande partie des adopter une attitude
«justice», éléments qui, à notre renseignements que nous plus sévère. Mais nous
avis, seront liés en bout de ligne. donnons aux citoyens ne leur devons le faire d’une
façon intelligente. J’ai
Il y a cependant suffisamment de permet pas d’évaluer le genre de
parlé aux personnes qui
données probantes pour affirmer crimes commis dans notre société
sont en proie à des
qu’un pays peut ou le fonctionnement du système sentiments de
substantiellement réduire le de la justice pénale. En même frustration à l’égard du
niveau d’emprisonnement et temps, ils adoptent probablement système, et ce qu’elles
gérer plus efficacement les de nombreuses opinions de veulent, ce sont des
délinquants présentant des divers leaders d’opinion (leaders mesures plus efficaces à
risques plus élevés s’il a la politiques, fonctionnaires de la l’endroit des
volonté de le faire. justice pénale, porte-parole de délinquants, des
divers groupes) sur le mesures qui
L’un des plus grands obstacles fonctionnement du système de permettront aussi de
est l’opinion erronée du public, justice pénale (Doob, 1995). s’attaquer aux causes
des politiciens et même de profondes de la
certains fonctionnaires du Il faut espérer qu’un plus grand criminalité. Lorsque
système de justice pénale qui nombre de collectivités les gens parlent des
croient que le remaniement des commenceront à insister pour mesures qu’ils
niveaux de peines ou d’autres souhaiteraient voir
obtenir une justice plus
adopter, ils ne veulent
parties du système améliorera la satisfaisante et l’optimisation des
pas nécessairement
sécurité communautaire au ressources, et formeront des parler
Canada. Il faut diffuser des conseils comme celui du projet d’emprisonnement.»
renseignements concrets et de détermination de la peine de
précis pour dissiper cette idée la collectivité d’Abbotsford en John Nilson
fausse, sans cependant oublier Colombie-Britannique ou le Ministre de la
les préoccupations légitimes des Conseil correctionnel Justice de la
gens. communautaire de la Miramichi Saskatchewan
au Nouveau-Brunswick. Tout
Certains citoyens canadiens, comme dans le domaine de la
manifestement, sont peu satisfaits santé on exige de plus en plus le
du processus actuel de «traitement fondé sur des
détermination de la peine. Selon données probantes», nous
les recherches de Doob, Galaway, pourrions bientôt voir s’exercer
Mathiesen et d’autres, il est dans le domaine de la justice
cependant tout aussi évident

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 201
pénale de plus fortes pressions objectifs positifs et les
communautaires pour la besoins de guérison dans
«détermination de la peine les cas dont ils sont saisis
fondée sur la preuve» : il faudra et signaler l’insuffisance
justifier les frais ou le caractère des occasions ou des
intrusif des peines imposées en ressources
ayant recours à des données communautaires locales
scientifiques pour en étayer la pour remédier à ces
nécessité ou les avantages prévus. lacunes.

Il incombe tout particulièrement • Ils peuvent attirer


aux fonctionnaires du système de l’attention de la
justice pénale de fournir au collectivité sur certains
public des renseignements précis problèmes économiques
sur les répercussions du système ou sociaux liés aux cas
actuel, sur ce qu’il peut et ne peut qu’ils doivent juger et
pas faire dans l’intérêt de la expliquer pourquoi les
collectivité. Les membres de observations formulées à
l’appareil judiciaire notamment leur égard les portent à
sont en mesure d’exercer leur croire qu’il faut affecter
jugement pour soulever davantage de ressources à
d’importantes questions et certaines interventions.
favoriser une plus grande
sensibilisation de la collectivité • Ils peuvent profiter de
aux problèmes qui se posent. l’occasion lorsqu’ils
prononcent leurs
• Les juges peuvent insister jugements pour tirer du
pour obtenir de meilleurs «châtiment» certains des
renseignements avant de avantages positifs qu’on y
déterminer la peine, cherche et comprendre
exiger qu’on ait recours à dans leurs décisions des
un processus de éléments permettant
communication axé sur la d’atteindre ces objectifs
guérison pour les positifs sans supposer que
recueillir, demander de l’emprisonnement punitif
consulter la collectivité de est la seule façon de les
cette façon ou encore atteindre (certains
demander que quelqu’un objectifs comme
le fasse en leur nom et que l’obligation pour les
la collectivité leur délinquants de rendre
présente des compte, la dénonciation,
recommandations. la réparation et le soutien
aux victimes, l’apaisement
• Ils peuvent dans leurs des craintes dans la
jugements exposer les collectivité, l’opprobre jeté

