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Elle est intérieure à l’esprit car elle présente en son secret des images, et
extérieur car elle emprunte au monde extérieur des formes, des couleurs, des
mouvements. Peut-être avons-nous tort d’opposer l’imagination à la réalité.
A/ Vocabulaire
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Image de Montaigne qui montre la supériorité de l’imagination sur la raison :
debout sur une planche au dessus d’un précipice, un philosophe est dominé par
son imagination qui lui donne le vertige. Aucun raisonnement ne pourra le
rassurer. « Plaisante raison qu’un vent manie, et à tous sens ! » ironie de Pascal.
Leçon d’humilité pour la raison à une époque où celle-ci prétendait tout régenter.
Nouveau regard sur l’Imagination grâce a Pascal, elle est vue comme une
puissance, il en fait la reine d’un peuple de crédule, «l’ennemie de la raison »
C/ Questions
Quels sont ses rapports avec les autres facultés de l’esprit telles que la mémoire
(passé), la perception (présent) et l’anticipation (futur) ?
Quel peut être son rôle ? (imagination pratique)
Pour Sartre, l’imagination est consciente, les images sont des intentions de la
conscience et ne recouvrent aucun mystère.
Pour Freud, l’imagination est en grande partie déterminée par l’inconscient
psychique (elle est poussé pas les désirs et utilisés par les rêves
E/Question de méthode
II Imagination et perception
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(reflets, ombre) ou artificielle (art) les images mentales sont plus insaisissables.
L’imagination ne ferait que prolonger la perception en notre esprit.
Selon Epicure nos sens sont la source de la connaissance. Cependant nos sens
produisent des illusions. Pour Epicure, ce ne sont pas les sensations qui sont
fausses mais les opinions que nous y ajoutons. Nos perceptions sensibles ne sont
pas a remettre en cause car elles captent bien les simulacres des objets perçus.
C/ L’Imago
A la différence de Platon qui morcelait l’âme en trois parties, Aristote soutient son
unité.
trois fonctions de l’âme : végétative (nutrition, croissance…), sensitive (5 sens et
imagination) et intellective (raisonnement et volonté). (Hiérarchie entre les trois).
L’âme intellective est purement humaine. Or « l’âme ne pense jamais sans
image » (De anima) donc elle a besoin de l’imagination.
L’imagination tient le corps à distance (aucun sens intermédiaire aux rêves).
L’imagination assiste l’intelligence.
B/L’image de Dieu
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L’Ancien Testament interdit la fabrication et l’adoration d’image. Pourtant la
Genèse dit que Dieu a crée l’home à son image. Dans l’Evangile de Jean, le Christ
dit : « qui m’a vu a vu le Père »
Chaque individu est une image imparfaite de Dieu mais peut, en prenant modèle
sur l’image parfaite du Christ, rejoindre Dieu.
Controverse iconoclaste pendant le Moyen-âge, Léon III puis son fils Constantin V,
empereurs de l’Empire romain d’Orient interdisent les icones au VIII siècle,
suivant la Bible. Mais selon les iconodoles, l’icône n’est pas une idole, on y
vénère à travers elle, la personne divine qui s’y présente. (lutte de pouvoir car
importance de la diffusion des images de Dieu dans les églises ou partout)
Après avoir été crée à l’image de Dieu, l’homme a commis le péché originel. Par
là, il a dégradé l’image divine qui était en lui. Saint Augustin (dans De la Trinité):
« l’image de Dieu doit être réformé dans l’homme ». Thomas d’Aquin (dans
Somme théologique): « Quelquefois même les phantasmes dans l’imagination de
l’homme sont formés divinement : ils expriment plus les choses divines que
celles que nous recevons du sensibles, comme il apparait dans les visions des
prophètes »
IV L’imagination reproductrice
A/ La faiblesse de l’imagination
B/ Malebranche (1638-1715)
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Pour lui, l’âme est obscure. L’esprit peut être troublé par l’imagination, puissance
envahissante qui brouille les rapports à la réalité et à soi-même. L’imagination
est un processus corporel, soumis au flux des esprits animaux. Ceux-ci sont
constitués des plus petites parties du sang qui circulent dans le sang et
parviennent au cerveau. (Théorie mécaniste de l’imagination). Selon lui, les
femmes ont un cerveau dont les fibres sont plus délicates, c’est pourquoi elles
sont plus sensible dans les affaires de gout. Mais du coup « tout ce qui est
abstrait leur est incompréhensible ». L’habitude creuse des sillons profonds (une
maladie dont tout le monde parle reste toujours à l’esprit). Même les personnes
savantes se laissent tromper par leur imagination.
