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HISTOIRE GÉNÉRALE

DES

AUTEURS SACRÉS
ET ECCLÉSIASTIQUES.
BEAUGENCY. - IMPRIMEniE DE F. RENOU.
HISTOIRE GÉNÉRALE
DES

AUTEURS SACRÉS
ET ECCLÉSIASTIQUES
QUI CONTIENT

LE CATALOGUE, LA CHITIQDE, LE JUGEMENT, LA CHRONOLOGIE, L'ANALYSE


LF.l-n VIE,

ET LE DÉNOMBREMENT DES DIFFÉRENTES ÉDITIONS DE LEURS OUVRAGES ;

CE qu'ils RENFERMENT DE PLUS INTÉRESSANT Sl'U LE DOGME, SUR LA MORALE ET SUR LA DISCIPLINE DE L'ÉGLISE ;

L'HISTOIRE DES CONCILES TANT GÉNÉRAUX QUE PARTICULIERS, ET LES ACTES CHOISIS DES MARTYRS,

PAR LE R. P. DOM REMY CEILLiER


Bénédictin de la Congrégation de Saint-Vannes et de Saint-Hydulplie, Goadjuteur de Flavigny.

NOUVELLE ÉDITION
SOIGNEUSEMENT REVUE, CORRIGÉE, COMPLÉTÉE ET TERMINÉE PAR UNE TABLE GÉNÉRALE DES MATIÈRES,

PAR L'ABBÉ BAUZON, ANCIEN DIRECTEUR DE GRAND SÉMINAIRE,


DÉDIÉE
*

AU CLERGÉ CATHOLIQUE FRANÇAIS,


HONORÉE DES SUFFRAGES DE PLUSIEURS ÉVÊQUES,

Des eacoiitajenienls de plusieurs Vicaires Oéiéraux, Ditecleors de Séminaires et d'un grand mmlre de personnajes dislinjuK

de la France el des pajs élranjers.

TOME ONZIÈME

PAEIS
CHEZ LOUIS VIVES, LIBRAIRE-ÉDITEUR
5, RUE DELAiMBBE, 5.

1862.
m 1

5 9-9Ô
6 ^^33
TABLE
DES CUAPITRES. ARTICLES ET PARAGRAPHES
COniTENUS DAIMS CE VOLUME.

Pages P««ei
CHAPITRE I". Saint Fulgencc, évêque d e Ruspe (529), Boniface 11 (531), saint Jean II (533)
et confesseur (Pèro latin, 535) 1 et saint Agapet (536), papes 112
Art. I. Histoire de sa vie 1 CHAP. VIII. Denis surnommé le Petit (écrivain
Art. II. Des écrits de saint Fulgence. ... 10 latin, 510) 121
§ I. Des livres h Mouime 10 CHAP. l.\. Saint Césaire, évêque d'Arles (écri-
§11. Li-vTC contre les Ariens 10 vain latin, 540) 125
§ m. Les trois livres au roi Trasamond. . 19 ART. I. Histoire de sa vie 125
§ IV. Lettre de saint Fulgence sur le vœu Art. II. Des écrits de saint Césaire d'Arles. 128
de continence 25 § I. De ses sermons recueillis dans VAp-
§ v. Lettres à Galla et à Proba 96 pendice de ceux de saint Augustin. . . 128
§ VI. Lettres à Eugippius, à Théodore et à § II. Des homélies de saint Césaire recueil-
Vénantie 29 lies dans la Bibliothèque des Pères et par

§ VII. Livre de la Foi orthodoxe à Donat. 32 Baluze 143


§ VIII. Livre contre le sermon de Fastidio- § ni. De quelques autres homélies que l'on
sus 31 a attribuées à saint Césaire 147
§ Lettres de saint Fulgence à Scarilas
IX. § IV. Des règles de saint Césaire .... 147
et à Ferrand, diacre 35 § V. Des lettres de saint Césaire. . . . 152
§ s. Lettre à Jean et à Vénérius .... 41 § VI. Jugement des écrits de saint Césaire.
§ SI. Lettre des évêques d'Afrique aux Éditions qu'on en a faites 155
moines de Scythie 44 CHAP. X. Saiut Benoît, jiatriarche des moines
§ XII. Lettre au comte Régin 50 d'Occident (écrivain latin, 543) 156
§ sill. Livre de la Trùîif^ à Félix. ... 50 CHAP. XI. Éphrem, patriarche d'Antioche (écri-
§ XIV. Des deux livres de la Rémission des vain syrien vers 546), saint Barsanuphe,
péchés 52 anachorète (écrivain grec vers l'an 550). 171
§ XV. Des trois livres de la Vérité de la CHAP. XII. De Procope de Gaze, Eusthate
Prédestination et de la Grâce de Dieu. 56 (écrivain grec, moine du vi" siècle), un
§ XVI. Du livre de la Foi 63 Commentateur anonyme sur l'Octateuque,
§ XVII. Du livre de la Foi
contre l'évêque Choricius, sophiste de Gaze (écrivains grecs
Pinta, de quelques Homélies 69 vers l'an S46) 176
§ xvm. Des livres contre Fabien. ... 70 CHAP. XIU. Jobius, moine d'Orient (écrivain
§ XII. Des ouvrages de saint Fulgence que grec du VF siècle) 181
nous n'avons plus 74 CHAP. XIV. Cosme d'Egypte, surnommé Indi-
§ XX. Des écrits faussement attribués à copleustes (écrivain grec du vi= siècle) . . 186
saint Fulgence 75 CHAP. XV. Silvérius (538) etVigile (555). papes. 192
§ XXI. Jugement des ouvrages de saint CHAP. XVI. Arator, poëte chrétien (écrivain
Fulgence. Catalogue des éditions qu'on latin, 551) 197
en a faites 75 CHAP. XVU. Pontien, évêque d'Afrique (340),
CHAP. H. Saint Rémi, évèque de Reims et et Aurélien, évêque d'Arles (546) (écrivains
apôtre des Français (écrivain latin, 535). . 76 latins, anonymes grecs du vi» siècle). . . 198
CHAP. III. Eugippius, abbé de Lucullane (avant CHAP. XVllI. Saint Viventiole évêque de ,

l'an 567), et Ferrand, diacre de Carthage Lyon (540) Léon, archevêque de Sens ;
;

(vers 547, écrivains latins) 85 Trojanus, évêque de Saintes saint Nicé- ;

CHAP. IV. Adrien, Laurent de Novarre, Mar- tius, évêque de Trêves (566); et Mappinius,
ceUin, Elpidius, Gilles, Orientius (écrivains évêque de Reims (550, écrivains latins). 201 .

latins du vi» siècle) 95 CHAP. XIX. Cassiodore, chancelier et premier


CHAP. V. Epiphane Scholastique (écrivain la- ministre de Théodoric, roi d'Italie, et en-
tin), Théodore Lecteur (écrivain grec vers suite abbé de Viviers (écrivain latin, 560). 207
l'an 535) 102 Art. I. Histoire de sa vie 207
CHAP. VI. Sévère de Sozopole, Jean de Scy- Art. II. Des écrits de Cassiodore 212
thople, Rasile de Cilicie, Jean d'Egée, Jean § I. Des lettres de Cassiodore 218
Epiphane de Constantinople, Epiphane de § II. De l'Histoire ecclésiastique appelée
Constantinople (écrivains grecs du vi= siè- Tripartite, de la Chronique, du Comput
cle) 106 pascal et de l'Histoire des Golhs. . 220 .

CHAP. VII. Saint Jean I (526), saint Félix IV S III. Du, Commentaire de Cassiodore sur
M TABLE DES CHAPITRES.

les Psaumes 223 tane (591); Gontran, roi de France (593 ;


§ IV. Du Commentaire sur leCantique des écrivains latins) 323
Cantiques attribué à Cassiodore 226 ... CHAP. XXXllI. Pelage I, pape (559) 327
§ V. Du Livre de l'Institution aux lettres CHAP. .XXXIV. Les papes Jean IH (572); Pe-
divines 226 lage II (390) 333
§ VI. Traité des sept arts libéraux, de l'o- CHAP. XXXV. Timothéc, prêtre de Constanti-
raison, de l'orthographe et des tropes nople. .4nonymc sur la réception des ma-
ou des figures 235 nichéens (auteur anonyme qui écrit contre
§\i]. Du
Traité de l'âme 238 les manichéens; écrivains grecs du vi« siè-

§ VIII. Des livres de Cassiodore (jui sont cle) 340


perdus, ou qu'on lui a faussement attri- CHAP. XXXVI. De Chronique d'Édesse et
la

bués 242 d'une autre chronique anonyme, par des


Abt. m. De la doctrine de Cassiodore. . . !43 écrivains grecs du vi« siècle 342
Abt. IV. Jugement des écrits de Cassiodore. CHAP. X.XXVII. Julien, évèque d'Halicar-
Éditions qu'on en a faites 353 nasse Domitien, évoque d'Ancyre (écri-
;

CHAP. .\X. Justinien, empereur (écrivain grec, vains grecs du vi« siècle); Vérécundus, évè-
566) 23* que d'Afrique (écrivain laliu du \l' siècle);
CHAP. .\XI. Dacius,évoque de .Milan; Justi- Paul le Silentiaire Eustralius, prêtre de
;

nien et Juste, évéques d'Espagne Aprigius, ;


Constantinople (écrivains grecs, même siè-
évèque de Badajoz ( écrivains latins du cle). Cogitosus (écrivain latin, même siècle). 344
VI» siècle); Arétas, évèque de Césarée Aga- ; CHAP. XXXVIII. Agnellus (vers 556), Gordien,
pet, diacre do Coustantinople; Constantin Simplice (570) et Colomba (598, écrivains
le diacre (tous écrivains grecs vers l'an latins) 349
535) 264 CHAP. XXXIX. Saint Martin de Dume, archevê-
CHAP. .\.\II. Zacharie, évèque de Mitilène que de Brague (écrivain latin, vers 580). . 350
(après l'an 536); Théodore et Cyrille de Scy- CHAP. XL. Eutychius Jean le Scholas-
(582) et
tople; Timolhéc, prêtre de Jérusalem; Eu- tiquc (575), patriarches de Constantinople
sèbe, patriarche d'Alexandrie (écrivains (écrivains grecs) 352
grecs du vi' siècle) 270 CHAP. XLI. Grégoire (593) et saint Anastase
CHAP. X.MII. Saint Crégentius, archevêque de (598), patriarches d'Antioche (écrivains
Taphar Nouuosus et Eutychieu (écri-
(553) ; grecs) 856
vains grecs du vi« siècle) 279 CHAP. XLII, Saint Grégoire, évèque de Tours
CHAP. XXIV. Junilius, évèque d'Afrique (530) ;
(Père latin, 595) 365
Primase, évèque d'Adrumète (553); Bellator Art. I. Histoire de sa vie 365
efMucien (vers le même temps, écrivains Art. 11. Des écrits de saint Grégoire de Tours. 367

latins) 281 §1. L'Histoire ecclésiastique des Français. 367


CHAP. XXV. Facundus, évèque d'Uermiane § II. Livre de la Gloire des Martyrs. . . 372
(547), et Rustique, diacre de Rome (549, § III. Livre dii Martyr, des Miracles et de
écrivains latins) 285 la Gloire de saint Julien 374
CHAP. XXVI.VictordeTunones (566); Libéral, § IV. Livre de la Gloire des Confesseurs. . 375
diacre de Carthage (vers 556) ; Victor de § V.Des Miracles de saint Martin .377 . .

Capoue (550, écrivains latins) 302 § VI. les T'ies des Pères 379
CHAP. XXVII. Saint Fortunat Eusèbe, (576); § VII. Des Commentnires sur les Psaumes,
évèque d'Antibes (avant 573): saint Ger- des Miracles de saint Ayuiré, des Actes
main, évèque de Paris (576);.\lérérius, évè- de saint Julien et-de l'Histoire des sept
que d'Angoulème (vers 570 ; écrivains la- DorniaJit 383
tins) 306 § VIII. Des Vies de saint Uaurille, de saint
CHAP. XXVIII. Saint Fcrréol, évèque d'Uzès ; rnciJ, et de quelques autres écritsattri-
saintDomnole, évêijue du .Mans (57G); saint bués à saint Grégoire de Tours. . 384 , .

Félix,évèque de Nantes (382); Chilpéric, § IX. De quelques ouvrages de saint Gré-


roi de France (écrivains latins du vi' siècle). 312 goire qui sont perdus 385
CHAP. XXl.X. Sainte Radcgoudc, reiuc de Art. m. Doctrine de saint Grégoire de Tours 385
France (587), et sainte Césarie, abbesse de Abt. IV. Jugement des écrits de saint Gré-
Saint-Jean d'Arles (vi« siècle écrivains la- ; poire de Tour» 395
lins) ai5 CHAP. XLIII. Marins, évèque d'Avcnches (596);
CHAP. XXX, Saint Gildas, abbé deRuis; saint Tétérius, clerc de l'église d'Auxcrre ; Uoté-
Frédolin, abbé de Sainl-llilaire, à Poitiers rius, historien (écrivains latins, vers le
(écrivains latins du vi« siècle) 318 même temps) 399
CHAP. .\XXI. Jauuarin, moine de Saint-Auré- CHAP. XLIV. Dyname, Patrice (écrivain latin,
lien d'Arles (après l'an 553) ; saint Prétex- 601). , 400
tât,évèque de Rouen (58G); salut Véran, CHAP. XLV. Saint Fortunat, évèque de Poi-
évèque de Cavaillon (après l'an 389); Aut- tiers (écrivain laliu, vers 609); Baudonivie,
monde. évèque de Toul (à la fin du vi' siè- religieuse de Poitiers (vers le même temps). 402
cle; écrivains laliiis) 321 CHAP. XLVI. Evagre d'Epiphanie, historien
CHAP. XXXII. Saint Aunaire, évèque d'Auxcrrc ecclésiastique (écrivain grec, après l'an 593),
Etienne, prêtre d'Auxerre; Si-dalus,
(586); Jean d'Asie ou d'Éphèse (écrivain grec,
«vêquc de Béliers; saint Yrieix, abbé d'A- vers le même tempç). 415
TABLE DES en APURES. VII

CHAP. XLVII. Saint Léandre, évÉque de Se- l'an CIÎJ); saint Bcrtchran, évêquo du Mans
ville (éoriTiiin latin, fi03); Jean, abbiS de (écrivain lutin,aprèa l'au 029); saint l'ro-
Biclnr (écrivain latin, 590) 422 tade, do licsançon (écrivain latin, C2S);
CHAP. XLYIII. Jean le Jeûneur, patriarche de saint Kusiase, abbé de Liiseu (écrivain la-
Constantinuple (écrivain grec, tiO^); Lici- tin, G2.'i); Luculeutius (temps incertain,
nien, évCque de Cartbagcnc (écrivain la- écrivain latin) , . • . 630
tin, 595); Sévère, évéque de Malaga (écri- CHAP. LV. Marc (écrivain latin, 012); Sébas-
vain latin, vers le mémo temps) . . . . 420 tien et Siniplice, disciples de saint Benoît;
CHAP. XLIX. Saint Grégoire le Grand, pape et Eutrope, évéque de Valence, et Maxime,
docteur de l'Église (Père latin, 601). . . 429 évù([ne de Saragosse (tous écrivains latins
Abt. I. Histoire de sa vie 429 au coinnicncenient du vii" siècle). .634 . .

