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University of Toronto

littp://www.arGliive.org/details/oeuvrescomplt04augu
OEUVRES COMPLETES
DE

SAINT AUGUSTIN

TOME QUATRIÈME
Cette traduction est la propriété des Editeurs, qui se réservent tous leurs droits. Toute contrefaçon

ou reproduction, quelle que soit la forme sous laquelle elle se présente, sera poursuivie rigoureuse-

ment , conformément aux lois.

(
ŒUVRES COMPLÈTES
DE
I

SAINT AUGUSTIN
TRADUITES POUR LA rUEMlEKE FOIS EN FRANÇAIS

SOUS LA DIRECTION DE M. RAUEX


Aum6nier de l'Asile de Fains.

TCM^Î (QUATRIÈME

COMMENTAIRES SUR L'ÉCRITURE


Doctrine chrétienne — Genèse — Hepîaleuque — Job

Je voudrais joindre ensemble saint


Augustin et saint Cbrysostome :

l'un élève l'esprit aux grandes


considérations; l'aulre le ramène
a la capacité du peuple.
[Boss. Ed. de Bar, xi, 4-11.)

BAR-LE-DUC, L. GUÉRIN & C\ ÉDITEURS

18G6
IHE INSTITUTF Cr '
STUD:£3
ELM3L..
10 ,,_£
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T&.10NÏ0 e, CAiJADA.

DEC -3 1931

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ŒUVRES

DE SAINT AUGUSTIN.

G C) M M K N r A B S S
1 ! : [ T H l. '
KC I { 11' UR 1^:.

DE LA DOCTRINE CHRETIENNE.

l'UOLOGlE.

II. n'ksC I'AS IM III.K u'ENSElf.NKit A IMKiil'UKTKI! I.KCIIITI liK SVIM'K.

I.llya pour rinliM-jH'élatioii de l'Ecrifiiiv, ri. Qiiel(iues-uns censureronl cel ouvra>;e,


(les rèîles qip l'on in>;it, je ciois, doniior ,i\cc parce ne conipreiulronl pas les règles
([u'ils

avantage ù ceuX' qui s'iii)plit(uent à les étudier : (|ue j'y dois établir. Daiilrcs en auront l'intel-
ils en profiteront, iion-senl 'ment quand ils ligence; m:iis quand ils voudront les appli-
liront les œuvres de l'eux (jui ont poilé la lu- ([uer, quand ils cherclieront à s'en servir pour

mière dans les passages obscurs des divines l'interprétation des divines Ecritures, et qu'ils
letlrcs, mais encore lors(|n'iis en donneront se verionl dans l'inqiossibilité de découvrir
au-v autres l'inltiligence. J'ai i-ésolu de l'onnu- et d'expliquer ce qu'ils désirent, ils penseront
ler ces préceptes en laveur de ceux qui ont le que je me suis livré à un travail inutile. N'y
désir cl la faculté de les apprendre, pourvu trouvaîit aucim secours pour eux-mêmes, ils
toutefois que noire Dieu et Seigneur ne me jugèrent qu'il ne peut servir davantage h
l'elïise poinl pour les écrire, les inspirations personne, il se renrontrera une troisième
((u'il a coulunie de m'euvoyer quand j'y rélli'- espèce de censeurs, parmi ceux qui en réalité
chis. A\ant de commencer, je crois devoir interprètent ou croient bien inlerpréler les
l'épondre à ceux qui blâmeront mon dessein, livres sainW. Sans avoir jamais hi aucune règle
ou qui le blâmeraient, si je ne préven lis leur du genre de celles que j'ai dessein de tracer,
critique; et si malgré mes observations, cer- ils croient à tori ou à raison qu'ils ont obtenu
tains esprits persisleni à censurermon œu\re, la gr.ice de commenler l'Ecriliu-e, et ils crie-
du moins ne feront aucune impression sur
ils ront partout que ces règles ne sont nullement
les autres ils ne les détourneront
: pas d'une nécessaires, etque tout ce que l'on peut dé-
niile élude pour les jeter dans une iguoraide couvrir de salutaires clartés dans la profon-
paresse, comme ils auraient pu le l'aire, si l'on deur des divins oracles esl dû exclusivement
n'était prémuni et fortifié contre leurs atta- à l'assistance divine.
ques. 3. Je répondrai à tous en peu de mots. \
S. .Vio. — T(),ii. IV. I
DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE

icii\ i(iii né conipreiinent pas les préceptes privilège. Ce qu'ils ne peuvent nier toutefois,
que je trace, je dirai (pic leur défaul (l'intelli- c'est (pie nous avons tous appris notre piopre
gence n'est pas un niotit de me ccnsiuer. langue par rhabilude de l'eiilendre parler
Pourraient-ils me censurer, si, voulant voir à dès notre première enfance, et que c'est de la
son déclin ou à son croissant la lune ou tout même manière, ou par les lc(;ons d'un pré-
autre astre peu apparetj,', la faiblesse de leurs cepleur, que nous avons acquis la connais-
yeux ne leur permetlait pas même d'aperce- sance de toute autre langue étrangère, grec-
voir mon doigt qui le leur monlre ? Pour ceux que ou hébraïque, peu importe. Maintenant
qui, môme avec la connaissance et l'inlelli- dirons-nous à tous nos frères de ne plus en
gence de ces règles, ne pourront pénétrer enseigner aucune à leurs enfants, parce qu'en
dans les obscurités des divines Ecritures, qu'ils un instant les apùtres remplis des lumières de
se regardent comme capables d'apercevoir l'Esprit-Sainl descendu sur eux, se sont mis à
mon mais non les astres vers les(piels
doigl, parler les langues de toutes les nations ou ;

je le pour les leur indiquer. Qao les


dirige que celui qui n'aura jias rei.'ii des dons sem-
uns et les autres cessent donc de me l)himer, blables ne doit pas se regarder comme cliré-

et qu'ils conjurent le ciel de coinmuni(picr à tien, mais douler s'il a reçu le Samt-Esprit?
leurs yeux la lumière. Si je puis mouvoir mon Loin de là; que chacun de nous apprenne
doigt pour indiquer, je ne puis donner des humblement de l'homme ce qu'il doit appren-
yeux pour l'aire voir le mouvement que j'im- dre de lui, et que celui qui instruit les autres
prime ni l'objet que je désigne. comniuniipie sans orgueil el sans envie ce
4. Venons à ceux qui se lèlicitent des dons qu'il Ne tentons point non plus celui
a reçu.
du ciel, qui se glorifient de comprendre el à qui nous avons donné noire foi; trompés par
d'exposer les sainis Livres, sans le secours de les ruses et la perversité de l'ennemi, peut-
préceptes semblables à ceux que j'ai dessein être pour entendre
refuserions-nous, et ap-
de formuler, et qui, pour ce motif, s'arrèlent prendre l'Evangile même, d'aller dans les égli-

à l'idée que je n'ai entrepris (pi'un travail su- ses en lire le texte sacré, ou en écouler la lec-
perflu. Sans doute ils peuvent se réjouir des ture et la prédication; peut-être attendrions-
dons précieux qu'ils ont re<;us de Dieu; mais nous que nous fussions ravis jusqu'au troi-
pour lenqiérer l'amertume de leurs criticpies, sième ciel, soit avec notre corps, soit sans
l'.e doivent-ils i)as se rappeler que c'est de la not'C corps, ainsi (|ue s'exprime l'ApiJtre, pour
boucbe des hommes qu'ils ont re(;u la con- y enlendre des paroles ineffables « qu'il n'est
naissance des lettres mêmes? Parce qu'An- « pas permis à l'homme de rapporter •, » pour
y
toine, ce saint et parfait solitaire d'Egypte, voir Jésus-Christ, notre Seigneur, et recevoir
parvint, sans aucune connaissance des lettres, l'Evangile de sa bouche, plut<')t que de celle

?i retenir de mémoire les divines Ecritures, qu'il des hommes.


lui suffisait d'entendre lire, et à en acquérir fi. Loin de nous de telles prétentions, elles

l'intelligence par ses sages méditations, a-t-il sont trop pleines d'orgueil et de dangers; rap-
le droitde les insulter ? A-t-il aussi ce droit, pelons-nous plutôt qu'instruit par la voix di-
l'esclavebarbare devenu chrétien, de qui nous vine qui l'avait terrassé du haut du ciel, Paul
ont parlé dernièrement les hommes les plus lui-même fut envoyé vers un ho;nnie pour
graves et les plus dignes de loi? Sans aucun recevoir de lui les sacr(>ments et être incor-
maître pour lui enseigner les lettres, il en ob- poré à l'Eglise 2. Après avoir appris de la bou-
tint par ses prières une pleine connaissance; che d'un ange que ses prières avaient été
d supplications, il put,
car, après trois jours ; exaucées, et ses aunK'ines agréées de Dieu, le
au grand étonnement de ceux qui étaient là, centurion Corneille l'ut également adressé à
parcourir à la lecture le volume qui lui fut Pierre pour être baptisé de sa main. Il devait
présenté. non-seulement recevoir de lui les Sacrements,
o. révoque en doute la véracité de
Si l'on mais encore apprendre ce qu'il faut croire, ce
ces faits, je lutteiai pas. Mais je m'adresse
ne qu'il faut espérer et ce qu'il faut aimer •'.

à des chrétiens qui se nalteni de connaître les L'ange, sans doute, pouvait faire tout cela;

Ecritures sans le secours de l'Iionmie; o'il en mais la condition de l'homme serait bien vile,

est ainsi, ils jouissent assurément d'un grand I


U Cor. XII. 4 — '
Act. l.v, 3-7. — '
Ibi.l. x, 1-fi.
IM<()LO(;iIK.

si Itk'ii sciiiltliiit iif Noiiloir pas Iraiisiiicllri' sa ";.;i'nl ctiin- les ni.iins di-s tiaïKpiiei's -? » (^es

parole aux homincs |tar l'oivaiu- dfs li )iiiiii('s. lidunnes livrent à d'autres, par' leurs discours
Kli I comnuMil soiail viaii- irllc maxime : « Le ou leurs écrits, ce (pi'ils eomprennenl dans les

•> temple de Kieii est saint et vous (Mes ee lein- Ecritures, et moi, si je liviv à mon tour, non-
c pie ', » si Dieu ne rendait point d'oracles du seidemeid ce ipi'ils coiuprenuerd, mais encoi'e
sein <le ee temple iiumain, s'il ne taisait plus les régies à observer poiu' bien ('(inqii'endre,

enteiiilre (pie du liant du eiel el par le minis- |)ourront-ils m'en


un crime? l'ersomiefaire

t('re des anjies, tout ee (pi'il xent l'aire coimai- ni' doit rien ((insidérer connue sa i)ro|)riété, si

tre aux lionnnes? l'jisuile, si nous n'asions ee n'es! peid-élre le mensonge, 'l'oiil ce ipii est
rien à apprendre de nos semblables, la charité vrai procède de Celui (pii a ilil : < .le suis la

elle-m("'mc (pii nous ('Ireiiit dans le nceud de ' Uu'avons nous en eMét (pu- nous
véril('' '. "

runil(', ne poiurait plus travailler an m('lan;:c n'avons point rec.u ? Et si nous l'avons re(;n,
et à la fusion des e(eurs. pourquoi nous en glorifier comme si nous ne
7. Aussi l'ApiMre ne ren\o\a jxiint à im l'avions point reçu'-?
ange cet ennu(iue (pii lisait le proplu'le Isaie !t. (^eiui (|ui lit en présence d'auditeurs (|ui

sans comitrendrc; et ce qu'il n'entendait


le savent lire, exprime sans doute ce qu'il con
point ne lui lut ni expliqué par un ange, ni nait; mais celui qui enseigne les lettres, ap-
découvert intérieurement par une rinélation prend aux aidres à lire chacun d'eux néan- ;

(li\ine, sans le eoneours d'aucun lionnne. Une moins ne communique (pie ee qu'il a re(,'u. De
inspiration céleste lui adiessa Philippe, qui même exposer ce qu'on comprend dans l'Ecri-
connaissait le inophète Isaie cet ap(Mre s'assit
; ture, c'est remplir en (pielipie sorte l'office du
près de lui, et dans un langag(> humain lui lecteur (pii lait entendre les lettres (pi'il con-
découvrit ce ([ue cette propla-lie avait d'obsciu' naît; mais tracer des règles pour conduire à
pour lui. Moïse ne conversa-t-il pas avec Dieu? rinlclligence de l'Ecriture, c'est ressembler au
Cependant il r(vut avec prudence et sans or- maiire qui enseigne les lettres, e'est-à-dire
gueil le conseil que lui donnait son beau- (|ui apprend à lire; et si celui qui sait lire

père, un étranger, pour le gouvernement et n'est point, quand il un ouvrage,


rencontre
railminislration d'un peuple si nombieux. Ce dans la nécessité de recourir à un lecteur
grand lionnne savait (jue, quel (|ue soit celui étranger poiu' connaître ce qui y est écrit, celui
qui dicte un sage conseil, il faut l'attribuer qui aura été instruit des règles que Je travaille
non à celui qui !e donne, mais au Dieu im- à formuler, pourra également s'en servir
muable qui est la V('rit('' même. comme des lettres ; et s'il vient à rencontrer dans
S. Enlin, celui qui sans avoir étudit' aucun les Saints Livres quelque passage obscur, ilne
précepte, remercie le ciel de lui avoir donné sera point forcé de chercher un intei-prcfe pour
1 intelligence de toutes les obscurités de l'Ecri- en comiirendre le sens caché; mais en mar-
ture, ne se trompe point, car il est
celui-là chant dans la voie qui va s'ouvrir, il le péné-
vrai que de lui-même il n'a pas cette intelli- trera lui-même sans erreur, du moins sans
gence; elle ne vient pas (le lui mais du ciel: tomber dans une interprétation absurde ou
ainsi, il cherche la gloire de Dieu el non la dan.geieuse. Cet ouvrage même pomra montrer
sienne. Cependant, s'il lit et comprend sans suflisamment que mon travail est utile et que
aucun interi)rètre humain, pour(|uoi affccte-t-il c'est à tort qu'on voudrait le blâmer cepen- ;

d'exijliquer lui-même aux autres? pourquoi dant si l'on juge que par ces observations pré-
ne les renvoie-t-il pas à Dieu? Eux aussi ne liminaires, nous avons convenablement ré-
devraient rien à l'homme et ne seraient éclairés pondu h tous nos détracteurs, voici ce qui
que par l'enseignement du Maître intérieur? s'offre à nous dès l'entrée de la carrière où
il craint sans doute d'entendre « Mauvais ser- : nous voulons marcher.
« viteur, pom-quoi ne mettrais-tii pas mon ar- ' Jean, xiv, 7. — ^ l Cor. iv, 7.

I
I Cor. IV, 17. — 2 Mattli. xxv, 27.
LIVRE PREMIER.

Hoiiiilriiiiivrii Ir seiisili' IKiTiluir, il laul se rappi'lcr <{Ut' luiil ce (luclle roiii|iiTiiil s<" (livise en choses el en signes, l'aijni les
elioscs, il en esl iluiil rmUs pouvons jouii- ; il en esl il'aalrcs donl nous ne pouvons (|iie laii-e usage. A Dieu seul nous ilevons
nous alUelier pourjouii de lui, e'esl à celle jouissance que nous romluisenl les mystères ilu Vevbe incan.é el l'auloVité confiée
à rKglise. Tout le cesle, même ce (pie nous devons ainiei-, esl slmplemenl destiné noire usage, ptiisipie cet amour doit èti-e il

ratlaclié Dieu, .\insiioute l'Ecriluce se lappoile andouMe i)i'écept<: de la cliariu'. ii l'ainonr


il Oieu pour lui-même el ii l'amour ii

du prochain |iar rapporl Dieu. il

à peine eut-on commencé à les distribuei-,


CHAPITRE PHEMIKK. qu'après en avoir rassasié plusieurs milliers
d'hommes, on en remplit des corbeilles et des
PIIIK TRAITEK UE l'ÉCRITIHE, IL F.\UT SAVOIR
paniers entiers '. De même donc que le pain se
K.N lIKCdlvniU ET EN EXPOSEU LE SENS.
multiplia sons les ma'ns qui le rompaient,
ainsi ce que Dieu nous a déjà donné pour en-
1. 1,'intorpiotatioii île rEcrilurc comprend
treprendre cet ouvrage, dès que nous aiu'ons
deux choses : la iiiunièic de découvrir ce que
manière d'expo-
commencé à le communiquer, se fécondera
l'on y doit comp.reudie, et la
sous le souille de sou iuspiralion, el loin de
ser ce que l'on \ a ciininfis. Nous parlerons
nous trouver jamais réduit à la disette dans
successivement de la première et de la seconde.
le cours de notre tàihc, nous aurons à nous
C'est une grande et dillicile entreprise; u'est-il
réjouir au sein d'une merveilleuse abondance.
donc pas téméraire de m'y engager? Oui, sans
doute, si nous présumions de nos forces; mais
loul notre espoir de mener à bonne lin cet CHAPITRE II.

ouvrage, repose en Celui dont nous avons déjà


reçu dans nos méditalions Ijien des lumières LES CHOSES ET LES SIGNES.
sur ce sujet, nous ne doutons point qu'il ne
et

nous accorde celles qui nous manquent, dès Tout ensei'iucment a pour objet les choses
2.

que nous aurons commencé à communiquer on les signes; c'est par les seconds qu'on ar-
(elles qu'il nous a départies. Car posséder sans l'ive à la connaissance des premières. J'ai>pelle

la donner une chose qui se donne sans s'épui- proprement chose ce (pii ne sert pas à déter-
ser, c'est ne pas la po'^séder encore comiriO il miner un au!i-e objet, comme le bois, la pierre,
convient. Or, Dieu a dit : « Quironqiie a déjà, un animal, ou tout être sembhblc. Ceci donc
on lui donnera encore '. » Il donnera donc
« ne s'applique pas an bos que Moïse, au rap-
à ceux qui possèdent, c'est-à-dire, que si on port de l'Ecriture, jeta dans les eaux amères
use aveo lari;esse de ce qu'on a reçu, ii rem- ponr les adoucir 2, ui à la pierre que Jacob
[dira et comblera la mesure qu'il a conliée. avait posée sous sa tc!e », à l'animal qu'A-
Ici il n'y avait que cinq pains et là que sept, braham immola en place de son fds •'. Car ce
avant de les donner à une nudlitude affamée; > Matlh. \iv, 17-2Î; .vv, 31-:ia. -2 Exoil. XV. 2fi. • fie

I
Mutlii. Xll:, 12. \xrm. II. - * Ibid. .\.\ll. 13.
HVIIE l'IlE.MIKU. —CONNAISSANCE DES CHOSES.

bois, cell(' pierre et cet aniin:il, (iiilrc l.i pro- qu'on aime, si toutefois il peut être aimé. Car

h priék'
" signes
il.iiil
il

l'iisagiî
iMro
»
« clios.>>,

iratilics clioses.
exclusif
»

esl
ont eiifiin'
Or
île
il

sigiiilier
celle d'iMn-
est îles signes

(|iioliiue
user d'une chose pour une fin illégiliinc, c'est
moins nii usage ipi'uii abus. Représentiins-
noin donc comme des vo)a',renrs qui n'ont de
chose; telle est l.i pirole que l'on n'emploie bonheur à attendre ipie dans la pairie; dési-
jamais qu'à celle (in. Ou compreiiil ilés lors reux de la rejoindre pour inetlre un terme aux
que j eiilemls par sij,MU', » ce qui s'emploie
< pleines cl aux misères de l'exil, nous avons

pour ik'sigiier ipulque ciiose. Ainsi tout sij<iie besoin demiilover les véhicules nécessaires
esl en même temps une certaine ciiosc, aulrc- |)onr nous transporter sur terre ou sur mer
meiil il ne ser.iil .ihsolument rien; mais toule jusipi'à celle pairie dont nous voudrions jouir.
chose n'est pas un signe. C'est pourquoi, ilans .Mais si, captivés parles beautés du vojage et

celte division des choses et dessignes, lorsque les douceurs mêmes du Iransporl, nous nous

nous traileroiis des choses, il pourra s'en ren- arrêtons à jouir de ce dont il (allait seulement
f inU'er plusieuis qui aient la propriété de si- user, alors nous désirons voir la voie se pro-
gnilicr; m.iis nous en parlerons de manière longer, et sous l'empire d'un plaisir (unesle,
à ne pas renverser l'ordie d'après lequel nous nous oubli ins la patrie dont les charmes de-
iK-soiis Iraiior d'abord des cii,)ses eî ensuiL' des vaient nous rendre heureux. Ainsi en est-il
signes; el r.ippeions-nous que
nous n'avo;is à dans le cours de celle vie mortelle où nous
consuiorcr ici dans ies choses que ce qu'elles voyageons loin du Seigneur s'il est vrai que '
;

so.it en e.L's-memes, et non ce qu'elles peu- nous soupirions après la patrie oii se rencon-
vent signiiier d'aUieurs. tre le vrai bonheur, il faut user de ce monde

et non pas en jouir; il taut s'en servir pour


CHAPITRE III.
découvrir et admirer dans l'image des créatu-
res, les grandiHirs invisiblesdu Créaleur ', et
UiVISION UES CHOSES.
s'élever ainsi de la vue des dioses sensibles et

i. Il _\ a des choses dont il laul jouir, d'au- passagères à la coiilemplalion des choses spi-
Ires il>)nl il laut user, d'auires cnlin qui sont rituelles et permanentes.
appeiees à cetic jouissance et à cet usage. Celles
CHAPITRE V.
dont on doit .|ouir, nous rendent heureux,
(belles dont on doit user, nous soulieniienl L()B.IET DE NOTRE .lOLISSANCE EST LA
duiis nos elïorls vers la Dealiludc, et sont SALXTE TniMTÉ.
comme aulaiil d'appuis et il'echelons à l'aide
ilesquels nous nous unir
[)ou\oiis i)ar\eiur ei La Trinité sainte, l'ère, Fils et Sainl-Es-
'>.

à l ojjet qui doit iaire noire nonheur. four pril, tel est donc l'objet de notre jouissance.

nous, destines à la jouissance et à l'usage de Chose unique dans son excellence et conimune
ces CHOSES, nous souunes places entre les pre- à tous ceux qui en jouissent, si toulefois nous

mières nous voulons jouir


et les secoiides ; si
pouvons l'appeler une chose, et non pas plutôt
de cènes dont il nous
lauaiait seuicuient user, la cause de toutes clioses et encore ce dernier ;

enlra\oas notii' ni.iiviie, et pariOis même nous terme sultil-il pour l'exprimer? Car il est
lui mipnmoiis une lausse dueclion, en sone dillicile de trouver im nom qui convienne à
que l'amour des ineus inlerieurs qui nous en- un Elle si sublune, et ce que nous avons en-
lace, retarde pour nous, si même il ne l'éloi- core de plus expressil', est île dire que celte
gné paur jamais, la possession de ceux qui Trinité sainte est le Dieu unique, principe,
doivent être l'oojel de notre jouissance. soutien et lin de toutes choses ''.
.Viiisi le l'ère

et le Fils et l'Esprit-Saint sont chacun Dieu, el


tous ensemble ne sont qu'un seul Dieu; cha-
CHAPITRE l\.
cun d'eux possède la plénilude de substance,
et les trois ne sont qu'une même substance.
UE LA JOLISS.VXCE ET DE l'US.VGE
Le Père n'est ni le Fils ni l'Esprit-Sainl; le
i. Jouir, c'est s'allacher par amour à une Fils n'est ni le Père ni lEspril-Saint, et l'Es-
chose pour elle-inème. User, c'est faire servir pril-Saint n'est ni le Père ni le Fils, mais le
ce qui tombe sous l'usage, à obtenir l'objet I
II Cor. V. 6. ' Rom. I, 20. — ' Rom. ti. 3S

5611
DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

Père est seulement le le Fils seulement


Père, ceux-mêmes qui se figurent d'autres dieux
le Fils, et l'Esprit-Saint seulement l'Esprit- dans le ciel ou sur la terre, à qui ils rendent
Saint. Aux trois appartiennent la même éter- des vœux et îles hommages, toujours ils se le

nité, la môme immutabilité, la même majesté représentent comme la nature la plus excel-
et la même puissance. L'unilé est dans le Père, lente et la plus sublime que leur esprit puisse
l'égalité dans le Fils, et dans l'Esprit-Saint le concevoir. Mais ils sont touchés par des biens
lien de l'unilé cl de l'égalité. Et les trois sont de différente nature, les uns par les plaisirs

tous trois un dans le Père, tous trois égaux des sens, d'autres par les plaisirs de l'esprit.

dans le Fils, et tous trois unis dans l'Esprit- Ceux donc qui par les sens,
se laissent captiver
Saint. regardent comme le Dieu souverain le ciel,
ou ce qu'ils y voient de [)lus éclatant, ou le
CHPIÏRE VI. monde lui-même. Et ceux dont les concep-
tions s'élèvent au delà des limites de cet uni-
DIEU NE PEUT SE DÉFIISIR.
vers, imaginent quelque substance lumineuse
Avons-nous dit et lait entendre un seul
tt.
qu'ils supposent infinie, et à laquelle ils prê-
mot digne de Dieu? Non, san;^ doute, et je tent, dans leurs vaines lictions, telle forme
qu'ils jugent la plus parfaite; ils lui attribuent
sens bien n'avoir eu que le désir de le l'aire,
car ce que j'ai pu dire n'est pas ce que j'ai même la figure du corps humain, quand ils la
voidu dire. Si j'en ai la conviction, n'est-ce préfèrent à toutes les autres. S'ils n'admettent
pas parce que Dieu est ineliable? Et si ce que pas l'existence d'un Dieu souverain de tous les
j'ai dit était inellable, aurais-je pu l'exprimer? dieux, mais en imaginent un nombre infini

Comment même dire de Dieu qu'il est inella- de même ordre, ils se représentent toujours
ble, puisque tout en lui appliquant cette chacun d'eiuvforme corporelle qu'ils
sous la

expression, c'est en dire quelque ciiose? Il


jugent lapins parfaite. Quant à ceux qui cher-
existe ainsi je ne sais quelle contradiction chent à découvrir par l'intelligence ce qu'est
dans les termes; car si l'on doit regarder Dieu, ils le placent au-dessus de toutes les na-

comme ne peut s'exprimer,


inelïable ce qui tures \isiijies et corporelles, au-dessus même
ce dont on peut dire seulement qu il est inef- de toutes les substances intelligentes et spiri-

fable, n'est plus Prévenons par le


ineffable. tuelles, au-dessus de tous les êtres inuables.

silence celte lutte de mots, plutôt que de cher- Tous proclament à l'envi l'excellence de la na-

cher à y mettre un terme par la discussion. ture di^ine, et pas un seul ne se rencontre qui
Dieu cependant, dont on ne peut dignement regarde Dieu comme im être inférieur à quel-

parler, n'a point dédaigné l'hommage de la (ju'autre que ce soit. Ainsi tous reconnaissent
parole de l'homme, et il nous a lait un devoir d'une voix unanime pour Dieu toute substance
de célébrer avec joie dans noire langage ses qu'ils estiment au-dessus de toutes les autres.
louanges et sa gloire. De là le nom même de
Dieu, Deus, que nous
CHAPITRE VIII.
lui donnons. Ce n'est
pomt assurément le son de ces deux simples DIEU est L.V sagesse LM.MU.4BLE ET DOIT ETRE
syllabes qui le fait connaître mais lorsqu'elles
;
PRÉFÉRÉ A TOUT.
viennent frapper les oreilles de tous ceux qui
comprennent la langue latine, elles éveillent «S. Tous ceux (|ui former
s'appliqueiU à se

aussitôt dans leur esprit la pensée d'une na- l'idée de Dieu, le conçoivent na- comme une
tm'e hnmortelle et souvei'aine dans son excel- ture vivante; mais ceux-là seuls évitent de
lence. tomber dans des pensées absui'des et indignes
de la divinité, qui le conçoivent comme la vie
CHAPITRE Vil. même. Car toutes les formes corporelles cpii

s'offrent à leurs regards leur apparaissenl \\-


TOUS LES HOMMES COMPRENNENT SOUS L'IDÉE vantcs ou inanimées, et ils préfèrent celle qui
DE DIEU l'Être le plus excellent. possède la vie à celle qui en est privée. Ils

comprennent aussi que cetli' forme cor|)0-


1. Quand, eu effet, les hommes s'arrêtent à relle vivante, quels que soient l'éclat doid
considérer le Dieu souverain, et je parle de elle brille, la gi-andeur qui la distingue et la

Z
LIVRE PKEMIKR. «lONNAISSANCE DES CHOSES.

liiNiulc (lonl cIIp osl oniéo, n'est pas Ifi iiuMin'

l'IiDSi' (]iii' la vie ([iii l'aniine, cl ils alli'iliiii'til CII.MMTKE X.


à fi'tic vil' une excellence iiieomparaljle sur la
iTiiEi'i; k'amk NÉcKssAniE l'oni voni niEr.
nialière à la(|iiclle elle es! unie. S'allaclieiit-

ils ensuite à considérer la vie en elle-niènie .'

Ml. Nous sonwnes doue destinés à jouir de


lis csliinenl Itien supérieure à la \ ie piu enieni
cette véiité toujours vivante et immuable, et
véfjétalivc (les plantes, la vie sensilive des ani-
par hupielle la Triinte sainte, le Itien sonve-
maux, et plus paii'aiti' (pie celle dernière, la
roiu de l'univers, gouverne toidesses (wvalures.
vie Intelligente de l'hoinine. l'Yappés de non-
Or, il faut pnrilier notre e(eiir |)our le rendre
veau (lu caraeU're de nudaltilili' de c(>lle vie
capable d'aiiercevoir cette divine lumière et de
intclligcule, ils se voient forcés de lui pr(''r(''rer
s'\ attacher une Ibis cpi'il l'aura contenqilée.
encore une autre vie inaccessitjle au eliange-
Elablir en nous cette pureté, n'est-ce pas en
uieut, c'est-à-dire celle vie qui ne s'écarte
(pielque sorte marcher ei naviguer vers la pa-
jamais des |)i'iucipes de la sage.sse, et qui est
trie ? (^ar Dieu est partout, et on s'approche de
[iroprcincnt la sagesse même, (-ar l'esprit
lui, non par les monvemeids du corps, mais
dont on dit ((u'il est sage, c'est-à-dire (pi'ii a
par la pureté des désirs et l'innocence des
acquis la sagesse, n'était point sage avant de
mœurs.
l'avoir acquise; tandis ([ue la sagesse par es-
sence n'a jamais cessé ne peut jamais cesser
et CHAPITRE XI.
d'ôti-c sage. Si les hommes ne connaissaient
celte sagesse, ils ne préléreraient pas ainsi sans L.\ SAGESSE INCAUNÉE NOUS APPIIENI) A PUUIEIER.
hésiter la vie immuahlemenl sage à la vie su- NOTHE COEUR.
jetteau changement. Car la règle de vérité
elle-même (jui leur lait |)tu'ter ce jugement, M. Nous serions sur ce point dans une im-
leui' apparaît avec ce caractère d'iminutahiJili', puisssance absolue, si la Sagesse elle-même
et celadans une région supérieure à leur pro- daignant s'acconnnoder à notre profonde in-
pre natm-e, puisipi'ils voient ou euv 1(^ clian- firmité, ne nous eût donné un modèle de vie,
gemenl et la vicissilude. dans une nature sendjiable à la niitre. Mais si
la sagesse pour nous est d'aller vers elle elle, ;

CHAPITRE IX.
en venant à nous, a passé aux yeux des

Tors l.KS 'UOMJIES POUTEXT LE UKME JUGEMENT.


houunes superbes comme ayant lait une folie.
Etsi nous retrouvons la force en allant à elle,

U"i serait assez insensé pour oser dire


!•. :
elle, en venant vers nous, a été regardée comme
Conmienl sais-tu qu'on doit préléi'er la vie et faible et infirme. « Mais ce qui parait en Dieu
la sagesse immuables à la vie sujette au chan- « une folie, est plus sage que tous les hommes,
gement? Cai' la vérité dont on me demande « et ce qui parait en Dieu une faiblesse, est

l'origine, brille d'un éclat égal et invariable « plus fort ((lie tous les hommes '. » Elle était
aux jeux de tons leshommes. Ne pas la saisir elie-mème la patrie, et elle s'est abaissée jus-
c'est ressembler à un aveugle en plein soleil ;
qu'à devenir la voie qui nous y conduit. Par-
il ne lui sert de rien de recevoir sur les yeux tout présente et visible à l'o-il du C(Pur qui
les rayons d'une lumière aussi resplendissante. est pur et sain, elle a daigné aussi se mon-
Mais malheur à qui la voit et la fuit! la viva- trer sensiblement à ceiLx dont cet œil inté-
cité émoussée dans l'amour
de son esprit s'est rieur était malade Car Dieu vovanl
et souillé. «

des ombres cliarnelles. Et c'est ainsi que les « que le inonde avechumaine ne la sagesse
désirs dépravés de leur cœur, comme autant « pouvait le connaître dans les ouvrrages de
de vents contraires, entraînent les hommes « sa sagesse divine, il lui a plu de sauver par
loin des rivages de leur patrie, pendant qu'ils « la folie de la prédication ceux qui croiraient
s'attachent à des biens périssables et de moin- " en lui '2. »

dre valeui- que ceux dont ils reconnaissent la '


I Cor. I, .15. — 5 Ibid. l.il.

supériorité et l'excellence.
DE LA bOCTKlNE CHREïlENiNE.

ble proportion, la Sagesse, en revêtant la na-


CHAPITKE Xll. ture humaine, a su proportionner ses remèdes
à nos blessures, nous les appliquant tantôt d'une
COMMENT LA SAGESSE DIVINE EST VENUE A NOUS.
nature contraire, tantôt d'une forme semblable
à celle du mal. Le médecin qui soigne une
12. Ce n'est donc point en franchissant les
blessure du cori)s, emploie les contraires; il
espaces qu'elle est venue à nous, mais en ap-
combat, par exemple, le chaud par le froid, le
paraissant aux yeux tics nioi'teis sous l'envelop-
sec par l'humide, et ainsi du reste. Il em-
pe d'une chair niorlelle. Elle estdonc aussi venue
ploie aussi les semblables; ainsi il applique un
là où elle était dijà, puisqu'elle était dans ce
linge de forme arrondie on allongée à une bles-
monde, et que par elle le monde a été lait.
sure de celte forme il ne fait pas servir la
;
Mais entraînes par la passion de jouir de la

créatme plutôt que du Créateur, les hommes


même ligature pour tous les membres sans dis-
tinction, mais il la réserve pour ceux auxquels
qui 6C conformaient à l'image de ce inonde, el
elle peut naturellemenl s'adapter. C'est ainsi
méiiiaieiit ainsi d'eu i)orter le noui, n'ont
que la Sagesse divine s'est montrée elle-même
point connu celle sagesse; ilc là celte parole
dans ce qu elle a fait i)0ur guérir l'homme, se
de l'évangéliste inonde ne l'a pas
: « Et le
donnant à la fois et comme médecin et comme
" connu '. > Ainsi le monde avec la sagesse hu-
remède. L'homme était tombé par orgueil;
maine, ne pouvait connaître Dieu dans les ou-
elle a eu recours à l'humiiilé ])our le relever,
vrages de sa s.igesse divine, l'onrquoi tlouc
La sages.se du serpeni nous avait trompés la ;
est-elle venue là ou elle était, sinon parce
folie de Dieu nous désabuse. La divine sagesse
qu'il a plu à Dieu de sauver par la folie de la
n'était que folie aux >eux de ceux qui mépri-
prédication ceux qui croiraient en lui Et '{

saienl Dieu; et la ilivine folie es! devenue la


comment est-elle venue? N'esl-cc pas quand
véritable sagesse pour ceux qui triomphent du
« leVerhe s'est fait chair el qu'il a habile par-
démon. En abusant de l'iinmoiiiililé, nous
tinii nous 2 ? » (Juand nous p.iilons, la pensée
avions jenconlré la mort; le Christ nous a fait
intime de notre cœur devient un son, c'est-à-
retrouver la vie dans le bon usage qu'il a fait
dire la parole sensible qui transmet cette pen-
de notre mortalité. C'est du cœur corrompu
sée à l'esprit des auditeurs, en frappant leurs
de la femme que s'élait répandue la contagion;
oreilles charnelles; et cette pensée néanmoins
c'est du corps pur et saint de la femme que
ne se change pas en la nature de ce même son,
nous est venue l.i guérison. A ce même genre
mais, conservant toute son intégrité sans au-
de remèdes contraires appartiennent les vertus
cune trace d'altération ni de changement, elle
du Christ, dont l'imilalion tend à déraciner nos
lie lait que revêtir la forme extérieure d'une
vices. Voici luainlenant les app.ireils coulonues
voix qui l'insinue aux oreilles. Ainsi en est-il
à la nature du mal, el semblables, pour ainsi
du Verbe divin; sans changer sa nature, il s'est
dire, à des ligalures adaptées à nos membres
fait chaii' pour habiter au milieu de nous.
malades et à nus blessures. Il est né de la
CHAPITRE XIV: femme pour délivrer ceux que la femme avait
perdus; il s'est fait homme pour sauver les

comment la sagesse divine a guéri hommes, mortel pour sau\er les mortels, et
l'homme. par sa mort, il a racheté ceux que la mort avait
frappes. Il est bien d'autres traits semblables
IH. Cette divine Sagesse a voulu guérir et plus au long à ceux
que je laisse à considérer
lorlificr les pécheurs à la manière dont on comme moi dans
qui ne sont pas la nécessilé
rend la santé aux malades. A l'exemple des mé- de poursuivre un ouvrage commencé; ils s'ins-
decins qui s'appliquent à bander les blessures, truuont inerveilleusemeulen voyant l'économie
non pas sans ordre, mais avec un ceriain arl
de la médecine chrélienne employer ces re-
qui ajoute à l'utilité de leur appareil une agréa-
mèdes, semblables ou coniraires.
' .ToJin, I, 10. - - Ihiil. I, 14.
LIVRK PIlKMIKIl. - CONNAISSANCE DES CHOSES.

les, aliii qu'après l'avoir liiée du siècle pii-senl,


CIIAIMTIU': W. IIIIISSI' lui pi>ur l'élerniti' lime uni
épouse ii'vaiit ni tache, ni ride, ni rien ipii lu
LA liKsi imECTioN Kl' i.'ascic.nsion I)I;.IÉSLS-(;111UST
déplaise'. ^
SOLÏlK.N.Mv.NT NdTliK l-(ll ; I.E .ll'llEMK.NT LA
STIMILK. CHAmilEXVII.

H. iMainti'iinnl la croyance à lu résurivction LA VOILDE LA 1>,U'U1E OLVEIITE DA.NS LE l'AHUON


cl à rascciisioii du Soif;iunir (loiiiic à iioliv loi DES PÉCHÉS.
rappiii (ruiic f;iMiuli' cspcranci-. Elle nous l'ait

coinpirnili'o, de la nianici'e la ])lus saisissante, Nous sommes donc présentement sur la


16.

avec ([u'cllc pl('niliiilo ilc voioiiU' le Christ a Mlle delà patrie sur cette \oie ipii se par-
,

donné pour nous, puiscpTil a eu le


sa vie court ])ar la saiidcté des al'lecl ons et non en
pouNoir de la reprendre ainsi (Jnelle douée . irancbissant les espaces. La malice de nos pé-
et consol.nile eonliaiiee pour resjxMVUKîe des chés l'avait fermée comme d'une bai'rière
lidèles, lorscpi'iis considèrent liiules les soul- tonte hérissée d'i'pines. Or celui ipii s'est

liances ipie ce jirand Itieii a supportées poni' abaissé jusqu'à devenir lui-même la voie de
en\ avard même (jn'ds ensseni la loi ! .Mais noire retour, pou\ail-il montrer plus de bonté
(|ncllc l'ra\eur pour les chrétiens lâches et et de miséricorde qu'en remeltaiil leurs pé-
sans lervcin', (juarul ils se le représentent des- chés aux cœurs repentaids et convertis, et on
cendant (lu ciel pour jnger les vi\ants et les se laissant clouer à la croix, pour renverser
morts! Une celle i)enséc csl jiroprc à les ra- rinrranchissabie barrière qui s'opposait à
mener à la lidélité à leurs devoirs, cl à les noire i)assage?
porter bien i)liis à désirer son avènement par
nne vie sainte, (jn'à h' rcdouler par une vie CHAPITKE XVIIl.

criminelle El <|iielle langue


! pourra jamais
exprimer, quel esprit pourra concevoir la nia-
LES CLEFS CONFIÉES A L'ÉGLISE.

fïnilicpie récompense
nous réserve à la qu'il
17. Aussi Jésus-Christ a conlié à son Eglise
lin de la eaiiière, puisque, pour nons consoler
le pouvoir des clefs, en sorle que ce qu'elle lie-
dans le pèlerinage de la lerrc, il répand sur
rait ou délierait sur la terre serait lié on délié
nous avec abondance son divin Esprit, qui nous
dans le ciel Il établissait ainsi que les péchés
''.
inspire, an milieu des aiKersilés de cette vie,
nne si grande conliancc et un si aident amour ne seraient point pardonnes à ceux qui ne
croiraient pas que l'Egli.se peut les absoudre
pour Celui que nous ne pouxons encore con- ;

cl que celui qui, placé dans son sein recon- ,


templer ;
pidscpic enlin, pour rinstiiiction cl
iKiitrait en elle ce pouvoir, et s'éloignerait du
l'édilication de son Egiise, il verse sur eiiacun
p(''ché par une vie nouvelle, obtiendrait, par le
lie SCS membres des dons si variés, qu'il iîous
mérite de sa de sa conversion, une gné-
foi.cl
l'ait accomplir non-senlenienl sans munnuie
,

rison parfaite. Refuser de croire au pardon des


mais avec joie, les ile\oirs qu'il nous impose?
péchés, n'est-ce pas se rendre plus criminel
encore par le désespoir, puisqn'en doulanl du
CIIAI'IÏUE XVI.
fruitde sa conversion, on ne voit plus d'autre
JKSLS-CHUIST l'IlUFlLSON ÙliLISK. parti ineilleîn- que ee'iii de croupir dans le
mal?
lo. Car l'Eglise, suivant la doctrine de l'A-
pôtre, estle corps du Christ; elle est aussi ap- CHAPITRE XIX.
pelée son épouse '. Ce corps mysli(|ue csl com-
posé de plusieurs membres vouesàdes l'onelions MOISTET l',i:Sli!!!Ei;riO.\ IM'COIiCS ET DE l'aVIE.

différentes "",
et il leur cominmiiqne la santé en
les resserrant par les liens de l'uniléelde la cha- 1<S. Maintenant l'àme subit un certain genre
(le mort, quand, parla pénitence, elle 'énonce à
ibaritc. Dans le cours de celte \ie, il pnrilie son
sa vie et à ses moîiirs antt'ricnres ; ainsi le corps
Eglise parde^ épreuves et des ]»eines médicina-
I
I Ephè». v,23. — 2 II Rom. xii. 4. '
Kph. V, 2.^-32. — îMatt. XVI, 19.
10 DE LA DOCTRINE CHRETIENNE.

meurt quand s'éteint le souffle qui l'animait : peuvent l'un et l'autre. Car il nous a été or-
et si l'âme après la pénitence qui a déirait ses donné de nous aimer uns les autres mais
les ;

mœurs dépravées, reprend une vie meilleure, il s'agilde savoir si l'hounne doit aimer l'homnu^
aussi devons-nous croire et espérer que le pour lui-même ou i)ar rapport à un autre objet.
coips, après celle mort que nous devons tous Ij'aimer pour lui-même c'est jouir de lui l'ai- , ;

comme un tiibul au péché, sera heureusemenl mer par rapport à uneautreoljjet, c'est seidement
Iranslormé au jour de la résurrection, 'puisqu'il en user. Or je crois qu'on ne peut aimer l'homme
est impossible que la chair et le sang possèdent que relativement à une autre fin car nous ne ;

le royaume de Dieu. Alors ce corps corruptible devons aimer pour lui-même que l'objet qui est
et mortel sera revêtu de l'incorruptibilité cl de le principe de notre béatitude,
et bien qu'en l'éa-

l'immorlalilé ne ressentira plus l'aiguillon


<
; il encore absent, l'espérance seule de le
lité il soit

de la souffrance, parce qu'il vivra de la vie de posséder nous console en cette vie. Or il est
l'âme parfaite et bienheureuse au sein du sou- écrit « Miuditsoit celui qui place son espérance
:

verain repos. « en l'homme » ' !

21. On ne peut même jouir de soi, puisqu'il


CHAPITRES \X ET XXI. est certain qu'on ne doit pas s'aimer pour soi-

même, mais par rapport à celui doid on doit

RÉSURUEtniON POUU LE CH.\TIMENT. jouir. L'honnne alteint sa plus gi-ande perfec-


tion, lorsqu'il fait converger sa vie tout entière vers
la vie immuable
attache de t(nde son affec- et s'y
19. Mais l'âme qui ne meurt pas au siècle pré-
tion mais s'il s'aime pour lui-même, il ne se rap-
;
sent, et ne commence point à se conformer à
porte plus à Dieu, il se rapporte à soi-même, cl
l'image de la vérité, est frappée d'une mort
s'éloigne de ce qui estinmuiable. Aussi ne peut-il
l)ien plus déplorable que la
mort corporelle
jouir de lui-même qu'à son détriment; car il est
;

elle non pour enirer en jouissance de


vivra ,

plus pariait lorsqu'il s'unit tout entier et se lie inti-


la béatilude céleste, jnais pour subir de terri-
memeid au bien ininuialile, uiu^ lorsciu'il s'en
bles châtiments. C'est donc un poini de foi
sépare pour se Lepliersurhn-mème. Si In nedois
dont il nous faut admeltrc l'inconlestable \é-
pas l'aimer pour toi-même, mais relativement à
rité, que ni l'âme ni le corps ne périssent en-
Celui qui est par excellence la lin directe de ton
tièrement mais que les impies ressusciteront
,

amour, pei'sonne autre n'a le droit de se plain-


pour des supplices impossibles à décrire, et les
dre, de ce que tu ne l'aimes que par rapport à Dieu.
justes pour une vieéternellenieid heureuse.
Voici en effet la règle divine de l'amour « Tu :

« aimeras, dit le Seigneur, ton prochain


CHAPITRES XXII. « comme loi-même. Mais lu aimeras ton Dieu
« de tout ton cteur, de toute ton âme et de toid
IMIOI' SEUL OH.IEÏ DE NOTr.K.IOUISSANCE. « ton esprit ''.
» Ainsi tu dois rapporter toutes
tes pensées, toute ta vie el toute ton intelligenci'
"iO. De toutes les choses dont nous avons parlé, à Celui dont la main radéjtarti ces mêmes biens
il ne faut jouir que de celles que nous avons dont tu lui fais hommage. En disant : <i De ton!
désignées comme stables et éternelles, et pour « ton co'ur, de toute Ion âme el de tout Ion
y parvenir, user seulement de toutes les autres. « esprit, » d a voulu ne laisser aucune portion
Mais nous qui sommes appelés à celle jouis- de notre viequi ne fût consacrée à cet amour,
sance et à cet usage, nous sommes nous-mêmes l't (]ui nous permit de placer ailleurs notic
du nombre des clio;es. C'est en effet une gran- jouisancc ; il demande que loul autre objet qui
de chose que l'honnne, formé à l'image et à la |)ouri'ail solliciter l'affection de notre C(uur, soil
ressemblance de Dieu, non pas dans le coips repoitê par le courant de l'amour divin au
mortel dont il est revêtu, mais dans son âme centre où il aboutil. Aimer son [)rochain selon la
raisonnable qui l'élève si haul en dignité au- règle, c'est donc aimer en même tenqis qu'il
dessus des animaux. C'est dojic une inqwriante tout son cœur, de toide son âme
aime Dieu de
'(uestion de savoir si les lionniH's doiveid jouir cl lie IomI son espi'il. En aimaid ainsi son pro-
ou simplement user les uns des autres, ou s'ils
I
Jért-m, XVII, ir,. — t,évit. xix, 18 ; Deul. vl,5. Matl.xKll, 31.
' I for. XV, &0, 63.
MVRK PKF.MIFsR. C()NNAISSANCK DES CHOSES II

celle vie, l'Ame ne puise que dans son alta-


clHiiiicoininc soi-nuMiicoii aiisoiin' l'un cl l'au-
la

divin {(MiiicI cliement iui'branlablean bien supérieur, c'est-à-


lir aiiiDiiid.iiisIc li.'iivi- île raiiitnir
soiiUVirla muiiuir(Mh'ri\iilioii(iui riilïiti- dire au llicn imnmalilc. .Mais celui (pu aspire à
ne |u'iil
dominei' sur les lionnnes, (pie la nahu'e a faits
hlissr.
ses égaux, ne inontr(> (pi'im intolei'ablc or-
CH.V1>ITRK Wlll. gueil.

I. "homme s'aime naturellement, quand cet amour


EST-IL DÉSORDONNÉ?
CHAPITUEWIV.

'2-2. Nous lu' (lovons pas aimer iiulisliiicloMUMit


l'KRSONNE NE HAIT SA PROPRE CHAIR, PAS MÈMK
loiilos les choses destinées à notre nsane,
mais CF.LUIQII LA CHATIE.
celles-là seulement (lui, par une destinée com-
mune avec nous, se rapportent à Dieu, eoimue -2i. Ainsi personne ne se hait soi-même. Cette
riionuue et l'ange, on cpii en \eitn des rapixiils vérité n'a jamais été contestée dans aucune
(pii les raltaclicnl à nous-mêmes ,
dnivent re-
secte, l'eisoune non plus ne bail son propre
cevoir par nous les dons de Dieu, eonnne notre
cor|)s, selon celte parole si vraie de rAp(Jtre :

corps. « Nul ne luut sa propre chair '. » Si donc il est


Assurément les martyrs n'ont pas aimé le des honmies (pu assurent (pi'ils prélereraienl
crime de leurs perséeulenrs, et cependant ils ont n'avoir poinl de corps, ils sont dans une com-
lait servir ce crime à luériter la possession de
l)lèle erreur; car ce n'est pas leur corps, mais
Dieu. Il > a donc ([ualre objets dill'érents (|u'il son lardeau et sa corru[)lion (pi'ils détestent. Ils
nous tant aimer le premier est au-dessus de
:
voudraient en réalité, non pasexislersans corps,
nous, le second est nous-mêmes, le troisième
mais en posséder un qui lut agile et iucorrup-
est près de nous, et \c <pialriènie au-ilessous.
Uble; or comme ils n'ont pas d'autre idée
QnanI au second et an (piatrième, il n'était lie- de l'ame, à leurs yeux un corps dans de telles
soin d'aucune loi ijui prescrivît de les aimer.
conditions n'en serait plus nu. Il en est d'autres
Car si loin que riiomme s'écarte de la \érité, (piisemblent diriger contre leur corps mie sorte
jamais il ne perd l'amour de lui-même et de son
de persécution, en l'astreignant aux privations et
corps. En fuyant la lumière iiunuiable qui règne
aux travaux; s'ils savent se contenir dans de
sur toutes choses, cherche a devenir maiire
il
justes bornes, ils cherchent non pas à s'alltran-
souverain de lui-nuMue et de son corps; [)eut-
chir de ce corps, mais à le rendre soumis et pro-
il donc s'empêcher de s'aimer ainsi que son
'!
pre à l'aecom plissement du devoir. En le sou-
corjis
meltanl ainsi àdes exercices pénibles et laborieiLv,
23. H regarde même
connue un innuense a-
ils tendent à faire mourir les passions qui font
vantagc, de pouvoir dominer sur d'autres hom-
(lu corps un usage pervers, c'est-à-dire, ces ha-
mes ses semblables. C'est le propi-e du c(enr
bitudes et ces inclinations de l'àme quirenlraî-
vicieu.x de désirer ardenunent et de revendi(pier
nenl aux viles et basses jouissances. Loin de se
comme un droit ce qui n'appartient [iiopremenl
donner la mort, ils veillent à la conservation de
(pi'à Dieu seul. Or un tel amour de soi mérite
leur vigueur et de leur force.
plulôt le nom de haine. Car c'est une injusiice
-£). Mais ceux qui, sous ce rapport, dépassent
de vouloir ainsi dominer sur ce qiù est infériem-
toute limite raisonnaiile, iiilenlent la guerre à
à soi, tandis (|n'on refuse sa iiropre soumission
à u H" autorilé snpéiieure ; et c'est bien à juste
leur ciiri)s comme un enncini naturel. Ils ne
à

titre qu'il a été dit : « Celui qui aime l'iniquité


compremicnl |)asparole de rEcrilure
celle :

« hall son âme i. » De là viennent les délail-


« La chair a des (b'sirs contraires à ceux de l'es-
« prit, et l'esprit en a de contraires à ceux de la
lances de l'àme qui li-ou\e un conlinuel tourment
dans son corps moi tel. Car elle est inéviîablo-
K chair : ils sont opposés l'un à l'aulre '. > l'.V-

ment contrainte de l'aimer, et de gémir sous p(')li'e a voulu désigner ce penchant efh-éné de
le
fardeau de sa corruption. Le principe de Tim- de la chair contre lequel l'esprit s'élève et lutte,

uiortalité et de l'incorruplibilit('- pour le corps non pour faire périr le corps, mais pour le ré-

résidi' dans la vie saine cl parfailc ilc ràmc duire sous sa puissance, comme l'exige l'ordre
;

'
Pn. 1.6. .
'
Gai. V, 17. >F.ph. V, IH.
12 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

naturel, en domptant sa concupiscence, son in- s'est rencontré en grand nombre des hommes
clination perverse. Et puisqu'après la résurirc- qui ont supporté volonlairemenl les plus vives
lion, le corps revêtu de l'iininorlaiité doit vivre douleurs et la perte de (]uclques-uns de leurs
dans une pcrpéluelle soumission à l'esprit, au membres, pour obtenir ce (pi'ils aimaient encore
sein d'une paix inaltérable, ne doit-on pas s'ei- davantage. Ce n'esl donc pas une preuve qu'on
Corcer dès cette vie, de réprimer l'inclination de n'aime pas le salut et l'intégrité de son corps,
la chair, de la tourner au bien, en sorte qu'elle parce qu'on lui prélèi'e un autre bien. Ainsi
ne résiste plus à l'esprit par des mouvements malgré l'amour que l'avare éprouve pour l'ar-

désordonnés ? Mais jusqu'à ce que ce but soit gent, ne il laisse pas que d'acheler du pain,
el

atteint, la chair s'élève contre l'esprit, et l'esprit dans ce but il donne son argent, qn il aime
contre la chair; l'esprit lutte, non par haine, passionnément, cl désire accroître sans cesse;
mais par sentiment de sa dignité et de sa puis-
le mais il estime eneore plus la vie de son corps
sance, parce qu'il veut que la chair qu'il aime que ce pain doil soutenir. Il serait superflu de
soit soumise à ce qui lui est supérieur; la chair nous arrêter plus longtemps sur une vérité aussi
résiste, de son côté, non par haine encoie, mais clair.\ el cependant c'est une nécessité que nous
par la force de l'inclination que la génération imposent Irop souvent le.-: erreurs des impies.
lui a transmise, et qui n'a t'ait que s'accroître et

s'invétérer par les lois de la nature. En domptant CHAPITRE XXVI.


la chair, 1 esprit ne tend donc qu'à briser les nens

funestes de l'inclination corrompue, et à faire Dr (.OM.MANDE.METr QUI PUESCRIT l'aMOI 11 DE rMKl,


naître la paix que donne l'inciinaiioii vertueuse.
DL' l'itOCHAIN ET DE SOJ-MÉME.
Quoiqu'il en soit, il est cerlain queceux-mèmes
(jui délestent leur corps, par suite de faux pré-
27. Si donc il n'est ])as nécessaire de pres-
jugés, ne pourraient se résoudre à perdre, même
crire à l'homine l'amour de lui-même el de son
sans douleur, un de leurs yeux, dusseid-ils voir
corps aimer ce (pie nous sommes el la parlie
; si
avec l'aulre seul aussi parlaiteinenl qu'aupara-
iniérieure de nous-mêmes, eesl une loi im-
vant, s'ils n y étaient détermines p.ir l'appât d'un
prescriptible de la nature qui s'étend jusqu'aux
avantage qu'ils jugeraient prepondéranl. Celle
aniinaiix , lesquels s'aiment ainsi que leur
réflexion suliil pour dcnionlrer à ceux qui cher-
corps, il ne taillait un commandement d'amour
chent la vérité sans obstinât on, la ccrtilude de
que relalivement à l'Etre souver.tin placé au-
cette parole de l'ApJtre : « l'er.sonne ne hait
dessus de nous, el à notre seinbiai)le qui est
« sa propre chair , » et de ce qu'il ajoute « Mais
:

notre prochain. « Tu aimeras, dit la loi, ton


;< il la nourrit et la soutient, cDinine ie Chrisi
« Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de
« son Eglise i
. >>

« tout ton esprit, et luainieraslon prochain com-

CHAPITRE XXV.
« me toi-meine. Toute la loi et les prophètes
« sont renlèrmdans ces deux commande- s

« menls '. » La lin du peceple est donc l'amour *,


yUKL AMOllî OA DOIT A SON COUl'S.
et un double amour, de Dieu el du prochain. Si
maintenant lu leconsidères toat enlicr, ton àvne el
-li^. Il faut donc prescrire à l'homme la me-
toncorp si Inconsidérés également Ion prochain
-
;

sure de son amour, c'est-à-dire la manière dont


dans ces deux parties con>tiiutives de l'nomme,
il doit s'aimer, pour que cet amour lui proiile;
tu reconnailras que dans ces deux préceptes a
car il j aurait lolie à douter qu'il s'aime lui-
été eoinj)ris toat ce qui doil être l'objet de uoti'c
même et qu'il cherche son proi)re avantage. Ce
amour. En plai,'anl lauioar de Dieu an premier
qu'il faut aussi lui prescrire, c'est la manière
rang, elcn nous le prescrivant de manière que
dont il doit aimer son corps, la mesure et la
tous les mouvements de notre cœur viennent s'y
prudence avec laquelle il doil lui consacrer ses
coniondii',il seiniile que la loi n'ait point pu'lêde
soins. Car il n'esl piis moins ineonte4able qu'il
1 amour de nous-mêmes mais quand il ; a éic dit :

aime ce corps et qu'il désire le conserver sain et


(( Tu aimeras Ion prochain comme loi-môme. ^

entier. Or on peut ainirr :inlir chose plus (]ue


c'ébiit bien en même teiopsexprimcr cet amour.
le salut l'I l'intégrité de son r(ir|is. En d'iel il

'
Eph. T, Ih,
I
Miill. xxir. .37-10. — ' I Tim. i, r..
I.IM'.K IMiK.MÎKU CONNAISSANCK |)KS ClIOSKS i:t

cnAPirm-, wvii. CIIAI'ITUK X\IX.

illtURR DANSLEUIEL ONUdlT AIMKK. ii.N llOITTKXDnE ACEyi K IHKI SOrf LMVKIt-
SEI.LEMENT AIMK.
:28. l/hommo qui vil selon les lois de hi jiis-

ficc cl (le la saiiiicU', est ('("lui i|iii sait csliincr'


:tl). L'amoiu' (pie nous a\iiiis pdiu' tous les
les c'Ikisos à li'iir vi'rilaiilc valriir ; en lui l'a-
lioumies appeit'sdc concei'l a\ec nous à la jouis-
iiioiir est parl'ailiMiKMil (inloniu'. Il n'aime pas
sauce de Dieu, s'étend à ceux (pu* nous assistons
ce (|ii'il ne latit pas aimer, cl ilaime ce (jii'il
oi! (pii nous assistent, à ceux dont nous soula-
doitaimiM'; moins une chose csl aimaMe, moins
geons l'indigence ou fpiipeinent soulager la
il l'aime mesure de son amonr s'clend ou
; la
n(>tr(', et à ceux mêmes avec les(piels nous n'a-
se relrécit Ion que l'objel est plus on moins
s
vons aucun échange de services réciproques.
ainiahlc, el elle reste é::aie ponr ce (jni csl ('pa-
Or, nousde\ons désirer de les voir Ions partager
iement digne d'anionr. Tonl pécheur considéré
notre amour pour Dieu, con\ergerà et faire
comme pécheui' ne peni élre aimé et lonl ;

celle fin tous les services que nous leur ren-


homme en tant qn'hon)me doit èlre aimé par
dons ou (|ue nous rece\ons de leur part. Dans
rapporta Dieu, el Dieu pour lui-même. Sidonc
ces Ihéàtres où ègneni la licence cl la corrup-
i

Dieu doit cire aimé plus que tout honune,


tion, on voit un spectateur se prendre d'affec-
cliacun doit l'aimer plus (pic soi-même. Nous
tion pour un comédien, et mettre son plus
devons aussi aimer le jirocliain plus (juc notre
gi and bonheur à le voir exceller dans son art ;
corps, parce que nous devons tout aimer relati-
il aime tous ceux qui paitagent son sentiment,
vement à Dieu et que le prochain est apiiele à
non en leur propre considération, mais en vue
partager avec nous la joui -sauce de cel Elle sou-
de celui qui est l'objet de leur affection comnui-
verain ;
privilège qui n'apparlieni pas au corps,
ne plus son amour est vif et ardent, plus il
puisqu'il n'a de vie que par noire àme, qui seule ;

s'attache à faire briller son taleul el à lui con-


nous fait jouir de Dieu.
cilier les cœm"s ; s'il voit quelqu'un rester in-
CHAPITRE XXVIU. sensible, il essaie de vaincre sa froideur en
l'accablant des louanges de son favori ; s'il en
QUI UOIT-O.X SECOCRia DE PUÉFÉUENC.E '?
rencontre un autre qui haïsse celui qu'il aime,
il s'irrite contre cette haine, et uudtiplie ses
^9. On doit im égal amour à tous les hommes; efforts poiu- arriver à l'éteindre. Et nous, que
mais comme il nous est impossible de faire du ne devons-nous pas faire pour étendre et pro-
bien h tous, il faut consacrer de préféiencc nos pager l'amour de Dieu, dont la jouissance est
services à ceux qu'en laison des temps, des le principe du vrai bonheur de Dieu, dont ceux ;

lieux , ou de toute autre circon.slances , le qui l'aiment tiennent tout ce qu'ils sont, jusqu'à
sort nous a en quelque sorte plus étroite- (^el amour même
de Dieu, dout nous n'avons
;

ment unis. Car si vous aviez un supertlu, pas à craindre qu'il puisse déplaire à ceux qui
dont il f iudrait gratifier pou- l'indigence, sans l'ont une fois connu ; de Dieu cnlin, qui veut
voir en faire deux parts, (^t que vous renron- èlre aimé, non pour son propre avantage, mais
(riez deux malheureux dont aucim ne pourrait pour donner à ceux qià l'aiment une récom-
se prévaloir da litre d'une misère plus profonde pense élMiielle, quisera de le posséder lui-même'?
ou d'une amitié plus intime, rien de plus juste De là vient que nous aimons jusqu'à nos enne-
alors que de déterminer par le sort celui à qui mis et qu'aurions-nous à craindre d'eiLX
;

vous devriez donner ce qu'il vous si-rait impos- puisqu'ils ne peuvent nous enlevci' l'objet de
sible d'accorder aux deux en même temps ;
notre amour? Ils nous inspireni plutôt une affec-
.linsien est-il à l'é^^ard des hommes ne pou- ; tueuse compassion, car ils ont le malheur de nous
vant étendre vos faveurs à lous, irgasdcz comme hair d'autant plus qu'ils sont plus éloignés du
vous étant d -ignés par le sort ceiLX que les Dieu que nous aunous. S'ils reviennent à lui, ils

ciicoustanccs de cette vie vous rattachent par sont invinciblement entraiuésà l'aimer, comme
des liens plus étroits. la source du vrai bonheur, et à nous aimer
14 UE LA DOCTKINE CHRÉTIENNE.

mez vos ennemis, laites du bien à ceux qui


nous- mêmes, comme étant destinés à parlager «

avec eux la même félicité. '< vous haïssent ' ? »

Telle est aussi la doctrine de l'apôtre Paul,


3^2.

quand il dit « Ces ;commnndements:


tu ne :

CtLVPITRE XXX.
« commettras point d'adultère, tu ne tueras
« point, tu ne déroberas point, lu ne désireras
TOCS LES HOMMES ET LES .4XGES MÊMES SONT NOTUE
.< point le bien d'autrui, et s'il y en a (pielqu'aulre
PROCHAIN.
« semblable, tous ces commademenls^ontconi-
« pris en abrégé dans cette parole Tu aimeras :

31. Ici se présente une question à pro])os des


« ton prochain conunc loi-même. L'amour
anges. Pour eux aussi le boniieur consiste dans
(< qu'on a pour son prochain ne souffre pas
la jouissance de Celui que nous désirons voir un » Penser que
(fu'ou lui fasse aucun mal
">
« .

jourrol)jot delan(Mre et plus nous jouissons de


l'Apôtre n'a pas étendu ce précepte à tous les
;

lui en celte vie, à travers les voiles qui nous le


hommes, c'est être contramt d'avouer, ce qui
cachent, ou dans les images qui nous le repré-
est lecomble de l'absurdité et du crime, qu'à ses
sentent, plus notre pèlerinage nous devient doux
yeux il n'y a point un péché à abuser de la fem-
et facile, et plus nous désirons ardemment en
me d'un infidèle ou d'un ennemi, à le mettre à
toucher le ternie, il n'est donc pas hors de pro- de le
mort ou à convoiter son bien ; si c'est folie
pos d'examiner si l'obligation d'aimer les anges
prétendre, n'esl-il pas incohtestaljle (|u'on doit
est comprise dans les deux préceptes dont nous
regarder tout homme comme son prochain, puis-
avons parlé. Que l'amour du procliain ne souffre faire de mal à pei-sonne ?
qu'il n'est permis de
d'exception pour aucun d'entre les hommes, le de prochain s'ap- nom
33. Maintenant si le
Seigneur dans rEvangile et l'apôtre Paul l'at-
plique tant à celui envers qui nous devons
exer-
testent formellement. Car un jour que le Sei- prati-
cer la miséricorde, qu'à celui qui doit la
gneur exposait à un docteur de la loi les deux évidence que
quer à notre égard, il est de toute
préceptes de l'amour, lui disant que toute la loi
le précepte nous ordonne d'aimer le pro-
ipii
prophètes y étalent renfermés, ce docteur
chain, comprend par là même les saints
et les anges,
lui adressa cette question « Qui donc est mon preuves les plus frap-
puisfiu'ils nous donnent les
:

« prochain ? » Alors le Sauveur lui pro|)osa la miséricordieuse compassion, ainsi


î>anles d'une
parabole d'un honinn^ qui descendait de Jéru- un grand nombre de passages
que l'attestent si

salem à .léricho ; cet homme tomba entre les


des divines Eciitures. C'est d'après ce
principe
mains des voleurs qui le blessèrent gTavement et notre Dieu a daigné s'appeler lui-
que le Seigneur
s'en allèrent, le laissant abattu et à demi-mort. prochain. Car Jésus-Christ s'est peint
même notre
montra que celui-là seul avait été son
sous les traits du Samaritain secourant ce mal-
Jésus alors
prochain qui, touché de son malheur, avait pris
heureux, abandonné sur le chemin par les vo-
soin de guérir ses blessures, ce dont docteur -mort. Et
leurs, couvert de blessures et à demi
le

ne put s'empêcher de convenir lui-même. El le Prophète disait dans sa prière « J'avais pour :
le
Seigneur lui dit « Ya et fais de même
: » vou- ' ,
« chacun d'eux de la complaisance, comme
lant nous laisser entendre (]ue le prochain est
« pour un proche et pour un frère
•'. >.

celui envers qui on doit exercer la miséricorde, élevée


Mais comme la substance divine est
est dans le besoin, ou qu'il faudrait soulager, de notre na-
par son excellence bien au-dessus
s'il

si son indigence le réclamait. Delà découle déjà de Dieu a été dis-


ture, le précepte de l'amour
cette conséquence, que celui dont nous sommes
tingué de celui du prochain. Dieu exerce
la

en droit d'attendre lenièmeoflice est aus?i notre miséricorde à noire égard par l'inclination de
prochain. Car le nom même
suppose le rap-
sa bonté, et nous la pratiquons les uns vis-à-vis
port miduel de deux nous ne ])ouvons êtres
de cette même bouté en
des antres à cause
;
;

être le prochain de quelqu'un, qu'il ne soit de nous


d'autres termes. Dieu a compassion
le nôtre. Or, qui ne voit qu'il n'est pas un seul
jouir de lui, et nous avons
pour nous faire
homme qu'on ne doive soulager et secourir,
compassion les uns des autres pour mériter
quand ce devoir s'étend jusqu'aux ennemis
cette jouissance.
mêmes, selon cette parole du Seignem* « Ai- :

' Matt. V. 44. • Hum. .tiii. S. — ' es>- xx-Kiy. 14.


• Luc, X, 27. 37.
I.IVIiK l'KKMIKK. - CONNAISSANCK HKS CIIOSKS. m
visage pas sa pro|)re utilité, mais la ni'itre;

CIIAIMTKI': \\\l rnniipie lin (pi'il se propose, c'est la inanilés-


lalion (le sa bonl(''. Poui' nons, (piaiid touchés

NOUS ET .IOUT de compassion pour (piehprnn, nous lui con-


ItlElI SE SEIIT l)K N'K.N l'AS.
sacrons nos soins, nous avons bien en vue de

MOUS iKMis procurer son avantage, mais |)ar une mysté-


W. Qii.iiiil (lisons (|ii(> idilissoiis

(riiiic cIkisc ([lie iKiiis aiiiKiiis |)()iii- cllli'-iiir'iiu'


rieuse consé(pience, nous assiMons par là même
le ii'Mre, puiscpie Dieu ne laisse pas sans ré-
(|ii(' nous lie (levons jouir (juc de rolijcl (|ni

nous ccikI liourcnx, cl user scnicnicnl de Ions


compense la miséricorde exercée à l'égard de
l'indigent, (ielle récompense souveraine est de
l(>s antres, il semble (|n'il reste sur ee point
nons jouir de lui, et de pouvoir tous, en participant
(|iiel(ine olisenrih- h dissiper. Car Dieu
à cette jouissance, jouir aussi en lui les uns des
aime, el elia(|ne paj;(' des divines Keriinres
autres.
lions rapix'll.' son amoin'. Commcnl donc
nons ainic-t-il? Venl-il se servir de nons ou
CifAPITHEXXXlll.
l)ien en joiiii? Sil |)lace en nous sa jouissance,

il a donc l)esoiii de nos biens; ce (|n'on ne COMMENT IL FAUT .lOLIH DE l'hOMME.


peul raisonnablement admettre. ïoid le bien
qui est en nous est-il antre (|ue lui-nK'me, ou 8(i. Etablir en nous cette jouissance, c'est
ne procèdc-t-il pas de lui? Qui |)eut donler (|ue nous arrêter sur la voie, et n'attendre plus (|ne
la lumière i/.i nul l)esoin do l'c'^clat des ùlrcs de l'homme ou de l'ange le bonheur (pic nous
qu'elle éclaire elle-nu-me? Le Prophète aussi espérons. C'est la prétention de l'homme or-
proclame la même vérité « J'ai dit au Sci- :
giieilliHix et de l'ange su[)erbe; ils se plaisenl

« gueur vous êtes mon Dieu, et vous n'avez


:
à voir d'autres créatures [ilacer en eux leuis
'caucun besoin de mes biens i. » Dieu donc ne espérances. Rien différente est la conduite de
jouit pas, mais il se sert de nous. En dehors de l'homme saint et de l'ange fidèle. Quand ils

cette jouissance ou de cet usage, je ne a ois pas nous voient, au milieu des fatigues de notre pè-
comment il nous aimerait. lerinage, chercher à lixer en eux notre repos,
ils ne songent (ju'à raviver nos forces, en nous

CHAPITRE XXXII. appli(piant les secours que la main divine leur


a conliés pour nous, et même en nous faisant

COMMENT DIEU SE SERT DE l'HOMME. part des faveurs particulières dont ils sont com-
blés; el après nous avoir ainsi rendu une nou-

3a. Mais en Dieu l'usage est liien différent velle nous pressent de poursuivre
ardeur, ils

du n('itre. Nons usons des créatmes pom- par- notre marche


Celui dont la jouissance
vers

venii' à la po- session de sa bonté infinie, et il


nous fera goûter avec eux un égal bonheur.
use de nous pour manifester cette bonté. C'est C'est pourcjuoi l'Ap('>tre s'écrie : « Est-ce Paul

parce qu'il bon (jne nons avons l'existence,


est
« qui a été crucilîé pour vous? ou avez-vous
el nons ne sonnnes l)ons (pie dans la mesure « été baptisés au nom de Paul ' ? » Et encore :

de notre être. Comme d'ailleurs il est juste,


« Ce n'est pas celni qui plante ou qui arrose

nous ne pouvons faire le mal impunément; et « qui est quelque chose, mais Dieu seul qui
notre être diminue en raison du mal (|ue nous
« donne l'accroissement ^. » Et l'ange n'a-t-il
commettons. La souveraineté et la primauté pas soin d'inviter l'homme qui l'adore, à n'a-

de l'être n'appartiennent qu'à Celui qui possède dorer que le Seigneur, dont il n'est comme lui
l'immutabilité parfaite, et qui a pu dire en
que le serviteur »?
37. Mais si tu jouis de l'homme en Dieu,
toute vérité. « Je suis I'Etue. » Et : « Tu
c'est moins l'hoinme alors, c'est plnt(jt Dieu qui
« leur diras TEtre qui m'a envoyé vers
: C'est
« vous 2. En sorte que toutes les autres exis-
).
devient l'objet lie ta jouissance. Car tu jouis
tences ne sont que p ir lui, et ne participent à de Celui qui fait ton bonheur, et ta joie sera
la bonté qu'ai'tanl qu'elles participent à d'être parvenu à Celui qui seul soutenait ton
l'être.
Dans l'usage espérance. C'est pourquoi saint Paul écrivait à
qu'il fait de nous, Dieu donc n'en-
Philémon « Oui, mon frère, que je jouisse de
:

' Ps. .XVI, l. — -'


Exod. m, 14. 1
I Cor. I, l;i. — ^Ib. m, 7.— '
Apoc. XIX.IO.
16 DE LA IXXITRINE CHRETIENNE.

'< toidans le Seigneur ' . » S'il eût dit seulement : que nous connaissojis par le Fils qui est son
<i que je jouisse de toi, » sans ajouter : « dans égal; et l'Esprit-Saint, par des liens ineffables,
'< le Seigiieur, » c'était établir en lui l'espoir de nous unit poui' toujours au bien souverain et
son bonheur. Il est vrai qu'user d'une chose immuable. Or ce qui nous fait comprendre
avec plaisir, c'est en quelque sorte en jouir; car qu'aucune créature ne doit nous arrêter sur no-
la présence d'un objet aimé emporte nécessaire- tre chemin, c'est que le Seigneur lui-même ne
ment avec elle une certaine délectation. Si tu nous a pas permis de nous lixer en lui, en tant
la reçois sans t'y arrètiM-, et si tu la reportes en qu'il s'estdonné comme notre voie, mais s..u-
Celui qui doit être le centre de ton repos, tu lement de passer par lui; il voulait nous éviter
n'auras fait qu'en user elle ne pourra s'appeler : le danger de nous attacher dans notre faiblesse
une véritable jouissance. Mais, si tu viens a y aux choses sensibles et passa;:èies, à celles
attacher et a y lixer ton cu'ur, eu la constituant mêmes qu'il s'était unies, et ipi'il avait accom-
ainsi conmie le ferme de ta joie, tu en lais l'ob- plies pour notre salut; il voulait nous les faire
jet d'une véritable jouissance, que tu ne dois servir ]ilul('it à accélérer notre marche et à mé-
chercher qu'eu la Trinité sainte, seul bien sou- riter (le parvenir jus(|u'à Celui qui a délivré no-
verain et immuable. tre nature des misères du temps, et l'a placée à
la droite du Père.
CHAPITRE XXXIV.
CHAPITRE XXXV.
LE CHRIST EST LA PREMIÈRE VOIE Ql] MÈNE A I.'aMOIR DE DIEU ET DU PROCH.M.N EST LA PLÉNI-
DIEl'. TUDE ET LA FIN DE l'ÉCRITURE.

Tout ce que nous avons pu dire jusqu'a-


;-S9.
38. N'est-il pas surprenant que la Vérité éter-
lors en traitant des choses, se résume à établir
nelle, le Verbe par ipii tout a été créé, s'étant
cette grande vérité, que la plénitude et la fin
lait chair pour habiter au miUeu de nous, saint
de la loi et de toutes les divines Ecritures, con-
Paul dise cependant nous avons connu : « Si
siste dans l'amour de l'objet dont nous devons
)>Jésus-Christ selon la ciiair, maintenant nous
jouir, et de la créature qui doit en jouir avec
•ine le connaissons plus de cette sorte ^ ? » Car
nous '
;caril n'éla'tpasnécessairedecouimander
Dieu ayant voulu se donner, non-seulement
à l'homme de s'aimer lui-niême. Pour nous
comme la possession de ceux qui parviennent
donner la connaissanfe de cette loi d'amour et
à lui, mais encore connue la première voie (]ui
le pouvoir de l'accomplir, la di\iue Providence,
y conduit, a daigné revêtir notre chair. De Ih
en ^ue de notre salut, nous a tracé l'usage que
cette parole « Dieu m'a créé au coinmence-
:

nous devons faire des choses de la \'ur présente;


« ment de ses voies 3; » et Jésus-Crist devait
elle nous jjrescrit de n'\ point placer notre
être le point de départ pour ceux qui voudraient
amour et notre joie coimne dans leur terme,
aller à Dieu. Mais quand l'Apôtre écrivait cette
mais de n'y attacher qu'une afiécîion transitoire,
parole, quoiqu'il fût encore sur la voie et (ju'il
conmie on aime le chemin {[uc l'on suit, le vé-
s'efforçât de remporter le prix de la félicité cé-
hicule qui Irausporle, ou autre chose semblable;
leste à laquelle Dieu l'appelait, oubliant ce qui
nous ne devons aimer ces appuis de notre fai-
était derrière lui, et s'a\ançant vers ce qui était
blesse qu'en vue du lerme vers lequel ils nous
eii avant, il avait alors dépassé le commence-
portent.
ment delà carrière; il n'avait plus besoin de
ces moyens, ncce^paircs, pour entier dans la voie,
CHAPITRE XXXVl.
à tous ceux qui désirent arriver à la vérit et
établir leur repos dan? ^éleI•|lelle^ie. Car IcChrist CE OU'iL PENSER d'UNE
FAUT INTERPRÉTATION
a dit : « Je suis la voie, la véritéet la vie ^ ; » c'est- DEFECTUEUSE DE l'ÉCRITURE, SI ELLE SERT A
à-dire, c'est par moi que
moi l'on vient, c'est à ÉDIFIE?. LA CHARITÉ.
que l'on arrive, et c'est en moi que l'on demeure.
Car arriver au Fils, c'est arriver aussi au Père 40. C'cb! donc à toit qu'on se flatterait de
comprendre les divines Ecritures en tout ou
' rhil. 20. — > n Cor. v, 46. - î l'r.iv. viir, 32. — «l'iiilip. in,
lî-14. — Jean, xiv, 6. I
Rom. xiti, 10; I Tim. I,&.
,

LIVRE l'UKMlKK. — CONNAISSANCK DKS CIIOSKS. r

en partie, si eetfe eoiinaiss.inre ne sert pas ^ sentiment. S'il admet que ces passages ne con-
établir le doiihie amour de dn jx'r- Itieii et lieiiiii-ul l'icn (|u<' di- \riii cl d'iMi'oiilcsIalile,

eiiain : c'est ne pas en avoir encore la moindre l'iulerprétalion (|u'il lisait ('mise ne iicuf

intelligence. Mais celui ipii en expiime un sens (prêtre fausse; et alors, pal' une conséquence
propre à tSIilier ectl<' même charité, sans tou- iui'\pllcabl(>, l'altachem(Mil à son pr'opre sens
tefois rendre la jxMisée de l'écrixain sacré dans le coudaimier |)lulôt la
coiuluil à parole de
le passage (pi'il inter(»rcle, se trompe à la vér l'Kcrilurc (pie son sentiment pri\é; et s'il s'a-

rite;cependant son errenr n'est point dange- bandonne à ce travers funeste, il y Irouveia
reuse, et réellcnuMit il ne metd i»iiiit. Le men- iulàilliblemcnl sa ruine. '
(!ai' nous marchons

songe, en etïel , suppose en celui (jui l'émet c ici-bas par la l'i', et non encore par la claire
l'intention délibérée de dire une fausseté, et «vue '. )) Or la foi dcNicnl i-liaHi<'!anti' des
c'est pom'ipioi nous r(>iicoidi'ons tant d'hommes (pie rautorité des divines l']crilures est ebraii-

(jniveulent bien mentir et pas un seul ipii l 'c ; et dès lors (pie la foi chancelle, la charité
supporte dVtrc trompé. Si donc l'Iionmie énici ('Ile-même se refroidit. Ainsi perdre la foi c'est

sciemment le mensonge et se laisse trom- ,


perdre iK'cessairemenl la charilé ; car coin-
per que par l'ignoraticc, il est évideid (|ue nient aimer ce (pi'oii ne croil |)as exister? Mais
sur le môme sujet, la condition de rhonune (juand on croit et que l'on aime, quand de plus
trompé est préférable à celle du menteur; car la vie est sainte et pure , on seul naitre en
il vaut mieux être victime de l'injustice ipie même temps l'esijérance de parvenir à l'objel
de commettre. Or, mentir, c'est commettre
la aimé. Toute science et toute interprétation de
une penser que le mensonge peut
injiistice; et rF.criture est donc fondée sur ces trois y>?i'Iiis ;

être quelquefois utile, c'est s'obliger à en dire la foi, l'espérance et la charité.


autant de l'injustice. Mentir, c'est par là même
être infidèle, puisque c'est exiger de celui que CHAPITRE XXWIII.
l'on trompe une foi que l'on viole à son égard.
Mais tout violateur de la foi est injuste; donc LA CHARITÉ DEMEURE ÉTERNELLEMENT.
ou l'injustice est quelquefois utile , ce (jui est
impossible, ou bien il faut admettre que le 42. A la foi succédera la claire vue de l'es-

mensonge ne le sera jamais. sence divine, et à l'espérance la liéalilude elle-

même à laquelle nous tendons. Mais ([uand la

CHAPITRE XXXVIl. foi et l'espérance auront disparu, la charité


n'en sera que plus ardente et plus parfaite.
ON DOIT INSTRUIRE IN' INTERPRÈTE QLU SE TROMPE. Car si la foi nous fait aimer ce (pie nous ne
voyons pas encore que sera-ce quand nous ,

41. L'interprète qui donne aux divines Ecri- pourrons le contempler? Et si par l'espérance
tures un sens différent de celui de l'auteur sa- nous aimons la gloire après laquelle nous sou-
cré, tombe dans l'erreur, malgré leur infaillible pirons, quel ne sera pas notre amour (piaiid
véracité; mais, comme je l'ai observé, si son nous en sera donnée la possession? Voici en
erreur est propre à édifier la charité, qui est efïet la grande différence entre les biens du

la fin des commandements,


elle ne ressemble temps et ceux de l'éternité on aime davantage :

qu'à celle du voyageur qui abandonne son les premiers avant de les posséder, et on les
chemin, et qui se rend à travers la campagne méprise aussitôt qu'on en jouit peuvent-ils :

au terme où ce chemin devait le faire aboutir. en effet combler les désirs d'un cœur (pii ne
Toutefois on doit redresser son erreur, et lui trouve son vrai repos que dans réternité ? Mais
faire comprendre toute l'importance qu'il y a la possession des biens éternels nous les fait
de ne pas s'écarter de la voie, dans la crainte aimer plus vivement (pie (piand nous étions
que l'habitude d'en sortir ne l'entraîne dans encoie à les espérer. Non, celui qui les désire
une direction opposée ou dangereuse. Car en ne les estimera jamais au delà de leur valeur;
donnant sur un point une interprétation témé- jamais il n'aura à les mépriser, ni à les trouver
raire qui ne rend pas la pensée de l'auteur au-dessous de l'idée qu'il s'était formée; quel-
inspiré, il rencontre presque toujours des que haute estime qu'il en conçoive en cette vie,
détails qu'il ne peut faire accorder avec son I
1 Cor. V, 7.

S. Auc. — Tome IV.


18 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

la possession les lui découvrira bien autrement


précieux encore. CHAPITRE XL.
CHAPITRE XXXIX.
DANS QUEL ESPRIT OK DOIT LIRE l'ÉCRITURE.
l'écriture n'est point nécessaire a l'homme
OUI POSSÈDE LA FOI, l'ESPÉRANCE ET LA CHA- 44. Celui donc qui connaîtra que la fin de la
RITÉ. loi, c'est la charité qui naît « d"uu cœur pur,
« d'une bonne conscience et d'une foi sincè-
43. Ainsi l'homme dont la vie a pour fonde- qui veut rapporter à ces trois vertus
« re ", » et
ment inébranlable la foi, l'espérance et la cha- des Ecritures peut avec
toute l'intelligence ,

n'a besoin de l'Ecriture que ])our instruire


rité, conlîance s'adonner à l'iulerprétalion de ces
les autres. N'est-ce pas sous la direction de ces divins Livres. L'Apùtre, en eflet, dit de la cha-
trois vertus que tant de cénobites passent sain- rité, qu'elle « naît d'un cœur pur, » afin que
tement leur vie dans la solitude, sans le secours l'on n'aime rien qui ne soit digne d'amour. Il
des saints Livres ? Aussi il me semble qu'en eux dit encore : « d'une conscience bonne, » pour
déjà accomplie cette parole « Les prophé-
s'est :
assurerun fondement à l'espérance ; car com-
M ties s'anéantiront, les langues cesseront, et la ment espérer d'obtenir jamais ce qu'on croit
« science sera abolie ' . » Reconnaissons toute- et ce qu'on aime, si l'on sent en soi les remords
fois que les saintes Lettres ont servi à dévelop- d'une conscience criminelle ? Il ajoute enfin :

per en eux la foi l'espérance et la charité, au


,
« d'une foi sincère » parce (pie si notre foi
,

point que, arrivés au sommet de la perfection, est dégagée de toute erreur, nous n'aimons pas
ils ne s'attachent plus à rien de ce (pii est im- ce qu'il ne faut pas aimer, et en menant une vie
parfait. ne parle que de celte perfection qui
Je innocente nous avons la douce confiance que
est possible sur la terre; car en regard de la vie notre espoir ne sera point confondu.
future, il n'est poinl d'homme juste et saint dont Je crois avoir parlé des choses qui renfer-
la vie puisse ici-bas se dire parfaite. C'est pour- ment l'objet de notre foi, dans la mesure qui me
quoi, selon l'Apùtre : « Ces trois vertus, la foi,
semble suhisante pour les circonstances présen-
« l'espérance et la charité demeurent à présent, tes, cette matière ayant déjà été traitée ailleurs
« mais la charité est la plus excellente des assez amplement soit par moi, soit par d'autres.
« trois Car lorsque nous mettrons le pied
2. » Nous terminons donc ici ce livre. Nous consa-
sur le seuil de l'éternité, la foi et l'espérance crerons le reste de notre travail à parler des si-
disparaîtront, et la charité n'en restera que plus gnes, selon les lumières que Dieu nous accor-
ardente et plus inébranlable. dera.

'Cor. .VMl, 9. Mbi.l. 13. ' [Tim. 1, 5.


LIVRE DEUXIÈME.

Sainl Augustin Iniile icisignes el des termes en usage dans rKeiilurc.


îles —
Il démontre ipiela [iluiiaii du temps la dirnculté

d'assiguei- au texte son vrai sens, lient il ce que ces signes sont inconnus ou é(|uivoiiues.
saei-é Apres avoir tracé le canon —
des Livres s.iints, il indlipie quelles sont les langues qu'il faut savoir, et les diverses connaissances ([u'il est utile dacipiérir,
|)OHr bien coin|iiendre le langage des écrivains inspins. —
Il répudie les scieiu-es superslicieuses des païens cl termine en rap-
pelant avec quelles dispositions on doit entrcprendie l'étude des licritures.

rience que nécessairement il y a du feu là où


CHAPITRE PREMIER. l'on voit s'élever la fumée. Comme signes du
même genre nous citerons encore les tra-
,

ces qu'imprime sur la terre un animal dans son


NATURE DU SIGNE ET SES DIFFÉRENTES ESPÈCES.
passage l'aspect du visa-ic où se peint la co-
;

lère ou la tristesse de l'homme agité par ses


1. Au coniiiiencemeiit du livre précédent, où passions sans nul dessein prémédité de notre
;

j"ai traité des dioses, j'ai fait observer qu'on ne part, nos traits sont connue un miroir où vien-
devait considérer que ce qu'elles sont en elles- nent se refléter les divers mouvements de noire
niènios, sans s'arrêter à ce qu'elles pouvaient âme 11 n'entre pas dans notre plan de traiter
.

signifier d'ailleurs. Ayant à parler des signes, de cette sorte de signes Cependant comme .

je préviens au contraire qu'il ne faut pas s'at- ils se sont rencontrés dans notre division, nous

tacher à ce ([u'ils sont en eux-mêmes mais à , n'avons pu les passer entièrement sous silen-
leur propriété signilicative, ou à l'objet qu'ils ce nous nous bornerons à ce qui vient d'en
;

désignent. On entend par signe ce qui outre , èlre dit.


l'objet qu'il offre h nos sens fait naître dans ,

notre esprit l'idée d'une autre chose . Ainsi CHAPITRE H.


la \aie des traces tl'un animal nous dé-
couvre son passage ; la fumée nous révèle l'ex- QLELS SIGNES SONT l'OBJET DE CE LIVRE.
istence du nos regards le cri
léu caché à ;

poussé par quelqu'un manifeste le sentiment 3. Les signes sont ceux que les
artificiels

qui l'agite; le son de la trompette api)ieiul êtres animés se donnent mutuellement pour
aux soldats quand, dans le combat, ils doivent manifester , autant qu'il est possible , leurs
avancer, rétrograder ou exécuter tout autre mou- pensées, leurs sentimenls , et les différents

vement. mouvements de leur àmc. L'unique fin que


2. Les signes sont naturels ou
artificiels. Les l'on se propose en adressant un signe à quel-
signes naturels sont ceux qui
en dehors de , qu'un, c'est d'exprimer et de faire passer dans

toute détermination particulière, font connaî- son esprit ce que l'on conçoit dans le sien.
tre par eux-mêmes un autre objet telle est la : Nous consacrerons notre travail à étudier les
fumée qui révèle le feu. Il n'y a ici aucime signes de ce genre, selon qu'ils sont en usage
convention arbitraire, puisqu'on sait par expé- parmi les hommes; puisque les signes d'insli-
'20 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

hition divine que renlerment les saintes Ecri- réception du sacrement de son corps et de son
tures nous ont été marqués par les hommes sans '; et un autre encoïc, dans la guérison
qui les y ont insérés. Les animaux ont aussi qu'obtint cette femme en touchant le bord de
entre eux certains signes par le.sijuels ils com- son vêtement '-. Mais le nombre incalculable
muniquent leurs sensations. Quant le coq ren- des signes qui servent aux hommes à commu-
contre quelque nourriture d'un signe de sa voix , niquer leurs pensées dans les paro- , consiste
il accourir la poule; les colombes s'appel-
fait les. Car, par la parole, j'ai pu exprimer Ions ces

lentmutuellement par leur cri plaiutil et com- ; signes dont je n'ai f.iit qu'énoncer les différents
bien d'autres laits semblables il est facile de genres ; tandis qu'il ine serait impossible
remarquer Quant à décider si les signes ex-
! d'exprimer la parole elle-même à l'aide de ces
priment les mouvements de l'àme indépen- signes.
damment de la volonté, comme l'aspect du vi-

sage et le cri de la douleur ou si, en réalité, ; CHAPITRE IV.


ils ne les expriment qu'en vertu dune con-
vention arbitraire, c'est une question étrangère à ORIGINE DES LETTRES.
notre sujet, et que nous laissons de côté comme
inutile. 5. Mais comme les paroles passent aussitôt
qu'elles ont frappé l'air , et disparaissent avec
CHAPITRE ni.
le son qu'elles produisent , on a imaginé les
lettres comme signes destinés à les fixer. Elles
l.A PAROLE EST AU PREMIER RANG PARMI
deviennent ainsi perceptibles à nos yeux, non
LES SIGNES.
par elles-mêmes mais par les signes qui les
,

représentent. Or, ces signes ne pouvaient être


4. Parmi les signes dont se servent les hommes
communs à tous les peuples, par suite de cette
pour se communiquer leurs pensées, quelques-
du genre
dissension funeste qui s'établit au sein
uns ont rapport au sens de la vue, le plus grand
humain, chacun voulant s'arroger la suprême
nombre au sens de l'ouïe, très peu aux autres
domination et cet orgueil se révéla dans cette
;

sens. Un mouvement de tète est un signe qui ne


tour que les hommes tentèrent d'élever jus-
s'adresse qu'aux yeux de celui à qui l'on veut
qu'au ciel folle entreprise où leur impiété
;

faire connaître sa volonté. Certains hommes sa-


mérita de voir la discorde s'introduire, non-
vent traduire la plupart de leurs sentiments par
seulement dans leurs esprits, mais encore dans
les gestes des mains ; les histrions font des
leurlangage^.
mouvements de tous leurs membres des signes
intelligibles pour les spectaieurs, et parlent,
pour ainsi dire, à leurs yeux la vue de l'éten-
CHAPITRE V.
;

dard et du drapeau transmet aux soldats les


ordres de leurs chefs Tous ces signes sont .
DIVERSITÉ DES LANGUES.
comme une sorte de langage visible. Mais la plu-
part comme nous l'avons observé se rappor-
, , 6. L'Ecriture sainte, ce souverain remède aux
tent au sens de l'ouïe et consistent principa- , maladies qui rongent le cœur humain, ne fut
lement dans les paroles. Ainsi la troinpette, écrite d'abord, il est vrai, que dans une seule

la flûte et la harpe font entendre le plus sou- langue, au moyen de laquelle elle put facile-
vent un son, non-seulement suave et harmo- ment se répandre dans l'univers; mais traduite
nieux, mais encore significatif. En comparai- dens les diverses langues du monde, elle vint à
son des paroles, les signes de cette espèce sont la connaisssance de tous les peuples, pour leur
très peu nombreux. La parole en effet est le salut. Ce qu'on se propose en la lisant, c'est d'y
signe de premier ordre dont se sei'vent les hom- découvrir les pensées et les volontés de ceux qui
mes pour exprimer leurs pensées, quand ils l'ont écrite, et, par lii même, les volontés de Dieu,
veulent les manifester au dehors. Le Seigneur dont les auteurs sacrés ne sont à nos yeux que
fit voir un signe dans l'odeur du parfum qui
, les fidèles interprètes.
fut répandu sur ses pieds i un autre, dans la ;

I
Luc, XII, 19,20.-2 Matl. ix, 21. — ' Gcn. xi, 1-9.
I
Jean, su, f, 7.

à
IJVIIK DKUXII^ME. —CONNAISSANCE DES SKiNES. 21

toutes nu double fruit, les deux préceptes


CHAPITRE VI.
de l'amour, sans (|u'il y en ait une seule de
QUI RESSOUT DE L'OIISCIRITÉ DE l/ÉCUI- stéiile et qiu ne produise ces fruits de sain-
ITII.ITÉ
TlUE. teté !

.S. Mais pour(pioi cetl<' même vérité 8'olîre-


7. C('|)t'ii(l;»iil ct'iiv (jiii lisiMil les saints Li- l-elle ainsi à moi avec plus de charmes, que
\res aM'c une iiru' coMliaiicc triiuTaiiT, s'rf^ai'oiit SI l'Eciitun; ne la re|)réseutait |)assous de sem-
hicntôl dans uno Ibiilc de passajios (lil'licilcs et blables ligures m serait dillicile de re\pli(|ucr,
obscurs, et pronncnl un sens pour un autre; et c'est d'ailleurs une question étrangère à
parfois niônie certains textes sont envcloppc'^s notre sujet. Toujours est-il certain qu'on décou-
(l'un voite si épais, don-
qu'ils ne peuvent en vre plus volontiers la vérité sous les ligures qui
ner une inter|)rétation quelconque. Je ne doute qu'on trouve avec une satisfaction
la voilent, et

nullement que ce ne soit une disposition par- plus vive ce qu'on à cherché avec (pielque
ticulière de la sagesse divine, (pii a voulu domp- peine. Ceux qm ne découvreid pas aussitôt
ter l'orgueil de l'Iiouuu;' par le tra\ail, <'l pré- l'objet de leurs recherches, se sentent excités

munir contre le dégoût son esprit qui trop connue par l'aiguillion de la faim; tandis que
souvent méprise ce qu'il découvre l'acilement. la tlécouverte tro[) facile de la véi'ité engendre
Qu'on dise, par exemple, que les liommes souvent la tiédeur avec le dégoût: dans
les deux
saints et partaits sont ceux dont l'Église du cas, néanmoins, il faut prémunir contre le
se
Christ propose la \ieet les nianu-s comme exem- découi'agement. C'est dans ce dessein que l'Es-
ples aux inlidèles qui viennent à elle, pour prit-Saint a composé les di\ lues Ecritures de la
les arracher à leurs vaines supei'titions, et se manière la plus admirable
plus salutaire. et la
les incorporer en les faisant marcher sur les 11 a dispose des passages clairs et évidents, comme
traces de ces justes ;
qu'on représente ces aUinent au besoin pressant de connaître, et
zélés et fidèles serviteurs du vrai Dieu, dépo- d'auti'cs plus obscurs, connue remède contre le
sant le fardeau du siècle, se plongeant ilans dégoût el 1 eniuii. li n'est presque rien d'ailleurs
les eaux saintes du baptême, et au sortir de de ce qui est caché sous ces onscuiités, qu'on
[k produisant, sous l'action féconde de l'Esprit- ne trouve exprimé claueinent en d'autres en-
Saint, le fruit du double amour de Dieu
et du droits.
prochain : comment exprimée
se fait-il qu'ainsi
cette vérité h'apps moins agréablement l'audi- CHAPITRE VU.
teur, que si on la lui découvre ligurce dans ce pas-
sage du Cantique des cantiques, on on adresse à LES SEPT DEGRÉS QUI CONDUISENT A LA SAGESSE.

l'Eglise cette louange comme à une femme ra-


vissante de beauté « les deids sont comme
:
9. 11 faut donc avant tout que la crainte de

« un troupeau de brebis tondues qui montent Dieu nous dispose à connaître sa volonté, et
H du lavoir, et qui portent un double fruit sans ce qu'il nous commande de rechercher ou de
« qu'il y en ait de stérile parmi elles ? » Y '
fuir. 11 est nécessaire que cette crainte frappe
découwons-uous une vérité différente de celle vivement noire àme de la pensée de notre

qui nous était présentée en tei'nies clairs et sans mortalité et du trépas qui nous attend, et que,
(igure?Et cependant je ne sais pourquoi je con- perçant les désirs de la chair, elle attache à la

temple avec plus de charme les saints quand croix toutes les révoltes de l'orgueil. Vient
je les consiuore comme les dents de l'E- ensuite la pieté qui doit nous rendre dociles,

glise, arrachant les hommes au joug de l'er-


et nous apprendre à ne jamais contredire la
i-eur, ijiisanl la pmeté de leurs cœui's, divine Ecriture, soit (pie nous en saisissions le
les
broyant quelque sens, et que nous remarquions qu'elle attaque
et les triturant en sorte
poiu" les lui incorporer. Comme je me plais à
quelqu un de nos vices, soit qu'elle reste fermée
tes considérer sous la délicieuse image de ces à notre intelligence, et nous expose à penser que
brebis tondues qui, après avoir déposé les fardeaiLX nous pouvons concevoir de nous-mêmes des pen-
du siècle comme des toisons, et remontant du sées et donner des prescriptions plus sages. Nous
lavoir, c'est-à-dire du bain baptismal, portent devons croire avec nue entière conviction que,
' Cant. IV, 2. même dans ces obscurités, elle renferme plus
DE LA DOCTRINE CHKÉTIEME.

de vérité et de sagesse que nous ne pouvons en plus on voit Dieu; et plus on vit pour la créa-
produire de nous-mêmes. ture, plus Dieu se cache. Et alors même que
10. Après CCS deux degi'ès de la crainte et cette lumière infinie commence à paraître
de la piété on
au troisième, qui est
arrive moins accablante, plus certaine et plus ravis-
celui de la science, objet spécial de ce traité. sante, nous ne l'apercevons encore qu'en énigme
C'est dans ce degré que s'exerce quiconque et dans un miroir i, parce que dans le pèleri-

s'applique à l'étude des divines Écritures. nage de cette vie, nous marchons plus par la
Tout ce qu'il y découvrira se résumera dans foi que par la claire vue 2, quoique notre con-

cette vérité : qu'il laut aimer Dieu de tout son versation soit déjà dans les cieux ''.
Celui qui
cœur, de toute son âme et de tout son esprit, est parvenu à ce degré, purifie tellement l'anl
ef le prochain commet soi-même, en sorte de son cœur, qu'il ne peut plus préférer ou
que l'amour du prochain et de soi-même se comparer à la vérité souveraine, ni le pro-
rapporte à Dieu. Nous avons parlé de ce double chain, ni, par conséquent, lui-même. Et telle
précepte dans le livre précédent, où nous avons sera dans ce juste la simplicité et la pureté
traité des choses. Aussi, à peine l'homme ou- du cœur, que jamais ni l'envie de plaire' aux
vrant riîcrilure, s'est-il reconnu épris de l'a- hommes, ni la crainte des épreuves et des ad-
mour du siècle et des choses passagères, qu'il versités de cette vie, ne seront capables de le
se sent très éloigné de ce parfait amour de détacher de l'amour de la vérité. C'est ainsi que
Dieu et du prochain qu'elle lui prescrit. Alors cet enfant de Dieu s'élève jusqu'à la sagesse,
la crainte qui le trappe de la pensée du juge- qui est le septième degré et il en jouit au sein
ment de Dieu, et la piété qui le soumet avec de la paix la plus profonde. Le commence-
une pleine conviction à l'autorité des saints ment de la sagesse est la crainte de Dieu *, et
Livres, le lorcent à \erser larmes sur sa
îles c'est de cette crainte qu'en passant par les

misère. Car cette science, en ouvrant son autres degrés on tend à la sagesse et qu'on y
cœur à l'espérance, lui apprend, non à pré- arrive.
sumer, mais à gémir, et ces larmes jointes à de
ferventes prières , lui obtiennent le secours CHAPITRE VlU.

céleste qui l'éloigné de l'abime du désespoir.


LIVRES CANONIQUES.
Il entre alors dans quatrième degré, qui est
le

la force, où il sent naître en lui la faim et la 1:2. Revenons maintenant au troisième degré,
soif de la justice. C'est parla force qu'il s'arrache dont nous nous sommes proposé de traiter spé-
aux joies mortelles qu'il goûtait dans les choses cialement, suivant les lumièies qu'il plaira à
passagères et qu'il les repousse, pour ne plus Dieu de nous accorder. La règle la plus sage à
aimer que les biens éternels, c'est-à-dire la suivre poni- pénétrer dans les profondeurs des
Trinité toujours une et immuable. divines Écritures, est de commencer par les lire
11. Aussitôt qu'il aperçoit cette divine lu- tout entières afin d'en acquérir au moins la con-
mière projetant au loin ses rayons, et qu'il naissance que peut en donner, celte lecture, si
sent que la faiblesse de son regard ne peut en l'on n'arrive pas encore aies comprendre. On se
supporter l'éclat, il monte au cinquième de- bornera d'abord à celles qui sont réputées ca-
gré, qui est le conseil. Là, il s'applique à pu- noniques. Il y aura moins de danger à lire les
rifier dans les œuvres de miséricorde, son âme autres, lorsqu'on sera instruit des vérités delà
agitée et irritée contre elle-même, de toutes foi; il serait à craindre que, s'cmparant d'un es-

les souillures contractées dans les jouissances prit encore faible, elle prévenant de leurs fables
terrestres. Là, avec une sainte ardeur, il
et de leurs dangereuses erreurs, elles ne lui
s'exerce et se perfectionne dans l'amour du inspirassent des préjugés contraires à une saine
prochain; et, lorsque rempli de force et d'es- interprétation.
pérance, il est parvenu jusqu'à aimer ses enne- Pour les canonicpies on suivra
Écritures ,

nemis, il s'élance au sixième degré, où il purifie l'autorité du plus grand nombre des Églises

cet œil qui seul peut contempler la divinité, catholiques, au prenfier rang desquelles on
autant qu'il est donné à ceux qui meurent au devra mettre celles qui ont eu le privilège

siècle présent. Car plus on meurt à ce monde, II Cor. xiii, 12.— niCor. v. 6, 7. — 'PliilJpp. m, 20.— »Ps. ex,

10 ,
Eccli. 1, 16.
1 Matt. XXII, 37, 39.
LIVRE DEUXIEME. — CONNAISSANCE DES SIGNES. 23

il'tHri' le siôfie des apùtros et d'eu rocevoii- des Malacbie. Ensuite les (juatre livres des (piati<'
lotlros. On aura pour principe cl pour rôfile en grands piophètes, Isaic, Jérémie, Kaniel et

celte matière, de pr('l'éi'<M' celles (|iie rec()i\eid Ez(''cbi('l. Telssord les quaianle-(|ualre livres (|ni

toutes les E^ïlises catli(>li<iues à celles (lui sduI re- foui autorité dans l'Aucien Testament '. Le
jetécs (le quelques-unes ; et parmi celles que Nouveau comprend les quatre livres de l'Evan-
toutes les Efilises ri'adniellenl i)as, ou |ii('l'érera gile selon -Mathieu, selon .Marc, selon Luc cl se-
celles (|ue reçoivent des ICglisesplus noud)reuses lon Jean; les quatorze é|)itres de l'ap('ilre Paul :

et plus considérables, à celles qui n'ont l'as- une aux Romains, deux aux Corinthiens, une
seulinieut (jne de ipielques ELiiises de moindre aux (Jalates, une aux Ephésiens, une aux I*hi
autoril('. Si l'on rt'uconlre cerlains livres admis lippiens, deux aux Thessalonicicns, une auxCo-

par un plus j;rand nombre d'Eglises, et d'au- lossiens, deux à Timothée, une à Tite, une

tres par des Eglises plus considérables, circons- àPhilémon et une aux Hébreux; deux épitres
tance il'ailleurs dillicile à se produire, je pense de saint Pierre, trois de saint Jean, une de saint
qu'on doit leur reconnaître le même degré d'au- Jac(|ucs, le livre des Actes des apôtres, le livre

torité. de l'Apocalypse de saint Jean.


Le canon entier des Ecritures, auquel se
13.
rapportent les considérations que nous venons CHAPITRE IX.

d'e.xposer, se compose des livres suivants les :

cinq livres de Moïse la Genèse, l'Exode, le Lé-


:
RÈGLE A SUIVRE DANS l'ÉTIDE DE l'ÉCRITLRE.
viti(]uc, les Nombres et le Deutéronome; le li-

vre de Josué, le livre des Juges, le petit livre de 14. C'est dans tous ces canoniques que
livres
Ruih, qui semble plutôt taire partie du com- les âmes touchées de de Dieu et ren-
la crainte
mencement de riiistoire des Rois, et les deux dues dociles par la piété, cherchent à connaître
livres des l'aralipomènes, qui sont, non une sa volonté. On doit débuter dans cette étude et
suite des précédents, mais connue des supplé- ce travail, ainsi que nous l'avons observé, par
ments qui en suivent marche. Tels
l'ordre et la une certaine connaissance de ces ouvi-ages com- ;

sont les Livres historiques, où les époques s'en- mencer, sinon encore par en pénétrer le sens,
chaînent les unes aux autres, et où se déroule du moins par les lire pour en confier le con-
la suite naturelle des événements. lien est d'au- tenu à sa mémoire, ou ne pas les ignorer com-
tres dont les laits n'ont aucun lien qui les rat- plètement. Ensuite rechercher avec attention
tache à cet ordre naturel ni entre eux. Ce sont et discernement les vérités qui y sont claire-
les livres de Job, de Tobie, d'Esther, de Judith, ment exposées, comme les préceptes des mœurs
les deux livres des Macchabées, et les deux li- et les règles de la foi on
découvre d'au-
: les y
vres d'Esdras, qui send)lent plutôt continuer tant plus que l'intelligence a plus de vivacité
l'histoire suivie des li\res des Rois ou des Para- et de pénétration. Il est remarquable en effet

lipomènes. Viennent ensmte parmi les pro- que les passages les plus clairs de l'Ecrihire
phètes, le livre des psaumes de David, les trois renferment tout ce qui concerne la foi et les
livres de Salomon ; les Proverbes, le Cantique mœurs, je veux dire l'espérance et l'amour, dont
des Cantiques et l'Ecclésiaste. Une certaine res- nous avons parlé dans le livre précédent. Après
semblance de l'orme et de style a fait attribuer s'être ainsi en quelque sorte familiarisé
avec le
à Salomon les deux livres de la Sagesse et de langage des saints Uvres, on entreprend de pé-
1 Ecclésiastique, mais une tradition constante nétrer dans les obscurités qu'ils renferment,
leur donne pour auteur Jésus Sirach loute- '
;
et d'en faire jaillir la lumière les passages ;

fois l'autorité qu'on leur a reconnnue dans l'E- les plus clairs servent à iiderpréter ceux dont
glise doit les faire ranger au nombre des livres le sens serait voilé, et les vérités incontestables,

prophétiques. Les autres livres sont ceux des à établir avec certihule celles dont on pourrait
prophètes proprement dits les livres des douze ;
douter encore. Ici mémoire est d'un grand
la
prophètes qu'on n'a jamais séparés ne forment secours; mais si on en manque, les préceptes
ensemble qu'un seul livre. Ces prophètes sont : que nous traçons ne peuvent la donner.
Osée, Joël, Amos, Abdias, Jonas, Michée, Na-
' Ibid.
hum, Habacuc, Sophonie, Aggée, Zacharie,
'
lIKétr. I, ch. IT, n. 2.
24 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

impossible de les faire passer dans une autre


CHAPITRE X. langue. Il est en effet des expressions tellement
propres à certaines langues, qu'aucune traduc-
OBSCtRITÉ DE l'ÉCRITURE DANS LES SIGNES QU'ELLE tion ne peut en reproduire la signification dans
EMPLOIE. une langue étrangère. Ainsi en est-il principa-
lement des interjections, qui servent plutôt à
15. de quelques passages de
L'intelligence
exprmier des mouvements subits de l'àme,
l'Ecritiu-e échapper pour doux raisons
peut :

qu'une conception raisonnée de l'esprit. A ce


le sens inconnu, ou la signification équivoque
genre appartiennent les deiLX ternies cités plus
des signes sous lesquels est enveloppée la pen-
haut. Radia, dit-on, est un signe d'indignation, (
sée de l'auteur sacré. Or, les signes sont propres
et Hosainia un cri de joie. Mais ce qui rend
ou ligures. Les signes propres sont ceux qu'on
nécessaire la connaissance du grec et de l'hé-
emploie pour désigaer pour lesquels
les objets
breu, ce ne sont pas les termes de cette nature,
ils ont été (lirectcnicnt institués. C'est ainsi que
qui d'aillem's sont peu nombreux, et qu'il est
par le mot ijonif, nous entendons cet animal
facile de remarquer et de comprendre, mais,
auquel donnent ce nom tous ceiLX qui i)arlenl comme nous l'avons observé, la diversité
avec nous la même langue. Les signes
sont
des interprètes. On peut compter ceux qui ont
ti^u-és, quand les choses désignées par les ter-
traduit l'Ecriture d'hébreu eu grec, tandis que
qui leur sont propres, servent à délermi-
nies le nombre des interprètes latins est infini.
Ainsi
ner elles-mèuics quelque objet différent. Car, dans les premiers temps du christianis-
le mot bond' nous rappelle, à la vérité, l'animal
me, des qu'un exemplaire grec tombait entre
ordinairement appelé de ce nom; mais, sous
les mains de quelqu'un qui croyait avoir cer-
remblènie de cet animal, nous entendons aussi taine connaissance de l'une et de l'autre langue,
quelquefois le prédicateur de l'Evangile dont l'E-
il se hasaidait à le traduire.
criture a voulu parler, selon l'interprétation de
l'Apôtre, (piand elle a dit « Tu ne tiendras :

CHAPITRE XII.
« point la bouche Uée au bœuf qui foule le
« grain ' .
»
UTILITÉ DES DIFFÉRENTES INTERPRÉTATIONS.
CHAPITRE XI
17. Cette grande variété de traductions sert
LA SCIENCE DES LANGUES NÉCESSAIRE POIK l'IN- plus encore à l'intelligence des Ecritures,
TELLIGENCE DES SIGNES. qu'elle met obstacle, quand on s'attache
n'y
à les lire avec une véritable application. C'est
16. La connaissance des signes propres dé- en consullant plusieurs traducteurs que sou-
pend principalement de celle des langues. vent on est arrivé à saisir le sens de quelques
Nous proposant ici d'éclairer ceux qui parlent passages très-obscurs. Dans le prohpèle Isaïe,
la langue latine, nous leur dirons que, pour par exemple, là où un interprète a dit » Ne :

l'intelligence des Ecritures, ils doivent posséder « méprise pas ceux de la maison et de ta
deux autres langues, qui sont le grec et l'hé- « race •; un autre a traduit « Ne méprise
>• :

breu, afin de pouvoir recourir aux textes ori- 'pas ta chair. » Tous deux s'appuient mutuel-
ginaux, toutes les fois que la diversité infinie lement, et l'un sert à éclaircir l'autre. En effet

des interprètes latins n'engendrera que le doute on pourrait prendre dans un


le mot chair
et l'incertitude. D'ailleurs il se rencontre, dans sens naturel, il serait alors prescrit à chacun
nos Livres saints, certaines expressions hébraï- de ne pas mépriser son corps; et « ceux de la
ques qui n'ont jamais été traduites, comme « maison et de la race » s'entendraient, dans

Amen, Alléluia, Bachu, Homnna et d'autres. le sens figuré, des chri'tiens qui sont nés spi-
On eût pu en traduire quelques-unes, telles rituellement avec nous de la même semence,
que umen, (lUeluiit; mais on a voulûtes con- de la parole divine. Mais en mettant en regard
server dans leur forme antique, pour en rendre le sens des deux traducteurs, on découvre,
l'autorité plus rcspectal)le ;
pour d'aulres, telles comme plus vraisemblable, qu'il nous est or-
que Huvhu et Husanna, on prétend (pi'il était donné en cet endroit, de ne pas mépriser ceux

<l Cor. IX, 19. '


Is, LVIIl, 7.
LIVRE DEUXIÈME. — CONNAISSANCE DES SIGNES. 23

qui nous sont unis par les liens du san^. Cai- " sont prompts pour ré|iandre le
et légers
en lappiocliant de « chair, » ceux qui sont de « sang : » trompés par un terme
les autres,
« la nii^iiie race, » ou voil paraître tout d'ahord équivoque, sont tombés dans une fausse iritfîr-
ceux (priuiissenl entre eux les liens du saiin. pi'i'lation. n'aulifs Iraiiiiclidns sont non-seu-
C'est di" là que viennent, à mon avis, ces pa- lement obscures, mais entièrement fausses;
roles de l'AidMre : » Je lAclie d'exciter une il faut alors s'ap|)liquerà les corriger plus qu'à
« saintt? jalousie dans ma ciiair, afm d'en sau- les éclaircir et à les comi»reudie. Tel est
>< ver quelques uns '. » Il voulait ipie l'exem- l'exemple suivant : Parce que p-oa/o;, en grec,
ple de ceux qui croyaient déjà, les amenai à signilie « un veau, » certains inteiprètres ont
lem' tour à la loi, en lem* inspirant une salu- traduit terme jXQT/t'Jixxza par « troup(;aux
le

taire énudation. Il appelle donc les Juifs sa « de veaux, » ne voyant pas que la véritable

chair, par suite de leur conunune ori^^ine avec signification était celle de plantes. Et cette er-
lui. Dans un autre passage du même prophète, reur s'est glissée dans un si grand nombre
un traducteui' a dit « Si vous ne croyez, vous: d'exemplaires, qu'à peine on en rencontre un
"ne comprendrez point - » un autre a rendu ; : seul où on lise différemment. (Cependant rien
« Si vous ne croyez, vous ne demeuierez de plus facile à déterminer que le vrai sens
« point. » Comment savoir quel est celui qui de ce mot, qui ressort si clairement de ceux
a exprimé moins de recourir à
le vrai sens, à qui suivent. N'est-il pas plus naturel de dire :

la langue originale? Cependant une lecture « Les plantes adultérines ne jelleront |)oint de

approfondie fait ressortir une grande vérité de « profondes racines, » que de dire : « Les trou-
ces deux interprétations. Il est diflicile que les « pes de veaux, etc., » animaux qui mar-
interprètes s'écartent tellemiMit les uns des chent sur la terre et n'y sont point fixés par
autres, qu'ils ne conservent entre eux quelque des racines? D'ailleurs l'ordre et la suite du
point de contact. Voici l'explication. La vue de discoui-s autorisent pleinement cette interpré-
l'essence divine par l'intelligence est perma- tation.
nente et éternelle tandis que la foi ne nom-
;

rit, pour ainsi dire, que de lait les hommes


CHAPITRE XIII.
encore enveloppés comme des enfants dans les
langes des choses passagères de cette vie. C'est
que nous marchons ici-bas et non COMMENT IL FAUT CORRIGER UN DÉFAUT
par la foi
encoi'e par une vue claire et parfaite *. Or, il
DE TRADUCTION.

est nécessaue que nous marchions à la lu-


mière de la foi pour parvenii" à cette vue claire 19. Mais il est souvent difficile de découvrir

et permanente, dont nous jouirons éternelle- la véritable pensée de l'écrivain sacré, au mi-
ment par le moyen de notre intelligence puri- lieu des différentes traductions que les inter-
fiée, qui nous tiendra unis à la vérité. C'est prètes ont cherché à en donner, dans la me-
pourquoi l'un des traducteurs a dit « Si vous : sure de leur pénétration et de leur intelli-
« ne croyez, vous ne ilcmeurerez pomt, » et l'au- gence, moins de consulter la langue qu'ils
à
tre « Si vous ne croyez, vous ne comprendrez
: ont traduite en latin, ou de consulter les traduc-

« point. » tions de ceuxqui se sont trop attachés aux mots.


L'ambiguité des termes de la langue ori-
18. Ces traductions ne suffisent pas sans doute,
ginale contribue encore souvent à jeter un mais elle.> servent à découvrir la vérité ou
interprète dans l'erreur, quand il ne saisit pas l'erreur dans celles ou l'on a préféré suivre la
parfaitement la pensée de l'auteur, et cette pensée plutôt que la signification rigoureuse
ambiguité lui fait donner une explication des expressions. Car on donne souvent des tra-
absolument étrangère au sens véritable. ductions de mots et même de locutions que la
Quelques traducteurs ont ainsi rendu ce passage langue latine se refuse d'admettre, quand on
des Psaumes. « Leurs pieds sont aigus pour veut conserver les principes des premiers
«répandre le sang < » Or, oHv;, en grec, . mailres en cette langue. Ces sortes de tra-
signifie aigu et léger. Le vrai sens n'a doue été ductions ne nuisent pas ordinairement à l'in-

saisi que par celui qui a traduit « Leuis i>ieds : telligence des choses ; mais elles peuvent cho-
' Rom. XI, 14. — 2 Is. vil. 9. — 3 II Cor. v, 7. — >
Ps.iiii, 5. quer les esprits que la pensée frappe plus agré-
26 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

ablemeni, quand elle est rendue dans son Dei, fortins est Iwminihits : « Ce qui paraît
intégrité sous les termes qui lui sont pro- « en Dieu une folie est plus sage que la

pres. Le solécisme, par exemple, n'est qu'une « sagesse des hommes, et ce qui parait eu
alliance de mots contraire aux règles tracées « Dieu une faiblesse est plus fort que la force
avant nous par les maîtres du langage. Or, n des hommes '. Si on eût voulu repro-
)>

qu'importe à celui qui ne cherche que la vé- duire la construction grecque et dire ; .S'a-

rité, de savoir s'il faut dire en latin : luter Im- pieiitius est hioninum, fortins est hominiim,
miiiex ou l'n
iitter barbarisme
Iwmiiiihus. un lecteur atlentif en aurait sans dofite saisi

n'est qu'un motou prononcé autrcmenl


écrit le sens vrai, mais un. esprit moins pénétrant
qu'il ne l'a toujours été avant nous. Qu'im- ou n'aurait pas compris, on serait tombé
porte à celui qui demande à Dieu qu'il daigne dans une fausse interprétation. Car cette locu-
lui pardonner ses péchés, de savoir s'il doit tion, en latin, est non-seulement défectueuse,
faire longue ou brève la troisième syllabe de mais présente aussi une équivoipie, et semble
igiioscere, pardonner, et de quelle manière il insinuer que la folie et la faiblesse des hommes
faut le prononcer ? La piu'eté du langage est- ont plus de sagesse et de force que la force et
elle donc autre chose que la conrorinité aux rè- la sagesse de Dieu. Stipientius est liomiuil^ns,'
gles observées autour de nous et autorisées par n'est pas d'ailleurs sans ambiguïté, quoiqu'il
la pratique des temps antérieurs? n'y ait pas de solécisme; c'est l'évidence de
-20. Mais pUis les hommes sont faibles, plus la pensée qui seule fait reconnaître si honii-
ils sont susceplibles, et ils sont d'aulant plus nibns est au datif ou à l'ablatif. La traduction
faibles qu'ils veulent paraître plus instruits. Je la plus irréprochable eût donc été celle-ci :

dis plus instruits, non dans la connaissance de Sapientius est quain liomines, fortius est quam
la vérité, dont le propre est d'édifier, mais dans iiomines.
la science du langage, dont il est facile de
CHAPITRE XIV.
tirer vanité, puisque la science de la vérité
même n'engendre que trop souvent l'orgueil, SOLRCES OU l'o.X ItOIT PLISKR LA tXWNAISSANCE
si l'esprit ne s'abaisse sous le joug du Seigneur. DES TERMES ET DES LOCUTIONS INCONNUES.
La construction de la phrase suivante est-elle
un obstacle au lecteur Qiiœ est terra in : qiiii isti :21. Nous parlerons dans la suite des signes
insidunt super eam, ctc : « Considérez quel équivoques; occupons-nous d'abord des signes
« est le pays et les peuples qui l'habitent, inconnus. Orilya deux sortes de paroles in-
« s'il est bon ou mauvais et (juclles sont les connues car le lecteur peut être arrêté par
:

« villes ceux qui y résident ? Plutôt que


et ' nue expression, ou par une locution inconnue.
d'y chei'cher im sens profond et mystérieux, Si elles proviennent de langues étrangères,

je n'y vois qu'une forme d'expression em- qu'on en demande la signification à ceux qui

pruntée à une langue étrangère. De même le parlent ces langues, ou (|u'on les api)renne soi-
terme floriet, eu usage parmi les peuples dans même si l'on se reconiiait assez d'intelligence

le chant de ce verset des psaumes Super :


et de pour cette élude, ou enlin qu'on
loisir

ipsirm (iiitein poriet siinetillrtttio mea : « Ma compaie enire eux les différents interprètes. Si,
« sainteté (leurira sur sa tète ', » n'enlève rien dans notre propre langue, on rencontre des
à l'intégrité de la pensée. Et cependant une jermes ou des locutions dont on ignore le
oreille plus délicale et plus exercée préférerail sens, on le découvre facilement par l'habitude
entendre //'//i'/)// au lieu de poriet. L'euq)loi de les lire et de les entendre. Il est d'une ex-

habituel de ce ternie dans le chant s'oppose *rème impoitance de confier à sa mémoire


seul à ce qu'on fasse celle simple corroclion. ces sortes d'expressions et de locutions in-

Le lecteur qui ne s'ari'ète pas à ce qui ne connues, afin de les avoir présentes ii l'esprit,

peut altérer le sens véritable, n'attache aucune quand il se rencontrera quelqu'un plus éclairé,

importance sérieuse à ces irrégularités de qu'on pourra consulter à cet égard, ou quand
langage. Il en serait autrement dans ce pas- on lira quelque passage dont le contexte en fera
sage de saint Paul : Qaod stiiltitin est Dei, saisir la propriété ou la signification. Consta-

sapientius est homiiiibus, et qiioil iiilirmum est tons cependant ici que tel est l'empire de l'ha-

I
Xomb. iiii, ÎO. — ' Ps. cxxii, 18. UCor. 1,26.
LIVRE DEUXIÈME. — CONNAISSANCE DES SKJNES.

hiliidc, iiuMne quand il s'agit de s'instruire, (juc uérables savants ? V eùt-il certaines divergences
ceuv (lui oui (Mé eu (iiieli|ue s(irt<' nourris cl irilrc le tcxlc hébreu cl Iciu- traduction;
éleM's dans l'étude des saintes iMiilui-es, hou- il laid considérer ici avant tout les vues de
vent ces locutions plus étranges et nioius coii- la Providence, dont ils lurent les instruments.
fornies au j^énie de la lan;jue ialine, que celles Celle Providence (li\iiie voulait (pie |)ar la
(|u'dsonl a|ii)rises dans l'Kerilure, et (jn'on ne puissance du roi PlolcuK-e, ces livres que la
renconlic pas dans les meilleurs auteurs latins. nalioii jui\c rclus.iit, par rchgion ou par envie,

Ajoutons ([u'il est d'une grande utilité en de livrer aux aulics peu[)ies, fussent remis,
cette inatièce, de comparer enli'elles les tra- dès cette épotpie reculée, entre les mains des
duclioiis, et d'en l'aire une étude attentive et lui nations qui devaient un jour croire en Jésus-
examen intelligent. Mais avant tout qu'on (;hrist. Ils ont donc pu faire leur traduction de
lasse dispai'ailre loule erreur du texte; car ceux inanicre tprelle fût en ra()|)oi-| avec les besoins
(]ui desireul comiailre l'Iù-rituie, doivent s'ap- (le ces peuples, selon (pie le jugeait l'Esprit-Saint
pliipier d'abord à en corriger les exemplaires. qui les dirigeait et qui niellait sin- leurs lèvres le
Ceux qui auront subi cette épreuve, devront même langage. Cependant, comme je l'ai re-
jouir d'une aulorilé suitérieiire à celle des tra- marqué, il n'est i)as inulile, pour mieux saisir
duclions (pu ne sont le Iruit que des lumières une pensée, de mettre en regard les interprètes
d'un seul interprète. qui se sont le plus attachés aux expressions.
.\insi, comme je l'ai dt-jà insinué, les traduc-
CHAPITRE \V. tions latines de l'ancien Testament doivent
être corrigées, s'd est nécessaire, sur les
EXCELLENCE DE L.\ VEUSION ITALIQUE ET UE
exemplaires grecs, et principalement sur ceux
CELLE DES SEPTANTE.
des Septante, qui ont interprêté l'Ecriture avec
•2'2. La version latine qu'on doit prélerer à une si étonnante conformité de pensées et d'ex-

toutes les autres, est la version italique : elle pressions. A l'égard des livres du nouveau Tes-
joint à la clarté de la pensée la lidélité des ter- tamment, si la divergence des versions latines
mes. Poiu" corriger les versions latines, quelles fait surgir quelque incertitude, il est incontes-
qu'elles soient, il faut recourir aux exemplaires table qu'il faut s'en rapporter aux textes grecs,
grecs, et spécialement à la version des Sep- surtout à ceux qui passent dans toutes les
tante, qui jouit de la plus grande autorité pour Eglises pour les plus célèbres par leur tidéhté
l'Ancien Testament ' . Au témoignage des Egli- et leur exactitude.
ses les plus célèbres, une assistance miracu-
CHAPITRE XVI.
leuse de l'Esprit-Saint ne forma en quelque
sorte de tous ces interprètes qu'une seule et UTILITÉ DE LA C(»XAISSA>CE DES L.VNGIES, DE LA
même bouche. S'il faut en croire la tradition et >ATL RE, DES NO.MBRES ET DE LA MLSHJLE POUR
plusieurs personnages dignes de foi ^, ces inter- L'i.NTELLir.ENCE DES SIGNES FIGURÉS.
prètes travaillèrent, chacun dans une cellule sé-
parée, à traduire l'Ecriture, et leurs traductions 23. Le lecteur qui rencontre des signes fi-

particulières se entièrement con-


trouvèrent gurés dont il ignore la signification, doit la

formes les unes ;uix autres, jusques dans la chercher, soit dans la connaissance des lan-
nature et l'arrangement des termes. Quelle gues, soit dans celle des choses mêmes. Ainsi
autorité comparer, et encore moins préférer à le nom de Siloè, cette piscine où le Seigneur
cette imposante autorité ? Et quand même ils envoya pour s'y laver, celui dont il avait oint
auraient mis en commum leurs travaux et les yeux avec de la terre détrempée de sa sa-

leurs lumières pour arriver à


unanimité celle live, rcnlèrme un symbole frappant et révèle

de pensées et d'expi-essions, serait-il encore un profond mystère. Si l'évangélisle n'eût ex-


nécessaire, serait-il même convenable qu'un pliqué ce terme d'une langue inconnue, nous
seul interprète, si profonde que fût sa science, en eussions ignoré la signification profonde.
tenlàt de réformer le sentiment de tant de vé- Il y a dans les Livres saints beaucoup d'autres
' Voir Citéde nieu. liv. xiiviii. cliap. 43. noms hébreux dont les auteurs n'ont pas donné
2 Saint Irénée. liv. 3, ch. 35 Clém. k\e\. livre l, Strom.; saint
l'interprétation et il est certain que cette
;

;
in-
Cyi-ill. Jérus. Catéch. iv saint Justin, mart. Disc. cont. les Gentils
;

Comparez saint Jérôme, préf. du Pentateuq. '


Jean, ix, 7.
28 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

terprélation une fois connue, sert beaucoup à béril etdu diamant, est souvent im voile sur
résoudre les dillicultés de l'Ecriture. Aussi lesyeux du lecteur. Comment voyons-nous si
plusieurs savants, très-versés dans la connais- facilement, dans ce rameau d'olivier que la
sance de cette langue, ont rendu un service con- colombe rapporta à son retour dans l'arciie »,
sidérable à la postérité, en s'appliquant à re- le signe d'une paix perpétuelle, sinon parce
termes et à en donner l'explication;
cueillir ces que nous savons que le doux contact de l'huile
nous apprenant ce que signifie Adam, Eve, résiste à l'action des liquides étrangers, et que
Abraham, Moïse, et ces noms de lieux : Jérusa- l'olivier est toujours couvert de son feuillage ?
lem, Sion, Jéricho, Siua, Liban, Jourdain et Si plusieurs eussent connu Ihysope, et la
tant d'autres noms hébreux qui nous sont in- propriété qu'a cette plante, si petite et si fai-
connus. Il y a là une source de lumières pour ble, de purifier les poumons et de faire pénétrer,
l'intelligence des locutions figurées répandues dans les rochers, ils auraient
dit-on, ses racines
dans les Livres saints. compris la raison de celte parole de l'Écriture ;

24. Ce qui contribue aussi à rendre obscures « Vous m'arroserez a\ec l'hysope, et je serai
les expressions métaphoriques, c'est l'igno; « purifié ^. »

rance de la nature des choses, comme des ani- 2o. L'ignorance des nombres est encore un
maux, des etc., que
pierres, des plantes, obstacle à rintelligence de pkisieurs passages
l'Ecriture emploie souvent comme termes de métaphoriques et mystérieux de l'Ecriture. Tn
comparaison. Nous savons, par exemple, que esprit peu éclairé se demandera toujours avec
le serpent expose au péril son corps tout entier élonnemenl pourquoi la durée du jeûne de
pour préserver sa tète. Cette connaissance ne Moïse, d'Elie et du Seigneur a été de quarante
nous lait-elle pas mieux saisir la pensée du jours. La dilficidté que présente cette figure
Seigneur, quandil nous ordonne d'imiter la disparaît avec la connaissance de la significa-
prudence du serpent i ? Ne nous lait-elle pus tion ilu nombre quarante. Il contient quatre
entendre que nous devons livrer tous nos fois dix, et comprend sous ce rapport la con-
memi)res à nos persécuteurs, pour conserver naissance de toutes les choses soumises à la
Jésus-Christ qui est notre chef, et ne pas lais- règle du temps. Le nombre quatre sert, en ef-
ser mouru- et s'éteindre en nous la foi chré- jct, à diviser le cours des jours et des années;
tienne en reniant notre Dieu, pom' épargner le jour se compose des heures du matin, du
notre corps? Le serpent, après s'être enlenné midi, du soir et de la nuit; et les mois, qui
dans une étroite caverne, y dépose son an- forment l'année, se distinguent en quatre sai-
cienne enveloppe reprend de nouvelles
et y sons, le printemps, l'été, l'automne et l'hiver.
forces. N'est-ce pas là nous dire que, à l'imi- Or, pendant que nous vivons dans le temps, il

tation de sa prudence, il nous faut dépouiller nous faut jeûner et nous abstenir des joies du
le vieil homme, comme s'exprime l'Apôire -, temps, nous qui aspirons à vivre dans l'étei'-
nous revêtir du nouveau, et faire ce dépouil- niié. D'ailleurs, la rapidité du temps nous ap-
lement en passant par la voie étroite, selon prend assez par elle-même à mépriser les
cette parole du Seigneui' : « Entrez par la biens passagers et à désirer ceux qui sont per-
« porte étroite 3 ? » Si donc la connaissance de manents et éternels. D'un autre côté le nom-
la nature du serpent facilite l'intelligence des bre dix implique la science du Créateur et de
comparaisons que l'Ecriture emprunte au ca- la créature. Trois de ses parties représentent
ractère de cet animal, l'ignorance au contraire la Trinité divine, et les sept autres l'homme
des habitudes des autres aiùmaux ne peut que dans son corps et dans son principe vital. Ce
rendre iuconq)rèlieiisibles les nombreuses princi|)e de vie se manifeste par trois facultés
figures dont ils sont l'objet. J'en dirai autant dffercntes, qui ont donné lieu au [irécepte
à l'égard des pierres, des plantes et de tout ce d'aimer Dieu de (oui son « cœur, » de toute
qui tient à la terre par des racines. La con- son« àine » et de tout son « esprit » Dans li-
naissance de l'escarboucle qui brille dans les corps se distinguent les quatre éléments (jui le

ténèbres, répand une vive lumière sur les composent. Le nombre dix multiplié \yay le
obscurités des Livres saints, là où elle sert de nonibre (]ualie, cpii inarque la révolution des
comparaison. L'ignorance des propriétés du temps, nous rappelle donc l'obligation où nous
' Matth. X, 16. — 2 Eph. iv, 2 ; Coloss. III. 9, 10. — ' Matth. vl, iGon. VIII, U. —
= Ps. L, 9. —
'Exod. xxiv. 18; III Rois, IX, 8 ;

13, Matth. IV, 2. —« Ibid. xvn. 37.


LIVRE nEli\I*:ME — CONNAISSANCE DES SICNES. 99

sommes de vivre diiiis l.i chaslelé et la coiili- du temple, il contraird certains hérêtiqnes ;\

iieiu'e, el île reiioriecr aiu joies (rivoles du recnmiaitrc (|iic le l'iis de Dieu a revêtu, non
sièeli- présent. Tel es! l"etiseiniieiiiciit (iiii res- un corps faidasliqne, mais un vi'rilahle coi-ps
sort de ce jeûne de quarante jours; ens-i^ne- humain. C'est ainsi que ça- et là dans l'Ecri-
nient exprimé par la Loi personniliée dans tiu'c se montrent d'uugiistes de nobles allégories

MoLse, par les propli 'lies personniliées dans enipnmtées aux nombres et à la inuslipie.
Elic, el pir le Seignenr lui-même, qni paiiil
sur la numla-iiie dans l'éelal de sa ffloire aux
CHAIMTUEXVll.
)eu\ de ses trois diseiples elïiMyés, a\ant à ses
OUUilNK UE l,.V FAKU: DIÎS NKL'F MISKS.
cùlés ces deuv grands lioiunK's, pour mar(|iiei'

que la Loi el les Prophètes lui rendaient témoi- rî7. On doit en effet rejeter l'erreur des païens
gnage 1. (pii, dans leui's vaines superstitions, ont repré-
C'est ainsi qu'on peut examiner encore com- senté les neuf .Muses commes filles de Jupiter et
ment du nombre quaranle se l'orme le nom- de la Mémoire. Varron, celui (pii fut parmi eux
bre cinquante, qui, dans la religion chré- le plus éclairé peut-être et le plus versé dans
tienne, a rei,u un caractère si sacré du mys- ces sortes de matières, s'est attaché à réfuter
tère de la Pentecôte ; constater que, répété cette fable. Il rapporte qu'une ville, dont le
tiois lois, à raison des trois époques de la vie nom m'échappe, chargea trois ouvriers de
de riuunanilé, avant la loi, sous la loi, et sous sculpter chacun trois statues des Muses, dont
la grâce, ou à raison des noms du l'ère, du elle voulait orner le temple d'Apollon ;
elle
Fils et du Saial-Esprit, et augmenté du nombre devait acheter celles qu'elle jugerait le plus
auguste de la Trinité même, il s'applique au parfaitement exécutées. Les trois artistes réus-
mystère de l'Eglise sanclilico, el lormele nombre sirent également dans leur œu\re, et la ville
des cent cinquante-tiois poissons que prirent fut si ravie de la beauté des neuf statues, qu'el-
les apôtres après la résurrection du Seigneur, le en fit l'acquisition et les dédia Apollon

en jetant leurs lilets du côté droit ^. D'autres dans son temple. Ce fut le poète Hésiode
mystères sont aussi voilés sous ces diverses (piidans la suite leur imposa des noms. Les
figures des nombres répandus dans les saints neuf Muses ne sont donc pas filles de Jupiter,
Livres, et passent inajjerçus aux yeux du lec- mais l'œuvre égale de ces trois artistes el ;

teur peu versé dans cette connaissance. cette ville avait commandé trois statues, non
26. Bien des vérités échap|)ent aussi par parce qu'elle en avait vu trois en songe, ou
suite de l'ignorance de ce qui tient à l'art de que ce même nombre était apparu à chacun
la musique. En traitant de la différence du de ses habitants mais par suite de la nature
;

psaltérion et de la harpe, un certain auteur a même des sons nmsicaux. Tout son, en tant
donné de plusieurs symboles une excellente qu'il forme un chant, peut se produire de
explication. C'est une question qui a son inté- trois manières différentes ou par la voix, :

rêt, entre les hommes


de savoir s'il de l'art, connne dans celui qui chante sans le secours
est quelque loi musicale qui oblige à donner d'aucun instrument; ou par le souffle, comme
au psaltérion le nombre de dix cordes 3. S'il dans la flûte et la trompette ou par la per- ;

n'existe aucune loi de ce genre, il faut recon- cussion, comme sur la harpe, le tambour, et
naître dans ce nombre une signification plus tout autre instrument qui résonne de la même
mystérieuse encore, tirée, soit des dix précep- sorte.
tes du Décaiogue qui se rapportent au Créa-
teur et à la créature, soit des considérations CHAPITRE XVUI.
exposées plus haut sur le nombre dix. Ce nom-
bre de quarante-six ans que dura la construc- NE PAS MÉPRISER CE QBE HES PROFANES OMT DE
tion du temple, au rapport de l'Evangile 4, BON ET d'utile.
fait entendre je ne sais quelle harmonie; car,

appliqué à la formation du corps du Seigneur, 28. Que ce récit de Varron soit vrai ou faux,
dont lui-mèiii3 voulait parler sous la figure les superstitions profanes ne sont pas un mo-
de repousser la musique, quand elle
tif sert à
'
Matth.xvi[. 2, 3. -' Jean, xxi, 11. — ^ Ps. .vxxii, 2 ; Ps. xci, 4.

- * Jean ii, 20. nous faciliter l'intelligence des saintes Ecri-


30 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

tures; pas plus que nous ne devons assister à leurs etau culte des idoles soit qu'elles enseignent ;

spectacles frivoles, parce que nous tirons de ilhonorer une créature quelconque comme la
leurs instruments de musique des considéra- divinité, ou à consulter les démons, et à se
tions qui nous (ont mieux saisir les choses spiri- lier avec ses esprits de ténèbres par des pactes
tuelles. Laisserons-nous de côté l'étude des let- et des conventions, telles que les opérations
ties, parce qu'ils prétendent que Mercure en a de la magie que l'on retrouve
ordinairement
été l'inventeur? Fuirons-nous la justice et la tlans les écrits des poètes, plutôt à titre de sou-
vertu, parce (ju'ils leur ont consacré des temples venirs que de doctrines. A cette catégorie ap-
et qu'ils ont mieux aimé les adorer sous des partiennent les livres des aruspices et des au-
images de pierres (pie de les porter dans leurs gures, remplis des plus vaines puérihtés; ces
cœurs ? Loin de là que tout chrétien fidèle et
: ligatm'es remèdes réprouvés par la
et ces
sincère sache que partout où il rencontre la science de la médecine et qui consistent soit ,

vérité, elle appartient à son Dieu et Seigneur, d;ins des enchantements et dans je ne sais
et que, faisant prolésaion de ne suivre que sa quelles marques appelées caractères, soit dans
divine lumière, il déteste, jusques dans les Li- des choses qui se suspendent, se lient ou s'a-
vres saints, les fables superstitieuses ;
qu'il s'é- justent de certaine manière, non pour le sou-
loigne avec une douloureuse compassion de ces lagement du corps, mais pour en former
hommes, « qui, connaissant Dieu, ne l'ont des symboles secrets ou apparents. Pour en voi-
ï point glorifié comme Dieu, et ne lui ont ler le caractère superstitieiLx et lui prêter
« point rendu grâces de ses bienfaits mais, ;
une efficacité naturelle, ils donnent à ces
« s'étant égarés dans leurs vaines pensées, leur choses le nom
imposant de physiques. Tels
« cœur, privé d'intelligence, a été rempli de sont ces anneaux d'or suspendus aux oreilles,
« ténèbres. Car, en voulant passer pour sages, ces autres, faits d'os d'autruche, (jui se mettent
« ils sont devenus de véritables insensés, et aux doigts, et quand on a le ho-
la coutume,
« ils ont transféré l'honneur qui n'était dû quet, de se presser avec la main droite le
« qu'au Dieu incorruptible, à l'image d'un pouce de la main gauche.
« homme corriqjtible, et à des figures d'oi- 31. A ces extravagances viennent s'ajouter
« seaux, de bêtes à tpiatre pieds et de rép- mille observations aussi vaines, quand un
it tiles 1.» membre tressaille, quand une pierre, un chien
ou un enfant se remontrent entre' deux amis
CHAPITRE XIX. qui se promènent ensemble. Encore vaut-
il mieux les voir fouler aux pieds la pierre
DEUX SORTES DE SCIENCES PARMI LES PAIEXS.
qu'ilsregardent comme cause de la rn[)ture
29. Pour donner à cette matière d'une si
de leur amitié, que frapper un enfant qui
grande importance, de plus amples dévelop- vient à passer au milieu d'eux. Mais ici les

pements, nous ferons remarquer qu'il y a enfants trouvent quelquefois leurs vengeurs
deux sortes de sciences en usage parmi les dans les chiens ; s'il est des hommes assez

païens, et qui se traduisent dans leurs mœurs. superstitieux pour un chien oser frapper
ipii passe entre eux, ce n'est pas impunément,
L'une a pour objet les choses d'humaine insti-
car souvent cet animal envoie à un véritable
tution, que l'homme a trouvées
l'autre celles
préalablement établies ou instituées de Dieu médecin celui qui cherchait un vain remède
même. A l'égard des institutions humaines, en le frappant. Et ces autres chimères Ne :

une partie est entachée de superstitions, le point passer devant sa maison sans mettre le

reste en est exempt. pied sur le seuil ; retourner à son lit, si on


éternue en se chaussant ; rentrer chez soi, si

CHAPITRE XX. l'on fait un faux pas en marchant ; si un vête-


ment est rongé par les souris, regretter moins
SCiENCESHlMAIXES REMPLIES DE SUPERSTITIONS. le dommage ipie trembler dans l'appréhension
du malheur qui doit arriver. A cette occasion
30. Il faut regarder comme superstitieuses Caton lépondit fort plaisamment. Un homme
les institutions humaines relatives à l'érection le consultait sur ce que des soiu'is avaient ron-
' Rom. I, 21-23. gé ses souliers : ce n'est pas là, lui-dit-il, une
\.\\\\K DKUXlftME. - CONNAISSANCK DKS SIGNES. M
iiu'|\(mII('; il y ni iiiiiMil une si les sdiilicrs soieni les noms (pic les hommes donnent à
a\;ii('iil idiijiv Icssoiii'is. ces asires, ils ne soni néanmoins que l'o-nvre
de Dieu, (|iii les a placés dans l'ordic qu'il lui
CIIAIMTUK XXI. a pin ;
leurs mouvements sont soumis à une
règle lixe, et scrvenl à manpicr la dislinclion
SUPEIISTITIONS DES ASTIlOI.Or.UES.
el la variéti' des saisons. Il csl l'acile d'observer
32. Motions ohcoit au iioiiiliic des seclak-iirs ces divers mouvemeiils à la naissance de ipiel-
(lo oos (laii^îcrcMiscs sii|H'i'lilioiis les l'aisciirs qu'iin, à l'aide des règles di'coiivertes el tra-
(l'horosco[)('s, (|iii (ihsciM'iil les jours âc la cées par ces hommes ipie rKciiliu'e condamne
naissance et sont aujounlliui vuluaiicuicul dans ces paroles: « S'ils ont i)u avoir assez de
corniiis sous le uoiu de uialliéuialicieus. lis 11lumière pour comiaili'e l'oi'dre du monde,
peuvent saus doute étudier la \(''ri(al)le situa- « coumient n'ont-ils pas connu plus lacile-
tion des a Les à la naissance de quelqu'un, et « ment celui (pii en esl le Seigneur el le
pai'l'ois la di'eouvi-ir ; mais c'est une étranne « Mailre' ? ..

aheii'aliou d'appuNcr sur cette déconveite la


CHAPITRE XXll.
piédiclion des actions el des événements de la

vie; ils vendent cliécement i\ la crédulité igno- VANITÉ DES l'UÉDICTlONS FONDÉES SUR
rante un avilissante servitude, l'n iionimc entre I.'oBSEItVATION DES ASTRES.
cliez l'un de ces matliéniatieiens avec la

conscience de sa liberté, et il donne son argent 33. Mais prétendre s'appuyer sur ces observa-

pour savoir au sortir de là (ju'il est sons l'es- tions pour prédire, à la naissance des hom-
clavage de .Mars, de Vcnns ou |)lutôl de tous mes, leurs mieurs, leurs actions et les événe-
les astres, au.vguels ceux qui tondjèrentles ments de leui' \ie, c'est une grande erreur et
premiers dans cette erreur et ipii la transmi- une insigne folie. C'est une superstition qui
rent à la postérité, inq)0sèrent, tantôt des trouve sa réfutation la plus parfaite dans l'en-

noms de bêtes, par suite d'une certaine res- seignement même de ceux qui se sont appli-
semblance, tantôt des noms d'hommes, en qués à l'étude de ces dangereuses puérilités.
l'homieur de (pielqucs lionnnes. Rien là d'é- Car, que sont leurs constellations, sinon l'as-
tonnant, puis(ju"à une époque encore toute pect et la situation où se trouvent les astres h
récente, les Romains ont voulu dédier l'étoile la naissance de celui sur le sort ducjuel ces mi
(jue nous appelons Lucifer, à la gloire et au sérables sont consultés par de plus misérables
nom de César '. Son nom fût peut-être resté à encore ? Ne peut-il pas arriver que deux
cet astre jusqu'aux
âges les plus reculés, si jumeaux se suivent de si près, au sortir du sein
Vénus, son aïeule, n'eût joui avant lui de ce maternel, qu'entre la naissance de l'un et celle
titre ; hérit;:ge qu'elle n'avait aucun droit de de l'autre, il n'y ait nul intervalle de
transmettre à ses descendants, puisque, pen- temps saisissable, et qui puisse être marqué
dant sa vie, elle n'en avait pas eu la posses- par différents mouvements des constel-

sion, ni réclamé la jouissance. Quand on dé- lations Nécessairement donc il y aura des
?

couvrait au ciel un astre non encore consacré jumeaux qui naîtront sous la même constel-
à la mémoire ancien héros, on
de queltpie lation, sans que rien se ressemble dans les

' iprcssait, comme


coutume, d'y atta-
c'est la événements qu'ils auront à accomplir ou à
c un n<ini illusti-e. C'est ainsi que le cin- subir ; souvent même il y aura enti-'cux cette
. ime et le sixième mois ont été appelés immense distance, que l'un sera au comble du
llet et août, en l'honneur de Jules César et bonheur pendant que l'autre gémira sous le

uguste. Qui ne sait que longtemps aupa- poids de l'infortune. Tels furent Esaii et Jacob,
! I
ant, ces astres accomplissaient leur course dont la naissance fut tellement simultanée,
!.uis les cieux ? Ce
mort de n'est qu'après la que Jacob, qui venait le dernier, tenait de sa
.1 "héros, dont la puissance des rois ou la va- mainte pied de son frère, qui le précédait î.
! é des honnnes voulait célébrer la mémoire, Assurément l'observation du jour et de l'heure
i|u'on a donné leurs noms aux astres, comme de leur naissance ne pouvait constater pour
pour les élever jusqu'au ciel. Mais quels que les deux qu'une seule et même constellation.
' Voy. Virg. Eglogueix. ' Sag. xiii,9. — >Gen. xxv,2B.
32 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

Et copenJant, quelle différence entre le\u-s bouche des mensonges, elle va


professeui's de

mœurs, leurs aclions, leurs travaux et leurs jusqu'à Quant même ce qu'ils vous
dire : «

destiiK-esNous eu avons pour garantie témoi-


? « auront dit arriverait, ne les croyez point '. »

gnage de l'Ecriture, aujourd'hui répandue Parce que l'ombre de Samuel après sa mort, ,

parmi tous les peuples. ne prophétisa rien que de vrai au roi Saul '>,
3i. Dira-t-on que le plus court intervalle de les sacrilèges qui furent commis, en évoquant

temps qui sépare la naissance de deux jumeaux, ce fantôme, n'en sont pas moins tléfestables.
estd'une grande importance dans la nature et El bien que cette femme ventriloque, ilont il

eu égard à la vitesse proiligieuse des corps est pailé dans les Actes, rendit un témoignage

célestes ? Quand même je reconnaîtrais celte véritable aux Apôtres du Seigneur, saint Paul

importance, un nialliémaficien peut- il saisir n'épargna pas pour ce motif l'esprit ipii était en
un instant si rapide dans les constellations, à elle, mais il la délivra en menaçant et en chassant

l'aspect desquelles il se vante de prédire les le démon (pii l'obsédait 3.

destinées? Si donc il ne découvre aucune dif- 80. Tout chrétien doit donc fuir et rejeter ces

férence dans les constellations, s'il les voit né- superstitions puériles ou dangereuses, qui entre-
cessairement les mêmes et pour Jacob et pour tiennent un connnerce contagieux entre le-

Esaii, que lui sert que dans les corps célestes, hommes et lesdémons, et ne sont que la

il y ait cet intervalle qu'il soutient avec convention d'une fausse et perfide amitié.

une assurance téméraire, s'il n'existe point « Ce n'est pas, dit saint Paul, qu'une idole soit
sur ces tablettes qu'il consulte en vain avec tant a quelque chose, mais je dis que ce que les
d'application ? Aussi doit-on mettre au nombre « païens iunnolent, ils l'immolent aux démons
des con\entions faites avec les démons, ces doc- <i et non pas à Dieu. Or je ne veux pas que
trines qui enseignent à chercher la connais- « les démons*. »
vous ayez aucune société avec
sance des événements dans des signes Ce que l'Apôlre dit des idoles et des victimes
établis par la vanité présomptueuse des immolées en leur honneur, il le faut dire de
hommes. toutes ces vaines institutions qui portent à

CHAPITRE XXlll. honorer ou une créature quelcon-


les idoles

que, comme on honore Dieu |ui enseignent ;

POURQUOI IL FAUT REJETER LA SCIENCE à recourir à ces remèdes et à ces observances


DES ASTROLOGUES. qui n'ont point été divinement et publique-

ment pour développer l'amour de Dieu


établis
35. Il arrive en effet que, par un secret ju- et du prochain, et ne font que livrer le cœur
gement de Dieu, les hommes au cœur perverti de (juelques misérables aux désii-s déréglés
sont livrés aux illusions et aux erreurs que des choses temporelles. Dans ces sortes de
mérite la dépravation de leurs désirs qu'ils
;
sciences on ne saurait trop craindre ni ti-op évi-
sont séduits et trompés par anges prévari- les car de con-
ter toute société avec les démons,
cateurs à qui la providence de Dieu a soumis ne cheichent qu'à nous
cert avec leur chef, ils

celte partie inférieure du monde, pour la plus


fermer la voie du retour à la patrie.
grande beauté de l'univers. Sous l'empire de Mais ce n'est pas seulement aux astres, que
leurs artifices et de leurs prestiges, ces hommes Dieu a créés et placés chacun Ji son rang,
de leurs sciences divinatoires, aussi
à l'aide que les honmies ont emprunté tant de fausses
funestes que superticieuses, révèlent des conjectures ils en ont tiré des différentes pro-
:

événements passés ou à venir, qiu arrivent ductions de la nature, de tous les événements
comme ont été prédits, et d'une
souvent ils
déterminés par l'action de la Providence di-
manière conforme à leui-s observations et leur ;
vine, et les ont consignées dans leurs écrits,
curiosité, de plus en plus stimulée, les jette et comme des règles infaillibles, dès qu'ils étaient
les enlace dans les nœuds inextricables de la témoins d'un phénomène extraordinaire,
plus pernicieuse erreur. comme quand une mule était devenue féconde,
a stigmatisé
L'Écriture, signalant le danger, de
avait été frappé
ou qu'un corps quelconque
cet égarement de l'esprit humain non-seule- ;
la foudre.
ment elle nous avertit de fuir avec horreur 1
Deul. XIII. 1-3. — M Rois, xïvill, 14-20 .
Kccli. xuvi, .'3. — ' Act-

ces extravagances comme provenant de la Xïl. 16-lS. — ' I Cor. X, 19. 50.
LIVKK Dia'XIÈMK. ~ CONNAISSANCK DKS SIGNKS. Ai

CHAl'ITKK WIV. CHAiMTUK XXV.

LES INSTITUTIONS HUMAINES EXE.MPTES DE SUPERS-


TOUT USAGE SUPERSTITIEUX SUPPOSE LE COMMEUCE
AVEC LES DÉMONS. TITIONS SONT EN PARTIE SUPERFLUES ET EN PAR-
TIE UTILES ET NÉCESSAIRES.

3". Toutes cos superstitions u'oiil (l'el'lit'acité 38. .Vprès avoir ib'liiiil et dciaciné de telles
qu'autant ([ne l'Iioiiuue y met sa coiiliauce, extravagances dans l'usprit du cbrétien, nous
et (|iu' [)ar ce JanM.iiic muet il s'associe avec les avons à examiner désormais les institutions
(léinons. Kt pou lanl ipie reiilenueiil-elles, humaines exemptes de siipeistitlon, et (pie les
sinon lies eui'iosilés tpii empoisourient, des hommes ont établies entre eux, et non avec
iiupiiétudes (pii tounneuteul, el une servitude les démons.
(|iii eonduil à la mort ? Ce n'est point leur vertu On doit regarder comme institutions hu-
(|ui leur a alliré l'allenliDU des lionnues, ce sont maines, toutes celles (pii n'ont parmi les
les observations mêmes dont elle sont été l'objet, hommes d'autre valeur (jue celles qu'ils sont
qui leur ont prêté quelque valeur. Aussi produi- convenus de leur attribuer. Les unes sont
sent-elles des elVets dilïére'ds selon la diversité supertlueset excessives, les autres utiles et né-
des peusées et des espérances de leurs scL'tateiu's. cessaires. Pour parler des signes que font les
Car les espiits de mensonge font arriver h histrions dans leurs danses, si la signilication de
ctiacun, des événements conformes aux di'sirs et leurs gestes était naturelle, et non de piu'c con-
aux craintes dont ils le voient agité. La lettre X, vention, un héraut n'aurait pas été chargé au-
par exemple, qui sert à manfuer le nombre dix, trefois d'expliquer aux citoyens de Carthage ce
achez les Grecs une signilication aidreqne chez que le pantomime voulait exprimer par sa
les Latins ; signilicatiou qu'elle tient, non de sa danse. Bien des vieillards se souviennent de cet
nature, mais d'une convention arbitraire et ; usage, et nous en parlent souvent. Ce qui con-
celui qui, connaissant ces deix langues, écri- firme leur témoignage, c'est que, aujourd'hui
rait ;\ un grec, n'eniploierait pas, pour expri- encore, lorsqu'on entre au théâtre où se jouent
mer sa pensée, cette lettre dans le même sens ces représentations puériles, sans y être initié,
que s'il écrivait à un latin. « Beta, » sous la c'est en vain qu'on y prête toute son attention, si
même prononciation, est le nom d'une lettre quelqu'un n'explii[ue ce que signifient les gestes
chez le Grecs ; et chez les Latins, celui d'une des acteurs. Tous cependant cherchent à pro-
sorte de betterave. Ces deux syllabes : « lege, » duire des signes qui ressemblent autant que
ont un sens bien différent dans les deux lan- possible à la chose signifiée. Mais commme il peut
gues. Toutes ces expressions frappent donc di- exister entre les choses divers points de res-
versement les esprits, selon la diversité des semblance, la véritable signification des signes ne
conventions adoptées dans la société à laquelle se détermine que par une mutuelle convention
ils appartiennent : ce n'est pas parce qu'elles entre les hommes.
avaient telle elles-mêmes
signilication par Quant aiLx peintures, aux statues et
39.
qu'on les a adoptées ; elles n'ont de sens que autres œuvres de ce genre, personne ne s'y
celui qui lem- a été donné d'un commun a.cord. méprend, surtout quand elles émanent de la
Ainsi en est-il de ces signes dont on se sert pour main d'artistes distingués il est facile de re-
;

lier un commerce funeste avec les démons : ils connaître ce qu'elles représentent. Ce sont là
n'ont de valear que celle que leur attribuent ceux des instilutions humaines superfliies, à moins
qui les observent. La manière dont agissent les qu'elles ne tirent (piehpie importance de la fin,
augures en est une preuve manifeste ; car avant du motif, du lieu, du temps et de l'autorité qui
l'observation comme après la découverte de leurs les fait produire. Reconnaissons encore la même
signes, ils ne s'arrêtent nullement à considéier origine à ces compositions et à ces fables sans
le vol des oiseaux ni à écouter leurs cris : quelle nombre dont les fictions mensongères ont tant
signification en effet peut-on y trouver, sinon de charmes pour les hommes. Et qu'y a-t-il,
celle qu'il plait à l'observateur d"y attacher ? dans ce qui émane de l'homme, qui soit plus

S. AuG. — ToM. IV.


;H DE LA DOCTRINE CHRETIENNE.

véritablement son œuvre que ce qui est erreur temps, ou ce que la sagesse divine a établies, et
et niensonfxe ? (|ue les houuues n'ont enseignées qiu^ comme
Il est d'autres iustitulions humaines qui soûl h-(iits (le leurs observations et de leurs recher-
utiles et nécessaires : tels sont les vêtements ches. Quelle que
soit la source où on les puise,
divers et les ornements extérieurs qui servent à on ne peut les regarder comme des institutions
distinguer les sexes et les digiiilés ; ces autres humaines. Les luies sont du domaine des sens,
signes innonil»i-al)les qui rendent possibles, ou les autres de celui de l'esprit. A l'égard des
du moins facilitent les rapports de la vie sociale: choses qui s'apprennent par l'entremise des
les poids, les mesures, l'etligie et la valeur des sens, ou l'histoire nous en instruit, ou la dé-
monnaies ])ropres à chaque pays et à cbaiiue monstration nous les fait saisir, ou l'expérience
peuple, etc. Si ces choses n'étaient pas d'institu- nous les fait conjecturer.
tion humaine, elles ne seraient pas si différentes
parmi les peuples, et ne changeraient pas dans
une même nation au gré de ses princes. CHAPITRE \XYHI.

CHAPITRE XXVI. UTILITE DE L ilISTOIUE.

INSTITlIT10.^S UUMAINES A REJETEli ; CELLES QU'iL


i2. Tout ce que l'histoire nous apprend des
FAUT ADOPTER.
faits qui se sont produits dans la suite ties siècles

antérieurs, nous facilite singulièrement l'intel-


40. Toutes les institutions humaines qui ont
pour objet l'usage des choses nécessaires à la
ligence de livres saints, alors même (pi'on n'y
chercberait, dans les écoles profanes, qu'une vaine
\ie, sont loin d'èlre indignes de l'attention du
érudition. Que de faits n'avons-nons pas à déter-
chrétien. Il doit même y consacrer une étude
miner souvent par le moyen des 01ymi)iades et
suffisante et les lixer dans sa mémoire. Car il
les noms des consuls ? C'est pour avoir ignoré
en est quelques-unes (pii ont un sens figuratif,
sous quel consultât le Seigneur est né, et sous
et ressemblent assez aux signes naturels. Mais
lequel il est moi't, que phisieurs ont cru faus-
je le répète, il faut repousser avec horreur toutes
seuieut qu'il avait souffert à l'âge de quarante-six
celles qui nouer quclqu'alliance avec
servent ?i
ans; parce que les Juifs avaient dit nu jour que
les démous. Uuant à celles qui ont pour objet
l'édification du temple, qui était la figure du
les rapports des hommes entre eux, on peut
corps du Seigneur, avait duré ce même nombre
en user dans ce qu'elles n'ont pas de superflu et
d'aimées • . Le récit évangélique nous apprend
d'excessif, comme les ligures des lettres sans
qu'il avait près de trente ans à l'époque de
lesquelles on ne pourail lire la science des ;

son baptême ;
quant au nombre d'années qu'il
diverses langues dans la mesure de sou utilité,
passa ensuite sur la terr?, on peut le déterminer,
ainsi que nous l'avons déj;i observé. On peut y
il est vrai, parla suite de ses actions ; mais pour
rapporter aussi les notes, (pii ont fait donner lo
dissiper jusqu'à l'ombre du doute, et établir sur
nom de notaires à ceux (pii eu font une étude
ce ]ioint |)lus de Inmièreet de certitude, il suffit
particulière. Ce sont là des institutions utiles et
de conhouter l'histoire profane avec l'Evangile.
dont il est permis de s'instruire : elles n'eutrai-
On verra alors que ce n'est pas en vain qu'il a
uenl dans aucune superstition et n'amollissent
été dit qu'on avait consacré quarante-six ans à la
point par le luxe, pourvu que le soin que l'on y
construction du temple. Car, ne pouvant appli-
consacre ne soit pas un obstacle aux fins plus
quer ce nombre à l'âge du Seigneur, on sera
importantes auxquelles elles doivent concouiir.
contraint de le rapporter à un mystère caché de
ce corps humain, dont n'a pas <lédaigné de se
CHAPITRE XXVII. revêtir pour nous le Fils unique de Dieu, par qui
toutes choses ont été faites.
SCIENCES QUI NE SONT PAS D'INSTITUTION HUMAINE. 43. Comme preuve de l'utilité de l'histoire,
sans parler ici des Grecs, avec quelle force notre
il. J'arrive à ces connaissances qui com- illustre Ainbroise ne réfute-t-il pas cette indi-
prennent les faits accomplis dans la suite des '
Jean, ii,20.
LIVIIK hKIIXlftMK — CONNAISSANCK KMS SKiNKS :!:;

Hiii- taloiuiiii' ilt's ailiiiiraloiirs de liai (|iu' arbres, des pierres et des anires corps. Nous eu
loiilos les maximes de Jcsiis-Clirisl Nolir-Sei- avons parlé pins haut, et nous avons l'ail ressortir
jiiu'iir, ([u'ils sont (•diilrainls iradiiiircr cl de l'ulililé de ces connaissances pour résoudre les

|)ul)li('r, oui ('II' llrc'i's dos livics de ce philoso- dillicullés de rKcritiire. (Ju'onn'N cherche point
piie, lequel vivail sans aiieuii doide loiiî^leiiips (le ces signes (piVin emploie comme reiiK'des ou
avaiil ravéïiemeiil du Sau\eur ï (À> saini \no- comme instrumeuts de ipiehpie supersiitiou.
lal a\aul dceouverl dans l'hisloire prolaiie (|iie Nous avons di'jà eoiidamiié cet usage impie, bien
Plaliin s'étailrendu euH^Nple, à l'époiiue même differenl de l'usage pei'inis cl i('gilime doul il es!

où Jérémie s'\ lrou\ail, a démoulré, connue ici (piestion. Dire [lar exenqile : Si nous preiie/
plus vraisend)lal)le, (in'il avait eu connaisanco celte herbe broyée, vous ne soutl'rire/. pins aux
de nos li\i'cs saiids par rcnircmise de ce pio- entrailles ; el douleur cessera,
dire : Voire si

phcle, et (pie c'csl là (pi'il a puise ces ddctiiues NOUS suspende/ celle herbe à votre cou, es!

et ces qu'on admire à juslelilrc. Les li\rcs


é(,'rils chose bien différente. D'un cot(' on \oil une
du peuple liélircu, ipii pi ali(iua par e\cclli'ncc propriété saliitaii'c, et de l'aulre une supersli-
I" culte d'un seul Dieu, et doul descend .Icsus- tioim condamuaiile. VA alors même (pi'il n'y a
CJH'ist selon la chair, exislaienl iiieii avant que ni enchantement, ni invocations, ni caractères,
parut PUIiayoïe même, doni les disciples, il est très-sou\('nl douteux si ce (|ue l'on attache

assure-t-on, enseignèrent la lliéolofiie à IMalon. ou ce qu'on a|)pliipie au corps pour le guérir,


Ainsi en rapprochant les divei-ses époques, il agit par une eflicacité naturelle, à la(|uelle on

parait plus raisonnable de croire (|ue ces philo- est libre de recourir, ou s'il ne lire sa vertu (pie

sophes oïd tiré de nos li\res saints tout ce (pi ils (le la manière signilicalive el mystérieuse dont

ont de hou et de vrai, que d'admettre


plut('it on l'emploie. Sous ce rap|)orl, plus l'eflicacité
cette insigne folie (pie Jésus-Christ ail emprunté du remède paraîtra étonnante, plus il sera de la
à Platon. prudence chrétienne de le rejeter. Ouand on ne
44. Uu(>i(pie les choses élahlies aulrelois [lar peut découvrir d'où pro\ienl la \crhi d'une chose,
les hommes puissent être l'ohjet d'un récit hislo- ilim|)orle de considérer l'intenlioii (piicu dirige
ri(iue, on ne doit cependant pas mettre l'histoire l'usage, si c'est uniquement pour la guérison on
au rang des iustilutioiis luiiuaiues, parce ([ne lesoiilagemenf du corps, si c'est suivant les prin-
les événements passés, qui ne peuvent plus cipes de la médecine et de l'agricullure.
n'avoir pas existé, appartiennent à l'ordre des 46. C'est par la démonstration, et non par
temps dont Dieu est le Créateur et le modérateur la narration historique, (pie s'ac(piiert la con-
suprême. Autre chose est de raconter ce qui est naissance des astres. L'Ecriture en dit fort peu
fait, et antre chose d'enseigner ce qui est à faire. de choses. Si l'on connaît généralement le cours
L'histoire j-aconle fidèlement et utilement les de la lune, (pii sert à déterminer chaque année
faits ; tandis que les livres des devins et tous les le jour où doit se célébrer la solennité de la

écrits de celte sorte prétendent enseigner, avec passion du Seigneur, il n'y a, pour les autres
plus de présomption ([ue de certitude, ce ((u'il astres, qu'un petit nombre de savants qui aient
faut faire et observer. une science certaine de lenr lever, de leur cou-
cher, etde leurs diversmouvements. Celte science
n'implique sans doute par elle-même aucune
CHAPITRE XXIX.
superstition mais son utilité est fort restreinte,
;

et pour ainsi dire nulle, relativement à l'étude


l'TlLlïÉ DE LA CONNAISSANCE DES ANIMAUX, DES des divines Ecritures ; elle y met plut(')t obstacle
HL.OTES, DES ARBRES, HOLIt l/lNTELLIGENCE
par le but futile qu'on s'y propose. Ajoutons qu'à
DE l'Écriture. raison des rapports qu'elle a avec les dange-
reuses erreurs de ces prophètes insensés des
43. 11 y a aussi une sorte de narration, sem- destinées humaines, il plus avantageux et
est
hiable à la démonstration, (|ui fait connaître plusconvenal)lede la mépriser. Outre la démons-
non les choses passées, mais les choses présentes tration de ce qui existe présentement, la science
à ceux qui les ignorent. Tels sont les. écrits qui des astres renferme encore une sorte d'histoire
traitent de la situation des lieux, de la nature du passé, en ce sens que leur silualion et leurs
des animaux, des propriétés des plantes, des mouvements actuels conduisent régulièrement
36 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

il connaître leur ancien coins. Elle enseigne de


plus M former sur l'avenir des conjectures qui ne CHAPITRE XXXI.
sont ni douteuses, ni de mauvais présage, mais
UTILITÉ DE LA DIALECTIQUE.
certaines et constan les ; conjectures qui doivent
servir, non à faire sur les actions et les événe-
48. Il nous reste à parler des connaissances
ments de notre vie des prédictions semblables aux
qui sont, non plus du domaine des sens exté-
extravagances des astrologues, mais à prévoir ce
rieurs, mais du ressort de l'esprit, et qui con-
qui a rapport aux astres mêmes. Ainsi celui qui
sistent principalement dans la science du rai-
obsene les pliases de la lune, jieut, en consta-
sonnement el des nombres. La science du rai-
tant le point où elle en est aujourd'hui de son
sonnement est de la plus grar.de utilité pour
cours, reconnaîtie où elle en était il va plusieurs
approfondir et résoudre toutes les dillicultés
années au|iaravaut, et où elle en sera plusieurs
qui se rencontrent dans l'Ecriture. Seulement
années dans la suite, à un jour déterminé. Un
on doit se mettre en garde contre la passion
observateur expérimenté établit des calculs aussi
de la dispute et contre la satisfaction puérile de
infaillibles sur chacun des auti-es astres. J'ai
tromper son adversaire. Il y a en effet une Coule
déjà déclaré ce que je pense detouleceite science,
de ces raisonnements appelés sophismes, dont
relativement à l'usage qu'on peut en faire.
les fausses conclusions présentent ordinaire-
ment un tel caractère de vérité, qu'elles sur-
CHAPITRE X\X. prennent, non-seulement les esprits moins pé-
nétrants, mais même les intelligences éclairées,
pour peu qu'ellesgarde. Dans n'y prennent
/utilité dks arts MÉCAN
MÉCANIQUES.
une conversation, quelqu'un s'adressant à son
interlocuteur lui dit Vous n'êtes pas ce que je :

47. Parmi les arts, il en est dont l'objet est de suis. Ce dernier en convint; el c'était vrai, ne
laconnerquelqu'ouvrage, elle travail de l'ouvrier lùt-ce qu'en ce sens que l'un était insidieux et
après lui des œuvres permanentes, comme
laisse
l'autre simple et droit. Il ajouta alors : Or je
une maison, un banc, un vase et autres choses suis un homme. Ce qui lui ayant été accordé,
semblables ; d'auties qui servent en quelque il tira cette conclusion : Donc vous n'êtes pas
sorte d'instruments à l'a'lion divine, comme la
un iiomine. L'Ecriture, je crois, a sévèrement
médecine, l'agi-iculture et le gouvernement ;
condamné ces sortes de conclusions captieuses,
d'autres enfin dont tout l'effet n'est que dans quand elle a dit « Celui qui parle par sophis-
:

l'action même, que l'exercice de la danse, de


tel
« mes est digne de haine » Cependant on re- '
.

la course et de la lutte. Or, dans tous ces arts, garde aussi comme sophistique tout discoure
l'expérience du passé sert aussi à conjecturer qui, sans être insidieux, sacrifie la gravité
l'avenir : car nul de ceux qui les professent à une recherche affectée des ornements du
ne travaille sans rattacher au souvenir des effets style.
passés l'espérance des mêmes résultats pour 49. Il y a en outre de ces raisonnements où
l'avenir. Il est bon, dans le cours de cette vie, de certaines conséquences se liront logiquement
s'appliquer quelque peu et connue en passant, à de principes faux et erronés posés par un ad-
la connaissance de ces arts, non pour les exercer, versaire. Un homme droit et instruit oppose à
à moins qu'une profession particulière n'y oblige, son interlocuteur ces conclusions qu'il ré-
ce dont il n'est pas ici qucslion ; mais simple- prouve, pour le contraindre à abandonner l'er-
ment pour pouvoir en juger, et pour ne pas reur dont elles découlent ; car en y persistant,
ignorer ce que l'Ecriture veut faire entendre, il est forcé d'admettre des conséquences qu'il
quand elle emploie des locutions figurées tirées repousse. Ainsi l'Apôtre ne tirait pas une con-
de cette source. clusion vraie en elle-même, quand il disait :

« Jésus-Christ n'estdonc pas ressucuscité notre ;

« prédication est donc vaine votre foi est donc ;

« inutile 2. « Ce qui est très-faux, puisque


Jésus-Christ est réellement ressuscité, puisque
la prédication de ce mystère n'était pas vaine,
'
Eccli. XKxvu.it. — I Cor. xv, 24.
,

LIVRK DEUXIÈME. — CONNAISSANCE DES SIGNES. 87

ni l;i lui (les lidMes imililc. M.iis ces l'aussos clusions, et non à la \érité absolue des propo-
assertions (Immlaicnt l<i^^i(|iioMi(Mit des prin- sitions.

cipes (le ceux qui niaient la lésiiriectiDii des


morts. Or, en rejetant ces tanss(>s conctusions, CHAPITRE XWIII.
(pi'il l'andrait admettre si les morts ne ressus-

citent, pas la consétpiencc nécessaire est (pi'ils


CONSICQUKNCES vraies IIK PROPOSITIONS FAUSSES,
ressuscitent. Comme on tire des conséquences
ET CONSÉQUENCES EAUSSES DE PROPOSITIONS
logiques aussi bien de l'erretu' (pie de la véril('',
VRAIES.
il est tacite d'eu apprendre les régies mêmes
dans les ('-coles profanes. Quant à la vérité des
principes, c'esl dans les livres ecclésiastiques
")1. Dans le raisonnement précédent, établi

qu'il faut la dierclier. SIM' la résurrection, la conséquence est vraie


logiipieinent et en elle-même. Voici mainte-
nant couunenl de propositions fausses ou peut
CHAPITRE XXXII.
tirer des conséquences très-logiques. Suppo-
sons que quelqu'un soit convenu de cette pi-o-
d'où provient la logique dans les conclusions. l)Osition : si le lima(;on est animal, il a une
voix. En prouvant que le limaçon n'a point
lui

y îiO. La vérité logique des conséquences n'est de voix, on devra conclure qu'il n'est point
pas l'dnivre de l'esprit humain, qui ne fait (pie un animal, puisqu'en déiruisant la conséquen-
la découvrir et la constater pour son instruc- ce , on détruit par là même la proposition
tion et celle des autres; elle a sou origine dans qui précède Cette dernière conclusion est
.

la raison divine et éternelle îles choses. L'his- fausse en elle-même mais elle est logique- ,

torien qui raconte les faits arrivés dans l'or- ment déduite d'une proposition fausse qu'on
dre des temps, ne rapporte pas ce qu'il a fait avait accordée La vérité d'une proposition
.

lui-même ; le naturaliste qui dépeint la situa- existe par elle-même, tandis que la vérité logi-
tion des lieu.v , les propriétés des animaux que d'une conséquence dépend du principe
des plantes et des pierres; l'astronome qui dé- pose ou concédé par l'adversaire. Or, on tire

couvre les astres et leurs mouvements divers, de ces conséquences fausses en elles-mêmes,
n'enseignent rien qui soit l'œuvre des hommes. mais logiquement vraies, pour redresser une
De même celui qui dit : quand le consé(iueut erreur, ainsi que nous l'avons observé, et pour
est faux , l'antécédent l'est nécessairement aus- démontrer qu'on avait tort d'accorder un
si, affirme une vérité évidente ; il jie ih'pend principe dont on voit qu'il faut rejeter les con-
;
pas de lui qu'il en soit ainsi, il ne fait que le séquences.
I démontrer. C'est sur cet axiome que repose le 11 est facile dès lors de comprendre que de
raisonnement de saint Paul dont nous avons propositions vraies, on peut dédruire des con-
parlé. La proposition antécédente était que les chisions fausses que de propositions ; de même
morts ne ressuscitent pas erreur que l'Apôtre ;
fausses on en déduit de vraies. Qu'on dise par
voulait renverser. De celte proposition il suit exemple Si cet homme est juste, il est bon
:
;

nécessairement que le Christ n'est pas ressus- or, il n'est pas juste ces deux propositions ;

cité. Mais cette conséquence étant fausse, puis- accordées, la conclusion sera donc il n'est :

qu'il est certainque le Christ est ressuscité, pas bon. Quoique toutes ces assertions puis-
on doit conclure que la proposition antécé- sent être vraies, cependant la conclusion n'est
dente l'est aussi, et conséquemment qu'il y a pas logiquement déduite. Car ôter l'antécédent
une résurection des morts. En deux mots : s'il n'est pas détruire nécessairement la consé-
n'y a pas de résurection des morts, le Christ quence , comme ôter conséquence c'est dé-
la

n'est pas ressuscité ; or le Christ est ressuscité; truire l'antécédent. Ainsi il est vrai de dire S'il ;

donc il y a une résurrection des morts. L'esprit est orateur, il est homme mais si vous niez
;

de l'homme n'a pas établi, il a seulement l'antécédent : or, il n'est pas orateur, vous ne
constaté qu'en renversant une conséquence pou^ez tirer comme conséquence : donc il n'est
on détruit nécessairement son antécédent. pas homme.
Cette règle a rapport à la vérité logique des con-
, ,

38 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

n'est : définition qui est vraie, quoique le faux


CHAPITRE XXXIV. ne puisse On peut en outre le diviser, et
l'être.
dii-e en a deux sortes l'une, des cho-
qu'il y
CONNAISSANCE DES RÈGLES, DES CONSÉQUENCES :

ses qui absolument ne peuvent pas être, et


ET DE LA VÉRITÉ DES PROPOSITIONS.
l'autre, des choses qui ne sont pas, bien qu'elles
soient possibles. Prétendre
par exemple que
oi. C'est donc chose bien différente de con- , ,

naitre sept et trois font onze, c'est avancer une absur-


les règles de la déduction des consé-
dité; el dire qu'il a plu aux calendes de janvier,
quences, et de connaître la vérité des proposi-
tions. Ces règles apprennent ce qui est con- quand il n'en est rien c'est soutenir un fail
,

séquence, ce qui ne l'est pas et ce qui répugne. qui pouvait avoir lieu, bien qu'il n'ait pas exis-

S'il est orateur, il est lionnnc


té.La définition et la division du faux peuvent
voilà qui est ;

donc être vraies, quoique le faux lui-même ne


conséquent s'il est homme, il est orateur
;
;

ceci ne l'est pas s'il est homme, il est qua- le soit jamais.
;

drupède voilà (|ui répugne. Il ne s'agit ici


;
CHAPITRE XXXVI.
que de la connevinn des propositions entre
elles mais pour juger de la vérité des propo-
; MÊMES OBSERVATIONS SIU LES RÈGLES
sitions, il faut les considérer en elles-mêmes DE l'Éloquence.
et non ilans leurs liaisons et leurs rapports.
Quant à celles qui paraissent incertaines, si elles 54. L'éloquence elle-même, aux formes plus
ont une connexion évidente avec d'autres qui développées et plus étendues, a ses règles qui
sont vaies et certaines deviennenl par là
, elles sont vraies, quoiqu'elles puissent servir à la
même incontestables. —
Quelques esprits se persuasion de l'erreur. Mais comme elles ser-
prévalent de celte science des rapports des pro- •\entégalement à persuader la vérité, ce n'est
positions, connue si c'était connaître la vérité pas l'éloquence elle-même, mais ceux qiu en
même, tandis que d'aulres, en possession des font un usage pervers, (ju'il faut condamner.

vrais principes, s'humilient trop d'ignorer les Car ce ne sont pas les hommes qui ont établi
règles d'après lesquelles se tire une conséquen- qu'une démonstration de bienveillance pré-
ce. Ne vaut-il pas mieux, par exemple savon- ,
vienne favorablement l'auditeur qu'une nar- ;

que les morts ressusciteid, cpie de connaître ration claire et précise insinue facilement son
que s'il n'y a point de résurrection des morts objet dans l'esprit; qu'un récit varié sou-
,

la conséquence est que .Îésus-Christ n'est pas tienne l'attenlion et prévienne l'ennui. Ces rè-
ressuscité ? gles et autres semblables sont loujom's vraies
dans la cause de l'erreur comuîe dans celle de
CHAPITRE XXXV.
la vérité, en ce sens que leur effet est de porter
SCIENCE DE LA DÉFINITION ET DE LA DIVISION DES la connaissance ou la persuasion dans les es-
CHOSES, VRAIE EN ELLE-MÊME. prits, de leur inspirer poiu- une chose le désir
ou la répulsion. Les hommes leur ont reconnu
53. Quoique la science de la définition et de celte puissance, mais ils ne la leur ont pas com-
la division s'exerce souvent dans le domaine de muniquée.
l'erreur, on ne peut en inférer qu'elle soit
fausse en elle-même. Elle a son principe, non CHAPITRE XXXVIL
dans le travail de l'esprit humain, mais dans la
raison des choses. Quoiqu'elle aitser\i aux poètes UTILITÉ I)K LA liHÉTORiyUE ET DE LA DIALECTIQUE.
dans leurs fables, aux philosophes et aiLX héré-
tiques, je veux dire aux faux chrétiens dans , .>5. L'art de rélo(pieiice doit servir plus à
leurs opinions erronées, il n'en est pas moins exprimer ce que l'on a com|)ris qu'à le faire
M'ai que toute délinilion toute division ne doit
, comprendre. La science des conclusions, des
rien renfermer d'étranger au sujet ni rien , définitions et des (Uvisions facilite beaucoup
omettre qui en soit de l'essence, même quand rinlelligeuee des choses seulemeni que ce-
; ,

le Taux est la matière à définir ou à di\iser. lui (|ui la possède ne se persuade i)as facile-
Cai' le faux lui-même se <iéfinit en disant qu'il , iiient tenir la vérilé niéine qui est li- piincipf
consiste à |)résenter une chose autre i|u'elle du bonheur. Il arrive souvent néanmoins qu'on
,

LIVKK DEUXIÈME. — CONNAISSANCE DES SICNES. dli

parvient plus l'acili'iiioni à la fin ([u'on se pro- nombies intelligibles n'ont |ias de Iraclion.
|)()S(' (liiris l'ctiidi' (!< celle seieiice ,
qu'à en Soil donc qu'on considère ces nombi'es en eux-
apprendie les pieee|)les si épinenx el si anlns. mêmes, soi! qu'ils servent à établir les lois
Uii'iiii hdniriie imagine de tiaeer des i'èj;les des ligures, de l'Iiarmonie et des niouvemeids,
pour ni.ircliei' ; (pi'il enseii;iie (pi'ii ne lanl lonjours ils sont soumis à des règles invaria-
le\er le pie<l (pii esl en ari'iere (pi'après avilir bles i\[u' les hommes n'ont point inventées, mais
pose eeliii (|iii esl en a\aMl;(|u'il explique en (|ue la perspicacité des savants a seulement dé-
détail les niouvemenls à iniininier aux diverses couvertes.
artieulaliiins des membres : tout ce cpi'il dit 57. Cependant, s'adonnei-
à ces diverses con-
est vrai, el il le lanl observer pour uiarelier. naissances pour s'en prévaloir aux yeux de
Mais n'esl-il pas plus l'aeile de réduire ces rè- l'ignorance; ne pas découvrir le [)rincq)e d'où
gles en pratique en se mettant à marcher, que découle Ja vérité des choses qu'on a simple-
d'\ prendre jiarde d.nis l'action même, ou de ment reconnues comme vraies, ni d'où pi-o-
les eom[)iendie (piand on les e\[>li(pie .'
Ont- cède non-seulement la vérité, mais encore l'iin-

elles le moindre intérêt pom* celui qui ne penl mmuabililé de celles (pi'on sait être immuables;
en faire l'expérience, |)arce qu'il ne [)eul mar- ne pas savoir s'élevei' de la vue des choses
cher? Ainsi en esl-il lie la science dont nous sensibles à la considéiation de l'iime humaine, de
parlons ; souvent un esprit perspicace verra manière à en conslaler, d'un côlé, sa mutabilité
|)liitùt qu'une conséquence est fausse qu'il n'en danslavissicitudedeses lumières el de ses ténè-
comprendra les règles ; une intelligence bres, et de l'autre, son rang sublime entre
bornée ne pouri-a juger de la nature dune riunuuable vérité qui est au-dessus d'elle
conclusion, mais elle saisira encore moins elles choses passagères qui sont au dessous,
les préceptes qui y ont rapport. Ces sortes de pour rapporter tout à la louange et à l'a-
sciences oll'rent donc plus de salisfaction par mour du Dieu que l'on pioclame auteui'
la manière dont la vérité est présentée, que de toutes choses : ce peut être un titre à la ré-
d'utilité réelle pom- la discussion et le jugement. putation de savant, mais jamais à celle d'homme
Peut-être cependant servent-elles à rendi'e les sage.
esprits plus exercés et encore est-il à dé- :

sirer qu'ils n'en deviennent pas plus pervers CHAPITRE \XX1X.


et plus orgueiUeiix, qu'ils ne se plaisent à trom-
per par des questions et des raisonnements SCIENCES AUXQUELLES ON PEUT SAPPLIQUER.
spécieux, et qu'ils ne regardent ces connais-
sjinces qu'ils onl acipiises , comme im rare pri-
rJS. C'est donc, à mon avis, une sage pres-
vilège qui les élève bien au-dessus des hommes cription à tracer aux jeunes gens studieux et
sages et vertueux. capables, qui ont, avec la crainte de Dieu , le
désir de la vie heureuse, de n'embrasser témé-
CHAPITRE XXXVIIl. rairement aucune des sciences qui s'ensei-
gnent en dehors de l'Eglise de Jésus-Christ
ORIGINE DE LA SCIENCE DES NOMBRES. comme moyens infaillibles d'arriver au bon-
heur, mais d'en faire un discernement exact et
Quant à la science des nombres, il est
^(î. judicieux. Toutes ces sciences humaines, dont
évident pour l'esprit le moins éclairé, qu'elle les principes varient au gré de leurs auteiu-s
n'est pas de l'institution des hommes, et qu'ils qui n'offrent que les lénèbres de leurs erreurs
n'ont l'ail (pie la découvrir Virgile a bien pu et de leurs doutes, surtout si elles supposent
changer la mesure de
première syllabe du la un commerce a\ ec les démons à l'aide de quel-
mot Itiilki, et de brève qu'elle était auparavant, ques signes de convention, qu'ils les répudient
la faii'e longue mais personne ne pourra éta-
; entièrement et qu'ils les délestent. Qu'ils laissent
blir que trois lois trois ne fassent pas neuf, également de côté toutes les connaissances vai-
qu'ils ne puissent former un carré qu'ils ne ,
nes et superflues. Quant aux institutions humai-
soient le triiile du nombie trois, ou une fois nes qui ont pour l>iit de facilitei' les rapports de
el demie le nomlnv six, ou qu'ils (orment le la vie sociale, qu'ils s'\ appliipient autant qup
donbli- d'un nombre quelconque , puisque les la néces.sité l'exige. A part l'histoire de.s évène-
40 DE LA DOCTRINE CHRET[ENNE.

ments des siècles passés ou de l'époque actuelle, ser à notre usage. Le peuple d'Israël rencon-
les expériences et les conjejfures que l'ou tire tra chez les Egyptiens, non-seulement des ido-
des arts utiL-s, de^.la ;science du raisonueuient les etdes fardeaux accablants qu'il devait fuir

et des nouil)res,lJe ne vois pas à


quoi peuvent et délester,mais encore des vases d'or et d'ar-
servir toutes les autres sciences profanes Il . gent, des vêtements précieux, qu'il leur enleva

faut s'en tenir à la maxime du


Uicn poëte : « secrètement en sortant de l'Egypte, pour les
« de trop » surtout en ce qui a rapport aux
'
;
employer à de plus saints usages Il ne le fit .

choses sensililes et dépendantes des temps et des pas de sa propre autorité, mais par un com-

lieux. mandement exprès de la part do Dieu et les :

Quelques auteurs ont


39. travaillé à inter- Egyplieasignorant leur dessein leur confiaient
préter séparément tous les termes et tous tes ces richesses, dont ils faisaient eux-mêmes un
noms hébreiLX, syriaques, égyptiens et ceux criminel abus i. De même les sciences des in-
de toute langue étrangère que l'Ecriture avait fidèles ne renferment pas uniquement des fic-

employés sans les expliquer. Eusèbe a inséré tions superstitieuses et des fables, des prescrip-

dans son histoire tous les documents propres tions onéreuses et vaines, que nous devons tous
à résoudre les difficultés des Livres saints qui fuir et détester, en nous séparant de la société
épargner au chrétien païeime sous la conduite du Christ. Elles con-
y sont relatives. C'était
une foule de recherches pour quelques ques- tiennent aussi ce que les arts libéraux ont de

tions de peu d'importance. De même un écri- plus propre à servir la vérité, d'excellents pré-

vain capable, animé du noble désir de se ren- ceptes des mœars


quelques vérités relatives
,

dre utile à ses frères, pourrait, je crois, exposer au culte d'un Dieu unique C'est là leur or .

à part la situation des lieux, la nature des ani- et leur ai-gent ils ne les ont pas créés, mais
;

maux, des plantes, des arbres, des pierres, des tirés des trésors de la divine Providene
répan- ,

métaux et de toutes les espèces d'êtres dont il dus partout comme les métaux au sein de la
est l'ait mention dans l'Ecriture. Il est facile lene et ils eu font un usage indigne eu les sa-
,

aussi d'exphquer la i-aison des nombres qu'elle crifiant aux démons En brisant tous . les liens

emploie. Peut-être ces divers travaux sont ils qui l'attachaient à leur société perverse, le cln'é-

déjà réalisés en tout ou en partie car il nous , tieiit doit enlever ces richesses pour les faire

est arrivé de découvrir des écrits, émanés de servir à la juste cause de la diffusion de l'E-
chrétiens vertueux et éclairés, dont la compo- vangile ; il doit aussi leur ravir , autant que
sition nous était restée inconnue ;
parce que possible, leurs vêtements de prix, c'est-à-dire
la négligence des uns ou l'envie des autres ces institutions humaines qui répondent aux
nous eu dérobait la connaissance. Quant à l'art nécessités de la vie sociale, à laquelle nous
du raisonnement, je ne crois pas qu'il puisse sonnnes astreints ici bas, pour les convertu" en
être l'objet d'un travail de ce genre, parce des usages chrétiens.
qu'il soutient toutes les pai'ties du texte sacré, fil. ce qu'ont fait nos plus
N'est-ce pas là

dont il est comme le nerf. Il sert plus à éclai- illustresmodèles? Pour ne rien dire des vi-
rer ou à résoudre les passages obscurs , dont vants ne voyons-nous pas de combien d'or,
,

nous traiterons dans la suite qu'à expliquer ,


d'argent, de vêtements précieux, se sont char-
les signes inconnus dont nous parlons mainte- gés en sortant de l'Egypte, et Cyprien, cet
nant. éloquent docteur et cet heureux martyr et ,

Lactance, et Victorin, et Optai, et Hilairc


CHAPITRE XL. et une foule d'autres parmi les Grecs? Ne
l'avait-il pas déjA fait auparavant, ce fidèle ser-
IL FAUT PROFITER DE CE QUE LES PAÏENS ONT
DE VRAL viteur de Dieu, Moïse lui-même, dont il est dit

qu'il dans toute la sagesse


avait été instruit
60. Si les philosoi)hes et principalement les des Egy tiens *? Cerlaiucment le paganisme,
platoniciens ont parfois ((uelques vérités con- engoué de ses superstitions, n'eût jamais fait
formes à nos vérités religieuses , nous ne de- part à ces grantls honunes des connaissances
vons pas les rejeter, mais les leur i-avir utiles dont il était en possession, surtout h une
comme à d'injustes posscssem's et les faire pas- époque où il repoussait le joug du Christ et
' Térence, And. act. i, scène i.
' Exod. III, 22; XII, 39. — • Act. vu, 10.
LIVRE DEUXIÈME. — CONNAISSANCE DES SIGNES. 41

pcrscciilnif U^s chrt'tions, s'il cù[ soupçon ik- à-dire la croix du Seigneur. La largeur, c'est le
([n'ils (liissfiil s't'ii sor\ir pour ('laljlir le ciilto bois transversal sur leciuel sont étenducf les
d'iiii Itioii iiiii(nu> et reiivcisor par là celui des mains; la longueur, c'est la partie qui monte
idoles. .Mais en coiiliant son or, son argent, ses de la terre jusqu'à la traveise, et à laquelle est
\(M('inents précieux au peuple île Itieu sortant attaché le corps à partir <les mains; la hauteur
(le l'Egjple, il ij;norail que ce (pi'il doiniait \a de la traverse au sommet où repose la lètc ;

allait Hrc consacré à la gloire du Christ. Le et la profondeur est la partie fixée et cachée

fait consiiiné ('.ans l'Exode, l'ut, sans aucun dans la terre. Pans ce signe de la croix, le
doide, la ligure de celui tloul je parle; ce ipie chrétien peut lire la règle de ses actions ; faire
pour toute autre interpré-
je dis, sans préjudice le bien en Jésus-Christ, s'attacher indissoluble-
tation semblable ou meilleure qu'on pourrait ment à lui, i)orter ses désirs vers les biens cé-
en donner. lestes, el ne i)as exposer les divins mystères à
la profanation. Purifiés par cette vie sainte, nous
CHAPITRE \LI. pourrons connaître l'amour de Jésus-Christ en-
vers nous, cet amour fpii surpasse toute con-
D.\\S yiEL ESPRIT IL FAIT ÉTUDIER l'ÉCRITLUE.
naissance et par letpiel ce Verbe divin qui a
<i:2. Déjà éclairé par ce que nous avons dit, fait toutes choses, est égal au Père, afin que
celui (jui s'a|ipli(jue à l'élude des Ecritures de- nous soyons comblés de tonte la plénitude des
vra, en ouvrant les saints Livres, se rappeler dons de Dieu L'hysope, par sa vertu purga-
'
.

sans cesse cette parole de l'Apôtre : «La science ti\e, nous avertit encore de ne pas nous laisser

:< enfle, et la charit •


édifie '. » Il comprendra enfler par cette science puisée dans les dé-

que, tout en sortant de l'Egypte chargé de ri- pouilles de l'Egypte, et de ne pas livrer notre

chesses, ne peut être sauvé s'il ne célèbre la


il
cœur aux folles inspirations de l'orgueil.
Pàque. Or Jésus-Chrst csl l'Agneau pascal qui « Vous m'arroserez, dit le prophète, avec l'hy-

a été iimiioié pour nous et son immolation '


;
« sope, et je serai purifié vous me laverez et ;

nous enseigne de la manière la plus saisis- « je deviendrai plus blanc que la neige. Tout
sante, il nous crie comme s'il nous voyait gé- « ce que vous me ferez entendre m'annoncera
mir en Egypte sous le joug de Pharaon « Ve- :
« » Et pour montrer
l'allégresse et la paix -.

« nez à moi, vous tous qui êtes fatigués et ac- que l'hysope symbole de la mort de l'or-
est le

« câblés de pesants t'ardeau.x, et je vous soula- gueil, il ajoute immédiatement « Et mes os :

« gérai. Prenez mon joug sur nous et apprenez « qui sont dans l'humiliation tressailleront de

« de moi que je suis doux et humble de coMir,


« joie 3. »

« et vous trouvère? le repos de vos âmes car ;


CH.\PITRE XLII.
« mon joug est doux et mon fardeau est lé-
« gcr ». » A qui s'adressent ces paroles, sinon DIFFÉRENCE ENTRE LES LIVRES S.\I.NT.S ET LES
à ceux qui sont humbles de coem', que doux et LIVRES PROFANES.
la science n'enfle point et que la charité édifie?
Qu'ils se sou\ieniieiit donc (prautrefois ceux
(îl .\utaut les richesses dont le peuple d'Is-
qui célébraient la Pàque avec des cérémonies
raël fut comblé dans la suite à Jérusalem, prin-
qui n'étaient que des ombres et des figures,
cipalement sous le règne de Salomon '', sur-
avaient été marqués avec rhyso[ie avant de
passaient l'or, l'argent et les vètemenls pré-
teuidre leurs portes du sang <le l'agneau ^ L'hy-
cieux qu'il enleva de l'Egyte, autant la science
sope est une plante douce et humble; mais
des saintes Ecritures l'emporte sur toute la
rien de plus fort et de plus pénétrant que ses
SL'ience, même utile, réunie dans les livres pro-
racines « afin qu'enracinés et fondés dans la
:
fanes. Car toute connaissance puisée ailleurs, y
« charité, nous puissions coinpreiuhe avec est condamnée si elle est nuisible; si elle est
« tous les saints, quelle est la largeur, la lon- utile elle est renlêrmée. Et non-seulement
y
« gueur, la hauteur et la profondeur»», c'est elles offrent tout ce qu'il y a d'utilechez les
' Cor. Tlll, 1.
: Ibid. V, 7. 'Ephès. m, 17-19.
3 Matth. .XI, 28-30. »Ps. L,7.
* Eiode, xn,22. ' Ibid. 10.
' Ephès. m, 17. ' III Bois, X, U-23.
*^ DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

païens; mais encore, ce qu'on ne trouve nulle fardeau léger, fondé, enraciné, affermi dans la
''"''"" '•"^•'*'^
;'"', " '^ 1^"^"""" '^"""•^^ l'^in»'-^ '!<' 'a science,
ïlt "n.lune profondeur
lablc et la su T"'''""''
de ces Livres d.- peul enirepren.ire d'examiner el d'approfondi.'
vins Le lecteur ainsi éclairé, n'ayant plus
à les signes a.nl.igus dont je vais parler .lans le
craindre d être arrête parles signes inconnus,
troisième livre, selon les lumières qu'il plaira
devenu doux et Immole de cœur, volontiers à Dieu de m'accorder.
courbé sons le joug du Christ, et chargé de son
LIVRE TROISIÈME.

Apres avoir pai'lc, dans le livre précédent, de la connaissance des signes, le «tint Docteur traite, dans celui-ci, du sens Incertain
et aniliigii cpie peut offrir lo texte sacré. — L'imerlitudc du sens, dans les termes propres, tient à la manière de les diviser
ilans la prononciation, où ii leur double signification. ^ La suite et l'encliainenuMU du texte, la comparaison des dilTérents inter-
(irctes entre eux. l'étude de la lan^'ue d'où l'Ecriture a été traduite, sont les moyens derésoudre la première difficulté. — Pour
les expressions métaidioricpu's, l'.\uleur trace les règles cpii doivent servir à reconnaître (|uand une locution est figurée, et dans
([Hcl sens il l'aul l'enteiidie. — Il Icriiiine en exposaiil les sept règles du donatiste Ticlionius, relativesà cette <piestion.

CHAPITRE l'HEJIlEH. CHAPITRE II.

AMBIGl'ITÉ yri NAIT llE LA DIVISION DES TERMES.


IIB4ET l)F. CK LIVRK.
-2. Quand du texte [)rovient des
l'obscurité
1. L'Iioiimio «itii craint Dicit chofclic avec termes propres, examiner d'abord s'il
il faut
soin sa volonté dans les saintes Eciilures. La n'y a pas eu division ou prononciation défec-
l)iété lui inspire la douceur, et l'éloigné de tueuse des mots. Si, après une étude attentive,
l'espiil (le contention. 11 [iivvient pat- la science on demeure incertain de quelle manière les
des langues tout ce (|ui pouirait rarrèler dans termes doivent cire reliés entre eux ou pro-
les termes et les locutions inconnues. Il acquiert noncés, il faut recourir à la règle de la foi éta-
les connaissances nécessaires sur la nature et blie par les passages pli's clairs de l'Ecriture,
les propriétés des choses qui servent de com- et par l'autorité de l'Eglise. Nous en avons suf-
paiaisons. Qu'il ait ensuite entre les mains des fisamment parlé dans le premier Livre en trai-
exeinplaices purifiés avec soin de toute erreur, tant des choses. S'il y a incertitude entre deux
il peut alors entreprendre de discuter et d'é- ou plusietirs sens également orthodoxes, il ne

claircir les passages douteu.x du texte sacré. reste qu'.àexaminer lecordcxledans ce qui pré-
.Nous allons, autant (jue nous en sommes capa- cède et suit, |)oiir découvrir, parmi les
ce qui
ble, lui aiiprendre à ne pas s'\ laisser tromper, sens divers ([lii se présentent, celui que récla-
l'eut-ètre l'élévation de son génie ou l'étendue ment l'enchainemenl et la liaison du dis-
de ses lumières lui fera-t-elle mépriser ces règles cours.
comme vaines et puériles. Mais enlin, s'il est 3. Citons des exemples. Voici une ili\isioii

disposé à recevoir nos instruclions, nous lui ie- des termes qui constitue une hérésie : /;/ /»/(»-

rons observer que toute ambiguïté de l'Ecriture cipiu erut Verhnm, et Verbum crnt tqiiid Peum,
réside dans les termes propres ou dans les ter- et Deux erat. « Au commencement était le Ver-
mes mélaplii)ri(|iics. .Nous avoiis déjà inditpié •< be, et le Verbe était en Dieu, et Itieu était. »

celle division dans le livre précédent. Ce qui suil n'a i)his le même sens : Verlnim hoe
44 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

erot in principio npud Deum. » Le Verbe était mes selon tel ou tel sens qui en résulte. Prenons
« en Dieu dès comiiicncement. » C'est é\i-
le ce passage de l'épitre aux Corinthiens ; lias ergo
deniincnl nier la divinité du Verbe Erreur que . ]n-omissiones habentes, carissimi, mundemus nos
repousse la règle de la loi en nous enseignant ab omiii coinquinntione carnis et spirittts, per-
l'égalité des trois personnes de la Trinité, et en licientes sanctijicationem in timoré Dei. Capite
nous faisant lire Et Detis erot Verbiim
: « et : nos. yemi)ti nocuimus '. Il est si on
douteux
le Verbe était Dieu, » et ajouter ensuite : doit lire : Mundemus nos abomni coinquinatione
Hoc eriit in principio, etc...ii.\\ était au com- carnis et spiritus : « Purifions-nous de tout ce
« niencement avec Dieu » ' . « qui souille la chair el l'esprit, » selon cet au-
4. Dans le passage suivant de saint Paul, on tre passage : « afin qu'elle soit sainte de corps
peut établir une double division des termes^ « et d'esprit, "^
>> ou bien s'il faut couper ainsi
sans que le sens soit opposé à la foi c'est l'en- : la phrase : Mundemus nos ab omni coinquinatione
semble du texte qui indique celle qu'il faut carnis, en sorte que la suite forme un autre
adopter. Et quid eligam iniforo rompellor autem : sens : Et .fpiritus perpcientes, etc,.. « Et ache-
ex diuibus, conciipiseentiam habens dissolri e^ « vant l'œuvre de de votre es- la sanctification
esse cum Cliristo ; multo euim mugis optimum; « prit, dans la crainte de Dieu, donnez-nous
nianere in rame necessiirium- propter vos 2. Il est « place dans votre cœur. » En pareil cas, c'est-

douteux on doit lire


si ex duobus concupiscoi- : au lecteur à adopter telle division des termes
tiam lidbens, ou Compellor autem. ex duobus;
: qu'il juge préférable.
en sorte que les mots suivants concupiscentiam :

habens etc... appartiennent à une autre propo- CHAPITRE m.


sition. Mais comme l'Apôtre ajoute immédiate-
ment 7nulto enim maijis optimum, il fait voir
: INCERTITUDE QUI XAIT DE LA PRONONCIATION.
que son désir se portait vers ce qui était le meil-
leur pour lui, de manière qu'étant pressé des
(). A l'égard manière de pro- du doute sur la
deux côtés, de l'un était le désir, et de l'autre règles que
faut observer mêmes
noncer, il les
la nécessité, c'est-à-dire, le désir d'être avec
pour la division des mots. A moins d'une né-
Jésus-Christ, et la nécessité de demeurer encore gligence excessive qui tombe dans une pronon-
en celte vie. La conjonction enim, car, fait dis- ciation trop déi'ectueuse, la règle de la foi, ou
paraître toute incertitude, et les interprètes qui la suite du texte suffira pour lever toute diffi-
ont supprimé celte particule, ont voulu faire pré- culté; et si, malgré ces moyens, le doute per-
valoir l'opinion que l'Apôtre était animé d'un sévère, il n'y aura plus faute de la p^rt du lec-
double désir. Voici donc comme il faut allier teur, quelle que soit la prononciation qu'il
les termes Et quid eligam ignoro; compellor
:
adopte. Sans la foi qui nous apprend que Dieu
autem ex duobus : « J'ignore ce que je dois choi- ne formera aucune accusation contre ses élus,
« sir, car je suis pressé des deux côtés « en- ;
el ([lie Jésus-Ch -ist ne les condamnera pas, on
suite l'Apôtre s'explique concupiscentiam ha- :
pouri-ait, après les interrogations suivantes :

bens, etc.. D'une part je désire être dégagé


«
« Uni accusera les élus de Dieuï Uni les con-
<(des liens du corps et être avec Jésus-Christ. » « damnera? » prononcer sous forme de ré-
Et comme si on lui demandait pourquoi là est ponse : « Dieu, qui les justifie. Jésus-Christ, qui
l'objet de son désir multo enim magis optimum, :
« est mort. » Comme ce serait folie d'admettre
ajoute-l-il; « car c'est assurément le meilleur un tel sentiment, ou doit prononcer de ma-
« pour moi. » Pourquoi donc est-il pressé des nière qu'il d'abord une demande et en-
y ait
deux côtés? Parce qu'il sent encore la nécessité suite une interrogation. Entre la demande et
de demeurer en celte vie pour le bien de ses l'interrogation il j a cette dilTérence, diseid les
frères, ainsi qu'il l'exprime manere in carne :
anciens, (|u'à la demande on ])cul faire plu-
necessarium propter vos. sieurs réponses, que l'interrogalion
tandis
3. Lorsque la dilticullé ne peut être résolue n'attend ([u'uii oui ou un non. Ainsi, après
ni par la règle de la foi, ni par la suite du avoir posé la demande : « Qui accusera les
texte, rien n'empêche alors de diviser les ter- « élus de Dieu? Qui les condamnera? » On

.Jean, 1,1,2. ! Philip. I, 23, 24. 'Il Cor. VII, 1, i. —21 Cor. VII, 34.
.

MVHK TROISIEME. — OHSCl'HITftS DE r/ÉCUITl'HE. 45

poiii"siiivia sous forme d'iiilorro)ialion : « Dieu savoirsi la seconde syllabe de prmdico es! lon-

« (|iii les justilie ? J('siis-(;iiiisl (|ui est gue on brève. Mais l'expression sinit prœdixi,
« mort, (|ui iiuMiio est ivssiisiitc, (|ui est et non imadicavi, démordre clairement qu'on

« assis à la droite de Dieu et qui intercc^de doit la faire longue.


« pour nous'?» .\(>u, sera la réponse sons-
enteiidiic. Dans ce passage de saint l'anl; CIIAPIÏKEIV.
Qiiid ergo dict'mns ? quia fieutes quce non sec-
ambiguïté Ori PROVIENT DES PAROLES.
tabantur jimtilitim, (qqn-t'licnileritnt justilidin ;

si après cette demande: Quid ('njit dicniuis, X. Outre les (ilisciniii's qui naissent des rap-
«que dirons-nous»? on ne donnait à ce ipii ports des termeset de la prononciation, il en est

suit le ton de la réponse : Qiiiii (ii'iitex, etr . . .


encore d'autres à examiner, telle (pic celle-ci
« Que les ficnlils qui ne cliercliaicnt point dans ces parolesde l'cpitre aux Thcssaioiiiciens:
« la justice, ont endirassé la justice "^
» ; il
Proptcrea ronsoluti sumus in vobis fratres '.

n'y aurait point de liaison dans le discours. Faut-il entendre o fratres, ou bien, lios /"/y;-
:

Dans ces paroles de Nallianaël : .1 yazareth nr.sPNil'un ni l'autre sens ne répugnent à la


fwtest (iliqiiid Iwiii esi^c =>? l'interroiiation finit- foi. La langue grecque ne donnant pas à ces
elle à ces luoii: A .\(i:iiri'tli1 le reste formant cas les mêmes désinences, indique que le terme
une afiinnation; ou bien s'élend-elle à la en question est au vocatif o fratres. Si
: l'in-
phiase entière avec l'expression du doute :
terprète eût ainsi traduit; Con.wUitionem ha-
« Peut-il venir qnel(|ue cliose de bon de .\(i- buinuis, fratres, in vobis, il se fût moins astreint
« zaretli »? C'est ce que je ne puis décider. aux mots, mais il eût rendu plus clairement
Mais dans les deux b\pothèses, l'intégrité de la pensée ou s'il eût ajouté nostri, tout lec-
;

la foi est sauve. teur aurait entendu le vocatif en disant Con- :

". Quelquefois le doute tient à une syllabe solatisumus, fratres nostri, in vobis. Mais c'est
tlont le sens varie selon qu'elle se prononce. une Mcence (pii peut devenir dangereuse. Un
Dans cet du Psalmisteendroit
.\un est :
interprète en a fait usage dans ce passage de
absfoiiditiim a te os meitm qnod fecisti iii l'épitreaux Corinthiens: Quotidie morior, per
td>srondito^, le lecteur ne voit pas d'abord s'il vestram qloriam, fratres, quam habeo in
doit faire longue ou brève la syllabe os. S'il la Christo .Jésus ">-.
11 traduit: Quoidie morior,
fait brève, c'est le terme, qui au pluriel ossa, si-
per ve.^tram juro qlorium « Je meurs chaque :

gnifie les os; s'il la fait longue, elle est le singu- «jour mes frères, je le jure par la gloire que
lier de ora, qui signifie bouche. Le texte original « je reçois de vous en Jésus-Christ, » parce
fait disparaître tout é(|uivoque : le. grec porte que terme grec vr, exprime clairement
le le sens
ôaTÉov os; et non azoïj-y. bouche. C'est pourquoi du serment. Rarement donc, dans les Livres
il arrive souventque des expressions vulgaires termes propres présentent des obs-
saints, les
font mieux pensée que les termes clas-
saisir la cuntés qui ne puissent facilement s'éclaircir
siques. J'aimerais mieux qu'on eût dit avec un par l'ensemble du texte, qui dévoile la pensée
barbarisme ossum meum, que d'avoir em-
:
de l'auteur, ou par le rapprochement des di-
ployé une expression moins claire, parce verses h'aductions, ou par l'étude de la langue
qu'elle est plus latine. Parfois aussi la pronon- originale.
ciation douteuse d'une syllabe se détermine
par le même terme placé plus loin : Quœ CHAPITRE V.
prœdico voliis, sicttt prœdixi, quoiiiam qui
talia aquut, recjnum Dei non possidebunt NE PAS PRENDRE A LA LETTRE LES EXPRESSIONS
a Je vous déclare, comme je vous l'ai déjà FIGURÉES.
« dit, que ceux qid commettent ces crimes
« ne seront point héritiers du royaume de 6. Nous allons nous occuper désormais des
« Dieu « Si l'Apùtre eût dit
'•>.
seulement : obscurités qui naissent des termes métaphori-
Quœ prœdico, sans ajouter : sicut prœdixi, il ques. La matière réclame une attention sérieuse
eût fallu recourir à la langue originale pour et une grande perspicacité. Il faut éviter avant
' Rom.vm, 31, 34.-2 Ibid.lx. 3J.— 'Jean, l, 46.—' Ps. cvx.tvm I Thcss. MI, -2 \Cur. \r, 31.

'

15. > Gai. T, 21.


46 DE LA DOCTRINE CHRÉTFENNE.

tout de prendre à la lettre une expression figu- qui crurent à la divinité de Jésus-Christ, et (|ui

l'ée. L'Apôtre nous prémunit contre ce danger. formèrent la première église de Jérusalem, furent
« La lettre tue, dit-il, c'est l'esprit qui \ivi- une preuve bien frappante de l'utilité d'avoir
« lie 1. Eidendre littéralement ce qui est dit
» été sous la loi, comme sous un conducteur.
dans un sens ligure, c'est ne penser que selon Ces cérémonies figiiratives étaient un lien qui
la chair. Est-il i)Our l'âme une mort plus réelle rattachait leurs fidèles observateurs au culte
que de courI)er ce qui l'élève au-dessus de la du Dieu unique, qui a fait le ciel et la terre.

brute, c'est-à-dire son intelligence sous le Quoique le sens spirituel de ces figures et de
joug de en ne s'altachant qu'à la
la chair, ces obligations charnelles fût voilé à leurs yeux,
lettre? Celui qui en est là prend les termes ils y avaient apprisà honorer un Dieu éternel.
métaphoriques dans leur sens propre, et sous N'ayant plus qu'un pas à faire ponr entrer
celte première écorce, il n'y a plus pour lui dans l'intelligence des choses spirituelles, ils

d'autre signilication. Parlez-lui dusabl)at; ce se trouvèrent si bien préparés à l'effusion des


nom ne rappelle à son esprit que l'un des sept dons de l'Espril-Sainl, qu'on les vit vendre
jours que temps ramène dans sa course pé-
le tous leurs biens, en déposer le prix aux pieds
riodique. Faites sonner à son oreille le mot de des apôtres', pour être distribués aux pauvres
sacrifice; sa pensée ne s'élève pas au delà et se consacrer eux-mêmes tout entiers à Dieu,

de l'offrande ordinaire des animaux et des fruits comme un temple nouveau dont l'ancien n'était

de la terre. Déplorable seivitude de l'àme qui (pie l'image terrestre.

prend le signe pour la réalité et ne sait pas


élever son regard au-dessus des objets sensi-
CHAPITRE VII.

bles, pour jouir de l'éclat de l'éternelle lu-


CULTE DES IDOLES ET DES CRÉATURES.
mière !

11. Ce fait ne s'est produit nulle part dans


CHAPITRE VI. l'Eglise des Gentils, parce que, regardant
comme des dieux les idoles, ouvrages deleurs
UTILITÉ DES FIGURES POUR LES .lUIFS. mains, ils étaient plus éloignés de la lumière
de la vérité. Et si parfois le paganisme a cher-
10. Telle fut la servitude du peuple Juif, ché à présenter les idoles comme de simples
mais cependant bien dilférente de celle des figures, toujours il les a rapportées au culte et
autres nations, car toutes les ligures sensibles à l'adoration de la créature. Qu'importe, par
auxquelles il était ramenaient sans
asservi, le exemple, que la statue de Neptune ne soit pas
cesse à la croyance d'un Dieu unique. Tout en regardée comme un Dieu, s'il faut y voir
prenant pour la réalité les signes des choses l'image de la mer, ou de toutes les eaux qui
spirituelles dont il ignorait la vraie significa- jaillissent des fontaines, suivant cette descrip-
tion, il avait l'intime conviction de plaire par tion qu'en fait un de ses poètes, si j'ai bonne
ce culte servile au Dieu unique, auteur de mémoire :

toutes choses. Cet asservissement fut pour les

Juifs, dit saint Paul, ce qu'un précepteur est Pi<re des eaux ilnnl la couronne
Se forme du cristal qui sur ton fi'ont résonne
pour les enfants '. Aussi ceux qui restèrent :

Toi qui de ton menton large et majestueux.


opiniâtrement attachés à ces figures, se soule-
Vois couler ii grands Ilots la mer ((ui t'enviromn-.
vèrent contre le Seigneur, qui n'y avait plus Kl les lleuves errants sortir de tes cheveux.
aucun égard, alors (pie le temps était venu où (CLAIDIEN.)

elles devaient recevoir leur accomplissement-*.


Delà toutes les calomnies que leurs princes Sous cette douce enveloppe delà cosse qu'y a-t-
ourdirent contre lui, parce qu'il guérissait les il, sinon de petits grains qui raisonnent?
malades le jour du sabbat *. Delà l'obstination C'est la nourriture des pourceaux el non des

du peuple, attaché à ces signes comme à autant hommes. me comprend qui connaît
Celui-là
de réalités, à ne pas reconnaître comme Dieu, l'Evangile A quoi bon me présenter l'idole
">-.

ni comme envoyé de Dieu, celui qui ne professait de Neptune comme l'image des eaux, sinon
pas pour eux le même respect que lui. Mais ceux peut-être pour que je n'adore ni l'un ni

MI Cor m, 6.- ! Gai. m, 24. - ' Matt. xir, 2. — ' Luc, vi, 7. I
.Xct, IV, 34.— 2 Luc, XV, 10.
\A\\\K tkoist>':mf,. — OHsr.i'niTfis m-: i/ficiuTriuK. 47

l'itiiln'':' La iiici' crilirrc n'est \y,\s plus un nieid institués, dont mi s.nsil sens
le et la por-
hiiMi à tni's M'iix, (jnc (|n('l(|n(' slaliic (juc ce tée, ce n'est plus l'endir liounnaj^e à des signes
soil. Sans doiilc ceux (|ni ont rr\\2.c en (li\inil(''s sensibles et |)assageis, mais aux mysières
mêmes
les onvriigi's des lionuiies, snnl (oniliés plus pi'ils représentent. A ce titre, riiomme

était vé-
avant dans l'aliinie de l'erreur, (pic ceux i|iii lilabieinenl spiriluel et lilnr, Miéine sons la loi
on! adoré les (l'inres de Dieu. Onant à nons, de seiviliide, alois (pie ne devaient pas encore
nous n'avons à aimer et à adorei' (pi'nii seul être dévoilées aux esprits charnels ces ligures
Dieu ', auteur de tontes les eréatures, dont les doni le joug servait à dompter l'or^iiieil. Tels
|)aiens vénéraient les (Igures eounne autant de étaient les patriarches, les prophètes, et tous les
di\inités, on eoninie des signes et des images jiisles par l'organe des(|uels l'Esprit-Sainf nous
(|iii les représentent. Or prendie pour la
, si a transmis les lumières el les consolations des
réalité un sifjne vérilablenient utile dans sa Ecritures. Mainleiiant, depuis qu'a paru, dans
(in, est (h'jà unt' servitude indij;ne de l'iionnue, la résurrection du Sauveur, le signe éclatant de
(|ue dire, ipiand on s'ai'rète à des lijiures de notre liberté, nons avons été affranchis de l'ob-
clioscs futiles comme à autant de réalités? Et servation onéreuse de ce culte (igui'atif, dont
ipiand niènie on ne verrait dans ees iniaf;es la nous a été révélée. A des prati-
signification
((ue les oitjets (pi'eiles re()résentent , vouer à ques multipliées, le Seigneur et les Apôtres en
ees objets un culte relijîieux, n'est-ce pas tou- ont subsistué un petit nombre, dont l'accomplis-
jours se courber sous le joug d'une eireur et sement est facile, le sens sublime, et on tout
d'une servitude avilissantes? respire la pureté comme le sacrement du bap-
;

tême, et la célébration du corps et du sang du


CHAIMTRE Mil.
Seigneur. Celui qui connaît et reçoit ces signes

LES .IIIFS ET LES GENTILS AFFR.VMIHIS UIFFÉHE.M- augustes, sait quels mystères ils renferment, et

MENT DE LA SERVITUDE DES SIGNES.


l'hommage qu'il leur rend, tient, non de la ser-
vitude de la chair, mais de la liberté de l'es-
1:2. Ainsi la liberté chrétienne a brisé les liens prit. Toutefois, comme ne s'attacher qu'à la let-
de ceux (pi'elle a trouvés assujettis aux figures tre , et prendre le signe pour la réalité qu'il
véritablement utiles, comme étant les plus près recouvre, c'est l'indice d'un âme faible et ser-
de son règne, en les élevant à riiitelligence des vile; ainsi donner à des figures des inter-
mystères voilés sous ces figures. Ce furent les prétations vaines et stériles, est la marque d'un
membres qui formèrent les églises des fidèles esprit livré à l'illusion et à l'ei-reur. D'un
Israélites. .Mais ceux qui étaient asservis à des autre côté , savoir reconnaître ce qui est une
s\ mboles vains et inutiles, elle les a affranchis, ligure, quoiqu'on n'en comprenne pas le sens,
en rejetant et en détruisant tous ces symboles et ce n'est plus être esclave ; mieux vaut alors
le culte servile dont ils étaient le principe. Elle être asservi à des figures mais inconnues ,

arrachait ainsi les nations païennes à cette cor- utiles,que de chercher, en en donnant des in-
ruption engendrée par la multitude des fausses terprétations futiles, à secouer le joug de la ser-
divinités, et que l'Écriture désigne si souvent vitude pour s'engager dans les liens de l'er-
,

sous le terme de fornication elles les amenait ; reur.


à la connaissance et à l'adoration d'un seul Dieu;
CHAPITRE X.
elle voulait, non plus les soumettre à des signes
autrefois utiles, mais leur apprendre à ne plus COMMENT RECONNAITRE QL'L'NE EXPRESSION
eu considéier que le sens spirituel et mysté- EST FIGURÉE.
rieux.
14. On ne doit jamais, avons-nous dit, don-
CHAPITRE IX. ner un sens littéral à une expression figurée.
Ajoutons que de même, il faut éviter de pren-
COMMENT ON EST ESCLAVE DES SIGNES.
dre sens méthaphorique pour le sens littéral.
le

13. C'est être esclave des signes, que de faire 11 donc nécessaire de déterminer d'abord
est

OU de vénérer un symbole dont on ignore la par quel moyen on peut reconnaître si une
signification. Mais s'il s'agit de signes divine- expression est naturelle ou méfaphorique. Le
'
Dent. VI. 5. principe général est de tenir pour figuré tout
48 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

ce qui, dans le texte sacré, n'a pas un rapport ne peut faire part à autrui de ce qu'on n'a pas.
réel aiLx \érités de la foi, ou à la pureté Or, plus le règne de la cupidité s'aflaiblit ,
plus
des mœurs. La pureté des mœui's a pour objet se lortifie celui de la charité.

l'amour de Dieu et du prochain, et les vérités


de la foi, la connaissance de l'un et de l'autre. CHAPITRE XI.
Quant à l'espérance, elle se forme dans la cons-
cience de chacun, en raison des progrès qu'il
RÈGLE POUR JUGER CE «LI, D.iNS l'ÉCRITIRE,
fait dans cette connaissance et cet amour. Nous
PRÉSENTE UN CARACTÈRE DE SÉVÉRITÉ.
avons traité ces matières dans le premier livre.
13. Mais, par suite de la propension qn'ont
17. Tout ce qui dans les discours et les faits
les hommes de Juger de la nature du péché,
plutôt d'après la coutume que par l'influence que l'Ecriture nous rapporte comme émanés de
de la convoitise, il arrive très-souvent qu'ils Dieu ou des saints, présente un caractère de
ne condanment ou n'approuvent que ce que cruauté et de rigueur, tend à renverser l'empire
l'usage approuve ou condamne dans la société de la cupidité. Si le texte parle clairement en
au sein de la(]uellc ils vivent. De là vient que, ce sens, inutile d'y chercher une autre pensée

là où l'Ecriture condamne ou défend ce que voilée sous une figurée. Tel est ce passage de

la coutume réprouve ou autorise , les esprits l'Apôtre : « Tu t'amasses un trésor de colère


qui d'ailleurs s'inclinent devant l'autorité de la « pour le jour de la colère et de la manifesta-
parole divine, ne voient qu'un langage figuré. « lion du juste jugement de Dieu, cpii rendra
Cependant l'Ecriture ne prescrit que la charité, « à chacun selon ses œuvres, donnant la vie
ne condamne que la cupidité, et établit ainsi « éternelle à ceux qui, par leur patience dans

la i-ègle des mœurs. De même un espiit imbu « les bonnes œuvres cherchent la gloire , ,

de quelque opinion erronée prendra dans un « l'honneur et l'immortalité, et répandant sa

sens figuré toutes les assertions contraires des « fureur et sa colère sur ceux qui ont l'esprit

Livres saints. Et cependant, dans tout ce qui « contentieux,et qui ne se rendent point à la

tientau passé, au présent et à l'avenir, ces li « mais qui embrassent l'liii(iuité. L'af-
>éiité,
M diction et le désespoir accableront l'âme de
vres n'aftirment que ce qui est de foi catholi-
racontent passé, prédisent l'avenir, « tout homme qui fait le mal, du Juif premiè-
que. Ils le
« rement, et ensuite du Centil Ces paroles
exposent le présent, et tout cela concourt à nour- '
. >>

rir et à corrober la charité, à vaincre et à dé- s'adressent évidemment à ceux qui n'ayant p.as

raciner la cupidité. voulu vaincre la cupidité, tombent avec elle dans


16. J'appelle charité ce mouvement de l'âme une ruine commune. Ceux qui en ont secoué
qui la porte à jouir de Dieu pour lui-même, du le joug, sont clairement désignés dans les paro-

prochain et de soi-même par rapport à Dieu. les suivantes: « Ceux qui appartiennent à Jésus-

J'appelle cupidité ce penchant qui entraîne « Christ, ont crucifié leur chair avec leurs vices
« et leurs mauvais désirs -. » Il y a sans doute
l'âme à jouir de soi, du prochain et de tout
objet sensible en dehors de Dieu. On appelle dans ces passages quelques termes métapho-
intempérance , « flagitium » tout ce que fait
,
riques, comme « colère de Dieu, » ils « ont cru-

effrénée pour corrompre l'âme « cifié; » mais ils ne sont ni assez nond)reux, ni
cette cupidité
et le corps; et iniquité, « facinus, » ce qu'elle placés de manière à voiler le sens, et à former
entreprend pour nuire à autrui. Telles sont des énigmes et des allégories que je regarde
les deux sources d'où jaillissent tous les cri- proprement comme un langage figuré. Mais dans
mes; mais f intempérance marche la première. cet endroit du prophète Jérémie : « Je t'ai

Quand elle a jeté l'âme dans un vide affreux et « choisi et établi aujourd'hui sur les peuples et

dans une entière indigence, cette âme se livre « sur les royaumes, afin d'ai'racher et de dé-
« truire, ^ » nul doute que toutes
de dissiper
à toutes sortes d'injustices pour satisfaire ses ;

désirs corrompus, ou renverser tout ce qui y les ne soient figurées, et ne doi-


expressions

met obstacle. De même ce que fait la charité vent se rapporter à la fin que nous avons signa-
pour son propre avantage, se nonine utilité; et lée.

ce qu'elle lait dans l'intérêt du prochain, s'ap- '


Rom. Il, b-9. — sCal. v, 24. — ' Jérém. I, IB.

pelle bienfaisance. L'utilité précède, parce qu'on


LIVRE TROISIÈME. -ORSCrRlTflS DR l/riCRITrUlv M
les aniiiiaiix n'en sont pas plus solircs (pii' nous.
CHAPITRE Xn. Sous ce rap|iorl, la règle d'aiirès lacpiellc nos
actions son! à louer ou à condamner, se tire,
Kicr.LK l'di it ,ii(;i':i! iii:s vciki.ns on paraissknt non de la nahnc des cliosi's doiil nous usons,
CltlMINKLLKS. mais du inolil (pii nous en lail user, et du di'sir
(pic nous en ('pi'oiiNoiis.
18. Il osl l'ii (iiilic (les i)arolos et des actimis t2(). Pour les anciens justes, les ro\aunics de
(|iic l'ficriliirt' alliihiK' ;"i Dieu cl à ces liomiiics la terre ciaieiil l'image cl l'annonce du ro\,iiiuie
(ioni clic luoclaiiic la saiiilclc, cl (|iii paraissciil du ciel. C"(''iail, de Iciir leinps, une coiiliimc iii-
(les criiups aux \cii\ de rifinoiviiico. (le soiil noceiitc {|n'im liominc eût à la fois plusieurs
aillant de lit;iires doid les sisndicalioiis tinslc- l'cmmes, pour rendre sa postérité plus nomlireii-
rieiises, ime (ois coimiies, scrxeid d'arniicnl à se I; cl par là mèiiK", il n'était |)as permis à

la charilc. l'seï- des choses ])assafïci-es avec plus nue femme d'avoir plusieurs maris, i)uisqu'ell<'

de niodcralion iin'oii ne le lait liabilucllenient ne pouvait en devenii' plus féconde s'ahandoii- :

autour de soi, c'est af;ir par sohiich' ou par sii- uer ainsi imi vue du gain ou des enfanls, c'est
perslition. Mais, dcpassci-, dans cet Msaf;(\ les plutôt che/, la femme proslilution et (h'hauche.
bornes on se renfeiinent ordinairement les L'Ecriture n'a point condamné la conduite (l(>

lioiunies vertueux, une conduite qin est c'est ces saints personnages, autorisée par les mœurs
ou un mystère, on un crime. Car ce n'est pas de leur époipie, et on la passion n'avait aucune
un tel usage en lui-inènic, mais la passion (pii l»art, bien qu'aujourd'hui ou nepiiisscse la per-

le détermine, qui est un mal. Jamais un esprit mettre sans crime. Tous les faits de ce genre
réfléchi n'assimilera l'action de cette lenune qu'elle a consignés ,
qu'on les ))renne dans le
qui réi)audil sur les pieds du Sauveur un par- sens propre et historique, ou dans le sens pro-
fum précieux ', à ce qui se pratique dans les phétique et figuré, doivent être expliqués comme
orgies ahominahics des honuncs livi'cs a la cor- ayant pour (lu l'amour de Dieu ou du prochain,
ruption et à rimi)udi(ité. C'est un parfum déli- ou raïuour de l'un et de l'autre. C'était autre-
cieux qu'une bonne réputation; celui qui la mé- fois chez les Romains nue infamie de porter de
l'ite parles onivres d'une vie sainte, en marchant longues robes à niauch(>s taudis qu'aujour- ,

sur les traces eu quei(iue sorte


ilu Christ, oint d'hui c'est une honte [)our les (ils de famille
ses pieds du plus suave parfum. Ainsi ce qui, distinguée de ne pas les porter ainsi. De même
pour le commun des hommes, est le plus souvent dans tout autre usage, doit-on s'attacher à ban-
un crime, en Dieu, ou dans un prophète, devient nir la passion qui, non-seulement fait un abus
la figure d'un grand mystère. Il y a loin de l'al- criminel des coutumes autorisées dans la société
liance que contracte un homme |)erdii de mœurs contemporaine, mais encore franchissant toutes
avec une prostituée, à celle que le prophète Osée les bornes, se jette dans les plus honteux écarts,

contracta comme un présage'-. Si c'est un crime et étale au grand jour ses ignobles convoitises,

pour des hommes liMés aux excès de l'ivresse cachées jusqu'alors sous le voile des mœurs pu-
et de la débauche, de paraître nus dans leurs bliques.
festins, ce n'en est pas un de se mettre nu dans
un bain. CHAPITRE XIII.
donc de considérer attentive-
19. Il im|)orte
ment ce ipii convient aux lieux, aux temps cl
SUITE DU MÊME SUJET.
aux personnes, pour ne pas crier témérairement
au crime. L'homme sage pourra manger mo-
dérément et sans avidité d'un mets exquis, taudis 21. Tout ce qui est conforme aux usages en
que l'insensé se jettera avec une voracité bru- vigueur dans la société au sein de laquelle la

tale sur des alimenls grossiers. Ne vaut-il pas nécessité ou le devoir oitlige de vivre, c'est aux

mieux manger du poisson comme lit le Sei- cœurs nobles et vertueux à le rapporter à l'uti-

gneur que des lentilles à la manière d'Esah,


•*,
lité et à la bienfaisance, soit directement, comme
petit-fils d'Abraham ou de l'orge à la manière'*,
il nous cou\ient, soit en figure, comme il était

des brutes ? Pour avoir une nourriture plus vile, permis aux prophètes.
' Jean, XII, 3. — 2 Osée, l, 2. — ^ L-lc, xxiv, 43.— ' Gen. .vxv. 34. iGen. xïi,3; xxv, 1 ;
Il Rois v, Kl.

S. Auc. — Tome IV.


,

50 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

découvre une interprétation qui conduise à ce


CHAPITRE XIV. règne de la charité. Si on y arrive directement
par le sens littéral, on est certain dès lors que
ERREUR DE CEUX QUI NE CROIENT P.\S A LX
l'expression n'est pas métaphorique
JUSTICE ARSOLUE.
CHAPITRE XVI.
22. Quand des esprits peu éclairés, façonnés
à des muLHiis dilïérenlcs, viennent à lire ces DES PASSAGES Qtl RE.XFERMEXT QUELQUE
actions des piopiiètes , ils n'y voient que des PRÉCEPTE.
crimes , à moins que l'autorité de^ l'Ecriture

ne réforme leui- ne s'apcrrui-


jugemeni, et ils
24. Une expression n'est pas figurée, quand
vent pas que leurs propres usages dans les ma- elle renferme un précepte qui défend l'intem-
riages, les feslins, les vètenienls, les ornements
pérance ou l'injustice, qui connnande l'utilité
et la nourriture, ne sont pour d'autres peuples
ou la bienfaisance. Elle l'est, au contraire,
etpour d'autres temps, que des usages crimi- dans le cas où, elle semble connnander le mal
et défendre le bien. « Si vous ne mangez, »
nels. Frappés de cette variété infinie de coutu-
dit le Sauveur, « la chair du Fils de l'homme,
mes et de mœurs, certains cs|)i'its livi'és à cet
« et si vous ne buvez son sang, vous n'aurez
état d'assoupissement où ils n'étaient ni enseve-
« point la vie en vous *. » N'est-ce pas là, en
lis dans le profond sommeil de la folie, ni capa-

bles d'ouvrir les yeux à la lumière de la sagesse,


apparence, commander un crime? C'est donc
ici une figure par laquelle nous est imposé le
ont pensé qu'il n'y a point de justice subsistant
que pour chaque peuple les usa- devoir de participer à la passion du Sauveur,
par elle-même ;

la règle du et de conserver le doux et salutaire souvenir


ges particuliers étaient juste ; et
de sa chair couverte de plaies, et attachée pour
comme les coutumes varient cliez tous les peu-
nous à la croix. L'Ecriture dit « Si ton en-
que la justice doit être partout im-
:

ples, tandis
ont conclu qu'évidemnient
« nemi a faim, donne-lui à manger; s'il a soif,
muable , ils il n'y
n'ont pas compris
« donne-lui à boire. » C'est là sans nul doute
avait de justice nulle part. Ils
prescrire la dans ce qui
bienfaisance. xMais,
que cette maxime, par exemple, pour ne pas
-en citer d'autres : « Ne fais pas à autrui ce que suit : « Enamasseras sur sa
faisant ainsi, tu
i, « tête des charbons ardents -, » vous verrez
« tu ne veux pas (ju'ou te fasse » devait tou-
nième en face des mœurs les plus peut-être un précepte de vengeance. Croyez
jours rester la
donc que ce passage renfei'uie une ligure.
diverses. Appliqué à l'amour de Dieu, ce prin-
cipe éteint toutes les ardeurs de l'intempérance;
Comme il prête à une double interprétation,
l'une pour le bien et l'autre pour le mal, la
appliqué à l'amour du procliaiu il prévient ,

charité doit vous faire adopter de préférence


toutes les injustices. Quel est celui qui aime de
la première, et vous faire voir dans ces char-
voir sa maison souillée? Qu'il ne souille donc
bons ardents les larmes brûlantes de la péni-
pas la maison de Dieu, c'esl-;i-dire, soi-même.
tence, qui guérissent de son orgueil celui qui
Et s'il n'est personne qui souffre qu'on lui
s'afflige d'avoir été l'ennemi d'un houuue qui
nuise, que de son côté il ne nuise jamais à
a daigné soulager sa misère. De même quand
autrui.
le Seigneur dit : « Celui qui aime sa vie la
CHAPITRE XV. « pei-dra 3; » il est loin de défendre l'utilité

propre qui nous oblige de veiller à la conser-


RÈGLE POUR LES EXPRESSIOXS FIGURÉES. vation de notre vie. « Perdre sa vie » est une
locution figurée dont le sens est qu'on doit
•23. Ainsi à l'empire lyrannique de la cupi-
renoncer à l'usage criminel et déréglé qu'on
dité succède le règne ùe la charité, fondé sur
en fait maintenant, usage qui tient courbé
les lois si justes de l'amour de Dieu pour lui- empêche
vers les biens de la terre et d'aspirei-
même, du prochain et de soi-même par rap-
à ceuxdel'éternité. Ailleurs il est écrit : « Fais
port à Dieu. A l'égard des locutions figurées « miséricorde, et ne reçois pas le pécheur ^. »

on aura donc pour règle de faire du texte sa-


La seconde partie de celte maxime parait dé-
cré l'étude la plus attentive, jusqu'à ce qu'on
I
Jean. vt,'t\. —' Prov. .\xv, 21, 22 ; Rom. xir. 2.1. 1 Jean, vu.
Tob, Ifi. ; Matl. vit, 12. . — ' ïCccli, .VII, 4.
LIVUK TROlSiftMK. -OUSniUtlTriS DK l/fiCRITIÎKF:. Kl

loiulfc la l)i(Mil'iiisaiico. Mais ici le « prcliiMir » riUix esclave de cette cupidité ne voit pas
a mis par iiK'Iapliorc pour le « pôolu' »
(M('' renseignenieut salutaire (pii ressoit de là
d ce (pii nous csl pÈ't'scril, c'est de ne pas pren- pom- ceux (pu ou\renl leurs cceins à de plus
dre pari an p('ciié du [K-clieiM'. nobles désirs, savoir qu'une coutume qu'ils :

réproiivenl anjomd'liui |K'ut éfre bonne et


CIIAl'lTUK WIl.
légitime, et ipie celle
qu'ils suivent peut de-
venir criminelle, eu supposant que la charité
IL Y A DES l'Ufir.KPTES COMML.NS A TOUS,
«'ai rr.ES Ql\ SONT l'VUTIC.ll.lRIlS.
purifie la première, el (|ue la passion vienne
corrompre la seconde.
"lit. SonvenI il arri\e ou (|iio celui (pii esl 27. Si, à
uneaidre époque, ua lionnne à pu,
qui se croil élevé à un degré supérieur dans avec plusieurs femmes, demeurer dans les rè-
la vie si)iiiluel!e, regarde comme autant de gles de la chasteté, un autre aujourd'hui peut,
Usures les pn'ceples imposés à ceux (pii sui- avec une seule, se livrer à l'incoulineiice. J'es-
\eiil la voie commune. Qu'il ail embrassé, time bien plus celui (|ui rapporte à wnc lin
par exemple, le céiih d, et se soit l'ail ennu- plus élevée la fécondité de plusieurs fenunes,
ipie en vue du royaume des cie^ix ', tout ce que celui qui s'attache à une seule pour
que les i^ivres saiids coutiennenl sur l'obli- elle-même. D'un côté, on ne cherche (pi'im
galiou d'aimer et de gouverner son épouse, avantage confoi-me aux nécessités du temps ;

lui parait tlevoir être entendu dans le sens et de l'antre, qu'à satisfaire une c(Uivoitise
(iguré et non littéral. Qu'im autre ait résolu (pii st> repait de voluptés charnelles. Ceux à
de conserver sa (ille vierge, il ne voit qu'une qui l'Apôtre permet, par indulgence et comme
expression m.Haphorique dans ces pai'oles : remède à leur incontinence, de vivre chacun
« Marie ta (ille et tu auras lait un grand ou- avec son épouse ', sont assurément moins
« vrage ~. » Une îles considérations qui con- parfaits devant Dieu, que ceux qui, autirlois,
tribuent à l'intelligence de l'Ecriture, c'est dans l'union avec plusieurs femmes, n'avaient
donc de savoir qu'il y a des préceptes com- en vue que de multi|)lier la race humaine ;

muns à tous les lionuues, et d'autivs qui ne de même que le sage ne se propose dans
s'adressent qu'aux personnes tl'une condition le boire et le manger que la conservation de
|)artieuliérc. Il remède (ùt
convenait i|ue le sa santé. C'est pourquoi s'ils eussent vécu sut-
non-seulemenl appliqué d'mie manière géné- la à l'époque de la venue du Seigneur,
terre
rale pour la guérison du corps entier, mais en- alors que ce n'était plus le temps de disperser
core approprié à l'inlirmité particulière de cha- les pierres, mais de les ramasser ils se fussent '',

cun des membres. Car il faut guérir et perfec- immédiatemeul condamnés à une conti-
tionner dcins sa condition celui qui ne peut être nence perpétuelle pour gagner le royaume
élevé à une condition supérieure. des cieux : car il n'y a peine dans la
privation qu'autant qu'il y a plaisir dans
CHAPITRE XVIIl.
la jouissance. Ils n'ignorent p;'s que, même
ON DOIT CONSIDÉREP. LE TEMPS OU U.NE CHOSE
entre époux, l'abus du mariage est une vé-

A ÉTÉ COMM.Vi\DÉE OU PERMISE.


ritable luxure. C'est ce que témoignait
Tobie, dans cette prière qu'il lit au jour de
26. Un autre danger à éviter, c'est de ne pas ses noces : « Soyez béni, Seigneur, Dieu de
regarder, comme pouvant être autorisés de « nos pères, et que votre nom soit béni dans
nos jours, certains usages rapportés dans l'E- « tous les siècles des siècles. Que les cieux
criture, quoique, même dans le sens naturel, « et que toutes les créatures vous louent.
il ne soient ni des désordres ni des crimes, « Vous avez ci'éé Adam, et vous lui avez donné
eu égard aux mœui's de ces temps reculés. « Eve pour aide et pour compagne. Et vous
Il n'y aurait, pour se les permettre, (ju'une « savez. Seigneur que maintenant je ne m'u-
cupidité sans frein, qui chercherait à s'ap- « nis point à ma sœur parmi motif de volupté,
puyer de l'autorité de l'Ecriture, laquelle ne « mais par la vérité même, afin. Seigneur,
lend au contraire qu'à la d.'truire. Le malheu- « ((ue vous nous fassiez miséricorde '^.

\!att. XIX. 12. — - Eccli. vil. 27. I


I Civ. vir. i. — - EcM. m, 5. ^Tob. viir. 7-9.
.N-> DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

être corrompus ni ébranlés, de même les an-


CHAPITRE \1X. ciensjustes, nvant avec plusieurs femmes, se-
lon les règles admises de leurs temps, étaient
LES MECHANTS JL'GENT DES AUTRES D' APRÈS ELX-
loinde s'asservir à celle convoitise qui domine
MÊMES.
ceux qui refusent de croire à une telle modéra-
tion.
28. Mais il est des iioinines dont la convoi-
tise effrénée s'abandonne à des commerces in-
30. Aussi ces hommes passionnés ne pour-
raient-ils se défendre d'une haine irréconcili-
fâmes des hommes qui, même avec une
;

able contre leurs propres enfants, qu'ils


seule femme, ne se contentent pas de franchir
sauraient avoir attenté à l'honneur de leurs
les bornes où se renferme le désir de donner
femmes ou de leur conculiines.
an monde des enfants, mais encore, esclaves
avilis d'une déplorable liberté, ou plutôt d'une CHAPITRE XXI.
licence sans i)udeur, se souillent sans cesse
des excès les plus monstrueux. Ces hommes ne .MODÉR.VTIOX DE DAVID QUOIQU'IL AIT ÉTÉ
comprennent pas que les justes de l'antiquité ADULTÈRE.
aient pu conseivei- avec plusieurs femmes les

règles de la tempérance, et n'aient cherché, David, après un pareil outrage reçu de la

dans cet usage, qu'à satisfaire au devoir où, part d'un tils impie et dénaturé, non-seule-

chacun était alors de multiplier sa race ;


et ment patiemment sou insolence, mais
souffrit
le pleura même à sa mort '. était loin de
enchaînés par la passion, ils no croient abso- Il

se livrer à une basse jalousie, lui qui ne se


lument pas qu'avec plusieurs femmes on puisse
se renfermer dans les limites où ils ne se tien-
montra sensible qu'à la faute de son fils, ei
nent pas avec une seule. non à l'injure qui lui était faite. Il avait dé-
•29. Ils pourraient même dire (ju'il ne tant fendu de le mettre à mort, s'il était vaincu,
parce que les afin qu'après sa défaite il eût le temps de dé-
pas louer les justes elles saints,
louanges entlent eux-mê- plorer sa conduite. Ses désirs ne furent pas
honneurs et les les

mes d'orgueil : cœurs d'autant plus avides d'u- accomplis ; et il fut moins affligé de sa perte

ne vaine gloire, que la langne des flatteurs les que de la pensée des peines où cette àrae adul-
a plus souvent et plus pompeusement encen- tère et parricide allait être plongée. Ne l'avait-
sés ; esprits légers et inconstants, le moindre on pas vu accablé de douleur par la maladie
souffle de la renommée qui les loue ou les d'un autre de ses enfants, et, à sa mort, ouvrir
condamne, suffit pour les jeter dans le gouffre son cœur à la consolation et h la joie?
31. Voici une preuve frappante de la mo-
du désordre, ou les briser contre l'écueil du
crime. Qu'ils reconnaissent donc combien il dération avec laquelle les anciens justes se con-

l(>ur est difficile de rester insensibles à l'apprd duisaient avec leurs femmes. Emporté par les

du mépris mais ardeurs de l'âge et les heureux succès de ses


des louange» ou aix traits ;

ne jugent pas des autres d'après eux- entreprises, il ravit injustement une femme
qu'ils
mêmes. dont il fit mourir l'époux. Lu prophète vint

pour l'accuser et le convaincre de son crime.


Il proposa la parabole d'un pauvre qui n'a-
lui
CHAPITRE XX.
vait qu'une seule brebis, et à qui un de ses
voisins, qui en possédait un grand nombre,
COXTIXLATIOX DU MÈ.ME SUJET.
prit cette uni(pie brebis pour épargner les sien-
nes et en faire un festin à l'hôte qu'il venait de
Qu'ils sachent que nos saints apôtres n'ont recevoir. David, indigné, ordonna qu'on fit
jamais été ni enflés par les honneurs ni ahat- mouru- cet homme, et que la brebis du pauvre
tus par l'hmiliation et cependant ils ont
;
dû lui fût rendue au quadruple. Il prononçait ain-

passer par cette double épreuve. Pendant ipie si, sans le savoir, la condamnation d'une faute
les fidèles célébraient leur éloge, leurs persécu- qu'il avait commise avec conscience. A peine
teurs les noircissaient de leurs calomnies. lui eùt-on fait saisir l'application, et an-
f)r, de même que les apôtres savaient faire un noncé le châtiment que Dieu lui réservait,
saint usage de ces diverses épreuves, sans en ' URois, XV H, 31.
F.IVRE TROISIÈME. — ORSCimiTIÏS DE L'ECRITURE. 83

(|u'il cxpiii son jk'^cIk' par la pc^iiitencc •.

C.lioso rciiianiiialilc, on m' icpri'senlc à CHAPITRE XXIII.

naviil son ciitiic ((lu^ sous rciMlilcnic de la


CO.NCLISION A TUtEU DES FAITES IIES HOMMES
lurbis du pmiviv ; on ne lui rappoUe i)as, par
|j;s IM.ISCKLÈRRES.
la mort de vo pauvre, le nicnrlro du mari de
celle qu'il a sédnile ; de softe (pie la seidenec ;W. Le lecleur, eu lisant le récit des fautes

de eondamnaliou (pi'il rend eoulre lui-mê- soûl tombés les plus grands iionunes, pourra y
me tombe seulement sur son adultère. Qu'on chercher et y di'couvrir (picl(]ue ligure des
juge par là de la modération avec la(|uelle il fulurs ('vènemenls. en
Toutelois, ces a(;tions
put posséder plusieurs lenunes, ipiand on le elles-mêmes devront être pour lui une le(,'on :

voit contraint de se punir lui-même des (pie jamais il ne lire vanité de ses œuvres les
excès qu'il a conunis avec une seule. Mais la plus saintes, et (pi'en voyant dans des hommes
passion dans ce prince ne lui (pi'uii acie aussi illustres des tempêtes si elfrayanles et de
passafjer, et non mie inclination permanente ; si déplorables naufrages, il ne regarde pas les
le Prophète désif^ue ce désir illégilime sons autres avec mépris comme autant de pécheurs,
la ligure d'iui élranger (pii passe. Une dil pas en vue de sa propre justice. Leurs (;hutes ont
([ue le voisin (lu pau\rt' lui avait enlevé sa bre- été consignées dans l'Ecriture, pour nous faire
bis pour la servii' à son loi, mais à un hôte trembler tons à cette parole de rAp(')tre :

descendu chez lui. U'iaid à Salomon, son Mis, « Que celui qui semble être debout, prenne
celle passion ue l'ut pas eu lui un écart transi- « garde de ue pas tomber '. " Car il n'y a pres-

toire, mais un tyran (|iu régna sur son cœur. due |)as une page des saints F>ivres, qui ne pro-
L'Ecriture le déclare assez, quand elle l'accuse clame celte véril(sque « Dieu résiste aux super-
d'avoir aimé les lemmes Lesconmieucenienls
''.
« bes et donne sa grâce aux humbles ^. »
lie sa vie n'avaient été pourtant remplis que des
désirs de la sagesse •'
; mais, après l'avoir CHAPITRE XXIV.
acquise parl'amour des biens spirituels,
il la perdit dans l'amour des plaisirs char- examiner avant tout la nature de
nels. l'expression.

3i. Il importe donc avant tout il'examiner


CHAPITRE XXIl.
si l'expression qu'il s'agit de comprendre est

propre ou figurée. Après s'être assuré qu'elle


.ACTIONS LOUÉES DANS l'ÉCRITURE, MAINTENANT
est figurée, il est facile, à l'aide des règles tra-
CONTRAIRES AUX BONNES MOEURS.
cées dans le premier livre, de l'envisager sous
toutes ses faces, jusqu'à ce qu'on parvienne à
'^'2. L'ancien Testament tout entier, ou pres-
saisir le sens véritable, surtout quand à l'habi-
(pie tout entier, peut donc s'interpréter, non-
tude de ce travail se joint la pratique d'une
seulement dans le sens littéral, mais encore
piété sincère.Nous avons indiqué plus haut la
dans le sens figuré. Cependant pour les faits
méthode à suivre pour distinguer entre une
(pie le lecteur croira devoir prendre à la let-
expression propre et une expression métapho-
tre, et dont les auteurs sont loués dans l'Erri-
rique.
liire, si ces faits sont opposés à ce qui s'ob-
serve parmi les fidèles depuis l'établissement CHAPITRE XXV.
de la loi nouvelle , il s'attachera à la tigme
qu'ils contiennent, pour la comprendre, mais LE MÊME TERME n'a PAS TOUJOURS LA MÊME
il se gardera de prendre le fait- lui-même signification.
comme règle de ses mœurs. Car bien des
choses se pratiquaient alors légitimement, nature de l'expression détermi-
(Tne fois la
qu'on ne pourrait aujourd'hui se permettre sans née, on remarquera que les termes qui la com-
péché.
posent, sont tirés de choses semblables, ou qui y

m Rois, X[|, 1-14. —nu Rois.xl.l. — '


Il raralip.l, 7-lU.
ont quelque rapport.

'
ICor. X, 12. — ' Jac. it. fi.
DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

35. Mais comme les choses ont cnli'oHes plu- rentes. Ainsi l'eau désigne tantôt le peuple,
sioiii's points de ressoniMance, ce serait une comme dans l'Apocalypse ' tantôt rEs])rit- ,

erreur de croire (jue la signilication d'un tern.e Saint, dont il est écrit « Des lleu\es d'eaux :

comme figin'e dans un certain passage, dût « vives couleront dé son sein 2 » sans parlei- ;

être partout la même. Ainsi quand le Seigneur de plusieurs antres sens que comporte cette
(lit : « du levain des pharisiens,
Déliez-vous >> expression dans les passages où elle est em-
il mot « levain » en mauvaise
prenait le ployée.
part et dans un sens lavorahle ici
; « Le ro- : 87. Car il y a des termes qui ont chacun,
« yaume des cieux est semblable à une femme non-seulement deux, mais plusieurs significa-
« qui cache du levain dans trois mesures tions diverses, selon la suite du texte où ils se
« de l'arine, jusqu'à ce que la pàtc soit toute fer- trou\ent insérés.
« menlce -. »

:3(î. signification est de deux


Cette variété de CHAPITRE XXVI.
sortes.Chaque expression peut avoir des sens
ou contraires, ou simplement différents. Les LES PASSAGES CLAIRS SERVENT A DISSIPER
sens sont contraii'es, (juand l'expression, prise LES OBSCLRITÉS.
mélaphoiiquenienl, doit s'entendre tantôt en
bien, et tantôt en mal, comme dans l'exemple Là OÙ une expression a un sens parfaitement
ihi levain i'api)orlé ci-dessus. Le mot « lion », clair, elle doit servir à découvrir de ([uelle
dans ce passage « Le lion de la tribu d'' Juda ; manière il dans un passage
làul l'entendre
a vaincu 3, » s'applicpie à Jésus-Christ ; et au
(' obscm'. Peut-on mieux comprendrcces paroles
démon dans cet autre « Votre adversaire : du prophète s'adressant à Dieu « Prenez :

« tourne autoin- de vous pour vous dévorer, « vos armes et votre bouclier, et levez->ous
K comme un lion rugissant ''.
» Ici le serpent « pour me secouir ^, » que par ces autres :

est pris en bonne part : « Soyez prudents « Seigneur, vous nous avez couvert de votre
« comme des seipents ', >> et là en mauvaise « bonne volonté comme d'un bouclier » Il
'* '?

part : « Le serpent, par ses artifices, séduisit ne faut pas conclure de là que partout où on
« Eve 6 ». De même pour le mot « pain, » dans rencontcra le bouclier comme arme de pro-
les passages suivants : « ,1e suis le pain vivant tection, il signifiera la bonne volonté de Dieu.
« descendu du ciel
'
; « et : « Mangez hardi- Car il est aussi i)arlé « du houclier de la foi,
« ment des pains cachés «. » On pourrait en a avec lequel vous pourrez , dit l'Apôtre,

citer beaucoup d'autres. La signilication de « éteindre tous les traits enflammés de l'en-

ceux que je viens de rajjporter n'est nullement «nemi •"'.


» De même
ne doit-on pas toujours,
ilouteiise je ne devais doimer comme exein-
;
quand il s'agit des armes spirituelles, regarder

[)les que des expressions très-claires. Il en est le boucher comme l'emblème de la foi, puis-
d'autres qu'on ne sait pas en quel sens inter- ([ue la foi clI encore ailleurs désignée sous ce
« Le Seigneur tient en delà cuirasse » Soyez revêtus de le cuirasse
préter, par exemple : lui :

sa main une
'< coupe de vin pur, plein d'amer- « de la foi et de la charité. '>
»

« tume '. >' Il est incertain si cette coupedésigne


la colère de Dieu, non encore poussée jusqu'à CHAPITRE XXVll.
ou bien la
l'extrémité, c'est-à-dire jusqu'à la lie,

grâce des Ecrihn-es passant des Juifs aux gen- LN MÊME PASSAGE PEUT ÊTRE IXTERPUÉTÉ
tils, parce <iue le Seigneur « a fait pencher DIFFÉREMMENT.
« cette coupe des uns sur les autres; » les

Juifs conservantencorelespratiquesiégales, qu'ils Uuaud un même passage de l'iM-riluiv


;(X.

n'interprètent <|ue dans le sens, charnel, al- admet, non pas un seul, mais deux ou plu-
lendu que « la lie de la coupe n'est pas encore sieurs sens, sans qu'on puisse délerminer (piel

'". » Une même expression, avons-nous esl véritablement celui de l'auleur, il n'y a
« épuisée
en outre avoir, non plus des sens nul danger à craiiulre, si, d'après d'autres
dit, lient
contraires, mais plusieurs significations diffé- lexles (11- l'Ecrilure, ou peul démontrer que
iMatt. xvi,ll.-2LiiP, .\III,21. — ' Apoc. v, 5. — ' I Pierre, v, S.

_i Malt X. 16. "II C-or. XI, 3. — - '
vl,51.— » Prov.lx, 17. 'Apoc. xvn, )5; XIX. 6. — - Jean, vil, 38. ' Ps. XXXIV, 2. ' II^-

— iTs. LJCXlv,9. '"Ibid. —


.lean,
V, t3. — '•Ephis, VI, 16. — '• I Thess. v, 8.
LIVRE TROISIEME. — ORSCURITÉS DE L'IÎCRITURE. 85

ces divers sens n'ont rien do coniraire à la \('- de liii-uli.ius (pie l(>s grannnairiens a|)pelleut
l'ilé. Toiitolbis celui <|iii veut pénéirer dans la du nom grec de « Iropes » (pi'ils en ont (ait ;

pi'oloiidi-ni' des divins oracles, doil conslaui- un usage plus IVé(pieiil et plus l'iclie (pie ne
ini-nt s'elïorcer de se ivipproelier de la pensi-e peusi>nt ceux (jni ne les ont pas lus, et qui ont
de l'aiileur par qni l'Esprit-Sainl nous a donné appris ailleiu's ces (igin-es du langai;e. Ceux
celle parlie des Livres sacrés, soit cpi'il par- (pliont connaissance de ce genre d'ornements,
\ieiHie à la déconvrir vérilableineiit, soil (pi'il savent les distinguer dans les saintes lettres,
tirede ses expressions nn aiiti'e sentiment (|tii dont l'intelligence leur devient ainsi plus fa-
n'ai rien d'opposé à la pnreté de la loi, et ([ni cile. Ce n'càt pas ici le lieu de les ensi-igner à

puisse s'appii\ei' sur nn t(''nioii;iiage des autres ceux ipii les igiioreul, car je neveux pas faire
Ecritures, l'eul-ètrerauleur lui-nièine a-l-il vu un coursde grammaire. Mais j'engage beaucoup
dans ces expressions qu'on cherche à interpré- à les apprendi'c ailleurs, comme je l'ai

ter, celle aulr(> si^iiilicaliou qui leur est atlii- déjà fait dans le second livre, où j'ai parlé de
huée. Du moins il est certain que l'Esprit de la nécessité de la connaissance des langues.
Dieu, ilont l'écrivain sacré n'était que l'inslrn- Car les lettres, d'où la grammaire a tiré son
menl, a prévu que ce sentiment s'offrirait à la nom, puisque les Grecs l(»s app|)ellenl roxiJ.ij.7zy.,
pensée de celui qui lirait ou entendrail lire ce sont les signes des sons articulés du langage.
passage je dis plus, c'est sa providence qni le
;
i/Eciiturenons non-seulement des e.xcm-
offre,
lui a inspiré, puisqu'il repose sur la vérité. ples de ces ligures, comme de toute autre
Cette providencL" divine pouvait-elle se mon- chose, mais les noms menues de quehjui^s-unes,
trer plus admirable et plus léconde dans les couiuK^ des allégories, des égnimes, des para-
saiids livres, qu'en renfermant ainsi sons les boles. D'ailleurs, presque toutes ces figures
mêmes expressions plusieurs sens différents, dont l'enseignement fait partie des arts libé-
dont la vérité serait attestée par d'autres passa- raux se retrouvent sur les lèvres de ceux qui
j;es d'une autorité également (li\iuc? n'ont jamais entendu de gramairiens, et
abondent dans le langage vulgaire. Ne dit-on
CHAPITRE XXVIII. pas tous les jours : Comme vous florissez !

ligure qui se nomme


métaphore ? N'appele-t-on
l'écritlres'expliqie juelx par elle-më.me
pas piscine un réservoir qui ne renferme aucun
qie par i.a raiso.x.
poisson, et n'est pas destiné à en recevoir,

39. S'il se présente un sens dont la certitude quoique ce terme tire de là son origine ? C'est
ne puisse être établie par d'autres témoignages là une catachrèse.

de l'Ecriture, il faut alors en montrer l'évi- 41. Il serait trop long de citer des exemples
dence par de solides raisonnements, bien que, d'autres vulgaire a même
ligures. La langue
peut-être, ce sentiment n'ait pas été celui de su en former qui sont d'autant plus frappan-
l'auteur en cet endroit. Mais cette méthode est tes, qu'elles signifient le contraire de ce qu'ex-
très-dangereuse. La voie la plus sûre sera ton- priment les paroles, telles que l'ironie et l'an-

jour celle de L'Écriture même et quand nous tiphrase. L'ironie indi(iue sa pensée par le
;

y cherchons la vérité cachée sous le voile des


mode de prononciation ; ainsi on dit à quel-
expressions mélaphoriques, il faut que notre qu'un qui fait le mal : Vous faites là une bonne
interprétation soit à l'abri de toute controverse, action ! L'antiphrase, pour signifier l'opposé,
ou que, si elle est contestable, l'incertitude n'a pas recom's au ton de la prononciation ;

soit résolue par des témoignages |)uisés ailleurs elle emploie des termes particuliers tirés du
dans l'étendue des livres saints. contaire, comme celui de luctis donné à un
bois sacré, parce que la lumière n'y pénètre
CHAPITRE XIX. pas ; ou certaines expressions consacrées par
l'usage, bien qu'elles n'aient pas toujours le
.\ÉCESSrrÉ DE LA CONNAISSANCE DES DIVERSES même sens, comme quand nous cherchons
SORTES DE FIGURES. une chose dans un lieu où elle n'est pas, et
qu'on nous dit il en est rempli: quelquefois ;

40. Les savants ne doivent pas ignorer que c'est par certaines paroles ajoutées qu'elle l'ait
nos anteiu's sacrés ont employé tous ces genres entendre le contraire de ce qu'elle exprime,
S6 DE LA DOCTRLNE CHRÉTIENNE.

par exemple : Défiez-vous de cet homme, car 43. L'auteur, en les recommandant leur
c'esl un homme (le bien. Quel est l'iïnorant qui attribuait une portée telle, que leur emploi
en parle ainsi, sans savoir ni la nature, ni intelligent pouvait faire jaillir la lumière de
les noms de toutes ces fig;ûres Cependant la ? toutes les parties de l'Ecriture. Voici comme
connaissance en est indispensable pour résou- il débute Rien ne m'a paru plus nécessaire
: «

dre les diiiicultés de l'Ecriture car si un pas- ; « que d'écrire un livre des Règles, et d'y don-
sage pris à la lettre n'offre qu'un sens absuide, « ner conune autant de clefs et de flambeaux
il faut examiner s'il n'y a pas là telle ou telle « pour pénétrer dans les secrets de la Loi. Ces
(igurc qui cache le sens véritable. C'est par ce " règles mys'iérieuses sondent toutes les pro-
moyen qu'on a porté la lumière dans la plupart « fondeurs, et ouvrent le trésor de la vérité à
(les obscurités. « ceux qui ne pouvaient les découvrir. Si on
« les reçoit avec la même
que nous simplicité
CHAPITRE X\X. '( les donnons, tout ce qui fermé s'ouvrira, est
« tout ce qui est voilé sera éclairci, et quicon-
RÈGLES DU DO>'ATISTE TICHONIUS.
« que voudra parcourir l'immense forêt des
4:2. L'n certain Tichonius, qui a vivement « prophéties, sera conduit connue par des sen-

combattu dans ses écrits, tout


les Donalisles
« tiers lumineux qui l'éloigneront de toute
Donatiste dont l'aveuglement
qu'il était, et
« errem'. » S'il se fût contenté de dire que ces

nous parait d'autant plus étrange qu'il n'aban- règles mystérieuses sondeid quelques-unes des

donna pas entièrement cette secte, a composé prolondem-s, même les plus secrètes, des di-
un livre intitulé « des Règles », parce qu'il y vins oracles, et aplanissent grand nombre de
expose sept règles à l'aide des(|uelles on peut diflicullés, sans présumer vouloir tout éclab-
pénétrer dans les ni\ stères cachés de lEcritm-e. La cu', il fut resté dans le vrai. Sans donner à son

piemière est « de Noire-Seigneur et de son livre, si utile d'ailleurs et si bien travaillé, un


« corps » ; -la seconde, « du du Seigneur
corp.s mérite exagéré, il n'eid pas llatté d'une vaine
« partag»' en deux » ; la troisième des promes- attente le lecteur qui eu prendrait connais-
« ses et de la loi » ; la quatrième, de l'es- sance. J'ai cru devoir consigner ici ces réflexions

« pèce et du genre » ; la cinquième, « des pour engager les esprits studieux à lire ce livre
» temps ') ; la «delà récapituliation»;
sixième, assurément très-propre à faciliter l'intelligence
la septième, « du démon et de son corps » .
de l'Ecriture, et pour prévenir de ne pas enten-
Gonsidéi'ées de la manière dont il les expose, dre plus qu'il ne renferme. 11 doit être lu avec

ces l'ègles sont certainement d'un grand secours prudence, en raison de quelques erreurs qu'il
pour porter la lumière dans les obscurités des faut attribuer à la fragilité humaine, mais prin-
saints Livres ; mais elles ne suffisent pas tou- cipalement à cause des maximes hérétiques
jours, car on doit recourir encore à bien d'au- que l'auteur y a émises comme Donatiste. Je
tres moyens pour résoudre toutes les difficul- vais expliquer en peu de mots les avis et les in-
tés ; Tichonius lui-même, en plusieurs cir- structions renfermées dans ces règles.
constances, les a laissées de crdc comme inu-
tiles. Aucune de ces règles, par exemple, n'a- CHAPITRE XXXI.
vait de rapport à la question de savoir ce qu'il
faut entendre par les anges des sept Eglises, l'RE.MliîRE RÈGLE DE TICHONILS.
dont il est parlé dans l'Apocalypse, et auxquels 1
saint Jean avait reçu l'ordre d'écrire. C'est par 44. La première règle est " du Seigneui- et
une suite de raisonnements qu'il arrive à con- « de son corps. » Elle nous apprend que quel-
clure que ces anges représentent les Eglises, quefois le chef et le corps, c'est-à-dire, le
mômes". Salongue dissertation sur un point aussi Christ et l'Eglise, soûl représentés dans une seule
difficile à élucider ne lait aucune mention des personne car ce ; n'est pasvainement (ju'il
dites règles, .le me borne à ce seul exem|)le, par a été dit aux fidèles : « Vous êtes de la race d'.\-
ce que ce serait une tâche trop longue et trop « braham '
;
» quoiqu'à vrai dire le Christ
pénible d'énumérer tous les passages pour les- seul soit de cette race. Ne .soyons donc
quels elles demeuieni insuffisantes. pas étonnés si, dans une seide et même per-
' Apoc. I, ÎO. '
r;al.ni,29.
LIVRE TROISIEME. — OBSCURITES DE L'ECRITURE. 87

soMiic, lodiscoui's passe taiilùtdti chef au corps, « ses; je leur ferai ce que je dis, et ne les aban-
cl liiiilùl (1(1 coi'iJS ;iii l'Iicl'. Ainsi, c'csl la iiuMno « donnerai pas '; " Dieu |»ai'le aussib'it des mé-
[n'isoniic parle ici « Dieu
([iii m'a mis sur la :
chants ciinrinidus avec les bons, cl il ajoide :

« une couronne seinl/labioà celle d'un époux


tclc « Mais ils sont retom'nés en arrière. » 11 send)le


et il m'a paré des ortiemenls d'une épouse', n l>arlei' toujours des premiers, (junicpie ces pa-
Kl cepeiidaul il l'aul dislinfiiier, dans ces i)ai()- roles désignenl évidenuneid les méchants. Mais,

les, ce (|ui se rappoi'le au eliel', ou à Jésus- connue ils sont maintenard méh's les nus aux
Christ, et ce (pii eonvieul au corps, c'est-à-dire, aidres, il coidiniie, en apparence, à s'adresser
à l'Eglise. à ceux dont il parlait auparavant. Un jour, néan-
niiiins, se fera la sé|iaralion, liginée dans ce ser-
cn.\i>iTRE\\\n. viteur de l'Evangile, tpie son mailre doit séparer,
à son arrivée, pour lui donnci- place an rang des
DEIXIKME RÈGLE.
hypocrites ?

io. La seconde règle est « du corps du Sei-


CHAPITRE XXXIll.
« gneur |)arlagé en deux » . Ce titre était peu
convenable, car ce (pu ne sera pas éternelle- TROISIÈME UÈGLE.
ment avec .lésus-(]hrisl ne peut lornier et'l'ecti-
vement son corps. Il fallait dire « du corps : 4(i. La trosième règle est : « Des promesses
« du Seifiueur véritahie et mélangé ;
>> on « et de la loi. » On ])ourrail l'intiluKu- autre-
hien : <> vérilahle et d(''giiisé, » ou de (piel- ment : '< De l'esprit et de la terre, connue
»

(|u'aiitre manière. Les hypocrites, eu effet, nous l'avons fait dans le livre (pie nous avons
non-seulement U(^ seroid pas ave: lui dans écrit sur ce sujet ;ou même : « De la grâce et

l'éternité mais ils n'j soid pas nuMue sur la


, <c du eonnuandement. Néanmoins, » celle rè-
terre, (pioi(pi'en apparence ils fassent partie gle me semble plut(")t une grande question
de son Eglise. On aurait donc pu intitider qu'une règle véritable, (pii doive servir à ré-
celle règle : « de l'Eglise mélangée . » Elle soudre les queslioiis mêmes. L'ignorance
exige du lecteur une grande attention, pour des pélagiens sur ce point donna naissance à
discerner quand l'Ecriture, paraissant s'adres- leur hérésie ou à ses progrès. Ticlionius s'est
ser toujours en parler, a déjà
aux élus, ou appliqué à éclaircir cette qneslion; sou travail
passé aux réprouvés, parce que les uns et les est bon, mais incomplet. Traitant de la foi et
autres ne tonnent qu'un seul corps, par suite des œuvres, il soutient que les œuvres nous
de leur mélange ici-bas, et de la parlicipaliou sont données de Dieu |)ar le mérite de la foi,

aux mêmes sacrements. En voici un exeuqite mais que la foi est tellement de nous (jn'elle

tiré du Cantique des Cauti(}ues : « Je suis ne nous vient pas de Dieu. 11 ne pensait pas à
« brune, mais je suis belle comme les tentes ces paroles de l'Apôlre « Que Dieu le Père et :

i< de Cédar, comme les pavillons de Salomou '. » « le Seigneur Jésus-Christ donne à nos frères

L'épouse ne dit pas : J'ai été brune comme les <i la paix et la charité avec la foi ^. » Mais il

tentes de maintenant je suis belle


Cédar , et n'avait pu couiiaiire l'hérésie pélagienne qui
connue de Salomon mais elle
les pavillons ; s'est élevée de nos jours, et qui nous ;i tant

dit tprelle est l'un et l'auli'C en même tem[)S, occupé à dél'endre contre elle la grâce ([ue
à cause de ruiùon i)assagère des bons et des Dieu nous donne jiar Noire-Seigneur Jésus-
mauvais poissons dans les nuMnes lilcts '. Les Chris. Selon ce mol de saint Paul : « Il faut

lentes de Cédar représentent ici Isinaél, qui ne « qu'il y ait des hérésies, afin (pi'on ih-couvre
doit point partager l'héritage avec le fils de la « par là ceux d'entre vous qui sont solidement
femme libre ''.
Ainsi, après avoir dit des justes, « à Dieu ', »cette hérésie nous a fait redoubler
dans Isaie : « Je conduirai les aveugles dans d'activité et de vigilance, et découvrir dans l'E-
>< des voies qui leur sont inconnues, cl ils crilure ce qui avait échappé à Tichoniiis, d'au-
« marcheront dans des sentiers où ils n'ont tant moins circonspect qu'il n'avait point d'en-
" jamais été je changerai leurs ténèbies en nemis à combatlre nous ; y avons vu (pie la foi
;

« lumière, et je redresserai leurs voies torlueu- ellc-méine est un don de Celui qui la

'Ib. LXI, 10. — = fnnt. I, 5, — ' Matl. x[tr, 18. = ' Gen. .\si. 10 '
Is. Xl.ll, 1«, 17. — 2 Miilth. x.xiv, 51. — 'Ephés. VI, 23. — 1 Cor.

Galat. IV, 30. XI. 1».


58 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENXE.

distribue à cliacun dans la mesure qui lui est 48. Le sens des paroles ne va pas toujours
propre. De là ces paroles aux Phillppiens : « 11 au delà des limites de l'espèce; souvent il s'y
« vous a été donné, non-sculoinent de croire rappoilc direcleiuent et même ne peut guère,
« eu Jésus-Christ mais même de souffrir pour
, évidemment, s'appliquer qu'à elle seule. Mais
« lui I. » Ainsi donc, comment douter que l'un quand l'Ecriture passe de l'espèce au genre,
et l'autre soient un don de Dieu, quand on continuant en apparence à parler de l'espèce,
affirme d'une manière si positive et si claire le lecteur doit y faire attenlion pour ne pas ,

que l'un et l'autre ont été donnés par lui ? chercher dans l'espèce ce qu'il trouvera plus
Cette vérité repose sur bien d'autres témoigna- naturellement et plus sûrement dans le genre.
ges mais je ne veux pas m'arréter ici à une
;
Tel est ce passage d'Ezéchiel « Les enfants :

question que j'ai traitée en tant d'autres circons- « d'Israël ont habité dans leur terre ils l'ont ;

tances. « souillée dérèglement de leur voie,


par le
« par leurs idoles et par leurs péchés. Leur
CHAPITRE XXXIV. « voie est devenue impure à mes yeux, comme
« la femme qui souffre l'accident de son sexe.
QUATRIÈME RÈGLE.
« Jai répandu ma colère sur eux je les ai ;

-i". La quatrième règle est ; « De l'espèce et « écartés en divers pays, et je les ai dispersés

a du genre. » Par l'espèce il faut entendre la « parmi les peuples je les ai jugés et je leur ;

parlie, et par le geiu'e le tout, dont l'espèce « ai rendu selon leur voie et selon leurs œu-
n'est que la partie. Ainsi chaque ville est une « vres '. » Ces paroles s'entendent claire-

parlie de l'universahté des peuples ; elle forme ment de cette maison d'Israël dont l'Apùtre a

l'espèce, et l'ensemble des peuples constitue le dit : « Considérez Isi aël selon la chair 2, » parce
genre. Nous n'avons pas à entrer ici dans les que cet Israël charnel a fait et souffert ce qui

distinctions subliles des dialectitiens qui dis- vient d'être rapporté. La suite du texte s'en-
putent fort ingénieusement sur la différence tend aussi du même peuple, mais à partir de

qui existe entre l'espèce et la partie. La ques- ces paroles : « Et je sanctifierai mon nom si

tion reste la même quand il s'agif, non plus seu- « grand et si saint, qui a été souillé parmi les

lement d'une ville, mais d'une province, d'une '< nations et que vous avez déshonoré au milieu
royaume tout entier. Car ce n'est
nation, d'un « sauront que je suis le
d'elles; et ces nations

pas uniquement quand il s'adresse à Jérusa- « Le lecteur remarquera qu'il s'agit


Seigneur. »

lem, par exemple, ou à quelque cité païenne, non plus de l'espèce, mais du geiue, car le Pio-
comme Tyr et Babylone, que le texte sacré a phète pouisuil « Lorsque j'aurai été sanctifié à
:

une signification qui s'étend plus loin que ces leurs yeux au milieu de vous, je vous retire-
<c

« rai d'entre les peuples, je vous rassemblerai


villes et s'applique mieux à tous les peuples ;

« de tous les pays, et je vous ramènerai dans


c'est quand il parle d'une province en-
aussi
« votre terre. Je répandrai sur vous de l'eau
tière, connue la Judée, l'Egyte, l'Assyrie, qui

renferment un grand nombre de villes, tout « pure, et vous serez purifiés de toutes vos

en ne formant qu'une partie de l'univer.s ce ;


« souillures, et je vous purifierai des ordures
qui esl dit de l'une de ces provinces se rap- « de toutes vos idoles. Je vous donnerai un

porte plutr»! à toute la terre ou, pour parler ,


« cœui- nouveau et un esprit nouveau au mi-

avec Tichonius, au genre, dont chaque peu- « lieu de vous. J'ôterai de voire chair le cœur

ple constitue l'espèce. Ces notions n'ont pas « de pierre el je vous donnerai un cœur de
échappé mènu^ au vulgaire et les plus igno- « ciiiiir. Je mettrai mon Esprit au milieu de
;

rants savent dislingner entre les obligations « vous. Je ferai que vous marchiez dans la

spéciales et les oljligalions générales que ren- « voie de mes préceptes, que vous gardiez mes
même « ordonnances, que vous les el pratiquiez.
ferme chaque édit inqx'rial. Il en est de
relalivement aux honunes; car toul ce qui esl « Vous habileiez dans bi terre que j':ii doimée
(lit (le Sidomon ne peut lui convenir el devient
« à vos pèiTS. V()us serez mon peuple el je serai

parfaiiement clair si ou rappli(pie à Jésus- « votre Dieu, et je vous purifierai de toutes

Christou à l'Eglise dont le iirince est un des (< \os souillures :' ». Celle piophftie regarde le
,

membres. nouveau Teslamenl qui renferme, noii-scule-


1 Philip. I, -'9.
I
Ezecli. xxxvi, 17-19. - : I Cor. x, 18. — ' Ezccli. xxxvi,ii3-29.
LIVRE TROISIflME. — ORSCL'RITES DE LTXRITURE. 89

meut les restes d'une nation doiil il est dit ré'gner l'Ii i iiclli'mcul a\cc le Christ, (pii est la
ailleurs : « F^e noml)re des entants d'Isi.u'l M'iilalile li'rrc des \i\aids et des bieidieureux '.

« l'ùt-il aussi jiraud ([ue les prains de saMe de C'est celle terre (|ui a el(' douni'e à nos pères,
'1 la mer, à peine le reste sera sanvi- '
, » mais quand, |)ai' nu décret de l'infaillible cl inunua-
(jui em!)iasse tous les peuples, selon la pro- ble Nolonté de Dieu, elle leur a été promise.
messe laite à leur p^res ipii sont aussi les nô- Car, par la foi (pi'ils avaieid (pi'elle leur serait
tres : \('i-it('' incoidestahle aux yeux de eelui ipii oclroyée en son temps, et eu égard à la stabi-
reconnait dans ees paroles l'annonce du bain lité de la promesse et de la |)rédestination di-
de le iép;énération maintenant ouvert à toutes vine, ne devaient-ils pas la regarder conmic
les nations, et sait entendre ce passage où l'A- leur étant déjà donn('e ? .Saitd Paid n'écrivait-il
polre exalte le prix et rexcellcnce de la grâce pas à ïimotlié, au sujet de la grâce accordée

de la nouvelle alliance sur celle de l'ancien Tes- aux justes Dieu nous a appelés par sa voca-
: «

tament « Vous êtes vous-mêmes notre lettre


: « tion sainte non selon nos (cuvres, mais se-
,

'ide recommandation elit> est écrite, non avec ; « Ion le décret de sa \olouté et la grâce qui
'<de l'encre, mais avec l'Esprit du Dieu vivant ;
« nous a été accordée avant tous les siècles en
« non sur des tables de pierre, mais sur des ta- « .lésiis-ChrisI, et qui a paru maintenant par
it blés de cbair (pii sont vos co'urs '. » Il lait « l'avèuement de Sauveur - ? « notre Il parle
é\i(lennnent allusion à ces expressions ilu Pro- d'une grâce donnée, quand ceux à qui elle de-
phète : « Et je vous donnerai un cœur nouveau vait l'être n'existaient pas encore, parce que
" et un esprit nouveau au milieu de vous. .!'()- ilans la disposition et la [)ré<lestiuation divine,
« terai de votre chair un cœur de piei're, et je était déjà occompli ce qui ne devait arriver que
« vous doimerai un cœur de chair. » Ce cœur dans la suite des temps et qui maintenant « a
de chair dont l'AixHre dit « Des tables de chair : « été Le passage cité plus haut
manifesté. »

(|ui sont vos cœurs, » doit être dislintiui- du peut aussi s'interpréter de la terre du siècle
cieur (le pierir par la vie de sentiment, c'est-à- futur, alors ([u'il y aura lui ciel nouveau et
dire,par la vie de l'iidelligence. C'est ainsi que une terre nouvelle, où les pécheurs ne pour-
se forme l'Israël spi iluel, non d'un seul peu- ront habiter. C'est donc avec raison qu'il est
ple,mais de tous les peuples comme il a été , dit aux justes que cette terre leur appartient,
promis à nos pères, dans un de leurs descen- puisque les impies n'y auront aucune part car ;

dants qui est Jésus-Christ. elle a été aussi véritablement donnée quand a été
i9. Cet Israël spirituel se distingue donc de établie la promesse qui en assmail un jour la
cet antre Israël charnel formé d'un seul peu- possession.
ple, non par la noblesse de l'origine, mais
CHAPITRE XXXV.
par la nouveauté de la grâce non par la ;

race, mais par l'esprit. Or, quand la paroI(>


CINQLliîME RÈGLE.
sublime et profonde du Prophète s'adresse à
l'un, elle passe insensiblement à l'autre, tandis .")0. Tichouius établit um' cinquième règle
(lu'ellc semble encore se rapporter au premier ;
qu'il appelle Des temps. » Cette règle a pour
: «

en cela non pas un ennemi jaloux qui


elle est, but de déterminer ou de faire conjecturer cer-
clierche à nous fermer l'intelligence de l'Ecri- tains espaces de temps qui ne sont pas bien
tuie, mais un sage médecin qui procure à notre précisés dans l'Ecriture. L'application s'en fait
esprit un exercice salutaire. Ainsi, quand le de deux m;uiières pas la synecdoche ou par :

prophète dit : « Je vous ramènerai dans votre les nombres consacrés dans la loi. La sy-
« tei're, » et nu peu [ilus loin, connue pour necdoclie est une figure qui l'ait eidendre la
exprimer de nou\eau la même pensée Et : < partie |)ar le tout, ou le tout par la par-
« vous habiterez dans la terre que j'ai donnée tie, t'n évangéliste, par exem|)le, place à huit
« à vos pères, » gai'dons-noiis d'entendre ees jours de distance, et un autre évaugéiiste à six
paroles à la lettre , connue l'Israc'l cÎKunel, le fait lie la Iransliguratiou du Seigneur, quand
mais dans le sens figiu'é, comme l'Israël spiri- sur la iniuilagne, Cn présence de trois de ses
tuel. Car c'est l'Eglise sans laclie et sans lide ', ilisciples, sa face devint resplendissante conmie
eonq)osée de toutes les nations et deslinée à le soleil et ses vètemeids blancs comme la nei-
' Is. .V, 22. — îlICor.iii, 2,3. — 3E|)hés. v,27. I
Ps. XXVI, 13. - î 'ITim. I. 9, 10.
60 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

gc '
. Les deux récits ne peuvent être en même
temps vrais quant au nombre de jours, à moins CHAPITRE XXXVI.
de supposer que celui qui parle do huit
jours prend pour deux jours entiers la fin SIXIEME REGLE.

de celui où Jésus-Christ prédit cet événement


M. La sixième règle de Tichonius est celle de
et le comraencemeid de celui où il l'accom-
« la récapitulation. » Elle est d'un secours pré-
plit tandis que celui qui n'en mot que six
;
cieux pour dissiper certaines obscurités du
n'a compté que les six jours pleins compris
texte sacré. QueUpicfois les faits sont placés
entre ces deux termes. C'est à l'aide de cette
dans le récit comme s'il étaient postérieurs dans
même figure, où la partie est prise pour le tout,
l'ortlre des temps, et se reliaient entre eux
que se résout la môme dilficulto sm" la résur-
par une tandis que la
succession naturelle ;
rection du Sauveur. Si l'on ne prend pour
narration, manière inaperçue, s'est
d'une
des jours entiers la fin du jour où il a souffert
réportée à des événements antérieurs qui
en y ajoutant même la nuit prccodon-
avaient été omis. On pourrait tomber dans
te et la nuit sur la fin de laquelle il est res-
l'erreur sans le secours de cette règle. Prenons
suscité, par radjonction du dimanche qui com-
ce passage de la Genèse « Le Seigneur Dieu :

menç,ait à luire, il esl impossible de trouver les


« planta du côté de l'Orient un jardin de plai-
trois jours et les trois nuits pendant lesquels
« sir, el il y mit l'homme qu'il avait formé il ;

le Christ a prédit qu'il serait dans le soin do la


« produisit aussi de la terre toutes sortes de
terre •*.

« beaux arbres dont les fruits étaient agréables


ol. Tiohonius appelle nombres oouï^icrés
« à la vue et délicieux au goût. » Le récit semble
par la loi, ceux tlonl elle fait le plus granti usa-
insinuer que ces dei'nières créations n'eurent
ge, comme
les nombres sept, dix, douze ot
lieu ({u'après (jue Dieu eut formé l'homme et
qu'un lecteur attentil remarquera faci-
auti'es,
l'eut placé dans le paradis mais l'au- ;

lement. Presque toujouis ces nombres expri-


teur, qui n'a\ait exposé qu'en peu de mots
ment un temps inilofini; ainsi : « Je vous loue-
que Dieu planta ce jarilin de délices et qu'il j
« rai sept fois le jour ', » c'est-à dire : « La plaça l'homme, fait une récapitulation et re-
« louange du Seigneur sera toujours dans ma
vient sur ses pas pour dire ce qu'il avait omis,
« bouche. * » Us conservent la même signiflca-
savoir, la manière dont Dieu orna ce jardin,
lion, soit qu'on les nudliplie, par exemple, par
en produisant de la terre toutes sortes de beaux
dix, comme soixante-dix, sept cents : ce qui au- arbres, dont les IVuits étaient agréables à la vue
torise à entendre, dans le sens spirituel, les soi-
el délicieux au goùl. L'auteur poursuit: « i^'ar-
xante-dix années do Jérémie la du- "',
de toute « bre de vie et l'arbre ae la science du bien et
rée de l'exd de l'Eglise ici-bas soit qu'on les ;
« du mal furent aussi placés dans le milieu du
multiplie par eu.vmêmes, connue dix par dix '<
i>aradis ». 11 parle ensuite du lleu\e qui
qui donnent cent, douze par tlouzo, cent qua- qui
devait arroser ce jardin et se divi-
raido-qualre, nondjro qui, dans l'Apocdypso ', grands
sait en quatre autres fieuves ; cir-
désigne l'assemblée univei'selle des saints. On constances qui toutes se rattachent à la créa-
voit ici que ces nondu'os sorvoni, non-soulo- tion de ce délicieux séjour. Après quoi, il re-
ment à résoudre les diflicultés relatives aux es- prend le fait qu'il avait déjà énoncé, et qui
paces de temps, mais que leurs significations venait effectivement à la suite des autres « Le :

s'étendent plus loin et touchent à une foule l'homme


formé
« Seiuneur Dieu prit qu'il avait
d'autres questions. .Vinsi le nondire piécilc de « et le mit dans le paradis. » Ce ne fut en '

l'Apocalypse se rapporte, non aux temps, mais effet qu'à la suite de ces diverses créations que
aux hommes. Dieu plaça l'homme dans le paradis, com-
me l'ordre des faits l'indique maintenant,
' Luc, lA, 23 MalUi. xvii, 1, 2 Marc, ix, 2. — îMattli.
i, xii,
non auparavant, comme on pouirail
; ;

le croi-
III. -k 'l's. cxvlli, KM. — ' es. xxxill, 2. — ^Jéiém, ixv, 11. — et
" A[)nr. VII, 4.
re d'après le n'cil, si ralleiilion n'v faisait dé-
couvrir une récapitulation dans laquelle l'his-

torien reprend des choses qu'il avait passées sous


silence.
I
Gen, II, 8-15.

LIVRE TKOlSlflMK. — OhSCIiKlTÉS DE LECKIII KK. (il

."3. An mi^fiio livre eiicoco, dans lo di^iiom- quel on a renoncé'!' N'est ce pas plulùl tuaiute-
lirciiu'iil lies (li'scciKlaiils de Noé, il est dit : nanl (pi'il le faut faire, afin qu'à l'aNèueMienl ilu
M Ce sont ïii les liis de C.liain, selon leurs Seigneur cliacun reçoive selon sa lidélilé ou son
'< alliances, leurs langjues, leurs terres et leurs lui'pris pour la loi divine? (lependaut ces pa-
« uatious. » Et après rénniiK'ralion des en- l'oles : « à celte heure, » semlilrui ({('signer

tants de Sein : « Ce sont là les (ils de Seni, l'heure solennelle de la nianireslation du Sei-
« selon leurs alliances, leurs lanfiues, leius gneur. Il faut ralteuliou vigilante du lecteur
1 leiTes et leurs nations. >> l'uis on ajoute en pour y découM'ir une réca|)itulation ; il \ est

parliiut de tous : « Ce sont les l'aniilles des amené d'ailleni's par une autre passage de l'K-
'( enlanls de Noé, selon les divers peuples qui critiu'c (pii, du temps même des ap('itres, procla-
^ « en sont sortis; et c'est de ces familles que se mait déjà cet oracle : >< Mes enfants, nous voici
« sont formées toutes les nations (|ui soid sur « à la dernièiv heure '. >' Celle lieui-e iieudant
' la terre di'puis le déluge. La leri'e n'avait laquelle on doit ol)seiver les [)rescriptions du
« alore qu'une même bouche et (|u'iuie même Sauveiu', s'entend donc du temps que doit durer
« voix, conunnne à tous'. » Ces dernières pa- la [iiédicatiou de l'Evangile, jusipi'au gi'and
roles send)lent imliipier qu'à l'épocpie où ils jour de la manifesrali()n, car l'heure à laipielle
fuient dispersés sur la face de la terre et for- le Seigneur paraîtra, sera l'heure même du ju-
;
mèrent des nations distinctes, ils n'avaient gement 2.

encore (|u'une même langue ; ce qui est évi-


ilemment contraire à ce qui est dit plus haut, CHAPITRE XXXV.
(pie les tribus avaient leiu's lansues. Dirait-on
SEPTIÈME RÈGLE.
de cha(]ue tribu, qui torniait une nation,
(pi'elle avait déjà sa langue propre, quand il .M. La septième et dernière règle de Ticlio-
u'\ avait qu'un langage commun à
encore nius est celle (pi'il intitule : « Du démon et de
tous les hommes? C'est donc par récapitula- i< son corps. » Le diable est, eu effet, le chef
tion (|ue l'auteur ajoidait « La teire n'avait
:
des impies, qui sont en quelque sorte son corps,
« alors qu'une même bouche et une même destinés à subir avec lui le supplice du feu
« voix commune à tous. » Sans aucune transi-
inextinguible ' ; de même que Jésus-Christ est
tion, il reprend son récit de plus haut, pour qui est son corps, appelée
le chef de l'Eglise,
exposer la cause de cette division des langues
à régner avec lui dans la gloire éternelle ^.
parmi les hommes, et immédiatement il nous Dans la première règle : " Du Seigneur et de
la montre dans la construction de cette fa-
« son corps », on doit s'attacher à découvrir,
meuse tour, alors que, par un juste jugement dans ce qui est dit d'une même personne, ce
de Dieu, ce châtiment lut imposé h leur or- (pii convient au chef et qui se rapporte au corps.
gueil.
De même dans cette dernière, on attribue par-
54. Cette sorte de récapitulation est quelque-
fois au démom ce qni s'applitpie plus directe-
fois plus insensible encore, comme dans cet
ment à son non-seu-
corps. Ce corps est formé,
endroit de l'Evangile où le Sauveur dit « Au :
lement de ceux (jui sont manilestement hors de
'< jour que Loth sortit de Sodoine, une pluie l'Eglise, mais aussi de ceux qui, lui appartenant
« de feu tomba du ciel qui consuma tons les trouvent néanmoins mêlés parmi
déjà, se
« habitants; et il en sera de même au jour où les élus jusqu'au terme de cette vie, alors
.> le Fils de l'homme se manifestera qu'à cette
:

que levan séparera pour toujours la paille


'i heure, celui ipù sera sur le toit et qui aura Comment
(lu bon grain Ces paroles d'Isaïe '•.
: '<

(I ses meubles dans la maison, ne s'amuse pas K a pu tomber Lucifer, (pii s'élevait avec tant
« à descendre pour les aller chercher; que de « matin ^'^ » et les suivantes qni,
d'éclat dès le
« même celui qui sera dans le champ ne re-
sous la figure du roi de Babylone, s'adressent à
« tourne pas en arrière et se souvienne de la
la même personne, s'appliquent clairement au
« femme de Loth 2. » Mais sera-t-il temps, quand démon. Et cependant celles-ci « Celui qui :

le Seigneur aura paru, d'observer ces pres- « envoie à toutes les nations, à été brisé sur la
criptions, de ne point regarder derrière soi, « terre ', » ne conviennent pas uniquement au
c'est-à-dire, de ne pas revenir sur un passé au- I
rjean. il. !'!. — = Rom. il. 5; XIII. 11. — Mattll. xxv.41.
'

'Gen. X. 2Û.3I. 31 xi, I. — ' Luc, xvii, 29-32. * Eph. I, 22. — ' Luc, il(, 17. — '
Is. XIV, li. — Ibid.
'
.

6-2 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

chef. Car si le démon envoie des anges vers tous gnification est littérale, soit pour les expres-
les peuples, ce n'est pas lui-même, mais son sions tigurécs, où une chose en signifie une
corps (|iii esl brisé sur la terre ; sinon en ce sens autre, et dont je crois avoir suffisamment parlé,
qu'il réside dans ce corps écrasé comme la je recommande à ceux qui étudient l'Ecriture

poussière que le vent emporte de la surlace de de remarquer attentivement et de confier


la terre < à leur mémoire les divei's genres d'expres-
56. Toutes ces règles, à l'exception de celle sions (ju'elle manière dont une
emploie, et la

de « la loi et des promesses, » font entendre chose y est exprimée; sur-


ordinairement
une chose par une autre, ce qui est le carac- tout je les exhorte à recourir à la prière pour
tère propre des locutions figurées. Mais l'em- eu obtenir l'uitelligence. L'Ecriture elle-même
ploi des ligures me parait trop étendu pour leur apprend que c'est « le Seigneur qui doime
qu'un esprit puisse en saisir tout l'ensemble. « la sagesse, que c'est de lui que viennent
Car il y a locution figurée toutes les fois qu'une « la science et l'intelligence » et que c'est '
;

chose sert à en signifier une autre, bien que lui-même qui leur a inspiré jusqu'à cet amour
la figure n'ait pas de nom en littérature. de l'étude, s'il esl accompagné d'une sincère
Dans les sujets où une figure s'emploie hal)i- piété.

tuellement, l'esprit la saisit sans effort ;


mais Nous terminons ici ce que nous avions à
dans les cas extraordinaires, l'intelligence, pour dii-e des termes considérés comme signes. Il

la comprendre, doit s'activer et travailler plus nous reste maintenant à parler, dans le livre
ou moins, selon le degré de grâce qu'elle a suivant, de la manière d'exprimer ce qu'on a
reçu de Dieu, ou selon les secours qui lui sont compris, selon qu'il plaira à Dieu de nous
accordés. Aussi, soit pour les termes dont la si- éclairer.

'
Prov. Il, fi.
LIVRE QUATRIÈME.

I.e s;iinl Dooleiir, après avoir enseigné la manière d'interprèlei' l'Ivcrilnre et d'en découvrir le sens véritable, arrive maintenant Ji

parler de la nianii're d'exprimer la doctrine (pi'oii vu puisée. — Son intention n'est pas de donner ilcs préceptes de rhétorique ;

cepeiiil.uil il e\piiso avec soin loii< les devoirs de locateur chrétien. -• Il lui offre, ilans les Livres saints et dans les auteurs
ecclésiastiipu's, les plus lican\ mod.d.'s de l'éloipience jointe il la sagesse, et eu cite |ilusieurs extraits dans les divers genres de
style. — Il leriuiuc eu exhortant l'ocateuc il recourir surtout il la prière, et à donner lui-mCme ilans sa conduite l'exemple de
ce qu'il enseigne dans ses discours.

que, tels que je les ai appris et enseignés


PROLOGUE. dans les écoles profanes. Ils ne sont pas uiui-
liles, sans doute mais si quelque sage trouve
;

1. En co;iimeii(;ant cet ouvrage de la Doc- assez de loisir pour ce genre d'étude, il devra
les apprendre ailleurs, et ne pas les chercher
trine chrélionne, je l'ai divisé en deux parties.
Car, après quelques observations prélimi-
dans cet ouvrage, ni dans tout autre des
naires, où je n'^pondais d'avance à la critiiiiie,
miens.
je disais : « I^'inlerprétation de i'EcritiU'e com-
« prend la manière de découvrir
deii.v choses : CHAPITRE II.

1 ce qu'on y doitcomprendre, et la manière


« d'cxprim n- ce qu'on y a compris. Nous parle- LE DOCTEUR CHRÉTIEN DO!T SE SERVIR DE l'.\RT
« rons successivement de la première et de la DE LA RHÉTORIQUE.
« seconde. » La première partie a été assez lon-

guement traitée dans les trois livres précédents.


3. Si l'art de la rhétorique s'emploie pour
Nous allons maintenant, avec l'aide de Dieu,
aborder la seconde; nous renfermerons, s'il est
persuader le faux comme le vrai, comment
prétendre que les défenseurs de la vérité
possible, le peu que nous avons à dire dans un
puissent la désarmée en face de l'ei'-
laisser
seul livre, (|ui sera le quatrième et dernier de
reur; (|u'ils soient dépourvus du talent qu'ont
cet ouvrage.
les professeurs de mensonges, de rendre, dès
le début, l'auditeur bienveillant, attentif de
CHAPITRE PREMIER. docile'/ Verra-t-on les uns exposer leurs er-
reurs avec précision, clarté et vraisemblance,
IL n'est pas ici question de préceptes et les autres enseigner la vérité d'une maiiière
DE RÉTHORIQUE. insipide, obscure, incapable de produire la'

conviction ? Ceux-là ébranler la vérité et sou-


•2. Je préviens d'abord les lecteurs de ne pas tenu- le mensonge par le faux éclat de leurs
attendre ici de moi des préceptes de rhétori- sophismes, et ceux-ci demeurer impuissants à
«4 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

réfuter l'erreur et à défendre la vérité ? Les rait-il, en les lisant, que la substance des idées,
premiers saiiroiit-ils, en faveur du mensonge, il (init par se pénétrer, dans ce travail, de la
émouvoir l'auditeur, l'effrayer, l'affliger, le forme et du style; surtout s'il s'exerce a écrire
réjouir, l'exhorter, l'entraîner avec force, tan- à dicter et à exprimer ses propres pensées selon,
dis que les seconds seroid lents, froids, sans ani- les règles de la piété et de la foi. Mais une intel-
mation et sans vie pour la cause de la vérité ? ligence bornée ne comprend rien aux règles de
Quelle folie de le penser ! Si donc le talent de la riiétorique ; et lors même que, par un tra-
la parole ])eut être mis au service d'une double vail opiniâtre, elle viendrait à en saisir ([uelque
cause, puissant pour persuader le
s'il est si chose, quelle en serait l'utilité? Ceux mêmes
bien ou le mal, pourquoi les hommes vertueux qui les connaisseid et qui s'expriment avec faci-
ne s'efîorceraient-ils pas de l'acquérir, pour le élégance, ne peuvent, tout en parlant,
lité et

consacrer à la défense de la vérité, (juand les penser à ces règles pour les observer, à moins
méchants en al)usent indignement pour les in- ({u'elles ne soient le sujet du discours. Je crois
térêts de l'iniustice et de l'erreur? même qu'il n'en est pas un seul qui puisse en
môme temps parler éloquenunent et penser aux
CHAPITRE III.
préceptes qu'il faut suivre pour y réussir. Car il
est à craindre que la pensée n'échappe à l'esprit
a quel age et de «lelle manière il convient
pendant qu'il s'applique à l'exprimer avec art.
d'apprendre la rhétorique.
Et néanmoins les grands orateurs, dans leurs

4. L'application des règles et des préceptes harangues et leurs discours, ont parfaite-
relatifs à cet art, jointe à une élocution facile, ment observé les règles de l'éloquence, sans y
abondante, habile à se servir des ornements et avoir songé pendant qu'ils se préparaient ou
des ressources du langage, constitue la véri- qu'ils parlaient, soient qu'ils les eussent ap-
table éloquence. C'est à ceux qui peuvent faci-
prises, soient qu'ils les ignorassent en-
lement les apprendre à y consacrer un temps tièiement. Ils les observent, parce qu'ils sont
convenable, dans un âge propre à cette étude ;
éloiiuents, mais ils n'y ont pas recours pour le

le répète, ils ne les trouveront pas devenir.


mais, je
dans cet ouvrage. Les princes mêmes de l'élo- 5. Si donc n'apprend à parler qu'en
l'enfant

quence, h Rome, n'ont pas craint d'affirmer retenant les ceux qui parlent,
expressions de
jjourquoi un homme, sans aucun précepte de
que quiconque ne peut acquérir promptemcnt
l'art, ne pourrait-il devenir éloquent en lisant
la connaissance de la riiétorique, n'y parvien-
dra jamais '. Qu'est- il besoin d'examiner si et en écoutant les discours des maîtres d'élo-
Quand même quence, et en les imitant dans la mesure de
une telle assertion est vraie ? les

intelligences pourraient
enfin y ses facultés ? L'expérience n'eu est-elle pas la
plus faibles
arriver, nous n'attachons pas à ces préceptes preuve la plus péremptoire? Combien n'en

une importance telle qu'on doive y consacrer


connaissons-nous pas qui, sans avoir étudié la
rhétorique, se montrent plus éloquents que
les années de l'tàge mûr, ou celles qui sont
destinées à des occupations plus sérieuses. Cette d'autres qui en ont appris les règles? Au con-

application revient aux jeunes gens; encore traire,nous n'en voyons pas un seul qui soit
n'est-ce pas à tous ceux que nous désirons voir éloquent, sans avoir lu ou entendu les modèles

instruits pour l'avantage de l'Eglise; elle ne con- de rélo(|uence? Aussi lagrannnaire elle-même,
qui est l'art de parler correclement, serait-elle
vient qu'à ceux qui n'ont pas dû se livrer
plus pressants et plus inutile aux enfants, s'il leur était donné de
encore à des intérêts
graves. Un esprit vif et jiénétrant qui lit ou en- grandir et de vivre dans une société dont le

tend les hommes éloquents, le devient plus fa- langage fût pur. Ignorant les vices du langage,
cilement lui-même, qu'en s'altachant aux pré- avec l'heureuse habitude qu'ils auraient con-
tractée, ils sauraient reprendre et éviter toute
ceptes de l'éloquence. Outre le canon des Ecri-
heureusement du plus haut expression défectueuse qui viendrait frapper
tures, qui jouit
degré d'autorité, combien d'autres modèles leurs oreilles, comme nous voyons le citadin ,

cherche- même illettré, corriger le langage d'un homme


l'Eglise ne lui offre-t-elle pas? N'y
de la campagne.
' Cicéron, de l'Orateur,
LIVKI-; giiATKir;Mi:. — \)K i/ouatkir ciiui'niKN. li.-;

an coiilraire v deveiiail la pluparl du temps la


CIIAI'ITIU'. IV. source (les plus grands iiiaiiv, el jaiiiaisdii moin-
dre avanlagc i. Si la force de la vérité a pu ob-
l)i:\l>lllS in IKICI'Kl I! CIlilKTIKM. lenirimlelaveii decenx-mèmes (pii ont coiisacri''
dc> ouvrages eidiers à tracer les refiles de l'élo-
(!. Celui (|iii ciiliciirciKl (rinlnpirtcr cl d'cii-
(picnce el r(d)leiiir dansées ouviM^ics mêmes, loul
sci^liicr It's divines lieiiliires, de déreiidre i;i loi
privcs(pi'ils éiaicul de la vr'rilal)leelcélestcsages-
el de comhallre renviif, doit iiistiiiire à l'aiie
sc ipii descend du l'ère des lumières, |>oui'ri(ins-
le liien e! ;i l'iiir le mal il doil en parlant se con- iious penser aulreiueul, nous sommes
;
i pi i lesen-
cilier les esiuils pi('\enns, raniniei' cen\ doid laiitsel les ministres de celle même sagesse '/Or,
l'atlenlion se relàehe, el ainionrer h rcn\ (pii
rbomnie avccplnsou moins de sagesse, se-
|iarle
rifiiiiM'cMil ('(Mprilsonl à l'aire el ce (pi'ils oui à al- lon les progrès (pi'il a faits dans la comiaissance
lendre. (Juand il anra trouvé on rendu ses aiidi- dessaintes l';crilures.,renten(lscctle (•omiaissance
teiMS hieineillanls, allenlil's el dociles, il déve- (piiconsiste, nonàleslire beaucoup, |ioiir Icscon-
loppera son sujet, selon (|ue l'exigent les ciicon- lier à sa mémoir(\ mais à les bien coniprcndre, el
slanees.Siondoit insliuire, (pi'on le lasse pai' une à en approfondir le sens, Caril v ena(pii les lisciil
sinii)le exposition de la \(''riléou du l'ail, autant sans les étudier. Ils les lisent [)our les retenir, el ils
([ne eela est néeessaire pour en donnei' eonnais- ne songent pas à en avoir l'intelligence, .reslime
saueeà l'andileur. S'a^it-il deleurrendi'e certain bien autrement ceux (|ui en retiennent moins les
ce pour eux est donleux'? il l'aul recourir au
(pii paroles, et (|ui en découvrent les pi'ofondeurs des
raisonnement en s'ai)pnvanl de preuves solides. veux du cœui'. Mais je préfère encore aux uns
Mais s'il est plus à propos d'i''niou voir les audileui's elaux autres, celui qui les cite quand il veut el
(pie de U's instruire, pour leur iiis|>irer le conrai;t' les com[)ren(l comme il faut.
d'accomplirce ((u'ils savent, elde coiil'ornier leur S.donc très nécessaire à roraleiir qui
Il est
coiidiiile à leurs croyances, on doit donner alors doit exprimer avec sagesse ce qu'il ne peut dire
plus de l'orce au discours: prières et menaces, avec éloquence, de graver dans sa mémoire les
evcilalions cl inslaiices, en un mot, tout ce (pii expressions de l'Écriture. Plus il se recoimait
est capable de remuer les cœurs, doil être mis pauvre de son propre fonds, plnsildoits'em-ichir
en o'uvre. en puisant à cette source. La parole divine ser-
CHAPITRE V. vira de[)reuve à sa parole et lui, si petit par ses ;

propres discours, s'élèvera en quelle sorte, en em-


I..V S.VC.KSSK 1>P.KFKR.VBLE .A. l'KLOQUENCE D.^NS pruntant de grands témoignages. On plait par les
L'0R.\TErn CIinÉTlEN. preuves, quand on. ne peut plaire par la beauté
du langage. Quant à l'orateur qui veut unir l'é-
". La plupart des orateurs ne manquent jamais loquence h la sagesse, il est certain (jue, s'il y par-
dans leurs discours d'olisei'ver ceqneje viens do vient, il obtiendra un plus quand succès. Je l'en-
dire. iMais les uns le l'ont d'une manièi'c oliscure, gage fortement à lire, à écouter et à imiter les
froide et sans art : les antres avec vivacité, élé- hommes vraiment éloquents, pluti'it que de con-
fiaiiccet entrainenient. La première qualité né- sacrer son temps à suivre les leçons des maîtres
cessaire à l'orateur Clir(''tien, pour être utile à ses de rhétorique ;
je parle de ces hommes dont les
aïKliteui's, estdonc de savoir raisonner et parler discours se font justement admirer autant pour
avec sagesse, si on ne le peut avec éloquence, bien la sagesse que pour l'éloquence car c'est avec ;

(pie celte utilité soit moindre que si, à la sa;;'esse, plai.sir qu'on entend une parole éloquente, et
on[)on\ait unii l'éloquence. Jlaison doil d'autant c'est avec profit qu'on écoute une parole sage.
plus se délier d'un orateur qui brille par une élo- Aussi l'Écriture ne dit pas : la lunllitude des élo-
(piencc sans sagesse, ([u'il charme davantaj>e ses quents, mais « lamultilnde des sages est le salut
auditeurs dans des clioses vaines et puériles ; car « de l'univers ''. » S'il faut souvent prendre
en trouvant qu'il parle avec éloquence, on croit des choses amères, quand elles sont utiles, on
aisément qu'il parleavec vérité. Cette observation doil toujours éviter la douceur quand elle est
n'a pas écliappé même aux partisans de la rhé- pernicieuse. Mais est-il rien de meilleur que le
torique ; ils ont avoué que si la sagesse sans l'é- mélange de l'utile et de l'agréable ? Plus on dé-
loquence ne pouvait être que d'une faible utilité sire alors ce qui est agréable, plus on profite de
pour la république, l'éloquence sans la sagesse ' Cicéron, liv. i, De V Invention. — 2 g^g, vi/26.

S. AuG. — ToM. IV.


66 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

ce (jui est utile. Or, il y a dans l'Eglise des au- nesl pas ce qu'ils ont de conuuun a\ec les ora-
teiiis qiH ont inlerprélé les divins oracles, non teurs et les poètes païens. Ce que j'admire, ce qui
seulement avec sajicsse, mais aussi avec élo- m'élonne, c'esl que, par une éloquence cpii leur
quence le temps manquera plu lui pour les par-
;
est propre, ils onl usé de l'éloquence profane,
courir, qu'eux mêmes ne poiu"ront faire défaut à demanièreàlui donner place danslems discours,
l'étude la plus persévérante. sans l'y laisser donnner. La négliger, c'élait
la condanmer lui donner hop d'éclat, c'était en
;

CHAPITRE VI. faire parade alternative qu'ils ne pouvaient ad-


;

mettre. Aussi là où un esprit éclairé en découvre


LA S.\CESSE .lOlNTE À. l'ÉLOQLE>CE DANS LES les caractères, telle est la nature de la pensée,
AUTEIRS S.ACRÉS. que les paroles ne paraissent point cheivhées,
mais comme placées d'elles-mênu^s pour la signifi-
On demandera peut-être si nos auteurs sa-
!t.
cation des choses; vous diriez quelorsque la sa-
crés, dont les éciils divinement inspirés noiis gesse sort de sa demeure, qui est le cœur du sage,
offrent un code si autorisé et si salutaire des plus l'éloquence la suit sans être appelée, connue une
pures doctrines, ont été doués non-seulement esclave dojit elle ne se sépare jamais.
de sagesse, mais aussi d'élo(|uence. Pour moi
et pour ceuxqni partagent mes sentiments, cette CHAPITRE VII.
question n'offre aucune difficulté. Partout où je
puis les comprendre, rien ne me paraît plus sage TRAITS d'Éloquence tirés de l'écriture.
et en même temps plus éloquent. J'ose même
avancer que tous ceux qui saisissent fidèlement 11. Quelle clarté saisissante, et en même tenqis

leur pensée, conqiremient aussi qu'ils ne pou- quelle sagesse dans ces paroles de l'.Vpôtre !

vaient parler autrement. De même qu'il y a une « .Nousnous glorifions dans nos trihulalions, aa-
éloquence qui sied mieux à la jeunesse, et une « chant que la tribulation produit la patience, la
autre plus convenable à l'âge mûr et que l'élo- « patience l'épreuv e, et l'épreuve l'espérance. Or,
quence cesse de poi'ter ce nom, dès qu'elle n'est « espérance ne nous trompe point, parce
celle

jilus en rapport avec l'orateur; de même il y a « que l'amour de Dieu a été répandu dans nos
une éloquence propre h ces hommes divins, re- «cœurs parle Saint-Esprit qui nous a été don-
vêtus d'une autoi'ité souveraine. Telle a été la « né '. » Quel savant assez ignorant, pour ainsi

leur. Nulle autre ne leur convenait, et la leur ne m'exprimer, oserait prétendre ([ue l'Apôtre s'est
pouvait convenir à d'autres ; elle leur est essen- attaché à suivre les règles de l'art ? Ne serait-il
tiellement propre ;
plus elle parait simple, plus pas la risée de tous ou non ?
les chrétiens, éclairés

elle s'élève au dessus des orateurs profanes, non et cependant il une fimu-e que
y a làles Grecs aj)-

par l'enflure, mais par la solidité. Là où je ne pellent y.},t'p.a£et nous gradation, pour ne pas dire
puis sonder la profondeur de leurs écrits, j'avoue échelle, figure dans laquelle les expressions ou les

que leur éloquence est pour moi moins sensible ; pensées s'enchaîneidles unes aux autres, comme
et néanmoins je ne doute pas qu'elle ne soit la ci-dessus, où la patience est liée à la tribulation,
même que dans les passages que je comprends. l'épreuve à la patience, et l'espérance à l'épreuve.
11 convenait même
que dans ces salutaires et di- Il y a même
dans ce passage mi autre genr-e de
vins oracles, mêlât à l'éloquence une obs-
il se beauté. A lade ces phrases coupées et dé-
suite
curité qui servit aux progrès de notre intelli- tachées, appelées par les grecs y.&lcc ety.ofjLfxara,
gence, non-seulement parla découverte delà vé- el qui se prononcent séparément, vient ce
rité, mais aussi par un utile exercice. qu'on appelle mie période, dont les membres
40. Je pourrais même, si j'en avais le loisir, s'énoncent d'une manière suspensive, jusqu'à la
montrer dans les livres sacrés de ceux que la Pro- fin du dernier. La première de ces phrases dé-

\idence divine nous a donnés pour nous ins- tachées qui précédent la période, est celle-ci : « La
truire, et nous faire passer de ce siècle corrompu « tribulation produit la patience « ; la seconde :

au bienheureux, toutes les qualités et tous


siècle •< la iiatience l'épreuve » ; et la troisième : « et

les ornements d'éloquence dont se glorifient ces « l'épreuve l'espérance. » Vient ensuite la période

hommes qui préfèrent renfiure de leur langage qui renferme aussi trois membres, dont le pre-
à la majesté de nos auteurs inspirés. Mais ce qui mier est « Or, l'espérance ne
:
nous trompe
me charme le plus dans ces grands hommes, ce ' Rom. V, 5-6.
L1\UK UI'VTKIKMK. ItK I, OUATKI i; CIII'.iniKN. t>"

« point >i
; II' second : « parce (pic l'amour <li' '< dans les périls sur la mer, dans les jH^i'iis enlir
« l*icu a l'ié répandu dans nos co-urs " ; le Iroi- < les faux frères. J'ai soiill'erl toutes sortes de fa-
sième « par rKspril-Sainl (pii nous a clé don-
: 11 ti^;iies et de liavaiiv, les \eilles hvqueules, la

• né ". Ces olisei\ allons l'ont |)artie de l'ensei- ' faim, la soif, les jeunes n''it(''i'(''s, le froid et la

i;neinent niétlioiiicpuMle l'art. Si donc nous disons .( nudité. Outre les maux exlerieiirs, le soin (pie

(pio l'Apôtre n'a jias cheiriié à en ol)ser\er les 'j'ai des Kglises attire sur moi une fonle d'af-
réiiles, nous sommes loin <le soutenir ipi'en lui <i faires (pii m'assiègent Ions les jours. (J'ii est

rélo(|nence n'ait aceompauné la sagesse,


|ias < faible, sans (pie je m'affaiblisse avec lui? Uni
1:2. Dans sa seconde é|)ilre au\ Corinthiens, il « est scandalisé, sans que je bnile ? S'il faut se
reprend (pielqnes l'anv Apôtres d'entre les Juifs !i glorifier de (piel(|iie chose, je me glorifierai de
i|ui parlaient mal de liu. (^lulraint de taire son 'i mes peiiK'set de mes souffrances '. » La moin-
propre éloj;e, il se l'impute connue nue tolie ;
dre attention déeou\re dans ces paroles un tré-
mais (|uelle san'esse elipielle éloipience dans ses sor de sagesse, et la nature la plus endormie \

jiaroles ! L'éUxpience toutefois ne l'ail (pi'accoin- sent coule un torrent d'ekKpience.


pag^ner la sa-^esse (|ui ledirii;e; la sa^^esse mai'- 13. In criti(pie judicieux reconnailra (jue ces
che la première^ sans repousser rélo(picnee cpii |)lnases coupées, ces membres et ces périodes,

la suit. « Je vous le dis encore une fois que per- : dont je parlais plus haut, disposées avec une ad-
« sonne me pr'cnue poiu- un insensé, ou du mirable \ariél(% ont im|)rimé à ce discoiiis ce
H moins, snppt)rle/. ma folie, et permettez-moi cachet particulier, cette forme d'animation et de
« de ni e glorifier aussi un peu. Croyez, vous si vie qui charme et entraîne les plus ignorants. An
« voidez, (pie ce je dis, je ne le dis pas selon Dieu , début de notre citation, c'est une suite de péri-
« mais (lue je fais |)arailre de l'imiinidence tians odes. La première est très courte, car elle n'a
« ce que je prends pour un sujet de me glorifier. que deux membres toute période ne peut en avoir :

« Puiscpie |)lusienrs se ulorilient selon la chair, je moins, mais elle peut en renfermer davantage.
'< puis bien aussi nie glorilier comme eux. Car, Voici donc cette première «Je\oiis le dis encore :

« étant sages comme vous êtes, vous souffrez sans « une fois (pie personne ne me prenne pour un
:

« peine les imprudents. Vous souffrez même « insensé ». Vient la seconde de trois membres :

« (ju'on vous asservisse, qu'on vous dévore, qu'on ou du moins, supportez ma folie, et [lermettez-
«

« prenne votre bien, qu'on vous traite avechau- « moi de me glorifier aussi un peu ». La troisi-

i< tcur, qu'on vous frappe au visage. C'est à ma ème en renferme quatre « A l'égard de ce que :

H confusion que je le dis, car je reconnais (pie « je vous dis, je ne parle pas selon le Seigneur,

« nous avons été faibles en ce point. Mais pour mais je fais paraître de l'imprudence, dans ce
ic

« ce qui est des autres avantages qu'ils osent s'at- « queje prendspour un sujet de me glorifier. » La

« tribuer eux-mêmes, je veux bien faire une iin- (pialrième n'en a ipie deux « Puisque plusieurs :

« prudence, en me rendant en cela aussi hardi « se glorilient selon la chair, je puis bien nieglo-
« qu'eux .Sont-ils Hébreux '?Je le suis aussi. Sont- u comme eux. » La cinquième de même
rifier :

« ils Israélites ? Je le suis aussi. Sont-ils de la « Car étant sages comme vous l'êtes, vous souffrez
« race d'Abraham J'en suis aussi. Sont-ils mi- "?
« sans peine les imprudents. » «Lasixièmeencore

« nistresde Jésus-Christ ?Quand je dcMais passer i<deux Vous souffrez même qu'on vous asser-
:

« poiu" imprudent, j'ose dire que je le suis encore visse. » Suivent trois phrases détachées « Qu'on :

« plus (preux. J'ai plus souffert de travaux, plus « vous dé\ore, qu'on prenne votre bien, qu'on

H ie(;u de coups, plus enduré de prisons; je me « vous traiteavec hauteur.» Puistroisautresmem-

« suis souvent vu tout près delà mort. J'ai reçu des « Qu'on vous frappe au visage c'est à ma
bres : ;

« Juifs, en cin(| fois différentes, quarante coups « confusion que je le dis, car je reconnais que nous

« moins un. J'ai été battu de verges par trois c<avons été faibles en ce point. > Ensuite une
« fois une fois j'ai été lapidé j'ai fait naufrage
; ; période de trois membres « Mais pour ce qui :

« trois fois j'ai passé un jour et une nuit au


;
« est des autres avantages qu'ils osent s'attribuer
« fond de la mer; j'ai été souvent dans les vo- <• eux-mêmes, je \ eux bien faire une imprudence,
« yages, dans les périls sur lesfleuves, dans les « en me rendant en cela aussi hardi qu'eux. »
« périls de la part des voleurs, dans les périls de Ici sesuccèdent trois interrogations avec autant
(I la part de ceux de ma nation, dans les périls de réponses, toutes en phrases coupées « Sonl- :

« de la part des païens, dans les périls au milieu « ils Hébreux ? Je le suis aussi. Sont-ils Israélites?
« des villes , dans les périls au miheu des déserts, I
II Cor. XI, 16-30.
HK DE LA UOCTRINK CHRÉTIENNE.

