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L’Etat moderne voit le jour à la fin du moyen âge. Il existait des entités pré étatiques qui
se rapprochaient des Etats dans le concept. A partir du moment où elles se mettaient en
rapport elles se devaient d’établir des règles, que ce soit des rapports amicaux ou
conflictuels.
La maîtrise du territoire est l’un des moteurs du Droit international.
Le premier traité international remonte à -3000 avant J.C en Mésopotamie où 2 cités
s’affrontent et trouvent un accord. Dans l’esprit commun, ces accords sont conclus pour être
respectés.
Il a fallu mettre en place des règles juridiques qui régissent le recours à la force, mais aussi à
l’encontre des citoyens étrangers. C’est l’apparition du principe d’immunité des “ diplomates ”
(terme anachronique pour l’époque), qui représentaient les Etats étrangers.
La chute de l’empire romain plonge l’Europe dans une période de barbarie, qui marque une
régression dans les règles qui régissent les relations internationales. Les règles existantes
ne s’appliquent plus, il faut attendre le 11e siècle pour que le monde renoue avec ces règles
minimum.
2 puissances vont contribuer à la réinstauration de ces règles :
• Le Pape, qui est une puissance religieuse mais qui se veut omnipotente. C’est le chef
de l’église mais aussi un chef d’Etat. Il tente d’établir un ordre spirituel mais aussi un
ordre terrestre, temporel.
• Le saint empereur germanique qui souhaite aussi contrôler l’ordre terrestre.
Il y avait une concurrence entre ces puissances. L’autorité de l’empereur a été contestée par
les princes vassaux et par le pape qui le menaçait d’ex communion, ainsi que tout le peuple.
La société internationale va connaître sa première grande mutation avec la fin du moyen
age et le début de la renaissance. Les règles internationales sont améliorées. On voit
l’apparition des premiers ministres des affaires étrangères, c’est la naissance de la
diplomatie. C’est le début du commerce international bien que cela reste assez limité.
1§ Un droit improbable
2§ Un droit indispensable
Un Droit utile :
Le professeur Prosper Veil considère que le DI est irremplaçable. Le monde sans les
organisations internationales serait un retour à l’état de sauvagerie.
Le droit international est un instrument qui permet de gérer cette tension permanente à
laquelle les relations internationales sont soumises.
Il faut réussir à articuler des intérêts divergents, avec la nécessité de servir un intérêt
commun.
Les Etats ont leurs intérêts mais ils doivent en permanence trouver le point d’équilibre entre
leurs intérêts et l’intérêt de tous. Il sert l’intérêt commun en garantissant une certaine
indépendance des Etats. Même si l’idée que les Etats puissent être indépendants les uns
des autres est une utopie.
Les instruments normatifs internationaux se sont multipliés de manière exponentielle
après la seconde guerre mondiale. Ce développement quantitatif ne peut pas être
déconnecté de l’aspect qualitatif des choses. Les Etats ont pris conscience de leur
interdépendance mutuelle, ils doivent compter les uns avec les autres. Les traités se sont
donc multipliés. De plus, la cœxistence pacifique est mise en avant et avec cela, la mise en
place de règles de droit. Il n’y a plus de domaines qui échappent au droit international. Il va
s’appliquer aussi bien à des problèmes politiques classiques qu’à des problèmes d’ordre
sociétaux. On assigne à l’ordre international des fonctions nouvelles alors qu’avant son
objectif était la conservation de l’ordre public international, en encadrant le recours à la force
sans l’interdire.
On est passé d’un système basé sur la conservation, à un système basé sur la
transformation de la société internationale. Il doit être fait pour protéger les faibles contre les
plus puissants. Ce discours politique qui conduit à favoriser une vague de décolonisation,
sera relayé par un autre discours, à savoir à quoi sert l’indépendance si elle n’est pas suivie
par une autonomie économique. Le nouvel ordre politique amène un nouvel ordre
économique.
Plus le droit international voit son champ s’étendre plus les règles se multiplient. Ses règles
doivent être douées d’une élasticité, elles doivent être adaptables car elles ont vocation à
s’appliquer à différentes situations. Il faut aménager des mécanismes d’adaptation. Les
traités facilement révisables seront facilement applicables car ils évoluent avec les Etats.
Régionalisation et spécialisation du DIP : On voit émerger des ordres juridiques
partiels. Depuis la seconde guerre mondiale on a vu se multiplier les exemples d’intégration
régionale. Les régions s’organisent et regroupent leurs forces. Il y a une multiplication des
ordres spécialisés. Chacune des organisations va générer un ensemble de règles
spécialisées.
Il n’y a pas d’autorité centrale qui hiérarchise les normes, et les conflits de normes, pour
savoir quelle priorité donner et à quelle norme. L’ordre international global imparfait
comprend les ordres juridiques partiels qui sont régionalisés et spécialisés.
Il n’existe pas de mécanisme d’harmonisation du système lui même, il n’y a pas d’uniformité
des règles.
1. Le principe de primauté :
Le droit international a une autorité, c’est un droit qui est considéré par beaucoup comme
supérieur aux droits nationaux.
On constate qu’il y a 2 types d’analyses possibles :
La théorie de dualisme : théorie pratique, appliquée par des Etats européens comme
l’Italie, la Grande Bretagne… Le dualisme postule la stricte séparation entre l’ordre juridique
international et l’ordre juridique interne. Ce sont 2 sphères étanches l’une par rapport à
l’autre. Il n’y a pas de contacts qui soient voulus. Il faut introduire le droit international dans
l’ordre juridique interne, au moyen d’une loi interne, ou d’une autre véhicule normatif. Ce
n’est plus la convention internationale qui s’applique mais la loi nationale, qui ne fait que
rependre les termes de la convention.
Il n’y a pas d’immédiateté dans l’application du droit international. Ce n’est pas un système
très sécurisant car le législateur fait ce qu’il veut, il peut revenir sur les engagements
internationaux.
Il n’existe pas de mécanisme pur et parfait. L’autorité de ces traités est conditionnée
par l’acceptation des Etats. Aucun de ses systèmes ne s’appliquent totalement et
uniquement.
Certains considèrent que l’autorité du droit international dépend de la volonté des Etats. Il
n’y a pas de règle internationale qui procède de la volonté des sujets.
On ne peut pas contraindre à signer un traité, sauf pour faire signer un traité de paix ou
perdant d’une guerre.
La coutume est une source importante en droit international mais elle est difficile à
appréhender. Parfois les volontés individuelles convergent de telle manière qu’une volonté
commune s’exprime.
L’ordre international est un ordre hiérarchisé, organisé. Les impératifs de la
normativité induisent le principe d’autorité (principe de Kelsen), mais ce principe ne résiste
pas à l’observation.
La volonté est très importante en droit international. Cela entraîne la relativité du droit
international et son instabilité. La sécurité juridique suppose la certitude des situations
juridiques. Les individus doivent s’appuyer sur des normes stables.
On parle parfois de normes impératives, qui sont insusceptibles de modifications et
s’appliquent à tous les Etats. Il n’y a pas de circonstance qu’un Etat puisse se dégager de
ces droits impératifs.
Les sources formelles constituent le droit positif international, c’est le droit applicable.
C’est un droit dans lequel on va aussi tenir compte des grandes tendances juridiques qui
renvoient à un droit en devenir, qui n’est pas encore établis mais dont les sujets en tiennent
compte. On relève ce phénomène en droit européen.
Le statut de la cour internationale de justice comporte un article 38 qui énumère un certain
nombre de sources. Il renvoi aux traités, à la coutume internationale, mais aussi aux
principes généraux communs aux nations civilisées (terme un peu anachronique).
Elle donne quelques indications intéressantes, notamment les principales sources
internationales. Cependant il manque les actes unilatéraux. Le droit international ménage
une place importante à la volonté, et donc les actes unilatéraux qui procède de la volonté
des Etats prennent une place importante.
Il faut faire une distinction entre source et norme. La source c’est le moyen, la norme
c’est la substance. Les sources peuvent être équivalentes mais le contenu de ces sources
formelles peut être complètement différents et se situer à des niveaux hiérarchiques
complètement différents. Toutes les sources se valent en droit international. Le traité
n’est pas supérieur à la coutume ou aux actes unilatéraux. Si on raisonne par analogie il y a
une correspondance en droit national entre hiérarchie et source.
Il existe probablement une hiérarchie des normes en droit international, donc il y a
des normes qui génèrent des exigences plus fortes que d’autres. On ne peut pas mettre sur
un même plan l’interdiction de l’esclavage ou du génocide et une obligation du droit du
commerce. Il peut y avoir des conflits de normes entre 2 systèmes d’obligations.
Du fait de la diversification de l’ordre juridique international il y a des sous systèmes plus
élaborés et qui ont su se doter d’une hiérarchie des normes, plus proches du système
interne.
L’ordre juridique communautaire est un système dans lequel la hiérarchie des normes existe.
Il y a des principes qui sont identifiés comme se situant au dessus des autres. C’est un débat
qui suscite la dispute entre les Etats. C’est une approche des choses qui semble réintroduire
le droit naturel, qui suppose quelque chose de supérieur à la volonté des Etats, qui
transcende les individus.
Cette idée a été consacrée par la convention de Vienne de 1969, c’est le traité des
traités. C’est le texte par lequel on a définit les principes directeurs du droit des traités. En
son article 53, il évoque les normes impératives du droit international, le jus cogens, et il y a
donc le signe de la part de communauté international, la volonté de mettre de l’ordre et donc
de mettre en place un forme de hiérarchie dans le droit international.
Le droit volontaire doit être distingué du droit spontané. Dans le droit volontaire on
compte les traités et les actes unilatéraux, c’est le droit qui procède à titre principal de la
volonté. Le droit spontané va naître au terme d’un processus social complexe qui va mettre
la volonté au second plan, comme la coutume internationale. C’est un processus long qui
conduit à l’émergence d’une norme juridique.
Le traité est un accord conclu entre 2 sujets, au moins, du droit international, destiné à
produire des effets juridiques, et régit par le droit international. C’est comme un contrat, le
fruit de la conjonction des volontés. C’est un accord passé entre des sujets de droit. Les
sujets sont les Etats et les organisations internationales.
Il y a des cas dans lesquels des sujets qui ne sont pas des entités juridiques signent des
accords qui sont considérés comme des traités, par exemple l’Union Indienne après 45 va
participer à la signature de traité alors qu’elle était encore sous la tutelle anglaise et donc
pas encore un Etat. Au lendemain de la seconde guerre mondiale, l’Union Soviétique
parvient à imposer, à ses partenaires adversaires, l’entrée au sein des Nations Unies de
l’Ukraine et de la Biélorussie qui ne sont que des Etats fédérés.