202 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
sur le délinquant afin de • remettre en question
faciliter sa réinsertion chaque période
sociale, etc.). d’emprisonnement
imposée comme élément
Il semble important que les d’une peine : est-ce
gouvernements prennent des vraiment nécessaire,
mesures à plusieurs niveaux s’ils même comme épée de
veulent réduire le coût des Damoclès? Peut-on
prisons dans leur sphère de vraiment justifier l’objectif
compétence, c’est-à-dire : de l’emprisonnement ou y
aurait-il une meilleure
• réaffecter les fonds solution?
réservés aux lits dans les
prisons aux solutions de • Examiner et évaluer toute
rechange la gamme des différents
communautaires; objectifs et raisons d’être
des peines
• mieux faire connaître les d’emprisonnement dans
ressources et en accroître notre société aujourd’hui
la disponibilité aux fins de (voir l’encadré latéral à la
l’application de solutions page suivante); il faut se
de rechange efficaces et pencher sur chacun de ces
satisfaisantes; éléments pour les
empêcher qu’il ne mine la
• se doter de mesures stratégie officielle visant à
législatives et de réduire la population
politiques qui exigent le carcérale.
recours à ces solutions de
rechange; Comme nous l’avons constaté,
cependant, il ne suffit pas
• encourager les membres d’appliquer ces mesures et de les
de la collectivité, les promouvoir. Nous devrons rester
organismes et les vigilants si nous voulons éviter à
fonctionnaires du système l’avenir les tragédies du passé.
de justice à avoir recours à
ces solutions de rechange [traduction]
chaque fois que la chose «La prison moderne, créée il y a
est possible; un peu plus de deux siècles
comme mesure de rechange au
châtiment corporel et à la peine
capitale, est riche
d’enseignements pour ceux
d’entre nous qui défendent le
changement social. Les Quakers
et autres groupes qui se sont fait

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 203
les champions des premières
prisons modernes avaient les
meilleures intentions, mais ils
Les nombreux buts et raisons d’être ont en réalité créé un monstre.
des peines d’emprisonnement... L’histoire nous révèle que, peu
• Protéger les membres de la collectivité
importe la noblesse de nos
contre les actes de violence graves que intentions et de nos théories, les
pourraient commettre les délinquants, du processus de rechange qui sont
moins pendant qu’ils sont en prison; censés être des réformes peuvent
• Restreindre la liberté afin de protéger la
être cooptés et détournés de leurs
collectivité contre un comportement objectifs initiaux.
délinquant moins grave;

• Punir les auteurs d’infractions contre les


biens non violents et qui présentent un Seule l’adoption de valeurs de
risque faible; rechange - voire d’une
nouvelle compréhension de la
• Donner un avertissement destiné à justice - permettra de réduire
éveiller les auteurs d’infractions mineures
à la nécessité de modifier de façon
pareille cooptation.
importante leur mode de vie;
«Les défenseurs du changement
• Communiquer un message symbolique doivent savoir que leurs réformes
(châtiment, réprobation, effet dissuasif)
destiné à apaiser les craintes du public au peuvent mal tourner; ils ne
sujet de la criminalité ainsi que la peur doivent donc imposer leur vision
plus profonde du mal dont est capable et leurs valeurs aux autres
tout être humain;
qu’avec prudence»
• Faire passer un message symbolique de (Howard Zehr, 1995).
justification de la victime;

• Placer les délinquants dans un endroit où


les programmes ou services de santé
mentale fournis sont encore financés, ou
bien où l’on croit que l’élément de
«coercition» favorisera la conformité;

• Assurer à certaines personnes démunies


un endroit où elles seront logées et
recevront leurs trois repas par jour;

• Donner à certaines des personnes


marginalisées de notre société accès à une
sous-culture qui nourrit leur sentiment
d’appartenance;

• Employer de nombreux citoyens dans une


industrie d’un milliard de dollars...