< Je lesuis aust^i. Sont-ils de la race d'Abraliaiii? 1 i. Il serait trop long d'analyser ainsi le
reste
" Je \c suiSfiussi. )- A uiiequatiièinc et seniljlal)le de ce discours, et de montrei les beautés de
inteirofj;ation, la réponse se lait, non par une même genre renfermées |)artouf ailleurs dans
pin-ase détachée, mais pai- un membre « Sont- : nos livres saints. Que serait-ce si j'avais voulu
« ils ministres de .lésus-Clu'isI ? Quand je devrais faire ressortir, rien (|ue dans ce passage
emprunté
« passer pour imprudent à le dire, je le suis en- à Saint Paul, femploi de ces figures de langage
« core pins qu'eux «.Après, sans plus d'iuterro- qu'enseigne la rhétori(iuc ? N'en amais-je pas
t^ation, se déroulent quatie phrases coupées : trop dit pour les honmies sages, et |)as encore
« J'ai plus souflert de travaux, plus emluré de assez pour ceux qui étudient les règles de lai-tï
« prisons, j)lus reçu de couj)s, j'ai été plus sou- Dans les écoles, on doime une haute importance
« vent exposé a la mort. » Ici vient s'interposer à tous ces j)réceptes; on les achète à grand prix,
une courte période, dont les mend>rcs se distin- et on les vend avec ostentation. Je crains même
j;ueid i)ar une prononciation suspensive, et dont que les détails ilans lesquels je suis entré, ne se
le premier est « Cinq différentes l'ois de la [tari
: ressentent de cette vanité que je condamne. Mais
« «les Juifs, »auquel se rattache le second « j'ai : je devais ré])ondre à ces faux savants (pii regai--
« reçu trente-neuf cou])s de fouet. » Ensuite re- dent nos écrivains sacrés comme mé|)risables,
parai.ssent des phrases détachées, au nombre de sinon pour ne pas faiie preuve, du moins pour
trois: n J'ai été battu de verjïespar trois fois, j'ai ne pas faire parade de cette ébupience pour la
" été lapidé une fois, trois fois j'ai fait naufVa lie ». (pielle ils sont passionnés.

l'uis un membre seul «j'ai passé un jour et une : io. Oncroha peut-être que j'ai choisi l'Apôtre
« nuit au fond de la mer i. Après se déioulenl saiid Paul, commele seul modèled'éloquenceque
avec ^ràce (|uator7.e phrases courtes et concises : nous ayons. S'il a dit (piehpie ]),irt : << Fussé-je
" J'ai ('té sou\ent dans les voulues, dans les ])é- « inliabile pouila parole, je ne le suis pas pour
< rils sur les fleuves, dans les périls de la part >' la science ', » c'est plutôt une concession qu'il
« des \oleurs, dans les périls de la part de ceux a faite à ses détracteurs, que l'aveu d'un défaut
« de ma nation, dans les périls de la part des qu'il aurait reconnu en lui. Cette interpréta-
« païens , dansau milieu des villes,
les périls tion serait la seule admissible, s'il eût dit : « Je
•c dans les périls an niiHcu des déserts, dans les « suis inhabile pour la parole, mais non pour la
« périls sur la mer, dans les périls entre les « science. » 11 n'hésistepas d'avouer (ju'il possè-
« faiLv frères; j'ai souffert toutes sortes detra- de la science, sans laquelle il ne pouvait être le
'i vaux et de fatigues, les veilles fréquentes, la docteur des nations et si nous citons quelques ;

" faim et la soif, les jeûnes réitérés, le froid et la passages de connue modèles d'éloquence,
lui

" nudité. » Ensuite une période de trois mem- nous les tirons de ces épitres que ses détracteui's
lires : « Outre ces maux extérieurs, une foule mêmes, qui méprisaient sa parole quand il était
.
d'atlaiies m'assiègent touslesjours, lesoinque présent, ont reconnues pour être ]ileines deforce
' j'ai de toutes les Eglises. >' A cette |)ériode ratta- est de gravité '-.

chent par interrogation : « Uni est faible sans que Je vais donc parler aussi de l'éloquence des
" j(> m"a(Tail)!isse ? Qni est scandalisé sans que je Prophètes, qui ont fait un si fréquent usage des
" brûle ? » Enfin ce passage magnilique, qui jjcr- fiiiui'es. .Mais plus la vérité y est enveloppée
mel à peine de respirer, se termine par une d'expressions métaphoniiiues, plus on la goûte
période à deux membres « S'il faut se glorifier : avec délices quand elle est dévoilée. Je doism'ai-
'< de quelque chose, je me glorifierai de mes |)ei- lêter ici à des citations où je ne sois pas obligé
II nés et de mes souffrances. » Unelle beauté, (|uel d'interpréter le sens, mais oùje puisse me b(trnei'

cliarme inexprimable dans Fart avec lequel l'au- à l'air eressortir le mérite du style. Je les emprun-
teur a su, après ce grand mouvement d'élo- terai lie préférence, au livre de ce prophète qui
quence, amener cette sinqjle narralion, comme nous apprend ipie son emploi était île garder les

pour se reposer et reposer avec lui l'auditeur! troupeaux, et que Dieu le tira de là pour l'en-
» Dieu, (pii est le Père deNotre-Scigneur Jésus- voyer prophétiser à son peujile ''.
Je ne suivrai
<< Christ béni dans tous les siècles, sait ipieje ne point la version des Septante. Cette version, faite
'i mens point '. « Il raconte ensuite brièvement sous une ins|)iration particulière de l'Esprit-
les périls (|u'il a courus, et la manièredont il \ Saint semble, en certains endroits, avoirr ap-
,

a échappé. porté les choses autrement que l'original, pour


I
II Cor. XI, 31. H Corin.xi, 6. — ^Ibid. x, 10. —' Abios, vu, 14, 15.
LrVRE Ol'ATRrftME. — DE i;ORATErR r.llltrTIEN.

averlii- le Ifclt'iir i\'\ cliPirluM- iiii sons spirituel; « i-oyaumes qui d(' pi ridi ni de ces villes; examinez
c'i'sl (•<'(|iii liiit (|Mc p.ii'lois elle csl plus olisciirc, « si lesterres ((u'ils possèdent sont plus éleridnes
piiiTc ([lit' le sl\l(' <'ii l'sl plus (ij:uiv. .le pifiidi-ai '< (pw lesv('itres. .. Tons ces noms (pii s|ie(ilienl
la version latine lailt' sur l'IicliriMi par le piclic les lieux, Samarie, Chalané, Emalh la
Sii.u,
.h-n'inie, versé dans riiiie cl raiilic ianf;ii('. grande, (lelh des l'Iiilislins, ne sord-iispas aulaMl
II). Vdici (lonecdiiimeiil s'élèxe Aiiios, (l'iiuni- d'éclats de limiièi-e ipii oincul le récit
(Judh; '.'

lile liahilanl (les (•haiiii)s devenu prophète, quand charmante variété encore dans Ions ces mots:
il atta(pie les liounuesinipies, supei'hes, dissolus, " Vousquiétes(laiisrabon(lance,(pii mettez votre
etIoulaidauN pieds lacharilerralernelle : < Mal- » conhancc, passez, allez, descendez ! ..

« licui' à vous (pii vi\e/. en Sion dans l'aiion- IS. Il annonce ensuiteel comme consc'qnence,
« dance de lotîtes choses, et (pii mettez \otre la captivité cpii est sur le point d'arriver sons
U\
" eonlianee en la nionlaf^ne de Samaric, grands règne d'un roi impie « V^oiis (pii êtes r(''servés
:

1 (|ui (Mes les ehels du |)euple, (pii eidre/ a\ee '< pour le join' de l'aflliclion, et prêts d'être as-
" nneponipel'astueusedanslesassendjli'es d'Irai'l! « servis à un roi barbare. » Il décrit alors leurs
« Passez ;\ Chalané et voyez. Allez de là dans (puvresde mollesse et de |)rodigalité en ces ter-
« Einatli la ^ii'ande, et deseendfv.à (lelh, an pays mes: « Vous qui dormez sur des lits d'ivoire, et
« des l'liilislins,et dans les ro\auines (juid('pen- « vous étendez mollement sur votre couche, qui
" (lent de ces villes. Examinez si les terres (pfiis « mangez les agneaux les plus gras et les gé-
" poss("'(lentsonl pliis(Mendues(pie lesvi'ifres, \ous '< nisscs choisies de tout leironpeau. » Cessix

" ([ue Dieu r(''ser\e pour le jour de ral'llictioii, et membres lorment trois péiiodes dont chacune
« ([ui nn roi barbare
êtes prêts d'être asservis à ;
en renferme deux. Il ne dit |)as : « Qui êtes ré-
« qui dormez sur des lilsd'ivoire, et vous éten- « serves pour lejour de l'afllictiou, ((iM êti^s pnMs
" (lez mollement sur votre couelie (jni mangez ; « d'être assei-visà un roi barbare, (piidornuv,
sur
•• les agneanxgras, el les génisses choisies de tont « des lilsd'ivoire, (pii vous étendez mollementsur
< leironpeau ;(piicliantezau\ accords delà harpe. « votre couche, qui mangez les agneaux les plus
" Ces hommes ont cm ({u'ils étaient pom- l'har- 1 gras el les génis.ses choisies de loul le trou-
'< monie les rivaux de David ; et ils boivent le c peau. » Sans doute il y aurait eu une véritable
«vin dansde larges coupes, el ils répandent sur beauté à voir ces six mcndires se tlérouler sous
« eux les pai'l'ums les pUisex(iuis, insensibles à la le même|)ronom autaid de fois répété, et d'en-
< mine de Joseph '. » Si ces docteurs inlatués tendre la voix lie l'orateur les distinguer chacun
de l'éloquence, (jui méprisent nos prophètes séparément; mais la forme la i)his parfaite était
conmie des ignorants, étrangers aux délicatesses de les réunir deux àdeuxsous le même pronom,
du langage, eussent euàtrailer lemcmesujet en exprimant aussi trois pensées, dont la première
présence des mêmes audileiu's, el s'ils eussent regarde l'annonce de la caplivité Vous qui : <(

voulu convenablement, je le demande,


le traiter
« êtes ré.servéspourle jour de l'aflliclion, el prêts
auraient-ils désiré s'exprimer aulremeul?
« il'ctre asservis à un roi barbare ;
» la seconde,
17. Et-il rien de plus pariait à désirer pour la mollesse de ce peuple Qui dormez sur des :«
les oreilles les plus délicates ? Avec quel éclat, « lits d'ivoire, et vous étendez mollement sur
dèsledcbul, l'invective vient frapper les cœurs « votre couche; » la troisième, leur intempérance
endormis, pour les réveiller « Malheur à vous Qui mangez
!

brutale : « les agneaux les pins gras,


« qui vivez en Sion dans l'abondance de touies
" et les génisses choisies detoutle troupeau. > Le
" choses, et qui mettez votre confiance en la
lecteur est libre de prononcer séparément
' montagne de Samarie, grands qui êtes les
chacun des menUjres et d'en faire six, ou de
< une pompe
chefs des peuples, qui entrez avec
prononcer le premier, le troisième et le cinquiè-
« fastueuse (^lans les assemblées d'Israël » En- !

me, d'une manière sus[)ensive, de la(;on à lier


suite, pour montrer l'ingratitude qu'ils profes-
le second membre au premier, le quatrième au
sent à l'égard du Dieu qui leur avait donné im
ti'oisième et le sixième au cincpùème, et à for-
si vaste royaume, en mettant leur confiance dans
mer trois belles périodes, chacime de deux mem-
la montagne de Samarie, où se pratiquait le
bres, dont la première montre le nuUheur qui
culte des idoles « l'assez, dit-il, à Chalaiié el
hommes
:

menace ces ; la seconde, leur volupté


" voyez. Allez de là dans Ematli la grande, des-
et leur nioll(^sse; latroisième, leur intempéran-
'< cendez à Geth au pavsdes Philistins, et dans les
ce et leurs prodigahlés.
'
Amos, VI, 1-6.
.

70 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

i9. II attaque ensuite leur passion désordonnée avoué des orateurs très distingués, on n'a pu dé-
pour les plaisirs de l'oreille. Mais après avoir dit; couvrir et formuler méthodiquement tout ce
« Vous quichantez aux accords de la harpe » sa- ; (ju'enseigne l'art oratoire, qu'en en voyant l'ap-
chant que l'exercice modéré de la musique n'est plication dans les œuvres du génie, qu'y a-t-il
pas incompatible avec la sagesse, tout à coup par d'étoimani qu'on le retrouve dans les écrits des
un tour admirable d'éloquence il suspend , hommes envoyés par Celui-là même qui est la
l'inveclive, cesse de s'adresser h ces hommes, source auteur de tout génie? Reconnaisonsdonc
(|uoi(|u'il parle toujours d'eux, pour nousappren- f|ue nos auteurs et nos docteurs sacrés ont su à
dre à distinguer la musique inspirée par la sa- la sagesse joindre l'éloquence, et cette éloquence
gesse de celle que produit la passion. Ainsi il seule convenait à leur caractère.
ne dit Vous qui chaidez aux accords de
pas :

la harpe, en musique les


et qui vous croyez CHAPITRE VIll.
livaux de David. Mais après ces paroles que
(les hommes dissolus méritaient d'entendre :
l'obscurité des AUTElItS S.iCRÉS N'eST PAS
« Uni chantez aux accords de la harpe » le ,
A IMITER.
prophète étale en quelque sorte aux yeux des
22. Les extraits (jue nous avons cités comme
autres leur ignorance, en ajoutant « Ils se sont :

modèles d'éloquence, offrent un sens clair et fa-


«crus en musi(jue les rivaux de David et ils l)oivent
cile à saisir mais dans d'autres passages le lan-
;
«le vin dans de larges coupes, ils répandent sur
gage de nos écrivains saci'és est voilé el obscur,
« eux les parfums les plus exquis. » La meilleu-
et ce serait une erreur de vouloir les imiter sous
re manière de prononcer cette jiériode, est de
ce rapport. Cette obscurité a un but utile et salu-
faire une suspension aux deux premiers membres,
taire; elle doit ser\ir à exercer et à développer
pour terminer au troisième.
l'espril du lecteur, à le prémunirconire l'ennui et
20. Quant à ces paroles qui terminent: « Et
à exciter son ardeur dans la recherche de la vé-
« ils sont insensibles à la ruine de .loseph, » on
rité; elle sert aussi à é\ ciller les impies soit pour
peut les prononcer comme un seul membre de
ménager leur conversion, soit pour leurdéruber la
phrase, ou y faire une suspension, de sorte
connaissance de nos mystères. De là un don spé-
qu'il y ait une période de deux membres, le
cial, correspondant à celte obscurité, déposé dans
premier « Et ils sont insensibles, »
: le se-
lasuite desiemps au sein de l'Eglise, je veux dire
cond: à la ruine de Joseph. » Avec quelle ad-
'<

le don d'intelligence el d'interprétation de l'E-


mirable délicatesse l'auteur, au lieu de dire Ils :

criture. Ceux qui l'expliquent, ne doivent donc


sont insensibles à l'affliction de leur frère, a mis
pas s'ex[)rimer comme si leur propre parole, re-
pour le mot frère, celui de Joseph, désignant
vêtue d'une égale autorité, devait recevoir à son
ainsi tous les frères sous le nom propre de celui
tour une nouvelle interprélation ; toujours cl
qui dut aux siens la réputation la plus éclatanle,
avant tout ils doivent s'attacher à se faire com-
par les maux qu'il en reçut et par les bienfaits
prendre, par la simplicité et la clarté de leur
dont il les combla. J'ignore assurément si la
langage, en sorte *|iril n'y ait qu'un esprit ex-
rhétorique quej'ai apprise et enseignée, pourrait
cessivement borné qui ne puisse lessaisir, et que
revendiquer une semblable ligure. Mais tout ce
ce qui entrave ou relarde l'intelligence , tienne
qu'elle renfci'me de beauté, la douce impression
plus à la subtilité et à la profondeur du sujet
qu'elle fait sur ceux qui la lisent et la compren-
qu'à la forme de l'expression.
nent, il est imdile de l'expliquer à quiconque
ne la sent pas.
CHAPITRE IX.
21 y a d'ailleurs dans ce passage que nous ve-
11

nons de citer comme exemple, bien d'autres traits '


JlANIÈUE DE TRAITER LES SIMETS DIKPICILES
d'une véritable éloquence. 3Iais on en appiend ET OBSCURS.
moins encore à un auditeur sensible par l'ana-
, ,

Ijse la plus exacte, qu'on ne le ra\it en le lui 2;i 11 y a effeclivemenl îles vérités ipii par
récitant avec âme. De telles paroles ne sont pas elles-mêmes ne sont pas intelligibles, ou qu'on
le fruild'unarl piu-emeut humain ; c'esl l'Esprit parvient à peine à saisir,m;dgré l'exposition la
divin qui les a inspirées, en \ iiiélaid l'éloquonce plus claire el la plus lumineuse. On ne doit ja-
avec la sagesse. Si, comincronl remarqué el mais les Irailer en présence du peuple, ou très-
LlVRf': QUATRIÈME. — DE L'ORATEim CHRETIEN. 71

lariMiiiMil, i|ii;iii(l il y ;i iir^oncc. Il cDiiviciil voulez inslriiiie, rejeté/ tous les mots qui n'iri-
iiiiciix ili' le l'aire dans des ('(iiiriTciiccs |)acticii- struisent pas. Clioisissez de prétéreiice, (piand
iicrcs, oiidaiis tK'sliMcs (|iii ont la |)i(i|ii'i('l(' de \()us le poiiNc/., les expressions piu'cs, faciles à
s'allaclicr le locleur (|ui les cdinpi riid, cl de ne saisir; et si nous ne le pouvez, parce que ces
|)as ('lie à ciiai'^o à <'('liii (|iii roliisc de les lire, expressions manquent, ou (pi'elles ne s'olfreni
laiili- de les ('iil('iidri'...\(' m'^^liniMiiis pas iiii iU^- [)as à voire es()ril, servez vous d'autres moins
\i)ir aussi iiohloiiiio ooliii Ac c()iniiuiMi(|ii('r aii\ correctes, pourvnqu'ellessoient propres <\ trans-
aiilirs, |iar loiilcs les expiicalioiis possibles, Tin- mettre claiivment votre pensée.
lellijieiice des vérités dont nous sommes nous- -2,i. C'est, non seulement dans les conférences
mêmes en |)ossession, (piand nous trouvons un entre deux ou plusieurs personnes, mais surtout
auditeur ou nn interlocuteur animé du désir de dans les discours adressés au peuple, qu'il faut
s'instruire, et capable de saisir enlin ce qu'on lui s'attachera se rendre intelligible. I>ans mieeon-
expose; et ici appli(pions-nons à enseigner; non léicnce, on peut adresser des (lueslions mais ;

l>as a\ecélo(juence, mais avec la plus saisissante dans une assemblée où un seul se fait entendre,
clarté. pendant que de toutes parts les yeux sont iixéssur
lui en silence, il est conti-aire à l'usage et à la bien-
CHAPITRE \.
séance de se faire expliquer ce que ion n'a pas com-
IMPORTANCE DE LA CLARTÉ DANS LE DISCOLRS. pris. C'est pourquoi l'orateur doit avoir grand
égardàce silence obligatoirederauditeur. Ordi-
-2't. L'orateur qui s'altaclic à la clarté clans le naireinenl dans un au<liloire anime du desii- d'être
discours, laissera parfois de côté une expression éclairé, il se produit un ceilain nioiivemenl (pii

plus cboisie et plus bai'nionieuse, pour prendre indi(jne (|u'il a compris jusque là, il faut re-
;

celle (|ui rend pins nettement sa pensée. Ce louiner son sujet sous différentes formes, faculti'
qui a lait (lire à un écrivain, parlant de ce genre que n'a [)as celui (pii prononce un discours
dest\le, (pi'il se distinj-uait par une certaine préparé et appris mol à mol. Une fois certain
luyiiyence 1res soignée '. Mais s'il rejette lesorne- qu'on a été compris, on doittermiuer ou passer
menls, ce n'est |)as pour devenir bas et rampant. à un
autre sujet. Si on plait en mettant la véri-
Telle doit èlre l'application d'im saye docteui' téen Imnière, on devient insipide en s'arrètant
à bien inslruire, qu'il préière à une expres- à une question désormais bien connue, et <iont
sion plus obscure et ambiguë, par cela même l'auditeur n'attendait que la solution. On peut
(lu'elleest plus latine efsavante, une expression plaiie aussi sans doute en parlant de choses con-
familière, (jui sur les lèvres du vulgaire présente nues, quand on s'attache moins à la pensée qu'à
lin sens clair et déterminé. Ainsi l'interprète la forme dont on la revêt. Si la forme, sans être
sacré n'as pascraintdc tiailuire : « yon comjre- nouvelle pour l'audileiu', le charme loujoiirs,
".(jubo convcntk'uUieonnn de Minijuinihuii\]c ne elle rini[)ressionne pres(iu'autanl dans la bou-
« serai point l'auteur de ces assemblées où ils se che d'un lecteur que dans celle d'un orateur.
« réunissent pour répandre les sangs des victi- Car quand un sujet est tiaité avec talent, non-
« mes •»; parce qu'il a jugé, dans l'intérêt de la seulement on le lit une première foisavec plaisir,
pensée, devoirmeltreau pluriel, en cette circons- mais encore on le relit avec satisfaction dans la
tances, le mol sdiuiuis, qui en latin ne s'emploie suite, si on n'en a pas perdu tout souvenir, et
qu'au singulier. El pourquoi un docteur chré- tous l'écouleiit volontiers. Raviver la mémoire
tien, s'adressant à des ignorants, ferail-il diffi- d'unechose oubliée, c'est en instruire de nouveau.
cidlé de dire ossiim pour os, dans la crainte que Mais je ne parle pas ici de la manière tle plaire,
celte syllabe ne soit prise ])Our celle qui , au je parle de la manière d'instruire ceux qui ont
pluriel, fait nra, bouche, et uonossii, os; sur- le désir derètre, elle moycnpar excellence est de
tout quand on parle à des oreilles africaines ne ne présenter que la vérité, et île la rendre intelligi-
sachant distinguer si une syllabe est longue ou ble à l'auditeur. Une fois ce but atteint, inutile de
brève ? A quoi seit la pureté d'un terme, s'il s'arrêter plus longtemps à la démontrer mais, :

n'est compris de celui qui l'entend? Et à quoi s'il est nécessah'c, qu'on en fasse ressortir l'im-

bon parler, si celui à qui on s'adresse pour se portance, pour la graver vivement dans le cœur,
faire comprendre, ne comprend pas? Si vous et cela brièvement, pour prévenir l'emuii.

' Cicer. Orateur. — = Ps. xt, 4.


.

DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE,

des maux dont vous gémissez, s'il prend part h


CHAPITRE XI. la joie (jue vous lui offrez, s'il a i)itié de ceux
dont vous lui dépeignez la misère, s'il fuit ceux
IXSTRIIRE CLAIREMENT ET AGRÉABLEMENT.
dont vous lui faites craindre la société; en un
26. Telle est l'éloquence de renseigneinent, la-
mot si vous employez tout ce (ju'une grande élo-

quence a de plus énergique pour remuer les


(luelle consiste, non à rendre ag:rcal)le ce qui
conn-s, non pour leur apprendre ce qu'ils doi-
déplaît, ni à faire pratiquer ce qu'on néiilige,
vent faire, mais pour les déterminer à accom-
mais à éclaicir ce qui était obscur. Sicependant
plir des devoirs déjà connus.
elle est dépourMie d'agrément, l'elTet ne se produit
28. S'ils étaient dans l'ignorance, faudrait
que sur un petit nombre d'esprits sérieux, qui il

les instruire,avantd'essayerdeles toucher. Peut-


s'attachent courageusement à connaître la vérité;
être la simpleconnaissance des choses suffira pour
malgré la forme grossière et triviale sous la-
quelle on la lem- présente, dès qu'ils l'ont saisie
lesémouvoir, sans qu'il soit nécessaire de recourir
ils s'en nourrissent avec délices car le caractère
aux grands ressorts de l'éloquence. On doit le
:

distinctif des esprits sages est d'aimer dans les


faire cependant, si les circonstances l'exigent,

paroles ce qu'elles ont de vrai, et non les paro-


c'est-à-dire, quand ils savent ce qu'il faut faire,

les elles-mêmes, .\quoi l)onuneclef d'or, sielleue


et ne le font pas. Voilà ce qui prouve la nécessité

peut nous ouvrir ? Et qu'importe une clef de bois,


d'instruire. Car si les hommes restent libres de

si ellenous ouvre, quand nous ne cherchons


pratiquer ou nonce qu'ils savent, comment pré-
tendre (pi'ils doivent faire ce qu'ils ignorent ?
qu'à ouvrir ce qui était fermé ?Mais sous certain
rapport, il en est de ceux qui s'infruisent connue
D'un autre ct'ilé, il n'est pas toujours nécessaire

de ceux ()ui mangent pour prévenir le dégoût, d'émouvoir, parce que l'instruction ou le charme
;

de la parole sufiit quekjuefois pour gagner l'au-


il faut assaisonner les aliments même les plus
diteur. Et si le triomphe est de savoir loucher,
nécessah'es de la vie.
c'est qu'on peut instruire et plaire, sans entraî-
CHAPITRE XII. ner. Mais à quoi aboutissent cesdeux conditions,
sans la dernière ?J'ajouterai qu'il n'est pas tou-
l'oRATEIR DOIT instruire, PLAIRE ET TOUCHER. jours indispensable de plaire, puisque dans la

simpleexpositiondelavéritéqiii se fait eninslrui-


27 . Un célèbre auteur a donc dit avec raison que
sanl, ou ne s'attache pas directement à plaire
l'orateur doit instruire, plaire et toucher. Il ajou-
par forme sous laquelle on la présente c'est
la ;
tait une nécessité, que plaire est
([n'instruire est
la vérité qui, par elle-même et de sa nature, char-
pour l'agrément et que le triomphe est de toucher '

me dès qu'elle est connue. Souvenl le meusou-


Le premier de ces trois devoirs, la nécessité d'ins-
ge mis à nu et bien prouvé jouit du même privi-
truire, se rapporte au sujet en lui même, et les
lège. Il plait, non comme mensonge, mais par-
deux autres à la manière de s'exprimer. L'orateur
ce qui! est vrai qu'il est mensonge, et ou écoule
qui parle pour instruire, doit donc se regarder
volontiers la parole qui le démontre et le
comme n'ayant rienditencore, tant queTauditcur
prouve.
ne l'a pas compris. Dire ce que l'on coraprendsoi-
mèmc, n'est pas encore l'avoiidit pourceluiipii '
CHAPITRE XIII.
n'a point compris; maison rasultisamentdit, dès
qu'on s'est fait comprendre, quelle que soit la ma- IL FAIT l'AUVEMU A TOI CHER I,'\H)ITEIR.
nière donton s'est exprimé. Si d'un autre côté, on
^eut plaireoutoiuher, la forme n'est plus indif- "29. Afin de condescendre à la faiblesse de
férente; on doit choisir celle qui fera atteindre le ces esprits pour qui la vérité reste insipide, si

but. Comme poursoulenir l'attention del'auditeur elle ne leur est présentée sous une forme at-
il faut plaire; il l'aut le toucher poiu' le déleruii- trayanle, on a donné à l'art de jilaire une grande
ner à Vous lui plaisez par un discours agréa-
agir. place dans l'éloquence. Ce|)endant il demeure
ble, et ^ous l'avez touché, s'il aime ce (jue \ous sans effet sur ces cnnus enduieis à (pii il ne sert
lui promettez, s'il craint îc mal dont vous le me- de rien d'avoir compris l'orateur, el d'avoir été
nacez, s'il hait ce (pie \oiis condamnez, si! em- channés pai' la beauté desousfvle. Uueserl à un
brasse ce que vous lui conseillez, s'il s'afllige homme de confesser la vérité, de louer lescharmes
' Rom. tif t'Orntflir, du discours, s'il ne se rend pas? N'est-ce pas
LIVRE OrATRlf.MK. — DE LORATECR CHRP/riEN. r.i

riiMi(|ii(' lin ([lie poiirsiiit rointeur dans Ions les (Ion! le propIiMe
parle « .le \ons loueiai Sei- :

ressorts ([u'il liiil jouer ? U'iniul il eiiseifine une " dans rassend)l(''ed'un peuple grave I, »
gneiu',
eliose (ju'il sullil (le i roire ou de coiiiKiilre, se on regarde conuni' de mauvais goùl celle délica-
rendre, e'psl sifnplenieni en eonresser la \erile. tesse de sl\le (pii pour décrier, non des choses

Mais(|u;ui(l on ens(>ii;ne ee(|uised(iil laire,e( ce- mensongères, maisdes biens faibles et fragiles,
la dans le dessein (|u'on l'aceoinpiisse, c'est en enqdoie des phiases|iom|)euses, sonores, (pnne
\aiu (|u'on piodnit la con\ii'tion, en \ain qu'on conviendraient même pas s'il s'agissait des biens
plail par la lieaule du ian;;af;<', si l'on ne déter- solides et durables.Nous en avons mi e\enq)le
mine l'audileur à a.^ir. L'orateur cinviien (pii dans une des lettres du bieidieureux C\prien.
\ent atteindre ce but, doit ditnc non-sculeinent Une ce passage ait été ainsi écrit, par a(;cideiil
instruire elcaptixerrattention par le charme de ou à dessein, il devrait apprendre à la postérité
sa parole, mais encore loneher poni' s'assuier (pu'l langage la inn-etéde la doctrine chrelieniK^
une élocpience lorte et sublime
la victoire. C/csl à a sid)stitué à celte sm'abondance vaine eU'rivole,
de porterie coup décisif sur un auditeur, (pie et quelle éloquence plus sérieuse et plus modeste
la pleine démonsliatiou de la xérité, revêtue elle a su adopter, comme on le voit dans les let-
même des oi'nements du st\le, n'a pu encore tres postérieures du saint évêtpie, où on l'aime
déterminer à se rendre. sans danger, et où on la cherche avec piété, sans
parvenir que fort diflicilemcnt à l'imiter. Voici
CHAPITRE XIV. donc conuneidils'evprimedans cette lettre « \\- ;

« Ions nous asseoir en ce lieu. La solitude voisine


i.'akt nn plaire xe doit pas m ire a i.a VKurrK
« nous y invite. La vigne y fait com-irses bran-
NI A LA (;RAV1TK.
(c elles errantes à tra\(»rs le treillage qui les sou-
Mi. L'artde plaire a été poussé si loin (pi'oii « lienl, d'où elle tond)e en festons entrelacés,
\oil des lioimneslire ce (|ui n'(>st pas à l'aire, ce « forme eu même temps par l'abri de ses feuil-
et
(ju'il tant au contraire éviter et détester, ce (pu est « lesim berceau de panqires verts '. » Il y a là
sicriminel etsi lionleirv (pi'onn'a i)u rinsi)irer une admirable et prodigieuse fécondité de |)aro-
(|u'à (les cceurs mauvais et corrom|ius; ils le lisent les, mais cette profusion excessive serait dépla-
non pour rapi)rouvei' mais nni(picnient pour cée dans un discours grave et sérieux. Ceux (pu
se laisser aller aux charmes dustUe. Daigne le aiment ce geiu'e de style, i)ensent qu'im genre
Sei;;iieur préserver son Eglise du désordre que plus sévère ne vientquc de l'impuissance de s'ex-
l(> prophète .lérémie reproche à la synagogue: » primer ainsi, et ils ne voient pas (|ue c'est à des-
« L'horreur et l'effroi se sont répandus sur
sein ([u'on l'évite. Mais le sainl (hêque a [)rouvc
« la teric. Les prophètes piophétisaient l'ini- qu'il pouvait l'employer, puisqu'il l'a employé
" (piité; elles prèlres j applaudissaient, et mon (juelipicfois, et qu'il le répudiait, puis(pu^ ja-
" peuple y prenait plaisir. Eh ! que dcvien- mais plus il n'y a eu recoiu's.
drez-vous à l'avenir ? " '
('loquence il'au-
tant plus terrible quelle est plus pure, d'autant CHAPITRE X.V.
plus véhémente qu'elle est |)lus solide ! véritable
cognée qui fend les rochers! Car Dieu ledi'dare AVANT DE PAP.LEli, L'0!;ATErP. Dorr PP.IEU.

|)ar le même organe, nous aimon-


la parole (|u'il

ce par ses prophètes, est semblable à la cognée '^ '6i. L'orateur chrétien traite que des (pii ne
Loin de nous, loin de nous de voir jamais les sujets convcnal)les, c'est-à-dire, conformes à la
les prèlres ap[)laudir aux prédicateurs de l'ini- justice, à la sainteté et à la vertu, doit donc s'ef-

([uilè, et le peuple de Dieu 5 prendre plaisir !


forcer (le parler d'imemanii're claire, attrayante

Loindenous, (lis-je,unesemblahle démence! Que et persuasive. Un'il s^oit bien convaincu qu'il \

dexiendrions-nous à l'avenir? Une iiolielfuigage parviendra, dans la mesure de son talent, plutcîl

soit moins intelligible, moins agn-able et moins par la ferveur de la piière, que par les ressoui'ces
louchant, je le veux, pom-vu qu'il soit confor- de rélo(iuence. Qu'il prie donc pour lui-même
me à la vérité; (juece soit la juslicf, elnon l'ini- i>t [jour ceux à ([ui il va adresser la parole, et
ijuité qu'on écoute a\ec plaisir, .\ussi demandc- qu'il soii ainsi o/v/^'j/r •*, avant d'être prédicateur.
t elle à être préscnléesous une forme agréable. L'heure de parler arrivée, avant de coimnencer
;M. Dans uneassemblée sih'ieusc, comme celle 'Ps. XXXIV, 18. —
Cyr. ùji. ù Dunal.
-'

Oratciii*, en lutin signirie
'

'
Jér. V, 30, yL — -•
Ihid. XLVI. 22. autant celui iiui prie Dien que celui qui parle aux hommes.
74 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

qu'il élève son âme altérée, pour répandre ce « res 1 ? )) Dans


seconde « Propose-loi pour la :

qu'il aura puisé à cette source divine, et faire « modèle, au même disciple, les saintes
dit-il

part à ses auditeurs de son aliondance. Pour « instructions que tu as entendues de moi. Mets-

ceux qui ont étudié la ma.ière, que de choses à « loi en état de paraître devant Dieu comme
dire sur tout sujet qui a trait à la loi et à lâcha- « un minisire digue de son approbation, qui ne

nte, et que de tonnes diverses sous lesquelles '<fait rien dont il ait sujet de rougir, et qui sait

on peut les présenter! Et qui sait ce que, dans « bien dispenser la parole de vérité -. » Et un

la circonstance présente, mieux à


il convient peu plus loin « Annonce la parole, presse les
:

l'orateur d'exposer, ou à l'auditeur d'entendie, « honnnes à temps, à conire temps, reprends, ,

sinon Celui (jui voit le tond de tous les cœursT Qui « supplie, menace sans te lasser jamais de les lo-

peut aussi nous l'aire dire ce qu'il faut, et comme « lérer el de les instruire ^. » Ne dit-il pas à Tite

il le faut, sinon Celui quittent en ses mains noire qu'un évéque doit persévérer dans la doctrine
parole et nous-mêmes
'. Sans doute l'orateur de la foi, « afin qu'il soit capable d'exhorter se-
doit d'abord apprendre tout ce qu'il doit con- « Ion la saine doctrine, et de convaincre ceux
nailre pour l'enseigner, et acquérir le talent de « qui s'yIl ajoute « Pour toi,
opposent ''? » :

la parole, autant qu'il est nécessaire à un mi- « manière qui soit digne
instruis le peuple d'une
nistre de l'Eglise. Mais au moment même de « de la saine doctrine. Enseigne aux vieillards

parler, un esprit bien disposé n'a rien de plus « à être sobres, etc. » « Prêche les vérités, '=>. —
sage à faire que de suivre ce conseil du Seigneur : « exhorte et reprends avec une pleine autorité.

« Ne pensez ni à ce que vous devez dire, ni à la « Que personne ne te méprise. Avertis-les d'être

« manière de l'exprimer. On vous donnera en « soumis aux princes ci aux magistrats «. » Que

« effet dans le moment ce que vous aurez à dire ;


conclure de là.' Dirons-nous que l'Apotre est en
« car ce n'est pas vous qui parlez, mais l'Esprit contradiction avec lui-même quand d'un côté il

" de voire Père (jui parle en vous. 2 » Si l'Es- allirme que c'est rEsi)ril-Saint qui fait les doc-
prit-Saint parle en ceux qui pour Jésus-Christ se leurs, et que de l'autre il leur trace lui-même
livrent aux persécuteurs, pourquoi ne parlerait- ce (ju'ils doivent enseigner el la manière de l'en-
il pas également quand on doime Jésus-Chrisi seigner? Ne faul-ilpas en inférer que jamais l'on
même à de dociles auditeurs ? ne doit cesser, avec la grâce de l'Esprit divin,
d'instruire les docteurs mêmes, el que cependant
CHAPITRE XVI. « ne sont
ni celui qui plante, ni celui qui arrose
« quelque chose, mais Dieu seul qui donne l'ac-
LES RÈGLES DE L'iaOQUENCE NE SOXT PAS IM'TILES,
teci'oissenient '? » C'est pourquoi les plus saints
QL'OIQUE DIEi; LUI-MÊME FASSE LES DOCTEURS.
ministres, les Anges mêmes seraient impuissants

do. Prctendra-t-on qu'il est inutile d'apprendre à nous apprendre à établir en nous la vie divine,
Dieu ne nous rendait ilociles à sa volonté, se-
aux hommes ce qu'ils doivent enseigner et la si

lon celle parole du psalmiste « Enseignez-moi


manière de l'enseigner, puisque c'est l'Esprit- :

« à faire votre volonté, parce (jue vous êtes mon


Saint qui fait les docteurs? Mais nous pourrons
dire aussi qu'il est inutile de prier, parce que le MDieu ^.» C'est pourquoi encore l'ApùIre, parlant
Seigneur a dit : « Voire Père sait ce qui vous à Timothée, connue un maitre à son disciple, lui
dit « Pour loi demeure ferme dans ce que tu
« nécessaire avant que vous demandiez » le lui •';
:

« as appris el ci> qui t'a été coulié, sachant de qui


que saint Paul ne devait nullement tracer à Tife
et à Timothée ce qu'ils avaient à prescrire aux « lu l'as appris ". » Les remèdes corporels(pi'nii
autres et la manière de le faire. Et pourtant qui- homme applique à un aulre homme, n'opèrent
que sur ceux à (]ui Dieu rend la sauté. Dieu
conque a reçu la inissiou d'enseigner dans l'E-
pom'rait guérir sans le secours de ces i-emèdes,
glise, doit avoir conlinucUemenlsous les yeux les

trois lettres <|u'il leur écrivait. Ne dit-il pas dans et sans le concours de sa puissance ils resle-

la première à Tliimoliiéc : «Annonce ces cho- raieul inefficaces; cependant on ne laisse pas (pie

« enseigne
ses, el les
'<'!
» Il pai'le de ce qu'il de les emplo\er: ce (|uiilevienliin(i'uvrede mi-
a\ait dit au[)aravaut . N'ajoute-t-il pas dans celte séricorde ou de bienfaisance, quand la charité

Ne ifpreuds pas les vieillards eu est le principe. Ainsi en esl-i! de l'enseigne-


uu-nie éjjilrc : «

« a\ec rudesse, mais aAcitis-les comme les pc- I


ITim, V, L --Il Tim. 1,1s ir,. — Ibiil. IV, .;.— 'Titc, I,

' Sa;;. vM.lfi.- - M:iU. .V, 1», 20. — Ibid. vi, —


' B. ' 1 Tim. iv, 9._ r-Ihid. iT, 1, 2.— '
lbi<l. iir, 1. I
I Cor. III, 7. — • Ps.cxiil, 1".
"UTim. 111,11.
L[VRE QUATR|f:ME. — DE L'ORATEIH CHRETIEN. 78

iiii'iil lie l;i M'i'itt' : il n'a d'aiili-i' dlicai'ilt' iiiic dioci-e ce (|ui est i>etil. Il en est autrement dans
('('ll<' (jiii lui est i'(iiiiiMiiiiii|iu'(' par Dieu, i|iii les matières Lcli;;ieuses; les discours (pie nous
|)<iii\ail sans U' niinisItM'iMraiiciiii liuiiinii', doii- adressons au peuple, snrUtiil du haut de la chaire
iu'|- son K\aiifrilt' à l'Iioinnii'. sacrée, ont pour objet d'assurer au.v hommes,
non la vie du temps, mais celle de l'éternité, et
CHAPITRE Wll, de les préserver d'une perte sans retniir; là tout
est grand, tout est relevé dans la bouche de l'o-
TROIS GENRES D'ÉLOgiENCE.
rateur chrétien, même (piaiid il parle de l'ac-
(piisition ou de la perte des biens de ce monde,
Si. L'oraloiir cjni s'allaclio à persuader la vé-
quelle ([n'en soit la valeur. Car la justice, pour
rité, et dans ce but, à instruire, à plaire et à tou-
s'ap[)liquer à ces intérêts de peu de valeur,
eliei-; doit donc unii' à la prière tous ses eflbrls
n'eu devient pas moindre, selon cette parole du
poiu" airi\er à parler, ainsi cpie nous l'avons
Seigneur : « Celui ((ui esl lidèle dans les petites
dit, d'nn(> manière claire, attrayante et persua-
« choses, le sera aussi dans les grandes '. » Ce
si\e. Toutes les lois (prit y réussit, il est v('rita-
(pii en toi est petit, est petit mais être tidèle dans
l)lenii>nl ékxpient, lors même que l'auditeur ;

les petites choses, c'est (piehpie chose de grand.


résisterait encore. C'est en vue de ce triple de-
La nature du centre ([ui exige l'égalité de toutes
voir de l'orateur, instruire, plaire et toucher,
les lignes aboutissant à la circonférence, est la
(pie le niaitre de l'élocpienee romaine e\i;;e de
suivantes
mèuu' dans un cercle étroit (|ue dans un cercle
lui les trois (pialilés : « être éloquent,
plus étendu. Ainsi en est-il de la justice : si elle
« c'est siivoir parler de^ petites choses dans lui
s'exerce dans les moindres choses, elle ne perd
« style simple; des choses médiocres, dans un
rien de sa grandeur.
« sl\le tempéré, et des grandes choses avec un
8(). Voici du reste comme s'exprime r.V[)(Jtre,
« style suhlime dans une seule et
'; « comme si

même phrase il eût uni la lin aux moyens, en au sujet des causes profanes; et de quoi y est-il
disard ia véritable éloquence consiste à Iraiter
:
(piestion, sinon d'argent? « Comment se trou-
ci ve-f-il ([uelqu'un parmi vous (jui, ayant un dif-
les petites choses dans un style simple, pour in-
« férend avec son frère, ose l'appeler en juge-
struire; les sujets médiocres dans un style tem-
péi'e, pour plaire; et les grands sujets dans un
« ment devant les infidèles, et non pas devant les
< saints? Ne savez-vous pas que les saints d(iivent
style sublime, pour loucher.
« un jour juger le monde? Or, si le monde doit
CHAPITRE XVHl. « être jugé par vous, êtes- vous indignes de juger
« des moindres choses? Ne savez-vous pas que
l'oRATELK CURKTIEX n'a Ql E DES SVJETS RELEVÉS « nous jugerons les Anges? Combien plus les
\ TU.VITEP.. « choses du siècle? Si donc vous avez des dilfé-
« rends cuire vous touchant les inlércls de cette
3o. Cicéron aurait pu nous montrer ces trois
« vie, prenez plut(")t pourjugesccux ipii lienueut
genres d'éloquence comme il les entendait, dans
<i icderuierrang(lansrEg'lise..leiedis pour vous
les causes profanes, mais non dans les matières
« faire rougù', n'ya-t-il donc parmi vous aucun
religieuses qu'est appelé à traiter l'orateur chré-
« homme sage qui puisse ètreju;ie entre ses frè-
tiens auquel nous nous adressons. Dans les causes
« res?Mais un frère plaide contre sou frère, et cela
profanes, on regarde comme simples les ques-
« devant des infidèles C'est déjà certainement
!

tions relatives aux biens de la fortune, et comme


« une que vous ayez des procès enirevous.
faute
de la plus haute importance celles d'où dépend
« Pourquoi ne supporlez-vous pas plutôt (pi'on
la vie ou la mort d'un homme. Les sujets étran-
« vous fasse tort ? Pourquoi ne souffrez- vous pas
gers aux intérêts de cette nature, et où on ne « plut('>t la fraude? Mais vous-mêmes vous lésez,
une action ni
s'attache à porter l'auditeur ni à à
« vous fraudez et vos propres frères Ne savez- !

une résolution quelcoiuiuc, mais uniquement à


« vous pas que les injustes ne seront point hé-
lui plaire, ont i-eçu le nom de sujets tempérés ou
« rétiers du roy aume de Dien ^ ? » Pourquoi
mé(hocres, comme tenant le milieu entre les
ccile indignation de la part de l'Apùlre? pour-
unset les auties. C'est ce qui leur a faifdoniu^r
quoi ces avertissements, ces reproches, ces répri-
le nom qu'ils portent; car ce n'es! pas ]»ro}!re-
mandes et ces menaces? Pour(iuoi dans sa pa-
ment, mais abu.si>emeiit que nous appelons iné-
role ce ton si varié et si sévère pour exprimer
' Cicér. de l'Orateur. I
Luc, .vvl, 10. — -
1 Cor. VI, 1-9.
76 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

le sentiment qui l'agite? Pourquoi enfin ce style jusques là résiste, qu'il fasse alors jouer les

grandiose pourdeschoses si minimes? Les inté- grands ressorts de l'éloquence, et les plus pro-
rêts de ce siècle valaient-ils donc la peine (ju'il en ])res à toucher les cieurs. Quelquefois, dans un

parlai ainsi ? Non, sans doule; mais il parle pour même sujet relevé, il emploiera le style simple,

la justice, la charité et la piété qui, aux yeux de pour instruire; le style tempéré, pour louer, el
tout esprit sensé, sont toujours de grandes choses, le style sublime pour ramener à la vérité un

même dans les affaires de moindre importance. esprit qui en élail éloigné. Qu'_\ a-l-il, par exem-
Sans doute si nous avions à enseigner aux
37. ple, de plus grand que Dieu? El cependant n'ap-

hommes la manière de soutenir les iidérèts tem- prenons-nous pas à le connaître? Pour ensei-
porels ou ceux de leurs proches devant les juges gner l'iiiiité des trois personnes divines, ne doit-
de l'Eglise, nous devrions leur apprendre à les on pas se servir d'un style simple, afin (pie l'in-
traiter avec simplicité, comme des choses de telligence humaine saisisse, autant qu'elle en est
peu de valeur. Mais nous parlons ici du langage capable, un mystère aussi profond? Ne soni-ce
dun homme appelé à annoncer les grandes vé- pas des preuves, el non des ornemenls qu'il faul

rités qui nous préservent des maux éternels de ici? Il ne s'agit pas de toucher l'auditeur, mais
l'enfer, et nous conduisent à l'éternel bonheur. et de l'éclairer. D'un autre côté,
de l'instruire
Or, quelque part qu'on en parle, soit en pui)lic, pour louer Dieu en lui-mèine ou dans ses ouvra-
soit en particulier, à un seul ou à plusieurs, à ges, quelles peintures brillantes, quels tableaax
des amisonà des ennemis, dansundiscoiu's suivi, magni(i(}ues, s'offrent à l'homme qui consacre
ou dans une conférence, dans im tiaité, dans un toutes ses lacullés à bénir Celui ([ui est au-dessus
livre, ou dans des lettres longues ou courtes, de toute louange, el que lout être loue néan-

t;iurjt(urs ces vérités sont grandes et relevées. moins à sa manière Et enfin si l'orateur voit
!

Parce qu'un verre d'eau froide est de soi la chose que Dieu n'est pas honoré, ou qu'on adore avec
la plus simple et de la moindre valeur, s'en suit- lui, ou à sa place, des idoles, des démons ou

il qu'on doive dédaigner aussi cet oracle du d'autres créatures, alors qu'il s'élève au style
Seigneur, quand il affirme que celui (|ui aura sublime, pour faire ressortir l'énormité d'un tel

donné ce verre d'eau à l'un de ses disciijles, ne désordre, et en détourner les hommes.
perdra pas sa récompense •, <! ipie l'orateur
chrétien, en traitant ce sujet dans l'assemblée
CHAPITRE XX.
des fidèles, devra croire que sa |)arole n'a rien de
EXEMPLES TIUÉS ItE l'ECUITI liE l'IU li CHAQl E
grand pour objet, qu'il lui faudra laisser de
GEMtE DE STYLE.
côté le style tempéré et sublime pour se borner
au sl\le simple? Uuand nous avons eu nous- 39. Pour ne rien citer que de clair, voici un
mcme l'occasion de parler sur celte niatièie, et exemple de style simple tiré de l'Apôtre Paul :

que nous l'avons pu faire assez heur(nisement, « Diles-moi, vous (jui voulez être sous la loi,

grâce à rins|)iralion di\iiie, n'avons nous pas vu, « n'enlendez-voiis pointée cpie dit la loi? Car
pour ainsi dire, jaillir de celle eau froide une (c il esl écrd : Abraham eut deux fils, l'un de la
tlamnie ni\stérieuse "-, ipii allail embraser les « servante, el l'autre de la femme libre. Mais
cipurs les plus glacés, el les porter aux o'uvrcs « celui de la servante nacpiil selon la chair, el
de nns(Micorde, dans l'espoir de la récompense « celui deféimne libre naipiit en vertu de la
la
céleste ? « promesse. Tout ceci esl une allégorie. Car ce
« soiil les deux alliances, l'une sur le niontSina,
CHAPITE XIX.
« engendrant pourla servitude, esl Agar; car
U. I AIT CErENDAXÏ VARUCl! LK STVI.K. « Sina est une montagne d'Arabie qui repré-
u seule ta Jérusalem d'ici-bas, laquelle esl escla-
;i8. (lependaid, bii'u que l'oraleur chrelieii H \e avec ses enlanls; au lieu (pie la Jérusalem
Mail (pie des sujets relevés à traiter, il ne doit " d'en iiaiil esl libie, et c'est elle qui est noire

pas loiijdiiis eiii|)lo\er uiislUe de celle naliiri'. '< mère, etc. ' » Tel esl encore le raisonnemenl
Ou il |)reiiii'' lesh le simple, pour enseigner; le suivant: «Mes frères, je parle à la manière des
sl\ le tempéré, pour lniieroii hlàiner; el (piand « hommes : Lorsque le tcstanieni d'un lioinme
il lui faiil di'lei'iiiiner à agir un aiidileiir (pii « a élé ratifié, nul ne le rejiMlc on nv aj(Uite.

'
Miitl. x,il. — Ml iMaccli. 1, 32.
I
(ial. IV, 21-2(;.
LIVKK OliATKIKMK. - DE L'OKATKHn CIIKfiTIKN. n
H Or, les iiromt'sscs oui t'Ii' Ihilcs à Aliiiili.ini cl 'i(l. \(ii( i in.liMieiiaiil qiiehpu'S p.'iss;»ges de l'A-
1' à ccliii i|iii ii.iiliail di' lui. l.'Kciiliirc ne ilil p(')tre oii uiiiis trouvons le stvie tempéré ; 'i Ne
u |jas : h ('(Mi\ (|iii n:iili'<iiil, ((iiniiir pailaiil (li> H reprends pas les vieillards avec rudesse, mais
» piiisictirs; mais ('(11111111' d'im seul cl à celui : « averlis-les comme tes pères; les jeunes hommes
« (|iii iiaiira de loi, c'csl-à-diic au (lliiisl. Ndici « comme les Iréres; les femmes Agées comme
« donc ce (|iic je (lis : Iticii a\anl lalilic 1111 Ics- " les mères; les jeimes lillescoiiime les S(eurs'. »
« lamcnt, la loi (iiii n'a de douncc (|uc (|iiali'c- VA ailleurs vous conjure, mes frères, par
; •< .le

1 ccnl Irciilc ans apics, n'a pu le iciidic uni, ni " la miséricorde de Dieu, deliii offrir vos corps
1 anc-ardir la piouicsse. Car si c'est par la loi « comme une liosli(> vivante, saiule cl agréable
. (pi'il \ a iH'rilafie, ce n'est doue plus en verlii « à ses yeux. » (le genre de style règne dans pres-
( de la promesse. Or, c'est par la |>roniesse ipie (pie toute cette evliorlatiou, où rAp(')lre s'élève à
« hieii l'a donne à .Vhraliam. » Le lecteur pou- la pins grande lieaiih''; il y revél la pensée de son
vait S(> demander : poiin|uoi la loi ii-t-elle étV' ornement le |)lus naturel et le jiliis agréable :

donni'e, si ce n'es! point par elle qiK^ l'hi'TilafiO '< ,\,\anl tous des dons différents selon la grâce
nous est transmis? .Viissi l'.^pôlre se l'ait à Ini- « (pu nous a été donnée, (pie celui (pii a re(;u
in(''nie celte olijcction : « Pour(pioi donc la loi »'/ « le don (le prophétie, en use selon la règle de
Kl il r(''pon(l : « Klle a oiô (Hahlie à cause des « la foi; (pie celui ([ui est appelé au ministère,
« li'ansuressions, jus([u'à œ (|ue vint le r(^jeton « s'y applique; à enseigner, enseigne;;! exhor-
'< pour le(piel Dieu a lait la promesse, et remise « ter, exhorte ; à(listribueii'aum('iiie,le fasse av(;c
<i par aux mains d'un nKidiateur. Mais
tes anfi(>s « simplicité; à présider, soit attentif; à exercer
" il n'y a pus do nu'Hliatem- pour un seul, et Dieu « les (Kuvres de miséricorde, le fasse avec joie;
" est seul » Ici se |)r(''sentail celte autre olijcclioii H eliarili' sans déguisemeul; avant le mal en
(pie saisil Ap(")lre La loi est-elle doue con-
: « « horreiu' vous attachant an bien; vous aimant
« traire aux promesses de Dieu? Nidiemeiit, ré- '< mutuellement d'un amour Iralernel; vous
" pond-il, " et la raison eu est (pie : « Si la loi « honorant les uuslesanlres avec iné'venauce;
c< (|ui a (''t('' donnée, avait i)u vivifier, la justice « empressés au devoir; fervents d'esprit; sér-
« s'obtiendrait ivellement par la loi. Mais l'E- ie vaut le Seigneur; vous réjouissant par l'es-
> criture a Imit reufeniu'' sous le licViK-, afin « péran(;e; patients dans la tribulation, persé-
i< (|ue la promesse t'ùt accomplie par la foi eu « vérants dans la prière, cliaiilal)lespoiir soula-
Cl J(!'sus-Christ en laveur des croyants, etc.. '. » « ger les nécessités des saints, prompts à exercer
Il ) a encore d'autres passuLies de ce genre. Ainsi H l'hospitalité. Bénissez ceux qui vous persécu-
l'orateur (pii vient instruire, doit s'ap[)li(iuer, « lent; bénissez et 11e maudissez point. Ké'jouis-
non-seulement à (Hlaircir ce qui est obscur et à « sez-vous avec ceux qui se réjouissent, pleurez
rc'soudre lesdif'(icuH(''S, mais à éclaircireu même « avec ceux qui pleurent; vous unissant tous
temps toutes les ipiestions incidentes (pii peu- « dans les mêmes sentiments 2. « Et comme tout
vent surgir, daiu la crainte qu'elles ne dt'lrui- ce passage se termine gracieusement par cette
sent ce qu'il veut établir. Ce])eudaut, il faut alors période à deux membres : « N'aspirez pas à ce
(|u'il eu ait la solution présente à l'esprit, pour « (|ui mais accommodez-vous à ce qu'il
est élevé,

ne pas soulever des dil'lieultés qu'il ne pourrait « y a de plus humble » 11 continue un peu plus !

ivsoudre. Eu traitant ainsi et en résolvant toutes loin « Toujours appliqués à vos devoirs,
:

les questions incidentes et celles qu'elles fout « rendez à tous ce (jui leur est dû à qui le :

naître à leur tour, la suite du raisonnement s'é- «tribut, le tribut; à ([ui l'impiM, l'impi'it; à

tend de plus en plus, eu sorte que l'orateur a « qui la crainte, la crainte ; àquiriioimeur, l'hon-
besoin d'une mémoire très Adèle et très active « neur. » Toutes ces phrases découpées se ter-
pour pouvoir revenir à son point de départ. Et minent aussi par une période de deux mem-
néanmoins il est très important de réfuter toutes bres : « Ne devez rien à personne, sinon de
les objections i\ mesure qu'elles se présentent, de « vous aimer mutuellement. » Il ajoute en-
|)eur qu'on ne les soulève dans une circonstance suite : « La nuit est déjà forta vancée, et le jour
où il n'\ aura personne pour y répon Ire, ou « approche. Renonçons donc aux auivres de
(ju'elles ne s'offrent à l'esprit d'un auditeur qui, « ténèbres, et revêtons-nous des armes de lu-
forcé à garder le silence, s'en ira moins con- H mière. Marchons avec bienséance comme (lu-
vaincu qu'il ne pourrait l'être. it rant le jour; non dans les excès de table
I
Gai m. 15-22. '
I Tim. V, 1, .1. — =Rom. .tu, 1,6-16.
78 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

« el les ivrogneries; non clans les dissolutions 42. Quant au genre sublime, il diffère du
« et les inipiidicités; non dans l'esprit de conten- style tempéré, moins par l'i'clat des ornements,
« tien el d'envie, mais revèlez-vous du Seigneur ((ue par la vivacité des mou\eincnls de l'âme.
« Jésus-Christ et ne cherchez pas à contenter la Il adopte la plupart de ces ornements, mais il ne

« chair dans ses convoitises '. » Si celte der- les recherche pas, et il peid s'en passer. Il mar-

nière phrase : « et caniis providenlium ne fece- che el se soutient de son propre mou\emenl, et
« ritis in concupiscentis, » eut été disposée de cette quand la beauté de l'expression vient s'offrir, il

manière : et carnis providottinm ne in concupis- la saisit plutôt par la grandeur de son sujet, que
elle eût sans doute offert une
centiis feceritis, dans le dessein de plaire. Il lui suflit, poiu' at-
cadence plus agréable; mais l'inlerpiète a cru teindre son but, de trouver des termes convena-
sagement devoir suivre l'ordre des termes dans bles,non pas choisis avec art, mais dictés par
l'original. A ceux (jui connaissent assez le grec l'élandu cœur. Qu'un guerrier courageux ait
d'examiner (pielle est l'harmoiue de la phrase entre les mains une épée enrichie d'or et de
dans le texte dont s'est servi l'Apôtre. Pour moi, pierreiies, tout entier à la lutte, il se sert de son
il me semble que la cadence fait défaut là où l'in- arme, non parce qu'elle est précieuse, mais par-
terprète a reproduit l'arrangejnent des termes. ce qu'elle est une ariue; mais il est toujours
41. Il faut convenir que cet ornement du style, le même redoutable, quand il ne trouve
et aussi
qui consiste dans les chutes haruïonieuses, man- d'autre arme que sa propre valeur. L'Apôtre
que à nos écrivains sacrés. Est-ce le fait du tra- veut que les ministres de l'Evangile souffrent pa-
ducteur, ou, ce que je crois plus volontiers, ces liemment tous les maux de cette vie, avec le
auteurs ont-ils rejeté à dessein ces ornements? soutien et les consolations des dons de Dieu. Le
c'est ceque je ne puis décider, et j'avoue sur ce sujet est grand; il le traite d'une manière subli-
point ignorance. Cependant qu'un homme
mon me et avec une grande richesse d'expressions.
habile à réformer ces cadences, arrange leurs « Voici maintenant, dit-il, le temps favorable,
périodes selon les règles de l'art; que pour cela, « voici maintenant les jours de salut. Ne don-

il remplace seulement quelques expressions par « nani à personne aucun scandale, alin que
d'autres de même signification, ou intervertisse « notre ministère ne soit pas décrié; nous mon-

l'ordre des termes, je suis certain qu'il reconnaî- « trant au contraire comme des ministres de
traque ces écrivans inspirés n'ont maïujué d'au- « Dieu, rendons-nous recommandables en toutes

cun de ces mérites qu'on va chercher près des « choses par une grande patience dans les Iri-

grammairiens et des rhéteurs, et auxquels on « bulations, dans les nécessités, dans les angois-
attache tant d'importance. Leurs écrits, même « ses, sous les cou|)s, dans les prisons, dans les

dans notre langue, mais surtout dans la langue « séductions, dans les travaux, dans les veilles,
originale, lui offriront souvent des beautés qu'on « dans les jeûnes; piu' la pureté, par la science,
ne rencontrera jamais dans les œuvres les plus « par la longanimité, par la bonté, par le Saint-
vantées de la littérature profane. Mais eu voulant « Esprit, par une charité sincère, par la parole
donner plus de cadence à ces vérités sublimes et « de vérité, par la force de Dieu, par les armes
divines, il faut éviter de leur faire perdre de leur « de la justice, à droite et à gauche, dans la gloire
gi'avité. D'ailleurs l'art de la musique qui traite à « et l'ignominie, danslamauvaiseet labonneré-

fond de mesure', a si peu manqué à nos prophè-


la « putiitiou; comme séducteurs, et cependaid
tes, que le savant prêtre Jérôme a rap[)orté plu- " sincères; comme inconnus, et toutefois très-
sieur vers tirés de quelques-uns de leursouvrages ; « connus; comme mourants, et voici que nous
il les a cités dans la langue hébraïque, il n'a pas « vivons; comme châtiés, mais non misa mort;
voulu pour en conserver la mesure
les traduire, « connue tristes, mais toujours dans la joie;
et la beauté''. Pour moi, si je puis exprimer mon « comme pauvres, mais enrichissant beaucoup
sentiment, qui m'est plus connu qu'à tout autre « d'autres; comme n'ayant rien, et possédant
et que celui de tout autre, autant j'aime à em- « tout. » Quel entraînement encore dans ces
ployer, selon mon faible talent, ces cailences me- paroles : « Pour vous, ô Corinthiens, notre bou-
surés dans mes discours; autant je préfère ne les « che s'ouvre et mon cœur s'est dilaté ',» et le

rencontrer que rarement dans les divins oracles. reste qu'il serait trop long de rapporter!
43. Ailleurs il encourage les Romains à sur-
'
Rom. xiTî, G-8; 12-14. — "*
Entendez ici la. Musique comnie la re-

présente sait Augustin dans le traité mémorable qu'il nous u laissé.


Voir ci-dessus, lom. in. — ^ S. Jérôme, Prologue aur le livra de Job. Mi Cor. vi,2-U.
LIVUK Ol'ATUIÏÎMK l»K l/OUATKHK CIlUfiTlKN. 7H

iiuuitor It's iicrst'riilitiiis (le co iiioiidi' |i;ii' la H un .\iige de Dieu, connue le Christ Jésus. Où
chnriU', i-l par iiih" coiiliaiii'e assurée dans le se- " donc est votre honheiu"? Car je vous rends ce
cours (If DiiMi. '< Ndiis savons, dit-il, (|ii(' Imil roii •
" t(''iU(>i'.;ria;ze, (pie s'il eût (''t('' possible, vous vous
« liilmo au bien poiii' ceux ([iii aiiiiciil Hicii, . sei'ii'z pour me les donner. Je
arraclK' les veux

« pour ceux (pi'il a ai)pelés selon son décret ;


« suis donc devenu votre emu-mi, en vous di-

« cai' ceux ipi'il a conniis parsa prescience, il lésa « saut la vérité? Ils ord pour vous un allache-
(I aussi prédestines pdiu' être conlornies,'iriina;ïe '< uu'id(pn n'est pas bon, |)nis(pi'ils veuleid vous
'> de son Kils, alin ipi'il tVil t'aim- entre heaii- « séparer de nous afin (pie vous vous attachiez à
ceux « Il faut au reste s'attacher toujours au bien,
eux.
« coup des frères; et (pi'il a iirédestinés, il

« les a aussi appelés; et cclix (jn'il a appelés, il « non pas seuleineut (piand je suis présent
et

« les a jusiiliés; et ceux qu'il a jnsliliés, il Uw a « parmi vous. Mes ])etits entants, pour (pii je

« aussi iilorillés. Api'ès cela (pie dirons-nousdonc? « sens de nouveau les douleurs de l'enfante-

« Si Dieu et poni' nous, (pii sera contre nous? « ment, jus(prà ce (pie le Christ soit formé en
Kils, mais
éparjiné son propre « vous, je voudrais mainienant être avec vous,
>< Lui qui n'a ])as

« qui l'a liviv pour nous tons, conunent ne nous «pour diversifier mes paroles, car je suis em-
« aurait-il pas donné tontes choses avec lui? Uni « barrasse à votre égard '. » Assurément il n'y a

« accusera les élus de Dieu'? Dieu (pii h^s justille? là ni antithèses, ni t;ra(lations suivies, ni phrases

« Qui lescoiulaninera?.lésns-Christ qui est mort coupées, ni périodes harmonieuses ; et ce[)endant


« pour eux, qui de plus est ressuscité, qui est tout le discours ne perd rien de sa vivacité, nous
« assis à la droite de Dieu, (pii même intercède la sentons à la lecture.

'i poiuMious? Uni donc nous sépai'cra de l'amour


Iribulalion? est-ce
CHAPITUE .\X1.
1 de Jésus-Christ? Est-ce la
« l'ans^oisse? est-ce la |)ersécntion ? est-ce la t'aim?
EXEMPLES TIRÉS DES DOCTELItS UE L'ÉfU.ISK.
« est-ce la nudilé? est-ce le péril ?est-ce le (cri
« selon qu'il est écrit : On nous égorge tous les 4o. Les divers passages empruntés à rAp("itie,
u nous re-
jours à cause de xous. Seigneur, on pour être claiis n'en sont pas moins profonds.
'< garde connue îles hrebis de tuerie. Mais en Tels ([u'ils ont été écrits et tels qu'on peut les
'< tout cela nous triomphons par Celui qui nous confier à sa mémoire,
ne suffit pas de les lire
il

« a aimés. Car je sni-; assuré que ni mort ni vie, ou de les entendre, si l'on ne veut pas s'arrêter
<tni Anges ni principautés, ni choses présentes à une connaissance superficielle il faut un ;

'<ni choses futuies, ni violence, ni ce qu'il y a de habile interprète pour en découvrir la profon-
" plus élevé, ni ce qu'il y a de plus profond, ni deur. Cherchons donc maintenant des modèles
« toute autre créature ne nous pourra séparer de de ces divers genres de style dans ces écrivains
« l'amour de Dieu qui est en Jésus-Christ Notre- (iui,par la lecture des auteurs sacrés, ont acquis
« Seigneur '. » à un haut degré la science des choses divines
4i. Quoique l'épître aux Galates soit écrite tout et salutaires, et l'ont ensuite comi mniquée à
entière dans le style simple, excepté vers la fin l'Eglise.

où il devient orne, cependant, dans un certain Le bienheureux Cyprien emploie le style sim-
passage, rAp('itre se laisse aller à un mouvement ple dans ce livre où il traite du mystère du calice.
où, sans aucun de ces ornements que nous avons 11 y résout la question de savoir si, dans le calice

admirés plus haut, il ne pouvait que s'élever au du Seigneur, il doit y avoir de l'eau pure,
ou de
genre svd)linie « Vous observez, dit-il, certains
: l'eaumêlée de vin. Nous allons en citer un extrait.
« jours, CCI tains mois, certains temps et certai- Après le prélude de sa lettre, comiuen(;ant déjà
nés années. J'appréhende pour vous d'avoir en
'<
à résoudre la question proposée: « Sachez, dit-il,

vain travaillé parmi vous. Soyez comme moi,


'< « que nous sommes avertis d'observer dans l'of-
« parce que moi j'ai été comme vous, je vous en « frande du calice la tradition du Seigneur, et que
« conjure, mes frères. Vous ne m'avez offensé « nous ne devons rien faire (pie ce que le Sei-
« en rien. Vous savez que je vous ai autrefois an- « gneui' a fait le premier pour nous; par consé-
« nonce l'Évangile, dans la faiblesse de la chair. « (pieni il doit y avoir du vin dans le calice qui
Or cette é[)reu\eà laquelle vous avez été mis à
i
« s'otïre en mémoire de lui. Car si Jésus-Christ a
cause de ma chair, vous ne l'avez ni méprisée,
<i
« dit Je suis la véritable vigne 2, le sang de Jésus-
:

« ni repoussée; mais vous m'avez reçu comme « Christ n'est pas certainement de l'eau, mais du
I
Rom. ïiii, 2S-39. '
Gai. IV, 10-20. — =Jean, xv, 5.
80 DE LA DOCTRINE CHRETIENNE.

« vin ; et le sang par lequel il nous a rachetés et vi- « Car il est écrit : Ils buvaient de l'eau de la

« vidés nepeut paraître dans le calice, quand dans « pierre qui les suivait •. Or cette pierre était
« ce calice il n'y a point de \in qni puisse inon- « le Christ *•.
Assurément ceci ne pouvait sera|)-
« sang de Jésus-Christ, ce sang que dési-
trer le « porter à sa divinité, mais à sa chair qui, ])ar

« gnent les oracles el les téuKjignaues de tontes les i< une effusion continuelle de son sang, a inondé
« Ecritures. Aussi voyons-nous dans la Genèse la « les coeurs altérésdes peuples. Il fut donc alors
« prédiction de ce mystère en la personne île Noé, « annoncé mystérieusement que sur la croix le
« et unefigure de la passion dn Seigneur '. Il est « Seigneur Jésus détruirait dans sa chair les
« dit eneffet que Noëbuldu vin, qu'il s'enivra, qu'il « péchés du monde entier, et non-seulement les
« parut nu dans sa tente, qu'il s'endormit le corps « péchés d'actions, mais aussi les mauvais désirs
« découvert, que cette nudité lut aperçue par le « du cirur. Car la cliair du chevreau repré-
K. second de ses (ils, (jue ses deux autres fils le « sente les péchés d'action, et le jus qui en sorlil,
« couvrirent, et le reste qu'il est inutile de ra|)- « les désirs de la ciqiidité, selon celle parole :

« porter 11 nous suffit de citer ce qui prouve


'*. « Mon conçu de très mauvais désirs,
])eu|)le a

« que Noé, montrant en sa personne une figure « et il a dit Qui nous donnera de la chair à
:

« de la vérité, ne but pas de l'eau, mais du vin, < manger '? En étendant sa bagiielte et en tou-
« et qu'il lut en celte circonstance une expression « chant la pierre d'où le feu sortit, l'.Vnge an-
(> sensible de la passion du Sauv em'. Nous voyons « nonçait (|ue la chair du Seigneur remplie lie
« encore ce sacrement du Seigneur figuré dans <( l'Esprit divin devait consumer tous les péchés
« le prêtre Melehisedech, selon le témoignage de « pourquoi le Seigneni' a
de l'hunianité. C'est
i< rKcrilure. Melchisedech, roi de Salem, dit-elle, u dit Je suis venu apporter le feu sur la terre »
:

u offrit du pain et ilu vin; or il était prêtre du grand et le reste, où le saint docteur s'attache princi-

« Dieu, et il bénit Abraham-*. Que Melchisedech palement ;i expliquer et à prouver son sujet.
« ail été la ligure du Christ, l'Esprit-Saint le dé- 47. Voici un exemple de style tempéré; il est île

« claredans ce [)samue où le I*ère dit à son Fils: saint Cypricn dans l'éloge de la virginité « Nous :

« Je vous ai engendré avant l'aurore; vous êtes « adressons maintenant la parole aux vierges, car

« prêtre pour l'éternité selon l'ordre de Melchi- « nous devons eu avoir d'autant plus soin, que

« sédech ^. » Ce passage, ainsi que le reste de « la gloire de leur état est plus éclatante. La

la lettre, est du style simple, comme il est facile « virginité est une tleur qui croit dans le chami)

de s'en convaincre en la lisant '^.


« de l'Eglise, la beauté et lornement de la grâce

iti. un grand
Saint Ambroise avait à traiter •idu Saint-Esprit l'heureux signe de l'hon- ,

sujet; il voulait montrer l'égalité de l'Esprit-Saint « neur et de la vertu, un ouvrage pur et ac-

avec le Père et le Fils. Il emploie cependant le « compli, une image de Dieu proportionnée à la

st\le simple, parce que la matière réclamait, non « du Seigneur, la plus illustre portion
sainteté
l'élégance des expressions, ni les grands mouve- « du troupeau du Christ. Elles sont la joie de
ments qui touchent les cœurs, mais une expo- « l'Eglise, font fieurir partout la merveilleuse fé-

sion claire de la doctrine. Voici donc ce qu'il dit, « condité de leur mère; plus se dévelojipe cette
entre autres choses, dès le commencement de son « virginité glorieuse, plus aussi redouble l'allé-
livre : « Frappé d'éionnement aux paroles de u. gresse de l'Eglise. » Sur la fin de la même
« l'oracle qui lui apprenait que, malgré la dé- lettre, il ajoute : « Comme nous avons porté l'i-

« léction de plusieurs milliers d'hommes. Dieu « mage de l'homme fait de terre, portons l'image
« délivrerait son peuple de ses ennemis par la « de l'homme descendu du ciel '. La virginité
« main d'un seul homme, Gédéon lui offrit en « la porte, cette image; la pureté, la sainteté, la

« sacrifice un chevreau; et, suivant la reconunan- « vérité la portent. Elles la portent, attentives
« dation de l'ange, il en mit la chair sur une a aux préceptes du Seigneur, lidèles à tous les
« pierre avec des pains sanslevain, qu'il arrosa du « devoirs de la religion et de la justice, fermes
« jus de la victime. Sitôt que l'Ange eut touché « dans la foi humbles dans la crainte, cou-
,

" l'offrande de l'extrémité de la baguette qu'il te- u rageuses à tout soulîrir douces à supporter ,

« nait, il jaillit de la pierre un feu qui consuma ce « les injures, promptes à faire miséricorde, ap-
u sacrifice *\ Ce signe semble indiquer que cette « plicpiées à conserver l'union et la paix avec le
« pierre était la ligm'e du corps de Jésus-Christ. « prochain. Vierges sages, voilà vos obligalions.
'
Gen. IX, 21. —
2 Gen. IX, 20-23. Gcn. xiv, — •'
18. — ' Ps. ri.v, 4.
« Sous devez les aimer, vous les devez remplii-,
— ^ Cyp. éplt. Lxiii. —
' Jug. Ti, 11-51.
I
Xomb. XI, 4. — s I Cor. xi, 4. — ' Xomb. xi, 4. — ' 1 Cor. xv, 49
, .

LIVUK OL'ATUlKMIv — hK I/OKATKIH CliHflTIKN. «V

H VOUS (|iii l'U's tout ()Cftiiu''es de Dii'ii l'I ili' « lie la nalmr; et pour elle à peine alliiit-ellc

« Ji''siis-Clirisl, fl i|Mi, par le incrilc ol iv hoii- « jns(prii un moment de son


ses besoins, l'as

« luMir (li> votre clinix, iiiarclu'/. les preiiiuVcs « temps (pii ne fût pour la charité; pas un de ses
« dans la voie du Sci.miiMir àtiiii vous vous iMos « joins (pii (i-hap|);il aujefme; et quand parfois
« coiisiu-roes. Vicruos plus àjii'os, iuslruisc/ 1rs « elle voidail repnndre des forces, elle picnail

« Jcuiu's; el vous jouuos l'ucoro, rendez service u le |)r<'uiier aliment (pii s'offrait plutôt pour

« auvi)lusànves,eteii!Iauinuv. dezèle voscompa- u empêcher la mort, (pie pour se procnrei' du


« {{ues. Aiiinie/, cuct)Mrai;e/-\ousniuhielleiueiit, > plaisir ',el('. » .l'ai cilé ce passage comme mo-

« excitez- vous à reini à acquérir la j;loire [tarla dèle de slvie tempéi'é, |)arce (pi'il n'est pas ques-
« vertu. Persévérez avec énergie , avancez spi- tion de porter à end)rasser la virginité celles qui
« riluelleinenl, parvenez lieiuiMiseiueni ; seu- ne l'ont pas encore fait, mais île reli'a((>r les

« lenienl sou\enez-\ous de nous (piaïul nous vertus (pie doivent piali(pier celles (|ui s'\ sont
« commencerez à porter la couronne de gloire vouées. Il n'appartient (pi'à rélo((uence la plus
« due à \olre \irginilé '. sublime et courageuse
d'iiis|>iier cette grande
48. Saint .Vnilnoise de son côté propose, dans résolution. Saint (Ivpiien [larle simplement de
l" même style, à celles (pii ont embrassé l'état l'élal des vierges, et ne se propose nullement de

de viruiiiilé, un exemple (pi'i'lles doivent imiter, le faire embrasser. Cependant le magnifique lan-

et reproiluii'c dans leur eonduile. « Elle était gage de saint Ambroise est propre aussi h ins-
« vierge, dit-il, non-seulement de corps, mais pirer cette détermination
« encore d'esprit. Elle n'altérait la pureté de ses 4t). ,1e vais néanmoins citer des exemples du
« ilésirs par aucun aitilice ni par aucun détour; style sublinu', tirés des onivres de ces deux
« humble de cœur, sérieuse dans ses discours grands hommes. Tous deux se sont élevés avec
« sage dans ses pensées, avare de ses paroles, force contre ces femmes qui essaient, jiar des cou-
« appliipiée à la lecture, se conliant moins dans leurs étrangères, de rehausser l'éclat de leur
« les richesses périssables (jue dans la prière du teint, ou plutôt de l'aiiéanlir. Voici comme saint
« pauvre, attachée à son ouvrage, l'éseivée dans Cv prien s'en expliijue : « Si un savant peintre,
Il son langage, fidèle à choisir Dieu et non les « par des couleurs capables de le disputer avec
« hommes pour juge et témoin de ses sentiments, « la nature, avait reiirésenté la beauté du visage
« accoutumée à ne blesser personne, à souhaiter « et la taille avantageuse de quebjn'im; si après
« dn bien à tous, à se lever devant les plus âgées, « qu'il a achevé et perfectionné son ouvrage, un
« à n'être point jalouse de ses égales, à fuir « autre, se croyant plus habile, y portait la main
« l'ostentation, à suivre la raison, à aimer laver- « ])oui' réformer celle image déjà peinte el finie,

« tu. Quand a-t-il paru seulement sur son visage « l'outrage fait au premier artiste semblerait

« rien qui [)ùt déplaire à ses parents ?Quand s'esl- « grave et son indignation très-juste. El loi, tn
« elle divisée avec ses proches ? Quand a-l-elle « penses porter impimément l'excès d'une té-
« ilédaigné la misère, raillé la faiblesse, évité « mérité si monstrueuse, et l'injure faite au cé-
« l'indigent ne voyait d'honnnes assem-
? Elle « leste Quand même tu ne serais pas
ouvrier !

« blés que ceux dont sa charité n'avait pas « impudique devant les hommes, ni déshonorée
« à rougir, ou sa pudeur à s'effrayer. Kien « par ces couleurs qui ne sont que les amorces
« de repoussant dans ses regards; rien d'aigre « de la lubricité; aux yeux de Dieu dont tu as
Il dans sesparoles rien de hardi dans ses actions
;
;
« profané el violé tous les dons, tu parais plus
a rien d'indolent dans ses gestes; rien de troj) « coupable iprune adultère. Ce que tu prends
u libre dans sa démarche; rien d'impétueux dans « pour une parure, ce que lu regardes comme mi
« sa voix; de manière que la beauté du dehors « ornement, c'est une insulte au divin ouvrage,

a était une image lldèle de la bonté desoncieur. «c'est un violation de la vérité. Voici l'avcrtissc-
« On doit juger d'une bonne maison par le ves- « ment de l'Apôtre, il s'écrie Purifiez-vous du :

a tibule même, et connaître au premier abord « vieux levain, afin que vous soyez une pâte
« ([u'il n'y a rien d'obsciw, conmie si une lu- « nouvelle comme vous êtes des azymes. Car no-
a mière, placée àl'inlérireur, projetait ses rayons « tre agneau pascal, le Christ, a été immolé. C'est
« au-dehors. Que de ses épargnes
dirai-je encore « pourquoi nous célébrons cette fête, non avec un
« pour se nouri'ir, et de ses excès pour servir le « vieux levain, ni avec un levain de malice et de
« prochain? Elle allait pour lui au-delà des forces « corruption, mais avec les azymes de sincérité
'
s. Cyp, des Viery. 1 s. Amb. des Vlerg. liv. 2.

S. AuG. — ToM. IV. 6


8â DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

« et de vérité '. Ya-l-il sincérité et vérité, quand siastiques qui ont su parler d'une manière digne
« tu cojTomps la nature par des couleursadultèros de lu vérité, c'est-à-dire d'ime manière saisissante,
« et que tu ensevelis la vérité sous le fard du attrayante et animée, on rencontrera une foule
« mensonge? Le Seigneur a dit Vous ne pouvez : d'exemples de ces trois genres de style, et par
< rendre nn seul de vos cheveux blanc ou noir - ;
l'assiduité à les lire, h les entendre et à s'exercer
« et toi tu prétends contredire cet arrêt irrévoca- on parviendra à taire des progrès soi-même.
<i Par de téméraires cH'orts, et par un sacri-
ble.
« lège mépris de la parole de ton Dieu, tu oses CHAPITRE XXII.
« peindre tes cheveux ils deviennent ainsi le fu- ;

< nestc présage de la chevelure ardente que tu OX DOIT V.VRIER LE DISCOURS P.VR LES DIFFÉRENTS
« appelles » Il serait trop long de rapporter
•''. GENRES DE STYLE.
toute la suite de ce discours.
51 . Loin d'être contraire aux règles, le mé-
oO. Voici comment s'exprime saint Amhroise
lange de ces divers genres de style, quand le goût
sur le même sujet : « Voici, dit-il, ce qui entlam-
« me le vice : dans la crainte de déplaire à leurs y préside, ne fait qu'introduire dans le discours
une agréable variété. L'emploi trop prolongé
« maris, elles se fardent le visage, et dans l'alté-
d'un style uniforme soutient moins l'attention
« ration de knu' teint, elles préparent l'altération
de l'auditeur. Mais le discours, si long qu'il
« de leur chasteté. Quelle folie il'employer l'art
soit,marche avec plus de grâce, Si on passe d'un
" à défigurer la même temps
nature, et dans le
genre à un autre outre que chaque style revêt,
;
« qu'on craint pour jugement d'un sa beauté le
dans la bouche d'un homme éloquent, une va-
« mai"i, de témoigner publiquement qu'on s'en
riété propre qui stimule sans cesse l'oreille de
'< défie soi-même! Car celle qui veut changer ce
l'auditeur. Cependant, pour s'en tenir à nn seul
" qu'elle est naturellement, est la première à pro-
genre, le style simple se supporte plus longtemps
« noncer contre elle-même; si elle prend de
tant
que le style sid)lime. Plus il est nécessaire d'é-
« soin de plaire aux autres , c'est qu'aupara-
mouvoir l'auditeur pour l'entraîner, moins on
« vaut elle se déplaît sans doute. Quel juge
doit le retenir dans cette émotion, quand elle est
« moins suspect chercherions-nous de ta laideur
suflisament produite. En voulant le surexciter
a que toi-même ô femme qui crains si fort
,
davantage, il est à craindre qu'on ne détruise
« qu'on ne te voie ? Si tu es belle, pourquoi te
ce que l'éloquence a^ait déjà opéré. En descen-
« cacher? Si tu ne l'es pas, pour([uoi feindre de
dant, par intervalles, au style simple, on remonte
« l'être, puisque tu n'auras le plaisir ni d'ignorer
avec plus d'effet au sublime, en sorte que le dis-
« ce que tu es, ni de te consoler par l'erreur
cours se déroule comme la mer, dont les flots s'é-
« d'autrui. Car ton mari en aime une autre, et
lèvent et s';ibaissent tour à tour. Aussi quand on
« toi lu cherches à plaire à un autre qu'à lui ; tu
doit parler assez longlemps dans le genre sublime,
a t'irrites de ce qu'il est infidèle, et tu lui donnes
il ne faut pas l'employer seul, mais le varier par le
« des leçons d'adultère ! C'est toi-même (jui cn-
mélange des deux autres et le discours prendra ;
« seignes follement à te faire celte injure. La
le nom du genre qui y dominera.
a femme, même corrompue, a horreur de la
« prostitution, et ne fait
si abjecte qu'elle soit, elle
CHAPITRE XXIII.
K pas le crime poarle plaisir d'autrui, mais pour

« le sien. Il semble même (jue dans l'adultère les M.iXIÈRE d'allier LES TROIS GENRES DE STYLE.
« fautes soient en quelquesorleplus supportables.

« Car si dans ce vice on corrompt la pureté, dans 3:2. Il importe de savoir quel genre de style
« celui de se farder on corrompt la nature mê- peut s'allier à un autre, et dans quelle circons-
« me *. » Cette éloquence assurément est propre tance cela est nécessaire. Dans le sublime, le dé-
à pénétrer vivement de pudeur et de crainte, à but doit être toujours, ou presque toujours tem-
empêcher les femmes d'altérer leiu' beauté. Aussi péré. Et même l'orateur peut se servir du style

nous y trouvons, non le style simple ou tempéré, simple où il pourrait employer le st\ le sublime;

mais le style le plus sublime. Dans les œuvres de dans ce rapprochement, la simplicité du premier
ces deux docteurs auxquels j'ai emprunté ces fait ressortir davanta'.;e l'élévation du second,
extraits, et dans celles des autres écrivains ecclé- et comme l'ombre à cùlé delà lumière, lui com-

— — = munique un plus vif éclat. Dans chaque genre


I
I Cor. r. 7, 8. 2 Matt. v, 36. ' S. Cyp. uhisupra. '
S. Am-
broisc, liv. ï, des Vierges. d'éloquence, Use présente des difficultés àrésou-
LIVUK QLlATIili:MK. — l)K l/Olt.VTELIU CIlumiKN. m
di'i' (|ui (liMiiaïKloiil (le lu |ii'ti(''li'iiiii)ii cl de l.i lini,j'iri\ilai l(ni> les c.i'uis et toutes les bouches
clarti"; c'csl le rôli' proiiroau ^tcnrc simple. Il à rendre grâces à Dieu. Déjà huil
ans et |>lus
tloil (loue cnlivi' dans les deux anlics fiiMircs, sesonl éeoidés, sans rpie depuis, par la miséri-
(|naiid d s'\ irnronirc di's (luoslioiis do ccilc corde de Jesus-ChrisI, aucune scène de ce ^em-e
iiahii'c; de iiiènie ((n'il l'aiil reeoiirir au sl\lc se soit lepi-odiiile parnù eux. El combien d'au-
leuipéré, toutes les lois ipril s'ajiil de louer ou tres pelilslails nous apprennent (pie c'est moins
de lilàuier, et non île eondannier ou (l'al)soudt'e par les applaudissements, (pie par les gémisse-
(pielqu'un, ni de l'aire prendre une d(''lerinina- iiienls, les larmes et priiicipaleiiienl le elian-
lion à l'audileur. Ainsi le style suMiuie et le gemenl de vie, (pie s'est léNélée la |)iiissance
stvlo simple admettent chacun les deux autres exercée sur les hommes par une parole à la fois

^eni-es. (Jnanl au sl\le leniiu-ré, il réclame non sublime et sage!


|)as toujours, mais (|ucl(pu l'ois le sl\ic sini|)le, oi. Sans doute le genre simple a ])U soin eut
(juand il survient, comme Je l'ai dit, (|uel()uc opérer un ( iiangemenl dans les esprits ; mais
(|ucslion à résoudre, ou liicn ipiand on vcid Irai- c'était en leur ap|)reiiant (•( (pi'ils igiioraieni,eii
tei' sans art certains détails, poiu' mieux
l'aire leur laisaiil admettre ce (lu'ils avaient regardé
paraître l.i lieaulc et la richesse des ornements comme incroyable, et non en les déterminant à
(lu'oii emploie ailleurs. Il n'exige jamais le st\le raccom[)lissemenl d'un di\oir bien connu qu'ils
suhlime, parce (pie son hul est de plaii'e à l'es- avaient repoussé jus(pi'alors. Au genre sublime
prit, et non de le toucher. seul il appartient de triompher d'une telle résis-
tance. Sans doute aussi le genre tempéré, em-
CHAPITRE XXIV. ployé avec éloquence dans leblàineou la louange,
a pu avoir pour effet sur certains esprits, non-
Effets du sublime.
seulement de leur plaire, mais même de les
o3. Les plus chaleureux et les plus nombreux porter à \ivre d'une manière louable et à l'abri
applaudissements prodigués à l'orateur ne sont de tout reproche. Mais \a-t-il jusqu'à changer
pas assurément une preuve du suhlime de son tous ceux qu'il charme,connue le sublime dé-
discours ; la vive clarté du style simple et les or- termine à agir tous ceux qu'il touche, comme
nements du style tempéré peuvent produire le le genre simple donne la connaissance et la

même enthousiasme. Ordinairement le poids certitude de la vérité à tous ceux (pi'il ins-

tlu sidilime étoid'l'e la voix et t'ait couler les lar- truit .i*

mes. J'entrepris un jour d'abolir, à Césarée en CHAPITRE XXV.


Mauritanie, une sorte de combat (ju'on apjielait
altroupemenf lutte barbare où non-seulement
;
BUT QUE SE PROPOSE LE STYLE TEMPÉRÉ.
les citoyens, mais les parents, les h'ères, les

pères et les enfants, divisés en deux partis, se 55. Ces deux derniers genres de style, eu égard
battaient solennellement à coups de pierres du- extrêmement
à la lin qu'on s'y propose, sont donc
rant plusieurs jours de suite, aune certaine épo- nécessaires à (pii veut parler en même temps
de l'année, et s'entreluaient sans distinction. avec sagesse et avec éloquence. Quant au style
J'employai tout ce que jepustrouver de plus fort tempéré qui a pour but de plaire, on ne doit pas
poiu' leur faire abandonne!' et détester une cou- s'en servir pour lui-même. Lorsqu'un sujet,
tume si cruelle et si invétérée, et pour la détruire d'ailleurs utile et digne, rencontie un auditeur
entièrement . Cependant
ne crus pas avoir je déjà éclairé et favorablement disposé, qui n'a
réussi, quand j'entendis leurs acclamations; besoin d'être ni instruit ni touché, ce genre de
mais lorsque je vis couler leurs larmes. Leuis ap- style, par le charme de l'élocution, peut con-
plaudissements témoignaient qu'ils me compre- courir à déterminer plus promptement son as-
naient et m'écoutaicnt avec plaisir; mais leurs lar- sentiment, ou à le rendre plus énergique et plus
mes me prouvèrent qu'ilsétaient touchés. Dès lois, inébranlable. En effet l'élotpience, de quelque
avant même que la suite l'eût démontré, je re- genre qu'elle soit, atoujours pour objet de parler
gardai comme abolie cette coutume funeste et d'une manière propre à produire la persuasion,
sanglante, ilont ils avaient hérité de leuis ancê- et pour lin, de persuader ce que l'on a spécia-
tres depuis plusieurs siècles, et qui exerçait sur lement en vue dans le discours. Dans chacun
eux l'empu-e le plus tyrannique. Mon discours des trois genres, l'orateur trouve sans doule ce
84 DE LA DOCTRINE CHRETIENNE.

qui ost propre h porsuador ; mais s'il ne persuade Une veut aussi celui qui expose un fait dans le

réelleincnt, il nianqiie la fin de l'éloquence. st\ le le plussimple, sinon (|u'ou croie à sa parole ?

Dans le genre simple il persuade la vérilé de Et (pii voudra l'entendre, s'il ne donne à son
ce qu'il expose; dans le sublime, il persuade de langage un charme qui capti\e l'attention de
s'il ne se fait comprendre, com-
faire ce qu'on savait déjà être un devoir, tout l'auditeurï El

en refusant de raccomjilir; dans le genre teni- ment l'écouter avec plaisir et avec docilité? Qu'un
l)éré, il persuade la
beaulé et les ornements discours simple s'attache à résoudre des (pies-

de son langage. Et (pie nous serl de nous proposer lions très difficiles, cl en donne une démons-
une fin semblable? Laissons-la à l'ambition de tration éclatante et inattendue ;
qu'il tire des
ceux (pii ne cliereheni que la gloire dans le ta- sources les plus oI)scures et les plus inconnues
lent de la parole, el se vanteid eux-mêmes dans les raisons les plus frap[)aules; (pi'il renvei-se Ter-

les panégyriques et autres discours de ce genre, reur d'mi adversaire el prouve la fausseté d'une

où il ne Vagit ni d'instruire, ni de toucher l'au- assertion réputée inatla(juablc; qu'en outreil re-

diteur, mais uni(iuemenl de lui plaire. Pour vête ceilaius charmes naturels et nullement étu-

nous, rapportons cette fin à une fin plus relevée; diés, eldonncà la chute deses périodes une caden-
proposons-nous, dans ce genre de style, le même ce qui n'ait rien d'affecté mais qui semble naître

but que dans sublime, c'est-à dire, de faire


le necessairemenl du sujet même, alors il soulève

aimer aux hommes la vertu et fuir le désordre, de si vifs applauilisfemenls, (pi'à peine s'apeiroit-

s'ils n'en sont pas trop


éloignés, pour qu'il soit on de la du sh le. Cette éloquence, pour
simplicité

nécessaire de l'aire jouer les grands ressorts de paraîtresansornements, et marcher comme nue

l'éloquence; ou s'ils sont déjà dans cette dispo- et désarmée, n'enterrasse pas moins l'adversaire
sition, de les y affermir et d'assurer
leur persé- parsa vigueur etsaforce de ses puissantes étrein-
;

vérance. C'est ainsi que nous saurons employer mensonge qui lui ré-
tes elle renverse et détruit le

le genre orné, non par ostentation,


mais par siste. Et pourquoi e\cite-t-elle de si nombreux et
prudence, non dans l'unique dessein de plaire, si chaleureux applau(Ussements, sinon parce que
mais pour porter plus efficacement l'auditeur l'auditeur prend plaisir à voir ainsi démontrer,

au bien que nous \ oulons lui persuader. défendre el faire Iriompher la vérilé? Dansée gen-
re simple, le docteur et l'oraleur doivent donc s'ap-
CHAPITRE XXVI. pliquer à se faire entendre, non -seulement avec
clarlé, mais encore avec plaisir el avec do-
D.OS CHAQUE GENRE, l'ORATEUU DOIT SE FAIUE
cilité.
ENTENDRE AVEC CLARTÉ, AVEC PLAISIR ET AVEC
D'un autre côté, l'éloquence tempérée, sur
57.
DOCILITÉ.
les lèvresde l'orateur chrétien, ne rejette pas les
56. L'orateur, avons-nous dit, (jui veut à la ornements, et sait s'en revêtir avec dignité; non
sagesse joindre l'éloquence, doit se faire entendre contente de plaire, comme l'ambitionne uni-
d'une manière intelligible, agréable etpersuasive. quement l'orateur profane, elle cherche aussi à
Cependant ou ne doit pas attribuer chacune de gagner rassentimeut de l'auditeur, à lui inspirer
ces trois qualités à l'un des trois genres de style, le désir ou un altacheiuent plus fort pour ce

comme si le langage de l'orateur devait être ex- (prdle loue, l'éloignement et l'horreur pour ce
clusivemenl clair dans le style simple, attrayant qu'elle blâme. Mais si la clarlé lui manque, peut-
dans lest} le lempéré, et persuasif dans le subli- elle se faire écouler avec plaisir? Même dans ce

me. Ces diversesqualités doivent, autant que pos- genre de style (pii consiste principalement à
sible, se trouver réunies dans chacun des Irois idaire, l'orateur doit donc réunir ces trois con-
genres. Ainsi, (piaïul nous parlons simplement, ditions : être cla'r, agréable et persuasif.

nous ne' prétendons pas produire le dégoût et 58. Enfin dans le cas où il s'agit d'émouvoir et

l'ennui nous désirons donc, non-seulement qu'on


; de tou3her un auditeur qui, tout en reconnais-
nous comprenne, mais ([u'on nous écoute avec sant la vérité et la beauté du langage de l'ora-
plaisir. Que clierchons-nous en enseignant les teur, persisl(> néanmoins à n'en rien faire, nul

divins préceptes, sinon qu'on nous entende avec doute qu'il ne faille recourir à l'éloquence su-
docilité, c'est-à-dire, qu'on ajoute foi à ces
pré- blime. Mais comment le loucher, s'il ne com-
ceptes, par la grâce de Celui dont il est dit : « Vos [nend ce (ju'on lui dit ? Comment fixer son atten-
« témoignages sont très-dignes de confiance » ? » tion, si on ne le captive par un certain charme?
'Ps. CSll, 5.
LIVRE QrATRlEMR. — DE I/ORATEIJH CIIURTIEN, sr;

1-0 ;;('iiiv siihliiiu' liii-mônio, appelé par son ea- [)as toi-même ce ([lie lu me (-ommandes.'' Aussi
l'aclèiu' à llécliir les <Mriirs endurcis el à xaineic n'écoulent-ils |)as avec docilib- celui (|ui ne s'é-
leurs n-sislaiiees, ne |)eiit iloni- proiluir<' la per- coule |>as lui-même; el ils eiiveloppeiil dans un
suasion, ([n'a la (-ondilioii de se présenlei' en commun iuê|»ris cita [larolede ItieiKjii'ils enlen-
même temps sons nne lornie claire el al- denf et leprédicaleur ([ni la leur annonce. Aussi
trayanle. saint Paul, écrivant à Tiniotlu'e, a|)iès lui avoir
dit : i< Que |)eisonne ne iné|)rise la jeunesse »
CIHAIMTRK WVII. ,

lui indique le moyen de prévenir ces mépris :

pi)1ssam;k dk i.'ou.vTi'.ru ddm i.\ vif, ukpom) « Hends-toi, dit-il, le modèle des lidèles, dans les
A siîs niscoi US. « entreliens, dans la manière d'agir avec le |>ro-
'< chain, dans la cliarilé, dans la l'oi, dans la
.">!>. Ponr produire la persuasion, la vie de l'ora- « chasteté •. »

leur sei'a toujours d'un i>lus grand poids que les


CllAPITUE XXVIIi.
plus sul)linies disconi's. (letni (jui parle avec sa-
gesse cl a\ec éloiinence cl qui vil mal, peut, je L'oii.VTEL'll DOITI'LISS'aTTVCHEU A LA VKUITK «l'a
l'avoue, en éclairer plusieurs qui onl un vil désir LAFOUMK.
de s'instruire, tout en « demeurant inulilc à lui-
« même '. » C'csl-ce ([ui a l'ait dire à rAjjôlre : (il . Un docteur de ce caractère puise dans une
« Pourvu que Jésus-Christ soit annoncé n'importe conduire exemiilaiie le droit, noii-seiilemenl de
« que ce soit par occasion, ou par le zèle de la prendre le genre simple et tempéré, mais encore
« vérité » .lésus-ChrisI est la vérité, el cependant
''.
de s'(''l(>ver an sublime pour lrioin|)lierde l'aiidi-
la vérité peut n'être pas annoncée avec le zèle de leur. En menant une vie réglée, il s'allache aussi à
la vérité; la vérité et la justice peuvent être piv- s'assurer une réputation irréprochable, cl à faire
cliées avec micienr hypocrite et corrompu. (l'est le bien, autant ((ue |)ossiblo, non-seulement de-

ainsi (ju'annoncenl Jésus-Chrisl, ceux qui chei- vant Dieu, mais encore devant les hommes 2, en
chenl leurs propres inlérêls et non les siens. Mais craignant l'un et en rendant service aux autres.
les vrais lidèles éconlent alors avec soumission, Qu'il préfère aussi dans ses discours plaire plul('it

non la parole de l'honnue, mais la parole du Sei- par la pensée que par la forme; et qu'il se i)er-
gneur «pii adil Faites ccqu'ils enseigncnl, mais
: '< suade qu'il ne parle jamais mieux que quand il
« ne laites pas ce qu'ils l'ont car ils disent et ne t'ont ; exprime pins lidèlement la vi'rilé. Ce n'est i)as
n pas. C'est [jounpioi on peut écouter utilement
1) à l'orateur à être l'esclave de l'expression ; mais
ceux qui ne font rien d'utile pour eux-mêmes. 11 à l'expression à servir l'orateur. C'est la pensée
est vrai qu'ils cherchent leurs intérêts, mais ils de i'Ap(Jtre, quand il dit : « Je n'emploie pas la sa-
n'osent pas enseigner leurs propres maximes « gesse de la parole pour ne [)as anéantir la croix
du haut de la chaire chrétienne étahlie par la « conlirme la même cho-
de Jésus-Christ :î.)> Il

saine doctrine. Aussi, avant de leur intliger le se dans son épitreàTimothée «Ne t'arrête point :

reproche ([ne je viens de rapporter, le Seigneur « à des disputes de [)aroles, qui ne sont propres
avait dit :
< Ils se sont assis surla chaire de « qu'à pervertir ccuxquiles écoutent '*. «Assurc-
« Moïse *. » Cette chaire qui n'était point à eux, menl l'Apôlreétaitloin denousdéfendre de sou-
niaisi'iMo'ise, lesfon;aildonc à annoncer le liien tenir par la parole la vérité attaquée par ses en-
iout en taisant le mal. Leur conduite n'avait nemis; autrement «à ((uoi servirailce qu'il dit lui-
d'autre règle que leurs propres convoitises mais : même, en retraçatit ces qualités d'un évèque :

cette chaire, qui leur était étrangère, ne leur per- « Qu'il soit capable d'exhorter selon la saine doc-
metlail pas d'enseigner leuis propres maximes. «lrine,el de réi'uter ceux qui la combattent •''? >>

60. Ils sont donc vérilablement utiles à plu- S'arrêter à des disputes de paroles, c'est s'ap-
sieurs en disant ce qu'ils ne font pas mais à com- ; pliquer, non à faire triompher la vérité de l'er-
bien d'antres ne le seraient-ils |kis d'ailleurs, s'ils reur, mais à faire [irelérer son langage à celui
taisaient ce qu'il? prêchent? Combien d'hommes d'un autre. (Jr, l'orateur étranger à ces luttes fri-

qui cherchent à justifier leurs dérèglemenls, voles, ([u'il i)arle d'une manière simple, tempérée
|)ar la conduite de ceux ([ui sonl préposés jiour ou sublime, n'a en vue dans ses discours, que de
les instruire, se disantintérieurement, et parfois rendre la vérité claire, agréable el touchante ;

mèiueii qui veut l'eulendre: pourquoi ne fais-tu


'
I Tim. IV, 12. — MI Cor. vin, 31. ICor. 1, 17. '
II Tim. 11
'
Ezécli. xx.\vii, a2. — - l'iulip. I, IS. — ' Matt. xxiii, 2, 3. 14. — iTit. 1,9.
86 DE LA DOCTRINE CHRÉTIENNE.

car la charité elle-même, qui est la fin des com- raître bons en l'annonçant, et qui sont pervertis
mandements et la plénitude de la loi ', n'est parce qu'ils vivent selon leurs convoitises. Et si
plus selon la règle, quand elle n'a pas pour objet l'on veut y prêter une sérieuse attention, ils ne
la vérité, mais lemensonge. Celui qui à la beauté prêchent pas véritablement le bien dont ils par-
du corps joint la difformité de l'âme, est plus à lent. Comment prêcher par la parole, ce qu'ils
plaindre que si à cette difformité il joignait en- désavouent par leurs actions? C'est avec raison
core celle du corps; ainsi en est-il de ceux qui que l'Apôtre les stigmatise en ces termes : « Us
revêtent le mensonge d'une forme éloquente ;
« font profession de connaître Dieu, et ils le nient
ils sont plus dignes de pitié que s'ils l'exposaient « par leurs œuvres '.» Sous un rapport ils disent,
sans agrément et sans art. Uu'est-ce donc que et sous un autre ils ne disent pas; c'est le témoi-
parleravcc éloquence et avec sagesse, sinon em- gnage de la Vérité même « Faites ce qu'ils disent, :

ployer dansle stylesimple des termes clairs; dans « mais ne faites pasce qu'ils font '. » C'est-à-dire,

le style tempéré des expressions brillantes et dans ; ce que vous entendez sur leurs lèvres, faites-le;
lesublime des paroles vives etentrainantes, mais mais ce que vous voyez dans leurs œuvres, ne
toujours pour exprimer la vérité qu'on doit faire le pratiquez pas « car ils disent et ils ne font
;

entendre? L'orateur qui ne peut réunir ces deux « pas.» Ils disentcependant, quoiqu'ils ne fassent

conditions, doit dire avec siigesse ce qu'il ne sait rien. Etailleursnonslisons cette invective « Hypo- :

dire avec éloquence, plutôt que de mettre de l'é- « crites, comment pouvez -vous dire de bonnes

loquence là où il ne peut parler avec sagesse. Et « choses tandis que vous êtes méchants ? ^ Ce qui i,

si même parler avec sagesse est au dessus de ses démontre que quand ils disent le bien, ce n'estpas
forces, qu'il vivede manière, non-seulement à eux qui le disent, puisque leur cœur et leurs ac-
s'assurerpour lui-même la récompense, mais tions désavouent leurs paroles. Il peut donc ar-
encore à servir de modèle aux autres, et à faire river qu'un homme éloquent, mais pervers, com-
de sa conduite une sorte de prédication con- pose un discours en faveur de la vérité, pour être
tinuelle. prononcé par un autre moins éloquent, mais
plus vertueux que lui; le premier alors prend en
CHAPITRE X\I\.
soi, pour le donner, un biencjui n'était pas à lui,

l'NORATElR PEIT SE SERVIR d'cN DISCOIRS COMPOSÉ et le second reçoit d'un autre ce qui lui appai'-

PAR IN AUTRE. tient véritablement. Mais quand les vrais fidèles


se rendent ce mutuel service, les ims et les au-
(i:2. Il y a des hommes qui ont le talent de bien tres ne disent que ce qui est à eux parce que le ;

prononcer un discours, maisqui n'ont pas celui Dieu àqui appartient ce qu'ils disent, estaussi leur
dclecomposer.S'ilsempruntent quelque discours Dieu; et parce qu'ils s'appropi'ient des discoui's
écrit avec éloquence et avec sagesse, et si après qu'ils n'ont pas composés, en composant leur vie
l'avoir appris de mémoire, ils le prononcent de- sur la doctrine qu'elles renferment.
vant le peuple, rien dans cette conduite qui soit
reprébensible. Il y a même en cela un grand a- CHAPITRE XXX.
vantage; le nombre des prédicateurs delà vérité
augmeide, sans que s'étende celui des maîtres, l'orateir doit prier avant de parler.
])ourvu que lousils annoncent la doctrinedu seul
Maître véritable, et tpi'il n'y ait entre eux aucune ()3. Mais soit avant de parler au peiqile ou en
division 2. Ce n'est point à eux que s'adresse le présence de (]uel(pies persoimes,soit avant de dic-
reproche que Dieu, par la bouche du prophète ter ce quitloit être prononcé en public ou
lu par

Jérénhe, fait à ceux qui se ravissent les uns aux ceux qui en auront le désir et le pouvoir, l'ora-
autres sa parole Dérober, c'est prendre le bien
•'. teur doit conjurer le Seigneur de mettre sur ses
d'autriii. Or, la parole de Dieu n'est pas un bien lèvres desparolesde -.ie. Si la reine Esther, avant

étranger à ceux qui s'y soumelleul; celui-là au de s'adresser au roi jiour lui deniander le sahd
coidraire est un ravisseur de la parole de Dieu, temporel de sa nation, pria Dieu de lui inspirer

(]ui parle bien et qui vit mal. Tout ce qu'il dit de des paroles convenables*, combien plus l'orateiu'
bien, scndjleêlrel'expi'ession de sa pens('e, niais cluêlicu doit-il solliciter par la prière un tel don,
se trouve contredit par ses mo'urs. Dieu ai>pelie lui dont les discmirs cl les enscignemcids (ud
donc ravisseurs de sa parole ceux qui veulent pa- \HH\y objet le salut ('leruel des honnnes? Ouard
I
I Tira. 1,5, R"m. xiii, Kl. — -
1 Cor. i, 10. — '
Jérém. xxrii, 30. I
Tit. 1, 1«. — 2MaU. XXIII, 3. — ' Malt, xii, il. — ' Esth. xiv, 13.
LIVRE QUATRIEME. — DE L'ORATEl'R CHRETIEN. &7

à ceux (lui ont à prononcer un discours d'oni- et plus ipi)' je n'avais pensé. Mais il n'est pas trop
|iiiiiit. ils il()i\cul, avant de le recevoir, |)iier Inii^ pour celui (pii aura du plaisir à le lire on
|)i)ur icu\ (jui le composent, et denianiier à Dieu à l'entendre. Si ou le trouve trop étendu, qu'on
do leur inspirer ce qu'ils désirent eux-mêmes ;
le lise à plusieurs re|)rises, |)onr en avoir nue vé-
et .iprès l'avoir reçu, prier encore pour (ju'ils le rilal)le connaissance. Siotine tii'iit pasà le con-

prououcenl divinement, et (pieceuv cpii l'enteu- iiaitre, on n'a plus le droit de .se plaindre de sa
drout en profilent. Qu'ensuite ils rendent grâces longueur. Cepcndantje rendsgr.\ces à Dieu d'avoir
lie riieul'eiix succès (1(^ ieurparoieà (^eluiipi'ilssa- pu sous cesquatre Livii's, non pas me représenter
xent en èli'c le \érital)le auteur; et qu'ainsi, (pii- t<'l que je suis, moi à (pii tant de clio.ses tout dé-

conque se glorilic, se glorifie en Dieu, ((iii tient laid, mais traiter, selon mes faibles moyens, des

eu ses mains et nous et nos discours '. (pialit('s (pie doit |)ossédcr ce lui ipii, par l'élude
de la saine doctiine, c'est-à-dire, de la doctri-
CHAPITRE XXXI. ne chrétienne s'appliipie à travailler, non-seule-
ment pour lui, mais aussi poui" l'utilitédesautres.
Air.rSTIN s'EXCLSESIR LA LONGIEIK I)K CE LIVKE.

H4. Ce livre s'est étendu plus que je ne voulais


' Sag. VII, 16.

Les quatre livres de lu Doctriue clirétieiiue ont été traduits par M. l'abbé Hlssenot.
COMMENTAIRES SUR L'ANCIEN TESTAMENT

DE LÀ GENESE CONTRE LES MANICHEENS.

LIVRE PREMIER.

Réfutation des calomnies des Manieliécns contre le commencement de la Genèse, rlcpuis ce vecset du chapitre premier " Dans ;

« le principe Dieu créa leciel et la terre, > jusi|u'au verset deuxième du chapitre second, où il est dit que Dieu se reposa le septième
jour.

CHAPITRE PREMIER. si j'avais à cu'ur de bannir des esprits nièine


grossiers de si funestes erreurs. Un tel langage
POUR DÉFENDRE L'A>CiENNE LOI CONTRE LES MAM- pour être simple et commun ne laisse pas d'être
(;HÉEN.S, le saint docteur écrira d'un STYLE compris des savants, taiulis que l'autre dépasse
QUI SOIT A LA PORTÉE DES MOINS HABILES. l'inlelligence des ignorants.
"2. C'est l'usage des Manicliéens de censurer les
1. Si les Manidiéens Jaisaient choix ilo ceux Ecritures de l'ancien Tcslameiit tpi'ils n'entendent
qu'ilsveulent séduire, iious-inènies, pourleur ré- pas, de tourner ainsi en dérision et de tromper
pondre, iiouschoisirionsnos i)aroles: inaiscomino les faibles et les petits d'entre les nôtres qui ne
ils poursuivent également de leur erreur et les trouvent pas coinmeni leur répondre. Il n'est point
hoinmeslettréset ceux (|ui ne le sont pas, et qu'ils d'I'À-riture en
ne puissent facilement
effet (jue
s'efforcent d'éloigner de la vérité en promettant critiquer ceux qui n'en ont pas l'intelligence.
delà faire connaître, il faut confondre leur four- Si la divine Providence permet qu'il y ait beau-
berie non un discours élégant et orné, mais
])ar coup d'Iiéréliques différeiils dans leurs erreurs,
par des preuves claires et que tout le momie sai- c'est afin que quanti ils s'élèvent contre nous avec

sisse. Aussi bienj'ai goiité le sentiment de quel- insulte et nous demandent ce que nous ignorons,
ques hommes vérilal)lemenl Chrétiens (>t foi't il nous vienne au moins dans celte circonslance

versés dans la connaissance des helles-lellres. Us la volonté de secouer noire paresse el le désir
ontremarqué, après les avoir lus, que mes livres d'apjH'cndre les divines lellres. C'est potn-quoi
précédemment écrits contre les Mtiiiicliéens l'Apritre lui-même nous dil : " Il fauhpi'ii \ ail des
n'ctaieni pas ou étaient diKicllementcompris par « hérésies, aliu ipie ceux qui soûl éprouNés soient
les ignorants, ils m'oni averti avec une extrême « connus |iarnii nous i
. » Ceux-là en eflel sont
bienveillance de me servirdii langage ordinaire, '
I ("urintli. .\l, 11).
LIVRE PUKMIEIl. - DK LA CKRATION. 89

ôpi'nii\(''s (IcNaiil Dieu (|iii soiil cap.iLIcs de liicit \ a en mi ccrlain lemps oh Dieu n'a\ail encoi-e
ciisci^iici', mais ils iio sont coiuiiis lics lidiimics ri<'n lail. (lommeid en effet |)ouvait-il y avoir un
(lii'aiitant ((u'ilsiMisiM^iuMil; or ils no viMilciil cii- lenq)s ipie hicn n'avail point lail, ijuisipiil es! Ini-

soi^tiuT «nie ceux qui cIioicIkmiI à s'instiiiirc. mêmeranlenrdetous les temps.' D'aillems si le
Mallu'iir('iisc'in('iil il en est l>('aiic(>ii|) (|iic la |ia- hwnps ac nencé a\ec le ciel et la lerre, on ne
icsso (iclouriic d'un k'I soin. Il lanl les lr;ii'asst'- peut trouver de leuq)son Dieu n'aurait pas encore
lies et les insultes des hérétiques pour les faire crée le ciel et la terre. Or quand on dit pour- :

siiilirde cofle espèce de sommeil, roufiir de leur ipioi la voloidé lui est-elle venue tont-à-conp?
iniioranee et voir le péril où elle les met. S'ils on le dil connue si déjà s'étaient écoulés des

ont une ne se laissent point ébranler


loi saine, ils temps où Dieu n'eût rien fait. Mais il ne pouvait
par les discours desli(''réli(|ues, mais ils cherchent s'écouler un tiMups ([ne Dieu n'avail pas encore
a\ccsoiu ce ((u'ilsdoivcnt leur répondre. Ll llieu l'ail, carcelui-là seul peut être l'anleiu' du lemps
de son ccMé ne les abandonne pas, de sorte qu'en qui existe avant temps. Sans aucun doute les
les
deu\aiidaul ils reçoivent, en cherchant ils Irmi- ManichéenslisentrApê)tre saint Paul, ils le citeid
\eul cl en happant ils se l'ont ou\rir '. Pour ceux el l'ont en giande estime. Un'ils nous disent donc
(pii désespèrent de pouvoir trouver ce qu'ils cher- ce que signifient ces paroles du même Apêjtre :

clieut , dans les enseignements de la doctrine « La connaissance de la vérité, qui est selon la
callioli(iue, ils sont d'abord écrasés par l'erreur; •< piété envers Dieu et qiù donne l'espérance de
mais, s'ils cherclienl avec persévéïance, ils re- « la vie éternelle, que Dieu incapable de mentir
viennent ensuite après bien des travaux, excédés « a promise avant tous les siècles '. » Qu'ils s'o-
de fatigue, dévorés par la soif et presque morts, bligent à exposer ce passage et ils comprendront
aux soiuces qu'ils ont quittées. qu'ils ne cromprennent pas, ipiand ils veulent re-
prendre téniérairemenl ce qu'ils auraient dû étu-
CHAPITIIE IL dier avec soin.
i.3Iaisaulieudedire: Pomcpioia-l-iipluàDieu
glE FAISAIT DHil. AVAM LA CliKATlON 1)1 .MO.NDK,
toul-à-coni) de faire ie ciel et la lerre ? il en est peut-
ET D'or LLl EST VENUE SOUDAINEMENT LA VOLON-
être qui ôlentle mot « tuut-à-cuup » et disent seu-
TE DE LE C.ÉER ?
lemeid Pourquoi a-t-il plu à Dieu de faire le ciel
:

3. Voici de quelle manière Manichéens ont


les et la terre Car nous ne disons pas que ce monde
?

coulinne de censurer le premier livre de l'ancien est aussi ancien que Dieu n'ayant pas la même

Testament, intitulé : la f.enèse. A propos île ces éteridté que lui. En effet Dieu a fait le monde,
mots : « Dans le principe Dieu créa le ciel et la et si les temps ont commencé avec cette création
« len-e ">-, « ils demandent de quel principe il qui est l'œuvre de Dieu, c'est pour cela qu'ils sont
s'agit. Si c'est dans quelque pi'incipe de tenqts appelés temps élernels. Ils ne sont point cepen-
que Dieu a fait le ciel et la terre, disent-ils, de dant élcrnels conmie Dieu l'est, puisque Dieu est

quoi s'occupait-il avant qu'il fit le ciel et la avant eux, lui qui en est l'auteur. Ainsi tontes les
terre, et [)our(inoi lui a-t-il plu tout-à-cou|) de clioses que Dieu a faites sont Irès-bounes, sans
l'aire ce qu'il n'avait jamais
dans les siècles lait éti'c bonnes que lui, car i! est Créateur et
aussi
éternels? A cela nous répondons que par le prin- elles sont créatures. Il ne les a pas non plus en-
cipe dans lequel Dieu a l'ait le ciel et la lerre, gendrées de lui-même pour leiu' donner son
il faut eideutli-e non le principe du temps, mais être, mais il les a tirées du néaul pour iprellcs ne

le Christ, puisque en Dieu le Père était le Verbe fussent égales ni à Celui par qui elles ont él é faites,
I)ar qui et en (]ui loida été fait •'. En effet lors(pu> ni à son Fils par le moyen de qui elles ont été
k's,liiifs lui demandèrent qui il était, Notre-Sci- faites : ce qui est de toute raison. Si donc ces hé-
gneur Jésus-Christ répondit : « Je suis le prin- rêliques viemientnous dire: Pounpioi a-t-il plu
« cipe, moi-même ipù vous parle ''. >- Et quand à Dieu de créer le Ciel et la terre':' il faut leur ré-
nous croirions que Dieu a fait le Ciel et la lerre pondre qu'avant de chercher à connailie ce^jui
dans le principe du temps; ne devrions-nous pas regarde la volonté de Dieu, ils doiveul d'abord
couqu-eiidre qu'avant le principe du temps, iln'\ s'instruire des propriétés de la volonté humaine.
avait i)oiut de lemps
Car Dieu a fait les lenq)s ? Us \eulent savoir les causes de la volonté de Dieu,
eux-mêmes; ainsi avant que Dieu les eùl faits ipumdla volonté de Dieu est elle-même la cause
il n'y en a\ail pas, el nous ne pouvons dire ipi'il de tout ce iiiû existe Si la volonté de Dieu a une
!

' Malt. VII, 7. — : Gen. I, 1. — '


Jean, r, 1, 3. — ' Ibid. vlll, 2-3, , Titc, I, 42.
90 DE LA GENÈSE CONTRE LES MANICHÉENS.

cause, il y a donc quelque chose qui précède la fi. Viennent ensuite ces paroles : « El les té-
volonté de Dieu, ce qu'il est impossible de croire ;
« nèbres étaient sur l'abîme. » Ce que les Mani-
et à qui demande Pourquoi Dieu a : fait le ciel et chéens reprennent en disant Dieu était donc :

terre, répondre parce qu'il l'a voulu. La


il laul : dansles ténèbres avant qu'Une fit la liunière? Ils

volonté de Dieu est en effet la cause du ciel et sont vraiment eux-mêmes dans les ténèbres de
de la terre. C'est pourquoi elle est supérieure au l'ignorance. C'est pourquoi ils n'ont point l'intel-

ciel et à la terre. Or demander en vertu de quelle ligence de la lumière où Dieu était avant qu'il fit

cause Dieu a voulu créer le ciel et la terre, c'est cette lumière. Ils ne connaissent en effet d'autre
chercher un objet plus grand que la volonté de lumière que celle qu'ils voient des yeux du corps.
Dieu. Où le trouver? Que l'homme sache donc Aussi leur vénération est si grande pour ce soleil
réprimer en soi une curiosité téméraire qu'il ;
dont la vue nous est commune, non-seulement
s'abstienne de rechercher ce qui n'est point, s'il avec les plus grands animaux, mais encore avec
veut trouver ce qui est. Et si on désire connaître les moucherons et les vers qu'ils y voient une ,

la volonté de Dieu qu'on devienne l'ami de Dieu. partie de la lumière où Dieu habife. Pour nous
Car qui prétcndraitsavoirla volonté d'un homme regardons comme bien différente la lumière où
s'il n'en était l'ami ? Tous riraient de cette im- Dieu habite. C'est celle dont on lit dans l'Évan-

pudence, de cette folie. Mais, pour devenir l'ami gile : « C'était la vraie lumière qui éclaire tout
de Dieu, il faut des mœurs très-pures et être « homme venant en ce monde '. » D'ailleurs

arrivé h cette lin dont l'Apôtre dit du : « La fin lalumière de ce soleil n'éclaire pas tout homme,
« précepte est la charité qui vient d'un cœu r pu r, maislecorps de l'homme et ses yeux mortels, infé-
« d'une bonne conscience et d'une foi sincère •
. » rieurs à ceux de l'aigle qui, dit-on, fixe le soleil
Avec ce trésor les malheureux que nous combat- beaucoup mieux que nous. Cette autre lumière
tons ne seraient pas hérétiques. au contraire n'agit pas sur les yeux des oiseaiLX
sans raison elle brille dans les cœiu-s purs de ceux
:

CHAPITRE m. qui croient à Dieu et qui de l'amour des choses


visibles et temporelles passent à l'accomplisse-
LE CHAOS ET LA LUMIÈRE.
ment des préceptes Ce que peuvent tous divins.

5. Les paroles suivantes du livre de la Genèse :


les hommes ', parce que cette lu-
s'ils le veulent

« Or la terre était invisible et informe » sont, '-,


mière incréée éclaire tout homme venant en ce
ainsi critiquées par les Maniciiéens. Comment, monde. Ainsi les ténèbres étaient sur l'abîme
disent-ils. Dieu a-t-il fait dans le principe le ciel avant que Dieu fil la lumière sensible, dont nous

et la terre, si déjà la terre existait quoiqu'invisi-


allons parlei'.

ble et informe? Ainsi en voulant blâmer les di- CHAPITRE IV.

vines Ecritures avant de les connaître, ils ne


LES TKNÈBRES NE SONT RIEN.
comprennent pas même les choses les plus claires.
Se peut-il rien de plus clair que ces paroles ;

7. « Et Dieu dit : que la lumière soit faite '. »


« Dans le principe Dieu lit le ciel et la terre or la ;
Où n'est pas la lumière sont les ténèbres ; cepen-
« terre était invisible et informe?» C'est-à-dire :

dant les ténèbres ne sont rien de positif; c'est l'ab-


Dieu dans le principe fit le ciel et la terre; et cette
sence de la lumière qui prend le nom de ténèbres.
terre faite par Dieu était in\isible et informe,
Le silence n'est rien non plus; mais on dit qu'il >
avant que Dieu donnât des formes déterminées
a silence parce qu'il n'y a pas de bruit. La nudité
à toutes choses et réglât leurs rapports eu mettant
n'est rien mais l'on dit d'un corps (ju'il est nn
;

chacune à la place (prt'lle devait occuper; avant


parce <pi'il n'est pas couvert. Le vide n'est rien non
qu'il dit : « Que la lumière soit faite: Que le fir-
plus; mais on dil d'un lieu qu'il est vide parce qu'il
« mameni soit fait : Que les eaux se rassemblent :

ténèbres ne
ne s'y trouve aucun corps. Ainsi les
« Que la partie aride se montre ;
« enfin a\anl
sont pas une substance; c'est le défaut de lumière
qu'il fit ce qui est exposé dans le même livre avec
(pi'on apix'lle lénèbres. Nous disons ceci pour
tant d'ordre (|ue les enfants jteuvenl le saisir.
répondre une objection que les .Manichéens
à
Et il \ a là de si grands mysières que quiconque
ont coulumed'élever. D'où venaieni, demandent-
en sera insjruil, ou bien aura pitié de la vanilé de
ils, les ténèbres (pii couvraient l'ahiiffe avant que
tous les héréti(jues parce qu'ils sont hommes, ou
Dieu créât lahimière? Qui les avait faites ou en-
bien s'en rira parce qu'ils sont superbes.
'
I Timotli. 1, 5. — 2 (ieii. i_ 2 .Jcan, I, 9. I Rélr. ch. X, n. 2.- ' Oen. 1,3.
,

LIVRE PREMIEH. — DE LA CREATION. 91

gentlives ? Et si personne no les avait laites ni gnée se retourner sur eux-mêmes. Car la vérité
enfiemin-es, ellesélaientdonci'lernelles? lis pai'- ne peut être renversée, |)uisqn'elle est immuable,
leiil eoinniesi les lénèhres élaient (iiiel(]ue eiiose; et tous les coups (pi'on v(>ut lui porter sont re-
mais nous l'avons dit c'est l'altsenee de la lu-
: pouss(<s et retombent a\cc plus de violence sui-
mière (|ni a été appellT'c ainsi. Parce (|iie, décns ceux(pii osenll'allaipK ii'u happant ce (pi'ilsde-
eux-mêmes parleurs l'ahles, ils ont cin à l'exis- vraienl croire, pour mériter de le comprendre.
tence d'un peuple de ténèbres, où ilss'imafîinent 9. Ils font une autre question el demamlent
(|n'(''taient les corps avec leurs formes et leurs avTc D'où venait l'eau sur laipiclle était
fierté ;

i\mes, ils peusenl ([uc les téuchres sont quehnie portérEsprilde Dieu? Esl-il écrit précédcnunent
chose ; el ils ne comprennent pas que l'on ne per- que Dieu ait créé l'eau ? S'ils cherchaient avec re-
çoit les ti'-iichi-es (\\\c quand on ne voit point ligion la réponse à cette diflicnlté, ils la trouve-

comme on que (piand aucun


nei)crroil le silence raient. L'eau dont il est i)arl(" en ce lieu n'est
bruit ne trappe les oreilles. Or, de même que le pas celle que nous pouvons maintenant voir c»

silence n'est rien, les ténèbres non plus ne sont toucher: comme la terre appelée invisible et in-
làen. El de la même manière (jue ces hérétitjues forme n'était point la terre (pie nous voyons et fou-
prétendent que la race des ténèbres a lutté contre lons aujourd'hui. Quand donc il est dit « Dans :

la lumière de Dieu, on peut itire, avec aussi peu de « le principe Dieu ht le ciel et la terre, « sons le

raison, (pie la nation des silences a lutté conlre nom de ciel et de terre on désigne tout l'ensem-
la parole de Dieu. Mais nous n'avons pas entre- ble des créatures sorties des mains de Dieu. Et
pris de réfuter ici et de convaincre d'erreur ces si les noms des choses visibles ont servi à tout
rêveries. Notre but est seulement de défendre, indiquer, c'est à cause de la faiblesse des petits,
autant que Dieu daignera nousen donnerla force, peu propres à se faire une idée des choses invi-
ce que les .Manichéens attaquent dans l'ancien Ainsi donc a été faite d'abord, confuse et
sibles.

Testament,et d'y montrer que les ténèbres de informe, la matière de laquelle devaient être faits

riiomme ne peuvent rien contre la vérité de tous les êtres qui ont paru ensuite avec leurs for-
Dieu. mes déterminées. C'est, je crois, ce que les Grecs
CHAPITRE V. appellent Chaos. Aussi bien dans un autre en-
droit nous lisons ces mots ;\ la louange de Dieu :

l'esprit de dieu porté sir les eaux.


« Vous qui avez fait le monde d'une matière iu-
8. Ces paroles écrites au verset deuxième « Et : « foiTne » D'autres copies portent
• . D'une ma- :

« l'Esprit de Dieu était porté sur les eaux, » sont tière invisible.
ainsi critiquées par les .Manichéens. L'eau, disent- CHAPITRE VI.
ils, donc l'habitation de l'Esprit de Dieu, et
était
LA MATIÈRE INFORME TI?.ÉE DU NÉANT.
contenait elle-même l'Esprit de Dieu ? Leur esprit
perverti s'efforce de tout pervertir et ils .sont '
10. .Nous croyons donc, à très bon droit, que
aveuglés par leur malice. Quand nous disons que )ieu a fait tout de rien. Car bien (pie toutes les
le soleil s'élève sur la terre, voulons-nous faire choses aient été formées de cette matière, cette
entendre que le siège du que soleil est la terre, et matière elle-même cependant a été faite de rien.
la terre contient le soleil? Cependant l'Elsprit de "Ne ressemblons pas à ces hommes qui envoyant
Dieu n'était point porté sur les eaux comme le le charpentier et tous les artisans incapables de
soleil est porté sur la terre, mais d'une autre ma- fabriquer aucune chose sans avoir d'abord de
nière (pie peu d'hommes conqirenncnt. Ce n'était quoi la fabriquer, ne veulent pas croire que le
point dans l'espace iiue l'Esprit de Dieu était Tout-Puissant puisse faire quehpie chose de rien.
porté sur les eaux comme le soleil est porté sur Il est vrai, le charpentier a besoin de bois; l'ar-

la terre, mais par lapuissancedc son iuvisiblena- genteiir,d'argeut ; l'orfèvre, d'or; le potier, d'ar-
ture. Dites-nous, héréli([ucs, comment la volonté gile, pour être capables d'exécuter leurs ouvrages;
de l'ouvrier est portée sur ce qu'il doit faire? et s'ils ne sont aidés par la matière d'où ils font
S'ils ne compvonneut pas ces ("hosos qui sont de (pielque chose, ils ne peuvent rien faire, ne faisant
l'homme et (piiarri\ eu lions les jours, qu'ils crai- pas eux-inèines cette matière; car le charpen-
gnent Dieu et cherclienl a\ec simplicité de ceour tier ne fait pas le bois, mais a\ec le bois il fait
ce (pi'ils n'entendent |iis; autrement en cher- quel(pie chose; de même lous les autres ouvriers
chant à abattre parltMus paroles s:crilèges la vé- (le ce genre. .Mais le Topl-Piùssant pour être en
rité (pi'ils ne i)eu\cnt voir, ils sentiraient la co- I
Saq. XI, 18.
.

9i DE LA GExNÈSE CONTRE LES MANICHÉENS.

état fie Caire ce qu'il voulait, n'avait besoin d'être la terre parait être le moins remarquable. Il l'a
aidé par rien qu'il n'eut pas fait; et, si pour faire appelée ferre imisible, à cause des ténèbres où
ce qu'il voulait laii'e il avait dû recevoir le se- elle était teii-e informe, à cause de son défaut de
;

cours d'une chose qu'il n'aurait pas laite, il ne forme. Il a aussi appelé cette inéine matière l'eau
serait pas tout-puissant, ce que l'on ne peut croire sur laquelle était porté l'Esprit de Dieu, comme
sans impiété. la volonté de l'ouvrier est portée sur les choses

CHAPITRE VU. qu'il doit façonner; ce que peu d'hommes peu-


vent comprendi-e, et je ne sais en est même s'il

LA MATIÈRE INFORME DÉSIGNÉE SOUS DIFFÉRENTS quelques-uns qui soient capal)les de l'exposer
NOMS. avec les ressources de la parole humaine. Mais
ce n'est pas contrairement à la raison que cette
11. Cette matière informe que Dieu fit de rien matière a été appelée eau car tout ce qui croit ;

a été tout d'abord appelée le ciel et la terre. Le sur la terre, animaux, aii)res, plantes et autres
texte porte Dans le principe Dieu fit le ciel
: « choses semblables, tire d'abord de l'élément li-
« non que cela l'ùt déjà, mais parce
et la terre, « quide de quoi se former et se nom-rir. Ainsi donc
que cela devait être car il est écrit que le ciel : tous ces noms de ciel et de terre de terre invi- ,

fut fait ensuite. En considérant la semence d'un sible et informe, d'abime couvert de ténèbres,
arbre, nous disons que là sont les racines, le d'eau sur laquelle était porté l'Esprit de Dieu,
tronc, lesbranchcs, les fruits et les feuilles, quoi- sont des noms dota matière première: ils ont été
que ces parties n'existent pas encore, mais parce employés afin que des termes connus fissent en-
qu'elles doivent sortir de là. De la même manière trer dans l'esprit des ignorants l'idée d'une chose
il a été dit : « Dans le principe Dieu fit le ciel et inconnue et au lieu d'un nom il y en a eu plu-
;

« la terre ; » c'était comme semence du ciel


la et sieurs, parce qu'un seul aurait pu donner occa-
de la terre, puisque la matière du ciel et de la sion de croire qu'il s'agissait de l'objet que les
terre était encore à l'état de confusion : mais hommes avaient l'usage de comprendre sous ce
parce qu'il était certain que de là devaient se for- terme. Cette matière est donc appelée ciel et terre,
mer le ciel et la terre, la matière elle-même a parce (jue de là devaient sortir le ciel et la tere.
pris le nom de ciel et de terre. Notre-Seigneur Elle est nommée terre invisible, informe, et té-
emploie cette manière de parler quand il dit :
était sans forme
nèbres sur l'abime, parce qu'elle
« Désormaisje ne vous appellerai plus serviteurs, ne pouvait d'aucune manière
ni figure, et qu'elle
« parce que le ser\iteui- ignore ce que fait son être vue ni touchée quand même il y aurait eu
« maître; mais je vous appelle amis, parce que là un homme capable de voir et de loucher. On
« toutes les choses que j'ai apprises démon Père, l'aijpelle eau, parce qu'elle était soupleet traitable
«je vousles allait connaiire '.» Ce qui n'était pas sous la main du grand architecte qui en voulait
encore, mais devait arriver très-certainement. (Jn
former toutes choses. Mais, encore une fois, tous
peu après il leur dit en effet « J'ai encore beau- :
noms désignent matière infor-
ces différents la
« coup de choses à vous dire, mais vous ne pou-
me et insaisissable de laquelle Dieu a fait le
« vezpas les porter maiidenanf. » Pourquoi leur
monde.
avait-il dit: « Tout ce quejaiappris démon Père,
CHAPITRE VU!
« je vous l'ai fait connaître, » si ce n'est parce
([u'il savait ile\oir le faire? Ainsi a pu être ap- DIEr APPROUVE LA LUMU'iRE.
pelée ciel et terre la matière dont le ciel et la
terre n'avaient pas encore été faits , mais de 13. « Et Dieu dit : Que la lumière soit faite. Et

laquelle ils devaieid l'être. Nous trouvons en « la lumière fut faite. » Ce n'est poini cela tpie

grand nombre de pareilles expressions dans les censurent les .Manicln'ens, mais ce qui vient en-
divines Ecritures; expressions conformes à notre suite : « Et Dieu \it que la lumière était bonne '. »

faroii ordinaire de pii'ler, lorsfjiie noas disons Ils diseid en effet : Dieu ne comiaissait donc pas
d'une chose que iiousalleiidoiis a\ec une entière la lumière, ou il iiecoimaiss;nl doue pas le bien ?

certitude : Tcnez-là pour arri\ée. Misérables à qui il déplaît ipie Dieu se soit com-
1:2. Dieu a \oulu (pie celle milièie premier^ plu dausses om\ rages, (]uanil paiMui les houuues
fût aussi appelée lene iiisisible et iiilorme, parce ils voient l'arl isan, par exempie le cliarpenlier,
que de lous les élémeiilsquicomposenlli' monde, toul nid (pi'il soit en comparaison de la sagesse et
'
.lean, xv, |5. — - Ibid. xvl, 13.
MVKK l'HT-MIKU. — l)K LA CKftATION. «M

(le la iHiissaiiccili' Dion, tailliMiiciiimioiiissi loiifj-

Iciiips, lra\aill(M'sainalii'r('avoc la hache, la scie, CIIAIMTUE IX.


la piano ol lo loin-, la polif poiir l'amoiior à la
poiloolioii ij,t:;i_ijj:los (lo l 'ail ot l'airo ([iio l'ou- .NOMS DONNÉS PAU DIEU A LA LUMIÈRE ET AUX
M'a^f hiaiso à son auloni'. Kl pai'oo <|iio son lou- TÉNÈBIIES.
vio hiipïïîlt, on ounolin'oz-\oiis qn'il n'a\ait pas
l'idôo (le ce (]ni osl hion? Sans auoim tlonlo il ir>. « Et Dieu lit ladivision entrela lumière et
l\nait dans son ospril, on rarl_ost_on liii-nionio « les ténèbres, et Dion donna à la lurniore lo nom
plus heaiuiuo loslbrniosipril pi'odnil.Ôr ce (|ue Il do jour et au\ lénobros lo nom de nuit '. » il

l'ouvrier voit iiilôriourornonl dans l'art, il le réa- n'est point dit ici : Dion 11! les ténèbres, parce que
lise au dohorsdans I'coum'o (ju'il o\(''cule, ot c'est les ténèbres, l'oinnio nous l'avons moidré plus
l'exécution lie colle (oumo (jui lui piait. « Dieu » haut, ne sont (piol'aljsonco do la luniiore.
11 y a

donc « \i! bonne.


(|'o la Inniière était » Ces pa- eu cependant une division entre la luinièreet les
rolesne Aoulonl pas dire (]ue Dieu \il un t)ion ténèbres. C'est ainsi que nous-mêmes on criant
doid il n'axait i)as encore connaissance, mais nous produisons lo bruit do la \oi\, ol on n'ex-

que l'acconiplissenient de son ou\ra^e lui pkd. primanl aucun son, le silence, parce que dans
14. Que serait-ce donc s'il était dit Dion \it : la cessation do la voix consiste le silence. Néan-

avec atlniiiation (]ne la Imnière était Ijoniio? moins nous distinguons do (|uol(juo inanioreentre
Comme ils se réei-icraient ! Quel procès ils nous la voix et le silence, et les doux noms désignent
leiaient! En efl'ot ce sont ordinaireineid les choses pour nous des objets dilïéronts. Comme donc
inattendues <pii font naitie l'admiiation ; ot ce- l'on dit ave<' raison que lo silence est fait par
pendant ils lisent dans ri'2\angile et r<'lèvont avec nous, ainsi dans plusieurs endroits de l'Ecri-
éloge que Notro-Soigneur Jésus-Christ admirait ture il est dit ajuste titre que Dieu fait les ténè-
la loi des ei'oyaids i. Kh! (jni avait formé en eux bres j
parce qu'il refuse ou retii'c la lunnèro
cette foi, sinon Celui (|ui l'aduiiiait? Eu suppo- aux temps ot aux lieux qu'il lui plait. Toutes ces
sant même qu'elle eût été l'ouvrage d'un autre, expressions se prêtent aux besoins de notre in-
potuquoi l'admirait-il, lui qui l'avait prévue? Si telligence. De quelle langue Dieu s'est-il servi

les Maniclié; :is. l'épondontà cotlo({uoslion, qu'ils pour-donner à la lumière le nom de jour et aux
reconnaissent aussi qu'onpeutrépondre àla leur. ténèbres le nom do nuit? Est-ce dota langue
Et s'ils ne sont point capables de la résoudre, hébraïque, de la langue grecque, de la langue
pourquoi oonsuror ce qu'ils repoussent comme latine ou dequelqu'autre?Demème pour toutes
no les regardant pas, quanti ils ignoient ce qu'ils les choses qu'il a nommées. Mais en Dieu il n'y
disent leur appai'tenir En admirant une chose,
? a qu'intelligence sans bruit de paroles ni diver-
Notre-Seigneur nous marque ([u'elle doit être sité de langues. Ce terme, « il donna le nom, »

un objet d'adudratioii pour nous, qui avons en- est mis pour : il lit donner le nom ; car il dis-
core besoin d'être remués parce sentiment. Tous tingua et ordonna toutes choses de manière
les mouvements semblables qu'on remarque en qu'elles pussent être discernées et recevoir leurs
lui, ne sont donc pas les signes d'un esprit agité, noms. Plus tai'd, ((uand le moment sera venu,
mais ceux d'un inaitre qui enseigne. Ainsi en nous examinerons sil'on peut avec vérité prendre
est-il de certaines paroles de l'ancien Testament : ce terme dans le sens que nous lui donnons. Car
elles ne révèlent on Dieu aucune faiblesse, mais plus nous avançons dans les Ecritures et nous
elles s'accomodent à la nôtre. Carau sujet de Dieu les rendons familières, plus aussi nous devicn-
rien ne peut cire exprimé en termes convenables; nentconnues les expressions qu'ellesrenfernient.
et c'est poumons faire croître dans la foi et par- Nous disons en effet Ce père de famille a bâti :

venir à ce que nulle parole humaine ne saurait cette maison, pour dire (pi'il l'a fait bâtir; et en
exprimer, que les choses nous sont présentées dans parcourant tous les livres divins dosEcritures,on
des termes que nous pouvons entendre. trouve beaucoup d'expressions semblables.

'
Malt. VIII. (0. I
Gcii. I, 1.5.
u DE LA GENÈSE CONTRE LES 3IANICHÉENS.

position locale, mais parla dignité de leur nature :

CHAPITRE X. encore ne doit-on rien affirmer témérairement


sur ce point, car c'est une question osbcure et en
LE MATIN ET LE SOIK.
dehors de la portée des sens l'homme mais :

16. Alors se quelle qu'elle soit, il faut croire avant de com-


« lit le soir, et puis le matin, et il
prendre. « Etalorsselitlesoir, puis le maUn, et
« y eut un premier jour K » Nouvelle calomnie
des Manichéens: ils imaginent que d'après ces « y eut
ilun second jour » Tout ceci n'est qu'une
répétition et doit être entendu et traité comme
paroles le jour aurait commencé par le soir. Ils
ne comprennent pas que faire précède nunent.
la lumière, la sé-
parer des ténèbres, et l'appeler jour, et donner
CHAPITRE XII.
aux ténèbres le nom de nuit, est une opération
qui tout entière appartient au jour. Or ce fut RÉUNION OL' FORMATION DES EAUX.
après cette opération et comme après le jour que
le soir se fit. Mais parce que la nuit elle-même 18. « Et Dieu dit : Qu'en une seule masse soit
appartient à son jour, il n'est dit du. premier « réunie l'eau qui est sous le ciel, et qu'apparaisse
jour qu'il fut écoulé, que quand la nuit étant éga- « l'élément aride. Et cela fut fait ainsi. Et l'eau
lement passée, le matin parut. Et c'est ainsi « qui est sous le ciel fid réunie en une seule
que sont calculés du matin jusqu'au matin tous « masse, et l'élément aride se montra. Et Dieu
les autres jours suivants. Car lorsque le matin a « appela terre l'éi; ment aride et il appela mer la
surgi et qu'un jour s'est écoulé, commence une « réunion des eaux. Et Dieu vit que cela était
seconde opération dont le point de départ est ce « bon 1. » Si tout était rempli par l'eau, disent
même matin qui vient de paraître; après cette ici les Manichéens, comment les eaux pouvaient-
opération se fait de nouveau le soir puis le ,
elles se réunir en un seul lieu ? Mais nous avons
matin alors un second jour est passé
: de la ;
déjà observé précédemment, que le nom d'eau
même manière s'écoulent ensuite tous les autres. désigne matièresur laquelle était porté l'Esprit
la

de Dieu et dont Dieu allait faire toutes choses. Or


CHAPITRE XI. maintenant, quand il est dit « Que l'eau de des- :

« sous le ciel se réunisse en une seule masse, »


LES EAUX DIVISÉES PAR LE FIRMAMENT.
c'estpour annoncer l'apparition de cette matière
n. « Et Dieu dit Qu'un firmament soit fait
:
corporelle sous la forme qu'offi-enl à nos regards
« au mUieu de l'eau et qu'il y ait séparation ces eaux visibles. Car la réunion des eaux est la

« entre l'eau et l'eau. Et


il en fut ainsi. Et Dieu
formation même de ces eaux que nous voyons et
« (irmameid et il sépara l'eau qui est au
fit le que nous touchons. En effet toute forme se ra-
« dessus du firmament, de celle qui est au des- mène nécessairement à la règle de l'unité. Ces
« sous et il donna au firmament le nom de ciel et
;
autres paroles Que l'élément aride apparaisse, »
: «

a il vit que cela était bon 2. » Je ne sache pas que dans quel sens doit-on les entendre ? Ne dési-
les Manichéens reprennent ce passage. Cepen- gnent-elles pas l'apparition de la même matière
dant, connue nous le disions tout-à-l'hcurc, la sousla forme sensible dont est maintenant douée
matière informe ayant été désignée sous le nom cette terre que nous voyons et touchons ? Donc
d'eau, cette di\ision des eaux, qui met les unes ce qui était nommé plus haut terre invisible et
au-dessus du firmament et les autres au-dessous, informe, c'était la confusion et l'obscurité de la

n'est, je crois, que la séparation opérée par le


matière, et ce que désignait le nom de l'eau sur
firmament du ciel entre la matière corporelle laquelle était porté l'Esprit de Dieu, celait encore

des choses visibles et cette autre matière incor- la même matière. Or maintenant l'eau et la terre
porelle des choses invisibles. Car si le ciel est le sont formées de cette matière, qui était ainsi ap-
plus beau des corps, toute créature invisible pelée avant qu'elle ne prit les formes ipie nous
l'emporte en beauté sur le ciel : et peut-être est-ce lui voyons présentement. On doit savoir que dans
pour cela que l'Ecritm-e nous montre, au-dessus la langue hébraïque, toute réimion d'eaux soit
du ciel, des eaux invisibles dont peu d'hommes douces, soit salées reçoit le nom de mer.
comprennent qu'elles le dépassent, non par leur ' Gen. 1, 9, 10.

' Gen. 1, 6.-2 Gen. I, 6-S.


LIVIIK l'KKMIKK. — l»K l,.\ CUI^LVTION. 9f>

cause, je crois, que nous venons d'énoncer. Car


CIIAPITIIE Mil. écoutons ce (|ui lut dit à l'honune après son pé.

ché « La lerre pouiloi sera maudite à raison (h;


:

l'Ol UyntI l.A TKKHK l'Ilolll n-ELLE DES PLANTES « ce(|netn as lait: tous les jours de ta Nie, lu ti-
STKItlI.ES ET 1»KS CHOSES M ISlItl.ES ?
« rei'as d'elle dans la tristesse cl lesg(''missemenls

« de quoi te nourrir. Klle te produira desépines


1!>. u Kl hiciulit : UiK' <!'' I;» •'"'•i'' sidlciil des
Il et des ronces, cl lu mangeras l'herbe de ton
« liiM'bi's propres à lii iiuuiiiliiri' des aiiiiiiaiix,
« champ ; lu mangeras Ion pain à la sueui' de ton
.< porlaiit leurs scinciices chacune selon son espèce
« front, jus(|u'àceipielu rentres dans la terre de
« et sa loiiiie, cl (lesaiiirt'srciliii's |)r(i(liiisanl du
>< la(iuelle tu as été lire, car tu es terre et tu re-
« l'ruil (pii ail en lni-nièiiio sa seiiicnrc selon sa
« lourneias en lerre '. »
« natm'e. Kl cela lui lail ainsi. I']( la leri'e se
« eouvril <rherl)es |)it)pii's au pàluraj.;e, [)ortanl
CHAPITRE XIV.
« sasenieia'i'cliaeuiie selon son espèce, eUlu bois
« fertile donnant du li-uit qui renlerniait en lui LE SOLEIL ET LES ASTRES.
« sa semence, selon sa l'orme et son espèce sur
« la terre. Kt Dieu \il (|uc cela était hon. Alors se H). Et Dieu (lit Qu'il \ ail des astres dans le
•' :

« lit le soir, puis le matui, et il \ eul un troisième «firmament du ciel, pour ipi'ils luisent sur la terre,
« jour '. Manichéens s'écrient Si Uieu
>' Ici les : « (ju'ils fassent la division entre lejoiu'et la nuit,
a l'ait naiti'c les herbes propres au
de la terre « (ju'ils servent de signes et fassent les temps, les
l)àlura!ie, et les arbres fruitiers, tpii donc a l'ait « jours et les aimées, et (pTils brillent au lirma-
naître tant d'herbes on vénéneuses ou hérissées « ment du ciel a(in d'éclairer la terre. Et cela fut
d'épines qui ne servent pas an pâturage, et tant « fait ainsi. Et deux coips lumineux, l'un
Dieu lit

d'arbies (pii ne portent aucun fruit 'Ml faut leur K plus gi'aïul et l'aidre moindre, le plus grand

répondre île façon à ne découvrir aucun mystère < pour le mettre à latèle du jour, elle moindre
il des indignes, ni à leur montrer ce qn'il y a de « à la tète de la nuit. Dieu fit encore les étoiles
tiffuré pour l'avenir dans de telles paroles. Il faut « et les plaça au firmament du ciel pour ipie la

donc leurdire queparsuite du péché deriiomme « terre en fût éclairée. Et tous ces corps lumi-
la terre a clé maudite et contrainte à produu-e « neux durent présider au jour et à la nuit et
des épines non pour en sentir elle-même l'ai-
; « faire la division entre l'un et l'autre. Et Dieu
guillon puisqu'elle est privée de sentiment, mais « vit que cela était bon. Et le soir se lit, puis le

pour mettre sans cesse devant les yeux de l'hom- « matin et il y eut un quatrième jour 2. »
me l'horreur de son péché, et l'avertir d'aban- Les Manichéens demandent d'abord ici com-
donner enfin les voies de l'iniquité pour s'attacher ment les astres, c'est-à-dire le soleil, la lune et

à l'observation des commandements de Dieu. les étoiles, n'ont été faits que le quatrième jour.
Quant ai'.x herbes vénéneuses , elles ont été Comment en effet les trois jours précédents ont-
créées pour la punition ou l'épreuve des mortels : ilspu être sans soleil, puisque nous voyons main-
cause du péché, puisque c'est après
et tout cela à tenant que le jour est limité par le lever et le
lepéché que nous sommes devenus mortels. S'il coucher du soleil, et que la nuit nous vient de
y a des arbres stériles c'est pour instruire et l'absence de cet astre, quand passant de l'autre
humilier les hommes en leur faisant comprendre coté du monde, il retourne à l'Orient '?
Nous leur
combien il est honteux de vivre sans fruit de répondrons premiers jours ont pu
(|ue les trois
bonnes ce'.! vres dans lechamp de Dieu, c'est-à-dh-e consister ehacun dans un espace de temps égal
l'Eglise, et en leur fiiisant craindre que Dieu ne à celui (lu'emploie le soleil pour opérer sa révo-
les abandonne puisqu'eux-mèmes négligent
, lution, depuis l'heure où il part de l'Orient jus-
dans leurs champs les arbres infructueux, et ne qu'au moment où il y revient. Même en habitant
se mettent nullement en peine de les cultiver. de sombres cavernes où on ne saurait voir ni le
Avant donc le péché de l'homme, il n'est pas écrit lever ni le coucher du soleil, on [lourrait mesurer
que la terre ait porté autre chose que l'herbe de cet espace et cette longuem* du temps et l'on ;

pâture et les arbres fruitiers; mais après le péché voit que même sans le soleil, avant que le soleil
nous voyous beaucoup de plantes qui font l'hor- eût été formé, du temps a pu être saisie
la suite

reur et beaucoup d'arbres infructueux, pour la et supputée pour chacun des trois premiers jours.
I
Gen. I, 11-13. I
Gen. m, 17-19. —> Ibid. U-I9.
96 DE LA GENÈSE CONTRE LES MANICHÉENS.

Nous bornerions là notre réponse si nous ne sa- 23. Pour les paroles : « Et qu'ils fassent la di-

vions qu'il est dit au sujet (les mûmes jours : « Et le i( vision entre le jour et la nuit, •> elles peuvent
« soir se fit, puis le matin, » ehose quemaiuteuant devenir l'objet d'une injuste critique. Coinineut,
nous voyons impossible sans le cours du soleil. dira-t-on peut-être, Dieu avait-il déjà précédem-
11 nous reste donc à comprendre que les distinc- ment séparé le jour et la nuit, si c'est là l'effet

tions mêmes des ouvrajîcs de Dieu dans les des astres au quatrième jour?Quand donc il est

inteivalles du tenq)s ont été ainsi appelées soir, , dit en ce lieu: « Qu'il fassent la di\ision entre le
à cause de la fin de rou\ra<ie accompli, matin, « jo;ir et la nuit, » c'est comme s'il était dit :

à cause du connnencement de l'ouvrage à lairc ;


Qu'il se partagent entre eux le jour et la nuit, de
cela ])ar comparaison avec les Ira vaux de l'iiomme, manière que le jour soit donné au soleil et la

qui ordinairement commencent le matin et finis- nuit à la lune et aux autres corps lumineux. Le
sent le soir. Car c'est l'usage des divines Ecritu- jour et la nuit avaient été déjà^éparés, mais non
de transporter aux choses divines les termes
l'cs encore divisés entre les astres, de manière qu'on
employés pour exprimer les choses humaines. fût certain jusqu'alors quel était dans le nombre
21. Ils demandent ensuite pourquoi ila été dit des astres celui qui apparaîtrait aux hommes pen-
des astres : « Qu'ils servent de signes et fassent dant le jour, (juels étaient ceux (jui leur apparaî-
<cle temps. » Est-ce donc, s'écrient-ils, que ces trois traient pendant la nuit.

premiers jours ont pu être sans aucun temps, ou


n'appartiennent pas aux espaces du temps ? Mais CHAPITRE XV.
s'il a été dit Qu'ils servent de signes et lassent
:

LES POISSONS ET LES OISEAIX.


les temps, c'est afin qu'au moyen de ces astres les
temps soient distingués et que les hommes puis- 24. « Et Dieu dit :Que les eaux produisent des
sent les démêler. Car si les temps courent et « [loissonsqui vi\ eut dans leur sein et des oiseaux
qu'il n'y ait pas pour les distinguer certaines di- « qui volent sur la terre, sous le firmament du
visions qui sont marquées par la marche des as- « ciel. Etileu (ut ainsi. Et Dieu fitlesgrands pois-
tres,ils peuvent à la vérité courir et s'écouler, « sons et tous les animaux et reptiles aquatiques
mais ne peuvent être connus ni discernés par les « que eaux produisirent chacun selon son es-
les
hommes. Ainsi, quand le jour est nébideux, les « pèce, ainsi qno tous les oiseaux chacun selon
heures passent, il est vrai, et achèvent leur car- « son espèce. Et Dieu vit que ces choses étaient
rière, mais ne peuvent être distinguées ni remar- « bonnes et Dieu les bénit en disant Croissez, :
;

quées par nous. « multipliez-vous et remplissez les eaux de la


22. Quant aux paroles : » Et Dieu fit deux corps « mer et que les oiseaux se multiplient sur la
lumineux, un plus grand, pourlemettreàlatête
«
« terre. Et le soir se matin, et il y eut
fit, puis le
du jour, et unmoiudre, pour le mettre à la tète « un cinquième jour i. » Les Manichéens criti-
de la nuit » on doit les entendre dans ce sens
;
quent ordinairement ce passage en demandant,
que les deux corps ont été formés, l'un pour do- ou plutôt eu objectant avec fourberie, pourquoi
miner pendant le jour et l'autre durant la nuit, il que sont nés des eaux, non-seulement
est écrit
et non pour commencer le jour et la nuit. Car le (pii vivent dans l'eau, mais encore
ètresanimés
les
soleil non-seulement commence le jour, mais en-
tous ceux (jui \ oient dans l'air et tous ceux
core il le continue et rachève, tandis que la lune qui sont pourvusde plumes. S'ilss'émeuventd'nne
ne se montre quelquefois à nous qu'au milieu et pareille difficulté, qu'ils apprennent que des
même à la fin de la nuit. Si donc elle ne com- hommestrès-savants, qui s'appliquent avec grand
mence pas les nuitsoùelle parait tard, comment soin à l'étude de ces matières, coufontlentordinai-
a-t-elle été faite pour commencer la nuit, inchoci- rement avec les eaux l'air nébuleux et humide
tionem »yrtis?Mais si l'on comprend que le mot dans lequel oiseaux volent. Cet air prend du
les
ituhuatiuiiem signifie priuci|)e et que par princi- corps et s'épaissit en recevant les exhalations et
pe on entende le premier rang, il est manifeste pour ainsi dire les vapeurs de la mer et de la
que le soleil tient le premier rang pendant le terre; il s'engraisse en quelque sorte de cette hu-
jour et que la lime le tient pendant la nuit. Car midité de manière à pouvoir soutenir le vol des
bien qu'alors paraissent les autres astres, elle les
oiseaux. D'où vient que même
pendant les nuits
domine tous par son éclat ; ainsi elle en est ap-
sereines il se fait une rosée dont on \oit le matin
pelée la reine à très-juste titie. I
IGcn I, 20-24.
UVUK l'KKMIKK. liK LA (;IU';ATI(iN. 9'

les jïonitcs siii' les licrhos. On dil (|U(' celte iiuui- des plus sols, il les cioil siipi'rlhis Lui ani\e-l-
liijiiie (le .Macédoine (|iii porto le iiiiin d'OlMiipi' 11 de loiulier dans i\ui- fournaise à laquelle il ne
est d'iiiie telle lianteiir, (|ii'fi son soiinnet ne se |)reiiail point ;;aide ou de se blesser avec un fer
l'ail sentir aucun vent et (|ue les nuages ne s'y aiguisé manie mal adroitement il [leiise
(pi'il '.'

amassent point, attendu (ju'elle excède par son aussitôt a là beaucoup de ciioses dangereu-
(pi'il y

élévalion loule la niasse de l'air hiunide où vo- ses et nuisibles. Cependant l'ouvrier en connaît
leid les oiseaux : aussi al'lirine-t-on encoi'e (|ue l'usage, se rit de la folie de cet bonuue et sans pren-
les oiseaux ne volent pas au sommet de l'Olympe. dre nul souci de plaintes ridicules, il continue h
On tient, dit-on, celle remarque de ceux (pii cha- evercer son indusliie. .Mais il \ a des honiiiiessi
que amiée, pour offrir je ne sais (piels sairilices, dépourvus de sens, que, n'osant blâmer chez un
{îra\issaieut lesommel de celle monlaiiue et tra- ouvrier inorlel ce ([u'ils ignorent, li- jugeant même
(.aient sur lesahle certains caractères (jue l'aimée nécessaire et préparé pour (piehpie usage ipiand
suivante ils retrouvaient sans altération; ce qui ils le voient; ils ont néanmoins la témérité de re-
n'amait pu arriver si le vent y a\ail soufll(' ou lii'eudre et (l(> critiquer nue foule de choses dans
qu'il ) lût tombé de la pluie. Kusuite parce (pie ce monde, dont Dieu est proclamé l'auleur aussi
l'air était trop subtil pour fournir à leur respira- bien que modérateur, et veulent paraître sa-
le

tion, ils ne poinaieiit demeurer en ce lieu (pi'eii voir ce qui leur échappe dans les ouvrages et
approchant de leurs narines des éponges mouil- les moyens du toiit-puissaul ari'hilecte?
lés pour avoir un air plus épais et respirer comnie 26. J'avoue pour mon compte, ne pas savoir
àl'oi'dinaire. Ces hommes firent connaître aussi pour (|uelle (in ont été créés les rats et les gre-
que jamais ils n'avaient vu là aucun oiseau. Ce nouilles, les mouclierons et les vers. Je vois ce-
n'est donc pas sans raison que l'Écriture, si digne pendant que tout est fort bon dans son genre,
tiel'oi, montre comme issus des eaux, non seule- bien qu'à raison de nos péchés beaucoup de
ment les poissons et les autres créatures ipii ont choses nous paraissent nuisibles, (^arjene puis
les eaux pour séjour, mais encore les oiseaux considérer le corps etles membres d'aucun animal
puisqu'ils ne volent que dans l'air formé des va- sans remarquer ((ue les mesures, les membres
[leurs de l'eau et du sol. et l'ordre se rapportent d'une manière exacte à
l'unifé de l'ensemble, toutes choses dont Je ne
CHAPITRE XVI.
vois la source que dans la mesure souveraine, le
nombre et l'ordre souverain, c'est-à-dire dans la
VXIM.VIN NUISIBLES.
puissance supérieure de Dieu, puissance immua-
•25. « Kt Dieu dit : O'io la terre produise des ble et éternelle. S'ils voulaient y réfléchir, ces
« animaux vivants chacun selon suu'espèce, les hommes dont nous
l'ineptie égale, le verbiage, ils

« quadrupèdes, les serpents et les bétes sauvages épargneraient l'ennui qu'ils nous donnent; en
« de la terre. Et il en fut ainsi. El Dieu lit les considérant toutes les beautés du premier ordre,
« bèfes sauvages de la terre selon leurs espèces, les il ne cesseraient de louer Dieu qui en est l'au-

« animaux domestiques et tous les reptiles ter- teur, et comme nulle part la raison n'est blessée,
« rostres, chacun selon son espèce. Et Dieu vit si le sens charnel vient à se choquer, ils athn-

« que cela élait bon '. » Les Manichéens agi- bueraient cela non au vice des choses elles-mêmes,
tent ici la iiièiiie question qu'au sujet des plantes. mais à la misère de notre mortalité. Et certaine-
Etait-il besoin, disent-ils, que Dieu créât soit dans ment tous les animaux sont pour nous utiles,
les eaux soit sur la terre tant d'animaux qui ne nuisibles, ou superflus. Contre ceux qui sont utiles
sont pas nécessaires;» l'homme et dont plusieurs ils n'ont rien à dire. Les animaux nuisibles ser-
même sont nuisibles et à craindre ? Mais eu par- vent à nous punir, à nous exercer on à nous
lant ainsi ne comprennent pas comment tout
ils effrayer, afin que nous détachant de cette vie su-
pourl'ouvrier suprême qui emploie
est excellent jette à tant de périls, nous aimions, nous dési-

tout au gouvernement de l'univers, qu'il conduit rions, et méritions de posséder par notre piété
avec une autorité souveraine. Un homme igno- cette autre vie meilleure, où nous devons jouir
rant les règles d'un art entre dans l'atelier de d'une paix souveraine. Duc<Mé des animaux su-
celui qui l'exerce, il y voit beaucoup d'instru- perflus qu'avons-noiis à nous plaindre? S'il te
ments dont il ne connaît pas la raison, et s'il est déplaît qu'ils ne soient pas utiles, sois content de
' Cm. I, 24. 25. n'en rien avoir à redouter. Encore qu'Us ne soient

S. AuG. — Tome IV.


98 DE LA GENÈSE CONTRE LES MANICHÉENS.

pas nécessaire dans notre demeure, par eux ce- dit lui-même « Ne jurez point par le ciel, par-
:

pendant est complétée l'infcgritc de cet univers, « ce qu'il est le trône de Dieu, ni parla terre parce
beaucoup jihis important et Lien meilleur (pic la qu'elle est l'escaljeau de ses pieds
•< i .
Il dit en-
demeure habitée ])ar nous. Car Dieu -ou\eiiie cet core qu'il chassait les démons par la vertu du doigt
univers beaucoup mieux que chacun de nous ne deDieus.Maistousceuxquientendentlesensspi-
"
gouverne
"' sa maison Servez-vous donc de ceux rituel des Ecritures, saventcomprendre, sous ces
qui sont utiles, prenez-garde à ceux (jui i-ont nui- dénominations non corporels, mais
tics membres
sibles et négligez ceux qui sont supertlus. Mais en des Ibrces purement spirituelles, conmie ils font
voyant dans tous, mesures, nombi'cs et ordre, encore quaud il est parlé de casque, de bouclier,
cherchez l'auteiu- et vous ne trouverez que Celu en de glaive et d'autres choses seuiblables s. Il faut
qui résident la mesure souveraine, le souverain donc dire d'abord à ces hérétiques, qu'ils calom-
nombre et l'ordie sou\erain vous ne trouverez :
nient avec une souveraine impudence dans l'an-
que Dieu lui-mèmedont il est ditsijustement qu'il cien Testament ces sortesd'expressions, puis(|ue
a tout disposé avec nombre poidset mesure '.Ainsi dans le nouveau, il les voient aussi employées ;

pouvez-vous retirer plus de l'ruit lorsque vous mais peut-êtrene les voienl-ilspas,aveugIesqu'ils
louez Dieu dans la petitesse de la fourmi, que sont quand ils disputent.
quand vous traversez un fleuve sur le dos de quel- 2<S. Cependant qu'ils sachent bien que, foi-més
que béte desonune. à l'école Catholique, les fidèles ne croient pas Dieu
circonscrit dans une forme corporelle et, s'il est dit
CHAPITRE XVI. ([ue l'homme aétéfaitàl'iinagede Dieu, cela s'en-
tendde l'homme intérieur, où est la raison et l'in-
l'homme créé
( telligence, qui assurent à l'homme la domination
.\ l'image de DIEl.
siir les poissons de la mer et les oiseaux diiciel,
27 «Et Dieu dit: Faisonsl'hommeà notre image sur les animaux domestiques et les bêtes sau-
« età notre ressemblance, et qu'il ait puissance vages, sur toute la terre et tous les reptiles qui
« surlespoissonsdelamer, smies oiseaux du ciel, s'y meuvent. Aussi, après avoir dit « Faisons :

« sur les animaux domestiques, sur les bêtes sau- " riiomme à notre image et à notre ressem-
« vages, sur toute la terre et tous les reptiles (pii « blance, » Dieu ajouta aussitôt « Et qu'il ait :

« s'ymeuvent, » et le reste, jusqu'au soir " puissance sur les poissons de la mer et les oiseaux
et
au matin p^r lequel est achevé le sixièmejour 2.
'< du ciel, » etc pour nous l'aire comprendre que
;

LesManichéensagitenl surtout cettequestion avec ce n'est point à raison du corps que l'honnne
beaucoup de bruit, et sont dans l'usage de nous est dit avoir été créé à l'image de Dieu, mais

faire un insolent' reproche de ce que nous à raison de celte puissance par laquelle il domine
croyons rhonune formé à l'image età la ressem- tous les animaux. Car toutes les bêtes ont été
blance de Dieu. Car ils s'arrêtent à la forme de mises sous son empire, non à cause de la dignité
notre corps, et dans leur pitoyable grossièreté du corps humain, mais à cause de l'intelligence
ils demandent si Dieu a des narines, des dents de 'P"' "^"'^ avons et qu'elles n'ont pas d'ailleurs :

la barbe ;
si les membres même intérieurs et les notre corps lui-même a été formé de manière
autres organes qui en nous sont nécessaires ap- à indique)- que nous soimnes supérieurs aux bêtes
partiennent à l'être divin. Counne il est ridicule, et semblables à Dieu. En effet les corps de tous
impie même d'avoir une telle idée de Dieu, ils
les animaux qui vivent soit dans les eaux, soit
nient que l'homme formé à l'image et à
ait été sur la terre ferme ou qui volent dans l'air, ont
la ressemblance divine. Nous leur répondou: une forme nalnrellement inclinée vers la terre
qu'en effet les noms de ces membres paraissent et ne sont point droits comme celui de l'homme.

ordinairement dans les Ecritures quand il s'agit "


Celle attitude signifie qu' à son tour notre esprit
d'insinuer aux petits l'idée de Dieu, et non-seu- doiTtèlre élevé aux choses d'en haut qui font son
lement dans les IIm-cs de l'ancien Testament ob'et propre, c'est-à-dire aux choses spirituelles
mais encore dans ceux du nouveau. Car il est et éternelles. Ainsi donc, comme le témoigne
y
fait mention des yeux de Dieu, deses oreilles,
de même forme droite du corps humain, c'est
la
ses lèvres et de ses pieds; et il est dit du Fils qu'il proprement par son âme queriiomme a étécrééà
est assis à la droite de Dieu le Père. Le Seigneur y l'image et à la ressemblance de Dieu.

'Sag. XI, 21. — !Gen. 1, 26-31. 'Matt, T, 34, 36. — 2 Luc. II, ÎO. — ^Ephés. vi, 16, 17,
MVHK l'KKiMIKK. ItK LA CKIvVTlON. m
Ni\iliail cl diiininail le corps; en d'antres termes
CHAI'ITIΠWlll. le tenaildans une telle soiuiiission qu'il n'y avait
à craindre de sa part aucun oiislacle ni aucune
l'llSSA>'Ci: I)K l.'iKIMMi: SI» I.ICS \MMAIX. conlrarii'lé. Il l'aul le croire ainsi, par la raison
((u'aNanldepeclicr l'Iioinmect la Icnnuc n'étaient
•2!l. On les (Milctuldiiv' iiiissi (|ii('I(iiiclois: Cnm-
pas encore enfants de ce siècle, et c'est le i)ropre
iiiiMil l'iioniiiu' ;i-l-il rcrii luiissiincc sur les pois-
des enfants de ce siècle d'enui'udrcr cl d'èlrc en-
sons de la mer, sur les oiseaux du ciel, sur tous
gendrés, comme s'en explifpie Nolic-Scignenr,
lesanit)iaii\(loinesfif|ueset tontes les lièlcssanva-
lorscpi'il déclare cette génération cbariK^lledigne
f;es, (jnand nons \()\oiis ((ne heancoupde ces der-
de mé|)ris, eu compai'aison de la vie Inlni-e ipii
nières ôtent le pins souvent la vie aux lionunes,
nous esl promise '

que beaucoup d'oiseaux nous nuisent sans (pie^


nous puissions les cloit;ner on les i)ren(lre nia!i;ré
CllAl'lTKK XX.
nos désirs? CouunenI donc avons nonsrei.u |)uis-
sance sni' eux ? Il faut Ici lenrn''|)ondre d'ahord sKxs Ai.i.Kc.or.iyi !•: dk \.\ i>ominatio.\' i>k i.'hommi:
(ju'ils se li'oinpent cousidérahlenienl, s'ils ne
SLK LES AM>IA( \.
voient riioinnicfpi'aprèsson péché, tpiandil a dû
suhir lacoudilion mortelle de celle vie, et (piand 31 . De même pour ces pai'oles adressées à nos
il est déchu de la perleciiou avec hwpielle il l'iit premiers parents: < Ayez puissance sur les pois-
créé à l'image de Dien Jfais . si dans son état de con- « sons de la mer, sur les oiseaux du ciel et tous les
danmatiou il a un tel pon\oir, qu'il commande « reptiles ipn se meuvent surla terre '-
; »sans reje-
à tantd'animaux domestiques; si d'ailleurs, quoi- terrinter[)rétalioubien cerfidne, suivant laquelle
(pi';'! raison de la l'rafjilitéde son corps, il y ait l'honune est au dessus de lous les animaux par
beaucoup debéles sauvages capables de lui don- sa raison, c'est avec vérité qu'on les entend d'une
ner la mort, aucune ne peut le soumettre, tandis manière spirituelle, en ce sens que nous devons
(|ue lui les dompte en araud nombre et presque lenir dans la soumission, et (lominei'])arla tem-
toutes; si, dis-je, malgi'é la condanmaliou ipii pérance et la modestie tous les appélits et tous
pèse sur lui, il a tant de pouvoir; que faut-il les mouvements de l'àmequi nous sont communs
penser de sa royauté, royauté dont il jouira encore avec les brides. Car si ces mouvements ne sont
suivant la promesse divine une lois qu'il sera pasi'églés, ils l'ont naître et entretiennent les plus
renouvelé et délivré? honteuses habitudes, ilsnous entraînent dans une
foule dejonissances pernicieuses et nous lendent
CHAPITRE XIX.
semblables à toute espèce de bêles. Sont-ils au
contraire bien réglés et soumis ? ils s'apprivoisent
UNION SPIRITUELLE.
tout-à-fait et vivent avecnousenboune harmonie.
30. A propos de ces mots les créa mâle : « Dieu Les mouvements naturels de notre âme en effet ne
« et femelle, et en disant Crois-
Dieu les bénit : nous sont pas étrangers; ils se nourrissent même
« sezet mullipliez-\ous, engendrez el remplissez avec nous de la connaissance des principes des
« la terre '; » on a raison de demander de ([uelle bonnes mœurs et de la vie éternelle ces connais- ;

manière il faut comprendre l'union de l'hounne sances sont comme des graines, des fruits, des her-
et de la femme avant le péché et dans quel sens, bes verdoyantes; et pourtant la vie heureuse et
charnel ou spirituel, doit être entendue cette bé- tran(|uille est celle dontnousjouissons ijuand tous
nédiction: " Croissez et nndtipliez-vous, engen- cesmouvements sont en accord avec la raison et la
« drez et remplissez la terre. Rien n'empêche >> vérité; alors on les appelle joies saintes, chastes
(|ue nous la prenions dans un sens spirituel, en délices, inclinations louables. Mais s'ils n'y sont
pensant que pour son objet elle a été clianuée en pas conformes, pour être gourvernés avec né-
fécondité charnelle après le péché-. C'était donc gligence, ils divisent, déchirent l'àme, et par eux
d'abord entre l'homme et la femme une union la vie devient fort misérable : on les appelle alors
toute chaste, assortie îyi commandement de l'un désordres, instincispci'vers et penchants mauvais.
et à l'obéissance de l'autre, et le fruit de cette union C'est ce qu'ilnous est ordonné de crucifier en
était un truit spirituel de joies invisibles et im- nous avec toute l'énergie possible jusqu'à ce que
mortelles, qui remplissait la terre, c'est-à-dire la mort soit absorbée dans sa victoire 3. L'Apôtre

' Gen. 1, 28. — 2 1 Réiract. ch. 10. n. 2. 'Luc, x.\, 34-36. —^ Gen. I, 28.- ' Cor. xv, W.
100 DE LA (;enése contre les manichéens.

dit en effet : « Ceux qui apfteitienncnt à Jésus- Ce dernier terme comme on le voit, de
\ient,
« Christ ont crucifié leur chair avec ses passions et celui d 'unité Si les Manichéens voulaient y réflé-
.

« sesdcsirs déréglés '. uCe qui d'ailleurs montre chir, ils loueraient Dieu, l'auteur et le modérateur
qu'il faut prendre aulrcnicnl qu'à la lettre les pa- de runivers, et ce qui, à raison de la condilion
roles citées plus haut, c'est que les herbes \ei- de notre mortalité, les offense dans la partie,
doyantcs et les fruits des arbres sont donnés pour ils ramèneraient à la beavité de l'ensemble
le

nourriture à toutes les espèces des bêtes, aux oi- et verraientcomment Dieu a fait toutes choses
seaux aux serpents maisnousvoyousles lions,
et : non-seulement bonnes, mais de plus très-bonnes.
les vautours, lesmilans et les aigles ne se nourrir Ainsi encore si dans un discours élégant et

que de chair, et ne \ ivre que par la mort d'autres orné, nous considérons les unes après les autres
animaux: ce que je crois aussi de (pichpies les syllabes ou même los lettres qui passent aus-
serpeids qui habitent les lieux sablonneux et sitôt (pi'elles ont fait entendre leur son, nous
déserts où ne s'élève point d'arbres, et où l'herbe ne trouvons point là ce qui plait et mérite
ne croit pas-. d'être loué. Car la beauté de ce discours nevieni
pas de chaque syllabe ou de cluKpie lettre en
CHAPITRE XXL particulier, mais de la réunion et de l'arrange-
ment de toutes.
.^, BEAUTÉ DE l'UNIVERS.
CHAPITRE XXII.
Assurément nous ne pouvons négliger ni
32.
passer sous silence ces paroles « Et Dieu vit que :
SENS ALLÉGORIQUE DU REPOS DU SEPTIÈME JOUR.
« tout ce qu'il avait fait était très-bon '. » Au sujet
dechaque chose prise àpart, ilcstditseulement: 33. Voyons encore maintenant ce que les Ma-
c< Et Dieu vit (pie cela était bon mais (piand
; .> nichéens tournent en dérision avec plus d'ef-

il est parlé detoutes les chosescnsenible, le ferme Ironlerie que d'ignorance; savoir, ce passage
bon ne suffit plus ; c'est le mot très-bon qui doit où il écrit que Dieu après a\oii' achevé le ciel et
être employé. Car si les boinmes capables d'en la terre et toutes les choses (]u'il a faites, s'est
juger, trouvent que chacune des annres de Dieu, reposé de tous ses ouvrages le septième jour, a
vue séparément et considérée en elle-même, bcni et sanctifié ce jour pour la raison qu'il s' y
fournit matière à louanges parles mesures, les est ainsi reposé '. Quel besoin avait Dieu de se
nonibres et le bel ordre qu'elle présente combien ; reposer, disenl-ils ? Est-ce que par hasard il était

plus méritent d'être îouéesces mêmes œuvrespri- épuisé de fatigues pour six jours de travail ?Ilsallé-
ses toutes à la fois, c'est-à-dire dans cet univers, guent encore témoigna;e de Noh'e-Seignciir
le

formé du concours de chacune d'elles àruniléde quand il dit : « Mon


Père jusques maintenant ne
l'ensemble? Sans contredit, un bel objet quelcon- « cesse d'agir 2; « et par là ils trompent beaucoup

que formé de plusieurs [)arties diverses est beau- d'ignorants, à qui ils s'efforcent de persuader
coup pluslouable dans le tout que dansune partie. que le nouveau Testament est en opposition avec
Si dans le corps humain, en isolant les membres l'Ancien. Mais comme ceux à qui Notre-Seigneur
les uns des autres, nous louons les yeux, tenez, les dit: « Mon Père jusques maintenant ne cesse
joues, la tête, les mains, les pieds, si nous louons « d'agir, » prenaient le repos de Dieu dans le sens
chaque belle partie considérée seule combien ;
de la lettre et (lu'euappuxant sur celle idée gros-
plus louons-nous le corps lui-même auquel tous ;
sière leur observation du sabbat, ils ne voyaient
les membres apportent la beauté particulière que pas quelle était la mystérieuse signilicalion de ce
chacun possède? Observation si vraie, qu'une jour; ainsi les Maiiichéensdans un antre dessein,
belle main qui, prise à part excitait la louange il est vrai, ignorenl également ce que signifie
étant imic au corps, perd, une fois coupée, sa le sabbat. Les premiers en l'observant charnelle-
grâce naturelle, et que le reste sans elle n'a plus ment, ceux-ci en le repoussant a\ec horreur
de beauté. Telle est la force, telle esl la puissance parce qu'ils le considèrent aussi triine manière
de l'intégrité de l'ensemble et de l'unité, que les charnelle, sont convaincus de ne le connaître
choses bonnes (reiles-mêmes et dans leur isole- aucunement. Que tous donc, Juifs et Manichéens,
ment, plaisent bien davantage quand elles sont viennent à Jésus-Christ, afin (pie de leurs yeux
réunies et concourent à faire un tout universel. soit enlevé ce voile dont parle l'Apiitre s. Car le

1 Oalat. V.Î4. — =1 Rétract, ch. 10. n. ï. — = Gcn. 131. ' Gen.ll, 1-3. — 2 Jean, V. 17' — ^ il Corinlh. III, 16.
LIVRE PRRMrr.R. — \W. lA CRIÎATION. 101

\oili' fsl l'iilfvc, (|tian(l rcinclopiic de lu siniili- sii^nilieripie nuiis nous reposerons en lui de toute
tiido et lie ralli'norit'voiiaiil à ilisparailir, ta virili- nos(i'uvi-es, si elles ont été bonnes; caries bonnes
se li'otnc mise à ini di" manièfc à |)(niv()ir èlre (Ciivres (pie nous faisons doivent être alliàbnées
\uc. à (Àdui (pii nous appelle, (p;i nous comman(l(<,
;U. Il faiil (loiir liiiMi icinaïqiier d'alionl el ipii nous inoidre la Noie de la vi'rilé, (pii nous
savoir que cotlc larim de pailcr se reneoiilie dans excile à votdoir et nous donne la force d'accom-

iieaiieoiii) d'endioils des divines Kcritures. Oiic plir ce ([u'il pn-scrit.

sii^nilie ee repos de Dieu a|irès (pi'il a t'ait

repos (pTil
CMAIMTRE Wlll.
très-lions tous ses onvraj^es, sinon le

doit nous donner un jouraprès toutes nos 'l'iivres, us LA OUKAÏION LES SEPT AGES
LES SEPT ,101 I)K ICT
si nous a NOUS lait de Intimes onnres? C'est
toutelois
DU MONDE.
sui\ant la même li;;uie de lan^aLie ipie l'ApoIre
(lit aussi: « Nous ne savons ce que nous devons X). PREMIER ,\(:E. - Mais je crois devoir exann-
« demander dans nos prières, pom- te demander ner avec iiliisde soii pourrpioi ce repos est affecté
.< eonuneil laul mais te Saint-IOspril lui-mènr"
; au se|)lième jour. Dans joule la suite du texte des
« demande pom- nous par des gémissements iné- divines Ecritur(>s je \ois c(nuuie six âges de
« narrahles '. " Le Sainl-Kspril enellel, lorsque tra\ail séparés lesuns desautics par des espèces
près de Dieuil inteipelle pour tes saints, ne tiémil de limiles bien manpiées, et la promesse du lepos
pas comme s'il était dans le besoin ou soullrail dans un septième; et ces si.\époqu(>s laborieuses
quelque détresse; mais parce que c'est lui qninous n^ssemblent aux six jours pendaid lesquelh^s ont
excite à prier toi'sipienons tiémissons, on ditipi'it été laites les o-uvres, (pie l'Ecritiue attritjue au
fait nous taisons sous l'inspira-
lui-même ce (pie En effet les premiers tenqis où le genre
Créateur.
tion qu'il nous donne. Ainsi encore ces parot(>s: humain commence à jouir de celte lumière, sont
" Le Seijmeur votre Dieu vous lente afin qu'il compares justement au pi'emierjour où Dieu l'a
« sache si vous l'aimez'. » i*uis(iue rien ne lui est faite. Regardons cet âge comme la première

incomiu, s'il permet que nous soyons tentés, ce enfance de tout ce monde que, dans la proportion
n'est pas i)our savoir l'ii-mème, mais pour nous de sa grandeur, nous devons envisager à l'instar
l'aire savoircondiien nous a\onspro(ité dans son d'un seul homme; car tout homme en naissantet
amoui'. Notre-Seignem- aussi use d'un langage en paraissant à la lumière entre par la première
seml)lal)le en disant qu'il ne sait ni le jour ni enfance dans lacairière de la vie. Cet âge va de-
l'heure de la findu monde*. En ellet que peut- puis Adam jusqu'à Noépar dixgénérations, et le
il y avoir (pi'it ignore? Mais connue il cachait déluge en est comme le soir; et aussi bien notre -

utilement ce point aux disciples, il dit n'en avoir première enfance disparait comme dans le dé- .

pas connaissance; parcMiu'en le tenant secret lugedel'oubli.


il le leur faisait ignorer. Selon la même ligure il
3(î. SECOND .vcE.^ Le second àgedu m(mde,(iui
a (lit aussi que ce jour
seulement connu du était
est semblable à la seconde enfance de l'homme, a
l'ère, parce (ju'il le faisait savoir au Fils. Avec la
son matindanslestempsdcNoé et s'étend jus((u"à
connaissance de cette ligure on résout sans au- Abraham jiar di.x autres générations. Il est com-
cune difficulté une loule de questions dans les paré avec raison au second jour, où le firmament
di\iues Kcritures. Nos discoiu's ordinaires sont pour séparer les eaux, parce que
a élé fait
mènie remplis de semhlahles expressions. Ainsi l'arche où Noé avec sa famille
était était aussi
nous disons que le jour est joyeux, parce tpi'il comme un firmament entre les eaux inférieures
nous inspire la joie que le froid est lent parce, ;
(jui la soutenaient et les eaux supérieures qui
(pi'il nous engourdit; qu'une fosse est aveugle, point par un
tombaient sur elle. Cet âge ne finit
parce que nous ne la voyons pas; qu'une langue déluge, parce que notre seconde enfance n'esl
est polie, parce qu'elle est l'instrument de belles mémoire par
point effacée non plus de notre
paroles ;enlin nous disons que le temps est tran-
l'oubli.Nous nous souvenons en efl'et de cette
((uille et libre de toute sorte (rineommodités,
enfance mais non delà précédente. Le soir de
;

(|uand nous y vivons lrau<juillesetsanscrainte. Or,


cet âge est la confusion des langues parmi ceux
de même il a été dit que Dieu s'est reposé de tous
qui élevaient la tour de Dabel ; et le matin de
ses ouvrages après les avoir faits ti'ès-bons, pour Abraham. Mais, pas
l'âge suivant se lève avec
plus que le premier, le second âge ne donna
'
I Hom. vlll, 26. — Deul. xlil, 3. — '
.Malt. .\.viv, 36.
102 DE LA GENÈSE CONTRE LES MANICHÉENS.

naissance au peuple de Dieu, parce que la secon- des Rois qui ont mérité à la nation juive d'être
de enfance n'est pas plus apte que la première à menée en captivité et réduite à l'esclavage, sont
la génération. comme le soir de cette époque.
37. TRoisiiiME .\GE. — Le matin donc sc fait avec 39. cixQnÈME .VGE. — Les .luifspassent à Baby-
Abraliam et alors commence pour le monde un lone; ils sont traités avec douceur dans leur cap-
troisième âge semblable à l'adolescence de lliom- tivité et trouvent le repos sur la terre étrangère:
me. On a raison de le comparer au troisième c'est lematin de l'âge suivant qui s'étend jusqu'à
jour où la terre fut séparée des eaux. En effet la l'arrivée de Jésus-Christ Notre-Seignein-. Cet âge
mer représente avec beaucoup de justesse ces est le cinquième, c'est-à-dire le déclin de la jeu-
nations dont l'erreur inconstante flotte au gré des nesse à la vieillesse, déclin qui n'est pas encore
\aines doctrines de l'idulàtrie comme au souille la vieillesse, mais n'est déjà plus lajeunesse. C'est
de touslesjvents, et lepeuplede Dieu fut séparé par l'âge de l'homme mûr que les Grecs appellent
Abraham des superstitions et des agitations de 7:piaê-jTr;;,car le vieillard chez eux n'est pas ap-
ces gentils, connue la terre, quand dégagée des pelé 7:p£aoiJTr;<;, mais yéc'ji'j. Et île lait cet âge du
eaux, elle apparut aride: il avait soif de la rosée monde a été celui où le peuple Juif a vu fléchir
céleste des divins commandements. En adorant ettomber la force de son royaume, de la même
le seul vrai Dieu, ce peuple reçut les Ecritures et manière (pie pourriioimne la vigueur de lajeu-
les prophéties, alin de rapporter des fruits utiles nesse disparait quand il passe à l'âge mûr. C'est
comme une terre bien arrosée ; et ce troisième avec raison qu'on le compare aucinquièmejour,
âge put donner un peuple à Dieu, comme le où ont été créés dans les eaux les poissons, et
troisième âge de l'honune, c'est-à-dire l'adoles- les oiseaux du ciel ; les Juifs ayant dû vivre alors
cence, peut donner le jour à des enfants. Q'est parmi les nations comme au milieu de l'Océan,

pourquoi Dieu dit à Abraham : « Je t'ai établi le sans avoir de lieu fixe et assuré non plus que les
« père d'une multiluiie de nations, je ferai croître oiseaux qui volent. Mais il y avait là aussi île
« ta race à l'intini ;
je te rendrai chef de nations, grands poissons : à savoir ces hommes illustres
« et des rois sortiront de loi. Jélablirai mon qui eurent le pouvoir de rester maîtres des flots

« alliance entre moi et toi, et après toi avec ta de ce monde plulùt que de subir un joug hon-
« race dans la suite de leurs générations ; ce teux dans celle captivité, la crainte en effet
« sera une alliance éternelle, et je serai ton Dieu ne put jamais les faiie succomber au cidle des
« et le Dieu delà postérité et je le donnerai pour idoles. Rcmanpmns encore (pie Dieu bénit en
« toujours h toi et à ta postérité la terre (ii'i lu ces termes les êtres vivants lires des eau\ :

' habites, toute la terre de Cbanaan, el je serai « Croissez, multipliez-Aous, et remplissez les eaiix
'. leur Dieu '. " Ce troisième âge s'étend depuis •< delà mer ; el (pie les oiseaux se mulli|jlieiit
Abraham jusqu'à Da\id par (jualorze généra- « sur la terre '. > C'est ainsi que la nation jui>e
tions. Le soir de cet âge est dans les péchés du depuis qu'elle fut dispersée au milieu des gentils
peuple contre la loi de Dieu, avant le règne de s'accrut considérablement. (>e (pii fait comme le

Saiil, et il se termine par le désordre et l'impiété soir de cet âge, c'est la imilliplication des péchés
de ce méchant roi. parmi les Juifs car ils devinrent si aveugles qu'ils
;

38. yiATUiii.Mi;\GE. — Avec le règne de David ne purent reconnaître le Seigneur Jésus-Christ.


apparaît malin d'un autre âge. Cet âge est
le 40. SIXIÈME \(,K. —Le malin se fait à la prédi-

semblable àla jeunesse. C'est en effet la jeunesse cation de l'Evangile par Noire-Seigneur Jésus-
qui prime entre tous les âges dont elle est l'or- Christ, et le CHKpiième jour ou âge du monde esl
nement et le solide appui. C/esl pourquoi on fini. Alors commence
le sixième, où apparaît la

peut comparer au quatrième jour, où ont été


le \ieillesse de l'homme ancien. Car dans cet âge,

faits les astresau lîrmainent du ciel. Est-il rien le royaume temporel des Juifs reçoit un coup si

ipii représente mieux la splendeur de laro\auté funeste, cpiand le temple lui-même (>st ruiné et

que le brillant éclat du soleil ? Pour la clarté de les sacrifices abolis, (pie ce malheureux |)eiiple,

la lune elle désigne le peuple obéissant à l'em- pource qui est de son existence en corps de nation,
pire du souverain, et la synagogue elle-même : les exhale en (pielque sorte le dernier soupir. Alors
étoiles représenleni les piinees de ce peuple et cependant, connue dans la xieillessede i'hoiniue

tout ce (|ui est fondé sur la stabilité du trône ancien, vient riiomme nouveau (|ui commence
comme les astres fixés au firmament. Les péchés à vivre d'une manière spirituelle; aussi bien, le
' Gen. XVII, 5-b. 'Gen. 1, Hi.
.

LIVRE PREMIER. — DE LA CRIÎATION. 103

sixième jour do la Création, il avait iHo dit ; « Que ne pttd jamais flétrir le souffle biùlant deslri-
« la lorro prodiiisi' les âmes vivantes, » ele, tinlaliiins, pour allérmir la foi, l'i-spcrauce et la

tandis ((lie le ein<iiiiènie jour il avait été dit, non cliaiitcdcstinceà l'ctcrnclle vie. En se iiomrisanf

l>as(ine la terre produise les ;\mes vi\antes, etc. de ces alimeids l'honnne spirituel peut com-
mais : c Qu'elle produise des fi-pliies d'ànies vi- prendre hrauconp de choses; mais l'homme
• >antes, " i)arei' ipie les reptiles sont deseorpsel i ncore charnel, c'est-à-diie peu avancé en Jésus-
ils lig;uicid bien le peuple parmi les na- juit'(pii C-lirist et qu'on peut appeler le troupeau de Dieu,
tions, comme au milieu d'ime vaste mer, était croit beaucoup sans comprendre encore. Tous
encore esclave de la loi par la circoncision cor- cependant ont la même nomiliu'e.
porelle et les sacrilices taiulisque lenom d'âme ' : il. SEPTIÈME AGE. —Ce qui fait comme le soir
\ivaide désigne l'âme qui asi)ire déjà aux choses de cet âge ,et plaise à Dieu (|u'il ne vienne pas de
de l'éternité. noire temps, si fontefois il n'a [tas déjà commencé,
Les serpents et les animaux domestiques que le Seiguem- nous le manjuc (>n disant: « Pensez-
produit la donc les nations ((ui
terre sis^nitient « vous que quand viendra le Fils de l'homme il
\ont manière solide à l'K-
hienlôt ci'oire d'mie '< trouve encore de ? Après
la foi sur la terre ' >>

vaufiile ;el doid il est dit au moment delà vision ce soir aura lieu matin, (piand
Seigneur en
le le

montrée à Saint Fiei'redans les Actesdes Apolivs : peisonne apparaîtra dans sa gloire. Alors se re-
« Tue et mange. » Connue l'Apôtre objectait poseront avec Jésus-Christ de toutes leursœuvres,
(|ne ces animaux n'étaient point purs, il reçut cette ceux à qui il a élé dit « Soyez parfaits comme :

réponse : « N'appelle (las impur ce que Dieu a « votre Père qui est dans lescieux -^ » Ceux-là en
« purifié '. >> L'homme alors est lait à l'image et à la effet font des œuvres excellentes ; et ils doiveid
ressemblimce de Pieu, de même qu'.ui sixième espérer ensuite le repos d'un septième joui' qui
âge dont nous parlons nait dans la chair Notre- n'a point de soir.
Seigneur, de qui un prophète avait dit : « H est un Ou ne peut donc exprimer par le discours de
' honune, cl (|ui le reconnaiti'a ? » Et connue au quelle manière Dieu a formé
fait et le ciel, la

sixième jour nait la nature humaine avec les terre et toutes les créatures sorties de ses mains.
deuxsexes, ainsi dansée sixième âge Jésus-Chi'ist Mais cette exposition suivant l'ordre des jours
et l'Eglise. L'homme en ce jour reçoit la donù- retrace de telle sorte l'histoire des choses
nalion sur les l)étes de la terre, les serpents et accomplies, qu'elle présente surtout le tableau
les oiseaux du ciel ; ainsi Jésus-Christ tiaus cet des événements futurs.
âge gouverne les âmes qui lui sont soumises, et
qui sont sennes à l'Eglise de cet Homme-Dieu, CHAPITRE XXIV.
pallie des nations, partie du peuple Juif, atin
IXÉGALITÉ DES AGES DU MONDE.
(|ue par lui lussent domptés et adoucis ces
honnnes livrés à la concupiscence charnelle 42. Si l'on demande pourquoi, d'après nos
connue un troupeau, ou enveloppés des ténèbres explications, les deux premiers de ces âges du
delaeuriosité comme des serpents, ou emportés monde se composent l'un et l'autre de dix géné-
par l'orgueil cannne des oiseaux. Et de même rations seulement, tandis (jne les trois qui sui-
<iue l'homme avec les animaux qui soid autour vent en comptent chacun quatorze et que le
de lui, de graines, de fruits el
se nourrit sixième n'est aucunement déterminé par le
il'herbes vivaces, ainsi dans le sixième âge tout nombre des générations -^
; Uest facile de voir
honune spirituel, fout fidèle ministre du Christ, que dans l'homme deux âges par les-
aussi, les
qui marche sur les traces du Sauveur autant quels il débute, savoir, la première et la seconde
((u'il lui est possible, se nourrit spirituellement enfance, appartiennent aux sens du corps, qui
avec le peuple rangé sous son autorité de la sul)s- sont au nombre de cinq, la vue, l'ouïe, l'odorat, le
tance des Saintes-Ecritures et de la loiilivine. Il goût et le loucher. Or comme dans la nature
y tiouve comme
des semences précieuses pour humaine il ya un double sexe poui- produire ces
se rendre fécond en idées et en paroles, comme générations, savoir le sexe masculin et le sexe
des arbres fruitiers pour soutenir ses niœm's au féminin, on double le nombre cinq, on obtient
si
milieu îles hommes, enfin comme des herbes le nombre dix. A partir de l'adolescence et pour
vivaces, c'est-à-dire toujoui-s vigoureuses et que le temps qui suit, c'est-à-dire quand la raison a

I
Hétract. ch. x, n,3. — ' Acte, x, 13-15. I
Luc, xviii, 8. — - Matt. v,48. — ^ Matt. i, 1
104 DE LA GENÈSE CONTRE LES MANICHÉENS.

pu prévaloir dans l'iiommo, aux cinq sens cor- aux .'toiles dans les ténèbres, brillent et resplen-
porels se joifjncnl la connaissance et l'action, dissent dans l'obscurité de cette vie mortelle.
qui règlent et gouvernent la vie c'est le nombre ;
Fortilié par ces connaissances on doit, au cin-
sept qui pareillement doublé à cause du double (juième jour, commencer à agir dans les vagues
monte aux quatorze générations dont se
sexe, se de ce monde si dans
plein d'agitation, comme
compose chacun des trois âges consécutifs que les eaux de la mer, pour l'avantage de la société
nous appelons l'adolescence, la jeunesse et l'âge qu'on forme avec ses frères et par les mou- ;

mùr du monde. Mais de même qu'en nous l'âge vements corporels qui appartiennent à la mer de
de la vieillesse n'est délimité par aucun nombre cette vie, on doit faire naître les reptiles d'âmes

convenu d'années, et que tout le temps de la vie, vivantes, c'est-à-dire, des anivres qui sei'vent
après les cin(j premiers âges, est rapporté sans aux vivants, et les grands poissons , c'est-à-dire
distinction à la vi(Mllesse de même dans ce : des actions très-généreuses contre lesquelles se
sixième âge du monde, il n'est point parlé de brisent et demeurent inutiles les tlots de ce
génération ; et cela atin que reste toujours caché monde ; entin les oiseaux du ciel, c'est-à-dire la

le dernier jour (jue le Seigneur a utilement dé- prédication des choses célestes. Au sixième join*
claré de voir être inconnu. on doit produire de la terre une âme vivante,
c'est-à-dire, que par la stabilité de son esprit
CHAPITRE \XV. où on renferme des fruits spii'ituels, en d'autres
termes de bonnes pensées, ou doit réglerions ses
ALLÉGORIE PLIS PROFONDE DKS SKI'T .lOlRS DE LA mouvements intérieurs de manière qu'il y ait en
CRÉATION. soi une âme vivante, une âme soumise à la
raison el à la justice, non au caprice et au péché.
43. Chacun de nous, envisagé du côté des Ainsi encore l'homme doit se faire à l'image et
bonnes œuvres et d'une vie bien réglée, voit la à la ressemblance de Dieu, mâle et femelle,
carrière de son existence partagée comme eu six par l'entendement et l'action; deux faculli'S dont j

jours distincts, après lesquels il doit espérer le l'union produua une génération toute spiri-

repos. Au premier jour c'est la lumière de la loi, tuelle qui remplira la terre, soumettra la chair
on croit à ce qui est visible et c'est pour domier et léra tout ce (pie nous avons dit plus haut en
cette toi que le Seigneur a daigné apparailre parlant de l'homme dans son état de perfection.
visiblement. Au second jour, c'est la lernictéde Or pour ces sortes de jours, le soir consiste dans
la vie réglée; on distingue les choses de la chair l'achève/nent de chaque opération, et le malm
de celles de l'esprit, de même que le firmament dans le commencement de celle qui vient ensuile.
sépare les eaux intérieures de celles qui sont au Après avoir durant ces six jours fait des o-uvres
dessus. Au troisième jour, pour porter les fruits excellentes, l'homme doit espérer un repos
des bonnes ouivres, on dégage son âme de la éternel comprendre ce que signifient ces
el

souillure des passions, on la dérobe aux Ilots paroles « Le septième jour Dieu se reposa de
:

des tentations de la ch;iir ; comme Dieu a séparé « tous ses ouvrages'. C'est Dieu lui-même qui
>>

la ferme des fiots de la


terre mer; en sorte f[u'ini fait en nous les œuvres qu'il nous commande de

peut dire « Par l'esprit, je suis soumis à la loi de


: faire c'est donc avec raison qu'on lui attribue le
;

< Dieu et par la chair à la loi du péché » Au '


. repos, quand après toutes cesœuvres il doit nous le
quatrième jour, appuyé sur le foudemeut de donner. D'ailleurs, si l'on jteut dire (pi'un père de
l'éducation religieuse, on produit et ou dislingue famille bâtit une maison, ([uoiqu'il ne la fasse

lesidéesspirituelles on voitce qu'est l'immuable


: pas de ses propres mains, mais par le travail de
vérité qui brille dans l'âme semblable au soleil ; ceux qu'il commande après avoir loué leiu's ser-
on voit comuieul Tàme devient participante de \ices on dit justement aussi <pril se repose de
;

cette même vérité et donne l'ordre et la beauté ses ouvrages; (piand la maison étant finie, il
au corps, connue la hnuMpii éclaire la nuit on ;
permet le re]tos et un diiux Vmw à ceux (pii
voit commenl les idées spirituelles, semblables étaient sous ses ordres.

'
Hum. vil, 'i\i. ' Gen. I. il.
DE LA GENESE CONTRE LES MANICHEENS.
LIVRE SECOND.

I.amem- conlinuc son exposition de la (Icnèsc ilcpuis ce verset (luatrlrmc du cliapitie so-oml : • Tel est le livre delà création
" ilii lii'l l'I de la terre, •• jnsiin'au verset ipii nou^i rnotili-c Adam et Kve chassés du paradis tern-stre. \'.n leriiiiiianl il rumparc
les du(îHies de I Kt'lise avec les eirenrs des M.inichérns.

CHAPITRK PHKMIKK. « le troisième fleuve, c'est le Tigre qui se répand


« vers les Assyriens. Et le (piatiième est l'Eii-

TKXTE A KVPI.iyiRR nA>S LE SECOISn LIVUE. « plirate. Oi' le Seigneur Dieu |tiil l'Iiomme et le

« plaça dausie paradis terreslre |»oin(pi'il leciil-

1. Après l'exposition en détail de l'œiivi'e des <c tivàl el le gardât. Elle Seigneur Hieii donna
jours, il \ a une softe de eoiiehision oi"i tout '< cet ordre à .Vdam : l'se pour ta uouriiliue de
sei)t

ee ipii pivcèile est appelé le livie de laeiration « tout arbre «pii est dans le paradis mais ne ;

du eiel et de la leiTe,l)ien que ee soit une faible « mange pas du fruil de l'arbre delà science du
partie du li\fe; mais il a mérité eetiti-e paire (pie « bien et ilti mal. Car le jour 011 tu en auras mangé,

lesscpl jours nous pi'éseuten! la lifiiife et eomiiic « tu mourras de mort. Le Seigneur Dieu dit en-
une irnaueraeeoureie de toute la suite dessièeles « suite: Il n'est pas bon ipie riiommesoilseiil fai- :

depuis leeoinmeneeiiieiitjiis([u'à latin. A partir « sons-liiiimaideseinblableà lui. Et Dieu amena


delà, réeiiv.du saeré s'oecupe de riioinme d'une '< devant Adam tontes les espèces d'animaux do-
maiiièi-e spéeiale et tout le réeit qu'il nous otIVe '< mestiqnes (pi'il avait créés, comme aussi toutes

d'ahord veut selon nous être eiitentlu, non dans « les espèces de bêles sauvages et lotîtes les es-
le sens propre, mais dans le sens (iguré, pour te pèces d'oiseaux qui volent sous le ciel, afin qu'il

exeieer les esprits qui elierclient Javériti' et les <t vit comment il les appellerait ; et les noms
retirer par une applieation spirituelle du soin su- « qu'il d(uuia à tous ces êtres vivants sont leurs

perflu des choses matérielles. Voiei en ellét la <c noms véritables. Adam imposadonc des noms à
teneur de ee récit :
« tous les animaux domestiques, à tous les

« Tel est le Hmv de la eréalioii du eiel et de la « oiseaux du ciel et à toutes les bêles sauvages,
« lerre, ipiand tut arrivé le jour où Dieu fit l'un « et comme il les nomma ils sont encore nommés
.1 et l'aulre et ton les les piaules verdo\antes des < aujourd'hui. Mais il n'y eut ])oint jusipie-là
« eliamps cpii n'étaient pas aupai^nant sur la H pour Adam d'aide semblable à lui. Or Dieu lui

a terre, et tontes les campagne, qui herbes de la « envoya un sommeil profond et Adam s'eudor-
'< n'y avaient pas encore poussé. Car Dieu n'avait « mit el Dieu prit une de ces côtes et en remplit
;

« pas encore l'ait pleuvoir sur la terre, et il n'y « la place de chair, et de cette côte que Dieu prit

. « avait point d'homme pour y travailler. Mais il '< à .Vdam, il forma la iéinme. Et il l'amena de-
« s'élevait de la terre comme une source qui en '< vaut .\.dam, alin que celui-ci vit comment il
« arrosait toute la surface. Et alors Dieu forma « l'appellerait. Or Adam dit Voici maintenant :

« l'Iiomine du limon de la lerre el répandit sur « l'os de mes os et la chair de ma chair. Celle-ci
« son visage un souille de vie eirUomme de\iut < s'appellera femme, c'est-à-dire faite de l'homme
« àmc vivante. Et alors Dieu planta un jardin de n et c'est celle qui sera mon aide. Pour cela
« déliées à l'Orient et il \ mit l'homme (pi'il avait « l'Iiomme quittera son père et sa mère et s'atla-
K formé. Et Dieu produisit aussi de la terre toute « cheraàson épouse, et ils seront deux dans une
« sorte d'arbres beaux à la vue, el dont le fruit « même chair. Or tons deux étaient nus, savoir
< était bon à maiiiier ; au milieu du pai'adis
et ' .\.dam et son épouse, et ilsii'en rougissaient pas.
'I l'arbre de vie et l'arbre de la science ilu bien :2. a Mais le serpent était le plus avisé de tous les
« et du mal. Or un tlcuve sortait du jardin de « animaux qui étaient sur la terre et que Dieu
« délices, et l'arrosait. De là il se divise en qua- « avait faits. Et le serpent dit à la femme : Pour-
« Ire autre tlenves. L'im s'appelle l'hison ; c'est « quoi Dieu vous a-t-il ilit de ne pas user pour
<i celui qui coule autour de la terre d'Evilath, « votre nourriture de tout arbre qui est dans le
" pavsqui produit del'or et le meilleur du inonde, "jardin? La feiume répoiidil au serpent: Nous
i< de même que le rubis et la pierre d'onsx. Le " mangerons du fruit de tout arbre (pii est dans

second fleuve s'appelle Géon ; e'esl celui qui « le (laradis, mais pour le fruit de l'arbre qui est

< coule autour de toute la terre d'Etliio|)ie. Pour au miliiMi du paradis. Dieu nous a dit de n'en
"
106 DE LA GENÈSE CONTRE LES MANICHÉENS.

« point manger et même de n'y pas toucher, de ce terre el lu retourneras en terre. Adam alors
« peurquenoiis ne mourions. Et le serpent dit à la ce donna à sa femme le nom de Vie, parce qu'elle
« femme Vous ne mourrez pas de mort, car Dieu
: ce est la mère de tous les vivants. Et alors le Sei-
« savait qu'au jour où vous aurez mangé de ce fruit, ec gneur Dieu fit à Adam et à sa femme des tuni-
Cl vos yeux seront ouverts et vous serez comme ec quesdepeauxpourlesenrevèlir;elildit: Voilà
« des Dieux sachant le bien et le mal. Et la femme ce qu'Adam est devenu comme un de nous, ca-
« vit que le fruit (Hait bon à manger, qu'il était ee pahle de connaître le bien et le mal. El pour
« agréable aux yeux de le voir et de le contem- ce qu'il ne mit pas la main sur l'arbi'e de ^ie, et

« pler. donc le fruit de cet arbre elle


Elle prit ;
ce n'acquit pas en prenant el mangeant du fruil
« en mangea et en donna à son mari qui le reçut ce de cet arbre le pouvoir de vivre élernellemenl.
« et le mangea pareillement. Or leurs yeux furent Cl le Seigneur Dieu le chassa du paradis de déli-
« ouverts et ils s'aperçurent qu'ils étaient nus, et ce ces, afin qu'il cultivât la terre même de la-

« ils prirent des feuilles de figuier pour s'en faire ce quelle il avait été tiré. El chassé du Paradis il

« des vêtements. Ayant alors entendu la voix du « demeura vis-à-vis de ce lieu de délices. Et pom'
« Seigneur qui se promenait dans le Paradis sur ce garder la voie qui l'aurait conduit à l'arbre de
.•
le soir, Adam et sa femme pour se cacher dede- ce vie. Dieu mil devant le l*aradis un Chérubin
« vant la face du Seigneur, se retirèrent près de ce qui brandissait une épée llamboyanle '
. »

« l'arbre qui était au milieu du paradis. Et le Sei-

« neur Dieu appela Adam et lui dit : Adam où es-


CHAPITRE IL

« lu '!

Seigneur, dit celui-ci, j'ai entendu votre
LA GE.^ÈSE iN'E PEUT ÊTRE PARTOUT LNTERPRÉTÉE
« voixdansle paradisetj'ai craintetje me suisca-
A LA LETTRE.
« ché, parce que je suis nu. Et le Seigneur Dieu
« dit: Qui donc t'a fait savoir que tu es nu, si ce 3. Si les Manichéens aimaient mieux discuter
« n'estque tu asmangédufruit duquel seul je t'a- ces paroles mystérieuses en cherchant avec res-
it vais déJéndu de manger ? Et Adam dit La :
pect le sens qu'elles renlennent, que de les cri-
« femme que vous m'avez donnée, m'a présenté de tiquer et de les accuseï' avec mépris, dès lors ils ne
« ce fruit pour que j'en mangeasse et j'en ai man- seraient plus Manichéens car eu demandant
; ils

« gé. Et Dieu dit à la femme Pourquoi as-tu fait :


obliendraient, en cherchant ils lrou\eraient et
« cela? Et la fennne dit : Le serpent m'a séduite en frappant ils se feraient ouvrir. Des gens qui
Cl et j'ai mangé de ce fruit. El le Seigneur Dieu cherchent la vérité avec un soin pieux proposent
ce dit au serpent : Parce que tu as fait cela, tu se- en elfel plus de questions sui' les deux chapitres
c< ras maudit de tous les animaux domestiques et dont il s'agit, que ces malheureux et ces impies.
ce de toutes les espèces de hèles sauvages. Tu ?ilais voici la différence. Lespremicrs cherchent
ce ramperas sur tapoilrine clsurtonvenh'e, et tu pour trouver, tandis (jue les seconds ne travail-
'c mangeras la teri-e tous les jours de ta vie. Et lent que pom" ne pas voir ce qu'ils cherchent.
ce je mettrai l'inimitié entre toi et la femme ; et Tout ce texte doit donc être discuté d'abord au
ce entre ta semence et la sienne. Elle observera poini de vue de l'histoire, ensuite au point de vue
ce ta tète et toi son talon. 11 dit ensuite à la femme ;
de la prophélie. En tant qu'historique il présente
ce Multipliant je nudtiplierai tes peines el tes la narrâlion des faits; en tant que prophétique
Cl soupirs, tu enfanteras dans la douleur, el tu ilannonce des événements futurs. Assurément
ce l'inclineras de\anlton mari el il le dominera, (piiconque voudra prendre à la lettre toutes les
'c El alors Dieu dii à Adam: Parce que lu as paroles (jue nous venons de l'apporter, c'esl-à-
ce écouté de la fennne, el que tu as mangé
la voix dire les entendre dans l'unique sens qui ressort
ce du fruil duquel seul je t'avais défendu dé niau- de elle-même, et qui pourra ainsi évi-
la lettre
ce ger, la terre [)our loi sera maudite en puni- ter leblasphème sans dire que des choses con-
ec lion de ce que tu as lait, et tu tireras d'elle la formes à la foi catholique, bien loin de mériter
ce nourriture dans la hislesseetlesgémissemeals des reproches, il doil être tenu connue un inter-
ce Ions les jours de la \\c. Elle le produira des prèle de premier ordre el digne de tout (loge.
ce épines el des ronces et tu mangeras l'herbe de Mais s'il est impossible de lem- trouver un sens
C' ton champ. Tu mangeras ton pain à la sueur (pii convienne à la piélé et soil digne de Dieu, à
ce de Ion l'roul, jus(|n'à ce (pie lu reloin nés dans inoins(lecioire(]uecesonldesligureset desénig-
ce la terre de laquelle tu as_été lire ; car tu es I
Gcn. M, 1-25, m, 1-2*.
IJVnK II. —LE PARADIS TERRESTRE. ur,

mes appuyi-s sur


; rautoritc^ des ApAIros qui doii- (luctiom verdoijantes et l'herbe des champs, sans
iu'iillas()liili()ii(k'taiil(ie(lir(ifiillcs(|iiise irncoii- rien dire de tant d'aulreschoses qui sont au ciel
tri'iit (liiiis Ii's livrt's de raiuMouTcsIamonl , sui- et sur la leri-e on même dans la mer? N'i;sl-ce
vons iioIrtMlossoin.ct inmiis du secours de Celui point parce (pi'il \cut faire entendre sous ci; ter-
(jui nous exhorte à demander, à eiiereiier et à me la créatiu'e invisible c'est-à-dire l'Ame. .Vussi
frapper ', e\pli(]U()ns, coid'orinénienl à la loi ea- bien dans les Ecrilures le inonde est souvent dé-
lholi(pie, toutes ces lifîures relatives à l'histoire signé sous la figure d'un champ ; el le Seigneur
ou .1 la proi)lir'lie, sans rien prt'ju;.;!'!' conlic nu liii-mémedit : < l.echampc'est le inonde, >, ipiaiid
traité nieilleur et l'ait avec plus de soin, soit par il expose la paral)oleoii il s'agit de la zizanie mê-
nous, soit pai' d'autres à qui Dieuveid liien coni- lée au bon grain Aussi à cause de leur vitalité
'.

uuuii(iuer sa Iniuièrc. vigoureuse, le nom de productions \erdo\aides


de la campagne eslem[)loyépom'sigui lier la créa-
CHAPITRE III.
ture spirituelle et invisible, et nous interprétons

OLE SIGNIFIENT LES PRODICTIONS VERDOYANTES.


!< nom de l'herbe dans le même sens el pour la

même raison '. Ce (pi'ajoute l'écrivain sacir :

i. « Le jour arriva donc où Dieu créa le ciel el '(Uni n'étaient pas aui)aravant sur la terre, «doit
« la terre et toutes les ])rodiicti(iiis \erdo\autes être couqiris de celle manière avant que l'àme ;

« des chain|)s, ((ui n'élaieid pas auparavant sur la eût pêche. Depuis en efl'et (pfelle est souillée par

« terre et foutes les herbes de la campagne ''. » des désirs tout terrestres, on dit d'elle avec raison
Plus haut on voit le nomlire de sept jours main- ;
(ju'elle a comme pris naissance sur la terre, ou
tenaid, selon l'auteiu' sacré, Dieu lait dans un seul qu'elle est sur la terre ; et de lace ([ui suit : « Car
jour le ciel et la terre, el toute la verdure el
« Dieu n'axait i)as encore fait i)leu\oir sur la
toute l'herhe des cliam|)s; et l'on a raison d'en- « terre '. »

tendre (|ne le uoui de ce jour manpie tout cet

espace de temps. Car Dieu a l'ait tout le temps


CHAPITRE IV.

avec toutes les créatiu'estemporelleset visibles qui


Pr.lIE MVSTÉRIELSE.
sont désignées par le nom de ciel et de terre. Ce
qui mérite et réclame notre attention, c'est que Maintenant encore Dieu fait naître la verdure
l'Ecriture après avoir nommé le jour qui a été des champs, mais en répandant la pluie sur la
lait, puis le ciel et la terre, ajoute encoie les terre, c'est-à-dire, (pie par sa pai'oleil fait re-
l>r(i(lii(iii)iisvi'r(lo!i(iiit('s('lt(nift'riii'rht'(lescluimii.'i; prendre aux àmes une nouvelle vigueur; mais il
car lorsqu'il est Dans le principe Dieu (il dit : « les arrose de l'eau des nuées, en d'autres termes
« le ne s'agit pas de la créa-
ciel et la leire, « il des Ecrilures que nous ont laissées les prophètes
tion (les plantes et des herbes de la campagne ;
el les Apôtres. A ces Ecrilures convient juste-
puis(pi"il est écrit sansaucune équivoque que les ment le nom de nuées, parce que les paroles
plantes et les herbes des champs turent créées au qu'elles renferment, qui retentissent el qui pas-
troisième jour ; el d'ailleurs ro|)i>ration énoncée sent en frappant l'air, siu'tout si l'on considère
par les mots : '< Dans le (irincipe Dieu lit encore robscuritédesallégoriescomparables à un
' le ciel el la terre, » n'appartient à aucun des brouillard épais, ressemblent bien à des nuées, et
sept jom-sdoni en ell'el,
il est iiuestion. Jus(|iie-là quaudon lesexplique, ellesdeviennent pourceux
ou bien récri\aiu sacré a voulu désigner sous le ([ui les comprennent bien, comme une pluie de
nom de ciel et de terre la matière même dont vérité qui tombe sur eux el les pénètre. Mais il
toutes les choses ont été faites, ou du moins il a n'en élaitpasaiusiquimd l'àme n'avait pas encore
(Tnljord sous ce nom présenté la création entière péché, c!est-à-(lire, quand la verdure des champs
en disant : «Dans le principe Dieu lit le ciel et la n'était pas encore sur la terre. « Car Dieu n'avait
" terre » puis prenant les uns après les autres les
; « pas encore fait pieux oir sur la terre, il n'y avait
ouvrages de Dieu, il les expose en particulier se- « pasd'homme pour y travailler. « L'homme en
counne il fallait raison du
lon l'ordre des jours, <'i effelquilravaillesurlaterre a besoin de la pluie des
sens prophétique que nous avons relevé dans le n.uéesdonl nous venons de parler. Or, c'est après
livre premier. Pourquoi donc niaiutenaul aiirès le péché que l'honune a connnencé son travail

aM'irnommé lecielet la terre, ajoute-t-il : les pro- sur la terre el (pie les nuées lui sont devenues nc-

Mdll. vu, 7. — ' Geii. Il, -Mail. .ïiii, aa. — -1 Kétr. x, u. 3. — -' Gen. il, 5.1
108 DE LA GENÈSE CONTRE LES MANICHÉENS.

ccssaires. Avant le péché, quand Dieu eut donné intérieure et n'avait pas besoin d'être alimentée
rétre à la vei'durc et à l'herbe des champs, la- par les nuées. « Dieu, en eflét, n'avait pas encore
quelle sifiniliait la créatiu-e invisible comme « fait pleuvoir sur la terre, et il n'y avait point
nous l'avons dit il y avait une source intérieure
;
'< d'homme pour y travailler. >' Après avoir dit:
pour arroser cette créature, Dieu parlait d'une « Dieu n'avait pas encore fait pieux oir sur la

manière iumiédiate à son intelligence ainsi elle : « terre,» l'écrivain sacré ajoute la raison pourla-
n'avait pas à recevoir du dehors les paroles di- quelleiln'avait pas encore fait pleuvoir: « C'est
vines, coninie une pluie tombant des nuées, mais « qu'il n'y avaii d'homme pour travailler
point
elle s'abreuvait de la vérité à la som-ce même « sur la terre. » Orl'homme commença à travailler
jaillissant dans son cœur. sur la terre quand après
péché il perdit la \ie le

bienheureuse dont dans le paradis. Car


il jouissait
CHAPITRE V. voici ce qui est écrit « Et le Seigneur Dieu le :

« chassa du paradis de délices pour le faire tra-


SOURCE DE VÉRITÉ.
itvailler sur la terre même de laquelle il avait
" été tiré. » C'est ce que nous examinerons en
(i. «Il sortait donc de la terre une fontaine et

« elle arrosait toute la surlace de la terre, >> dit son lieu ', et ce que je rapelle dès maintenant

l'écrivain sacré. Il s'agit de la terre dont parle le pour faire comprendre que l'homme travaillant
sni' la terre, c'esl-;i-(hre gémissant dans l'aridité
Psalmiste, quand il dit : « Vous êtes mon espé-
« rance, mon partaire dans la terre des vivants. < » de son état de pécheur, a besoin de recevoir du
Or quand l'àme était arrosée de l'eau de celte langage humain la divine doctrine, comme la
pluie des nuées. Mais celte science sera détruite.
source, elle n'avait pas encore jeté dehors par l'oi--

gueil l'intérieur de son être ; car « le commence- Car maintenant nous voyons en énigme, comme
cherchant la vie dans un nuage, mais alors nous
" ment de l'orgueil de riiomme est son éloi-
xeri ons face à face ', quand toute la surface de
« gnement de Dieu. » Et parce que, l'enflure
notre terre sera arrosée de la source d'eau vive
de l'orgueil a\ant poussé l'àme au dehors, celle-
jaillissant de l'intérieur. C'est a'msi qu'il faut en-
ci a cessé d'être arrosée par la source qui cou-

lait en elle, elle subit à juste titre le reproche


tendre ce passage : « Une source s'élevait de la
« terre et en arrosaittoute lasurl'ace. » En elfel si
contenu dansées paroles du prophète -: « Pourquoi
« s'enorgueillit la terre et la cendre? Car elle ajelé
nous voulonsqu'ils'agissed'unesource matérielle,
Qu'est- il n'est pas Maiseinblable que cette source (|ui
«au loin ses entrailles durant sa vie •'. >'

arrosait toute la surface de la terre ait seule tari,


ce en effet que l'orgueil, sinon la volonté de paraî-
(juand partout se rencontrent tanl de cours d'eau,
tre au dehors ce que l'on n'est pas en rejetant le
rivières ou lleuves, (pii ne tarissent point •'.

juge intérieur de la conscience. Aussi l'homme


condamné maintenant à travailler sur la terre a
CHAPITRE YI.
besoin de la pluie des nuées, c'est-à-dire d'un en-
seignement fornudédansle langage humain, afin TERMES FKllRKS.
que de celte manière son âme puisse encore trou-
ver remède à l'aridité dont elle est afiligée, re- 7. Sous ce peu de mots nous est donc insinuée
l)rendre \igiieur et devenir une vei'te piaule des la création entière avant le péché de l'àme. Les
chanqts. Et Dieu ((u'elle veuille lecexoir
jtlaise à noms de ciel et de terie signifient toutes les créa-
du moins de vérité (|ui tombe de ces
la pluie tures \isibles ; lenom de jour tous les temps; les
miées. Car Noire-Seigneur axant daigné pour elle nomsde xerdiire, d herbede la campage, la créa-

prendre le image de notre chair, a répandu la ture inxisible ; el le nom de cette source qui

abondanledu saint Evangile il a même


pluie très ;
sortait de la terre et en arrosait toute la surface,

promis que (juiconque boiraitde son eau revien- désigne les (lot.^ de vérité qui pénétraient l'àme
drait à la siiui'ce inliiue et ne chercherait plus avant le péché. Poureejourdont le nom, comme
la rosée extérieure. 11 dit en effei « L'eau (jue
: iious l'avons dil. sert à m.u-quer toul l'espace
« donnerai deviendra en lui une source qui
je lui du lemps, nous indique cpie non-seulement la
il

jaillira jus(|ue dans la \ie éternelle '. » C'est, créature mais encore la créature in\ isible
\ isible,

je crois, celte sourceqni a\anl le péché sortait de peut être soumise à l'aclion du lenips. Nous le
la teirc et en arrosai! toute la surface elle ; était xoumspour l'àîne car par rétoimanle variété de ;

I
l's. rxLl.li. —-l Rétr. di. 3.— Eccli. x, 14,9, 10.—
.x, ii.
-i
'Jean, I
Ci-dessous, cil. xs.li. — =1 ("r. xii, 8, 12. —M Kétr. ch. x.

IV, U. M. ï.
Mvm'. II. m; i'akadis tkkiu'.stkk. l()!t

sps tioùts ('{(le SCS alTi'i'lions, p.tf l;i cliiiti' tiu'iiii' quelle nous n'avons cicsounnsque |»ar une Juste
(loiil l'cITi'l l'a iriKliic misi'i'ahJi' cl par la ri'pa- condamnation. .Mais. I(uit en formant l'homme
raliiHi aiiiiiou'ii de larpicilccllc rc\icnl à son clal «lu limon de celle Icirc, Dieu ne pouvail-il ren-
lie Ixiiilieiir, elle csl ('oinairieiie de |i(iii\oii' cliaii- dre soncdipsincorriqilible, si, lidcleà gai'der le
Her a\(T le temps. C'est poiiiipioi il n'a pas été préeepledivin, l'hounne avail voulu s'abstenir du
(lit seiileiiieiit : « U'iaiid arriva le jour où Dieu péché? Y a-t-il là rien d'i''lounanl, lien de dilli-
<< créa leeiel et la lerre, « noms sous iesipiels nous cilc à Nous disons que le <je| Mièiiie, avec
Dieu '!

(lc\onsenlendrelesèlr('s\isil)lcs; maison a joule : sa beanlé, csl sorli du M(''aiil, ou a ilc lait d'une
« la M'i'dui'ect l'iierhe de la eampa^ue;»el sous matière informe, parce (pic nous crovons à la
ce terme, iiousl'avons-dil, esl(lésif;née, à laisou loiile-puissaucede l'auleur ; doil-on alors s'éton-
de sa vigucuf cl de sa vie, la eréalui-e iinisihle ner (pie le corps foiiui' (l'un limon quelconque,
c'est-à-dire l'àmc. Or s'il a été dit : « Quand ar- ail main de ce Dieu tout-puissant,
pu sous la
« riva lo j<un- où Dieu créa le ciel et la terre et exister de manière à n'allligei riiomme, avant le
« toute la MMdmcel l'Iicrlic des champs, >
c'est péché, par auctme inlirinité, par aucun besoin,
pour nous l'aire comprciuliiMpic non-seulemenl et à se trouver exenqtt de toute corruption";'
la créature visible, mais encore lacréalure invi- 9. 11 est donc oiseux, de demander avec quoi
sible ai)i)arlienncnl au iemps, connue sujciles à Dieu a le corps de l'hounne, s'il s'agit ici de
l'ail

changer, [mrce cpic Dieu seid csl imnmable, lui la formation du corps. Je sais que quebpies-uns
qui est avant tous les temps. des nôtres l'entendent ainsi, ils disent que si
par ces mots : «Dieu l'oi'uia l'homme du limon
CHAPITKK Vil. « de la terre, » on ne tiouve point ces autres :

« A son image età sarossend)lance, » c'est qu'ici


L'.VltCÈLK m CORPS HIM.IIX. il est parlé seulement de la formation du corps.
Pour l'homme intérieur, il est désigné par ces
Après avoir coustalc en (piels termes il nous
tf.
expressions Dieu : « lit l'hounne à son image et
est |)ai'lé de toute la création tant visible qu'in-
« à sa ressemblance. » Mais je le veux, enlendons
\isible, aussi bien que des heureux effets pro-
ici riioimne en corps et en âme, supposons qu'il
duits par la source divine sur la créature invisi»-
ne s'agit pas de quelque nouveau travail, mais
ble, \o)ons main tenant ce que nous suggère le
de reprendre avec plus de soin ce cpii a été déjà
texte sacré de l'homme en particulier
au sujet ;
brièvement insinué plus haut. Si donc nous
ceqnidoit principalement noiisoccuper. D'abord
entendons ici l'homme composé d'un corps et
siu" le passage où que Dieu a l'orme
il est dit
d'un âme, la raison ne s'offense pas de ce que le
l'homme du limon de on demande or- la terre,
terme de limon sert aie désigner, vu le mélange
dinairement quel était ce limon ou quelle
de substance dont son être est formé. De même
matière est désignée par ce terme. Les ennemis
que l'eau rapproche, unit et retient la terre quand
des livres de i'aucien Testament, qui entendent
elle se mêle au limon qu'elle forme, ainsi l'âme
toute chose dans le sens grossier de la lettre, et
en vivifiant la matière corporelle, met en har-
par cela même sont toujours dansl'erreur, se ré-
niornie les unes avec les autres les différentes
crient ici avec aigreur contre ce fait, que Dieu a empêche corps de
])arfies de cette matière, et le
Ibrmé riionnne du limon de la terre. Pourquoi,
tomber en dissolution.
disent-ils. Dieu s"esl-il sei'\i du limon pour for-
mer l'homme'^ ilanquait-il donc d'une matière
CHAPITRE VHI.
meilleure '!
n'.ivait-il pas à sa disposition les corps
célestes dont il pouvait faire l'hounne Pourquoi '!

I.E SOUFFLE UE VIE.


l'a-l-il formé d'une fange terrestre qui le rende
si fragile et sujet à la morl?()r, ils ne comprennent Par ces paroles « Et Dieu souffla sur lui
Kl. :

pas en premier lieu, la nudtitude des sens que de vie et l'hounne fut fait âme vivante, »
« l'esprit

présentent dans les Ecritures le nom de terre et nous devons entendre que si jusipie-là le corps
il'eau car le limon est un mélange d'eau et de
: était seul,rànie y fut alors unie. Peut-être était-
terre. Mais nous disons que le corps humain elle comme dans la
créée déjà, mais retenue
n'est de\enu corruptible,
fragile et mortel qu'a- bouche de Dieu, dans sa vérité ou
c'est-à-dire
près péché et ces hérétiques ne voient avec
le ; son inlinie sagesse, d'où cependant elle ne sortit
horreur dans notre corps que la mortalité à la- pas de manière à en être séparée par une dis-
110 DE LA GENÈSE CONTRE LES MANICHÉENS.

tance locale lorsqu'elle fut communiquée à de la contagion des vices et du péché;


est infectée

l'homme par le soulfle divin, puisque l'être de on bien encore, d'après vos propres aveux elle ,

Dieu n'est lunité à auciui espace, mais est présent se soinlle an contact d'une natui'c qui lui est

partout. Peut-être aussi reçut- elle l'existence au essentiellement contraire,


cl le reste autant de :

moment même où Dieu soulfla l'esprit de vie sur conséquences que l'on ne peut croire de la na-
l'argile qu'il venait de façonner, et alors cette tiue de Dieu. L'àme effectivement a été faite
insuftlation n'est autre chose que l'opération par la toute-puissance divine, conséquemment
divine créant l'àme dans l'homme par l'esprit elle n'est ni une partie de Dieu, ni la nature de
de sa puissance. Snpposc-t-on que Thounne, à Dieu; c'est ce qui nous est expressément déclare
qui l'être avait été doimé, suhsistait déjà dans l'u- dans un autre endroit « Celui, dit le prophète, :

nion de l'àme et du corps'/Lesoufllede Dieu vint « quiafait l'esprit de chacun, est lui-même l'au-

ajouter le sens et la i-aison à l'àme vivante, lors- « leur de toutes choses '. » Ailleurs encore il est

qu'en vertu de celte insufflation l'homme fut fait dit « C'est Lui qiù a fait dans l'homme l'esprit
:

âme vivante, non pas que le souffle eût été changé « de riiomme » 11 est donc bien avéré par ces
'-.

en âme vivante, mais il agit sur l'àme vivante. témoignages que l'esprit de l'homme a été créé.
.Ius(iue-là néanmoins nous ne devons pas encore Or dans les Ecritures res])rit tle l'homme n'est
voir l'homme spirituel danscelui qui aété fait àme rien autre chose que la faculté raisonnable de

vivante, mais toujours l'homme animal il ne :


son àme elle-même, faculté qui le distingue des
devint spirituel que quand placé dans le Paradis, animaux et lui donne sur eux un empire natu-
c'est-à-dire mis en possession d'une vie heureuse, rel. C'est dans ce sens (pu' l'Apôtre dit « Pér- :

il reçut aussi le précepte de la perfection qu'il itsonne ne connaît ce qui est dans l'homme,
devait trouver dans la sonndssion à la parole de « sinon l'espril qui est en lui » On ne pourrait •*.

Dieu. Aussi après qu'il eut péché en rejetant le donc, d'après ces témoignages, croire que l'àme
précepte divin et qu'il fut chassé du Paradis, il ne et non l'esprit, a été que l'esprit
créée, ni soutenir
lui resta que son être animal '.Et c'est pourquoi est de la ou qu'une partie de
nature de Dieu ,

nous qui sonuuesnésdeluiai)rèssonpéciié, nous Dieu s'est changée en lui au moment de l'insuf-
n'avons en nous que l'homme animal avant d'a- flation divine. C'est d'ailleurs ce que réprouve

voir atteint l'homme spirituel, c'est-à-dire Notre- le simple bon sens; car l'esprit de l'homme qui

Seigncur Jésus-Christ, qui n'a point commis le tantôt se trompe et tantôt juge suivant la vérité,

péché 2, et avant d'avoir été réformés, vivifiés par crie par là qu'il est muahle, ce qu'on ne peut

lui, et rétablis dans le bonheur où a mérité absolument supposer de la nature de Dieu. Mais
d'entrer avec lui le larron pénitent, au jour qui dire que l'àme humaine est la propre substance

termina sa vie mortelle ^. Car écoutons ce que de Dieu, quand elle gémit encore sous une telle
dit l'Apôtre « Ce n'est pas ce qui est spirituel
:
masse de vices et de misères, c'est la plus haute
« qui a été fait d'abord, mais ce qui est animal, expression de l'orgueil.
« ainsi qu'il est écrit Le premier Adam a été :

Adam, CHAPITRE IX.


« fait àme vivante, le nouvel esprit vivi-
« fiant 'i. »
LES DÉLICES UL PARADIS.
11. Ainsi par ces expressions « Dieu soulfla :

« sur lui l'esprit de vie, et l'hounne fut fait àme l'a. Voyons maintenant le bonheur de l'hounne,
« nous ne devons pas entendre que
vivante, » désigné sons le nom de paradis. Le repos que l'on
c'est counne une partie de la natuie de Dieu qui goûte à l'ombi'e des bocages est ordinairement
est devenue l'àme de l'homme, ce qui nousobh- tlélicieux, c'est de l'Orient que part la lumière
gerait d'admettre que la nature divine est mua- destinée à nos sens corporels, et là se montre
bie, erreur dont sont convaincus les Maniciiéens d'abord le ciel, corps bien supérieui' au nôtre
surtout, par la vérité môme. En effet comme l'or- et d'une nature plus excellente. C'est pourquoi
gueil est le père de toutes les hérésies, ils ont ici encore il faut voir lui sens figuré, les délices
osé dire que l'àme est de la nature de Dieu. El spirituelles bienheureuse; et pour le
de la vie
là dessus nous les pressons de la manière sui- même que le paradis fut planté à
motif il est dit

vante : Donc, leur disons-nous, la nature de Dieu l'Orient. Or comprenons que nos joies spirituelles
est sujette à l'égarement et la misère; donc elle sont marquées par tous ces arbres beaux à la
I
I Kélr. ch. X, 11. 3. .
2 1 Pierre, II, 22, — ^ Luc, xxiil, 43. — > I

Cor. XV, 44-46.


'
Ps. XXXII, 15.— J Zach. xii, i. 'I Cor. Il, 11.
LIVUK II - NK l'AlUhlS TKKKKSTISK. Il

mumIc rinU'Ilifreiico.oliloiitli'sIriiils soiil lions h


inan^ier ('oiiiiiie nnc noiirriliiir inrorifiiilililc, Cli.UMTUK \.
la noiirritiirt* des àiiu-s hlt-nlicuiciiscs; car li'

Seigneur a ilil : « ïra\aill('/. pour mic iioiirritiirc LES QIATIIE PLEIVES.


« (iiiiiipse corrompt point '
; » telles soiil toutes
les eonnaissanres (|iii seivent d'alimeiil àr.iine. 1^. Lu lleu\e sortait de llulen; l'den dé-
I/Oneiil (l('sif:iie la lumière de la sagesse, et Kdi-ii lices, plaisirs, banquet ; c'est ce (leuve dont veut
les déliées imiDorlelles de l'âme iidelliijeiile.
parler le Psalmisie (piand il dit : « Vous les

i'.iw les inlerprèles eiiseigiienl ipie ee mot Ira- « abi'cuverez au lorreidde nos voluptés •, >. car
tliiit de riiéhreii en latin, siiiiiilie déliées, joiiis-
VAvn en hébreu signilie voluptés. Ce lleuve se
sanee on l)aii(|iiet. S'il a été mis iei sans traduc- di\ise en quatic parties <"t représente les cpiatre

tion, c'est pour paraître indi(pier vertus de prudence, de force, de tempérance et


(piel(iue lieu
particulier, el plusencore, pour laire une locidion d<> justice. On dit que le Phison c'est le Gange,
ligurée. l'ar tous ces arbres fjui s'i'lèvent de la
et le Céon le Nil, ee (pi'on peut remanpier en-
terr(> nous entendons celte joie spirituelle, qui
core dans le prophète Jérémie. Ces Meuves por-
consiste à dominer la terre, à n'être pas enve- tent donc aujourd'hui d'autres noms, ainsi en
loppé ni esl-il du Tibre qui d'aboi'd s'appelait .VIbula.
accablé par le désordre des passions
de vie planté au milieu du
terrestres. L'arbre l'our le Tigre et Tf^uphrale ils ont jus(pi"ici con-
païadis représente celte sagesse qui fait com- servé leurs noms. Ces noms cependant, dési-
prendre que sa destination est de tenii- connne gnent aujom-d'hui comme je l'ai dit, des vertus
le milieu des choses. Si elle est supérieure à toute s|)irituelles, ce (|u'on peut voir même ii leur tra-

la nature corporelle, elle a néanmoins au dessus duction dans les langues hébraïque ou syi'iaque.

d'elle la nahne de Dieu; ainsi elle ne doit s'éuarer C'est ainsi que Jérusalem, encore que ce soit un
en affeclant ce ([u'elle n'est pas, ni à
ni à dioife lieu visible et terrestre, veut dire dans le sens
sjiirituel Cité de paix de même Sion quoiqu'une
puiche en dédaignant néjïliïemment ce qu'elle ;

est. Voilà l'arbre de vie planté au milieu du parii-


simple montagne de la terre, rappelle la Con-
dis. L'arlire de la sciencedu bien et tlu mal rappelle templation, et dans les allégories que présentent
les ficiitures ce nom est employé souvent pour
aussi cette situation naturelle de l'âme enti'e la
nature divine et la nature corporelle; car cet élever l'âme à la méditation des choses spiri-

arbre était encoiv planté au milieu du paradis. tuelles. C'est ainsi encore que cet homme qui des-
Il est appelé arbre de la science du bien et du cendait de .lérusalem à Jéricho, comme s'exprime
mal, parce que si l'âme qui doit s'étendre vers ce Noire-Seigneur, et qui frappé, bless-', fut laissé

(pii est devant elle, c'est-à-dire vers Dieu, et ou- à-demi mort par les voleurs ', nous oblige certai-
blier ce qui est derrière elle ', c'est-à-dire les
nement à prendre dans Icsens spirituel ces lieux,
plaisirs des ^ens, vient à se replier sur elle-même (pie suivant l'histoire on trouve néaumoùis sur

en abandonnant Dieu, et à vouloir jouir, comme la terre.

si elle était sans Dieu, des facultés de son être, Laprudencesignifielacontemplationmème


14.

l elle s'enfle d'orgueil, ce qui est la source de tout de contemplation que ne peut rendre
la vérité,

\ péché. Et lorsque la peine de cet égarement aucun langage humain parce qu'elle est inef-
\' vient la frapper, elle voit par expérience condiien fable; et vouloir la faire connaîh-e, c'est se

dilTère le bien qu'elle a délaissé du mal où elle mettre plutôt dans douloureux travail de l'en-
le

esttombée. C'est, pour elle, avoir mangé du fantement que de la produire au jour. L'Ap(Mre
de l'arbre de la science du bien et du mal.
fruit nous dit lui-même qu'il a entendu là des paroles
Quand donc il lui est commandé de manger du dont l'expression est impossible à l'homme^.
fruitde l'arbre qui est dans le paradis, mais de Celte prudence traverse donc la terre qui possède

ne pas manger du fruit de l'arbre de la science l'or, le rubis et la pierre d'onyx, c'est à-dire : la

du bien et du mal, il lui est interdit d'eu jouir bonne règle de vie, qui purifiée de toute souil-
de manière à dépraver, et à corrompre comme lure terrestre, brille comme l'or le plus pur;

en mangeant, l'intégi'ité de sa nature. que ne peut vaincre aucune erreur


et la vérité

pas plus que la nuit ne peut vaincre l'éclat des


rubis; enfin la vie éternelle désignée par la
'
Jean. V, 27. — 2 Philip m, 13.
coulem" verte de la pierre d'onyx à cause de sa
' Ps, XXXV, 9. — 2 Luc, X, 30. — ' Il Corinth. xii, 4.
m DE LA GENÈSE CONTRE LES MANICHÉENS.

\igiieur toujours pleine de sève. Pour ce fleuve Aussi bien, une chose encore était à réaliser ; il

qui coule autour de la terre d'Ethiopie, échauffée fallait non-seulement que l'àme fût maîtresse
et comme embrasée par les rayons du soleil; du corps, parce que le corps n'a que le rang de
il signifie la force à laquelle la chaleur de l'ac- serviteur et d'esclave, mais de plus que la raison
tion donne du mouvement et de la vivacité. I^e (jui fait proprement l'homme, assujettit la partie

troisième fku\e, le Tigre se dirige contre les animale de l'àme et s'en (it un aide pour com-
Assyiiens et rappelle la tempérance qui résiste mander au corps. Pour représcnler ce devoir, a
à la sensualité, toujours ennemie des conseils de été formée la femme, que l'oi'dre naturel soumet
la prudence terme d'Assyriens est
; aussi le à l'homme; el ce qui ])arait avec une évidence
souvent i)ris dans pour synonyme
les Écritures frappante dans les rapports de deux personnes,
d'ennemi. Il n'est pas dit de quel cùté se dirige c'est-à-dire de l'homme et de la femme, peut être
le ([iiatrième fleuve, ou quelle terre il parcourt : aussi observé dans une seule. Car le sens inté-
c'esl (pie la justice tient à Ions les c(Més de l'ànie, rieur, ou la puissance virile de la raison, doit sou-
et n'est autre chose (}ue l'ordre et l'équilibre d'où mettre au frein el à la règle d'une juste loi cette
résultent l'union et l'harmonie des trois autres partie animale qui nous sert à agir sur nos mem-
vertus. A la tète marche la prudence ; la force bres, de même que riiomme doit gouverner la
vient en second lieu ; et en troisième latempé- fennne, sans lui permettre de dominer sur lui,
lance : dans cette union, dans cette harmonie ce qui plongerait la famille dans le désordre et
consiste la justice. la misère.
1(>. Ainsi donc. Dieu lit d'abord voir à l'homme
CHAPITRE XI. combien il l'emportait sur les brutes, sur les ani-
maux dépourvusde raison :que marqueté
c'est ce
OCCUP.VTION DE l'HOMME DANS LE PARADIS ; passage où il est dit que tous les êtres animés fu-
FORMATION DE LA FEMME. rent réunis devant .\dam, pour qu'il vit comment
ils les ai)pel!eraitet quelsnoms il leur donnerait.
lo. L'homme fut placé dans le paradis pour y
Ce qui montre en effet ([ue riiomme est au dessus
travailler et pour le garder ce travail était une
;
des animau.\ par la raison elle-même, c'est que
occu[)atioii honorable et sans fatigue. Autre
la raison seule qui apprécie chacun d'eux, peut les
chose est le travail dans le paradis, autre chose
distinguer et les désigner chacun sous une déno-
le travail sur la terre, au(]uel l'homme a été
mination particulière. Mais c'est là une raison qui
condanmé après sa faute. Quant à la garde dont
se révèle facilement car l'hoimne comprend vite
:

parle l'écrivain sacré, elle marque la nature de


qu'il est au dessus des brutes; ceipi'il comprend
cette occupation primitive de l'homme. En effet
diflicilement, c'est qu'il y a en lui une partie rai-
dans le bienheureuse où la mort
repos de la vie
sonnable qui gouverne et une partie animale qui
n'a point d'empire, tout le soin se borne à con-
est gouvernée.
server ce que l'on a. L'homme reçut aussi le
précepte dont nous avons déjà traité plus haut '
; CHAPITRE XII.
et la conclusion de ce précepte, exprimée de telle
sorte qu'elle ne s'adresse pas à un seul, puisqu'il LE SOMMEIL 1) ADAM.
est dit avec le nombre pluriel : « Le jour où
Et parce que l'homme pour voir cela a be-
« vous en mangerez, vous mourrez, » commence
soin d'une sagesse plus profonde; je crois que celte
déjà à faire entendre counuent la femme fut
vue intérieure est désignée sous le nom du som-
tonnée.
meil envoyé par Dieu au premier homme, (luaiul
Elle fut faite, dit le texte, pour servir d'aide à
la femme fut formée pour lui être unie. Si l'on
l'homme afin de produire, dans une union spi-
veut en effet reconnaître cette vérité, il n'est jias
rituelle, des fruits tout spirituels; c'est-à-dire des
besoin des yeux du coi'ps, et on la comprendra
œuvres saintes à la louange de Dieu, l'homme
d'autant mieux et d'autant plus clairement, qu'on
connnandant et elle obéissant, l'homme étant
s'isolera davantage des choses sensibles pour se
gouverné par la sagesse, et elle par l'homme.
renfermer au dedans de l'intelligence, ce qui est
Car le chef de l'homme est le Christ, et l'homme
comme s'endormir. Car la réflexion même qui
est le chef de la femme '. Voilà pouripioi Dieu
nous fait comprendre qu'en nous il y a une partie
dit : « 11 n'est pas bon que l'homme soit seid. »

' Ci-dessus, cil. IX. — 2 I Corinth. XI, 3.


qui doit connnander par la l'aison et une autre
LIVHK II. — IHJ l'AlUhlS TKKIiKSTIW:. iiH

(|iii iliiil <ili(''ii' à l.'t l'iiisiiM, )>sl coMiiiK* hi riiriiia-

femme, liivc {riiiic cù[v de riioiiiinc


iioii (11' la CIIAl'ITIil': MU.
|i<iiir iiiiciix iinr(iiier leur iiiiioii. lùisiiili' [loiir

(li)iiiiii('i' de
ciiinciialilciuciit la paiiic iiirr'iiciiii' U.MON SPiniTLELLE.
son cMre et Ibrnier dliymen, où
en soi une sorte
la ehair ne eonvoile pas eonire l'espfil, mais lui I<S. l.'lKHiimc donna doue un nom à sa femme
soil somnise, en d'aiilfcs teiMiies, où la concii- ciimmc un supérieur à sou intérieur, et il dit:
piseenec de la eiiair ne iidl(! point eonlie la X Voici maintenant l'os de mes os cl la chair
raison, mais plutôt cesse dVHi'e charnelle en « de ma chair. « L'iis lU' mes os, peut cire pour

obéissant à la raison, on a i)esoin d'une saf^esse marquer la force; La chair de ma chair, peut
|)arl'aite. Ov le re^;ard de celle sat;('sse, paire (|u'il être pour manpier la tempérance. Car (jii en-
est intérieur, secret conipièlenieut étrauj;ei'à tout
, seigne (pic ces deux vertus appartienuenl à la
sens corporel, peut conveuablemcnt être entendu partie inférieure de l'âme, régie par la prudence
sous l'ima^ic du soiniucil d'Adam; car l'iioiunie de la raison. Onaiil aux paroles sui\aiites :

mérite d'élre le clief de laléiimic, (juand le (Ihi'ist « Elle sera appelée l'emme, parce (pi'cUc a été
c'est-à-dire Ig Sagesse môme de Dieu, est le « prise de son mari, » celte étymologie n'a point
chef de l'Iionnne. passé dans notre langue. (]ar on ne trouve |>;is

17. Si à la [)lace de cette cùle du premier comiiicutlciiomdc /;i»//cr pcutdérivcrdu nomde


honnne, Dieu remet de la chair, c'est pour rappe- on dit (pic dans la langue hébraï(pie
vir. Jlais

ler leseiitimeuf d'amour dont chacun est pénétré les mots sont semblables Vocabitar rirarju, :

poursou âme; on ne la traite pasavec dm'eté et quoniam de rira sun niniiida est. Aussi bien le
mépris, car on aime naturellement ceux que l'on terme viraçio ou [)lutôt vinjo vierge, a qiiehpie
ilirise. Il faut donc remarquer (|uc la chair ici ressemblance avec le nom de vir, homme. Quant
ne désigne pas la concupiscence charnelle; mais au nom midier, il n'en a point : mais, comme
bien plutôt ce qu'entendait Prophète quand le je l'ai dit, cela vient de la différence des lan-
il parlait du cœur de chair substitué, chez le gues.
peuple de Dieu, au cœur de pierre '. Aussi bien 19. Adam ajoute : « L'homme quittera son
l'Apôtre dit encore dans le même sens : « Non ;< père et sa mère et s'attachera à son épouse,
« sur des tables de pierre, mais sur les tables de « et ils seront deux dans une même chair. » Je
« chair du cœur 2. » Autre chose est en effet une ne vois d'autre moyen d admettre ici le sens
locution propre, autre chose une locution figu- hislori(jue, si ce n'est en disant qu'ordinaire-
rée telle que celle dont nous traitons maintenant. ment les choses arrivent ainsi dans le genre
Si la femme pi'oprement dite a d'abord
donc humain. Mais tout cela est une prophétie dont
été réellement formée par Dieu du corps de rApiMrerappellelesouvenir (|uand ildit : « C'est
riiomme, elle ne l'a été de cette manière assu- « pourquoi l'homme abandonnera son père et
rément que pour insinuer quelque mystère. Dieu « sa mère pour s'attacher à son épouse et ils ;

manquait-il de limon pour en faire aussi la fenune? « seront deux dans une seule chair. C'est un
Ou 1)ien ne pouvait-il, s'il le voulait, ôter sans « grand sacrement; je dis dans le Christ et dans
douleur une côte h Adam éveillé ? Soit donc que « l'Église '. » Si les Manichéens lisaient ce pas-
ce langage soit figuré, soit que l'action elle-même sage autrement qu'en aveugles, eux qui se servent
le soit, ce n'est pas sans raison que Dieu a parlé des Epitres des Apôtres pour tromper tant de
on agi de cette manière. C'est assurément pour monde, comprendraient comment l'on doit
ils

exprimer des mystères et des secrets; soit ceux entendre de l'ancien Testament, et
les Écritures
(pie notre faiblesse essaie d'exposer, soit ceux n'oseraient point attaipier, par des discours sa-
(pie mettrait en lumière une interprétation meil- crilèges, ce qu'ils ignorent. Adam et sa femme
leure, pourvu cependant qu'elle fût conforme à étaient nus sans en rougir : ceci désigne la siinpli-
la saine doctrine. citéet lachasteté de l'âme. Car voici encore ce que
'Ezéch. XI, 19. — -II Cor. m, 3. dit l'Apôtre : « Je vous ai préparés, fiancés comme
« une vierge toute pure pour un époux unique,
« pour Jésus-Christ. Mais je crains que comme
« le serpent séduisit Eve par ses artifices, vos

Ephès. V, 31, 3».

S. AuG. — ToM. IV.


114 DE LA GENESE CONTRE LES MANICHÉENS.

« esprits ne dégi^nèrent de la simplicité et de la inférieure de l'âme. Car notre raison elle-même


« cliasteté qui est dans le Cln-ist i
. » ne peut être amenée à consentir au péché, si la

délectation n'a été excitée dans cette partie de


CHAPITRE XIV. l'âme qui doit obéir à la raison, comme la femme
à l'homme qui la gouverne.
EVE ET LE SERPENT.
21. Maintenant encore, dans chacun de nous,
Or le serpent signifie le diable, qui cer-
20. lorsque nous succombons au péché, il ne se fait

tainement n'était pas simple; car s'il est dit que rien autre chose que ce qui a eu lieu dans les

le serpent était le plus avisé de lous les animaux,


rapports de ces trois êtres, le serpent, la lenime
et l'homme. Car il y a d'abord la suggestion du
c'est pour nous taire entendre sous des termes
figurés sa ruse et sa malice. Il n'est pas dit ipie mal, soit par la pensée, soit par les sens, la vue,
le serpent était dans le Paradis, mais il était le toucher, l'ouïe, le goût ou l'odorat. Si après

parmi les bêtes sorties des mains de Dieu. Car cette suggestion, nous n'inclinons pas vers le

le Paradis, ainsi que- je l'ai dit plus haut ', si- péché, le rusé serpent est repoussé; dans le cas
gnifie la vie heureuse où n'était plus le serpent, contraire, il y a déjà comme la défaite de la

puisqu'il était déjà le diable et qu'il était déchu femme. Quelquefois cependant la raison agis-
de sa béatitude poui' n'avoir pas voulu rester sant avec vigueur impose silence et met un frein

dans la vérité. 11 ne faut pas s'étonner qu'il ait nous ne tombons


à la passion déjà excitée; alors

pu parler à la femme quand celle-ci était dans point dans mais en luttant plus ou
le péché,
le Paradis et que lui n'y était pas. Car, ou bien moins nous gagnons une couronne. Si au con-
la femme n'était pas dans le Paradis d'une ma- traire la raison consent, si elle conclut à l'action

nière locale mais plutôt par la jouissance du que la jiassiou conseille, l'homme est comme
bonheur, ou bien en supposant qu'il y ait eu un chassé du paradis, il perd la vie heureuse. Car
lieu digne du nom de Paradis et dans lecjuel le mal est imputé sans même que le fait ait

Adam et la femme habitaient corporellement, lieu, puisque le seul consentement rend la cons-

devons-nous comprendre que le diable, lui aussi, cience coupable.

y soit entré d'ime manière corporelle. ? Non,


CHAPITRE XV.
sans aucun doute, mais U n'y est entré que spiri-
tuellement, selon ce que dit l'Apôtre: «Le prince MARCHE DE LA TENTATION.
« des puissances de l'air, de l'esprit qui agit
« maintenant sur les fils de la défiance s. Appa-
>, 22. Il faut considérer a\ec soin de (pielle ma-
raît-il donc à ces fils, sous des traits visibles, ou est- nière ce serpent persuada le péché. Aussi bien
ce d'une taçon locale et sensible qu'il approche ceci intéresse éminenuuent notre salut. Car ces
de ceux sur qui il exerce son action? Nullement, malheurs ont été écrits pour nous porter à en
mais au moyen de merveilleux procédés il leur éviter de semblables. La femme interrogée ré-
suggère par des pensées tout ce qu'il peut. A de pondit en rappelant ce qui leur avait été pres-
telles suggestions l'ésistent ceux qui disent vrai- crit, et le serpent lui dit « Vous ne mourrez :

ment ce que dit encore l'Apôtre : « Nous n'i- « point; car Dieu savait que le jour où \ous au-

(( gnorons pas ses ruses *. » Comment eut-il « rez mangé de ce fruit, vos yeux seront ou-
accès près de Judas, quand il lui persuada de li- « verts, et vous serez comme des Dieux, sachant

vrer le Seigneur? Est-ce qu'il parut réellement « le bien et le mal. » Ces paroles nous uion-
à ses yeux dans déterminé? Point du un lieu hent que l'orgueil a été le moyen employé pour
tout, mais, connue le déclare l'Évangile, il entra persuader le péché; c'est ce que prouvent en
dans son cœur >. Or l'homuie le repousse s'il effet les mois « Vous serez comme des Dieux. »
:

garde le Paradis. Car Dieu plaça l'homme dans Quant aux précédents « Dieu savait que le
:

le Paradis pour travailler et le garder. Aussi « joiu' où vous aurez mangé de ce fruit vos yeux

bien il est dit de l'Église dans le Cantique des. « seront ou verls, » quel en est lésons, sinon qu'il
Cantiques : « C'estun jardin fermé, une fontaine leur persuadé de refuser la soumission h
fut

« scellée s, » où certainemen! n'est pas admis ce Dieu; de demeurer plutôt indépendants, sans
mécliant qui persuade le mal. Et cependant il rapport avec le Seigneur; de ne plus observer sa
trompe par la femme, c'est-à-dire par la partie loi, parcequ'il voyait a\ec peine qu'ils se gou-
I
II Cnr. M, 2, 3. — = Ci-dcsius, ch i.\-. — ' Ephés. n, 2. — MI Cor. vernassent eux-mêmes en dehors de la lumière
II, — 11. il-uc,.\xn, 3. — ' Cant. iv, 12.
I.IVKK II. — DU l'AUAItlS TKKKKSTltK. il fi

intrruniic t'I on liiisant iisa^rc ilc leur propic sii-

t;essc, cuiiiiiiL' de k'iiis \(M1\, pour coiiii.iitic le CIIAIMTIII'; \V1.

bien ot le mal. (piaïul il le Icni- ,i\ail (lilcndii .'

l'UKl.l l)i;s 1)1 ILCK.MKNT l)"\hVM KT ll'lCVK.


Il Iriir fut iliiMC pcrsiiaiir' de liop aitiicr iciir

puissance, «le xoiiioir èlrc é^aiix à Dieu, d'nser


•2i. C'est pourquoi, connue Dieu se promenait
mal, c'esl-;Vtliie contre la loi divine, de celte con- dans le Pai'adis sur le soir, c'est-à-dire se dispo-
dilion miloyenne ipii les soumellaileiix-mèmes, femme; avard donc
sait à Juger riiomme et la
loiil en sonniell.nd leurs corps à eux-mêmes. (pu^ leur fût irdligée la peine (pi'ils avaient
Celle siluation milo\enne élait comme le Iruit de méritée. Dieu se piomenait dans le Paradis :

l'arbie, |>Ianlé au milieu du pai'adis; il leur fui


cela signifie que ta pr(''seuce de Dieu se déla-
donc persuadé de laisser perdre ce (pi'ils avaienl cliail poiu' ainsi dire de leurs àuie«, eux-mêmes
reçu, pour vouloir usurper ce ipii ne leur avail n'élant plus stables dans son précepte. Sur le

pas été donné, ('.ai' Dieu ne donna pas à la na- soir; (piand déjà 1(> soleil se couchail poiu- eux,
ture de riiumme de pouvoir être heureuse par en d'autres termes, (piaiid cette liunière inté-
sa propre puissance, en dehors de l'action di- ricm-e de la vi'rilé couunencail à les (piiller; ils
vine, parce qu'à Dieu seul il api)arlienl d'être
entendirent la \oix du Seigneur et se cachèrent
heureux, dans une indépendance absolue et par
pour éviter sa prés<'nce. Qui fuit la présence de
sa puissance naturell(\ Dieu et se lui, sinon le malheureux
cache devant
23. « El la reinme, \il que le Iruil était bon à ipii abandonné veut dès lois aimer ses
l'ayant
« manger, qu'il était Iteau h voir et h connaître. »
propres intérêts ? .Vdam et Kve en effet avaient
Comment voy.iil-elle, si ses yeux étaient fermés? déjà le masque du mensonge. Or quiconqiu' est
Jlais cela a été dit pour nous taire comprendre menteur parle de sou fond i. Ils se cachent donc
ipie leurs yeux, qui lurent ouverts après qu'ils près de l'arjjre qui élait au milieu du Paradis,
eiu'ent man^é de ce fruit, sont les yeux par les- c'est-à-dire en eux-mêmes; car ils ont été créés
quels ils se voyaient nus cl se déplaisaient, c'est- pour tenir le milieu des choses, èlre au dessous
à-dire les yeux de la fourberie auxquels déplaît de Dieu et au dessus des corps. Ils se cachent
la Car dés ipi'on {>st déchu de cette
simplicité. en eux-mêmes, pour se laisser aller au trouble
intime lumière de la vérité, l'or-
et très-secrêle (H à la misère (|u'engendra l'erreur, après avoir
gueil ne veut plaire que i)ar de trompeuses ap- abandonné la vérit", qui n'était point l'essence
parences; et c'est de là que naît encore l'hypo- de leiu' nature. L'âme humaine peut bien effec-
crisie, avec laquelle on se croit bien sage (piand tivement participer à la véiilé; mais cette vé-
on a pu abuser et tromper celui qu'on a voulu. rité est Dieu lui-même, immuable et bien au
.\insi la fenmie domia du fruit à son mari, ils dessus de nous. Celui donc qui se détourne de
en mangèrent l'un et l'autre et alors furent ou- cette vérité pour se tourner vers lui-même, et
verts leurs yeux, comme nous l'avons dit plus qui se glorifie et se réjouit,non d'avoir Dieu
haut; alors aussi ils virent qu'ils étaient nus; pour guide et pour lumière, mais d'être libre
c'est ([ue leurs yeux mêmes étaient troublés et dans ses mouvements, a les ténèbres du mensonge
ils jugeaient honteuse cet te simplicitécpie marque en partage. Car tout menteur parle de son
te terme de nudité. Afin donc de n'être plus propre fond; ainsi ce déserleur de la vérité est
simples ilsse tirent des ceintures avec des feuilles troublé el réalise cette parole du prophète « Mon :

de figuier; ils voulaient cacher leur honte c'est- « i\me a été troublée en moi-même ^. »

à-dire la simplicité dont rougissait alors leur Dieu alors interroge Adam, non qu'il
ignore où
orgueil mal avisé. Or les feuilles de figuier il en est, mais pour l'obliger à confesser sa faute.
signilient une certaine démangeaison, s'il est Car Jésus-Christ Notre-Seigneur n'ignorait pas,
permis toutefois d'employer ce mot en parlant tout ce qu'il demandait. Or Adam répondit, après
de choses incorporelles, que produisent dans avoir entendu la voix divine, qu'il s'était caché
l'esprit, d'ime façon étonnante, le désir et le
parcequ'il était nu. Quelle pitoyable erreur! pou-
plaisir du mensonge. Aussi dit-on le sel de la vait-il déplaire à Dieu dans l'état de nudité où
plaisanterie; et l'on sait que dans les plaisan- Dieu l'avait créé? Mais h propre de l'erreur est
teries domine une espèce de mensonge. de faire croire à l'homme que ce qui lui déplaît,
déplaît aussi à Dieu. Cependant il faut com-
Jcan, VIII, 44. — 2Ps. XLI,
,

116 DE LA GENÈSE CONTRE LES MANICHÉENS.

prendre dans un sons tlcs-l•ele^ é ce que dit le cetix qui méprisent les commandements de
Seigneur « Qui t'a fait connaître que tu étais
: Dieu. C'est ce. que déclarent les paroles dans
« nu, si ce n'est que lu as mangé du fruit duquel lesquelles la sentence lui est dénoncée; celte
« seul je t'avais défendu de manger? :» Adam eu peine est même d'autant plus grande, qu'il est
effet était nu d'aljord, c'est-à-dire exempt de dissi- réduit à se réjouir d'ime si malheureuse puis-

mulation, mais il était revêtu de la liunière di- sance, lui qui avant de tomber était habitué à
vine. S'en étant détourné pour se tourner vers mettre son plaisir dans la vérité souveraine où
lui-même, ce que signilie avoir mangé du fruit il ne voulut pas se maintenir. Aussi les bêtes
de l'arbre, il vit sa nudité et se déplut parce qu'il mêmes lui non comme ayant
sont préférées,
n'avait en propre aucun bien. plus de puissance, mais comme ayant mieux
conservé leur nahu'e. Elles n'ont en effet perdu
CHAl'ITRE XVII. aucune béatitude céleste, puiscjne jamais elles

EXCUSES d'aDAM ET d'ÈVE. — CHATIMENT DU


n'en ont joui, et elles passent leur vie avec
la nature qu'elles ont reçue. Il est donc dit à cet
SERPENT.
esprit méchant : « Tu ramperas sur ta poitrine
25. Ensuite, selon la coutume de l'orgueil, il « et sur ton ventre. » C'est ce qu'on remarque
ne s'accuse pas d'avoir écouté la femme, mais il aussi dans la couleuvre; et ce qui convient à cet
rejette sa faute sur elle et en le faisant, il veut ;
animal visible, est, par métaphore, appliqué i\
par une vaine subtilité et comme i)ar suite de la l'invisible ennemi de l'homme. Sous le nom de

fourberie que le misérable conçoit, rendre Dieu poitrine est désigné l'orgueil, parce que la poi-

lui-même responsable de son péclié. Car il ne trine est le siège des mouvements impétueux de
dit pas seulement « La femme m'a donné du :
l'âme; pour le nom de ventre il désigne la con-
« fruit, » il va plus loin et dit. « La feunucque cupiscence chamelle, parce que le ventre est la
« vous m'avez donnée. » Rien de plus ordifiaire plus molle des parties sensibles du corps. Et
aux pécheurs que de vouloir attribuer à Dieu ce comme, au moyen de l'orgueil et de la concu-
dont ils sont accusés, et ce mouvement vient de piscence charnelle, le diable s'insinue près de
l'esprit d'orgueil. L'orgueil en effet fait que ceux qu'il veut séduire, il lui a été dit pour
l'homme ayant péché en voulant être égal à cela : « Tu ramperas sur ta poitrine et sur ton

Dieu c'esl-à-dire absolument iudépeudanl connne


,
« ventre. »

Dieu lui-même est indépendant puisqu'il est le

maitre de tout, et ne pouvant l'égaler en grandeur


CHAPITRE XVIII.

s'efforce, quand il est déchu et qu'il gît dans son


INIMITIÉ DU SERPENT ET d'iîVE.
péché, de rendre Dieu sendjlnbleà lui. Ou plutôt
encore il veut montrer que Dieu a péché et que
27. « Et lu mangeras la terre, lui est-il diten-
lui-même est innocent. De son côté lafemme étant
« core, tous les jours de ta vie ; » en d'autres
inteiTOgée rejette la faute sur le serpent. Adam
ternies, tous les jours où tu dois exercer cette
avait-il donc reçuune épouse pour se soumettre
puissance, avant que vienne le frapper la der-
à elle et non plutôt pour la faire obéira ses or-
nière peine du jugement. Car ce temps d'un
dres? et la fenune ne pouvait elle garder le com-
pouvoir qui le réjouit et dont il s'honore semble
mandement de Dieu plutôt que d'écouter les pa-
être celui de sa vie. Les paroles, donc : « Tu
roles du serpent?
« mangeras la terre, » peuvent être comprises
20. Le serpent n'est pas interrogé, mais il
dans deux sens ou bien ils t'ap[)artienilront,
:

reçoit le premier sa peine, parce qu'il ne peut


ceux que tu auras trompés par rattachement aux
s'avouer coupable ni s'excuser d'aucunei'naniêre.
choses terrestres, c'esl-à-dire les pécheurs que
Or condamnation du serpent n'est pas celle
cette
désigne le nom de terre ou du moins ces pa- ;

qui est réservée au jugement derniei- et


lui
roles figiu'cnt un troisième genre de tentation,
dont parle Noire-Seigneur quand il dit « Allez :

qui est la curiosité. Car uiaugei- la lei're, c'est


« au feu éternel, qui a été préparé au diable et à
sonder des profondeurs et des obscui'ilés mais
« ses anges « il s'agit ici de la p(<ine (pu nous
>
;
des profondeurs et des obscurités temporelles et
le rend redoutable cl nous oblige à nous en
terrestres.
garder. Car sa peine est d'avoir en sa puissance
28.Dieu ne met pas d'inimitié entre le serpent
I
Malt. XXV, 41, et l'homme, il en met seulement entre lui et
LIVRE II. — Dr PAKADIS TERRESTRE. 117

la l'cinmc. Esl-co parce que le démonnc trompi' Il diilude formée est comme un (ils qui vient de
et IK' t('iili> pas Icslioimnes?!! l'sl maiiircsti" (pi'il naihc; c'est l'incliiiation disposée au bien par
les Irmiipc. KsI-cc parce (pi'il n'a aliiise ([lie la riiabilude. l'onr faire naiire celte b le liabi-
l'einme et non Adam? Mais pour n'avoir l'ail par- tude on a résisté avec douleur à l'habitude mau-
venir riinposliirejns(pi'à lui (pie par le nio\en vaise. Que siguilient encore ces molsrpii expri-
(le la l'ennne, en esl-il moins son ennemi'? D'ail- ment lasuile.de l'eulaulemenl : -( Tu letoiirneras
leurs c'est au leiiips riiliir(iiiellieii parle (piaiid il « vers ton mari et il le dominera ' ?» Est-ce qui; la
dit : u Jemellrai riiiimilic' enireloi etlal'emine. » plupart des femmes et même presque toutes n'en-
El si l'on dil (|ue le (U'uiou n'a pu (K'sormais lantent pas en l'absence de leurs marisel ne sont
séduire Adam, nous répondrons qu'il n'a pas pas après renl'anlement dans l'impossibilité de
non plus sédiiil Eve. Pourquoi donc ces paroles, se tourner verseiL\?Ces femmes superbes cl (|ui
si ce n'esl pour nous montrer clairement que dominent leurs maris perdent-elles ce vice après
nous ne p(m\()ns c[\c lentt's par le diable, qu'au dominer par eux?
avoir enfanlé(>l se laissent-elles
inoven de celle partie animale dont nous avons Loin de libelles croient qu'en desenant mères
déjà beaucoup parlé plus haut et qui présente elles on t acquis une dignité non velle et se montrent
tlans un seuM'homme comme l'imaue et la simi- ordinairement plus orgueilleuses. Poiiiipioi donc
litude de la lemme'? Il y a aussi des inimilies après ces mots: « Tuenfanlerasdans ladouleur, »
établies entre la semence du dial)leel celle de la a-t-il été ajouté « Et tu
: te tourneras vers ton
femme; semenco du diable signifie les sug-
la « mari, et il te dominera,
ce n'est pour mar- » si

{jestions per\ erses, et celle de la femme, les fruits quer que de l'àme qu'attaclienl les
cette partie
de bonnes œuvres par lesquels on résiste à la plaisirs des sens, obéit avec plus de soin et de
tentation du mal. Le diable observe la plante du zèle ;\ la r'aison comme à un mari, quand pour
pied de la femme, afm de la mettre sous son vaincre telle ou telle babitiule mauvaise elle a
jou;;, si elle se laisse aller à desjoies défendues; éprouvé de la douleur et des diflicultés, et qu'uis-
de son C('ité elle observe la tète du serpent, afin truite pour ainsi dire au moyen même de ce pé-
de le repc)usser dès que se fait sentir la teidation nible combat elle se tourne vers la raison, reçoit
du mal. et exécute volontiers ses ordres pour ne pomt

tomber de nouveau dans quelque habitude per-


CHAPITRE XIX.
nicieuse? Ainsi donc ce qui parait malédiction
devient commandement, pour ijui lit avec l'esprit
PEINE INFLIGÉE V LA FE.MME.
les choses spirihielles. Car la loi est spirihielle 2.

'2ff. Point de difliculté relativement au châti-


CHAPITRE XX.
ment de la femme. En effet il est évident qu'elle
est soumise à des douleurs multipliées et qu'elle
CHATIMENT DE l'hOMME.
pou.sse bien des gémissements dans les angoisses
de cette vie. Quant aiLX enfantements doulcu- 30. Que du-ons-nous aussi de la sentence portée
reux, ils se réalisent chez la femme proprement contre l'honnne ? Les riches qui sont pourvus des
dite; il laul né'anmoins les considérer dans l'iii- moyens les plus faciles d'existence
et qui ne cul-
\isible partie de nous-mêmes que représente tivent point la terre, ont-ils échappé à la peine
la femme. ElTectivement les femelles même des énoncé(« en ces termes ? « La terre pour toi sera
animaux sans raison mettent au jour leurs petits « maudite désormais. Tu mangeras de ses fruits

avec douleur; et pour elle c'est la condition de « dans la tristesse et les gémissements de ton

leur mortalité plutôt ipie la peine du péché. Il « cœur tous les jours de ta vie. Elle te produù'a

peut donc se faire que pour les femmes aussi cette « des ronces et des épines et tu mangeras l'herbe

douleur soit naturelle à leurs


corps mortels; mais « de Ion champ. Tu mangeras ton pain à la sueur

legrandsupplice que d'immortels qu'ils étaieiU


est « de Ion front, jusqu'à ce que tu retournes dans

leui-s corps sont devenus mortels. Néanmoins « la terre d'où tu as été tiré, car tu es terre et
il y a dans cette sentence une profonde et in\s- « tu retourneras en terre '?» Mais certainement
térieuse signification c'est (pi'on ne s'abstient
; il est manifeste que personne n'échappe à l'effet
jamais de ce que prétend la volonté de la chair, de cette sentence. Car la tristesse et les travaux
SUIS éprouver d'abord de la douleur jus(iu'au que la terre ménage à riiomme ne sont autre
inoment où l'habitude du b-en est formée. Cette ' Gen. III, 16. — !Bom. vu, M. — -iGen, m, 17-19.
H8 DE LA GENÈSE CONTRE LES MANICHÉENS.

chose que la difficulté pour tous, durant cette vie, douleureux desquels de l'âme
la partie inférieure
de trouver la vérité, et cela par suite de l'étal se tourne vers la raisonpou r être soumise à son em-
corruptible du corps. pire et desquels nous avons parlé précédemment?
En effet, comme le déclare Salomon, « le corps Danse? sens en effet elle est la \ ie et la mère des vi-
" qui se corrompt appesantit l'âme et celte de- vants. Caria vie souillée par le péché est appelée
« meure terrestre aljat l'esprit dans une nuUtilude mort dans l'Écrilure. Ainsi l'.VpiMre dit qu'une
« de préoccupations'. » Lesépines et les ronces \euve qui vit dans les délices est morte', et nous
sont les embarras îles questions lorti:euses, ou les voyons que le péché lui-même nous est présenté
pensées qui ont pour objet les soins de cette vie souslenom et l'image d'uncadavredanscet endroit
et qui ordinairement, si elles ne sont extirpées de 1 Ecclésiastique « Celui qui se lave après avoir
:

et rejetées du champ de Dieu, étoulfent la parole « touché un mori et qui le touche de nouveau, à
pom* l'empêcher de frnctiMer tlans l'homme, se- « quoi lui sert de s'être lavé? Ainsi en est-il de celui
lon renseignement évangélique de Notrc-Sei- « qui jeûne aprèssespéchés, et qui marchant dans
gnem' -. Maintenant encore la nécessité veut que « la même voie les commet de rechef -. » Ici en
nous soyons inslruits de la vérité par le moyen effet mort est pour péché; abstinence et jeûne
des yeiLX et des oreilles du corps d'un autre côté ; après le péché correspond an bain, c'est-à-dire
il est diflîcile de résister aux illusions qui do ces à la purification obligatoiie quand on a touché
.sens pénètrent dans l'âme, quoique les mêmes un mort, et retourner à son péché
c'est toucher
sens nous transmettent aussi la vérité. Quel est de nouveau un mort. Pourquoi donc cette partie
donc, au miheu d une perplexité pareille celui , animale de noire âme (pii doil obéira la raison,
dont le visage ne sue pas pour manger son pain? comme la femme à son mari, ne serait-elle pas
C'est ce que nous de\ons soulfrir tous les jours appelée vie, quand par
la raison elle-même elle
de notre \ie, c'est-à-diie de cette vie qui aura un aura conçu de la parole de vie une bonne règle
terme. Otte sentence regarde celui qui cultive le de conduile?et quand se retenant sur la pente du
champ de son âme; il souffre cela jusqu'à ce qu'il vice quoiqu'avoc peine et génùssement, elle aui'a
i-etom-ne dans la terre dont il a été formé en d'au- : parsai'i'sistanceà unemanvaise habilude, produit
tres termes, jusqu'à ce (ju'il sorte de la vie présente. imehabiludelouableponrlebien,pour(pioi ne se-
L'homme en effet qui cultive cechanii) intérieur rait-elle pas appelée mère des \ ivants, c'est-à-dire
et gagne son pain quoique avec peine peut en- desactesdontladroilure el la bonté font le carac-
durer ce travail jusqu'à la fin de cette vie; mais tère; actes auxquels sont opposés les [léchés que
après cette vie il n'est point nécessaire qu'il en nous avons dil pouvoir être désignés sous le nom
soit chargé. Quant à celui qui laisse sans culture de cadavre ?

le chanq» dont il s'agit, il subit dans toutes ses Car pour celle autre mort que tous, en laids
3-2.

(euvresla malédiction portée contre sa terre, du- d'.\dani, nous devons d'abord à notre nature, et
rant la vie de ce monde, après laquelle il éprou- dont Dieu menaçait en donnant le précepte de
\era le feu du ])uigatoire ou la peine éternelle. ne pas manger du fruit de l'arbre de la science
.\insipersonne n'échappe à la sentence; mais il du bien el du mal, elle esl indiquée par la luniqne
faut faire en sorte que du moins on n'en i-essente de peaux. Adam elEve se firent eux-mêmes des
point l'elfet au delà du tombeau. ceintures de feuilles de figuier el Dieu loin- fil des
tuniques de peaux ' : c'est-à-dire qu'eux-mêmes
CHAPITRE X\l. cherchèrent le plaisir de mentir librement après
avoir détourné leurs yeux de la vérité, el que Dieu
XOM DONNÉ X EVE APRÈS SON PÉCHÉ.
condamna leurs corps à celte condition mortelle
LES TrXIQlES DE PE.41X.
de la chair, où peuvent se cacher les cœurs faux.
Qui ne doit iMre surpi'is (pi'api'ès son j^éché
;ii. Car il ne faut pas croire (jue dans les corps lels

et lasentence du jugement de Dieu, Adam ait qu'ils doivent être au ciel, puissent se dissiinulei'
appelé sa femme du nom de Vie, conune élanl les pensées conune dans les corps tels qu'ils sont
mère des vivants-' : landisiiu'cllea niéiilélauidrl swrla terre. Si même ici bas certains mouvemenls
et se trouve destinée à mettre au monde des des âmes se peignent .'^ur- les traits du \isage el

honnnes mortels? L'Écriture n'avait-elle donc pas surtout dans les yeux, comment la subtilité et la

en vue ces fruits mystérieux, après l'cnfanlement siinplii'ité di>s corps dans le ciel pourraient-elles

I
Sag. IJL. lô. — ï Marc, IV, ,18, 19. — ^ Gcii. iv, l. iTimv, (i. - ' Ecrli. XXXIV, 30, 31. Gpm. m, 7,21.
LIVRK II. — DU PARADIS TERRESTRE. 119

poriiiclliv à 1111 seul iiiouvcmonf do l'àiiit' de se qu'il ne peut éviter, l'ctlet de celte puissance du
voil(>r/.\iissi iiiciilcidiil-ils (•clic (Iciiiciircclccllc Irès-llaut, dont il n'a pas voulu siiliir l'action
liciiirusc Iraiisloi'iiiJilioii (|iii les l'ciidra sciiilil.i- de |)lein gré et dans sou état de honlieiir.
Itk's aux anges, ceux (lui dans la vie |)icsciilc, ;H. « Et aloi-s, pour qu'Adam n'etendd pas la
litrs iiicnic (lu'ils |)Ciivciil l'achci' le riiciisoii;;c " main sur l'ailire de \ie, alin de \i\re clernel-
sous les l(iiiii|ues (1(> peaux, le liaïsscul poiulaii' . lemciil. Dieu le chassa, (tiinisit, du paradis i...
Si
et rc\ileiit par un aident aiudiii- de la vci'ili' l'on veut picsscr le IcriiK; dimisit, on \oil (pi'il
éearlaut seideiiK'iil ce «pic les aiidilciiis ne |)eii- signilic pliiliil laisser aller ipie chasser, ce ipii
vent suppoiler, cl ne inenlaiil jamais; car |)arait très-juste, pour marquer ipie par le poids
viendra le temps où rien ne restera couvert, et de ses péchés Adam était pousséde lui-même dans
il n'est aucun secret ipii ne doive tMi-e inanircstc Iclieuipiiconvenailàsonétal. C'est ce (pi'i'prouve
un jour I. ordinairement riiomme méchant, <[uaiid ai)rès
Nos preiniers |)areuls turent dans le paradis, avoir commencé à vivre avec les hons, ne s'a- il

(pioicpie déjà IVappés de la .sentence divine, jus- méliore pas : le poids de sa mauvaise habitude
(in'au nioinent où ils se virent couverts des tu- l'enlraine loin de cette société des gens de bien:
nicpies de [jcaux, c'est-à-dire voués à la inorlalitc ceux-ci ne le cliasscnl pas malgré lui, mais ils
de celte vie. \'A t[uel signe plus Irappanl de la le laissenl aller selon ses désirs. Dans les mots
mort corporelle (pii nous altenil pouvaitleurètre précédents:» \e purriijeret Adam manum siuim
donné, ([lie ces peaux ordinaircuieni arraclK'cs '( ail arborem vita', » il y a encore une ra(,'on de
aux hètesipiiont perdu la vic.'.Viusidouc ipiand parler é([ui\oque. Nous parlons de celte sorte,
l'Iiomme vent être Dieu, non par une imitation soit quand nous disons « Ideo te moneo ne iterum :

:
légitime, mais par un orgueil criminel et en \io- '<facias: tiuod feeisti, et nous voulons alors >>

laut les précc|)lcs divins, il est ra\alé Jusipi'à la qu'on ne lasse plus ce que l'on a l'ail soihjuand ;

condition mortelle des bêtes. nous disons -.Ideo te moneo ne forte sis bonus; et
*
nous voulons alors (pi'on devienne bon. C'est
CHAPITRE Wll. comme s'il j avait : je l'avertis, ne désespérant
pas (pie lu puisses être bon. L'Apùtre dit de la
vnvM nous 1)1 l'vi! vins.
même manière : Xe finie det illis Deiis pa'iiiten-

S'i. C'est pounpioi la loi di\iiie le tourne eu tiani ad eoijnasceiidam veritatem, exprimant le

dérision par la houelie même de Dieu, et celte désirel la possibilitéde la pénitence et delà con-
nous avertit île nous garder de
ilérision l'orgueil naissance de la vérité [lour ceux dont il parle ''.

aulaul que nous en sommes ca|)al)les. On peut donc croire (juc riioinme est sorti du
« Voilà, dit le Seigneur, (ju'.Vdam est dcxeiiii Paradis pour être livré aux peines et aux tra-
« comme un de nous pour la science de comiaitre vaux de la vie présente, afin ([u'un jour il

« le mal '. » Les mots tanquam itniis


hien et le étende la main sur l'arbre de vie cl vive éternel-
c.f iiobis l'ont une locution équivoque qui présente lement : or l'extension de la main marque bien
iiuo tigure car ces mots peuvent être compris
: la croix par le mo\en de on recouvre la
la(]uellc

de deux manières; ou bien dans ce sens qu'Adam vie éternelle. Si néanmoins nous com[)renons
est devenu lui-même en quelque sorte un Dieu, les mots : .Vf manum porriiiat etvivat in œternum,
comme on dit uniia ex ftfU'.itorihus, poiu' dési-
: non dans le sens optatif, mais dans le sens pro-
gner (luelqu'im qui est vraiment sénateur; et hibitif, il le péché la
n'est pas injuste qu'après
alors c'est une moquerie ou bien dans ce sens : voîede fermée à l'homme, jus-
la sagesse ait été
(pi'il serait vraiment un Dieu, par le bienfait de qu'à ce qu'au moment délerminé il revive par la
son (Créateur et non par nature, s'il avait voulu miséricordedivine après a\ oir été mort, et ([u'il se

lui demeurer soumis. Ainsi on dit ex cunsulibux retrouve après avoir été perdu. L'homme est donc
ou pro en pav\\n\ de celui qui n'est
eoiisiil Unis sorti du paradis de délices pour travailler sur la

plus consul. Mais en quoi est-il devenu comme terre dont il a été formé, en d'autres ternies, pour
l'un de nous?C'esl par rapjjorlà la connaissance ti'a\ ailler dans ce corps mortel, et mériter s'il est
du bien du mal. L'homme donc saura par ex-
et possible, la grâce du retour. Or il demeura à l'op-
périence, en le ressentant, le mal (|ue Dieu con- posé du paradis '^, c'est-à-dire dans la misère, de
nail par sagesse; il verra, en souffrant sa peine tout point opposée àla vie bienheureuse. J'estime

Matt. .V, iH. — nien. m, 2i '


Gen, Ilf, 23. — U
= à Timolh. II, 25. - Gen. m. 24.
120 DE LA GENÈSE CONTRE LES MANICHÉENS.

en effet que le nom de paradis signifie la vie bien- « de toute ton âme et de tout ton esprit, et tu
et

heureuse. « aimeras ton prochain comme toi-même, «que,


de plus, « ces deux commandements contien-
CHAPITRE XXHL « nent toute la loi elles prophètes ', » nous com-

prenons sans aucune dihiculté qu'on arrive à l'ar-


LE CHÉRUBIN ET SON GLAIVE.
bre de vie non pas imiquement par le glaivede fou

Or Dieu plaça à la porte du Paradis un


33. «
agité en tous sens, c'est-à-dire par le siipi)ort des
« Chérubin avec un glaive flamboyant qu'il agi-
peines temporelles, mais en ouhejtar la plénitude
« tait, pour garder la voie de l'arbre de vie
i » delà science, c'est-à-dire par ta charité ',l' Apô-
;

mot tre disant « Si je n'ai pas la charité je ne suis


ou Ijien avec un glaive sans cesse agité. Le ;

« rien 2. »
Chérubin, comme le veulent ceux qui ont tra-
duit de l'hébreu les saintes Écritures, se rend
CPAPITRE .\XIV.
par plénitude de la science. Uuant au glaive flam-
boyant et toujours agité, il désigne les peines tem- AD.4M ET ÈVE ; LE CHRIST ET l'ÉGLISE.
porelles; carlepropi'e tlu temps est une moinlité
contiMuelle, et toute trd)ulation agit en quelque 37. J'ai promis d'étudier dans cet écrit les
sorte connue le feu. Mais autre chose estdesuliir choses accomplies, et je crois l'avoir l'ait sufli-

l'action du feu pour être consumé autre chose ; sammcnt; j'ai promis de les considérer aussi au
de la subir pour se purifier. L'Apùlre dit « Uui : point de vue prophétique, c'est ce qu'il nie reste à
« est scandalisé sans que je brûle '? » (Jr ce sen- faire eu peu de mots. J espère en effet qu'après
timent le puriliait phttôt parce (lu'il venait de a^oir placé d'abord comme un jalon qui frappe
la charité. Les tribulations que souffrent les justes tous les yeux et vers lequel on peut tout rappor-
ont aussi rapportàce glaive de feu « Car de même : ter, notre travail ne sera pas long. L'Ap(>tre

« (|ue l'or et l'argent sont éprouvés dans le feu, donc voit un grand mystère dans ces paroles :

« ainsi les hommes agréables à Dieu le sont dans le « Pour cela riiomme (piillera son père et sa mère

« creuset de l'humiliation, » est-il dit •'


; et encore : « et s'attachera à son épouse et ils seront deux
n La louî'iiaise éprouve les ^ases d'argile, et la Iri- « dans une même chair; >> ce (]ue lui-même expli-
'< Ijulalion les iiounues justes '. Puis donc que que en ajoutant : « Je dis en Jésus-Christ et dans
« Dieu corrige celui qu'il aime, et llagelle tout « l'Eglise-'. » Ainsidouccequis'estaccomphhisto-
« enfant qu'il regarde d'un air favoraiile >, » se- riquemenl dans Adam, désigne ce (pii devait s'ac-
lon ce que dit rAp(Mre : « sachant que la tribu- complir prophéliquemeut dans le Christ, qui a
« lation opère la patience, lapatiencel'épreuve '>, >> quitté son Père comme il le déclare quand il dit : « Je
nous lisons, nous entendons et il laut croire que « suis sorti de mon Père et je suis venu en ce mon-
la plénitude de la science et le glaive llamboyanl de^. « lU'a quitté, non pas en changeant de lieu,

gardent l'arbre dévie. Personne donc ne saurait puisque Dieu n'est renfermé dans aucun espace ni ;

y arriver queparcesdcux moyens, c'est-à-dire par en se détournant de lui par le péché, comme font
le support des peines et la plénitude de la science. les apostats; mais eu apparaissant aux hommes
36. Mais si pour parvenir à l'arbre de vie les dans la nature humaine lorsque. Verbe, il s'est

hommes sont assujettis à porter le poids de l'af- fait homme et qu'il a habité parmi nous •"'.
Ceci
lliction et de la douleur duraid presque toute la encore ne signifie pus (ju'il a changé sa nature
vie présente, la plénitude de la science parait divine, mais qu'il a pris une nalure inférieure,

être le partage du petit nombre seulement; de la nature de riiomme. A cet acte se rapportent

manière que tous ceux qui arrivent à l'arbre de aussi les paroles de l'.VpiMre : « Il s'est anéanli
vie ne paraissent pasy atteindre parla plénitude « lui-même "; » car il n'est pas apparu aux
de la science, encore (pie tous endurent le poids hommes avec celte gloire éclatante dont il jouit
(les peines marquées par ce glaive de feu toujours dans le sein de son Père; mais il a voulu con-
en mouvement. Mais eu songeant à ce que dit descendi'eà leur faihlesse, puisqu'ils n'avaient pas
l'Apôtre « La plénitude de la loi c'est la cha-
: le cœur assez pur pour voir le Verbe, qui dès
« rite ", » en remrn(|iianl aussi (pie la cbarilé se le principe esl Dieu en Dieu'. Qu'exi)riinent donc
trouve renfermée dans ce double précepte Tu : " ces mois : Il a (|uillé son Père ? Evidemment (pi'il

« aimeras le Seignein' ton Dieu de tout ton c(eur n'est point apparu aux hommes coinme il esl en
' Gen. m, 24. — » Il Cor. xl, 29- — 'Eccli. 5. — il, ' Ibid. xxvli, Matt. XXII, 37-10.
I
— ' 1 Cor. xiii, 2.— î Ephés. v,3I, 31. —
6. — ' Hébr. XII, 0. - Koni. v, 3,4. — 'Hom.xiii, 10. Jean, xvi, 28. * Jean, — i, U. — ' Pliili|i. il, 7. — ' Jean, i, 1.
LIVRE II. — DU PARADIS TERRKSTRK. 121

son IVro. Il a aussi quitté sa mère, c'csl-fi-dirc c'est-à-dire ipienous ne voulions pas nous en-
U's anci<'im('S(>l clLirni-ilcs olisoiNaiici's delà Sy- de noli'e nalure qui lient 1<- nnlieu,
ori:ueillir

na^'ii;;U(', <|iii l'Iail sa iiiôrc coiniiu' a|ipai'l(>iiaiil connue nous l'avons dêjàdll, ci que nous n'i'iti'on-
à la race de David sl'Ioii la chair, cl il s'est atta- vions pas, une fois déçus, la dilïérencc qu'il y a
ché à son épouse, c'est-à-dire à l'I^ïlise pour entre la foi catholique toujours simple et la dis-

être deux ilans une même chair. L'.Vprilrc dii sinndidion des lu'rctiipiesl
.Vinsi en elfet nous
elïeetivement qu'il est le chel'de ri^^jlise et (jne parvenons an discernemeid du bien et du mal.
rrifiiise est son corps '. Aussi s'esl-il endorun à « Car, est-il dit, il faut ([u'il y ait même des lié-

son tour, mais du sommeil de sa passion pour « restes, alin que l'on coimaisse parmi \ous(;eux
la formation de riljïlise son épouse; sommeil 'I (pii sont à rt'preuve '. » Aussi le serpent signilie
ipi'il eélèhre ainsi parl'orfiane du prophète :«Je dans le sens prophéti(|ue le venin des héréli(pies,
« me suis endormi, sommeil, et je j'ai goûté le surtout des iMauichécns et en général des ennemis
« me suis éveillé parce m"a pris que le Seiiziieur de l'ancien Teslament. Carji! ne crois pas ijuc
« sous sa protection '. » L'Eglise son épouse a été rien ;iit été plus clairement prédit dans le seri)enl
l'onnéedeson côté, je veux dire par la foi aux tour- que ces sortes d'hommes ou plutôt que la néces-
ments qu'il a endurés et au baptême <iu'il a établi ; sité deré\iler en leur personne. Il n'en est point
car son côté percé d'une lance répaiulit du sang eHéelivenient ([ui i)ronietle a\ec i)lus de verbiage
et de l'eau De plus « il a été formé, comme je
'^.
et de jactance la science du bien et du mal : et
« viens de le rappeler, de la race de David selon c'est dans l'IiDiinne Ini-même, eounnc dans un
" la chair; » ainsi (jue parle lApùtre ', c'est-à- arbre planté au milieu du paradis, ([u'ils s'enga-
dire il a été formé en quelque sorte du limon de gent à faii'c trouver cette coimaissance. Et cette
la terre quand d'honnne pour
il n'y avait point autre assurance Vous serez cifinme des dieux »
: «

la concouru à la
culti\er: nul lionnne en effet n'a (piels antres la donnent [)lus ([u'eux Leur sot '.

formation du Christ avec la Vierge qui est sa mère. orgueil, pour se communiquer, ne montre-t-il
« l'ne source jaillissait de la terre et en arrosait pas l'àme connue étant de la nature même de
« toute la face. » La face de la terre, c'est-à-dire mieux rappelés
Dieu ?Unels autres encore sont
la dignité delà tene, est-elle autre chose ici que par ces yeux qui s'ouvrent après le péché puis-
;

la mère du Seigneur, la vierge Marie, en qui s'est que, laissant de côté la lumière intérieure de la
répandu l'Esprit-Saint, désigné dans l'Evangile sagesse, ils poussent à l'adoralion de ce soleil vi-
sous les ligures de fontaine et d'eau \ive •">'/
sible? A la vérité tons les hérétiques séduisent
C'est donc aussi comme du
limon qu'à été formé généralement par une vaine promesse de science,
l'homme divin, établi dans le paradis pour y tra- ils blâment ceux qu'ils trouvent en possession de

vailler et le gai'der, c'est-à-dire fixé dans la vo- la simple foi, et parce qu'ils persuadent des choses
lonté du l'ère pour l'accomplir et l'observer toutes charnelles, ils appli(iuent leurs efforts à
toujours. faire ouvrir, pour ainsi parler, les yeux de la
Ma-
chair pour obscurcir ïœ'û intérieur. Mais les
CHAPITRE WV. nichéens ont horreur de leurs corps même, non
LKS M.VMCHÉEXS ET LE SERPENT. à cause de la mortalité dont nous avons encouru
la juste peine en péchant, mais |)Our nier que
Nous aussi nous avons reçu ensa ponsonne le
08. Dieu en soit le Créateur. Ne dirait-on pas <[ue
commandement qui lui a été fait car chaque Chré- ; leurs yeux charnels se sont ouverts et qu'eux
tien représente le Christ, quia dit lui-même « Ce : aussi rougissent de leur nudité?
« (jue NOUS avez lait au moindre des miens, c'est

« à moi que vous l'avez fait » Et plaise à Dieu i-. CHAPITRE XXVI.
ipie selon leprécepte divin nous jouissions de tons
EXCOP.E LES M.VXICHÉENS ET LE SEUPENT.
les fruitsdu Paradis, c'est-à-du-e lies délicesde l'es-
prit. Orles fruits de l'esprit, dit l'Apôtre, «sont la 39. Rien cependant ne les désigne et ne les
« charité, la joie, la paix, la patience, la <lonceur
signale avec plus de force qne ce que dit le ser-
" labonté, lafoi, la mmsuétude, laconlinence '; »
pent : « Sansaucun doute vous ne mourrez point ;

que nous ne touchions pas à l'arbre de la science « car Dieu savait que le jour où vous aurez
du bien et du mal planté au milieu du Païadis, '< mangé de ce fruit vos yeux seront ouverts. » Ils

'Colus. 1, IS. — îPs. III, 6. —-Jean. .\IX. ai. — • lium. 1, 3. —


Jean, vll,3S, 3S.— •'Matu i.\v, 41).— ' Gai, v, 2î, 23. '
1 Cm'. XI, 19.
122 DE LA GENÈSE CONTRE LES MANICHÉENS.

croient en effet que ce serpent est le Christ lui- douleur, et se tourne vers l'homme pour se sou-
même : et c'est selon eux, je ne sais quel Dieu mettre à son empire. On peut en effet reconnaî-
de la nation des tonèijres qui par envie a dél'endu tre par là qu'il n'y a pas en nous une partie qui

de toucher à l'arhrc de la science du bien et du ait Dieu pour aulcuret une autre quiappartienne
mal, comme pour se réserver cetteconnaissancc. à la nation des ténèbres, comme disent les Ma-
Une telle opinion a donné naissance, je crois, à nichéens, mais plutôt (pu^ ce qui doit gouverner
une certaine secte d'Ophitcs qui adorent, dit-on, dans riionnne, comme ce qui doit être gouverné,
un serpent pour le Christ, sans considérer coque vient également de Dieu suivant ces paroles de
dit l'Apôtre « Je crains que comme le serpent
: l'Apôtre : « L'homme, il est vrai, ne doit point
« a séduit Eve par son astuce, ainsi vos esprits ne « voiler sa tête parce qu'il est l'image et la gloire
« se corrompent » Je pense donc qu'il s'agit
' . « de Dieu, mais la femme est la gloire de l'Iiom-
d'eux dans cette prophétie. Or c'est notre concu- « me : car l'homme ne femme vient pas de la
piscence charnelle que séduisent les paroles du « mais la L'hommeen
fennne vient de l'homme.
serpent, et à son tour elle lait tomber dans le « effet n'a pas été créé pour la femme mais la ,

piège Adam, non pas le Christ mais le Chré- « femme poin- l'homme. C'est pourquoi la femme
tien. Pourtant si celui-ci voulait observer le com- « doit un voile sur la tète à cause des
porter
mandenicnt de Dieu et vivre, avec persévérance, « anges.Du leste, m l'bonnne n'est point sans la
de la foi, jusqu'à ce qu'il lui capable de compren- « femme, ni la femme sans l'homme dans le Sci-
dre la vérité; en d'autres termes, s'il travaillai' « gneur. Car comme la femme a été tirée de
dans le Paradis et gardait avec soin ce qu'il a « l'homme, ainsi l'homme maintenant est parla
reçu, il n'oublierait pas sa dignité jusqu'à recourir « fennne, mais tout vient de Dieu '. »

quand sa chair lui déplaît comme une nudité,


aux déginsements charnels du mensonge, ains' CHAPITRE XXVH.
(ju'à des léuilles de liguier, pour s'en taire une
CHUTE ET CHVTIMEXT d'aDAM.
ceinture. N'est-ce pas ce que font ces misérables
hérétiques, lorsqu'ils mentent au sujet du Chris' il. Maiidenantdonc qu'Adam travaille eu son
et le représentent comme a} ant menti lui-même ? champ et, s'il y rencontre des lonces et des épi-
Ils se cachent en quelque sorte de devant la face non l'effet delà nature mais la pei-
nes, qu'il voie là,
de Dieu, lorsqu'Us désertent la vérité pour leurs ne du péché, l'attribue, non à je ne sais
et qu'il
mensonges. « Ils détourneront, dit l'Apotre, leur quelle nation des ténèbres, maisaujuste jugement
Cl entendement de la vérité et se livreront à de Dieu, ])aice que la règle de la justice est de
« des tables 2. »
domieià chacun ce qui lui revient. Que lui-même
iO. Et qu'on le remarque bien, ce serpent, ou présente à la femme la notu'ritui'e céleste (pi'il a
cette erreur des hérétiques qui tente l'Église et reçue de son chef qui est le Christ, sansselaissei-
dont l'Apôtre signale le danger quand il dit : « Je imposer par elle une nourriluredéfendue, c'est-
"« craitis (pie comme le serpent séduisit Eve par à-dire lesdoclrineslrompcusesdes hérétiques ol-
« son astuce, ainsi vos esprits nese corrompent ;
» ferles avec grande promesse de science, et la
celte erreur, dis-je, rampe sur la poitrine, sur le pn'tendue révélation des secrets qu'ils foni en-
ventre et nianue la terre. Car elle ne trompe (]ue trevoir pour ménager à l'ei-reur plus de succès.
lesorgueilleux (pu en s'arrogcaid ce qu'ils ne sont Car c'est l'orgueilleuse et inquiète prétention des
pas, croient tout aussitôt que l'âme humaine est hérétiques, qui sous l'image d'une femme dans
de la même nature (|ue le Dieu suprême; ou (pie le livre des Proveibes, lait entendre ces paroles:
les hounnes dominés par les désirs charnels, (pii « Uu'il se détourne et vieinu'àuuii, celinqui est
entendent dire volontiers (pie ce (|u"ils !bnl de « insensé; «elle engage ainsi ceux qui du côte de
iionteuxTie vient pasd'enx-mêmesniais de la na- l'esprit soid dépourvus de ressources et leurdit :

tion Icni'brense; ou enlin (pie les hommes cu- « .Alange/ avec délices le painpris eu secret, goù-
rieux, qui goûtent seulement les choses de la terre '< lez avec diinccin- les eaux dérobées.'» Etpoui'-
et envisagent d'un (rit (ei'i-esire les choses spiri- tanl il estni''Ci\ssaire, que si guidé par l'envie de
luelles. Il V aura des inimitiés enli-e ce serpent meiilii', (pii làil croire (pie le (^liiisla iiienli lui-

ellalenuuc, eidrelarace de l'un et la race de l'au- même, on se laisse prendre à de tels discom"s, on
tre, si celle-ci met an jour des hiiits, ipioicpi'avec reçoive aussi, parjugemeni di\in, une tunique

'Il Cor. XI, 3. — MlTmi.lv, 1. '


1 (nr. XI, 7,1:. — 'Prov.ix, 16, I!.
LIVRE II —DU PARADIS TERRESTRE. 123

(le ponii. Ce nom nit- semble no pas (l(^if;nor dans que en elTel la femme est cerfainnement (piebpie
la pn)i)lii'lir la nioilalité dn corps marfpirc dans chosedc bien, ius(pii>-là même (pie le grand .\p(^-
le sens liistori(ini', dont lions a\ons Ifail»' pr(''cc- tre l'appelle la ;:loire (leriiomme, en ajonlant
demmonl, maisles illusionsqni naissent dos sens (pie toul esl de Dieu. — Ils disent encore Uni a :

rnal('riels et(|nipai' iwi eliàtinieni divin |)onisni- faille diable? — (;'estlui-même, car il est tel, non
\enl le nientenr el le jellenl dans les ténèhres. l)ar le vice de sa nature, mais par le pi'ehé (pi'il
(lelni-ei es! ainsi eliassé dn paradis, e'esl-à-dii'<> a commis. — Du moins, poursuivent-ils, Dieu
(le la loi (;atlioli(]ue el de la M-rilé, ponrdemeu- ne devait pas le créer sachanl (pi'il pécherait —
i-er à ro|)posé dn paradis, en d'anires termes, Et pounpioi lu^ l'anrait-il [las créé, puisque par
poni' eonlri>dire cflle même loi. Kt si cpielrpie sa justice et sa l'rovidence, il redresse beaucoup
joiu' il re\ienl à Dien [iremièrement par le d'hommes au uiojeii de la inalicedM diable? N'a-
moyen dnfilaive llamboyant, c'est-à-dire des tri- vez-vous doncpas entendu ce que dit r.Vp(')trc :

linlations lemporelles, eecomiaissaid et plemant 'c Je les ai livrés à Satan, afin (pi'ils apprennent à ne
ses péeliés, et en aeeiisanl, non pins nne natni'e '< [las blasphémer' ? " ?Le niênie .\|)i"ilre ditencore
élrangùre dont l'idée est cliiméri(pie, maisen s'ac- de lui-m(5ine: «De peur que la grandeur de mes
eusant Ini-niènie afin de mériter son pardon ;
« révélalionsne m'élevai, l'aiguillonde la chair,
secondement parla piiiiilnde de la science, c'esl- '< l'ange de Salaii pour me souffle
m'a ('b' doiiin'

à-dii'e parla cliarile ainiani de tout son cœur, de « ter''. » —


Le diable est donc bon, demandent-ils
lonl<'son àm(>et de tonl son esprit, Dieu qui, tou- puisqu'ilestulile? —
Non, entantquediable il est
jours innnnahle est an dessus de toul, et le pro- mauvais, mais Dieu est bon et tout-puissant, et il
chain comme soi-même, il par\icnilraà l'arbre fait servir la malice même dndiable à la production

d(> vie et vivra éternellement. de beaucoup (r(eu\res de justice el de sainteté.


Carnousu'im[)utons au diable (|ue sa volonté per-
CHAIMTRE WVIIl. verse (pii rai)prK|iie à mal faire, non la l'rovi-

iiKsrMK r.r hkfi tatio.n ni:s impostures mam- dence lie Dieu (jui du maltirele bien.

CIIKK^NES.
CHAPITRE \XIX.
i'i. Une donc à reprendre dans les
\oient-ils
livres de l'ancien TestauKMd? Ils peuvent, sui- i.K iio(;me de e'e(;lise et les ekhei ks des
vant leur coutume, l'aire des questions; et nous MANICHÉENS.
répondrons ecunme le Seii;neur daiiînera nous
en faire la grâce. — Pourquoi, disent-ils, Dieu i/i. Enfin la religion est l'objet de notre dis-

a-l-iicréé l'hoinme, qu'il sa\ail devoir pécber? — pute avec les Manichéens,'et la question se résu-
Il l'a créé', soit parce qu'il pouvait, même avec me en ces termes: Une doil-on pieusement penser
l'bomme pécheur, faire beaucoup debien,le re- de Dieu? ne peuvent nier (pie legenre humain
Ils

ienanl toujours sous le régime de sa Justice; soit soit danslamalheurousecoudifionqui résulte du

parce que péché ne pouvait nuire àDieu. Si


le pi5ché, mais ils prétendent que la même nature de

d'ailleurs l'homme ne péchait pas il ne serait l>ieu gémit sous celte infortune. Nous le nions,

point condaniné à la morl, et s'il péchait les au- et nous soulenonsque la naliire vouéeà la misère
tres mortels prolileraient de son exemple pour se est celle que Dieu a tirée du néant, et qu'elle esl
corriger. Car il n'est rien qui éloigne plus effi- devenue misérable non par force mais par le
cacement du péché, que la pensée de la mort choix ((u'elle a fait du péché. Seloneux, la nature
tpi'on ne peut éviter. —
En le créant il devait l'af- de Dieu est contrainte par Dieu même au repen-
franchir du péché —
Mais c'est à quoi l'homiue lir et à l'expiation des fautes commises. Nous le

de\ail travailler Ini-mé. ne, car il fut créé tel, que nions et nous disons (jiie c'est la nature faite de
s'il n'avait voulu il n'aurait point péché — Le dia- rien parla puissance divine, ipii devenue coupa-
ble, disent-ils encore, ne devait pas avoir d'accès ble est obligée de faire pénitv'iice de ses péchés.
près de la femme —
Mais la Icmine elle-même Ils enseignent que la nature divine reçoitdeDieu
ne devait pas le lui permelire; car elle était niêiue sou pardon. Ilcjelanl cette idée, nous di-
sortie des mains de Dieu en état de le repousser sons (uie c'est la naliire tirée par Dieu du néant,

>i ne voulait pas le recevoir


elle Dieu, ajoii- — (|ni re(;oit lepardon descrinies dmit elle est souil-
lenl-ils, ne devait pas créer la fcnune -- (','est lée, ipiaud elle s'éloigne dn p('cbé pour revenir à
dire
I
ITim. I, 20. — Il Cnr. xli, 7.
(|u'il devait négliger de (aire un bien, puis-
134 DE LA GENÈSE CONTRE LES MANICHÉENS.

son Dieu. La nature de Dieu, ajoutent-ils, est par tant qu'elles sont, parce que Dieu a fait toutes
nécessité sujette au cliangemcnt. Nous le nions choscscxcellentcs, toutefois à des degrés divers qui
et nous disons ciiangée par sa propre volonté, les distinguent de manière que l'une est meil-
cette nature que Dieu a faite de rien. La nature leure que l'autre; qu'ainsi de toute sorte de cho-
de Dieu, poursuivent-ils, pâtit de fautes qui lui ses bonnes, les unes plus parfaites, les autres
sont étrangères. Nous le nions et nous disons moins foimépar Dieuunen-
parfaites, se trouve

qu'aucune nature ne souffre que des fautes qui seml)lc parfaitque lui-même gouverne avec une
sont les siennes De plus nous tenons Dieu pour si
i
. admirable sagesse enfin que faisant par sa vo-
;

bon, si juste et si saint, qu'il ne pèche ni ne nuit lonté toides choses bonnes, il n'est réduit à souf-

à personne qui n'aura point voulu pécher, pas friraucun mal. Car il est impossible que celui
plus qu'on ne peut lui faire tort à lui-même en dont la volonté est au dessus de tout ait à sup-
se livrant au péché. Ils disent qu'il y a une na- porter quoi(|ue ce soit malgré lui.
ture du mal à laquelle Dieu est forcé d'ahandon- On connaît maintenant ce qu'ils disent de leur
ner, pour en ressentir les cruelles rigueurs, une côté, ce que nous disons du notre; que chacun voie

partie de la sienne. Nous, nous disons qu'il donc la doctrine qu'il doit suivre. Pour moi j'ai
n'y a point de mal naturel ^ que toutes les natures
;
parlé de bonne foi devant Dieu; et sans aucun
sont bonnes ;
que Dieu lui-même est la nature esprit de contention, sans nul doute de la vérité,

souveraine; (pi'il est l'auteur des autres sans en saus vouloir en rien préjudicier à un traité plus
excepter une seule ;
que toutes .^ont bonnes en exact, j'ai exposé ce t\ui m'a paru véritable.

IRétract. ch. 10, n. 3. — = Ibid. 5.

Traduction de 3/. l'abbé Tassin.


,

DE LA GENESE AU SENS LITTERAL


OUVRAGE INACHEVE.