Le traité est aussi un acte qui va produire des effets juridiques. En droit international on
attend des effets juridiques et non pas politiques. A contrario, les accords informels relèvent
plus de la politique que du droit.
Le traité international est principalement régit par le droit international, mais il l’est aussi par
le droit interne qui va choisir les règles de compétences, comme le droit de traiter. La
ratification est réglée par le droit interne.
La terminologie n’est pas très précise : on peut parler de convention comme d’accord
ou de traité. Les termes sont indifférents. Mais c’est une question qui peut avoir une
implication pratique forte. La cour internationale de justice a indiqué qu’en cas de litige on
règle le problème en utilisant la technique de faisceau d’indice pour conclure à une
classification plutôt qu’à une autre.
La convention de Vienne reprend ces principes. Elle défini le traité comme un accord écrit,
peut importe son nom, du moment qu’il remplit les critères.
On peut dire que le droit international est peu formaliste.
On peut différencier les traités lois des traités contrats (distinction doctrinale, qui n’est pas
validée).
On peut différencier les traités normatifs et les traités constitutifs des organisations
internationales. Les traités normatifs définissent des normes alors que les traités constitutifs
des organisations internationales sont plus techniques. Mais ce n’est pas une distinction
valide car certains traités peuvent être classés dans les 2 catégories.
On peut distinguer les traités bilatéraux et multilatéraux.
La procédure solennelle :
Il s'agit d'une procédure en 2 étapes :
• L’authentification du texte de l'accord
• La phase d'expression du consentement à être lié par l'accord.
Ces 2 étapes s'effectuent à des moments séparés par un laps de temps variable, mais la
conclusion n'est effective que lorsque ces 2 actes ont été successivement et effectivement
accomplis. Le traité ne peut commencer à produire des effets juridiques que quand le
deuxième acte a été ratifié ou approuvé. Rien n'oblige les parties à porter leur choix sur une
procédure lourde (Article 14 de la Convention de Vienne). En ce sens, la Convention de
Vienne énumère au nombre des modes d'expression du consentement à être lié par un
traité, "la ratification, l'acceptation, l'approbation, ou tout autre moyen convenu" (art. 11),
sans toutefois préciser ce qui distingue éventuellement chacune de ces formalités. Il s'agit
plus d'une différence de degré que de nature. La ratification est un acte par lequel l'autorité
étatique la plus élevée confirme le traité négocié par ses plénipotentiaires, exprimant ainsi le
consentement de l'Etat à être définitivement lié par un texte dont il admet solennellement le
caractère contraignant. La procédure solennelle ménage une marge d'appréciation et de
sécurité supplémentaire aux autorités de l'Etat qui conservent, d'ailleurs, à ce stade, toute
leur liberté. On ne saurait donc, du moins sur le plan juridique, faire grief à un Etat de n'avoir
pas ratifié dans de brefs délais ou d'avoir finalement refusé de s'engager. Il est des
exemples célèbres de refus de ratifier : le refus du Sénat américain de ratifier le pacte
Société des Nations et plus récemment du CTBT.
Les autorités étatiques sont parfois tentées de retarder le plus possible la ratification de
certains textes. Tel fut le cas, en France, pour la ratification, seulement en mai 1974, par le
Président de la république (par intérim) de la Convention européenne de sauvegarde des
droits de l'Homme.
L'exemple de la CED : Après avoir vainement proposé aux 5 partenaires de la France
l’adoption d’un protocole additionnel réduisant la CED “ à n’être plus qu’une agence
régionale de l’OTAN, sous l’autorité exclusive d’un Conseil intergouvernemental de
coopération” (P.-H. Teitgen), P. Mendès-France, nouveau chef du gouvernement, a décidé
de soumettre le traité à la procédure d’autorisation de ratification. La CED a succombé, le 30
août 1954, dans l’hémicycle du Palais-Bourbon, à la suite de l’adoption, par une coalition
disparate de députés gaullistes, communistes et socialistes, d’une question préalable
refusant l’ouverture du débat. Paradoxalement, c’est le pays qui avait initié cette entreprise
qui s’est ainsi trouvé à l’origine d’une vaste faillite, car le rejet de la CED, par les
parlementaires français, emportait logiquement l’abandon du projet de Communauté
politique. Cette position d’obstruction n’a pourtant pas empêché que le réarmement allemand
se fasse dans le cadre renouvelé de l’Union de l’Europe occidentale, et que ce pays, intégré
comme membre à part entière à l’OTAN, devienne une pièce maîtresse du dispositif de
défense ouest européen.
La procédure simplifiée :
Le traité est définitivement conclu dès lors qu'il est signé. La signature servant ici à
authentifier le texte et à exprimer le consentement à être lié. En ce sens, de nombreux traités
(notamment bilatéraux) sont conclus sous la forme de simples échanges de lettres. Le
développement des accords en forme simplifiée est souvent le signe de la volonté des
exécutifs d'échapper aux inconvénients d'un contrôle parlementaire trop pointilleux (environ
60 % des accords conclus par la France le sont par ce biais).
Il n'existe aucune différence de nature ou de substance entre les traités selon le mode de
conclusion retenu. Si les accords en forme simplifiée sont adaptés aux sujets techniques, on
ne peut exclure qu'il y soit recouru s'agissant de questions politiquement sensibles.
Pour s'en convaincre, il suffit sans doute de rappeler que les accords de Munich sur la
Tchécoslovaquie (1938), les accords de Camp David (1978), les accords conclus entre l'OLP
et l'Etat d'Israël à Washington en1993 sont des accords en forme simplifiée.
En tout état de cause, qu'ils soient ratifiés ou approuvés les traités et accords ressortissent
clairement à la catégorie internationale des "traités en forme solennelle", ce qui, au
demeurant, n'empêche pas la France de conclure par ailleurs des accords en forme
simplifiée au sens que le droit international prête à cette expression.
La procédure interne de conclusion des traités : Les modalités de conclusion d'un traité en
forme solennelle ne peuvent être le fruit du seul droit international. L'État doit se soumettre à
des exigences établies par son droit constitutionnel.
Les solutions retenues dépendent de facteurs structurels (nature du régime, structure de
l’Etat), et plus conjoncturels (rapports de force entre les différentes composantes du
pouvoir). Au-delà de spécificités nationales, l'objectif généralement recherché par les
systèmes démocratiques est un encadrement (même partiel) du pouvoir exécutif au moyen
d'un contrôle exercé par le peuple ou ses représentants. Dans les régimes parlementaires, le
pouvoir de ratifier ou d'approuver est, en général, confié à l'exécutif sous réserve qu'il
obtienne l'autorisation préalable du Parlement du moins pour les traités les plus importants.
Par exemple, au Royaume-Uni, l'autorisation du Parlement avant ratification est exigée pour
4 séries de traités: les traités dont l'application exige une adjonction ou une modification du
droit interne, les traités d'extradition, traités imposant une obligation financière, les traités
comportant une cession territoriale. Depuis 1924, les gouvernements successifs ont pris
l'habitude de soumettre au Parlement tous les traités qui doivent être ratifiés ; il n'accomplit
les formalités internationales de la ratification que si à l'expiration d'un délai de trois
semaines, le Parlement n'a pas fait connaître son intention d'ouvrir une discussion.
Dans le système présidentiel américain, la prééminence de l'exécutif est plus marquée, sans
que toutefois le législatif soit condamné à s'effacer totalement. La constitution de 1787
dispose en son article 2, Section 2, que "le président aura le pouvoir, sur l'avis et le
consentement du Sénat, de conclure des traités, pourvu que ces traités réunissent la
majorité des deux-tiers des sénateurs présents". Ce dispositif réduit de manière importante
la marge de manoeuvre du président. La pratique a cependant apporté un tempérament aux
rigueurs du système.
S'agissant des traités formels : l'intervention du Sénat est indispensable. Elle s'explique par
le souci des entités fédérées de pouvoir contrôler la politique extérieure de la fédération.
Les executive agreements (accords de l'exécutif). Le président est chef suprême des
armées, il doit donc pouvoir conclure des accords en matière militaire et plus largement de
sécurité. C'est dans ces conditions que les accords de Yalta ont été conclus. Le président a
également qualité, en vertu de la constitution, pour recevoir les représentants des Etats
étrangers. Sur cette base, il doit pouvoir conclure les accords sur la reconnaissance de
gouvernement. Le président doit enfin veiller à la "fidèle exécution des lois". Cela l'habilite
implicitement à conclure des accords nécessaires à l'exécution des lois votées par le
Congrès.
En dépit de tentatives pour réduire le pouvoir que le président des USA s'est arrogé, la seule
obligation à laquelle il est soumis est celle d'informer le Congrès dans les deux mois de leur
entrée en vigueur. Le Congrès procède ainsi à un contrôle a posteriori.
Le système français se caractérise quant à lui par le rôle renforcé de l'Exécutif, l'implication
éventuelle du Parlement et le contrôle toujours possible du Conseil constitutionnel en amont
de la ratification ou de l'approbation. Le Président dispose de pouvoirs importants en matière
internationale. Il est d'abord le "garant …du respect des traités" (art. 5 de la Constitution). Il
peut également décider de mettre en oeuvre l'article 16 de la constitution “ si l'exécution des
engagements internationaux de la France est menacée d'une manière grave et immédiate ”.
Il dispose enfin du pouvoir de décider de soumettre l'autorisation de ratification de certains
accords à referendum (art. 11).
En pratique, le Président de la République a toujours exercé un pouvoir prédominant en ce
domaine (bien que partagé en période de cohabitation). Le Ministre des affaires étrangères
assume cependant, dans ce dispositif, une responsabilité décisive. Il joue un rôle de
conception et de coordination, d'autant plus capital que le développement des relations
internationales implique que d'autres autorités (ministres, collectivités infra-étatiques) que lui
nouent des rapports avec leurs homologues étrangers.
La ratification d'un traité ou l'approbation d'un accord peut être subordonnée à une
intervention préalable du Parlement (article 53).
L'énumération de l'article 53, dont les contours méritent souvent d'être précisés, permet de
sauvegarder efficacement les droits du Parlement.
On relève, néanmoins, que tous les traités politiques importants ne sont pas cités par l'article
53 (ex. traités d'alliance, de non-agression, les traités relatifs au règlement pacifique des
différends…). Le pouvoir exécutif garde la faculté de saisir le Parlement, y compris en ces
matières, lorsqu'il le juge opportun (ex. ce fut le cas, en 1963, pour le Traité franco-allemand
"de l'Élysée"). Du reste, le Parlement ne se substitue jamais au pouvoir exécutif dans
l'exercice du pouvoir de ratification ou d'approbation, car la loi qu'il adopte prend la forme
d'une habilitation rendant possible l'accomplissement de cette formalité.