204 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Annexe

Nous avons pensé qu’il serait utile de fournir, selon le sujet, aux lecteurs
qui cherchent des programmes, des initiatives ou des cas pertinents à
leur domaine de travail ou d’intérêt, les renseignements généraux
suivants :

Le délinquant déficient mental


Occasions d’indépendance - les handicapés développementaux -
Winnipeg (Manitoba) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .143
Le projet d’approche de la cour - Ottawa (Ontario) . . . . . . . . . . . . . . . .97
Ranch El’dad - Steinbach (Manitoba) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .154

La consommation d’alcool ou l’alcool au volant


Le cas de Kevin Hollinsky à Windsor (ordonnance de service
communautaire) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .2
Programme d’absolution pour suivre une cure de désintoxication -
Territoire du Yukon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .110
Sober Streets - Kitchener-Waterloo (Ontario) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .134
Projet à l’intention des récidivistes de la conduite avec facultés
affaiblies - Île-du-Prince-Édouard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .135
Programme à l’intention des adolescents toxicomanes -
Île-du-Prince-Édouard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .135

Les infractions sexuelles


Soutien à un délinquant sexuel mis en liberté -
Le récit d’une communauté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .34
Agression sexuelle - Un cas de guérison dans une communauté . . . .166
Solution de rechange communautaire dans les cas d’agressions
sexuelles et d’infractions connexes - Canim Lake (C.-B.) . . . . . . . .99
Protégeons les enfants - Les enfants et l’agression sexuelle -
Territoire du Yukon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .168
Programme résidentiel pour jeunes délinquants sexuels -
Ottawa (Ontario) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .149

Les Autochtones
(Seuls les services visant essentiellement les Autochtones sont
énumérés ici. De nombreux autres services auraient aussi des
répercussions sur les populations autochtones.)

Justice communautaire de Kwanlin Dun -


détermination de la peine par le Cercle (Yukon) . . . . . . . . . . . . . . . .7

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 205
Programme du Cercle de guérison holistique communautaire -
Hollow Water (Manitoba) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .16
Atoskata - Projet d’indemnisation des victimes à
l’intention des jeunes (Regina) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .23
Détermination de la peine par le Cercle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .52
Cercles urbains - Vol à main armée à Saskatoon . . . . . . . . . . . . . . . . . . .58
Participation au Cercle de détermination de la peine -
Une expérience menant à un changement d’attitude . . . . . . . . . . .62
Cas d’homicide involontaire à Fort St. John
(Colombie-Britannique) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .63
Kwêskohtê - Conférences familiales (Regina) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .77
Projet de justice tribale de Teslin - Groupe de détermination
de la peine (Yukon) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .82
Comité de justice de Wabasca - Alberta . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .85
Groupe de détermination de la peine du lac des Esclaves - Alberta . . .86
Comité de justice des Aînés - Fort Resolution
(Territoires du Nord-Ouest) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .88
Projet de déjudiciarisation du Conseil communautaire -
Services juridiques autochtones (Toronto) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .95
Conseil de déjudiciarisation micmac de l’île Lennox -
Île-du-Prince-Édouard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .101
Participation d’Aînés aux audiences de la Commission -
nationale des libérations conditionnelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .175
Projet d’aide aux délinquants après la mise en liberté -
Services juridiques autochtones (Toronto) . . . . . . . . . . . . . . . . . . .183

Les jeunes

Atoskata - Projet d’indemnisation de la victime à l’intention


des jeunes - Regina (Saskatchewan) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .23
Pro-Services - Québec (Québec) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .22
Second Chance - dédommagement - Lloydminster (Alberta) . . . . . . .129
Conférences familiales - Nouvelle-Zélande . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .70
Conférences familiales - Wagga Wagga (Australie) . . . . . . . . . . . . . . . . .74
Conférences familiales - jeunes Autochtones -
Regina (Saskatchewan) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .77
Conférences familiales - États-Unis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .78
Comités de justice pour les jeunes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .87
Projet d’aide juridique pour les jeunes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .122
Solution de rechange au programme de placement sous garde -
Kitchener-Waterloo (Ontario) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .127
Programme d’intervention intensive -
St. John’s (Terre-Neuve) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .129
Programme d’intervention communautaire d’Eastwood -
Edmonton (Alberta) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .131