Art. II. Des écrits de saint Grégoire. . . . 441 CHAP. LVl. Marc l'Ermite (écrivain grec, épo-
§ I. De ses livres de Morale sur Job. . , W que incertaine, peut-être au commence-
§ II. Des homélies sw)- le prophète Ézéchiel. 452 ment du v» siècle Galland le place en390).
; 636
§ III. Des homélies sur les évangiles . . 458 CHAP. LVII. Audronicien, Lucius Charinus,
§ IV. Du Pastoral de saint Grégoire. . . . 4G2 Méthrodore, Héraclien et Léontius (écri-
§ V. Des Dialogues de saint Grégoire. . . 470 vains grecs, vers le commencement du
Art. m. Des lettres de saint Grégoire. . . . 479 vii« siècle) C43
§1. Lettres du premier livre 479 CHAP. LVlll. Les
papes Boniface IV (614),
§ II. Livre ii. Des lettresde saint Grégoire. 486 Deusdedit (616), Boniface V (625), Hono-
§ m. Livre m. — — 490 rius (C28), Jean IV (642) 645
§ IV. Livre iv. — — 494 CHAP. LIX. Jean Philoponus (écrivain grec,
§ V. Livre V. — — 499 610), Tbéodose, Conon, Eugène Thémistius,
§ VI. Livre vi. — — 503 Théodore, Nicias, Léontius et Georges Pi-
§ vu. Livre VII. — — 506 sidès (écrivains grecs, vers le même temps). 650
§ VIII. Livre viil. — — 509 CHAP. LX. Hésychius, prêtre de Jérusalem
'§ IX. Livre ix. — — 513 (écrivain grec, en 513 d'après Galland), et
§ X. Livre x. — — 518 Hésychius, prêtre de Constantinople (écri-
§ XI. Livre XI. — — 520 vain grec, versle même temps, peut-êtreen
§ XII. Livre XII. — — 528 513 d'après Galland 654
§ XIII. Livre XIII. — — 529 CHAP. LXI. Léonce, évêque de Naples en Cy-
§ XIV. Livre xiv. — — 535 près (écrivain grec, entre 602 et 616). 658 . .

§ XV. Appendice aux lettres de saint Gré- CHAP. LXII. Léonce de Bysance, avocat, et
goire 535 depuis moine (écrivain grec, 610). 666 . . .

Art. iv. Du Sacramentaire


de saint Gre'goire CHAP. LXllI. Nicéphore,maître d'Antioche (écri-
et des autres écrits qui regardent la Celé- vain grec, commencement du viin siècle);
bratiôn des offices divins 537 saint Siméon Stylite le Jeune (597, écrivain
Art. v. Des Commentaires sur le premier grec); Paul, diacre de Mérida (écrivain la-
livre des Rois, sur le Cantique des Canti- tin, 610) 673
ques, sur la Pénitence, et de la Concor- CHAP. LXIV. Saint Jean Climaque, abbé du
dance de l'Écriture 545 Mont-Sinaï (écrivain grec, 605); Jean, abbé
Art. Extraits des écrits de saint Gré-
VI. de Raïthe (écrivain grec, après 605). . . 676
joire, par Patérius et par Alulfe. . .651 . CHAP. LXV. Agathias, poète et historien (écri-
Art. vil. Doctrine de saint Grégoire. . .552 . vain grec, 590): Auremond, abbé du Maire
Art. viii._ Jugement des écrits de saint Gré- (écrivain latin, 625); Sonnace, évêque de
goire. Éditions qu'on en a faites. , .583 . Reims Florent prêtre de l'église de Trois-
;

CHAP. L. Saint Euloge, patriarche d'Alexan- Châteaux (écrivains latins, après 625). 692
drie (608); Saint Grégoire, évêque d'Agri- CHAP. LXVI. Dorothée, archimandrite Hypéré- :

gente (vers 598; écrivains grecs) 587 .... chius, prêtre; Antioehus, moine de Saint-
CHAP. LI. Anastase Sinaïte, prêtre et moine Sabas (écrivains grecs, au commencement
(écrivain grec, vers 680) 594 du vil" siècle) 695
CHAP. LU. Fauste, moine de Glanfeuil (écri- CHAP. LXVII. Modeste, patriarche de Jérusa-
vain latin, VIF siècle) 610 lem (écrivain grec, 629); Georges d'AIexan-
CHAP. LUI. Saint Colomban, abbé de Luxeuil drie (630); Jean, moine d'Antioche (vers le
(écrivain latin, 615) 612 même temps; écrivains grecs); Aransius,
Art. I. Sa vie 612 Helladius, Juste, Nonnitus et Conantius,
Art. 11. Écrits de saint Colomban 617 évêques d'Espagne (écrivains latins au
§ i. Règle de saint Colomban 617 commencement du vii« siècle) 698
§ II. Instructions ou discours de saint Co- CHAP. LXVIII. Jean Mosch, abbé (619 ou 620),
lomban 622 et Sophrpne, évêque de Jérusalem (619 ou
g III. Des lettres de saint Colomban. . . 624 744) (écrivains grecs) 700
§ IV. Poésies de saint Colomban . . . . 62T CHAP. LXIX. Saint Isidore, évêque de Séville
§ T. Des ouvrages de saint Colomban qui et docteur de l'Église (écrivain latin, 636). 710
sont perdus 629 CHAP. LXX. Braulion, évêque de Sarragosse
Jugement des écrits de saint Colom-
§ VI. (vers l'an 646); Jean, évêque de la même
ban. Édition? qu'on en a faites. . 629 . . ville; saint évêque de Bourges;
Sulpice,
CHAP. LIV. Varnahaire (écrivain latin, après saint Didier, évêque de Cabors; Vérns,
vni TABLE DES CHAPITRES.
Figt*
Ptgu
éyèqne de Rodez saint Valère, abbé (655;
CHAP. LXXXVI. Conciles du vi« siècle. . . .814
;
Art. Conciles d'Épaone et de Lyon (517). 814
tous écrivaius latins du vii« siècle) . . .728
I.

Art. II.Des conciles de Constanliuople (518),


CHAP. LXXI. Saint Gnl, abbé, (646); Jonas,
de Jérusalem (518), de Tyr (518) et de
abbé d'Elnone; saint Cuméen, abbé en Hi-
beniie; saint Donat, abbé de Besançon; la
Rome (519) glS
Art. Conciles d'Arles (524), de Lérida
III.
Bègle du Maître (deux anonymes; tous
( 524) et de Valence (524)
écrivains latins du vii« siècle) .736 823
Art. IV. Des conciles de Junque (524) et de
CHAP. LXXII. Marculphe, moine (660): saint
Livin (vers l'an 656); Eugène, évêque de Carthagc (525) 828
Art. V. Du concile de Carpentras (527), du
Tolède (657); Apollonius de Novarre (xv« siè-
cle écrivains latins) 739 second d'Orange (529), du troisième de Va-
;

historien (658), et lence (329) et du second de Vaison (529). .


CHAP. LXXIII. Frédiîgaire, 831
ses continuateurs écrivains latins du Art. VI. Concile de Tolède (531) 839
(

vil" siècle) 744 Art. VII. Des conciles de Rome (530, 531). 841
CUAP. LXXIV. Les papes Tbéodore I (649), Art. viii. De la conférence des Catholiques
saint -Martin (655) et Maure, archevêque de avec les Orientaux ou Sévériens, à Constan-
Ravenne (648; écrivains latins) 748 tinople (533; 843
CHAP. LXXV. Saint Éloi,évêque de Noyon Art. IX. Du second concile d'Orléans (533). 847
(659): saint Ouen, évêque de Rouen (683; Art. X. Des conciles de Clermont en Auver-
écrivains latins ) 753 gne (535), et de Carthage (535) 849
CHAP. LXXVI. Saint Maxime, abbé de Chryso- Art. XI. Conciles de Constantinople et de
polis (écrivain grec, 662); Anastase, disciple Jérusalem (536). . . • 851
de saint Maxime (même année) ; Anastase, Art. XII. Troisième concile d'Orléans (538) et
apocrisiaire (666); Théodore et Théodose du concile de Barcelone (540) 856
(vii« siècle ; tous écrivains grecs) 760 .... Art. XIII. Du concile d'Afrique (541) et du
CHAP. LXXVII. Saint Udephonse, archevêque quatrième concile d'Orléans (541). . . .859
de Tolède (667); Quiricius de Barcelone Art. XIV. Des conciles de Constantinople
et Taion de Saragosse (écrivains latins, (54Ti, du cinquième d'Orléans (549); du

Ters le même temps) 773 deuxième de Clermont (549) et concile de


CHAP. LXXVIIl. Saint Priest ou Préjcct, évêque Toul (550) 862
de Clermout (678); saint Léger, évêque Art. XV. Concile de Mopsueste (550), du se-
d'Autun (6"8): saint Arbogaste, évêque de cond concile de Constantinople, cinquième
Strasbourg (678), et Ternacc, évêque de Be- général. Edit de Justinicn contre Origène. . 865
sançon (vers 680 tous écrivains latins).
; 778 . Art. xvi. Conciles de Paris (551), d'Arles (554)
CHAP. LXXIX. Les papes Vitalien (672), saint et de Paris (557); ordonnance de Childebert
Agathon (682), saint Léon II (684), saint (?58): édit de Clotaire (559) 882
Benoit 11 (685) 781 Art. XVII. Conciles de Landaf (560). . . .884
CHAP. LXXX. Saint Siviard, abbé (vers 687, Art. sviii. Concile de- Brague (863). . ..885
écrivain latin): Jean, archevêque de Thes- Art. XIX. Conciles de Saintes (563), de Lyon
saloniquc; Théodore, abbé de Rhaîte ; (566) et de Tours (566) 886
Pierre de Laodicée; Thalassius; l'abbé Art. XX. Conciles de Brague et de Lugo (572) 891
Isaïe: l'abbé Théofride Cosme, moine de :
Art. XXI. Conciles de Paris (573) et de Chft-
Jérusalem Pantaléou, diacre de Constan-
:
lons (579) 892
tinoplc (écrivains grecs du vu* siècle). 786 . . Art. xïu. Conciles de Màcon (581), de Lyon
CHAP. LXXXI. Julien, archevêque de Tolède (583) et de Braine (580) 894
(690); Idalius, évêque de Barcelone (vers le ART. XXIII. Conciles de Valence (584) et de
même temps; écrivains latins) 791 Mâcon (585; 896
CHAP. LXXXII. Théodore, archevêque de Can- Art. XXVI. Conciles d'Auxerre (après 585;, de
torbéry (690, écrivain latin) 796 Clermont (585) et de Constantinople i587). 897
CHAP. LXXXlll. Saint Fructueux, archevêque Art. XXV. Conciles de Tolède(586)et de Nar-
de Brague (666); Adamnan, abbé de Hi (704 bonne (589), de Sauriciac et de Rome (589). 899
ou évêque gaulois (vers le
705); Arculfe, Art. XXVI. Des conciles de Poitiers et de Metz
même abbé de Wire-
temps); Céolfride, au sujet de troubles excités & Sainte-Croix
mouth et de Jarou (716) 799 de Poitiers (590) 905
CHAP. LXXXIV. Saint Adelme évêque de , Art. XXVII. Des conciles de Nanterre (591),
Schirburn (709): Apponius (vu» siècle); Cres- de Saragosse (592), de Tolède (597), et de
conius. évêque d'Afrique (viF siècle; écri- Barcelone (599} 906
vains latins): Démétrius de Cizique; Jean CHAP. LXXXVll. Des conciles du \ii« siècle. . 908
de
Nicée (du vii" siècle; écrivains grecs); Art. Concilesde Rome(OOl), de M'orchester
1.

saint Lucius, archidiacre (vi»ouvii« siècle, (601), de Byzacène (602), de Numidie (602),
écrivain latin) 804 de Cantorbéry (605), de Rome (606), de To-
CHAP, LXXXV. Ursin, abbé de Ligugé; saint lède (610) et d'Égara (614) 908
Ausbert de Rouen; Évance, abbé de Tro- Art. II. Conciles de Paris (615), de Kent
clar; Défenseur, moine de Ligugé (sur la fin (617), de Séville (619) et de Théodosiopo-
du vii° siècle écrivains latins); Denis de
; lis (020) 'Mi
Telmera (écrivain syrien) 811
FIN DE LA TABLE DES C1IAP1TBES.
HISTOIRE GÉNI'RALE
DES

AUTEURS SACRÉS
ET ECCLÉSIASTIQUES.

AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.

[suite du vi" siècle.]

CHAPITRE I.

Saint Fulgence, évêqne de Ruspe et confesseur.

[Père latin, en l'an 533.]

appris par cœur flomère entier et une bonne


CHAPITRE I".
partie de Ménandre. Fulgence prononça en
niSTOIRE DE SA VIE. effet toute sa vie le grec comme s'il eût été
né dans Grèce, gardant exactement les
la
l. Genséiic, roi îles Goths , s'étant em- aspirations et toutes les autres propriétés de
paré de Cartilage, en chassa tous les séna- cette langue. Après cela, elle lui donna des
teurs après les avoir tlépouillés de leurs maîtres pour la langue latine et pour la
biens. Gordien, aïeul de saint Fulgence, fut grammaire , dans lesquelles il fit de grands
de ce nombre. [1 se retira en Italie avec sa progrès.
famille et y mourut quelque temps après. 2. Ses études furent interrompues par le Il opl clinr.
gè dos nlT.iires
Deux de ses fils retournèrent en Afrique soin qu'il fut obligé de prendre de ses af- de su Tainillu.

dans l'espérance de recouvrer la succession faiies domestiques. Mais il se conduisit en


de leur père mais ils ne purent demeurer
; tout suivant les ordres et les avis de sa mère
dans Cartilage où leurs maisons avaient été à laquelle il était parfaitement soumis. Il Cai.. II.

données aux prêtres ariens. Etant toutefois usait de son pouvoir avec bonté, traitant ses
rentrés dans la possession de leurs biens par débiteurs avec douceur et sans les vexer ja-
l'autorité du roi, ils passèrent dans la By- mais. Les reproches qu'on lui en lit ne con-
zacène et s'établirent .'iTélcpte. L'un d'eux, tribuèrent pas peu à lui faire trouver pesant
nommé Claude, épousa Marie-Anne, femme le poids des affaires dont on l'avait chargé ;

chrétienne et d'honneur, dont il eut un iils et, commençant à se dégoûter de la vie du


qu'il nomma Fulgence. C'était en 468. Claude monde, il sentit croître en lui l'amour d'une
ne survécut pas longtemps à la naissance de vie toute opposée à celle du siècle. 11 visi-
ce fils. Marie-Anne, sa mère, chargée seule tait souvent les moines, prenant plaisir dans
de son éducation, lui fît apprendre dès' son leurs conversations et à s'instruire de leurs
bas âge les lettres grecques, afin qu'il pro- observances. Ayant considéré que la retraite
nonçât mieux celte lani;ne, et ne lui permit et l'abstiueuce dans laquelle ils vivaient, les
point de pai 1er, ni de hre eu latin qu'il n'eût mcUaieut à couvert des tentations du siècle,

XI.
,

2 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIOITS.


et qu'ils vivaient ensemble dans une vraie vie retirée et pénitente. Il se jeta aux ge-
charité, il vivement touclié d'embrasser
fut noux de Fauste, lui baisa la main, et, les
le même ëtat, sedistint souvent à lui-même : yeux baissés vers la terre, il lui demanda
« Pourquoi travaillons-nous dans ce siôcle avec beaucoup d'humilité l'entrée du mo-
sans l'espérance des biens futurs? Si nous nastère pour y vivre sous sa discipline. Le
désirons de nous réjouir, quoiqu'il soit beau- saint vieillard, nepouvant se refuser h ses
coup mieux de bien pleurer que de se mal prières, lui accorda sa demande aux condi-
réjouir, les plaisirs de ceux dont la cons- tions de l'éprouver pendant peu de jours,
cience est tranquille en Dieu et qui ne crai- pour savoir si ses actions étaient d'accord
gnent rien que le péché, ne sont-ils pas pré- avec ses paroles. Le bruit de la retraite du
férables? « Sur ces réilexions et sur d'autres jeune homme se répandit bientôt dans sa
très-salutaires, forma le dessein de renon-
il famille et parmi ses amis. Les gens de bien
cer au monde mais il ne s'en ouvrit à per-
; le congratulaient de s'être fait moine. Les

sonne, se contentant de s'exercer dans la méchants que cette retraite couvrait de cou- cap.v,

c.p.iii. maison de sa mère à la retraite, au jeune et fusion, en murmuraient. Mais plusieurs avec
à la prière. 11 rompit insensiblement avec qui il avait lié amilié dès son enfance suivi-
ses anciens amis, diminua du
la quantité rent son exemple et renoncèrent au monde.
boire et du manger qu'on avait coutume de Sa mère fut troublée de sa retraite, parce
lui servir, ne fréquenta plus les bains en ;
qu'elle se reposait sur lui du soin de sa
sorte qu'étant encore laïque, il vivait com- maison, et vint au monastère en criant et se
me un moine. Ceux qui l'avaient coiuiu, ne lamentant comme si son fils eut été
, la i\

sachant point la cause de son changement, veille de sa mort. Quoique pieuse, elle char-

l'attribuèrent à une faiblesse d'esprit. Mais gea d'injures l'évoque Fauste, en lui disant :