Imagination forte : constitution d’un cerveau tellement marquée par certaines
images qu’ils ne peuvent pas penser à autre chose. Ceux qui ont reçu ces fortes
impressions sont les fous.
Malebranche : « Elle jette le trouble dans toutes les idées de l’âme par les
fantômes qu’elle produit »
V L’imagination créatrice
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Elle est plutôt la faculté de déformer les images fournies par la perception.
Moteur de création qui transforme, libère. L’imagination ne travaille pas des
images toutes faites ; elle ouvre et crée un nouveau monde ; elle crée un
imaginaire. « Le vocable fondamental qui correspond à l’imagination, ce n’est
pas image, c’est imaginaire ». L’imagination, c’est l’esprit se dégageant de la
réalité.
Pour Bachelard, les images sont mobiles. Par l’imagination nous abandonnons le
cours ordinaire des choses. Percevoir et imaginer sont aussi antithétiques que
présence et absence. Imaginer c’est s’absenter, c’est s’élancer vers une vie
nouvelle.
C/ La fonction de l’irréel
Certains poètes ne font que déguiser le réel mais au moins ils ont le mérite de
changer notre regard sur la réalité. D’autres poètes nous emmènent
véritablement dans le monde de l’imaginaire. Le flux du psychisme imaginant
amène le lecteur au pays de l’infini, là où « l’imagination s’affirme comme
imagination pure ».
« Un être privé de la fonction de l’irréel est un névrosé aussi bien que l’être privé
du sens du réel ».
C’est une fonction essentielle. « Le monde vient s’imaginer dans la rêveries
humaine » cad l’image n’est pas l’objet du verbe imaginer, elle en est le sujet.
C’est l’image qui s’imagine en nous.
D/ Le droit de rêver
Le royaume des images n’est pas celui des concepts, où tout est bien défini une
fois pour toutes. Selon les images sont commandées par les éléments
fondamentaux de la matière (terre, eau, air et feu).
Bachelard réclame un droit de rêver. Dans La Terre et les rêveries de la volonté,
Bachelard regrette la domination de la vision sur le rêve dans notre culture.
Bachelard ne nous recommande pas de s’adonner au rêve nocturne dans lequel
le sujet est passif (ex : un rêve me visita). Il faut une rêverie guidée par les
mouvements du corps au contact de la matière. Le droit de rêver est le droit de
vivre éveillé les images de la vie réelle.
La poésie est une invitation aux images par le biais des mots (Proust et ses noms
de ville). Les mots ne décrivent pas les images, ils les font rêver aux lecteurs.
L’Air et les songes : « L’imagination, en nous, parle, nos rêves parlent, nos
pensées parlent.
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Le chercheur doit imaginer une nouvelle explication. Ex : Lavoisier observe que le
poids du plomb calciné est plus lourd que le plomb. Or on expliquait la
combustion come une perte d’une substance que l’on pouvait apercevoir dans
les flammes. Lavoisier imagine que la combustion est une fixation d’un corps de
l’atmosphère sur le corps en combustion. Puis il s’agit de vérifier l’hypothèse en
la confrontant à la réalité au cours d’une expérience.
