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Construction Référence
1. – INTRODUCTION
Une structure peut être considérée défaillante lorsque au moins un des états limites
ultimes se trouve être atteint. Parmi ces états limites figure la fatigue (ou fissuration pro-
gressive), due à des charges répétées en un très grand nombre de cycles dans le temps.
Passé un certain seuil de fissuration, il risque de se produire un phénomène de rupture.
D’une manière générale, la rupture se produit par propagation d’un défaut existant dans
le matériau. Tous les matériaux contiennent un certain nombre de défauts qui peuvent
se propager sous l’action des charges répétées et qui peuvent conduire à la rupture
lorsqu’ils atteignent une taille critique.
Dans le cas d’une pièce lisse, la fissure peut prendre naissance à partir de défauts
microscopiques à l’échelle du grain, ou de défauts de bord dus à l’oxycoupage, au per-
çage, etc. Dans le cas des constructions soudées, ne faisant pas l’objet d’un traitement
de parachèvement, c’est à partir d’un cordon de soudure qu’une fissure peut s’amorcer,
car il existe toujours des défauts dus à la soudure.
Les étapes du développement d’une fissure – selon une terminologie reconnue – sont :
– La rupture, qui peut être ductile ou fragile, selon les propriétés du matériau.
FAT-CAL 1-01
La capacité d’un détail de structure à résister à la fatigue est caractérisée par sa durée de
vie à la fatigue. Celle-ci est définie par le nombre de cycles d’étendues de contrainte
conduisant à la rupture. La notion plus concrète pour le projeteur est la durée de vie de
calcul qui est la durée de référence pendant laquelle l’élément se comporte en sécurité
vis-à-vis de la fatigue. De nombreux facteurs peuvent avoir une influence notable sur la
durée de vie à la fatigue des éléments. Les facteurs les plus importants pouvant être
retenus pour les justifications des détails de structure sont :
La contrainte nominale est la contrainte dans le métal de base calculée selon la théorie
élastique simple de la résistance des matériaux, à l’exclusion de tous les effets de
concentration de contrainte. L’étendue de contrainte nominale, ∆σ ou ∆τ, est la diffé-
rence algébrique entre deux extrêma successifs d’un cycle de contrainte nominale. De
l’autre côté, la géométrie et l’exécution des assemblages sont caractérisées par la
notion de catégorie de détails d’assemblage définie plus loin.
La résistance à la fatigue d’un détail est établie expérimentalement. Ce détail est soumis
à des cycles d’étendue de contrainte, ∆σ ou ∆τ, d’amplitude constante. Le nombre de
cycles à la rupture, N, correspond généralement à une fissuration notable de l’éprou-
vette. Différents essais permettent de tracer ∆σ ou ∆τ en fonction de N. Compte tenu de
la dispersion importante des résultats de tels essais, une courbe – appelée courbe S – N,
ou courbe de Wöhler – correspondant à une probabilité de non-ruine de 95 % est rete-
nue.
FAT-CAL 1-01
Une telle courbe – pour les contraintes normales (Fig. 1) – est caractérisée par [1] :
– La résistance à cinq millions de cycles, ∆σD , mise en évidence par les essais, appelée
limite de fatigue sous amplitude constante. Si tous les cycles de variation de
contraintes se situent en dessous de cette résistance, la propagation ne s’initie pas.
Une courbe de résistance à la fatigue pour les contraintes normales nominales peut
donc être définie par :
où :
m est la constante de pente des courbes de résistance à la fatigue, dont la valeur est
3, pour N 5 × 106, et 5, pour N 5 × 106 cycles,
2 × 106
∆σD =
3 –––––––––––––
5 × 106
∆σC 0,736 ∆σC est la résistance à la fatigue pour 5 × 106 cycles, et
∆σC est la résistance à la fatigue pour 2 × 106 cycles, c’est-à-dire la catégorie de détail.