206 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
Programme de la rue Rideau pour la jeunesse -
Ottawa (Ontario) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .132
Programme à l’intention des adolescents toxicomanes -
Île-du-Prince-Édouard . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .135
Programme de prévention axé sur la collaboration
interorganismes (MAPP) - Brandon (Manitoba) . . . . . . . . . . . . . .137
Programme d’évaluation, d’intervention, de surveillance (AIM) -
Brandon (Manitoba) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .137
Modèle de préservation de la famille - La Ronge (Saskatchewan) . . .138
Services de soutien communautaire, St. Lawrence Youth Association -
Kingston (Ontario) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .140
Projet de préservation de la famille de Simpsonville,
Caroline du Sud . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .142
Programme de liens familiaux «Family Ties» -
New York (New York) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .142
Programme de résidences communautaires - Saskatchewan . . . . . . . .146
Programme résidentiel pour jeunes délinquants sexuels -
Ottawa (Ontario) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .149
Foyers d’accueil Maple Star - Colorado . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .150
Programme d’internat et d’externat «Youth Futures» -
Vallée du bas Fraser (Colombie-Britannique) . . . . . . . . . . . . . . . .152
Programmes de mesures de rechange . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .106
Libération provisoire des jeunes par voie judiciaire . . . . . . . . . . . . . . .155
Centre Ma Ma Wi Wi Chi Itata - Winnipeg (Manitoba) . . . . . . . . . . . .157
Programme Stop and Think - Halifax (Nouvelle-Écosse) . . . . . . . . . . .172
Programme de déjudiciarisation et de médiation à
l’intention des jeunes - Shaunavon (Saskatchewan) . . . . . . . . . . .105

Les femmes
(Seuls les services réservés uniquement aux femmes sont énumérés ici.
Presque tous les services énumérés au répertoire s’appliquent aux
femmes.)

Expansion-Femmes de Québec - Québec (Québec) . . . . . . . . . . . . . . . .147


Maison Thérèse-Casgrain - Montréal (Québec) . . . . . . . . . . . . . . . . . . .148
Services d’intervention à la cour de Coverdale -
Halifax (Nouvelle-Écosse) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .169
E.V.E. (Entraide vol à l’étalage - Stop Shoplifters) -
Montréal (Québec) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .102
Projet de Dos Pasos à l’intention des femmes enceintes
et toxicomanes - Tucson (Arizona) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .126
Projet Another Chance - Kingston (Ontario) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .181

Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie 207
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210 Pour une vraie justice / Le Conseil des Églises pour la justice et la criminologie
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Pour une vraie justice - Un aperçu des solutions
de rechange crédibles à l’emprisonnement et
des raisons pour lesquelles elles ne sont pas
plus nombreuses

Le système de justice au Canada est en pleine crise. Les populations carcérales


montent en flèche. Les coûts ne sont plus abordables. Pourtant, les gens se
sentent de moins en moins en sécurité. Ce que les Canadiens veulent, ce dont ils
ont besoin, c’est une «vraie justice» - une réponse à la criminalité qui prend les
victimes au sérieux et qui aide le processus de guérison, une réponse qui tient les
délinquants responsables de leurs actes et prend des mesures efficaces à leur
égard, une réponse qui s’attaque résolument aux causes de la criminalité.

Il est évident que l’incarcération n’est pas la bonne solution.

Pourquoi agissons-nous de la sorte?

Ne pourrions-nous pas dépenser cet argent à MEILLEUR escient, de manière à


accroître notre sécurité?

Comment pouvons-nous nous attaquer au problème de façon


plus intelligente?

Que pouvons-nous faire d’autre?

Cet ouvrage, «Pour une vraie justice», expose le pour et le contre des solutions
de rechange crédibles à l’emprisonnement qui s’offrent actuellement au Canada
et ailleurs. Il contient plus de 120 vedettes sous lesquelles on trouvera des
descriptions de programmes, des renseignements sur les personnes-ressources et
de nombreux récits illustrant les modes d’intervention et leurs résultats.
Pourtant, ces solutions de rechange ne réussissent pas à réduire sensiblement les
populations carcérales. «Pour une vraie justice» en donne les raisons et vise à
susciter des approches novatrices et de nouvelles orientations sur le plan de la
détermination de la peine.

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