De nombreux savant ont eu recours à des expériences dites imaginaires. Ernest
Mach les appelle « expérience de pensée ».
Ex : Galilée veut montrer que dans le vide tous les corps tombent à la même
vitesse, quel que soit leur poids. Il va observer que les vitesses sont de moins en
moins différentes dans des milieux de moins en moins résistants puis il admet
que c’est vrai dans le vide.
Limites :
-danger de la caractérisation à outrance (oublier des paramètres difficiles à
imaginer)
- arbitraire du raisonnement à l’abri d’une infirmation par l’expérience
A/ Les monstres
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A travers la question des monstres se pose la question de la responsabilité de
Dieu dans l’existence du mal. « Les voies de Dieu sont impénétrables ». Or la
monstruosité n’est pas nécessairement laide, ni symbole du mal (licorne). La
valeur de la laideur semble dépendre d’autres valeurs ; la conformité aux critères
formels (symétrie, proportions…) compte moins que la conformité aux règles
morales. (Quasimodo/Mata Hari)
La pensée s’appuie couramment sur des images, car elle est sensible à la
ressemblance et à la répétition. Une ressemblance est une identité partielle entre
deux termes. En littérature on usera de métaphores, cad de transfert de sens par
substitution analogique. Allégorie : image dont les détails correspondent aux
traits de l’idée qu’elle représente. L’imagination n’est pas qu’une faiseuse de
désordre ; c’est aussi une précieuse auxiliaire de la raison.
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Kant est le premier à lui conférer un rôle positif dans la connaissance. Il insère
l’imagination entre l’intuition sensible et les concepts de l’entendement. D’un
coté les intuitions sont trop empiriques, trop dépendantes de l’expérience. De
l’autre coté, les concepts sont trop abstraits. Le rôle de l’imagination est
d’homogénéiser la matière sensible et la forme intelligible, faire le lien entre les
phénomènes et les concepts.
Symbole : représentation sensible plus complexe car il repose sur une analogie,
cad une ressemblance entre des rapports et des termes. (Algèbre, grandeurs=
symboles)
Figure : représentations dans l’espace, l’esprit humain n’est seul à décider de ses
objets, déterminés maintenant par les lois de l’espace.
La figure est moins libre que le symbole, lui-même plus complexe que le schème.
Donc l’imagination est une faculté libre mais elle doit compter avec les règles de
l’entendement.
C/Les hypotyposes
Kant : A l’ origine, ce mot désigne une empreinte en creux laissée, par exemple,
par un sceau. C’est ce qui impressionne, frappe l’esprit. En littérature, c’est une
description animée et spectaculaire d’une cène ou d’un personnage. Différent
d’un exemple : les hypotyposes rendent sensibles des concepts abstraits, alors
que les exemples ne font qu’illustrer des concepts empiriques directement
observables dans la nature. Pour Kant, c’est d’abord « une opération consistant à
rendre sensible quelque chose », c'est-à-dire à associer une intuition à un
concept. En philosophie, ce sont les symboles pour la réflexion : fondement
(construction), découler (fleuve).
IX La conscience imageante
Dans les théories classiques, l’image est présenté somme un tableau intérieur
qu’il s’agirait de déchiffrer
A/ La critique de la représentation
B/ La phénoménologie de l’imagination
C/ La pauvreté de l’image
Finalement l’image est confondue avec le mot. On est loin d’une image animée,
ayant sa vie et son contenue propres. (Pourtant Sartre est contemporain des
surréalistes)
Une structure est un agencement d’éléments, tel que la totalité des éléments et
de leurs relations forme un système autonome. Claude Lévi-Strauss (1908-
2009) analyse les liens de parenté, coutumes culinaires, autres productions
culturelles et notamment les mythes. Récits qui se rapportent aux origines des
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peuples, semblent fantaisistes, rendre compte de l’origine des choses et de
résoudre des problèmes hétérogènes. Lévi-Strauss considère qu’il y a une
logique : il faut le décomposer en mythème (= ensemble de propositions simples
qu’on peut réunir par la ressemblance de leur contenu (liens forts dans une
famille ou au contraire rapports violents)
Ex : Abbé Pierre (barbe qui implique liberté, apostolat, charité..) Toute cette
construction de signes rassemblés sur un même personnage produit un effet
considérable, qui, non seulement le rend célèbre mais aussi répond a une
demande sociale, a une consommation de signe. « je m’inquiète pour une société
qui consomme si avidement l’affiche de la charité qu’elle en oublie de
s’interroger sur ses conséquences, ses emplois, ses limites.