F.Tl'nE SIP, I.R COMMKNCKMENT DE LA GENÈSE JISQI'a CES PAROLES :

« 1-AISO.NS l'homme a NOTllE LMAGE '. »

CHAPITRE PREMIER. spirituelle soit corpoi'elle, ou poiu' parler d'une


manière i)lus simple, et employer les termes des
ABRÉGÉ DE LA FOI CATllOLiyrE.
divines Ecritures, soit visible soit invisible, n'est
pas de la nabu'e de Dieu mais a été faite de rien
1. Si l'on veut parler des mystères de la natu-
par Dieu, que tout son rapport à la Tiinilé
et
re, que nous reconnaissons connue l'ouvrage de
c'est d'avoir Dieu pour créateur, puisqu'elle
la ]iuissance divine,il faut le faire non par voie
est sortiede ses mains. Aussi n'est-il point per-
d'alïirnialions mais par voiede(iuestions; quand
mis de dire ou de croire que les êtres de la créa-
smtoui on les étudie dans les livres que recom-
tion sont consubstantiels à Dieu ou éternels
mande une autorité di\inc; car alors l'affirma-
tion téméraire d'une opinion incertaine
comme lui.
et
douteuse se justifierait difficilement tlu crime de
3. Mais d'ailleurs, suivant la même doctrine,
que Dieu a fait il l'a fait très-bon. Quant
tout ce
sacrilège. Le doute cependantne doit point fran-
aux maux, iisnesontpas des réalités substantiel-
chir ici domaine de la
lesboi-nes ni atteindre le
les, des objets delà nature. Ce qui est appelé mal
foi que beaucoup d'héré-
catholique. Et parce
est toujours le péché ou la peine du péché. Or le,
siarques ont l'habitude de plier à leur sentiment,
péché n'est rien que le consentement déréglé de
réprouvé par la docti'ine de l'Eglise universelle,
la volonté libre. Nous portons-nous à ceque dé-
l'exposition des divines Ecritures; avant de venir
fend la justice quand nous sommes maîtres de
à l'objet particulier de ce livre, il estbon de pré-
nous déterminerautrement? voilà le péché c'est- :
senter en peu de mots la foi catholique.
/ à-dire qu'il ne consiste pas dans les choses el-
"2. La voici C'est par son Fils unique, qui étant
:

sa Sagesse et sa Vertu lui est consubstantiel et \ les-mèmes, mais dans leur usage illégitime.,
coéternel,et en unité
/Le légitime usage des choses c'est de rester
du Saint-Esprit qui est aus-
dans la loi de Dieu, de se soumettre ;\ Dieu seul
si de même substance que lui et possède la mê-
avec une pleine et entière dilection, et de faire
me que Dieu le Père Tout-Puissant
éternité, .'i

tout ce qui est permis, d'ailleurs sans attache,


Ib-é du néant et formé tous les êtres de la créa-
,

Vsans affection déréglée, c'est-à-dire selon l'ordre


tion. La doctrine Catholique nous oblige donc de
divin. Ainsi en effet trouvera l'àmc dans l'exer-
croire que cette Trinité est un seul Dieu, et qu'il
cice de son empire, non la difficulté, non la misè-
a fait et créé tout ce qui existe connue réalité
re, mais une grande facdité, mais un grand bon-
substantielle en sorte que toute crcatiu'e, soit
;

heur. Pour la peine du péché, elleconsistedans le


Gen.
1 1-26. I, tourment qu'éprouve l'âme de ce que la création.
l"it) DE LA GENÈSE AL" SENS LITTERAL.

soumise à son autorité quand elle-même obéis-


saità Dieu, rel'use de la servir depuis que de son CHAPITRE m.
côté elle s'est révoltée contre lui. Ainsi le leu
étant une créature de Dieu n'est pas un mal; ce- OIE SIG.MFIENT LES PREMIERS MOTS DE LA GEXÉSE?
pendant notre faiblesse en souffre les atteintes
(i. On peut donc demander sicesmots: «-Dans
comme une juste peine du i)éclié. On nom-
« le principe Dieu lit le ciel et la teri-e, » doivent
me du reste naturels les pécbés dont nous ne pou- être entendus seulement dans le sens historique,
vons, sans la miséricorde Dieu nous ah-tcnir, de-
ou s'ils signifient encore quelque chose dans le
puis que parla faute de notrelibre arbitre nous
sens figuré, comment ils concordent avec l'Evan-
sommes tombés dans la triste condition de cette
gile et pourquelleraison le livre sacré conuuen-
vie.
ce ainsi. Prenons ces paroles au point de vue de
4. C'est pai- Notre-Seigneur Jésus-Cbrist que
l'histoire le mol principe doit-il s'entendre du
:

l'homme se renouvelle, depnis ([uecetle ineffable


connnencement du leuqis ou de la sagesse me-
et iunnuable Sagesse de Dieu a daigné prendre eu
nu^ de Dieu ? car le Fils de Dieu s'appelle lui-
sa personne tout ce qui ap])artient à lanaturehu-
nuhne principe quand on lui fait cette question :

maine, du Saint-Esprit et de la Vierge


et naître
« Qui êtes-vous? » et qu'il réponil : « Je suis le
Marie. La foi nous enseigne aussi le crucifiement,
« princii)e moi qiù vous parle i. » Il y a en effet,
la sépultui'c, la réssurrcctiou de l'Iiounne-Dieuet
un i)rincii)e sans principe et im principe ayant
son ascension dans le ciel, ce (piidéjà est accom-
un autre principe. Le Père seul est principe sans
pli; sa descente ici bas pour juger les \ivants et
ixincipe, et de là ce point de notre foi, (|ue tout
les morts à la lin des siècles, et la résurrection
est d'un seul principe. Pour le Fils, ilestprincipe
de la cbair, ce qui est jusqu'alors prêché comme mais de telle sorte qu'il est engendré par le Père.
devant arriver un jour. Elle nous enseignequel'Es-
La première créature intelligente peut être elle-
prit-Saint a été- communiqué à ceux qui croient
même appelée piincipe pour les êlres dont elle
en .lésiis-Cbrist ; que par Jésus-Ciuist a été
est le chef et que Dieu a formés. Le chef en effet
formée l'Eglise, la mère des fidèles et appelée Ca-
étant avec raison appelé principe, l'Apôtre ne dil
tholique parce qu'elle est achevée de tout point,
pas dans cette gradation que la femnu^suil le chef
qu'elle ne présente aucun côté faible et quelle
de quelqu'un. Il appelle l'homme le chef de
est répandue partout l'iuiivers : elle nous ensei-
lafemme, le Christ le chef de l'homme et Dieu
gne la rémission, accordée aux honnues pénitents,
chef du Christ - ainsi se rattache la créature an
:

des pécbés dont ils ('taient coupables, et la pro-


Créateur.
messe divine de la vie éternelle, du royaume des Dans
7. S'il est dit : « le principe, » est-ce par-
cieux.
ce que les objets dont il s'agil ont été créés avaiH
CHAPITRE II. tout? Si les anges et tous les êtres spirituels ont
été faits en premier lieu, est-il inq)ossibleque le
DIVERS SENS DE l'ÉCRITURE.
ciel et la terre aient été forméset créésd'abord? Car

o. 11 faut envisagerau point de vue de cette foi


il faut recoimaitre que les anges sont des créa-
ce qui dans le livre présent, doit être l'objet de tures de Dieu et ont été faits par lui. En effet le

nos recherches et de nos discussions. « Au com- prophète parle des anges quand il dit dans le
« mencement Dieu fit le ciel et la terre. » D'a-
Psaunu' I We: « Dieuacommandé et touta été l'ail,

près certains interprètes des divines Ecritures, il


« ila voulu et tout a élé créé » Mais si les anges
ont reçu les premiers l'existence, onpeutdenian-
y a quatre manières d'envisagerla parole sainte :

l'histoire, l'allégorie, l'analogieet l'étiologie. Ces derencore: ont-ils été créés dans le tenqi^, ou avant
noms vienneid du grec, mais nous pouvons en tous les temps, ou aucomuiencemeut du temps?
Si c'est dansle temps, le tempsexistait donc avant
donner dans notrelangueladéfiuitionet l'expli-
qu'il y eût des anges; et comme le temps lui-même
cation. L'histoire consiste à retracer, soit sous
est une créature, on doit reconnai lie alors que
l'inspiration divine soit avec les seules ressources
de l'esprit humain, les choses accomplies; l'allé-
quelque chose a été fait avant les anges. Si nous
dans un sens figtné disons qu'ils oat été faits au commencement du
gorie, à entendre les textes ;

l'analogie, à faire voir l'accord de l'ancien et du temps, el que le lempsa commencé avec eux ,nous

nouveau Testament; l'étiologie à faire connaître


devons tenir comme erroné ce que prétendent
les motifs des paroles et des actes. ' Jean, viu,25. — » I Cor. XI, 3. - i
Ps. cxLviil, &.
DUVUAGK INAf.HEVfi. 127

i|ii('l(|iicsaiilcniis, (|iit' \o loinpsa comiiioiitr jimt !•. Il |)eulseinltleraussi qiielesmolscielet terre


If rie! cl lu It'i ro. oui éle cmiiloNcs |)oiir dcsij;iier toutes les créa-
S. Si CCS aiififs oui ctc roi'iiu''s avant le loinps, tures (pic la vorileélhérée(pn frappe nos regards,
;

il laiil examiner clans (|ni'l sens viennent plus aveclc monde invisibiedes puissances supérieu-
loin CCS pai'olcs : « F.l Dicn dit : Qu'il ) ait dans res, a été appcl('e ciel, chpic le iiomdc lerrca été
'< le lii'niauicMl du ci(>ldcu\ ;;rands luminaires, (buiiié à touic la |)arlic iiilcrieurc de i'imivers et
Il aruHpi'ils luisentsurla teiieetséi)arent le jour à l'ensemble des êtres auimésqu'elle renferme.
" (le la nuit; (pi'ils servent desit;nesel lasseni les 0(1 bi(>n encore, toute créatur(> siipéiieureet in-
. temps, jours cl lesauu<'es. » H peul sembler
les visible esl-cl le compiise sous le nom de ciel, toute
ici temps iiulccnumencé (piand le ciel et
(|ue les créature visible sous celui de terre; et peut-on en-
les llamhcaux du ciel ont paru et ont eoniniencé tendre ainsi de Ion le la création lespa!'oles:it Dans
leurs ié\()lutions. Or si cela est vrai, si le « le principe Dieu créa le ciel et la terre? > t^eut-
temps a C(>':!meucéa\ec le cours des astres qu'on êlre en elTet con\enail-il (|ue comi)arativemcnt
dit avoiiétc laits Iccpialiicinejom-, comment a-l- à la civature invisible, ijui serait nommée le ciel,
ilpu V avoir des joins avant l'existence du temps? tout ce qui est visible fût ai)pelé terre. L'àme est
(Iclle lormalidM des joins n'aiirait-elle clé rap- invisible et néanmoins l(irs([u'elles'esl entlée de
poiteelà (pie par é^ard pour notre l'aiblesse, pour l'anKiurdes choses visiblesel enorgueillie de leur
insiniierdoueementàde pauvres intelligencesdes ac(|uisition, n'a-t-ellc pas étédésignée sousienom
choses d'un ordre plus relev('% parce (pie aucun de terre dansées parolesde rKcriture : « De quoi
récit ne peut se l'aire ipie l'on n'\ distingue un « peut s'enorgueillirla terre et la cendre '? »

coniinenceinent, un milieu et une tin? Les flam- 10 Autre question : L'écrivain sacré a-t-il dé-
beaux du ciel ont-ils ('h'' cir(''s [)ar la parole divine signé sous les noms de ciel et de terre toutes
dansées temps «pie les liommes mesurent par la les choses déjà distinctes, coordonées et revêtues
durée des mouvemenls corporels; dans ces temps de leurs formes particulières ? Ou bien a-t-il
qui en elïet n'existeraient pas sans Icsmouvcments donné ces noms à la matière d'abord informe de
des corps cl que tout le monde comiait parlaile- toute la création, à celte matière d'où sont en-
inent ? Enadmettantcelte liypothèsc, nousdevons suite venus, sm" un ordre inelïable de l'Eternel,
examiner s: eu dehors du mouvement des corps, les différents êtres avec leurs proportions et leurs
le temps peut exister dans le mouvement d'une beautés spéciales? Nous lisons, il est vrai :

créature incorporelle, telle (pi'est l'àme ou 'esprit l


« Vous avez fait le monde d'une matière infor-
lui-même; car sajisnul doute lame est en mou- « me '. » Cependant nous ne pouvons dire que
vement dans les pensées qui l'occupent, et il y a celte matière, quelle (lu'elle soit, n'ait pas été
dans ce mouvement un commencement et une créée par Celui de qui nous avouons et croyons
suite d'idées, ce qui ne peut se coin prendre qu'avec que vient toute chose. Le monde alors désignerait
les intervalles du temps. Adoptons-nous cette o- l'ordre et l'harmonie cpii règne entre tous les
pinion? cio_\ons-nousaussi que les anges ont été êtres déjà formés et distincts: et les nomsdeciel
créés avant le ciel et la terre? Nous pouvons alors et de terre s'appliqueraient à la matière pre-
concevoir que le temps ait existé avant la créa- mière, comme à l'élément du ciel et de la terre:
tion de la terre et du ciel, puisipi'il y avait des ce cielet cette terre eussent été alors mêlés, con-
créatures pour le déterminer par leurs mouve- fondus et propres seulement à recevoir leurs for-
ments incorporels et puisqu'il est aussi juste de mes de Dieu leurauteur. C'est assez sur ces mots :

le \ oir en elles, (jue de le voir dans l'àme humaine, ( Dans le principe Dieu lit le Ciel et la terre. »
habituée p,ir son union avec le corps aux mou- Nous nous sommes bornés à des questions :

vements corporels. Mais peut-être n'y a-t-il point aussi bien ne fallait-il là dessus rien affirmer
de temps pour les prenaièresetlespluséminentes
témérau'eraent
créatures. Quoiqu'il en soit, car c'est ici une chose
des plus profondes et des [dus impénétrables à CHAPITRE IV.
l'esprit assurément tenir comme
humain, on doit
un point de foi, encore qu'il excède la mesure de SECOND VERSET DE L.V GENÈSE.

nos connai sauces, que toute créature a un com-


1 1 . « Or la terre était invisible et sans ordre
mencement, que le temps lui-même est mie créa-
« et les ténèbres étaient sur l'abîme, et l'Esprit
ture, que par conséquent il a un commencement
et n'est pas coéternel au Créatem-. lEccli. x, 9- — =Sag. XI, 18.
128 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

« de Dieu était porté sur l'eau. » Les hérétiques a été appelée terre invisible et sans ordre, abîme
ennemis de l'ancien Testament accusent ainsi ce et profondeur manquant de lumière; elle avait

passage : Comment, disent-ils, Dieu a-t-il fait été désignée aussi sous les noms de ciel et de teri'e

dans le principe le ciel et la terre, si déjà la comme étant l'élément du ciel et de la terre,

terre existait ne comprennent pas que ceci


? Ils ainsique nous l'avons déjà dit : à moins toutefois
a été ajouté pour exposer dans ciuol étal se trou- que par les termes de ciel et de te ire l'écrivain

vait la terre dont il a été dit réellement « Dieu : sacré n'ait voulu proposer d'abord tout l'ensemble
« fit le ciel et la terre. » Il faut donc entendre de la création, et en montrer toutes les parties

ainsi le texle : « Dieu dans le principe lit le ciel après avoir donné l'idée de cette matière univer-
(( et la terre ; » or cette terre que Dieu avait faite selle.

que désordre, jusqu'à


était invisible et n'offrait 13. «Et l'Esprit de Dieu était porté sur l'eau. »

ce (]ue lui-même encore la fit paraître dans sa Jusque-là il n'a pas été dit que Dieu eût fait l'eau.

forme et passer de la confusion où elle était Etcependant nous ne devons pas croire ([ue Dieu
d'abord à l'état d'ordre qui règne entre toutes nel'ait pascrééeet qu'elle ait exisféavant qu'il eût

ses parties. Ou bien ne vaudrait-il pas mieux encore rien fait, car il est celui de qui, par qui et
penser qu'il s'agit encore ici de la même matière en qui toutes choses ont l'être, comme le déclare
qui a été ])récédemment désignée sous les noms l'Apàtre 1. Dieu donc est aussi le créateur de l'eau
de ciel et de terre ? Le sens serait celui-ci : « Dans et ce serait une grande erreur de croire autre-
« le principe Dieu fit le ciel et la terre; « or ce ment. Mais pourquoi n'a-t-ii pas été dit que
qui est appelé ciel et tei-re en ce lieu, était une Dieu ait créée l'eau? L'écrivain sacréa-l-ilvoulu
terre invisible et sans ordre et les ténèbres encore appeler eau cette même matière déjà
étaient sur l'abîme ; en d'autres termes, ce qui désignée sous les noms de ciel et de terre, de
a été nommé ciel et terre était une matière con- terre invisible, sans ordre ni arrangement et

fuse de laquelle le monde, composé de deux d'abime ténébreux? Et pourquoi ne serait-elle


grandes parties (|ui renferment tout le reste, pas appelée eau, quand- elle a pu être appelée
savoir, du ciel et de la terie, devait sortir avec terre, quoique rien jusque-là, ni eau, ni terre, ni

une forme déterminée, après que les éléments se- aucun objet n'eût encore do forme distincte?
raient coordonnés entre eux. Cette confusion de Mais il peut paraître convenable qu'elle ait d'a-
la nuitière a pu du
être indiqxu'e à l'intelligence bord été appelée ciel et terre; en second lieu terre
vulgaire, par les mots de terre invisible, sans invisible, sans ordre ni arrangement, abîme sans

ordre, sans an angement^ de ténèbres sur l'abîme, lumière et eau en troisième lieu. Tirée du
;

c'est-à-dire sur une immense profondeur. Ce néant pour la formation de tous les èircs de l'u-
dernier mot a pu être employé aussi pour faire nivers, elle aurait été appelée d'abord ciel et terre,

entendre que nulle intelligence ne saurait com- parce que le ciel et la terre, dont se compose le

prendre la matière informe, à raison même de monde en devaient être formés. Elle aurait été

son informité. nommée en second lieu terre informe, en dés-


12. « Et les ténèbres étaient sur l'abime. «L'a- ordre abîme, parce que de tous les éléments
et

bîme était-il dessous elles ténèbres dessus, com- la terre est le moins beau et a moins d'éclat que
le reste. Enfin elle aurait été désignée sous le
me en des lieux distincts ? Ou bien est-ce parce
qu'il s'agit encore ici de la confusion de la
nom d'eau, pour exprimer sasouplesse entre les
matière ou du Chaos, comme parlent les Grecs,
mains du Souverain architecte car l'eau est plus ;

que l'écrivain sacré dit : « Les ténèbres étaient mobile que la terre, et comme elle se laisse tra-
vailler et mouvoir plus facilement qu'elle, cette
« sur l'abîme; « il n'y avait pas de lumière, car si

la lumière eût existé, sans aucun doute elle aurait matière première a dû s'appeler eau plutôt que
été au dessus, pour tout éclairer au dessous d'elle? terre V
Il est vrai que l'air est lui-même plus mo-
14.
Aussi bien celui qui considère attentivement ce
que sont les ténèbres, n'y trouve rien que l'ab-
bile que l'eau; et l'on croit ou l'on éprouve avec
sence de la lumière. Ces paroles donc raison que l'éthcr est plus encore mobile que l'air.
: « Les
« ténèbres étaient sur l'abîme, « équivalent à
Mais ces noms d'air ou d'éther étaient moins con-
celles-ci : Il n'y avait pas de lumière sur l'abime.
venables pour désigner cette matière premiè-

Ainsi donc, c'est cette matière, dont l'opération re. Car on croit que la propriété de ces éléments

divine doit former ensuite tantd'èlres divers, qui ' Rom. xr, 36,
nrvuA(;i': iNAcnEvr;. IM
ost plus active <|iio p.tssiv<', tandis i|ii(' c'csl le s()uplesse (pie considère l'Esprit de l'ouvrier sou-
conliairc pour la h'vvc ol l'raii. Si co <pii' je dis verain avant de travailler.
l)arait ohsfiir, il est très clair cepeiidaiit, selon K). « El l'Espril (II- hicii était porté sin- l'eau. »
moi, ipie le vent a'.'iie l'eau el l>ien des |(aiiies Il n'y élail pas porté connue l'huile sur l'eau ou
terrestres : or, le vent est l'air mis en mouvement coiniue l'eau sur la terre, c'est-à-dire qu'il n'y
et lloltaid en quelque sorte. Comme donc il est étail poinl porté poiu' y cMre contenu ; mais, s'il
maniî'esle (|ue l'air ai;iir l'eau el (|ue nous ne l'aul pdui-ccci emprunter dr'seveuqiles aux choses
savons ee (pii l'élti-anie Ini-nuMue el en loruie le visibles, il \ élail porté connue la lumière du
vent; qui ne voit cpie la malièie (|ui se laisse soleil ou (h; lahmeest portée sur le ((trps qu'elle
monvoii- doit jwrler le nom d'eau |)lnlôl <|ue ce- ('claire. Celle liiuuère eu effet n'est pasconicmie
lui d'air, pniscpiee'esl l'air qui imprime le mon- en eux ; elle esl porli'c siii- eux, tandis (pie c'est
vemenfi' Or, t^tre nni c'est recevoii- l'action , le ciel (pii la conlieul. Prenons garde aussi de
mouvoir c'est a;;ii'. Ajoulous(|ueles proilni'lions nous iinagiuei- (|ue l'Espiil de Dieu tût porté
de la pour naître et se développer, sont
terre, sur la iiKilièi-e à la fa(;ou des corps; c'était sa
imbibées d'eau et que l'eau semble se transfor- puissance d'opération et d'exécution (pii était
mer en elles. Le nom d'eau convenait donc bien port(''e sur les objels à faire et à former; comme
mieux à la matièi'e pour exprimer sa souplesse la volonté de l'ouvrier esl portée sur le bois ou
entre les mains de l'ouvrier et sa Iranslormation lout autre chose (pi'il doit travailler, ou même
aux êtres formés par lui, (lue ne Iiù convenait sur les membres de son corps qu'il applique au
le nom d'air; puisque ce dernier nom exprime- travail. Cett(> comparaison, (|uoique tlc-jà supé-
rait sans doul(> sa mobilité, mais non les autres rieure à toute aube (pie nous pouvons emprun-
propriétés qui la ilisliniiuent. Kn sorte que voici ter aux corps, esl bien faible cependant, elle n'est
tout le sens : « Dans le piincipe Dieu lit le ciel pres(pie rien pour nous donner une idée du mys-
« et la terre, » c'est-?»-dire nue matière (piii)ùt tère de l'Espi-it de Dieu poi-lé sur la matière du
devenir le ciel et la terre; celte matière « était inonde soumise à son opération Mais dans tout
.( invisible et sans ordre, » c'est-à-dire ime masse ce (pii peut être de quelque manière saisi par les
informe, un abîme sans lumière ; cette matière hommes nous n'en trouvons pas de plus claire
cependant se montrant docile au niouvenieni ni de plus convenable pour le sujet dont nous
((ne lui imprime rouvrier souverain reçoit encore parlons. C'est pourquoi l'on fera ici une excellente
le nom d'eau. application de cette sentence de l'Ecriture :

15. premier de ces noms qui dé-


Ainsi dans le « Bénissez Dieu, exaltez son nom autant que vous
signent la matière est indiquée la fin pour laquelle « le pourrez, il sera toujours au dessus de vos
elle était créée dans le second, son défaut de
; « louanges Nous parions ainsi dans la sup-
'. »

forme, et dans le troisième sa souplesse et sa do- po où l'esprit de Dieu signifierait le Saint-


ilion
cilité sous la main du grand arcbitecte. D'abord Esprit que nous adorons dans l'ineffable et im-
donc elle est appelée ciel et l.'rre parce qu'elle muable Trinité.
était faite pour devenir le ciel et la terre; en se- Ou
peut aussi l'entendre autrement et sous
17.
cond lieu, terre invisible el en desordre, ténèbres lenomd'espril de Dieu comprendre une créature,
sur l'abîme, c'est-à-dire, matière sans forme et savoir l'esprit vital, qui maintient et fait mou-
sans lumière de ce défaut de lumière son nom
; voir tout ce monde visible avec tous les corps
déterre invisible; en troisième lieu eau, soumise dont il est le séjour; et à qui le Seigneur Tout-
à l'esprit pour prendre un état et revêtir des for- Puissant a donné le pouvoir de lui prêter son
mes. Aussi bien l'Esprit de Dieu était-il porté sur concours pour la production des êtres qui vien-
l'eau et par l'Esprit nous devons entendre celui nent à la vie. Cet esprit étant supérieur à tout
qui opérait; par l'eau, la chose sur laquelb il corps incine aérien, puisque toute créatiu-e invi-
opérait, c'cst-à-dirc la matièrcà travailler. Quand sible l'emporte sur toute créature visible, ce n'est
donc nous donnons à une seule et même chose pas sans raison qu'il serait appelé Esprit de Dieu.
ces trois noms de matière du monde, de matière
Est-il rien en effet qui n'appartienne à Dieu
informe, de matière àlaçonner; au premier cor- parmi les êtres qu'il a créés, puisqu'il est dit de
respond bien la dénomination de ciel et de terre, la terre même : « La terre et tout ce qu'elle
au second celle d'obscurité ou de confusion, de
profondeur ou tle ténèbres, et au troisième la '
Kccli. .vi.m,33.

S. AUG. — TOM. IV.


130 DE LA GENÈSE AU SENS LITTERAL.

« renferme apparlienl au Seigneur ', « et puis- Verbe de Dieu, par qui tontes choses ont été
le

qu'au sujet de l'univers entier nous lisons ces faites? C'est ce qu'on peut examiner, pourvu
'

mots « Toutes elioses sont à vous, Seigneur, à


: cependant qu'on évite l'impiété de croire que le
« \ous (jui aimez les âmes -. » Or on peut recon- Verbe, que le Fils mn(pie de Dieu soit une])arole
naître cet esprit créé dans le passage en ques- semblable à celle (pie nous pronoiii;ons nous-
lion, si les paroles : « Dans le principe Dieu lit mêmes. Mais ce Verbe de Dieu par qui toutes
« le ciel et la terre, » n'ont i)oui- objet que les choses ont étéfaites, n'a pas eu de commence-

créatures visibles. On peut entendre alors (pie ment et n'aura pas de lin; il est né sans com-
siu" la matière des choses visibles, au début de mencement et coéternel à son Père. C'est pour-
leur l'onnation, était porté un esprit invisible et quoi, si la parole : Fiat lux, a commencé et fini,

cependant créé, c'est-à-dire un esprit ([ui n'était elle a été plul(')t adressée au Fils qu'elle n'est le

pas Dieu, el (]ue Dieu avait lait et formé. Mais si Fils lui-même. Et néanmoins dans ce sens elle
l'on estime que le nom d'eau désigne la matière est encore un mystère ineffable qu'aucune :

de toute créature soit spirituelle, soit animale et image sensible n'entre dans l'àme et n'y vienne
corporelle, on est de tout point oi)ligé d'entendre troubler une pieuse contemplation purement
ici par esprit de Dieu, cet Esprit innnuable et spirituelle. Car si l'on enteiul d'une manière

saint qui était porté sur la matière de toutes les propre et absolue qu'il y a dans la nature de
choses auxquelles Dieu a donné l'être et la l'or- Dieu quelque chose (pii commence el finit; c'est
me. une opinion téméraire et périlleuse. On peut
18. Au sujet de cet esprit peut naître une troi- cependant par une charitable condescendance
sième o])inion on peut croire ipie sous ce nom est
;
la permettre aux charnels et aux petits, non pour

désigné l'élément de l'air :desorleque le textesug- qu'ils y demeurent mais pour (jue de là ils
,

géreraitl'idéedesquatreélémentsdont le monde s'élèvent plus haut. Car tonte chose en quoi


\isible se compose, savoir, le ciel et la terre, l'eau l'on dit que Dieu cominence et finit, ne doit

et l'air. Ils n'étaient encore ni distincts ni coor- d'aucune sorte s'entendre de la nature de Dieu,
donnés mais on les voit comme en germe dans
;
mais de la créature, admirablement docile à ses
la confusion même de la matière informe con- ; ordres.
fusion el informUé mentionnés sous les noms de 20. « Et Dieu dit : Que la lumière soit ; » s'a-

ténèbres et d'abîme. Mais de ces trois opinions git-il de la lumière qui parait aux yeux du corps
quelle que soit la vraie, il faut croire (pie Dieu ou d'une lumière secrète dont il n'a pas été don-
est l'auleiir et l'organisateur de toutes les choses né à nos sens de jouir ici bas? Et s'il s'agit d'une
qui ont commencé, visibles el invisibles, non lumière secrète, est-ce une lumière coi'porelle
pas de leurs défauts, opposés à leur nature, mais qui soit répandue d'une fa(;on locale dans les
de leur nature même, et tpi'il n'est absolument parties supérieures du inonde, ou bien est-ce
aucun être créé ipii ne lui doit son origine et la une lumière incorporelle (elle (ju'elle existe dans
perfection de son être. les êtres animés, même dans les bêtes, et qui, sur

le rapport des sens, leur fait voir ce qu'il faut fuir, -^

CHAPITRE V. ce qu'il faut rechercher; ou bien (Milin est-ce


cette lumière d'un ordre bien supérieur que ré-
CRÉATION DE LA LIMIÈRE.
vèle le raisonnement et qui tient la première
91 . « Dieu dit One : la lumière soit et la lumière place entre tout ce ([ui a élé créé? Car quelle

« lut. » Ne pensons pas (pi'en disant : « Que que soit la lumière dont il s'agit ici, nous deviens
(I la lumière soit, » Dieu ait fait entendre un cri comprendre qu'elle a été formée et créée tandis ;

sorti des poumons et articnlé par la langue et


que celle qui brille dans la sagesse même de Dieu
les dents. De telles pensées couviemient aux àines n'a i)as été créée mais engendrée en effet on ne ;

charnelles, et l'Apôtre nousdit que juger selon la doit point penser que Dieu ait été sans lumière

chair c'est la mort 3. Mais c'est d'une manière avant de produire celle dont il est maintenant

ineffable (pie Dieu a dit : « Que la lumière question. Les expressions mêmes indiquenl suf-

« soit. » Maintenant cette parole a-t-elle été


tisamment que cette lumière dont nous parlons
adressée au Fils unique de Dieu ou est-elle le Fils
a élé faite, car il est écrit : « Et Dieu dil : Que la

unique de Dieu lui-même, car le Fils est appelé


« lumière soil faite et la lumière fut faite. » Autre

I
Ps. xxri, I. — 2Sag. XI, 27. — ' liom. tiii.6. 'Jean, i, 1, 3.
oi^vi\a(.f: iNACiiEvf;. lai

est l;i liiiiiii'i't' IK'C (l(> l)icii,aiili'(' la liiiiiii'rc l'aile luniièn^ (pie perçoivent les \eii\ du cor|)s et (pii
par lui. La lumière née do Itiou est la saj^cssc est elle-même corporelle; telle esl la lumière du
mu^iiumIc l)i('ii,laluiiii("ri' l'aile jtar Dieu est loiile soleil, de la lune, des étoilesel de lout autre llam-

hiiiiière iiuialile soil ('(irpoicllesdil iiicoi'poreiie. beaii de même sorte à celte lumière sont oppo-:

:>1. On se (lemaiule oïdiiiaiiciueiil, (-(11111110111 sées les l('iit'l)res ipii résultent de son absence en
la lumiî're corporelle a pu exister a\aiil le ciel (|uel(iiie lieu. 11 y a une autre lumière, celle de
et les llaiiilieaiix du ciel dont il n'es! parle iin'eri- la vie, (pii sent el ipii peut discerner irc «pic les
siiile. iMais il n'esl pas lacile, il esl nièiue aliso- organes du corps pr('senlent à son aiiprécialion,
liuueul iiupossihle à l'Iioninie de di'couvrir si comme le blanc el le noir, la mélodie el les

au delà du ciel il \ a iitie liiuii('re spiViale ipii sons discordants, la bonne et la mauvaise odeur,
soit ri''paii(liie dans l'espace cl ipii enveloppe le le doux et l'auier, le chaud et le frctid et autres

monde. Ni'amnoins connue on peut encore choses de ce genre. Aussi bien la lumière (|iii se
comprendre ici la lumi('i'e incorporelle, en ad- fait sentir aux yeux esl différente de celle qui vient
niellaid (pi'il esl paih" dans ce livre non-si^nle- par le moyen des yeux éveiller des seiisaliims.
nienl des créatures \isihles, mais de Ions les L'une est dans leeorps, et l'autre, bieiuprellcper-
êtres (le la c^'ation; (pi'esl-il besoin de nous ar- parrinlernu'diaireducorpsce qu'elle sent,
(,'oive

n'^ter plus lont,ienipssur ce sujet? Peut-iMre aussi a néanmoins l'àme poursiéne. Les ténèbres oppo-
(pie c'est ici une courle maiscoinenaliie et lielle sées à cette dernière consistent dans le défaut de
r(''ponse à la tpieslion (|ue l'on lait siu' ri'[io(|ue sensibilité ou, si l'on aime mieux, de sensation; en
de la cri'-ation des An^es. d'autres termes, elles consistent à ne point sentir,
^â. '< Kl Dieu vit (pie la lumière était bonne. » (pioi(pril se présente des choses (|iii pourraient
Il tant voir dans ces paroles non pas la joie pro- être senties, s'il y avait dans l'être lalumièrequi
duite |)ar un l)ien tout extraordinaire, mais l'a])- éveille la sensibilité. Et cela a lieu non pas (piand
prolialion (pie Itieu donne
sonouvrage. l'eut-on à les organes du corjis font défaut, comme dans
en eltet parler à des hommes plus convenable- les aveug:Ieset les sourds; car lésâmes de ceux-ci
ment de Dieu ipie de la manière suivante : Il a possèdent la lumière dgnt nous parlons, bien
dit, la chose a été l'aile, et la chose lui a plu. // (pi'ils soient privés de l'oftice des senscorporels :

(/ (lit inanpie son comniaiulement; la chose ii été ce n'est pas non plus (piand avec celle lumière
faite, sa puissance; et /(/ cliuse lui a plu, sa bien- de l'àme et l'usafie des orfianes du corps il
veillance. C'est un homme (]ui rapporte à des ne s'offre aucun objet de sensation, comme lors-
hommes ces choses ineffables ; elles ont du être (pi'on n'entend aucun bruit, au milieu du si-
exposées de manière à profiter à tous. lence.
:23. < El Dieu sépara la lumière' des ténèbres. » Celui donc qui pour de telles causes n'éprouve
On peut voir ici av(T (Uielle extrême facililé point de sensation ne manque pas pour cela de
lout cela s'est tait par Dieu. Qui pourrait croire la lumière dont il que
s'agit. Elle n'est absente
([ii'unc l'ois produite la lumière se trouvât d'abord dans le cas où cette faculté manque à l'âme et ;

confondue avec les ténèbres et eût besoin ensuite encore ne dit-on pas alors qu'elle soit une âme,
d'en être séparée'/ Ce simple fait de la création elle est plutôt une simple vie, une vie sem-
de la lumière en
au si la sépai'ation d'avec
fui blable à celle que l'on prèle à la vigne, aux ar-
les ténèbres. Quelle union possiide entre la lu- bres et à tous les vé|iétaux : si toutefois on peut
mière et les ténèbres ? Dieu donc sépara la 1
prouver que les plantes aient une ^ie. Et pour-
lumière des ténèbres par cela même ([u'il lit la tant il est des hérétiques assez aveugles pour
lumière, dont l'absence j)rend le nom de ténè- les croire capiibles, non-seulement de sentir par
bres. Entre la lumière et les ténèbres il y a la le moyen du corps, c'est-à-dire de voir, d'enten-
même différence (pi'entrele vêtement et lanndité, dre, de discerner le chaud et le froid, mais même
entre le plein et le vide, et entre des choses op- de raisonner et de connaître nos pensées : mais
posées de celle manière. ceci est l'objet d'une antre question. Ainsi donc
24. Dans combien de sens peut être comprise les ténèbres opposées à la lumière ([ui l'ait sentir,
celte lumière dont la privation, suivant les ac- seraient l'insensibilité, on le défaut de sen-
ceptions diverses du mot, porte le nom de ténè- sibilité dans un être vivant quel qu'il fût. Or il
bres? Nous l'avons dé'jà dit plus haut. 11 y a la esl convenable d'accorder le nom de lumière à

celle faculté, dès qu'on veut bien appeler lumière


Ur Cor. VI, (4.
\M DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

ce qui rend une clioso manifeste. Lorsque nous place les nns à droite, les autres à gauche, et qu'il
disons il est manifeste que cela est me.odieux,
:
envoie ceux-ci au feu éternel, i! nous montre par
il est manifeste que cela est doux, il est mani- là qu'il traite les uns et les autres selon leur

feste ijnerela est froid; lorsque sous l'impression mérite. Ainsi donc il fait et ordonne les espèces
des sens corporels nous faisons d'aut es affirma- et les individus. Quant aux noii-è!i'es et aux dé-

tions semblables alors cette lumière ipii nous


;
fauts, il ne les fait pas, il les règle et les ordonne
rend tout cela manifeste, est certainement au de- seulement. Il a donc dit : « Que
lumière soit,
la

dans (le l'àmc, bien «pie le corps lui serve d'in- « et la lumière a été. « Mais poiu' produire les
termédiaire pour lui transmettre ce qu'elle sent ténèbres, il Que les ténèbres soient.
n'a pas dit :

ainsi. De ces deux choses, il a lait l'une et non l'autre;


On peut entendre connue troisième espèc^i mais il les a ordonnées toutes deux, lorsqu'il a
de lumière créée la faculté du raisonnement; séparé lumière et les ténèbres. Ainsi chaque
le défaut déraison, qui est la condition des âmes chose qu'il a créée est bonne en soi et l'ensemble ;

des bêtes, constitue les ténèbres ([ui lui sont qu'il ordonne est excellent.

opposées.
- 23. Quelle que soit donc la lumière que Dieu CHAPITRE VI.

ait créée monde, que celle lu-


d'abord dans le
NOMS DONNÉS LA LLMIÈUE ET ALX TÉNÈBRES.
mière soit la lumière du ciel, ou la lumière de
.\

la vie sensitive dontjouisseul les animaux, ou soit


26. « Et Dieu appela la lumière jour et il donna
la Imnicrc rationnelle que possèdent les Anges
K aux ténèbres le nom de nuit. « Le terme de lu-
et les bommes, il est certain que Dieu a séparé
mière el celui dejour désignent une même chose
lumière des ténèbi-es par cela même (pi'il a
;

la
une même chose est également désignée par les
créé la lumière parce que autre chose est la lu-
;
mots de ténèbres et denuit. Oi'il a fallu employer
mière, et autre cliose ces absences de la lumière
les deux termes pour délinir chacun îles objets,
dont Dieu a réglé le rôle dans les ténèbres ipii
car on ne pouvaitendiscourirautrement. De plus
lui sont opposées. C>ar^l n'est pas dit ([ue Dieu
il est dit: Dieu appela la lumièrejour et les ténè-
ait fait les ténèbres. Il a fait les réalités, non les
bres nuit; de manièie qu'on |)ouirait renverser
défauts (pii tiennent du néant, d'où sa puissance
l'orde des mots et dire égalcmeni: Dieu appela
a tiré tout ce (jui existe. Cependant nous com-
le jour lumière et la nuit ténèbi'es. Que répondre
prenons qu'il les a ordonnées quand nous lisons :

donc à celui qui nous demanderait si à la lumière


« Dieu sépara la lumière et les ténèbres. « C'est
a été donné le nom de jour ou au jour le nom
que les privations elles-mêmes de\aient être à
de lumière? Ca^- ces deux termes, en tant qu'on
leur place sous renq)ire universel du Maître
les articule pour désigner des choses, sont égale-
souverain. Ainsi, dans le chant, les silences,
ment des noms. On peut aussi faire la question
l)lacés à des intervalles déterminés, ne laissent
suivante Est-ce aux ténèbres qu'a été <ionné le
:

pas d'être bien ordonnés par ceux qui savent


nom de nuit, ou à la nuit le nom de ténèbres?
chantei-, et ils contribuent à la beauté de toute
Assurément, selon le texte de l'Ecriture, il est
la piècede musique, quoiqu'ils soient pourtant
manifeste que la lumière a été appelée jour et
des absences de sons. Ainsi encore, dans les ta-
les ténèbres iniit. Quand l'écrivain sacré a dit :

l)leaux, les ombres font ressortir les endroits les


Dieu fd la lumière et il sépara la lumière des
plus saillants, et plaisent non par elles-mêmes
ténèbres, il ne s'agissait pas encore des noms :

mais par leur disposition. Dieu n'est pas l'au-


c'est ensiùle qu'ont été enq)loyés ceux de jour
teur de nos vices; et néanmoins à cet égard il
et de nuit, encore (|ue, sans nul doute, lumière
est ordonnateur, en plaçant et en condamnant
et ténèbi-es soient aus:i des noms
et serven t à mar-
à souffrir comme ils le méritent, ceux (pii ont
quer certaines choses, de même que les mois jour
péché. Aussi bien est-il dit dans l'Evangile
i,
et nuit. Faut-il donc n'entendre ici que l'imiiossibi-
que les brebis sont placées h droite et les boucs lité de délinir ce ipii a d^j.i un nom, aidremiMit
à gauche. Il est donc certaines choses dont Dieu
q l'en lui donnant un nom nouveau ? Ou plutôt
est à lafoisl'auteur et l'ordonnateur. Il fait et or-
celte appellation m- doit-elle pas être prise pour
donne les justes; pour les pécheurs, il ne lestait
la distinction niêmede la lumièreeldes ténèbres?
pas, mais il les soumet à l'ordre. En effet qu'il
Car toute lumière n'est pas le jour, et toutes
' Mon. .XXV. .13.
ténèbres ne sont pas la nuit : mais il n'y a que
OUVRAGE INACIIEVIÎ. 138

la lutnière cl los It^iiùbros mises en rapport el manière que quand nous disons par exemple: le
ili'liiij; ii't's (•iili''i'lli's p.ir iini^ Siiccessioii lixe mois a treMl(> jours, comprenani dans celle ex-
ol rcf^iiliinv, (pii soiciil (ir'sir:iii't'ss()iis li's noms pression la iiuil aussi bien (piele joMi|iro|>remenl
(le jour cl de nuit. Tout nom en elTel sert à (lit, tandis (]ue précédemment ce nom excluait la
(lislinjiiierla chose h laqiii'iieil s'appliipie; et de miit.Lejour donc a>ant éléciré avec la lumière,
là même, terme de nomcii, iioliiiiini,
\ieiit le il matin ont l'orme
s'ensuit (|ue le soir el puis le

marque, pareeipie le nom est une manpie.e'esl- un premier jour, el (pi'iiii jour esl le temps qui
;V(lire qu'il aide et apprend à discerner et à re- Ml du commencement de l'un an commencement
connailieson ohjet. de raulre,c'est-à-dired'im malin jus(pi'aii matin
Il se peut tlonc (pie la si-paraliou de la Imnièlc sui\anl. (Nestlé sens (pie nous donnons au ukU
et (les t(Mièl)res n'ait consisté qu'à donner à la jour, (piandnousy coinprenonsles nuits, comme
liniiièrele nom de jour, el aux ténèbres le nom de je l'ai déjà l'ail observer.
nuit et (pie leur imposer des noms n'ait c-le pure- Mais comment s'est l'ail le soir et comment
ment elsini|)lenienl (pieu rejeter l'ordre. Uu bien s'est malin? Pour créer la lumière el la
l'ail le

ces noms veulent-ils nous luire entendre de quelle séparer des ténèbres, Dieu a-t-il employé tout le
lumii^'re il de (piclles It'uèhres; comme
sa,i;ilel lem|)s (proccupe la durée de la lumière sans y
s'il y avait dans le texte; Dieu lit la lumi(;'re el comprendre la nuit'.' Que devienl alors ce qui
sépara la lumière des ténèbres; or comprenez est écrit: « Vous pouvez tout dès que vous le vou-
par lu lumière le jour, par les ténèbres la nuit'/ « (Irez 1. » Dieu a-l-il besoin (le la durée du temps

L'eeri\ain sacré a-l-il eu le dessein d'éloi^^iier pour l'aire quelque chose? Ou bien doit-on con-
de notre esprit l'idée d'une lumière qui ne soit sidérer les œu\res de Dieu comme les œuvres
pas le jour et de ténèbres qui ne soient pas la qui sont dans la pensée de l'artiste ; les envisager,
nuit? Et en elTel si toute Uuuière était le jour et non dans le temps, mais dans la puissance c{ui

toutes ténèbres hi nuit, peut-être n'aurait-il pas produit par un acte immuable les choses mêmes
été besoin de dire : « El Dieu appela la lumière qui changent sous nos yeu.x? Quand nous parlons,
« jour, et il appela luiil les ténèbres. » les mots passent et se succèdent; mais il n'en est
^7. On peut aussi demamier quel est le jo îr pas ainsi de l'ariisle lui-ii^ème (pii l'orme et qui
el quelle est la nuit dont il esl parlé. Si l'on doll contemple enreposlasuiteenlièredesparolesavec
comprendre du jour que commence
qu'il s'agit tout leur arrangement. C'est ainsi que Dieu agit
le lever el qu(> lerme le coucher du soleil; et en dehors du temps, lui qui peut loutce qu'il veut ;

(le la nuit qui s'étend du coucher du soleil à son mais de leur ctjiê les natures soumises au temps
lever, je ne vois pas comment étaient possibles ce exécutent leur mouvement d'une manière tem-
jour et cette nuit, avant la lormsHion des lumi- porelle. Peut-être donc que ces mots: « El le soir

naires célestes. Serail-ce que lasuile des heures et « eut lieu, puis le matin, pour former un premier
lesinlcrvallesdu temps, même en dehors de toute « jour, » doivent s'entendre de ce que la raison
distinction d'ombres el de clarté, ont pu dès lors divine jugea possible ou nécessaii'C, el non de ce
être appelés ainsi ? Mais comment celte succes- qui se passa dans la succession des instants. C'est
sion allernalivc, désignée par les nomsdejour et en effet dans son intelligence que Dieu a con-
de nuit, convient-elle à la lumière rationnelle, s'il templé son u'u\ re el à la lumière de l'Esprit-Sahil
en étaii ici question, ou à la lumière de la vie sen- qui a dil : « Celui (jui est étei'uel a créé tout sim-
sitive? L'écrivain sacré a-t-il sur ce point voulu " inullanénient propos que
^. » Mais c'est fort à

insinuer, non ce qui est, mais ce qui peut élre? dansée nous présente les œuvres de
livre le récit

carl'erreur peul succédera la raison, el l'engom-- Dieu comme séparées les unes des autres par des
dissement à la sensibilité? intervalles de temps et cette belle disposition ;

/' que notre intelligence trop faible ne pou'.ail con-


CHAIMTRE Vil. templer d'un seul regard, devient pour ainsi dire
accessible aux yeux même du corps grâce à
LE PREMIER JOLR. l'ordre du discours.

'2H. « Et alors se lit le soir puis le matin, et il


y '
Saj?. Xl(, IS. — 'Eroli.xviII. 1.

' eut un premier jour. > Le nom de jour ici

a un autre sens que dans ces paroles: " El Dieu


appela la lumière jour : > il esl pris de la même
134 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

des eaux froides qui couvrentlasnperficieduciel.


CHAPITRE VIII. J'ignore comment on peut soutenir cette opinion
parmi ceux qui s'occupent avec soin de ces ques-
CREATION DU FIRMAMENT.
tions. Mais il ne faut sur cela rien affirmer témé-
rairement: il faut tout traiter avec précaution
29. <' Et Dieu dit : Qu'il y ait un firmament
et modestie.
« au milieu de l'eau : et qu'il lasse séparation entre
« l'eau et l'eau. Et il en fut ainsi. Et Dieu lit le
30. « Et Dieu dit: Qu'il y ait un firmament au
« milieu de l'eau, et qu'il fasse séparation entre
« lirmament, et sépara l'eau qui était au dessus
« l'eau et l'eau. Et il en fut ainsi » Après ces
« du lirmament de celle qui élail au dessous. »
derniers mois, qu'était-il besoin d'ajouler « Et
lirmament des eaux sem-
:

Y-a-t-il au dessus tlu


« Dieu lirmament et sépai'a l'eau qui était
fit le
blables à celles que nous soyons sous le lirma-
« sous le firmament de celle qui était au dessus? »
ment ? Ou bien, comme en cet endroit l'écrivain
Car plus haut, après ces mots: « Dieu dit: Que
sacré parait désigner l'eau sur laquelle était porté
« la lumière soit et la lumière fut, » l'écrivain
l'Espi'it, où nous avons vu la malièrc du
l'eau
sacré n'a point ajouté « Et Dieu fit la lumière »
monde; ne pas entendre que cotte eau a
faut-il
;

mais ici aux mots: « Dieu dit qu'il y ait, et


été divisée par l'interposition du lirmament, et que
:

« il y eut, » il ajoute: « Dieu lit le firmament. »


l'eau inférieure e,>t la matière corporelle et l'au-
tre la matière animale? Car ce qui est ici appelé
Doit-on en conclure que dans cette lumière il ne
fallait pas voir la lumière corporelle, et que con-
lirmament sera appelé ciel plus loin. Mais parmi
séquemment,Dieuc'est-à-dire laTrinité, l'a pro-
les coij)S il n'y a rien de plus élevé que les
duite sans aucune créature pour intermédiaire;
corps célestes. Autres en effet sont les corps cé-
tandis que le firmament étant corporel, aurait
lestes, autres les corps terrestres et sans aucun '
;

doute les corps célestes sont les meilleurs. Je ne


re(;u sa nature moyen de quel-
cl sa foi'me ])ar le

comment on pourrait appeler corps ce qui


que créature La Vérité même, pour
spirituelle?
sais
la formation du lirmamenl, aurait ainsi imprimé
les dépasse, c'est peut-èli'e une puissancesounnse
sur quel((ue nature spirituelle ce que celle-ci
à la raison, à la raisou dont la lumière nous fait
(levait à son toui'inqtrimei'sur les corps; et pour
connaître Dieu et la vérité ; une nature qui étant
ce motif il aurait été écrit: « Dieu dit: que le
susceptible d'être formée par la vertu et la pru-
« firmament se fasse et il fut fait; » il se fit peut-
dence et trouvant dans la vigueur de celle-ci le
être d'abord dans la nature raisonnable [)Our se
moyen de fixer son agilation et d'acquérir une
reproduire ensuite sur la nature corporelle.
consistance qui la rend connue matérielle, a été
Les mots qui viennent ensuite « Et Dieu lit
par Dieu même justement désignée sous le nom :

« le firmament, et sépara l'eau qui est sous le


d'eau ; au dessus du ciel cor-
et cette eau serait
« firmament de celle qui est au dessus, « mar-
porel, non pas localement, mais par sa qualité
quenl-ilsle concours qui lui fut pièté pour former
d'être incorporel. Du reste puisque le firmament
le ciel? Ou bien si l'écrivain sacré dit ici ce qu'il
a été appelé le ciel, c'est avec raison que l'on
n'a pas dit plus liaul; n'est-ce pas' pour varier
tient comme plus changeant et plus dissoluble
le récit, pour empècliei- la numotouie et parct;-
ce qui est au dessous du ciel éthéré où toul est
qu'ilnefaut pas fout polir av("clrop de soin? Que
tranquille et bien affermi. Cette espèce de matière
chacun choisisse seulement (ju'on n'affirme rien
:

corporelle, ayant exislé dans la confusion primiti-


témérairement qu'on ne donne point pour connu
;
ve, avant d'avoir la forme distincte et les (pialités
ce ([ui est inconnu qu'on se souvienne ([uec'cst
nom de firmament
particulières, d'où elle prit le
;

un homme qui éludie les œuvres divines selon sa


;

il y a eu des lionmies pour voir en elle, des eaux


faiblesse.
froides et visibles qui semblables à celles de
la terre seraient au dessus du ciel. Et ils ont
CHAPITRE IX.
voulu en donner pour preuve la lenteur de l'une
des sept planètes appelée cpaj'vww, brillante, par I)li:i ACIT EN DEHORS Dl' TEMI'S.
les (irecs; laquelle est plus élevée (]ue les autres,
et met trente ans à parcourir le cercle de .sa ré- 31. '< Et Dieu appela le firmament ciel. >• On
voluti(m dans le zodiaque : ils ont prétendu peut appliquer ici, ce ([ucj'ai dit précédenunenlau
ipi'ellc est si tardive parce quelle est plus voisine sujet des noms: car tout firmament n'est pas le

'
I Cor. iv,4li. ciel. i< Et Dieu vil que son ouvrage était bon. »
OUVRAGE INAClIKVfi. 135

Ici pncoiv jt> me contenterais de renvoyer aux était invisililc et sans ordre tant (pic la matière
observations que j'ai faites plus liaiit,si je vojais n'avait paseneore
de forme dislincle. Dieu
revélii

le m(Mne ordre. Mais, dans le ijceinierpassaf^e il dit (loue: « Que l'eau de dessus le ciel se ras-

y a: • Dieu vil (|iie laliiiiiièic elait hontie; n puis « sciiihie, » pour coniniaudcr (pie la inalière

viennent seuleinenl les mois : « l>ien si-para la coi'porclleIVit amenée à l'état de celle eau qui

« linnière des lénèlires, et il appela la lumière tombe sous nos sens. « Qu'elle se réunisse en un
« Jour, les ténèhres nnit ;
» tandis (jue dans le (< seul lieu;
» c'est la |)ropiiét(' essciilicllc de la

passade ([ui nous occupe maiiiletiaiit, c'est après lormiVJ[iiinous est niar(piéc ici dans le teriiuî
avoir exposé la Ibrmalion du lirmamcnl cl c'est djinilé. Car être form é \éiitableiiicnl. c'estjle-
après avoir (lit: « Dieu appela le lirmamcnl ciel, n venir un tout , i].n ensenilile parlait : parce que le
que l'écrivain sacré ajoute:" Kl Dieu vil (pie cela p rincipe de toute forme est éiiiiiieiuiiieiit nu.
« était bon. » Si la narraliou u'esl pas ainsi variée "Que la partie ariile paraisse, » c'est-à-dire (prellc

pour prévenir la lassitude que fait naîlre lamoiio- |>rcrmc une t'oiiiie visible (pii la dégage delà
tonie, nous sonunes sans aucun doulc oliliui's de eonriision. Du reste on coiiiprcnd (jue l'eau doive

recouiiailrc.d'cnlcndre (pie celle uiarclieex|)rime se rassembler pour laisser paraître la [lailie aride ;

encore ici que « Dieu a l'ait lonl d'un seul acte.» en d'autres termes la mer sans limites doit être
Aussi l)ien])oui'quoi est-il dil précédemment que resserrée pour rendre visible ce qu'elle re-
Dieu d'al)oi(l approuvason ouvragcel ensuite lui couvre.
donna un nom, tandis (pi'ici il lui donna d'abord « El il en lut ainsi : » peut-être l'écrivain sacré
un nom puis ra])prouva? Celle différence nemar- veut encore ici marquer que le fait a eu lien d'a-
(pic-l-clle pas (pie l'opération dcDieii est indépeii- bord dans laiialiirc spirituelle; de sorte (jue les

daiile du leinpsel (pie ses onivres mêmes V sont sou- paroles suivantes : « Et l'eau lut rassemblée en un
mises? Nous vovonsdesinlervalles de temps dans « seul lieu et la partie aride se montra, » ne pa-

nneexécutionqui comineiice par un détail et liiiil raîtraient point iinesiipertctation, mais nous fe-
par un autre, 'cl en deliors de celle idée le récit raient eiitciidie (pic l'ieiivre matérielle a suivi
serait impossible; mais Dieu pour produire ses l'opération intellectuelle et incorporelle.
ouvrages n'a pas besoin de la succession des ins- 3;i « El Dieu appela terre la partie aride, et
tants. «Et alors se (il le soir puis le matin, et il « le nom de mer à l'eau rassemblée. »
donna
« y eut un second jour. » Qu'on se rappelle ici Le motif de ces noms vient encore appuyer no-
ce que nous avons dit plus haut. Carje crois que tre sentiment. Aussi bien toute eau n'est pas la
les mêmes raisons se représentent avec la même mer, ni toute partie aride, la terre. Il a donc
valeur. fallu distinguer par des noms l'eau et la matière
aride dont il s'agissait. Or on peut certainement,
CHAPITRE X.
sans blesser d'aucune sorte la raison, entendre

LA TERUE SÉPARÉE DES EAl\.


ici, comme plus haut, qu'avoir nommé, c'est
pour Dieu, avoir formé et sépai'c. « Et Dieu vit
3:2. « El Dieu dit : Que les eaux ([ui sont sous « que cela était bon. n L'ordre est le même que

« le ciel se rassemblent en un seul lieu et qu'ap- précédemment. Qu'on applique donc ici les ob-
'
« paraisse la partie aride : et il en fut ainsi. » servations que déjà nous avons faites.
Ce passage donne une nouvelle probabilité au
sentimenl d'après lequel nous disions tout-à- CHAPITRE XL
l'heurc que sous le nom d'eau a été désignée la
CRÉATION DES VÉGÉTAUX.
matière même du monde. Car si l'eau était par-
tout, de quel lieu et en quel lieu pouvait-elle 34. « Et Dieu dil Que de la terre sortent des
:

être réunie? Mais si le nom d'eau est appliqué à « herbes poilant, selon leur espèce, une semence
laconfusion primitive de la matière, le rassem- « d'où puissent naître désherbes semblables;
blement dont il s'agit doit être entendu du fait « que la terre donne des arbres qui portent du
même de la formation, qui a donné à l'eau la na- « renfermant la semence propre à les l'e-
fruit
ture (pie nouslui voyons maintenant. Et les mots iproduire selon leur espèce. » A])rès la forma-
qui vieimenl ensuite: « Que l'aride apparaisse, »
tion de la tere et de la mer. Dieu leur a donné
peuvent niaïqiier l'origine de la terre dans la
leurs noms cl a approuvé son œuvre, ce qu'il ne
forme qu'elle présente à nos regards. Car elle faut pas entendre de plusieiu-s actes successifs,
136 DE LA GENESE AU SENS LITTÉRAL.

comme nous l'avons remarqué plus d'une fois, car et lamer ont pu être formées simultanément,
on ne doit d'aucune sorte attril)urr à l'ineffable non-seulement dans lacrédion idéale cl ration-
action de Dion le besoin de se développer dans nelle où toul s est l'ait à la fois, mais même dans
les intervallesdu temps mais ici on ne lit pas tout
; leur apparition sensible et leur réalité corpo-
aussitôt, connue pour les deuv jours précédents : relle; tandisque les arbres et toutes les plantes
« Le soir se lit puis le matin et il y eut un tioi- ne pou\a'.enl naître, à moins que la terre où
« sième jour. « Mais on voit une nouvelle opé- elles devaient germer ne les eût précédés? est-ce
ration Que de la terre sortent desliei-bes por-
: c< pour cela qu'il lallait un nouvel ordre de Dieu
« tant, selon leur espèce, une semence d'où puis- alîn de marquer la distinction de la terre et des
« sent naitredesherbes semblables : (jue la lerre végétaux, qui néanmoins devaient être faits le
« donne des arbres qui portent du fruit renfcr- même jour que la terre, d'autant qu'ils y tiennent
« niant la semence propre à les reproduire se- par la racine et en sont pom' ainSi dire la con-
" Ion leur espèce. » Rien de pareil n'a été dit ni tinualion?Maison peut demander aussi pourquoi
delà lumière qui brille à nos yeux, ni du lirma- Dieu neleur a pas ilonné des noms. Celle omission
inent, ni de l'eau, ni de la partie aride. Aussi vient-elle de leur multitude, qui empêchait de
liien la lumière n'a pas de liuiiée qui lui succède ; les désigner chacun par un nom parlicnlier? La
du ne uaii pas un autre ciel; de nouvelles
ciel question trouvera mieux sa réponse plus loin,
terres, de nouvelles mers ne sortent pas de la (juand nous remarquerons d'autres choses encore
terre et de la mer pour les remplacer. S'il a que Dieu n'a point nommées, comme il a nommé
donc fallu dire rci portant semence selon
: < la lumière, le ciel, la lerre et la mer : « Alors
« leur espèce, renfermant une semence selon « eut lieu le soir, puis le matin et il y eut un troi-
« leur espèce et pour la reproduction d'êtres « sième jour. »

« semblables; » c'est qu'il s'agit de cboses qui


en périssant laissent à d'autres, produites par CHAPITRE XIL
elles, leur forme et leur ressemblance.

35. Or tous les végétaux dont il est parlé ici LE JOUR ET LA Nlirr.

sont de sur la terre qu'ils y tiennent


telle sorte

par la racine, en font la continuation, et néan- 3(i. u El Dieu dil : Qu'il y ait des llambeauv
moins s'en séparent de (pielque manière. Aussi •' danslellrmanu^ntduciel, afin qu'il luisent sur

bien je pense (jue dans le récit, le nom de terre « la terre et séparent le jour de la nuit; qu'ils

l'onserve la signilicalion qu'il a dans le passage 1 servent de signes et lassent les temps, les jours
précédent, puisque les cboses dont il s'agitont été « et les années: qu'ils soient dans le firmament
laites le même joui'
que celle terre parut. Dieu ce- « du pour y resplendir el qu'ils liùseut siu-
ciel

pendant par un nouvel ordrc.commande à la terre « la terre. » C'est au quatrième jour qu'ont paru

(le les produire. Puis viennent encore les mots :


les flambeaux dont il est dit : « Qu'ils fassent

« Et il fut fait ainsi « et après les mots 11 fut : •<


« les jours. Que sont donc les trois jours pas-
»

« nous lrou\ous comme plus haut le


fait ainsi; » sés sans eux ? ou comment pourront-ils former
détail même de l'exécution « La terre donna :
les jours si, en leur absence, des jours ont déjà
« de l'herbe portant, selon son espèce, une se- pu exister? Ce rôle leur est-il attribué parce
« menée d'où devait naître de l'herbe sembla- qu'an moyeu de leurs différents aspects les

« ble, et des arbres portant du fruit qui renfer- hommes peuvent mieux se rendre comjde de la

« juaiten lui-même la semence propre à les re- durée el des intervalles du temps? Ou bien cette
« produire selon leur espèce. » Et enfin on lit ('numération ])récédeiite de joui's et de nuits

de nouveau : « Dieu vit que cela était bon. » a-t-ellepour objet de dislinguer entre les néga-
Ainsi donc la terre et les plantes apparaissent tions ou les défauts que Dieu n'a pas faits, et les

dans un seul jour, et cette double parole de Dieu natures (pi'ii a faites'/ Le matin désigue-t-il les
sert à les distinguer. S'il n'en a pas été de même qualités des choses créées, et le soir, ce (pii leur

pour la distinction de la terre et delà mer; c'est, manque? Car lesen tant que Dieu
créatures
je crois, parce mieux mar(|uer des
qu'il Callail les a formées sont bonnes et d'une beauté irrépro-
cboses qui naissent et meurent et dont les es- chable: mais, poiu'ceqniest d'elles-mêmes, elles
pèces se propagent par une suite de reproduc- ont des iléiauts et inclinent au néant parce
tions séminales. Ou bien est-ce parce (juela terre qu'elles en sortent ; et si elles subsistent, ce n'est
OUVRAGE INACHEVÉ. ii'

point piir la vcriu de leur essence qui \ieiil du (pie les mots signes, temps, s'e.xpliipu^nt l'un par
noaiit, mais parl'aclioii de l'KIrc soiiM'iaiii (|iii l'aulre cl qu'on ne doit pas enteiidii' une chose
les l'ail exister dans leur fleure et dans l'ordre sous lenom de signes et une antre chose sous le
qu'il leur a uuu-qué. nom de temps. Ici, en elïet, il s'agit des temps ({ui
M. u Kt Dieu dil : O'i'il y ail des llainbeaux avec leurs inlei'valles distincts annoncent (pi'au
M dans le liruiaiueiit du eiel afin ([u'ils luiseid. « dessus d'eux règne rélernitc lixe et inunuable.
Ceci regarde-t-il seulement les astres lixcs ou Ainsi le temps apparaît comme un signe, ou»;

encore les astres ([ui sont en niDUvemenl? Mais en d'antres ternu's, connue une sorlede vestige
les deux luminaires, l'un plus j^iand et l'aidre deréteruité. De même, les mots suivants «jours :

moindre, dont il s'agira d'abord, se comptent « et montrent (jue les temps dont il est
années. »

parmi ces derniers. Conunent doue tous les parlé sont ceux qui se divisent en jours par la
aslivs, sans exception, otd-ils élé laits dans le conversion des astres (ixes; en années vulgaires
lirmament du ciel, puisque les astres mobiles ont par la révoluiiou du .soleil dans le Zodiaque; en
chacun leur ^lobe ou leur cercle particulier? aimées moins sensibles et moins connues par la
t'aut-il euleudre ici par le ciel l'ensemble univer- luéme révolution de tout astre mobile dans
sel de la machine céleste qui contient tous les son orbite. Car s'il n'est pas fait mention des
astres, et sous laquelle règne dans la région su- mois, c'est peut-être parce que le mois n'est au-
périeure un air pur, calme et serein ; sous la- tre chose qu'imc année de la lune; de sorte que
quelle s'agitent aussi ]>lus bas les vents et les douze années de la lune seraient une année de
tempêtes? Kl parce que l'Ecriture dit tantùt les cet astre que lesGrecsappellentl^haeton, comme
eieux et tantôt le ciel, commeen cet endroit aussi trente années du soleil, une année de la
où le lirmament est appelé ciel, ne sei'ait-ce planète qu'ils appellent Phainôn. Et peut-être la
point peut-être l'inlerprélaliôn véritable? « Alin grande année, dont plusieurs oui longuement
« qu'ils luisent sur la terre et qu'ils séparent le écrit, consiste-t-elle dans l'intervalle du temps
'< jour et la luùt. » Puisque Dieu avait déjà sé- que met l'ensemble des astres à revenir au même
paré la lumière des ténèbres, et qu'il avait appelé point et à reprendre son premier aspect. Ou
la lumière jour et les ténèbres nuit, n'est-il pas bien en comprenant que les astres déterminent
évident (ju'il avait séparé le jour de la nuit? Uiu^ les jours et les années, comme nous venons de
veut donc dire ce ((ue nous lisons luaiutcuaiit au le dire, faut-il entendre, sous le mot .sifjiu's, l'iii-

sujet dçy luminaires : « Qu'ils lassent la sépara- dicatiou certaine de la roule à suivie dans la
« fion entre le jour et la nuit? » Dieu ordounc- navigation, et i)ar /f'.v ^c//îyw, les ditl'éientes sai-
t-il que cette séparation ait lieu de telle sorte, par sons, comme le piiulenips, l'été, l'automne et

le moyen des luminaires célestes, que le seul usa- l'hiver, parce que c'est avec le cours des astres
ge des yeux corporels dans l'observation du plié- (pie les saisons changent, se succèdent et con-
nomèue sullise pour le constater; tandis qu'au- servent leur ordre?
paravant la division qu'il avait laite aurait seu- iit). M Qu'ils soient dans le lirmament du ciel
lement été saisie i)ar des hommes d'un esprit '< pour y resplendir etque la terre en soit éelai-
sûr et d'une raison lucide? tJu bien ne s'agit-il « rée. » Il avait d'a!)oid été dit : « Qu'il y ait des
pas d'un autre jour et d'i ne autre nuit? Dans « lumiuiares dans letirmameni du ciel, a(iu qu'ils
la division précédente le journemarquc-t-il i)as « luis^Mil sur la terre. » Pouripioi donc cette
lesformes déjà imprimées à la matière, et la répétition? Au sujet des plantes il est com-
nuit, la |)artie de cette même matière, cpii res- mandé (ju'elles portent leur semence, qu'il i/ ait

tait enore à former; au lieu que maintenaal, en elles une semence selon leur espèce pour en
le jour et la nuit dont il est parlé sont ceux reproduire de semblables. Le contraire serait-il
qu'on voit se succéder l'un à l'autre dans le mou- maripié ([uaut aux luminaires célestes dans les
vement du ciel ce qui serait im()Ossiliie sans le
:
tenues : (jti'ils soient et qu'il >j ait'! Le sens se-
lever et le coucher du soleil? rait-il celui-ci : qu'il liait des luminaires et q^jMIs

n'eiiiicndren! pas, mais qu'il soient eux-mêmes?


CHAPIÏKEXIII.
" Et il eu l'ut ainsi. " L'ordre de la narialion est
l.KS V.STRES. le mcnieriue précédemment.
W. •' Et Dieu lit di'iix luminaires : un plus
38. « Qu'ils servent de signes et lassent les
ic ^rand à la tête du jour, un moindre à la tète
< temps, les jours elles années » 11 me semble .
las DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

« delanuit, et les étoiles. « On verra bientôt dans que l'ambignité du texte précédent, au sujet de
quel sens les deux luminaires sont à la tète du ces dernières, ne doit plus faire surnousaucunc
jour ou de la nuit. Quant aux étoiles qui viennent impression, et nous devons croire qu'elles ont
ensuite, l'on peut douter si elles sont aussi à la été mises au firmament pour être h la tête de
lète de la nuit. Quelques-inis veulent entendre la nuit, c'est-à-dire y tenir avec la lune le prc-,
ici que second luminaire a été tout d'abord
le mier rang. « Et Dieu vit que cela était bon. »

la pleine lune, parce qu'elle se lève aussitôt que C'est le même


ordre que plus haut. Remarquons
vient la nuit, c'est-à-dire un peu après le cou- bien (jue Dieu n'a pas ici donné de noms. On
cher du soleil. absurde que l'on com-
Mais il est aurait pu dire :Dieu donna aux luminaires le
mence à compter non du premier mais du 16" nom d'astres; mais tout luminaire n'est pas un
ou du t.')» jour. Il ne faut pas alléguer comme astre.
une difficulté, que la lune, du moment quelle a 43. « Alors se fit le soir, puis le matin, et il
y
été laite, adû avoir toute sa perfection. Car elle « eut un quatrième nous arrêtons no-
jour. » Si
est parfaite en quelque jour que ce soit; seule- tre idée à ces jours que marquent le lever et le
ment les hommes ne la voient dans son plein coucher du soleil; en comprenant que le lever
que quand toute la partie tournée vers eux re- du soleil a été le t(Mnps de sa création, et son
garde le soleil. Mais en rapport avec cet astre, coucher, le tenq)s de la création des autres astres,
quand elle est sous lui elle parait n'être plus, nous aurons le premier jour et non le quatriè-
cependant encore pleine, parce qu'elle
elle est me. Mais (piiconque sait que le soleil brille
est éclairée ne présentant à la
de l'autre côté ; sur d'autres points quand nous avons la nuit, et
terre quesafaceobcure, elle ne peut être vue de qu'ailleurs régnent les ténèbres quand le soleil
ceux qui habitent la terre. Mais c'est là une chose nous éclaire, considérera d'une manière plus
«lu'on ne peut pas enseigner en peu de mots. 11 profonde l'énumération de ces jours.
faudrait des dissertations assez subtiles et l'usage
de certaines ligures visibles. CHAPITRE XIV.
41. « Et Dieu les mil dans le firmament du
« ciel, pour que la terre en fiit éclairée. » Com- CUÉATION DE l'EAI
ment l'écrivain sacrée fait-il dire à Dieu : « Que
« des luminaires se lassent dans le firmament ? » 44. « Et Dieu dit : Que les eaux produisent des
Et comment dit-il après cela Dieu fit : « les lu- « reptiles vivants et des êtres qui volent sur la
« minaires et les mit dansle firmament; » com, « terre, sous le tiruuiment du ciel. Et cela fut
me s'ils avaient été faits hors du ciel pour y être « fait Les animaux qui nagent ont été
ainsi. »

ensuite ])lacés, (juand déjà, ]>ar sa parole. Dieu, a|)pclés re|>tiles, paire (pi'ils n'ont [)as de pieds
avaitordonné qu'ils y fussent faits? Veut-il en- pour marcher. Ou bien en est-il d'autres (jui
core marquer ici, que Dieu n'a pas opéré sui- sous les eaux rampent sur la terre? Doit-on
vant l'usage des honuues, mais que la chose a compter ici parmi les êlres qui volent les pois-
été rapportée comme elle peut l'être à des sons qui ont des écailles, ouïes autres qui n'ayant
hommes? Veut-il obliger à comprendre que si de pas d'écaillés se soutiennent au milieu des eaux,
la part de ces derniers faii'e et placer sont deux parées nageoires qui ressemblent à des ailes?
actes différents, ce n'est qu'un seul et même acte Ce point peut être l'objet d'un doute. Car du
de la part de Dieu, qui place ces objets en les fai- reste on peut demander pourquoi la formation
sant et les fait en les plaçant? des ^()latiles est attribuée à l'eau et non à l'air.
42. « au jour et à la nuit, et
Qu'ils président Il est impossible en effel d'admettre (jue le texte

'(fassent la séparation entre le jour et la miit. » regarde uniquement ces oiseaux à qui les eaux
Les mots précédents « à la têledu jour » et « à
: sont familières, comme les plongeons, les ca-
« la fêle de la miil, >- sont expli(juéspar ceux-ci : nards et tous ceux de mêmes mœurs s'il n'était :

» (ju'ilsprésident au jouret àlanuit. Ce ternie, « ici question (jue ces derniers il sérail parlé ail-
" à la tête, « doit donc être compris dans le sens leurs des autres, parmi lcs(iuels on eu voit (pii
de premier l'ang. Aussi bien parmi les objets (pii éNitent l'eau jus(iu'à ne boire jamais. Mais peut-
frappent les yeux, il n'eu est pas de plus rcmar. être en cet enijroille nom d'eau est-il appliqué
(jualile dans le jour cpie le soleil, ni dans la miit à l'au' inférieur, (pii emironne et touche la sur-

(jue la lune ou les étoiles. D'où résulle encore lace de la terre. Aussi bien la rosée juscpic
OrVRAf.E INACHKVf:. 189

dans U's nuits les plus scivitios on atlostc la na- i(î. Mais, dira-l-on peul-élre : Si parles mots:

liiir iiiiiniilo; fl nii^mc il se coiidiMisi» <mi mu'i'. « Une l'eau se rassiMuble, nous compretu)ns
Or une micc n'est aulie eliose (|iie lie l'eau, que l'eau a été l'aile et tirée d<' la conlu>i(in |iri-

etiiiiiiie reuianiuent ceux qui l't)nt route i^i travers mitive de l;i malière, nous savons aussi (jue ce

les nii:»j;essur les inontaities, ou hien encore au rassendilemeiU a regu de Dieu le nom de mer.
milieu des lirouillards dans la plaine. Du reste Connnent donc pouvons-nousconq)rendre (ju'à-

e'esl l'air où volent les oiseaux; et ils ne peu- lors a été créé l'air inférieur, (|ni n'est jamais
\ent, dit on, voler dans la réfîion plus élevée et désigné sous le nom de mer, encore (pi'il puisse

jilus i)ure ([ui eonlient l'airproprement dit, at- être ap|)elé eau? — Devant cetic objection, il me
tendu (pu> eet air esl trop suMil pour les por- semble i[\w ces mois « Que la parlie aride se
:

ter. On allirme (|u'il n'y a jamais là ni nuaf;e ni « muntre, insinuent non-seutcMiienl la iorma-
>.

rieiupii tiennede la lempèle. Le vent n est telle- lion de la terre elle-même, mais de pins celle

ment nui, (pi'au ra|)ptirt de eerlaiiis persoimages de l'air épais ([ui en touche la surface. Lu effet,
année, pour oll'rir des c'est [)ar son intermédiaire (puî la terre est
(pii ^'ravissaient eliatiue \

sacrifices le mont Olympe, dont la couche de éclairée etdevientsisible. Ainsidans le sculmot:


l'air humide, par,iit-il, n'alleint pas le sommet; « que l'aride paraisse, » sont entendues toutes
des lettres gravées dans le sahie sur le haut de les choses sans lesquelles ne pourrait |>araitre la

celte monlagne étaient retrouvées l'année sui- terre. Cl'est-à-dii-e qu'il s'agit à la de sa fois et

vante sans aucune altération. formation, et de son dégagement du sein des


-4o. Aussi l'on |>eut, sans choquer la raison, eaux, cl de l'air dont elle est cinironnéc et par
penser que ce qui est appelé dans les Ecritures lequel la lumière lui arrive des hautes régions
(irmament du eiel, s'étend jusqu'aux espaces oc- du monde.
cupes par l'ail' hmnide; on peut croire aussi cpie Ou iilutol les termes: « Que l'eau se l'assem-

la réfïion de cet air si tran(piille et si pur l'ail « ne regardent-ils pas i)lulôt cet air dont
ble, »

partie du lirmamenl. On peut comprendre en nous parlons, puisqu'on le voit se réduire en


effet, sous le nom de lirmamenl, cette Iranquil- eau (piand il se condense? Ce qin est appelé
lilé même, ainsi (pi'unc graiule portion des cho- rassend)lement des eaux et ensuite mer, pour-
ses créées, et de là ce me scmhle, les paroles cpie rait donc bien être le sinH'lc résultat de la con-
nous lisons dans i)hisieurs Psaumes : '< Votre densation de l'air; de sorte que la partie non
« vérité, ô Dieu, s'élentl jusqu'aux Car nuées • .» rassemblée, c'est-à-dire non épaissie jusqu'à ce
il n'est rien de plus stahle ni de plus serein que point et (jui en louchant la terre s'élève au
la\érilé cl c'est sous la région de l'air parl'ailc- dessus d'elle, serait une eau capable de soutenir
nu'ul calme et serein, que se forment les nuages. le vol des oiseaux, et (pi'on pourrait également lui

Kncore que l'on comprenne dans un sens (iguré donner les deux noms d'eau plus délice et d'air
cesparolesdu roi prophète, toujours csl-ilqu'elles moins subtil. Mais quand on demande pourquoi
(tnl li'ur i-aison d'être dans une certaine res- cetair a été fait, l'Ecriture ne iloniie point de ré-
sendilance des ohjets, et qu'aussi bien l'ensemble ponse. Serait-il vrai, comme plusieurs le soutien-
(le la création coi'porelle plus stable et plus pure, nent, que les humides exhalaisons de la mer
conlenue dans res[)ace qui s'étend du liaui du ci de la terre forment celte couche d'air (pu,

ciel jusqu'à la région île l'air humide, où régnent |)lus que l'air supérieur parfaitement pur,
épais
les nuages et les tempêtes, figure admirablement se trouve en êlal de soutenir le vol des oiseaiix;
la La formation des oiseaux qui volent
vérité. mais que beaucoup moins dense que les eaux
sur la terre sous le (innameni du ciel est donc dans lesquelles nous nous lavons, il semble prt-s
avec raison attribuée à l'eau, parce que l'air (pii d'elle un élément sec et de la nature de l'air

soutient leur vol peut recevoir convenablement proprement dit? Alors de même qu'il n'était pas

le nom d'eau. Dès lors aussi, il est facile de coni- besoin de parler de l'air supérieur, si pur et si

[irendrc pourquoi aucune mention


il n'est fait iranqiùlle, puisqu'il est compris (ians le firma-

expresse tle l'air, comment il n'est parlé ni du ment de même, après


;
avoir parlé de la terre et
temps, ni du mode do sa création. Sous le nom de la mer, qu'élail-il besoin de parler encore
d'eaux nous devons voiri'air inlériem-, et sons le de l'air inférieur, s'il esl formé par leurs exha-

niim de lirmamenl rairsupérieur;de sorte (|u'il laisons et n'est autre chose ([ue l'eau disséininéc
n'est aucun élément dont il ne soit question. en \a|)eur pour servir au vol des oiseaux?
'P^. \xx.y, 6 m, 11.
140 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

4". Aussi bien l'on n'a pas dit non plus com- parait aucun nuage, il est évident que cet air
ment liirenl créés les sources et les fleu\ es ; et ceux, appartient au hrmament, puisqu'il est dit qu'ils
qui s'occupent plus spécialement de ces matièies « volent sur la terre, sous ie (irinament du ciel.

enseignent que par des ascensions, dont le lait <i Et il enfui Le même ordre est toujours
ainsi. »

en lui-même échappe complètement à nos sens, observé. C'est pourquoi nous trouvons encore les
une vapeur douce se dégageant de la mer est mots suivants, comme dans le récit des autres
élevée vers le ciel; que de là résultent les nuées, opérations, si on excepte la création de la lumière
qu'ensuite les pluies venant humecter la terre, produite en premier lieu :

celle-ci laisse couler et dégoutter par différentes 49. « Et Dieu ht les grands poissons et tous les
voies,dans ses cavités secrètes, une masse d'eau « animaux rampantsque les eaux produisirent se-

capable de former des sources, soit petites, soit « Ion leur espèce, et loul volatile ailé selon son es-
sullisantes pom" donner naissance à des ileuves. « pèce. » Remarquons bien que les expressions :

Comme une preuve de leur sentiment, ils allè- « selon leur espèce, » sont employéesquand il s'a-

guent que la vapeur de l'eau de mer soumise à git de créatures qui se conservent el se propagent
l'ébullition, devient dans les replis du couvercle par rei)roductions séminales; en effet ces termes
où elle s'arrête, un liquide qui n'a plus d'amer-, oui déjà paru au su jet, des herbes et d'arbres. « El
tume pour le goiit. Du reste tout le monde, à « tout volatile ailé. » Pourquoi ajouter le mot ailé?
peu d'exceptions [ii'ès, sait bien que les sources Peut-il exister de volatile sans ailes? Et si cela
en diminuant témoignent du besoin quelles ont est possible. puisque nous ne
Dieu en a-l-il fait,

de la pluie. L'histoue sainte elle-même nous- voyons nulle part qu'il en soit question? Mais
prête ici son autorité. Elle le prophète deman- enliii est-il un êlre <jui puisse aucunement voler
dant la pluie dans un temps de sécheresse com- sans ailes? Les chauves-souris, les sauterelles,
mande à son serviteur de regarder la mer tan- les mouches et toutes les auti-es créatures de ce

dis qu'il prierait. Celui-ci voyant s'élever un genre, n'ont pas de plumes, il est vrai, mais les

très-petitnuage annonça au roi inquiet que la aller, ne leur manquent pas. L'addition du mot
pluie allait tomber et en effet le roi fuyant : « ailé » a eu pour lin tle nous faire entendre
alors en fui bientôt couvert •. David dit encore : qu'il ne s'agit pas uniquement des oiseaux, parce
« Seigneur, qui appelez l'eau de la mer el laré- que les poissons, eux aussi, ont des ailes et volent
« pandez sur la surface de la terre '^
. » La mer sur la terre au milieu des eaux. C'est pour cela
donc ayant été nommée, il aurait été superllu (|u'au lieu du terme « oiseaux, » nous trouvons
de parler des auti'es eaux, soit, comme nous l'a- le terme généra! « volailles ou êtres qui voient, »
vons déjà dit, de celles qui donnent la rosée el et ensuite, « volatile ailé. Et Dieu vit que cela
(jui par leui' subtilité font un air propie à sou- « était bon. » Il faut encore comprendre ce détail
tenir le vol des oiseaux, si elles ne sont autre comme dans les autres passages.
chose que l'effet des exhalaisons; soit de celles ofl. « El Dieu les bénil en disant: Croissez, mul-

des sources et des fleuves, si elles viennent -des « tipliez-vous et remplissez les eaux de la mer;
pluies que fournit la mer el que la terre absorbe « el que les volatiles se mulliplientsur la terre. »

pour la rendre ensuite à l'océan. Dieu voulut que sa bénédiction produisit la fé-
condité, dontl'effet se révèle dans l'existence des
CHAPITUE W. descendants; alni qu'en vertu de celte béné-
diction, des êtres créés faibles et mortels ne
AMMAIX SORTIS DKS E.41X.
vissent pas périr avec eux leur espèce, mais
qu'elle se conservât pir d'autres êtres aux-
i8. < Une
eaux produisent des repliles à
les
quels auraient donné naissance. Néanmoins,
ils
« âmes \ Pourquoi ces deux mots? Est-ce
ivanls. >?

(jii'il peut y avoirdcsàmes sans vie? Ne serait-ce puisque les planlesmèmeen naissant, conservent
\oulu lessoitir caractère l'espèce et la ressemblance de celles qui meurent,
pas(iu'i)ii a faii'e ici le

de celle vie plus manifeste qui est le propre des pouniuoi Dieu ne les a-t-il pas bé;iies? Est-ce
animaux doués de senliuient et que n'oni pas parce qne'eliessontdépourvuesdu sentiment qui

lesi)lanles?« El des oiseaux qui volent sur la terre, approche de la raison et que possèdent les ani-
' sous lehrniamcnt du ciel. » Si les oiseaux ne maux? Aussi bien, il est bon de remarquer que
vnleiit pasdans la région de l'air très-pur où ne Dieu bénissant ce qu'il vient de créer se sert de la
seconde personne, ellenr adresse en qnelquesorle
'
in Roi». Xïiir, 4:). 11. — Amos, t,b i.\ti-.
.

OUVRAGE nSACHEVf:. 141

lu iKirolt'i'omnie s'ils l'iVoiiluiciil : «Croissez, iniil- d'exister aver- la disposition à prendre une aji-
« tiplioz-vivis, dil-il, irniplisst'z les cniix de la pai'cnce, à revêtir des formes. Ou peut aussi
« iiiiT. » Opciidiiiil Rank" pas dans son
il 111" comprendre sous le nom des ténèbres le néant
tliscoMis la niiMm* porsonne jiisqu';'i la (lu delà absolu que Dieu n'a pas l'ait et d'où il a tiré
hi^n('dicli(>!i,(nii>(| l'il dit (Misiiilc, noi; ,)as : Miil- tout ce (pi'il a daigné faire dans sa l)oidé inef-
liplic/.-vons siirla ti'rrc : mais « Que les vo'alilrs so fable, et dans son inlinic puissance, laquelle a
« iiinllip!ioiit sur la lonr. « One signifie iri la su opérer de rien tant et de si -randes <-hoses.
eondnile de lti(Mi, sinon i)enl-(^ti'e (pielesensde îiû. « .\lors se' lit le soir, puis le matin; et il
y
ces aniiuanx approihe de la raison el pointant « eutun (irKjuiènie joir. » Nous voyons (pi'a-
s'en (éloigne assez ponrrpi'ils soient incapables de près les mois :« Il enfui ainsi, » lenarraf<Mnn'a
saisir parfaiteinenl la iiai-ole (pi'on lenr adresse, point a'onté le lécil derexécntion. L'ayant don-
eonnne eenx (pii on( rinlellij;enee el la raison en né précédeunncnt, il n'avait pas <"i le rcproduiie,
partage comme si choses eussent été faites une secon-
les

M. « Ella ehose l'nl ainsi. » Assnrénient lonl de fois.- Dieu d'ailleurs, en vertu de cette béné-
honnneqnin'a pas eornpiis jnsipi'alors de cpiel diction qui regarde la fécondité, ne formait pas
jonr il s'apildans rénnniéiation de l'écrivain sa- de nouveaux éti'es mais il conservai! les espèces
cré, doit s'éveiller niainlenanlpour le compren- decenx qu'il avait formés, enleurcommuni(iuant
dre. Réglées i)ar Itien d'nne manière fi.xc, les gé- le pouvoir de donner naissance à d'atdres (pii

nérations cliez ces aniinanx gardent nne cons- leur succéderaient. C'est poni([noi nousne trou-
tance admirable, et il y a un nombre déterminé vons pas non plus la conclusion oïdinaire : « Et
de jours assigné à cliaque espèce pour porter, «Dieu vit (pie cela était bon.» Nous l'avoiis vu plus
mellre bas et couver leurs œufs: la sagesse de haut, et il ne s'agissait ici (jne de la conserva-
Itieu, (pii atteint avec force d'ime extrémité à lion future de l'objet par reproduction, llien
l'autre el cpii dispose tout avec douceur i, con- donc, en cet endroit, n'a été répété sinon les mots :

serve cet ordi-e (|u'elle a établi, ('omment donc « Elit fut fait ainsi, » après lesquels sont aussitôt
en im seul jour lesanimaux dont il est parlé ici mentionnés le soir et le matin, dont les nomsd(''-
ont-ils pu concevoir, porter, mettre bas, couver signent, comme nous l'avons dit,
l'achèvement de
leurs (Piifs, nourrir lenr petits, et enfin remplir l'œuvrequantàla matièreet{]nantàla forme (pie
leseaux delà mei- et se midtiplier sur la terre? revêt la matière. Voilà notre sentiment que nous
Car nous lisons les mots « Il en fut ainsi, » : sommes prêts toutefois à abandonner, si d'autres
avant qu'il soit fait mention de soir. Mais, sans dans leurs recherches trouvent quelque chose de
aucun doute, (juand il est dit (pie le soir eut meilleur et de plus relevé.
lieu, puis le matin, sons le nom de soir, nous est
désignée la matière informe,
de et, sous le nom CHAPITRE XVI.
matin, forme imprimée à la matière par l'o-
la
pération di\ine, puisque le malin forme le jour ANIMALX TERRESTRES. CRÉATION DE l'HO.MME.
écoulé après celte opération. Dieu cependant
n'a pas dit : Que le soir se fasse, ni : Oue le matin 53. « Et Dieu dit : Que la terre produise des

soit. Car il ne
que d'un simple rappel des
s'agit
« animaux vivants, chacun selon son espèce, les
chosesqui ont été précédemment, le soir et
faites
« quadrupèdes, les serpents, les bêtes de la terre

le malin désignant la matière et la forme que « selon leur espèce, et le bétail selon son espèce,

l'écrivain sacré a déjà représentées eonnne l'œu- « Et la chose fut ainsi. » Au sujet de l'addition

vre de Dieu, sjuant aux défautsmèmes deschoses, du terme « vivants » à celui d'animaux, comme
c'est-à-dire ce qui de la forme tend à la maiière et au sujet des mots « chacun selon espèce » et de
:

au néant, si nous pensons ajuste titre qu'ils sont cesautres: « il en fut ainsi, » qui reviennent ha-
indiquésdans le mol nuit, ce mol n'enseigne pas, bituellement, il faut se rappeler nos observations

il est vi-ai, que Dieu les ait faits, mais en disant


précédentes et les appliquer ici. Dans notre lan-
:

«Dieu sépara la lumière des ténèbres, » l'Écriture gue, il est vrai, lenom de bête désigne en général
nous apprend qu'il en a été l'ordonnateur. Ainsi tout animal privéde raison : cependant l'on doit

le mol soir doit désigner la matière informe qui distinguerici les différentes espèces et compren-
malgré son extraction du néant, ne laisse pas dre quelesc[uadrupèdes sont toutes lesbètesde
charge, les serpents tous les animaux qui rampent
' Sag.Tiii, 1. sur la terre, les -bêtes de la terre ou bêtes sau-
142 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL

vages, tous les quadrupèdes indomptés, enfin sons et l'exécution n'on point été séparés, mais ont
le nom do bétail il faut voiries quadriipèdos qui eu lieu enseiuble ?
ne rendent pas de service par leur travail, mais 57. « Et Dieu dit Faisons l'homme à notre
:

donnent quelque revenu à ceux qui les nour- «imag:eetà notre ressemblance.» Toute image esT?
rissent. ressemblante à celui don telle est l'image et néan- ;

54. « Et Dieu fit les bêtes de la terre selon moins tout cequi ressemble à(|ue!qu'un n'est pas
« leur espèce, tout bétail selon son espèce, et pour cela son image. I>ar exemple, les figures dans
« tous les serpents de la terre selon leur espèce. » un miroirétantdes images sonlrcsscnd)lantes,de
Celte répétition : « La chose fut (liimi ;
— Dieu même les portraits dans la peinture. Cependant si

« lit les bêtes de la terre, etc. » doit être entendue de deux objets l'un ne résulte pas de l'autre,
suivant la règle que nous avons ])réscntéc plus aucun d'eux ne peut être dit l'image de l'autre.
haut. I^e mol de bétail comprend ici, je crois, les Car ime image véritable, c'est la copie innnédiate
animaux qui vivent sous le soin et dans la dé->_tl^ celui qu'elle imite/ Pour(juoi donc, après
pendauce de l'homme. « Et Dieu vit que cela avoir dit, « à notre image, » ajouter encore ; « et
« était bon. » Cette conclusion doit être prise « à notre ressemblance ; » comme une image
si

dans le même sens que partout ailleurs. pouvait ne pas ressembler à l'original? Il semble
55. « Et Dieu dit : » Faisons l'homme à notre qu'il aurait sulli de dii'c : « à notre image. »

« ùnage et à notre ressemblance. » Ici encore Mais le ressemblant diflere-t-il de la ressem-


nous avons à remarquer un rapprochement et blance, connne l'homme chaste diffère de la

ime différence enire les animaux. D'après le chasteté, comme l'homme toit diffère de la force

texte, l'homme fut créé le môme jour que les même ; en sorte que les choses ressemblantes ne
bêtes. Aussi bien compose-t-il avec elles la masse le soient qu'en participant à la ressemblance,
de tous les animaux terrestres. Mais parce qu'il comme ce qui est fort par la force, comme
l'est

a en partage le noble privilège de la raison, se- ce qui est chaste l'est par la chasteté ? Il faut
lon laquelle il est créé h l'image et à la ressem- l'avouer, c'est ilans un langage peu propre que

blance de Dieu, on s'occupe de lui séparément, l'on dit de notre image ipi'elle est notre ressem-
après qu'on a conclu pour les animaux de la blance, quoi(iue l'on puisse dire en toute vérité
terre, dans les termes accoutumés : « Dieu vit que qu'elle nous ressemble. Il en est donc de la
« cela était bon. » ressemblance qui se conmnmique comme delà
56. Il faut de plus remarquer que pour le reste chasteté qui rend chaste tout ce qui l'est. La
Dieu ne dit pas « Faisons, » et qu'en révélant
:
chasteté pour être chaste n'a besoin de la
cette circonstance à l'écrivain sacré, l'Esprit-Saint participation de qui quece soit; au contraire ce

a voulu encore indiquer la supériorité de la na- qui est chaste ne l'est (|ue par la participation
ture humaine. Or à qui Dieu a-t-ildit: «Faisons, >>
de la chasteté et sans aucun doute cette perfec-
:

quand il s'esl agi de créer l'homme, sinon au tion se trouve en Dieu, où se trouve de même

Verbe, à qui, pour celte sagesse que utUIo jiarlicipation ne l'ciid^


k^ reste, il disait Fiat -.qm' :

cela soit Car toutes choses ont été faites par lui
?
sage, mais qui rend sage tout ce (|u'il l'est. C'est 7

et rien n'a été fait sans lui i. Mais quelle est, à donc dansée sens que la ressemblance de Dieu
notre avis, la raison de cette différence ? Pour- par laquelle loiilcchoses ont été faites, est propi'c-

quoi le terme fiât, si ce n'est pour marquer l'o- ment appelée resscndilance; elle es! ressendjlanle
pération du Fils exécutant l'ordre du Père? et non en vertu de la iiarticiimtion de(iuelque res-
pourquoi ensuite faiaons, semblance, mais comme élant elle-même la pre-
pour marquer si ce n'est
mière ressend)laiice, dont la paiticipalion rend
l'opération de tous deux tout ce que ? Ou bien
faille Père, le fait-il par le Fils, et quand il est ressemblant tout ce que Dieu a fait par elle.

dit, au sujet de rhomine, « Faisons, » est-ce en :


donc il a été dil, non-seulement « à l'i-
58. Si

vue d'appi-eudre à l'honnue, pour qui l'Ecriture- « mage, » mais encore « à la ressead)lance » ;

Sainte a été dictée, que ce que fait le Fils en c'est peut-être ])our montrer que Tette image n'est

accomplissanf la volonté du Père, le Père le fait pas rcsscndjianfe à Dieucomnie participant à quel-
aussi lui-même ?Etle mot « ftiisons » doit-il lui que ressemblance de lui, mais qu'elle est sa
montrer ici que partout ailleurs où nous lisons: « resseud)lancc même et qu'il elle doivent par-

«Qu'il soitfîdt ticiper toutes les choses dont il est dit qu'elles
; et il fui fait; » le commandement
ressemblent à cet original divin. C'est ainsi
I
Jean, 1,3.
oi'vi{A(;e iNACiiKvf:. 143

(|irileiiosl delà cliastoti^lonl lap.irlic ipalinn lait des êtres de leurs esp(''ces, mais en eux-mêmes
losiniu'siliasli>s;<lclasatr('ssf(|iiisc (•oniinmiiiiuc et piis à part ils n'en aillaient aucune. .Nous
aux àiucs |i(iiirli's iTiidrc sajios ; o lili'lal)faiil(-([ii i voyons du reste ipi'im corps est d'autant Jilus ,

iviul Ix' dti tiiiil iv(|iii IVsl. Si Dieu a\ait sciilc- beaiMpi'il se ('oi!q)iisc de parties plus semblables
mcnt ilili" à notre rcssciiihlaiice, » on ne \ei- entre elles. (Juant aux .'iiiies, des mieurs seinbla-
railpas(|iie celle ressenihlaiiee est prise sin hii; cles les unissent d'amitié les uiiesaiix autres; mais
et s'il avait dit seulement :
• ànoti-e iinauc, «tiMil de plus, dans mie même .-^iiu', des actions et des
en déelarant ipie la siinililmle est prise sni' lui, verliis semblables, sans lesipielles il ne saurait v

il n'aurait p.isinanpié (pie l'iinaui" lui ressemble avoir de conslance , sont l'indice de l,i vie bien-
juscpràètresaressemlilance luènie. Or de même heureuse. Kn
tout cela cependant nous vovoiis
(pi'il n'est rien de plus eliasle (pie la eliaslet(', des t nous pou vous dire semblables, nous
rails ([lie

rien de plus sage <]ue la sagesse, j Men de p lus ne \o\ons pas la ressemblance elle-même.
hean (pie la lieauti', il n'est rien mu plus (|ui Si donc l'univers est formé d'êtres qui ont
puisse être ni ipie l'on puisse dii'e ou imaginer entre eux ([iiebpie ressemblance, si chacun d'eux
plus resseinlilaiit (pie la ressenihlance. On en restant ce qu'il est n'en contribue pas moins
comprend de là (pi'au Père est tellement sein- à former ce grand ensemble (pie Dieu a créé et
hlaltle sa l^esseiiihlance, (ju'elle exprime avec (pi'il gouverne; il est certain (pie toutes les créa-

une entière perlèction toute la j)lénilude de sa tures ont été faites par la Ressemblance siirémi-
nature. nente, immuable et inaltérable de Celui à qui
59. Mais conil)ienne contribue pas à la beauté doit l'être tout ce (pii existe, et ([ne de là leur
de cliafpie l'Ire, celte llessemblanee divine par vient la beauté (pii consiste dans le merveilleux
(|ui toutes choses ont été laites ?Cette étude dépasse rapport de leurs [larties. Toutes ce|)en(lanl n'ont
de beaucoup les liiinièresde l'esprit humain; on l)as été faites à la ressemblance même de Dieu,
piMit cependant l'aliorder de (piclque manière, c'est l'avantage des seules natures raisonnables.
et il sul'lit d'observer que tout objet cpii s'offre Ainsi tout a été fait par elle ; mais il n'y a que
soit aux sens soit à la raison, doit à la similitude les êh'es spirituels qui aient été créés pour elle.
V de ses parties son caractère d'unité. Les âmes (jO. Lasultstance raisonnable a donc été faite
raisonnables sont ap|)elées sages grâce à la sagesse en mêmetemps par la ressemblance et à la
divine, et cette sagesse ne s'étend pas plus loin car : ressemblance de Dieu. Car aucune nature ne s'in-
nous ne pouvons nommer sages ni les bêtes ni terpose entre elles. Aussi bien l'esprit de l'hom-
bien moins encore les arbres, ni le feu, l'air, l'eau, me, mais il ne le voit que dans l'état d'une vie
la terre, quoique ces choses, en tant qu'elles sont, pure et bienheureuse, ne s'attache et ne s'unit
subsistent parlasagessede Dieu. Mais nous disons réellementqii'àlavérité, appelée la ressemblance,
([lie les jiierres se ressemblent, que les animaux se l'image et la sagesse du Père. C'est donc à bon
ressemblent comme nous le disons et des hommes
; droit qu'on entend de la partie intérieure et prin-
et des anges. Doplus, en considérant chaque créa- cipale de riiomme, c'est-à-dire de son esprit,
ture en ])articulier, nous disons que la terre est les mots : « Faisons l'homme à notre image et
vraiment la terre, parce qu'elle a toutes ses par- « à notre ressemblance. » En effet ce qui fait la

ties semblables entre elles que toute partie ;


valeur de l'homme, c'est ce qui tient en lui le
de l'eau est semblable aux autres parties et que premier rang, c'est ce qui le distingue des bêtes.
sans cela l'eau ne saurait être l'eau que si une ;
Le reste, quoique beau en son genre, lui est
([uantité quelconque de l'air ne ressemblait pas commun avec les autres animaux, et conséquem-
au reste, il serait impossible de tout point que ment de grand prix dans l'homme. A
n'est pas
ce lut de l'air; et que la moindre étincelle moins cependant que la forme du corps humain
de feu ou le moindre rayon de lumière n'est dressé pour regarder le ciel ne soit une raison
bien du fen ou de la lumière que par une de croire que lui aussi a été fait à la ressemblan-
exacte ressemblance avec toutes les autres étin- ce de Dieu parce que comme cette divine res-
;

celles ou tous les autres rayons. 11 en est ainsi semblance ne se détourne pas du Père, ainsi le
d'une pierre, d'un arbre, du corps de n'importe corps de l'homme ne se détourne pas du ciel
([uel animal, et on peut penseref affirmer, que si pour s'incliner vers la terre à la manière des
n'en étaient pas semblables entre elles,
les parties autres animaux. Mais encore la comparaison ne
non-seulementcesobjetsn'auraient pas la nalm'c doit pas être admise de tout point. Car notre
144 DE LA GENÈSE AU SENS LITTIÎRAL.

corps diffère beaucoup du ciel, tandis que dans Aussi bien nous ne lisons pas, que le Père parlant
celte lessemblance, ne peut qui est le Fils, il au Fils lui ait dit : Fai.sons l'homme image
à votre
rieuy avoir qui uc ressemble au type divin. Par- ou à mon image ; mais nous lisons,au nombre
tout ailleur.i les semblables diffèrent entre eux de pluriel : « Faisons l'homme à noire image et h
quelque côté; mais la ressemblance elle-nicnie •' notre ressendjl;mce ; » et qui oserait oxlure
n'a rien qui ne soit ressemblant. I^e Pèi-e cepeu- le Sitinl-Espritdecette pluralité? Comme les trois
dant est le Père ; le Fils n'est que le Fils. Car, bien personnes ne sont pas plusieurs Dieux mais
qu'on soit obligé de i-econnaîti-e qu'il n'y a en un secd Dieu, on doit voir que la conclusion
luiabsolument aucune dissemblance dès qu'il présentée ensuite par l'Ecriture quand elle dit au
est appelé la ressemblance du Père, on doit re- nombre singidier « Et Dieu fil l'homme k l'i- .

connaître aussi que le Père n'est pas seul puis- « mage de Dieu, » ne signifie pas que Dieu le
qu'il a sa ressemblance '.
Père a créé l'homme l'image de son Fils Com- ii :

61. « Faisons l'homme à notre


Et Dieu dit :
ment serait vraie l'expression « à notre image, »
« image et à notre ressemblance. » Ce qui pré- que nous voyons plus haut, si l'homme avait
cède au sujet de ces divines paroles que nous été créé ;» l'image du Fils ? Mais
seidemenl par
présente l'Écriture, suffit, il est vrai, pour mon- cela même
que Dieu a dit « à notre image, » et :

trer que
ressemblance de Dieu à laquelle
la que la parole de Dieu est nécessairement vraie,
l'homme a été créé, peut être entendue du Verbe il faut entendre les mots qui viennent ensuite
même de Dieu, c'esl-à-dire de son Fils unique ; dans l'Ecriture « Dieu fit l'honnue h l'image de
:

mais il ne s'ensuit pas que l'homme soit l'image « Dieu » comme s'il y avait
; La Trinité fit :

parfaitedu Père etsa ressemblance en toutégaleà l'honune à son image.


lui. L'homme cependant est aussi l'image de Dieu, C>'2. Quelques-uns pensent que si le mot res-

comme le déclare ouvertement l'Apôtre endisant: semblance n'est pas répété ici et que si l'Écriture
« L'homme ne doit point voiler sa tète, attendu n'a pas dit Dieu fit l'honune à l'image et à la
:

« qu'il est l'image et la gloire de Dieu. 2 » Mais ressem!)lance de Dieu c'est que l'homme fut ;

cette image a été faite à l'image de Dieu ; elle alors créé seulefnent l'image de Dieu (|uanl i'i ;

n'est pas égale et coéternelle à celui dont elle h la ressemblance, disent-ils, elle lui était réser-
est l'image, et ne le serait pas quand même vée pour plus lard, à la résurrection des morts.
l'homme n'aurait jamais péché. Ils supposent qu'il peut y avoir quelque image
Mainlenant voici, selon nous, le sens à préférer sans ressemblance. Mais il est hors de doute que
dans ces divines paroles. S'il est dit, non au sin- ce qui ne ressemble aucunement à ijuelqu'un,
mais au pluriel:
gulier., « Faisons l'homme à n'en est pas non plus l'image. Cependant pour ne
« iWiti'e image et à notre ressemblance, » c'est
point paraître traiter ceci avec les seules lumiè-
que l'homme n'a pas été créé à l'image ou du res de la raison, nous nous appuyei'ons sur l'au-
Père seul, ou du Fils seul, ou du Sainl-Esprit torité de l'Apôlre saint Jacques. Il dit en parlant
seul, mais à l'image de la Trinité même, de cette nous bénissons Dieu et
de la langue : « Par elle
Trinité qui est Trinité sans laisser d'être un seul « par elle, en même temps, nous maudissons les
Dieu, et un seul Dieu sans laisser d'être Trinité. « hommes qui ont été faits h la ressemblance

Ce qui suit fut ajuulé qu'après coup.


« de Dieu i
. »
' lie I Rélract. ch. 18.
Cor. XI, 7. '
Jacq 111,9.

Traduction de M. l'abbé Tassin


DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

LIVRE PREMIER.

(CREATIONS PRIMITIVES '.

CHAPITRE PUKMIKU. et les corps que renferment le ciel et la terre, ou


seulement les corps ? En supposant qu'il ne soit
DIVERS SENS DE l'ÉCKITURE. PREMIERS MOTS I)K
|)oint iciquestion des esprits, les termes de ciel
I,\ GENÈSE. et de terre ne servaient-ils qu'à désigner la ma-
tière dansles régions supérieures ou mférieurcs
i. F^'Px'ritiire sediviso en deux parties, eomine
de l'espace ? Sous les mots de ciel et de ferre
nous le fait' euleuilre le Seignein- lui-même,
faut-il voir la sulistauce matérielle ou spirituelle
quand ileompare un docteur versé dans la science
en l'absence de toute forme je veux dire la vie de :

du royaume (1(> Dieu à un père de famille » (|ni


l'esprit, tel qu'il peut exister en lui-même, avant
«tire lie son trésor des choses ancienneseldesclio-
de s'être uni au Créateur, union qui fait sa
•< sesnouvelles^;» cesdeuxparliess'appellentaussi
beauté et sa perfection, et sanslaquelle il ne possède
les deuxTestaments. Dans les saints Livres, il faut
pas sa forme véritable je veux dire aussi la vie
toujours examiner la révélation des vérités éter- ;

du corps, tel qu'on ])eut le eonc<'voir dépouillé


nelles, le récit des événements, les prophéties, les
de toutes lespropriétés que révèlela matière, quand
les avis moraux. A propos desévène-
préceptes et
elle a atteint sa perfection et que les corps ont pris
mcntsonse demandes'il sullit depreudre les faits
les formes siucepfibles d'être perçues par la vue
au sens figuré, et s'il ne faut pas encore les
ou tout autre sens ?
accepter et en soutenir l'autlienticité comme faits
3. Ou bien, faut-il entendre, par le mot ciel, la
histoii(pies. Qu'il y ait des allégories dans l'Ecri-
créature immatérielle, jiarfaite et bienheureuse
ture, c'est ce qu'aucun chrétien n'oserait nier, pour
du moment qu'elle recul l'être par le mot
peu qu'il songe aux paroles de l'Apôtre quand ;

terre, la matièie imparfaite encore ? car, est-il


il dit « Toutes ces choses leur arrivaient pour
:

dit, « la terre était invisible, sans forme, et les


« nous servir de ligures •'; » ou quand il cite ces
« ténèbres étaient sui' l'abîme, » expressions qui
mots de la(ienèse: « Ils seront deux en unmème
semblent désigner dans la matière l'absence de
'< coi'ps *, » pour exprimer le mystère auguste
toute forme. Faut-il voir dans ce passage l'im-
de l'union de Jésus-Christ avec son Eglise '>.

perfection naturelle aux deux substances au


-2. Puisque l'f^criture admet cette double inter-
;

corps, parce que « la terre était invisible et sans


prétation, cherchons, en dehors de toute allé-
« forme;» parce que les ténèbres étaient
à l'esprit,
gorie, le sens attaché à ces mots : « Au commeu-
« sur l'abîme L'abime ténébreux serait dans
? »
« cément Dieu créa le ciel et la teire. » Faut-il
ce cas une métaphore pour désigner l'état pri-
entendre par là l'origine du temps, les éléments
mitif de l'esprit, avant qu'il s'unisse à son Créateur;
primitifs de la création ou le principe suprême,
celte union étant l'unique moyen de mettre en
je veux dire le Verbe, Fils unique de Dieu ? En
lui pour faire disparaître l'abîme, et
l'orihe,
outre, comment Dieu peut-il se manifester, et,
la pour chasser les ténèbres ? Dans
lumière,
sans cesser d'être immuable, créer des êtres sou-
quel sens devons-nous aussi entendie que « les
mis aux changements du temps? Que signitient
« ténèbresétaieni sur l'abîme? » Serait-ce (jue la
les mots ciel et fnvr? Représentent-ils les esprits
lumière n'existait pas encore
Car si elle eût exis-
?
I
Gcn. I, 1-5. — - Matt. .\-|lI. 62. — •'
I Cur. x, 11. — ' fien. ir,
té, elle serait élevée et comme répandue, dans les
24. — ' Epllés. v,31, 32.

S. AUG. — TOM. IV. to


i4fi DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

régions supérieures : ce qui sefaitdans les âmes 6. Que faut-il donc dire ? L'idée cachée sous

loisqn'cUes s'atlachent à la lumière immi'able ces mots, <> fiât lux, » n'esl-elle pas, au lien du
et toute spirituelle qui est Dieu.
son même des mois, la véritable voix de Dieu ?

El celle idée, n'est-elle pas de la nature même .

CHAPITRE II. du Verbe dont il est dit : « Au commencement


» était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le
Verbe Dieu par
Fiat hix dieu a-t-il prononcé cette parole
« était ? » Car, si « to'it a été fait
:

PAR l'entremise DINE CÉ.\TLRE OL PAR SON


« lui '. » ile-l manifeste qu'il a fait également la
VERBE? lumière, au moment où Dieu a dit : « Que la
« lumière soit. » D'aprèsce principe, la parole di-

4. Comment Dieu a-t-il dit : « Que la lumière vine : <i Que la lumière soit, » est éternelle ; car

« soit ? » Est-ce dans temps ou dans l'éternité le le Verbe de Dieu, Dieu au sein de Dieu, Fils uni-
temps impli(iue le chan- que de Dieu, est coéternel à son Père. Toutefois,
de son Verbe ? Or, le

Dieu n'a pu prononcer celle la parole divine émise dans le Verbe étei-nel, n'a
aement dès lors
;

produit les créatures que dans le temps. Bien
parole que par l'entremise d'une créature, puis-
qu'en effet les expressions humaines d'époque,
qu'il esten dehors de tout changement. Mais si
de jo:u', aient rapport à la durée, la désignation
Dieu s'est servi d'une créature pour dire « que :

de où un a te divin doit s'accomphr est


l'instant
« lalumière soit, » comment la lumière
serait-elle
éternelle dans le Verbe quant à l'acte, il s'ac-
lepremier être créé, puisqu'il aurait existé anté- ;

complit au moment où doit se réaliser la concep-


lieurement une créature qu'il aurait employée
tion du Verbe, qui reste en dehors de toute
pour dire « que la lumière soit ? » Faudrait-il,
passage, «au commencement époque, parce que tout en lui est éternel.
ense fondant sur le

» Dieu créa le cielel la terre, » admettre que la

lumière n'a pas été créée au début, et que dès CHAPITRE m.


loi-s une c)-éature céleste a pu
faire entendre
qu'est CE OIE LA LUMIÈRE? POURQUOI DIEU N'a-
dans la succession de latlurée celle parole « Q le :

ce serait à T-iL PAS dit: Fiat cœliim. comme il v dit:


« la lumière soit? > S'il en était ainsi,
Uunière visible aux yeux Fiatluxl
l'instant où fut créée la
du corps, que Dieu aurait employé un pur
antérieurement au moment
et 7. mais quelle est son
La lumière est créée ;
esprit, créé
pour prononcer essence une créature intelligente
? faut-il y voir
même qu'il fil le ciel et la terre,

le Fiat lux, comme le pouvait prononcer par un ou un agent physique ?D;ms le premier cas, elle
intérieur et mystérieux, cette sorte serait le premier être créé et arrivé à la perfection
mouvement
(lecréalure sous l'inspiration divine.
en verlu de la parole souveraine. Car nommée
.1. Ou bien encoie, quand Dieu dit « que la :
d'abord le ciel, selon le passage : « Au commen-
cernent Dieu créa aurait
lumière soit » aurait-il fait entendre un
son « le ciel et la terre,» elle
.< ,

été rappelée au Créateur, par parole Que


matériel semblable à celui qui éclata, quand
il la : «

« Vous êtes mon Fils bien-aimé » ?» et


par a la lumière soit, » et cette expression signi-
dit :

le moyen de la créature à qui il donna l'être au fierait comment celte créalu^e s'est attachée à

ciel et la terre, et avant la Dieu et a été éclairée par lui.


moment qu'il fit le

création de la lumière destinée à paraître au


son 8. Pourquoi a-t-il été dit : « Au cominence-
dans quelle « ment Dieu créa le ciel et la terre, » et n'a-l-il pas
de celtevoix ? Et s'il en était ainsi,
divine; commencement Dieu dit que le
langue aurait été prononcée la parole été écrit \\\
:
:

« Que la lumière soit?» Les langues ne se diver- ciel et la terre soient, et le ciel et laleire furent,

sifièrent qu'après le déluge, Inr.^qu'on éleva la en racontant celte création so's la même forme
tour de Babel ">. Quelle serait donc celte lansue que celle de la lumière ? L'Ecriture veut-elle
simple, uni.-orme, dans laquelle Dieu
aura l fait enib asser sous l'expression générale de liel et de
terre la création loul entière, puis exposer en
entendre « Que la lumière soit?» Quel
serait
:

parole détail coimni-nt Dieu a en répétant à chaque


agi,
l'être qui dut entendre, comprendre
celte
ce pas là un création spéciale « » pour exprimer
Dieu dit,
et lui servh- comme d'écho ? Mais n'est
:

une conjecture de la chair ? que Dieu a fait par son Verbe toutes ses œuvres?
songe creux et

' Jean, I, 1. 3.
'Matt. III, I' ' Gcn. XI.
,
ijviu: I. CHTlATlONS l'IUiMITIVKS. 14"

N CHAPITRE IV. CHAPITKEV.

ALTHE RÉPONSE A LA JliÎME QUESTION. LA CltÉATURE INTELLIGENTE RESTE INFORME, Si


ELLE NE SE l'ERFECTIONNE EN l'IlENANT Horu
Ne serait-co pas qu'an moniont oiisp produi-
9. FIN LE VEiuu; m; uiel. i-ui iiyioi l'esi'iut I'oiité
sait dans son iniperl'eclion lasuh-lancosimploou Slll LES EAl \, AVANT LE /'"/(/( lltay
conipost'C il n'y avait point lieu de pimioneer
le fidt de la puissance créalrice ? En etTet le Verbe
10. En effel, la vie du Vi m lie. Fils de Dieu,
inséparable du IVie, en (|ui Dieu pnuKiiuc tout n'aduicl aucune inq)erf('cliou ;
pour lui, l'exis-

éternelleinenf sans employer ni sons, ni langage lenceu'esl pas seulemcid la vie, c". si la \i(' unie
sueeessit', puisque c'est seulement à la Inuiière à la au bonbeiu' absolus. Quant à la
sagessi> et

foéternelle de celle Sa<;esse (|u'ihi enf^cndrée ;


créature spirilucllc, malgré lestions de l'intel-
11' Verbe, dis-je, n'est paspris poiu' modèle par la ligence (>t de la raison (pii scud)leiil la rap-

créature grossière aiimoment où elle n'a aucune procher du Verbe, elle n'admet la vie qu'à un
ressemblance avec l'être pieniier, souverain, et degré imparfait en elle im-
: car, si l'existence

qne, par même elle lend au


son imperfection l)li(|ue la vie, elle ii'impii([ue pas les dons de la
néant. au contraire la perfection de
Elle imite sagesse et du bonheur, et en s'écartant de la sa-
ce Verl)e, intimement uni au Père dans l'im- gesse immuable elle vil dans l'aveuglement et le

mobile ctei'nilé, lorsqu'ens'attaclianl, à sa ma- malheur, ce qui constitue son imperfection. Or,
nière, A l'Etre absolu et éteinel, c'est-à-dire à son pour s'élever à la plénilude de son être, elle
Créateur, elle se façonne en quelque sorte et ac- doit se diriger vers la lumière indéfectible de la

ipiiert sa perfection. Dès lors, ne faul-il pas en- Sagesse, le Verbe de Dieu. C'est t^n se tournant
tendre par le pat de l'Ecriture la pai-ole toute vers le principe au(piel elle doit son existence

spiritnelle ((ne Dieu prononce ou son Verbe telle quelle et sa vie, que commence pour elle
coélernel, attirant à lui les créatures encore im- une vie de sagesse et de bonheur. Car le prin-
parfaites, afin (pie, dépouillant leur grossièreté, cipe de la créature raisonnable est la Sagesse

elles arrivent au degré de perfection (|u'il veut éternelle ; et quoiqu'elle garde en elle-même sa
donner à chacune d'elles ? Comme elles imitent, pure et imnuiable essence, elle ne cesse ja-
dans cette période de leurdéveloppemenl, el selon mais de parler par une inspiration mystérieuse'
leur capacité. Dieu le Verbe, je veux dire le Fils à sa créature, pour la rappeler à son principe,
de Dieu coexistant avec son Père, ayant les mêmes en dehors duquel elle perd tout moyen de se déve-
attributs et la même essence, ijuisqu'ils ne sont lopper et d'alteindre h la ])erfec!ion. Aussi a-t-

qu'un ',et conune


ne prennent plus modèle
elles elle répondu, quand on lui a demandé qui elle

sur le Verbe, loisqne, s'écartant du Créateur, elles était : « Je suii« le principe, est c'est moi qui
se condamnent à l'imperfection et au néant, il n'est « vous parle i
. »

pas question du Fils en tant que Verbe, mais en 11. Or quand le Fils parle, c'est le Père qui
tant qne principe delà création, dans ce passage :
parle, puisque la parole du Père est son Verbe
IlAu commencement. Dieu fit lecielet la terre, » ou son Fils, qu'il produit par un travail éter-
passage qui fait entendre que la créature à son nel, si l'on peut employer C(*mol,f(uand il s'agit

origine manquait de forme et de perfection, du Verbe coélernel à Dieu. Car, Dieu est animé
.^ais il est (pieslion du Fils, qui est aussi le Verbe, d'une bonté infinie, pleine de sainteté et de jus-
dans ces mots : « Dieu
que la lumière soit. »
dit :
tice de plus la bienviellance et non le besoin est la
;

Ainsi par le mot de commencement ou de prin- souicede l'amour qu'il ('[)i'ouve poui'ses œuvres.
cipe on fait entendre l'ori ine de la créalure Aussi avant de rappelé.' ces paroles « Dieu dit : :

« que la lumière soit, » l'Ecriture rapporte que


tenant de Dieu une existence encore imparfaite;
en nonuiiaiit le Verbe, on révèle le perfectionne- « l'Espiit de Dieu était porté sur les eaux.» Soit

ment de la créature qu'il s'est rattachée, afin que Dieu ait voulu désigner par l'eau la na-
qu'elle se !'ormàl en s'unissaid au Créaleur, et en ture ])hysique, et indiquer le principe générateur
imitant, à sa manière, l'original immuablement des choses dont nous voyons inaiidenant les
uni au Père, lequel l'engendre éternellement espèces, comme l'expérience nousmontre en effet

égal a lui-même. qu'ici bas Icsétres, sous toutesles formes, naissent

'Jeun. x,3a. ' Jeftii, vi;i, 25,


14« DE l.A (iENÉSE AL' SENS LITTRKAL.

et se développent dansiin milieu liquide ; soit(|u'il besoin s'attache avec tant de foree à son objet
ail représenté par ce terme les fluctuations, pour (pi'il lui est entièrement soumis, n'aiirait-on
ainsi dire, de la vie inlellecluelle, avant qu'elle pasditilu Saint-Esprit, expression de la bonté
se fût attachée à sa lin ; il est incontestable que et de l'amour divins, qu'il était porté sur les
l'Esprit de Dieu était répandu sur les choses, car eaux, pour montrer que, si Dieuaimesesouvrages,
les éléments que Dieu avait créés au début poui- en ce n'est point parbesoin, mais par excès de bien-
faire des nnivies parfaites, étaient comme sous la veillance? Fidèle à cette pensée, l'Apôtre, avant
main desa bienveillance, et, Dieu a\ant dit par son de parler de laCbarité, dit qu'il va nous montrer
Verbe : « Fiat litx, » tous les êtres devaient être la voie la plus élevée '
; et ailleurs, il rappelle
maintenus, chacun sclcn son mode d'existence, que l'amour de Jénis-Christ surpasse toute
dans sa fa^eur et dans ses généreux desseins: science '. Avant donc que de montrer l'inter-
aussi tout est bien dans ce qui a plu à Dieu, selon vention souveraine de l'Esprit-Saint, il valait
ce témoignage de l'Ecriture : « El la lumière mieux parler de l'a^uvre primitive sur laquelle
" fid, et Dieu \it ipie la lumière élail bonne. » il devait être porté: il la dominait, en eflet, non
comme d'un lieu plus élevé, mais par l'etîet
CHAPITRE M. de sa jiuissance souveraine et sui)érieure à
tout.
LA TRINITÉ APPARAIT DANS LA CRÉATION PRIMITIVE
COMME DANS LE DÉVELOPPEMENT DES ÊTRES.
CHAPITRE VIH.

12. Au début même de cette création ébauchée


l'amour de dieu est la CAUSE QUI FAIT NAITRE ET
qui, du nom des œuvres destinées à en sortir, a
SUBSISTER LES CRÉATURES.
été appelée cielet terre, onvoit appraitre la triple
personne du Créateur. Dans les paroles de l'E- Lorsque des éléments |)rimitifs furent sor-
14.
criture: « Au commencement Dieu tit le ciel et la êtres accomplis et tout formés,
tis les Die« vit <t

'< terre, " on reconnaît le Père dans le mot « que tout était bien » son œuvre lui plut en ;

Pieu et le Fils dans le mot cummencemeiit le ; vertu de la bonté même qui l'avait engagé à la
Fils en eflet qiioitpi'il n'ait pas produit le Père créer. Dieu en effet aime sa créature à deux ti-

est le principe des êtres, surtout des êlres spiri- tres : il veut (pi'elle reçoive et qu'elle conserve
kiels créés par sa puissance,
i)rimitivemeut l'existence. Ainsi, cpiand de Dieu était « l'Esprit
et conséquent de toute la nature. En
par « porté sur les eaux, pour communi- » c'était

ajoutant « L'Esprit de Dieu était porté sur les


: quer cette existence; et, quand " Dieu vit que
" eaux, « l'Écriture complèti' l'énumération des « tout était bien, «c'était pour en remb'e le bien-

personnes divines. On reconnaît également la fait diu'able. Or, ce qui a été dit de la lumière,
l'rinité dans le mouvement qui perfectionne et l'a été aussi du re.>tc de la création. Parmi les
ordonne la ciéation, en y établissant les espèces; êtres, en elîet, il en est qiii sont eu dehors de
le Verbe de Dieu et son Père apparaissenl dans toutes les révolutions de la durée et qui, sous la
les expressions: « Dieu dit; » la Bonté divine éclate souveraineté de Dieu, conservent le privilège su-
dans la s disfaction <pie fait éprouver à Dieu la blime de la plus haute sainteté: les autres vivent
|)erfection relative ti?s êtres selon leur nature :
dans les limites assignées à leur existence, et leur
« et Dieu vit que c'était bien. » durée, qui tour-à-toiir s'épuise et se renouvelle,
forme la trame des siècles.
CHAPITRE VII.

CHAPITRE l\.
POIRQIOI DIT-ON UlE l'esprit DE DIEU ÉTAIT PORTÉ
SUR LES EAUX. LA PAROLE DIVINE « FIAT LUX » A-T-ELLE ÉTÉ
:

PRONONCÉE DANS LE TEMPS OU EN DEHORS DU


l;l Mais pourquoi parle-t-on de la création, TEMPSi »
(pioique imparfaite, avant de citer rinter\ention
de l'Esprit de Dieu? L'Ecriture en eti'et dit d'a- lo. Uiiant à la parole : « Que la lumière soit et

bord:» La terre était invisible et sans ordre, et les « la lumière fut, » est-ce un jour, est-ce avant la
« ténèbres étaient sur l'abîme, » puis elle ajoute : naissance des jours qu'elle fut prononcée ? Si Dieu
« Et l'Esprit de Dieu était porté sur les eaux. « l'a fait entendre dans son Verbe coéternel, elle

Comme l'amour qui naît de la privation et du I Cor XII, 31. — 5 EpMs. m, 19.
LIVRE I. — CRRATIONS PRIMITIVES. U9

est en doliors du Icmiis; si an ((inliaiiv il m> l'a di(pienl ces paioles :


< Au connnencement Dieu
|)n)ii(tiu-i'tMiiritiiiUMi'rlain(M'i>iM|iu', iiacmpJDNr, '
créa /(' rifl et la terre ? " ( tu bien, raul-ii penser
non son Vciho, mais l'oiifano d'un èlrc coriUii- cpie cette expression, sans inq)liquer ni un son
fîiMit, cl dans celle iiypoliii'sc la liiinicrc ne sciait ui mênu< un moinement iutellectuel, aurait élé

plus liciiMC priniili\c de la cicalion, piiis(iu'il li\ée eu (pielque sorte |kii' le Vci'bc ciiélernel à
ain-ait existe antcricurcmcnt un tMre pour taire son l'ère, et gravée dans la raison de l'être innuaté-
(•clalerla parole « \)\h' la lumière soit. » Or, les
:
riel |>oureomuumi(pier la\ie et l'ordre au chaos

êtres créés |)ar l»ieu a\aiit la période des jours lénebreuv, (>t pour produire la lumière? Mais si
sont indicpu's dans le passage : « Au coimuen- Dieu n'a point conunandé dans le lenqts; si ce
« cernent Dieu créa le ciel et la terre; » le ciel conuuandcnient n'a point él('' entendu dans It;
serait la création spii-iluelledéjàparraitc, car elle temps par une créature appelée, en dehors du
est connue le ciel de ce ciel, qui est la ré|j;ion la temps, à conleuq»ler laverile; si le lùle de celte

plus éle\ée du monde pli\si(|ue, et c'est seide- créature s'est l)orné à tiansniellre dans les ré-

inent le second jour que tut créé le lirmainent, gions inlérieuresdu monde, par une activité toute
à <|ui IHiMi douii.i cticoi'c le nonuleciel. La terie spiriluelle, les idées giavées en elle |)ar l'inumia-

nueetinvisil)lc,ral)inie(le ténèbres serviraient à ble Sagesse cl, pour ainsi diie, des [)arolcs tout

désifïuer la matière imparfaite destinée à for- intellectnetles, il est fort diflicile de concevoir
mer dans le temps lesdi\erses substances, cl, au comment il se produit des moLivements tempo-
début, kl lumièi'c. l'clspour Ibriner les êtres cl pi>iu' les gouverner.
Ui. Comment lèhe créé avant l'origine ilu Quanta la lumière,première reçut l'ordre
(pii la

temps a-l-il pu prononcer dans le temps Une : <i de se IbrnuM- et se forma, s'il làul admettre qu'elle
« la liuuière soit.' « C'est un secret dillicileà dé- lient te premier rang dans la création, elle se

couvrir; carie sonde la voi.\ n'a pu faire enten- confond avec la vie de l'intelligence, de l'intelli-

dre celle parole; puis(iue tout sou de ce genre est gence (juidoit se tourner vers le Créateur pour en
(|uel(iue chose de plnsique. Serait-ce donc que être éclairée, sous peiuede llolter dans l'incerti-

Dieu aurait formé de la matière encore impar- tude et le désordre. Or, l'instant où elle se tourna
faite une voix pour exprimer : « Que la lumière vers Dieu et fut éclairée, fut ccliù où s'accomplit
« soit? » Dès loi's, il aurait existé une substance la i)arole prononcée dans le Verbe île Dieu : « Que
sonore, créée et façonnée avanl la lumière. Mais, « la lumière soit. »

dans cette hypothèse, le temps devait déjà exister


pour être i)arcouru par la voix et pour trans- CHAPITRE X.

mettre les intervalles successifs des sons. Or, si


DIFFÉRENTES M.VMÈRES d'eXPLIQLER LA DIRÉE DL"
IHiur transmettre les vibrations de ces mots: « Une
PREMIER JOUR COMR.VDICTIONS Of DIFFICULTÉS
:

'< la lumière soit, » le temps précédait la création


yt'ELLES RENFER.MENT.
de la lumière, à quel jour doit-on le rattacher,
puisqu'il n'a été parlé encore que du premier IS. La parole qui créa la lumière avant été
jour, où la lumière fut faite? Faut-il voir dans ce éternelle, puisque le Verbe coéternel à son Père
jour tout le temps employé soit à fornier la sub- est en dehors du temps, on va peut être se de-
stance sonore, soit à créer la lumière? Mais un mander si l'acte de la création a été également

connnandement [)areil doit partir d'un être qui éternel. Mais pcul-on s'arrêter à celte question,
l)arle poui- 'Vapper l'ouïe : l'oreille, en effet, a quand l'Ecrilure, après la création de la lumière
besoin pour entendre (jue l'air soil mis en niou- et sa séparation d'avec les ténèbres, donne à l'une
\ement. Et comment attribuer un pareil sens à le nom de jour, aux autres celui de nuit, et ajoute:
une matière invisible, inorganique, dont Dieu se « Et il V eut un soir et un matin, un jour accom-
serait fait un écho pour dire « Que la kuuière
On voit par là que cette œuvre de Dieu
:
<c pli. »
« soil? » Il y a là une contradiction que doit re- duquel eut lieu le soir
se lit en un jour, à la lin
pousser tout esprit sérieux. ou le commencement de la nuit ; la nuit ache-
donc en vei'tu d'un mouvement spi-
17. Est-ce vée, la durée du jour fut conq)lète, et le inathi
rituel, bien que tenqjorel, que fut prononcé le d'un second jour où Dieu devait ac-
fut l'aurore
Hat lux, » mouvement parti du Dieu éternel et,
'
complir une œuvre nouvelle
%ràce au Verbe coéternel, comnumiijué à l'être 19. La véritable énigme est de savoir comment
spirituel ou auciel du ciel, déjà créé connue l' in- Dieu prononçant le fiat h(.v dans rintelligence
150 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

éternelle de son Verbe sans la moindre succes- doute il est dit dans le livre de l'Ecclésiaste :

sion de syllabes, la lumière s" . si laite si lente- t Et le soleil se lève, et le soleil se couche, et il

menl, dans l'esp.ice d'un ouriusqu'au soir. Se- « revient à sa place, » c'esl-à-dire, à son point de
rait-ce que la iumière se lit on un instant, et que départ; on y lit encore: « En se levant ii va vers
« le midi et décrit un cercle vers l'aquilon. »
la durée du jour lut consacrée à la séparer d'avec

les ténèbres et ;i les nomniertoulcsdeu\?JIais il Par conséquent, nous avons le jour, lorsque le so-
serait étrange que cet acte eût demande à Dieu leil éclaire la parlieméridionaleduglobe, et nous

le temps que nous mettons à en parler. 'Jar la avons la nuil, lorsqu'il a décrit le cercle qui le

séparai. on de la lumière et des leuèbrcs tut la ramène au nord. Mais il est impossible à ce
conséquence immédi de de la création de la lu- moment que le jour ne brille pas dans une autre
mièie, puisqu'elle ne pouvait se produire sans contrée où le soleil est sur l'hori/.on. Pour ad-
se distinguer des ténèbres. mettre cette hypothèse, il faudrait abandonner
:20. Dieu nomma la lumière jour, et les té-
« son imagination aux lie. ions des poètes, se tigu-
« nèbres,nuit; » mais en admettant même que rer avec eux que le soleil se plonge dans la mer
cet acte eût été accompli avec des mots nette- et, qu'après s'y être baigné, ilen sort le matin
ment articulés, aurait-il lallu plus de temps que du cJté opposé. Encore, s'il en était ainsi, le

nous n'en metlrions à dire : que la lumière s'ap- fond de TOcéan serait-il éclairé par les rayons
pelle jour, elles ténèbres, nuit? Un ne poussera du soleil et le jour brdlerail dans ses abîmes.
pas sans doute l'extravagance jusqu'à s'imaginer Pourquoi enetlétle soleil ne répandrait-il passa
que. Dieu surpassant loul par sa grandeur, les lumièredansl'eau, puisqu'elle n'aurait pas la pro-
syllabes sorties de sa bouclie, peu nombreu-
si priété de l'é.eindre.' Mais on sent combien cette

ses qu'elles aient été, aient pris un volume ca- hypothèse est bizarre; d'ailteursle soleil n'existait

pable de remplir uPi jour entier. Ajoutons que pas encore.


Dieu a nommé la lumière jour, et les ténèbres ^2. En résumé, est-ce une lumière spirituelle
nuit, dans son Verbe coéternel, je veux dire, qui a été créée le premier jour ? Commenf a-t-elle
dans la pensée tout intérieure de son immuable disparu pour faire place à la nuit? Est-ce une
Sagesse, sans avoir recours k des sons matériels. lumière matérielle? Qu'est-ce que la lumière qui
On veut encore savoir dans quelle langue Dieu devient invisible après le coucher du soleil, puis-
s'est exprimé, eu supposant qu'il se soit servi qu'il n'\ avait alors ni lune ni constellation? Est-

d'une langue humaine; et on se demande s'il elle toujours dans la même région du ciel que
était nécessaire d'employer des sons fugitifs, le soleil, de telle sorte que, sans cire le rayon-

dans l'absence de tout cire capable de les enten- nement de cet astre, elle lui serve de compagne
dre : à pareille question impossible de répondre. inséparable et reste confondue avec lui? Mais on

21. Faul-il avancer que, l'œuvre divine ins- ne que reproduire le j)roblèmeavec toute sa
fait

tantanément accomplie, la lumière brilla, avant La lumière élani, danscelle hypolhùse,


dillicalté.

l'arrivéede la nuit, loul le temps nécessaire pour intimement unie au soleil, exécute la même ré-
volution de l'Occident à l'Orient elle est donc-
former un jour, que les ténèbres succédèrent à la
:

lumière aussi longtemps qu'il fallut pour former dans l'autre hémisphère, quand le nuire est en-

une nuit, et que, le premier jour écoulé, l'au- veloppé des ténèbres de la nuil ; ce qui aboutit à

rore du jour suivant se leva? En soutenant cette cetteconséquence impie, que Dieu était isolé dans
opinion, je craindrais fort de faire rire, soitceux une certaine région dont la lumière s'éloigne,

qui savent avec une pleine certitude, soit ceux pour produire le soir à ses yeux. Enfin, Dieu
moment même où aurait-il créé la lieu même où il allait
lumière au
qui peuvent remarquer qu'an
la nuit règne dans notre pays, la lumière éclaire bientôt créer l'homme? Serait-ce au moment où
les contrées que traverse le soleil pour revenir la lumière quittait ce lieu que le soir serait sur-

de l'occident à l'orient, el que dès lois par con- venu ? Aurait-elle gagné une autre partie du
séquent, dans les ving1-quatre heures de la ré- monde, po n- reparaître le matin, après avoir
volution diurne, il est impossible de ne pas voir achevé sa révolution ?

régner ici la nuit, ailleurs le jour. Allons-nous


donc placer Dieu à un point de l'espace où .sur-
venait le soii-, au moment que la lumière quittail
cette région pour en éclairer une autre ? Sans
,

LIVRE 1. — CRÉATIONS PRIMITIVES. iM

(pie cette matière épaisse fiU impi'nélrattle à la

CHAPITRE XI. lumière, soit (pi'une masse aussi considérable,


diU rester dans l'ombre, comme il arrive pour
les corps dont une fac:- seule est éclain'c. Dans
nOLE nu SOLEIL : NOUVELLE DIFFICULTÉ D.VNS
L'HïPOTlIKàE PHECKUK.NTE. un corps (iuelcoii(iue,eii ellél, tout côlé où la lu-

mière ne peut pénétrer , reste dans


l'ombre
-28. Dans qui-l hiil ;i daiif iHi^ cvv(' le soleil, le
puisiiu'ou ap|)elle omlire, la face d'mi corps inac-
cessible à la lumière (pii s'y r(''pauilrait, si elle
roi (lu jour lluubeau de la terre, si, poiu'
', le

produire le joui', il sul'lit de la lumière, désijifiiée ne rencontrait pas une matière opaque. Admct-
aussi sous le nom de jour? Eclaii'ail-elle d'abord
tousquc cette ombre soit proportionnée à l'éten-
les régions supérieiu'es? La terre élail-clle trop
due de la terre et y couvre une surlace égale à
éloignée pour sentir ses ctïets, et le soleil devint- celle qu'éclaire le jour, la nuit s'e\pli(|ue. Les
il nécessaire |)our eouiuiuui(|uiM' aux ré;;ious iu-
ténèbresen effet nesupposentpastoujoursla nuit.

l'érieinvs île l'ouixers le hienlail du joui'? On Dans nue immense caverne dont la Ininière ne
poiu'iail encore avancer que l'éclat du jour s'ac- peut perci'r les profondeurs, à cause de masse
la

crut pai' le rayounenienl du soleil, et voir dans ((ui s'oppose il son passage, il y a assurément des

la lumière un joiu' uuius viliiue celui d'aujour-


ténèbres, car la absente et n'en
lumière en est

d'hui. Je sais qu'un auteur a prétendu que la éclaire aucune cependant les ténèbres de
partie;

lumière fut l'agent primitif, introduit par le cette sorte ii'uiil jamais été ap[)elées nuit: ce ter-

Créateur dans souteuvre, (|uaud il fut dit « Que ;


me e.it réservé k l'obscurité qui se répand sur
« la lumière soit et la lumière fut, » mais que
une jiartie du globe, (juaiid le jour l'abandonne.
l'emploi de la lumière ne fut régie qu'au moment De même toute e.<pèce de lumière ne mérite pas
le uoiudejour, par exemple, celle que projettent
où a|)parurenl les luminaires, dans l'onlre des
la lune, les ("toiles, les (lambeaux, les éclairs, et
jours (pi'il pour composer
plul à Dieu d'adopter
ses (inivres. Mais que devint la lumière, quand en général loul corps brillant elle ne s'appelle :

survint le soir, pour taire régner la nuit à sou jour qu'autant qu'elle succède péridioquement à
la nuit.
tour ? C'est ce ((u'il ne dit pas, et c'est un seci'et,
23. Cependant, si la lumière primitive, immo-
selon moi, dillicile à pénétrer. (.)n ne saurait
croire, en effet, que la lumière s'éteignit, pour
bile ou animée d'un mouvement de rotation ,

faire place aux ténèbres de la nuit, et qu'elle se


enveloppait la terre de tousc(')tés, on ne voit plus
en quel endroit elle pouvait admettre la nuit à
raviva, pour donner naissance au matin, avant
sa place car elle ne (piiltait jamais un lieu pour
que le soleil servit à accomplir cette révolution :
:

se retirer devant la nuit. N'avait-elle été créée


car le rôle du soleil ne commence, selon l'Ecri-
ture, ([u'au quatrième jour. que dans un hémisphère, et, en décrivant son
tour, permettait-elle à la nuit de décrire le sien
dans l'autre hémisphère? Dans ce cas, comme
CHAPITRE XII.
% la terre était en ce moment couverte par les eaux,
>Ol VELLE DIFFICULTÉ QUE PRÉSENTE LA SUCCESSION ce globe li([uide pouvait sans obstacle produire,
d'un côté, le jour, grâce à la présence de la lu-
DES TROIS .I0Ua5 ET DES TROH NUITS QUI PRÉCÉ-
mière, de l'autre, la nuit, grâce à la disparition
DÈr.E.NÏ LA CREATION DU SOLEIL. COMMENT LES
de la lumière : la n lit régnait depuis le soir ilans
EAU.V SE UA.SSE.HBLÈRENT-ELLES ?
un hémisphère, tandis que la lumière sedirigeait

M. Mais en vertu de quelle révolution s'est ef-


dans l'autre.

fectué, avant la création du soleil, le retour al- 26. Maintenant, où se rassemblèrent les eaux,
s'il est vrai qu'elles étaient auparavant répan-
ternatif de trois jo'.u's et de trois nuits, san^ ([ue
la lumière, à ne voir dans ce mot qu'un pliéno- dues sur toute la surface de la terre? En quel
endroit, dis-je, se rassemblèrent les eaux qui
mène physique, ait chaugé de nature? C'est un
problèni" diflicile à résoudre. On pourrait dire furent écartées pour faire paraître la terre? S'il

peut-être que Dieu nomma existait sur le globe quelque lieu sec où les eaux
ténèbres la masse
pussent s'amasser, le sol était d(\jà découvert et
forin je par la terre et les eaux, avant leur sépa-
ration, qui n'eut lieu que le troisième jour, soit l'abiine n'en couvrait pas toute la surface. Si
elles la couvraient tout enhère, quel peut-être
'
Pg. cxxxvr, s.
,

13-2 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

le lieu 011 elles se réunirent, afin de laisser la terre /(n/x/Wc, parce qu'elle était ensevelie sous les omux
à sec ? Furent-elles soulevées dans l'espace, à peu et qu'elle ne pouvait être aperçue, eùt-il même
près comme une moisson qu'on bat dans l'aire existé alorsun être capable de lavoir; sans oriire,
et qui, portée sur le vent, s'animoncelle en un tas parce qu'elle n'était encore ni séparée de la mer,
découvert le soi qu'elle cachait au-
et laisse à ni Jimitécparscs ri\ages, ni peuplée d'animaux;
paravanl? Mais comment ne pas renoncer à cette alors,pourquoi ces propriétés, qui sont physi-
pensée, en voyant la mer former une vaste plaine ques sans aucun doute, oïd-elles été créées an-
et,après les tempêtes qui élèvent ses dots comme térieurement aux jours ? Pourquoi n'a-t-il pas

des montagnes, redevenir unie comme mie glace? été écrit Dieu dit que la terre soit, et la terre
: :

Il que la mer découvre un peu au loin ses


arrive fut faite, que l'eau soit, et l'eau fut faite ? ou bien,
rivages; mais on ne saui'ait nier qu'en se reti- en embrassant dans une même parole deux élé-
rant d'un côté, elle ne s'étende d'un autre et ments, placés sous une loi commune dans les
qu'elle ne revienne sur les bords qu'elle a quit- régions inférieures de l'espace que l'eau et la terre :

tés. Où tlonc la mer pouvait-elle se retirer, pour soient faites, et il en fut ainsi?
laisser apparaître lescintinents, puisque les Ilots
couvraient toute la surl'ace de la terre? L'eau CHAPITRE XIV.
qui couvrait le conmie une
globe, aiu-ait-elJe été
légèi-e vapeui', et, en se condensant pour former CE un r.vrr e.xtexdre, daxs le premier verset
un amas, aurait-elle laissé en ditléients eudi'oits DE LA GEXÈSE, OLE LA MATIÈRE ÉTAIT INFORME.
le sol à découvert ? On pourrait dire encore que

la terre, s'abaissant en larges et profondes vallées, 2S. Pourquoi enfin n'a-t-on pas ajouté inuné-
put offrir de vastes réservoirs où les Ilots amon- médialementces paroles: Dieu vit que cela était
celés se précipitèrent, et qu'ainsi le sol apparut bien ? Si l'on y réiléchit, on se convaincra que,
aiL\ endioits abandonnés par les eaux. pour tout être qui change, le ju-ogrès suppose
l'imperfection que dès lors, connue l'enseigne
;

la foi catholique unie à une logique invincible


CHAPITRE XIII.
aucun être n'aurait pu exister, si le Dieu qui
créé et organise toute chose sous sa forme ache^
A QUEL .MO.MENT ONT ÉTÉ CRÉÉES l'E.\L ET L.\
vée, ou perfectible qui comme dit l'Ecriture
;
:

TERRE.
" a fait le monde d'une matière informe ', »

n'eût créé le fond même des êtres, tel que l'É-


2". La matière n'est pasabsolumentsansforme, criture le définit en termes assez clairs pour être
lors même qu'elle s'offre sous l'apparence d'une entendus des oreilles comme des intelligences
masse sombre. Aussi peut-on se demander à les plus rebelles, lorsqu'elle nous représente
(pielle époque Dieu donna aux eaux et à la terre qu'avant la période des six jours « Dieu fit au
les formes qui les dislingiieid, création dont il « commencement le ciel et la terre » et le reste

n'est pas parlé dans la période des six jours. Sup- jusqu'au passage : « Dieu eut : que la lumière
posons un moment que cette œuvre ait précédé « soit; » car c'est alors seulement qu'elle nous
l'origine du jour, et que ce soit elle dont parle révèle dans quel ordre se formèrent successj* e-
l'Ecriture quand elle dit avant les six premiers ment les choses.
jours : « Au commencement Dieu fit le ciel et la
« terre,,» que le mot terre désigne ici la terre CHAPITRE XV.
même a^ec ses propriétés spécifiques, ensevelie
encore sous eaux qui déjà apparaissent avec
les LA SUBSTANCE PRÉCÈDE LE MODE, NON EN DATE,
leur forme déterminée; que, dans ces paroles :
MAIS EN PRINCIPE.
« La terre était invisible et sans ordre, et les té-
».

« nèbres étaient sur l'abime, et l'Esprit de Dieu ne veux pas dire (lue la matière sans
29. Je
« était porté sur les eaux, » on doive voir, non ses qualités existe aulérieuiement à l'être tout

la matière imparfaite, mais la terre et l'eau avec formé, puisque la substance et ses modes ont été
leui's propriétés les plus coimues, au moment où créés simultanément. Par exemple, tessons cons-
elles n'étaient pointencore éclairées par la lu- tituent le fond.des mots, les mots représentent
nlière; que, par conséquent, la terre fut appelée I
Sag.xi, 18,
LIVRE I. — CRÉATIONS PRIMITIVES. IKH

les sons tout formes or, colui qui parle ne fait


:

pas d'abord entendre des sons cont'us, (luitte à CII.VPITUE \VI.


les rasstMuhler pour en composer des mots.
L)e

d'aijord la ma- NOLVELLE MANIKHE n'iCXIM-HilKH LA SLCCESSION


nuiiie le Créateur n'a pas fait

tière, pour en tirer plus tard lesdilïéreutes espè- DES .lorns KT DES M ITS l'AU l,'ÉMISSIO\ Of

ces d'iMres, comme a\ait modilié son plan


s'il : l'aifaiblissemicnt de la i,LMn;iiE ; m ei.i.eest

a tout créé à la fois. Cepen- PEi satisfaisante.


lualière et loiine, il

dant connue le Coud précède la forme, non en


31. Mais, si cette opinion est vraisemblable, il
date, mais en principe, l'Écriture a lé^iliniemcnt
fatd renoncer à l'idée que la lumière éclairait un
elalili dans son récit, des époques que Dieu n'a
coté du globe, eu laissant l'autre dans rond)re ;

p.iird mises dans Qu'on demande


l'acte créateur.
a\ec les
on ne doit plus expliquer ainsi la succession du
si dans le langage les mots se lorment
jour et de la nuit.
sons ou les sons avec les mots quoique en par-
;
Veut-on concevoir le jour et la nuit en ad-
lant ou accomplisse cette double ()|)ération, on
Or, mettant que les rayons lumineux sont sus-
\oit sans peine celle qui précède l'autre.
ceptibles de s'allonger ou de se raccourcii-? .Mais
Dieu ayant créé simultanément et la matière et se serait produit ce
Je ne vois pas dans quel but
lesformes qu'il lui a doimées, l'Ecriture devait d'animaux
phénomène. Il n'existait point alors
mar([uer cette double action; mais, connue elle/-
pour profiter du bienfait de ce mouvement al-
ne pouvait la raconter que successivement, ne
ternatif; il s'élablit après leur naissance, et fut
devait-elle pas parler de lasul)stance avant d'eu
i-églé par le cours du soleil. D'ailleurs on ne
exposer les niodilications? Counnent en douter?
saurait prouver par aucun exenqile que la lu-
Ku parlant du fond et de la forme, nous conce-
mière, en se dilatant ou en se contractant, pro-
vons ces deux idées à la fois, et nous les expri-
duit la succession du jour et de la nuit. Lors-
mons séparément. Or, si nous sommes incapa-
(|ue l'œil étincelle, on voit comme un jet de
bles d'exprimer les deux mots à la fois dans lui
lumière; ce jet peut se raccourcir, quand nous
moment très-court, il fallait bien décrire succes-
considérons un point dans l'air tout près de nos
sivement lejj,dcnx actes dans un récit développé,
veux il peut s'allonger, quand sous le môme
; ,

(luoiurtel)ieu les ait accomplis en même temps.


angle, nous cherchons à fixer un point éloigné.
D^ sorte, l'acte qui n'était le premier qu'en
Cependant, l'affaiblissement des rayons ne nous
principe, s'est placé au début du récit. Si deux
empêche pas absolument de distinguer les objets
idées, sans être antérieures l'une à l'autre dans
dans le lointain; ils sont seulement plus obscurs
l'esprit, ne peuvent s'énoncer simultanément, à
qu'au moment où les regards s'y concentraient.
plus forte l'aison ne peuvenf-elles s'exposer à la
Mais d'ailleurs la lumière est en si petite quantité
fois dans un récit. Il n'est donc pas douteux que
dans l'organe de la vue, que, sans la lumière du
la matière intbrme, presque voisine du néant,
dehors, nous serions incapables de voir; et,
n'ait été créée pai' Dieu seul en même temps que
comme elle ne peut guère se distinguer de celle
les œuvres dont elle était comme le fond.
qui nous environne, j e ne vois pas par quel exemple
30. Si donc yn dit avec raison qu'il n'est ques-
l'hypothèse suivant lai[iielle
on pourrait justifier
tion que de la matière dans ce passage : « La pour produire le jour,
la lumière se dilaterait,
« terre était invisible etsansordre, et l'Esprit de pour produire la nuil.
et se contracterait,
« Dieu était porté sur les eaux, » c'est pour faire

comprendre, à partrintervention du Saint-Esprit,


CHAPITRE Wll.
et pour rendre sensible airx esprits les plus lourds

l'inqierfection de la matière même dans les


,

HYP0THf;SE DE LA LLMIÈUE IXTELLECTLELLE DIF- ;

choses visibles qui vont être nommées la terre


FICULTÉS ol'elle entraixe; co.mmext elle
:

et l'eau sont, en effet, les substances les plus fa-


SERT A EXPLIQUER LE SOIR ET LE MATIN, LA SÉ-
ciles à mettre eu œuvre, et les niotsde l'Ecriture
PARATION DE LA LUMIÈRE d'aVEC LES TÉ.NÈBRES.
sont bien choisis pour indifiuer leur impeifectiou
originelle.
3-2. Est-ce une lumière intellectuelle qui fut
créée au moment où Dieu dit : > Une la lumière
« soit >' ? Je n'entends point par là cette lumière
coéternelle au Père, par qui tout a été fait et qui
154 DE LA GENÈSE SENS AU LITTÉRAL.

illumine tous les hommes, mais celle dont on a elle qu'une distinction métaphysique entre la
pu dire : « la sagesse est la première chose qui substance et le ma, le ? La dénomination de jour
« ait été créée '. » Ë,i eiïet, qnaai la Sagesse et de nuit ne S3rt-elle q l'à exprimer la loi d'a-
engendrée, quoique in:rééc, ét.u-iielle, immua- près laq lelle Dieu ne laisse auca.ie di ses œu-
ble, se répiiid dans les créatures intelligentes vres en désordre, et règle jusqu'à l'état impar-
comme dans des âmes saintes 2, afin de les illu- fait d'où p nient les êtres, pjur accomplir la
miner de ses rayons, il se produit en elles une série de leurs transformations? Signifie-t-elle
clarté d'esprit qui pourrait bien ressembler ta que le mouvem>nt qui tour-à-tour épuise et
celle que Dieu créa, en disant « Que la lumière : renouvelle les générations dans le temps, con-
« soit. » Dans ce cas, il aurait alors existé une court à l'harmonie universelle? La nuit n'est
création spirituelle, que désignerait le mot ciel que l'ordre dans les ténèbres.
dans ce passage « Au commencement Dieu fit : oj. Voilà pourquoi on dit immédiatement
« le ciel et la terre, » non le ciel visible, mais le après la création de la lumière
« Dieu vit que :

ciel immatériel qui s'élève au-dessus du ciel vi- « la lumière était bonne. » On aurait pu ré-

sible, je veux dire au-dessus de tous les corps, péter ces paroles après chaque œuvrede ce jour;
non par son élévation daim l'espace, mais par en d'autres termes après avoir exposé comment
:

l'excellence de sa nature. Comment a pu cire Dieu fit la lumière, comment il sépara la lu-
produite celte création en môme temps que les .mière d'avec les ténèbres, comment il appela la
clartés qui l'illuminent ? et comment le récit a- lumière jour et les ténèbres nuit, on aurait pu
dû exposer séparément cet acte indivisible ?
t-il ajouter successivement : « Dieu vit que cela était
Nous venons de l'expliquer à propos de la ma- « bien, » et ter/niner par ces mots : « Il y eut
tière 3. « un soir et matin, » comme on l'a fait pour
;^3. Mais comment comprendre, dans cette toutes les œuvres auxquelles Dieu a donné un
hypothèse, que la nuit succéda à la lumière, pour nom. Si on n'a point suivi cette marche, c'est
amener le soir i" Quelles sont^les ténèbres dont qu'on voulait distinguer d.^ l'être formé la ma-
Dieu sépara celte lumière immatérielle, puisque tière impaiiaite, et révéler que, loin d'avoir ac-
l'Ecriture dit: « Et Dieu sépara la lumière d'avec quis son point de perfection, elle devait servir à
« les ténèbres ? » Serait-ce qu'il existait déjà des fai.'onuer de nouveaux êtres dans l'ordre physi-
pécheurs, des esprits insensés quirenouçaientaux que. Si donc on eût ajouté, après avoir établi
clartés du
que Dieu séparait des esprits
vrai et celte distinction et ces dénominations : « Dieu
fidèles, comme
ténèbres de la lumière? En les « vit que cela était bon, » on nous aurait fait

donnant à la lumière le nom de jour, aux ténè- entendre que ces œuvres étaient achevées el

bres celui de nuit, voulait-il montrer qu'il n'est complètes dans leur genre. La lumi(M-e seule
pas l'auteur (les péchés, mais le juste rémunéra- étant une anivrc achevée « Dieu, dit l'Écri- :

teur des mérites? Le jour désignerait-il ici la du- « turc, vit qu? la lum ère était bonne » et il la

rée, en sorte que la suite des siècles serait tout sépara de fait comme de nom d'avec les ténè-
entièrerenfermée dans ce mot? Aurait-il été ap- bres. Celle opération ne fut point consacrée par
pelé pour cette raison ui' jour et non le premier l'approbation divine; elfel ne
la contusion en
jour? « Et ily eut un soir, dit l'Écriture, puis un cessait qu'autant qu'il pour produire le fallait

« matin, »» jour entier. «Le soir signifierait alors un nouvel ordre de choses. La nuit, que nous
le péché de la créature raisonnable, le matin, connaissons si bien maintenant, grâce à la révo-
sa rénovation. lution du soleil autour de la terre, ne plait à

34. Cette discussion repose sur une allégorie Dieu qu'au moment où la'disposilion des lumi-
prophétique, et par conséquent es! étrangère au naires dms le ciel la distingue du jour; la di-
plan de cet ouvrage. Notre but, eu effet, est d'y vision (lu jour et delà nuil est en effet suivie alors
interpréter l'Écritiu-e en nous attachant moins de ces paroles que cela était bien. «
: « Dieu vit

au symbole qu'à la lellrc. Or, à ne considérer La nuit n'élail pis alors une substance im-
dans les êtres créés <|ue leurs propriétés natu- parfaite destinée à eu produire d'autres c'était :

relles, comment découvrir dans une lumière l'air dans l'espace, sans la lumière du jour, un

immatérielle le soir et le matin? La séparation phénomène complet dans son genre el qui ne
(le la lumière d'avec les ténèbres n'impli(pie-l- pouvait de\enir ni plu^ pni'ait ni mieux accusé.
'
Kcrii. I, 4. — : Sac. vil, 27. — '^
ri-dcsstis, rh. i\. Quant au soir durant les trois jours qui ont pré-
MVRR I. — CI\ÉATIONS PRIMITIVES. \!iH

cédé l'appaiitidu dos astres, on pont sans invrai- en démontre la fausseté loin de soutenir la
;

SLMnljhuu'i' y voir la lin (rmicn'ian" aicomplic : p.-nsée (11- ri'À-riture, nous ne lérions plus tiue
\e malin est le sifinal d'une u'inre noiivelh;. soidenir une opinion personnelle, tloiiniinl nuire
sens partictdier pour celui de l'tcrilure, tandis
CHAPITRK XVIII. que la pensée de riïcriluredoil devenir la nôtre.

DE l'aCTIV TÉ DIVINE. CII.VPITRR \1\.

H6. Quoiqu'il e:; soit, n'oublions pas le prin- n. K.VLT s'iMEIiniKE TttUTi: .iSSEUTION ILVSARDÉE

eipe établi priVédenunenl : ce n'est point |)ar IIVN'S LES l'ASSvr.KS OltSCritS DES SAINTS LIVRES.
(les opérations successives ilc son intelligence ou
Admettons effeclivement qu'à propos de ce
;{S.
par des ninnvenients |)liysi(|ues que Dieu april,
passage « Dieu dit: que hiliunière soit, » les uns
:

CDunne ferait un ange ou un honinie; son ac-


voient dans la lumière une darlé intellectuelle,
tivité s'exerce selon les idées éternelles, ininiua-
les autres, un pliénomène physique. Un'il y ail
I)les, constantes, de son Vcibe coi'ternel, cl par
une lumière intellectuelle qui illumine les es-
la técoiidité, si j'ose ainsi dire, du Saint-I'.sprit,
prils, c'est un point admis dans noire foi; quant
qui lui est également coéternel.
est dit, d.ms Il
à l'hypothèse d'une lumière nialérielle créée
't's traduelioMs greciiie que « l'Esprit et latine
dans le ciel, ou au-dessus du ciel, ou môme avant
«'de Dieu était parti' xiir li'^ean.r; » mais d'après
le ciel, et suscejttible de faire pl.ice à la nuit,
le syriaque, langue de la même l'amille que
elle n'est point contraire i'i la foi, aussi longtemps
l'hébreu, on doit ijlntôt entendre qu'il les
(pi'elle n'est pas renversée par une vérité incon-
t'cli au n'ait, fm'i'bat : c'est l'interprétation d'un
reconnue fausse? L'Ecriture ne
testable. Est-elle
savant chrétien de la Syrie. Ce mot ne rappelle
la CDiilenail n'éliiit que le fruit de l'igno-
pas; ce
pas les fomentations h l'eau froide où chauile
r;uice humiine. Est-elle au contraire démontrée
([u'on emploie pour guérir les llu\ions ou les
par une preuve infaillible ? Même dans ce cas,
plaies ' : il exprime une sorte d'incubalion, qu'on
on pouri'ii se demander si l'iîcrivai.i sacre a
pourrait compai'cr à celle des oiseaux fécondant
\oulu dans ce passage révéler cette vérité ou
leurs œufs, ([uand lanière, obéissant à l'inslinci
exprimer une autre idée non moins certaine.
de la tendresse, communique sa clialeur à ses
Uuand même on verrait par l'ensemble de ses
petits pour les faire édorc. N'allons donc pas
paroles, qu'il n'a pas songé à cette idée, loin de
nous imaginer, par un grossier matérialisme,
conclure (juc tout autre iilée qu'il a voulu ex
que Dieu ait prononcé des paroles humaines à
primer soit fausse, il faiidraitrecounaitre qu'elle
chaque création des six jours. Ce n'est point dans
est vraie cl iilusavantageuseàconnailre. Etquand
ce but que la Sagesse même de Dieu a revêtu
l'ensemble n'eiupêcherait pas de croire qu'il ail
nos faiblesses; si elle est venue rassembler les
eu cette intention, il resterait encore à examiner
fils de Jérusalem, comme la poule réunit sa
s'il n'a pu en a\oir une autre. Celle possibilité
couvée sous les ailes ', ce n'est pas pour nous
reconnue, on ne pourrait ilécider quelle a été sa
laisser dans une éternelle enfance, mais pour
véritable pensée; on serait même fondé à croire
empêcher d'être enfants par la malice et jeunes
((u'il a voulu exprimer une double pensée, si
de discernement •'.

3". Sil'lù'rilure nousoffre des vérités obscures,


l'ensenihle prêtait à une double interprétation.
39. Qu'ari-i\e-t-ii encore? Le ciel, la terre
hors lie noire portée, et qui, sans ébranler la
et les auti'<'s éléments, les révolutions, la gran-
fermeté de notre foi, prêtent à plusieurs inter-
ileur et les distances tles astres, les éclipses du
une opinion
prétations, gardons-nous d'adopter
soleil et de la lune, le mouvement périodique de
et de nous y engager assez aveuglément pour
l'.mnée et des saisons, les propriétés îles ani-
succomber, quand un examen approfondi nous
maux, des plantes et des minéraux, sont l'objet
'Les typiques froids étaient d'un fréquent usa -ïe dans la médecine de connaissances précises, qu'on peut acquérir,
antique Celsc les dér-it Horace s'y condamna, (^-t'oii ne s'étonne pas
;

de roir saint .Vu^ustin en papier ici il aim3 à prevc.Tir les interpi'c-


;
sans être chrétien, pai' le raisonnement ou l'ex-
tationsquc des esprits illettrés ou grossiers tels que les Nfan chéens périence. Or, rien ne serait plus honteux, plus
pouvaient donner à sa |^e:tS!;c. Le mé aphysicien qui s".-tdressc aux
[tliilosophes. est en même temps un èvê piî accontum à p irler an peu- déplorable et plus dangereux ([ue l;i situation
ple et à s'abaisser jusque dans son langage, pour s'élever à la grandeur
— d'un chrétien, qui traitant de ces matières, de-
des vérités chrétiennes c'est nn <les traits de son cénie.
; 2^j,.^tt_
xxm,37. —
! Cor. xiv,2rt. vant les inlidcles, comme s'il leur exposait les
156 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

v(^rités chrétiennes, débiterait tant d'absurdités, rôles destinées à entretenir la piété dans les
([u'en le voyant avancer des erreurs grosses cœurs : elles n'ont pas d'ailes et rampeni sur
comme des montagnes, ils pourraient à peine la terre, grenouilles boiteuses qui poursuivent
s'empêcher de rire. Qu'un homme provoque le de leurs coassements les oiseaux dans leur nid.
rire par ses bévues, c'est un petit inconvénient ; Plus dangereuse encore est l'illusion de ces fai-
le mal est de faire croire aux infidèles que les bles chrétiens qui, en entendant les impies dis-
écrivains sacrés en sont les auteurs, et de leur cuter sur mouvement des corps célestes ou sur
le

au préjudice des âmes dont le salut nous


|)rèter, les phénomènes physiques avec autant de finesse
préoccupe, un air d'ignorance grossière et ridi- que d'éloquence, se sentent anéantis ils soupi- :

cide.Comment en effet, après avoir vu un chré- rent en se comparant à ces prétendus grands
tien se tromper, sur des vérités qui leur sont hommes; ils reviennent avec dégoût à l'Écriture,
familières, et attribuer à nos saints Livres ses source de la plus pure piété, et se résignent à
fausses opinions, comment, dis-je, pourraient- peine à effleurer ces livres qu'ils devraient dé-
ils embrasser, sur l'autorité de ces mêmes livres, vorer avec délices ; le labeur de la moisson
les dogines de la résurrection des corps, de la leur répugne et ils jettent un regard avide sur
vie élernelle, du royaume des cieiLX, quand ils des épines fleuries. Ils ne s'appliquent plus à goû-
s'imaginent y découvir des erreurs sur des vé- ter combien U' S3igaeur est doux '; ils n'ont pas
rités démontrées par le raisonnement et l'expé- faim le jour du sabbat; et telle est leur indolence
rience? On ne saurait dire l'embarras et le cha- que, malgré la permission du Seigneur, ils ne
grin où ces téméraires ergoteursjettent les chré- peuvent se résoudre à arracher les épines, à les
tiens éciah'és. Sont-ils accusés et presque con- retourner entre leurs mains et à leshroyer, jusqu'à
vaincus de soutenir une opinion fausse, absurde, ce qu'enfin ils en extraient la nourriture -.

par des adversaires qui ne reconnaissent pas


l'antorité de l'Écriture ? on les voit chercher à CHAPITRE XXI.
s'appuyer sur l'Écrihn-e même, pour défendre .VV.iNTAGE d'un COMMENTAIRE QUI EXCLUT TOUTE
leur assertion aussi présomptueuse que fausse, PROPOSITION HASARDÉE.
citer les passages les plus propres, selon eux, à
prouver en leur faveur, et se perdre en de vains il. On va me dire : Eh bien ! que resnlle-t-

discours, sans savoir ni ce qu'ils avancent ni les il de ces discussions agitées avec tant de h-acas?
arguments dont ils se servent pour l'établir i. Où est le bon grain que tu as recueilli? Pourquoi
la plupart de ces problèmes restent-ils aussi
CHAPITKE XX. obscurs qu'auparavant? Affirme enfin quelques-
unes de ces vérités dont la plupart, à t'entendre,
BIT DE l'auteur EN EXl'LIQU.VNT L.V GENÈSE .\
sont accessibles à l'esprit. Ma réponse est facile :

DIVERS POINTS DE VUE. ,1'ai trouvé un aliment délicieux; je me suis con-


vaincu qu'en s'inspirant de la foi, on trouve
40. Dans cette discussion, j'ai éclairci le texte
toujours une réponse à faire aux spirituels qui
de la Genèse, en nuiltiplianl les explications au-
se plaisent à attaquer les Livres de notre salut.
tant que je l'ai pu; j'ai proposé différents com-
Ont-ils, sur la nature, des principes solidement
mentaires sur les passages obscurs où Dieu
établis ? Nous leur prouvons que l'Écriture n'>
exerce notre inleUigence. Je n'ai rien avancé
coidredit pas. Tirent-ils des ouvrages [)rofanes
avec une présomption tpù condamne d'avance
(pielque proposition contraire à l'Écriture, c'est-
tout autre solution, (pioi(pi'elle puisse être meil-
à-dire, à la foi catholique? Nous avons la logicpie
leure; on peut, selon la portée de son esprit,
pour en démontrer la fausseté, ou la foi pour la
admettre l'application ipi'on trouve la plus sa-
rejetersans l'ombre d'un doute. Ainsi demeurons
tisfaisante, à condition d'accueillir les passages
allachés à noire Médiateur, en ([ui sont cachés
(lifliciles avec autard de respect pour l'Ecriture
tous les trésors de la sagesse et de la science ' ;

que de défiance poin- soi-même. Que ces expli-


et gardons-nous tout ensemble des sophismes
cationssi di\erses îles paroles sacrées servent du
(l'une i)hilosophi(> vei'])euse, et des terreurs su-
moins à en imposer aux personnes qui, enflées
jieislilieuses d'une fausse religion. Lisons-nous
de leur science mondaine, crilirpient connue
les livres saints? Dans celle multitude de pensées
mie (euM'e de barbarie et d'ignorance des pa-
\raies, exi)rimées en quelques mois et protégées

ITira. I, 7.
I
Vu. XX.V1II, 9. — 'Matl. XII, 1. — -i
Colos. Il, 3.
LIVRK II. CUftATlON DI' KIKMAMENT, 1S7

par la plus pim; liiulilioa de la loi, clioisissoiis aux prcsiriplioiisdo la loi. Il est hioii diffiTeiil, on
le sens ipii s'arcorde le mieux a\ee les iiileii- ell'et, d'être iiieapaliiede saisir la pensée vérilahle

lions de ri'.erivain saerc. (lelle inleidion n'est- de l'éerivain saciv on de s'éearter des principes de
elle pas mar(|née? IM'él'érons, choisissons celui la i('!i;;ion. Si un l'énssit à iHiterces deux éciieils,

(|ue le conlexle permet d'adopter et (jni est con- la lectnre [jorle Ions ses Iriiits si on ne peut :

forme à la loi. Si enlin le contexte ne soidliv ni échapper à tous deux, on tire avec prolil d'nn
éclaircissement ni discussion, lenoas-nons en passage obscin- une maxime conl'onne à la loi.

LIVRE II.

(JHKATION DIT FIRMAMENT '.

régions célestes où nous voyons maintenant les


CHAIMTKE PKEMIER. astres se mouvoir. Notre but est de chercher,
d'après les livres saints, les lois ([ue Dieu a im-
QllE SIGNIFIE LE KlRMAMEiNT AU MILIEU DES EAUX ?
posées il la nature, et non le miracle (pi'il peut
l'eau PEUT-ELLE, I)'aI'IÙ;S LES LOIS DE LA PHY-
opérer par elle et en elle pour manifester sa
SIQUE, SÉJO' 'INEU AU-DKSSUS IJU CIEL ÉTOILE ?
puissance. Si par exception Dieu voulait ijne
l'huile restât sous l'eau, le phénomène aurait
1. « Dieu dit : (pie le firniament se fasse an
lieu : jious n'en connailrious pas moins la pro-
« milieu des eaux et (pi'il sépare leseaux d'avec
priété qui fait monter l'huile au-dessus de l'eau
« les eaux. Et sela se fit. Dieu fit donc le linna-
malgré l'obstacle qu'elle' lui oppose. Kxauùnoiis
« ment et eaux qui sont au-dessous du
sépara les
donc si le Créateur « ipii a disposé tout avec
« lirmameut, d'avec les eaux (|ui étaient au-des-
nombre, poids et mesure ',» loin d'assigner aux
i<

« sus. Et Dieu nomma le firmament ciel. Et


eaux un lit unique à la surface du globe, les a
« Dieu vit que cette œuvre était bonne. Et le
encore superposées à la voûte céleste, en dehors
« soir arriva, et au matin se fit le second jour. »
de notre atmosphère.
Il serait inutile de répéter ici le commentaire ipie
3. Ceux
ne veulent pas admettre une pa-
(pii
j'ai fait tout à l'heure sur la parole créatrice,
reille hypothèse, se fondent sur
les lois de la (le-
sur l'approliatiou donnée par Dieu à ses œuvres,
santeur; à leurs yeux la voûte céleste n'est point
sur le matin et le soir : chaque fois (]ue ces ter-
une espèce de sol assez ferme pour soutenir le
mes reparaissent, je prie le lecteur de se repor-
poids des eaux; une telle consistance n'appar-
ter aiLX explications précédentes. La question
tient qu'à la terre et la distingue tlu ciel ; les
(|ui doit maintenant nous occuper est de savoir
propriétés des éléments ne les distinguent pas
s'il s'agit ici du ciel, je veux dire de l'espace qui
moins que la place qu'ils occupent, ou plutôt, leur
s'élève au-dessus de l'atmosphère, quelle qu'en
place est dans un juste rapport
avec leurs pro-
soit la hauteur, et des régions où le soleil avec
priétés par exemple, l'eau ne peut être que sur
:

la lune et les étoiles furent placés le quatrième


la terre fût-elle sous ferre, comme l'eau im-
;
jour; ou- si le firmament ne sert qu'à désigner
mobile ou courante des grottes et des cavernes,
l'atmosphère elle-même.
c'est encore le sol qui lui sert de base. Qu'un
2. Plusieurs prétendent en effet que les eaux
éboulement se produise, la terre ne reste pas à
ne peuvent physiquement se tenir au-dessus du
la surface de l'eau, mais descend jusqu'au fond
ciel étoile, parce que selon les lois de la pesan-
et s'y fixe comme à sa place naturelle. Par con-
teur, elles doivent couler sur la terre, ous'ékner
séquent, lorsqu'elle était au-dessus de l'eau, ce
sous forme de vapeur à quelque hauteur seide-
n'est pas l'eau qui la soutenait, mais la force
ment dans l'atmosphère. Qu'on ne s'avise pas
de cohésion qui soutient aussi la voûte des ca-
d'objecter à ces physiciens qu'en vertu de la
vernes.
puissance inlinie de Dieu les eaux ont pu, mal-
4. On doit ici se garder d'une erreur que J'ai
gré leur pesanteur, se répandre au-dessus des
' Genl, G-19. Sag. XI, 21.
iS8 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

recommandé d'éviter; elle consisterait à pren- où vous ne versez pas et fait un ^ideoù l'eau pé-
dre le passage du Psalmiste : « Il a fondé la terre nèlre; mais si le vase, sous une pression violente,
Il sur les eaux, » et à opposer, ce témoignage de perd sa portion, et que l'eau s'y précipite de
l'Ecritureaux théories des physiciens sur la pe- toutes paris, de fa^on à obstruer l'ouverlure, l'air
santeur des corps. En effet comme ils n'admet- lîi pour regagner sa hauteur nahu-elle et
divis"
tent pas l'autorié des livres saints et qu'ils igno- lui laisse une place au fond le brcsit intermittent
:

rent le véritahlc sens de ce passage, ils auraient qu'on eniend alors, vient" des efforts de l'air
plus de penle à s'en moquer qnh renoncer aux pour s'éch :q)per successivement, l'ouverture trop
\érités qu'ils tiennent du raisonnemL'nt ou de étroite ne lui i)erm3ttant pas de soi'tir tout d'un
l'expérience. Or, ce passage du Psalmiste peut coup. Ainsi, l'air est-il obligé de monter au-des-
fort bien s'entendre au sens figuré : le ciel et la sus de l'eau? Il en perce les couches, et la fait

terre sont souveul une métaphore dans le lan- Jailliren bulles légères par son impétuosité; il
gage de l'Église pour représenter l'état spiri- s'évapore bruyamment pour reprendre sa posi-
tuel ou charnel des âmes. Par conséquent, le tion naturelle et laisser l'eau retomber à la place
Psalmiste, eu |)arlent des eieux « que Dieu a que lui assigne sa pesanteur. Veut-on au con-
« créés dans l'intelligence S » aurait désigné la traire le forcer à passer d'un vase sous l'eau,
contemplation sans nuage de la vérité; la terre en tenant l'orifice renversé? On aura moins de
aurait été pour lui le symbole de la foi naïve peine à le renfermer sous l'eau de tous côtés
des esprits simples, qui, sans se laisser égarer qu'à en faire entrer lamoindre goutte par rorifice.
par de vaines théories, ont trouvé dans la pré-
dication des pi'oi)liètes et de l'Evangile un fon- CHAPITRE ni.

dement devenu inéljranlable par la grâce du


le feu est plus léger OLE l'air.
Baptême : aussi ajoute-t-il : « il a fondé la terre
" sur l'eau. » Aime-t-on mieux expliquer ces pa- (î. Quant au feu, son mouvement ascensionnel
rolesà la lettreïElles rappellent naturellement les n'indique-t-il pas qu'il tend à s'élever au-dessus
montagnes, les iles qui s'élèvent au-dessus du de l'air? Tenez un flambeau renversé, la i)ointp
niveau de mer, ou même les grottes dont la
la
de la tlannne ne s'en dirige pas moins >ers le
voûte est suspendue au-dessus des eaux. Ainsi ciel. Cependant, comme le feu s'éteint dans l'air
d'après le sens littéial, ce passage ne peut signifier (juaud il devient trop épais, et qu'il perd ses
que l'eau, en vertu des lois de la nature, formait propriétés i)our se confondre avec lui, il ne
une base capable de porter la terre.
pourrait atteindre jusqu'aux dernières limites
de l'atmosphère. De là vient qu'on nomme ciel
CHAPITRE II.
le répandu au-delà del'almosphère; c'est
feu pur
là, selon quelque physiciens, la matière première
l'air est plus léger que la terre.
des astres, qui ne seraient qu'une combinaison de
o. naturellement au-dessus de
L'air s'élève cette lumière ardente transformée en sphères
l'eau, quoiqu'il se répande à la surface de la terre solides, connue nous les soyons aujourd'hui
par sa force d'expansion c'est ce que l'expérience; dans le ciel. Ils ajoutent que si l'air et l'eau
démontre. Enfoncez un vase dans l'eau, l'ori- sont au-dessus de la terre, c'est que leur pesan-
(ice renversé; il ne peut s'emplir, tant il est vrai teur est moindre de même que si l'air est sus-
:

que l'air a la ])iopriété de se tenir jjIus haut. Le pendu sur l'eau ou sur la terre, c'est qu'il pèse
vase semble vide, mais il est évidemment plein moins que l'eau. Ils souliennent donc (|u'un peu
d'air: car, comme ne peut plus s'échapper
l'air d'air, en supposant qu'on pnl l'introduire dans
par l'orilice et (jue sa nature l'empêche de des- leshaules régions du ciel, en lelomljcraitpar son
cendre sous couche liquide, il se concentre,
la propre poids, jusqu'à ce qu'il rencontrât noire
repousse l'eau l'empêche de monter; mais si
et atmosphèie; et ils concluent que l'eau ne pour-
vous inclinez l'ouverture du vase, au lieu de rait à plus lorle raison séjourner au-dessus des
l'enfoncer verticalement, l'air trouve une issue régions où brille le feu pur, puisque l'air, spéci-
pour s'échapper et l'eau s'élève. Tenez le vase fiquement plus léger, ne saurait y rester en
en l'air avec son entrée parfailemenl libre, et équilibre.
versez-y de l'eaip l'air trouve un passuj^e partout

' Ps. cxxxv, 6, 5.


LIVRE II. — CKfiATION Dl' HHMAMKNI. 1««

Les philosophes eux-mêmes nous démontrent


ClIAPITUEIV. pir un rai^oimeinent Irès-ri îouroux, que la ma-
tière est divisible à l'inliii et ipTim r.iccour.i
1)K l.'01'l.MON SUIVANT LAQUELLE LE FlUMAMEM' NE
d'attune est s isceptible encore de se diviser: car
SERAIT QUE l'aTMOSI'IIÉUE
toute partie d'un corps est corps elle mêms, et
tout corps est nécessairement (livisible en deux.
". Collo obit'clioii a lr.ii)|)t' iiii auteur, ol il a
chcrclu" un iiiou'ii ded 'iiu)ii(ri'n|iii' l'oaii élait
Par conséipieut, si l'eau p.nil si' ivduire, comme
le démontre en elfet l'expérience, en goul'elettes,
siispeiuliii' aii-di'ssus des cieiix, aliii de coiieilier
assez ténues pour s'élever au-dessus de l'air,
rKerilure a\ei' les lois de la |)h\si(|iie. Il |>i(mvo
(pioiipi'il soit naturelleui'nt plus léger; |><)ur-
d'aliord, ce qui étaitque l'air et le ciel
l'aeile,
(pioi ne pourrait-elle, malgré sa pesanteur rela-
soûl des ex|)ressions synonymes, non-seuleineut
tive, se répandre par de-là le ciel en gouttelettes
dans le lanthane ordinaire où l'on ilil sans cesse
plus déliées, en vapeurs plus légères?
ini fiel pur, un ciel ehuvin' de iiiiiiijes, mais en-
core dans le style de l'Ecriture, par exemple :

Il V'ojez les oiseaux du ciel '; » or, le ciel où


CHAPITRE V.

volent les oiseaux ne i)eut èU(^ (|ue l'aie. En


l'eai' suspendue au-dessus du ciel étoile,.
parlant des nuages, le lui-mùme
Seigneur dit :

« Vous savez juger l'aspcL-l du ciel -. » Quant


9. Quelques auteurs chrétiens, voulant réfuter
aux nuages, nous les \()\ons se loinier dans l'air
ceux qui s'appuient sur les lois de la pesanteur
qui nous a\ )isine, retomber le long des monta-
pour soutenir que l'eau ne peut rester en équi-
gnes et souvent uu'Uie resler au-dessous de leu:s
libre au-dessus du ciel étoile, oïd essayé de les
cimes. Ce point établi, il prétend (pu- le tirina-
incltre en contradiction avec leur propre système
iiient a été ainsi .q)pelé, parce qu'il met comme
sur la température et les révolutions des astres.
une ligne de démarcation entre les vapeurs lé-
D'après ce système, en eflVI, la planète de Sa-
gères, sorties du sein des eaux, elles eaux plus
turne est glacée et met trente ans à accomplir
denses (pii coulent sur nuages, en
la terre.*1.es
sa révolution sidérale : son élévation dans l'es-
elïet, comme l'ont ceux ([ui les ont
vcrilié tous
pace l'oblige il décrire un plus grand tour. Le
traversés dans les montagnes, ressemblent à un
au contraire, achève la même révolution
soleil,
amas de goulteleltes très-déliées. Ces molécules
en un an, et la lune en un mois moins l'astre ;

viennent-elles à se condenseretà se réunir en une


est élevé, plus sa rotation est rapide, afin (pi'il y
grosse goutte? L'air ne pouvant plus la soutenir
aitun rapport exact entre la durée du mouve-
l'abandonne à son propre poids et elle toud)e
msnt et SI hauteur relative dans l'espace. Ils se
sur la terre. Telesllephénoraènede la pluie. Par
demandent donc par quel mystère la planète de
conséquent, dans l'air, placé entre les vapeurs
Saturne est si froide, quand sa température de-
dont les n' iges sont formés et les eaux répan-
vrait être d'autant plus élevée que sa rotation
dues sur la Icrre, il retrouve le ciel qui divise
s'accomplit du haut de la voûte céleste. Voyez
leseauxd'avec les eaux. Cette explication'si exacte
une roue tourner le mouvement est plus lent
:

mérite, à nion sens, les plus grands éloges : elle


au centre, plus ranide à la circonférence, a(in
n'est point contraire ;i la loi et s'accorde avec
que, malgré la différence des rayons, tous les
l'expérience la plus lacilc à réaliser. Toutelois
mouvements se comb'iienl pour former un mê-
on peut pense: au^si que la pesanteur n'empê-
me to u'. Or, plis la rotation est rapide, plus il
che point r,\iu de rester au-dessus du ciel, sous
se déiaGrede chaleur : la tcmpératiu'e de Saturne
l'orme de vapeurs, pui-qu'elle ne l'empêche pas,
devrait donc èti-e plutôt brûlante que froide.
sous la même forme, d'être stispendue en l'air.
C b'en que Saturne ayant un vaste cercle à
u'
Quoique plus lourd et par conséquent moins haut
décrire, mette trente ans à achever sa révolu-
que le ciel, l'air est san^ aucun doute plus léger
t'on par son mo ivem^nt
propre, il est soumis
que l'eau, ce qui n'empêche pas les vapeurs de
chique mo:ivernmt général et en
jo u- au
monter au-dessus. Il est àon^ possible qu'une
sens coifraire diiciel, do;it une conversion pro-
masse liquide, réduite en vaptnns infinimeiit
duit un jo u-, au dire de ces physiciens par :

plus subtiles, s'étende par de-là le ciel, sans èlre


conséquent, la partie du ciel où il tourne, étant
forcée d'en descendre parles lois delà pesanteur.
animée d'un mouvement plus rapide, il devrait
'Matt. vi,26 — -Ibid. XTi,4. dégager plus de chaleur. D'où vient donc ce
160 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

mystère ? Du a oisinage même des eaux suspeu- celui qui commande et celui qui exécute ?

dues au-dessus du ciel étoile et dont ces pii) - Veut- on aussi en laissant de côté: « Et il fut fait

siciens contestent l'existence. Voilà sur quelles « ainsi, » se borner à rapporter les deux autres
conjectures s'appuient nos auteurs poui' com- passages, celui où Dieu commande et celui où il

battre les physiciens qui, sans vouloir entendre agit (^flf — /'fr??) , et retrouver ici l'intervention
parler d'eaux au-dessus du ciel, soutiennent néan- du Père, là celle du Fils?
moins que la planète placée au sommet de la 12. On peut encore se demander s'il ne faudrait

voûte céleste est glacée : ils les forcent ainsi à pas voir dans l'expression fiât un ordre, pour
conclure que ces eaux existent, non plus sous ainsi dire, donné au Fils par le Père. Dans ce

forme de vapeurs légères, mais à l'état de glace. cas, pourquoi l'Ecriture n'a-t-elle pas pris soin
Quelque système qu'on adopte, l'exislence des de désigner la personne du Saint-Esprit? Est-ce

eaux au-dessus du ciel, sous quelque forme que f[u'il faut reconnaître la Trinité dans le com-
l'on voudra, est un fait indubitable l'autorité : mandement, dans l'acte créateur, et dans l'ap-
de l'Ecriture doit prévaloir sur les plus ingé- probation donnée à l'œuvre? Mais la Trinité for-
nieuses théories de l'esprit humain. me une unité trop absolue pour que le Fils
reçoive en quelque façon l'ordre d'agir, tandis
CHAPITRE VI. que le Saint-Esprit approuve de lui-même et
sans y être invité l'œuvre accomplie. Quel ordre,
FAUT IL VOIR D.VNS LE PASSAGE « ET DIEU FIT LE
Père pourrait-il donner au
:
en effet, le Fils, c'est-
« FIRMAMENT, » ETC. l'iNTERVENTION DIRECTE
à-dire, à son Verbe éternel, le Verbe du Père, le
DU FILS? Fils unique en qui existe tout ce qui a été créé,
même avant la création, le principe de la vie,
10. On a remarqué, et cette réflexion, mérite,
en ce sens que tout ce qu'il a fait est en lui vie
selon moi, d'être approfondie, qu'après cette pa-
et vie créatrice, et en dehors de lui, vie contin-
role immédiatement accomplie : « Que le firma-
gente et créée? Les êtres qu'il a créés sont donc
u ment se fasse au milieu des eaux et qu'il
en lui puisqu'il Igs gouverne et les contient, mais
« sépare eaux d'avec les eaux, l'Ecriture ne
les >>

à un tout autre titre que l'Etre qui constitue son


se contente pas de dire « Cela se fit, » mais :

essence. Car la vie qui est en lui n'est autre chose


qu'elle ajoute « Et Dieu fit le firmament, et il
:

ipielui-même, parce qu'en tant que vie il est la


« sépara les eaux qui étaient au-dessus du firma-
lumière des hommes i. Ainsi donc, rien ne
« ment, d'avecleseaux qui étaient au-dessous. »
pouvait être créé, soit avant les temps sans tou-
On croit donc que la personne du Père est mar- tefois être coéternel au Créateur, soit à l'origine
quée dans le passage « Et Dieu dit Que le : :

des temps ou à un moment quelconque de la


« firmament se fasse au milieu des eaux, et
durée, sans que le type de cette création, si l'on
'< qu'il sépare les eaux d'avec les eaux ; ce qui fut
peut parler ainsi, n'eût dans le Verbe coéternel
« fait ; » pense que l'Ecriture avait pour
et l'on
à Dieu une existence également éternelle voilà :

but de entendre
faire que le Fils avait accompli
pourquoi l'Ecriture, avant de raconter chaque
la parole du Père quand elle ajoute « Et Dieu :

création dans son ordre, remonte au Verbe de


« fit le firmament, » etc.
Dieu et débute par ces mots « Dieu dit » en : ;

H. Mais, puisqu'il a déjà été écrit : « Et cela


effet, elle n'explique la création d'aucun être,
« fut fait, » je demande par qui cela fut fait,
sans en découvrir la cause dans le Verbe de
Etait-ce par le Fils? A quoi bon alors cette espèce
Dieu.
de pléonasme « Et Dieu fit le firmament,
:

13. le Fiat de la création


Dieu n'a pas répété
« etc? » Si au contraire on voit dans le passage :

aussi souvent que nous lisons dans la Genèse :

« Et cela fut fait, » l'acte du Père, il ne faut


« Dieu dit. Car Dieu n'a engendré qu'un Verbe
>-

plus admettre que le Père parle et que le Fils


unique, en qui il a tout exprimé universellement
exécute il faudrait même en conclure que le
;
avant que les choses sortissent du néant selon
Père agit indépendamment du Fils, et que le
leur ordre particulier. Mais l'Ecrivain sacré,
Fils reproduit les actes du Père par imitation, ce
abaissant son langage à la portée des esprits les
qui est contraire à la foi catholique. Aime-t-on
plus humbles, énumère successivemnet les di-
mieux ne voir qu'une répétion de la même idée
verses espèces d'êtres, et considère successive-
dans les deux passages « Et cela : se fit, » et

« Dieu fit ainsi .' » Pourquoi ne pas identifier '


Jean, i, 3,4.
LIVUK 11. — CUIÎATION DC nHMAMKNT, KM

liii-iil dans 11' Vi'ilif lie hicii la caiisi- (•Icincllc " sons le ciel se rassembla. " Et la lumière? Le
lie ilia(|iu' iTcalioli. \ oilà |H)iin|UiM il l'ciiMc la l'ilsn'a-l-il point concoiuiiàsa l'i'i'-ation, |)ar('eipie
parole, i|iioiniu'lli'iraii iioiiilfto ivpi'li'c : >< Dii'ii rEirilure n'a point emplové cette double bji-
« ilil. » Supposons ([ii'il ail tl'abonl sonjçi^ à s'cx- inule ? Car, n'aurail-on pu adopler aussi la l(jr-
pririiiT aiti-ii : « Le lii'inaiiiciit st> lit au milieu mule suivante : Et Dieu dil (pie la lumière soit
« (les eau\ aliu ijui' les eauv Idsseiil séparées faite, et cela se lit ; et Dieu lil la lumière, ou dire,
«des eaux; » si on lui avail (ieinaiulécoiumeiil comme pour le rassemblement des eaux : Et Dieu
celle (l'uvre s'élail aeeitMiplie, il aurait répondu dil ; (|ue la lumière soit laite, et cela se lit;

a\ee raison (|ue Dieu a\ail dit : « Une le liruia- et Dieu vit (pie la lumière était bonne? Mais
<i nient se lasse, » en d'antiiis termes, (pio la non après avoir exprimé l'ordre
: divin, rEcritiire
ciratioa ilu dans son
lirui:inient était ariuMée ajoide simplement:» El la Inuuère lut laite ; »

Veihe éternel. Il a done déliulé dans son réeit puis elle raconte, sansaueuue ré|)(''liou, (|ue Dieu
parl'explieation uiénie dont il aurait pu le l'aire approuva la lumière, lasépara d'avec les ténèbres
suivre, si on lui avail demandé la manière dont et leur donna un nom.
la création s'élail accomplie.
H. Ainsi donc les expressions : « Dieu dit :

« que nous l'ont entenilre


telle a'uvi-e se lasse, » CHAPITRE VIII.

l'idée créatrice arrêtée dans le Verbe de Dieu.

Les mois « Cela l'ut t'ait, » nous révèlent que


:

POIRQUOI l'expression : « ET FEClT DECS, » N*A-T-


l'être créé se tonna dans les limites lixées à son
ELLE PVSÉTÉ REPRODIITE .4PRÈS LA CRÉATIO.X-
espèce par le Verbe de Dieu. Enfin les mots
DE LA LCMIÈRE?
« Dieu %il (|ue cette œuvre était bonne, > nous

montrent (pie, grâce à la cbarité de son Ksprit,


l'être créé lui plaisait; cette approbation n'indique Ifi. Que signifie donc cette répétition ipii se
pas qu'il ne eoimùt son «nivre et ne la trouvât reproduit à chaque cré-ation sauf à celle de la
agréable ([n'eu la vovant accomplie, mais qu'il lumière? Cette omission n'aurail-elle |)as |)our
voidait lui conserver l'existence en vertu de la but de démontier que le premier jour, date de
ménie bonté qui l'avait engagé à la lui donner. l'apparition de la lumière, manifesta, sons le
nom même de lumière, la nature des êtres spi-
CHAPITRE VIL rituels et intelligents, parmi lesquels il faut ran-
ger les saints Anares et les Vertus? Si, en effet,
CO.N n.MATlO.N DU MÊME SLJET.
l'Ecriture n'ajoute rien aux expressions : « Et la

13. La question n'est pas encore épuisée : ou << lumière fut faite, » la raison n'en est-elle pas
peut eiieoivse demander poiuxpioi, aux expres- que la créature intelligente, loin de connaître
sions qui indiipienl en elles-mêmes raccom[)lis- d'abord son moyen de perfectionnement et de
sement de l'ordre divin : « Et cela ce lit, » ou l'atteindre ensuite, n'en prit conscience qu'au
ajoute ces paroles : « et Dieu lit telle ou telle
•.
moment où elle se perfectionnait, en d'auh'es
chose. Les mots, en elïet, qui marquent le cou- termes, qu'au moment où rayonnait en elle la

mandement et son exécution immédiate {[iat, — vérité à laquelle elle s'unit ; tandis que, pour les
l'iivlum est) révèlent assez clairement ([ue Dieu créatures d'un ordre inférieur, l'existence était
a parlé dans son Verbe que son Verbe a et connue comme possible dans l'esprit de la créa-
réalisé sa parole ils sullisenl pour monlrer la
:
tion raisonnable, avant de se réaliser sous une
double personne du Père et du Fils. Si cette l'é- forme déterminée Par conséquent, la lumière ?

pélilion n'a pour objet que de l'aire apparailre doit apparaître sous deux points de vue d'abord, :

la personne du Fils, il faudra donc admettre dans le Verbe de Dieu, si l'on considère la cause
que Dieu ne s'est pas servi de son Fils, le troi- de son existence, en d'autres termes, dans la
sième jour, pour rassembler les eaux et dé- sagesse coéternelle au Père puis, en elle-même, ;

C(nivrir la surface de la terre car, l'Ecriture :


si l'on considère sous quelle forme elle s'est
n'ajoute pas ici « et Dieu rassembla les eaux. »
:
Dans !e Verbe,
réalisée. la lumièi-e n'es! pas faite,

Toutefois, dans cet endroit même, après avoir mais engendrée; dans la nature, elle est faite,

montré l'œuvre divine accomplie, l'Ecriture re- parce quelle a été tirée des éléments grossiers et

double l'expression et ajoute « Et l'eau qui est :


primitils. On voit maintenant pouniuoi Dieu dit :

S. AUG. — ToM. IV. \\


16-2 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

« Que la lumière soil faite, et la liuiiièrc fut apprend que la créature raisonable fui initi('e au
« faite :» il faisait passei-l'iilée Je son Verbe daus de celle créalionel le reproduisit, pour ainsi
|)lan
la réalité. Au point de vue .de la sagesse engen- dire, par le privilège qui lui fut donné de le
drée, le ciel existait eoniine type dans le Vcr])e connaître la première au sein du Verbe de Dieu;
de Dieu : ce type l'ut ensuite reproduit dans la enfin la formule fecit, (|ui est une réi)étition de
raison des Anges, d'ajirès la sagesse qui avait été la précédente, nous fait entendre que la créature
créée en cu.\ : enfin le ciel devint une réalité, afin elle-même |)assa à l'existence sous sa forme spé-
(|u'il existât sous safoi'ine spéciale. On e.xijjique- ciale. Quant au passage vidit Deiis quia bonum :

raitde la mèjne manière la séparation des eaux est, il révèle que Dieu, dans sa bonté, approuva

d'avec les eaux, la forjnation des arbres et des son œuvre, afin de .lui conserver l'existence qu'il
plantes, la naissance des animaux dans les eaux avait bienvoulu luidomier au momentoù « l'Es-
et sui- la terre « prit-Saint était porté sur les eaux. »

n. Les anges, en effet, n'ont pas seulement


des sens, connue l'animal, pour considérer la CHAPITRE IX.
nature visible : à supposer qu'ils aient des sens,
ils connaissent mieux l'univers, d'après les idées 1)K LA CONFIGIU.VTIO.X DU CIEL.

qu'ils découvrent dans le sein du Verbe de Dieu,


20. On agite assez souvent la question de sa-
qui les éclaire et leur communique la sagesse.
voir quelle est la configuration du ciel d'après
Donc, de même que le type de la créature ré-
nos Saints Livres. C'est un sujet sur lequel les sa-
side dans le Verbe de Dieu avant ([u'ellc reçoive
vants ont accunnilé des volumes et que les écri-
l'existence ; de même ce type se découvre d'abord vains sacrés ont sagement négligé tous les sys- ;

à la créature intelligente dont la raison n'a pas


tèmes sont inutiles au bonheur, et ce qui est pis,
été obscurcie ])arle péché enfin : le type se réa-
dérobent un temps précieux qui devrait être con-
lise. Pour concevoir les vues de la Sagesse les
sacré au salut. Que m'importequele ciol soit une
anges n'avaient pas besoin des'expli<iuer, com-
s|)bère qui enveloppe de toutes |)arts la terre
me nous, lesdesseinsinvisiblesdeDieu parlespec-
innnobile au centre dumonde, ou un disque im-
taelcdc ses ouvrages ' : depuis qu'ils sont créés,
mense qui ne la recouvre que d'un côté? Toute-
ils contemplent le Verbe et son éternelle sainteté
fois, comme l'autorité de l'Ecriture est en jeu,
dans une extase ineffable ; c'est de cette hauteur
et qu'il est à craindre que les esprits étrangers à
qu'ils regardent le monde et (pi'à la lumière des
la parole divine, rencontrant dans nos saints li-
idées qu'ils trouvent dans leur intelligence, ils
vres on entendant dii'e aux chrétiens des choses
approuvent le bien, et condamnent le mal.
qui semblent contredire les vérités scientiliipies,
18. On ne doit pas être surpris que Dieu ait
n'en profitent pour repousser l'histoire, les dog-
révélé à ses saints anges, lespremiers-ni's delà
mes, la morale de la religion il faut répondre en ;

lumière, le type de ses créations futures. Ils ne


peu de mots que les écrivains sacrés savaient fort
pouvaient connaître ses desseins qu'autant qu'il
bien la véritable configuration du ciel, mais que
lui plaisait de leur en découvrir les mjslèi'es.
l'Esprit-Saint, qui parlait parleur bouche, n'a pas
« Car, qui connaît les pensées de Dieu, ou qui
voulu découvrii' aux honmiesdes connaissances
« l'a aidé de ses conseils? Qui lui a donné quel-
inutiles à leur salut.
«que chose le premier pour en recevoir une ré-
21. Mais, dira-ton, l'expression du Psalmiste :

« compense? Car, c'est de lui par lui, et en lui ,


« 11 a étendu le ciel connue une peau ', » ne
« que sont toutes choses 2. C'est donc lui qui ré- >,

dément-elle pas le svsiènie de la sphéricité du


vélait aux anges la nalure des êtres avant connue
ciel? Eh bien! qu'elle le démente, s'il est faux :

pendant leur création.


la véritéest dansla parole infallible de Dieu plu-
19. En résumé, lalnmière, c'est-à-dire la créa-
l<M (piedans toutes les conjectures de la faible
ture raisonnable formée pai- la lumière éternelle,
raison. Le système reposc-t-il sur des preuves
avait été faite la première :donc, les paroles que
incontestables? Démontrons que l'expression du
Dieu fait entendre pour créer les autres êtres,
Psalmiste ne Ace lili'e, en effet,
le contredit pas.
« (lixit Dciis fuit, » nous révèlent que la pensée
:

un autre passage de l'Ecriture


elle contredirai!
de l'Ecriture remonte la conceplion éternelle ;i
elle-même, où le ciel est comparé à une voûte ^ :

du Verbe; l'expression, sic est fiictum, nous


car, qu'y a-t-il de plus différents qu'une peau

iRom. 1,20. — ! Ibid. xi, 34-36. '


Ps. cm, 2. — ' Is. XL, 22, sel. i\x.
UVRK II. — <:Kr:ATI()N nii fiismamknt i«;i

l'Ii'iuliic cl une voùlc ai roiiilic.' Ur, il faiil liicii iléveloppcr ces tbéoi'ies, et (pi'il doit manquera
li'oiivi'r uni' i'\|)li("ilii)ii (|iii accoi'do cnlic ciiv ceii\ (|uc MOUS désirons foi-mei- pour accouq)lir
ci'sdi'iix [Kissa^jcs, il l'aiil ('•^alcnn'iit iiionlrcr (|iii' leur salut cl |)our i-endi-e tous les services ni'ces-
It's deux passajivs riMuiis uoconircdisi'iil pas l'o- saires à la sainte Kglise. Qu'ils sachent seule-
piiiinn(l<> la spliiMiciU' du ciel, àcundiliou toulc- ment (pie le terme di> lirmameut lu- nous oblige
l'ois (prello soi! (talilic sui' des raisons solides. j)oint à regarder le ciel connue im bile car :

;22. La comparaison du eiel avec une \()ùle, <'e terme peut fort bien si-uilier, non l'iuuno-
UK^iue au pied de la iellre, ue piésenle aiii une bilité du ciel,maisla bariière solide, infranchis-
dillieullé. (tu peul loii hieu croire (|ue IKciiluie sable, placéeentreleseauxsiqtéiienresetles eaux
n'a voulu parler (pie de la eonli;jruiatiou du ciel inférieures. Serait-il démordre que le ciel esl
siispiMidu au-dessus de nos lèfes. Doue, si le ciel innnobile? la révolution des astres ne nous obli-
n'est i>as spliérii|ue, il s'arroudil eu voide, dans gerait pas à repousser la vérité de ce système.
l'espace où il chumc la Ici re ; s'il esl spli(Ti(|ue, Ku effet,des |)lnlosophes (pu ont consacré tout
il s'areoudil eu \oùle dans toni l'espace. Ouaul leiu- teuq)set toute leur sublilitéà résoudre ces
à la eoiuparaisou du ciel aM'c une peau, elle esl problèmes, ont tlécouvert (pie, dans l'IiNpothèse
phisenibariassanle: il faut en clfel la concilier, de l'immobilité du ciel, le mouvement propre des
nonaveclas|iliéricité du ciel, fjui n'est peul-èlr(> astres suffirait à explitpier tous les phéiKimèiies
ipi'une iuiaiiiuatiou, mais a\ec la voûte dont par- (pie rex[)érieuce latlaclie à leurs révolutions
le rKcriture. On trouvera au xui livre de mes périodiques.
Confessions ' l'explication allégorique de ce pas-
\(>ir tel ou tel s\nd)oledans cette
sage. Qu'il faille
CHAPITRE XL
manière d'étendre le ciel connne une peau, je
vais, pour conteuler ceux (pii iièsent scrupuleu- yiE F.VLT-IL ENTENDUE PAIÎ l'ÉTAT INFOIÎME DE I, \
semenl le sens littéral, donner une explication TEItltE 1?
matérielle et, je l'espèi'e, à la |)ortée de tous :

car, puisqu'il y a sans doute un lien entre ces 24. « Puis Dieu dit (pie leseauxqui sont au-des-
:

deux expressions, au sens figuré ; il fout exami- « sous descieux se rassemblent enun lieu et que l'a-
ner « il en fut ainsi. L'eau (pii(>stsousle
ride paraisse. Et
si, au sens littéral, elles n'admettent pas une
interprétation conuuune. Eh bien ! le mot crt-
«ciel serassemblaen uuseul lieu et l'aride parut.
Jiiccfl (voûte, plafond) s'eutend d'une surface plane '<Et Dieu nomma l'aride, terre, l'amas des eaux,
ou concave or, une peau peut aussibien s'('ten- « mers. Et Dieu vit que cela était bon. » Nous nous
;

dre sur un plan horizontal que s'arrondir en sommes longuement étendus sur cet ouvrage de
sphère, témoin une vessie, une outre. Dieu, à propos d'une question qui s'y rattache
intimement 2 n suffira donc ici de rappeler
CHAPITRE X. sommairement aux esprits trops élevés pour se
préoccuper de l'époipie où furent créées les pro-
DU MOUVEMENT DL CIEL.
priétés spécifiques delà terre etde l'eau, quel'ou-
vrage dece jourconsistesimplement à séparer ces
Le ciel est-il enmouvement ou immobile?
53.
deux éléments dans les régions inférieures de
c'est une (juestion ([uclquelois débattue parmi nos
l'espace. Veut-on au contraire se demander
fi'ères <'ux-mèmes. S'il est eu mouvement, disent-
pourquoi la créationde lalumièreetduciela une
ils, comment exidiquer le lirmamenl? S'il est
date, tandis (pie celle de la terre et de l'eau s'est
innnobile, connnent les astres, attachés, dit-on,
accomplie en dehors des jours ou les a même
à sa voùle, tournent-ils d'orient en occident, en
précédés .^Semble-t-ilsuprenant que le comman-
décrivant prèsdu pùleuortluu cercle d'un moin-
dre rayon, de sorte que la rotation du ciel est celle
dement fuit ait présidé
création de la à la
lumière, tandis qu'il entendre pour sé-
s'est fait
d'une splièie, s'il existe un pôle à l'extrémité
parer la terre avec les eaux sans avoir présidé à
opposée, celle d'un disque, s'il n'y en a pas? Je
leurcréation ? On trouvera une explication sans
leur réponds que c'est par les raisonnements les
plus substils et les plus contournés qu'on recher-
danger pour la foi dans le passage où l'Ecrihire,
che ce après avoir établi que « Dieu créa au commen-
qu'il peut y avoir de vrai ou de faux dans
« cernent le ciel et la terre » ajoute, pour repré-
ces systèmes; que le temps me mantjuerail, pour
senter la terre en cet état : « La terre était invi-
' Confess. liv. xin. Uc. xv. ' Gen. 1,9, 10. — • Ci-dessus, liv. 1, cli. xii, xiii.
164 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

« siblc et sans ordre. » Ces paroles, en effet, ne « qui avaient leur semence en eux-mêmes, selon
tlésignent que l'état iiirornu- dp la matière, et « leur espèce, sur la tei're. Et Dieu vit (|uecela
l'Efriture a ciioisi le mot de terre coiiiine étant « était bon. Elle soir se (il, cl au matin fut ac-

plus ordinaire et moins obscur. Si cette expli- te compli le troisième jour. «11 faut ici remarque''
cation est trop dillieilc à saisir, qu'on s'efforce la mesure que l'éternel Ordonnateur met dans
aiimoinsdesépareidanslelempslu matière et ses ses œuvres. Les plantes et les arbres, ayant des
niodilicatiuns, connue l'Ecriture les dislingue propriétés fort distinctes de la terre et des eaux,
dans sou récit qu'on se ligure (|ue Dieu a créé d'a-
: et ne i)ouvant se langer parmi ces cléments, re-
bord la matière, et au bout d'un certain temps, çoiventl'ordre spécialde sortirdn sein delà terre;
l'a euricliie de ses propriétés. 11 est clair cepen- spécialement encore il est dit de ces])ro(luctions :

dant que Dieu a tout créé à la lois, et qu'il a façon- « Et il en fut ainsi et ; la lerre produisit » etc. ;

né la matière déjà formée, le mot terre ou eau ne elDieu approuva spéeialemeni leur formation.
servant dans l'Eciiture qu'à désigner l'imperlcc- Cependant, comme ils se rattachent à la teri-e
lion de la matière, connue je l'ai déjà lemiuqué par leur racines, Dieu a compris toutes les phases
à cause de son emploi fréquent. En effet la terre de cette création dans im même jour.
et l'eau, même sous leur forme actuelle, ont une
tendance à se corrompre qui les rapproche bien CHAPITRE Xlll.

mieux de l'imperfection primitive que les corps


célestes. Or, dans la période des six jours, on l'OlRQlOl LES LIMINAIRES x'OXT-ILS ÉTÉ FORMÉS
énuuière les ouvrages tirés de celle matière in- yiE LE yiATiUÈME .lOLU''!"

forme, dont était déjà sorti le ciel, si diffèrent


•26. « Et Dieu dit : qu'il y ait des luminab'es
de donc pas voulu,
la terre; l'écrivain sacré n'a
«dansle firmament, alin qu'ils brillent sur la ter-
en prononçant le fiât, ranger parmi ces autres
« re, maripieni le commeneeinenf dujour etde la
œuvres de Dieu l'œuvre qui restait à faire dans
« nuit, et séparent le joui- d'avec la nuit ;
qu'ils
la région la plus basse de la nature; les éléments
« servent de signes pour distinguer les saisons, les
y gardaient une imperfection trop grossière, pour « jours elles années ; (pi'ils brillent dans le firrna-
se prêter à uneœuvreaussiparfaitequele ciel ils :

« ment, afin de luire sur la terre. El cela se fit.


ne pouvaient que recevoir une forme inférieure,
« Dieu fit donc deux grands luminaires, le plus
moins constante et plus voisine de l'imperfec-
« grand, pourmarquer le commencement dujour,
tion primitive. Les paroles « Une les eaux se ras- :

« le pluspelil, [lour marquer le commencement


« semldent, (pie l'aride paraisse, » indiqueraient
« de la nuit. Il lit aussi les étoiles. Et Dieu les mit
donc que la terre et l'eau reçurent alors ces for-
« dans le lirmament pour luire sur la terre, pour
mes siconnueset qui nous ])enneitenldeiesplier
« marquer lecommencenient dujour et de la nuit
à tant d'usages : l'eau, sa lluidité ; la terre, sa
« et pour diviser la lumière d'avec les ténèbres. Et
consistance. Aussi est-il écrit des eaux : « quelles
« Dieu vit que cela était bon. Et le soir se fit, et
« se rassemblent, » et de la terre : « qu'elle se mon-
« au matin fut accompli le quatrième jour. » La
«tre» : l'uneestcourameêt fugitive, l'autre com-
première question qui se présente ici est de sa-
pacte et immobile.
voir quelle est la raison d'mi ordre où la créa-
tion de la terre el des eaux, leur séparation, les
CHAPITRE XII.
productions du sol précèdent l'apparition des as-
l'OLRylOl LX FO.l.MLLE « ET CEL.V SE FIT .\1NS1, » tres dans le ciel. On ne saurait dire en effel que
EST-ELLE E.MPLOYÉE SPÉCI.\LE.MENT POIR LES la succession des jours corresponde à la dignité
PLANTES ET LES ARBRES ' ? des objets,et que la lin et le milieu y soient mis

en Sur une période de sept jours, le qua-


relief.

ûo.« Dieudit:quela terre produise des plantes trième forme le milieu, et on sait que leseptième
« avec leurs semences, chacune selon son espèce ; ne fut marqué paraucunecrcatiou. Dira-t-on que
>. des arbres fruitiers, produisant des fruits selon la lumière du premier jour soit dans un juste
Il leur espèce, et (pliaient eu eux-mêmes leur se- rapport avec le repos du septième, et qu'on
' inence sur La terre
la terre. Et cela se fil ainsi. puisse former ainsi une série harmonieuse, où
« produisit donc des plantes avec leurs semences, le coinmencemenl réponde à la fin, où le mi-
« chacune selon son espèce des arbres liuitiers, ; lieu se dégage et reluit de la clartéduciel? Mais
1 Gen. 1, 11, 12,13. ' Gcn. I, 14, 15, Ole.
[JVRE If. — CREATION hV FIRMAMENT. 1«K

si If proiniiT jour a uni' ;;raii(lciir(iiii!(' rapiu-o- passage du mouvement au repos, la i'(''volution

clic (lu si'plii'iiii', il l'aiil liicii (\\ir le second coi- du soleil a étalili entre du jour et
l'aiernatlM'
rcspoiKh" au sixième. Or. (|iiel lapiioil \ a-l-il de la unil el le jiassage du repos à la veille, une
entre le liinianienl ell'luunnu' lail à riinai^e de juste correspondance; la nuit, loin d'être sans
Oieii? Serail-eetiue le ciel séterid dans la région beautés, a offert, dans le doux éclat de la lime et
snpéiieufe dn monde et (pie l'Iionime a l'cen le des étoiles, ime cnnsolaliou aux hommes qn(t la
privilège île lé^iier sur la iv'fiioii inleiienre? nécessih' force somenl à travailler la nuit; cette
Mais que dire des animaux et dos hôtes produits paisible lumière convientd'ailleurs aux animativ
par la terre, selon leur esi)èee, le sixième jour? qui ue peuveni soutenir l'écial du siijeil.

l'eut-il y avoir (jneUpie rappoi't entre lesaniuiaux


et le ciel ? CHAPITRE \1V.
:27. Voici peut-être l'explication <le cet ordre.
La créature iutellinente axant étc' l'ormée au dé- COMMENT LES LUMINAIRES Di: CIEI, SERVEST-ILS A
but, sous le nom de lumière, il i'Iaitnatiu'el ((ue MARQUER LE TEMPS, LES JOURS, LES ANNÉES.
la nature pliysi(pie, en d'autres termes, le monde
:28. dit que « les Inmi-
Le passage où l'Ecriture
visible l'ut l'oruu'. Cette création se fit en den\
jours qui eorrespomlent aux deux parties i)rin-
« du ciel servent à donner des signes, h
naircs
« marquer lestemps,lesjours, les années, » ofh'c
cipales dont se compose l'univers, je veux dire
d'après celte an;dogic qui
une grande difliculté. Si le coui's du temps n'a
le ciel et la terre, t'ait

souvent désigner sous !< nom de ciel et de terre


connnencé que le quatrième jour, les trois jours
qui précèdent se sont donc passés en dehors du
les esprits et les corps. Ce globe lut le domaine
assigné à la partie la plus bruvanle et la |>lus
temps'/ Qui peul conq)reudre comment ces trois
jours se sont écoulésavant le cours régulier dn
grossière de l'air : il se condense en eCt'el |)ar les
temps, puisqu'il ne date que du quatrième jour ?
émanations de la terre; aiicontiaire, la partiede
Se sont-ils même écoulés? Le joUL' et la nuit ne
l'air la plus paisible, celle que n'agitent jamais
servenl-ils ici qu'à désigner, l'un, la sid)stance
lesvenls ni les lenqiètes, eut ieciel pour séjour.
avec scsqualitésdistinclives, l'antre, la substance
La création du monde pliNslipu' achevée, à la
sansscs modiliealions? I>auuit, liis-je, nerepré-
place qui lui a\ait été assignée da)is l'étendue,
seulerait-clle (pie iamalière encore informe dont
il l'allait le [("uiplir irétres organisés, capables
de se transporter d'un lieu dans un autre. Les les êtres devaient sortir avec lem's propriétés spé-

plantes et les arbres ne rentrent pas dans cette


ciales ? Même chez un êlre formé, la i)ossibilité

catégorie
de changer implique l'imperfection du fond; or,
: ils tiennent à la tei-rc parleurs raci-
cette imperfection ne se mesure ni par l'espace
nes, et quoique le mouvement qui les fait croî-
passe en eux,
ni par le lemps : elle n'impli(jue ni distance ni
tre se ils n'en sont pas moins in-
antériorité. Serait-ce cette possibilité dechanger,
capables de se mouvoir par un effort qui leur
qui suppose celle d'être défectible, qu'on a ap-
soit propre : ils se nourrissent etse développent
aux lieux où ils sont enchaînés. Par conséquent pelée nuit mêmechezlescréatures toutes formées,

ils ont un rapport plus élroit avec la terre qu'avec


lechangement étant possible chez les êtres, même
les êtresqui se meuvent sur la terre ou dans les
quand ils ne changent pas? Le soir et le matin,
eaux. Deux jours ont été consacrés à organi- au lieu d'indiquer un écoulement et un retour
ser la nalure matérielle, je veux dire le ciel et périodique dans la durée, ne désigneraient-ils

la terre qu'une limite, celle où s'arrête le développement


: il faut que les trois jours suivants soient
consacrés aux étresvisihles d'une substance et où recommence le dévelop-
et animés de mouvc-
menl, qui sont créés surceIhéàIre.LecicI avant pement dune autre? Ne faut-il pas plutôt cher-
cher dans un autre ordre d'idées le sens exact de
été formé le premier, doit le premier recevoir
les corps destinés à l'occuper. C'est donc ces mots ?
le qua-
trième jour que sont formés
'29. Comment pénétrerce secret et définir ce que
les astres, qui lui-
l'Ecriture appelle signes, lors([u'elle dit des as-
sent sur la terre, et qui en portant la lumière
tres : « qu'ils servent de signes ? » Elle entend
dans les plus l)asses régions de l'univers, permel-
par là, non les conjectures d'un art insensé, mais
tent de ne pas iidroiluire ses habilants futurs
les pronostics si utiles dans la vie humaine, les
dans un séjour ténébreux. Comme les faibles or-
observations qui gindeul le pilote sur les mers,
tianes des êtres d'ici-basse reuouvèlent,par„lc
les prédictions du temps selon les diverses sai-
166 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL

sons. Elle appelle) temps, non une durée quelcon- se fut borné à examiner sans chercher à
que, mais celle iiiii se l'ègle sur le cours des convaincre! Les uns veulent, en effet, que la
astres et les mouvements périodiques du ciel. lime ait été créée dans son plein, par la raison
Supposons en effet qu'il ait existé un mouve- ([u'un ouvrage inachevé aurait été indigne de
ment, soit plnsique soit intellectuel, antérieur Dieu, en ce jour où il fit les astres, selon les ter-

h la disposition des astres dans le ciel, et que, mes de l'Ecriture. A ce compte, répondent les
par la pensée, ce mouvement ail été transporté autres, il aurait fallu du-e la nouvelle lune, et
de l'avenir dans le passé à travers le présent : non la lune âgée de quatorze jours. Qu'est-ce

cet acte est impossijjle en dehors du temps; cl que ce calendrier à rebours? Pour, moi je reste
connnent prouver qu'un tel acte ne se soit pro- neutre; tout ce que j'affirme, c'est que Dieu a
duit qu'à dater de la ciéation des astres? Uuant créé la lune sous une forme achevée, quelle
aux divisions si connues du temps en heures, qu'en ait été alors la phase. En effet Dieu crée à
jours, années, elles ont nécessairement i)0ur ori- la fois le fond et la forme. Or quel que soit le

gine les mouvements ties astres. En elïet qu'eu- développement qu'un être acquiert successive-
lendons-nous par temps, par jours et par années? ment, il en contient le principe au moins dans
Le temps n'est pour nous quecerlaines divisions l'activilé de sa nature. Trouverait-on qu'un ar-

dans l'espace, marquées sur les cadrans ou sur la bre est incomplet, parce qu'il n'a l'hiver ni
voûte du ciel où le soleil s'élève de l'orient,
;
feuillage ni fruits? Dirait-on qu'il lui manque les

atteint le méridien et s'abaisse vers l'occident; germes essentiels, parce qu'il n'a encore rien pro-
où on observe ensuite soit ta lime soit une étoile duit? Non assurément l'arbre, les germes même
:

monter à l'horizon après le coucher du soleil, recèlent d'une manière invisible ce que le temps
au poiid cuhninant de son cours marquer mi- doit développer en eux. Cependant, si l'on se bor-

nuit, et se coucher, avec le lever du soleil, pour nait à dire (jue Dieu a laissé une œuvre impar-

marquer le matin. Le jour mesure la révolution faite pour l'achever ensuite, cette pensée ne se-

totale du soleil d'orieid en occident. Quant à rait pas condamnable; elle ne clioquerait ([u'au-

l'année, elle comprend la révolution circulaire tant que l'on voudrait soutenir (iiiuiie leuvrc
qui ramène non à l'orient, comme clia-
le soleil, inachevée de Dieu a i-eçu d'ailleurs sa perfection

(|ue jour, mais au même point du ciel par rap- définitive.

port aux autres astres : cette révolution s'achève 31. On ne s'étonne pas que la terre, invisible,
en 'Mî^jours 6 heures ou le quart d'un jour, ce sans ordre, quand Dieu créa au commencement
(jui, au bout de quatre ans, produit un jour in- le ciel et la terre, apparaisse et s'organise le troi-

tercalaire, appelé bissextile dans l'année llomai- sième jour; pour(juoi doue entasser sur la lune
ne, afin de faire concorder le calendrier avec la comme un nuage de questions? J'ai dit, à propos
marche du soleil. On nomme aussi années des de la terre, qu'entre la création du fond et de la
cycles plus longs et moins comms : une grande forme il n'y avait eu aucun intervalle, et que celte
année commence au retour de tous les astres au distinction était faite pour la commodité du récit.
même point du ciel. Si donc nous entendons Approuve-t-on cette pensée ? Poiiniuoi alorsne pas
dans ce sens le fewps, \ef. jours et les aunéi's, il voir de ses proi)res yeux, comme il est si facile

est incontestable qu'ils sont déterminés par les de le faire, que la lune (>slun globe complet,
mouvements des astres et des grands luminaires, d'une parfaite rotondité, même sous la forme
cai' on ne saurait trop décider si dans ces paroles d'un croissant, au commencement comme à la
de l'Ecriture. « Qu'ils servent de signes et mnr-
: tin de son cours? Sa lumière vient-elle d'un feu

« ipieut les temps, les jours et les aimées, " les (|iii s'augmente, brille dans toute sa force et di-

jours et les années ont rapporlau soleil, les lein[)s minue? Ce mais le feu qui
n'est pas le luminaire,

et les signes, au reste des astres. subit ces alternatives. Consei\e-t-elle une faible
portion de son disque perpétuellement éclairée ?
CHAPITRE \V. Pendant qu'elle pré.^.ente cette face à la terre,

jusqu'au moment où s'achève sa conversion to-


DE LA LUNE.
tale, cequi a lieu au bout de 11 jours, elle s'ac-

Sous quelle forme a été créée la lune?


30. eroît en apparence, en réalité elle est loujours
dans son plein; seulement sa grandeur, vue de
Voilà une question qui a provoqué un tlux de
intarissable, et plût au ciel qu'on la terre, n'est pas toujours égale. Em|)iunte-t-elle
(|UCslions
J.IVRK II. — CRf.ATlON W FIIOIAMKM . i«;

sa luinit'iv an soloil? L'o\i>licali(in ivsti'la iiu'inc, ils peuvent faire obser\cr rpic l'.Vpôlre cherchait
Uiiaiiil l'ilo l'sl 1<' plus rai)|)ri)cli(''(' du soloil, clli' une analogie jionr expliqii(>r la résurrection des

n'fsl irlainr (iii'à une lAlivinilc ; le ri'slc du corps, ipii n'auront pas sans doute telle qualité

gldbi', (luii'sl Utid l'iilicr en liimirnMrcsl


plfiiif visible, telle aiiti-e (pialilc inliinsèipie ; (pi'à CC
visil)lc' lie la tcnv (luaii nioincnl où l'ashv est titre, puisque les astres ont en eux-mêmes un
opposé à la oUVf sa l'ace liuuiucusc.
Ifiir cl lui éclat ditférent, il peut \ en avoir de plus gros
;VJ. ne uian(|uc pasde sa\auls poiu-
Toiilclois il (|ue le soleil. Ceiiendaiit, c'est à eux d'expliquer
soutenir ipie ce ii'csl pas la pleine hiiio qui leur comment, dans leur pro|tre svstème, le soleil

lail croire ipic cel aslrc a clé créé dans la phase exerce une intlueucc prépondérante, ar-
si ipi'il

du ([ualoizièine jour, mais ces leiines deriùii- rête avec ses rayons et force à [rétrograder les

Inie La lune lut créée pour inarcpiei- le coin-


: « étoiles les plus considérables et |jiis(pi'à celles

« niencenienl de la !uiit; » en elïel la lune n'ap- honorent davantage car si elles égalent
(pi'ils :

parail au coinnicnc<'nieid de la nuil ([ue lors- ou sur|)assent le soleil en grosseur, il n'est pas
qu'elle estdans son plein anlrenienl, elle ap- ; vraisemblable qu'elles cèdent à riiilliieiice'de ses

paraît dans le jour à l'horizon, ou se lève à une rayons. aux cons-


S'ils atlribiieiil la su|)éri()rité

lieuie d'aulant plus avancée de la nuit que son tellations du Zodiaque ou au Chariot, quisonlcn
croissant est plus petit. .Mais si l'on entend (pie dehors de l'action du soleil, pounpioi décernent-
la lune est le principe, c'est-à-dire, la domina- ils un culte particulier à ces constellations'? pour-

trice des nuits, connue l'induiuc le terme grec quoi en font-ils les reines du [Zodiaque? C'est
àoyr, et plus clairement encoiv le passage où une contradiction en effet bien qu'on jniisse
:

le l'salmiste s'écrie : <( Une le soleil commande soutenir (|ue le mouvement rétrograde ou |teiit-
« a» jour, (>t la lune, à la nuit '; » ou n'est plus être le relard de ces constellations ue dépende
de calcnler l'âge de la lune ni de croire
(ililij;é pas du soleil, mais de causes moins connues,
que la lormalion de cet astre suppose la première c'est au soleil qu'ils attribuent la principale in-

phase. fluence dans les calculs insensés où ils s'égarent


CHAPITUE \Vl. à la recherche des décrets du destin, comme
on peut le véi'ifier dans leurs livres.

1)K 1,.V LIMIKRE RELATIVE DES .4STKES. 34. Mais qu'ils parlent du ciel comme il leur
plaira ue connaissent pas le Père qui règne
: ils
33. On agite encore la question de savoir si
dans les cieiLX. Pour nous, il n'y a ni utilité ni
les luminaires visibles du ciel, c'est-à-dire, le
convenance à nous perdre dans des recherches
soleil, la lune et les étoiles, projettent une même profondes sur la distance ou la grandeur des
quantité de lumière, et si leur clarté de plus en
astres,et à consacrer à de tels problèmes le
plus tàihle n'est (ju'une illusion qui s'explique
temps que réclament des questions plus sérieuses
par leur éloignement relatil de la terre. Pour la fécondes. N'ous av ons toute raison de croi-
et plus
lune en particulier, on ne doute pas qu'elle ne re, sur la foi de l'Ecriture, (lu'ily a deux luminai-
jette moins vive que le soleil, on croit
une clarté
sans qu'ils soient
res plus grands que les astres,
même (pi'elle lui emprunte sa lumière. (Juant pourtant d'égale grandeur. Aussi l'Ecriture,
au\ étoiles, on ne craint pas de soutenir qu'un après leur avoir décerné la prééminence, ajoute-
gland nombre égalent ou surpassent même le « 11 lit le plus grand luminaire pour mar-
t-elle :

soleil en grosseur et que leur distance seule les l'ait


« quer le commencement du jour, le plus petit,
paraître plus petites. Peut-être devrait-il nous
« pour marquer le commencement de la nuit. »
sutlire de savoir que ces astres, quelle que soit
On nous accordera bien sans doute, pour ne pas
leur nature, ont eu Dieu pour créateur. Cepen-
contredire le témoignage de nos yeux, (pie ces
dant, ra|)peloiis-nons ces paroles inl'aillibles de
deux astres éclairent notre globe plus que tout
l'Apôtre : « L'éclat du soleil n'est pas le niénie
les autres ensemble, (jue l'éclat du jour n'est dû
Il que celui de la lune et des étoiles : une étoile
qu'à la lumière du soleil, et que la nuit, malgré
« ditTère d'une autre en clarté -. » Les partisans de
toutes les étoiles, serait bien mois brillante sans
ce système peuvent objecter, sans contredire l'A-
les ravons de la lune.
pôtre, (jue les astres ont un éclat différent sans
doute, mais à condition d'être vus de la terre :

'
Ps. c.vxxv, 8, 9. — • I Cor. xv. 4».
168 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

qui, l'œil fixé sur cette position des astres, tirant


CHAPITRE XVII. lemôme horoscope, aurait prédit que l'un des
deux frères serait chL-ri da sa mère, et l'autre,
RÉFUTATION DE l'aSTROLOGIE.
non? Sa prédiction en effet aurat été fausse, si
80. Quand à l'art chimérique qui fait dépendre elle n'eût pas signalé cette antipathie ; et si

le destin des astres, à ces prédictions faites sur elle l'eût signalée, quoique conforme à la vé-
les prétendues lois de l'astronomie qu'on appelle rité, elle n'aurait plus été faite selon les for-
les aiTêls de la fatalité, la saine doctrine de l'E- mules consacrées dans ces absurdes manuels.
glise les repousse avec mépris cette opinion, Si celte histoire les trouve incrédules, parce
:

en effet, a pour conséquence de supprimer le qu'elle est tirée de nos saints livres; peuvent-
principe même de la prière et d'attribuer à Dieu, ils donc nier l'ordre naturel ? Puisqu'ils se
lecréateur des astres, plutôt qu'à l'homme, l'au- prétendent infaillibles, une fois qu'ils ont trouvé
teur des crimes, l'aveuglement dans les actions l'heure précise de la conception, qu'ils ne dé-
le plus clairement condamnées par la conscience. daignent pas de jeter sur la conception de deux
D'ailleurs, notre àmo n'est sous la sujétion d'au- jumeaux ordinaires un regard tout humain.
3". Reconnaissons-le
cun corps, même
des corps célestes, par le pri- rencontrent parfois
: s'ils

vilège de sa nature sur ce point, les astrologues


:
la vérité, c'est par un impulsion mystérieuse que
peuvent écouter les leçons même de leurs phi- l'àrae humaine reçoit à son insu. Et lorsque
losophes. En outre, les corps suspendus au- cette connaissance doit séduire les hommes, elle

dessus de la leri-e, n'ont pas des vertus supé- est l'œuvre des esprits tentateurs : car ils ont
rieures à celles de la matière que ces hommes l'idée ce de qui arrive dans le monde, par l'effet

ont entre les mains. En voici une preuve : une de la pénétration d'une intelligence plus fine,

multitude infinie de germes destinés à produire d'une organisation plus subtile, d'une expérience
des corps de toute espèce, animaux, plantes, ar- consommée qu'ils doivent à une existence si lon-
en un clin-d'œil et il en
bustes, se disséminent gue, enfin par une révélation de l'avenir, que les
naîtégalement en un clin-d'œil une foide d'êtres saints auges leur font, sur l'ordre même de Dieu
imiombrables. Quelle prodigieuse ^ariété de dé- qui, dans les mystères de sajustice incorruptible,
règle les destinées des hommes. Parfois ces es-
veloppements, de propriétés actives, et cela non-
môme prits pervers font prédire, comme par une ré-
seulement en différents pays, mais dans la
vélation surnaturelle, ce qu'ils ont dessein de;
contrée! Ils réussiraient plus vite à compter
faire.Tout bon chrétien doit donc se défier des
les étoiles qu'à analyser ces merveilles.
astrologues, des devins, surtout quand ils disent
36. Qu'y a-t-il de plus insensé, de plus extrava-
vrai, de peur qu'ils ne séduisent l'âme et ne
gant que de soutenir, malgré ces raisons qui les
l'enveloppeuî dans le pacte impie que fait con-
confondent, que la situation relative des astres
tracter tout con)merce avec les démons.
influe seulement sur la destinée des hommes
dont l'existence s'y rapporte? Eh bien! sur ce
point même, ils sont confondus par l'exemple CHAPITRE XVIII.
de deux frères jumeaux qui, malgré l'identité la
plus parfaite dans la conjonction des astres, ont qu'il est difficile de savoir si les astres sont
un sort différent, mènent une vie où le bonheur GOUVERNÉS et AMMÉS PAR DES ESPRITS.
et l'infortune sont inégalement repartis, et
mem'ent d'une façon toute contraire. Quoique 38. On demande souvent si les luminaires
la naissance de l'un ail précédé celle de l'autre, du ciel ne sont que des corps, ou s'ils possèdent
l'intervalle fut assez courtpour échapper à tous des esprits pour les diriger dans ce dernier cas,
:

les calculs d'un astrologue. Jacob tenant de sa on voudrait savoir si ces esprits leur commiini
main le talon de sou frèie, soiii le premier du quent la vie, comme le principe qui anime la
sein maternel; on aurait qu'un dit qu'il n'y avait
matière dans les animaux, ou s'ils les gouver-
seul enfant qui se dédoubla 1. Assurément, le nent sans y être unis, par le seul fait de lem-
rapport de ]»osition, poui' employerleur langage, présence.
lie |)0U\ait ètie diffei'eid. Oi' pouiiaif-on rien 3!1. où nous sommes arrivés, celle
Au |)oiiit
maginer de plus chimérique (ju'un astrologue (|uestioii me
semble insoluble toutefois, j'es- :

père que dans la suite des ex|)licatioiis (|uc je


' Gen. xvv. 2.

LIVRE m. — LES ftTRES VIVANTS. IRA

(loiiiif sur l'Ecriliiiv, il se prôsontcra (iiichiuo hasai'd une o|iinion mal éclaircic, de peur ipi'au
passa^c'oi'i jc|)()iinai la IraitiM' plus à propos, cl, moment où la vérité peut-cMrc se montrera dans
livres saints, tout sou jour, sans coidredii'e toutefois les pa-
sans coiuproinoltiv l'aiilorili- ili's

arrivrr, non f^i une vérité invincil)lt'nu;nt dr- roles île ou du nouveau l'estaïueid, nous
raui'ieu

nionlnr, mais à uno liypoliièso plausible. Gar- ne tiouvions, dans l'altaeiiemenlà notre erreur,
dons ici le juste t(>nipéi-aMii'nt (pie coniinande un molif de la repousseï'. J'ai'rive doue au li'oi-
une pieté sél•icus(^ et exilons d'admettre au sième livre de cet ouvrage.

LIVRE

LES KTRES VIVANTS

de ciel et de cieux. C'est ainsi qu'en latin le


mot terra s'emploie dans le même sens au sin-
CH.VPITKE PREMIKR.
gulier et au pluriel et qu'on dit également ar-
bem terrurum, arbem terne.
poniyroi i.a c.ukation des poissons i'reckue-t-
i;i.I,E, n.VNS I.F. Rh'eiTSACUÉ, CELLE OES OISEVIX?
ET LE CIEL.
CHAPITRE 11.
AFFINITÉ ENTRE l/EAt: ET I.'aUI, I.'aIU

LES CIEUX PRIMITIFS ONT ÉTÉ ABÎMÉS DANS LES


1. « Et Dieu dit :Que les eaux produisentdes
EAIX DU DÉLUGE ET 1,'aIR s'EST TRANSFORMÉ
>< animaux qui se meuvent etipii aient vie (pie :

vers le liriiiauieut.
EN EAU.
' les oiseaux volent sur la terre,

.- Et il en l'ut ainsi. Dieu créa donc les fjrands


"2. Nousdans une des Epilres appelées
lisons
" poissons, lesanimau\vivantset(pii se meuvent,
Canoiii(pies, que les cieux aériens ont disparu
<i tiue les eau.x produisirent, selon leures[)èce; il

selon dans le Déluge '. En elfel la masse d'eau ([iii,


« créa aussi les oiseaux ayant des ail. s,
d'après la Genèse, dépassa de quinze coudées h;
« leur espèce. El Dieu vil i|ue cela ('lai! hoii, et
sommet des (ilus hautes montagnes, ne put mou-
« il les bénit, disant : croisse/ et niultiplie/-vous;
ler jusqu'aux astres. Au contraire, l'espace où
« remplissez les eaux dans les mers et (pie les
l'air est plus dense et où volent les oiseaux,
« oiseaux se miilliplient sur la terre. Et le soir
ayant été en tout ou en partie envahi par les eaux,
" se tit, el an matin s'accomplit le ciiupiième
Ainsi, ce sont maintenant les êtres vi-
les cieux d'alors périrent, comme dans on le dit
« jour. »

produisent dans la région inl'é-


cette Epitre. La seule manière, selon moi, d'en-
\auts (pii se
tendre cette disparition des cieux, est d'admettre
rieure du monde, et d'abord dans les eaux, l'é-

plus d'aflinité avecl'air car, que l'air y changea de nature el se transforma


lémeul (pii a le :

voisin du ciel où brillent les lumi- en ces vapeurs qui ont tant d'allinité avec l'eau :

l'air est si
autrement, loin d'avoir disparu, ils auraient été
naires, (pi'on lui donne souvent le nom de ciel;
transportés plus haut, lorsque les flots envahi-
je ne si on pom-rait le nommer
sais toutefois
rent leur domaine. D'après cela nous pourrons,
firmament. Quant au mot deux, il désigne au
conformément à de cette Epitre, croi-
l'autorité
pluriel la ini'ine chose que ciel au siimulier :

re ([ue les cieux d'alors ont péri, en se ré-


car, si le mot ciel, dans la Genèse, signiiie l'es-
duisant en subtiles vapeurs, et (pie d'autres les
pace qui sépare les eaux supérieures d'avec les
ont remplacés 2; plus aisément que d'admettre
eaux iiilérienres, le Psaliniste n'entend pas autre
l'hypothèse où le ciel aérien aurait reculé, en
chose (piand il dit : « Que les eaux su'pimdues
•< au-dessus des rieii.r louent le nom du Sei-
empiétant sur l'espace assigné au ciel étoile.
3. L'ordre exigeait donc que, dans la création
« gneur. » Les cieux des cieux distinguent dans
des êtres destinés à peupler les régions inférieures
l'espace le ciel étoile du ciel a ''rien, l'un au-des-
sus, l'autre au-dessous, et on retrouve ce sens dans de l'iiuivers, si souvent comprises sous l'expres-
le môme Psaume : « Louez-le, cieux des cieux ">. » sion générale de terre, les animaux fussent tirés

Il est donc évident (pic l'air est souvent synoinme de VcAW, d'abord, de la terre, ensuite. L'air, en
' lien. 1, 20-31. — = Ps. cxLvlli,!, 5. ' U eétr. 111.1!. 'Ibid.v.7
,

170 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

effet, a tant d'affinité avec l'eau, qu'il s'épaissit de la terre, pleine de vapeurs et d'agitation Voilà .

avec les vapeurs, produil le vcul cl comme i'àmc pourquoi, au lieu de dire que les eaux piodui- :

des tempêtes, rassemble les nuages, et est assez sent des animaux qui se meuvent et (|ui vivent
lourd pour porter les oiseaux. Un poète profane et que l'air produise des oiseaux qui volent sur la

a dit L'Olympe domine


peut-être avec vérité : « terre; l'Écriture raconte que ces deux espèces
« les nuages et sa cime est paisible » on pré- '
; ont été tirées des eaux. Ainsi on a résumé sous un
tend en effet que l'air est si rare au sommet de même mot et les eaux condensées qui s'écoulent,
l'Olympe, qu'il n'est jamais obscurci par les séjour des poissons, et les eaux suspendues sous
nuages ni agité par le vent il est même trop : forme de vapeurs, séjour des oiseaux.
léger pour porter les oiseaux ou suffire à la respi-
ration de l'homme, accoutumé à une atmosplière CHAPITRE IV.
moins subtile, si d'aventure il faisait l'ascension
DES RAPPORTS QV\ EXISTENT ENTRE LES QIATUE
delà montagne. Cependant, l'air lui-mèmequitte
ÉLÉME.NTS ET LES CINQ SENS.
ses hauteurs pour se mêler inlimemenl avec l'eau
et on a raison de croire qu'il s'est fondu en eau à 6. Certains philosophes ont poussé l'analyse
l'époque du déluge car on ne saurait admet- :
jusqu'à distinguer les opérations des cinq sens
tre qu'il ait envahi l'espace réservé au ciel étoile, d'après le r.Me qu'y remplissent les quatre élé-

quand les flots dépassèrent les plus hautes mon- ments : d'après eux la vue à rapport au feu, l'ouïe
tagnes. à l'air, l'odorat et le goût se raltachenl à l'eau ;

l'odorat en effet, exige pour s'exercer les exhalai-


CHAPITRE III. sious qui vont épaissir l'air où volent les oiseaux ;

le goût, la sécrétion d'une humeur gra.sse et vis-


OPINIONS DES SAVANTS SrU l.\. TUANSFORMATION (pieiise. La saveur des substances n'est "per(;iie
DES ÉLÉ.1IENTS. 1,'AUt n'EST POINT OMIS DANS 1,\ (pi'à la contlilion qu'elles se mêlent à la salive,
GENIÎSE. tussent-elles toutes sèches quanti elles ont été iii-

troiluites dans Cependant le feu se


la bouche.
4. La transformation des éléments, il est vrai,
mêle à tous les éléments pourv proiluire le mou-
soulève bien des diflicultés même parmi les sa- vement. L'eau, en effet, se congèle par dél'aul de
vants qui consacrent à ces recherches tout leur
chaleur, et quoique les autres éléments puissent
temps et toute leur sagacité. D'après ceux-ci,
être portés à une haute température, le feu ne
il aucun élément qui ne puisse se transfor-
n'est
peut perdre la sienne : il s'éteint et cesse d'être,
mer et se clianger en un autre selon ceux-là, :

pluUM que de rester froid ou de s'attiédir au


chaque élément a une propriété essentielle, irré-
contact d'un corps froid. Quant au cinquième
ductible, qui l'cmpèche de se fondre absolument
sens, le tact, il correspond à la terre: remar(jiiez
avec un autre. Nous ti'aiterons peut-être cette
qu'il est répandu sur toute la surface du corps
question, si Dieu le permet, avec le développe- qui n'est qu'une argile transformée. On ajoute
ment quelle comporte, quand l'ordre des idées
même (pie les corps cesseraient d'être visibles ou
l'appellera : jjour le mouieid, j'ai jugé à propos
palpables, en l'absence du feu ou de la terre. Il
d'en l'aire mention, afin de faire sentir avec faut donc conclure que tous les éléments se mê-
quelle justesse on raconte la ci-éation des animaux lent entre eux et (pie leur nom vient de la pro-
aciuatiques avant celle des animaux terrestres.
priété niaitresse qui les distingue. Pourquoi les
o. 11 ne faut pas s'iniagiuer en effet que l'É-
sens s'émoussent-ils, quand le corps éprouve un
criture ait passé sous silence aucun des éléments froid trop vif?Cjla tient au ralentissemeut du
qui composent l'univers, et que, sur les quatre
mouvement naturel que le corps doit à la cha-
éir'uienls si conmis, il ne soil (|uestion «juc de trois,
leur, et qui s'opère au moment que le feu .se
le ciel, l'eau, la terre, tandis (pie l'air serait omis.
mêle à l'air, l'air à l'eau, l'eau à la masse argi-
l^'Kcriture, pourdésigiier l'univers, emploie cons- leuse du corps, les éléments les ])lus sublils péné-
tamment les termes de
de terre, en y ajou- ciel et
trant les plus épais.
tant quelquefois celui de mer. Par conséquent, '
Plus la matière est subtile, plus elle se rap-'
DU peut confondre l'air, soil avec le ciel, soil
lu'oebe sans doute de l'esprit : tmitefois, il y a
avec la terre, selon que l'on en considère la pai-
toujours un abime entre ces deux substances,
sible et tranquille élévation, <iu la région voisine
puisque l'une reste corps et (pie l'aulie ne le de-
I
Lucain. Iiv. 1. vient jamais.
.

LIVRE III. — i>ES rTRES VIVANTS. 171

inférieur, comme il recueille les vapeurs qui


CIIAPITHF, V. s'élèveiil (le lu tcire ri di' la nier, et ipi'il se con-
deiise en quelque sorte pDiiicIre capable de porter
DIC l,A SEMSIBILITIC ItK l'.V.MK.
les oiseaux, les seuls animaux ipii \ S(uit intro-
duits viennent des eaii\. L'atiuuspliére, eu elfel,
7. A ce litrclast-nsalion n'est point nn pliôno-
[Kirte les oiseaux, et ilss'\ soiitieiiiieiit a\ec leurs
in(>ii(' pliNsiquo c'est l'Ame qui seul an niojen
:

ailes, comme les poissons fendenl les eaux avec


lies iiryanes. On a liean deinonlier avec (inesse
leurs nageoires.
(|ne la division des sens correspond à la divei-
silé même des éléments, l'âme innnaléiielle cl
CHAPITRK VII.
seule douée de la facilité de sentir, est le principe

secret qui met la sensibilité en jeu dans les or- IL EST PROBABLE QLE LES OISEALX TIRENT
ganes. Son acIiNite succède donc inunédialemeul LEIU oniC.lNE DE l'eaU.
au mouvement subtil du t'en, maiselle n'obtient
pas les mêmes elTels dans tous les orfzaiies : dans 0. C'est donc avec une exactitude scientifiipie

l'opération de la vue, elle refoule la cbaleur et pourainsi dire, ipie l'Ks[)iil(le Dieu ipii inspirait

atteint la lumière ; dans celle de l'ouïe, elle pé- railleur de la (icnèsc,nous apprend que tout ce
nètre avec la cbaleur du feu jusqu'au fluide de qui vole a pris naissance dans les eaux. Ce do-
l'air; dans l'acte de lodoiat, elle dépasse l'air maine s'est divisé en deux, l'eau condensée en
pur émanations des eaux qui com-
et atteint ces bas, l'atmosphère en haut, pour recevoir la

posent l'atmosplièiv; dans l'acte du goût, elle double espèce de ces animaux, ceux qui nagent
alleini les humeurs iuiueuses et grasses du cor|»s; et ceux qui volent. Aussi ont ils été pourvus des

eiiliii, elle dépasse ces humeurs et, rencontrant la deux sens qui ont le plus de rapport avec cet
masse argileuse du corps, elle exécute l'oiiération élément, l'odoral, pour apprécier les vapeurs, le
du toucher. goùl, pour apprécier la [tureté de l'eau. Le tact,
sansdoiite, nous permet de sentir l'eau et le vent,
CIIAPITIU': VI.
grâce à la matière terreuse qui s'y mêle mais :

DE pour ces éléments si condensés que l'on peut les


I.VIK .n'a point KTK O.MIS l'Ali I.'aITEI 11 l>\
manier, le tact est encore plus développé. On a
GENÈSE
donc eu raison de comprendre sous l'expression
S. L'auleur de la Genèse n'ignorait donc ni les générale de terre tous les éléments tlistribués dans
propriél(''s des éléments ni leur ordre, puisqu'en ces deux parties de l'univers ;cet ordre est claire-

inlroduisanl ilans l'univers les êtres visibles, des- ment marqué dans le Psalmiste :« Louez le Sei-

tinés à se mouvoir au sein des éléments, selon « gneur dans les cienx, » voilà pour les sphères
leur espèce, il a successivement parlé dans ses supérinires; « louez le Seigneur sur la terre; »

récits des luminaires du ciel, des animaux nés voilà pour la région inférieure qu'il asssigne
des eaux, enfin des animaux terrestres. S'il n'a comme domaine aux tempêtes, aux abiines, et à
pas nonui lé l'air, ce n'est j)oint une omission : cela ce feu (|ui brûle celui qui le touche '. En effet, le

vient de ce ([ue la région paisible et tranquille de l'eune s'échappe de l'eau et de la terre en mou-
l'air, où, dit-on, les oiseaux ne peuvent voler, vement que pour se transformer immédiatemen 1

touche au ciel étoile et, d'après son élévation, en un autre élément. Bien qu'il révêle sa ten-
prend dans rtcriturelcnom de ciel; tandis (jue dance à s'élever en haut par son mouvement
sousle nom de terre, il faut comprendre tout l'es- ascensionel, il est cependant incapable de percer
pace (|ui s'étend depuis la région des météores, jusi|u'à la hauteur paisible des cieux : l'atmos-
« (lamme, grêle, neige, glace, lem[)èlt's, abiines phère l'éloiilfe et l'absorbe. Aussi s'agite-t-il en
« de toute sorte ', njnscpi'au globe solide qui est la mouvements bruyants an sein de cette masse
terre |)ropremeut dite. Ainsi, l'air le plus élevé impure et engourdie, afin d'en tempérer l'inerf ie,
ou ne ren-
faisant jjartie de la plus haute région, et de servir aux hoinnies d'auxiliaire ou d'épou-
fermant aucune créature analogue à celles dont il vanlail même.
est ici question, n'a été ni omis, puisque le ciel 10. Comme le toucher permet de percevoir l'agi-
est nommé, ni cité, puisqu'il n'avait aucun rap- tation des eaux et le mouvement de l'air et qu'il

port avec cet ordre de créatures; ipiant à l'air est surtout relatif à l'élcinenl de la terre, les

' l's. rxtvm, 8. 7. Ps. cjtLvill, 1-6.


172 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

poissons et surtout les oiseaux aiment à se nourir leurs mœurs dans des viviers. Je veux bien qu'ils
de subtanccs terrestres. Les oiseaux, en effet, se soient trompés, mais j'assure que les poissons
se posent ou font leur nid sur la terre. C'est que ont don do la mémoire je le sais par expé-
le ;

les vapeurs sorties des eaux se répandent aussi à rience et on peut l'observer comme moi. Il y a
la surface du sol. Aussi l'Écriture après avoir à Bulle-Royale un bassin magnifique rempli de
dit « Que les eaux produisent des animaux qui
: poissons. Les promeneurs ne manquent guère de
« vivent et qui se meuvent et des animaux qui leur jeter quelque chose, et poissons aussitôt de
« volent, » ajoute « sur la terre, vers le lirmament
: saisir la proie et de fuir ou de se la disputer.
« du ciel » ces dernières expressions peuvent
; Accoutumés à recevoir ainsi la pâture, ds aper-
éclaircir un point jusque-là resté obscur. Elle ne çoivent à peine quelque personne circuler le
dit pas, en effet, dans le lirmament du ciel, comme long du bassin, qu'ils se rassemblçnt, vont et
elle a fait en parlant des luminaires, mais vers viennent à la nage, épiant l'endroit d'où on
le lirmament du ciel, en d'autres termes, dans la leur jette quelque chose. Je trouve donc que l'é-
région voisine. En effet l'atmosphère où volent piihète de reptile caractérise aussi bien les pois-
les oiseaux est voisine de l'espace où ils ne peu- sons que celle de volatile les oiseaux : car, si le
vent s'élever, lequel, par sa tranquillité, se con- manque de mémoire ou peu de développe- le
fond avec le lirmament. Les oiseaux Aolentdonc ment des sens avaient élé une raison suffisante
dans la partie du cielque le psaliniste désigne aussi pour leur ùter le nom d'animaux qui vivent, il
sous le nom de terre ; à ce sont souvent
titre, ils faudrait aussi l'ùler aux oiseaux pourtant l'exis- :

appelés les oiseaux du ciel dans l'Écriture. Mais tence de ceux-ci, qui se passe sous nos yeux,
n'oublions pasque le ciel ici esttoutel'étenduequi nous révèle leur mémoire, leurs chants variés,
touche au lirmament, et non le lirmament lui- leur admiralile industrie pour construire des nids
même. et élever leur couvée.

CHAPITRE VIII. CHAPITRE IX.

POURQIOI LES POISSONS OM-ILS KTli APPELÉS DE LA CLASIFICATION DES ETRES SELON L ELEMENT
KEPTU.ES A AMES VIVANTES? Oi; ILS VIVENT.

11. On pense assez généralement que les pois- 18. Je n'ignore pas quecerlains philosophes ont
sons ont élé appelés, non des animaux vivants, classéles èlres d'après les élémenls qui leursoid
mais «reptiles à âmes vivantes, » parce que leurs propres : ils appellent terrestres, non-seulement
sens sont peu développes. Si celte explication les animaux qui rampent ou qui marchent sur
était exacte, les oiseaux auraient été expressé- la terre, mais encore les oiseaux parce qu!ils
ment appelés «H/;nr(Hxr/(Y/;i?.';. Mais puisqu'ils ont s'abattent sur la terrequand ils sont las de voler.
été appelés « ceux qui volent, volatilia, » comme Dans leur système, les démons habitent l'air, les
les poissons ont été nomiiu's «ceux qui l'ampeiil, DieiLx, le ciel ou nous plai.ous les huniuaires el
•ireptilia, « il faut bien admetlreune ellipse eltra- losanges. Ils assignent aussi aux poissons, aux
duire ceux d'entre lesanimaux vivants qui l'am-
: monstres marins les eaux pour séjour, afin que
pent et ceux qui volent. C'est par untouranalogue chaque élément ait son espèce propre. Mais la
(lu'on dilen lalin iijniibiliahomiinim, les hommes terre forme apparennneiil le fond des eaux, et ils
inconnus. Ilya sans doule d'autres animauxqui auraient quelque peine à prouver que les pois-
rampentsurla terre; cependant la piuparlonides sons ne vont jamais s'y reposer et y repren-
pieds pour se mouvoir, et le nombre des animaux dre des forces p(tur nager , comme font les

qui rampent sur la terre est peut-être aussi borné oiseaux pour voler. Jeveux bien que les poissons
que celui des animaux qui marchent dans les ne le fasseid pas souvent mais cela vient de ce :

eaux. que l'eau est plus capable que l'air de les sou-
12. D'autres ont cru que les poissons n'avaient tenir; aussi ])orlo-l-elle des aniuiaux terres-
été qualifiés ainsi que parce qu'ils n'ont ni mé- tres, soit qu'ils aient appris à nager, connue
moireiii vi(M|uidénole(|uel(pu' inleirmeucc. Celle riionnne , soit qu'ils uagi-id nalurellemenl,
iipiniomicntd'untléraiil d'expéiieiice. Uuelqucs coaune les (piadrupèdos . Se rolraiiehent-ils

savaids racoulenl s'jr les poissons des eho.ses sur ce lail, (|iio les poissons soûl dépourvus de
surprenaides, el ils oui fort liieii jin obsciNcr |ial les ?Mais alors les phoques ne sont plus dos aui-
,

I.IYIIK m. — LKS f.TUES VIVANTS. Il.t

iii.iu\ iii.uiiis, les iinilt'iiMcs, les (•oliiiiiii.'oiis ne condensation, les nuages cl la pluie, par le re-

soni plus (It's aiiim,ni\ Ici rcsiit's : c.ir les pic- froidissement des nuagi'S, la neige el la grêle,

iniiMs app:irlii'iiiu'iil;i la classe des ipiadruijMcs, pai- son epaiiouissemeul, la séréiiilé, selon les
cl IcssiToiiils, bien (pi'ils ii'aiciil pasilc pallcs, se ordres el la puissance de Dieu, le(piel, après avoir
rcposciil sur la Icrre, (pic liis-.ic '!
ils la ipiilteiil créé le monde, le ;ioinerue dans toute son élen-
peu ou jamais. Les (Irajions, (pKiiipie ilépouivus due. Aussi le l'sahniste apièsa\oii' énuméré tous
(le i)ictls, se reposent, ilit-ou, dans les cavernes, ces phénomènes, ajoute « (pi'ils o!)éissent à la

ou nicme s'i-ièNcnl dans faif. Ca' son! des ani- « parole de Dieu, » alin (pi'on ne s'ima^;iiie pas
maux diriicilcs à oliseiM'i', sans doidc, mais ils ne (pie la proNideiice divine est éti'aiigère à leur

sontinconmis ni dans les Icllrcs profanes ni dans production '.

rivcrilurc. l.'i. Si aucontraire lesangesrcbellesavaieul un


corpscélesle, a\antleui' [)éclié, on ne sera pas sur-
CIIAPITRK X. pris qu'ils l'aient échangé pour une envelopix'
d'air, alin de jiouvoir être tourmentéspar le feu,
ON PEl/T ACCORUEB OL E LES UÉMONS HABITENT t'.VUt,
rélément de la icjiion supérieure. Dieu leiira per-
SANS CONTHEDIUE LE IIÉCIT Ol" l'ÉCKITIKE NOl S
mis d'occuper, non la |)arlie pure et élevée de l'air,
ItÉVKLEUlELES POISSONS SONT SORTIS UES EAIX.
mais l'atmosphère c'est leur prison en atten-
— DES MÉTÉORES. dant le jour du jugement. D'autres passages de
:

li. Les démons liabitonl l'air, dil-oii, el sont


riuiitiire nous donneront occasion de parler plus
doués d'un corps aérien; par coriséqiienl, ils ikï à fond des anges prévaricateurs. IJornons donc

sont jamais décomposés paiMa mort ;carrélémenl ici nos réflexions et concluons (pie, si l'atmos-

cpii domine dans leur organisalion, cstplus actif phère, grâce à l'air qui s'étend jusqu'à la surface

ipie passif. L'eau el la terre sont au-dessous d'eux, de la terre et des eaux, est assez lourde pour
et le leu [)m- du ciel étoile s'élève au-dessus de porter les substances aérifomes, elle peut aussi

ou sus- soutenir les oiseaux sortis de l'eau, grâce aux


leur tète. J'entends par èlcmcids passifs,
ceptibles de subir des modilicalions, la terre vapeurs : on sait en effet que ces exhalaisons se

et l'eau, par élérnents actifs l'air et le feu.


mêlent à l'air le plus voisin de la terre et des
C.ette opinion n'est point contraire au passage eaux et composent ces nuages <[ui se distillent en
dans lequel l'Écriture révèle que les « ani- douce rosée dans les nuits fraîches el tombent sons
la forme de givres par un lioid plus intense.
« maux qui volent » sont tirés des eaux, sans
(|u'il soit question de l'air, puisque le domaine
assigné aux oiseaux est formé d'eau à l'état de
CHAPITRE XL
va|)eurs légères et subtiles. Or, l'air s'étend des
DES DIVERSES ESPÈCES d'aNI.MAUX CRÉÉS DE LA
limites du ciel étoile à la surface des eaux et de
TERRE 2.
la terre ferni;\ Les vapeurs, loin de l'obscurcir

dans toute son étendue, s'arrêtent aux limites 1(). « Et Dieu dit : Que la terre produise des
où commence la terre, selon l'expression du « animaux vivants selon leur espèce, quadru-
l*salmiste « Louez le Seigneur sur la terre i » .
pèdcs, reptiles, bêtes de la terre selon leures-
:

«
Quant îi la région supérieure de l'air, le calme « pèce, animaux domestiques selon leur espèce.
(|ui y règne la confond dans la même tranquilité
« Et cela se donc les bêtes de la terre,
fit. Dieu fit
avec le ciel et lui vaut le même nom. Si donc les « selon leur espèce, lesanimaux domestiques se-
anges rebelles, avant leur faute, occupaient ce « Ion leur espèce, et tous les reptiles de la terre
séjour paisible avec l'Archange, leurchef, aujour-
« selon leur es])èce. Et Dieu vit que cela était
d'hui Satan, et s'ils ne faisaient p;u-tie ni de la
dans l'ordre de peupler à ce
« bon. ') Il était
cour céleste ni des chœurs par de là les cieux,
moment la seconde partie de cette basse région
comme le prétendent certains docteurs, on ne
dans laquelle l'Ecriture comprend sous le nom
• doit pas s'étonner qu'ils aient été précipités dans
de terre l'atmosphère el tous les abîmes, en
celle atmosphère car l'atrydomineencore, puis-
d'autres termes, la terre proprement dite. On
:

qu'elle se compose d'un mélange de vapeurs et


reconnaît bien les espèces d'animaux que la terre
d'air qui, par son agitation, produit le vent, par
produisit par l'ordre de Dieu. Cependant, com-
ses ébranlements, les éclah's et le tonnerre, par sa
me on désigne souvent les animaux sous le nom
Ps. cxLvm.7. ' Psal. CXLVIII, 8. — ' Gen, 1, 2i, 25.
174 bE LA GENÈSE AU SENS IJTTÉKAL.

gï'iK'rujue li'ètres privés île la raison, il convient hasard, mais sont pris dans leur acception pré-
de distinguer ici Iciu- caractère s[)écil]i]ae. l^es cise, connue on peut aisément le remarquer dans
animaux qui rami)ent ou reptiles sont les ser- le langage ordinaire.
pents ; bien que cette qualification s'applique
CHAPITliE \1L
aussi à d'autres bètes. Le nom de bètes s'ap-
plique surtout aux animaux sauvages, lions, léo-
FORMILE, « SELON LELR ESPÈCE, » n'EST POINT
L.\
pards, tigres, loups, renards : les chiens mêmes
EMPLOYÉE POLU l'HOMME.
et les singes rentrent dans cette catégorie. Uuant
au mol pecora, bétail, il représente dans la lan- 18. Une question doit encore préoccuper le
gue ordinaire les animaux domestiques, soit qu'ils lecteur : c'est de savoir si la formule, selon leur
aiitentl'liommedansses travaux, comme le bœuf espèce, a été jetée ça et là au hasard, ou si elle
et le cheval, soit qu'ils servent à le vêtir ou à le a pour but d'indiquer que le règne animal avait i
nourrir, comme les brel)is et les porcs été créé dès l'oiigine et ne s'estdivisé en espèces
''

17. Uuant au mot quadrupèdes, que signifie- (|u'à cette époque ;si, dis-je, il préexistait comme
t-il? Tous les animaux que je viens de nommer, idéaldaus les intelligences supérieures antérieu-
si en excepte (pielques-nns, les serpents, ont
l'on rement créées. Dans celte hypothèse, l'Ecriture
quatre pattes pour marcher cependant l'Ecriture : aurait dû employer cette expression pour mar-
n'a pas employé ce terme, quoiqu'elle le suppri- quer la formation de la lumière, du ciel, des eaux
me dans le verset suivant, sans y attacher un et de la terre, des llambeauxduciel. Car leur rai-

sens particulier. A-t-elle donc entendu par là les son d'être n'a-t-elle pas préexisté éternellement
cerfs, les daims, les onagres, les sangliers, ani- et immuablement dans la sagesse de Dieu, « qui

maux qui n'appartiennent pas à la classe des « s'étend avec force d'une extrémité à l'autre, et

lions, et qui se rapprochent des bestiaux sans « qui dispose tout avec douceur i
? » Or, l'emploi
être domestiques ? Le nond)re de leur pattes leur de cette formule ne commence qu'avec la création
aurait-il valu ce nom générique devenu dès lors des végétaux et cesse aveclacréation des animaux
celui d'une espèce que l'expression
? Serait-ce terrestres. L'expression en eflfet, bien qu'elle ne
nous averti-
selou leur espèce, répétée trois fois, soit pas employée dans le verset où Dieu com-
rait de songer à trois espèces d'animaux ? D'a- mande au eaux de produire les êtres qui leur
bord on nomme les quadrupèdes et les reptiles, conviennent, se retrouve encore dans le verset
selon leur espèce : à cette classe se rattachent, suivant : « Et Dieu fit les gros poissons, tous les
selon moi, tous les reptiles pourvus de pattes, « animaux qui vivent et rampent et (|ue les eaux
comme les lézards, les steîlions. Le mot quadru- « avaient produits selon leur espèce ;
puis, tous
pède donc pas répété dans le verset suivant,
n'est <( les oiseaux selon leur espèce. »

parce qu'il est compris dans celui de reptile re- : 19. Comme les animaux sont destinés à se re-
marquez en effet qu'on n'y dit pas « les reptiles, » produire et à se transmettre leurs qualités origi-
mais, « tous les reptiles de la terre : » de la terre, nelles, faut-il voir dans l'expression sacrée la loi

puisqu'ils appartiennent à la terre et aux eaux; qui assure aux es|)èces la perpétuité ? Mais alors
tous, puisqu'on y rattache les(]uadrupèdes spécia- pourcjuoi est-il dit des arbres et des plantes que
lement désignés |)lushaut. Uuant à la seconde es- Dieules lit, non-seulement selon leur es])èce, mais
pèce, celle des bêt?s,elle comprend tous les ani- encore, selon leur ressemblance ? Les animaux

maux armés de gueule et de griffes, à l'exclu- terrestres ou aquatiques ne produiseid-ils pas


sion des serpents. La troisième espèce, celle des des êtres qui leur ressemblcid ? Serait-ce que
bestiaux, comprend les animaux qui ne sont pas l'analogie des ternies espèce et ressemblance a
carnassiers et qui n'oid pour défense que leurs empêché l'auteur sacré de répéter le second? Le
cornes, quand encore ils en ont. J'ai prévenu que mot semence n'est pas non plus répété partout ;

le mot quadrupède avm sens très-étendu, le nom- cependant il y a des germes déposés chez la plu-
bre des pattes sei't à caractériser toute cette classe; part des animaux comme chez les plantes je dis ;

et que, sous le nom de bêtes ou de bétail, on la plupart des animaux, parce ipi'on a reconnu
comprend quelquefois tous les anhnaux sans rai- (ju'il naissait des eaux ou de la terre des êtres
son. Le mot fera en latin a un sens analogue. 11 sans organes de reproduction, ce (pii indique
était utile de faire l'cmarquer (jue tous les termes que les germes ne sont pas iléposés dans leur
employés par l'Ecriture n'ont point été jetés au '
Sas. VIII, 1.
I.IVIU', III. I.KS iVrUKS VIVANTS. |-K

l'iirps, mais ilaiis les ('ir-iiiciits iiiriiics (iont ils « mei', et (pie les oiseaux se miiltiplienl sur la
|M'o\i<'iiiirnl. La rorniiilc : " selon rrs|)èce, " s'ap- " terre. on avance (pi'il snflisail de iirouon-
. Si
|»li(|uf lioiic aii\ (Mrcs (|iii se rciuodiiisriil avec cerces paroles sur une seule espèce de créatures,
k's iiit'iiu's geriiu'si'l les iiièiiics luoprit-lés a\aiil et (lu'il était iialurelde les su|ipleer pour tous les
(le tlisparaitreà leur loiir : aiiiiiii d'i'ii.x, cii cITcl, aulres èlres destinés à se reproduire, pour(pioi
n'a pour ronfinincr en lui-niènie lonle
otii criV' cette béiK'diction n'a-l-elle pas été adressée aux
son exisleiice, ou poiu' la ^larder i)erp(''lin'lle- arbres et aux |>lanles, (pii, dans cet ordre, furent
ini'iil, on enliii pour inonrii' avant de s'clic re- créés les premiers 'MUeii aurait-il jugé les végé-
pi'oditit. taux indignes de recevoir ces paroles de béiié-
•JO. S'il en esl ainsi, ponnpioi n'a-t-il pas éié diclioii, parce ipi'jls n'ont ni sensibilité ni cons-
dit : « Faisons l'Iioinine à noire iina^e ei à notre cience de l'acte par leipiel ils se reproduisent ?

Il ressoniblauce, » selon son espèce, l)ien que Aurait-il attendu, pour les prononcer, le moinenl
riionnne suit nianilestenuMit soninis à la même où il créait les êtres sensibles, idin (pi'on les ap-
loi'.' l)ira-t-on i|ne Dien a\ail créé l'iionnne im- pli(piàt ensuite à tous les animaux de la terre ?

mortel, à eondition qu'il gardât son comman- l'n ])(iinl inconicstable, c'est (pie cette béné-
dement mais(pra|)rèsle péché, l'Iiomnie « étant
; dicliori de\ail se r'''p(''ler pour l'homme, aliii

tombé an l'an;: des animaux deponi'\ns de rai- (ju'on n'accusât pas de péché l'union conjugale,
« son et leur ayant été assimilé ' , » les entants principe de la famille, et (|ii'on ne l'assimilât
de la terre turent condaumés à se reproduire, |)as à la débauche à l'adullère et à l'abus même
alin (pie le 'remr humain se perpétuât en se re- du mariage.
nouvelant '1
.Mais (pie siLiiiilierait alors la béné-
diction di\ine donnée à l'iiomme après sa créa-
CHAPITRE \IV.

lion : « Croissez, multipliez-vous, remplissez la DE I.A CRÉ.iTION DES I.NSECTES.


« terre.' » .\ui'ait-elli> pu s'accoinpliri)ariineautre
voie (|ue la jjénération? l'tMit-ètre aussi serait-il '2-2. Les insectes provoquent une (|ueslioii qui
à proposde ne hasarder aucune proposition, avant n'est pas sans importance. Ont-ils été produits au
d'avoir rencontré dans rKeriture l'occasion d'ap- début (le la création, ou sont-ils nésde la coi'rup-

prol'ondir cite question. Au ])oint où nous en lion des êtres périssables'.' La plupart, en effet,

sommes, l'oinission de la l'orimile s'explique doivent leur naissance aux maladies qui allèrent
assez par le fait que l'homme était créé seul et les corps vivants, aux immondices, aux émana-
(pie la t'einine devait en être tirée. L'espèce hu- tions empestées des cadavres ; d'autres se forment
maine d'ailleurs n'admet pas, comme les plantes, dans les végétaux qui se détériorent ou dans les

les arbres, les poissons, les oiseaux, lesserpenls, h-uils qui se gâtent : cependant tous ces êtres ont
les animaux sauvages ou domesli(pies, une va- nécessairement Dieu pourcivateur. Chaque créa-
riété infinie ; et dès lors la formule, « selon les es- ture, en effet, a son genre de beauté, et, à bien

< pèces, » excellente poiirdésiiiner les propriétés examiner, les insectes ont une structure plus
particulières d'êtres qui se ressemblent et ont merveilleuse et prouvent plus pleinement la tonte-
une origine commune, ne s'applique plus à puissanc(^ de l'ouvrier, ([ui « a tout fait dans sa
l'homme. « sagesse ', » et (jui « étendant son action d'un
« bout à l'autre du monde, y dispose tout avec
CHAPlTliE XIIL « harmonie » Loin d'abandonner à leur
''.
lai-

deur les corps é[)uisés, quand ils se décomposent


l'Ol ityroi L.V BÉMiDICTlO.N DIVINE n'a-T-ELLE ÉTÉ selon la loi de leur nature, et provoquent en nous
do.xxée yi'.vlx .vmm.vlx tirés des evlx et \ l'horreur, par la dissolution qui nous rappelle la
l'ho.m.me ?
niorlalité attachée au péché, il en fait sortir des
êtres dont les organes presque imperceptibles re-
:2l. On se demande aussi par quel privilège les
cèlent les sens les plus vifs ; aussi voit-on avec
animaux tirés des eaux partagent seuls avec
une surprise plus profonde le vol agile d'une
l'Iiomme le bienfait de la bénédiction du Créa-
mouche que la marche pesante d'une bête de
teur. Il est bien vrai, en ellet, (jue Dieu les a
somme, et l'industrie des fourmis excite plus l'é-
expressément bénis, en disant : >< Croissez et
tonnement que la force du chameau.
« multipliez-vous, et remplissez les eaux de la
23. Mais la question importante, coimne je
' Ps. XLTIII, 1^. 'Ps. dit, 24. — 'Sag. VIII, t.
ne DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉKAL.

l'ai (lii, est de savoir si les insectes uni été lur- sans éprouver déniai nidepeur, après avoir i-e-

més comme les autres êtres dans la période des couuu par un aveu sincère ses péchés et ceux de
six jours, ou s'il sont nés dans la suite de la dé- son peuple l'Apjlre même vit une vipère s'é-
1 ;

composition des corps. On (leut soutenii' que ceux lancer sur sa main et n'en rei;ut aucun mal '.
qui naissent de la terre et des eaux lurent créés Ainsi doncces animaux pouvaient être créés sans
dès l'abord on peut même y ajouter les ani-
;
être malfaisants, puisqu'il n'y avait alors ni vices
malcules qui se forment avec lavégL^ation dont à effrayer ou à punir, ni vertus à perfectionner
la terre est le principe ; car celte végétation avait par la souffrance. Aujourd'Imi, le.s exemples de
précédé la création des animaux et même celle patience sont nécessaires pour l'éditication des
des luminaires en outre, elle lait presque par-
;
hommes ; nous révèle
d'ailleurs, l'épreuve seule
lie de où ses racines s'enfoncent et d'où
la terre à nous-mêmes, dans le.s souffrances
et l'énergie
elle sortit le jour même que parut le globe nu et est le seul moven légitimi^ de reconquérir le salut

aride, plutôt pour achever de le rendre habitable éternel, (pi'une faiblesse honteuse pour le plaisir
(jue pour le peupler. Uuant aux vers qui se for- a fait perdre.
ment danslecorpstles animaux et surtout dans les
cadavres, il y aurait folie à prétendre qu'ils furent CHAPITRE XYl.
créés en même animaux, à moins
temps ipic les
qu'on ne veuille dire que dans l'organisme de POURQUOI DES ESPiîCES SOXT-ELLES EXNEMIES ?

ces animaux étaient déposés les principes, et pour


25. Je prévois une objection Pourquoi les :

ainsi dire, les germes enveloppés des insectes


animaux s'attaquent-ils entre eux? Ils n'ont point
futurs, destinés à naître, selon leurs espè-
de péchéà expier ni de vertu à perfectionner dans
ces, de leurs corps cori'ompus, d'après les
les épreuves. Assurémentmais les espèces -vivent
lois mystérieuses du Créateur, qui donne à tout le ;

les unes aux dépens des autres. Il serait peu


mouvement sans cesser d'être immuable.
juste de souhaiter une loi (pii permit aux ani-

CHAPITRE XV. maux de vivre sans se manger entre eux. Tant


que durent les êtres, ils offrent proportion, sy-
DES AMM.4LX VEXIMEIX. métrie, hiérarchie dans l'ensemble cet ordre est ;

merveilleux, mais il y a une beauté mystérieuse


iA. On demande encore d'ordinaire si les ani- et non moins réelle dans celle loi d'é luilibre qui

maux venimeux et malfaisants ont paru après la renouvelle les animaux en les transformant les
prévarication de l'homme pour le punir, ou s'ils uns parles autres. Inconnue aux ignorants, cette
ont été créés avec des mœurs inoffensives et n'ont loi sedécouvre à mesure <[u'on avance dans l'é-
attaqué poiu- la première fois (|ue des coupables. tude de la nature et devient évidente pour les
Cette dernière opinion n'a rien qui doive sur- savants accomplis. Le spectacle du mouvement
pi endre: sans doute, les peines et les douleurs qui anime les créatures moins parfaites, doit au
se nuiltiplient pendant cette vie mortelle, puisque moins offrir à l'homme d'utiles leçons, et lui

personne n'est assez juste pour oser se dire par- appi-endre à quelle activité l'oblige le salut éter-
fait et que l'Apôtre nous atteste avec tant d'auto- nel de son âme, ce magnilique privilège qui fait

rité « qu'il n'a point atteint le but et n'est point sa supériorité sur tous les êtres privés de raison.
« arrivé au bout de la carière ' » sans doute,
; Depuis l'éléphant jusqu'au ciron, les animaux
les épreuves et les souffrances physiques sont né- déploient pour sauver l'organisation éphémère
cessaires pour exercer la vertu et l'achever, car qui forme leur lot dans l'ordre où ils ont été
l'Apôtre nous apprend encore que, « pour qu'il créés, tous leurs mo\ens de défense, toutes les
« ne s'enflât pas de la grandeur de ses révéla- ressources delà ruse; celte activité n'apparait
« lions, un aiguillon a été mis dans sa chair, un que dans le besoin, lorsqu'ils cherchent à réparer
« ange de Satan, pour le frapper de la manièi-e leurs organes aux dépens de la substance des au-
« la plus ignominieuse qu'il a prié trois fois le ; tres et ceux-ci, poir se conserver, luttent, s'en-
;

« Seigneui' de l'éloigner de lui et que trois fois il fuient oucherchr-nt un refuge dans les cavernes.
'ilui a répondu ma grâce te suffd car la ver-
: ; La sensibilité physique chez tous les êtres est un
« tu s'achève dans la faiblesse 2. » Cependant, le ressort d'une énergie merveilleuse : répandue
saint prophète Daniel est resté parmi les lions dans touirorganisme par une mystérieuse union,
' Philip, m, 12. —2 II Cor. XII, 7-9. ' Daniel, vi, 22 ,
xiv, 38 , 1.x, 4-19. — ' .\ct. xxvill, 5.
I.IVHK m. — I.KS RTRKS VIVANTS

l'Ile en fait rin sysfèniovivmil, clic en ni.iinlicnl siu- le dit à riiomme


passage où Mien « La terre :

l'iinilé, ol trioniphc si hion (\e rindilTciciicc, ' pour loi des épines et des char-
produira
(|iraunin c^Iit iu- voit son corps s'allcicr ou so « dons '. » Cependant il est rlifficile de décider

(lissoiidiv sans tin nuiu\cincnl inicricur de ré- si la terre les produisit alois pour la première
sistance. fois car, les plantes et arbustes de cette espèce
:

étant utiles à beaucoup de points du vue, pou-


CHAPITRE XVll. vaient exister avec les anlrr-s, sans être pour
l'homme un instrument de supplice. Leur nais-
POL'RQIOI CERTAINS .V.MMAIV IIKVOHKNT-II.S LES
sance dans les champs (pie riiouiiuedut labourer
CADAVIIES ?
en expiation de sa faute, eut sans doute |)our
but d'agiraversa punition, puisipie partout ail-
"26. On va peiit-iMre se deniaiuler avec (piel-
leurs ils pou\ aient seiNJrd'aliMienls aux oiseaux et
qiiein(pii(''lnde pourquoi ces aiiiinatiN carnassiers

(|ui, en al'atpianl l'iionuu(> \i\anl, ne sonl ipic


au bétail, ou répondre nu lue à rpichpie besoinde
riionuiie. rneautreexplicatioii d'ailleurs ne coii-
des instrunients|)(Mn' lui l'aire expier se l'aule, lui
Iredil en rienlesensattaclieàl.i pai'oli'dixine: « L»
valoir (les sou rrranccs sa lu lai res, ilesépreuv es uti-
les, et enfin lui donner des leçons à leur insu, « terre produira pour toi des épines et des char-

|iounpioi, dis-je, ces animaux (h'-cliiiml lescada-


" dons. » On pourrait dire qu(> le sol pi-oduisait

vresdans le but de se repaitre?Kli !(priiuporteen


d(''jà celte végétation, mais (pi'elle était destinée

\ inanimée retourne, par celle


érité ipie cette chair
à fourniraux animaux une nourriture agréable,
et non à devenir pour l'homme une source de
\oieoupai' une autre, dans les profondeurs de la
peines: on sait que parmi ces plantes, les plus
nature dont le Créateur doit la retirer un jour, par
sèches et les |)lus tendres offrent à certains ani-
un miracle de sa puissance, pour lui rendre sa
forme première ? Cependant, une foi éclairée peut
maux une p.iture délicieuse et substantielle.

tirer de là une leçon salutaire il faut se confier :


Ainsi la ferre aurait commencé à pioduire ces
espèces de plantes etd'arbustes, pour condamner
entièrement au Créateur qui, i)ar des ressorts
riiomme à un pénible trava'l, à l'époque seule-
cactiés, fait mouvo'r tous les êtres depuis le plus
firandjusiprau |)lus pelitet pour (pii nos cheveux
ment où sa faute l'obligea à laboui-er le sol. Je
neveux p:is dire qu'elles uaissaiiMit ailleurs au-
mêmes sont comptés '
; et, loin de redouter cer-
paravant et qu'elles apparurent alors dans les
tains genres de moit, parce qu'on n'a pu préser-
\ erses proches du trépas, se préparer à les souffrir
champs qu'il travaillait pour y faire sa récolte ;

non, elles se reproduisaient partout seulement


tous avec une pieuse énero;ie. ;

il y eut alors entre elles et l'homme un rap-


CHAPITRE WIII. port jusque-là inconnu. Aussi l'Ecriture ne dit-
elle pas : « La terre produira des ronces et des
\ yiEL .MOMENT ET DANSQLEL BIT ONT ÉTÉ CKÉÉS « épines, » sans ajouter le mot significatif
pour : <

LES CHARDONS, LES ÉPINTIS ET, EN GÉNÉUAL, « toi en d'autres termes, tu verras naître dé-
; »
LES PLANTES STÉRILES ! sormais pour ta peine des plantes, (]ui jus(jue-
là ne servaient qu'à nourrir d'autres animaux.
•27. l'iie (piestion analogue à celles qui précè-
dent, consiste à savoir quand et pourquoi ont
CHAPITRE XIX.
été créées certaines plantes stériles, puisque Dieu
a dit « Que la terre produise de l'herbe portant POlRQrOI LE MOT
:
FAISONS » N'.V-T-IL ÉTÉ PRONONCÉ
'<

semence et des arbres fruitiers. » Ceux (pi'un


X
OIE DANS LA CRÉATION DE l'HOMME.
pareil problème occupe, ne songent pas assez à
ce qu'on appelle l'usufruit en t^rmc de droit. Le :29. « Et Dieu dit : Faisons l'homme à nohe
mot fruit n'a rapport qu'à la jouissance du pos- « image notre ressemblance, et qu'il domine
et à
sesseur. Qn'ilsexauiinent donc les avantages (|ue « sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du
l'homme recueille ou peut recueillir des produc- « ciel, sur les animaux domestiques, sur toute
tions do la tsrre et qu'ils aillent pour le reste « la terre et sur tout reptile qui rampe sur la
s'instruire auprès des personnes compétentes. « terre. Dieu créa donc l'homme à son image ;

58. Apropos des épines, et deschardonson pour- « il le créa à l'image de Dieu; il les créa mâle
rait répondre catégoriquement, en s'appuyant « et femelle. Et Dieu les bénit et leur dit : Crois-
'
Luc. Gen. m, 18.

S. ACG. — Tome IV. i«2


nx DE LA GENKSE Ad SENS LITTÉRAL.

« sez et multipliez-vous, et remplissez la terre : la raison, de l'intelligence, peu importe le mot.


« assujétissez-là, et dominez sur les poissons de Voilà pourquoi l'Apôtre dit: « Renouvelez-vous
« la mer, les oiseaux du ciel et toute bète qui se <• dans l'intéiieur de voire âme et revêlez l'homme
« meut sur la terre. Et Dieu dit Voici que je : « nouveau •, qui, par la connaissance de la vé-
« vous ai donné toute herbe ayant sa semence et « rite, se renouvelle selon rimage de Celui qui
« tout arbre portant sa semence en soi ce sera : a l'acréé 2; » ctparlà,iliii(liqiie nettement que,
« votre nourriture. Mais j'ai donne à toutes les si l'homme a été fait à l'image de Dieu, le point
« bêtes de la terre, à tous les oiseaux du ciel, à de ressemblance n'est pas dans la forme du
« tout animal qui se meut sur la terre et a la vie corps, mais dans l'essence immatérielle d'un es-
« en soi, toute herbe verte pour leur servir de prit que la vérité éclaire.
a nourritiue. Et il en fut ainsi; et Dieu vit tout 31. Aussi l'Ecriture n'a-t-elle point ici em-
« cequ'ilavait fait : etvoici(juetout étaittrès-bon. ployé les formules habituelles : « Cela se (if, »

« Et le soir arriva et au matin s'accomplit le si- et « Dieu fit ; » elle les a supprimées comme elle
« xième jour '. » La nature de l'homme offrira l'avait déjà fait pour la lumière primitive, s'il
bientôt un vaste sujet à nos réflexions. Bornons- estpermis d'entendre parcelle expression la lu-
nous maintenant à remarquer, pour terminer mière de l'intelligence, en communication a^ec
nos considérations sur les œuvres des six jours, la Sagesse éternelle et immuable de Dieu : c'est
que Dieu a employé jusqu'ici l'expression du un point que j'ai déjà longuement développé.
commadement « fiat, « et qu'il dit en parlant
: Alors, en effet, le Verbe ne se révélait à aucune
de l'homme: « Faisonsl'homme à notre image et créature primitive ; le type éternel ne se reflé-
« à notre ressemblance. » Ce tour n'est point in- tait pas dans une intelligence pour se réaliser en-
différent : il marque la pluralité des personnes suite en un être d'un ordre inférieur : car, il s'a-
divines. Père, Fils, Saint-Esprit. L'unité reparaît gissait de créer la lumière ou l'intelligence pre-
inmiédiatement dans l'expression : « Et Dieu fit mière à qui devait se révéler l'idée de son Créateur,
« l'homme à l'image de Dieu, » en d'autres ter- et cette révélation avait pour but de lasousfraire
mes, le Père ne le fit pas à l'image du Fils, ou à son imperfection pour la diriger vers Dieu,
le Fils à l'image du Père; autrement l'expression principe de son être et de son perfectionnemenl.
collective « à notre image, >> n'aurait pas été exac- Dans les créations subséquentes, l'Ecriture em-
te mais Dieu le fit à l'image de Dieu, c'est-à-dire,
; ploie la formule : « cela se fit; » ce qui signifie
à sa propre image. Ainsi les deux expressions : que le dessein du Verbe se produisit d'abord ilans
« à l'image de Dieu » et « à notre image, » compa- la lumière ou l'intelligenie primitive ;
puis elle
rées entre elles, ne désignent pas l'intervention ajoute : donc » telle ou telle œuvre,
« Dieu fît

des trois Personnes comme si elles formaient pour nous apprendre la réalisation sous une for-
plusieiu-s divinités la première nous fait enten- : me déterminée de rêtre qui avait été appelé à
dre un seul Dieu, la seconde, les trois Personnes. l'existence dans le Verbe divin. Or, la création de
l'homme est racontée comme celle de la lumiè-
CHAPITRE XX.
re. « Faisons l'homme à notre image et à noire
EN QUOI l'homme EST-IL FAIT A l'iMAGE DE DIEU ? te ressemblance, » dit Dieu; puis l'Écriture ajoute
QUE LA FORMULE « IL EN FUT AINSI » n'EST PAS immédiatement: « Dieu fit donc l'homme à son
EMPLOYÉE DANS LA CRÉATION DE l'hOMME ET ;
« image, » sans s'arrêter à la formule : « cela se
POURQUOI. « fit. » que l'homme est, comme la lumière
C'est
primitive, une intelligence, et que, pour l'intel-
30. Un point essentiel qu'il faut aussi remar- gence, exister, n'est au fond que prendre cons-
quer, c'est qu'après avoir dit: « Faisonsl'homme cience du Verbe Créateur.
« à notre image, » Dieu ajoute immédiatement :
32. Si l'Ecriture conservait ici cette double
« Et qu'il commande aux poissons de la mer et formule, ou s'imaginerait qiu^ l'idéal de l'homme
« aux oiseaux du en un mot, à tous les ciel, »
fut d'abord reflété dans l'inlelligeuce d'une créa-
êtres privés de la raison. C'était nous montrer ture raisonnable, puis réalisée dans un être qui
que le trait de ressemblance entre l'homme et n'aurait pas eu le privilège de la raison : or,
Dieu consiste dans le privilège même (|ui l'élève l'homme étant un être intelligent, avait besoin,
au-dessus des animaux dépourvus de la raison. pour être créé avec toute sa perfection, d'avoir
Ainsi cette ressemblance consiste dans le don de
I
C.tn. 1. 26-31. ' Ephés. IV, »3, 2.1. — » Colos. III, 10.
LIVUK III. — LES KTIIKS VIVANTS. 17«

CDiiscicMcc (le sdii (Irt'alciir. \W iiiùinc (|iii'

riiommc ii|)r(^s sa cliiilo so renouvelle selon l'i- CUM'ITltH Wll.


niaf;e tie Celui (jui l'a créé, par la connaissance
DK I.'oi'lMON yi lUI'l'OllTi: CIIKATIO.N UC
(le la vérité; (le même il lui ciéé par la connais- I \.\

coiU's i;t i)1o i.'ami; a v mo.me.nts disti.ncts.


sance même (pi'il cul de sou (Créateur, a\aul de
i)i:i

lomber, par l'criéldu pcché, dans ladcfïradaliou


:i'(. (JucNpies pcrsouncsoid pensé (pie l'IioinuK!
d'où la mémelundére de\ail le lirereu le reiiou-
intérieur pourrait bien a\oir été ciré d'abord et
velanl. Ouaul au\ cires à (pu celle révélation aélt-
(pi'il ne re(;ut un corps (pi'au niomeul où, selon
relusée, parce (pi'ils claienl loul matériels ou
l'Ecriture, « Dieu fa(;ouna rbommedii limon de
avaient la vie sans la raison, leur existence a
« la terre. « De la-soile, le mol eréei' aurait l'ap-
d'aliord été révélée à la créatiu'ciidellineule par
porl à l'âme, le mot façonnerau corps. Maison ne
le Verb(> qiii leur counnandait de se produiic,
rélU'cbil pas (pie riiomiuc fui cré('' mâle et fe-
et c'est pour montrer ipie le dessein du Verbe
iiielic, cl (pie l'àmc n'a pas de sexe. On a beau
était connu de celle créature, (pii a\ ail le priviU'-fje
soutenir fort subtilement que l'intelligence, qui
(le ledécouM'ir la première, (pi'il a été dil : < VA
forme le Irait de ressemblance entre Dieu et
« cela lut fait ; » puis les corps, les animaiivdé-
riiouimc, est au fond la vie raisonnable, avec la
|)ourvus de raison, se l'ormcrenl : dans ce
c'est
double ronclion de coiilcmplcr rélciucilc vérité
sens (pi'on ajoule les paroles : « Dieu lit donc »
el de régler les choses Icmporellcs, et (pi'on re-
telle ou telle rtHi\re.
trouve ainsi l'homme dans la faculté uiaitiTsse,

CHAPITRE X\l. la femme, dans la matière obéissante ; cette dis-


tinction supprime la n^ssemblance de l'homme
DIFFICULTÉ DE CONXEVOU! l.'iMMOUTALITK .lOlNTK .V avec Dieu, ou ne la laisse subsister (pic dans la fa-
LA NÉCCESSITÉ DE SE NOLKRIR. culté de contempler la vérité. L'A|)é)tre a repré-
senté ce rapport entre deux sexes « L'homme, :

Par quel mystère l'iiouune a-t-il été créé


33. « dit-il, est l'image el la gloire de Dieu, lafenmie
immortel et tout ensemble a-t-il reçu l'ordre de « est la gloire de riiomme •. » Il est bien vrai
se nourrir, connue les autres animaux, d'bcrbes
que les facultés qui constituent l'homme inté-
portant semence, d'arbres fruitiers, de végétaux? rieur ont pris au dehors double forme qui ca- la
Si le péché' seul lui a enlevé sa prérogative, il
ractérise l'homme d'apirs les sexes mais la ;

n'avait pas besoin de pareils aliments dans l'état


femme n'est telle que par son organisation elle :

d'innocence, la faim était incapable d'épuiser ses se renouvelle dans l'intérieur de son âme, par la
organes. On ])ourrait encore remarquer que connaissance de Dieu, selon l'image de son Créa-
l'ordre de croître, de se multiplier et de remplir teur, el le sexe n'a aucun rapport avec celle n'géné-
la terre, ne pouvait guères'exécuter que par l'u- ratioii. Pai' conséquent, de même que la femme
nion de l'homme et de la femme, et que cette est indistinctement a|)peléc avec l'homme à la
imion supposait des corps mortels. Cependant il grâce de se régénérer et de reformer en elle l'i-
n'y aurait aucune invraisemblance à dire que des mage du Créateur, et que son organisation spé-'
corps immortels pouvaient se reproduire par un ciale seule l'empêche d'être proclamée, comme
pur senliment de pieuse tendresse, en dehors de l'honune, l'image el la gloire de Dieu; de même,
la corruption de la concupiscence, sans que les
aux premiers jours de la création, elle avait la
enfants dussent remplacer leur parents morts ou
prérogati\e delà nature humaine, l'intelligence,
mourir eux-mêmes qu'ainsi la terre se serait
;
et, à ce titre, avait été faite àrimage de Dieu.
remplie d'hommes immortels, et qu'elle aurait
C'est pour marquer le rapport qui unit les deux
vu naître un peu|)le de saints et de justes, sem-
sexes que l'Ecriture dit « Dieu fit l'homme à :

blable h celui qui, selon la foi, paraîtra après la « l'image de Dieu. » Et de peur (pi'on ne vit
résureclion. Celte opinion peut se soutenir, nous
dans cet acte que la création de l'intelligence,
verrons bieutcM comment; mais il y aurait trop formée seule à l'image de Dieu, elle ajoute :

liehardiesse a prétendre qu'un organisme peut


« Il le fit mâle et femelle, » ce qui implique
avoir besoin d'aliments pour se réparer sans ètie
'
I Cor, .VI, 7.
condamné à périr.
,

i8§ DE LA GENÈSE Al' SENS LITTÉRAL.

la cn^ation du rorps. L'Ecriture sait également


couper court à l'opinion qui ferait du premier
CHAPITRE WIV.
homme un monstre réunissant les deux sexes,
un herma])hrodite comme il s'en produit quel- PolUyLOI LA CRÉATION DE l'hOMME X'a-T-ELLE
quefois: elle fait sentir, en employant le singu- PAS ÉTÉ SPÉCIALEMENT APPROUVÉE?
lier, qu'elle désigne l'union des sexes, et la nais-
sauce de la femme tirée du corps de l'hounne, ;^(î. On doit remarquer qu'il n'a pas
été dit pour
connue elle l'expliquera hieutàt aussi ajoute-elle ; riionnneconnne pour les autrescréatures: « D'-eu
immédiatement au pluriel « Et Dieu les créa et :
« vit (pi'il était bon.
Après avoir créé l'homme,
>-

« il /c.s'bénit. » Maisnousappi'orondironscesujet, lui avoir donné commander, de se


le droit de
quand nous traiterons de la création de Jlionime nourrir. Dieu embrasse rensembie de son œuvre :

dans la suite de la Genèse. « Dieu vit tout ce qu'il avait l'ail, et ces (puvres
'( étaient parfaitement bonnes. >.
C'est une ques-
CHAPITRE XXIU. tion qui vaut la peine d'être discutée. Ou aurait
pu, en accorder expressément
effet, l'homme .-i

DU SENS DE LA FOP.Ml'I.E ; '< CELA SE FIT '. »


la faveiu' accordée à chnque espèce d'êtres, puis

'A5. nous reste à examiner pourquoi donner à l'ensemble l'approbation inar((uée par
11 l'Ecri-
ces paroles:« Dieu vit cpie tout ce qu'il avait fait
criture après avoir dit : « Cela se lit, >. ajoute
imuiédintement Et Dieu
«et ces œuvres étaient parfaileuieul bonnes. »
: « vil tout ce qu'il avait
ces oeuvres étaient excellentes.
Dira-t-(m quer(ruvre du Créaleurs'étaul achevée
« fait : et Ce pas- «

sade a Irait au pouvoir abandonné à l'espèce hu-


lesixième jour, l'approbation divine devait porter

maine de faire usage pour sa nourriture des vé- sur l'ensemble de la création et non sur la créa-
lion si)éciale accom|)lie ce jour-là Pourquoi
gétaux et des arhi'cs fruitiers: l'expression : « cela ?

« se fit, » résume le récit sacré à partir des mots :


alors (pialifier de bons les animaux domestiques
« Et Dieu (lit : Voici (pie je vous ai donné l'herhe ou sauvages dont l'Ecriture fait
et les reptiles,

« portant sa seinence » etc. En effet, si celle for- rénumération dans le passage relatif au sixième
muleavait une ai)p]icationplusétendue, il faudrait jour? CesMuim.urx auraient donc eu le privilège
rigoureusement en conclure (|ue, dans l'espace d'èti-eaopi(nivés,-iIa loi; en p;u-ti -idiereten géné-
du sixième jour, l'espèce humaine s'était accrue, ral, et l'hounne, créé h l'imaiic de Dieu, n'aurait
multipliée au point de peu])ler la terre, ce qui plu que dans l'ensemble de la nature? Serait-ce
n'eut lieu, au témoignage de l'Ecriture, que long- qu'il n'avait pas encore alleint sa iierfection
temps après. Par conséquent, cette expression si- parce (pi'il n'était point placé encore dans le Pa-
gnifie seulement que Dieu donna à l'homme la radis? Mais l'Écriture ne songe guère à réparer
faculté de se nourrir, et que l'homme eut cons- celte omission, quand l'homme est iniroduil dans
cience de la parole divine elle n'a pas d'autre : ce séjour.
sens. Supposons, en effet, que l'homme eût alors 37. Comment donc expliquer cette exception?
exécuté cet ordre et qu'il eût pris les aliments N'cst-ilpasvraiseml)lableque Dieu, prévoyant la

qu'on lui assignait, l'Ecriture selon la forme ha- chute de l'homme et sadégradiilion, l'a jugé bon,
bituelle de son récit, aurait ajouté à l'expression non en lui-même, mais comme partie de la créa-
qui révèle que l'ordre est entendu, l'expression tion, et a en quelque sorte révélé sa déchéance?
(pii inditiue que l'ordre est accompli ; la formule : Les èli'cs qui ont gardé la perfection relntive où
« il en fut ainsi, » aurait été suivie des mots: Et ils ont été créés, et qui n'ont point péché soif
ils en prirent, et ils en mangèrenl. C'est le tour par choix soit par impuissance, sont p:irfaitenient
qu'elle emploie pour raconter l'nMivre du second bons en eux-mêmes comme dans l'ensemble
jour « Que l'eau qui est sous le ciel se rassem-
: de la création. Reniar(piez ici la forme du su-
« ble en un mciuc lieu et que la terre nue se perlatif. Les membres ont chacun leur beauté, ^
« montre. Il en fut ainsi l'eau se rassembla en : et l'ensemble leur donne une beauté nouvelle.
« un même lieu. » L'omI, par exemple, est admirable et plail en lui-

'
fîcM. 1 . 30.
même ; isolé du corps, if n'aurait plus la beauté
que lui valait sa place dans l'ensemble, son rôle
dans le concert des organes. Mais en perdant sa
dignité première par l'effet du péché, la créature
L'VRE IV. — LES JOURS DE LA CREATION. 18i

lie cesso pas (rt'trc asstiji'ltioà l'onlri' :


clli' l'sl inèini'. Les expi'essions sacrées unissent donc,
bonne, si on la consiilèro dans l'iMisiMnl)!!' des pai' un .juste lenipi'iaiiient, la vériti'acluclle avec
l'ircs. Ainsi l'honnno avant sal'anto, (Mail i)on ca lapresfieneedel'avenii'. Dieu n'est pas seulement

soi; mais Eciilniv a i)assé sous siloncc celte


I
le Créateur excellent des êtres, il est aussi l'or-

lionlc pour lairc sentir sa iliviuMiiee future, dcMUialem' équilalile rpii rè;zle le soi't des pé-
elle l'a misa sa pLue ear, si un être est lion en
:
eheiu's : par eousequenl im èti'e peut se dégra-
lui-mùme, il est meilleur encore dans le tout der par ses laules, sans cesser d'être une tieaiit»*
duni il lait parlie; mais, (|uiiii|ii'il soil bon dans dans l'ordre universel. Mais poursuivons notre
le tout, il ne s'en suit pas ciu'il soil hun en lui- sujet et eouunençons un nouveau Livre.

LIVRE IV.

LES JOURS DE LA CREATION.

ciel ; et c'est la condition même de la beauté


CHAPITRE PREMIER.
passagère des ci'éaturesd'un ordie inférieur, qui
se succèdent en allant tour-à-tour de la nais-
01 E KAIT-U, KNTKXnRE PAR LES SIN .MUIiS ?
mort, phénomène journalier ici-bas.
sance à la

Le soir ne serait-il <pie la limite où s'arrête la


I. « Les cieu\ donc et la iene luienl achevés
perfection pour cha(pie être, le matin, la limite
avec tout ce qui les embellit. Et Dieu acheva le
• sixièmejoiu' les (euvres qu'il avail laites. Etilse où elle commence ? (lar, tout être créé est ren-
septième jour de toutes les o'uvres
fermé entre un conunencement et une fin. Voilà,
« reposa le

'< (pi'il avait laites. EtDien bénit le septième jour


dis-je,un i)roblèmedinicile à résoudre. Quoiqu'il
([u'eu ce jour-là s'était en soit de ces deux explications, qui n'en ex-
u et il le sanelilia, ])arce il

cluent pas une troisième, peut-être meilleure,


« reposéde toutes les(eu\resqu'ilavait l'ailes, ilès

« le commencement. » Jlalgré tous les efforts de


comme nous pourrons le voir plus tard, nous
allonsexaminei-laperfecliondunoml)ret) d'après
l'attention, il est difficile et prescjne impossible
les propriétésdes nombres qui nous permettent
de découvrir par la pensée quelle est l'idée de
décompter les objets matériels et de leur donner
lécrivain sacré dans cette énumération des sLx
joiu-s et de résoudre le problème que voici Ces :
ime disposition harmonieuse. Cette question n'est
point étrangère à notre sujet.
six joursavec le septième se sont-ilsécoulés réel-

lement et ressemblent-ils à ceux que la marche


CHAPITRE II.
du temps ramène, puisque les jours se suivent
et ne reviennent jamais ? Ou bien, loin de s'être
(JLE LE NOMBRE 6 EST IN NOMBRE PARFAIT.
écoulés, comme les jours dont ils portent le nom,
dans un temps régulier, ne sont-ils qu'un idéal :2. Le nombie 6 est le premier nombre parfait,
inhérent à l'essence uièjiie des choses? Eaut-il en ce qu'il est égal à la somme de ses parties
voii' non-seulement dans les trois jours qui ont aliquotes: il y aen effetd'autre nombres parfaits,

précédé la formation des luminaires, mais encore mais à d'autres titres. Le nombre (i est donc par-
dans les trois suivants, les mouvements opérés fait en ce qu'il est égal à la somme de ses parties

flans les èlres, de telle sorte que le mot jour dé- aliquoles, telles, en d'autres termes, que leur
signe leurs formes, la nuit, l'absence de ces for- produit soit égal au nombre qu'elles composent.
mes ou leur caractère défectible? Ou'on prenne Cette partie aliquote peuttoujours être exprimée
tout autre expiession, si l'on xeut, pour expri- par une fraction ainsi le noml)re3 est une fraction
:

mer changemenl qui s'opère dans un èire,


le du nombre (3 dont il forme la moitié, et de tous les
lorsqu'il perd ses qualités par une dégradation nombres supérieurs à 3. Par exemple, il forme
insensible et qu'il se dépouille de ses formes; car la nombres 4, 5,
patrie la plus considérable des
toute créature est sujette à ce changement, lors |)uisque 4 se décompose en 3 et 1, 5 en 3 et 2.
même qu'elle n'y serait pas soumise effective- Quant aiLx nombres 7, 8, 9 etc, 3 y entre pouj-
ment, comme il arrive pour lesêh'es qui sont au la plus petite part. En effet, 7 se décompose en
DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

3 et 4 ; 3 9 en 3 et 6. Mais 3 ne forme
8, en 3 el ; comme 3, 3, ou dont les parties aliquotes addi-
la patrie allqiioted'aucun de ces nombres, à l'ex- tionnées font une somme tantôt plus faible que
ception toulelois (le 9 dont il est le tiers et de (! le noml)re' lui-même, comme S, 9, tantôt ])lus

dont il est la moitié. Par conséquent, de tous les forte, comme 12, 18. L'espèce de ces nombres
nombres cités, 9 et (j sont iesseuls dont 3 soit une estdonc bien plus considérable que celle des
partie aliquote, puisque 9 est égal à 3 multiplié nombres parfaits. Le premier que l'on trouve
par 3, et ti à 3 multiplié par 2. après (î, est 28: carilest divisible par 1,2, 4,7,14 et
Le nombre (i est donc égal, comme je l'ai
3. la somme de ces parties Plus on s'é-
est juste 28.
dit au début, à la somme de ses parties aliquotes. lève dans l'échelle des nombres, moins on en
Il existe d'autres nombres dont les parties mul- trouve qui aient la propriété de se décomposer
tipliées entre elles lorment un produit intérieur en parties abquotes dont la somme les reproduise.
ou supérieur au nombre lui-même; mais il y en On les appelle parfaits : ceux dont les parties ad-
apeuquisedécom[)osenteiipartiesdontlasonnne ditionnées forment une somme trop faible, se
leur soit égale rigoureusement: parnn ces nomment impai laits; si la somme est trop forte,
derniers le nombre ti est le premier. En effet on les nomme plus-que-parfails.
l'unité n'a pas de parties, car on entend ici par (î. Dieuadonc achevé la série de ses œuvres dans

unité, le nombre qui n'a ni moitié ni partie quel- un nondtre de jours parlait. « Dieu, dit l'Ecriture,
conque, mais est rigoureusement un, sans aucun « acheva toutes ses œuvres lesixième jour. » Mon
reste. Ur le nombre -2 n'a qu'une partie qui en attention redouble pour le nombre (>, quand
forme la moitié, je veux dire, l'unité. Le nombre je viens à considérer la suite des créations divines.
3 en a deiLX, l'une qui le divise exactement, c'est Les parties aliquotes du nombre (5 forment une
Ion le tiers, l'autre, irrationnelle, ou :2: il ne se série qui se termine au triangle: ce sont 1, 2, 3,
compose donc pas de parties abquotes. Le nom- en d'autres termes lesixième, le tiers, la moitié:
dre 4 se décompose bien en deux parties dont aucun autre nombre ne les sépare et n'interrompt
chacune le divise, 1 ou le quart, :2 ou la moitié ;
leur suite. Eh bien ! la lumière a été faite en un
mais la somme de ces parties est égale à 3 et jour; les deux suivants ont été consacrés à former
non à 4, et par conséquent inférieure. Le nom- l'immense machine de l'univeis; l'un a été em-
bre 5 n'a qu'une partie qui le divise, à savoir plo\éàcrécr la partie supérieure ou le lirmamenl,
l'unité ou le cinquième; 2 est trop faible, 3 est l'autre, la partie inférieure, ou laterreet les eaux.
trop fort et aucun de ces nombres ne le divise Larégion supérieure n'étant pas destinée à se peu-
exactement. Quant au nomtn'eti, il se décompose pler d'êtres qui ont besoin d'aliments pour re-
en trois parties aliquotes, le sixième ou 1, le nouveler leurs forces. Dieu n'y a placé aucune
tiers ou 2, la moitié ou 3, et cesnombres ajoutés substance nutritive: au contraire, il a enrichi la

entre eux, c'est-à-dire, 1, 2, 3, forment une région inférieure, où ildevait placer les animaux,
somme égale à 6. de toutes les subtances propres à réparer leurs or-
Le nombre 7 n'a pas cette propriété il n'est
4. : ganes. Les fro/.s jours suivants, il a créé tous les
divisible que par I. Le nombre 8 est divisible êtres visibles qui devaient se mouvoir, selon les
par 1, 2, 4: mais la somme de ses parties ali- lois de leur nature, dans l'espace que renferme
quotes donne 7 ce n'est donc pas un nombre
; l'univers visible, avec tous les cléments; le premier
parfait. Le nombre 9 est divisible par 1 et par jour, il a placé dans le tirmament créé le pre-
3 : mais ces nombres additionnés ne font que 4, mier, les luminaires les deux jours suivants, il a
;

nombre l)ien intérieur à 9. Le nombre 10 est créé les animaux, d'abord ceux des eaux, puis
divisil)le par 1, 2, 5; la somme de ces parties, ceux de la terre, connue l'ordre le demandait.
ou donc au-dessous de 10. Le nombre
8, reste Est-ce à cUre que Dieu, s'il l'avait voulu, aurait
11 est un nombre premier au même litre que 7, été incapable de créer le monde en un jour, on
3,3,2: il n'est (li\isible (jne par l'ynilé. La d'emplojer deux jours, l'un à former les coi-ps,
somme des p.arties du nondjre 12 est plus forte l'autre à former les esprits, ou même de créer
que 12: elle va jusqu'à 16: car il est divisiidc dans un jour le ciel avedes êtres qu'il contient, et
par 1, 2, 3, 4, (5, dont la somme est 1(5. dans l'aube, la terre avec les êtres qui lui sont
o. Ainsi donc, pour ne pas pousser plus loin propres? Qui serait assez insensé pour soutenir
cette analyse, la série indéfinie des nombres nous nue telle opinion ? Qui oserait du-e que la volonté
en offre qui ne sont divisibles que par l'unité. de Dieu leucontre des obstacles ?
LIVRE IV. - LES JOURS DE LA CREATION. 188

CHAPITRE III.
CHAPITRE IV.

EN DIEU LA MESIRE, LE NOMBRE, LE POIDS SUBSIS-


EXPLICATION DU PASSAGE DE LA SAGESSE: « DlEl' A
TENT INDKI'EMIAMENT DU NO.MBRE, DU POIDS, DE
" TOUT DISPOSÉ AVEC POIDS, NOMBRE ET MESURE. »
LA MJ-:si RK.

8. En effet, la mesure, le nombre, le poids ne


7. Km voyant (ioiic nue Dion a cinploNi' six jours
sont pas seulement des propriétés inhérentes aux
pour aciievor toutes ses ouivres, et que la suite

ses créalions répoïKl la séri'î int'^ine des pieriTs, au bois, et en général aux corps (pie l'on
(le ;'i

iiomlires dont la souiine est égale au nombre ])eut observer ou concevoirsur la terre ou dans le

parlait (i, songeons au passage où l'Ecriture dit ciel.L(^sactesmoranx admettent unejuste mesure,
(le IMeu ; «Vous ave/, tout disposé avec poids, noin- qui les empêche d'aboutir à des excès sans bornes
et sans retour; les sentiments et les vertus sont
« bre el mesure » ' ; (jue notre âme, après avoir
appelé Dieu à son aide et sous son inspiration, susceptibles d'une harmonie ou d'un nombre,
considère si ces trois idées de mesure, de nom- qui bannit de l'âme le désordre des passions et

bre el de poids, d'après lescpielles Dieu a tout y fait régner la sagesse dans toute sa beauté ; la

disposé, étaient queUiue part avant la création de volonté et l'amour ont comme une balance qui,
l'univers ou si elles-mêmes ont été créées. Si elles par leurs désirs ou leurs répugnances, leur pré-
sont antérieures au monde, où élaient-ellesi' Avant férences ou leurs dégoûts, marque le prix des i

la création, il n'y avait (pie le Créateur : elfcs dans les âmes une mesure est rem-
objets. .Mais

étaientdonc en lui, mais de quelle manière? car, placée par une autre, un nombre est limité par

nous lisons dans l'Ecriture que les cboses créées un autre, un poids a son contrepoids. Or, la me-
sonl également en lui '. Est-ce que les unes sont sure indépendante de toute mesure, est adéquate

Dieu même, tandis (pie les autres y subsistent ;\ elle-même et ne suppose qu'elle-même ; le

comme dans le principe qui les gouverne ? Mais nombre indépendant de tout nombre, forme tous
comment peuvenl-elles être Dieu niènie? Dieu les autres sans être formé par aucun ; le poids
n'esl assuréinent ni mesure, ni nondtre, ni poids, absolu est centre où tout aboutit pour y trou-
le

par plus qu'il n'est le monde. Faut-il dire que ces ver l'équilibre, et ce repos est la joie inalté-
idées ne sont point Dieu, en tant (lu'elles nous rable.

apparaissent dans les objets, dont nous appré- 9. Si on ne voit ces idées que dans la nature

cions les dimensions, la symétrie, la pesanteur physique, on les voit en esclave des sens. Qu'on
;

(pi 'au contraire, en tant qu'elles maintiennent en s'élève donc au-dessus de ces perceptions sensi-

toute chose la juste mesure, l'harmonie, l'éqiù- bles,ou si on est encore incapable de ces efforts,
libre, elles sont primitivement et par essence Ce- qu'on ne s'attache plus à des mots qui n'inspi-
lui qui donne à tout ses limites, ses formes, ses rent que des idées grossières. Les vérités supé-
lois ? Le passage de la Sagesse : « Vous avez tout rieures plaisent d'autant mieux qu'on considère
« disposé avec poids, nombre et mesure, » n'est- moins subalternes avec les yeux du
les vérités

ilque l'expression, la plus vive de cette vérité :


corps. Si on ne veut pas épurer les termes dont
vous avez tout disposé en vous? un usage vulgaire et grossier a fait connaître le

C'est par un \igoureux effort et dont peu sens et les appliquer aux vérités sublimes dont
d'esprits sont capables, qu'on peut s'élever au- la contemplation élève l'àme, soit ; toute exhor-
dessus de tous les objets qui se mesurent, se coin p- tation serait inutile. Pourvu qu'on ait l'idée, peu
lent el se pèsent, et mesure en de- atteindre la importe le mot qui l'exprime. 11 est bon toute-
hors de la mesure, le nombre en dehors du fois de connaître les rapports qui lient les vérités

nombre, le poids en dehors du poids. contingentes aux vérités absolues : c'est la seule
méthode qui permette à la raison de passer
' Sag, XI, 21. — 2 Rom. xi, 3«.
d'mi sujet à un autre.
10 Veut-on regaider comme des choses con-
tingentes la mesure, le nombre,
le poids, qui ont

servi à Dieu pour tout disposer, au témoignage


de l'Écriture ? Mais s'il s'en est servi pom* dis-
poser le monde, avec quoi a-t-il disposé ces
184 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

rapports eux-mêmes? A\ ce d'autres rapports ? Il apercevait pas non plus en lui-même,


ne les
Mais alors ils n'ont pas servi à tout disposer, comme nous faisons par l'imagination qui nous
puisqu'eux-mèmes out été réglés suivant d'au- représente les objets en leur absence, ou à
tres rapports. 11 est donc hors de doute que les l'aide des formes que nous a\ons vues, nous en
idées selon lesquelles le monde a été disposé sont fait concexoir de nouvelles. Comment donc

en dehors du inonde. apercevait-il les objets dont il réglait les propor-


tions? Comment,
dis-je, sinon de la manière
CHAPITRE V.
dont seul capable de les voir ?
il est
lô. Pour nous, êtres bornés et esclaves du
c'est e> diel: qu'existe l'idée de mesure, de
péché, dont l'àme gémit sous le poids d'un corps
poids et de nombre ql 1 préside a la dispo-
périssable et dont la raison, malgré toutes ses
sition desob.iets.
pensées, reste emprisonnée dans sa demeure
H. Ne vaut-il pas mieux eroire que ce pas- terrestre nous aurions beau avoir le cœur le
i,

sage de rÉcritiire revient à dire Vous avez tout :


plus pur et rintelligence la plus dégagée des
disposé de façon à établir partout la mesure, le sens, nous aurions beau ressembler aux anges,

nombre et le poids ? Je suppose que l'Écriture l'essence divine ne saurait jamais se révéler à

eût dit : Dieu a disposé les corps avec leurs cou- nous comme elle se manifeste à elle-même.
leurs; il serait absurde d'en inférer que la Sages-
se de Dieu, principe de la création, contenait CHAPITRE Vil.

en elle-même les couleurs pour lesrépandre sur


COMMENT DÉCOUVRONS-NOUS LA PERFECTION DU
les corps. On entendrait par là que Dieu a donné
NOMBRE 6 ?
aux corps des formes susceptibles de se colorer.
Mais comment comprendre que Dieu ait dispo- Cependant, (juand nous découvrons la perfec
sé les corps avec leurs couleurs ou qu'il leur ait lion du nombre (>, nous ne la voyon.s pas hors
donné des formes susceptibles île se colorer, à de nous, comme les corps par l'intermédiaire
moins d'admettre qu'il y avait, dans la sagesse des yeux ni en nous, comme les formesdes ob-
;

de rordonnaleiir, im|)lan selon lequel les cou- jels absents ou les images du monde extérieur :

leurs devaient se distribuer sur les corps avec nous les saisis.'^ons par une voie toute différente.
toutes lems nuances coup sûr ce dessein
? A En effet, bien que des images presque imper-
conçu par ne peut s'appeler
rintelligeiice divine ceplil)les se présentent à l'esprit quand on con-
la couleur elle-même. Je le répète, pourvu sidère les éléments dont se compose le nombre
qu'on conçoive bien l'idée, peu importe le mot. 6 et leur série, toutefois la raison, par son éner-
12. Supposons donc cpie la pensée de l'Écri- gie souveraine, dissipe ces fanl(')mes et contem-
ture peut se traduire ainsi : tout a été disposé
l)le les propriétés absolues de ce nombre : celle
de façon à renfermer en soi mesure, iioinbre perception lui fait reconnaître sans le plus léger
et poids, et tel est le principe ([iii fait varier dans doute que l'unité est simple et indivisible, tandis
chaque être, selon sa nature, la grandeur, la que la matière peut se diviser à l'inlini, et ipie
quantité, la pesanteur ; dira-t-on, parce que ces le ciel et la terre construits sur le type du nom-
rapports varient sans cesse, que le plan selon bre (î, passeront avant que la somme de ses
lequel Dieu a tout combiné, varie avec eux? Que parties aliquoles cesse de lui être égale. Que
Dieu lui-même nous préserve d'un tel aveu- l'esprit de l'homme rende donc éternellement
glement !
grâces au Créateur, qui lui a donné la faculté de
voir des merveilles invisibles pour les oiseaux
CHAPITRE VI.
animaux, quoiqu'ils puissent apercevoir
et les
comme nous le ciel, la terre, les luminaires du
COMMENT DIEU VOYAIT-IL CES RAPPORTS?
ciel, la mer et tout ce quiils renfennenl.