Fulgence, en qui l'amour de la vie reli- (iRendez le fils à sa mère et le maître au ser-
gieuse croissait chaque jour, ayant lu un viteur. Les évêques ont toujours comblé les
sermon de saint AugusUn sur le psaume veuves de bienfaits. Pourquoi soull'rez-vous
XXXVI, en fut si touché, qu'il résolut de ren- aujourd'hui que la maison d'une veuve pé-
dre, public son dessein en changeant d'ha- risse par vous? » L'évêque lui représenta
bit, afin qu'il ne fût plus obligé de recevoir avec beaucoup de sagesse, que ce n'élait point
amiablement chez lui ceux avec qui il avait lui quilui avait enlevé son fils, et qu'elle

vécu longtemps d'une manière mondaine. ne devait point trouver mauvais qu'il se fût
3. La plupart des évêques que Gensciric consacré au service de Jésus-Christ il lui ;

avait contraints de soitir de leurs diocèses, refusa même de le voir ce qui lui fit re-
:

Il so rcliro étaient relégués dans les lieux voisins. Ce doubler ses cris et ses larmes. Fulgence qui
dans un mo>
prince en usait ainsi dans l'espérance que, aimait tendrement sa mère et qui l'enten-
souflVant les incommodités de l'exil proche dait g(''mir, en fut sensiblement touché mais ;

du lieu de Icni- demeure, ils en seraient plus élevant son cœur ;\ Dieu il demeura ferme.
tentés de renoncer à la foi catholique. Fauste, Après cette épreuve Fauste l'admit sans
,

l'un de ces évêques bâtit un monastère


, peine dans sa communauté disant à ses re- ,

lap. 1'. dans le lieu de sou exil, où il vivait avec tant ligieux « Ce jeune homme pourra suppor-
:

d'édification qu'il s'attirait le respect de lous ter tous les travaux que \ous lui iuqioserez,
les chrétiens. Fulgence, de qui il était connu, puisqu'il a pu mépriser la douleur de sa
l'alla trouver pour lui ouvrir son cœur. Le mère. » Ses austérités furent incroyables
saint évoque sachant que Fulgence, né de il de vin ni d'huile, mangeant et
n'usait ni
parents nobles et riches, avait été élevé buvant si peu, que son corps en devint tout
dans les délices, le rebuta d'abord, comme desséché et sa peau converle d'ulcères. Mais
s'il ne fût venu dans son monastère que à mcsiu-e que sa chair s'atlaiblissait, son es-
pour tromper par un extérieur de piété les prit prenait de nouvelles forces; et comp- c^p. n,

servitiHU's do Dieu qui y demeuraient. Vous <c tant p(uu- rien tout ce qu'il faisail, il s'élu-

serez, lui dit-il, reçu au nomijre des moines diait à devenir de jour en jour plus parfait.
lorsque, ayant changé votre ancienne habi- Il laissa à sa mère la portion de bien (jui
tude de vivie dans les plaisirs, vous ne se- lui appartenait quoiqu'il eût un frère plus
rez point ollcnsi; à la vue des mets et des jeuiH! que lui nonuni'^ Claude, voulant toute-
vêlemenls les plus vils. » Ce discours ne (it fois (|uo cette portion fut ensuite donnée à ce

qn'augnu'nlcr dans Fulgence le désii' d'une frère, s'il se conduitait bien. Par celte sage
[Vl' SIKCLE.] CnAPITltl': I. — SAIXT FIXGKNCE DE RUSPE.
ilisposilion, il songeait i'i abattro rorjriicil ilc des rois chréliens? Comme ils se préparaient
son jeune frère, afin qiie, s'il ne voulail pas !\ lui répondre, le prêtre, sans leur d(unicr
(•Ire Inmilile par un uinlif de pii'-li", il appi'it I(! liiisir de parler les lit frapper. Alors ,
,

(lu moins à IV'trn i\ cause ilc la siuccssiiin à l'abbé Félix, poussé d'i.n mouvement de
laquelle sa sagesse |)ouvail lui dcuuK!!- lieu charité, dit : « Epargnez mon frère Ful-
de prétendre. gence (pii n'a pas la force de souffrir les
4. Il ne restait plus aucun des obstacles tourments peut-être mourra-t-il entre vos
:

(pie eus à surmonter dans


Fulj,'cnco avait mains; que voire colère se tourne contre
les commeiK'cmeuts de sa conversion, lors- moi qui suis cause de tout, je ne sais que
(]ue, lapersécution s'allumani de nouveau, répondre.» L'arien, étonné de cette charité,
IVhêque Fauste se trouva obligé de changer fit un peu éloigner Fulgence et ordonna à

souvent de demeure pour se cacher. Cela ses gens de frapper rudement Félix. En- cip. u
obligea Fulgencc, de l'avis de Fauste même, suite, il revint à Fulgence, à qui la délica-
de passer à un monastère voisin où il y tesse de tempérament ne permit pas de
avait peu de moines, mais d'une grande soutenir longtemps les coups de bâton.
simpliciti-, et dont l'abbé, nornuK- Félix, était Pour avoir quelque relâche, il s'écria qu'il
son ami dès sa jeunesse. L'abbé le recrut, avait quelque chose à dire. Ou le lui per-
non-seulement avec joie, mais connaissant mit, et alors il commença à raconter l'his-
sa capacité, il voulut lui céder le gouverne- toire de son voyage avec tant d'agrément
ment de sou monastère. Fulgencc s'en ex- que le prêtre arien peusa oublier toute sa
cusa , et après plusieurs contestations, ils cruauté. Mais dans la crainte de paraître
convinrent, du consentement de la commu- vaincu, il ordonna de le frapper une se-
nauté, de le gouverner ensemble. Fulgence conde fois et fortement disant Je pense , :

était chargé particulièrement de l'instruc- qu'il veut me séduire. Enfin, il leur fit raser
tion des frères et des étrangers, Félix, du la tête a l'un après les avoir
et à l'autre, et
temporel et de l'hospitalité mais ils ne fai- ; dépouillés, il les chassa de sa maison. En
que de concert.
saient rien l'un et l'autre passant à leur retour par la plaine où ils
L'incursion des Barbares les ayant peu de avaient été pris, ils retrouvèrent toutes les
temps après obligés de quitter leiu- monas- pièces d'or que l'abbé Féli.x avait jetées.
tère, ils sortirent avec toute leur commu- Us les reçurent comme venant de la main
nauté, et après un assez long voyage dans de Dieu ; en rendirent grâces et s'en
ils lui

les régions inconnues de l'.Afrique, ils s'arrê- retournèrent chez eus, sans s'émouvoir des
tèrent à Sicque, attirés par la fertilité du ignominies qu'ils avaient souffertes pour l'a-
lieu et par de cjnelques fidèles qui
la charité mour de la religion regardant au contraire
;

les avaient re(^ns. Il y avait dans le voisi- la nudité à laquelle on les avait réduits ,

nage un prêtre arien riche barbare de , , comme la marque d'une insigne victoire.
naissance, cruel et très-animé contre les ca- L'évêque qui était à Carthage pour les
tholiques, qui de la desserte
était chai-gé ariens, informé de la cruauté que ce prêtre
d'une paroisse. S'apercevant que le nom de avait exercée contre Fulgence qu'il connais-
Fulgence devenait célèbre dans ces cantons, sait, voulut l'en châtier. Mais Fulgence, loin

il le prit pour un évêque déguisé en moine, d'écouter ceux qui l'excitaient à demander
et craignit qu'il ne ramenât à la foi catho- vengeance, leur répondit cpi'il n'était pas
lique ceux qu'il avait engagés dans l'erreur. permis à un chrétien de la chercher en ce
En efl'et, Fulgence travaillait à réconcilier monde; que Dieu savait de quelle manière
tous ceux qu'il pouvait, en les invitant par il devait défendre ses serviteurs et que ,

de salutaires instructions à se convertir. Le plusieurs seraient scandalisés de voir un


prêtre arien mit donc des sentinelles sur catholique et un moine demander justice à
le chemin pour arrêter Félix et Fulgence. Le un évêque arien,
premier portait quelques pièces d'or pour la 3. Néanmoins pour éviter de nouvelles 11 ff-nde LD

subsistance des frères. Se voyant arrêté, il cruautés de la part des ariens, ils sortirent D^slère.

les jeta où il put, sans que les gardes s'en de cette province, et se retirèrent dans un
aperçussent. Ils les menèrent tous deux liés autre lieu qui n'était pas éloigné de la leur,
au prêlre arien, qui leur demanda d'une aimant mieux avoir les Maures pour voisins
voix clfrayante, pourquoi ils étaient venus que de s'exposer encore à la violence des
secrètement de leur pays, contre le service ariens. Ils y fondèrent un monastère près de
,

IIlSTOmE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


(«p. m. la ville nommde Idicli. Ce fut en cet endroit Fulgence se rendit à un avis si salutaire.
que Fulgencc, lisant dans les Institutions et Mais à la persuasion d'Eulalius, il demeura
les Conférences de Cassieu les vies admira- , quelques mois ù Syi-acuse, retiré d^ns un petit
bles des moines d'Égfvpte, forma le dessein logement, que cet évêque lui donna. Quoi-
d'aller dans leur pays tant pour renoncer, qu'il ne voulut y recevoir que très-peu de

aux fonctions d'abbé, et vivre sous l'obéis- choses pour sa subsistance, il ne laissait pas
sance dans l'humilité, que pour pratiquer les d'y exercer l'hospitalité envers les étran-
loisd'une abstinence plus rigoureuse. Pré- gers, ce qui remplissait Eulalius d'admira-
voyant que si son dessein venait A être connu tion et de joie. Cet exemple lui fut même un
on l'eiupèdicrait de l'exécuter, il alla à Car- motif de devenir de jour en jour plus libéral
thageavec un seul moine, nommé Rédemp- et plus miséricordieux envei-s les pauvres.
tus, qu'il avait choisi pour le compagnon de G. Après que l'hiver fut passé, Fulgcnce |_J'
"""•
son voyage, et s'embarqua pour Alexandrie. traversa par terre la Sicile, pour aller voir
De là il passa avec un vent favorable à Sy- un évêque nommé Rufinien, que la violence
racuse, où il fut bien reçu par l'évêque Eu- de la persécution avait obligé de quitter
lalius, homme de grande vertu, qui avait im l'Afrique pour se retirer dans une petite île
monastère où il passait avec les moines fout où il pratiquait la vie monastique. Le but de c»;.

le temps que ses fonctions lui laissaient lilire. ce voyage était de consulter Rufinien sur
Fendant le repas qu'il donna à Fulgcnce ', celui qu'il avait eu le dessein de faire en
comme on vint à parler des choses de Dieu, Egypte non qu'il eût de la défiance sur
:

comme il était d'usage à la table des évo- l'avis qu 'Eulalius lui avait donné, mais parce

ques, il connut bientôt aux discours de son qu'il s'imaginait que dans les choses dou-

hôte que c'était un homme d'un grand


,
teuses il fallait consulter plusieurs personnes.
savoir , sous l'apparence et l'habit d'un Mais de Rufinien fut le même qpie
le conseil

moine. Il ne voulut pas toutefois lui deman- celui d'Eulalius. Fulgence ne pensa donc
der, en présence des convives qui il était, ,
plus à aller en Egypte. Ayant trouvé l'occa-
ni pourquoi il était venu. Mais après le dîner sion d'aller à Rome par mer, il en profita
il le flt venir, et le pria de lui apporter le li- pour visiter les sépulcres des apôtres. C'était
vre des Institutions et des Conférences, dont vers l'an 500. Ce fut en cette année que le
il avait commencé à dire quelque chose pen- roi Tbéodoric vint dans cette capitale du
dant Fulgence obéit sur le champ,
le repas. monde. Sa présence remplit toute la ville de
instruisit Eulalius du contenu de ces livres. joie. Fulgence fut non-seulement témoin de

L'évêque admirant sa science, voulut savoir la pompeuse réception qu'on fit.^ ce prince,

de lui par quel motif il était venu d'Afrique. il assista encore à la harangue qu'il fit en
Fulgence ne dissimula point que c'était pour présence du sénat et du peuple. Mais toute
.iller vivre dans le désert de la Thébaïde, où il l'impression que ces spectacles firent sur
pùtimilerlesvertusdes moines qui y étaient, son esprit, se réduisit à la réflexion qu'il fit
et mourir au monde. « Vous faites bien, lui sur les degrés de beauté que devait avoir la
dit l'évêque, de chercher la jierfection; mais Jérusalem céleste, puisque la splendeur de
vous saveï aussi qu'il est impossible de plaire Rome terrestre était si grande et sur les de- ;

à Dieu sans la loi. Le pays où vous allez est grés de gloire, dont devaient jouir les saints
séparé par un schisme perfide de la com- qui contemplent la vérité, puisqu'on accor-
munion de saint Pierre. Tous ces moines, dait tant d'honneur en ce monde aux ama-
dont on loue l'abstinence admirable ne , teurs de la vanité.
communiqueront point avec vous dans le sa- 7. Le désir de revoir son monastère lui fit n i

crement de l'autel. Que vous servira-t-il d'af- bientôt quitter Rome; il s'embarqua pour
lliger votre corps par les jeûnes, tandis que l'Afrique par la Sardaigne. Ses frères, en le c.p.

votre Ame qui vaut mieux manquera de con- voyant, ne savaient s'ils devaient ou se plain-
solation spirituelle. Relournez-vous-en, mon dre d'abord de ce qu'il les avait quittés, on
fds, de peur de mettre votre foi en danger. plutôt lui ti'moigner leur joie de son retour.
J'ai eu le même dessein que vous avant d'être Aucun néanmoins n'osa le blùmor de s'être
évoque, mais cette raison m'en a détourné. » retiré; mais tous s'empressèrent de rendre

' tfox sicul moris est in convivio sacerdotum, gnlaris snenlUe loculio sua continua prodidit.
dum de divinis rcbus ortiis est sermo, vintm sin. Vitii Kulgfliit., cap. XII.
vr SIKCLE. CIIAPITIIE 1. — SAINT FULGENGE DE UL'Sl'E.

grâces à Dieu pour f5on retour, el t\ lui donner ville de Huspc était ime de celles que l'on
de grandes marques de charitd. Un nommé n'avait point pourvues d'évôque, parce qu'un
Sylvestre qui était im bon cliri'tion, et l'un diacre nonnné Félix, qui n'avait pas assez
des premiers do la Byzacène, lui oll'rit tiii de mérite pour se faire choisir lui-même,
endroit propre à bâtir nu monasti'^re. Ful- avait trouvé le moyen d'empêcher l'élection
gcnco l'accepta, et il eut la consolation de d'un autre à la faveur de la puissance sécu-
le voir dans peu rempli d'un grand nom])r(î lière. Les plus honnêtes gens de la ville, pé-
de sujets qu'il avait engagés par ses exhor- nétrés de douleur de se voir seuls sans pas-
tations ;\ reuoncei- au siècle. Après les avoir teur, ayant ap|iris que Fulgence était de-
gouvernés pendant quelque temps, il alla se meuré prêtre, s'adressèrent à Victor, primat /

cacher dans une île en un autre monastère de la Byzacène, comme on


menait par or-
le

où il savait que l'on observait avec plus dre du roi à Carthage, et obtinrent permis-
d'exactitude l'ancienne discipline. 11 y vécut sion de faire ordonner Fulgence par les évê-
en simple moine, s'occupant ;ï écrire, parce qnes voisins. Victor consentit même qu'on
qu'il avait la main bonne, et à faire des éven- l'allât surprendre dans sa cellule. Il s'assem-

tails de feuilles de palmier, comme il avait eu bla à cet efî'el une troupe nombreuse qui le
coutume d'en faire dans le monastère où il prit et l'emmena, le conduisant à celui qui
était abbé. Il s'occupait aussi dans sa cellule devait faire l'ordination, en sorte qu'on ne
à la lecture, et voyait fréquemment les reli- le pria pas de recevoir l'épiscopat, on l'y

gieux de la communauté, dont il gagna l'es- contraignit. Le diacre qui avait ambitionné
time et l'amitié. le siège de Ruspe mit une embuscade sur le