Barthes insiste sur le fait que la forme déforme le sens, l’appauvrit et n’en garde
que les aspects les plus simples. Par exemple les photos de couverture des
magasines sont destinés à frapper le lecteur et sombrent souvent dans un
symbolisme pauvre.
Signifiant Signifié
C/ Mythes et croyances
Structure inconsciente
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Le consommateur ne distingue pas le signifié du signifiant mais reçoit la globalité
de la signification, sans aucun recul critique.
Longtemps l’on a confondu les images avec les perceptions sensibles et avec les
souvenirs, faisant d’elles des tableaux fixes et sans vie (imago : empreinte figée
du visage d’un mort)
A/ La réhabilitation de l’imagination
Gaston Bachelard avait rompu avec cette vision restrictive. Selon lui
l’imagination infantile est d’abord très riche et c’est le passage progressif vers la
langue et la culture qui la rétrécit. La puissance de l’imagination se mesure aux
obstacles épistémologiques qu’elle interpose entre la raison et la connaissance
objective : obstacle animiste qui consiste à attribuer à des objets inertes des
propriétés des organismes vivants (Au 18ème rouille=maladie du fer), beaucoup
d’images telles que terre=organisme.
Pour Sigmund Freud (1856-1939), « l’interprétation des rêves est la voie royale
qui mène à la connaissance de l’inconscient dans la vie psychique »
L’interprétation des rêves
A/ Le rêve et le sommeil
B/ L’essence du rêve
Selon Freud, le rêve est la tentative de réalisation déguisée d’un désir refoulé. Le
cauchemar est un rêve second, en réaction à un premier rêve exprimant trop
franchement un désir interdit.
C/ L’élaboration du rêve
Deux niveaux de signification des rêves : un contenu manifeste, c’est le rêve tel
qu’on en a le souvenir (la censure a abrégé le message, par l’oubli et un contenu
latent, c’est la signification cachée du rêve. Son but est de parvenir à exprimer
un désir interdit sans que cette expression soit censurée.
A/ La diffusion d'images
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Une grande difficulté de l'exercice du pouvoir: le légitimer. Le chef doit frapper
l'imagination du pouvoir, il lui faut inventer des images pour à la fois légitimer et
manifester son pouvoir. Il faut faire croire à son omniprésence, représenter les
signes de l'autorité (coiffe, sceptre...). Ex: art égyptien= art officiel de la
représentation du pouvoir. De même les empereurs romains ont choisi de figurer
sur les pièces de monnaie.
C/ La comédie du pouvoir
On pourrait objecter que la tromperie sur les apparences ne dure qu'un temps
mais Machiavel rappelle que les hommes sont crédules.
D/ La scène du pouvoir
XV L’imagination technique
A/ L’imagination inventive
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1) La découverte (science) : révéler un objet nouveau qui existait avant d’être
découvert. Il n’est nouveau qu’à la connaissance humaine (Pascal
découvre le vide)
Par son nom, « le prévoyant », Prométhée désigne le technicien qui sait anticiper
les effets. Il révèle aux hommes les secrets du feu, de l’art de travailler le bois et
le métal, l’écriture, la domestication des animaux qu’il a volés aux dieux. Il
incarne la lutte de l’intelligence et de la ruse contre la force et la violence.