Quant aux contraintes de cisaillement (Fig. 1), la courbe S – N est caractérisée par deux
points, définis comme pour les contraintes normales :
FAT-CAL 1-01
4 9.3.4(2) En ce qui concerne les conséquences de la ruine, deux cas peuvent se présen-
ter :
– Éléments « redondants », c’est-à-dire que la ruine locale d’un élément constitutif n’a
pas pour conséquence la ruine de la structure,
– Éléments « non redondants », c’est-à-dire que la ruine locale d’un élément constitutif
conduit rapidement à la ruine de la structure.
9.1.1(2) Le degré requis de sécurité est obtenu par l’application des coefficients partiels
de sécurité adéquats.
– Dans le cas des cycles d’amplitude constante, l’étendue de contrainte agissant N fois
est comparée à la résistance à la fatigue du détail concerné pour N cycles :
où :
γFf est le coefficient partiel de sécurité pour le chargement de fatigue, qui prend en
compte les incertitudes dans l’analyse d’une structure,
γMf est le coefficient partiel de sécurité pour la résistance à la fatigue, qui tient compte
des incertitudes sur la résistance.
– Quant aux cycles d’amplitude variable, une loi d’endommagement est le plus sou-
vent appliquée pour mesurer la sévérité de la fissuration. Le modèle de Miner sup-
pose que le dommage s’accumule de manière linéaire :
ni
D= Σi N
––––
i
1,
FAT-CAL 1-01
où :
9.6.1(1) La résistance à la fatigue est définie pour les contraintes normales par une série
de courbes log ∆σR – log N, chacune d’elles s’appliquant à une catégorie de détail
constructif. Chaque catégorie de détail constructif est désignée par un nombre qui
représente, en N/mm2, la valeur de référence ∆σC de la résistance à la fatigue à 2 mil-
lions de cycles (Fig. 2). Les valeurs utilisées sont des valeurs arrondies, correspondant
aux catégories de détails constructifs du tableau 9.6.1.
5
9.6.1(4) Les courbes sont fondées sur les études expérimentales représentatives et, par
conséquent, englobent les effets :
– de la direction de la contrainte,
– dans certains cas, des opérations de soudage et des procédés d’amélioration consé-
cutifs.
FAT-CAL 1-01
– Les catégories de détail ne sont valables que si les soudures respectent un niveau de
qualité donné, qui doit être défini dans une norme.
9.5.1(3) Pour les détails constructifs définis dans les tableaux de classification des
détails (tableaux 9.8.1 à 9.8.7) on utilisera l’étendue de contrainte nominale.
9.1.4(1) La vérification à la fatigue n’est pas requise pour les ossatures de bâtiments, à
l’exception des cas suivants :
– Éléments sollicités par des cycles répétés de contraintes dûs à des machines
vibrantes,
4. – EXEMPLE NUMÉRIQUE
On s’intéresse ici à une ossature dont on étudie le détail constitutif et qui reçoit deux cas
de charges :
L’histogramme des ∆σ est donc simple : tous les ∆σ sont de même valeur pour un détail
quelconque et se produisent en nombre connu.
Les aciers sont de nuance S 235 (NF EN 10025). S’agissant d’une ossature sollicitée en
fatigue, les exigences suivantes sont à noter :
– Boulons HR à serrage contrôlé (jugés préférables par rapport aux boulons normaux
vis-à-vis de la fatigue), car :
FAT-CAL 1-01
– Soudures à pleine pénétration, sauf exceptions dûment justifiées par le calcul. (Sou-
dures à pénétration partielle et les cordons d’angle sont pénalisés à la fatigue par le
risque de fissuration à la racine du cordon et ne conviennent donc pas pour les fortes
sollicitations.)
De manière générale, la prise en compte de la fatigue se traduit plus par une vérification
plutôt qu’un dimensionnement. La résistance à la fatigue est justifiée par calcul : les
changements d’épaisseur ou de conception peuvent ainsi être proposés au maître 7
d’ouvrage. En l’absence d’autre référence traitant le sujet, on se réfère généralement à
l’EC3-DAN, chapitre qui traite la fatigue, P 22-311-9 [2].