8. L'abbé Félix et ses moines ayant ap- chemin par où devait passer Fulgence après
pris le lieu de la retraite de Fulgence, enga- la consécration mais le peuple de cette
;

gèrent Fauste à le revendiquer


l'évoque ville, je ne sais par quelle inspiration du

comme son moine. Fauste menaça d'excom- Saint-Esprit, l'amena par un autre chemin
munication les moines de l'ile où Fulgence que celui où son enuemi l'attendait. Ful-
s'était retiré, s'ils refusaient de le renvoyer; gence fut mis dans la chaire épiscopale,
et il le menaça lui-même d'une semblable célébra le même jour les divins mystères,
peine en cas de désobéissance. Il revint, fut et tout le peuple, après avoir reçu de ses
obligé de reprendre la charge d'abbé, et, mains la communion, se retira avec joie. Le
afin qu'il ne pût plus quitter le monastère, diacre, averti de ce qui était arrivé, céda à
ni être ordonné dans une autre église, Fauste la volonté de Dieu et se soumit. Saint Ful-
l'ordonna prêtre. Sa l'éputation était si grande gence le reçut sans délai et avec bonté en- :

en Afrique qu'on l'aurait demandé pour suite il l'ordonna prêtre. Mais il mourut dans
évoque, si on avait pu en ordonner. Mais le l'aunée, et le procurateur, qui avait appuyé
roi Trasamond avait défendu de ponrvoir d'é- sa brigue, fut réduit à une pauvreté extrê-
véques les églises vacantes. Quoique cette me. On met l'ordination de saint Fulgence
défense mît l'esprit de Fulgence en repos ,
en 508, la quar;jntième année de son âge,
sachant toutefois que les évêqnes avaient ré- étant né en 468.
solu de faire des ordinations, nonobstant ledit 10. L'honneur de l'épiscopat n'occasionna socnnduuo

du roi, il sut si bien se cacher qu'on ne put le aucun changement dans les mœurs de saint «i"'"i-'-

trouver, et qu'après l'avoir élu en plusieurs Fulgence. Il conserva l'état de moine et


endroits, on fut obligé d'en élire d'autres. toutes les pratiques de la vie monastique,
9. Mais lorsqu'il vit la province de Byzacène ne portant jamais d'habits précieux, conti-
remplie de nouveaux évêqnes, en sorte qu'il nuant ses jeûnes accoutumés et vivant so-
restaitpeu d'églises cathédrales vacantes, et brement. Hiver et été il n'était vêtu que Ca.-. xvni.

ceux qu'on avait nouvellement élus envoyés d'une tunique fort pauvre, qu'il ceignait
en exil par ordre du roi Trasamond, il crut d'une ceinture de peau à la manière des
qu'ayant évité d'être élevé à l'épiscopatpour moines, sans porter VOrarium, suivant la
'

cette fois, il n'avait plus rien à craindre à coutume des évoques. C'était une - écharpe
l'avenir, et retoui-na en son monastère. La de toile autour du cou, dont est venue notre

Orario quidem, sicut omnes episcopi, nun-


1 * Fleury, liv. XXX Hist. ecclés., tom. VII, pag.
quam utebatiir : pelliceo cingulo tanquam mona-
chus cingebalur. Vila Fulg., cap. xvui.
6 HISTOIRE GKNKRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES,
diolc. ne portait pas la chaussure des
Il nouveaux moines dans l'un ou dans l'autre,
clercs, mais telle des moines, et marcliait ils y avaient rang suivant le temps de leur

souvent nu-pieds, si ce n'est dans le monas- conversion.


tère où il se sen'ait ordinairement de la 1 1Pendant que saint Fulgence était oc-
.
s-im

chaussure commune aux autres. Jamais il ne ciipé â ces œuvres de piété, le roi Trasa- wjéen»
porta de chasiilile piëcieusc, ou de couleur moud l'envoya prendre par les ministres de
éclatante, ni n'eu peimil de telle i\ ses ndi- sa fureur, pour le conduire en Sardaigne
gieux. C'était un habillement ordinaire qui a\ecles autres évéques. Quelle que fut la don- c»r-xi-
couvrait tout le corps. Il portait par dessous leur du Saint d'abandonner son Eglise avant
sa chasuble nn petit manteau noir ou blanc; qu'il eût le temps de l'instruire, il témoigna

et quand le temps était doux, quelquefois néanmoins sa joie de participer a la glo-


dans le monastère, il ne portait que le man- rieuse confession de ses confrères. Il sortit
teau. Il n'ùtait pas même sa ceinture pour de Ruspe accompagné de moines et de
dormir; et il offrait le sacrifice avec la même clercs, laissant tous les la'iques en pl.icc. La
tuni([ue dans laquelle il couchait, disant, ville de Cartilage le reçut avec honneur, on

que pour cette sainte action il fallait plutôt lui fit des présents, qu'il envoya au monas-

changer de cœur que d'habits. Personne ne tère qu'il faisait billir, et s'embarqua sans
put jamais l'obliger à manger de la chair de rien emporter que les richesses d'une science
quelque espèce qu'elle fût. Il se nourrissait singulière, dont il faisait part à tous ceux
d'herbes, de grains et d'œufs, sans les assai- chez qui il allait. Quoique saint Fulgence fut
sonner d'huile, tant qu'il fut jeune dans sa ; par l'ordination le dernier de tous les évé-
vieillesseon lui persuada d'en user, de peur ques exilés, ils le reconnaissaient pour le
que, sa vue venant à s'allaiblir, il ne put plus premier, h cause de sa science et de sa vertu.
lire. Tandis qu'il se porta bien il s'abstint du Dans les choses douteuses, le primai et tous
vin lorsqu'il fut obligé d'en boire par rai-
: les autres évéques voulaient toujours l'enten-
son de santé, il le trempait avec tant d'eau dre pour savoir son avis et le chargeaient,

qu'il ne sentait point le goût du vin. Avant d'expliquer les résolutions communes. Lors-
que l'on avertit les frères pour les veilles de qu'il s'agissait aussi de répondre au nom de
la nuit, il se levait pour prier, lire, dicter, tous aux évéques d'oulre-mer, soit sur la foi,
ou méditer, parce qu'il n'en avait pas le loi- soit sur d'autres matières, on lui en donnait
sir pendant le jour, étant occupé pour les lacommission, en quoi on l'a comparé à Au-
all'aircs de son peuple. Quelquefois il des- rèlede Carthage qui écrivait ordinairement
cendait pour célébrer les Vigiles avec les au nom des évéques du concile d'Afrique ce
serviteurs de Dieu, mais il ne manquait pas qu'ils y avaient résolu en commun. Outre les
de vaquer aux exercices dont nous venons lettres publiques que saint Fulgence écrivait
c>p. xi».
(Je parler. Jusqncs-k'i on no l'avait vu en au- au nom de soixante t'vêques exilés, il en écri-
cun endroit, saus demeurer avec des moi- vait encore de particulières pour tous ceux
nes; c'est pourquoi la première grûce qu'il qui l'en priaient, lorsqu'ils avaient quelques
demanda aux citoyens de Uuspe, depuis avis .i donner à leur peuple, ou quelqu'un à
qu'il en fut fait évêque, fut de lui donner corriger. C'était encore à saint Fulgence que
une place propre pour bâtir un monastère. s'adressaient ceux qui avaient été punis de
Plusieurs s'empressèrent de seconder ses quelques censures évéques ab-
])ar leurs
désirs. Postliuraien entre autres lui donna pour eux. N'ayant
sents, afin qu'il intercédât
un piMit héritage qui n'était pas éloigné de pu emmener avec lui assez de moines pour
l'église, où des pins trcs-élevés formaient en former un monastère, il persuada .1 deux
un bois, dont la verdure rendait l'endroit évéques, l'un nommé Illustre, et l'autre Jan-
agréable. Saint FuJgence r;icce]ila d'autant vier,de demeurer avec lui et ayant ras- ,

plus volontiers, qu'il tiouvail pur les lieux semblé ipielqiu's moines
quelques clercs
et .

mêmes les bois nécessaires à l'édifice. Il fit il composa l'image et la ressemblance d'une

venir aussitôt l'abbé Félix avec la plus grande grande communauté. Tout était commun
partie de sa communauté, l'autre demeura entre eux, la table, le cellier, l'oraison, la
sons conduite d'im des frères noiiim('! Vi-
la lectuie, aucun ne s'élevait insolcnnnent au-
tal ;
mais avec la même union entré les deux dessus des autres : siudement
moines se les
monastères que si ce n'en eût été qu'un distinguaient par une plus grande «lustérité
sinl en sorte que, si l'on recevait quelques
; que les clercs, et ne possédaient rien en pro-
SIKCLE. CHAPITRE I. — SAINT FUl.fiKNCE DE lUJSPE.
pi'O. I,ii iiKiisoii où ils clciiiiMiiaicnt ('liiil l'n- jouit secrèlcmenl do la victoire quo la foi

rarlo do la villn tir Ca^liari : les alllim'"s


y catholique avait remportée sur l'arianisme.
vcnaiont recevoir le remède de la consola- 13. Pour ('prouver encore la science du n i" p'»-

tion on y accordait ceu\ qui dlaient en dil-


: samt éveqnn, le roi lui envoya d autres ques- j','';jj'°°'
"'
férèiid et ceux qni aimaient
: cntendi'e les i\ lions, enjoignant au poi-teur de les lire seu-
divines Ecritures, IrouvaionI dans coite mai- lement une fois devant lui, sans lui pormet-
son de quoi se satisfaire. On y faisait l'au- Ire d'en tirer copie. Ce prince craignait que cjp. mu
mône, que le saint accompagnait ordinai- saint Fidgence n'insérât dans sa réponse les
rement de quel<[ue insiruclion, et il arrivait paroles de l'écrit, comme la première fois,
souvent ([ne ceux, dont il avait soulagL^ les et que tonte la ville ne connut une seconde
besoins, emlirassaienl par ses exhortations fois qu'il avait éîé vaincu. Saint Fulgence
la viemonastiqne. pouvant i\ peine se ressouvenir de ce qu'on
T.n. 12. Cependant le roi Trasamond, feignant lui avait lu dilTérait de répondre. Mais,
,
fait
saTil! de vouloir s'instruire, s'informa qui était le pressé d'obéir , il composa les trois livres
plus puissant di'fenseur de la doctrine catho- adressés à Trasamond dans lesquels, en
,

lique. On hii nomma Fuiyence entre les répondant avec étendue aux questions du
évêques exilés. Aussitôt le roi le fit venir à roi, il lui faisait voir que le Verbe, en se fai-
Carthage, où le saint Evêque profitant de ,
sant chair, avait aussi pris une âme raison-
l'occasion , instruisait soigneusement du nable. Le roi, étonné de la réponse de saint
mystère de la Trinité les catholiques qui Fulgence, n'osa plus lui faire de question ;

venaient le trouver à son logis, leur ensei- mais un des évêques ai'iens, nommé Pinta,
gnant comment le Père, le Fils et le Saint- fut plus hardi. Ilcomposaun écrit, auquel ce
Esprit ne sont qu'un seul Dieu, quoicpie la saint évêque répondit de façon qu'il fit voir à
diU'ércnce des personnes demeure. Tous les ses adversaires que vainement ils étaient re-
fidèles s'empressaient de le venir entendre, venus au combat. 11 écrivit un autre traité
parce qu'il parlait avec ime grâce particu- touchant la divinité du Saint-Esprit, contre
lière. II répondait à tous ceux qui l'interro- un prêtre nommé Ahragila. Les ariens, ne se
geaient, sans en mépriser aucun, toujours trouvant point assez forts pour se défendre
prêt à écouter lui-même les autres, et à ap- contre lui, persuadèrent à Trasamond de le
prendre d'eux, s'il se trouvait que Dieu leur renvoyer en Sardaigne, disant qu'ayant déjà
eût révélé quelque chose de mieux. Il en- perverti quelques-uns des évêques de leur
seignait k ceux qui s'étaient laissés rebapti- secte, elle serait en danger dë'périr, s'il res-
ser, de pleurer leur faute et les réconciliait , tait plus longtemps à Carthage.
ensuite à l'Eglise. Il soutenait les autres prêts 14. Le roi céda à leurs remontrances, et "
l-nû
«seconde
"'lé

de tomber, ceux-ci à leur tour se trouvant pour dérober au peuple le départ du saint '"'=•

fortifiés par ses discours attaquaient avec , évêque il le fit embarquer de nuit. Mais les
,

confiance les ariens. Le roi , averti des pro- vents contraires arrêtèrent le vaisseau sur
grès que la foi catholique faisait dans Car- la côte pendant plusieurs jours : ce qui don- <'»p- "iv,

thage par le ministère de saint Fulgence, na lieu à presque toute la ville de s'y assem-
lui envoya un écrit plein du venin de l'héré- bler pour lui dire adieu, et de communier
sie arienne , avec ordre d'y répondre au de sa main. 11 prédit à un nommé Juliatée,
plus tôt. Comme cet écrit était fort long, le qui s'afUigeait de son départ, que son exil
saint évêque le réduisit à quelques objec- ne serait pas long, et que l'Eglise recouvre-
tions divisées pai articles, auquelles il joi- rait bientôt sa liberté ; mais il lui recom-
gnit des réponses nettes et solides. Avant manda de tenir là-dessus un grand secret,
de les envoyer à Trasamond, il les exa- ne voulant point passer pour prophète. Une
mina longtemps avec plusieurs person- demandait jamais à Dieu de faire des mira-
nes habiles les fit même, connaître au cles et lorsqu'on le pressait quelquefois de
;

peuple puis il les donna au roi qui les


; prier pour des infirmes, il se contentait de
attendait avec impatience. Trasamond les dire au Seigneur « Vous savez ce qui con-
:

lut attentivement admira l'éloquence de , vient au salut de nos âmes, que votre vo-
leur auteur, loua son humilité, mais il lonté soit premièrement accomplie.» Une de
ne mérita pas de connaître la vérité. Le ses maximes était que les miracles ne don- *

peuple de Carlhage, sachant que les pro-


positions du roi avaient été réfutées, se ré- ' Mirabilia non conferunl homini juslitiam sed
,
.

mSTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


ncnt pas la justice, mais la réputation, qui qu-î pendant son règne il n'ouvrirait point
sans la justice ne sert qu'à nous fViire con- les aux catholiques et ne leur ren-
églises
Cap. x*rii. damner au s\ipplicc éternel. Arrivé en Sar- drait point leurs privilèges. Hildéric, croyant

daigne, il un nouveau
bàlit monastère,
' ne pas fausser son serment, donna ses ordres
avec la permission de Brumas. évoque de avant d'être roi pour le rappel des ëvcques
Cagliari. près de l'église du martyr saint catliolicpies, et pour faire ouvrir les églises.