^Pendant que tout s'organisait selon ces rap-


1 i. nous ne devons pas dii-e que le
Ainsi,

ports de nombre, de mesure et de pesanteur, où nombre (i est parlait, parce que Dieu a achevé
l'organisateur les voyait-il ne tons ses ouvrages en six jours loin de là. Dieu :
'!
11 les distinguait

pas sans doute hors de lui, comme nous voyons a achevé tous ses ouvrages en sixjours parce que

les corps : d'ailleurs les corps n'existaient pas en-


le nombre (i est parfait; suppi'imez le monde, ce
Sag. IX,
core, puisqu'ils se combinaient pour se former. '
lf>.
I,IVI\F IV. — LES joins HE I.A CRIÎATION. 185

noinbiv rcstorail ppaliMiiciil pai l'ail ; mais s'il dans nos cii'ui's ', et que nos désirs les plus ar-

n'ctail |»as parlail, i»' miiinic, (|iii rcpiodiiil dents doivent nous porter au centre du repos
li's iiièiiU'S rapports, n'aiirail |i.us la tiu'iiii' hetireuv où nous n'aiiions |)lus rien à désirer?
pirri"i-li()ii. Ou dit avec raison que Itieu lail tout ce que nous
faisons par son secours; de même, on se re-
CIIAPITHE VIII. pose en lui, quand le repos est un de ses hicnfails.
17. Cette idée est facile ;i coneeNoir. S'il est
in UEPOS DE DlEr LE SEPTIÈME JOIR QLEL SENS :
une vérité aisée à comprendre, c'est cpie Dieu se
FAI T-ll. ATT.VCHEU A CE MOT? repose, lorsqu'il nous accorde le repos, au même
litre qu'il connaît, lorsqu'il éclaire notre intelli-
In. L'Rcritiiro nous appivnd que Dion so re- gence. En effet Itieu ne prend pas connaissance
posa le se|)liènie jour île toutes ses (puvres, et avec le temps d(! ce ([u'il ignorait auparavant;
(pi'à ee titre il le hénit et le sanctifia. Si nous et pourtant il dit à Abraham : « Je sais maiiite-
voulons coniprciulie ce mystérieux repos, selon « naiil ([ue lu crains Dieu 2. » Or, que peuvent
la portée de notre iiitellim'iiee soutenue par la signilier ces paroles, sinon, j'ai fait connaître à
;.nMee di\iiie, coiiuneuçons par haiinir de noire ((uel point tu crains Dieu? Ces sortes d'expres-
esprit toiile idée charnelle. Peut-on sans iiii-
sions, où nous attribuons à Dieu des actes (pii
piele se lijiiu'er et dire que la création a coûté ne s'accomplisseiil pas en lui, ont pour t)ul de
quel([ue travail à Itieu, tiuaiid nous voyt)us les
nous apprendre qu'il en est le principe j'en- :

ch jses sortir du néant à sa parole ? Une l'exécu-


tends des actes conformes au bien, sans dépasser
tion suive le conunaudemeut, ce n'est plus une la portée des termes de l'I-Jcrilure. Car nous ne
lalifiue, luèniepour l'hoaune. Sans doute, la pa-
devons hasarder sur Dieu aucune proposition
role exigeant (pi'ou rra|»pe l'aii', linit par de- de ce genre, sans l'avoir lue dans l'Écriture.
venir une laligue ; mais, tpiand il s'ajiitde pro- A ce genre
18. d'expressions se rattache, selon
noncer (pielques mois, comme ceux que Dieu moi, le passage où l'ApAtre nous dit : « (iardez-
lait entendre dans riîcritme : [iat lux, fmt « vous de contrister l'Esprit de Dieu, cjui vous a
jimuimi-ntum, et ainsi de suite, jusqu'à l'achève- « marqué de son sceau, au jour de votre déli-
meiit de la création au septième jour, il y au- « \rance •*. » Assurément la tristesse ne peu!
rait une e\lravaf;auce par trop ridicule a soute-
atteindre la substance de l'Espi'il-Saint ou l'Es-
nir qu'elles lassent, je ne dis pas Dieu, mais un
pril-Saiiil lui-même, (|ui jouit d'un bonhmir
homme. éternel, ou plutôt qui est la béalilude immuable
II'.. <iue la latijine eonsislàl pour
Dirait-on
et souveraine. Mais l'Esprit-Saint habile dans le
Dieu, donner des ordres immédiatement
non à
canir des justes, [lour les remplir de la charité,
exécutés, mais à méditer prolondément les
qui seule ici-bas apprend aux hommes à voh"
moyens de réaliser ses plans ([ue délivré de ;
avec joie progrès des fidèles dans
les la veiiu et
de celle préoccupation à la vue de la perfection
leurs bonnes œuvres; aussi sont-ils attristés par
lie ses œuvies, il se reposa et voulut avec raison
les fautes ou la chute même des chrétiens dont
bénir, sanetilier le jour où, pour la première ils considéraient avec bonheur la foi et la piété :

lois, il n'eut plus à tléployer nue si grande at- tristesse digne d'éloges, puisipi'elle à |)oiir prin-
fiMilion? In pareil raisonnement serait Iccomble
cipe que l'Esprit-Saint leur inspire.
la charit('
de la déraison. L'iiilelligence en Dieu in-
est
Si donc on
que l'Esprit-Saint est contristé
dit
linie, illimitée, comme la puissance elle-même.
par les pécheurs, c'est uniquement en vue de
faire enlemire que les âmes saintes, ses hôtes,
CHAPITRE L\. déplorent de pareils crimes, et qu'elles sont ani-
mées par une charité assez vive pour s'affliger
MITE m CHAPITKE PRÉCÉDENT. — LK l'KI.NClPE DE sur de ces malheureux, surtout si elles
le sort
LA TKISTESSE EST QIELQLEFOIS EXCELLENT. lesav aient connus ouerusverlneux. Cette tristesse,
loin d'être une faiblesse, est une vertu qu'on ne
A quelle idée faut-il donc s'arrêter'? Ne fau- saurait trop louer.
drait-il repos que prennent en Dieu
pas voir ici le l',t. Le même Ap')tre fait un admirable em-
les créatiu'es intelligentes dont l'homme fait par-
ploi de cette forme de langage, quand il s'écrie :

tie, après avoir atteint leiirdéveloppeinent, par le


'< Maintenant que vous connaissez Dieu ou plutôt
secours du Saint-Esprit qui répand la charité '
Rom. V, 5. — - tîen. x.vn. 12. — ^ Ephês. rv. 30.
186 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

« que vous en êtes connus ' . » Ce n'est pas Dieu


qui les avait connus alors, puisqu'il les con- CHAPITRE XI.

naissait avant la création même du monde "*


;
LE REPOS DE DIEU AU SEPTIÈME JOUR SE CONCILIE
mais comme eux l'avaient connu à ce moment
AVEC SON ACTIVITÉ CONTINUE.
par un bienfait de la grâce, et non par leurs
mérites ou leurs propres forces, l'Apôtre a eu 21. Ainsi le motif le plus légitime nous engage
recours à une figure de langage, pour leur ap- à examiner, dans la mesure de nos
forces, et à
prendre qu'ils connaissaient Dieu, en tant qu'il prouver que le passage où Dieu se reposa de ses
s'était fait connaître à eux; il a mieux aimé cor- œuvres, et ces paroles de l'Evangile prononcées
riger l'expression vraie qu'il avait employée au par le Verbe créateur lui-même « Mon Père :

propre, que de leur laisser croire qu'ils tenaient « ne cesse point d'agir, et j'agis aussi ', » n'offrent
d'eux-mêmes le privilège qu'ils avaient reçu de aucune contradiction. Il fit cette réponse à ceux
Dieu. qui se plaignaient qu'il n'observât pas le sabbat,
CHAPITRE X. institué dès l'origine, selon l'Ecriture, pour rap-
peler le repos de Dieu. Il est vraisemblable que
PELT-ON CONCEVOIR LE REPOS EN DIEL? du sabbat fut prescrile aux Juifs
l'observation
connue un symbole du repos spirituel que Dieu
20. On trouvera peut-être satisfaisante l'ex- promettait, sous la figm-e mystérieuse de son
plication que nous venons de donner, et d'après propre repos, aux fidèles qui accomplissaient
laquelle Dieu s'est reposé de toutes les œuvres leurs bonnes œuvres. Jésus-Christ lui-même, qui
qu'U a faites avec tant de perfection, en tant n'a souffert qu'aumoment où il lui a plu, a con-
qu'il nous fera goûter le repos à nous-mêmes, firmé par sa sépulture le sens caché de ce repys.
lorsque nous aurons fait nos bonnes œuvres. Car il se reposa dans son tombeau le jour du
Mais, puisque nous avons entrepris de discuter sabbat et en fit une journée de sainte inactivité,
ce passage de l'Écriture, nous sommes tenus après avoir accompli le sixièuie jour, c'est-à-
d'examiner si Dieu a pu se reposer en lui-même, dire le jour de la préparation et la veille du sabbat,
tout en admettant que le repos est le gage du toutesses œuvres surle gibet inémcde la croix.
repos même
que nous goûterons un jour en lui. «Tout est consommé, s'écria-t-il, et baissant la tête
Or, Dieu a fait lui-même le ciel et la terre et « il rendit l'esprit 2. » Est-il donc étrange que
tout ce qu'ils renferment, et il a acbevé ses œuvies Dieu se soit reposé le jour même où le Christ devait
le sixième jour: loin de nous accorder le pou- se reposer, pour figurer cetévènement d'avance?
voir de créer quoi que ce soit, c'est par nous un seul jour
Est-il étrange qu'il se soit reposé
qu'il a fini, puisqu'il aclieva toutes ses œuvres, avant de développer cette suite des siècles qui
comme dit l'Éciiture, le sixième jour. De même, prouvent la vérité de celte parole « Mou Père :

ilne faut pas voir le repos que Dieu nous fera « ne cesse point d'agir? »

goûter dans ce passage de l'Écriture « Dieu :

« se reposa septième jour de toutes ses œu-


le CHAPITRE XH.
« vres, » mais le repos auquel il se livra lui-
même, NOUVELLE EXPLICATION SUR LE MÊME SUJET.
après avoir achevé ses créations. Cette
méthode nous révélera (]ue tout ce qui a été écrit 22. On peut encore s'expliquer que Dieu se
nous aidera ensuite à en saisir le
s'est réalisé, et
reposa d'avoir créé les espèces d'êtres qui rem-
sens métaphorique. Donc, ladiscussionqui amis
plissent l'univers, en ce sens
qu'il ne créa désor-
en pleine lumière que lesieuvresdeDieun'appar-
mais aucune espèce nouvelle, loulen continuant
teiiaieid qu'à lui, exige pour pendant la dé-
de gouverner celles qui furent alors établies. Il ne
monstration que son repos lui est pour ainsi
faudrait pas croire en effet (pie, même le sei)lième
dire personnel.
jour, sa puissance abandonna le goinernemenl
' Oal. IT, 9. — -
1 Pierre, i, 10.
du monde des êtres qu'il y avait créés
et cette :

inaction aurait entraîné un boulversement uni-


versel. La puissance du (Créateur, cette force in-
finie et qui embrasse tout, est la seule cause qui
fait subsister les créatures : si celle force se reti-

'
Jean.v, 17. — Ubid, XIX, 30.
\A\WK IV. — LES JOURS DE I.A CREATION. 187

rail ilti iimiiilc cl no n'fiissail plus les ètros, mè- sédcses œuvres, en lant ipTil n'a créé aucun être
iiii- lin inslant, \c (lt'\el()|t|)ciiiciil des (>spèee« d'une espèce nouvelle el non en vue d'abandoii-
s'antMorail el la naliii":' enllèfes'airaisseiait. ("-ar nerlegouvernemenlelleinaintii'nde la créalion.
il n'en es! pas de runiveis eomme d'un édiliee, ipii Ainsi se concilie celle double vérité, <|iie Dieu
siilisisie apiès ipie l'arclMli-cli' l'a aliaiidoiiiir : il s'est reposé le se|)lièmc juin- cl ipi'il ne cesse
nediirerail pas niicliml'a'il.si Dieu cessait de le pas d'agir.
gouverner.
'2'A. La i)arole du Seigneur « Mon Père ne :
CHAPn KE \m.
nous rcvèledoiieeelle création
a eessepasd'agir, '>

DE I.'oRSF.RV\TIO> Itl SARUM. — SABB.VT CIIHÉTIEN.


eonlinue par laquelle Dieu iiiaiiilieiil et réjiil

ses o'iivros. Le Seiuueiir ne se coiileiile pasde '21. .Nous pouvons appr(''cier rexellence desu'u-
dire cpie son l'ère aj;il inainleuanl, ce (|iii n'iiii- vresde Dieu ([uaiit aux joies de son repos, nous
:

pliquerail pas une aelivilé perinanenle; il dit en jugerons après avoir accompli nos bonnes
(pi'il a|ïit encore aiijoiird'luii , (lcpuis(|iiaiid ? Kvi- «piivres. Le sabbat qu'il i>n'scrivil aux Juifs d'ob-
dciiiiiienl dc[)uisia crcalioii. L'Kcritiire ilil de la server était le svmbole (le ce repos
' mais lel :

Sagesse divine ([u'elle étend sa puissance d'un bout était leur esprit charnel, qu'en voyant le Seigneur
du inoiiile à l'aiilre, et dispose tout avec liar- travailler ce jour-là à notre salut, ils lui en tai-
iiionie '
;que son mouvement a une
et ailleurs, saient un crime, et dénaturaient la ié|)oiiseoii il

rapidité, une vitesse incomparable Pour ceux '-.


leur parle de l'activité de son Père, avec lequel il

(|ui onl l'esprit droit, il est clair que la Sagesse gouvernait l'univers el opérait notre salut. Mais
communique aux êtres qu'elle dispose avec tant tlu moment(pie la grâce a été révélée, celte ob-
d'harmonie sou iiioineiiiciit incomparable, au- servation du sabbat, représenté par un jour de
dessus de toute expression, et si l'on peut ainsi repos, n'a plus été une loi pour les lidèles. Sous
parler, son immuable activité; et quc,sicemou- le règne delà grâce, le sabbat est perpétuel pour
\eiuenl cessait d'animer la nature, elle s'anéan- celui qui opère toutes ses bonnes (ciivres en vue
tirait aussitôt. La [)aroie que l'Apolre adresse du reposa venir, et qui ne se glorilie pas de ses
aux Athéniens en leur prèdianl le \raiDieu:« C'est actions, comme s'il avait le dond'une vertu qu'il
« en lui cpie nous avons la vie, le mouvcmenl cl
n'a peut-être pas reçu. Ne voyant dans le sabbat
« l'être, » celte parole d'une larlé que l'esprit hu- t
c'est-à-dire, le repos du Seigneur dans son tom-
main ne saurait pousser plus loin, corrobore l'o- beau, que le Siicrcmeul du Itaptêmc, il se repose
pinion qui lions l'ait croire et dire que Dieu ne de sa vie passée : marchant dans les voies d'une
cesse jamais d'agir dans ses créatures. En etïel, recoimait l'action qu'ex-
vie toute nouvelle '\ il

nous ne Taisons pas partie de la substance divine, erce en lui Dieu,{pii tout ensemble agit et se re-
et nous ne sommes ])asenluiau même titre (|u'il
pose, gouvernant la créature au sein d'une éter-
à la vie en lui-même or, du moment que -^
:
nelle tranquillité.
nous sommes distincts de Dieu, nous ne pouvons
avoir l'être en lui qu'autant qu'il agit en nous. CHAPITRE XIV.
Celte activité consiste à tout gouverner, à étendre
sa puissance d'un bout à l'autre du monde, à POLRyi'OI DlEi: A-T-lL S.VNCTlFIK LE .lOl R DE SON
tout disposer avec harmonie, et c'est grâce à cet REPOS?
ordre sans cesse maintenu que nous avons en
23. Dieu a donc créé sans fatigue et n'a point
luirèlre, le mouvement et lavie. Par conséquent,
trouvé dans le repos de nouvelles forces : ainsi a-
si Dieu cessait d'animer la créature, nous n'au-
t-il voulu nous inspirer le désir du repos,
rions plus l'être, le mouvement el la vie. 11 est
donc évident que Dieu n'a jamais cessé, même en nous révélant par son Ecriture qu'il sanctifia
le jour où il cessa de créer. On ne lit jamais, en
un jour, de gouverner les êtres créés, pour les
effet, qu'il ait rien sanctifié, soit dans la période
empêcher de perdre cesmouvements qui les ani-
des six jours, soit au commencement, lorsqu'il
ment el les conserveiitaveclespropriétés el selon
fit le ciel et la terre. Mais il voulut sanctifier le
de leurs espèces; etqu'ilsseraienl iuimé-
les lois

ihalement anéantis sans cette activité de la Sa- jour où il se reposa de toutes ses œuvres, comme
si le repos à ses yeux avait plus de prix que le
gesse tlivine qui répand partout l'ordre el l'har-
travail, bien que son activité ne lui coûte aucune
monie. Convenons donc bien que Dieu s'est repo-
'
Sag. VIII, I. — îlbid. ïn,î4. — Mean, t, 2«. ' E.tod. XX, 8. — 2 Koni. VI, 4.
188 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

peine. C'est ce qui doit être pourl'liomme aussi, du repos absolu n'a pu se reposer que pour nous
et nous en trouvons la preuve dans l'Evangile où doimer un enseignement.
le Sauveur y déclare que3Iaiie,sc lenantassise à
ses pieds pour écouter sa parole, a choisi une CHAPITRE XVL
meilleure part que Marthe, malgré sou empres-
sement à le servir et le pieux embarras qu'elle 1)1 UEPOS DE DIEL' LE SEPTIÈME .lOLR.
se donnait '. Mais il est bien di.ficile de con-
:27. Remarquons qu'en nous révélant le repos
cevoir ceci quand il s'agit de Dieu, lors même qui assiu-e h Dieu sa félicité en lui-même, il fallait
qu'on soupçonnerait à force de réfléciiir poiu--
nous faire concevoir à quel titre on dit que Dieu
quoi il a sanctifié le jour de son repos, lui qui
se repose en nous-mêmes cette parole signifie
:
n'a sanctifié aucun jour de la création, pas mê-
que Dieu nous assure le repos en lui-même. Pour
me celui où iirn l'homme et où il acheva toutes
endomier donc une juste définition, le repos de
ses œuvres. Et d'abord quelle idée l'esprit hu-
Dieu implique qu'il ne manque d'aucun bien par
main avec toutes ses lumières peut-il se l'ormer :

conséquent nous sommes assurés <le trouver le re-


dureposde Dieu? Cependant, si lachosen'existait
pos en lui, parce que le bion essentiel à Dieu fait
pas, l'Ecriture n'en prononcerait pas le mot. Je
notre bonheur etque sa félicité est indépendante
vais dire ce que je pense, eu faisant une double
du bien qui est en nous. Nous représentons en
réserve d'aboi'd que Dieu n'a point goûté
: un re-
effet (jiielqiie bien, puisque nous sommes aunom-
pos pareil à celui qui succède agréablement à la
bre des œuvres qu'il a faites excellentes. Or nul
fatigue ou qu'un long travail fait souhaiter; en-
être n'es! bon en dehors de lui, sans qu'il ne l'ait
suite que les saints livres, dont l'autorité s'im-
créé, et par suite, il n'a besoin en dehors de lui
pose a l'esprit, n'ont pu avancer sans raison ou
d'aucun bien, puisqu'il ne peut avoir besoin du
.'i tort que Dieu se reposa le septième jour de
bien même qu'il a créé. Voilà en quoi consiste
toutes les œuvres qu'il avait faites elle sanctifia.
le repos de Dieu après l'achèvement de ses œu-

vres. N'eùt-il rien ciéé, quel est le bien qu' lui


CHAPITRE XV.
uianqueraitvéritablemenl?Qu'ilse repose de ses

KÉPONSE A LA QUESTION POSKE Cl-DESSl œuvres en lui-mènu\ ou qu'il ne crée rien, il n'en
S.
est pas moins le liien absolu. .Mais s'il n'avait pu

•IG. Comme l'âme humaine a le défaul et la


composer desouviages excellents, il aurait été im-
faiblesse de s'attacher
vivement à ses œuvres, si puissant; si malgré sa puissance il ne l'avait pas
qu'elle y cherclie le repos plutôt qu'en elle-inè- voulu, il aurait été jaloux de son être. Connue il

me, quoique la cause soit nécessairement supé- joint la toute-puissance à labontéhilinie, ila l'ail

rieure aux effets, Dieu nous apprend, i)ar ce toutes ses œuvres excellentes ; et comme il trouve
passagedel'Ecrilure, qu'il n'a com|)osé aucun de en lui le bien absolu et la félicité |)arfaite, il s'est

sesouvragesavecunpiaisircapablede faire suppo- reposé en lui-même de ce repos dont il n'est ja-

serque lacréalion était pour lui une nécessité, ou mais sorti. Dites qu'il s'est reposé de ses œuvres à
que sans elle il aurait eu moins de grandeur et faire, on comprendra qu'il n'a jamais rien fait.

de félicité. En eflél, toute créature lui doit son Dites qu'il ne s'esl pas rej)osédesesu'uvresaccom-

être, mais
ne doit sa félicité à aucune; il atout
il plies, on ne comprendra plus aussi clairement
dirigé par un \)[w eftet de sa bonté aussi u'a-t- :
qu'il n'a aucun besoin de ses créatures.
"28. Or (|uel jour pouvait mieux que le septiè-
il saudilié ni le jouroùil commença ses ouvra-
ges, ni celui où il les acheva, afin que sa félicité me nous révéler cette vérité? C'est-ce qu'on voit
ne semblât pas s'accroître du plaisir de les foi-- aisément en se rappelant les proi)riétesdn nom-
mer et de k^s voir dans leur perfeclion il n'a bref?, dont la perfeclion aservi de type à la per-
;

sanctifiéque le jour où il s'est reposé desesœuvres feclion des ouvrages divins. Supposez que la créa-

en lui-même. Il n'a jamais eu besoin du repos, tion devait être, connue elle !'a été, modelée

mais il nousen a lévélé le bieulail dans le mys- sur l'ordre même des éléments qui composent
tère du septième jour; il nous a encore enseigné le nombre (i, et qu'on voulait nous révéler le

qu'il fallait èlre parfaits |)oui' le goùler, pai' le repos de Dieu, en vue de nous convaincre que la
choix même (jn'il a l'ail diijiiur(pii suivit l'achè- créatui-e même iiarfaite n'ajoute rien h sa félici-

vementde lacréationuniverselle. L'èire (pii joint té : le joui' qiril l'ail.iil sauclidei' dansée but de-
\;\\\ iK'cessah'emeiil siii\re le sivième afin de
'
Luc, X, :«-i'i.
I.IVHK IV. - LES JOt'RS DK U (:Rr;ATlOiN. m
HOiiSfinachoi- il la vie d'ici-has.cldc nous ins|ii-

rer le il<''sii- {ralli'iiidic au repos dans le sein de


CHAIMTKK XVIII.
Dieu.

CIIAI'inii; Wll. l'OlItyiOl LE SEI'Tli^ME.IOLli s'ol VKE-T-IL J'.VR LE


MATIN SANS l'IMK l'AU I.E LE SOIK?
DU REPOS DK l'homme EN DIEU.
HI.Lerejios deDieiiconsidéré en lui-miine ne

une imitation sacrilège


en coin|)te ni malin ni soir, |)uis(pi'il n'a ni {om-
:20. Il y aurait, eni'l,

à vonlnir se icposiTcn soi-niènic do ses propres


mencemenlni lin; quant à ses leinres arrivées à

(i-MNirs, coninu' Diru l'a lait a|Mès les siennes :


la perfection, le matin uail poiirellessans jamais
nous ne devous nous reposer (]u'au sein du hion être suivi du soir. Lu effet, la créature sous sa

inuntialilo, et, paiconsé(|uenl de noIreCréaleiii-.


forme conunencer le mouvement
|)arfaile voit
q{ii laporteà se reposer dans son Créateur; mais
Uuel sei'a doiie pour nous le repos souverain,
véritable ce mouvement vcrsla perfection n'admet |)oint
tMrangor à l'org^ueil et conl'ornie à la

piété? De prendre in()dèle sur le Dieu qui eu se de limites, comme cellesqui renferment les ouvra-
reposant de ses leuxres, a elierelié sa l'élieité,
ges de la création. Ace litre, le repos divin com-

non dans mais dans lui-même on


ses ouvrages,
mence, non pour Dieu, mais pour la cr('alure,
le l)ien cpii le rend heureux, et par eonséquenl,
((uand elle alleiut sa perfection : c'est l'instant

d'espérer (pie nous trouverons seulement en lui où elle commence à se reposer en celui qui l'a

la paix à la s lite de toutes nos bonnes œuvres


formée, c'esl le malin. Sans doute, considérée

qui sont aussi les siennes; ee sera d'aspirer à eet le en elle-même, elle est siisceplibie de rencontrer le

paix, eonnne à une eonséquenee des aelcs dont soir, ou sa limite naturelle; mais, considérée
nous reconnaissons le priueipe en Dieu plus qu'en dans ses rapports avec Dieu, elle ne connaît pas
le soir, parce iprelle ne peut dépasser le dé'gré
nous. De la sorte Dieu se reposera lui-même
eneore de ses œuvres, puistiu'il nous accordera de perfection où elle est parvenue.
ii'2. Dans la période des jours où les êtres se
le repos dans son sein à la snile des bonnes ani-

vres (|ue nous aurons accomplies par sa grâce. formaient, le soir a été pour nous la (in d'une
création, et le matin, le signal d'une autre. Le
C'est une nobleprérogativeque de tenirrexislence
de Dieu : il \ aura plus de gloiie eu'ore a se re- soir du cinquième jour a clos la création du cin-
()Oser en lui. Donc, counne la création n'ajoute quième jour; le matin qui l'ava't suivi a marqué
le commencement des œuvres du sixième jour;
rien à la de Dieu et qu'il peut s'en passer,
l'élieité

il s'est reposé en lui-même j)Iutôl qu'en ses ou-


encore survenu pour clore la création.
le soir est

vrages voilà |)ourquoi il a choisi le jour du re-


;
Comme ne restait plus rien à créer, le matin
il

pos et non un des jours employés à créer, pour le a paru pour servir de début, non à une création

sanctilier il a révélé ainsi que sa félicité consis-


:
universelle dans son auteur, mais au repos de la

tait non à l'aire le montle, mais à n'avoir aucun création universelle dans son auteur. Carie ciel,

besoin de ses créatures. la terre et tout ce qu'ils renferment, je veux dire les

30. Qu'y a-t-il de plus simple à exprimer, de


corps est les esprits, ne subsistent pas en eux-
plus sublime cl de i)lus difficile àconcevoir que mêmes :ilsc!emeurent cnCclui « quidonne la vie,

le repos de Dieu après l'achcvemnlde ses ouvra- «lemouveirent etl'êlre'. » Quoiquechaque partie
puisse subsister dans le toutcpi'elle sertà foimer,
ges ? l^ouvait-illrouver le repos ailleurs qu'en lui-
même, puis.pi'il n'est heureux lui-même? letoutnepeutstibisterquedanssonprincipe. Il est
(lu'en
Uuand pouvail-il le goûter, sinon toujours? donc naturel de croire que, si le soir du sixième
l'our l'époque où se terminent scsouvrages, dont jour a été suivi du ni'itin, ce n'était plus pour
il distingue son repos, commcun ordre de choses ouvrir un nouvel ordre de créations, mais pour
tout différent, quel joir poivait il choisir, si-
marquer que fous les êtres commençaient à
s'établir dans un équilibre durable, grâce au
non celui qui succèdeàl'entierachèvementde la

création, et par conséquent le septième? La per- repos de leur Créateur. Ce repos n'a ni commen-
fection des (Piivres devait être eu effet le signal cement pour Dieu; pour la créature, il
ni lin

du repos pour l'être qui ne trouv e dans les créa- commence, mais n'admet aucun limite. Voilà
tures les plus parfaites aucun élément de félicité. comment le septième jour commence pour la
' Act xvll,28.
190 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

créature par le matin, et ne finit point par le être, Dieu ramène à lui-même tout ce qu'il en
soir. a tiré.La créature garde donc en soi la limite
33. Venl-on que dans les six jours primitifs qui la sépare de son Créateur ; mais c'est en lui

le malin et le soir représentent la même succes- qu'elle trouve son lieu de repos, et le principe
sion dans le temps qu'aujourd'hui? Je ne \ois qui lui conserve l'être. Le mol lieu que je viens
plus pourquoi le septième jour n'a pas de soir d'employer est sans doute impropre, puisqu'il
et la nuit suivante, de matin; ni pourquoi l'Écri- désigne l'espace occupé par un corps ; mais
ture ne dit pas selon son usage: Et le soir sur- comme les corps ne restent en repos dans un
vint, et au matin s'accomplit septième jour.
le lieu qu'autant qu'ils y ont été attirés par leur
Car ce jour lait partie de cette période des sept pesanteur, il m'a semblé naturel d'appliquer cette
jours, qui, en se renouvelant sans cesse, l'ornienl expiession aux esprits, par uiélaphore, quoi-
la durée des mois, des années, des siècles, et le qu'il y ait un abîme entre ces deux ordres
matin succédant au soir du septième jour, aurait d'idées.
été le conunencement du huitième, limite à la- donc (pie le matin qui
35. Slon opinion est
quelle on devait s'arrêter, puis(iue la série recom- succéda à du sixième jour, représente le
la nuit
mence pour l'oinier une nouvelle semaine. Il premier moment où la créature participe au re-
estdonc plus ])robable (pie les sept jours primitifs, pos du Créateur. Ce moment, en effet, ne peut
malgré l'anologie du nom et du nombre, repré- exister pour elle qu'à la condition qu'elle ait
sentent une révolution dans le temps, toute atteint sa perfection : or, la création ayant été

diflérente de la révolution actuelle; ils s'expli- achevée le sixième jour, le soir s'accomplit; le

quent {)ar une révolution intérieure des êtres matin parut ensuite, afin de marquci' l'instant

dont nous ne voyons plus d'exemple, et dans la- ou la créature atteint à sa perfection, et com-
quelle les mots soir etraalin, ténèbres et lumière, mence à se reposer au sein de son Créateur. Pour
nuit et journiarquent une succession tout autre la première fois elle trouve dans le repos atisolu

que mesure par le cours du soleil


celle qui se : de Dieu son repos relatif, d'autant plus assuré,
c'est un point qu'il faut reconnaître, au moins d'autant plusdurablc, que si elle abesoin de Dieu
pour les trois jours qui sont comptés avant la comme d'un centre, Dieu n'a pas besoin d'elle.
création des astres. Et comme la création, malgié tous les change-

34. Aussi, quel que soit le matin ou le soir ments qui s'opèrent en elle, ne sera jamais un pur
dans cette ])i''i'i(i(le, il yauraitcontradiclion à voir néant, elle doit rester pouii toujours rattachée î\

dans le matin qui succéda à la nuit du sixième sou Créateur ce malin s'ouvrit donc pour tou-
:

jour, le commencement du repos divin : ce se- jours et ne fut pas suivi du soir.
rait prêter immuable, par une
au Dieu éternel et Voilà, selon moi, comment le septième jour,
illusion impie, luie iélicité accidentelle. Le repos où Dieu se reposa de toutes ses œuvres, commeiK.a
que Dieu goûte en lui-même, et qu'il trouve après le soir du sixième jour, par un malin au-
dans le bien absolu qui est son essence, ne quel ne correspondit aucun soir.

peut avoir pour lui ni conunencement ni fin :

mais conuncnce par la créature arrivée à sa


il
CHAPITP.E XIX.
perfection. Pour tout être, en eflet, la perfection
NOUVELLE EXPLICATION DU MÊME SUJET.
vient moins de l'ensemble dont il fait partie, que
de l'auteur même de l'ensemble,
Créateur le :
36. Mais on peut donner sur le même sujet une
c'est h lui qu'il emprunte selon
convenances les explication plus littérale et, à mon sens, iihis
de sa nature, la stabilité et l'équilibre, en d'au- décisive, quoiqu'elle soit plus difficile à expo.scr;
tres termes, l'ordre que lui assigne son rôle dans à dire que ce lut le repos de Dieu
elle consisterait
la création. Ainsi l'univers, tel qu'il fut achevé et non celui de la créature, qui eut pour signal
au bout des sixjours, change d'aspect selon qu'on ce matin aucpiel le soir ne devait jamais succé-
le considère en lui-même ou dans ses rapports der, en d'autres termes, qui coinmença pour
avec Dieu. Sans trouver en-lui-mênie, comme n'avoir jamais de fin. Si l'on se bornait à dire
Dieu, son centre de repos, il n'a de stabilité et il'é-
que Dieu se reposa le septième jour, sans ajouter
quilibre qu'autant qu'il se rattache à celui qui ne que ce tut à la suite de ses œuvres, nous sciions
cherche point en dehors de son étie un but à incapables de von- où ce repos commence. Car le
atteindi-e pour s'y reposer; car sans sortii'de son repos pour Dieu n'a point de date sans com- :

/^
i.ivHK IV. ij;s .(oniis m: \a nufiAxioN. \Ui

inoncoineiil roiiinic s.nis lin, il est ('Icrncl ; cl à créei'un premier joiu- doid les autres ne His-
|)uis(|ii'il s'csl repose (!<• loiilcs ses (l'iiM'cs eu ce serd plus ipi'ime reprodiicliou dans la dtui'c, en
siMis (|iril iioii\,iil se passcf (relies, on concoil sorte (pi'il ei'il (lé iiiiijile ,1e cr('er le se|)licme
(|iie ie l'epos n'ailnietio en Dieu aiieiiii leiiiie où jour, piiis(|iril u'elail que le premier se renoii-
il connnence el où il expire. On peiil dire ee- \elaul poiu' la septième Ibis? Il sépara en elTel
|)en(lanl tpie le l'epos pris par lui à la siiile de la imiiièie d'avec les léiièhres, iKumnant I'iuk!
ses u'iivrcs coïiieide avec l'aelicvoiiient nu^incdc jour l(^s autres nuit i.
Ainsi hieii lil alors lejour,
la crcalion ; car Dieu nese seiait pas reposé, avant el c'est le de la même doive
reiiouvellemeul
i|n'ellcs l'iisseid composées, de ces ouivres iini- (|iie noiinne succe.ssivemeid second,
i'Ecrilure
lilesà sa lélicilé, el doril la pcrfec lion iiiénio lui troisième jour, jusqu'au sixième où Dieu achève
élail indit't'éienle : de plus, comme il n'a jamais ses o'uvres : le septième n'est alors (pie la re-
en liesoin de ces o'iivres, el (pic la lélicilé ipii le prodiicliou du i)iemier jour pour la seplièine Ibis.
rcndindépeiidani doses créalmes ne pcnl croilrc, De la seplième jour n'est point une
sorte, le

ni s'aclie\eipar conseipieni, on comprend pour- cré'ation spéciale; c'est le


renouvcllemenl pour la
(|Uoi 1(^ scplicme jour n'a poini eu de soir (jni en septième fois du pliéuomèiie (pie Dieu |iidduisil
marquât la lin. (piaiid il appela la lumière jour el les ténèbres
nuit.
CHAPITRE XX.
CHAPITKE XXI.

LE SEPTIÈME .lOlU EST-U, l NE CRÉATION SPÉCI.VLE?


DE L.V LUMIÈRE AVANT LA cnÉATION
àl. Une question non moins haute, non moins DES ASTUES.
(ligne d'attirer l'attention, est desavoir comment
hieu s'est reposi' de toutes ses (puvresc» /»/- 38. Nous retombons ainsi dans la question ipie

même, puis(iue rKcrilurc dit : « Dieu se reposa nous semblions avoir résolue an déhut de cet
« dans le septième jour. » Elle ne dit point qu'il se ouvrage: il nous làut examiner encore comment
reposa en lui-mcmc, mais « dans le septième la lumière a pu décrire un tour (fui lit naître

H jour. » Comment délinir ce se|)tième jour? alternativement lejour et la nuit, avant la Ibr-

Kaut-il y voir une création spéciale ou un espace mation des astres, du lirmament même, que dis-
(le temps? Mais la durée elle-même à été créée
jc? avant l'époqueoù le globe putollïirdes régions

avec les êtres qui durent à ce titre, elle est une :


assez distinctes pour que la lumière les éclairât

création elle-même. Il n'est aucun moment dans successivement et laissât régner la nuit à mesure
la durée, pr(''sent, passé, avenir, (|ui n'ait Dieu qu'elle se Frappés de cette difliciilté,
retirait?

pour cause : si donc le septième jour est une nous n'avons pas craint de conclure, après avoir
période de temps, Dieu, le créateur du temps, pesé le pour et le contre, que la lumière primitive

peut seul l'avoir créé. Or, l'Ecriture nous a parlé était leperfectioiinemeut des esprits; et la niiil, la
précédemment de six jours, connue de créations matière destinée à former les autres ouvrages
avec ou pendant lesquelles d'autres créations de Dieu, laquelle avait été i)roduite à l'époque où
s'accomplissent. Par conséquent, sur ces sept il lit le ciel et la terre, avant que lejour parût à
jours, si nous entendons par là ces jours bien sa parole. Un examen delà formation du
attentif

connus (]ui s'écoulent sans retour et n'ont avec septième jour nous a éclairés sur la valeur de
ceux qui les remi)lacent que le nom de commun, ces hypothèses, que l'expérience est incapable de
les six premiers ont été créés àdes moments que
contr(Mer. La lumière appelée jour était-elle un

nous pouvons déterminer quant au septième, :


agent physique qui par sa révolulion ou par sa
appelé sabbat, nous ne pou\ons distinguer l'é- propriété de se dilater et de se contracter, pro-

poque de sa création. Loin décomposer quelque duisait la succession du jour et delanuil? Est-ce
ouvrage ce jour-là. Dieu s'\ reposa de tous ceux lacréature intelligente initiée aux diverses phases

qu'ils avait laits. Comment donc anrail-il choisi de la création, qui représentait le jour et la nuit,
pour se reposer, un jour qu'il n'aurait pas créé? encecpiclle parlicipait ou ne participait pas aux
Etcomment l'aurait-il créé immédiatement après
idées divines ; le malin el le soir, en ce qu'elle
les sixpremiers jours, puisqu'il acheva ses ou- voyait cette révélation naître et disparaître tour-

vrages au sixième jour, puisqu'il ne créa lien le à-tour? Nous aimons mieux faire l'aveu de
septième et le consacra au repos ? Se borna-t-il • Gen, |,.3.
\Ui DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

notre ignorance que de forcer le sens de l'Ëcri- connaissance qu'elle acquiert, au sein du Verbe,
liiredans un passage frcs-clair, et d'aller chei'- de la création (lui va suivre la sienne, je \eu\
cher dans le septième jour autre chose que la dire celle du lirmament. Cette révélation lui est
reproduction du premier. Hors delà, en effet, il faite au moment où s'acomplissent ces paroles :

faut admetire ou que Dieu n'a pas créé le sep- « Il en fut ainsi. » Ensuite elle voii le firmament

tième jour, ou qu'il a créé quelque chose après en lui-même, lorqu'il est créé selon cette seconde
les six jours, ce qui ne peut élre que le septième formule : < Et Dieu fit le firmament. » Le soir se
jour lui-même : cette hypothèse contredit évi- produit dans la lumière, lorsqu'elle a vu le (ir-

demment l'Ecrilure, puis(ju'elle dit que Dieu mamenl dans la réalité et non plus dans l'intel-
acheva toutes ses œuvres le sixième jour et qu'il ligence divine : cette connaissance étant moins
se reposa le septième de toutes ses œuvres. Or, sublime que la première est exactement repré-
l'Ecriture ne pouvant se tromper, il faut recon- sentée par le soir. Survient alors le malin (pii

naître que l'apparition de la Inmièir, dont Dieu termine second jour et commence le troisième
le :

fit le pendant toute la


jour, s'est renouvelée, c'est l'instant où la lumière remonte à Dieu pour le
(ku'ée de la création, autant de fois que le jour bénir d'a\ oir lait le firm \mcnt et pour apprendre
est expressément désigné, par conséquent le (lu Verbe la création qui va suivre. Quand Dieu
septième jour, où Dieu se reposa de toutes ses dit : '< Que
eaux qui sont sous le ciel se ras-
les
œu'STes. « semblent et que la terre aride paraisse, » elle

connaît cette œuvre dans le sein du Verbe, selon


CHAPITRE NAII.
le sens attaché à la formule « cela se fit » en : ;

d'autres termes, le plan divin se révèle à elle


EXPLIC.VTIOX DE L\ SUCCESSION DL" .lOL R ET DE LA
par l'entremise du Verbe ; puis elle le voit réa-
NUIT DAXS l'hypothèse OU LA LUMli':RE SERAIT
lisé. L'instant où la lumière aperçut sous ses
LA CRÉATION SPIRITUELLE.
formes distinctes l'ouvrage dont elle avait connu
le dessein dans le Verbe, fut le troisième soii-.
dans l'impuissance où nous
39. Toutefois,
sommes la succession du jour et delà
d'expliquer lien fut de même jusqu'au matin qui tinil et

nuit parmi tour qu'aurait décrit la lumière phy- commença le sixième jour.
sique, antérieurement à la formation du ciel et
CHAPITRE XXIll.
des astres, nous ne pouvons renoncer à cette
question sans indiquer au moins notre pensée. DE LA CONNAISSANCE FORT DIFFÉRENTE QU'ON A
Supposons donc que la lumière primitive n'est DES CHOSES SELON QU'oN LES VOIT EN DIEl
pas un agent physique mais, la création intel- (tu EN ELLES-MÊMES.
ligente : elle se forme en se séparant des ténèbres,
en d'autres termes, elle sort de son imperfection 40. L'idée forme des choses (^st en efl'et
qu'on se

naturelle pour se rattachera son Créateur, prin- bien différente selon (ju'on les voit en Dieu ou

cipe de la perfection. Au soir succède donc le en elles-mêmes la différence est aussi profonde:

matin, je veux dire l'instant où, après avoir qu'entre le jour et le soir. Comparée à la lumière
reconnu sa propre nature et s'être distinguée de contemplée au sein du Verbe, la notion qu'on se
Dieu, elleremonte, pour la bénii', jusqu'à l'éter- forme en considérant les choses elles-mêmes
nelle lumière doid lacoidemplation l'épure et la n'est qu'une nuil en revanche cette notion com- ;

forme. Comme la création des êtres d'un ordre parée à l'ignorance el aux préjugés des esprits
inférieur ne s'accomplit pas sans qu'elle ne la qui ne connaissent pas même les choses dans
connaisse, lapparilion d'un jour tout semblable leurs i)ropi<'tés naturelles, est un véritable jour.
se produit autant de l'ois qu'il y a d'ordres distincts C'est à ce tiheque la vie des fidèles ici bas, dans
dans la création, laquelle se dévoloppe sur le les liens de la chair et du monde, si on la com-

type parfait du nombre 6 par conséquent


: le soir pare h l'existence en dehors de la foi et de la
du premier jour est le moment où elle prend piélé, inélite le nom de lum'cre et de jour que
consience d'elle-même et reconnaît qu'elle n'est lui donne l'Apàtre: « Vous étiez autrefois ténè-

pas Dieu le matin qui dot le premier jour et


;
(' bres : vous êtes inainlenant lumière dans le

tout ensemble ouvre le second, marque d'abord « Seigneur >


; » et ailleurs Renonçons aux
: «

le mouvement qui la porte à rattacher son exis- œuvres de ténèbres el revètons-nous des armes
tence à Dieu et à lui en faire hommage, puis la
' Eph. V, 8.
LIVUK IV. - LKS JOURS DK LA CltriATlON. 1»;^

<' (le liiiiiii'i'c : iiiiii'cIkiiis Mnlilciiii'iii ('iiiiiiiic iti

• |ilt'iii jour ' . " Si loiili'lois, ce jour ctxiiii.irc ;'i (('lui CHAPITKK XXV.
(Ml (leM'iius les ('j^aiix (les animes nous M'rrdiis le
Si'ijjnour liice à f'aci', n'élail pas une nuit, nous l'oruyioi I.K MOT .MIT n'eST-II, l'AS AJOUTÉ AUX SIX
.louiis ?
n'aïu'ioiis [tasici iicsoin du llanilicau des pi'oplK''-
lies. Aussi l'ApiMrc l'i('ir(' dit-il : < Noii< avous
42. Les angeseonnaisseni doue la créaliiie
" la parole pro|)lu''ti(pu', à ia(pi('ll(' \ous lailcs
en elle-mêiiie, tout eu iirefi'iant
telle (lu'elle est
c bien de vousarrèter, ((iniuie à une laïupi' ((ui
à cette idée, par choix et par amour, la science
'< luit dans uu lieu olisciu, jiisipi'à ce (pie le jour
(pieleiir coiimiiiiiiqiie la Vérité, principe desclio-
« (;oii;iiieiiee à paraître et ipie l'étoile du malin
ses; voilà [loiiiipioi dans la pi'iiode des si\ jours
< selè\e dans nos eo'iirs '. »
c'est le jour et non la nuit que l'on désigne.

CIIAIMTUI': WIV-. Après premier jour s'accom|)lit au ma-


le soir le

tin il en est deniêmedu second, du troisièiiie et


;

DU MODE DK LA l'KMSKK CUK/. I.KS ANGKS. ainsi de suite jusqu'au matin du sixième, avec
lequel commence le seplième jour consacré an
il. Ainsi les ailles dont nous deviendrons les
repos de Dieu. Chaque époque comprend sans
L'fJiaiix après la résurrection •', si nous niarelions
doute un jour et une nuit, mais il n'est ipiestion
jusqu'à la lin dans la voie, ou dans le Christ,
ipiedu jour. En etfel la nuit se confond avec le
\oient Dieul'ace à l'aee, et jouissent du Verhe, du
jour pour les saints anges dans les cieux, pen-
unique de Dieu, égal à son l*ère et c'est en
Fils :

dant (prils rapportent la coiiaissance (pi'ils ont


eux que la sagesse a été créée avant tout ^. (tu
prise des êtres créés, à la gloire et à l'amour
ne i)eut tlonc iiiettie en doute (pi'ils n'aient les
du Dieu en qui ils contemplent les ])rincipes
premiers connu l'ordre de la création, dont ils
éternels de la créalion. Cette vision subliiiie où
occupent le rang le plus élevé, par l'entreniise
tous les esprits se confondent ensemble est le jour
du Verlie de Dieu, l'auteur de toutes choses et
que Seigneur a fait
le et auquel l'Eglise affran-
ipii renlérme dans son intelligence le dessein
chie de sou pèlerinage ici bas doit être associée,
éternel suivant lequel les êtres ont été créés dans
alin (pie nous soyons à notre tour remplis en lui
le temps. Ils ont connu ensuite ce même ordre
de joie et d'allégresse '.
dans lesci'éaturesqiii le réalisaient, ipiand ils les
ont aperçues comme au-dessous d'eux et qu'ils en CHAPITRE XXVI.
ont béni l'immuable vérité, au sein de laipicUe
surtout ils coiiteiiiplent le plan de la créalion. COMMENT FAUT-IL COMPTER LES SIX .lOURS?
: De celte double intention, l'une est analogue à
, du jour et l'harmonie si j)arl'aite qui
la clarté ;
43. C'est donc à l'époque où se renouvela pour
s'établit entre eux par la participation à la même
la sixième fois le jour, tel qu'il vient d'être expli-
\

vérité, constitua le jour qui lut créé le


(pié avec ses alternatives du soir et du matin, que
/ premier:
la créalion fut achevée dans son ensemble. Alors
' l'autre ressendile à la clarté affaiblie du soir. I^e
malin succède au soir, et cet ordre est invariable survint le matin, pour clore le sixième jour et

peiidanlles six premiers jours c'est que la pensée :


tout ensemble ouvrir le septième celui-ci devait
;

des anges, loin de rester attachée à la créature, n'avoir jamais de soir, parce (pie le repos divin
s'en sert pour glorifier, et pour aimer pins vive- n'appartient pas à à mesure
la création. En effet,

ment Celui qui lui avait révélé le type avant que la création se faisait, les êtresapparaissaient
l'ouvrage même et lejour règne pendant qu'ils aux anges, tantôt au sein de la Vérité, avant leur
;

dans cette contemplation de la vérité.


restent fixés formation, tantôt dans la réalité; la lumière allait
Supposez en effet que l'anse se soit replié sur ainsi s'affajblissant et produisait le soir. Une faut

lui-même et y ait cherché plus déplaisir que dans pas, dans la suite ainsi comprise des œuvres di-
le principe même auquel il doit participer pour vines, regarder un jour comme un cadre où vient

être heureux, il serait tombé sous le poids de se disposer un ouvrage qui se termine au soir,

son orgueil comme le démon, dont nous ex- tandis que le malin inaugure une création nou-
velle; on se condamnerait alors à soutenir, contre
poserons la chute, lorsqu'il sera question du ser-
le témoignage de l'Ecriture, que le septième jour
pent qui séduisit l'homme.
est une création en dehors des six premiers jours,
I
Hom. XIII, 12, 13. —2 II Petr. 1, 10.— ' Matt. .\xii, 30. —
Eccli. I, 4. '
Ps. cxvl], 24.

S. AuG. — ToM. IV. 13


194 DE LA GENÈSE AU SENS IJTTÉRAL.

ou qu'il ii'esl pas une création divine : non ; le du soleil, ne sauraient représenlei' les sept jours
jour, ouvrage tlu Seigneur, se reproduit à chaque primitifs : il est hors de doute qu'entre ces deux
ciéalion nouvelle, ol se mesure, non au tour cjue révolutions il \ apeu de rapports et desdiflérences
décrit un astre, mais au mouvement qui s'opère proiondes.
dans la j)ensée des anges, quand ce chœur bien-
heureux contemple dans le Verbe, au comman- CHAPITRE XXVHI.
dement de la puissance créatrice : « (iat, » le type
cette explication de la lumière et du jour
de la créature qui va se former ; ce type se ré-
>'est poixt uxe .allégorie.
déchit dans leur intelligence, selon les formules
de l'Eci-iture : « cela se lit » puis la créature
;
43. Qu'on ne s'imagine pas que celte lumière
elle-même découvre à leurs regards, et celte
se
toute intellectuelle, cette création des anges et
clai-lé plus obscure forme le soir; enfin, celle
d'un jour (jiii ne brille que pour les esprits, celte
connaisance (pi'ils oui prise de l'être réalisé, ils V ision en Dieu, cette perception des êtres créés, ce
la rapportent à la gloiie de la vérité, où ils en oïd retour à l'imranaljle Vérité où le type des créa-
contemplé le type ; c'est le matin. Les trois pre- tures s'est i-évélé aux anges avant de leiu' appa-
miers jours delà création désignent donc un jour raître dans la réalité qu'on ne s'imagine pas,
;

(pii ne doit pas se mesurer connne le noire, sur


dis-je,que ces mouvements spirituels ne soient
le cours ilu soleil il est d'une nature bien dil-
:
qu'une figure, une allégorie ])our représenter e 1

lérente, et ces trois jours dont il est parlé avant jour, le malin et le soir. Sans doute on ne
l;i création des astres dans le ciel peuvent
retrouve pas ici les phénomènes produits chaque
nous en donner quelque idée. Loin d'expirer au
jour par la lumière physique :mais il ne faut pas
(juatrième jour, ce jour spécial se conlimie jus-
croire ipie le symbole soit substitué à la réalité.
(|u'au sixième et au septième, connue pour nous
Plus la lumière est pure, excellente, plus il règne
empêcher de calculer des jours ordinaues avec un jour véritable. Pourquoi n'y aurait-il pas
la naissance des astres le jour et la nuit repré-
:
également un soir, un matin plus |)urs (pie les
sentent donc des idées fort différentes, selon que
iKMres ? Si aujourd'hui s'atïaiblil au
la lumière
Dieu les forma lorsqu'il « sépara la lumière coucher du soleil, et forme
par son dé- le soir
« d'avec les ténèbres, » ou qu'U les établit, lors-
clin si elle rei)araità l'Orient et forme le matin,
;

qu'il assigna aux luminaires du ciel le rôle « de pourquoi n'apellerait-on pas soir le moment où
" sépai'er le jour d'avec la imit i. »
Il créa le jour
l'intelligence s'abaisse du Créateur à la créature,
ordinaire, au moment qu'il créa le soleil dont et matin celui où s'élève du spectacle des
elle
la présence à l'horizon fait le jour actuel mais créatures à la glorification du Créateur ? Jésus-
;

cet autre jour créé d'abord élail déjà reproduit


Christ n'est p;vs appelé hnnière au même sens '

pour la troisième fois, lorsqu'à la (juatrième (pi'ilest appelé la i)rincipale |)ierre de l'angle-!
aurore les luminaù-es fment crées. De ces deux expressions, l'une est prise au sens
propre, l'autre n'est qu'une figm-e. Si donc on
CHAPITRE XXYIL n'a])prouve pas cette manière de compter les six
jours, telle que notre faiblesse nous a permis de
LES JOIRS DE l,\ SEMAINE NE RESSE.MBLEXT PAS
la découvrir ou de l'imaginer et qu'on veuille en
AUX .lOlRS DE LA GEXÈSE.
chercher une autre plus satisfaisante dans la na-
Dans la condition où nous sommes placés
44. ture même des êtres créés, en dehors de tout
ici il nous est impossible de vérifier par l'ex-
bas, sens prophéti(pie ou allégorique, (ju'on cherche
périence, la durée du jom' prinntif ou des jours et qu'on réussisse à trouver avec l'aide du ciel. Je

(pu en furent la reproduction nous ne pouvons : ne désespère pas de découvrir moi-même une
(pu' faire des hypothèses. On ne doit doue pas autre explication mieux appropriée encore aux
précipiter son jugement ni se figiuvr que son paroles de l'Ecriture. En avançant cette opinion
Inpotbèse est le dernier degré de la vraisem- je ne prétends pas qu'il soit impossible d'en trou-
blance et de la probabilité. Toutefois, les sept ver uneplusplausible;j'afl]iine,je l'avoue, avec
jours de la semaine, de celle période qui laisse le plus de confiance que l'Ecriture sainte, en par-
temps s'enfuir et tour à tour le ramène, cl dans lant du repos de Dieu, n'a voulu nous montrer
laquelle chaque jour s'étend du lever au coucher en lui ni fatigue ni accablement.
' Gfi]. L 11. '
.ïpan, VIII, 12. — 2Act. IV. IL
IJVUK IV. - LES JOUKS l»K LA CKfiATlON. 1»K

clan pour b('iiir le Cii'aji'iir prodiiisciil pcrpetu-


CHAIMTKK WIX. <'lli'iii('iil le soirci \r malin. I.esoir, loin d'ynai-
trc jiar le déclin du soleil, n'est (prune \iiejel('e
Ul JOl'.;, 1)1 M VI IN, 111 SOI», i:.\ TANT (,« '<>I'KHA- en bas sur ciraliire: malin
la le n'y succède pas
TIO.NS l.MKI.I.Kini KLI.KS llIiS AiNCKS. à la nuit, comme nue idée nouvelle à l'ignorance,
c'est le moment où de la pénombre du soir l'in-
i(i. On sera peiit-tMic iiiriiu' (oiik' de provo-
t"Uigence s'élève pour loiiei- Dieu. Le l'salmisie
(|iit'i' une (lisfusioii avec moi, et de m'oltiocloi'
s'écrie, sans nommer la nuit : « Je louerai et je
que les aiii;es an plus liaiil des cieii\ ne conleni-
« raconterai vos merveilles le soir, le malin et à
plent pas d'altoid le type éternel des eiéalines
« midi, et vousécouterezmavoix '. .. Tout en dis-
au sein de la M'rilé imnniable, puis les eréatines
tinguant certains points dans la durée, le Psal-
en elles- nièiiies, poni rapporter enlin cette eon-
iniste veut |)arler, à mon sens, d'actes indépen-
naissance à la f^loire de Dicii ; mais (pie leur in-
d.uils (le la succession des temps, au sein de la
lellinenee exécute à la lois Imites ces opérations
|)aliie, apirs Lupielle son exil le faisait soupirer.
avec une aisance nierveilleuse. Kli bien ! iiiera-
t-on,ou nii'ril('ra-l-on d'être ('coiile, si on le nie,
CHAPITUE XWI.
<|ue la cité céleste, lorinée detanl demilliersd'an-
ses, voit l'éternitédu Créateur, connaît l'existence Ai: DÉBI:T de la CUÉATION, le .lOLIl, I.K S(tlli KT
('pliénière des créatures, et de cette idée siihal- LE MATIN APPARURENT SUCCESSIVEMENT AUX
teriic s'élève à la glorilication de Dii'U '1
(Qu'ils ANGES.
I
puissent accomplir cette triple opération et qu'ils
raccomplisseiiientsiiniiltaïK'inent, il n'en est pas Le chœur des anges possède à la fois tou-
48.

moins Mai (pi'ils [leinent l'accomplir et (prits


tes cesconnaissances dans l'unité du jour créé

n'accomplissent. Donc pour eux jour, soir, malin,


primitivement par le Seigneur. En fut-il de
tout est simultané. même au début de la création ? N'est-il pas vrai,
an contraire, que, dans lessixjoursoùil plaisait à
^
Dieu de composer successivement ses ouvrages,
CHAPITRE XXX.
les anges voyaient d'abord dans le Verbe le typede

l'anivre, qui prenait une première forme dans


I.A SCIENCE DES ANGES n'EST PAS RABAISSEE PAR-
leur intelligence, selon la i)arole «cela se fit; »
CE «u'eLLE DEVIENT TOIR-A-TOIU PLIS OBSCIKK :

or PLI S VIVE.
(lu'ensiiite, ils connaissaient l'univre réalisée dans
sa nature, lorsque Dieu l'avait composée et en
i~. Tout es|»rit capable de s'élever à ces con- avait approuvé l'excellence ; et cette connais-
sidérations n'ira point sans doute s'imaginer sance, reflet afTaibli de la première formait le

que ces mouvements dans les intelligences cé- soir; qu'enfin le matin apparaissait, au moment
lestes sont impossibles, parcequeles pbénomènes où ils louaient Dieu en son (cuvre et (pi'ils étaient
analogues tians l'ordre physique ne peuvent avoir initiés par le Verbe à la création (}ui allait s'ac-

lieu avec le jour, tel qu'on le mesure aujourd'hui complir? Par conséquent ces trois époques, jour,
sur le cours du soleil. Le phénomène ne se pro- soir,matin, n'étaient pas alors connues simul-
duit pas dans les mêmes contrées à la lois, je l'a- tanément elles se succédaient dans l'ordre mar-
;

voue mais qui ne voit avec un peu d'attention


: qué par l'Ecriture.
que l'univers entier a tout à la fois le jour et la
matin et le soir, à mesure que le soleil
nuit, le
CHAPITRE XXXH.
brille sui- un pays et en disparaît, à mesure qu'il
LA SIMULTANÉITÉ DECES IDÉES n'EN EXCLUERAIT PAS
s'approche d'un lieu ou s'en éloigne ? Ces phéno-
l'ordre SUCCESSIF.
mènes ne sont point simultanés pour nous sur
ce globe mais ce n'est point une raison pour as-
; 49. Toutefois, comme ces opérations n'étaient
similer l'ordre qui règne ici-bas et la révolution pas subordonnées à la marche du temps et ne se
accomplie dans l'espace et dans le temps par la produiraient pas avec la lenteur de la révolution
lumière physique, aux harmonies de la patrie du soleil, ne pourrait-on cnconcevoir lasimnlta-
céleste, où la contemplation de l'immuable vé- néité en songeant à l'intelligence puissante cpii
rité fait régner un jour éternel, où la connais- aurait permis aux anges d'embrasser à la fois
sance de la création en elle-même suivie d'un I
Ps. trv, IS.
im DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

toutes ces idées ? S'il en est ainsi, la simultanéité la lumière créée s'attacha aussitôt à la lumière
ne saiiraitdétniire l'ordre (luioiichaine les causes créatrice ; elle la vit et s'y vit elle-même , en
aux effets. Car la connaissance ne peut avoir lieu d'autres termes, elle vit le principe de son exis-

sans que l'objet à connaître ne préexiste seule- :


tence. Elle se vit aussi eu elle-même, c'est-à-dire

ment, tout existe dans le Verbe, l'auleur de tout, qu'elle reconnut la distance infranchissalile ([ui

avant d'exister en soi. Aussi l'espiit buinain, séparait la créature du Créateur. Lors donc que
part de la réalité que Ini livrent les sens et en ac- Dieu eut approuvé son ouvrage et en eut vu l'ex-
quiert l'idée dans leslimilesde sa faiblesse : delà, cellence, qu'il eut séparé la lumière d'avec les

ilpasse à la recliercbe des causes il essaie de ren- ;


ténèbres et nommé la lumière jour, les ténèbres

contrer jusqu'aux principes éternels et absolus qui nuit, le soir se fit : il fallait, en effet, (pie la créa-

subsistent dans le Verbe de Dieu et d'apercevoir ture se connût en elle-même et se distinguât

dans œuvres ses attributs invisibles i. Que de


ses d'avec son Créateur ; le matin apparut ensuite,
peines dans cette recliercbe, que de difricultés !
pour révéler le second ouvrage du Verbe, le fir-

(pie de temps fait perdre ce corps périssable qui


mament : il fut connu des anges avant sa forma-

alourdit l'àine ', même chez ceux qu'un divin tion, puisilleurapparut dans sa réalité. Aussi est-
écrit Dieu dit, que le firmament se fasse et il
enthousiasme emporte sans trêve ni repos vers il ; (1 ;

ces vérités sublimes l'ersonne ne l'ignore. Mais


!
« fntfait, >) maisdans la connaissance que lesanges
l'ange, attaché au Verbe de Dieu par l'amour le eurent de sa création, avant qu'elle fùtaccomplie.
plus pur, ayant été créé le premier, vit les êtres Puis on ajoute : « Et Dieu firmament, »
fit le

dans le Verbe avant de les connaître dans la na- en d'autres ternies, le firmament sous sa forme
ture: les êlres apparurent dans son intelligence actuelle, et la connaissance de ces ou «rages, infé-
au commandement de Dieu, avant d'exister sous rieure à sa vision en Dieu, ftd une sorte de crépus-

leurs formes réelles ;enliu, lorscpi'ils eurent été cule. 11 en fut ainsi moment ou s'a- jusqu'au

créés, il les vit en eux-niêmes, et cette notion cheva la création et où commença le repos divin

d'un ordre inférieur s'appellale soir. Assurément qui n'admet pas de soir, parce qu'il n'est point
une création dont l'idée pouvait se dédoubler
les œuvres se faisaient avant d'être connues car :

connu n'existe pas dé- en pure dans


q'iel(iue sorte, préexistante et plus
un objet ne peut être s'il

Ajoutez que si lesanges se fussent complu en le Verbe, où eu l'éclat du jour, posté-


elle aurait
jà.
eux-mêmes, au de trouver leur félicité dans
lieu rieure et plus obscure en elle même, où elle

matin n'aurait pas eu lieu, puis- n'aurait plus eu que la pâle clarté du soir.
le Créateur, le

qu'ils ne seraient pas sortis du théâtre de leur


CHAPITRE XXXIII.
conscience pour s'élever jusqu'à louer Dieu. Mais
le matin se leva, il y eut un ouvrage à composer
LA CRÉATION A-T-ELLE ÉTÉ SIMULTANÉE OU SUC-
et à connaître, quand se fit entendre le comman-
CESSIVE ?
dement du Créateur ; cet ouvra'^e fut d'abord
connu des anges et se réalisa dans leur intelli- 51. Mais si on admet que l'inteUigence est
gence, puisque l'Ecriture ajoute et cela se »
: « lit ;
assez puissante chez lesanges poui' embrasser à
il fallut enfin qu'il se réalisât en lui-môme, pour la fois la série des causes et des effets qu'analyse le

être connu le soir qui suivit. langage humain, ne doit-on pas reconnaître que
30. Lors même que le temps ne se succéderait les œuvres divines, le firmament, l'aggloméra-
pas avec ses diverses époques pour les anges, il tion des eaux, la terre nu?, le jet des arbres et
n'en faut pas moins admettre la préexis'ence du des végétaux, la formation des luminaires et des
type delà créature dans le Verbe de Dieu, quand étoiles, la création des êtres qui se meuvent sur
se fit entendre le commandement : « Que la lu-
la terre et dans les eaux, tout a été créé du mê-
« mière soit. » Cette parole fut suivie de la lu- me coup? Chaque ouvra7;e a-t-il une date mar-
mière dont ,
l'esprit îles auges fut formé : ils
quée dans la période des six jours, ou phitcit,
reçurent ainsi leur être, sans qu'il eût été repro- faudrait-il cesser de comparer aux mouvements
duit dans une autre intelligence; aussi l'Ecriture de la nature, tels que les révèle l'expérience, les
ne dit-elle point ici, comme ailleurs : et cela se lois établies à l'origine du monde, et concevoir
fit, et Dieu fit la lumière. La création de la lu- les révolutions primitives d'après la puissanccin-
mière suivit immédiatement la parole du Verbe ;
finie, ineffable de la Sagesse de Dieu, dont l'ac-

tivité s'étend d'un bout du monde à l'autre et dis-


I
Rom. r, • Say. IX, ir>.
LIVRE IV. — LES JOURS DE LA CRRATION. 197

contredire, Dieu a créé tuut ensem


pose font avec iiannonii' ?Si(l(>iu- laSagossodivi- < se (|ne

no n'allciiil i)asson luit paninosiiitcdc iloinarclips lili' '. Par consé(iuent. Dieu ayant tout lait en-
Dieu a cnv l'univers avi-c seudile, a cré'é à la fois la période des six on des
et comiiicpar di-fiiTs,
cxccnlc les mon sept un joiu" qui
jouis, disons mieux, a créé
la MU'inolacililctinf la Sa^îi'ssc

vcinents les pins pnissants, pnisipi'il a tonl iréé s'est lenouvelê ou sept l'ois. Poiuquoi donc
six

nionvenienls que distinguer avec tant de rigueiu' et de précision


par elle; par <onsé(inenf, les
poin' six jours dans le récit sacré? La raison en est
les eréainres aceoinpiisseni anjonnl'luii ,

fonetions qni lenr sont assi|inées, sont claire les esprits qiu ne sauraient coinpre?idre
remplir les :

elconnne le déve-
ronsé((iience des principes c ([ue Dieu ait tout créé ensemble, > iw peuvent
la

loppemeid des germes cpie Dieu a répandns en atteindre le but où l'Ecriture les mène, qu'au

elles dn même eonp don! il ciéa l'nniveis H ;


•< moNcn d'un récit aussi lent que leurintelli).'ence.
« parla, dit le Psalmistc, etlcsùlresl'nrent créés;
CHAPITRE XXXIV.
.( il commanda, et l'nnivcrs parut 2. »

0-2. Les êtres ne Inrent donc poiid créés avec LA CRÉATION EST SlMlLT.\iNKE, SANS CESSER n'h^TIlh

cette lentenr (jni caractérise anjonrd'lnii lenr


blVISKEENSlX ÉPOQUES.
existence ;
an déhnt, ne mirent
les g;énérations,

point à se l'ormer tout temps (lu'elles <lnrent


le o3. Comment soutenir à présent (pu- les six

niaintenaid. Enelïel, le temps accomi)lit aujonr- jours n'ont été knnière se renouvelant à
que la

d'Iini des revolntions qui, à l'origine, ne pou- six reprises différentes dans l'intelligence des
\ conséquence de sa nature. Autre-
aient être la Anges, du soirau matin? Ne suffisail-it pas (pi'ils

ment, nous voulionsvoir dans les mouvements


si du jour, du
vissent à lafoiseelte triple révoluliou
naturels des êtres et dans les jours actuels la mê- matin, du soir? Ne pouvaient-ils pas contempler
me durée (pie dans la création primitive, ce ne la création comme elle a été faite, dans son en

serait plus un jour, mais une loule de jours semble, du même coup, connaître ses principes
et,

qu'aurait exigés pour se développer, dans l'in- eux-mêmes,


éternels et invariahles, voir les êtres
térieur de la terre, la ^égétation aux racines enfin s'élever de ces notions plus grossières pour
sans noml)i-e qui tapisse le sol : il aurait encore célébrer les louanges du Créateur, en d'au-
fallu plusienrsjonrs |)0ur lui permettre de se dé- tres termes, assisteràla loisà l'apparition du jour,
velopper en plein air, selon la variété des espèces, du soir et du matin? Coumient le matin surve-
et d'accpiérir la perfection qu'elle atteignit en nait-il d'abord, afin d'initier les anges à l'œuvre

un jour, c'est-à-dire, le troisième, d'après le récit que Dieu allait accomplir, conuuent le soir sui

de l'Ecritin-e sainte. Combien de jours ne fallut- vait-il, afin de leur montrer l'être réalisé, si les

il pas aux oiseaux pour être capables de voler, s'ils œuvres ayant été faites toutes ensemble, il n'y

furent créés petitsencore et s'ilsattendirent, pour avait plus ni antériorité ni postériorité? Loin de
avoir leurs plumes et leurs ailes, le temps ((n'e- voir là une contradiction, il faut admettre avec
xige aujourd'hui la nature ? N'y avait-il que les l'Ecriture que les œuvres divines se sont faites
œufs de créés, quand, au cin(|uième jour, les successivement durant six jours et (pielles se

eaux reçui'ent le commandement de laisser sor- sont laites toutes en même temps : car l'Ecri-
tir de leur sein les oiseaux avec toutes leurs va- ture est infaillible, soit qu'elle raconte la créa-
riétés? Si, pour appuyer cette assertion, on fait tion du monde en six jours, soit fpi'elle la pro-

observer avec justesse que dans la partie liquide clame sinudtanée ; elle est une dans ces deux
des œufs étaient déjà renfermés tous germes les passages, parce qu'elle est écrite partout sous
<[ui se fécondent et se développent en un temps l'inspiration du Saint-Esprit.
déterminé, par la raison que les principes de la 54 Toutefois, bien (pie dans cet ordre d'idées la
vie étaient déjà naèlés à la matière pourquoi ;
différence des temps ne marque pas la suite des
ne pas admettre qu'antérieurement aux teufs faits, et qu'on puisse y voir également soit la si-

mêmes, l'eau contenait déjà les germes dont multanéité, soit rantériorité ou la postériorité, la

les oiseaux devaient sortir, en se développant simultanéité est plus facile à comprendre. Voici
dans la période de temps qu'exige leur espèce? une comparaison. Quand nous regardons le so-
La même Écriture qui raconte ((ue Dieu acheva leil levant, il est clair que nos regards ne peuvent

toutes ses ceuves en six jours, dit ailleurs, sans atteindre cet astre qu'à la condition de percer à

'
Sig. VIII, 1. — ' Ps. xixn,9. '
Eccli. xvin,
198 DE LA GENÈSE Ail SENS LITTÉRAL.

travers l'air et le ciel, jusqu'à lui; or, qui pourra toutes les œuvres créées en même temps, on ur
calculer cette distance? Assurément, le regard, peut voii' celle qui a dû précéder ou sui\i'e l'au-
-I
ou, si l'on veut, le jet de lumière sorti de nos yeux, tre qu'à la lumière, de la Sagesse même qui a
ne peut traverser l'air au-dessus de la mer, qu'à tout créé en ordre et du même coup.
la condition de traverser l'air qui s'étend du lieu
où nous sommes dans l'intérieur des terres jus-
CHAPITRE XXXV.
qu'aux rivages. S'il y a des pays au delà de la
mer, dans la direction même du rayon visuel,
RÉSUMÉ DE LA THÉORIE DES SIX JOURS.
le regard, pour traverser l'air qui enveloppe

ces régions d'outre-mer, doit franchir encore


l'air qui s'étend au-dessus des flots. Supposons o6. En résumé, le jou r primitif créé par le

enfui qu'il ne reste plus devant nous que la plage Seigneur, étant la .kiinière intellectuelle, ceUc^
de l'Océan le regard peut- il percer l'air qui s'é-
: qui éclaire les anges et les Vertus célestes, a ac-
tend au-dessus de l'Océan, sans traverser celui compagné toutes les œuvres de JPJeiij dans l'or-
qui s'étend au-dessus du globe jusqu'à l'Océan dre même des connaissances que ces esprits ont
lui-même ? La grandeur de l'Océan, dit-on, acquises. Or, ils voyaient d'avance au sein du

est incommensuiable; quelle qu'elle soit, il faut Verbe de Dieu l'œuvre qui allait s'accomplir et
d'abord que le regard perce l'atmosphère qui la découvraient ensuite dans sa réalité cet ordre :

est au-dessus, puis tout l'espace au-dessus de était indépendant de la succession du temps ce ;

l'atmosphère : alors enfin il atteint le corps du qui était antériorité et postériorité dans la série
soleil. Eh bien! malgiv celte série d'actes, qui logique des créations, était simultanéité dans la
se précèdent ou se suivent, le regard ne fran- puissance créatrice. Car, si Dieu a fait des ouvra-'
chit-il pas tous ces espaces à la fois? Qu'on se ges qui devaient durer, il n'a point créé dans
place en face du soleil les yeux fermés et qu'on le temps, mais il a fait le temps destiné à s'é-

les ouvre tont-à-coup : ne croirons-nous pas couler. Par conséquent, cettejiériode de jours
avoir découvert cet astre plutôt que d'y avoir que la lumière du soleil par sa révolution ra-
dirigé nos yeux? N'est-il pas vrai que l'o'il sem- mène sans cesse, ii'es t qu'une ombre qui nous
ble avoir atteint le but aussi vite qu'il s'est ou- invite^ à chercher ces jom's plus vrais, durant
vert? Et cependant, ce regard, qui atteint un lesquels la lumière intellectuelle a été associée
corps placé à une distance presque incalculable à tous les ouvrages de_j)ieu, dans la période
avec une vitesse prodigieuse, n'est qu'un rayon marquée par le premier des nombres parfaits.
de lumière naturelle, émis par nos yeux! Il est Le repos de Dieu, au septièmejour, a commencé
même coup ces
bien évident qu'il travei'se du par un matin qui ne devait point être suivi du
espaces infinis, et il n'est pas moins certain soir ; car, si Dieu s'est reposé le septième
qu'il les traverse successivement. jour, ce n'est pas qu'il eût bessoin du septième
S5. C'est avec raison que l'ApiMre, voulant jour ])Our se délasser, mais il s'est reposé, aux
exprimer avec ipiellc rapidité s'opérerait notre yeux des anges, de tous les ouvrages qu'il avait
résurrection, a dit qu'elle aurait lieu en un clin faits, et ne s'est reposé qu'en lui-même, parce

d'œil 1 : de tous les mouvements physiques, aucun qu'il est l'être incrée et par là, les anges qui
:

n'est plus rapide. Mais si le regard lancé par des avaient connu ses ouvrages, soit en lui soit sous

yeux de chair est doué d'une vitesse si prodi- leurs formes, avec la clarté du jour et la faible
gieuse, que sera-ce du regai'd de l'esprit hu- lueur du soir, reconnurent que la création, mal-
main, du regaid des anges? Que sera-ce surtout gré son excellence, était au-dessous du repos i)ar
de la Sagesse de Dieu, qui pénètre partout par lequel Dieu rentrait en lui-même et marquait
sa pureté, que rien ne peut altérer^? Ainsi dans qu'il n'avait besoin d'aucune de .ses nnivres

Cor. XT, 52. — pour être heureux. •


I ' Sag. vu, 24.
LIVRE V.

TOUT CREE EN MKME TEMPS.

CHAl'ITUF. PHEMIF.U. ajoute immédiatement : Dieu fit le ciel et la

" PnKMlKltS JdlUSl'Kl VK.NT IsinK UKC.VR-


« terre. » En parlant du ciel et de la terre,
LES (î 01
avant comme après la formation du joui-, clic
IIK.S COMMi: I.K HKTOl H PKlilODiyiK n'iN JOllï
ne permet pas même de conjcilurer (pTclle voit
l'ItlMITlK.
ici dans ces dcu.x ouvrages la même création que
I. « C'csl là le li\|-c (le la civatioii (liicifl cl celle (pii précéda la naissance du jour. Car dans
« (Iclatcnc, (|iiaii(l le jniirliil l'ail, et (|Ui' Dieu le passage : « C'est làle livre des origines du ciel et

« (it W cifl cl la terre, Iniile la vcidiiic des « de la lerre, quand le jour lut l'ail et ((ne

« cliamps avaiil (|ii'il y en ci'il siiiia leiic, loiiles « Dieu fit le ciel et la terre, » l'arrangement
« les herbes (l(-s champs avaiil i|ii'elles |)(iiissms- même (les mots ne permet pas de voii', dans le

« seul. Car l>icii ii'avail [kimiI encore l'ail [lieu- premier membre de phrase, le ciel et la terre
.. vdir snrla lerre cl il n'\ axait point d'Iioinnie tels que Dieu les fil au commencement, avant

« pour la ciilli\er; mais une sunrce montait de la la création du jour on ne saurait s'arrêter à celte
;

« terre et en arrosait toute la surface, » rKcriture opinion, sous prétexte que le ciel et la terre sont
fournil une nouvelle preuve à l'appui de l'o-
ici nommés avant la crcalion du jour, sans être
|)inion suivant laipielle Dieu lit un jour dont les aussit(')t arrêté par le texte sacré où la création
six ou scjil antres ne furent ijuc le retotu' régu- du jour est à peine signalée que l'on revient à
lier ; car, a|)rès avoir résumé en quelque sorte la la formation du ciel et de la terre.

création, elle ajoute ces expressions signiicatives :


3. La valeur seule de laconjecfion quand, dans
« Unand le jour fut créé. » On ne dira i)as sans ce passage, suffirait à un dialecticien pour sou-
doute ([ue le ciel et la terre dont il est ici ques- tenir que tout autre sens est impossible retran- :

tion soit le même ouvi'ag;e (pie c^'lui qui jjrécéda chez-la, en effet, et dites Voici le livre des ori- :

la création du jour, d'après ce passage « Au :


gines du ciel et de la terre, le jour fut créé, Dieu
< connnencement Dieu lit le ciel et la terre. " Si lit le ciel et la 1ère; on pourrait alors s'imaginer

on vent voir là une création accomplie par Dieu qu'il n'est (piestion dans le premier membre de
en dehors du jour, et avant sa naissance, j'ai phrase que du ciel et de la terre, tels qu'ils fu-
e\|)osé connncnf elle était jiossible, sans interdire rent créés au commencement, avant la nais-
à personne une théorie pins satisfaisante que la sance du jour; que la création du jour est men-
mienne. Uuoiqu'il en soit, l'Ecriture montre tionnée ensuite, comme elle l'est effectivement
assez dans le passage : « Voici le livre des ori- dans qui ouvre la Genèse, et (|u'enfin le
le récit
« gines du ciel et de la terre, quand le jour fut dernier membre de phrase a trait à la création
« fait, « qu'elle ne voit point ici dans le ciel et la du ciel et de la terre; qu'ils fiu-ent organisés après
terre l'ouvrage qui fut créé au commencement, la formation du jour. Mais la conjonction ratta-
avant la naissance du jour, lorsque les ténèbres che la proposition qu'elle annonce, au début de
étaient sur l'abime : il est clair, à mon sens, la phrase, ou à la fin, en d'autres termes, il faut
((u'elle parle du ciel et de la teire, tels qu'ils lire « Voici le livre des origines du ciel et de la
:

furent formés, après la création du jour, en (1terre, quanil le jour fut lait, » ou « quand le :

d'autres termes, avec cet ordre qui distribua les « jour fut fait. Dieu créa le ciel et la terre » dans ;

él.Mnents, disposa les êtres selon leur espèce, qui les deux cas, on est forcé de convenir que l'Ecri-
domia enlin à la création entière cette organisation ture n'a voulu ici parler que la de formation du ciel

et cette harmonie que nous appelons le monde. et de la terre accomplie lorsque le jour eut été créé
•2.Le que le firmament,
ciel n'est donc ici D'ailleurs, les expressions qu'ajoute l'Ecritm-e :

tel qu'il fut créé et nommé par Dieu, avec tous « Toute la verdure de la terre, » se rapportent

les êtres qu'il renferme et la terre n'est que la ré- ; sans conteste au troisième jour. On voit donc
gion inférieure avec l'abime et avec tous les êtres clairement que Dieu créa un seul et même jom-
qu'elle contient. Cela est si vrai que l'Ecriture qui, en se renouvelant régulièrement, produisit
'Oen. Il 4,-«- la période des six jours.
-200 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

l'idée de jour qu'il place entre les deux autres.


CHAPITRE II. Il ne dit point : C'est ici le livre de la création
du jour, du ciel et de la terre, comme il aurait
POIRQLOI L'ECRITinE A-T-ELLE A.I01TÉ l'eXPRES-
fait s'il avait sui\i l'ordre hislorique; ne dit pasil
.SION « TOUTE LA VERDIRE DE LA TERRE ? »
:

non plus: C'est ici le livre de la création du ciel et


4. Comme lesmotsciel, terredcsignent dans le de la terre, lorsque Dieu lit le ciel el la terre el toute
langage l'Ecriture l'ensemble la verdure des champs; enfin il n'emploie pas
île fie la création,
ou peut se demander à quoi servent les expres- ce tour : C'est ici le livre de la création du ciel

sion qu'elle ajoute : « Et lonte la verdure de la


et de la terre, lorsque Dieu fit le jour, le ciel et
« terre. » Selon moi, elles servent à déterminer la terre et la vei-dure des champs. Il ne se sert
le jour dont l'Ecriture veut parler, lorsqu'elle pas de ces formes de langage les plus usitées, et

dit « Quand ce jour fut On aurait


s'exprime ainsi : « C'est là le livre des ori-
: fait. >> été
tenté, en un jour senddable à cette
eCfet, d'y voir
n gines du ciel et de la lerre, quand le jour fut
succession du jour et de la nuit que la lumière
« fait, que Dieu fd le ciel et la terre avec toute
et
« la verdure d es champs, » comme s'il voulait
physique prodiùt par sa révolution mais quand :

la pensée se rapporte sur la suite des œuvres di-


nous révéler que Dieu lit le ciel et la terre avec
vines et qu'on trouve que toute la verdure des la verdure des champs à la même époque qu'il

champs a été créée le troisième jour, avant la fit le jour.

lormation du soleil qui ne jiarut que le qua- Or dans le récit qui ouvtc la Genèse, l'E-
fi.

criture nous ré\èle la création d'un jour pnmilif


trième, et doid la présence sur l'horizon nous
et elle le compte puis elle cite le deuxième, où
vaut le jour actuel; quand (m entend ensuite :

le firmament fid créé le troisième où la terre


l'Ecriture dire : « lorsque le jour fui fait. Dieu ;

" lit le ciel et la lerre et toide la verdure des


el la mer parurent sous leurs formes déterminées
et où la terre produisit ses arbres et ses plantes.
'< champs, » il faut bien alors voir dans ces pa-
roles un avertissement que le jour était produit
Ne voit-on pas ici apparaître clairement cette
simultanéité dans la création divine, que j'ai
soit une lumière phjsiipie inconime aux
pai'

hommes, soit par une lumière toute intellectuelle cherché à ])rouver plus Ii;ud, |)uis(pie la période
des six jours, où l'Ecriture expose avec ordre la
répandiu' dans la sociélé des auges: qu'en loid
création et l'achèvement des œuvres de Dieu, se
cas il ne ressemblait point à celid d'aujourd'hui
résume à |)r(''seiil en un seul joiu' ([ui comprend
et qu'il faut en concevoir un autre par uti effort
la formation du ciel et de la lerre et la naissance
de la raison.
de la végétation? On ne saurait voir ici un jour
CHAPITRE m, semblable aux nôtres : il suffit, comme je viens
de de se rappeler qu'antérieurement à
le dire,
LA CRÉATION A ÉTÉ SIMULTANÉE : PREUVE TIRÉE I)E la révolulion diurne du soleil, Dieu commanda
CE PASSAGE COMPARÉ AU RÉCIT PRÉCÉDENT. à la terre de pi'oduire ses piaules et sa. verdure.
Ainsi donc la simultanéilé de la création n'est
5. Une aut'T (piestion se présente ici naturel-
plus une vérité empruntée h un autre livre de
lement. L'Ecriture pouvail dire : Voici le livre
l'Ecriture ' : à la seconde page de la Genèse, nous
de:, origines du ciel et de la terre, quand Dieu
Irouvons un témoignage qui nous invite à re-
créa le ciel et la terre. Ces expressions nous au-
monter jusqu'à ce principe, dans ces paroles :

raient rappelé tous les êtres que renferme le ciel


« Quand le jour fut fait, Dieu fit le ciel el la terre
et la terre; car l'Ecriture désigne ordinairement
« avec la verdure des champs. » Conce\ez donc
sous les noins de ciel et île lerre, auxqiuds par-
bien que ce jour s'est renouvelésept fois pourpi-o-
fois elle joint celui de la mer, l'ensemble de la
(luire les sept jours ;
puis en enlcndant dire qu'au
création; et quelque fois même eile dit expres-
moment où le jour se lil tout se fit du même coup,
sément : «Le ciel, la terre et tout ce qu'ils renfer-
essjiyez, si vous le pouvez, de compremlie que
« ment ' : » par conséquent, à toutes les idées qu'é-
ce renouvellement s'est accompli en dehors de la
veillent ces mots nous aurions associé cell ; d'un
succession lenteet régulière du temps ; si vous ne
jour, soit primitif, soil semblable h celui que le
pouvez allei'jusipie-là ,abau(lonnez ces théories à
soleil jtroduil par sa révolution. iMais loin de
la médilation des esprits capables de les entendre.
s'exprimer ainsi, l'Ecrivain sacré fait intervenir
' Pfi. CXVLV.H. '
Eccli. XTiii, 1.
I>1VRE V. — TOUT CRÉÉ EN MÉMR TEMPS. iO\

Pour NOUS, iiiiirchcz sous la coiuliiilo de l'EiTi- pe, au même titre (pie les germes contiennent les

ture, (jui ne vous laisse point h votre faiblesse et êtres avant qu'ils se dé\eloppent et acquièrent
i]iii, comme ime mère, s:iil raiiMilir ses p;is a\ee leurs iiroporlious el leurs formes avec le temps?

le Sun lan^ane, en en'el, a nne haiilenr


\otre. .Mais cesgeiiui's (pie nous vojons sont déjà siii"
qui étonne l'oi-îîiieil, une profondeur (pii épou- la terre, ils ont déjà pris naissance. Elaieiit-ils
vante les esprits atlenlil's, une véril ipii sou- • donc aioi's cachés sous la lerre, el peut-on dire
tient les forts et une grâce (]ui nourrit les cpu' les plantes hireni faites avant de naître, en
plus petits. ce sens qu'elles prirent naissance, (piand les
germes se gonllèrent et s'épanouirent en plein
Cli.\PlTKE IV.
air, pour y croître dans les proporlions (pu- la

nature assigne aujourd'hui à leur dé veloijpement?


EN QUEL SENS EST-T-IL DIT Ql E l'HERBE germes (pii auraient été
Ce seraient ilonc les
FIT FAITE AVANT DE POUSSER ? créés avant la naissance du jour et qui auraient
contenu les plantes et la verdure des champs,
". Que signitient donc les paroles qui suivent
non sous la forme qu'elles prennent quand elles
dans cet ordre : « Lorque le jour fut (ail, Dieu
poussent sur la terre, mais intérieurement et en
« tu le ciel et la terre, et loule la verdure des
vertu de la (éeouditi' naturelle à toute semence?
« champs, avant qu'il y en eût sur la terre, et
Ea terre aurait donc (ommeneé par produire
" l'herlie des elinin|)s avant qu'elle \ poussât?»
1 s germes eux-mêmes? Mais l'Ecrihirc tenait
Que sigiiifienl, dis-je, ces ijaroles/ Faut-il exa- un langage bien différent, quand elle disait :

miner le temps, le lieu où la végétation se fit, « La terre |)roduisit l'herbe |)()rlanl semence
avant d'exister sur la terre, a\ ani d'y a\ oir jtoussé?
« selon ses espèces, des arbres fruitiers portantdn
Ne serait-il pas naturel de croire que Dieu la lit, « h'uit et ayant leur semence en eux-mêmes sur
non avant qu'elle poussât, maisau moment même
« la terre. » C^s paroles montrent clairement
(pi'elle iii'it naissance, si l'on n'était |)ré\ enu par la
que les semences furent produites par les herbes
parole divine qu'elle fui laile avant de pousser?
et les arbres, et que la végétation, loin de sortir
Par conséquent, fùt-on incapal)le de découvrir où
de semences primitives, prit naissance dans la
et quand elle se fil, on ne laisserait pas de croire
terre. La meilleure raison qu'il en hit ainsi,
|)ieuseiuent, sur la loi de ri'À'riluic, (prelle fut
c'est que l'Ecriture l'aflirme car elle ne dit ;

faite avant de naître : ne pas croire à l'Ecriture


pas que les semences produisent l'herbe et la
:

étant une impiété.


végétation, mais que « la terre produise l'her-
:

Que dire ? Faut-il admettre ici l'opinion assez


S.
« he portant semence; » c'est exprimer bien
répandue que tout a été fait dans le Verbe de
clairement que la semence vient de l'herbe, et
r>ieu avant de naître sur la terre ? Mais si tout a
non l'herbe de la semence. « Et il en fut ainsi,
été lait dans le Verbe, tout a été fait avant la
« et la terre produisit de l'herlie portant se-
naissance du .jour, et non au moment où le jour
menée
« en d'autres termes,
; » le commande-
fut créé. Or l'Ecriture dit en termes exprès :

ment se n-alisa dans l'esprit des .\uges, puis la


« Quand le jour fut fait, l)i(Hi (itle ciel et la terre
terre se mit à produire, afin (|ue la parole divine
« et toute la verdure des chanqis avanl qu'elle
re(;ut son accomplissement dans le monde phy-
" existât sur la terre, et toute l'herbe avant qu'elle
sique.
« poussât. » Donc cette création a eu lieu avec
10. Quelle esldonccelte création (pii a précédé
le jour, loin de lui être antérieure : par consé-
l'aiiparition des herbes sur la terre? Quelle dit-
quent, elle ne s'est point faite au sein tlu Verbe
féreuce y a\ ait-il pour elles à se faire eu môme
coéternel à son Père, avant toute époque et toute
temps que le ciel et la terre, lors de la naissance
créature, mais au moment où le joiu- se fit. Les
de ce jour mystérieux que Dieu créa à l'origine,
idées qui, antérieurement à toute créature, sub-
ou à pousser leur jet sur la terre dans l'espace
sistent dans le Verbe, ne sont point faites au mo-
(le temps nécessaire à chaque espèce, et mesuré
ment où naquit le jour, selon le tiMnoignage
sur le cours du soleil? Si cejour mystérieux existe,
de l'Ecriture. Et cependant herbe et
foriuel
s'il lumière qui éclaire et unit la so-
n'est (pie la
verdure furent faitesavantd'existeret de pous-
la
ciété des Vertus et des anges au plus haut des
ser sur la terre
cieux, il est évident (]ue les esprits célestes con-
9. Où donc furent-elles créées? Serait-ce dans
la terre conçue comme leur cause et leui- princi- ' Gen. 1, 11,12.
202 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAÏ..

naissent pins parfaitement que nous les ouvrages s'iln'y avait aucun être, esprit ou corps, qui fiit
(le Dieu : outre qu'ils les voient dansle Verbe de animé d'un mouvement dont la durée actuelle
Dieu, l'auteur de toute chose, ils en connaissent serait une transition entre" le passé et l'avenir, le
la nature par une intuition plus profonde et temps n'existerait pas. Or, la première condition
toute ditlërente. En effet, ils les connaissent dans du mouvement et de la créature est apparem-
leurs cléments, et pour ainsi dire, dans leur ori- ment l'existence de cette créature même, i^e
gine, tels que Dieu les a faites primitivement, temps a donc commencé avec elle plutôt qu'elle
avant de se reposer de ses œuvres en cessant avec le temps mais tous deux ont Dieu pour
:

désormais de créer nous au contraire, nous les


: auteur. Tout en effet vient de lui, tout est par lui
connaissons en observant les lois qui les régis- et en lui '. Quand je dis que le temps a com-

sent, dans l'ordre du temps, api'ès leur forma- mencé avec la créature, je n'entends point que le
tion, et selon lesquelles Dieu continue d'agir au temps ne soit pas lid-même une création, puis-
sein des êtres qu'il créa, durant ce nombre par- qu'il est le mouvement même qui marque le
fait de six jours, a\ec toute leur perfection. passage d'un état à un autre chez les créatures,
11. J^'ordre divin consista donc alors à créer d'après cette suite qu'amènent les
d'effets lois

la cause d'où sortent les plantes et les arbres, établies par Dieu, qui gouverne tout comme il a

en d'autres termes, à comnumiquer à la terre tout créé. Par consé(jueiit, quand nous remou-
son principe de fécondité. Dans ce principe, tons par la pensée à la condition première des
j'allais dire dans ces racines, toute la végétation ouvrages dont Dieu s'est reposé le septième jour,
à veuii- était déposée et livrée à l'action du temps. il ne faut songer ni à la durée que mesure le
Plus tard en effet Dieu planta un jardin du côté mouvement diurne du soleil, ni même à la ma-
de l'Orienl, et lit sortir de la terre toute sorte nière dont Dieu produit aujourd'hui les êtres;
d'abres qui flattaient l'œil ou offraient des fruits il faut voir comment Dieu a fait les créatures

exquis ' . On ne saurait prétendre qu'il lit alors un qui ont déterminé la marche du temps, com-
nouvel ouvrage, qu'il donna un nouveau degré ment il a tout produit à la fois et établi du même
de perfection aux OHivres qu'il avait aciievées et coup l'ordre universel , non d'après certaines
jugées excellentes le sixième joui': mais, comme |)ériodesde temps, mais jiarla subordination des

toutes les espèces de plantes et d'arbres avaient elfetsà leurs causes, de telle sorte que la création

été déjà créées dans leur principe, puisque Dieu à été simultanée et tout ensemble conduite à sa
se reposa de cette œuvre, tout en continuant de perfection, selon le t\pe du nombre six qui sert

diriger et de maintenir en harmonie, au milieu à caractériser ce jour.


(les ré\olutions du tenqis, la création qu'il avait / 13 Ce n'est donc point dans une série d'épo-
achevée et dont il s'était reposé, il faut atlmet- ques, mais dans un ordre logique que fut créée
tre que Dieu planta alors non-seulement ce jar- d'abord celte matière informe, mais susceptible
din, mais encore toute la végétation qui naît de se former, la substance des corps et celle des
même aujt)urd'hui. Quel autre en effet peut la esprits, destinée à servir comme de fond à toutes
créer, sinon Dieu, dont l'activité s'exeice même les œuvres divines; elle ne put être modiliée
en ce moment ? Toutefois il la crée aujourd'hui avant d'être, et elle ne fut modiliée que par le
avec les éléments qui existent, tandis qu'elle Dieu sou\eiaiu et véritable, principe des choses.
l)assa du néant à l'existence, quand se (il le jour Celte matière première, faite par Dieu a>ant la
qui lui-même n'était absolument rien, je \eux création du jour, a pu être appelée ciel et terre,
dii'e la création puronent intellectuelle. ])arce que le ciel et la lerre en furent conqiosés;
ou elle a élé représentée par « la terre invisible,
CHAPITliE V.
« par l'abîme ténébreux, » connue
sans ordi-e, et

nous l'avons développé dans le pirmier livre.


l'oUDRE des CRÉ.VTIOXS divises PEND.iKT LES SIX
/ 14. Parmi les êtres (|ui liueiil tirés de celte
JOURS >"est p.vs cHROsoLor.iQLE : c'est r>' EX-
isubslance nue et qui méritent encore mieux le
CHAIXEMEXT DE C.VISES ET «'EFFETS.
Inom de créations, ou d'o'iivres, se fit d'al)ord le

Les êtres ayant été créés, leurs mou\ emenls


\-2. jour. La prééminence appartenait, en effet, aux
eommeiicèreu là marquer le cours du temps. Aussi êti es capables de comiaitre la créature dans le

chercher temps avant les créatures, ce serait


le Créaleur, au lieu de lemonler de la créature à
chercher le temps avant le temps même car :

I
Gen. II, 8, 9. '
lii.ni. XI, 36,
LIVRE V. — TOUT CRBf: KN Mf.MK TEMPS, 208

sou autour. Kusuilc app.irjiit le tirin;iiiiciil, il mais en principe. (;ar, au inomenl (prelle prit
avoc lui le iiumdc |)li\si(|ii(' conimciicc. Kti Iroi- ses loruKN le jour rnupiil, et (|iiand li- joui- ua-
siènic lieu, la mcv cl la terre s'oi-gauiseut, et la (piit, Dieu lit le ciel et la terre, et la veidurc

végélaliou esl reufennée, si j'ose ainsi dire, des champs, avantipi'clte poussi\t sur la leric, cl
virluellenieiildaiisle soLT/esl à ce litre, en elïet, l'herbe des chauq>s avani (prelle prit naissance.
(|nelaleri'e, aiieniiuiiaruleiiunt de Dieu, ()i(nhii- Nous avons sur ce sujet di^eloppc noire pensée,
sit les herbes cl les |)lautes avant qu'elles eussent sans préjudice des idées plus claires, plus conl'or-
pris naissance; elle contenait tons les f;crnicsf[ui nies à la vérilé, (pii ont pu ou (pii pourront être
a\ec le temps (le\aien[ se d(''\elopi)er dans les émises.
proi)orlious assignées à cliarpie espèce. Puis, CHAPITKE VI.
(|uaud le séjour lut prêt, les luniinaiics du ciel

lurent créés le (|uatriènie jour, alin que la région l'ElT-OX INTKItKIl, DE CE Ql'lL x'WAlT l'OlM'

siq)érieure de l'uniNcrs lui ornée des corps des- ENCOItE l'Ui: SLU L\ TERRE, QUE LA (IRÉATION
mouvoirdans l'enceinte du monde. Au
tinés à se EST Sl.VUl.TANÉE ?

cinquième jour l'eau, l'élément (jui a le plus d'af-


linilé avec l'air et le ciel, [H'oduisil, au comman- 17. Quant au passage suivant: « car Dieu
" n'avait point encore lait tombei' la |)luie sur la
dement de Dieu, ses hahitans, je \eux dire les
« terre et il n'y avait poinl d'bonuni' pour culli-
()oissons et les oiseaux : et cette création contint
« veiia terre, » il estassezdiflicile d'en découvrir
virtuellement tous les êtres (|ui devaient n'-gu-
lièrement se succéiler avec le temps. Au sixième la signilicaliouct la portée. Ne dirait-on pas (pu;
si Dieu (il alors la végélalion et les herbes avant
jour, le dernier des éléments produisit les der-
niers-nés delà création, laterrepi'oduisit les ani- qu'elles eussent poussé leur jet, c'est (jne la pluie

maux tei'restres, qui renrermaicut \irtuellemcnt n'était pas encore tombée sur la terre? S'il eût
fait les herbes à la suite de la pluie, elles au-
aussi tous les animaux (juc la suite des temps
(levait faire naitie.
raient paru avoir ce phénomène plutôt que sa
lo. Le jour, tel qnc nous l'avons désigné, lut
puissance pour cause. Mais ce qui vient à la suite
de la pluie en a-l-il moins Dieu pour princi|)e?
instruit de cet cnchainemeut des œuvres divines :

cette révélalion le lit assister, pour ainsi dire, à


Conunent entendre aussi qu'il n'j avait point
d'honnui> pour travailler la terre? Dieu n'avait-il
six reprisesditTércntes, aux harmonies de la créa-
pas créé l'homme le sixième jour?Ne s'élait-il
tion, et produisit ainsi comme une période de six
pas reposé le septième de toutes ses ceuvres ? Ne
jours, quoi(]ue ce soit le même joui' (|ui contem-
faudrait-il voir dans ces paroles ((u'un résumé
ple la création, telle qu'elle s'accomplit tians la
puissance divine, telle ensuite (ju'elle s'aperçoit
de ce (pii précède, par la raison (pi'au moment
où Dieu lit toute la verdure des chanqis et toutes
dans les ceuvres de Dieu, et qui la ramène à sa
les herbes, la pluie n'était point encore tombée,
lin, l'amour divin, établissant ainsi le soii', le
ni l'hounne créé? Dieu en effet fit les plantes le
matin, le midi, (juidiviseul chaque création, non
d'après la chronologie, mais seloii l'ordre qui
troisième jour et l'homme le sixième. Mais,

préside à leur développement. Ce même jour


quand Dieu verdure et les herbes avant
lit la
qu'elles eussent poussé, non-seulement iln'yavait
reproduisit au point de vue intellectuel le repo î

poinl d'hommes pour travailler le sol, mais il


(jue prit le Créateur après l'achèvement de toutes
ses œuvres, et qui, à ce titre, n'eut pas de soir,
n'y avait pas même d'herbe, pu'squ'elle fut créée,
selon le témoignage de l'Écriture, avant de pren-
et il nii'rita d'être béni et sanctilié. Voilà pour-
dre naissance. Serait-ce que Dieu l'aurait faite
quoi le nombre sept est en quelque sorte consa-
le troisième jour, précisément parce qu'il n'exis-
cré au Saint-Esprit : l'Écriture le célèbre '
;

l'Église s'en souvient.


tait pas encore d'homme dont le travail put la

faire naitre?Mais que de piaules, que d'arbres


l(i. C'est donc ici le livre des origines de la
naissent sur la terre grâce au travail de l'honune !

terre et des cieux, en ce sens que Dieu


au fit
IS. L'Écriture aurait-elle voulu signaler à la
commencement le ciel et la terre, comme une
substance perfectible, qm devait, à souconuuan-
fois l'absence de la pluie et du travail de l'homme ?
Car, sans aucun travail de riiomuu\ la pluie
denient, prendre des formes spéciales, et ipii
suffit pousser l'herbe mais il y
parfois à faire ;
précéda ces modifications, non dans le temps,
a aussi des herbages que la pluie, sans le con-
'
Isa. x?,2, 3. cours de l'homme, ne saurait produire. Ainsi
.

DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

cette double cause est aujourd'hui nécessaire à la indique, selon moi, le moment où se forment,
production générale des tierbes, mais alors elle selon les progrès réguliers du temps, les êtres

ne s'exerça pas Dieu les créa par la puissance


: sorlisde l'état primitif dans lequel tousavaient été
de son Verbe, en dehors de toute pluie comme créés. Il était naturel de commencer par l'élément
de toule culture. Il les crée sans doute encore au- où prennent naissance toutes les espèces d'ani-
jourd'hui, mais avec le concours de l'homme et de maux, d'herbes et d'arbres, pour se développer,
la pluie, « quoique celui qui plante et celui qui dans le temps, selon les proportions qui leur sont
« arrose ne soient rien, mais Dieu seulqui donne assignées. En effet, les semences dont se forment
« l'accroissement i. » et la chair et le bois sont des liqueurs et se déve-
19. Que signifie encore celte source qui jail- loppent dans un milieu liquide ; elles renferment
lissait de la terreet qui enarrosait toute la surlace? des élcmenls très-aclifs et tirent une vertu iné-
Cette source jaillissait avec tant d'abondance, puisable de ces œuvres achevées dont Dieu se

qu'elle auraitpu tenir lieu de pluie à toute la terre, reposa le septième jour.
comme lait le Nil en Egypte. Dès lors pourquoi 2i. Mais quelle est cette source assez riche
citer comme im miraele que Dieu eût créé les pour arroser tonte la surface de la terre? C'est
herbes avant qu'il eût plu, quand la source qui une question qui mérite d'être posée. Si elle a
inondait la terre produisait le même effet que la existé et qu'elle se soit cachée ou tarie, il faut en
pluie? Lors même que l'herbe eut poussé moins découvrir la on ne voit plus de
raison : car,
haut, elle n'en aurait pas moins poussé. L'iîcri- source ({ui arrose la surface du globe. C'est peut-
ture ici n'abaisserait-elle pas son langage jusqu'à être par un juste châtiment du péché que cette
la porté des faibles, selon sa coutume, tout en source mer\ eiller.se a cessé de jailir, afin d'en-
faisant entendre à ceux qui ont assez de force lever au sol sa facile fécondité et d'augmenter
pour la pénétrer une vérité plus profonde ? Dans les peines des hommes. L'esprit humain pour-

le passage qui précède, elle a parlé d'un jour rait s'arrêter à cette conjecture, malgré le silence

pour nous révéler que Dieu lit un jour et qu'il des livres saints, si une pensée ne s'offrait natu-
créa le ciel et la terre auand ce jour fut fait: elle rellement à l'esprit c'est que le péché, qui con-
:

nous faisait ainsi concevoir, dans les limites de damna l'homme au travail, ne fut commis qu'a-
notre intelligence, que Dieu créa lout ensemble, près un séjour délicieux dans le Paradis. Or le
quoique la période des six jours semble hnpliquer Paradis possédait lui-même une source immense,
des époques bien déterminées de même ici, après ; dont nous parlerons bientôt en détail il en sor- ;

avoir raconté que Dieu fit, en môme temps que tait, au langage de l'Écriture, quatres grands
le ciel et la terre, toute la verdure des champs, fleuves, connus des gentils. Où était donc cette
avant qu'elle fût sur la terre, toutes les herbes, source, où étaient ces fleuves, quand une source
avant quelles eussent poussé, l'Écriture ajoute : immense jaillissait de la terre et suffisait pour
« Dieu en effet n'avait point encore fait tomber en arroser la surface? Assurément un de ces fleu-
« la pluie sur la terre et il n'^ avait point d'homme ves, le (iéon qui passe pour le Nil, n'arrosait point
« qui travaillai la tene; » elle semble nous dire: alors l'Egypte, puisqu'une source unique jaillis-
Dieu n'a point alors fait les herbes comme il les sait de la terre, et inondait non-seulement l'Egyp-

crée aujourd'hui, avec le concours de la pluie et te, mais enrore la surface du globe.
du l'homme. Elles poussent aujour-
travail de -2-2. Faut-il ci-oire que Dieu voulut d'abord
d'hui dans un certain intervalle de temps; mais il n'emphner qu'une source d'eau immense pour
n'en était pas de même au moment où Dieu créa arroser toute que les
la terre, afin êtres, dont il

du même coup tous les cires, avec lesquels le avait déposé les germes dans l'eau, se fécondas-
temps a commencé. sent à l'aide de cet élément, et acqui.ssent avec
le temps un développement tel que le no:nbre
CHAPITRE VII. des jours fût dans un juste rapport avec la va-
riété des espèces ? Après avoir planté le Paradis
1)K LA SOLItCE yUI AHUOS.Xrr LA SIKFACE llli LA aurait-il arrêté cette source pour nudtiplier les
TERRE sources sur la terre, comme nous le voyons au-
jourd'bui ? De la source unique qui jaillissait dans
"20. J'arrive à ce passage « l'ne source jaillissait sortir les quatre grands
:
le Paradis, aurail-il l'ail

de la terre et en arrosait toute la surface. « 11


fleuves, afin que le reste de la terre, déjà peu-
'
I Cor. m, 7.
I.IVKK V. - TOUT CRfif; KN MKMK TKMPS. -2(».'i

plt' (les iMrcs de iliMM'scs csptMi's qui se dcNc- pour dénionlrer la yéracilé de l'Écriture, véracité
ioppait'iil clans lu pt^riddc du Iciiips cxifïiV par incontestable, ipiand même elle ne seraitpas dé-
liMir iialiiri', lui poiirMi de sdiirccs cl do (Iciivcs iiiontrée. Si en clfet on raisonne dans le but de
à son Idiir; l'ilcl'aradis, ce paie clKiisidcItii'ii, aii- la convaincre d'eireiir, on ne dija soi-même l'ien
rail-iicnJcpiiviii'jiiMliMaiirsoriirdi'sasouiriMpia- de vrai sui- la création et le gouvernement du
trc Meuves ?Kst-il pi lis pr()lialil(Mnioriiiii(iiii'S()in'cc inonde, ou, si l'on rencontre on taxera
la vérité,

du l'ai'adisa\ail d'alioi'il un jcIcousidi'i'aiiieeUiue l'Iùriture d'erreur sans la comprendre, .le sup-


nk'us'on servil pour arroser louto la terre, alin de pose, par exeii;|)le, «prou |)r('leiide ici (jifil était

la l'éeonder el de lui l'aire |)roiluire, dans une iin|)ossibliMprune source unique, si énorme (pi'on
périoiie de temps réf-idier, les espèces de |)lantes voudra, sulfit à arroser la terre entière, par la
tpi'il avait eréées toutes enseinitle; ([u'ensuile il raison ipie, si elle n'arrosait pas les iiioiita^nes,

arrêta en ce lieu ce jet d'eau éuoruu', alin (pie elle n'arrosait i)as toute la terre, et que si elle

les lleuves et les ruisseaux sortissent de ditïérenles arrosait les montagnes, loin de porter avec elle
sources dans les dilTérenls conirérs; el (pi'eiilin la fécondité, elle exerçait les ravages d'un déluge :

dans le |)ays même d'où elle jaillissait, au inu- par conséquent (pie la terre en cet état était une
uient qu'elle n'arrosait plus la surface du globe, mer et n'était point encore distincte des eaux.
mais donnait seulement naissance à (piatie
fleuves , il planta le Paradis pour placer'
CHAPITRE X.
y
l'homme ?
CfUlMENT PEUT-ON EXPLIQUER CE PHÉNOMICNE'/

CHAPITRE VIII.
23. On peut répondre que cette inondation

POl RyLdI Sl'PPLÉER PAR DES CONJECTIRES AL pouvait être périodique, comme celle du Nil

qui tour-à-tour couvre les plaines de l'Egvpte


SILENCE DES LIVRES SALMS?
et rentre dans son lit. Peut-être ol)jectera-t-on
•23. L'Écriture n'a pas exposé dans tous les dé^ quel crue annuelle de ce fleuve tient aux pluies
la
laits les origines du tenqis au début de la création et aux neiges de je ne sais (pielle contrée loin-
pi'imitive, ni la suite des lois d'après lesquelles taine et inconnue, soit mais quediie du llux et du
:

se développent les êtres qui furent créés d'abord, reflux dans l'Océan, de la marée qui tour-à-tour
puis achevés le sixième jour : elle a raconté ces découvre ou envahit certaines plages sur une
laits dans la mesure qu'il a plu au Saint-Esprit, longue étendue? Je ne parle pas de ces sources
lequel faisait écrire les événements capables tout intermittentes qui, par un singulier phénomène,
ensemble de révéler le passé et de figurer l'avenir. tantiM coulent avec une telle abondance, dit-on,
Conjecturons donc tians notre ignorance les faits cpi'elles arrosent tout un pays, tant(")t laissent à
que l'Espril-Saint à négligés sciemment; et tra- sec les puits les plus profonds et fourn issent à peine
vaillons dau'î la mesure de nos forces et de la assez (l'eau pour boire. Pourquoi donc trouve-
grâce (pie Dieu nous fait, à écarter la pensée qu'il rait-on étrange qu'un gouffre, soumis au flux et
y ait dans les saints Livres des absurdités et des au reflux, ait arrosé la terre par une inondation
contradi 'tions qui, choquant le jugement du lec- périodique? D'ailleurs si l'Ecriture, laissant de
teur et lui faisant croire ([ue les faits racontés par mer dont les flots salés enveloppent évi-
côté la
l'Écriture sont im|)os^ibles, le feraient renoncer demment le globe de leur immense ceinture, n'a
à la foi où l'empêcheraient de l'embrasser. voulu parler que des lacs intérieurs d'où sortent
par des canaux souterrains ou des infiltrations les
CHAPITRE IX. ruisseaux elles sources, pour s'échapper les uns
sur un point, les autres sur un autre, et qu'elle ait
EST DIFFICILE DE CONCEVOIR U.NE SOURCE
IL
compris dans ce gouffre immense, sous le nom
CAP.ABLE d'arroser LA TERRE ENTIÈRE d'une source unique, toutes les sources du globe,
à cause de l'identité de leur nature; si, dis-je, on
:24. Quand nous cherchons à comprendre dans
suppose que cette source jaillissait de la terre
quel sens l'Écriture a dit qu'« une source jaillissait
par les mille ouvertures des antres ou par les
« de la terreen arrosait toute la surface, » il ne
et
crevasses du sol, et que, se divisant en filets in-
faut pas y voir pour cela un phénomène impos-
nombrables, elle se répandait sur la terre sans
sible si notre explication renferme une impos-
:

former une nappe d'eau comme la mer ou les


sibilité, qu'on en cherche soi-même mie autre
206 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

lacs, mais en courant, comme les rivières, dans sent, croissent, verdissent etse dessèchent; chez
nn lit sinueux qu'elle lianehissait poiuinonder les les animaux mêmes la gestation et l'enfantement
alentouis, pourra-l-on ne pas concevoli- un pareil sont soumis à des époques hxes, et leur existence
phénomène, à moins d'avoir le travers d'un esprit traverse différents âges avant d'atteindre la vieil-
poinlilleux? 11 est naturel de penser <|u'il est lesse et la mort. Or, quel est l'auteur de ces mou-
dit de la terre (juelle était arrosée sur toute vements dans la nature, sinon Dieu, encore qu'il
sa surface comme on dit d'une robe à raies n'y soit pas soumis lui-même? Le temps, en effet,
qu'elle est tout teinte, d'aulant plus que la n'a pas de prise sur lui. L'Ecriture a donc dis-
terredans sa nouveauté, tout en étant accidentée, tingué entre les œuvres de Dieu, celles dont il se
se composait probablement de vastes plainesoù reposa le septième jour, et celles qu'il accomplit
les eaux pouvaient courir et se répandre en encore aujourd'hui: elle arrêle sonircil, pour
liberté. avertir (ju'elle a exposé les premières et qu'elle
2(i. Qu'elle a élt' la grandeur de cette source va expliquer les secondes dans leur ordre. « Voici,
ou comineni s'esl-elle multipliée? Est-ce parce « (lit-elle, le livre des origines du ciel et de la terre,
d'un seul jet, ou
qu'elle jaillissail ipielque part « quand Dieu fit le ciel et la terre, toute la verdure
qu'elle forme dans les profondeurs de la terre un u des champs avant qu'il y eneùt sur la terre, toutes
vaste et unique réservoir, d'où s'échappent les «les herbes de la ferre avant qu'elle eussent poussé.
eaux de tous les sources grandes et petites, que « Car Dieu n'avait point encore fait pleuvoir sur
l'Ecriture a parlé d'une source qui sortait de la « la terre et il n'y a point d'homme pour la tra-
terre, en se partageant de tous les côtés, et qui ie
Icicommencel'expositiondesnouveaux
vailler. »
arrosait la surface du globe? Ou bien n'est-il pas actes de Dieu: « Une source jaillissait de la terre
])lus probable (pu' le singulier a été mis pour le « et en arrosait toute la surface. » Cette source

pluriel, puis(}ue le mot


employé sans indica-
est et les autres œuvres dont parle désormais l'Ecri-
tion de nombre fous et non pas unus funs ; et
: ture, se font dans une durée successive, et non
(lu'ainsi il faudrait entendre parla une multitude toutes ensemble.
de sources qui arrosaient, sur différents points
duglobe, celles-ci une contrée, celles-là une autre
CHAPITRE XII.
;

comme on dit le soldat pour désignei' une armée, nu TRIPLE POINT DE VUE SOUS LEQUEL ON DOIT
comme l'iurilure elle-même signale parmi les CONSIDÈRE?. LES OEUVRES DE DIEU.
plaies de l'Egyptela grenouille et la sauterelle i,
La création offre donc un point de vik^ Iou
28.
quoiqu'il y en eût un nombre incalculable? Le
différent, selon que l'on considère le type éternel
problènu' ainsi posé ne vaut pas la peine qu'on
des êtres dans le Verbede Dieu, lesonvrages com-
s'y arrête plus longiemps.
posés avant le repos du septième jour, enfin les

CHAPITRE XI.
mouvements que Dieu accomplit aujourd'hui en-
core dans l'univers. Deces trois ordres de choses,
LA CRÉATION FUT INSTANTANÉE, LE GOURVERNEMENT le dernier seul nous est découvert par les sens

DU MONDE NE PEUT L'ÉTRE. et par l'expérience. Quant aux deux autres, si


élevés au-dessus du domaine des sens et des idées
27. Revenons donc avec une attention nouvelle naturelles à l'esprit humain, il faut d'aliord y
à la théorie que nous avons déjà présentée,
afm croire sur l'autorité de la parole divine, puis, à
d'en vérifier l'exactitude dans tous les détails :
l'aide de nos connaissances, chercher à les com-
nous avons que Dieu, lorsqu'il créa primiti-
dit
prendre avec plus ou moins de succès, selon la
vement les êtres et lit les œuvres dont il se reposa portée de notre esprit et l'abondauce des grâces
le septième jour, n'agit pas delà même manière
divines.
qu'il agit encore aujourd'hui en réglant l'ordre
CHAPITRE XIII.
de l'univers. Alors, en effet, il créa tout à la fois
sans le moindi'e intervalle detemps: aujourd'hui AVANT d'ÈTUE créés, TOUS LES ÊTRES ÉTAIENT
il agit dans ces périodes régulières selon lesquelles DANS LA SAGESSE DE DIEU.
les astres exécutent leurs mouvements d'orient
29. Surces principes divins, immuables, éter-
en occident, le ciel passe de l'été à l'hiver, et les
nels, qui; la Sagesse de Dieu, parqui touta été fait,
plantes, sous l'influeivce de la température, pous-
connaissait avant qu'ils eussent été réaUsés dans
I
Ps. civ, 34.
l'univers, l'Ecriture s'exprime en ces termes :
MVUE V. — TOUT CRf:f; KN Mf:ME TEMPS. 207

« Au (omiiu'iicciiiciit l'Iait If NCiiic, cl le NCrhc ipie par la cnaliou, mais poss«>de lu vie purCelui
« ('tail «'Il Dieu cllt' VitIh- t'-tait Dieu. Il ('lail di's (pii a couiui tous dont il est l'auteur,
les êtres,
« lo coiiiiiiciii'cnuMit l'ii hicii. Toutes cliosos ont a\ant(pril lussent loiinés. Dès l<u*s cette vie n'est
« élc taili's jiaf lui t'I rien de ce (|ui a clé lait u'a plus ici une existence coutiu^ieide ; c'est la vie et
« été l'ail sans lui '. «Or, l'cxliavanaiicc peut-elle la luinièi'c des hommes, la Sagesse elle-inèine,
alleijus(iu';isi»uteuii(iue Dieu n'a pas lait les clio- le Verbe,Fils unique de Dieu. Le sens est le

ses(pi'il cotuiaissaiiyS'il les eouuaissail, où pou- même dans ce passage: «Comme lePèrea la
(|ue
vait-il les coniiaili c, sinon eu lui-iiicuic, uni asou « vie en lui-même, il a aussi donné au Filsd'aNoir

Verbe, par cpii tout a ele l'ail ''S'il les a\ ait \ ues en « en lui-même la vie '.»
(leliorsde lui, qui l'en aurait iustruif? « Uni donc 3:2. N'oublions pasd'ailleurs (picdes manuscrits

« a connu les pcusc'cs du Sci;;ucui'? Uni l'a aidé plus coi'i'ects portent : « (fund factum est, in illo

« de ses conseils'.' Oui lui a doiuic le picuiicrcl « vild erat, ce (|ui a éti' fait, (''lait vie en lui ; » et
« sera réli'ihué? (]ar, c'estde lui, piU' lui cl imi lui qui! faut entendre les (lcu\ mots:« était ta vie, »
« (|ue sont loides choses ''. » comme on erdend: c< au commcucemeiil était 1<'
M). I>u resteceltc |)enséeest mise dans tout son « Vei'beet le Veri)e était eu Dieu, et le Verbe était

jour par les paroles qui vieinient iuunédiateinent « Dieu . » Doue, (('(/»/ u été fait avait dé-ormais/H
a|irès: < Ce (pu a été fait est vie en lui et la vie vie e)i lui; non la vie telle quelle, ce mot s'appli-
« était la lumière des lionin les-'. >' Eu elTel les êtres (juantaux bêles (pii n'ont aucune counuunication
raisonnables, |)arnii lesquels se range l'Iionnne avec la Sagesse, maiscette vie qui est la lumière des
lait à l'image de Dieu, ne trouvent leur véritable hommes. Les intelligences, en effet, ipiand elles
lumière (pie dans le Verbe, par (pii tout a été ont été puriliées par sa grâce, peuvent Jouir de
lait, lorsque leur âme puriliée du péché et dé- cette vision sublime et béatiliipie, au delà de-
livrée de l'erreur, est entrée en connnunication la((uelle il n'y a plus rien.
avec lui.
CHAPITRE XV.
CHAPITRE XIV.
(:O.MMENT LES CHOSES SO>T-ELLES VIE E.N DIEl?
EWMEN 1)1- TEXTE : Çiiod fnrtum est, in ///-j vild.

33. Mais en supposant qu'il faille lire « Ce qui :

81 . En lisant ce passage, gardons-nous de faire


« a été fait, est vie en lui, nous reste à éclaircir
» il
entrer dans le premier membre de phrase les
comment ce qui a été fait est en lui vie. Or, c'est
mots: '< in illo, » et deréduircla proposition prin-
dans son essence qu'il 3 tout vu,(iuaiul il a tout fait,
cipale aux mots: X vitaest '>,en d'autres termes,
et il l'a fait comme il l'a \ u il ne voyait pas les êtres ;

lieponctuer ainsi quod factum est /» Ulu, erut


eu dehors de lui; c'est en lui-même qu'il conqita
;

l'Ha: ce qui a été t'ait en lui, était vie. Uu'\ a-t-il


toutes les choses (ju'il (it. Cette vue de la création
donc qui n'aitété fait en lui quand le Psalmiste,
n'était pas différente chez le Père et le Fils : elle
après avoir cité plusieurs créatures même ter-
comment
était une comme leur subtance. Voici
restres, s'écrie dans votre
: « Vous avez tout fait
la Sagesse elle-même, par (jui tout a été créé,
« Sagesse *;» (puindTApùtre nous apprend: «que
est dépeinte dansle livre de Job « Mais d'où vient :

toutes chosesontétécréesen lui, celles qui sont au


(1

« donc la Sagesse? et quel est le lieu de l'intelli-


«ciel connnc celles quisont, sur la terre, lesclio-
« gence?Lesmortelsn'en connaissent pas le clie-
« ses visibles et leschoses invisibles -«T » Enponc-
« min et elle ne se trouve pas chez les bounnes. »
tuaid ainsi, il faudi ail admettre que la terre elle-
Un peu plus bas il ajoute: « Nous avons ouï sa
même avcv- tout ce (lu'elle contient est la vie. Or,
«gloire: leSeigneurnous adécouvert le chemin
s'il absurde de prétendre que tout estvivant,
est
« de laSagesseet lisait où elle est. C'est luiqui a
combien l'est-il davantagede dire que tout est la
«achevé toutce que existe sous les cieux; il con-
\ ie, surtout au sens que l'Evangéliste précise avec
« naîttoutce que la terre contient, tout ce (pi'il a
tant de rigueur, quand il ajoute « Et la vie était :

«fait, llapeséles vents, ilamesuré leseanx, quand


« la lumière des hommes ? » Coupons donc ce
I il les lit, et comme il les a vus il les acomptes. » '^

passage de façon à lire: « Ce qui a été fait, est la vie


Ces témoignages prouvent que leschoses étaient
« en lui ;
» c'est-à-dii'e, n'existe pas nécessaire-
connues du Créateur, avant d'être créées. Elles
ment et en soi, puisque l'être ne lui a été donné
étaient d'autant plus parfaites dans linteUigence
I
Jean, 1,3,4. — 2Rom. xl, 31-36. — ^ Jain, I, 4.— < Ps. cm, 24.
— ^ Colos. I. 1, 16.
I
Jcnn, ï, 26. — = Job, .\.\ni , 12, 22-2-i.
202 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

conformes à la vé-
divine, qu'elles y étaient plus plus de peine que leur auteur, et tout ensemble
rité éternelle etimmuable. Il suflit sans doute de il y a un bonheur incomparablement plus élevé
savoir ou du moins de croire leiniement (jue Dieu à \(ilr d'un coup par le moindre rayon des per-
a créé l'univers cependant nul n'est assez dé-
: fections divines, qu'à embrasser dans sa science
nué d'intelligence pour penser que Dieu ait fait toutes les merveilles de l'univers. C'est donc avec
deschosesqu'il ne connaissait pas. Or, s'ilconnais- raison qne la Sagesse adresse ces reproches aux
saitleschosesavantdeles faire, elles étaient évide- investigateurs du siècle: « Si leur génie, dit-elle,
ment connues de lui, avant d'être créées, selon « a été assez puissant pour pénétrer l'univers,
le mode dont elles subsistent éternelllenient, « comment n'en ont-ils pas découvert le Seigneur

invariablement, et qui les confond avec la vie « plus facilement encore?' Nos yeux ne peuvent »

elle-même mais elles ont été créées selon le mode


: découvrir les fondements de la terre, mais Celui
d'existence assijiné à chaque être d'après son (|in les a posésest tout près de notre intelligence.
espèce.
CHAPITRE WII.
CHAPITRE XVl.
DES EXPRESSIONS : AVANT LE SIÈCLE , DEPUIS LE
DIEU EST PLUS FACILE A CONNAITRE QUE LES CRÉA- SIÈCLE, UANS LE SIÈCLE.
TURES.
maintenant les êtres que Dieu
33. Considérons
34. Cet Etre éternel, innnuable, ce Dieu qui a créés tousensemble et les ceuvres dont il s'est re-
existe par lui-même, comme il l'a révélé à Moïse posé le septième jour nous examinerons ensuite :

enlui disant : « Je suis l'Être ', » a sans doute une les œuvres où son activité se fait sentir aujoui'-

nature bien différente des créatures qu'il a faites ; d'hui encore. Pour lui, il existe uvun\ tous les siè-
il possède en effet rêtre véritable et par lui-même, cles ; ce qui existe depuis le siècle, est ce qui existe
en ce qu'il est toujours de la même manière, et depuis l'origine des siècles, comme le monde lui-

que, loin de cbanf:er en acte, il ne peut changer même; et ce qui est dans le siècle désigne poui'
même vrituellement; aucune de ses créatures nous tout ce qui y nait. Aussi après avoir dit :

ne peut se produire ni subsister en possédant « Tout a été fait par lui et sans lui rien n'a été

comnu^ lui la plénitude de l'être: car il ne sau- 'iJ'iHt, i> i'Évangile ajoute un peu plus bas « 11 :

rait les faire sans les connaître, ni les coiitt&îifé' « étaitdans le monde, et le monde à été fait par
sans les voir, ni les voir sans les conte»|^"f en lui or, : « lui '. » Le monde est ici l'ouvrage dont l'Écri-

ilne peut contenir en lui-uvginpjes êtres qui ne critiue a dit ailleurs « Dieu, vous avez fait le
:

sont pas encore formés; qu'autant qu'il ne l'est pas « monde d'une matière sans forme 3. Le monde >>

lui-même. .g;£,n essence ineffable nepeutse déli- est souvent appelé dans l'Écriture, comme nous
que grossièrement dans les langues humaines,
V.'.'i"
l'avons remarqué, ciel et terre : c'est l'ouvrage

à l'aide de termes empruntésaux idées de temps (pie Dieu lit, lorsque le jour fut créé. Nous avons
et d'espace, pour dépeindre Celui qui est avant traité ce sujet avec tout le développement qu'il

l'espace et le temps. Cependant le Créateur est nous a paru comporter cherchant à expliquer ,

V plus près de nous qu'une foule de ses créatures. que, dans sa création primitive, le monde a dû
C'est en lui que nous avons la vie, le mouvement s'achever en six jours avec tout ce qu'il contieid,

et l'être
">
;
quant aux créatures, la plupart sont qu'en même temps il s'est fait avec le jour, et
éloignées de noire raison par la distance même qu'ainsi tout concourt à prouver que Dieu a

que la matière met entre les esprits cl les corps; créé tout ensemble *.

puis, noire raison elle-même est impuissante à


voir au sein de Dieu les principes qui ont pré-
CHAPITRE XVIII.

sidé a leur l'orm ilion, el à découvrir ainsi, en


dehors de l'expérience, leur nombre, leurs pro- DE l'ignorance OU NOUS SOMMES d'UNE FOULE DE
priétés, leur grandeur véi'itablc. Enfin, ils échap- CRÉATURES. COMMENT SONT-ELLES CONNUES DE
pent même à nos sens, parce qu'ils sont trop loin DIEU ET DES ANGES ?
ou que d'autres corps viennent se placer entre
36. y a dans le monde une foule d'êtres que
eux et nos organes, et nous empêchent de les voir
Il

nous ne connaissons pas; les mis, comme le3 astres


ou de les toucher. Ainsi on les découvre avec

— 2Act. 'Sag. xiii.S. — 2 Jean, 1,3, 10. — 3Sag. XI, 18. — 'Eccli. xviii, 1.
'Exode, m, 14. XVII, 23.
LivKK V. — HUIT mm m mi:mi': tk.mps. nw
tliins Ir cii'l, soiil Irop cloitiiirs piiiir ne pas ccliai)- " A moi ijui suis le dernier de Ions les saints, a
perà nos regrards; d'autres se tioinoiit dans dos « été donnée lagrAcede |»ublier parmi les (ienlils
cimliM'i's piMd-iMre iiilialtilMlilcs; cnliii il \ en a « les richesses ineornpi-elierisililes deJi'sus-t^hrist,

(II' cai'liés dans les aliinics de la niiT iiu dans les « et d'élcaii'er tons teshonnues sur la dispensa-
fidraillt's de la Iciri'. Tons ces (Hirs n'a\airiil ' lion du mystère caché dès l'origint; des siècles,
ancnne existenee a\anl d'èlres ci'éés. (lonmicnl « dans le scinde Dieu, créaleiu-detoides choses,
Dieu a-l-il eoinui ce (pii n'clail pas, on i'éei|)io- < alin ipie les principautés et les puissances c6-
quement, comment a-t-il créé ce qu'il ne con- « lestes connussent par l'Eglise la sagesse si di-
naissait pas? Or, il n'agit pas avec isnoranco. Il « versiliée de Dieu, selon le déci'el éli'inel rpi'il
a donc l'ail ce cpi'il eonnaissail, et a eonnn les " a exécuté eu Jésus-CInisI Notre-Seigneur '. «

choses avant qu'elles tussent laites. A\ant la créa- Ainsi ce mystère avait été caché depuis l'origme
tion, les choses (-taieid et tout enseinhle n'iHaient des siècles, dans le sein de Dieu, de tiK.on tou-
pas; ell(>sdans l'iidellincnce divine, elles
étaieni tefois cpit' rr^glisedevailri'véleraux Principautés
n'étaient |»as dans -nr nalin'e. Il créa alors ce1 et aux Puissances la sagesse de Dieu sous ses for-
jour intelligent tpii devait les comiaitre en Dieu mes si diverses. Au ciel est l'Iîglise primitiveà la-
et en elles-mêmes en Dieu et ce l'ut comme le : quelle doit se réunir la nôtre a|)rès la résurrec-
malin et le jour, en elles-mêmes et ce t'iitcomme de nous rendre semblables aux anges '*.
tion, afin
le soir. Uuaid à Dieu, je craindrais de dire (ju'il Ce mystère leur fut donc révélé dès l'origine des
vit autrement les choses, après leur création, (pie siècles : car tout èti'C créé n'existe que depuis
dans les idées (pi'il devait réaliser, puisqu'il n'y l'origine des siècles et ne leur est pas antérieur.
a en lui ni chanj;euient ni ombre de vicissi- Les siècles conunencent avec la créature et la
tudes' . créature avec les siècles, puisque l'origine de
l'une est celle des autres. Le seul ôtre engendré
CHAPITRE XIX. avant les siècles est le Fils unique par lequel ont
été créé les siècles ^ Aussi la Sagesse dit-elle dans
LES .\NGES ONT CO\.NL' DÈS l'oRUJINE DES SIÈCLES
l'Ecriture : « Il m'a établie avant tous les siè-
LE MYSTÈRE DU ROYAUME DES CIEUX.
« clés ^; » et c'était atiude former tout par elle,

de messagers pour être


Al. Dieu n'a pas besoin suivant la parole : « Vous avez tout fait dans la

instruite! en quelque sorte informé de ce qui se « Sagesse ^. »

passe dans les parties les plus éloignées de la 39. Or les Anges découvrent ce mystère caché,
création : il connail tout d'une manière simple non-seulement dans le sein de Dieu, mais encore
et absolue par son intelligence infinie. S'il a des au moment qu'il s'accomplit et se répand le :

messagers, c'est dans leur intérêt et dans le m'itre :


même Apôtre le témoigne en ces termes « Et :

obéir à Dieu, se tenir en sa présence, afin de lui « il est manifestement grand ce .uystèrede piété,

demander monde,
ses desseins et ses ordres sur le « qui s'est manifesté dans la chair, qui a étéjus-

et d'exécuter un
ses cummandements , c'est « tilié par l'E^prit-Saint, dévoilé aux anges, prè-

bonheur auquel tend leur nature et pour lequel « ché aux nations, cru dans le monde et élevé

ils sont laits. Le mot Ange, emprunté au Grec, '< dans la gloire ". » Ou je me trompe fort, ou
sert à désigner toute la cité céleste, dont la créa- l'unique raison qui fait dire que Dieu connaît
tion est à nos yeux celle du premier jour. dans tel ou tel temps, est qu'il révèle les choses
38. Us n'ont pas ignoré le mystère du royaume soit aux anges soit aux hommes. Cette figure de

des qui nous a été révélé au temps mar-


cieu.x, langage, qui consiste à prendre la cause pour
qué pour notre salut, et ils savent que délivrés l'effet, esl très-fréquente dans l'Ecriture; surtout
un jour de nous serons réunis à leurs
cet exil, quand on dit de Dieu îles choses qui ne sam-aient

chœiu-s. Il est impossible, en eflet, qu'ils aient lui convenir au sens propre, d'après le cri de la
ignoré ce secret. Car, l'avènement de Celui qui vérité même qui dirige notre âme.
devait naitre au tenq)s marqué a été préparé — 'Prov. viii
I
Kpliès. 111, s. 11. — : Matt. xxii,30. — "Héb. 1, î.
par leur entremise, et avec la puissance du Mé- 23. sel. Lxx. — ' Ps. cm, 24. — ' I Tim. m. 16.

diateur , en d'autres termes 2, du Dieu qui est


leur Seigneur et dans sa nature divine et dans
sa nature humaine. L'Apôtre nous dit ailleurs ;

'
Jacq. 1. (7. — 2
1 Rét, liv. 2. cli. 24, n. i , Gai. m, 1^.

S. AuG. — ToM. IV. u


210 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

leur existence par la diversité de leurs instincts,


CHAPITRE XX. lesimpies enfin peuvent éprouver quelque temps
les justes voilà comment Dieu déroule la suite
:

OUE DIEU AGIT .VOOIRd'hLI .MÉ.ME.


des siècles qu'il avait pour ainsi diie enveloppée

40. Disiinguons maintenant œuvres que début dans la ciéalion. Les siècles ne sauraient
les
Dieu fait eneore, des œuvres dont il s'est reposé eu développer avec leiu's péi-iodes régu-
effet se

septième jour. lières, si lem- auteur cessait de les régir d'après


le Il y a en effet des j)hilosophes
qui pensent que Dieu les lois de sa Providence.
s'est borné à créer le monde,
que tout ensuite s'aceonq)lit nalnrellement dans
le monde, d'après l'ordre que Dieu y a établi, CHAPITRE XXI.
taudis qu'il demeure inactif. Cette opinion est
refutée par celte parole du Seigneur lui-même: L.^ DIVINE PnOVIDENCE GOUVERNE TOUT.
« 3Ion Pèi'e agit encore aujourd'hui. » Et pour

qu'on ne s'imagine pas que le Père agissait dans 4:2. Ce qui se forme et nait dans le temjis, doit
nousai)pi'endre à quel point de vue nous devons
son Fils sansagirdans le monde, il ajoute « Mon :

tout envisager. Ce n'est point inutilement qu'il


« Père qui demeure en moi, accomplit ses œu-
a été écrit de la Sagesse : « iqu'elle se montre en
« vres : et, le Père ressuscite les morts et leur rend
« riant à ceux qui l'aiment et qu'elle se présente
« la vie, donne la \ie h qui il lui
ainsi le Fils
a plait '.
« dans sa providence universelle '. » Gardons-
y> ne produit .pas seule-
Cette activité
ment des miracles et de grands événements elle nous donc d'écouter ceux qui prétendent que les
:

s'étend aux moindres phénomènes qui s'accom-


régions supérieures de l'nuixers, en d'autres ter-

phssent ici-bas comme nous le dit l'Apôtre: « In- mes, celles qui commencent où finit notre at-
« sensé, le grain que tu jettes dans la terre, meurt
mosphère, sont seules gouvernées par la Pi-ovi-
« avant de prendre une vie nou\ elle
dence, tandis que ces parties basses et humi-
et ce (pic ;

« tu sèmes n'est pas le corps même qui doit venir.


des de la teri-e, cette atmosphèi-e épaisse où se

« Ce n'est qu'un simple grain, comme celui du condensent les émanations de la terre et des eaux,
« froment ou de tout autre plante. Dieu néan- où s'élèvent les nuages et les tempêtes, n'obéis-
« moms
donne un corps selon sa volonté,
lui
sent (\uk des mouvements irréguliers et pour
« et à chaque semence son corps propre ^. »
ainsi direau hasard. Le Psalmiste réfute ces phi-
Croyons donc et comprenons même, si nous en losophes dans le cantique où il invite d'abord les
sommes capables, que Dieu continue d'agir dans
cieux à louer l'Eternel, puis s'adresse aux créa-

le monde, et que la création disparaîtrait, si le tures des régions iuférieiu'es en ces ternies « Du :

concours divin venait à « milieu de la terre louez le Seigneur, ilragous,


lui manquer.
41. Une faut pas s'imaginer
« abîmes, feu et grêle, neige et glace, vents cl
que Dieu aujoui--
d'hui crée dans les êtres des espècesdont il n'aurait
a orages, qui exéiutez sa parole 2. » En appa-
pas déposé les principes dans la création pre- rence c'est le hasard qui déchaîne les oi-ages et

mière les tempêtes, dont la fureur change, bouleverse


: ce serait évidemment contredire l'Ecri-
ture quiaftirme qu'au sixième jour Dieu acheva cette atmosphère, que l'Ecriture appelle souvent
tous ses ouvrages 3. Qu'il produi.se de nou\ elles du même nom que la terre mais le Psalmiste, •

créatures, selon les lois qu'il a ét;d)Iies;i l'origine, en ajoutant que ces éléments « exécutent la pa-
« rôle » de Dieu, montre clairement qu'il y règne
c'estun point incontestable mais ce serait une :

erreur de croire qu'il crée des espèces nouvel- un ordre établi parla sou\eraine Providence, et
les, puisqu'il atout achevé au sixième jour.
que l'harmonie uni\ersellenous y échappe plutôt
Ainsi,
sa puissance renuie secrètement toute la nature que d'en être absente. Eh quoi le Sauveur, en !

et en fait mouvoir tous les ressorts disant qu'un seul passereau ne tondje pas sur la
les anges :

accomplissent ses ordres, terre sans la volonté de Dieu ^, que l'herbe des
les astres parcouient
leurs orbites, les vents changent de direction, champs qui doit être jetée au feu est vêtue par
l'a-
bîme se renouvelle par
chute des eaux et la la
Dieu même '<,
n'affirme-t-il pas de sa propre
formation des vapeui-s dans l'atmosphère les bouche que les régions du
assignées aux monde
,

plantes se multiplient et développent leui-s semen- corps prérissables et corruptibles, sont soumises
ces, les animaux se reproduisent et soutiennent
au gouvernement de la Piovidence, que les plus

' Jean; v, 17, 20, 21 .


—2 I Cor. xv, 36-38. — •>
Gen. it, 2. I
Sag. VI, 17. — îPs. cxLvill, . — iMalt.x,a9.— ' Ibitl. vr3û.
LIVRE V. — lOUT CUEf: KN MKME TKMl'S. '2\\

\ils l'I li's plus gtrossiors des iilôiiios ne le sont reur, au iiio\en de la sainle Ecriture, cherchons

|).'is mollis : à péueirer plus a\aul a\ec le sceniirs divin, dans


CHAPITRE Wll. les œuvres (pieDieu créa tontes à la fois, lorstpril
les îicheva (>t qu'il se re|tosa, el ipi'il produit aii-
l'IlElVICS lU cm VKIINKMENT IH] I.V l'lt(i\ IDICNCK. jonrd'liui aveceellesiiile (pie eoniporle le temps.
Considérons la beaiilé d'un arbre dans son
Si los |)liilos(i|ilu's (jni iiiciil celle vérilé el ne
i;{. tronc, ses rameaux, son feuillage, ses fruits. Cet
veulent pas se rondie à l'aiitorilé de rEeritiiie,
arbre, avec ses proportions et ses propriétés, ne
si liaiile ipi'elle soil, éliidiaienl celle pariie de l'ii- formé tout d'un coup, s'est de-
s'est pas il

niveis, ilsxoieiil lesa\eiii;les iiioii\eiiieiils du que nous connaissons


(u'i
veloi)pé dans l'ordre : il

hasard pliilol (|iie la direclion d'une sagesse su- s'est épanoui sur une racine (|u'un germe avait
périeiiie,en aluisanl, iKinr donner à lenr llièse d'abord lixée dans le sol, puis celle lige a grandi
l'apparence d'nnedenionslialion, de rar;;iiiiienl el s'est organisée. Or, ce germe vient d'une se-
londé sur les \aiialions alinospliéiupies ,
on semence contenait donc tmiles les
iiK'nce; cette
niènie sur la dispioporlion qui renne ici-bas parties de l'arbre, non en acte el avec leur gran-
entre les niérilesel le lioiilieur; s'ils exaininaniel
deur naturelle, mais en puissance. Cette gran-
laslrucluredii corps des animaux et envoyaient deur s'est formée sans doute avecles sucs féconds
l'ordre, non avec les yeux d'un médecin que son delà terre, mais elle n'en prouve que mieux la
art oblige à désigner et à observer minutieuse- force supérieure el merveilleuse qui, r(>nferniée
ment les moindres organes, mais a\ec l'inleili-
dans une graine presque imperceptible, a Irans-
gence el le cieur d'imbonime ordinaire; ne s'é-
foiiué les sucs mêlés au sol environnant, connne
crieraient-ils pas (pie Dieu, principe de toute pro- une matière première, et leur a donné la soli-
porliiui, de tout équilibre, ne
deloule svinétrij',
dité du bois avec la vertu de s'étendre en une
cesse i)asinéine un instant de diriger la nature? foule de rameaux, avecla verdure et la variété des
N'est-ce pas le comble de la déraison et de l'ev- nombre des fruits, en un
feuilles, la ligure et le
Iravagance, que de ne pas voir la direclion de la mot ordonnance adiniralde de toutes les
cette
l'rovideiice de l'univers où les
dans nue i)artie parties qui conq)osent un arbre. Pourrait-il y
plus petits des êtres ont une organisation si belle,
naître une feuille, y pendre un fruit qui ne sorte
si parfaite, (|u'mie analyse un peu attentive ins-
du trésor mystérieux caché dans la semence ?
pire une admiration qui terrasse et (}ui confond? semence vient d'un autre arbre, lequel
Or, cette
Si,d'autre part, l'àmc est supérieure au corps est sortid'une autre semence; parfois aussi un
par sa nature, \ a-t-il rien de plus insensé que arbre naît d'un arbre, ipiand on en sépare un
de se (igurer la l'rovideiue indifférenle à la con- rameau et qu'on le replante. Ainsi la semence
duite des bonnnes, quand elle fait briller avec vient de l'arbre, et l'arbre de la semence ou de
tant d'éclat sa sagesse dans la structure de leurs l'arbre même. La semence encore ne peutsortir
organes? D'où vient cette illusion? C'est que les d'une autre semence que par l'intermédiaire
petites clioses, étant à la portée de nos sens et tl'uu arbre, tandis que l'arbre peut se repro-
faciles à découvrir, laissent apercevoir l'ordre de duire sans semence. Ils sont donc réciproque-
lanature; tandis ((ue d'autres, dont l'ordre nous ment cause l'un de l'autre, et prennent égale-
échappe, ne sont que confusion aux yeux des ment naissance dans la terre et connne la terre ;

sensualistcs, qui n'admettent rien au-delà du do-


n'en provient pas, elle leur sert d'élément pri-
ou admettent
maine de mitif et générateur. H en est de même des ani-
l'expérience, qui, s'ils

chose, le con(,oivent à l'image de ce


(lueliine
maux: on peut dout-^r si la semence vient d'eux-
qu'ils voient d'ordinaire. viennent de la semence mais,
mêmes ou s'ils ;

quelle que soit la première de ces causes,


CHAPITRE XXIIl.
toutes deux ont évidemment une origine com-

COMMENT PEIT-OX CONCILIER L.V SIMILTANÉITÉ DE


mune dans la terre.
43. Ainsi donc une graine contient imlsible-
LA CRÉATION AVEC LE GOUVERNEMENT ACTUEL
ment toutes les parties qui, avec le temps, doi-
DE LA PROVIDENCE?
vent former un arbre : il faut concevoir de la

44. Pour nous, dont la divine Providence dirige môme manière que le monde, à l'instant où Dieu
empêche de tomber dans l'er- créa tous les êtres à la fois, renfermait l'ensem-
les pas et qu'elle
â12 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

ble des êtres qui se (irent en lui et avec lui, « d'homme pour la cultiver, » comme ajoute
quand le jour lut fait; j'entends par là non- l'Écriture. Il créa tout ensemble et acheva son
seulement le ciel avec le soleil, la lune, les as- ouvrage en six jours, en faisant apparaître six
ti'es qui exécutent leurs mouvements de rotation fois, de^ant le jour qu'il avait fait, les êtres
en restant toujours les mêmes, non-seulement la créés,non par une révolution de temps, mais
terre avec les abimes qui, soumis à de brusques par un enchaînement logique de cause à effet.
révolutions, forment la région inférieure et Il se reposa de ses œuvres le septième jour, et

comme la seconde partie de l'univers, mais en- daigna révéler son repos et en faire un sujet
core tous les êtres que la terre produisit virtuel- d'allégresse : ainsi ce n'est point h propos d'un
lement et en puissance, avant qu'ils naquissent, de ses ouvrages, mais de son repos même
dans la suite des temps, en l'état où nous les qu'il bénit et sanctifia le jour. Dès lors , sans
voyons successivement apparaître à nos regards créer aucun être, gouverne et met en mouve-îl

parmi les œuvres que Dieu accomplit encore ment par sa Providence tout ce qu'il a fait du
aujourd'hui. même coup son activité est permanente, il se
:

46. « C'est donc là le livre des origines du ciel repose et agit tout ensemble, comme nous l'a-
« et de la terre, quand Dieu fît le jour et qu'il fit vons exposé. Quant aux dernières œuvres qu'il fait
« le ciel et la terre, toute la verdure des champs, encore aujourd'hui et dont la suite doit se déve-
« avant qu'elle existât sm' la terre, et toute lopper selon la marche du temps, l'Écriture en
« l'herbe des champs, avant qu'elle poussât. » H marque le début dans ce passage « Une source :

n'agit point alors, comme aujourd'hui, avec le « jaillissait de la terre et en arrosait toute lasur-
concours de la pluie et du travail des hommes, « face. » Comme
nous avons exposé nos idées sur
puisque « Dieu n'avait point encore fait tomber cesujet, nous reste à poursuivre notre commen-
il

« la pluie sur la terre et qu'il n'existait pas taire en ouvrant de nouvelles considérations.

LIVRE VI.

LE CORPS HUMAIN

CHAPITRE PREMIEK. eut poussé : dans ce cas, riiomme fait comme


en germe dans les profond':'urs de la natm'e,
LES MOTS . « DlEl FORM.V l'HOMMEDU LIMON DE LA ainsi que tous les êtres créés ensemble à l'ins-
« TERRE, » 0.\T-ILS TRAIT X LA FORMATION PRI- tant où naquit le jour, aurait pris avec le temps
MITIVE DE l'H0M:,!E LE SIXŒME JOUR, 01 BIEN ces formes sous lesquelles aujourd'hui il passe
INDIQUENT-ILS UNE FORMATION POSTÉRIEURE ET sa vie dans la pratique du bien ou du mal, de la
SUCCESSIVE ?
même faç^'ou (jue l'herbe, faite avant d'avoir

1. « Et Dieu l'homme du limon de la terre,


fit poussé sur la terre, se développa avec le temps
« et il souffla sur sa face un souflle de vie, et et sous l'influence des eaux de la source.
« l'homme devint un âme vivante ', » La pre- 2. la première hypothèse.
Discutons d'abord
mière question qui se présente est de voir si l'É- Il que rhoiniue eût été fait le si-
serait possible

criture reprend son récit, pour expliquer la for- xième jour, suivant la même loi que le jour
mation de l'homme dont elle a raconté la créa- primitif, le fiimanent, la terre et la mer. On ne

tion au sixième jour, ou si Dieu ne fit pas saurait dire en ctïet que ces ouvrages étaient

l'homme en principe, quand îl créa tout à la formés en puissance dans quelque création pri-
fois, comme il fit l'herbe de la terre avantqu'clle mordiale, et ques'étaut développés avec le temps,
1 Gen. II. 7.
ils sont apparus pour composer l'édifice de l'u-
LIVRE VI. — LE CORPS HUMAIN. -213

tiivers : c'est h l'origine des temps, quand se lil le Paradis i* Y aurait-il encore là une omission
le jour, que (ut eréé le uiDUile et (|ue l'nicnt dé- (pu- r(''pare rr.criliu'e ? C'est le luèuie sixième

posés à la lois dans ses éléiueids les neruies demi joiu-, eu cri'i'l, (pii' le Paradis hd plaidé, que
les plaides ou les animaux devaient sortir dans l'homme y fut établi, puis endormi pour que la
la suite des temps. Car, il ne l'aul pas noire ipie femme fût formée, eidiii cpi'il s'éveilla et lui

les astres mêmes aieid éléd'ahard \iilueliemeri( doima le nom irKvc. Or tout cela ne peut se
éléments de l'univers, pour se faire que successivement (U'sieuvres sont ilonc
créés dans les ;

coniposer a\ee le temps, el ai)paraitre eidiu (lislinctes de la création où tout fut simultané.

tels (pi'ils l)rilleut dans les eieu\ ; tout a été

créé ensemble dans la période marquée par le CHAPITRE m.


nondtre parlait six,au moment où le jour se lil.
EXAMEN DU Mh'lME SUJET d'aPRÈS d'aUTRES
L'homme lut-il doue créé eouuue eux dans sa
PASSAGES DE l'eCRITURE.
grandeur naturelle, tel qu'il vit, el ipi'il prati<pie
le bien ou le mal ? Ou bien aurait-il été l'onué Supposé que Dieu ait composé cet ouvrage
i.

eu puissance, comme l'iierbe des champs, pour en même


temps que tous les aulres, avec une
uaitie plus lard et devenir avec le temps l'èlre facilité aussi grande qu'on voudra; il n'est pas
i|ui fut formé de la poussière? moins certain que les paroles exigent une cer-
tain temps pour sortir de la bouche d'un homme.
CHAPITRE II.
Quand donc nous entendons l'honnue donner un
nom aux animaux, à sa femme et ajouter même :

vkiiifu;ation de l'hypothèse d'après l'e>semble


« C'est pourquoi l'homme laissera son père et
Di: PASSACE DE l'ECRITLRE.
« sa mère et s'unira à sa femme, et ils ne forme-

« ront qu'une même chair i, « quels que soient


Admettons comme vrai ([ue l'Iionnne lut
;l
les sons qu'd aillait entendre, il n'a pu prononcer
l'ormé au sixième jour du limon de la terre ilans
sa perfection naturelle, et que l'Écriture coud)le
deux syllabes en une seule émission de voix à :

plus forte raison tous ces événements n'ont-ils pu


celle lacune en reprenant son récit. Voyons donc
Dans s'accomplir à la lois, au moment où la création
s'il \ a accord entre elle el notre opirùon.
se fit dans son ensend)le. Alors de deux choses
le récit du sixième jom-, elle s'exprime ainsi :

" taisons l'honnne à notre image


Et Dieu dit :
l'une ou toutes les choses n'ont point été faites
:

« et à notre ressemblance et qu'il domine sur ;


simultanément à l'origine des siècles, et par con-
< les poissons de la mer et sur les oiseaux des
séquent ont été créées dans des périodes succes-
« cieux, sur les animaux domestiques, sur toute sives etrégidières,quandle jour primitif, phéno-
< la terre el sui' tout reptile qui ranqie sur la mène physique et non intellectuel, ramenait le

" terre. Et Dieu créa l'homme : il le créa h l'i-


soir et le matin, soit par une mystérieure révo-
" mage de Dieu; il le créa mâle et femelle. Et lution de la lumière, soit par la contraction et
•' Dieu les bénit et leur dit Croissez et nudtipliez-
:
la dilatation des rayons lumineux ; ou bien l'on

•< vous, remplissez la terre et assujettissez-la ;


regarde comme plausible, d'après les raisons

I dominez sur les poissons de la mer, sur les


et
ci-dessus développées, l'opinion que le jour trans-

« oiseaux du ciel, sur les animaux domestiques,


cendental et primitif fut une lumière toute spiri-
« SUI' la terre et sur tous les reptilestpd rampent tuelle, appelée jour, et initiée successivement

« sur la terre '. » Par conséquent l'homme était aux mystères de la création, dans un ordre lo-

déjà formé de la poussière, la femme avait déjà gique réprésenté par le nombre six ; on trouve
elé formée d'une de ses côtes pendant st)n som- cette opinion conforme aux paroles qu'ajoute
meil mais ces œuvres n'avaient poiid été décrites
;
l'Écriture : « Quand le jour fut fait. Dieu fit le

alors dans l'Écriture, et elle revient sm* son récit « ciel et la terre, et toute la verdure des champs
« avant qu'elle poussât sur la terre, et l'herbe
pour le compléter. Le sixième jour en effet,
« des champs avant qu'elle prit naissance 2 »
Dieu, loin de créer l'homme, en laissant à la
;

femme le temps nécessaire poiu- nailre, < créa enlin, on en vod la coidirmation dans cet autre
" l'homme et le créa mâle el femelle : et il les témoignage des li\res saints «Celui qui vit à :

« jamais, atout créé en même temps »; «dans ce


'< bénit. >i Mais alors comment la femme fut-elle
cas, il est incontestable que la formation de
créée poiu* lui, lorsqu'il eut été déjà placé dans
'
Gen. Il, 24. — ' Ibid.4, 5. — ' Eccli. ivni. 1.
'
Gen. I, 26-28.
214 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

l'homme tiré du limon de la terre, et celle de la avoir dit le jour où l'homme fut créé, a pu lais-

femme, tirée d'une de ses côtes, se rattachent, ser de côté sa formation et celle de la femme,
non à la création universelle et simultanée pour revenir i lu^ tard sur sm récit et le com-

après laquelle Dieu se reposa, mais aux œuvTcs pléter mais : elle n'a oublié aucune espèce de
qii'aujourd'hui encore Dieu accomplit dans la créahu'es, soit en exprimant le commandement
suite des siècles. divin, fiiit, faciamiis, soit en écrivant sesrésuUals,

S. Ajoutons que les termes mêmes du récit sic estfactum, fecit Deus. Eteneffet la dislinclion

où Dieu plante le Paradis, y place l'homme, si exacte des œuvres divines jour par jour de-
son ouvrage, lui amène les animaux afin qu'il viendrait imitile, si les époques prètaietd même
leur donne un nom, et ne tiouvant point d'aide h une ombre de confusion, et qu'il fallût croire
pom- Adam qui fût semldable à lui, tire d'une qu'après la créalion des plantes et des arbres, ren-
de ses côtes et forme la lennne, témoignent hien fermée toute entière dans le troisième jour, cer-
clairement que tous ces actes se rattachent, non taines espèces furent créées le sixième, sans que
aux œmxes dont il se reposa le septième jour, l'Ecriture en ait parlé.
mais à celles qu'il produit dans le cours du
temps. Voici, en elt'et, comment l'Écriture ra- CHAPITRE V.

conte que le Paradis liit planté : « Dieu planta


SUR LE MÊME SUJET.
« un jardm en Éden du côté de l'Orient et y pla(;a
« l'homme qu'il avait formé et Dieu fit sortir :

7. En dernier lieu que répondrons-nous à


d ensuite de la terre toutes sortes d'arbres agré-
propos des bêtes des champs, et des oiseaux du
exquis i.
« ables à la vue et offrant îles fruits »
ciel que Dieu fitvenir devant Adam, afin qu'il vit

conunent il les nommerait? Voici les termes de


CHAPITRE IV.
l'Ecriture : « Et le Seigneur Dieu dit : Il n'est
« pas bon que l'homme soit seul, faisons-lui
PLANTATION DU PARADIS TERRESTRE, AU MÊME POINT
« un aide semblable à lui. Et Dieu forma en-
DE VUE.
« core de la terre toutes les bêtes des cluunps,

Les mots : « Dieu lit aussi sortii- île la terre « tous les oiseaux des deux ;
puis il les (1 1 venir de-
« toutes sortesd'arbres agréables à la vue, « révè- " van! .V.dam, afin qu'il coiuuKMd il les nom-
vit

lent clairement que Dieu fit alors sorth des arbres ci nierait : et le nom qu'Adam, donna à tout ani-
de manière toute différente qu'au
la terre d' mie
''
mal vivant est son nom. Et Adam donna leurs
troisième jour, quand la teri-e produisit les her- « noms à tous les animaux domesti(|ues, aux
bes avec leurs semences, selon leur espèce, elles « oiseaux des cieux, et à toutes les bêles des

ai-bres fruitiers, également selon lem- espèce. « champs; mais ne se trouvait point pouril

Les expressions ejecit adhur signifient qu'il lit « Adam, d'aide qui fût semblable à lui. Et Dieu
naih-e ces arbres et ces herbes en sus de ceux « fit tondier un profond sommeil sur Adam, el

qu'il avait d'abord créés en eflét les premiers : « il s'endormit; et Dieu prit une de ses côtes el

avaient été formés virtuellement et en puis- « mit de la chair à la place. Et le Seigneur Dieu
sance dans cette création simultanée, après la- forma une femme de la côte qu'il avait prise
«

quelle Dieu se reposa au septième jour; les se- «Adam '. » Si donc Dieu tira des côtes de
à
conds apparurent réellement par un de ces l'homme un être semblable à lui pour l'aider,
actes que Dieu accomplit dans la suite des tenq)s après qu'il n'eut point trouvé d'aide qui lui res-
et qu'il exécute encore aujourd'hui. semblât parmi les animaiLX domesli(pies, les

6. On m'objectera i)cut-élre que toutes les es- bêtes des champs et les oiseaux du ciel; si d'au-

pèces d'arbres ne furenl pas créées le troisième tre part, la formation de la femme n'eut lieu

jour et que quelques-unes furent réservées pour qu'après que Dieu eut formé de la terre d'autres

le sixième, époque à la(|uelle l'honnue fut créé animaux el d'autres oiseaux, e! qu'il les eut fait

et mis dans le Paradis. M tis l'Ecriture énumère venir devant Adam ;


comment concevoir que
fort clairement les êtres créés le sixième jour, cet acte se soit accompli le sixième joui' ? La terre
lesanimaux selonleurs espèces, qua-
c'est-à-dire, n'a-t-elle pas produit ce jour-là même les ani-

drupèdes, reptiles et bêtes, et l'homme créé mâle maux, à la parole de Dieu"? Les eauv n'ont-elles
et femelle à l'image de Dieu. L'Ecritiu-e, après pas produit, le cinquième jour, les oiseaux du

' Gen, II, 8, 9. I


Gen. II. 18-2Î.
LIVRE VI. — LE CORPS HUMAIN. 2iK

ciol, ;iii ciiiimianilcniciil de Kii'ii? On HMuriiit sujet dil'licilc à saisir, cl dunl les espi'its lenis
donc |)as dit (iiii- « Hit'ii loriii;! incovr de l.i sont incapalilcs d'atteindre la liaidcin-, cl j'ai à

n IcriT /(iK^'.v It's lii'lcs des (•li;inii)s cl /ok.s' Icsoi- craindre de me voir prêter des pens(''es on des pa-
« scau.x (les deux, » si ronn'aviiit voulu exprimer roles anxcpielles j'ai la conscicMice de n'avoir
(|iic l,t Icriv avait di'Jà pruduil /o;/fi'.s- les licics des i.unais songé. (Juclipie allerdion ipie j'aie mise,

champs le sixième jotii-, cl (pie le ciiiipiième les dans les déNelojipenK'nis (pii précèdent, ;'i[)réve-

eaux avaieutépilemeid produit tous les oiseaux, nir toute confusion dans l'espril des lecteurs, je

tl \ eut donc une donl)le création, l'uueeu prin-


suis bien convairu'u (pi'uue foule d'entre eux,

cipe et en puissance, connue il couM'iiait à I'omi- loin d'y voir clair, s'imaginent cpu', dans la créa-
vre où Dieu créait tout à la l'ois, et dont il se reposa tion simullan(''e, l'hoimne l'ceut la vie et fut ca-

le septième jour, l'autre elTective et successive paljle (le disi'crner, de com{)i'eiuirc


et de saisir

ipi'il continue encore aujourd'iuii. Par causé- la parole divine : « vous ai donné
Voici que je

ipient, ce lut duraiil un de ces jours produils par « tonl(^ herbe poi-laul semence. » Qu'on venilh^
la révolution du soleil et semlilahles aux noires bien \\o nu' [tièter ni ime pareille idée, ni un
ipi'Eve lut tirée de la côte de l'houune. A cette pareil langage.

épo(|ue, en ettet. Dieu loriua de la terre d'autres tO. En revanche, si je prétends que, dans la
oiseaux, d'autres auimanx, et ce lut après n'a- création pLimilive et sinuillauée, l'homme, loin
voir trouvé parmi eux aucun èlre semblable à d'avoir atteint le développement de l'àgc mur,

Adam, et eai)ai)le de l'aider, (pi'il lit la fenuue. était moins (ju'un enfant (pii vient de naitre,
(l'est à la même épocpu' encore ([u'il lit l'iumune moins (pi'un iMnbi'jon dans le sein maternel,
du limon de la terre. moins que le germe visible dont il naît, on pen-
X. Qu'on ne dise pas que l'homme fut créé sera peut-être que c'est un rêve de métaphysi-
mâle le sixième jour, lèmelle lesjoui's suivants : cien. Qu'on revienne alors à l'Ecriture on y :

rKcriturc déclare expressément que « le sixiè- veria que le sixième jour l'homme fut créé à
>'nu^ jour r)i(>u créa l'iiomme mâle et feuielle l'image de Dieu, et créé mâle et femelle. Qu'on
« et les héuil. » (le lut donc eucore une dou- poursuive et qu'on demande à quelle époque
ble création l'une virtuelle
: et comme un fut fornu'c la fenuue ; on trouvera qu'elle fid for-
germe déposé dans le monde par la parole de mée en dehors îles six jours : car, elle fut faite

Hieii, loisqu'il lit à la Ibis les (Puvres dont il se à l'époque où Dieu fd produire à la terre de
reposa le septième jour, et ipii devaient èh'C le nouvelles l)étes des champs, d'autres oiseaux du

pi'incipe de toutes les créatures appelées à naître ciel ; et non au moment où les eaux produisi-
chacune en sou lenq)sdans la suite des siècles; rent les oiseaux, et la terre, les animaux vivants
l'antre, analogue à celle d'aujourd'hui par la- auxquels se rattachent les bêtes des champs. Or,
ipielle Dieu opère dans le temps, le moment c'est à cette dernière époque cpie l'homme fut

étant venu où Adam devait se former du limon créé mâle et femelle : l'homme fut donc créé à
de la terre, et la femme d'une de ses côtes. deux moments différents. On ne saurait dire en
effet qu'il fut créé le sixième jour et qu'il ne le
CHAPITRE VI. fid pas ensuite, ou, réciproquement, que les uns
furent créés le sixième jour, les autres plus
1/ VITEUR FOUMri.E SON OPIMOX AVKC, TOITE L.V tard : il n'y eut qu'un seul couple créé à
deux
NETTETÉ DONT U. EST CAPABLE, DE PEIIU D'ÊTRE époques différentes. Par quel secret, me deman-
MAI. COiMPKlS. dera-t-on'? Je répondrai que l'homme ne reçut
qu'après le sixième jour cette forme visible et
11. En faisant deux classes des œuvres divines, cette organisation particulière à l'espèce hu-
et en les rattachant, les unes à ces jours invisibles maine premier couple naquit sans
et que le
où il créa tout ensemble; les autres, aux siècles parents, l'homme du limon delà terre, la femme
en naquirent, et dans la suite desquels
(pii
de ses côtes. Et comment y étaient-ils contenus
il

l'ait journellement sortir les êtres des germes dira-t-on? Virtuellement, répondrai-je, en puis-
primitifs où ils sont comme enveloppés, j'aurai sance bref, ils naquirent selon la loi qui d'im
;

eu beau suivre avec discrétion et sans inconsé- un être réel.


être possible fait
([ueuce les paroles de l'Ecriture qui seules m'ont 1i . On ne me comprendra peut-être plus ; car
conduit à faii'c cette distinction, je n'en dois pas abstraction de toute idée physique, je dé-
je fais
mobis prendre gaidc d'être mal compris en un
216 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

pouille les semences elles-mêmes de toute éten-


due. L'homme n'était pas même un raccourci CHAPITRE VHI.
d'atome, lorsqu'il fut fait dans la création des
six jours. La semence fournit une métaphore comment concevoir oie DlEl AIT TENU UN DISCOUKS
assez heureuse pour faire comprendre cette idée, A l'homme le SIXIÈME JOUR?
parce que les êtres qui doivent en sortir plus
tard y sont virtuellement contenus mais avant ; 13. Et comment, va-t-on dire, Dieu adressait-il
les semences matérielles, il y a les causes, les un discours à ceux qui ne pouvaient encore ni
principes invisibles : c'est le point délicat à saisir. entendre ni concevoir, en l'absence de tout être
Que donc? Une seule chose; avertir de s'at-
faire capable d'accueillir ses paroles ? Je pourrais ré-
tacher fidèlement à l'Ecriture et de crou-e, d'a- pondre que Dieu leur a parlé, au même titre
bord, que l'homme lut créé quand Dieu lit avec que Jésus-Christ s'est adressé à nous longtemps
le jom* le ciel et la terre, puisque l'Ecriture dit avant notre naissance, et non-seulement à
ailleurs : « Celui qui vit à jamais a tout fait nous, mais encore à tous ceux qui naîtront après
« en même temps » ensuite, qu'à l'époque
'
; nous. 11 parlait en effet à tous les fidèles qu'il
où Dieu après avoir créé tous les êtres à ia fois voyait dans l'avenir, lorsqu'il disait « Voilà :

les produisit réguhèment dans la suite des temps, « que je suis avec vous jusqu'à la consomma-
il forma l'homme du limon de la terre, cl la « lion du siècle '. » C'esl encore ainsi qu'é-
femme d'une de ses côtes : car, on ne saurait tait connu de Dieu le prophète à qui il disait :

dire ni qu'ils ont été formés ainsi le sixième jour, « Avant de te former dans le sein de ta mère,

ni qu'ils n'aient pas été formés du tout le sixiè- « je te connaissais -; » que Lévi, qui reçoit la

me jom', l'Ecriture ne le permet pas. dîme, l'avait en quelque sorte payée dans la
personne d'Abraham, son aïeul 3. Pourquoi
CHAPITRE VII. donc Dieu n'aurait-il pas également vu Abraham
dans Adam, et Adam, dans les êtres qu'il créa
l'ame a-t-elle été créée avant le corps chez tousàla fois?Sans doute lesparolesdu Seigneur
l'homme? impossibilité d'une pareille hy- prononcées par l'organe de sa créature, par la
pothèse. bouche de ses prophètes, exigent une voix pour
se faire entendre etchaque syllabe se protluit
Mais peut-être que les âmes seules ont été
12.
dans un intervalle de temps; il n'en était pas de
créées le sixième jour, puisque l'image de Dieu même quand Dieu disait « Faisons l'homme :

réside dans l'âme même, tandis que la formation


« à notre image et à notre ressemblance et tpi'il
des corps aurait été ajournée. C'est une hypothèse « domine sur le poissons de la mer, sur les oiseaux
à laquelle l'Ecritm-e encore ne permet pas de « du ciel, les animaux domestiques et les reptiles
s'arrêter. D"abord, tous les ouvrages divins fu- " de la terre; » ou encore « Croissez et mulli- :

rent achevés alors or, je ne vois pas comment


:
« pliez-vous, remphssezla terre et soumettez-la à
on pourrait concevoir cet achèvement, si un « votre empire; » ou bien « Je vous ai donné :

être eût été créé sans contenir la cause des dé- herbe qui porte semence, tout arbre
« toute
veloppements qu'il devait prendre plus tard. « fruitier avec sa semence : ce sera votre nourri-
Ensuite, la distinction des sexes ne peut exister « ture*.La parole, antérieure à toute vibration
»
que pour les corps. Dira-t-on que l'intelligence
de l'air, à toute voix échappée d'une nue ou
et l'action doivent être considérées comme deux
sortie d'une bouche humaine, se prononçait
sexes dans l'âme? Soit; mais comment alors con- dans la Sagesse souveraine par qiù tout a été
cevoir que ce jour-là même, Dieu leur donna fait : elle ne retentissait pas aux oreilles, elle
pour aliments les fruits des arbres, cette nour- principes des
déposait dans les êtres créés les
riture n'étant appropriée qu'à un homme pourvu
êtres à venir ; elle formait avec une puissance
d'organes? Si on y voit une allégorie, on oublie quant à
infinie les êtres destinés à voir le jour;
que dans ces sortes de récits la réalité des faits
l'homme qui devait se former au moment mar-
doit être avant tout et par toutes sortes de preu- pour ainsi dire
qué, elle le créait à l'origine, et
ves établie comme fondement.
l'entait sur la racine des temps, quand elle
'
Eccli. xviii, 1. étabUssait, quoique antériem- à tous les siècles,

'Matt. xxvin,20. — ' Jérem. i. 5. — ' Hébr. vu. 9, 10. — ' (îen.i.
LIRVE VI. — LE CORPS IH'MAIN. 211

qui devait ouvrir la marche des siè- lo. Cependant il n'a pas été écrit en vain que
le |)rmci|)e

cles. Les ciratures SI' i)rc(r(iciil, laiitôl en date, l'enlaid, u'ent-il vécu ipi'un jour sur la terre,
lanlôl connue causes : Kien ne ilépasse pas sen- n'est [tas pur de tout péché le l'salmiti' a dit '
;

lenienl ses créatures par la puissance souveraine avec vérité « (|u'il a été conçu dans rini(|nité(;t
« que sa mère l'a nourri dans ses entiail les au mi-
i|ni en lai! le Créateur des causes niènics, il les

ces ré- « lieu lies péchés ^;» il est également écr't que "tous
piLTèile de tmde son eiernite. -Mais

mieux aiiiulees jiar leshoiiMues ont péchéet meiu'cnten .\dam '. »


llexions seront peut-être
.<

iTaulres passages de l'Lcriture. Attachons-nous donc à celle vérité incontestable


que, malgré les mérites qui passent des pères à
ciiAi>rnii': ix. leurs descendants, malgré la grâce (pii peut sanc-
tilicrun honune avant sa naissance il n'\ a point
( OMMENT DIEf COMNIT-IL JKRÉMIE AVANT QU'iL FUT
d'injustice de la part de Dieu etqu'aucun acte en
KOIOIÉ DANS LE SEIN DE SA Mb:UE? MÉIUTE (tl bien ou en mal ne peut ètie personnel avant la
niOIEBlTE DES IIOM.MES AVANT I-El R NAISSANCE. naissance par conséquent, (]ue le système par-
:

ticulier d'après lequel lésâmes ont plus ou moins


1 Aehevans nos considérations sur Ttiomme,
1.
commis de dans une vie antérieure, et,
fautes
en gardant une juste mesure et en portant, dans
selon l'élendue de leurs péchés, ont été unies à
rexanien di's passants les plus prol'onds de l'E-
différents corps, est enconlradiction avec la pa-
irilure, un esprit de sajie recherche plutôt qu'une
roles! formelle de l'Apôtre, que les lilsdeRebecca
présomption tranchante. Une Dieu ait connu
ne tirent, avant leur naissance, aucun acte bon
Jérémie avant de le l'ornuM- dans le sein de sa
ou mauvais.
mère, ou nesaurait en douter sans impieté, puis-
Ki. Ici se pose la question, que nous aurons à
(|ue récriture l'allirme en teiines exprès. Mais
reprendre plus tard, de savoir comment le genre
où connu avant de le lormer dans le sein
l'a-t-il
humain, en se répandant sur la terre, a contracté
maternel ?C'est une vérité quilest ditticile et peut-
le péché de nos premiers parents qui existè.-ent
être impossible;! notre faihlesse d'atteindre. Est-
d'abord seuls: quant à eux, ils n'ont pu subir les
ce dans des causes prochaines, comme il connut
suites d'aucune transgression, avant d'être formés
dans la personned'Ahraham tpu^ Lévi avait payé
du limon de la terre et de recevoir la vie au mo-
la (lime? Est-ce dans Adam, le |»rincipe et com-
ment marqué; c'est un point qui ne doit pas
me la tige de tous les hommes? Eu adoptant
même êtie discuté. De même en effet que nous
cette dernière opinion, serait-ce dans Adam n'aurions aucun motif de din; qu'Esaii et Jacob,
lors(|u'il l'ut l'orme du limon de la terre, ou lors-
incapables, suivant l'Apôtre, d'avoir agi en bien
qu'il n'existait qu'en puissance parmi les causes
ou en mal avant leur naissance^, axaient hérité
qui lurent créées toutes ensemble ? Ne serait-ce
des vertus ou des fautes de leurs parents, si leurs
pas antérieurement à tous les êtres, de la même parents n'avaient eux-mêmes fait ni bien ni mal,
manière (ju'il a choisi et prédestiné ses saints
ou que le genre humain avait péché en Adam,
avant la création du monde • ? Ne serait-ce pas
si Adam lui-même n'eût péché, ce (jui aurait été
plutôt dans la série des causes antérieures que
impossible, s'il n'avait reçu avec la vie la liberté
je viens d'énumérer ou que j'ai pu oublier? On
de faire le bien et le mal ; de même nous cher-
ne doit pas, ce me semble, approfondir trop ri-
cherions envaiucommenlAdam pouvait être cri-
goiuTusement celte question, poui'vu qu'on ad-
minel ou innocent, lorsqu'il était créé en prin-
mette ce point incoidestable <|ueJérémie, du mo- dans l'ensendile des causes personnelles
cipe
ment qu'il re(,ut le jour, eut une existence per- parents
et n'était point renfermé dans des
sonnelle, se développa avec l'Age et devint capa- En
qui eussent vécu d'une vie propre. effet,
ble de faire le bien connue d'éviter
le mal, et
dans la création primitive et simultanée, l'homme
(ju'il n'avait pas celte l'acuité,
non-seulement
fut formé connue un être possible, c'est-à dire,
avant d'être formé dans le sein de sa mère,
dans le principe dont il devait sortir, et non avec
mais encore à l'époque où il était déjà formé
l'exisleuce effective qu'il mena plus tard.
sans a\oir vu la lumière. La décision de l'Apôtre
I
Job. XIV, sel. hXK. — ' Ps !., 7. — Rom. U. — Ib. ix,
' v, il
siu" les jumeaux que Rebeccaportaitdanssonsein

ne souffre aucun doute avant deuaitre, « ilsn'a-


:

i valent fait ni bien ni mal 2. »

'Ephès. 1,4. — - Rom. IX, 11.


218 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

semble dans les créahu-es dont les causes furent


CHAPITRE X. créées i'i l'origine, quand Dieu fit tous ses ouvrages
à la fois, pour proiluire dans la suite des temps
DE l'existence SOLS SES DIFFÉRENTS MODES.
tous leurs effets : elles sont complètes, en ce
17.Mais les choses ont un existence fort diffé- que l'existence qu'elles acquièrent dans le cours
rente dans le Verbe de Dieu, où elles n'ont point du temps a toutes les qualités implicitement con-
été créées et sont éternelles dans les éléments pri- tenues dans le principe de leur espèce elles sont ;

mordiaux de la création, où tout ce qui devait inachevées, en ce qu'elles renferment le germe


exister a été créé simultanément en principe ;
d'êtres à venir qui doivent apparaître dans la
dans les êtres qui sortent de ces causes primitives, suite des temps, au moment opportun. Les paroles
au moment marqué, tels qu'Adam, lorsqu'il lut de l'Ecriture, si on y prête attention, ont une
formé du limon de la terre et animé par le souffle force bien significative et nous avertissent de cette
divin, ou l'herbe, quand elle poussa sur la terre; vérité. Elle proclame en effet ces ouvrages com-

enfin dansles semences où semblent se renouveler plels et tout ensemble inachevés. 'S'ils n'étaient
les causes primordiales que reproduisent les êtres pas complets, elle n'aurait point dit « Le ciel et la :

même sortis de ces causes c'est ainsi que l'herbe


: '(terre furent donc achevés dans toute leur beauté.
vient de la terre et lasemencede l'herbe. De tous « Et Dieu acheva le sixième jour toutes les œuvres

ces êtres celui qui est arrivé à l'existence apparaît « qu'il fit; et Dieu se reposa le septièmejour detoii-
avec les modifications qui composent la vie, et « tes les œuvres qu'il avait faites ;et Dieu bénit le
qui sont le développement cffectifdansune subs- « septième jour et il le sanctifia. » D'autre part,
tance réelle des causes secrètes, virtuellemcntcon- s'ils n'avaient pas été inachevés, elle n'aurait
tenues dans toute créature : telle fut l'herbe, point ajouté les paroles suivantes : « Dieu se re-
après avoir poussé sur la terre, tel futl'homme « posa de toutes les anivres qu'il a commencé de
formé en être vivant, et, en un mot, les animaux ou « faire. »

les plantes que Dieu produit en vertu de son ac- lit. On se demandera sans doute comment
tivité continue. Du l'este, tout être contient en Dieu a fait des œuvres à la fois complètes et ina-
soi un autre lui-même, grâce à cette propri('téde chevées : car il est impossible d'admellre qu'il
se repro(hiire qu'il tient des causes primordiales ait achevé les unes, ébauché les autres; ce sont
où il fut enveloppé, avant de naître sous les formes bien les mêmes nnivres dont il se reposa le sep-

propres à son espèce, au moment où le monde tième jour, comme on peut le voir par le pas-
fut créé avec le jour. sage qui précède. Selon nous. Dieu les acheva
lorsqu'il créa tout à la fois, avec une telle j)erfec-
CHAPITRE XI tion qu'il ne lui resta plus rien à créer dans

SONT- l'ordre des temps qu'il ne l'eût déjà créé dans


COMMENT LES OEUVRES DIVINES AL fi« .lOLR
l'ordre des causes et des effets : il les laissa ina-
ELLES A LA FOIS COMPLÈTES ET INACHEVÉES ?
chevées, en tant qu'il devait faire sortir plus tard
18. œuvres primitives de Dieu, lorsqu'il
Si les tous les effets renfermés en puissance dans leur
créa tout ensemble, n'avaient pas été achevées, cause. Ainsi, « Dieu forma l'honmie poudre de

elles auraient postérieurement reçu le dévelop- « teireou limon de terre, en d'autres termesde
>>

pement nécessaire pour les rendre complètes ;


la i)ou(lie ou du limon de la terre il souffla sur :

la création universelle se décomposerait en deux sa face un esprit de vie, et l'homme devint une

moitiés, pour ainsi dire, et sa perfection serait Ame vivante. L'homme à ce moment ne fut pas
celle qui résulte dans un tout de la réunion de prédesimé à naître : sa naissance était avant tous

ces deux moitiés. D'autre part, si les (cuvres les siècles un mystère de la prescience divine ; il

avaient été achevées comme elles le sont, lorstjue ne fut pas non plus créé en princiiie, ni avec
les êtres se le temps
développent réellement dans une perfeclion inachevée il fut formé ainsi à ;

sous ime forme visible, deux choses l'une ou


(le : l'origine du monde, parmi les causes primitives,
iln'en serait rien sorti aNec le temps, ou elles de- au moment où elles furent créées toutes ensem-
vaient servir de princi|)e aux créaluresque Dieu bles; il lui créé, quand le temps marqué fut ac-
ne cesse de tirer de celles qui se sont formées par compli, visiblement dans son corps, invisible
le progrès du temps. Mais aujourd'hui même il luenl dans son ànie, ayant été composé d'une

y a une (Fu.vre complète et inadunée tout en- àme et d'un corps.


I.IVRR VI. — LE CORPS IIIIMAIN. 219

nait l'homme de ses mains. La supériorité de


CIIAIMTRF. MI. l'hoimne ne consisti* «pie dans le don de la rai-
sou (pu l'élève au-dessus des animaux, conunr
LA (;UI..VriO.\DE l/m).>IMK A-T-ELLE ÉTÉ SPÉCIALE? nous l'avons vu déjà. El quand l'homme ne com-
prend pas le rang (in'il (icciq)e cl sadif:nil('' «pii
2((. Kxamiiions iiiaiiilonant comment Dieu
consiste à bien a^ir, il toudie au lang des bêtes.
l'orma riioiimie. Traitons d'alxinl du corps qui
« L'homme, placé à un si haut rang, ne l'a point
fui tiré (le nous traiterons ensuite de
la terre ;

'( comitris ; il s'est comparé aux animaux sans


l'àino, dans la mesure de nos forces. Il serait jiar
c raison et leur est devenu tout send)lable '. "
trop naïf de s'imaginer (jue Dieu forma l'honune
Dieu a bien fait les animaux, mais il ne les a
du limon de la terre eu le pétrissant avec des
pas faits à son image.
doigts l'Kciilure eût-elle employé cette expres-
:

û'2. ne faut donc pas dire Dieu a fait


Il ;

sion, nous devrions croire que l'écrivain sacré


l'homme, tandis qu'il a commandé aux animaux
s'est ser\i d'une métaphore, plutôt que de nous
de se former car, Dieu a fait ces deux espèces
;
(igurer Dieu linulé par des organes semlilat)les
de créature par son Verbe, l'auteur de tout. Seu-
au\ nôtres. S'il est écrit : « Votre main a dispersé
lement, comme le Verbe de Dieu est aussi sa sa-
« les nations', » « Vous avez délivré
et ailleurs :

main puissante et un
gesse et sa puissance, le bras est ici non un mem-
>' voire peu[>ie avec une
bre, mais l'emblème de la puissance créatrice.
< brast'tendu -, » ce n'est là ((u'un s\ml)ole jxtur
Aussi l'Ecritm-e, après avoir que Dieu façon-
dit
peindre la puissanccet latirandeur deDieu ; n'y
na l'houmie avec le limon de emploie-
la terre,
auiail-il pas folie à ne point le comprendre '!

On ne doit pas non plus croire a\ec quelques


il.
t-elle la même expression pour les animaux que
Dieu lit venii' avec les oiseaux devant Adam.
personnes que riiomme est le principal ouvrage de
Voici ses termes : « Dieu façonna encore toutes
Itieuparee qu'il connnanda pourcréerles auti'cs
« les bêtes avec la terre 2. » Si donc l'homme aété
êtres, tandis(pielui-mèmelil l'homme : lavérita-
hle raison est qu'il le lit à son imaue. I.,cs expres-
formé de la terre comme le reste des animaux,
quel est son titre de supériorité sinon sa ressem-
sions : « Il ditet leschoses furent ', » révèlent que le
'
blance avec Dieu ? Cette ressemblance ne consiste
monde fui cr('é par le Verbe, autant que cette
pas dans la forme du corps, mais dans l'intelli-
\crite peut être représentée à l'honnue par l'en-
gence, connue nous le verrons bieidr>t toutefois
Iremise d'un homme et au moyen de paroles qui
;

exigent du temps pour se concevoir et se pro-


le corps même révèle cette prérogative par son
attitude ; elle indique assez que l'homme ne doit
duiie. Or, Dieu ne parle ainsi ((ue lorsqu'il em-
point s'attacher aux choses terrestres comme
un organe, comme il lit en parlant à Abra-
ploie
font les animaux qui, demandant tous leurs plai-
ham et à Moïse ou une nuée, connne il lit en ;

sirs à la terre, sont penchés et pour ainsi dire


l>roelaur'nl le nom de sou Fils. .Mais ce fut anté-
afiaissés sur leur ventre. Il y a donc enh-e lecorps
rieurement à loutesles créatures, pour les tirer et
et l'âme raisonnable, chez l'homme, une analo-
du néant, que cette parole fut prononcée dans
gie qui ne vient pas de la disposition et de la
le Verlie qui « au commencement était en Dieu
forme des organes, mais de l'attitude même qui
(i l>ieu lui-même
i » et comme « tout a été fait ;

lui lait diriger ses regards vers le ciel pour y con-


parle Verbe et que rien n'a été fait sans lui ', »
<

templer les régions les plus ('levées du monde ;

l'honnue a été également fait par le Verbe. As-


de la même manière, l'ame doit aspirer aux
surément il a l'ait le ciel par sa parole : « il dit
choses les plus hautes dans l'ordre spirituel, afin
« (lit, et il fut fait. Cependant il a été écrit
>• : « Les
de n'avoir de goût que pour les choses du ciel,
'< cieux sont les ouvrages de vos mains •'. » Il est
et non pour celles de la terre *.
également écrit de cette région qui est comme
fond de l'univers « La mer est à lui, il l'a faite
le :

CHAPITRE XIll.
«lui-même, et ses mains ont façonné la terre f'. >>

Qu'on ne croie donc pas (jne ce passage de l'E-


DE l'ace et de LA TAILLE d'aDAM, QVXM) IL FLT
criture ait trait à la gi-andeur de l'homme, com-
FORMÉ.
me si Dieu eût fait l'honune, tandis qu'il com-
mandait au reste de se former, ou qu'il eût fait Quel était l'homme, quand Dieu le forma
"2:^.

tous les êtres avec sa parole , tandis qu'il façon- du limon de la terre? fut-il créé tout d'un coup
Ps. xun. 3. — : Ibid. c.vxxv.ll, 12.—
'
Ibid. c.'iLviii,5.— » Jean >

', 1. 3. - s
Fs. Cl, 26. —« Ibid. .xciv, S. '
Ps. XLVUI.IJ. — -Gen. 1,25.— 'Colos. 111,2.
220 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

à l'âge de la vigueur et de la jeunesse, ou comme


l'embryon qu'actticllement encore Dieu forme CHAPITRE XIV.
dans les entrailles maternelles ? Le Créateur
DES CAUSES DÉPOSÉES D.\XS LE MONDE K .SON
d'Adam même
que celui qui a dit à Jéré-
est le
ORIGINE.
mie « Avantde te former dans le seinde tanière,
:

«je te connaissais '. » Adam, il est vrai, a pour 2o. On peut se demander avec raison en quel
caractère particulier d'avoir été lormc de la terre état furent créées les causes que Dieu déposa
et de n'avoir point eu de parents cependant ;
dans le monde, lorsqu'il fil tout à la fois? Faut-il
n'a-t-il pu recevoir en naissant une organi- concevoir par analogie avec tous les arbres
les
sation capable de se développer avec les années ou tous les animaux que nous voyons naître, et
et d'acquérir les proportions naturelles qui sont penser que, pour Se former et se développer, elles
assignées à l'espèce humaine ? Mais ne serait-ce eurent à traverser une période de temps plus ou
point làune question oiseuse ? De quelque la(;on moins longue, selon les convenauces de l'espèce?
que Dieu l'ait l'ormé, il l'a formé comuie pouvait Ou bien se formèrent-elles sur le champ comme
et devait le faire un être tout-puissant et sage. Adam, qui fut, pense-t-on, créé dans la vigueur
a en effet déterminé les lois selon lesquelles
Il
de la jeunesse, sans se développer avec les an-
les èlres sortent de leurs germes et apparaissent nées?Mais pourquoi n'admetlrions-nouspasqu'el-
avec toutes les propriétés de leur espèce, d'une lesétaienl susceptibles de celle double formation,
manière si infaillible que sa volonté domine tout :

de faç,'on à se développer selon le mode qui plai-


sapuissance a assigné aux créatures leurs limites, rait au Créateur ? En effet, si nous n'admettons
mais sans s'y renfermer elle-même. L'Esprit- que le premier mode, il y aura contradiction
Saint était porté au-dessus du monde avant sa entre leurs effets et tous les miracles, comme le
formation ; il l'est encore maintenant, par sa changement de l'eau en vin, qui s'accomplissent
puissance souveraine, et non dans l'étendue. en dehors du cours ordinaire de la nature en ;

24. Qui que l'eau mêlée à la terre,


ne sait
revanche, si nous n'admettons que le second
lorsqu'elle a pénétré dans les racines de la vigne, mode, il sera plus étrange encore de voir les
se transforme en sève et acquiert dans le bois la former chaque jour aNCc leur organisa-
êtres se
propriété de se changer en un raisin qui se dé-
tion spéciale et traverser, coutrairemeni aux
veloppe insensiblement; qu'à mesure (jue le rai-
causes primordiales dont ils sorleid, la période
sin se gonfle et mûrit, le vin se forme et perd
de temps nécessaire à leur dévelopi)emenl. Reste
son aigreur, bouillonne même dans la cuve, et donc à admettre qu'elles ont été créées avec la
foiu-nit enfin, quand s'est rassis avec le temps,
propriété de se former de ces deux manières,
il

une liqueur plus saine et plus agréable? Eh avec concours du temps,


l'une ordinaire et le
bien ! le Seigneur s'esl-t-il mis en quête de tous l'autre plus rare et merveilleuse, quand il plait
ces éléments, le bois, la ferre, le temps, lorsqu'il à Dieu d'oi)érer des miracles suivant les circons-
changea, par un prodige instantané, l'eau en vin, tances.
et en vin assez exquis pour flatter les convives
déjà satisfaits Le Créateur du temps a-l-il
2 ? CHAPITRE \V.
donc besoin du concours du temps? Il faut au dé-
veloppement de chaque espèce un certain nombre L\ FOI!M.\TI0N DEL'HOMMEFCT LA CONSÉQUENCE DES

dejours spécial pour chacune ainsi se forment, ;


CAUSES PRIMITIVES OU IL ÉTAIT CONTENU.

naissent et grandissent les serpents. Fallut-il


"2(). Quant à l'homme, sa formation fut lacoii-
attendre tout ce temps avant que la verge se
sé(iuence des causes destinées à faire sortir le
changeât en serpent dans la main de Moïse et d' A-
premier homme, non de parents antérieurs,
aron ? Quand ces faits s'accomplissent, l'ordre
•'

mais du limon de la terre, en vertu du principe


de la nature n'est interverti que pour nous, qui En
où il avait été virtuellement créé. eiïef, s'il
sommes accoutumés à procéder autre-
la voir
a\ail été formé autn-ment, il n'appartiendrait
ment: il ne l'est pas pour Dieu, dont les œuvres
pas aux œuvres ((ue lit Dieu dans la période des
sont la uature elle-même.
six jours or, quand on dif <iu'il fut créé, ou
;

Jérem. ' Jean, 10. — Kxode, vu, lu.


cideiid que Dieu créa la cause dont il devait sor-
' i, &. it. 9. '

tir au temps marqué, et selon laquelle il avail ilu

être fait, par Celui qui avait achevé ses ouvrage.-


I.IVHK M. LK COUPS IH'MAIN. •iâ\

seiil('inenlcoiiiriu'iic(^s, oiuiéanl les caiiscstliiiis vieillesse. I,c principe ipii rend celle transfor-
ItMii-|u'rri'rlitm,t>t(|iii tmil <'riscmlilc Ics.ivail cniii- mation possible est bien cache aux >cu\, mais
iiU'ii(-t'S pour It'saclii'M'id.iiis l'ordre des l('iii|is il ne l'est pas à la raison : quanta sa\oii-si elle

Si (loiif Dion,en enfant les laiiscs (in'il déposa est nécessaire, nous sommes dans nue impuis-
piiiniliM'menl dans riini\ers, a clalili (pi'il l'oi'- sance absolue; c'est qu'eu elTet la raison (pii fait

iiiei'ait riioiiiiiu' du litiioii de la lene ci eoiunieiil conce\oir la possibilité d'un corps se découvre
il le formerait, en d'antres tenues, ù l'état d"(>ni- d'après sa nalure.taiidisqueeellecpii le fait exis-
l>i\on on dans la beauté de la jeunesse, il est ter <'sl évidcMuiienl ailleurs.
hors lie doute qu'il l'a lornié selon les principes
qu'il avait lixés d'avance : eai- il est iinpossilile CIIAPITKI'; XVII.

qu'il n'ait |)as exécuté son plan Mais si Dieu,


IIKSCMOSKS riTURES : QUELLES SONT CKI.I.KS gLI
après avoir donnée la cause priniilive assez d'é-
DOIVENT SE RÉALISER '!

nerjiie poiu' proiluire l'iioinine suivant la doidde


loi de développement successif ou de t'oi-mation
•IH. La cause (pii doit faire vieillir nu bomnie
iuuned'ate, et pour le contenir en puissance de
nécessairement est i)eut-èlre dans le monde,
ces denv manièies, a gardé dans sa xolonlé un
ou si elle n'est pas dans le monde elle est
des deux modes de lormation, au lieu d'en dé-
en Dieu. En effet, ce que Dieu veut doit né-
[)oser le principe dans le monde, il est évident
nécessairemenl s'accomplir, et ce (pi'il connatt
(juc, même dans cette lupotlièse, l'homme ne
en verlude sa prescience est véritablement destiné
serait pas proiluit en dehors des lois assignées
à l'existence, l'iie foule de choses peuvent être
aux causes sa formation en effet y
pi imodiales :

la consé(iuence des causes secondes : ellesse réa-


aurait été possible, sans y être nécessaire le ;

liseront infailliblement si elles existent à la fois en


principe n'en aurait pas été contenu dans l'es-
[tiincipe dans ces causes et dans la i)rescience
sence de la créature, mais dans les desseins du
(li\ine; plus infailliblement encore, si elles sont
Créateur, et sa volonté seule forme dans la na-
disposées d'une manière particulière dans la
ture les lois de la nécessité.
prescience divine, parce ([uecette prescience ilivi-

ne est inaccessible à l'erreur. Chez un jeune


CHAPITRE XVI.
homme la vieillesse, dit-on, doit arriver : ce-
pendant elle n'arrivera pass'ilmeurt auparavant.
l'N ÊTRE POSSIBLE PAU ESSENCE NE PEUT EXISTER '
Cefaitneseraquelaconséquenced'unecause qui,
QUE PAR LA VOLONTÉ DE DIEU.
comme toutes les autres, aura été déposée dans
^1. Malgré la t;iible portée de l'intelligence le monde ou gardée dans Icri secrets de la presci-

humaine, nous pouvons prévoir nous-mêmes, ence d'vine. Lamortd'Ézéchias était une consé- '

dans les êtres que le temps voit se former, le quence éventuelle de certaines causes Dieu ce- :

développemeat que comporte leur nature, pendant lui prolongea la vie de quinze ans, et en
et que l'expérience nous a permis de con- cela il ne faisait qu'accomplir un dessein conçu
stater mais ce développement aura-t-il lieu ?
: avant la création du monde et resté caché dans

C'est là ce que nous ignorons. Par exemple, un un décret de sa volonté. Par conséquent, il n'a
jeune homme est naturellement destiné ;\ vieil- ])oinl fait une chose qui ne devait pas exister loin :

lir Dieu le voudra-t-il :'Nous n'en savons rien.


; de là, elle devait d'autant plus exister qu'il avait
Mais ce fait ne saurait ètie dans
les lois de la décidé d'avance qu'il la ferait. Toutefois il n'au-
nahire, s'il auparavant dans les desseins
n'était rait pas été exact de dire que sa vie fut prolongée
de la volonté du Dieu qui atout créé. La cause de quinze ans, si ce prolongement n'avait pas été

virtuelle de la veieillesse est contienne dans un la conséquence de causes élrangères à sa vie


jeune homme, comme celle de la jeunesse est elle même. En effet, il avait atteint le termede
enfermée dans un enfant. Sans doute elle ne se son existence, si on ne considère que l'effet îles
<lécouvrc pas aux yeux, comme la jeunesse dans causes secondes mais d'après les causes qui ne
:

un jeune homme, etl'enfance dans un enfant ;


dépendaient que delà volonté et de la puissance
mais la raison nous fait comprendre qu'en vertu de Dieu, lequel connaissait de toute éternité l'acte
d'unprincipecaché dans l'organisation humaine, désormais inévitable qu'il accomplissait à cette
lecorps acquiert ses proportions visibles et passe époque, il ne devait terminer sa vie qu'au mo-
de l'enfance à la jeunesse, de la jeunesse à la I
Ts. xxxm, i.
222 UE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

ment où il expira plus tard. 11 est vrai, ce bien- dans ce cas, non le corps que nous avons perdu
lait lui lut accordé à sa prière mais Dieu savait : en lui, mais un corps d'autant plus glorieux
dans sa prescience infaillible que sa prière mé- que l'esprit l'emporte sur la matière, alors que
riterait d'être exaucée, et ce qu'il prévoyait de- nous deviendrons les égaux des anges '. Les
vait nécessairement avoir lieu. Anges ont une aux autres
sainteté supérieure
créatures; sont-ils donc au-dessus
du Seigneur,
CHAPITRE XVIU. dont le jjsalmiste a dit « Vous l'avez fait un :

« peu moindre que les Anges 2? » El d'où vient


OLE L.V FORM.iTION d'.\D.^M NE FLT POINT EN DEHORS
leur prééminence, sinon de la faiblesse de celle
UES CAUSES PRIMORDIALES.
chair que le Seigneur a revêtue dans le sein d'une
•29. Par consétpient, s'il est vraiqueles causes
vierge, prenant la formede pour mourii-
l'esclave
et nous raciieter de la servitude s? Mais à quoi
de tout ce qui devait exister aient été mises dans le
bon poursuivre cette discussion? L'Apôtre, sur ce
monde, au moment où le jour se lit et que Dieu
point, a prononcé son arrêt sans la moindre ob-
créa tout à lois Adam lut lormé du limon
la ;

probablement dans toute la vigueur scurité voulant démontrer l'exislcnce du corps


:
de la terre,
animal, il n'a songé ni à sou corps ni à celui
de l'iige, selon le développement régulier des
causes où l'homme fut créé parmi les œuvres des d'un autre homme, sons sa forme actuelle; il

six jours. Ces causes impliquaient, en effet, ce s'est reporté au passage de l'Écriture que nous

mode de formation, non-seulement comme pos- commentons et a dit « II ya un corps animal et :

sible, maisencoreconnne nécessaire. Dieu, ayant


c un corps spirituel, selon <{u"il est écrit Adam, :

>olontairement établi les causes primitives, n'a « le premier honmie, a été fait i\me, vivante, et le
point dérogé à cet ordre, non plus qu'à sa vo-
» second .\dam, esprit vivifiant. Non d'abord ce
lonté même. Au contraire, n'a-t-il point déposé
« qui est spirituel, mais ce qui est animal. Le

toutes les causes dans la création primitive et en


« premier honnne, formé de la terre, est terres-

a-t-ilgardé quelques-uns dans les mystères de


« tre: le second, venu du ciel, est céleste. De
sa volonté ï Les effets de ces dernières ne sont
« mêmeipie le premier est terrestre, ainsi le sont

point liés nécessairement aux effets des autres;


a lous les habitants de la terre ; et de même que
« le second est céleste, ainsi le sont tons les
cependant les principes que Dieu a voulu se ré-
server ne sauraient être contraires à ceux qu'il a
« habitants du ciel. Comme donc nous avons
voulu établir car la volonté en Dieu ne saurait
:
« porté l'image de l'homme terrestre, portons
admettre de contradiction il a donc créé les ;
« l'image de l'homme céleste ^. » Qu'ajou-
premières de telle sorte que leurs effets soient ter à ces paroles? Nous poi'tons maintenant
[)ar la foi l'image de l'homme céleste, et la
possibles sans être nécessaires quant aux secon- ;

des, il les a enfermées dans l'univers, afin qu'elles résurrecliou nous vaudra la foime même à la-

produisent nécessairement les éti'es, puis- quelle aspire quant à l'image notre foi :

qu'elles sont la condition première de leur de l'homme teriestre, nous la prenons dès le
existence.
premier moment de notre conception.

CHAPITRE XL\. CHAPITRE XX.


FORMÉ d'abord AVEC UN CORPS jVMMAL, ADAM A-T-U.
LE CORPS D'ADAM,TELyLE DlEl LE FORMA, N'ÉTAIT
PAS SPIRITLEL, MAIS ANIMAL. REVÊTU UiN CORPS SPIRITUEL DANS LE PARADIS?

31. Ici se présente une ..utre question : com-


30. On se demande encore si l'honune formé
ment serons-nous renouvelés, si, ])ar la giàce
du limon de la terre eut un corps animal sem- de Jésus Christ, nous ne sommes pas ramenés à
blable au nôtre, ou un corps spirituel, pareil à la ])erfecliou primitive d'Adam? Rien que la ré-
celui que nous prendrons en ressuscitanl. Il novation consiste souvent, non à revenir à l'état
est vrai que celui-ci sera une transformation primitif, mais a acquérir un développement
de notre corps actuel car on sème un corps :

plus parfait, le point de départ n'en est pas moins


animal etilenressuciteraun corps spirituel ce- ;
une condition inférieure. Pourquoi cesparolesde
pendant le point important dans la question est l'Evangile : « -Mon fils mort, et il est res-
était
de savoir si le corps du premier homme a été ' -Malt, ïj£ll, 30. — = Ps vm, 6. — ^ Philip, II, 7.
— < I Cor. .\v, IJ.

un corps animal, parce que nous reprendions


A

I.IVIIK VI. - LK COUPS HUMAIN.

" siiscili'; il l'Iail perilii cl le voilà relroiivô ' ? »

l'oiii(|ii(ii iciidif à ce lils la rolti' i)riiiiilivp d'iii- ciiAPiii;!'; XMi.


iKiccin'c, s'il lie recoiivrc pas le |iii\ili'i;(' dcrim-
ON ME l'KlT SOITK.MII OC'aIiAM AI'IIIOS LE PÉCHÉ A
iiiiM'Ialilc (|ii'.\(laiii a pordii? Kl comiiieiil Adam
ÉTÉ Cll.XDAMNÉ A LA MOIIT DE l'a.«E PLlTor
a-l-il pu piM'di'c riiMiiiorlalili'. s'il ira\ail (pi'iiii
yi'A CELLE lie COUPS.
ciirps animal'.' Kii ('H'i'l le (•(H'[)s ne sera pins ani-
mal, mais spii'ilncl ' lorscpio eoniipllhie il anra On
HIL es! ailé plus loin ; ou a prétendu que
" rt'\(Mnrineoirn|)lil>iliU',etimm(irlel,rinnniirta-
la uiori, clifdimciil du péclii', n'aurait pas frappé
'< lilé -. » On s'est (piel([nerois enlei-nié dans celle le corps, mais l'àuu', cii y cvcrifant l.'s ravages
ipicsiion ctirtile : on a vonlu saiivc;;artlci' l'opi-
de l'iui(pùl('. Ou s'est imagin('' en cficl (pic l'hom-
nion (pii rcprcsenle le corps d'Adam comme un me, pom\ u d'iui corps animal, aurait abandouné
corps animal, chpiia fait dire : « Le premier son enveloppe pour aller goùtei' le repos dont
Il Adam a eli- lait âme \i\anlc, le second Adam Jouisseid actuellement les saints qui se sont en-
«esprit \i\ilianl ; »etcn même temps leiidre viai-
dormis dans le Seigneur, et (pi'à la lin du monde
sendilalilc la pcnsce ipi'en nous renouvelant et
il aurait rccouvir les mêmes organes désormais
en de\i>iiant immoiicls, nous ne l'erons(pie ren-
inunortels : par conséquent, qu'il n'a point subi
trer dans noti't' situation picuiicre pordue par
la mort en punition tle son |)éclié, mais selon
la lante d'.Vdain. On s'est imaginé que le corps
les lois (le la nature, comme tout autre animal.
d'Adam avait ctc d'abord animal, et (pi'il avait
Mais rA[)iMre contredit cette opinion (piand il
sidii dans le Paradis terrestre la même Iranslor-
dit : « Le corps est mort, à cause du péché, mais
mation que nous subirons en ressuscitant. La « l'âme est vivante à cause de la justice. (^arsil'Es-
(ienèse "ne parle pas sans doute de ce ]>rodige :
« prit de celui qui a ressuscité Jésus-Chrisl d'entre
mais on a cru |)ou\oir concilier ainsi le passage
« lesmorts habite en vous, celui qui l'a ressus-
où l'Apôtre parle du corps animal, avec les té-
« cité donnera une nouvelle vie à vos corps
nu)ignages nombi'cux où l'Écriture nous apprend <c mortels, à cause de cet Esprit-Saint (pu y a
ipie nos corps seront renouvelés, et l'ormer cette
« tixé sa Donc la mort même phy-
demeure '. »
liypollièse par une déduction rigoureuse.
sique est une suite du péché donc, si Adam ;

n'avait point péché, il n'aurait point connu le


CHAPITRE XXI.
trépas, il aurait eu un corps innnortel. Mais com-
ment le corps était-il immortel s'il était animal?
RKFLTATION DE CETTE HYPOTHÈSE.

M. Si celle opinion est fondée, nous faisons CHAPITRE XXIII.

de vains efforts pour expliquer au sens littéral,


NOUVELLE RÉFUTATION' DE l'hVPOTHÈSE
en di'hois de toute allégoiûe, le Paradis, les arbres
PRÉCÉDENTE.
avec leurs (luils. Comment croire, en effet, quêtes
fruits des arbresaieiit été nécessaires pom* nourrir 34. Pour en revenir à l'hypothèse suivant la-
des corps siiirituels et doués d'immortalité? quelle le corps d'Adam aurait été transformé
coup sur, si celte liypothèse est le dernier effort dans le Paradis et d'animal serait devenu spiri-
de l'esprit, mieux vaudrait encore voir dans le tuel, on ne songe pas que l'homme, s'il n'avait
Paradis im symbole, que de croire, malgré lesté- point commis sa faute et qu'il eût mené dans le
moignagesnudti|)liésderÉciiture, (pi'iln'y aura Paradis une vie de justice et d'obéissance, aurait
pas de rénovation pour l'homme, ou d'aller s'i-
pu sans inconvénient se transformer, dans la vie
maginer ((u'il recouvrera un privilège sans l'avoir éternelle, où désormais il n'aurait plus eu besoin
peut-être perdu. Ajoutons, que la mort étant lejus- d'aliments matériels. Est-il donc bien nécessaire
techâtiment du péché, comme l'atteste l'Écriture de se condamner à voir dans le Paradis un sym-
en cent endroits, c'est une preuve sufdsaute que bole au lieu d'une réalité, par l'unique raison que
l'honune aurait été à l'abri du trépas, s'il n'avait le corps sans le péché aurait été immortel ? As-
pas connnis de faute. Comment donc concevoir surément l'homme n'aurait point connu letrépas,
qu'il était mortel sans être exposé à la mort, ou s'il n'avait pas péché, car « le corps est sujet à la
qu'il était iimnortel avec un corps animal? «mort à cause du péché, » dit formellement
I
Luc. XV, 32. — - 1. Cov. XV, 53. l'ApcJlre il était possible néanmoins que son corps
;

1 Rom. vni, 10, 11.


-224 DE LA GENKSE AU SENS LITTÉRAL

fût animal avant le péché, et qu'il serait devenu point eu lien sans le péché, devint possible. Ainsi
spirituel, quand Dieu l'aui'ait voulu, apW-s une donc l'organisation de sou corps auiuial l'expo-
vie consacrée à la justice. s.iit à la mort; s'il était immortel, il le devait
à la bonté du Créateur. Le coi-ps étant animal,
CHAPITRE XXIV. par même moilol, on ce sens
était là ([u'il pou-
COMMENT l'homme EN SE RÉGÉNÉItANT RECOIVUE- vait mourir : il n'était immorti'l ([u'eu tant qu'il
pouvait aussi ne pas mourir. Quant à l'immor-
T-IL LE PRIVILÈGE PERDU PAR ADAM?
talité (pii exclut la possibilité même de mourir,
sommes nous
35. Mais, dira-t-on, h quel titre elle sera un attribut du corps spirilueldout nous
régénérés, nous ne recouvrons pas ce qu'a perdu
si avons la prome.ssc dans la résurrection. Ainsi le
Adam, en qui meurent tous les houunes? Distin- corps d'Adam, animal et pourtant mortel, au-
guons parmi les privilèges d'Adam. Nous ne re- rait pu devenir, par une vie de justice, spirituel,
couvrons point assurément l'iuimortalité des etdèslorsimmoi'tel dans le sens absolu du mol :

corps spirituels et glorieux : aucun homme ne le péché n'en fait pas un corps mortel, il l'était

l'a encore reçue; mais nous recouvrons la justice déjà, mais un corps mort, ce qui aurait pu n'avoir
dont riionnne fui déchuà la suite du péché. Ainsi pas lieu, si l'Iiommc était resté innocent.
nous dépouillerons l'antique péché et notre corps
sera réparé, non sous la forme du corps animal CHAPITRE XXVI.
qui fut celui d'Adam, mais sous une forme plus
DIFFÉRENCE DU CORPS d'aDAM AU NOTRE.
glorieuse, celle du corps spirituel, quand nous se-
rons devenus égaux aux anges •, capables d'habi- 37. A quel titre l'Apôtre a-t-il pu dire que
ter le séjour célesteoù nous u'aurous plus besoin notre corps était mort, tout en parlant d'êtres en-
d'une nourritin-e corruptible. Ainsi c'est dans core vivants ?N'a-t-il pas exprimé ainsi la loi qui
l'intérieur de notre âme que nous sommes renou- le condamna à mourir, ii la suite du péché que
velés 2, que nous recouvrons cette ressemblance se transmettent les parentsLe corps humain est ?
avec le Créateur qu'Adam perdit en péchant. aujourd'hui animal comme celui du premier
Notre chair se renouvellera aussi lorsque ce corps homme, mais dans une condition bien infé-
corruptible se revêtira d'incorruptibilité pour de- rieure il est soumis à la nécessité de mourir,
:

venir spirituel, tel que n'était pas le coi'ps d'Adam, au lieu que celui d'Adam ne l'était pas. Celui-ci
mais tel qu'il fût devenu, péché n'eût en-
si le avait encore à se modifier, sans doute, et à re-
traîné pour lui la nécessité devoir son corps ani- cevoir la forme spirituelle, et l'immortalité ab-
mal se dissoudre. solue (pii devait le soustraire à la nécessité de se
86. Enfin l'Apôtre ne dit pas Le corps est mor-
:
nourrird'aliinents corruptibles : toutefois.il pou-
tel, mais : « Le corps est mort à cause du péché. » vait se transformer en substance spirituelle, sans
passer par l'homme vivait selon les
la mort, si
CHAPITRE XXV. règles de la justice. Pour nous, fussions nous
justes, le corps n'est pas moins condamné à
LE CORPS d'aDAM ÉTAIT A LA FOIS MORTEL ET mourir celte nécessité, conséquence de la faute
:

IMMORTEL. du premier homme, a fait dire à l'Apôtre que


notre corps est mort, parce que nous mourons
Aussi le corps d'Adam avant le péché pouvait
être regardé comme
tous effectivement dans Adam '
; ailleurs ils s'ex-
mortel sous un rapport et
prime La vérité en .lésus est de dépouiller,
ainsi : «
immortel, sous un autre : j'entends par là qu'il
« par rapport à la première vie, le vieil homme,
])0uvaifmourrir et ne pas mourir. H y a en effet
« que dépravent les désirs séducteurs,» etdontle
une différence profonde entre le privilège de ne
péché a fait un autre Adam. Remarquez de i>lu**
pouvoir mourir, tel que Dieu l'a donné à certains
ce qui suit : « Renouvelez- vous dans l'inlérieur
êtres essentiellement immortels, et celui de
pou-
voir ne pas mourir, tel que Dieu l'accorda au
« de votre âme et revêtez l'homme nouveau, qui
« a été créé à l'image de Dieu dans un esprit de
premier homme en le faisant immortel. L'homme
«justice et de sainteté véritables '; )> ce que le
empruntait celte immortalité h l'arbre de vie, il
péché a fait perdre à Adam.
ne la tenait pas de la nature il fut éloigné de :

' Riim. T, !»; I Cor. xv.22. — ^Epli. iv, 21-24.


cet arbre après sa faute, et la mort qui n'aurait
1 Malt, xxn, 30. — 2 Eph. iv. 23.
LIVKK M. LK COUPS m'IMAIN 'Hii

lioiiirail dire ipie nous devons sur ce |)oiul

CHAI'ITUKWMI. le reproduire en nous. Lecommaiidemenl :« Ke-


» uoii\elc/.-\ons dans rinti'riciir de voire àme, "

UtMMliM l'OrVONS-NOlS UKTUîll Vi;;i I.KS l'KIVII.K(;i;s s'adresse aii\ hommes pour (pi'ils dcvieimenl
qu'adam a peudls? spiriinels. Si donc Ailam ii'a\ail pas élé spiriluel
dans riiili'iieur de son commenl poinrions-
i'ime,

Nous |)(m\(m< donc nous ri'ni'iicriM', on icnon- noiis reiioiivi'lrr en nous-mémrs un dal qu'il
vi'lant CM nous ci' (iii'Ailani avait perdu, cost-à- n'aurait pas connu ? Les Apôtres et Ions les justes,
dirc l'esprit (le noire ànie (jnant ancorps, semé : ipioiipi'ils (dissent un corps animal, vivaient in-
animal il ressiiscilera spirilnel, el celte f;lor:eMse liMieuremenl de lavie de l'esiiril ; mais renouvelés
Iransibrmalion ne s'était pas encore pi'odnite par la eoiinaissance de la vérité, selon l'image du
pour Ailam. Créateur, ils n'élaient pas pour cela inpeccables;
;W. l.'Apôtre dit dans le même sens : « Di-- il leur fallait encore m; point succomher à l'iiii-
M |)0!iillez-\()u^ du vii'il lionune el de ses (eu- (piilé. Car les hommes, même siiiriluels, peuvent
« vres; ie\ète/-vous de cet homme nouveau, (|ui céder à la tentalion; c'est une vérité proclamée
« se renouvelle à la eonnaissauee de DicM, selon ainsi par l'A|)ô|re : « Mes h'ères, si ([uelqu'un
« riiuai^e d(> celui (pii la créé '. >; Celle iiua^ïi', « d'enlre vous se laisse surpendre à cpielipie
ftravéc par Dieu au l'onil de nous, Adam la per- « faille, vous (pii êtes spiriinels, corrigez- le dans
dit par le péché nous recouvrons l'âme, ">
: « l'espril de douceur, prenant garde à toi-même
par la i;ràee (pii nous jnslilie; mais nous ne " de peur que loi aussi lu ne sois tent('' '. «J'ai
saurions recou\rer li' corps spiriluel et iminoi- donné cette explicaliou, alin (pion ne trouve
lol dont il n'élait i)as encore revélu et que pren- point invraisemhlable (pi'Adam, qui vivait selon
dront tous les saillis qui ressusciteront d'en- l'esprit avec un corps animal, ait pu |)écher. Ce-
tre les moris : celle f>loire, en clïet, est le prix peiidaul gardons-nous de tout jugement préci-
des mérites qu'il a sacrifiés. Far conséquent la pité, et attendons plul(jt pour voir si le reste du
roh(> iilanche de l'iManfiile ' désigne la juslice récit sacré ne contredira point nos asseitions.
dont déchu; ou liien, si elle représente la
il lui

l'orme immortelle du corps, elle fut également CHAPITRE XXIX.


perdue par Adam, puisipie sa faute l'empêcha
d'alleindreàcetélal t;lorieu\. Onditd'unhonnnc,
SUJET DU LIVRE SUIVANT.
en effet, (pi'il a perdu une (lancée, une charge,
(piand il n'a pu ohlenii l'ohjet de ses vœux, à la iO.Nous avons maintenant à traiter de l'àme;
suile d'une offense contre la personne dont ilat- coûté mi Ile peines
c'est un sujet hiendil'licile,(jui a
leiitlait les laveurs.
à nos devanciers et qui nous en réserve encore
à nons-mème. Soit que je n'ai pu lire tous les
CHAPITRE XXVIll. ouvrages de tous les docteurs qui, en étudiant
cette question à la lumière de nos saints livres,
VDAM, OlOIQUE SPIUITLEL A l'EXTÉIUEUR, ElT U> ont pu atteindre à la vérité et à l'évidence ; soit
COUPS AM.MAL, MÉ.ME DANS LE PAUADIS. que le problème offre des difticultés telles que
ceux-nicmes qui l'ont résolu avec sincéi'ité res-
39. D'après eetteexplication, Adam eutun corps tent obscurs pour des esprits comme le mien ;

animal avant et pendant son séjour dans le Para- personne, je l'avoue, n'a pu me convaicre (jue
dis. Il n'était sj)ii'ilKel(|u'à l'intérieur, selon l'ima- épuisée. Aurai-je le
la (piestion de l'àme soit
ge de celui tnii l'avait créé; mais il perdit ce don bonheur de trouver la vérité et de l'exprimer
par le mérita de voir condamné à la
péché et avec nettelé? Je l'ignore. Je développerai, dans
mort ce corps cpie, sans le péché, il aurait mérité le livre suivant, les idées cpie j'aurai pu me for-
de Iranslormer en un corps spiriluel. S'il a\ait mer sur l'àme, si toutefois le Seigneur bénit
au dedans vécu à la manière des animaux, on ne mes efforts.
I
Colos. lit. 9, 1(1. '
Il Hetr.cli.S3. 2. — 'Luc, XV, 22, I
Gai. VI, 1.

S. AuG. — ToM. IV.


LIVRE VII.

L AMB HUM AINE.

CHAPITRE PREMIEH CHAPITRE n.

I.A SUBSTANCE DE 1,'aME N'eST PAS l,A MIÎME


I>I1É1.IMI.NAIIIE,S Di; CE I.IVKE. (.IIJK

CELLE DE DIEl'.

1 < El Dieu lit rhoniiiie du limon de la lene 3.Uuelques-uns en effet se sont appuyés sur
'i
et il souilla sur sa lace un souffle de vie et :
celle expression pour prétendre, que l'unie est
" l'homme l'ut l'ait âme vivante. » Telles soni les ' une émanation delà substaucedivine et participe
paroles de l'Ecriture qu'aii début du livre pré- à sa nature, l'honnue ne pouvant souiller, di-
cédent nous nous étions proposé de connnenler: sent-ils, sans laisseï échapper quelque chose <le
nous avons exposé formation de l'homme en
la son être; mais nous devons phdôt y voir un en-
général et de son corps en particulier avec ,
gagement à repousser une opinion si dangereuse
tout le développement qui nous a semblé néces- pom' la foi chrétienne. Nous croyons que la
saire et conforme à l'esprit des saints livres. substance et la nature de Dieu est absolumenl
Connue l'àme humaine soulève une question des immuable; beaucoup le croient, peu le com-
plus hautes, nous avons songé à en l'aii'e le sujet prennent. Or, peut-on douter que l'àme ne
d'un livre spécial. N ous ne savions pas jusqu'à change soit en bien soit en mai? Par conséquent
(|uel point le Seigneur seconderait notre ardent ro])inion qui va jusqu'à ideidilier la substance
(lésir<i'en parler a\ec justesse; ce qui n'élaii pas de l'àme a\ec celle de Dieu, es! une impieté ne :

im secret poni' nous, c'est que son secours nous se réduil-cUe pas à faire de Dieu un être chan-
était indispensable [tour tenir ce langage. Or geant'i' Il faut donc croire et bien se convaincre,

la justesse ici consiste à ('viter avec sincéiilé et eu écarlani rond)re même d'un doute, (jiie d'a-
mesure loute réftitation hasardée, con)me toute près la véritable foi l'ame vient de Dieu, connue
assertion téméraire, sm- les poiids vrais ou taux, son ouvrage et non comme une émanation,
que la foi ou la science chi'ctiemie n'ont point (luelle que soit la manière dont i! l'ait fait naître
encore lï.vés; elle
tem])s à al- consiste en même ou appelée à l'existence.
liruiersans hésitation les vérités démontrées par
l'évidence même ou appuyées sur l'autorité in- CHAPITRE IH.

laillihle de l'Ecriture. SUITE DU 1\1ÊME SUJET.


:2. Exammous d abord le texte : « llavit vel
< sitflldvil'm faciem ejus. « Quelques manuscrits i. Mais, dit-on, à quel titré est-il éciil que
jiorlent spiniri! ,iu inspinivit. La version des Sep- « Dieu souffla sur la face de l'homme pour faire

tante donnant evECfûo/.cev , l'expression exacte


» de lui une âme vivanle, » si l'àme n'est pas
doit être flavit ou .v«///«i'/^ Nous avons vu dans une parcelle de Dieu ou une substance absolu-
le livre précédent ce (ju'il fallait entendre par ment identique? G'estune erreur, et l'expression
les mains de Dieu, ([uaud il forma l'honnne du même de l'Ecriture suilil à la faire pieiuemeid
limon de la terie n'esl-il pas également clair ;
senlir. Dans l'acte de souiller, l'àme met en
(jue Dieu, pour souiller sur la face de l'homme mouvement le corps qui lui est soumis, et en tire,

n'employa ni gosiei' ni lèvres!' au lieu de reuqiriuiler à sa propre substance,


Cependant celle expression de l'Ecriture l'air qu'elle chasse. Serail-on assez peu instruit

nous servira aidant que je puis croire, à étudier |)our ignorer ipie, dans le phénomène de lares-
un problème aussi compliqué I)iralion, on absorbe et on chasse tour à tour

l'air ambiant, et cpi'il suilil de la volonté pour

' f»en. w, 7. produire du vent par la jnême opération ? Lors


même que nous n'emprunterions pas à l'air ex-
térieur, mais à la propre substance du corps, le
LIVKE Vil. — LAMK HIMAINK. '2Î-

lluidi' <iiif (liasse le souille, ht nature de l'aine proiluile par celle insulllatinn, non nue émana-
ne ser.iil pas idenliiine à celle du corps : c'esl tion de son èlre, mais im <'otnposc de l'air

un point snrleiincl nosadveisaircs son! d'aecocd ri'pandiidans soncoi-ps,semlp|:dile au souille (pie


a\cc nous, l'ai' consivincnl, l'ionc, Ibrce dii'i- l'àme produit avec l'air ambiant par le jeu des
^caule et inoirice, est essentiellement disliiicte organes, sans le tirer d'elle-même. .Mais comme
du souille (pfeile pi'odiiit en nietlaul lesoij^anes Dieu, d'a|)rès nous, ne commande pas seniemi'ul
en jeu et (|u'elle tire non de sa substance, mais à la nature physicpie, et i(u'il s'élè\e infiniment
du <'oips cpii lui <'st soumis. Or, IMen i;ouvenie au-dessus de tous les cor|)s comme de tous les

la créature connue l'àme fionverne le cor|>s, esprits créés, nous devons admettri' que l'àme
(|uoi(|ue d'une manièic inlinimenl supérieure; (pi'il a créée i)ar insiilllalion n'est ni un écoule-

poincpioi donc n'admet trait-on i>as ne Dieu, dans i| ment de sa stdi<tauce, ni un composé d'éléments
l'acte d'iusulllation dont parle l'Kcrilnre, tira nue matériels.
;iine de la ci'cature somnise à sa volonté, i^nisipu-
CIIAIMTUE V
l'àine humaine est assez puissante pour produiie l.'\>IK KST-El.l.K TIISKE DC NÉ.VNT "?

lui sout'lle par le jeu des ortiaiies, sans l'emprun-


7. .Maintenant l'àme a-t-elle été tirée du néant
ter à s;i s'dislance, (pioii|n'el!e exerce siu' le corps
nature on sort-elle d'un principe immatériel qui fut
un empire moins absolu que l>ieu sm- la
créé sans être encore elle-même? Cette question
universelle ?
mérite d'être examinée. Or, si nous croyons que
5. Nous aurions pu dire (|ue le souille divin
Dieu ne lire plus rien du néant, depuis qu'il a
n'est pas l'àme, un acte d'iu-
et ipie Dieu |)ar
tout créé à la fois, si nous admetions (pi'il s'est
snftlation créa l'àme dans l'homme: mais comme
re|)Osé,aprèsavoir achevé en principe les œuvres
on pourrait se fiirurer (jue Dieu a fait par sa
dont il devait désormais tirci" tous les êtres qu'il
parole des cruvres plus parfaites (pi'avec son
produirait, je ne vois pas connuent on pourrait
souftle, par la raison que la parole chez l'homme
s'expli(juer iju'aujourd'hui il crée les âmes de
est plus que le souffle: nous re-
e\cell(Mile
rien. Faut-il admettre, au contraire, qu'en créant
conu;iilroiis (pi'on peid confondre l'àiue avec le
les (euvres des six jours priniilifs, il lit ce joiu'
souffle divin, sans abandonner le raisonnement
un térienx, et selon une opinion plus vraisem-
(pii précède, à comlilion de voir daTis l'insuffla-
blable, le monde des esprits et des intelligences,
lion.non une émanation de la substance divine,
c'est-à-dire la société de .\n.ies, puis l'miivers,
m;ns la production d'im souffle; et dans la pro-
c'est-à-dire le ciel et la terre? Faut-il croire que
duction d'un sonifle, celle d'une àme. Cette opi-
dans ces substances il créa les principes, non les
nion est conforme à la ])arole que Dieu a fait
entendre par la bouche d'isaïe « L'esprit sortira :
substances mêmes de tous les êtres à venir.
[)ar la raison que s'ils avaient été créés tels
•' de moi; c'est moi qui ai créé tout souftle. >
Uu'il ne soit point ici qi;estion d'un souffle ma-
(ju'ils devaient exister un jour, ils n'auraient
plus eu be.-oin de naître? Alors on doit recon-
tériel, la suite le fait assez voir. Le prophète
naître (pie l'àme n'existait pas encore substan-
ajoute en effet « Et à cause du péché, je l'ai
:

tiellemeut dans les œuvres divines, et que sa


« affligé et je l'ai frappé L v Qu'entend-il donc
par souftle, sinon l'àme aftligée, frappée par
naissance date du moment où Dieu la fît par un

suite du péché? L'expression :« J'ai réé


acte humain d'insufflation et l'associa au corps
i tout
de l'honmie.
« souffle, ne revient-elle donc pas à dire
)i
: j'ai

créé loule àme ? 8. La question est loin d'être résolue : on veut


savoir si Dieu a tiré de rien la substance appelée
CHAPITRE IV.
àme pur néant, sidis-je, l'acte d'in-
et jus([ue-là
IIIEI >'v F.VIT SOKTIR l'.VME M
DE SON ESSENCE sufflation n'ayant point eu lieu avec le concours
M DES ÉLÉMENTS. d'un élément étranger, comme celui qu'accom-
fi. Si Dieu é-tait pour nous l'àme du monde plit l'àme enchâssant l'air du corps, ne s'est opéré
physicpie, et était couune
si le monde phvsique sur aucun principe, et a produit, (piand Dieu l'a
son nous serions obligés d'admettre
corps voulu, l'àme humaine; ou liien, s'il y avait un
(pi'il forma, en soufflant, une àme matérielle, principe spirituel qui, sans être encore la subs-
composée de l'air extérieur, par voie d'e.xpira- tance de l'àme. lui préexistait, et qui sous le
tion ; toutefois il faudrait voir dans la substance souffle divm devait former l'àme humaine, au
' Isaïc. ivii. 16, 7. sel. LX.V. même titre que le corps humain n'était pas réa-
-228 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

lise, avant ffiie Dieu ne l'ent formé du limon ou sortent aujourd'hui les âmes, comment la déter-
de la poussière de la leire. En elle! poussière miner ?Qiiel est son nom, ses qnalilés, sa fonc-
ou limon n'avait pas les propriétés de la chair tion dans la création primitive?Est-elle ou n'est-
humaine et cependant c'était la malière doni
; elle pas animée? Si elle csl animée cpiels sont
devait se tonner la chair qui n'a> ait encore aucu- ses acies ? En quoi concourt-elle aux elTcts pro-
ne existence propre. duits dans l'univers ? A-t-elle uneexislenceheu-
renseou malheureuse o;i iiidifféiciile?Commu-
CHAPITRE VI.
nique-t-elle la vie ?Esi-elle inaclive, el repose-t-
V ^-T-IL POUR l'aME U.\E SIBSTA.XCE PHÉEXIS-
EL" elledans les profondeurs de la création sans con-
TANTE, DE MÊME QUE POUR LE COUPS ? science d'elle-même et sans mouvement ? Com-
ment, si la vie n'avait pas encore commencé, pou-
9. Est-il donc croyable que Dieu, après avoir
créé dans la période des six jours non-seulement
vait-il exister ime matière spirituelle el inanimée
qui serait le principe de l'e.xislence à venir des
la cause primordiale du coi'ps humain , mais
encore la malière dont il devait être pétri, je veux
âmes ? Ce sont là autant de mystères impéne-
tlire la terre, se soit borné à trahlesoude chimères. D'ailleurs sielle était étran-
établir le principe
(jui devait pivsider à la fonclion de l'àme, sans
gère au bonheur comme au malheur, pouvait-

créer substance spéciale destinée à la cons-


la
elle êtreraisonnable ? Si elle n'est devciuie rai-
sonnable fju'au moment où elle a formé l'àme
tituer? Si l'àme était incapable de changer, nous
n'aurions aucun sujet de nous dem^inder, pour humaine, lame raisonnable ou humaine aurait
ainsi dire, (juel est son fond;
donc eu pour princi])? la \ ie sans la raison ? Et
mais les modifica-
tion qu'elle subit révèlent assez qu'une l'ois
alors commenl distinguer cette vie de celle des

douée des tacullés qui la constituent elle se dé- animaux ? Serait-ce qu'elle était raisonnable en
puissance et non en acte? L'àme chez un enfant csl
grade par le vice et l'crreui-, se perfectionne dans
l'àme humaine, el nous n'Iiésilons point à l'ap-
la vertu et la connaissance de la vérité ; de la
peler raisonnable avant qu'elle fasse usage de la
même manière que la chair, une fois formée
avec les propriétés
raison pourquoi donc ne pas admelire que la
:

(jui la caiactéi'isent, s'em-


substance dont l'àme se forma était douée d'une
bellit dans la santé et se défigure dans les ma-
intelligence encore inaclive, au même titre que le
ladies et les souffrances. Mais si la chair, en
deliors de toutes
raisonnementestencoreendormidans l'àme d'un
les qualités qui la rendent
enfant, quoiqu'elle soit déjà l'àme humaine ?
susceptible d'acquérir la grâce ou de s'altérer et
de s'enlaidir, a eu dans la terre un éléiuent pii-
mitif dont elle devait sortir sous sa forme natu-
CHAPITRE VIII.

relle; il est bienpossiblequel'àme, avant de for-


QUE CETTE MATIÈRE DE l'aME ÉTAIT INCAPABLE DE
mer celte substance animée que le corrompt vice
BONHEUR.
et que la vertu embellil, a eu pour principe une
force spirituelle qui n'était pas encore l'àme elle
H. Si l'àme humaine a eu son principe dans
môme, au même que l'argile dont la chair
litre
une existence déjà heureuse, il faut admettre que
(levait se former était une substance, avant de
sa formaliou fut une déchéance et au lieu d'a- ;

devenir la chair proprement dite.


voir été formée decctte matière, elle en serait une
iO. Dé;à en efl'et la lerie remplissait la région
dégénérescence. Car, toute matière, à son oi'i-
inférieure de l'univers, et le coi-ps de l'homme gine, surtout quand elle la lient de Dieu, est
([ui devait en sorlii' n'élail pas encore formé :
incoulestableinent plus parfaite. Fùl-il possible
tléjà elle complélail le monde, et lors même ue concevoir l'àme Iniinaine le simple comme
qu'elle n'aurait servi à former la chair d'aucun écoulement par Dieu, il
d'une vie he'.u'euse créée
être vivant, elle aurait achevé l'édifice immense
n'en faudrait pas moins reconnaître qu'elle ne
de l'univers, nommé le ciel el la terie.
commen(,a à mériter ou à démériter qu'au mo-
CHAPITRE VU. meiiloù elleeutune existence personnelle, on elle
anima le corps, fit de ses organes les mes.sagers
qu'il est IMPÇ3SIBLE DE DÉTERMLNEIl LES QUALITÉS de sa volonté, et eut conscience de sa vie par
DE CETTE FORCE PRIMITIVE. l'exercice de la liberté, de la pensée, de la mé-
Quant à cette matière spirituelle, principe, si moire. Car, s'il y avait une existence antérieure
elle a jamais existé, d'où l'àme est sortie et d'où et hem'euse que le souffle divin aurait fait dé-
LIVRE VU. — LAME HUMAINE. m
coiih'r dans la iliair api'ôs s,i roniialion, cl (|tii' c< intraiiement aux dogmes lcui'slaiissesopini<ins.
riitni' mil r<''Siill(' lie celle irisiiillarKiii, cel t'coiile- Uoiiiqu'd ensoil dessysiémes pliilosopliiques sui'
iiu'iil se serai! piddiiil sans aelivile, sans clian- latransmigration des âmes, la foi catholique
geau'iil, sans aUt-ratioii dans la snbslaiice des- défend de croire (jue l'àme d'une béte passe dans
tinée ù de\eiiir l'àine. le corps d'un hoirnue ou celle d'un homme dans

le corps d'une Itéte.


CHAPITRE IX.

CllAtMTIU-:X.
Ql'E CETTE MATliÏRE NE PEUT-ÊTRE UNE AME DÉ-
P( lin VIF. DK RAISON. l'analogie DKS MOlCrUS KXTllK l'homme ET l'ani-
mal N'E.ST l'AS INK I'UKLVE E.N I'AVEUR DE LA
12. En ell'el celle suhsianeo ne scrail poini un MLTKMPSVCOSK.
corps snsceplilile de diniiniier par exlialaismi.
Si on doinio pont' |iiinci[)e à l'ànie l'aison- 14. Que l'honuiie dans sa conduite se ravale
nalile, lininaine, nne ànie dé|>ouivue de rai- parfois jns(praii rang des animaux, la vie hu-
son, la uneslion esl alors de savoir d'où vieiil maine le procUune, l'Ecriluie l'atteste. Delà ces
celte Ame sans raison : elle ne peni avoir d'autre paroles que nous venons de citer : « L'homme
cause que le (a'éaleurde tous les èlres. Or, esl- '< n'a pas compris le haut rang où il aélé placé;
elle composée délenieiits malciiels? l'ouniuoi, " il a été compart'auv brutes el leur esl devenu
dans ce cas, l'àme raisonnable n'en serail-elle « seml)lable. Mais cette analogie n'existe que
»

pas aussi composée ?()n ne niera pas, j'iinajjinp, pendant la \ieel s'ai-rèteà la mort. C'est à cette
(|ue Dieu pou\ail l'aire d'un seul cou[) ce (pi'on espèce de bêtes quele l'sahnile craignait que son
croit se former par degrés. Or, si la matière esl àme ne lut abandonnée quand il disait « Ne :

le principe de l'àme privée déraison, et que celle- « livrez pas aux bêtes une iime qiû vous bénit. >>

ci soil le principe de l'àme raisonnable, on am'a 11 entendait par là soil les loups dévorants sous
heau ménager les transitions, U laudra toujours ra[>parencc de brebis, contre lesquels le Sei-
l'ccomiailre que lamalicreesl l'élément primilif gneur nous met en garde ', soit le diable et ses
de l'àme raisoimablc. Mais je ne sache pas (lu'on auges, qu il appelle lui-même ailleurs le lion et
ail jamais osé soutenir celle opinion, à moins de le dragon -'.

regarder l'àmecounne une variété de lamalière. 15. Unelles preuves, eu effet, les partisans de
13. Prenons garde d'ailleurs que la possibilité lamétenqjsycose avancent-ils pour montrer qu'a-
pour une âme de passer d'un animal dans un près la mort les âmes humaines peuvent passer
liomme, erreur coniraire à la vérité et à l'ensei- dans le corps des bêles et réciproquement? Selon
gnement catholique, est une conséquence du sys- eux celte trasmigration est un elfet naturel de l'a-
tème (|ui ferait de l'àme sans raison l'élément et nalogie desmoîm-s: l'avarice transforme en four-
connue lamalière de l'àme raisonnable. Dansée mi, la rapacité en épervier, l'orgueil farouche
système, en elïet, l'àme devenue plus parlaile en lion, les voluptés dégradantes en porc. Mais
lial)itera le corps d'un homme ; dégradée, elle en nous citant ces analogies, ils ne prennent pas
passera dans le corps d'une brute. C'est une rê- garde que leur raisonnement prouve l'impossi-
verie de certains philo^^ophes, et leurs disciples bilité absolue pour une àme humaine de passer
eu ont tellement rougi pour eux, qu'ils préten- dans le corps d'un, animal après la morl. En cffel,
dent que leurs maîtres n'ont jamais eu celle opi- un porc ne ressemblera jamais à un homme au
nion el qu'on les a mal compris. Ils suivent à peu même degré qu';\ un autre porc; un lion môme
près la mèuu' méthode qu'un homme qui voudrait apprivoisé a plus de ressemblance avec un chien,
nous laire voir la métenqjsycose dans ces paroles ou un moulou (ju'avec un honune. l*uis donc
de l'Ecriture L'Iionmien'a pas compris le haut
: « que les animaux ne dépouillent jamais lem- ca-
•oangoii il a éléplacé ila été comparé auxbru-
:
ratère el que,même dans les traits qui établis-
'< devenu tout semblable
tes et leur est » on '
; sent entre eux quelques différences, ils se rap-
encore :« Ne donnez pas aux bêles, une àme qui prochent infiniment plus de iem- espèce que de
'vous bénit Les hérétiques, en effet, lisent
"^
. >.
la nature humaine el restent bien |)lus loin de
les livres canoniiiues, leur hérésie ne consiste l'homme que des autres animaux, leurs âmes
qu'à mal les comprendie et à vouloir soutenir n'habiteront jamais un corps humain, quelles

Ps. xi.Tin, 13. — Ibid LXXIII, 19. '


Matt. vu, 16. — ' Psal. xc, 13.
230 DE LA GENftSE AU SENS LITTÉRAL,

i|ue soient leurs ressemblances aM'c riiumnie. en dehors de tout changement et de toute alté-
Ce raisonnement étant fau\, quand pourra-t-on ration; ils verront tout coup s'écrouler avec
à
prouver la verilc du SAstènie, puisinron n'avance son échafaudage si compliqué le système qu'ils
aucune autre preuve pour lui donner au moins ont dans leur imagination sacrilège, et
bàli
les couleurs de la vraisemblance? J'inclinerais qui ne repose que sur une variation perpétuelle
donc moi-même à croire, avec les disciples de ces del'essencedivine.
philosophes, que leur doctrine primitive n'avait 18. Ainsi l'âme humaine n'a point une âme
d'autre but que de se Ijorner à la vie présente, sans raison pour cause piimordiale.
de montrer qu'une viedéiegiée et inlame établit
entre l'homme et l'animal une ressemblance si v:HAPrrKE \ii.

profonde qu'elle semble changer l'homme en


I. VSIE .VA eOl.XT POIR PRINCIPE IN ELK.^IE.VT
hrute, et de trouver dans cette humiliation un
MATÉRIEL.
moyen d'ariacher les <>sprits au desordre et à la
dégradation. Uuel est donc le principe qui sous lesoultle de

Dieu, a formé l'âme? Est-ce la lerre combinée


CHAPITKE \1.
a\ec l'eau ? Assurément non c'est plutôt la chair :

qui est résultée de ce mélange. Qu'est-ce en eflel


DES ILl,US10>'Syil FONT CROIRE A I.VMKTEMl'SVCOSE.
que le limon, sinon un mélange de la terre avec
I/ERREI'R des manichéens VLVS impie QUE
l'eau? 11 fautegalemenl repousser l'idée quel'âme
CELLE DES PHILOSOPHES.
a pour élément primitif l'eau, tandis que la chair
serait une transformation de la terie. Il sérail
lli. Unant h la réminiscence d'une vie passée
par Irop insensé de faire sortir l'âme humaine
dans le corps de tel ou ici animal, qu'ont eue,
des mêmes éléments que la chah' d'un poisson ou
dit-on, certaines personnes, ou elles mentent,
d'un oiseau
ou dupes d'une illusion produite par
elles ont été
!!•. Viendrait-elle de l'air? Le souflle a quelque
lesdémons. dans un songe, par je ne sais quel
Si
analogie avec cet élémenl; mais" lesoultle de
souvenir chimérique, un homme se rappelle une
l'honmie el non le sonftle de Dieu. Celte hypo-
existencequ'il n'a jamais menée, des actes qu'il
n'a jamais faits, pourquoi s'etoimei-ait-on
Ihèse serait vraisemblable, comme nous l'avons
cjue
par un juste et mystérieux arrèl de Dieu,
déjà dit, si le monde était un animal immense
les dé-
dont Dieu serait l'àine; il aurait en effet produit
mons aient permission de produire dételles illu-
l'âme en expulsant l'air répandu dans son corps,
sions dans les es|)rits même pendant la veille?
n. LesManichéens, qui se comme notre âme le chasse du sien. .Mais Dieu
croient chrétiensou
étant inliniment au-dessus de tous les corps du
veulent passer pour tels, poussent le sytème de
métempsycose desconséquences plusabsurdes
la
monde comme de tous les esprits qu'il a ciéés,

et plus condamnables que lesphilophespaïenset


comment rattacher à l'air l'origine de l'âme?
les esprits faibles
Dira-t-on qu'en vertu de la toute-puissance qui
qui adoptent ce rêve : ces der-
niers distinguent
lerend présent à l'ensemble de la création, il a
au moins Dieu de l'âme hu-
maine; pu produire avec l'air le souffle qui formerait
Manichéens admetlant l'idenlité ab-
les
solue de la substance divineet del'àme humaine,
l'âme humaine? Mais, comme l'âme est imma-
lérielle, et qu'il ne peut résulter qu'un (;orps de
conilamnent sans sourciller, celle substance à
la combinaison des éléments doid l'air i'ail par-
des transformations si indignes, qu'elle est con-
tie, celle supposition n'esl i)as admissible, lors
fondue avec moindre brin d'herbe, avec le der-
le
nier des vermisseaux ou ([u'elle subit de pa-
même qu'on assignerait pour origine ù l'âme le
feu céleste dans toute sa subtilité. Qu'un corps
reilles métamorphoses. C'est un prodiged'exlra-
ait la pi-opriélê de se réduire en un antre, on
vagance. Qu'ils écartent les problèmes obscurs
(|ue soulève la créalioii, el qui, discutés au gré
l'a soulenn mille fois mais qu'un corps, soit au
:

ciel, soit sur la terre, puisse se transformer en


de l'imaginai ion et des sens, les l'ont tomber dans
une âme el devenir un substance immaléi'iellc,
les conséquences les plus fausses, les plus dan-
personne ne l'a prétendu, «jue je sache, et la foi
gereuses, les plus cxorbitanles, qu'ils s'allacheul
n'offre rien qui p(M'melte de l'induire.
à ce principe naturellement gravé au fond d(> tonte
intelligence, eu dépit de toutes les opinions et
de tous les sophismes, que Dieu est par essence
LIVRE Vil. - LAMK HUMAINE 28 1

CHAIMTISEXIII. CHAIMTUE XV.

I.'aME EST IMMXTÉIUELI.E.


IIK l.'oi'INKtN DES MKDKCINS SI II LK (XtUMS
i(K l'homme.
pas im composé de terre,
'

'1\. L'àuir n'est duiii'

d'eau, d'air ou de l'eu : cependant elle gouverne


id.Toiitt'I'ois, si()iis"i'nra|ip(trli';iii\ uM'ilcciiis,
l'ep lisse ni.ilière ipii l'envelopiii'.je \eu\ dire, ce
(|uiseloiittorl tic (li'inoatiM- leur proposition, tout
yeux limon transl'ormé en ihair, aiinioxen d'une ma-
(or|is, (|iioi(itrii n'oUro aux (]u'uiie inassi'
osl
tière plus subtde, la lumière et l'air. Olezeii efl'el
aif;ii('US(', loiilieiil lii- l'air cl liu Icii : l'air
ces deux éléments, le corps n'a plus de sens,
ii'iik'rmc dans les poiiiiions l'I se réiiand du ciriir

qui comme source de l'àme ne coiuniunique plus direclenuMil aux or-


par li's arti'ros ;
1(> Rmi,
ganes aucun mouveinenl. Mais, si la pensée pré-
chaleur a soulo\er pour ainsi dire dans le l'oie,
cède l'action, la sensation doit aussi précéder le
s"éi)ure, se \olalilise, cl monte au cerveau, sous
mouvement. Moue, l'àme étant iinnialérielleagil
une tonne lumineuse, conum' au ciel du corps
d'at)ord sur l'eléiuenl le moins matériel, je veux
humain: de là jaillit l'étincelle du regard, de là
dire ou plutôt la lumière et l'an-; puis
le feu
connue d'un centre, parlent des canaux d'une
elle remue par leur eiilremise la matière la plus
intinie délicatesse qui aboutissent non-scLde-
é|)aisse du corps, j'en tends l'eau mêlée de terre qui
uient aux yeux, mais encore aux oreilles, aux
l'orme celte chair massi\ cet lourde, plus suscepti-
narines, au palais, pour Iransmeltre les sous,
saveins (piant au loucher, ré- ble de subir des niodilications toutes passives
les odeurs, les ;

du s'exerce que douée d'activité et d'initiative.


pandu sur toute la surlace corps, il

par la \oie delà moelle du cerveau, de la moelle


de ces innondjraliles (pii se
CHAPIÏKEWI.
epinière et lilels

détachenl de la colonne vertébrale i)om- tapisser [)l SENS DES expressions:" l'homme eut EAIT AME
lous les organes.
« VIVANTE. »

CHAPITKE \IV.
"l"!. Ces expressions : « L'homine fut fait âme
I.'aME est distincte des ELEMENTS.
< vivante, » n'indiquent, à mon sens, que la fa-

culté de sentir au moment où elle commença à

A l'aide des sens, comme


de messagers, l'àme s'exercer dans le corps : la sensibilité est, en effet,

esl inslruile de tous lesphénomènesqui ne s'ac- la marque infaillible de la vie dans un corps ani-
complissent pas sourdement dans l'organisme : mé. Les arbres obéissent à des mouvements, non-
mais elle est une lorce si distincte des sens que, seulement sous l'impulsion d'une force étangère,
loisqu'cUe entreprend d'étudier Dieu etlesclioses comme le vent, mais encore sous l'influence de
divines, ou de s'examiner elle-même et ses fa- la force intérieure qui pro(hiit au dehors tous ce

cultés, elle est obligée, pour arriver à la vérité qui contribue à leur forme et à leurs proportions :

et à la certitude, de fermer les yeux à la lumière ;


c'est ainsi que les sucs de la terre passent dans

s'apercevant que la lumière extérieure, loin de les racines et se transforment en bois et en feuil-

i l'aider, la distrait de celte étude, elle s'élève à une les; tous ces développements supposent en effet

j conlemplaliou toute spirituelle et se demande à un mouvement intérieur. Mais ce mouvement


(|uel titre elle serait de la même nature que ces élé- n'est point spontané ne ressemble pas à l'ac-
et

ments dont le plus subtil, à son plus haut degré, tivité qui se communique aux sens pour diriger
est cette llamine du regard qui ne lui sert qu'à le corps, telle qu'on la découvre chez les animaux
distinguer la forme et la couleur des corps. En appelés tunes vivantes dans l'Ecriture. S'il n'y
outre, elle trouve enelle-même des qualités sans avait point en nous de mouvement organique,
nombre, o|iposées aux propiiélés des corps et nous ne venions pas notre corps se développer,
(jui, écliappanl aux prises des sens, ne peuvent nos ongles et nos cheveux pousser mais en même :

être perçues que par la conscience et le raison- tem|)s si ce mouvement n'était pas uni à la sen-
nement. sibilité et à l'activité siiontanée, on ne saïu'ait

dire de l'homme « qu'il a été fait âme vivante. »


232 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

ment, et par là, elle veille sur la santé du corps


CHAPITRE XVIL et sur la conservation de celte existence que
reçut l'homme, lorsqu'il fut fait Ame vivante
POl Ityidl DIEU SOIFFLA-T-IL SLR LA FACE
l'homme? CHAPITRE XIX.

â3. C'est vers la région du front que se trouve SCPÉRIORITÉ DE l'aME SUR LA MATIÈRE.
placée la première partie du cerveau, centre de
sur la lace
25. Il faut donc, quand on demande d'où vient
toutes les opérations des sens : c'est
l'àme qu'on cherche le priucipe dont Dieu à
et
que sont disposés les appareils des sens, si l'on
fait ce soulfle qu'on appelle àme, écarter toute
excepte le toucher répandu sur tout l'épiderniL' ;

encore la voie que siul ce sens part-elle de la


id(''e matérielle. En effet, de même que Dieu par
l'excellence de son èlre s'élève au-dessus de toute
région antérieure du cci-\eau pour traverser la
créature, de même ràmejiar la dignité deJa na^
tète, le cou, et s'étendre le long de l'épine dor-
ture surpasse tous les corps. 11 es t vrai q ue la
sale avec la moelle éi)iuière dont nous paillons
Imnière el l'air, les éléments les plus sublils de
tout à l'heure par conséquent les opérations du
;
la créajion, pour agir que pour
bien plus faits
toucher aboutissent, ainsi que tout l'organisme, à
recevoir des modilications comme les reçoit une
la face, où se localisent en même temps les ap-
masse d'eau ou de terre, lui servenl d'inlermé-
pareils de la vue, de l'ouïe, de l'odorat et du
diaire pour gouverner le corps, paj' la inème
goût. Voilà pourquoi, je pense. Dieu souilla sur
qu'Us ont plus d^ajllnilé avec la substance spiiù-
la face de Ihonnne un soultle de vie, quand il
àmevivante. La partie proéminente devait tuelle. La lumière révèle des phénomènes; mais
lui fait
à partie inférieure l'une gouverne, l'èlre auquel elle sert de messager ne seconfoiid
être préférée la :

l'autre obéit; de la première part la sensation, pas avec elle. Quand l'àme se sent gênée par les '

mouvement, au même que la


maladies du corps, c'est qu'elle est importunée
de l'autre le tilre

délibération précède l'acte.


par les obstacles que les désordres de l'orgaiiis-
nie opposeid à l'aclivité qu'elle déploie pour le

CHAPITRE XMII. gouverner, et la conscience de cet embarras l'ail


lonte la douleur. L'air qui circule d.uis les libres
DES TKOIS l'AUÏIES l'HINCU'ALES DL CERYEAl .
nerveuses obéit à la volonté pour mouvoir les
membres : il La pariiccen-
n'est pas la volonté. >

24. Connue tout mouvement (|ui suit la sen-


traie du cerveau mouvements qui indi([ue les
sation dans le corps ne peut s'accomplir sans un s'accomplissent dans les membres, afin que la
certain intervalle de temps, et que la méuioire
mémoire les conserve elle n'est pas non plus la :

est indispensable à l'exercice de l'activité intelli-


mémoire. Ces fonctions cessent-elles sous l'in-
gente dans le temps, il y a trois parties fort dis- fluence d'une maladie ou d'une grave peiiurha-
incles dans l'encéphale : l'une antérieure, du
tion dans les organes ï l'àme, privée des servi-
côté de la face, centre des sensations ; l'autre pos-
teurs qui lui révèlent lesscnsalionsoutransniel-
lérieureet ducôlédu cou, centre du mouvemenl ;
leul son aciivilé, se retire, comme si sa présence
la troisième iulermédiaire, siège de la mémoire,
élait devenue inutile. Quand
ne cesseni pas elles
comme on le démontre, afin que l'homine, chez
d'une manière aussi absolue que dans la mort,
qui le mouvement succède à la sensation, ne
son aciivilé se trouble par l'elforl impuissant
soit pas dans l'iuqiossibililé d'associer ses actes
qu'elle fait pour i-établir le concert interrompu
en oubliant sans cesse ce qu'il a fait. Les méde- même où
(les organes. La partie son activité esl
cins pour appuyer leur théorie citent des preu-
confuse révèle la fonction en souffrance, afin
\es invincibles à leurs yeux câinsi quand ces par- :

((ue la médecine y applique ses remèdes.


lies du cerveau sont malades ou lésées, la sensa-

tion, la locomotion, le souvenir cessent de se


CHAPITRE \X, -
manifester, cequidémontreelairementla fonction
attachée à chacune de ces parties; de plus, ce sont IIISÏINCTIOA' DE l'aME ET DES ORGANES.
CCS fonctions mêmes que médecine réussil h
la

rétablir. Toutefois, l'àme ne fait que se servir de -2(i. La distinction de l'àme el des organes, n'é-

ces organes, sans s'ideutilier avec eux; elle n'est clate jamais mieux (jue dans ces inomeid.'-. où
rien de tout cela : elle dirige la vie et le mouve- l'àme, sousTinlIueuce d'une rétiexion profonde.
LIVRE VII. — L'AME HUMAINE. 233

se sépari' si roniplMi'iiionl du moiulo o\tr>rionr, -2S. D'ailleurs l'àme ne s'olTre jamais à <'lle-

(Hii-, los \i'ii\ oiMciis cl iiiliicts, clic ne \(iil |»iis luèmc cinniiie miesubstance(''tendue, (luoifpi'clle

une l'oiilo d'objels places dovaiil elle. L'allention ne puisse s'iguoivr, même (|uand elle cherche à
devient-elle pins énerjjiqne i" ellesiispend l)rns- se connaître. Kn ell'et, (piand elle se replie sur
(pu-nicnt sa marche, ne songeant pit.s à donner elle-même, elle a eonsciciice de celte réilcxion ;

anciui signal aux l'orees nuilrices ([ni meltaieid or, ell<' n'en aui'ail pas conscience, si elle ne se
les pieds en nionvernenll Quand la distraelion, connaissait pas elle-même -.car elle ncsecherche
sans iMre assez pi'olbnde pour clouer le pronie- ipi'eu elle-même. Ainsi, puisipi'elle sait qu'elle se

iiicnrà sa place, est Ictulerois assez forte pour ne cherche, elle se comiail. iMaisliiulcs Icsconnais-
pas lui la^ec le loisir d'apprendre de la partie saucesqirelleac([uierl, elle lesacquiert dans son
cenliale du cerveau les mouvements qu'il exé- unité el tout entière. Donc, quand elle sait qu'elle

cute; l'ànie ouhlie d'où elle \ienl et où elle va; se cherche, elii' est tout entière occupée à se con-
elle dépasse sans j soiiyei' le but de sa coiu'se: naître et par C(UiS('(pientse coimait tout entière:
l'orpuie csl siiin, mais elle est occupée ailleurs. ce n'est point un autre être (pi'elle connaît, c'est
UuanI à ces atomes d'air (>t de lumière, qui éma- irelie-inème et dans son uiiili' (prelle prend
nent du ciel et (pu sont les premiers à transmet- conscience. Pourtpioi doue eherclu'-t-elle encore
tre les ordres de l'Ame pour donner la \ie au à se connaître, si elle se connaît quand elle se
corps, parc(> ([u'ils confinent à l'être iunnaténel cherche ? Assurément si elle ne se connaissait
de plus [)rès (pie l'eiu et la terre, et servent im- l)as, elle ne i)oiiriait pas se connaître au moment
uiédialemenl à {ouverner masse du cor[)s, je la qu'elle se cherche : mais elle a conscience d'elle
lie veux point reclKMrher maintenant si Dieu les au moment où elle s'analyse, et l'objet de ses
a tirés du ciel cpii nous environne et s'élève au recherches est de savoir son origine t?l sa tin.
dessus de nos létes, pour les mêler et les asso- Quelle cesse donc d'avoir le moindre doute sur
cier au corps déjà animé, ou s'il les a Ibrmésdu sa nature incorporelle : si elle était un composé
limon en même temps que la chair je sortirais :
de matière, elle se comiaîtrail comme matière ;

de mon sujet. Ileslvraisemhlahle que tout corps car elle a une idée plus nette d'elle même que
peut se trauslormer en un autre corps : l'absur- du ciel el de la terre qu'elle connaît par les yeux
dité consisterait à croire qu'un élément maté- du corps.
riel, (pielqu'il soit, puisse servir à lormer l'àme. '2!'. Je ne m'arrêterai pas à montrer (pie la fa-

formes des corps, fa-


culté de se représenter les
CHAPlTIiE \\l.
culté qui se révèle chez les animaux, chez
oiseaux, quand ceux-ci, par exemple,
M.'aME .ne PEIT M SORTIR I)E I.V M.VTIÈKE M F^TRE
les
regagnent leur séjour habituel ou leur nid,
r>- CORPS.
est incompatible avec toute espèce de corps:
'2~. donc repousser l'opinion d'après la-
Il tant cependant 'l'imagination devrait être d'autant
quelle il existerait un ciiKiuièine élément qui plus analogue à la nature matérielle, qu'elle con-
aurait ser\ à composer l'àme et (pii, sans être
i
tient pour ainsi dire les foruK^s de tous les corps.
identique à la leirc, à l'eau, à l'air, au feu même, Si celte faculté est évidemment incompatilile avec
prrossiercomme le l'eu terrestre, ou subtil et bril- la matière, en ce qu'elle peut non-seulement
lant comme la clarté des cieux, formerait je ne garder et reproduire images des objets, mais
les
sais quel élément nouveau qui n'a pas de nom au gré delà fantaisie,
encore les varier à l'intîni .
"^
dans les lan.mies liu'Maines '. Si les partisans plusforte raison aucune autre faculté de l'àme
à
de celle opinion entendent avec nous par corps ne permet de l'idenlifief à la matière.
une substance étendue en longueur, l>%eur et ;^0. Kn!eiul-ort^)ar corps l'être en général, je
profondeur, une pareille substance ne iieul ni veux dire, toute espèce desubslance?ll faut ban-
se confondre avec l'àme ni lui servir de principe,
nir cette expression, si on ne peut pas se réduire
four ne pas multiplier lesar,T;uments, cette sub- à n'avoir aucm
terme pour dislinguer les corps
stance pourrait être divisée dans une des ses par- detoiiice(|Min'esl paslui. Cependant iliie faut pas
ties ou circonscrile par des lignes : or, supposez trop se préoccuper d'un simple question de mots.
l'àme ainsi divisible, elle ne connaîtrait jamais A nos yeux l'àme n'a|ipartient à aucun des quatre
la ligne, comme une suite de points indivisibles, éléments si connus qui soid manifestement des
puisque ie corps ne la présente pas. corps : en même temps elle n'est point idenli-
'
Cicéron. Tiisc. liv. I.
-

iSi DR LA r.R.VÈSE AL SENS LITTÉRAL.

que à la substance divine. Onant aux ternies rieuse, la matière dont il devait sortir était égale-
pour la désigner, il n'y en a pas de plus conve- ment préexistante, je veux dire la terre où cette
nable que celui d'esprit ou souffle de vie. J'ajoute cause a pu être enveloppée comme dans un
le dernier mot, pour qu'on ne confonde pas le germe. Mais comment concevoir qu'une cause
souffle immatériel qui nous anime avec le sou 111e primordiale dont l'àme, ou le souffle destiné à
de l'air. Encore arrive-t-il que dans la langue former l'àme, devaitctre le développement, ait été
latine lesmols anima el spiritus sont souvent sy- créée .au moment où Dieu dit Faisons l'homme : <

nonymes, de sorte qu'il n'y a ])lus de terme spé- « à notre image et à notre ressemblance, » s'il
cial pour caractériser celte vie si dislincte de celle n'existait aucune substance où pût être créé ce
des corps et de celle de Dieu, celte existence su- principe de l'àme, à qui seule s'appliquent évi-
périeure à celle du vég^étal par le don de la sen- (iennnent ces expressions':'
sibilité, à celle de l'animal |)ar le privilège de la iiS. Celte cause était-elle
en Dieu, au lieu
raison, inférieure aujourd'hui à celle des Anges, d'être déposée dans une substan-e ? Elle n'était
mais capable de devenir aussi parfaite, si elle donc pas encore créée. Alors pourquoi est-il
est conforme ici-bas aux commandements du écrit: « Dieu tit l'homme à limage de Dieu '? >
Créateur. Etait-elle au contraire enveloppée dans une des
M. Quand même on desdoutes sur l'o-
aiu-ait substances que Dreucréa simultanément '!
(Jnelle
rigine de l'àme et qu'on agitei'ait encore la ques- est cette substance? Etait-elle spirituelle ou ma-
tion de savoir si elle a été formée d'une substance térielle? Si elle était spirituelle, produisait-elle
primitive, si elle est comme un écoulement dune ses conséquences dans les corps qui composent
nature parfaite et heureuse, enfin si elle a été le monde soit au ciel soit sur la terre? Etait-elle
formée (le rien, il n'en existe pas moins une vé- inaclive avant la formation spéciale de la nature
rité incontestable : c'est que si elle a existé anté- humaine, de la même
manière que chez im
rieurement dans une matière quelconque, cette homme, déjà en possession de l'cNislence, la fa-
matière à rei,u de Dieu son existence, et (juau- culté de se reproduire reste ensevelie dans les
jourd'hui l'àme est créée par Dieu pour devenir profondeurs de l'organisme, avant de s'exercei'
ime àme vivante ; car, ou elle a été pur néant parl'union des sexes? L'être spiritueloù elle était
ou du moins elle n'a pas existé avec ses facultés pour ainsi dire latente, ne produisait-il aucun
actuelles. Mais il est temps de borner ici nos re- (, acte il'après sa nature ? Puis, dans quel but au-
flexions sur la substance primitive dont l'àme a rait-elle été créée ? Etait-ce pour renfermer en
pu se former. elle implicitement le principe de l'àme ou des
âmes à venir, comme si elles n'avaient pu exister
CHAPITRE XXII. en elles-mêmes et qu'il leur fallût résider dans
une créature ikyà animée, au même titre que le
LA CAUSE VIRTlKi.l.E DE i/aME A-T-EIJ,E RTÉ principe de la génération ne peut se trouver que
CRÉÉE DAXS LA PÉRIODE DES SIX ,101'ltS. chez un être vivant et complètement organisé?
L'àme amait donc poui- mère une créature spi-
3:2. En admettant que l'àme n'ait pas été rituelle, contenant en soi la cause destinée à la
d'abord un être, il reste à examiner connnent former, mais au momeni seul où Dieu la créée
on pourrait concevoir que la cause virtuelle dont pour l'insufller à riionune. Mémedanslecorps hu-
elle devait sorlii" ait été créée parmi les o'uvres main, aucun germenese féconde, aucun embr.>
des^six jours, quand Dieu forma Ihommo à son on ne se forme, sans avoir Dieu pour auteur, |)ar
image, formation (|ui ne peut s'entendre (jue de l'action de cette sagesse qui dans sa pureté
l'àme. En avançani ([ue Dieu «tlaiis la création se répand parloul, sans contracter aucune souil-
simultanée des êtres lit, non les sal)stances (|ui liu'c '",
et dont la puissance s'étend à tout l'uni-
devaient plustardrccevoir la vie, mais les causes vers et dispose tout avec harmonie
s. Mais je ne

\irtnelles de leur existence, je dois craindre de sais trop comment on pourrait concevoirqu'une
passer ponr ne dire (|ue des mots vides de sens. créature spirituelle uniquement dans
ait été l'aile

(Ju'esl-ce donc que ces causes virtuelles qui per- ce but, sans avoir été citée parmi les œuvres des

mettent de dire que Dieulil l'hommeàsou image, six jours; il faudrait admetlie que l'homme fut
a\antdelui avoir formé un corps du limon de la
créé le sixième jour, (piand loin d'être formé
lerre et de lui avoir insufllé une àme ? Si le corpsa avec tous ses facultés naturelles, il n'exislaif en-

étécontenu en puissance dans une cause mysté- 1


Geii. (,26,27.— ,î Sag. vu, 24.25.—" Ibid.viii. t.
\

IJVHF, VII. — l/AAfE HFMAINE '23K

coiv qii'tMi principi" îiii si-in ilc ci'ltf crr'alnrc


(|iii n'est |)as iiiOmi- noimiice. La iiuMilioinh" «clli' CMAPITKK \XIV.
nvaliiiT élail d'aillant i)liis indispensable, (|ii'eilc

une (envi'c c|irelle


l.A.MK A-T-KI.LE I:TK CllÉKE AVANT Ii'RtHE ASSOCII^IE
aurait tnrniê aclie\t''(>, et
\i X or<;am;s?
n'ainail plus en l)esiiiii d'èlce ert'i-e d'après la

eanse primordiale destinée à la produire.


3o. Voyons donc si on ne poui-rait donnei'
une autre explication à la l'ois vraie et moins éloi-
CHAIMTFŒ Wlll. gnée des opinions conununes; la voici, l'armi les
œuvres qu'd fit simidtanément, Dieu créa l'àme
I. V CAISE VntTl Kl.l.K 1)K I.'v.MK Hl.MAINK A-T-EM.K
humaine en rései-vant le moment oii il l'unirait
KTÉ DÉP(KSÉE l).V\S LES ESPRITS ANGÉLigUES?
par son souille au.\ organes formés du limon de
M. {>erait-ce dan s la lumière du Jour primitif, UlIcitc, de nième qu'il créa la cause virtuelle
si par là (in i^st l'onde à entendre une ioree inlel- dont il devait faire sortir le corps humain, quand
Ugenle, (^ue Dieu renleinia iniplieilenieid, ([uand le moment de le former sérail venu. En effet,

il créa l'homme à son image, l.e principe dout l'expression suivant laquelle Dieu fit l'homme à

r.ïïneTiinnainê devait se former ?Aui ait-il établi son image ne |)eut s'appliquer qu'à l'àme; les
"ainsi la cause et la raison selon lesijneiles il termes de mâle et de femelle ont trait évidem-
formerait l'àme après la période des sept jours, ment au corps. On peut donc admetire, sans
de telle sorte (pi'il auniit créé dans l'élément contredire l'Écriture et sans choquer la raison,
Itiixcstre. hi cause \irlnelle du corps, daiis la que lors delà formation de l'hounne au sixième
du jour primitif la cause vir-
force intelligente jourja^usevirtuelle du corpsétait renfermée
lnelU> de l'âme ? Mais que signilie au fond ce dans les éléments matériels; tandis que l'àme
lanjiage, sinon que l'es|)rit angéli(pie est connue créée comme le jour primitif, était restée enve-
le père de l'àme humaine dont il contient le loppée dans les œuvres de Dieu jusqu'au momeni
principe, au même litre que l'Iiounne contient marqué où le souffle divin l'associa au corps
les germes de sa po^térile ? L/hoinme serait donc formé du limon de la terre.
le père du corps, l'ange celui de l'àme, et Dieu,

créateur du corps et de l'àme, formerait le pre-


CHAPITRE XXV.
mier dans l'honune, le second chez l'ange ? Ou
l'ame, en si i'posant (Ji'elle ait existé hors Di-
bien encore Dieu aurait-il formé un premier
CORPS, s'est-elle spontanément associée aux
corps et une première àme, l'un de la terre,
ORG.\îiES?
l'autre de l'esprit angélique, c'est-à-dire des
substances où il avait d'abord mis les causes vir- 3(i. Mais se présente encore une question
ici
tuelles de l'un et <le l'autre, quand il créa intéressante. Supposons queTàmc étaitdéjà créée
l'homme en même temps que toutes ses œuvres ; et qu'ell(> avait une vie mystérieuse, où pouvait-
et aurait-il dorénavant fait sortir l'homme de
elle trouver une existence ]>lus heureuse Pour- :'

l'homme, le corps du corps, l'àme île l'àme? On quoi associer l'existence innocente de l'àme à
est surpris sans doute d'entendre appeler l'àme celle du corps, où elle pouvait par le péché of-
tille d'un ange ou des Anges : mais il sera il plus fenser le Créateur peine du
et encourir ainsi la
étrange encore d'v voir la filledu ciel étoile, à travail et le damnation ? Faut-il
supplice de la
plus foi'le raison de la terre on île la mer. Si dire qu'elle a été poussée par un mouvement
on regarde connue invraisemblable ipie l'àme volontaire à prendre la direction du corps, et
ait été créé viituellement dans l'essence des
qu'en adoptant un mode d'existence compatible
anges, il serait plus invraisemblable encore de
avec la justice comme avec l'iniquité, elle se
croire que ce principe fut di'iiosé dans une sub-
soumettait aux conséquences de la liberté, la
stance matérielle, au moment on Dieu lit riionune
récompense pour cbàliment pour le
le bien, le
à son image, antérieurement à l'époque où le
mal'? Cette opinion ne contredirait en rien la
corps fut formé du limon de la ieneet aniiiuMlu « Avant leur naissance
parole de l'Apôtre : ils
souffle divin.
« n'avaient rien fait de bien ni de mal i. »

En effet ce penchant qui aurait entraîné la vo-


lonté vers le corps ne saurait être un des actes
' Rom. IX, 11.
23fi DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

innocents ou coupables dont il faudra rendre


compte au tribunal de Dieu, quand chacun re- CHAPITRE .WVll.
cevra ce qui est dû aux bonnes et aux mauvaises
1>L PENCHANT .N.VTLREL QLI ATTACHE l'a.VIE Al
actions qu'il aura faites pendant qu'il (Mail re-
CORPS.
vêtu de son corps Et pourquoi dès lors ne pas
'
.

admettre qu'elle soit descendue dans le corps 38. L'àme étant créée pour être envoyée dans
sur l'ordre de Dieu, à la condition que, sielleyvi-
un corps, on peut se demander si elle a obéi
vait suivant les commandements du Créateur,
à une nécessité impérieuse. Mais il vaut mieux
elle recevrait poui' récompense la vie éternelle
croire (pi'elle a suivi un penchanl naturel, en ',

dans la société des Ancres; tandis qu'elle sérail d'autres termes, qu'elle a l'instincl d'èlre unie à i

juslement condamnée, si elle violait celte loi, lui corps, comme


nous avons celui de vivre :

à une longue peine ou môme au supplice du (pianl à l'inclination au mal, ce n'est plus une
feu éternel? Comment croire que l'exécution de
inclination de la nature, mais un désordre de la
cet ordre de Dieu ait en principe constitué un
volonté qui appelle une juste i)unition.
acte vertueux et qui démentirait la parole suivant
39. II est donc inutile de se demander quelle
laquelle « ils n'avaient fait, avant leur naissance,
est la subslance dont l'àme a été tirée, si l'on
« ni bien ni mal? >i

peut concevoir (ju'ellc apparlient à l'ordre des


œuvres primitives et créées avec le Jour elle fut
:

CHAPITRE XXVl.
cri'ée avec elles et comme elles, sans avoir aupa-

l'ame volontairement lme au corps n'a-t-elle ravant l'existence. 31aiss"ilv aeuanlérieuremeni

El AlCl.XE connaissance DE l'aVENIU? — Df une substance matérielle et spirituelle suscepti-


ble de se développer, cette subslance aurait été
LIBRE ARBITRE.
l'œuvre de celui qui a tout créé, et elle aurait
3". S'il en est ainsi, nous reconnaîtrons que précédé ses modifications en principe plutôt qu'en
l'àme n'a point été initiée à son origine aux actes date, (le la même manière que la voix précède
bons ou mauvais qu'elle accomplirait. Il serait le cliant. Uuanl à la convenimce de laire sortir

trop étrange qu'elle se fût condamnée à vivre l'àme de la substance immalériellè, pourrait-on
dans le corps, avait ])révu qu'elle y pour-
si elle ne pas la voir ?

raitcommellre des fautes dont la juste consé-


quence serait un supplice éternel. Le Créateur CHAPITRE XXVUl.
est loué avec raison de l'excellence de ses œuvres :

louange n'a pas seulement aux nES OBJECTIONS CONTRE l'oPINION SELON L.M)L ELLE
or, celle trait
l'aMÈ et le corps n'ADVM ONT ÉTK SIMULTA
elresà qui il a donné le privilège delà prescience ;

NÉ.MENT CREES.
elle s'applique à la création des brûles que
riiomme surpasse en dignité, fùt-il pécheur,
40. Veut 011 admettre que l'àme n'a été créée
l/homme tient non l'iniquité
de Dieu l'être, et
(pi'au moment où le souille de Dieu l'a unie au
dans laquelle il s'engage en abusant du libre ar-
corj)s tout formé ? Un fera bien de songer à la
bitre toutefois, si ce don lui manquait, il aurait
:

question (pie soulève l'o. igine même de l'àme.


dans la nature un i-ang moins élevé. Que l'on
Répondia-t-on que Dieu a crée et crée encore
considère un hauuui' qui accomplit la justice
quelque ch,)se de rien apirs avoir achevé tous
sans connaître l'avenir on sentira le faible obs- :

ses ouvrages? Il làut alors se demander comniciil


tacle qu'il trouve, à rendre sa vie juste e! agréa-
on expruiuera (jue l'hoaune fut fait le sixième
ble à Dieu, dans l'ignorance où la foi la con-
jour à l'image de Dieu, ce (pii ne peut s'enlen-
danme sur l'avenii', si sa volonté est pure et
(Ire (pie de l'àme; en d'autres termes, dans([uelle
élevée. Ainsi on ne saurait nier la possibilité
subslance fut créée la cause virtuelle d'un être
d'une telle àuie sans se mettre en contratlK lion
qui n'existait pas encore. Répondra-on qu'elle a
avec la bonté divine; d'autre part, on ne saurait
non du purn('ant,maisirunélre préexis-
été tirée,
la soustraire à l'expiation que le péché entraine
tanl?On se tourmentera à chercher si cet êhc
^ans élie ennemi de la justic*.
était corps ou espiit, on soulèvera toutes les
'
tICor. V. 10.
questions (|uenons venons d'agiter, el pour der-
iiièi-e difficulté, on aura (>ncore à se demander
LIVRE VII. — I/AMK FirMAINK i37

(|iicllo osl, p;inni les (i'iivi<'s des si\ piTiniprs sàt? Comment ne pascroire en ell'et (pie l'Iicrbe
joins, la siilislaïu'c on Dit'ii a ci'i'c la cansp vir- fui l'aile au niomenl (prelle poussaet non avant
liii'IU" ili' IMiiiP, |)nis(|n'à ce inoinciit il ne l'aNail (letre ai)paruc sur la lerre si les i)aroles de ,

lin-i' ni du néant ni il'nn tMrc anlriicnr. rKcritnrene s'opposaient à celle pensée si natu-
il. Si on irpoïKl, |)onr ('•\ilcr ('t'ilc (liriiiMlIc, relle?Uu'onse rappelleeneore li's paroles de l'Kc-
qnc riionnni' l'nl l'oi'nic iln limon le sixiènic JiMir, clcsiasliipie ;« Celui (pii \il éternellement a tout
et qnc ci'llc Joj'inalion n'a l'Ic raiipi'li'i' pins lard " crééà la fois ' > cl (pi'oii ilierclieà concilier avec
(pic Mins loi inc (11' ii'siinii'', (|n'()ii soiij;i' aux t's- la créalion siiimllaniicc une série de cr(''alions
picssioiis (pii d('sii;ii(Mil la l'ciinno : •> Il les cira sé|)arées [lar des iiileixalies de Joui", cl
non de
« niAleolfcnicllc, cl il les bi-nil '. >> Si on prétend minutes Qu'on s'applicine à prouver l'égale vé-
.

alors ipic la l'cnimc lui (•(> jonr-làrorince d'un os rité de ces deux passages enapparence coiilradic-

de riioinnie : ipi'on cxainine liien connnenl les toii'es, où la (icnèse, d'une pari, ré\èle(jiie Dieu

oiseaux anieiii's devant .\dani Inieiit eivi's le si- se reposa le seplièmejonrde loitlesses œuvres '',
xiiMiie jour, aiin de concilier cette opinion avec et où l'Kvangile, de l'antre, dérlare par la bouche

le l(''nii>i;;nafîeon rKcrilnre r(''\i'le(pie les oiseaux du Seigneur (pie Dieu agit encore auj(jurd'luii 3.
de tonte esp('ce riiient liirs des eaux le cinquii!'- Enfin qu'on approfondisse en (piel sens les
ine jour (pi'on relhVlrsse ('salenient anxaibrcs
;
mêmes œuvres sont à la fois conq)Iètes et ina-
(|ni furent plan t('s dans le Paradis, (luandcel or- chevées.
dre de eiral ion appartient au troisième jour, 42. C'est l'ensemble de ces témoignages de
selon le tt'moi^iiaf>e de rKcriture ;
qu'on pèse l'Ecriture, dont la véracité ne peut être suspecte
bien ces pai jIos : « Dieu lit encore soitir de la qu'à un infidèle ou un impie, qui m'a conduit à
« terreloule esiiècedarliresbeaiixà la \ne et qui l'opinion (pu'J'ai exposée. Selon moi. Dieu à l'o-
'< olïraienldeslruitsexcellentsànianficr: » com- rigine (les siècles a ciéé tons les êtres à la fois, les

me si lesarbi'es sortis de la terre le trosièino Jour et iïns"féellement eT en acte, les autres en puissance
compris dans les (ciivrescpie Dieu jn^ea excellen- et dans leurs jjrincipes ; de même (pie dans sa
tes, n'a\ aient i)asol1èrtunspeclacleetdesaliments l()ule-[)uissance il a créé non-seulement les êtres
délicieux! Qu'on pèse aussi ces expressions :
actuels mais encore les êtres à venir ; il s'est re-

K Dieu Ibrma "ucorede la terretoiit(^slesb('tes des posé de ce qu'il avait de créer ensuite,
fait, afin

« cbainps et du ciel » connue


Ions les oiseaux '
;
en les gouveriianl par sa proxidence, la suite
s'ils n'('taientpasdiniombre de ceux qui avaient régulière des temps et des générations : car, il

cre(''s, on pliiirit comme s'il n'en avait jamais


i't(''
avait achevé ses œuvres, au point de vue de la

existé auparavant! Kenianpiez en effet que l'E- perfection des espèces, et il les avait commencées
crilurc ne dit pas: Dieu forma de la terre d'au- au point de vuede leur succession dans le temps ;

tres bêtes des champs, d'uiitrcs oiseaux, afin de ainsi, il s'est reposé en tant que la création

compléter le nombre des êtres sortis de la terre était achevée, il agit encore en tant qu'elle est in-

le sixième jo.;r et des eaux le cinquième, non; complète. A-t-on une opinion plus vraisem-
«Dieu forma toutes les bêtes, dit-elle, tous les oi- blable sur ces vérités? Loin de la combattre,
« seaux » Qu'on examine encore l'ordre dans
.
j'y applaudirai.
lequel Dieu lit toutes ses univres iJ. Quant à l'âme, dont Dieu anima l'homme
le premier :

jour, le jour iui-mênic lesecond, le firmament; ;


en souiîlanf'sur sa l'ace, voici tout ce que J'en
le tioisième, la terre et la mer sous leurs formes affirme : elle vient de Dieu, sans être delà même
distinctes, iwoc les arbres et les lierbcs qua- le
substance que lui ; elle est immatérielle, en
;

trième, les Iciainaireset les étoiles le cinquième,


d'autres termes, elle n'est point coqismais esprit.
;

les animaux tirés des eaux ; !c sixième, les ani- Cet esprit n'est point engendré de îasubstancedi-
maux tirés de la terre puis, (ju'on ra|)proche vine et n'en procède point : il n'est que l'ouvrage
;

de cet ordre le passage suivant : « Lorsque le


de Dieu. Grâce à ses facultés, il ne peut être la
« jour fut fait. Dieu fit le ciel et laterreavec toute transformation d'un corps quel qu'il soit, ni d'un
«la verdure des champs. «MaisquanilDieu fit le être dépourvu de raison par conséquent il a ;

jour, il nelil que lejour.De piusconunent a-t-il été tiré du néant. S'il est immortel d'après un
fait toute la \erdure des champs avant qu'elle mode d'existence qu'il ne peut perdre, on peut
fût sur la terre, toute l'hcrbeavant qu'elle-pous- dire qu'il est périssable au pointde vue des chan-
gements qui le dégradent ou l'élèvent le seul :

>Gen. 1,26-28. — Ubid. Il, 19. Ecdi. xviii, (.— SGen.


'
i. —3 Jean, v, 17. il.
238 DE LA (;ENÈSE \V sens LITTÉRAL.

être absolument immortel est celui dont à l'Apô- ijre par l'Ecriture, en se préservant de toute
« qu'il possède seul l'immortalité ' » assertion présomptueuse. Si ma méthode ne lui
tre a dit : .

Surtout autre point débattu dans celivre, que la en pénètre au moins l'esprit, en
plaît pas, qu'il
dautrcs qu'il consente h m'instruire s'il
discussion serve à montrer au lecteur comment
termes,
peut, ou qu'il cherche avec moi un commun
on peut rechercher les vérités laissées dans l'om- le

maître.
^\ Tim. VI. 16.

LIVRE HUITIÈME.

LE PARADIS TERRESTRE

CHAPITRE PREMIER. on ne retrouve point ici le cours oïdinaire de la


nature, on ne peut se résoudre à voir la réalité
LE l'.4RADIS TERRESTRE EST TOUT ENSEMBLE INE et on con((tit tout comme des symboles; on veut
RÉALITÉ ET L> SYMBOLE. même ne faire conunencer l'histoire proprement
dite qu'à l'époque où Ailaui et Eve, ayant été
1. « Et Dieu planta un paradis du côté de l'O- chassés du Paradis, s'unirent et eurent des en-
.< rient en Eden et il > plaça l'homme qu'il avait fants. Mais, eu vérité, est-il dans le cours naturel
11 existe, je le sais, une toule
d'opinions
« fait 2. ))
des choses qu'ils aient vécu laid d'années, qu'E-
sui- le Paradis terrestre, mais elles peuvent se ra- noch ait été enlevé au ciel, qu'une femme ait en-
mener à trois principales la première consiste
la vieillesse et la stcrélité, et mille
:

fanté malgré
à ne voirdansle Paradis qu'un jardin ; la seconde,
autres |)rodiges ?

à le considérer comme une allégorie la troisième, ;


3. Mais, dit-on, il faut distinguerentreunrécit
qui concilie les deux autres, admet le sens littéral de miraculeux
faits des lois qui ont
et l'exposition
et le sens ligure. J'avoue en passant que je par- présidé à la formation des êtres. Là en effet les
tage ce dernier sentiment. Ici j'entreprends de prodiges mêmes démontrent que lecoursdes cho-
parler du Paradis terrestre au senslitléral, selon ses est tantôt natur-d, tantôt extraordinaire et

les grâces que Dieu daignera m'accorder, et


de on ne
par consé(pient amène des miracles ; ici

comprendre conunent l'homme du


querévélerla création des êtres. —La réponse
faire
Ibiiné
lail
limon de la terre, cest-à-dirc pourvu d'un corps, est facile. La création elle-même a été extraoi'-
fut établi dans un véritable jardin.
Adam sans dinaiiepar cela seul qu'elle élait création. !>ans
doute était la ligure et le type de l'Adam futur
'

l'organisation des choses du monde, n'y a-t-il


:

cependant on voit eu lui lui homme doué de pas un fait sans précédent et auquel rien ne cor-
toutes les facultés de son espèce, lequel vécutun respond, à savoir le monde lui-même ? Faut-il
certain nombre d'annéeset, après avoir laissé une donc admettre que Dieu n'a pas fait le monde,
postérité nombreuse, mourut comme le reste parce qu'il n'en compose plus d'autres, ou qu'il
d'aucuns
des hommes, encore qu'il ne fût issu n'a pas fait le soled, (tarce qu'il n'en crée pjisdenou-
parents, mais formé de la terre, en qualité de
veaux? Pour mieux déconcerter Tobjection, il au-
dans
premier homme de même on doit voir le
:
rait fallu citer l'hounne, au lieu dediscuter sur le
jardin où Dieu le plaça, un lieu, un séjour terres- Paradis. N'admet-on pas qu'il aété formé par Dieu
tre destiné à
formé de la terre.
un être
comme jamais homme ne l'a été'? Pourquoi alors
(ienèsene rentre point en effet même
:2. Le récit de la refuser de croire que 1«^ Paradisa été fait de la

allégories, conmie le Cantique


dans le genre des nianièrequese forme aujourd'hui une forêt ?
des cantiques il est historique
:
comme le livre 4. Je m'adresse à ceux qui
reconnaissent l'au-
ceux qui offrent le même carac- euxqui
(les Rois et tous torité des saintes Lettres; il enest i)armi
historiques contenant lesfaits or- qu'une
tère. Les récits ne veulent voii- dans le Paradis terrestre
delà vie humaine, on les explique aisé-
Quant aux adversaires de l'Ecri-
dinaires pure allégx)rie.

ment ou prime-abord au sens littéral,


plutôt de ture, j'ai suivi dans un autre ouvrage', une mé-
afin de déduire des
événements passés le sens thode-toute différente pour leur répondre. Ce-
allégorique des événements futurs
mais comme ;

Gen. cont. les Manicli. ci-dessus.


'
Gsu. U. 8-17. — > Gen. II, 8. - ' Hom. v, U.
'
I.IVIIF VIII. -|,K PARADIS TKUltKSTUK. -239

pciidanl, iiitMnp dans i-v traite, j'ai ih^IcMidii jus(prau sacrilège, (l'est contre euxque j'écrivis
rKci'itiirc ,111 |iiiinl de mic lilli'ial, aiitaid i|iu' je deux livres sur la (Jenèse dans les premiers
l'ai pu, allii (|ii(' ceux (|tii oui l'iiilcili^ciR'c trop lenq)sdemaconversion, me proposant à la foisde
t^inoiisst'O ou trop cndiiicie pour se rendiT à la réfulerleur système insensé, eldeleminspireile
raison cl rroire à
«'cs \(''riti''s, n'aient du moins désir declierclierdauslesti\resméme(prilsdétes-
aucun nioscii de l<'in' donner l'apparence de lenl la foi chrétienneelevanKéli(pie. Comme le
tailles. Mais que des cs|trils (|ui ont toi dans l'K-
sens liltéralnese présentait pas toujomsà mon
ci'ilnr(>, reliisenl de croire (pi'il a réellement et à espiit.et mémemesemliiait impossible ou (larlois
la letlre existe un Paradis, c'est-à-dire mi |)arc
du moins ne pas perdre trop de
Irès-dillicile, poiu'
délicieux où les arlires oti'raient des fruits et des tenq)s, je me mis à ex|)li(picr avec toute la net-
oudjrafjes, un pai'c iunueuseariosé parune ini- teté et tonte la précision dord j'étais capable le
luense source, el cela ipiand ils \oieid tant de sens allcfiorique des faits ipie je ne pouvais en-
l'orèts considt'rahles se former sans le concours core interpi'éter à la lettre : je craignais d'ail-
deriionunei fraction mystérieuse du (]réatem', leurs delesrebider par' un long ouvrage ou une
c'est pour mol un sujet d'élomiement à (|uel :
discussion obscure, el de leiu' faire tomber le
litre croient-ils donc (|ue l'homme a été créé, livre des mains. Toutefois je me ra|)pelle le but
puisqu'ils n'ont jamais vu d'e\emplc d'une pa-
piincipal que je me pi'oposai sans l'atteindre :

reille l'ormalion'? S'il ne tant voir dans Adam lui-


c'élait de moatrer (jue les ('xènements de la Ge-
même (pi'un l.\i)e, (piel a été le père de Gain, nèse étaient historiques et non de pures allé-
d'Abel, de Setli'.' Ces personnages neseraienl-ils gories. Je désespérais peu de les voirainsien-si
eux-mêmes fjue des symboles, au lieu d'être fds
tendus (pic j'établis au second li\re le piincipe
d'un homme el hounues eiix-niénies? Qu'ilsexa- suivant « Si on se résout à prendre au sens ri- l_
:

uiiueul donc de près à (juelle conséquence les


« goiireusement littéral tous les récits de la Ge-
conduirait un pareil système et qu'ils s'unissent '<nèse, on trouvera un moyen infaillible d'éviter
à nous p. ur interpréter au pied delà lettre le
«bien des blasphèmes sans sortir du domaine de
récit desfaits i)rimilifs. Itèslors, cjui n'accueillera
<(la foi. Loin de voir avec dépit un tel ti'avail, il
avec sunpalhie symboles qu'ils découvrent
les
c< faul le regarder commoune
preuve merveilleuse
dans ces événements, et qui révèlent soit les dis-
«d'iidelligence. Mais nous ne pouvons entendre
si
positions migrâtes des esprits, soit lescliosesà ve-
« l'Lcrilured'un manière à la fois pieuse et di-
nir.' Assui'ément si on ne pouvait entendre lil-
« gncde Dieu qu'en prenant les faits poui' des (i-
téralemcnt les faits qu'expose l'Écriture sans
«gures et desénigmes, appuyons-nous surl'auto-
compromettre la toi, que resterait-il à faire si-
« rilédes Apôtres qui ont donné le no'ud de tant
non de voir [lartout des allégoiies plutôt que de
« d'énigmes dans l'ancien Testament, etpoursui-
lancer contre la parole sainte dos accusations
« vous notre but avec l'aide de Celui qui nous a
impies? iMais l'interprétation historique de ces
<( exhortés à chercher, àdemander et à frapper '.
faits, loin d compromettre les récits de l'Ecri-
«?3xpli(iuons doncd'aprcslafoicalholiqueles fi-
ture, ne sert (|u'à lescorroijorer il n'est ; personne,
« gures que renferment les événements ou les
à mou sens, <jui après avoir vu les événements
« prophéties, sans préjudiced'un traité plus exact
delà (leaèse e\i)rKiués liltéralemenl selon cette
« et plus parfait, qu'il vienne de moi ou de toul
rèftle de foi, poussera l'olislinalion et l'incrédulité
« aidriNujuiDleudaigneraaccordersa lumière -.>'
jus(prà persévérer dans la fausse opinion que
Voilà ce que je disais alors. Aujourd'hui que le
le Paradis terrestie ne peul èlre qu'une allé-
Seigneur m'a inspiré la pensée de considérer avec
iiorie.
plus d'attention ces événements, et que j'ai l'es-
CHAPITKE II. péran.ce ou plutôt la con\ idion de pouvoir les
interpréter connne des faits historiques et non
l'OCnQUOl UES EXPLICATIONS .VLLÉG0U1«UES DANS LE
plus connne de pures allégorics,je vais expliquer
de la OEJiÈsE contre les manichéens
'?
riivrrÉ
le Paradis terrestre, en suivant la même méthode
<pie dans les livres précédents.
Les Manichéens ne se bornenl pas à mal in-
.~).

terpréteiies saintes Lettres ils les rejettent el vont


:
'
Miitt. VII. 7. — • Gcn. Cûiit. Ips Man . liv. ir, ch. 2.
-24(t DE LA GENÈSE AU SENS LITTERAL.

l'homme, formé du limon de la terre et animé


CHAPITRE III. du souffle divin, devait avec sa postérité pren-
dre j)our aliments les productions que la terre
DE LA CRÉATION DES ARBRES DANS LE l'AUAUlS.
de son sein, enveiiu du principe de
ferait soitir
RETOUR SLR LA CRÉATION DES PLANTES LE
fécondité dont elle avait été déjà enrichie. Ainsi
TROISIÈME .lOLR.
Dieu, en créa ni lescausesciuicoidenaieul en prin-

6. Donc « Dieu planta le paradis d'Edcn cipe tout l'avenir, se parlait conune si l'avenir

«(c'est-à-dire, de délices), vers l'Orient et y plaça cid déjà existé, au sein de cette vérité tout
« l'honnnc (ju'il avait créé. » Tel est le récit de intérieure que l'o'il n'a pomi \ue, <|ue l'oreille
l'Ecritnre et tels sont les laits. L'Ecrivain sacré n'a point entendue et que Tlispiit-Sainta révélée
reprend alors sa pensée ponr la développer et pour à l'écrivain inspiré.

montrer comment cette anivre s'est accomplie,


CHAPITRE IV.
en d'autres termes, comment Dieu a planté ce
parc et y a établi l'honuiie. Il ajoute en effet :
DE l'arbre de vie qu'il EST TOUT ENSEMBLE UX
:

« Dieu fit encore produire à la terre toute es- ARBRE RÉEL ET LE SYMBOLE DE LA SAGESSE '.
« pèce d'arbres beaux à voir cl qui donnaient
« des fruits délicieux. » Remarquez qu'il ne dit 8. Quant aux ex])ressions qui suivent «L'arbre :

pas que Dieu créa des arbres d'une espèce nou- «devieau milieu du jardin et l'arbre de la con-
velle ou le reste des arbres. Eu effet, la terre « naissance du bien et du mal, » il faut les pe-

avait déjà produit les arbres


ou plantes de toute ser avec attention, si on ne veut pas être entraî-
espèce qui présentaient une vue charmante et né à voii- sous ces mots un symbole en
des fruits délicieux cette création avait eu lieu
; dehors de toute réalité. Il est écrit de la Sa-
au troisième jour, et voilà pourquoi Dieu avait gesse « qu'elle est l'arbre de vie pour tous ceux
dit au sixième « Je vous ai donné toute espèce
: « qui l'embrassent .2 » Cependant, quoiqu'il y
" portant semence qui est sur la terre,
d'hei-liLS ait au ciel une Jérusalem éternelle, il n'en a pas
« tout arbre fruilier, portant semence, pour vous moins existé sur la terre une cité qui la repré-
«servir de nourriture '.'Dieuleuraurait-ildonné sentait. Sara et Agar, tout en étant les symboles
une chose et voulu ensuite leur en domier une des deux Alliances, n'en oïd-pas moins été deux
autre ne puis le croire. Les arl)resqui fu-
? Je femmes s. Jésus-(>hrist par les mérites de sa
rent créés dans le Paradis appartenant aux es- passion sur la croix nous arrose de son sang ;

pèces de ceux que la terre avait produits le troi- mais le rocher dont Moïse fit sortir une source
sième jour, sorfiient également de la terre au d'eau vi\e, pour apaiser la soif du peiqde, ne
moment qui leur avait été fixé en effet, les pro- :
cesse pas d'avoir été un rochei' véritable, parce
ductions de la terre au troisième jour représen- qu'il était, selon l'Apôtre,« la figure de Jésus-

taient dans l'Ecriture la cause virtuelle de ces « Christ Le sens allégorique de ces événe-
''. »

productions créée au sein de la terre, en d'autres ments est sans doute fort <listincl de leur
termes, le sol avait alors reçu ce principe de vérité historique mais il n'empêche pas qu'ils
;

fécondité qui se développe encore atijourd'hui aient eu lieu. A l'époque où l'écrivain les ra-
en productions toutes semblables, à l'époque contait, il ne conq)osail pas de symboles il ;

qui leur a été assignée pour apparaître au joui'. faisait un récit exact de laits destinés à fi-
7. Par conséquent ces paroles de Dieu au sixième gurer ceux qu'ils piécédaient. Il y a donc eu un
jour : « Voici que je vous ai donné toute espè- arbre de vie, comme il a existé un rocher li-
" ce d'herbes portant semence, toute espèce d'ar-^ gure de Jésus-Christ Dieu n'a pas : \ oulu que

« bres fruitiers portant semence, afin qu'ils vous l'homme vécut dans le Paradis, sans offrir à ses

« servent de nourriture, n'ont été ni dcsfons, >< yeux (pichpies iniaws matérielles des choses de
ni une sucession de syllabes elles ont été pi'o- :
l'esprit. Le reste des arbres fournissaient des

noncées par la puissance créatrice telle qu'elle alimeids, celui-ci coidenail de plus un mystère;
réside dans le Verbe. Mais pour faire entendre à il représentait la Sagesse dont il a été dit
l'homme ce que Dieu a dit sans enqiloyer de « qu'elle est l'arbre de vie, >> au même titre que
sons successifs, ilfallaitbien recourir à une série Jésus-Christ est le rocher d'où j'aillit l'eau pour
de sons. C'était à une époque postérieure que ceux qui l'iiiment. Il est le rocher, dis-jc,

' Cen. 1,29.


iGen. II, 9. - 2 Prov. m, 18.—' G:il. iv, 24-2(;. — < I Cûi-,i;, 1.

(
,

I.IVRK VIII. — LK l'AHADIS TKI'.KKSTHK. 2 il

paire iiiic loiil ce (|ni a iiivfédi' lui lail iriscnlion snblile on l'on ne peut arriver à la cer-
poiii- If llmiriT ilitil sciNir ;i le il('sif;ii('i-. Il lii"l'' l''.iill de qnehpu' iauin (pi'il faille c(Ui-
s,

s'iimiioic dans cevoir II, mime de l'enfer, le sein


est (•fialeiiiiMil l'afiiicau (|iii la la d'Abraham,
Pà(|iit'; or, losyml)i)lt'ir('sl pas un imil, c'clail iiiu' la langue ilii riche,
le doigt du pauvre, le supplice

r('alil('';rafiii('aii pascal clail tiri Nciilaiilc agneau, delasoil, l.igoMlted'iMii raliaicliissanle '; la vé-
011 riiiiiiiolail, on le niant^oail '. OcpiMulant cf rité peut sortir (riiii paisible examen elle ne :

sacrilice irel en li.inail un anlrc. Ne le conipa- jaillira jamais d'une controverse passionnée.
l'ons |)as an vcan ^las (pi'on Ini' poni' fclcr le Alinde ne pas nous laisser arrêter par une ques-
roloni' (le l'cnlanl proilif^ne '. Là, en clCel on tion aussi prolonile et ipii exigerait de longs dé-
tlévelo|)pe une allégorie, on ne elierche pas le \eloppements, nous nous bornerons à celte
sensallcudrirpie il'évènenuMilsvérilahles; ce n'est simple réponsiî ; si les âmes dé'gagees du coi-ps
point rK\ani:i''lisle, c'est le Seifiiienr même cpii peiiveni êlre renfermées dans un lieu maléiiel,
est l'antenr <le celle narration , l'i-lvanîïéliste l'Ame du bon larron a pu être admise dans le
ne fait fpie la repnulnire : le récit est poin- Paradis où le corps du premier honune In! in-
tant un lait, on ce sens tpie le Sanveni- a tenn troduit. Plus tard, s'il est nécessaire, nous trou-
réellement ce langaw ; mais dans sa bouche ce verons dans (piebjiie passage de l'Ecriture une
n'esl ipi'ime |)araltole et ou ne saniMil exiger occasion plus favorable d'exprimer à ce sujet
(pi'on démontre l'aullieiitieilé des laits (pii y sont nos doutes ou notre sentiment.
laeontés. Jésus-t^lnàst est anssi tout ensemlile 10. Une la Sagesse n'ait rien de matériel et

la pierre sur hupielle Jacob versa do l'iniile ' [)ar consécpient qu'elle ne |)uissc être un arbre,

et la pierre, (pii, rejetée par les architectes, c'est un point incontestable à


mes yeux et ipù,
est dcNennc la principale pierre de l'angle ''. je crois, n'est mis en doute par personne mais :

Mais ici la li;Jiure n'est (pi'nne prophétie, là elle pour refuser tradmettre qu'un arbre ait pu dans
implique un fait. Moïse racontait en eiret un un parc repré.senter la Sagesse sous un sjmbole
évèneiiieni |)assé, le Psalmiste ne taisait que m\st 'rieux, il faut ou ne pas songer à tous les corps
prédire l'avenii-. dont l'Ecriture s'est servi pour figurer les choses
spirituelles, ou soutenir que l'existence du pre-
CHAPITRE V.
mier homme a été incompatible avec un pareil
SUITE Df CHAPITRE PRÉCKDENT.
Cependant l'Apôtre répèle ces paroles
ni) stère.
prononcées par Adam sur la femme qui, selon
V). C'est ainsi (jne dans le Paradis tout spiri- notre croyance, fut tirée de son côté « L'homme :

tuel où le Larron l'ut introduit après sa mort < laissera son père et sa mère et
s'attachera à
sur la croix », la Sagesse, ou Jésus-Christ est l'ar- « sa l'emnie ; et une seule
ils seront deux en
bre de vie ; mais, poiu- le représenter, il lïit « chair y2, » « un sumbolc aiufiisti' de
et il voit :

créé un arbre de vie dans le Paradis matériel :


'<l'union de Jésus-Christ avec "son Eglise ». »
ainsi le vent l'Ecritiue qui, racontant les évé- N'csI-cc pas une chose élrange, j'allais dire in--
nements dans leur ordre chronoloitique, nous soutenable, qu'on voie dans le Paradis une pein-
apprend (pie riioinme l'ut formé d'abord, puis ture allégorique et qu'on ne veuille pas
y voir
établi dans ce lien, en pleine possession de la une réalité destinée à devenir une allégorie?
vie dos sens. Se ligure-t-on que l'àinc, une fois Si on admet, comme on le fait pour Agar
et
dégagée du corps, est renfermée dans un lieu Sara, pour Ismaël et Isaac, qu'il
y a dans cette
\isible, bien qu'elle n'ait plus sou enveloppe ma- création un fait historique aussi bien qu'iuie
térielle? Uii'on avance celte proposition; il ne ligure, iJOurqnoi ne pasadmeltreque l'arbre
de
manquera pas de gens |)our l'appuyer, pour vie fut à la fois un arbre réel et un emblème de
soutenir même que le riche altéiV' par l'Evangile leSagesse ? C'est ce (jue je ne saurais comprendre.
est dans un séiour matériel, et que sa langue 11. 11 ne me coûte pas de dire encore
que cet
di'sséchéc, la goutte d'eau qu'il aspù-e à recevoir arbre mystérieux, tout en olfrant à l'iiomme un
du bout du doigt de Lazare, prouvent une âme aliment inalériel, a\ait une vertu secrète et ex-
unie à un corps. Je ne me hasarderai avec traordinaire poiu- maintenir son corps dans la
i)as
eux dans une (pieslion aussi dillicile. Le doute, vigueur et la santé. A coup sûr, il s'ajoutait aux
quand la vérité est obscui e, vaut mieux qu'une propriétés naturelles du pain une vertu particu-
' Kx. XII, 3-11. — 2Luc, XV, 23. — -iGenès. x<v ii |8 — '
i^s.
J.XV1I. ÏÎ.5. Luc, X-.VI1I,4<. 1 Luc, .xvl,24.— 2Ccn. II. 2-1. — •
iCph. v, 31, 32.
S. Alg. — ToM. IV.
16
242 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

lière Jans le gâteau qui suffit à Dieu pour pré- de la soumission et de la révolte. Il est donc
server un prophète de la faiin, iiendanl qua- ici question d'un arbre et non d'un symljole :

rante jours Comment 1 . hésiter à croire qu'a- son nom


ne vient pas des fruits qu'il devait pro-
vec le fruit d'un arbre, par un bienfait dont la duire, mais de la conséquence même qu'entraî-
cause nous échappe, Dieu ail mis le corps de nerait pour l'homme l'infractioti au comman-
l'homme à l'abri des ravages de la maladie, des dement de n'y point toucher.
années et même
des atteintes de la vieillesse,
(|uand on voit ce même Dieu empêcher des ali- CHAPITRE Vil.

ments ordinaires de diminuer par un prodige


des fleuves qui arrosaient le
et renouveler sans cesse la farine et l'huile dans
paradis terrestre.
des vases d'argile Vienne maintenant un dia-
' ?

lecticien subtil qui prétende que Dieu a dû 13 « Il d'Eden un fieuve (pii arrosait le
sortait
faire sur la terre des miracles (ju'il n'a point dû '< jardin etse divisait eu quatre lleuves.
delà il

faire dans le Paradis : apparemment que l'acte


« Le nom du premier est Pliison; c'est celui qui
par lequel forma l'homme du limon, la femme
il
« coule autour de tout le pays d'Evilath, où il y
d'une côte de l'homme, n'est pas un prodige « a de l'or et l'or de le pays-là est bon. C'est là
:

plus étonnant que la résurrection d'un mort. « aussi que se trouve le bdellion et la pierre
« d'onyx. Le nom du second fleuve est Géon ;
CHAPITRE VI.
« c'est lui qui coule autour de tout le pays
« d'Ethiopie. Le nom du troisième fieuve est le
l'arbre de l.v science du bien et du mal.
« Tigre ; c'est celui qui coule vers l'Assyrie.
12. L'arbre de la science du bien et du mal « Et le quatrième fleuve est l'Euphrate '
. »

se présente maintenant à notre attention. Sans Faut-il m'évertner à prouver ([iie ce sont là de
nul doute, c'était un arbre réel et visible comme véritai)les fleuves plutôtque des fleuves imagi-
tous les autres. Là n'est point la question le : naires destinés à servir de symboles, quand leur
point à éclaircir est de sa\oir ])Ouiqaoi il a été réalité est indiquée par leurs noms seuls, si

nommé ainsi. Or, plus j'examine, plus je suis connus dans les pays (pi'ils Iiaignent et répandus
porté à admettre (pie cet arbre n'offrait aucun pour ainsi dire dans le monde entier? Le temps
aliment nuisible. Celui (pii n'avait créé que des a changé le nom primitif de deux de ces Reuves;
œuvres excellentes*, n'avait rien mis de mauvais de même que le Tibre s'est d'abord appelé
dans le Paradis le mal data pour l'homme de
: r Albula, le Nil et le Gange sont les noms modernes
sa désobéissance au commandemenl. L'homme du Géon et du Phison quant au deux autres ils :

étant soumis au souverain empire de Dieu de- portent encore le même nom que dans les an-
vait être assujéti îiune loi, afin d'avoir le mérite ciens temps. Or, si leur existence est avérée,
de conquérir la possession de son Seigneur par ne devons-nous pas également entendre à la
l'obéissance. L'obéissance, je puis le dire en lettre tous les récits de l'Ecriture, et y voir, au

toute sûreté, est la seule vertu de toute créatiu'e lieu de pures allégories, des événements histo-
raisonnable, agissant sous la suzeraineté de riques qui cachaient un sens figuré? Assurément
Dieu, de même
premier des vices et le
que le une parabole peut emprunter une couleur his-
comble de l'orgueil est de faire tourner sa li- toricpie à des circonstances (pii n'ont rien de
berté à sa perte, ce qui est proprement la déso- réel,par exemple, celle où Seigneur raconte
le

béissance. Or l'homme ne pourrait reconnaître qu'un homme, qui allait de Jérusalem à.léricho,
ni sentir la souveraineté de Dieu, s'il n'avait un tomba entre lesmains des voleurs -. Comment
commandement h exécuter. Par conséquent, ne pas voir que c'est là une par;d)ole et que le
l'arbre n'avait en lui même rien de malfaisant : langage est allégorique d'un bout à l'autre ?
il fut appelé l'arbre de la science du bien et du Cependant les deux villes qui y sont nommées
mal, parce que, si l'iiomme venait à manger de sont véritables et peuvent encore aujourd'liui
ses fruits après là délensc qu'il en avait reçue, il se voir dans la Judée. Nous explicpierions de la

violerait, par Li même, l'ordre do Dieu et recon- même manièie les quatre fleuves, si nous étioi.s
naîtrait, au châtiment qui suivrait cette hans- obligés (rinlerpréler au sens figuré tous les d(''-
gression, toute la différence du bien et du mal. tails que l'Ecriture nous transmet sur le Paradis

I
III Roi'!, XIX, K — sihid. xvii.lB.— ' Gen. I,.U. I
r,en. ir, 10-14. — ! Luc, x, 30.
I.IVUK Mil. - LK PAKAOIS TKKUFSTKK ÎU
li'ircstn' ; mais cmiimo nous n'avons aiiniii lie ipielle surveillance peut-il t^tre (|uestion ? Dieu
iiiolit' |i(iui' iif pas priMidi'c à la Icllrc les laKsà a-t-it vendu (pic le premier homme se livi;il à
leur orifiinc, pi>ni(|iitii ne pas s'allarher avec; l'aiiiiciilluie? .Ne serait-il pas invraisemblable
sinipliciti' à l'aiilorili' de rKciilnrc, (jnand clic ipi'it feùt condamné au travail avaid sa laiile?
raconte ilcscvcncnicnls d'un caraclcrccinincin- (In pouriail le penser, si l'expérience ne démon-
iiicid hisloi-i(|nc, en passant tW la connaissance trait jias (pie l'homme parfois prend un plaisir
di' la ri'aliti' an sens li^nri- (|u'clle penl len- si vif à travailler la terre, (pie c'est un suiqilice
l'erniei? pour lui d'être arraché à cette occupation. Or,
1 1. Faiil-il nous anclcr à l'olijeclion (|iic, soi' l'altrait attaché à rauriciiiliire était bien plus
ces qiiati'o lleiives, les uns ord inie soin'ce con- vif encore à une époque où la terre el le ciel

iiiio, les antres une source cachée, et (pie par avaient une perpétuelle b 'nignifé. Cen'é'tail point
consiMpicid il (>sl lilli'i'alcincid inipossi le ipTils un travail écrasant, mais comme un (paiioiiis-
sortent de i'uni(pie llcuvctiu l'aradis? Loin ileià :
seiiieiil de l'aclivili', charmée de voir les crea-
la situation du Paradis terrestre étant luie énig- tionsdivines prendre avec son concours un aspect
me pour l'esprit humain, il l'ant croire (pie le plus vivant et une fécondité nouvelle :c'était un

lleuve ((ui arrosait le l'aradis se divisait en (pia- sujet perpétuel de louer le (Iréateur lui-même,
tre le témoignage incontestahle de
bras, selon pour ce (ion de l'aclivité qu'il avait fait à l'àine
l'Ecriture;quant aux fleuves dont les sources, iin'e à un corps, pour cette faculté qui s'exeirait

dit-on, sont connues, ils ont disparu ipiehpie dans la mesure du plai-ir et non à contre cienr
part sous terre, et, après avoir parcouru un long pour satisfaire aux besoins inférieurs du corps.
circuit, ils ont repnrn en d'autr(^s pays où ils I(i. Y a-l-il un spectacle plus sublime el plus
passent pour prendre leur source. Qu'y a-t-il ravissant pour l'homme, un entretien jibis intime
de plus fréquenl (|ue ce phénouK^-ne ? .Maison pour ainsi dire de sa raison avec la nature, (pie
ne le connaît que jKinr les cours d'eau\ qui ne d'examiner ses semis, ses pépinières, ses boutu-
restent pas longlenqis cachés sous la terre. Ainsi res, ses greffes, et de se demander ([uelle est la
un lleuve sortait d'Eden, c'esl-à-dire, d'un lieu vertu secrète des germes et des racines; d'où
de délices; ce fleuve arrosait le Paradis, en dtheloppement ou leur stérilité quelle
vient Icîu- ;

d'autres lermi^s, Ic^ arbres maïniliques et chargés de la force invisible qui les fait croître
est l'action
de t'ruils (|ni ombrageaient tout r(^space compris au dedans, l'infliienre de la culture au dehors?
dans ce parc. Ces considérations n'élèvent-elles pas jus(pi'à
montrer que celui qui plante et (]ui arrose
CHAPITRE VIll.
n'est rien, mais Dieu seul qui donne l'accroisse-

l.'llOMME l'LACK D.VXS LE PAR.VDIS TERKESTRK POIU


ment '? Le travail extérieur ne vient-il pas d'ail-
leurs de l'être même que Dieu a créé et qu'il
s'y I.'IVUER a L'AGIilCLLTiHE.
gouverne selon les desseins secrets de sa provi-
lo. « Dieu prit donc l'homme et le plaça dans dence ?
« le jardin d'Eden, pour le cultiver et poiu- le
CHAPITRE IX.
i uarder. Puis le Seigneur Dieu commanda à
" l'homme, disant Tu mangeras de tout arbre ENSEIGNEMENT QUE
:
DONNE LA CULTURE DE LA
X qui est dans le jardin quant à l'arbre de la ;
TERRE.
" science du bien el du mal vous n'en mangerez
< point car au jour que vous en mangerez,
: 7. De là l'esprit porte ses regards sur le monde
1

« vous mourr(^z de mort ». » L'Ecriture après lui-même comme sur un arbre immense, et il y
avoir dit brièvement, un peu plus haut, que retrouve ladoubleaction delà Providence, l'une
hien avait planté
y avait placé un jardin et nato.relle et l'autre voloulaire. ,(e veux parler des
l'homme sa créatiue, était revenue sur ces ex- mouvements mystérieux que Dieu imprime par
pi-essions pour décrire la formation de ce parc; lui-même pour donner raccroissemenl à tout,
elle y revient encore pour raconter com'ueut même aux plantes et aux arbres, et de l'activité
l'homme v l'ut introduit. 11 y lut placé, dit-elle, libre qu'il gouverne chez les anges et chez les
pour le cultiver et pour legiu-d(>r. Examinons le hommes. .\ l'action naturelle appartiennent les
sens attaché à ces derniers mots. De quel travail, loisqui régissent les corps au cieletsurla terre : le

'
(ïen. M, 15-17.
244 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

rayonnement des luminaires et des étoiles, la


succession des jours et des nuits, le mou\emeid
CHAPITRE X.

des eaux à la surlace et autour du globe fondé SUR LE SENS .VTT.VCllÉ .\IX MOTS CUltiVCr ET
sur elles, l'équilibre de rafmosi)hère répandue
(jarder.
au-dessus de la terre ; l'origine, la naissance, le
développement la vieillesse et la mort des ani- 19, « Dieu mit l'homme dans le jardin pour
maux des plantes « garder. » Mais garder quoi? Serait-ce le
et ; bref tous les phénomènes jar-
qui s'accomplissent chez din lui-même ? Contre ([ui ? A cou[) sûr
les êtres par les mouve- il n'y
ments naturels de avait à craindre ni empiélemcnls de
l'organisation. A l'action vo- voisin, ni
lontaire se rattachent la création et la transmis- cbicaneà propos de limites, ni attaque de voleur
sion des signes du langage, les travaux de
ou de brigand. Comment donc concevoir (|ue
la
campagne, le gouveiiiement des états, la culture
l'bomme ait réellement gardé un parc véritable ?
des arts, enfin tous les actes qui s'accomplissent L'Ecriture ne dit point qu'il devait garder et cul-

dans la cité céleste, tiver le Paradis elle emploie les deux mots ab-
soit soit dans la société des ;

des honnnes ici-bas, où les méciiants même solument pour garder et cultiver » Une tra-
: «
a
leur insu travaillent dans l'intérêt des bons. Cette ducliou littérale du grec donnerait: jwsiii eum

double action de la Providence éclate chez il) Paradisu opcrari eum el ciistudire. L'honnne
l'honnue considéré en lui-même physiquement, :
a-t-il été placé dans le paradis pour travailler,
dans la suite de mouvements qui le font naître, ou, comme semble le croire l'inlerpi-èle qui a
traduit « ut operaretur, ou pour travailler le
croître et vieillir; moralement, ilansles penchants >-

qui portent à se nourrir, à se vêtir, et à se


le
Paradis lui-même ? Le lour est équivoque. Il

conserver. L'âme elle-même obéit à une im- semblerait qu'il eût fallut ici faire du mot Para-

pulsion naturelle pour vivre et pour sentir; elle disnon un complément direci, mais un complé-
. agit sous l'influence de la volonté pour appren- ment de lieu et dire « : afin de travailler dans
dre et pour juger. « le Paradis. »

Consacrée à un arbre, 20. Toutefois, dans la crainte que l'expression


18. la culture a pour but
de donner par un travail extérieur, tout le
lui « travailler le jardin » ne soit la véritable et
développement de ses propriétés intrinsèques ne rappelle le passage « Il n'y avait point :
:

« d'bounne pour ti'availler la terre, » examinons


chez l'homme, l'hygiène seconde extérieure-
ment le travail que la nature accomplit dans ces paroles dans les deux sens qu'elles peuvent
offrir. J'admets donc d'abord qu'on puisse dire
l'intérieur du corps, et la science donne les mo-
yens extérieurs de rendre l'âme heureuse au-de- que l'homme fut introduit dans l'Eden « afin de
dans. Néglige-t-on la culture d'un arbre ? les effets « garder dans le Paradis. » Qu'y avait-il à gar-
sont analogues à ceux que pi-oduit, dans le corps, der dans le Paradis ? Je ne parle pas du travail

l'indifférencepour l'Ingiène, dans l'âme, la d'Adam question vient d'être ti'aitée. Devait-
:1a
il garder dans son co'ur le principe
nonchalance à s'instruire les ravages qu'une hu-
;
(pu rendail
la terre docile à ses travaux; en d'autres termes,
midité maligne cause dans un arbre, des ali-
ments délétèiesles exercent dans le corps, et les devait-il obéir au counnandement divin avec la
maximes de l'injustice dans l'âme. C'est ainsi que même compl;iisance (pie la ferre se laissait cul-
le Dieu qui domine tout, qui a créé et qui gou-
tivei' par ses mains, afin qu'elle produisit pour
verne tout, a établi dans nature des
lui les fruits de
soumission au lieu des épines
la
la lois ex-
cellentes et a soumis toutes les volontés aux règles
de la révolte? En
il ne voulut pas imiter
réalit'',

de la docilité du jardin qu'il cultivait, et, pour sa


Quelle conséquence y a-t-il donc
la justice.
à admettre que l'homme a été établi dans le pa- peine, reçut un sol ingrat comme lui : « Il te

radis pour se livi-er à la culture de la terre,


« donnera, dit l'Ecriture, dcsépincs et des char-
si

elle entraînait alors pour lui non un « dons. »


travail d'es-
mais les plus nobles jouissances de l'âme?
clave, 21. Si on adopte le second sens, d'après le-
Y a-t-il une occupation plus inocente, quand on quel Adam aurait Iravaillé et gardé le jardin, on
a du loisir, plus féconde en médilations sublimes, première expression par ses travaux
s'exi)lique la

quand on est éclairé ? d'agricidlure tels (pie nous les avons exposés ;

maiscommc^it expliquer la seconde? Il ne gardait


pas le jardin contre des voleurs ou des ennemis
qui n'étaient point encore apparus : peut-être le
LIVRF VIII. — LK PARAniS TERRESTRP:. 2io

fiarilnit-il contre les animaux; mais pourquoi et I)ien absolu et s'y li\i>r, sous peine di' ne pou-
(•oinrii('iil?l.('siiÉ''leslaisaienl-i'll('S(l(''i;'i;'iriioinni(' voir se lormer àla vei'tii etau bonhciu'. Par C()ri-
celle };ueir<' (|ni liil la coiisi'ciiience du in'clii'? sé(iiient Dieu cii-e l'homme, i)our lui donner le

Non sans lioule : les animaux a\aieul élé ame- fond de son élic, et tout enseml)lele façonne et

nés (icvaiil riiouuue qui leui" avait ilouiié des le garde pour le rendre bon cl heinvux; l'ex-
noms, couune nous allons bieutiM le voii', et le pression d'apivs la(|iiclle rhoiiime culti\e la
sixième join- une nomiitmecomnnnie leur avait terre, déjji créé, pour l'endjcllir et la féconder,
t^té assimilée pai* le commandement de la parole di'siune aussi le tia\;iil par letpiel Dieu forme
souveraine, n'ailleurs. les animaux eusseut-ils riioinine, dé-jà créé, à la pieté et à la sagesse;
inspiré quelque crainte, comment un seul il le garde, parce ([n'en jnéléranl son indi-pen-
honnne aurail-il été capable démettre le jardin dance à lii puissance supérieure de Dieu, et en
à de leurs ivivages? Le parc ne de>ait pas
l'al)ri mépiisiuit la soin eraineté du Créateur, l'hounne
être renlermé dans (réfroites limites, puisqu'il ?ie iieiil être en sûreté.
était ari'osé par une source aussi abondante, et

l'homme aurait apparennnentété ot)ligé de cons- CHAPITRE XL


li-uir(> autour diii)are, iWbrce de travail, une l'Iô-
l.'.VrTOUITI-. I)K DIKU RAPPELÉE .V I.'HOMME'.
tni'ecapable d'en lormem?nlrée ausjrpcnt mais :

il aurait tallu un prodige pour cliasser tous les


'2i. Ce n'est point par omission, à mon sens,
serpents avant que l'enceinte n'eût élé aclie\ée. mais pour donner mie grande leçon, que l'E-
•2-2. i'omvpioi ne pas conqirendre une vérité qui
criture ne dit jamais depuis le début de la (Jenèse
crève les yciix? L'homme l'ut établi dans le jardin jusqu'au verset où nous sommes arrivés le Sei-
atin de le travailler, en selivrant àcelt<> eidlure ijucur Dieu : le mot Seigneur est absent. Dès
qui excluait toute latipue, connue nous l'avons (pi'elie arrive à l'époque où l'homme est établi
dit, el qui était tout ensemble féconde en jouissan- dans ce Paradis et reçoit l'ordre de le cultiver
ces et en leçons sublimes pour un esprit éclairé :
comme de le garder, elle s'exprime ainsi : « Et
il lut chargé de le garder dilns son proiire inlérél, « le Seigneur Dieu prit l'honime qu'il avait fait
c'est-à-dire, en s'abstenant de toute faute qui « et le mit dans le jardin pour le cultiver et le
le condamnerait à en sortir. Bref, il reçoit un « garder. » La souveraineté de Dieu s'étendait
commaiulement qui devient pour lui un motif sans doute sur les créatures qui avaient |)récédé
de garder le Paradis, puisqu'il ne doit pas en
l'homme mais ces paroles ne s'adressaient ni
;

être chassé tant qu'il l'observera. On dit avec aux Anges ni à aucune antre créature que l'hom-
raison qu'un honnne ne sait pas garder son me elles avaient pour but de lui révéler tout
:

bien, quand il le perd par sa conduite, lors l'intérêt qu'il avait à avoh" Dieu pour Seigneur,
même que cette fortune passe à un autre qui a su età vivre docilement sous son empire, au lieu d'a-
l'acquérir, ou s'est rendu digne delà posséder.
buser lie sa propre puissance au gré île ses ca-
Ce texte permet une autre interprétation
•2',i.
prices. L'Ecriture attend donc pour employer'
qui vaut, je crois, la peine d'être exposée : c'est
cette expression l'instant où riioinine est placé
que l'homme même aurait été l'objel de l'activité
dans le Paradis pour s'\ développer et s'y con-
et de la surveillance de Dieu *. Si l'iiomme tra-
server souslamam de Dieu : alors elle ne dit
vaille la terre, non pour la créer, mais pour la
plus seulement Dieu, comme tout à l'heure, elle
rendre belle et feitile, Dieu, à plus forte raison,
ajoute mot Seifiueitr. « Le Seigneur Dieu prit
le
travaille l'àme humaine, à qui il a donné l'ê-
« rhoinme qu'il avait fait et le plaça dans le pa-
tre, pour la rendre juste
seulement l'hounne :

« radis afin de le façonner 1) il la justice, «et de le


ne doit pas renoncer à Dieu par orgueil, com-
« pour assurer sa sécurité en
garder, » exer-
mettre cette apostasie qui premier pas de est le
çant sur lui cet empire cpii n'est utile qu'à nous-
l'orgueil, selon ce mot de
« Le com- l'Ecriture :

mêmes. Dieu en elfet peut se passer de notre


« mencemeiit de l'orgueil est de s'éloiïner de
soumission; mais nous avons besoin de l'em-
« Dieu » liii'u étant le bien immuable, l'homme
'-.

pire qu'il exerce sur nous pour cultiver notre


qui dans son corps et dans son àuie n'a qu'une
àine et la garder : à ce titre il est seul Seigneur,
existence contingente, doit être tourné vers le
puisque notre dépendance, loin de lui valoir
' Le texte htfbreu no permet guère cette interprétation ; le pronom,
qui fait en latin et en grei- loute la difficulté, est au féminin et se rap- quelque avantage, ne sert qu'à nos intérêts et
porte par conséquent au mot paradis, qui en hébreu est féminin . (Note
de J'éditioa Migne )
— ^Eccli.x, 14. ' Gen. 11, 15.
i>4(i m LA GENÈSE AU SENS LITTÉKAE.
à notre salut. S'il avait besoin de nous, il ne se- l'homme et son absence le laisse plongé dans
rait plus véritablement Seigneur : il tiouverait les ténèbres : cet éloignement ne se mesure
en nousdes auxiliaires dans l'indigence dont il se- point par la distance; c'est ta volonté détachée
rait l'esclave. C'est donc avec justice que le Psal- de son principe.
misles' écrie :« J'ai dit au Seigneur: Vous êtes ^21. Uue l'Etre imnuiablement bon perfec-
u mon Dieu : car vous n'avez pas besoin des tionne donc l'hommeetle préserve. Nolrcdevoir
« biens que je possède '. » Toutefois en disant que à nous est d'elre façonnés sans cesse cl pL'rlec-
nous le servons dans notre propre intérêt et pour tionnes par lui en nous attachant à lui, eleu lui

notre salut, nous n'avons pas prétendu qu'il l'aille restant unis comme à notre lin : « Mou bonheui'
attendi'e de lui une autre récompense que lui- « est de ju'aliachei' au Seigneur; c'est en vous,
même : il constitue tout seul notre intérêt le « Seigneur, que je garderai ma force '. » Nous
plus élevé et notre salut. C'est ce sentiment qui sommes son ouvrage, en tant qu'il nous a domié
nous l'ait l'aimer d'un amour désintéressé : l'éti'eetque déplus il nous donne la vertu. C'est
i< m'altacber au Seigneur, voilà mon bien ''-.
» la véi'ilêque proclamait l'Apjtre, quand il faisait
sentir aux tidèles arrachés à l'impiété la grAce
CilAPlTIiEXII. qui nous sauve « CasI la grâce qui vous a :

« sauvés par la loi, difTi; cela ne ^ient pas de


1>K l.'lMPlISSANCE UE l'HOMME A FAUiE LE BIEN SANS a vous c'est un pur don de Dieu, et non le fruit de
;

LE SECOUltS IIE PIEU. « vos œuvres, de sorte que l'homme ne peut s'en

« l'apporter la gloire. Nous sommes son œuvre


:25. L'homme en ellel n'est point un être qui,
;

« c'est lui qui nous a créés enJésus-CUrisI pour


une l'ois créé, puisse accomplir le bien par lui-
« opérer les bonnes œuvres dans lesquelles il
même sans l'intervention de son Créateur. La
« avait réglé d'avance que nous devions mai-
bonté de ses actes consiste h s'attacher au Créa-
« cher 2. » Ailleurs a[)rès avoir i-ecoimnandé
teur, et par lui à devenir juste, pieiLx, sage et
d opérer son salut » avec crainte et treuihlc-
heureux. On ne dans ce tra- doit pas s'arrètei'
« meid, » il ajoute ijnmédiatement, aliu ((u'on
vail, ni quitter Dieu, comme on prend congé
ne s'alliibue pas la gloire de s'être rendu soi-
d'un médecin après avoir été guéri; le médecin
jnême juste et bon « C'est Dieu qui opère en :

n'opère qu'au dehors et seconde la nature dont


« vous Ainsi donc « Dieu plaça 1 honnne
•'. )'

Dieu l'ait mouvoir intérieurement les ressorts,


« dans le Paradis pour opérer en lui et pour le
parce que Dieu, comme nous l'avons vu, con-
« garder. »
.serve les êtres pai- la double impulsion que sa

providence communique à la nature et aux vo- CHAPITRE Xltl.


lontés. L'homme doit donc s'attacher à son
Siegneur comme à sa (in, non pour le quitter POlKyrol LAllBliË DE LA SCIENCE UL BIEN ET 1)1

lorsqu'il sera devenu juste par ses bienfaits, mais MAL A-T-n. ÉTÉ INTERDIT A l'hOMME?
pour être sans cesse formé à la justice. Par cela
^(S. « Et le Seigneur Dieu lit un comiuande-
seul qu'il ne s'éloigne pas de Dieu, il trouve
dans cette conununication justice, lumières,
« ment à Adam, lui disant Tu mangeras libre- :

bonheur; il se perfectionne, il est en sûreté


ce ment de tout arbre du jardin. Quant à l'arlin'
« de la science du bien et du mal, vous n'en mau-
pendant qu'il obéit et que Dieu commande.
« gérez pas car du jour que vous en maiige-
26. Nous l'avons dit, quand l'homme qui culti-
:

« gez vous mourrez de morî^. » Si l'arbre (pie


ve la terre en vue de l'enibellir et de la fécon-
Dieu interdit à
il l'homme avait été nuisible,
der, la laisse à elle-même après les travaux du
aurait nalurellemeut contenu un poison mortel.
labour, des semailles, de l'irrigation, son œuvre
n'en est pas de
Mais tous les arjjres que Dieu avait [tlaMlés dans
n'en subsiste pas moins; mais il

le Paradis étaient excellents >, comme tontes ses


même de Dieu : l'ieuvre de justilication (|u"il
(envies; d'ailleurs le Paradis ne renrermait au-
accomplit dans l'homme ne subsiste plus dès (|ue
celui-ci l'abandonne. De même
que l'air i-eçoil cun èlve naturellenient mauvais, le mal n'existant
de lumière un depermaneni,
éclal (jni n'a rien
nulle part en soi, comme nous le démontrerons
la
rigoiu-ensement, s'il plait à Dieu, quand nous
puisqu'il ne brille plus dans l'absence de la
serons arrivés au serpent tentateur. L'homme
lumière; de même la piésence «le Dieu éclaiie
'
IN. I.V111, 10, '- = Eph. Il, 8-111. — 'Philili. II. 12, 13. — (Jrn.
'

'
Pk. XV, 'i. — '
Ibid. LXXIl, 2K. |], lH-17. — !•
Ibid. I, 12.
LIVHK Vin. — LE PAK DIS TEKKESTRE. Wi

ri-roil donc (léloiiso tli' loiiclii'r à un arhro (|iii

on soi, alin (jnc le liu-u CIlAI'liKK .\IN.


nrlail pi)iiil nuisihle
consistai pour lui ;i observer ce précepte, le
lie >UI. ; l.'llOMMK KN A lAIT I.'kXI'KHIK.XCK KN VIO-
lual, l'eulreindie.