La liberté de l'Exécutif n'est pas, loin s'en faut, sans limites. En effet, le Conseil d'Etat a
décidé que les traités et accords "relevant de l'article 53 dont la ratification ou l'approbation
est intervenue sans avoir été autorisée par la loi ne peuvent être regardés comme
régulièrement ratifiés ou approuvés au sens de l'article 55" (CE, ass., 18 décembre 1998,
SARL du Parc des activités de Blotzheim, Rec., p. 483). L'autorisation ainsi accordée ne lie
nullement l'Exécutif qui demeure libre d'en tirer les conséquences ou d'assortir la ratification
ou l'approbation de réserves.
L'intervention du Parlement peut être court-circuitée lorsque le président de la République
décide de soumettre l'autorisation de ratification directement au peuple par la voie du
référendum. L'article 11 de la Constitution l'autorise à recourir à cette procédure pour les
traités qui, sans être contraires à la Constitution, auraient des incidences sur le
fonctionnement des institutions (formule assez vague). Le recours au referendum est
également envisagé afin d'assurer le respect du principe d'autodétermination. L'article 53,
troisième alinéa, exige que "le consentement des populations intéressées" au moyen d'un
referendum d'auto-disposition en cas de cession, échange ou adjonction de territoire.
La CEDH n’autorise les réserves que si elles portent sur une disposition
précise mais pas si elles sont de protée général. Toutes les dispositions ne sont pas
susceptibles de réserves.
Une réserve est qualifiée de générale lorsqu’elle ne se rapporte pas à une disposition
spécifique de la Convention ou qu’elle est rédigée d’une manière telle qu’elle ne permet pas
d’en définir la portée. Trop large par son contenu, elle serait de nature à porter atteinte à
l’objet et au but de la Convention.
• Un acte exprimant le consentement d’un Etat à être lié par le traité et contenant une
réserve prend effet dès qu’au moins un autre Etat contractant a accepté la réserve. Là
où il fallait, auparavant, que tous les Etats acceptent la réserve pour que son auteur soit
admis à participer au traité, il suffit aujourd’hui d’une seule acceptation :
_ Pour qu’un Etat réservataire ne puisse pas devenir partie au traité, il faudrait donc
que toutes les autres parties contractantes y fassent unanimement objection, ce qui, cela va
sans dire, est tout de même très improbable.
_ À moins que le traité n'en dispose autrement, une réserve peut à tout moment être
retirée sans que le consentement de l'Etat qui l'a acceptée soit nécessaire pour son retrait.
Idem pour le retrait d'une objection. Le retrait d'une réserve ne prend effet à l'égard d'un Etat
que lorsque cet Etat en a reçu notification (art. 22). Le retrait d'une objection ne prend effet à
l'égard d'un Etat réservataire que lorsque cet Etat en a reçu notification. Le retrait est formulé
par écrit (article 23 § 4).
Le dépositaire : Dans tous les cas, les lettres de ratification sont échangées entre les parties
contractantes. Chacune des parties doit envoyer autant d'exemplaires qu'il y a de
contractants. La mise en oeuvre de cette procédure est rendue plus difficile dans le cadre de
traités multilatéraux. C'est pour simplifier les choses que le dépôt des instruments de
ratification a été imaginé. Les Etats signataires désignent, d'un commun accord, un
dépositaire du traité chargé de centraliser la procédure, de recueillir les lettres de ratification,
de vérifier la régularité formelle des actes accomplis par les Etats intéressés.
L'enregistrement et la publication : En créant une obligation d'enregistrement et de
publication, les rédacteurs du Pacte SDN pensaient mettre fin aux excès de la diplomatie
secrète. Ils ne parvinrent cependant pas à enrayer cette pratique. Avatar de l'article 18 du
Pacte SDN, l'article 102 de la Charte des Nations Unies a reconduit un système qui a
également inspiré d'autres organisations (par ex. article 17 Pacte de la Ligue des Etats
arabes).
Le règlement adopté par l'Assemblée générale des Nations Unies prévoit que
l'enregistrement et la publication valent pour tous les accords conclus par un membre de
l'organisation. Il peut certes arriver que des accords internationaux soient volontairement
soustraits à cette obligation par les parties.
L'obligation pèse sur tous les Etats membres de l'ONU. Cependant, l'article 10 du règlement
de l'Assemblée générale admet l'enregistrement volontaire par les Etats non membres. En
cas de non respect de cette obligation, l'article 18 du Pacte SDN était d'une rigueur
excessive en considérant qu'aucun traité ne serait obligatoire avant d'avoir été enregistré. En
pratique, les Etats admettaient qu'un traité non-enregistré entrait en vigueur avait force
obligatoire; mais qu'il était simplement inopposable devant un organe de la SDN (y compris
la CPJI). C'est cette solution raisonnable qui a été retenue par la Charte. Un traité non
enregistré n'est invocable devant aucun organe de l'ONU. La CIJ a pu préciser que le défaut
d'enregistrement ou l'enregistrement tardif reste sans conséquence sur la validité de
l'accord, qui n'étant entaché d'aucun vice propre, reste la loi entre les parties (Affaire relative
à la délimitation maritime et à des questions territoriales entre Qatar et Bahreïn CIJ, arrêt du
1er juillet 1994, Qatar c/ Bahreïn, § 29).
Les conditions de validité des traités sont proches de celles des contrats en droit
privé interne. Il est indispensable que le consentement de l'Etat soit authentique et que
le traité ait un objet licite.
Ces faits vérifiés, l'erreur n'est plus excusable. L'article 48 paragraphe 1 de la Convention
de Vienne reprend ce principe, dans une formule plus ramassée. L’état à peu le droit à
l’erreur.
2- Le dol :
La dissimulation est inévitable, du moins jusqu'à un certain point, dans le maniement des
affaires de l'Etat. Elle s'apparente alors à une forme de prudence. Le dol est une
manoeuvre frauduleuse visant à induire le co-contractant en erreur. Il constitue donc un
manquement très grave à l'exigence de confiance mutuelle qui sous-tend en principe toute
négociation internationale. Néanmoins, le dol est intrinsèquement difficile à identifier.
Il a cependant été singularisé par la Convention de Vienne (article 49) sans pour autant
avoir été précisément défini. Cette omission volontaire tient sans doute au fait qu'on ne
relève aucun cas déclaré de dol dans la pratique internationale. Admettre le dol revient
pour l'Etat qui s'en réclame à avouer sa propre naïveté.
3- La corruption :
Sont visés des actes dépassant les manifestations de courtoisie internationale ou les faveurs
limitées. La corruption doit être, en vertu de l'article 50 de la Convention de Vienne,
imputable directement ou indirectement à un autre Etat ayant participé à la négociation. Elle
doit avoir été déterminante pour l'engagement. Très fréquente, cette pratique n'en est pas
moins fort difficile à circonvenir. La corruption est un phénomène d'une ampleur économique
considérable. La Banque mondiale estime que les sommes versées au titre de pots de vins
totaliseraient chaque année 80 milliards de dollars US. Souhaitant réagir à cette situation,
l'OCDE (Organisation pour la Coopération de Développement Economique) a depuis 1989
inscrit cette question à l'ordre du jour de ses travaux. Elle a suscité l'adoption, le 17
décembre 1997, d'une convention entrée en vigueur le 15 février 1999. Ce texte oblige ses
signataires à adopter une législation nationale disposant que la corruption d'agents publics
étrangers constitue une infraction pénale. Signalons que cette convention est ouverte à la
signature d'Etats non-membres de l'OCDE. Cinq d'entre eux l'ont déjà signé (l'Argentine, le
Brésil, Chili, Bulgarie et Slovaquie). Le seuil de ratification est bas.
• Le seuil de l'illicite :
La Convention de Vienne laisse entière la question de la définition du seuil de l’illicite et de
l'intensité requise pour qu'un comportement puisse être assimilé à un acte de contrainte.
L'article 52 fait mention de la menace ou de l’emploi de la force. La notion de “menace de
l’emploi de la force” est vague et fluctuante. La menace peut, dans certains cas, revêtir
un caractère permanent ou n’être que ponctuelle. Sa perception s'avère en pratique
éminemment subjective.
Il faudrait, enfin, se garder d’assimiler les conséquences de l’inégalité souvent inévitable
entre Etats contractants à une forme de contrainte. La théorie des traités inégaux constitue
une tentative finalement assez vaine de théorisation de l’illicéité de la contrainte non-armée
dans la conclusion des traités. La théorie des traités inégaux est l’oeuvre du gouvernement
soviétique. Celui-ci a négocié avec plusieurs de ses voisins des accords abrogeant les
traités conclus par l’ancien régime, et affirmant la volonté de l’URSS de renoncer aux
engagements de partage qui furent secrètement passés avec des pays occidentaux. Cette
doctrine a suscité, plus tard, l’intérêt des Etats du tiers-monde qui y virent un moyen de
remettre en cause nombre de traités accordant des facilités militaires, économiques …
Grâce à cette théorie, il devenait possible de se délier d’engagements souvent imposés par
les anciennes puissances coloniales, au moyen de menace implicite et sans souci réel de
réciprocité dans les prestations. La solution a le plus souvent résidé dans la renégociation de
ces accords que dans leur invalidation.
Les traités affectés des vices les plus graves (contrainte ou violation d'une norme de
jus cogens) sont concernés par la nullité absolue. Ces vices portent atteinte, au-delà de la
situation des victimes directes, à l’ordre public international. Il est donc logique que dans ces
circonstances, toute partie contractante puisse l'invoquer.
La nullité relative frappe les traités en cas de violation des formes constitutionnelles
fondamentales, d'erreur, de dol et de corruption. Seul l'Etat contractant victime peut invoquer
une telle nullité. Cette restriction tient au fait que ce sont les intérêts de cet Etat plus que
l'intérêt général qui sont en cause. Si, après avoir eu connaissance des faits, un Etat accepte
de considérer que le traité est valide ou si, à raison de sa conduite, il doit être considéré
comme ayant acquiescé à la validité du traité (art. 45), il ne peut plus invoquer la nullité.
Il n'existe pas en droit international d'action ouverte à tout Etat même non partie. S'agissant
de la violation du jus cogens cette solution peut paraître contestable. Dans l'arrêt Barcelona
traction (1970), la CIJ semble avoir admis que les obligations de jus cogens d'origine
coutumière donnent à tous les Etats qualité pour agir. Cette solution n'est toutefois pas
applicable aux normes d'origine conventionnelle compte tenu de l'effet relatif des traités.