Saturnin, loin du bruit de la ville. Il assem- Il ordonna en même temps, par une bonté
bla en ce lieu plus de quarante moines, aux- singulière, d'élire des évêques partout où il

quels il faisait observer exactement la règle en manquait. Ainsi, saint Fulgence retourna
de leur profession, surtout l'article qui dé- en Afrique avec les autres évêques exilés
fend d'avoir rien en propre, mais qui veut sous le règne de Trasamond. Ils furent re-
que tout soit en commun; ce qu'il regar- çus à Carthage comme des confesseurs de
dait comme l'essentiel de la vie monasti- Jésus -Christ surtout saint Fulgence qui
,

que. Il disait qu'un moine pouvait quelque- était plus connus que les autres dans cette

fois être obligé par l'infirmité de son corps ville, d'où il était sorti seul. Le peuple as-

à prendre une nourriture plus délicate mais ; semblé sur le rivage ne l'eut pas plutôt
que de s'attribuer la propriété même des aperçu, qu'il s'éleva un grand cri de joie,
petites choses, c'était un signe d'orgueil et et on entendit chanter les louanges de
d'avarice. Il distribuait lui-même avec une Dieu en toutes sortes de langues. C'était
grande discrétion les besoins aux serviteurs à qui recevrait le premier sa bénédiction ,

de nieu, faisant attention aux forces ou à la et tous s'etforçaient de le toucher au moins

faiblesse de chacun, avertissant ceux à qui du bout des doigts. Les évêques allèrent
il donnait davantage, de s'en humilier à d'abord à l'église de Saint-Agilée, précédés
cause de leur faiblesse. Comme il avait et suivis du peuple qui les conduisait comme
grand soin de prévenir les demandes de ses en triomphe. Les plus zélés environnèrent
religieux, aussi ne voulait-il pas qu'ils le pré- saint Fulgence pour le soulager dans la
vinssent, mais qu'ils attendissent avec une chaleur et lui faire un passage libre. Dieu,
entière résignation. C'était assez pour être pour montrer de ses peuples, per-
la charité
refusé que de lui demander. Il regardait mit qu'il survînt une grande pluie ils n'en:

comme de véritables moines ceux qui, en furent point dissipés, et comme saint Ful-
mortifiant leiffs volontés, étaient toujours gence marchait la tête nue, les plus nobles
prêts de se conformer en tout aux avis et étendirent sur lui leur manteau pour en
aux préceptes de l'abbé. C'est pourquoi il éloigner la pluie. Le saint, après avoir vi-
ne permettait pas que celui qu'il avait pré- sité sesamis h Carthage. en sortit pour se
posé au gouvernement de son monastère, rendre à Iluspe. Pendant tout le chemin qui
fit quelque chose, sans l'avoir consulté au- était long, les peuples vinrent au-devant de
paravant. 11 préférait ceux en qui il voyait lui de tous les côtés portant des lampes, des
un graud amour pour la lecture et la science flambeaux et des branches d'arbres, en ren-
spirituelle quand même la faiblesse de leur dant grâces à Dieu de ce qu'il leur faisait
corps les eût absolument empêchés de tra- voir un si saint personnage. A son retour à
vailler de leurs mains, à ceux qui ne s'oc- Ruspc, il continua de vivre avec les moines;
cupaient qu'au travail corporel. mais pour ne point diminuer l'autorité de
Sn écr:i<i 15. Pendant son séjour en Sardaigne, il l'abbé Félix, il voulut lui-même être soumis
]t ^ort Cl- ««Il
e 1 i I , e -^
i> écrivit plusieurs lettres et composa divers à uu autre, ne faisant rien dans son propre
vient à Ra»i f écrits dont nous parlerons dans la suite. Il monastère, sans avoir atiparavant consulté
C«J>. XklX.
finissait son ouvrage contre Fausle de Riez, l'abbé Félix.Il ne voulut pas même s'attribuer

lorsque le roi Trasamond mourut. enC'était quelque chose en propre dans le monastère,
02.3, le 28 mai. Ce prince, avant de mourir ni user d'aucune autorité sur les moines. Et
avait fait jurer à Ilildéric, son successeur. afin - que ses successeurs ne pussent rien

hominum nntitinm. Quisquis autem hominibus moiiaKlcriiim fabricavit. Vila Fulfi., l'np. xxvii.
fueril noins, nisi fnerit justusad a-tenia perve- * l'arum fuil bealo Ftil^geiilio verbix et operi-
niet supplicia cotulrninatus Vila Fulg., cap. 25. 6m.« hanc huwililalcin scriiti ac rctinere, nisi per
• Drumasio Catnrilanœ civilalis antislile,prius, scripluram qvoqur firmarel, nihil se in illo mo-
sicul dccuil postulalo, nocii/m propriis sumptibus na$lerio proprium vindicare, nec pro potestatc.
, ,

[Vl' SIKCI-E.] cnAPirnE i. — saint FULnENCE de ruspe. 9


prétpndrc «an pn'Jiulicc dos moines do son tourner â Ruspe pour faire cesser les plaintes
inonastèro, il (h'clara par ('crit qu'il n'y prc^- que l'on faisait de son absence. Il y tomba
toniiait plus l'ion lui-mômi', et que, s'il y de^ jnalado et pondant [ilus do deux mois qu'il
,

lueuiait, ce n'ctail pas qu'il en eût le ilroit, fut attaqué de douleurs très-aiguës, il disait
mais parce qu'on voulait bien le lui permct- sans cesse â Dieu « Donnez-moi maintenant
:

Ire. 1! poussa plus loin ses pri'caulions car ; la patience, et ensuite le pardon.» Ses méde-
il aclietii une maison dans le voisinage do cins étaient d'avis de lui faire prendre les
l'église , et commodihuont pour
la bAtit bains. « Pourront-ils, leur répondit-il, empê-
qu'elle servit à la demeure de l'évèquc de cher qu'un homme ne meure, après avoir
lluspc. Il pourvut encore aux logements dos accompli le temps de sa vie? S'ils ne le peu-
clercs, et au r6p;loment de lours mmurs; vou- vent, pourquoi voulez qu'('tant près de mou-
lant qu'ils fussent tous proches de l'Kglise, rir,je relâche quelque chose de la rigueur
que chacun d'eux cultivât un jardin de ses de la profession que j'ai observée depuis
propres mains, qu'ils s'étudiassent h psal- longtemps? » Se voyant près de sa fin il as- ,

modier avec grâce et à bien prononcer, sembla tous ses clercs et ses moines, et après
qu'ils évitassent le fastedans lours habits, et leur avoir demandé pardon de la sévérité
qu'ils ne s'ingérassent pas dans le maniement dont il craignait d'avoir usé envers eux,ildis-
des affaires séculières, de peur que cette tribua l'argent qui lui restait aux veuves,
occupation no los détournât trop souvent des aux orphelins et aux étrançers, les nommant
fonctions de leur ministère. Il les choisit pres- cliacun pau leur nom. Il n'oublia pas ses
que tous d'entre ses moines. Il prescrivit clercs dans cette distribution sachant leurs ,

deux jours de jeûne la semaine, le mercredi


'
besoins. A l'égard de ceux qui le venaient voir
et le vendredi, à tous les clercs, aux veuves, il leur donnait sa bénédiction. Il mourut le
et à ceux des laïques qui le pouvaient leur , premier jour de janvier de Tan 333 le vingt- ,

ordonnant en outre de se trouvei' aux offices cinquième de son épiscopat, et le soixante-


et aux prières du jour et de la nuit. cinquième de son âge. On ne put point lui
Son hnmil. 16. Dans un concile tenu à Junque, en 524, donner la sépulture le même jour, mais on
té, M T.orX en
U3. un évéque nommé Quod-mlt-Deus, lui dis- porta son corps * dans l'oratoire du monas-
puta la préséance; tout le concile l'adjugea tère, où les clercs et les moines passèrent
Cap. a saint Fulgence. Le saint ne dit mot, pour toute la nuit à chanter des psaumes, des
ne point préjudicier à l'autorité du concile. hymnes et des cantiques. Le matin après ,

Mais s'étant trouvé encore dans celui de Suf- que les peuples du voisinage furent arrivés
féte, avecle même évoque, il supplia publi- pour ses funérailles, il fut porté par les mains
quement de le mettre devant lui ce que les : des prêtres à l'église de la ville, que l'on
évéques du concile lui accordèrent, en admi- nommait la Seconde, et où le saint évêque
rant son humihté. Un an avant sa mort il quitta avait mis des reliques des apôtres. Il fut le
secrètement son église et son monastère premier qui mérita d'être enterré dans cette
pour seretirerenunautre qu'il avait fait bâtir basilique aucun prêtre, ni laïque n'y ayant
,

sur un petit rocher dans File de Circine. Là jusque-là eu sa sépulture suivant l'ancienne
il redoubla ses mortifications et ses larmes, coutume. Mais ou passa au-dessus de l'usage
vaquant continuefiemeut à la prière ou à la à cause de l'amour que l'on portait au saint
lecture, comme s'il eût senti approcher son évêque. Les habitants de Ruspe éprouvèrent
dernier jour. Mais la chanté l'obligea de re- en plus d'une occasion les eifets de l'inter-

sed prochariiate inter monachos habitari. Consi- » Ipso autem die sanctum corpus ejus sepeliri

derans eixim vir providus ne quod servi Vei


, minime potuit : sed in oratorio monasterii cons-
simplices prœjudicium postea paterentiir, obicem titiitum, tota nocte illa in psahnis, hymnis et
conlradiclionis in hac scriptu7-a successoribus canlicis spiritualibus vigilare monachos simul
suis apposuit. Emit tamen juxta Ecclesinm do- et clericos invitavit. Mane rero sncerdotum ma-
mum, oui fabricandœ cvram maTimam diligen- nibus ad ecclesiam civitatis quœ Secunda dicitur,
ter inipendit : ne fuluro successori suo deesset «fti etiam reliquias apostolorum conslituerat
hospilium. Vita Fulg., cap. xxix. deporlaltis, sortitus est honorabile monumentuyn.
' Per singulns septimanas omnes clericos ac Primtis plane iti eadem basilica pontifex poni
viduns et quicumque potuisset ex laïcis qunrla meruit, wfcî nullum mortuum, neque sacerdotem,
et sexta feria stntuit jejunare, quotidianis vigi- i\eqne laïcum, sepeliri consuetudo sinebat antiqua.
liis, jejuniis, malutinis et respertinis oratiunibus Sed magna vis dilcctionis removebat impedimen-
adesse prœcipitns omnes. Ibid. tum consueludinis. Jbid.
10 HISTOIRE GE.NKR.\LE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
Fulsonce, lui avait écrit plusieurs lettres, m»» m» Adk-
cession de saint Fulgcnce, particulièrement '.

ire-

dans l'incui-sion des Maures. Toute la pro- dans lesquelles il lui demandait son senti- '^;' , ^'^^

ment sur plusieurs diflicullés qu'il ne pou- ""*


vince eut Foulliir de leur part des maux
ti j^';!-*

infinis, et une Imrrible caplivilc. Le saint, vait résoudre lui-même, quoiipi'il ne fut pas

servant comme de mur aux babitants de sans érudition. Le saint évêque, chargé de
Ruspe, les préserva de la cruauté de ces bar- diverses occupations, ne se trouva point en
bares. Les laïques et les clercsue s'accordanl état de répondre à Monime aussitôt qu'il l'au-

point pourl'éleclion d'un successeur, le siège rait souhaité il ne le fit que dans son second
:
*•*•" ' " ''•

vaqua presqu'un an entier, après quoi on exihlansl'ile de Sardaignc, c'ost-à-dire, vers


élut Félicien, qui fut installé le même jour l'an 321. Il renferma dans trois livres ses ré-

que Fulgence était mort. C'est ce que


saint ponses aux difficultés de son ami. La pre-
dit l'auteur de sa vie qui était un de ses dis- mière était touchant la doctrine de saint
ciples. (Juelques-uns croient que c'est Fer- Augustin sur la prédestination. Monime qui
rand, diacre de l'église de Cartliage, mais la n'avait pas bien conçu ce que ce Père en-
cbose n'est point certaine et il parait que ,
seigne sur cette matière, s'était imaginé que,
celui qui a composé celte vie, avait non -seu- suivant les principes établis dans son livre
lement été disciple de saint Fulgence mais , de la Perfection de la justice , et ailleurs,

qu'il l'avait encore suivi partout ce qu'on , Dieu nous prédestinait également au mal
ne peut dire du diacre Ferrand. comme au bien, au péché comme à la vertu,
Érri» t.» 17. Les écrits que nous connaissons de à la mort comme à la vie. Pour appuyer son
MJOI FoIgtD-
lui sont dix réponses aux dix objections des scnlinicnt, il apportait dans ses lettres quel-
ariens; trois livres à Trasamond; un livre ques passages des écrits de saint Augustin.
contre Pinta ; trois livres à Monime deux li- ; Saint Fulgence emploie son premier livre tout
vres de la rémission des péchés; plusieurs entier à montrer que, dans le sentiment de
lettres, dont la iiremière est à Proba, dame saint Augustin, Dieu ne prédestine point les
Romaine ; un livre àDonat sur la foi; divers hommes au péché, mais seulement à la peine
traité sur la proposition de Jean Maxen- ou au supplice qu'ils ont mérité par leurs
ce: Un de la Trinité a souffert; trois livres péchés. 11 montre que ce saint docteur, en ca?. >.

de la vérité, de la prédestination et de la disant qu'il y a des hommes prédestinés à la


grâce ; la lettre à Jean et à Vénérius, au mort, n'a pas entendu par le terme de mort la
nom des évoques d'Afrique ; dix livres con- première mort de l'àmc dans laquelle les en-
tre Fabien; un traité adressé à Victor; un fants naissent, ou celle que nous nous don-
traité de la foi à un laïque, nommé Pierre : nons par nos crimes pr iprcs mais la seconde
,

un autre où répondait à cinq questions du


il mort, c'est-à-dire les tourments que nous
,

diacre Ferrand; un traité à Réginus, et plu- méritons par nos péchés, soit ceux que nous
sieurs sermons. Voilà l'ordre dans lequel on avons commis avant le baptême, quand nous
aurait dû mettre
les ouvrages de saint Ful- mourons sans avoir été régénérés; soit ceux
gence, on eut voulu les placer suivant le
si que nous commettons depuis le baplêmc ,
temps où ils paraissent avoir été composés. lorsque nous mourons sans les avoir cttacés
Maison ne s'est point embarrassé, dans la nou- par la pénitence. C'est cette mort que lepé- cap. v,.

velle édition de ses œuvres à Paris, en 1684, cheur se donne lui-même par le mépris qu'il
de les mettre selon l'ordre chronologique, et fait des divins commandements, que Dieu

l'on a mis en premier lieu les trois livres à punit par une double mort la première, :

Monime, qiioique saint Fulgence ne les ait dans la séparation de l'àine et du corps la ,

écrits qu'après ceux qu'il adressa au roi Tra- seconde dans les supplices éternels, dont il
samond. .Nous suivrons néanmoins cette nou- punil làuie et le corps. Comme donc en Dieu
velle édition pour la commodité des lecteurs. il n'y a point de péché, le péché ne peut pas

venir de lui, ni par conséquent être son ou-


ARTICLE n. vrage. Or il ne pr.ulestine que ce qu'il fait,
D£S ECRITS DE SAINT FULGENCE. ou ce qu'il veut faire il ne fait point de
:

mal ni ne le veut faire le mal n'est donc


, :

§1- point un elfet de sa prédestination. D'où il ci.-. >„.


suit que les méchants ne sont point prédes-
Des Livres à Monime.
tini'S pour faire le mal, mais seulement pour

Utr« 4 I.Mouime.un des principaux amis de saint souffrir la peine due à leurs péchés. La pré-
, ,

[Vl' SlLCLE.] cn.\prniii I. — . SAINT FUi/'.ivNCE \m nusPE. 11

dcslinatinn '
ne renferme point une néccssito même volonté qui est rendue Ijonne par le
do contrainle pour hivoloiilé humaine, mais don do Dieu, suiraonte ensuite la mauvaise
mu' jiisie miséricordieuse el éternelle dis-
, concupiscence par son divin secours, et est
position de l'ieuvie ili^ Dieu, par laquelle il cnlin établie lie Dieuniêiiie dans cet heureux
accorde gratuitement le pardon à un miséra- état où elle n'a plus de mauvaises concupis-
ble, tandis qu'il en punit un autre; le tout par cences. Saint Fulgencc enseigne qu'il n'y a
un conseil secret, mais juste, de sa volonté. dans l'Écriture C'est le Seigneur qui prépnrr
:
PrtT, ri 1,

Dieu prévient par sa miséricorde celui qu'il lu cdlnnté que parce que le prophète a pré-
,

veut, sauver, quoiqu'il en soit indigne: il dit par ces paroles que Dieu nous la donne-
c»r. T11-.
trouve l'autre digne de sa colère. Il donne rait. C'est de cette bonne volonté qu'il entend

gratuilemeut la grâce celui (]ui on est indi-;"! le cœur nouveau et l'osprit nouveau que

gne par elle l'impie étant justilié se trouve


: Dieu promet dans Ezéchiel. Dieu nous donne' LVPfh.
xxivi,36.
éclairé par la bonne volonté qu'il lui inspire, ce cœur nouveau afin que nous marchions
et il reçoit en même temps le pouvoir de dans ses préceptes; et c'est en cela que con-
faire de bonnes œuvres; en sorte qu'il com- siste le commencement de la bonne volonté.
mence il vouloir le bien par la miséricorde; Il nous donne aussi de garder et de prati-
de Dieu qui le prévient; et par la même mi- quer ses commandements, ce qui regarde
séricorde qui le suit et l'accompagne, il peut l'elfet de la bonne œuvre d'où nous ap- :

faire le bien qu'il veut. Dieu - donne aussi prenons que c'est un don de Dieu de ce que
la grâce â celui qui la mérite, lorsqu'il rend nous voulons faire le bien, et de ce que nous
aux œuvres de l'homme juste la récompense pouvons le pratiquer. Ce Père autorise cette cap.