Selon (1) et (2), le format de vérification en fatigue d’un détail constructif, soumis aux
cycles d’amplitude constante, est donc :
γMf γFf : Produit des coefficients partiels de sécurité pour la fatigue, soit
1,25 × 1,00 = 1,25
(cas d’une structure non inspectée spécifiquement vis-à-vis de la fatigue, et
avec conséquence d’une rupture affectant la sécurité des personnes ou
entraînant une importante perte d’exploitation, cf. P 22-311-9),
2 × 106 2 × 106
1 1
∆σ 3 ––––––––––––– –––––––––– ∆σC = 3 –––––––––––––––––––– ––––––– ∆σC = 0,812 ∆σC . (4)
N γMf γff 1,971 × 10 6
1,25
Le détail constructif à traiter – dont l’inspiration a été trouvée dans la référence [4] – est
un assemblage de trois poutres en HEA 500 : une poutre porteuse et deux poutres por-
tées. Ces dernières sont supposées articulées dans le calcul de l’ossature. Afin de facili-
ter la pose et plus particulièrement le serrage contrôlé des boulons, l’assemblage est
réalisé en utilisant des plats – dont les dimensions sont 260 × 134 × 15 (en mm) – soudés
sur l’âme de la poutre porteuse et sur lequel les âmes des poutres portées sont boulon-
nées (Fig. 3). Les cordons d’angle pour les plats ont une gorge de 8 mm.
Comme il n’y a pas de problème de fatigue pour les boulons à serrage contrôlé vis-à-vis
du cisaillement, on s’intéresse seulement à la liaison soudée plat-âme. Cette dernière
est calculée en y appliquant la réaction de la poutre portée, F, agissant au centre de gra-
vité des quatre boulons (Fig. 4) :
État limite Fx Fy Fz
Fatigue 0 40 kN 5 kN
FAT-CAL 1-01
54 40 40
40
60
8 60
60
40
15
134
8 HEA 500
Fig. 3 – Assemblage, 1re solution
94
15
8
∆Fz = 5 kN ∆Fz = 5 kN
∆Fy = 40 kN ∆Fy = 40 kN
134
Cet assemblage peut être assimilé à un assemblage soudé par soudures (d’angle) trans-
mettant des efforts (Tableau 9.8.5 de P 22-311-9 [2]). Deux vérifications à la fatigue sont
exigées :
Les recommandations [5] précisent que « pour des composants classiques dont la géo-
métrie est simple, la contrainte nominale peut être déterminée à partir des théories élé-
mentaires de la résistance des matériaux fondées sur un comportement mécanique
linéaire élastique ».
15 . 2602
Wz = –––––––––––––– = 169 × 103 mm3,
6
260 . 153
Wy = –––––––––––––– = 9,75 × 103 mm3.
6
FAT-CAL 1-01
Ces analyses montrent que cette solution « classique » ne donne pas les résultats satis-
faisants. Pour résoudre ce problème, la première idée est de « rigidifier » le plat soudé et
de maintenir le caractère articulé de la poutre portée. Ceci est fait en le transformant en
raidisseur vertical, soudé sur tout son contact aux semelles et à l’âme, comme présenté
sur la Figure 5. Les cordons d’angle ont toujours une gorge de 8 mm.
54 40 40
9
60
8 60
60
15
134
HEA 500
Fig. 5 – Assemblage, 2e solution
Cet assemblage ne peut pas être trouvé dans les tableaux de P 22-311-9 [2]. La référence
[5] nous oblige à utiliser – pour les composants dont la géométrie est plus complexe – la
méthode des éléments finis. Elle précise que : « Pour la détermination des contraintes
nominales à partir de cette méthode, le maillage peut être simple et grossier ». Pour
calculer ces contraintes nominales, on a donc utilisé un logiciel, simple à utiliser, mais
destiné principalement à l’enseignement du calcul des structures par la méthode des
éléments finis. Ce logiciel – RDM, Version 6, de l’IUT du Mans – permet :
Par contre, les calculs en membrane et en plaque ne peuvent pas être traités simultané-
ment. Or, les deux modes de chargement du raidisseur doivent être séparés (Fig. 6) :
94 15
8
∆Fz = 5 kN ∆Fz = 5 kN
∆Fy = 40 kN ∆Fy = 40 kN
134
FAT-CAL 1-01
– Les étendues de contrainte sont très faibles par rapport à la résistance à la fatigue, on
peut se contenter du résultat obtenu, mais si
– Ces étendues sont proches de cette résistance, il faut soit refaire le calcul avec un
logiciel plus précis, soit changer les dimensions ou la conception de l’assemblage.