Effets des nullités : La nullité est normalement rétroactive. Le traité est nul au jour de
sa conclusion. Si des actes ont été accomplis en exécution de ce traité, avant la constatation
de sa nullité, les parties doivent rétablir pour autant que possible dans leurs relations
mutuelles la situation qui aurait existé si ces actes n'avaient pas été accomplis. La
Convention de Vienne stipule très clairement que les dispositions d'un traité nul n'ont pas de
force juridique (article 69). Cependant, il se peut que les parties décident
conventionnellement d'assouplir la rigueur de cette règle. Comme en témoigne la
controverse germano-tchécoslovaque, il se peut que les parties décident
conventionnellement d'assouplir la rigueur de cette règle. La Tchécoslovaquie souhaitait que
soit reconnue la nullité ab initio de l’accord de Munich. Un tel accord ne devait avoir eu
aucune validité à aucun moment. Par là, il s’agissait d’affirmer la continuité de l’existence de
la Tchécoslovaquie dans ses frontières de 1937. La RFA entendait privilégier une autre
solution. Elle considérait de façon plus ambiguë que l’accord n’était plus valable. Par cette
formule, elle suggérait qu’il l’avait été un temps, tout en s’empressant de préciser qu’elle ne
formulerait aucune revendication territoriale.
Cette appréhension se justifiait pour 2 raisons :
- le souci de ne pas voir contester le fait que les allemands des Sudètes aient pu avoir la
nationalité allemande avant leur expulsion au lendemain de la deuxième guerre mondiale
- le souci de ne pas être obligée de faire droit à une demande de réparation extrêmement
lourde.
Les 2 Etats ont conclu à la nullité sans plus de précision. L'article 1er du traité 19 juin 1973
dispose que les parties "considèrent comme nul l'accord de Munich du 29 septembre 1938,
pour ce qui concerne leurs relations mutuelles". L'article 2 ajoute que "le traité n'affecte pas
les conséquences juridiques découlant pour les personnes physiques ou morales du droit qui
a été en vigueur dans la période du 30 septembre 1938 au 9 mai 1945", réserve faite de
"l'hypothèse où ces conséquences seraient incompatibles avec les principes fondamentaux
de la justice". En revanche, il n’en va pas de même dans les relations entre la
Tchécoslovaquie et d’autres Etats (RDA, URSS, France, GB, Italie) qui ont, pour leur part,
reconnu que cet accord était “nul et non avenu depuis le début avec toutes les
conséquences qui en découlent”.
L'article 44 § 3 de la Convention prévoit également qu'une séparation est
envisageable lorsque la cause de nullité ne vise que certaines clauses déterminées. Pour
que la séparation soit envisageable il faut que:
• Les clauses en question soient séparables du reste du traité en ce qui concerne leur
exécution
• L’acceptation desdites clauses n'ait pas constitué pour l'autre partie ou les autres parties la
base essentielle de leur consentement à être lié par le traité dans son ensemble
• Il ne soit pas injuste de continuer à exécuter ce qui subsiste du traité
La séparation est facultative pour l'Etat qui invoque le dol ou la corruption. En revanche,
compte tenu de la gravité des faits, la divisibilité est exclue dans l'hypothèse d'un recours à
la contrainte ainsi que dans celle d'un traité en conflit avec une norme impérative du Droit
international général.
L'article 69 § 2 de la Convention de Vienne atténue les exigences du principe de
rétroactivité en disposant que "les actes accomplis de bonne foi avant que la nullité ait été
invoquée ne sont pas rendus illicites du seul fait de la nullité du traité". La bonne foi légitime
est une entorse au principe de la rétroactivité sans pour autant effacer l'illicéité.
Le principe de la nullité est par ailleurs sérieusement menacé par le fait que, d'une part, le
retour au statu quo ante est conditionné par une demande en ce sens de la partie lésée et
que, d'autre part, ne se fait (répétons-le) que "pour autant que possible".
Dans l'hypothèse de la violation d'une norme de jus cogens, les parties sont tenues
d'éliminer dans la mesure du possible, les conséquences de tout acte accompli sur la base
d'une disposition qui est en conflit avec la norme de jus cogens et de rendre leurs relations
mutuelles conformes à la norme impérative (article 71). En cas d'émergence d'une nouvelle
règle de jus cogens, la nullité n'est pas rétroactive. Les parties sont libérées de l'obligation
de continuer d'exécuter le traité.
2§ L'application du traité
Le principe de bonne foi a une valeur très importante. Au-delà des dispositions formelles,
c'est-à-dire la lettre du traité, les parties ne doivent pas contrevenir à l'esprit du texte.
Comme le souligne la Cour "la confiance réciproque est une condition inhérente de la
coopération internationale, surtout à une époque où, dans bien des domaines, cette
coopération est de plus en plus indispensable" (CIJ, arrêt, Australie. et Nouvelle-Zélande c/
France, affaire des essais nucléaires, 1974).
Exécuter de bonne foi un engagement impose de "s'abstenir de tout acte visant à
réduire à néant l'objet et le but du traité" (article 18 CV), ce qui revient à proscrire toute
fraude au traité, toute duplicité et à exiger une attitude fidèle et loyale aux engagements
souscrits.
Tout acte inamical n'est pas nécessairement considéré comme un manquement à l'obligation
de bonne foi. Soucieuses de préserver au mieux leurs intérêts, les parties s'attachent
souvent à formuler de manière équivoque les obligations contenues dans le traité, afin de
rendre difficile la distinction entre obligations de comportement et obligations de résultat
(plus contraignantes). Un traité peut même dans certains cas prévoir une possibilité de
suspension prenant la forme d'une clause de sauvegarde (dont l'usage dépend de la seule
volonté de l'Etat intéressé) ou de clause dérogatoire nécessitant l'autorisation des autres
parties ou d'un organe déterminé.
L'application territoriale : Selon la Convention de Vienne "à moins qu'une intention différente
ne ressorte du traité ou ne soit par ailleurs établie, un traité lie chacune des parties à l'égard
de l'ensemble de son territoire" (art. 29).
Il arrive cependant que les dispositions d'un traité formulent des clauses restrictives à cet
égard. Il en va ainsi des clauses fédérales qui écartent du champ d'application territoriale du
traité les entités fédérées afin de sauvegarder leur autonomie par rapport au pouvoir fédéral.
On peut également mentionner le cas des clauses coloniales dont l'objet est d'exclure du
champ d'application d'une convention les possessions coloniales d'un Etat, ou tout au moins
de les soumettre à un régime particulier.
Depuis une trentaine d'années, ces clauses se sont raréfiées. Toutefois, les Etats
conservent la possibilité de formuler des restrictions leur permettant d'obtenir un résultat
équivalent. Tel est le sens de l'article 299 (ex-article 227) §2 et 3 du traité instituant la CE. Le
§ 2 précise les modalités de l'intégration des départements d'Outre-mer (DOM) à la
Communauté. Les DOM sont certes bien intégrés à la CE mais de manière progressive.
L'idée de progressivité dans l'application du droit communautaire qui rejoint celle à l'oeuvre
dans la mise en place du marché commun lui-même révèle un souci d'adaptation.
L'application immédiate du droit institutionnel et de l'essentiel du droit matériel aux DOM est
la marque d'un régime d'intégration qui tranche cependant avec le régime d'association
prévu à l'article 299 § 3 s'agissant des pays et territoires d'Outre-mer (PTOM).
L'effet des traités à l'égard des tiers : Lointain écho aux dispositions de l'article 1165 du code
civil français, l'article 34 de la Convention de Vienne pose qu'un "traité ne crée ni obligations,
ni droits pour un État tiers sans son consentement", entérinant ainsi une pratique et une
jurisprudence internationales constantes. Ce principe explique que les traités constituent une
source de "droit international spécial" ne concernant que les Etats qu'ils lient par opposition
au "droit international général" (coutume et principes généraux) qui crée des droits et des
obligations pour tous les sujets de droit international. Un tiers ne saurait donc être engagé
contre son gré. Aussi, une obligation ne peut naître à son égard que s'il y a consenti
expressément (article 35 de la Convention de Vienne).
L'article 36 de la Convention indique que la stipulation pour autrui est admise en droit
international public. Il s'agit d'une technique par laquelle les parties à un accord énoncent
une promesse au profit d'un tiers.
- L'article 35 Convention de Vienne dispose que "une obligation naît pour un Etat tiers d'une
disposition d'un traité si les parties à ce traité entendent créer l'obligation au moyen de cette
disposition et si l'Etat tiers accepte expressément par écrit cette obligation".
- L'article 36 de la Convention de Vienne dispose quant à lui que "1) un droit naît pour un
Etat tiers d'une disposition d'un traité si les parties à ce traité entendent par cette disposition,
conférer ce droit à l'Etat tiers ou à un groupe auquel il appartient, soit à tous les Etats, et si
l'Etat tiers y consent. Le consentement est présumé tant qu'il n'y a pas d'indication contraire,
à moins que le traité n'en dispose autrement. 2) Un Etat qui exerce un droit en application du
§1 est tenu de respecter, pour l'exercice de ce droit, les conditions prévues dans le traité ou
établies conformément à ces dispositions".
Notons que l'article 37 § 2 de la Convention de Vienne précise que "au cas où un droit est né
pour un Etat tiers conformément à l'article 36, ce droit ne peut être révoqué ou modifié par
les parties s'il est établi qu'il était destiné à ne pas être révocable ou modifiable sans le
consentement de l'Etat tiers".
L'opposabilité de certains traités aux Etats tiers : Des obligations conventionnelles peuvent
s'imposer aux Etats en dehors de leur consentement. Il en va ainsi d'un certain nombre de
traités dits objectifs :
• Les traités établissant des statuts territoriaux. Le caractère objectif de tels traités a été
admis pour la première fois par la commission de juristes qui eut à connaître de l'affaire des
Iles d'Aaland. Ces îles avaient été démilitarisées en 1856 lors d'un traité conclu entre la
France, la GB et la Russie puissance souveraine. En 1920, la Finlande ayant accédé à
l'indépendance a reçu la souveraineté sur ces îles. La Suède, pays tiers, soutenait qu'en
dépit de ce changement de souveraineté le statut démilitarisé des îles ne pouvait être remis
en cause par la Finlande. Sa position fut entérinée par la commission de juristes.