Hubris, il veut bouleverser l’ordre naturel et donner aux mortels des armes trop
puissantes.
L’intelligence est l’instrument dont l’homme se sert pour trouver des solutions et
pour agir : elle requiert la représentation consciente et claire des données du
problème : objectif ? Obstacles ? Il faut pratiquer l’analyse (17ème, Descartes). Au
lieu de rester bloquer devant une difficulté, il faut donc imaginer la solution
obtenue, puis remonter peu à peu aux conditions nécessaires pour réaliser cette
solution. L’imagination sert à présenter à l’esprit de l’inventeur l’anticipation
d’une solution.
D/ La dématérialisation
E/ Le virtuel
Le virtuel est une tromperie consentie, une simulation du réel. C’est ce qui
n’existe qu’en puissance et non en acte, simplement comme une possibilité. Ex :
la statue est virtuelle dans le bloc de marbre. Cette virtualité réclame une mise
en œuvre, un travail, sinon le virtuel n’apparait pas. Le virtuel est encore irréel.
Le joueur de jeux vidéo se prend pour un héros mais pas de matérialité : il peut
recevoir une blessure sans aucune douleur, comme dans un rêve.
Une fiction est un récit inventé mais qui se fait passer pour réel.
A/ L’illusion
Le prestidigitateur fait passer une apparence pour la réalité. Illusion réussie car il
y a erreur sur la réalité qu’il fallait percevoir. Selon Freud, il faut prendre en
compte le désir dans l’illusion. Nous désirons y croire. L’Avenir d’une illusion.
B/ La critique de la religion
C/ La critique de l’idéologie
Marx : critique des idéologies car c’est un rapport faux, imaginaire, avec la
réalité, qui exprime et sert les intérêts politiques et économiques d’un groupe
social. La conscience croit que l’idée qu’elle a d’une réalité est cette réalité.
Principales illusions idéologiques : la croyance en l’autonomie des idées,
l’utilisation de catégories éternelles et universelles (valeurs absolues conférant
une autorité…), la neutralité (description objective des faits..) et tautologie
(éliminer les contradictions grâce à des formules closes telles : un Français est un
Français)
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« Autrement dit, on ne part pas de ce que les hommes disent, s’imaginent, se
représentent, ni non plus de ce qu’ils sont dans les paroles, la pensée,
l’imagination et la représentation d’autrui, pour aboutir ensuite aux hommes en
chair et en os ; non, on part de leur activité réelle ».
Pourquoi les hommes se complaisent-ils dans les illusions qui leur font perdre
toute lucidité ? pour Nietzsche c’est la peur de la vérité « Nous avons tous peur
de la vérité ». La connaissance de la vérité est dangereuse parce que la vérité
principale de notre existence, c’est que nous allons mourir. Le mensonge est
condamné, non par principe moral mais parce qu’il est asocial. Le mensonge
consiste à faire paraitre réel ce qui ne l’est pas. De plus il abuse de la crédibilité
d’autrui ; il joue sur le besoin de croire des autres. Nietzsche énumère les
illusions consolatrices recherchées par les hommes parce qu’elles les aident à
supporter la vie : ce sont la connaissance, l’art et la métaphysique. La
connaissance nous fait imaginer que nous pourrons trouver la sagesse, qui guérit
les blessures de l’existence. L’art nous protège de la vision horrible de la vérité
en dressant entre elle et nous le voile de la beauté. La métaphysique entretient
l’espoir que, sous le flot continuel du devenir, quelque chose de permanent et de
stable reste, sans sombrer dans le néant.
A/ Mythomanie et hallucination
Erotomanie : pathologie consistant à croire que l’on est aimé par une personne,
généralement de niveau social prestigieux. L’érotomane imagine que l’autre
l’aime et n’ose pas se déclarer. Elle prend donc contact avec elle, voire la
harcèle. Toute tentative de désillusion est considérée comme une persécution.