I.X.M l.i: l'ItKCKPTK bE DlEl.
'!'.>. l.<Mnalall;u'hé;i la seule (iésol)éissanee ne
ponvailèlre uiieuvniisen lelielni [tluslorlenienl ;tl. La volonté ne peid manipier de retoudter

accusé, (pi'en laisant peser sur l'Iionniie tontes connue une inine elconnne mi i>oids immense sur
les c(Uiséciueui<'S(le l'iniiiuité, s'il louchait nial- l'hounue, si celui-ci l'élève et la met an-dessus de
\ré la delense de Dieu, à un arlue auquel il
lavolonté souNcraine. C'est l'épreuve (pie lit Adam
aurait pu loucher iniiocenuncnt sans celte dé- en violant le coinmaiideinent divin : il apprit
fense. Je suppose (pi'on interdise à ([uelqu'un à ses'dépens la différence qui existe entre le bien el
de loucher à nue plante [laree qu'elle est ^ené- le mal, entre les avaidages de rohéissance
el les

neuseet donne la mort; le mépris de cette re-


résultats funestes de la d(''sobéissance, c'est-à-

commandation enirainerait la mort, sans aucun dire, de l'iugneil, de la révolte, de folie à vou- 1;>.

doute; mais si on \ a\ait touché sans avoir été loir mal imiter Dieu, de la liberté eoupalile. L'ar-
prévenu, il n'en aurait^k moins lallu mourir. bre sur lecpiel devait se faire cette épreuve, lira
Uu'il \ eût dél'ense ou i^^, le poison n'en serait son nom, comme nous l'avons remarqué »,

pas moins t'alalà la saule et à la vie. De même en- de cette épreuve même. Nous ne saurions en
core, si on inlmlisail de toucher à une chose, effet connaître le mal que par expérience, puis-

parce (pie celt prescription serait dans l'intérêt (}u'il n'existerait pas si nous ne lavions
jamais
de celui qui la lait et non de celui qui la viole, fait :car le mal n'existe point par Ini-mème; ou
et qu'on mit la main, par e.vemple, sur l'artienl nouniie ainsi la privation du bien. Dieu est le

d'autrui après en avoir reçu la défense du pos- bien immuable riiomme considéré dans les fa-
;

sesseur même; la faute consisterait à porter pré- cultés qu'il a reiaies de Dieu, est bon aussi, mais
judice à l'aideur du commandement. .Mais il non d'une bonté absolue. Or, le bien contingent
s'agil d'un ohjel qu'on aurait pu toucher sans qui dépend du bien absolu, devient plus parfait
se nuire, s'il n'avait pas été interdit, et sans en s'v attachant avec l'amour et la docilité d'un
l'aire tort à qui (pie ce soit dans aucun temps, are intelligent et libre. La faculté même de s'at-

t'ourquoi donc Inl-il interdit, sinon pour mon- tacher à l'Etre souverainement bon prouve dans
trer le bien attaché à la pure obéissance, le mal un être l'excellence de sa nature. Refuse-t-il? il
attaché à la simple désobéissance? renonce lui-même au bien de là ; le mal pour
Ml Le crhninel n'aspirait ici qu'« se soustraire lui, de là le juste châtiment qui en est la consé-
'
à l'autorité de Dieu, puisqu'il aurait dû pour quence. Le comble de l'injustice ne serait-il pas
éviter la faute considéier uniquement l'ordre du de voir bien-être uni à la désertion même du
le
souverain. A quoi se rétluisait cette soumission, bien? Cette anomalie est impossible mais il :

sinon à respecter attentivement la volonté de peut se faire qu'on soit insensible à la perte du
Dieu, à l'aimer, à la mettre au-dessus de la volonté souverain bien, parce qu'on possède le bien se-
humaine? Le umlit qui avait i;uidé le Seigneur condaire dont on s'est épris. La justice divine
ne regardait (pie lui; le serviteur n'avait qu'à y met ordre quiconque a perdu librement ce
:

exécuter son ordre, quitte à en peser les motifs qu'il aurait dû aimer, doit perdre douloureuse-
(piand il Sans nous arrêter trop
le mériterait. ment l'objet préféré ; c'est faire éclater ainsi l'har-
longtemps;! examiner la raison de ce précepte, monie universelle de la création. En etïet l'ê-

on. voit bien que l'inlérèt de l'homme est de servir réglette la perte d'un bien, est encore
tre qui
Dieu, et (jue, par conséquent, ses ordres quels bon : s'il n'axait pas conservé quelque trace de
(piils soient sont un hieidait p(3ur nous, car bonté, souvenir cruel du bien qu'il a perdu
le
nous n'avons point à craindre de recevoir d'un n'entrerait pas dans son châtiment.
tel maître un conmiandement inutile. 8:2. L'homme qui aunerait le bien avant d'avoir

. fait l'épreuve du mal, en d'autres


termes, qui
se déterminerait à ne s'en détacher jamais, sans
avoir même senti le regi'et de sa perte, serait
au-dessus de la nature humaine. Ce privilège

Ci-deutts, ch. Tt.


248 DE LA. GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

doit ètro extraordinaire, puisqu'il n'appartient de connaissance du bien


la et du mal eussent- :

qu'à l'enfant qui, sorti de la raee d'Israël, a reru ils été obéissants, le terme aurait été exact par
le nom d'Emmanuel, ou de Dieu avec nous i, et cela seul qu'il désignait le malheur qui leur ar-
nous a réconciliés avec Dieu; en d'autres termes riverait, s'ils \enaient à faire usage de cet arbre,
au Médiateur, entre Dieu et riiomme à celui '',
supjiose qu'il eût été appelé l'arbre
.le
du rassa-
qui est le Verbe dans le sein de Dieu et l'homme siement parce qu'il aurait eu la propriété de ras-
au milieu de nous celui qui s'est interpose entre
•'*,
sasier, le mot aurail-il cessé d'élrejusle parceque
nous et Dieu. C'est de lui que le propliéle a dit l'homme n'y aurait jamais
;
louché ? Il aurait
« Avant que cet enfant sache le bien et le mal, suffi (|u'il y vint se rassasier pour prouver
« il rejettera le mal pour choisir le bien >. » la justesse de l'expression.
Jlais comment ou
rejeter choisir ce qu'on ne
sait pas encore, s'il n'y avait une double voie CHAPITRE XVI.
pour connaître, le bien et le mal, la raison et
l'expérience? L'idée du bien sert à faire connaî- l'homme a pu avoir l'idée du mal avant de le
tre le mal, quand même on n'en ferait pas l'ex- gonn.vltree.x réalité.
périence; récipi'oquement l'idée qu'on acquiert
du mal par la pratique donne celle du bien
34. 3Iais,ajoute-t-oii^^iiment pouvait-il con-
on :

connaît en effet l'étendue de sa perle, quand on


cevoir le nom attaché à cet arbre, puisqu'il était

en subit conséquences. Ainsi, avant


les tristes
dans une ignorance absolue du mal ? Ces habi-
les gens ne songent guère qu'in^oule de choses
de savoir par expérience le bien qu'il pourrait
sacrifier, ou le mal que lui ferait sentir la perte
inconnues se conçoivent par leurs contraires, et
du bien, l'Enfant dédaigna le mal pour cela si nettement, qu'on peut placer dans la con-
choisir
lebien il ne voulut pas sacrifier son avantage,
:
versation des termes qui ne correspondeni à
de peur d'être éclairé sur sa valeur en le perdant. aucune réalité, sans être obscur pour l'auditeur.
C'est là un exemple unique d'obéissance Le néant ne représente aucune réalité, et il
: aussi
n'est personne qui ne comprenne le
cet Enfant, loin île faire sa volonté est « venu faire
volontéde Celui quil'envoyait ché à ces deux syllabes. Pourqii
« la "'; >'
tandis que
l'idée d'être permet de concevoir
l'homme a mieux aimé suivre sa volonté que les 1 >

ordres de son Créateur. « Ue même donc que par


même de l'être. Le vide se concoi!
la désobéissance d'un seul tous ont été parle plein, son contraire. L'oreillees.
" faits pé-
« cheurs, de même par l'obéissance d'un seul seulement des sons, mais du silen
« tous devieiment justes '\ » El « si tous meurent
vie dont il jouissait, l'homme pouvai-

« enAdam, tous seront vivilîés en Jésus-Christ ". '>


contraire, c'est-à-dire l'absence de i

mort : il pouvait donc concevoir la ernse qn


CHAPITRE XV. lui ferait perdre le bienfait si doux l'e ^•
teiice, en d'autres termes, l'acte qui ani 'i'

POURQUOI l'arbre DE LX SCIEXCE DU BIEX ET DU conséquence de lui ravir la vie, le nin', I

M.\L A-T-U. ÉTÉ APPELÉ AINSI ? quelque IVit le mol qui traduisît son ittét .(
^^ :.

mêmes, comment avons-nous une idée tl«- I

33. C'est doncen vain quecertaines personnes,


surreclion, sans enaxoir fait l'expérience . . .uci
qui deviennent inintelligentes à force d'esprit, se
de la ne ne nous fait-elle pas concevoir la privation
demandent conimenl l'arbre de la science du
de la que nous appelonsmortîet ne voyons-
vie
bienetdumalapu être nommé ainsi, avant que
nous pas dans la résurrection un retour à
l'homme n'eût violé en j touchant les ordres Dieu,
à l'exislence même dont nous avons la consci-
etappris ainsi par expérience à discerner le bien
ence ? Quel que soit le terme dont on se serve
perdu du mal (|u'il a\ ail gagné. Celle ex-
qu'il avait
pour dé.-;i iuer dans une langue la résurrection,
pression signifiait que l'homme, en n'ytouchant
la piu-ole fait alors péuélrer dans l'esprit le si-
pas selon la défense divine, éviterait la consé-
gne de la pensée, et le son aide <à concevoir l'i-
quence dont il serait \ iciime, s'il y louchait au
dée <|u'on aurait eue indépendamment du signe
mépris de ces commandements. Ce n'est pas
lui-même. La n.dure met du reste à éviter la
pour avoir mangé des fruits de l'arbre défendu
perte de ses avantages, avant d'en avoir été dc-
que nos premiers parents le virent appelé l'arbre
pcuillée, une vigilance (pii tient du prodige.

' Matt. 1,23. — 'iTim. — =Jean, |-11. —
II 5. i, < Isaïe. vir, 16.
— ' Jean, vi 38. — Rom. v, 19. — "I Cor, XT, 22.
6 Ouel maître a donné aux animaux l'instincl
I.IVKK VIII. — LK l'ARAPlS TKRRESTIUv 249

d'oxilcr 1,1 iiiori, si ce n'osl riiisliiict interne do premier coiiiile liiimain : « C:ir du jour que
la \it' .'
Uni .ippii'iiil à lin prlil ciilaiil li' sccicl •'
NOUS eu maii:;rre/, miiis iiKtui're/, de iimil .
»

• le s'alliifluM' à ('«'liii i|iii le iioili", si ci'liii-ci lail l'.tait-ee en pré\()\aul (lu'il allait l)ieiitrit dmmer
s("inl)laiil(li' \oiiloii- Icpnriitifi'r d'iiii lien cIcm'.' une compagne à Adam que Dieu l'ornuilail son
Cos idi't's naissonl an l)oiil d'un (l'itaiii Iciiips, eommaudemi'ut avec tanlde |>récision, aliii (pie
mais l'Ili's dcNanccid loiilo t'Np( liciico aiiolomii'. l'hoiuiiie transmit à sa femme les ordres du

;)5. premières créalures iimnaines


Ainsi les Seigneur y L'.Vpùtre a conservé cet usage dans
aiinaieiilla vie et craifîuaientde la perdre (piand ;
ri'"glise, ipiand il a dit : " Si les fenunes veii-

l>ie(i Icsineiiurait de leur ùler l'exisleuee, eu « lent s'instruire de (jnelipie chose, (pi'elles in-

eiiiplii\aul le langage ou tout autre moyen de « lerrogent leurs maris à la uriison '. »

couuiuiuieatioii, elles le comprenaient : l'uni-

(|ue moyeu île leur faire concevoir le péché CHAPITRE Wlll.


élailde les coinaiucre qu'il les coiidauiuerail à
COMMIC.NT MKV A-T-ll, l'AKI.K A 1,'llOMME.
mourir, en d'autres termes à perdre le hieul'aitsi

doux de la\ie. Qu'on examine, si celte ques- 'M. On pont encore se demander ipiel moyen
tion peut iiiléresser, ^^Hcnl ils oui reiii,
Dieu enii)loya pour parler à l'homme; à ce mo-
en dehors de l'expériein^PR idéesque Dieu leur ment, en effet, il était formé avec son intelligence
conunuuiipiail,les menaces qu'il leur adressait: et ses sens, capahle d'entendre et de saisir
il était
on reconnaîtra oue nous coiicevoiis sans elTort la parole du Cré.iteur. D'ailleurs une loi dont la

et sans l'omlj^^Bn doute les idées qui nous violation devait être un crime, ne pouvait lui
sont le phis^^-aufières par les idées contraires, imposée sans qu'il ne l'eût entendue et
être
si eu luai'quent la prixatiou, par les idées
elles comprise. Mais comment Dieu lui parla-t-il? Ne
an;:i'^pvs, si elles eu désijiiieul l'ordre. Ou ne s'adressa-t-il qu'à son iulelligcucc, en d'aulreLi
sVmlW •ra])as,j'im;igiue, danslaquestiondc
termes ne fit-il qu'éclairer sa raison et lui ré-,
pouvaient parlei'ou entendre ; vêler la imposait sans euqdoyer ni
loi (pi'il lui
.itiaiuais apprisfusagedesuiols
son ni image /Mais je ne pense pas que Dieu ait
dans la, .oi len nu à l'école : apparemment (pi'il
ainsi i)arlé au premier homme. Le récit de l'É-
[j^
11' pas iii'icileà Dieu de leur enseigner le
eriliire laisse plutôt croire ipi'il s'adressa à Adam
l:*"ir.»'-'e. :[\ni> leur avoir donné la l'acuité de
connue il le lit plus tard aux p.itriarclies, à Abra-
le la l)ouche d'un autre homme, ham, à Moïse, c'est-à-dire, apparaissant sous
qu'il eût existé.
.

quelque foime corporelle car nos |ireuiiers :

parents entendirent sa voix pendant qu'il se


CHAPITRE Wll. coururent se ca-
promenait dans le jardin et

cher r
1

SE FIT-ELLE F.VITE A ADAM ET A EVE EN
MÊME TEMPS ? CHAPITRE \ IX.

DE l'activité DIVINE DANS LA CIIÉATIJRE, ET


•".On se demande avec raison si la dél'ense fut
lissée à l'honnne et à la femme, ou ;\ d'aBOUD de DIEr MÊME.
.'iiome seulement. A cet endroit de l'Ecriture,
vaste et bien
3S. Ici se présente une question
l.É )rmalionde la feuinio n'est point encore dé-
digne de nous arrêter : il s'agit d'examiner dans
I
te Aurait-elle été déjà créée à cette époque?
la mesure de nos forces, on de la grâce et du
Écriture reprend plus tard son récit pour ex-
secours de Dieu, l'activité divine dans double la
.oser en délail l'ieuvre qu'elle n'axait fait, d'a-
sphère où elle s'exerce c'est un sujet que nous ;
i)ord (pie mentionner. iUi reste voici les paroles
avons déjà eflleuré eu passant, à propos de la
de l'Ecriture : « l.e Seigneur Dieu commanda à
ciillure du Paradis terrestre, afin que t'intelli-
« Aihnn » il ; n'est pas queslion de deux. Elle
geiice du lecteur s'accontiunàt à une théorie si
ajoute : « Tu mangeras de tous les arlires ipii
capable d'élever l'e.^prit au-dessus de toutes les
« sont dans le jardin ; » il ne s'agit encore que
pensées basses qu'on pourrait se former sm-
d'un seul. Viennentensuite ces paroles : « Quant
l'essence même de Dieu. Pour nous le Dieu sou-
" à l'arbre de la scieucedu l)ien et du mal, vous
verain, véritable, unique, est le Père et le Fils
« n'en mangerez pas. » Ici on emploie le pluriel ;

la fin du précepte s'adresse également au '


1 for. XIV, 3à — ' Gfii- ", 8.
-iod DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉHAL.

a\ec le Saint-Esprit, en d'autres termes, Dieu, voir que dans letemps, t'emporte sur celle qui
son Verbe et l'Esprit qui leur sert de lien : c'est se meut à la fois dans le temps et dans l'esijacc, il
la Trinité à la fois dislinele et indivisible; c'est faid uéces.^ai renient qu'elle soit iiilêrieure à celle
le Dieu qui seul possède l'élcrnilé et liaijile une qui ne varie ni avec le temps ni avec l'espace.
lumière inaccessible, le Dieu qu'aucun homme Par conséquent, de même que le mouveineni
n'a vu et ne peut voir ', qui n'est reulermé dans du corpsdans l'espace et le temps a poui- principe
aucun espace fini ou sans b;)rnes, qui ne change l'esprit créé, (jui ne sj meut que dans le temps, de
Jamais avec les révolutions limitées ou indélinies même l'esprit créé doit son inouveinenl dans le
du temps. Car, il est impossible à la substance temps à l'Esprit créateur, dont l'acliNité est indé-
divine d'èh'e moindre dans la partie que dans pendante de l'étendue et de la durée. Ainsi,
le tout, comme doit l'être tout ce qui se meut l'esprit créé se meut lui-même dans le temps,
ilans l'espace autom- d'un point
fixe, la main, et meut le corps sous
le double rapport du temps
par exemple, dont dépendent d'une
les parties et de l'espace
tandisque l'Esprit créateur, agis-
:

articulation principale; il est également impos- sant en dehors du temps et de l'espace, fait
sible que cette substance ait souffert quelque mouvoir l'esprit créi' d,ms le temps en dehors
diminulion ou reçoive quelque modification de l'espace, et le ci^^^^laus le temps et dans
nouvelle, comme les êtres soumis aux change- l'espace tout euseml^^P
jnents du temps.
CHAPITRE XXI.
CHAPITRE X\.
COMMENT DIEU EST-lL A L^^^PJ^MUAHLE ET
tK COUPS SE MEUT D.VNS LE TE.\IPS ET l'eSP.\CE, paixciPE DU mouvemeUI
l'aME ne se meut QLE D.i>S LE TEMPS DIEU EST :

EN DEHORS DE CETTE DOUBLE MODIFICATION. iO. Veut-on essayer de saisir par qi^fcecret
Dieu, l'être éternel, impéris.sable et im^mable,
du sein de cette existence éternelle-
;W. C'est quoiijue inaccessible à toute mobilité dans l'es-
ment immuable que Dieu à créé simuilanémeut pace et le temps, meut sa créalure dans l'étendue
les êtres destinés à marquer le cours du temps et ladnrée?Pour atteindre à cette vérité, il faut,
et à remplir l'espace et c'est grâce aux mouve-
; selon moi, comprendre d'abord cominenti'àmd^
ments des êtres dans l'espace et le temps que ou l'esprit créé, n'est muable que dans le lem|)s
leurs générations se succèdent. Dieu a fait les et néanmoins communicjue an corps le mouve
esprits et les corpsen imprimant aux substan- ment dans le teuips et l'espace. Si ou est incapalile
ces créées par sa puissance a.^solue, sans le cou- de concevoir ce cpii se passe en soi-même, pom--
cours d'aunm être, les modilicalions dont elles rail-ou déeouvi'ir ce qui s'accomplii dans un être
étaient susceptibles, de façon toutefois que le plus parfait ?

fond formes non en date, mais en


précéda les Il l/.une, dans l'illusion où lajeltenl les opé-
principe. Il a donné aux esprits la supéiiorilé rations babiluelli's des sens, se ligure qu'elle se
siu' les corps, en ce sens que les esprils ne se meul dans l'espace avec le corps, tandis qu'elle
modifient (|u'avec le temps, tandisque la malière n'ymeul que. le corps. Qu'elle examine attenti-
change selon le temps et les lieux. L'àme par veinenl ces jointures où les membres vieuneni
exemple se meut avec le temps, quand elle se s'emboilcr et s'appuient comme sur des pivots
rappelle ce qui lui était échappé, quand elle ap- pour y commencer leurs uio;ivements; elle dé-
prend ce qu'elle ignorail ou qu'elle veulce qu'elle couviira que, pour se mouvoir, les membres
ne voulait pas les corps se meuvent dans l'espace,
: ont besoin de trouver dans d'autres membres un
(juand ils sont trausporlés des airs sur la terre, de point (i.xc. Le mouvement d'un doigt exige que
la terre dans les airs, de l'Orient à l'Occidenl, la main luiserve de point d'appui; celle-ci se
ou subissent des mouvements analogues. Oi', raltacheàravanl-bras, qui s'articule avec le bras,
toul ce (jui se nuMd dans resi)ace, se meut aussi livé lui-même à l'épaule; ce sont-là ciminie
dans le tem|)s par une consé(|uence inévitable : autant de pivots immobiles sur lesquels lourneni
mais il ne s'ensuit pas que tout ce qui se meut les membres mis eu mouvement. De même le

dans le temps se miuive aussi dans l'espace. Si pijil est assujéti au talon, sur lequel il opère
dtinc la substance (|ui a le privilège de se mou- son mouvement; la jambe s'articule avec le ge-

uitu. et la marche tout entière vient aboutir aux


'
1 Tim. M, li;.
I.IVIIE VIII. — LK PARADIS TKHUESTRK. -2f54

hiincliL's. \\iv{\ aucun inoinhiv n'oiitre cii imm- l'nellie que son adivité est en deliois du temps
\(>[iii'iil sous riiiiptilsioii (le la \()liiiil('', sans et de l'espace, ou'n'a pas encore une idée juste
liomiT un pivot d.nis son point d'altaclic : c'est de son innnutabilile.
l'c point ipic la voliinti' coinnicnci' par li\cr, et
le nunnenienl part ainsi coninio (rinicenti'c ini- CHAPITRE Wllt.
niohile. Enlin, clans la niarclie, un |)ie(l ne se
yi !•: i)n;i FArr tout sans soktui de son hei'os.
lève (piaulant ([uc l'antre est ti\é pour snpi>iirler
le p^nds lin coi-|)s, et le passa;;e s'opère d'un ii. LaTrinitéélantessenlicllenientinnnuableet
point à un autie, tandis que le pied en iuduvc- |)ar la même éternelle sans qu'il pmssi- rien
inent trouve un support dans le pied eu repos.
exister (pii lui soit coéternel, demeure en elle-
Or, si la\ot iide pour uiouvoirun meiul)re
i'2.
m 'uie en dehors de tous les lieux c'est elle, :

doit l'appuNcr sur l'arliculalioa iniiiiobilc d'un cependant qui conummicpie dans la sphère de
autie ineniDre, (pioiipie l'organe mis eu uiou- l'étendue el de la dm'ée le mouvement à toutes
venienl, ctunue l'()r,:iaue lixeipului sert de |)ivol,
les créatures qui lui restent soumises; elle leur
accusent une étendue proportionaée à leur vo- donne l'être par sa bonté par sa puissance
;
elle
Imue; ne t'aul-il pas à |)lns l'orte raison que lu.'l toutes les volontés à leur place. Ainsi tout
l'ànie, qui couiuiaude aux uieuihres cl doiuie être dépend de la Triuile; loide volonté, quand
aux uns le signal de rester ininubiles pour servir elle prali(iue le bien, est dirigée par elle; el
de poial d'ai)pui aux atdres; que la lorce inuna- (piaud elle mal, lomlte
fail le soils les lois de sa
uiati'riedu', q n loin de remplir lu masse du
jusiice. Mais coniin.' tons les êtres n'ont pas reçu
corps comme l'eau rempld luie oidre ou une 1(! privilège du libre arbitre, principe de supé-
éponge, rt'pand son activité toute spirituelle, par de puissance,
riorité el les êtres qui ne jouissent
nue sorte de prodige, iLius les organes qu'elle pas tle la liberté Si)ul nécessairement soumis à
vivilie cl doiil elle se fait i>l)éir par nu signal ceux qui sont libres, et cela, par le sage dessein
(jui tend leuis ressorts sans peser sur eux; ne du Créateur qui, en châtiant la volonté coupable
l'aul-il pas, dis-je, que l'àme ail une activité en ne lui enlève jamais sa dignité primitive. La
dehors de l'espai'e pour v mouvoir le corps, matière, l'animal sans raison n'ayant pas le don
puiscpi'elle remue le tout à l'aide des parties, et de la libei'té, sont soumis aux êtres qui l'ont
qu'elle ne met les oi'ganes en jeu qu'à l'aide reçu; mais celle subordination loin d'être con-
d'autres organes immobiles?
fuse est réglée par la justice souveraine. Ainsi
la Providence divine gouverne et dirige la créa-
CHAPITRE XXII.
tion entière, les êtres, afin qu'ils existent, les vo-

IMKl EST StRE.ME.XT ET ABSOLU.» EST IMMUABLE. lontés, afin qu'elles ne soient pas vertueuses sans
récompense, ni coupables sans punition. Dans la
i'.i. Si celle vérité semble dirticile à concevoir, hiérarchie qu'il a établi, il a subordonné l'univers
il laudra s'attacher par la loi à ce double prin- à ses lois, puis la matière à l'esprit, la brute à
cipe, que l'àme sans se mouvoir dans l'espace \ l'être raisonnable, la terre au ciel, la femme à
meut le coi-ps, et que Dieu Sans se mouvoir dans l'honune, la faiblesseà la force, la misère à l'a-
le temps V meul l'àm.*. Peut-être ne voudra-l-on b()ndauc(>. Quant aux \olonlé.s, il les a soumises
pas adaieltre pour l'àme humaine une véi'ité que à lui-même, quand elles sont bonnes, à leurs pro
l'on n'aurait aucune peine à croire et même à près esclaves, quand elles sont mauvaises : par
comprenilre, si on était capable de la concevoir conséquent, la volonté coiq)able est condamnée
comme elle est e.-senliellemenl, je veux dire spi- à subir le joug contre lequel l'àme juste a lutté
rituelle u"esl-il pas évident, eu eiïel, que pour
:
pour obéir à Dieu, je veux dire celte domination
se mouvoir dans l'espace, il faut s'étendre sur des corps ()ui sontnalurellemenl inférieurs au.x
divers points de l'espace ? Or, tout ce (jui occupe volontés même coupables. Ce châtiment est ex-
divers points de l'espace, est corps; l'àme ne peut térieur; mais au dedans les volontés criminelles
donc se mouvoir sur une cerlaine élenilue, en subisseid un autre, je veux dire le ravage
puisiiu'elle est n'est point cor()orelle. Cependant, de leurs iniqnib's mêmes.
^i ((uelques esprits ne veulent pas reconiiaitre à
l'iuiic celle faculté, je ne veux pas les [tresser
trop vivement : (piant à Dieu, si on refuse d'ad-
2o2 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

Anïcs, reçoivent un secours intérieur et tout


CHAPITRE XXIV.
spirituel pour posséder rexistcncc et la sagesse.

DES CRÉATITIES SOLMISES AIX AXGES. Dieu se communique à eux par un langage
mystérieux et inelTable il n'emploie pas pour eux
:

Par suite, les Esprits sublimes qui possè-


io. une écriture fixée par des moyens matériels, des
dent Dieu humblement et qui le servent au sein sons qui frappent l'oreille, des images pareilles
de la lélicitc. dominent sur In nature physique, sur aux fantômes que l'esprit se représente dans un
les animaux sans raison, sur los\olontés faibles songe ou même dans cet étal où l'esprit semble
ou corrompues : ils font régner dans le monde sortir de lui-jnème et que les Grecs ont nommé
des corps, ils accomplissent chez les êtres libres extase, ô/.-^TJCJti; : les idées de cette sorte se produi-
et avec leur concours, les lois qui président à sent sans doute plus intérieurement que celles qui
l'ordre universel, sous l'empire de l'Etre de tjui nous arrivent par le canal des sens ; mais com-
tout relève. Ils découvrent en lui l'immuable me elles leurressemblentsi parfaitemeiit qu'on ne
vérité et règlent leurs volontés sur ce principe : peut les distinguer entre elles qu'à grand-peine
à ce titre ils participent à l'éternité, à la vérité, et fort rarement, et que d ailleurs elles sont plus
à la volonté immuable, indépendante des lieux matéiielles que l'intention pure de l'immuable
et des temps. Ils exécutent dans le temps ses vérité , dont la lumière éclaire l'intelligence
ordres éternels. Je ne veux pas dire qu'ils ces- seule et lui sert à connaiire toutes choses, on
sent ou se lassent jamais de le contempler: ils le doit à mon avis ranger toutes ces visions parmi
contemplent dans son immensité et son éter- les perfections extérieures. Ainsi donc les créa-
nité; mais, quand ils remplisseilT*ses ordres au- tures spirituelles et raisonnaliles, à ce degré de
près des èlres d'une dignité intérieure, ils agis- de béatitude qui est le privilège des
perfi-ction et
sent dans le temps, ils ébranlent la matière dans Anges, reçoivent un secours tout intérieur, pour
les limites de temps et d'espace qu'exige l'acte conserver leui' être, leiu' sagesse, leur iionhem-,
à accomplir. C'est un des aspects de la double et le trouvent dans la vérité et l'amour éternels
activité que Dieu exerce souverainement sur la du Créateur. Si elles reçoivent une impulsion du
création il donne l'existence aux êtres, il règle
: dehors, ce ne peut être que de la communaiilé
les volontés, afin qu'elles n'accomplisent rien d'intuition et d'allégresse n) Dieu, du concert
sans son ordre ou sa permission. d'action de grâces de louanges que la vision de
tous les êtres en Dieu pro\oque parmi elles.
CHAPITRE XXV. Quant aux actes qu'accomplissent les Anges pour
DES LOIS GÉNÉRALES ET PARTICILIÈRES SELON LES- veiller, selon les ordres de la Providence, sur
QUELLES DIEU GOUVERNE TOUT. les êtres de toute espèce et en particulier sur le

genre humain, ils consliluent un secours exté-


46. L'univers physique ne reçoit donc aucune
rieur qui se communique au moyen de visions
impulsion matérielle en dehors de lui-même :

analogues aux formes que l'imagination se re-


car il n'y a pas de corps en dehors de lui, autre-
présente ou des corps mêmes qui sont soumis à
ment ce ne serait pas l'univers au dedans, il
;
la puissance des Anges.
obéit à une impulsion veux dire à
spirituelle, je
l'action par laquelle Dieu donne l'existence,
CHAPITRE XXVL
selon celte parole ; « C'est delui, en lui et par lui
« que tout Quant aux êtres particuliers
existe •. » DIEU GOUVERNE TOUT S.\NS CESSER D'ÊTRE
qui composent ils sont au dedans
l'univers, IMMUABLE.
l'objet d'une action spirituelle, ou plutôt acquiè-
rent par là l'existence et tout ensemble trou- 18. Dieu donc a une puissance souveraine et
vent au dehors les moyens matéiiels d'améliorer sans limites ; éternité, vérilé, volonté, rien ne
leur condition dans les ;iJiments, l'agriculture, la change en lui; au-dessus de tous les mouvements
médecine, bref dans les ressources qui assurent qui s'accomplissent dans la durée et l'étendue,
la conservation et la fécondité des espèces non il l'ait mouvoir les esprits dans le temps, les corps
moins que leur beauté. dans le temjjset l'espace tout ensemble : après
47. Les créatures spirituelles, quand elles sont avoir créé chaque être en soi-même, il le gou-
parfaites et bienheureuses, comme les Saints verne an moyen de forces extérieures, en d'autres
'
Rom. XI, 56. termes, au moyen des volontés subalternes qu'il
LIVIU'. VIII. — LI-: l'AHAniS TKHKKSTrtE -ir>A

fail ;ij;ir liiiiis le temps, cl des idips (|iii tlipoii- parlei' lauli'il un esprit, connue dans les songes,
ilciil ;'i la l'ois tic liii-riirtiic cl (1rs Miloiitcs el à les extases où la \(''rité apparaît sous une l'orme
(|iii il coiiiimmiiiiic le iiioii\emeiil dans resjiace sensible ; lanti'il im corps, connue il arrive lors-
el le leiiips, iloiihie coiidilioii de i'c\isleiiec (pi'im être se montre aux veux ou (pie des sons
Unie (lonl le principe Ici ipTIl esl en Diencons- happent l'oreille.

lilne la vieen di'liDrs de Ions les lenipsel de tons donc .Vdam était assez parfait pour
.')(). Si

les licn\:\(iilà les modes de i'aclivilé divine, l'ar comprendre la parole (pu- Dieu fait directement
consétpient, loin d'imauiner (pie la siibslancedo entendre aux esiiiils angerupies, nul doute (pie
Dieu elian,u(>a\ee le lempscl
ou (pi'elle les lienx, Dieu, sans de son élernib-, n'ait commu-
sortii-

se ment scion les divers points de res|)ace el de ni(piê dans kmps


à son iiitelligt lu-e une im-
le

lu (luire, nous devons croire (pi'il connaît toutes pulsion mvslérieuse et ineffable, et n'ait gravé
ces irvolulions connue les cons('(piences de son dans son es|)rit la vérité profonde qui devait à
action providentielle : [lar là j'entends non-seu- la l'ois l'éclairer sur la portée de son comman-
lement l'acle ,1e créer lessid)sl;mces, maisencore deinenl et sur la peine allachée à sa violation :

celui de les gouverner en dehors d'elles après c'est ainsi (pie tous les prêceptesdu bien se voient,
leur avoir donné l'être. Car, sans être com- s'entendent dans l'immuable Sagesse, qui se
pris dans auemie division de l'espace, en vertu communi(pie aux âmes sainles ', à un moment
de sa puissance inmuiable el al)solue, il est à la lixe, sans être assujétie aux changements de la
t'ois plus profond el plus élevé que toute chose, durée. Si Adam au contraire n'était point encore
en ce sens (pie tout est en lui et (pi'il est su- assez juste pour être soustrait ;M'influence d'une
périeur à t(i!:l. lien esl de même pour la durée: créatme plus sainte et plus sage, chargée de lui

sans cire reiit'ermé dans aucune limite de temps, révéler la volonté de Dieu, comme le l'ont pour
en vertu de son inmmahie éternité, il est à la nous les prophètes et comme les Anges le font
l'ois le plus ancien et le plus nouveau des êtres, |iour les |)rophètes, pourquoi douter que Dieu
|)arce qu'il préexiste à tout et survit à tout. ne lui ait d'une créature
parlé par l'entremise
semblable au moven des signes du langage '?

CHAPITRE XXVII. N'esl-il pas écrit un peu plus loin qu'après leur

? péché ils entendirent la voix de Dieu qui se


COMMENT DIEC l'.VUL.V-T-lL A AU.VM .'

promenait dans le jardin 2? Or, que cette voix


i9. Lors donc que l'Ecrilure nous dit « Dieu : sortit de l'organe d'une créature et non de l'es-

« commaiula à Adam eu lui disant Tu mangeras : sence divine, c'est un point évident pour qui-
« de tous les arbres qui sont dans Paradis ;
quant conque a le sentiment de la foi catholique. Je
« du bien et du mai, tu
h l'arbre de la science me suis proposé de traiter cette question avec
« n'en mangeras point. Le jour que vous en plus de développement contre certains hiréti-
« mangerez, vous mourrez de mort; » et qu'on ques •*, qui se figurent que la substance du Fils
sedemande lommont Dieu tint ce langage à de Dieu était visible avant son incarnation et
Adam, il esl impossible de le déterminer neltc- qu'il apparut à nos pères sous une forme pal-

meiil sans iloule, mais il n'est pas moins incon- pable, si bien que Dieu le Père seul serait dési-
leslablc que Dieu lui parla directement ou par gné par celte expression « Aucun homme ne :

rentremise d'une créature. Or, quand Dieu paile « l'a vu ni ne peut le voir ^, » parce que le Fils

directement, c'est qu'il crée les êtres, ou qu'il aurait été vu en lui-même avant d'avoir pris les
crée éclaire et de plus les intelligences, lors- dehors de l'esclave. C'est une impiété que doit
qu'elles sont devenues capables d'entendre sa repousser tout esprit catholique. Mais nous dis-
parole dans le Verbe (jui était en Dieu au com- cuterons ailleurs cette question, s'il plait au
mencement, Dieu lui-même, et par qui tout Seigneur.
a été lait '. Quant aux êtres incapables d'enten- Terminons ici ce livre et voyons comment la

dre le Verbe éternel. Dieu emploie pom- leur femme fui tirée d'une C(Jte de l'homme.

I
Jean, I, 1-3. ' Sag. vil, 2". — = Gen, m, 8. — '
Les Ariens. — ' I Tim. vi, Ifi.
LIVRE IX.

(JHËATION DE LA FEM.ME I.

CHAPITKK PREMIEK. sortir les uns de la terre, les autres des eaux, on
verra aisément que ce passage admet une double
DL SENS ATTACHÉ AL\ EXPRESSIONS :« DlEl' FIT explicalion. En effet, ou l'Ecriture n'a point
< ENCORE DE LA TERRE TOUTES LES BlÎTES DES parlé ici de l'élément tlont les oiseaux du ciel
•< CHAMPS, » ET AU MOT terre. furent tirés, parce qu'on pouvait aisément sup-
pléer à son silence et comprendre que les bêtes
1 . « Et le Seigneur Dieu dit : Il n'est pas bon
que des champs seules furent formées de la terre,
" l'homme soit seul : faisons lui imaide sembla- puisque l'on savait déjà par le récit de la créa-
« bleàlui. Et Itieufit encoredela terre toutes les tion des causes primitives (]ue les oiseaux huTut
'i bêtes des champs et tous les oiseaux des cieux ;
tirés des eaux :ou la terre est comprise avec
« puis il les lit venir devant Adam, afin qu'il vit l'eau sous un terme général, comme dans le
« comment il les nommerait. Et le nom qu'Adam Psaume où, deslo lang's ciMéhrécs dans les es-
« donna h tout animal vivant lut sou nom. Et paces célesles en l'hoimein' de Dieu, ou passe à
« Adam donna des noms à tous les animaux do- celles qui s'élèvent de la terre : « Du sein de la

« mestiques aux oiseaux des cieux et h toutes


et « terre louez le Seigneur, dragons et vous abi-
« les hèles des champs. Mais il ne se trou- « mes ; » sans ajouter : louez le Seigneur du fond
« vidt point d'aide pour Adam qui fût sem- des eaux. Or, c'est aux eaux qn'a|)partiennenl
« blable à lui. Et Dieu plongea .\dau\ en une les abîmes, qui de la terre louent le Seigneur,
K sorte de ravissement et il s'endormit. Et il ainsi qne les reptiles et les oiseaux dont les hym-
« prit une de ses cùles et il resserra la chair à nes s'élèvent également de la terre. D'après ce
« If, place. Dieu forma la femme de la ccMe (pi'il sens général du mol lerrcquise retrouve encore
« avait prise d'Adam et il la fit venir devant dans la passade où Dieu est appelé le créalein-
<( Adam. Alors Adam dit C'est bien là l'os de :
du ci(>l et la terre, c'est-à-dire, de l'univers, on
Il mes os et la chair de ma chair. On la nomme- voit qu'il est juste d'assigner la terre pour ori
« ra femme, parce qu'elle a été tirée Ce l'homme. gine commune à tous les êtres tirés soit les
« Aussi l'homme laissera son père et sa mère et eaux soit de la terre proprement dite.

« s'attachera à son épouse et lisseront une même


CHAPITRE II.
« chair 2. » Si le lecteur a goûté les considérations
que nous avons faites dans les livres précédents, COMMENT DIEU PRONONÇA - T - IL LES PAROLES :

il est inutile de un long commentaire sur


faire « IL n'est PAS BON QUE L'HOMME SOIT SEUL? »

ces mots : « Dieu forma encore de la terre les 3. Examinons mainlenant comment ont été
« bètes des champs. » 1.,'expression encore sup-
prononcées les paroles : « 11 n'e?t pas bon que
pose la création primitive des six jours, où tous « rhoinme soit seul. » Dieu a-t-il fait enteiKh'e
les êtres furent simultanément créés dans leurs
une suite de s\llabes et de mots ? L'Ecriture ne
causes achevés et inachevés lout ensemble,
,
fiil-eile (pi'exposcr la l'aisou scion laquelle la
puisque ces causes devaient produire succesive-
formation de la femme était décidée en principe
ment c'est un point que nous avons
leurs effets :
dans le Verbe, raison que l'Eciilnre exprimai!
éclairci autant que nous l'aMJUS pu 3. Si on sou- que ou
déjà par ces mots : « Dieu dit (elle telle
haite une autre solution, qu'on pèsi* exactement
« œuvre sefasse, » lorsque tout fui piimilixenient
toutes les exjjressions qui nous ont amené ,\
crée? Est-ce dans l'esprit même de l'homme que
nous former celle-ci, et si l'cm en tire une expli- Dieu fit entendre ccsparoles, conmu'lorsiiu'il par-
cation plus claire et plus salisfaisante, loin de
le au cieur de ses serviteurs ?Tel élail le Psalmiste
la rejeter, nous serons heui'cux de l'adopter.
qui a dit : « J'écouterai ce que dit au-dedansde moi
~2. Si on est embarrassé de voir ici l'Ecriture
« le Seigneur i. » L'homme aurait-il reçu inté-
assigner la terre pour origine commune aux
rieurement la révélation de ce fait par l'entremise
animaux et aux oiseaux, au lieu de les faire par
d'un Ange, qui aurait représenté les paroles
lien. 11, 18-24. —2 Gen.
I
18-24. - Liv. vi, ch.5. II, ^ '
Ps. LXXXIV, 9.
MVRK l\. - CKftATION UK \A l'KMMK.

ili's iiiiaiACS .scnsililos, hicii tnic rKciilmc in'disi' eipe de l'union des deux sexes et la beiii'diclion
pas si <'(> fui <iaiis (in soii^coii dans un nidnicnl répandue sur eux, n'oiil pas cessé d'avoir leurs
ircxlasc, coMinic ilairiM- d'oidiniiiri'';' .\'\ aniail- ellels apivs la l'aiile de riiomme et son châti-
il pas. là nui' i(>\('lalioii aiialnmic à celle" (|nc ment : c'est toujours en vertu de (-etle loi (pie la
(li'iril le Prophète : « Kl l'Aniic ipii parlait en terre est rein|)lie d'hommes (pii la soi tient à
< nuii nie ilil '
? >> iMilin ces paiolcsaniaient-elles leur em|)ire.
retenti par l'organe d'une créature, connue celles (>. 11 esl dit (|ue le premier couple limnaiii ne
ipii ivfeiilircnl dans la inie : « f,elin-ei est mon s'unit (pi'après sou expulsion du Paradis; ce-
' rils liien-ainié'? » Quel lui le niou'iHpie Dieu pendaiil je ne \ois pas à ipiel litre il u'\ aiuail
(>ni|)ioya '!
(l'est ce (pi'il est inipossilile de déter- |)as eu dans l'Kden « un mariage saint, un lit

miner. Mais nous devons rester convaincus que « nuptial exempt de souillure '
; » ni (toiinpioi
Dieu a pai'Ié (>t (jue, s'il a employé une succes- Dieu n'aurait pas accordé à leur loi et à leur in-
sion de sons ou une suite d'images sensibles, nocence, à leur sainte el pieuse soumission, leiiri-
loin départi !• directement et par lui-même, il a vilègedc se reproduire sans éprouver les ardeurs
eniploNé (pielcpie créalui'e soumise ù ses ordres : iiupiiètes de la conciqiiscence ni le pénilile
nous l'avons dénionlri' au livre précédent -i.
tra\ailde l'enfanteineiit. Les (ils n'auraient point
i. Dieu sans doute s'est monti-é plus lard aux été destinés à remplacer les pères morts; pen-
saints, tantôt avec des cheveux hlancs connue de dant (pie ceux-ci auraient gardé intactes les for-
la laine, tantôt avec des pieds senihlahles à l'ai- mes de leur organisation et puisé la vigueur
rain lin '',
mais
bret, sous différcnles l'oi'mes; corporelle dans l'arbre de vie , leur postérité
ipi'il ait pour apparaîlre aux hommes,
em, 'oyé, aurait ac(piis le même développement, jusqu'au
des créatures soumises à ses ordres et non son moment où genre humain se serait élevé an
le

essence, (pi'il ait sianillé ses volontés à l'aide d'i- nombre par Dieu. Alorsaurail eu lieu, s'ils
(ixé
majïes ou de sons, c'est une vérité incoidestable avaient tous vécu dans la sainteté et l'obéissance,
pour les esprits qui croient ou qui même ont la leur transformation sans passer par la mort, el

l'orée de compi'endi'e (]ue l'essence de la Tiinité le corps animal se serait changé en un corps spi-
•est eu dehors de tout changement, et
éternelle, rituel, parce qu'il aurait eu le don d'obéir au
(pie, sans tomber dans l'étendue de
la durée elle moindre signal à l'esprit qui le gouverne, et qu'il
meut tous L s èlres dans l'espace et le temps. aurait été \iviriéi)arràine sans avoir besoin pour
Sans L'Iiercber davantage par quel secret ces pa- se soutenir d'alimenls matériels. Voilà ce qui
roles se sont lait entendre, tâchons d'en décou- aurait pu s'accomplir, si la violation du |)récepte
vrir le sens, il a donc fallu donnera l'iiomnie divin n'avait entraîné la mort pour châtiment.
un aide de son espèce; c'est ce que déclare la 7. Déclarer impossible une pareille hypothèse,
\érité créatrice elle-même; et pour entendre sa c'est se régler sur le cours ordinaire des lois de
|,arole, il stilfit de comprendre la raison (jui a la nature, telles qu'elles existent depuis la faute
présidé à la réation de chaque être. et le châtiment derhomme mais nous ne : devons
pas être de ceux qui n'ajoutent foi qu'à l'expé-
CHAPITRE m.
rience. Pourquoi en effet ne pas croire que Dieu
I.A |-KnME UO.N.NliE A l'iIO.WME POUK ASSURER LA eût accordé ce privilège à l'iioinme, s'il avait vé'cu

REPRODLCTION DE l'ESPÈCE HUMAINE. dans l'obéissance et la i)iété, quand on ne doute


pas que les vêtements des Israélites ont été pré-
o. Si donc on se demande dans quel but la servés pendant quarante ans de toutes les attein-
leinme fut l' mnée à l'homme pour compagne, tes du temps 2?
i première et la plus solide raison qui se pré-
sente est la loi nicmc de
CHAPITRE IV.
génération c'est la :

ainsi (pie la terre coopère avec un germe pour DE LA RAISON QUI AURAIT EMPÊCHÉ >'0S PREMIERS
iroduire une piaule. Cette raison apparait dans PARE.XTS DE s'U.MR DANS l'EDE.X.
la création primitive, puisqu'il dit alors: «
Dieu
c li^s créa mfde et femelle; et 8. Et pourquoi nos premiers parents n'ont-ils
il les bénit, el il

leur dit Croissez et mullipliez-vous, et connu mariage qu'après avoir été chassés de
le
< :
rcm-
< plissez la lerrc et assujeltissez-la '•.
>> Le prin-
l'Eden ? On va répondre
aussitôt que la femme

Zach. 11,3. — ïMatl. m, 17. — i


ayant été créée après l'homme, le péché se fit
'
Ci-dcs»us, liv. viil,ch.27.—
•Apoc. I, 14, 16. — Gen. 1,27. 28.
»
'
Héb. xu, 4. — - Deut, xxjx. 5.
"256 DE LA GENÈSE AU SENS LITTERAL.

avant qu'ils se fussent unis, et qu'ayant été punis \'w ici-bas, eusseni été transporlés dans un sé-
par une juste conséquence, ils lurent condam- jour meilleur, en subissant non la mort, mais
nés à la moit et sortirent de ce séjour de bon- une transfoiinalion el peut-éire ce changement
heur. I^'Ecritui'c ne fixe point le temps cpii s'é- merveilleux (jui doit rendre à l'homme son corps
coula entre leur création cl la naissance de Gain. et l'égaler aux Anges '. Getle transformation
On pourrait aussi ajouter que Dieu ne leur avait glorieuse ne dùt-elle être accordée aux hommes
point encore iait le coniniandeinent de s'unir. qu'à du monde el à la même berne? Ils
la liu

Pourquoi en effet n'auraient-ils pas attenilu que auraient pu passer à un état moins parlait, mais
Dieu leur fît connaître sa volonté, quand la con- supérieur encore, soit àla vie humaine ici-bas, soit
cupiscence n'aiguillonnait ])oiut encore la cliair à la condilion primitive deriiomme quanti il sor-
révoltée? Or, Dieu n'avait point encore donné titde la teri'e et que la femme fut tirée de sa chair.
cet ordre, ])ar(c qu'il réglait tout selon sa ni'es- 1 1Ou'on ne croie pas, en effet, qu'Elie soit
.

cience, et (pi'il prévoxait sans aueiui doute leiu' dans l'élat glorieux où seront les saints, lorsipie
chute, qui allait gâter la source d'où le genre chacun aura reçu son denier à la (in de la join--
humain devait sortir. née 2, ou que sa condition soitcelledes hommes
qui ne sont point encore sortis de ce monde,
CHAPITRE V.
hors duquel il a été traus[>orlé sans inouiir 3. Son
LA FEMME n'a ÉTÉ DONNÉE A l'hOMME POUR COMPA- sort est meilleur que celui dont il pourrait jouir
GNE qu'en vue de la PIîOPAGATlON DE l'ESPÈCE. ici-bas cependant il ne possède point encore la
;

récompense qui attend lesjusles au dernier jour.


Supposons que la femnu^ n'ait pas été as-
9.
Dieu ayant voulu, par une faveur parliculière,
sociée à l'honnne pour jjropager l'espèce dans ;
qu'ils ne parvinssent point avant nous à la féli-
quelbul lui a-t-elle été donnée? Serait-ce en vue cité suprême Se ligurerait-on qu'Elie n'a pu
'•.

de cultiver avec lui la terre ? Mais le travail n'a-


mériter cette réconqiense parce qu'il aurait eu
vait pas encore besoin de soulagement ; d'ail-
une femme et des enfants ? On croit bien qu'il
leurs l'homme aurait trouvé dans un autre n'a point été marié, parce que l'Ecriture ne le
homme un aide plus actif: il y aurait également dit pas, mais eile est également muette sur son
trouvé un asile plus sûr contre les ennuis de célibat. Et que dira-t-ou, si on fait observer
l'isolement. En effet, pour le commun de la vie qu'Hénoch plut au Seigneur, après avoir été père et
etdelaconversation, ne s'établit-i! pas entre deux fut enlevé sans mourir-'? Dès lors, pourquoi .\dam
amis une sympathie pbis profonde qu'entre im et Eve, s'il leur était né des (ils d'une chaste luiion
mari et sa femme ? Admettons que l'un devait et qu'ils eussent passé leur vie dans la justice,
commander et l'autre obéir, afin que la paix ne n'auraieiit-ilspa cédcrla place à 1(MU' postérité et
fût pas troublée par quebpie désaccord entre les se voir du monde sans mourir? car,
enle\er
volontés : cette subordination aurait-eu naturel- si Henoch et Elic, qui sont morts en Adam et (pii
lement pour principe l'âge, puisque l'un aurait portant ce germe de mort dans leur chair, doi-
été créé après l'aidre, comme le fut la femme. vent revenir ici-bas, dit-on, pour y payer leur
Objecterait-on qu'il efd été impossible à Dieu, dette 6, et souffrir le trépas si longtemps ajourne,
s'il l'avait voulu, de tirer un hounne de la côte n'en sont pas moins dans un autre monde où,
d'Adam, connue il en tira un femme ? Rref, sup- dans l'attentede la résurrection qui doit changer
primez la propagation de l'espèce, l'union de la eu un corps spirituel leur corps animal, ils ne
femme avec l'Ironune, à mes yeux, n'a plus au- s'ad'aiblissent ni de vieillesse ni de maladie ;

cun but. n'am-ail-il pas été plus juste, plusraisonable d'ac-


GIIAPITRE VI.
corder aux premiers honnues,(pii n'auraient été
SEIIAIENT-ELLES sous coup d'aucun |)éché soit volontaire soit
COMMENT LES GÉNÉUATIONS SE le

SUCCÉDÉ SANS LE PÉCHÉ d'aDAM? originel, le privilège de céder ici-bus la place à


leurs enfants et de piisser d.iu^ imc condilion
10. Aurait-il fallu que les pères sortissent de meilleure, en altendautipi'à la lin des siè 'les ils
ce monde pour faire pbiceàlenrs enfants et que pussent avec toute la suite des saints, revêtir la
le genre humain atteignit, par une série dévides formedes anges, sans subirl'épieuve de la nu)rt,
toujours comblés, un chiffre déterminé? 11 aurait par un doux effet de la puissan 'c divine ?
été possible que les honnnes, après avoir donné 'Malt .\xii,30.— îMiiU. x.v, 10. — 'IVRcis.ii. 11.— ' Uéb. .xi.

le jour à des enfants et rempli les devoirs de la 40. — Gcn. V, 24 — ' Malacli. iv, h; Apoca. XI, 3-".
MVUK rX. - CRRATrON nF I.A FKMAIF.

des enfants leur eût été interdite dans le l'aradis.


C.IIAI'ITUK VII Les partisans de cette lixpollièse se ligiirent sans
(liiule (pie tout rapport entre les sexes est un
ROI.K DELA KKMME. — MKlllTl. I>E I.A VIIIGIMTÉ KT
p('ché. est aux
clïectivement bien
Ul MAniACK. — TllII'I.E AVAMACK IIKS l.MONS
Il

bouillies de n'êlre pas eiilraiiK'sdaiisnn vice en


dillicile

LÉGITIMES. voulant éviler son c(inlraire. Ainsi la peur de


l'avarice conduit à la prodigalité, celle de la pro-
l'2. V.n resiimi', je ne saurais foinprcndir dans
digaliti' à l'avarice. Si ou reproche à mu hoiiiiiie
«liiol biil la It'innioa été donnée ponr aiile à
son a|>alliie, il loiiilie (l.iiisuuc liiiiiieur iiupiiète;
riKiinnie, si l'on sui)pnnie sa l'onition de mère.
C'est ee que je ne si on lui reiirocheson humeur inquiète, il lomlie
Kl [iom(iiioi la siriprinier ?

en
dans l'aiiathie. .V-t-mi ouvert les umix sur sa
in'expliiiiie pas non pins. D'où vient, eti'et,
prt'somption ? ou se jelledans la timidité. Vciil-
le inéiile snhlime de la virginité aux veux
011 sortir de sa timidité '!
il semble qu'on force
de Oieii, sinon de l'empire qu'on exerce sur soi-
une barrière tombe dans la présomption,
et l'on
même, à une époque où le mariane est assez ré-
en s'adressant à rimagmaliou piuli'il (pi'à là
pandu ici-bas pour pioduire chez toutes les na-
raison ponr mesurer les fautes. Voilà comment
tions un nond)ie suKisant de saints, et durenon-
on arrive à ne pas comprendre le crime que le
ceinenl à un grossier plaisir des sens (pie ne
de propager l'espèce?
droit divin condamne dans la fornication et l'a-
jusiilie plus la nécessité
dultère, et à maudire riinion (pii a (lour but la
Kniin, comme les deux sexes ont nn penchant
propagation de l'espèce.
qui les entraine au déshomienr et à la ruine, le
mariage leur oll're nn moyen honorable de ne
CHAPITRE l\.
point succoml)er, et ledevoir que pourraient rem-
plir les esprits sains se tourne en remède pour LA FEM.ME ÉTAIT DESTINÉE A ÈTUE MÈIiE LORS .MÊME
les esprits malades. Si l'incontinence est un mal, (,HE LE l'ÉCHÉ n'eut PAS ENTRAÎNÉ LA MORT.
il ne s'ensuit pas quemariage ne soit pas un le

l)ien, même quand des cœurs sans em-


il luiit I i. D'antres personnes, sans tomber dans cette
piresureux-mèmes, loiude là le l)ien nedevieut ;
erreur, voient bien que la fécondité est une loi
pas un mal à cause de ce vice, mais il rend le divine établie pour réparer les vides du genre
vice plus excusable le bien attaché au mariage
:
humain mais ; elles se figurent (pie le premiei"
et (pii le rend légitime ne peut jamais être un couple humain n'aurait jamais connu le ma-
péché. Ce bien est triple : il comprend la fidélité, riage, s'il n'avait pas été condamné à mourir en
la lamille, le sacrement, La fiitélité consiste à punition de sa faute, et par suite obligé de se
ne jamais violer la foi conjugale la famille doit ;
crééer une postérité. On ne songe pas ipie si le

être adoptée avec amour, nourrie avec tendresse, niariage était légitime ponr s'assurer des succes-
éle\ée dans la piété le sacrement rend le ma-
;
seurs après la mort, il eût été plus légitime encore
riage indissoluble et interdit airx époitx, même ponr associer des compagnons àsa vie. Sans doute
séparés, d'avoir des entants d'un autre lit. Tel si la terre était tonte remplie par le geni'e
est le principe du mariage ; il embellit la fécon- humain, on ne songerait à se reproduire ipie
dité comme il règle la passion. Mais comme nous pour combler les vides faits par la mort mais, :

avons snflisainment développé dans notre traité (piaud un seul couple devait remplir la terre, au-
ttu Bifii anijiiijal les, mérites relatilsd'une vidinté rait-il pu, sans le secours du mariage, suffire aux
chaste et d'une pureté virginale et fait ressortir fonctions de la société humaine? De plus, est-il
la supériorité de celle-ci, nous ne nous arrête- un esprit assez aveuglé pour ne pas voir (piel or-
rons pas plus longtemps sur cette question. nement le genre limnain ajoute à ce inonde,
malgré le petit nombre des esprits droits et su-
CHAPITRE VIII.
blimes, et pour ne pas sentir l'excellence des lois

LA KIITE Ii'l.N DÉFAUT FAIT SOI VE.NT TO.MBER DANS humaines, qui par un lien puissant assujettissent,
L"> ALTHE. jusqu'aux pervers, à l'ordre tel qu'il peut régner
ici-bas ?Quellequesoit la corruption deshommes,
13. Nous devons maintenant examiner quel ils n'en gardent pas moins leur supériorité sur
concours la femme pouvait prêter à l'honnne les bêtes et les oiseaux. Cependant si l'on con-
dans l'hypothèse où toute union en vue d'avoir sidère de quelle décoration les espèces si va-

S. Alg. — ToM. IV. 11


258 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL

l'iées d'animaux servent à cette liuiiilile partie de Mort, remarquez l'expression, et non mortel, quoi-
l'univers, n'a-t-du pas un spectacle ravissant? qu'il le soit réellement, puisqu'il doit mourir.
Commentdonc croire sans une sorte de que folie Tel n'était pas l'état primitif du corps : animal
la terre aurait perdu de sa uiagnificence en se sans être encore spirituel, mort je il n'était pas ;

peuplant de justes iuuuorlels? veux dire, condamné irrévocablement à la mort :

La cité céleste des anges étant assez peu-


15. il ne fut soumis à cette loi qu'au moment où
plée, le mariage n'y serait nécessaire qu'autant l'arbre défendu eut élé louché.
que la mort y réguerail. Or, le nombre de ses ha- 17. Aujourd'hui le corps a une santé relative,
bitants doit être achevé par la résurrection des et lorsqu'elle est si profondément troubléequ'une
saints qui iront se joindre aux anges, comme l'a maladie dévore déjà les organes essentiels à la
prédit Notre-Seignear en disant « Après la ré- : vie, les médecins déclarent (pie la mort est im-
« surrection ni la leunne ni l'homme ne se ma- minente. On dit alors que le corps est mourant,
« rieront : car, ils ne mourront plus et seront mais à un tout autre point de vue que lorsqu'il
« égaux aux anges i. « Mais ici-bas quand les jouissait de la santé qui pourtant n'empêchait
hommes devaient remplir la terre et que les pas de prévoir infailliblement saniort. lien était
rapports étroits qui lient l'espèce humaine et en de même
du premier homme il avait un corps :

font l'unité ne pouvaient mieux éclater que dans animal, que le péché seul pouvait faire mourir
la communauté d'oriyitie, la femme pouvait-elle et destiné à revêtir les formes célestes de la na-
avoir une autie loncliou que de seconder le père ture angélique. Mais aussitôt qu'il eut enfreint la
du genre humain, comme la terre aide à la pro- loi, la mort même
dans ses organes en
se glissa
duction des plantes? y faisant sentir une langueur fatale et il perdit
l'heureux empire qui l'empêchait « d'éprouver
CHAPITRE X.
« dans ses membres une loi opposée à la loi de

« son esprit » quoique animal, sans être. encore


LA CONCUPISCENCE EST UNE MALADIE NÉE UU
:

PKCHi':.
spirituel, le corps n'était point sous l'influence
It>. Toutefois il est plus sûr et tout ensemble plus de celle mort, de laquelle et avec laquelle nous
noble de croire que le premier couple humain, sonunes nés. Dès noire naissance en effet, que
tel qu'il était dans le Paradis avant d'être cou- dis-je ? dès notre conception même, nous con-
damné à la mort, ne connaissait pas les voluptés tractons le germe de cette maladie qui doit fa-
sensuelles qu'éprouvent aujourd'hui tous ceux talement nous conduire à la mort. Les autres
(pii sont sortis de cette tige de mort. Il est im- maladies, comme ITiydropisie, la dissenterie, la
possible en effet qu'il ne se soit pas produit de lèpre, aboutissent moins infailliblement à la mort
changements en eux lorsqu'ils eurent touché à que la conception même, qui fail de tous les
l'aihre défendu car le Seigueur ne leur avait
;
honunes des enfants de colère par un châtiment i
,

pas dit (pi'ils mourraient de mort, quand ils au- infligé au péché.
raient mangé du fruit défendu, mais bien le jour 18. S'il en est ainsi, pourquoi ne pas croire
même qu'ils en mangeraient '. Par conséquent que nos premiers parents aient pu, dans l'acte
ils ont dû voir se révéler en eux ce jour-là même de lu génération, exercer sur leur corps avant
la lutte qui faisait gémir l'Apôtre en ces termes: le péché le même empire qui permet à l'àme
« Je me complais dans la loi de Dieu, d'après de mouvoir les organes, dans certaines fonctions,
« les sentiments de l'homme intérieur mais : sans douleur conune sans voluplé?Le Créateur,
« j'éprouve dans mes membres une autre loi qui dont la i)uissance est au-dessus de toute louange
i> combat la loi de mon esprit et qui m'asservit v^t (jui fait éclater sa grandeur dans les êtres les

« à la loi du péché qui est dans ma chair. Ma!- plus petits, a donné aux abeilles la i)ropriété de
K heureux homme que je suis Qui me ! reproduire leur espèce comme elles produisent
« délivrera du corps de cette mort ? Ce leurs rayons de cire ou leur miel pourquoi :

'< sera la grâce de Dieu par Jésus-Christ Notre- donc n'aurait-il pas donné au premier honmic un
" Seigneur •'. >> Il ne lui suKit pas d'appeler le corps assez docile pour qu'il pût connuander aux
corps mortel; il dit : « Qui me délivrera du corps organes de la reproduction avec un esprit aussi
« de cette moi't ? » C'est ainsi qu'il ajoute plus souverain qu'à ses pieds, de telle sorte que la
loin «Le corps est mort à cause du péché ^ »
: conception et l'enfantement auraient eu lieu sans
I
MtiU. xxii, 30. —'' Gen. II, V. — 'Uom. vu, 22, îi. — i
IbiJ. ' Epliùs. II. U.

v:ii. 10.
|
,

LIVIVE IX. — CHKATION l)K LA I KMMK 2m

a ne s;iiis (Ic.iilciii-; Mais


passion loiit:iioiis(' CIIAIMniK Ml.
tli'iuiis (|ii'il a \ioli'' le pmcplc «livin, il a justc-

III, Mil irsscnli les moiiMMUCiils de la loi fjiii osl I,KS \M.MAl A IIICVA.NT ADA.M.

l'<'spiil. ji' ^i'""^ ''"'' '•'' '''


en hitlc a\<-<- ci'H'' i'''

organes; Iclloosllanm- -H). Nous a\ous siillisameiil examini', je |)ense,


iiKirl ciil'crmt'c diiiis les
le inaria^jc, qiio la chastck'
pour(iiielle lin la lémme a\ail éli' ci'i'éeet associée
iiipiscciHr ipic iv:.ili"

(loininc, fl, df iiu-iiio que lo iliàli- àl'homme; voyons maintenant |)ourqnoi les bêtes
coiilii'iil cl

le iiifiilc pinil sorlir des (hauq)s el lesoiseaiiv du ciel furent amenés


iiiciit ost allaclu' à la l'aiiti',

liàliiiKMil.
eu présence d'.Vdaiii, afin ipi'il leur donnât un
ilii 1

nom, etiprapparùten (piel(|ue sorte la nécessité


CIIAIMIKKM. de tirer la femme d'une de ses côtes, puisqu'il
ne se ImuNail parmi eux aucun être capable
SI I.'IIOMMK NAVMT l'AS l'KCllK, L\ (iÉNKUVIION SK
(le lui prêter sou concours. Ciît événement me
SKItAlT l'AITKSANS PASSION.
semi)le renfermerun sens prophéti(|ue: il est réel
I!l. I.a rciiiiiic a iloiU' ('ti' laiti' pour riiomnif sans doute, mais ou petd, après en avoir ("on-
clil»^ riioiiiiiicini'iiio, avec son orsianisalioii s])!'- lirnié raceomplissement, l'interpréter eu liberté
ciale coniiuo: c'ost la mère de Gain eld'Abelelde et y voii- une allégoiie. Or, poui(iuoi .Vdam ne
Ions leurs frères, dont le peiire humain devait (louna-t-il pas de nom aux poissons connue aux
sorlir;c'esielle(piiadonnénaisaneeàSetli,raneè- oiseaux etaux animaux terrestres?Si l'on consulte
Ired'Abraliamella tigediipenpled'Israèl, la pins le langa'.;e ordinaire, tous ces êtres ont reçu des
eélèîiredesraees,lepèreanssidelouteslesnations noms ipie leur a donnés la |)arole humaine. Non-
par Noé el ses eid'anls. Donter de eelle vérilé, seulement les éties (pii peuplent les eaux et la

e'esl londemenls delà Joiel mériter


ébranler les terre, mais encore la terre, l'eau, leciei,l(^s \)\u^-
la réprobation des lidèle.s. Si donc on demande nomènes célestes, réelsousupposés, quedis-je?les
dans (|iiel bnl la femmea été donnée pnur com- couceplions même de l'esprit, ont rei;u un nom
pagne à riionnne, je ne puis me Texprupier (pii diffère selon les idi(jii!es. On nous a révélé

après miirc retlexion, que dans l'intérêt de l'es- qu'il y eut à l'origine une langue uniforme,
pèce, afm que leur posléiilé peuplât loulela terre; avant que l'érection delà tour orgueilleuse après
toulelois la géiiéralion n'aurait pas été soumise le déluge n'eût divisé le genre hnuiain, en faisant

aux mêmes conditions qu'à l'époque actuelle, où attacher aux mêmes signes des sons différents.
réside dans les organes celte loi de péché cpii Quelle fut cette langue i)rimitive? C'est un pro-
s'oppose à la loi de l'esprit, lors même qu'on eu blème assez indifférent. Ce qu'il y a de sûr, c'est
triomphe avec la grâce de Dieu cette faiblesse : qn'Adam la parla et que les derniers vestiges de
en elTet ne [pouvait exister que dans le corps de ce langage, s'ils subsistent encore, se retrouvent
cette mort, dans le corps destiné à mourir par dans les sous articulés aumo\en desquelsle pre-
suite du péché. D'ailleurs quel châtiment plus mier homme dé.^igna lesanimaux terrestres et les
juste (|ue de condamner l'âme à ne plus voir le oiseaux. Mais est-il vraisemblable queles poissons
corps, son esclave, obéir au moindre signal, quand ne furent point nonnués par l'homne d'après les
elle a refusé elle-même d'obéir à son Sei;.;nenr? racines de cette langue, et que les mots qui les

Mais que Dieu fasse sortir l'âme de l'âme des représentent furent créés de Dieu cpii les ensei-
parents, le corps de leur corps, ou qu'il donne gna ensuite à l'homme? S'il en était ainsi, on ne
aux âmes une autre origine; il n'eu est pas pourrait s'expliquer ce fait (pi'en voyant éclater
moins évident cpie l'âmeaccomplit une œuvre ;\ sous ces mots un sens niysti(|ue. 11est probable

la foispos-ible et digne d'une magnifique réconi- que les poissons furent nommés peu à peu à me-
l)ense, lorsque, pieusement soumise à Dieu, elle siue (pie leurs espèces furent reconnues : mais
triomphe avec la grâce de la loi du péché, in- si les animaux, les bêtes, les oiseaux furent amenés
hérente à ce corps de mort, en punition devant l'homme s'ils furent réunis et classés par
;

(le la faute du premier homme; plus la g'oire espèce afin qu'il leur donnât nu nom, quand il
(pi'elle recevi'a au ciel doit être brillante, plus aiuail pu les nommer peu à peu et bien plus vite
Dieu montre avec éclat le mérite attaché à l'o- que les poissons, en supposant que leurs déno-
béissance, puisqu'elle a assez de force pour triom- minations n'eussent pas déjà été trouvées, n'ya-t-
pher du châtiment infligé à la désobéissance il ])as dans ce fait ime raison cachée et une allé-

d'antrui. gorie prophétique ? C'est ce que la suite du récit


260 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

sacré tend claircniciit h nous faire conipiendre vait-on atteindre ce but sans créer la femme
i\. En second lien, Dieu pouvait-il ignore, pendant sommeil d'Adam, sans mettre de la
le

qu'il n'avait crééaucun animal capable de scrvii- chair à la place de l'os employé ?N'aurail-il pas
d'aide àrhonune?Elait il nécessaii'e que l'homme mieux valu ne se servir que d'un morceau de
en fùl instruit et se lit une idée d'autant ])liis chair pour en former la femme, puisque son
haute de sa femme que sur tous les animaux sexe est plus délicat ? Quoi Dieu a pu d'une côte !

qin comme lui avaient été créés sons le ciel et former le corps d'un femme avec tous les organes
respiiaientle même air, aucun ne s'était trouvé qui le composent, et il n'aurait pu la former de
son semblable? Mais il serait étrange qu'il eût chair, de cette pulpe sanguine, lui qui avait tiré
fallu, pour lui donner cette idée, lui amener riiomme de la poussière? Admettons (pi'il avait
et lui faire voir les animaux. S'il avait foi en fallu tirer une côte; pourquoi ne pas la rempla-
Dieu, il pouvait l'apprendre de lui, de la même cer parune autre? Pourquoi au lieu des expres-
manière qu'il fut instruit de sa défense, iider- sions consacrées : î7 façonna, il fit, l'Ecriture dit-
rogé après sa faute et condanmé. S'il n'avait pas elle que Dieu édifia cette côte, comme s'il s'agis-
foi en lui, il lui était impossible de déconvrir si ait d'un édifice et non d'un corps vivant ? Or, com-
ce Dieu, en qui aucune confiance, lui
il n'avait me ces événements sont réels et ne peuvent être
avait montré tous
animaux, ou s'il en avait
les taxés de rêves insensés, il est incontestable que
caché d'autres semblables à luidansqaelque con- tous ces actes cachent une prophétie et que, dès
trée lointaine. Parconsécjuent je ne puis m'em- le berceau du genre humain. Dieu a découvert

pècher de croire que cet t'vènement, quoiqu'il dans ses œuvres, par un effet de sa miséricorde,
ait eu lieu, ne cache quelque allégorie prophé- les bienfaits des âges à venir : il voulait que ces
tique. bienfaits révélés au moment H.xé à ses serviteurs
22. Mais le plan de cet ouvrage ne consiste dans la suite des siècles, sous l'inspiration du
point à édaircir les prophéties mystérieuses: j'ai Saint-E: prit ou par le ministère des anges, et
poui- but d'exposer les é\ènements avec leur ca- consignés dansl'Ecriture, servissent de garanties
iaclère historique, alin(jue, si quelque fait semble pour les promesses ([u'il faisait dans l'avenir, par
impossible aux esjjrits irivoleset incrédules, ou l'aciomplissement même des prédictions faites
"opposé à l'autorité de l'Ecriture, en offrant pour dans le passé : c'est là un point (|ui va s'ériaircir
ainsi dire un témoignage contradictoire, sa pos- de pins en plus dans la suite de cet ouvrage.
sibilité et sa concordance soit démontrée, autant

que je puis le faire avec l'aide de Dieu. Quant CHAPITRE XIV.


.iiLV événements dont la possibilité est évidente et
COMME.'VT LES AMMAL'X FLUE.NT-ILS PRESENTES A
(|ui, sans offrir aucune contradictionavec le reste
ADAM ?
(lel'Ecrilure, paraissent aux yeux de quelques
personnes, inutiles ou même déraisonnables, je 24. Examinons donc, en nous attachant, selon
devrais m'atfacher à démonli-er que tout ce qui le plan de cet ouvrage, aux faits eux-mêmes
est en dehors du cours ordinaiie de la nature a plutôt qu'aux événements qu'ils annonçaient, à
poni- but de nous apprendre à préférer le témoi- la lettre symbole, ce passage
plutôt qu'au :

gnageinlaillible del'Ecritiu'c à nos imaginations, 1 Dieu ainenadevant.\damtôusles animaux, afin


et (pi'au lieu d'y voir une extravagance, il faut « (pi'il vit comment il les appellerait. » Je ne parle

le prendre pour une allégorie. Mais ces explica- pas du jiassage « Dieu forma de la terre toutes les
:

tions et ces comnientairesfontdéjà on feront plus «bêtes des champs et tous les oiseaux du ciel » :

lard le sujet d'autres ouvrages. nousluiavons consacréassez de dévelop|)ements.


Quel moyen Dieu employa-t-il pour amener les
CHAPITRE XIII. animaux devant Adam? Il faut bannir à cet é-
gard toute idée grossière, en se reportant à la
LA FORMATION' DE LA FEM.ME EST A LA FOIS RÉELLE
théorie (jue nous avons exposée au livre précè-
ET SYMUOLlylE.
dent, sur double mode suivant lequel s'exerce
le

la '. N'allons pas croire


Providence qu'on ras-
23. Que signifie donc celte formation de la
seud)la les animaux connue fait le chasseur ou
femme tirée d'unecôte de l'homme'!' Admettons
l'oiseleur, quand il fait tond)er sa proie dans ses
(pic c'ctail un moyen nécessaire de faire com-

prendre l'union des deux sexes; mais ne pou- ' Ci-dessiis. liv VIII. ch. ix, xix-xxvi.
LIVRE IX. — CREATION DE LA FEMME i6i

on onlir, paili se mouvoir dans le tenqis, pom- ébranler


pièces ou dans ses lilots; (in'iin

(lu sein <lf la nuo, lit ciitciKlic aii\ animaux ik's dans la dmée el dans repsac(' les êtres subal-
crôaluic inli'lIif;('uU' 1)ihiI souk- ternes, [tour i)résenter_ aux animaux les ima-
|)an>lrs ([uo la

icdutcict suivre. Ce couimaudiMnenl n'aurait pu ges capables de les frapper et de llalter leurs ins-
Toulc- tincts N'ont-ils pas ceid fois plus de ressources
èliT compris ni di's brtt's ni dos oiseaux.
I

lois la hrulo olle-uu'uie roçoil à sa manière k's pour amener, même à sou insu, toid ètr('(piires
dune pire à un but déterminé?
ordres de Dieu; sans obéira l'impidsion
volonlé iiltre el inlellificnle, elle suit les mou\o-
moteur inunoliile, lui com-
CHAPITRE W.
ments (pie Dieu, le

munique par l'entremise des anges, (|ui voient i.A l'on.MVTKix m; i.\ kemmk >'a i;i yrK uiKt eoiu
dans son Vérité les actes à accomplir et le mo- AUTEUR.
ment (létermin(' où ils doiveid s'ex(Vuter c'est :

ainsi que Dieu reste en dehors des mouvements :?(!. Examinons luairdenant conuuent s'est opé-
du temps, et que les an^jcs se meuvent dans la rée la ktrmation (le la fenune, bien (pi'il \ ail

dmve, pour transmettre ses ordresaux t-tres qui dans cette nnstérieuse structiu'e, comme l'appel-
sont sous leur dtipendance. lent leslivressaints, imsensall('gori(pie. Lafeni-
^5. Tout l'Ire vivant, qu'il soiliulelligcnl com- uu\ (pioi(iue tirée de la substance préexistentede
me l'homme, ou privé de la raison connue l'ani- l'honniie, fut créé-e alors avec sou sexe, sans être
mal, le poisson, l'oiseau, est trappe de ce (pi'il voit, l(eu\re(TaucunètreanlérieLU' . Car les anges ne
l/honuue, étant raisonnable et libre, obéit ou peu\ eut créeraucunesid)stance :1e seul auteur des
n'obéit i)as à la sensation; l'animal ne sait pas êtres, quelle ((ue soit leur grandeur ou leur pe-
délibérer, mais l'ima^iele trappe et le lait a^ir se- titesse, est Dieu, en d'aidres termes la Trinité,

lon les lois de sa nature. an pouvoir dau- Il n'est l^ère. Fils etSaint-Espril. Maison voudrait savxjir
eunètre de déterminer quels objets lui viendront comment Adam s'est endormi, conuuent une de
aux sens ou même à l'esprit, et par consé(pienl ses ciUes lui a été arrachée sans (pi'il ait ressenti

mettront eu jeu son activité. D'où il suit (pi'une aucune douleur. Un dira peut-être (jue ces actes
fois présentés d'en haut par la docile entremise ont pu s'accomplir parrintermédiairedes anges,
des -\nges, ces objets tombent sous les sens et l'ont soit; mais l'acte de façonner cette ciJte et d'en

parvenir les ordres de Dieu non-seiik^nent aux faire sortir la femme appartient tellement au

hommes, mais encore aux oiseaux et aiLX bêtes, Dieu qui a créé la nature universelle, qu'il était
par exemple, au monstre qui engloutit Jouas '. hors dupouvoirdes anges, de formerlachair des-
Sa volonté se communi(|ue même aux plus petits tinée à remplir la C(')te d'Adam, aussi bien que de
èti-es, comme au ver qui reçut l'ordre de ronger tirer la poussière. Je ne veiux point
l'homuie de
l'arbriseau à l'ombre du quel le même prophète direque lesangesn'ontaucune part à la création
s'était reposé '. Si Dieuadoniiéà l'homnie, mal- d'un être, mais qu'ils n'ont point la puissance
gré la chair de péché qin l'enveloppe, la faculté créatrice, au même titre que le laboureur ne sau-
de faire servir à ses besoins les animaux et les rait créer ni ses moissons ni ses arbres. Celui qui
bètcs de somme; s'il l'a fait capable de prendre planteetcelmquiarrose ne sont rien mais Dieu :

non-seulement les oiseaux domesti(pis, mais en- seul (jui donne l'accroissement Or, c'est en vertu '
.

core ceux (pii volent dans les airs, quelque sau- d'un accroissement de ce genre que l'os fut rem-
vage que soit leur instinct et de les iipprivoiser placé par un morceau de chah-, c'est-à-tlii-e, en
eu trouvan! le merveilleux secret de les dominer vertu de l'acte souverain qui a créé les substances
dans la raison plut(Jt que dans la force, puisqu'il et donné aux anges eux-uiéines le fond de leur
parvient en observant ce qui provoque chez eux être.
le plaisir ou la douleur, par unsage mélange de 2". L'œuvre du l;d)0ureur consiste à mettre
caresses et de rigueur, à leurfaire dépouiller leurs la plante en comnuniicalion avec l'eau, lors-
instincts sauvages pour prendre des mœurs plus qu'il arrose elle ne va pas jusqu'à la répandre
;

douces; quel n'est pas le i)ouvoir des anges qui, clans le tissu même du bois c'est l'acte de Celui
:

après avoir découvert la volonté de Dieu au sein (pii mesure 2.


a tout disposé avec ordre, poids et
de l'immuable Vérité qu'ils contemplent sans Le laboureur peut encore arracher à un arbre
cesse, déploient une activité meiveilleuse pour ime boutm-e et la planter dans la terre mais ;

'
Jon. II, 1. — 2Ibid. IT,6, 7. [ Cor. 111, 7.-2 Sag. XI, 2,
26-2 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

dépend-il de lui qu'elle se pénètre des sucs de


la teiTe, qu'elle pousse à la fois son jcl et les CHAPITRE XVI.
racines qui rallaclient au sol, qu'elle se dévelop-
pe dans les airs poiu'y puisscr la force et étende l'KSPP.IT HIMAIX INCAPABLE DE COMPIIENDRE LES
de tous c(Més ses rameaux ? Non, c'est l'œuvre OEUVRES DE DIEU.
de celui qui donne l'aecroissemcut. Un méde-
i9. L'expérience, aussi loin que la portée de
cin peut adminisirer un remède à un malade,
bander une blessure mais d'abord il ne crée
l'esprit humain peut s'étendre, nous a révélé
;

emprun- connnc les sources où un corps animé et sen-


pas le fond de ses médicaments, il les
sible prend naissance les élén.cnts, ainsi l'eau
aux œuvres mêmes du Créateur; ensuile, s'il
:

te
peut préparer une ])otion et la faire boire, s'il
et la terre; lesplautcsou les fruits, la chair même
des animaux, par exemple les vers et les insec-
peut composer un topique et l'appliquer sur
tes de toute espèce; enfin l'union des sexes. Mais
une partie malade, est-il pour cela capable de
nous ne voyons par aucun exemple que de la
ranimer les forces el de créer une cliair nou\ el-
chair d'unanimal il naisse un animalqui soit un
le ? Non, la nature opère ce prodige i)ai' un
autre lui-même, en dehors des niodilications
mouvement mystérieux et qui écbappe à nos
parliculièrcs à son sexe. Ainsi nous avons beau
regards. Que Dieu fasse dispaiaitre ces ressorts
chercher dans la ci'éaliondes analogies |)om- nous
imperceptibles par lesquels il lorme et renouvelle
expliquer par quel secret la femme lut lorniée
l'organisiTtion ;aiissil(M elle se déconcerte et s'ané-
d'une côte de l'homme, nous n'en trou\ous pas.
antit.
l'ounpioi? C'est que nous voyons bien counnent
38. Ainsi, puisque Dieu gouverne la nature
l'hommeagit ici baset que nous igaoronscommeni
universelle en agissant à la lois dans le monde
agissent les Anges, ces laboureurs de la nature
pbiysque et moral, connue nous l'avons démon-
universelle. Si coursdes loisnaturelles produi-
le
tré ', il faut admettre qu'un Ange est aussi
sait toides les plantes sans le concour de ri ndustiie
incapable de créer un être que de se créer lui-
humaine, notre science se bornerait à connailre
même. En soumettant |)leinement à Dieu cl
se
(pie les arbres végélaux naissent ilans la
el les
en exécutaul ses ordres, l'Ange peut gouver-
terre des semences <pii s'y étaient déposées :

ner selon les lois de la nature les êlres inférieuis


saurions-notis (|ue la greffe est capable de
qui sont l'ojet de son activité il peut, dis-je, :

produire dans letemps, ensuivant les principes


faire [)orter àun arbre des Iruils d'une autre
espèce pour ainsi dire adoptifs ? C'est un se-
et
incréés (pii résident dans le Verbe ou les causes
cret (pienous révèle le travail de l'horticulteur,
primordiales qui furent créées dans l'œuvres des
(juoifpi'on ne puisse à aucun titre voir en lui
en cela il ressemble au laboureur
six jours, et
un créateur d'arbres, puisqu'il ne fait que prê-
et au médecin. Mais (pielle espèce de concours
ter sou aide au Dieu (jui seul crée le cours de
les Anges prêtèrent-ils à Dieu, lors de la for-
la nature. Son œu\resei'ail stérile, si l'œuvre de
mation de la femme ? (lonnuent Irancber une
Dieu n'cncontenait pas les germes dans ses pro-
pareille question ï lu point incoustestable selon
fondeurs. Est-il donc supren.uil que nous igno-
moi, c'est que si la cliair prit la place d'une
rions connneiil il est sorti d'un os de riionime
côted'Adam, si lafeunue se forma de son corps;
un être semblable à puisque nous ne savons
lui,
sonàme, ses sens, en un mot rap|)areil desorganes
et l'ensemble des facultés qui la rattachent à
même pas quelle part les Anges prennent aux
créations divines ? Saurions-nous (pi'uu arbre
l'homme, ce fut l'œuvre de Dieu. Sans recourir à
se transforme i)ar la greffe en un autre arbre, si
ses Anges, sans abandonner sou ouvrage pour
nous ignorions le concours i]ue riiorliculteur
le reprendre, il le conliinie encore aujourdlmi,
prêle à cette création de Dieu /
en \ertu de cette a(ti\ité qui, si elle s'iider-
;^0. Cependant nous ne pouvons douter que
rompait, laissei'ait retomber dans le néant tous
l'homme aussi bien que les arbres n'ait d'autre
les êtres avec les Anges eux-mêmes.
Créaleiu' (jue Dieu. Nous croyons fermement
' Ci-dessus, liv, viu, ch. ix, xxl-xxvi. que la fcnnne est sortie de l'homme sans être le
fait d'une union charnelle, encore que la côle de

l'homme ait pu être taçonnée par les Anges


dans cette création di\ine nous croyons au
;

même titre (ju'en dehors de tout commerce des


LIVRK IX. — CRRATIOX DE LA FEMMK. 26H

soxps il s'osi foniKMiti homino, quand la soiucii- desquelles ils n'apissiMit plus. Tous les êtres trou-
fi> Iji'iiii- (rAI)raliani a servi aux Anges i)mir M'id ilaus ces causes primordiales les |)rincipes
lormer le .Méilialeiir '. Un'n" païen voie dans ce (pii les Ibut naiire, se dt'Nelopper et périr, chacun
diMililepiOilige une doiiMe ai)siii(lili', si>il mais ; selon sou espèce. Delà vient qu'une levé ne sau-
poni'qiKii un (Ihiélien (|ni leeoniiait à la lellre rait sortir d'un grain île blé, ni un fifrain de blé

latbrnialioii du .Messie, s"iinaf;inerail-il (|ne (oui d'une lève, (pi'un animal ne saurait engendrer
est allé^'oii(|ne dans la loinialiond'Kve ? Quoi! i'iiouune, ni l'homme mi animai, .^u-dessiis du
un honinio peut naitre d'iuie l'euune Vier);(', cours naturel des cliosi>s s'élève la pinssanc(; du
el une lennue ne sauçait \euir d'iui luiunne ? (liéaleur, qui trouve en ellc-mêini! le moyen de
Lt'seiiid'iuie vierge contenait legernie d'un lioni- laite produire à toutes ces causes des effets,

nie, el les lianes d'iui lionnne n'aurai(>nl pasreu- (pTelles ne l'ontenaient pas à l'origine. Je ne
l'erniéle gernied'iuie teunue, el cela quand l'iuie veux point tlire (pie Dieu n'ait pas mis en elles
élailuneseivaiilequidonnaitlcjouràson mailrc, la possibilité de se prètei' à ses desseins : car,
l'aidi'cun servileur (pii produisait sa sei'vanle? son pouvoir absolu ne repose pas soi' une force
I,e Seigneur aurait pu aussi loruuM' son pro[)re aveugle, mais sui- une puissance intelligente; il

corps d'une côte ou tle tout autre nieud)redi' la tire de chaque cause au moment (pi'il a (ixé,
Vierge mais au lieu de reuuuvelei' pour ce
: l'effet dont il a\ ail aupiua vaut établi la possibilité.

corps le prodige autre Ibis accompli, il nous a Ainsi des lois dilferentesrèglenl les divers modes
donné un enseignement plus utile, et fait voir, de lagermination chez les plantes, déterminent
dans la personne de sa mère, que l'ien n'est à la IV'condité ou la siérililé selon les âges, valent
coudanmer dans la chasteté. à I hoiiune le don de la parole reliisé aux ani-
maux. Les principes de ces lois el autres sem-
CHAPITRE XVII. blables ne résident pas seulement en Dieu; ils

ont été déposés par lui dans les choses el créés


LK l'KIXai'K DONT L.\ FEM.ME DEVAITSORTIR KTAIT-
avec elles. Mais qu'une verge, un rameau des-
IL Itli.NPEKMÉ D.VNS LA ORÉATION' VIRTUELLE
séché, poli, sans racine et sans communication
DE l'homme W SLMÈ.ME .IOLR '!

avec le sol, Heurisse


el se couvre tout-à-coup

31. Ici s'ollre une question: l'acte par lequel de fruits '
;
qu'une femme
dans sa jeu- stérile

Dicucréa virtuellcnient l'homme uifdc et femelle, nesse enfante sur ses vieux jours '>; qu'une

comniedit laGenèse ',el le lilà son image et à sa ànesse parle •'; tout en admettant que Dieu a

ressemhiancc, lorsqu'il forma |)Êimiti\enient les


rendu ses créatures capables de devenir l'instru-
causesgénéi-alrices tle tous les êtres, cet acte, dis- ment de pareils prodiges, puisqu'il ne saurait
jcimpliquait-ikiae lafeuunesorlirait des tlancs en tirer des effets qu'il leur aurait d'avance in-
terdit de |)rodiiire, sous peine de surpasser sa
de riionune par une conséquence rigonreuse,
ou ne faisait-il que rendre sa formation possi- propre puissance, il faut bien reconnaître qu'il
ble, de telle sorte que la naissance de la femme leur a attribué, en dehors des lois ordinaires de

loin d'être établie nécessairement en piincipe, la nature, un mode spécial et inhérent à leur

aurait été un mystère caché en Dieu ? Je veux création même, de rester plus coinplétenient

lépondre à celte question, selon mes lumières soumises à la puissance souveraine de sa vo-

sans rien trancher : toutefois, j'espère que les lonté.

esprits pénétrés de la vérité chrétienne, en pe-


CHAPITRE XVm.
sant mes paroles, trouveront ma proposition in-
contestable, dussent-ils l'entendre pour la pre- LA FORMATION DE LA FEMME A EU UNE CAUSE SYM-
mière Ibis. BOLIQUE.
32. La nature, dans son cours ordinaire, est
soumise à des lois cpii [iioduisent même chez 33. Par conséquent il y a des effets dont Dieu
les êtres vivants certaines tendances auxquelles conserve en lui-même la cause mystérieuse, au
la volonté la plus rebelle »e peut se soustrau-c. lieude la déposer au fond même des choses :

Dans le monde physique, les éléments ont cha- pour produire ces effets, il n'agit point en vertu
cun leurs propriétés, qui déterminent la mesure de cette providence qui établit les êtres dans
des effets qu'ils peuvent produire et en dehors les conditions essentielles de leur existence.

'
Gai. m, 19. — ' G«n. i, 27. '
Nombr. xvji. 8. — ' Gen. .icnii, U ; xxi, 2. — ' Nombr. xxn, 28,
Mi J)E LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

mais en vertu de cette volonté souveraine f|ui « sent elles-mêmes par la formation de l'Eghse la
>ïouverne à son gré ce qu'elle a créé à son gré. « sagesse si diversifiée de Dieu ', » on a quel-
Ainsi en est-il de la grâce, qui assui-e le sa- que raison de croire que, si la semence bénie k
lut des pécheurs. La nature faussée par les qui la promesse, a été faite, a été disposée, parles

écarts de la volonté, est incapahlc de repren- Anges, aux mains d'un médiateur, tous les mi-
dre sa droiture par elle-même elle a besoin
: racles qui se sont accomplis pour figurer d'a-
(lu secours de la grâce pour se régénéi'er. Que vance ou prédire l'avènement de celle semence,
riiomnie ne se désespère donc pas en écoutant ont eu lieu avec le concours des anges, en re-
ce passage « Quiconque marche dans celte voie,
: marquant toutefois que celui-là seul crée ou ré-
i< ne reviendra jamais sur ses pas '. » On veut génère lesèlres « qui féconde les travaux de(|ui-
ici faire sentir lou,-; le poids de l'iniquité, alin « conque plante ou arrose -. »

que pécheur attribue son letour non à ses


le

mérites mais à la griice, et ne s'enorgueillisse CHAPITRE \l\.


pas de ses œuvres '^.

DE l'extase d'.^D.VM.
34. Aussi, d'après l'Apôtre, le mystère de la
grâce est-il caché, non dans l'univei's qui ne 3(i. où Dieu fait entrer Adam, afin
Ij'extase
renferme que les causes naturelles des êtres à de le le sommeil, peut donc fort
plonger dans
venir, au même titre que Lévi a payé la dime bien s'entendre d'uu ravissement qui le mil en
dans la personne île son aïeul Abraham mais •',
communication avec la société des anges et le
en Dieu, le créatem- de l'univers. Par consé- fit pénétrer dans le sanctuaire de Dieu, afin qu'il

quenl, tous les prodiges que Dieu a accomplis


y apprit le mystère qui ne devait s'accomplir
en dehors des lois ordinaires de la nature, pour (pi'à la fin des temps •'. Aussi en voyant près de
figurer le mystère de la grâce, ont eu leur prin- lui, à son réveil la femme tirée d'une de ses côtes,
cipe caché en Dieu. Or, s'il faut ranger parmi laissa-f-il comme
dans un transport
échapper,
ces miracles la formation de la femme d'une prophétique, cesparolesoùl'Apôtre voit unmjstè-
côle de l'homme pendant son sommeil si elle ; re si auguste ':« C'est là l'os de mes os et la chair
prit dans cet os un principe de force, tandis que ' lie iiiachair:oiirapi'lleia femme, parce qu'elle a
l'homme s'affaiblit pour elle, en échangeant « été tirée de l'hoinine. L'homme quittera donc son
cette côte pour une chair délicate on doit ; « père et sa mère pour s'attacher à son épouse, et
admettre qu'au sixième jour la création primi- «ils seront deux en une seule chair. «Quoique l'E-
tive de l'hounne « mâle et femelle » n'impli- criture atlribue ces paroles au premier homme,
quait pas la naissance de la femme, telle qu'elle le Seigneur dans l'Evangile les cite c omme étant
s'accomplit, mais la rendail seulement possible; sorties de la bouche de Dieu même « N'avez-vous :

autrement un changement de volonté aurait pu « pas lu, dit-il, que celui qui créa l'homine au

produire une œuvre en contradiction avec les « commencemeni, les cn'a niàle el femelle, et
principes que Dieu avait volontairement établis. « qu'il dit : A cause de cela, l'iiomme quillera son
Quant à la raison qui devait empêcher cet ou- « père et sa mère el s'allachera à sa feimiie, et ils

vrage d'apparaître sous une forme indépendante « seront deux dans une seule chair ">
? » C'est
des causes primitives, elle était renfermée en afin de nous faire comprendre qu'Adam prononça
Dieu, l'auteur de toutes choses. ces paroles par une inspiration proplu'li(iue, en
•35. L'Apôtre ayant donc déclaré « que ce mys- sortant de son ravissement. Mais terminons ici ce
« tèreétait caché dans le sein de Dieu, afin (pie les livre et cherchons à renouveler par l'altrait d'une
« principautés et les puissances célestes appris- question nouvelle l'allenlion du lecteur.
' Kph. 111,9, 10— = I Cor. III, 7.—' Ps. LX.\li, 17. — »E|.li. v.
'
ProT. 11, 19. — 2 Ephés. 11,9. Héb. vu, 9, 10. 31-32. — •Matt. XTX, 4.
LIVRE X.

DE 1. ORIGINE DÉS AMES.

tnre ne dit pas que Dieu ait souffle sm- sa faci-


(.UAI'IÏUE IMU'.MIKK. :

pourcpioi aduielire alors qiu^ l'àuie de la femme


vient de l'homme, puisque l'Ecriture n'en dit
I.'VMK l>i; \.\ IV.MMV. EST-E1.I.K IIIUMKE DE CELLE
également rien? Loin d<' si Dieu, à niesiuT l.'i :

DE l'homme.
(pie les houuues naisseni, crée leurs âmes connue
il a créé la première, l'Ecriture a gardé natu-
I. Si nous siu\ioiis l'ordre liisloricjiic, nous
rellement le silence, puisqu'il suffit d'une sim-
jiiiiions inainfcaant à Irailer de la faute du pre-
ple induclion poui' ajjpliipier à toutes ce ([u'elle
Mais connno rKcriUuv l'xjioso la
inici- lionnni'.
a dit d'une seule, .\dmettons d'ailleurs que l'E-
du rorps de la l'ennue sans parler de
l'orinalion
criture ail voulu ici éveiller notre alteidion : si
son Anio, ce silence doit nous frapper et faire
la formalion de la femme avait différé de celle
examiner avec attention s'il y a, oui ou non, des
de riionuue en ce point, que l'àme, chez la
raisonnenienis dc'cisifs contre ceux cpii préten-
femme, s'était produite par [tropagation, tandis
dent que l'ànie sort d'une autre àmc, comme que l'àme et le corpsde l'homme avaient eu. cha-
le corps d'un auti'e corps, par une sorte de trans-
cun leur origine, l'Eci^itui-e aurait dn iusistei'
fusion, (pii lait passer des parents chez les enfants
précisément sur cette différence, pour empêcher
les premiers principes de chaque substance.
de raisonner par analogie. Mais comme elle
Tout d'aliord ils soutiennent (]ue Dieu, en soui-
n'a point dit que l'àme de la femme s'était for-
llant siu- la fîice de Thoinnu' qu'il avait tiré de
mée de celle de l'honune, il est plus vraisem-
la |)oiissière, créa l'âme dont toutes les autres
blable de croire qu'elle a voulu prévenir toute
devaient sortir, au même titre que le corps du
hypothèse en dehors des idées qu'elle venait de
premier homme contenait ceux de ses descen-
nous donner sur l'origine de l'àmc chez l'homme;
dants. En efl>t, Adam avait étéformé le pre-
en d'autres termes, nous indiquer que ces deux
mier, Eve le fut ensiiite; on nous apprend d'où
âmes élaient également un don de Dieu même.
viennent le corps et l'ànie d'Adam, l'un de la
De plus l'Ecriture aurait troiné une occasion bien
lerre, l'autre du souille de Dieu; quant à la
naturelle de formuler cette pensée, sinon au
eniiue, après avoir raconté conunent elle fut tirée
moment où la femme se forma, du moins lors-
d'une cote de l'homme, on ne dit pas qu'elle fut
(ju'elle tut faite et ([u'Adam s'écria « Voilà l'os :

également animée par le souflle divin; on laisse


« de mes os et la chair de ma chair ' . » N'é-
croire ({u'elle est sortie àme et corps de celui qui
tait-ce pas en effet le moment d'ajouter dans une
avait d'abord été forme. Or, disent-ils, ou l'Ecri-
effusion d'amour et de tendresse : Et l'àme de
ture devait rester muette sur l'àmc de l'homme,
mou àme? Mais ce simple raisonnement ne
alin de nous laisser deviner uo conclure par nous-
suffit pr.s pour résoudre un problème aussi im-
mêmes que son àmc avait été un don de Dieu;
portant : nous n'avons encore établi aucune |)ro-
ou bien, était d'empêcher qu'on n'assi-
si son Ind
position incontestable.
gnât la pour origine comiuune à l'àmc et
tel le
au corps, elle ne devait pas rester nuietle sur CHAPITRE II.

l'àme de la femme, de peur qu'on n'y vît par


une erreur toute naturelle, si toutefois c'est une RÉSUMÉ DES C0NSIDÉR.\T10>iS FAITES D.4NS LES LIVRES
erreur, nue substance transmise. Donc, ajou- PRÉCÉDENTS SIR l'ORIGIME DE l'.\ME.
tent-Us, si Dieu n'a point souillé sur la face de
la femme, c'est unicpieinent parce que son àme 3. La première question à examiner est de
s'est formée de celle de l'hoimne. savoir si l'Ecriture interixétée attentivement,
:2. Ce n'est là qu'ime présomption, et il est fa- comme nous le faisons, de|)uis le début de la Ge-
cile de laconibathe. L'àme de la femme, dit -on. nèse, permet ici le doute : ce point éclairci, nous
s'est formée de celle de l'homme, parce que l'Ecri- ' Gen. u, 23.
266 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

aurons à choisir l'opinion la plus probable, ou


à fixer, s'il y a incertitude absolue, les bornes où CHAPITRE III.

il faut savoir se renfermer. Il est incontestable

riiomme à son TROIS HYPOTHÈSES SUR l'ORIGINE DE l'aME.


que le sixième jour Dieu fit

image, et qu'en mèuic temps il le créa mâle et


4. Mais si l'âme de la femme, loin d'être éma-
femelle >. Nous avons reconnu précédemment ',
de l'homme, a été, connue pour
née de celle
que la ressemblance avec Dieu était propre à
un présent de Dieu, et que la création
celui-ci,
l'âme, tandis que la distinction des sexes était
des âmes soit successive, il faut ou reconnaître
spéciale à la chair. Une foule de témoignages
qucFânia de la femme n'a aucun rapport avec
imposants, que nous avons alors discutés en dé-
lesœuvres de la création primitive, ou supposer
tail, nous ont empêchés de rapporter au sixième
que le principe de la formation des âmes a été
jour la formalion de l'homme et celle de la établi en général, comme celui de la reproduc-
femme, tirés, l'un de la poussière, et l'autre
tion des coi'ps, et par conséquent retomber dans
d'une côte de l'honune, la formation de la
l'opinion si bizarre et si insoutenable que les
femme évidemment postérieure à l'époque
étant
des anges, ou, ce qni
âmes humaines sont fille
où Dieu créa toutes ses œuvres du même coup ^. révolte encore davantage, du ciel physique,
Nous avons alors essayé de formuler notre opi- et même d un élément plus gro.ssier encore.
nion sur l'âme de l'homme, et une discussion
Puisque la vérité absolue nous est cachée, il
aussi complète qu'approfondie nous a conduits
faut examiner qu'elle est l'opinion la plus vrais-
à croire, ou du moins à regarder conmie probable semblable.
que la création de l'âme chez l'homme se rat-
Or, il y en a trois : je viens en dernier lieu
tachait aux œuvres primitives de Dieu, tandis que d'après la seconde,
d'expliquer la première;
la formation de son corps était implicitement
Dieu n'aurait créé primitivement qu'une seule
comprise dans matériel. Par là, nous
le monde âme, celle du premier homme, et toutes les âmes
avons conséquences
évité plusieurs opposées aux
en viendraient par une sorte de propagation ;

témoignages de l'Ecriture, par exemple, que le d'après la troisième, les âmes seraient successi-
sixième jour l'honnne aurait été formé du Union même virtu-
vement créées, sans avoir préexisté
de la terre et la femme tirée d'une de ses cotes; des six jours.
ellement dansles œuvres |)riniiti\es
que l'homme n'aurait été créé à aucun titre le
De ces trois hypothèses, les deux premières n'ont
sixième jour; que le corps aurait été créé en prin-
rien qui contredise la théorie de la création pri-
cipe, tandis que l'âme, (jui constitue la ressem- En que
mitive où Dieu fit tout à la fois. effet,
blance de l'homme a\ ec Dieu, ne l'aurait pas été. dans
le principe de l'âme humaine ait été créé
Enfin nous n'avons pas été contraints d'admettre de père, de comme
un être destiné à lui servir
une opinion qui, sans contredire l'Ecriture, est
prennent nais- âmes
telle sorte que toutes les y
bizarre, insoutenable, et d'après laquelle l'âme
sance et soient créées par Dieu qui les donnerait
de l'hounne aurait été renfermée en principe dans
aux hommes en même temps que les parents
un être si)irilucl créé tout exprès, sans que l'E- ou que l'ànie ait été créée,
fourniraient le corps ;

criture en aucune mention parmi les ouvra-


fit
sans avoir une raison
(juand fut créé le jour,
ges de Dieu, ou même qu'elle aurait été impli- semblable à celle qui ren-
d'être préexistenle,
citement comprise dans les êtres déjà créés, au
ferme implicitement un enfant dans son père,
même titre qn'im enfant aujourd'luù est inqili- comme le jour, le ciel, la
et qu'elle se soit faite
citement renfermé dans les parents qui doi\ent
terre, les luminaires du dans les deux cas, ciel;
lui donner le jour, et par conséquent, qu'elle au-
on peut dire, en même temps cpie l'Ecriture :

rait été la fille d'un ange ou, ce qui est plus in-
« Dieu fit l'homme à son image. »
soutenable encore, une transformation de la
Quant à la troisième liypothèse, il est bien
r;.
matière.
difficilede Li concilier avee le princiite incon-
Ocn. I, 27. — -Ci-dessus, lir. VI, Tin. — ' Kccli. xtiti, 1.
testable que l'homme fut créé, le sixième jour,
à l'image de Dieu, et ne reçut qu'aiirês le sixième
jour une forme visible. Prétendre que Dieu crée
des âmes nouvelles sans les avoir créées le si-
xième jour, soit en elles-mêmes, soit dans un
principe qni les contint an même titre que le
LIVRE X. — DE L'ORFCINE DES AMES. 2fi'

\n'\v reiil'eimo son fils, et sans les avoir faites con-


joiiilciiiiTil avec ei's (riivre.-! à li l'ids iiiaclii-M'cs CHAPITRE IV.
et fi>iii|)li'tes (loiil il se reposa le s('|ilièiiie JDiir;
c'estrendre inutile le soin niinulieux avec le(|uel I>K QrELQLKS I'IUM:il>KS INCONTESTABLES A l'HOPOS
rKciilurenonsaiipiend (|ne DIimi acheva Imiles iiE i.A \ATruic r,T î)i: î.'oiuiaM-; dk i.'ame,

ses(eii\resle six ièi ne jour cl les lron\a excellen-


7. Tout d'abord, tenons pour certain (pu' l'Ame
tes: car c'est supposer qu'il devait a|)rès cette épo-
ne peut ni se changer eu corps cl devenir ma-
(pie créer des sul)slanees sans les avoir l'orniées
térielle, ni dégénérer en àinc déraisonnable et
priinili\enient en elh's -nièniesou dans leurs cau-
s'idenlilier avec celle des bêles, ni enlin se con-
ses. Voudrait-on dire que Kieu garde enlui-nièni("
fondre avec la substance divine, et (pregaiement
le piiu! ipe selon le([ue] il cn-e an nionienl de
ni li'cor|)sni l'ame deshètesni lanalui'edivinc ne
la conceplioii clia(pie ànie en particulier au lien
peuvent se ti'ansformer et devenir âme humaine.
de l'avoir élaltli dans la créaluie? Mais comme
In point aussi inconteslable, c'est (pie l'àine bu-
l'ànie aujourd'Iuu est de la niùnie espèce <pie
maiiie n'est nepeutétre(prunecréa(ionde Dieu.
et
celle ipii lut donnée à l'iionnue le sixième jour
( )r, si Dieu ne l'a fait sortir ni de lui matière, ni d'une
et lui valut sa ressendilance avec Dieu, on ne
.ime sans raison, ni de sa propre substance,
saurait dire (pie Dieu crée aujourd'hui une
la (pieslion se réduit à sa\oirs'il l'a tirée du iK'ant
àuie qu'il n'aurait point alors achevée. A ce
ou d'une substance spirituelle et intelligente.
rnometd, en elTet, il a\ail créé lame telli' «pi'il
Uu'il la fasse de rien, après avoir acliev(5 les
la crée tMicore aujoiud'liui : par conséquent il
(eu\res où il une thèse
('réa tout à la fois, c'est
ne crée jas aujourd'hui une espèce nouvelle,
(pi'il serait par tro[) fort de vouloir démontrer,
sans rapport a\ec les lenvres (pi'il acheva pri-
et s'il existe des preuves sérieuses en faveur de
mili\emeu[. Loin donc (li> s'accoMq)lir eu dehors
celle opinion, je ne les connais pas. Qu'on ne
<les causes que contiennent les êtres futurs et qui
vienne pas nous imposer des idées (pie l'homme
ont été déposées dans l'univers, l'opération
ne peut comprendre; le pourrait-il, je m'éton-
divine n'en esl(|ue le de\eloppemcnl; lescoips
nerais foi't qu'on pût les communi(pier à d'au-
humains n'étant qu'uni> propagation à travers les
tres es|)rils qu'à ceux ([ui |)ar leurs propres forces
siècles d'une cause primitive, c'esten vertu d'une
et sans avoir besoin des lumières d'autrui sont
loi analogue (|ue doi\eut s'y associer lésâmes,
capables de les concevoir. En de telles matières
telles (pie Dieu les crée et les unit aux organes,
il est plus sûr de laisser de ci')té les opinions hu-
(i. iNous pouvons maintenant, sans craindre
maines et de se borner à peser attentivement le
de contredire l'Ecriture sur la création primi-
sens des témoignages divins.
tive, faire ressortir la pro'iahililé |ilus ou moins
grande d'une de ces trois hv|)olhèses; entrons
CHAPITRE V.
donc dans la question en lui donnant, avec
l'aide de Dieu, tout le dévoleppement qu'elle
l'ame n'est LXE émanation ni des anges, ni DES
comporte. Si nous ne pou\ons arriver à ce degré
ÉLÉMENTS, NI DE LA SIBSTANCE DIVINE.
d'évidence qui exclut le doule, tâchons au
moins de nous l'ormer une opinion qu'on i)uis-
•S. L'opinion d'après laquelle Dieu donnerait les
s<^ adopter eu attendaul Li pk-iiie lumière,
anges pour principe et comme pour pères aux
sans tomher dans l'absurdité. Si nous ne pou-
âmes, ne s'appuie sur aucun témoignage des Li-
vons alleindre ce modeste résultat, si les argu-
vres canoni(iues du moins je ne le connais pas. A
:

incuts se balancent et se détruisent, nous prou-


plus forte laison ne sauraient-elles sortirdes élé-
\erous, en restant dans le doute, «pie nous ir('\i-
nieuls matériels. Ou sera peut-être embarassé
tons pas les recherches laborieuses mais les altir-
.par passage du prophète Ezéchiel annonçant
le
mations inconsidérées. De la sorte, celui (pii
la irsurrecliou des morts, (pii fait venir l'esprit des
posséderait la vérité, daignera nous la commu-
quatre venisdu ciel, alin qu'il les vivilie par son
niquer quant à ceux dont l'assurance tient de
:

souille et les ressuscite. Voici ce passage : « Le


la présomption plus qu'elle n'est fondée surTau-
de rEcriliire ou sur l'évidence du raison-
lorité
<< Seigneur me dit : Prophétise et adresse-toi à
< l'Esprit. Prophétise, fils de l'homme et dis à
nement, ils ne iledaigneront |jas de partager nos
« l'Esprit : Viens des quatre vents, souffle
doutes.
« sur ces morts et qu'ils revivent. Je prophé-
"268 DE LA GENÈSE AÏJ SENS LITTÉRAL.

« tisai donc, coinme le Seigneur me l'avait mier homme, ou qu'il les crée d'après une loi
» commandé, et l'Esprit entra en eux, et ils re- qu'il s'est réservé d'appliquer, il est toujom's et
« prirent la vie, et ils se tinrent sur leurs pieds absolument le ciéateiir des âmes.
« et ils formaient une troupe considérable K >> 10. Ces paroles du Psalmiste : " Il a formé le

Ces paroles cachent selon moi une propiiétie et « cœur de chacun d'eux ', » à prendre le cœur
nous révèlent que les hommes ressusciteront pour une expression qui désigne l'âme, se con-
non-seulement dans la campagne où s'est mon- cilient également l)ien avec l'une ou l'autre des
trée la vision, mais encore dans le inonde entier, deux hvpothèses que nous discutons. Dieu, en
désigne par les vents qui soufflent des quatres effet, forme chaque âme soit qu'il la tire de celle

coins de l'univers. N'allons pas voir en effet la qu'il souffla sur la face du premier honune, de

substance même de l'Esprit-Saint dans le souffle la même manière qu'il forme chaque corps, soit

que Notre-Seigneur tira de son corps pour le (]u'il les façonne et les envoie dans chaque corps,

répandre sur ses disciples, quand il leur dit ; ou même qu'il les façonne dans le corps même
« Recevez l'Esprit-Saint non; Jésus-Christ '', >> ou il les a envoyées. A mon sens toutefois, ces
révèle que le Saint-Esprit procède de lui comme paroles ne s'appliqueid qu'à la régénération qui
le souille procède de son corps. Mais le monde s'accomplit chez l'ame par la vertu de la grâce et
n'étant point uni à Dieu hypostatiqucment, y renouvelle l'image de Dieu. « C'est la grâce,
l'onime le corps de Jésus-Christ l'est au Verbe, « dit l'Apùtre, qui vous a sauvés par la foi. Cela
Mis unique de Dieu, nous ne saurions dire que « ne vient pas de vous, un pur don de Dieu,
c'est

l'àme sort de la sidistance divine, au même titre que « cl non 11' Iruit de vos œuvres, de sorte que
le soulfle, qui part des quatre coins de runi\ers, K l'homme ne peut s'en rapporter la glob'e. En
est formé de ses éléments. A mes \ cu.\, ce souffle « effet, nous souuues smi (eiiirc, crées en Jésus-
était une réalité et un symbole, connue on peut " Christ, pour opérer de bonnes œuvres *. » 11

très-bien le conce\oir par le souffle tpie le Sei- ne faudrait pas voir dans cette grâce de la créa-
gneur tire de son corps, et lors mémo que le tion une formalion matérielle il faut l'enten- ;

prophète aurait moins exposé la résurrection de dre d'après ces paroles du Psalmisle : « Dieu,
la chair, telle qu'elle doit un jour s'accomplir, « créez en moi un cœur pur ^. »

({u'il n'aurait révélé par uneallégoricle rétablisse- 11. J'expliquerai la même manière
encore de
ment inespéré d'un peuple détruit eu apparence, le passage où que Dieu façonna l'esprit
il est dit

par la vertu de l'Esprit qui a rempli l'univers ^.


de riiomme au dedans de lui '. L'acte par le-
quel Dieu crée l'âme et l'envoie dans le corps y
CHAPITRE VI.
semble distinct de l'acte par lequel il la crée
TEXTES nE l'ECRITIUE yiT PELVENT s'ENTEXORE dans l'homme lui-même, c'est-à-dire la renou-
velle. M.iis supposons qu'il soit ici question de
UE LV CRÉ.XTIOX successive ET DE L.V
DES AMES. l'origine de Ihonnue et non de sa régénération
TR.\KS.MISS10.X
par la grâce ce texte peut s'expliquer dans les
:

9. Voyons maintenant en faveur de quelle hy- deux opinions. Dieu en effet peut tirer de l'âme
poth'se l'Écriture fait pencher la balance : en unique du pi'emier honune le germe de l'âme,
d'autres tenues est-il plus coniorme à l'Écriture pour ainsi dire, et le fai.onnei- au dedans de
([ueDieu ait créé et donné au premier homme l'homme afin de vivifier son corps il peut encore ;

une âme destinée à produiir toules les autre?, répandre l'esprit de vie dans Ii^ corps par une
par une loi analogue à celle qui devail faire sortir autre voie que la transmission, et le façonner
du corps d'Adam le corps de tous les hommes, dans cette organisation mortelle, pom' faire de
ou que Dieu crée successivement les Ames riiouuue une âme v'vante.

connue il en a créé une pour le premier homme,


sans que celle-ci ait servi de principe générateur
CHAPITRE VIL
aux autres ? Le passage d'Isaïo « C'est moi qui :

sagesse A OLELLE IIM'O-


d'lX 1'.4SSAGE de la :

Cl ai créé tout souffle ^, » touten s'a])pliquant à


THÈSE EST-n. FAVORABLE ?
l'âme, comme on le voit clairement par le con-
texte, s'explique dans les deux hypothèses. En \-2. Voici un texte du livre de la Sagesse (pii

effet, que Dieu tire les âmes de l'àme du i)re-


demande un examen .|»lus attentif : « J'ai ivçii

Eïech. XXXVII. 9, 10. - Jean, xx, 2î Sag. 7. ' Isaïc,



<
2 I,
'

I.VII, 16.
1 Psal. XXXII, 15. » Eph. II, 8-10. — 3 Ps. L, 12. — ' Zach. xii,l.
LIVRE f\. — DE LORICINE DES AMES "2«»

« une i\mc bonne, el devenant nieillciir. jf m'unis " li'iir poussière. Vous rem errez votre souille, elles
« à lin corps |iur'. " Ce lexle.cii vïïci, semlilc èlre «seront irét'es et vous renouvellerez lafaeedela
favorable, non àriivpollièse seloiilai|uelle tontes « lerre '. "Ces|)arolesseuiblenl olîrir un sens fa-
tes ànies sortiraient (rniii' seule par propa^iafion, vorable à ceux (pii pensent (pie les parents pro-

mais à celle (pii tail desceiKh'e les âmes d'en diiiseul l'àme aussi bien ({ne le corps de leurs
haut poufs'assoLnerà un ct)ips. o, l'avais reçu une enlanls. LeI'salmisIe en disant « huirsoiillle >• pro-
« Ame bonne, »qu'est-(^e àdirei'll semblerait (|iie pre, indi(pieuiie transmission d'homme à hom-
dans le principe où les âmes sont reiil'ermées, si me. Mais les hommes ne sauraient rendre le
loiitelois ce principe existe, les unes sont bonnes, souilleaux moils pour les ressusciter, parce (pie
les autres non, el (pi'elles en sortentselon la des- loin de le rec(>\oir d'une àme humaine comme
llnée im|)o-;ée à cbaipie homme, ou que Dieu, au inoiuent (l(> la naissance, ou le recoii\re par
au moment d(> la conccplioii, de la naissance la |)uissance An Dieu « (pii ressuscite les morts. ^ «

uièmc, en eréi' de bonncscl de mauvaises quise Voilà pourquoi le l'salmisle dilà la fois le souffle

reparlisseid au hasard. Il serait par trop étrange des hoimueset le souille de Dieu le souffle des :

(pie ce texte lui favorable aux parlisans de la liouimes(piaud ils meurent, le souille de Dieu
création snceeslve des âmes plutôt qu'à ceux (piand ils ressuscitent. D'autre partceuxqui pré-
(pii prétendent que les âmes sont envoyées dans tendent que lésâmes ne sont point transmises ])ar
tel ou tel cor|)s selon les mérites qu'elles ont ac- les parents, mais que Dieu les envoie, penveid
(|uis dans une vie antérieure. Quelle antre raison concilier ce texte avec leur opinion, eu disant
(pie celle des bonnes œuvres pourrait expliquer (pielesouffleest propre à riionuiuMpiandilmeurt,
l'arrivée d'une àine bonne ou mauvaise dans le en ce sens (pi'il était en lui el (pi'il eu soi't; et

corps d'un homme? Elles ne peuvent être telles (pi'il a|)partient à Dieu au moment de la résnrec-
assurément dans l'essence qu'elles tiennent de lion, parce qu'il rend l'àme qu'il avait envoyée
Celui (plia créétoutcslessubstancesellesa créées au moment de la naissance. Ainsi ce témoi-
excellenles. Mais loiiideiuoi la pensée de conlre- gnage ne contredit aucune des deux hypo-
dircTApùlre qui nous révèle (jue les enfants de Rc- thèses.
becca.étantencoredanssonscin, n'avaient fait ni 14. A mon sens, ce texte s'entendrait mieux
bien ni mal ava'it leur naissance, et qui prouve pai' de la grâce divine qui nous renonvelle intérieu-
là (pie cette prédiction : « L'ainé seraassujéti au rement. L'orgueilleux qui vivait d'après les ins-
« plus jeune, » n'avaitaucun rapport à leurs œu- tincts de l'homme terrestre et qui rapportait
vres, mais à la volonté de celui (pii appelle '.Ou- tout à sa vanité, voit se retirer en ([uehpie sorte
blions donc un monieni ce passaj^e du livre de la son souille propre, lorsipi'il se dépouille du vieil
Sagesse; car, il faut aussi tenir compte de l'opi- homme, de bannir l'orgueil
qu'il s'abaisse, afin
nion vraie ou fausse d'après laquelle ces paroles pourdevenir parfait, et qu'il dit au Seigneur avec
concernent uniipiement l'àiiIe du Cinàst, Média- un humble aveu « Souvenez-vous que je suis :

iem' entre Dieu et les hommes. S'il le faut, nous « poussière 3, )) après avoir entendu cet avis de
examinerons pliis bas ([uel est le sens de ce texte, l'Ecriture Pourquoi la cendre et la poussière
: «

à supposer qu'il ne s'appli(pie pas à Jésus-Christ, « s'enorgueillit-elle? Coutenq)lantavec les yeux

de peur de contredire un dogme enseigné par «de la foi la justice de Dieu pour ne plus cher- ,

l'Apôtre, en croyant (|ue les âmes acquièrent des «cher à établir la justice de ses œuvres, * » il se
mérites personnels, avant de vivre unies à un méprise comme dit Job, se dessèche et ne
corps. voit en lui que cendre et poussière, et c'est ainsi
« qu'il rentre dans sa poussière. » Mais quand il
CHAPITRE VIII.
a reçu l'esprit de Dieu, il s'écrie « Ce n'est plus :

d'un passage du psalmiste ne contrarie : qu'il « moi qui vis, c'estJésus-Chiistciiiivitenmoi, •'>
»

aucune de ces hypothèses. et c'est ainsi que la grâce du nouveau Testament


« renouvelle la lace de la terre » et multiplie les
13. Examinons maintenant cet autre passage :
saints.
« Vousretii'erezleursouflle, elles défailleront dans
I
Psal.cill.29. 30.— 2 IIMachab. vil. 23. — '
es. eu, 14.— > Rom.
'Sages. VIII, 19,2 1— i Rom l.v, 10-13. x,3.— i fîalat 11. 20.
•210 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉKAL.

CHAPITRE IX. CHAPITRE .\.

d'iw passage de l'ecclésiaste : yr'it s'apim.i- IL EST Ill-^FICILE DE ISESOlDr.E LA yi ESTIO.N DE


QLE I.NUIFFÉREMMEM ALX DELX HYPOTHÈSES. l'0R1(;1>E DE l'a.ME avec les TEXTES DE l'eCUI-
TIRE SAIME.
Uuanf à ce passage de FEcclésiaste « Que
lo. :

« la poudre retoui'iie dans la Icne, coninie elle 17. Il est donc hien difficile ttfe rassemhler
y
«avait été et que l'esprit retourne à Dieu, ipii
,
sur cette question des passages décisi.'s. Ou peut
«l'adonné ', » loin de favoriser une liypollièse aux sans doute recueillir des textes, les citer, leur
dépens de l'autre, ils'appliqueindifféremment au donner môme de longs développements; mais
deux. Ce texte, diront ]e.s uns, prouve l)ieu que si ou ne peut en déduire des vérités aussi iucon-
l'àme, loin d'émaner desparents, est donnée par testaldes que la création de l'àme par Dieu, et
Dieu car, tandis que la poussière, c'est-à-dire
;
le don qu'il y eu a fait au premier lionime, je

la chair qui en a été faite, rentrera dansla pous- ne vois pins couunent ou pourrait trouver dans
sière, l'esprit retournera à Dieu qui l'axait les lémoigMa,iies de l'Enilme la solution du pro-

donné. Oui sans doute, répondront les autres, blème. S'il avait été écrit que Dieu souffla éga-
l'esprit retourne à Dieu qui l'adoiuié au premier lement sur la face de la femme, apiès l'avoir
liomme quand il souflla sur sa face ^, et la pous- formée, et qu'elle devint ainsi nue âme \ivante,
sière, en d'autre termes, le corps liumain ren- ce serait pour lui un rayon de lumière, et nous
trera dans la terre dont elle est venue primiti\e- pourrions croire que l'àme assoiiée aux organes
ment 1.,'àuie ne doit point retourner aux pa-
:*. n'es! point une émanation de l'àme des pareids.
rents, l)ien qu'elle en sorte par une transmission Toutefois il restei-ait encore à savoir ce qu'on de-
qui remonte jusqu'au premier liomme, au même vrait penser de la génération, acte d'après lequel
que titre la chair ne retourne point après la mort l'homme sort d'un autre homme. Car la pre-
aux parents, dont elle est un produit manifeste. mière l'emuR- ne se forma point par cette voie,
Par conséquent, de même que la chair rentre, et à ce litre, on pourrait dire que l'àme qu'elle
non dans les corps dont elle s'est formée, mais reçut de Dieu ne fut point une émanation
dans la terre dont elle est soi'tie pour composer de celle d'Adam, i)uisqu'clle n'en sortit point
le corjis du premier liounne; de même l'esprit comme un enlaid de son père. Si seulement
ne letonrne point aux hommes qui l'ont trans- nous avait révélé quele premier onfatit
l'Écritin-e
mis, mais à Dieuqui l'avait uni àla chair du pre- d'Adam et d'Eve reçut son âme, non par pro-
mier homme. pagation, mais par mi don d'en haut, c'est alors
16. Ce textesert du moins à nous rappeler que qu'on aurait pu induire la même chose pour
Dieu a tiré l'àme qu'il donna au premier homme toutes les âmes, malgré le silence des livres
du néant, ei non de quelque être préexistant, saints.
counneil tira le corpsdela terre par conséquent :

l'àme ne peut revenir qu'à celui là même qui l'a


CHAPITRE Xi.

domu'e; n'avant point été foimée d'une créature,


Dr PASSAGE DE SAINT PAIL nEL.\TIF Al' PÉCHÉ
elle n'y saurait rentrer comme le corps rentre
or.lGlXEL, ET DU BAPTÊME DES E.XFANTS.
dans la terre. Or
formée d'aucun être,
elle n'a été
puisqu'elle a été faite de rien. C'est donc à son
IS. Examinons encore un passade de l'.Vpôlre
Créateur, à celui (jui l'a faite de rien, qu'elle se
et \ oyons si, sans contredire ces hypothèses, il
rend, du moins quand elle accomplit son retour.
se concilie également avec chacune d'elles;
Toutes en effet ne l'accomplissent pas, parce qu'il
voici ce passa,ue « Un seul homme a introduit
:

y a <' des esprits qui passent , comme dit l'Ecri-


" le péché dans lemonde et par le péché la mort,
« ture, et qui ne reviennent point ^. »
« qui a ensuite passé dans tou> les hommes,

' Eccl, xll, 7. — 2Gen.li, 7. '


Ibid. IM. 19, — ' r.s. l.xjiVil. 30.
« tous ayant péché en lui; > et un peu pl:isbas :

« De même donc que par le péché d'un seul,


« tons les houunes sont fombésdans lacondam-
« nation de la uioi'l, ainsi par la justice d'un seid
« tous ont reçu la justilicalion de la vie. Car de
« même que parla désobéissance d'iui seul, beau-
LIVKK \. — Dl-; i;()IU(;iNK DKS AMES. -J-l

« coiii» uni .'lé faits |Wrli('iirs. .uiisi par rolii-is-

« sauce trimsinilhoaucoupdi'viiMKlroiil justes'. »


ClIAPITUK XII.

C'est sur ee passaf^ede r.Vpolie cpie les partisans


I,\ CON'C.l l'ISCENCK UK I.A CIIAUt TIK.NT A I.'a.MI-; KT
(le fJiNpollièsede la pnipa;.;ali()n des âmes elier-
A LA CIIAUt TOI r i;.Nsi:>iiii.i;.
elieiit à édilier leur système. S'il n'\ (pieln eliair,
diseiit-ils, pour a\oir péelié et pour rendre ité- ^0. \a\ V('ri!é même se lait cnlendre dans ces
eheur.ees paroles n'entrainent pas rigoureuse- paroles : « La chair convoite coidic rcs|)rit, et
ment poui- eonsé(|uenee (pie les Ames des parents « l'esprit contre la chair '; " toutefois, s'il esl un
l)roiluisent telles des eulaiils: maissil'àme seule point incoiitcslable pour le savant comme pour
pèche, (pu'lipie anioree(iueluijettcla chair, com- l'ignoranl, c'csl (pie la chair ne pomrait sans
ment admetlie « (pielousaieni pc'clK'en Adam, »
rfiuie éprouver aucune convoitise. Le principe
sans reconnaître (pie leur âme, comme lein-
de la concujtiscence charnelle ne réside donc
corps, soit issue d'Adam? Comment seraient-ils pas exclusi\cment dans l'âme, à plus forte raison
(levenns p(''cheurs par la d(''soI)(''issanc(^ d'un dans la chair: il suppose l'âme et la chair;
seid, si leur àmcconnne leur corps n'avait point l'âme, sans laquelleaiicun plaisir ne serait pen.u ;

p(''ch('' en lui ? la chair, sans laquelle aucune volu[)té sensuelle


lil. l'renons f;arde en et'Iet de l'aire de Dieu n'evislerait. Lors donc que l'Api'dre nous parle
l'aideur du [U'clié, en supposant (pi'il associe entend
de la chair (jui convoite conire l'esprit, il

lïime à nn corps qni la condamne à pécher, sans aucun doute les plaisirs que la chair pro-
oubien(radnieltre(pi'ind('^pen(lamment de .U'sus-
voque dans l'âme et lui l'ail goûter de concert
Christ, le seid (pii n'ait point p(''clir' en Adam, avec elle, à l'encontre des plaisirs purement spi-
d'antres ûmes peuvent s'affranchir du péclu' oii- rituels. Par exemple, éprouve un désir l'esprit
jïinelsansleconconrsdelajiTàce, enrecomiaissant sans aucun mélange de volupté ou de liassions
(pie le p(Vh(' orifiinel est relatif au corps (pi'on sensuelles, « quand l'âme soupire ardeinuienl
tient d'Adam, et nonàl'àme. C(Hte (lerni('re opi- « et se se sent défaillir après les parvis du Sei-
nion est si opposée à la foi caiholifiue, (]ue les « gneur '. » C'est un plaisir également spirituel
parents s'empi'essent de faire recevoir à leurs en- qu'on propose à l'âme, en disant « Tu as désiré :

fant nouveau nés la grâce du saint l{apt(~>me. Or, « la sagesse; garde le conmiandement et le
si le haplénie affranchit du péché originel en ce « Seigneur te la donne ''. » Quand l'esprit com-
(pii tou'helecorps, sans purifier l'âme, on potu-rait mande aux organes et les fait docilement con-
se demander avec raison quel nialhenr il ré- courir à un désir qui n'enflamme que lui,
sulterait pour les âmes de sortir du corps, avant par exemple, quand on prend un livre, quand
le baptême, dans un âge si tendre. La \ertn de on s'occupe à lire, à écrire, à engager on à
ce sacrement ne s'étend-ellc qu'à la chair, sans suivre une discussion; quand on donne un
produire aucun effet sur l'âme? Il lâudrait alors morceau de pain à un pauvre alTamé, bi-ef,
baptiser jusqu'aux morts. Mais, connue nous quand on remplit les autres devoirs de miséri-
\ oyons par lii pratique constante de rEglis(>,
corde et de charité, la chair se montre obéis-
(pi'on se précipite au secours de ceux qui vivent sante sans irriter la concupiscence. Mais ces
encore, dans la crainte de rencontrer un ca- nobles plaisirs dont l'âme seule est capable en-
davre |)0in' le(piel il n'y aurait plus rien à faire, trent-ils en lutte avec les plaisirs que la chair
il faut bien en conclure, à mon sens, (ju'il n'y a fait sentir à l'âme? Alors il est vrai de dire que
point (le nouveau-né qui ne soit un Adam, en la chair convoite, s'élève contre l'esprit et l'esprit
corps et en âme, et qui n'ait besoin de la gi-àce contre la chair.
de Jésus-Christ. En effet, cet âge est incapable 21. Le mot chair dans ce passage n'est que
par lui-même de faire le bien et le mal, et l'âme l'âme agissant conformément aux suggcsiions
serait en ce moment innocente et pure, si elle de la chair, fait dire que
d'après l'analogie qui
ne sortait d'une tige corromi>ue. Que les parti- l'oreille entend ou que l'œil voit. Qui ne sait en
sans de l'opinion contraire démontrent qu'une effet que l'âme seule entend par l'organe de

telle âme subit une juste condanmation, quand l'ouïe et voit par les yeux ? C'est la même figure
elle quitte k- corps avant le baptême; ils auront de langage qui permet de dire une main bienfai-
accompli un prodige de logique. sante, la main s'étendant en etïet pour secourir
1 Rom. V, 12, 18, 19, 1 Ps Lxxxiii, 3. — sEccli. 1, 33.
573 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

autrui. Si en parlant des yeux de la foi, Eeuls avec Dieu, laquelle gouverne la chair et la l'ail

aux
capal)los d'atteindre les vérités inacccssililes se révolter contre l'esprit. Enfin nous ne sommes
sens, on a pu dire « Toute chair verrale Sauveur
: point condamnés à dire que certaines âmes
« envoyé de Dieu « i|uoi(ju'elle ne
'
puisse le
; pourraient se passtM- de la grâce de .lésus-ChrisI,
voir que par l'ànie qui la fait vivre, et quoique pour répondre Quel est donc
à cette objection :

pour voir pieusement, avec les yeux du corps, le ce crime (pii rend pour l'âme d'un
si affreux
Christ sous la foi me dont il s'est revêtu pour jeune enfant le malheur de sortir du corps avant
nous, il aucun mouvement de concupis-
n'y ait d'avoir reçu le baptême, si elle n'est coupable
cence, mais seulement un acte de la chair et ; d'aucune faute personnelle, ou si elle ne vient
(}u'ainsi il ne faille pas voir une pure opéra- pas de cette âme qui la première a péché en
lion de l'esprit dans ces mots « Toute cliair : Adam '/

« verra le Sauveur envoyé de Dieu ^; » combien 28. Il n'est point ici question des enfants
est-il ])liis juste encore dédire que « la chair d('jà grands auxquels on ne peut, selon (pielques
« convoite » lorsque l'àmc al;andonnc le corps à personnes, reprocher aucune faute, avant l'âge
la vie des sens ou même accède aux désirs de la de quatorze ans, époque où ils entrent dans l'a-

chair; lorsipi'il n'est point au pouvoir de l'àme dolescence. Nous serions de cet avis, si l'en-
d'être au-dessus de pareilles con\oilises, aussi fance n'avait d'autre vice que l'appétit gros-
longtemps (pie domine dans les membres le sier du sexe; mais qui aurait lefront de soutenir
péché, je veux dire, ce fougueux penchant à la que le vol, le mensonge, le parjure ne sont point
volupté qui uait dans ce corps de mort en puni- des péchés, à moins d'être intéressé à voir de
tion du péché au sein duquel nous naissons tous pareils métfiits se commettre impunément? Or,
et qui fait de nous, avant le don de la grâce, les fautes de ce genre se multiplient chez l'enfant
des enfants de colère », ce péché contre lequel et si elles paraissent moins graves que dans un
luttent ceux qui sont établis en grâce ? Ils ne âge plus avancé, c'est qu'on espère que la raison
réussissent pas sans doute à l'étouffer dans ce s'étant fortifiée avec les années, les règles de la
corps mortel ou ]dutùt mort, mais il l'empêchent saine inorale seront mieux comprises et plus do-
d'y régner. Or, pour que le péché ne règne pas, cilement pratiquées. Mais je ne veux point ici

il faut qu'on n'obéisse point aux désirs qu'il ])arler de ces enfants, encore qu'on les voie pro-
fait naître, je veux dire à la concupiscence ([ue la tester de toutes leurs forces, en actes et en pa-

chair rebelle irrite contre l'esprit. Delà vient role, conlie la vérité ou la justice, quand elles
que l'Apôtre ne dit pas que le péché ne soit : contrarient cet instinct de volupté qui, malgré
plus dans votre chair mortelle, il savait trop leur âge, trouble leur âme et leur corps; et (piel

bien que le péché a pour nous un attrait qui est est le motif ipii leur fera paraître légilimi' l'at-

la suite de la corruption originelle mais « Que ; : trait pour le plaisir, la répugnance pour
dou- la

« le péché ne domine plus dans votre chair leur, sinon un amour secret du mensonge et de
« mortelle, pour vous faire obéira ses désirs dé- l'injustice? .l'ai en vue les enfants plus petits,
« réglés et n'abaiulonnez par vos membres au non [laree qu'ils naissent trop souvent de l'a-
« péché comme des instruments d'iniquité *. » dultère. La corruption des mœurs n'est point un
motif pour reprocher à la nature ses bienfaits; fi

CHAPITRE XIII. ce litre, en eflét que le blé semé par


, il faudrait
un voleur ne germât pas dans la terre; il fau-
DE l'avantage qu'on TROUVE A COMPRENDRE drait encore que l'iniquité des parents retombai
AINSI LA CONCUPISCENCE. DU PÉCHÉ CHEZ LES — sur eux, malgré leur retour au Seigneur; coiii-
ENFANTS. bien moins en seront châtiés les enfants, s'ils

mènent une vie vertueuse!


Ce point de vue offre plusieurs avantages;
22.
d'abord il n'y aucune inconséquence à dire que CHAPITRE XIV.
la chair sans l'âme serait étrangère à la concu-
l'existence du péché chez les enfants ET LEUR
piscence; puis on "ne tombe pas dans l'erreur
BAPTÊME PKOUVENT-ILS LA PROPAGATION DES
des Manichéens, qui, voyant avec raison (pie la
AMES?
chair sans l'âme serait étrangère à la concupis-
cence, ont hnaginé une seconde âme, en lutte Le problème seposeavec toute sa force, quand
'Luc, 111.6. —2 Ibid.— -^Eph. 11, 3. — » Rom. VI, 12, 13, on se demande comment l'âme, à cet âge où
LIVRE X. — DE i;aRir.lNE DES AMES. 273

("lie n'.i ciicoro coiiiinisaiiciino faiilt> persoiiiiclli', \i\ii' (le la vie de l'esprit, elle doit nécessaire-
pciil l'tiv jiislilii'c |i;ir l'olit'issiincc d'un seul ment rece\oir le saci'emenl du M(''dialeiu', afin

liomine, si cllf ii'csl |>,is cniiiiiililf pur la (l('S(i- (pi'elle doive à la loi de ceux (pii l'aiment l'af-

Wissance d'un seul, l'cl csl le iiiisdinii'nicnl ilc franchissement qu'elli> ne peut obtenir par la

ceux (pii i)i'('"l('inl('iil (|iic les runes sdiil piodiiilcs sienne. Cai' ce sacren\enl a la vertu de remettre
par celles des parents, liien (pi'elles n'aieid, la peine du péclie originel même dans l'âne le

iiunine les eorps eux-mêmes, d'antre créatenr plus tendre : sans ce secours, on ne saurait domp-
(pie Dien ; eai' ce sérail mie eri'enr de croire ter dans la jeimessc la concupiscence de la chair;
(pie les pai'cnls puissent produire même le la chaii" elle-même domptée, ou ne saurait entrer
corps sans lo concours de Celui (jui a dit : en possession de la vie ('lernelle, sans la grâce de
« Je t'ai coniui avant de te (brmer dans le sein Celin (pi'on s'est appliipie à mériter. Le baptême
« de ta mère '. » estdoue indispensable atout nouveau-né vivant,
-2i. Voici connneni on leur r(''i)ond. Dienciée et pom- ai'i'acliei' l'àme à la c(Uila;.;ion de la chair
donne snccessivemeni aux lionnnes des âmes de péché, la((uelle ne peut rester en counnuuica-
nouvelli>s, atin qu'en vi\ant bien dans cetleeliair liou avec l'âme de l'enfant sans la rendre inca-

de i)(''cli(> issue du péelii' orii^inel, et (pieu domit- |)abl(^ d(> toute affection spirituelle. La fauteori-
tant la concupisciMice delà chair sous riulluence nelle pèse sur l'âme même apiès la moi't, à
de la grâce, elles acfpiiêrent des mérites qui moins qu'elle ne l'ait expiée avant d'être sortie
leur vaudront de à un état pins partaitjiasseï' des liens du corps par la vertu du sacrifice uni-
avec le même
au temps de la résurrection,
corps (pu^ du véritable prêtre, lo sacrifice du Métiia-

et de vivre éternellement en Jésus-Christ dans teur.

la société des Anj^es. >[ais connue l'àme est as-


CHAPITRE XV.
sociée par une mystérieuse union à des organes
de boue, périssnt)les, ayant pour ainsi dire leur MÊME SUJET.
racine dans la chair du |)éclié, il faut, pour qu'elle
puisse les vivifier d'ahord et les gouverner en- 26. Et (pi'arrivera-t-il, dira-t-on, si les pa-
suite avec le temps, qu'elle soit plongée en lents |tar incrédulité oupar imiiffférence, négli-

(piehpie sorte dans l'oubli. Si elle était incapable gent d'accomplir ce devoir ? On pourrait en dire
lie sortir de ce désordie, on pourrait alors s'en autant des personnes plus âgées; car, elles peu-
prendre au Créateur maisi)uisqu'elle est capable :
vent mourir subiteuuMit ou tomber malades chez
de secouer cette torpeur, de sentir son oubli et des gens qui ne leur ofïriraient aucun moyen
de revenir à son Dieu puisqu'elle peut, dis-je, ;
de recevoir le baptême. Or, ajoute-t-on, ces per-
mériter les dons de sa miséricorde et de sa vé- sonnes ont de plus des fautes personnelles à
rité, d'abord par une pieuse conversion, ensuite expier, et, à moins d'en recevoir le pai'don, il

parla fidélité persévérante à garder ses comman- sera de toute justice quelles soient punies des

dements qui l'empêcherait de sortir peu-à-peu


;
fautes dont elles se seront volontairement ren-
de son souuueil, de s'éveillei- à la lumière intel- dues coupables en cette vie (piant à l'âme d'un ;

lectuelle, (in de la créature raisonnable, et de enfant, à qui on ne saurait reprocher d'avoir


clioisir la vie du bien ]>ar l'effort d'une bonne concfracté les souillures de la chaii- de péché, si
volonté ï Cet effort toutefois est au dessus d'elle, on ne veut pas admettre (pi'elle sorte de la pre-
sans le secours de la gi'àce de Dieu par l'entre- mière âme qui ait péché; comme ce n'est pointsa
mise du Médiateur. Si l'homme néglige ces de- faute, maisla nature et Dieu même qui l'ont unie
voirs, il sera un autre Adam en chair comme au corps, pourquoi serait-elle exclue de la rie
en âme; s'il les accomplit, il n'aura plus d'Adam éternelle, quand l'enfant n'a point trouvé de
que la chair; en vivant selon la loi de l'esprit, il main secourable pour le faire i)aptiser? Dirait-

purifiera des souilluresdu péché la chair cou- on qu'il n'en résultera pour elle rien de fâcheux?
pable qui lui est venue d'Adam, et méritera de ,\ quoi donc servirait de recevoir cette grâce, s'il

recouvrer un corps pur en passant par la trans- n'y a aucun inconvénient à en être privé?
formation que la résurrection fait attendre aux 27. Uuelle réponse peuvent faire ceux qui pré-
saints. tendent (pie les enfants re(;oivent une âme nou-
23. En attendant que l'àme puisse avec l'âge velle, ([u'elle n'a point été produite par celle des
parents, et qu'on cherche à appuyer cette thèse
'
Jérém. l, 5.

S. AuG. — ToM. IV. 18


-274 bE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

sur rÉeriture parce qu'on l'y trouve ou du moins ble d'un poids qui doit se faire sentir après la

qu'elle n'ycst pas combattue ?.le l'avone, jcnerai mort, si l'àme n'en est pas délivrée en cette vie
jamais lue, nienlendul'aire.Toutel'ois, pournepas par le sacicment du Médiateur; ce bienfait est
négliger la cause des absents, je ne voudrais pas accordé d'eu haut à tout àme dont Dieu prévoit
cacher une idée qui se présenterait à mou esprit la pieuse existence si elle vit jus(|u'à l'époque où
pourdéiendreleur système. Or, ilspourrai(>nt en- commence la pratique de la vertu, quand il veut,
core observer ipie, sachant par sa prescience la par un secret particulier, qu'elle prenne nais-
vie que mènerait chaque âme, si elle restait long- sance dans un corps pom- le quitter aussitôt
temps dans le corps, Dieu accorde le bienfait du après. On oppose à cette réponse une objection :

baptême à celui doutai! |)révoit la piété, à l'Age qui c'est que nous sommes dansuneincertilutle tci'ri-
la comporte, si une raison mystérieuse n'exigeait ble sur lesalutdesàmesqui, après une \ic pieuse,

pas qu'il mourût d'une mort prématurée. Oui ont rencontré la mort dans la paix de l'Eglise,
c'est un m\ stère impénrliablepom- l'intelligence si nous devons ètrejugés, non-seulement siu' les

humaine, ou du moins pour la mienne, qu'il œuvres que nous aurons faites, mais encore sur
naisse des enfants destinés à mourir bientôt ou celles que nous aurions pu faire dans l'hypothèse

même après leur naissance mais ce mystère est :


où notre vie se serait prolongée. Si Dieu tient
tellement insondable qu'on ne peut en tirer au- compte non-seulement des fautes passées, mais
cune conséquence pour ou contre ces deux hypo- encore des fautes futures et si la mort n'empêche
thèses. Or, connue il faut, renoncer à l'opinion pas la responsabilité des crimes qu'elle a préve-
suivant laquelle les âmes seraient envoyées ici- nus, le juste ne gagne rien quand une mort |ré-
bas, d'après leurs mérites dans une vie anté- maturéeempLche le vice de corrompre son àme ? '

rieure, et qu'elles seraient d'autant plus vite af- Car Dieu connaît d'avance ce vice pourquoi :

franchies qu'elles auraient commis moins de donc n'en fait-il pas de préférence la règle de ses
fautes, pour ne pas contredire r.\pôtre ([ui nous jugements, si, pour empêcher que la contagion
assure qu'avant de naitre on ne fait ni bien ni du péché originel ne gâte l'àme d'un enfant des-
mal on ne
; saurait expliquer ni dans l'hypothèse tiné <à mourir, il décide qu'elle recevra le bien-
de la création successivede^ âmes, ni dans celle faitdu baptême, par ce motif seul qu'il sait d'a-
de leur propagation, par ([uel secret la mort ar- vance qu'elle mènera, si la vie se prolonge pour
rive plustôt pour les uns, plus tard pour lesautres. elle, une existence de piété et de foi?
C'est un mystère insondable dont on ne peut 29. Voudi'ait-on rejeter ce raisonnement par
tirer ])arti, à nos yeux, pour réfuter ou pour cela seul qu'ilm'est personnel? Eh bien que ceux
soutenir l'une de ces deux opinions. qui voient dans leur hypothèse l'expression de
la vérité citent des témoignages de l'Ecriture,
proposent des aguments (jui lèvent toute équi-
CHAPITRE XVI.
voque, ou du moins prouvent que leur opinion
ne contredit pas le passade significatif où l'Apô-
MÊME SU.1ET ENCORE.
tre, mettant en relieflagràcequifait notre salut,
dit « De nu'me que tous meurent en Adam,
: de
28. Quand on demande h ceux qu'embarras- '<mêîue tous seront vivifiés en Jesus-Christ '-, >>

sait déjh la mort des petits enfants, quelle peut


ou celui-ci « De même que par la
: désobéis-
éh'e la nécessité de recevoir le baptême pour sauce d'un senlbeauroupontété
« faits pécheurs,
les âmes, ne sont point sorties de celle
si elles
« ainsi par l'obéissance d'un seul beaucoup de-
dont la désobéissance a fait beaucoup de péi-hcnrs,
« viendront justes. » Parces nombreux pécheurs,
voici leur l'éponse Tous sont devenus pécheurs
:

il entend tous les hommes sans exception, puis-


au point de me de la chair ; sous le rapport de
qu'il disait plus haut qu'en Adam a tous ont pé-
l'àme, ceux-lîi seuls deviennent péehenrsqui vi-
«ché Le mot tous et l'nsage d'administrer le
3. »
vent dans le mal an lieu de taire le bien ici-bas ;
baptême aux enfants ne permettent donc pas de
le baptême donc nécessaire aux âmes en gé-
est
faire une exception eu leur faveur, disent lespar-
néral et en particulier à celles des enfant^^, parce
tisansdel'hypolhèscde la propagation des âmes;
qu'il serait funeste pour elles de quitter la vie
et cette conséquence semble juste tant qu'on n'a-
sans avoir reçu ce sacrement; car, la contagion
vance pas, pour la comballre, une proposition
du péché communiquant ;\ l'àme par la chair
se
de péché, .se glisse dans les membres et les acca- '
S.ig. IV, 11 - 2 1 Cor, XV, 22. — 1 R.im. v, 19, 12.
LIVKh: \. - l)K l.(tlU(;iNK DKS AMF'IS.

l'vicIciiU' cl inillt'iiiiMil i)|)|(usi'f à rKcriliiri' <iii pèreouson teni-


c'est-à-dire, lecaraclére de son

un li-moif^nafro do rHcrilure iiu^ine. péiament.Uuant au\ evpressions :« Et devenant


' m(>ll!eur je me suis uni à un coi'ps pur, »
ClIAlMTIiK Wll on |)eut lesentendic de sa mère el l;'s concilier
avec cellesijiii piécèdenl; car, étant admis qu'il
hlSClSSKI.N m Ti;\TE ItE l.V SAIIKSSK CITK I>LIS
est sortide l'àme el du coi-ps de son père pour
H ALT.
eidrer dans les entrailles sans souillure de sa

80. Examinons iniiinli'iiaiit, ilans les limites


mère, on peutconclurequ'il n'a point été conçu
i(ne nous ti'aee le |)lan di' ecl on\raf;e, le texte
dans ce flux de sang qui, dit-on, conunnniipie
dont nous avons toiitàriieine ajourné ladiscus- à l'enlant im espiit loiud, ou dans l'iiiipiidicité

sion : '< J'étais un enfant d'heureux naturel, Jai


(le raduitère. l'ar cons('(iuent, ou ce te\ti' de la

« reeu une âme l)onne, et devenant meilleur je Sauesse esl plus favorable à l'hypothèse de la

icme suis uni à un coips pur '. » Ce texte send)le tiansmission des âmes, ou il ne prouve ni poui'

favorable <i ceux (|ui |»iélendeiil (|ue les ùines,


ni contre, si l'on réussit à l'iuteiprétei' aussi d'a-

loin d'être produites par celles des près l'opinion contraire.


i)arents,
viennent ou descendent d'en haut etsonlen\oy-
CHAPITOE Wlll.
ées par Dieu dans le corps; en revanche, les ex-
pressions . « J'ai reçu une ànie bonne, » ne laissent DE l'a.ME Ul CHRIST LE TEXTE
: l'RÉCKbEN f LA
pas d'être fort embarrassantes pour eux . cai', ils COXCEUNE-T-IL?
croient sans ain'un doute que les âmes envoyées
par Dieu dans les cori)s sortent d'une source m. Si l'on \eid appli(|ucr ces paroles au Sei-
unique dont elles sont comme autant de ruisseaux gneur, sous le lapport de la nature humaine
ou du moins sont île la même esiièce, ils n'ad- revètuepar le Verlie, on trou\e dans le contexte
mettent pas que unes soient bonnes ou meil-
les des traitsquine conviennent guère à une si haute
leures, les autres mauvaises ou pires encore. majesté, principalement cet aveu que fait l'au-

D'où viennent en etîet les différences ipii ren- teur un peu plus haut, lorsqu'il dil « ([u'il est né :

dent les âmes boimes ou mauvaises, à divers H la semence d'un homme épaissie dans le
de
degrés, sinon des habitudes librement contractées «sang 1. » Ce n'est point ainsi qu'est né le Filsde
ou des tempéraments, qui font plus ou moins la Vierge, dont l'incarnation, comme aucun
plier l'àme « sous le poids de ce corps corrompu chrétien n'en doute, s'est faite sans le concours
« qui est un faix pour l'àme '? » Or, aucune àme, d'un homme. Sans doute quand le Psalmite dit :

avant de descendre dans le corps, n'a contracté « Ils ont percé mes pieds et mes mains et ils ont

d'habitudes en vertu d'actes personiicis. et ce « compté tous mes os; m'ont regardé, consi-
ils

n'est pas en songeant à un corps moins lourd que « deré ; ils mes vêlements et ont
se sont partagé
l'auteur de ce passage a pu dire de lui-même : «jeté le sort sur ma robe, » ces traits ne convien-
« J'étais un enfant d'heureux naturel, j'ai reçu nent qu'à Jésus-Christ; mais il dit au même
« une àme bonne et devenant meilleur je me endroit « Mon Dieu,
: regardez-moi, pourquoi
« suis uni à un corps pur. » Ainsi il était bon avant « ni'avez-vous abandonné ? La voLx de mes péchés
de descendre dans un corps, mais cette bonté « éloigne ma délivrance 2; » et ces paroles
ne tenait nia la dilïérence des mœurs, i)uis([u'il ne lui conviennent qu'en tant qu'il représente
n'avait point acquis de mérites dans une existen- notre corps dégradé, parce que noussonnnes les
ce antérieure, ni à quelque dilïérence dans le menbres de son corps. Il est dit dans l'Evangile
corps, puisqu'il était bon avant d'y descendi'e. même: j L'enfant croissait en âge etensagesse. »

.\ quoi tenait-elle donc ? Or, si quelques expressions, qui avoisinent dans


31. Pour les partisans de la transmission des le livre de la Sagesse le texte que nous citons,
âmes, le texte, à part les exprc-^sions : « Je me peuvent s'appliquer àNotrc-Seigneur, parce qu'il
« suis uni à un corps, «se concilie bien avec leur a pris les humbles dehors de l'esclavage et que
opinion. L'auteur, en effet, aprèsavoirdit :« J'é- le corps de l'Eglise devient un par son union

«tais unenf:intd'heureuxiiaturel, ajoufeimmé- » avec son Chef, je le demande, peut-on conce-

diatemenl : « et j'ai reçu ime àme bonne, » pour voir un enfant de plus heureux natiucl que ce-
montrer les causes auxquelles tenait cetavantage. lui dont les vieillards admhaient la sagesse à dou-

'S,lg. VITI.19,20. — 2Ibid. IX, 15. 'Sag. vil, 2. — =Ps. XXI, 17. 18. 19,2.
276 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

ze ans '? Y-a-t-iluiieàme meilleure que la sien- Providence : ou plutôt, comme on peut le dire
ne? Quand bien uiènic l'hypollièse de la trans- avec confiance, cette expression a été choisie
mission des âmes sérail prouvée au lieu d'être en vue de nous montrer que des œuvres antéri-
débattue, on ne devrait pas pour ce niolif croire eures ii'ou point élevé à cettegrandeur sublime
l'àme issue de l'âme du premier prévaricateur, l'àme avec laque Ile le Verbe s'est lait chair pour
puisque autrement la désobéissance d'un seul habiter parmi nous ', le moi sartiri excluant tout
ferait un pécheur de celui-là même qui par son mérite dans une vie antérieure.
obéissance en a affranchi beaucoup de la con-
damnation elles a justifiés? Qnel sein est plus CHAPITRE XIX.
chaste que celui de cette Vierge qui, loul en a-
l'.VME UL christ x'ÊTAIT POl.M U.V>S ABR.VH.\.M ; ELLE
vantpris sou corps à la tige du péché, a conya
x'eST POINT VENUE PAR TRANSMISSION.
en dehors de toute communication avec le pé-
ché, en sorte que le Christ a pris naissance dans 34. L'Epitre aux HébreiLx renferme un passage
ses entrailles sans être soumis a la loi qui, inhé- qui mérite toute notre attention. L'Apôtre mon-
rente aux organes de ce corps de mori, contre- tre la différence qui sépare la sacerdoce de Lévi
dit celle de l'esprit ? C'est cette loi que les saints du sacerdoce du Christ, sous l'emblème prophé-
de l'ancien Testament ont dominée dans le ma- tique du grand-prèli-e Mclchisédech « Consi- :

riag:e, et n'ont laissé aj;ir qu'autant qu'il le fallait « dérez, dit-il, combien grand a dû être celui à
dans l'intérêt de l'espèce. Tout en s'incarnanl «qui le patriarche Abraham lui-même a donnéla
dans une femme, conçue d'après le mode dont la « dîme des plus riches dépouilles. Ceux des en-

chair de péché se transmet, comme sa concep- « fants de Lévi qui ont reçu le sacerdoce ont ordre,
tion s'est accomplie autrement que celle de sa « d'après la loi, de lever les dîmes sur tout le
mère, sa chair, loin d'être corrompue par « peuple, c'est-à-dire, sur leurs frères, quoique
le péché, n'eu a pris que la ressemblance. S'il a « sortis comme
eux du sang d'Abraham. Et voi-
étécondamné à mourir, ce n'est point à cause « là que ne partage point avec eux la
celui qui
de ces mouvements involontaires, quoique la vo- « même origine, aprisles dîmes d'Abraham lui-

lonté doive les dominer, (pii éclatent dans la chair «mème, et il a béni celui à (pii les promesses a-
et qui s'élèvent contre l'esprit '
: il n'a pas pris « vaient été faites. Or c'est une maxime incontes-

un corpsseulement pour arrêter la contagion du '(table que celui qui bénit est au-dessus de ce-
péché, mais pour payer à la mort le tribut « lui qui reçoit la bénédiction. De plus, quand
qu'il ne devait pas, et pour faire briller à nos « il s'agit des Lévites, ce sont des hommes mortels
yeux les promeses de la résurrection :c'est ainsi « qui reçoivent la dîme, et quand il s'agit de
qu'il nous a tout ensemble délivrés delà crainte « Mclchisédech, c'est un homme que l'Ecriture
et donné l'espérance. « nous représentecomme toujours vivant. Si j'ose
',i'd. Du on me demande où Jésus-
reste, si « le dire, Lévi, qui reçoit la dime, l'aen quelque
Christ a puisé son àme, j'avoue que sur ce sujet « sorte payée dans la personne d'Abraham car :

j'aimerais mieux écouter des personnes plus ver- « il était renfermé en son aieul 2. Si donc la >,

tueuses ou plus habiles que moi toutefois, s'il :


prééminence du sacerdoce de Jésus-Christsur le
faut répondre,je dirai selon la portée de mon es- sacerdoce de Lévi éclate dans ce fait, que celui
prit, qu'il la tient, non d'Adam, mais du princi- qui reçutla dîme d'.\braham, en qui Lévi la paya
pe même dont la tient Adam. Si la poussière lui-même, était la figure de Jésas-Christ comme
empruntée à la terre a pu s'animer sous un «ouf- prêtre, il faut reconnaître que le Sauveur n'a
(le aucune intervention de l'homme,
divin sans poinlpayé la dime enla personne d'Abraham; et
le corps emjjrunté à une chair virginale ne de- si Lévi paya ladiine, parce qu'il était renfermé
vait-il pas à plus forte raison obtenir une àme dans Abraham, le Christ ne l'apoint payée, par
honne, quand il s'agissait, ici, d'élever celui qui ce qu'il n'était pas renfermé dans sa personne.
devait tomber là, de faire descendre celui qui
; Est-ce le corps de Lévi, et non son àme, (pii était
(levait nous relever? Peut-être, si cette pensée implicitement renfermé dans la personne d'Ab-
loutefois peut s'appliquer au Christ, le mot sor- raham ? A ce titie, le Christ y était également
tititu siim a-t-il été employé parce queles donsdu conq)ris, puisqu'il est selon la chair de la race
hasard ne sont d'ordinaire que les dons de la d'Abraham, et à ce titre aussi, il a payé ladime.

I
Luc. 11,42.52. —2 Gai. V. 17. ' Jean, i 14. — » Hébr. Tir, 4-10.
LIVRE X. — DE l/ORIGINE DES AMES.

En prouvant donc la supérioriti'Mlu sacerdoce de de t';iuie : ils ne le l'ureid ipi(> sous le rap|)ortde
Jésiis-(',lii'istsiir{'('lindi'Li'viparc("(|iieLé\i |);iy;il;i la cliair, av<'c cette dirtiTcnci' (pic L(''\i dut sa
diineàMek'liisédei'lidaiislapersoiiiK'd'Alualiain, naissance aux désirs de la chair, tandis t\m'. le

(pii renlerniait t'fi,aleiueiit le Christ et par con- (^iuist ne |)rit dans le sein de samôre quelasub-
stMpicMt pa)aitl:id(iiiepiiiirlni,(pie veiil-on iiuiis stanccde son corps. I,a semence en effet se com-
rtnélersiiuiii ijiii' U' (llirist ii'elail|)as renleriiir pose à la fois d'une substance coi|)orelle et d'un
loulcntier dans Alirahaui'JOr, peut-on dire que jirincipe invisible; elle s'est transmise ainsid'A-
soneorpsn'\ était pas iniplicitemenlc(iin[)ris?C'est bi'aham ou i)lut<')t d'.Vdam au corps de Marie,
donc son l'nne (pii en était at)seMte. l'ar consé- dont la conception et la naissance ont été sou-
(luenl i';\ineeoupal)le d'Adam n'a point Iburni, mises à cette loi. Unantan Clirisl, il a pris lasub-
par voie de transmission, r.'une du Christ ; au- stance visible de sa chair danscelle d'une vierge,
trement elle eut été comprise dans la personne mais le |)rincipe de sa conception, loin ded('pen-
d'AI)raliam. dred'un hon>me, a été tout surnalin-el. Il a donc
été renfermé dans les reins tl'Aljraham pour le
CHAPITRE X\.
corps qu'il a reçu de sa mère.
KÈPOXSE qu'on l'OrRUAIT FVIUK DAMS L'hYPOTHÈSE ;^li. Ainsi Lévi a pa\é la dime dans la personne
DE LA TllANSMlSSiO.N DES AMES. d'Abraham, mais n'a dans ses reins qu'au
été
point de vue de la chair et au même titre qu'A-
3o. Ia's partisans de la propagation des Ames braham lui même avait été renfermé dans ceux
se montrent ici cl prétendent ([ue leur sjstéme de son père en effet il est né d'un père comint;
:

est démontré, s'il est prouvé (jue Jjévi, même


Abraham, en vertu delaloiqni soulève la chair
avec son àme, était renlernié dans la personne contre l'esprit et de l'invisible concupiscence,
d'Abraham, qui paya la dime à Melcliisédech qu'une légitime et chaste union ne laisse s'exer-
pour son pelit-lils, et qu'on puisse distinguer cer que dans l'intérêt de la reproduction de l'es-
le Chi'isl d'a\ec Levi à propos de cette oifrande :
pèce; mais le Christ n'a pu payer la dime en la
or, le Christ n'ayant point payé la dime, tout en
personne d'Abraham, puisque sa conception loin
étant irnl'ermé dans l,i personne d'Ahrahatn se-
d'y avoir puisé la blessure enatiré le remède. La
lon la chair, il tant admettre que son àme n'\
(lime même étant une figure de ce remède divin,
étaitpas comprise, et que celle de Lévi y était ren- .le nialaile, non médecin, a du paver
le le tribut
fermée. Pour moi, cet argument me touche peu;
dans la persomie d'Abraham. Car le corps d'A-
je suis plus disposé à entendre les deux parties braham, et même celui du premier homme for-
qu'à me prononcer pour l'une l'autre. ou pour mi'de la terre, contenaijnt tout ensemble la plaie
Ce que je ine suis proposé en citant ce passage, du péché et le remède pour la guérir; la plaie,
c'est de prouNcr que l'iune du Christ n'a point
c'est-à-dire cette loi c[ni soulève la chair contre
pris naissance par transmission. Parmi lesadver- la loi de l'esprit et qui va se comnumiquant
sairesdecettetransmission quelques-uns répon- d'honnne à homme, comme si elle se gravait suc-
tlront peut-être à cet argument et feront valoir
cessivement le remède, c'est-à-dire ce corps
;

un raisonnement qni n'est pas sans importance conçu et formé dans le sein d'une vierge sans
à mes yeux, le voici : Bien qu'aucune àme ne concupiscence, par une pure incarnation, alin
soit renfermée dans les reins d'un père, Lévi fut de pouvoir mourir malgré son innocence et de
toutefois selon la chair renfermé dans ceux d'A- nous donner un gage sûr de laréssurrection. L'â-
braham en la personne duquel il paya la dime; me du Christ n'est donc point née par transmis-
le Christ y fut également renfermé selon la chair sion de la première àme coupable; c'est un point
tout en restant exempt de ce tribut.
En effet A- que doivent admettre ceux mêmes qui croient à
braham contenait Levi dans ses reins d'après le la propagation des âmes. Car, d'après eux, cette
principe qni lait sortir un enfant du germe dé-
propagation se produit par l'acte générateur du
posé par le père dans le
mais sein maternel ; père or la conception du Christ est en dehors de
:

comme la conception du Christ se fil eu dehors la génération ordinaire. D'ailleurs s'il avait été
de cette loi, son corps ne fut point renfermé au compris avec son àme dans la peisonne d'Abra-
même titre (|ue Lévi dans la personne d'Abra- ham, il aurait payé lui-même la dime, ce qni est
ham, encore que Minio en soit issue. Par con- contraire au témoignage de l'Ecriture, puisqu'elle
séquent ni Lévi ni le Christ ne furent enfermés établit sur ce principe même la prééminence du sa-
dans les reins d'.Vbraham sous le rapport cerdoce lie Jésus-Christ sur le sacerdoce de Lévi.
278 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

jamais entier dans mon esprit aidé de la grâce


CHAPITRE XXL de Dieu.

SERAIT IMPOSSIBLE yiE LE CHRIST k'eUT PAS


CHAPITRE XXII.
IL

PAYÉ LA DIME, s'iL AVAIT ÉTÉ RENFERMÉ AVEC D'iN passage de SAINT JEAN PEIT-IL s'EXPLIQIER
:

S0> AME DANS LA PERSONNE d'aBRAHAM. DANS LES DELX HYPOTHÈSES?

87. On va peut-être me dire : Si le Christ a pu 38. Il y a dans l'Ecriture un autre passage que

être implicitement renfermé avec son corps dans nous ne devons pas oublier et sur lequel peu-
la personne d'Abraham sans être soumis à la vent s'appuyer ceux qui prétendent que les âmes
diine, pourquoi n'aurait -il pu y être également viennent d'eu haut; le Seigneur a dit lui-même :

avec son âme sans cire condamné à ce tribut ? « Ce qui est né de la chair est chair, ce qui est

Je réponds : parce que, la substance de l'âme « né de l'esprit est esprit'. » Pout-on trouver

étant simple, il est impossible qu'elle s'accroisse un témoignage plus précis, dit-oa, pour prou-
comme font les corps; c'est un point que recon- ver que l'àme ne naît pas de la chair ? Qu'est-ce
naissent les auteurs mêmes qui considèrent l'àme Cil effet que l'àme, sinon l'espril de vie, créé et

comme corporelle, opinion à laquelle appartien- non créaleur? A ce raisonnement les adversai-
nent la plupart de ceux qui croient, que les Ames res en opposent un autre. Eh! prétendons-nous

sont produites de celles des parents. Or, dans la autre chose, s'écrienl-ils, nous qui disons que la
semence d'où naît le corps il peut y avoir un prin- chair vient de la chair, l'àme de l'àme? L'homme
cipe invisible, destiné h présider à son dévelop- en effet est composé d'un corps et d'une àme, et
pement harmonieux, principe que l'intelligence, nous soutenons que le corps nait du corps par la
et non les yeux, distingue de la matière visible et génération, l'esprit de l'esprit par la concupis-
palpable. Le volume même du corps humain, cence. Encore oublient-ils de nous dire que
par sa dispro])ortion avec le germe dont il Aient, les paroles du Seigneur ont trait, non à la gé-

fait assez \oir qu'il e.-t [)Ossibie d'empruiiler au nération matérielle, mais à la régén{'ralion spi-
corps des cléments qui contiennent la matière rituelle.

visible et non l'invisible principe de la reproduc-


CHAPITRE XXIIl.
tion, comme l'a fait le Christ, dont la chair s'est
formée par un effet surnaturel, sans se propager QUELLE EST l'hypothèse LA PLLS VRAISEMBLABLE?
aux dépens d'un père et d'une luère. Mais qui DE LA COITL'ME OU EST l'EGLISE DE BAPTISER
oserait dire de l'àme tprelle contient un germe
LES ENFANTS.
composé à la fois d'une matière visible et d'un
principeinvisible? Du reste à quoi bon se travail- Ad. Après que nous l'ont
cette discussion, telle
ler pour formuler une vérité que la parole toute permise temps et nos forces, je conclurais
et le
seule est incapable de démoidrer, à moins qu'on (pie les raisonnements et les témoignages de
ne s'adresse à un esprit vif qui devance la parole l'Ecriture ont une valeur égale ou presque égale
et qui n'attend pas tout de la clarté des mots ? dans les deux hypothèses, si la coutume où est
Voici donc ma conclusion : Si l'àme du Clu'ist
l'Eglise <le baptiser les petits enl'ants, ne me fai-
s'estformée d'une autre âme, comme on l'a cru sait pencher en faveur de l'opinion selon laquelle
peut-être, quand nous ne parlions que de son les àines émanent de celles des parents; je ne
corps, elle s'en est propagée sans contracter la \ois aucune réponse à faire à cette opinion sur
souillure originelle; mais si elle n'a pu s'en pro- ce point; si Dieu m'envoie ensuite quelque lu-
pager sans contracter celte tache, c'est qu'elle
mière, s'il accorde même la grâce d'écrire aux
n'en vient pas. Quant à la question de savoir si
docteurs (|ui se préoccupent de ces questions, je
les autres âmes viennent des parents ou d'en le \cn\n a\ec plaisir. Aujourd'hui toutefois je
haut, le démontre qui pourra. Je flotte d'une déclare que l'argumant tiré du baptême des pe-
ma pensée,
opinion à l'autre, sans pouvoir (ixer tits enfanis est très-sérieux, a(in (pi'on s'occupe
ferme uniquement sur ce point, que l'àme n'est de le réfuter, s'il est faux. Car, ou nous de\ons
ni un corps, ni une organisaliou ou, comme abandonner celle question et croire qu'il suflil
disent les Grecs rinirminue de parties matérielles ;
pour la foi de savoir le but où nous conduira une
voilà ce que tout le verbiage du monde ne fera
'
.leîtn. III, 0.
LIVRE X. DE L'ORIGINE DES AMES.

()rij;iri(';"iil'''iii><' que l'un regarde ciiiHinc une cerlilinlc l'Iiypo-


vio pi(Misc, saiisc(innaitirii()ti-('
iiilclli;iiMit(M'st|)orlwavecarilinirhsoii(l(M-unpr()- llièse de la Iransmision des âmes ou i|n'oii l'este
iDiu-hr alors, mêlions di' côlt- loiitc dans le doute, on ne doit jamais aller jus(pi'à
l)li'iiUMiiii 1.1 :

lais.ms nos iV(-li(>r- croire ou dire (pie l'àuie est matérielle, surtout
oiistiiialioa dans le (i<'l'al;
pour évitei' de se ligurer Dieu comme un corps;
rlicsavec coiiscitMicc, (li-nniuloiisuvecluiniilili',
puisque, malgré sa perlecliou, malgré le privi-
iVappons a\iT pi'rsi'vciMnc;'. Si cc-llo coniiais-
inioux que lège de surpasseï- tous les (Mres par son essence,
sanir nous est util.", Ci'lni (pii sait

nous faut nous l'accordora, lui qui il n'en serait pas moins un corps.
nous ce qu'il
donni' lU'quili'uiM'st l)oii à si'senlants Toute-
•.
CHAPITRE \\V.
lois l'usa.iic où l'Eglise, notre mère, est de
i)aptiser les enfants, doit (Mit pris en sérieuse
EUUElIt DE TEUTULLIEN SLU LA NATURE DE l'aME.
eousidération : il ne faut ni le regarder eoinnie
inutile, ni ei'oire qu'il n'est pas une
tradition
41. Aussi quand Terlnllien a cru l'àme cor-
des Apôtres. Cet âge tendre offre un ar-uineut l)orelle, c'est qu'il n'a pu la concevoir comme
d'autant plus sérieux, que le [jreniier il a eu le une subslaniv simple, et qu'il aurait eu peur de
bonlieui- de verser son sang pour le Christ.
raiinihiler en n'en faisant pas un corps; etcon-
séquemment il a été incapable de se former sur
CHAPITRE XXIV.
Dieu une autre opinion. Mais comme son génie
eoNSKyiKxei-: QiK doivent KvriKii les partis.\ns est per(;ant, il découvre parfois la vérité en dépit

DE LA PR01'.\(.AT10N DES AMES. de son système. Quoi de plus vrai que ce prin-
cipe cju'il formule dans un de ses ouvrages :

40. J'avertis de tout mon pouvoir les partisans '(Tout ce qui est corporel est passible • ? » Par
bien
de la propagation des âmes etje les prie de (onsé(pient, dû renoncer à l'opinion
il aurait
s'exanuner eux-inènies, alin qu'ils se convain- qui lui faisait dire un peu plus haut que Dieu
quent que leuràuie n'est point un eoips. Il n'est est un corps je ne saurais croire, en effet, qu'il
:

effectivement aucune substance ipii, par une étu- ait perdu le sens au point d'admettre que la

de attentive, révèle mieux à l'es|)rit le Dieu sou- subslance de Dieu fût i)assil)le et de faire non-
verain et imnuiable, ([ue celle qu'il a faite à son seulement du Christ avec sa chair, avec sa chair
image d'autre part, on est bien près de croire
: et son âme, mais encore du Verbe par qui tout

(pie Dieu est un corps, ou y arrive peut-être


lo-
a été fait, un être passible et susceptible de
giquement, lorsqu'on admet que l'Ame est cor- changer : pour un esprit chrétien ce serait une
porelle. Accoutumé à la vie et aux opérations des impiété. Ailleurs, après avoir attribué à l'àme
sens, on ne veut pas croire (pie l'àme soit d'une la transparence de l'air et de la lumière, il ar-
autre nature que le corps, dans la crainte qu'elle rive aux sens, dont il essaie de faire comme les

ne soit ]>lus rien : h plus forte raison, plus on organes de l'àme, l'homme in-
et il dit : « Il y a
craint ([ue Dieu n'existe pas, plus on craint de « lérieur et l'homme extérieur, un en deux le :

ces
lui refuser un corps. L'imagination entraine « premier a aussi ser yeux, ses oreilles, au moyen
sensualistes avec tant de force vers les représen- « desquels le peuple a du voir et entendre le
tations réelles ou chimériques que l'esprit se for- « Seigneur; il possède enlin tous les organes
me à propos des corps, que sans ces représen- " nécessaires pour la pensée et pour les visions

tations ils redoutent de se perdre dans le vide ; « des songes *. »

de là vient qu'ils se figurent nécessairement la 4-2. Ainsi les yeux et les oreilles qui ont permis
justice et la sagesse sous des formes et des cou- au peuple de voir et d'eidendre le Seigneui-,
leurs, car ils ne peuvent les concevoir d'une sont ceux qui permetleul à l'àme d'avoir des
manière purement spirituelle ; et pourtant, songes. Et pom-tant, si vous aviez vu Tertullien
(piaud la sagesse et la justice excitent leur ad- en songe, il vous soutiendrait que vous ne l'avez ni
miration ou leur inspirent quelijues actes, ils vu ni entretenu, à moins de vous avoir vu à son
ne disent point le coloris, les traits, la taille, les for- tour. Enlin supposons que l'àme se voie elle-
mes (pii ont frappé leurs regards. C'est un sujet même en songe, quand les membres du corps
([ue nous avons déjà ti'aité ailleurs et que nous sont immobiles et (lu'elle prend l'essor à la
traiterons encore,, s'il plait à Dieu. Ainsi donc, suite des fantômes qu'elle apenjoit : l'a-t-on ja-

'
Matt. vil, H. I
De l'àme, ch. viii. — ' Ih. rh. IX.
DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

mais vue sous une forme diaphane et brillante, « ture, s'étend insensiblement avec le corps,
à moins de la voir comme tout le reste, par une « sans que le volume de substance, qui est le

illusion trompeuse ? Cette illusion est possible sans « principe de son accroissement, s'altère et di-
doute; mais à Dieu ne plaise que dans la veille « minue. » Ces expressions resteraient peut-être
on la croie une réalité autrement, quand on ! obscm'es, sans une (îomparaison qui y jette quelque
la verrait sous une forme différente et inoins lumière « Supposez, dit-il, un lingot d'or ou
:

éloignée des idées communes, il faudrait admet- « d'argent; les formes qu'il recevra y sont comme
tre ou qu'elle s'est changée, ou que, loin de voir « ramassées et seront peut-être moindres, quoi-
sa substance véritable, on ne voit plus (pie l'i- " que son volume contienne tout ce qu'il y a en
mage inunatérielle d'un corps, analogue aux « lui d'orou d'argent. Quand il s'allonge eu
fantômes de l'imaginalion. Est-il un Ethiopien « minces lames, il s'augmente par l'étendue
qui dans ses rêves ne se voie presque toujours « même qu'acquiert son poids invariable : il s'al-

avec un teint noir, et qui ne s'étonne, à son ré- « longe sans être grossi par des éléments étran-
veil, s'il sest vu a\ecun autre teint? Or, je crois « gers, sans s'accroître, et pourtant c'est s'ac-
ne se serait jamais vu sous une cou-
tort qu'il « croître que de s'étendre ainsi. Le volume en
leur diapl/ane, s'il n'en avait jamais entendu « effet peut s'accroitre, le poids restant le même.
parler ou si quelque livre ne l'en avait insfrnit. « Alors apparaît du métal, jusque-là ca-
l'éclat

que ces hommes, égarés par


43. Ajouterai-je '< ché, quoique réel, au sein du lingot; alors
leur imagination, veulent nous imposer de « se montrent toutes les formes que sa ductilité le
par l'Ecriture l'opinion que Dieu lui-même est « rend susceptible de prendre s(\us la main rjui
matériel, tel qu'il a été révélé en figure aux es- 11 le fai,omie el qui n'ajoute à son poids qu'une
prits des saints ou tel qu'on le dépeint dans un « empreinte. Il en est de même de l'àme; ses
langage allégorique ï Car c'est là que vieid aboutir « accroissements sont une augmentation de \o-
leur système. Leur erreur consiste à trailuire ci hune etnonde substance. «

par des images leur fausse opinion, et ils ne com- 45. Comment concevoir tant d'éloquence unie
prennent pas quêtes saints ont considéré leurs à de pareilles chimères? Exemple singulier, qui
visions, comme ils les considéreraient aujour- provoque plutôt l'effroi que le rire. Terlullienen
d'hui, s'ils lisaient dans l'Ecriture, ou s'ils enten- serait-il venu là, s'il avait pu concevoir l'exis-

daient dire qu'elles étaient un symbole, comme tance indépendaimnent du corps ? Y-a-t-il rien
les sept épis et les sept vaches désignaient sept de plus illogique que de s'imaginer une niasscî
années'; comme lanappe suspendue par les de métal susceptible de s'étendre sous le laminoir
quatre coins, où il y avait dos animaux de toute sans diminuer à d'autres égards, ou de s'ac-
espèce, qui représentaient la terre avec les divers croitre en longueur sans rien perdre de son
peuplesqui l'habitent '^ Aplus forte raison faut-il épaisseur? Est-il possible qu'un corps, qui con-
s'expliquer ainsi les idées toutes spirituelles qui serve la môme nature, s'accroisse dans toutes
sont repi'ésentées par des images, au lieu d'y les dimensions sans devenir plus léger? Com-
voir des êtres réels. ment doue l'àme pourrait-elle tirer d'un germe
presque imperceptible un accroissement propor-
CHAPITRE XXVIl.
tionné à la grandeur du corps qu'elle anime, si

DE l'accroissement DE l'aME d'aPRÈSTERTIILLIEN. elle n'est qu'un corps dont la substance ne


reçoit rien du dehors pom* s'accroitre ? Com-
44. Toutefois TertuUien n'admet pas que l'Ame ment, dis-je, pourrait-elle remplir la chair
croisse comme le corps: « Je craindrais, dit-il, qu'elle vivifie, sans s'exténuer à proporlion que
« qu'on ne la crût susceptible de décroitre, et le corps grandit? Il a craint que l'àme ne s'a-
« par conséquent de s'anéantir. » Mais comme néantit, ne diminuait en s'accroissant, et
si elle
il y voit une substance étendue par tout le corps, il n'a pas craint (lu'elle s'anéantit en s'exténuant

il ne découvre |)as à quelle conséquence abou- à mesure qu'elle s'accroîtrait. Mais à quoi bou
tissent des accroissements (pii, selon lui, déve- prolonger une discussion, qui devrai! èlre déjà
loppent un faible germe et le proportionnent au terminée, puisque l'on sait ma pen.sée, les points
volume même du corps. Voici ses paroles: « La sur les (jiiels je suis li\é, mes doutes et leur
« force qui constitue l'àme et où s'amassent, raison ? Terminons <lonc ici ce livre et passons
« comme dans un trésor, les économies de la na- au suivant.
I
Gen. XLI,26, — ! Act. x, 11.
LIVRE XI.

CHUTE ET CHATIMENT DADAM.

« rite de la fennne : elle t'observera h la léle


CHAPITRE PRKMIRR.
« et toi tu l'observeras au talon. Puis il dit à

CITATION 1)1 texte; PRÉLIMINAIKES. « la femme ; ,1e muiliplierai énormément tes


« douleurs el tes gémissements : lu enfan-
L«Ailaincts;ilVmiin't'laiontiuisloiisdciixelils « teras dans la peine, tu te tourneras vers ton
« n'eii avaiiMil poiiil do lioiilo. Or le ser|);'nl iMail « mari el il le dominera. Puis il dit à Adam :

« le plus nisi' lie tous losauiniauMiuisoiilsur la « Parce que tu as écouté la voix de ta femme et

.< leno Seigneur Dieu avait laits. El il


el (juc le « que lu as mangé de l'arbre au quel seul je
« (lit à la liMUine Uuoi! Dieu nous auiail-il dil
:
:
(( t'avais oi donné de ne pas toucber, la teire
« Vous uc luaugerez paj de tout arbre du « sera mauilite dans ton travail lu en man- :

f jardiu El la leuiuie répondit au scrpeut


'! :
« géras tous les jours de ta vie avec tristesse.
(' Nous nian,;coiis des fruits desai'hres du jardin; '<
Elle te prodtura des épines el des clianlons, el
« mais ((uaid au fruit de l'arbre (pii est au milieu « tu mangeras l'Iierbe des cliamps. Tu man-
< du jardin, Dieu a dit Vous n'en mangerez : « géras pain à la sueur de ton visage, jusqu'à
le
H point, et vous u'\ toueherez pas, de peiw que « ce que tu retournes eu la terre d'où tu as été
« sous ne mouriez. Alors le serpent dil à la « pris; car tu es poudre et lu retournei'as en
« t'enime Vous ne tnourrez nullement. Mais Dieu
: « poLiilre. El Ailam appela sa femme la Vie,
« sait (ju'an jour où vous en mangerez, vos yeux « parce qu'elle a été la mère tous les vivants. Et
« seront onserts, ci \ous serez eomme des Dieux « le Seigneur Dieu lit à Adam elà sa feuune des
« connaissant le i)ien et le mal. La femme donc « tuniques de peaux et les en revêtit. Et le.
« voyant que le bon à
fruit de l'arbre était «Seigneur Dieu dit : Voici que l'iiomme est
« manger, agréable à la vue el désirable pour « devenu comme l'un de nous, sachant le bien
« donner de la science, prit du fruit, en mangea, « et le mal: or il faut prendre garde maintenant
« en donna à son mari comme à elle, et ils en « qu'il n'avance la main et ne prenne aussi de
« mangèrent. Et leurs yeux furent ouverts et ils « l'arbre de vie el qu'il n'en mange à loujours.
« reconiuu-ent ([u'ils était nus; et ayant cousu « Et Seigneur Dieu
le le fit sortir du jardin
« ensemble des feuilles de figuier, ils en (ircnt « d'Eden pour labourer la terre ilont il avait été
« des ceintures. Et ils entendirent la voix du « pris. Alors il chas.sa Adam et le plaça à l'op^
« Seigneur Dieu promenait dans le jardin
(jui se « posé du jardin d'Eden il plaça aussi des Clie- :

« vers le soir. Adam


Eve se cachèrent de et « rubius avec un glaive de tlamine qui se tour-
« devant la face du Seigneur Dieu, au milieu « nait ça et là, pour gai'derle chemin de l'arbre
« des arbres du Paradis. Et le Seigneur Dieu dit :
« de vie '. »
« Qui l'a montré que tu étais nu, sinon parce (|ue 2. Avant d'expliquer ce texte dans tous ses dé-
« lu as mangé de l'arbre dont je l'avais défendu tails, je crois devoir rappeler, comme je l'ai déjà
« de manger? Et .\(lam répondit La fenuneque :
fait ici, que h^ but de cet o;ivrage est de com-
'( vous m'avez domiée pour compagne, m'a menter littéralemenl les laits dont l'écrivain sa-
« donné du fruit de l'arbre et j'en ai mangé. Et cré nous donne le récit historique. Si les paroles
« Dieu dit à la femme Pourquoi as-tu fait cela?
:
de Dieu, ou celles des personnages qu'il a dioisis
>< El la femme répondit: Le serpent m'a trompT-e pour remplir le rôle des prophètes, nous présen-
« et j'en ai mangé. Alors le Seigneur Dieu dit tent quelquefois des expressions qui ne sau-
« au serpent Pidsque tu as l'ail cela, tu siM'as
:
raionl s'entendre à la lettre sans devenir absurdes,
c< maudit entre tous les animaux el enlre toutes il faut y voir un sens figuré : il serait néanmoins
« les bêles des liiamps; tu ramperas sur ton impie de douter qu'elles aient été réellement
« ventre et lu manderas de la poussière tous les prononcées: ou ne doit i)as attendre moins de
« joui"s de ta vie. El je metti'aide l'inimitié enlre
« toi et la femme, entre ta postérité et la posté- I
(ieii II, 25-111, J-».
-282 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

la probité du narrateur, et des promesses de lui sont consacrés, eût rendu cet animal le plus
l'historien '. sage des ètresqui ont ici-bas la vie sans la raison?
3. Ainsi « tous deux étaient nus. « C'est un Toulefois le mit sagesse ne peut s'appliquer,à un
fait premier couple hum lin vivait
historique : le méchant que par abas; c'est comme si l'on di-
ab^olumi^nt nu dans le paradis. Ils n'en rougis- sait de Ih amme bon qu'il est rusé. Or, dans notre

saient pas; eh quelle honte pouvaient-ils éprou-


! langue, le mot sagesse renferme toujours un
ver, quand ils n'avaient point encore senti dans éloge, celui de ruse implique la perversité du
leurs membres la loi qui soulève la chair contre cœur. De là vient que dans plusieurs éditions
la loi de ? l'esprit 2 châtiment du péché, C'est là le latines, où l'on a consulté les convenances de la
et ils n'en subirent les effets qu'après avoir été langue, on s'est attaché au sens plutôt qu'à l'ex-
prévaricateurs, lorsque leur désobéissance eut pression, et on a mieux aimé appeler le serpent
enfreint le commandemeal, et que lajuslice eut le plus rusé des animaux. Quant à la significa-

puni leur crime. Auparavant ils étaient nus, et tion précise du mal hébreu, ceux qui connais-
à l'abri de toute contusion; il ne se passait dans sent parfaitement cette langue examineront s'il

leur corps aucun mouvement qui exigeât les peat désig.ier rigjureiivement et impro-
sans
précautions de la pudeur ils n'avaient rien à : priété la sagesse dans le mal. L'Éeriture nous
voiler, n'ayant rien à réprimer. Naus avons offre ce sens dans une autre passage ', et le
vu plus haut 3 comment ils auraient pu se Seigneur dit que les enfants du siècle sont plus
créer une postérité; c'eut été d'une manière su i<'s que les en;ants de lumière dans la conduite
différente de celle qui fut la conséquence de leur de leurs alîaires, quoiqu'ils imploient la fraude
faute, quand la vengeance divine se réalisa; par et non lajuslice '.

un juste effet de leur désobéissance, ils senti-


rent en effet avant de mourir, la mort se glisser CHAPITRE III.

dans leurs membres et y répandre le désordre et


IL XA KTÉ l'EKMIS \r DÉMON DE TENTER 1,'HOMME
la révolte. Mais ils ignoraient cette lutte, au mo-
ylE SOIS LA FIGURE DU SERPENT.
ment qu'ils étaient nus et ne rougissaient pas.
.1. N'allons pas croire du reste que le démon
CHAPITRE H.
ait fait choix du serpent pour tenter l'homme et

DE LA FINESSE DU SERPENT : d'OV VENAIT-EI.LE? l'engager au péché; sa volonté perverse et jalouse


lui inspirait le désir de tromper, mais il ne put
4. Or, «lesei'pent était le plus prudent, > sans exécuter ses desseins que par l'entrciuise de l'ani-
contredit « de tous les animaux qui étaient sur mal dont Dieu lui avait permis de prendre la li-

« la terre et que le Seigneur Dieu avait faits. » gure. L'intention coupable dépend de la volonté
Le mot prudence, ou sagesse, selon la version chez les êtres; (piant au pouvoir delà réaliser, il

latine de (|uelques maimscrits, s'emploie ici pai' vient de Dieu, qui ne l'accorde ipie par un arrêt
extension il ne saurait se prendre en pro])re
: mystérieux de sa justice profonde, tout en res-
et en lionne part, comme il arrive lorsqu'on tant lui-même inaccessible à l'iniquité '.

l'applique à Dieu, aux anges, à l'âme raisonna-


ble : autant vaudrait alors appeler sages les CHAPITRE IV.

abeilles où même lesfourmis, dont les travaux


L'HOMME FUT
POURQUOI DIEU A-T-lL PERMIS QUE
offrent un senïhliuit de sagesse. Toutefois, à con-
TENTÉ.
sidérer dans le serpent, non l'animalsans raison,
mais l'esprit de Satan «lui s'_\ était introduit, on OU nie demande inainlenant pourquoi
(i. Si
pourra l'appeler le |)lus sage des animaux. Si Dieu a permis que riiouime fût tente, quand il
bas en effet que soient toml) 'sles auges rebelles, savait d'avance qu'il écouterait le tentateur ; j'a-
précipités des hauteurs célestes parleur orgueil, voue que je suis incapable de pénétrer la pro-
ils ne gardent pas mains par le |)rivilège de la
fondeur de ce dessein c'est trop au-dessus de :

raison la supériorité sur to is les animiux. Q l'y mes forces. La découverte de celle cause mys-
aurait-il alors d'étonnant si le démon, en com-
térieuse est peut-être réservée à des esi)rits plus
muniquant son inspiration au serpent et en l'ani- saints et plus puissants, encore qu'ils la devront
mant de son génie, comme il fait aux devins qui à la grâce plutôt qu'à leurs mérites ; il me sem-
'
Ci-dessus, liv.viii, f-h. 1-7. — Rom. vil, 'Ai. — Ci-dcssiis, liv. ix.
h. 3-11.. '
Jerem. lv,22. — ' Lur, xvl, 8. — ' Rom. III. b.
r.IVRE XI. — CHUTE ET CHATIMENT D'ADAM. 283

hli' loiitotois, il'après les idi'i's i\\\c Dieu m'.ic- plus combien leur dési-ilioii est funeste, ils sont
coi'ili' li (|n il MU' pi'i'iiii'l d'cxposiT, iiiii' I'Ikiiiiiih' plus malhi'ureux encore (pie ceu\ (piiont cons-
n'amail^tUTc lUiTiUMlVhty 's, s'il n'avail pu pia- cience de leur elal repoussant le remède (pli
:

liciuer le bien qu'à la coiulilioii tic ii'ctiv jamais les guériraitde lems erreurs, ils ne font plus que
l'xiiiirU'' an mal; piiisipril a\ail la ptiissaiicc, ol servir d'exemple aux antres poar h'ur en ins]ii-
dès lors di'vail a\(iii' la Noloiilc de l't'paiisstM' ces rer le dégoût. « Cliacim est tenté, dit rA|iotrt;
conseils, avec l'aide de Celui qui résiste aux su- « Jacques, par l'attrait et les amorces desapro-
l>erl>es et donne sa nràce aux humbles '. l'our- « pre convoitise. Quand laconcu[)iseence a con-
(pioi donc Dieu, tout en sachant ([ue l'honnue « i.ii, elL' enl'aule le [)éché, et le péclu', étani con-
sueconihcrait, n'aurait-il pas permis qu'il lût « sommé, engendre la mort '. » Jlais, l'enllure
lenlc, puisque la l'auie dépi'iidrait do la volonté de l'orgueil guérie, on renaît à la vie, quand,
humaine, el que le châtiment inlli^é par la jus- après l'épreuve, on retrouve, ponrrevenirà Dieu,
tice divine rétalilii'ail l'ordre '/N'était-ce pas ap- la volonté ([ui avait manqué avant l'épreuve
[trendre aux âmes orj;UL'ilKHises pour l'edilica- pour lui rester lidèle.
lion des saints futurs, que Dieu disposait équila-
hlemeiit de IcLU's nh.ojiIcs même cou|>al)les, CHAPITRE VI.
tandis (jucUes l'ai^aienl un si mau\ais nsayc des
natures créées bonnes? POURQUOI DIEU A-T-II. l'EllMlS LA TENTATION?

8. On s'étonne quelquefois que Dieu ait permis


GHAPITHE V. que le premier homme fût tenté mais ne voit- :

on pas ({u'aujouririmi encore le genre humain


LA CHUTK DK l'iIOMMIC VIEM' DR l.'oUGUElL. est sans cesse en butte aux ruses du démon ?
Pourquoi Dieu le permet-il ? N'est-ce pas pour
7. Le tenlaleur n'amail pu réussira triompher mel Ire la vertu à l'épreuNc'/ N'est-ce pas LUI Iriom-
derhounue,s'ilnes'('laillaissr'aupara\anl('m|)(ir-
phe plus glorieux de rési.ster à la tentation, que
ler à un mouM'iiicnl (roi|;ucil, leipiel dut élrc
d'être sousirail à la possibilité même d'être ten-
réprimé afin de lui faire sentir par l'Iunniliulion
té? Ceux mêmes qui renoncent au Ciéateur pour
de sa faute combien il avait eu tort de présumer courir sur les pas du tentateur, ne font que mul-
de lui-même. Caria Vérité même s'ex[irime ainsi: tiplier les tentations pour les âmes lidèles, en
«Le cœur s'exalte avant la chute, il s'humilie même temps qu'ils leur ùlent par leur exemple
« avant la f;loire ''. » On retrouve peut-être l'ac-
l'envie de fuir a\ee eux, et leur inspirent une
cent de ce pécheur dans ces paroles du Psalmis- crainte salutaire de l'orgueil. De là ce mot de
te Uuand j'étais dans la prosp(n-ité, je disais:
: «
l'Apùtre: «Regardant à toi-même, de peur que
« ne serai jamais ébranlé. » Mais, après avoir
Je
« toi aussi tu ne sois tenté ''•.
» Car l'humilité
éprouvé les funestes elfets de l'orgueil, ([ui s'e-
qui nous assujettit au Créateur, et qui nous em-
nivrede sa puissance, el ressenti les bienl'ails de
pêche de présumer assez de nos forces pour croire
la protection divine, il s'écrie; « Seigneur, c'était
({ue nous pouvons nous passer tle son secoui's, nous
« par pure bonté (jue vous m'aviez affermi dans est reconnnandée dans toute la suite de l'Ecriture
« cet étal tloriss;inl ; von-; avez caché votre face,
avecunattention frappante. Puisdoncque lésâmes
n et j'ai été tout éperdu '. «Mais quiil que soit le
pieuses el justes se perfectionnent par l'exemple
personnage dont est ici question, il n'en foUait
il
même et de rin|ustiee, on n'est plus
de l'impiété
pas moinsdomier nnele.onà l'ànie (pii s'exalte
en droit de dire que Dieu n'aurait pas dû créer
el qui compte trop sur ses propre.i forces, et lui
les hommes dont il prévoyait l'exislt'uce crinu-
faire sentir, par les tristes suites du péché, tout
nelle. Pour(|uoi ne |)as les créer, [luisqu'ils doi-
le malheur ((ui attend la ciéalure, (pianil elle se
vent servir, comme
Dieu l'a prévu, à éprouver,
sépare du Créateur. )n di''cou\ re mieux que Dieu (

à tenir en éveil les cœurs droits, et qu'en outre


est le souverain bien, en voyant que loin de lui
ils ilolvent subir le châtiment que mérite leur
il n'y a pas Je bien : car ceux qui goûtent le poi-
mauvaise volonté?
son morlel des voluptés, ne peuvent s'empêcher
M.T'.). T, 14. ir,. _ 'Ual. VI. I.
de craindre la rigueur du chàlinient; (juaut à
<ou\ qui, tout étounlis par l'orgueil, ne sentent

'
Jaoq.iv, H. — ^ l'i Cs. xxi.\. 7. s.
,

284 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

chant à qui ses fautes attirent un juste châtiment.


CHAPITRE VII. Or, quand un raisonnement invincible prouve que
deux biens ne sont point égaux entre eux, etque
POURQUOI l'homme N'a-T-IL PAS ÉTÉ CRÉÉ AVEC LA
l'un est plus parfait que l'autre, les esprits peu
VOLONTÉ DE NE PÉCHER JAMAIS?
philosophes veulent les identilier, sans s'aperce-
voir qu'ils en retranchent un; par conséquent,
9. Eh bien ! ajoiite-t-on , Dieu devait créer
l'homme enUii donnantla volonté de ne jamais ils diminuent le nombre des biens, en confon-
dant leurs variétés l'importance exagérée qu'ils
pécher. Soit, j'accorde qu'un être incapable de :

consentir au péché, est plus parfait; mais on doit


donnent aune espèce leur fait supprimer l'autre.

m'accorder ou mémo temps qu'on ne saurait ap- Qui pourrait s'empêcher d'éclater, s'ils en ve-
naient à dire sérieusement La vue esl supé-
peler mauvais un être créé avec la faculté de ne :

jamais pécher, s'il lèvent, ni trouver injuste, qu'il


rieure à l'ouïe : donc l'homme devrait avoir qua-
soit puni, puisqu'il a péché par choix et non par
tre yeux et point d'oreilles ? Eh bien ! étant éta-

nécessité. Si donc la raison démontre clairement


bli qu'il existe une créature intelligente soumise
la supériorilé d'un être qui n'éprouve que des à Dieu, sans avoir à craindre ni orgueil, ni châ-

désirs légitimes,
timent, tandis que la créature humaine a besoin,
elle prouve clairement aussi
l'excellence relative d'un élre qui a le pouvoir pour apprécier pour ne
les bienfaits de Dieu, «

« pas s'enller d'orgueil et pour demeurer dans la


de dompter les désirs
coupables, et d'être sen-
« crainle i, » de voir le chàliment est-il un
sible à qui accompagne, non-seulement
la joie ;

les actes per.i.is, mais encore la victoire sur une homme sensé qui veuille confondre ces deux
passion désordonnée. De ces deux êtres, l'un est classes d'èlres, sans s'apercevoir immédiatement

bon, l'autre qu'il sup[)rime la seconde pour ne conserver que


est meilleur : pourquoi Dieu n'au-
la première^ Un tel raisonnement supposerait
rait-il créé que ce dernier, au lieu de les créer
tous deux ? Ceux qui sont disijosés à louer la pre-
un délaut absolu de logique et de bon sens. Dès
mière création, doivent trouver dans les deux lors pourquoi Dieu n'aurait-il pas créé les hommes

un sujet de louanges encore plus riche. Les saints dont il prévoyait la malice « si, voulant mon-
anges représentent la première « trer sa juste colère el faire éclater sa puissance,
les hommes ,

sainis, la seconde. Quant à ceux qui ont choisi « il a laiss:' subsister dans sa grande patience les

le parti de l'iniquité, et qui ont corrompu par « vases de colère qui élaicnl préparés à la des-

une volonté coupable les avaniages de leur na-


« truction, afin de montrer toutes les richesses
ture. Dieu n'était point obligé à
« de sa gloire sur de miséricorde qu'il
les vases
ne pas les créer,
par cela seul qu'il prévoyait leur existence. Eux
n a préparés pour sa gloire '•? C'est à ce titre

aussi ont leur rôle dans le inonde et ils le rem-


« que celui qui se glorilie se glorifie dans le

plissent dans « Seigneur » il reconnaît en effet que ce n'est


''
:
l'inlérèt des saints. Quant à Dieu,
s'il peut se passer des vertus de rhomine juste pas de mais du Seigneur, que déjjendent à
lui,

la fois et son être et son bonheur,


à plus forte raison n'a-t-il pas besoin des vices
II. Il serait donc par trop étrange de dire
de l'homine corrompu. ' :

ceux à qui Dieu donne une preuve si éclatante


CHAPITRE VIII. de sa miséricorde, devraient n'exister pas, s'il
était nécessaire que naquissent en même tenijis
POURQUOI \nVX \-T-lL CRÉÉ LES MÉCHANTS TOUT les victimes destinées à faire briller la justice de
EN PRÉVOYANT LEUR MALICE? sa vengeance.

10. Qui oserait dire de sang froid : Dieu aurait CHAPITRE IX.
mieux lait de ne pas créer ceux à qui la malice
d'autrui devait servir d'cxeini)le salutaire, que RÉFUTATION DE LA MÊME, 0B.IECTI0N.
de créer avec eux les misérables que leur ini-
quité devait conduire à la damnation; car il sait .V (pieltiireoii ell'et ces deux classes d'hommes
tout clernellement'? Ce raisonnement, en effet, n'exisleraienf-elles pas, puisqu'elles font éclater

revient à dire (pi'il vaudrait mieux avoir refusé la bonté et la justice de Dieu?
l'existence à celui qui, metlaut à prolilles dé- t'2. Mais, les méchants seraient bons aussi, si

fauts d'autrui, reçoit par la grâce divine la cou- Dieu le voulait. — Ah! le dessein de Dieu esl

ronne imniortelle, (jnede l'avoii- donnée au mé- '


1C...I1. Xl.i». — ' ll.iil. ix,a2,23. 'UC.r. X. 17

LIVKK \l. - CmiTK KT CIIATIMKNT D'ADAM. 2rai

bien plus sa}îc! il a voulu (|iu' Ions (ioviiisscnl


<r iin'ils viiiiiliaii'iit ; «iiic les bons ne |>iissi'nl CIIAl'irUKXI.
i'OsUm' sans rccompcnsi', ni les MK-ciianls jouir
LE CILVTIMENT IIES .MÊCUVNTS NE CONSTll l'E POINT
(le l'iinpiniiU', (M (pie lt> vice piolilàt ainsi à la
r.NE NKCEssrn-; imhudiki c'est inmove.n I'olk
vorin. — Il piv\oyail piinilani, (pic leur volonlé
n le s.vlut des bons.
:

los porterait an mal. — Sans aucun donlc, cl


I d'oimckeii

connue sa prescience est infaillible, c'est leur l. Alors, \a-t-on ajouter, a dans les
volonté, et non la sienne, cpii esl nianvaise. — I

(ciivres (le Dieu ime paille (|ui


il

ne
\

|)om rail at-


l'our(pioi donc Ics-a-l-il crées, loni en sachant teindre sa peireclioii sans le mallieiirde l'autre?
iravanec leur malice ? — Parce (pi'il prévoyait tonl — Comment! (>sl-on devenu, ;;r;'ice à je ne sais
ensemble elle mahprilst'eraient et l'avanta'^erpie (pielle uiiuie de laisoiiiier, assez sourd et assez
lesiuslesen l'etircraienl. Cai',en les créant, il leur aveuule [loiir ne plus sentir (pie
la iiiinitioii de
a laissé leponvoinraecomplircerlains actes, et île i]iiel(pics-ims sert à corriger le grand nombre?
comprenilie (pi'il l'ail sei\ ir an bien rusaj^e même Esl-il iinJuif, un |)aïen, un lieréti(pie (pii ne fasse
coupable ipi'ils l'ont (le leur liberté; car ils ne éclater celle véiilé cliaipie jour, au sciu de sa
doivent (pi'à eux-mêmes leur volonté perverse, propre famille? Mais dans l'ardeur de la discus-
ils doivent à Dieu la bonté de leur êtie et leur
sion, on recherche la vérité, sans jeter les yeux
juste cliàtiment;ce sont eux qui se l'ont leur place, sur les o'uvres de la Providence (piih'apiieraient
et (pii, du même coup, soulienn(Mil les autres l'esprit, et y ferai(Mit pénétrer laloi selon laquelle
ilans leurs épreuves en leur olbant un exemple le supplice des méchants, lors(pi'il ne les cor-
redoutable. rige pas, a du moins pour effet d'effrayer le
reste, de sorte que la juste punition des uns
CHAPITRE X.
donc
salut des autres. Dieu est-il
conti-il)ue au
l'auteur de la perversité ou des crimes de ceux
1>IEI l'orUR.VlT TOIRNEII XV BIEX LA VOLONTÉ DES
par leur juste punition, lui offieut un
(pii,
MÉCILVXTS; l'OlROrOI NE LE F.\IT-IL 'l'

moyen de veiller sur les âmes à (pii il réserve


cette leçon ? Non assurément tout en sachant :

t;{. Mais !>ieii pourrait, dit-on encore, tourner


d'avance (pi'ils seraient mauvais par leurs vices
au bien leurs volontés méchantes, puis(pi'il est
personnels, il les a néamnoins créés, parce que,
tout-iuiissant. — (Uii, il le iwurrait. — l'^b !
dans ses conseils, ils devaient être utiles aux
pounpioi ne le l'ait-il pas'? C'est qu'il ne l'a — hommes qui auraient besoin, pour avancer dans
pas voulu —
Pourquoi ne l'a-t-il pas voulu'? le bien, de l'exemple du mal. S'ils n'existaient
C'est son secret. N'allons pas « viser à une sa-
pas, ils ne serviraient à rien or, n'est-ce pas :

« «esse au-dessus de nos forces i. » Je crois


un grand bien (lue leur existence, puisqu'ils
avoir suffisamment démontré tont-à-l'heure que
rendent tant de services àcette classe d'hommes,
la créature i:;lsonnable, lors même qu'elle ti-ouve
cpi'on ne saurait chercher à supprimer, sans
dans l'e.veniple du mal, un motif pour l'éviter, vouloir renoncer à en faire partie?
est une expression assez élevée du bien; or lo. Les (Puvres du Seigneur sont grandes :

cette espèce de créature n'existerait pas, si Dieu elles sont parfaites dans tous ses desseins'. Il
tournait au bien toutes les volontés niauvaisesel
connaît d'avance gens de bien, il les crée; il
les
n'infliireait pas au péclié le châtiment qu'il mé- connaît d'avance méchants, il les crée en-
les
rite : dès lors les êtres raisonnables se confon- core. Il se donne lui-même aux justes pour faire
draient en ur.e seule classe, la classe de ceux leur bonheur; en même temps il répand ses
qui n'ont pas besoin de voir les fautes et le chà- bienfaits avec abondance sur les méchants; il
liment des méchants pour se perfectionner; en pardonne avec bonté, il punit avec justice; de
d'autres tei-mes, on diminuerait le nombre des même il pardonne avec justice et punit avec
espèces bonnes en elles-mêmes sous prétexte bonté. Ni la vertu ni les vices d'un honnne,
de multiplier une espèce plus parfaite. quel qu'il aoit, ne lui sont nécessaires il n'est :

pas intéressé aux bonnes œuvres des justes, mais


' Ri>ni. XII, 3.
il veille sur eux en punissant les méchants.
Pourquoi n'aurait-il pas permis que l'homme

> Ps. ex, 2.


'

286 DE LA GENÈSE Al) SENS LITTÉRAL.

fût soumis à la tentation, puisqu'elle devait ré- lonté perverse, l'isolent des créations du Dieu
prouver, montrer sa l'aiblessc et amener son
lui suprême et véiûtahle, pour le raltacher à un
chàlimeul ? La concupiscence qui l'avait enivré autre |)rincipe en oppositionavcc Dieu lui-même.
du sentiment de ses forces devait produire son Us sont donc incapables de comprendre que
fruit et le remplir de confusion; sa juste pu- tout être, en tant un bien, et par
qu'être, est
iiilion était destinée à faire craiuilre les funestes conséquent ne peut exister que par la puissance
effets de la désobéissance et de l'orgueil à ses du vi'ai Dieu, source de tout bien ils ne voient ;

descendants, à qui le souvenir de cet événement pas que la malice de la volonté est un mouve-
devait être transmis, d'après les conseils divins. ment désordonné qui lui fait préférer les l)iens
secondaires au souverain bien, et qu'ainsi la
CHAPITRE Xll. créature intelligente, ayant pris plaisir à consi-
dérer ses forces dans leur degré éminent, s'est
PlUiiyUOI UlEf A-T-U. PERMIS QUE LA TENTATION'
SE FIT PAR l'organe DU SERPENT?
enflée d'orgueil et par là même a perdu le bon-
heur du jiaradis spirituel et a séché de dépit.

I(i. On se demandera peut être pourquoi il a Cette condition n'exclut pas la bonté du principe
été i)ermis au démon de tenter l'homme par (pii la fait vivre et animer soit un corps aérien,
l'entremise du serpent. Qu'il yait là un symbole, comme l'esprit de Satan et des démons, soit un
l'Ecriture ne le revèle-t-elle pas avec son auto- corps de boue, comme l'âme humaine, quelle
rité imposante, et avec toutes les preuves de la que soit d'ailleurs sa malice et sa perversité.

divinité de ses prophéties qui remplissent l'uni- Ainsi, en refusant d'admettie qu'une créature
vers ? Je ne veux pas dire que le démon ait songé de Dieu puisse pécher par sa volonté personnelle,
à nous offrir un symbole pour notre instruction; ils en viennent à soutenir que l'essence même

mais puisiju'il ne pouvait entreprendre de tenter de Dieu se corrompt et se pervertit d'abord par
l'homme qu'avec la permisiondeDieu, pouvait- une dégradation fatale, ensuite par une volonté
il employer un autre moyen que celui qui lui li\rée au mal sans retour. Mais nous avons ré-

était permis Par conséquent, quels que soient


'! futé ailleurs ce monstrueux système.

les enseignements que le serpent figure, il faut

y voir un dessein de la Providence, qui domine CHAPITRE XIV.


jusqu'à la passion cpie le démon a de nuire.
Quant au pouvoir de faire le mal, il ne lui est CAUSE DE LA CHUTE DES ANGES. DE l'oRGUEIL ET
accordé que pour briser et perdie les vases de DE l'envie.
colère, ou pour humilier et mettre à l'épreuve
les vases de miséricorde. Nous savons déjà quelle
IS. Ici nous devons nous bornera interro-
est l'origine du serpent la terre produisit, au:

ger ri';critme pour savoir ce qu'il faut penser


commandement de Dieu, les animaux domesti-
du d ''mon. Et d'abord, est-ce à l'origine même
ques, les bètes et les reptiles ; or toute créature,
du monde qu'il se complut dans l'idée de sa force
ayant la vie sans la raison, a été subordonnée
et se vil société et de cet amour,
exclu de cefte
par une de l'ordre divin aux créatures in-
loi
(|ui bonheur des anges en possession de
fait le
telligentes, que leur volonté soit bonne ou mau-
Dieu ? Ou hien a-t-il vécu quelque temps avec les
vaise'. Pourquoi dès lors s'étonner que Dieu ait
bons anges, pariageant leur sainteté et leur bon-
permis au démon d'agir par l'intermédiaire du
heuryon a prétendu que la cause de sa chute
serpent? Le Christ lui-même n'a-t-il pas permis
hit la jalousie que lui inspira la vue de l'honnne
aux démons d'entrer dans le cor|)S des pour-
créé à l'ininge de Dieu. Mais la jalousie est la
ceaux 2?
suite et non le principe de l'orgueil; on ne de-
CHAPITRE Xlll. vient pas orgueilleux par jalousie, on devient
jaloux par orgueil pour s'en couvaim-re, il suird
;
ERREUR DES MANICHÉENS SLR l'oRKHNE DU DÉMON.
de voir que l'orgueil est l'amour de sa propre

élévation, tandii; que l'envie est la haine du bon-


17. Qu'est-ce que le démon? C'est une question
heur d'aulrui. Or, rainour-pro|)re porte envie
qu'on approfondit d'ordinaire, parce que cer-
à seségaux, parce qu'ils lui soid égaux à ses ;
tains hérétiques, ne pouvant s'expliquer sa vo-
inférieurs, parce qu'il craint d'en être égalé ; à
' Gen. I. 20-26. — 2 Malt. ïM, 32. ses supérieurs, parce qu'il n'est pas leur égal.
LIVIU-: \l. CliriK Kl CIIATIMKNT llAltAM ^7
I/ornii(>il ciit'aiilr clone la jaltuisic ;iii lien irt'ii l'anti'e iuqtur; l'un decliarilé, l'anli'e d'égoïsme;
soilir. l'un concoinl à l'utilité connuune, en vue de la
société céleste, l'autre fait plier l'iidérèl général
CHAI'ITUK W.
sous sa piiisssaiice |»ailiculière, en vue d'exercer

i-'outaKii. KT L'AMoru-i'Kdi'm;, principe ue tois mie orgueilleuse tyramre; l'un est calme et
LES MAUX. DEl\ AMDUnS. UELX CITÉS. l'aUTELU paisible, l'autre bruyant et séditieux. Le pre-
ANNONCE SOMU V1U(;E Sl'U LA CITÉ UE DIEl'. mier pri'lère la \ériti'' à luie fausse louange ;le
second aime la louange (pielle (pi'elle soit : le
19. L'ReiiliuT donne avec raison l'orgueil premier, de swnpathie, désire à son pro-
|)lein

pour le prineipe de tons les péehés : « Le eom- chain ce qu'il souhaite pom- lui-même; lesecond,
c nieneeuieiil dt> tout péché, dit-elle, c'est l'or- plein de jalousie, ne veut (pie se souiuetlre scjii
< fïueil '. » On peut rappiochei- sans inconvé- prochain leiilin, l'un gouvei'iiele prochain pour
nient ce passa'.;e de celui-ci di' l'Apôtre : « L'ava- le i)rocliaiii, l'autre, jiour soi. Ces deux amours

.< de tous les maux '•, » en pre-


rice est la racine ont d'abord paru chez les anges, l'un chez les

nant l'avarice dans son acception -irénérale, je bons, l'autre chez les mauvais de là deux cités
:

\eiix dire coniuie le pencliant à étendre ses as- fondées parmi les lioimnes, sous le gouverne-
pirations au-delà de leurs bornes, par un désir ment merveilleux et iniiellable de la Providence
seei'et de sa grandeur et par un certain ainoui' (|ui ordonne et régit la création uni\erselle, la
pour son bien privé. Le mot i)ri\é est ici tort cité des justes et celle des méchants. Elles se mê-
significatif, si l'on remonte à son étymologie la- lent ici-bas à travers les siècles, jusqu'au dernier
tine : il ind! ,ue évideniuieut rpie l'on perd plus jugement ([ui les séparera sans irtour. .\lors
qu'on n'ac(iuiert : tout ce (|ui devient privé, dé- l'une sera réunie aux bons anges et trouvera dans
croit (privatio omnis minuit.) Ainsi, en vou- son Roi l'élernelle vie, l'antre sera réunie an mau-
lant s'élever, l'orgueil retondje dans la détinsse vais anges et précipitée avec son roi dans le feu
et la misère, ])arce ([u'im fatal amour-propre éternel. Telles sont les deux cités; nous pourrons
l'isole de la société commune et le réduit à lui- les décrire avec quelque développement ailleurs,
même. L'avarice, qu'on appelle plus communé- s'il plait à Dieu.
ment l'amoi'rde une variété de l'or- l'argent, est
gueil. L'.\pôtre, prenant l'espèce pour le genre, CHAPITRE XVI.
entendait le mot avarice dans toute sa portée,
racine de tous
A yiEL .MOMENT s'eST ACCOMPLIE LA CHl'TE DE
lorsqu'il disait « qu'elle est la
SATAN.
« les maux. » C'est elle qui tomber
a fait

Satan, quoiqu'il ait aimé sa propre force et non


21 . L'ficriture ne dit pas à rpielle époque Satan
l'argent. Par conséipient, l'amour-propre isole corrompit par
lomba victime de son orgueil et
de la société sainte l'àme oruueilleuse; il la ren-
sa mauvaise volonté les magnifiques dons de sa
ferme dans le cercle de sa misère, malgré tout
nature. Cepen<lantil est trop clair (pi'il a d'abord
son désir de trouver dans l'iniquité une pâture
cédé à son orgueil et qu'ensuite il a conçu saja-
à ses passions. Delà vient (|ue l'.Xpôtre après
lousiepour l'honnne car, aux yeux de quicon-
:

avoir dit ailleurs : « Il s'élèvera des hommes pleins que examine ces deux passions, la jalousie ne
« d'amoui-proprc, » ajoute « et avides d'ar- :

produit pas l'orgueil, mais elle en vient. Ce n'est


« gent ' » il descend de cette avarice générale
;
pas non plus sans raison qu'on peut croire qu'il
dont l'orgueil est la racine, à cette avarice spé-
tomba victime de son orgueil à l'origine même
ciale qui est un travei-s propre à l'humanité. En
du temps et qu'il ne vécut jamais avec les saints
effet, les hommes n'aimeraient pas l'argent s'ils
anges dans la paix el le bonheur. Son renonce-
necroyaient que leur grandeur esl proportionnée
ment au Créateur suivit de près sa création; et
à leurs richesses. C'est à celle maladie qu'est op-
quand le Seigneur dit « qu'il a été homicide dès
posée ne cherche point ses in-
la charité : « elle
« le commencement et qu'il n'est point resté fi-
« térèts en d'autres termes, elle ne
propres, «
.

« dèle à la vérité on peut faire remonter jus-


', »
s'enixre point de sa grandeur, et conséquem-
qu'au counnencenientotson caractère homicide
ment « ne s'enfle point d'orgueil *. »
et son iniidélité. Sans doute il ne fut homicide
:20. Ainsi il existe deux amours l'un saint,
;
qu'à l'époque où l'homme put être tué et par

'Eccli. X, 15. — 2T. Tim. vi. 10. — ^ Ibid. m. 2. — ' I Cr-r. xii;, ô, 4. 'Jean. Tiil,44.
288 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

conséquent eut été créé mais il aété homicide dès


: bonheur peut se concilier avec l'incertitude où
le commencement, en ce sens qu'il a tué le pre- l'on serait ou susceptible de se
de le voir durable
mier homme et s'il ne resta pas dans la vérité,
;
changer en misère. Supposez que le premier
ce fut dès le principe de sa création, parce houune connût d'avance et sa faute et la ven-
qu'il y serait resté, s'il l'avait voulu. geance divine, comment pouvail-ilétre heureux?
Il aurait élé malheureux dans l'Eden. N'avait-
CHAIMTRE XVII. il aucun pressentiment de sa faute ? Cette igno-

rance devait le faire douter de son bonheur, ce


LE DÉMON .\-T-lL ÇTÉ HEUREUX AV.\NT SON
qui lui enlevait tout bonheur véritable, et il se
PÉCHÉ?
berçait d'une fausse espérance sans avoir de
certitude absolue.
22. Comment croire en effet qu'il aurait vécu
24. Si l'on songe toutefois que l'homme avec son
heureux dans la hienheureuse société des Anges,
corps animal, avail l'espérance de se réunir aux
puisqu'il ne coimut à l'avance ni sa faute ni sou
Auges et de voir ce corps animal changé en corps
châtiment, ni sa rébellion ni son supplice parle
spirituel, s'il vivait soumis à Dieu; on comprendra
feu éternel? On pourrait se demander pounjuoi
que son existence était relativement heureuse,
il n'en fut pas instruit. En etTet, les saints anges
quoi(pi"il n'eût aucun pressentiment de sa faute.
n'ont aucun doute sur leur existence et leur
Il n'y avait sans doute aucun pressentiment de ce
bonheur éternels : le doute serait-il compatible
genre chez ceux à qui l'Apùtre adresse ce lan-
avec leur félicité? Faut-il dire que Dieu n'a pas
gage « Vous qui êtes spirituels, recevez-le dans
voulu lui révéler et son crime et sa punition, à
:

encore un bon ange, tandis


« de douceur, regardant à toi-même, de
l'esprit
l'époque où il était

qu'il avait découvert aux auti-es leur éternelle fidé-


'<peur que toi aussi tu ne sois tenté •. » Cepen-
son bonheur, loin d'être égal à celui dant nous pouvons dire sans inconséquence ni
lité? Alors
exagération qu'ils étaient heureux par cela seul
des autres, aurait été imparfait, puisque la souve-
raine félicité pour les anges consiste à la posséder qu'ils étaient spirituels, non par le corps mais

avec uneccriitude qui exclut la plus légère inquié- par la justice de la foi, goûtant la joie de l'espé-
commise pour que rance et pratiquant la patience dans les adver-
tude. Mais quelle faute avait-il
Dieu le mît à part et lui cachât son sort ? Loin de sités Quel n'était donc pas le bonheur de
'>.

nous l'idée que Dieu eût puni Satan avant son pé- l'hommedans le Paradis, avantson péché, puisque
ché: il n'ajamais condamné l'innocence. Aui'ait-
sans ètie assuré de son sort, il avait le doux

appartenu à un ordre d'Anges moins élevé, espoir de voir une transformation glorieuse
il

aux(|uels Dieu n'aurait pas révélé ce qu'ils de- couronner sa vie, sans être obligé de lutter avec

viendraient ? Je ne vois pas, je l'avoue, ce que patience ? Sans pousser la


contre l'adversité

peut être une félicité dont on n'e.st pas assuré. présomption jusqu'à se cioire follement assuré
d'un avenir encore incertain, il pouvait espérer
On a dit que Satan n'appartenait pas à la hié-
rarchie des Anges placés au-dessus du ciel, et avec foi « et se réjouir avec crainte, » comme il

été créé parmi ceux qui occupent les est écrit 3, avant d'avoir conquis le séjour où il
qu'il avait
régions inférieures, selon le rôle qui leur est as-
serait sûr de vivre à jamais; cette joie, plus vive

signé. De tels Anges, en effet auraient pu ,


dans le Paradis qu'elle ne saurait l'être ici-bas

éprouver des émotions illégitimes, tout en ayant pour les saints, pouvait lui procurer un bonheur
réel, quoi(pie inférieur à celui des saints Auges
la liberté d'y résiter, s'ils l'avaient voulu ils :

auraient ressemblé au premier homme, avant dans la vie éternelle au-dessus des cieux.

que peine de sa faute se fût glissée dans tout


la
CHAPITRE XIX.
son corps, peine dont la grâce fait triompher
les saints à force de piété lorsqu'ils restent ,
HYPOTHÈSE SUR LA CONDITION DES ANGES.
humblement soumis à Dieu.
2o. One cerlains Anges auraient pu être na-
CHAPITRE XVin. turellement heureux, sans connaître leur faute
et leur punition futures, ou du moins leur salut
DU BONHEUR DE l'hOMME AVANT LE PÉCHÉ. éternel, et sans avoir d'ailleurs l'espérance de
voir enfin leur condilion s'améliorer pour tou-
23. Du reste la condition du premier homme
soulève également la question de savoir si le ' Gai. VI 1. —'Rom. XII, 12. — iPs. ii, 11.
MVKE XI. — CHUTE ET CHATIMENT D'ADAM. JS!»

Jours, c'osi une Iniiollirsc ijui n't^sl piiric vi.ii- vices qui le distinguent, an lieu de s'être cor-

sciiilthililc : loiil :iii plus |i(iiii r;iil-i)ii iiMiiuiT rompu lilireinetil.

(|iic (crtaiiis Antres liirciil civcs iunii- ii'iii|ilii-

(>in|tl(iis (l;iiis iralioii, sousIccdiii-


CIIAPITKE XXI.
tliUV'iviils l;i <

iiiaiiilciiKMil (raiilii's Aiifjcs ])his ('Icvr's cl plus


ItKI'lTAl'ION DE CETTK Ol'INION.
lu'iiiciix, cl |i(iur rcc(>v<)ir, à |ir(i|i(>rli(iii de Iciiis

services,une exisicnce |)lus roi-luncc cf i)liis liante !2S. Jesaisbieu qu'onessaie (leconciliercetteopi-
ijiii pu Icurètrc rcvcice, cl dont l'espoir, eu
aiirail nion avi>c le jiassage de laCenése : « Dieu (ittou-
Icscliariuaut, amail étc imureux nu liti'c sérieux II
les ses (euvi'cs excellentes '
; »on assiu'e aveu-
au bonheur. Si Satan avec ses couipliees est tombe (pielqneai)|)arencedejustesse cl de logicpie, que
deeerann,on peut comparer sa chute à celle des dans la créaliou primitive aussi bien (pie dans
liommes (pii ahMiidonnenl la justice delà foi, soil le monde actuel où tant de volontés se sont per-
paireqn'ils se laissent comme lui enliainer par verties, la nature en général est excellente; non
l'ori^neil, soit parce(prils s'éfiarenteux-mènicsou (|iie les mi'cliants soient bons, mais c'est que
cèdent aux séductions du tenlatem-. liMir malice ne peut ni altérer ni troubler le nia-
"2(1. Assurez, si vous 1(> pouvez, l'cxisteucc de gni(i(pie concert de la création sons le goiner-
ces deux ordres de saints Anges l'un, au-dessus :
ueinent plein de sagesse et de force du Dieu qui
ihi ciel, qui ne compta Jamais parmi ses mem- y règne. Car, ajoute-t-on, les volontés même
bres l'Ange transl'onu('' eu (b'mon à la suite de mauvaises ont un pouvoir renfermé dans des
sa chute raulre,i'talili dans le luonde cl au(|uel
; limites si nelleinenl déterminées, leurs actes
le démon appartenait. Je ne lionve aucun pas- ont des suites si justes, qu'elles s'ordonnent har-
'sage dans l'Ecriture pour appuyer celteopiniou, inoiiicu^emen dans renseinbl(>el lui laissent toute
1

je l'avoue mais connue la fpieslioii de savoir


: sa beauté. (^'est un principe
Cependant, comme
si l(> (l(>mon a eu le presscnliment de sa chute aussi simple qu'incontestable que Dieu ne pour-
uie semblait (Muliarrassante, et que jene saurais rait avec justice condamner, sans une faute in-
me résoudre à dire ipi'il ait pu exister, même térieure, le caracièrc même (prii aurait doniK-
un moment, des Anges qui n'avaient pas la ecr- à un (Mrc, et ([u'il n'y a d'autre part rien de plus
litiule de leur bonheur, J'ai avoué qu'on avait certain, de plus infaillible (|ue la damnation du
(|uelque raison de croire que le démon tomba à iliable avec ses Anges, puisque d'après l'Evan-
l'origine du temps ou h la suite de la création, gile leSeigneur dira aux pécheurs placés à sa
et qu'il ne demeura jamais dans la vérité. gauche « Allez au l'eu éternel cjui a été préparé
:

« an diable et à ses Anges '; » il faut absolu-

CHAPITRE X\. ment renoncer à l'idée que Dieu doit châtier en


lui par le supplice du feu éternel la nature qui
LE DÉMON .V-T-IL KTÉ CRÉÉ MÉCH.4NT ?
est son ouvrage, et non des fautes personnelles.

"21. De là vient une autre opinion : on a pré- CHAPITRE XXII.


tendu que le démon ne s'était point tourné an
sriTE nu MÊME SIJET : ANALYSE Di: TEXTE PRÉ-
mal par un libre choix de sa volonté, mais qu'il CITÉ.
était né méchant, quoiqu'il fùl sorti des mains
du Créateur véritable et souverain de tous les 2it. Dans le passage de Job Il est le pre- : '<

êtres. A l'appui ou cite un passage du livre de «mier être créé par Dieu pour servir de Jouet à
Job (311 il est dit en parlant du diable « C'est le :
« ses anges, » il ne faut pas voir la nature même

( premier èlre créé par le Seigneur pour servir de Salan, mais le corps aérien que Dieu lui donna
de Jouet à ses Anges i. » On trouve dans les
>< dans un Juste rappoit avec son caractère, on le
Psaumes une pensée tout à-fait analogue « Ce :
rôle qu'il lui assigna, en l'obligeant à rendre
« <iragon que vous avez formé pour servir de malgré' lui service aux Justes; on |)eut encore dire
Jouet ^. » La seule différence c'est (|uc le mot
> qu'il prév(jyail sa malice et sa chute, mais qu'il

liri'mier (initium) n'est pas dans le Psalmisie; il eut la bonté de ne pas refuser l'être et la vie à
seudilcrail donc qu'il a été créé primiti\emenl une volonté qui devait tourner au mal, en sa-
malin, envieux, séducteur, eiilin avec tous le chant d'avance tout le bien iiiiesa bonté et sa puis-

sance infinie tireraient de ce fléau. Par consé-


' Jnb, XL, 4 ; sect. LXX. — ^ Ps. CIH, 2 6. I
Gcn. I, 31. — = >Iatt. Jtv, 41.

S. AuG. — To.M. IV. 19


-2W DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

(juent ces paroles n'induiuent pas t}ue Dieu créa dire qu'il est tombé au commencement, car il
Satan avec ses \ices, en d'antres termes qn'il le n'est pas tombé s'il a été créé en bas. Mais A
lil originaii'Ciiient mauvais, non ;
prc\oyanl peine créé, il renonça aussit('>t à la lumière de

qu'il se tonrnerait volontairement au mal pour la vérité,en se laissant aller à l'orgueil et en se ;

nuire aux justes, il le créa afin de le faire concou- complaisant dans l'idée de sa propre puissance. 1

rj]- au bien des justes. C'est en ce sens (|u'il lut Par consé(pient, il n'a pu goûter les délices de
créé « pour servir de jouet aux Anges. ) 11 de- la vie angelique je ne dis pas qu'il les ait dédai-
;

vient en effet un objet de risée, quand ses séduc- gnés après \ avoir été associé il n'a pas voulu s'y :

lions touruenl au profil des saints qn'il voulait associer et c'est à ce titre qu'il les a perdues ou
pervertir, et (pie la malice, où soncboix l'a fixé, plutôt sacrifiées. Il a donc été incapable de pré-
devient malgré lui utile aux serviteurs du Dieu voir sa déchéance : car la sagesse est un fruit

qui ne l'a créé que dans ce but. Il lut encore « créé de la piété. Ennemi de la piété dès l'origine et

« dès le principe pour servir de jouet, » pai'ce par suite aveuglé, il est déchu, non du rang
que les mécbanls eux-mêmes, ces instr;iments qu'il avait re(;u, mais du rang qn'il aurait pu
(le Satan, ce coips dont-il forme la tête, et qui, recevoir, s'il était demeuré fidèle à Dieu.
comme lui, fur(>nl créés en vue de concourir au Mais il nel'a pas voulu, et il s'est vu ainsi préci-

salut des jusles, malgré la prescience que Dieu pité des hauteurs qu'il aurait pu atteindre, sans
avait de leur perversité, deviennent^ comme lui toutefois échapper à la puissance à laquelle il a

un objet de risée, quand leur dessein de nuire refusé dese*soumettre:il a élé condamné par un
aux justes rencontre comme un écueil, la défiance chàlimenl sagement mesuré à ne pouvoir plus
oiiles jettent leurs exemples, la pieuse soumission ni jouir des clartés de la justice ni éviter ses
anx ordres de Dieu, dont ils comprennent mieux ai'rêls.

la grâce, enfui l'épreuve douloureuse (jui leur


CHAPITRE XXIV.
apprendà supporlerlesméchanls età aimer leurs
ennemis. » Il est le premier être créé pour ser- l'ASSA(.h: D ISAIE on s APPLIQUE AU CORPS DONT LE
« \ir de jouel aux Anges, » en ce sens qu'il est DÉMO.N EST LA TK'TE.
le premier représeulant du mal en date comme

en puissance. Or, Dieu lui fait jouer ce i(Jle par 31 Le prophète Isaïe a dit du démon : « Com-
l'entremise des saints Anges, conformément aux « ment es tu tombé des cieux, Lucifer, étoile du
lois que suit sa pro\ idence dans le gouvernement « matin? Toi qui foulais les nations, tu t'es brisé
du monde en d'aulres termes, il subordonne
: « contre la terre. Tu disais en ton cœur Je :

lesmauvais anges aux bons, afin que la malice « monterai aux cieux, j'élèverai mon trône au-
des mécbanls ait pour limites sa volonté et non « dessus des étoiles; je m'assiérai au haut de la

lem- énergie : jenlends par méchants, et les « montagne, par-delà les hautes montagnes qui

anges et les hommes qui font le mal, jusqu'au « sont du côté de l'Aquilon je monterai par- ;

moment « où la justice qui vit de la foi i


, » qui « dessusles plus hautes nuées et je serai semblable

s'exerce ici-bas dans la patience,« se changera « au Très-Hanl. Et toutefois te voilà plongé dans

« en jugement donnera aux bons le droit


^ » et « les enfers <. » Il y a dans cette peinture du

de juger non-senleinent les douze tribus s, mais démon, représenté sous la figure du roi de Ra-
encore les Anges eux-mêmes ''.
b\lone, une foule de traits qui conviennent
au corps que Satan se forme dans le genre hu-
CHAPITRE XXIII.
main, principalement à ceux qui s'attachent à
lui par oigueil et renoncent aux commande-
l.K DÉ.MOiN n'est pas KESTÉ DANS LA VÉlîITÉ .

ments de Dieu. En effet dans l'Evangile le dé-


30. Ainsi quand on dit que le démon n'est mon est appelé un homme « C'est l'homme :

jamais resté dans la vérité, (ju'il n'a jamais vécu « ennemi qui a fait cela 2, » et réciproquement
lieureusenienl dans la société des Anges, et que rhomine est appelé démon « .Ne vous ai-je pas :

immédiatement son « choisis vous douze ? Et néanmoins un de vous


sa chute a suivi origine, il

ne faut pas entendre par là qu'il est sorti mé- « est un démon » Le corps du Christ, ou l'Egli-
•*.

chant des mainsde Dieu, au lien de s'êli'e dégi'adé se, est souveul aussi appelé leChrist; par exem-

ple, l'Apùtre dit aux Calâtes « Vous êtes la race


pai- sa faule: anlreinenl on ne pourrail plus :

< Hom.l, 17. — 'Ps xcill. 15. — 'Malt, xrx, 23. — < I Cor. vi, '
Uiiïe, XIV, 12-M. — • Mail, xiii, 23. — ' Jean, vi, 71.
MVRK \l. - CHUTE ET CHATIMENT 11 AllAM. -J»l

» (l'Abrahatn, » a|)ivs avoir ilil plus liant ;


" poni- eux connu la Miic
qu'ils n'eussent point
« Dion a une proincssc à Alii'aliaiii l'I à sa
l'ait "de la Justice que de retoiuner en ari'ière a|irès
<< postorilé, et rEiTiliii'o ne dit pas à ccmix ilc : " l'avoir cimnne et d'abandonner la loi sainte
'< sa race, comme si (>lle avait voulu en inai(pur « (pii leiu- avait été donnée i. » Voilà (•(•tic race
" plnsienis; niaisellc dit en|)ailanl d'nn soni ici criminelle ijne Seigneur dépeint (piand il dit
le

" àCelniqninailradetoi.iVsl-à-dii'eauChiisI '. > (|ue l'esprit innnonde sort d'nn lionnne, et que
Et aillenrs : « Commenotre corps qui n'est qu'nii trouvant à son retour la maison lu-llojée et
« est composé de pinsieuisMiiMuhres, cl (pi'iMicorc parée, il l'habile avec sept antres démons, si
< (jn'il y ail plusicms mciubics dans le cori)s bien que le dernier état de cet honmie devient
. ils ne sont tons néanmoins qu'un seulcorps; il pire que le premier 'K C'est à elle, c'est au corps
< en est de même dn Christ . » C'est île la dn démon, que penveid s'applupier les paroles
même manière que le corps doni le dialile l'or- d'Ezéihiel : ( 'In étais dès la création un Clié-
me la tête, en d'autres termes, la multitude des « rubin, » c'est-à-dire le irône de Dieu, plein
impies et surtout des apostats (pii tomlient des de science, « et Dieu l'avait établi sur sa monta-
liauteins de rEi;lise et du Chrisl connue il est « gnc sainte, dans son Eglise; ex-
» c'esl-à-dire
tondié du ciel, est ap|)elé le diable et qu'on ap- pression que l'on retiouve dans les Psaumes :

plique an corps une l'oide de traits qui convien- « Vous m'avez écoulé dn haut de votiv monla-

nent aux UKMubres mieux qu'i'i la tète. Par con- « gne sainte >; » « tu maichais au milieu des —
séquent, on peut voir dans Lucifer, se levant le « pierreries éliiicelanles comme le feu, » c'est-à-
matin et tombant des cieux, la race des apostats dire, au milieu des Justes que l'Esprit embrase
qui renoncent an Christ ou à l'Eglise en effet, : et qui son Ides pierres précieuses toutes vivantes;
ils se tournent vers les ténèbres, après avoir lu étais (lariàil dans tes voies depuis
« le Jour où
perdu la lumière qu'ils portaient, de la même « tu fus créé Jus([u'au Jour ou lapervei'sité a été
manière que ceux qui reviennent à Dieu se tour- « trouvée en toi ''.
» On pourrait analyser ce
nent à la lumière, en d'autres termes, devieiment passage avec plus de soin et montrer peut-être
lumière, de ténèbres qu'ils étaient. que ce sens est non-seulement exact mais le
seul exact.
CHAPITRE XXV.
CHAPITRE XXVI.
PASSAGE d'ÉZÉCHIEL : (JU'lL s'aPPLIQUE AU COUPS DE
SATAN, l'église EST LEP.\RADIS.
DE LA CRÉATION ET DE LA CHtTE Dl DÉMON E\
3:2. Les expressions suivantes que le Prophète (;ÉNÉi!AL.

Ezéchiel adresse au roi de Tyr, s'appliquent


également au démon « Toi (jui es plein de sa-
:
Abrégeons une question aussi vaste exi-
33. ;

« gesse et couronné de beauté tu as été au sein ;


gerait nn développement considérable et il suf-
fira d'en résumer les points principaux le dé-
« des délices du parailis de Dieu, couvert de toutes ;

« sortes de pierres précieuses •'. » Ces paroles et


mon s'est vu immédialemenl après sa création
celles qui les suivent conviennent mieux au déchoir, par l'effet de son orgueil infini, du bon-

corps dont Satan foi'me la tête qu'au prince du heur qu'il aurait pu goûter s'il l'avait voulu ; ou
mal. Le Paradis devient alors bien il y aurait des Anges d'nn ordre infériem-,
l'Ei^lise , « le Jar-
« din fermé, la source close, la fontaine scellée, chargé des fonctions subalternes dans l'univers,
« le Jardin avec ses fruits, « comme dit le Canti- parmi lesquels il aurait vécu sans avoir la cer-

(piedes cantiques de là que les héréti-


*. C'est titude de son éternelle félicité, et des rangs des-

(jues sont tombés, tantôt en consommant ouver- quels son orgueil insensé l'anrail fait tomber
tement leur rupture, tantôt en restant attachés avec les anges dont il était le chef, et comme
à l'Eglise de coi'ps et non il'esprit, hypocrites l'archange, opinion qui ne saurait être avancée
'< qui retournent à ce qu'ils ont vomi, qui après sans paraître étrange d'autre part, si l'on ;

« avoir reçu le pardon de leurs péchés et avoir veut que le démon ait paiiagé quelque temps
" quelque temps marché dans le sentier de la jus- avec les siens le bonheur des saints anges, il

« tice, se sont laissé vaincre leur dernier état est faut chercher par quel secret les saints anges
:

n'auraient acquis la certitude d'être éternelle-


» devenu pire que le premier; il eût mieux valu
'liai. III, 29, |G. — 2ICor. XII, 12. — '
Ezéch. .\xïlll, 12, 13.— 1
Prov. x.vvl, 11 II Pierre, 11, 21. 22.
.
— - Mutt. Xll, 43-15. —
'Cant.iv.l2, 13. 5 Psal. m, 5. —
' Ezeih. xxviii, 14, Ifi.
-29:2 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

mont lieureiix qu'après la cluile ilii démon, ou n'avait fait jouer que les ressorts secrets du cœur,
par quelle exception, antérieurement à sa laute, connue il pour résoudre Judas à trahir le
le fit

le démon a\ec ses compagnons n'aurait point Christ 1, il aurait pu atteindre ses fuis avec une
été instruit de sa chute, tandis que les saints àmc égarée par un vainetorgueilbux amour de
Anges l'auraient été de leur lidélilé inunualtle. sa forces; mais, comme je l'ai déjà remarqué, le
Qnoiqu'ilen soil, il doit élre pouinoushorsdedou- diable a le désir de tenter sans pouvoir disposer
teque les anges prévaricateurs ont été précipités
: des moyens ni régler les suites de cet acte. 11 a
dans la lourde atmosphère qui en\ironue ce tetdé (juand et comme on le lui a permis. Mais
globe, comme dans une prison, pour être te- _\ il ne savait ni ne voulait rendi'e ainsi service
nus en réserve jusqu'au joiudu jugement, selon à une cei'taine classe d'hommes. C'est en cela
la parole expresse de l'Apôtre '; que le bonheur qu'il sert de jouet aux Anges.
surnaturel des saints an,Mes est accompagné d'une
certitude absolue île vivre élernellement; et CHAPITRE XXVHl.
qu'entin nous serons également certains de ce
bonheur éternel, eu vertu de la bonté, de la LE SERPENT A-T-IL COMPRIS LE SENS DES PAROLES
grâce et des promesses inlailliblesde Dieu, lors- yu'lL PRONONÇAIT?
que nous aurons été réunis à la société céleste
après la résurrection et la trauslormation de 3o. Ainsi dontc le serpent n'entendait rien au.\
nos corps. C'est dans cette espérance que nous paroles qui sortaient de lui et s'adressaient à la
vivons c'est au bienfait de cette promesse que
; femme. ne faudrait pas croire en effet qu'il fut
11

nous devons notre joie. Quant aux motifs qui ont alors transformé en un être intelligent. Les hom-
conduit Dieu à créer le diable, quoiqu'il prévit sa mes mêmes, qui sont naturellement raisonnables,
malice, et qui l'empêchent malgré sa toute-puis- ne savent pas ce qu'ilsdi-ent quand ils sont pos-
sance, de tourner au bien sa volonté rebelle, nous sédés du démon ; à plus forte raison le serpent
les avons exposés, en discutant lamème question était-il incapable de comprendre les paroles dont
jiropos des honnnes corrompus qu'on cher-
,"t :
le diable foimait les sons en liiietpar son organe,
che à lesconiprendre, à \ cro're, ou du moins lui qui serait incapable de comprendre les pa-
à en découvrir de plus élevés, s'il en existe. roles d un homme, s'il venait 'i l'écouter sans
élre possédé. On se (igure que les serpents écou-
CHAPITRE XXVI 1.
tent et comprennent ies formules magiques des
Marses, qui réussissent par leur enchantement à
KE LA TENT.VTION PAU l'ORG.VNE TiV SERPENT ET
les faire sortir de leurs retraites ; mais tous ces
DE LX FEMME.
mouvements ont le diable pour cause et font

M. Celui qui a tout créé et qui étend sur tout reconnaître tout ensemble le rôle naturel que
son empire, par l'enlremisedes saints Anges qui la Pro>idence a assigné aux êtres et celui que

se font un jouctdu diable, dont la malice même peut leur faire jouer, avec sa permission tres-
lourne au bien de l'Eglise, a donc permis qu'il sage, une volonté malicieuse. C'est ainsi que le
employât le serpent pour tenter la femme, la serpent est devenu le plus sensible de tous les

femme pour tenter l'homme, sans lui laisser animaux aux opérations de la mag'C. Ce fait est
d'autres moyens. Cependant le démon a parlé une preuve considérable que l'espèce humaine
par l'organe du serpent ; il a communiqué à a été primitivement séduite par un entretien avec

cet animal les mouvements que sa puissance le serpent. Les démons s'applaudissent d'être

pouvait en tirer naturellement pour exprimer les assez jtuissants pour faire mouvoir les serpents

paroles et les gestes propres à faire entendre ses dans les incantations; c'est un moyen pour eux
conseils à lafcnunc :mai:; quanta celle-ci, com- de tiomper.Mais, si Dieu leur donne cei)ouvoir,
me si elle était un être intelligent qui pouvait c'est poui' rap[)eler la tenlation primitive par le

produire des paroles en \erlu de ses facultés, il commerce même qu'ils continuent d'entretenir

n'a point parlé par sa bouche; il a fait agir la per- avec cette espèce d'animaux. Si même la

suasiondanssoncienr, loulen développant parune tentation primitive fut permise, ce fut pour offrir

impulsion secrète au dedans l'effet (pi'il avait pro- à l'homme, à qui cet é\éueinent devait être
duit au dehors, par l'entremise du serpent. S'il raconté pour son instruction, une image de

- n Pierre, H. 4. 'Jean, xiii,2.


,

LIVRE XL— r.Hn'K KT CIIAÏLMKNT H AltAM. -298

lonlos los st'diiclions <lii diahli' sons la tii^nrcdii

sorptMil : ce point s'i-dairiira i|iiaii(i nous aiiivc- CIIAPITUKXXX.


foiisàla nialt>(liction(|iiol>i(Mitil loiiihcrsni- rctic
KNTIiETIEN DU SERPENT AVEC LA FEMME.
l)(Me.

CILVI'ITREXXIX. ;{S. Le serpent dit h la femme : « Kh (pioi I

« pouripioi l>ieu voiisa-l-ildil : Vonsue mangerez


DE LA PRUDENCE DU SERPENT.
« jjasde t(,>us les arbres (jui soûl dans le Paradis?
;Hti. Si le stM'pciit a t-lo appolrlo plus pruilciil, « La l'einme répondit au serpent Nous mangeons :

c'csl-à-ilirt', le plus nisc (i(> Imis les animaux, il


'•
(in IViiil (le tout ailire (pii esl d;iiisle Paradis;
doit celte e|)itliete à la ruse niènicdudenion (pii " ([liant à l'arbre (pii estait milieu, Dieu nous a

s'en était lait un instiumeut pour liionipher :


« dit : Vous n'v loucherez pas et vous n'enman-
on appelle, an même tilre, (lue et rusée la lan- « gérez pas, on vous mourrez. » Ainsi le seipenl
pue dont se sei'l un esprit lia et rnse pour sé- s'adresse le i)i-(>inier à la lemme, ipii lui 111 cette

duire. Ces qualités, en ellet, n'appartient point à réponse; de sorte ipie sa laiite fut sans excuse et

l'orjiaue (pi'on nomme langue, m us à Imteili- ([ii'on ne put dire iprelle avait oublié le com-
gcnce qui la l'ait mou\oir. C'esl par la même maudemenl divin. L'oubli diin coiiiin indeinent

ligure qu'où qualilie de menteuse la plume d'un uniipieet si im|)(nlant serait déjà une négligence
écrivain le mensonge suppose un être animé et
;
condamnable; cependaul le délit est d'autant

raisounal)le, mais, comm^' la plume est rinlru- plus llagranl, qu'Eve se rappelle l'ordre de Dieu

inent du meusouge, on lu qualilie de meuleuse. et le méprise en {|uel(iiie sorte sous ses yeu.x. Le
Ou pouirait de la même la(,'on appeler menteur Psalmisle après avoir dit ; « Ils gardent le sou-

le mauis du diahle,
serpent, de\enii entre les
« venu- de ses commandements, » a donc bien

coinine la plume entre les mains d'un écrivain raison d'ajouter : « alin de les observer. " Souvent
sans loi, nu iuslrmiienl de mensonge. en effet on ne se soiivieni du ceminandcmenl
3" J'ai cru devoir laire ces observations, alin (|iie [loiir !e braver, cl le péché esl d'autant plus

d'empèelierlesesprilsde croireque les aiiimaii.v grave (|u"on n'a pas l'oubli pour excuse.
oit. Le serpeni dit donc à ta fenmie « Vous
sans raison puissent Jamais acqueru' don de le :

la raison humaine, ou réciproquement qu'un


« ne mourrez point. Dieu savait en effet que le
être raisonnable puisse toul-à-coup se méta- « jour où vous mangerez de cet arbre, vos yeux
morphoser en bète; et de les soustrau'e ainsi à <i seront ouverts et vous serez comme des dieux,
l'opinion aussi criminelle que rid cule selon la- « connaissant le bien et le mal. » La femme
(pielle les âmes des hèles passenl dans le corps pu se laisser persuader parces paroles
aurait-elle

des honunes ou les âmes des hommes dans le que Dieu leur avait défendu une chose bonne
corps des bêtes. Le serpent parla à l'homme et utile, si elle n'avait déjà cornai de sa propre
comme (it l'âne sur lequel était monté Balaam '; force un amour secret et comme une haute idée,

avec cette dillérence que l'un lui l'organe du que la tentation devait dévoiler et rabattre ?

diable et l'autre d'un Ange. Les œuvres des bons D'ailleurs, non contente d'écouter le serpent,

et des mauvais Anges se ressemblent quelquci'ois, elle jette les yeux sur l'arbre, « elle voit que le

comme celles de Moïse et des magiciens de « fruit était bon à manger et agréable à la vue. »

l'haraon '. iMais là encore les bons Anges ont une S'imaginaiit (|u'il n'était i)as capabli> de lui don-
puissance supérieure, ou plutôt les mauvais Anges ner la mort et que sans doute Dieu n'avait atta-

ne peuvent [iroduire ces elléls, (lu'aiilanl (jne ché qu'un sens allégor'wjue à cette menace :

lUeii le leurpermet par rintermédiaire des bous « X'ous mourrez de mort, si vous en mangez, »

Anges, que chacun reçoive un salaire pro-


alin en mangea et en donna à son
elle prit le fruit,

portionné à ses intentions ou à la gràcede Dieu, mari, en ajoutai! l sans doute quelque parole
loujours juste, toujours bon, « dans l'abimedes engageante, que laisserait supposer le silence de
« trésors de sa sagesse s. « l'Ecriture, à moins ciuc l'homme, en voujntque
sa femme n'en était pas morte, n'eût plus besoin
' Nom. XXII, 28. — 'E.xod. vu, 10. 11. •Rum. xi,33.
d'encouragement.
,

294 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

s'ouvrirent . Ils n'étaient {)as fermés en effet,


CHAPITRK WXL mais s'ouvrirent en ce sens qu'ils se fixèrent
ils

sur des objets qui jusque-là n'avaient point attiré


COMMENT ET SUR QUOr LEURS YEl \
leur alteniiou. QuaiKl donc .Vdam et Eve eurent
S'0UVRIRE?{T-ILS?
été entraînés à enfreindre le précepte par une
curiosité criminelle avide de reconnaître les
iO. en mangèrent donc ef letu's )eu.\
« Ils ,

s'duvrirent, « mais snr quoi? Ce fut liélas conséquences mystérieuses qu'ils auraient à subir
!

pour éprouver les feux de la concupiscence et s'ils louchaient au fruit défendu, et, qu'ayant vu
subir la peine du péché qui, avec la morl, s'était
ce fruit tout semblable à ceux dont-ils avaient

insinuée dans leurcliair. Celle-ci ne AU phisseu- mangé sans éprouver aucun mal,
ils eurent plus

lement ce corps animal, (|ui pouvait se transfor- de penle à Dieu excuserait aisémenl
ci-oire (|ue

mer, s'ils a-vaient piTséNoré dans l'obéissance, en leur faute, qu'à résister à la tentation de découvrir
les propriétés de ce fruit, ainsi que le motif qui
un corps plus parlait el lout s[)irihiel sans passer
par la mort elle devint une chair de mort et avail décidé Dieu à le leur défendre lorsqu'ils ;
;

" une loi lutta désormais dans les membres eurent transgressé le conimandement et qu'ils
« contre de l'esprit '. « Car, ils n'avaient pas
la loi furentdépouillésintérieurementde la grâce qu'ils
été créés les yeux termes; ils n'avaient pas erré à avaient offensée parleur orgueil et les fumées de
tàtonsdansTEden, exposés touchcrsans le savoir i'i
leur amour-propre; alors iisjetèrent les yeux sur

l'arbre détendu et en cueillir les fruits malgré


i"i
leur corps et éprouvèrent, par un mouvement
eux. IVailleurs, comment les animaux auraient- jusque-là inconnu, les désordres de la concupis-
ils été amenés à Adam pour qu'il vit comment cence. Par conséquent, leurs yeux s'ouvrirent sur

il nommerait, s'il n'avait pas vu en effet ?


les un point qui jusque-là avait échappé à leurs re-
Connnent la iemme aurait-elle été présentée à gards, quoiqu'ils fussent antérieurement ouverts

l'honnne el lui aurait-elle fait dire : « Voilà l'os sur d'autres objets.

« de mes os et la chair de ma chair 2, » s'il avait


CHAPITRE XXXII.
été aveugle ? Enfin, comment Eve elle-même
eût-elle vu que le fruit défendu « était beau à DU PRINCIPE DE LA MORTALITÉ ET DE LA
« vou' et agréable à manger, » si leurs yeux' CONCUPISCENCE.
avaient été réellement fermés?
41.ne faudrait pas toutefois, en prenantun
11 42. La mort entra dans leurs organes le
ainsi

seul mot dans le sens métaphorique, changer ce jour même oùde Dieu fut violée.
la défense
passage en une allégorie. C'est à nous d'exami- Leur corps n'eut plus cet état merveilleux où le
ner en quel sens le serpent a dit « Vos yeux :
maintenait la vertu mystérieuse de l'arbre dévie,
K s'ouvriront. » Sans doute le serpent à tenu ce qui l'aurail mis à l'abri des maladies comme des
le i-aconte; mais nous
langage, l'écrivain sacré atteintes de la vieillesse: car bien qu'il fût encore
pouvons examiner quel en est le sens. Ces ex- animal et qu'il ne dût se transformer que plus
pressions « lueurs yeux furent ouverts
: et ils lard, l'effet de l'arbre de vie représentait déjà
'< s'aperçurent qi:'ils étaieid nus, > sont le récit l'effet tout spirituel de la sagesse qui fait partici-

d'un fait historique ; rien ne nous autorise à y per les Anges à l'étcrnilé en dehors de toute dé-
voir une allégorie. L'Evaugéliste apparemment chéance. Ainsi détérioré, leur corps contracta
n'introduisait pas dans son récit les paroles mé- les principes de maladie el de mort qui sont
taphoriques (le quelque personnage, mais rap- propres également aux animaux, eux et comme
pelait en son nom ce (jui s'était passé loi'S<|u'il il combler
ressentit l'appétit des sexes destiné à

disait des deux disciples d'Emmaiis, dont l'un les vides de la morl. Toutefois, la noblesse de

s'appelait Cléophas, que leurs yeux s'ouvrirent, l'âme i-aisonnahle, éclataul jusque dans sa pu-
quand le Seigneur romjjit le pain, et qu'ils le nition, la fit rougir du mouvement brutal qui se
reconnurent ; ces disciples en effet n'avaient pas ])assail dans les membres; la honte naquit en
marché yeux fermés, mais leur vue élait
les elle, de la sensation étrange (ju'elle n'a\aitpoiid
d'abord impuissante à reconnaître le Sauveur '. encore éprouvée, et surtout de l'idée que le pé-
Dans ces deux récits il n'y a aucune allégorie ché cause de ce penchant grossier. Ce fut
élait la

((uoique l'EcritMi'c dise au ligure que leurs yeux l'exacte applicalion de la |)arole du prophète :

Rom. \ 11,23. — 'Gen. Il, 19,22, 23. — •''Luc, xxlv, 13-31. « Sei"neur, vous avei dans votre volonté donné
LIVRE XI. — CHUTE ET CHATIMENT D'ADAM. "298

' l'oclal il ma piiissaiico ; vous a\oz oiisnilc di'- à leur insu des actes propres à iu^lruirc la pos-
" toiiriiiMdtic l'acccl J'ai ('Icloiil tioiilili' '. «Dans Ifiité, (|iii (lc\ail im jour les apprendre <lans un
cetlf t'oiitusiou ils ciiiciil irrours à des rciiillcs (•('cil i-ompusé poui' elle.

(le liguiei', se firent des ceinluies, et, pinir axdir


renoncé à un élal iilorieux, eatlièrenl leur hon- CilAlMTKK XWIV.
teuse nudité. Ces lenilles n'a\aient sans doide à
IIE l.'l.NTEItIKK'.ATOllIE Ql E ItlEI FIT S( BIK
leurs \eu.\ aucun rapport avec les organes révol-
A ADA^I
tés (]u'il s'afiissail de voiler; ils n'y eurent re-
cours (pie sons l'impulsion secrète de la lionle Le Seigneur Dieu appela Adam el lui
'!.>. «

(|iii lestrouhlait, alin de révéler ainsi à leiii- insu < es tu?


dit : Où
Le reproche cl non l'igno- )>

leur véritable (ii.-itiinent. rance éclate dans celle question. Ilemarquons


que le conimandemenl ayant été fait à l'homme
CilAl'lïKK WXIII.
pour ((u'il le transmît à la femme, c'est l'homme
interrogé le premier. Le commandemenl
(pii est
I)K \.\ V01\ DE niEl, QIAXD U. SIC PROMENAIT
DANS LE .lARDIN.
se communique du Seigneur à la femme par
l'entremise de l'homme le [)éché passe du diable ;

i3. « K ils entendirent la voix du Seisineur à l'homme par l'entermédiaire de la femme.


'< qui se promenait dans le jardin, sur le soir. » Tous ces faits sont pleins d'enseigneinents; ce ne
C'était bien l'heure en effet où il convenait de sont pas les [)ersonnages qui nous les donnent,
les visiter, eux qui s'étaient éloignés de la lumière c'est la sagesse loute-[)uissante de Dieu (pii les

de la vérité. Il est possible que Dieu leur parlait fait sortir de leurs actes. Mais nous n'avons point
auparavant en s'adressant à leur intelligence ici à découvrir le sens caché des événements;
a\ec, ou sans langage, comme il parle encore bornons-nous à en montrer la vérité.
maintenant aux Anges, en éclairant leur esprit 't(>. <c .V.dam répondit : J'ai entendu votre voix
de sa lumière iminu:ible el en leur faisaid com- " dans le Paradis, et j'ai eu peur, parce quej'étais
prendre d'un seul coup même ce qui se déve- « nu et je me suis caché. » Il est fort vraisem-
loppe dans la suite des temps. Dieu, dis-je, pou- blable que Dieu se montrait habituellement à
vait les entretenir de la même manière sans , ces premiers humains sous le couvert d'une
toutefois leur communiquer la sagesse aussi créature ayant la forme humaine et disposée à
pleinement qu'aux .\nges Quelque distance
. cette fin; et comme il tenait sans cesse leur esprit
(piil mit entre eux et l'homme, selon la portée tourné vers les choses surnaturelles, il n'avait
de son intelligence, il ne laissait pas de les vi- jamais [)ermis qu'ils aperçussent leur nudité,
siter et de leur parler; cl peut-être employait-il avant l'instant où le péché leur fit sentir par une
des moyens plnsirpies, comme
les images (jui juste punition un mouvement honteux dans leurs
ravissent l'esprit en extase; des apjjaritions qui memhi'es. Ils éprouvèrent doue l'impression d'un
frai)peiit les yeux ou les oreilles, comme celles hommeenfaced'unauli'ehomme,etcelte impres-
où Dieu montre sous le couvert d'un An.:e ou
se sion, châtiment deleurraute, les portait à essayer
l'ail retentir sa parole dans une nuée. Quant au de se cacher devant celui à qui rien ne peut être
son (ju'ils entendirent, au moment où Dieu se caché, etdedéroberleur corpsàlavue deCelui qui
l>romenait vers le soir, il l'ut formé par l'organe lit dans lescœurs. Maisfaul-il s'étonner qu'ayant
d'une créature : ce serait une erreur de croire voulu dans leur orgueil devenir comme des dieux,
que l'essence invisible et immense de la Trinité ils se soient évi<noiiisdausleurspropres|)ensées et
se soit montrée à eux d'une manière sensible, aient vu leur cœur insensé se couvrir de ténèbres ?

dans un certain lieu et à un certain moment. Dans leur prospérité ils se sont donné le nom de
ii. « El Adam etsa femme se cachèrent île la face sages, el le Seigneur ayant détourné sa face, ils

•du Seigneur au milieu des arbres du Paradis. » sont desenus des hommes stupides '.Mais le sujet

Quand Dieu détourne sa face de l'àme et qu'elle de leurhonte, le molifqui leur avait fait prendre
se ti'ouble, elle fait naturellement des actes qui desceinlures, devint plus affreux encore, quand
tiennent de la sons l'inlluence de la honte
folie, il iallul paraître en cet accoutrement devant Celui
et de ne faut donc pas s'étonner que,
la peiu- : il qui s'abaissait familièrement poiu^ venir les visiter
ressentant encore cette confusion, lisaient fait et empruntait pourainsi dire les yeux d'une créa-
Ps.X.XLV. 8. Rom. U, il. 22.
296 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

ture Iminaine. Et s'il leur apparaissait sous la sans imiter leur orgueil, et s'écriera jusqu'à la

incuiP loiine qu'il se montra à Abraham, au fin des siècles : « J'ai dit Seigneur ayez pitié de
:

pietl (lu chêne de .Mainhré ', afin de leur parier « moi; guérissez mon àme, car j'ai péché con-
comme un homme à un liomme, ilsdurenlaprès « tre vous'. mieux valu pour eux
» Qu'il eût
leur péché trouver un nouveau sujet de lionte tenir ce langage Dieu n'avait point encore! iMais

dans celte tendresse voisine de l'amitié qui, brisé la tète des pécheurs 2. 11 fallait attendreles
avant le péché, leur inspirait tant de confiance. afflictions, les horreui'sde la mori, les angoisses

Aussi n'osaienl-ils plus montrer à ces jeux di- des générations, la grâce qu'au moment oppor-
vins une nudité que leur propre vue était in ca- tun Dieu enverrait aux hommes, après leur avoir
pable de supporter. appris dans les souffrances à ne point présumei-
de leurs forces.« Le sopenl m'a séduite. » Fallait-
CHAPITRE WXV. ildonc préférer au commanilement de Dieu le
conseil de qui que ce fût ?
EXCISES d'ADAM et D'ÈVE.
CHAPITRE XXXVL
i". Le Seigneur qui voulait interrog;er lescou-
liables, comme l'exige la justice, et leur infliger MALÉDICTION Di; SEUPENT.
un chcàtimenl plus sévère que la honte qu'ils
éprouvaient, dit h Adam : « Et comment sais-tu 49. " Et le Seigneur Dieu dit au serpent
« que pour avoir mangé du
tu étais lui, sinon « Puisque tu as lait cela, tu seras maudit entre
« seul arbre dont je t'avais détendu de man- v< tous les animaux et entre toutes les bêtes <]ui

ieser? Cette faute en etTet, leur avait commu-


>> « sont sur la terre. Tu marcheras sur ton ventre
nique un principe de mort, selon l'arrêt du < et tu mangeras la poussière tous les jours de
Seigneur, qui, accomplissant sa menace, leur « ta vie. Je mettrai de l'inimitié entre toi et la

avait l'ait sentir le trouble de ia concupiscence i< femme, entre sa postérité et la tienne. Elle

au moment où leurs yeux s'ouvrirenl,et la con- « l'épiera à la tète ei lu chercheras à la mordre


tusion qui en était la suite. Et Adam dit La >< :
« au talon. » Cetarrèt doit être entendu au figuré;
" femme que vous avez mise avec moi, m'a pré- il a élé prononcé, mais c'est là tout ce qu'oblige
« sente de ce fruit et j'en ai mangé. » Quel or- à croire la sincérité de l'historien et la vérité

gueil! Dit-il J'ai péché ?Non. 11 éprouve la con-


:
infaillible de son récit. Les mots: « Le Seigneur
fusion dans toute sa laideur, il n'a pas assez d'hu- i Dieu dit au serpent, apparliennent au nar-
;.

m'iité pour avouer sa faute. Ces paroles nous ont rateur, il faut les prendre à la lettre, en d'auh-es

été transmises, parce que ces demandes ont été termes, l'arrêta été prononcé réellement contre
faites en vue de nous être rapportées fidèlement et le sei|)ent. Quant aux [)aroles mêmes de Dieu,
de nous servir de lei^'ons, car si elles étaient fausses, le lecteur a toule libert(> d'examiner s'il faut les

elles ne pourraient être instructives: elles étaient entendre à la lettre ou au figuré, d'après le prin-

donc destinées à nous montrer jusqu'où va l'or- cipe que nous avons posé au début de ce livre •'.

gueil chez i'homme qui, aujourd'hui encore, rend Ainsi donc le serpent n'a été soumis à aucun in-
Dieu responsable de ses crimes en s'attribuant à terrogatoire, c'est peut-être qu'il n'avait point

lui-même toutes ses vertus. «.La femme que vous a:.;i libr<?nienl d'après ses instincts; il n'avait été

avezmise avec moi, » c'est àdire que vous m'a-


<i
que l'iuslrument aveugle du démon qui était
vez donnée pour compagne, m'a présenté de ce déjà destiné au feu éternel, à la suite du péché
fruit et j'en ai mangé; il semblerait à l'entendre, ([ue lui avait lait conunettre l'impiété et l'orgueil.
(pi'elle lui avait éf' donnée pour lui désobéir et le Mais ton! ce (jui s'adresse au seri)eut et par con-

rendre avec elle infidèle à Dieu. séquent à cehn qui s'en est lait un inslruuienl,
4S. « Et le Seigneur dit à la fenuue Pourquoi : ne peut être pris qu'au figuré : c'est le [loitrait

«as-tu l'ait cela ? La femme répondit Le serpent


: même du tentateur, tel qu'il devait se montrer
«m'a s'éduite et j'ai mangé du Iruit. » Eve non un jour au genre humain, dont l'origine re-
plus ne reconnaît pas sa faute et la rejette sur monte du reste à l'époque même où cet arrêt
un antre c'est le même orgueil dans les deux
: fut prononcé conh'e le démon sous la figure du

sexes. Voilà pourlant les ancêtres de celui qui, seipent. Quel sens faut-il allacher à ces paroles
éprouvé par une foule de disgrâces, s'est écrié, prophétiques? c'est une question que j'ai tâché

' Gen. xvill; 1.


'
Ps. XL, 6. — 2 Ibid. cxxviii, 4. — ^ Ci-dessus, n. 2.
LIVRE XI. — CHUTE ET CHATIMENT D'ADAM •291

lii- résoudre dans deux livres sur la (lenèse, les

piil)liés contre les Manichéens, et si je trouve CHAPITRE XXWIII.


ailleurs occasion de rappioloiidir, Dieu uie pn^-
CIUTI.MKM IMI.I(;K A I.HO.MME DU N0.M «l'iL
lera son secours poui' la developpcrencore; mais
DONNA ^ I.A KEMME.
en ce uiouicnl jeddis poursuivre mon plan sans
m'en laisser distraire.
.'il. " Puis il dit à .\dam : Piiiscpie tu as obéi
« h la parole de la que lu as mangé de femme et
CllAl'IÏHK WWll.
«l'arbre auquel je t'avais défendu de toucher;
« la terre sera miuilite à ciuse de toi; lu en
Dl CHATIMENT INFLIGÉ X LX FEM.ME.
« mangeras dans la douleur tous les jours de ta

.'id. « Puis il dit à la l'emme : Je midliplicrai •< vie. Elle te produira des épines et des chardons,
'< tesdouleurs et tes (•éinissenients tu entauleras : « et tu mangeras l'herbe des champs. Tu man-
" dans la douleur tu seras tournée vers ton mari ; « géras ton pain à la sueur de ton front, jusqu'à

et ildominera sui' toi. « 11 était éfialemeul plus « ce que tu retournes dans la terre dont tu as
aisé d'entendre au sens ligure et prophétique « été pris : car lues poussière et lu retourneras en
cet arrêt que Dieu prononce sur la leinme. « poussière. » Voilà bien hïs peines de l'homme ici-

Mais obserNons (pie la leiumc n'avait point en- bas, (|iii l'ignore/Eiles n'aii. aient jamais existé,
core été mère, et (pic les doulcuis de l'eutante- si nous jouissions encore de la félicité qui régnait
ment péché
étaient attachées à ce corps où le dans l'Eden, on n'en dès lors saurait douter;
avait introduit la mort, à ce corps, animal sans nhésilons pas à prendre ces expressions à la
doiile, mais destine à ne jamaii périr si rhoimue Icllre. Toutelois elles renferinent un sens pro-
n'avait péché, etàse transloimer glorieusement phéli(pie (ju'il faut garder comme un principe
après une veihicus.- exislence, comme je l'ai dit d'csijcrance, parce qu'il est le but où tendent
soiaent; ou peut donc eulciidre ce chàliment à les paroles du Seigneur. D'ailleurs ce n'est pas
la lettre. Toutelois il reste encore à examiner en vain qu'Adam, guidé par une inspiration su-
comment on peut expliquer litîérallement ces blime, a donné à sa femme le nom de vie, en
mots Tu seras tournée veis ton mari et il
: '<
ajoutant qu'elle serait la mère de tous les vi-
<

<dominera siu' loi. » En effet, il est naturel de « Car ces derniers mois ne sont point un
vants. «

croire que la femme, même avant le péché, récit, une assertion de l'historien ce sont les :

était faite pour être soumise à l'homme et pour paroles même dont l'homme s'est servi pour
rester tournée vers lui eu vertu de sa subordina- expliquer à quel litre il avait donné ce nom à
tion. Mais on peut iort bien admettre qu'd s'agit son épouse.
ici de celte sujétion qui tient à la condition plutôt
ipi'à raltachement, de lelle sorte que l'esclavage CHAPITRE XXXIX.
qui plus lard mit un homme au service d'un
DES ROBES nE PEAUX : CONDAMNATION DE l.'oRiil'ElI..
autre, serait un châtiment du péché. L'Ap(jlre
dit sans doute : > Assujettissez-vous les uns aux Adam
o2. « Et le Seigneur Dieu lit à et à sa
« autrespar la charité '; « mais il n'aurait jamais << femme des robes de peaux et les en revêtit. »

(Ut Dominez les uns siu" les autres. » Les époux


: M
C'est làunfait réel, quoiqu'il soit en même temps
|)euvcnt donc s'assujettir l'un à l'autre par la
allégorique; de même (pie les i)aroles [)récédentes,
charité; mais r.\p()lre ne permet pas à la femme touten cachanl une proph 'lie, avaieul été réel-
de dominer ''. C'est un droit que l'arrêt du Sei- lement prononcées. Je l'ai dit, je ne me lasse
gneur a consacré pour riiomine; la femme a été pas de le redire le devoir d'un historien con-
:

condamnée par sa faute iilutôt (pic par la nature siste à raconter les faits, tels qu'ils ont eu lieu,
à trouver ilans son mari un maître : toutefois
telles qu'elles ont élé pro-
à citer les paroles,
elle doit rester soumise, sous peine de se dt^grader noncées. Si l'on examine à la fois dans un fait
(>ncore et d'augmenter sa faute.
son authenticité ou doit voir
et sa siguilication,

I
Gai. V, (3. — UTim. ii, 12.
dans les paroles et les mots et leur sens. Qu'on
entende à la lettre ou au (iguié des paroles que
le récit reproduit comme \ raies, il n'importe:
c'est un fait et non une figure, qu'elles ont été
prononcées.
298 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

58. « Et Dieu dit : Voilà Adam devenu comme est réel, bien qu'il nous appienne en même temps
« l'un de nous, sachant le bien et le mal. » Dieu que le pécheurest à l'opposé de la vie spirituelle,
a prononce^ ces paroles, quel que soit le moyen dont le paradis était le symbole, et qu'il vit dans
qu'il ait employé; dès lors il faut voir dans le la misère. « Puis il plaça un Chérubin et un
pluriel une allusion à la Trinité, analogue à celle « pour garder le
glaive flamijoyant qui s'agitait,
qu'on trouve dans ce passage « Faisons l'Iiom- : « chemin qui conduisait à l'arbre de vie. » Que

u me ', » ou dans cet autre « Nous viendrons : les puissances célestes aient exécuté cet ordre
« vers lui et nous habiterons en lui, » comme le dans le paradis terrestre et qu'une llainme vigi-
dit le Seigneur de lui-même et de son Père ''.
lante ait été entretenue par le ministère des
Ainsi la promesse du serpent est retombée sur la anges, on n'en saurait douter le fait ne doit pas :

tète de l'orgueilleux voilà ou aboutissent ses as-


; être contesté; mais il représente en même temps
pirations « Vous serez comme des dieux, disait
.
ce qui se passe dans le Paradis spirituel.
« le serpent. Voilà Adam devenu comme l'un de

'<nous, » répond Dieu. Ces paroles divines sont CHAPITRE XLI.


moins une insulte, qu'un avertissement terrible
HYPOTHÈSES SIR LANATIRE DU PÉCHÉ d'aDAM.
destiné à reprimer l'orgueil de tous les hommes,
dans l'intérêt desquels ce récit a été composé. 56. Je n'iguore pas que, d'après certai-
Peut-on voir en effet dans ces mots « Le voilà :
nes personnes, le premier couple humain
« devenu comme l'un de nous, sachant le bien
n'a pas su contenir l'instinct qui le portait à
« et le mal, » un autre but que celui d'inspirer
connaître le bien et le mal, en d'autres fermes,
une terreur salutaire, puisque, loin de devenir
qu'il a voulu devancer le moment où il lui au-
ce qu'il avait rêvé, Adam n'a pas même gardé rait été donné d'acquérir plus utilement cette
sa grandem- originelle ?
idée, et que le tentateur a eu pour but de leur
faire offenser Dieu en leur donnant cette science
CHAPITRE XL.
anticipée, afin qu'ils fussent condamnés à cire
ADAM ET EVE CHASSÉS Dl' PARADIS. — EXCOMMUNI- dépossédés du trésor dont-ils auraient pu jouir
CATION. sans danger, s'ils avaient su ne s'en approcher
qu'au moment fixé par Dieu. En prenant l'arbie
54. c< Et maintenant, prenons garde dit Dieu, de la science au sens figuré, au lieu d'y voir ex-
u qu'il n'étende la main, qu'il ne touche à l'arbre clusivement un arbre réel avec ses fruits, on
« de vie, qu'il n'en mange et ne \\\e éternelle- pourrait donner à cette hypothèse un tour con-
« ment. Et Dieu le chassa de l'Eden pour qu'il forme à la saine doctrine.
« allât dont il avait été tiré. »
travailler la ferre 5". D'autres ont cru que nos premiers parents
Dans ce passage, on reproduit d'abord les paroles s'étaient approprié le droit de mariage, sans
de Dieu; l'expulsion d'Adam en est la consé- attendre que leur union eût été permise par le

quence rigoureuse. Mort à la vie des anges qui Créateur : l'arbre de la science serait le symbole
aurait été sa récompense, s'il avait été fidèle au de cette niiiou qui leur aurait été interdite jus-
commandement de Dieu, que dis-je? à la vie heu- qu'au moment faxorable pour la consommer.
reuse que lui assurait dans le paradis la vigueur Ainsi nous voilà réduits à croire qu'ils ont été
de son organisation, il dut être séparé de l'arbre créés àun Age qui précédait la i)leine puberté
de que cet objet visible lui aurait con-
vie, soit ou que leur union ne fut pas légitime au premier
servé, par une vertu invisible, son heureuse or- moment qu'elle put s'accomplir, et que, ne
ganisation, soit qu'il fût le signe visible de l'in- pouvant être légitime, elle dut ne point s'accom-
visible sagesse. Il en fut séparé par le fait de sa l^lir : il aurait fallu attendre sans doute (}ue le

condamnation à mort, ou même par une espèce mariage se fit dans les formes avec la eérénionie
d'exconimimication, analogue à celle dont l'IÎ- des VdMix, l'appareil du festin, le contrat. Toul
glise, le Paradis de la terre, frappe les coupables cela est ridicule, et a en outre rinconvénieni
selon la règle de sa discipline et les sépare des d'être en désaccord avec les faits (huit nous cher-
sacrements visibles de l'autel. chons a établir et dont nous a\ons établi la va-
55. « Et il chassa Adam : et il le plaça àl'op- leur historique, selon les forces qu'il a plu à
« posé du jaiilin des délices. » Cet évène.nent Dieu d(^ nous prêter.

' Ceii, 1,26. —'Jean, .\lv, 23.


I.IVRK XI. — CHIITE ET CHATIMKNT D'ADAM. 299

3!). Voyez Salomon est-il possible ([iiim roi :

CHAIMTKK M.n. de sihaute saf^csse ail ciii (pie l'idolâtrie eût


le moindre fondement? Non, mais il ne peut ré-
\1>A>I A-l-ll. AJOITKI-Ol U \ l'VUOI.KS 111 SKUl'KM? sister à sa passion iioiir les femmes (pil l'entrai-
ni' MOTIF yi I ' ^ l'MT l'KCllKli. naient à ce péché, ci il lil le mal (pie lui rc-

lirochait sa conscience, poiii- ne pas déplaire aux


oK. l'iie (luostion plus iiiiporlaiilo est de sa-
\eii\ pleins dim poison mortel, (pii le transpor-
\oir coinnionr Adam, si son iiitelliticiuT iHait
taient irim amour aveugle et insensé '. lien fut
déjà spiiiliu'llc, (|ii(ii(iiu> le corps IVil animal, a
de même d'.Vdaui ; quand la femme eut mangé
pu se laisser prciidri' aii\ paroles du serpent et
du défendu et qu'elle lui en eut présenté,
fruit
eroire 4110 Dieu leur axait déleiulu de toiielier
aliu (pi'ils eu mangeassent ensemble, il ne vou-
à l'arbre de vie, parce (pi'il savait (pie la eou-
lut pas l'attrister, à la pensée sans doute (prellc
iiaissanceduliieiietdiimallesretidrailsemhiahles
serait inconsolable, s'il lui relirait son afléction,
à lui; comme si c'eut été là l'uiii(pie a\aiitage
et qu'une rupture aussi cruelle la ferait mourir.
que Dieu eût envié à sa créature? Il serait étrange
Il ne céda pas à la concupiscence de la chair,
(pi'a\cc une intelliticnee itrné(- des dons de la
puisqu'il n'avait point encore éprouvé les effets
spiritualité, riiummeefil été dupe d'une pareille
de la loi (pii révolte la chair contre l'esprit; il
illusion. N'est-ce point parce qu'il y résista qu'il
céda à cette sMupathie (pii nous fait souvent of-
fut harcelé parsa l'emme,la(pielle était moins in-
fenser Dieu pour conserver un ami et en cela ;

telligente et vivait peut-être à celle é|)0(pie de la


il fut coupable, comme rindi(pie assez la juste
viedes sens sans connaitre celle de l'esprit?
exécution de l'arrêt divin.
L'Apôtre en clïet ne lui donne pas le privilège
(iO. Adam a donc été trompé, mais d'une ma-
(le ressembler direcleuieiit à Dieu : « L'homme, mes
nière bien ditïérenle ; il est impossible, à
"dit-il, ne doit pas se couvrir la tète, étant l'i-
yeux, qu'il soit tombé comme la femme, dans le
« mage du Seigneur mais la femme est
et la gloire ;
L'Apôtre
piège que lui tendait le serpent. voit
i la gloire deriiomine '. » Ce n'est pas que l'es-
une séduction, au sens rigoureux du mot, dans
prit de la femme ne puisse également rélh'chir
l'illusion qui fit prendre à la femme les men-
la même image, puis(}ue le même A|)(~)tre dit
songes du serpent pour des vérités; en d'autres
que sous le règne de la grâce « il n'y a plus ni
termes, dans la faiblesse qu'elle eut de croire
« hommes ni femmes - » ; il est plutôt probable
que Dieu leur avait défendu de toucher à l'arbre
que la femme n'avait point encore accpiis les
de la science, uni(piemenl parce qu'il savait
dons que vaut de Dieu
à l'esprit la connaissance
qu'en \ touchant ds seraient semblables à des
et qui lui peu à peu communiqués
auraient ét(''
dieux, comme si le Créateur des hommes eût
par son mari, chargé de l'instruire et de la gou-
envié à riiomme le privilège de devenir son
vei'ner. L'Apôtre n'a pas dit en vain « Adam
Une l'homme ait é[»iouvé nu mouvement
:

égal.
" a été créé le i)rcmier, Eve ensuite. De plus
d'orgueil, qui ne put échapper au Dieu qui lit
« ,\dam n'a pas été séduit, mais c'est E\e (jui
dans les ciPiiis, et qu'il ait, comme nous l'avons
« ayant été séduite a été la cause de la prévarica-
dit plus haut, cédé au désir de faire l'épreuve,
'< du genre humain ' > ajoutons, en ren-
lion
en voyant que sa femme avait mangé du fruit
:

daid riionune lui-même prévaricateur. .Vdam


déf:>ndu sans mourir, soit; mais je ne saurais
en effet a été prévaricateur, comme le dit en-
croire (pi'il ait pu s'imaginer, si son intelligence
core l'Apôtre quand il parle « de la prévarica-
était \iaiment spirituelle, ()ue Dieu leur eût in-
« tion du premier .Vdam, type de l'Adam fu-
terdit l'arbre de la Science par un sentiment de
« tnr ^. « Mais il dit lormcUenient (lu'Adam n'a
jalousie. Pour terminer, ils ont été engagés au
point été séduit. Kemar(pions en elfet ([n'en ré-
péché par des motifs capables d'agir sur eux, et
pondant à Dieu, il ne dit pas la femme m'a :

le récit de leur faute a été lait pour être lu avec


séduit, mais bien la femme (pie vous avez
[irolil par tout le monde, encore que bien peu
;

" mise avec moi m'a donné du fruit et J'en ai


le com])reniient comme il faudrait.
mangé. » La femme dit au contraire expicssc-

inent « Le seipent m'a séduite. »


:
'
m Rois, XI 1.

1 Cor. XI, 7. — 2 Giil. 111,27,28. — ' I Tim. li, 13, U. — '


Kum. v, 14.
LIVRE XII.

LE PARADIS ET LE TROISIEME CIEL.

CHAPITRE PREMIER. dans le monde physique, ous'il doit


ciel est situé
être compris parmi les choses purement spiri-
DL: passage de SAIM PAIL RELATIF AL PARADIS. tuelles. On avancera peut-être qu'un homme ne
pouvait être ravi avec son corps que dans uni-
1. commentaire qui s'étend depuis
Dans le
région matérielle, soit mais comme l'Apôtre
:

les la Genèse jusqu'au moment


premiers mots de
déclare qu'il ne sait pas s'il y fut ravi avec ou
où riioaune fut chassé du Paradis, j'ai traité en
sans son corps, comment oser assurer ce que
onze livres toutes les questions que j'ai pu, dans
l'Apôtre ne sait pas hù-mèmc, selon ses propres
la mesure de mes lorces; j'ai altlrmé et soutenu
paroles ? Cependant, comme il est impossible
les vérités incontestables, j'ai analysé et discuté
que l'esprit sans le corps soit ravi dans une
les hypothèses : mon but a été moins d'imposer
région matérielle, ou que le corps soit trans-
mon opinion sur les points obscurs que d invo-
porté dans un séjour spirituel, le doute même
quer les lumières dautrui dans mes doutes, et
de l'Apôtre, sur un événement qui lui est tout
de prévenir toute assertion présomptueuse chez
personnel, comme personne ne le conteste, force
le lecteui-, quand je n'ai pu donner à ma pensée
en quelque sorte à conclure qu'on ne saurait
un fondement Dégagé des préoccupations
solide.
savoir nettement si ce séjour était matériel ou
où me jetait l'interprétation littérale du texte
purement spirituel.
sacré, ce douzième livre sera un traité plus libre
et plus développé de la question qui a pour
CHAPITRE II.
objet le Paradis : de la sorte je n'aurai pas l'air

d'avoir évité le passage où l'Apôtre semble par-


l'aPOTRE a PL IGNORER s'iL AVAIT VU LE PARADIS
ler du Paradis sous le nom de troisième ciel, le
IXDÉPENIIAMMENT DE SON CORPS.
voici : « Je connais un chrétien qui, ily a qua-
« torze ans (était-ce dans son corps, ou hors de l'image d'un corps nous
i. En effet, lorsipie ,

« son corps, je le ne sais pas, Dieu le sait,) fut


apparaît soit en songe, soit en extase, on ne la
« ravi jusqu'au troisième ciel. Je sais encore que corps lui-même il faut pour
distingue pas du :

« ce même homme ( était-ce dans son corps, ou


cela revenir à soi-même et recoimaitre (|u'ou
« horsde son corps, je ne le sais pas. Dieu le sait,)
s'est trouvé en présence d'images que l'esprit ne
« fut ravi jusque dans le Paradis, et y entendit
recevait pas par le canal des sens. Qui ne s'a-
« des choses qu'il n'est pas donné à l'Iiomme perçoit à son réveil que les objets vus en songe
« d'exprimer i. »
purement imaginaires, quoiqu'il fût im-
étaient
2. 11 faut d'abord chercher ce que l' Apôtre en- possible de distinguer pendant le sommeil entre
tend par troisième ciel ;
puis, se demander s'il a l'apparition et la réalité ? Il m'est arrivé et, à ce
confondu ce séjour a\ec le Paradis, ou s'il veut
titre, d'autres ont é|)rouvc ou éprouveront la
dire (ju'il est |)assédii troisième ciel dans le Para-
même chose, quedans ces rêves j'avaisconscience
dis, en quelque lieu(|u'il soit, de telle sorte (|ue,
de rêver: tout endoriiii (]ue j'étais, je voyais fort
loinde confondre le ciel a\ec le Paradis, il révèle
distinctement que les images qui d'ordinaire font
qu'ila étéraviautroisièmecieletde làau Paradis.
illusion à notre esprit, étaient, non des réalités,
Or, ce dernier point me semble si obscur (|ue, mais des fantômes. Voici mon erreur je voulais :

pour résoudre la question, il faudiait à mes \eux persuader à l'ami dont les soni^es me reprodui-
trouver dans d'autres passages de l'Ecriture, plu- saient le portrait exact, (jue nos perceptions
tôt que dans les paroles de l'Apôtre, ou demander
n'avaient riendevraiet n'étaient quedes visions de
à une raison i)éremptoire la preuve décisive que songes; et pourtant il n'v avait aucune différence
le Paradis est ou n'est pas dans le troisième ciel :

entre elles et l'image qu'elles m'olfraient de sa


car on ne découvre pas clairement si le troisième
personne. J'ajoutais que notre entretien même
I
II Cor. XII, 2, 4.
était une illusion et que juste en ce moment il
I,K l'AHADIS KT l,K TKOISIKMK CIEI, 3(M

i'i'()\;iil voir cii soiijic une iiiilriMliosc, sans sa- distinguer ni dessin ni couleur, sans [lei-cevoir
voir si j(« no voyais pas ce qiit' je voyais juliicl- ni son, ni odeur, ni saveur, eidin sans être avertis
liMiicnt. Tout en mVd'oiraiit de lui proiivci- (|ii(' l)ar le tact cpi'il y ail là une surface froide ou
te ii't'lail lias lui, J'étais aiiiciic à rccoiiiiailic imi chaude, dure on tendre, iiide ou polie nonssom- ;

que c'était lui, car je n'aui'ais pu


quoliiui' sorli' mes guidés par nue anire lumière, im autre éclat,
avoir avec lui cdtc conversation, si j'avais eu une autie vue pins inlaillihle ipie les sensations et

pleine conscience qu'il n'était rien. Ainsi dans bien plus hanle.
ce phénomène de l'àiue ('veillée nialniéle som- ~. Uevenons doncinx paroles même de \'\-
meil, il lallait hien quelle lut guidée par les re- pôtre, examinons-les avec atlention, en partant
présentations des corps, comme si elle avait été de ce principe incontestable (\m' l'AiJÔtre avait
en présence de i-éalités. une science du monde des esprits et des corps
\. Il m'a été donné d'enlendr(> uu lionuue de inlinimeid sup(''rieiu'e à celle (|ne nous cbei'-
la canipa'iue, à pcinecapable de s'expi'imer.cpii, chons ;'i nous formel' en tâtonnant. Or, s'il sa-
dans une eviase, avait le seidimetil d'éti'C éveillé vait (pie les choses spiiiluelles ne peuvent être
et d'apercevoir un ol)jel sausj[ue ses yeux en aperçues par les sens et ipie le cor|)s seul peut
l'ussenl frappés. « Mon àme le voyait et non mes voir les choses du corps, pourquoi ne concluait-il
" yeux, » disait-il, autant (|ue je puis me rap- l)as de la nature même des choses qu'il avait vues,
peler ses propres paroles. Il uc pouvait dire ce- la manière dont il les vit? S'il était sur (|u'elles
pendant sic'(''taitun corps ou l'image d'un corps, élaient spirituelles, pourquoi n'en concluait-il
cette distinction était trop siditilepour lui; mais pas avec certitude qu'il les avait vues en dehors
sa loi était si naïve qu'en l'écoutant je croyais de son corps? Si elles étaient matérielles, pour-
voir moi-même l'objet ipt'il me racontait avoir (|Uoi ignorait-:il qu'il ne pouvait les avoir vues
vu. (lu'avec le corps? D'où vieid donc ce doute, si-
j. Si donc Paul avait vu le l'aïadis dans non de l'incertitude même où il est d'avoir vu
une vision analogue à celles où Pierre vit une soit des corps soit des images matérielles? Ainsi
nappe qui descendait du ciel ', où Jean aperçut cherchons d'abord dans l'ensemble de ses pa-
tout ce qu'il a exposé dans son Apocalypse 5, où roles le point sur lequel il n'a pas le moindre
leprophète Kzéchiel vit la plaine jonchée d'os- doute; nous verrons ensuite ce ((ui cause son
sements qui reprenaient la vie ', où Dieu ap- incertitude, et nous comprendroi.s peut-être le
parut au prophète Isaie, assis sur son trône et secret de son doute, en saisissant le point qui ne
ayant en sa présence les Séraphins avec l'autel lui en inspire aucun.
où lut pris un charbon aident par purilier les 8. « Je connais un honmie, dit-il, qui, il y a
lèvres du prophète ^; bien évident qu'il a
il est « quatorze ans (était-ce dans con corps ou hors
pu ignorer s'il avait été ravi sans son corps ou « de son corps? je l'ignore. Dieu le sait, ^ hit
hors de son corps. '< ravi jusqu'au troisième ciel. » U sait donc qu'il

y a quatorze ans un homme fut ravi jusqu'au


CHAPITRE m. troisième par la vertu du Christ; sur ce
ciel,

l'.VPOTRE .VrTESTE point, aucun doule dans son esprit et par con-
yu'lL A VL LE TROSIÈME CIEL
séquent dans le nôtre. Fut-ce avec son corps on
SANS SAVOm COMMEiNT.
en dehors de son corps ? voilà ce qu'il ne sait

6. Supposons qu'il ait été ravi sans son corps pas; et comment oser dire avec certitude d'où
dans un séjour où aucun corps on il n'y avait :
vient son doute? Faut-il donc conclure que nous
pourrait e..core se demander si ce domaine était devons à notre tour douter du troisième ciel où
plein d'images matérielles, ou s'il ne renfermait il assure que ce chrétien fut ravi? S'il a vu une
que des natures indéi)endantes de la matière, réalité, l'existence du troisième ciel est par là
comme Dieu, comme IVune humaine, comme même démontrée Si cette vision ne s'est com-
.

la raison, les vertus, la prudence, la justice, la posée que d'images matérielles, il ne skgit plus
chasteté, la charité, la piété, bref les êtres et les du troisième ciel : c'est une apàrition successive
idées que nous concevons et que la raison seule où le chrétien dont il parle, croit gravir le pre-
nous peruift de classer, de distinguer et de dé- mier ciel, monter au second, de là aperçevoii-
linir; nous atteignons en effet ces idées sans le troisième, où il croit s'élever encore et pou-
' .\ct. X, U. — 2 Apoc. I, 12, etc. — -1
Ezêcli. xx.ïvii, 1-10. - '
Isa. voir dire qu'il a été ravi jusqu'au troisième ciel.
v,l-7.
302 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

Mais l'Apôtre ne doute pas et ne nous laisse point en lui-même, et par conséquent s'il a sur ce
douter de l'existence de ce troisième où il a ciel point certitude absolue, comment aurait-il vu
été ravi « Je sais » dil-il totd d'abord, et pour
: seulement son corps sous une forme idéale '!

ne pas croire à cette vérité, il faut cesser de 1:2. Voyail-il un ciel matériel ? Pourquoi igno-

croire à l'autorité uièuie de i'Apôti'e. rer (]u'il le voyait avec les yeux du corps? Ne
savait-il pas s'il le voyait en esprit on avec les
CHAPITRE IV. yeux du corps, et aurait-il dit par suite de cette
incertitude : « Je ne sais si ce fut avec ou sans
ur l'existence du troisième ciel or l'ai'Otre
son corps? Commont ne
FL'T RAVI. — 0B.IECTI0N. «

le ciel qu'il avait


»

vu était une
pas douter alors
réalité ou une sim-
si

l». Il sait donc (ju'uii liouune a élé ravi jus- ple image ? Etait-ce au contraire une nature spi-
qu'au Iroisièuie ciel ; ainsi ce ciel existe réelle- rituelle, sans aucune image pour la peindre à
l'esprit, telle qu'ajjparait lajustice, la sagesse, et
ment. Il n'y a point là de signe matériel, analo-
autres conceptions de ce genre? est encore évi-
gue h celui qui fut montré a Moïse Moïse lui- ;
Il

même seidail si bien la dislance qui séparait dentqu'un pareil^ciel n'a putombersous les sens ;

l'essence divine de laforme visible que Dieu em- par conséquent, s'il savait qu'il avait contemplé
pruntait pour apparaître aux regardsd'un honune,
un semblable idéal, il devait être pour lui hors

qu'il disait au Seigneur « Monlrez-vous vous- :


de doute que ce n'était pas à l'aide des sens.
« même Ce n'est pas non plus un em-
à moi '. »
« Je sais, dit-il, qu'un homme fut ravi il y a

blème sous la forme d'un être réel semblable à « quatorze ans. » Je sais cela, on ne peut en douter
ceux que Jean voyait en esprit, quand il en de- sans cesser de croire en moi ; « Mais si ce fut

mandait la signilication et qu'on lui répondait :


« avec ou sans son corp^, c'est ce que je ne sais
« |)as. »
« C'est une cité, » ou bien-' Ce sont les peuples, »
ou lout autre chose, lorsqu'il voyait par exemple CHAPITRE V.
la bète, la grande prostituée, les eaux et autres

allégories du même genre 2. « Je sais, dit l'Apù- RÉFL'TATIO^ DE l'0B.IECTV()i\.

« tre, qu'un honune fut ravi au troisième ciel. »


13. Eh bien que sais-tu donc pour le distin-
10. S'il avait eu dessein d'appeler ciel l'image
!

immatérielle d'un corps, il aurait vu au même guer de ce que tu ignores? réponds, ahn de ne
titre une image dans le corps avec lequel il fut
pas induire les fidèles en erreur. « Je sais qu'un
« homme fui lavi au troisième ciel. Ce ciel )>

ravi et transporté dans ce séjour idéal il i)ren- ;

drait donc un fantôme pour son propre corps, était matériel ou spirituel. S'ilétait matériel, il est

un ciel imaginaire pour le ciel même mais alors ;


apparu aux yeux du corps; pourquoi donc con-
il n'aurait plus aucune raison pour distinguer naître ce ciel et ne pas savoir du même coup
s'il a élé vu des yeux du corps? S'il était spiri-
entre ce qu'il sait et ce qu'il ne sait pas, je veux
tuel, est-il apparu sous une forme réelle? Alors
dire, entre la certitude d'avoir été ravi au troi-
il est aussi impossible do décider si c'élait une
sième ciel, et le doute s'il y fut transporté avec
réalité qu'il l'est de déterminer s'il a été visible
ou sans son corps il exposerait simplement sa :

vision et donnerait aux images qu'il avait con- aux jeux. Est-il au contraire apparu à l'esprit,
templées le nom des êtres réels dont elles étaient comme ferait l'idée de justice, sans le (;oncours

la représentation. Nous-mêmes, quand nous ra-


d'aucune image sensible, et par conséquent des
contons un rêve ou ce (pie nous avons vu en organes? Alors il doit y avoir absolument certi-

songe, nous disons j'ai vu une montagne, j'ai


:
tude ou incertitude : autrement d'où \ ieut la cer-

vu un fleuve, j'ai vu trois hommes, et ainsi du titude sur l'objet lui-même, et l'incertitude sui-

reste nous désignons l'image par le mot même


;
te mode de perception ? H
en effet est trop clair

(pii sert à nommer l'être qu'elle représente. Il


(pie ce qui est immatériel ne peut-être penju par
n'en est pas de même de l'Apôtre : il est certain les sens. S'il est possible de Aoir les corps en de-

sur un point, il est dansTignorancesurun autre. hors du corps même, cette vue est indépendante
vu en imagination et le ciel et son
11. A-t-il des sens et suppose un mode de perception tout

corps? Alors il y a également certitude ou igno- diftérent, quoiqu'il soit. Mais il serait par trop

lance sur ces deux points. Or, s'il a vu le ciel étrange que l'Apôtre eût été trompé ou laissé
dans le doute par ce mode de perceplion,
I
Exode xxxir, 13. — s Apoc, xiil, i; xvii, 15, 18.
IJVHE Ml — I.E PAUADIS KT I.E TIU)IS11>:MK CIEL aoa

(lu'ayanl \ii iiiu'iolinaUTiolsans Iccoiicoiirsdcs la terre el tout ce qui peut y tond)er sons
ci(!l,

sens, il cnl ('tt' iru-apahic de savoir s'il ya\ail i'l('' lesyeux; sans rien voir des veux du corps, nous
ravi avec ou sans son corps. apercevons les images des corps, soit réelles,
li. Or. r.VixHre ne ptnit-iMrc soupçonne de (|uand elles représentent les corps eux-mêmes
niensoufre, lui (|ui ilislinuiie si sci'npulensenieiil el (pie la mémoire les reproduit; soit idéales,
ce ((u'il sait de ce ([u'il ne sail pas; |)eiil-i'tre ipiand elles sont une conception de l'esprit. On
donc ne rosle-t-il plus qu'inie conclusion à ad- ne se l'ail pas de Carihage, si on la connaît, la
niellir : c'esl (pi'il imiorail, au niomciit on il l'iil même image (jne d'Alexandiie si on ne la ,

ravi au troisième ciel, s'il élail dans son corpsaii comiail pas. Le h'oisiènie genre de vision a pour
même titreipie l'Ame conlinued'v lésider, quand comme celle d'amour, auxquelles
objet les idées,
le corps esl vivant soit à l'état de veille, soit dans ne correspond aucune image ([ni les repn'senle
lesonmieil, soit dans im trans[)ort e\tati(pie (jni exaclemenl. En el'lêl, un honnne, mi arbre, le
suspend les opérations des sens; on bien s'il soleil, bref un corps sui- la terre on dans le ciel,

élail hors de son corps deveiui un cadavre jus- apparaissent sons leins formes, quand ils sont
qu'an moment où la vision étant tei'niinée, la pr('sents, et se conçoiveid sous des images im-
vie rentra dans les organes. Il sérail alors irvenu primées dans l'esprit,' quand ils soni absents :

à lui-même, non comme un homme qui sort du delà par rapport à eux, deux genres de vision
sommeil ou qui reprend ses sens à la suite d'ime s'opérant l'une au moyen des sens, l'autre au
extase, mais comme un mort qui ressuscite. Par moyen de l'esprit qui con(;oit l'image des objets.
conséquent, ce qu'il a vu dans son ravissement Quant à l'amour, apparait-il à l'esprit tanl(')t

au Iroisième ciel, ce qu'il est sûr d'avoir vu, est dans sa nature réelle, tantôt sous une image qui
une réalité et non un produit de l'imagination; le reproduit, selon qu'on le conçoit ou qu'on se
mais il n'était pas évident à ses v en.\ que son âme, le Non assurément, on le voit avec
rappelle?
dans ce transport sm-naturel eût quitté le corps, plus ou moins de clarté, selon la portée de son
ou que son intelligence eût été ravie an ciel pour esprit; on ne le voit plus, (piand on songe à
y voir et v entendre des choses ineltahles, tandis quelque forme sensible.
que l'Aine am'ait continué d'animer le corps.
Voilà peut-être la raison qui lui fait dire : « Si CHAPITRE VII.

>t ce fui avec ou -sans son corps, je ne sais. »


UE LA VISION SENSIBLE, SPIRITUELLE, R.ATION-
CHAPITRE VI. NELLE. LA PRE.VIIÈRE SUPPOSE L\\ OBJET RÉEL
OU UNE MÉTAPHORE LA SECONDE S'EXERCE DE
:

TROIS MAMÈRE.S DE VOIR LES CHOSES. PLUSIEURS MANIÈRES.

15. Percevoir indépendamment de l'imagina- 16. Tels sont les Iroisgenres de vision dont nous
tion el des se !s les objets en eiL\-mêmes, c'est avons parlé dans les livres précédents, quand le
la vision la plus haute. Je vais expliquer, dans la sujet, a exigé, sans toutefois les classer : comme
mesure des forces que Dieu me prêtera, la vision nousallonsmaintenant les expliquer avec quelque^
eten distinguer les espèces. Ce commandement : étendue il est bon de les désigner par des termes
' Tu aimeras le prochain comme toi-même, » précis, afin d'éviterl'emharrasdescirconlocutions.
peut nous offrir la vision sous un triple aspect. Appelons donc la première sensiible, parce qu'elle
D'abord on le voit par les yeux, en lisant les lettres à besoin pour s'exercer des opérations des sens.
qui le compos-^nt; ensuite par l'esprit, qui se re- Nommons la seconde spirituelle en effet on ap-
;

présente le prochain même en son absence ; pelle avec raison esprit tout être (jni existe sans
enfin par une intuition de la raison, qui décou- être corporel :d'un corps en son
or l'image
vre l'amour lui-même. Rien de plus facile à absence, en reproduise la forme,
quoi(iu"elle
comprendre que le premier genre de vision : n'est point corporelle, non plus que la perception
celui qui nous fait découvrir le ciel, la terre et qu'on en a. Appelons la troisième nttimnn'lle, du
Ions les objets qui y frappent nos regards. 11 n'est mot raison.
pas difficile non plus d'expliquer le second c'est 1".
: Il serait trop longd'approfondir la significa-
celui (juinous permet de concevoir les objets en tion de ces termes: notre sujet l'exige peu ou point.
leur absence. Ainsi nous avons la faculté de nous de savoir que mot
Il suffira le sensible ou corporel
.représenter même au milieu des ténèbres, le suppose tantiJt une réalité, tantôt une simple mé-
304 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

taphore. Ainsi dans ce passage : « En lui ré- « chair i. » La l'aison et l'esprit sont donc syno-
« side corpoiellcment toute la pléniliule de nymes dans ces passages. Enfin .Dieu est appelé
" la divinité. » La divinilé n'est pas un corps lui-même Esprit, puisque le Seigneur dit dans
sans doute; mais couinie l'Apôtre voit dans le l'Evangile : « Dieu est Esprit, et ceuxqui l'adorent
récitde l'ancien Testament des ombres de l'ave- " doivent l'adorer en esprit et en vérité 2. ..

comparaison l'amène à dire que la plé-


nir, cette
nitudede la divinité résidecoi'porelle nent dans le CHAPITRE Vlll.

Christ, parce (|ue tout ce qu'annouraieut cesligu-


ress'élant accompli en lui, ilestpourainsidire la l'ouayroi i.'auteuu appelle-t-il spirituelle la

réalité et le corps de ces ombres '


; en d'autres sV^CONDE VISIO.X?

termes il esl la vérité môme dont ces rites étaient


:20. Voilà bien des acceptions cependant nous
la tigure et l'emblème. De même donc que les :

figures elles-iuémes ne peuvent s'appeler ombres


n'avons emprunté à aucune d'elles le sens que

que par uiélaphoi'e, de même on ne peut dire


nous attachons au mot spirituel, nous le tirons
ici

sans métaphore ((ue la divinilé réside corpo- d'un passaie de aux Corinthiens où l'es-
j'épitre

l'ellemcnt eu lui, rorporaliter.


prit est nettement distingué de la raison. Quand -

19. Le mot s|)iriluel a plus d'application.


« je prie avec la langue, c'est mon esprit qui prie,

L'Apôtre appelle spirituel le corps tel qu'il sera


« ma niisoi) n'en retire aucurf fruit. » La langue
désigne ici les pensées obscures et mystérieuses
lors de la résurrection des saints. « On sème un
(pu sont incapablesd'édifier.quandonneles saisit
« corps animal et il ressuscilera corps spi-
*. pas avec la raison, puisqu'elles n'offrent alors
« rituel )• Gela vient de ce qu'un pareil corps
sera soumis à l'esprit avec une
aucim sens, .\ussi avait-il déjà dit : < Celui qui
lacililé merveil-
leuse et à l'abri de toute corruption : sans avoir
» parle avec la langue, ne parle pas aux hommes,
besoin d'aliments matériels,
« mais à Dieu personne ne le comprend, mais
il sera vivilié par ;

Je ne veux pas dire que « par l'esprit .il dit des choses mystérieuses. »
l'esprit. le corps n'aura
alors rien de matériel; aujourd'hui
l'ar conséquent, la langue ne sei't ici qu'à dési-
on l'appelle
bienauiuial,(|iii»ii[u'ilne soit pas de la subslance
gner les pensées qui sont comme une image et un
portrait des choses et (pii deineuient inintelligi-
de l'àuîe. Espril, spiritiis, signitie également l'air,

le vent, c'est-à-dii"e le mouvement del'aii", comme bles à moins d'être conçues par la raison. Tant
qp.'elles restent inintelligibles, elles résident dans
dans le passage « feu, grêle, neige, glace, esprit
:

« de la tempête '. » Ge terme désigne encore l'ànie


l'esprit et non dans la raison : aussi dit-il plus

chez l'hpmme ou chez la bète, comme dans ce clairement encore : « Si tu pries en esprit,
passage : « Uni est-ce qui connaît si l'esprit des
« comment l'ignorant pourra-t-il répondre
« hommes moule en haut, et si l'esprit de la bête
'< .(»)f» à ta bénédiction, puisqu'il ne comprend
" pas ce que tu dis ? » Ain>i, il s'est sei'vi du
« descend en bas dans la terre ^? » On appelle
encore ainsi lai'aison, l'intellect, qui est comme mot langue, cet insti'umentquien frappant l'an'

l'œilde l'àmeoù se retlètent l'image et la con- produit les signes des idées sans exprimer les
naissance de Dieu. C'est en idées elles-mêmes, pourdés'gner melaphorique-
ce sens que
l'Apôtre a Renouvelez-vous mcnt tonle émission de signes avant qu'ils n'aient
dans
dit : «

« l'intérieur de votre âme, et revêtez-vous de


été saisis par l'intelligence : la conception des
« l'homme nouveau qui a été créé à l'image de
signes, (jui relève de la raison, a-t-elle eu lieu?
alors il y a révélation, intuition, prophétie,
«Dieu et dans une justice et une sainteté véri-
« tables"'. » 11 dit ailleurs, en parlant de l'homme science. C'est en ce sens qu'il dit: «Moi-même,
intérieur, « qu'il se renouvelle par la connais-
1'mes frères, si venant parmi vous, je vous parlais
« sauce de l'image de celui (jui
la vérité, selon
«des langues inconnues, de quelle utilité vous
" sei'ais-je, si je ne joignais à mes paroles ou la
« l'a Après avoir dit dans son Epitre
créé ". »
« révélation ou la science, ou la prophétie ou fa
aux Romains ' « Je me soumets par la raison à :

« la loi de Dieu, mais parla faiblesse de la chair,


«doctrines?» En d'autres termes il faudrail
« je suis soumis la loi du péché, » il revient ;'i
avoir recours aux explications, faire compren-

ailleurs sur la même pensée


dre le sens de ce qu'on difen langues inconnues,
La chair, dit-il, : <'

« s'élève contre l'esprit et l'esprit contre la


afin que la puissance de la raison s'unisse à celle
de l'esprit.
' Colos. II. 9, 17. — 2 I Cor. XV, 44. — J Ps. cvLvlll, 8. — < Eccl.
m, 21. — = Eph. m, 23-24. — « Colos. m, 10. —'Rom. vu, 25. ' Gai, V, 17. — 2 Jean, iv, 24. — ' I Cor. xiv, 14,2, 16,6.
LIVKE XII. — LE PARADIS KT LE TUOISIKME CIEL. m>

CHAl'lTUE IX. prit. Les mots iiilellecliiel et iidcUigible otïrent


le uiènie sens. Ou a toutefois voulu établir enli'e
ULE LE .NOM DK l'IlOPIIÉÏIE SE RATTACHE A LA cu\ nue distinction ass<7. profonde au.\ yeux <lc

ItAISON. (pielques |>hilosophcs : l'objet perçu pai' la rai-

de proplK'lic S(ui seul sérail iiilelligible, la facnlli'de le perce-


42. Il lie saurait donc y avoir
voir serait in lellecluelle. Mais existe-t-il nu être qui
ciiniplèlc, si la raison ni> survenait pour iiit(>r-
ne soit (pi'inlelligible sans avoir le don de l'intel-
pivtiT les sij;ni's (pic l'cspiit apciroil sons une
ligence'!' C'est là ni\ problènu' Irès-dildcile. Mais à
ibrnic scnsililc : à ce titre, le don de |)roplu''lie
consiste plidôt à inferiicctcr une vision ipi'à mes yeux on ne saurai! croire ni a\aucer (pi'il
l'a\oir. C'est ce (pii lail voir cpic la i>ropliclie se
existe un èlre capable devoir par la raison, sans
([u'il ne soit aussi du domaine de la raison. D'a-
rallaclie plnt(H à la raison qu'à cette iacuUé in-
ressem- près cette distiuclion la raison sérail intelligi-
férieure à la raison, où se peij;nenl les
ble, en tant (pi'elle pourrait être vue; elle
blances (les réalités corporelles que nous nom-
et

en prenant ce mot dans serait en tant (prelle ixnuTait


intellectuelle,
mons esprit, niïiritus,
aussi voir. Mais laissons de c(Méle problème fort
un sens particulier. Aus.-^i Joseph conq)renant ce
diflicile de savoir s'il existe un être qui ne soit
(jne signifiaient les sept vaches et les sept épis,
[Mophète (|ue tMiaraon qui les avait
accessible qu'à la raison sans avoir la raison
élait pluti")!

chez l'haraon, l'esprit avait été moMlié lui-même, et convenons de regarder les mots
vus 1 :

intelligible et intellectuel comme synonymes.


pour voir; chez Joseph, la raison avait été
é^'lairée pour comprendre. L'un avait le don
CHAPITRE XL
de la langue, l'aidre le don de pru|)hélie, en ce
sens que l'un pouvait s'imaginer les objets et LA VISION SENSIBLE SE RATTACHE A LA VISION SPi-
l'autre iiderpréler les images. donc pro- On est UITLELLE ET CELLE-CI A LA VISION RATIONNELLE.
phète à un degré intérieur, quand on ne voit
22. Analysons cesmodes de vision, afin
trois
que les signes des idées sous des images maté- d'aller successivement dn plus humble an plus
rielles représentées dans l'esprit; à un degré supé-
élevé. Déjà nous avons offert un exemple qui
rieur, quand on a la |tnissance d'interpréter les
les renferme tons. Quand on lit ces mots « Tu ai- :

signes le don de prophétie au degré éminent


« meras ton prochain comme toi-même <, » on
;

consiste à voir par l'esprit les symboles des


voit les lettres par le ministère des sens, on se
idées et à les coinprendie par la pénétration de
représente le prochain par une opération de l'es-
la raison; c'est ainsi que la supériorité de Daniel
prit, enfin on conçoit l'amour par un effort de
éclata dans ré[)reu\e à la quelle il lut soumis :

laraison. Cependanton pourraitse représenter les •'

il sut tout ensendjle révéler an roi le songe qu'il


lettres sans les avoir sous les yeux, comme on '
avait eu et lui en expliquer le sens ^. En effet
pourrait voir le prochain lui-même en face de
les images qui composaient ce songe furent gra-
soi quant à l'amour, on ne peut ni voir son
:

vées dans son esprit, les lumières pour en com- essence avec les yeux du corps, ni le concevoir
prendre la siguificalion éclairèrent sa raison. On sous une image qui le reproduise; il n'est connu
reconnaît ici la distinction établie par l'Apôtre :
ni saisi que par la raison. La vision sensible ne
« Je prierai avec esprit, je prierai aussi avec la
saurait être la principale les perceptions dont :

« raison 3,» c'est à-dire, de telle façon que l'esprit


canal se transmettent à l'esprit comme ^
elle est le
conçoive les images et que la raison en pénètre le
à une faculté supérieure. Un objet fi'appe-t-il les
sens : voilà pourquoi j'appelle spirituelle la vision
yeux? aussitôt son image se peint dans l'esprit :

qui consiste à nous représenter les choses comme mais on ne peut reconnaître cette impression,
le fait l'imagination en l'absence des objets.
qu'à l'instant où, l'objet disparu, on retrouve
son image dans l'esprit. Si l'âme n'est pas rai-
CHAPITRE X.
sonnable ainsi , celle de la bête , les yeux ne
DE LA VISION R.\TI0NNELLE. conmimiiquent rien an delà de cette image. Si
l'àme est raisonnable, l'image se transmet jus-
21. La vision intellectuelle, qui dépend de la qu'à l'intellect, faculté sui)éricure à l'esprit; et
raison, est la plus éle\ée. Le mol raison m'admet quand la perception des yeux, transmise à l'es-
pas une foule d'acceptions comme le ternie d'es- prit sous forme d'image, cache une idée, la rai-
' Cou. XLI, 1-3-2 - - Don. ll, 27-45: iv, K^'il. I
Malt. .\Ml, 39.