La convention de Vienne sur le droit des traités du 23 mai 1969, dans son article 62
(paragraphe 2) fait d'un traité établissant une frontière, une exception à l'invocation de la
clause de changement fondamental de circonstances (rebus sic stantibus). La convention de
Vienne sur la succession d'Etats en matière de traités du 22 août 1978 exclut, dans ses
articles 11 et 12, la possibilité de remettre en cause les régimes frontaliers et autres régimes
territoriaux.
Ces traités territoriaux présentent une nature particulière : ils créent, transfèrent, ou
reconnaissent l'existence de certains droits permanents, qui acquièrent ou maintiennent une
existence séparée et une validité indépendante des traités dont ils résultent (Tran Van Minh,
"Remarque sur le principe de l'intangibilité des frontières", Peuples et Etats du tiers mondes
face à l'ordre international, 1978). Les accords frontaliers dérogent, par conséquent, à l'effet
relatif et ont un caractère objectif qui se fonde sur le principe général du respect de l'intégrité
territoriale (article 2 § 4 de la Charte des Nations Unies).
• Les traités établissant les statuts des voies de communication internationales (par exemple
les traités relatifs aux fleuves internationaux).
• Les traités établissant une nouvelle entité internationale : Exemple : traités portant
constitution d'organisation internationale. À ce titre, la CIJ a affirmé dans son avis de 1949,
Affaire Bernadotte : "La Cour est d'avis que 50 Etats représentant une très grande majorité
des membres de la communauté internationale (vrai à l'époque) avaient le pouvoir,
conformément au droit international, de créer une entité possédant une personnalité
internationale objective et non simplement une personnalité reconnue par eux seuls". Si
cette solution vaut sans difficulté pour les organisations universelles, elle ne saurait être
systématiquement étendue aux institutions régionales.
La modification des traités : Cette question est traitée par les articles 39 à 41 de la
Convention de Vienne (partie IV intitulée "amendement et modification des traités").
Les révisions unilatérales sont, en vertu d'un principe coutumier, prohibées. Une révision ne
peut s'effectuer que par le commun accord des parties contractantes.
• L'unanimité est requise pour la révision de certains traités politiques et/ou
d'intégration régionale (par ex. article 48 du Traité sur l'Union européenne).
• La révision peut être subordonnée à l'obtention d'une majorité. Telle est la pratique
dominante actuellement. Cette majorité sera le plus souvent qualifiée, c'est-à-dire renforcée.
C'est ainsi que les amendements ou une révision de la Charte des Nations Unies doivent
être adoptés et ratifiés par les 2/3 des membres de l'organisation parmi lesquels on doit
obligatoirement compter tous les membres permanents du Conseil de sécurité, ce qui leurs
confèrent une capacité de blocage.
• Ses rédacteurs craignant sans doute de favoriser une certaine instabilité des
relations conventionnelles, la Convention de Vienne n'a pas prévu la possibilité d'une
révision implicite. Cette prudence est surprenante car la révision peut parfois être le fruit de
la pratique ultérieure des Etats parties. En ce sens, on relève dans la pratique onusienne un
exemple de modification coutumière tout à fait remarquable. Rappelons que l’article 27 §3 de
la Charte dispose que les décisions du Conseil de sécurité, en dehors des questions de
procédure, requièrent un vote positif de 9 membres dont les voix concordantes des membres
permanents. Une pratique établie permet de dissocier l’abstention du veto. Elle va à
l’évidence à l’encontre des termes de la Charte, mais il s’agit là d’un cas éloquent de
coutume modificative, d'ailleurs consacrée par la Cour. L’abstention ne brise pas l’unanimité.
• L'article 41 de la Convention de Vienne envisage l'hypothèse de la révision d'un
traité multilatéral par deux ou plusieurs parties contractantes en vue de le modifier dans leurs
relations mutuelles seulement. Elle ne doit pas être exclue par le traité ni porter atteinte aux
droits que les autres parties tiennent du traité ni à l'exécution de leurs obligations.
Une modification n'est pas en principe opposable aux Etats minoritaires. Cependant, cette
opposabilité est, en pratique, de plus en plus souvent admise. Elle peut n'être que partielle
lorsque l'on laisse aux minoritaires la possibilité d'exercer leur droit de retrait. Il s'agit d'une
tolérance en trompe-l'oeil dans la mesure où ces Etats auront souvent plus intérêt à rester
dans le système qu'à en sortir. L'opposabilité peut être totale lorsque les Etats minoritaires
se trouvent dans l'obligation d'accepter les révisions sans aucune faculté de retrait (Charte
des Nations Unies).
Durée et fin des traités :Cette question est abordée par les articles 54 à 72 de la Convention
de Vienne. Un traité peut prendre fin dans un certain nombre de circonstances.
• L'expiration : lorsqu'un traité a été conclu pour une durée déterminée et que ce
temps est écoulé, il cesse de produire tout effet juridique. Un traité peut également contenir
une clause résolutoire, en vertu de laquelle la survenance d'un événement prive la
convention de sa force obligatoire.
• La dissolution : les parties à un traité peuvent décider d'un commun accord que ce
traité est dissous parce qu'il a perdu toute raison d'être. La dissolution peut également
prendre une forme implicite. Tel est le cas lorsque les parties contractantes, procédant par
substitution, concluent un nouveau traité couvrant le même domaine que l'ancien. La
dissolution peut enfin résulter d'une dénonciation.
• L'extinction : nombreux sont les évènements de nature à entraîner l'extinction d'un
traité. Il faut rappeler que la dénonciation unilatérale n'est possible que lorsque l'une des
clauses de l'accord le prévoit expressément "à moins que le droit de dénonciation ou de
retrait ne puisse être déduit de la nature du traité" (art. 56 § 1 b).
• La suspension : suspension de son application comme conséquence de sa violation
(article 60).
La violation substantielle d'un traité par l'une des parties ouvre la perspective d'une
terminaison du traité. Un tel manquement est constitué par un "rejet non autorisé du traité"
ou par la "violation d'une disposition essentielle pour la réalisation de l'objet ou du but du
traité". Les conséquences d'une violation substantielle sont variables en fonction de la nature
du traité.
Dans le cas d'un traité bilatéral, la victime de la violation peut l'invoquer comme motif
pour mettre fin au traité ou suspendre son application en totalité ou en partie (art. 60 § 1).
Dans le cas d'un traité multilatéral, les autres parties, agissant par accord unanime, peuvent
décider de la suspension ou de l'extinction partielle ou totale, soit entre elles-mêmes et
l'auteur de la violation soit entre toutes les Parties. Cette consécration de l'exception
d'inexécution s'explique avant tout par la prégnance du principe général de réciprocité. Ce
mécanisme libératoire n'est cependant pas applicable aux dispositions relatives à la
protection de la personne humaine, contenues dans des traités de caractère humanitaire
(art. 60 § 5).
.
La survenance d'une situation rendant l'exécution impossible (article 61) par la
disparition ou de la destruction définitive d'un objet indispensable à l'exécution de ce traité.
• La rupture des relations diplomatiques ou consulaires (article 63) : la rupture des relations
diplomatiques ou consulaires entre parties à un traité est en principe sans effet sur les
relations juridiques établies entre elles par le traité, sauf lorsque l'existence de relations
diplomatiques ou consulaires est indispensable à l'application du traité.
• La survenance d'une nouvelle norme de jus cogens (article 64).
• Un traité peut s'éteindre à la suite de la disparition d'une des parties contractantes. Dans
l'affaire relative au projet Gabcikovo–Nagymaros, la Cour a du ainsi déterminer si la
Slovaquie avait succédé à la Tchécoslovaquie pour le traité de 1977 ou si celui-ci avait
disparu du fait de la disparition de l'une des parties contractantes. En effet, la
Tchécoslovaquie s'est scindée en deux Etats le 1er janvier 1993, situation posant la question
du sort de 2000 traités bilatéraux et 800 traités multilatéraux. La Cour a considéré que le
traité de 1977 ne pouvait en tout état de cause être l'objet d'une répudiation unilatérale,
compte tenu de son objet territorial (la création de droits et d'obligations attachés aux
secteurs du Danube auxquels il se rapporte).
L'interprétation faisant foi : Les Etats peuvent décider de confier la tâche d'interpréter
le traité à un tiers, et de conférer le cas échéant à cette interprétation un caractère
obligatoire. Cette technique offre, en principe, des garanties d'objectivité et permet bien
souvent de départager les parties en désaccord sur le sens à prêter à une disposition
ambiguë.
Fréquemment assignée à un organe juridictionnel, cette mission peut également être
assurée par les organes politiques d'une organisation internationale. Tel est clairement le
cas du Conseil de sécurité ou de l'Assemblée générale des Nations Unies. Ainsi c'est à la
Conférence ministérielle et au Conseil général, qu'appartient à titre exclusif, le pouvoir
d'interpréter l'accord OMC et les Accords commerciaux multilatéraux à la majorité des 3/4
des membres. Ce mécanisme exclut l'interprétation des Etats. L'unité d'interprétation et
l'uniformité d'application sont ainsi assurées. Il s'agit là d'une différence notable avec le
GATT où l'on était en présence de problèmes d'interprétation qui restaient en définitive du
ressort des Etats car l'organe chargé du règlement des différends n'avait pas la possibilité de
rendre une décision ayant valeur obligatoire. Le crédit accordé aux interprétations délivrées
par des organes non juridictionnels dépend dans une très large mesure de l'autorité de ceux-
ci et de la possibilité d'en interjeter appel.
1/ Principe de primauté :
L'applicabilité directe des traités : L'applicabilité directe désigne avant tout l'aptitude
pour une norme à être appliquée sans l'intercession ou le complément du droit national.
En pratique, l'exécution d'un traité exige souvent l'édiction par l'Etat de mesures spécifiques
d'application. Dans certains cas, ces mesures s'avèrent inutiles car le traité présente un
caractère auto-exécutoire (self executing). Tout est une question d'espèce. Certains actes
ont presque systématiquement une telle qualité (ex. les règlements et les décisions
communautaires adressées aux particuliers).
La jurisprudence française estime que l'applicabilité directe est subordonnée à la
complétude, la précision, l'objet d'une norme et / ou l'intention des parties. On constate que
pour le juge administratif, les notions d'applicabilité directe et d'invocabilité se confondent. En
d'autres termes, un particulier n'est fondé à se prévaloir en justice d'une norme internationale
que si celle-ci a eu pour objet de lui conférer directement des droits.
Le juge interne et l'interprétation des traités : Après avoir longtemps considéré que
l'interprétation des traités lui était interdite (CE, 23 juillet 1823, Dame veuve Murat), le juge
administratif a progressivement abandonné une jurisprudence restrictive. C'est ainsi qu'à
compter des années trente, il ne rejetait plus les requêtes dont il était saisi, préférant
renvoyer, à titre préjudiciel, la question de l'interprétation au ministre des affaires étrangères.