Différent degrés : nous pouvons tous être victimes d’illusion mais non pas
d’hallucinations. Une illusion procède d’une croyance et émane d’un désir. Une
hallucination est une perception, jamais remise en question, sans objet à
percevoir. Il entend des voix et se trouve aliéné à la voix étrangère.
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Le poète Henri Michaux (20ème) a fait des expériences avec des hallucinogènes
avec des médecins pour montrer que la drogue crée un état analogue à la folie et
il veut l’expérimenter sans s’y enfermer. « Les drogues nous ennuis avec leur
paradis ». La drogue déforme notre rapport à la réalité, le monde s’effondre au
profit d’une présence prégnante des images, qui viennent prendre la place de la
réalité. Les autres semblent alors étrangers et nous sont indifférent. L’autre effet
est l’indécision. Conduite passive. Mais la pensée devient très vive. Le drogué
assiste au passage ahurissant de milliers d’images qui explosent en même
temps. Michaux parle de « geyser » intérieur. De plus effondrement du concret.
En imaginant des girafes, Michaux ne voit que des structures élancées frêles, très
hautes : il voit des « schémas en mouvement de la notion de girafes ».
Finalement on a une pensée incapable de penser. Le sujet est incapable
d’affronter la réalité.
A/ L'image sociale
Pascal remarque l'illusion sociale: « Nous ne nous contentons pas de la vie que
nous avons en nous et en notre propre être: nous voulons vivre dans l'idée des
autres d'une vie imaginaire, et nous nous efforçons pour cela de paraitre ». Nous
voulons exister avant tout dans l'idée que les autres auront de nous. Aussi nous
nous fabriquons une image, nous jouons un personnage (persona en latin=
masque de théâtre). « La vie humaine n'est qu'une illusion perpétuelle
B/ Le registre imaginaire
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miroir= identification, transformations produites chez un sujet quand il assume
son image. L'image de soi est reçue de l'autre.
C/ La théorie de la cristallisation
D/ Le comique de l'amour
Effet comique car ridicule. Lucrèce: « la passion ferme trop souvent les yeux aux
hommes et ils attribuent à la femme aimée des mérites qu'elle n'a pas ».
Molière dans le Misanthrope, Acte II scène 4: « C'est ainsi qu'un amant dont
l'ardeur est extrême, aime jusqu'aux défauts des personnes qu'il aime ».
Le désir d'amour est insatiable. L'aliénation imaginaire à autrui est donc une
méconnaissance de soi. L'imagination est complice du désir d'ignorance.
L’imagination est sans borne, elle est très riche dans les utopies. L’adjectif
« utopique » est devenu synonyme d’irréaliste. Les utopies sont des sociétés
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fictives permettant à la fois de critiquer les sociétés réelles, de laisser libre cours
à son imagination et de proposer un programme de réforme politique. Ce sont
des sociétés petites, fermées sur elles-mêmes (autarcique) et non datées.
George Orwell, 1984 (1949) dérive vers un système totalitaire, qui supprime le
sens de l’histoire et toute pensée critique.
C/ La fonction de l’utopie
-Critiquer la société
Kant : L’utopie doit être prise au sérieux. Elle n’est pas inutile car irréaliste.
L’important, c’est l’idée qui l’anime cad la liberté humaine la plus grande
possible. Idée de permettre à chacun d’être libre tout en respectant la liberté des
autres. L’utopie pose les idées que l’humanité se doit de réaliser au mieux.
Mépriser l’utopie sous prétexte qu’elle est irréalisable, c’est abandonner à
l’avance tout espoir de progrès de l’humanité. Finalement, au lieu d’être un
inconvénient, l’idéalité de l’utopie constitue justement son essence et son
avantage.