éternelle, de telle sorte que, soit qu'étant doctrine par divers passages de l'Écriture ,

juste lui-même, par sa mi-


il justifie l'impie où nous lisons que la volonté et le pouvoir
séricorde, selon ces paroles de saint Paul : de faire le bien nous viennent de Dieu; d'où
Rom. 11,20. Montrant tout ensemble (ju' il est juste et qu'il il infère que c'est Dieu même ' qui fait en

justifie celui qui a la foi en Jésus-Christ; soit nous tout le bien que nous faisons en lui la ,

aussi que, plein débouté, il donne au juste bonne volonté et la bonne œuvre venant de
la gloire qui lui est due, selon ces autres pa- lui. 11 eu infère encore que, par la prédesti-

Rnm. VIII, rôles du même apôtre : Ceux qu'il a justi- nation Dieu prépare non-seulement la va-
,

fiés, il les a glorifiés. C'est toujours la grâce lonté par laquelle nous voulons le bien
qui agit, et qui commence le mérite dans mais encore les bonnes œuvres que nous fai-
l'homme, en le rendant juste, et qui le con- sons. Il prouve que la vie éternelle, qui est
somme couronnant
et le perfectionne, en le la récompense de la bonne vie, est encore un

delà gloire. C'est elle qui commence à met- don de Dieu, et que, comme la bonne vie est
tre la bonne volonté dans l'bomme, qui aide donnée " gratuitement aux personnes justi-
ensuite cette bonne volonté de sorte que la ;
fiées, la vie éternelle est de même donnée

Prœdestinationis nomine non aliqua volun-


' operatio graliœ quœ meritum hominis bonum
tatis hitmanœ coactilia nécessitas exprimitur, et ad juslitiam et consununat ad glo-
initiât
sed niisericors et justa futuri operis dicini sem- riam. Primo inctioans in homine bonam volun-
pilerna dispositio... ciijus hoc opus est in homine latem deinde eamdem voluntatem adjurons in-
ut occulUv roltintatis suœ noti tamen injiislo choatam ut eadem voluntas et divino dono bona
consilio, aut gratuitnm misericordiam prœrnget sit et divino adjutorio malam concupiscentiam
misero aut debitam juslitia}n rependat injuslo .. superare possit, et Dco perficienle talis poslmo-
ac sic aut istum prorsus imlignuin misericordia dum ipsa voluntas sit ut malam concupiscetitiam
prœveiiiat, aut illum ira dignum inveniat. Ipse liabcre non possit. Ibid., cap. viii.
eniin dnnat gratis indigna gratiain qua jusiifi- Dat Deus cor norum ut injusti/icationibus ejus
'

catus impins illuminetur munere bunœ volan- ambulenius, quod perlinet ad bonœ volunlalis
latis, et facullate bunœ nperatinnis ut pnve- initium ; dat etiam ut judicia ejus obscrvemus
nienle misericordia bonum velle incipial, el sub- et faciamv.s, quod pertinet ad bonœ operationis

séquente misericordia bonum quod vult facere effectum. Unde cognoscimus Dei esse et ut bonum,
valent. Tahg., lib. Il ad Monim., cap. vu. facere velimus, et ui bonum facere valeamus. IHd.
- Donat eliam gratiam digno in retributione et cap. IX.
mercedis œternœ ut scilicet, sive cum impium pie * Omne igitur opus quod a nobis in Deo fit,

justilicat jiistus quia de ipso .ipostolus dicit :


,
Deus in nobis facit. Ex ipso est ergo et voluntas
Ut sit ipse ju?tu3 et justiCcaus eum qui ex fide. bo a et operalio bona. Ibid.
est Jesu. Seu cum justum juste (jlorificat pius * En gratia dalur non solum juslificalis vila
quiaquosjustificavit, illos et glorificavit, eadem sit bona, sed etiam glorificatis vita œterna. Quod
12 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
par irrâce à celles que Dieu a glorifiées, grâce dîxns la vocation, dans la justification,
cp... C'est, dit-il, saint Paul qui nous apprend et dans la glorification des saints, selon que
ntn..x. cette vérité, lorsqu'il nous dit La mort : le dit l'.\potredans sonÉpitre aux Romains.
est du péché ; mais la vie éternelle
la solde 2.Quoique Dieu n'exécute que dans le c>r iM.

est une grâce de Dieu en Nntre-Seigveur Jé- temps ce qu'il a ordonné pour l'avantage
sus-Christ. Car pourquoi r.-Vpûlrc appclle-t- de ses élus, on ne laisse pas de dire qu'il l'a
il la mort la paie et la solde du péché, et fait de toute éternité, parce que sa volonté

dit-il que une grAce, si ce


la vie éternelle est est immuable; c'est ainsi que nous regar-
n'est parce première est donnée à
que la dons ses promesses comme déjà accomplies,
celui à qui elle est due, au lieu que la se- parce que nous ne doutons point qu'elles ne
conde est accordée par pure grâce à celui le soient un jour, rien n'étant capable de

qui n'y a aucun, droit? Or, lorsque Dieu puuit l'empêcher de les exécuter tôt ou tard, selon
de mort le pécheur, il punit en lui l'œuvre sa volonté. Il a donc pu, comme ' il a voulu, ci? x<».

mauvaise, qu'il n'aurait point commise, s'il en prédestiner quelques-uns à la gloire et


ne s'était retiré de Dieu au lieu que lors-
;
d'autres à la peine due à leurs péchés. Ceux
qu'il accorde la vie éternelle il achève, en
,
qu'il a prédestinés à la gloire, il les a pré-

glorifiant le juste l'ouvrage qu'il avait lui-


, destinés à la justice ; mais ceux qu'il a pré-
mcm.e commencé, enle rendant juste, d'impie destinés à il ne les a pas prédesti-
la peine,
Tip. I. qu'il était. Il montre par les paroles du psau- nés au péché. couronne dans ' les saints
II

me que la grâce de Dieu, que David exprime la justice qu'il leur a donnée gratuitement,

par le mot de miséricorde, prévieut notre qu'il a conservée en eux gratuitement, qu'il

volonté, et qu'elle la suit pour l'empêcher a consommée et perfectionnée gratuitement


de retomber dans le mal; elle prévient l'im- en eux. Mais il condamnera les méchants
pie afin qu'il devienne juste; elle le suit
' pour leur impiété, et leur injustice qu'il n'a
lorsqu'il est devenu juste, de peur qu'il point faites en eux. Dans les uns il glorifie
ne redevienne impie. Elle prévient l'aveugle ses propres œuvres dans les autres il con-
;

pour lui communi(juer une lumière qu'il n'a- dimine des œuvres qui ne sont pas les sien-
vait pas elle le suit lorsqu'il voit
: aliu de , nes. Dans les justes, comme dans les injus- cip. \<^.

lui conserver la lumière qu'elle lui a donnée. tes, il faut considérer trois choses : le com-
Ainsi la grâce ne rappelle pas seulement au mencement de la volonté, le progrès de
bon chemin, en justiliunt celui qui était dans l'aclion, et la fin de la rétribution; attribuer
l'égarement elle le garde encore et l'aide
: à uu Dieu bon que nous
et juste tout te
dans le chemin pour le conduire au don de voyons être bon et juste, et regarder comme
la gloire éternelle. Or toutes ces choses, indigne de lui tout ce en quoi nous n'aper-
c'est-à-dire les commeucemcnls de notre vo- cevons ni bonté ni justice. D'où il suit qu'en
cation, les accroissements de la justice, et ce qui regarde la foi, et les bonnes œuvres,
lesrécompenses de la gloire, ont toujours été nous ne devons nous glorifier de rien, n'ayant
renfermées dans la prédestination de Dieu, rien, selon l'Apôtre, que nous n'ayons reçu icor. ni.

parce qu'il a prévu les œuvres futures de sa de Dieu. C'est gratuitement* qu'il appelle les cj... i».

Pauli lenemus prcedicalione compertum dicentis : Hœcaulem omnia,id est et vocalionis noslrœ ini-
Slipendium eiiiiii peccati mors, gratia autem X)v tia, et justiftcationis augmenta, et glorificalionis
vita œterna in Cliii.sto Jesu. Cur autem mors sii- prœmia, in prœdestinalione scmper ])cus Itabuit :
pendium, vila rero œterna gratia dicitiir, nisi quia et in rocatinne it in justificalione d in glo-
ijuia illa redditur, hœc donatur ? Sed nbi illam rificatione sanctorum , gratiœ suic opéra futurœ
Deus reddil npus mnlum peccatoris hoinims pu- pricscirit. Il)iil., cap. xi.
nit, quod
nullalcnus fecisset liomn, nisi dis- Perinde potuit
* sicut roluit , prœdestinare ,

cessissel a Dco. Cum vero Deus douai litam quosdani ad glariam, qvosdam ad pœnam. Sed
œternam, opus suutn quod inchoavil justifi- quos prd'destinaiùl ad glariam, prœdeslittavit ad
cans impium, perficit gluri/lcans justtim. Ibid.. justitiam. Quos autem prœdeslinavil ad pœnam
cnp. X. non privdestinatit ad culpam. Il)i(l., rap. xiii.
' Misericordia prœvenit impium ut /iat jusius. ' In sanclis cnronat Deus justiliam, quam eis

SuUsequitur justum ne fiât iinpius. Prwienil cœ- gratis ipse tribuit, gratis sen'niit, gratv<que per-
cum ut lumen, quod non invenil doiiel.Suhsequitur fccil. Iiiiquos autem condemnabit pro impitlate
videiitcm xit lumen, qund conlulit, sériel; et ideo rel injustitia quam ipse in eis non fecit. In illis
vnn solum erranlem justiftcanito ad viam rerocat, enim opéra sui/ glorificat, in istis opéra non sua
sed etiam bene ambulanlrm tuslodil et adjuvat, condemnal. \b\<\., lap. xiii.

ul ad donum glorificalionis œternœ perducal. * Unns autem Deus est qui gratis el vocal prœ-
[VI* SIÈCLE.] ClTAPITrtl': I. — SAINT FLlI.r.ENCE DR RUSPË. 13
Cap. »vi. ceux qu'il appelle;
pi'iUlcsIinds; qu'il Justifie dans les saintes Ecritures, afin qu'on évite le
et qu'il glorifieceux qu'il jusiilio. péché, on commande la charité // a réglé :

Cnp. x\l. 3. Siiint Fulpeuce cxiimirin cusuito si Dieu et ordonné en moi In charité, dit l'i'jpoux; et si
x.ili.
a prodosliuo les uK'cliauts pour faire le mal on y * fait att(!ution on trouvera que la

qu'il devait piiuir eu eux, on s'il les a pré- source de tout péché n'est autre chose que
destintis au supplice, parce qu'il a prévu l'amour déréglé, par lequel la créatiu-e rai-
qu'ils feraieut de uianvaises aciious. Il pose sonnable renverse l'ordnî que Dieu avait
deux principes l'un, que l'orj^nieil est le
;
'
établi dans le monde, et que c'est en per-
commenccHieut de tout péché; l'autre, que' dant volontairement cet ordre de la charité
la volonté de la créature raisounahle ne qu'elle s'est perdue elle-uiême. Or, ce n'est
peut être sans quelque amour, et qu'elle ne point à renversement que la créature
ce
peut aimer qu'elle ne se poito à (luelque raisoiuialjle a éti' prédestinée de Dieu. Sa °
cliosc, connue à l'objet de son amour; de prédcslinalion n'est autre chose qu'une pré-
sorte qu'étant établie, comme au milieu cn- paration éternelle des œuvres futures dans
ti-e le souverain bien pour lequel elle a été laquelle ou ne trouvera aucune cause du
créée, et les biens int't'rienrs, au-dessus des- mal, parce que l'origine du péché n'a ja-
quels elle est élevée il est nécessaire ou
, mais procédé de Dieu. Comme il lui con-
qu'elle s'arrêtemisérablement aux biens in- vient^ d'être la cause de toute la bonne
férieurs, ou qu'elle se repose heureusement action, il est indécent de lui imputer la C^p. XXI,

dans le bien souverain car elle est entraî- : cause d'aucune mauvaise œuvre. D'ail-
née par un certain amour, soit lorsqu'elle se leurs, on ne peut produire quelque raison Ctp xxii

soumet à son Créateur, soit lorsqu'elle do- qui nous porte à croire (jue Dieu prédestine
mine sur la créature. Mais comme elle est au péché. N'est -il pas écrit au contraire
humiliée, lorsqu'elle s'élève de même elle
, que Dieu n'a pas fait la mort, qu'il est Saii. 1%

s'élève par son humilité ; Dieu donnant sa juste et qu'il a aimé la justice? Disons donc
grâce aux Immblcs, tandis qu'il résiste aux que Dieu a prévu toutes les actions des
superbes. Ce n'est pas' que Dieu trouve l'hu- hommes, bonnes et mauvaises, parce que
milité dans l'homme avant de l'y avoir mise . rien ne peut lui être caché mais qu'il n'a
;
'Jap.
XXIV.
lui-même; mais en lui donnant sa grâce il le prédestiné que les bonnes qu'il a prévu
,

Cai, \ni. rend humble. Saint Fulgence conclut de tout qu'il serait lui-même dans les enfants de la
cela, que l'orgueil, qui est le principe de la grâce qu'à l'égard des mauvaises actions
;

mauvaise volonté, n'étant point de Dieu on , des impies, il les a seulement prévues;
ne peut pas dire non plus que la mauvaise qu'en conséquence, il a, par un etiet de sa
action soit de lui, au contraire, qu'il la pu- miséi'icorde, prédestiné les bons à la gloire,
nit justement et qu'ainsi il n'a point pré-
; et par un effet de sa justice, les méchants
destiné l'homme à la mauvaise volonté, puis- aux supplices. Saint Fulgence prie Monime cap. nvi.