La théorie de l’acte clair a, originellement, été adoptée par le Conseil afin de contourner les
effets mutilateurs de son incompétence en matière d’interprétation des traités. Largement
éprouvée, cette technique lui a longtemps permis de se livrer, sous couvert de clarté, en
réalité à des interprétations. Il faut cependant attendre un arrêt d'assemblée du 29 juin 1990
pour que le Conseil d'Etat reconnaisse officiellement sa compétence pour interpréter les
traités. Il n'a pas pour autant renoncé à solliciter, lorsqu'il le juge opportun, une interprétation
ministérielle.
La chambre civile de la Cour de cassation a, elle-même, unifié sa jurisprudence en
considérant qu'il "est de l'office du juge d'interpréter les traités internationaux invoqués dans
la cause soumise à son examen sans qu'il soit nécessaire de solliciter l'avis d'une autorité
non juridictionnelle". Aujourd'hui, la chambre criminelle est la seule à maintenir des
préventions en la matière, estimant que l'interprétation des traités doit échapper aux
tribunaux.
Il est admis que des normes internationales peuvent procéder de sources unilatérales. Les
actes unilatéraux ont d'ailleurs connu un accroissement constant.
b- La portée et la valeur des actes autonormateurs : Ces actes ont une portée soit
individuelle (ex. nomination d'agents ou de juges, création d'organe subsidiaire), soit
générale (ex. les décisions portant définition d'un règlement intérieur). Doués d'une valeur
obligatoire, ces actes lient non seulement les organes mais aussi les Etats membres de
l'organisation. Ce caractère explique dans une large mesure le fait qu'ils ne puissent être
adoptés qu'au terme de procédures souvent complexes. Par exemple, la nomination du
Secrétaire général des Nations Unies intervient par décision de l'Assemblée générale sur
recommandation du Conseil de sécurité. La recommandation du Conseil de sécurité apparaît
ici comme un véritable acte condition, qui sans être par lui-même un acte normatif n'en
constitue pas moins un préalable absolument obligatoire. Le non-respect de cette formalité
emporte l'annulation ou au moins l'inopposabilité de la décision finale.
Il s'agit là d'une catégorie d'accords dont la nature est difficile à cerner. Sans être des
traités, ces accords visent toutefois à régler les rapports mutuels des parties et à définir leur
conduite. À l'instar des traités, ils résultent d'un processus de concertation (on parle d'ailleurs
d'actes concertés non conventionnels ou ACNC), mais ne sont cependant pas soumis au
droit des traités et à la règle pacta sunt servanda. Ils produisent néanmoins un certain
nombre d'effets juridiques.
§ 1- Typologie et intérêt des accords informels
Les ACNC présentent souvent une évidente proximité avec les traités. Parfois
malaisée, la distinction n'en est pas moins essentielle, compte tenu des conséquences qui
en découleront sur le plan juridique. L'opération est rendue complexe par le fait que l'on ne
peut considérer les critères formels et matériels comme totalement fiables. On constate, en
effet, que les ACNC peuvent avoir un objet comparable à celui d'un traité ou du moins lié à
celui-ci.
Il en va ainsi tout d'abord, des accords par le biais desquels des Etats s'entendent sur les
grands principes politiques qui régiront leurs relations mutuelles ou leurs relations avec des
pays tiers. C'est sur la base d'accords de ce type que les USA, la GB et l'URSS ont
implicitement procédé au "partage du monde" en zone d'influence en 1945. L'un des
exemples les plus topiques nous est fourni par la Charte de l'Atlantique en date du 14 août
1941 conçue et signée par W. Churchill et F. D. Roosevelt. Elle définissait les principes
communs aux deux puissances qui, propres à garantir un monde meilleur, devaient
s'appliquer une fois la guerre achevée. Il en est de même des accords de Yalta et de
Postdam, signés par l'URSS, les USA et la GB qui comme les précédents définissaient des
principes qui s'appliqueraient ensuite à l'égard d'Etats tiers.
On peut également citer les accords interprétatifs dont la vocation est de compléter et de
préciser un cadre juridique préexistant. 2 exemples :
• l'accord de Londres (1946) par lequel les membres permanents du Conseil de sécurité ont
procédé à une répartition des sièges pour l'élection des membres non permanents au
Conseil
• le compromis de Luxembourg (29 et 30 janvier 1966) entérinant la position de la France
pour laquelle il était inacceptable qu'un Etat fut mis en minorité sur ce qu'il considérait
comme l'un de ses intérêts fondamentaux.
Les accords informels peuvent aussi avoir un objet normatif. En ce sens, ils constituent un
instrument particulièrement adapté aux questions politiquement ou économiquement
sensibles. Entre dans cette catégorie l'acte final d'Helsinki qui vint clore, en 1975, la CSCE.
Le droit économique s'accommode fort bien des ACNC car ils garantissent une flexibilité
intéressante. De nombreux arrangements informels ont pu être conclus à propos notamment
de certains produits dits de base. Ces instruments permettent d'encadrer de façon
pragmatique à court terme les échanges On peut aussi évoquer les arrangements bilatéraux
d'autolimitations des exportations de divers produits sensibles tendant à encadrer leur
commerce en marge du multilatéralisme prôné par le GATT. Les USA ont été les promoteurs
de cette pratique illicite en expérimentant pour la première fois cette méthode en 1986 avec
le Japon dans le secteur des semi-conducteurs. La CEE et le Japon ont également recouru
en août 1991 à cette technique souple pour régler le délicat problème des exportations
d'automobiles nippones dans la CEE d'ici à la fin du siècle.
M. Virally évoque les ACNC comme des textes incertains qui peuvent être plus ou
moins formalisés.
Gentlemen's agreements : accords entre dirigeants politiques ne liant pas les Etats qu'ils
représentent sur le plan du droit mais dont le respect s'impose à ses signataires comme une
question d'honneur ou de bonne foi.
Communiqués conjoints : documents publiés à la fin de toute réunion internationale par
lesquels les parties en présence mettent en évidence les points de convergence ou de
divergence. Ils cristallisent ainsi une prise de position commune en assurant son
officialisation.
Procès-verbaux offrant une relation officielle ce qui a été dit et fait entre les négociateurs.
Conclusions ou déclarations concertées qui tendent à faire savoir officiellement l'attitude
que les Etats entendent adopter à la suite de leur rencontre. Déclaration d'intention C'est
dans ces conditions que Staline accorda à ses 2 partenaires une déclaration conjointe sur
l'Europe libérée au terme de la Conférence de Yalta. Cette déclaration promettait des
élections libres et la mise en place de gouvernements démocratiques en Europe de l'Est.
Les Etats adoptent parfois, au sein d'organisations internationales (OCDE, CNUCED), des
documents que l'on appelle code de conduite et dont l'ambition est d'établir assez
précisément les principes qui régiront leurs relations dans des secteurs délicats. Moins que
des conventions, ces codes constituent une collection de lignes de conduite acceptées par
les Etats qui les ont élaborés. Certains codes font toutefois l'objet d'une consécration
conventionnelle.
Les ACNC connaissent un succès qui ne s'est jamais démenti et qui tient à leur
"informalisme" et à leur souplesse. Y recourir permet d'éviter la solennité et la longueur d'une
procédure conventionnelle tout en obtenant (plus rapidement) un résultat souvent
comparable. Il est même possible d'envisager la création, par ce moyen, d’une organisation
internationale. C'est ainsi que la CSCE fut transformée, à l'initiative de la France et de la
Russie, en une véritable organisation par la Charte de Paris pour une nouvelle Europe en
date du 21 novembre 1990. L'OSCE s'est ensuite dotée de structures permanentes entre
1990 et 1992.
Ces accords peuvent en outre constituer un "banc d'essai pour des engagements
conventionnels ultérieurs".
"les instruments n'ayant pas de force juridique obligatoire servent de solutions intermédiaires
en cas de problème durable, au règlement incertain (…) il paraît certain que, si l'acte final de
la Conférence d'Helsinki a été préféré à un traité, c'est essentiellement parce que certains
Etats ne voulaient pas que l'on pût y voir un règlement définitif de la question des frontières
allemandes".
L'idée de départ est simple puisqu'elle revient à considérer que si les traités sont
obligatoires, les actes concertés ne le sont pas.
Il convient de nuancer cette apparente simplicité en rappelant que le traité est
obligatoire en tant que source du droit, mais qu'il peut contenir des prescriptions imprécises
ou incertaines dont la teneur est laissée à l'appréciation de ses destinataires.
Si les ACNC n'imposent le plus souvent que des obligations de comportement, ils
peuvent néanmoins établir dans certains cas de véritables obligations de résultat à la charge
des Etats participants. À cet égard, l'Acte Final d'Helsinki offre un exemple intéressant. Il
énonce des normes générales qui présideront aux relations réciproques des Etats
européens (1ère corbeille), définit les principes essentiels qui régiront les relations et la
coopération économique entre les Etats participants (2ème corbeille) et fixe les règles
applicables en matière de coopération humanitaire.
Toutes ces normes incertaines, soit en raison de leur contenu, soit parce qu'elles sont
posées par des sources insusceptibles d'avoir un effet juridiquement obligatoire
(recommandations d'organisations internationales, ACNC) n'en sont pas moins pertinentes.
Elles constituent ce que les juristes anglo-saxons appellent la soft law. La soft law ne prend
cependant sa consistance que si elle fait l'objet d'une application effective, sinon elle reste
une vue de l'esprit.
Le recours de plus en plus fréquent aux ACNC permet de constater qu'ils sont
honorablement respectés, au moins autant que des traités véritables, et qu'ils sont
finalement conçus, en pratique, par les Etats comme contraignants.
Cela tient-il au fait, comme le pense une partie de la doctrine, que ces accords tirent leur
force de leur nature d'engagement moral et politique ? Témoignant d'une assimilation, pour
ne pas dire d'une confusion, entre ce qui est juridique et ce qui est obligatoire, cette
approche revient à considérer qu'ils ne sont pas régis par le droit international. Pour être plus
précis, il faut au contraire admettre que comme les recommandations des organisations
internationales, les ACNC, sans être obligatoires n'en sont pas moins soumis au droit
international. Le droit international ne se résumant pas au droit applicable aux traités. On doit
évidemment réserver le cas où le contenu d'un acte concerté non conventionnel est accepté
comme un acte juridiquement obligatoire par un engagement unilatéral d'un Etat ou par
traité. C'est ainsi, par ex., que l'article 11, § 1, troisième tiret, du Traité sur l'U E dispose que
"les objectifs de la PESC sont le maintien de la paix et le renforcement de la sécurité
internationale conformément aux principes de l'acte final d'Helsinki et aux objectifs de la
Charte de Paris".