XX L’imagination artistique
L’art est souvent considéré comme le dernier refuge de la liberté pour ceux qui
sont opprimés. Possible que si l’imagination est elle-même libre. L’art n’est pas
seulement un espace de liberté pour l’imagination ; il est aussi ce qui la libère.
A/ l’imagination surréaliste
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L’artiste joue, s’amuse avec son inconscient. Il faut suspendre le contrôle de la
raison, la censure morale afin de créer la surprise.
B/ L’inconscient de l’artiste
Kant dans son Analyse du beau, fonde l’universalité du jugement du goût. C’est
une manière de sentir commune aux hommes, non pas réservé à quelque uns.
Ainsi une satisfaction esthétique peut être à la fois subjective et universelle. Le
sens commun esthétique juge par le sentiment. Le sens commun du goût est un
« libre jeu de l’imagination et de l’entendement ». Il veut dire qu’au contact
d’une œuvre, l’imagination est stimulée par des associations (entre des
symboles, des souvenirs, d’autres œuvre..) qui en même temps stimulent notre
entendement. C’est dans ce jeu réciproque des deux facultés de l’esprit que se
ressent le plaisir au contact du beau. Ce jeu est libre car il n’est engagé dans
aucune recherche de la connaissance.
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XXI Vers la mort de l'imagination?
A/ Le réel
B/ Le recours à l'illusion
C/ L'image photographique
La photo subit une mise en forme qui atténue la scène réelle en image
acceptable par le public. L'horreur du réel est mise en retrait, si bien que l'on
peut se demander si ce que l'on voit sur la photo est une scène brute ou la
reconstitution d'une image artistique. Le recouvrement de la réalité par l'art
engendre une indécision qui, finalement, nous rassure. Analyse de Roland
Barthes: Selon lui, il y a deux approches de la photographie, le studium et le
punctum. Le studium consiste à décoder l'image par rapport à son contexte.
C'est une lecture savante, intellectuelle, qui refoule l'affectif. Le punctum
consiste à repérer ce qui nous pique dans l'image.
La photographie est l'image d'un « avoir été », l'image vivante d'une chose morte
D/ Le recouvrement du réel
JF Lyotard montre que l'homme postmoderne est ébranlé par le peu de réalité du
réel. On sait que l'humanité va au devant de problèmes énormes (pénuries d'eau,
de pétrole, sida, pollution...) Ces problèmes sont si complexes qu'ils dépassent
même le pouvoir des états. L'image est un écran interposé entre soi et la réalité
et même si des scènes de guerre envahissent l'écran, ce ne sont justement que
des scènes de guerre et non la guerre elle-même.
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Les objets matériels deviennent eux-mêmes des images, selon Jean Baudrillard,
ils ne sont plus achetés pour leurs utilités mais pour leur séduction. Le monde
n'est plus fait que de simulacres. Tout objet devient symbolique, une
représentation de soi au regard des autres. Baudrillard distingue le simulacre de
la copie. La copie reste dans un rapport de référence à un original alors qu'un
simulacre est entièrement dans la simulation et passe pour valoir en lui-même.
Imaginer ce n'est pas nier le réel. Comme l'a écrit Bachelard « imaginer c'est
hausser le réel d'un ton ». Or les images produites par notre société sont des
images composées et imposées toutes faites au consommateur. Paradoxalement,
plus il y a d'images et moins on imagine.
L'homme est celui qui peut mettre à distance le réel immédiat grâce à l'art, au
rêve, en somme grâce aux créations de l'imagination. Aujourd'hui nous n'en
sommes plus les créateurs mais les consommateurs. Il faut admettre que,
derrière l'écran, il ya la mort, alors que, dans notre esprit, vit l'imagination.
La salon de 1859
Considérant que les contraintes formelles sont un puissant stimulant pour l'imagination, l'Oulipo s'est
fixé plusieurs directions de travail :
24
t Raymond Queneau, Italo Calvino ou Georges Perec, (La Disparition, romans sans « e »)
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