S. AuG. — ToM. IV. 20


306 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

son comprend coltc idée immédiatement ou corps mais les images de ces corps qu'il com-
cherclie à l;i découvrir. C'est qu'en effet la raison teinplait, soit au moment qu'il considérait cette

seule a pour fonction de comprendre ou de cher- xision dans son ravissement, soit au moment
cher à comprendre. (pi'elle revenait à son esprit et qu'il y réfléchis-
23. Le roi Rnltha.^ar vit les iloints d'une main sait. Mais, lorscpi'il était en peine de ce que si-
qui écrivaient sur la muraille; innnédiatemenf gnifiait celte vision, c'était sa laison qui faisait

l'image de cet ohjet s'imprima dans son esprit un pour comprendre, et qui restait impuis-
efïort

par le ministère des sens, et elle y resta gravée, santejusqu'à l'arrivée des envoyés de Corneille.
après que l'objet eut disparu. Il était alors vi- A la vue de cet homme jointe à l'ordre que l'Es-
sible pour l'esprit; mais au moment où il appa- prit-Saint fit de nouveau entendre à son esprit,

raissait aux yeux sous- sa forme matérielle, il où déjà les signes s'étaient gravés, où axaient
n'étaitetn'avail point encore été compris comme retenti ces paroles,' « Marche avec eux, » sa
:

un symbole; ce ne fut(pi'en troisième lieu qu'il raison éclairée des lumières divines comprit le
apparut comme un symbole, et cela, par une sens attaché à tous ces symboles. L'analyse de
opération de la raison. C'est la raison encore ces visions et autres semblables fait assez com-
qui faisait i-echei'cher quelle était sa significa- prendre que la vision sensible se rapporte à la

tion. On n'y put réussir, et c'est alors que la vision spirituelle et celle-ci à son tour à la vi-

raison de Daniel éclairée des lumières prophéti- sion rationnelle.

ques révéla au roi éperdu l'idée cachée sous ce


CHAPITRE XII.
signe ' . Ici le don tle prophétie, se rattachant à
ce mode de vision qui relève de la raison, était RAPPORTS ENTRE LA VISION SENSIBLE ET LA VISION
supérieur h celui qui ne consistait qu'à voir des- SPIRITUELLE.
yeux du corps le symbole matériel d'une idée cl à
25. Lorsipie nous voyons les objets extérieurs,
reconnaître par la réflexion son image trans-
I
sans être transportés hors de nous-mêmes et à
mise à l'esprit, puis(iue dans ce dernier cas le
l'état de nous distinguons nettement cette
veille,
rôle de la raison se bornait à découvrir que c'é-
vision de la vision spirituelle qui nous permet
tait un symbole et à en rechercher la significa-
de concevoir les objets en leur absence sous
tion.
forme d'images, soit à l'aide de la mémoire qui
24. Pierre, dans un ravissement d'esprit, vit
nous rappelle des choses connues, soit à l'aide
une grande nappe suspendue par les quatre
de l'iniagination qui nous représente des choses
coins qui descendait du ciel sur la terre, et il
inconnues, quoique réelles, soit enfin par une
ententlil une voix (|ui lui dit « Tue et mange. » :

libre création de formes qui n'existent que dans


Revenu à lui-même, il cherchait à s'expliquer
notre esprit. Nous établissons, dis-je, une dis-
la vision ipi'il avait eue, lorsque les hommes en-
tinction si profonde entre ces imaginations et
voyés par Corneille arrivèrent, et l'Esprit lui dit :

les objets réels (jui frappent les sens, que nous


Il Voilà des hommes (pii le demandent ; lève-toi
n'hésitons jamais avoir, ici, des corps, là, des
« donc, descends et n'hésite pas à aller avec eux;
représentations de corps. Arrive-t-il que sous
« car c'est moi qui les ai envoyés. » Arrivé chez
l'influence d'une idée tlxe, d'une maladie qui,
Corneille, l'Apôtre révéla lui-même le sens de la
conmie la fièvre, jette dans le délire, d'un com-
vision où il avait entendu une voix lui dire :

merce intime avec un Esprit bon ou mauvais,


« N'appelle point impur ce que Dieu lui-même
lesimages des objets ^e peignent dans l'espril
« a purifié. Il dit en effet>>« Dieu m'a ap])ris à ne :

avec la même vi /acité que si les objets étaient


Clregarder tuicun homme comme impur ou i)ro-
présents, sans que toutefois l'action des sens soil
« fane ^. » Ainsi, au milieu du transport qui lui
suspendue? Alors les images des objets qui se
faisait voir cette nappe, ce fut avec le concours de
peignent dans l'esprit apparaissent comme si les
l'esprit (|u'il entendit les mois « mange cl tue, » et
objets eux-mêmes frappaient les sens; de là ce
« ce que Dieu a pinifié, ne le regarde pas commis
phénoiuèiie (pii consisie à voir réellement un
« Revenu à lui-même, il reconnaissait
impiu'. »
hoiimie en face de soi, et tout ensemble à s'en
également avec le concoui's de l'esprit les for-
figurer un autre, comme avec les yeux, par la
mes ou les paroles qu'il se souvenait d'avoir
force de l'imagiiialion. vu des gens qui s'en-
.l'ai
perçues pendant la vision. Ce n'était pas des
frelenaieiit avec les personnes présentes et adres-
' Dan. V, S-23. — 2 Art. x, 10-2^. saient en même temps la parole à un être ima-
LIVKE XI!. —LE PARADIS ET LE TKOISIIIME CIEL. aoT

ginairc roinme s'il fût (Mt- dcNaiil eux. Uciircii- M'Iopper et dVn lendr(> les ressorts avec tant de

noiit-ils l'usafiv delà raison? tantôt ils pcnvcMil lorce, que l'esprit comprend les images (|iril conte-
se lapiicliT Icnr vision, tantôt ils n'en f;ai(t(Mil nait à son insu au mèmelilrcfpi'il vaendé'pôldaiis
amnii somonir. (l'rst ainsi i\nc (|m'l(|iu's-iins laUK'moireunc roule d'jdr'cs (p l'on n'apenoit pas?
{XMiveiil se rappelor un songe, tandis quo d'au- Faut-ildire queces signes apparaissent sansavoir
lii's en sont iniapahios. L'ànic cst-clU' ravio hors été conçus aidérieureuKMit ou (pi'ils résident en

du l'oi'ps et l'onnuc soiisli'aili" à l'empire des sens? (pielque sorte dans l'esprit d'où ils jaillissent et

alors l'extase est plus profonde. Les corps ont deviennent visibles à la l'aison ?Mais s'ils étaient
beau ùlre présents et les yeux ouverts, on ne \oit, renfermés dans l'àme en quehpie sorte essen-
on n'entend pins rien le regard de l'ànie est con-
: tiellement, ponripioi ne les conqirend-elle pas
centré sur les images ipii ai>paraisseut à ['(^spril, |>ai'voie le cons(''(pieuc<'?Ln elTel elle ne lescom-
ou sur les idées pures ipii se découvrent à la pi'cnd presque jamais. La raison aurait-elle besoin
raison. d'iiLC intluence étrangèrepour saisii'les images
-2{\. dememe-t-il fixé sin- les images
L'esprit connue l'espril pour les dé-
([ue lui livre l'esprit,

lies objets, dans un moment où les sens n'exer- couvrir en lui-même? L'àme peut-elle, sans que
cent plus juicun empire sur l'ànie, comme il les liens corporels soient roni|»us ou élargis,

arrive dans les songes ou dans im transport ? Si prendre son essor et atteindre aux idées pures :

ce (pi'on voit ne cache pas une idée, c'est luw est-elle, dis-je, capable par ses seuls ellôrts de
imagination. Du reste il ai'rive qu'à l'iMal de voir les images et même de deviner ce iprelles
veille, en [ileine sauté, sans aucmi transport, on ont d'inlelligible ? Enfin saisit-elle les syndjoles
se représente une foule d'objets (pii ne lrap[)eiil tantôt par elle-même, tantôt par le concours il'un

pas alors les sens. La différence, c'est qu'on ne autre esprit? Unelle que soit la valeur de ces hy-
cesse jamais de distinguer ces fictions il'avecles pothèses,il ne laut en admettre aucune légère-

objets réels et préseids. Si ce qu'on voit est un vé- ment. Vu point incontestable, c'est que les images
ritable signe qui apparaisse soit dans le sonuneil, aperçues par l'esprit dans la veille, le sommeil,
soit dans la veille, lorsfiue les yeux découvrent la maladie, ne sont pas toujours un signe, tandis
les objets en face d'eux et ([ue l'esprit voit l'image que dans le véritable ravissement , il serait
d'objets absents, soit dans l'extase proprement étrange ([ue ces images ne fussent pas des signes.
dite où l'âme sendjle diîvenir éti'angère aux sens ; 28. Il n'est donc pas étonnant que les possédés
c'est alors une révélation surnaturelle : seule- disent parfois la vérité sur des choses qui n'appa-
ment il peut se faire (|u'uu autre esprit, venant raissent pasaux yeux des assistants le démon ;

à s'unir avec celui qui rei,oit la vision, luiilécou- s'unit intimement avec le possédé, je ne sais
si

vre la vérité cachée sous ces images et la lui comment, que l'acteur et le patient semblent ne
fasse com|)rendre, ou bien la fasse couq)rendre faire qu'un même esprit. Quand c'est un bon es-
à un autre chargé de l'intei-préter. Du moment prit qui cause le transport et le ravissement de
en effet que les signes sont interprétés et qu'ils l'àme, pour lui communiquer une vision, les
dépassent la portée des sens, il faut bien qu'ils images sont alors des signes et ces signes ca-
soient expliqués par quelque esprit. chent d'utiles connaissances on n'en saurait :

douter, puisque c'est un don de Dieu. Mais il est


CHAPITRE XIII.
fort difficile de distinguer d'où vient la vision,
l'.4ME possède-t-elle une faculté de divination ? quand l'espril malin exerce doucement son in-
«
fluence, et que, ravissant l'esprit sans tourmen-
il. D'après quelques philosophes, l'àmc pos-
ter le corps, il dit ce qu'il peut, parfois même il
sède natureilement le don de la divination. S'il
révélations et se trans-
dit vrai, donne d'utiles
en est ainsi, pounjuoi l'ànie n'est-elle pas ton-
de
Ibrme en Ange de lumière i, afin de profiler
joui'S capable de lire dans l'avenir, quoiqu'elle
la confiance qu'il s'est attirée en révélant les
le souhaite toujours ?Dira-t-on que cette faculté
vrais biens pour entraîner à ses faux biens. Pour
doit être secondée pour entrer en exercice ?Mais
discerner ces sortes de vision, nous n'avons, je
si elle a besoin d'une iulluence étrangère, la re-
crois, qu'une seule ressource, c'est ce don « de dis-
çoit-elle d'un corps? Non évidemment. Il faut
« cerner les esprits » que l'Apôtre énumère parmi
donc que cette intluence vienne d'un esprit. Puis,
les dons de Dieu 2.
comment s'exerce-l-el!c? Se pass_'-l-il dans le
corps un certain mouvemeut capable d'en dé- 1
II Co. Xî, 14. - 'I Cor. xii, 10.
,

30S DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

âtre incrédulité, une interprétation orgueilleuse


CHAPITRE XIV. ou impie. Quanddoncle démon nous trompe par
des visions sensibles, les yeux peuvent être dupes
LA VISION RATIONNELLE n'EST .TAMAIS UN LEURRE.
sans péril, à condition qu'on ne s'écarte ni des
l'illusion dans LES DEUX AUTRES n'eST PAS
vérités de la foi, ni de cette rectitude d'esprit
TOU.IOURS DANGEREUSE.
dont Dieu se sert pour insluire ceux qui lui sont
11 n'est pas diUicilcencfTcldc reconnaître Satan
soumis. De même encore, quand il fait illusion à

en vient à donner des conseils et des l'àme en lui offrant, dans une vision spirituelle,
(|nand il ins-
pirations contraires soit à la morale soit aux dog-
une image si ressemblante de la réalité qu'on la
jjiend pour la réalité même, l'àme ne court
mes :bien des gens alors distinguent ses pièges.
d'autre danger que de s'abandonner à ses per-
Le don de Dieu consiste à le reconnaître dès l'ins-
fides insinuations.
tant où la plupart le prennent encore pour un
bon ange.
CHAPITRE XV.
29. Cependant les visions sensibles, comme la
vision spirituelle, sont pour les bons un moyen DES SONGES IMPURS : QU'iLS PEUVENT ÊTRE
d'édification et pour les mécbanls une source d'il- INNOCENTS.
lusions. Quant à la vision rationnelle, elle n'est
jamais un leurre. En effet, on ne la comprend 31 . On se demande quelquefois si la volonté
pas, loi'S(pi'on y découvre un sens qu'elle n'a pas, intervient dans un songe où des images obscènes
et si on la comprend, on est en possession de la viennent vous assaillir en dehors même de vos
vérité. Les yeux n'en peuvent mais, quand ils habitudes. Il arrive en effet qu'après avoir pensé
voient un objet tout semblable à un autre, sans dans la veille à des obscénités, non pour s'y com-
pouvoir distinguer le fantôme de la réalité.; l'es- plaire, mais ponrremplir un devoir sérieux, on
prit est également réduit à l'impuissance, quand les voit reparaître dans le sommeil, prendre une
il se forme en lui une image qu'il est incapable forme dans l'imagination, exercer même sur les
de distinguer d'avec les corps eux-mêmes. La organes un honteux empire. C'est ainsi qu'en ce
raison au contraire cbercbe l'idée ou la leçon moment je suis obligé de penser à ces détails
utile que la vision peut offrir la découvre-l-elle? ; pour en parler. Or, si les impuretés auxquelles
c'est un beureiix profit ne réussit-elle pas? elle ; j'ai dû penser pour les exprimer, produisent en

reste dans le doute, alin de n'être pas entraînée songe les mômes effets que sur un homme éveillé
h quelque erreui' fatale par une dangereuse qui s'y livre, il est évident qu'un acte qui serait
témérité. criminel dans la veille, ne l'est plus dans un
30 La raison maîtresse d'elle-même et éclairée songe. Car comment parler de ces dérèglements
d'en haut distingue vite les cas où l'on peut se lorsqu'un pareil sujet s'impose, sans penser à
tromper sans danger, et même le degré où l'er- ce que l'on dit ? Or, si l'image qu'on s'est faite
reur est aucun péril à prendre
innocente. Il n'y a vient à se reproduire en songe avec tant de viva-
pour un homme de bien un méchant hypocrite, cité qu'on ne distingue plus entre l'apparence et
quand on ne se trompe pas sur les principes la réalité, les sens sont nécessairement agités,

mêmes qui foui le véritable homme de bien. S'il sans que l'acte soit plus criminel que ne l'a été
étaitdangereux de prendre pendant son sommeil la pensée même, h l'état de veille, lorsqu'on
l'image d'un corps pour le corps même, il n'eût refléchissait à ce qu'on allait dire. Mais l'âme,
pas été sans péril pour Pierre de se figurer purifiée par des désirs plus élevés, sait mortifier
qu'au moment où un Ange le délivrait de ses fers une foule de passions (pii ne se rattachent pas
et marchait devant lui, il était dupe d'une vision • aux mouvements grossiers de la chair les per- ;

ou de s'écrier dans l'extase dontnous avonsparlé : sonnes chastes savent, pendant la veille, mettre
I'Seigneur, je n'ai jamaisrien mangé d'impur ni un frein à ces désordres, sur lesquels elles sont
« de souillé, » en prenant pour de véritables ani- impuissantes pendant leur sommeil, par cela seul
maux les images représentées sur la nappe 2. que le fantôme qui reproduit la réalité et lait la
Ainsi, quand on s'est trompé sur les objets qu'on même impression, est hors de leur pouvoir; et
avait cru voir, celte illusion nedoil inspirer aucun ces nobles habitudes ont naturellement pour con-
remords, si on n'a point àse reprocher luieopini- séquence de faire éclater le mérite de ces Ames
'
Act. .VII, 7-n. - 2 Ibid. X, 11-14'
jusqu'au sein du sommeil. C'est pendant son
LIVRE XII. — LE PARADIS ET LE THOISlf;ME CIEL. m
sominoil (|iio Salomon \\\ Juis la saftessc un seul (pii la eiée en soi-même avec une facilité

tivsor incstiiiiahlo cl la ilcriiaiulaà Dieu au uu'pris incroyable laipu'llc l'orMi(!a\ec la pcsaidenr des
ilcliiul le ii'sU'. Ci'tli'|tiii'rc lui atiivabk'auw eux sens un étrange conliastc; à pcitu' l'objet est-il

du Seigneur, dit l'Eciiluie, el, couiuie le désir vu,(i(U' sa représentation se produit pour ainsi dire
éUiil pur 11 lui iiumédialenienl ivuiiili I. inslaulanément dans l'esprit. Il en est de même
des phéuDMiènes de l'unie : si l'esprit était inca-
CllMMTUKXVl. pable de se repiésenteret la mémoire de con-
server un son perçu par l'oreille, on ne saurait
LES IMAGES DES COKl'S SE FOUME.NT DANS l'ESI'HIT
même pas (pielle est la seconde syllabe d'un
E> VERTl' DE SA PROl'UE ACTIVITÉ.
mol, puisque la première se serait évanouie avec
le son Itigilir qui aurait h'appé l'air; dès lors on
3:2. Il y a donc un rapport onire les visions

sensiltles el eel appareil de la seusalion ipii se \ errait dis[iarailre l'agrément de la conversa-


décompose on cinq organes d'une éneigie plus tion , le charnu' de la nuisi(|ue et tout mou-
ou moins puissante. D'abord l'élémeid le plus vement suivi dans les organes. Ajoutons que

sublil et |)arsuilele plus rapproché de L'ànie, la tout [)n>giès de\iendrail impossible, si l'esprit

luudère, inonde les yeuxel brille dans le regard, ne conservait avec concours de la mémoire
le

(juand il se lixe sur le» objels : ensuite, grâce à les actes accomplis, pour eucliainer les effets
i'actioii succcsive de l'àme sur l'air pur, sur les au.\ causes et agir avec suite. Or, l'esprit ne

vapeui's, sm' les luuuidilés, enlin sur la masse peut les conserver qu'à la condilion qu'il les aft

argileuse du corps, se loruienl qualre sens qui transformés^ eiijmages^ 11 y a plus : les images
s'ajoutent au cinquième, celui de la, vue, le seul des actes à accomplh' se présentent avant que
où éclate la supériorité de l'àme. Nous avons, je les actesne soient accomplis. Quel acte en effet
m'en sou\iens, développé cette théorie au qua- peut-on produire au mo\ en des oiganes sans que
trième cl au septième de cet ouvrage. Le,
livre l'çsprit n'aille au-devant, sans qu'il conunence
cielj où brilleul les luminaiies el li^s étoiles, (^ par voir et en quelque sorte par disposer, d'a-
pen^uj)ar les yeux : c'esU'élémeul principal (jui près les images qu'd coûtait en lui-même, louie
se découvre au sens le plus élevé. Ma^couinie la suite des mouvements qu'il faut exécuter/?
l'esprit est sans exception et sans aucun douFe
CHAPITRE XVII.
1 supédxim" à tout être matériel, il l'aut en conclure
que toute substance spirituelle, uiéme celle où D'oU vient que LES IMAGES EMPREINTES DANS l'ES-
les objels graveut leur empreijite, a une dignité l'RlT SONT CONNUES DES DÉMONS.— DE QUELQUES
uaturcUequi l'élève inliniment au-dessus même VISIONS SUIIPRE.NANTES.
dujcieLphysique.
une singulière canséquence quoique
33. Delà : 34. Comment les esprits immondes peuvent-
l'esprit le corps, et que l'image soit pos-
précède ils deviner images empreintes dans notre
les

térieure au corps qu'elle reproduit, la repré- esprit ? Jusqu'à quel point les hommes ne peu-
sentation que le corps laisse dans l'esprit est su- vent-ils les découvrir les uns chez les autres au
périeure au corps lui-même, par cela seul que le fond de leurs âmes, grâce à la barrière que lem-
phénouu'ne, quoi(iue antérieur en date, se pro- oppose ce corps de bouc? C'est un secrel diflicile
vduil dansune l'acuité naturellement plus haute. à pénétrer. Toutefois nous avons des preuves
N'allons pas croire que le corps opère sm' l'es- irréhagables ' que les démons ont révélé les

prit, conune un être actif sur la matière qu'il pensées de certaines personnes, tandis (pie s'ils

pétrit : car la matière reste toujoius au-dessous pouvaient voir au fontl des consciences l'idéal
lie la cause qui la façonne ; or, lom d'être au- de vertu qui y brille, ils renonceraient à leurs
dessous du corps, l'esprit lui est ('videuuneut tentations : il n'est pasdouleiLX, parexemple, que
supérieur. Ainsi, quoiqu'il l'aille a\oir vu préa- si Salau avait pu découvrir chez Job la fermeté
Tablcûiient un corps, resté jusque-là inconnu, illustre, héroïque, qu'il déploy.Tda»is l'épreuve,
pour qu'il se l'oruiL' dans l'esprit une image, il n'aurait pas voulu s'exposer à être vaincu par
destinée à le rappeler à la mémoire malgré sa victime. Qu'ils anuonceut un fait acconqdi
son absence, cependant le corps ne produit dans un pays éloigné et tlont on peut vérifier
pas une image dans l'esprit ; c'est l'esprit (jnelques jours après l'exactitude, il n'y a là rien

m Hois,iu, a, 15. '


CoiU. les Académiciens, liv. 1, ch. 6, 7
310 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

qui doive surprendre. Ils peuvent en effet le me s'il ava it été tourmenté par une douleur très-vi'
connaître, non-seulement parlii vivacité de leur ve,maisiialiu'eite. Bientôt après, toid en parlant il

\ue inlininienlsupérieure àla nôtre, maisencore devenait insensible et paralysé. Ses yeux ouverts
par la prodigieuse vitesse qu'ils doivent à leurs ne reconnaissaient aucun des assistants, on le
corps si sul)tils. piquait sans lui causer la moindre impression.
32. J'ai connu un homme tourmenté par Puis il avait l'air de s'éveiller et de ne plus souf-
l'esprit impur il avertissait de rinstantoù par-
: frir; il révélait ce qu'il voyait. Au bout de quel-
tait le prêtre qui venait le visiter, cpioiqu'il y que jours lamème crise reparaissait. Dans toutes
eût une distance de douze mille; il marquait où presque toutes ses visions il prétendait voir
durant toute sa route l'endroit où il se trouvait, deux bonunes, l'un âgé, l'autre encore enfant;
son approche, le moment où il entrait dans le c'étaient eux qui lui disaientou qui lui montraient
village, dans la maison, dans la chauibre, jus- tout ce qu'il nous racontait avoir vu ou entendu.
qu'à ce qu'il le vit enlace delui. Il fallait bien que un jour un chœur de justes qui chan-
3!^. Il vit

ce malaile, pour parler si juste, \it toute la suite taient des psaumes et qui s'abandonnaient à leur
du voyage de quelque manière, encore qu'il ne allégresse au sein d'une lumière éblouissante :

pût la voir des yeux. Il avait la lièvre et débitait d'un autre côté, il vil les supplices atTreux que
tout cela comme s'il avait été en délire. Peuj- subissaient àdivers degrés les inqiiesau milieu des
être était il réellement en délire, et passait-il à ténèbres. Ces deux guides lui montraient ce spec-
cause de cette h'énésie pour étre^possédé du dia- tacle et lui expliquaient comuieni les méchants
ble. Il refusait toute iu)urritnre de la main de ses avaient mérité ces tourmeuts, les justes, cette
proches, et n'en voulait |H'cndie (jue de la main, félicité. 11 eut celte vision le jour de Pâques, après
duprètre. Il opposait encore à ses proches toute avoir été durant tout le Carême à l'abri des atta-
la résistance dont il était capable ; le prêtre ar- ques, qui 'auparavant lui laissaient à peine trois
rivait-il? aussitôt il se calniait, répondait awe jours de trêve. 11 avait vu à 1,'entrée du Carêmeces
docilité et oljéissait eu tout. Cependant le prêtre deux hommesqui lui avaient promis que pendant
ne put le délivrer de c#llc frénésie ou de celle quarante joms il ne -sentirait pas la moindre
possesion ; le mal ne le quitta qu'avec la lièvre, douleiu'. Plqs tard ils lui indiquèrent une opéra-
connue il arri\e à ces sortes de.malailes, et de- tion chirurgicale, qui effectivement le délivra
puis lors il ne resentit jamais rien de sembla- pour longtemps de ses souffi'ances. La dou-
ble. leur étant revenue ef aVec elle les mèines
36. J'aiaùssiparfaitement connu un honnne^ visions, il reçut deux un nouveau conseil :

agité d' une véiltable frénésie, qui avait prédit la c'était de se jeter dans la mer jusqu'à la cein-

mort d'ime femme il ne donnait pas cet événe-: ture et d'y rester quelque temps; ils rassu-
ment pour une prophétie, mais connue un fait rèrent (jue désormais, à labri de toute souf-
accompli et il avait l'air de s'en souvenir. Cha- irance, serait plus gêné que par le flux de
il ne
quefois qu'on lui en parlait ildisait :elle est morte, l'humeur visqueuse ce qui eut lieu. Jamais
:

je l'ai vueulerier; leconxoidsuivi telle direction. ilepuis on ne le vit perdre l'usage de ses sens
Or, elle était encore à ce moment en pleine san- ni avoir des visions comme au temps où, se tai-
té; quelques joiu'saprèselle mourut subitenient, sant brusquement au milieu d'atroces douleurs
et sou convoi passa par où cet homme l'avait et décris épouvantables, il éprouvait ces trans-
prédit. ports. Les métlecius réussirent plus tard a gué-
37. J'ai eu chez moi ungar(;on(iui,;irentrée de rir son corps, mais il ne persévéra pas dans la

japuberlé, éprouvait d'épouvantables souffrances; viesainte qu'il avait résolu de mener.


les médecins ne pouvaient deviner la cause de sa
maladie une humeur visqueuse et cuisante lui
; CHAPITRE XVIU.
sortait des entrailles et lui brûlait lescuisses i.La
crise était inl^i'iiTilleule; au nuinient où elle écla- DKS DIFFKUE.XTES C.VLSES UES VISIO.NS.

tait, il poussait des cris déciiiranls, en agitant tous


30. Si je connaissais un honuiiecapablc de re-
ses membres, sans toutefois perdre la raison, com-
chercher les causes el la maiclieile ces sortes de
'
Dolorem acerriramn gcnitaiium patiebatur, medicis nequaijuam
valeiitibus quid iUud csset agnosrere, iiisi quod tiervus i|)se introrsuiii
visions on de divinations et de les rattacher à un
recondilus erat. ita ul ncc jtraîcisti prai iitio, quod imnioderala lon- principe sur, j'.iiinerais mieux l'écouler, je l'a-
gituditie propendebat, appurerepotucrit, s(>dpostea vix esset inventus
Humor autem viscosus el acer exsudans testes et Inguina urebat. voue, que de faiie attendre de moi une explication
MVHK \n. — LK PARADIS KT LK l'HOlSlIùVIE CIEL. 3H

aiissiiliHicile.CcptMKlanl Je iuMli»;siriiiiltMai|)asm;i même l'image des corps (pi'elie a vus par le

pi'iisi'c, Ionien r'vitaiil(l("|iii'ii(li('unloii(l"iiiil(iiilr ininisière des yeux. Unelle «pie soil la iiainrede

(|iii li'iaitriii' les savaiils.oii de iii"nn|>os('r aux ces images, il esl ineonleslable (pielles ne sont

inuoiaiilscdiniiic ini (iorlcnr : je ciicrciu', jcdis- pas corporelles. Si, trouvant celte iiolion insnl-
ciilc, sans avoii' (le iirclciilidii à la siit'ni(>. honc (isanleon vent savoir de ipiel principe elles s(tr-

Iduli's fcs visions rcsscniiilcnl, selon moi, à celle


leul, {pTon s'adresse ailleurs; j'avoue sur ce point
(Ic^* songes. Celles-ci sont lanlôl vraies, lanlôl
lans- mon ignorance absolue.
ses, lanlôl asitéos, lanlôl [laisililes ; ((nand elles
soni \raies, elles rejirésenlent e\aelenienU'a\eiiii' CIIAPITKKXIX
ell'annonconl clairement, on bien encore elles le
font pressentir par îles signes obscurs et connne d'où naissent les visions.'

par(lese\|)rcssions lig^nées; il en est de même de


celles-là Mais l'Iionune esl ainsi l'ail ; il l'Indie il. Uiiaiit au\ propositions suivanles, on peut
rextraorilinaire, dierche le [irincipe des phé- les déduire d'une foule d'exi)ériences. I^a pideiir,

nomènes les plus élnuiges, et' reste iudillé- la rougeur, les frissons, les maladies mêmes ont
renl à ues merveilles (pii, (pioicpie plus com- pour causé lanlôl le corps, lanb'il l'ame; lecor|)s,
munes, ont sou\eid une cause plus mystérieu- par l'elfetdes Inmienrs, de la noinrilure (.! de
se. Par c.\eniplc, entend-il prononcer nu mol tout ce quiagitdu dehors sur les organes; l'àiiie,
lieu usité .'\ilc il eu ciierclie le sens; le sens par l'elfel des passions, comme la crainte, la

tronVc il remonle à l'eljmologie et cepeii- ; honte, la colère, raniour : il est d'ailleurs natu-

ilanl, qnedeniots d'un emploi journalit-r dont la rel que plus le principe qui anime et régit
deri\alion ne l'inquiète guère ? Il en esl de lecorps est soumis à des émotions violenles, pins il
même pour tons les iaits de l'ordre piijsiqueou communiipie à son tour une inqiulsion énergi-
moral dès qu'ils sont extraordinaires, on, 'se
; que. Deinéme, lemouvx^mentqui emporte l'ànie '

liàle d'en recliercher la nature et les causes, ou vers des images que res[)rit et non les sens lui
l)ien on [tresse les habiles d'en rendre com[tle. communiquent, de force qu'elle
et cela avijL' tant

40. Uiiandon me ileniande ce (juc signilie im ine dislingne plus entre lantôme et la réalité, part
le

.mol, par exemple c(((i(.s (^a\iséj,je conuucuce par tantôt des organes, tantôt de l'esprit. 11 vieiddu
répondre, ;»/(((/c)is, imprudent;, wutus (pénétrant;; corps, comme dansles songes, par une conséquen-
si cette réponse ncsullitpas elcpi'on me deman- ce nalurelleilii passage de la veilleau sommeil, le
de il où \ienl le n'iol (((/«*•, je répète la même sounued étant un phénomène tout relatif aucorps ;

expression, acutus, de remonter à


et je iorce il en vient aussi à la suite des pertiuiiations que

son origine. On l'ignoraU aussi bien (jne celle de la maladie cause dans rorgaiiisine, par exemple,
((itus; et connne l'exiiression, était ordinaire, dans quand on perçoit les objets exté-
le ik'lire,

on s'accouunoilait lort bien de son ignorance; rieurs et que néamnouis on prend les images des
mais du moment qu'un moi rare avait trappe cori)s pour les corps eux-mêmes; d y prend enfin
roreiile,ou se ne conleidait plus d'en 'savoir naissance, quand l'action des sens a efé complè-
le sens, on voulait en connaître l'étjniotgié'. tement suspendue, comme il arrive à ceux qui,
Eb bien! qu'on me demande poui quoi il appa- frappés irmie attaque violente, on! pour ainsi dire
raît des images dans l'état cxtiaorduiaiie qu'on voyage longtemps nors 'de leur corps immobde
appelle extase; je demanderai union tour pom- et qui,rendus au commerce de la société, racon-
quoi nous en vojons dans nossonges, piienome- mule choses qu'ils oui vues. En revanche, ce
.tent
ne jonrnaiier qui ne trappe ou qu'on pei soiiue mou\ emeiit vient de l'esprit, lorsque l'on éprouve,
ne s'enqjresse guère d'étudier. iist-U donc moins en pleine santé, un transport tel que l'on perçoit
élonnanl, parce qu'à est journalier; moins digne parla vue lesobjcls extérieurs et que néanmoins

d'altenlion, parce quilest gênerai '/ Un croit fane on découvre des fantômes qu'on ne peut distin-
preuve d'esprit en ne soccupantpasd'nnsonge; guer d'avec la réalité ou tel que liprs de soi-
;

on dev l'ait à plus iorte raison demeurer indift'é- même et devenu complètement étranger aux
rentaux visions. Pour moi, une chose ine trappe opéralions des sens, on vil au milieu des images
et me confond bien plus que les visions dans im par l'effet d'une vision spiriliieli«. L'esprit malin

songe ou mèmedans une extase; c'est la facilité coimnimique-l-il ces Iransports'/ on devient pos-
lapromptitudeaveclaquellej'àme produit en elle- sédé, convulsionnaire, faux prophète: viennent-
312 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

ils (lu bon esprit? le fidèle intei'prète des mystères (levant eux pendant ce rêve. Veillent-ils les yeux
devient un véritable propliète, quand il luiit au fermés? ils n'ont plus ni les visions qui accom-
don devoir les signes celui de les saisir, et qu'il pagnent la veille, ni celles qui surviennent dans
voit d'avance les temps qu'il a mission de dévoiler le sommeil. Néanmoins, ils ont cet avantage que

et s'en fait l'historien. les organes qui transmettent la sensation du


cerveau jusqu'aux yeux n'étant ni assoupis, ni
CHAPITRE XX. interceptés, ni paralysés, et par conséquent lais-

LES VISIONS QUI NAISSENT A l'OCCASION DU CORPS, sant un libre passage à l'activité de l'àme jus-
n'ont pas le corps pour cause VÉRITABLE. qu'aux barrières de l'organisme, toutes fermées
qu'elles sont, ils peuvent concevoir les images
Le corps sans doute peut-être le point de
42.
des corps sans être condamnés à les prendre
départ de ces visions, mais il ne saurait les l'aire
pour les corps mêmes qui tombent sousles yeux.
paraître il est incapable, en effet, de produire
;

43. II importe seulement de discerner dans


aucune forme immatérielle. Uuand l'effort de
quelle partie des organes réside l'obstacle qui
l'àme ne peut arri\er jusqu'au cerveau, centre
empêche de percevoir les corps. L'obstacle est-
des mouvements sensibles, à la suite du sounneil,
il ou pour ainsi dire h la porte des
à l'entrée
ou d'une perturbation dans les organes, ou
sens, je veux dire dans l'œil, dans l'oreille et
d'un obstacle qui lui ferme le passage, l'àme à
dans tout organe? La perception des corps est
qui son activité essentielle ne permet pas d'in-
I
suspendue sans doute, mais l'activité de l'àme
teri'ompre ses fonctions, devient incapable de
ne se tourne pas ailleurs avec assez de force
sentir ou du moins de sentir pleiuemenl par le
pour qu'elle transforme l'image en réalité.
ministère des sens et de diriger son activité ^ers
L'obstacle est-il dans l'intérieur du cerveau,
le monde extérieur ; elle s'occupe alors à conce-
le centre d'où partent tous les chemins que la
voir les objets avec le concours de l'esprit, ou à sensibilité suit jusqu'au monde extérieur? Les
contempler les images qu'elle rencontre devant organes que l'àme einplo'e pour \oir ou sen-
elle. Sicile enfante cesj'eprésentations toute seule, tir la réalité, s'assoupissent, se déconcertent
ce sont de pures imaginations : si elles s'offrent à ou même se paralysent. Or, l'àme ne perd pas
elle et lixent ses regards, il y a vision. D'ailleurs, son activité avec les moyens de l'exercer; elle
quand on a mal aux yeux ou qu'on est aveugle, se forme donc des images si ressemblantes des
l'effort de l'àme pour voir ne trouve plus dans choses, qu'elle ne peut plus distinguer l'appa-
le cerveau son moteur babituel ce genre de :
rence de la réalilé, ni savoir si elle est en face
vision disparaît donc, quoique l'obstacle opposé des corps ou de leurs représentations: en fùt-elle
à la perception des corps vienne du corps même. capable, ce sentiment est bien plus obscur que
Aussi les aveugles perçoivent-ils plus souvent les la consience claire avec laquelle on conçoit les
images dans la veille que dans le sommeil. En effet images, lorsque l'esprit les produit ou les voit
quand ils sont endormis, le canal par où passe dans apparaître. C'est là un mode de l'imagination
lecerveau l'elfort que fait l'àme pouratteindre jus- qu'on ne peut guère concevoir que par expé-
qu'aux yeux, s'assoupit en (juelque sorte, et l'ef- rience: de là venait ce songe dans lequel j'avais
fort prend une autre direction : ils voient les images pleine conscience de me voir, quoique je fusse
cnsongecomme si les réalités étaient devant eux; endormi, sans toutefois pouvoir distinguer l'ap-
au seinjnèine du sommeil , ils se figurent être éveil- parence de la réalité avec autant de précision
lés et croient voir les corps dont la représenta- que nous le faisons, lorsque nous réfiéchissoiis
tion seule les frappe. Au contraire, quand ils sont les yeux fermés ou plongés dans l'obscurité La .

que l'àme fait pour voir suit sa


éveillés, l'effort possibilité depousser sou activité jusqu'aux yeux,
route accoutumée et trouve en arrivant aux jeux fussent-ils fermés, ou la nécessité de prendre
une barrière infrancliissable ils comprennent : une autre direction devant un obstacle que pré-
donc mieux, qu'ils veillent, qu'ils sont plongés sente le cerveau, point de départ de ses mouve-
dans les ténèbres, même en plein jour, qu'ils ne mi^'iits, établit donc pour l'iiine nue situation bien

le font pendant leur sommeil le jour ou la nuit. différente dans ce dernici' cas elle a beau avoir
:

Quant à ceux qui ne sont point aveugles, il leur conscience qu'elle voit des apparences et non
arrive souvent de dormir les yeux ouverts : des réalités, elle a beau voir que le corps n'a
rien ne frappe leur vue, mais ils n'en ont pas pas d'intelligence et deviner que ces visions
moins l'esprit frappé des images qui passent vieiineat de res|)rit et non des organes, elle est
,

LIVRE XII.— LK PARAHIS RT LE TROISIEME CIEL. 313

Ibrl loin de l'i-lat s.iiii oi'i clli' seul clairiMiiciit la " dit; Ne crains poiiil de garder .Marie pour ton
pivsoiicc (le son propre' (•oi'|)s. Aussi ini avciifcle « épouse; '> et encore; « Prends l'enlant et pars
p('nl-iiais(MUiMilsi> (on\ain(r('(|n'il \cilli', (piand ' poiii- l'Egypte '. »

il (lislirijiMc notli'iiu'nt les imagos (ju'il conroil


de la réaliti^ (pi'il ne voit pas. CHAPITRE XXII.

DES VISIONS COMME CAUSES OCCASIONNELLES DE


CHAPITRE XXI.
PRÉDICTIONS FAITES AU HASARD OU PAR UN INS-
QUE DES VISIONS ANALOGUES AUX VISIONS SENSIBLES TINCT SECRET COMMENT SE PRODUISENT-ELLES.
:

PKI VK>T SE PHOlinUE DANS UN TRANSPORT, SANS


45. Je suis donc convaincu qu'un bon Esprit
CHANGER DE NAIl RE. ne provoque jamais dans l'esprit humain une
44. Lorsque rorganisme est sain, (pie les sens extase pour lui monirerde pareilles images, à

ne sont point engourdis par le sommeil et cpie, moins qu'elles ne cachent un avertissement.
par une opération seerète dans l'esprit, Tànie Quand la cause qui concentre l'attention de l'es-

épiome un ravissement dans le(iuel il ap-


lui prit sur ces images, dépend de l'organisme, il

paraît des représentations de corps, le mode de ne faut pas croire qu'elles aient toujours un
la vision change, mais sa nature reste la même. sens caché elles n'ont ce caractère qu'à la con-
:

En effet, lescauses nudéiiellescpii douneut nais- dition de se produire dans l'àme sous l'ins-

sance à des visions peuvent être absolument piration d'un Esprit qui en révèle la significa-
dilYérentes et quelque même tout opposées.
l'ois pendant le sommeil, soit dans un mo-
tion, soit

Parexemple, chez un homme en délire, les traces ment où les opérations des sens sont suspendues
que la sensihilitésuit dans la tète ne deviennent par une modilicatiou(pielconque du corps. Quel-
pas phis confuses par reflet du sommeil, quand il quefois il arrive à des gens qui veillent que, sans
a des visions analogues à celles des personnes être ni atteints de maladie ni agités de mouve-
quirèvenl: or, c'est giViceausommeilméme que ments furieux, ils re(;oivent par une impulsion
ces personnes n'ont plus conscience d'être dans secrète certaines pensées qui constitue ni une
l'étatde veille et qu'elles tiennenl leur esprit sorte de divination, soit qu'ils prophétisent à
concentré surlesfantômesqui leur apparaissent. leur insu, comme
Caiphe qui fit une prophétie
.Vinsi, première vision ne dépende
(pioique la sans en moindre dessein
avoir le soit qu'ils '',

pas diisommcil et que la seconde s'y rattache, il aient une idée vague de faire ainsi une prédic-
ne faut pas conclure (pie toutesdeux soient d'une tion. le sais par expérience.
,1e

espèce différente: elles tiennent également à la Quchpies jeunes gens en voyage s'avisèrent
il>.

nature de l'esprit, principe ou source de tontes de rire aux dépens d'autrui et de se donner pour
les images. Par conséquent, lorsque l'àmo, à des astrologues, sans savoir même s'il y avait
l'état de dans un corps sain, é[)ronve,
veille et douze signes dans le Zodiaipie. Voyant que leur
par une secrète opération dans l'esprit, nn trans- hôte écoutait ce qui leur passait par la tête avec
port où elle apeivoit les images des corps à la une profonde surprise et en reconnaissait l'cxac-
place des corps mêmes, la cause qui détourne tituile, ils ne. craignirent pas d'aller plus loin.
son activité n'est même sans dontc,
phis la L'hôte de déclarer aussitôt qu'ils avaient dit
mais la vision garde son caraclère immatériel. vrai et de s'extasier. A la fin il leur demanda
Comment d'ailkHirsallirmer que si lacansedcla des nouvelles de sou lils, absent depuis long-
vision est dans le corps, c'est d'elle-même et temps et doid le relard inexplicable lui causait
pressentiment de l'avenir que l'àme remue les (le vives inquiétudes. Sans se soucier si la pré-
images, connnc elle le ferait par la réflexion; diction se vérifierait après leur départ, dans l'u-
et qne la lumière lui vient d'en haut lorsque nique but de faire plaisir au père, ils répondi-
c'est l'esprit qui est ravi en extase ? En effet rent, au moment de se mettre en route, que le

eltet, l'Ecriture ditexpres-icmcnt;


Jerépandrai « fils allait bien, qu'il n'était pas loin, qu'il arri-
«mon esprit sur toute chair; les jeunes gens auront verait le jour même. Pourepioi pas'? ils n'avaient
« des visions, les \ieillai'ds auroatdessonges '. » guère à ci'aiudre qu'à la lin du jour le père
Le prophèle altribue à l'opération divine la se mit à leur poursuite pour les convaincre d'im-
vision souscette double forme. Ailleurs : « l'Augi' posture. .Mais ne voilà-t-il pas qu'au moment
« du Seigneur apparut eu songe à Josepli et lui qu'ils allaieid jjarlir le jeune homme^arriva'?
IJoel, II, 2S, 'Malt. 1,20, 11, 13. — 2 Jean, .\i, 61.
314 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

Voici un autre fait. Un homme dansait de-


M.
vant un cliœur de musiciens, au milieu de nom- CHAPITRE WIII.
breuses idoles, un jour de l'ète païenne. Il n'é-
prouvait pas, il contrefaisait les transports des LA FACULTÉ SPIRITUELLE OU SE FORMENT LES IMA-
démoniaques, d'anmser les spectateurs qui
afin GES, sous l'influence de causes si MULTIPLES,
l'entouraient et qui comprenaient son jeu. C'é- EST EN NOUS.
tait un usage reçu que tous les jeunes gens qui

voudraient, une fois les sacrifices accomplis et les 49. 11 me suffira maintenant d'établir le prin-

convulsions des possédés tournées en ridicule, cipe incontestable qu'il y a en nous-mêmes une
donner une pareille représentation avant le re- faculté toute spirituelle où se forment les images.-

pas, le lissent en toute liberté. Cet bonnne donc Des causes multiples président à leur formation.
interrompit sa danse, et ayant fait faire silence, Un corps fait impression sur nos organes aus- ;

prédit en s'amusaiit et au milieu des éclats de sitôt son image se peint dans l'esprit et se con-

rire de la foule que, la nuit prochaine, dans la serve parla mémoire. Nous songeons à des corps
forêt voisine, un homme serait tué par un lion déjà connus et dont la ressemblance s'était anlé-
et qu'au le\ er du soleil la foule quitterait le lieu rienrement gravée dalis l'esprit; nous les voyons
de la solennité pour aller voir son cadavre. Celle sous un aspect tout-à-fail spirituel. Il est des
prédiction s'accompht cependant tous les spec-
: corps que nous ne connaissons pas, sans toutefois
tateurs a\ aient vu clairement qu'il n'avait parlé douter de leur existence; nous en voyons l'i-
ainsi que pour plaisanter, sans avoir jamais eu le mage plus ou moins exacte au gré de notre fan-
cerveau troublé ni l'esprit en délire ; lui-même taisie; nous concevons encore, comme il nous
dut èli e fort surpris de l'événement,
, d'autant plait, des êtres qui n'existent pas ou dont l'exis-
plus qu'il savait bien dans quelle intention il tence est incertaine. Quelquefois des images se
l'avait annoncé. présentent à l'esprit, on ne sait d'où, en dehors
48. Comment ces visions se font-elles dans de tout acte volontaire. Souvent, au inomenl
l'esprit humain'? Y naissent-elles avec lui, ou de mettre le corps en mouvement, nous dispo-
bien s'y montrent - elles loule^ formées, en sons la suite de nos actes el nous les réglons d'a-
vertu d'une conununication avec les Anges vance par un ellort de l'imagination, ou bien
qui révèlent aux hommes leurs pensées, et (jui nous concevons ces mouvements, actes el pa-
leur découvrent les images que la connaissance roles, à riustaul même qu'il vont s'exécuter, afin
de l'avenir crée dans leur esprit au même titre de les produire. Comment, par exemple, pro-
que les Anges voient nos pensées en esprit'/ En noncer la syllabe la plus courte et lui donner sa
non avec les yeux du corps, puis-
esprit, dis-je, et place dans un mol, si res|)rit ne la conçoit avant
qu'ils sont immatériels. Cependant il y ainail entre qu'elle se fasse entendre? Le sommeil amène
eux et nous une grande différence ils verraient : des songes qui tantôt sont insignifiants, tantôt ca-
nos peneécs, même malgré nous, tandis ipie nous chent une vérité. Une peitinbatiou dans les orga-
ne connaissons leurs conceptions cpi'à la condi- nes rend (jnehiuefois les traces que suit intérieu-

tion qu'ils npus en instruisent : ils ont, j'imagine, rement la sensibilité, toutes confuses alors l'es- :

des moyens spirituelspour cacher leurs pensées, prit mêle lellemenl les apparences avec les réa-

comme nous avons la ressource de nous cacher lités, qu'il a beaucotipde peine ou même devient

derrière un corps pour échapper aux regards. impiiissantà les distinguer entre-elles, et(|ueles
Enfin que se passe-1-il dans noh-e pour esprit, images laiitôl sont insignifiantes tantôt corfor-
que nous y voyions apparaître tantôt des images mes à la vérité. Uuand la maladie ou la souf-
qui cachent un sens mystérieux, sans savoir si hance deviennent assez violentes pour fermer,
ellesconlieimenl un sens; tantôt des syudioles les canaux intérieurs par lesquels l'àme Irans-
ou nous sou[)(;onnons une idée, sans pouvoir la mellail son activité, afin de recevoir les impres-
démêler; tantôt enfin des visions où la lumière est sions (lu dehors, l'esprit se sépare des spns plus
si vive, que l'on peut à la fois percevoir les ima- profondément que dans le sommeil alors se :

ges par l'esprit el les com[)rendre pai' la raison? forinent ou apparaissent des images (jui ont ou
Cesont autant de questions l'ort dilliciles à rc'sou- n'ont pas de signification. D'anhes fois, sans le
dre: leseùl-on résolues, ou devrai! encore se don- concours d'aucune cause physi(iue, un Esprit
ner bien de la peine pour les exposer clairement. s'empare de l'àme el la transporte en présence
LIVRE XFI - LK PARADIS ET LE TROISIEME CIEL. 318

d'iinafcos soiisil)los : alors elle coiilorul avec ros n'existe plus. En effet, ce n'est pas le corps, c'est

iiMafics les pt-rcoplions des sens, (iiioiqu'cllc ail l'.'uno (pii seul par rontremise du corps, simple
nu'orc \c liliic iisaf^v ilo tes sens. Knliii l'Kspiil niossa^<'i' qu'elle oinpidio pour savoir ce (pii se

lui cciiiiiiniiiuiiu' un liaiisiH>rl(iui l'ana-


pailbis passe an dehors et se le ligurer en olle-inêine.

rlio à la \ii' des sons ol no Ini porniol pins qno La vision sensible ne peut donc avoir lieu sans
d'aporoovoir les imagos dans nno \isit>n lonio la vision spiriinolle; elles sont simiillanéos, et

spirituelle je no crois pas (pi'uno paroillc \i-


:
pipur les dislingiior, il laiit s'abstraire des sons :

sion puisse avoir lion sans(pioriniafio (•(inlioniu' on rolrouvo alors dans l'ospril l'imago do ce
une vorilo. qu'tm voyait par les yeux. La vision si)irilnelle

CHAPITRE XXIV. au contraire peut avoir lion mémo sans la vision

sonsii)lo, [lar oxoiuple, (piaiid l'iuiage d'un corps


SI PEHIORITK DE l..\ VISION RATIONiNELLE SUR I.A
apparaît dans son absence, ou qu'elle se modilie
VISION Sl'IIUriEI.LE ET DE CELLE-CI Slll LA VI- au gré de la lantaisio, ou mémo (pi'olle aiqiarail
SION SENSIBLE. en dépit de la volonté. \ son tour la \isi()n spi-
rituelle a besoin pour être contrôlée du concours
50. L'esprii, on s'impriinoiil non les corps
do la vision rationnelle, ipii en est tout-à-lait
mais les imagos dos corps, est donc un principe
indo[iondanle. Ainsi les doux piemières espèces '^

do visions inlériouros à celles de la raison, dont


de vision sont subordonuoes à la troisième. Lors
la lumière .>ert à distinguer entre elles ces visions
donc que nous lisons dans l'Ecriture « que
inrorienrosol tout ons(>ml)lo à découvrir les idées
« riiomme spirituel juge tout et n'est lui-même
(jnine sont ni les corps ni les représentations des
«juge par [)ersonne ', m il n'est pas ici question
corps par exemple la raison elle-même, les
:

de l'esprit, en tant que lacullé subordonnée à


vertus, ou les vices (jne l'on condamne si jiislo-
la raison comme dans c#s mots « Je prierai :

inont clioz les liomines. L'intelligence en oITot


« avec l'esprit, je prierai aussi avec la rai-
li'esl apert.ne que par un effort de rintolligenco.
« son ''; » celte expression a le même sens que
Ainsi on osl-il do « lajoie, la cliarilé, la patience;, la
dans cet autre passage : « Renouvelez-vous dans
« bénignité, la honte, lalonganimiU', la douceur,
« l'esprit de votre intelligence •'. " Nous avons»-
« la foi, la modestie, la continence, la chasteté, »
remarqué plus haut que rintelligonce, qui aide
hrol' do toutes les vertus qui nous rapproclioid
Dion, enlin do Dion lui-même « princi[)o, cause l'homme spirituel à juger de tout, est aussi dési-
gnée par le mot esprit. Il me semble donc qu'on
« et centre de tout '
.
»
peut regarder avec raison la vision spu'iluelle
."H. Ainsi quoique la même àmo serve de
théâtre au\ diUorentos visions, soit (pi'olles dé- comme tenant le milieu entre les deux autres.
Il convient on ort'et de voir dans images qui
les
pemlenl des sens, conîme celles que nous dé-
roprésonlent les corps sans être matérielles, une
couvrent le ciel, la terre, les ètresqui y tombent
sous nos regards avec leurs caractères propres chose intermédiaire entre l'impression physique
;

et l'idée qui n'est un |iioduit ni dos sens no de


soit (lu'olles dépendent de l'esprit, comme celles
qui reproduisent les corps, grâce aux imagos dont l'imagination.

nous avons déjà tant parlé; soit enlin qu'elles CHAPITRE \XV.
relèvent do la raison, comme celles qui nous
l.V VISION RATIONNELLE SEILE INCAPABLE DE
l'ont comprendre les choses en dehors de toute
TROMPER.
sensation et de toute image; chacune a son
rang particulier qui établit entre elles divers ijâ. L'Ame est souvoni ilupo des imagos, non '

degrés. La vision spiriliiollo est plus haute que parce qu'elles sont l'ausses, mais [lar ce qu'elle se

la vision sensible, comme la vision rationnelle l'ail illusion à elle-même : elle prend l'apparence
est plus parfaite que la vision spirituello. Car, la pour laréalité, ce qui est un faiblesse d'esprit.

vision sensible no saurait exister sans la vision Ou se trompe donc on croyant que ce qui se pas-
spirituelle au moment où les organes reçoivent
: se dans les sens se passe aussi dans la réalité :

nno impression d'un corps, il se grave dans rame par oxomiile, quand on est sur l'eau on croit'voir
une einproi^nto qui, saiis être le corps Ini-inêmo, marcher les objets immobiles sur le rivage; les
en est la représentation; suppiunez cette opéra- aslres en mouvement dans le ciel sont immobi-
tion, lo sens qui nous livre la réalité extérieure. les pour les yeux; (luand les rayons visuels sont

I
Ual. V, a2,23;I{om. xl,3C. '
1 0"r. II, lô. — - Ibid. -\lv. 15. — ' Epliès. iv,23.
316 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

trop divergents, on voit deux flambeaux, un]);i- peu importe que la personne inspirée ignore si
ton dans l'eau parait brisé : il y a mille exemples elle est dans son corps ou en dehors de son corps,
de ce genre. Ine autre illusion consiste à identifier si elle est morte ou non, à inoins qu'on ne l'en
les objets qui ontmême couleur, même son, instruise.
même odeur, même saveur ou qui font la mê- 54. Ici l'âme est soustraite à l'influence des
me impression au toncber une drogue en cire ; sens et ne voit plus que les images telles que l'es-
jaune fondue dans une marmite ressemble à nn prit les conçoit : supposez de même qu'elle soit
légume une voiture qui passe produit l'effet du
; soustraite à l'influence de l'imagination et ravie
tonnerre si on flaire une certaine plante, fort
; dans la région des vérités purement intelligibles
goûtée desabeilies, sansètreavertipar les autres où la vérité apparaît dégagée de toute image ma-
sens, on croit aspirer le parfum du citron ; tout térielle, de tous les nuages dont l'enveloppent
aliment doux paraît apprêté au miel ; un an- les fausses opinions ; à cette hautcm- ses vertus
neau palpé dans les ténèbres, semble d'or, et s'exercent sans peine ni fatigue. L'énergie devient
ilest de cuivre ou d'argent; des images, qui as- inutile à la tempérance, pour dompter les pas-
saillisent l'ànie soudainement, la troublent et lui sions, au courage, poursoulenir lescoupsde l'ad-
l'ont croire qu'elle rêve comme dans un songe. pour châtier le mal, à la
versité, à la justice,
Aussi faid-il dans toutes les visions sensibles, prudence, pour éviterrerreur. Lavertuse réduit
appeler les autres sens en témoignage et surtout toute entière à aimer ce qu'on voit; la félicité sou-
recourir au contrôle de la raison, afin de décou- veraine consiste à posséder ce qu'on aime. Là se
vrir ce (iii'elles contiennent de vrai, autant (pi'on puise à sa source le bonheur dont quelques
le peut en pareille matière. Dans les visions gouttes seulement arriventjusqu'àla vie humai-
spirituelles, l'âme se irompeenprenantles ima- ne pour lui faire traverser les tentations du mon-
ges pour les corps, ou bien en attribuant aux de avec tempérance, courage, justice, prudence.
corps, sans les avoir vus, des qualités qu'elle /Ce repos sans mélange d'inquiétude, cette vue in-
avait imaginées sur de vagues et fausses conjec- effable de la vérité, voilà, en eflèt, le but suprême
tures. La vision ratioimelle seule est inconq)ati- où tendent tous nos efforts à triomplier des plai-
ble avec l'erreur : car si l'on comprend, on est sirs, à vaincre l'adversité, à soulager la misère
dans le vrai, si l'on n'est pas dans le vrai, on ne d'autrui, à résister aux séductions. Là on con-
comprend pas : delà vient qu'il est lorl difféi-ent temple Dieu dans ses clartés, et non plus à tra-
desetromper sur ce que l'on voit ou de se trom- vers les nuages d'une vision sensible, comme au
per parce qu'on ne voil pas. mont Sinaï ', ou les symboles il'une vision spi-
rituelle, comme celles d'Isaïe ', ou de Jean ^ : on
CHAPITRE XXVI. le voit face à face et sans voile, tel que l'âme hu-
maine peut le comprendre, tel que sa gi'âce le
DEUX SORTES D'EXTASES SPIRITUELLE :
découvre à ceux qu'il juge dignes de participer
OU RATIONNELLE. plus ou moins intimement à l'entretien où il

53. L'âme voit-elle apparaître des images, parle directement, je ne dis pas aux sens, mais à

analogues à celles que l'esprit conçoit, dans un rintelligence/

transport «pu l'arrache à l'influence des sens par


CHAPITRE XXVII.
un eflel plus énergique que le sommeil, quoi-
que moins puissant que la mort ? C'est un avis A QUELLE ESPIÎCE DE VISIONS FAUT-IL RAPPORTER
d'en hani qu'elle ne voit i)lus les corps, mais les CELLE OU MOÏSE VIT DIEU ?
images des corps, par une opération surnatiu'clle
de l'esprit, à peu près comme on a conscience Ainsi doit s'entendre, selon moi, la vision de
d'avon- un songe même avant d'être éveillé. Si Mo'ise^.

ces images expriment des événements à Ncnir et ao. Il avait désiré voir Dieu, comme on peut
qu'on lise les faits sous le symbole, soit avec la le liredans l'Exode il souhaitait le voir, non :

raison éclaii'ée d'une lumière siniialinelle, soit sous la forme qu'il avait emi)iuiitée pour lui
avec le concours d'un ange (pu('\pli(piela vision ap[)araitre sur le mont Siiiai ou dans le taber-

à mesure (|u'elle apparaît, comme cela se (il nacle •',mais dans son essence même, sans les

pour Saint Jean', c'est une révélation sublime; voiles dont il s'enveloppait pour frapper les

'
Apoc. j, 10, et iuiv.
'
Ex.id. Jtix, 18. — 2 Is. VI, 1. — ^Apoc. — ' Numb- xii, B. — ^Ex.
.\lx, Itj; x.vxiii, 9.
LIVRE \II. — LE PAKAniS ET LE TllOISlftMK CIEL mi

yeux, sans les images niaU^iioUos (iiii iicrmol- hii-même, dans ectli \isiou inelîable où il se

tent àlVsprililo le ooncovoir ; il \()iilail, (lis-jc, le inotihi' el parle à l'àme a\('i nue inell'ahic clarlé.

voirt'aiv à l'atT, dans la piMioclionquc peut saisir .Vucuii liouime ne peut joiiirde celle vision, tant

civalinv inlollif;iMilcs('par(''0(ln ronimoiretlcs qu'il ^ il de l'existence morlelle cpii reste atta-


la

sens, iléfia^iée dos sMnlxilcs ('(inc'iis par l'ospril. cIh'c aux sens il laiil moiuii' à celle vie, soilen
:

Voici, en elïet, la parole de l'Ecrilnre : > Si j'ai (piillaiil le corps, soi! en selron\ant si complè-

« trouvé <^rAce devant vos yeux, montrez-vous temeul souslraii à riiilluenec des sens, qu'il dc-
(1 voiis-incMne à moi, atitupie je vous voie. » Or, \ieul impossible de dire si, peudanl celle extase

connue il esl dit un peu i)lus liant : « l'I'^ternel par- suhlime, ou était ra\i avi'(- ou saus sou corps '.
« laitA Moïse face îi face, comme nuhonuue parle
eompi'eiiail ce
CHAPITKE WVIII.
« avec son inlime ami; » ainsi il

qu'il voyait el ce cpi'il aspirait à voir ce (pi'il ne LK TIlOlSIÈME CIEL ET LE P.Vlt.VDlS DONT P.VULE l'.\-
voyait pas. Aussi Dieu lui ayant répondu : « Tu l'OTIlE PEUVENT s'entendre DE CETTE TROISIÈME
« as trouvé grâce à mes yeux et je te connais ESPÈCE DE VISION.
« préférablement à tous, » Moïse dit : « Monlrez-
.")(î. Celte Iroisième espèce de vision, la plus
« moi vos clartés. » Il reçut alors de la bouche
élevée lie toutes, dégagée à la fois de toute percep-
(lu Seiprnenr ime réponse , dont le sens figuré
tion des sens et de toute conception des corps par
serait trop long â discuter ici : « Tu ne pourras
rimagiuation, peut être le Iroisième ciel dont parle
« pas voir ma face ; car nul homme ne peut me
TApôlre c'est là qu'on voit Dieu dans sa clarté,
« voir et vivre. » Et il ajouta : « Voici un lieu près
:

« de moi ; et tu l'arrêteras sur ce rodier : il arrivera vision qui exige un cœur pur et qui a fait dire :

« (|ue, ([iiand ma gloire passera, je te mettrai dans « Heureux ceux qui ont le cieiir i)ur, car ils ver-
« ront Dieu '. » Ce n'est point celle vision à la-
« rouvertnre du rocher, et je te couvrirai de ma
« main jusqu'à ce que je sois passé, et je retirerai quelle concourent les sens ou l'imagination et
(]ui nous montre Dieu comme dans un miroir,
« ma main, eltume verras par derrière quant à :

à travers des énigmes ^ c'est une vision (jui


« ma face, elle ne se montrera point à tes yeu.x
;
» '
.

L'Ecriture n'ajoute pas que ces paroles se soient ac- nous le montre face h face * et, comme il est
complieset m mtre assez par là qu'elles désignent écrit de Moïse, bouche à bouche, je veux dire,

l'Eglise en allégorie. Le rocher près du Seigneur dans son essence, à ce degré où peut la com-
représente l'Eglise, son temple, bâtie elle-même prendre la faiblesse d'une intelligence humaine
sur le roc en un mot il y a entre cette allégorie
: ,
qui ne peut être adéquate à l'intelligence divine,
de ce récit une exacte concordance.
et les traits quoiqu'elle soit purifiée des souillures delà terre

Cependant si Moïse avait souhaité voir les clartés et ravie en une extase où tout commerce avec les

du Seigneur, sans mériter celte grâce, Dieu n'au- sens et l'imagination est rompue vision à la- ;

rait pas dit au livre des Nombres à son frère Aaron quelle nous sommes étrangers pendant que

sœur Marie nous voyageons sous le poids de cette chair mor-


et à sa : « Ecoutez mes paroles : s'il y
«a quelque prophète parmi vous en l'honnetordu telle et corruptible, et que nous vivons de la vie
des justes, dans la la claire vue =.
foi, non dans
« Seigneur, je me ferai connaître à lui eu vision

Pourquoi donc que Dieu ait voulu


ne pas croire
« et je lui parlerai en songe. Il n'en est pas ainsi
de mon serviteur Moïse, ainsi montrer ù ce grand Apôtre, au maîlre des
« qui est fidèle dans toute
ma maison..le parle Gentils, ravi en une vision si haute, l'éternelle
« avec lui bouche à bouche,
« etm'a vu en effet, et non obscurément ni par
il
vie dont nous vivrons après cette existence mor-

« image » Ces paroles ne peuvent s'entendre


'*. telle ? Pourquoi ne pas voir là le paradis, en

d'une forme matérielle qui rendait Dieu visible au dehors de celui où Adam a vécu de la vie du corps,
corps; il s'adressait en effet face à face, bouche à au milieu des bosquets et des fruits ? Sans doute
l'Eglise, qui nous rassemble dans le sein de sa
bouche à Moïse, quand ce dernier le pria de se <

« montrer lui-même » el même, au moment


charité, a été appelée un paradis avec des fruits
;

qu'il adresait ces reproches au frère et à la soMir,


délicieux ". Mais c'est là une allégorie, comme
le Paradis où Adam a vécu réellement est nue
moins agréables que Moïse à ses yeux, il em-
pruntait la forme d'une créature qui frappait figure prophétique de l'Eglise. Lu examen plus
attentif démontrerait peut-être que le paradis
leurs regards. lU'a donc vu tel que Dieu se révèle
1
ir Cor. XII. 3. — 'Matlh. v, 8. —M Cor. xlll. 12. — ' ibid. — i II

I
Ex. x.v.vlll, U-23. — 2 Xomb. .xil, 6, 7, 8. Cor. .\, fi 7. — : Gant. IV, 13
318 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

matériel, où Adam véciiUle la vie des sens, était corps. Les visions de cette sorte, en effet, sont
le symholeetde la vie des justes ici-bas, au sein de parfois supérieures et divines et ont pour prin-
l'Eglise, et de la vie éternelle qui doit la suivre : cipe l'action surnaturelle des .\nges ; nous com-
c'est ainsi que Jérusalem, qui signifie vision muniqueiil-ils leurs pensées par une intime et
de la paix, tout en étant ici-Jjas une cité terrestre, toule-puissanle union avecnosesprits, ont-ils un
désigne soit la mère éternelle et céleste de ceux moyen mystérieux de former les visionsau-de-
« qui sont sauvés en espérance et qui atten- daus de nous? C'est une question difficile à ré-
« dent avec constance ce qu'ils ne voient pas soudre et plus encore à formuler avec jirédsion.
« encore i, » cette mère quia t'ait dire « que la Parfois au contraire, les visions appartiennent à
« lemme délaissée avait plus d'enfants que celle l'ordre naturel commun : elles naissent sous mille
« qui avait un époux "^
; soit la mère des saints foruiesdans notre esprit ou s'y élèvent à la suite
« Anges qui voient éclater dans l'Eglise la sa- lies impressions que nous ressentons selon nos
it gesse multiple de Dieu ', >> et en compagnie dispositions physiques et morales. Les hommes en
desquels nous vivrons après ce pèlerinage, sans effet ne se coutentcnt pas de se figurer leurs
fin comme sans souffrance. occupations et de les concevoir dans la veille ;

ils songent à leurs Ijesoins endormant; c'est alors


CHAPITRE XXL\. qu'ils conduisent leurs affaires ù leur gré et que
couché dans les tourments de la faim et
tel s'était
Y A-T-IL PLUSIEURS DEGRÉS DANS LA VISION SPIRI-
de la qui dévore en songe les mets et les vins
soit,
TUELLE OU RATIONNELLE, COMME IL Y A PLUSIEURS
exquis. Entre ces visions et celles qu'envoient
CIEUX ?
les Anges, il y a le même intervalle j'imagine, ,

o". En admettant que tel soit le troisième ciel qu'entre les choses du ciel et celles delà teiTC.
où fut ravi l'Apôlre, faut -il croire qu'il y ait un CHAPITRE XXXI.
quatrième ciel ou même plusieurs autres au-
dessus ? Quelques-uns en com|)tent huit, d'au- DANS LA VISION INTELLECTUELLE, IL FAUT DISTIN-

tres neuf ou même dix ils en distinguent même : GUER ENTRE LES IDÉES QUE l'aME CONÇOIT ET
plusieurs superposés dans le seul qu'on appelle LA LUMIÈRE QUI LES ÉCLAIRE. DIEU EST LA LU-
firmament: delà, pour prouver que ces deux MIÈRE DE l'aME.
sont matériels, des raisonnements, des conjec-
39. On peut faire la même remarque pour les
tures qu'il serait trop long d'analyser ici. S'il y visions rationnelles : elles nous offrent des objets
a plusieurs deux, on peut soutenir, démontrer
qui se voient dans l'àmc même, par exemple,
peut-être que les visions spirituelles et rationnel-
les vertus, opposées aux vices, tantôt celles dont
les admettent aussi différents degrés, où l'on
l'usage est éternel, comme la piété, tantôt celles
atteint selon que l'on a reçu des révélations plus
(jui sont indispensables à celle vie mais qui ces-
ou moins claires. Quelle que soit la valeur et le
sent de s'exercer avec elle, comme la foi qui
nombre de ces hypothèses, je ne connais pour
nous fait que nous ne voyons pas en-
croire ce
ma part et je ne puis enseigner que ces trois
core, l'espérance qui nous l'ait attendre avec
ordres de vision.
S'agit-il de définir les espèces
fermeté l'avenir, la patience qui nous aide à
dans chacun des trois genres et les degrés di-
supporter l'adversité, jusqu'à cequenous ayons
vers dans chaque espèce? Je reconnais mon
atteint notre but. Ces vertus sont nécessaires en
ignorance.
ce monde pour accomplir notre pèlerinage; elles
CHAPITRE XXX. cesseront dans cette autre vie qu'elles servent à
nous faire conquérir. Cependant nous les con-
LA VISION SPIRITUELLE EST TANTÔT INSPIRÉE
cevons par l'intelligence en elles-mêmes : car
TANTÔT NATURELLE.
ellesne sont ni des corps ni îles représentations
08. La lumière visible enveloppe le ciel que corporelles. Mais ces vertus sont distinctes de la
nous voyons au-dessus de la terre et dans le- lumière qui éclaire l'âme et qui lui révèle dans
quel brillent les lumières et les astres, corps toute sa vérité ce qu'elle conçoit en elle-même
bien supérieurs aux corps terrestres en est ; il ou au sein de celle lumière. La lumière en effet
de même delà lumière immatérielle qui, dans la est Dieu lui-même, tandis que l'âme est une créa-
vision spirituelle, éclaire les représentations des ture qui malgré sa raison, son intelligence, sa
'
Uom. VIII, 24,25. —2 Gai. I», 26,l27. — ^Eph. m, 10. resseinblaiice avec Dieu, vacille par sa faiblesse
I.IVRR \II.- LF. PAUAItlS KT LK TUOISIKMK CIEL ;M!»

naliiicllc, (|iiaii(l elle essaie île coiilciuplei- ecllc l'ai)pai'enee pom- la ri'alili' cl n'ciiiriKpicnicnt.
claile (|ii'elle ne peul soiiteiiii-. Ni'Miiinoiiis.c'esl I.oiscpic Pierre \o\ail la nappe cl les animaux
à eelte liiiiiièic <|irelle doil loiil e<' (lu'elle eoiii- s\ udi(ili(|ii('s, il se lriHU|iail eu prenant ces (igni'es
preiid dans mesure de
la ses forces. Lurs dime pour des corps vivants >. Unaixl il était délié
(in'elle est l'avie dans ces l'éfiions et (|ues(Mis- par l'ange, (pi'il marchait, cpTil evêinlait tous
traite aii\ impressions de la chair, elle esl en ces mouvemenis l'éels en se cro\,inl iliqie d'un
lace de celle vision i|n'elle conleniple en dehors songe î, il se ti'ompait encore. Sur la na[)pe, en
de l'espace, d'après le mode pnremeni ration- effet, étaient des swuholes cpii lui semhlaierit
nel, elle aperçoit aii-dessns d'elle celle hnnière des réalités; sa délivrance, (|ui s'accomplissait
(pii l'aide à d(''coii\rii' tout ce(|n'elle \oil, même sous ses >eu\, par là même snrua- (pi'elle était

en elle, |)ai' rinlelli^cnci'. liirelle, lui semblait une |nu'e imagination. Alais
dans les deux cas l'illusion consistait à prendre
CIIAIMTI'.KXXMI. l'image poiu- la i-ealili' el la réalité poiu' l'image,
[.es émotions de plaisir ou de [)eine, que les
Of VA l.'.VJIK UKl'OflLLKE Ui; COUPS?
âmes éprouvent après la mort, ne sont donc pas
des inqn'cssious pliysi(|ues; elles les représen-
(>(). Veul-on savoir si l'ànie, nne l'ois sorlie du
leid, |)uis([ue les elles-mêmes
;'unes se voient
corps, \a dans un lien, si elle renct)ntre nn sé-
comme si elles avaient leurs corps; mais elles
jonr ipii l'enlêrme non les corps, mais des re-
n'en sont jias moins des émotions réelles de joie
présentations matérielles, on enfin si elle s'élève
ou de peine (pie ressent une substance immaté-
aii-dessns des corps et de leni's images?,le ré-
rielle. Quelle différence n'y a-t-il pas entre un
ponds sans liésisler (pie l'âme ne peut s'en aller
songe triste ou riant Bien des gens, qu'un songe
!

dans un lien h moins d'avoir un corps et ([ue


avait mis au comble de leurs désirs, ont été
sans corps elle ne peut être transportée dans nn
fâelK's de se réveiller; d'autres, après un songe
lieu. A-l-elIe nn eori)s après être sortie de celui
on ils avaient été exposés aux alarmes les plus
qu'elle habitait ici bas ? Qu'on le démontre si
vives, aux supplices les plus cruels, tremblent à
on le peut. Fom- moi, je n'en crois rien l'hom- ;

la pensée de se rendormir, de peur de revoir


me après la mort est à mes yeux spirituel sans
apparaître les mêmes southances.Or on ne peut
aucun organisme. Selon ses mérit<'s l'âme vole
douter que les représentations des tortures in-
vers les choses spirituelles, ou descend dans un
fernales ne soient plus vives el par conséquent
séjour de peine qui est l'image d'mi lieu, sembla-
ue causent des souffrances plus altreuses. En
ble à celui (pi'onl vu certaines personnes, les-
effetceux qui ont été souotraits à l'influence des
quelles ravies lu)rs de leurs corps et i)resque mor-
organes [ilus complètement (pie dans le som-
tes, ont contemplé les peines de l'cnler et devaient
meil, quoique moins absolument que par la
pai' conséquent garder certains rapports avec le
mort, disent qu'ils ont vu des représentations
corps, puis(iii"elles pouvaient être transportées
d'une énergie bien supérieure à celles des
dans un pareil séjour et y éprouver de pareilles
Anges. L'enfer est donc, selon mol," une réalité
sensations. Car, jeiie comprendrais pas que l'àme
spirituelle et non physique.
gardât une certaine analogie avec son corps
dans des visions où, le corps étant inanimé sans CHAPITRE XXXllI.
être complètement mort, elle vient contempler
une spectacle pareil à celui ([ue nous ont DE l'enfer. — QUE l'aME EST IMMATÉRIELLE. —
dépeint une f uile de personnes revenues ensuite DU seind'abraham.
à elles-mêmes, et qu'elle ne pût la garder lors-
62. Il ne faut pas écouter les gens qid pré-
que la mort l'a séparée absolument du corps.
tendent que l'enfer se fait sentir dans la vie
Ainsi donc elle va ou ressentir des peines ou
présente et qu'il n'est rien après la mort.
goider un repos etune joie qui comme les pei-
mêmes sentimenls, les mô- Qu'ils expliquent ainsi les fictions des poètes,
nes représentent les
c'est leur affaire; notre devoir est de ne pas nous
mes émotions (ju'on éprouveiuit avec le corps.
lil. N'allons pas croire eu elïet que ces peines, écarter des paroles de l'Ecritm-e, à qui seule nous
devons ajouter foi surcepoint.il nous serait
ce repos et celte joie soient chimériques ; les re-

présentations de la l'éalité ue sont fausses qu'au- néanmoins facile de prouver que les philosophes

tant que, dans un moment d'illusion, ou prend 1


Act. X, 11, 12. — Ib. Ail, 7-9.
380 DE LA GENÈSE Al] SENS LITTÉRAL.

profanes n'ont pas eu le moindre doute sur la (>4. Ces paroles de Jacob à ses enfants
« Vous :

réalité d'un état qui attend les âmes après la vie « conduirez ma au milieu de la tristesse
vieillesse

ici-bas. Une question importante est de savoir « jusqu'aux enfers ', » semblent montrer chez ce

à quel titre ou peut dii'e que les enfers, s'ils ne patriarche la crainte d'être exposé à un» tris-
sont pas un lieu déterminé, sont sous terre, et tesse coupable qui le conduii'ait aux enfers et
d'où ce nom peut leur venir, s'ils ne sont non au séjom- des bienheureux. La tristesse en
pas situés sous la terre'. L'àme n'est point corpo- effet n'est pas un mal peu dangereux pour l'àme,

relle; ce n'est pas seulement mon opinion, c'est puisque l'Apùtre montre la plus vive sollicitude
poui- moi une vérité incontestable que je ne pour empêcher un homme de succomber sous
crains pas de proclamer. Cependant on ne sau- le poids de la tristesse 2. Je cherche donc et je

rait nier qu'elle garde une certaine ressemblance ne puis trouver dans les livres canoni(jues de
avec l'organisme ; autant vaudrait nier que c'est passage où le mot d'enfer soit pris en bonne
l'àme qui dans un songe se voit marcher, asseoir, part. Personne n'oserait aller jusqu'à diie <iue
aller, revenir, voler même, opérations qui sup- le sein d'Abraham, le repos où les Anges intro-

posent quelque ressemblance avec le corps. duisirent le pieux Lazare, b'aient pas ici un sens
Si donc elle garde dans les enfers une certaine favorable. Je ne vois donc pas à quel titre
ressemblance spiiituelle et non physique avec on pourrait placer dans les enfers ce séjour de
le corps, il semble que le séjour de repos ou paix.
de souffrance, qui lui est réservé après la mort CHAPITRE XXXIV.
n'est pas corporel, mais semblable seulement à
DU PARADIS ET DU TROISIÈME CIEL OU FUT RAVI
à un séjour corporel.
SAINT PAUL.
63. Je n'ai pu encore trouver, je l'avoue,
qu'on nomme enfers le séjour où reposent que nous débattons
65. Mais cette question,

les âmes des justes. On croit avec quelque en cherchant laou sans succès, ne
vérité avec

apparence de raison que l'àme du Christ des- doit pas nous faire oublier qu'il est temps de ter-

cendit jusqu'aux lieux où les pécheurs sont miner ce long ouvrage. Nous avons ouvert celte
tourmentés, afin de délivrer ceux qui lui en discussion sur le Paradis à propos du passage où
paraissaient dignes d'après les décrets mysté- l'ÂpcMie dit qu'à sa connaissance un homme fut

rieux de la justice. Ce passage : « Dieu l'a res- ravi jusqu'au troisième ciel sans savoir si ce
« suscité, après qu'il eut fait cessé dans les enfers fut avec son corps ou en dehors de son corps,
« les douleurs qui ne pouvaient l'arrêter '', » ne qu'il fut ravi jusqu'au Paradis où il entendit des

peut s'entendre, selon moi, qu'en admettant paroles ineffables que l'homme ne ])eut entendre ;

qu'il fit cesser les douleurs de quelques malheu- et nous ne voulons pas affirmer témérairement

reux, parce qu'il est le Maiti'e absolu, en vertu que le Paradis est dans le troisième ciel, ou que
de cette puissance devant qui tout fléchit le cethounne fut ravi au troisième ciel d'abord, en-
genou au ciel, sur la terre et dans les enfers 3, et suite tiansporté dans le Paradis. Puisque le mot

qui l'empêcha d'être arrêté par les douleurs de Paradis, qui à l'origine signifie parc, est devenu
ceux qu'il délivrait. Abraham, ou le pauvre une métaphore pour désigner tout séjour même
qui était dans son sein, en d'autres termes, dans spirituel où l'àme est heureuse, on peut ap-

le séjour où il goûtait le repos, n'habitaient point peler ainsi non-seulement le troisième ciel,
le lieu des tourments ; car il existait un abîme quel (ju'il soit, avec son élévation et ses gran-
immense entre ces justes et les supplices de deurs, mais encore la joie qu'une bonne con-
l'enfer; ne dit-on pas que l'enfer était
aussi science inspire à l'homme. C'est ainsi que l'Egli-

leur séjour. Il arriva que le


« pauvre mourut se est nommée le paradis de iousceuxqui vivent
« et les Anges le portèrent dans le sein d'Abra- dans la tempérance, la piété, la justice s,
paradis
« ham le riche aussi mourut et fut enseveli
:
;
qui est une source de grâces et de pures délices :

« et comme était dans les enfers au milieu


il au milieu même des tribulations on s'y glorifie,
« des tourments, il vit de loin Abraham *. » on se réjouit de la patience, « parce quelescou-
Comme onlevoit.Vesl par l'enfer qu'on désigne « solations de Dieu y proportionnent la joie à la

le séjour où le riche est aussi, et non celui où « multitude des douleurs ipii affligent le cœur *. »

Icpanvregoùte le repos. Couibien donc est-on plus fondé encore à ap-


1
Htt. lir. H, (-11.24, 11.2. — = Act. 11,24.- ' Pliilii). II, tO.— ' Luc,
XVI, 22-26. ' Gen. .\LV, 29. — » IJ Cor. Il, 7. — sEccli. xi.,28. — ' Ps. xciii, 19.
LIVUK XII. — LE PARADIS ET LE TROISIEME CIEL. 321

peler de ce nom le sein d'Abraham où Ton même di' Dieu, le Verbe divin jiai ipn loiM a

ifîMore les teiit;dions,où l'on trouve len'i)os après élé créé, il est permis 'de croire (pu- c'est là le
lonles les misères de celle \ie? Là aussi règne troisième ciel où bit ravi l'Aimlre ', le paradis
une lumière vive el propre à ce séjour; de l'a- supérieur peut-être el, s'il tant le dire, le Para-
liiin<' (le tourments et <le li'uèhres où il est dis d(^s Paradis. Car, si l'àmc juste trouve un
plongé, le riche peut la voir malgré un inler\alle motif dejoie eu vo.\anl le bien dans loide espèce
immense, el reconnaître à sa clarlé le pauvre de créalme, peut-il y avoir une joie plus haute
(pi'il avait auiivl'ois dédaigné. ipic celle (|ui naît à la vue du Verbe, le cré-ateur

ti(î. Si donc ou dit ou on croit (pie les enfers de l'imivers'.''

sont situés sou'< la terre, c'est que l'on y montre


CHAPITRE XXXV.
en espril, par des représentations de la réalité,

à toutes les ;\mes qui ont méiité l'enler, en pé- L\ HliSLUBECTION EST NÉCESSAUIE POUR ACHEVEli
chant par amour pour la chair, ce ipii d'ordi- LE BONHEUR DES AMES .rUSTES.
naire frappe la chair et l'enfonce dansia matière.
D'ailleurs le mol enfer dérive eu latin de l'ad- 68. On va peut-être se demander ici quelle néc(îs-
\erl)e (/)/;•(/ 'inférieurement. ) Oi, de même cpie silé il y a pour les àmesjusies de reprendre lem's
les lois (le la pesanteur font tomber les corps corps par la rc.surreclion, puiscprelles n'ont pas
d'aidanl plus bas qu'ils sont pins lourds; de besoin du corps pour goûter la IV'licité souve-
même au point de vue moral, pins une chose est raine. La qu(^stiou est trop (liflieile pour que
triste ,
plus elle est basse. Cela explique poiu' je puisse la traiter ici coniplèleuient; cep(MKlant
quoi en grec le mot qui désigne l'enfer vient, dit- il que l'intelligence humaine,
est incontestable

on, de la tristesse qui règne dans ce séjour'. soit dans une extase (pii l'arrache à ses sens,
Cependant notre Sauveur, après sa mort, n'a soit dans la vision que, dégagée de la chair, elle

pas d(»daigné de visiter ces tristes lieux, afin contemple au-dessus de toute les représentations
d'en faire sortir ceux qu'il en jugeait dignes dans corporelles, après la mort; il est incontestable,

sa justice souveraine. En disant donc au lion dis-je, qu'elle est incapable de voir l'essence di-
larron : « Tu seras aujourd'hui avec moi dans vine aussi parfaitement que les Anges. Sans ex-
« le Paradis ^, » il ne promet point h son âme clure une raison plus profonde, je crois qu'elle
l'enfer méchants soni puni<,mais le
où les a un penchant trop naturel pour gouvei'uer le
séjour du repos, comme le sein d'Abraham; corps. Ce penchant l'arrête en quelque sorte dans
d'ailleurs il n'est aucun espace où ne soit le son essor,et l'empêche de tendre avec toute sou

Christ, puisiju'il est la Sagesse qni « atteint au plus haut des cieux, tant qu'elle n'a
aclivité
« paitont à cause de sa pureté » ou encore
•'*
; pas pour enveloppe ce corps qu'elle doit gou-
le Paradis, soit qu'il se confonde avec le troi- verner pom" sentir ses inclinations satisfaites. Si
sième ciel, soit qu'il s'élève au-dessus, dans une le corps était difficile à gouverner, « comme cette
région où fut ravi l'ApcJtre. Il est aussi possible <i chair qui se corrompt et pèse sur l'âme '2, » et

qu'on ait désigné sous ces noms divers le séjour qui nait par la propagation du péché , l'àme
où résident les âmes des bienheureux. éprouverait un obstacle plus insurmontable en-
6". Si donc on entend par le premier ciel, l'es- core à contempler le haut des cieux
il a donc :

pace matériel qui s'étend au-dessus de la terre fallu d'abord la soustraire complètement à l'or-
et des eaux;* par le second, l'image du ciel con(;u ganisme, afin de lui montrer comment elle pour-
par l'esprit , tel , par exemple
que celui d'où ,
rait s'élever jusqu'à cette vision sublime. Puis,
Pierre vit en extase descendre une nappe char- quand le corps sera devenu spirituel, grâce à la
gée d'animaux ^; par le troisième enfin la région résurrection, et qae l'àme sera « l'égale desan-
immatérielle où pénètre l'intelligence dégagée 11 ges, aura atteint la perfection à laquelle
» elle
de tous liens, de tout commerce avec la chaii- tend sa nature; elle pourra tour-à-tour obéir et
purifiée de toute souillure, el où il lui est donné commander, donner et recevoir la vie, au sein
de voir et d'entendre, dans une vision ineffable, d'un bonheur inelTable qui de son fardeau ici-

et dans la charité du Saint-Esprit, l'essence bas fera un uistrmnent de gloire.

1
'Aô'tjç i-(îÛ5, sans plaisir. - - Luc, XXII. 43. 'ag. XII, 24, II Cor. xii, 2-4. Sag.i X, 15.
Act.'x, 11, 12.

S. AUG. — TOM. IV. 21


,

32-2 DE LA GENÈSE AU SENS LITTÉRAL.

CHAPITRE XXXVI. Anges ; car il ignora s'il était avec ou sans son
corps. Nous aurons aussi ce privUège, quand la
QUEL SERA LE CARACTÈRE DE CETTE TRIPLE VISION résurrection nous aura rendu nos organes
DANS LA BÉATITUDE? « quand ce corps corruptible aura revêtu l'in-
« corruplilité, et que ce corps mortel aura revêtu
69. En effet trois espèces de vision se retrouve-
mé-
« l'immortalité K » L'évidence seule, sans
ront dans 1.1 bratitnde, mais en dehors de toutes
lange d'illusion et d'ignorance, avec un ordre
que nous valent les sens et l'iniagina-
les illusions
lumineux, régnera dans les visions sensibles,
tion : en sera-t-il de même
à plus forte raison
spii-ituelles, rationnelles, au sein de la perfec-
des visions intelleetnelles qui auront un degré
tion et du bonheur dont jouira alors la créa-
de clarté et de vivacité bien supérieur à l'évi-
ture.
dence qu'ont aujourd'hui pour nous les percep-
tions sensibles. Ce])endaut, ce sont ces percep-
CHAPITRE XXXVII.
tions auxquelles tant de gens s'abandonnent
ne veulent DE l'opinion de QUELQUES DOCTEURS SUR LE
et en dehors desquelles ils re-
Les sages au TROISIÈME CIEL.
connaître rien de l'éel. vrais
contraire, quoiqu'ils soient plus fortement frap-
70. Quelques-uns de ceux qui ont commenté
pés par les sensations, regardent comme infini-
avant moi l'Ecriture sainte en restant fidèles i'i la
ment plus certaines les idées qu'ils découvrent
doctrine catholique, ont soutenu, jele sais, que le
avec la raison, indépendamment des sens et de
troisième ciel dont parle l'Apôtre, laissait aperce-
l'imagination : et pourtant ils sont impuissants à
voir une triple distinction entre l'homme corpo-
percevoir ces vérités par la raison avec autant
rel, que l'Apôtre eut un ravis-
animal, spirituel, et
de vivacité qu'ils perçoivent les corps avec les
sement pour contempler dans la vision la plus
sens. Quant aux saints Anges, ils président à ces
haute ce troisième ordre des vérités de l'esprit,
visions pour les contrôler, sans toutefois s'y aban-
ordre qui, mémo ici-bas, provoque chez l'homme
donner comme si elles étaient plus frappantes
spirituel un enthousiasme au-dessus de tout et
et plus naturelles; ils discernent le sens caché
devient le but de ses aspirations. J'ai adopté les
sous les images, manient pour ainsi dire lesils
termes de spirituel et de rationnel pour désigner ce
symboles avec tant de puissance, qu'ils peuvent
qu'ils entendent peut-être sous les mots d'homme
les communiquer à l'imagination humaine dans
animal et spirituel. Je n'ai fait que changer les
une révélation ils voient en même temps l'es-
;

mots, et j'ai expliqué suffisamment, je crois, au


sence immuable du Créateur si parfaitement,
début de ce livre, les motifs de ma préférence.
qu'ils la contemplent et l'aiment de préférence
Si celte discussion est exacte, autant qu'il a dé-
à tout le reste : c'est le principe de tous leurs
jugements, le centre et la linde tous leurs actes
pendu de ma faiblesse, le lecteur spiiituel l'ap-
prouvera et même, avec la grâce de Dieu, en
et des directions qu'ils impriment. L'Apôtre
profitera pour arriver à un plus haut degré de
eut beau être arraché à l'influence des sens,
spiritualité. Terminons ici cet ouvrage divisé
ravi au troisième ciel et transporté dans le pa-
une en douze livres.
radis, il lui manqua, pour avoir des choses
connaissance pleine et achevée, le privilège des '
I Cor. XV, 53.

FIN.

Cette traduction est l'œuvre de M. Citoleux.


LOCUTIONS EMPLOYEES DANS L'HEPTATEUQUE.

LIVRE PREMIER.

LOCUTIONS TIRÉES DE LA GENÈSE.

LOCUTIONS TIRÉES DE LA SAINTE ÉCRITURE, QUI NE PARAISSENT ÊTRE QUE DES IDIOTISMES OU FORMES
PARTICULIÈRES DE LA LANGUE HÉBRAÏQUE ET GRECQUE.

Chapitre I. — 14. Et dii'iihnit iiitcr médium une simple locution ; ou s'il n'y a pas plut(M un
diei, et hiter médium noctis '. sens particulier que le texte laisse enhevoir.
20, -H^. Voltitilia l'olantin super terrain secuu- K). Dans cette phr;ise du texte latin : Ex omni
dum (irmamentum eœli ^. Comment faut-il cn- liijno quod est in paradiso, escœ edes ne faut i, il

teiulrc secuiidum firmamentum l'Mcme question pas lire : in paradiso escœ, mais escœ edes car ;

sur CCS autres paroles: Furidmufihdmiuem secuii- l'expression escà edes est conforme au génie de
dum iinaijinem et secuiidum siinilitudiiiem •', que la langue latine, qui, dans ces sortes de locutions,
beaucoup de manuscrits latins rendent ainsi, remplace ordinairement le datif grec par l'a-
ad imaiiiiiein et similitudiiiem. blatif, que les grauunairiens appellent aussi le

28. Impiété terrain, et iloininainini ejus '. Le septième. Ou bien il faut construire la phrase de
latin demande .rfom/xflm/»/ ei. cette manière Ex omni ligno escœ.
:

Chapitre II. — o. Et lioinn non erat operari Chapitre III. —


l. Serpens erat prudentissimus

terrain -'.Les versions latines portent : qui upera- omnium bestiarum ^. Ainsi s'expriment un grand
retur terram. nombre d'interprètes latins. On lit dans le grec :

8. Plantavit Deus paradisum secundum Orien- cfpovifxwTXTo; le plus entendu, et non (7ocjiwt«toç
ff m
Lesexemplaires latins portent :(/(/ rt/vVfifcm.
<'•.
le plus sage.
Ce que beaucou[) de versions latines ren-
9. 7. Il est écrit d'Adam et d'Eve « Leurs yeux
:

dent ainsi Et liiinum sciendi honum et malum,


: « s'ouvrirent. » Mais il serait absurde de croire
ou bien liçinum scientiœ Iwni et mali, ou bien que jusqu'alors ils étaient aveugles, ou avaient
li(jnum sciendi boni et inuli ', ou toute autre forme erré, les yeux fermés, dans la paradis terrestre.
semblable, à laquelle d'autres interprètes au- C'est donc là une locution, la même que nous
raient pu s'attacher, le texte grec l'exprime de retrouvons dans ce passage où il est dit d'Auar :

cette manière Et liijnum ad sciendum eognos-


: « Elle ouvrit les yeux et aperçut un puits 3; »

cibile boni et mali'^ je ne saurais dire si c'est là


; certainement, elle n'était pas restée assise jusqu'à
ce moment, les yeux fermés. Ils ne marchaient
' Et qu'ils divisent le
jour d'avec la nuit. î Des oiseaux qui vo- —
lent sur la terre sous le firmament du ciel. 3 Faisons
l'homme à — pas non plus Ips yeux ftM'més, eu suivant avec
notre image. —
* Remplissez la terre et soyez-en les
maîtres '
Et il Jésus le chemin d'Eiuiuaiis, ces disciples qui re-
n'y avait point d'homme pour cultive- la terre. « Dieu planta
un —
jardin délicieu.t du cùté du Le"vaiit. ' L'ar'ore de la —science du bien
et du mal. —
» L'arbre qui fait savoir ce qu'on peut
connaître du bien ' Tu mangeras du fruit de tous les arbres. — 2 Le serpent était le
et du mal.
plus fin de tous les animaux. —
1 Gon. xxi, 19.

324 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

connurent le Seigneur après sa résurrection, et uns ont préféré dire e.v transverso, voulant ainsi
dont il est dit cependant que leurs \eux s'ouvri- i'e|)roduire le sens du grec e/. iilxyîtûv.
rent à la fraction du pain '. Chapitre VII. — 4. On lit dans plusieurs ver-
15. Au lieu de ces paroles, ([ue l'on trouve Adhur enim septem dies,
sions latines : eijo indii-

dans beaucoup de manuscrits Iiiimicitiam pu- : cam diluvium aquœ super terram mais le '
;

nam inter te et mulierem le grec porte /«- "^


, : grec porte eqoinducam pluviam super terram.
:

medio tuiet in medio mulieris. C'est évidemment Dans la locution grecque on remarque l'em-
une loculion, puisque la signilicalion est abso- ploi du génitif, et non de l'accusatif, en sorte
lument la même, que (|uand on dû: Inter te et que, pour se servir du même cas en latin, il

mulierem. La même remarque s'applique aux faudrait dire : Adhuc enim septem dierum, in-
paroles qui suivent iumiédiatement : fn meilin dueam jduriam super terram.
seminis tiii et in medio seminis ejns'-^. o. Cette phrase Etfecit Noë omnia quœcum- :

1". On lit dans plusieurs versions latines : que prœcepit un Dominus Deus, sic fecif-, pré-
Quia audiativurem mulieris tuœ, et edisti de liiino sente une locution semblable à celle que nous
de quu prweeperam tibi de eo solo non edere ^
; trouvons dans l'histoire delà création du monde,
et dans le grec Edisti de ligno de quu prœceperam
:
où après avoir dit Et sic factum est et cela :

tibi eosolo non ederee.reo. Mais d'autres interprè- se fit ainsi, Moïse ajoute : Et fecit Deus, et Dieu
tres grecs aclièvent la phrase par le mot mtiudu- le fit.

casti,ou edisti en sorte que, selon eux, le sens se-


; 4. Il est à remarquer que dans cette phrase :

rait Parcequc tu as écouté la voix de ta femme,


: helebii omnem suscitation-'m ^, l'Ecriture ne se
et que tu as mangé du fruil de l'arbre, le seul sert pas du mot creationem, ce qui est créé,
dont je l'avais défendu de manger, tu en as mais du mot .^uscitationem, ce qui a recula vie;
mangé. c'est le sens du mot grec avaTraTiVjqui ne laisse
Chapitre IV. —
'2. Kl upposuit parère fra'rem
pas toHte''ois d'être employé habituellement
ejus Abel '".
On rencontre fréquemment cette dans les versions grecques pour signifier la ré-
locution dans les saints livres : apposait dicere^'. surrection, quoique ce dernier sens soit très-
Et factum est, dum essent in campa, insur-
S. bien exprimé par ilxyxa-xaic. : et qu'on eût pu
rexit Caïn sujier Abel. et orcidil eam '. On voit par conséquent, rendre par Mcf.azxcii l'action
ici une loculion car si l'on suprimail Et fac-
; :
de naître, et par eÇava(jTa<ji;, l'action de res-
tum est, pour commencer la phrase par ces susciter. C'est de cette dernière expression que
mots Et cnnt essent in rampu
: le sens serait ;
l'Apôtre s'est servi, lorsqu'il a dit Si quu modo .

aussi complet. occurram in resurrectionem mortuorum ^ ; \îi en


Chapitre VI. —
0. On litdansplusieurs versions
effet le texte grec porte dtxvxa-aaiv, et non
latines :« Dieu se repentit, et dit J'exterminerai :

xvxi-xaLV.
« de dessus la terre l'honmie que j'ai créé. ><
Dans ce passage Et ommes bestiœ secun-
14. :

Mais on trouve dans le grec le mot oiv./or,%, qui dum et omnia pecora secuudum tjenus, et
genus,
exprime plutôt l'action de méditer, que celle de se (nnne repensquodmovetur super terram secundum
lepenlir. C'est aussi le sens (|u'onl adopté plusieurs qenus, et tnnne volatUe secundum genus, intrarunt
interprètes latins. (id Noë in arcam, bina ab 07nm carne, in quo est
La plupart des versions latines portent
li. :
spiritus vitœ "', le pronom in quo n'a pas d'anté-
quoique le latin demande
.\idos faciès in arcam^, ct'dcnt, .'1 moins qu'on ne sousentende le mot
in arcâ, et non pas in arram. 3Iais le grec ne (jenus comme s'il y avait in quo génère. Car si l'on
met ni in arcam, ni in arcâ il dit Aidos fa- ; ;
sousentendait le mot carne, il faudrait dire in
ciès arcam, pour faire entendre que l'arche ne qua : or aucun interprète n'a fait ce changement
sera qu'un composé de petite.^ chambres. si ce n'est Symmaque.
16. Au lieu de dire avec la plupart des in- 23. Et deleta e.^t omnis suscitatio ••. On voit
terpètes : Faciès ostinm arcœ à latere », quelques-
I
Encore sept jours, et J'amènerai le déluge sur la terre. ' Noë (it —
tout ce que le Seigneur lui avait commandé. ' J'exterminerai tout ce —
'Luc, XXIV, 31. —
2 Je mettrai l'inimitié entre toi et la femme. qui vit. — ' Afin que je puisse à tout prix parvenir à la résurrection des
* Entre ta race et la sienne. —
* Parce que tu as écouté la voix de ta morts. (Philip, m, 11). —''Tous les animaux sauvages selon leur
femme, et que tu as manf,'é du fruit de l'arbre, le seul dont je t'avais espèce, tous les animaux domestiques selon leur espèce, tous ceux qui
dt-fendu de mantrer, —
Elle enfanta de nouveau, et mit au monde
-^
rampent sur la tcire selon leur espèce, et tous ceux qui volent dans les
son frèreJAbel. — ^ Il dit encore. *

Lorsqu'ils furent dans les champs. airs selon leur espèce, entrèrent avec Xoë dans l'arche, au nombre de
Gain sejeta sur .\bel et le tua. —
^ Tu feras de petites chambres dans deux de toute chai r vivante et animée . — '•
Toutes les créatures vivan-
l'arche. —
" Tu feras la porte de rurclio sur le côté. tes périrent.
LIVRE I. — LOCUTIONS TIRÉES DE LA (lENflSE 32K

ici [xiiii' la sccdiiili' lois l'("\|)ri'ssi()ii suscildlia. (^-IIAI'ITUE X, — fl. ///'' eral fiifias venator eon-
iiiiso pour roiulilio. ciralurd fdDiis. Irii Ihiminum Denm '
;
pciit-élrc pourrait-on
Apivs ii\<)ir ilil « Kt toiik's losfiraliircs aiii-
: eutcmire ces (li'rniers mots dans le mèniesens
• iiu'os, (|iii exislaioiit sur la surface do la Iciiv, (piec();7///( />(nin»i(» />('!), devant le Seigneur, puis-
« depuis riioinnie jus(|u'an\ IkMcs, tant ceilcsfpii que le s\nouNmegi'ei' £v:/>t[ov est pris ordinaire-
« rainpeul, (jiie cfllcs ipii \()li'iil dans l'aii', l'n- ment dans cette ac('e|)tioii.
« rent déliuiles, » l'auleur de la (îeuèse ajoute : li. l'nde exiit inde Philiahiim', il sitKis.-iilde
« VA elles luiviit exterminées de dessus la terre." dire : Vnde exiit Philistliiim.

C'est là une l'orme partieulière de lanj;a^H', ap- CiiAPiTUK XI.— I . /;/ erat omnis terni iiibium
pelée répétition, et dont l'usage est lamiliei- aii\ unum -^
; nous disons en una. Dans
latin linijua

écrivains sacrés. celte même phrase, les mots omnis terra dési-
Chapitrk VllI. — 7. Danscette phrase : « Noé gnent la totalité deshommesqui existaient alors,
« fil s(M'lii' im corbeau, pour voir si les eaux bien ([u'ils ne lussent pas encore répandus \):\v

« s'étaient retirées ; et le corbeau, élaul sorti, loide la leri'e.

ne revint plus, jusqu'à ce que la terre lut 3. Et faeti sunt illis lateresjirn liiiiide'\Legvec
« entièrement sèche, « on voit nue locution (jui s'exprime ainsi : IJt farti sunt illis lateres in
revient hécpiemment dans l'Ecriture, et (lu'ilesl lcipidem;vcm\iie en latin, cetlelociition est moins
l)on de signaler dès maintenant: en disant que facile comprendre.
à
le corbeau ne i-evint plus jusqu'à ce <jue la terre Venez, b;Uissons-nous ime ville et une
4. «

lut eidièrenient sèclie, l'écrivain sacré ne veul « tour, dont le somniel s'élève jusqu'au ciel. »

pas donner à entendre, qu'il soit revenu dans la Ce langage esthjperijolique, du moins dansTopi-
suite. niondeceuxqui yvoient une locution mais faut ;

!t. Ces paroles Et extendit manum siiam dcrcpit


: ,
il prendre àla lettre les mots « jus(|ii'au ciel? » :

l'iim et iiidu.rit cdin ad scmctipuum in an-inn ', C'est (jue nous examinerons dans le livre des

renlérment une locution qui me parait venir de questions.


l'hébreu ; car elle est très-familière aussi à la 10. Là où quelques versions latines portent :

langue des Carthaginois, ((ui a des caractères de Sem Koë erat annorum rentum, cum genuit
filius

rcsseml)lance très-nombreux avec la langue Arpliaxad >, ou lit dans le grec Sem filius cen- :

hébraïque. de dire: Et extendit ma-


11 suffisait tum annorum cum genuit Arphaxat ; il y a donc
num, sansajouter stuim. Faisons lamème remar- une ellispe, attendu que le verbe erat n'est pas
quer sur celte phrase, que nous trou\ons {piel- exprimé. Ensuite, comme on ne lit pas /i//«s Aw'
ques lignes plus loin: Habebat nlivr folid, .iinrti- mais simplement /iV/Hs, il faut y reconnaître une
liim in ore siio '. nouvelle loculion.
1:2. Et non apiMsiiit leverti ad cum mnjilius •'; 30. CI Sara élail stérile, et n'avait pas d'en-
dans l'Ecriture.
cette locution est très-usitée « l'ants ; » il sufiisait de dire : « Sara était
:21. Cette phrase: Etnonadjiciam adhuc malc- « stérile. »

dicere super terrum ', présente imc locution sem- Chapitre XII. — 1-2. Erit ergo, eum te vide-
blable à la précédente Et non npiiosuit reverti : :Quiauxor illius hœc<'\ C'est
rint .Egiiptii, dicent

ad eum. par une espèce de loculion que le mot quia a


Ibid. Même remarque sur cette autre phrase : été a outé ici on aurait pu dire simplement,
;

Ktnnn adjieiampereutere omnem carnem viram-'. nxor illius hœc.


Cii.viMTUK 1\.. —
o. Au lieu de dire Etenim : 14. Au lieu de dire : Faetum aulem statimest

sanijuinem vestrum animarum restrarum, votre ut intravit Abram in ^Eguptum. on aurait pu se


',

sang, il eut sultil de mettre sanijuinem vestrum, contenter de mettre ; Statim autem ut intravit
ou hïcii sd)uiuinem animarum vestrarum. Abram in ^Eyyptum.
1:2. Hoc si{jnum te-stamenti, quod ego ponam 18. Quidhoc fecistimihi, quianun annuntiasti
intermedium meum et vestrum " ; c'est comme s'il mihiquiauxortuaest'^TilsuUisaiiï de dire non an-
y avait : inter me et vos.
Il était un fort chasseur contre le Seigneur.
' 2 De cette famille —
' 11 étendit ta main vers la colombe, la prit, et la remit avec lui dans sont sortis les Philistins. ^ —
Tous les hommes parlaient la même
l'arche'. — ^ La colombe portait dans son bec un rameau d'olivier char- langue. *

Ils se servirent de briques au lieu de pierres. ^ Sem —
gé de feuilles, (v. 11.) —i
Et elle ne revint i>ius à lui. 'Je ne frappe- — fils de Xoé avait cent ans, lorsqu'il engendra Arphaxad. ^ Lors- —
rai plus la terre de malédiction. —
^ Je n'exterminerai plus les créa- que les Egyptiens l'auront vue, ils diront ; c'est la femme de cet
tures rivantes et animées. —
6 Voicilesiyne del'alliance qnejeveu.v homme-là. —
'Aussitôt qu'Abram fut entré en Egypte. Pourquoi — ''

élablirenlrcmoi et vous. ne Dï'as-tu pas dit qu'elle était ta femme?


326 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

nuntiasti. De plus l'expression anuuntiasti est Eschol, et fratris Aunan ;


qui erant conjurait
elle-même une forme propre à l'Ecriture; car Abram i.
une transposition de mots
Il existe ici
les versions latines la traduisent presque tou- fort obscure l'ordre natm-el est celui-ci ; Ad- :

joiu's par non dixisti. veniens eorum qui evaserunt quidam Amorrhis
Chapitre XIIL — 1. Ascendit autem Abram de fratrisEschol et fratris Aunan, qui erant conjurati,
uxor
-^{lypto, ipse et ejus, et omuia ejus, et Loth nuntiai'it Abram transjtuviali; ipse autem habi-
cum eo i)i deseiium ' . Il faut sous-entendre ascen- tabat ad quercum. Celte transposition de mots est
deruut. Cependant on ne peut pas dans le dire, rendue plus obscure encore parune ellipse, car en
sens propre, que les choses inanimées qu'Abrani disant quidam Amorrhis fratris Aunan, onn'ex-
:

possédait, comme l'or, l'argent et tous ces meu- prime pas ce qu'est cet homme pour le frère
bles, soient sortis avec lui : c'est donc ici une locu- d' Aunan, mais on laisse entendi-e qu'il est son tils.

tion, que les Grecs appellent Çgjyfix KXT'eXXenJytv, C'est donc la même locution que dans ce passage
ellipse. de l'EvangUe Jacobus Alphei, Jacques fils d'Al- :

7. Et fada est rixa iiiter médium pastorum phée, où il est impossible de ne pas sous-entendre
pecorum Abram et pecorum Loth Les interprètes ''. filius, bien qu'il ne soit pas exprimé. On ren-

latins n'ont pas recherché, pour la plupart, à re- conh-e souvent dans l'Écriture de semblables
produire cette locution, mais ils se sont conformés locutions, où le mot filius est sous-entendu.
au génie de notre langue. C'est pour la derniè- On lit dans quelques manuscrits latins
•2-2.
:

re fois que nous mentionnons cette manière de Et Abram ad reyem Sodomorum Extendo
dixit :

parler; car elle reparaît dans le texte grec tou- manum meam ad Deum altissimum, qui creavit
tes les fois qu'une idée semblable se présente cœlum et terram, si a sparto usque ad corrigiam
à exprimer. calceamenti On voit que le tracduteur n'a pas
'>
.

8. « Parce que nous sommes frères, » disait compris le sens du mot grec OTtapt wj, qui veut du-e
Abram à Loth. On voit par là que, dans ce lan- fil. La locution du texte sacré est celle-ci Ex- :

gage de l'Ecriture, le nom de frères est donné tendo manum meam ad Deum altissimum, qui
à tous ceux qui sont unis par les liens du sang, creavit cœlum et terram, si accipiam de omnibus
lors même
que le degré de parenté n'est tuis. Or si l'on admet que ces paroles Extendo :

pas égal pom- tous, et que l'un est à un degré manum meam ad Deum altissimum, ont le sens de
supériem' et à l'autre uu degi"é infériem', comme jura, la locution ne pourra passer dans la langue
cela a lieu ici, puis qu'Abrani était oncle de latine ; il faudra tourner la phrase de cette ma-
Loth. nière Extendo manum meam ad Deum altis-
:

Chapitre XIV. —
1. Factum est autem invegno simum, me non accipere de omnibus tuis.
Amarphal Sennaar s. Suivant le génie de
régis Chapitre XV. 13. Sciendo scies quia pere- —
notre langue, nous aui'ions dit simplement In :
grinum erit semen tuum in terra '. Cette locution
reijnii autem Amarphal. Quand donc l'Ecriture est d'un usage très-fréquent dans l'Ecritm-e le ;

commence une phrase par les mots Factum est :


grec l'e xprime ainsi -.sciens scies, ce qui est pres-
autem, elle emploie une forme qui lui est propre. que la même chose.
5. Dans cette phrase Quartodecimo autem anno : Chapitre XVI. 3. Et dédit eam Abram vira —
Chodollogomor et reges qui cum eo *, il faut sous- suo ipsi uxorem Le mot ipsi est de trop. '».

entendre erant ; et même certains interprètes 1. Cum autem viditseconceptum habere, spreta

latins ont eu soin de l'exprimer. sum coram illa ^. Le grec emploie ici un participe
6. Il faut également sous-entendre erant dans qui n'existe pas dans la langue latine, le participe
ce meulbre de phrase Et Chorrœos qui in mon-
: ijouca c'est comme s'il y avait
; Videns autem :

tibus Seir ^. se conceptum habere, spreta sum coram illa, où


13. Adveniens autem eorum qui evaserunt qui-
dam, nuntiavit Abram transiluviali, ipse autem En même
'
temiïs arriva un de ceu.v qui s'étaient sauvés du combat,
habitabat adquercum Mambre, Amorrhis fratrie c'était un fils d'Amorrhis frère d'Eschol et frère d'Aunan, qui tous
trois avaient fait alliance avec Abram ; il vint apporter la nouvelle de
cette défaite à Abram, qui avait passé l'Euphrate ctqui habitait près
du chêne de Mambré. —
- Abram dit au roi d»' Sodomc Je lèvela main ;

• Abram sortit del'Egypte avec sa femme et tout ce qu'il possédait, et je jure })ar le Dieu Très-Haut, qui a créé le ciel et la tcçre, que
ainsi que avec Lotli et prit le cliemiri du désert. —
2 u s'éleva une je n'accepterai rien de ce qui t'a|)parlient,depuis le moindre fil
querelle entre Icspas'teurs d" Abram et ceux de Loth, —
^ Sous le règne jusqu'à un cordon de soulier. — ^ Sache que ta pistérité demeurera
d'Amarphal roi de Sennaar. — < La quatorzième année Chodollogomor comme étrangère sur cette terre. — * Elle la donna pour femme à
et les rois qui étaient avec lui. — ^ Et les Cliorréens qui habitaient Abram son mari. — ^ Agar, voyant qu'elle a conçu, n'a pour moi que
dans les montagne» de Séir. duméi)ris.
— —

LIVKE I. - LOCUTIONS TIRÉES DE LA GENÈSE. 327

l'on voit une espèce île soléeisnie. Il y en a éga- M). « Stiigneur, si je parle encore ? » il faut
lement un dans remploi du parlicipe t^ouax, sous-entendre vous iriilercz-vous ? ou : tonte
<iue nous remphieon* parle mol laliu vidois. autre expression ayant le même sens.
("-hi'.vitkkWII. — (Î.Ceiiueles versions latines Ciivi-rnii: \l\.— -i!!. Cum everteret Dmninus
rendent ainsi : AïKjcum te itimix viiltlc ', est ex- civitales, in quibus habitabat ineis '.

primé ilans le grec par les mots valde valde. CiiAPiTRK XX.. — 13. In omni loco iibi intra-
H. Kt daliti tibi fl scmini tiii>i>(isl le terrain in rerimus ibi 2.

qua liabitds, amncni terrinn ('Jiiiiiaan in passes- CiiAi'rniic XXI. — l!t. « Diuii lui ouvrit les

sionem œternam 2. Ou peut se demaiuler s'il n'y a « yeux, et elle aperi;iil un |)iijls d'eau vive. »

pas une locution dans le mot œtcniam, traduit C'est une locidion, cm- ou ne |)eut pas sup-
ici

du grec atwviov ainsi que dans ces paidles ;


: poser qu'Agar avait les yeu\ iermés. Nous avons
Et semini tito post te, ([ui e\[)li(iuenl dans (piel déjà lait la même remarque au couunencement
sens l'aut entendre le mot tibi, qui précède.
il de ce livre à l'endroit oii il est dit : « El leurs jeux
l>. Tu autemtestamcntummeum conservabis, et « s'ouvrirent ». »

nemen ttiitinpoftt te inproijeiiiessuus'^ ; eonservabis :2;;i. Et terni quiiin inhabitasti in ea ''.

est mis pour conserva, le l'utur pour l'impèi-atif. '2'i. Et dispusuerunt ambo testumentum •; c'est
1:2. Et puer octo dieriim circumcidetur, umne comme s'il y avait : testati suiit ambo ; l'Ecrilure
maseulinum '; omne masrulinum est mis pom- aime à em[)loyer le mol testumentum dans le sens
omnis maseulus; comme si la circoncision ue de pacte.
concernait pas exclusivement les entants màlcs. Chapitre XXII. -2. Accipe filiuin tiunn —
dilec-
il. Et proeidit Abraham in faciem, et dixit in tuin Le mot accipe est une locution, ((ui se
''.

anima sua dieens Si niihi centam annus habenti : trouve déjà dans les [)aroles de l'ange à .Vgar au
nascetur, et si Sara annorumnunayinta pariet
'>
1 sujet de sou lils ".
Celte locution exprime l'étonnement et non pas i. Et respiciens Abraham oculis»;il snltisait
le doute ; rien n'est plus cerlaiu. de dire respiciens.
24. Abraham auteni erat unnorum nunayinta 16. Per memetipsum juravi, nisi benedicens
novem cumcireumcisus est curnem prxputii sui «; benedicam te ; c'est connue s'il y avait
'i
Per :

le latin demandait carne ou in carne. meinetipsuin juravi quod beiieilicens benedicam te,
Chapitre XVlil. 7. Et in buves udcucurrit — ou simplement et sans conjonction Permemet- :

Abraham ' ; le latin demandait ad buves. ipsuin juravi, benedicens benedicam te.
11. Abraham uutem et Sara seniores proyressi Et multiplicansmultiplicabosemen tuuin i";
17.
lu diebu^ ^. Le grec porte proijressi dierum. c'était assez de dire multiplicnbo.
-m. Dixituutem Dumiiais:Clanwr Sodumuram 20. Et nuntiatum est Abrahœ diceiites iJ : la
et Gomorrhœ impletusest, et deiictu eurum magna foi-nie régulière serait celle-ci : Nuntiaverunt
valde Dans le langage de l'Ecrilui-e le mot
s».
Abrahœ dicentes, ou bien : Nuntiatum est a di-
clamor désigne souvent le crime commis avec centibus.
cette impudence et celte eulière liberté qui exclut Chapitre XXIII. 3. Et surrexit Abraham a —
tout sentiment de honte ou de crainte. mortuo suo '- ; on devait mettre (/ mortuasua. Le
:28. Et dixit Quia nun perdam, si inveneru ibi
:
sainl patriarche dit encore en parlant de Sara :

quudratjinta quinque '". Le mot quia semble inu- Et sepeliam mortuum meum i3 ;ce n'est pas le genre
tile ; aussi ne se trouve-l-il pas dans certains neutre qui est employé ici, comme s'il fallait
exemplaires latins. Ib'e corpus mortuum, mais le genre masculin,
ainsi qu'on le voit par le texte grec.

Je muliiplierai ta race d'une manière prodigieuse.


I

Chapitre XXIV. — 3. Et adjurabo te per Do-
2 Je le don-

nerai àtoi et à ta postérité la terre que tu habites tout le pays de ;


minum Deuin caii et Deum terrœ ^^. Legvecn'sL
Chanaan sera à jamais ta possession. 3 Garde fidèlement mon —
alliance, toi et ta postérité, dans toutes les générations à venir. —
'Toutenfantmàle sera circoncis huit jours après sa naissance. — ' Lorsque le Seigneur détruisit les où Loth avait demeuré.
villes
^ Abraham se prosterna la face contre terre, et dit en Ini-mème A :
- Dans tous les pays oii nous irons. m, 7.
^ Le pays où tu
Gen. —
l'âge de cent ans puis-je espérer d'avoir un iils? et Sara pourrait-elle as demeuré. — ^ Ils tirent alliance ensemble. ^ Prens ton tUs —
enfantera quatre-vingt-dix ans / —
Abraham avait quatre-vingt-dix-
"^
qui t'est cher. —
Gen. XKl, 13.
"

.Vbraham levant les yeux. '^ ^ —
neuf ans, lorsqu'il se circoncit lui même. -"Abraham courut à son — Je jure par moi-même que je te comblerai de bénédictions. "> Je —
troupeau. —
"^Abraham et Sara étalent fort avancés en âge ^ Le . — multiplierai ta race. —
" On vint annoncera .\braham. '^ Abra- —
Seigneur dit Les iniquités de Sodome et de Gomorrhe ^sont trop
; ham cessa de pleurer la mort de sa femme. '^ Et que je puisse en- —
criantes, et leurs crimes dépassent toute mesure. — '^
Je ne Dieu dit : terrer la personne que je viens de perdre. ( Ibid. 4.) " Et je te —
perdrai pointla ville, si j'y trouve seulement quarante-cinqjustes. ferai jurer par le Seigneur, le Dieu du ciel etde la terre.
328 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

pas la préposition per, mais simplement : Ad- 40. Dominus cui placui ante ipsum, ipse mittet
jiirabo Domiiutm Deiim cœli. unqelum suum tecum •
; il suffisait de dire : cui
Ibid. — Cum fiuihus ego habita /» eis i.
placui, au- Abraham pou\ait-il plaire à Dieu au-
o. « Si la femme ne veut pas me suivre. » C'est trement qu'en sa présence ante ipsum"! :

une forme propre h la langue grecque, d'ap- 42. Si tu prospéras viam meam, qua ego nuiic
peler femme toute personne du sexe. ingredior in eam'^.
Ibid. — In terrum dequa existi inde "i.
43, 44. Le serviteur d'Abraham, rapportant les
fi. Attende tihi ne revoces filium meiim illiic •*. paroles qu'il avait prononcées lorsqu'il s'appro-
Ces paroles sont la formule ordinaire d'une dé- chait de la fontaine, s'exprime ainsi : «La vierge
fense comminatoire. « à qui je dirai : Donne-moi à boire un peu de
9. «Le serviteur mit la main sur la cuisse « eau qui est dans ton vase, et qui me ré-
cette
« d'Abraham, et promit avec serment, juravit, «pondra Bois, et je vais aussi en puiser pour
:

» de faire ce qu'il lui avait ordonné. » On Mail « tes chameaux cette femme est celle que le Sei-
;

ici la preuve que ces paroles d'Abraham déjà « gneur adestinée àson serviteur Isaac. » Par ces

citées Adjura te, sont une locution ayant le


:
paroles nous voyons clairemeut que la langue
mémesensquejf/ra m//»', jure-moi. Mais comme hébraïque donne même aux \iei-ges le nom de
cette manière de parler ne nous est pas familière, femme.
il faut examiner s'il n'y a pas dans le texte 48. « J'ai béni le Seigneur, le Dieu d'Abraham
d'autres formules équivalentes qui confirment « mon maître « c'est une formule de respect très-
;

notre explication. Or Abraham venait de dire : familière à l'Ecritm'e, comme cette expression:
« Si la femme
de refuse te suivre, tu seras « Le Dieu d'Hélie. »

« dégagé de ton serment * : « c'est une preuve « 49. Faites-moi connaître vos intentions afin que
manifeste, qu'il avait employé l'expression ad- « je sache si je dois retourner à droite ou à
jura te, dans le sens de jura milii. «gauche. » Pai' la droite il entend le succès, et par la
16. Il de Rebecca « C'était une vierge
est dit :
gauche la mauvaise fortune en sorte que ce ;

« d'une grande beauté, elle était vierge, aucun sera la droite, si sa demande lui est accordée,
" homme ne l'avaitconnue. » Cette répétition ren- et la gauche, si elle lui est refusée : car nul doute
ferme l'éloge de sa virginité. Mais pourquoi a-t- qu'il ne dût retourner par le chemin qu'il avait
on ajouté « Aucun homme ne l'avait connue, » même
:
déjà suivi. Nous trouverons la locution
si ces paroles ne sont pas une simple locution ? Il
dans d'autres endroits de l'Ecriture, où la droite
serait inoui que le mot vierge servît à désigner désigne toute espèce do biens et la gauche toute
la fleur de l'âge |)lut(jt que l'intégrité du corps. espèce de maux, soit auphysique comme le bon-
On lit dans le grec : «Aucun homme ne l'a con- heur et le malheur, au moral comme la jus-
soit
« nue, » au lieude « nel'avait connue ; » l'enchaî- tice et l'injustice ; et quelquefois encore la droite
nement des idées parait brisé par ce changement estmise pour les choses éternelles et la gauche
de temps. pour les choses temporelles.
Domino s nous disons en latin
26. Adoravit ; :
Chapitre X.XV. 13. Hœc siint nomina fUio- —
Adoravit Daminum. rum Ismaël secundum nomina generatianum
il.Quoniam non dereliquitjustitiam et verita- eorum c'est comme s'il y avait: secundum quœ
•*
;

tem a Domino meo ; c'est comme s'il y avait <>


:
nomina generatianes eorum appellatœ sunt.
justitiani et veritatem quœ eM a Domino meo, ou 20. Accepit Uebeccam filiam Bathuel Sijri de
plus clairement : quani fecit Dominus meus. Mesopotamia,sororem Laban Syri, sibi in uxorem '».

28. (c La jeune fille courut à la maison de sa On pouvait se contenter de mettre uxorem, ou


« mère, porter cette nouvelle, » comme si ce bien sibi uxorem.
n'était pas aussi bien la maison de son père. 24. Et ei erant gemiiii in utero ejus on pou- •>
;

Et aquam lavare pedibus ipsius, et pedibus


32. vait se dispenser d'ajouter ejus.
virorum qui cum eo eront '. 27. Creverunt autem juvenes 6. On rencontre de

' Au
milieu desquels j'habite. —
' Dans le pays dont tu es sorti. Le Seigneur aux yeux de qui j'ai trouvé grâce, enverra lui-même
'

— Garde-toi bien de ramener jamais mon fils en ce pays-là.


^ — son ange pour te conduire. 2 Si vous bénissez —
le voyage que j'ai

> Ibid. 8. —
''Il adora le Seigneur. —
^ Parce que Dieu n'a pas oublié entrepris. —
' Voici les noms des enfants d'isniaél, qui servirent aussi

la justice et la vérité, dans lesquelles mon maître a toujours marché. à désigner leurs familles. — 'II épousa Rébecca, fille de Bathuel. Syrien
— ' De l'eau pour laver les pieds de cet homme et de ceux qui étaient de Més'tpotamie, et sœur de Laban, Syrien. — '^
Elle portait deux ju-
venus avec lui. meau.v dans son sein. — Ilsgrandirent. *'
LOCUTIONS TIRÉES DE LA (;ENÉSE. 3"2fl

semblables locutions môme chez les auleuis Ce sont les paroles d'Isaaeà son lils ; mais en réa-
proliuies, par exemple dansée passage de Vir- lité Abraham, père d'Isaac, était le ^;rand-père
gile : Et sruta liiteiitid ivikIiiiiI ", mis pour : con- de Jacob.
dendii Intrutiii furiuiil. Hc même ici la plirase •>. « Kl il parti! pour la .Mésopotamie de S>rie, »
creirntiit juvenea, étant appliquée à des eiilanls, connue s'il y avait un autre Mé.sopotamie que
doit s'entendre de cette manière : crescendo facti celle qui esten Syrie. Mais ce denier mot ne doit
siiiit juvt'iu's. pas venir des Seplanle, i>arce ipie dans cette ver-
;U. Jaeoh dit à Esaii : Vende milii hodie pri- sion il est maripié d'unastérisciue.
moijenitatua mihi- ; ainsi porte le texte grec. 15. Dieu dità Jacob :« Je ne t'abandonnerai
C.iiAPiTUK XWl. — '28. Vidi'nti's vidimua quia '1 pas que je n'aie acompli tout ce ipie je t'ai
l'itt Ihnniniis teciim ^. I promis ; » comme s'il devait l'abandonner une
Etdisponemustccum testrnnentum^.L'Ecr'i-
. . . foislespromessesacomplies ; tel n'est pas certaine-
ture se sert volontiers, pour (lési.;ner un pacte, ment le sens : c'est donc une locution.
(lu mol testamentiim, en tirée oioSr.y.vj. Ce que les 10. Surre.vit Jacob de sommn.fuo et dixit: Quia
versions latines expriment de cette manière Et : huclhiminu.": inloco hoc, eqo autem ignorabam '. Le

diaponcmux tecum testamentum ne facias nobis- sens seraitcomplet sans le mot 7»/». (k's paroles :

citm malum ', revient à ceci Ut pacixcaris non : « le Seigneur


vraiment en ce lieu, » équi\ aient
est
ftirerr nobisriim mahim. à celles-ci Le Seigneur s'est nianiresté ici;»
; (1

Chapitre WVll. [.Et voccivit liliiim sitiim — cai- le Seigneur ne peut-ètrecontenu dans un lieu.

seniorem Esaït etdixif^. Le mot seniorem n'est pas o. Jacob demande aux ber-
Ch.\pitreXK1.\. —
employé ici i>our indiquer un âge avancé, mais gers: Connaissez-vous Laban filsdeNachor? » Il
«

un âge relativement plus grand. am-aildudire de Hathuel. .Mais nous concluons de


3. yiinc ergo sume vas tnuin pharetramque et ces paroles quele nom de Nachor était plus connu,
arcum '. On ne lit pas vam, mais van. La signi- etque c'est par honneur pour sa dignité de chef de
licalion de ce mot est assez obscure, si l'on n'y famille qu'il le iiomme de préférence. Cest imc
reconnaît pas une locution, en vertu de laquelle locution très-commune d'appeler fils dun aïeul
exprimerait déjà pharetram. Ce serait donc
i'rt.s ou d'un bisaïeul ou de tout autre ascendant plus
pourexpliquer le mot i'^.s, (prtsaacyauraitjoinl : éloigné, celui qui en dcscenil tlirectement. Voilà
pharetramque et arcum et ainsi en disant sume ; :
pourquoi Isaac a donné à Abraham le nom de
vas tuum id est pharetram et il aurait ajouté et ar- ; père à l'égard de son propre fils, comme nous l'a-
cum, pour désigner un second objet différent du vons remarqué tout-à-l'heure.
carquois déjà exprimé par vas. Ou encore le mol 7. Adhucestdiesmulta, )ioiidum esthora congre-
vas désigne en même temps le carquois et l'arc, et gaiidi pecora 2.

lesingulierest mis pour le pluriel; c'est ainsi qu'on Ch.vpitueXW. i. Et dédit ilUBalam ancillam —
dû: accipe vestem /(((/»(, prends ton habit, pour suam ipsiu.vorem le sens entêté complet indé- •';

signifier plusieurs vêtements; on dit également pendamment du mot ipsi.


miles, le soldat, pour désigner plusieurs soldats. ^l.Siinvenigratiam antete, auguratus essem;
Nous pourrions apporter beaucoup d'autres beticdi.ritenim me Drus in intmitu f//(M. Ces paroles
exemples. du lextene paraissent pas avoir une raison logique,
Ibid. Exiin campum venare mihi venatiunem ^. il fallait dire Si invenissemgratiamante te, augura-
:

it. «Coursait troupeau de brebis, et apporte- tus es.^em. Mais puisqu'on s'est exprimé ainsi : si in-
«moi deux des meilleurs chevreaux. » Ces deux cs- veni, l'ordre naliirel e^lceluic'; .si inveni gratiam
pècesd'animauxsont désignés sous la dénomina- antete, permitte meaugurari, comme s'il y avait :

tion commune de brel)is, parce qu'ils paissaient siauijur((tus es.wml dont le sens est: Adbonum au-
ensemble. gurium te in domo mea haberem.
Ch.vpitre XWIII. — i. '< Que Dieu t'accorde 33. Et exaudiet me justitia meuindie crastino";
« la bénédiction promise à Abraham ton père, n c'est comme sil y avait exnudiri me faciet.

' Ils fabriquent des boucliers qui ne soient pas apparents. (Eiiéid. 3.) ' Jacob, s'étant éveillé, dit Le .Seigneur est vraiment en ce lieu, et
:

— Vends-moi aujourd'hui ton droit d'ainesse. — ^ Xous voyons clai-


-
je ne le savais pas. —
* Il fait encore grand jour, et l'heuren'est pas
rement que le Seigneur estavectoi. >Et nous fe-ons alliance arec — encore venue de ramener les tr.iupeau.v. — ^ Elle lui donna pour femme
toi. — -' Nous ferons alliance avec toi, et tu t'engageras à ne nous faire Bala, une de ses servantes. —
* Si j'ai trouvé grâce devant toi, que
aucun mal. —
« Il appela Esau son fils aine, et lui dit. — ' Prends
donc ta p-ésencescil toujours pour moi un gage de prospérité ; car depuis
tes armes, ton carquois et ton arc. — * Va dans les champs, et tue que lu es entré chez moi. Dieu n'a cessé de me bénir. ^ Mon inno- —
I>our moi quelque gibier. cence fera encore à l'avenir réussir ma cause.
.

330 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

:2. « Jacob remarqua que Laban ne le regardait et dices : La phrase


Pueri tuiJarob i.
serait com-
«plus du niènieœilquc la veille et l'avant-veillc. » plète, quand mèm.elaconjonclion et serait sup-
C'est une locution très-laniilière aux écrivains primée.
sacrés, de dire « la veille et l'avant-veille » pour 19. « Il les envoie pour présent à Esaii mon
exprimer un temps passé en général. « seigneur, et lui-même après nous. »
il vient
m. « J'ai vu de mes yeux en songe, » quoi- Il fallait dire, pour ne pas s'écarter du langage
que les yeux du corps soient fermés dans le ordinaire : « A toi, mon seigneur, » ou bien :

sommeil. « A toi, son seigneur. »

13. E(jo sum Dem, qui apparui tibi iii loco Deii. 2:2. Surre.vit<iutemeadem noete, et aecepituxo-
On voit ici une locutiou les mots Dctis in locoDei, ; res duas et duas ancillas 2 ; il est facile de voir
nedoivent-jlspasètre pris dans le même sens que : que ces servantes ne sont pas les femmes, que
Pluit Dominus a Domino 2, où est indiquée la l'Ecriture a désignées tout à l'heure sous le nom
génération du Fils par le Père ? d'épouses. Etaccepit duas ancillas : voilà un ex-
SI Respondeus autem Jacob dixit ud Laban
. : emple du sens particulier que l'Ecriture donne
Dixi enim, ne forte auferas filias tuas à me, et assez souvent au mot accepit ce n'esl pas ; cette
omnia mea ^. nuit-là, en effet, queJacobles aépousées, ou qu'il

33. « Laban entra dans la maison de Lia, pour les a reçues de son beau-père.
« y faire des recherches. » On s'étonne qu'il Chapitre XXXIII. — 13. Au lieu de dire comme
soit question ici de la maison de Lia, puisque le texte latin : Et oees et bores fœtantur ^, le grec
c'est au milieu du chemin que la famille de porte ;
fœtantur super me, « par dessus moi, »

Jacob fut rejointe par Laban. Peut-être est-ce un pour signifier : par mes soins et mes peines.
usage de la langue sacrée, dcr donner le nom de Nous disons de même que nous avons des affai-

maison à une chambre ou tente, comme quand respardessus la tête, quand elles nousdemandent
il est parlé des maisons des servantes. beaucoupde soins.

37. « Jacob dit à Laban Tu as examiné :


Chapitre XXXIV. —7. « Quand les fds de
« avec le plus grand soin toutes les choses qui «Jacob revinrent des champs, et qu'ils apprirent
« sont dans ma maison. » Il n'est plus question 1 ce qui s'était passé, ils en furent vivement af-

maintenant que d'une seule maison composée « fligés, et ils ne pouvaient contenir leur indi-

des maisons des femmes et des concubines de « guation, en voyant r(>p[)robre iniligc à la
Jacob ce qui prouve que ce nom désigne ici
:
« maison d'Isi'aêl par celui qui avait violé la fd-

des chambres ou tentes, ou, si l'on veut, despa- « le de Jacob. Les choses n'en resteront pas là. »

villons. On Irouverail diflicilemeut dans l'Ecriture un


42. « Si le Dieu démon père Abraham, et le autic exemple tl'uue locution comme celle-ci,
« Dieu que craint Isaacnc m'eiit assisté. » Jacob où l'écrivain sacré mêle à la trame de son dis-
donne ainsi à son aïeul le nom de père, suivant cours les paroles de quelqu'un, sans mettre en
encela l'exemple qu'il avait re(;u desonpèrelsaac. scène la personne qui parle ;car il n'a pas mis:
Chapitre \XX.II. —
3, 4, S. « Jacob envoya de- « Et Us dirent ; » il s'est contenté de rapporter
«vantluiplusiearsdeses gens vers Esaii son ft'ère, leurs paroles. A qui, en effet, peut-on attribuer
« qui habilait la terre de Seïr en Iduinée, et celle menace : « Les choses n'en resteront
pas
a lem- donna Vous direz ceci à Esaii
cet ordre :
« là, >) sinon à ceux qui, dans les transports de
« mon seigneur: Voici ce que ton serviteur leur colère, méditaient des projelsde vengeance?
a Jacob te fait dire : J'ai habité chez Laban, H. 11 faut noter l'expression dont se sert Em-
i' cl j'ai resté avec lui jusqu'à présent ;
j'ai ac- mor, lorsque, parlant de Dina à Jacob et à ses
« quis un bon nombre de bœufs, d'ânes, de bre- fils, il dit « Ta (illc » au
: pluriel , au lieu dire :

« bis, de serviteurs et de servantes ; et j'ai en- ta fille, sœur de ceux-ci


« voyé prévenirEsaii mon seigneur. » 11 ne dil to, 16. //( hoc similes erimus robis, et habitabi-
pas : « J'ai en\ové le prévenir. >> mus in robis ''
; in !'y/)/.s est mis pour inter ros.
t", {i^.Si internxjaverit te Esaudirens -.Cnjus
es 2 et (juo eailis ? et ru jus luer (iiuv antecedant le
'
Si Esaii te Quel est ton maître ? où vas-tu ? à qui
demande :

aitpartie'uicnt ces marciicnt devant toi",' Tu diras;


troupeau;: qui
Je Kui.s le Dieu qui f;i nj)paru a Bèiliol.
' ^ Le Seigneur fît — C'est i Jacob ton serviteur. —
' L;i même nuit, Jacob se leva et prit

pleuvoir de la ]>ai"t du Seigneur, (Gen. xix, 24.) 'Jacob répandit à — sci deux femmes et leur deux servantes. — ' Mes brebis et mes vaclies
Laban ; J'ai cupeurijue tune vinsses à nïc reprendre tes lilles, et à ont fait leurs petits. — * Kn cela nous vous ressemblerons, et nous ha-
m'enicvcr tout ce que je possède. biterons au milieu de vous.
LiVUE I. — LOCUTIONS TlliriES DL LA GENf:SE. 331

10. Aiiiiosilus l'iiim l'ftit fili(r.liin>l> ', csl mis en peu de iiiois la iiiaiiièri' ilont il s'y prit pour
pour iimiilxit fum, il l'aimait. le déli\rer.
:2ti. El jilium ejus Siclwm inUrl'i'reruitt in nrr "2-2. .\on feriamus eum in animam '. Le mot
qladii', au lieu ^W(|l(l(li(l. animii s'enlend ici de la vie <lu coips animé :

'IX, r2!l. L'éiiivain sacii- lail ainsi réruunéni- c'est lii Ciiusi' mise pour l'efl'i'l. Ou [teul donner
lion (les dépouilles que les lils de Jacob empor- le même sens àces paroles adressées au démon,
lèrent de Salem, ville des Sieliimites après s'en au sujet de la persomie de Jacob : Animam ejus
èliv emparés : (h'('sc(inim,i'tl>in'i's t'onim,t't asi- /!(' ((//i(/((,s'',([iué(pii\;dcul à celles-ci : ne (w/W«.v
iiDx t'oriim, qiKi'cunKiiif quœ-
t'iiinl in rivilittf, et eum. La siguilicationestloidedilléreule dans ces
tiimque l'iaiil in cunpu tulerunt,et omnia corporu paroles de Notre-Seigneur, où la nature do
rontm raiitivavt'ritut, et diripuerunt quœcumque l'âme est clairement désignée lyolite timere eus :

ennit iu rivitiite, elqiKeeiimque erant iiulnmibus'K qui oeeidunt eorpus, nninuim aulem non jumunt
Dans cette éumnération on ne comprend pas uccidere •'.

bien ce qui est exprimé par les mots et corpo- : 27. Ces paroles de Juda : Mon Ms autem nostrx
ni enritm; car on ne peut pas supposer ([ue les nim sint super eum '',
équivalent à la formule
(ils de Jacob aient em|torté les corps de ceu.\ (pi'ils latine : .]/</«».'> ei non inferumus.
avaient tués. Il l'auteutendre parla les choses (jui Ibid. « Car il est notre frère et notre chair. »

peuvent être l'objet d'une posession physique ;


11 n'y a pas ici deux sens, mais un seul et même
de sorte (jue les mots ipii suivent et sttpellecti- : senssous diftérentes expressions; «notre chair, »

lem, les meubles, et autres objets, ne sont que n'est que l'application des mots « notre frère; »

le complément de l'énumération ; c'est ainsi et en effet, le sang du même père coulait dans
qu'on dit, en style de droit, tradilio rurponim, la leurs veines.
tradition des choses. Il est vrai qu'en vertu d'une 81. Oeeideruntliœdum capr(irum->.Ce genre de
locution (pii leur est très-familière, les i^recs se locution rcvicntsouvent dans l'Écriture, comme
servent du mot awfxxTtz pour ilésiyner les escla- dans ce passage des psaumes : Sieutaqni (winm'';
ves; mais connue c'est le mot (jihp.ot.zs. et non pas comme s'il [louvait y avoir des chevreaux qui ne
atùpitioi. qui est employé ici, il ne faudrait pas soient pas les petits des chèvres, ou des agneaux
témérairement donner à ces deux mots le même qui ne soient pas les petits des brebis.
sens il peut se faire néanmoins que ce soit le
; 13. Et nuntiatumestnu-
CtiAi'iTRE\X_\VllI. —
plus vrai. rui Thamav, dicentes' pom' parler corrcc-
eju.s ;

Ch.umtre XXXVl. 40. Après avoir faille dé- — rectement, on aiu-ait du mettre Nuntiaverunt :

nombrement delà raced'Edom, oudesidumcens, dieentes.


et des rois qui les avaient gouvernés, l'Ecriture ti. Et deposiliseestimentisviduitatisiiua' a se •*;

ajoute : « Voici les noms des princes sortis d'Esaii le sens eut-il été moins complet, sans les mots
« selon les lieux qu'ils ont habités dans le pays a se?
« au milieu de leurs races, » où l'on voit le
et 26. Et non upposnit amplius srire eum'-* ; ces
pluriel employé pour désigner une seule race, derniers mots ont le sens de misceri ei.

à cause du grand nombre des fiimilles qui la Ch.vi'itre XXXIX. — 4. « Joseph trouva grâce
partageaient. On sait qu'Ebaii s'appelait aussi « aux yeux de son maître» ; il n'est personne qui

Edom ; et ce nom a servi à distinguer la nation ignore cette locution particulière à l'Ecritm'e.
dont il était le père. (!. Et nesriebat quw rireum eum eranl nihil i»;
Ch.vpitkeWXVH. '21. « Ruben, ayant enten-
— celte locution très-1'aniilière aux grecs, est con-
« duce discours, ledélivra de leurs mains, et dit: traire aiLx règles tle la langue latine; nous dirions
« Gardons-nous d'attenter à sa vie. »Ce n'est pas en latin : nescielmt aliquid.
après l'avoir délivré qu'il pronon(;a ces paroles, Ibid. «E.xcepté le pain qu'il mangeait; » sous le
mais c'est en parlaid ainsi qu'il le délivra. C'est nom lie pain il faut sans doute entendre toutes
donc par anticipation que l' l'écriture commence
par dire qu'il le délivra, poiu- rappeler ensuite ' vie. — - Ne touche pas à sa vie. (Job,
Gardons-nous d'attenter i sa
11^ 6. ) —
Ne craignez pas ceu.ï qui tuent le corps, mais qui ne sauraient
'

tuer l'ànie. (Matt. X. 2S.) — Xe portons |ias la main sur lui. — "Ils
'

' Il était attaché à la fille de Jacob. — * Us tuèrent par l'épée son tuèrent un chevreau. ^ Conime des agneaux. (Ps. cxlll, 4. ) — On
'• '

fils Sichem. — ^ Ils prirent leurs brebis, leurs bceufs. leurs ânes, tout vint dire àThamar, après avoir quitté ses
l'épouse de son fils. — »El
ce tjui était dans la ville et tout ce qui était dans les champs ; ils firent habits de veuve. —
Il n'eut plus de commerce avec elle.
'' "> 11 ne se —
esclaves tou-s tes habitants ; et livrèrent aupillage tout ce "lui était dans mettait nullement en peine de coiuiaitre par lui-même les aHaires de sa
la ville et tout ce ijui était dans les maisons. maison.
332 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

les clioses que l'on servait Putiphar. C'est ainsi îi 1 1 . <c Lui et moi, nous eûmes tons deux un
que (ians l'Oraison Dominicale il n'est parlé que « songe dans la même nuit » Ces mois « lui et
du pain pour désigner en général la nourriture « moi » sont superflus, si l'on met« tous deux. >.

de ehaque jour. Le nombre singulier: nous avons eu un songe, » «

7. « La femme de Putipiiar Jeta les yeux sur est encore employé ici au pluriel « nous avons
«Joseph » c'est une locution qui est passée éga-
; « eu des songes, » comme si tous deux avaient

lement dans l'usage de la langue latine pour ,


eu le même songe.
dire qu'elle l'aima. \'à. Eartum est autem sicut romparavit nobis,

Ibid. Et ait : Dormi mecum '


; cette locution ita et contigit '. Les mots factum est autem, sont

est souvent employée dans le sens de couciiwlx' souvent employés de cette manière dans l'Ecri-
mecum. ture il suffisait de dire sicut enim romparavit
; :

i-2. Et (ledit (arn'i'iscu-sto.s varceremper manum nnbis, ita et rontigït.


Joseph-; mots sont mis \)our i)i mcnius Joseph,
coi> 19. Quales nunquam vidi taies i)i totu terra
ce qui veut dire en son pouvoir. : .Egiipti turpiores ^. Pour être latine, la phrase
Chapitre XL. S. « Ils dirent :Nous avons eu— aurait pu se construire ainsi : Quibus nun(puim
« un songe, et nous n'avons personne pour nous vidi lurpiures, ou simplement : Qz/a/es nunquam
« en donner l'explication. » Ils ne disent pas :
vidi, ou bien nunquam vidi taies.
« Nous avons eu des songes » quoique chacun ,
Ibid. E.rsurgens autem dormivi 3; exurgens est
d'eux ait eu le sien. mis pour expergiscens.
12. « Les trois provins sont trois jours » letexte ; 20. « Dieu a montré à Pharaon les merveilles
ne dit pas « signifient trois jours. » Il est im-
: « qu'il accomplira. » Le roi est nommé à la troi-

portant de remarquer ce genre de locution, où sième personne, quoique la parole lui soit adres-
le signe reçoit le nom de la chose signifiée c'est ;
sée.
ainsi que l'Apôtre a pu dire « Le rocher était : 30. « La famine épuisera la terre, » c'est-à-
" le Christ « au lieu de « Le rocher rcprésen-
•'*.
: dire les hommes qui sont sui- la terre.

« tait le Christ. » 33. « Maintenant donc choisissez un homme


18. Etdabis cnlirem Pharaoni manum ejus^;
in « sage et habile, etdonnez-hii le commandement
il n'était pas bien nécessaire d'ajouter in manum «sur toute la terre d'Egypte; et que Pharaon
ejus. « choisisse aussi, et établisse dans toute l'élen-
lit. El uuferel Pliarau eaput tuum abs te "•; on «due du pays des gouvercnurs de provinces, »
aurait pu supprimer abs te. comme si la personne à qui l'on dit « Choisis- :

Ibid. Et mandurabunl aves rœli rames tuas « sez un honnne sage, » n'était pas la même que

abs te 'S" cette locution est semblable à la précé- celle de qui on dit « Que Pharaon établisse. » :

dente. 33. « Que l'on amasse de grandes provisions


CH.iPiTRE XLl. — I. Et fartiim e.sl po.st bien- « de blé, et qu'on les mette sous la main dePha-

uium dierum'. Qu'eùt-il manqué au sens, si die- « r;ion, » c'est-à-tlire sous sa puissance.
rum eût été supprimé ? 40. Tamen thronum prœcedam lui ego ', c'est
". Surre.iil autem Pharao, et erat somnium s ^•
en ces termes que les paroles de Pharaon à Joseph
c'est ainsi que riÀritm-e a coutume de raconter sont rendues dans le texte grec. La locution prœ-
les songes
lorsque le sommeil est passé et que
: cedam fK/est propre à la langue grecque, tandis
le libre exercice de la raison est revenu avec que le latin demande prœcedam te. Quant à la
l'état de veille, on reconnaît l'illusion du songe, forme pnvcedam le thronum, le grec même ne
au lieu que, pendant (]iril durait, on le prenait l'admet pas, mais il exige prœcedam te thnmo, :

pour une réalité. c'est-à dire je te serai supérieur par la préé-


9, 10 . « Je reconnais aujourd'hui ma laule. minence tlu siège, ou je serai au-dessus de toi

« Unjour Pliar.Kuirulirrité contre ses serviteurs, parla dignité royale. D'ailleurs cette id.-e est clai-

« et nous lit jeter en prison. 11 parle à Pharaon >- renient exprinu'e dans la suite du discours de
lui-même, comme s'il parlait d'un autre. Pharaon.
44. « JesuisPiiaraon; personne dans toute le
'
iCIle lui dit : Dors avec moi. —
gardait laprisuii eu ' Celui qui
cutifialcsoiri à Joseph — ^ I Cor. x,
présenteras la coupe 4. — * Tu Les choses arrivèreni, comme il lîous tes avait pi-édites.
' ^ Des —
à Pharaon. —
Pharaon te trancliera la tête.
• ' Les oiseaux du — vaches si ])rodigieusement laides, que je n'en ai jamais vu de semblables
fiel dévoreront tu chair. "
Deu.v ans après. —
^ Pharaon s éveilla, — dans tonte l'Kgyptc. —
Après m'être éveillé, je me rendormis
-^ Ce- — '

et vit que c'était lui songe. pendant je serai au-dessus de loi par la di),'iiité royale.
LIVRE I. — LOCUTIONS TIUl'lKS DP: I.A CKNK.SK. 383

H Iciidiic (le ri'lnyplc, iic h'-vera la main (|iii' par pas, cuinme on \oil, pour uiii(pieacception, (l'ex-

" Ion ordre. « ("est cominc s'il y avait : .le suis primer ipie Dieu exauce la prière.
10 roi, mais lu es le [jriiici', le fioiivcnu'iir 2;!. « Mais ils ne savaieiil pas rpie Joseph les

(le l'Egypte. Car le mol Pharaon n'est pas un '< eilleildil. > KhIcikIic ici a le iiiêiiie sens (pie
nom propre (riionune; il désifiiie la puissanee comprendre car ipiaiid même on ne compreii-
:

royale. drait pas une langue, le son des paroles n'en ar-

ChapitheXLII. — I. « Jaroh, voyant que l'on rive pas inoinsà l'oieille. Colle locution reparaît

vendait du hlé en Egypte, dit à ses (ils ; « l'onr- (piand U^s eiilimls de Ja('ob raconleni à leur
i (pioi n'êtes \()us pas plus empressésï J'ai ap- père ce ipii leiiresl arri\é en Kgyple e| ce (pi'ils

H que l'on vend du bk^ en Egypte. » He-


pris ont dit à Joseph,
manpu^z que là où le saint patriarehe dit qu'il ;i2. buodeciiu suiiius frcdres jUii patris nostri :

a appris, le naiiateiu- dit (pi'il a \u. uiius non est; jiusillus outem rum paire nostro
:2. <. Acliel(>7.-nous(|nelques provisions, alin( pie luidie in terra (Hninaiin '. Il y a, diinsees(pielques
« nouspnissions vivre, et (pie nous ne moiu'ions paroles, plusieurs locutions d'espèces différentes.
« pas; » ilsullisait (le dire : « afin (pie nous puis- Et d'abord celle-ci, que nous avons remarqué'e
« sions vivre, » on bien « alin (pie nous ne inoii- tout à-l'lienre : « nous sommes douze, » bien
11 rions pas. » (pi'ilsdisenl : « l'un n'est plus. > Eiisiiile ///// ,s»-

1 1 . « Nous n'avons aucune intention hostile, )/(!/.s- patris nostri, nous sommes les enfants de
'i tes serviteurs ne sont pas des espions. » An noire père, comme s'ils pouvaient êti-eles enfants
lieu de dire ; « Nous ne sommes pas des es- d'un homme, (pii ne fût pas leur père. Dans
« pions, » ils disent « Tes serviteurs ne sont pas
: celte autre pusillusautemcum^ pâtre nostro hodie
:

« (les espions, » eomme s'ils i)arlaienl d'autres in terra C.hanaau, le verbe c.sMi'esl pas exprimé,
persomies. Ils employaient eette loriiie de lan- ni aiieuii autre mot éipiivident. C'est ici le lieu
gage, pour mieux témoigner leur respect. de faire une remarque d'une extrême importance
13. « Nous sommes douze livres tes servi- , à cause de l'application (pi'on peut en faire à cer-
« leurs, dans la terre de Cbanaan, n et plus loin tains récits des évangélistes. H arrive souvent
ils disent que l'un d'entre eux n'est plus, ne pou- qu'eu rappoiiantce quiaété dit, on ne le répète
vant croire :. l'evistenee de Joseph (pi'ils suppo- pas absolument de la même manière; seulement
saient avoirp('ri. La uR'ine locution se reinar(pie on a soin (pie la différence des termes n'altère
eu
dans cet autre passage « Ce sont là les lils qui : rien la substance des choses. Ainsi nous ne vo-
'(naquirent à Jacob en Mt'sopotamie ', » quoique yons pas que Joseph ait dit ces paroles que les
Benjamin ne lïit |)as né dans ce pays. Quand ils lils de Jacob Iniattribuent « Vous trafiquez dans :

disent Nous sommes dans la terre de Cha-


: « « ce pays. » Mais, à son langage, ils ont pu com-

« naan, notm sommes est mis i)onr nous hnbi- : prendre que telle éta't sa pensée, et le lui faire
bitoiis, puisque, au moment où ils parlaient, ils dire sans mensonge. Les mots, en effet, ne sont
se trouvaienl en Egypte; mais ils étaient venus que des signes destinés à manifester, et à jioiter,
(le la terre de Cbanaan avec l'intention d'y re- autant que possible, à la connaissance de ceux
tourner, comme dans le lieu ordinaire de leur qui nous écoutent, les choses que nous avons
s(''jour. dans l'esprit.
14. Hoc est qmxl dixi vobis, diceiis qiiod explo- 35. Et erat uniusrujasque alliqatura anjeiiti in
ratoresestis'^. Qu'eùt-il manqué au sens, si le mot sacco eorum '^ on n'a pas mis //) sacco ejus, ou
(liceiis avait été retranché ? bien in saceis earum, mais in sacea eorum, (•oiniiie
19. « Poui' vous, retournez dans votre pays, et s'il n'y avait qu'un sac [)our Ions.

" conduisez le blé que vous avez acheté. » Con- 36. Superme factasuntomniuhœr c'est com- •',

duisez est mis pour emportez mais parce que


:
; me s'il y avait me miseriu onerant.
l'on conduit les bètes de somme qui portent le Chapitre XLIll. — 3. Ait autemilli Judas, di-
blé, on dit que le blé lui-même est conduit. rects
'>
, le sens eut été aussi complet sans le mot
22. « N'avais-je pas raison de vous dire : Gar- dicens.
« dez-vous de faire du mal à cet entant? et vous
« ne m'avez pas exaucé. » Le verbe exaucer n'a frères, tous enfants du même père l'un n'est
'
Noussonunes douze ;

jeune est aujourd'hui avec notre père au pays de Cha-


plus, et le plus
Gon. xxiiV, 16.
' —
2 Voilà bien la prouve de ce que "ançais
j'ïiv. tout naan. —
^ L'arpent de chacun était lié dans leur sac. Tous ces — '

k l'heure, que vous êtes des espions. maux retombent sur moi. Mais Juda lui i-épondit.— '
334 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

Ibid. Interroqnns interrogavit noshomo^. On pression d'une pensée particulière, et non une
renconti'c souvent dans l'Ecriture des locutions simple locution? Autre chose est, en effet, de ré-
comme celle-ci : interrofjans interroqavit nos ho- péter textuellement les paroles, et autre chose de
mo, ou bien interroqando interrogavit, on toute n'en donner que le sens, secundum ipsa verba,
autre construction équivalente. sans s'attacher rigoureusement aux mots qui ont
16. « Ces hommes mangeront le pain avec moi été prononcés. Comme, dans leur réponse, les
« à midi. » Est-il croyable que qu'on n'ait servi enfants de Jacob se servent des termes mêmes :

du pain? C'est donc une locution qui comprend, Vtquid loguitur dominus secundum verba hœc ' ?
sous le nom du premier des aliments, toute autre quand il n'y avait pas heu évidemment de chan-
nourriture. Mecum enim manfhicabunt liomine ger la forme ordinaire Vtquid loquitur domi-
:

panes meridie l'expression meridie indique le


: nas verba hœc ? nous devons en conclure que cette
dîner, ou le repas cpie l'on prend au milieu du manière de parler est mie locution.
jour. ". Absil a pueris tuis facere secundum verbiim

18. lit accipias nos in servos etasinos nostros 2. hoc '-; ils pouvaient dire : Absita nobis; mais c'est
Il est clair que le mot servos n'est pas sous en- une marque de respect, très-fréquente dans l'E-
tendu dans le second membre de phrase ; car ce criture, de parler de soi à la troisième personne.
que le texte latin rend par servos, le grec l'ex- Quant à pueris, il est mis pour servis.
prime par 7r«tiî«ç qui ne peut nullement s'ap- 9. Et nos autem erimus servi Domino nostro *.
pliquer à des ânes. Il n'y a donc que le verbe Ici le texte grec emploie le mot Trai^eç, en la-

accipias de sous-entendu devant asinos nostros. tin pueri cette expression est si généralement
:

21. Aperuimus saccos nostros, et hoc argentum employée par l'Ecriture dans le sens de sénateur,
nniuscnjnscjvein sacco svo ^. Aucun verbe n'est que très-rarement on la voit se servir d'un autre
exprimé, ni inventum est, ni appariiit, ni erat, ni mot.
aucun mot équivalent. Quomodo autem adscendam ad patrem, cum
34.
23. Propitius vobis, noiite timere ^. Dans le puer non sit nobiscum, ut non videam mala quœ

premier membre de la phrase propitius vohis, il invenientpatrem meum^ ? Les règles ordinaires du
y a deux mots sous-eidcndus sit cl Deus. Car : langage demandaient que la phrase fiit construite

la proposition entière qu'on trouve très-fréquem- ainsi : mala quœ invenient patrem
Vt videam
ment dans les Septante, est celle-ci : Propitius sit meum;y> c'est-à-dire Quomodo adscendam ut vide-
:

vobis Deus. am ? La forme inusitée employée ici équivaut à


28. Salvus est puer tuus pater mMer, udhuc vi- une proposition négative, que l'onpom'rait cons-
vit ». Ce passage fait voir clairement que le mot truire régulièrement de la manière suivante :

puer est pris souvent dans le sens de serviteur ;


Non adscendam ad patrem, cum puer non sit no-
car, appliqué à un vieillard connne Jacob, il ne biscum, ut non videammala quœ invenient patrem
peut exprimer nombre des années.
le meum.
32. « Les Egyptiens ne pouvaient manger le Chapitre XLV. — 23. Aprèsavoirditque Joseph
« pain avec les Hébreux c'eût été pour les Egyp-
;
fondit en larmes, en se faisant connaître à ses
« tiens comme une souillure. » On rencontre frères, l'Ecriture ajoute: Tous les Egyptiens l'ap-
«

souvent cette locution, qui consiste à désigner, « prirent, et la cour de Pharaon en fut instruite » ;

sous le nom de pain, toute espèce de nourriture. et alors seulement elle cite les paroles de Joseph :

autem pars Benjamin


34. Magnific'ita farta est « Et Joseph dit à ses frères. » Ainsi l'Ecriture ra-
prœ partibus omnium quintupliciter ad illorum *'\ conte en premier lieu ce qui n'est arrivé que pos-
Après avoir dit prœ partibus omnium, on pour-
: térieurement, car c'est grâce à la renommée,
rait se dispenser de mettre ad illorum. que cette scène est venue à la connaissance de
Chapitre XLIV. —
6. Inveniens autem eos, di- tous les Egyptiens; elle continue ensuite la nar-
xit secundum verba hœe ; on pouvait mettre "!
: ration interrompue, et résume brièvement les

Dixit eis verba hœc. Mais n'y aurait-il pas ici l'ex- parolcs qui avaient été prononcées.

Cet homme nous interrogea.


* —
2 c'e.st pour nous réduire en ser- '
Pourquoi notre maitre nous parle-t-ii ainsi ? — 2 A Dieu ne
vitude, et femparer de nos ânes. —
3 Xous avons ouvert nos sacs, plaise que tes serviteurs se permettent un si grand crime. 'Pour —
et chacun a retrouvé son argent dans le sien. —
Dieu vous soit propice,
^ nous, nous serons les esclaves de notre seigneur. —
* Comment pour-

n'ayez aucune crainte. —


•'•Notre père, ton serviteur, vit encore, et rai-je retourner vers mon père, sans ramener l'enfant avec nous, et
il se porte bien. — On fit la part de Benjamin cinq fois plus grande
i"
être ainsi témoin de l'atfliction extrême dans laquelle va être plongé
(jue celle des autres. *

Lorsqu'il les eut rejoints, il leur dit ces paroles. notre père?
— ,

LIVRE I. — LOCrTIONS TIUflKS DK LA GENfcSE. 335

K Ki. Et (lii'ulfiatd l'sl vo.riii iloino l'Iiiiidiniis, di- La lerrc esl mise ici piiin' les hommes (pii l'ha-

tciilrs : \'i'iu'ruiit fnitrfs.hisi'iih '. Dict'nlt'scsl mis liilaienl.

\)om- diiriiliiiw; r'esl coiniiie s'il y avait: vox I.'). « 'fous les l'^iiNijliens vinrent Ironver Jose|>h,
diceutium divulfialn est: « Venenint fratres Jo- « et lui dirent Doiukvuous du pain. » Le ini>l
:

« Sl'llll . » pain s'cnleiid ici du blé, c'est une locution dési-

CiiAiMTiiK \LV1. — -2. .U illc lYspoiulil. quid liuaiil [)iW le uoui luènic de rdbjcl, ['('lément

est? dicens ''.


L'ordre naliirol est celui-ci: .1/ illc (|ui sert à le composer.
i;
fi'xpoinlit. dircns : Qiiid csl ? •20. Et farta est terra l'Iiannini il fallail dire
i. Dieu (lit ù Jacoh :
/.'(;() di'Sfriuhim Irnim iii l'Iiaraouis. Celte luiinièrede parler est fauiilière

^Eiiuptum, et ego adsceiitlcit' tt'fiuiam in jincm '; à l'Ecriture. On en voit un autre exemple dans
ainsi s'exprime le texte nnu- ; mais les veisious ce passage des psaumes : Et riistodivi legem tu-
latines portent (/ ajo dcihirum te in [inein. (im; hœc farta est milii, quia juntilirntitmes tuas
28. «Jacob envoya .hula devant lui avertir Jo- exquisivi ">
; ainsi David dit de la loi divine :

« seph.pour (|u'il vînt à sa rencontre jnsqn'^ la h(re farta estmilii, pour siguilier iii meamutilita-
« ville d'ilerous : » je ne pense pas ([ne le nom de tem.
cette ville se retrouve ailleurs dans l'Ecriture. i\. Prwter terrain sarerdotum tantum, nonpus-
31, Dans ces paroles de .losepli à ses livres
'A-2. :
xedit Joseph •'; c'est comme s'il y avait ; Prœter
« Je m'en vais dire à Pharaon Mes frères et :
terrarn sacerdotum tantum, omnem terram posse-
« tous ceux de la maison denum père, <]ui liabi- dit Joseph.

« lent laterredeClianaan, sont venus m(> trouver; 2(î. « A imposa


partir de ce jour, Joseph lein-
« ils sont tous pasteurs, (car l'occuppatiou de ces « payera Pharaon la cinquième par-
l'obligation de
« hounues était de nourrir des troupeaux) et ils «tiedes fruilsdelaterre, ce quis'observe encore
« ont amené avec eux leurs héles desouune, leurs «aujourd'hui. » Ces mots « encore aujourd'hui, » :

« brebis et tous ce ({u'ils possèdent. » Cette phrase font bien voir que Pharaon est un nom commun
mise entre parenthèse est une réflexion de l'é- à tous les rois (l'une même dynastie. Car, à l'é-
crivain sacré, cpii reprenant aussitôt la suite du |)oque où cette histoire a été écrite, le Pharaon
discours de Joseph ajoute : « ils ont amené leurs contemporain de Joseph n'existait plus ce n'é- ;

« bêtes de sonmeet tout ce qu'ils possèdent. » tait donc pas à lui que les Egyptiens pouvaient
Tel est donc l'ordre des paroles prononcées par payer l'impôt.
Joseph « Ils sont tous pasteurs, et ils ont ame-
:
28. Et fuerunt dies Jaeob annorum vitw ejus *.

« néleursbètes di^somme, leurs brebis et tout ce L'Ecriture dit souvent dies annorum, \h où il

« qu'ils possèdent. » lui suffirait de mettre simplement anni.


Chapitre XLVII. 8. Dixit outem Pliarao ad — Ch.vpitreXLVIU. 1. Dans cette phrase: Nun- —
Jarob Qiiot aniii dierum l'itœ f »«''? Il faut sous-
: tidtum est Joseph : Quia pater tuus turbatur'^
entendre sunt. certaines versions emploient le mol rexatur ;

9. PusiUi et midi fiieruntdies annorutnvitœmeœ^. d'autres œstuatur, ailleurs ce sont d'autres ex-
Puxilli est mis pour paitri ; car il n'y a pas pressions encore, chaque traducteur latin choisis-
d'homme, dequi comptent moins d'heu- les jours sant le terme qui lui semblait le plus propre k
res que ceux des autres. Jacob parlait ainsi, en rendre du grec evoylurc/.!.. Mais le mot
l'idée

comparant sa vie avec la longue vie de ses ancê- turbatur parait être le mieux choisi, parce qu'il
tres : car il avait cent trente ans, et personne au- se dit ordinairement deceux dont le corps est
jourd'hui n'arrive à cet âge. en proie aux agitations de l'agonie. De là vient
a. Triticurusecundumeorpus''>;c'eslcoïnmes'il aussi que turba et o;(Xoç sont synonymes; car le

y avait secundum mimeruin eorponim. Il faut donc mot turba représente une multitude confuse : il

entendre parcorps le nombre des corps, et par n'a donc pas le sens de /w/jif/Hs", peuple, en grec
le nombre de corps celui des personnes. or,y.oç„n[ de plebs ' , en grec Xaoc, mais bien le

14. «La famine sévissait plus fort que jamais, sens de o^Xoç, qui signifie foule.
« et la terre d'Egypte était condamnée à périr. » 16. Entre toutes les paroles par lesquelles

Le bruit se répandit dans toute la cour do Pharaon, que les frères


'
'
Toute la terre devint la propriété de Pharaon. — J'ai observé
de Joseph étaient vu us. = Il répondit —
Que demandeiS-vous de moi? : votre loi m'a été d'une grande utilité, parce que je n'ai eu d'autre
elle
— 3 Jiraiavectoi en Ksj-pte, etjesaurai t'en faire sortir un jour.
;

désir que d'accomplir vos commandements. (Ps cxvlil, 56.) Il n'y- — •'

-- » Pharaon demanda à Jacob quel âge il avait. > Los jours


que — j'ai eut que la terre des prêtres, dont Joseph ne prit pas possession.
vécu sont peu nombreu.\, et remplis de beaucoup de maux. — '•
Du blé < Tout le temps de la vie de Jacob fut. * On vint dire à Joseph que —
en proportion du nombre des personnes. son père était fort mal. — " peuple, — ' bas peuple.
336 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

Jacob bénit les enfants de Josepb, ses petits-fils, Joseph. La même chose se remarque dans l'E-
on remarque celles-ci Etinvocabitur iiiliis no- : vangile ; car un des évangélistes raconte qu'un
moi meum, et nomen patnim meorum i;ce qui fait centurion vint trouver le Seigneur, en disant :

voir que le verbe //n'orï/rc, aussi bien que le verbe « Mon serviteur est malade de paralysie dans ma
exaudire, ne s'applique pas seulement à Dieu, « maison i
; « et im autre évangéliste, quiraconte
mais quelquefois aussi aux bonimes. le même fait avec toutes ses circonstances, nous
18. Hic eiiim primitiviis '';le verbe <'sf n'est pas apprend que cet officier envoya vers le Seigneiu"
l'xprnné, conlorménient au texte grec. plusieurs de ses amis, pour lui faire connaître l'é-

24. Jacob, bénissant Joseph, dit entre autres tat de son serviteur î. Mais on peut dire que c'est
choses :Inde quid coufortavH Israël 3. Il y a tout lui-même qui venait dans la personnelle ses a-
lieu de croire que le \erbe ed est sous-enlendu, mis puisque ceux-ci n'étaient que les exécuteurs
;

en sorte que la proposition pleine serait : Inde de ses volontés. Même remarque encore sur ces
est qui confortavit Israël. paroles de Jésus-Christ : « Celui qui vous reçoit
Chapitiîk L. — 2. Au sujet de cette phrase : « me reçoit; et celui qui me reçoit, reçoit Celui qui
Dixit Joseph servis su issepuUoribus, ut sepelirent « m'a envoyé s. »

patrem ejus '',


notons que la langiie latine n'a 10. Plan.veruut eum jilaurtum maçinum etvali-
pas de mot, pour ox|)rinier l'office de ceux qui dum *. Planxerunt plaudum est mis pour ;

sont en grec Eyracptaa-ai. Leur of-


appelés planxeruutplanrtu. Cette locution n'est pas étran-
fice n'était pas d'inhumer, c'est-à-dire, de con- gère à la langue latine, où l'on dit : servitutem
fier à la terre les corps morts, ce qu'on exprime servivit, il a vécu dans l'esclavage, militiam mili-
en grec par 9a'^ai etnon par ev-acfiatjtat. Ceux , tavit, il a suivi fa profession des armes, et
qui sont appelés étaient chargés de
*
ivry.'^iy.a-ïv.i, autres locutions semblables.
faire tous les préparatifs qui précédaient l'inhu- lo.Ef redditione reddet nohis omnia mala quœ
mation des corps, connne de les embaumer, de les osteudimus ei'^. La même locution se remarque
sécher, de les envelopper et serrer de bandelet- dans ces paroles de l'Apùtre; Alexander œrarius
tes et l'on sait qu'en cette matière les Egyptiens
; muUa mala mibi osteudit s. Ainsi ostendimus est
n'ont pas de rivaux. Quand on lit Etiam sejte- : mis pour ferimus, et iisteiidit\)onr fecit.
lierunt, cela veut dire qu'ils lui donnèrent leurs 16. Accipe iniquitatem servtirum Dei patristui '.

soins. Et ces autres paroles quadraginta dies : C'est encore une nouvelle locution, de dire accipe
sepulturœ doivent s'entendre des quarante jours
, iniquitatem, an lieu de (V/iiasff, pardonne, ou re-
employés en ces sortes de préparatifs jjuisque ,
mitte, remets, ou bien obli viscère oubfie ;
je
le saint patriarche n'a jamais été enteri'é ailleurs pense toutefois que le mot accipe a été choisi
que dans le tombeau qu'il avait lui-même dé- à dessein, même idée quedans
pour présenter la
signé. cette phrase œquoanimo accipe, dontle sens est,
:

4. Loquimini iu aures Pliaraouis'', est unlocn- supporte sans aucun ressenliment.


tion très-usitée dans l'Ecriture. 18. « Etant venus le trouver, ils lui dirent :
»

<i. «Pharaon dit à Joseph Va, : et ensevelis ce n'est pas que les frères de Joseph se soient ren-
« ton père. » Quoiqui; ces paroles fussent di- dus vers lui une seconde fois, mais l'écrivain sa-
tes aux grands seigneurs, que Joseph avait en- cré répète seulement ce qu'il a déjà dit. On trou-
voyés, et qui devaient lui rapporter la réponse ve beaucoup d'exemples semblables dans l'E-
de Pharaon, elles s'adressaient véritablement à critm'e.

' Ils porteront mon nom et le nom de mes pères. — î Celui-ci est ' Matth. 5, 6. — Malt. X. v. 14.
2 Luc, vil, 3. —
• Ils le pleurè-
' —
l'aîné. — 3 Par là il est devenu l'appui de la maison
Jo- d'Israël. — *
rent avec de vifs sentiments de douleur. ^ Il nous rendra sans doute —
seph commanda à ceux de ses serviteurs qui avaient le soin des morts, tout mal que nous lui avons fait.
le —
" Ale.vandre, l'ouvrier en cuivre,

de rendre les derniers devoirs à son père. ^ Parlez vous-même à — m'a fait beaucoup de mal. (II Tim. iv. 14.) » Oublie l'injustice de —
Pharaon. ceux qui servent le Dieu de ton père.

I
. .

LIVRE DEUXIÈME.

LOCUTIONS TIREES DE L'EXODE.

Chapitre I. — ", 1:2. El hivalesccbinil vahlc ;!. L;i signification de tliibiii es!
(iiflicile à dé-

l'iiltli' ' couvrir, pju'ce (pie riiiler|)rclc grci' n'a pas tra-
:2I. UiK'l l'sl le sons de ces p.irolcs relatives duit (^e mot de l'Iiébreii, ni rinlcipréle latin du

aux sages-femmes d'Egypte : « Elles élnhlireiit grec ; mais cliaciin l'a rei)roiliiit comme il l'a
« leurs niiiisoiis, parce qu'elles avaieiil a;;! avec trouvé.
« la crainte de Dieu? » On lit an verset précé- I i. Timuit (lutem Mtnjses et di.rit : Si sir di-
dent : « Dieu combla fes sagcs-fennnes de ses vuUjatum verbum liiir '.Il a deux choses à
est \

« laveurs ; » et ce iiu'on voit ensuite, « (pfelles remarquer dans celte locution: la première, c'est
« établirent leurs maisons, en agissant avec la q p pr-'sée n'est pas entièrement exprimée et
« crainte de Dieu, » ne parait être que la cou- I *f inachevée ; la seconde, c'est
séquence de ce qui précède les faveurs de Dieu : ii' '

l)our fartum.
auraient donc eu précisément poui objet l'éla- iliiis Isvdi'l, et iiniiituil illis '-*.

iilissemenl de leurs maisons. Est-ce pour ce- ; ' ' I cetpu' Dieu (il pour prouver
la qu'avant ce moment elles n'avaient pas ; .
'-1 i étaient l'objet de .sa sollici-
de maison ?Ou ne faut-il pas plutôt enten- I

dre par ce mot les richesses, ou mieux encore I -7, Videna vidi l'exatiaiieDi
certains avantages qui font la prospérité des fa- ,.L, :..: ,1:. -, . u /EfUipUi-K
milles semble en effet que ce terme a la même
? Il 11, 12. Etdi.vitifDjjses adneumjQnis '<'im,quiu
(ication ipie dans ce passage, où Jacob, ibo (id Pliaraouem refiem r Ui-
/Efuipfi, et (i

; avoir servi pendant quatorzeans son beau- enm filios Israël de terra .Efiupti ? Om'i /<

qui voulait le retenir plus longtemps euco- Quuiiiam ero terum '*
; ainsi |)orte le te '

grec.
li dit : i< Quanddonc pourrai-je, moi aussi, Mais le texte latin nvA : Et quis ne dit
eç/o 1 il

blir ma maison'? » Or il venait dédire qnc pas non [iMs -.Quia ibo, et quia edncam, mais (.''

oupeanx de Laban s'étaient considérable- eam et eduram. Quant à ces paroles du text.
nmltipliés par ses soins et Laban lui- ; grec Di.rit autem quia ero terum, ou
:
>inprend t

e l'avait reconnu par ces paroles » Le :


sans peine que Dieu les adresse à Moïs': .• 'in,'
igneur m'a béni à ton arrivée
• » En di- •'.
marque expressément la version latin-
11.1 donc « Quand pourrai-je, moi aussi, éta-
:
autem Oeus ad .1/(i//.sc/)

'u'iir ma maison?» c'est comme s'il eût ajouté



:
It!. Dieu charge Moïse de dire de sa part aux
.\i!i.u que tu t'as fait toi-même car telle est, enfants d'Israël
; : Visitansvisitavivos, etquœcum-
cc semble, la portée de ces mots « Et moi que contifierunt
:
robis iu .Eiiupto ">.
On lit dans
. aussi. » Par là-mème le salaire que Laban le grec Visitatio)ie visitavi
; rus.
-' -ié de fixer, parait se rapporter à l'établis-
.

IS. Dieu
en parlant des enfants
dit à Moïse,
ut de la maison de Jacob. d'Israël: Et audieut rocemtuam ". Le grec porte ;

Et i))inu' fi'ininiiiumvivilkate illiiil'' : ainsi ht e.raudient rocem tuam par où l'on voit que le <fc
;

i-jirime le texte grec : les versions latines ne verbe exaudire s'appli(|ue aussi à l'homme.
il. lient pas illitd. "22. Là où le latin met: Posretmulier a vicina et
Chapitre II. — 1, 2. Erat autem quidam tic ab in quilina sua vasa argentea etnurea etvestem'^,
tribu Levi, et sumpsit sibi de fiUahusLevi '; u.vo- on lit dans le grec : a cohabitatriee sua, du mot
lem est sous-entendu, et même quelques inter-
prètes latins on jugé à propos de l'exprimer. On ' ^[oïseeut|)eur. etdit :Si le public connaît ainsi cette action. —
2 LeSeigneur re^.irdales enfants d'Israël, et se déclara en leur faveur.
lit ensuite : Ethabuit eam, et concepit «. 3 J'ai vu l'afRiction de mon peuple qui est en Egypte. — 'Mojsedit à
Dieu Qui suis je. pour me présenter à Pharaon, roi d'Egypte ? Et
:

Kt ils se multipliaient prodigieusement. - Gen. x.xx, 30. — — —


— Gen. Dieu lui répondit Je serai avectoi.
' '•
^ Je suis: venu vous visiter, et
x.i;x, 27 > Ne réservez que les filles.— •
Il y avait un homme de la j'ai été témoin de tout ce qu'on vous a fait en Egypte. " Us écoute- —
tribu de Lévi, qui é|.ons.T une des filles de sn tribu. —'Ml l'épnus.i, et ront ta voix. —
Chaque femme demandera à sa voisine et à son
'

elle ront,Mit.
hôtesse des v.ases d'or et d'argent et des vêtements.

S. AuG. — ToM. IV. •^3


338 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

ovTOxvov que plusieurs traducteurs latinsren- 17. Postâtes autem illos multos, mortuusest rex
ilent par a ronvellaria sua. .Ejiijpti dixit autem Dnminus'ad Moysen
; in
(Ihapitke IV. — I. Dans ces paroles de Moïse ; Madian : yade,pergein^Egiitum, mortui sunt enim
Quiil si itmi credideriiit iiiilii, neque exaudieriiit omnesqui quœrehant aninuim tuam K On remar-
l'ocem mt'am '? la Ncrsion latine s'est servie du que ici plusieurs locutions d'espèces différentes.
mot (ludieriiil. La première Vade,pergein .Egijtum; W^vim^axi :

4. On lit dans le grec : Extende iiunniin et ap- de dire seulement rade, ou bien perge. La se-
préhende eaudum ' ; ce qui est rendu en latin conde « Tous ceux qui veulent fôler la vie
:

par munin)ituam,et caudam ejiis. On lit ensuite : « sont morts » cependant l'Ecriture ne parle ;

Etextendensmauum, apprebendit caudam, et farta que de mort du


roi d'Egypte, et n'a Jamais
la
est virga in manu ejus s.
attribué qu'à lui senlje dessein de faire mouiir
0. « Et Dieu ajouta
Afin qu'ils croient, que : Moïse. Faut-U entendre qu'il mourut après tous
. « le Dieu de leurs |)ères, t'a ap-
Seigneur, le les autres ennemis du prophète / Alors ce ne se-
'"paru.» Le grec ne met pas: « Et Dieu ajouta ; >> rait plus une simple loculi"-
'

.serait
mais aussitôt après le récit du miracle, il reprend changé. Enlln ces r.T nimam
les paroles mêmes de Dieu : « Afin qu'ils croi- tuam, sont .«m .us l'Écriture en bonne
« ent
» ; comme si
Dieu parlait encore, et ache- fO"^ f, com-
vait seulement d'expi imer sa pensée. Car yo'-; ' nlantur
l'ordre des paroles « Etends ta 'a, et : '
\ C'est
« saisis la queue du serpe»^* ijitils le ^=' ••- '•1 Periit fuga
• i j^ : \

« croient. » Mais on a infei ;l rUj fait u me. et non est qui requi -ut unimam meam •'. Je
miraculeux, pc' k: le discours ...ilaisant cette remarque, qu'on
par cp'^ un ils : ni. „ Ci: '
. . uiiférence des acceptions dans la dif-
I' Ml lit dan- i
,i est l^reiice des verbes quœrere et requirere, comme
'•
luit uLi • . i.i sii'C ne si le premier devait être pris en mauvaise part
i" iil'i'mei;' jartu est tan- et le second en bonne part.
quam »' Chapitue V. 10. Et dicebant ad populum di- —
S. ')((/.;,'
:;i nou lUi '.lerint iwcem .si(i)ii primi «•
: centes : Hœc dicit Pharao ^. Le traducteur latin
liii 1 [iiirle le texte grec ; mais on lit dans le la- n'a pas jugé à propos de reproduire cette locu-
tu : eocem tuam signi primi. Même remarque tion.
-que pour la phrase suivante Credent ; tibi in rare :21. Vident Deus vos et judicet, quoniam ex-
y/^ signi sequentis ''\
secrabilemfecistisudoremnustrumpalam Pharaone
tt. Et erit aqua, quam sûmes de jlumine, sun- et palam servis ejus, dare gladium in manus ejwn
fiuis super aridam '. Il faut ])lutôt mettre super ut occidat nos •>
; ainsi s'exprime le texte grec.
aridum, qui veut dire : en un lieu sec. L'inter- L'interprète lalin, que nous avons suivi de pré-
prète latin a mis : sanguis super terram. férence à tous les autres, triiduit de cette maniè-
10. Moïse dit à Dieu : « Je vous prie, Seigneur, re : ut daretis gladium in manibusejus ; c'est li'i

« de considérer que je n'ai jamais été un hom- un solécisme, que ne justifie pas même un
I' me éloquent, ni hier ni avant-hier. scrupule de traducteur, puisqu'U n'existe pas
\'. Et virgum liane sûmes in .munum tuam, dans le grec.
in qua faciès in ea signa ». On pouvait dire sim- Ch.\pitre VI. — 4. Statui testamentum meum
^ plement ; /)) qua faciès signa ou du moins
Virgam hanc sûmes in manum tuam et faciès in
; : ad illos, itu utd((rem illis terram Cliananœorum.

et terram quam incoluerunt, in qua et incolue-
ea signa. Mais ces deux formes sont employées runtin ea ''; ainsi porte le texte grec, quoique
en même temps, commeon le voit souvent dans cette forme, même en grec, paraisse contraire à
les Ecritures.
Longtemps après. le roi d'Egypte mourut, et le Seigneur dit à Moj'se

qui habitait Madian \"a et ret lurnc en Egypte, car ceux qui vou-
:

laient t'oter la vie sont morts. —- Que ceux qui en veulent à ma vie
'
Que ferai-je. s'ils ne s'en rapportent pas à
moi, et s'ils n'écoutent soient couverts de honte et de confusion. (Ps. .vxxix, 16.) - ^Je ne
pas ma
voix? ^ Etends ta — main, et saisis la queue du serpent. puis plus trouver mon salut dans la fuite, et je ne vois personne qui
— 3 Alors étendant la main, il prit la queue du serpent, qui se changea veuille me sauver la vie. (Ps. cXLt, 5.) — »lls disaient au peuple:
en verge dans sa main. —
* Et sa main fut couverte d'une lèpre aussi Voici les ordres de Pharaon. — ^ Que Dieu voie et te juge : c'est toi
blanche que la neige. —
^S'ils résistent au premier miracle. ''liste — qui as rendu notre nom odieux à Pharaon et à ses serviteurs, et lui
croiront après le second miracle. '
L'eau que t^i prcncIr.TS d^ns le as mis le glaive en main pour nous fair.nimrir ''J'ai fait alliance —
tieuvc, étant versée sur la terre, se chan^^era en s;iii^. ''Tu tien- — aveccu.v, et je nie suis engagea leur donner laterredeChaiiaan,Ia terre
dras en la main cette verge, avec laquelle tu feras dos miracles. où ils ont demeuré conmie étrangers.
i.iVRK II, — LocnioNs Tii'.fiKs 1)1-; i;i:\(»iti<: 339

loulcs les règles. El poiirlant grande esl r.iiild- a\oir été heureux, eu reudanl 'îootçr^; par .v«/W-

de parler enles, les sages de Pharaon; c'est le wuA nnijoi,


lilé lies Seplaiile qui n'ont pas eraint
sens sons qui est synonyme de supieutes. auraient pu
anisi. Uiiiii doue? Se eaehfiait-il un
Ils

laid picndre Irés-liicn nii'llrc snpliistas, puisrpie le lidin n'a


ces paroles? Si ee sens n'exisle pas, il

eas où elle pasiraiitremololh'iuit le nicmesens. .Viissi celte


noie de eetle loenlion, alin que, dans le

sens vérilahle n'en fût pas expression est-elle passée en usage dans notre
se représenlerait, le
pas à des langue, de mèmetpie le mol /(////o.s'o/j/i/r/.philoso-
ohsenrei, on qu'on ne se l'alit-uàt l'aire

lihie, égalemeni em|)ruiil(' aux grecs, et nos


lecherelies inutiles.
On dans la version latine E.vaiKlii'it (jc- meilleurs écrivains ne loul pasdilliciiili' de l'ein-
3. lit :

lilionnn Israël, (iiicmadwiiduni .Knni'tH plo\er'.


mitiim
fos '. Dans le grée on einplou- le \erl)e 1:2. « El la verge d'Aaron dévora leurs ver-
(iflliiH'iriit

qui se rend en lalin par in '(ges; » c'est commt^ s'il y avait ; « Le serpent
xyLzy.§o-Ao-jv7»L,
st'rriliilfm rrdiijintt eos''- ; ear le latin n'a pas de '< d'Aaron. »

15. Dans celle phrase relative à Pharaon


mol unique pour exprimer eetle idée.
:

Erre ipse exiit ad (Kiuam '', le gi'cc mel super


!). Et locuUis est Moiises sir ad (ilius Israël, el

non exaudierunt Mofisen a defeelione auimi et aquam.


ah operilnis duris on voit iei exaudierunt, au
-^
;
1(). Dimitte jiiipulunnnenm ut serriat milii in

lien de uudieruut. déserta, et erre n(niex(nidislius(ine ad hur'-^. On peut

H. Dans ces paroles de Moise au Seigneur s juger combien de lois le mot exaudire est appli-

lùjoenim iiteloqueus sum '',\c grec se sert du qué aux hommes.


qui ne signilie pas, conune àiJ.xHç 2:2. Fererunt uutem similiter et inrantatores
mol aloyoi ,

,E{iiiptioru\n reneliriis sais. El induratum est cor


on àr.y-îoiu'oi, un homme dépourvu de con-
Pharaonis, et Do-
non exaudivit eos, sicut dixit
naissances.
H\. m suiit Aarou. et Moi/ses, quibus di.rit eis minas Preu\e noii\elleque l'Ecriture emploie
'>.

Deus, ut edueant filios Israël de terra .Einipti


'. souvent le verbe exaudire lois-mème qu'il s'agit
Ainsi s'exprime le texte grec. de l'homme.
80. Erre ego ijraeili rore sum, et qunmodo CiiAPiTiiE Vlll. —
l. Dimitte populum meum, ut

exuudiet me Pharao <'. Remaniuez l'emploi de sei'riant milii on ne lit pas «( serriat. Cette
">;

exuudiet pour audiet. manière de parler s'emploie peu près exclusi- i'i

Cii.vi'iruE VII. — 7. Fevil autem ^hnpes et vement, quand un substantif singulier offre à
Auron, sieut priveepit illis Ihiminus, ita fereruul'. res[)rit l'idée il'uiie pluralité, .\insi le mot peu-

Le sens eùt-il été moins complet, sans les mots ple se ditau singulier, mais il désigne une mul-
ita fecerunt ? titude d'individus. On dit de même Omnisterru :

9. Si luquetur vohis Plianto dieeus : Date nabis adorent te '% parceque (««/(/.s- terra est mis ici
xifinum aut portentum, et dires Aaron frutri tua: pour la totalité des hommes tpn sont sur la
Sume rirqam *. Les règles ordinaires de la lan- terre.

gue latine et, jusqu'à un cerlidn poiid, l'inté- Erre ego ferio omnes fines tuosranis '.La lo-
2.

grité du sens exigeaient (jue la phrase fut cons- cution grecque est très-élégante elle nous re- ;

^
truite ainsi: Si loqueturrobis Pharao direns Date présente les grenouilles elles-mêmes conune une
nobis siquum aut portentum, dires Aaron fratrt plaie, dont la terred'Egypte est frappée.
tuo Sume virgam. Pourquoi a-t-on ajouté la
: ',^.Et erurtabil /lumen ranas,et adsrendentesin-
conjection et, si ce n'est pour rendre en lalin trabunt in domos tuas et in prompluaria cuhirii-

une locution familière à la langue héhaïque '!


lorum tuorum., super lectos tuos, et in domos ser-
car celte locution n'est pas reçue en grec. rorum tu(n-um et populi tui, et in nnispersis tuis,
11. Les traducteurs latins ne me paraissent pas etiurlibanistnis,etsuperte,etsuperpopulumtuum,

'J'ai entendu les cris des enfants d'Israël, que les Egyptiens acca- D'autres éditions offrent le sens suivant On désigne, sous le nom
' :

bientde maux. — 2 Ils les réduisent en esclavage. — -^


Moïse raconta tout de sophistœ. les auteurs qui ont excellé dans les lettres latines. ' Il —
ceci aux enfants d'Israël, et ils ne l'êcoutèrent point à cause de leur ex- est sorti pour aller sur l'eau. —
^ Laisse aller mon peuple, afin qu'il me

trême abattement, et des travaux pénibles auxquels ils étaient assujet- rende ses devoirs dans le désert et jusqu'alors tu ne m'as pas
.

tis. —' Car je n'ai pas le talent de la parole. —


^ Ce sont Aaron et Mo'i'se, écouté. —'Les magiciens d'Egypte firent la même chose par leurs en-
à qui Dieu donna mission de faire sortir les enfants d'Israël de la terre chantements et le cœur de Pharaon s'endurcit, et il n'écouta point
d'Egypte. — J'ai la voi.iL trop faible comment Pharaon m'entendra-
"^
:
.

les envoyés de Dieu, selon que le;Seigneur l'avait prédit. Laisse — ''

t-il ?
"—Mo'ise et .\aron livent exactement ce y\\ie le Seigneur leur avait aller mon peu|>le. afin qu'il me rende ses devoirs. — "^ Que toute la
ordonné. —
^ Si Pharaon vous dit Montrez-nous quelque signe ou quel-
: terrevous adore. (Ps. Lxv, 4.) — ' Je frapperai toutes tes terres, en les
ijue prodige, Vu diras à ton frère Aaron Frens ta verge. : couvrant de grenouilles.
340 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

et super servosf nos ascendent ranœ '. Remarqncz on lit, immédiatement après,
qu'ils ne purent v
qu'en disant iu domuscic, l'éciivain sacré se sert réussi)-, en résullequ'ils n'ont pas fait la même
il

de l'accusalif, et qu'en disant et super lectos elc, chose, mais seulement qu'ils ont essayé. Ou bien
avec super, il emploie également l'acrnsalif si l'on suppose que, tout en se servant
;
d'enchan-
mais qu'étant arri\é à in eonsperiset in rlibnnis, tements, ils étendaient une verge, et faisaien'
il prend l'ablatif. Cela vient de ce que le grec en apparence ce que faisait Aaron, bien que
change la pi-éposition, ce (|ue ne fait pas la ver- l'Ecriture se taise là-dessus, c'est dans ce sens
sion latine. Car on lit d'un côté eiç tov; or/.wi, laudra entendre
qu'il : « ils firent la même
in domos, et de l'autre ev toFc cpvpafxzffiv, in « chose. »
eonsperis, ce qui ferait croire à un sens particu- 21,22. Et in terram super rpiamsunt super eum.
lier, plutôt qu'à une simple locution, de telle Et (jloriosam faciam in die illa Gessen, in qun
sorte que, dans la pensée de l'écrivain sacré, populus 7neus inest super eam i.
les grenouilles auraient pris naissanceau milieu 2t). « Moïse répondit Quand je serai sorti d'au- :

des aliments et dans les fours, sans venir de l'ex- « près de vous, je prierai le Seigneur et tous les ;

térieur conune ilestdit qu'elles devaient sor-


et « moucherons se retireront de Pharaon
;
et de ses
tir dulknue, ellesseraient parties de là pour rem-
«serviteurs;» comme si celui à qui il est dit:
plir toute l'Egypte. « Quand je serai sorti d'auprc.s de vous, » n'était
6. Et Aaronminunn super (iquas Jùinp-
extetidit pas le même Pharaon, de qui les moucherons
ti et edu.iil rimas, et eduda est rana et vperuit devaient se retirer.
terram '. Ou \oit que dans la répétition de rana C»Ai>iTP.E I\. — 1. Dimilte papulum meum, ut
l'écrivain sacré est allé du pluriel au singulier; mihi serriant''-.
car le singulier rana est mis pour une nudtilude 18. 24. Ecce ego jiluam, liane horam, crastinam
de grenouilles. Je ne m'explique pas comment diem, grandinem muUum. Grande ntitem multa
l'esprit humain a pu s'habituer à cette manière l'aide valde 3.

de parler, el trouver une signilicalion plus éten- 29. Et desinent races et grando '*.
Il est à re-
due dans le singulier que dans le pluriel. Ainsi marquer que l'Ecriture emploie le mot voces,
on indique plus, en disant Le soldat est là, que si :
pour désigner le tonneri-e. C'est de ce même
l'on disait Les soldats sont là ; eu disant Le pois-
: : terme que Pharaon s'est servi précédennnenl,
son est là, que si l'on disait Les poissons sont : quand il a dit Orate pro me ad Domimtm, ut
:

là. desinaut jieri voces Dei-'; oii l'on voit une secon-
[A.EtcoUigebanteasdcervus arerros^. La répé- de locution dans ces paroles : Desinant jieri

fion de arervos exprime le grand nombre des voces.


monceaux : l'Ecriture emploie volontiers cette Ch.vpitre X. — 2. Ut narretis in aures filiis

forme. vestriset fiiiisliliorum vestrorumquœcumque illu-

16. On lit dans les versions latines : E^iende si jEguptiis 6. Remarquez ici le sens de illusi ;

manu virijam tuani, et percute terra ^, au lieu de car il a peut-être la dans ce même signification
percute terram.Le grec porte aggerem terrœ, un passage des psaumes Draco hicquem finxisti ad :

amas de terre, si toutefois ce mot rend lidèle- illndendum ei '; et dans cet autre de Job: Hoc f.sf
ment le sens de ri -/muv. rrjç, yr,ç,. initium jigmenti Dumini, quud fecit ad illuden-
18. a Les magiciens tirent la même chose par dum iib angeiis ejus *.
i

« leurs enchantements, afin de produire desmou- 4. Ecce ego induco, hanc horam, crastino die,

« cherons, et ils ne purent y réussir. « L'expression locustam multam ''. On peut faire ici la même
« ils firent » est mise pour « ils voulurent faire : » remarque que nons avons faite plus haut sur le

car, s'il est vrai (|u'ils ont fait la même chose,


ils ont dû produite des moucherons; or, comme
'
Et dans tous les lieux qu'ils habitent.Et ce jour-là je ferai éclater la

gloire de la terre de Gessen, où demeure mon peuple. — - Laissez aller

mon peuple, afin qu'il me


rende le culte qui m'est dû. — Demain à cette
heure, je ferai tomber une horrible gréic. Or la grêle était d'une
même
' Le fleuve produira uuc multitude de en sortirent
grenouilles ; elles
violence extraordinaire. —
tonnerre et la grêle cesseront.
< Et le

pour se répandre dans votre maison, dans les meubles de vos chambres
5 Priez le Seigneur pour moi afin que le tonnerre ne se fasse
plus enten-
où sont renfermées vos provisions, sur votre iit. dans les maisons de ,

dre. - ' .\fni que vous racontiez à vos enfants et aux


enfants de vos en-
vos serviteurs et de votre peuple, dans vos aliments et dans vos fours
et ainsi les grenouilles vous accableront par leur nombre, vous, votre
;

fants de quelles plaies j'ai frappé les Egyptiens. — Ce monstre que


'^

peuple et vos serviteurs. - 2 Aaron étendit la main sur les eaux do vous avez formé pour se jouer des mers. (Ps. cm, 26.) « 11 est —
un
l'Egypte et en sortir une grande quantité de grenouilles et les gre- le premier parmi les ouvrages du Seigneur, qui l'a créé pour être
fit

nouilles, étant sorties; couvrirent toute la terre. — •* On


;

les amassait iouct dans la main de ses anges. (Job. XL, 14.)
" Demain à cette —
Cil mil.- multitude de monceaux.— Etends ta verge, et frappe la terre. même heure, je ferai venir une immense quantité de sauterelles.
I.IVRF. II. — LOCUTIONS ÏIRfiKS I>F, l'FAOnE. 341

soincul Cl, ".« Il s'éli'-vera un si grand cri dans tonte


mol )•((»«, c'ost-;i-(Hro,quolesin(ils oui

11110 si;iiiilic;(lion jiliis (•IcikIiic


,iiisiii^;iiru'r(iirau > retendue de l'Kgvple, que jamais on n'en a en-
pluriel. On \i)il clairomoiit fii cH'cI (|ii<' I'cx- « tondu, ol que jamais à l'aNonir on n'en onteii-
niultnw dit plus, (pu- s'il « (Ira lie semblable; mais parmi les enfants d'Is-
piTssiou InvHsUim y
wiilt(tf<. « raël, (lei>uis les hommesjustpi'auv bêles, on
avail hifiisids
(/»/ sinil qui ibunt '. Nous (li- « n'onlondra pas méiiu" un chien i)oiissoi' la
S. Qui iiiilem et

sons tous les jours, dans le style lrès-1'auiilicr, (c moindre phiinlo. » llioii do plus ologant (pic

quam quiet qui ilniut"! celte locution désignanl sous le noiude chien, le

\"i. i\(m est rclirtitw viride niliil in liijuis


''.
dernier des hommes et des animaux; elle expri-

Il fallait iliio, suivant les ivglos de iiolir langue: me très-bien le calme prolond dont jouissaient
you est relielum viride aliquid iii liijnis. U^s Hébreux, tandis (juo le deuil le plus amer
1(5, 1". Pernivi tmte Dominum Deum vestrum airachait de grands cris h tous les Egyptiens.

et iii vnhis; suscipile erqo delirtum me»»! •'; ainsi CiiAi'iTiiU \ll. — •!. .irripiant sinijuli ovcm
piu-lait IMiaraon à Moise. Nous avons vu cotte perdomospatriarum '. llost dilïicile do délermi-
niônio locution ouiplovée paiiest'rères deJosepli, ner l'idée qu'il faut attacher ;\ /;(///•/«)» m. Veut-on
lorscpi'ils lui diront ..[rripciiiiquitiitcui serrarum désigncrpar là les villes habitées par un eorlain

Dt'i piitris lui '. nombre d'Hébreux ou no s'agit-il pas plul('>td(;s


y

Cette phrase de la version latine Et nemo


'le. : familles nombreuses descendant d'un même
l'iditfnitreuisuum tribus diebus'\ est exprimée père? Cette dernière signilication résulte plus
ainsi dans le toxlo urec Kl non ridit nemo fni- : clairenionl du texte grec.
trein suum. Komarquons encore le nonule l'ioro 4. Si autem pauci sint qui in domo, ita ut non
donné à tout en {iénoral.homme sint idoneiad ovem -'-,•
c'est comme s'il y avait: ut
H i. Celle phrase de t'haraon à Moïse et à Aaron ipsa paucitas non sit idunea ad ovem consumen-
est tirée mot pour mot du grec : Ite et servite dum. Dans la proposition suivante Assumet sé-
:

Domino Ih'o restro: prœter ores et boves, relin- rum vicinum proximum .viurn •', assumet, a pour
quite «. C'est une locution tout-à-l'ait inusitée ; à sujet domus; proximum est mispour/(ci)»/»('»i, et
moins qu'on ne rapporte à la proposition précé- le singulier est employé pour le pluriel car on ;

dente les objets exceptés, et qu'on ne lasse de re- devait prendre non pas un homme seulement
une préposition à part, ayant pour coii-
linquite mais autant qu'il en fallait. Enfin en parlant
plémont sous-entendu ista, en sorte que l'ordre de manger l'agneau, l'Ecriluro dit Serundum :

naturel serait : Ite, pnrter ores et boves, et relin- numerum auimarum unu.squisque quod sujjiriat *,
quite ista ; ce serait alors une ellipse, dont l'u- oùronvoil anima mis pour homo, bipartie pour
sage est si fréquent dans les locutions de l'E- le tout.
criture. 7. Sument a sanyuine et ponent super duos pos-
-26. « Nous ne laisserons pas la corne de leurs tes, et sujier limen in domibus, in quibus mandu-
«pieds, conimesi lestroupcaux pouvaient par-
»
rabunt illas in eis >. Après avoir dit in ([uibus,
tir sans la corne de leurs pieds. Que signilîc donc on ajoute encore in eis : c'est une locution très-
cette phrase, sinon: Nous ne laisserons rien, pas commune. Maintenant à quoi se rapporte illasl
même la corne d'un pied? Evidemment à carnes, puisqu'on Ht au verset
:28. Ces paroles do Pharaon à Moïse Attende :
suivant Et manducabunt rames liae aorte as-
:

tihi ultra apponere faciem meam ', sont mises satas igni ". Ce qui confirme notre assertion,
pour Attende tibi ne ultra videiis fariem meam.
:
c'est que le synonyme grec du mot latin rarnem,
Chapitre XI. —
-l. Etpetatunusiiuisque a jini-
xpÉa;, étant du genre neutre, les cxonqilaires
aimcsuo et muliera proxima rasa arqentea et au- grecs ne mettent pas illa mais illas in domi- :

rea et vestem^. Kemanpioz la qualification de pro- bus, in quibus mandurabunt illa in eis. Cette lo-
.rimus donnée aux Egyptiens eux-mêmes à l'é- cution, en hupioUo l'écrivain sacré a
vertu do
gard des Hébreux. mis illas, avant d'indiquer à quel mot de la phra-
Qui sont ceux qui doivent y aller
' —
- II ne reste plus aucune
.'

feuille sur les arbres. —


^ J"ai péché contre le Seigneur votre Dieu et

contre vous; pardonnez-moi ma faute. — * Oubliez l'injustice de ceux Que l'on i)rcnnc un agneau par maison.
' - Mais si les personnes—
qui servent le Dieu de votre père. (Gen. L, 17.) 'Et pendant trois — de la maison sont en trop petit nombre, pour pouvoir man.;er l'agneau.
jours personne ne put voir son frère. —
* Allez rendre vos devcirs au — 3 Chacun appellera son frère, qui habite près de lui. ' .Vutant de —
Seigneur votre Dieu et laissez seulement ici vos brebis et vos bœufs.
; personnes qu'il en faudra. —
' Ils prendront de ce sang, et en marque-
— Garde-toi de paraître désormais devant moi. Chaque — '^
ront les deux poteaux et le linteau des portes des maisons où l'agneau
homme demandera à son voisin, et chaque femme à sa voisine, des sera mangé. -• * Et cette même nuit ils en mangeront la chair rotic au
vases d'or et d'argent et des véteraets. feu.

342 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

se suivante il \c faisait rapporter, est la même hi data erant ^, où les mots om»!?, qucecumque tibi

que celle qu'il emploie quaml il nous apprend )irt/« c;v(»/, nesont que la répétition de la locu-
qu'un ange voulait faire mourir le (ils de tion précédente.
Moïse. Nous en avons donné l'explication dans {^.Omne adaperiens vnivam asinœ i,
le grec
les Questions sur l'Exode ', et à cette occa- porte asini en vertu d'une locution que
et cela
sion nous avons l'apporté l'exemple suivant tiré nous avons déjà signalée dans la Cenèse. Nous
des psaumes Fuudamenta ejus in montibus sanc-
: avons vu, en elTet, le masculin employé pour le
DomiiuisjwrtasSion'i, où l'on ne sai'
tis,(liU(iit féminin, quand il est dit à l'occasion de la mort
de quelle cité sont ces fondements, que par les de Sara Surqens Abraham « morfi/o '^ au verset
:

paroles qui suivent. De même dans cette phrase : suivant Sepeliam mortiium meum^. De sembla-
:

/» quibus mandurabiint illati in cix, qui équivaut bles expressions reviennent souvent dans ce
à celle-ci : in quibu.t dumibiis mnndncabnntillas, chapitre.
on ne voit que plus tard, quand le mot rames immolo Domino omne quod
lo. Propter hor eqo
est exprimé, le sens qu'il faut attacher à illas. aperit vnivam, masrniina ^ cette locution ne dif- :

"Vousprendrez un bouquet d'hysope, vous


22. fère pas de celle que nous avons vue plus haut.
«le tremperez dansle sang qui seraplacé à l'en- 16. Et erit signum super manum tuam c'est •'»;

«trée devotre maison, et vousteindrezdece sang comme s'il y avait super opéra tua'^ : peut-être est-
« le linteau et les deux poteaux de chaque porte. » ce un sens particulier , plutôt qu'une locution.
En disant « un bouquet d'hysope, » on veut Chapitre XIV. — 27. Et
Dominas JEqy- ejccussit
sans doute signifier plusieurs bouquets, comme ptios in médium maris. ' on lit dans le grec Et : :

nous avons vu plus haut « la grenouille » mise ercmsit Dominas ^Eqyptios médium maris.
pour une multitude de grenouilles, et « la sau- 31. Viilit autem Israid manum maqnam, quw
« terellc » pour une multitude de sauterelles. Il ferit Dominas .Egyptiis **.

faut avouer cependant que cette figure rend la Chapitre XV. —


1 Tune cantavit Moyses et [ilii

pensée bien obscure, quand ou l'emploie sans y Israël cantiram hor, et di.verunt direre^; c'est la
être autorisé parla coutume. reproduction du grec /.ai ei'tt^v \tydv.
26, 27. Et erit cum dicent ad vos filii vcstri : 22. « Et ils ne trouvaient point d'eau pour
Qaœ est servitus ista ? Et dicetis eis : Immolatio « boire ; « il n'était pas nécessaire de dire « pour
pasrlia hor llominu '; il suffisait de dii-e : dicetis « boire. »

eis, sans la conjonction et. Et murmuravit populus adversus Moysen,


2i.
28. Et advenie)ites fuennit filii Israël, sicut direntes;on a mis dicentes '"; au lieu de dics, par-
prœcepit Dominas Moysi et Aaron, ita fererunt'*; ce (ju'un peuple est la réunion de plusieurs in-
l'addition de;7n feventntn'c?\ qu'une locution fa- dividus.
milière à l'Ecriture. Chapitre XVI. — 1. Et venerunt omnis syna-
o2. Et fartam est, in die illa eda.iit ftominas (joqa filiorum Israël ineremum >' ; on n'a pas mis
filiosJsrai'l de terra Eçnjpti '='.
venit, attendu qu'il y a plusieurs personnes
CH.iPiTUE XIII. — 1. Ait autem Dominas ad dans une multitude.
Moysen direns ''\ 2. Mnrmurabunt munis synagoga fiUorum Is-

12. Omne adaperiens vulvam, mascalina '. Ici raël adversus Moysen et Aaron •''; c'est encore la

le pluriel est jointau singulier; c'est qu'en effet même locution.


omne adaperiens ne s'applique pas à un seul, Le Seigneur dit à Moïse Je ferai tomber
i. « :

mais à plusieurs. On \ oit une locution sembla- «pour vousdu pain venu du ciel. Dieu devait !>

ble dans ces paroles: Atlendtte, papale meas La >^. doimer la manue, et il promet du pain c'est ;

même chose se remarque encore dans la suite unelocutionquidésignesouslenomde pain toute


du -verset qui nous occupe Omne qaod aperit :
espèce d'aliments. Remarquez encore comme
rnivam dearment-is et de pee(>r!inis,qa<vcnmqaeti-
'Tout premier-né de l'âne. —- Abraham ayant cessé de pleurer son
' Lîv. II,

Ses fondements sont posés sur tes saintes
quest. II. 2 mort. (Gen. xxlll, 3.) —
' Que J'ensevelisse mon mort. ' C'est pour- —
montagnes; le Seigneur aime les portes de Sioii. (Ps. LXXXVl, 1,2.) quoi j'immole au Seigneur tous les mâles premiers-nés. —'Ce sera
— ''Et quand vos enfants vous diront t^uel est ce culte religieux ' : pour vous un mémorial en votre main. ' En vos actions. Et le — — ''

vous leur répondrez : C'est la victime du passage du Seigneur. — * Les Seigneur renversa les Egyptiens au milieu des flots. * Israël vit —
enfants d'Israël, étant sortis de là, firent ce que le Seigneur avait or- alors les effets prodigieux, que la main du Seigneur avait opérés con-
donné à Moisc et à Aaron. —
^ Et en ce même jour le Seigneur fit sortir
— tre les Egyptiens —
».\lorsMo'ise et les enfants d'Israël chantèrent c«
de l'Egypte les enfants d'Israël. • Dieu dit à Moise. —
' Tous les cantique au Seigneur et ils dirent. —
'" Le peuple murmura contre

mâles premier.s-nés. —
^p>outez, ô mon peujile. (Ps. Lxxvll, '). M. lise, en di-sant. —
" Et tniiH' la multitude des enfants d'Israël entra
" Tous les mâles premiers-nés que vous donneront vos bêtes de somme dans leJcser!. — i^Toute la multitude des enfants d'Israël murniu-
et vos troupeaux. rail contre Mo'ise et Aaron.
MVHK II. — LOCUTIONS TIIUÎKS DK L'KXODE. .U:i

^ rEcrituir so plaît à dire «des pains » au (iliiiicl, CnAi'iritio Wll. — I. .\iin cral aulcni jnqmhi a-

au lieu (roMipldjtT le siiiunlier. qua hilicrc i; il l'allail ad bibcnduni.


7. 8. Moisi- dil : Mkiu' riiliiiitis ifloviiim, dum cr- 2. Kl nudcdiccbat jiiqïulus ad Moijsen '', comme
(ludit't miirmunitioïK'in vcstntm siijk'r Dt'uiii ', s'il \ avait malediclix aqebal Mdjiscn, ou simple-
eouuues'il y avait f/»/" munnunitis suik-r Ih'itm; ment mulcdicebanl illi, iiinsi (pi'on le voit dans

et ces derniers nu)lsé(iuivaleiit;\ adivrsus Denni. la réponse de Moïse malcdicitis mihi


: Quid •' \'

Il tant renianiner ensuite la nouvelle acception 3. Et muvmuravit impalus ad May.sen dicentes ':
doiuiée au mot iwaudire, i\n\ a jiour olijet ici, non o. Et rirqidii, in qua jicrcus.Histi llumen, acci-
plus des prières, mais des nuuiuuros, et des jic in manu tua • : ct>s piu'oles : in qua percus-
nuMinures que rKcriiure condamne. Moïse veut sisti, é(juivident l'i la l'orme ordinaire, de quuper-
dire (jiie Oieu a eu connaissance des niurmii- cns.^isli; c'est mie locution très-comnmne dans
resdes Israélites, cl c'est celleconnaissauceiiu'il l'Ecriture.
exprime par le mol exauditio. Chapitre XVlll. — l^. /*.'/
sumpsit Jotlwr sacer
*J. Arc'dilc aiiti' Deiim; e.vinidirit l'iiim ïitin- Mojisi li<iloraufi>niata cl sacrificiaDca sunipsil i'
;

mitr vcstni))! ''.


Le verbe CKiiidire s'eidend en- est mis ))our (ddalit. Voiidr;iit-on trouver ici non
core ici, non des prières ou des demandes, mais une simple locution, mais un sens parliculiei',
des nuu'nuu'es des méchants. L'n peu plus loin, coimnesi Jothor avait présenté les victimes offer-
Dieu répète la même expression ; l'^.vtiuilivi tes en sat'iilice [)ar Moïse? Jusqu'iilors cependant

mitrmur liliorum Israël '. on n'a pas vu qu'aucun sacrifice ait été offert soil
14. El ecre in facie cremi miinititm tanquinn par Moïse, soit par Aaron, soit par quelque autre
coritiiidniin <. Quand l'Ecriture dit si sou\ent d'eiitre les Hébreux sortis tle la terre d'Egypte ;

faciès terne, connue ici faciès eremi, on on lit seulement que iMoïse dressa im autel, el
s'élonne que certains esprits en entendant le (ju'il l'appelad'un nom qui signifie « Le Seigneur :

mol/'ar((',s, puissent encore sereprésenter la l'ace « est mon refuge ". » Au contraire l'Ecriture nous

d'un lionnne ou de qnehiue être animé. a déjà appris que Jotlior était un prètie de Ma-
Secunduin numerum animarum restrarum
U). dian, c'est -;"i-dire de la nation des Madianites. Il

unusquisque ciim commanentibus vobis colUgite '".


serait donc étiange que, à l'arrivée de son beau-
On ne saurait dire combien de l'ois le mot aiiiiiKv père. Moïse eût commencé à exercer l'ollice de
dans l'Ecriture, sert à désigner des personnes ; sacrificateur, au lieu de laisser cette l'onction i'i

c'est la partie prise pour le tout. Le mot carnes Jothor, qui était déjà prêtre.
ne pouvait guère avoir cette acception; mais il 18. Grave libi verbum hoc ^; le verbe csl est
en est autrement du singulier (7//'(i, connue dans sous-entendu.
ce passage des psaumes : Non titnebo quid milii 20. Et demonstr'.dns illisrias, in quibus ambu-
faciat caro'\ rendu plus clairement
ce qui est labunt in eis '>.

dans le même psaume Qaid mihi facial lioino. :


-20. Verbum aulem (jrave referebunt super Muji-
L'écrivain sacré n'aurait donc pas mis .SV- :
sen 1" : ainsi s'exprime le texte grec; les versions
cundum numerura carnium veslrarum, comme latines ont mis ad Moi/sen. Celte locution super
il a pu mettre Secundum numerain animaram
:
Moysen est rès-propre à exprimer la sollicitude de
t

restrariim.
Moïse, où à marquer le fardeau qui lui était hn-
'21. Et collajerunl illud mane mane '
; mane posé. Verbum aulem grave est mis pour quœstia
mane présente la même locution que initeos pii- qravis, comme on le voit par ce qui suit: Omnc
leos, et arerras accrvos. aulem verbum levé judicabant ipsi ".
i9. .\'ullus cestrum eyredialur unasquisque de
Chapitre XX. 24. Le mot du texte grec—
loco suo die septimu «; on pourrait se dispenser tm^ojxxcKj} '2, est rendu dans toute sa force par
d'intercaler unusquisque. supcrnominaverii, ou adnumiiiaveru; mais l'ex-

Demain vous verrez éclater la gloire du Seigneur, lorsqu'il vous


I

I
II ne se trouva point d'eau à boire pour le peuple. — ^ Et le

montrera qu'il a entendu vos murmures contre lui. Approchez de — peuple maudissait Mo'isc. —
^ Pourquoi me maudissez-vous ? * Le —
Dieu, car il a entendu vos murmures. ' J'ai entendu les
mur- — peuple murmura contre Moïse en disant. ' Prends en ta main —
mures des enfants dTsraél. —
* On vit paraître sur toute la
sur- la verge qui t'a servi à frapper le fleuve. Jothor. beau-père — "^

face du désert quel ne chose de menu comme la graine dccoriandre. de Moïse, olfrit à Dieu des holocaustes et des sacrifices, ' E.\od. —
— = Que chacun en recueille en
proportion du nombre des personnes -vvii, 15. —
» Ce travail est au-dessus de vos forces. » Vous leur —
qui sont dans sa maison. —
Je ne craindrai point ce que les hommes
i^
montrerez la voie par laquelle ils doivent marcher. " Mais ils ren- —
pnurront faire contre moi. (Ps. lv, 5.)— Ils la rornc.ii:ren- de

voyaient à Nr.Vïso les araires les plus difficiles. — "Poureu.v, ils dé-
grand matin. — * Que personne d'entre vous ne sorte de sa tente le scn- cidaient seulement les questions les plus faciles — '^ Je fixerai mon
lièrae jour. nom.
344 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

pression la plus usitée est rofjnomrnavero, choisie tume de désigner ainsi un temps passé, quelle
par quelques traducteurs. Ce verbe ne répond pas qu'en soit la durée; c'est la partie prise pour le
entièrement au mot grec, toutefois il est préfé- tout.
rable kninninavero, que l'on trouve dans d'autres 33, 34. quelqu'un ouvre ou creuse une
« Si
traductions. « fosse sans la couvrir, etqu'un veau ou un âne
Ibid. « Je viendrai à toi, etje tebénirai. » Toul- « vienne à y tomber, le maître de la fosse res
à-l'heure Dieu employait le pluriel en disant : « tituera. » C'est une locution, où la partie est
« Vous ferez et vous immolerez; » maintenant il prise pour le tout : car si un cheval ou une bre-
emploie le singulier : « Je viendrai à toi, >> connue bis tombait dans la fosse, on ne serait pas sans
si ce qu'il dit au peuple s'adressait à la personne doute dispensé de restituer, par la raison que le
même d'Israël. cas n'est pas mentionné.
Ch.vpitke XX.I. — i, 2. « Voici les lois concer- 34. Qiiud autem murtiium fuerit, ipsi erit ', il

« nant la justice que tu leur proposeras : Si fallait ipsitis erit.

« tu achètes un esclave hébi-eu, etc. » Remar- Chapitre XXII. — 5. Si autem depaverit quis
quez ce genre de locution. Dieu dit à Moïse :
iKjrum (Dit vineam, et admiserit pecua suum de-
« Voici les lois concernant la justice que tu leur pascere (Kjrum alium 2; uHum est mis pour alie-
« proposeras. » Puis, il dit au peuple, comme num.
s'il lui-même « Si
continuait de parler à Moïse : 26. « Si tu reçois pour gage le vêtement
« tu achètes un esclave hébreu. » Ce n'est pas « de ton prochain, tu le lui rendras avant le
à Moïse cependant que s'adressait la suite du dis- « coucher du soleil. » Ici le genre est mis pour
cours, mais au peuple, à qui il était chargé de l'espèce. Au premier abord, on croirait qu'il est

répéter ce qu'il avait entendu. question de tout \ élément donné en gage ; mais
domiuus aiiricukim de aiihuhi,
6. Pertuiulet ei cette loi est faite exclusivement en favem' de
etserviet eiin sempitenuim, ou bien iii wtennim •; l'homme, qui aurait engagé le seul objet qu'il
le grec porte da tov cÙ'mv.. Les mots latins sem- ail ])our se cou^rir pendant la nuit, comme la

suite du texte le fait voir.


piterntim, œtennini, traduction de cette expres-
sion grecque, ont sou\ent, dans l'Ecriture, le
Cii.vpiTRE XXIII. —
20, 21.£fce egomittouuije-

même sens qu'ici œtt'nvn». Ils ne désignent pas lum meum iiute faciem tuam,ut servet te in via, et
immua- induratte in temim quampuravi tibi; ante te ibit
cette éternité durant laquelle des biens
et exaudi eum s. En recommandant au peuple
bles nous sont promis, tandis qu'un feu éternel y
d'écouler cet ange. Dieu emploie le mot exaudi,
est réservé aux méchants. En effet, cet esclave
quoiiiue ce soient des ordres, et non des prières,
qui ne pouvait vi^re éternellement, ne pouvait
non plusservir éternellement. L'expression wter- que l'ange doive adresser au peuple.
28. Kt mittam vespas ante te, et ejieiet Amor-
7mm s'applique donc à inie chose dont on ne voit
rliœos''. Ainsi l'écrivain sacre passe du pluriel au
pas latin. Tout au plus pourrait-on dire, qu'elle
renferme un sens mystérieux relatif à l'éternité.
singulier. C'est comme s'il y avait: Ejieiet Amor-
donc employé de la même
rliœus vespa. Vespa est
13. Daho tihi locnm, iu qnem fu(\i(it ibi qui oc-
manière que rana et lorusta, non pour désigner
ciderW^.
un seul hvlon, mais pour exprimer la pluralité
20. Si quis perçussent servum suum aut ancil-
par un nom singulier.
lam suom ?» rirgn *; il fallait mettre r/f virga.
30. /*('/ parles ejiciam illos a te ^.
28. Lapidibus lapidiibitur taurus '^, comme si
32, 33. .\(in disponesillis et diiseorum partum,
l'on pouvait lapider autrement qu'avec des pier-
un pende celle où l'on et twn consident in terra tua, ne peccare le facianl
res. Cette locution diffère
dirait, en imitantde l'Ecriture lapida-
le style :
ail me on ne lit pas in me, mais le sens est le
'*
;

tione lapidabittir cependant ces deux formes ont


;
même.
beaucoup de ressemblance.
letau-
I
Quant àl'animal qui aurapéri, illui appartiendra —' Si quelqu'un
29. « Mais si, la veille el l'avant-veille,
cause du dommage dans un champ ou dans une vigne, en y laissant
« reau fi-appait de la coine. » L'Ecriture a cou- aller sa bête pour manger ce qui n'est jias à lui. — ' Voici que j'en-

voie mon ange devant toi. pour te garder pendant le chemin, et te

conduire dans la terre que je t'ai préparée, il marchera devant toi


sois fidèle à l-'écouter. —
* J'enverrai devant toi des frelons, quj
Son maître lui percera Toreille avec une aîène. el il demeurera son
' mettront en fuite les Amorrhéens. —
*Jc les di.asserai peu à peu do
esclave pour toujours. —
' Je te désignerai un lieu de refuge pour devant toi. —
« Tu ne feras point d'alliance avec eux ni avec Icv

celui qui aura donné la mort â quelqu"im. —


' Celui qui aura frappé son dieux qu'ils adorent ils ne demeureront
; point dans ta terre, do

serviteur ou sa servante avec une verge. —


Le taureau sera lapidé.
* peur qu'ils ne te portent à m'olfenser.

i
.

LIN Kl-: II. — LUCITIONS TlllP.KS l)K l/KXODi;. aiïï

r.iiu'iTUK WIV. — H. Itesininilil iiiiti-m nniiiis tr(''\ilcr le solt'cisiue. .Mais comme le dalil' intni-

^ lioimlus raci- iiiia, tlitrutes '. ( anti, se trouve d.iiis le grec, et qu'il a même
10. lu ridt-nint lorum iihi stctcnil ihi Dcks Is- piissé dans ipieUpies versions latines, j'ai iiiii'iiv

rui'l 'l; ilsiillisait ili'iiii'lliv ///>/ sti'lrral ; iiimIs ces aime si^;n,'dei' celle Inciilion, (pie de la coiriger.
sortes (le loctiliims soiil adiiiisi-s en lichiTii. -IL El jiunes super ratiinale judieii linihrias ru-
CiiAiMTiiE XX.V. — l-î. l'A intiurdbisilUniHVo •'; lenatd '. Uuel(pies traduclenrs latins, pour éviter
c'est une lo iilii)ii du mèiiu' •^ciirt' (|iii' Uipiilibnn le solérisnie, ont mis fimbrias eateaatas; mais le
hipiddhit'ir ' grec porte -olc, xoot'îo'j; tx a/.joi'jorc/.. Nous
:2t>. Cyiitlios iii quibtix immnliihiiiit iii fis '>.
appelions locution absolue celle sorte de locu-
ChaimthkWVI. — 19. Dims buses rnliDimn-iaii lion (pii joint le genre neuire au jicni'e m;is-
iii'/iiiibds jKiiit's t'ju.i, l'I (liias bases nihdiiua' in am- ciiliii ou léiiiiiiiii, (hms celte pliiase .las-
('innine :

IxtsparteH ejits de parler de toutes les


''. Au lieu tiliie terrenœ nou saut stabilia ''.

colonnes en général, l'I-ÀTiture ne parle (pie de 3o. Et Aartni eum neperil funip surerduliK, au-
deu.\, en répélani ees luèuies mois, par une lo- dietur rax ejus intranti in sanrtani in enaspeetu
cution (jui lui est Irès-l'annlière ; e'esl ainsi (pi'elle hiimini et exeunti ^. Sonus ejus, eut élé inieu.v
dit piileos inile(>s,iicerros iicerras, tieiieriitiotes et clioisi (pie rox ejus pour exprimer le bruit des
geiieratioiies, et autres expressions seinblabU's. sonneltes. Intranti et exeunti est mis pour ins-
'3^. Et eiilidniKis iuiiunihis (iiirn, et iiiininibis tranlis et ex"untis, c'est le didi! en place du gé-
'.
seras auiv iiilil.

Chapitre WVll. — (i. El iiKrrabisea a'ruiiien- Chapitre XX1.\. — l;!. El dims renés etiiilipem
((( ^; cette loculion est la inènie (|iie la préc'- ipiie super eus ', il |;uit sous-eiileiuli'cN'x/, (jiie pln-
dente iituurabis aura. sieiiis traducteurs ont expriiiK-.
-2[. E.vtra rehim, quod est stiiier Testanien- Et sepurubis
-21. illud separatione >.

liim ". Ainsi s'exiiriine l'écrivain sacré, en par- Chapitre X.XX. — 8. EJt eum aeeeadet Aaron
lant des lampes qu'on «levait allumer. 11 veut lurernus, sera inrendet super illud '. Seruesl mis
dire que ces lampes devaient brûler an dehors pour respere, c'est encore une locution emprun-
dans le Saint, et non pas à l'intérieur du voile tée au grec, où on lit (j'|£. Le mot sero, dans:

placé devant l'arche, dans le lieu appelé le Sainj le sens |)ropre, ne se dit guère (pie d'une action,

des Saints. 11jà propos du mot


ne faut donc pas, qui se fait postérieurement au temps où elle
super, se figurer quelque chose de semhialde ici aurait dû s'accomplir.
à un toit, à une voûte, au firmament du ciel, ou 12. Si aeceperis nnnputatinnem lili(nuni Israël

à un couvercle pour l'arche ce mot indique :


in risitatione eorum, etdabunt sinfiuli redemptio-
iciune séparation tenant lieu d'un mur. Nous nem aniinœ sute Duntino, et
non erit in eis ruina
disons de même qu'un supérieur se couche ou in visitatione eorum, et hoc est quod dabunt tibi ?.

se tient debout, sans prétendre affirmei- (ju il soit Il y a ici une locution (pii n'est pas sullisamment
supporté par un autre. déterminée, parce que l'intercalation de la con-
Legitimum sempiternitm in pmiienies res-
Ibid. jonction cf jette de l'incertitude siu-le sens. Tout
tras tant prendre senipiterniim dans le sens
"'. Il deviendrait clair, si on la supprimait de l'un ou
que nous avons longuement expliqué plus haut. l'autre des trois membres de phrase où elle se

Ch.vpitreXXVHI. '2[.-~EtsumetAarun nomina houve. D'abord dans ce passage Si aeceperis com- :

(iliorum Israël super ratimiale jailicii saper peetus putationem liliorum Israël in visitatione eorum, et
iiitmeunti sanetum 'i. Les règles de la grammaire dabunt sin(juli redemptionem animœ swe Domi-
demandaient intrviens in sanctam, puisque /;;-
no; si l'on mettait shnplement dabunt, au heu de
troieus se rapporte à Aaruii et dabunt, on aurait le sens unique et bien déter-
; c'est ainsi que plu-
sieurs traducteurs latins se sont exprimés, alin

Tu adapteras au rational du jugement des franges en forme


'

' El le peuple répondit tout d'une voi». — ' Et ils virent le lieu où de chaînes. —
^ La justice des hommes est changeante. ^ Et lors- —
|e Dieu d'Israël s'était manifeste. i —
Et tu les couvriras d'or. — qu" Aaron, pour exercer les fonctions de grand-prètre, entrera dans le
»II sera lapidé (Gen. xxi. 23).— Des tasses devant servir auï liba- sanctuaire devant le Seigneur, ou qu'il en sortira, on entendra le son
tions. — Tu Iferas pour chaque coloruie deux bases, qui en soutien-
••
des sonnettes. —
^ Et les deux reins et la graisse 'qui les couvre.—
dront les deux angles. —' Tu couvriras d'or les colonnes ainsi que les
— — ^ Et tu le sépareras. — ^ Et quand Aaron allumera les lampes, il
barres. ^ Et tu les couvriras de lames d'airain. En dehors du '' brûlera le soir de l'encens sur l'autel. —^
"
Si tu passes en revue les
voile qui est devant l'arche d'alliance —'«Ce rit sera perpêtuclle- enfants d'Israël pour en faire le dénombrement, chacun donnera quel-
mînt observé par tes descendants. —
" Aarou gravera les noms des que chose au Seigneur pour le rachat de son âme, et il ne leur arrivera
enfants d'Israël sur le rational du jugement, qu'il portera sur sa poi- aucun malheur à l'occasion Jde ce recensement or voici ce qu'ils de- ;

trine pour entrer dans le sanctuaire. vront te donner.

S. AuG. — ToM. IV. 23


34f> LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

iiiiiio que ^oici : « Si vous passez en revue les (piels objets se rapporte uurea: aussi les inter-
« enfants d'Israël pour en faire ledénonibremenf, prètes latins ont mis qui habet aurum demat.
:

« chacun donnera quelque chose au Seigneur ÎÎ6. Quis ad Dvminum, reniât ad me 1.

Il pour le rachat de son âme. » Prcfère-t-on lais- il. « Ils se sont fait des dieux d'or; » et cepen-
ser ici la conjonction cf, alors qu'on la retranche dant il n'y avait qu'un veau d'or : le pluriel est

de la dernière proposition, et l'on aura ce sens: donc mis pour le singidicr. C'est dans le môme
« Ouand vous passerez en re\ ue les enfants d'Is- sens qu'il faut prendre ces autres paroles: « Voici,
« pour en faire le dénonibreinent, et que
rael « ô Israël \os dieux, qui vous ont tire de l'E-
« chacun donnera quelque chose au Seigneur « gypte '. Ce genre de locution, où le pliu-iel
»

« pour le rachat de son ànie, et (ju'ilneleur sera est mis pour le singulier, n'est reçu que quand

« arrivé aucun luallu'ur à l'occasion de ce recen- il peut y avoir ou qu'on peut se représenter plu-
« sèment, ils donneront ceci. « Si l'on maintient sieurs objets semblables à celui dont on parle.
la conjonction dans ces deux cas, du moins Ainsi, de ce (jue les Israélites n'aient qu'un fait

faudra- l-il le retrancher île la proposition inter- veau d'or, il ne s'ensuit pas, ni (ju'ils n'aient pu
médiaire : et )iiiii crit iii cis ruina, pour olitenir en faire plusieurs, ni que ce veau ne ressend)làt
ce sens qui n'a |)lus rien d'incertain : « Quand pas à un grand nond)red'idoles. 11 est dit pareil-
« vous passerez eu re\ue pour les enfants d'Isiacl lement (jue les voleius insultèrent le Seigneur ^,

a en faire !edénonibrement,et que chacun don- taudis qu'il est certain, d'après im autre évangé-
« nera quelque chose au Seigneur pour le rachat liste, qu'un seul a blasphémé * mais ce voleur ;

« de son âme, il ne leur arrivera aucun mal- n'était pas non plus le seul de son espèce. Même,
« heur. » Mais comme la conjonction est expri- quand celle locution s'applique;» des noms pro-
mée devant chacune des propositions, il y a une pres, ce dont nous n'avons pas encore trouvé
sorte de susjjcnsion, et la phrase reste inachevée. d'exemple dans l'Ecriture, il faut que ces noms
Voilà pourcpidi nous avons cru devoir signaler puissent désigner ])Iusieurs personnes ainsi cer- :

cette sorte de locution. tains auteurs ont pu dire « les Phèdres et les
Chapitre XXXII. — 1. (Àmsurrexit populus in « Médées, » bien que l'on ne connaisse qu'une

Aaron, et ilixcnivtei '


; c'estlàuneloculion très- fenune du nom de Phèdre, et une du nom de
comnnme, qui s'explique facilement, si l'on con- Médée, parce que sous ces deux noms ils enten-
sidère que le peuple se comjjose de plusieurs in- daient toutes les personnes semblables à Phèdre
dividus. 11 faut remarquer encore que le tout a et à Médée. Ou le voit, ces sortes de locutions ne

été mis pour la partie; car l'Apùtre rapportant ce s'euq)loient pas sans motif et sans discernement,
fait comme il s'est passé, ne rejette pas sur le connue des écrivains dépourvus de talents pour-
peuple tout entier la responsabilité de cette faute, bon goût; mais
raient le faire coidraiiement au
mais seulement sur queh|ues Israélites, puisqu'il elles sont soumises à certaines conditions et à des
dit « Ne soyons pas adorateurs des idoles,
: règles précises.
« comme l'ont été plusieurs d'entre eux 2. » CH.iPiTUE XXXIll. — 1. Vade,ad.scendeliinctu,
Ibid. « Lève-toi, et fais-nous des dieux (lui et populus fi/i/.v, (puis eduxi.sti de terra jEgiipti •"';

« marchent devant nous. » Aaron aurait-il été on n'a pas mis quem edu.viftti cette locution re- ;

assis, lorqu'on lui parlait ainsi? ou ne faut-il pas vient si souvent, que la forme régulière est de-
plutôt voir dans ces mots une simple Icoution ? On venue l'exception,
en rencontre souvent de semblables dans l'Écii- 5. Et di.rit Ihiminun : Depoiiite .s-fc/rw (jhiria-

ture, par exemple: « Levez-vous, Seigneur », « rum vextrarum et ruitum, et ustendam quid faettt-
et encore « Levez-vous, ô Dieu, et jugez la
: rus sum tibi La phrase commence avec le sin-
''\

« terre *. » gulier et se termine avec le pluriel, parce qu'il


10. Et Hunr nini' wi', et iratiis ira >; c'est la s'agit en même temps de plusieurs personnes et

même locution que mnrtr nwrictiir '•


: cette for- d'un seul peuple, connue le montrent ces paro-
';
me plait à l'écrixaiu sacré. les du même verset Vos populus dura eervice ;

24. Cui sunt aurca lUnnite '


: On ne dit pas à où l'on dit vos populus, au lieu de tu populus,

Si quoiqu'un est au Seigneur, qu'il se joigne à moi.-»


I
Ibid. 4.

'
Le peuple s'éleva contre Aaron, et lui dit. — 'I ad Cor. \, 7. — '
Matt. xxvii, 4-1. ' —
Luc, xulli, 38. * Va, —
sors de ce lieu,

ton peuple, que tu as tiré de l'Egypte. —''Le Seigneur


dit:
^ Ps XLIll. 26.— '•

Ib. Lxxxi. S.— ' Kt maintenant laisse-moi faire, il toi et

faut que je fasse éclater ma colère. — * 11 sera puni de mort. Si — '' (Quittez voshabitsdc fête et tous vos ornements,
et je vous montrerai

quelqu'un a de l'or, qu'il le donne. quelle conduite je vais tenir. —


' Vous êtes un peuple d'une tête dure.
LIVRE II. — LOCUTIONS TIRIÎKS DK l'KXODK. :u"

qnoiciiioni.ssoitaii i)liiiii'let /»(7)i//H.s(liisingiilior. d'un animal tué et rôti pourmit-elle dormir ?


CiiAi-nuK \\\IV. — 1 . l'^.icidftihiduns tabulas Ce passage des i)saumes'. Quare nbilorniis. Ho-
siriit fl jninKr "; il ^alllsolls-(Mlloll(l^^/|/('^M»^ aus- me ', présente donc une locution send)lablc

si, nos tradiK'Iciirs ont-ils jiinv à propos de l'cxitri- dont le sens est : Pourtpioi demeurez-vous en

(jiio la lanfiiic latine n'adtiiol jias inic repos? c'est-à-dire, pourtpioi ne prenez-vous
nuM-, |>arco
cllipsi' (If ci'lti" nature. pas notre défense?
1). « Si j'ai tron\éfii-iee iknant vous, (pie mon 'IX. L'l'".( rifui-e, iiarlani du jeùiie de quarante
jour obserM" p.u' .Moïse, s'cxpiime ainsi « Il ne
« Soipiunir \euille bien lonjoins marcher a\ee ;

« nous; » comme si l'on parlait d'une tierce per- « mangeapoint de ])ain et ne Iml point d'eiui : »

cette locution est très-commune. Mais elle prend la partie |iour le tout, désignant par
sonne :

comme c'est à Dieu (jue Moïse s'adresse, on doit le pain toute espèce de iionnitiu'e, cl par l'eau
penser au Père. Au contraire,
(prit parle du Fils toute espèce de boisson.
([u;ii;d i;iusa\oiis tiii.xé, en maint ci(!ioilde Cu u'iTRK XXXV. — i. Kt ait Moi/ses ad omnem
Israël, dicens
''
sens eut
riu-rilure, la même forme de langage emplojée stiiiiKjoijdm liliorum ; le

à l'égard de Pharaon et de Joseph, et d'antres été complet indépendamment de dicens.

encore, nous l'avons regardé comme une simjjle 2t. Kt attulerunt quod afferebat
unusquisque
loctdion. cor ei rum •'; on pouvait employer la forme ordi-
lo. ycqiiaiHlo ponas testamentum iis qui seilciit naire et dire Kt ottulit iinus(iuis(jue (jin'd offe-
:

super tt'iram ''


; c'est comme s'il y avait sedes ha- rebat cor ejns.
bent, ou habitant. Ibid. Kt quibus vi.-<um e.^t tinimw eorum, at-
17. « Tu ne feras point des dieux jetés en tulerunt demptionem Domino '; il fallait dire :

« fonte; c'est une locution, où la partie est


>> Kt sicut visum est aninur eorum.
prise i)our le tout. Car en ne nommaid (pie les 23. Et omnis cui inventum est opud eum co-

idoles coulées dans le moule, Dieu ne permet- da arietum rubricata '; les règles ordiindri^s de-

t ail pas pource la d'en fabriquer qui soient sculp- mandaient : omnes opud quos inventa sunt coria
tées, liallues au marteau, ou faites d'argile, ni rubricata.
d'avoir aucune espèce de sinudacres ou de di\i- 24. Oniuis afferensdemptionem onjentum et œs
nilés faites deniaind'honmie. 'ittuleru)itden)ptiones I)onuno''\ Omnisiittulit eut

Omue adaperiens vvlvain masculina


19. 3; c'est été plusconforme à l'usage, que omnis attulerunt.
comme s'il \ avait omne adaperiens ; rulvam apud quos inventa sunt apud eos li(]na
Ibid. Kt
mihi quw sunt masculina.
erit, ex iis imputribiliu
'
apud eos pou^ait être supprimé
;

20. « Tu rachèteias avec une brebis le prc- sans nuire au sens, mais on trouve fréquem-
« nùer-né de l'animal qui porte le joug; i ici ment de ces sortes d'addition dans l'Ecriture.
encore la partie est prise pour le fout. Car, si par- îlo.Kt omnis mulier sapiens mente, manibus
mi les bêtes de somme dont la chair réputée nere **, comme si l'on pouvait filer autrement
immonde, ne peut être ofTerte en sacrifice, il en qu'avec main. Sapiens nere est une locution
la

est qui ne soient pas assujettis au joug, il ne nouvelle, et pleine d'élégance. Quant à celle-ci :

s'ensuit pas qu'on ne doive point les racheter, ou Omnis mulier attulerunt, qui commence parle
qu'on doive les racheter autrement qu'avec une singulier pour finir par le puriel, nous en avons
brebis. vu précédemment des exemples. La forme ré-
Aon oceides super fermentum sanguinem
2o. gulière demandait -.Omnismulier attulit.
immolatorum meorum ^. Il va certainement une 26. Et omnes mulieres quibus visum est sensu
locution dans ces paroles oceides sanfiuinem, : suo, in sapientia nerunt pilos caprines^. l'Ecriture
qui équivalent à celles-ci : occidendo elfundes. désigne souvent par sapientia en grec, trocfi'a,

Ibid. Kt non donniet usque in mane immolatio l'habilité dans ces sortes de travaux.
Paschœ
solemnitatis ^ ; dormire, dormir, est mis
pouv manere, rester Seigneur pourquoi paraissez-vous dormir (Ps. xllll. 23).— 'Moise
comment en effet la chair
'

à toute l'assemblée des enfants d'Israél. —^ Chacun ap-


;
dit encore
portait des dons suivant la dispositiop de son cœur. Kt ils se pri- — *

vèrent, pour l'oiTrir au Seignenr, suivant leur bon plaisir,


d'une partie
' Fais-toi deux tables qui soient comme les premières. — 2 Ne de leurs biens. —
s Tous ceux qui avaient des peaux de béliers teintes

rontrartc pas d'allianre avec les hommes qui habitent cette terre. — en rouge. — ' Chacun apporta ce qu'il put d'argent et d'airain, et s'on
^ Tous les premicrs-ncs d'entre les mâles. ' Tu n'offriras point — priva pour l'o.lrir au Seigneur. —
Et ceux qui avaient du bois incor-
'

avec du levain le sang des victimes immolées.— s Et pour le len- ruptible. —


» Et toutes les femmes qui étaient habiles dans l'art de

demain matin il ne restera rien de la victime de la fêle solennelle lilcr. ' —


Et toutes les femmes de bonne volonté filèrent avec beau-
de Pâques, coup d'art des poils de chèvres.
. . —
348 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATELQUE.

28. Et compoi^itioiii's et oleiim iindionis et blaità un édifice et était bâti comme une mai-
composititiiii'm iuct'iisi ne faut pas supposer
'. Il son ? Que faut-il entendre encore par« le Saint ?»
d'autres compositions que celles qui sont ex- Est-ce le prêtre saint de tra- ? car il s'agit aussi
primées ici car, en mrtiuit la conjonction
; vailler à sarobe ou à ses robes. Veut-on parler
et après les mots et cumiwsitiones, on n'a pas de Dieu saint dont le culte était la cause de tous
voulu désigner des objets nouveaux, mais seu- ces ouvrages ? Ou enfin ce mot désignerait- il
lement expliquer ie mot précédent, et nous ce qu'on appelait le Saint, et le Saint des saints
apprendre ((uelles étaient ces compositions ; Ce n'est pas chose facile à voir.
c'était dit l'écrivain sacré, « de l'huile pour les Chapitre XXWL— lï.Humeraliu vmtinenlia
(t onctions et de l'encens. » i)n a donné à ces ex utrisque partibus ejus '. L'écrivain sacié n'a
choses le nom
de compositions, parce qu'elles pas mis ex utrisque purtihus eorum, quoitju'il ait
étaient formées de plusieurs matières dit liumeralia et non pashumerule qui lui est ce-
29. Et omnis vir et millier, quorum ufferebiit pendant plus familier; il a ilonc employé, pour
sensus eorum, ut iutrareut et fiirerentamiie djius désigner cet objet, le pluriel humeraliu, comme
quodcumque pra'rejiit Dnmitiutt fieri illud per Mo- lemot stohis pour désigner une robe.
ysen,attuIeruntlUii demptionem Domiiiu
Ii<riiël
''-.
CiiapitueXW Vlil.— 23. Et Eliah lUius Aehisa-
Omnis donc la même chose que
vir et mulier csi maeh de tribu Dan qui, (irrhitertoutitus est textilia et
filii Israël. Les autres locutions, contenues dans consutilia, et diversiroloriu, texere decoccoet bjis-
cette phrase, ressemblent aux précédentes. so'i. L'expression arehitectonari est une nouvelle
M. Faeereaurumeturfientum etœs^, revient à manière de parler. Dans cet autre membre de
facere ex uiiro et (injento et (ère car on ne faisait ; phrase : « faireet de fin
des broderies d'écarlate
pas l'or, mais on le travaillait. La même locution « lin, » pour le tout car,
la partie est prise :

se voit encore dans le verset suivant, où nous li- sous ces deux noms, nous entendons encore les
sons et operari liijna '',pour(',r Vupiis. autres étoffes, comme la pourpre et l'hyacin-
35, « Faire des tissus de tout ^enre pour ie the.
« Saint, faire différents ouvrages de broderie Chapitre XXXIX. — 31. Etfecenuit jHii Israël
« avec l'écarlate et le tin lin, et exécuter toute es- sieut prwrepit Dominas Moijsi, ita feeerunt '^; le

« pèce de travaux d'architecture. Ainsi on parle >-


sens eut été complet sans les mots ita fereruiit.
d'architecture lorsqu'il est question d'ouvrages Chapitre XL. 14. Et fecit Moyses omnia, quœ
à l'aiguille ; c'est, sans doute, parce que le ta- prœcepit ei D:iminus, /7(/fcr(7'i..\I>in^ remarque
bernacle qu'il s'agissait de construire, resseni- que pour la phrase précédente, relative aux en-
fants d'Israël
I
Et des compositions, c'est-à-dire de l'huile pour les onctions et de
l'encens. —
2 .\insi tous les enfants d'Israël, hommes et femmes, s'offri- ' qui pouvaient s'attacher des deux côtés.
Des rideaux ^ Et —
rent d'eux-mêmes à contribuer à l'exécution des ouvrages que le Sei- Eliab, d'Achisamach, de la tribu de Dan, qui excellait dans l'art
fils

gneur avait commandes à Mo'ise. et donnèrent au Seigneur une partie de tisser, de coudre, de faire des étolTes aux couleurs variées et des
de leurs biens. —
' Travailler l'or, l'argent et l'airain. ' Travaillait — broderies de tin Un. —
' Les enfants d'Israël firent tout ce q'.lo le Sei-

en bois. gneur avait ordonné à Mo'ise.


.

LIVRE TROISIÈME.

LOCUTIONS TIREES DU LEVITIQUE.

Chaimtue 1. "2. —
ilimui c.v vobis si (ihtidfrit la. Anima si httnerit eum oblirione et perça ré-
dona Domino a pecoribus, a bobtisct til> ovibus of- cit nidens '. L'i-crivain sacré ne dit pas .s-/ latuerit

fert'tis <
; c'est coinino s'il y avait -.si a pccoribus eam, parce (|u'il prend anima comme synonyme
offerelis, a bobuit^iib oribus n/'/i'rrf/.v.Soiis le nom de homo, .'liiisi ipi'il le fait en d'aiilres endroits,
lie brebis récri\aiii sacré comprciul aussi les où, après avoir exprimé d'iibord le mot anima
{•lièvres, coiniiie il le l'ait très-souvent ail- ([ui est du genre féminin, il emploie plus loin le

leurs. genre masculin, en le raiiportant à luonn. Mais


Chapitre 11. — <>. Et ((infriiiijfs ai l'nnjmcntii ^, ici la locution est bien plus tranchée; carie mas-

c'est comme s'il y avail ; l'tnifrini'iulo l'iiricx ca culin et le féminin se suivent immédiatement et
friHimenUi tlans la mèmepro|iositioii, anima si latuerit eum.
Chai'itke IV. ^ :23. VA cdijuilum fiicrit ci jifc- Les tl'ildtictelirs l;iliiis ont reculé devant cette lo-
ratum iiiiod peccnvit in eo *. Il y a ici deux sortes cution, et pour ne pas la reproduire ils ont mis:
(le locutions à remarquer : la première pcrratum Anima si qua latuerit et peccarerit non rolens.
/>crc(/i'/ seconde consiste dans l'addition de
; la Mais il y a une différence entre nous cacher
il! eo, qui est encore là pour in pecratu, ce qui nous-mème et commettre une faute ([iii nous soit
n'était pas du tout nécessaire. cachée ou inconnue. Or, le texte original porte
Chapitre V. —
1. Si [nutem nnimii perciircril, si latent eam, et non pas si ipsa lateat. Dans une

ctaudicriti'orem juriitionis, et ipse testis fnerit, aidre version grecque nous avons lu Aïiimam :

autviderit, autconsrius fnerit, si non nuntifii'erit si latuerit ea oblirione: mais dans le verset sui-

peccatum *. La dernière conjonction est


et accipiet vant elle emploie également le genre masculin
de trop car si on la supprime, la phrase se ter-
; en disant Sacerdos envahit pro eo et dimittetur
:

mine clairement par ce qui suit : accipiet pec- un 2, en grec aurôj. On voit par là que l'au-
Mtum. teur a voulu éviter le solécisme mais que, forcé ;

IL. Dans la même phrase .9/ : (intem anima de se rendre à l'évidence de plus en plus frap-
peccaveril, et audierit rocem jurât ion is, et ips' pante du texte sacré, il n'a pu continuer plus
testis fuerit aut viderit, aiit conscius fuerit, non longtemps d'employer le féminin.
nuntiaverit, la conjonction et est mise pour id est, 9.Istah(docanst(isissuiH'rincensionem ejus super
en sorte que, pour conformer au génie de
se altare totam noctem asque in mane, et ignis alta-

noh-e langue, il faudrait dire Si antem anima : ris ardebit super ilhtd ^.On pouvait supprunerla
peccaverit, id est, andierit rocem jnrationis, et le conjonction et, et dire totam noctem asque in
reste. mane iijnis altaris ardebit. L'emploide cette
3.Aut tetiijerit ab immiinditia Itominis, abom- conjonction renil la pensée obscure pour ceux
ni immunditiu ejus, qiiam si tetiijerit, inquiue- qui nesont pasfamiliarisés avec ces formes parti-
tur, et latuit eum, post hoc autem coanorerit, et culières de l'Ecritme.
deliquerit »; l'ordre naturel était : et dcliqiierit, le.r sacrificii, quod afférent illud ji-
14. Ista est
post hoc autem cognorerit. liiAaron, sacerdotesante Dominum ^. Le sens eut
été aussi complet sans illud.
* Si quelqu'un d'entre
vous offre au Seigneur une hostie de son trou- 17. Sancta .^tanctorum est ', ainsi s'expriment
peau, la prendra parmi ses bœufs ou ses agneaux.
il 2 Tu les brise- — les Septante eux-mêmes. Mais cette locution n'est
ras en morceaux. —
'''Et qu'il reconnaisse le péché qu'il a commis.
— * Si un homme pèche, en refusant de faire connaître un serment
qu'il aura entendu, ou dont il peut rendre témoignage, parce qu'il
a vu ' L'homme qui aura péché par ignorance et sans le vouloir. — ^L^
le fait ou qu'il en a acquis une connaissance certaine, il
faute. —
répondra de sa prêtre priera pour lui, et son péché lui sera pardonné. ' —
tenant à
^ Ou s'il a touché quelque chose d'un homme qui soit impur, l'holocauste qui doit être brûlé sur l'autel, il sera consumé sur le feu
et qu'il soit souillé par le contact de cette impureté, quelle qu'elle soit,
et qu'il ait contracté cette souillure sans le savoir,
de l'autel pendant toute la nuit, jusqu'au matin. —
^ Voici ia loi du

lorsqu'il viendra à sacrifice, que les prêtres enfants d'Aaron doivent offrir devant le Sei-
la reconnaître.
gneur. — -'
C'est une chose très-sainte.

S. AuG. — ToM. IV. -24


— — —

330 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

reçue qu'en grec aussi plusieurs traducteurs la-


; « distinguer ce qui est pur et ce qui ne l'est pas,
tinspour ne i)as la reproduire ont mis saurtii : « Remarquez la qualification d'éternelle
etc. »

saiictariim siiiit. donnée à une chose qui ne devait pas toujours


3:2. On lit dans les Septante : Occident avietem subsister.
qui prii (lelicto (iiitc nomiiium '. Les interprètes 1 i, lo. Moïse, s' adressant à Aaron et à ses fils
latins ont ajoutt' le verlie c.vrqni ne se tron\e pas Eléazar et Ithamar, leur dit entre autres choses :

dans le grec, et ont mis : ijui prc delicto « Lorsque les enfants d'Israël offriront des hos-
es!. « lies pacifiques,on offrira avec la graisse des
Chapitre VIL — l(i. Kt si rutiim mit voluutn- « victimes l'épaule et la poitrine après les avoir
ritim siirrificaverit iloiium suum, qiui eu nique die « mises à part devant le Seignem- ; et alors ces
ribtulerit sncrificium,edetur crastin(idie'>-;criistinn « choses vous appartiendront à vous, à vos fils et à
dieesi mis])Oiu' postera die; aussi quelques ver- « vos fillesen vertu d'une ordonnance éternelle; »
sions l'ont rendu par iiltera die. et cependant toutes ces observances devaient
Ch.vi'itue VIll. ^\.Ci)quile catnes inatriu ta- être un jour abolies.
hernaculi festimouii /ii Ini'n sanrto et ibi edetis Chapitre XL —
9. Lorsque l'Écritm-e vient à
eus, et piines: fiiiisnnt in canistro ronsummdtinnis, parler des animaux qui vivent dans l'eau, pour
quomndii prie<'eptnniest milii diceiis: Aaron etiilii indiquer ceux qui sont purs et ceux qui sont im-
ejus edent eiim Pour éviter de reproduire cette
'. purs, elle emploie les expressions suivantes in :

locution, plusieurs ont mis quoniodoprccrepit mi- (iquis et in nuiri et in torrentibus i. Les vei'sions
hi dicens; c'est-làune construction régulière, tan- latines portent in mari, non in maribus,el à bon
dis que l'autre est un solécisme. droit, car il estimpossible de faire passer ce plu-
35. Et adiistium talierniiculitestimonii sedehitis riel du grec en latin. Ce qui s'y oppose surtout,
septem dies, die et nocte '*;
sedehitis est mis pour c'est l'équivoque quien résulterait, m«r<'.s- lesmà-
habitiibitis. les, et maria les mers ayant tous deux le même
CHAi'iTr.ic IX. — 7. « JFoïse dit à Aaron : abhatif : maribus. Aussi, le nominatif »)«;•/« est-il

« Ap])ioclio-toi de l'autel; immole la victime admis, tandis que santjHis qui n'a pas non plus
« pour ton péché, offre l'holocauste, et prie de pluriel en latin, même aunominatif, se trouve
« pour toi et pour ta maison ; otïre ensuite employé à l'abbatif, comme dansées phrases:
« les sacrifices poiu- le peuple, et prie pour lui Libéra measanquinibvs''-, et non congreyabo con- :

« selon que le Seigneur ordonné à Moïse. »


l'a reiitirula eorum de sanquinikus ^. La crainte de

Moïse ne dit pas : « selon que le Seigneur me l'a l'équivoque a donc seule empêché de dire: ma-
« mais il
ordonné; » parle comme s'il y avait deux ribus. Quant au mot fonYHf/fcus, l'Ecriture l'em-
personnages du nom de Moïse, l'un à qui le Sei- ploie pour désigner les fleuves car on donne
ici :

gneur a donné des ordres, et l'autre qui tient à proprement le nom de « torrents » à ces couis
Aaron le discours que nous venons de lire. d'eaux qni se forment dans la saison des pluies
Chapitre \. —
S, 0. « Le Seigneur parla ainsi et se dessèchent en été, et où par conséquent le

« à Aaraon Tu ne boiras ni ^in ni bière,


: poisson ne peut habiter. Aussi plusieurs de nos
« etc, » et le discours se termine ainsi « toutes : haducteurs ont-ils préféré le mot fleuves. Que
« lesordonnancesquele Seigneur leur a intimées l'Ecriture emploie le mot torrent comme syno-
« par l'organe de Moïse •. » C'est le Seigneur qiù nyme de fleuve c'est ce qu'il est facile de constater
parle et au lieu de dire Les ordonnances que : par ce passage du psaume XXXV, 9 : « Vous les
je leur ai intimées par l'organe de Moïse, il em- « enivrerez du torrent de vos délices. » Evidem-
ploie la même locution qiu^ nous venons de voir ment ce qui porte ici le nom de « torrent » n'est

dans la bouche de Moïse. pas une eau qui coule pendantun certain tenqis

9, 10. «C'estuneordonance éternelle qui pas- et se dessèche ensuite ;


puisque le Psalmiste
« sera à toute ta postérité, afin que tu puisses ajoute immédiatement Car il y a en vous une
: «

« source de vie ', » source certainement éternelle


' On
immoloi'a devant le Seigneur lo bélier offert pour le péché.
- Si quelqu'un ofTre une hostie pour s'acquitter d'un ?œu ou satisfaiie
et intarissable.
sa piété, quelque soit le jour où se fera le sacrifice, la victime sera 2t. Sedhœc edetis a repentibus volatibibiis quœ
mangée le lendemain. —
^ Faites cuire la chair des victimes devant la

porte du tabernacle de
l'alliance dans le lieu saint, et mangez-la en ce
même lieu, avec les pains qui sont dans la corbeille destinée aux prê- '
Danseaux, dans la mer et dans les fleuves.
les ^ Puritiez-moi du —
tres, selonque le Seigneur me l'a ordonné en disant Aaron et ses fils : sang qui a mes mains. (Ps. L, 16.)
souillé —
3 je ne prendrai point de

en feront leur nourriture. —


' Vous demeurerez jour et nuit, pendant part à leurs réunions, où ils offrent le sang des victimes. (Ps. xv. 4).
sept jours, .levant KMabernacle de l'alliance. ''Ibid. 11. — ' Ps. XXV, 10
,

LIVRK TK(MSII>ME. — LOCUTIONS TIHIÎES DU LÉVITIOIIE. 351

ambuldiil siijH'r nualiiin-, ipid- lialiritl rnini snjif- idlcinlc Inclus, pai'ce (pi'ou ju^e à sa présence

riora ju-ditm i-jtis- ', il t'alhiil ix-ilitm sitonini. ipie riiouiuic même esl alleiid de ce m.'il.

il. l'^lrritix x(tiirH,(iiuiiiiinns(iit(tus('ti(>'^-; il l'aiil ti, Elvidebil eiDii sta-erdr.set iui/iiiindiit eum ' ;

soiis-t'iilriuliv siini ; d'où \ieiit (iiie dans la plii- c'est connue s'il \ a\ait inijiiinatum proiiim-

|)arl (les versions laliiicsoii lit : (jui.niam smicliis titdiil.


''

stim It). bit jiHiis (jiii esl iii liirlti cniirerldliir dlbiis :
eifo.

(liiArMTKE XII. — 1. l'A londKs rsl Dumiiiiis ail il laudrail niuverldUir in iillnnn.

Miiiisru (lii-rns '. ('.(ilc lociilinri huiitiis rsl dicins (). /v7 signnw eniiii est ^
pnrfiabit ennt sarerihis, :

esl trèscoininiinccl ie\iciit àcluuiue inslant dans purijaril esl mis [H)uvpi(r(idliunpi(ninnli(diit com-
rKeritiMc. Mais celle (jiii suif se présente bien me nous venonsde voir /;i(/»/»^(/'// pour inipiind-
plus raiemeni, el décoiiceiie la pauvreté de no- lum pr<niuutidbit.

tre langue ; ou lilen dans le grée y.y.i i^ii^


elïel : 7. Kl vidi'ril eum sdeerilns, et eeee eommututa
Ttpoç aiJTou; Xs'ywv, ce ipTon peut rendre ainsi est siyniticdtio in cute, et inquindbit illtim sdcer-
en latin: F.t dici'x 'id n^s (limis '. Cependant la dos ''.
L;i conjonction et est de trop ; car, si nous
[)lnase serait moins clioipiante, si l'on disait : la supprimons nous avons le sens complet que
EtiiKjitifs ad cas diceiis; cl en même temps on se voici : Si aiitem eoneersd l'nerit signilicidio in cute,

rap|)roclierait davantage du grec où on ne lit pustedqudni vidit eum sacerdos ni purget illum, et

pas : /.éysiç irpo; aùrovç /iywv, mais éc/nç Kohq visus fuerit deniio sdcerdoti, et viderit eum sa-
cerdos,et ecce commntdtd est siqnijindid in ente,

inquindbit illum sacerdos '.


2. Millier (juivcnmiiueacmi'n rccc}H'vit et iiepererit
miiseiiliim, et iniinuiida erit septemdies->. La plu- il, 10. Et tdctus lej)r<e si l'ueril in liinnine, vé-
part desveisionslatinesn'ont pasre[)roduit celte niel d(l sdcerdotem, et videbit sdcenlns et ecce ei-
locution ; ellesontrnis : MiilierqiKecumquesemen cdlri.r dlbd in cute, et hœcmutavit pilnmalbum et

receperit et pepererit maseiilum, immunda erit. d sdjio cdrnis viv(e in cicdtrice ^'. Mutavit piluni
Les Septante auraient pu aussi bien ne pas la dlbinn esl mis pour ; nintdvit pilum in albumco-
traduire, puisqu'elle n'est |)as plus ret;ue en grec loremin <'/c«(r/rf«/.. Si l'on a ajouté -.mutavit asano
qu'en cependant comme ils n'ont pas fait
latin :
Cdrnis vivœ, c'est parce que les poils ne changent
dillicultéde l'admettre, je ne comprends pas pas ainsi de couleur dans les parties saines de la
pour (pioi les latins ont été plus scrupuleux. chair vive.
4. TrUjinta et très dies sedebit insdtujuiue mun- 43. En parlant du lépreux, l'écrivain sacré dit :

do xuo La même loi est formulée dans les mê-


*\ Et immundus vucdbitur '. Un exemplaire grec
mes termes pour celle qui a mis au monde une ne dit qu'une ibis immundns; plusieuis antres le
(ille seulement le nonil)re des jours est doublé
; répètent deux l'oisce qui était inutile. On lit encore
el porté à soixante-six. Cela nous prouve que se- au verset suivant Cuni sit immundns immundns :

debit, elle sera assise, est mis pour manebit, elle erit >*; phrase qui n'a pu être traduite mot pour
demeurera car on ne peut supposer qu'il fut
; mot du grec ; car le gi-ec porte ày.aSx^roç wv

interdit pendant si longtemps aux femmes de se «îcaOapToç 'éarxi, en latin immundns existeus
lever de leurs sièges. immundus erit ; encore le participe existeus
CH.vriTRE XIII. —2. Hifininisi eiii [acta fiterit n'est-il pas l'équivalant du grec wv; ce qu'il fau-
in ctite corporisejtiscieiitrix sicjni liieida' .Le mol drait ce n'est pas le participe de existere mais,
cicatrix signifie, dans le style de l'Ecriture, non si cette forme était reçue, essens participe de
seulement trace d'une blessm-e, mais la simple
la esse.
diversité de couleurs. 47. Et vestimento si fnerit in eo tdctus leprœ '>
:

Ibib. Et fuerit iu ente coloris ejus tuctuskprœ ».

L'écrivain sacré appelé la tache de la lèpre une ' Il sera examiné par
le prêtre, qui le déclarera impur. - Si le —
poil qui est au milieu de la tache, devient blanc. 3 Le prêtre le dé- —
clarera pur, car c'est une marque certaine. * Si en l'examinant le —
prêtre remarque sur sa peau un changement de couleur, il le déclarera
Mais parmi les animaux nui ont dos ailes et qui marclicnt en même
'

impur. —
''Mais si la marque de la lèpre reparait sur sa peau, après
temps sur quatre pieds, vous mangerez de ceu.ï qui ont les pieds de qu'il a été vu par le prêtre et déclaré pur, et que le prêtre, quand il lui
derrière plus longs que ceux de devant.— 2 Vous serez saint, parce un nouvel examen, s'aperçoive que la
que est présenté pour être soumis à
je suis saint. > —
le Seigneur dit encore à Moïse. Et tu leur di- — i
peau a changé de couleur sera déclaré impur par le prêtre.
il ^ Si —
ras. —
' Toute femme, qui aura
conçu et mis aumonde un enfant mâle, quelque homme porte des traces de lèpre, il se présentera au prêtre qui
sera impure pendant sept jours. —
Elledemeiirera trente trois jours]
^^
l'examinera la peau est-elle marquée d'une tache blanche, et les poils
avant d'être puritiée de son sang, ' Lorsqu'un homme —
portera sur .sa
;

devenus blancs, montrent-ils que la chair vive n'est plus saine. On — '

peau une marque brillante comme une cicatrice. * Si la couleur


de sa — l'appellera impur. —
» Jl sera regardé comme impur.— Si un vête- -'

peau indiiiue la présence de la lèpre. ment est infecté de lèpre.


332 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

on pourrait dire dans la forme ordinaire : Et iu ayri tiiipermetere '. La phrase commence par le

vestimentii si fiwrit tarttis lepne. pluriel et se termine par le singulier. C'est une lo-
31 . A ut in omni vastepellii-eo in qwjcumquefner i t cution que la plupart des traducteurs latins n'ont

in eu tactils*; ilsuffisait do dire/z^yî/Wi/mr/»!' /'»('- pas voulu reproduire : ils ont dit (/(/;'/ vestri, au
rit tactus.
lieu de «(//•/ tui comme si les Septante n auraient

53. Et ecce non rummutavit tactus asjiectum paspuen faire autant. Il vaut donc mieux signa-
suum'^; aspertus est pris ici passivement -.une ta- ler cette locution que la corriger.

che, car c'est ce que désigne le mot tactus, ne 17. Quicumqueacceperit sororemsuamex pâtre
saurait legarder. silo autexmatresuii, et viderit turpitudinem ejus,
Chapitre \1V. — 13. « Le prêtre prendra la et ipsa viderit turpitudinem ejus, turpitudinem so-

« mesure en versera dans lamaingau-


d'huile, et roris suœ peccatumsuumaccipient
revelavit, '•: pec-
« che du
prêtre, il fallait dire dans sa main
>> : ciitiim est mis pour penam peccati.
gauche, puiscju'il ne s'agit pas de la main d'un 23. Et seijreijabitis vosmeptisos iuter médium pe-

autre. corum mniidoruin et inter médium pecorum im-


Chapitre XV. —2. Mm, rimcuirumquc fucrit mundtnumetinter médium volucrummundarum et
fluor 3. immundarum'^.L-àphiaaeseqregabitisvosmeptip.'ios
16. Ethomo cuirumque exierit ex eo concubitus inter mediummundor un et immundorum, expri-
seminis *. me la séparation des choses pures d'avec les
21. Et omnc super quodcumque dormit super il- choses impures ou des chosesimpures d'avec les
Iud,etomnesuper quod sederit superiUud,immuii- choses pures c'est une locution tout-à-fait nou-
;

dum erit •''.


velle. Car autre chose est, seyreqabis inter me-

Chapitre XVI. —
21. Et emittet in manu ho- diumpecoruni mundorum et iuter médium pecorum
miiiis parati in eremum «; c'est comme s'il y avait immundorum, comme s'exprime très-fréquem-
emittet in eremum in manu hominis ad hoc parati ; mentl'Ecriture et autre chose : seiireiinbitis rosme-
ces paroles sont relatives au bouc émissaire. 11 tip.ws. Dans cette dernière forme, ceux qui font
faut remarquer encore , le sens, dans lequel l'E- la séparation nous sont représentés comme se

criture emploie les luots in manu . séparant eux -mêmes des animaux de l'une et de
'
Chapitre XVII.— 3. Homo liomo fiUorum Israël l'autre catégorie, pour en faire le discerne-
c'est-à-dire ex liliis Israël, ainsi répété, signifie ment.
quilibet homo, on, si l'on veut, ///(' aiit ille. Chapitre XXI. — 1, 2. « Dites aux prclres,
Chapitre XVIII. — 7. « Vous ne découvrirez « enfants d'Aaron : Qu'ils s'abstiennent de con-
«point dans votre père ni dans votre mère ce que « tracter quelque impureté à la mort de leurs con-
« la pudeur vousdéfend de regarder» ;
par cette « citoyens, à moins qu'ils ne soient de leurs plus
locution. Dieu interdit le commerce charnel avec « proches parents. » Il est question ici du deuil
les personnes désignées. auquel les .âmes des défunts ont droit car on les :

Turpitudinem fratris patris tui non revela-


14. pleure, parce qu'elles ont quitté ce monde.
bis, et ad uxuremejus non introibispropinqua enim o.Et calvitium non rademini supermirtuum, et

tua est». La conjonction cf aicilesensde idest,en carnes suas no)i secabunt sectiones '*. La lo-
.'iuper

sorte, que turpitudinem fratris patristui, ou tur- cution ordinaire était celle-ci: carnes suas non
pitudinem patrui, est la même chose que pudenda secabunt sectionibus.
îixoris patrui. 7. MuUeremfornicariam et profanam non acci-

23. Etexhorruit terra eosquiinsidentsupeream 9; pient, et mulierem ejectam a viro suo; quoniam
insident est mis pour .wdes liubent ou habitant. sanctus est Domino Deo .tuo '>. Après avoir com-
Chapitre XIX. 9. [Et permetentibus vobis — mencé par le pluriel on termine par le singulier,
messem terne vestrœ; non perficietismessem vestram
' Lorsque vous ferez la moisson dans vos terres, vcius ne moisson-
nerez lias votre champ tout entier. —
' Si un homme s'approche de sa '

i.bjct, fait de peau, où la lèpre aura pénétré. sœur, qui est fllle de son père ou (ille de sa mère, et s'il voit en elle ou
'
Ou bien dans tout
regarder, comme il a di-
— s Et pas changé d'aspect.
si la taclie n'a
' Tout homme atteint — si elle voit en lui ce que la pudeur défend de

—ijuL éprouvera une perte honteuse.—


L'homme couvert dans sa sœur ce qui doit être caché, ils porteront la peine
de gonorrhée. '

sur leauel elle aura dormi, ou sur lequel elle se


de leur crime. —Séparez les bêtes pures d'avec ,les bêtes impures,
'

i Tout objet


" Il l'enverra au désert par un homme et les oiseaux purs d'avec les oiseiux impurs. —
* Ils ne se raseront

sera assise, sera impur.


point la tète à l'oîcasion des funérailles, et ne feront aucune
inci-
destiné à cela. —
Tout homme de la race d'Israël. ' Tu ne — —
pudeur te dé- sion sur leur corps. Us n'épouseront point une femme corrom-
-'

découvriras pas dans le frère de ton père ce que la


fend, en t'approchant de sa femme car elle est ta
parente.:
' Cette — pue etprostituée, ou une fem-ne répudiée par son mari; parce qu
ils

sont consacrés au Seigneur leur Dieu,


terre eut en horreur ses habitants.
;

LIVRE III. — LOCITIONS TlUKtS lil I.IAIliglE. ;»;;:{

toiiiiii.' >'il iii' s'a^i^sailiHK' .l'im mmiI. Uau^ le adresser la parole à plusieurs.
MMSt'l suivant saiiclifinn'H «'"m iloiin Domiiii Dci CiiMMTiiK WIV. — II. Ht raiii iiomiiidsset fi-

lYsIri ijisi' iil'l'eni; siiiirlii!< est, nuiniimn saurtux lins mulieris Isrdililidis , iiniiii'ii uwledi.vit '.

('//(" Doiniiius (jui siiiirliliiii eus ',011 (•(minii'iicc an Ouoicpi'on n'ait pas evprimi' le mol Dei. ou \oil

i-onlrairo par li" sinniilii'r, rt en In iniii.inl on clairenienl ipie c'esl le iiiini du Sriiiinnr qui a
ii"\i('iil au pluriel. clé luaiiilil.

(lini'irKK Wll. — 11. .S' iiiiti'iu sdii-rdiis jiii.'i- I.">. Ilmiti'. Iioiiio si maledi.rerit Heum, suaiii

st-derit (inim'im l'inpldin in'niiiiii hic edi'lilr pdiiihii.s perrdtdiii urripiet ''
. On voit ici, de manière à ne
i'jii.t ". (le n'esl pasaverle mot (iiiiiii'ini (|ues'ae- pouvoir eu ilonler, ipie l'expression hiniio lunno

conle ieiirouom niaseuliu liic, mais a\ee l'idée est une locution, (]iii si.miilie tel ou tel liomine,
exprimée paf (ni/m»»!, c'est-à-dire a\er /(('/H /iicw. ou tout homme. Larépr'lilio'.nle/iiD/M n'est donc
1-2. l'A liiui hnminis sucerdoU.ssi fiii'iH rim tilic- pas, comme <|uel(pii's uns l'ont pensé, une for-
)(i(/('i((r •>; c'osi i-Dinino s'il y avait : si iiitiixerit iiui!eélogieuse,qui reviemliailàceci un homme, :

riro alii'uiiji'DiC. mais ce qu'on appelle un lioinme, non pas le


-2(i, -27.est Ihiminiis ad MnijSi'n di-
ht lofutiis premier-venu, non pas celui qui s'(''lè\e à peine
ri'iis : Kvem dut cdpriim, citm iiutiiDi
\ ittilut)! (lul au-dessus tle la brute, mais celui qui iiurite vé-

l'iii'iil.fl dit ai'idi'm ilii-s sub iniitrc sint


'. Laenn- rilablemeiit le nom d'homme. La fausseté de cetle
joiulitiu et est de trop c'est une de ees locutions : explication ressort clairenienl de ce piss.ijic, où
très familières à l'Écriture, que la plupart des il s'a'.;il iriiii homme qui mérite non la louange,
Irailuclcnns latins n'oul pas ju^é à propos de re- mais le hl'iiiu'. I! faut donc \ voirune lociilioii
propre à l'Écriture.
|triiiluire.

M. -' au milieu des entants


Et je serai saiiclilié CHvPiTitt; \\V. — l!i. En pirlanides esclaves
•d'IsraPl, c'est-à-dire ma sainteté sera hono-
>> que les Israël'te.; pouri'aient avoir, le Seigneur
rée; car il est im[tossil>Ie que le Sei;;neur ne soif dit Kt eniut rubis in pussessinnem in <eten)inu '
;

pas saint partout, aussi bien que parmi les enfants cependant ni les maîtres ni les serviteurs ne pou-
d'Israël. C'est dans le même sens tju'il faut en- vaient vivre éternellement, puisque les uns et les
tendre celle demande de l'oraison dominicale : autres devaient mourir. Le mot irteniiim siy;ni-
c Que \otre nom soit sanctitié "•, » c'est-à-dire lie donc ici, (jui^ladiiréede leur esclavage n'était
qu'il soit honoré comme saint par tous les hom- pas limitée, comme elle l'était pour ceux (pi'on
mes. devait rendre à la liberté dans l'année jubilaire.
Cii.viiTiiK Wlll. — i, 3. Loiluevi' ad filiox Is- CiiÀi'iTitEXWL — 3. Si in pnereptis ineisdm-
raël, {'t dires adeos : Soleiniiiu Domiitiiiuw rora- bitlareritis, et mandata mea observaveritis, et fe-
hitis rocata sunrtii, ista siint solemnia meti ; sex reretis ea, et dabo pluviam rubis in tempore sn<i '.

dii'hii-i furies iii>('r(i''\ C'est à i)lusieurs(pie cette loi L'addition de la conjonclion et est contraire aux
iloil élre annoncée; dans la suite cependant. Dieu règles de notre langue; elle n'est reçue tpie dans
parle comme à un seul. le stylede l'Ecriture car : la suite naturelle des
13. Et nitmenibitis vobisii die erastiiinsKbbdli, paroles était dabo vobis.
quaobtiilerit gremium superpositioiiis, septem sep- 18. Et si nsqne adhnr non oliedieritis mihi, et
timdiiiis intégras numernbis'. Ici encore Dieu ne apponam rastiijare vossepties in peccatis vestris *.
dit pas iiamernbitis, (pioiqu'il ait commencé par La conjonction et est encore de trop ici ; il suf-
fisait de dire (^y*yMi;(«)» r(/.s/ /(/(//•(' ros. pour faire
Ils sont ^nctitiOs pour p^iuvoir o.ïrir les s.icrilices au Seigneur
aux paroles précédentes. Quant au mot
'

suite
votre sont saiots. parce que je suis saiot moi-même, moi
Dieu ; ils

le Seigneur qui —
^ Mais si un prêtre a un esclave qu'il
les sanctilie. septies, il est mis pour un nombre iniléterminé.
a acheté, celui-ci pourra manger de ce que mange le prêtre. -^ ^ Si ta
lille d'un prêtre épouse uo homme d'une auixe ti'ibu, -.- ^ £t le Seigneur
"lit à Mo'isc : Quand un veau, ou un agneau, ou un chevrau est né, on • Le ayant blasphémé, maudit encore le
û\s d'une t'emme Israélite,
le laissera sept jours à téter Matth. vl. 9. .— l'arlc aux
-sa mèi'e. — '-'
"^ nom du Seigneur.^' Tout maudit le Seigneur, por-
honiEoe, qui aura
'•nfanis d'Israël, et dis-leur Voici les fêtes du Seigneur que vous
: tera la peine de son pédiê. - Et ils vous appartiendront pour tour
'

apiR'llercz saintes, ce sont les jours solennels que je me r.'ÂCrve


— tu : Joui*s. Si —
vous marcli.ez
-•
dans \a voie de me^ conunandcmeQ ts, Ai
travailleras pendant six jours. " "V'ous compterez sept sem-iines plei- vou.« gardez <îl pratiquez mes préceptes, je ferai tomber la j'Iuie.sur
nes, à partir du lendemain de la fi;te. en Laquelle !a gerbe des prémices T<js cliamps au temps favorable. —
Et si voiu me dêoobéiiis^s .en-
-*

.-ïu*-.'! êl-'- .jflêrte. core, je vous punirai sept fois darant^ge à caiwif ie vos f*^ch«6.

Aie. Tovi. IV.


LIVRE QUATRIÈME.

LOCUTIONS TIREES DES NOMBRES.

CHAi'iritK I. — i. Et viibixcum (ninl uiiusquis- 7. Et reddet eui deliquit ei '. Pour éviter dt^ re-
qiw M'ciniduni cttimt iiiiiiisciijusqiu' priinipinn '. produire cette locution, il en est qui ont modilié
:2:2. Filins Sininni sccinnlin)! propinquitutes eo- l'ordre des paroles de cette matière : Et reddet
nim, scciindiim lUtuiasIqmiliarum eorum, secun- ei eut deliquit.

(hini )nnni'ni)ii iiiniiiiiinn cdrum, secundum cuput 12. 17/'/, ('//•/ si inwraricatii fuerit uxin' ejus''\
eoniDi, immiii ))i(isriiliii(i u viijinti aiiiiis et supra, On voit ici une locution, non-seulement dans la
omitis qui procéda in rirtute, recognitio eorum '. répétition du m >t riri, mais encore dans l'addi-
Au lieu de mcllre Simeon, ou bien e.i filiis
/(/// tion de ejus.
Siineoii, on a mis Simeon au datif; et la
filiis 14, 15. Si superreniet illi spiritus zelnndi, illu
même chose se reniartjue dans Icdénomlircnient (lutem non fuerit inquinata, et adducet homo u.ro-
des autres tribus une locution, qui n'a pas
: c'est rem suam ad .tacerdotem^. Il fallait mettre la con-
été reproduite dans les versions latines, que nous jonction et; mais c'est une locution familière à
avons eues sous la main. Il n'\ a qu'en ce qui rKcritnre.
concerne la tribu de Kulten, placée la première 18. Erit a({uu arqutionis, quœ maledieitur hire '•.

dans rénuinéralion, que cette locution n'existe La locution inusitée, que présente cette phrase,
pas; car au lieu de ces paroles Filiis Rubense- : est due uniquement à l'arrangement des mois;
ruiidum prapiiKiniliites eorum, on lit Et fueru)il : car on pou\ail employer cette forme régulière:
filii Bulien, primoijeiiili /.s/vdV/.s secundumpropin- Erit (iqua itrqutionishœcquœ maledicitur, ou bien
quitales eurum, et le rest(^ comme pour les
'',
eril ho'caiiuii nrijutionis quœ malediritur, ou toute

autres tril)us. autre que l'usayc autoriserait.


Et feceruiit jiUi

54. Israël secundum omnia quw 19. Innocens esto ahaqna arqutionis, quœ male-
mandaverat Domiiius Mojisi et Aaron, ita fere- dicitur Jiœc '. Ce qui fait la locution ici, ce n'est
ruiit '. plus seulement la construction irrégulière de la

CHAPrrRE lit. — 3. Sueerdotes qui uneti suiit, phrase, c'est encore le changeineul de cas; pour
quorum eoiisummareruiit manus eorum sarerdotio suivre tout à la fois les règles et l'usage, il fallait

funqi '. dire : innocens esto ah har aqua aryutiouis, quœ


CiiAPriKE IV. — I i. Et imjHDieut super illud maledicitur, ou Itien : ah aqua arqutionis hncqtin'
omnia rasa ejus, quiliusministraut in ipsis '\ maledicitur.
Chapitre V. l>. —
Vir aut mulier quicumque 27. Et inllabitur ventrem '"•
est mis pour : in-

feeerit ah omnibus peeeatis liumanis '. On devait jlahHur rentre. Celte locution est familière uu''uie
dire quœeumque feeerit. C'est une locution peu aiLvauteurs latins; mais nos traducteurs, qui n'ont
usitée,de faire accorder le pronom avec le nom pas voulu la reproduire, ont mis : et inflahitur

masculin bien (jue le nom féminin, soit le plus renter ejus.


rapproché. Chapitre VI. —
2. Vir vel mulier quicumque

maqni voverit votum ' ; il fallait quœeumque.


fl. Et radetur caput suum *<; c'est la même lo-

Autant il y a de chefs de l'amillcs, autant il y aura d'hommes


< cution que dans i)illahitur rentrem..
avec vous. —
2 Voici le dénombrement des fils de Simton, de ceux

qui, depuis l'âge de vingt ans et au-dessus, étaient


propres à lii
maisons,
guerre; ils sont comptés par branches, par familles, par
avec le nombre exact de chacun. -
> Voici quels furent les fils de '
Il rendra à celui à qui il a fait tort. — ^ gj un homme a une fenuuc

Euben. l'auié des enfants d'Israël, comptés par branches ( Ib. 2U ). qui lui manque de fidélité. — ^ Si un homme est transporté de jalou.sic

— S Les enfants d'Israël firent tout ce que le Seigneur avait ordonné contre sa femme, et que celle-ci soit innocente, il la conduira devant
Mo'iseet à Aaron. —
''Les prêtres qui ont reçu l'onction, et dont les le prêtre. * Il —
y aura une eau de probation, sur laquelle des malé-
il

mains ont été remplies d'offrandes, afin qu'ils exerçassent les fo; c- dictions seront prononcées. • Sors saine et s.auve —de cette eau

tions du sacerdoce. —
' Ils placeront sur l'autel tous les vases qui de lirnbatinn, qui est chargée de malédictions. Et son vculre — "^

leur servent dans leur ministère. —


Si un homme ou une femme ' s'enflera. — "
L'homme ou la femme qui se sera consacrée par un vfti.

se permet une de ces fautes q\ii se commettent parmi les hommes. — '^
Il se r.i-sera la tête.

LIVKE IV. — LOCniONS TEKIÎES DKS NOMI'.KKS. 3{(5

Chai'ITIik vu. — ;<• 'SVj' l'i'hirulii Iccta <7 dun- « Madianite, ( I ;;endre de .Moïse, >- au lieu de :

(lecim hoven ; reliirulum a <liii>bu.'< priiiripHnis, cl son gendre.


.lo dois fairo icinannior (ini-, ;t(t. /•:/ (//.i(7 (id ciim ; .S'mi ilm, scd ad terrain
vitiilum (isiiiiiulis<.
on ilési^iio par viliilos les iiicani ('1 iid pro(\ciiiem incaiii '
il faut sous-en-
dans (•(•Ile loiiilioii, ;

mûmes aiiimaii\, (lu'on vient de désifziier par tendre ibii.

hoirs. On sait (pie eelte manière de parler est (lirvPiritK. M. — 'i. /•.'/ iinniii.'icuus qui cnit In

reene même en pree. eis, nniciipircrniil tinirniii.'iccnliam ''. On a mis


iiinis ijiKitidic, jtriiirrps quotidic le singulier pour le pluriel, eu dis;nit /i/oiii/.svhi/s-
11. I'riii<('i)s

iijl'ereiil doiui sua '


; c'est comme s'il \ avait ; au lieu de praiiiiscui; eependaul, ou a i'Ui|)lo\é

shifiulis dii'biis siiuiiili iirinripcK. le pluriel dans cniii-iipicrinit.

l'j, l(i. Vitiilinti iiiuim firc hobiix. ri liirniin 'W (i. ,\niic (inlciiiiniima nosli'ii arida. iiiliil priv-

'. Icr in niiinnii miili imslri


'•.
Il \ a deu.x motssous-
aipris uniiiii
r,H\i'iTRE VIII. — lil. /•;/ 1/11)1 dit in jiUis Isntcl eulendus, es/ et sniit ; la phrase entière serait :

Apparem- anima nosira arida est, niliil pnvtcr in inann<i


iiircdciix [iliiinim Isrdfl ad sinirla '.

ment on pouvait se contenter de dire: cl iinii .sani oriili iwstri. C'est ainsi en effet (pie (ilusieurs

avcedcns tid saiictu. interprètes ont traduit, en suppléant les mots


(rit in filiis Israël

HO. Kl fct'it Moiist's cl .hiron et omnis sijnmtofpi qui ne sont pas dans le grec.

filiiiritm Isnicl Levitis. semndum qun' pncrcpit S. Kl inalcbani illad in mola '<.

Ihmiiius Miiysi de l.critis. iUi fcccnuil cis jiHi -21. Se.rcciila iiiillia pedituni, in iinilms snm in

eis '.
hrticl -K

CiiM'rruK 1\. — VA. Klhionii, lnDnuquicumqiic •2."). 1:1 al'sliilil ilc spiviln, qai saiicr ipsaiii '. Il

muudiis fuerit, et in viam loiiiiinqudDi iwn est, et faut sous-enh'udre rral ou eril. Celte locution,

defuerit farere pascha, extenniitubitiir aiiima illa qu'on appelle ellipse, si familière à la langue
lie piqmlo suo '! .•
preuve nouvelle que /iomo homo grecque et, autant que j'en puis .juger, à la lan-
est une locution (pii a li^ sens de tout homme, gue héhraï(pic, n'a pas été conservé<' par les
telou tel. traducteurs latins. Elle n'est cependant pas étran-
17. El riiin asrcndisscl )iiibes a labcniarulo, et gère à notre langue, quoique nous l'employions
'
postca prumovebunt lilii I.traël il suffisait de ; moins h'équemment que les Crées.
dire: et ciini iisreiidissel nubci a tiibenKimlo, pra- ;-!;î. Kl perrnssit Domiuus phujam nuiijnam val-
movebunt lilii Isr(i''l. de '. 11 y a évidemment une locution dansyjcr-
CHAprruK \. — li. h't promorebiint crdu cas- cussit piaiiain, puisque les règles ordinaires de-
Irariim liliunnn fiida primi >^. mandaient pernis.si plana.

17. lu promovebunt fil'i Gerson et filii Mera- Chapitre XII. — ;•<. Kl limiui .Ifo//»!-. Unis
ri ". Le futur désigne ici im fait accompli. C'est ralde ^ ; erat est sous -entendu,
ce qu'on remarque également dans les versets 9. Et ira animatimiis Dominns super cas ''; il

précédents, où il est question de la nuée qui se faut sous-entendre farta est.


mettait en mouvement ou s'arrêtait, pour indi- 10. /:,'( ecce Maria leprimi siciit ni.v '"; il faut

quer au peuple le moment de décamper ou de encoi"? sous-entendre ici fucta est.


cauqier. Le même temps est encore employé dans Chapitre Xlll — "20. Et qiiœ terra, in qua isti

la suite '", quand on parle des mouvements des iiisident snpeream; et qnœ rivita>is,in qaihns isti

différents corps de l'armée d'Israël. habitant in ipsis ".


29. « Alors Moïse dit à Obeth, (ils de Raguel 2o. « Le lieu qu'ils appelèrent la vallée de la

« grappe; » c'est donc par anticipation, qu'on

' Six charriots couverts et douze bœufs un chaniot offert par ;

lieux chefs, et — 2 Chaque jour un des


un bœuf par chacun d'eux. '
Et il lui Je n'irai pas avec vous, mais je retournerai en
répondit ;

chefs olfrira ses présents. —


un bouc de ses troupeaux.
"
Vn bœuf et mon pays dans ma famille. —
= Et un grand nombre de ceux qui s'é-

— Personne parmi les enfants d'Israël ne s'approchera du sanc-


' taient joints àeu.M. brillèrent d'un grand dé>ir. ^ Maintenant le dé- —
tuaire. —
Moïse et Aaron et toute rassemblée des enfants d'Israi^l
'"•
goût s'est emparé de notre âme, et nos yeux ne voient jamais ((Ue la
accomplirent à l'égard des Lévites, les ordres que Mojse avait reçus manne. —
^ Ils la broyaient sous la meule. Ce peuple, avec lequel — !•

du Seigneur à leur sujet. —


^ Tout homme qui, étant pur et n'étant je suis, compte six ccntmilleh rames de pied.
' Et il prit de l'Es- —
pas parti pour u pays éloigné, aura omis de célébrer la pâque sera
1 prit qui était en lui.
' —
Et le Seigneur frapi^a le peuple d'une très-
exterminé du milieu de son peuple. 'Et lorsque la nuée s'éloignait — grande plaie. — " Moise était un homme d'une grande douceur.
du tabernacle, les enfants d'Israël partaient. — ^ Et la troupe des
°
Et le Seigneur entra en colère contre eux. '• Et aussitôt Marie —
enfants d'Israi,"l et de .luda décampa la première. -' Les enfants de fut couverte d'une lèpre blanche comme la neige.— " Examinez
Gerson et les enfants de Mérari se mirent en marciie. '" Exod. xil, — quelle est la terre habitée par ces peuples et ce que .sont les villes ;

-21, 23. oil ils demeurent.


.

3o6 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATELOUE.

(lit au xeisi'l inéerdent ;


< Ils anixoiviil dans la (lire ' ; Penitusque snnantes ueeestis scopulos,
« \a!lL-e (le la f;ia|»pe. » En voici la laison : c'est-à-dire accessistis .•<eopul(is, pour ad scopu-
bien que (•cite n.iIIi'imu' portai |)as cenoni,(|uan il Ids ^; et encore : Deveneie loms ». \wiiyad loros;
ils V arrixi'rent, l'Ilc le portait dry,\ (jiiaiid ic li- de même ici on a mis quum ulisri'ssistis, pour fi

vre lïit t-erit. quu ubscessistis.


;-$2. Quiniiinn fi>rtioriitihis cstmiuiin ' ,•
la phra- 33. Eqo Dominas loeutus snm, nisi ita ferero
se eut eli'iéiiuliere sans le mot iivniis. siiniHjaqw muHqnu' isli '. On peut légitimement
33. Et prutulerunt ixtrniD'in trrrw. iiiimn ex- se demander quel est le sens de l'expression grcc-
])lomverunt eam -. (pie r, ^r,v, (pie nos tradiicleiirs rendent prestpie
Ibid. Teri'am ijikidi trtnisiriinii.'i ciun crpUniire, toujours par )//.v/.

tenu comeileiiii qui hubituiit sujH'r eam est •'. Les Cn.iPiTRE XV. — //) terrum in (juam ego indu-
demandaienl terrn (puim Iraiisivimits e.r- eo vos illue '.
règles :

phiiare. '21, 28. Si aulem iniinui nnii peecaverit non


Chapitre \1V. 7. —
Teinim <iutiiii e.yplnrit- sptnite, «H'eret eaprum iintim dunienhim pm perva-
l'imufi eum, Iwiui est vulile vulde >. to, et ejorubit s-.ieerd 'S pro anima invita et quœ

10. Et (lit omnis siimujoiju lupiduie eus iii lnjii- peceaverit iwlenter ante hominum, exorare pm
ilihus On ]ioinait se contenter de nielti'e lupi-
"'.
eo, et remittetur ei Celte phrase |)résente une
'•.
j

(libus; et nK^'uie l'usage deniaiid.iit simplenn^it première locution dans runion de e.rvrabil sarer- ,

Uipidure. dus avec exorare ; ciir en rapprochant ces deux '

1 1 Et iptnusipie non eieilerunt niihi in innnibus verbes, on a e.rorabi! e.inrure. On en remarque


signis, (piibiis fecit in ipsis '•, il fallait iiuiv feci une seconde dans le changement du genre; fé-
iii ipsis. minin au commencement il est masculin à la
'21. Puevuutem meus C.luileb, qnoniam spiritus (in :car après avoir mis si anima unu peceaverit,

ulius in eu et asseeulus est me, et indueiiin eum in l'auteur sacré ajoute : e.vorare pro eo, comme
terrum "; la phra.se serait rL'guli('re sans la coii- s'il y avait pro eo Jimnine; d;uis le dernier mem
joixtion et. hre de phrase et dimiltetnrei, le iatin,il est vrai,
Ibid. Et indurum eum in tenam. iit ijuam in- ne présente pas de genre déterminé, puisque ce
trui'il illue on pouvait
>*; se contenter de la for- ])ronom coinient à tous les gem-es mais là :

me ordinaire in quam intravit. ou nous mettons ei, le grec porte a-jz&) mot
2(>. « encore à .Moïse et à
Le Seigneur dit qui est é\idenunent du genre masculin. Enlin
« .\aron. » On a interciilé cette phrase dans le l'expression pro anima invita, signifie que la
discours, quoique le.^ paroles précédentes soient personne a péché sans le vouloir, et non pas
aussi du Seigneur. C'est un usage de l'Écriture, (pi'elle s'oppose àl'oUrandoqiicle prêtre fait pour
lorsqu'elle passe à un iuitro sujet, de mettre de elle; comme on le voit paro-
clairement par les

nouveau en scène la personne (pii parle, lors les qui suivent et quie peeeuverit noienter. Le mol

même qnele discoui-s n'est pas interrompu. invita a élé employé, parce que la langue latine
29. Qudtquot mnrmuruverunt super me on ''
; n'a pas de terme correspondant au grec a/.ou-
n'a pas mis de me, ou adversus me. '-A7.Hii.rjf,ç on ne pouxait pas dire nolent'ita ni ,

31. Et liœreditate possidd'unt terrum, quum trouver d'autres mots que noiens facere, pour
vos ubscessi.'itis ab eu >». Les règles demandaient -.
rendre malgré soi.
l'idée d'agir

a qua vos ubscessislis; mais en disant quam (d>s- 3(1. Et anima qwveumque feverit in manu su-

r^ssihlis, on a créé une nouvelle locution, et en perlnœ Pereatum est sous-entendu, il faut re-
'.

ajoutant ab en, on n'a fait que répéter une locu- marquer en outre l'expression manu superbiœ,
tion lamilière à l'Écriture. Comme Virgile a pu où maïius est pris dans le sens de opus ou potes-
tlHt.

Xi. .Morte miiriulur liomo, lapid^ite eum laih-


'
Parce' qw'il est plub Tort que nous. -- Us lliv.il une peinture ei'.

frayante du p»y« qu'ils avaient visité. J La terre que nous a\"ons —


été reconnaître est une terre qifi dévol-e ses habitants. Le pîiys, — *

tjue nous avorw exploré, est très-bon. ^ Kl tout le peuple s'écriait — I


Knéid. 1. ï. Î04. — - Vous avez toaclié ù des r.clicrs dml le bruit

(jn'îl lallait les lapider. Refuseront-Ils —


toujours
''
de me croire, retentit au loin.— " Ils arrivèrent en deslien.v (L. vi. v. 638). —'Moi
malgré tous les prftdiges que j'ai op:^rés au milieu d'eu.v '
'
Mais — le SeiBneuT je saurai e.técuter les menaces que j'ai pn.nonoées

p.-iree ipie mon WM"viteuT Clialeb a i4é anime d'un nicilk^nr esprit et contre ce peuple méchant. ^ Dans la —
ter c o'i je vous mène.

m'a parFaitemenl obéi, je le ferai entrer dans cette terre. ''3e le — " Si quelqir™ pèche par ignorance, il oniira une chèvre d'un an pour

le ferai entrer dans cette terre, qu'il «déjà porcMirU". — son i»é.-lié; et le prêtre priera ]H>ur !a })ersonne qui a i>échédevant le
" Tous ceux

qui murmui«reril contre moi. '* IV; .^o' int i'»n —


'r-it.-^re W pays '
Soi<.'nour par ignorance cl sans le vouloir; et son péch'^ln' ^era re-
dont vo»i^ n'avez pas voulu. mis. — '
Tout tionimo qui aura p'-cîivpar orgueil.
LIVUE IV. — LOCrTIONS TIKIÏES DES NOMimES. 3S7

dihiis omiiis sjinaiiiDia '. Murti' inuridlitr, Uipuliite non par oofjta; en négligeant cette distinction ou
lapidibtis, etlaiiidateomiiis sniiaiioijd, soiilaulaiil tombe ici dans l'erreur, car ce n'est pas un don
(K- Idciiliiiiis, (jui nr soiil jms reriu-s dans notre que Dieu déchire avoir rerii des eiilaiils d'Israël,
laniAiic. mais une compensalion itoiir les iircmiers-nés
(Ihaimtrk XVI. — 17. El uccipUc siiKjiili lliu- qui lui étaient dus. Le mot data se dit donc éga-

ribuliim suiim
''.
lement des choses données en payiiienl et des
3l:i. Et dfsiriiilfriiiil ipsi, et mniiin ([uw siuit choses données en |)ur don. De la sorte, toiildou
eis •'. Li" présent est mis pour le passé, suiitpoiiv peut s'ex[)rimer par datum niiiis ce qui s'ex- ;

craut ou fiieriiiit. prime [)iu- datum n'est p.'is toujours un pur don,
3i. Et omnis Israël uni in rirriiilu funiiii, fii- puis([u'il y a des choses qu'on donne en paxc-
fientut it roct' l'iinim '. Il sousentendre crut,
l'aut ment.
et compléter ainsi la phrase amnis [snii'l qui
: 1"2. Omnis primitia olei, et omnis primitia vint
erat in circuitu eorum. ettritiri, primitia eorum qua-runupte dederint Do-
;-57. Qiiniii'ini sdiiclilicdvi'ruiit tliitrihulii pccra- mino, tibi dedi ea '. L'('cri\ain sacré n'a pas mis
torum liDium in (iiiimid)us suis '. On n'a pas mis omnem iirimitiram tibi dedi eum; mais après
quia sanctilirai'i'iuiil Ihiiribula pecvalores lii in avoir dit omnis pi-imilia, et énuméré les choses
aninidlius suis ; iivMs cntmuc si l'on ne savait [tas demi on de\ail olfrir les prémices, il a ajouté
de (pii étaient les eneensoirs, on a dit peccato- tibi dedi ea. Il aurait pu dire du moins tibi dedi
rum horum, au lieu de dire sua. Quant au sujet eam,on bien ///*/ dedi eus, c'est-à-dire primitias;
i\c sanrtilicavci unt ,
qui ne peut être que ipsi, mais il ;i employé Ce change-
le .ucnre neutre.
on laisse au leeteur lt> soin de le suppléer. ment de cas est reçu langue la- même dans la
Cii.vi'iTRE XVII. — 8. Et ecce ijerminavit vii^ia tine, en vertu d'une locution absolue. Quant au
Aaron in domnm /.ce/''; les règles de notre lan- mot primitia, il ne me parail pas être admis
gue demandaient /(( doma Lt'vi. :
dans notre langue, qui neii^iloie guère que le
Chapitre XVtlI. (>. Et ego iieeepi fratres — pluriel primitia'. Mais si nos traducteurs ont pu
restros Leritas de medio liliurum Israël dationem reproduire ces locutions grecques .Yo» eonqre- :

datam Domino '. Cette locution ne pouvait pas (jabo eonrentirula eorum de san()uinibus Vi- '',

être exprimée autrement en latin. En effet le rum sanquinum et dolosum abominabitur Domi-
texte grec porte îofjis: ôBof^evov; dont la tra- nus quoique la langue latine n'emploie le
•!,

duction littérale est datum datitm.A6iJ.<x, en effet,


:
mot sn»;/«/.s' qu'au singulier, poui'tjiioi aurait-on
se rend par datum, connue on le voit dans ces pa- plus de scrupule de mettre primitia au singulier,
roles de IWpôtre .Voii (juia ipoero datum, en grec,
:
afin de se rapprocher davantage du grec ? Ce-
Jôfxa, sed requiro frurtum s, et dans ce pas- pendant quelques traducteurs recourant à l'ac-
sage de la Cenèse Dédit Àlmiham data filiis cusatif pluriel primitias,
:
omnes pri-ont écrit :

.fî//.«" entrée, (Jô^xara ; et aussi dans ce passage de mitias tibi dabo. De


manière ils ont évité
cette
l'Évangile : Nostis buna data dare jilii vestris lo^ de faire passer du grec en latin deux locutions
où le grec porte également ^ôp-^ra. D'un autre qui nous sont étrangères.
rend aussi par datum, non plus
côté, Jc'oo/jtîvov se CnAPiTiiE XIX. —îl.Loqueretiliis Israël etaeci-
substantif, mais participe. On aurait" donc pu tra- piantad te juveneamrufam ^ : c'est comme s'il
y
duire par datum (/«n/of, c'est-à-dire datum quod iwailaddueant ad te. On pourrait aussi réunir les
datur, s'il n'y avait pas eu d'équivoque à éviter. deux formes, et dire : accipiant et addueant ad te
Pour ne pas donner lieu à cette équivoque, quel- juveneamrufam..
ques uns de nos traducteurs ont mis donum da- 7. « Et il lavera son corps avec de l'eau »
; le
tum. Mais donum s'exprime en grec par 5wpov, et sens n'eut pas été moins complet quand même
on n'aurait pas ajouté « avec de l'eau. » :

' Quccctliomme soit puni de mort, et qu'il soit lapidé par tout le
— — 9. Etponet extra eastra in lorum mundum'\ Le
peuple. Prenez chacun vos encensoirs.
~ J Ils furentengloutis,
eux
et tout ce qui leur appartenait. ' Et tout le —
peuple d'Israël, qui était latin demandait /» loeo mando.
autourd'eu.v, s'enfuit en entendant leurs cris. ^ Parce que les
en- —
censoirs de ces pécheurs ont été sanctifiés par leur mort. — • Et la
verge d'Aaron.qui était confiée à la famille de Lévi, se trouva avoir
Henri. — J'ai accepté, parmi tout le peuple d'Israël, les enfants de
'
' Je vous ai donné toutes les prémices de l'huile, du vin et du
Lévi, vos frères, pour être consacrés au Seigneur. Ce n'est pas — >*
blé, to«t ce qu'on offre de prémices au Seigneur. ^ Je ne prendrai —
que je recherche des présents car je ne demande que des fruits
; point départ à leurs réunions, où ils offrent le sang des victimes
( Ps.
(PhiUp. IV, 47). —
" Abraham lit des présents
à ses enfants ( Gen. "v, 4). —
î Le Seigneur déteste Iliomme de sang
et de fraude Ps.
*xv, 6), —
"> V'ous savez donner de bonnes choses à vos enfants V, 7.) — * Commande aux enfants d'Israël de t'ammenerune génisse
(

(Matth. VII, 11 ). rousse. — 11 les mettra hors du camp dans un lieu pur.

S. AuG. — ToM. IV. 26


338 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

L'i. Oiniic ras npcrfiim quipciiinque no)i Iiabeut Denm et adversus Moi/sen '; on a mis ad Deum au

tiUiiiaturamiill'Kjntam super en '.


lieude de Deo. Mais certains traducteurspourne
CnAPiTP.E \X. \). Et (ivrcpit Mdfises —
rirçiam, pas reproduire cette locution, on dit detrahe- :

quw ante Domininn - il f;iiit sous-ontondrc ernt. ; bant d'' Deo.


1:2. « Parce que tu m- m'as pas cni, et que Ora ad Deum, vt auferat anobisserpentem^.
7.
« tu ne m'as pas banctilié aux yeux des en- au lieu du pluriel, comme nous
C'est le singulier
« fanls d'Israël ; » c'est-à-dire, tu n'as pas ren- l'avons remarqué pour rana, au livre de l'E-
du ténioi:;na^c à ma sainteté. On retrouve la xode •^.

même locution dans ces paroles « .le me sanctifie 9. Et factum est quando motnordit serpens lio-
'< pour eux •'
; » et dans l'oraison Dominicale : minem, et aspe.ritin leneum serpentem,et virebat ''.

« Que votre nom soit sanclifu' '*. » Cette locution a deux particuliarités ; elle chan-
13. Et incolœ fiiiniiisin j-Egijpto (lies plures •";
ge le temps du verbe, en passant du parfait à
,
dies plures est mis pour miiiis niultis. l'imparfait, puis elle ajoute sans nécessité la con-
18. « Édom lui repondit. » Sous ce nom, on jonction ('/.

désigne la nation elle-même; car Edom, qui n'é- H. Et eleva}(tesexOboth, castra coUocaverunt
taitautre qu'Esaii, n'existait plus de même ; in Arehalgaï trans in eremo ': c'est comme s'il y
ceux qui avaient envoyé les ambassadeurs sont avait /)! ulteriore eremo.
appelés Israël, qui était primitivement le nom Chapitre XXII. — 23. Et pereussit asinam in
d'un homme. virga ', il fallait rirga, au lieude in virga.
19. Et dicunt ei [ilii Israël : Juxta viontem Chapitre XXIII. — H. In maledictionem ini-
transibimus, si autemdeaqua tua biheritnus eçjo et
mieorummeorum voc((rite,eteere benedixisti bene-
pecora mea dabo pretium tibi Ce passage du ''.
dictionem ' on n'a pas dit benedictione; maison
:

pluriel au singulier ne manque pas d'élégance. a employé l'accusatif comme s'il y avait ecce
Bien qu'il y ait /(/// Israël, on croit voir Israël dixisti benedirtionem.
lui-même prendre la parole, et commencer son 12. Quœcumque miserit Deus in os meum, lior
discours par le pluriel : transibimus et biberi- obsermbo loqui '^
: il hxWpiiUiœc ohservabo.
mus. 13. mecum adliuc in locum alium, de (juo
Veni
30. Et ridit (imuis sijnaqoija, quia dimissus est non eum inde
videliis ''.

Aaron '
. Ilde trouver dans l'Ecriture
est difficile Chapitre XXV. 4. « Et le —
Seigneur dit à
le mot dimissus employé comme synonyme de « Moïse Prendslcs princes du peuple, et pends
:

morluus; si ce n'est dans ce passage de l'Evangile « les coupables en plein jour devant le Seigneur,
où Siméon dit : Xuur dimittis serrum. tuum in « et le Seigneur détournera sa colère de dessus
in pare ^. Encore le grec ne dit-il pas acfeic, équi- « Israël. » C'est le Seigneur qui parle et cepen-
valant de dimittis mais «7:o>.-jei;, qui a plutôt la dant il ne dit pas : Pends les coupables devant
signification de resalvere que de dimittere. moi, et je détournerai ma colère de dessus
Et lleverunt Aaron triqinto dies omnis
Ibid. Israël.
domus Israël « on n'a pas mis flevit. On ne lit pas
;
IS. Domus familiœ est Madian '" ; c'est ainsi
non plus tota ou unirersa, mais omnis comme qu'on désigne la femme qui fut tuée avec l'Israë-
s'il y avait plusieurs maisons. Le sens, en effet,
lite adultère. Par ces paroles, on a voulu, ce me
change considérablement selon que l'on emploie semble indiquer, la ïioblesse de sa naissance car ;

l'un ou l'autre de ces mots; ainsi omnis homo, l'expression domus familiœ -d beaucoup d'analo-
désigne l'universalité des hommes tandis que to- gie avec les mots paterfamilias et mater familas,
tus homo se dit d'un seul homme. Mais l'Ecriture par lesquels nous avons coutume dedésignerles
emploie habituellement ojnji/.spour totus. personnes extrêmement riches.
Chapitre XXI. — 5. Et detrahebatpopulus ad

Et le peuple murmurait contre Dieu et contre Moïse.


' 3 Prie —
Tout vase qui n'a point de couvercle, ou qui n'est point lié par-
'
Dieu qu'il nous délivre des serpents. ' Ch. vin, v. 6. —
* Et tous —
dessus. —
2 Mo'i'se prit a verge qui était devant le Seigneur. — ceux qui avaient été mordus par les serpents et <iui regardèrent le ser-
3 Jean, xvir, 19. — Matt. vr, 9. Nons avons demeuré en — •'•
pent d'airain, furent guéris. —
''Etant sortis d'Oboth, ils campèrent
Egypte pendant longtemps. - Les enfants d'Israi-I lui dirent Nous
••
: à Archalga'idans le désert qui est de l'autre côté. 11 frappa l'ânesse — i-

passerons auprès do la montagne et si nous prenons de votre eau pour avec son bâton. ^ —
Je t'ai appelé pour maudire mes ernemis et

;

nous et nos troupeaux; nous vous en payerons le prix. ^ Et tout le tu les bénis. —
J'aurai soin de dire tout ce que le Seij,'neur me
'^

peuple apprit qu'Aaron était mort. Maintenant laissez mourir — **


mettra dans la bouche. —
Viens avec moi en un autre lieu,
'•'

votre serviteur en paix (Luc, ii, 29.) " Et toute la maison d'Is- — d'oii il te sera împrssible de ic voir. '" Elle était d'une fiimiile —
raël plenra Aaron pendant trente jours. illustre parmi les Madianites.
LIVRE IV. — LOCUTIONS TIIIÉKS DES NOMIJKKS. 359

Chai'itiie WVI. — I, ^. /•-' loniliisi-sl Ihnni- «sans taolio. >. Ce n'olaiout pas seuloiuonl les a-

nus ad Monsfii ,'tiiil Kleaziir sanrdntem, iliirnx : gneaux, qui devaient être « sans laclie » mais
Arciiiei)riiirii)iiim tolius snuniiixjw liliorum Isnirl
ou a sdus-onloudu (cllo (iiiaiilé en parlant des
a vifiiiiti aunis el supra '. l{oiiiar([iio/, le sons du veaux et dos bolior.-^.

n\o{ priticiphtm oniployc ici pour dt-signor la i. Décima décima agno uni, septem a<jnis* ;c'cs,l

liarlio (hi pouplo ipii était dans la t'oico do comnios'il \ avait siuiiuhi singulis.
3i». Excjitis vdtis restris, et vdltintaria vestra,
laf;o.
Chapitre \XVIi. — ifl, "21. U exaiidiant cum et lioliicauliinuitd vestni, siuriliid restr'i, et liba-

jilii Israil - ; et pins Iciin : lu irr <-jii>ic.iiiinit •'; mina restra, et salutaria reslra '.On n'a pas dit

encore In oie ejus iiitroilniiit poui' ilire exceptis cutis vestris, et vulinitaciis restris, el
et :
<
; :

Ils exécuteionl tous ses ordres. le reste de la même manière ; on mis


n'a pas
-2iî. « Mdiso lit tout 00 (inoleSoifïnour lui avait non plus excepta rota restra, ce qin eut été débu-

« conunando; ot ajantprisJosuoil le prosonlado- ter par un solécisme. Mais, après avoir onq)loyé

« vant le g:rand-prètrc Eléazar, etc. » Ce qui nous la forme régulière et usitée exceptis rôtis vestris,

porto à noioroos paroles : « ïloïse fit loid ooqiic on mot les substantifs qui suivent à un autre cas,
« le Seigneur lui avait oounuaiuh', » c'est (juel'o- qui ne peruiot pasdosous-ouloudrof'jrc/ït/.s, mais
crivain sacré ne s'est pas contenté de les dire une seulement excepta. Quand mémo cotte locution
fois. ne serait admise qu'on grec je n'en parlerais pas,
23. « Il lui fil cunnaitre les ordres que le Soi- mais elle n'est pas plus reçue en grec qu'en latin.
«gneur avait donnés à Moïse ; » poiu": les ordres Chapitre \\X. '^.HomnJuinuiquicumqHero- —
que le Seigneur lui avait donnés rerit cotum Ikimiuu '
; c'est comme s'il y avait,

Chapitue WVIII. 13. —


f)t'(imiim decnnam (imnis homo.
similagiuif: nmspt'isdin in (deonçinoiini'-': comme \. « Quand une fournie aura fait un vœu au
s'il y avait : sinfiulmt décimas sinriulis agnis. Car « Seigneur, ou promis quoique chose avec ser-
l'expression riecimam decimam indique qu'il faut « ment, si c'est une jeune fille qui soit encore
prendre autant âc dizionios d'agneaux qu'il y a <i dans la maison deson père. » L'Ecriture, com-
1(), 17. « Le quatorziémojourdu premier mois me on le voit ici, donne le nom de « femme » à
« sera le jour de la l'été; vous mangerez pendant toute poisonno du sexe, lors même qu'elle est
« sept jours despainssanslcvain. Lafète secé- >' vierge. C'est pour cela que l'Apôtre a pu dire de
lébrait pendant plusieurs jours et cependant, ;
Jésus-Christ, qu'il a été « fait de la femme *. »

chose digne de remarque on dit « le jour, de la Ibid. Et audierit pater ejus rota ejus, et defi-

fête », et non « les jours de la fétc sans tenir ,


nitiones ejusquas definirit'". Definitiones definivit
compte de sa durée. est une locution.
Chapitre NXIX. — l. Et mense septimo una Ibid. Delinirit adrersus animam suam*^, comme
mensis^'. C'est la même locution dans ce passage s'il y avait adrersus delectationes aninrœ suœ.
delà Genc&e 1 Et fai ta est vespera,et fartum est \hk]. Et taciierit pater ejus, et stabunt omnia
mane dies unus '. Dans l'un et l'autie cas, le rota ejus '. La conjonction et est de trop : car on
grec porte r.fiéçx ^îx. En traduisant ici par trouve un sens complet dans la phrase consti-uite
prima die mensis, certains interprètes ont donc de la sorte : Si audierit et tacuerit pater ejus,
supprimé une locution inévitable, tout en con- stabunt omnia rota ejus.
servant le vrai sens. Si autem facta fuerit riro S; c'est le sens de
7.

2. Vitulum unum ex bobus,arietem iinum ^. On nupserit l'Ecritm-e s'exprime souvent de cette


:

n'a pas mis ex ovibus, comme on a mis ex bo- manière.


bus, mais ces derniers mots eux-mêmes n'ajou- Ibid. Et vota ejus super eam ^, il faut sous-en-
tent rien au sens. tendre sunt que plusieius traducteursont eu soin
Ibid. « Sept agneaux d'un an, qui soient d'exprimer.

> agneaux, qui sont au nombre de sept.


Un dixième pour chacun des
'Le Seigneur dit à Moïse et au grand-prêtre Eléazar: Prenez: tous — 'Sans matière de vos vœux, vos dons volontaires, vos
compter la
les hommes valides de la nation d'Israël depuis vingt ans et au des- holocaustes, vossacrifices. vos offrandes deliqueurs.et vos hosties pa-
sus. —'Afin que les enfants d'Isaaël l'êcoutent. 3 A sa parole
ils — cifiques. —
3 Tout homme qui aura fait un vœu au Seigneur. ' Gai.

sortiront.— » A sa parole ils entreront. - s Un di.Tième de mesure
de IV, 4. —
* Si son père est instruit des vœux qu'elle a faits, et du
fleur de farine, mêlée avec de l'huile, pour chaque
agneau. 6 Et le — serment par lequel elle s'est liée. -«Elle s'est engagée par serment à
premier jour du septième mois. —
Et du soir et du matin se fit le pre- quel que chose de pénible.
'

Si ïon père n'a rien dit. son vœu sera
mier jour. — * Vn veau et un bélier. obligatoire. — *Mais si elle a un mari. — ^Siellea fait quelquevœu.
.

360 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

13. Omnia quœcumque exierint ex Ittbiis ejiis Galaad, et erat locusjocus pecoribus K II ne faut

secitnihim vota i'jus,et secuiuliim detînitiones quœ pasunir ensemble dansla prononciation les mots
adveisus (inimam ejus,ium manct c/'. On s'atten- locus locus, mais faire une pause après le pre-
dait à lire non mnnent ei au pluriel ; c'est en effet mier et dire ensuite locus pecoribus. On est ainsi
ce que plusieurs traducteurs ont mis, pourévitei' un istant à se demander quel est le lieu, dont il
cette espèce de solécisme. est question ; et c'est ce qui fait l'élégance de
Chapitre XXXL -i. Mille ex — tribu, et mille ex cette répétition.
tribu ex omnibus tribubus Israël On ne dit ''.
pas 2. Et accedentea {îlii Ruben etfilii Gad dixerunt
douze foismille, ctpourtantcette répétition n'in- ad Moysen et Eleazar sacerdotem, et ad principes
di([ue-t-elle pas le même nombre ? synagotjœ, dicentes'^-. Cette locution dixerunt di-
8. Interfecerunt in gladiu'^; les règles deman- centes n'est in grecque ni latine ;clle paraît em-
daient : interfecerunt gladio. pruntée à l'Hébreu.
10. Et omnes civitates eoruin, quœ in habitatio- o. « Donnez cette terre en partage à vos sér-
nibus eorum *; il faut sous-entendre erant. ie viteurs ; » comme s'ils parlaient pour d'autres,
Ibid. Et villas eorum succenderunt in ifpii j; tandisqu'ils demandent pour euv-mèmes.
pour se conformer à l'usage, il fallait dire suc- 11, 12. .\on enim seruti suiit post me prœterCa-
cenderunt iqni. leb filius Jephone Il semble qu'on devait dire : •'.