Ces engagements non contraignants ne sont pas des traités, ils n'ont donc pas
vocation à être enregistrés au Secrétariat général des Nations Unies conformément aux
dispositions de l'article 102 de la Charte. Tel a été clairement le cas pour l'acte final
d'Helsinki. Bien que ce texte présentât toutes les caractéristiques d'un traité, il s'agissait ainsi
de démontrer en ne l'enregistrant pas qu'il s'agissait bien d'autre chose, un texte ne liant pas
juridiquement ses signataires. A moins d'être secrets, ils bénéficient souvent d'une assez
large publicité. Ainsi, la Charte de Paris de 1990, tout en précisant qu'elle n'est pas éligible à
un enregistrement, a toutefois pris soin de charger le gouvernement français d'en assurer la
diffusion notamment auprès du Secrétaire général des Nations Unies et demande aux Etats
participants à la CSCE de la publier.
2º La contrainte temporelle
La "répétition est la condition de l'affermissement de la pratique sans lequel il serait
impossible de parler <<d'usage>>". La jurisprudence exige traditionnellement une "pratique
constante et uniforme".
Plus que la durée c'est donc la constance et la stabilité de ces pratiques qui compte
avant tout. Il faut une répétition concordante et suffisante de certains faits pour que l'on
puisse évoquer une répétition fondatrice. La CIJ considère qu'il paraît "suffisant, pour
déduire l'existence de règles coutumières que les Etats y conforment leur conduite d'une
manière générale et qu'ils traitent eux-mêmes les comportements non conformes à la règle
comme des violations de celle-ci et non pas comme la reconnaissance d'une règle nouvelle.
Si un Etat agit d'une manière apparemment inconciliable avec une règle reconnue, mais
défend sa conduite en invoquant des exceptions ou justifications contenues dans la règle
elle-même, il en résulte une confirmation plutôt qu'un affaiblissement de la règle, et cela que
l'attitude de cet Etat puisse ou non se justifier en fait sur cette base".
Ces pratiques matérielles doivent-elles s'inscrire dans la durée ? La Cour estime que le
"fait qu'il ne se soit écoulé qu'un bref laps de temps ne constitue pas en soit un
empêchement à la formation d'une règle nouvelle de droit coutumier". Il est toutefois
indispensable que durant cette période fut-elle courte, "la pratique des Etats, y compris
ceux qui sont particulièrement intéressés, ait été fréquente et pratiquement uniforme".
3º Le cercle variable des Etats intéressés
Est-il nécessaire que le comportement indispensable à l'apparition d'une règle
coutumière ait une manifestation universelle ?
Il convient de distinguer les coutumes générales (ou universelles) des
coutumes régionales et bilatérales.
- S'agissant des premières, on relève que l'article 38 du statut dispose que les règles
coutumières résultent d'une pratique générale. Cette expression laisse à penser qu'il n'est
pas nécessaire que cette pratique soit unanime pour servir de point d'appui éventuel à la
formation d'une règle coutumière. De façon plus raisonnable, la Cour exige, pour que l'on
considère qu'une règle conventionnelle est devenue une règle coutumière, une "participation
très large et représentative à la convention (…) à condition toutefois qu'elle comprenne des
Etats particulièrement intéressés". En d'autres termes, la jurisprudence semble plus sensible
à la qualité des sujets impliqués dans le processus qu'à leur nombre.
- S'agissant des secondes, le cercle des Etats intéressés étant par définition plus
restreint, l'unanimité peut, notamment dans le cas des coutumes bilatérales, être nécessaire.
B- L'élément psychologique
L’élément psychologique est un processus qui conduit les Etats a considéreré qu’ils sont liés.
Les sujets doivent avoir la conviction qu’ils sont obligés.
"Les actes considérés doivent (…) par leur nature et la manière dont ils sont
accomplis, être [révélateurs] de la conviction que cette pratique est rendue obligatoire
par l'existence d'une règle de droit (…)" .
René Jean Dupuy distinguait les "coutumes sauvages" des coutumes sauvages.
Par opposition aux "coutumes sages", qui se sont lentement dégagées de faits
immémoriaux, les coutumes sauvages ont littéralement fait irruption dans le droit
international. Il s'agit d'une manifestation révolutionnaire de la coutume tendant à la remise
en cause de l'ordre dominant. Les nouveaux Etats ne s’accommodent pas toujours de la
coutume traditionnelle formée au cours des siècles par les vieux Etats européens. Cette
véritable contre-coutume qui ne s'appuie que sur des précédents de courte durée a reçu un
accueil favorable de la part des Etats du Tiers monde. En effet, récusant la répétition chère
aux pays anciens, ils préféraient au "temps historique" un "temps psychologique" plus apte à
prendre en compte leur condition sociale et économique. Ici, l'idée précède le droit. Comme
le souligne, R.-J. Dupuy, "Les rapports internes à la structure de la coutume sont altérés au
profit de l'élément volontaire : à la limite la prise de conscience de leur condition rend inutile
la répétition diluée sur une longue histoire : elle se trouve remplacée par une fréquence
concomitante, du fait de certains Etats intéressés adoptant un comportement conjoint dans
une période relativement ramassée".
C- Les limites du schéma théorique traditionnel
La distinction entre les 2 éléments n'est pas toujours évidente car il n'y a pas entre eux de
différences tranchées mais au contraire une profonde interdépendance. L'opinio juris peut-
être inférée d'une pratique matérielle clairement avérée. À l'inverse, lorsque la pratique
matérielle est défaillante ou incertaine, il devient nécessaire de tenir compte prioritairement
de l'élément psychologique. En dépit d'une pratique plus qu'incertaine si on doit en juger par
le nombre de fois où l'interdiction du recours à la force a été violée depuis 1945, la Cour a
constaté que l'accord des Parties pour considérer que le principe relatif à l'emploi de la force
figurant dans la Charte des Nations Unies correspond, pour l'essentiel, à celui qui se
retrouve dans le droit international coutumier. Elle a estimé que l'opinio juris est confirmée,
entre autres, par l'attitude des Parties et des Etats à l'égard de certaines résolutions de
l'Assemblée générale, notamment de la résolution 2625 (XXV). Le consentement à ces
résolutions apparaît comme une des formes d'expression d'une opinio juris à l'égard d'un
principe, considéré comme un principe de droit coutumier indépendant des dispositions,
notamment institutionnelles, auxquelles il est soumis sur le plan conventionnel de la Charte.
En cas de doute, le rôle du juge (ou de l'arbitre) est essentiel. Sans s'encombrer de
considérations psychologiques excessives, le juge s'efforce de déceler dans leur pratique
concrète le signe d'une opinion juridique. À cette fin, il peut également être attentif à d'autres
éléments, telles que les résolutions de l'Assemblée générale (v. par ex. Licéité de la menace
ou de l'emploi d'armes nucléaires, CIJ, avis consultatif du 8 juillet 1996)49. Le juge se livre
ainsi à un travail d'investigation et de reconstruction a posteriori beaucoup plus qu'à une
simple tâche de constatation.
• Il n'existe pas en pratique de situation correspondant exactement au schéma
d'analyse volontariste ou objectiviste. Chacune de ses écoles contient sa part de vérité. Il
serait ainsi naïf de minimiser l'importance du consentement des Etats s'agissant de
l'opposabilité des règles coutumières. C'est ce que souligne très clairement la notion
d'objecteur persistant. Un Etat peut se soustraire à l'autorité d'une norme coutumière en
objectant à sa création. En revanche, les Etats nouveaux, en dépit de fortes préventions
idéologiques, sont en principe tenus au respect de règles à l'élaboration desquelles ils n'ont
pu contribuer. En cas de désaccord de fond irréductible, ces Etats n'ont d'autre choix que de
favoriser l'adaptation des règles anciennes ou de susciter l'émergence de nouvelles règles.
Le droit de la mer offre à cet égard un exemple intéressant. Par l'affirmation collective et
répétée de leur attachement à la règle des 200 miles, les Etats latino-américains ont, par
ailleurs, joué un rôle essentiel dans la consécration générale de l'une des innovations
majeures du nouveau droit de la mer, à savoir la zone économique exclusive. Apparaît ici en
pleine lumière la capacité d'une poignée d'Etats, liés par une forte solidarité catégorielle et
géographique, à peser de manière décisive sur le déroulement d'un processus universel de
production normative. En lançant ce "nombre sacré"ils forgèrent un mythe de nature à
entraîner de grands bouleversements et à bousculer toutes sortes d'inégalités (y compris
naturelles). Formalisée et réitérée solennellement, l'espérance, au départ diffuse, s'est
progressivement affermie pour devenir une aspiration politique et juridique à laquelle se
rallièrent successivement pratiquement tous les Etats de la région, les Etats côtiers en
développement puis le grandes puissances maritimes.
Il ne faudrait pas à l'inverse refuser à la contrainte (sociale) toute fonction dans l'émergence
des règles coutumières. Il est vrai que cette contrainte résulte elle-même de la confrontation
de volontés. Mais peu importe, dans la mesure où finalement les Etats en viendront à
accepter l'opposabilité d'une règle générale. La consécration de certaines règles du droit du
développement en atteste. Nul ne songerait ainsi à contester le droit des Etats à disposer
librement de leurs ressources naturelles ou de nationaliser des biens privés étrangers.
De même on ne peut nier le fait qu'existent des solidarités objectives très fortes entre les
Etats, qui les conduisent à reconnaître ou favoriser l'émergence de règles coutumières. Tel
est le cas en ce qui concerne les exigences de la protection de l'environnement. Lors du
sommet de Rio, en 1992, les Etats ont mis en avant l’obligation de ne pas causer de
dommages à l’environnement des autres États, obligation “de bon voisinage”, qui trouve
notamment son fondement théorique dans l’interdiction de l’abus de droit.
Cette double dimension se retrouve dans le “principe 21” (21ème principe de la Déclaration
de Stockholm) dont la Cour a récemment confirmé, à deux occasions, le caractère coutumier
Peu à peu a été déduite de ce principe 21 une obligation de coopération. Celle-ci est à situer
d'abord dans un cadre plus général : le principe dit de solidarité et de coopération, un
principe général du droit international. Ainsi, la Charte de l'ONU dispose dans son article 74
que "(L)es membres de l'Organisation reconnaissent aussi que leur politique doit être
fondée, autant dans les territoires auxquels s'applique le présent Chapitre que dans leurs
territoires métropolitains, sur le principe général du bon voisinage dans le domaine social,
économique et commercial, compte tenu des intérêts et de la prospérité du reste du monde".