10 Les résultats obtenus sont présentés sur les Figures 7 et 8.
Les résultats ainsi obtenus permettent de considérer chacune des sections (A-A et B-B)
comme un assemblage soudé par soudures (d’angle) transmettant des efforts
(cf. Tableau 9.8.5 de P 22-311-9 [2]). Donc, la procédure de vérification reste la même.
FAT-CAL 1-01
11
∆σ1, max = 8,08 + 18,99 = 27,07 MPa 57,65 MPa = 0,812 . 71 MPa ;
FAT-CAL 1-01
Même avec ce plat-raidisseur, les résistances à la fatigue (cette fois, vis-à-vis de la fissu-
ration à la racine) sont dépassées. Pour satisfaire ces vérifications, une solution envisa-
geable peut être de remplacer les cordons d’angle ayant une gorge de 8 mm par les cor-
dons qui ont une gorge de 10 mm, par exemple :
e 15
∆σw, max = ∆σ2, max ––––– = 32,14 ––––––––– = 24,10 MPa 29,23 MPa = 0,812 . 36 MPa.
2a 2 . 10
12 Une autre solution peut être de remplacer les cordons d’angle par les cordons à pleine
pénétration, donc de se limiter à la première vérification (cf. Tableau 9.8.5 de P 22-311-9
[2]) :
Mais, il est considéré que ces résultats ne sont pas suffisamment satisfaisants, vu les
limites du logiciel utilisé et de la modélisation adoptée. Une nouvelle solution est donc
étudiée : reprendre les efforts horizontaux – d’ailleurs plus pénalisants – par les couvre-
joints, avec les boulons HR travaillant en cisaillement (qui ne doivent pas être vérifiés à
la fatigue), et les efforts verticaux par le plat vertical. Ainsi, on arrive à la solution sui-
vante (Fig. 9).
54 40 40
40
60
8 60
60
40
15
134
HEA 500
Dans la mesure où on prend comme hypothèse que les efforts ∆Fz – ainsi que le
moment fléchissant Mz , car c’est maintenant un assemblage encastré – sont pris par les
couvre-joints et que seul l’effort vertical transite par l’âme (Fig. 10), les contraintes dans
le plat restent quasiment identiques à celles de la première solution, dues aux efforts
∆Fy (Fig. 4). Cette hypothèse peut être facilement justifiée : un calcul simple montre que
– dans ce cas – la partie de moment fléchissant Mz transitant par l’âme est inférieure à
5 %.
FAT-CAL 1-01
94 ∆Fz1 ∆Fz1
15
8
∆Fy = 40 kN ∆Fy = 40 kN
134
∆Fz2 ∆Fz2
3 308 × 103
∆σmax = –––––––––––––––––– = 19,57 57,65 MPa = 0,812 . 71 MPa.
169 × 103
e 15
∆σw, max = ∆σmax ––––– = 19,57 ––––––– = 18,35 MPa 29,23 MPa = 0,812 . 36 MPa,
2a 2.8
Fy 40 × 103
∆τw, max = = ––––––––––––––––– = 9,62 MPa 64,96 MPa = 0,812 . 80 MPa.
––––––––
2a . l 2 . 8 . 260
Toutes les conditions requises étant enfin ainsi vérifiées, c’est cette dernière solution qui
peut être acceptée.
5. – CONCLUSION
Cet exemple simple montre que – dans certains cas – la fatigue peut devenir détermi-
nante pour les dimensions et pour la conception des assemblages. Donc, la vérification
à la fatigue doit être prise au sérieux dans tous les cas où les efforts variables sont à
envisager.
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6. – BIBLIOGRAPHIE