18. « Conservez toutes les femmes, dont au- prœterChaleb filium Jephone si l'on a emplo- :

« cun homme n'a approché. » Nulle part on ne yé le nominatif c'est sans doute à cause du verbe
voit plus claiicment que l'hébreu, par une lo- secuti sunt, qui précède. La langue latine elle-
cution qui lui est familière, donne même aux même fait usage de cette locution, mais rare-
vierges le nom de femmes. ment.
28, 29. Et (I dimidid parte eorum accipietis, 13. Honec convimeretur omnis qeneratio fa-
et dabis ea Eleazar sacerdoti primitas Domini «; cientes maligna in conspectu Domini on n'a pas '*
;

on ne lit pas dabitis. mis (ariens maligna, ou bien facientium mali-


3o. « Et les femmes, qui n'avaient pas connu gna.
« d'hommes, furent au nombre de trente-deux 16. Et accesserunt ei, et dixerunt \ La forme
« mille. » C'est ici une nouvelle preuve que le en usage est-celle-ci -.accesserunt ad eum.
nom de femmes est donné mêmes aux person- 24. Etœdificabitis vobis ipsis civates impedimentis
nes qui n'ont pas connu d'hommes, c'est-à-dire vestris '•
; c'est comme s'il y avait : œdificabitis
aux vierges. vobis ipsis civitates propter impedimenta vestra.
54. Et accepit Moyses et Eleazar sacerdos au- 26, 27. « Notre bagage, nos femmes et tous
rum a vhiliarcJiis et a centnriotiibus, et intulit ea « nos troupeaux resteront dans les villes de Gâ-
intabernaculum testimonii '. Il semble qu'onde- te laad mais vos serviteurs passeront tous le
;

vait direct intulit illud in tabernaculum testimo- « Jourdain, prêts h combattre, » au lieu de dire
nii. C'est ce qu'onlit dansla plupartdes versions nous passerons tous le Jourdain, prêts à combat-
latines, elle mot aurum, dont le pronom rappel- tre, ils semblent parler de personnes étrangères.
le l'idée, parait l'exiger. Toutefois la multitude 28. «Moïse leur recommandaEléazar; le grand-
des objets énoncés précédemment, et d'où cet it prêtre et Josué fils de Navé, et les princes
or étaittiré, peut expliquer l'emploi du pluriel : « des familles danschaque tribu d'Israël. » On ne

intulit ea. lit pas : Moïse recommanda à Eleazar, grand-


les
Ch.\pitre XXXII. —
1. Et pecora, multituào prêtre ; ce que les règles communes du langa-
erat filiis Ruben et filiis Gad, multitudo copiosa ge exigeaient cependant. Car c'est sous la con-
valde 8 ; on ne lit pas et pecorum jnultitudo duite de ces chefs que les enfants de Ruben et
erat. de Gad prirent possession du pays qu'ils avaient
Ibid. Etviderunt regionem Jazer et regionem demandé en partage. Il est donc à présumer

' Tous les vœux qu'elle aura formulés, et tous les serments, par
lesquels elle se sera engagée à quelque chose de pénible, seront nuls. Ils virent que le pays de Jazer et celui de Galaad, offraient
'

— Mille hommes de chaque tribu. — Us firent périr par Pépée. —


2 ^ des lieux très-favorables aux troujieaux. Les enfants de Ruben et —'
*Toutes les villes où habitaient, — ils brûlèrent leurs châteaux.
^ Ils de Gad vinrent trouver Moïse et Eleazar le grand-prêtre et les prince s
— Vous prendrez les prémices du Seigneur sur moitié du butin
^ la i|ui du peuple, et ils leur dirent. ' Ils n'ont pas —
voulu me suivre, excepté
leur est destinée, et vous donnerez au grand-prètre Eleazar. — Moïse
le ^ Chaleb, fils de Jéphoné. —
' Jusqu'à ce que cette race d'hnrames qui ,

et le grand-prêtre Eleazar,ayant reçu l'or des tribunsetdes centeniers, avait fait le Seigneur, fut entièrement éteinte.
mal devant le
' lis —
le mirent dans le tabernacle du témoignage. Les enfants de Ruben — **
s'approchèrent de lui, et lui dirent. —
''El vous bâtirez des villes pour
et de Gad possédaient une multitude innombrable de troupeaux. y mettre en sûreté votre bagage
LIVRE IV. — LOCUTIONS TIKÉKS DES NOMItRES. 361

qu'on ne lour recommanda |)ar l(>s liomnies CiiM-rriiE XXXIV. — 6. Ilor erit vohis fines ma-
chargésilc les introduire dans la terre tant dé- ris I, il fallait /// eruntvobis.
sirée, mais <|n'ils furent pliitôl iveomniandés, 7. Et hoc erit voliis fines ad uijuilonem ' ; celte
eux-mêmes à leurs eliels. 1()( iilion est la même (inc la précédente.
30. ^'/ autein non tninxirriiit armati vohiscitm CmmmtueXXXV. — 3. E( erunt rivitates eis
in hélium in ronspretu Dumini, et tramtferte im- li(d>itare^ ;
lc$iT\îlcs(.\('in:inih\\cn[ad haliitandum.
pedimenta eorum '
; la eonjonction et est de H. Itêfufiia erantrobis fnijere iUn homieidam '•;

trop. (in poinail employer la forme (irdiriairr cl dire:


33. Et (ledit eis Mojises [iliis Cad et liliis Itit- ni fufiiat illo homieida.
ben 2; il n'était pas nécessaire démettre eis. lo. Et ineolœ qui in vobis, istie rivitates i)i re-
Chapitue WXlll. —
li. Et nonibi erat aqua fuiliam '. Inrolœ est ici an sinjjidier et on doit
populo bilh'ie -^ Ml lieu de(/(/ liibenilum. l'entendre connue s'il y avait huie incolœ qui in
51. Loquere tiliis Israi'l, et dices ad eos ^ ; on vobis k quoi il faut ajouter est ; car s'il n'y a pas
pouvait se eimlentei' de dire ; Imiuere filiis hruel. ([ui in i'(i/'/.s('.sf, c'est en vertu d'une locution l)ien
5:2. Et omnia idola fiisili'i eorum perdetisea ' ; connue, mais plus familière à la langue grectpie
le pronom ea est de trop. qu'à la langue latine.

'Mais s'ils refusent de marcher avec vous pour combattre sous les ' Vous aurez la mor pour limite. —
Voici quelles seront vos limites
!

yeux du Seigneur, vous transporterez au-delà du Jourdain tout ce du cûté du nord. —


' Ils auront de.s pour y habiter.
villes < Vous —
qu'ils ont ici. —
3 Moise accorda aux enfants de Gad et de Ruben, aurez des villes de refuge pour ceux qui auront donné la mort Â
— Le peuple n'y trouva point d'eau pour boire. — * Parle aux
-^
quelqu'un. —
Ces villes serviront aussi de lieu de refuge à l'étran-
''

enfants d'Israël, et dis-leur, — ^ Tu détruiras toutes les idoles qu'ils ger qui habite au milieu de vous.
se sont fabriquées.

S. AuG. — ToM. IV. 27


LIVRE CINQUIÈME.

LOCUTIONS TIREES DU DEUTERONOME.

Chapitre I. — 7. l'sque ad /lumen miKjnum, 20. « Et il vous tirera de la fournaise de fer


flumen Eiipbratem '
; on n'a pas dit Vsque ad : « de l'Egypte. » Par « la fournaise de fer, » on
flumen mtujnum Euphmtem. a voulu du-e une dure oppression. Lepsalmiste
:

1". Et jndicium quod durum fuerita vobis, af- s'est servi dela même figure, en disant de Jo-

feretis illiid ad me Au lieu de dire quod durum ''.


seph : « Le fer a traversé son âme i » .

fuerunt vobis, on a rais a vobis, comme s'il y 22. « Je ne passerai pas ce Jourdain, » comme
avait : ita durum, ut a vobis judicari non possit. s'il y avait un autre fleuve de ce nom. C'est la
35, 36. Si videbit aliquis virorum istorum ter- même locution, je crois, qui fait dire souvent :

ram optimam hanc, quam juravi pairibus eortim, ce monde, comme en existait un autre.
s'il

prœter Chaleb filius Jephone, hic videbit eam ^. 25. « Si vous engendrez des enfants, et des
Nous avons déjà trouvé cette locution au li^TC « enfants de vos enfants. » Remarquez celte lo-

des Nombres ; elle consiste h mettre le nomi-


'*
cution, en vertu de laquelle on dit des aïeuls
natif filius, là où il fallait dire avec l'accusatif, qu'ils engendi'ent leurs petits-fils.

prœter Chaleb filium Jephone. Et quaretis ibi Dominum Dettm vestrinn;


^9.
Chapitue II. —
". Doyninus enim Deus rester et eum, quando e.vquiretis eum ex toto
invenietis
benedixit omni opère manuum tuarum^. On
te in corde tuo, et ex tota anima tua in tribulatione
vos in omni opère manuum
n'a pas dit benedi.vit tua 2 on ne lit pas in toto corde vestro et in tota
;

vestrarum, quoiqu'on ait mis auparavant rester, anima vestra, in tribulatione vestra.
et non pas tuus. 32. Interrogate dies priores, qui fuerunt priores
24.yune erqo suryite, et promovete, et pertran- te ^. Dies est mis pour /(om/?!PS. Remarquons en-
site-vosvallem Arnon; erce tradidi in manus tuas core que après, a\oir commencé par le pluriel
Seon regem Esebon «. On n'a pas mis in manus interrogate, on termine par le singidier yw/orfs te,
vestras; mais on a passé du pluriel au singu- tandis qu'il fallait dire priores vobis.

lier. 34. Si et tentavit Deus iugressus accipere sihi


Chapitre IV. — 7. Quoniam quœ est qens gentem de média gente *. Tentavit est mis pour
maqna, eui est ei Deus appropiuns illis '. Il y a voluit, ou toutauti-e mol ayant le même sens. Et

ici deux choses à remarquer la première c'est : lorsqu'on lit de média gentc, il faut entendre de

qu'on a dit : eui est ei ; la seconde, c'est qu'on mediisgevtibus; c'est le singTilicr employé pour

n'a pas dit mais illis.


: appropians illi, le pluriel,coimne quand nous avons vu serpens,
12. « Vous n'avez aperçu aucune forme, mais rana, locusta, mis pour serpentes, ranœ locitstœ.
« seulement une voix. » La voix ne peut pas Ibid. Serundum omnia quœ feeit Doyninus Deus
tomber sous le sens de la me ; mais, comme si rester in jEgijpto coram te vidente '; on pouvait
tous les sens avaient la faculté d'apercevoir, on se dispenser de mettre vidente, qui n'ajoute rien
emploie ce mot pour désigner en général, toute au sens.
perception sensible. Chapitre V. — 5. Et ego stabam inter Domi-
o, 14. In quam vosingredimini illo, hœreditare num et vos in tempore illo, annuntiare vobisverba
eam^; le sens eût été complet sans illo. Domini ; quoniam timuistis a facie ignis, et non
causes qui vous
ascendistis in montem, dicens : Egosum Dominus
'
Jusqu'au grand fleuve de l'Euphrate.— = Et pour les

nai-aitront difficiles à juger vous me les soumettrez.


— •'Aucun de ces
hommes ne verra cet excellent pays, que j'ai promis à leurs pères
avec serment, excepté Chalep, fils de Jéphoné,
qui le verra. « Ch. — —
2 Et là vous chercherez le Seigneur votre Dieu et
Ps. civ 18.
*

Car le Seigneur votre Dieu vous a béni dans toutes vos


;

xxxll 12. - ''

Tousle trouverez, pourvu que, dans votre affliction, vous le cherchiez


entreprises. —
» Maintenant donc levez-vous et marchez, et passez la
— de tout votre cœur et de toute votre âme. —'Interrogez les siècles
d'Esébon.
vallée d'Arnon car j'ai livré entre vos mains Séon, roi ' Si —
un Dieu est venu se choisir un
passés, qui vous ont précédés.
,

qui ait son


'Car quelle est la nation, quelque puissante qu'elle soit, —
' Selon tout ce que le Seigneur votre
—« peuple du milieu des nations.
Dieu si près d'elle. Dans laquelle vous allez entrer, pour en prendre
Dieu a fait en Egy-pte sous vos yeux.
possession.
LIVRE V. — F.OCUTIONS TIUftES \)V DElUftHONOME. 3fi3

l>cu!i ttiiis, t'tr. '


; ditrii.i est mis |iinir rum ilire- minus Deus luus (jentes islas ante faciem luam,
irt. dicens : l'ropter justitias nieas indiiait me Ihimi-

1 1. /•.'/ ikIiyiki qui iiirolit i)i t<-


''.
Os ivirolos s'a- nus hmeditiireterram bounm istam '. Voici l'or-
dressent an penjile, cl nt)n à un seni liounne ; lar dre na'nrci des paroles: ne dicas in corde tua di-
ce n'est ([u'au milieu du iieiqile ipie l'étranger cens.
pouvait denieuier. •28. Ne quando dicani inluibitantes terram, unde
15. Proptcr hoc comtituit tihi Domiinis Dcus edu,risti nos inde ^. L'adililion de inde est une
tuiis, ut obscnrs (li<'iiisiilih(ili,('tsi(tilif'iran'i'um •'. forme ]>arliculièreà l'iùiitme.
Si la ronjourtion et était supprimée, on ne s'é- CHAPriiîK XI. — 3. Qu(C ferit rirtutem yl'-^Hfip-

carterait pas, ce semble, de l'usage, en disant : tioritm ''.


Quelques traducteurs latins, ne s.iisis-

ut obsrri'i's (lirmsdhbati stinctilirart't'um. On pou- said \ as jtai lailemenl le sens de celle iiluase,
vait mettre encore : ut observes diem subbati, et n'ont pas voulu dire virtutcm^ : mais connue le

saurtitices etini; ou bien : propter hoc coiistituit mot grec 5vvap.i; a quelquefois la signification
tibi homiuus Deus tuus nlisernire diem sobboti, et de ils l'ont rendu par rirtuti ou c.irr-
e.rercitus,

sauetiliaire eiim. Mais i)uis(iu'on lit : ut (diserres /(//. a cependani


11 \ de l'élégance dans celte lo-
diem sabbati, et saiietifieure eum, il faut recon- cution quœ fecit virtutem eorum; c'est comme
:

naître dans celte phi'ase ime locidion inusitée, si l'on disait ((uid eam fecit, ce que le Seigneur

qu'il est bon de signaler. en a fait, i)our indiquer que le Seigneur l'a ré-
Chapitre VI. —
13. Attende tibi ne dilatetur duite à néant. Toute la difficulté vient de ce que
cor tuum, et oblieisearis noiniïii f)ei tui '. /)//((- le pronom exprimé au pluriel.
relatif est

tatio eordis pont donc se prendre aussi en mau- (!. ossuum deglutivit eos, et
Quos aperiens terra
vaise part. La joie a certainement pour effet de doinos eorum, et tabernacula eorum 11 y a ici '•.

dilater le cœur; la tristesse au contraire le res- deux locutions la première consiste dans l'ad-
:

serre; mais l'une et l'autre peuvent se prendre dition de eos, mot que le pronom quos, exprimé
en bonne et en mauvaise part. au commencement, rendait inutile; la seconde
20. Et erit, cum interrogaverit te filiustuus cras consiste dans les mots domos eorum, ajoutés à
diceus â; cras marque ici un temps futur indé- tabernaculaeorum, comme si les Israélites avaient
terminé. eu dans le désert d'autres habitations que des
Chapitre VII. — 1. Septem cjeiites magnas et tentes. Mais, en parlant de leurs maisons, on a
multas ''. Comment a-t-on pu dire multas,»i ces voulu sans doute désigner les personnes de leurs

nations ne sont qu'au nombre de sejit? Multas familles ; de même que le prophète désigne tout
est donc mis pour multitudinem habeutes. le peuple, quand il dit : Et nunc tu, domus
2. Non dispones ad eos testamentum 7; il s'agit Jacob 5. Cette locution n'est pas étrangère à la
ici de peuples; testamentum est donc mis pour langue latine; et Virgile lui-même appelé les

pactum. Romains domus Assaraci e, parce qu'ils descen-


3,4. « Vous ne permettrez pas à vos fils d'épou- dent du Troyen Assaracus.
« ser leurs fdles; car elles détourneraient vos fils 7. «Parce que vos yeux ont vu toutes les
« de mon culte, pour leur faire adorer des dieuv « œu\res merveilleuses, que le Seigneur a faites
« étrangers, et le Seigneur entrerait en colère « aujourd'hui au milieu de vous. 11 s'agit des >>

« contre vous. » Le Seigneur comme s'il parlait prodiges qni ont été opérés dans le désert, pen-
d'un autre que hii-mème, ne dit pas « J'entre- : dant les quarante ans que les Israélites y ont de-
« rai en colère. » mem'é; et cependant Moïse dit: « aujourd'hui. »
Chapitre IX. —
1. « Des villes très-grandes, et Ce mot désigne donc tout ce laps de temps, quel
« dont les murailles s'élèvent jusqu'au ciel; » que soit le nombre des années qiù le compo-
c'est là une hyperbole. sent.
4. Ne dicas in corde tuo, cum consumpserit Do- 9. « La terre que le Seigneur a jm'é de donner

> Je fus alors votre médiateur auprès du Seigneur, pour


vous trans-
mettre ses paroles car vous avez été saisis de fraj-eur à la vue du feu
; Après que le Seigneur votre Dieu aura détruit devant vous toutes
I

et vous n êtes pas montés sur la montagne, lorsqu'il vous disait Je ; lesnations ne dites pas : C'est à cause de ma justice que le Seigneur

.

suis leSeigneurvotre Dieu, etc. —


= Et l'étranger qui habile
aumilieu m'a mis en possession de cette terre e.vcellente. ' De peur que les

de vous. —
^ C'est pourquoi le Seigneur votre Dieu vous a prescrit de habitants du pays, dont vous nous avez tirés, ne disent. 'Ce que le —
garder et de sanctifier le jourdu Sabbat. < Gardez-vous —
de mettre Seigneur a fait de la puissance des Egj-ptiens.— * La terre, s'étant
votre cœur au large, et d'oublier le Seigneur votre Dieu. — = Et plus entrouverte, les engloutit avec leurs maisons et leurs tentes.— * Et
tard lorsque vosenfants vous demanderont —
' Sept nations grandes maiulenant donc, ô maison de Jacob ( Ts. il, 5) .— « Maison d' Assara-

et nombreuses. —
' Vous ne ferez point d'alliance
avec eux. cus ( Eneid. I, v. 288 ).

364 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

« ;\ VOS pères et à leur postt^rité après eux. » tas •. Fœneratio, dans l'Écriture, signifie l'action
Entendez « c'est-ii-dire h leur postérité après
: de prêter de l'argent, quand même on n'en tire-
« eux; » car ce n'est pas à eux personnellement rait aucun intérêt. On en voit une preuve dans
qu'elle a été donnée; mais ils l'ont seulement ce passage des psaumes Beatiis qui miseretur .•

possédée dans la personne de leurs descendants. et cotnmodat 2; car là où les traducteurs latins,

13. Si aiiU'in auditu nudieritis omnia niaiiilatii plus attachés au sens qu'aux paroles, ont em-
ejuK, qiiœ ego maiido tibi hudie '. On'pourrait ployé le mot eommodat, le grec porte Sy.vdhi
supprimer auditu; mais c'est une locution très- auquel correspond parfaitement le mot latin /"«'-
familière aux livres saints. neratiir.

14. Et dabit pluviam teirœ tuœ in tempore siio Ibid. Et principaberis gentium multarum, tiii
matutinnm et serotinum Commematutinum tem-
2. autem non principabuntur S; c'est comme si l'on
piis signifie le commencement du jour, n'aurait- disait tibi non dominabuntur, proposition dont
:

on pas voulu désigner par cette expression la le sujet est gentes. Car tui est le génitif singulier
prejnière époque de l'année ? Le mot serotinum, du pronom, qui au datif; il ne faut pas
fait tibi

est moins latin; mais il n'y avait pas d'autres le confondre avec nominatif pluriel de l'ad-
le

terme qui rendit aussi fidèlement la signification jectif qui a pour génitif tuorum.
du grec oij/tfxov. On s'en sert très-souvent, il est 7. Si autem fuerit in te egenus in fratribus luis *.

vrai ,mais dans le sens de tardif, tandis que, ici, Ces paroles ne s'adressant pas à un seul indivi-
il marque plutôt une certaine époque de l'an- du, mais à un peuple, on a pu dire in te.

née. 7, 8. Si autem fuerit in te egenus in fratribus


15. 16. Etcum comederis et siitiatus fueris, at- tuis in una civitatum tuarum, in terra quam Do-
tende tibi ipsi ne dihitetur cor tiium, et prœvari- minus Deus tuus dut tibi, non avertes cor tuum,
cemini, Nous avons déjà
et serviatis diis aliis 3. neque constringes manum tuam a fratre tuo egen-
signalé plus haut des locutions semblables, où te aperiens aperies manus tuas ei, fœnus fœnera-
;

l'on passe du singulier au pluriel, et où dilatetur bis et quantumeumque postulat, et quantum eget =>.

est pris en mauvaise part, pour signifier une Dans une loi qui prescrit des œuvres de miséri-
prospérité dont on abuse. corde, il n'y a pas de place, évidemment, |)our
^i.Etflumenmaçinum, llumenhuphratem'^. Ces les cruelles exigences de l'usure par les mots :

dans l'E-
sortes de locutions sont très-fréquentes fwnus fœnerabis ei, il faut donc entendre l'obli-
criture et rendent la pensée avec beaucoup de gation de prêter gratuitement les choses deman-
grâce. dées. En outre, les expressions aperiens aperies
25. « Le Seigneur votre Dieu répandra votre monustuas, aussi bien que celles-ci fœnus fœne-
« crainte et votre terreur par toute la terre. » Il rabis, présentent unelocution familière à l'Écri-
ne s'agit pas ici de la crainte ou de la terreur ture.
que les Israélites auraient éprouvée eux-mêmes, Après avoir prescrit de percer l'oreille au
17.
mais de celle qu'ils devaient inspirer aux serviteur, la loi ajoute ; Et ancillam tuam faciès

autres. similiter <•, ici l'accusatif est mis pour le datif;


Chapitre XII. 17. « Tu ne pourras pas — car l'usage de notre langue demandait ancillœ :

« manger dans tes villes la dinie de ton blé, » tuœ faciès.


c'est-à-dire vous ne devrez pas. : 21 Si autem fuerit in eo vitium, claudum aut cœ-
.

Chapitre XIII. — 16. Et incendes civitatem in cum, vel omne vitium malum '. On n'a pas mis
njni '"
; l'usage de notre langue demandait que claudicatio aut cœcitas, qui sont les défauts eux-
l'on mit simplement iiini. mêmes, mais claudum aut cœcum, qui se disent,
Chapitre XIV. —
24. Si autem longe fuerit via non des défauts, mais des animaux qui ont ces
a te c ; c'est comme s'il y avait longa via fuerit;
l'adverbe est mis pour l'adjectif. Tu prêteras à beaucoup de nations. —
' Bienheureuï celui qui


'

Chapitre XV. G. Et fœnerabis génies mul- exerce la miséricorde et qui prête (Ps. cxi.5). - 'Tu auras Tem-
pire sur beaucoup de nations, et personne n'aura l'empire sur toi.
* S'il
y a au milieu de toi un de tes frères, qui soit réduit à l'indigence.
Mais si vous êtes fidèles à observer les commai. déments que je
1
— 5 Sien quelqu'une de tes villes, dans le pays que le Seigneur ton

vous fais aujourd'hui. —


' II fera tomber sur vos champs, au temps fa-
Dieu va un de tes frères est réduit à l'indigence, tu
te donner,
vorable, les premières et dernières pluies. —
^ Lorsque vous aurez eu
n'endurciras pas ton cœur, et tu ne resserreras pas ta main à son
les biens de la terre en abondance et que vous serez rassasiés, gardez- égard tes mains s'ouvriront pour lui, et tu lui prêteras tout ce qu'il
,

vous de mettre votre cœur au large et de violer mon alliance, en ado- te demandera, et tout ce dont il aura besoin. ' Tu feras la même —
rant des dieux étrangers.— * Et le grand fleuve de l'Euphrate. — ^ Tu choseàtascrvante. —
' S'il a une tache, s'il est boiteux ou aveugle,
brûleras la ville. —
" Mais si le chemin est trop long pour toi. ou s'il a un défaut quelconque.
LIVRE IV. — LOCUTIONS ÏIllJ^IKS 1)1 DKITÉUONOMK. 365

défauts. K(>iMar(|UOz oucoiv roniini'iil on dit ri- « lies deux frères a accompli la Noloidc de sou
tium ituiliim, coiiimc s'il i»iii\ail \ avoir un do- « i)ère, » on répond cpic c'est le dernier ipioi-
tant qui lût bon. i|u'ils ne soient (piedeiix '.
(^iiAi'ii'itii \VI. — i. l'^t lien (Idimii't de cumi- (i. .\on piqueraliis niidain, ne(iiic siipeiidieni la-
bu.t, (le iiitibus immoldri-ritis vespert' die priinti pidem mol(r, quia aniniam isie pi(}nerul c'est ''
;

usque iu minw *;donnii-t est mis pour non renid- comme s'il y avail .quia animam piijnerussi fec-
iiebit ea iiocte. eris. Rcmaniuez ensuite le mot aniniani emplo-
Ciivi'iïiu: Wll. — I. .Voii iiffcrcs Dtiminn f)co yé i>oiir di'signcr celle \ie, (pii résiille de l'union
ttto l'itiilum vcl orcm, in quo est in ijisn iw7/»m'; deràme et du corps. La même locution repaiait
la l'orme réjjulièrc était in quo est viliinn ; mais dans ce passage de l'Evangile Nonne anima plus
la locution ciléc est |)Ins ritiniliôro ;i rRcritnro. est quam esc a •''.

5. Kl Idiiidiil'is eus in Iniiidihiis, et )ni)rienhir ''•;


7. Si aulem deprehendatui liomofurans animam
les règles de notre langue veulent sinipienicnl ejc fratribus suis filiis Israël ''.
.(»/m«m est mis
lupidibus, et fion pas in liipidihus. pour liominem. Ou lit ensuite : Eldjiiirimensenm
Vous ne poiuTcz pas prendre |)onr votre
liî. « vendiderit •"; c'est là une locution tpti mérite iinssi

« cher un étranger, qui ne soit pas votre frère. » d'être signalée : en


de mettre eam, effet iiu lieu

Ces mots « vous ne pourrez pas » sont mis pour cetjui eut été plus logique, puisque ce mol se

« vous ne devrez pas. >> nqiporte à animam, on a mis eum, (pii tient la
17. .\on mniliplirabit sibi equum '
; equnni est |)l;ice de liominem représenté par aniniam.

mis pour equos ou equilatum : aussi plusieurs Kl. Si debilum fuerit in proximo luo, debilum

ont-ils traduit par equilatum. qui'dcumque *'. La répétition de debilum, est une
Ch.vi'itue XVIII. — l(i. Si-riindnm omnia quœ locution à sigriiiler.

petiisli n Domino Deo luo in (Ihoreb, in die eon- Chapitre XXV. — 7. ,S'/ aulem noiueril homo
vocationis dicentes '».
Après avoir dit d'abord pe- accipere u.vorem fratris sui, et ascendet mulier in
tiisli, on a mis ensuite dicentes, au lieu de di- porta udsenalum, et dicet : Xon vult frater riri
cens. mei susi'itare nomen fratris sui in Israël, noiuit
ChapitreXX. — 4. Quoniam Dominus Deus frater viri mei '. Il
reconnu que l'Ecriture est
vester qui prœeedil vobiseum '''
; an n'a pas mis aime mots celle que nous
les repi'titioiis tics ;

vos. signalons ici, l'une des moins usitées, exprime


Chapitre XXII. — (i. « Si vous rencontrez de- avec beaucoup d'art la vivacité de la plainte.
« chemin un nid d'oiseau.v. »
vaut vous sur votre Chapitre XXVII. —21. Malediclus omnis qui
Ainsi l'Ecriture se sert du mot « rencontrer » à dormierit eum omni pécore «; dormierit a le sens
l'égard d'une chose qui est sans mouvement. de concubueril Ensuite c(/»( omni pécore csl mis
8. Si aulem œdifieaveris domum novum, furies pour eum quolibet pérore.
coronam solario tuo, et non faciès homiciilium in Chapitre XXVill.— 48. « Vous servirez les
dojno tua, si cadat quiceeiditabeo' ; c'est comme « ennemis, que le Seigneur votre Dieu suscitera

s'il y avait a solorio cadal qui cecidit; cette locu- « contre vous » Le grec porte axzovjoziç, qu'on

tion est tout-à-l'ait inusitée. a rendu par « vous servirez » or dans l'Ecriture :

Chapitre XXIV. —
î>, 3. «Si, étant sortie, elle cemots'entend ordinairement du service ou culte
« épouse un autre mari, et que le dernier mari qui est dû à Dieu, si bien que l'on donne le nom
« la prenne en aversion. » 11 est à remarquer d'idolâtres à ceux qui rendent ce genre de ser-
que, de deux hommes, le second est appelé « le vice aux idoles ce termeestdonc prisicidans un
;

« dernier. » Cette locution se voit encore dans sens différent de celui qu'on y attache orilinaire-
l'Evangile lorsque, à cette question : « Lequel ment. Cependant, il est possible qu'il ait, même
ici, la signitication ordinaire : car on prédit aux

' Et
ne restera rien, pour lo lendemain matin, de la chair de la
il

victime qui aura été immolée le soir du premier jour. ^ Vous n'immo- —
lerez point au Seigneur votre Dieu un veavi ni une brebis, qui ait quel- ' Matt. XXI. 31.— 'Vousne recevrez pas pour gage la meule de dessus
que défaut. — ' V^ous les lapiderei, et c'est ainsi qu'ils mourront. — ou de dessous, parce que celui qui vous l'o.ire engage sa propre vie. —
* II ne réunira pas un grand nombre de chevaux. » Selon la demande — 3 La vie n'est-elle pas plus que la nourriture ? ( Matt. vr, 35 ). * Si —
que vous avez faite en ces termes au Seigneur votre Dieu, auprès de la quel.iu'un est convaincu de s'être emparé injustement d'un de ses frè-
montagne de Choreb, au jour où le peuple était assemblé. ''Parce — res, enfant d'Israël. —
* Et de l'avoir entraîné par force et vendu. —
le Seigneur votre Dieu, qui marche devant vous, "
Si vous bâtissez — ^ Si votre prochain vous doit quelque chose. ' Mais si
un homme re- —
une neuve maison, vous ferez un appui autour du toit, et de cette ma- fuse d'épouser la femme de son frère, celle-ci ira à la porte de la ville,
nière vous ne serez pas responsable de la mort qu'un homme pourrait et dira au.v anciens Le frère de mon mari ne veut pas conserver le nom
;

trwiver dans votre maison, s'il venait .i tomber du toit. de son frère en Israël. —
" Maudit soit celui qui
pèche avec une bête.
S. AUG. — TOM. IV. '28
366 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

captifs lies mfiii\ si grands et si nombreux qu'on même sens que cette autre formule plus commu-
peut les supposer violeminentcontraints de ren- nément employée d'un bout du monde à l'au- ;

dre les lionncnrs divins à des ennemis, dont l'or- tre. Ce qui semble justifier cette locution, c'est
gueil élait porté à son comble. que l'on donne souvent le nom de cielàcette at-
49. Gt')itt'in cujus non aiidies vocem ejtts '.Re- mosphère, (jui nous environne et qui touche la
marquez d'abord que l'on dit en même temps terre.

cujus et ejus suivant la coutume de l'Écriture ; 12, 13. .\on in ca'lo est, dicens : Quis axcendet
et ensuite pbrase cujus non audies vocem
que la inc(elum, etaccipietnobis illud, etaudientesillnd
équivaut à celle-ci cujus linguam non intel- : l'aciemus '!
Meque trans mare est, dicens : Quis
lifies. transfretabit nobis trans mare, et nccipiet nobis
oi,oo. Mollis in te et tenern vulde fasciméit iliud, et audientes illud faciemus^? Dicens estmis
oculosuo frutrem suum et uxoremquœestin sinu pour ut dicas, c'est une locution nouvelle.
ejus, et qui reliquisunt filii quicumque relicti ftie- ChapitreXXXI. —
8. Et Dominus qui comitalur

rint un, ita ut det uni ex eisa cnniibus filiorum tibi tecum'i
suorum de quibuscumque edet, eo quod non deve- « Et le Seigneur dit à
16. Moïse: Bientôt tu
lictum sit eiquidquam inangustia et tribulatione, «dormiras avec tes pères « ces paroles expri- ;

qud tribuldbuntte inimicitui in omnibus rivitatibus ment la mort prochaine de Moïse.


tuis Remanpiez ici l'emploi defascinabit dans
''-. 27. Amaricantes eratis quœ ad Deum •'
; c'est

le sens de invidebit. Une mère sera jalouse de ce- comme s'il y avait : amaricabatis ea quœ Del
lui qui semble n'avoir survécu, que pour exi- sunt.
ger sa part de la chair de ses enfants, horrible 2!1. Scio enim quia post obitummeum iniquitate

nourriture dont les parents seront obligés de se iniquitatem facietis ''.


Le grec se sert du seul mot
repaître. C'est ainsi qu'au livre des Proverbes, ai/o^'/^oere, pour signifier iniquitatem facietis.
les versions latines ont mis : Non cœnabis cum Ibid. Et occurrent vobis malu novissimorumdie-
viro invidu^, là où le grec porte «yiîpi Pa'w.avw ; rum''; ainsi porte le grec qui revient à /;; novissi-

or jSaijy.ayo; a pour synonyme fascinus. mis diehus, ou bien in Jiovissinto dierum.


63. Et eiit sicut Malus est Dominus in vobis, Chapitre XXXII. 6. « N'est-ce pas lui, vo- —
benefacere vobis '. Le grec [)oi-lebenefacere vos ;
« qui vous a possédé, qui vous a fait et
tre Père,

et cette locution n'est même pas grecque. On « et vous a créé ? » L'ordre des paroles est à re-

voitque l'accusatif est mis pour le datif et à : marquer : il semble qu'on devait dire d'abord :

traducteurs latins ont préfé- « qui vous a créé et qui vous a fait, » et après
cause de cela, les

ré dire vobis, que de mettre l'accusatif vos. seulement : « qui vous a possédé. » Le moyen,
Chapitre XXIX. 2, 3. Vos vidistis omnia— en effet, de posséder une chose qui n'existe pas
quœ fecit Dominus Deus vester in terra .t^qijpto encore ?

coram vobis Pharaimi et servis ejus omnibus et Avec la graisse des reins du froment. »
14. «

omni terrœ illius, tentntiones magnas quas vide- C'est une métiaphore tout-à-fait inutisée.de dire

runt 0( uli tui


">
il faut remarquer le nom deten- « les reins dufroment, «pour signifier l'intérieur
;

tationes donné aux plaies d'Egypte. du grain de blé, d'où est tirée la farine compa-
Chapitre XXX. — 4. « Quand même vous se- rée à la graisse. Cette comparaison est familière
« riez dispersés d'une extrémité du ciel à l'autre, à la langue grecque. Nous en avons la preuve
« le Seigneur votre Dieu saura bien vous rassem- dans ce passage de l'Exode Elevantes farinam :

« bler. » 11 y a tout lieude croire, quecette expres- super humeras suos'\ où les Septante ont emplo-
sion « d'une extrémité du ciel à l'autre » a le yé le mot oxixzot. ,
qui signifie graisse.
'
20. Filii inquibusnon estfidesineis ;cettelo-
cution est d'un usage commun dans l'Ecritm-e.
1 Unenatinn dnnt vous n'entendrez |)as la langue. On verraau — '^

milieu de vous la femme, liabituéc à la vie U


plus molle et la plus dé-
licate, regarder d'un œil jaloux son frère et H
femme de son frère, et Il n'est point dans le ciel, pour que vous puissiez dire : (Jui est ce-
'

sespropres enfants qui lui sont restt^s, et ne leur donner qu'à regret lui qui montera au ciel et nous l'apportera, afin qu'en l'entendant nous
de la chair de ses enfants qu'elle sera contrainte de manger, parce qu'il puissions l'accomplir ? 11 n'est pas non plus au-delà des mers, pour que
ne lui restera rien autre chose, dans l'état de détresse et de misère, où voussoyezen droit de dire Qui est celui qui passera la mer et nous
:

vos ennemis vous réduiront dans l'enceinte de aos villes. Ne man- — -^ l'apportera, afin qu'en l'entendant nous puissions l'accomplir. 'Et le —
gez pas avec l'homme envieux. —
* Et de même que le Seigneur s'est Seigneur qui t'accompagne. — ^ Vous ne répondiez que par des
plu à TOUS combler de ses faveurs. —
'Vous avez vu tout ce que le Sei-
' murmures à tout ce que Seigneur faisait po'irvous — *Carjesais
le

gneur votre Dieu a fait devant vous en Egypte à Pharaon, à tous ses qu'après ma mort vous vous abandonnerez à tous désordres. — Et les ^

serviteurs, et à tout son peuple vos yeux ont vu les grandes plaies,
;
à vous serez en proie à tous
la fin mauï. — Mettant farine sur
les " la

par lesquelles il les a éprouvés. leurs épaules. (Exod. XII, 31.) — "
Ce sont des enfants infidèles.
LIVKE IV. — LOCUTIONS TIRIÎES DU DEUTfiRONOMK. 367

3(5. Qitoniamjiidicobit Domiiiiisiwpulum suitm, //)s/.v ' . Le sens eut été aussi complet sans in ipsis.

ft iii si'ivis suis niiisolahiliir '


; c'est loiiime s'il
y
M). El jiinihi) ilr.vlrnim wram '•
; c'est comme
a\iiil scnos suos ctuisolabitur. A iiiuiiis (iii'oii ne s'il y avait /)t';- (/ca/('r«m vieiim.
piviine ce \eil)e dans le sens passif, pour sip:ni- 42 (Chez les Seplmite). « (lieux réjonissez-
licr (iiif le .S('i|:iienr se cdiisolera des offenses, « voiisavec Ini ; et «piétons les an;ies de Dieiil'a-
par lestiuelles les niéeliants provocpienl son inili- « dorent :« d'antres exem|)lairesporteid " et que
fïnalion elsa colùre. Mais alors il faut entendre « touslesenfants de Dieu l'adorent. » (Jn trouve-
la consolation en Hien aniremerd (]ue dans les rait difficilement dans les Saintes Ecritures des

hommes, comme on le fait pour la oolèie, la ja- exemples semblables, où le nom d'enfants de
lousie, et lesantres sentiments. Dieu fût donné aux anges qui sont dans le
H". l'bi\-.iiiit (lii conitiK i» (l>iibus fidebiait in ciel.

1 Oîisont les (lieux, en qui ils mettaient leur confiance ' — 'Je lè-
' Car loSeifjiicur jugera son peuple, et il consolera ses serviteurs.
verai la main, et je ferai serment.
. ,

LIVRE SIXIÈME.

LOCUTIONS TIREES DU LIVRE DE JOSUE.

Chapitre I. — 14. Vos autemtransibitisexpedi - bile, afin délivrer passage à l'arche et au peuple
îiores fratrihus vestris,omnis fortis i
; c'est comme on dit qu'elles y sont restées « jusqu'aujour-
s'il y avait onviis qnicumque in vobis fortis est d'hui'. » Cette expression donneà entendre que
Chapitre III. — 4. Utsciatis vium,quamibitis le fait dont
il s'agit, n'a été rapporté dans l'E-
eam 2 ; le sens eut été complet indépendamment criture que longtemps après, et que cette histoire
de eam. n'a pas été écrite à l'époque où la mémoire du
Chapitre V. — 13. Et quand Josué fut dans
« fait était encore récente. Mais si l'on admet cette

« Jéricho. » On voit iciune locution. En effel les interprétation, que penser de la courtisane Ra-
Israélites n'étaient pas encore dans les murs de hah ? A-t-elle donc vécu plus longtemps que les
cette ville dont les portes avaient été fermées à autres hommes, elle dont on affirme qu'elle a de-
leur approche. Us ne purent y entrer qu'après la meuré « jusqu'aujourd'hui ? » Reconnaissons
chute des murailles quand l'urche du Seigneur en plutôtque cette cxpiession s'emploiepour indi-
eut fait plusieurs lois le tour. Cette expression quer une situation qui ne doit pas être changée
« dans Jéricho » signilie donc : dansle*terriloire par le fait de celui qui l'a créée. Ainsi dire
qui environnait Jéricho. de quelqu'un qu'il est condamné à un exil per-

CHAPri'RE YI. —
1. En parlant de la ville de soumis à cette peine
pétuel, c'est dire qu'il est
Jéricho, qui avait fermé ses portes, on dit Nec :
pour un temps indéfini, et non qu'il restera per-
quisquam ex illa prodibat, neque intruibat ». Il pétuellement en exil, puis que personne ne peut
faut évidemment sous-eutendrc in illtim et non vivre perpétuellement. Si donc l'historien sacré
pas ex illa ; celle ligure est appelle en grec dit de la courtisane de Jéricho quelle est restée
Çeùypa xai-' éXÀei'ijytv , une ellipse. «jusqu'aujourd'hui, » c'est qu'on ne lui avait
2. Le Seigneur dil à Josué : Ecce eçjo trado ti- fixé aucun temps après lequel elle dût sortir du

bi subjiiçiatiim Jéricho et regemejus qui est in ea, milieu des Israélites.


patentes fortitudine * . Il est étonnant que la con- Chapitre VII. — 11 . Le Seigneur dit à Josué :

jonction c< ne se trouve pas devant patentes for- Peccavit populiis, et trançiressus est testamentum
titudine. L'Ecrituie en est pourtant si prodigue meum quad disposai ad eos 2. Remarquez le nom
qu'elle l'emploie même dans des passages, où de testamentum donné à la sentence, par laquelle
elle ne sert qu'a rendre ininlelligihles les locu- l'anathèmc a été prononcé contre Jéricho ,

tions les plus utisées. Patentes fartitudinese rap- et qui interdisait aux Israélites de s'approprier
porterait-il par hasard à Jt^c/c/io et regem ejusl la moindre chose des dépouilles de cette ville.
25. « Josué sauva Rahah la courtisane et la mai- Chapitre VIII. —
1, '2. Le Seigneur, parlant à

«son de son père, et elle a demeuré jusqu'au- Josué, dit entre autres choses Eccedediin manus :

o jourd'hui parmi le peuple d'Israël. » 11 faut re- tuasreqem Gaï et teiram ipsius et faciès Gaï sicut fe-
marquer le sens de ces mots « jusqu'aujour- cisti Jéricho etregiejus etprcedam pecorumprœ- :

« d'hui, car ils reviennent souvent dans l'Ecritu-


'>
daberistibi «.Cette locution mérite une attention
re. Ainsi, en parlant des douze pierres, placées à toute spéciale, non plus seulement parce qu'ondit
l'endroit où se lit la séparation des eaux du Jour- prœdaberis tibi, comme si les dépouilles devaient
dain dont la partie inférieure acheva de s'écou- appartenir à un seul, tandis qu'elles devaient
ler, tandisque la partie supérieure resta innno- certainement être partagées entre tous; de sem-
blables locutions, où Dieu semble parler à une

Pour vous tous, tant que vous êtes de vaillants hommes, débarassés
>

de votre bagage, vous passerez à la tête de vcs frères. 2 Afin que


— 1 jos. IV, 9. a péché en violant la défense que je lui
—' Le peuple
vous sachiez le chemin i)aroù vous devez aller. ' Personne n'en sor- — avais faite. — ' mains le roi de Gai et tout son peu-
J'ai livré entre tes
de son
tait, et personne n'y entrait. —
* Je vais livrer entre tes mains Jéri- ple et tu feras de la ville de Gaï ce que tu as fait de Jéricho et
;

cho vaincue, et le roi qui y règne, et sa vaillante armée. roi el tu prendras les troupeaux pour ton butin .
;
IJVRE VI. - LOCUTIONS TIREES W LIVRE HE JOSIJÉ. 369'

seule personne, bien qu'il s'adresse fi lont lepiMi- vitiile pra>ilittisunl lilii Israël secuiitinm privreplum
ple, ne sont pas nires. Mais \oici ce (pi'il \ a de l)<nni)ii, iinenutdmoilum ronstilnit l)oininus.lesu '.
nouveau : l'Ecrilure nous a|)preM(l ([ik' Dieu i)arle Kn lisanl : Hj-eeplis pecoriliu.s et spoliis pnnlati
à JosuiS i\ un seul iiomnie, par conséquent : et suni, (111 sciail Iciilc de croire tpie ces objets ont
(li.ril Domiiius (1(1 néamnoins, cndisatil
Jcsiini ', été sousdails au pillage, tandis ipi,. ,-Vsl pié-
prœtlaht'fis lihi ct'i\'cs[ ii un seul lioniiiic,
\):\s cisémeiil cela (pii es! dcveiiii la proie- du vain-
maisàloul le peuple, que Dieu veut donner les •pieur. Le mot exceptis sert donc à indi(pier les
dépouilles de l'ennemi. seules cboses qui n'aienl |ias l'Ié déli nilcs dans
\-2. •• Deseiuluulics étaient dresséeseonire la ville le combat.
« du ciMédeia nier. » On pourrait prendre Caï Cii.UMTUE IX. 7. Les Israélites, répondant —
pour une ville niaritine, si l'on ne savait pas «pie aux (iabaonitcs, s'expriment ainsi Vide ne in :

l'Ecriture désigne habiluelleuient la partie occi- me habites et quomodo disponnm tibi testcmen-
;

dent«le par les mots « du côté de la mer « ou tum '. Nous avons reiiiartpié précédemment des
" vers la mer. « C'esl que celle partie du |)ays locutions semblables. Ainsi ils disent ride ne in
oùlesévènemeulsse passaient est moins éloignée me habites, pour apnd me, c'est-à-dire dans la
de la mer(pu^ les aiilres. terreque Itieu leura\ait luomisc. Eu outre, leur
li>.Extcudemauum tuam in (Uvsu, qmnl est in réponse parait s'adressera un seul lionime quoi-
manu tua, contra civitatem '^.
Cette locution n'au- qu'il y ait plusieurs ambassadeurs dé[uilés vers
rait rien de pai-liculier, si elle ne l'enlerniait eux ; mais c'est la
coutuniedcslsraélitesd'emplo-
une expression bien oliscure pour ceux qui la ren- yerle singulier, lorsque les paroles se rapportent
conlreraienl pour la première l'ois. Il est difficile, à une nation el à un peuple, ainsi que le Sei-
enelfet, de trouver la sisnilicatiou du mol Gœson. gneur et Moïse leur cliel' le font sou\eiit à leur
Symmaque l'a rendu par bouclier. Quant aux égard, liemartpioiis enfin le mot testamentiim
Septante, qui me servent ici des guides et qui employé pour désigner un traité de paix c'est :

ont traduit par Gv^iDn, je serais étonné s'ilsavaient une forme particulière à l'Ecriture, et dont elle
voulu signifier par là, dans leur langue le jave- fait un fréquent usage.
lot ou la lance gauloise. C'est le sens de ce mot Ch.vpitue \.—H.Et nuntiatum estJesu dicen-
en latin, et Virgile lui-même nous en donne la tes -.Inrenti suntquinque regesabsconditUn spe-
preuve quand il dit des Caulois peints sur le lunca 3; il fallait nuntiaveruntdicentes.
bouclier d'Enée Duo quisque (///»»« coruscant
: 2o. Itafaciet
Dominus omnibus inimicis vestris
gœsa manuK quos vos debellabitis eos i on pouvait supprimer ;

22. Etfacti sunt iitter médium eastrorum, hi eos sans nuire à l'intégrité du sens.
hincethi hinc ^. Il y a dcuxchosesà remarquer Chapitre \I —
II», -20. Et omues cepitin bello,

dans cette locution. En premier lieu, ce sont les quiaper Dominumfactum estconfortari coreorum,
ennemis en déroute qui se trouvaient au milieu :
ut obviam irent ad bellum ad Israël ut extermina-
or il semble que les mots hi hinc et hi hinc se rentur'^. On
donc qucconfortari cor n'est pas
voit
rapportent à eux. Ces mots, cependant, convien- toujours pris en bonne part.
nent bien mieux aux Israélites, qui les avaient ChapitueXIV. (i. « Voussavezce
que le Sei- —
attirés entre deux corps d'armée pour les tailler « gneur a dit de moi et de vous à Moise
servitem-
en pièces. En second lieu, l'Écriture dit qu'ils « de Dieu » on ne lit pas son serviteur.
; :

se trouvèrent placés entre mé- deux camps, niter Chapitre XVII. — 16. Et dixerunt Jilii Joseph :

dium eastrorum, donnant ainsi le nom de camps Aon sufficit nobis mons, et equus electus et ferrum
à des armées rangées en bataille et aux prises Chananœo qui habitat in BœthsaW^. Equus electus
avec l'ennemi, tandis qu'on désigne ordinaire- est mis pour equi electi ; celte locution n'est pas
ment par mot une armée qui s'arrête en quel-
ce
Les enfants d'israèl pillèrent la ville, et scmparèrent
que lieu pour y séjourner. Mais peut-être en em- '
des troupeaux
et du butin, qui avaient été épargnés, selon l'ordre que Josué
en
ployant cette expression, a-t-on voulu dire, queles avait rei;u du Seigneur. 2 Vous ne pouvez pas — demeurer au milieu de
Israélites portaientavec eux tous leurs bagages.
nous commment donc ferions-nous alliance avec
.
vous ' 3 On vint —
dire à Josué Cinq rois ont été trouvés cachés dans une caverte.
:

' C'est ainsi que le Seigneur traitera



'i~. Exceptis pecoribus et spoliis, quœerantin ci- tous les ennemis que vous aurez
à combattre. — s
II prit de force toutes les villes, parce
que Dieu avait
endurci le cœur de ceux qui les habitaient, afin qu'ils
' Et Seigneur dit à Josué.
le —
2 Lève contre la ville ta main
avec le contre Israël, et qu'ils fussent exterminés.
combattissent
6 Et les -
bouclier que lu portes.— ' Ils brandissent deux lances gauloises enfants de
(Enéid. Joseph dirent Nous ne pouvons pas nous contenter
Tiii, V. 661). —
< Et ils se trouvèrent
entre les deux armées, qui les
:

mais les Chananéens, qui habitent le p.iys de Bethsan,


d'une montagne
chargeaient des deu.v côtés. ont une cava-
lerie d'élite et des fe^s tranchants.

S. Auc. — Tn.M. IV.


370 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

reçue dans notre laii};ue;c'est pourquoi plusieurs sacré se contente d'ajouter : « Ils sont retour-
traducteurs latins mis equitatus au lieu de
ont « nésdans leurs maisons avec d'immenses riches-
equiix. On a cru sans doute, pouvoir dire equus « ses, emmenant avec eux de nombreux trou-
electiis pour ciiiii, comme nous disons vuiirairc- « peaux, et emportantune grande quantité d'ar-

ment miles pour milites. « gent, d'or et de vêtements ils ont partagé avec :

CnAiMTr.E \1X. — 83, ;3i. Et fucti siiiH exitus il- « leurs frères les dépouilles de leurs ennemis ; »

lorinn Jordanis, et revertentur fines ad mare '. paroles qui ressemblent bien plus au récit d'un
Au de mettre reversi sunt, ou du moins re-
lieu historien qu'à une fornmle de bénédiction.

vertentur comme on a coutume dédire, lorsque 10. jfEdificaverunt ibi aram .super Jordanem,

on décrit les bornes d'un pays, on a mis rever- aram magnam videre '. Cette locution n'est pas
tentur. L'historien sacré no racontait pas cepen- étrangère à la langue latine.

dant une chose future mais un fait accompli. \.\.Et audierunt filii Israi'ldicentium ''-;
il fa^
11 emploie également le futur ,
lorsqu'il trace lait dicentem ou dicentes.
les limites du territoire occupé par chacune des 27. Servire .servi tutem Dotnini '. Il y a deux
autres tiibus. choses à remarquer dans cette locution en pre- :

ChapitreXX. — Befiigere illucqui perctissitani- mier lieu servire servitutem qui est aussi une
mam On
noiens''-. pour signifier
a misici«(i/?H(/»i, formule latine : en second lieu, servitutem Do-
un honunc, ou bien la vie coiporelle dont l'âme mini, c'est-à-dire le service qui est dû ou qui est

est le principe. C'est la même locution qu'em- rendu au Seigneur.


ploient les frères de Joseph, quand ils disent ; 30. Et audientes Phinees sacerdos, et omnes

Non percîitidmitsejus animam^, ce qui signifie :


principes synaijoyœ qui erant cum illo, verba quœ
Ne lui ôtons pas la vie. Car si l'àme elle-même locuti sunt filii Ilube)! et filii Cad et dimidium
pouvait périr sons les coups d'un assassin, Nolre- tribus Manasses, et placuerunt illis '*.
Il fallait

Seigncur n'aurait pas dit : « Ne craignez point ou bien mettre, audierunt en place de audientes,
« ceux (]ui tuent le corps, mais qui ne peuvent ou bien supprimer la conjonction et: car en di-
« tuer l'àme ''. » sant audientes verba bœc, placneruntillis, on a
:

Chapitre XXI —
"2. M((ndavit Dominus in ma- un sens complet toutefois, même alors, pour
;

nu Moysi '. Cette locution est très-familière à que la construction fût régulière, fl aurait fallu
l'Ecriture ainsi on lit souvent
: Verlmm quod : dire ; cum audissent.
factum est in manu prophetœ, ce qui veut dire : Chapitre XXIII. —
\. Et Jésus senior provectus

Parole confiée à tel on tel prophète, avec mission diebus '. Nous avons remarqué la même expres-
de l'annoncer. sion au sujet d'iVbraham, et nous avons fait ob-
40 (Chezles Septante ). Et accepit Jésus cultros server que l'Ecriture donne la qualification de
pétrin os in quilnis cireumciderat filios Israël " ;
senior, et à l'homme qui n'est pas encore un viel-

il fallait duvquiluis cireumciderat, au lieu de in lard, et à celui qui est arrivé à la plus extrême
quihus. vieillesse. Ainsi on peut-être .sch /or sans être se-

Chapitre XXII. —
7. Et ubi dimisit eos Jésus nex mais celui qui est senex peut toujoursêtre
;

in domns suas, et benedixit eos dicens '. La con- appelé senior.


jonction et parait superflue car on pouvait dire Chapitre XXIV. —
7. Et indu.rit super illos

aussi bien et ubi dimisit eos in dumos suas, be-


: mare, et opérait super illos on n'a pas dit ope- '-,

nedixit eos dicens. ruit illos, ce que plusieurs traducteurs ont cepen-
Dans ce même passage, nous avons à signa-
><. dant trouvé préférable.
ler une autre locution. Nous lisons « Josué les : 17. In omnibus gentibus, quas transivimus per
« bénit en disant. » Après ces paroles, nous nous ipsas '. Ces sortes de locutions sont très- conmni-
attendons naturellement à trouver la formule de nes dans l'Ecriture et il serait trop long de les
;

bénédiction employée par Josué. Or, l'écrivain signaler toutes les fois qu'elles se présentent.

Ils dressèrent sur les bords du Jourdain un autel d'une grande


'

' La frontière de cette tribu se terminait au Jourdain, et de là extraordinaire. —


^ Et les enfants d'Israël apprirent cette nouve

eUe retournait vers la mer. —


pour servir de lieu de refuge à celui
^ — 3 Servir le Seigneur. — * Le prêtre Pllin^es et tous les chefs du
qui aura tué involontairement quelqu'un ^ —
Gen. .v.vxvri, 22. — peuple qui étaient avec lui ayant entendu les explications des enfantfi
*Matt. X, 28. —
Le Seigneur a ordonné par l'organe de Moïse.
'' de Ruben, des enfants de Gad, etde la demi-tribu de Manassé, en
et
''Josué prit les cailloux tranchants, qui lui avaient servi à circoncire furent satisfaits. —
^ Josué étant déjà vieux et fort avancé en âge. —
les enfants d'Israël. ^ Et —
avant de les renvoyer dans leurs foyers, • Il fit revenir sur eux la mer. qui les couvrit de ses flots. ^ Parmi tou- —
Josué les béniten disant. tes les nations, au milieu desquelles nous avon.s passé.
,

LIVRE SEPTIÈME.

LOCUTIONS TIREES DU LIVRE DES .lUGES.

Chaimtiik 1. — 1. lit fdctumt'st poslqurnu ile- mettre.' rum inurerelur judex, revertebantur, et

functus est Jésus, inteirogabant (iUi Israël iii Do- iterum corruvipebant sujier patres suas c'est-à-
miiio ' ;on ne lit pas /)(i»i//n/m,ooinmolcs règles dii'c, plus quam patres eorum.

(le notre lanj^ue le deniandaicnt. -H). l'ropter tjuod tanta dereliquit (jcns liœc tu-

3. Et bellemus /h r;/!«»o«a'(i !; 11 fallait dire ad- tumentum meuin '. Tanta est mis y^ovw tantum
versus Cfiannnwiim, on bien, cotitra Chnnauœnm c'esl-il-dire/a)» wiH/<;/ni,'c'esiradjectil' pour l'ad-
ou du moins in C.haniina'um. verbe. Cette locution est re(,ue aussi en lalin,

Chapitre II. —
8. Et muvtuiis est Jésus lilius surtout chez les poêles.
Nave,servus Domiui, filius ceiitumderem (inno- Ibid. Et non obaudierunt vocis meœ •'; c'est une
rum ^. L'usage n'approuve pas que, aprcsavoir dit locution propre à la langue grecque.
(iHus yiive, on répèle le mot filiiis devant (r»?»)» Chapitre 111. — 10. Eactus est super eum spi-

devem anuvrum. 11 eut été mieux de dire liomo : ritus Ikimini •'. On ne peut pas dire (jue l'Esprit
centum deeem annorum. Cependant on retrouve du Seigneur a été fait ; la phrase, super eum fa-
eneorc ailleurs cette sorte de répétition. ctus est, revient donc à celle-ci Eactum est ut :

10. Et (imnis generatio upposili sunl ad patres esset super eum. La même locution se retrouve
suos *. Remarquez celte locution .'
appositi sunt, dans ces paroles de l'Évangile Ante me factus :

ou lieu de apposita est parce qu'il s'agit de plu- est * ce que l'on peut tourner ainsi
;
factum e.st :

sieurs hommes. ut esset ante me, ou d'une autre manière encore :

14. TradkUt eos in manu prœdantium s; on ne Pru'Iatus est mihi.


dit pas in manum comme l'usage de la langue la- 17. « Eglom était un homme extrêmement
tine semblait le deniander. a maigre. a là une antiphrase, c'est-à-dire,
» Ilj

Et cum suscitarit Duniinus eis judices, et


18. une locution qui fait enttndre le contraire de
erat Dominus cumjudice Ici, comme en beau- '•.
ce que disent les mots on le voit par la suite :

coup d'autres endroits, la conjonction f/ ne joue de l'histoire. En effet, quand Eglom reçut le
aucun rôle car on pouvait se contenter de dire : coup de la mort, le glaive ne fut pas retiré de
Et cum suscitavit Duminus eis judices erat Dumi- son ventre, mais la graisse se rejoignit et le
nius cumjudice. Il faut remarquer encore que ferma.
l'auteiu' inspiré passant du pluriel au singulier, 21. E^ sumpsit Aioth gladium de super femore
écrit cum J(/rf/cc, c'est-à-dire cum unoquoque ju- suo dextro '. Ce n'est pas là une locution latine,

dice au lieu de cumjudicibus. mais la traduction littérale du grec «ttô «vw9ei/.


19. Et factum est cum mareretur judex, et re- 31 . Et percussit alien igenas in sexcentos viros G;
vertebantur, et iterum corrumpebant super patres il fallait dire alienigenarum sexcentos viros, ou
suos '. On
pouvait très-bien dire, sans déroger du moins alienigenas insexcentis viris.
l'usage de notre langue Et fiebat cum morere- :
Chapitre IV. — 6. Nonne prœcepit Dominus
,ur judex, et revertebantur, et iterum corrumpe- Deus Israël tibi, et perges in montem Thabor '?
bant super patres suos. On pouvait encore sup- Il semblait plus naturel de mettre utpergas;
primer la conjonction et, et se contenter de mais on a employé une locution inusitée, et l'on
a dit : Nonne prœcepit tibi, et perges? De cette
' mort de Josué, les enfants d'Israël consultèrent le Sei-
.^près la
gneur. —
Allons combattre les Chananéens.
2 ^ Josué fils de Navé, —
serviteur de Dieu, avait cent-dix ans, lorsqu'il mourut. * Kt toute — Parce que cette nation a violé mon alliance dune
>
manière aussi
cette génération fut réunie à ses pères. ^11 —
les livra entre les mains effrayante. —
' Et ils n'ont pas écouté ma voix. ' L'esprit du Sei- —
— gneur fut en lui.— < Il est avant moi (Jean i, 27). - Aioth tira le
i
de leurs ennemis. "^Et quand le Seigneur leur suscita des juges, il
était avec ces juges. " —
Et après que le juge était mort, ils retour- glaive qu'il portail au côté droit. —
« Il tua six cents hommes des na-

naient à leurs péchés, et retombaient dans de plus grands désordres tions étrangères. —
' Le Seigneur, Dieu d'Israël, ne t'a-t-il pas or-
que leurs pères. donné d'aller sur le mont Thabor ?
372 LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

manièrele premier mot de la phrase, nouiie, osl Ibid. Et indurabatur in .Jabin regem Cha-
sous-eiileiidii devant perijes. Mais ne pourrait- naan K Le mot indurabatur est pris ici dans une
on encore supposer qu'ici, comme en lieaueoup acception nouvelle pour signifier : croître en
d'autres endroits, la conjonction et est de trop ? force et prévaloir.
Si on la retranche, en effet, la pensée ressort Chapitre V. — 26. « Elle perça la tète de Si-
clairement des paiolcs suivantes :yonne mnn- « sara, et la frappa, « c'est-à-dire : elle frappa la
davit Ihimiuus Ih'iis Israi'l tibi : Pcnjes in mcm- tète de Sisara, et la perça.
tcm Thabor, et necipe tenim deeem millia viro- 31. « Que tous vos ennemis. Seigneur, péris-
rum '. « sent de la même manière; et que ceux qui
Quonium nesrio diein, iii qiui tl<nuhiuspnispe- « l'aiment brillent comme le soleil à soulever. »

rat unçjehim mecitm 2. Dieu favorise-t-il les en- On ne dit Et que ceux qui vous aiment ;
pas :

treprises de l'ange fjui est avec moi? ou bien c'est cependant du Seigneur que l'on veut par-
est-ce moi qu'il favorise par le secours de son ler.
ange? Chapitre VI. — 3. Et factum est, quando se-
13. Omnes rurrus siios, iimiyentos cunus fer- minavit vir Israël ''.
On ne veut pas désigner un
reos ^. Cette phrase présente une répétition élé- homme en mais
particulier, la nation tout en-
gante à quelque place qu'où melte la virgule, tière.
soit qu'on sépare omnes cwrus siios de non^ien- Ibid. Aseendebat Madian et Amalech et [dit 0-
tes currtis ferreos, soit qu'on dise d'abord omnes rienti.r, et aseendebat super eum ». Ici la répéti-
ciirrits siios nongentos, et seulement après: eur- tion ne présente plus, ce me semble, la même
riis ferreos. élégance ou la même force que dans les autres
15. Et puvefecit Dominus Sisaram, et ovines endroits de l'Écrilure.
eiirrits ejus, et omnia eastra ejus, in are ijladii in 9.Et liberavi vos de manu -Egypti Ici manu "*.

conspeetu Baraeli ^. Comment les chariots pou- est mis pour potestate, et ^Egypti pour jEgyptio-
vaient-ils être frappés de terreur ? il faut donc rum.
entendre par les chariots les hommes qui les Et dixit ad eum Cedeon In me, Domine
13. :

montaient. Ensaiie pavefeeit in are (jludii est mis mi Il faut sous-entendre intende, comme
"'. s'il

pour interfeeit in are gladii; c'est-à-dire qu'ils


y avait in me intende; c'est une locution très-fa-
étaient saisis de terreur, lorsqu'on les passait au milière aux saints livres.
(il de l'épée. Ibid. Et si est Dominus nobisciim, et ut quid
Ibid. Et descendit Sisara desuper enrru suo ^; invenerunt nus omnia mala ista^'f La conjonction
c'est ainsi (ju'oii a pu rendre en latin h sens du et est inutile ici, comme
dans bien d'autres en-
grec «7:0 â'vwQev. droits de l'Écritm-e; car, si on la supprime, on
18. Et cooperuit enm in pelle sua •>; ou n'a pas aura le vrai sens dans ces paroles Et .fi est I) 0- :

mis pelle, ou de pelle; mais on a traduit mot minus nobiscum, ut quid invenerunt nos (nnnia
pour mot le grec év zr, lîéppEt «vt/î;. mala ista On pourrait égah^nent retrancher la
'!

20. Et erit, si quis venerit ad te et dixerit Est :


première conjonction, sans nuire à l'intégrité
hic vir ? et dices Non est ~. Si l'on (Me la con-
:
du sens, et, à la suite de ces paroles In me. Do- :

jonction et, les paroles se suivent dans un ordre mine mi, placer immédiatement celles-ci Si est :

logique Si quis venerit ad te, et dixerit: Est hic


:
Dominus nobiscum, ut quid invenerunt nos om-
vir ? dices Non est. :
nia mala ista? Construite de cette manière, la
24. Et pergebat manus filiorum Israël pergens». phrase serait plus conforme à l'usage de notre
C'est une locution propre et familière à l'Écri- langue.
ture. 25. « El un veau de sept ans. » On voit ici d'une
manière évidente ce que l'Écriture eidend par
' Le Seigneur, leDieu d"lsraèl, ne vous a-t-îl pas donné cet ordre ; un veau car ce que nous avons coutume tl'ap-
:

A'ous irez sur le mont Thabor, et vous prendrez avec vous dix mille
hommes, etr, — - l'arce que je ne sais pas le jour où le Seigneur doit
peler un bœu! de sept ans et bien différent d'un
envoyer son ange pour faire réussir cette entreprise. ^ Tous ses —
neuf cents chariots armés de faux. —
* Le Seigneur frajjpa de terreur
1
Sisara, tous ses cliariots et toute son armée, qui fut passée au fil de '
Et elle se fortifiait de plus en plus contre Jabin, roi de Chai aan.
l'épée sous les yeux de Barach. — ^ Et Sisaradescendit de dessus son — ï Et quand les Israélites avaient semé. —
^ Les M.adianites, les

char, —
" Elle le couvrit de son manteau.— ' Si quelqu'un se présente à Amalécites, et les autres peuples de l'Orient venaient ravager leurs
toi et dit ; N'y a-t-il personne chez toi? tu répondras: II n'y a personne. terres. * —
Je vous ai délivrés de main d?s Egyptiens- * Et —
— **
Kt la nation des enfants d Israël devenait tons les jouis plus Gédéon lui dit; Ecoutez-moi, mon Seigneur. Si le Seigneur o.st — •'

puissante. avec nous, comment tous ces maux sont-ils arrivés?

C-*

I.IVIIK Ml. — LOCUTIONS TIUKES 1)1 MVliE DKS JUCJKS. 1";!

voiin. C.'osl l'ii vcrlu ilf la iiuMni- lociiliDii iiii'il massacre, le nieiirtiier d'abord et ensuite Joa-
csl (lil(U> Samt'îiiir ; (hridit si-xtrntos riros pnv- liiaiii le plus Jeune ipii se eaeliii, comme on le

ter t'itiilos hniiiii ', nmimc s'il y aviiil jinrirr ha- \i)it parce tpii suit immédiatement : " Il ne resta
Vl'S. « ipie .loalliaiii, le |)liis jeune lils de Ji'idbaal,
;U. /'J/ (t'cinit in rovncii '. Il l'aiil sous-ciilcii- " pjirce {pi'il s'i'l.iil cacln'. •
Le iKiiiibie lotiil

(lir tuba. Legroc'iioii plus n'a pas mis /»/)(/, mais est donc mis pour designer la pii^qiir totalité.
soiilciiKMil rornea. :2;i. Et si)reveraiil riri Sicliinmiraai in dnnio Abi-
(liiAi'iTiu; VII. — 1:2. ('.nnu'lls cnonm non mit melerh I; il [aUdW sprerernnt ilmnnni .\hi\iielerli.

intmfius, cl (nnil siiiit nnini <iiin' est ad liihium A'i. Et insidiati ^^aiit saper Sicliiinani ijaalaia'
maris '-K Le iiomliit'dcs cliamcaiix ('lait cxprimi' prinripia '>; c'est comme s'il \ a\ait (jnatnnr par-
d'ime maiiiiTC li\p('ili(ili(|ii('. (JiianI à l'iApics- tes. .Nous avons déjà remaniiu' plus liant i elle

sioii dans le sens de lit-


labium maris, ('m|)lo\i'' locution.
tits, elle se lit Irès-soiiveid dans le texte oy\'/\- 't'A. Et aerepit papuhnn, et dirisit enni in tria
nal, maisraremeid dans les \erM(ins latines, (pii prinripia '. Arrepit papaluni, désigne les gens
tiadnisent piescpie tttiijouis par liltus, et donnent ([ui étaient de son |)arti. Ici encore tria priniipia

ainsi la signillealion de laliiam, an lieu du mot estmis poui' très partes.


hii-nièine. Les Septante am'aient pn en taire Etabierunt viri lurnin sanin
i)u. '; il iàiilsous-
antani, et ils iiiuaient lacilemenl tronvé dans entendre anusiiaisipie.
leur lanjriie un mot correspondant à littiis. ('iiAi'iTiiE XL — H. Et eris mdiis in eaput oni-
IH. Et ilivisit trecentos viras per tria prinri- nibus liabitantibas (".alaad •. Ou ne lit pas eris
pia '<

;
prinripia est mis pour partes. nnbis eapnt ; c'est une lociilioii laniilière à l'K-

Chapitre Vlll. — 1. « Et les lionnnes d'K- criliire. En voici encore un exemple, eiitr(> mille
« phrem direntfi Gédckm, >- c'est-à-dire les liom- autres : Esta milii in Deum praleeturein d in da-
nies de la liihn d'KpIn-em. muni refaijii 'v
Il)id. Quiil rrrbiiin litir fc'cisli nabis. Ht non m- ;ii. « Elle est son imi(|iie lilje, et il n'a pas
cari's nus, ciim crires puijnare in Madian >; ver- « d'autre enfant. » Le second membre d(> la

bum mis pour faclum.


est phrase ne de plus (pie le premier; mais
dit rien

Chapitre IX. 4. Et — >< ils donnèrent soixan- cette répétition exprime bien l'affection du père
« te-dix d'argent; » il faut sous-entendre « li- pour sa fille.
« vres, » ou quelque mot équivalent. La vei'sion Ibid. « Il n'a pas d'autre enfant. « Le présent
faite sur l'hébreu porte « soixante-dix livres. » « il n'a pas » est mis pour : il n'avait pas ; car il

Ibid. Et conduxitin ipsis Abimelerh viras «; in s'agit d'une chose passée.


ipsis est mis pour ex ipsis, ce qui revient à dire: CHAPiTlfc XIII. — 2. « Son épouse était stéri-
avec ces soixante-dix livres d'argent il leva une « le, et n'avait pas d'enfant; » il sullisait dédire
troupe d'iioumies. qu'elle était stérile.
Il)id. Viras inanes d pcrturbutas '. /»(/;(« est S. Et precatus est Manue Doniinum, et dixit :

mis pour levés, qui est opposé à ip-aves : ainsi In me, Daniine; liamu T)ei, quem misisti, veniat

on lit dans les psaumes ; [n papnla gravi lauda- aune iterum ad nas '. Il faut sous-,entendre /)(-

bo te s. tende devant in me.


o. « Il enb'a dans la maison de son père en Chapitre XV. — 8. Etpercussit eos tibiam su-
« Ephrata, et il tua sur une même pierre les per feninr **,inusitée. Néan-
Celte locution est
« soixante-dix lils de Jérobaal, ses frères. « Ou moins une vraie locution car on n'indique
c'est ;

a dit précédemment que Jérobaal ou Gédéon pas ici l'endroit du corps où quelque blessure,
avait soixante-dix fils; et on dit maintenant que aurait éti' faite, comme nous l'avons démontré
soixante-dix ont été mis à mort. Cepeudaid, il dans les questions rétomieuient et la stupeur '•>;

y en eut deux qui ne furent pas victimes de ce


'
Etles liabitantsde Sichem prirent en aversion la maison d'.^bimé-
lech. -^Ils dressèrent des embûches contre la ville de Sichem en
' Il tua six cents hommes, sans compter les bœufs. (Juges in 31.) quatre endroits. ---^ 11 mit son monde sur pied, et divisa ses gens en
— -Et il sonna de la corne. —
^ Leurs cliameaux ne pouvaient
se com- trois bandes. —
* Et ses h-immcs retournèrent chacun dans sa maison.

pter ,
ils que le sable qui est sur le rivage de la
étaierilaussi nombreu.v — -''Tu seras no;re chef ànous tous, qui habitons le pays de Galaad.
mer. — Et
divisa les trois cents hommes en trois bandes.
1 il i Pour- — — • Soyez pour moi un Dieu protecteur et un asile assuré (Ps. .xxx,
qu 'i nous avez-vous traités ainsi en ne nous ap|ielant pas lorsque vous 3.) —Manué adressa cette prière au Soigneur
' Ecoutez-raoi, Sei- :

êtes allé combattre les Madianites. — '•


Et Abimélech les employa à gneur, et que l'hont ne de Dteu, que vous avez envoyé vienne une se-
lever une troupe d'homntes. 'Des — hommes légers et vagabojids. conde fois vcr-s î'.ous. —
* 11 les frappa d'une telle stupeur, qu'ils,
s
Je vous louerai dans une grave assemblée. mirent teurs Jambes l'une sur l'autre ''Liv, 7, q. 56. —
S. AcG. ToM. IV. 30
— ;
.

LOCUTIONS EMPLOYÉES DANS L'HEPTATEUQUE.

dont furent frappés les Pliilistins. nondum siccatis '


; au lieu de septem nervis, on a
10. Et Quare ascendistis
(lixenint vir Juda : mis in septem nervis.
super iios^? Lesin;iulier est mis pour le pluriel; Ibid. Si Hijaverint me in seplem nervis humidis
car dixennit a réellement pour sujet viri, et non nandum siceatis, et infirmabor '-
; la conjonction
pas iimis vir. et n'ajoute rien au sens.
12. « De peur que vous ne vous jetiez sur 9. Ëtinsidiœ ei sedebant in rubirulo'-^. Plusieurs
« moi, » c'est-à-dire : que vous ne me fassiez traducteurs ont mis obsidehnnt mais le grec ;

mourir. Cette locution a été expliquée dans les porte ÈzxÇy.To, qui se rend exactement \>diV sedebat
questions 2. Pour toute différence, nous mettons ce verbe au
13. 14. « Ils le tirèrent du rocher et il vint à pluriel, parce que insidiœ n'a pas de singulier
« la Mâchoire. » On a appelé ainsi dans la suite en latin comme en grec. La locution, que nous
le lieu rendu célèbre par l'exploit de Samson, qui remarquons ici, se trouve dans les mots insidiœ
y terrassa mille Philislius avec une mâchoire sedebant, qui sont mis pour // qui insidiabantur;
d'âne. Cette histoire ayant été écrite lorsque le car sedebant ne peut se dire que des honunes
lieu dont on parle portait déjà ce nom, l'histo- qui étaient en embuscade.
rien sacré a pu l'employer ici par anticipation. 10. i\u)ir enjo indien niilii in quo Jigaberis '^

14. '< Comme l'étoupe, lorsqu'elle a llairé le on n'a pas mis quu Uijaberis, ou bien, unde li(](t-

« feu. » Il y a ici une métaphore, qui transporte beris.


à une chose inanimée ce qui est propre aux 11. Si lignverint me infunibus novis '•
; il fallait
êtres animés car l'étoupe n'a pas le sens de l'odo-
; mettre simplement funibus.
rat. ( )u aurait pu dire équivalemment, lorsqu'elle Ibid. Si liqaverint me in funibus novis, inqui-
a senti le feu; encore cette phrase contient-elle bus non fuctum opus, et infirmabor '•;
est le sens
une métaphore du même genre. Si donc on s'est eût été complet sans la conjonction et.
servi du mot « llairé » c'est pour mieux exprimer If). Et hoc tertium fefellisti me '. Tertium est

la rapidité de l'aclion. mis pour tertio, ou bien ter; c'est l'adjectif en


15. « Il élendit la main, et il la prit. » Quand place de l'adverbe. Cette locution est reçue
môme on n'aui'ailpasdit « Il étendit la maiu,
: >< dans notre langue, et donne au style plus d'élé-
nous l'aurions supposé, comme condition néces- gance.
saire pour s'emparer de l'objet. M. Dimitteme, et juilpabo col umnas, super quas
Chapitre XVI. —
"2. Et Huntiiitum est Gazœis, domus conprmata est super eus *.

direiites'^; il fallait mettre iiKittiarenint dit-entes, '


Si on me lie avec
sept cordes liumides et qui ne soient pas encore

ou bien nuntiatum est a direntilms. sèches, — melie avec sept cordes humides et qui ne soient pas
^ Si on
encore sèches je serai sans forces. —
^ Et des hommes qui cherchaient ,

7. Si licjtiverint me in sejitem iiereis hinnidis à le surprendre, étaient cachés dans sa chambre * Indique-moi donc —
maintenant avec quoi il faudrait te lier. —
^ Si on melie avec des cor-
des toutes neuves. —
' Si on me lie avec des cordes toutes neuves, qui

Les hommes de la tribu de Juda leur dirent


' Pourquoi marchez- : n'aient pas encore servi, je serai sans force. '

Tu m'as déjà trompée
vous contre nous ? 2 Liy^ 7^ ,j —
5fi^ On vint annoncer au.\" lialii-
r.
trois fois —
Laisse-moi toucher lescolojines, qui supportent toute la
>*

tantsdcia ville de Gaza. maison.

Les sept Livres ont été traduits pur M. l'abbé Leclerc.


QUESTIONS SUR L' 1 1 I<:PT ATEUQUE

LIVRE PREMIER

QUESTIONS SUR LA GENÈSE.

INTRODUCTION. l'iiio.MiKRE Question. (Gen. iv, 17.) Coinmi'iit


<'.(iïii ii-l-il pu bâtir iinci'illi' '! — Eue ville exige
En lisaiil les Saillies Ecritures (|ni poi-lciU le évidemmerd une cerlaine (|uaMlilé d'habilanls.

titre lie en collalionnaiil a\ec les


canoniques, el Or, il n'est paiié (pie des deux chefs de ialamille
autres la version des Septante, il nous a paru humaine, et des deux fils dont l'un tiil mis à
bon, de peui' (l'en perdre la mémoire, de lixer mort par l'autre, et remplacé par la naissance
par écrit les ([ueslions ([in se présenlaieni à d'un troisième. Si l'on l'ail celte (pu'slion, n'est-

notre es[)rit. Tantôt nous les raitpellerons en ce point parce que les lecteurs s'imaginent qu'il
pende mots ; tantôt nous nous contenterons de n'y avait alo: s d'autres honunes (pie ceux dont
lesexaminer ; d'antres lois encore, nous en l'Ecriture rappelle la mémoire ? Mais ils ne ré-
donnerons comme à la hâte une solution qucl- lléchissent pas que les deux premiers qui furent
coaipie. Noire dessein n'est pas de les développer créés, et ceux qu'ils engendrèrent, vécurent assez
autant qu'il serait nécessaire, mais de pouvoir longtemps [)onr en engendrer un grand nom-
y jeter les yeux, (juand besoin sera, soit pour y bres d'autres.Adam lui-inènie n'engendra pas
retrouver l'indication des recberclies (pi'il reste seulement ceux dont les noms nous ont été con-
à faire, soit pour être à même d'approlondir le servés ; l'Ecriture, parlant de lui, conclut en
sujet, à l'aide de ce que nous croyons avoir' déjà disant qu'il engendra des fils et des tilles '. Enfin
pu découvrir, et de répondre aux diflicultés. Si la vie de ces premiers hommes ayant été beau-
donc il est des lecteurs ipie ne rebutent point les coup plus longue que Israélites en celle des
négligences de ce Iravail précipité, et s'ils} remar- Egypte, et ceux-ci ayant pu, dans un leinps
(pient lies questions pioposéeset non résolues, ils beaucoup moins long, se multiplier d'une ma-
ne doivent pas en conclure perdu leur qu'ils ont nière si prodigieuse, qui ne comprend dès lors
peine c'est déjà avoir trouvé quelijue chose, que
: combien d'enfants ont pu naître au temps de
de savoir ce (jne l'on cherche. Quand nos solu- Caïn et remplir sa cité ?

tions sendjleront raisonnables, qu'on ne dédaigne II. (Ib. V, 25.) On demande souvent s'// est /)os-

pas la sinq)licité de notre langage, «ju'on soit Mathusahim ait l'érti après le déluge; ce
*//)/(' (/(/('

plutôt satisfait d'\ découvrir quelque portion de que prouve la supputation de ses années, tandis
la vérité : car on ne cherche pas la vérité pour qu'il est dit que tous les hommes pérb'ent, à
discuter, mais on discute pour la chercher. l'exception de ceux qui étaient entrés dans
Laissons de coté les ([uestionsrelatives à ce qui l'arche. Mais ce qui donne lieu à cette ques-
s'est passé depuis le couimecement, alors que tion, c'est l'interpolation du texte dans plusieurs
Dieu, suivant le récit de l'Ecriture, créa le ciel exemplaires. L'hébreu dit autrement, et en
etla terre, jusqu'à l'époque où il chassa dupa- s'en tenant nièmeau texte des Septante, on trouve
radis les deux premières créatures humaines. dans plusieurs exemplaires, peu nombreux, il est
Iles questions peuvent être traitées de plusieurs vrai, mais plus dignes de foi, que Malhusalam
manières, et nous les avons discutées nous-mème mourut sixans avant le déluge.
ailleurs, selon nos forces' ; voici donc celles qui m. (Ib. VI, 4.) On demande encore cummeut :

nous sont venues en pensée, au courant de la les AiHjes ont-ils pu avoir avec les filles des hom-
lectin'e, et que nous avons voulu laisser par mes un commerce impur, d'où les géants, dit-on,

écrit. seraient issus? Cependant plusieurs exemplaires,

'
Vuir ci-devant les trois ouvrages sur lu. Genèse. ' Gen. V, -1.
376 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

tant grecs que latins, ne portent pas anges, mais parce qu'ils n'auront pas partagé la foi de ce
filsde Dieu et quelques connnentateurs ont
; patriarche.
cru, pour résoudre la difficulté, qu'il est ques- VI. (Ib. VI. 16.) Quesiqnifie cette parole relative

tion ici dos hominesvcrlueiix. Ils ont pu elîec- à la fabrication de l'arche « Tu y feras un bas :

tivcment être appelés desanges : n'est-il pas écrit « une seconde voûte » ?
étage, et Le bas étage ne —
de Jean, qui pourtant était un homme « Voici : devait pas recevoir deux et trois voûtes. En se ser-
« que j'envoie mon ange devant moi pour pré- vant de cette distinction, Dieu a voulu faire en-
« parer ton chemin i. » Ce qui préoccupe, c'est tendre que l'arche tout entière devait avoir un
de savoir comment les géants ont dû leur nais- local inférieur; puis,au-dessus, un étage, qu'il
sance à des hommes ; ou hien, s'U est ici question appelle une seconde voûte; plus haut enfin, un
des anges, et non des hommes, comment ces an- autre étage, ou une troisième voûte, .\insi, dans
ges ont pu avoir commerce avec des femmes ? la première habitation, je veux dire, dans la

Je ne vois pas, en vérité, que ce soit une mer- partie inférieure, l'arche avait une première
veille (]ue des géants, c'est-à-dii'o des hommes voûte dans ; la seconde habitation, qui se trouvait
d'une taille et d'une ioicc extraordinaires, aient au-dessus de la première, elle (Mail également
dû leur naissance à des hommes : il y en eut de voûtée ; aussi l'était-clle encore et une troisième
seml)lables, même après le déluge, et aujour- fois dans la trosième habitation, qui s'élevait

d'hui encore on trouve dt's hommes, et même des au-dessus de la seconde.


l'emmes, dont la haute stature tient du prodige. VII. (Ib. VI, 21.) Dieu dit que les animaux de-
Il est donc plus rationnel de croire que les hom- vaient non-seulement vivre, mais encore se nour-
mes justes, désignés sous le nom d'Anges ou de rir dans l'arche, et il doimaordreà Noë de pren-

fds de Dieu, ont cédé à l'attrait de la concupis- dre toute espèce de nourritm-e pour lui et tous les
cence, et péché avec des femmes, que de croire animaux qui devaient l'accompagner. Comment
les anges, spirituels par nature, capables de des- donc les lions et les aiijles qui virent de chair, ont-ils
cendre jusqu'à cette ignominie : tout ce qu'on pu s'il nourrir"! Onive le nombre d'animaux dé-

dit de la propension de certains démons à tour- terminé, en a-t-on introduit dans l'arciie pour
menter les femmes, ne laisse pas cependant (\uc servir de nourriture à d'autres. Ou hien, ce qui
de rendre difficile une définition sur cette ma- est plus probable, faut-il se persuader que la
tière. sagssse humaine ou la lumière divine avait fait
IV. ( Ib. VI, 13.) On demande aussi comment, préparer pour ces animaux des aliments autres
avec ses dimensions telles qu'elles sont décrites, que de la chair et cependant convenables?
l'arche de Noë put contenir tous les animaux qui VIII. (Ib. VII, 8, 9.) yombre inéqal des ani-
y sont entrés, et leur nourriture. — Origène résout maux purs et impurs. — Les oiseaux purs et les
«

cette question parle moyen de la coudée géomé- « oiseaux impurs, les animaux purs et les ani-
trique. Ce en vain, dit-il, que rEcriture
n'est pas « maux impurs avec tout ce qui rampe sur la
nous représente Moïse comme ayant été instruit « terre, » sans doute, pur et impur, quoique cela
dans toute la sagesse des Egyptiens 2, qui culti- ne soit pas exprimé dans l'Ecriture, « entrèrent
vaient la géométrie. La
coudée géométrique, « dans l'arche avec Noë, deux à deux, mâle et

selon lui, équivaut à six de nos coudées. Or, en « femelle. » Pour distinguer les animaux impurs

prenant cette grande mesure pour base de notre on disait d'eux précédemment deux à deux; :

calcul, il ne faut plus demander si l'arche fut pourquoi est-il rapporté ici indistinctement des
d'une capacitésuffisante pour contenir tout cela. animaux pm's et des animaux impurs qu'ils sont
V. (Ib. VI, \5.)Comment une arche de dimensions entrés deux à deux dans l'arche ? C'est que ceci
si considéraldes a-t~elle pu être construite, dans n'a point rapport à la quantité, mais an sexe des
l'espace d'un siècle, par quatre hommes, c'est-à- animaux : dans toutes les espèces pures ou
dire, parNoëet ses trois fils? — Si ce travail était impures, il y a mfde et femelle.
au-dessus de leurs forces, il ne leur était pas IX. (Ib. vu. 13.) Que siqnifie Esprit de vie ? :

difficile d'employer d'autres ouvriers. Ceux-ci, — Il faut remarquer (|ue cette parole': « en qui est
tout en recevant leur salaire, ne se seront pas « l'esprit de vie » s'applique non-seulement aux
inquiétés si l'entreprise de Noë était sage ou hommes, mais encore aux animaux. C'est que
insensée, et ne seront pas entrés dans l'arche, plusieurs entendent de l'Esprit-Sainl le passage
' Malach. m, 1. —2 Act. tu, 22. suivant : « Et Dieu répandit sur son visage l'Esprit
LIVRE I. — QUESTIONS SUR LA GENÈSE.

« i]o vie '. .) Qnolfiiics o\(^mpl,iiivs porlenl avec tacher à(piel([ue cadavre, tandis (pie la colombe
I)liis (ri'x.iililiulc : « iiii soiilllc (le vic\ » en a horreur nalurellemeiit.
X. (lit. VII, -20.) De l'élcvaliim île l'eau (lu-dessiis XIV. (Ib. VIII, 9.) Sur la colombe. — l'nc autre
(les DiDiildijneu pendant le iléhific — .V cnnso do question se présente : Comment la colombe ii'a-
ce ([Ile rii|);)Oi[(> l'iiisldirc du nioiit Olvnipo, on t-elle pas trouvé où poser le |)ied, si déjà, comme
dcniando .si IVaii tout cntioro du di-Iugo sur- le contexte cl le récit le font voir, le sommet des
passa dcMpiiiizi' coudtk's les plus liaulos monta- montagnes nu ?La question parait être ré-
était à

fïucs, connue le dit l'IÀ-rituiT. Mais si la [cire a solue par ces deux consich'ralions ou la réca- :

pu envahir l'espaee de celle réf^iou lran(iuille, |)ilulali{)n meulioniie comme arrivées anléricu-
inaccessiMe aux vents et aux tempêtes, poucciuoi semeut les ne sont arrivées que pos-
choses cpii

l'eau, ens'clevant, n'aurait-elle puparvcnirjus- térieurement ; ou


c'est que les sommets
[tlutùt,
que là ? des montafîiies n'étaient pas encore desséchés.
-XI. vil), vu, -2i.} H est écrit; « L'eau s'éleva au- XV. ^Ib. VIII, :21.) Caractère de l'ancioi et du
« dessus de terre pendant cent cinquante jours. » nouveau Testament. Que signifie cette parole—
— Cela sij;uilic-l-il ([lie l'eau s'accrut jusqu'au du Seigneur « Désormais je ne maudirai plus la
:

cent cin(iuaulièui(> juur du (|u'elle se uiaiuliuf « terre à cause des œuvres de l'homme, car res[)ril
pendant tout ce temps à la iiaiileiu- ([u'elle avait « de l'homme est porté au mal dès sa jeimessc.
atteinte? D'autres \ersious semblent prélërer ce « Je ne frapperai donc plus comme je l'ai fait
dernier sens. Aiiuila dil eu ellel : Elle cou- t< toute chair vivante. » Et après cela pourtpioi
vrit, et Synimaque : Elles conservèrent leur Dieu rapporte-t-il les bienfaits dont la générosité
niveau. de son amour gratilie des hommes indignes? Est-
XII. 111. VIII, I.} Sue plusieurs particularités re- ce ici une figure des miséricordes qui signalent

latives il la (in ilu déhuje. — Il est écrit qu'au bout le nouveau Testament, elles vengeances passées
de cent cinquante jours un vent fut envoyé sin- seraient-elles l'image de l'Ancien? En d'autres
la terre et que l'eau ne monta plus; que les sour- termes, la vengeance serait-elle le type des sé-
ces de l'ahimc et les cataractes du ciel se l'ermè- vérités de la loi, et la bonté des doucem's de la
i-cnt et enfin (jue la pluie cessa de tomber du grâce ?
ciel. On demande si ces choses se sont accomplies XVI. (Ib. IX, o.) Tous les hommes frères par l'u-
au bout des cent cinquante Jours, ou si tout ce qui nité d'origine. — Que mots
signifient ces« Et :

estrappelé tlans cette éuuméralion a commencé « je vengerai la mort de l'homme, de la violence


après les quarante jours de pluie; dans ce cas les « de Ihomine son frère ? » Dieu veut-il faire en-
cent cincpiante jours se rapporteraient unique- tendre que tous les hommmes sont frères, en
ment à cette circonstance, que l'eau s'éleva jus- vertu de la parenté qui résulte d'une origine
(ju'à cette date, soit que la pluie cessât alors de commune ?
sortir des somxes de l'abime, soit que l'eau XVII.
IX, 25.) Malédiction de Chanuan.
(Ib. —
demeurât à la même hauteur, tant qu'elle Pourquoi péché deCham envers son père est-il
le

ne fut pas desséchée sous l'action du vent dans : maudit, non dans la personne du coupable, mais
cette hypotlièse, toutes les particuliarités dont il dans son fils Chanaan? N'était-ce pas la prédic-
est l'ait mention ne se seraient pas réalisées au tion que les enfants d'Israël, postérité future de
bout de cent cinquante jours, mais le texte rap- Sem, devaient un jour recevoir en pai'tage la
pellerait tout ce qui commença de s'opérer à terre de Chanaan, après en avoir expulsé les
partir du quarantième. Chananéens par le droit de la guerre ?
XIII. (Ib. vni, 6-9.) Sur le corbeau .sorti de XVIII. (ib. X, 8.) Nembroth premier des géants
l'arche. — Il est écrit qu'un corbeau fut lâché, et après le délaye. — On demande pourquoi il est dit
ne revint pas; et qu'ensuite une colombe fut en- de Nembroth : « Celui-ci fut le premier de la race
voyée dehors, et revint, ne trouvant pas ou poser « des géants sur la terre, » puisque auparavant
le pied. Ceci donne lieu à la question suivante : il est fait mention dans l'Ecriture de la naissance
Le corbeau est-il mort, ou a-t-il pu vivre d'une des géants? Serait-ce parce qu'il est ici question
manière quelconque ? S'il put reposer sur la terre, de la restauration d'un nouveau genre humain,
la colombe le put également. C'est ce qui fait du milieu du quel Nembroth apparut le pre-
conjecturer à plusieurs que le corbeau a pu s'at- mier comme un géant sm- la terre?
' Gen. n, 7. XIX. (Ib. X, 2o.) Confusion des langues et di-
378 QUESTIONS SUR L'HEPTATEruiE.

vision dex peuples. — On demande ce que veulent vie humaine, avec les quatre cents ans et plus
dire ces mots Héber eut deux tils l'un
: « Et : (]ue vécut cet homme? Cet arrêt, Dieu ne l'au-
« s'appela Phaleg, parce que la terre fut di\isée rait-il pas fait entendre à son serviteur, en lui
« de son temps. » Ne signifient-ils pas que pendant annon(,ant le déluge qu'il devait envoyer, vingt
la vie de Phales eut lieu la confusion des langues, ans avant le commencement de la construction
source de la liivision des peuples? de l'arche, qui ne fût construite qu'en cent
XX. (Ib. XI, \ .) i'iiité de langage. — « Et toute la années, et n'aurait-il pas prédit dans cette
« terre n'avait qu'une langue. » Comment ce pas- circonstance la durée des hommes (jue le
sage peut-il être entendu, quand il a été dit plus déluge devait engloutir, non celle de la vie des
baut que les enfants de Noé ou les enfants de ses hommes qui naîtraient après le déluge?
enfants se répandirent sur la terre selon leurs X.XIV. (Ib. X. 21.) Origine du nom des Hébreux.
tribus, leiu's nations et leurs /«Hf/z/cs? N'était-ce — On demande pourquoi il est écrit : « Sein fut le
point parce que le texte ra[)pelle ici, par mode « père de tous d'Héber; »car Héber esl
les enfants
de récapitulation, les choses qui sont arrivées le descendant de Sein, fils de Noë, à la cinquième
antérieurement? L'obscurité vient de ce que la génération. Serait-ce parce que les Hébreux tien-
trame du récit [)résente cet événement comme neuf leur nom de lui? C'est de lui en effet que
s'U était arri\é après ceux qui l'ont suivi. descend Abraham. Lequel est donc le plus pro-
XXI. (Ib. XI, 4.) Tour de Babel.— « Venez, bàtis- bable, que les Hébreux soient ainsi nommés
« sons une ville et une tour dont le sommet mon- d'Héber ou d'Abraham c'est une question qui
:

« tera jusqu'au ciel. » Si ces hommes ont cru mérite d'être posée '.
réellement pouvoii' y atteindre, leur projet dénote XXV. (Ib. XI, -26.) Quand Abraham fut-il établi
une imi)iété et une audace profondément in- dans la terre de Chanaan ?— 1. Tharra, père d'A-
sensées. Toutefois la vengeance iliviue qui s'en braham, engendra ce dernier à l'âge de soixante-
est suivie, et la confusion des langues, autorisent dix ans; il demeura ensuite à Charran avec
à croire qu'ils ont eu cette pensée. tous les siens, y vécut deux cent cinq ans,

XXU. l'ib. XI. 7.) Trinité des per.wniies ilaus et y mourut. Le Seigneur dit ensuite à Abraham
l'unité de la nature divine. — « Venez, descendons desortirde Charran, et celui-ci en sorti! en effet,
« etconfondons leurs langages qu'ils ne s'enten- : à l'âge de soixante-quinze ans. Comment faut-il
« deni plus les uns les autres. » Est-ce aux Anges entendre tout cela? Ne faut-il pas voir dans cette
que Dieu adi-essa ce discours, ou faut-il l'inter- récapitulation (|ue le Seigneur se fit entendre du
préter tlans le même sens que ces paroles vivant tle Tharra, qu'Abraham sortit de Charran,
du commencement de la Genèse « Faisons : conformément à l'ordre de Dieu, du vivant de son
« l'homme à notre image et à notre re.s.sc»!- père; qu'il avait alors .soixante-quinze ans, et
« blance? » Car de même qu'il est dit ensuite
i son père cent quarante-cinq, dans le cas où la

au singulier que « le Seigneur confondit les lan- vie ce dernier aurait été de deux cent cinq ans?
« gués de la terre; de même, dans le passage >i Parconséqiieul, s'il est écrit : «Tharra vécut deux
eu question, après qu'il a été dit « Faisons à : « cent cinq ans à Charran, » c'est parce qu'il
« notre image, » il n'est pas dit : Ils firent, mais: finit ses jours dans ce pays. La question se trouve
« Dieu fit. >i donc résolue de cette manière, tandis qu'elle
XXIII. (Ib. XI, \-2, 13.) Durée delà viedesliommes deineureiait insolul)le, si nous admeltions que

avantle déluge. — Uestéciit : « Et Arphaxad avait le Seigneur ne donna à Abraham l'ordre de


« cent trente-cinq ans, lorsqu'il engendra quiller Cli:uran qu'après la mort de Tharra; car
« Chainan; et après avoir engendré Cbaïnan, il il devait asoir plus de soixante-quinze ans lors-
« vécut quatre cents ans, » ou, selon le grec, que mourut son père, puisque celui-ci l'avait en-
« trois cents ans. » On demande, à ce propos, gendré à l'âge de soixante-dix ans en consé- :

comment Dieu a dit à Noë : « Désormais la vie (juence, Abraham avait cent trente-cinq ans à la
« des hommes ne dépassera pas cent-vingt ans. » mort lie son père, si ce dernier a vécu deux
Arphaxad n'était pas né encore, lorsque Dieu pro- cent cinq ans. C'est ainsi qu'en tenant compte
nonça ces paroles; il ne fut pas non plus dans du 'uode de récapitulation employé dans l'Ecri-
l'arche avec ses parents: comment donc concilier lure, on résout un grand nombre de dillicult(>s,
les cent-vingt années, données pour limite à la qui peuvent paraître échapper à toute solution.

Gcn. I, 2t>. 'Citéile Dieu, liv. 16. cil. 3; Rétractations, liv. 2, ch. IK.
LIVKE I. — OUKSTIONS SIK LA GENKSK. 'MU

comme on
pu le voir p.ii'rcxposi'' des (|ii('slioiis
n " la mort de son |)ère. Dieu le (il passer en ce
prt'Ci'denlcs, où son! iciMpiliilcs Icsi'M'ncinciits. " pa\s. La question resie doue la même si,
..
:

2. Plusieurs inlerprètcs doiuicnl cependant connue le (lit Meitem'iil le Icxtc de la (lenèse,


niic anlrc cNpIicalioii. Ils siipitidcn! les aiiiK'cs .\braham avail s(ii\,uili'-(pMn/e ans, (piand il
(i'Miiaham àparlirdii 1('mi|)s où il liddoliNrc' des siii-lil de CiiariMu, coiuiurul cela peut-il être
llainmes dans les<|uelles il avait été Jeté par les vrai? On pourtail donm r peid-èire à ces paroles
(llialdéeiis,eleondaninéà \ itérir, iXJiiru'avoirpas d'Klienue ; • Alors .Miraliam sortit du pa\s des
voulu s'assoeier au culte supersiilieux (|u'ils < Chaldéens, el habita àCiianan, ..
riidei|)réta-
rendent au feu. Ce récit, (jui s'appuie sur la tra- tion suivante : Il se mit en chemin, lorsque le
dition desJuit's, ne se lit pa-; toulcibisdans l'Kci-i- Seigneur lui eut parlé; et il était déjà en Méso-
lure. Celle solution est é^aleiuenl admissilile ;
polamie, connue il a été dit plus liant, quand il

car, en disant (pie « 'l'Iiarra avail soixaiUe-div enlendit cel ordre de Dieu; mais saint Etiennea
« ans quand il eufiendra Abraiiain, Nadior et voulu tout ré?.umei-, en usant du mode de réca-
« Arraii, » l'Kcritin'e ne veut pas l'aire entendre pilulation, et dans ces mois « Abraham sortit :

assurènienl (|u'à l'à;ie de soi\ante-div ans il les « alors de la terre des Chaldéens et habita à
entendra tous les trois, mais qu'il conunenea à « Charran », dire à la l'ois, el le lieu d'où sortit
avoir des enfants à cet iVge. Or, il est possible Abraham, et celui où il habita. C'est au milieu

qu'Abraham soit le i)lus jeune, mais qu'il soil de ces événements, entre son départ du pays des
nouuné le premiei' eu raison de la grandeur de Chaldéens el son séjour à Charran, que le saint
son mérite. C'est ainsi que le proplièle, en disant : patriarche entendit la parole de Dieu. Etienne
a J'iii «/»!('' ./(/(()/* t't détesté Esdi'i ', » désigne dit ensuite : «mort de son père,
El de là, après la

d'abord le plus jeune ; c'est ainsi encore ipi'aiix « Dieu le lit passer dans ce |)ays. » Il faut ob-
I\iralii)omènes, Juda est cite le |)remier, (pioi- servei' ici qu'il ne dit pas Et api'ès la mort de :

qu'il soit le quatrième dans l'oidre de la nais- son père, il sortit de Charran; mais « De là :

sance 3 : n'était-ce pas à lui que la nation juive « Dieu le fil passer en celte région. «Ainsi, après
devait emprunter son nom, parce que la royauté avoir habité Charran, il fut établi dans la terre
était dans sa tribu? Or, c'est un grand avantage de Chaiiaan; il mort de
n'est pas sorti ajirès la
d'avoir [)oiu' la solution des questions dilliciles son père, mais il a été établi après la mort de
plusieurs moyens de s'en tirer. ce dernier dans la terre deChanaan. Voici donc
A. Il est bon maintenant d'examiner laquelle l'ordre des faits Il demeura à Charran, et de là
:

de ces explications se trouve en plus partait ac- Dieu le fit passer en cette contrée après la mort
cord avec le récit de saint Etienne. Suivant ce de son père il faut conclure de là qu'Abraham
:

récit, et contrairement à ce que semble du'e la était placé ou établi ilans la terre de Chanaan,
(ienèse *, ce n'est pas après la mort de Tharra à l'épocpie où lui fut donné le descendant dont
qu'Abraham de Dieu l'ordre de quitter sa
rei.iit toute la race devait régner en ce pays, suivant
famille et lamaison de son père, mais lorsqu'il la promesse et l'héritage (ju'il avait reçus de Dieu.
était en Mésopolamie, sorti déjà du pays des Car Abraham eut Ismaël de son union avecAgaî',
Chaldeéns et avant (|u'il habitât Charran; et ce et de Céthura d'autres enfants encore, à qui cette

serait dans ce voyage que Dieu lui aurait parlé. conlréene venait point à titre héréditaire. D'Isaac
Mais Etienne dit ensuite : « Alors Abraham naquit Esaù, qui en fut exclu également. Quant
« sortitdu pays des Chaldéens, et alla demeurer à .lacob, fds d'isaac, tout ce qu'il eut d'enfants,
« à et de là, après la mort de son père,
Chairan; sa race tout entière, partici|)aà l'héritage. Si on
a Dieu le fît passer en ce pays *. » Ces paroles ne le comprend bien, Abraham fut donc placé et
créent pas un léger embarras à l'explication, établi dans cette région, car il vécut jusqu'à la
qui se base sur la ircapitulation. Car Abraham naissance de Jacob la (luestion se trouve résolue ;

liaraît avoir reçu l'onlre de Dieu, lorsqu'il était par mode de récapitidation les solutions dilîé- ;

sur le chemin de
Mésopolamie, à sa sortie du
la rentes ne sont pas cependant à dédaigner.
pays des Chaliléens, et dans son voyage àCharran XXVI. f'ibid. \ii, 1-2, li.) Poiirquai Abraham

;

et cet ordre, il ne l'a fidèlement accompli, ce cache aux Eipjptiens que Sara est sa femme.
semble, qu'après la mort de son père, puisqu'il « 11 donc que les Egyptiens, en vous
arriva
est dit : « Et il demeiu'c à Charran; et de là, après « voyant, diront que c'est la femme de cet
'Mal. 1,2, 3. — ! I Parai. lï, l. — SGen. xll, 1.— Act. vu, 4.,

« honnne. Et il arriva qu'aussitôt qu'Abraham
380 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

« lui ciilré en Efivpte, les Egyptiens virent que tendre par ce pays, promis à Abraham et à sa pos-
« celte l'ennne était frès-lielle. » Comment est-il en étendue à ce que ses yeux pouvaient
térité, égal
possililc qu'Ai)i-aliam, à son entrée en Egypte, cm brasserauxipiatre points cardinaux. Qu'est-ce
ait voulu (aelicr que Sara était sa l'einme, en rayon visuel de noire œil peut at-
effet (pie le
connue l'aMinnent tous les textes relatifs à teindre dans un regard jeté sur la terre? Mais la
cetévénemeni? Celte conduite est-elle digne question n'aplusdoraison d'être, sil'on considère
d'un si saint personnage; ou laut-il y voir, que la promesse porte phis loin car il n'a pas ;

avec plusieurs iider[)rèles, une délaillance de été dit : Je te donnerai autant de pays que tu en
sa foi? J'ai déjà soutenu sur cette matière vois, mais: « Je te donnerai la terre que tu vois. »
une controverse avec Faustus <; et le prètie Quand donc Abraham recevait par surcroit le
Jérùnie a pariaiteinent démonlié que si Sara est I)a\s même environnant qui s'étendait plusloin,
demeurée plusieurs jours à la cour du roi d'E- celui qui était sous ses yeux n'en était certaine-
gyle,il ne s'ensuit par qu'elle ait contracté an- ment que la partie principale. Il faut remarquer
cune soudlui'e avec ce prince '^ C'était en eflét encore ce qui suit : dans la crainte qu'Abraham
une coutume établie que le roi n'admettait ses lui-même ne crût aussi que la promesse com-
feunnesqu'à tour de rôle, et nulle d'entre elles prenait exclusivement le pays (ju'il pouvait dé-
n'avait accès auprès de lui qu'après s'être long- couvrir on voir autour de lui : «Lève-loi, luiest-
temps serviede poudreset de parl'nmspour l'orne- « il dit, parcours lepaysdans sa longueur etdans
ment de sa beauté. C'est pendant cespréparalils « sa largeur, parce que je le le donnerai. » Dieu

que Dieu atfligca Pharaon. Il voulutle contraindre veut qu'en parcourant le pays, il voie de près
à rendre à son mari, sans l'avoir deshonorée, celui qu'il n'aurait pu découvrir en se tenant
latémme que celui-ci avait confiée à Dieu lui- sur un point que le peuple
isolé. Or, cette terre,
même, laissant ignorer que celle-ci était son d'Israël rei;iit d'abord en partage, ligure la race
épouse, mais ne menlanf point non plus lorsqu'il d'Abrahain selon la chair; non point celte pos-
disait qu'elle était sa sœur son dessein élail : térité plus étendue selon la foi, qui, pour ne pas
d'empêcher tout ce (ju'il lui était possible humai- le passer sous silence, devait être selon la pro-
nement, el do se confier à Dieu pour le resle. messe ciiinme le sable de la mer; expression
11 craignail, en s'en remellaiil à Dieu seul, même hyperbolique, est vrai, mais postérité
il celle
pour ce qu'il pouvait empêcher, d'être trouvé devait être si nombreuse que nul ne pourrait la
non pas homme de foi, mais coupable du péché compter.
detenler Dieu. XXIX. (Ib. XIV. 13.) Pourquoi le .surnom « qui
XXVII. (11). XII, iO.)Ce qu'était le Paradis. — « ('.s-( d'an-de lit du fleuve » donné à Abraham? —
Quand l'Ecriture compare la contrée de Sodoine « Et il annonra à .\l)raliaiii qui est d'au-delà du
et de Comorrhe, avant ses désastres, au Paradis « lleuve. un surnom que les exemplaires
» C'est
lie Dieu, parccqu'elle était arrosée, et à l'Egypte
grecs eux-mêmes donnent assez clairement à
que le Nil fertilise; elle montre assez, àmonavis, Abraham mais pour quel niolif? C'est, api)a-
:

ce qu'était paradis que Dieu créa pour y placei'


le
remmenl, parce qu'il traversa l'Kuphrale en quil-
Adam. Jene vois pasenelfel quele paradisdeDieu lanl la Mésopotamie, pour venir se fixer dans la
ait été autre chose. El certes, si les arbres à fruits terredeChanajm, elce surnoinV/'f/((-f/('-/à dufleuve
du paradis devaient être, suivant l'opinion de lui vient du pays
abandonna. C'est pour- qu'il
quelques-uns, comme des vertus de
coiisidi'rés quoi Jésus, fils de Navé, dit aux Israélites :

l'àme, il ne serait pas dit


de cette contrée qu'elle « Quoi ? voulez-vous adorer les dieux que vos
était « comme le paradis de Dieu », puisqu'il n'\ « pères ont servis au-de là du fleuve ? «

aurait pas eu en realih^ de paradis terreslre, XXX. (lb.xv,l-2.) Surletrouble d'Abraham.—


planté d'arbres vérilables. Ileslécrit : « Verslecoucherdusoleil, Abraham
XXVIII. (Ib. XIII, i4.)Kt('ndiii' delà promesse faite « fut saisi de peur et loinha dans une grande
(tAhraliam. — « Lève les \eux el regarde du « épouvante. » C'est une question àtrailer, parce-
« lieu où lu es au Seplenliioii elau Midi, à l'O- qii'il y en a quiprélendeiil i[ueràmcdii sage est
« rient el du côté de la mer : loutcepa\s ([uetu inaccessible à ces frayeurs. Est-ce ici quelque
« vois, je te le donnerai el à la posférilé pour chose de sein iilable à ce que rapporte Agelliiisdans
« toujours. » Ou demande ici ce qu'il faul en- son oiivragedes nuits Altiques '!
Un philosophe hit
' Contre Faustus, liv. 22. cli.31, 34.- î S. Jérôme, Quest. sur la Gen. ell'ray é dans une grande tempête élevée sur la
LIVRK I. —QUESTIONS SUR LA GENftSK. 381

mer; un jeune ili'liaiichi', i|ni dait au noinl)n' hnilium. — l'oiu'ipioi hieu dit-il à Abraham, en
(les passaijcrs, iviuaniiia sdii troulilc ;<'! comme, parlant ileson llls : i
l'^l des rois des nalionssor-
le (lanniM- passé, il rcpiocliail au iiliilosophc di' > liront de lui? » On ue voit point la réalisation

sï'liv si iinimplciiu'iil cimi, laiidis (pi'il u'avail, de celle |(i(i|)li('lie dans les rovaiimes ierirslres ;

lui, ni liTuihli- ui pâli, U'philosoplu'lui icpli(iua laut-il donc eu laiie ra[iplication à l'Eglise? ou
([ue s'il n'avait pasélé saisid'elïroi, c'est parce qu'il doit-on l'eiileiKlrr littéralement d'Esiiii lui-

tic (lc\ait lieu cniiu<lic pour une \ie idolondé- même?


mcut coriMuipue, altendu (pi'elle ue méi'ilail pas .\\\III.(lb. wiii, -1.) .\p\tiiritiiin deslrois nuyes

(ju'on redout.d rien pcm- elle. '. Kt connue les il Abraham. — « Et les vovaiit, il courut de la

autres passagers du navire lui prêtaient une « porte au-devant d'eux et il se prosterna en
oreille attentive, il leui- lit voir un livre du « terre, et il dit : Seigneur, si j'ai trouvé grâce
stoïcien Kpictète, où il était dit qu'au sentiment « devant vous, ne |)asscz pas la maison de
des Stoïciens, il n'est pas vrai que l'ànie de salies « votreserviteur. » Pnisqu'ilsétaienttroishommes
soit inaccessible à de i)areils troubles, ni que rien (juilui apparurent, pounpioi dit-il : Seigneur, au
de semblable ne se trabisse dans leurs impres- singulier; « Seigneur si J'ai trouvé grâce devant
sions; mais qu'il y a trouble, suivant eiiv, quand « vous:' >• Pensait-il (piel'uudeux fùtle Seigneur,

la raison ne trionq)be pas de telles émotions, et que autres lussent des Anges ? Ou mieux,
les

tandis que ipiand elle en triomphe, il ne faut plus vovant Seigneur dans la personne des Anges,
le

dire quelle est troublée..Mais illaut voir comment ne preléra-t-il point parlera Dieu plutôt qu'à ces
Agellius dit cescbosesetle discute sérieusement. derniers ? Car, l'un d'eux étant resté ensuite avec
\X\l.vlb. \\u,X.('.i>mmt'ntl)it'u (ipjh'IU'ctcrncl .\braham, les deux autres sont envovés à Sodome,
ce qui ne durera qu'un temps.' « ,1e te donnerai, — et Lotli aussi s'adresse à eux comme au Seigneur.
« et à la race après toi, la terre on tu habites, XXXIV. (Ib. xvni, 4.) Sur le repus serri au.r
« toute la terre cultivée, [)our la posséder étcr- Anyespar.llniiliam. — « Uii'on apporte de l'eauet
i< nellenient. » l'onr([uoi l>ieu se seii-il de ce «je laverai \ospietls, ralraicliissez-vous sous cet
mot éternellement, puisque la possession des Is- « arbre, etjeserviraidu pain et vous mangerez. »

raélites nedevaitètre(}ne temporaire? Est-ce pour Si Abraham les prenait pourdes Anges, connnent
désigner lesiéclei)résent;et comme on dit en grec a-t-il pu les convier à cette hospitalité? car la
atwv, qui signifie siècle, dit-on «ttivioy comme on nomriture est un hesohi pom* notre chair mor-
dirait wculuire ? Ou bien l'aut-il entendre ce terme telle, mais non pour la nature immortelle des

dans lesensd'une piomesse spirituelle et appelle- Anges.


t-on éternel ce qui signilieune chose réellement KXXV. (Il), xvni. 11.) Conment Abraham eut

éternelle? Ou plutôt serait-ce un idiotisme de par miracle un enfant de Sara. « Or, Abraham —
l'Ecriture, (jui appelle éternel ce qui n'a pas de «et Sara étaient vieux et avancés en âge et ce qui ;

terme assigné, ou ce qu'il n'y a pas de raison de « arrive d'ordiuaireauxfemmesavail cessé pour

ne pas faire encore, si l'on considère la volonté ou « Sara. » Les vieux ne sont pas encore vieillards

le pouvoir de celui qui agit ? Horace dit dans le quoique on domie aussi le nom de vieillards à
même sens : « Celui-là sera éternellement esclave, dcspersonnessimplement avancées en âge. Or, s'il
« qui ne sait se contenter de peu'. » Peut-on être est vrai, comme l'aflirment quelques médecins,
esclave éternellement, quand la vie même, né- qu'un mari avancé en âge ne puisse avoir des
cessaire poui-êlre esclave, ne peut être éternelle'.' enfants d'une femme également âgée, quand
Je n'aurais pas recours à ce témoignage, s'il ne même éprouverait encore ce qui arrive
celle-ci
s'agissait dune manière de parler. Car les au- d'ordinaire aux femmes, nous pouvons, d'après
teurs profanes font autorité pour nous en ma- cela,compren(li-erétonnement d'.Vhraliam à la
tière d'expressions, mais non pour les maximes promesse d'un lils i, et la réflexion de l'Apôtre,
et la doctrine. Or, sion peut défendre les Écri- qui y voit un miracle, {)uisqu'il dit que le corps
tures en expliquant les termes qui lui ;;ont pro- dWbralunn était déjà morf-. Il ne faut pas s'ima-
pres, c'est-à-dire les idiotismes, ne le peut-on giner toutefois quclccori)s d'Abraham fût mort,
davantage encore en interprétant les mots qui au pouit qu'il n'aurait pu avoir des enfants
lui sont communs avec les autres langues? d'une fennne jeune mais il l'était en ce sens ;

XWII. \\h. xvu, 16. j Sur les mis i.tsus i/'.l- ipi'il n'aurait pu en avoir d'une femme avancée

• .4gellius, 19. ch.


liv. De cité da Dieu, 9, ch. 4. —
I . Ho-
la liv. ^ ' Gen. XTii, 17. — !Bom. it, 19.
race, liv. I, Epilre 10.
382 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQIE.

en âge. S'il eut de? enfants de Céthura, c'est nut-il que Dieu parlait en eux, à certains signes
parce qu'il la pritjeune encore. Les médecins reélset apparentsde lamajestédivine, ainsi qu'il
disent en elïel que l'homme, dont les forces s'en montre souvent, au témoignage de l'Ecriture,
sont déjàassez affaiblies, pour qu'ilne puisse avoir dans les liommesdeDieu. Mais s'il en est ainsi, il
d'enfants d'une femme avancée en âge, lors faut examiner encore à quel signe ils reconnurent
même que celle-ci éprouvei-ait ce qui arrive à ensuite que c'étaient desanges Serait-ce au mo- '!

son sexe, peuten avoir d'une femme jeune. Et ment où ceux-ci remontèrent an ciel en leur
réciproquement, la femme avancée eu âge, qui présence ?

ne peut avoir d'enfants de son union avec un XXXVllI. (Il), xviu, 19.) a Dieu promet de ré-
homme âgé, quand même elle éprouverait ce compenser l'obéissance (les enfants d'Abraham. —
qui arrive au.\ femmes, peut en avoir de son « Carjesaisqu'il instruira ses enfants, et sa maison
union avec un homme jeune. Ce miracle ici « aprèslui;ils garderont lesvoiesduSeigneur, et
consiste donc en ce que, suivant ce que nous « agiront selon l'équité
et la justice afin que le ,

avons dit, en même temps que le corps du mari « Seigneur accomplisse en faveur d'.\braham
comme mort, la lémme était si avancée en
était « tout ce qu'il lui a promis. » C'est ici que le
âge que ce qui arrive d'ordinaire à son sexe Seigneur promet à .Vbraham, outre les récom-
avait cessé pour elle. Si l'on presse ce mot de penses, l'obéissance (idèle qui attirera sur ses en-
l'ApùIre Son corps était déjà mort, » car il dit
: « : fanls raccomplissement des promesses divines.
mort, il ne faudrait pas entendre que ce corps X.XXIX. (Il), xvnii, :21. ) Dieu, parlant au.r
avaitencore de la vie, mais ipi'il était un cadavre ;
hommes, s'abaisse à leur langage. — « Jedescen-
ceqni est de la dernière ansurdité. La question se « drai donc, je verrai et jesauraisi, oui ou non,
trouve donc résolue de cette manière sinon, on ; « leur iniquité s'est consommée, comme l'an-
ne comprendra pas comment l'Apôtre dit d'A- « nonce lem' clameur qui vient jusqu'à moi. «

braham, qui était arrivé à peu près à l'âge ï^n prenant ces paroles comme l'expression, non
moyen des houunes d'alors et eut ensuite des d'un doute sur ce qui arrivera, mais de la colère
enfants de Céthura, que son corps était mort et et de la menace, nous n'avons pas de question à
qu'il engendra pas mù-acle. poser. Dieu en effet parle aux hommes leur lan-
-VXXVI. ^Ib. XVIII, 13. ) Pourquoi Dieu reprend gage dans l'Ecriture, et ceiLX qui le connaissent,
le rire de Sai'a et non celui d'Abraham? — « Et savent que sa colère est exempte de toute passion.
« le Seigneur dit à .Vbraham ; Pourquoi Sara Nous disons souvent nous-mêmes, en forme de
« a-t-elle ri, disant en elle-même ; Serait-il donc menace Voyons si je ne le fais pas ceci, voyons
:

« vrai que j'eusseun enfant, étant vieille comme si je ne lui ferai pas cela et encore Si je ne puis
; :

« je suis ? » On demande pourquoi le Seigneur pas te faire telle ou telle chose ou bien Je ; :

un reproche, puisque .\braham a ri éga-


lui fait saurai, c'est-à-dire, je m'assurerai si je ne puis
lement ? N'est-ce point parce que celui-ci a ri pas faire cela. L'émotion de la colère et non
d'admiration et de joie, tandis que Sara a ri sous l'ignorance se trahit dans ces menaces. Dieu donc
l'impression du doute ? Et Celui ([ui connaît le est inaccessible au trouble ; mais le langage hu-
cœur des hommes, n'a-t-il pu \oir cette diffé- main se proportionne ordinairement à l'humaine
l'cnce ? faiblesse, et à cette faiblesse Dieu adapte ses
XXXVll. (Ib. xvni, [o.j A quel .signe Abraham et paroles.
Sara reconnurent-ils les Anyes? — « Sara nia en XL. (Ib. xvni, 32.) Dieu pardonne-t-il partout
« disant Je n'ai pas
: ri, car elle eût peur. » Com- oi( iltrnure dix justes^. — On demande souventsi ce
ment comprenaient-ils ipie Dieu lui-même leur (jue Dieu dit de Soilome, qu'il ne la perdrait pas,
parlait, puisque Sara osa nier ([u'elle eût ri, com- s'ilne s'\ trouvait même que dixjustes, doit s'en-
me si Dieu pouvait l'ignorer? N'est-ce point peul- teudred'un décret particulier à cette ville, ou s'il
être parceque Sara prenait les anges pour des faut considérer connue une loi générale et uni-
honnues, tandis qu'.Vbraliam voyait en eux Dieu verselle, que Dieu pardonne à tout pays au mi-
lui-même ? Cependant lorsqu'il leur rendit, com- lieu duquel il rencontre r//,r ./(/.sfcx ? D'abord il
me nous l'avons rapellé plus haut, lesdevoirsde n'y a rien qui nous oblige à voir ici ime loi géné-
riiospilalité, dont le besoin ne se fait sentir qu'à rale mais, eu ce qui concerne Sodome, Dieu a
;

une chair fragile, je m'étonne s'il ne les i)rit pas pu tenir ce langage, parce (ju'il savait qu'elle ne
d'abord pour des hommes mais peut-être recon- ;
contenait pas même dix justes; et sa réponse
I.IVKK I. — OUKSTIONS SDK LA GKNKSK. 383

avail |tomlmt(lo faire voir à Alu-aliam (|u'il rtail trepoiils à des infamies ou à d'autres péclu's, il

ini|)()ssil)liMl'N froiivci' ce iiomhi'c, tant leiii' ini- <'stpermisde im mal, afin d'empêcher un
faii'c

(|iiit('M'-tait iiKiiitcc an <'<iinlil('. Dieu n'avait pas autre d'en commettre un plus grand ou s'il no ;

lii'Sditi (l"('|)ar;;ri('nl('s Ikmiiiiic^ si (liiiiiiirls, dans laiil pas alli'iliuer les pai'ol(>s de Loth au trouble

la craiiitc de piMdrc en iih'hu' temps U-s justes, plutiM (lu'à la réilexion. Il serait en eflét extrê-
puis (|tril pouvait, apri^s avoir sauvé ceux-ci du mement dangereux d'approuver cette manière
daiim'r, iulliiicr aux impies les eliàtimerds (pi'ils d'a^iir mais si on l'altribue au trouble et à
;

mei'itaieut ; mais, toiimie je l'ai<ii)ser\é, il a voulu l'émolion produite par un si grand mal, elle n'est
inetfrcaufirandjour la malice de ce peuple; c'est imilableàaucun titre.
l)()iu'(]uoi il a dit : « Si j'en trouve dix, je pai'dou- XLlll. (II). XIX, II.) Ai'eiKjlement des Soda-
i nerai à toute la ville. » (^est connue s'il disait : mites —
Or, ils h'appèreut de cécité les honuues
'(

Je puis assurément ne pas perdre les justes avec « qui étaient ;\ la porte de la maison. » Le grec

les impies, sans néanmoins éi)ari;ner ces derniers, porte : «opact'a, ce qui signifie ])lutôt privation
pai'ce ([u'il est en mon j)ou\oir d'inllijiei' aux de la vue (piirendail invisible, non pasioul, mais
impies les châtiments dont ds sont dignes, après ce (pi'il ne fallait i)as voir. En effet, s'ils eussent ét('

avoir délivré et sauvé les justes. Cependant si ces happés decécité et id)solumenl incapables de rien
justes se trouvent, je pardonne ; c'est donc qu'il distinguer, comment auraient-ils pu se lasser
était im|)ossil)le de découvrir ce nombre. II\ a de chercher la porte ? AKligés de leur malheur,
(iuel<iue chose de semhlable daus.Jérémie, lors- ils n'en auraient |)as même eu la pensée. C'est de

(lu'il dit : « Parcourezlesruesdclérusalemetvoyez, cette espèce de privation de la vue que furent


« cherche/ lians ses places et considéiTz si vous h'appés ceux qui ('taient à la recherche d'Elisée '.

« \ trouverez im homme qui agisse selon la ju^- Ceux(}ui ne reconnurent pas le Seigneur après
« ticcctqui cherche la vérité, et je serai miséri- la marchant avec lui dans la
résurrection, en
« cordieux pour Umu's |)éch(''s < : n c'esl-à-dire, chemin, réprouvèrent également ^; si le mol
trouvez-en un seul, et je pardonne aux autres; n'y est pas, la n'alité néanmoins est évidente.
c'est pour mieux (aire sentir ([u'on ne pouvait XLIV. (Ib. XIX, iS. 19.) Sur les paroles que lu
découvrit' même un seul honune de hien. peur inspire Loth. « Loth leur dit
ti —
Seigneur, :

XLI. II). XIX, I.) Sur rappurUitui des (iiiijfs


i^
ti Il puisque votre serviteur a trouvé grâce devant
Lotit. —
Lors(|ue Loth va au-devant des anges et « vous et que vous avez signalé votre justice à
les adore en se prosternant sur sa face, il semble « mon égard, en me conservant la vie; consi-
(|u'il voit d'abord en eux des anges mais ensuite, ;
« que je ne puis me sauver sur
dére7,,je vous prie,
quand il les invite à prendre de la nouriture, « la montagne, que les maux m'y atteindront

comme en ont besoin les mortels, il semble, « peut-être et que je mourrai. » Il ne se confiait

qu'il croit distinguer en eux des hommes. La [)as même à Dieu, qu'il reconnaissait dans les

question se résout ici de la même manière qu'elle anges. C'était déjà sous cette inspiration qu'il pai-
a été résolue au sujet des trois anges, qui appa- lait, lorsqu'il consentit à livrer ses Mlles. Com-
rurent à Abraham. La divinité de leur mission prenons par là que ses paroles relatives au dés-
éclatait à certains signes, mais en même temps honneur de ses enfants ne doivent point faire au-
ils paraissaient de simples mortels. Aussi lit-on torité, pas plus que le manque de conliancc en
dans l'épitre aux Hébreux, ijuand l'Ecriture fait Dieu, qui s'appuierait sur son exemple.
l'éloge de l'hospitalité : « C'est en l'exereanl XLV. (11). XIX, 29.) .1 (luoi faut-il attribuer la
« que plusieurs, sans le savoir, eurent pour liùtcs dclicranee de Loth '! — « Et Dieu se souvint d'A-
« des Anges ^. » « braham et délivra Loth du milieu des ruines. »

XLH (th. XIX, 8.) Conduite de Lotli envers les L'Ecrilure atliibue la délivrance de Loth pi'in-
Sodomites. — «J'ai, dit Loth aux Sodomites, deux cipalemenl aux mérites d'Abraham, pour nous
« lilles qui sont encore vierges, je vous les amè- faire comprendre que Loth n'est appelé juste que
« nerai usez-en comme il vous plaira, pourvu
; dans une cerlaine mesure, surtout parce qu'il
« que vous ne fassiez point de mal à ces hom- adorait le seul vrai Dieu, et par comparaison avec
« mes. en livrant ses lilles, obtenir en
« Il voulait, les crimes des Sodomites; car en vivant au mi-
retour que ses hôtes ne subissent point un pareil lieu d'eux il ne put jamais se faire à leur genre
outrage de la part îles Sodomites. On demande, de vie.
et à bon droit, si pourétablir une sorte de cou- XLVI. (Ib. XIX, 30.) De la moutnque oii Loth se
'
Jér. V, I. — 2Heb.xlll,2. 1 IV, Rois, Tl, 18. — 2Luc, ïxiv, 16.
.

384 QUESTIONS SUR L'HEPTATELQUE.

réfugia. — de Ségor et demeura sur


« Or, F^otli sortit « le fils de cette servante nesera point héritier avec
'< la montaune.
m'élonne si cette montagne,
» Je « mon fils Isaac, » pourquoi .\braham, s'atlriste-

sur laquelle il monta de son propre mouvement, t-il, pniscpu^ c'était une prophétie qu'il devait
n'est pas celle qu'il refusa de gravir, quand le assurément mieux connaître que Sara ? Mais il
Seigneur l'en avertit. Ou ce n'en est pas une autre, faut comprendre ou que Sara tint ce langage en
ou rien ne le t'ait supposer. vertu d'une révélation qu'elle reçut la première,
Xr.VII. Sur le peu de fuide Lotb.~
fil). XIX, M).) et qu'Abraham, instruit seulement dans la suite
Car il eut peur de demeurer à Ségor.
« Le Sei- >- par le Seigneur, céda à l'émotion de l'aifeclion
gneui", par égard pour la fail)lesse et la frayeur de paternelle envers son fils ; ou que tous deux igno-
Lotli, lui avait accordé la ville de sou choix, et lui rèrent il'abord le dessein de Dieu, et ipic Sara
avait domié l'assurance que cette villcserait épar- prononça cette parole prophétique, sans en savoir
gnée à cause de lui cependant Loth eut peur : comme une femme blessée au cœur par
le sens,
encore d'y demeurer; tant sa foi était peu robuste. l'orgueil de sa servante.
XLVIII. (Ib. \\,:>.)BeaulédeSara.—
Abra- « ( tr, LU. (Ib. x.xi, 13.) Ismaél, enfant de la chair.
« hamditdeSara, sa femme Elle est masœui". Il : Isaac, enfant de la promesse. — Il faut noter
a n'osa dire Elle est ma femme, dans la crainte
:
qu'Ismaël, lui aussi, reçut de Dieu la qualification
« que les habitans de la ville ne le missent à mort de fils du sang (i'.Vbraham, en raison de l'in-
« àcaused'elle. » Comment, à cet àge,la beauté de terprétationsuivante que l'Apôtre nous donne de
Sarapouvait-elleiuspirer descraintes àAbraliam? ces paroles « C'est il'lsaac que sortira la race
:

Mais il faut plutôt admirer la vigueur de cette « héritière de ton nom : c'est-à-ilire ce ne sont
beauté, qui pou\ ait encore avoir des charmes, « pas les enfants nés delà chair, mais les enfants
que de voir ici quelque difficulté sérieuse. « de la qui sont réputés de cette
promesse,
XLIX. (Ib. \\,li.')P(irolesde Dieuà Ahimélecli — « race '. donc proprement le fils en
» Isaac est
«Je t'aipréservé de pécherconlremoi » dit le Sei- sa qualité, non de fils de la chair, mais de fils
gneur à Abimélech, quand il avertit ce princcque de la promesse relative à toutes les nations.
Sara n'était point la sœur d'Abraham, mais sa LUI. (Ib. XXI, 14.) lîenvoi d'Aqar etd'lsmaël. —
femme. Il faut noter et observer ici qu'un pèche « Or Abraham se leva dès le malin, et il prit des
contre Dieu, quanti on se reutl coupable de lautes « pains et une outre d'eau, les donna à Agar,
qui passent pour légères aux yeiLX des hommes; « et les lui mit sur les épaules; et l'enfant, et la
tels sont les péchés de la chair. Et quand le Sei- « renvoya. On demande ordinairement com-
»

gneur lui dit : « Voilà que tu mourras, » il faut ment il put mettre sur les épaules d'Agar un
observer que Dieu annonce comme devant se enfant de cette taille. Car Ismaël fut circoncis à
réaliserindubitablementcc qu'il dit pour engager l'âge de treize ans, avant la naiss;ince d'Isaac ;

à éviter le péché. Abraham avait alors quatre-vingt dix-neuf ans,


L. (Ib. XXI, <S.) Sur le festin que fil Abraham et à la naissance d'Isaac il avait atteint sa centiè-
quand on sevra son ///.«. Pourquoi .Vbrahani lit- il — me année. Or, quand Ismaël jouait avec Isaac et
un léstin, non pas le jour de la naissance de son contrista Sara, ce dernier était sans iloule déjà
fils, ni le jour où il fut circoncis, mais le
Jour où grand, puisqu'il était sevré : Ismaël devait donc
on le sevra ? Si l'on ne découvre pas ici quelque avoir plus de seize ans, lorsqu'il fut chassé de la
sens spirituel,la question reste sans solution. Ce maison paleruelle avec sa mère. De plus, (juaud
donc qu'une grande joie doit éclater,
fait signifie
même on admettrait que cette circonstance du
lorsque l'homme, arrivé à l'âge spirituel, est de- jeu d'Ismacl avec le petit enfant doit se rapporter
venu un homme tout nouveau, c'est-à-dire, dif- par mode de récapitulation, à répoi|ue où Isaac
férent de ceux à (jui l'Apotre dit « .le vous ai : n'était pas encore sevré, il n'en serait pas moins
« nourris détail, non de \iande; parce que vous toujours absurde de croire qu'un enfant de plus
« n'en étiez pas capables; et à préseul même vous de treize ans eût été nus sur les épaules de sa
« ne l'oies pas encore, parce que vous élcs encore mère, avec une outre et des pains. La «luestion
« charnels '. » se résout très-facilement, si nous ne sous-en-
Ll. (Ib. XXI, 10.) Sur ces mots prophétiques: tendons pas : // mit .s)/r les épaules, mais il donna.
:

Chassez cette serrante et son fils, etc. — Lorsque Car selon le texte, Aluahain donna à la mère de
Sara dit : « Chassez cette servante et son fils, car l'enfant une outre et des pains qu'elle plaça sur

II Cor. 111,2. ' Ilom. i.\,


\A\\\K I. — UI'KSTIONS SI'U LA (ÎENftSlv 88S

SOS (•pailles. VA (|naii(l le l<'\l(' ajoiilc : et l'cnfinil, Aliiinélecli, e| le pnils qu'il creusa fui appelé le
nous soiis-oiitonilons : //non pas
donna et : l'nitsdu sernieni .•
conuneni, peut-on demander,
// mit sur li'sépauh'x; apr^s avoir donné l'oulrc cela s'accorde l-il avec la vérité? Agar, expulsée
et les iiains, il donna encore l'enlaid à A|;ar. de inaisou d'Aliialiain, errail, dit l'Eciiliire,
la

LIV. ,11). \\i, lo-iS.) l'iiroIr.K ilerAnijc à Anar. aux enviroMs du pulls du sermeul; or la cuns-
— « Et l'eau inanipia dans l'oulrc et elle laissa Iriiclioii ipii eu fui par Abialiain csl rap-
l'aile

« l'enfanl sons nu sapin, c! elle s(''loiutia el elle portée longlemi)s après, car Abimélech et
« s'assit vis-à-\is de lui à la dislance d'un li'ail Aliialiam Jiiièreiil en cel endroit, et cet événe-
Il (l'arc; car elle disail :.Ie ne ver-rai pointla inoit mcntirétait(XMiainemenlpasencoi-c arrivé, quand
« de mon (ils, el elle s'assit en l'aceih^ lui. Or l'en- Sara fut chassée avcH' sou (ils de la maison d'.\-
« faut jela ini cri el |)lein'a ; el Dieu iVonla la bialiam. Coimnent donc enail-elle aiiloiir du
« voix (le reniant dn lieu où il était; et un An^e puits du serment? Faut-il croire ijuc le [xiits était
(I de Dieu aji^vla Apar du ciel et lui dit Ai;ar, :
déjà creusé, et (pie l'entr(>\ue d'.Vbraham avec
« (pi'y a-l-il? ne crains rien, car Dieu a entendu Abimélech esl rai»[)orlée ensuite sons forme de
« la voix de ton lils du lieu où il est. Lève-toi et ré'capilulalion ? Celui qui écrivit le livre long-
« prends l'enfant et tiens-le par la main par- :
temps après, n'a-t-il pas appelédn nom di;
« ce(pie je le ferai chef d'un ^land peuple. » On puits du serment, la contrée où errait la mère
a coutume de demander coniuicnt la mère put avec son fils, connne s'il (lis:iit : Elle errait dans
laissei-sous lui arbre cet enfant (jui avait plus de cette contrée où hit établi le puits du serment ?
(juinze ans, et s'en alla i\ la distance d'un trait Ce puits hit construit dails la suite,mais longlemps
(l'arc, poin- ne pas le voir mourir. Il seuihle en avant l'époipie où V(''cut l'auteur; et au moment
effet (ju'elle l'ait porte'' el (K'posé à terre ; c'est où le livre s'écrivait, le puits s'a|)pelait ainsi,
le sens que parait pri'senter le texte, surtout conservant l'anti(pie dénomination (pi'il tenait
(pi.uid on lil plus loin :« L'enfant ])!ein'a. » Mais d'Abraham. Cependatil, si c'est ce même puits
il faut comprendre cjue la mère l'abandonna, qu'Agar vit de ses propres yeux, il n'y a plus
non après l'avoir porté, mais, ainsi qu'il arrive d'autre moyen de résoudre la question que d'y
par désespoir, comme s'il allait mourir. Portait- voir une récapitulation des faits. Et dans le cas
on celui qui ii lit ces paroles de l'Ecriture : «J'ai où le puils eût été creusé avant l'expulsion
« été laissé loin de vos yeux i ? »
Et ne dit-on pas d'Agar, on ne doit pas se préoccuper de savoir
tous les jours dans le langaîie ordinaire qu'on commeul elle ignorait qu'Abraham l'eût établi,
laisse loin un familier quand pour ne plus
de soi car il pourrait Irès-bien se faire que le [inils existât
le voir on cesse de l'admettre en sa compagnie ? à son insu, pour les troupeaux, loin de la maison
Il faut donc entendre ici ce ([ue l'Ecriture ne dit qu'Abraham habitait avec les siens.
pas que la mère s'éloiiiua de son llls, pour(jue
: LVl.(Ib.x\i,iî3.) Abralmni ne possédait-il aucun
l'enfant ignorât où elle s'était retirée, et qu'elle se domaine dans la terre de Chanaan ? — On peut
cacha dans la profondeur de la foret, pour ne pas demander comment Abraham planta un champ
avoir sous ses yeux son lils mourant de soif. non loin du puits (lu serment, si, comme le dit
Quant à lui, qu'y a-t-il d'étonnant que même à saint Etienue, il n'avait point reçu d'héritage en
son âge, il ait pleuré, privé qu'il était depuis ce pays, pas même un pied de terre i. Mais
longtemps delà vue de sa mère, qui l'avait pour il faut entendre ici par héritage, non celui (pi'il
ainsi dire perdu, et laissé seul en cet endroit ? acheta à prix d'argent, mais celui que Dieu de-
Les paroles suivantes : ne « Prends l'enfant » vait lui donner dans sa mnnificence. Or l'espace
signifiaient donc pas qu'Agar dût le relever du qui environnait le puits, fut sans doute compris
sol où il gisait, mais ipi'elle devait le rejoiudie dans l'acquisition (pi'Abrahain paya de sept
et le tenir main, suivant ce qui se pratique
par la jeunes brebis, lorsque lui et Abimélech se jiu-è-
à l'égard d'un compagnon, et il en était un c'est :
rent mutuellement fidélité.
ce (|ue font souvent ceux qui cheminent ensem- LYII. (th. xxn, 1.) Tentation d'Abraham.—
ble, de quelque âge qu'il soient. « Et Dieu tenta Abraham. » On demande souvent
LV. (Ib. XXI, 22.) Quand fut creusé le puitu du comment cela est vrai, puisque saint Jacques-
serment? —
« Oi' il arriva dans ce temps-là qn'Abi- dit dans son Epiti'e que Dieu ne tente per-
« mélech dit, etc. » Abraham lit allia nce avec sonne 2. Mais n'est-ce point parce que, dans le

Ps. XXX, 23. ' Act. TII.5. — 2 Jacq. I, 13.


386 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

langage de l'Ecriture, tenter a le même sens psaume : « Le Seigneur m'a dit Tu es mon Fils, » :
i

que, éprouver ? Or la tentation dont parle saint Mais il est difficile de découvrir dans l'Evangile
Jacques ne s'entend que de celle qui i)Ousse au même, que le Christ appelé Dieu le Père son Sei-
péché. C'est dans ce sens que l'Apùti'e dit: « Dinis gneur, parce que celui-ci le serait en vérité, quoi-
« la crainte que le tentateur ne vous tente •
; » qu'il l'appelle Dieu, dans ce passage où on dit: « Je
car il Le Se-gnem- votre Dieu
est écrit ailleurs : « « vais \ ers mon Père et votre Père ; vers mon Dieu,
« vous tente, pour savoir si vous l'aimez 2. » « et votre Dieu de l'E-
'. » Quant à ces paroles
Celte autre manière de parler pour savoir, a : criture Le Seigneur a dit à mon Seigneur
: « » •'',

le sens de pour vous faire savoir car l'homme


: ; c'est au nom de celui qui parle qu'elles sont pro-
ignore la puissance de son amour, tant qu'une noncées « Le Seigneur a dit à mon Seigneur, »
:

épreuve envoyée de Dieu ne la lui a fait con- c'est-à-dire. Le Père a dit au Fils. Ainsi ces au-
naître. tres paroles « Le Seigneur fit pleuvoir de la
:

LVIII. (Ib. xxH, 12.) Sur ces mots : Je connais « part du Seigneur ^, » sont dites également au
maintenant (pie tu crains Dieu. — Un Ange dit du nom de l'écrivain sacré et en voici le sens Le :

ciel à Abraham : « Ne mets pasla mainsur l'en- Seigneur de cet écrivain envoya la pluie de la
« fant, et ne lui fais rien. Car je connais maiute- part de son Seigneur notre Seigneur de la part ;

« nant que tucrains Dieu. » Cette question se résout, de notre Seigneur, le Fils de la part du Père.
connue la précédente, par une analogie d'expres- LX. ( Ib. xxu, ril.) Sur (]hamuel,père des Su-
sions; car ces mots: «Je connais maintenant que riens. —
Quand on annonce à Abraham que
« tucrams Dieu » siguifient maintenant je te :
Melcha a eu des enfants et qu'on nomme l'un
fais connaître. Cette manière de parler se com- deux, Chamuel, le père des Syriens, il est évi-
prend avec évidence dans la suite du texte « Et :
dent que cette dernière dénomination n'a pu être
« Abraham appela ce lieu Le Seigneur a vu :
; donnée par ceux qui apportèrent la nouvelle,
« et l'on dit aujoud'hui Le Seigneur apparut :
puisque les Syriens, <pii doivent leur origine à
" sur la montagne. « Ha \u, mis pour il ap- :
ce Chamuel, ne formèrent un peuple nombreux
parut, a le même sens que: il a lait \oir; la cause (]ue dans des temps bien postérieurs. Celle ad-
est mise pour l'effet ; comme on dit : im froid dition est de l'auteur, qui écrivit ces faits long-
engourdi, pour : un froid qui engourdit. tempsaprès qu'ilssc furent accomplis nousavons ;

LIX. (Ib. \\u, l^.) Est-ce par cijardpour l'ange fait déjà une remarque semblable, à propos du
oupar égard pour IHeu, qu'Abraham était prêt à )ie Puits du serment >.
pas éparqner son[ils? « Et pour moi tu n'as pas — LXI.(Ib.xxni,7.).S'(')/s du motadorer. « Abra- —
« épargné ton fils bien-aimé. " Est-ce par éganl « ham, se levant, adora le peuple de cette contrée. »

pour l'Ange, et non pur égard pour Dieu qu'A- Pourquoi demande-t-on, est-il écrit « Tu ado- :

braham n'a pas épargné son fils? Ainsi, de deux « reras le Seigneur ton Dieu, et tu ne serviras
choses l'une ou sous ce nom d'Ange est dé-:
« que lui «; » Abraham a porté jusqu'à
puisqu'
signé le Christ notre Seigneur, qui est Dieu sans l'adoration ses hommages à un peuple païen ?
aucun doute, et que le Prophète appelé mani- Mais il remarquer il n'est pas dit dans
faut le :

festement : « l'Ange du grand conseil »; » ou ce cûmumadementTu n'adoreras que ]e Sei- :

bien, c'est que Dieu était dans l'Ange et celui-ci, gneur ton Dieu, comme il est dit; « Tu ne serviras
comme il arrive souvent dans les prophètes, « ([ue lui, » en grec tu rendras le culte de latrie
parlait au nom de Dieu. Ce dernier sens paraît Aarpsûaeiç. Ce culte n'est dû qu'à Dieu. Aussi
se dessiner d'une manière plus évidente dans les condanme-t-on les idolàlres, c'est-à-dire, ceux
paroles suivantes du texte « Et l'Ange du Sei- :
(juirendent aux idoles un culte semblable à celui
« gncur appela de nouveau Abraham du haut du que l'on doit à Dieu. Et qu'on ne se préoccupe
« ciel, disant J'ai jmé par moi-même, dit le Sei-
:
pas de ce que, dans un autre endroit de l'Ecri-
« gneur. »11 est difficile en effet de trouver que ce ture, l'ange défend à l'homme de l'adorer, et
Christ nomme Dieu le Père son Seignem-, dans le l'avertit d'adorer plutôt le Seigneur". Cet Ange
temps surtout qui |)récédarhicarnation. Euégard a\ait apparu dans un tel éclat, qu'il pouvait être
à laforme d'esclave qu'il a prise, cettee xpression adoré à la place de Dieu; or, c'était une erreur
semble ne pas manquer de convenance. En elfet qu'il fallait dissiper.
pour prophétiser cet événement ilestdit dans un LXll. (Ib. XXIV, 'è.JSerment exigé par Abraham.
'
Ps. M, 7. 2 Jt-aii, — x.v. 17. — >
Ps. cl.\,r. ' Gin. .\l.v.a4. —
' I Tlieas. III, .'j. — 2 Deut. xill, 3. — ">
Isaïe, ix. fi. selon les Sept. '
Ci-dessus, iiuest. 55.— ' Deut. vi, l:t-. x, 20. - Apor. XIX, 10.
IJVRK I. — gUKSTIONS SUK LA f.ENH'SE. a87

— I/or<lro (luo donno Al)raliaiii son scivitciif ;i " ieslillesdes (lliananéens, dans le pays des(|uols
(le mclli'c sa main sous sa cuisse, ol le sfiiucul " j'habite; mais lu irasdaus la maison de mon |ière,

((u'il lui l'ail pnMcr au nom du Seifiiwur Dieu du " et dans ma tribu, et tu prendras là une épouse
ciel, et du Srifiiirur de Iti Irm', (lécduccilcnl m- " poui- mou (ils, ()!• .. si l'on se rend ((inipte de
(liiiaireiuoul les Icilcuis iuliahiles; ils ne rcniai- la mauièii' doul tout ces ordres huent domiés
iiuctit pas qu'il j a ici une grande proplu'lie le- ou trouve (|ue le sens est le môme; mais les pa-

lalive auChrisl. Il csl elïeetivenieni, le Seigneur i-olesne soûl |)as touh's ideuli(pies, ou sont ren-
Dieu (lu ciel et le niailre de la terie, el il devait dues autrement. Je fais celle observation |)our
\cnir uu jiuir dans une eliau' issue du sang les sots et les ignorants, cpii reprochent aux
(l'Ahraliaïu. Evangélistes de ne pas s'accoider parfaitement
lAlIl. illi. wiv, l"J-li.^ En quiti la ihnnundc dans (piekjues e\[)ressious, taudis (|ue pour les
A' un prinHije diffère delà consultation des augures. choses et les pensées ils ne sont nullement en
— Il faut reelierelier en quoi les auqures détendus désaccord. Il n'y eut certainement (|u'un seul
dilJerent de hi demande d'un prodiqe, deuiaude auteur pour écrire ce livre et il aurait pu se ;

que lit le serviteur d'Abraliani, lors(pi'il pria Dieu relire pour se répéter textuellement, si la chose
de lui nionti'iM' (|ue la Ceinniedeson uiailre Isaac lui avait paru convenable mais la vérité du récit :

serait celle qui lui dirait, après qu'il aurait de- ne porte (jue sur les choses et les pensées, et il

mandé à boire : « Hois tout d'abord, et je don- sul'ht que la volonté, pour la manifestation de
« nerai à boire fi tes chameaux juscju'à ce qu'ils laquelle les paroles sont faites, soit comprise
« cessent d'avoir soif. » Autre chose est de de- assez clairement.
mander uu miracle ipii soit un vrai prodij;e ;
LXV. Th. XMV, 41.) Serment et malédiction. —
autre chose est d'observer ce qui n'a rien de Dans le discours où le serviteur d'Abraham ex-
merveilleux et n'a de sens que dans la vaine pose les ordres de son maître, les exemplaires
et superstitieuse interprétation des devins. latins lui font dire « Alors tu seras déchargé de
:

Mais encore, permis de demander un pro-


est-il « mon serment, on, de mon jurement; » tandis que

dige, pour être assuré de ce qu'on veut savoir ? le grec porte : de ma malédiction. "Oo/.oç veut
ce n'est pas là une petite question. Car, c'est le dire en effet serment, malédiction d'où et àoc. ;

lieu on convient que ceux qui lontcela


de le dire, viennent y.aT:<paT04 ou £7:t/.xTapaTo; qui signilient
sans raison suffisante tentent Dieu. Lorsque le maudit. Or on demande comment un serment
Seigneur lui-même fut tenté par le démon, il peut être pris pour une malédiction ; n'est-ce
eut recours à ce témoigiiaiic des Ecritures : « Tu point en ce sens que celui-là sera maudit (|ui
« ne tenteras pasleSeiEfnem- ton Dieu '. » En effet, contreviendra à son serment ?

on lui demandait comme s'il eût été uu simple LXVl,(lb. xxiv. Ai).) Sur lamiséricorde et la jus-
Inortel, de montrer par quchpie preuve ce (lu'ii tice. — « Si' donc vous exercez la miséricorde et
était, c'est-à-dire, la grandeur de son pouvoir « la justice envers mon maître, dites-le moi . « Ici

auprès de Dieu ce qui est en soi un mal. Jfais


: commencent à apparaître ces deux attributs di-
ilne faut pas confondre avec cette tentation vins, la miséricorde et la justice, toujours insépa-
mauvaise la conduite de Gédéon, pressé d'en- rablement imies dans les autres livres des saintes
gager la bataille avec l'ennemi 2 il consultait Dieu : Ecritures et principalement dans les Psaumes.

I dans cette circonstance plutôt qu'il ne le tentait.


Achaz lui aussi, dans Isaïe, craint de solliciter
Car miséricorde et vérité ont la même significa-
tion que miséricorde et justice.
un prodige, de peur de paraître tenter Dieu, au LXVll. ( Ib. XXIV, ol.'; Iléponse de Bathuél à
moment où le Seigneur lui donne par le pro- Eliéier. — « Voici Rébecca devant toi; prends-
phète le conseil d'en demander un 3. Il croyait « la et retourne ; qu'elle soit la femme du fils de
sans doute que le prophète cherchait à savoirs'il « ton maître, selon ce que le Seigneur a dit. » A
se sou venait du précepte qui défend de tenter Dieu. quel moment le Seigneur a-t-il dit cela? Les pa-
LXlV.(Ib. xxiv, 37, 38.) Des diljërences qui por- rents de Rébecca voyaient donc dans la personne
I tent sur les 7nots, non sur la pensée. — Le serviteur d'Abraham un prophète, et ils acceptaient ce
d' Abraham,racontant les ordresqu'il a reçus de son qu'il avait dit comme une parole prophétique
maître, dit qu'ilslui ont étédonnés en ces termes :
inspirée de Dieu : ou bien, ce qu'ils entendaient
« Tuneprendraspas d'épouse pour mon tîls parmi nommer parole de Dieu, c'était le signe arrivé
' Deut. VI, 16, Matth. iv, 7. — ' Jug. vi, 17. '
Isaïe, VI, 11, 12. au serviteur du patriarche et rapporté par lui :

I
388 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

cette dernière interprétation s'applique mieux ii d'antres enfants. Mais il est beaucoup plus sim-
Rébccca. Ce qu'avait dit Abraham n'avait pas ple d'admettre qu'un vieillard ait pu engendrer
efïectivement Kébecca pour objet, mais une avec une fenune jeune; ce qui était impossible, à
femme quelconque de sa tribu ou de sa parenté; moins d'un miracle, à un vieillard imi à une
et dans l'un et l'autre cas, le serviteur devait fenune âgée, eu égard surtout uon-seidement
être déchargé de son serment, s'il n'obtenait pas à l'âge, mais encoreàlastérélité de Sara. Qu'un
ce qu'il demandait. Or on ne parle pas ainsi, homme d'un âge avancé, et comme dit l'Ecriture,
quand on prophétise (pielque chose. Car la cer- plein de jours, puisse être appelé ancien, presbij-
titude est une condilion de la prophétie. ter on |)eut le conjecturer de ce qu'Abraham fut
LXVIII. (Ib wiv, (iO.j Adieux fatis à Rébecca appelé de ce nom après sa mort. Tout vieillard
par ses frères. —
Quand les frères de Rébecca lui est donc un ancien, mais tout ancien n'est |)as
disent à son départ « Tu es notre sœur; sois la
: un car on désigne ordinairement ainsi
vieillard :

« la mère de mille milliers d'enfants; que tapos- l'âge voisin de la vieillesse ; aussi, dans la langue
« térité possède l'hérdage et les villes de ses en- latine, du mot vieillesse, seneetiis, est venu senior
« nemis, » ils ne prophétisent point ces souhaits ;
(]ui signifie ancien et ré|)ond à presbyter. En
magni(i(iues ne leur sont pas non plus inspirés grec, principalement dans le style de l'Écriture,
par l'orgueil mais ils ne purent ignorer
; les on dit par opposition Tzpzacvztpoi et vEWTspoi même
promesses que Dieu avait faites à Aliraham. (piand on parle d'hommes jeunes encore, comme
LXIX. (Ib. \\i\,G'6.) Ej-ercice (l'Isaac. Il — -est on dit parmi nous l'ainé, et le plus jeune. Ce-
écrit : « Isaac sortityers, le milieu du jour dans la pendant si Abraham eut, après la mort de Sara,
« campagne pour s'exercer. » Ceux qui ne con- dix enfants de Céthura, il ne faut pas juger ce
naissent pas le mot qui correspond dans le grec, trait de sa vie d'après la coutume et les idées

croient que cette expression exereeri marque un humaines, ni croire qu'il n'eut d'autre dessein
exercice du corps. Mais le grec porte àSoleoy-nacd ;
que de se créer une nombreuse postérité. On
or, à^nkinyùv s'entend d'un excercice de l'esprit pourrait intei'préter dans le même sens sa con-
et généralement en mauvaise part; souvent néan- duite envers Agar, si l'Apôtre ne nous avertissait
moins l'Ecriture prend ce terme en bonne part. que les choses sont arrivéesprophétiquement, et
Les uns le traduisent parc.ccir/cc; les autres par (jue personne de ces deux feunnes et de
dans la
causerie, verbiage, mot qui, dans la
sorte de leurs eid'ants les deux Teslaments se trouvaient
langue ne se retrouve jamais ou presque
latine, allégoriquement prédits '. Il faut donc aussi cher-
jamais employé en bonne part mais, comme je ; cher, une signification semblable ici (juoiqu'il ne
l'ai dit,i)resque toujours il est pris en bonne part s'en découvre pas facilement. Je vais dire néan-
dans l'Ecriture et je crois que cette expression moins celle qui me vient à l'esprit les présents :

signifie l'état d'une âme profondément absorbée faits aux enfants des concubines signifient, ce me

dans la méditation et y trouvant ses délices. Ceux semble, les dons départis, soit dans les sacre-
(jui entendent mieux le grec y verront peut être ments, soit dans les miracles, aux Juifs charnels et
un sens préférable. aux hérétiques, ces fils de concubines tandis que ;

LXX. (Ib. XXV, \.) Sur la polygamie . — « Abra- le trésor de l'héritage, qui est la charité et la vie
i< ham épousa ensuite une femme nommée éternelle, n'appartient qu'à Isaac, c'est-à-dire,
« Céthura. » Il y aurait ici sujet de demander s'il aux entants de la promesse.
y avait péché, surtout pour les Patriarches (]ui LXXl. ( Ib. XXV, 13. ) Pourquoi les noms des
s'appliquaient à propagei- leur race. Il ne faut eiifanis d'Israël d'après les noms de leurs (jénéra-
en moins que de l'incon-
effet soup(.'onner rien tiu)is ? —
Que signifient ces mots « Voici les :

tinence de la part d'un si grand homme surtout « noms des enfants d'Israël d'après les noms de

à l'âge où il était arrivé. Mais pourquoi eut-il « leurs générations?» On ne voit pas assez
des enfants de Céthura, après en avoir eu de clairement i)oiuquoi il est ajouté : « d'après les
Sara par miracle ? Nous en avons donné la raison « noms de leurs générations, » puisqu'il n'est
pins haut i. Toutefois, au sentiment de plusicuis fait mention (pie des enfants doid d'Israël est le

interprètes, le don (jui lut accordé à Abraham, l)ère, sans parler de ceux qui sont issus de ceux-
d'avoir eu des enfants dans un corps en quelque ci. Le sens de ces paroles : « d'après les noms de
sorte revenu à la vie, aurait longtemps persé- « leurs générations que les nations
» serait-il

véré, et lui aurait permis de devenir le père dont ils sont la souche portentleursnoms?Maisde
' Ci-dessus, question 30.';, ' Gul.U. IV, 22-Î4.
LIVKE 1. — UUESTIUNS Sl'l; I.A GENKSK, m»
(•('Ile miiiiiôiclfs noms (les ii.itiiiiis s('r.ii<'iil con- compléter celle ii-ponse l'aile pu- Dieu, i|uanil
loiincsaiix noms ilcsiMilliMlsd l>i-,ii-l, pluli'it ipic elle rapporte que le pi'uple d'Israël, c'est-à-dire
les noms de cesdernici-s, contbrrnos ù ceux dos Jacob, le plus jeune, surmonta les Idunii-ens, c'est-
nations (iiiin'cni'i'nl d'i>\isl(Mico(|M(*dans la snilo. à-dire la nillon issue d'Ksaù, et les rendit tribu-
Il laut donc notiM' ci'llc cxiircssion, cuv il est dil taires au temps de D.ivid. Les Iduméerri denieu-
iMicoro plus loin qu'ils lincid « ilmize priiirex rèrent longtemps en cet état, jusqu'au roiJoram,
a sriiiii leurs natious. » sous le règne duq lel ils se révoltèrent et se dé-
lAXII. fil). \\v,i'2.) Rrbeira consulte le Sei- livrèrent du joug des Israélites, conrormémcnt à
ifueur. — Il est ranporti' (|ne Ki-bec -a alla con- ce qu'avait pivdil Isaac lu-m^me, après qu'il
snKor le Soijiiienr, loisqiie ses onlanls tressail- eut béni le plus jeune à la place de l'aine : car
laient dans son sein. .Mais où est-elle allée '.
Il \\'\ il lit celte promesse à. l'ainé quand ensuite il le

avait pas alors de |>r()pliètes, |)as de prêtres non bénit '.

|)lns pour le service du talicrtiacle ou du temple 1A\IV. Sur ces mots Jacob
(Ib. xxv, -27., :

du Seiijneur. Où alla-t-elle donc, si ce n'est était un homme« Or Jacob, étail un


simple. —
à l'endroit où .Vhraliain avait établi un autel? « hom'nesim[)le,demeurantàlam lison. » Le mol

Cette (jueslionpiN'occupe justement. .Mais riicrl- grec àuXaiToç a élé traduit par le mot simple. Or,
lure se tait absolument sur la mmière dont elle iV/.y.'îTo; signifie proprement sans artifice; aussi

\ recul la n'ponse de Dieu. Serait-ce jiar l'in- plusieurs interprètes latins ont-ils tiad-iit : .sy/hs

termédiaire d'un préti'e? .Mais si ce prêtre exis- artifice, el ils disent ; « Jiicob était un homme .lans
tait, il serait incroyable qu'il ne fût pas nommé, « iirtifice, demeurant ii la maison. » C'est donc une

et qu'il ne aucune mention de


lût alors fait grande question de savoir conunenl sans artifice
(|uel(|ues prêtres. Serait-ce que par liasard, a|)rès ila|»u se faire donner par arlilice la bénédiction
avoir exprimé leurs vœux dans la prière, ils se j)aternelle. .Maisl'Ëcriture s'est servie de ce terme
livraient au sommeil en cet endroit, poui' y re- pour signifier ipiel'jue chose île grand. En effet,
cevoir des avertissements eu son>;e ? Ou bien ce ({ui nous conduil surloul à découvrir des
Melcbisédech, cet être si pailait que plusieurs choses spirituelles dans cei)assage, c'est précisé-
ont mis en doute s'il lût un homme ou un anfre, ment que celui qii usa d'artifice n'en était point
\i\ait-ii encoreàcette époque ? Y :i\nit-il, même capable. Nous avons suffisamment développé,
eu ce teiups-là,des hommes de Dieu par qui on dans un sermon adressé au peuple, notre senti-
pût interroger le ciel? Quoiqu'il en soit de ces ment à ce sujet 2.
hypothèses, yen eùl-il quelque autre encore qui LXXV. (Ib. x.xvi,i.) Famine arrivée au temps
aurait échappé à ma mémoire, il est certain que d'Isaac. — « 11 arriva une famine en ce pays,
riîcrilure ne peut mentir, quand elle dit que « outre celle qui arriva auparavant au temps
Hébecca alla consuller le Seioueiu-, el que le Sei- « d'Abiaham ; et Isaac s'en alla à Gérare, vers
gneur lui réi)ondil. < Abimé.ech, Eu quel temps,
roi des Philistins.»
LXX.I11. ,Ib. xxv, :23.) Sens nujstiqne de la ré- demande-ton? Est-ce après qu'Esaii eut vendu
ponse faite à Rébecca. — Le Seignem- répondit à son droit d'aînesse pour mi repas de lentilles ?
Rébecca « Deux nations sont dans tes entrailles,
: Car, après le récit de ce trait vient celui de la

« et deux peuples sortant de ton seui seront di- famine. Ou bien, conjme il arrive souvent, le
« visés, et l'un de ces peuples l'emportera sur narrateur ne reprend-il pas son sujet où il l'a

'< l'autre, et l'aine sera assujetti au plus jeune. « laissé,après avoir parlé du fils d'Isaac et du
L'ainé, suivant le sens spirituel, est laligm^e des plat de lentilles ? Ce qui porte à le ci'oire, c'est
hommes charnels, et le plus jeune, la figure des qu'on retrouve ici le même Abiuiélecb, qui avait
hommes spirtuels, parmi le peuple de Dieu car, :
déjà aimé passionément Sara; on revoit aussi le
dit l'Apùtre, i ce n'est pas ce qui est spirituel favori et le chef de l'armée de ce prince, dont il

« qui vint d'iiboid, mais ce qui est animal; ce qui fut alors fait mention pouvaient-ils être encore
:

« est spirituel vint ensuite '. » Ces paroles s'en- en vie ? Quand Abimélech devint l'ami d'Abra-
tendent encore en ce sens qu'Esaii lii^ure le peu- ham, pas encore né,
Is.iac n'était lis il étail déjà m
ple aine de Dieu, c'est-à-dire les Israélites selon la promis. Supposons que cette alliance eut lieu un
chair, tandis quo Jacob ligure sa propre descen- an avant la naissance d'Isaac. Isaac eut ses fils
dance spirituelle. L'iiistoire vient à son tour à l'âge de soixante ans ; or, ceux-ci étaient des

' I Cor. XV, 46. 1


Oenése, xxril.W. - ' Scioion iv, n'. 15-24. lom. vi.

S. Alg. — ToM. IV 31
390 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

jeunes gens, lorsque Esaii vendit son droit d\ii- des malédictions qui retomberont sur le parjure.
nesse supposons qu'ilsa vaient alors en\ iron
; vi ngt Il faut observer que tel fut le sens des paroles em-
ans, à l'i'poqiiedecet échange Isaac avait quatre- ployées par le d'Abraham, dans son
serviteur
vingts ans. Admettons depliisqn'Abiniélccli était discours à ceux dont il reçut une épouse pour son
jeune, quand il aima la mère d'isaac et devint maître Isaac.
l'ami d'Abraham Isaac pouvait donc être cen-; LXXVIIl. (Ib. \\\i, di.) Le nom de jurement
tenaire, si ce fût après le marché conclu entre ses donné au puits creusé par Isaac. Pourquoi est- —
fils dans cette contrée, pressé
qu'il se transporta il écrit que les serviteurs d'isaac étant venus
par la lamine. Rien par conséquent n'oblige à lui dire « Nous avons creusé un puits, et
:

penser que le départ d'isaac pour Gérare est « nous n'avons pas trouvé d'eau, » Isaac don-

rapporté par modede récapitulation. Mais comme na à ce puits le nom de jurement : Serait-ce
il est dit qu'lsaac demeura longtemps dans ce que, nonobstant le sens historique, il faut dé-
pays, qu'il y creusa des puit'^, à l'occasion des- couvrir ici quelque sens spirituel ? Car, à la
quels il y eut des contestalions, et qu'il y devint lettre, il n'y a nulle convenance d'appeler un
fort riche il serait étonnant que ces circonstances
; puits jurement parce qu'on n'y a pas trouvé
ne fussent pas antérieures à la vente du droit d'eau. Il est vrai néanmoins qu'au sentiment de
d'aînesse par Esaii. Elles auraient donc été passées quelques autres interprètres, les serviteurs d'isaac
sous silence, pour permettre au récit de parler ont plutôt annoncé qu'ils avaient trouvé de l'eau :

d'abord des fils d'isaac jus(|u'à l'endroit où il est mais, même dans cette hypothèse, pourquoi
question du plat de lentilles. donner au puits le nom de jurement, quand au-
LXXVl. (Ib. XXVI, 12, 13.) Isaac béni par le cun serment n'avait été fait ?
Seigneur. —
Le Seigneur le bénit, et il fut un
•< LXXIX. (Ib. xxvii, l-l".) Jacob béni à la place
« homme remarquable, et eu avançant il de\e- d'Esaïi. —
Sur le point de mourir, Isaac, cegi"and
« grand encore jusqu'à ce qu'il devint
nait plus patriarche, demande à son fils, en retour d'un
« extrêmement puissant. » La suite nous ap- bienfait considê.'able, le fruit de sa chasse et le
prend que ces paroles relatives à Isaac se rap- mets qu'il aime, puis lui promet sa bénédiction.
portent surtout à la félicité terrestre. Car l'écri- Nous croyons que tout cela n'est point sans ren-
vain décrit ensuite les richesses qui firent sa fermer un sens prophétique surtout parce que ;

grandeur et dont Abimélech s'énuit r.u point de sa femme s'empressa de faire recevoir cette bé-
craindre son voisinage, parce que sa puissance nédiction au plus jeune, qu'elle chérissait, et que
pouvait lui être funeste. Quoique ces choses ca- le reste du récit excite beaucoup à concevoir ou à
chent un sens spirituel, cependant, avant de les rechercher des chosesd'un ordre plus relevé.
rapporter dans le sens littéral, l'Écriture observe LXXX. (Ib. xxvu, 33.) L'extase d'isaac. — Ce
« Qu'il fut béni du Seigneur. » Elle veut nous que portent les exemplaires latins : « Isaac fut
faire bien comprendre que ces biens temporels « saisid'une très-grande stupeur, » les exem-
eux-mêmes ne peuvent venir, et qu'ils ne doi- plaires grecs les rendent par ces mots « Isaac :

vent être attendus que de Dieu seul, lors-même fut jeté dans une extase très-grande, termes qui
qiùls sont l'objet des désirs des hommes faibles font concevoir une émotion si profonde qu'elle
dans la foi : afin que celui qui est fidèle dans produisitune certaine surexcitation d'esprit.
les petites choses t aussi dans les
le soi grandes ;
le sens propre du mot extase. Et
Tel est en effet
et que celui qui est fidèle dans les richesses d'i- comme elle arrive d'ordinaire dans la révélation
niquité, mérite aussi de parvenir à la vérité, se- des grandes choses, il laut se persuader qu'lsaac
lon ce que dit le Seigneur dans riivangile '. Il reçut alors l'axertissement intérieur de confirmer
est dit également d'Abraham que ses richesses la bénédiction donnéeàsonplusjeune fils, quand
furent un bienfait de Dieu. Ce récit compris avec celui-ci était, ce semble, plutôt digne de la colère
piété, ne sert donc pas médiocrement à édifier la de son père pour ra\oir trompé. C'est ainsi que
foi sincère, lors même qu'on n'en pourrait dé- pour prophétiser ce grand mystère qui est, dit
gager aucun sens allégorique. l'Apôtre, dans le Christ et dans lÉglise, et de dire:
LXXVn. (Ib. XXVI, 28.) Sens du mot malédic- « Ils seront deux dans une seule chair, » Adam
tion. — « Qu'il y ait entrenous et toi malédic- fut ravi en extase '.

'< tion, » c'est-à-dire, un serment accompagné LXXXI. (Ib. xxvn, 42.) Comment Uébecca con-

l.ur. \Ti. 111. I


Genèse, 11,21-24 Epllis. ïl, 31, 32.
;
LIVUK I. — UULSTIUNS Slli LA (iK.NKSK 391

uut-fUf It's fh'ssi'iiiit mt'intiifiK (/'/•.'.s(/i(? — Citiii- maisMaisonde Dieu, pour signifioi- que là devait
incnt liiri'iit aimoiicoes ourapiiarlées à Uobecca êtreunjonr une maison consacrée an Seigneur.
los menaces ilo mort proiioiioécs par Esaii contre LXXXVl. (Ib. xxi\, 10.) // faut suppléer
sonfi'ire'/llli'sraisaili'ii lui-même, dit l'IuTilnre. ce que rKcrUureueditpoint. Hachel \int avec —
iN'esl-ce pas une pieu\e ipie tout leur était alors les brebisdeson père, et, dit l'Ecriture, Jacob
révélé d'en haut? La conduite de Uél)ecca, taisant ayard vu Kachel,lillede Laban, frère de sa mère,
bénir son plus jeune lils à la place de l'ainé, lon- s'ai)pro(ha et ôla l'ouverture du
la pierre de
cliu donc à un grand mystère. Ituits. Ici plulôl (pie de soulever
aucune (|uestioii
IAX.\II. (Ib. xvvui, -2.) Ilsn'cldicnt iKisiijiiorcs il vaut mieux obscrverque l'Ecriture omet quel-

d'Isaiic. — Lesexemplaireslaliiisporient (pi'lsaae que chose (pie iiosinlelligences doivent suppléer.


dit à son Va en Mésopotamie, dans la
lils : « On comprend ene(l'et([ue Jacob demanda à ceux
« maison de Bathuel, |)ère de ta mère et lu prends avec qui il s'entretenait d'abord, quelle était celle
« une femme pour épouse. « l^es exemplaiirs qui venait avec ses brelsis et (pi'ils répondirent
grecs ne disent |)as y'n mais l''uis, car tel est
: ;
(pie c'était la de Laban. Jacob évidemment
(ille

le sens de àz-j^px^i.. On compi-end de là qu'lsaac ne la connaissait pas mais l'Ecriture, enpassant


;

connut aussi ce cpic son lils l']sai'i disait de son sous silence la demande de l'un et la réponse
IVèie en lui-même. des autres, a voulu que nous les suppléiins.
LXXXIII. (Ib. xxvm, 16, 17.) Echelle de Jacob, LXXXVll. ( Ib. XXIX, V{,{-2.)Surle baiser que

figure du tabernacle. —
« Et Jarob se leva ai)rès Jacob donne ii Rachel. — Il est écrit : « Jacob
« son sommeil, et il dit Le Seigneur est en ce :
« baisa Rachel, et élevant la voix il pleura; et il

« lieu-ci et je ne le savais pas ; et il frend)la et il « lui dit qu'il était son frère el qu'il éla t fils de
« Que ce lieu est terrible! c'est certainement
dit :
« llébecca. » C'était la coutume, surtout dans la
« la maison de Dieu, et c'est la porte du ciel. " belle simplicité des temps anciens, de se baiser
Ces paroles renlérment une prophétie, car là entre parents et parentes, et aujourd'hui encore
devait être le tabernacle, que te Seigneur fit cet usage se prati((ue
dans beaucoup de pays.
dresser parmi les hommes au sein de son pre- Mais on peut demander comment Rachel accepte
mier peui)le. 11 nous faut entendre par le mot le baiser d'un inconnu, puisque Jacob ne lui ré-
porte du ciel, que le tabernacle est pour les hom- véla sa parenté qu'après l'avoir embrassée. 11 faut
mes de foi comme une avenue qui les conduit au donc recourir à une de ces deux hypothèses : ou
royaume des cieux. queJacob, sachant déjà qnielleétait, se précipita
'lXXXIV. (Ib. xxvm. 18.) Pierre de Jacob. — à son cou avec confiance, ou que revenant sur ses
Lorsque Jacob dressa la pierre qu'il avait mise pas, l'Ecriture raconte, après, ce qui était déjà fait,

sous sa tète, en fit un autel et l'arrosa d'huile, il je veux dire, que Jacob s'étaitdéjà fait connaître
n'iniilaen rien la conduite des idolâtres ; car ni à elle. Ainsila même Ecriture raiiporte comment
dans ce temps-là, ni dans la suite, il ne visita cette Dieu forma le paradis, après avou* dit que Dieu
pierre pour l'adorer ou lui sacrifier mais ce fut ; le planta et y plaça l'homme qu'il venait de
le monument d'une [trophêtie, très-significative créer, llya une foule d'autres traits qui évidem
relative à l'onction du Christ : aussi le nom de ment ne sont point rapportés dans l'ordre où ils
Christ vient de Xfjiofxa, onction. se sont accomplis. '^S*

LXXXV. (Ib.xxvni, 19.) Maison de Dieu. — ^< Et LXXWlll. (Ib. XXIX, 20.) Comment Jacob trou-
« Jacob appela cet endroit Maison de Dieu, et Vi.it court le temps de son servicepour Hachel. —
a Ulammausétait auparavantlenomdela ville. « 11 est écrit : « Et Jacob servit sept ans pour Ra-
Si l'on entend qu'il se soit endormi près de la « chel et ce temps lui paraissait court, par-
ville, il n'y a point de difficulté à répondre ;
« ce qu'il l'aimait. «Comment l'Ecriture fait-elle
mais si c'est dans la ville, il semble étonnant cette réflexion, puisque d'ordinaire les amants
qu'il aitpu y ériger un monument. Quant au vœu trouvent plutôt long temps qui est de peu
le

qu'ilémet,silest heureux dans l'alleret le retour, de durée ? C'est donc pour signifier que l'amour
et à la promesse qu'il faitde donnerla dime àla rendait légères et supportables à Jacob lesfatigues
maison de Dieu, qui devait s'élever en cet endroit, de son service.
c'est l'annonce prophi'ticpie de la maison de Dieu, LXXXIX. (Ib. XXIX. 27-31 .)Quand'Jacob épousa-
où, de retour, il offiit lui-même au Seigneur un t-il Bachell — Si
l'onmetpeu d'attention dans la
sacrifice. 11 n'appelle point celte pierre Dieu, lecture de ce trait on pensera qu'après avoirépousé
39-2 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

Lia, Jacob servit encore pendant sept années pour fortune , sans être pourtant régardée comme une
Raclielehiu'ensintpiiréponsa, iMaislelIe n'est pas divinité, doit être prise pour ce qui semble arriver
la vérité; Lalian lui dit: «Aciiovc donc la semaine de par hasard, tandis que tout ce qui pai ail l'effet du
« celle-ci et je te donnerai l'autre encore pour hasard est soumis par Dieu à des causes cachées; de
« l'ouvi-age f|ue lu feras chez moi pendant sept là ces expressions que personne ne peut retirer du

.< autres années. » Ainsi ces paroles : " Achève langage, par exemple : peut-être, par hasard, par
« la semaine de celle-ci, i se rapportent à la accident, fortuitement. Cosiainsiencore
que dans
célébration des noces, dont les fêtes durent or- on dit zxy», peut-être, comme on dit riyr,,
le gi'ec

dinairement sept jours. 11 dit donc Passe : les sept hasard; ou bien Lia s'est exprimée ainsi, parce
joins de noces de celle que tu as épousée, puis je qu'elle avaitconservé cette habitude des païens,
t'accorderai l'autre pour ce que tu feras encore car ce n'est point Jacobquia employé ce terme et
chezmoipendantsepl anlresannées. 11 est dit en- on ne peut le considérer comme autorisé par le
suite . « Jacob lit cela, et passa la semaine de patriarche.
« Lia, c'est-à-dire les sept joursdeses noces, elLa- XCII. (Ib. xxx,30.) Obserrerle sensdesparotes de
« ban lui donna sa fiîle Rachel pour épouse. Et l'Ecriture. —
« Le Seigneur, dit Jacob, t'a béni dans

« Laban donna pour servante à Rachel, sa fdle, « ma démarche. » Il faul observer et noter avec
« sa servante Balla, et Jacob s'approcha de Ra- soin le sens des Ecritures, et ne pas regarder
« chel. Or, il aima Rachel plus que Lia, et il ser- comme une espèce de devin celui qui tenait un
« vit pendant sept autres années.» Il est donc pareil langage. Comme on serait loin du sens !

clair que c'est apiès avoir épousé Rachel, qu'il « LeSsigneur l'a béniJan-îma démarche » signi-
servit ponrelle sept anlresannées. Il eût été trop fie en effet depuis mon arrivée, et Jacob en rend

dur et trop injuste en effet de prolonger- encore grâces à Dieu.


sept aulres aniiées sa d-cépiioii, cl de lui livrer XClIl. (Ib. XXX, 37, 4!2.) Sur l'industrie de Jacob
seulement alors cel e à la [uelle il avait droit en pour varier la couleur des troupeaux. A propos —
premier lieu. Que ce fiif bien la coutume de cé- de ce que fit Jacob, quand il (")la l'écorce des
k?brer les noces pendant sept jours, le livre des branches en arrachant ce qui était vert pour
,

Juges le fait voir aussi dans la personne de Sam- qu'elles parussent tachetées de blanc, afin qu'an
son. 11 donna un festin pendant sept jours '. moment delà conception, lorsque les mères boi-
EtrEcrifure ajoute que tel était l'usage des raient à l'eau descanaux et regarderaient sur les
jeunes gens. Or, Samson fit ce festin pour ses branches celte variété de couleurs, les petits des
noces. troupeaux devinssent aussi tachetés; on dit que
XC(Ib. \xx,3,9.) Epouses et concubines. — Par- beaucoup de faits de même nature se produisent
mi les femmes que nomme l'Ecriture, on ne dis- dans les petits des animaux. On rapporte même
tingue pas facilement les épouses d'avec les con quelque chose de semblable d'une femme, et ce
cubines: ainsi Agar est appel ie d'abord épouse fait est décrit dans les livres d'Hippocrate ce ,

puis concubine ; ainsi encore Céthura 2, et les médecin si habile et de la plus haute antiquité.
servantes que Rachel et Lia donnèrent h leur Une femme donc ayant mis au inonde un en-
ma^s. N'est-ce pascpie dans le style de l'Ecritu- fant d'une rare beauté, qui n'ayant de ressem-
re toide concubine est nonnnée épouse et non blance ni avec sou père et sa mère ni avec sa
toute épouse concubine ; -à-dire que Sara et
c'est famille, allait être, sous le soupçon d'adultère,
Rébecca, Lia et Rachel, ne peuvent recevoir le nom condamnée au supplice. Mais le médecin que
de concubines; landis que Agar et Cétbiu-a, Ral- nous venons de nommer trancha la question, en
la etZelfa, furent à la lois épouses et concubines;' donnant le conseil de rechercher s'il n'y avait
XCI. (Ib. \\\,H.)Surla fortune. — Les exem- pas dans la chambre à coucher quelque peinture
plaires latinsportent(|u'à la naissance d'un (ils de ressemblante on la trouva, et cette femme fut
:

Zellà, Lia dit: «Je suis devenue heureuseoii bien- déchargée du soupçon. Revenons à ce que fit
« heureuse;» le grec porte eÙTÛyr;, ce qui marque :
Jacob on ne voit nullement de quelle utilité
:

de préférence la bonne fortune. Deslecteurs inin- fut, pour la multiplication des animaux tachetés,
telligentsconcluent de là (jiie cet homme adorait la réuuiondc troisbranchesde différents arbres;
lafortune ou que l'autorité des divines Écritures a peu importait pour ce résultat que les branches
consacré ce mol. Maisde deux choses, l'une ou la :
tachetées provinssent d'une seule ou de plusieurs
'.luges, XIV, 10. — î Geri. XVI, 3i xxv, l, 6. — ^ Ib. xïx,3,4,9. espèces d'arbre, puisque la variété des couleurs
LIVRE I. — QUESTIONS SUK LA GENÈSE. 393

estait la siMilt' donc


onndifion nôrcssaiiv. Il faut « ma récompense dedix agneaux » el
a changé ;

voir une [iroplii'lli'dans cet l'I un sens (inurc ensuiti! àLaban lui-même " Tu m'as frustré :

aclc tjno, sans aucun donlo, Jacob lit en qualité « sur ma récompense de dix jeunes brebis, » Ja-

de propliùte et c'est pour cela, (|n'il ne faut pas


: cob ne veut donc pas faire entendre que cetti;
l'accuser de supercherie. On doit croire on elTel, déloyauté i)ro(ila à son beau-père: il <lil en effet
qu'il ne s'est condnil de celle inanièr(' (pie d'après que Dieu lui vint en aide contre Laban pour
une l'ovclalion tonlespiriluede. MainlenanI, pour empêcher ce résultat.
ne pas violer la justice, d'aiilres inlerpiètes l'ont Les dix agneaux ou les dix jeunes brebis sont,
fait voir pins au long,
(las les bran- il ne mettait dans sa manière de parler, les dix saisons, où
ches à rc|)0(jue de seconde portée des brebis.la les brebis dont il avait la garde, donnèrent leurs
C'est ce que disent les Septante en peu de mots petits pendant six ans. Car elles mettaient bas
et avec cpielipie obscinàté : << .^|)rès (ju'elies di'ux fois raniu'e; or," la première année qu'il

« avaient mis bas, il ne plai,ail plus les bran- Iraila avec; Laban, accepta de garder les
cl qu'il
« ches, » ce qui veut dire : après qu'elles avaient troupeaux pour la récompense convenue, les bre-
mis bas pour la iireinière fois : il faut donc en- bis ne donnèrent des agneaux (ju'mie fois, à la
tendre qu'il ne [ilaçail pas les i)ranclies, quand lia de l'année, la première porl(!e étant déjà ve-

les brebis devaient donner une seconde portée, nue, quand l'engagement fut contracté. La môme
poui- éviter de recueillir à lai seul tous les pe- chose arriva la sixième cl dernière année ; quand
tits : ce qui eût été une injustice '. les brebis eurentdonné une première portée,
XCIV. ( Ib. .\xxi, 30. ) Les dieux Hommes- paiir il fallut partir, avant qu'elles eussent donné la

la première fois. — « Pourquoi, dit Laban, m'as- seconde. La première cl la dernière année ayant
« tu (lérol)é mes Dieux ? >i De là vient peul-étre produit sous la garde de Jacob deux portées d'a-
qu'il se disait instruit que sa tille de l'aNcnir et gneaux seuiemeut, c'est-à-dire une pour chaque
parla de la bonne forliuie. Observons que c'est anni.'c, et les quaire années intermédiaires ayant
ici pour la première fois (jue nous voyons men- donne cliacune deux portées, cela l'ail dix en tout.
tionnés les dieux des nations : l'Ecriture jusque- 11ne faut pas s'étonner quil désigne ces dix sai-
là n'a nommé que Dieu. sons par le nom des agneaux qui vinrent à ces
XCV. (Ib. XXXI, 41, l.)Siirlii ciinduite de Luban époques; c'est comme si l'on disait pendant :

envers Jacob relatireinent (iitx troupeaux. — Que tant de vendanges, pendant tant de moissons,
signilie ce que dit Jacob de son beau-père : « Tu pour marquer le nombre des années c'est ainsi ;

« m'as frustré sur ma récompense de dix jeunes qu'un poète a dit Après quelques épis ', enten-
:

« brebis? » Quand et comment cela arriva-t-il, dant par épis les moissons, et par les moissons
l'Écrilure ne le dit mais le lait rapporté par
[joiiit : des années. Qi:ant à la fécondité des troupeaux
Jacobestanivécerlamement:cariltint le même de ce pays, elle est telle qu'ils donnent, comme
langage à ses femmes, quand II les fit venir dans en Italie, deux portées dans un an 2.
la campagne. Se plaignant en effet de leur père, XCVI. (Ib. XXXI. 4o.) Pourquoi on élevait des
il leur dit entre autres choses : « Il a changé ma ré- pierres monumentales. —
« Alors Jacob prit uiie

« compense de dix agneaux. » Ainsi, chaque fois " pierre, et en fit un monument. » II faut avoir

que portaient les brebis, Laban, voyant ([ue les soin de remarquer qu'on élevait ces monuments
petits venaient tels qu'il était convenu de les en mémoire d'un événement quelconque ce :

donner à Jacob, changea par supercherie les con- n'était pas pour leur rendre des honneurs di-
ventions et voulut qu'à la portée suivante ce qui vins, mais pour \ attacher un souvenir.
serait de couleurs échût en partage à
tlifférentes XCVII. ( Ib. XXXI. 4", 48. ) Monceau de pier-
Jacob. Celui-ci ne mettant plus alors les bran- res élevé par Laban et Jacob. — Le monceau de
ches de nuances variées, les agneaux ne nais- pierres élevé par Laban et Jacob reçoit de chacun
saient plus tachetés, mais d'une seule coideur, et d'eux un nom quelque peu différent Laban ;

Jacob les emportait, en vertu de la nouvelle con- l'appelle Monceau du témoiynaye: et Jacob Mon-
vention. A cette vue, Laban changeait encore ceau témoin. Au dire de ceux qui entendent le
frauduleusement les contlitions, et ce qui était syriaque et l'hébreu, cette différence vient de la
tacheté devait revenir à Jacob. Encore alors les propriété de chacune de ces langues. Il arrive
petits naissaient tachetés, grâce aux branches de souvent en effet, qu'une langue n'a pas le même
ih\ erses coiilem-s. En disant à ses fenunes « U : mot qu'mie autre pour signifier la même chose,
'
II Ketract. cil. 55. n» 1. I
Virg. Bucol. Eglog. i, 70. — ' II. Rét. ch. 55, n" 1.
394 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

et qu'on se sert alors d'un mot qui approche néanmoins tout ce qui est possible à l'homme pour
pour le sens. Aussi est-il dit plus loin « C'est : protéger notre vie, dans la ci'ainte qu'en négli-
« pour cette raison qu'on a appelé ce lieu Le : geant ces précautions, nous ne soyons trouvés
« monceau rend témoignage, » ternie moyen qui coupables de tenter Dieu. Il fautenlin après cela
convient aux deux langues, dont l'une dit Mon- : donncrson attention à cesantres parnlesde Jacob:
ceau du ti'moigndqe, et l'autre: Monceau ténwin. « Dieu de mon père Abraham, dit-il. Dieu de
XCVIII. ( Ib,' XXXI, 48, 49. ) Ordre interverti. — « mon père Isaac, Seigneur, qui m'avez-dit Re- :

Comment Laban dit-il en parlant à Jacob « Ce : « viens dans le pays de ta famille et je te ferai
« monceau est témoin, et ce monument est té- « du bien, vous méritez ma reconnaissance pour
« moiu; c'est pourquoi il est appelé Le mon- : « toute la justice et toute la (idélitéque vous avez
«ccau rend lémoig^nage; et la vision qu'il a •< exercéeenversvotre serviteur. J'ai passé ce fleuve
« montrée Que Dieu juge entre toi et moi »
:
'!
« du Jourdain, n'ayant que ce bâton, etmaintenant
L'ordre des paroles ne serait-il pas celui-ci : « me voici avec ces deux troupes délivrez-moi :

« Et que la vision que le Seigneur a montrée juge « de la main de mon frère, de la main d'Esaii ;

« entre toi et moi / » car Dieu lui avait défendu « car je crains qu'en venant il ne me tue et les

dans une vision de aucun mal à Jacob.


taire « mères après leurs enfants. Mais vous m'avez
XCLS.. ( Ib. Que signifie: Personne
xxKi, oO. ) ndit: Je te bénirai, et je rendrai ta race pareille
n'est avec nous? —
PourquoiLaban dit-ilensuite : « auxsables delà mer, dont la multitude est in-
« Vois, personne n'est avec nous? » Veut-il dire « calculable. » En ces paroles apparaissent à la fois

aucun étranger? ou bien, est-ce par égard pour et l'inlirmité de l'homme et la contiance de la
le témoignage de Dieu, qu'ils devaient avoir en piété.
si haute estime, qu'il eût été inconvenant d'a- cm. 'xxxii, 20.) Les présents de Jacob it Esai'i.

jouter à ce témoignage celui d'une tierce per- — Les exemplaires latins portent ce mot relatif à
sonne ? Jacob : « Car il disait : J'apaiserai son visage,
C. (Ib. XXXI, 53, 42. ) Crainte d'Isaac. — « Or, « avec les présents qui le précédaient. » Quand
<< Jacob jura par la crainte de son père, Isaac. » l'auteur du livre dit de Jacob : « Car il disait :

Evidemment, c'est par la crainte d'isaac pour «J'apaiserai son visage, «jusque-là on comprend
Dieu, cette mèmL' crainte qu'il a déjà exaltée que c'est Jacoî) qui parle maisles mots suivants ; :

plus haut, quand il a dit « Le Dieu de mon : « avecles présents qui le précédaient «sont unead-

« père Abraham, et la crainte de mon père dition de l'écrivain cela signifie Avec les pré- : :

« Isaac. » sents qui précédaient Jacob, « ildisait j'apaiserai le

CI. (Ib. XXXII, 2.) Le camp de Dieu. — Le camp « visage de mon frère. » Voici donc la liaison des
de Dieu que vit Jacob dans son chemin, est, à paroles de Jacob : < J'apaiserai son visageet après
n'en pas douter, la multitude des Anges : elle « celaje le verrai, et il m'accueillera peut-être
s'appelle en effet, dans l'Ecriture, l'armée des «favorablement . » Ainsi avec les présents qui le
Anges. précédaient sonl des paroles intercalées dans le
Cil (Ib. XXXII, ()-l'2.; Crainte de Jacob devant texte par l'écrivain.
Esaù. — Quand on annonce à Jacob que son frère Cl\.(lh,\x\n,W.)Jacobboiteuxetbéni.—iACob
Aient au-devant de lui avec quatre cents hom- désire la bénédiifion de l'Ange qu'il a vaincu

mes, ilcsl troublé, hors de lui même et saisi d'une dans le une grande prophétie qui
combat. C'est
frayeur extrême. Ilcroitbien fairedanss on trou- regarde Ce qui nous avertit qu'il y a
le Christ.

bledc partager srifaniille cl de la disposer en deux un sens mystérieux, c'est que tout homme vent
bandes. On peut demander ici comment il eut foi être béni par plus grand que soi. Comment donc
aux promesses divines, puisqu'ildit « Si mon frè- : Jacob veut-il être béni par celui qu'il a surpassé
« revient à détruire la première bande, la seconde danslalutte? Jacoba prévalu, ou plutôt a sem- il

«pourra échapper» ? Mais Dieu ne pouvait-il per- ble piévaloircontre le Christ, quand les Israélites
mettre à Esaiide meltre le désordre dans le camp ont crucifié le Christ. Cependant il est béni par
de son frère, afin de se montrer lui-même après lui lorsque d'autres Israélites ont cru en Jésus-
cette épreuve, de délivrer Jacob et d'accomplir ce Christ. De ce nombre était celui qui a dit « Je :

qu'Ului avait pr()mis?Nousavonsaussi besoin de « suis moi-même Israélite, delarace d'Abraham,


cet exemple pour apprendre que tout en mettant « de la tribu de Benjamin « '. C'est donc un
notre contiance en Dieu, nous devons faire '
Kum. ,\l. 1.
LIVRE I. — Ol'ESTIOXS SUR LA GENÈSE. 398

seul et niôinc hxcoh qui ('sl j'i la (bis l)oit('u,v ol bciii: CVIL (lb.x>cxiv,2,3.) Comment l'Iùriture donne
boiU'u.y dans loulc la ioiificur de sa cuisse, c'csl- lenom île Vienje Dina, déslidniirce jmr Sicliem.
ii —
à-dirc daiisia niidliliidi-dc ceux de sa race doul l'oiu-ipioit'Kcriture dit-elle Sichem, (ils d'Em- : '.

il est dit : « Kt ilsoul Itoiléeu dehors de vos seii- « mor, l'^véeu, prince du pays, vit Dina.litlede Ja-
« tiers • dans feux dont il est dil « l'ar un
; » /»('»/, : « col), il l'enleva et il doruiit avecelle el l'outragea;
'I clioixilelauràce, il eu reste t\u\ sont sauvés. » ' < et il lut allaché de cu-nr à Dina, (llle de Jacob,
CV. (11). xxxni. 10.) Surces paroles ;
./'((/ vu ton '1 et il l'aima vierge el il parla àcette vierge sui-
visage comme (iitnnd on voit le visage d'un Dieu. — « vant les sentimentsqu'elleéprouvait / 1) Comment
Que signilienl ces paroles de .laeoh à sou frère : l'appeler r/c/f/c, si déjà il avait dormi avec elle
(. (l'est pounpioi j'ai \u Ion visaj;e couuue ipiaud el ra\ail deshonorée? Me serait-ce point parce
•< ou voit le visage d'un Dieu ? » Un esprit Ireui- (piedans l'hébreu le mol vier-ge désigne l'iige;-
lilant et é()erdu peut-il pousser jusipi'à ce i)oiul ou plidùl parce (|ue re\enard sur le passé, l'E-
eu uu eeitain sens Jut^cr
l'adulatioir.''(tupeut-()u crilure raconte a[)rès coup, ce (pu avait eu lieu
ces paroles excin|)tesdc péché? De ce que par ha- antérieurement ? Sichem put eu effet s'attacher
sard lesdénious oui étéappelésles dieux des ua- d'abordà Dina, l'aimer vierge, et lui parler com-
lious, il ue laudrait [)eul-ètre pas portei' jiour me il convient aune vierge et [)uis dormir avec
cela un jugeineutdéravorable à l'honunede Dieu. elle et l'outrager.

Car il ne dil pas Couuue si je voyais le visage


: CVlll. (Ib. xxxni, ri; xxxiv, 25.) Comment les
de Dieu, mais comme (juand on voit; or, cet ou enfants de Jacob ont pu faire tant de mal aux Si-
ne dcsigue personne en particulier et peut-être cliimitesl —Jacob s'eniretenautunpeu auparavant
ces mots sout-ils choisis dans le dessein de taire avec sonlrcrcEsaii appelle seslils des enfants, ce
agréer à Ksaii lui-même uu tel honneur rendu à que le grec exprime par ce mol nxidix; on
sa personne, et pour (jne cenx-mèmes ipii dou- peut demandercommentils onl pu faire uu mas-
neraieutà ces expressions une siguiticatiou dif- sacre cl un ravage si considérable dans la ville,
férente, n'accusent pas d'impiété celui qui les en mettant à mort, même au milieu de leurs
a prononcées. Sans doute aussi on peut voir la souffrances, ceux qui s'étaient circoncis à cause
preuve d'un bon C(Pur dans les paroles adressées de leur sœur Dina. Mais il laut observer que Jacob
à un Irère, car un bienveillant accueil avait fait demeura longtemps dansée pays et que pendant
disparaître toute crainte. Il peut se faire néan- ce temps sa fille et ses fils graiidirent.il est écrit
moins que Jacob ait donné ce nom h Esai'i dans en effet : « Et Jacob vint à Salem ville des Sichi-
le même sens que .Moïse fut appelé dieu de Pha- « mites qui est dans le pays deChanaan, en quit-
raon, et dans le sens de ces mots de l'Apôtre : « tant la Mésopotamie de Syrie el il s'établit à
(' Bien (ju'il y eu ait, soit
dans le ciel, soit sur « coté (le la ville el il acheta à Émmor père de
« la terre, qui sont appelés dieux et ([u'en ce , «Sichem, pour cent agneaux, la partie du champ
» sens il y ait plusieurs dieux et plusieurs sei- « où il établit sa tente, et il dressa là uu autel et

» « gneurs » 11 faut observer surtout que dans


'>.
« il invoqua le Dieu d'Israël. (3r Dina, fille de Lia et

le grec ce terme est ayoks- «;f/r/t'; or l'article s'em- « de Jacob, sortit pour faire connaissance avec les

ploie évidennnent lorsqu'ilest question du seul « filles de ce pays » etc '


. Voici donc ce qui res-
vrai Dieu. Le grec ici porte en effet mo'îWTrov sort de ces paroles : c'est que Jacob ue demeura
Seoù, et non 7rpô<îW7rov zov 0£où: la différence du point dans ce pays transitoirement, à la manière
sensest facilement saisie par qui entend et com- d'un voyageur, mais qu'il y acheta un champ, y
preuil le grec. établit une tente, y dressa un autel el par consé-
CVL (Ib. xxxni, 14.) Promesse inexécutée de quent y demeura un temps considérable. Quant
Jacob. — N'y eut-ilpas un mensonge dans la pro- sa fille, arrivée a cet âge où elle pouvait déjà se
ti

messe que fit Jacob à son frère, de [suivre les pas faire des amies, elle voulut faire connaissance
des siens dont la marche était lente et d'aller avec les filles des habitants de la cité et alors
ensuite le retrouver à Séir? L'Ecriture dit en effet arriva à son occasion cette scène de sang et de
plus loin qu'il n'y alla pas, mais qu'il suivit la pillage qui, je le pense, n'a plus besoin d'expli-
route qui le ramenait vers les siens. N'a-t-il cation. Car Jacob tlevenu extrêmement riche ne
pas promis avec sincérité, et après réflexion comptait pas autour de lui une suite peu nom-
changé ensuite de sentiment ? breuse ; et si ses fils sont désignés nommément
' Ps. ITII, 46.— ' Rom. XI, 6. —3 I Cor. viii, 5. Gen, xxxia, 18, 20 : xxmv, I.
39fi QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

dans cette circonstance, c'est parce qu'il étaient ses promesses envers Jacob et ses enfants?
les chefs et les auteurs de cette entreprise. GXllL (11). \xxv, ().) Clunujement de noms. —
CIX. (Ib. XXXIV, 30.) Mombredes personnes de « Or, Jacob vint à Luza, qui est la même que
le suite de Jacob. —
.lacob, redoutant la guerre « Bctiiel, dans la terre de Chanaan. » Observons
avec les voisinsde de Salem, attaquée par
la ville ici les trois noms déjà doimés à cette ville :

ses fils, dit : « Nous ne sommes qu'en petit noni- Ulammaiis, premier nom qu'elle portait, a-t-il
le

« bre, et ils se réuniront pour ni'accabicr. » été dit, lorsque Jacob y vint en se rendant en Mé-

S'il parle ainsi du petit nombre des siens, c'est sopotamie Betliel, nom (pi'il lin donna lui-
'
;

parce que la guerre pouvait lui venir de plusieurs même ''


et qui signifie .Maison de Dieu; et enlin
points à la fois, et non parce qu'il n'avait pas Luza, qu'on vient de rappeler. Ce ne doit fait

assez de monde poui' se rendre maître de la ville. pas étonner; car il arrive dans beaucoup de

IN'avait-il point dans le voyage partagé les siens pays, et pour des raisons
que des différentes,

en deux troupes? (leuves, bonnnes eux-


d'autres objets et les

ex. (Ib. XXXV, 1.) Apparitions de Dieu à mêmes, ajoutent à leur noms, ou en prennent
Jacob. —
« Or Dieu dit à .lacob : Lève-loi et mon- de nouveaux.
« te h Bethcl, demeure en cet endroit et
et : CXIV. (Ib. xx.w, 9, H}.} Sur le nom d'Israël

« dresse là un autel au Dieu qui t'apparut, lors- doïiné il Jacob. — Dieu apprarut encore à Jacob,
« que tu fuyaisdevanl ton frère Esaii. Pourquoi >> à Luza, et lui dit « Tu ne seras plus nommé :

Dieu ne dit-il pas Dresse là un autel pour jnoi,


: « Jacob, mais Israël sera ton nom. C'est poui' >>

qui l'apparus? Pourquoi dit-il « Dresse là un : la seconde lois que Dieu adresse ces paroles à

« autel au Dieu qui t'apparut? Serait-ce le Fils >. Jacob en le bénissant, et c'est ainsi qu'il con-
qui se lit voir à .lacob et le Père qui tient ce lan- firme la grande promesse attachée à ce nom.
gage? Ou bien ost-ce une manière quelconque Voici un fait remarquable ceux aiLxquels on :

de s'exprimer? a donné même une seule fois un nom nouveau


CXl.(Ib. XXXV, :2.j Amulettes de.'i idides. — ne [lurtent plus leur ancien nom; le nouveau
Sur le point de monter à Bethel, où un aidel qu'ils ont reçu est le seul absolument qui leur
devait être dressé par ses soins, Jacob dit à sa soit donné. Au contr dre, et durmt toute sa
maison et à tous ceux de sa suite « Jetez loin : vie, etdans la suite, Jacob porta son premier
« de vous les dieux étrangers qui sont au milieu nom, quoique Dieu lui ail dit à plusieurs reprises :

« de vous, etc. » 11 est dit encore plus loin: « Et « Tu ne l'appeleras plus Jacob, mais Israël sera

« ils donnèrent à Jacob les dieux étrangers qui « ton nom '. » Il s'ensuit donc que ce nom a rap-

« étaient entre leurs mains, et les pendants at- port à la promesse que Dieu fait, de se montrer
« tachés à leurs oreilles. » On demande pour- un jour autremeiU qu'il ne s'est fait voir aux
quoi : et les pendants-d'oreilles? S'ils servaient Patriarches. Alors il n'y aura plus de noms an-
comme des ornements, ils n'avaient point de ciens; car tout sera renouvelé, même dans le
rapport à l'idolâtrie : ne faut-il donc pas croire corps, et la vision de Dieu sera la suprême ré-
que ces pendants étaient des amulettes des dieux compense.
étrangers? L'Ecriture dit en effet que Rébecca CXV. (II). x\Lxv, il.) Quesiijnilie : Des iH'Ujiles

re(,'ut des pendanls-d'oreiiles du serviteur d'A- et des multitudes de peuples? — Il est dit dans les

braham : ce qui n'eût pas eu lieu, s'il avait été promesses faites à Jacob : « Des peuples et des
défendu de porter des pcnilants-d'oreilles connne « nuiltiludes des peuples sortiiont de toi. « Des
ornements. Les pend.uits-d'oreilles qui furent peuples selon la chair, et des nudtitiides de peu-
apportés, comme on l'a dit, avec les idoles, ples selon la foi : est-ce là le sens de ces expres-
étaient donc des amulettes des idoles. sions? ou bien chacune d'elles a-t-elle rapport
(;\ll.(lb. \\\\,5.) Cumment Dieu injit sur à la foi des gentils, dans le cas où le peuple
l'esprit des hommes. —
« Et la crainte île Dieu d'Israël selon la chair ne pourrait, à lui seul, être
se répandit dans les villes d'alenloui-, et l'on
<i
désigné sous le nom de peuples?
« ne [)onrsui\it puinl les enfants d'Israël. » Rc- CXVl. (Ib. xxxv, ïd-\o.) Jficob imitait-il les

inar((uous, à jjartir de cet endroit, couuneni idolâtres, en élevant des monuments? — « Dieu re-
Dieu agit sur l'esprit des liommes. Car à (jui '< monta du lieu où il s'élait entrelemi avec lui :

attribuer la crainte de Dieu répaiulue sur ces « el Jacob éleva, dans le lieu où il avait parlé
villes, si ce n'est à celui qui se montrait fidèle à I
Urr. .'cxvlll, W. — 2)l)id. x.xJlv. 15. - ' Hiid. .KXXll.aS.
LIVRE I. - QUESTIONS SUR LA GENESE. 397

(' avec Difu, un iiuiminit'iit do pionos, sur \c- elle eu sans interruption, un enfant chaque
« (|ucl il (illi'il (lu \iii cl r('|i;iiiilil de riiuilc; cl aiiU('e..Mais il est incroNable (pie des enlanis (h;

« Jacoi) appela Bcliu'l, le lieu où Dieu s'eulie- cet âge aient pu taire tout cela, quand d'ail-
« tint avec lui. » Ce i|ui s'étail déjà l'ail s"esl-il leurs Dina elle-même avait à |ieine six ans.
lejjroduil ici? Ou bicu esl-ce le uièuie ('vène- ;{. Il faut d(uic une solution dillérente. Si
uieul (|u'()n rappelle' U'K'iij" '' ''" ^"'U ''^' 'i '-'''l apiTS le dénombremenl des douze llls, il est
pas à la pierre, mais sur luie i)ierre, (|ue Jacol» dit : <( Tels sont les
lils de Jacob, qui lui vin-

(ilïril uu sacrifice. Il n'imita donc pas les ido- « refit en Mésopotamie de Syrie, » c'est parce
l.'drcs, (pli dressent des ,nil<'lsde\atd des pierres, que entre tous les membres de celte famille
et saerilieul à des pierres connue à îles uicu.x. si nombreuse, il u'n eu eut qu'un seul (|ui
CXVIL (Ib. XXXV, :2().) lienjtitnin naquit-il en n'était pas néon ce pays. Dans un sens néanmoins
Mési>i)ottimi(''/ le déuondiremeid des — 1. Après il y reçut le |)rincipe de son existence, car ce tut
douze entaids d'Israël, il est dit « Ce soid là les : là (pie sa mère s'unit à son père. Mais cette solu-
« fils qui naquireul à Israël eu Mésopolauiie; >'
tion doit s'appuyer sur quelque exemple de locu-
et {lourtanl Uenjaunn ne vint an monde que liuig- tion semblable.
lemps a|)rt's, (piand Jacobcnt (juille Helliei pour n'y a pas de moyeu plus facile de la résou-
4. Il

aller à Bethléem. Undqiies interprètes s'ctlorcent dre que de l'expliquer par l'emploi de la synec-
iiuitilemcnt de trancher cette (piesliou, en di- doche. En effet là où une partie est plus grande
sant ipi'il ne iaut pas lire natisuiit, comme : ou plus importante, ou comincnd onhnaire-
portent la plupart dos exemplaires latins, uuds ment, sous son nom, même ce qui ne s'y rap-
l'iicti sitnt, coutormemenl au texte grec ÈyêVov-o. porte pas. Ain-si Judas étant mort avant la ré-
IJ'aprèscc seidimeut, iJenjamin ne serait pas né surrection du Seigneur, n'était plus du nombre
eu Mésopotamie, mais il y aurait été ibruié; il des douze Apôtres, et cependant l'ApiJtre con-
aurait été eu germe au sein maternel, et lîa- serve ce nond)re douze dans son Epitre, quand
chel serait soitie de la contrée, le portant déjà il dit qu'il apparut aux douze '
. Les exemplaires
en elle. Jlais ou en pourrait dire autant, si giecs |)oilent eu clM l'article ne permettent
', et
on lisait iiiiti suiit; car Henjamin était né déjà
: pas de croire que c'était douze hommes quelcon-
au sein maternel, puiscpi'il était conçu. C'est ques, mais bien les Apôtres que leur nombre
ainsi qu'il est dit à Joseph au sujet de sainte
,
même 11 me semble
reiul célèbres entre tous.
Marie : >< Car ce (pu né en elle, vient de l'Esprit- que dans le même sens que le Seigneur a
c'est
« Sainl '. )> dit « Ne vous ai -je pas choisis au nombre de
:

'2. Mais
une chose qui rend inadmissible
il est « douze? et cependant l'un de vous est un dé-

celte solution c'est que si Benjamin était déjà :


« mon •', >i pom- faire voir que celui-ci ne fai-
conçu dans ce pays, les aines de Jacob pouvaient sait point partie des apijtres de son choix. Il

avoir à peine douze ans. En effet Jacob


y passa
sciait diflicile en effet de montrer le nom d'élu,
vingt ans, les sept premières années sans être de dans un mauvais sens, excepté
fliuini, pris

marié, et il n'obtint de l'être, que par ses servi- quand méchants cho sissent les méchants.
les
ces. Si donc il lui vint nnlils la première année Si nous pensons que ce Judas a été choisi pour
de son mariage; étant l'aiiié de la famille, celui-ci amener la passion du Seigneur par le moyen
pouvait avoir douze ans quand il partit de Mé- de sa trahison, c'est-à-dire, que sa malice a été
sopotamie. El si Benjamin ('tait déjà coiiçii, tout choisie dans un but déterminé; Dieu sachant
I ce grand voyage, ainsi que tout ce (pii est écrit sur faire servir au bien les méchants mêmes, il
le voyage,
accompli dans l'espace de deiuv
s'est faut faue attention à cette autre parole du Fils
mois. Il s'ensuit que les enfants de Jacob de Dieu ne parle pas de vous tous; je
: « Je
étaient bien j^-uues quand, pour leur sanir Dina, « sais ceux que j'ai choisis ^; » car il déclare
ils ont fait tant de carnage, tué tant de monde, ici que les bons seuls font partie de l'élection.
et pris la ville comme il est dit; que deux, d'en- Ces mots : « Je vous ai choisis au nombre de
tre eu.x, Siiuéon et Lévi, (pii l'épée à la main « douze, )) ont donc été dits par s\ necdoche sous ;

sont parvenus les premiers jus([u'à ces hommes le nom de la partie lapins grande et la meilleure
et les ont mis à mort, se trouvaient âgés l'un se trouve renfermé ce qui n'appartient même
de onze et l'autre de dix ans, leur mère eùt- pas à ce nombre.
' I Cor. XV, 5, — 2 Le grec porte : TOÏ5 (îw(ï£Xa, douze, et la
'
Matt. 1, Su. vulgate. muiecim, onze. — 3 Jean; vl, 71. — * Ibid. xlll, 18.
398 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

8. De même dans ce livre de la Genèse, quand ses parents, et après qu'ils eurent ensemble ense-
Emmor vient parler i^ Jacob et lui demander sa veli leur père, comme ils étaient très-riches et que
(ille Dina pour son (ils Sicliem, les fils du pa- ce pays, suivant la remarque de ne l'Ecriture,
triarche, qui étaient absents, étant arrivés, pouvait les contenir, il nouveau à
se retira de
Emmor dit à ions : « Mon fds Slchem a choisi Séïr, et y propagea la race Iduméenne.
« votre (ille par affection : donnez-la lui donc CXX. (Ib. xxxvi, 21.) Sur le pans d'Edom, au-
« pour épouse '. » La personne du père étant la trement ridumée. —
« Voici les princes Chor-

plus vénérable, il dit icof/r/î'//? parsyncdoche.el « réens, (ils de Seïr, dans le pays d'Edom. »

dans cette expression il comprend les frères eux- L'écrivain parle ici comme au temps où il vivait.
mêmes, dont certes elle n'était pas la (ille. On Lorsque le père de ces princes habitait Séïr,
explique de môme ce passage : « Cours vers les Esaù n'étant pas encore arrivé dans ce pays, il
« brebis, et rapporte m'en deux chevreaux. » Les ne s'appelait point évidemment le pays d'Edom.
brebis et les chevreaux paissaient ensemble; Car ce nom lui vient d'Esaii, qui se nommait
mais comme les brebis étaient la portion prin- à la fois Esaù et Edom et de qui sont issus
cipale du troupeau, l'interlocuteur a compris en les Iduméens, en d'autres termes le peuple
même temps les chèvres sous le nom des brebis. d'Edom.
Ainsi, parce que le nombre des onze enfants de CXXl. (Ib. XXXVI, 31,32.) Sur les rois dE-
Jacob, qui naquirent en Mésopotamie, était le dom. — Voici les rois qui régnèrent àEdom, avant
plus considérable, rF]crilure, après avoir parlé « (lu'un roi régnât en Israël. » Il ne faut pas en-

d'eux, fait entrer dans ce nombre Benjamin, «jui tendre ce passage, comme s'il contenait le dé-
n'y était pas né, et elle dit Ce sont là les en- : « nombrement de tous d'Edom, jusqu'au
les rois
« fants de Jacob, qui naquirent en Mésopotamie temps où la royauté commença en Israël, dans
« de Syrie. » la personne de Saùl. II y eut beaucoup de rois

CXVIll. (Ib. xxxvi, 1.) Comment est-il paricdcla à Edom avant l'avènement de Saùl, au tenqis
postérité d'Esiiii après le récit (le himortd'Isaac'/ — des Juges, qui précédèrent la royauté mais ;

Si après le récit de lamort d'lsaac,ilest(lil (pielles parmi ces rois, Moïse n'a pu nounner que ceux
femmes eut Esaii et quels enfants il engendra, il qui ont vécu avant sa mort. Et qu'on ne s'é-
fautconsidérerque l'Eci'iture reprend ici les évé- tomic pas de trouver, depuis Abraham jusqu'au
nements de plus haut. Car ceux-ci n'arrivèrent derniei' roi nonuné par Moïse, eu passant par
pas après la mort d'isaac, quand Esaii et Jacob Esaù, père du peuple d'Edom ;
par Kagnél, fils

étaient àgésdéjà de cent-vingt ans. En effet Isaac d'Esaù; parZara, (ilsdeRaguél ;par Jacob, (ils de
était âgé de soixante ans, quand il eut ses deux Zara, et par Halac, son successur, qui est donné
fds, et sa vie entière futdécent quatre-vingts ans. comme le premier roi d'Edom, plus de généra-
CXIX. (Ib. XXXVI, 6, 7.) Commoit Esaïi se tions qu'on n'en compte par Jacob depuis Abra-
retira deux fois sur le mont Séir. Comment — ham jusqu'à Moïse. Là effectivement se trouvent
l'Écriture dit-elle (pi'après la mort de son père pres(pie douze générations, et ici se]it à peine
Isaac, Esaii s'éloigna de la terre de Cbanaan, pour jusqu'à Moïse. pu se faire que là où on en com-
Il a
habiter sur le mont Séïr ; tandis qu'à l'époque pte le plus, il y ait eu plus de rois pour se suc-
où son frère Jacob revint de Mésopotamie, il ha- céder, parce que la mort les enlevait plus rnpi-
bitaitdéjàsurcetlemontage'!' Il est facile d'expli- dcuuml. Ces! ainsi qu'en suivant un ordre dif-
quer comment l'Ecriture n'est ni trompée ni lérent, saint Mathieu compte deux générations,
trompeuse. Esaii, api-ès le départ de son (ièrc depuis Abraham jusqu'à Joseph '
; saint Luc,
pour la Mésopolamie, ne voulut plus demeu- suivant un aube ordre
comptant les généra-
et
rer avec ses parents, soit à cause de la dou- tion, non point par Salomon, comme lui, mais
leur qu'iléprouvaitau souvenir de la bénédiction par Nathan, en énumère cinquant(>-cinq depuis
dont il avait été h'usiré.soit à cause de sa (émme Abraham jusqu'àJoseph '. Dans la ligne où l'on
qu'il voyait exposée à l'aversion de ses paients, compte le plus de générations, la mort a été pins
soit pour tout antre motil. C'est alors qu'il habita prompte, (pie dans celle où on en compte le
pour la première fois le mont Séir. Dans la sui- moins. Et dans la crainte qu'on ne s'étonne de
te, quand son frère Jacob fut de retour, la paix ce (pie lîalac, fils de Béor, mis au nombre
est

s' étant rétablie entre eux, il revint auprès de des l'ois d'Edom, et qu'en raison de la resscm-

'
Gcn. XXXIV, 6,-8. 'Matt. 1,1-17. —'Luc, m, Î3-38.

i
LIVRE I. — QUESTIONS SUR LA GENÈSE. 399

blanco do noni.on nos'iiiiiisiiUMiiiccT't.iitct' Ra- an pour se retirer sur le mont S('>ïr puis elle ;

lac i|iii résista à .Aloïsc, le clicrdiipciipli' d'Israc'l, donneia nonienclalun' des rois est des princes de
il faut savoir qiii> cdiii-ci l'tail Moaliilc et iioii cette iialioii, au milieu de lai|uelle il s'établit
l(iuMU't'n,otqiril('lail(l(' S{'pli(ir et iioii <!(• lîciii'; ou dont il lui-mèmi' la sduchc. .Vprès cela,
hit

il > eut an ti-iiips de Moisc un lilsdc lioor, (|iii s'ap- l'histoire de Joseph débute dans les termes sui-
pi'lail Kalaaiii cl non pdiiil lialac, cl f'osl ro nicinc vants I
: Mais Jacob demeurait dans le pays
((

ISalar (|ui avait appolc Itaiaain pour niaiidiic le n de Chanaan. Or, voici ce (jui regarde les en-
peuple d'Isiat'l '. ce fants de Jacob. Joseph, âgé de dix-septans, fai-
CWII. fil). \\\v, ^'.t;\\xvii,:2.) Joscpliuniit-il " sait i)aitrelestronpeaux avec ses frères. «Il est
dix-sept ansà lu mort d'isnii'l ? — De queUiue côté dit ensuite comment, à cause de ses songes, il

qu'on se tourue, il est «lilliiile de trouver aim- devint l'objet de la haine de ces mêmes hères,
mci>t (I Idiiiort d' IsfKir, .l()S('jili ,sim\)cM-l\\s, jKiiu'dlt et lutvendu [)ar eux Donc c'est à dix-sept ans '.

avoir dix-si'jit ans, connue cela scuU)le résul- ou à un âge un peu plus avancé, (pi'il vint en
ter de la marche du récit ilaus l'Ecrilure. .le ne Egypte mais, quelle (pie soit l'hypotlièse que l'on
:

veux pas iliie qu'on ne puisse le prouver, car adopte, cela ne change rien à la (piestioii. Car s'il
je puis ignorer ce ipii n'eihappeiait pas à d'au- avait dix-sepl ansà la morl de son aïeul, (piand
tres. Si Joseph, après la mort d'isaac son sonpèreenavaitcenl-\ingt, lorsqu'il en eut tren-
aïeul, avait di\-sepl ans,quandses Irères le viMi- te-neuf, et que sou père vint eu Evgpte, celui-ci de-
direiil pour l'lig\pte, il est hors de doute qu'il la vait en avoir néeessairenicutceul-([naiaiile deux.
même epocjue, Jacoh son père en avaiteent-vingt. Or Jacob n'en avait alors que cent-trente: d'où
Eu elïet, selon l'Ecriture ', Isaac avait soixante il suit que Joseph ayant dix-sept ans (|uand il fut

ans, lorsqu'il eut Ksaii et .lacoh ; il vécut enco- vendu pour l'Egyple, il setrou\e (pi il fut vendu
re cent-vingt ansaprès, puisqu'il niomut âgé de douze ansavaul la mort de son aïeul. C'est nécessai-
cent quatre-vingt ans ; il laissa donc ses lils âgés rement douze ans avant la mort d'isaac, et quand
(lecenl-viugf ans, et Joseph
de dix-sept ans. Jacob, son père, avait cent-huit ans, (pie Joseph
Comme Joseph avait trente ans, quand il parut était âgé de dix-septans. En y ajoutant les vingt-
à la cour de Pharaon, et qu'il v cid ensuite sept deuxannées(pi'il passa en Egyple avanl l'arrivée
années d'ahondance et deux de disette, jnsiiu'à de son père, on trouvera trente-neuf ans pour
de son père et de ses frères, Joseph avait
l'arrivée l'âge de Joseph, et cent-trente pour l'âge de Jacob
parconséqucnt atteint sa trente-neuvième aimée, et la questionsera tranchée. Mais, comme l'Ecri-

lorsque Jacoh vint en Egypte. Or à celte époque, ture fait le récit de ces événements après la mort
Jacob était arrivé, comme il le dit lui-même à d'isaac, on croit devoir en conclure que Joseph
Pharaon: à sa cent-trentième année et il avait •''; était âgé de dix-septans à la mort de son aïeul.
cent-vingt ans, quand Joseph en avait di.x-sepf il :
Ciim[)renons donc (|ue l'Ecritiire, une fois qu'elle
est impossible absolument que cela soit vrai. a parlé de Jacob cl de ses fils, garde le silence sur
En effet si Jacoh avait cent-vingt ans, quand Isaac devenu un vieillard fort décrépi et que ;

Joseph enavait (lix-sepl;à l'époque ou celui-cien c'est néanmoins du vivant d'isaac que Joseph
avait Irente-nenf, ce n'est pas cent-trente ans, avait atteint sa dix-septième année.
mais cent-quarante-deux que devait compter CXXllI. (Ib. xxxvii, 10.) Songe de Joseph.
Jacob. Etsi Joseph n'avait pas encore atteint
sa
— Jacobdit à Joseph : « Quesigniliece songe que
dix-septième année à la mort d'isaac, mais seu- « que nous viendrons, moi, ta
tu as en? est-ce
lement ([uelque temps après, comme c'est à cet '< mère nous prosterner jusqu'à
et tes hères,

âge qu'ilfut, au témoignage de l'Ecrilure, vendu '<terre devant toi ? » Comment, à moins d'ad-
pour l'Egyple par ses frères, il s'ensuit que son mettre un sens m\stérieux dansées paroles, en
père devait même avoir plus de cent quai-anlc- faiie l'application à la mèie de Joseph, puis-
deux ans, lorsqu'il alla retrouver son lils en qu'elle était déjà morte 11 ne faut pas non plus '!

Egypte. En effet, api-ès avoir dit qu'Isiuic vécut se persuader que ce songe eut son accomplisse-

cent quatre-vingts ans; après avoir raconté sa ment eu Egypte, quand Joseph y fut élevé en
mort et sa sépulture '\ l'Ecriture rapporte com- honneur; car son père ne l'adora point, lors-
ment Esaii quitta son frère et la terre de Cliana- qu'il vint f'y retrouver; et sa mère, morte depuis
longlemps, ne put l'y adorer davantage. C'est
1 Nombr. xxii. î-6. ' Gen. XXV, 2G. Gen. XLVir, 9.
Gen.itxXT, 28, 29. ' Gen. XXXTI,6-13. — -Ib. XXXVII. 1-28.
400 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

donc en la personne du Chri.t que s'applique fa- « quitta ses frères et vint chez un homme d'O-
cilement ce passage, même relativement aux « dolla, nommé Iras; et ayant vu en ce lieu la
morts; car, dit l'Apôtre, Dieu « lui a donné un « tille d'un Chananéen, nommé Sara, Juda l'é-

« nom qui est au-dessus de tout nom, afin « pousa, vécut avec elle, et elle conçut et elle en-
<( qu'au nom de Jésus tout genou fléchisse au K fantaun fils, » et le reste. A quelle époque ont

« ciel, sur la terre et dans les enfers '. » pu s'acconqîliices événements? Si c'est après la
CXXIV. ab. xx.vvu, 28.; Les MmUanites venue de Joseph en Egypte, comment, dans l'in-
ninnméx Ismaélitex. On demande pourquoi l'E- — tervalle de vingt-deux ans à peine, (car il est
criture donne aux Ismaélites, à qui Joseph lut constant que c'est dans cette intervalle que les
vendu par un autre nom, le nom de
ses frères, frères de Joseph sont venus le rejoindre en
Madiajiites, puisque Ismaël descend d'Abraham Egypte avec leur père,) comment a-t-il pu se
par Agar, et les Madianites par Céthura ? L'Ecri- faire que les fds de Juda fussent tous arrivés en

tm'e ayant dit qu'Abraham fit desprésents aux fils âge de se marier ? En effet, après la mort de
de ses concubines, c'est-à-dire, d'Agar et de Cé- l'aîné de ses fils, il accorda à Thamar, sa belle-
thura, et qu'il les éloigna de son fds Isaac pour fille, son second fils; celui-ci étant mort à son

lesenvoyer vers l'Orient 5, ne faut-il pas en con- tour, il attendit que le troisième fui devenu granti ;

clure qu'ils ne formaient qu'une nation ? et quand il fut en âge, il ne le donna point à sa
CXXV. (Ib.xxxvn, 35.) Filles de.Jacob. — Il est belle-fille, dans la crainte qu'il ne vînt à mourir

rapporté qu'au moment où Jacob pleurait Jo- aussi : ce qui fut cause qu'elle se livra à son
seph, « tous ses fils et ses filles se réunirent, et propre beau-père. Comment donc tout cela put-
« vinrent le consoler. » Outre Dina, quelles filles il se réaliser peu d'années? Cette question est
en si

eut Jacob ? Eu parlant de fils et de filles, ne embarrassante, à moins peut-être qu'on n'ad-
compte-t-on pas les petits-fils et les petites-filles ? mette que l'Ecriture reprend ici sa narration de
Car les fils aînés de Jacob pouvaient déjà avoir plus haut, selon son ordinaire ; alors il serait
des enfants. permis de penser ipie l'origine de ces événe-
CWVl. (Il), xxxvii, 33.) Quel est l'enfer ilont ments précédala vente de Joseph c'est en ce sens :

parle Jacob? —
ne voulut pas être cou-
« Mais il qu'il serait dit « Or il arriva dans ce temps-là. »
:

« sole, et il disait Ma tristesse me conduira : Néanmoins, si Joseph avait dix-sept ans (|uand
« aux enfers avec mon fils. «Une faut-il entendre il fut vendu, quel âge pouvait avoir Juda, le
ici par l'enfer? sujet ordinaire d'une grande quatrième fils de Jacob, quand Kuben, l'aîné des
question. Est-ce exclusivement le séjour des nv}- fils, avait au plus cinq ou six ans de plus que son

chants, ou le séjour conunun aux bons et aux frère Joseph ? L'Ecriture dit clairement que Jo-
méchants api'ès leur mort. S'il n'est destine seph avait treide ans, quand il fut connu de
qu'aux méchants, comment donc Jacob dit-il Pharaon ' . Puisqu'on croit qu'il avait dix-sept
qu'il veut dans sa tristesse y descendre auprès ans, (piand il fut vendu, il passa donc treize an-
de son fds Car il ne croit pas que son fils subisse
'!
nées en Egypte sans être connu de Pharaon ; à ces
les tourments de l'enfer. Serait-ce là les paroles treize années se joignirent les septannéesd'abon-
d'un homme à qui son trouble et sa désolation dance, ce qui porte le nombreà vingt; à ces vingt
font exagérer ses maux ? aunéess'en ajoutent encore deux, car c'est lase-

C.X.XVII. (Ib. xxwn, 3(î.y Qu'était-ce que Pété- conde année de la famine que Jacob entra en
phrès? — " Et ils vendirent Joseph pour l'Egypte Egypte avec ses enfants. On trouve ainsi vingt-
« à reumi((ue Péféphrès, chef des cuisiniers. » deux années, pendant lesquelles Joseph fut
Plusieurs interprèles rejettent le mot chef des éloigné de son père et tle ses frères. Couunenl,
cuisiniers, qui se rend en grec par apx'/^ia'/é'- dans cet intervalle, ont pu s'accomplir toutes
poç, et traduisent par : maitre de la milice, celid les particularités mentionnées par l'Ecritiu'e au
à qui appartenait le dioit de mettre à morl. sujet de rèpi)use, des lils et do la belle-lille de
Le même nom, en effet, était donné à cet Juda? Il serait difficile de le découvrir, à moins
envoyé de Nabuchodonosor, qui était plutôt un (pi'oii n'admette (et la chose a pu se faire) (|ue
général. Juda, à peine adolescent, fid éjjiis d'amour
CXXVIII. (Ib. XXXVIII, 4-3.) Que.ition chrouolo- pour celle qu'il épousa, et que Josej)!) n'était pas
iijue. — « Or, en ce temps-là il arriva (jue Juila encore à cette époque vendu pour l'Egypte.

Philiii(>. Il, 9, 10. — 2 Gen. xxv, 6. CJen. XLI, 4tî.



I.IVKK I. — Ql'ESTIONS Sl'K LA (JENfcSE. 401

CXXIX. (Il), wwiii, I4./.S'(/;' Im ivli'nit-iil!< ih's <pie signillent les vaches cl les ('pis maigres,
veitirs. — » Kt a\ant(|iiitli'' ses liahils de m'iivc. n les honuni's oïdilieronl l'aboudaïu-e, signiliée
Il semble résiilli'r de ce passage, que, dis le par les vaches et les épis de bonne espèce.
teiii|is (les l'atiiatclics, 1rs \(Mi\(S portaiciil des CXXXIV. fil). M,i, as. l/esprit de Dieu.
\èli'iiicids à part cl à elles propres, (pii dilTé- « Où pomrious-nous tiouver mi lionuneconnne
raieiil assiirénient de eeiix des leiiiines mariées. « celui-ci, (pu ait eu lui l'Esprit de Dieu!" » Si je
CWX. (Il), xwix, 1.) Tnmsition. — Quand ne me trompe, voici déjà la tfoisiéme fois (pie
l'Eerilure dit pour la seeoiule fois : « Jose[)li lut ce livre fait lucnlioti de i'Espril-Saiiit, c'est-
« niené en Kfi\pte et Péléplirès, eunuipie de à-dire de l'Esprit de La première
l>ien. fois, à
« Pharaon, lut son niailie, » reprend le (il
elle ces |)aroles : « El l'Espril-de Dieu était porté
de son réeil, poiu'dorMier la suite des événements « sur les eaux '
;
>> la seconde fois, lors(pie
qu'elle a rappoiiesplus haut. l>i('u dit : (( Mon Espril ne demeurera point
CXXI. vlb XI-, H>-,J Que niiitciiiiieiil Irstniis Ildans ces homnuîs, parce qu'ils sont chair •'; »
corbeilles du (iraiid paiietier ? — Comme plusieurs et ici, pour la troisième fois, lorsque Pharaon
exemplaires latins ixu'teni .•
« trois eorheilles de (ht (le Jose|)h, (pie l'Esprit de Dieu était en lui.

« pains de Irouieut, » tandis que le grec tlil : Cependant nous ne lisons pas encore l'Esprit- :

« de pains d'orge, » ceux à (|ui la langue grec- Saint.


que est familière entendent parce mot des pains CXXXV.db. XLi, 'Ki.jSurnamile .losepli. — « Et
eonnuuns. .Mais conuueul Pharaon pouvait-il " Pharaon donna à Joseph le surnom de Pson-
avoir à son usage des pains communs, puisqu'il « thomplianech » mot qui signifie, dit-on // a ; :

est dit (pie duiis la corbeille supérieure se trou- révélé les secrets; eo (pii vient assurément de ce
vaient toutes les pâtisseries dont il se nourrissait? (|u'il avait donné l'explication des songes. Mais

Il faut croire que cette corbeille contenait aussi il parait que ce nom veut dire en langue égyp-
des pains ordinaires, puiscpi'il est dit : trois cor- tienne Sauveur du monde.
:

beilles de pains il'orge, et qu'au-dessus de la CXXXVI. (Ib. XLi, iî>.) Sur Pétéplirès, beau-père
corbeille supérieure se trouvaient des pâtisseries de Joseph. — « Et il lui fit épouser Aseneth,
de toute espèce. « fille de Pétéphrès, prêtre delà ville du soleil. »

CXXXIl. (!!). xLi, \.j Que veut dire :n semblait On de(nande ordinairement de quel Pétéphrès
à Pharaon qu'il était sur le fleuve? « 11 semblait — il est-ce de celui dont Joseph fut
s'agit ici ;

« à Pharaon qu'il était sur un fleuve. «Le servi- l'esclave, ou bien est-il (pieslion d'un autre?
teur d'Abraham avait dit dans le même sens : Il est plus probable qu'il est question d'un autre.

« Voici que je me tiens sur la fontaine » car ' , Car il y a beaucoup de raisons qui portent à
le texte grec porte eu cet endroit sm* la fontaine, croire qu'il ne s'agit pas du premier. D'abord,
£711 -f.ç •Kfiynç, comme il porte ici sur le fleuve parce que l'Ecriture ne dit pas que Joseph
ÏTti Toû TîOT^/io-j ; si l'on comprend bien cette épousa la fille de celui dont il avait été l'esclave;
manière de parler dans ce paassge du psaume : ce (pi'elle n'aurait pu, ce semble, passer sous
« C'est lui qui a établi la terre sur l'eau '!, » on silence, attendu qu'il n'en serait pas revenu
verra que rien n'obliue à croire que la terre soit peu de gloire à ce jeune homme. Ensuite, com-
portée sur l'eau comme un navire. Cette ma- ment un eunu(pie aurait-il pu avoir une fille?
nière de parler indi(]ue en effet que la terre est On répond Et comment pouvait-il avoir une
:

au-dessus de l'eau ; il faut liieu qu'elle s'élève femme ? On croit effectiment (pi'il ne devint eu-
au-dessus, pour ser\ ir d'habitation aux animaux nuque que plus tard, ou par accident, à la suite
terrestres. d'une blessure, ou par son libre choix. Ajoutons
CXXX. (Ib. xLi, 30.j L'abondance promise. — quel'Ecriture ne rappelle passon titre honorifique
Quand il est écrit : « On oubliera l'abondance ordinaire, celui de ào/tfjiayîtpo;, que les interprè-
« qui doit arriver dans toute la terre d'Egypte, » tes latinsont rendu par:maître des cuisiniers, mais
il ne s'agit pas d'une abondance à venir que d'autres tradu'.sentpar: général des armées.
pour ceiLX qui souffriront de la famine, si cette Ici encore on répond qu'il fut honoré de deux char-

abondance devait suivre la disette; mais elle ges la dignité de Prêtre du soleil et le comman-
:

était à venir, au moment où parlait Joseph. dement des troupes. Précédemment il remplit un
C'est comme s'il eût dit Au milieu de la famine, : emploi qui convenait à son service mais, du ;

Gen, XXIV, 13. — ' Ps. xxiii, 2. ' Gen. I, 2. — 2 Ib. vi, 3.
40-2 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

jour où la (li\initéelle-mèrae se fit voir non sans sonne de son père encore en vie, et de sa mère
éclat tlans lapersoniio de .losoph, il lalliit mettre déjà morte.
eu reliel' tlans son beau-pèie une charge qui le CXXXIX. ( Ib. XLii, lo, 16. ) Sur le serment de
ratlacheiait à quelque dignité principale; dans Joseph : « Parlesniutde Pharaon. » — Comment
l'opinion desEixyptieus, cette dignité, ne pouMiit- Joseph, cet homme si sage et si digne d'éloges,
èti'e que celle de Prêtre du soleil. Jlais au milieu au témoignage non-seulement île ceux parmi
de tout cela, comme
l'emploi de chef des gardes lesquels il vécut, mais encore de l'Écriture, jure-
desprisons emxire confié, il est fort difficile
lui fui t-il ainsi " par le salut de Pharaon,
: » que ses

lie croire que ces foncti(uis s'allièi'ent en lui avec frères ne sortiront pas d'Egypte, sans (|ue leur
celles du sacerdoce. Ensuite il n'est pas dit sim- plus jeune frère ne soit venu ? Est-ce que le salut de
plement, qu'il était prêtre du .soleil, maisdelaville Pharaon, envers qui il était fidèle eu toutes choses
du soleil, autrement d'Héliopolis; or il paraît comme à son premier maître, était devenu peu
qu'elle est à plus de vingt milles de Memphis, où les digne d'estime aux yeux de cet homme bon et
Pharaons, c'est-à-dire les rois d'Egypte, avaient fidèle ? Car s'il se montra irréprochable envers
établi leur principale résidence. Conunent donc le maître qui l'avait acheté eu (pialité d'esclave,

aurait-il pu quitter ses fonctions sacerdotales, et combien plus devait-il l'être à l'égard de celui qui
servir courageusement son roi à la tète desarmées ? l'avait élevé à un si haut point d'honneur?
De plus, il est rapporté que jamais les prêtres Et s'il peu de cas du salut de Pharaon, ne
faisait

Egyptiens ne servirent (pic dans les tem])les de devait-il pasdumoinséviterde se parjurer pourle
Dieu, ni ne remplirent aucun autre emploi; en salut de qui que ce pût être ? Mais y eut-il parjure?
fut-il autrement dans ce cas-ci? chacun peut en Il retint un de ses frères jusqu'à l'arrivée de Ben-

croireceqii'il lui plait. Peu importe néanmoins la jamin, et il vérifia ce qu'il avait dit « Vous ne :

solution de cette ipiestion, qu'il n'y ait eu qu'un « sorlirez point d'ici, si votre frère ne vient pas. »

Péléphrts, ou qu'il y en ait eu deux car, quelle : Ces paroles ne pouvaient s'adresser à tous; com-
que soit l'hypothèse qu'on admette, ellenecons- ment eu effet Benjamin serait-il venu, si quel-
titiie pas un danger pour la foi et ne contrarie en ques-uns n'étaient repartis pour ramener? Mais
lien la vérité des divines Ecritures. la question devient encore plus pressante d'après
CXXWII. rib. \\u, W. ] Que siiTiifîe : Car il les paroles suivantes qui renferment un second

II'
Il
avait plus (le iiiimbrc? — « Et Joseph amassa serment « Envoyez l'un de vous
: et amenez ,

« du froment en quantité prodigieuse, comme le « votre frère cependant vous serez conduits en
;

a sable de la mer, de sorte qu'on ne pouvait pins « prison, jus(]ii'à ce qu'on voie si ce que vous

« compter : car il n'y avait plus de nom!)re. « « dites est vrai ou non : autrement, par le salut

Ces derniers mots : car il n'a avait plus de nom- « de Pharaon, vous êtes des espions; » c'est-à-
bre, sont mis pour signifier que la quantité dé- dire, si vous ne dites pas la vérité, vous êtes des
passait tous les nombres dont le nom était usité espions. Il conlirme sa décision en jurant que
dans la langue, et qu'on ne trouvait plus de ter- s'ils ne disent pas la vérité, ils seront des espions,

me pour les exprimer. Comment en effet les en d'autres termes, dignes du châtiment des es-
nombres manqueraient-ils pour marquer une pions il savait cependant ipiils disaient la vé-
:

quantité, puisque, si grande qu'on la suppose, rité. Or, on n'est pas parjure, pour dire à quel-

elle est néanmoins toujours finie? Ceci pouvait (pi'un dont on connaît parfaitement l'innocence :

cependant se dire encore par hyperbole. Si vous avez commis cet adultère dont on vous
CXXXVIII. f Ib. xLii, t). )Siir l'accomplissement accuse. Dieu vous condamne, ni pour joindre à
(les soiifies de Joseph. —
« EtJoseph se souvint des ces paroles la formule d'un serment; car ce ser-
« songes qu'il avait eus autrefois : » car ses frères ment ne contient rien que de vrai. Il renferme
venaient de l'adorer. Cependant il faut cherche!' en effet cette condition : Si tu es coupable, quoi-

dans ces songes une pensée plus haute. Car les qu'on soit certain que celui à qui on s'adresse,
paroles de reproche que Joseph reçut de son est innocent.

père ', h cause de la vision du soleil et de la Il est vrai que si l'adul-


Mais dira quelqu'un :

lune qu'il avait eue, n'ont pu avoir leur accom- commis. Dieu punira le coupable mais
tère a été ;

plissement de la môme manière, dans la per- comment ceci peut-il être vrai Si vous ne dites :

pas la vérité, vous êtes des espions ,


puisque,
' Gen. xx.\TlI, 10. lussent-ils nienleiu's, ils ne seraient pas des es-
^ LIVRE I. — QUESTIONS SI U LA CENIISE. 403

pions? Lo sens de ces paroles : « Vous t^tes des faut croire (jn'elles renferment un sens caché.
« espions, » est eeliii (|ne j';ii déjà donné : Vous Cet argent, donné et resté intact, |)uisqu'il est
serez difjnes du eliàliiMcul des espions, c'esl-à- ra|iporti' (pi'il lut trouvé bon, si'/uifie ce cpii est

dire, vous serez, à raison de \otre niensouj;e, dit ailleurs : « Les paroles du Sc'gneur soûl des
considérés connue des espions. D'ailleurs on peut « |)aroles chastes, un argent passé au feu, épron-
dire : Vous éles, [)our : Vous serez remaniés. « veau creuset, purilié sept fois ', » c'est-à-dire
Vous serez eonsidén-s ; c'est ce (pi'on voit par |)arl'ail('uieid.

d'innond)ral)les expressions écpiivaienti's. Telles (ALIW ( 11), \i.iii, Hi.j i}uesi(inilir« .^'enirrer'! «

sont, par exemple, ces paroles d'P^lie « Celui :


— « Or, ils bùreni et s'enivrèrent avec lui. » Les
" <pu aura exaucé \y,w le l'eu celui-là sera , lioumies sensuels s'autorisent souvent de ce
« Dieu '. » Ce cpii ne sigiiitie pas sera Dieu, : passage, et s'appuient, non siu' l'exi'iuple des
mais sem reconnu pour Dieu. enfants d'Israël, mais sur celui de Joseph, dont
GXL. ( 11). \i.u, :2;i Sur ce passade ) : //>' ifino- lahaute sagesse est l'objet de tant d'éloges;
raient que Joseph leseiitendail, nir il )/ arail un in- mais eu lisant attentivement les Ecritures avec
terprèle entr'eux. — Lorsque l'Ecriture rapporte attention, on trouvera beaucoup d'endroits, où
que les entants d'Israël, touchés de repentir, le mot s'enivrer siguilie se rassasier. Par exem-
disaient entr'eux (pi'ils avaient mal agi envers ple, celui-ci : « Vous avez visité la teri'e et vous
leur frère Joseph, et que le danger où ils se « l'avez enivrée , et vous avez mis le comble
voyaient était un juste thàtinient permis de Dieu, « à ses richesses -; » comme ces paroles expri-
pounpioi ajo'ite-l-elle ces paroles : « Ils igno- ment des bénédictions et marquent un don de
« raient que Josei)li les entendait , car il y avait Dieu, on voit clairement que le mot enivrement

« un interprète entr'eux ? » Voici le sens de ce signifie rassasiement. Car il n'est pas utile à la
passage : ils croyaient que Joseph ne les enten- terre d'être enivrée à la manière des ivrognes,
dait pas ,
parce ([ue l'interprète ne lui disait parce qu'elle se corrompt par l'humidité, (piand
rien de ce dont ils s'entretenaient entr'eux; ils elle en est pénétrée au-delà de ce qui lui est né-
pensaient qu'il n'avait recours à un interprète, cessaire; il en est ainsi de la vie des ivrognes,
qu'en raison de l'ignorance où il était de leur (pii, ne se contentant pas de ce qui leur suffit,
langue; et que l'interprète ne prenait point la se plongent dans une sorte de déluge.
peine de traduire à celui qui l'employait ce qui CXLV. (Ib. XLiv, 13.) Sur la science divinatoire
ne s'adressait point à lui, mais Cormait l'objet de Joseph. — « Ne saviez-vous pas qu'un homme
de leurs conversations particulières. « telque moi découvre ce qui est caché ? » On de-
CXLL (Ib. XLu, 2i. ) Réticence. — « Et, étant mande ordinairement ce que signifient ces pa-
« de nouveau revenu auprès tl'eux, il leur dit. » roles de Joseph à ses frères ce que c'est que ;

L'Ecriture n'ajoute pas ce qu'il leur Ce qui dit. cette divination dont son intendant, d'après son
signifie qu'il ! >nr adressa de nouveau les paro- ordre, a déjà parlé à ses frères. Parce qu'il ne
les qu'il leur avait déjà fait entendre. parlait pas sérieusement, mais par jeu comme ,

CXLII. (Ib. XLU, 88. ) Encore .fur l'enfer. — la suite le démontre, faut-il ne pas voir un men-
« Vousconduirez ma vieillesse avec douleur en en- songe dans ces paroles ? Les menteurs, en effet,
« fer. Jacob veut-il dire que c'est la tristesse qui le
>> mentent sérieusement, et non par plaisanterie;
conduira en enfer, ou, quand même la tristesse ne et (piand on dit, pour rire, des choses qui ne sont
l'accablerait pas, qu'eu mourant il descendra en pas, cela ne s'appelle pas mensonge. Mais voici
enfer? L'enfer est l'objet d'une question impor- une (piestion plus grave que signitie la con- :

tante, et il faut observer en quel sens l'Ecriture duite de Joseph, quand il se joue tant de fois
emploie ce mot, dans tous les endroits où elle de ses frères, avant de se faire connaître à eux,
vient à l'employer. et les laisse plongés dans une si grande incerti-

CXLIU. ( Ib. XLHi, 28.) Sur l'araent des frères tude ? Il est vrai que toutes ces particularités
lie Joseph .
— Ces paroles de l'intendant de
la mai- sont d'autant plus altachantes à la lecture ,

son : « Dieu de vos pères vous


Votre Dieu et le qu'elles furent plus surprenantes pour ceux à
« a donné des trésors dans vos sacs; quant à qui elles arrivèrent cependant, eu égard à la ;

« votre argent, je l'ai vérifié, j'en suis content, » gravité et à lasagessede Joseph, à moins qu'une
semblent renfermer mi mensonge , mais il signification importante ne fût attachée à cette

ni Rois, xviii. 24. Ps. XI, 7. — 2 Ib. LXIV, 10


404 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

espèce de jeu, ces choses ne se seraient point paroles de Joseph : « Car Dieu m'a envoyé devant
proiliiites à son instigation, et l'Ecritin-e, monu- « vous, pour sauver la vie de vos restes etnour-
ment d'une sainteté si autorisée et source cachée « rirce qui reste de votre grande race? » Il n'est
de tant de mystères à venir, ne les aurait pas pas possible que ces expressions s'appliquent à
rapportées; nous n'avons pas entrepris d'en Jacob et à ses fils, puisqu'ils sont tousen vie. Ces
donner ici luie exposition suivie mais nous , paroles, par un sens mystérieux et profond, se
ivons voulu seulement signaler ce qu'il importe rapporteraient-elles à ce que dit l'Apôtre : « Par
de découvrir dansce passage. Aussi i)ien, ce n'est « un choix delagràce y a des reste-; qui ont été
il

pas, je pense, sans raison que Joseph ne dit pas : «sauvés ',)> selon celte prédiction du prophète :

Je devine ce qui est caché, mais « Un homme : « Quand le peuple d'Israëlserait aussi nombreux
« tel que moi devine ce qui est caché. » Si c'est « que le sable de la mer, quelques restes seront
une manière de parler propre à l'Ecriture, il « sauvés '? » Si le Christ en effet a été mis à mort
faut qu'on retrouve quelque chose de semblable par les Juifs et liM-é aux Gentils, comme Joseph
dans le corps de ce divin ouvrage. aux Egyptiens par que les
ses frères, ce fut afin
CXLVl. Mb. xLiv. ) Pourquoi Joseph dijfère de restes d'Israël eussent également part au salut.
se faire eoniuiître à ses frères! — Il ne faut pas, Ce qui fait dire à l'ApcMre «Et moi aussi jesuis :

à mon avis, considérer à la légère la conduite de « Israélite; «et encore « afin que la plénitude des :

Joseph, laissant subsister tant qu'il le veut, le « nations entrât et qu'ainsi tout Israël fût sauvé s. «

trouble et l'anxiété de ses frères , et en prolon- Il est question ici des restes d'Israël selon la chair
geant durée à son gré il ne voulait pas leur
la ;
et de la plénitude des nations appelées, à cause
malheur, puisqu'il leur réservait pour le dénoue- de leur foi dans le Christ, Israël selon l'esprit.
ment nue joie si complète; tout ce qu'il faisait Mais, si la plénitude de la foi appartient aussi au
pour différer leur allégresse, n'avait d'autre but peuple que les Apôtres appelés déjà
israélite, et

que de mettre le comble à leur bonheur leurs : au salut soient une partie des restes de ce mê-
souffrance;, pendant tout le temps iju'ils furent me peuple, alors la plénitude de la délivrance
liATés à la désolation, n'avaient point, on pourrait d'Israël à l'époque où Moïse le sauva de l'Egypte,
le dire, de proportion avec la gloire et les trans- figure ce mystère.
ports de joie, qui devaient éclater en eux, quand CXLIX. l'Ib. XLVi,(î,7.) Ques iqni fie ses filles et les
ils reconnaîtraient le frère qu'ils croyaient perdu Jilles deseslillesl — «Jacob entra en Egypte avec
par leur faute. «toute sa famille, avec ses filsetlesfdsdesesfds,
CXLVII. (Ib. XLIV, i9.) ynrrntio)! erronée de «ses filles elles fillesde ses filles. » Pourquoi : « ses
Judo. — Juda, (|uoiqn'iI parle à Joseph lui-même, « filleset lesfillesde ses filles,» puisque nous lisons
ne raconte pas exactement la manière dont ses qu'il n'en eut qu'une seule? Nous avions dit plus
tî'ères et lui ont été traités ; il ne dit même pas haut qu'on pouvait parfaitement sousce nom de fil-
qu'on les avait soupçonnés d'être des espions, lesentendre lespefites-filies de Jacob, commcon
comme Joseph, en effet, avait feint de le croire. (lit to'.is les enfants d'Israël pour tout le peuple
Est-ce i\ dessein qu'il passe ce fait sous silence ,
sorti de lui. Mais maintenant quand l'Ecriture
ou son trouble lui fait-il oublier d'en parler ? c'est dit : les filles de ses [illes, quoique Jacob n'ait eu
ce que rien n'indique. Quant aux réponses que que Dina, elle emploie le pluriel pour le singu-
les frères de Joseph lui auraient aux faites, et lier, comme par fois elle emploie le singulier
renseignements qu'ils lui auraient donnés au pour le pluriel. Onpourrait dire encore cependant
sujet de leur père et de leur jeune frère, je ne que le nom defiilesest donné ici auxbelles-filles:
vois pas comment, même à ne considérer que les belles-filles de Jacob.
le sens de la conversation qu'il rapporte tout , CL. (Ib. XLvi, 15. ) Que faut-il entendre pur les
cela peut s'accorder avec la vérité. Cependant, àmessorties de Jacob ? — L'Ecriture disant que Lia
qu'on y réfléchisse, et l'on verra dans ces erreurs enfanta tant r/'(im('.sou que tant et faut d'âmes
un oubli et non un mensonge; car Juda savait sontsortiesde Jacob, il fautvoirce qu'il convient
très-bien que Joseph était au courant des faits, de répoudre sur ce texte à ceux qui s'en empa-
et tout ce qu'il lui disait a^ait pour but d'ex- rent, pour soutenir (juc les parents engendrent
citer sa pitié. à la fois et les âmes et les corps. Que l'on dise : les

C\!^Yi[I.(Ib XLV, DQuesiçinilie : les restes de âmes pour les hommes, la partie étant prise pour
la firande rare de Jacob'! — Quel est le sens de ces '
Rom. XI, 6. — 2 Isaïe, x, 22. — ^ Koni, xi, I-2S.
LIVK 1. ~ UHESilONS SLi; I.A GKNKSK. 40?J

le loiit, mil lie le coiilcstc. M.iis la parlic ciii- d'ajontci'au di'nombrenient de sa famille, usant
ployccpoiir le tmit, lïmic snilo iioiiiiiK'c cl mise d.inscellecirconslaneepoiu' (|nelque iviison mys-
pour siîiiiilior l'homme loiil onlior, coinmciit la térieuse d'unesortede liberté prophétiipie. Toide-
séparer dans ces mois : Ces àiiies soi'lireiil de Ja- fois, conime il est conslautque Jacob \('cnl dix-
cob, et coiicliire (pi'il ne donna naissance (pi'aii sepl anscn Egypte', ou ne voit p;is conmient les
corps? Il faut avoir c^fiard nnxmaiiiC'resde parier (ils de Joseph purent avoir des petits-enfants du
pi-o|)res ;\ l'Ecrilnre. vivant deleur aïeul. Eu effet Jacob entra en Egyp-
CM. (II). M. VI, la.) Sur les trcnli'-lroisàmi's de te la seconde aimée de la (amiiie
', cl Joseph

Lia ni Mésopotiimic. — « Cesont là Icsfils que Lia eut ses deux fils dans les années d'abondance. Or
eut de Jaeol) en Mcsopolaniie de Syrie avec (piclle (pi(>soit l'aiiuéc d',i!)o idiuce à la (piclle
« Dina sa (ille; ses (ils et sa (ille claienl en loid on r.ipporle leur naissance; on
neuf conqtle
« trente-trois ;\mes. » Comment ces trente-trois années depuis la première année d'abondance
âmes Mésopo-
sont-elles tontes ni^es de Lia en jusqu'à la seconde iuinéede diselte, dans la(pielle
tanie de Syrie? Assurément il n'est (pieslion Jjicob entra en Egyjjle en ajoutant à ces neuf an-
;

ici que des six fds de Lia et de son inii(|ue lille, néesiesdix-seplannéesqueJacobyvéciil ou trouve
desquels sont issus les petits-lils mentionnés en en tout vingt-six années. Comment donc desjeu-
même tem|)s. Si donc ime objection s'('lait (''le\ée nes gens âgés de moins de vingl-six ans ont-ils
déji\ au sujet du seul Renjauiin, lorsque l'Reri- pu avoir de petits-enfants? 11 n'y a rien, môme
ture, après avoir énuméré les douze enfants de dans le texte hébreu, qui donne la clef de cette
Jacob et les avoir cités nommément ajoute « Ce ; (|uestiou. De plus comment Jacob, avant son en-
« sont là les enfants qui vinrent à .laeob en Mc- trée en Eiiyple j)ut-il avoir tant de pelits-eu'ànts,
« sopotaniie de Syriei; « à combien pins forte rai- même de Benjamin qui avait le même âge
son faudrait-il maintenant demaniler comment quand il vint auprès de son frère?Or l'Ecriture ne
ces trente-trois âmes ont pu naître de Lia en dit passeulementqu'il eut des fils, maisdespelits-
Jlésopotamie de Syrie. Maisia même locution re- fils et un arrière-petit-fils, qui tous ensemble
produite dans ces deux passages nous autorise à forment le nombre de soixante-six personnes,
admettre que dans l'Ecr ture tons les enfants avec les quellesJacob entra eu Egypte, même se-
sont considérés comme
du pays où orisinaires lon le texte original. Pourquoi encore, après
sont nés leursparents. 11 est ésralement hors de que Joseph et ses fils n'étaient pas plus
qu'il est dit

doute que l'on dit ici les fdles pour la fille, et que le de huit que Benjamin et ses fils étaient au
et

pluriel est mispourle singulier. nombre de onze personnes, voyons-nous que ces
CLIL (II). XLVi, 26, 27.) Sur le nombre des per- deux nombres réunis, onze et huit, ne font pas
sonnes qui accompagnèrent Jacob en Egfipte. — dix-neuf, mais (pi'on com])te dix-huit personnes
Quand on que soixante-six àmesentrèient avec
lit en tout? cl pourcpioi eusniteest-ildil que Joseph
Jacob en Ésryptenon compris les enfants de Jo-, et sesfilsforinaientnonpas huilâmes, maisneuf,
sepb et qu'après les avoir énumérées, l'Eeritnre tandis qu'on n'en trouve que huit ' ? Toutes ces
ajoute : « Les âmes avec lesquelles Jacob entra pari'cuiaiités,qii semblent inexplicables, ont, il

« en Egypte étaient au nombre de soixante- ne faut pas en douter, une profonde raison d'ê-
« quinze, » il faut enlendrece passas^eeu ce sens : tre; mais je ne sais s'il est possible de tout. expli-
les âmes qui étaient dans la maison de Jacob lors- quer littéralement, surtout les nombres, qui à en
qu'il était en Egypte. Il est évident en effet qu'il n'y juger par plusieurs dont nous avons pu pénétrer
entra pas avec ceux qu'il y ti'ouva. Mais connue en lesens.sout certainement très-dignes de respect
recherchantexactenient la vérité on se convainc et remplis des mystères les plus profonds.
qu'à sou arrivée Epbremel Manassés étaient di^jà CLlll. (Ib. XL VI, 32.) Pourquoi l'Ecriture loue
néstousdeux car lesexemplaireshébrenxen font
: dans les Patriarches la profession de pasteurs de
mention en cet endroit et la version des Septante troupeaux. — On loue dans les Patriarches la
l'affirme au livre de l'Exode, lesSeptaut(% en eom- profession de pasteurs de troupeaux, qu'ils ont
plétantle nombre, n'ont pas ce mesemble commis exercée depuis leur enfance et sous les yeux de
d'erreur. Ilsuffitpourlesjustilierque Jacob vécut leurs parents. Et c'est à bon droit car, lorsque:

encore quand, de ses deux (ils Manassés et lesauiinaux obéissent à l'homme, etqiie l'homme
Ephrem, naquirent ceux qu'ils ont jugé à propos leur commande, cette obéissance d'une part et

* Ci-dessus, Question cxvii. ' Gcn. XLVii, 28. — - Ib. xlv, 6. — -"Ib. XLïi,2r, 22,27.

S. AuG. — ToM. IV. 32


406 QUESTIONS SLR L'HEPTATEUQUE.

ce commandement de l'auti'e sont assurément conté que l'on rappelle brièvement et d'une ma-
justes. Aussi Dieu dit-il en créant l'homme : nière obcure; rien déplus clair que cette répé-
« Faisons l'honuiie notre image et à notre res- ;i tition. L'Ecriture avait déjà dit les circonstances
« semblance et qu'il domine sur les poissons de de la présentation des frères de Joseph à Pha-
« la mer, sur les oiseaux du ciel et sur tous les raon, les paroles que ce prince leur adressa, les
«animaux de la terre '. » Ces paroles donnent à réponses que ceirx-ci lui firent •
; maintenant
entendre que la raison doit avoir l'empire sur l'écrivain sacré reprend son récit comme au dé-
tout ce qui n'est point raisonnal)le. Mais que but, et le relie à ce qui précède par les paroles
l'homme devienne l'esclave de l'homme, c'est que Pharaon fait entendre à Joseph en particu-
le péché ou l'adversité qui en sont la cause : lier. Dans les exemplaires grecs écrits de la main

le péché suivant ces paroles « Chanaan sera ; des copistes les plus habiles, onremarque à cer-
« maudit, il sera le serviteur de ses frères 2; » tains passages du récit de tous ces événements,
l'adversité, connue il arriva même à Joseph, de petites broches, qui indi(juent ce qui manque
qui, vendu par ses frères, devint l'esclave d'mi dans l'hébreu et se trouve dans les Septante ;

éh'anger pom-quoi les premiers esclaves,


3. C'est d'autres passages sont marqués d'astérisques,
ceux pour qui la langue latine créa ce nom, pour indiquer ce qui se trouve dans l'hébreu et

furent des victimes de la guerre. L'homme vaincu manque dans les Septante.
par son semblable, pouvait, en vertu du droit CLVI. (Ib. xLvii, 9.) La vie de ce monde n'est
de la guerre, être mis à mort; conservé à la vie, qu'une demeure passagère. Pourquoi Jacob —
serrât us, il fut appelé esclave, semis; on lui dit-il à Pharaon « Les années de ma vie, que je
:

donna aussi le nom de mancipium, parce qu'il « passe en étranger? » Car ainsi porte le texte
avait été fait captif à main armée. L'ordre naturel hébreu, tandis que le texte latin porte que je :

veut aussi que dans la société les fennnes obéis- pusse, ou que j'ai, ou tout autre terme équiva-

sent aux maris, et les enfants aux parents : ilest lent. S'il dit : queje passe en étranger, est-ce parce
juste, en effet, que la raison la plus faible se sou- qu'il au monde dans un pays où son peu-
vint
mette à la raison la plus forte. En fait de com- ple n'habitait pas encore, bien que Dieu eût
mandement et d'obéissance, il est donc évidem- promis de le lui donner en héritage, et qu'en ce
ment de la justice que ceux qui l'empoitent par sens, la vie qu'il menait était véritablement celle

la raison, remportent aussi par le conunande- d'un étranger, non-seulement lorqu'il voya-
ment : et quand cet ordreest troublé en ce mon- geait en Mésopotamie, mais lors même qu'il

de, soit par l'iniquité dcl'bonnne, soit parlesdif- était dans le pays où il vit le jour? Ou plutôt

férentes espèces d'animaux, les justes supportent ses paroles n'ont-elles pas le sens de ces mots

ce dérèglement dans le temps, assurés (pi'ils de l'Apôtre « Tant que nous sommes dans ce
:

jouiront dans l'éternité d'un bonheur parfaite- « corps, nous voyageons loin du Seigneur *, .»

ment conforme h l'ordre. et dece passage du Psaume, que l'on entend de la


CLIV. (Ib. XLvi, 34.) Les Eiiytiens, ptjure du même manière «Je suis un étranger sur la terre,
:

monde iwésent. —
« Car tout pasteur de brebis est « et voyageur comme mes pères ^ ? » En effet
« un objet d'abominalion pour les Egyptiens. » Jacob dit encore en parlant des jours de sa vie :

Que les Egyptiens, figure du siècle présent où « Ils n'ont pas égalé les jours de la vie que mes

abonde l'iniquité, aient en abomination tous les « pères ont passés en élrangers. » Au lieu de ces

pasteurs de troupeaux, c'est dans l'ordre : car le dernières expressions les exemplaires latins por-
juste estun sujet d'abominalion pourlemécbant. tent : «Qu'ils ont vécu; » le sens est évidemment

CLV. (II). XLvn, 5, 6.) liépclitiun. « Or Ja- — le même, et par conséquent Jacob a voulu dire
« cob et seslils vinrent en Egypte auprès de Jo- quecette vie est un exil sur la terre, c'est-à-dire,
ie seph et Pharaon, roi d'Egypte, en eut con-
:
unedemeure passagère. Pour moi, je crois que
« naissance, et Pharaon, parlant à Joseph, lui cesparolesonf leur véritable application dans les

« dit : Ton père et tes frères sont venus vers Saints, à qui le Seigneur promet une autre patrie,

«toi; voici devant toi la terre d'Egypte; éta- dont la durée sera éternelle. On voit aussi par là
« blis ton père et tes frères dans la partie la dans quel sens il est dit des impies « Ils resteront :

« meilleure du pays. » Ce n'est, pas connue il « connue étrangers et cacheront, ils observe-
arrive souvent, la répétition d'un fait déjà ra- « ront mes démarches ^. » C'est à eux que convient

' Gcn. I, 2r,. — î Ib. I.V, 25, — 3 )b. xxxvil, 28, 36. '
Gen.jLV, 16-20.— MI Cor. v, 6.— J Ps. xxïvill, 13. — Mb. LV, 7.
LWM: 1. - giIESTIONS si U la CEiNKSK. 407

rappiic.'ition île ce p;issap;e : ils rcsii'iil coiniiic momir, Jacolidil à son (ils Joseph : '< Si j'ai troii-
(''(i;in;;t'is poiir cacher; c'csl-à-ilirc (|iic pour " \é grâce devant toi, mels la main sons ma
U'iKliTdcspii'gt'^''"''' irilaiits, ils {Icinciii'Cntliiirs "Cuisse, ci jure-moi (pie lu agiras selon la
(le la maison pour loiijoiirs. « miséricoi(l(> et la vérité. >. Jacoh lie son (ils du
(ILVJI. Jl>.\i,vii, II.) Le iKiiis (le Hanu'ssî'x est- même serment dont Abraham lia son ser\ iieiii' <

il /(' même que relui de (Messeii? — « Kl, siiivuiit celui-ci, en disant d'où il
ramener une fallait
;

« le coininaiiilcmciil de IMiaraon, il les mil en épouse à son (ils; celui-là


en ircommandaul ,

.. possession iln pays le pins lerlile, le pa)S de la sépulture de s(ui corps. Dans ces deux cir-

« Kamcssès. « H lanl s'assurer si ce pays de R:i- constances se trouvent nommées en même temps
messès est le même (pie ceini de Oesseii. Car deux choses qui méritent une ;dlenlion et un
c'est celui-ci (ju'ils avaient demandi'ct (pie IMia- intérêt particuliers, en (piel(preudi()il des Eeii-
raon avait donne'' l'ordre de leur livrer. tiire (pi'on les r(<trouvc; taiitiU elles se nomment
CLVlll. (Ib. xi.vii, 1:2. ) ./«(()/) n'adore iniint la miséricorde et lajustice, lant(Hla miséricorde
Joseph. — « Et Joseph mesncail le rronieni à et la vérité; il est (Vrit en effet (piel(|iie part :

« son père. » Et ceiiendanl .lacolt n'adora « Tontes les voies du Seigneur sont misé-
Josepii, ni quand il le revit, ni à l'eiiorpie « ricorde et vérité ">-.
» Ainsi ces deux choses
où il ie(;evait de lui sa nourriliirc. (^oninienl si recommandables doivent être prises en
donc voir ici raccoiiiplissemeiil du soii;^e de grande eonsid('ration. Or, le serviteur d'A-
Joseph, et ne pas comprendre tpie ce songe braham avait dit : « Si vous exercez envers
inyslc-rieux rent'erinail l'annonce ])rophéti(|uc « mon maître la miséricorde et la justice •'
; » et

d'un événement |)liis considérahle? Jacob, à son tour, dit à son (ils : « Afin que tu
CL1\. 01>- '^i.vii, li.) Vrohité de Joseph.— « exerces envers moi la miséricorde et la v6-
« Et Joseph porta tout l'arficnt dans la maison « Mais d'où vient que ce grand homme
rilé. »
« du roi. )> L'Ecriture a voulu dans ce trait faire recommande avec tant de sollicitude que son
l'éloge de la tidélilé de ce serviteur de Dieu. corps, au lieu d'être enterré en Egypte, soit dé-
CLX. (Ib. XLVii, l(i, i. ) Disette de (irai)is: (ibon- posé dans de Chanaan auprès de ses
la terre
daitee de pâfitriKjes. — « Joseph leur dit : Si l'ar- pères? 11 quelque chose de surprenant,
y a là
K gent \ous niaïKpie, amenez vos tioupeaiix, et et même, à juger ce fait d'après des idées tout
« je vous donnerai du pain en échange. » On humaines, cela parait presque absurde et peu di-
peut faire cette (pieslion : Lorsque Joseph re- gne d'un âme à la fois si grande et si remplie de
froment (piidevail nourrir les liouiiiies,
cueillit le l'csjirit prophétique. Mais si l'on approfondit les
comment fit-il pour conserver les troupeau.r nu mystères cachés dans toutes ces choses, plus
milieu d'une si ip-unde disette ? Les frères de Joseph grande sera la joie et l'admiration de celui qui
ii'avaient-ils pas dit à Pharaon : « 11 n'y a plus les aura découverts. Or, dans la Loi, les cada-
« de pâturages pour les troupeaux de vos servi- vres des morts, cela ne lait point de doute, sont
ceteurs, tant est grande la famine dans le pays la figure du péché car elle ordonne à ceux qui
:

i<de Chanaan; » de leur aveu, c'était ce manque les ont touchés, ou qui ont eu avec eux quelque
de pâturages qui les avait amenés en Egypte. contact, de s'en purifier conmic d'une souillure.
Si donc famine avait causé cette disette de
la De là ce commandement « Si celui qui se lave :

pâturages dans le pays de Chanaan, pourquoi les « après avoir touché un mort, le touche de nou-

])àtui âges ne manquaient-ils pas en Egypte, puis- « veau de quoi lui sert de s'être lavé? De même,

que la lamine était iii;ive:fel!r? ?.',' beaucoup « que sert à un homme de jeûner après avoir

de marais d'Egyplene pouvaient-ils pas, comme « péché, si en avançant il retombe de nouveau

l'affirment ceux qui ont la connaissance des « dans les mêmes fautes <? » La sépulture des

lieux, procurer des pâturages dans le temps morts signifie donc la rémission des péchés, et ici
même où manquait le froment, parce qu'il n'y s'applique à propos ce mot des Psaumes « Heu :

avait pas eu d'inondation du Ml? On dit en effet « reux ceux dont les iniquités sont remises et
(|ue ces marais produisent de fertiles pâturages « les péchés couverts '>. » Puisque la sépulture des
quand les eaux du Nil n'ont pas eu une crue suf- Patriarches figurait le pardon des péchés, où
fisante. devait donc avoir Heu cette sépulture, sinon
CLXI. rih. xLvii, 29.) Recommandation de
— lu.— Gcn. — Kccli.
Jacob relativement à .«/ sépulture. —
Sur lepoint de
' Gen. .\xiv,
XXXIV, 30, 31. —
2.
s
-

Ps. XXXI,
l's. x.xiv,
1.
x.\iv. 49.
408 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

dans la terre où fut mis en croix. Celui dont le un moyen très-facile de résoudre la question ;

sans" nous a rachetés du péché? Car la mort il dit en effet : « Et Israël adora tourné vers le

des Patriarches était la tigure des péchés des « chevet du lit, >- de celui évidemment sur lequel
hommes. Or, du lieu où fut crucifié le Seigneur, le vieillard était mis de manière à prier sans
jusqu'à celui qui porte le nom d'Abraliani, où peine, quand il le voulait. Toutefois il ne faut

sont enterrés les corps des Patriarches, il y a, pas imaginer que l'interprétation des Septante est
dit-on, la distance de presque trente milles; ce vide de sens on ne présente qu'une signification

nombre lui-même signifie celui qui vint rece- peu im portante.


voir le baptême vers l'Age de trente ans. On CLXIII. (Ib. XLviii, 4.) En quel sens Dieupro-

peut, sur ce sujet, découvrir encore d'autres met à Jacob qu'il sera le chef d'une multitude de
my-tères, on analogues ou plus sublimes, en par- nations. — Ici encore Jacob rappelant les pro-
tant loutelois de ce principe, que des hommes messes qui lui'ont été faites de la part de Dieu,
de Dieu, d'im mérité si relevé, n'ont pas sans rapporte qu'il lui a été dit : « Je te ferai le chef

raison donné tant de soin à la sépulture de « d'une multitude de nations. » Ces paroles de
leurs corps; en quelque lieu quêteurs
au reste, Jacob signifient la vocation des fidèles plutôt

corps soient cnlerrés, ou même quand dans que la propogalion de ses descendants selon la

sa rage un persécuteur les laisserait sans sé- chair.

pulture, ou les déchirerait et les anéantirait au CLXIV. (Ib. xLvin, o, 6.) Sur Manassès et
gré de sa passion, les fidèles sont et doivent être Ephrem, fils de Jacob. — Il que Jacob
est écrit

assurés que leur rt'surrection future n'en sera dit en parlant d'Ephrem et de Manassès : « Main-
pour cela ni moins parfaite ni moins glorieuse. '< tenant donc tes deux fils, qui sont nés dans la
CLXII. flb. X.LV1I, '^[^Sur fadonitionde Jacob. « terre d'Egypte, avant que je vinsse en Egypte
— Les exemplaires lalinsportcid: •( Et il s'iuclina « auprès de loi, sont à moi. Ephrem et Manassès
u sur le haut delà verge de lui [ejiis .

; » mais iilu- " comme Rubeu et Siméon, seront à moi mais ;

sieursexcmplairespluschàtiés disent: il s'inclina « ceux que tu engendreras aprèseux, seront à toi ;

haut de sa ou bien au haut


vercje (suce), « ils seront appelés du nom de leurs frères dans
sûr le
« leurs partages. » Le lecteur est parfois induit
de sa verge; à l'extrémité, ou sur l'extrémité. Ce
qui est cause de cette confusion, c'est que le mot en erreur, parce qu'il interprète ce discours en
grec, par lequel on exprime de lui, ou de son, se ce sens que si Joseph avait d'autres enfants,

compose des mêmes lettres; mais les accents Jncob voulait qu'ils fussent nommés comme leurs
diffèrent, et ceux qui en connaisccnl la valeur, en frères : ce qui n'est pas. Mais voici l'ordre et la

tiennent grand compte dans les manusrits, car suite du discours : « Maintenant donc tes deux
ils aident beaucoup à discerner le sens. Cepen- " fils, qui te sont nés dans la terre d'Egypte,
dant s'il y avait de son, û pourrait se faire qu'il « avant que je vinsse en Egypte auprès de toi,

y eiit une lettre de plus, kx-jro'j, au lieu de «ù- » sont à moi. Ephrem et Manassès, comme
ro-j. Ce n'esl donc pas sans raison qu'on demande « Ruben et Siméon, seront à moi; ils seront
quel est le sens de ce passage. On comprendrait « appelés du nom de leurs frères dans leurs par-

facilement qu'un vieillard, portant une verge de « tases, » c'est-à-dire, qu'ils recevront leur part

la même manière qu'on porte à cet âge un bâton, d'héritage avec leurs frères et seront nommés
lorsqu'il s'inclina pour adorer Dieu, le fit sur comme eux enfants d'Israël. Telles sont les deux

l'extrémité de sa verge, puisqu'il la portait de aux autres, et en laissant à


tribus, (pii, jointes

cette sorte qu'en inclinant la tête dessus, il part la tribu sacerdotale de Lévi, forment les

pouvait adorerDieu. Que signifie donc : « Ils'in- douze qui devaient se partager la terre promise
« clina sur l'exlréinité de la verge de lui, » c'est- et fournir la dîme. Ce qui est dit des autres en-

à-dire, de son tils Joseph? Serait-ce par hasard fants que Josehp est ainsi comme une paren-
que Jacob avait reçu le sceptre de son filspen- thèse.

dant que celui-ci jurait, et qu'après le serment CLXV. (Ib. xi.vin, 7.) Pourquoi Jacob indique à
de Joseph, leuant encore le sceptre entre ses Jo.^eph le lieu oii il ensevelit Rachelsa mère. Jacob —
mains, adora Dieu immédiatement? 11 n'avait
il indique à son fils Joseph, comme s'il l'ignorait,

pas à rougir, en ellet, de porlei- un instant l'insi- le lieu elle temps où fut ensevelie sa mère; à celte

gne du pouvoir de son fils, figure d'un grand époque cependanf Joseph était encore avec ses frè-
événement à venir. Mais le texte hébreu donne res mais s'il était trop jeune pour s'occuper de ce
;
LIVRE 1. — QUESTIONS SL'R LA GENÈSE. -409

soin ou pour en garder le souvenir, (|uel ninlil cl i|ii'ils ri'iiiiiici'roiil aux dieux de ieiiis pères
il pu (KMenniner .liicoi);\ lui i-appolcrces circon- pdiii- eioiieeii lui.

stuuccs? N'i'sl-copas |)aric' (pi'il était i)i)u lif ic- CI-WIll. ,11). \i,i\,;t-2.) Que siiiuijie: llfut
niar(]uor que la inèro de .loso|)ii lid eiise\clii' « réuni il sou peuple ? >- llfaiit \oir en quel sens
dans le lieu où devait uailre le Christ '!
l'Ecrituredil si fre(|uemriierd : " Et il fut r(''uui à ses

CL.WI. (II). xLvni, li, lit.)./(/(()/) haiil le plus « pères, » ou : « Il l'iiti<'UMi à sou peuple. » (Vest
jeune des fils de .los('i)li , de }iréférenceh l'ainé. — le laïuage (pi'elle lient au sujet de Jacid», ausitùl
Loi^sque Israël bénit ses petils-lils, en uiettaid (pi'ilest mort, et avant même qu'il soit enterré ;

sa main droite sur le plus jeune, sa main gauclie maisfi quel peuple fut-il réuuiy c'esl ce qui n'aj)-
siu' l'aiué, et (|iauil il répond à .losepli, ((ui l'eu |)aiait pas claii'emeul. (]ar le premier' peuple, (pii

reprend connue d'une erreur ou d'une inather- s'a|)pelle le peuple d'Israël, est issu de lui ; et le
tance : « Je sais, mon fils, je sais : celui-ci sera nombre des justes, reconnus comme tels, qui ont
« aussi ])ère d'un peuple et d sera jiiand mais ; vécu avant peu considérable, (pi'on
lui, est si

" son Irère qiù est plus jeime sera plus grand hésite à leur donner la dénomination de peuple.
« que lui, et sa postérité formera une inidtiluile Si l'on disait simplement il fut réuni à ses pères, :

>< de n.dions ; « ee |)assage doit s'entendre du il n'y aurait point de question à poser. Ce peuple
Christ,connue quand il a été dit de Jacob lid- se composerait-il donc à la fois îles Saints et des
nième et de son Irèie « Que l'ainé sera assujéti : Anges Serait-ce le peuple de celte cité dont il
'!

« au plus jeune '. » L'action d'l?raél contenait est parlé aux Hébreux « .Mais vous vous êtes ;

donc un sens prophélique et signifiait que le « ap()rocliésde la montagne de Sion, de Jérusa-


second peuple, eni,^endré spirituellement par le « lem, la citéde Dieu, et de milliers d'anges Ires-
Christ, devait surpasser le prouier, qui se giori- « saillants d'allégresse ' ?)> Ceux-là sont réunis à
liait de ses ancêtres selon la chair. ce peuple, qui, au terme de leur vie, sont trouvés
CLWII. (Ib. XLvni, ii. ) Sur le (lo)i que fait agreabiesà Dieu. Us lui sont réunis, quand les
Jacob il Joseph du paiis de Sicliem. — Lorsque troubles des tentations et les dangers d'y suc-
Jacob dit à son (ils Joseph donne Sicliem
qu'il lui comber ont entièrement cessé pour eux. Aussi
à part, et ajoute qu il s'en emparé avec son
est l'Ecriture dil-ede :«JNe fais l'éloge d'aucun hom-
glaive et son arc, on est en droit de demander « me avant sa mort 2. »

comment cela peut être vrai à la lettre. Car il CLXIX. ( Ib. L, 3. )Sur les quarante jours con-
acheta cette terre au prix de cent agneaux '
;
sacrés il la sépu tare. — Lesquarantejoiu'sconsa-
et ne s'en rendit pas maitre par le droit de con- crés à la sépulture, dont parle la Genèse, signi-
quête. Serait-ce parce que ses fils prirent Salem, fient peut-être en quelque manière la pénitence
ville des Sichimites •', qui lui appartint dès lors qui est la sépulture des péchés. Car ce n'est pas
par le droit de la guerre, le sanglant outrage en vain que le jeûne de iMoise 3, d'Elie ^, et de
commis envers sa fdle devant paraître un motif Notre-Seigneur lui-môme-', dura quarante jours
sutlisant pour justifier cette entreprise ? Mais alors et que l'Eglise donne le nom de Uuadragesime
pom-quoi Jacob n'accorde-t-il pas ce pays à ceux aujeùne principal qu'elle observe. On lit égale-
qui vengèrent leur sœur, c'est-à-dire aux aînés ? Et ment dans le texte hébreu des prophéties de
s'il se tienthonoré de celte victoire, maiulcnant Jouas au sujet des Ninivites « Encore quarante :

qu'il en donne le prix à son fils Joseph, d'où « jours, et Niuive sera détruite ' ; » ces paroles
vient le déplaisir qu'il éprouva quand ses lits ac- nous donnent à entendre que pendant tous ces
complirent cet exploit ? Pourquoi enfin, au mo- jours, passés dans l'humiliation et la pénitence,
ment même où il les bénit, rappelle-t-il ces faits ils seli\ièrent aujeùne, versèrent des larmesde

en accompaguant d'une parole deblàine''?


les repentir sur leurs péchés et implorèrent la mi-
Il est donc tout-à-tait hors de doute qu'il y a là séricorde divine. Il ne faut pas croire néanmoins
une prophétie et quelque mystère caché Joseph : que ce nombre n'a de rapport (pi'avec le deuil et
ligure particulièrement le Christ ;et cette terre, la pénitence autrement le Seigneur n'aurait
:

où Jacob avait renversé et ruiné le culte des point passé quarante jours avec ses disciples après
idoles, lui est donnée, pour nous faire entendre sa résurrection, allant et venant, mangeant et

que les gentils doivent appartenir au Christ,

'Gen.xxv,23. — -Ibid. xx«iii, 19. — ' Ihirl. xxxiv 25. 'Ibid. 'lléb. XII.22. —
'Eccli. xi,30. Ex. xxxiv, -3 28.— '
IH Hois
XUX,6. XIX, 3. —' Matt. IV, 2. » Jon. m, 4. —
410 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

buvant avec eux car ces jours furent assurément


: paroles et des récits qui sont des redites, il faut
jours fie grande joie.
(les avant tout s'aMacherausens. Carénoncei' la pen-
il ne laut pas croire non plus cpie les Septante, séeet la faire connaître, tel es! l'usage auquel doit
dont latraduction fait autorité dans l'Eglise, aient servir la parole. Or, que Jacob se soit creusé un
commis une erreur, en disant, non point Encore : sépulcre, nous ne le lisons nulle i)art dans les cha-
qnaratite jours, mais : Encore trois jours, et pitres précédents. Maisl'lîcriture ne le dirait pas,
Nini\e sera détruite. Revêtus en effet d'une auto- si réellement Jacob ne s'était préparé un sépul-
rités supérieure à celle des interprètes ordinaires, cre dans la ferre de Cliauaan.
et doués de cet esprit de prophétie qui explique CLX\1. (Ib. L, lO.j liaison mystérieuse du che-
comment, par un vi-ai miracle, ils se sont trouvés min qu'on suirit pour aller ensevelir Jacob. —
parfaitement d'accord dans leurs interprétations, Que signifie ce passage, où l'Écriture raconte
ils ont mis « trois jours, » bien (ju'ils sussent le chemin qu'on suivit pour ialler ensevelir
qu'on lisaitdansriiébreun quarante jours ; « par Jacob : « Et ils arrivèrent à l'aire d'Atad, qui
là ils ont voulu nous faire comprendre que les « est au-delà du Jourdain » ? Au témoignage des
péchés ont été remis et effacés dans la glorifica- honuues compélents, ils se portèrent à plus de
tionde Notre-Seigrieur .lésus-Christ ca'- il est ; cinquante mille au-delà du lieu réservé à la sé-
dit de lui : « Qu'il a été livré pour nos péchés, et pulture du mort : tel est en effet, approximative-
« pour notre justification '. »
qu'il est ressuscité ment, la distance qui sépare l'enilroit où il est
Or, du Seigneur se montre dans sa
la glorification (lit (|u'ilsai'rivèrent, de celui où furent ensevelis
Résurrection et dans son Ascension au ciel. De là les Patriarches au nombre desquels il faut comp-
vient qu'il a donné le même et unique Esprit- ter Jacob. Et après avoir beaucoup pleuré gémi
et

Saint à ses disciples, bien que ceux-ci fussent en cet endroit, ils repassèrent le Jourdain pour
nombreux : la première fois, après s;i résur- revenir à l'endroitqu'ils avaient dépassé. On dira
rection "i,
la seconde fois, après son Ascen- peut-être qu'afin d'éviter la rencontre de quelque
sion •'. Et parce qu'il est ressuscité le troi- ennemi, ils suivirent avec le corps de Jacob le
sième jour, et monté au ciel le quarantième, le chemin du déserf, où passa à son four le peuple

dernier de ces événements se trouve signifié par d'Israël à sa sortie d'Egypte, sous la conduite de
le nombre marqué dans les exemplaires hébreux ;
Moïse. Ce ch'^nin forme efti^cfivement un cir-

quant événement, le.- Seplaule, ne s'en


à l'antre cuit considérable, et aboutit, en traversant le Jour-
tenant point à une interprétation servilc, mais dain, au lieu qui porte le nom d'Abraham ^etqui
parlant avec l'aulorité des prophètes, ont voulu servit de sépulture aux corps des Patriarches, en
le marquer par les trois jours, qui, selon eux, d'autres termes, à la terre de Chanaan. Mais de
furentconsacrés au jeûne des Ninivites. Ne disons quelque manière que ce voyage se soit accompli,

pas que l'un des deux récits est fautif et ne pre- ce n'est pas, croyons-le, sans une raison mysté-
nons pas fait et cause pour nue version contre une rieuse qu'on se portasi loin vers l'Orient au-delà du

autre, puisque ceux qui ont interprété l'hébreu lieu de la sépulture, poury revenir ensuite à tra-

nous prouvent que leur interprétation est con- vers le Jourdain :Israéldevait un jour, dans la per-
forme autexie original et que d'ailleurs l'autorité sonne de ses enfants, se transporter en ce pays
des Septante, sirecommandablcànos yeux parle en traversant le même fleuve.
mh-acle prodigieux que Dieu fit en leur faveur, CLXXll. f Ib. L, 10, 3.) Sur le nombre sept. —
s'appuiedaussonEglisc sur une si haute antiquité. « Et il fit à son père un deuil qui dura sept jours. »

CLXX. (Ib. L, o.j Sur le sépulcre de Jacob. — Je ne sache pas qu'on trouve dans l'Écriture, à

Lorsque Joseph envoie les premiei-s de l'Iigypte l'occasion de la mort d'un saint personnage, un

dire de sa part à Pharaon : « Mon père m'a fait deuil célébré pendant neuf jours, ce que les latins
« Tu m'enseveliras dans le mo-
jurer et m'a dit : appellent les Xoraiidiales. Si donc il est des
M nument quejemc suis creusé au pays de Cha- chréliens qui observent, à la mort des leurs, ce
naan, « où est, dira-t-on peut-éire, la vérité
' nombre en usage surtout parmi les païens, il
dans CCS paroles, puis(|ue nous ne lisons pas que faut, à mou avis, leur déjéndre celle coutume.

Jacob les ail prononcées lorsqu'il dictait sa vo- Quant au nombre sept, il l'ail auloiàté dans l'É-
lonté relativement à sa sépulture ?Mais comme crilure ;
pourquoi il est écrit ailleurs « On
c'est :

nous l'avons déjà observé plus haut, à propos des « pleure un mort pendant sept jours; mais un
iRom. IV, 25. — -Jean, XX, 22. — » Act. n,2-l. 1 Voir ci-dessus, Quest. clxi.
MVRK II. — UnESTlONS SI'K l/KAuhK. ill

» inspiisc^ doit C'Ut plniio tonic sa vie '. Le Ta'. .Mais si pour demander comment
l'on insiste
iioinhro septénaire inarciiie iiriiieipaleiiioiil le il est viiidiqueet conlornieàriiistoiic, rpieJacob
reposa eausedela re!i<ji()ii du Sahhat; c'est donc soit entré en Ej;y[)te avecsoix,iide-(]nin/.e âmes,
avec raison (pi'on pour les iiioris, parce
l'oltsi'i've il l.inl coniprendriMpii! son entrée ne signifie
pas
(pTiis sont coniine enirés dans leur repos. (Je- seulemeid lejouroùil est venu. En effet, connue
[)eiulant les EjJtyptieiisdéciiplèrenlce nombre aux le nom de Jacob est souvent donné à ses enfants,
Innérailles de.lacol); ils le plenrèreiil pendant c'est-à-dire à sa postérité et (pie sa descente en
S()i.\aiile-di\ jonrs. E;j;y[»te esl ilne à Joseph, son entrée signifie tout
CLXMII. (II). I,, m.) Comment il // eut soixante- le temps que vécut Joseph, grâce auquel il i'ef-
qiiiii:e personiiea qui (lesreiidireiit avec Javoh en l'ectna. Or, tous ceux qiK- nonnni> l'Ecriture, pour

Kfiiipte . — K Kt Joseph vécut cent-dix ans, et il coni[)l('ter ce nombre de soixante-ipiiiize, en


y
•< vit les enlaids d'Ephrein Jusqu'à la troisième comprenant les petits-lils de Benjamin, ont pu
« fjénération ; et les entants de Macliir, fils de naiire et vivre dans cet intervalle di; temps. De
« Manassé, lurent élevés sur les genoux de même donc que l'Ecriture dit « Ce sont là les :

'< Joseph. » Li)rs(|ue l'Ecriture ohserveque Joseph « enfants que Lia engendra à Jacob en Mésopo-
vit les entants de ses entants, et même sesarriè- « tanie de Syrie ', » com[)lanl ceux-mémes ([ui
re-petifs-tils, comment les joint-elle aux soi.xante- n'étaient pas nés, mais qui avaient déjàrei.u une
quinze pei-sonnes, qui, selon son récit, entrèrent sorte de naissance dans la personne de leurs au-
en Egypte, avec Jacob ''Moseph, devenu vieux, put teurs ou de leur.^ parents, nés de Lia en Méso-
les voir entants; mais quand Jacob fit son entrée potamie ;
ainsi Jacob, devant à Joseph d'être
en Egypte, Joseph était jeune, et, à la mort de son venu en Egypte, censé y entrer avec tout
il est
père, il n'avait environ que ciiuiuante-six ans. ses descendants que voit naître Joseph, cause pre-
C'est donc pour une raison mystérieuse que l'Écri- mière de son arrivée.
tnrca vouluconsigner ce nombre soixante-et-quin-
I
Eccli. XIII, 13. — ï Gcn. XLvi, 27. ' Gen. XLvl, 15.

LIVRE DEUXIÈME.

QUESTIONS SUR L'EXODE

Question première. (Exod. 1.19-20.) Sur le— ces enfants, les sages-femmes accomplissaient
mensonge dessaçies-femmes. Les sages-femmes — une œuvre de miséricorde, mais en mentant à
voulant épargner la vie des enfants màlcs d'israèl Pharaon, elles agissaient dans leur intérêt, et
I à leur naissance, trompèrent Pharaon par un par crainte du châtiment, action digne peut-
mensonge, en lui disant que les femmes des être de pardon, mais non d'éloge. Ceux dont il
Hébreux n'accouchaient pas comme les femmes est dit: « qu'il ne s'est point trouvé de mensonge
des Egyptiens; à ce propos, on demande ordi- « dans leur bouche ', » n'ont pas vu, ce me
naii'ement si de pareils mensonges ont reçu la semble, mensonge, un exemple à
dans ce
sanction de l'autorité divine, puisqu'il est écrit suivre. Ceux qui mènent une vie bien éloignée
que Dieu fit du bien à ces sages-feûiines : mais de celle des saints, quand ils commettent ces
pardonna-t-il leur mensonge, en considération péchés de mensonge, s'y portent d'eux-mêmes
de leur humanité; ou bien jugea-t-il digne par tempérament et à mesure qu'ils a\ancenten
de récompense ce mensonge lui-même? c'est ce âge, surtout lorsqu'au lieu d'élever leui's espé-
qui n'est pas certain. Car autre chose était de rances vers les biens célestes, ils recherchent
sauver la vie aux enfants nouveau-nés, autre
chose de mentir à Pharaon : en sauvant la vie à ' Apoc. XIV , 5.
«2 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

exclusivement les biens de la terre. Mais ceux, même sensque quand est parlé du cri de Sodo- il

(loutla viecst, suivant le téinoignagede l'AptMre, me pour désigner une iniquité criante, sans
'

toute céleste i, ne doixeiil pas régler sur l'ex- crainte et sans pudeur.
emple des sagcs-lennues leur manière de parler, VI. (Ib. III, 'li.)Sur l'ordre que Dieu donna aux

quand il s'agit de dire la \érité et d'éviter le Hébreux de dépouiller les Egyptiens. Lorsque le —
mensonge. Au reste, cette question mérite d'être Seigneur ordonna aux Hébreux, par l'intermé-
traitée a\ec un soin particulier, en raison des diaire de Moïse, de prendre aux Egyptiens des
aulies exemples que fournit l'Ecriture. vases d'or et d'argent, et des vêtements, et qu'il
II. (Ib. n, 1-2.) Moïse tue un Egyptien en vertu de : ajoute : « Et vous les dépouillerez, » il ne faut pas
quel droitl — Dans l'ouvrage que nous avons écrit juger ce commandement comme contraire à
contre Fausius sur la vie des Patriarches, nous l'équité. C'est un ordre de Dieu: par conséquent
avons suffisamment disserté sur le meurtre de nous n'avons pas à le juger mais à y obéir. Dieu

l'Egytien, commis par Moïse: faut-il louer le saiten effet, quelle justice préside à ses com-
naturel ardentqui le fil tomber dans cette faute, maudeinents: quant au serviteur, il n'a qu'à se
comme ou loue la fécondité de la terre qui pro- soumettre par obéissance à ses ordres.
duit des plantes inutiles en abondance, avant Vil. (Ib. IV, 10.) Moïse est convaincu que Dieu
même que la bonne semence y ait germé ? Cet peut tout à-coup lui délier la langue — QuandMoïse
acte en lui-même est-il loul-à-fail excusable 2? dit à Dieu : « Seigneur, je vous prie de considérer
Il semble que non, par la raison que Moïse « queje ne parle facilement nid liier, ni d'avant-
n'était pas encore en possession de l'autorité légi- >< hier, ni depuis que vous avez commencé de
time, qu'elle lui vint de Dieu ou que la société « parler à votre serviteur, » on voit qu'il avait la

l'en eût revêtu. Néanmoins, au témoignage de ferme confiance que Dieu pouvait ,si c était son
saint Etienne dans les actes des Apùti-es, ses bon plaisir, lui accorder tout-d'un-coup le
frères, pensait-il, comprendraient que Dieu les don de la parole, puisqu'il ajoute « ni depuis :

délivrerait parson ministère 3; il semble, d'après « que vous avez commencé de parler à votre

cela et malgré le silence que garde ici l'Ecriture, V serviteur. «Celui, pensait-il, quijusque là n'avait
que Moïse avait été déjà autorisé par Dieu à faire pas eu le donde la parole, pouvait tout d'un coup
cet acte d'autorité. l'acquérir, dès lors que Dieu s'entretenait avec
III. (Ib. m, 4.) Est-ce un ange ou le Christ lui.

qui apparaît h Moïse dans le buisson ardentl — VIII. (Ib. IV, \\.) Sur ces mots: « C'est Dieu qui
« Le Seigneur l'appela du milieu du buisson. » « a fait le muet, etc. » — « Qui a fait le muet et
Le Seigneur était-il caché dans l'ange? ou le « celui qui entend, celui qui voit etcelui qui est
Seigneur est-il ici celui qui s'appelle « l'ange du « aveugle? N'est-ce pas moi,
le Seigneur Dieu? »
« grand conseil » et qui est le Christ!' Car
'
11en est qui fout un reproche à Dieu, ou plutôt
nous lisons plus haut: «l'Ange du Seigneur lui à rAncien-Teslament, d'avoir dit que c'est
« apparut dans une flamme de feu, du milieu du Dieu qui a fait l'aveugle elle muet. Que pensent-
« buisson. » ils doncde cette parole si nette de Notre-Seigneur
IV. (Ib. ni, 8.) Sur la terre promise. — « Les Jésus-Christ dans l'Evangile « Je suis venu pour :

« faire passerde cette terre dansuneterre bonne « que ceux qui ncvoient point, voient, etque ceux
« et spacieuse, où coulent le lait elle miel. » « qui voient, deviennent aveugles ' ? » Mais
Celte terre, où le lait et le mie! coulent par ruis- quel homme,
moins d'être insensé, croira qu'il
à
seaux, doit-elle être entendue dans le sens spiri- puisse exister dans son semblable un défaut cor-
tuel?car, dans le sens propre, telle n'était pas la porel, contrairement à la volonté divine? Au
terre qui donnée au peu|)lc Israélite. Est-ce une
l'ut surplus, personne ne doute que Dieu est juste
manière de parler pour faire l'éloge de sa fécon- dans toutes ses volontés.
dité et de ses agréments ? IX. (II). IV, i'2.) Le commencement même de la
V. (Ib. ni, !).) Sur le cri des Isrnëlites. « Et — volonté est l'œuvre de la grâce. — Lorsque le
'< maintenant voici (|ue le cri des enfants d'Israël Seigiieurdit a Moïse ;
« Va maintenant, et j'ouvri-
« vient jusqu'à moi. » Le mot cri n'a pas icile « rai la t'apprendrai ce que tu auras
bouche, et je
« on voitaisément dausce pasage qu'il ap-
à dire, »

partienlà la volonté et à la grâce de Dieu, non-


' Philip, m, 20.— 2 Cent. Fausius liv. xxil, ch. 60, et suiv. -. ' Acl.
VIII, 25. — * Isa. IX, 6. '
Gen. xviii, 20. — ' Jean, ix, 39.
LIVRE FI. — QUESTIONS SUR L'EXODE. 418

seulement il'enscipncr à parlei-, mais iiK'^me fait bien voir que Moïse devait charger son frère
d'oiivrii- la lioiirlie. Ilieu ne dit pas, en elTet :( tuvic (In soin de les cxijrimer car si Aaron devait seu-:

la bdiiiiic el je l'iiistiiiiiai, mais il piDiiii'l riiiii'l lement les cuIcMiIre eoinine le peu|)le, c'est à ses
l'autre :j'(iHr(7;«(,el////.s/;(/(;7//. Il (lit ailleurs, au.\ oreilles et non dans sa bouche qu'il fallait les
psaumes •
« Ouvre ta bouche, et je ta rempli- faire arriver. 11 dit un peu plus loin « Il par- :

« rai '. » Ces mots mar(|uent, dans l'iiomme, la tilera pour loi au peuple, et il sera la bouche, »

\olonté de recevoir le don que Dieu l'ait à celui sous-entendu, ici, ilevaiit le iïcujiU'. Et quand il
i|ui le veul . Ohi7<' f(/ /johc/u', voilà qui se rap- dit « 11 parlera pour loi an peu[)le, " Dieu fait
:

porte au conuneneemenl de la volonté ; et je la assez entendre que Moïse tient la première place,
leiiiplirai, voilà IVeuvre de la gi-àce. Mais et qu'Aaron ne tient (jue la seconde. Enlin dans
Dieu dit ici : « J'ouvrirai ta bouche, et je t'ins- ces dernières paroles : « Et toi, tu le représen-
truirai, » « dans tout ce qui a rapport à Dieu, » se
teras
X. Sur la colère de Dieu.
(Ib. IV, li-16.y — cache peut-être un mystère profond ligure par
« Le beigneur, ennuie colère, lui dit. » La colère Moïse, médiateur entre Dieu et Aaron, tandis
de Dieu, n'est pas chez lui, comme chez l'hom- que celui-ci est médiateur entre Moïse et le

me, le résultat d'un trouble déraisonnable; une peuple.


l'ois pourtoules, il laut retenir celte réllexion, et XI. (Ih. VI, "2i-25.) Sur la rencontre de Moïse
en laire usage dans les cas où l'Écrilure emploie avec rAmje qui vient le mettre à mort. — « Et il

de pareilles expressions, aliii que nous ne soyons « arriva que l'Ange se présenta à lui dansleche-
pas obliges de redire souvent les mêmes choses. « min, au moment du repas, et cherchait à le
Mais on ilemande avec raison pourquoi, dans « mettre à mort; et Séphora, ayant pris une
sa colère, ildilàMoisequeson trère parlera pour « pierre, circoncit la chair de son lils et elle se ;

lui au peuple: car ilsemble qu'il punit sa delian- «jeta à ses pieds et dit Le sang de la circon- :

ce enne lui accordant pas le pouvoir Irès-étendu « cision de mon lils s'est arrêté. Et l'Ange se re-

qu'il devait lui donner, et en voulant qu'ils soient « tira de pourquoi Séphora dit Le sang
lui; c'est :

deux pour accomplir ce qu'il aurait pu faire à « de la circoncision a cessé. » Sur ce texte on
lui seul, s'ilavait eu conliance. Cependant toutes fait (l'abord cette question : était-ce Moïse que
ces paroles, à les bien prendre, ne signilicnt pas l'ange voulait mettre à mort, puisqu'il est dit :

que Dieu dans vengea par les fa-


sa colère se « L'ange vint au devant de lui et cherchait à le faire
veurs accordées à Aaron. Voici en effet ce qu'il est « mourir? Car à qui pensera-t-on que l'ange
>>

dit « Aaron ton frère, lils de Lévi, n'est-il pas


:
se présenta, ce n'est à celui qui était en tête de
si

« là?Je sais qu'il parlera de sa propre bouche. » tous les siens et leur servait de guide ? Ou bien

Ces paroles font voir que Dieu le reprend plutôt de l'ange voulait-il la mort de l'enfant, que sa mère

ce que, ayant un frère qui pouvait dire de sa sauva par l'opération de la circoncision? Dans ce
part au peuple ce qu'il voudrait, il s'excuse d'o- cas, l'Ange aurait voulu la mort de l'enfant parce
béir, sur son incapacité, et objecte qu'il a la voix (ju'il n'était pas circoncis, etcechàtiineiit sévère
grêle et la langue embarrassée, tandis qu'il au- eût été la sanction du précepte de la circoncision.
raitdû tout attendre de Dieu. Ce qu'il avait pro- S'il en est ainsi, on ne voit pas à qui s'appliquent
mis peu auparavant, le Seigneur le confirme ces paroles qui précèdent ; « Il cherchait à le

I après la colère qu'il a éprouvée. Il avait dit en « mettre à mort ; » il faut rester dans l'ignorance
effet : « J'ouvru'ai la boiuihe, et je t'instruirai; » à ce sujet, à moins que la suite ne le découvre .

il dit maintenant : « J'ouvrirai ta bouche et la Assurément l'Ecriture, se sert d'une locution fort
« sienne, et je vous instruirai de ce que vous devez extraordiiiiiaire, quand elle dit « lise ])réseiita :

« faire mais comme il ajoute « Et il parlera


; » :
« à lui etclierchait à le tuer, » à propos de quel-
« pour toi au peuple, » il semble avoir ouvert la ([u'un dont elle n'avait pas parlé auparavant.
bouche à Moïse, parce qu'il s'était plaint que sa Mais la même
manière de parler se trouve dans
langue fut embarrasée. Quant à sa voix grêle. le Psalmiste « Ses fondements sont établis sur
:

Dieu ne la change point, mais pour y suppléer, <c les montagnes saintes le Seigneur aime les ;

il lui donne l'aide de son frère, dont la voix « portes de Sion Tel est en effet le début du
' . >-

pom'ra suffire à enseigner le peuple. Ce qu'il Psaume, et rien n'avait été dit auparavant de ce-
dit : « Tu mettras mes paroles dans sa bouche, » lui ou de celle à qui il est l'ail allusion dans ces

'Ps. LXXX.ll. '


Ps.LXXXT.l,
,

414 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

paroles : « Ses fondements sont établis sur les que Dieu a donné l'ordre de le transporter de
« montagnes saintes. » Mais, comme il est dit l'Kgyiite dans la terre de Chanaan: tandis qu'on
ensuite : « Le Seigneur aime les portes de Sion, » dit à Pharaon que les Hébreux veulent aller trois

il est question nécessairement dans ce passage journées de chemin dans le désert, pour offrir
des fondements du Soigneur ou de Sion, et au Seigneur le sacrifice qu'il leur a eaminandé?
mieux, dans un sens plus naturel, des fonde- Quoique Dieusùt cequ'il ferait, car il avait la pres-
ments de cette cité. Toutefois comme le pronom cience que Pharaon ne consentirait pas au
ejus est d'un genre indéterminé (car il est de départ de son peuple, il faut se persuader que ses
tout genre, masculin, féminin et neutre,) tandis premiers ordres se seraient accomplis, si le peu-
qu'en grec on dit àur»;; au féminin, et à\j-o'j ple eût été libre de partir. Et si les événements
pour le masculin et le neutre, et que le texte se passèrent comme l'Écriture en fait plus loin
grec porte «utoO, il s'agit évidemment ici, non la description, c'est à l'obstination de Pharaon et

point des fondements de Sion, mais des fonde- des siens qu'en revient la responsabilité. Car Dieu
ments du Seigneur, c'est-à-dire, de ceux qu'il a ne prescrit point d'une manière menteuse des
établis conformément h ces paroles « C'est le : ordres qu'il sait devoir être transgressés, pour
« Seigneur qui bâtit Jérusalem •. » Et cependant exercer ensuite envers le coupable la justice de
avant de dire « Ses fondements sont établis sur
: ses jugements.
« les montagnes saintes, » le Psalmiste n'avait XIV. (Ib. V, 22, 23.) Prière de Moïse. — Lors-
parlé ni de Sion ni du Seigneur; de même, ici, que Moïse dit au Seigneur Pourquoi avez- : «

sans qu'il eût été fait mention de l'enfant, il est « vous affligé votre peuple ? Et pourquoi m'avez-
dit : « Il se présenta i\ lui, et cherchait à le met- « vous envoyé ? Car depuis que je me suis pré-
« tre à mort; » et c'est par la suite du récit que « sente à Pharaon pour lui parler en votre
nous découvrons de qui il est question. Néan- « nom, en faveur de votre peuple, vous n'avez
moins si quelqu'un préfère appliquer ce passage « pas opéré sa délivrance ; » ce ne sont pas là
à Moïse, il ne faut pas beaucoup disputer avec des paroles inspirées par la désobéissance ou l'in-

lui sur ce point. Mieux vaut, s'il est possible, avoir dignation une question et une prière on
; c'est :

l'intelligence de ce qui suit Pourquoi l'Ange se : le voit par la réponse que lui adressa le Seigneur.

garda-t-il de mettre à mort l'un ou l'autre, quand Il ne lui fait point un reproche de son manque

la fennne eut dit « Le sang de la circoncision


: de foi, mais il lui fait part de ses desseins pour
« de l'enfant s'est arrêté? » Car l'Écriture ne dit pas : l'avenir.

l'Ange laissa l'enfant, parce que sa mère le cir- XV. (Ib. VI, 14-28.) Généalogie de Moïse. — Il

concit, mais, parce que le sang de la circonci- n'est point douteux que ici l'Écriture voile quel-
sion s'arrêta non parce qu'il sortit à flots, mais
;
que mystère. Car voulant établir la généalogie
parce qu'il cessa de couler. Si je ne me trompe, de Moïse, ainsi que l'exigeait le sujet lui-même,
il y a ici un grand mystère. elle commence par faîne de Jacob, c'est-à-dire

XIL (Ib. IV, 20.) Contradiction apparente. — par Ruben, puis de là vient àSiniéon, et enfin à
Il est dit que Moïse mit sa femme et ses enfants Lévi; elle ne va pas plus loin, parce que Moïse
sur des chars, pour se rendre avec eux en Egypte, était descendant de ce dernier. Si elle nomme
et plus loin, que Jéthro, son beau-père, vient au- les autres. C'est qu'ils avaient été déjà été men-
devant de lui avec les mêmes personnes, après tionnés parmi les soixante quinze personnes
que Moïse a tiré son peuple de l'Egypte 2 ; on peut (pii firent leur entrée*en Egypte avec Israël :

demander comment la vérité s'accorde avec ces car ce n'était ni la première tribu, ni lasecondi",

deux passages. Mais il faut croire que Séphora mais la troisième, celle de Lé\i, que Dieu desti-

reprit avec ses enfants lechemin de son pays, nait au ministère sacerdotal.
lorsque r.\nge menaça de mort Moïse ou l'enfant. XVI. (Ib. VI, 30.) Moïse s'e.rcuse .'<ur la faiblesse

Car, au sentiment de plusieurs interprèles de sa voix. — Quand Moïse dit : " Je suis d'une

l'Ange mit l'épouvante dans son àme, afin que la « voix grêle, et comment Pharaon m'écoutera-l-
compagnie d'iuie lemnie ne fût point un obsta- « il?" il semblerait qu'il allègue la faiblesse de sa
cle à la mission (pie .Moïse a\ait reiue de Dieu. voix pour s'excuserde ne pouvoir se faire entendre,
XII. ([b. V, 1-3.) Dieu nunlonne ijne ce (ju'il non-seulement de la multitude mais même d'un
veut qu'on fasse. — Pourquoi dit-on au peuple seul liomme. (élonnant que sa voix efit
tr, il serait

— été faible à ce point qu'il ne pût se faire enten-


' Ps. cxLvi,2. - Ex. xviii, 1-5.
LIVRE II. — OrESTIONS SUR LTAHOF 418

drc d'un seul liomnie Ponf-iMic cependant l'éli-


!
céder humblement, Pharaon n'sistait avec obs-
tinalion, ils lïncnl ime [)ermissi(tn de la divine
(luelte de liùoinciniu^li.iil-clli' (l'iippiiMlier de la
personne du roi pour lui parler '.'Mais il est dit à sagesse, qui pic'p.irail à ce C(eur un ehàlimeni,
Moïse « Voici (pie je t'aiétal)li le dieu de IMia-
:
non-seulement mérité, mais évidemment plein de
i.» justice, et où les hommes craignant Dieu trou-
« raon, etAaron, Ion (lère, sera ton |ii()|iiiète

Wll. (11). IV, lli; vil, \.) Mnis('iiiiiicl(-li' IHi'u de veraient une lec.on. Etant |)roposc(', par exemple,

Vliariwn, ftAaroii, le iimphi'ti- de Moïse. — Chose une récompense pour la perpétration d'un homi-
Dieu ne pas à Moïse, cide, l'avare celui (pii méprise la loiiime seront
dinne de reinanpie ! dit (>t

lorsqu'il l'envoie vers son peuple : Voici (pie je t'ai musdans unsensditïérent; porléà com-
l'un sera

de ton |)euple, et ton Irère sera ton


établi le dieu mettre le crime; l'autre à s'en défendre: la pro-
prophète, mais « ton lïère parlera pour toi
:
position du bénéliee à retirer n'était eeiiendant
« au peuple. » Il lui dit encore « Il sera ta :
au pouvoir d'aucun des deux. C'est ainsi qu'il se
« bonche, et tu le repirsenleras dans tout ce qui pi-ésente, i)our les méchants, des causes d'agir

« a rapport à Dieu; » il ne dit (las : ïu seras qui ne sont point en leur pouvoir, mais qui

son Dieu. Mais Moïse est établi le dien de l*ha- les trouvant déjà engagés dans leurs propres vices

raon, et par analogie, .Varon, le prophète de et par suite d'un choix antérieui' de la volonté,

Moïse, toutefois à l'égard de l'haruon. 11 nous les portent à suivre leurs penchants. Toutefois
il faut bien voir si ces paroles « J'endurcirai, » ne
semble résulter de là que les prophètes de Dieu :

raiiliorlent les paroles (ju'ils tiennent de lui, et peuvent aussi signifier je montrerai combien :

qu'un prophète n'est autre chose que l'organe son cœur est dur.

par lequel Dieu adresse ses paroles aux hommes XIX. (Ib, Sur le rôled'Aaron.
vn, 9. ) « Si —
incapables ou indignes de l'enlendi-e,
K Pharaon vous dit Donnez-nous un miracle
: ou
« un prodige, tu diras à Aaron, ton frère: Prends
X.VI11. (Ib. \u,H.) Endurcissement du cœur de

Pharaon. —
Dieu dit à plusieurs reprises: «J'endur-
« une verge, et jette-la devant Pharaon et
« ses serviteurs; et ce sera un dragon. » Assuré-
« cirai leconir de Pharaon,» et il donne poui- ainsi

dire la raison de sa manière d'agii' « J'enplirai :


ment, dans ce cas, il n'était pas nécessaire de re-
« durcirai, dit-il, le cœur de Pharaon, et j'accom-
courir au ministère de la parole, créé en faveur

« mes merveilles et mes prodiges en Egypte; »


d'Aaron par une sorte de nécessité, pour venir
en aide à l'infirmité de Moïse il s'agissait uni-
On dirait que rendureissementdu ccrur de Pha- :

raon est comme la condition indispensable à la quement de jeter la verge qui devait se chan-
multiplication on à l'accomplissement des pro- ger en serpent. Pourquoi donc Moïse n-a-t-il pas

diges de Dieu en Egypte. Dieusaitdoncse servir accompli lui-même cette action, sinon parce
des cœurs mauvais, pour l'instruction ou l'utilité que cette médiation d'Aaron entre Moïse et Pha-
des bons. Et quoicpiele degi'é de malice dans
raon renferme la ligure d'un événement consi-
chaque cœur,ouaulrenient, le penchant de cha- dérable ?

XX. (Ib. \u,in .)Sur la veriie de Moïse et d' Aaron.


cun au mal, soit le résultat d'un vice person-
nel, issu du hbre libre clioix de la volonté;
— Autre remarque. llestécrit,à propos du mira-
cle opéré sous les yeux de Pharaon « Et Aaron
cependant, pour que le cœur soit porté au mal
:

« jeta sa verge. » Si l'Ecriture avait dit Il jeta


dans un sens quelconque, il y a des causes qui :

agissent sur l'esprit l'existence de ces causes la venie, il n'y aurait pas matière à discuter;
: ne
dépend pas de rhonmie;mais proviennent elles
mais comme elle metlcmot.sa, bien que Moïse

de cette providence cachée, assurément très- juste la lui eût donnée, ce n'est peut-être pas sans
raison que le texte est ainsi con(,u. Cette verge
et très-sage, par laquelle Dieu règle et dispose
tout ce qu'il a créé. Ainsi, que Pharaon eût un leur aurait-elle été commune à tous les deux, de

C(eurcapablede Irouveidaiisla patience de Dieu sorte qu'on pourrait la regarder comme appar-

un non au bien mais au mal, ce l'ut


excitant,
tenant à l'un aussi bien qu'à l'autre ?

XXI. (Ib. VII, i-2.) Chançiement des rm/cs en


en un vice personnel mais quant aux évé-
lui

nements qui déterminèrent ce crem- si dépravé à


;

serpent. — Ella verge d'Aaron dévora leurs ver-


«

« ges. » Si le texte eût porté Le serpent d'Aaron .

s'opposer aux ordres de Dieu, car c'est là, à propre-


ment parler, reiuhircisseiiient, puisqu'au lieu de
dévora leurs verges, on eût compris que le ser-
pent d'Aaron dévora, non des serpents imaginai-
'Ex. VII, 1. res, mais des verges. Car il a pu dévorer des verges
«6 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

réelles, non des apparences sans réalité. Mais nous lorsque les enchanteurs eurent montré leur im-
lisons : « La verge d'Aaron dévora leui's verges » ; puissance.
or, sile serpenta pu dévorer les \ erges des magici- XXlII.flb.vin, 7.) Comment lesmagiciens purent
ens, lavergenelepouvaitpas.Aulieud'appelcr la imiterMoïseet Aaron, après la seconde pluie et la
chose du nom de l'objet auquel elle a été changée, troisième. — «Maisles enchanteurs Egyptiens firent
l'Ecriture lui donne donc le nom qu'elle avait « la même chose par leurs sortilèges ; et ils firent
avant son changement, par la raison qu'elle est « venii- des grenouilles sur la terre d'Egypte. »
revenue ensuite à son premier état; il convenait De quel demande-t-on, si déjà ce pro-
endroit,
d'aillems de lui donner le nom qui exprimait dige était accompli partout ? Mais il faut deman-
sa nature principale. Mais que faut-il penser der aussi comment ils changèrent l'eau en sang,
des verges des mages? Furent-elles changées aussi si déjà dans toute l'Egypte l'eau avait subi ce
en serpents véritables, et sont-elles appelées changement miraculeux. On doit donc supposer
verges au même titre que la verge d'Aaron ? que le pays habité par les enfants d'Israël ne fut
ou plutôt, par un prestige de l'art magique, pas frappé de plaies semblables : alors les en-
ne semblaient-elles pas être ce qu'en réalité chanteurs ont pu y puiser de l'eau qu'ils ont
elles n'elaientpoinl?Pourquoi donc les unes et les changée en sang, ou en tirer des grenouilles, uni-
autres sont-elles appelées verges el serpents, sans
quement pour montrer leur puissance magique.
aucune distinction, quand il est parlé de ces presti- Rien n'empêche non plus d'admettre qu'ils se sont
ges '/Si l'on admet que les verges des magiciens ont
livrés à ces malécifices après que les vrais mira-
été changées en serpents véntables, une nouvelle
cleseurent cessé. Le rapprochement des faits,
et sérieuse ditficidté se présente, car il faut dé- dans le récit de l'Écriture, n'indique pas qu'ils se
montrer que la création de ces serpents ne fut 1 œu- soient accomplis simultanément.
vrenides magiciens, nidesmauvaisanges par qui XXIV. (Ib. vin, lo.)SurlapatienredeDieu. « Et —
ils opéraient lems enchantements. Or, parmi tous
« Pharaon vit qu'il y avait un peu de relâche, et
les éléments corporels de ce monde sont cachées « son cœur s'appesantit, et comme le Seigneur

des raisons séminales, qui, à l'aide du temps et « l'avait dit, il ne les écouta point. » On voit ici que

d'une cause favorables, deviennent des espèces si Pharaon tomba dans l'endurcissement, cène fut

déterminées par leurs qualités et les fins qui leur pas seulement parce que les enchanteurs faisaient
sont propres. C'estpourquoi onne dit pasdes an- la môme chose que Moïse et Aaron mais ce fut ;

ges, par qui ces êtres arrivent à la vie, qu'ils créent encore à cause de la patience et de la longani-
de animaux, pas plus qu'on ne dit des laboureurs mité de Dieu. La patience divine à l'égard du
qu'ils créent les moissons, les arbres ou toute autre cœur de l'homme est utile à quelques-uns, qui
productionde la terre, parcequ'ils savent utiliser en profitent pour se repentir inutile à d'autres, ;

les causes visibles et les circonstances favorables qui en abusent pour s'obstiner contre Dieu et
au développement. Ce que ceux-ci ma-
font d'une persévérer dans le mal cependant son inutilité :

nière visible, les anges l'opèrent d'une manière ne vient pas de sa nature, mais, ainsi que nous
invisible; mais Dieu seul, est vraiment créa- l'avons dit, de la dépravation du cœur. C'est aussi
teur, lui qui a déposé dans la nature les causes cl ce que ditl'Apùtre «Ignores-tu que la patience :

les raisons séminales. Je dis tout cela en peu de « de Dieu t'invite au repentir? Mais par la durc-

mots; mais pour le faire mieux comprendre et « té de ton cœur et par ton impénitence, tu l'a-

l'appuyer d'e\ein])les et d'une discussion sérieuse, « masses un trésor de colère pour le jour de la
il faudrait un long traité la précipitation qui « vengeance et de la manifestation du juste jii-
;

préside à ce travail nie servira d'excuse. « gement de Dieu, qui rendra à chacun selon
« ses œuvres » Et ailleurs après avoir dit
XXII. (Ib. vii,^r2.) Mutif de reudiircissemeut de • . , :

Pharaon. — « Maisles magiciensd'Egypte fii'enthi « Nous sommes partout la bonne odeur du


«même chose avec leurs enchantemenls: et le « Christ, » il ajoute « Et à l'égard de ceux qui;

'< cœur de Pharaon s'endurcit, et, comme l'avait « se sauvent, et à l'égard de ceux qui se

«ilitle Scigncm', il ne les écouta point. » D'après « perdent '. » n ne dit pas qu'il est la bonne
ces paroles, sendderaitquelecœur de Pharaon
il (uleur du Christ pour ceux qui se sauvem, et la

s'endurcit parce que les enchanteurs Egyptiens mauvaise pour ceux qui se perdent mais il dit :

imitèrent Moïse et Aaron mais la suite fera ;


uniquement la bonne odeur. Or, ceux qui
qu'il est

voh- combien fut grande encore son obstination I


Boni. II, 4-6. — -'
11 Cor. 11, 15.
-

IJVKE II. — Ul ESTIONS SlIIl LliXDDE 411

sesaiivoiif, pipin^ par la bonneoilciii- (lii('lii'isl, èlre fiappés d'iinpiiiss.mcc dès le premier
nuniront, ainsi que nous l'avons dit sdummiI, à prodige, celui du cbangeincut delà verge en
celle disposition de l'Ame qui doil faire place serpent, et à la première plaie, lorsque l'eau
en eux à niu^ volonit' Ixmiio inspirée pai- laf^rà- fut changée en sang cl à la seconde, celle des
;

ce divine : ils l'oninienfeiil alors à [)ioHiei' des grenouilles, si le doigtdc Dieu, c'est-à-dire, l'Es-
jufïenienls de Dieu, qui l'ont le malheur des in-ms pritde Dieu, l'avait voulu. Uiielest enelTet l'hom-
dépravés. Delà eelte hymne sortie d'un e(eur me assez insensé pour dire ipiele doigt de Dieu
hem-eusement tianstortué : « .Mou âme vivra cl piitarrèlerlcs efforts des magiciens à ce |»|-(ulige,

« vous louera; et vos Jug:emenls me soulieu- et qu'il en fut incapable h ceux qui précédèrent ?