Ce principe, qui sous-tend l'ensemble du droit international de l'environnement, a reçu une
abondante consécration coutumière et conventionnelle.
On le retrouve énoncé dans la Déclaration de Rio, sous la forme d’une obligation générale :
“Les États doivent coopérer dans un esprit de partenariat mondial en vue de conserver, de
protéger et de rétablir la santé et l’intégrité de l’écosystème terrestre” (principe 7).
De cette obligation générale découlent certaines obligations plus spécifiques.
Certaines d’entre elles se retrouvent dans la Déclaration de Rio mais formulées dans des
termes très généraux :
- dans le domaine scientifique et technique (principe 9) ;
- dans le domaine du commerce international (principe 12) ;
- dans le domaine des transferts d’activités dangereuses (principe 14).
Le progrès est sensible pour 2 questions :
- celle de la notification des catastrophes naturelles et des -selon la formule consacrée-
“autres situations d’urgence” susceptibles d’avoir des effets transfrontières. La notification
doit être “immédiate” (principe 18) ;
- celle de l’information sur les activités qui peuvent avoir des effets transfrontières
“sérieusement nocifs” sur l’environnement. Les États “doivent prévenir suffisamment à
l’avance” les États susceptibles d’être affectés et “leur communiquer toutes informations
pertinentes”, ainsi que mener des consultations avec eux “rapidement et de bonne foi”
(principe 19).
§ 2- La codification de la coutume
B- La technique de la codification
La codification peut être initiée par des Etats mais aussi des organisations
internationales voire dans certains cas par des organisations non gouvernementales (par ex.
les protocoles de Genève 1977 à l'initiative du CICR).
Dans le cadre des Nations Unies, le choix d'un thème de codification résulte d'une
décision de l'Assemblée générale (art. 13). Elle est souvent aiguillée en ce sens par la
Commission du droit international (CDI). La CDI est un organe subsidiaire technique (créé en
1947) composé de 34 membres, experts reconnus et indépendants, élus de manière à ce
que soient représentées "les grandes formes de civilisation et les principaux systèmes
juridiques du monde". L'Assemblée générale peut décider de confier la préparation d'un
projet de texte à un organe temporaire ou permanent, technique (CDI) ou politique (composé
de représentants d'Etats). Le choix de la CDI offre des garanties de rigueur scientifique, au
prix, il est vrai d'une certaine lenteur. La CDI commence par désigner un rapporteur spécial
chargé, d'une part, d'étudier la question (avec l'assistance du Secrétariat des Nations Unies
ou d'autres organisations internationales) et, d'autre part, de proposer une méthode de
travail et une série d'avant-projets. Plusieurs années plus tard, la CDI adopte un avant-projet
(projet d'articles) soumis à la VIème commission de l'Assemblée générale. Des navettes
s'effectuent sur diverses parties du texte avant qu'il ne soit soumis dans son ensemble à
l'Assemblée générale. L'Assemblée générale décide de la suite à donner au(x) projet(s) qui
lui sont soumis. Elle peut se contenter d'attirer leur attention sur le contenu du texte par le
vote d'une résolution plus ou moins solennelle. Elle peut également adopter le texte, en
l'assortissant le cas échéant des modifications opportunes, sous la forme d'une convention à
laquelle les Etats seront invités à adhérer. Le plus souvent l'Assemblée générale suggérera
la convocation d'une conférence diplomatique chargée d'adopter le texte de la convention de
codification. Dès que la CDI a été créée, elle a été chargée de codifier les principes de
Nuremberg. Ses travaux ont abouti en 1950 à l'adoption d'un texte qui servira de base à un
projet plus ambitieux de code des crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité. La CDI
a, au même moment, été invitée à se prononcer sur l'opportunité de créer une juridiction
pénale internationale. La réflexion se poursuit à l'Assemblée générale qui met sur pied, en
1950 puis en 1952, un Comité spécial chargé de proposer un statut de juridiction pénale
internationale. Mais, en 1954, l'Assemblée générale décide de suspendre les travaux, tant
ceux relatifs au projet de code que ceux afférents à l'instauration d'une juridiction pénale
dans l'attente d'une définition de l'agression. Cette définition n'interviendra qu'en 1974, et les
travaux de la CDI ne reprendrons eux-mêmes qu'en 1981. La Commission privilégiera
l'élaboration du code, ne commençant à se pencher sur l'institution d'une Cour criminelle
internationale qu'à compter de 1990. À partir de 1991, en raison d'une brusque évolution du
contexte international, les travaux de la Commission se sont accélérés, voyant cet organe
subsidiaire littéralement bouleverser ses habitudes de travail pour répondre à une attente
impérieuse. Elle a d'abord créé un groupe de travail au lieu de désigner un rapporteur
spécial, ensuite en menant à bien le projet de statut en 1994, soit en 3 ans au lieu d'une
dizaine d'années ou plus pour les autres projets, et, enfin, en se limitant à une seule lecture
au lieu des deux habituelles. En 1996, le projet de statut est suivi de l'adoption du projet de
code des crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité.
Il a donc fallu à la CDI deux tentatives d'une durée totale de 20 ans, s'étendant sur une
période cinquante ans pour que le projet de codification aboutisse. Il est vrai, que la
Commission n'assume pas seule la responsabilité d'une telle situation. Cependant, cette
lenteur jette le discrédit sur son mode de fonctionnement et ses méthodes de travail.
La codification peut aussi être conduite dans un cadre régional. Elle est alors un mode
d'adaptation du droit général à des particularités régionales.
§ 3- Règles de conflits
L'absence d'une hiérarchie entre les sources ne signifie pas que ces sources
n'entretiennent aucun rapport entre elles. Il existe même des interactions.
Le "télescopage" entre normes coutumières successives liant les mêmes Etats peut être
surmonté par application des règles de conflits traditionnelles. On considère habituellement
que la norme la plus récente l'emporte sur la plus ancienne ou que la norme spéciale prévaut
sur la norme générale. Cette dernière règle peut être invoquée notamment dans le cas d'une
contrariété entre une norme coutumière universelle et une norme coutumière régionale ou
locale.
Dès lors qu'une règle coutumière est opposable à un Etat, celui-ci ne peut s'y soustraire par
l'adoption d'un acte unilatéral. La coutume l'emporte en toute hypothèse.
Lorsqu'un conflit surgit entre une norme coutumière et une convention, deux cas de figure
doivent être distingués. En ce qui concerne, tout d'abord, les rapports entre les Etats parties
à la convention et les autres sujets qui ne sont liés que par la coutume, seule cette dernière
est opposable. Elle apparaît en effet comme le seul dénominateur commun. En revanche,
s'agissant des rapports entre Etats parties à la convention, également liés par la coutume, il
convient de faire application de la norme obligatoire la plus récente. La coutume peut donc
être écartée au profit du traité sous réserve toutefois que les parties aient expressément
manifesté leur intention en ce sens.
Ce phénomène d'interaction n'est jamais plus perceptible qu'en cas de codification. Loin
d'être juridiquement abaissée, la règle codifiée conserve une existence coutumière parallèle
et autonome. La Cour a précisé que la codification ou l'incorporation de principes dans des
conventions multilatérales ne les privait pas d'existence et d'applicabilité en tant que
principes coutumiers, même à l'égard des Etats parties auxdites conventions
Il résulte de cette absence de hiérarchie que si la codification est possible, la coutume peut
inversement réviser un traité ou l'abroger. De même, les instruments résultant de la
codification peuvent servir de base à la formation d'une nouvelle règle coutumière, au moins
pour certaines de leurs dispositions. Encore faut-il que ces dispositions aient un caractère
fondamentalement normatif et puissent constituer la base d'une règle générale de droit ; que
la convention ait fait l'objet d'une participation très large et représentative des Etats
particulièrement intéressés ; que la pratique des Etats établisse une reconnaissance
générale du fait qu'une règle de droit est en jeu (Plateau continental en mer du nord).
L'article 38 du Statut de la CIJ vise les "principes généraux de droit reconnus par les
nations civilisées" comme constituant l'une des sources du droit international. Introduite en
1920 dans le statut de la CPJI, cette expression peut surprendre par son caractère douteux.
Cette expression se rapporte à une conception euro-centrée du droit international, la
référence aux "nations civilisées" signifiait, dans le contexte de l'époque, que les principes en
cause étaient ceux reconnus par les peuples jouissant de la civilisation européenne. Pour le
reste, les relations internationales étaient naturellement régies par la force. Maintenue dans
le système de la charte, cette formule n'en est pas moins critiquée. La perception dont elle
est l'objet a sans doute profondément évolué.
On considère désormais que ces principes généraux sont les principes reconnus par
les Etats quel que soit leur mode d'organisation, l'Etat étant le signe tangible de l'accession à
la civilisation juridique (au sens de l'article 38).
Il faut que ce soit un principe de droit positif interne et que ce principe soit
transposable du droit interne au droit international.
Ce qui est pris en compte c'est beaucoup plus l'esprit d'un concept que la technique
juridique proprement dite qui lui permet de déployer sa pleine efficacité en droit interne. Tel
est le cas, par exemple, pour l'estoppel, qui rappelons-le est une objection péremptoire
s'opposant à ce qu'un Etat notamment lorsqu'il est partie à un procès puisse contredire une
position qu'il a prise antérieurement et dans laquelle les tiers avaient placé leur légitime
confiance. Il s'agit, au départ, d'une technique de droit processuel anglais. L'application de
l'estoppel dans l'ordre juridique international ne revient pas à mettre en oeuvre la règle de
droit britannique, mais plutôt l'esprit d'une institution que l'on retrouve dans un large spectre
de systèmes juridiques.
L'appréciation, par le juge ou l'arbitre de ce caractère transposable, n'échappe pas à
une inévitable subjectivité. Cependant, l'interprète reste enfermé dans des limites inhérentes
aux particularités de l'ordre international qui rendent impossible l'élévation de certains
principes du droit interne. En dépit, de certains traits communs, le régime applicable au
territoire ne saurait être assimilé à celui de la propriété privée. La prescription acquisitive ne
saurait par ex. devenir un mode d'acquisition du territoire en droit international.
De même on constate, à quelques exceptions près il est vrai, que la juridiction des tribunaux
internationaux demeure facultative. La transposition des règles procédurales en vigueur
dans les Etats n'a à cet égard jamais été possible.