qu'il ne devait point la lui donner, et qu'il ne de faire attention à l'endroit du neuvième
''

la fait pas. Ne faisant rien qui ne soit dans chapitre de l'Épître aux Romains, où l'Apô- n"'"". '•

l'ordre comment aurait-il prédestiné au pé-


, tre, pour marquer la distinction entre les

Cap. is* ché qui est contre l'ordre ? Nous voyons que élus et les réprouvés, appelle les premiers

desti7iatos, et jusli/icat vocalos, et gloriflcat jiis- est aliud quam ordinataruni a Deo rerum inor-
tificatos. Ibid., caii. xvi. dinata rationalis creaturœ dilectio, quœ sponte
* Si initium peccali requirilur, nihil aliud nisi perdendo dilectionis ordinem perdidit et salutem.
svperbia invenilur. Ibid. cap. xvn. Iljid., cap. SX.
' Voluntas creaturœ ralionalis sine cjualicum- 5^eque enim alia est ejus prœdestinatio, nisi
que amore esse non jiotest : nec sic potest dili- futurorum nperum ejus œterna prœparalio, in
gere ut amorem suum non velit ad aliquid rele- qua nullius causa mali poterit inveniri. quia ex
gare, quœ inter summum bonum a quo creata voluntate Dei nunquam processit origo peccali.
est, et in/imum bonum cui prœlata est medio
, Ibid.
quodam loco posita, profecto aut in infimo bono ^ Sicut competit Deo bono ut causa sit totius
necesse est miserabiliter jaceat, aut in summo boni operis, sic incongruum est ut impulatur ei
bono veraciter feliciterque requiescat. Ibid., causa cujuslihet operis mali. Ibid., cap. xxi.
cap. xvni. Sic appareat et in vasis misericordiœ non ex
''

' Neque vero Deus hiimiles, quibus dal gratiam, ipsis sed ex Deo esse quod boni sunt, et in Viisis
anle datam humiles invenit ; sed dando gratiam irœ.non ex Deo sed ex ipsis esse quod mali sunt.
humiles facit. Ibid., cap. xvni. Ibid., cap. XXVI.
* Peccali initium si attend lur, puto quod nihil
,

14 iiistoihe générale des auteurs ecclésiastiques.


vases de misériconics. les secniids vases de montrant dans sa réponse ;\ la quatorzième
colère. « Il est notoire, dit-il, que l'on ne peut objection des Gaulois que l'infidélité de
,

dire de Dieu qu'il soit en colère, si ce n'est ceux qui ne croient point l'Kvaiigile n'a
.'t

lorsque l'iniquité de l'homme a précède. Il point pour cause la prédestination de Dieu,


l'estencore que les élus sont apjiclés vases qui est auteur des biens et non des maux ;

de miséricorde, et non vases de justice que Dieu a bien prévu leur infidélité, mais
parce que c'est de Dieu et non d'eux-mê- que sa prescience ne leur a imposé aucune
mes qu'ils sont justes , au lieu que les ré- nécessité de ne pas croire.
prouvés sont méclianls d'eux-mêmes. » Saint 4. Les ariens prétendaient que le sacri- Ani!fU do
EccoiM livre,

Fidgence fait voir iiprès cela que, les mé- fice du corps et du sang de Jésus-Christ ne k
i»e.
MoDlme ,
î-..

chants ayant abandonne Dieu les premiers devait être ollert qu'au Père seul et non pas
en se livrant à leurs mauvais désirs, Dieu h toute la Trinité. C'était une suite de leur er-
les abandoune et les punit avec justice; que reur sur la divinité du Verbe; car ne recon- c>p- •" •'
n-.

leurs péchés sont la seule cause poui-quoi naissant pas le Fils pour Dieu, et soutenant
Dieu les prédestine à la seconde mort, c'cst-à qu'il était d'une substance dillërente du
dire aux supplices ;
qu'ils sont eux-mêmes la Père, ils devaient nier conséquemment qu'il
cause de leur première mort, qui est celle fût digne du même honneur que le Père.
de l'âme et qui consiste dans le péché que ;
Saint Fulgencc, voyant qu'ils ne laissaient
l'on doit dire que la première mort de l'iiom- pas de se llalter d'avoir la même foi que VÉ-
me vient de lui-même et la seconde de Dieu ;
glise, et de l'Kglisc était la même
que celle
qu'ainsi la première mort est la cause de la
' par laquelle Abraham plut h Dieu, prouve
seconde, et la seconde la peine de la premiè- que, ce patriarche ayant sacrifié aux trois
re que' Dieua prévu les mauvaises actions
;
personnes de la Trinité, nous devons en faire c«p. t.

des pécheurs mais que ne les ayant point


; de même. Il prouve la même chose d'Isaac,
préordonnées il est équitable dans la peine
,
des Prophètes et de l'Église catholique ' où
,

Cap. ixTif. qu'il leur destine. Il rapporte un lon^ pas- le sacrifice salutaire est également olïert au

sage du second livre de saint Au<,'uslin sur Père, au Fils et au Saint-Esprit, c'est-à-
le baptême des enfants, pour montrer que dire, à la sainte Trinité; comme c'est au
ce Père a enseigné constamment que l'or- nom de ces trois personnes qu'elle con-
gueil est la seule cause du péclié de l'hom- fère le baptême. Quoique dans la prière de
me, et qu'il n'est point prédestiné au péché, celui qui offre le sacrifice, il ne soit fait
c-r». lux. mais à la peine due à son péché. Il en cite un mention que du Père seul, il n'en résulte
autre du premier livre sur le même sujet, où aucun préjudice pour le Fils et le Saint-
sr.inl A:giistin dit nettement qu'encore que Esprit parce que la consommation de ce
.

la prédestination ne puisse être sans la pres- sacrifice renferme le nom de ces deux per-
cience, la prescience peut être sans la pré- sonnes, et qu'encore que les paroles du prê-
destination : par la prédestination. Dieu pré- tre s'adressent nommément au Père, l'obla-
voit ce qu'il doit faire lui-même, c'est pour- tion se fait en l'honneur de tonte la Trinité.
quoi il est écrit : // a fait les choses futures. L'Eglise latine faisait en ce temps-là une
Mais il ne fera pas ;
peut prévoir celles qu'il prière, par laquelle elle demandait à Dieu
péchés des hom-
c'est ainsi qu'il prévoit les que le Saint-Esprit descendit sur les dons,
mes. Il remarque que saint .Vugnstin n'ayant c'est-;\-dire sur le pain et le vin, pour les
pu répondre aux objections que quelques changer au corps et an sang de Jésus-Christ.
Gaulois avaient faites contre son livre de la Les Grecs ont conservé cette prière; mais
Prédestination, parce que la mort ne lui en ils ne la récitent qu'après les paroles de la

donna pas le loisir, saint Prosper y suppléa, consécration. Les Latins la disaient tantôt

' Prima igitur mors animœ quam sibi liomo cl Patri et Filio et Spirilui Snnrlo, lioc est sanc-
inlulit,secunJœ mortis causa esl : el secuiula lip Trinilali ab Ecclesia pariler exhiberi. In cu-
mors quam D us homini reddidil primœ tnorlis jus ulique uomine uno manifestum est sanchim
est pœna. Ibid., rap. xxvii. quoque baptisnia cetebrari. Neque enim prtvju-
' Peccata itaqiie liominum cuncla quidem Deus dicium Filin cet Spirilui Sancio cnmparalur,
in pcccalonbus pnisciril fulura cl quia ipse : dum ad Palrispersonam prccalioab offcrenle di-
non ea prwdi'stinavil fuciinda, juste prœdeslina- rigilur: cnjus consumnialin, dum Filii cl Spiri-
viljudicio punienda, lliid., «ip. xxvn. lus Sancl complectilur iiomen. osUndil nullum
' Cdlltolici fidèles Siire debent omne cujusiihet esse in TrinitJle discrimen. Fulg., lib. II ad Uo-
honorilicentiœ el salularis sacrificii obsequium nim., eap. v.
[VI° SIÈCLE.] CHAPlTltl': I. — SAINT FUI.GENCK DE lU'SPK. 4 S

.ivanl , tiiiili'il aprrs. Nous ne la liisoiis nous (li'iiiaMdons dignenu'ut, lorsque nous
plus, ot à s;i plaie nous disons aiissiirit apiôs demandons (jue cela se fasse en nous par le
l'olilatioti du pain el du vin : « Venez, sanc- don de cet Esjjrit, qui est l'esprit du Père et
tificalonr. Dieu élerncl, bénissez ce sacrifice du Fils parce que la sainte et naturelle
,

cif. VI. (pii esl prt''par(; ù votre saint nom. » Celte unité, égalité ettharit(! de la Triniliî, qui est
prière Inurnissail aux ari(Mis une objection un s(nd et vrai Dieu, sanctifie par sou una-
contre la divinité du Saint-Ksprit , disant nimité ceux qu'elle adopte. Saint Fulgence
qu'il était moindre que le Pore et le Fils, montre que sans la charité les autres dons
l>uisqu'il était envoyé par eux. Saint Ful- du Saint-Esprit sont inutiles; que plusieurs ' Cnp.u,

i;ence réjioud , (|ue si, le Saiut-Ksprit est ont disd ibué leurs biens aux pauvres, aux-
moindi'c que le Père et le Fils, parce qu'il quels cela n'a servi de rien, parce qu'ils se
est envoyé par eux, le Fils est donc aussi sont perdus, en ne se mettant point en peine
moindre que le Père et le Saiiil-Esprit, puis- d'acquérir la charilt; qu'ils devaient uni(jue-
que nous lisons ([uc le Père et le Saint- mcnl s'eû'orcer d'avoir ;
que ceux-là perdent
Esprit l'ont envoyé. «Mais, ajoutc-l-il ni , le Saint-Esprit qui se séparent de l'unité de
IS j. XLVIM, la mission du Fils ni celle du Saint-Esprit , l'Église; qu'ainsi la grâce' du Saint-Esprit
lu.
ne sont locales elle sont spirituelles com-
: , n'est point chez tous les hérétiques; que
me l'est aussi la venue du Père dans les lems sacrifices, tandis qu'ils sont héréti-
cœurs des lidèles, dont Jésus-Christ dit dans ques, ne peuvent plaire Dieu que l'on ne ;'i
;

JoaD. X[V, l'Kvangile : Si quelqu'un m' aime, il gardera ma peut reconnaître la vertu de sanctification
il.
parole : et mon Père l'aimera, et notis vioi- dans les sacrifices de ceux qui offrent, étant
drons à lui, et nous ferons en lui notre de- séparés de l'unité de l'Eglise; que Dieu
i ,,.. vir. meure. montre par l'Ecriture que l'immen-
Il n'accepte d'autres sacrifices que ceux de
sité est un attribut commun aux trois per- l'Eglise seule, parce qu'elle les offre dans
sonnes que toute la Trinité concourt à la
;
l'unité que les hérétiques en quittant le
; ,

sanctification de l'Eucluiiistie que l'invo- ;


schisme pour revenir à l'unité de l'Égiisc,
cation paiticulière du Saint-Esprit mar- offrent h Dieu une hostie d'une odeur agréa-
que souvent les dons du Saint-Esprit, la cha- ble mais que c'est la charité qui fait qu'ils
;

rité, la continence; que, ces


paix, la foi, la reviennent, et qui rend leur sacrifice agréa-
dons, pouvant être aufjmeutés ou diminués. ble. Il rapporte quelques passages de saint
Car. V II.
ne peuvent être la même chose que le Saint- Augustin, pour faire voir que par le Saint-
Esprit qui est immuable de sa nature et ; Esprit qui nous est donné par l'imposition
que ce sont ces dons que l'on demande pour des mains, les saints Pères 'ont entendu la
c»p. is. tout le corps de l'Eglise dans le sacrifice, charité qui est répandue dans nos cœurs
n'y en ayant point d'occasion plus convena- par Monime avait aussi de-
le Saint-Esp'-it.
cjp. X. ble, que lorsque le corps et le sang de Jé- '
mandé de ce que dit saint Paul
l'explication
sus-Christ sont offerts, dans le sacrement du dans sa première aux Corinthiens, que la I Cor. vu
pain et du vin, par le corps même de Jésus- virginité est une chose de conseil, et non
c»p. "• Christ qui est l'Église que c'est pour cela ;
pas de précepte il pensait que la virginité
:

que nous demandons que la même grâce était un œuvre de surérogation, et y rap-

qui a fait l'Eglise le corps de Jésus-Christ, portait ce qui est dit du Samaritain de l'É-
en fasse persévérer tous les memin-es dans vangile qui donna deux deniers à l'hôte, en
l'unité par les liens de la charité. Ce que lui disant Ayez bien soin de cet homme, et
:

' Hcec œdificalio spiritaiis nunquam oppor- crificia, quandiu liœretici sunt, passe Deoplacere :

timitis pi'titur, quam


cuin ab ipso Christi cor- neque spiritulis gratiœ sanctificationem sacri/i-
pore, quod est Ecclesia, in sacrameiUo panis et ciis eorum tribut qui offerunt ab ecclesiastici
calicis ipsuin Cliristi corpus et sanguis o/fertur. corporis unitale disjuncti : solius enim Ecclesiœ
Ibiil., cap. SI. Deus delectatur sacrificiis, quœ sacri/icia Dco
- Mulli faciiUales pauperibus erogantes, quia facit imitas spiritaiis. Cap. xi.
non curaierunt acquirendœ char itati sludium ' Spiritus autem Sanctus, quod in sola
catho-
impemlere, res quidein suas donaierunt, quod lica Ecclesia pcr manus imposilionein dari dici-
ideo nihil eis profiiit, quia seipsos perdiderunt, tur, inmium hoc intelligi nifijores nostri volue-
vnii acquirendo charilatem quant ucquirere de- ruiil quod Àposlolus ait : Quoninm charitas Dei
buerant. Ibid., cap. ix. diffusa est in cordibiis nostris per Spiritum Sauc-
3 Uude manifeslum est apud oiunes hœreticos tuiu ijui datus est nobis. Ibid., cap. xii.
Spiritus Sancti gratiim non cssc, nec eornia sa-
16 HISTOIRE GÉNKRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
tout ce que vous dépenserez de plus, je vous le la même manière que le Fils unique est
rendrai à mon retour. Saint Fulgence con- dans Dieu et avec Dieu. Il est dans Dieu,
vient que l'Apôtre parle en cet endroit et en comme né naturellement de Dieu, c'est-â-
d'autres desœuvres desurérogation et après ; dire de la propre substance du Père; au lieu
avoir allégué ce que saint Augustin, saint que nous somimes ses enfants par grâce et
Ambroise et Opiat de Miléve ont pensé sur non par nature. •

cette matière, il dit qu'il importe peu en


quel sens on entende les deux deniers de §n.
surérogation, parce qu'un même passage de Livre contre les Ariens.
l'Écriture peut avoir divers sens tous ap-
prouvés, que la virginité est une chose de 1. Le li\Te des réponses aux dis objections h*,^«M

volonté et non de nécessité, qu'on peut la re- des ariens parait être le premier des cents - =
'i^"^^»

garder comme une œuvrede surérogation, de saint Fulgence, selon l'ordre des temps.
de même que le travail des mains que saint Il le composa étant à Caitbage, où le roi Tra-

Paul s'imposait pour subvenir à ses besoins, samond l'avait fait venir de Sardaigne vers
quoiqu'il lui eût été libre de vivre de l'Évan- l'an 321. Ce prince, qui voulait éprouver son
gile, comme les autres apôtres. savoir, lui envoya diverses objections contre
Atê'ye do o. U était parvcnu à saint Fulgence que la foi catholique, avec ordre d'y répondre
«!• > M.»- les ariens, voulant s'autoriser dans leur er- promptement. Elles étaient fort longues, et
reur par premières paroles de l'Kvan-
les d'au style aussi obscm- que barbare. Le saint
gile selon Jean Le Verbe était avec
saint : les réduisit, les divisa par articles et y joi- ,