« (Iront n '. Il ne dit pas : ''os bienfaits, ou Vos Il yadonccertainementune raison pour laquelle
récompenses, umùsvos jiniemeiits. Or c'est hean- ils ont eu la liberté d'opérer jusipie là des choses
coujjde pouvoirdireavec une sincère confiance: merveilleuses. Peut-être ceci a-t-il rapport à la
« Eprouvez nuTi, Seigneur, et tentez-moi ; b.'ù- Trinité: il est certain, etccla résultede l'examen
« lez mes reins et mou cœur.» El dans la crainte de leurs écrits, que les plus grands philosophes
de paraitie attribuer àses forces quoi (piecesoit, de la gentiiité n'on point connu le Sa'nt-Esprit,
il se hâte d'ajouter Car votre miséricorde est
: « quoiqu'ils aient parlédu Père et du Fils: on trou-
I « devant mes yeux, et je me suis complu dans ve aussi cette remarque dans l'ouvrage de Didy-
1 votre vérité '. » Ilra|)pclle la miséricorde dont me sur le Saint-Esprit '.

il a été l'objet, et (pii l'a aidé à se conduire se- XXVI. (Ib. viii, :2l-23.) Les plaies d'Egijpte ne
lon la \érité : c'est que « toutes les voies du Sei- s'étendaient passurlaterre de Gessen. — « Voici
« gneur sont miséricorde et vérité^. » « quej'envoiedes mouches contre toi, contre tes
\\V.(lb. vni, 19.) Les maiiiviens uf peuvent c( serviteursel contre ton peuple, etlesmaisonsdes
produire des mouvlierons pourquoi ? Lorsque :
— «Egyptiensen seront remplies; afinquetu saches
les magiciens dirent à Pharaon « Le doigt de : « que je suis le Seigneur Dieu de toute la terre :

« Dieu est ici, » réduits qu'ils étaient à l'im- <i et je une séparation entre mon peu-
mettrai
possibilité de produire des moucherons; ils « pie et ton peuple. » Ce que l'Ecriture observe
pensèrent assurément, tant ils connaissaient ici, pour ne pas le répéter constamment, il faut
la puissance de leurs coupables artifices, que le comprendre, s'est produit dans les miracles
leurs pour produire des moucherons
efforts qiù ont suivi ou précédé celui-ci le pays ha- :

avaient été rendus inutiles, non par un art sembla- bité par le peuple de Dieu ne fut affligé d'aucu-
bleauleur.en ce sens que Moïse s'\ serait montré ne de ces plaies. Mais il était convenable de pla-
supérieur à eux, mais par le doigt de Dieu, qui cer franchement en cet endroit cette observation ;

agissait en la personne de Moïse. Or, par le ici, en effet commencent les prodiges que les
doigt de Dieu, ou entend le Saint-Esprit, suivant magiciens n'essayèrent pas même d'imiter :

le langage très-net de l'Evangile. Car, taudis et très-ce! tainement, c'est parce que les mouche-
qu'un Evangcliste fait dire au Seigneur : « Si je rons remplissaient tout le royaume de Pharaon,
« chasse les démons par«le doigt de Dieu*, »
à l'exclusion de la terre de Gessen, que lesmagi-
un autre Évangéliste, rapportant le même fait et ciens s'efforcèrent, mais sans le moindre succès,
voulant exphquer ce que c'est que le doigt de d'en produire aussi dans cettedernière contrée.
Dieu, se sert de ces exprsesions : « Si je chasse Tant que leur art n'a pas été en défaut, le texte
»« les
les démons par l'Esprit de Dieu
magiciens, dont le pouvoir inspirait une ex-
^. » Bien que sacré ne dit pas que la terre de Gessen ait été pré-
servée, maisil signale' la séparation des deux
trême conlîauce à Pharaon, aient avoué alors pays quand commencent les prodiges que les
que le doigt de Dieu était sur Moïse, par qui ils magiciens n'osèrent pas même imiter.
vamcus et réduits à l'impuissance, né-
avaient été XXVII. (Ib. VIII, 25.) Pcrmision dérisoire —
anmoins le cœurde Pharaon s'endurcit d'une ma- « Le texte latin porte : « Allez sacrifier au
nière tout-à-fait étonnante. Mais pourquoi la dé- « Seigneur votre Dieu dans ce pays, » et le
faite des magiciens à cette troisième plaie ? car grec « Venez
: sacrifier au Seigneur votre
les plaies commencèrent lorsque l'eau fut chan- «Dieu dans ce pays. » Car il ne voulait pas les
gée en sang. 11 est difficile de s'en rendre compte laisser aller où ils demandaient; mais il exigeait
et d'en donner l'explication. Car ils pouvaient qu'ils offrissent leur sacrifice en Egypte. Ceci res-
' Ps. «Tltl, 175.— »Ps. .TXV, 2, 3. ^Ps. xxiT, 10. — * Luc, XI,
ÎO. — 'Matt. «11,28. ' Didym. Ht. 1 sur l'Esp. St.
418 QUESTIONS SLR L'HEPTATEUQUË.

sort évideniiniMit de la réponse de Moïse : car il nières les uns dans un sens, les autres dans un
,

dit que cela ne i)eutse faire; parce qu'ils seraient autre, chacun suivant les dispositions particuliè-
un objet d'abonnualion pour les Egr^ptiens. res, qui ont leur principe dans la volonté.
XXVIII. II). vin.^B.; Les sticri fiées des Israélites XXX. (Ib. IX, ".) Progrès de l'endurcissement
abuminablesaux yeux des Egyptiens. Ces paroles — de Pharaon. — « Lorsque Pharaon vit qu'aucun
de Moïse « Cela ne peut se faire ainsi car nous
: :
« des animaux des enfants d'Israël n'était mort,
« sacrifierons au Seigneur notre Dieu lesabomi- « son cœur s'endurcit. » Comment cet endurcis-
« nations des Egyptiens, » signifient : Nous le- sement du cœur de Pharaon eut-il son origine
rons des sacrifices odieux aux Egyptiens, par con- dans des motifs opposés? Si les troupeaux des Is-
séquent nous ne pouvons sacrifier parmi eux ;
raélites avaient péri, il y aurait eu pour lui, ce

tel est le sens qui résulte clairement des paroles semble, une raison suffisante de s'endurcir jus-
suivantes nous sacrifions des abomina-
: « Car si qu'à mépriser Dieu, comme si ce désastre était

<clions sous leurs propres yeux, nous serons lapi- l'o'uvrede ses magiciens mais nîaintenanf qu'il ;

« dés. » Plusieurs de nos interprètes, se mépre- voit que pas un des animaux des Hébreux n'a
nant sm'le sens de ce passage, l'ont traduit de cette péri, son cœur s'endurcit, quand il aurait dû se

manière: Cela ne peut se laire ainsi; est-ce que sentir porté à la crainte ou à la confiance : voilà

nous sacrifierons au Seigneur notre Dieu ce qui est jusqu'où a pu aller son endurcissement.
abominable aux yeux des Egyptiens? Mais l'Ecri- XXXI. ilb. IX, 8. ) Sur le rôle de}[oïse et d'A-

tm'e a précisément voulu dire que les Hébreux tiron dans l'opération des miracles. — Que signi-
devaient immoler ce qui était une abomination fient ces paroles de Dieu à l'adresse de Moïse et

pour les Egyptiens. D'autres encore parmi les d'Aaron : « Prenez, plein vos mains, de la cen-
latins traduisent : Cela ne peut se faire ainsi, « dre du foyer et que Moïse la jelte vers le ciel
parce que nous ne ferons pas au Seigneur notre « en présence de Pharaon et de ses serviteurs,
Dieu des sacrifices que les Egyptiens considèrent « et quelles'étende en poussière sur toute la terre

comme abominables. L'addition de la particule « d'Egypte. » Les miracles précédents s'opéraient


négative constitue un contre-sens, puisque Moïse avec la verge qu'Aaron, et non point Moïse, éten-
a dit : « Cela ne peut se h\re ainsi ; car nous sa- dait sur l'eau, ou dont il frappait la terre; mais

« au Seigneur notre Dieu desabomina-


crifierons ici, après les deux miracles relatifsaux mouches
« tionsles Egyptiens; » et s'ils exprimaient
pour et à la mortalité des troupeaux, où ni Aaron ni
la volonté d'aller au désert, c'était afin que les Moïse n'ont point ai)porté lesecoursde leur main,
il est dit que Moïse doit jeter au ciel la cendre
Égyptiens ne fussent pas témoins de leurs abo-
minations. 11 laiit voir ici le même sens mysté- de la fournaise deux doivent en pren-
; tous les
dre; mais l'un pom- lajetterau ciel, l'autre pour
rieux, que nous avons déjà signalé à propos des
pasteurs, qui étaient détestés des Egyptiens i; la répandre à terre Aaron, dont le ministère :

c'est le motif pour lequel les Israélites reçurent regardait le peuple, dut frapper la terre ou éten-

ime contrée à part, quand ils vinrent en Egypte. dre la main soit sur la terre, soit sur l'eau ;tandis
Les sacrifices des Israélites sont un objet d'bor- que Moïse dont il a été dit « Tu le représenteras :

« dans toutes les choses qui ont rapport à Dieu «


reur pour les Egyptiens, comme la vie des justes
' ,

pour les méchants. reçoit l'ordre de jeter la cendre au ciel. Que

XXIX. (Ib. viii, 32.) L'endurcissement de Pha- signifient les deux miracles précédents où
raon voluntaire dans son principe. Après la — Moïse ni Aaron n'eurent aucune part? Pourquoi
disparition des sauterelles, il est dit de Pharaon :
cette différence ? Ce n'est pas pour rien.

« Mais en ce temps-là encore Pharaon endurcit


XXXII. (Ib. IX, 16.) Patience de Dieu à l'égard

«son cœur, et ne voulut point permettre au peu- de Pharaon. — « La vie t'a été conservée, pour
« pie de s'en aller. » Cette fois à coup sûr nous ne
« faire éclater en toi ma puissance et pour rendre
lisons pas :1e cœur de Pharaon fut endurci, mais:
« mon nom célèbre par toute la terre. » L'Apôtre
« Pharaon endurcit son canir. » C'est ce qui ar-
cite ces mêmes paroles de l'Ecriture, en traitant
riva certainement à toutes les plaies. Les vices ce sujet extrêmement difficile. Et il ajoute :

ont en effet leur principe dans la volonté de « Mais si Dieu, voulant montrer sa colère et

l'homme. Des causes, souvent les mêmes, meu- « faire éclater sa puissance, a supporté les vases

vent les cœurs des hommes de différentes ma- « de colère avec une grande patience » en épar-

' Gcn. XLVI, 34. I


Ex. IV, 16.
.

LIVRE II. QUESTIONS SUR L'EXODE. 419

«ïnaiit ri'M\ (in'il sa\ait dans sa iircscioricc devoir « maisons ; mais celui (|iii dansson Cd'ur ne fit

ùtir navlianls, et aii\(iiit'ls l'A|ioli(' doiiiic \v. « poiid altenlion à la parutedu SeigMcnr laissa

nomde «vases pr(^paréspoiir la pcMililioii, c'csl >< « périr ses troupeaux dans les champs. " U"oi-
aussi, coiiliiiiio-l-il, adiidf l'aire voir les riclies-
>< ([ue riMM-iture garde le silence à ce sujet, les cho-
« sesdesanloiresiiiles\asesde iiiisérieorde. '» De ses ont aussi bien |)U ari'ivei' de cette manière,
h\,daiis les l'saiiinos, ce mot des vases de iniséii- (piand Dieu menaça dv, faire péril- les troupeaux.
corde : « Mon Dieu me préviendi'a par sa misé- XXXIV. (Ib. w,"}'!.) lim- xcrondc foin. Moïse
« ricorde; mon l>ien s'esl deiiioiitrépour u)oi éli'Vt' samaiii vt'rs leciel. — «Elle Seigneurdit à
« coulre mes ennemis '. « Dieu sait donc se « Moïse: Etends ta main vers le ciel, et il y aiu"i de
servir des mc'-cliants, qu'il n'a point cependant « la grêle dans toute la terre d'Egypte. » C'est pour
créés poiu' le mal, mais il les supporte patiem- lasecondefois (jue l'ordre est donné à Moïse d'é-
ment jns(pi'an temps (]ui lui send)le ()[)p()rltm; tendre samaiii,nonsur la tei're, maisvei'sle ciel,
il ne les souHVc passans utilité, voulant (ju'ils connue nous l'avons remarqué précédemment
servent d'aveitissement et d'épreuve aux bons. à propos de la cendre.
En elTel la |)atietice divine en\ers les méehaids WW . (Ih.w, "21 ,<M).) Sur lu rrninte (le Pliaroon
prolile auxvases de miséricorde, parcpiile nom — Lorsque Pharaon consterné de l'épouvantable,
de Dieu est |)ublié par toute la terre. Aussi Pha- hacas qui accompagnait la grêle, fait l'aveu de
raon lut-il réservé [)our l'utilité de ces derniers, et de celle de son peuple et conjure
sou iniquité
ainsi que l'atteste l'Ecriture et cpie la suite nous Moïse de prier i)our lui, celui-ci lui répond :

le fera voir. « Je sais que toi et tes serviteurs, vous ne craign ez


X\XlII.(lb.i\,
19,(5,-20.) .S»;- /(/f;;r7('. Pour- — « pas encore le Seigneur. «Quelle ciainteexigeait-
quoi, eu menaçant Pharaon d'une grêle désas- elle donc, puis(pie celle de Pharaon n'était pas
trueuse. Dieu luirccommande-t-ilde rassembler encore la crainte du Seigneur? C'est qu'il est
à la hâte ses troupeaux et tout ce qu'il a dans la facilede craindre le châtiment; mais ce n'est pas
campagne, dans la crain te que la grêle ne les lasse làcettecraintedeDieu, inspirée parl'amour, dont
périr'?Car cet avertissement parait empreint de parle Jacob quand il dit « Si le Dieu de mon :

miséricorde plutôt que de colère. Mais cpie Dieu « père Abraham et le Dieu (pie craint Isaac ne
même au milieu de sa colère, tempère le chàti- « m'avait assisté, vous m'auriez aujourd'hui ren-
timent cela ne fait aucune difticulté. Ce qui
, « voyé tout nu •. »

préoccupe et ;\ bon droit, c'est de savoir quels XXXVI. X, 1.) Encore sur la patience de
(11).

troupeaux il s'agissait de préserver si tou>; , Dieu. — Le Seigneur dit à Moïse Va trouver


« :

avaient été frappés de mort dans la plaie précé- « Pharaon, car j'ai endurci son cœur et celui de
dente, car il est écrit que Dieu distingua les trou- « ses serviteurs, afin que mes prodiges se suc-
peaux des Hébreux de ceux des Egyptiens et que «cèdent en leur personne. » Ne semblerait-il pas
les premiers lurent totalement préservés, tandis que Dieu a besoin de la malice de qui que ce
que les derniers furent entièrement anéantis. soit? Mais voici le sensde ces paroles; c'est comme
Ne peut-on admettre la solution suivante? Dieu si Dieu disait : J'ai été patient envers lui et ses
ayant dit que les animaux laissés dans la campa- serviteurs, quand je les ai épargnés, quand
gne périraient, c'est à ces animaux que s'ap- j'ai fait éclater successivement mes prodiges sur
pliquerait le mot tous; ceux qui étaient dans la eux. Plus Dieu était patient, plus le cœur du
maison et ceux que les Egyptiens, même dans le prince devenait pourquoi le
obstiné. C'est
doute, purent y rassembler dans la crainte que la texte sacré dit « J'ai endurci son cœur, » pour
:

prédiction de Moïse ne fût vraie, échappèrent signifier J'ai été patient à son égard.
:

au désastre une partie de ces animaux pouvait


; XXXVII. (Ib. X, 19.) Le pécheur abuse des hien-
de nouveau s'être répandue dans la campagne, faitset delà patience de Dieu. « Il ne resta pas —
et c'est pour qu'ils soient préservés de la grêle, « une sauterelle dans toute la terre d'Egypte et ;

que Dieu avertit de les faire rentrer dans les mai- « le Seigneur évidemment endurcit le cœur de
sons. Les paroles suivantes del'Ecriture viennent « Pharaon. » L'Ecriture signale un bienfait de

corroborer cette opinion : « (2elui] d'entre les Dieu dans cet acte par lequel il fait disparaître
« serviteurs de Pharaon qui craignit la parole du les sauterelles; puis elle dit que le Seigneur en-
« Seigneur, rassembla ses troupeaux dans ses durcit le cœur de Pharaon : ce fut certainement

iRom. IX, 22,23. — 'Ps.Lviii, 11, (2. ' Gcn. XXXI 42.
420 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

par ce bienfait, par celte patience, qui permet- aux persécutions dont son peuple
injustices et

tait au coupable de s'ol)stiner dans le mal tant avait été victimepour leur épargner encore ce
qu'il se voyait épargné c'est ainsi que tous les
: donuuageaprès les avoir préservés des plaies qui
cœurs dépravés s'endurcissent par un abus déplo- affligaient l'Egypte, mais n'atteignaient, pas ce
rable de la patience de Dieu. pays.
XXXVlII.(Ib.x,2i,"22.) Puissance (le Moïse. — \L.{lh. \i,9.)Dieusesert de lamalicede Pharaon.
Quand il s'afïit de produire les ténèbres, c'est — « Or, le Seigneur dit à Moïse: Pharaon ne t'é-

pour la troisième fois qu'il est dit à Moïse : « contera pas, afin que je multiplie mes signes
« Etends ta main vers le ciel. » Orjamais Araonson « et mes prodiges dans la terre d'Egypte. » On
frère, n'a reçu un ordre semblable. Lorsque diraitque Dieu avait besoin de la désobéissance
Dieu dit à Moïse « Etends ta main sur la terre
: de Pharaon, pour multiplier ces mêmes prodiges,
« d'Egypte, et (|ue les sauterelles se répandent qui avaient d'ailleurs leurs utiles résultats : ils

« sur la terre, » ces paroles me donnent à entendre inspiraient de la terreur au peuple de Dieu et le

que celui qui peut davantage peut moins; mais formaient à la piété par un sage discernement.
ilne s'ensuit pas pour cela que celui qui peut Mais c'était là l'œuvre de Dieu, qui faisait servir

moins, puisse davantage. au bien la malice de ce cœur coupable, plutôt


XXXIX. (Ib. Sur l'emprunt des vases et
\i,-2.) que l'œuvre de Pharaon, qui abusait de la pa-
des habits fait par lesHébreux aux Egyptiens. — tience de Dieu.
Dieu dit à Moïse :« Parle donc en secret au peuple, XLI. (Ib. xu, 10, 46.) Que restait-il à brûler de
« et que chacun demande à son voisin, et chaque l'afineau pascal? — « S'il en reste quelque chose
« femme à sa voisine, des vases d'or et d'argent, « le matin, vous le brûlerez au feu. » On peut
« et deshabits. Que personne ne songe à s'auto-
» demander comment il restera quelque chose,
riser de cet exemple pour dépouiller sou prochain puisque l'ordre donné de prendre avec soi
est

de la même manière. Car cet ordre émanait des voisins, si la maison ne contient pas un
de Dieu, qui savait la part de souffrance qui nombre suffisant de personnes pour manger l'a-
revenait à chacun les Israélites ne se sont pas
: gneau. Mais comme il a été dit « Vous ne bri- :

non plus rendus coupables de vol, mais ils se (c serez pas ses os, » les os certainement étaient de
sont prêtés aux ordres de Dieu. C'est ainsi que le reste, et le feu devait les consumer.
bourreau, lorsqu'il exécute un homme condam- XLII. (Ib. xu, o.) Sur l'agneau pascal. — « Vous
né à mort par la sentence du juge, se rend cou- « prendrez un agneau parfait, mâle et âgé d'un
pable d'homicide, s'il agit spontanément et sans « an. » Cette expression, aguus masculus,
ordre, quand même il saurait que l'homme à qui comme si un agneau pouvait n'être pas mâle,

il donne la mort était irrévocablement condanmé peut embarrasser celui qui ignore la raison im-

par le juge. Il y a encore une autre question de périeuse de cette traduction. Il a fallu traduire
quelque importance Si les Hébreux habitaient
: par ovis, brebis, parce que le grec porte TipoêaTov ;
séparément le pays de Ge>;scn, où nese produi- mais r.oôËx-ov , en grec, est du neutre, et tout ce
saient point les plaies qui affligaient le royaume qui suit s'accorde en genre avec ce mot c'est ;

de Pharaon, comment put-il se faire que chacun comme si on disait Pecus perfectum, masculum,
:

demandât à son voisin ou à sa voisine de l'or, anniculum erit vobis. On peut dire en latin :

de l'argent et des vêtements; surtout si l'on con- musculum. pecus, comme on dit : mascula thura,
sidère que cet ordre est donné la première fois au neutre mais on ne pourrait pas dire ovis
;
:

à Moïse dans les termes suivants : « Que la masculus, une brebis mâle, parceque ovis,
« femme demande à sa voisine et à sa concham- brebis, est du genre féminin. Si on disait une
« ou à celle qui habite sous le même toit? »
brière brebis mâle, ce serait une grande absurdité. Et
On doit comprendre par là que les Hébreux si l'on se servait du mot pecus, le sens serait en-

n'étaient pas les seuls habitants du paysde Gessen, core altéré, et l'on ferait disparaître le sens mys-
mais qu'un certain nombre d'Egyptiens y de- térieux de l'Ecriture, qui, après avoir parlé de
meuraient avec eux; ceux-ci, favorisés des bien- la brebis, ajoute : « Vous la prendrez parmi les

faits de Dieu départis à cette contrée, s'attachèrent « agneaux et les chevreaux. » C'est avec raison

aux Hébreux par reconnaissance et leur prê- que l'on voit le Christ désigné dans ce passage.
tèrent facilement ce qu'ils demandaient cepen- ; Qu"était-il nécessaire en effet d'a\ertir qu'il

dant Dieu ne les jugea pas assez étrangers aux fallait prendi-e la brebis ou l'agneau parmi les
i.iviiK .11.— uiiKSTioNs si;k L'KXODK Wl

apiicaiix (( les cIk'vi-c.-iiin, si ii- Irail ne (ij;iiiail ipi'il V eùl dans toutes les maisons des premiers-
coliii tloiil la nciK'alo^iiccliariii'lli'oiiiipla parmi nés, en (pii les Egyptiens sei'aieid châties '/ Il ne
SOS luomhres (ipsjiislosci dos pôclunirs?Uiii>i(iiii' faut ceilaiiiement pas croire (pic les Egyptiens
los .liiils s'all.u'iKMil à (li'iiionlicr (pi'il (all.iil du pa\s <le (iessrii furent exemples de celte
prciKlic aussi im cliCMcaii poiif la cclobialidii plaie : car elle frappai I les JKinmii'sel les animaux
(!(> la l'iupio, <'l (|ii(\ siiivaiil eux, ces mois : et non la terre; c'est-à-dire (|ueles liommesct les
« piiMidrc parmi les aiiiicaux ol les clicviTaiix, » |)reiiii(M's-nés d<'sanimau\ inouraieiit, liapix's en
sigiiiliciil (|ii'il fallail cliiiisir im a;;ii('aii parmi secret |>ar la main de l'ange, sans (pi'on aperçut
les agneaux, où, à son (l('raiil , un chevreau rien au ciel ni sur la lerre (pii afiligeàl les

parmi les chcM-caux; ccpeiidanl la réalité ac- hommes, connue la pniduclioii des gi-euouilles,
complie dans le Christ l'ail hiei» voir ce (pii étail des sauterelles et des ténéhres. Lorsque la lerre
(iguré dans ce commandemenl. de (Jessen éclKqipa à ces plaies, le bienfail de

XLIII. (11). \n, li.) Sur le mot l'h'rm'L— S'il Dieu s'étendit sans aucun doute sur les Egyp-

esl écrit « Vous ferez en ce jour,


: de race en demeuraient en ce pays avec les Hé-
tiens tpii
« race, une lèle lépde (pii durei"i ton jours, » ou breux mais tous leurs |)i'emiers-nés complè-
;

hien, « une lèh' rtcriu'llc, » atrivto-y, selon le texte renl au nombre des victimes dans cette circon-
firec, ce n'est iiasàdire (pi'il y ail aucun jour de stance.
celle vie passagère doué d'nne durée élenielle; XLV. fit). XII, 3o, '.M\.) Enrorc sur l'emprunt fait
mais ce qui est éternel, c'est l'ohjel sijjulhé par aux EjUipticns par les Hébreux. « Or, les enliiiits —
ce jour; comme quand nous disons que /)/('(/ est « d'Israël firent ce que Moïse leur avait ordonne,

éternel, ce n'est |)as ceilaiiiement à ce mot « et demandèrent aux Egyptiens des vases d'or

Dieu, mais à ce qu'il signilie ([ue nous atlri- « et d'argent, et des vêlements; et le Seigneur
buons l'élernité. Néanmoins il faut recher- « rendit les Egyptiens favorables à son peuple :

cher avec soin en (juel sens l'Ecriture emploie « ils leur prêtèrent, et les Hébreux dépouillèrent
souvent ce mot ctfrnt'l; peul-èlre Dieu dit-il « les Egyptiens. » Cet événement était déjà ac-
que ce jour sera solennisé éternellement, pour accompli, avant la inoi-t îles premiers-nés de
nioidrer qu'il ne sérail pas permis de le transgi'cs- l'Egypte : c'est ici une répétition et un retour
ser ou de le changer, de sa propre autorité. Car sur le passé. Ce fait a été raconté en son temps.
autre chose est de commander ce qui ne doit se Comment dans le deuil immense causé par la
faire qu'en une cu'constance déterminée tel fut : mort de leurs enfants, les Egy|)tiens auraient-ils
l'ordre domié à ,Iosué de faire avec l'arche sept pu |)réter ces objets divers? Il faudrait admettre
fois le tour deJéricho ' : autre chose est de poser alors que les Egyptiens mêlés aux Hébreux dans
un commandement, dont la solennelle obser- le pays de Gessen, échappèrent encore à cette
vation n'aura jamais de terme et sera quoti- plaie.
dienne, ou mensuelle, on annuelle, ou bien en- XLVl. (Ib. XII, 22.) Sur le sang de ''Afineau. —
core fixée à une période régulière de .plus ou « Vous prendrez un petit bouquet d'hyssope et
moins d'années. Donc, ou bien ce que l'Ecriture (I le trempant dans le sang qui est sur le seuil

appelle éternel, siunilie que les Hébreux ne de- V de la maison, vous en frotterez la porte et les

vront jamais se permettre de mettre un terme à la « deux poteaux. » Un demande quel est réelle-
célébration de la Pàque ou bien, je le répète, il ; ment ce sang placé près de la porte, puisque
faut appli(pu>r cette (pialification non aux signes l'auteur sacré parle sans aucun doute du sang
mais aux choses qu'ils désignent. de l'agneau immolé pour la Pàque. Cet ordre est-
XLIV. (ih. XH, 30.) Sur la mort des pri'mk'rs- il conçu en ces termes, quoique d'ailleurs l'Ecri-

nés. —
" Un grand cri s'éleva dans toute la terre ture n'en dise rien, pour que l'Agneau pascal
« d'Egypte. Car il n'y avait aucune maison où il soit mis à mort sur le seuil de la maison ? Ou
« n'y eût un mort. » Ne peut-il se faire qu'il y bien, ce qui est plus probable, quand le texte
eût quelque maison où ne se trouvait point de sacré porte : « dans sang qui est sur le seuil
le

premier-né ? Puisque les premiers-nés étaient « de la maison, » est-ce pour indiquer que celui
seuls voués à la mort, conunent donc n'y eut-il qui doit en répandre sur la porte et les poteaux,
aucune maison qui ne comptât point de victime? placera le vase , où il a reçu le sang ,
près de la
Dieu avait-il voulu, dans sa divine prescience, porte, afin d'y puiser plus facilement ?

Nombre

m
' Josué. VI, 3, 4. XLVll. (Ib. XII, 37-40.) des Israélites

S. AuG. — ToM. IV 33
,

422 QUESTIONS SIR L'HEPTATEUQUE.

à la sortie de l'Egypte, et durée de leur servitude. — nistère de Moïse, attendu qu'il est écrit dans
« Or, les ent'anis d'Israël parlircnl de Ramessès l'Exode Le temps d'exil que les enfants d'Israël
: «

« pour venir à Socoth, au nombre de six-cent « passèrent dans la terre d'Egypte et dans la

« hommes de pied, sans compter les baga-


mille « terre de Chanaan, eux et leurs pères, fut de

« ges, instructum, » ou « les biens, » s'il est permis « quatre cent-trente ans. » Et ils veulent que la

de traduire ainsi l'expression grecque ànwv.vr.v. servitude ait duré quatre cents ans, parce qu'il
Cette expression signifie, d'après l'Ecriture, non- est écrit dans la Genèse « Sache bien que ta race
:

seulement ce qui peut être transporté, mais en- « demeurera dans une terre étrangère et qu'elle

core ce qui peut se moiixoir : ( ar Juda, s" adres- « sera réduite en servitude et persécutée pendant

sant à son père, lui dit : « Envoie l'enlant avec «quatre centsans. » Mais comme lesannéesde la
« moi, et nous nous lèverons, pour aller chercher servitude se comptent à partir de la mort de Jo-
« de quoi vivre et ne pas momir, toi et nous, et seph, car, de son vivant, les Hébreux régnèrent
« ce que nous possédons » (Jr, le grec porte en ce
' .
plutôt qu'il ne furent esclaves, on ne voit pas
passage le mot à7rowjv;y, (pie le latin rend par comment il est possible de trouver (juatre cent-
s»/?sta»<;«m; nos interprètes le traduisent aussi trente ans pour leur séjour en Egypte. En effet,

quelquefois par ceiisum, dans le sens que nous quand Jacob entra dans cetteconirée, son fils Jo-
donnons ici à instructum, voulant qu'on enten- seph avait Irente-neufans; car il en avait trente
de parce mot les hommes elles bètes de somme, lorsqu'il parut en présence de Pharaon ', et com-
ou tous les animaux. Peut-on aussi entendre par mença d'administrer sous son règne vinrent en ;

là les épouses, je l'ignore. Cependant lorsque suite les sept années d'abondance , et Jacob entra
l'Ecrilure parle des six-cent mille hommes de en Egypte avec ses autres enfants dans la seconde
pied et qu'elle ajoute :« à l'exception des bagages, année qui les suivit 2. Par conséquent Joseph
« ou du bien, ou de ce qu'ils possédaient, » ou était alors dans sa trente-neuvième année, et il
tout autre terme qui traduirait mieux txTioT/.-jrrj, mourut à l'Age de cent-dix ans s il vécut donc :

il est évident qu'elle manpie par là les hommes, en Egypte, depuis l'arrivé de son père, soixante-
serviteurs, femmes ou jeunes gens encore inca- et-onze ans défalquons ce chiffre de quatre
:

pables de servir, et que les six-cent mille hom- cent-trente, il restera, en prenant pour point de
mes doivent s'entendre exclusivement de ceux départ la mort de Joseph, non plus ([uatre cent,
cpii étaient en
de porter les armes.
état mais trois cent cinquante-neuf ans de servitude.
Maison demande ordinairement si les Hébreux Et si nous croyons devoir compter depuis l'épor

ont pu former un si grand peuple, pendant les que où Joseph commença de régner sous Phara-
années que l'Écriture, attentivement examinée, on, en sorte qu'Israël serait censé être entré en
montre qu'ils ont passées en Egypte. Et d'abord Egypte au temps où son fils fut élevé au faite du
combien d'années y demeurèrent-ils ? Ce n'est pas pouvoir, dans cette hypothèse ou ne trouverait
une petite question. Car,àrépoque où Abraham même que trois cent-cinquante ans. Tychonius
offrit en sacrifice une vache de trois ans, une chè- veut que ce chiffre soit mis pour quatre cents, en
vre, un bélier, une tourterelle et une colombe; prenant la partie pour le tout, c'est-à-dire cinquan-
avant même la naissance d'Isaac et d'Ismaël te pour rond cent, et il fait voir, par des
le chiffre
Dieu dit à ce « Sache bien que
patriarche ta :
exemples, que l'Ecriture emploie communément
« race demeurera dans une terre étrangère, cette manière de parler i.Dansl'hypothèse un peu
« et quelle y sera réduite en servitude et persé- plus probable, que Jacob serait censé descendu en
« entée pendant quatre ceiitsans 2. » Si donc on Egypte quand Joseph y fut vendu, il faudrait enco-
admet que ces quatre cents ans se rapportent re soustraire treize années, et alors on aurait trois
à la servitude d'Egypte, on ne trouvera pas trop centtrente-sept, aulieude quatre cent. L'Ecritu-
court le temps qm fut donné à l'accroissement re rapportecncore(iueCaath,filsileLévi, aïeul de
de ce peuple. Mais l'Ecriture attestede la maniè- Moïse, eiitia euEuypte avec Jacob, son grand-pè-
re la plus évidente que la servitude des Hébreux re s; et elle dit qu'il y vécut cent fiviile ans «, et
ne dura pas un temps si considérable. son fils Ambram, père de Moïse, cent trente-sept ;

Quelques-uns pensent qu'il faut compter (/«rtf/'c enfin que Moïse avait quatre-vingts ans, lorsqu'il
cent-trente ans, à partir de l'entrée de Jacob en délivrasonpeuplederEgypte" or, quand même :

Egjpie ju.qu'àh délivrance du peuple nir le mi- —


iGen. XLI,46. — Ib.xLV, 6.
' Ib. L, 22-25. * Tyrhonius,

Gcn, Ibib. XV, 13.


Eegular. lib. 5. — Gcn. XLVI,
''
I
'••
Ex. VI, IS, 20. — ' Ib. VII, 7.
' XLiir, S. '
LIVRE H. — QIESTIONS SUK L'KXOUE. 423

Ciialli OUI ciiiAfiidiv le iii'tc (le Afoiso dans l'aii- (pie où Israël descendit en Egypte. Durant ces
IK'C ili' sa iiioil, cl (|irAiiiliraiii à son loiir cùl longues aiPiécs, en clfcl, li's l'atriarclics, connue
iMifiCtidré Moïse <lans la dciiiièrc aiiiK'c de des \oyageurs, véeiu'enten étrangers dans le pays
sa vi(> ; coiil-lroiilc, ccnl lrcMlc-s<'|)l cl (lualic- de Chanaan, comme dans la suite les enfants
viiii^l l'ont trois ccnis (|uaianlo-sc|)l, cl non pas d'Israël, en Eg\ptc: c'csl ainsi (pic le calcul exact
(luatreocnt-trenlc. Si l'on vent ([uc Caalli, lils de (pialre cenl-trenlc années se retrouve, en
de Lcvi, soit ne la dernière année de la vie de prenant pour point de départ la pi'omesse, pour
Joseph, e'esl environ soixanle-el-(iixaiHiées(|n'on aboidir à la sortie d'EgypIc, ipiand fut domiée sur
peut joindre à ce total, earJoscpli vécut soixante- lemoni Sinaï la loi(pii u'annulail point le testa-
el-on/,c ansen E^\ pie après l'arrivée deson père. ment et laissait intactes les pronicssi's.
Pai' conséiiuenl, même en additionnant ces soi- En effet, au témoignage de l'Ecriture, .Vhra-
xantc-dixannéesde la vie deJoscpli, depuis l'en- liam ('lait dans sa soixarde-ipiinzièmc année,
trée tic .laeoh en Kf;vpte jus(|u';i la naissance de (piand il vintdans le pays de Clianaau ', et il
Caatli, si tant est ([u'il soit né à cette épo(|iie, engendra Isaac à l'âge de cent ans 2. Il s'écoula
— avec les c(>nt-l renie années (jue vécut Caalli, par cons(''ipient vingl-cinq années entre la pro-
les cent Irerde-scpl de son lils Anibrani, ])ère messe clla naissani'etl'lsaac. EnyajoutanI toutes
de Moïse, et lesquatre-vingt de Moïse lui-même, les années de la vied'lsaac, c'est-à-dire cent

on n'aura encore que «piatre cent dix-sept an- (piairc-vin il, on a le chiffre de deux cent-cinq-':
nées, au lieu de ([ualie ccnl-lreidc. Jacob avait alors cent-vingt ans, car Isaac en
Il suit de là que lasupputation, suivie par Eu- quand il eut ses deux enfants ju-
avait soixante,
sci)e dans saCln'oni(pie,a pour elle évidemment meaux, Jacob etEsaù '';dixansaprès, Jaco!) entra
la vérité. Cet historien compte en etïet les (jua- en Egypte, âgé de cent-trente ans '. Joseph était
tre cent-trente ans à partir de la promesse que dans sa trente-neuvième année. Depuis la pro-
Dieu (ità.\hraham quand il l'appela deson pays messe jusqu'à l'entrée de Jacob en Egypte, ou
dans la terre lie Chanaau i,el il s'appuie sur l'cxem- com|)te donc deux cent-(iuinze ans. Joseph, âgé
blc de l'Apôtre, qui, après avoir loué et recom- iU- trente-neuf ans, (piand son père vint le trouver
mandé la loi d'Ahrahain dans la promesse que en Egypte, vécut encore soixante-et-onze ans :

toutes les tribus de la terre seraient bénies en car il vécut jusqu'à l'âge de cent-dix ans''. Deux
lui — promesse où voit une prophétie
il relati- cent-(|uiuze et soixaute-et-onze fout deux cent
ve au Christ, — ajoute :« Ce que je veux dire, quatre-vingt-six. Restent deux cent quarante-
«c'est que Dieu, ayant lait un testament en hon- quatre oucinq années, qu'onadmel pour la durée
«ne forme, la Loi, cpiia été donnée quatre cent- de la servitutle des Israélites en Egypte après
«trente ans après, ne Ta pas annulé, ni anéanti la mort de Joseph. Eu ce qui concerne leur mul-

« les promesses 2. » D'après l'Apôtre, c'est donc tiplication prodigieuse pendant ce laps de temps,
quatre cent-trente ansaitrès la vocation d'Abra- si compte de la puissance d'engendj'er
l'on tient
ham promesse divine à laquelle crut ce
et la dans riiomme et de la bénédiction de Celui qui
patriarche, et non quatre cent-trente ans après voulut opérer cette merveille, on n'aura plus lieu
l'entrée de Jacob en E;;yple, (piela Loi fut publiée. de s'étonner que le peuple d'Israël sortit d'Egypte-
Au reste, le texte sacré le fait assez entendre ;
au nombre de six cent-mille hommes de pied,
car nous lisons dans l'Exode, non pas « L'exil : sans parler de la suite où se trouvaient les ser-
« des enfants d'Israël » dans le pays d'Egypte viteurs, les femmes et tous ceux ipii étaient iu-

fut de (juatre cenl-trenlc ans mais bien « L'exil ; : capa!)les de porter les armes.
« qu'ils passèi'ent dans le pays d'Egypte et dans Lorsque Dieu dit à Abraham « Sache bien :

» le pays deChanaan,eux et leurs pères. »ll est « que ta race sera voyageuse dans une terre étran-
clair, par consé(iuent,(iu'il faut faire entrer dans la « gère, et quelle y sera réduite en servitude, et

supputation le temps que vécurent les Patriarches a persécutée pendant quatre cents ans, » il ne

Abraham, Isaac et Jacob, depuis l'époque où faut donc pas entendre ces paroles, en ce sens
Abraham mit le picil dans la terre de Chanaan, que le peuple de Dieu fut aussi longtemps ré-
c'est-à-dire, depuis la promesse à laquelle il eut duit à la plus dure servitude; mais il est écrit:
foi, ce dont l'Apôlrcfait l'éloge, jusqu'à l'épo- « D'isaac sortira la race qui portera ton nom 7, »

' Gen. XM,4. — - Ib. XXI. 5. — ib. xvxv, 2S.


J
*Ib. XXV, 26.
1
Eusèb. Chroiiiii. an du monde 3260. — 2Gal. llr, 17. •
Ib. XLVll, 9. — 'Ib. I.,22. — "Ib, x\l, 12.
424 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

depuis l'année de la naissance d'isaae jusqu'à « vient de la grâce, cen'est donc pas des œuvres ;

l'année de la sortie d'Egypte, on compte (juatre « autrement la grâce ne serait plus grâce '. »

cent-cinq ans. Si des quatre cent-trente années XLIX. (Ib. XIII, 17.) // faut écarter les obsta-
on soustrait les vingt-cinij qui se trouvent entre cles aiibien. — « Or, Pharaon ayant laissé partir
la promesse et la naissance d'Isaac, il n'est pas « le peuple, Dieu ne les conduisit point par le

étonnant que l'Ecriture donne pour résultat le « chemin du pays des Philistins, qui était le plus

chiffre rond quatre-cent, au lieu de quatre-cent « court : car, disait-il, ce peuple se repentirait
cinq quand elle suppute les temps, elle ne tient
:
« peut-être quand il verrait la guerre, et re-
pas compte en effet de quelques années en plus « tournerait en Egypte. » Onvoitpar là qu'il faut

ou en moins et préfère employer un nombre faire tout ce cpii est prudemment possible, pour
rond. Ces mots du texte « Elle sera réduite en : éviter les obstacles, quand même Dieu viendrait
« semtude et persécutée, » n'ont donc pas rap- ouvertement en aide.
port aux quatre cents ans la servitude n'a pas eu ;
L. (Ib. XIII, tS.) Que faut-il entendre par gé-
la durée de cette longue période; mais les quatre nération? — « Les enfants tl'Israél sortirent de
cents ans se rapportent à ces mots « Ta race : « la cinquième génération. »
terre d'Egypte à la
« sera voyageuse dans une terre étrangère; » car L'écrivain sacré veut-il qu'une génération compte
cette race fut voyageuse dans le pays de Chanaan pour un siècle, et parle-t-il de la cinquième gé-
aussi bien qu'en Egypte, jusqu'au jour où elle nération parce que l'événement qu'il raconte
,

reçut en héritage la terre que Dieu lui avait pro- s'accomplit après les quatre cent-trente ans ?

mise ce qui s'accomplit quand eut lieu la déli-


:
Ou bien, par générations, ne faut-il pas plutôt

vrance de la servitude d'Egypte. Il y a donc entendre celles qui se succèdent depuis .lacob à
transposition dans le texte, et les mots doivent son entrée eu Egypte jusqu'à Moïse qui en sortit
se rétablir dans l'ordre suivant: « Sache bien que à la tète du peuple ? Car on trouve Jacob à la

« ta race sera voyageuse dans une terre étran- première, Lévi à la seconde, Caafh à la troisiè-

« gère pendantquatrecentsans, » le reste elle : •< me, Ambram à la quatrième, et Moïse à la cin-
« sera réduite en senitude et persécutée, » ne quième. Le traducteur latin a rendu par proge-
doit venir qu'a])rès, elles quatre cents ans ne s'y »/c.Si le mot grec ysysàc, que l'Evangile traduit
rapportent point. Car c'est dans la dernière partie par generationes: or, les générations se comptent
des années qui appartiennent à ce chiffre total, par l'ordre de succession généalogique, non point
c'est-à-dire après la mort de Joseph, que le par le nombre des ann.ées.
peuple de Dieu fut soumis en Egypte à une dure LI. (Ib. xiv, 13.) Sur le sens de ces paroles :

servitude. Vous ne verrez- plus jamais les Eguptiens. —


XLVIII. (Ib. xni, 9. ) Sur lu foi et /es œuvres. Moïse dit : « Ayez confiance et demeurez fer-
— Pourquoi Dieu dit-il, en ordonnant la Pàque: « mes, et voyez le salut t[ui vient du Seigneur et
« Gesera pour toi comme un signe siu ta maint » « qu'il vous accordera aujourd'hui. Car vous ne
Ces paroles signitient-elles supérieur à tes œu- :
« verrez plus jamais les Egyptiens, comme vous
vres, que tu doives préférer à tes œuvres ? Car, « les avez vus aujourd'hui. » En quel sens faut-
•en raison de l'immolation de l'agneau, la Pàque il prendre ces paroles, puisque les Israélites ont

se rapporte à la foi dans le Christ et dans le sang eu dans la suite l'occasion de voir des Egyptiens ?
qui nous a rachetés. Or, cette foi doit passer Est-ce en ce sens que ces mêmes Israélites, qui
avant les œuvres, elle doit être en quelque sorte voyaient actuellement les Egyptiens, ne les virent
sur la main, contrairement à l'opinion de ceux plus dans la suite : parce que ceiLX qui les pour-
qui se gloriliaient dans les œuvres de la Loi. suivaient étaient morts, et que ceux-ci à leur tour
L'Apôtre parle sur cette matière et en traite lon- avaient tous cessé de vivre? Car la postérité des
guement; il veut que la foi marche avant les uns a pu voir la postérité des autres. Ou bien ces
œuvres; que les bonnes œuvres soient une con- mots « Vous ne les verrez plus comme aujour-
:

séquence de la foi et que celle-ci les prévienne; « d'hui, » signilienl-ils: Vous ne les verrez plus

enfin qu'on ne la considère pas comme une ré- comme aujourd'hui persécuteurs ennemis et ,

compense du mérite des bonnes œuvres '. Car marchant à votre poursuite en si grand nombre?
la foi a sa source dans la grâce « or, si elle :
Alors il n'y a plus de difficulté sérieuse , pas

' Gai. III ; Heb. X!. ' Rom. XI, 6.


LIVIIK U. — QFKSTIONS S['K l/ICXODK. 42.1

iniMiio fi propos de ce /Vnwrnv doiilpiirlo railleur; coi('|>uiu(li.dier. (Jiiel autre sens en elï'el donner
car bien que ces d mi\ pcniilcs doivi-iil se voiraii à ces paroles que Moïse; a dites précédenmienl :

jour de la n^surreclioii, ce ne sera pas cerlai- « L'eau a été divisée jiar l'Esprit de votre co-
neiiieid ilaiis le iiièine étal (praiijiiiird'liiii. « lèi'e? 1) A l'égard des Kg\pti'us, cet Esprit de
) Sur le cri du m'iir.
Ml. (Il), XIV, 15. Une — Dieu fut donc un ICspril de colère; car ils trou-
sif^iiide celle parole du Seigneur à Moïse « l'our- : vcreiit lem- pei'le dans la division des eaux ils ;

« (|uoi ci'ies-lu vers moi ? » puis(pie l'Eei'ilure entrèrent dans le lit du lleuve, el quainl les eaux
ne rapporU; aucune expression dont se sérail reprireiil lein- cours, ils liu-eut eugloidis par elles.

servi Moïse, el ne dit point (ju'il ail prié? Ne veut- Mais à l'égard des enlants d'lsi-aél, il ne fut pas
elle pas nous l'aire entendre <[ue sa voix restait l'Esprit delà colère de Dieu; car ceux-ci trouvè-
silencieuse, tandis que son eieur jetait nu cri. rent leiH' salut dans la (li\isiond('s eaux. On voit
LUI. (II). \iv, Ki.) .S'(( /(( )'('/•(/(' de Moïse. — donc, par cet exemple, que, suivant la diversité

« Pour loi lève ta cov/c el étends ta main vers de ses opérations et de ses effets, l'Esprit de Dieu
« la UKM'. » Ici il est dit de colle verge miracu- prend des dénominations différentes, (pioiqu'il
leuse qu'elle appartient à Moïse; et (jùand sou ne soit qu'un sent et même Es[)ril, ([ui n'est

frère s'en servait pour opérer des miracles, le autre que l'Esprit-Saint dans l'unité de la Tri-
texte sacré en parlait comme d'une verge qui nité. Par conséquent je crois que c'est le même
était à lui. Esprit dont parle l'Apôtre, quand il dit « Vous :

LIV. ( Ib. XV, 1:2. ) Comment Moïse dit-il que « n'avez pas reçu de nouveau l'Esprit de servi-

la terre a dévore les Equptiens ? — « Vous avez « Inde, pour être encore dans la crainte ; mais
« étendu votre droite, et la terre les a dévorés. » « vous avez reçu l'esprit d'adoption, par lequel
U n'est pas étonnant que la terre soit mise- ici « nous crions Abba, notre Père « car la crainte
: '
;

pour l'eau. Car toute cette du monde, la


partie a été imprimée dans ceux qui n'avaient pas enco-
dernière et lapins basse, est désignée par le mot re l'intelligence de la grâce, parce même Esprit
terre, suivant celteexpression tant de fois répé- divin, c'est-à-dire, par le doigt de Dieu, qui a
tée Dieu qui a fait le ciel et la terre; et le psal-
: giavé la Loi sur des tables de pierres ^; la Loi
mistedans son énumération après avoir appelé devail les convaincre de leur infirmité eldc leurs
à son aide les choses célestes, venant à dire : péchés, et en même temps, comme une sortede
« Louez le Seigneur, créatures de la terre, » ne précepteur, les conduire à la grâce qui se trouve
poursuit-il pas son hymne, en parlant aussi des dans la foi en Jésus-Christ '. Mais quant à cet
cires qui vivent dans les eaux '? Esprit d'adoption et de grâce, je veux dire, celte
LV. (Ib. XV, 10, 8.) Sur l'Esprit-Saint. — opération par laquelle l'Esprit de Dieu accorde
« Vous avez envoyé votre Esprit, et la mer les a la grâce et la régénération pour la vie éternelle,
« engloutis. « C'est déjà pour la cinquième fois il est caractérisé par ces mots : « I^'Esprit vivi-
qu'il est fait mention de l'Esprit tle Dieu, en ad- « fie, « tandis qu'on lit plus haut : « La lettre
mettant que ces paroles « Ceci est le doigt de : « tue *, » c'est-à-dire, la lettre qui est écrite et
« Dieu 2, » se rapportent à ce divin Esprit. I^'E- qui contient des prescriptions, mais ne donne
criture en parle pour
première fois dans ce
la pas la grâce.
passage : « L'Esprit de Dieu était porté sur les LVL (Ib. XV, 23, 24. ) Sur le nom de Merra. —
a eaux 3; )> la seconde fois, quand il est dit : « Or, ils vinrent à Merra, et ils ne pouvaient
« Mon Esprit ne demeurera plus dans ces « boire des eaux de Merra, parce qu'elles étaient
X hommes, parce qu'ils sont chair ^; » la troisiè- « amères. » Si ce lieu prit le nom d'Amertume,
me fois, lorsque Pharaon dit à Joseph : « L'Esprit parce que son eau était trop amère et qu'on ne
« de Dieu est en loi j; » la quatrième fois, cpiand put en boire, car Merra veut dire amertume,
les enchanteurs Egyptiens s'écrièrent : « Ceci est comment l'Ecriture dit-elle que les Israélites
« le doigt cinquième enfin, dans ce
de Dieu; r. la vinrent à Merra? N'est-ce pas parce quelle donne
passage du cantique de Moïse « Vous avez en- : au lieu où ils vinrent, le nom qu'il avait déjà
« voyé votre Esprit, el la mer les a submergés. » reçu quand écrivait l'auteur inspiré? Le récit
Mais remarquons à ce sujet ([ue l'Esprit de Dieu sacré, en effet, est évidemment postériem- aux
intervient non-seulement pour bénu% mais en- faits qu'il rapporte.

' Ps. C.VLVIH, 7. — = EXO, VIII, 19. ' Gen. I, 2. 'Ib. VI, 3 — ' Rom. VIII, 15. -2E!ici. xx-xi, 18. — 'Gai. III, 22-26 — Ml Cor.
^ Ib. xLl, 38. in, 6.
426 QIESTIONS SUR L'HEI^TATEIQIT.

LYII. (Ib. \y, 23.) Sur le bois qui adourit les oséme mentir? ce n'est pas à moi que tu as menti
eaux de Merra. — « Le Seigneur lui montra mais à Dieu : s'il avait tenu ce langage, il aurait
« un bois, qu'il jota dans l'eau, ef l'eau devint parlé comme Moïse
Aaron. Il n'a pas dit non et

« douce. » La vertu do ce bois était-elle natu- plus Comment as-tu osé mentir à l'Esprit-Saint ?
:

relle? Ou bien, Dieu, qui faisait tant de prodiges, ce n'est pas à l'Esprit-Saint que tu as menti, mais
pouvait-il avec un
quelconque opérer ce
jjois à Dieu un tel langage eut été la négation de la
:

changement ? « il kii montra, «


Ces expressions divinité du Saint-Esprit. Mais après avoir dit :

semblent plus favorables à la première hypo- « Comment as-tu osé mentir à l'Esprit-Saint? »

thèse elles donnent lieu de penser que ce bois


;
sachant qu'Ananie croyait avoir menti à des
était doué de la propriété d'adoucir l'eau ; mais hommes, Pierre ajouta pour montrer la divinité
peut-être aussi cet endroit était-il absolument du Saint-Esprit :« Ce n'est pas aux hommes que
dépourvu de bois en sorte que le Seignem* mon-
;
« tu as meuti, mais à Dieu. »

tra à Moïse un bois dans un lieu qui n'en possé- LX. (Ib. xvi, 12. ) Ce qui est signifié par les

dait point. 11 faudrait voir alors jusque dans ce chairs et lespains que Dieu envoie ii son peuple. —
lait l'intervention du secours divin et l'adoucis- ;
Dieu fait dire à son peuple par l'intermédiaire
sement des eaux par la vertu du bois serait une de Moïse « Ce soir vous mangerez de la chair,
:

figure prophétique do la gloire et do la grâce de « matin, vous serez rassasié de pains. » Les
et le

la croix : mais quand même ce bois aurait pos- pains ne sont pas marqués ici pour désigner
sédé naturellement cette vertu, qui faudrait-il en toute espèce d'aliments : car ces termes compren-
louer, si ce n'est Celui qui l'a créé et qui l'a draient également la chair qui sert d'alimenta-

montré à son serviteur ? tion.Les pains dont il vient d'être fait mention
LVIII. (Ih. XVI, 4.) Sur la tentation de In part de ne sont pas non plus ceux qu'on pétrit avec le
Dieu. — « Alors le Seignem'dit à Moïse : Voilà froment et auxquels on donne communément le
« que je vous ferai pleuvoir des pains du ciel ; et nom de pains mais ; c'est la manne qui est ainsi
« lepeuple en amasser ce qui suffira pour
ira appelée. Or, ce n'est pas sans raison que Dieu
« chaque jour, afin que je tente s'il marche, ou promet de donner de la chair, le soir, des pains
« non, dans la loi. » Celte tentation est une . le matin. C;u' ce qui arriva à Elic, quaiul un cor-
épreuve, cl non un entraînement au péché et si ; beau lui apportait sa nourriture ' a une signifi-
Dieu éprouve, ce n'est pas pour apprendre ce cation semblable. La chair que Dieu envoyait le
qu'il ignorait,mais afin que les hommes se con- soir, et le pain qu'il envoyait le malin, ne sont-
naissant mieiLv et devenus plus humbles, implo- ils s'est livré pour
pas une figure de celui qui
rent le secours de Dieu et ne méconnaissent pas nos péchés, pour notre justi-
et qui est ressuscité
sa grâce. fication 2? Car, le soir, il est mort dans sa fai-
LIX. (Ib. XVI, 8.) Si/r ces mots: Que sommes- blesse et il a été enseveli et le matin étant res- ;

nousl — Entre autres paroles. Moïse et Aaron suscité par sa propre vertu, il est apparu à ses
adressent celles-ci au peuple : « Parce que le Sei- disciples.
« gneura entendu le murmure que vous faites LXl. )La mesure de manne plarée
(Ib. XVI, 33.
a Pour nous, qu'est-ce que
éclater contre lui. devant Dieu. dit à Aaron —
Prends un " Moïse :

« nous sommes? Car ce n'est pas conh'e nous; « vase d'or, mets dans ce vase, plein un gomor
«jmais contre Dieu, que s'élève votre murmure. » « de manne, et tu le placeras devant Dieu, afin
Chargés d'une mission divine, ils ne veulent pas « qu'elle se conserve pour les races à venir, selon

pour cela se croire autant que Dieu car ils disent: ; « que Dieu l'a ordonné.» On peut demander com-
« Que sommes-nous?» afin de leur faire com- lueiilAaron put placer devant Dieu le vase rem-
prendre que Icm's murmures attaquaient celui pli manne, puisqu'il n'y avait point d'image
lie

qui les avait envoyés et qui se servait d'eux en l'honneur de la divinité, et que l'arche-d'al-
comme d'instruments pourses prodiges. Ce n'est liance n'était pas encore construite. Le futur,
pas dans le même sens que Pierre dit à Ananie : « tu placeras, » n'est-il pas mis pour donner à
« Comment as-tu osé mentir à l'Esprit-Saint? Ce entendre que le vase pourrait être placé devant
« n'est pas aux hommes que tu as menti mais , Dieu, quand l'arche existerait? ou plutôt, ces ex-
«à Dieu 1. » Car il ne dit pas Comment as-tu :
pressions : « devant Dieu, » ne marquent-elles pas

I
ict. v,3,4. ' IlIRois, xrii,6. — 'Rom. iv,25.
LIVKE II. — OrRSTIONS SI'U L'EXODR. i27

la |)ir'l('(|ui (lovail pr(''si(i(Mà riilïiaïKit' d'Aaron, leurs d('sirs el l'espèce de viande rpii itouvait les
011 (iiit'l(|iii' li(Mi (railleurs (|ii(' le vase seniil |)la- rassasier. Mais l'Ecritnreayant dit qu'ils d('siraienl
(,•(' y car où Dieu n'esl-il pas? Mais ce qui suit ; des viandes, sansobserveripielle sorte de; viandes
« Kl Aarim mit ce vase en réser'\(< ilevaiil le la- ils réclam lient, nonsdevionsirailercette question.

« beruacle, » l'ail pivlérer le picmier sens. Car lAIII. (Ib. \vi, ar;.) Qiu'll,' csl celle Phéiiieie
alors rKciilure dit par anticipation ce qui s'est (UmliMiie l'Exodel— Us mangèrent de la man-
«

réalisé dans la siiile, (piand le lahernacledn té- « ne, ju.squ'à ce ((u'ils vinssent sur les conlius
inoi;;iiage lut érij;é. « de la Phénicie. » Déjà l'anteui' sacré avait dit :

LXII. (Ib. \vi, 33.) Sur lu iinnnic. — « Or, les «jusqn'àcequ'ilsvinsscntdanslaterrehabilée » ;

«enl'anls d'Isiaél nian;;èrenl de la manne pen- mais comme il n'avait pas in(li(pi(> e\préss(!ment
« (tant ([uaianle ans, jiisipi'à ce (ju'ils vinssent en ([uelle terre, il senihU- (ju'il a voulu le dire
«dans la terre qui est habitée, ils mangèrcnl de en propres termes, dans ces mots « sur les :

« la manne, jusqu'à ce ([u'ils vinssent sur les « confins de la l'hénicie. » Il y a lieu de croire
« contins delà IMiéuieie. » L'Ecriture anticipe; ra- •que tel était alors le nom de ce pays ; mais au-
contant par anticii)atiou ce qui arriva dans la jourd'hui, on lui eu donne un autre. Il est vrai
suite, elle dit ici tpie les enfants d'Israël n'eiurnl que la réunion deTyr et de Sidon s'appelle l'hé-
d'autre nourriture que la mamie dans le désert. nicie; mais nous ne lisons pas que les enfants
Car c'est le sens de ces mots : « jusqu'à la terre d'Israël aient passé par là. Cep(!ndant l'Ecriture
« qui est habitée, » c'est-à-dire, celle qui n'est a pu donner le nom dt) Phciiieie à la région où
dejàplusle désert. Ce n'est pas qu'ils aient cessé commençaient les palmiers, sur la limite du dé-
de manger de la manne, aussitôt qu'ils lurent sert, parce que /«(//h/c;- en grec s'expi'ime de la
parvemis à la terre habitable; mais il n'ont [)as même manière '. Au commencement du voyage,
cessé auparavant. On ilit en effet que lorsqu'ils ils trouvèrent un lieu où étaient douze fontaines
eurent opéré le passage du Jom'dain, la maime et soixante-dix palmiers; après, conmiença pour
ne tomba plus, et qu'ils mangèrent des pains du eux la vaste solitude du désert, où rien de sem-
pays. Unand ils eurent atteint la terre habitable blable ne leur apparut, jusqu'à ce qu'ils eussent
ils parent donc
avant d'avoir traversé' le.Iourdain, atteint les régions habitées. Mais il est plus proba-
vivre uniquement tle manne, ou de manne et ble que ce pays portait à cette époque le nom de
de pain il est permis de le conjecturer, puisque,
: Phénicie. Car il en est de beaucoup de contrées
comme l'Ecriture nous l'apprend, la manne cessa et de pays comme des fieuves et des cités, qui
seulement de tomber après le [)asage du Jourdain. dans longue suite du temps, ont changé leurs
la

Mais pourquoi, au milieu des privations du dé- noms antiques pour des raisons particulières.
sert, désirèrent-ils a\oir des viandes, puisqu'ils LXIV. (Ib. xvH, o.) Supériorité de Moïse sur
emmenèrent à leur sortie d'Egypte des quanti- Aurou. — a Le Seigneur dit à Moïse : Marche de-
tés considérables de troupeaux '!
Cette question « vant le peuple ; mène avec toi des anciens du
a de l'importance. Nepeut-on point dire que les « peuple, et prends en ta main la verge avec la-
pâturages du désert étant de moindre valeur, la it quelle tu as frap|)éle fieuve. » Suivant le texte,
fécondité de leurs animaux leur parut devoir en ce n'est pas Moïse, mais Aaron qui trappa le
souffrir, et ([u'ils épargnèrent leurs troupeaux, fleuve avec la verge. Moïse s'en servit
pour diviser
dans que tous venant à manquer, il
la crainte la mer, mais non le fleuve que signifient donc ;

n'y eût plus même


de victimes pour les sacrifi- ces expressions « Prends la verge dont
: tu as
ces? Ne pourrait-on encore, pour la solution de « frappé le tleuve? » Est-ce que l'Ecriture donne

cette difficidté, trouver quelque antre explication? le nom de fleuve à la mer? 11 faut chercher un
On croit, avec pins de raison, qu'ils nedésirèrent exemple, s'il en est, d'une pareille manière de
point les viandes qu'auraient pu leur procurer s'exprimer. Ou bien ce que faisait Aaron n'est-
Icm's troupeaux, mais celles (pii leur manquaient, il pas attribué à Moïse, parce que Dieu donnait
c'est-à-dire la chair de poisson, car ils n'en trou- par l'infermédiairede Moïse les ordres qu' Aaron
vaient point dans ce désert : c'est pourquoi Dieu exécutait ? A Moïse appartenait le commande-
knu' envoya des râles ; la plupart des traducteurs ment, à son frère l'exécution de ses ordres. Effecti-
quoiqueees oiseaux, sans
latins disent des cailles, vement Dieu lui dit dès le principe àproposdece
différer beaucoup, soient cependant d'espèces dernier : « Il tiendra taplaccauprèsdupeuple, ettu
différentes. Dieu savait ce qui faisait l'objet de '
^otvi^ palmier.
428 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

a tiendras h son égard la place auprès de Dieu < . » matin au soir dans l'exercice de la justice pour
LXV. (Ib. xvn, 9.) Sur In venje de Dieu. — terminer les différends survenus parmi cette
« Voici que je me liens debout sur le sommet de multitude? Etcependant s'il n'avait pas consulte
« la colline, et la verge de Dieu à la main, » dit le Seigneur comme le guide de sa conscience,
Moïse ;'i Josué, fils de Navé, lorsqu'il lui ordon- et s'ilne s'était sagement inspiré de son éter-
ne de combattre contre Amalech. La verge ap- nelle loi, il n'aurait pu juger les différends suivant
pelée d'abord verge d'Aaron, puis de Moïse, s'ap- les règles de la plus stricte justice.
pelle donc maintenant la verge de Dieu comme : LXVIII. (Ib. xviii, 18, l'o.) Excellent conseil
l'Esprit de Dieu est appelle l'esprit d'Elie par- '', de Jétltro à Moïse. —A
propos du conseil que
ce que Elle en a été rendu participant, ainsia-t- Jéthro donna à son gendre, Moïse, de ne pas se
on pu donner différents noms à cette verge. On consumer lui et son peuple dans les inton' râbles
dit également la justice de Dieu, pour désigner embarras de lajustice, on demande d'aboi d pour-
la nôtre, mais considérée comme un don de Dieu : quoi Dieu, qui honorait son serviteur de révéla-
parlant sur cette matière, l'Apôtre reproche aux tions si nombreuses et si iuiportantes, permit

Juifs « leur ignorance de la justice de Dieu et qu'un étranger lui fit une leçon. L'Ecriture nous
« leur efforts pour établir leur piopre justice 3, » ap|>rend par là qu'un bon conseil, de quelque
c'est-à-dire celle qui vieiulrait d'eux-mêmes; part qu'il vienne, nedoif pasélie méprisé. Il faut
c'est contre ces aberrations qu'il s'élève en disant : voir encore si Dieu n'a pas voulu qu'un élranger
« Qu'as-tu en réalité que tu n'aies reçu *? » reprît Moïse sur un point où l'orgueil avait pu
LX.VI. (Ib. xvni, 1:2.) Que sujnifie : Devant le tenter, puis(pie seul pour rendre les
il siégeait
Dieu'! — « Araon et tous les anciens d'Israël arrêts de la justice souveraine en présence de
« vinrent manger du pain avec le beau-père de tout le peuple. C'est ce qu'indique le texte, car
X Moïse (levant Dieu ou suivant » (ante DeumJ, Jéthro veut qu'on choisisse, pour juger les causes
d'autres exemplaires, eu présence de Dieu (coram du peuple, des hommes ennemis de la superbe.
Deo) en grec, hy.-jxwj toû Oeoû. On deman-
: De plus, on voit assez dans ce passage combien
de où ce repas se fit devant Dieu, puistpic il faut être fidèle aux conseil que donne l'Ecri-
le tabernacle et l'arche-d'alliance n'existaient ture en un autre endroit « Mon fils, ne t'engage :

pas encore et furent érigés seulement dans la « point dans une imdtilude d'actions '. » Enfin

suite. Nous ne pouvons pas rapporter ce fait à les termes, dans lesquels est conçu l'avis de Jéthro
un temps à venir, comme nous l'avons dit pour à Moïse, sont à considérer : « Maintenant donc,
la manne placée dans un vase d'or .On doit donc ">
« lui dit-il, écoule-moi, et je te donnerai un con-
regarder comme fait devant Dieu ce qui se fait « seil, et toi. » Le sens qui me
Dieu sera avec
pour sa gloire car où Dieu : n'est-il pas ? parait en résulter, c'est
que l'esprit humain, trop

LXVII.(Ib. xvui, 15.) Éternité de la loi de appliqué aux actions humaines, se vide en quel-
Dieu. — Moïse Le peuple
dit à son beau-père : « que sorte de Dieu, et qu'il s'en reuiplit à mesure
« vient h moi pour recevoir le jugement de Dieu; qu'il se porte phis librement vers les choses cé-
« lorsqu'il leur arrive quelque différend et qu'ils lestes et éternelles.
« viennent à moi, je juge chacun d'eux, et je les LXIX.. (Ib. xviii, 19, 20.) Encore .sur le
« instruis des ordonnances et des lois de Dieu. » conseil de .Jétlirott Moine. — Ce (pi'ajoute Jéthro :

On peut demander comment un pareil langage « Sois pour peuple dans tout ce qui regarde
le

se trouve dans la bouche de Moïse, puisque la « Dieu, et tu rapporteras à Dieu leurs paroles et
loi de Dieu n'était pas encore écrite. N'est-ce ' tuteur apprendras les ordonnances et la loi
point parce que la loi de Dieu est éternelle et que " divines; et tu leur montreras les voies par les-
toutes les âmes pieuses la consultent, afin de « quelles ils marcheront, et ce qu'ils auront à
conformer leurs actions, leurs ordres ou leurs « accomplir, » fait voir (pie loufes ces choses
défenses avec ses préceptes, qui reposent sur l'im- concernent le peuple pris en masse. Car Jélhro
muable vérité? Se persuadera-t-on, en effet, que ne dit pas Tu rapporteras h Dieu les paroles de
:

Moïse, bien qu'admis à des entretiens familiers chacun, mais « leurs paroles, » api es qu'il venait
avec Dieu, le consultait ordinairement pour cha- dédire: « sois pour le peuple dans tout ce qui
que difficulté, quand parfois il était retenu du « regarde Dieu. » Ensuite il veille à ce que le
soin des affaires particulières ne soit pas dé-
' f".Vo. IV, 16. — 2 Luc, I, 17. 'R"n>. X, 3.— M Cor. IV, 7.
^ Ci-dessus, Ques. LXi. 'EccLi. XI. 10.
LIVRE II. — QrESTIONS SIR LTAODE. 429

laissé : des hommes justes et puissants, enno- « (lin, et étant arrivé au désert (li> Sina, Israël

niis i|o rociiiicil cl scrvilciirs (idoles de Dieu, '<


campa au pied de la montagne; et .Moïse moida
semiil l'iioisis pour iHre ctahiis les uns sur iiiiiie « sur ta monlagne de Dieu, et le Seigneur l'ap-
lioinines, les autres sur cent, les autres sur eiii- i< pela (lu haut de la montagne, et lui dit: Voici
(|uaulc, les autres enliu sur dix. ("est ainsi (pie, n ce (pie tu annonceras aux enfaids (risra('l, »
sans aeeabler ees derniers, il déciiargea Moïse etc. Et un peu |)liis loin : « Descends, et [)arle

d'occupations graves et épineuses. En elTel mille « au peuple, aujourd'hui et demain,


et purilie-le

liouuues étant coudés à la conduite d'un seul, « qu'ils lavent leurs vêtements, et qu'ils soient
(pii avait au-dessous de lui, dix, vingt et cent « prêts pour le troisième jour, (iar dans trois
autres chels, il arrivait nceessaircment que « jours le Seigneur descendra sur le mont Sina,
chacun de ceux-ci avait à peine de (pioi juger. a en présence de tout le peuple. » C'est en ce
Ou découvre aussi dans ce passage un exemple jour, comme on le voit par la suile du récit ',
d'humililé dans la personne de Moïse: lavorisé que lïitdounée la Loi, écrite du doigt de Dieu sur
irentreliens particuliers avec Dieu, il ne conçut (les tables de pierres. Or, il est constant (pie ce

point tie dédain ni de mépris pour le conseil que jour est le troisième du mois depuis la sortied'E-
luidouuail lui étiaiiger, son lieau-père. Cepen- gypte. On compte doue cinquante jours depuis
dant, connue .lelhro n'étaitpas Israélite, l'aut-il le celui où les Israélites célcbierenl la Pàque par
compter aussi bien que Job, étranger aussi à ce limmolation et la manducation de l'agneau, c'est-
peuple, parmi les adorateurs du vrai Dieu et les à-dire, depuis le quatorzième joir du premier
sages éclairés p;u- la religion ? Cette question mé- mois, jusqu'à celui ou la Loi Jul publiée : savou'
rite d'être posée et parait devoir être résolue dix-sept jours qui restent du premier mois, en
allirmativenient. 11 est vrai (pie le texte ne dit parlant du quatorzième puis les Irenle jours ;

pas dairemeul s'il a sacrilié au vrai Dieu painii du secoudmois, qui, réunis aux précédents, don-
son peuple, quand son gendre, ou si c'est
il vit nent quarante-sept; et enfin les trois jours du
Moïse qui l'a adoré; mais quand même on dirait troisième mois : ce qui fait cinquante jours à
positivement que Moïse l'adora, l'iionncnr rendu partir de la solennité de la Pàque. Ainsi l'ancien
par lui à son beau-père n'eût différé en rien des Testament était comme une ombre de l'avenir :

marques de respect familières aux patriarches de même qu'il s'est écoulé cinquante jours entre
à l'égard des hommes : ainsi est-il dit qu'A- la fête de l'unmolation de l'agneau et la proniid-
braham adora de Chet Qnant aux le doigt de Dieu ; de même
i.
le fils gation de la Loi par
-/oaina5!TO£i5ayo)yer;, que le texte désigne après dans le nouveau Testament, où la Vérité même
les décurions, il n'est pas facile de savoir ce est apparue, on compte cinquante jours depuis
(pi'ils étaient : car ce nom est tout-à-fait inu- la fêtede l'immolation de Jésus-Christ, l'agneau
sité parmi ceux qui exercent nos charges ou immaculé, jusqu'au jour où le Saint-Esprit des-
nos emplois. Quel(iues-uus le traduisent par cendit des deux Déjà précédemment nous
^-. •'

(loctores, docteui's, comme si l'on disait : maîtres avons dit,surle témoignage de l'Evangile, que, par
des lettres, qui introduisent la connaissance le doigt (le Dieu,\\ faut entendre l'Esprit-Saint.
des lettres; c'est du mot grec. On voit par
le sens LX.XI. ;lb. XX, l-7j Division des préceptes du
là que les Hébreux avaient une littérature, avant
Décaloijue. — 1. On demande comment il faut
la publication de la Loi mais quand a-t- cllecom- en
:

classer les dix commandements de la Loi :


y
niencé, je ne sais s'il est possible de s'en assurer. quatre, y compris le précepte du sabbat,
a-t-il
Car ilenestqui pensent que l'usage des lettivs re- qui aient Dieu pour objet ; et six qui regardent
monte aux premiershommes, qu'elles passèrent à r/io/Mmt', en commençant par celui-d : « Honore
Noë, de lui aux ancêtres d'Abraham, et ensuite au ceton père et la mère ? Ou » bien faut-il de pré-
peuple d'Israël mais comment en établir les
férence en admettre trois qui se rapportent à
:

preuves, je l'ignore. Ceux


Dieu, et sept qui se rapportent à V homme?
LXX. (Ib. XIX, l-ll.) Sur les rinqunnte jours
qui s'en tiennent à la première clasitication font
écoulés entre Ui Pàque et la publication de la Loi.
un commandement, à part, de ces paroles « Tu
— Le troisième jour du troisième mois depuis
>'

« n'auras pas d'autre Dieu ([uc moi, » et


:

un
« la sortie de l'Egypte, les enfants d'Israël vinrent
autre de celles-ci : « Tu ne te feras pas d'idoles
« au désert de Sina ils étaient partis de Raphi-
;

' Gen. xxni,". '


Kjc. XXXI, I ». — = Act. II. — • Quest. XJCv.
430 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQFE.

« etc, » qui renferment la condamnation (Inculte « ni aucune image de tout ce qui est en haut
(les faux dieux. ne trouvent, au contraire,
Ils c< dans le ciel, et en bas sur la terre, ni de tout
qu'un seul précepte dans ces paroles < Tu ne : « ce (pii est dans l'eau sous la terre tu ne les ;

« convoiteras pas la teninie de ton prochain tu ; « adoreras point et tu ne leur rendras point de
« ne convoiteras pas la maison do ton prochain, » « culte :» à quoi tout cela se rapporte-t-il, si ce
et tout ce qui suit jusqu'à la (in. Mais ceux qui n'est à ce commandement : « Tu n'am'as pas
adoptent la seconde classification ne voient qu'un « d'autres dieux que moi ? »

commandement dans le précepte de n'adorer que On demande encore quelle différence il y a


3.
Dieu et la défense de rendre à aucune créature entre ces mots « Tu ne déroberas point, » et la
:

le culte qui est dû à lui seul; suivant eux il y a défense qui est laite, un peu plus bas, de désirer
au contraire, deux commandements dans les der- les biens du procham. Sans doute on n'est pas
nières paroles du Décalogue l'un exprimé par : voleur, parce qu'on désire le bien d'autrui; mais
ces mots « Tu ne convoiteras pas la femme de
: si tout voleur sent en lui ce désir, la défense
« ton prochain » l'autre par ceux-ci
; « Tu ne : de voler pouvait donc être comprise dans la dé-
« convoiteras pas la maison de ton prochain. » fense générale de convoiter le bien du prochain.
Néanmoins tous s'accordent à reconnaître dix De même, quelle différence entre ces mots :

commandements, parce que l'Ecriture le dit en « Tunecommettras point d'adultère, «et ceux-ci

termes exprès. qui viennent un peu après « Tu ne désireras :

2. Pour moi, je regarde comme préférable la « pas la femme de ton prochain?» En disant :

seconde classilication, parce que les trois pré- « Tu ne commettras pas d'adultère, » ne com-
ceptes qui ont Dieu pour objet apparaissent, prenait-on pas l'un et l'autre ? Mais peut-être la
quand on y regarde attentivement, comme un double défense de voler et de commettre l'adul-
symbole de la Trinité. A vraidire, qu'est-ce que tère regarde-t-elle les actes extérieurs ; tandis
la défense du culte des idoles, sinon une sorte que les autres prescriptions se rapportent à la
de commentaire de ces paroles « Tu n'auras : convoitise de l'àme ; deux choses tout à fait dif-

« pas d'autres dieux que-moi y» Quant à la con- férentes. Car on peut se rendre coupable d'adul-
voitise de la femme du prochain et à la convoi- tère, sans désirer la femme de son prochain, en
tise de la maison du prochain, ce sont deux pé- commetlant mal avec elle pour tout autre
le

chés de nature différente, car à ces mots : « Tu motif; comme on peut le désirer, mais ne pas en
« ne convoiteras pas la maison de ton prochain, » venir à l'acte coupable, par la crainte du châ-
l'Ecriture ajoute immédiatement ceux-ci « ni : timent. La Loi a peut-être voulu l'aire voir qu'il
« son champ, ni son serviteur, ni sa servante,
y a péché dans l'un et l'autre cas.
« ni son bœuf, ni sa bête de somme, ni aucun 4. On demande aussi ordinairement si la for-
« de ses animaux, ni quoique ce soit qui appar- iiiration est comprise dans le mot mœchia, adul-
« tienne à ton prochain. » On voit que la convoitise tère, mot grec que l'Écriture a latinisé. Les Grecs
de lafcmmed'unautre diffère essentiellement de ne ilésignent sous cette expression que les hom-
la convoitise delà maisondu prochain, parceque mes adidlères. Cependant la Loi n'a pas été
chacune de ces prescriptions commence de donnée pour les hommes à l'exclusion des
la même manière « Tu ne désireras pas la femme
: femmes. Parce qu'il est écrit : « Tu ne désireras
« de ton prochain; Tu ne désireras pas la mai- « pas la femme de ton prochain, » la fennne ne

« son de ton prochain, » tandis que les paroles doit pas se croire en dehors de la Loi ni autorisée
qui suivent ne forment qu'un tout avec ce der- à désirer l'homme de sa voisine. Si donc le texie
nier conunandement. Après avou- dit : « Tu ne do la Loi qui parle de l'homme, s'applique éga-
« désireras pas la femme de ton prochain, » l'É- lement à la femme, quoiqu'il ne la nomme pas,
criture n'ajoute pas : ni sa maison, ni son champ, à combien plus forte raison ce commandement:
ni son serviteur, et le reste; elle n'unitenscm- « Tu ne conunettras point d'adultère, » regardc-

bie que forme un seul commandement


ce qui t-il les deux sexes, puisqu'il peut s'appliquer à

et le sépare du précepte où il est question de la l'un et à l'autre, de même que ces préceptes :

femme du prochain. Mais quand il est dit « Tu : « Tu ne tueras point, tu ne déroberas point, »

« n'auras pas d'autres dieux que moi, » ce qui et autres semblables qui ne désignant point de
suit parait u'èlre ([ue le développement exact sexe, se rapportent à tous les deux. Cependant
de la même pensée. « Tune le feras pas d'idole, quand il y en a un de nonuné, c'est le plus no-
LIVRE II. — OrnSTIONS SIR L'EXODE. 431

blo, c'esl-îi-(liiv riioiuiiir, et l,\ rcniiiuMloitsoron- Hieni s'élcverait-il contre ceiiv (|ui disent qu'il
sidi'i'cr comme liée par 'es mômi's commaïKlo- est permis de merdir, (piand le mensonge est
inoiils. Par foiisétiuent, si iiiio rcinmo ma;i('e csl utile à ([uehpi'un et ne l'ail |)oint de tort à celui
adultôre, on so livrant à miJioiiimo ([iii n'est pas à qui l'on meid ? De pareils mensonges ne sont
lesien, bien (pi'ii soit lilire ; île même nn homme |)oint contre le prochiiiii : or, c'est ce (pie l'Ecri-
marié est certainement eoniialde d'adultère, s'il ture send)le avoir eu principalement en vue ; car
commet le péché avec une lemme qui n'est pas elle amait pu dire simplement « Tu ne diras :

la sienne, ([noiipi'elle ne soit |)()ird lii'e jiac le « pas de faux tiMUoiguage, » connue elle a dit :

mariage. Jiais voici une questimi qui vaut la « Tu ne tueras pas, Tu ne commettras pas d a-

peine d'être posée : Un homme qui n'est pas « dultère, Tu ne déroberas point. » Mais c'est là

marié une femme qui ne l'est pas non plus,


et une question qui exigerait de grands di'veloppc-
ayant conuneree ensemble, transgressent-ils ments, et le temps nous manijue poiu- exptiiiuer
tous les deux ce commandement? S'ils ne le trans- ici à notre aise en quel sens il faut prendre ces

gressent pas, le Déealogue ne contient aucune paroles « Vous perdrez ceux qui usent de men-
:

défense contre la Ibrnication, mais seulement ti songe ', » celles-ci « (iarde-toi de toute :

contre l'adultère, quoicpie, suivant le langage « espèce de mensonge '•;» et autres semblables.

de l'Écritm-e, tout adultère soit une fornication. LXXll. { Ib. XX, IS.) Emploi lin verbe voir. —
Le Seigneur ne dit-il pas en effet, dans l'Evan- « Et tout le peuple voyait la voix, et les lampes, et
gile Quiconque renverra sa femme, excepté
: « « ce sonde la trompelte, et la montagne couverte
« pour cause de fornication, la fait tomber dans « de fumée. » Ou a coutume de demander com-
« l'adultèi'e ? » Qu'une femme mariée
i
pèche ment le peuple vouait cette voix, puisque,
avec un autre, il appelle cela fornication ce qui : comme on le voit, c'est à l'oreille plutôt qu'aux
est cependant un adultère. Tout adultère est donc yeux que s'adressent les sons. Maisde même que
désigné dans l'Ecriliu'e sous le nom de for- je viens de dire : comme on le voit, rapportant
nication. Peut-on dire, par réciprocité, que ce mot à tout ce que j'avais dit ; de même, voir,
toute fornication estun adultère ? il ne me re- dans son acception générale, s'entend des facul-
vient pas à la mémoire un seul passage de l'É- tés de l'âme aussi bien que de nos sens corporels :

criture où cette manière de pailer soit em- delàcesmotsdelaC.euèse : « Jacob ayant va tju'il y
ployée Mais permis de dire que
s'il n'est pas " avait du/)/i' en Egypte ^, » quand rien de tout cela
toute fornication soit un adultère, je ne vois pas n'était sons ses yeux. Cependant, au sentiment
en quel endroit du Décalogue se trouve défendu de plusieurs inierprètes, voir une voi.r signifierait
le commerce entre deux personnes libres. Toute- kl la voirdesyeiLX de l'àme. Vou-
comprendre, on
fois, si l'on considère comme un vol toute usur- une énumération rapide, l'historien
lant faire ici
pation illégdime dubien d'aulrui, — car celui qiù sacré rapporte ce que voyait le peuple la voix :

a détendu le vol n'a point aidorisé la rapine mais ; du tonnerre et les lampes, le son de la trompette
en mettant la partie pour le tout il a voulu ex- et la montagne toute en feu mais s'il s'était servi ;

primer tout ce qui ne peut légitimement être du verbe entendre, combien il eût été plus difficile
ravi auprochain, —
nous devons également re- d'expliquer comment le peuple entendait les
garder comme défentlu sous le nom d'adultère lampes et la montagne couverte de fumée, objets
tout acte coupable et tout usage illégitime des qui tombent sous le sens de la vue. On dira peut-
mendjres. être que la brièveté est ici un défaut, et qu'il
Quant à ce commandement. « Tu ne tueras
o. eût fallu dire pour ne rien omettre : le peuple
« » on ne doit pas croire (|u'il est violé,
pas, entendait la voix et votpiit des lampes, entendait
lorsque Dieu ou la loi condamne quelqu'un à le son de la trompette et voyait la montagne toute
mort. A celui (jui conunautle revient la respon- en feu. Il y avait deux sons qui se faisaient en-
sabilité, quand celui qui exécute n'a pas le droit tendre : celui des nues, du tonnerre vraisem-
de refuser l'obéissance. blablement, et celui de la trompette, en sup-
(5. Entîn on demande souvent dans ces pa- si posant toutefois que premier son dont il est le
roles ï Tu ne diras pas de
: faux-témoignage parlé sortait des nues. En somme, dès lors que
« contre ton prochain, » se trouve la condamnation l'Ecriture a voulu tout exprimer en peu de mots,
de toute espèce de mensonge ce commande- : il était préférable qu'elle employât le verbe voir
'
>Iatt. V, 32.
I
Ps. V 7. — J Eccli. VII, 14. — ^Gen.-XLII, l.snivantlcs Septante.
.

432 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

dans son acception générale, en parlant des cho- « dieux d'or. » Répétition de la défense renfer-
ses qui frappent l'oreille, plulùt que d'employer le mée dans premier commandement car par
le :

verbe entendre, en parlant des objets qui tom- les dieux d'or et d'argent il faut entendre toute
bent sous le sens de la vue. Cette dernière façon espèce de simulacres : < les iiloles des nations, dit
déparier n'est poinidans nos usages. Nousdisoiis « le l'salmite, sont de l'or et de l'argent '
. »

bien lois ce bruit, mais non


; Ecoute cette : LXXVIl. (Ib. XXI, 2.) Sur la loi relative aux
lumière. esclaves. — La
de Moïse règle que l'esclave
loi
LXXIII. (Ib. XX, 19.) Lu crainte, caractère hébreu servira pendant six ans, et qu'à la septième
principal de l'ancioi Testament ; l'amour, carac- année ii sera renvoyé libre et quitte de toute obli-
tère du .\ouveau. —
Parle-nous toi-même que
((
;
gation. Dans la ci'ainte que les esclaves chrétiens
« Dieu ne nous pai'le point, de peur que nous ne réclament de leurs maîtres un send)labie
« ne mourions. » L'Ecriture nous montre à plu- privilège. Saint Paul, s'appuyant sur son auto-
sieurs reprises, et d'une manière incontestable, rité apostolique, ordonne aux esclaves d'obéir à
que la crainte estlesigue distinctif de l'ancienne ceux dont ils sont les serviteurs, afin que le nom
Alliance, et l'amour, le signe disliuctif de la de Dieu et sa doctrine ne soient point outragés
nouvelle celle-ci était cependant en germe dans
; par des blasphèmes Au reste, cette prescrip- '•.

l'ancienne, et en est comme l'épanouissement. tion mosaïque renferme quelque mystère ce qui :

Mais comment avancer que le peuple d'Israël le prouve, c'est l'ordre donné par Dieu tle percer

voyait la voix de Dieu, en donnant à ce mot le avec une alêne, contre une poteau, l'oreille de
sens de comprendre, puisqu'il craignait de celui qui refusait le bénéfice de la liberté.
mourir en l'entendant ? en vérité, nous n'avons LXXVIII. (Ib. XXI, 1-il.) Sur laloi relative aux
pas de raison suffisante pour admettre cette in- filles esclaves. — « 1. Si quelqu'un a vendu sa fille
terprétation. « pour esclave, elle ne sortira point comme fout
LXXIV. (Ib. XX, 20.) Dieu éprouve son peuple « les autres servantes. Si elle a dépluà son maître,
par la terreur. —
dit Ayez con-
« Et Moïse leur : « qui ne lui a pas donné son nom, il lui don-
« fiance ; venu à vous pour vous
car Dieu est « nera une récompense. Mais il n'est pas le
« tenter, afin que sa crainte soit en vous, et que « maître de la vendre à un peuple étranger,
« vous ne péchiez point. » La crainte des châti- « parce qu'il l'a méprisée. S'il la fait épouser à
ments sensibles voilà donc le frein par lequel
, « son fils, il connue il est juste de
la traitera
Dieu les empêche de pécher car ils n'étaient pas ; « traiter Icsfdles. Et en prend une autre pour
s'il

encore capablesd'aimer lajustice pourcUe-mème ; « son fils, il ne refusera pas de lui donner l'en-
et cette épreuve. Dieu la permet pour mettre au « tretien, le vêtement et la cohabilatiou. S'il ne
grand jour les dispositions qui les animent. Ce « lui accorde point ces trois choses, elle sortira,
n'est pas (pi'il en eût besoin pour les connaître :
« sans ([u'il en puise (irer d'argent. » Ce passage
il les comiaissait parfaitement ; mais ii \onlalt est obscur par l'emploi de termes et de
rendu si

les faire connaître les uns aux autres, et à eux- constructions inusités, que nos commentateurs
mêmes. Ces terreurs, qui forment le trait carac- savent à peine connnent en expliquer le sens. Cet
téristique de l'ancien Testament, avaient cepen- endroit n'est pas plus facile à conii>rendrc dans le
dant leur utilité l'Epitrc aux Hébreux en fait
; grec. J'essayerai pourtant dédire ce que j'y vois.

l'éloge en termes très-expressifs '


2. «Si (piehpi'un, porte le texte sacré, a vendu
LXXV. (Ib. XX, 21.) Comment Dieu se mani- «sa fille pour servante, » c"est-à-cUrepour qu'el-
feste à Moïse dans la nuée. «Or, Moïse entra — le soit servante, ce que lesCrccs expriment par le

« dans la nuée où Dieu était, » c'est-à-dire où mot oc/.i-Y.ç,, « elle ne s'en ira point connue se

Dieu faisait éclater lesphisgrands prodiges, afin « lelirenl les servantes. » Cela veut dire qu'elle
de se faire connaîtiv. Comment, en effet, se mon- ne se retirera pas, comme les servantes juives au
dans une nuée, Lui que les cieux des
trait-il boul(lesi\ ans. Car il faut admettre que, devant
cieux ne peuvent contenir ? n'était-ce point de celle loi mosaïque, la Icnuue était mise sur le
la même manière qu'il est i);ulout. Lui qui n'est même pied que l'homme. Pouniuoi donc ne se
en aucun lieu en particulier ? retirera-l-cUe point la septième année, si ce n'est
LXXVl. (ib. XX, 23.) Sur les idoles— « Vous parce que, durant son service, son maître l'a

« ne vous ferez point de dieux d'argent ni de


I

Heb. XII, 24-28. 1


l'b. cxm, 4 cxxxiv,
,
15. — ' Eph. vi, 5; I Tim. vi, 1.
LIVIU-: 11. - UIKSTIONS SnU L'EXODE. 433

avilie, on almsaiil dVIio ? Los paroles (\\\\ siii- aiilre, <i il ne refusera pas à cette servante
vtMil victmcnl coiitirmereellciiifcriiivlalioii. Voi- '< l'enlrelicu, le \(Memi'iil et la cohahitatiori ;
>-

ci eu cUcI ce (iiieiioiis lisons : u Si elle ne plail parce (pi'elle n'esl pasdemeiirec l'épouse de son
« ne lui a pas donné son
pas à son inailie, (pii lils, il lui doimera ce (|ui convieiil, ce qu'il lui
« nom ne l'a pas prise pour épou-
», c'esl-i'i-dire, aurait accordé, s'il n(> lui eut pas fait iirendre son
se, illni donnera une récompense, «ce (pii si-
'< nom, apn'is l'avoir cependant avilie par le com-
fjnilie, comme il a étédil plus haut, « qu'elle \w merce charnel. « H ne lui refusera pas la nihabi-
'< s'en ira point comme s'envontles seivanles.» « talion», \c grec porte : manière chaste
ô^O.iy.v,

La jnslice vont enolTot (pi'elloro(;oivc un dédom- de désigner le commerce charnel.


Maintenant
mauemenl pour avoir été avilie, puisque son (pie signifie : « Il luidDiiiiera en place une ré-
commerce avec elle, il ne l'a jtas
maitre ayant eu « compense? » Au livre de Daniel', les vieillards

prise pour épouse, en d'antres tenues, no lui a (pii accusent faussement Suzanne, déposent en ces
pas donné so.i nom. i^lusieui's inlerprètes tra- « lermes ; l'njeimi' homme (piiélait caché, est v(>-
duisent " il l'a rachètent », ce (pie nous
: avons « nu, et a commis lepécliéavec elle. » I)aniel in-
rendu pai" « il hwcrottiprnst'Vd. « Si le );rec avait terroge l'un des ileiix à ce sujet et leur dit : « Sous
porté «TOÀ'jTpwrjôTai, ou l'aurait traduit com- « (piel arhre l(>sas tu vus parler ensemble ?» ex-
me dans ce passage du l'saume « Il rtichiiem : pression modeste qu'il sultsi il ne à celle dont ilssé-
lui-même Israël ', » où on lit duoXurpwosTai. Mais taientservis. Puis, s' adressant à l'autre et le con-
ici nous lisons: am)vu-po)t;£i ce ipù donne à en- : vainquant de mensonge « llace de Chanaan,
:

tendre ((ne 1' maitre rct.oit, pluti'it que de don- « lui dit-il, et non de Juda, la heauté t'a séduit,
nerqnehpieclioseponr le rachat de sa servante. « et la passion a perverti ton cœur. C'est ain-
A qui, on elTet, le maitre donncra-t-il, pour ra- « si que vous traitiez les filles d'Israël, et elles,

cheter celle (pi'il possède en([nalité (h; servante? « ayant peur, vousohéissaient. » On lit dans le

« H n'est pas le maître de la vendre ;\ un peuple grec : Elles \oiis parlaient : ces expressions dési-
« étraufïor, parce qu'il a eu du mépris pour elle. »
gnent le commerce charnel. Car dans ce passa-
Le mépris qu'il a eu pour elle, ne lui donne ge : « Sous quel arbre les avez-vous surpris, » le

pas le droit de la vendre en d'autres termes, il


; grec s'exprime de cette sorte : Les avez-vous
n'en sera pas tellement le maitre, qu'il ait le surpris parlant ensemble : ce qui, encore une
droit delà V(Midre à un peuple étranjjer. Avoir fois, signifie l'union des corps.
ou du mépris pour elle, ou l'avoir mé- 4. Quant aux autres paroles qu'on lit dans l'E-
prisée, c'est la même chose l'avoir méprisée, ; criture : « S'il ne fait pas ces trois choses, elle
signifie l'avoir avilie, c'est-,-i-dire avoir eu « sortira sans rien recevoir,» en voici le sens:

commerce avec elle sans la prendre pour épou- S'il ne l'avilit point par le commerce charnel,
se. Le grec porte v^9£Ty;«7ey, qui correspond à notre s'il ne la donne point pour épouse II son lils, ou la
mot sprevit, dont l'Ecriture se sert dans Jéré-
: renvoie sans avoir marié son fils à une autre,
niie « Comme une femme méprise celui avec
: « elle se retirera sans qu'on paie rien pour elle, »

« qui elle a commerce ~. » c'est-à-dire qu'il lui suffira de ne |)lus être tenue
3. L'ficriture dit ensuite : « S'il lui fait porter en servitude. Elle s'en ira, comme un esclave
« le tum de son fils, il la traitera comme il hébreu, sans rien recevoir. Il n'est pas permis
« pstjuste de traiter les filles. «Ici revient l'expres- à son maître de la marier à un autre qu'à un hé-
sion employée précédemment : « à qui il n'a pas breu, pas plus qu'il ne lui est permis de la ven-
ailiniué son i!>m. » Or, ces paroles: «S'il lui fait dre h un peuple étranger. Mais s'il la marie à
(( porter le nom de son que signifient-
lils, » nu hébreu, il faut comprendre qu'elle se retire-

elles, sinon qu'il la lui donne pour épouse ?Car ra avec son mari, sans qu'on paie rien pour elle
il est marqué : « il la traitera comme il est juste et sans qu'on puisse non plus la séparer de lui.
« de traiter les tilles, » c'est-fi-dire qu'il la ma- LXXIX. (Ib. XXI, 12.) Sur l'homicide volon-
riera comme une fdle en lui aiiiiortant une dot. taire et involontaire. quelqu'un frappe — « Si
L'Écriture ajoute : « Mais s'il prend une autre « un homme au mourir, qu'il point de le faire
« femme pour son fils, «autrement, s'il ne lui don- « soit puni de mort. S'il n'a pas voulu la mort de
ne pas l'esclave pour épouse, et lui en accorde une « cet homme, mais que Dieu l'ait fait tomber
« entre ses mains, je te donnerai un lieu où il
' Ts.cxsLv.S. — ' Jér. lll.iîO. iDan. .-^111,37, 54-58.
434 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

« pourra se réfiip;ier. » On tlemantle quel est le core en cet élat dans le sein maternel. Ici l'on
sens de ces (»ai'olcs : « S'il n'a pas voulu doinier soulève ordinairement une question au sujet de
« la mais que Dieu ait livré entre ses
mort, l'àme Ne peut-on pas dire que ce <jui n'est pas
:

« mains. Ne semblerait-il pas que celui qui


» formé encore, n'est pas même anime, et con-
conunettrait un homicide volontaire, serait dans sé([uemment qu'U n'y a pas homicide, puisqu'il
son droit, si Dieu ne faisait pas tomber la vie lime est impossible d'ôter la vie à ce qui n'avait pas
en ses mains? Mais voici la signification de ce d'àme ? Qu'on encore ce qui suit
lise « Mais si :

passage : quand l'homicide a été inrnloiitiiirc, « l'enfant est formé, il donnera vie pour vie '. »
Dieu seul intervient dans cet acte, et c'est préci- Qu'est-ce à dire, sinon qu'il mourra ? Prenant
sément pour exprimer cette pensée, qu'il est occasion de là, le législateur établit pour les
dit « Que Dieu a tait tomber la victime sous les
:
autres crimes des pénalités analogues : « OEil
« coups » du meurtrier. Mais quand l'homicide « pour dent pour dent, main pour main,
œil,
a été volontaire, il y a à la fois l'intervention du « pied pour pied, brûlure pour brûlure, blessure
meurtrier et celle de Dieu qui livre la victime « pour idessure, meurtrissure pour meurlris-
entre ses mains. Dans le premier cas, apparaît « sure 2 : » c'est la justice du talion. La loi mo-
donc exclusivement l'action de Dieu, dans le saï(|ue l'a établi, pour faire voir dans quelle
second, l'action de Dieu et l'action libre, volon- mesure on avait le droit de tirer vengeance.
taire de l'homme seulement l'homme n'inter-
: Car si la com-
Loi n'avait pas fixé cette règle,
vient pas à la manière de Dieu. Dieu en effet ment aurait-on connu la valeur du pardon ?
n'est que juste, tandis que l'homme est digne de comment aurait-on pu dire; « Remettez-nous
châtiment, non pour avoir tué celui dont Dieu « nos dettes, comme
nous remettons à ceux qui
ne voulait pas la mort, mais pouravoir donné la « nous doivent s?
La loi fait donc connaître „

mort injustement. Il n'a pas été l'instrument de le débiteur, afin qu'on mesure la valeur du
la volonté de Dieu, mais l'esclave de sa malice pardon sur l'importance de la dette. Car nous
et de sa passion. Dans un seul et même acte ne saurions pas nous-mêmes ce que nous remet-
se trouvent donc réunis ces deux extrêmes :
trions aux autres, si nous ne savions, par les
Dieu, dont il faut bénir la justice mystérieuse, prescriptions delà Loi, ce qui nous est dû. Si
et l'homme, (jui mérite la punition de son crime. donc l'enfant existe déjà, mais informe en quel-
Judas, qui a livré le Christ à la mort i, n'est point que soi'te, quoique animé, ( sur cette grande
excusable, parce que Dieu n'a pas épargné son (piestîon de l'àme, il serait téméraire de pro-
propre fils et l'a livré pour nous tous 2.
noncer à la hâte un jugement irréfléchi,) la Loi
LXXX. (Ib.xxi, :2:2-2o.) Sur l'avortement d'une ne veut pas que ce soit un cas d'homicide. Sup-
femme, provenant d'une rixe entre deuxhommes. — posé en effet qu'une âme vivante puisse exister
« Si deux hommes se querellent ensemble et
dans un corps informe et par conséipicnt privé
« frappent une femme dans sa grossesse, et
de sensibilité, on ne peut dire cependant que
« qu'elle mette au monde un enfant qui n'est
cette âme vit, tant que le corps n'est pas doué
« pas formé, le meurtrier paiera l'idemnité que de ses sens. Quant à ces mots « Et il paiera :

(1 lui imposera mari de la femme, sur sa de-


le
« sur sa demande » (jcerà «^['w/iâro; l'indemnité
« mande. Il me semble que l'Ecriture a moins
>•
que le mari fixera pour l'avortement, il n'est
en vue les circonstances du fait qu'elle signale, pas facile d'en déterminer le sens. 'A^i'wpa, le
qu'une signification particulière. Si elle n'avait mot grec correspondant, s'interprète de plu-
en vue que la di-leuse de frapper une femme sieurs manières, et la traduction la plus suppor-
enceinte et de la faire avorter, elle ne ]iarlerait table est encore celle qui porte : « cum pos-
pas de deux hommes <{ui se querellent ensem- « tulatioue, » sur sa demande. Peid-èirc cela
ble; un seul, dans un rixe avec cette femme, signifie-t-il : il demandera qu'il lui soit permis de
ou même sans querelle et uniquement dans le ilonner, afin de satisfaire à Dieu de cette ma-
dessein de nuire à la postérité d'autrui, peut nièi-e, quand même le mari ou sa femme n'élè-
causer ce funeste résultat. Mais quand l'Écriture verait aucune prétention.
ne voit pas un homicide dans la mort donnée à LXXXI. (Ib. XXI, 28.J Le taureau qui aura
un enfant qui n'est pas formé, c'est qu'elle ne attaqué de sa corne et tué un hommesera lapidé. —
considère pas comme un homme le fœtus en- « Si un taureau frappe de sa corne un homme

' Malt. \K\\, IS. — ' Rom. virr, 31. E.vu. XXI,
I
- Ib XVI, 21, — Malt, vl, 12.
2;). ï -25. '
LIVKK 11. — m'KSÏIONS SUR L'EXODK. 43r>

« 011 mio IV'iiimt', cl <|n'ils on inciiront, il scrii lAXW. (Il), xxn, !).) Sur le parjure dévoilé
« laiiidi", l'I l'on in' niuriiîcra point do sa chair; par Dieu lui-mrnie. Que veulent dire ces mots: —
« mais le niailic lin lncnf sera innocent. » i.a « (Iclniipii auriiétécoriviiincup;ui)icii,rciidr;i le

justice veut (ju'on lasse périr l'animal (pii nuit •< (li)Mi)lc':' « Ne si;;Miliciil-ils pas (pie Dieu veut
aux honnnes, et (piand la Loi parle du taureau parfois, à certains signes, laire connaître le par-

en particulier, c'est la partie (|ui est prise poui- jure?


le ton!; de là tons les animaux au service de LXXXVI.(Il). XMi, •2H.)Quesiqnilie:Les dieux"!
riionnne, dès qu'ils lui sont nuisihles, doivent éga- — « Tu ne maiidiriis point les dieux. » Uni
lement être sacritiés. Mais s'il tant les faire périr, ;ippelle-l-il de ce nom? Sonl-cc les premiers qui
p()ui'(|ui)i employer la lapiilaliou? Ou'imporlc rendent la justice au peuple ? .Moïse futde même
en ell'et geine de mort |)our un animal des-
le appelé^le dieu de Pharaon i. Alors ce (jui suit :

tiné à périr'? De pins il ne faut i)oint se nomrir « Et tu ne maudiras point le prince de ton peu-
de sa chair; à ipioi tout cela a-t-il ra|)port'!' L'E- « pie » — le grecporte :tunediraspasdemal, —
criture, lidèle à l'es|)rit ([ni l'anime, n'a-l-cllc seiiiit l'explication d(> ce qui précède, et ferait

pas ici cnvnc(inel(|ue signihcalion mystérieuse? voir ceux que le législateur entend désigner par
lAXXlI. (II). 21, 3.J.) Sur le tnureau qui cette expression : lesdieux. Ou bien laiit-il donner
blesae et tue un autre taureau. « Si le taureau — à celte |)arole lesensque lui prèle l'Api'iIre, (piand
« de quelqu'un frappe de sa corne le taureau du il dit: « car encore qu'il y en ait, dans le ciel
« voisin, et (]u'il en meure, ils vendront le tan- « ou sur la terre, qui sont appelés dieux, et qu'en
te rcau (jui e.U vivaid et ils en partageront le ;
« ce.sens il ij
ait plusieurs dieux et plusieurs Sei-

« prix, et ils partageront le hœuf. » Est-ce que «gneurs ^? » en ajoutant: dansce .wns il yena,
cette loi ne devait avoir d'application que pour l'Apôtre veut dire qu'il est des créatures vrai-
le taureau, et non pour tous les autres animaux ment dignes de ce nom, mais c'est ii cette condi-

en pareil cas ? Il est évident qu'ici encore la tion ([lie ce qu'on nomme en grec AarpEt'a, en
partie est mise pour le tout seulement si la chair ; latin servitus, c'est à dire le culte d'adoration,
de l'animal tué était de celle dont on ne man- n'est dû qu'au seul vrai Dieu, qui est noire Dieu
geait poiid, !a loi n'avait plus en ce point de à nous. Il est défendu de maudire
les dieux, mais

raison d'être. en supposant mèmequ'ily ait des créatures vrai-


LXXXIII. (Il), xxii, I.) Loi relative au vol des ment dignes de ce nom; il n'y a pas de loi qui
veaux ou des brebis. —
Pourquoi la loi veut-elle commande de les honorer par des sacridces ou
qu'on rende cin([ veaux pour un seul, et quatre par aucune démonstration qui tienne du culte
brebis pour une, sieeci ne voile quelque mvstère? de latrie

LXXXIV. (Ib. x\u, 2.) Sur les voleurs qui LXXXVII. (Ib. xxni, 2.) Le mauvais exemple
s'attaquent aux maisons. — « Si un voleur est du (p'and nombre n'excuse pas du péché. « Tu —
« surpris perçant la muraille, et qu'étant blessé « ne seras pas avec le plus grand nombre pour le

« il en meure, il n'y aura pas homicide. Mais si « mal. » Juste condamnidion de ceux qui excusent

M le soleil selèvesurlni, lemeurtierseracoupable, leur conduite sur l'exemple du plus grand nom-
« et il mourra. » Par conséquent, si le voleur est bre, ou qui pensent être par cela même irrépro-
tué pendant la nuit, ce n'est pas un cas d'ho- chables.
micide; mais le contraire a lieu, si c'est pendant LXXXVIII. (II). xxui,3.) Sur la miséricorde
lejour Car tel est
. le sens de ces paroles : « si le soleil et la justice — « Tu n'auras pas compassion du
« selèvesurlni. » On pouvait discerner alors s'il « pauvre, en le jugeant. >• Sans en
cette adition, «
se présentait pour voler et non pour tuer, ce « le jugant, » le texte précité eût donné lieu
qui ne donnait pas le droit de le mettre à mort. à unegrave question. D'ailleurs quand cette addi-
La législation antique des païens, moins ancien- tion n'eût pas été écite, il aurait fallu la suppléer
ne cependaid que celle de Moïse, permettait par la pensée. Plus haut, le texte porte « Tu :

aussidetuer impunément et de quelque manière « netejoindraspasà la multitude, pour te laisser

que ce soit le voleur de nuit, et même le voleur « aller avec le nombre ii porter un
plus graïul
de jour, quand il se défendait à main armée car :
« jugement quand on lit ensuite:
injuste ; »

alors c'était plus qu'un voleur '. « Et tu n'auras pas compassion du pauvre, « on
pouvait donc sous-entendre : « devant la justice. »
Voir la loi des xilTables, ces paroles eu sont extraites par Cicéron
1

dans son discours ;>rt) Miloiie. '


Exod. vir, 1 . — 2 1 cor^ vin 5.
436 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

Mais dès lors que l'addition s'y trouve, la que les sangliers, les cerfs et autres animaux d'es-

raison de ce précepte est évidente: il ordonne pèce semblable? cette prescription doit néan-
que quand nous rendons la justice, si nous moinsvoilerquelquesligures. Car, si Dieu endon-
voyons que le riche ait droit contre le pauvre, nant les préceptes aux hommes, ne s'inquiète pas
nous ne favorisions pas le pauvre contraire- de bœufs i: —
ce qui signifie, non qu'il ne nourrit
ment h la justice, sous prétexte d'humanité. pas les animaux qui ne sèment, cpii ne mois-
La miséricorde est donc bonne, mais elle sonnent ni n'amassent point dans des greniers,
ne doit pas être contraire anjuainnent, c'est-à- mais que ses préceptes n'ont point pour objet de
dire, i)0ur interpréter ce mot de l'Ecriture, à ce prescrire à l'homme le soin qu'il doit avoir de
qui est juste. Dans la crainte (pi'on ne conclue son bœuf; —
combien moins s'inquicte-t-il de lui
de cette maxime que Dieu défend la miséricorde, prescrire le soin qu'il doit avoir des bêtes
qui vient ensuite dit avec beaucoup d'a-
le texte sauvages. Ne les nourrit-t-il pas lui même des
propos « Si tu rencontres le bœuf de ton enne-
: trésors qu'il a déposé dans le sein fécond de la
« mis, ou sa bète de somme, lorsqu'ils sont nature, et n'a-t-il pas soin de leur nourriture
« ramèneras et les lui rendras »
égarés, tu les ; pendant les six années où l'on récolte ce que
alin donc que lu saches que l'exercice de la misé- l'on a semé.
ricorde ne t'est pas défendu, pratique-la, même XC. (Ib. xxni, t9.) L'agneau ne doitpas être
à l'égard de tes ennemis, quand tu le peux, en cuit DANS LE LAIT DE SA MÈRE. — « Tu UC fcraS
dehors de la justice car en ramenant et en : « pas cuire l'agneau f/«)is /f lait de sa mère. »

rendant à ton emiemi son bœuf égaré, tu n'es Est-il possible de prendre ce passage dans le sens
plus un juge qui siège sur son tribunal et exerce propre et littéral, je n'en sais vraiment rien. Car
ses fonctions. si l'on admet que la défense de de faire cuire
L\X\1X. (Ib. xxHi, 10.) Sur le repos de la l'agneau dans le /rt/f symbolise quelque mystère,
terre pendant la septième année. — « Tu sèmeras je réponds que l'usage de cuire un agnau dans
« ta terre pendant six ans, et tu en recueilleras le lait n'existe nulle part. Et si l'on veut que ces
« les fruits ; mais tu feras relâche la septième mots signifient pendant ([u'il est encore a la ma-
:

melle, quel est, observerai-je, le Juif qui a jamais


« année, et tu la laisseras reposer ; et les

« pauvres de ton peuple auront à manger; ce attendu, pour faire cuire un agneau, qu'il ces-
« qu'ils laisseront, les bêtes sauvages le man- sâtde téter? Mais que signifie dans le lait de sa :

te geront. Tu feras de même pour ta vigne et ton mère; est-ce que, en admettant ce dernier sens,
«plant d'oliviers. «On peut demander ce que la loi ne serait pas transgressée si l'agneau, que
lepauvre trouve à recueillir, si le possesseur l'on fait cuire ayant perdu sa mère, était allai-
laisse ses champs sans même les ensemencer. té par une autre brebis ? Il n'est personne qui
Car ce n'est pas à la vigne, ni aux oliviers que se ne reconnaisse à cette loi un sens figuratif. Les
rapportent ces mots : « Les pauvres de ton peu- prescriptions mêmes (jui peuvent être observées à
« pie auront à manger : » d'une terre non ense- la lettre, n'ont pas été commandées sans motif ;

mencée, incapable de porter des moissons, ils elles ont leur signification. Ici je ne vois pas
n'auront rien à recueillir, et quant à la vigne et quel sens littéral a, ou pourrait avoir ce comman-
aux oliviers, il est dit qu'il faut faire la même dement. Cependant j'admets l'interprétation, qui
chose il s'agit donc ici des champs qui four-
:
y voit une prophétie relative à Jésus-Christ il ne :

nissent le froment. A ces paroles: « Tu sèmeras devait pas, dans son enfance, être mis h mort
« ta terre pendant six ans, et tu en recueilleras par les Juifs, mais échapper aussi h la cruauté
« les fruits, » faut-il donner l'interprétation d'Héiode, qui cherchait à le faire mourir^; alors

suivante pendant six ans tu sèmeras et tu re-


: cette expression : « Tu feras cuire » désignerait
cueilleras; mais la septième année, tu ne recueil- le feu de la Passion, en d'autres termes, la tri-
leras pas, sous-entendu, après avoir semé ? ainsi bu talion. L'Ecriture ne dit-elle pas, en cfict :

pendant six ans, le possesseur sèmerait et recueil- « La fournaise éprouve les vases du potier, et l'é-

lerait, mais la septième année il abandoimerait ce « preuve de la tribulation, leshommes justes*. »

qu'il aurait semé ? Autrement qu'est-ce qui en re- Comme Jésus-Christ n'a point souffert dans son
viendrait aux pauvres, dont les restes sont encore enfance, lorsque poursuivi par Hérode il sem-
réservés aux bêtes sauvages, c'est-à-dire à celles
qui peuvent se nourrir des mêmes aliments, tels .' Cor. IX, 9. — 2 Matt. H, 16. — ' Eccli. xxvn, 6.
.

LIVRE II. — UUKSTIONS SI II L'KXODIv W7

|ioinl lie siKTOinlicr au (lancer, (111 diiiil jouissaient les pécheurs '. Il \oyailles im-
lilMilsiir le

iccomiiiilic une prédii'lutii do col ('vèiic- pies posséder euahoiidaiicc ces liieiis (pi'aimon-
(li)il

mciit dans ics painles : « Tu no loras pas cuiic çait l'Alliance anli(|ue, cl (pi'il alleudait du
« l'agnoau dans lo lait de sa mère. » Il ne sciait Seigneur Dieu, comme la r(''C()m|)euse ih; sa

peut-èli'e pas non |)lus dérais()nnai)le d'aduiet- soumission. De là cette i)ensé(; iiui)ie ((ui com-
avee certains connnenlaleuis, (pie le l'io- mençait à gagnersoii cd'iir Dieu nes'iiKpiiète :

iro,
plii'te a voulu, par ee eoMunaudeineiil, enipi'-
pas de rhoimue; mais il s'ancle, dil-il, n'osant

elier les vrais Israélites de s'assoeiei' aux mauvais coiidamuer la coiiduiledcs saiuls; alors la lumiè-
Juifs, (pii ont f;iit souffrir le Clirisl. Comme un re commence à descendre dans sou àiue, et il

lujnciiu ihnis le liiitdi' siimi'ir, e'esl-à-dire,^/» Jiuir s'écrie : «C'est là un travail dillicile iiour moi,

de sa coiuriition. On dit eu efleldcs « jusipi'à ce quej'ent''e dans le sanctuaire de


(in)iiversairi'

femnu^s (pie, du jouroù ollc^s ont eoiuu, elles « Dieuetquejc comprenne (piellesera la lin '•. »

eoneeplion cl la passion Là eu effel seront données lesiY-compenses (pu


amassent du lail. Oi', la

du (lliiist ont eu lieu dans le nu'me mois, com- sonl le privilège du nouveau Testamenl, el h^s

impies n'y auront point de i)art alors les châ-


me rallestent la (vlt'bralion de la l'àipie elle :

timents atteindront les im])ies, el nul d'entre les


grand jour, si eoiiuii dans les ('t; lises, consacre' à la
lëlo de sa Nati\itt'. Venuau monde au terme des saints n'éprouvera leurSjtoiirments.
XCIII. (II). x\ni, i.H.)Sur les ifuèpes dont le
neuf mois, le huit de calendes de Janvier, il a
été con(,'u nécessairement vers le huit des calen- Seifineur fait précéder son peuple dans la terre

des d'Avril; or ce fut aussi dans ce temps (lu'eut promi.ie — « Et j'enverrai devant toi des guêpes

lieu sa passion, dans le lait de sa mire, c'est-à- « el elles chasseront loind(> loi les Amorrhéens,
dire au temps ou sa mère vivait encore. « les Evéens, les Chananéens el les Cheltéeus. »

XCI.ill). K\n\,'!îS\i\ Suil' .htije conducteur des Une faut-il entendre par ces guêpes ? Dieu pro-
.)

Hébreux. — « Voici (pie j'envoie mon Anpe de- met qu'il lesenverra, et le livre de la Sagesse af-
firme qu'il a rempli sa promesse « Et il en-
« vaut toi, pour (ju'il te garde dans le chemin, :

« qu'il te conduise dans que je t'ai ])ré-


la terre « voya, y lisons-nous, des guêpes en avant de
« son année 2. » Cependant nous ne lisons la
« parée. Ecoute-le, et garde-toi de ne point te
« confier à lui : il ne te pardonnera rien car ;
relalion de cet événement ni au temps de Moïse,

« mon nom est sm- lui. » Ces paroles s'appli- ni à l'époque de Josué, fils de Navé, ni enfin
quent à celui dont le nom a été changé en celui sous le gouvernement des Juges ou des Rois. Il

de Jésus, ou Josué : c'est lui en effet qui a intro- est donc permis d'entendre par ces guêpes les

duit le peuple dans la terre promise. aigTiillons de la crainle qui tourmentaient les

\CII. (Ib xxiii, 25-27.) Surles récompenses tem- peuples cités plus haut et les foi'(;aient à se re-

porelles. — ce Tu serviras le Seigneur ton Dieu ;


tirer devant les enfants d'Israël. C'est Dieu qui
« et je bénirai ton pain, et ton vin, et ton eau, parle et si sa parole, contenant un sens ligure,
« et j'éloiaiierai de vous l'infirmité. aura
Il n'y ne s'accomplit point dans le sens littéral et sui-
« point d'honuue qui n'ait des enfants, [)oiiit de vant la propriété des termes, cela n'empêche
« femme stérile dans ta terre. Je remplirai le nom- point d'ajouter foi à l'histoire où la vérité du
«bi-edetesjours. Et j'enverrai la craintepour te récit apparaît. Il en est de même de ce que rap-
« précéder et je ferai perdre laraison aux nations portent lesEvangéhstes : lesfaits réels n'y pei'dent
;

«chezles([uellestu entreras etc. « Ces promes- rien de leur civdihilité, parce que le Christ tient

ses peuvent ètreprisesaussidans lesensspirituel; (pichpiefois un langage ligure.


mais entendues de la félicité tempoiel le, elles for- XCIV. (Ib. xxiii, 33.) Sur le service et l'adora-

ment le typecaracléristique de l'ancien Testament tion (lui sont dus h Dieu. — « Si lu sers leurs

Là, si nous en exceptonsles commandements ipii « dieux, ilsserontpourtoi un sujet de scandale. »

cachent une signification mystérieuse, nous trou- Ici le texte grec porte §o-jli{iar,c„ tu serviras, au
vons les mêmes préceptes moraux que dans la loi lieu de ly-^vjrjr.i, tu adoreras. Ilsuitde laque le

nouvelle, mais les promesses sont toutes char- service, oouXeta, est dû à Dieu en sa (pialilé de

nelles el terrestres. Aussi, au Psaume soixante- Seigneur, mais que l'adoration, Xatpst'a, n'est
douzième, l'homme de Dieu dit-il que ses pieds due qu'à Dieu et par cela même qu'il est Dieu
ont pres(pie fléchi et qu'il a été sur le point de
tomber, lorsqu'il voyait d'un œil jaloux la paix '
P3. IXXII, 2- ' Sap, .XII, 8.

S. AuG. — ToM. IV. 34


438 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

XCV. (Il), wiv. l-o.).S')/)7('.s' ordnniKinces du Sei- « montagne, et douze pierres pour les douze tri-

(jneur. — EtildilàMoiso: «Monte vers le Seigneur, « bus d'Israël. » Ces douze pierres (]ui composent
« toi et Aaion, et Nailiilj, et Al)inil, et les soixan- l'autel signilient que ce peuple estl'aulelde Dieu,
« te dix anciens d'Israël, et ils adoreront le Sei- aussi bien qu'il en est letemple i.
« gneur de loin, et Moïse s'approchera seul du XCVIII. Ib. \xiv,.3.) Sur ce mot la victime :

« Seigneur, mais pour eux ils ne s'approcheront du .salut. —


« El ils immolèrent à Dieu la victime

« pas, et le peuple ne montera pas avec du salut. » Le texte ne porte pas la victime :

« eux. Or, Moïse vint et rapporta au peuple .fulutaire, mais la victime du salut en grec on lit :

« toutes les paroles et toutes les ordon- également 50)T/,pi'oj, du salut. Le Psalmistedit de
« nances de Dieu, et le peuple répondit même « Je prendrai le calice du sulut,» et non
:

« en disant Nous ferons et nous


fout d'une voix, :
pas le calice salutaire Il faut examiner si '-.

« écoulerons tout ce que le Seigneuradit. On voit >. ce passage ne ferait pas allusion à Celui (jue

qu'il est question,jusqu'àcetendroit de l'Ecriture, désignent ces paroles de Siméon « Mes yeux ont :

des ordonnances qui furent laites au peuple et « vu votre Sauveur^. » C'est Celui-cique célèbre
qu'il fut lecommandé d'ohserver. Comme également le Palmistedans cesmots « Annoncez :

il ressort du texte lui-même, elles commencent (cbiende jourenjour le^S«i/ir»;quivientdelui "•.»

par la loi h l'esclave hébreu, dont l'o-


relative Or, si nous y regardons attentivement, que pré-
percée contre un poteau, etc'est
reille devait être tend-il désigner dans ces mots de jour en jour, :

là que ce mot (rordoiuKinre est écrit pour la pre- si ce n'est Celui qui est la lumière de la lumière.
mière fois. Or, il faut bien distinguer dans toutes Dieu de Dieu, en d'autres termes, le Fils unique
ces ordonnances les règles qu'on peut en tirer de Dieu ?
pour la conduile et la conser\ation des bonnes XCIX. (Ib. xxiv,().) Premiersacrifice offert dans
mœurs. Car on beaucoup de cho-
ti-ouveen elles le désert. — « Moïse prit la moitié du sang, qu'-
sesquirenferment plutôtunsens mystérieux que « il versa dans une coupe, et répandit l'autre
des règles de morale. Les interprètes latins ont « moitié sur l'autel, et, prenant le livre de l'al-

bien renduparlcmot orihuiiKiiices, justilicatioiies, « liauce, il eu lit la leiture devant le peuple. »

ce quelesCrecsexpriment parlemot JtzatwfjiaTa. Faisons ici une remarque : c'est la première fois
XCVI. (Ib. XXIV, 3.) Sur ces paroles : .Yoj/.ç que l'FIcriture dit clairement (pic Moïse offrit un
ferons, et nous écouterons. — Il faut observer que sacrifice ilepuis la sortie tl'Égypte. Précédemment
le peuple répond pour la seconde fois : « Nous elle avait parlé, mais en ternies assez ambigus,
« ferons et nous écouterons tout ce que le Sei- d'un sacrifice offert à Dieu par son beau-père,

« gneur a dit. » Mais l'ordre naturel devait être: Jélliro "'.


Remarquons aussi <juc la lecture du
Nous écouterons et nous ferons. Je serais éton- livre de l'alhanee se fait en même temps que l'ef-
néqu'iln'y eûtpasici un tens caché. Car si nous fusion du sang de la victime : or, nous devons
écouterons est mis pour nous comprendrons, :
croire (|ue dans ce consignées les
livre étaient

il fautd'abord accomplir humblement la parole divines ordonnances. Car nous voyons que le
de Dieu, afin d'être conduit par lui à l'intellige- Décalogue ne fut gravé sur les tables de pierres

ce des choses (ju'on a faites d'après ses ordres: que dans la suite.

digne récompense de la docilité dont on au- C. (Ib. XXIV. 7, j youvelle répétion. — «Et ils

ra fait preuve, au lieu de mépriser ses lois. Mais «dirent ; Nous ferons et nous écouterons tout ce
il fautvoir si le peupleht'hreiines'est point mon- (I (pie le Seigneur a dit. » C'est littéralement la

tré semblable à ce fds, (pii repondit aux ordres même réponse qu'ils font pour la troisième
fois.
de son père « : J'irai àla vigne, «etn'y allapoint ',

tantlis (|ueles Cienlils, (|ui avaient conçu poui' le Cl. (th. XXIV, 9.) Dieu paraît sous une forme
Seigneur un profond mépris, juslifiésdansla sui- sensible. — « Et Moïse monta ainsi que Aaron,
te par l'obéissance d'un seul, s'atlachèi'cnt à la
« el Nadab, et Abiud, et les soixante-dix anciens
justice qu'ils ne suivaient pas auparavant ''. « d'Israël ; et ils virent le lieu où s'était arrêté

XCVII. fil). XXIV, i.) .S'(//- l'autel élevé par i< le Dieu d'Israël. » Pour ceux qui entendent
Moïse au pied duSinaï. — Remarquonscette i)ar- l'Ecriture, il est évident que Dieu n'est con-
ticularité : « Moïse dressa un autel au pied de la tenu en aucun lieu, et (pi'il n'est pas assujéti

'Il Cor. TI,I6. — 'Ps. cxr, H. — 'Luc, il,30. • ' Ps. r\v, i. —
' Matt. x.tT. 30. - 2 Rom. IX, 3(1. •
Ex. XVIII, 22.
LIVRE II. — UMESTIONS SLR L'EXODE. i3!t

rwiiiine nous avec noscorps, à inciidic (iiNciscs .I.icoil ihiiis le ro\,iMMie des cieux '. El ailleurs
siluiitions, foiiune de s'asseoir, de se coiiciier, de ne pidiiiil-il pus aux (idèles de leur faire pren-
se tenir dehonl, et le reste. Ces exifzenees s'im- dre placr au festin, d'aller et de venir, el de
posent uniipienient aux corps. Or Dien est es- les servir '?
prit '. Si donc il s'est manifesté sons la l'orme cm. (Ib. xxiv, 13.) Sur Jésus, [ils de Navé
d'nn corps on par des siiiiies exprimés corporel- (Josué.) —Comment se fait-il que .lésiis, (ils de
lemerit, sa sniistan(edivine,(iui fait qn'il est ce Na\é, qui n'est i)as désigné avec les (piatie per-
iprilesl, ne s'est point montrée à des yen\ mortels; sonnages cités plus haut, parait toul-d'un-coup
mais, en prenant îles formes sensibles, il a fait acte avec Moïse, lesuilsmlaiiionlague ()our recevoir
de lonte-pnissance. les tables de la Loi, puis lout-d'iiii-ioiip rentre

CII. au. wiv. 11, 10.-! Sur les élus (Vhrnrl. — (lansFolisciirité, c'est-à-dire, n'est plus
mention-
« Et parmi les éins d'Israël, pas \m seul ne tut né par l'écrivain sacré y Comment, après cela,
« en désaccord : et ils vini'eni au lieu où Dien lorsque Moïse reçoit la Loi gravée sur les deux
« avait été, et ils mandèrent, et ils iinrenl. >> Peut- tailles,.lésusrepar.iit-il auprès de lui? Ne mon tre-
on mettre en tloule (pie ces élus d'Israël ne soient t-il pas par son nom de Jésus (juc le nouveau Tes-
les personnages que l'Écriture vient de désigner ament caché dans l'Ancien, et apparaît quel-
est
nommément, et avec eux, les soixante-dix an- quefois à ceux qui ont rintelligenee ? Quant au
ciens? Ils étaient incontestablement la personni- nom de Jésus, nous lisons au livre des Nombres •',

fication des élus du peuple de Dieu. « Car la loi la circonstance ou il fut imposé au fils de
« n'est pas commune ^ tous, et Dieu comiait Nave : c'est quand il était sur le ])oint d'entrer
« ceux qui sont à Dans une grande inai-
lui -. dans la terre promise. L'Écriture anticipe donc
« son, il y a des vases pour des usages hon- icisur un événement postérieur. Car fous ces
« nèfes, et d'antres pour des usages honteux 3. événements ont été décrits après leur accomplis
« Puisqu'il a prédestiné ceux qn'il aconmis dans sèment; aussi quand arriva celui (pii vient d'être
« sa prescience appelé ceux qu'il a prédestinés
; ;
mentionné, Jésus n'avait pas encore reçu ce
« justifié ceux qu'il a appelés; glorifié enfin ceux nom nouveau; mais il le portait au moment où
« qu'il a justifiés ^, » il n'y eut donc assurément fut écrite cette page sacrée.
point de désaccord parmi les élus d'Israël. Or, le CIV. H, 12.) Des cymaises et des an-
(Ib. XXV,
nombre quatre, représenté par Moïse, Aaron, neaux d'or de l'Arehe-d' alliance. « Et tu feras —
Nadab cl Abiud, est une ligure des quatre Evan- « des cymaises d'or qui tourneront autour de
giles et de la pi-omesse faite an monde entier, « l'arche. » Ces symaises affectaient la même
qui se divise en quatre parties le nombre des ; forme que l'arche, et, comme cela se voit à une
anciens, soixante-dix, qui n'est autre que le nom- table carrée, couraient d'un angle à l'antre. Elles
bre sept décuplé, est la figure de l'Esprit-Saint. tmirnaient autour, mais n'étaient point pour cela
Le saphir est l'image de la vie céleste, surtout mobiles. Elles étaient fixées, je le répète, comme
parce qu'il « ressemble au firmament. » Et qui celles d'une table
tournaient alentour, ; c'est-à-
ne sait qu'on donne au (irmament le nom de dire, étaient contournées pour la forme; les ûrecs
ciel? Les cOtés de ce saphir représentent le carié ont le mot
pour désigner ce genre d'or-
cj-oeTTra,
lui-même, ou la stabilité, ou bien encore les nementalion c'étaient deiLx filets, pareils à ceux
;

mystères cachés dans le nombre f/(/«frc. I^e repas d'une colonne torse, ou deux petites baguettes
de Moïse et de ses compagnons dans le lieu où entrelacées enformede câbles, imitant une gidr-
Dien avait ajiparu, est le symbole des délices et lande on une couronne. « Tu fabriqueras aussi
de l'abondance, qui constituent le bonheur du « quatre anneaux d'or, et tu les jilaceras sur les
royaume de l'éternité. « Bienheureux, en effet, « quatre Cotés, deux anneaux sur
le premier côté,
« ceux qui ont faim et so't de la justice, parce « deux anneaux sur le second. «Cela veutdire
et
« qu'il seront rassasiés '". > Aussi le Seigneur dé- que ces quatre anneaux correspondent à chacun
clare-t-il qu'il en viendra plusieurs, ce sont des quatre coins de cette manière tout en n'é-
:

évidemment ceux qu'il a élus, connus dans sa tant posés que sur deux côtés, ils sont en réalité
prescience, prédeslinés, appelés, justifiés, glo- sur Un coin tient à deux côtés; c'est
les quatre.
rifiés, qui s'assiéront avec Abraham, Isaac et la seulemanière d'expliquer comment on peut
placer deux anneaux sur les quatre côtés, puis-
' Jean, IV. 24. — MI Thés. m. 2.— ' Il Thim. ii, 19, 20. — <Roni.
VIII, 30- - ^Matt.T.e. ' Matl. Tin,U. — îLuc, xii,37. — 3 Xumb. .\iii, n.
440 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

qu'il n'y a que quatre anneaux; il en fau- parce que, en dehors de la miséricorde divine,
drait huit, si l'on entendait la chose autrement il ne faut point espérer faire de progrès dans le

que nous venons de l'exposer. Les anneaux sont vaste champ de la science.

mis aux quatre coins, aiin qu'on y introduise CVI. (Ib. XXV, 27.) Sur les anneaux de
les bâtons à l'aide desquels quatre hommes l'Arche. — Les anneaux seront dans des étuis
«

peuvent porter l'arche. « qui serviront à porter la table. » Cela veut


CV. (Uj. XXV, 17.) Sur le Prapitiatoire. — On dire que les anneaux seront comme les gaines
demande ordinairement ce que signifie le Pro- . des bâtons sur les quels sera portée l'arche; en
pili'itiiire placé sur l'Arche. Comme il devait être d'autres termes, que les bâtons entreront dans
d'or et avoir en longueur et en largeur les di- ces anneaux comme dans des étuis. « Les an-
mensions données pour l'arche, il est hors de « neaux seront dans des étuis, » c'està-dire qu'ils
doute que c'était comme une table d'or destiuée en tiendront lien.

à couvrir l'arche elle-même deux Chérubins : CVII. (th. XXVI, 1.) Sur le Tabernacle. —
étaient siu' 1(^ |iropitiatoire, se regardant l'un l'au- Dieu ordonne qu'il soit fait dix rideaux pour le
l'auh-e; leur visage était du côté du propitiatoire tabernacle c'est l'image des dix connnandc-
:

et ils le couvraient de leurs ailes : sujet plein de ments de la Loi. Les rideaux, en raison de leur
mystère. L'or est le symbole de la sagesse divine ; ampleur, signifient l'accomplissement facile des
l'arche, le symbole des secrets de Dieu. 11 est commandements. Caria charité est la pléni-
prescrit de placer dans l'arche la Loi, la manne, tude de la Loi i; et la charité seule rend fa-
et la verge d Aaron dans la Loi sont renfermés
: cile la fidélité aux préceptes de là cet éloge :

les préceptes; la verge est la marque de la puis- de l'expansion de l'âme « Vous avez élargi le
:

sance; la manne, l'image de la grâce : frappant « chemin sous mes pas, et mes pieds n'ont pas
symbolisme, qui nous fait voir que, sans la grâce, « été affaiblis ''. » Mais comme cette sorte de di-
il est impossible d'accomplir les commande- dans la grâce divine,
latation de l'âme a sa source
ments. La Loi ne peut néanmoins être parfaite- car l'amour de Dieu a été répandu dans nos
ment accomplie par tout homme qui fait des pro- co'nrs '; comme elle ne vient pas de nous, mais
grès dans le bien c'est ce qui est marqué par
: de l'Esprit-Saint, qui nous a été doimé; nous
la place élevée du propitiatoire. Dieu en effet doit retrouvons nombre mystérieux qui désigne
ici le

être jwopin'h l'homme pour qu'il réussisse dans l'Esprit-Saint, par qui est rendu possiltle l'ac-
cette tâche ; le pro[)ilialoire mis sur l'arche est complissement de la loi. La longueur du rideau
donc l'image de la miséricorde qui l'emporte doit-être de ving-huit coudées. Or, il faut diviser

sur la justice • Les deux Chérubins déploient leurs


. ce nombre par .sc/if, pour avoir la largeur du
ailes sur le propitiatoire, pour l'honorer en éten- rideau, qui devait être de f/(/af/v coudées. 'Quatre
dant sur lui comme un voile, parce qu'il renferme fois sept, en effet, font vingl-luiit. C'est de
des choses mystérieuses; ils se regardent l'un plus un nombre parfait, car il se compose,
l'autre,parce ipril s'accordent, comme les deux connue le nombre six, de ses propres éléments.
Testaments, dont ils sont la ligure; leurs visages Quant à ces paroles du texte, si fréqueunnent
sont tournés vers le propitiatoire, poumons faire répétées « Tu feras les Chérubins en ouvrage
:

mieux sentir le prix de la miséricorde divine, de broderie, » quel en est le sens, sinon qu'une
«

source unique d'espérance. Dieu enlin promet à science innnense présida à toutes ces choses;
Moïse de lui parler du milieu des Chérubins, de c'est d'ailleurs la signification du mot Chérubin.
dessus le propitiatoire. Or comme ces deux ani- CVIIL (Ib. XXVI. 7,) Sur les onze couvertures
maux sont d'une vaste science dans la
le tyi)e de poils de Chèvres etc. « Tu feras pour leta- —
création raisonnable, c'est en effet ce que signi- ((bernacle des couvertures de poils; tu en
fient les Chérubins, il faut à ce sujet quelques « couvertures de poils,
feras onze. » Ces onze
remarques : par la charité , ils couvrent le pro- c'est-à-dire tissues de poils de chèvres, sont un
pitiatoire de leurs ailes, parce qu'il ne faut s'at- symbole de la trangression. Pourquoi? Parce que
tirer aucune qualité, mais en rapporter à
Dieu le nombre onze va au-delà
du nombre dix,
toutle mérite, c'est-fi-dire l'honorer par l'éclat des symbole, à son tour, de la Loi elle-même. Le
vertus dans lesquelles on excelle; enfin leurs vi- nombre onze, uuiltiplié par sept, produit soi-
propitiatoire. ce dernier chiffre est l'image
sages ne sont tournés que vers le xante-dix-sept :

'Rom. XIII, 10.-2 Ps. XVII, 37.-3Hom. v, 5


LIVUK H. —QUESTIONS SUR L'KXOIJE. 441

(lo la r(''tJiissiiiii de lotis les iirclu-s : « Tu p.ir- les deux colonnes des angles, ou a le même chif-
<> ilomu'ias, (lit le Sauveur, non |)as sciilciiiciit fre total.

sept fois, mais cucovc soixaiitr-dix sept /'o/s' :» CXII. (Ib. wvi, ;t;(.; .s»;- /,' .SV/Z/i/c' le Saint
i-c (liilTi('r'j;aI(' aussi Icmmilnv des générations des Saints. — ; Le \(iile vous servira de separa-
(liic Saint Luc ('iiutui'ii', a|)ii's avoir raconli' le « tioiimédiane entre le Saint et le .Saint des
baptême ilu Seigneur, en remonlanl de lui Jiis- « Saints;" en d'autres termes, le voiledontil est
([u'à hieu par l'intermédiaire d'Adam -. Si ces fpieslion acluellenienl, suspendu. ipialre colon- "i

couvertures ligiuent les pi'iliés, c'est pour ([ue nes, séparera le Sidiil du .S.iinl desSaiuls. L'é-
nous nous en conlessionset ([u'ils soient elïacés et pitre aux Hébreux fait voir la différence qui exis-
couverts pai'la grâce ilonnée àrEgliseseloncetle tait entre ces deux parties <lu Tabernacle '. A

parole : « llcureuv ceux à qui les iiiicpiilés l'intérieur, au delà du voile, était le Saint des
Il sont r(Muisesel dont les péchés sontci)HiVc?s-*. » Saints, (jui contenait l'Arche-d'alliaiice; au de-
Uieu ordonne ensuite d'étendre sur ces couver- hors, se trouvaient la lable et le candélabre ,
tures des peaux de héliers teintes en ronqe. qui avecles autres objets, sur la confection des

Or, qui ne \nit dans le hi-lier niai'([ué de celle Dieu a\ ait donné sesordres précédemment,
(piels

couleur, le (>hrist lui-même ensanglanté dans sa foimaieut le .S'((//(f, et non le Saint des Saints.
passion ? Ces peaux teintes en rouge figurent L'extérieur du voile était le type de l'ancien
également li'S saints marlu's, dont les pi'ières Testament ; rintérieur, le type du nouveau ; car
olilieiment de Dieu misi'ricorde pour les pé- l'un et l'autre se découvrent, dans l'ancien Tes-
chés de son peuple. Enliii les peaux d'hyacinthe, tament, exprimés dans les faits et figurés d'une

qui l'ormeut la dernière couverture, sont une manière symboli([ue. Ainsi le.S'«//)/est la figure

image du piinlemi)s éternel de la vie bienheu- de la ligure; car il est le type del'ancien Testa-
reuse. ment; tandis que le >S'«/)i« rft'.s 5«/»/.s' est la fi-

CIX. (Ib. xxvi, 17 '.s('/o«/('.s\S'f/)ffn!fc.) Sur /es gure delà vérité elle-même, puisqu'il est le type
coim qui assuji'tissdii'iit les rohnnu's du ttiber- du nouveau Testament. Tout l'ancien Testa-
niule. — «Tu feras à chaque colonne, deux petits ment nous présente des figures dans ces objets
« coudes opposés l'un à l'autre, » c'est-à-dire, et ces observances dont la fidèle exécution est
un d'un cùlé de la colonne, et l'autre de l'autre. prescrite.
Ces petiiscoudessont noscoins vulgaires, comme CXIll. (Ib. xxvii, l.) Sur l'autel des holocaus-
il s'en trouve aux colonnes des pressoirs, contre tes. — On demande comment Dieu exige que l'au-
de bois qui sup-
les quelles s'appuient les pièces coudées de haut, puisque celle mesure
tel ait trois

portent les cuves. On leur a donné ce nom, par égale à peu près la taille de l'homme. Comment
analogie avec la situation d'un homme, qui, donc pouvait-on servir à l'autel, puisqii'ailleurs
étant couché à table, est appuyé sur le coude. il est défendu d'établir desdegrèsqui y condui-
ex. Sur lu hase et le rhapiteaudes
(Ib. XXVI, :21. sent? « Dans la crainte, dit le texte sacré, que
colotiiwa. —
Tu feras « deux bases à chacune des « tu ne laisses voir ce qui est honteux 2. » Mais
« colonnes. » Il semble que l'Ecriture ne parle là, il était question du massif de l'autel, qui de-
pas seulement ici des bases sur lesquelles sont vait être ou de terre ou de pierre, et dont les de-
assises les colonnes, mais encore des chapiteaiLx grès eussent fait corps avec lui; tandis qu'ici
qui en forment couronnement. C'est pour-
le l'autel dont Dieu ordonne la construction devait
quoi nous lisons Tu feras « deux bases à une
:
être de bois: si à l'heure où le lévite remplissait
« colonne [)our ses deux parties. » Que signi-
son ofliee, quelque chose était déposé sur l'au-
fient en effet ces derniers mots, sinon la partie tel et devait en être enlevé, quand il avait ter-
inférieiu'c et la partie supérieure?
miné ses fonctions, cet objet certainement ne
CXI. Tb. XXVI, io.) Sur les huit colonnes dres-
pas corps avec Comment, encore,
l'autel.
faisait
sées derrière le tabernacle .
— Après avoir dit
le feu pouvait-il être mis au sacrifice sm* un au-
qu'il y aura six colonnes derrière le tabernacle,
tel de bois, quand on pense surtout que cet autel
1 Ecritm-e ajoute que les colonnes seront au placée au milieu
devait être creux, et la grille
nombre de /(»/f et les bases, selon l'explication
de la cavité? Serait-ce que dans ce texte «Tu fe- :

que nous venons de donner, au nombre de seize. « ras des cornes qui s'élèveront aiLx quatre coins
En ajoutant airxs/.r colonnes mentionnées d'abord
'Matt. iTin,22.— 'Luc, m, 23-33. — ^ Ps. i.xm. 1. ' Heb, IX, 1-T2. — = Exod. xx, 2fi.
442 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

« de l'autel , et lu les comxiras d'airain ', » ces « sur l'autre, suivant l'ordre de leur naissance. »

dernières paroles : « Tu les couvrirasd'airain, » Ces derniers mots doivent-ils s'entendre de l'or-
ne se rapporicnl pas seuleinont aux cornes de dre dans lequel soûl nés les eufanls d'Israël ?
l'autel, niais encore à tous les autres matériaux CXVL (Ib. xxvin, 2-2. )Sur le rational.— '^ Tu
qui devaient entrer dans sa construction ? « feras sur le ;Y/f/o»r//des franges enlacées ensem-
CXIV. (Ib. xxvni, 3, 4.) \. Sur l'esprit d'intelli- « ble, d'un or pur! » C'est à défaut d'un mot
ijence. — « Parle à tous ceux qui sont sages d'es- propre que traducteurs latins ont employé ce
les
« prit, que j'ai remplis de l'esprit d'inteUUjence.n lcniK,rationale, lerutional. Le grec porte Xoyiov,
Le grec porte ic\Ma%amc,, que l'on traduit exac- et non pas XoyiKoi/. Notre expression ration aie
tement par, sens, et non, par intcUiijence. Mais a lesens du Xoyt/.6v des Grecs. Aoyo; en grec
l'Ecriture ne se seit pas ordinairement d'un autre signilie tantôt le verbe, la parole; tantôt la raison
mot pour marquer le sens intérieur, ce que nous et sertà désigner l'un et l'autre là où Xoyioy :

appelons l'intelU(jencc. En voici un exemple tii'é paraît signifier le verbe, nos commentateurs se
de l'Epitre aux Hébreux « La nourriture solide
: servent du mol /«//o/f, eloquium, dans leur traduc-
« est pour les parfaits, pour ceiLxqui ontlesofs, tion ; c'est ainsiqu'ànotre version : « Les paroles
« res|)rit, exercé par un long usage à discerner « (eloquia) du Seigneur sont des paroles chas-
« le bien tlu mal '-. » Le texte grec porte aïaS-noiç,, «tes 1, «le grec a pour expression correspondante
là où le texte latin emploie le mot sensus. iMais à Aoyia. Mais quand il est question de ce vêtement
quel espiit lait allusion ce passage, sinon à l'Es- sacerdotal qui doit être carré et double, placé
prit-Saint ? sur la poitrine du prêtre, composé d'or, d'iiya-
"2. Sur les vêtements sneerdotaux, «Et voici les cinte, de pourpre, de (il d'écarlate retors et de
« vêtements qu'ils feront : le pectoral, l'huméral, la fin lin retors, désigné sous le nom de Xoyiov,
« tunique traînante, et la tunique avec des fran- dans l'incertitude si ce terme signifie ici raison
«ges de lierre. «Notons en passant la nomencla- ou verbe, nos interprètes ont préféré la premiè-
ture de ces vêtements et les détails qui suivent : re signification à la seconde et ont traduit
car il avait été dit plus haut qu'il ne serait fait Xôyiov par rationale.
qu'une seule robe traînante. Uiianl à la tunique, CXVII. (Ib. XXVIII, 30.) Sur l'Ourimetle Tlwm-
au lieu de dire qu'elle avait des frunfies, orne- mim. —
« Tu placeras sur le rational du juge-

ment dont la disposition heureuse donne de la «ment: Doctrine et Vérité. » Que signifie ce pas-
grâce aux vêtements, les traducteurs latins ont sage?La Poctrineet la IVr/fc' étaient- elles placées
jugé plus convenable dédire ipi'elle serait ornée audessus du rof/yii«/ sur une baude d'étoffe ou sur
de lierre. une plaque de métal ? car, selon le texte, elles
CXV. (Ib. xxvni, 4, 16,9,10.) Sur rertainespcir- étaient réellement attachées au vêtement du prê-
licuUiritésdes vêtements siiverdotaujc. — Ces orne- tre. C'est nue question difficile à résoudre, Plu
menlsdu vêtementsacerdolal, que le texte appelle sieurs interprètes imaginent que c'était une pier-
(ispidiscas ^^ f^oni-Ws de petits boucliers (scutuhis), re, dont la couleur changeait suivant la bonne
diminutif du mot latin sculum, Iniuelier ? Les ou la mauvaise fortune, loisque le prêtre entrait
Grecs eux aussi se servent du mot aam'Sx, pour dans le sanctuaire de là, selon eux, ces mots ;
:

désigner un bouclier. Ou bien le texte emploie-t- « An ion portera sur sa poitrine les jugements des

il le terme aspidiscasau ligure, le vêtement devant " enfants d'Israël, » Dieu se servant de /'Oi/r/m et

être fortement serré comme dans les replis d'un du Thummim, pour manifester à son peuple l'ex-
rtS7»V', de même qu'il difdes lamprois, murivnulas, pression de ses volontés. Il y a cependant quel-
pour signilicr une chaîne? "Le rationnai aura — (pie vraissemblance que ces mois Doctrine et ;

« une palme en longeur, une palme en largeur ''.» Vérité, étaient gravés sur le rational.
Quelques interprètes latins supposent que CXVIII. (Ib. xxviii, 31.) Sur la unique de
cette mesure égale toute l'élendue de la main l'épliod. — « Tu feras decouleurd'liyacinlheune
depuis l'extrémité du pouce jusqu'à l'extré- «lunique loncjue, » c'est-à-dire, qui descende jus-
mité du petit doigt. « Tu prendras deux pier- — (piaux talons, « sur le milieu existera une ou-
« res d'onyx, sur lesquelles tu graverasles noms « verture, » par où la têle passera car c'est ce :

« des enfanis d'Israël, six sur une pierre, et six que les Crées expriment par le mot Tiepi'îrôp.iov,
'Exo, XXVII, 2, —
2Héb, v, 14. —
^ Au figuré, de /;c/t/s boucliers; « Le bord de cette ouverture sera tissu
dans le sens propre, àepelits ospics, sorte de serpents. ' Ex. xxx- —
TIII, 16. I
Ps. XI, 7.
LIVRE II — QUESTIONS SUR L'EXODE. iia

tiuit !i l'oiitoiir, » r'i'sl-fi-(liiv (|iril m* s'y existent, ainsi ipieji» l'ai dit, ces lettres: la sain-
InniviMM aiicimo roiiliiri" .-ippai-ciilc; c'est vc teli\ ou, si lin l'aime mieux la saneliliralinu du
((iii irsiillc, l'c stMiihli", de ces ('xiii'cssions : co»)- Seiijneur, coulormemeiit au terme grec ayi'z'îp.a,

misuram viiiitt'.vt(iin, relie iiièee seni lissiie. De n'a |)U être, seliui hkiI, ni.iripn' sur l'or qu'avec
là ces aiilr(>s mots du li^xlc : » ce bord iio l'cia des lettres. Or, il es! dit (pie le jjrêtre ôtera
« (lu'iiii a\('c la tiiiii(iiu', de peur (lu'il iio roiii- les |)échés des saints : « Quelles (|U(! soient les
« pc. » Le sens de ce passaj^ecsl que le i)ord lui- Cl clio.ses (pie sanclifieiont les entants d'Israël,
même devi-a eiitivr dans la trame de la tuni- '( de tout i)résent de teui's saints . » Il me sem-
(|iie. ble que ces mots l'ont allusion aux sacrifices
C\l\. 1.11). xwiii, ^o.) Sur les soiiiieltes du (|u'ollVaienl les Israélites pour leurs péchés il ;

vêtement.fdrerdiitdl Aaron s'ac- — « El lorsque ne donc pas ici


s'agit des saints, mais des choses
» (piitlera des l'ouclions du sacerdoce, ou /'<^/(f('?if/r« .•iaiiites. Car ce qui est offert pour les pécliés
« entrer dans le simetuaire en j)résence du Sei- de\ienl pai- là même une chose .sr/r/w. Voici
" gnenr et en sortir, ufin qu'il ne meure poiul. » |)ai' eonscipient le sens de ce passage : le prêtre
Il est question iciidu retentissementdes sonnettes ('liera tout ce que les enfants d'Israël offrentpour
à l'entrée et à la sortie du pirtre, et ces mots : leurs péchés : ces on'randes sont appelées choses
« alin qu'il ne meure [)oiut, » indiquent combien .sr///(/('.v, jiarce quelamatière dusaerilice est sainte,
grave est la sanction de la prescription divine et péchés, parce que le sacrifice est offert pour les
Dieu a donc voulu atlacber au vêtement sacer- péchés, i^'lù'ritin-e, on le sait, se sert fréquem-
dotal des sii!;uilic.ilii(iis mystérieuses : c'est l'E- ment tl'expressidMs send)lables. Il est dit plus
glise en elt'et (juc symbolise ce vêtement, et ces loin : « Ce titre sera mis sur le front d'Ai'aon,
sonnettes sont une image de la vie édifiante du '< pour leur être toujours favorable en présence
Prêtre : «Montre-loi, dit l'Apôtre, aux yeux de « du Seigneur » Ici le texte sacré parle de
.

« un modèle de bonnes œuvres


tous ». et •
;
nouveau de cette lame d'or, destinée à orner le
encore « Ce que tu as appris de moi devant un
: front du prêtre, figure en môme temps de la
« grand nombre tle témoins, conlie-le à des Confiance (jue ilonne une vie pure. Or, il n'y a
«lionunes fidèles, qui seront eux-mêmes capables qu'un prêtre quipuisseôler les péchés des autres
« tl'en instruire d'autres 2. » Ce vêlement con- et n'a pas besoin d'offrir de sacrifice pour les
tient-il quei(iue autre signification ? Quelle siens; c'est Celui qui po.ssède, nonplusen figure,
qu'elle puisseêtre, elle a derimporlance. Le datif mais en réalité et dans toute sa perfection, cette
« iutruntielexeuiiti » tient lieu ilu génitif /)(f/7/)((/.s éminente pureté de vie.
et e.reuntis\ vox, la voix est mis pour souitu.s, le CXXl. (Ib. xxviii, 41.) Sur ces mots: Tu
son : les sonnettes rendent un son, ne font pas rempliras leurs mains. « Après avoir donné à —
entendre une roix. Moise ses ordres relatifsaux vétementsetà l'onc-
CXX. (Ib. xxviii, 36, 38.) Sur la lame d'or delà tion d'Aaron et de ses fils. Dieu ajoute: « Et
tiare. — « Tu feras une lame d'or pur, et sur elle tu " tu rempliras leurs mains, afin qu'ils accomplis-
« formeras cescaractères laSiiiuleléduSeiiineur; :
« sent les fonctions de mon sacerdoce. » Serait-
« tu la placeras sur une bande double d'iiyacin- il question ici des présents qui devaient être
« tlie; cette lame sera sur la mitre cl de là ex- offerts en sacrifice à Dieu?
« posée aux regards ; elle sera mise sur le front CXXll. (Ib. xxvni, Ai.) Sur les caleçons des
« d'Araon, et quelles que soient les choses que prêtres. — « Tu leur feras aussi des caleçons de
« sanclilieront les enfants d'Israël, Araon ôtera « lin, pciur couvrir ce qui n'est pas honnête dans
« les pécbés des saints, de tout présent de leurs « le corps, ils iront depuis les reins jusqu'au
« saints. » ne vois pas, à moins que ce ne soit
Je « cuisses. 11 Le vêtement du prêtre couvrait tout
avec des commentée titre symbolique la
lettres, :
son corps, pourquoi donc Dieu dit-il : « Tu feras
sainteté du Seiijneur, était placé sur une lame. « des caleçons de lin, poui' couvrir ce qui n'est
C'étaient, suivani quelques interprètes, quatre « pas honnête dans le corps ? » L'ampleur du
lettres hébraïques, formant ce que les Grecs vêtement sacerdotal ne rendait-t-elle pas une in-
appellent un tétruijramme, en exprimant le nom décence impossible? N'y aurait-l-il pas ici, dans
inelfaltle de Dieu. .Mais de quelque nature que la pensée de Dieu, une image de la continence
soient ces lettres, de quelque manière qu'elles ou de la chasteté? Si un vêlement en est le type,
' Tit. Il, 7. — : II Tim. ii, 2. c'est pour nous faire comprendre que ces vertus ne
444 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

viennent pas de l'homme, mais de la grâce. « du Seigneur. » Voilà l'explication de ce qui


CXXIII. (Ib. XXIX, 8, 9.) Sur les cidares des précède : leurs mains seront perfeclionnées,
prêtres. — Dieu dit, en parlant des fils d'Aaron : c'est-à-dire que leur pouvoir aura atteint sa per-
« Tu les re\ éliras de tuniques, et tu les ceindras fection, ([uand ils sanctifieront à leur tour : ce
« de ceintures, et tu les envelopperas de cidares. » qui a lieu, quand ils mettent leurs mains sur
On ne sait ce qu'il faut entendre parcelle der- le veau destiné au sacrifice.
nière expression, car le sens n'en est pas fixé, CXXVII. (Ib. XXIX, 18.) Sur les sacrifices de
etjamais noire lanj^ue n'en fait usage, l'our lunnie odeur. — Souvent, dans l'Ecriture, il est
moi, je pense, contrairement àl'opmionde plu- dit que les sacrifices des animaux sont en
sieurs interprètes, que la c/f/f/jr n'était point des- « odeur de suavité au Seigneur. » Evidemment
tinée acou\rirla lèle. Le texte en ellel poiterait- Dieu ne prend point plaisir à l'odeur de la fu-
il: « lu [caeneelopjieras, » s'il élait question d'un mée de ces sacrifices, mais ceci doit se prendre
objet qui servit, non pas au corps, mais à dans un sens spirituel, c'est-à-dire qu'un sacri-
la tète? fice de victimes, offert dans des dispositions sur-

CXXIV. (Ib. XXIX, t).) Surla durée du .sacer- nalurelles, est agréable à Dieu, en raison des
doce d'Aaron. — .« Et mon sacerdoce sera en eux choses qu'il symbolise. Dieu en effet n'a pas
«pour toujours. » Plusieurs fois déjà nous avons comme nous le sens matériel de l'odorat. La
précédemment expliqué eu ouel sjus l'Ecrilure signification des sacrifices est donc spirituelle
attribue l'éternité à ces instilulions figuratives. comme leur odeur que Dieu respire.
La vérité est (pie ce saceriloce a changé, et celui C\\VIlI.(lb. \\ix,:2().) Sur lapartdu Crand-
qui a pour lui l'éternité est selon l'ordre de Mel- Prétre dans les sacrifices. « Tu prendras aussi —
chisédech, non selon l'ordre d'Aaron. Ici Dieu a « la poitrine du bélier de la consécration, qui est
engagé sa parole et elle sera sans repentance, « la » c'est-à-dire, de ce même
part d'Aaron,
c'est-à-dire opposée à tout changement. « Le Aaron, présent au sacrifice Dieu voulant que ;

<iSeigneur a fait ce serment, et il ne le rétrac- cette portion de la victime appartint au grand-


« fera pas Vous êtes le prèlre éternel selon
: prêtre.
« l'ordre de Melcbisédcch i. » Mais s'il est dit de CXXIX. (Ib.xxix, 28-30.) 1. La part des prêtres
l'ordre d'Aaron qu'il est /ir/i/r toujours, c'est par- leur es' due par un droit perpétuel. — « Aaron et

ce qu'aucune limite n'était assignée primiti- « ses enfants exerceront éternellement ce droit
vement à sa durée, ou parce qu'il était un type « sur les enfants d'Israël. » Us'agit ici de la poi-

des choses éternelles; quoiqu'il en soit, nulle trine et de l'épaule des viclimes. Eternellement
part iln'est écrit de ce mèine sacerdoce que Dieu a donc dans ce passage le sens que nous avons
eût pris l'engagement irrévocable de le conserver. exposé précédemment.
Et si, à propos du sacerdoce selon l'ordi'e de '2. — Sur les vêtements sacerdotau.r et l'entrée

Melchisédecli, est dit: « Il ne s'en repentira


il du (jrand-prêtre dans le Sai)it. — « Le vêtement
« pas, » c'est afiinde nous faire comprendre qu'il « du Sai7it, qui est à Aaron, sera à ses enfants
s'est repenti d'avoir créé celui d'Aaron, en d'autres « après lui, afin qu'en étant revêtus, ils reçoivent
termes, qu'il l'a changé. « l'onction et que leurs mains soient consacrées.
CXXV. (Ib. xxix,9.)5Mr le pouvoir sacerdotal .
— « Celui d'entre ses enfants qui lui succédera en
Que signifient cosmots « Tu perfectionneras les : « (|ualitéde prêtre, et qui entrera dans le tabcr-
«mains d'Aaron elfes miiinsdc ses enfants? » Est- « uacle du l^'inoignagc pour s'acquitter de ses
ce le pouvoir que l'on désigne ici par les m«/»s; « fonctions dans le Saint, portera ce vêtement
et cette expression inarque-t-elle la communica- V pendant sept jours. » Ces paroles donnent lieu
tion faiteaux prêtres du pouvoir de consacrer? à plusieurs «pieslions. Et d'abord, notons en (juel

Ce pouvoir lui même, en reçurent-ils laperfec- sens le texte mentionne \c vêtement du Saint, au
Uon, lorsqu'il se sanctifièrent sur 'ordre de f singulier ;
puis ajoute, au pluriel, afin qu'étant
Moïse? revêtus de ces vêtements ils reçoivent l'onction
CXXVI. (Ib. XXIX, 10.) Suite du précédent. — sainte, comme si en réalité il y avait plusieurs
« Tu amèneras fe veau à la porte du tabernacle vêtements. C'est qu'en effet l'Ecriture avait décrit
« du témoignage, et Araon et ses enfants mettront plus haut les vêtements divers qui composaient
« leurs mains sur la tète du veau en présence l'ornement du grand-prêtre. Toutefois le texte
I
Ps. CIX,4. renferme quelque ambiguité, et il est douteux si
LIVRE II. —QUESTIONS SUR L'EXODE. 445

CP pronom iu ipsis, (|iii est de tout ^ctirc, so laii- lout ce (pii est Saint ne peut s'apptiler le Saint
porte aux noms iKMitios par ii>s(ni('lss()nl(l('sif;iu's lies Saints, mais ce (|ui est \c Saint des Saints, est
tout Icsarcossoircs du viMcinont sacerdotal : c'osl assurément Uuant au prêtre qni, seul,
Saiïit.

du riKiiusIc plus pr(il)aitl(\ car voici la siiitcdiitcx- entrait une fois année dans le Saint des
charpie
to : « Le |)ri'lrc (pii lui siiccdci'a poilci'a rcsvdlt'- Saints, ri'^pitreauvllclireux, nous fait voir en lui,
« 7H('))^'pciidatitscpl jours; » en d'autres termes, im type très-expre.ssifde Notre-Seignenr Jésus-
il portera tout vêtements particuliers men-
les Christ. Autreremanjue sur le Saint des Saints :

tiomiés dans l'Kcrilurcà l'endroit où elled(''critle au-dessus de l'Arche, (pu coidenait la loi, se
vêlement sacerdotal. Etaliu(pie leurs mains
< trouvait le propiliataire, dans lecpiel il faut
« soient perfcctiotDtécs. «Ces mots nesontêvidem- reconnaître une image de la miséricorde divine
nieiit que la répétilioude ceuxfpi'onlit an verset |)OLn' les péclK's de ceux ([ui n'accomplisseid [)as
précèdent ; nous avons dit ' le sens ([u'il tant, la loi ; lit même signilicaliou syud)oli(pie m'ap-
selon nous, y attacher. Le texte ajoute : « Le parait dans le vêlement sacerdotal : que signilie-
« prêtre portera ces vêtements pendant sept t-il en effet, sinon les sacrements de l'Eglise?
« jours. » Est-ce à dire (pi'aux autres jours il ne Sur le ratioual, (pii couvrait la |)oilrinedu[)rélre,
s'en revêtira pas ?Mais cela signifie sept jours de Dieu avait établi les jugements, et sur la lame
formeront comme la dédicace de son
suite, qni d'or la sanctilication et le pai'don des péchés : le
sacerdoce une semaine de tète en soleiniisera
; ratioual, placé sur la |)oilrine, est sendilable à
ledéliut. Ilesl parlé ensuite du successeur d'Aaron l'Arche qui contenait la Loi ; et la lame, mise sur
« qui entre dans le lalternacle du témoijfnagc, le front, a du rapport avec le propitiatoire qui
« ponrs'acquitterde ses fonctions dans \c Saint -.y était au-dessus de l'Arche : ce double symbole
ici il est lait allusion au [yrêtre, ([ui jouissait justifie cette pai'ole de nos Saints Livres ; « La
fxclusit'fiut'iitdc ce pri\ilège; les enfants d'Aaron « miséricorde l'emporte sur le jugement "2. »

ne pouvaient y prétendre du vivant de leur père ; CXXX. (Ib. XXIX, 37.) Sur la cansécralian de
il est donc (pieslion du succeseur d'Aaron lui- l'autel des sacrilices. — Pourquoi l'Ecriture dit-
même. Mais comment l'Ecriture peut-elle dire elle, que, après avoir été purifié et sanctifié
qu'il n'appartenait qu'à celui-ci, « d'entrer dans pendant sept jours, l'autel sera saint de saintf
« le tabernacle du témoignage, pour s'acquitter Elle ne lui donne pas, il est vrai, le nom de
« de ses fonctions dans le Saint, » puisqu'on saint des saints comme à cette partie du taber-
donne le nom de Saint aux objets placés en de- nacle, séparée par un voile, où était dressée
hors du voile qui fermait le Saint îles Saints, et l'Arche d'alliance; cet autel, placé en dehors du
que la même
dénomination s'applique au taber- voile ,csl devcim saint de saint pluti'il par la
nacle du témoignage, qui renfermait des choses sanctification qui dura sept jours que par l'onc-
saintes, c'est-à-dire la table et le candélabre ? tion. Et l'Ecrifin-e ajoute « Quiconque touchera
:

Les autres prêtres avaient accès dans leur minis- « l'autel, sera sanctifié. »
tère auprès de la table, du candélabre et même CXXXI. (Ib. XXIX, 'è, i.) Sur les anneaux de
de l'autel : comment donc l'auteur sacré dit-il l'autel des parfums, diffirulté littérale. — Dieu,
que le successeur d'Aaron avait si'ul le droit parlant à Moïse des anneaux de l'autel tle l'en-
« d'entrer dans le tabernacle du
témoignage cens, qu'il lui ordonne de couvrir d'or et non
« ponrs'acquitterde ses fonctions dansleSw/nf?»
d'airain, lui dit Tu feras aussi deux anneaux
: «

S'il avait dit « pour s'acquitter de ses fonctions


:
« d'or pur sous la couronne qui régnera autour;
« dans le Saint des Saints, » la question serait « tu les feras pour deux cotés, sur deux entés, »

tranchée. Car cette partie du Tabernacle, où c'est la traduction litérale du grec : si; -x lîvo
était déposée l'Arche d'alliance, ne s'ouvrait que
y.lî-r, -otr,csiiiv Toïi Sval-Aixicioï^. Car y.h'-r, signi-
devant le grand-prêtre la remarque en est faite ;
fie côtés, et -Xe'jpà aussi. Plusieurs interprètes
expressément dans l'Epltre aux Hébreux ^. Mais latins ontdonné la traduction suivante : Tu les
peut-être en disant qu'il était exclusivement ferasen deux parts sui' deux ccJtés Mais le grec,
réservé à celui-ci « d'entrer dans le tabei-nacle
aujlieude porter i^i^r,, qui signifie parts, porte
« du témoignage, pour oflicier dans le Saint, »
/Ikr,, qui signifie côtés. C'est le même mot qu'on
l'Ecriture n'a-t-clle voulu désigner autre chose
lit au psaume : « Ton épouse est connue une
que le Saint des Saints, appelé aussi le .S'r//»r. Car
' Voir plus haut, Question cxxv. — ' ITéb. ix, 7- iHéb. IX, 7-11. —5 J.acq. II, 13.
446 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

« vigne féconde aux côtés de ta maison i. «Toute


chaque jour de l'encens sur ce même autel. C'é-
la différence consiste dans l'accusatif et l'ablatif taient des parfums, etnon du sang, que Dieu com-
employés successivement pour le même mot In : mandait d'y déposer, non pas une fois dans
duo latera faciès, in duolnis lateribus. Il est dif- ''année, mais chaque jour. Comprenons-le donc;
liciled'en fixer le sens ; à moins qu'on n'admette le prêtre n'entrait pas une seule lois l'an dans le
que l'Ecriture, ù qui l'ellipse est familière, man- Saint des Saints, mais uneseule fois chaque année
que ici d'un mot qu'il faut sous-entendre : or, en pour y répandre du sang chaque jour il y entrai' ;

sous-entendant eriittt, ils seront, voici le sens


: pour un autre motif, afin d'y déposer de l'en-
qu'on obtiendrait « Tu feras pourdeux côtés, ils
: cens il n'y entrait avec du sang qu'une seule
;

« feront sur deux côtés, » en d'autres termes : Tu fois l'année. Ce qui suit confirme parfaitement
feras pour les deux côtés des anneaux qui de- notre interprétation « Il purifiera cet autel une
:

vront être placés sur les deux côtés. « fois l'an, c'est le Saint des Saints pour le Sei-

CXXXII. (Ib. XXX, 4.) Même sujet. « Et il


y — « gneur. » Le prêtre n'offrira donc pas l'encens

« aura des arcs pour les bâtons qui serviront à une fois chaque année, c'est un devoir qui lui
« le porter. » Le texte désigne ici par le mot incombe chaquejour; mais une lois l'an, il puri-
(iirs ce qu'il vient d'appeler des anneaux et il a ;
fiera l'autel, et cela avec du sang. Dieu ajoute :

donné nomd'anneauxà des anses arrondies.


le Or, « C'est le Saint des Saints pour le Seigneur. »

qu'est-ce qu'nn anneau, un cercle, sinon un arc Par conséquent si le Saint des Saints était, non
de tous côtés ? Plusieurs interprètes, ne voulant pas en dehors, mais en dedans du voile, l'autel
point du mot arcus, ont préféré le terme thecœ, dont il est ici question, qui devait être placé
étuis ; suivant eux, il faudrait lire : Et il y aura vis-à-vis du voile, se trouvait aussi à l'inté-

des étuis par lesquels on fera passer les bâtons. rieur.


Ils ne réilécliissent pas que les grecs auraient pu C.\..\XIV. (Ib. XXX, 1-2.) Sur le dénombrement
se servir du mot theca, puisqu'il vient de lem* du peuple. — Pourquoi Dieu dit-il; « Si tu fais
langue ; leur texte porte cependant tjiaXi'iîe;, qui « le dénombrement des enfants d'Israël en les vi-

signifie arcus, arcs. « sitant?» N'est-ce point parce qu'il exige qu'on
CXXXIII. (Ib. XXX, 8-10.) Destination de l'au- les visite et les compte parfois, en d'autres ter-
tel des parfums. — « Il brûlera sur cet auki l'en- mes, (ju'on en fasse le dénombrement ? Si Da-

« cens de continuation, en présence du Seigneur vid fut puni de l'avoir opéré, c'est parce qu'il
« d'âge en Dieu veut faire entendre, en
âge. » avait agi sans avoir reçu l'ordre de Dieu '.

employant ce terme d'encens de continuation, CXWV. (Ib. XXX, :26-33. ) Sur l'huile des
qu'il doit brûler toujours cl sans interruption. onctions. — Remarquons aussi et notons comment
Parlant de l'autel des parfums. Dieu avait réglé Dieu donne l'ordre d'oindre tout avec l'huile du
qu'il n'y serait offert ni bolocausle, ni sacrifice, chrême, je veux dire, le tabernacle, et tout ce qu'il
ni libation, mais uniquement de l'encens, qui contenait conunent tout dès lors, par l'effet de
;

serait renouvelé chaque jour. Ici néanmoins l'onction, devient Saint des Saints. Quelle diffé-
voici ce qu'd ordoime « Aaron implorera, ou : rence verrons-nous donc entre les objets placés
«priera une fois l'an sur les cornes de l'autel, en à l'intérieur, que cachait le voile, et tout le reste,
« y répandanlsonsan;; pour l'expiation des pé- si tout ce qui recevait l'onction devenait
« elles. » Depropitiabit, il implorera, d'où vient par la même Saint des saints '!
Celte ques-
depropitiatio, qui a pour ternie correspon- tion doit être sérieusement étudiée ; J'ai cru du
dant en Comprenons ce pas-
grec èHtXac7f;.o;. moins devoir l'indiquer. Ajoutons une autre
sage: cet ordre donné au prêtre et qui doit remarque de ; même qu'après l'onction de l'au-
s'accomplir une fois chaque année sur les cor- tel des sacrifices, au quel il impose dès lors la

nes de l'autel des parfums, pour apaiser Dieu ce ; dénounnalion de Saint de Saint, Dieu dit:« Qui-
sang de l'expiation des péchés, c'est-à-dire qui « conque le touchera, sera sanclilié ;
» de mênu^
provient des victimes immolées pour les péchés, après avoir fait oindre tout le reste et avoir dit

et qui doit touelier une lois l'an les cornes de que tout cela est devenu Saint des Saints, Dieu
l'autel : tout cela n'a point de rapport avec le prononce cette sentence « Quiconque les louche-
:

conunandemenl qui est fait au prêtre de placer « ra sera sanctifié. » Ce qui peut s'entendre de
deux manières: On sera sanctifié en les touchant ;

Ts. cxxvii, 3. ' IV Rois, xxn.


I>IVRE H. — QrESTIONS Sl'R L'EXODE. 447

ou roiisosaiioliliora pour pouvoir los toucher en : d'ofTrir des sacrifices, et qui était dans le Saint
supiH)s;mt toulot'ois (|u'il ne tut pas permis des Sairds.
au peii|»l(' (le toueher le lahernacle, quaiul il CWWIl. ,1b. xxx,;i(i.) ICn quel lieu dev(é
amenait les victimes, ou quand on oflrail à l>ieu hn'iler l'encens. — « Deceschoscsiu ferasune pou-
ee (pi'il avait appoiti' pour le sacrifice. .Mais les « dre cl lu en placeras vis-à-vis des t(''moignages
averlisscmenis (pie Dieu donne ensuite ne s'a- v( dans le tabernacle du témoignage, d on j(^ me
dressent pas senlenierd aux prtHrcs et au\ « ferai connaître à toi. Cet encens sera pour
L(''\ites, pnis(pi'il dit à Moïse : « Tu parleras en « vous le Saint des Saints. « C'est pour la secon-
« ces termes aux ('ntants d'Israël. » Or, les eii- de fois (pie cet encens re(,oil semblable déno-
:anls d'Israël, c'était tout le ])euple ; et voici ce mination, parce ipiilétait déposéà l'intérieur du
qu'il leur l'ait dire : « Cette huile (pii doit servir tabernacle, sur l'autel qui était lui-même à l'in-
« aux onctions, vous sera une chose sainte de térieur ; le tabernacle du témoignage propre-
'<gtMKMation en génération ou n'en oindra : ment dit était cette partie intérieure elle-même
« point la chair de l'homme, cl vous ne l'crt^z pas où se trouvait l'arche et qui est distinguée par ces
« pour vous-mèinesdes compositions scmhlables mots «De làje me ferai connaître à toi. » Dieu
:

«àcelle-là. C'est unechosesainte, et ce sera pour avait déjà tenu ce langage en parlant du pro-
« vous un moyeu de sainteté. Uiiicon(iue en té- pitiatoire, qui était à l'intérieur, c'est-à-dire au-
« rade semblables, et quicoii([ue en doimera à dedans du voile au-dessus de l'arche.
« une nation étrangère, périra du milieu de son CWXVllI. (11). XXXI, '2-0.) Sur l'esprit dont fut
« peuple. Cette delénse de composer une Imi-
') rempli Bésclées. — Lorsque Dieu veut employer
ie semblable pour des usages profanes, ne con- Bésélées à la construction du tabernacle, en quel
cerne donc pas seulement les prêtres, mais en- sens dit -il qu'il « l'a rempli de l'esprit divin de

core tout le peuple d'Israël. Car c'est le sens de « sagesse, d'intelligence et de science pour
ces mois : « On n'en oindra point la chair de l'hom- « toute espèce de travairx, pour inventer, cons-
« me.» Il leiirdéléndd'en laire de seudilables pour c trilire etc '? » Faut-il voir un don du Saint-
leui's propres usages, etil mcnacede la mort ce lui Esprit dans la fabrication de ces ouvrages, qui
qui se rendrait coupable de cette faute, c'est-à- semblent du ressort de l'artisan ? ou bien encore
dire, qui composerait à sonusage une huile pa- faut-il interpréter ces paroles en un sens mysté-
reille à l'huile des onctions, ou qui en commu- rieux ? alors le symbolisme des diverses parties
niquerait une portion ;\ un peuple étranger. du tabernacle aurait eu pour auteur l'Esprit
Enfin quand Dieu fait dire à tout le peuple d'Is- divin de sagesse, d'intelligence et de science.
raël « Ce sera pom' vous un moyen de sancti-
: Toutefois, même ici, lorsque rEcrituredit expres-
lication, »je ne vois pas quel sens donner à ces
> sément queBésélées a été rempli de l'esprit divin
paroles, sinon (ju'il était permis à tous les Israé- de sagesse, d'intelligence et de science, elle ne
lites de loucher le tabernacle, (piaiid ils y venaient nomme pas l'Esprit-Saint.
avec leursoffrandes;etque cet attouchement les C\XXIX. (îb. XXXI, 13.) Sur l'observation du
sanctifiait, àcause de l'huile qui avait été répan- Sabbat. — Pourquoi
Dieu dit-il, en prescrivant
due sur toutes les parties (lu tabernacle de là cette : l'observation du sabbat « C'est un testament •

parole « Uuiconque touchei'a ces choses


; sera ^< « éternel en moi et dans les enfants d'Israël, »

« sanctifié," non toutefois comme les prêtres, au lieu de dire entre moi: et les enfants d'Israël ?

(jui, avant d'exercer les fonctions du sacerdoce, Est-ce parce que sabbat est l'image du repos, le

devaient recevoir l'onction de cette huile sainte. et (pie ce repos, nous ne le trouverons qu'en lui"?

CXXXVl. (Ib. XXX, 3i.) Sur la composition Car il est hors de doute que, sous cette dénomi-
de l'eiiceiis. — Lorsque Dieu désigne les aroma- nation d'enfants d'Israël, Dieu entend tout son
tes qui doivent entrer dans la compositiou du peuple, c'est-à-dire la race d'Abraham ; mais il
y

parfum, c'est-à-dire de l'encens, lorsqu'il dit a Israël selon la chair, et Israël selon l'esprit. Site
(pi'il doit passer au feu suivant l'art du par- nom ne devait s'appliquer qu'à ceu.x qui
d'Israël

fumeur, iiiiquentarii, nous ne devons pas c in- en descendent selon la chair, l'Apôtre dirait-il :

clure du mot latin que c'était une huile pro- « Voyez Israël selon la chair i? ». Et par cette

pre à faire des onctions ; c'était, comme il est expression ne fait-il pas sentir qu'il y a un Israël
dit, un parfum, un encens destiné à l'autel

l'encens sm' lequel il n'était pas permis ' I Cor. X, 18,


.

448 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

selon l'esprit, qui n'est autre que le Juif intérieur chose de semblable pour obtenir la vie éternelle.
de cœur ? Le meilleur serai! donc
et circoncis '
CXI^ll. (Ib. xxxii, 8.) Pensée interprétée. — Le
probablement de partager la phrase en deux Seigneur, faisant connaître à Moïse la conduite
membres : « C'est un testament éternel en moi, » de sou peuple à propos du veau, c'est-à-dire,
serait le premier membre ; viendrait ensuite (le l'idole qu'il a faite de son or, lui dit ([u'ils se
celui-ci : « Et pour les enfants d'Israël, c'est un sont écriés : •< Israël, ce sont là tes dieux ijui l'ont
« signe éternel, » c'est-à-dire le signe d'une « de l'Egypte. » On ne lit pas qu'ils aient tenu
tiré
chose éternelle, de même qu'il est dit : « que la ce langage, mais Dieu fait conuaitre la pensée
< pierreétait le Christ, » c'est-à-dire qu'elle repré- qui les animait. Le sentiment qu'expriment ces
sentait Jésus-christ 2. Ainsi il ne faut pas lier paroles était dans leur cœur, et Dieu ne pouvait
les mots de la manière suivante : « C'est un festa- l'ignorer.
« ment éternel en moi etdanslesenlants d'Israël, » CXLllI. (Ib. xxxu, 14.) Quand Dieu fait dumal,
comme si en réalité les enfants d'Israël entraient il n'est pasméchant, il est juste. — « El le Seigneur
pour quelque chose avec Dieu dans ce testament ;
« s'apaisa, pour ne point faire à son peuple le
mais voici comment il fautlire « C'est un testa- : « mal dont il avait parlé. « C'est un châtiment
« ment éternel en moi, » parce qu'en lui nous a qu'il veut dire, comme dans ce passage « Leur :

été promis l'éternel repos et pour les enfants ; .< « sortie de ce inonde a été considérée comme un
« d'Israël, c'est un signe éternel, » parce qu'ils « mal '. » 11 est dit dans le même sens que « le

ont reçu l'ordre d'observer ce signe symbolique bien et le mal viennent de Dieu '
: » il n'est pas
du repos éternel, qui est la récompense des vrais question ici de la malice propre à l'homme wi;-

Israélites, c'est-à-dire, desenfantsde la promesse cliant. Dieu n'a point de malice mais il envoie ;

admis au bonheur de voir Dieu face à face tel


des, maux aux méchants, parce qu'il est juste.
qu'il est. CXLIV. (Ib. XXXII, deux
16.) Moïse brise les

CXL. (Ib. XXXI, 18.) Sur les deux tableK de la tables de la Loi. — Nous voyons
dans sa Moïse,
Loi. — « Et il donna à Moïse, aussitôt qu'il eut colère, jeter et briser les tables du témoignage

« cessé de lui parler sur le mont Sinai, les deux écrites du doigt de Dieu profond mystère qui :

« du témoignage, qui étaient de pierre et


tables symbolise le second Testament, l'ancien devant
« écrites du doigt de Dieu. » Après avoir révélé un jour disparaître pour faire place au nouveau.
tant de choses à Moïse, Dieu ne lui donne cepen- Il est bon de le remarquer si Moïse fut si sévère :

dant que deux tables de pierre, appelées tables dans son indignation et sa vengeance, que ne fit-
du témoignage, et destinées à demeurer dans il auprès du Seigneur pour obtenir grâce en
l'arche. C'est que, à le bien prendre, et si l'on faveur de son peuple ? Ailleurs, dans notre ou-
y regarde atentivement, on se convaincra que vrage contre Eauste, le manichéen 3, nous avons

toutes les autres prescriptions de Dieu découlent exposé comment, selonnous.iliàllait interpréter
des dix commandements gravés sur les deux sa conduite, ([uand il brise et met dans le feu le

tables, comme ces dix commandements, à leur veau coulé en fonte, puis en jette la poussière
tour, serésument dans ces deux-ci, l'amour de dans l'eau et la fait boire au peuple.
Dieu et du prochain, où sont renfermés la Loi et CXLV. (Ib. xxxii, 24.) Excuse d' Aaron. « Ils —
les Prophètes *. «m'ont donné leur or, je l'ai jeté dans le feu, et
CXLl. (Ib. XXXII, -2. ) Sur le Veau d'or. — « ce veau en est sorti. » Aaron s'explique som-
Quand Aaron exige que « les femmes et les filles mairement il ne dit pas qu'il a lui-même jeté
;

« se dépouillent de leurs pendants d'oreilles, » en fonte lespendanls-d'oreilles, afin d'en former


pour qu'il leur en fasse des dieux, on peut raison- un veau.A-l-il menti sousl'inspiralion de la crain-
nablement penser qu'il leur impose ce pénible dans l'intention de s'excuser, en donnant à
te et

de les détourner de leur projet


sacrifice, afin entendre qu'il avait jeté au feu cet or péris-
Celte grande privation qu'elles se sont imposée sable et qu'un veau en était sorti à son insu ? II

pour avoir tout l'or nécessaire à la fabrication n'est pas croyable que son langage ait été dicte
d'une idole, j'ai cru devoir
remarquer à l'a- la jtar une pensée semblable ;car Moïse, avec qui
dresse de ceux qui s'attristent quand Dieu ordonne Dieu daignait converser, ne pouvait ignorer sa
de faire ou de supporter patiemment, quelque pensée intime, et en réalité il ne lui a point re-
proché de mensonge.
I Rom. II, 29. — î I Cor. x,4. — ^ Matt. xxii, 37-40. 'Sagesse, m, 2. — •Eccli.;xi, 14. — 'Cont. Faust. liv. xwi, ch.93.
I.IVRK II. — OrESTIONS SUR L'EXODE. i49

CXI.,V[.(Ih. XXXII, 2?S.)Aaron r('.s7)rt».sY(h/('rf^'.« />;«- ceci revient h celte exclamation de l'Apôtre: « Que
tesdu pt'upli'. — «Moïse ayaiil vu ([iic le juMiplc « les jugi-mcnls de Dieu sont impénétrables, et
« était (ir-poiiillô, car.Varoii li>s (Ic'ixiiiilla, an point « ses voies incoiiqiiélicnsiljlos '
! »

" qu'ils (leviiiront un siijcl i\c joio poin- leurs CXLIX. (Ib. xxxui, l.) Lu colire (le Dieu apaisée
« (Minoinis. * IliMnaicpions ici (|n'.\aron est par l'amour de Moïse envers son peuple.— « Va,
chargé de tont le mal eoniinis par ee peuple, « sors d'ici, toi et ton peu|)le,(iue lu as tiré de la
pour avoir consenti ;\ satisfaire leur coupable « terre d'Egypte. » Ces paroles « toi et ton peu- :

demande, t^e texte poi te en effet « Aaron les : « pie que tu as tiré, -> (laraissent empreintes de
« dépouilla, » parce (pi'il céda à leur exiïcnce, colère ; sans ([uoi Dieu aurait dit ; loi et mon
plutiMque de dire ils se sont dépouillés eux- : piMii)le, que j'ai tiré d'Egypte ; mais quand ils

mêmes, quand ils ont voulu un si <jrand mal. ont demandé une idole, voici ce qu'ils ont dit :

CXI, VII. Il), xxxii, 'M ,


'^•2.''
dévouement
Prière et « Moïse, cet homme ([ui nous a tiré de la ter-
(h'Miiïse. — !.ors(jue Moïse adressa à Dieu cette « re d'Egypte, nous ne savons ce qu'il lui est ar-
prière Ce peuple à commis un j^rand péché,
: « « rivé '•',
» leurfauteaété d'attribuerà un homme
« et ils se sont fait des dieux d'or mais main- ; leur délivrance. Elle leur est rap|)elée dans ces
« tenant, Je vous conjure, si vous lein- paidon- paroles : « Toi et ton peuple, que tu as tiré de la
« nez leur péché, pardonnez-le sinon effacez- ;
( terre d'Eygpte 3; » ce lut pour eux un crime,
« moi do votre livre, que vous avez écrit, » il mais Moïse Car Moïse voulait qu'ils,
fut innocent.
parle avec l'assurance que son raisoimement missent leur espérance en Dieu, et non en lui-
aura d'heurcises conséquences, c'est-à-dire (|ue même et qu'ils se reconnussent redevables à la
Dieu pardonuera au peuple ce péché, parce miséricorde du Seigneur de leur délivrance de la
qu'il ne voudra pas effacer Moïse de son livre. Il servitude cependant tel est, par une grâce spéci-
:

faut remarquer toutefois quel grand mal .Moïse ale, le crédit de ce (idèleserviteiu' auprès de Dieu,
voyait dans ce péché, puisqu'il crut devoir l'ex- que Dieu lui dit « Laisse -moi, et dans ma co-
:

pier par des Rots de sang, lui qui, dans son «1ère je les briserai ^. » Laisse-moi, ïmû-W voir
amour pour les siens, trouva en leur faveur des dans ces mots un commandement ou une sor-
paroles si généreuses. te de prière? Impossible, ce semble, d'admettre ni
CXLVIII. Aaron pardoiviê
[Vu. \\\ii,'io.]
Il est . — l'un ni l'autre. Car, si Dieu commande, alors
dit plus Aaron avait dépouillé le peuple:
haut iju' le serviteur désobéit à son ordre ; et si l'on
pounjuoi donc, demande-t-on et à bon droit, suppose que Dieu lui demande une grâce, mie
nul châtiment ne vint-il l'atteindre, ni lorsque telle supposition est indigne de Dieu, puisqu'il
Moïse lit mettre à mort par les Lévites en armes pouvait, malgré sou serviteur, exercer sa ven-
tous ceux qu'ils rencontrèrent en passant et en geance sur eux. Voici donc le sens qui se présen-
repassant d'une porte à l'autre ; ni lorsque se tenaturellement Dieu a voulu nous marquer :

réalisa, dans la suite, cette prédiction de l'É- dans ces paroles l'avantage immense quire\int
criture : « Et le Seigneiu" frappa le peuple Jicaur au peuple d'être tant aimé de cet homme, objet
« se du veau d'or, qu'avait fait Aaron ? » Qu'on lui-même de tantd'amour de la part du Seigneur,
note bien surtout que dans ce passage la même et nous a|)prendre par là que quand nos péchés

pensée se trouve mentionnée de nouveau. En nous rendent indigues île son amour, nous pou-
effet nous ne Le Seigneur frappa
lisons pas : « vons nous relever auprès de lui, grâce aux méiites
« le peuple à cause du veau » qu Usèrent, mais de ceux qu'il aime. Que veulent dire, en effet,
« que fit Aarmr.yy et cependant Aaron ne fut pas ces paroles du Tout-Puissant à unhonnne:« Lais-
châtié il y a plus Dieu fit exécuter les com-
; : « se-moi, et je les briserai,» sinon Je : les briserais

mandements qu'il avait donnés au sujet de son s'ils n'étaient aimés de toi ? Laisse-moi signi-
sacerdoce avant son péché. Il lui ordonna seu- fie donc aime : Ne les plus, et je les briserai :

lement de se purifier lui et ses enfants, avant car ton amour est un obstacle. Il aurait fallu
d'exercer les fonctions du sacerdoce. Dieu sait s'incliner devant celte parole du Seigneur : Ne
donc qui épargne jusqu'à ce qu'il s'améliore,
il les aime plus, si elle eiit exprimé un ordre, au
et qui il épargne pour un temps, voyant dans lieu d'être une simple indication de la cause
sa prescience qu'il ne s'amendera pas qui il ; qui retenait le bras de Dieu. Quoique Moïse

n'épargne pas pour le convertir, et qui il n'épar-


gne pas sans aucun espou" de changement tout : I
Rum. ïi, 33. — 'Ex. x.icjai, 1, 23. — ' Ib. xxxii, 10.
450 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

emploie sa médiation, Dieu cependant ne laisse « vous me dites: Emmène cepeuple. Mais vous
pas d'infliger un chfitinient à son peujjle. « ne me faites pas voir ([ui
vous envoyez avec
Car, pour inspirer à Moïse un tel amour, je ne Cl moi. Cependant vous m'avez dit: Je te connais
sais comment Dieu les aimait lui-même plus « entre tous les autres, et tu trouveras grâce de-
secrètement, tout en leur adressant extérieure- « vant moi. .Mais si j'ai trouvé grâce en votre
ment des paroles menaçantes. « présence, montrez-vous ^ous-mème à moi,
CL. (Ib.xxxiii, 1-3.) Dieu imr miséricorde s' éloi- « pour que vous voie plus clairement, que je
je
gne de son peuple et il envoie un Ange. « Va, — « trouve grâce devant vous, et que je sache que
i< dit le Seigneur à Moïse, toi et ton peuple, « cette nation est votre peuple. >- Plusieurs inter-
« que tu as tiré de la terre d'Egypte, va dans la prètes latins ont traduit terme grec wwotô) le

« terre que j'ai promise avec serment à Abraham, par clairement; l'Ecriture ne dit pourtant pas
« à Isaac et à Jacoi), eu disant: Je la donnerai à ©aveûû;. Il aurait peut-èlrc été plus convenable
« votre race. » Il parle encore h Moïse, et tout-à- de traduire: « Si j'ai trouvé grâce en \otre pré-
coup, se servant d'une l'orme de langage que les « sence, montrez-vous vous-même à moi afin
Grecs appellent apostrophe, il s'adresse directe- « que je vous voie de façon à vous connaître; >>

ment au peuple en ces termes;« J'enverrai en paroles qui montrent assez que Moïse ne voyait
« même temps mon Ange devant toi et il chassera pas Dieu avec toute la familiarité qu'il désirait.

« leChananéen, l'Amorrhcen, leChettéen,lePhé- C'est que,dans ces visions divines accordées à des
«réséen, leGergcséen, l'Evéen elle Jébusécn, et regards mortels, où se produisait un son qui at-
a il t'introduira dans un pays ou coulent le lait et teignait une oreille mortelle. Dieu prenait la
« le miel. Car je ne monterai pas avec toi, parce forme qu'il voulait et telle qu'il voulait; alors sa
« que tu es un peuple à la tète dure, de peur nature divine, totalement invisible en quelque
« que je ne t'extermine dans le chemin. » Profond lieu que ce soit, incapable d'être contenue dans
mystère qui ravit et qui étonne ! Ne dirait-on un espace quelconque, ne pouvait être perçue
pas que l'Ange, épargnant ce peuple dont la tète par aucun sens du corps. Mais comme toute
est dure, surpasse Dieu en miséricorde, puisque laLoi se résume en deux commandements, celui
Dieu ne ferait pas grâce, s'il était au milieu d'eux? de l'amour de Dieu et celui de l'amour du pro-
Et cependant c'est Dieu qui, absent en quelfjue chain ', Moïse manifestait un désir qui avait
sorte du milieu de son peuple, quoiqu'il ne trait à l'un et à l'autre; à l'amour de Dieu,
puisse en réalité être absent nulle part, déclare quand il disait: «Si j'ai trouvé grâce en votre pré-
qu'il accomplira, par le ministère de son Ange, « sence, montrez-vous vous-même à moi, afin
les serments qu'il a faits à leurs pères: il semble « que je vous voie clairement et que je trouve
montrer par \h que s'il agit de la sorte, ce n'est « grâce devant vous ; » h l'amour du prochain
pas ([u'il soient dignes de ses
bienfaits, mais quand il ajoutait: i Et afin que je sache que
parce qu'il en a promesse à leurs ancê-
fait la « cette nation est votre peuple.»
tres qui étaient des saints. Que signifie donc CLII. (Ib. xxxni, 17.) En quel sens dit-on que
cette parole que Dieu ne sera pas avec eux,
: Dieu connaît et ignore ? Que signifie cotte —
parce qu'ils ont la tète dure, sinon que l'humi- parole de Dieu à Moïse: » Je te connais entie
lité et la piété ont seules droit à sa miséricorde « tous ? » Est-ce qu'il y a du plus ou du moins
et h sa bonté ? Quand Dieu est avec les hommes dans la connaissance que Dieu a des choses ? Par
dont la tète est dure, il est pour punir
et pour le-t-il ici dans le sens de ces mots qu'il adi'esse
exercer ses vengeances quand il n'est pas de la
; dans l'Evangile à quelques uns: « Je ne vous con-
sorte avec les méchants, c'est donc dans des vues « nais pas 2? » C'est en ce sens qu'on dit des choses
de miséricorde: ce qui justifie ces paroles: « Dé- qui sont agréables à Dieu, qu'il les connait, et
« tournez votre visage de mes péchés i. » En des choses qui lui déplaisent, qu'il ne les con-
effet, si Dieu envisage le péché, il renverse le cou- naît pas, non qu'il les ignore, mais parce qu'il
pable: « Comme la cire fond devant le feu, ainsi les désapprouve ; de même qu'on dit très-bien
« les pécheurs périssent devant Dieu 2. » de l'art qu'il ne connaît pas ïe vice, parce qu'il
CLI. (Ib. xxxni, 12, 13.) Apparition de Dieu à le condanme. Dieu connaissait donc Moïse entre
Moïse. — « Et Moïse dit au Seigneur : Voilà que tous, parce que Moïse entre tous était agréable
à Dieu.

'Ps. L,ll.— 2Ib. tXTlI, 3. Malt. XXII, 37-40. — = II). XXV, 12.
LIVRE II. — QUESTIONS SUR L'EXODE. 481

(:LIII.(Il).xxxm.1'2,t7.) L'ICrritKir n'a |)(l^rll|h rôles s'adressaient à lui. Or, le nom de Notre-
|Wltr tautcs lea n'irldlinns dr IHiii à Mdïsc. — Ob- Seigneur Ji'siis-Clirist est |)ubli(' parmi toutes
si'i-voMs (|iio Moïse avait adrcssi- plus liant ces pa- lesiialions, sous les yeux de son |»eiiple dispersé
rolosà l)ieii:« Vous m'ave/ dit: Jeté connais entre en tout lien. Le texte porte .le nommerai, au :

« tons. 11 Or, ("OS paroles que Moïse rappi'l le. Dieu les lieu de : « /V ,s(77// nommnié ;
» l'actif est mis,
prononeeelTeetiveinenl ensuite, mais auparavant |»ar extraordinaire, pour le jinssif: ceci voile évi-

nous ne lisonsrien(lesenil)lal)le. Cela nous mon- demmeiit un sens pidloiiil. Pcul-èlre Dieu, en
tre (pie toutes les révélations de Dieu à son servi- signalanl ici sou iiiterveiilion, a-l-il voulu faire
teur ne son! point iiiséréesdans l'Herilure. Il l'aiit eiileiidre(pie parmi ell'el de sa grâce, le iiomdu
toutefois reeherciier soigneusement dans les pre- Seigneurserait prononcé parmi tontes les nations.
mières parties de TEeritiire si la eliosc est ti. Sur la vocation 'des f.oilils. — « J'aurai pi-
ainsi. « tié de celui dont j'aurai en pitié, et j(> ferai
- CLIV. (Ib. xxxni , i-i'i.) Interprétfttion prolictique « miséricorde à qui j'aurai l'ait miséricorde. » Ici

(Icct'x mots : Je pdaserai devant toi. — Moïse ayant Dieu montre encore plus expressément le carac-
ditan Seiiiuenr «Montrez-moi votre gloire'
:
i> tère de notre vocation à son royaume et i\ sa
le Seitineiir lui loi dans
répond: « Je passerai devant gloire : elle n'est pas le fruit de nos mérites, mais
« ma gloire et je nommerai le Seigneur enta pr'é- de sa miséricorde. Car après avoir jiromis d'in-
« sence; j'anriapitiédeeelnidont j'aurai en pitié, troduire les nations, en disant : « Je nommerai le
« et je ferai misérieordeà (jui j'aurai lait niisé- « Seigneuren ta présence, » ilaltribuecettefaveur
« riconle. » Or un peu plus liant Dieu avait dit : « Je à sa miséricorde, selon ce mot de l'AixMre : 'Je dé-

« te précéderai moi-même, et je te donnerai le re- (( clare que le Christ a été le ministre de la cir-
« pos.» Moïse semble avoir interpréléeetteparole: « concision pour la véracité de Dieu dans l'accom-
,
,

« Je te précéderai, » en ce sens rpic Dieu ne serait « plissement des promesses laites à nos pèi'es; mais
pas présent au milieudu peuple dans le voyage; « quant aux Gentils, ils doivent louer Dieu de sa
aussi rej)ond-il : « Si vous ne venez jias vous même « miséricorde '.» Tel était donc le sens de cette

avec nous,ne me faitespoint sortir d'ici, etc. »


prédiction : » J'aurai pitié de celui dont j'aurai

Et cette prière Dieu ne la rejette pas encore, il lui


« eu pitié, et je ferai miséricorde à (pii j'aurai

dit : (I
Je ferai encore ce (pie tu viens de deman- « fait miséricorde. » De là, défense à l'homme
«der. » Comment donc après (pieMoiseluia dit :
de meltre sa gloire dans le mérite de ses pro-
Montrez-moi votre gloire, donne-t-ilde nouveau pres vertus : il faut que « celui qui se glorifie,

à enlendredans ces paroles :«Je passerai devant,


« se glorifie dans le Seigneur 2 . 1, Car il
«toi» qu'il lesprécèdera, maisqu'il ne serapasavec ne dit pas ; «J'aurai pitié n de tels est tels, mais
« de celui envers quij'anrai été miséricordieux; »
eux ? Ne faut-il pas évidemment admettre ici
nn autre sens Celui en effet qui fait entendre voulant faire voir que personne n'a mérité la
ce langage:» Je passerai devant-toi,» est Celui grâce de cette sublime vocation par ses bonnes
dont l'Evangile parle en ces termes: « Jésus œuvres précédentes. Le Christ est mort, en etïet

« voyant que l'heure était venue de passer de ce pour des coupables ^.


« monde à son Père '
; » passage qui est encore i. Sur la miséricorde de IVen. — Dans les pa-
appelé la Pàque. Ici par conséquent se trouve une roles suivantes : «Je feraimiséricordeâqui j'aurai
prophétie de hante importance. C'est Lui qui « fait miséricorde », ou selon d'antres interprètes,
a i)assé de ce siècle à son Père avant tous les
« envers ([ui j'aurai été miséricordieux, » faut-il

saints, jjonr leur préparer dans le royaume des voir la ré[)étitiondecequi précède, ouhienqnel-
cieux les demeures qu'il leur donnera à la ré- que chose de différent? Je l'ignore. Car cequele

surrection des morts; devant passer avant tous, grec exprime en deux mots èXs>iaco et oiV-Tsipvîow,
il est devenu le premier-né d'entre les morts 2. qui semblent n'avoir (pi'unc seule et même
2. Continuation de lu même prophétie. — Quand signification, le latin ne peut le rendre par des

Dieu ajoute : « Je nommerai le Seigneur en ta mots différents, et c'est avec une variante de
« j)résencc, i>
il fait connaître d'une manière frap- forme qu'il exprime la même pensée de miséri-
pante la grâce qu'il a mise en lui : C'est comme corde. Si le texte portait : « Je ferai miséricor-
« de à qui je fais miséricorde, » et « Je ferai
s'il disait : en présence du peuple d'Israël, car :

Moïse en était le type, au moment où ses pa-


Jcan, xm, 1. —'1 Col. 1, 18. I
Rom. XV, 8, 9. — 2 II Cor. x, 17. — ^ Rom. v, 6.
4o2 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

« miséricorde à qui j'aurai fait miséricorde, » il fidèle s'est tenu sur la pierre. Nous lisonsencore:
semblerait que cette rédaction est imparfaite. La « El je le mettrai dans la caverne de la pierre, »

répétition employée iii, rend cependant le sens cequi siguilie une position inébranlaijle. Plusieurs
avec plus de force ou bien Dieu s'est servi : car, traduissent dans lëchauguelte de la pierre; mais
de cette répétition pour mieux affermir sa misé- le grec ])orle ômv, expression que nous ren-

ricorde, connne quand il est dit rumen, : dons mieux par creux ou caverne.
ainen, fiât, fiât; le double songe de Pharaon, 1. Moïse type des Juifs convertis aprèsla résur-

et plusieurs autres exemples semblables pour- rection de Jésus-Christ. — « Je te couvrirai de ma


raient être cités à l'appui. Ou bien encore « main, jusqu'à ce queje sois passé ensuite je ;

dans la bouche de Dieu, c'est l'annonce de la « retirerai ma main, et alors tu me verras par

miséricorde <|n'il doit exercer envers les deux peu- « derrière, mais tu ne verras pas mon visage. »
ples, jeveuxilii'c les Gentils et les Hébieux. C'est Dieu ayantdit: « Tu te tiendras sur la pierre aus-
ce que dit l'Apôtre « Comme autrefois vous ne
:
« que ma gloire passera, » ceci implicpiait
sitôt

« croyiez pas en Dieu, et que maintenant vous la promesse de la stabilité sur la pierre après le

« avez obtenu miséricorde à l'occasion de l'in- passage de Dieu. Comment donc interpréter ce
« crédulité des Juifs ainsi à présent les Juifs ; qui suit « Je te mettrai dans la caverne de la
:

« n'ont pas cru à la miséricorde que vous avez « pierre, et je te couvrirai de ma main, jusqu'à

« reçue, afin qu'ils obtiennent eux-mêmes mi- « ce que je sois passé puis je retirerai ma main ;

« séricorde. Car Dieu a renfermé tous les peu- « et alors tu me verras par derrière »Ici il sem- .

« pies dans l'incrédulité, alin d'exercer sa misé- ble que Moïse se tient déjà sur la pierre; Dieu
« ricorde envers tous i
.
» lecouvre de sa main, et c'est ensuite qu'il passe,
5. La vision de Dieu est réserrée au Ciel. — tandisque Moïse ne pouvait être surla pierre qu'a-
Après cet éloge de sa miséricorde. Dieu répond près le passage de Dieu. Mais il faut voir dans ce
à celte prière de Moïse « Montrez-moi votre :
passage une de ces transpositions qu'on rencontre
« gloire, » ou à celle autre demande qu'il lui avait si fréquemment dans l'Ecriture. Elle a mis après

faite précédeaunent Montrez-vous vous- : «: cequi devait être avant. Le récit doit marcher dans
« même à mol, alin que je vous voie claire- l'ordre suivant : « Je te couvrirai de ma main
« ment. » — « Tu ne pourras, lui dit-il, voir « jusqu'à ce que je sois passé, et alors tu me
«mon visage: car nul homme ne le verra sans « verras par derrière .car tu ne verras pas mon
« mourir nous enseigne parla
2. » Il qu'il ne « visage ; et tu te tiendras sur la pierre, aussitôt

peul-étre vu de nous tel qu'il est, pendant cette « que ma gloire passera, et je te mettrai dans
vie, qui se passe dans les sens mortels d'une chair a la caverne de en effet ce qui'se
la pierre. » C'est

corruptible mais qu'il est visible dans cette autre


;
réalise dans la personne de ceux que i-eprésen-

vie, où il n'est donné de vivre, qu'à celui qui es tait Moïse, je veux dire, dans les Israélites, qui
mort à la vie de ce monde. au rapport des Actes des Apôtres, crurent t'îisH (7c
6. Le lieu vit Dieu appelle Moïse, image de l'E- au Seigneur Jésus, c'est-à-dire aussitôt que sa
glise. —
Nous lisons ensuite dans l'Ecriture « Le :
(jloire fut pa.ssée. Après sa Résurrection d'entre
« Seigneur dit encore » et voici la suite de son les morts et son Ascension au Ciel, il envoya le

discours « 11 y a un lieu où je suis ^. » Or, en


: Sainl-Esprit; et au moment où les Apôtres par-
quel lieu Dieu n'est-il pas, puisqu'il n'est absent laient les langues de tous les peuples, plusieurs

pour aucun endroit de la terre ? Dans ces paro- d'entre ceux qui crucifièrent le Christ « furent
un où je suis, » c'est l'Eglise touchés de componction en leur cœur'
« » une
es : « Il y a lieu :

qu'il signale et (ju'il nous signale comme son portion d'Israël, en effet, était tombée dans l'aveu-
temple. « El, ajoute-t-il, tu te tiendras sur la (jlement •*, selon celle parole : « Je te couvrirai de
« pierre." C'est « sur cette pierre, dit le Seigneur, « ma main, jusqu'à ce queje sois passé, >> et ils

« queje bâtirai mon Eglise "i. » — « Aussitôt que méconnurent et crucifièrent le Seigneur de la

« magloire passera, » ce quiveutdire :tu te tien- gloire. Ce qui fait dire au Psalmite : « Le jour et la

dras surla pierre, aussitôt que ma gloire passera; « nuit, votre main s'est appesantie sur moi-'. Le »

car après le passage du Christ, en d'autres termes jour, c'est le temps où le Christ opérait ses mi-
après sa passion et sa résurrection, le peuple racles divins; la nuit, c'est le moment de sa mort

iRom. XI, 30-3Î. — iE.K. xxxiii, 20. — 3 Ib. 21. — » Malt, xvi, 18. i.\ct. 11,37. —2 Rom. xr, 25. — ' Ts. .xxx, 1,4, 5.
.

LIVKKII. -Ul'KSTIONS SUU L'EXODK, 4u3

on lant (]irh(>tnino, où se troinôiirit (•liiiinli's Uiiand .Moïse est sur le point de graver, sur la
C('ii\ in("'iiu'S(iiiia>aioiit cru en liiiiliiiaiit le jour. mordagne, les deux nouvelles
tables de pieri-e.
« Loi"squo jo serai passé, lu me \erras par <lor- Dieu luidilenticautn'schoses: Je ferai des mei-
« l'ièrc, » sijiiiilic donc ; Lois(|U(' je serai passé " veilles en présence detinit ton peuple.''
Il ne dai-

(le ce iiioiitle à mon


après eela seulement,l'èie, gne pas dire encore: en [)résence f/c mon peuple.
ceux dont tu esie lyi)e croiront en moi'. C'est Car ces mois, ton peuple, n'ont-il pas dans sa bou-
ali>rs en eflet (|u'ils difenl a\ec un c(eiu' iileinde che, la même signific,iliiin(|iie s'ils s'adiessaient
componction: « Que l'aul-il(|iie nous lassions ?» à toul autre houunedii iik nie iieuple, comnie.s'il
Et les Apôlroslcnrordonnèi cnt (le l'aire pénitence eût dit; le peui)le (!<int tu fais partie; on com-
et de recevoii'
l)aplèineaunom de Jésus-Christ,
le me nous disons tu ville, poiu- signifier non
pour (lu'ils olilitissenl la rémission de leurs p(''- pas celle où tu conunaiides, ni celle ijue
chés. Nous voyons rencliainoment deccs lails au lu as bâtie, mais celle dont lu es citoyen ?
psaume cité plus liant. A])rès avoir dit ; < l.e In ]ieii plus loin en effet, il dit : Tout le
« jour et la nuit, \olremam s'est api)esanliesur jieuple au milieu desquels lu es : n'est-ce pas
« moi, » pour m'empèclier de connaître, dire en des termes différents ton peuple ? S'il
« cars'ils avaient connu le Seip:nenr de lajiloire, ne se sert pas de ces termesau milieu duquel, :

«jamais ils ne l'anraiiMit crucilié - », il ajoute : il faut voir là un tour de langage (jui n'est |)as
« Je me suis tourné vers vous dans ma désola- rare.
« tion, me pénétrait, » c'est-à-
tandis que ré|)ine CLVII. (Ib, xxxiv, 12.) Sur la défense de faire
dire, tandis i\uc mon cœur était dans la componc- alliance avee lesliabitantsde la terre promise. —
tion; dit ensuite
il « J'ai connu mon péclié, : et Une sii^nifie celle observation faite à Moïse :

« je n'ai pas caché mon crime, » ce (juieut lieu "l'rends garde (/«'(/ /«'/W.s.st'allianceavec ceux qui
quand ils reconnurent la grandeur du forfait « demeurent danscepays? Car le grec ne porte
»

ipi'ils avai(>nt commis en crucifiant le Christ. II pas: prends garde ^/(' mais r/«'// ne fas-
faire,
leur fut conseilléensuite de faire pénitence et de se. Dieu \ eut-il parler du peuple dont Moïse
recevoir dans le liaptème la rémission de leurs fut le conducteur
? Mais ce n'est pas lui qui
péchés, c'est pourquoi le Palmiste ajoute: « J'ai le entrer dans cette terre, dont leshabitansne
fit

«dit : Je m'accuserai péché moi-même de mon doivent pas être admis à conetracter alliance
« devant le Seigneur, et vous m'avez pardonné avec les Israélites. Cette locution, si toutefois c'en
« l'impiété de mon cœur. » est une, et s'il ne faut pas y voir plutôt un sens

8. Ce que Dieu veut dire est une prophé- particulier, a donc de ipioi nous étunnei-, et jus-
tie. —
Il est évident de soiquecediscoursdeDieu qu'ici nous ne l'avons rencontrée ni remarquée.
h Moïse est surtout nue prophétie. En effet, nous CLVIII. ab. xxxiv', l3,io.) Sur ndolàtrie.—
ne lisons pas que la pierre ou sa caverne, ni cette Quand Dieu ordonne à Moïse, une fois qu'il sera
main dont Dieu devait couvrir Moïse, ni le pri- mis en possession du pays, d'extirper l'idolâtrie et
vilège qu'il lui aurait accordé de le voir par der- d'empêcher le culte des dieux étrangers, il ajoute :

en un mot de tout ce qui est rap-


rière, ni rien « Car le Seigneur Dieu s'appellejaloux. Dieu veut

porté dans ce passage ait existé. Sans autre « être aimé uniquement;»end'autrestermes:Ja-

transition ([u'une particule, l'Ecriture ajoute : loux est le nom même du Seigneur Dieu, parce
a Et le Seigneur dit à Moïse » ; or, c'est le même que Dieu veut être uniquement. Dieu pour cela
Seigneur qui vient de parler plus haut, et l'Ecritu- n'éprouve pas le trouble, ce déf-jutde l'homme :

re relie de cette manière aux paroles précédentes toujours en toute manière il est immuable et
et

ce que Dieu dit ensuite: « Fais-toi deux tables de tranquille mais il emploie cette expression pour
;

« pierre, semblables aux premières etc.» montrer que la nation choisie ne peut inpunément
CLV. (Ih. xxxiv, 7.) Que signifie purifier? :
— se prostituer à des tlieux étrangers. Ce mot em-
Quand on ditduSeigneur: « Il ne purifiera pasle prunte métaphoriquement sa signification à la ja-
« coupable», que signifient ces paroles sinon : lousie du mari attentif à conserver la chasteté de
Il ne le dira pas innocent ? de son épouse. Ici l'avantage est poumons, et non
CLVI. (Ib. XXXIV, 10.) [Heu,méeoulent des Isra- pour Dieu. Quel homme en effet pouriait nuire
élites, coutiiiuede ue pas les appeler son peuple — à Dieu par ce genre de fornication ? Mais c'est
à lui-même qu'il nuit plutôt, en causant sa per-

Act. il,i7. —2 Cor. 11,8.


te. Dieu en s'appellant jaloux, inspire pour ce pé-
I I

S. AuG. — ToM. IV. 33


454 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

ché une ternnir piofonde: «Vous avez perdu, a CLXII. (Ib. XXXIV, 2S.) L'agneau pascal et les

« dit le Psalniiste, toul adultère qui s'éloiçine az-nmes. — Quel est le sens de ces paroles: « Tu
« de vous. Pour moi, mon bonlvnu- est d'être « ne m'offriras point avec du levain le sang de
«uni à Dieu '.«Enfin Dieu conclut par ces « mes victimes y>l Dieu appelle-t-il ici ses vic-
mots : > Dans la crainte que tu fasses alliance times celles(pii sont immolées au temps de la Pù-

« avec ceux qui habitent cette terre et qu'ils ne que, et défend-il qu'il y ait alors du levain dans
« se corrompent avec leurs dieux 2. » la maison, parce que ce sont les jours azymes?

CLIX. (Ib. xxxiv, 20.) Que s>(jnifu': Paraître CLXIII. (Ib. xxxiv, 25.) Explication firamma-
devant Dieu, et, sansaroirles maiusvidesl Dieu — ticale. — Que signifient ces mots: « La chair de
dit ; « Tu ne paraîtras pas eu ma présence les « la victime immolée pour la solennité de la Pa-
« mains rides. » Eu ég;ard aux circonslanccs dans « que, ne ^/orm/ra pas jusqu'au matin?" N'est-ce
lesquelles Dieu parle, ces mots « en ma pré-; pas, en d'autres termes, Tordre qu'il a donné for-
« sence, » signifient dans mon tabernacle, et ces mellement plus haut, de ne rien corserver jus-
autres : « Tu ne paraîtras pas ici les mains vi- qu'au matin des chairs de la victime immolée?
« dis, «veulent dire Tn n'entreras pas sans ap-
: L'obscurité de ce passage venait du mot: dormira,
porter (luelque présent. 11 y a là, au sens spirituel, qui est mis pour demeurera.
:

un mystère dune grande profondeur; pourtant CLXIV. (Ib. XXXIV, 26.) En quoi consiste la fi-
ces paroles concernaient les ombres et les délité de l'histoire? —
« Tu ne feras point cuire

figures. « l'agneau dans le lait de sa mère. » Ici revient

CLX (Ib. XXXIV, 21.) Sur l'observation du Sab- pour la seconde fois cette prescription, dont le
bat. — Que signifient ces paroles qui suivent le sens m'échappe. Cependant, dùt-on la prendre
précepte du sabbat: « Tu te reposeras dans les dans le sens littéral, elle renferme une grande
« semailles et la moisson, » c'est-à-dire, au temps prophétie, dont le Christ est l'objet: à combien
dessemaiUes et de la moisso)it L'observation du re- plus forte raison, si l'interprétation littérale était

pos sabbatique serait-elle donc commandée d'u- inadmissible. Car il ne faut pas croire que toutes
ne manière si rigoureuse, qu'aux yeux de Dieu, les paroles de Dieu, par exemple ce qu'il dit de
ces saissons, si précieuses au laboureur pour la la pierre, de la caverne et de sa main qu'il éten-

nourriture et l'existence, ne présenteraient dra sur Moïse, aient été mises à exécution. Ce
pas elles-mêmes de sujet d'excuse? Le repos du que la lidélité de l'histoire exige, c'est que les faits
sabbat est ordonné, même au temps des semail- mentionnés se soient accomplis réellement, et
les et de la moisson, à l'époque où l'ouvrage que les discours relatéspar elle aient été pronon-
presse beaucoup: ainsi le Iravail doit cesser en cés véritablement. On exige les mêmes conditions
tout temps le jour du sabbat puisqu'il est spécia- des récils évangéliques: ils rapportent certains dis-
lement défendu pendant les saisons qui récla- cours du Christ donnés en forme de paraboles; il

ment le plus de bras. n'estcependant par douteux que le Christ ait dit
CLXI. (Ib. xxxiv, 24.) Dieu promet que, pendant ces choses; le récit en est authentique et fidèle.
les trois fêtes annuelles, ancuti ennemi n'attaquera CLXV. (Ib. xxxiv, ^8.) Second jeûne de Moïse.
les Israélites. — « Personne ne convoitera ton — « Moïse y demeura en présence du Seigneur
« pays, lorsque tn monteras te présenter de\ant « quarante jours el quarante nuits, sans manger
« le Seigneur, à trois époques de l'année. » Ces « de pain et sans boire d'eau. » Ces mots sont
l)aroles veulent dire que chacun devra monter une répétition de ce qui a été dit précédemment,
avec sécurité et sans s'in(iuiéler de sa terre, ([uand Moïse reçut les tables qu'il brisa: toulefois,
grâce à la promesse par laquelle Dieu s'engage ce n'est pas le même fait, mais un autre, que
à y veiller: nul ne la convoitera, etceluiqui sera mentionne ici le texte sacré. Nous avons déjà
monté n'aui'a rien à redouter en son al)sence. dil (pielle signilicalion se rapporte à cette se-
Et ici l'on voit assez le sens de ces paroles citées conde publication de la Loi. Quant à ces mots:
» 11 ne mangea point de pain, et il ne but point
plus haut:<( Tu ne paraîtras par les mains vides
« en présenre du Seigneur ton Dieu; » elles dési- « d'eau, » le sens en est évident: c'est-à-dire

« il jeûna; » la partie est mise pour le tout sous le


gnent le lieu où Dien devait avoir son taberna- :

cle ou son temple. nom de pain, l'Ecriture comprend toute espèce


d'aliments, et sous le nom d'eau toute espèce de
' Ps. Lïxii, 7,28. — -'Eï. XXXIV, ir>.
breuvage.
LIVKK II. — Ql'KSTIONS SHU l/EXOKE.

CIAVI. (Il), xxxiv, -IH.) I. Moïse rharqr il' érriri' " Dieu» ' ? C'est pouiquoi Dieu leur donna des
li's ilixromiHiiiulcmt'iits sur les )iiiii relies tables de tables tailb'i's cl éciitcs par la main de l'homme,
la lui. — « Kt ih'crivilsiir IcsIjiIiIcs Icspaioics de pour (|u'elles liisseid conserv(''es parmi eux com-
" rAlliaiicc, CCS jnirolos a» noiiilirc de dix. » Le me une type li^uialif de la gloire (pt'ils cberclie-
tc.xU" dit roniicilcmoiil (iiic Moisc écrivit iiii- raieul, non dans le iloigl, c'est-à-dire, dans l'Es-
inôiiic les coimiiaiulcmeuts; un pou plus iiaid, prit de Dieu, mais dans leurs œuvres.
nicti lui a\ail dit: « Ecris pour l(ii ces |)ar>)Ics. ' » -2. fji première Lai, imiuje deruneieu Testa-
Or, ([iiaiid il rcçid pour la prciuicrc Ibis la loi ment; la seronile, imaijedu nouveau. — Mais il est
donl il rejeta loin de lui et brisa les lahles, il incontestable (pie les secondes tables, don-
n'est pas i'api)orlé(pie les laides de pierre aietil ('té nées au Siuaï, SMidiolisenI le nouveau Testament;
préparées par lui landiscpie nous lisons ici: « Kais- connut' les [jcemières, bi'isées et
entièrement dé-
« loi deux tables de pierre; '«de plus, l'ordrt' ne lui Imites, symbolisaient l'ancien. Ce qui confirme
l'ut jias doiuK'- d'écrire, eoiunie en celle circon- sinloid celle manière de voir, c'est (pie la Loi
stance ; enlin le livre sacré ne dit |)as (pi'il ail écrit lïd donnée jtour la see.onde fois sans aucun ap-
sur connue nous voyons qu'il le fit cette
les tables, pareil terrible, sans ces appareils formidables de
fois: « Il écrivit sur les laides les pandes de l'Allian- llanunes, de nuées el de trompellesipii arrachaient
« ce, ces paroles au nond)re dedix. » Mais voici te cii au pen[)le consterué: « Que Dieu ne nous'
le récit de ce qui ce passa alors: « Et aussitôt qu'il « parle pas, de peur que nous ne moni'ions 2. »

« eut cessé de lui parler sur le mont Siuaï, Dieu La ci-ainte est donc le trait distinctif de l'ancien
« donna à Moïse les deux tables du léuioif;riai;e, Testaïueut, et la dilccliou, du nouveau. Mais
« qui étaient de pierre et écrites du doigt de (pu'lle solution donner à la ([uestion suivante :

« Dieu 3. »Etun peu plus loin: «Moïse, retournant, Pour(|uoi les premières tables furent-elles I'ohi-
« descendit de la uiontague, les deux tables du vre de Dieu et écrites de son doigl ? Pourqiuii les
« témoignage en ses mains; ces tables étaient de dernières furent-elles l'onivre de l'homme ? Les
« pierre, écrites de cba(|iie côté, d'im côté et de premières ont-elles figuré l'antique alliance,
« l'autre; les tables étaient l'ouvrage de Dieu, et sm-tout à cause que Dieu y donna ses connnan-
« l'écriture, l'écriture de Dieu gravée sur les ta- dements, mais(pi(> l'honune n'y fut point docile?
« blés '«.» Une grande question surgit de ces pré- Car la Loi a paru dans l'ancien Testament, pour
mices: Conmient les tables, qui devaient être convaincre les transgresseurs, et « son appari-
brisées par Moïse, — Dieu dans sa pres-
le savait « lion a donné lieu à l'abondance du péché s. »

cience, — sont-elles, au rapport de l'Ecriture, Ne pouvant être accomplie que par la cliarité,
l'ouvrage de Dieu, et non celui de l'homme ? elle n'était point observée sous l'impression de
Comment furent-elles écrites, non par la main la erainte. xVussi est-elle appelée l'ouvrage de
de riiomine, mais par le doigt de Dieu; taudis Dieu, parce que Dieu en est l'auteur, parce qu'il
que les dernières tables, destinées à une durée en aucune manière l'ouvrage
l'a écrite; elle n'est

si longue, appelées à prendre place dans le taber- de l'homme, parce que l'homme ne s'est point
nacle et dans
temple de Dieu, furent taillées
le soumis à Dieu, et que la Loi a plutôt établi sa
et gi-avécs. sur l'ordre de Dieu, il est vrai, mais culpabilité. Quant aux secondes tables, l'homme,
par la main de l'honuue ? Les premières tables soutenu de l'aide de Dieu, les a faitcsetlesaécrites,
ne figin-aient-elles pas, non l'univre de riionuue, parce que la eliarité constitue la loi du nouveau
mais la i^ràce divine, dont se montrèrent indignes Testament. Aussi le Seigneur dit-il: « Je ne suis
les enfants d'Israël, reportèrent leurs quand ils « pas venu détruire la loi, mais l'accomplir *. »

cœursversl'Egypte etsefirentunc idole?Ils furent « La charité, dit à son tour l'Apôtre, est l'ac-
en conséquence privés de ce bieutait, et Jloïse « complisemeni de encore: « La foi la loi >, » et

dut briser les tables. Quant aux dernières tables, « agit parCe qui était difficile dans
la charité <'. »

n'étaient-elles point la figure de ceux qui se glo- l'ancien Testament, est donc devenu facile dans
rifient dans leurs onivres, et dont l'Appôtre parle le nouveau, à l'homme doué de la foi qui agit

en ces ternies: « Ne connaissant point la justice par la charité; le doigt de Dieu, c'est-à-dire, son
« de Dieu, et s'efforçant d'établir la leur propre, divin Esprit, écrivant la loi, non plus au dehors
« ils ne se sont point soumis à cette justice de sur une pierre, mais au-dedaus, au |)lus intime

'Eom. X, 3. — ^E.v. XX, 19. - 'Rum. T. 2o.— •


.Vl.ut.
'E.\o. XXXIV, 27.— 2 Ib. 1. — Mb. x.x.Kl, 18. — 1
Ib.xxxil, 15, 16. i Eom. XIII, 10. — « Gai. v. 6.
.

4S6 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

(lu cœur de l'homuie: « non plus, dit l'Apôtre, sur l'Ecriture. Les Latins ont bien traduit par dem-
« des tables de pierre, mais sur les cœurs comme ptionem, retranchement, le mot grec àcfai'psfxa;
« sur des tables de chair • : » car, « la charité, » et ce terme est fort convenable, car celui qui ap-
qui donne d'être vraiment fidèle au précepte, portait au Seigneur s'imposait une privation, un
« a été répandue dans nos cœurs par le Sainl- .wrrilice.
'< Esprit qui nous a été donné ">-.
» La Loi qui l'ut CIAIX. (Ib. XXXV, 29.) Encore sur Béséléel,
publiée au premier lieu type figuratif de l'an- l'esprit dont il est rempli, et ses travaux. —Moïse
cienne alliance qui est l'anivre exclusive de Dieu, rappelle, mot pour mol, ce que Dieu lui avait dit
écrite de son doigt, est donc caractérisée par de Béséléel « Qu'il l'avait
: rempli de l'Esprit
ces paroles de rAp(jtre: « Ainsi la loi est sainte, « divin de sagesse, d'intelligence et de science,

« et le commandement est saint, juste et bon-'.» « poui' exécuter les travaux du tabernacle, ap-
La loi, bonne en elle-même, est
sainte et « partenant aux arts mécaniques. » Nous avons

l'œuvre de Dieu et l'homme n'y intervient nul- ;


dit plus haut notre sentiment sur ce passage '

lement, parce qu'il n'obéit pas; devenu coupa- Mais nous avons cru devoir le rapiieler, parce
ble, il est plutôt écrasé par ses menaces et ses con- que cet ordre, donné précédemment à Moïse de
damnations. Car, ajoute l'Apotre, «le péché, pour la part du Seigneur, n'est pas sans un dessein
« faire paraître ce qu'il est, m'a donné la mort particulier répété en des termes tout-A-fait iden-
« par une chose qui était bomie » Heureux ''.
tiques. L'architecture nous est représentée ici,
celui qui, aidé de la grâce de Dieu, fait son œuvre comme comprenant des travaux où entrent l'or,
de ce précepte saint, juste et Iwn ! l'argent et les autres métaux , la chose, je l'avoue,
CI^VII. (Ib. XXXV, 1.) Dieu agit avec nous. — est assez singulière : car l'architecture ne s'en-
Lorsque Moïse fut descendu de la montagne tend ordinairement que de la construction des
vers les enfants d'Israël, tenant en ses mains les édifices.

autres tables, et le front couvert d'un voile, à CLXX. (Ib. XXX VI, 2, 3.) Sur les ouvriers em-
cause de la gloire qui brillait sur son visage, et ploijés aux travaux du tabernacle. « Et tous —
dont les enfants d'Israël ne pouvaient soutenir « ceux qui voulaient d'eux-mêmes aller aux tra-
l'éclat : « Voici, leur dit-il, les paroles dont le « vaux, pour y prendre part; et ils reçurent de
« Seigneur veut l'accomplissement. » Cette cons- « Moïse tous les dons offerts généreusement. »
truction ambiguë permet de douter si c'est le Moïse ne mentionne que les travaux commandés
Seigneur lui-même, ou si ce sont les Israélites par le Seigneur, pour le tabernacle et ses acces-
qui doivent accomplir ces paroles; toutefois il soires, et les vêtements sacerdotaux.il cite aussi
est évidentque leur accomplissement regarde ces les noms de quelipies ouvriers, à qui, dit-il,

derniers, car c'est Dieu qui vient de dicterses or- l'Esprit de Dieu fut donné pour l'exécution de
dres. Mais peut-être est-ce à ce dessein que l'E- ces ouvrages : mais, comme on le voit, il y en
criture parle ainsi, afin que cette expression eutun grand nombre qui vinrent s'offrir d'eux-
s'entendit également et de Dieu et de l'homme : mêmes, sans avoir reçu aucun ordre, et l'Ecri-
car le Seigneur agit quand il vient en aide à ture ne dit pas que le Seigneur ait dicté leurs
ceux qui agissent, conforuiément à la doctrine noms à Moïse. Ceux dont les noms figurent dans
de l'Apôtre Opérez votre salut avec crainte et
; « le texte sacré, ne furent donc pas les seuls favo-
« tremblement, car c'est Dieu qui opère en vous risés du don mais peut-être y participè-
céleste,
« et le vouloir et le faire, selon son bon plai- reut-ils d'une manière plus large et plus abon-
« sir 5. » dante. Ce qu'il faut louer dans tous ces ouvriers,
CLXVIII. (Ib. XXXV, 24.) Sur les olfrandes vo- c'est, au lieu de dispositions grossières et servi-

lontaires des enfants d'Israël. — « Chacun of- les, le dévouement spontané et la libéralité qu'ils

« frant ce qu'il se retranchait, ils apportèrent apportèrent dans leur travaux.


« généreusement au Seigneur de l'argent de et CLXXI. (Ib. XXXVI, 4, S.) Probité des ou-
« Ce qui revient à dire
l'airain. » : Quiconque vriers. — Il faut noterque ces ouvriers, quali-
apporta, donna une chose ou une autre; seule- fiés du nom dosages, saintement adonnés à leur
ment, l'argent et l'airaiusout spécialement men- travail, étaient en réalité des hommes intègres.
tionnés parmi les autres offrandes dont parle Ils recevaient tout ce que le peuple offrait et ju-
geait nécessaire à l'achèvement de leurs ouvra-
'
H Cor. III, 3. — - Rom, V, -1 Ib. vu, 1-2. - ' Ib. IJ. — 'Philip.
II, 12, 13. ' Ci-dcisus Question cw-wiii.
Liviii' Il — oi'KSTioNs srn i.T.xom:, 451

ges; mais voyant qu'il appoil.iit au-delà <ln né- (le r.nnonr, et par conséquent deviendront scr-
rossairc, ils eu aNcrlirent .Moise, (|iii (il antioueer viles el ne proeureroid point le ri'jKis. La pléni-
au peuple par un lieraul de ne |)liis rien appor- niluile du salib.d aina sa réalite dans le repos
ter il l'avenir. Ils pouvaient, s'iU avaient voulu, (lernel. Et ce n'est pas sans raison ipie fui insti-

détourner l)eaucoup de elioses mais ils tu- ; tué le giaud Sabbat '.
leut enipèeliés par un principe d'Iionueur ou et- CLWIII. Ib. XL, !), 10.) Sur les nbjels sane-
I

un sentiment de religion.
Irayés i)ar liliés par l'onrlion Précédemment, lorsque .

CLWli. (Ib. \x\v, -2.) Sur le Sahlxit. Lors- — Dieu enjoignit pour la première fois d'oindie le
que Moïse est descendu de la montagne, il re- tabernacle, il donna l'ordre d'en sanctilier tout
commande les IraNanx relidils à la consiruetion les accessoii'es au mo\en de la même onction, et
du tabernacle el au vêtement sacerdotal mais, ;
ditque ces objets seraient Sainte îles Saints.
avant do donner aucun ordre pour ces ouvrages, Quant à l'autel des holocaustes, sanctifié de la
il parle au peuple de la saiicliUcation du Sabbat. même manière, il avait dit qu'il était <leveuu
Il \'wiï[ de recesoir iestlix paroles de la Loi con- Salut (le Sdiut ''
: et toute la différence send}lait
signées sur les nouvelles tat)lcs de pierre, qu'il consister en ce que la dénomination de Saint
lui-même; ce n'est donc pas
a taillées et gra>ées (les Saiuts s'appli(|uait exclusivement à ce qui
à tort qu'on demauile pour quel motif, une lois était séparé ilu Saint par un voile, dans cette poi--

descendu de la montagne, il entretient le peuple tion du tabernacle où était l'arche d'Alliance et

du Sabbat exclusivement. S'il ne lut pas néces- l'autel de l'encens. Mais ici, revenant sur les

saire de publier denouveau, devant le peuple, mêmes prescriptions, IMeu ordonne qu'une même
les dix commandements de la Loi, pourquoi cette onction sanctifie le tabernacle et ce qu'il con-

exception en faveur du sabbat, qui compte au tient, et lerende saint ; puis, parlant de l'autel
nondjre de dix préceptes ? N'y aurait-il pas ici des holocaustes, auquel il avait lait donner d'a-
quel([ue cbose de semblable à ce voile dont bord la déuominaliou de Saint de Sai>it, il dit
Moïse se couvrit le visage, iiarce que les enfants maintenant qu'il est devenu, en vertu de la même
d'Israël ne pouvaient en supporter l'éclat ? En onction, Saint des Saints. Ceci nous donne à
effet, des dix eomuKuidenienls, c'est le seul qui entendre que ces deux dénominations Saint de
ait été prescrit d'une manière liguralive; quant Saint et Suint des Suints, ont la même signifi-

au.\ neuf autres, nous ne doutons aucunement cation; que tout ce qui a reçu l'onction, c'est-à-
qu'ils ne nous obligent encore sous la Loi nou- dire, le tabernacle et ce qu'il renfermail, appelés
\elle, tels qu'ils ont été formulés. 11 n'y a que le d'abord Suint des Suints, reçoivent ici iutliffé-
précepte du Sabbat qui fut voilé pour les Israé- remment le nom de Saints, el que chacun de
lites par l'observation symbolique du septième ces objets en particulier, comme l'autel des ho-
jour; ce précepte était mystérieux et liguralif, locaustes, une fois sanctifié par l'onction, s'ap-
à ce point que nous ne sommes pas tenus main- pelait non-seulement Saint de Saint, mais encore
tenant de l'observer, mais que nous devons tenir Suint des Suints. Toute la différence, quant au
compte uniquement de sa signilicaliou. Or, ce nom, entre les objets placés à l'intérieur au de-
repos qui exclut les œuvres ser\iles, est l'image dans du voile, auprès de l'Arche d'Alliance, et
des abimes profonds de la grâce divine. Car les ceux qui étaient placés en dehors, consiste en
bonnes leuvres s'opèrent c/i repos, quand « la foi ce que les premiers étaient qualiliés de Saints
« agit par l'amour » la crainte au contraire,
' : de Saints, même avant d'avoir reçu l'onction,
porte avec soi son supplice, et quel reposai com- tandis que l'onction devait sanctifier les autres,
patible aveccc*Hy)/)/(rf ?Lacrainten'est donc pas avant qu'ils reçussent ce nom. 11 faut du loish-
avec la cliarité ', et « la cliarité a été répandue pour démêler ce que signifient ces choses.
« dans nos cœurs par l'Esprit-Sainl, qui nous a CLXXIV. (Ib. XL, 19 Sur les tapis du taber-
)

« été donné 3. » C'est pourquoi « le repos du nacle. — L'Ecritiu-e, faisant le récit des circons-
« sabbat est saint devant le Seigneur ^ ; > c'est- tances de l'érection du tabernacle, dit que Moïse
à-dire qu'il faut l'attribuer à la grâce de Dieu, et « étendit destapis au-dessus.» 11 est évident que

non pas à nous, comme venant de nous. Sans ce n'est pas sur le toit du tabernacle, mais autour
quoi nos œuvi-es seront tout humaines, ou cou- des colonnes, dont il venait d'être fait mcidion.
pables, ou bien s'inspii-eront de la crainte et non CLXXV. 'Ib. \L,2'J;Sur l'emplacement de l'autel
',Ga). V, 6. — 21Jean,;iv,18. — Rom. v.5. — '
E.v. xxv, 2. ' Lév. XXV, — » Ib. XXX, 26,-38; xxix, 37.
438 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

(lesholocaustes : —
En employant ces expressions; figuratif ; car il ne faut pas croire qu'il y eut une
« Sur le parvis autour du tabernacle et de l'au- seule des prescriptions au Tabernacle
relatives
« tel, » l'Ecriture fait \oir que l'autoldesliolocaus- qui ne fût dans les desseins de Dieu, le type de
tes était placé en doliors et vis-à-vis de l'entrée du ([uclque chose de grand, dont la connaissance
tabernacle, de sortequele parvis occupait tout le importe à la foi et à la piété.
tour, et que l'autel ctaitdans la partie inférieure, 2. (Ex, \\\\, \ .) Sur lesrideaux (l u tabernacle. —
entre la porte du parvis et celle du taberi^aelc. Dieu ordonnedoncà Moïsedefairepourletaberna-
CLXXVI, (Ib. XL, 34, 3o). Sur la nuéequi cou- cle dix rideaux de fin lin retors, de couleur d'hya-
vrait le tabernacle. — Circonstance étonnante et cinthe, de pourpre d'écarlate, avec des chéridiins
bien digne de remarque ! Lorsque la nuée, la en broderie. Le mot gi-ec crActloLc, est rendu en
gloire du Seigneur, comme l'appelle encore l'E- lalinpar auhea, rideaux, ce qu'on nomme vulgai-
crilure, s'abaissait et remplissait le tabernacle, rement des courtines. Il ne dont pas de dix
s'agit

Moise ne pouvait y entrer, et cependant, sur le parvis, comme l'ont cru trop légèrement plu-
mont Sinai, lors(]uela Loi lui fui donnée pour la sieurs interprètes; car le grec ne porte pas
première fois, il pénétra dans la nuée où Dieu dvlxç mais avlai'aç. Des chérubins doivent être
était 1. Il n'est donc pas douteux qn'cn ces deux brodés sur les rideaux, dont la hauteur aura vingt-
circonstances, il élaiU'image de personnages dif- huit coudées, et la largeur quatre •. Ces rideaux
férents première lois il représentait ceux
: la ,
doivent s'attacher ensemble et s'unir entre eux,
qui participent aux secrets de la vérité divine ;
cinq d'un côté et cinq de l'autre, en sorte que
la seconde, les Juifs à qui la gloire du Seigneur l'espace renfermé dans leur enceinte forme l'es-
s'oppose comme une nuée dans le Tabernacle, pace du tabernacle 2. ôr, comment étaient rat-
lequel est à son tour une figure de la grâce du tachés entre eux les cinq rideaux placés du même
du Cbrist : ils ne l'ont pas comprise, pour
et c'est côté, c'est ce que Dieu précise en ces termes ."

cela qu'ils n'enirent point dans le tabernacle de « Tu feras des cordons d'hyacinthe sur le bord
l'alliance. El il faut croire, qu'aussitôt après l'é- « d'un rideau d'une part pour servir d'attache,
rection du tabernacle, ce fait se produisit une « et tu feras de même sur l'autre bord pour la

fois, avec cette signification mystérieuse ou quel- « seconde attache 3 ;.) en d'autres termes, à l'en-
que autre analogue. Car la nuée ne demeurait dioit où un rideau tient à un autre rideau, le

pas toujours sui- le tabernacle, aupoint d'en in- troisième par exemple au second, lequel tient
terdire l'accès à Moise : elle s'élevait pour aver- déjàau premier, c'est-à-dire lui est uni etaltaché,
tir de sortir, c'est-à-dire de transporter leur chacun des rideaux fera face à celui qui lui corres-
camp d'un lieu à l'autre : la luiée protégeait leur pond de l'aulre côté ; car il est exigé que les
marche pendant le jour, une flamme les guidait rideaux soient placés cinq par cinq vis-à-vis les
pendant Et tour à tour la nuée et la
la nuit. uns des autres. L'espace compris entre eux était-il
flamme, première pendant jour, la seconde
la ou rond ou carré, c'est ce qu'on ne voit pas en-
pendant la nuit, demeuraient sur le taberna- core mais on sera édifié sur ce point, lorsqu'il
;

cle, partout où ils campaient. sera fail mention des colonnes, auxquelles se-
ront appendus les rideaux. C'est donc à dessein
DIl TABEKNACLE. qu'il n'est parlé quedestroispremiers, de la maniè-
CLXXVII. —
But (le ce travail.—Commc le
1. re dont premier esl uni au second, et le second
le

livre de l'Exode se termine parle récit de l'érec- au troisième, afin que les autres soient unis en-
tion du Tal)ernacle, et (]u'il donne à ce sujet, semble de la même manière. Il est prescrit de
dans les Cliapiiros précédents, de nombreux dé- faire cinquante cordons pour le premier rideau
tails difficiles à compi'endre, inconvénient or- du côté où il touche au second, et cin([uantepour
dinaire de toide topoijritphieow desci-iplion his- le troisièmedn côté ou il sejoint au second ,(|uant

torique d'un lieu ([uelconque ;


j'ai voulu Irailer, à celui-ci, qui lient le milieu entre C(^s cinquante
à pari, de tout ce qui a rapport au taberna(5Ie cordons de part et d'autre. Dieu veut qu'il aitcin-
lui-même. Afin, s'il esl possible, d'arriver à faire (|n;mle aimeaux d'or, d'ime part, afin qu'il soit
comprendre et ce cpi'il lui et ijuel il fui, j'exa- attaché aux cinquaulecordons du premier rideau;
minerai selon l'occasion le sens littéral du texte, il fallait conséquemment qu'il eut aussi le même

remettant à une autre fois l'explication du sens nombre d'anneaux pour être attaché aux cordons
'
Exod. X rx, 20. '
Ex. XXVI, 2. — ' Ib. 3. Ib.4.
.

LIVRE IF. — UI'FSTIONS Slli I/FAOnF. \:;9

(lu litiisii'im' riilcaii. T/ost ce qno l'Ecrituro e\- amicaux, par lesipiels passeront citu|uante cor-
jtriiiic soiimiaiiciiiciil on ces Icniios ; « Tu dons ipii l'uniront au premier et au troisième. Il n'y
« feras ciiKiiiaiili'aimt'aiiv (l'or, ol lnjoindrasiiii a de dirrircncc ([uepourles anneaux (jui doivent
« ruk'aii à un rideau pur des anneaux, ot il n'y être d'airaui, au lieu d'être d'or. Quiint aux cor-

ciaiira(|iriin laheiiiaele '. » Citninaiite anneaux dons.il avail été prescrit ([u'ils seraient de cou-

d'or du deuxième rideau étaieul doue eulaeés leur d'IiNaciidiie pour les rideaux; mais comme
dans les cuKiuanle corilQns d'hyacinthe du pre- il n'est |)asdit de ([uelle nature seront ceux des
mier rideau, et ein(|uaide anneaux dans cin- tapis de poils, n'est-il pas vraisendilale qu'ils
ijuaute eorduns du Iroisièuu' rideau; les autres étaient de poils commes les tapis ?

rideaux s'unissaient delà même manière et des i. IUlliciillésiionrésolues — Ce(piisiulest réel-


l'incin'en laisaienl (|u'nn ;les cinq autres, placés lement si.difliiile à conq)ren(lrc, (pie je crains tic
vis-à-vis, re|)i()duisaient le même arrangement. le rendre encore plus obscur, en voulant l'ex-

3. Sur /('.s- /(//»/.s- (/(' /)()/7,s- (le chèvre, destinés h plupier « Tu relèveras, dit le Seigneur, dans les
:

couvrir le tapis précieux. — Dieu ajoute : « Tu fc- « lapis du tabernacle la moitié du tapis, (juj

« ras encore des tapis de poils pour couvrir le « sera de surplus , et cet excédant des tapis,

« taheruacle '. » Ces lapis ser\ iront de couvertu- « tu en couvriras le derrière du tabernacle •

re au tabernacle, non en l'orme de toit, mais en « l'necoudée d'un c(Hé et une coudée de l'autre
forme d'enceinte. Nous disons aussi, en effet, « provenant des surplus de la longueur des ta-
qu'une chose est i^osée siu' une autre, connue ct pis, seront étendues sur les c('>tes du tabernacle

sur une hande de lin, non à la manière d'un toit i' et lescouvrironldepail et d'autre ''. » Il a été
surune maison, mais comme un enduit qui cou- prescrit de relever le sixième tapis à l'entrée du
vreuunuu-. <Tuleras, dit-il, cestapis au nombre tabernacle pourquoi donc Dieu dit-il
: qu'il y au-
« de onze La longueur d'un tapis sera de
-K ra la moitié d'un tapis en surplus? Comment
« trcnlecondées, et la largueurd'un tapis de qua- encore comprendre ces expressions: une cou- «

« Ire coudées ce sera la même mesure pour les


: a dée d'un C(Hé et une coudée de l'autre, » puis-

« onze tapis ''.


Et lu joindras cinq tapis entre quela moitiéd'uutapisest dequinze coudées. Dieu
« eux, et les six autres ensemble. ^ » De même ayant voulu que la longueur d'un tapis lïd de
qu'il a ordonné d'miir les rideaux cinq par cinq trente coudées ? Ou bien, s'ily a de l'excédant
dechacpie colé, ainsi Dieu veut que l'on assemble dans la longueur des tapis, parce que les rideaux
cinq tapis d'un coté et six de l'autre, onze en de de couleur d'écarlate, de pourpre et
lin lin,

tout, au lieu de dix. « Tu relèveras, dit-il, le d'hyacinthe, doivent avoir vingt-huit coudées de
« sixième tapis à l'entrée du tabernacle «, » pour long, tandis que les tapis de poils doivent en
empêcher l'embarras qui devait résulter du avoir trente, chacun des rideaux a deux coudées
nombre impair. Dieu règle ensuite la manière en moins que chacun des tapis tic poils : en
dont il eux les tapis de poils. II
faut unir entre somme, en laissant de côté le onzième tapis
ré|)ète ce qu'il a dit, mais peut-être plus claire- qui doit être relevé, cela fait vingt coudées
ment « Tu feras encoi'C cinquante cordons sur
:
que les tapis ont de plus que les rideaiLX. Deux
« le bord de l'un de ces tapis, qui touche à celui coudées en excédant de longuem- pour cha-
« du milieu ', » c'est-à-dire au second, parce cun des dix tapis, donnent en effet pom- le
que celui-ci tiendra le milieu entre le premier total vingt coudées ainsi ce n'était pas, comme ;

cl le troisième : « pour servir d'attache, » c'est- dit l'Ecriture, une coudée ce chaque côté,
mais
à-dire, pour les unir entre eux. « Et tu feras bien dix qui pouvaient être en surplus. 11 nous
« cinquante cordons sur le bord du tapis, qui faut donc différer l'explication de ce passage,
« est joint au secoiul ^, » en d'autres termes, sur jus(pi'à ce que nous voyions le tabernacle
le bord du troisième tapis, afin de l'attacher au dressé dans son ensemble, reposant sur
tout
second. « Tu feras encore cinquanteanneauxd'ai- toutes ses colonnes et entouré de son parvis.
« rain, ettuferas passer lescinquantecordonsdans Peut-être, en effet, en parlant des tapis de poils,

« les anneaux et tu joindras les tapis, et ils n'en l'Ecriture dit-elle parautici])ation quelque chose
« ferontqu'un Dieu exige doncqu'il y aitau ta-
•'. » qui se rapporte à des objels dont il n'a pas été
pisdumilieu, c'est-à-dire, au second, cinquante question. Ces mots, par exemple : « Tu feras des

>Exo. XXVI.e. — = Ib. 7.— Ub. 7. — llb. 8. • Mb. 9. — '-Ib.


"
Ib. 10. — «Ib.— -'Ib. 11.
'
Ex. XXI, 12 . — = Ib. 13.
.

460 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

« de poils pour coim-irle tabernacle *, »


tapis « deux parties, et deux bases pour une colonne
signifient-ils que les tapis couvriront le taber- « en ses deux parties, » Qu'on ne s'étonne i

nacle tout entier y comprenant le parvis, qui,


en pas de cette redite c'est une manière ûc parler :

ou le voit plus loin, en fera le tour; ou seulc- qui signifie que toutes les colonnes dont il n'est
nieut cotte portion intéricuie du taberuiicle qui rien dit seront disposées de la même manière
devait ùlre formée de dix rideaux? On ne peut le Quant aux bases, nous avons déjà dit précédem-
dire. Nous lisons plus loin « Tu feras encore une : ment pom-quoi il y en adeux pour une c'est que ;

« couverture pour le tabernacle avec des peaux l'Ecriture comprend sous ce nom les chapiteaiLX

« de moutons teintes en rouge 2.» Cette autre cou- avec les bases 2.

vertm-e devait-elle s'étendre sur tout le taber- 6. Suite du même Nous voyons donc
sujet. —
nacle et tout autour, ou seulement sur sa partie vingt colonnes se dresser aux deux côtés, méri-
intérieure?nouvcau sujet d'incertitude. Mais pour dional et septentrional, du Tabernacle restent ;

ce qui suit Tu feras «des peaux de coulem'd'hui-


:
les deux autres côtés, le côté oriental et le côté
« pour coumr le dessus, » il faut admet-
cintlie occidental ; s'ils avaient, à leur tour, le même
tre que ces peaux n'étaient pas placées tout autour, nombre de colonnes, il s'ensuivrait nécessaire-
mais qu'elles formaient une sorte de voûte des- ment que le tabernacle était carré. Mais si l'É-
cendant du toit. criture parle du côté occidental, elle garde le
o. Sur les colonnes du tabernacle. « Tu feras — silence sur le côté oriental; est-ce parce qu'il
« encoi'e pour le tabernacle des colonnes de bois était privé de colonnes, et que les rideaux s'éten-
« incorruptible * nue colonne aura dix cou-
: daient seulement de la dernière colonne d'un
« dces de hauteur, et une coudée et demie de côté à la dernière colonne du côté correspon-
« deux coins qui soient vis-à-vis-
largeur'', et dant ou bien n'y a-t-il pas quelque raison à ce
?

« l'un de l'autre c'est ainsi que tu feras pour


;
silence, malgré lequel nous devrions supposer

«toutes les colonnes du tabernacle » Je ne vois •^. que ces colonnes existaient réellement ? Je l'i-
pas bien à quel dessein Dieu commande ces coins, gnore. Ce qui est certain, c'est qu'il est fait men-
dont j'ai d'ailleurs expliqué précédemment la na- tion, dans la suite, de dix colonnes placées du
ture <5. Cai" s'ils devaient servir à porteries colon- côté de l'Orient; mais pom- le parvis, qui devait,
nes il en fallait au moins quatre ; et s'ils devaient comme on le voit plus loin, s'étendre tout autour
supporter des bari'es, il en fallait encore un plus du Tabernacle. Après avoir parlé des deux côtés
grand nombre : à chaque colonne en elïet il avait du tabernacle, tournés au nord et au midi, l'É-
fait placer cinq barres. A moins que ces coins ne criture ajoute « Dans la partie postérieure du
:

fussent d'aucim usage, mais seulement desobjets « tabernacle, qui regarde la mer, tu feras sLx co-

figuratifs, comme le onzième tapis de poils. En « lonnes Tu feras encore deux colonnes aux
•^.

réalité la colonne, élevant comme des bras ses « angles du derrière du tabernacle ^. Elles se-

lieux coins de part et d'autre, est une figure de « ront pareilles de bas en haut, et se rapporte-
la Voyous maintenant le nombre des co-
Croix. « ront l'une à l'autre, et seront semblables quant

lonnes pour nous former une idée de la dispo- « aux chapiteaux pour être unies ensemble.
sition du tabernacle, poursavoirs'il affectait une « C'est ainsi que tu feras pour les deux angles;

forme cirrée, ou ronde, ou celle d'un carré « qu'ils soient pareils '. Et il y aura huit co-
long, les côtés étant plus longs que le frontispice, « lonnes, qui auront seize bases d'argent deux :

comme dans la plupart des basiliques c'est évi- ;


« bases pour une colonne, et deux bases pour
demment cette dernière forme que le texte in- « nue colonne en ses deux parties. >> En ce qui
dique. Voici en effet ce qu'il porte « Tu feras : concerne les bases, même sens et même manière
« encore des colonnes pour le tabernacle, vingt de parler. Le côté de l'Occident, car c'est celui
« colonnes pour le côté qui regarde l'Aquilon. '» qui regarde la mer, se prolonge donc appuyé
« El lu léias quarante bases d'argent pour les sur huit colonnes, six intermédiaires, et deux
« vingt colonnes, deux bases pour une colonne qui doiventoffrir aux angles la même disposition
« ensesdeux parties. Le secondcôté, vers le midi, et servir de liaison : je crois qu'un angle est le

« recevravingt colonnes et leurs quarante bases point dejonclion de deux côtés, et que la colon-
« d'argent ; deux bases pour une colonne en ses ne placée à l'angle relie, l'une le côté occidental

' Ex. XXVI, 7. — J Ib. 14. — 'Ib. t5. — «Ib, 16. — 5 Ib. 17.— '
Ex. ixvi, 19. 5 Ci-dessus q. ex. — ' Ex. xxvi, 2î. — ' Ib.

* Voir Quest. cix. — ' Exod. xxvi, 18. 21. - »Ib. 24.
.

LIVRE II. — QUESTIONS SUR L'EXODE. 461

et le côté septentrional, l'antre le côté orien- « voile séparera par le milieu le Saint d'avec le
tal el le eôtiMlii midi. U'iînil à celle oliserNalioii, « SainI des Saints '. El lu couvriras du voile

(|n(' les colonnes angulaires doivetil èlic pareil- " l'arche du b'inoigriage dans le Saint des
les de bas en liant, elle sinnide (pie ces colonnes « SaintsTout cela est clair ainsi à l'inté-
'*. » :

seront exacleineni ])ei pendienlaires, el ne seront rieur du voile qui était suspendu à (piatre colon-
pas plus inassi\es à la liase (pi'à la partie snpi'- nes, fui déposée l'archi' du tciii(>i;;iiage mais :

riciire, connne le sont la plupart des coloiuies. le voile ne doit pas [loser sur le couvercle de

1. Sur les barres qui (Irnileiil assujcltir les cii- l'arche; Dieu prescrit seulement de l'appuyer
lotiiies. —
« Tu l'eias encore, dit l'Kciilnre, des contre elle. Il « Tu metiras aussi la ta-
ajoute :

« barres de bois incorrnptible, cinq pour une « ble au-deliors du voile; el le chandelier vis-à-
« colonne d'un côté du tabernacle ', et cinq « vis de la table au côté du labernacle qui re-
« pour une colonne du second côté du taberna- « garde le midi et tu mettras la table au côté
;

« cle, et cinq poiu' nm^ colonne derrière le ta- « du tabernacle (pii regarde le septentrion •*. »

« bernacle, du cùlé <pii regarde la nier. Com- >> Ceci est égalenienl facile à comprendre. On lit

ment douter, après cela, que le côté oriental ne ensuite : « Tu feras encore pour l'entrée, un
lut privé de colonnes à cette partie inléri(Hire du « voile (pii sera d'hyacinthe, de pourpre, d'écar-
tabernacle, sur laquelle le par\is s'ouvrit dans « laie retors el de lin lin retors, travaillé par la
la suite ? Dieu veut donc que chacune des co- « main du brodem- *. Et tu feras pour le voile
lonnes sur les trois côtés soit maintenue par « cinq colonnes, et tu les couvrira.; d'or, et leurs
cinq barres. « Une la barre du milieu, ajoule-t- « chapiteaux seront d'or, et lu leur fondras cinq
« il, passe par le milieu des colonnes d'un côté « bases d'airain pas ici, mais
•''.
» Un ne découvre
« à lin antre côté -. » Cela semble siffuifier que on verra plus loin la destination de ce voile sus-
la barre allait d'une colonne à l'autre et s'ap- pendu à cinq colonnes. IHeu vent (pie ce voile
puyait contre ces mêmes colonnes : par consé- occupe l'entrée du tabernacle intérieur, qu'en-
quent, chaque colonne n'avait pas ses cinq bar- vironne le parvis. Viennent cnsnileses prescrip-
res respectives, anxtpielles aboutissaient cinq tions relatives à l'autel des sacrifices et des ho-
barres qui parlaient de la colonne voisine. « Tu locaustes. Dieu dit comment on doit le faire ; il

« doreras les colonnes, et tu l'eras des anneaux n'indique pas maintenant où l'on doit le poser,
« d'airain, dans lesquels tu feras passer les bar- mais ceci encore se verra plus loin.
« res, et tu doreras ces barres 3. « Afin d'cinpè- 9. (Ex. XXVII, 9.) Sur le parvis — Aparlirde cet
cher qu'on ne tasse dans les colonnes des trous, endroitjnsqneversla finducliapitre, il est ques-
pour y faire passer les barres. Dieu donne l'or- tion du parvis, qui doit régner autour du taberna-
dre de faire de anneaux, dans lesquels s'engage- cle pour l'éreclion da(piel Dieu a précédemment
ront lie part el d'antre les extrémités des barres. donné ses ordres. « Tu feras aussi, dit-il, le par-
On eompiend dès lors que ces anneaux étaient « vis, » en grec avlriv et non pas axilcîav :

suspendus à des cordons fixés eux-mêmes au plusieurs de nos inl'.'rprètes , n'ayant [las fait
bois des colonnes, et qu'ils pou\ aient recevoir et celte distinction, ont traduit également par le
maintenir l'extrémité des barres. mot parvis, et l'expression ci-dessus aùXw et le
8. Sur le voile et ce qui doit être mis ciu-dedans mot aulœa rideaux, qui a pour terme corespon-
et au dehors. — « Tu dresseras, dit le Seigneur, daiit en grec y:j'kj.îy.% et non pas x-JAx; ; ils font
« le tabernacle selon l'image qui t'a été moii- dire au texte : « Tu feras un tabernacle qui aiu-a
« trée sur la Tu feras encore un
montagne '*.
« dix /)ftn'/s '', >> quand ils auraient dû traduire :

« voile de couleur hyacinthe, de pourpre, d'é- « qui aura dix rideaux. » Quelques uns, plus
« carlate retors et de lin lin filé; tu le feras avec ineptes encore, ont admis dans leurs versions le
« des Chérubins travaillés au tissu '. Et lu le mot /)o;tc.s comme synonyme de c-'Aotc et de «ù-
« placeras sur quatre colonnes incorruptibles Im'cç. De même que nous trouvons en latin au-
« revêtues d'or, dont les chapiteaux seront d'or lœa, traduction du mot grec a-jXjti'aç; ainsi l'ex-
« et les quatre bases d'argent ''. Tu placeras pression grecque avX/;v a été rendue, grâce aux
« ce voile sur les colonnes, et tu mettras au-de- nôtres, par «!(/(/. Mais ce terme ne signifie pas
« dans du voile l'arche du témoignage : et le atrium, parvis, dans la langue latine, ilveutdire:

'Ex. XXTI,33. —Mb. 34. — 3Ib. 35. '


Ib. 36. Ib. 37.
'Ei. XXTI, 26. — 2 1n.28. — nb. 29 — Mb.30. — Mb. 31.— «Ib. 32. " Ib. xxvji, I.
462 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

demeure royale; tandis que le grec xx)).r, signi- l'on voudra, attendu que l'Ecriture ne dit rien
fie parvis. Dieu dit donc
: « Tu feras le parvis : formellement àce sujet, il s'ensuivra que les huit
« du tabernacle du cùté (jni regarde le midi; les colonnes de l'intérieur du tabernacle du cùté de
rideaux du parvis seront de fin lin retors; que
'
« l'Occident seront plus espacées que les vingt
« la longueur soit de cent coudées pour un colonnes du cùté du tabernacle au nord et au
« côté '. Leurs colonnes seront au nombre de midi, afin de fournir l'étendue suffisante pour
« vingt , leurs bases d'airain au nombre de suspendre les dix rideaux dont il a été parlé
K vingt; leurs anneaux et leurs crochets seront d'abord à l'occasion de la construction de ce ta-
« d'argent 2. n y aura de même du cùté de bernacle. En effet, ces rideaux ont vingt-huit
« l'aquilon des rideaux de cent coudées de long, coudées de long, ce qui donne deux cent-qua-
« avec leurs vingt colonnes et leurs vingt bases tre-vingts coudées pour le tout s'il y avait cent;

« d'airain; leurs anneaux, les crochets des co- de ces coudées, aux deux côtés du nord et du
« tonnes et les basses revêtues d'argent 3. La midi, où se trouvent vingt colonnes, devrait y
il

« largeiu' du parvis qui est du cùté de la mer et en avoir quarante sur les deux cùtés de l'Orient
« ses rideaux seront de cinquante coudées ; leurs etde l'Occident, et la proportion serait exacte
« colonnes seront au nombre de dix, et leurs entre les quarante coudées qui sont suspendues
« bases au nombre de dix *. Et la largeur du à huit colonnes et les cent coudées suspendues à
« parvis qui est vers l'orient sera de cinquante vingt colonnes ; mais, dans ce cas, les cùtés du
« coudées; il y aura dix colonnes et autant de parvis extérieur ne mesureraient pas une éten-
« bases ^. » due plus longue, puisque leur limite est fixée
10. Suite. — Venant à parler du parvis, l'Ecri- à cent coudées, et alors il n'eût pas été possible
ture nous apprend maintenant qu'il y avait des que le rang de dix colonnes, allant du cùté
colonnes au cùté oriental du tabernacle, et que sud au cùté nord, renfermfd dans son enceinte
ce cùté en avait dix avec des bases d'airain, com- les huit colonnes intérieures. Pour que le par-

me le cùté occidental : or, de là surgit une ques- vis environne le tabernacle intérieur de toutes

tion extrêmement difficile à résoudre. En effet, parts, il faut donc nécessairement que celui-

il nous est aisé d'admettre à l'Orient un rang de ci soit établi dans des proportions plus res-
colonnes, appartenant au parvis, qui environnait treintes; par conséquent, (jue ses vingt colonnes
tout le tabernacle intérieur sm' ses quatre cùlés: latérales,dans le sens de la longueur, soient plus
car, de ce côté, le tabernacle intérieur n'avait rapprochées que les vingt du parvis extérieur,
point de colonnes. Mais il en avait déjà huit à tandis que, au contraire, les huit colonnes inté-
l'Occident.Cominenl donc admettre encore ces rieures placées à l'Occident, doivent être plus es-
dix colonnes, dont il est fait mention pour le pacées que les deux colonnes correspondantes du
parvis extérieur? Du cùté de l'Occident, se dres- parvis extérieur: carie nombre de coudées en
saient donc deux rangs de colonnes, huit à l'in- moins qu'on étendra de ces rideaux sur les vingt
térieur et dix à l'extérieur? S'il en est ainsi, les colonnes des deux cùtés sud et nord, doit trouver
cùîés du parvis extérieur seront plus longs que sa place aux cùtésde l'Orient et de l'Occident, pour

ceux du tabernacle intérieur, et sur tous ces cùtés que les rideaux aient leurs deux cents coudées
s'élèvera un autre rang de colonnes, qui ne cor- de développement. Il n'en est pas de ces rideaux

respondra point avec le premier rang de colon- comme des tapis de poils, où il un en
s'en trouve

nes du tabernacle intérieur. Alorsil arrivera né- surplus: Dieu ne prescrit pas d'y faire un double
cessairement que les vingt cokumesipii décorent donc on diminue la
pli. Si longueiu" du taber-

l'intérieur ilu tabernacle, au miili et an septen- nacle intérieur, afin que le parvis extérieur

trion, seront moins espacées entr'elles que les puisse le renfermer dans son enceinte; si, au

vingt colonnes qui s'élèvent sur les mêmes cùtés lieu décent coudées de rideaux, iln'yena, par

dans le parvis extérieur. Et comme, suivant l'E- exemple, que quatre-vingt seize desuspendues à
criUu-e, ces rangs de colonnes placées à l'exté- ses vingt colonnes, ce qui fait quatre coudées eu

rieur, mesurent cent coudées; et que les rangs moins; alors ce sera quatre coudées, ou plutùl

intérieurs,composés d'un même nondjre de co- huit coudées, qui devront s'étendre sur les deux
autres cùtés à l'Orient et à rOcidenl: de cette
lonnes, en mesurent telle quantité en moins que
manière, ce n'est plus quarante coudées qui se

— - Mb. — Ib. 12 •Ib. 13.


suspendent aux colonnes occidentales du taber-
'Ex, x.wii, 9. ; Ib, 10. 11. '
MVRF, II. — OFESTIONS SUR I/EXODE. 463

nacle intrriciir, mais quaraiito-quatrc ; les qiia- sera suspendu à la fois comme un ornement et
i'aiili'-i|iiatrc autres (UTii|it'iil le cùtc' oi-ii-nlal. MU ri<leau; ce voile occupei'a l'espace de ipiatre
Par ('oiiS('i|ii(Mil, lorscjui' cinquaiitc coikIccs ik' colonnes, ipii a été désigni- et réservé pour la
riileaii.v soiil tendues sur les ili\ colonnes ilu par- porte du parvis. El ce voile, distinct et séparé des
\ise\ti'rieur, et (|uarante-(|uatre eouiiées sur les rideaux qui mesurent (|uiuze coudées. Dieu veut
huit eoloruies i>lacees à l'intciiour du labernaele, encore (|u'il en dilfère par la beauté, et qu'il
on trouve les intervalles des huit eolounes inté- soit parsemé de dessins brodés de quatre cou-
rieures plus espacés qiu> ceux des dix colonnes leurs. -Mais si les cotés, qui mesurent quinze cou-
exiérieuies : car,on suspen-
s'il étaient ég;aux, dées et comptent chacun trois colotmes, sont pla-
drait coudées à huit colonnes aussi
quaiante cés sur la même ligne que la porte du parvis et lui
bien que cimiuante à dix colonnes, la propor- sont adhérents, il ne restera plus d'intervalle li-

tion étant la même de huit à dix que de qua- bre entre colonnes du parvis extérieur et
les dix

rante à cin(|uante. En effet, quarante roiifciine les liuit colonnes de rinléiieiu' du tabernacle,
huit fois le nombre cinq, et cincpiante dix fois le pour recevoir l'autel île cinq coudées, qui y oc-
même nombre. cupe un espace carré; ni devant cet autel, pour
1 1 . Sititi'. —
Nous ne serions pas étonné de cette le service qui s'y rappoite ; ni enfin entre ce
dilïérence d'intervalle entre les colonnes, les unes même autel et l'entrée du tabernacle intérieur,
étant plus rapprochées dans le sens de la longueur pour recevoir le bassin d'airain. Cette place en
où au nombre de vingt, et les autres
elles sont effet fut désignée pour le bassin, afin que les
plus espacées dans le sens de la largeur où il n'y prêtres pussent s'y laver les pieds et les mains,
en a que huit, s'il n'y avait pas quelque chose quand ils entraient dans le tabernacle, on quand
qui nous force à changer de sentiment. Après ils s'approchaient de l'autel, pour y remplir les
avoir dit en etl'et que la largeur du parvis du côté fonctions de leur ministère; et si l'on n'imagine
de la mer aura cinquante coudées de rideaux, dix pas que ce bassin se trouvait en dehors du taber-
colonnes et dix bases, que la largeur dn par\is à nacle et dans le parvis, comment les prêtres
l'Orient aura de même cinquante coudées, dix co- pouvaient-ils se laver les mains et les pieds,
lonncset autant de l)ascs;a|irèsavoir ainsi, ce sem- avant d'entrer dans le tabernacle Nous ne pou-
?

ble, décrit entièrement la forme du tabernacle vons cependant mettre l'autel en dehors du par-
avec son parvis qui l'environne de toutes parts, le vis: car le tabernacle et l'autel doivent positive-
texte sacié parle des autres objets dont on ne ment dans l'enceinte du parvis lui-
être placés
peut que très-diflicilemcnt se faire une idée, et même. donc la dernière hypothèse à ad-
Voici
aux(iuels il n'est pas aisé d'assigner une place : mettre: ces côtés, qui avaient chacmi des rideaux
« D'un aura luie hauteur de
côté, est-il dit, il y de quinze coudées soutenus par trois colonnes,
« quinze coudées de rideaux, trois colonnes et formaient un intervalle d'égale grandeur entre la
« leurs trois bases Le second côté am'a égale-
• .
porte dupai-vis et l'entrée du tabernacle intérieur ;

« ment une hauteur de quinze coudées de rideaux, la porte du parvis s'ouvrait sur une largeur de
« trois colonnes et trois bases 2. Ktàla porte dn vingt coudées et de quatre colonnes, auxquelles
« parvis sera un voile de vingt coudées de haut, était suspendu le voile de vingt coudées semé de
« fait d'hyacinthe, de pom'|)re, d'écarlate filée broderies faites à l'aiguille; plus loin se trouvait
« et de lin lin retors, ouvrage travaillé àraiguille; l'entrée du tabernacle, avec un voile suspendu à
« il y aura là quatre colonnes et quatre bases*. » cinq colonnes: tout cela n'était point disposé dans
Où placer tous ces objets dans l'ensemble si l'espace fermé de huit colonnes, mais en dehors,
parfait du tabernacle ? Je ne le vois pas mais ce
; dans le parvis. Dans cette hypothèse, le voile de
que je vois bien, c'est qu'on trouve ici également l'entrée du tabernacle formait comme une porte
dix colonnes, trois d'une part, trois de l'autre, et à doubles battants, à l'endroit où les rideaux n'é"
quatre au milieu. Ces rideaux de cinquai.te cou- taient pas unis cntre-eux par des anneaux et des
dées ne seront donc par unis ensemble, afm de cordons. Peut-être encore ce voile, suspendu à
laisserun passage pour l'entrée dans le parvis: ci':q colonnes à l'entrée du tabernacle, occupait-
les vingtcoudées du milieu seront séparées des il l'intérieur du tabernacle fermé d'un rang de
quinze coudées, et formeront une tenture à la huit colonnes, de sorte que quand on entrait dans
porte du tabernacle, autrement mi voile, qui le tabernacle, l'inlérieiu' en demeurait caché et

'Ex. XXVI, 14. — Ib. 15. — 'Ib. 16. voilé aux regards profanes: toutefois, que le voile
464 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

fût placé en-dedans ou en-dehors de ce rang ït lonnes et trois bases •. Et la hauteur des ten-
de colonnes, — point qui n'est pas suffisam- « tures de l'autre côté, sera également de quinze
ment éclairci, — il est hors de doute qu'il en « coudées, avec trois colonnes et trois bases 2.

était à une distance convenable, sans quoi les « Et le voile de la porte du parvis aura trente
cinq colonnes trop rapprochées des quati'c sui- :< coudées de hauteur '. » 1^^ texte sacré veut dire
vantes, eussent plutôt empêché que voilé l'accès la lomjueur, quand il parle de la hauteur des ten-
du tabernacle. tures. Car leur hauteur, quand ou les tisse, cor-
12. Suite. — D'après cette forme et cette dis- respond h leur longueur, quand on les étend.
position, il n'est plusdésormais nécessaire de Et dans lacrainle qu'onne s'y trompe, l'Ecriture
resserrer les vingt colonnes placées au midi et dit ailleurs expressément : « Et ils firent le par-
au nord dans l'intérieur du tabernacle et d'es- ce vis qui est au midi, les tentures du parvis, de
pacer davantage les huit colonnes placées à l'Oc- « fin lin retors, cent pour cent *, » en d'autres tcr-
cident. Car ces dix colonnes du parvis extérieur, mcs,cent coudées de tentm-es pour l'espace de cent
du côté de l'Occident, ne forment pas un long coudées occupé par vingt colonnes. On lit en-
rang de colonnes, qui enceigne les huit colonnes ensuite : « Leurs vingt colonnes et leurs vingt
intérieures; mais trois d'entre-elles s'élèvent de « bases étaient d'airain. Et du côté du midi les
chaque côté et quatre à la porte, circonscrivant « tentures étaient aussi cent pour cent, leurs vingt
l'espace où se trouvent l'autel des holocaustes, « colonnes et leurs vingt bases étaient d'airain ;

entre la porte du parvis et l'entrée du taberna- « et du côté qui regarde la mer les rideaux avaient
cle ; le bassin, du tabernacle et
entre l'entrée « cinquante coudées, dix colonnes et dix bases."»»
l'autel ; et au service de
l'intervalle nécessaire Ici rideaux et tentures sont synonymes. « Et du
l'autel, entre l'autel lui-même et la porte du « côté de l'Orient les tentures avaient également
parvis: de cette manière toute la surface ilu par- « cinquante coudées. » Ensuite le texte sacré traite
vis est limitée par dix colonnes, dont trois au de nouveau de la partie postérieure du taberna-
nord, trois au midi et quatre à l'Occident, lor- cle, pour montrercommcnt les dix colonnes em-
mant ensemble la ligure de la lettre grecque II. brassaient l'espace du parvis dont il a été parlé
Ainsi cet espace lui-même s'ajoutait à celui qui précédemment. « Il y avait, y est-il dit, quinze
était enfermé dans la longue suite de colonnes « coudées parderrière. » Il appelle derrière la par-
du tabernacle iidérieur. l'our se faire une idée tie postérieuie du labernacle, située à l'Occident.
de cette disposition, qu'on prolonge lesjambages Il « Leurs colonneset leur bases étaient
ajoute :

ou les iotas de la lettre tt du côté où elle est ou- au nombre de trois. Et par derrière, également
«

verte, et qu'on la ferme au point où commence « de chaque côté de la porte du parvis, étaient

cette prolongation, de façon que les iotas s'éten- « des rideaux de quinze coudées, avec leurs trois

« colonnes et leur trois bases. » Ce qu'il noni-


dent de part et d'autre. On pouvait donc trouver ''

dix colonnes formant une longue ligne au côté oc- me les deuxdcrr/('Tcs du parvis, maintenant qu'il
cidental dans l'intérieur du labernacle, mais en a- rapporte la manière dont ils furent éiigés, ne dif-
joutant auxluut colonnes intérieures les deux der- fère point évidemment de ce qu'il ap|)elail les

nières qui faisaient angle au noril et au midi. Car côtés,en que Dieu avait
faisant connaître l'ordre

sur ces dix colonnes (pii tenaient proprement au donné de lescouslruire c'était un des en :
(•()((''.<;,

parvis, cl donnaient entrée dans le labernacle, il tant qu'unis de part et d'autre à la porte ils ;

y en avait trois sur les côlés, et quatre de face, embrassaient l'espace du parvis à l'Occident:
à l'endroiloù se trouvait la porte elles cndjras- :
c'étaient pareillement des rfcfr/t'rcx, parce que cet-
portion du parvis occupait la partie postérieure
saient ainsi l'espace exigé i)Our l'ollrande des sa- te

sacrifices, dans l'intérieur du parvis et en a- du tabernacle, c'est-à-dire l'Occident. « Tous les

vaut du labernacle. Aux trois coloniies latérales « rideaux du parvis étaient de fin lin retors, les i)a-

étaient suspendues des tentures de lin longues de « ses des coloimcs d'airain, leur anneaux d'ar-

quinze coudées ; et aux quatre colonnes de la ec gent chapiteaux argentés et toutes les
et leurs ;

porte, un voile de vingt coudées brodé et travaUlé « colonnes du parvis étaient aussi couvertes d'ar-
à l'aiguille. ec gent. 7 Le texte fait ensuite mention d'une
)>

13. Et qu'onne se trouble point, dans si ont lit particularité qu'il n'avait pas encore signalée ici:

« La/fr/i/ff"/' des tentures sera d'un Kxcd. jxwjii. 11. — ' lli. 15- — ' II) Ifi. — ' Exod. xxxvici,

1

l'Ecriture :

selon les Septante comp. la Vulg;ile, K.\o<l. xxxviil, 9. et suiv.


« côté de quinze coudées elles auront trois co-
; sibid — «Ibid. — 'Ibid,
LIVKK II. — QFKSTIONS SUR L'EXODP:. 468

« I^cs voiles (liiilil i),irvis ('laiciil un ouvrafjo di- du côlé (le la mer. Que faut-il donc (nifendrc par
« linuloric, (rinaciiillic, do iioiiiiirciri'carlatc (i- If ilrriniliUt tabernacle, si ce n'est la partie (pii

n ii'O l'I (If lin lin irlois ; ils avaient \ ingl eoiulées de regardait l'Orient ? La partie où cin(| tapis sont
« lottfiin'ur eltle larfieur » Il résulte de ce pas-
'. unis ensemble mesure cent-cinquante coudi-es,
^aj;<' (|ne la liinitt'ur mentionnée plus hani eor- auliement cin(| fois trente; car Dieu avait com-
respond à la /('(((/i/ci/r des rideaux (|nand ils sonl uiatKh' (pie ces tajiis (nissent chaciiii treille

étendus. Le texte ajoute enfin : « Etcinq coudées coudées; cl la parlicoù six tapis, au lieu de
« delarjienr. •> Les tentures du parvis extérieur a- ein(|, se troinaicMl pareillcnieiit unis ensem-
\aient,enelTet,een(»nd)rede eoudéesiMi largeur, ble, mesiu'ail cenl (pialic-viiigl coudées, au-
tandis que celles del'intérieur n'en avaient (pie trement six fois trente; par conséquent, dès lors
quatre; haut " La
e'est ainsi (pi'il a été dit plus : iju'on pliait nu de ces tapis au devant dutaberna-
« Idiiiiueurdu pai\is était de eeni pour cent, de clesiiivaiil l'ordre de Dieu, on retranciiail ([uiii/.e

<( ein(iuante pour cinquante, et la liaideur de coudées surle total, et il ne restait plus(iue cent
« ein(| couikvs de lin lin retors. » L'Ecriture ap- soixante-cin(| coudées. Et après avoir mesuré, du
pelle loiiiiin'iircc (pri-llenonnne ensuiteZ/'/H/c»/', C(')té où il y avait six ta|)is, cent cinquante coudées
parce (pie d'un objet placé à teriv est
la lart;eur de dévelloppement, longueurégale au C(")lé cpii
la même que hauteur du même objet placé de-
la n'avait que cinq tapis, il n^stait également (piinze
bout. Kn d'autres termes, comme je viens de le coudtV's en surplus. Car lecêjlédescinq tapis me-
dire, la hauteur d'une étolîe, (piaudon la tisse, surait cent cinquante coudées, et le C('ité des six
devient sa longueur, (piand on l'étend. tapis, en défahiuant la moitié du voile plié en
li. Sur les couvertures de poils. — Nous a- avantdu tabernacle, en présentait cent soixante-
vons dilTéré jusqu'ici l'examen d'une dif'liculté re- cinc]. Ce c(Mé-ci avait donc quinze coudées en

lative au tajjis (le poils voyons mainlenanl com- ; plus. C'est cette moitié de tapis ([u'il laut cacher
ment nous pouvons la résoudre d'après la forme derrière le tabernacle si l'on a du en plier une ;

du tabernacle que nous avons décrit en sou en- moitié sur ne faut pas faire de même
le devant, il

tier, connue nous avons pu. Peut-ètie l'obscurité à la partie postérieure du tabernacle, maiscacher
dont cette question est envelloppée vient-elle de ces quinze coudées de tapis à l'arrière du taberna-
ce que l'auteur sacré a parlé, par anticipation cle ; d'après cette disposition, on retranchait cette
d'un détail sur le quel il devait revenir plus tard, longueur par derrière comme on avait fait par
dans la description du parvis qui faisait le tour devant, grâce au pli d'un tapis; aux cent-cin-
du tabernacle. Examinons donc le texte en lui- quante coudées des cinc] tapis correspondaient
même. «Tu relèveras encore, y est-il dit, ce qui cent-cinquante coudées provenant des six au-
« sera en surplus dans le tapis du tabernacle, tu tres, parce qu'on avait pris trente coudées sur les
<( cacheras la moitié du tapis qui sera desur|)lus, cent quatre-vingts, en pliant un tapis au-devant
« et l'excédaiil des tapis, tu le cacheras derrière du tabernacle et en cachant par derrière l'au-
« le Tout cela ne signifie qu'une
tabernacle 2. » tre moitié.
seule et mèmechose c'est que la moitié du tapis :
lo. Suite. — Ce qui suit est différent etfoiu'uit
qui était de reste, c'est-à-dire, qui était en sur- matière à une autre question, qui est la cause
plus parmi les voiles du tabernacle, doit être ca- principale pour laquelle nous avons cru devoir
ché derrière le tabernacle Comment donc y a- . différer l'explication de ce passage ayant ;

en surplus, comment reste-t-il la moitié d'un


t-il voulu auparavant voir la forme donnée au taber-
tapis sans enr)loi':' U faut pour s'en rendre com- nacle et la description du parvis qui l'environnait.
pte; examiner dans quel ordre les tapis étaient Voici donc ce qui suit : « Une coudée d'un C(Jté

reliés entre eiLx : Dieu ordonne y en ait qu'il <i et une coudée de l'autre, provenant du surplus
cinq d'une part, et six d'autre part unis ensem- « de la longueur des tapis, seront étendues sur
ble; le sixième lapis devait de cette manière,'ainsi « les C(jtésdu tabernacle et les couvriront de part
qu'il l'avait dit précédemment,
doublé au- être « et » Autre chose est le surplus
d'autre ' . qui
devant du tabernacle, c'est-à-dire à l'Orient. Car existeau côté qui est orné de six tapis, compa-
bien des fois le texte a fait entendre que le der- rativement au C(jté (pii n'en a que cinq, dif-
rière du tabernacle était à l'Occident, c'est-à-dire férence numérique dont nous avons déjà parlé ;

I
E.vod. xxx.\vii,l,9-lS. — 21bid. xxTi, 12. 1 Ex. x.\iri,I3.
.

QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

autre chose est le surplus qui existe sur la Ion l'on en compte huit. En retranchant trente cou-
gueur lia tapis, et dont il est question mainte- dées sur les (apis de poils, en restait trois cents
il :

nant. Ainsi il ne s'agit pas de comparer un côté par conséquent si les deux cent quatre-vingt
à l'autre, et de trouver leur différence en lon- coudées de rideaux sont couvertes par les trois
gueur ; orné de six tapis, en
l'un, celui qui est cents coudées des tapis de poils, il restera vingt
ayant plus que celui qui en compte cinq iné- ; coudées qui seront sans emploi. Les deux cou-
galité qui disparaissait, grâce au pli fait à un dées que les tapis de poils ont chacun en sur-
tapis sur le devant du tabernacle, et au déve- plus, et ([ui ensemble donnent vingt coudées,
loppement d'une moitié de tapis à la partie pos- doivent donc être distribuées, de cette manière :

tcreure. Mais il s'agit de la comparaison entre a une coudée d'une part une coudée de l'autre,
et
les tapis de poils elles dix rideaux, tissés dequa- « » c'est-à-dire, de telle sorte qu'elles ne soient

tre couleurs, que Dieu avait ordonné de faire pas toutes amassées sur un seul point, mais
pour l'intérieur du tabei'nacle il se trouve que : qu'elles servent à couvrir les côtés du taberna-
les tapis dépassent les rideaux de deux coudées. cle, toutefois vers le parvis extérieur
en d'autres :

Ceux-cien effet n'avaient que vingt-huit coudées termes, ces coudées des tapis de
(rois cent
etceux-là trente; aussi l'Ecriture ne dit-elle pas : poils doivent toutes environner le tabernacle
Le surplus des tapis, mais « le surplus de la : à l'extérieur. En
si l'on tient compte
effet
« longueur des tapis. » Quel sens faut-il donc des cent coudées que mesurent les côtés du
donner à ces paroles « Une coudée d'un côté
: parvis extérieur au nord et au midi, il res-
« et une coudée de l'autre seront étendues sur tera pour l'Orient et l'Occident cinquante
« les côtés du tabernacle ? » N'est-ce pas que ces coudées ce qui forme les trois cents cou-
;

deux coudées, dont les tapis dépassent en lon- dées, que suffisent à couvrir les trois cents
gueur les rideaux, ne doivent pas être entière- coudées des tapis de poils. C'est ce que signi-
ment ramassées surun côté, end'autres termes, fient cesmots « Une coudée d'une part et une
:

que tout le surplus ne doil pas être reporté sur '<coudée de l'antre » cette distril)ution des deux
;

le derrière du tabernacle, mais que ladistribution coudées que chaque tapis de poils mesure en
doit s'en faire avec égalité, qu'il y en ait autant plus, est marquée dansées autresmots du texte:
à l'avant du tabernacle qu'à l'arrière ?au Irement, « Le surplus provenant de la longueur des tapis,

puisque chaque lapis a deux coudées de plus « couvrira les côtés du tabernacle ; » il s'agit ici

que chacun des rideaux, qu'une coudée aille d'un des côtés extérieurs, qui tiennent au parvis et
côté, et une coudée de l'autre ainsi chaque côté :
« qui doivent être couverts de part et d'autre ;
»

aura les dix coudées qui lui appartiennent ; car et non des du parvis lui-même, qui ont
côtés
les dix tapis étantchacun plus longs de deux vingt colonnes et une tenture de cent coudées ;

coudées l'emportent d'une longueur totale de car ces côtés ne sont pas plus longs que les côtés
vingts coudées, sur la série correspondante des du tabernacle intérieur, où se trouvent égale-
rideaux ment dix colonnes, auxquelles sont suspendus
16. Suite. — Il faut examiner ensuite quel les dix rideaux. Les côtés du parvis extérieur eom-
espace doivent enceindre les vingts coudées de me ceux du (abernacle intérieur s'étendent éga-
tapisqui sont en excédant. Car si les tapis de poils galement à l'aquilon et au midi, sur un espace
couvrent tout le tabernacle intérieur, que pour- de cent coudées. La longueur excédante des tapis
ra-t-on couvrir avec tout ce qui est de trop? Il faut de poils sur les rideaux n'est donc pas employée
alors qu'ils soient cachés, et par là même qu'ils à couvi'ir les vingts colonnes du parvis extérieur,
disparaissent : ce que l'Ecriture ne dit pas. Ur, qui demanderaient aulantd'étoffe que les côtés du
les dix rideaux, longs chacun de vingl-huit cou- tabernacle intérieur, c'est-à-dire, cent coudées à
dées, qui sont tendus autour du tabernacle inté- chacun, deux cents coudées en tout au con- :

rieur, embrassent un espace de deux-cent quatre- traire, (juarante coudées suffiraient pour le côté
vingt coudées ; les deux côtés le plus prolongés, oriental et le côté occidental si les tapis de poils
le nord et leniidi, où se ti-ouvent vingt colonnes, ne couvraient que le tabernacle intérieur, mais
prennent chacun cent de ces coudées ; restent si l'on prolonge ces côtés jusqu'au parvis, ce
quatre-vingts, que se partagent, à part égale, les n est i)as assez de quaran(e coudées, il en faut
deux côtés les moins longs, le côté oriental, qui cinquaule l'excédant de longueur des tapis île
;

n'a pas de colonnes, et le côté occidental, où poils lelativement aux rideaiLX, a pu servir à
I.IYKE II. — QliKSTIONS SIR L'EXODE. Wl

couvrir ces ctMi's: do colliMiiaiiiôn' les ilciix foii- rait pas sans raison (|ue plusieurs de nos inler-
(li'i's (|iii luniu'iil un oxcrdaut de loufiiicur, ui" pièles auraient traduit pai' ahliques le r).«yta
seiaiiMil jias touilui's d'un sculi'ùli-, uiais « uni- des (ii-ecs. (lar les tapis de poils ne peuvent avec
« coiidi'o d'un côU^ et un coudre de l'autre ; » le (piinze de leurs couch'es couvi'ir quinze coudées
cùlé orierdal aurait ainsi di\ coudées prises sui' de rideaux sur ces (ril<''s, à moins (pi'avant d'y
cet excédaut, et le côté occideulalics dix autres. aboutir, ils nesoieid pas étendus à la partie pos-
(^ar deux fois dix fout viuf-t dans ce calcul ue
; térieure du tabernacle sur une longueur de plus
sont pas couipi'ises les lictde coudées du ouziè- de dix pour la ligne dioite qui
cou(l('es. Ainsi,

uic voile, à raisou du pli et du dévelopi)euu'ut part du du tabernacle c'est-à-dire de


dcrrièi'c ,

particulier (ju'il reçoit. l'Occident celle ligne après avoireu huit colon-
:

n. Suite. — Les latins oïdlradiut : «rnccou- nes, ipii faisaient partie de l'intéiieur du taber-
<i dée d'un côté, uue coudée de l'autre, pro-
el nacle, en eut dix, euy joignant les côtés du par-
« venant du surplus de la longueur des lapis du vis extérieur et après avoir mesuré
; quarante
« tabernacle, couvriront les ciUés ("lalera) du la- coudées provenant de ses buils colonnes, elle en
« hernacle. » Mais coiniue le grec porte n'koi.yi'a, compta ciiKpianle avec dix colomies (|uand on :

que plusieurs traducletns rendent en latin par aura, sur cette ligne, couvert avec
tapis de le

obliqua, et non par littcni, luie question intéres- poils les dix coudées aboutissant de chacun des
sante s'élève à ce pro[)os. Car, quoique l'on ne angles, il restera donc trente coudées intermé-
voie ici rien d'oljli([ue, puisque les (juatre côtés diaires, qui ne seront pas couvertes par les ta-
sont tous à au^ies'droits ; si l'on ne peut pas dire pis de poils, mais seulemenlpar les rideaux, qui
du côté oriental, qui l'ait lace, ni du côté occiden- mesurent trente coudées et au milieu desquels
tal, (pii est par derrière, (pi'ils sont ol>liques, ce- était l'entrée du tabernacle. Par conséquent, si

pendant ou peut l'allii'uuM' du côté du nord et du ces côtés, formés de trois colonnes et mesurant
côté du midi. Puisque les côtés, qui ontcinquan- quinze coudées, à partir des limites extrêmes où
te coudées de long, ne nmi pas abliques, ce ils touchaient à la porte du parvis, se trouvaient
sont ces mêmes côtés qui pouvaient être couverts distants entre-eux de vingt coudées, parce que
comme nous l'avons dit par le surplus de la lon- telle était la largeur de la porte qui séparait ces
gueur des tapis de poils, comment donc la vérité côtés ; si h l'autre extrémité, où ils se reliaient h
se trouve-t-elle dans ces paroles « Une coudée :
la ligne postérieure du tabernacle, dont nous
« de l'autre, provenant du surplus de la longueur avons parlé, ils avaient entr'eux l'intervalle de
« des lapis du tabernacle, couvriront lesciifc'sdu trente coudées ; il est hors de doute qu'ils é-
« tabernacle ? » iMais il est évident que l'Ecriture taient obliques: car leur distance respective était
parle ici des côtés qu'elle nomme encore derrière, plus grande à l'endroit où se trouvaient trente
et qui, outre les trois colonnes mesurant quinze coudées intermédiaires qu'à l'endroit où il n'y
coudées d'étendue, comprennent la porte du par- en avait que vingt. Ainsi les dix coudées de tapis
vis qui a vingt coudées et quatre colonnes, ce de poils, c'est-à-dire la moitié de l'excédant en
qui fait un ensemble de cinquante coudées et longueur, cinq d'un côté et cinq de l'autre, com-
de dix colonnes. A l'une des extrémités de ces plétaient à la partie postérieure du tabernacle,
côtés, se trouve la porte du parvis, et à l'autre tournée vers l'Occident, comme les dix autres,
l'entrée du tabernacle entre la porte du par-
:
à la partie antérieure, tournée vers l'Orient, la
vis et l'entrée du tabernacle existe un espace li- couverture des côtés que les Grecs qualifient de
n\ilé, à la porie, par inie étendue de vingt cou- TrXayi'a. A leur défaut, il y aurait eu sur ces
dées ; à droite et à gauche, par une étendue de côtés dix coudées couvertes, et cinq privées de
quinze coudées. Dans cet espace, est dressé couvertures. Aussi, autant que je puis en juge ,

l'autel des holocaustes, entre la porte du parvis le but de ces mots Une coudée d'un côté, et
: «

et en avant de l'entrée du tabernacle : et entre « une coudée de l'autre, provenant du surplus

l'autel et l'entrée du tabernacle, est le bassin d'ai- « de la longueur des tapis du tabernacle, » est
rain, où les mains et les
les prêtres se lavaient moins de nous apprendre qu'il y avait dix cou-
pieds. mesures avec soin, peut-
En prenant les dées de part el d'autre, en effet il y en avait cinq^
être, trouvera-t-on quelque obliquité dans cescô- que de nousmontrer cette longueur de deux cou-
tésoù se trouvent trois colonnes, etqueles Grecs dées comme des tapis de poils par rapport aux
désignent par le terme uÀayi'a; alors ce ne se- rideaux une coudée de chaque tapisallaitdu côté
:
468 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

de l'Orient ; pour le cùté de l'Occi-


restait l'autre était suspendu à cinq colonnes, et teint lui aussi
dent, et de celte manière une coudée couvrait de (]uatre couleurs; en commandant de le faire.
la partie oblique du tabernacle. De là ces mots : Dieu le désigna par un mot particulier, adduc-
« afin de couvrir de part et d'autre, » car au dé- torium; c'est, je crois, parce qu'il était mobile,
faut de ces cinq coudées, le tout n'a pas été et fermait ou ouvrait l'entrée, selon qu'il était
couvert. ramené ou poussé en avant. Au-delà de ce voile,
18. Récapitulation. — C'est avoir assez discuté, on se trouvait dans le milieu du tabernacle, en-
pour comprendre tout ce qui paraissait obscur tre le voile (|ui vient d'être cité et un autre voile
dans rétablissement du iabernacle essayons ;
plus intérieur, teint également de (pialre cou-
maintenant, s'il est possible, de faire voir en peu leurs, qui était suspendu à quatre colonnes et for-
de mots le résultat de cette discussion. On entrait mait la séparation' entre le Saint et le Saint des
donc du côté de l'Occident, et la première porte saints. Dans cet espace iidermédiaire limité par
d'entrée était celle du parvis, large de vingl cou- les deux voiles, était au nord la tabled'or, qui por-
dées ornée de quatre colonnes à ces colonnes
et ;
tait les pains de proposition et en face, ; du côté du
était suspendu un voile de vingt coudées de large midi, le chandelier d'or à sept branches. Les prê-
et de cinq coudées de haut, teint des quatre cou- tresdu second ordre pouvaient pénétrer jusquelà.
leurs souvent mentionnées et brodé à l'aiguille. 20. Suite. — L'intérieur, c'est-à-dire le Saint
En entrant par cette porte, on pénétrait dans le des Saints, au-delà du voile que snppoi'taient
parvis, dont les côtés, à droite et à gauche, se quatre colonnes, renfermait l'arche du Témoi-
prolongeaient à l'intérieur sur une longueur de gnage couverte d'or. L'arche elle-même contenait
qninze coudées, où se dressaient trois colonnes: les tables de pierre de la Loi, la verge d'Araon et
on avait devant soi l'eidrée du tabernacle placée un vase d'or rempli de manne. Au dessus de l'ar-
vis-à-vis de la porte du parvis, qui occupait le che étaient le propitiatoire d'or que couvraient de
milieu du côté par où l'on entrait. Ce parvis me- leurs ailes, deux chérubins tournées l'un vers l'au-
surait donc plus de largeur que de longueur. Car tre en même temps vers le propitiatoire. Devant
il n'avait guère que quinze coudées depuis la porte l'arche, c'est-à-dire, entre l'arche et le voile était

jusqu'à l'entrée du tabernacle intérieur; quanta dressé l'autel de l'encens: tantôt l'Ecriture dit

sa largeur, elle était de vingt coudées à la porte, qu'il était d'or, tantôt qu'il était revêtu d'or; il est

et de trente coudées à l'entrée. On comprend dès probable (ju'en le disant fait d'une matière aussi
lors que les deux côtés, à droite et à gauche, for- précieuse, elle voulait simplement dire qu'il était
més de trois colonnes et mesurant quinze coudées, doré. Il n'était permis qu'au grand-Prêtre d'en-
étaient obliques. Dans ce parvis se trouvait l'autel trer tous les jours dans ce Saint desSaints pour
des sacrifices, de forme carrée, ayant cinq coudées y porter l'encens d'y entrer une fois l'année, avec
;

de long, et autant de large. Entre la porte et du sang, pour purifier l'autel et parfois encore, ;

l'autel était un espace libre, pour ceux qui por- quand les péchés du prêtre ou de toute la syna-
taient les sacrifices sur l'autel; plus loin, entre gogue, exigeaient une expiation, suivant ce qui
l'autel et l'entrée du tabernacle, était un endroit est écrit au Lévitique i. C'est ainsi qu'on entrait
creusé pour recevoir les cendres, et ensuite le dans le tabernacle du côté de l'Occident, c'est-

bassin d'airain, où les prêtres se lavaient les à-dire, par la jiorte du parvis, et qu'on parvenait

mains et les pieds, soit avant de servir à l'autel du côté de l'Orient à cette partie intérieure de

dans le parvis, soit avant d'entrer dans l'intérieur l'édifice qui renfermait l'arche du témoignage.
du tabernacle. Or, les rideaux de ce parvis, sur 21. Ce tabernacle intérieur, qui ne commen-
les côtés formés de trois colonnes, étaient de fin çait pas à la porte du parvis, mais à l'entrée dite
lin, et mesuraient quinze coudées en largeur et du tabernacle, et se terminait dans le sens de la
cinq en hauteur. longueur au côté oriental, où était l'arche du té-
19. Suite. —
Du parvis, on entrait donc dans moignage, était fermé par dix rideaux, qui me-
le tabernacle, en laissant derrière soi l'autel et le suraient chacun vingt-huit coudées. Cinq de ces

bassin d'airain. Pour entrer, on soulevait des ri- rideaux occupaient un côté, et cinq occupaient
deaux: ceux-ci, au nombre de dix, cinq d'un l'autre; ils étaient unis entre eux par des cordons

côté et cinq de l'autre se faisant face, ornaient etdes anneaux, et se correspondaient mutuelle-
tout le tabernacle intérieur. Après avoir franchi ment. Aux côtés du nord et du midi, qui étaient
celle entrée, on se trouvait en face du voile, qui ' Lëv. xvr.
I.IVKK II. - OIKSTIONS Sl'K L'p:X()l)K. 'i(l!t

lospliis lorms.s'i'IcN.iii'iil \iii.;l ((iliiimcs; du (-('île lirinarlr n'en mcsmaieut ipiedeuv cent (|ualrc-
lie rOicidcnl. il ,\
cm avait liiiil; mais à l'driciil, \iiipl. Carcliaiiiie rideauavait vingt-huit coudées
il n'y l'ii avait point, il n'j avait ilc ce cùlc que lie long, au lieu (pie les tapis de poils eu avaiem
dos rideaux. Ces rideaux, au iu)nd)re do dix, a- Ireide. Aussi les rideaux qui (levaient faire le
vaient (inalfc cuikIim-s de liantiMU', et toctMaioiit tnur de l'iidéiieur du ime lon-
taliernaclo, sur
tout auloiu' luic Icntuic Ionique de cent (|iialic- gueur de deux cenl (piaire-vingt coudées, on me-
vingt ooudéos. Au uoid et au tnidi, les côU^s.les suraient-ils cent aux côtés les plus étendus du
plus lonijs, il \ avait ccul ('oudr'<"s Ao rideaux, sus- nord eldn midi, clipiai anlc aux côléspliis étroits
pendus à viimt colouiies; aux deux luili'es côtés, de !'( )rient cl île !'( Iccideul ; tandis (pic les tapis de
(|ui avaient moins d'étendue, il y avait qnaiante poils, destinés à fermer l'enceiiitr ilu parvis cxti'-
coudées; à l'Occident, les l'ideaux étaient stis|ieu- rieur, surune longueur de trois ceuts (^oiKh'os,
dus à huit eolomies; mais à l'Oricut, qui n'avait en mesuraient cent, aux côtés les |ilus prol()ng(;s
point de colonnes, les rideaux étalent seulement du nord et du midi, parallèles et égan.x à ceux du
susi)eiulus aux deux colonnes des anjrles, sans tabernacle intérieur; et cinquante aux deux aii-
((u'il y on eût d'intermédiaires: ces dix rideaux tirs côlésde l'Orient et de l'Occident. Il suit de là
étaient tissus de (piairo couleurs. Ce tabernacle que deux coudées, dont un tapis de poils ex-
les
intérieur était enviromié d'un iiarvis; vini^t colon- cédait un rideau en longueur, ne trouvaient
nes s'olevaieid au.Midi,
et vinjitcoloiuiesau Nord. ])as leur emploi aux côtés du nord et du midi,

Ces deux côtés du parvis s'étendaient sur une qui étaient d'égale longueur pour le parvis ext(''-
lonj^uour égale aux côtés du tabernacle intérieur : rieur et l'intérieur du tabernacle, mais aux cô-
car ils avaient également vingt colonnes et me- té'S de rOri(Mit et de l'Occident. Car, avec le parvis
suraient aussi cent coudées. Ducôléde l'Orient, (pii s'étendait à l'eiilour extérieurement, ces C(-)-

dix colonnes, sur une étendue de cinquante cou- lés du tabernacle étaient devenus plus largos.
dées, fermaient l'eucointc du parvis ; ce rang de Mais, à l'Orient, les cin(juante coudées de lapis de
colonnes foi'mait une ligne droite et venait rejoin- poilsétaieiit siispenduesà dix colonnes, disposées
dre losdeux colonnes placées aux angles du taber- en ligue dioile, et l'on obtenait cette longueur,
nacle intérieur, les seules qui fussent de ce côté: moyennant l'une desdeux coudées que chaque
ces deux colonnes faisaient donc partie des dix. tapis avait de surplus, au lieu que les cinquante
Du côté do l'Occident, le parvis en avait égale- c(5udées, destinées à l'Occident, et que complé-
ment dix; mais, commenousTavonsdéjà fait voir, tait coudée disponible, n'étaient point
l'autre

elles n'étaient pas en ligne droite: ellesformaient suspenduesà des colonnes disposées en lignodroi-
une sorte do portique à trois pans (piatrecolonues ;
te. Car il y avait là une sorte do portique à trois

se dressaient à la porte, et trois de chaque côté. pans, qui enfermait, entre quatre colonnes dans
a. Tout le parvis, à l'entour du tabernacle, lesons de la porte et troissurles côtés, cette partie
était formé par des rideaux de fin lin, qui avaient du parvis oùétait l'autel dos sacrifices. Ces cent-

cinq coudées de haut: onze tapis de poils les cou- cinquante coudées ne pouvaient donc en mémo
vraient, cinq luiis ensemble d'un côté, et six de temps comprendre la porte dans leur enceinte,
l'autre. Ia's cinq lapis réunis formaient une lon- mais elles couvraient les côtés obliques, où
gueur de cent-cinquante coudées et les six tapis, ;
étaient trois colonnes sur une longueur de quinze
réunis d'autre part, en formaient cent (|uatre- coudées. Or, les tapis de poils avaient quatre cou-
vingt: car chaque \a\ns avait trente coudées de dées de hauteur et protégeaient lesrideaux do fin
long. Mais, pour rendre les deux côtés égaux, on lindu parvis, dont la hauteur était decinq coudées.

avait plié un tapis sur le devant du tabernacle, '21. Les p(\iux teintesen rouge venaient ensuite
c'est-à-dire, à l'Orient; et caché, la moitié d'un sur les tapis de poils. Au-dessus, je veux dire
tapis sur le dei-rière du tabernacle, c'est-à-dire, du côté du toit, des peaux d'hvacinthe cou-
à l'Occident : de cette sorte, on avait retranché vraient îo tabernacle en forme de voûte : cou-
trente coudées, longueur égale à colle d'un tapis, vraient-elles et le parvis et l'espace enfermé ?Kien
et d'un côté comme de l'autre, il ne restait plus ne le fait voir mais il est
; très-probable que les
que cent-cinquante coudées. Los tapis de poils, intervalles compris entre les colonnes intérieures
qui fermaient l'enceinte du parvis, étaient donc et les colonnes extérieures étaient à ciel ouvert,
tendus sur une longueur de ti'ois cent coudées, surtout du côté de l'Occident, où était l'autel des
tandis que les dix rideaux de l'intérieur du ta- holocaustes.

S. AuG. — ToM. IV. 36


LIVRE TROISIÈME

QUESTIONS SUR LE LÉVITIQUE

Première mESTiON'(Lév.v,l-) Del'ubligatiinide II. (Ib. V, 2-6. ) Lois touchant lesacrifice pour

(Icnoncenmparjure. — un houiine pèche, pur-


^i Si le délit. — Après avoir signalé le péché de ce-
« ce qu'il a entendu quelqu'un faire un serment, et lui qui ne dénonce pasun parjure. Dieu n'ordon-
« qu'en ayant éléténioin, pour l'avoir \u, ou pour ne aucun mais il
sacrifice |)Our son expiation ;

« en être assuré, il ne l'a pas dénoncé, et il est ajoute Quiconque touche une chose impure,
: «

« lui-même coupable dépêché. » Cela veut dire :


« soit un cadavre, soit un animal impur pris
« par une bête, soit le corps mort de quelque ani-
« Il est certainement coupable d'a\oir fïardé le
« silence. » La particuleff, est une addition fami-
« mal impur dont le cadavre est un objet abo-

lière à l'Ecriture. Mais comme ce sens lui-même « minable et impur, ou qui touche quelque
offre un côtéobscur, semble nécessaire de l'ex-
il
« chose d'un homme qui soit impur, ou en-
pliquer. Ce passage parait signifier qu'im hom-
« fin quelque autre objet impur dont le con-
me est coupable quand il entend quelqu'un prê- « tact souille et s'il ignore ta faute mais
,

ter un faux serinent, et qu'en ayant acquis la « qu'il la connaisse ensuite, et devienne cou-
certitude il ne dit rien. Or, il en a la certitude, « pable. » Ici encore point de sacrifice prescrit
s'il a été témoin de la chose jurée, soit pour pour ce genre de péché mais nous lisons plus
;

pour en avoir eu l'assurance c'est-à- loin « Uiiiconque, par une parole précise, aura
avoir vu , soit

pour en avoir eu connaif sauce de quelque « fait serment de mal faire on de bien faire,
dire
« selon lout ce qui aura été précisé dans
manière, qu'il ait vu de ses propres yeux, ou que le ser-

celui qui a fait le serment s'en soit ouvert à lui : «ment, s'il l'ignore etqu'il le reconnaisse ensuite,
« et pèche en l'mi de ces points, puis fasse
car il a pu ainsi en acquérir la certitude. Mais
« contre lui l'aveu du pi'ché dont il s'est rendu
entre la crainte de commettre ce péché, et la
crainte de dénoncer ses semblables, il existe « coupable. » Tout cela se suit dausle texte sans

d'ordinaire une violente tentation. Car nos con- qu'il soit fait mention de sacrifice ;
puis vien-
seils ou notre défense peuvent détouiiier d'un nent les prescriptions suivantes : « Il offrira, pour
si grand crime un homme prêt à se parjurer ; «le délitqu'ila commis envers le Seigneur, pour
mais s'il refuse de nous écouter, et qu'il prête « le péché dont il s'est rendu coupable, une jeu-
un faux serment sur un ol)jet connu de nous, « ne brebis femelle prise parmi les brebis, ou une
laul-il révéler sa faute, même dans le cas où celte « chèvre prise parmiles chèvres, pourson péché,

révélation l'exposerait à la inoi't ? Cette ques- « pom* son péché, et son péché
et le prêtre priera

tion est d'une extrême gravité. Toutefois, comme « lui sera remis. » Pourquoi doncaucun sacrifice

il formellement à ([ui doit se


n'est pas dit faire n'est-il commandé, soit pour le silence gardé à

cette dénonciation, si c'e.U au juge, ou si c'est l'égard d'un parjure, soit pour la souillure contra-
au prêtre ou à quelqu'un qui non seulement n'a ctée au contact d'un catlavreou d'un objet impiu",
point le pouvoir de le poursuivre et de l'envoyer tandis (pie Dieu ordonne l'offrande d'une jeune
au supplice, mais peut même prier en sa faveur, brebis ou d'une chèvre pour lepéchéde celui qui
il me semble que le ilênoncialeur est absous de l'ait un faux sermenl sans le savoir? Ne faut il pas

tout péché, s'il révèle ce qu'il sait à ceux <|ui admettre que ce sacrifice est obligatoire dans tous
peuvent être utiles plutôt que nuisibles au par- les cas émimérés précédemment ? Alors, avant

jure, soit en le ramenant de son erreur, soit en de faire connaître par ipiel sacrifice ces fautes
apaisantla colère de Dieu à son égard, dèslorsqu'il peuvent être expiées le législateur a voulu les
aura lui-même recoursauremèdede la confession. indiquer loules. Mais dans ri-miiuéiation de ces
LIYIIE III. — UI'KSTIONS SIU I,K LÉMTIQIIE. ff

divers pochés, se IroiiNcnl (|ii('l(|ii('S olisciirili^s, « elii' (li)ul il s'esl rendu eoui»able," prinjua pec-
(|ui provioiinoiil ili' do ciMlaiiics expres-
ri'iii|il(ii riirii au lieu de (IuikI pecravit, c'est une locution
sions, des siiivatiles, par exemple nidrliciiiiiim :
pi(ipr<' à l'Kerilure. Elle ajoute : >i roulre lui. n

jumottonim, le'eada\i'e desaniiMaux. [.a [)lii|iaii Qu<' si^nilieul ces [laioles, si ce n'est ipie le cou-
de nos inlerprMes tiadiiisenl le iikiI jjrec htwï; pable s'esl levé contre son piopre péché, c'esl-
|»ar le mol lalin jitiuriilti celle dernière ex- ;
à-dire (pi'ill'a accusé en eiiraisaiil l'aveu « Et '!

pression d{''sij;rie ordinairemeni dans noire lan- « il offrira pour le délit dont il s'esl ren(hi cou-
gue les tinimaux dont le travail vient en aide à <. pable devant le Seigneur, poui' lepéchérprila
riioninie, principalement les hiMes de eliai-ge, < comnns, ((»«' /VH/i('/);r/>/.s- femelle prise ptirmi les
comme les clie\an\, les ânes, les mulets, lesclia- « Itrebis. ».C'esli)ar im lour ilelau;;a.ic(pii luiesl

ineaux, et autres animaux sendjiables tandis ;


propre ((ue le texte sacré qiialilie de femelle une
(pie le sens du mol /.-hr, ;>, 'lii'is le j;rec, une jeiiiie /))r/)/,s-cunnne si elle pouvait ne pas l'être ;

extension si lai'jio, (pi'il s'appli(pieà tous les ani- et une chèvre parmi les chèvres, et une
dit

maux, ou du moins à |)res(pie tous. Aussi, a-t- jeune brebis, prise parmi les brebis, conuuesi ime
on employé un nouveau j^enre de location, et jeune berhis et une jeune chèvre pouvaient être
lai! une sorte de pléonasme, quand ou a traduit prises ailleurs que dans un troupeau île leur es-

du grec le mot impurs pour en (pialilier le mot pèce. .Maintenant il n'est pas insignilianl, ni même
Uû'mjtimenta car parmi les animaux que désigne
;
sansimporlancedesavoir poiu'quoi l'Ecriture ré-
l'expression kzvjt, il y en a qui sont purs ;
pète souvent cette formule « Si aprèscela il con- :

au lieu que ceux que nous désignons sous le nom " nait, eleommel le délit ; « il semblerait (pie le

de jiiiiu'utii sont tous d'après la distinction de la délit commence à exister lorS(iu'ou eu a connais-
Loi classés parmi les animaux impurs. sance.Cela ne signifierait-il pas pluti'it qu'il n'est

III. ( ll>. V, i-(i.) Diffiniltcs littérales sur le possible de salislaire que pour un délit (pie l'on
>«(''»((• sujet. — Le texte ])orle : « Quiconque, couuait? Mais l'Ecrilure nedit pas: Siaprêscela
« par une parole précise (dislinguens labiis) aura il L'omiaît sa faute et s'en répent. Quel est donc
« juré de l'aire quehpie chose de hou ou de mau- le sens de ces mots : « Si après cela il comiail,
« vais. » Que signilie encore celle expression :
« et commet le délit, » sinon (pie la faute a sui-

(Ustitigiiensl Car elle est fréquemment employée vi la connaissance en sorte que si l'on a fait sci-
;

dans l'Ecriture. Ainsi dans ce passage ; « J'ac- emment ce qui n'était pas à faire, l'expiation

« coinpliraimes V(eux([ue mes lèvres ontl'ormu- est une suite nécessaire du délit '/Mais le langa-
« lés avec précision '; » et dans Ezechiel: «Lors- ge qui précède n'est pas celui-là. Dieu ne sem-
« que je dirai au méchant Tu mourias si tu : ;
ble y avoir en vue que les péchés commis par
« n'as pas dit aver iiréeision et parlé -, » et ail- ignorance , et par là même conire le gré de la

leurs encore : « Si quelque jeune fille, établie volonté. Alors on peut croire, que par un tour
« dans la maison de son père, fait un vœu, for- de langage à part, cette expression deliquerit,
« mulanl son dessein avec précision contre sa commettre un délit, signifie, savoir que c'est un
« propre vie-*. » La distinction, (listiiujuere, dont délit. Ou bien encore, suivant un usage fré-

il est parlé ici, serait donc unesoiie de délini- quent dans l'Ecrilure, le texte n'aurail-ilpas in-

tion par laquelle on distingue une chose des terverlidans ce passage ce qu'il rapporte avec un
autres qui ne peuvent être exprimées par un seul ordre logi(pie eu d'autres passages semblables?
mot. Ce passage signitierait par conséipient : Ailleurs en effet nous lisons souvent : « lia com-
« Celui qui aura juré, en définissant son dessein «mis le délit et l'a connu
on n'a donc fait ici, ;
>>

« de mal faire ou de bien faire, selon tout ce qui comme nous l'avons remarqué, que changer
« aura été délini dans le serment, s'il l'ignore, » l'ordre, l'on a dit ; « // (/ connu, » avant « // a
c'est-à-dire s'il jure de faire une chose sans sa- commis le délit. » Rétabli dans l'ordre qui lui con-
voir si elle doit s'accomplir oui ou non « et ;
viciil, le texte pourrait se lire ainsi qu'il suit:
« qu'il le reconnaisse et pèche en I'lui tie ces « Quicon(pie touche une chose im[)ure, d'un soit

« points, » soit pour avoir jurésans connaissance, « cadavre d'un animal impur pris parune bête
soit

soit pour avoir accompli sou serment, ayant « soit le corps mort dequelque animai impur dont

connu ensuite qu'il ne devait ni le faire ni le a Icc.idavre est un objet abominable et impur; ou
mettre à exécution ; « puis, fasse l'aveu du^ pé- « qui touche quelque chose d'un homme qui soit
'
Ps. Lxv, 13, 14. - ' F-ze. m, 18. — 'Nomb. x.v.\-. 4.
« impur, ou enfin quelque aulre objet impur
472 QUESTIONS SUR L'HEPTATEUQUE.

« dont le contact souille, et si dans rii;iio- « délit un bélier sans tache pris d'entre les bre-
« rance il commet cette faute, et le reconnaît « bis et acheté à prix d'argent; et le prêtre prie-
« par la suite. » « ra pour à cause de l'ignorance dans la-
lui,

IV. ( Ib. V, 1 .) Offrande du pniirre (hiDsIe sacri- « quelle tombé, sans le savoir, et elle lui
il est

fice pour le délit. —


en son « Mais s'il n'est pas « sera pardonnée car il a commis un délit devant :

« pouvoii' d'offrir une


au Sei- brebis, il oiTrira « le Seigneur. Abstraction faite d'un nombre
>-

« gneur, pour le péché dont il s'est rendu coupa- peu ordinaire de locutions qui ne doivent plus
« ble,deux tourterelles ou deux petits de colom- rien avoir de nouveau pour nous en laison de
" bes, l'un pour le péché, et l'autre en holau- leur rép('lition fréquente, ce passage reste encore
« causle. " Ce texte éclaircit évidemment la plein d'obscurité: comment en effet mettre une
question qui nous embarrassait un peu plus différence entre ce genre de délit et ceux que
haut. Car de ces mots « l'un pour le péché, et l'Ecritm-e comprend un peu plus haut dans
« l'autre en holocauste, » il senii)le résulter que une prescription générale Il semble rationnel ':'

l'oblation du sacrifice pour le péché était insépa- que des péchés du même genre exigent pour
rable de l'holocauste. De plus lorsque précé- leur expiation des sacrifices d'un genre sembla-
demment Dieu donne à part les lois rel-itives ble. Or, le péché dont il s'agit dans le texte que je
aux holocaustes, il ne parle point de deux tourte- viens de citer, ne constitue pas une espèce à part ;

relles mais d'une seule ici au contraire, il fait '


; mais il rentre dans la loi générale portée précé-
mention de deux, parce que l'on n'offrait point demment, et suivant la([uelle le prêtre doit of-
de sacrifice pour le péché sans y joindre l'holo- frir un veau pour son péché, la synagogue en-

causte. D'après ces paroles que nous lisons « Il : tière un veau également, le prince un chevreau,
«mettra sur l'holocauste 2, il n'est pas douteux >,
et toute âme, autrement tout homme en parti-

non plus que l'holocauste était offert d'abord et culier, une chèvre, ou, s'il le préfère, une brebis,
qu'on ajoulaiU'autre victime par-dessus; mais en pourvu que la victime soit femelle i. L'Ecriture
parlant ici de l'olfraude des oiseaux, Dieu or- signale ensuite certaines espèces particulières de
donnequel'un soit d'abordimmolé pour le péché, péchés, et dit en propres teruTes ce qu'il tant of-

et l'autre en holocauste. frir poiu- leur expiation; ainsi entendre un par-


V. ( Ib. V, lo.) L' mot âme suniniiime du jure et ne pas le dénoncer, toiu'her un cadavre

mot homme. — « une âme ig:nore paroul)li »


Si ; et une chose impure, faire un faux serment par
c'est-à-dire, s'il arrive par suite d'un oubli que ignorance, sont des péchés à part; pour les ex-
quelqu'un ignore; le mot eum qu'euiploie le la- pier, il est prescrit d'offrir ou une jeune brebis,
anima xi lutuerit eum, se rapporte alwmme.
tin, une chèvre, ou une paire de tourterelles, ou deux
Ame et Iiomme sont ici synonymes. petits de colombes, ou entin la dixième partie
VI. ( lh.\,io,l6.)Loi relative au sacrifice pour d'un éphi de fleur de farine; quant à celui qui a
le péché d'i(inorancedansle.'<clioses saintes. — « Et péché en s'emparant par ignorance de ce qui ap-
« si cet homme pèche sans le vouloir contre les partenait aux choses saintes, il est tenu d'olfrir
« choses saintes du Seigneur. » On ne voit pas un bélier, de restituer la chose due et d'y ajouter
bien d'abord en quoi consiste cette espèce de un cinquième en plus 2. Et ici, sans avoir signalé
péché ; mais la suite le l'ait voir, quand il est dit, une espèce particulière de péché. Dieu dit d'une
qu'après avoir offert un bélier en sacrifice, le manière générale: « Quiconque péchera, et vio-
coupable a restituera et ajoutera un ciuquièuie « lera quelqu'un de tous les commandements du

« en sus. » On voiten effet, dans ce passage, ([iie '< Seigneur, eu faisant quelque chose qu'il a dé-
le péché d'oubli relatif aux choses saintes con- « fendu de faire, la prescription

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