Dieu, soutenaient qu'autre chose était d'ê- gnit des réponses claires et solides.
•>»•'• tre chez quelqu'un, ou avec quelqu'un, et 2. Les ariens disaient Les noms de Père
: ,
la
««i»"»
{emleie
»

autre d'être dans quelqu'un que le Fils ;


et de Fils sont difl'érents leur nature est
: •^""«'ijt-

était avec le Père mais qu'il n'était pas


, donc aussi difl'érente. Saint Fulgence répond
dans le Père. Us apportaient pour exemple que la difl'érence des noms marque en Dieu
un habit que nous disons bien être avec la distinction des personnes et non pas une
,

nous, lorsque nous le tenons en main, mais diversité de nature. Les noms de Père et de
qu'on ne peut dire être dans nous. Ce Père Fils sont des noms relatifs qui ne séparent
fait remarquer l'indécence de la comparai- point la nature de celui qui engendre de la
c«p. :. «! son par rapport au Verbe de Dieu. Ensuite nature do celui qui est engendré. Ils signi-
il montre que, si tout ce qui est avec Dieu, fient au contraire une même nature dans le
est extérieur à Dieu, et que si tout ce qui Père et le Fils. Cela se trouve même dans les
est dans lui, lui est intérieur, il s'ensuit que hommes où les noms de père et de fils em-
nous sommes plus intimes à Dieu que son portent nécessairement la même nature dans
propre Fils. Car il est dit de lui // était : l'un et dans l'autre, puisque tous deux sont
avec Dieu dès le commencement ; au lieu qu'il hommes, quoique l'un soit appelé père, l'au-
A,:. xMii, est dit de nous que c'est en lui que nous
,
tre fils. Mais l'un est appelé père, afin qu'on
avons la vie, le mouvement et l'être, et que connaisse qu'il a engendré uu fils; et l'autre
DoB.i :.ic. tout est de lui, par lui, et en lui. Il rapporte est nommé fils, afin qu'il soit connu qu'il est
divers passages de l'Écriture où ces paro- engendré du père. Ainsi cette diversité de
les avec et dedans se prennent indifférem- noms est nécessaire pour la distinction des
cap. r: >t mcnt. U cst dit dans saint Jean Je prierai : personnes, chacun de ces deux noms jjère et
j«». 1 V, mon Père, et il vous donnera un autre consola- fils est relatif. Mais il n'y a qu'un nom pour

leur, savoir l Esprit de vente. Vous le connaî- marquer la nature commune àl'un et àl'au-
trez, parce qu'il demeurera avec vous et qu'il tre, qui est celuide substance, parce que leur
sera dans vous. D'où il conclut, que lorsqu'il substance est une et la même. Le Fils est
est dit que LeVerbe était avec Dieu, c'est com-
: Dieu comme le Père est Dieu.
me si l'i^vangélislc avait dit : // était en Dieu, N'est-il pas écrit, ajoutaient les ariens, que Rl,^„„ \

parce que le Fils qui est le Verbe-Dieu dit la génération du Fils est inctfable ? « Cela est jmuoÔ"
63.
W
que non-seulement le Père est dans lui, mais vrai, répond saint Fulgence; mais si ne
l'on
4;us III, qu'il est lui-même dans le Père : Ae voyez- peut raconter sa génération, ni expliquer de
vous pas que je suis dans mon mon
Père, et que quelle manière elle s'est faite, il n'est pas écrit
Père est en moi ? Il est vrai que nous sommes qu'on ne peut pas la connaître. De ce qu'on ne i«i. L.n.

dans Dieu et avec Dieu, mais ce n'est pas de peut expliquer une chose, il ne suit pas qu'il
[VI" SIÈCLE.] CII.\PITRE I. — S.MNT FULGENCE DE RUSPE. n
sûil iiiipossiljlo (le siivoiiwnu'llc elle est. (Jui rcr i^t à craiudrc! un Dieu, ne nous enseigne
[unil (lire tlo Dieu (oui c(! (lu'il est ? l'cisoiiiio. pas (ju'il soit im pi'rsoiuicilcnu^nl, ni dislin-
Il n'est pas néaimioins permis d'ignorer qu'il gu(! ])ar uiu! diversitéde substance, de peur
cxislc. Il est si l'acile de le connaKrc, cpie (lu'cn adorant diverses substances, nous ne
"•'>"• l'Apôtre nous assure que lea pli ilos<i/)/ics sont t()mi)ions dans l'erreur des gentils rpii ado-
inexciisalilcs, parce qu'ayant connu Dieu, ils ne rent plusiem's dieux ou dans l'erreur de
:

l'ont point glorifié comme Dieu, et ne lui ont Sabeliius, en niant avec lui l'existence du
point rendu tp-àces. Couime done il ne nous '
Fils et du Saint-Esprit, et la Trinité des per-
est pas permis d'ignorer la divinité de J6- sonnes. Il prouve ce que la foi
1) nous en-
sus-Ghrist, quoique nous ne puissions l'expli- seigne sur ce sujet, par un grand nombre
quer, la connaissance de sa génération ne de témoignages de l'Ecriture, remarquant
nous a point été refusée, encore que nous sur celui d'Isaïe où il est dit que deux sé-
,

ne puissions pas en faire connaître la ma- raphins répètent jus([u'ii trois fois: Saint,
nière. saint, saint, au lieu qu'ils ne disent qu'une

°r°'oi,°. ^' ^'^ objectaient divers passages, où le fois Le Seigneur Dieu des armées , que c'est
:

"• "«• Fils est appelé créateur , entre autres celui- pour nous apprendre qu'il y a en Dieu trois
111, «r"''' ci Le Seigneur m'a créé le commencement de
: personnes, et une seule substance. « Car k
ses voies. Saint Fulgcnce répond, que cela quoi bon ^, dit-il, répéteraient-ils trois fois:
doit s'entendre de la génération temporelle Saint, s'il n'y a pas trois personnes en Dieu?

du Fils, selon laquelle il est né dp la Vierge, Pourquoi ne diraient-ils qu'une seule fois :

et a été créé le commencement des voies du Sei- Le Seigneur Dieu , s'il n'y a pas en Dieu une
gneur, non iiouv donner l'être à de nouvelles seule substance? Il faut donc s'en tenir ,

créatures, mais pour réparer les anciennes : à la règle de la vraie foi par laquelle nous ,

ce qu'il a fait par ses apôtres, en les faisant croyons que le fils de Dieu est de la subs-
eux-mêmes le commencement de cette créa- tance du Père, c'est-à-dire de ce que le Père
tion, selon que l'apôtre saint Jacques le dit de est lui-même; qu'il en est né d'une manière
Jtcob. 1, 18.
Dieu le Père C'est lui qui par le mouvement
: ineU'able sans commencement et qu'on l'a- ,

de sa volonté, nous a engendrés par la parole de dore comme vrai Dieu avec le Père. »
vérité, afin que nous fussio7is comme des prémi- 5. Le Fils, disaient les ariens, n'est point
*-
nfron^psia
CÎDqiiJunie ou-

ces de ses créatures. En distinguant dans Jé- égal à son Père, puisqu'il est engendré , et J"''""-

sus-Christ les -
propriétés de ses deux na- que le Père ne l'est pas. Saint Fulgence ré-
tures, la nature divine et la nature humaine, pond qu'il faudrait au contraire dire qu'il
on explique comment on dit de lui qu'il est n'est pas égal au Père, s'ils étaient tous les
engendré, et qu'il est créé. Il est engendré deux non engendrés. Car clans deux non
selon sa naissance ineflable du Père; il est engendrés, la divinité est ditférente au lieu
:

créé selon sa naissance humaine, par laquelle que dans celui qui est engendré de celui qui
il est né d'une servante, serviteur lui-même, n'est pas engendré l'unité de nature se
,

c'est-à-dire qu'il est engendré comme Dieu ,


trouve évidemment. C'est pourquoi le Fils
et créé comme homme. de Dieu, étant de la substance du Père, ne
"c oïlî
^- ^^'^'® pourquoi , dites-vous , deman- peut en avoir une moindre que la sienne,
daient les ariens aux catholiques, que le Fils ni une différente. Jésus-Christ ne marque-t-
est né de la substance du Père ? « C'est, ré- il pas son égalité avec son Père lorsqu'il ,

pond Fulgence que nous ne pouvons


saint ,
dit Mon père et moi, nous sommes une même
: ^mn. x,m.

adorer que ce qui est Dieu substantielle- chose, et encore : Tous honorent le Fils comme it'ii- v, 23.

ment. Or nous voyons tellement un Dieu ils honorent le Père?

Père, que nous croyons aussi un Fils et un 6. Les ariens insistaient Autre est le Père
: Réionsos

Saint-Esprit. La foi qui nous enseigne à ado- de la lumière, autre est la lumière. Le Père U""'

' Sicut ergo Cliristi divinitatem ignorare non dum quod de Domino inenarrabiliter natus est
debeinus, licel enarrarenun possimus, ila dicini- Doiiiinus. Creatus autem secundum humanum
talis ejus quainvis nulli suppetat emirratio non generationem, qua de ancilla natus est serius.
est taintn fidelibus adempla cognitio. Lih. Contra Fiilg., Contra Àrian., pag. S7.
Àrian., pag. 53. 3 Quid est ergo quod tertio Sanctus dicitur, si

* Àgnoscatur ilaque in Christo proprie tas non trina est in divinitate persona ? Cur semel
ulriusque nalurœ, ut sine errore possit intelUgi Doaiiuus D<!us dicitur, si non una est in divini-
et creatus et genitus : genilus quippe est secun- tate substanlia ? Ibid.

XI.
18 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
est l'auteurde la lumière, le Fils la lumière : nent aux catholiques le nom à'homousiens,
ilsne sont donc point éfraux. Saint Fulgence parce qu'ils confessent que les trois person-
répond, que le Pore et le Fils sont une même nes de la Trinité sont cbnsubstantielles, ne
lumière substantiellement. Il le prouve, parce peuvent refuser d'être nommés triousiens ,
que le nom de lumière renferme nécessaire- puisqu'ils soutiennent que les trois pci-son-

ment celui de la Divinité selon que le dit


,
nes de la Trinité sont chacune d'une subs-
1 jmo. 1,5. saint Jean dans sa première Épitre Ce que : tance dillërente.
nous vous enseignons, est que Dieu est la lu- 8. C'est faire injure au Père, disaient les
bullièaie

mière même. D'où il suit que celui qui est ariens, de croire que le Fils lui soit égal , et j«"o". i

Dieu est aussi lumière et que celui qui n'est


, ;
de rendre un semblable honneur. «La foi
lui

pas lumière, n'est pas Dieu. « Il faut donc apostolique, répond saint Fulgence, ne fait
croire, dit-il, que le fils est lumière de lu- point d'injure i\ Dieu, mais elle l'honore en ,

mière, parce qu'il est ne Dieu de Dieu car, : assiu-ant que la substance divine ne peut ni
en voulant nier que le Père soit lumière, êtie changée, ni être diminuée. C'est pour
tandis que l'on dit que le Fils est lumière ce , cela qu'elle enseigne, que le Fils est égal au
serait blasphémer contre le Père. Recon- Père, parce que l'unité de substance dans
naissons donc que le Père est dans le Fils tous les deux, conserve à chacune de ses
lumière, et le Fils dans le Père lumière, la personnes la plénitude de sa perfection. Ce
jMn. HT, Lumière disant d'elle-même: Je suis dans Père fait le même raisonnement à l'égard du
13.
mon Père, et mon Père dans moi. » Saint-Esprit, disant que si le Seigneur eût
Biprauiii 7. Le Père est autre que le Saint-Esprit, voulu qu'on le regardât comme une créature,
jKiion, i>.g. puisque le Fils dit : Mon Père vous donnera un il n'aurait pas commandé qu'on le joignît à
ioM. iK, autre consolateur. Le Fils est encore autre lui et au Père dans le sacrement de bap-

lud. T,32. que Père, selon qu'il dit lui-même Il y


le : tême : Allez, dit-il à ses apôtres, enseignez m^"

en a un autre qui rend témoignage de moi. toutes les nations, bnptisez-les au nom du Père,

Saint Fulgence répond, que le mot autre du Fils et du Saint-Esprit, n


dans ces deux endroits est mis pour distin- 9. L'Écriture dit, en parlant de la généra-
,f„'J;î^"'^
guer les personnes de la Trinité et non , tion du Fils, qu'il a été engendré du sein '^^"""'• *•

pour marquer entre elles une diflerence de avant l'aurore ; ce qui, disaient les ariens,
nature et de substance. Si le Père rend té- ne peut s'entendre que d'une naissance char-
moignage au Fils on ne peut douter qu'il
,
nelle. Saint Fulgence répond, que le terme
ne soit une personne distinguée du Fils; s'il de sein ou de ventre ne se dit de Dieu, en
est véritablement son Père, il est donc aussi cet endroit, que dans un sens métaphori-
de môme nature. C'est pourquoi le Fils dit : que; et que l'Écriture se sert souvent de
Mon Père et moi , nous sommes une même chose. cette figure, lorsqu'elle parle de Dieu, com-
Il appuie sa réponse sur le décret du concile me on voit dans le livre des Proverbes, où
de Nicée, où le Fils fut dit consubstanliel au nous lisons Les yeux de Dieu considèrent
: P""- ">

Père et remarque que qaoique ce terme ne


; ,
les bons et les mauvais ; que. par le terme de

.se trouve pas dans les Écritures la doctrine, ventre, on doit entendi'e la nature divine; et
signifiée par ce tenne s'y trouve; qu'il a été
'
que ces mots A vant l'aurore, signifient que
:

d'usage dans l'Église, lorsqu'il s'élevait de la naissance du Fils est éternelle, et qu'elle
nouvelles erreurs, d'employer de nouveaux n'a pas commencé dans le temps. Encore
termes pour les combattre comme on a; donc que nous confessions que le Fils est né
employé le mot de non engendré , en parlant du sein de la Vierge selon la chair, nous ne
du Père, pour confondre Sabellius qui ne douions pas qu'il ne soit né engendré du
voulait pas reconnaître trois personnes en sein du Père, c'est-à-dire de la substance du
Dieu. Il ajoute que ses adversaires qui don- Père; au contraire nous confessons ' qu'il est

' Mintm est quod in hnc nomine sonus tan- l'ait em Filiumque non communione substantiœ
tnm a qiiibiisdam itttenditur, ncc dicli intelligen- vniim iutelligil, sed personali singul<iritate con-
tUi invrstigatur, cum pleraque non sint antigui- ftindit. Fiil^'., lil). Contra Ariiin., p.ig. 63.
Itis dicta, et pro tempornm cnusnruiiiqtie oppor- ' Filium secundum cnrnem
Liret ergo conftteamur
tunitatibus professioni fiUei reperianlur inserla. ex utero Yirginisprocrealum.nnii tamfn nmbigi-
Sicul iugeiiiliis l'aler, nusquam in Scripluris ca- mus de utero Patrùi, id est de l'utri:) subst4uilia
nonicis legitiir, et tamen secundum fidei verita- genitum , imn sic confileniur Filiiim de utero Dci
lem ingritilus prœdkatur tidrersus Snliellium qui , rerum Vetim nalum esse, sicul de Yirginis utero
[vi" siÈCLt:.] Cn.\PITRE I. — S.MNT FULGENCE DE RUSPE. d9
du sein du Vive, vnii Diou, comme il est
ne' que, triompha de la victoire que la foi catho-
vrai homme du sein de la Viern;e.
lie lique avait remportée sur l'arianisme.
.or<f>ii 10. Il u'ost nas iiormis de dire que Dieu
' *
mil cl- '_
">. w» soit composé tle trois parties. C'est la dcr-
.

§ m.
nii^-re objection des ariens, .'i laquelle saint
Les trois livres au roi Trasamond.
Ful|:rence répond qne l'Kglise enseigne avec
vérité, (ju'il y a trois personnes en Dieu, et Trasamond, voulant éprouver de non-
1. oco.inmK!
T^
• 1 • "* livre*.
Si par le nom de
I t ï •

une seule substance. veau le savoir de samt Fulgence, lui envoya


Djuicr.
Qiejj Q,^ ,jp jiojt eniendre que le Père seul d'autres questions par un de ses officiers, nom-
dans l'Écriture, où il est dit, que le Sei- mé Félix avec ordre de les lire seulement
,

gneur est un et qu'on ne doit servir que lui, une fois devant lui, sans lui permettre d'en
il s'ensuivra qne nous ne devons au Fils au- prendre copie. Carie roi craignait qu'il n'in-
cune marque d'adoration, ni de servitude, sérât dans sa réponse les propres paroles de
parce que tout ce qui n'appartient point la ;\ l'écrit, comme il avait fait à l'égard des ob-
nature de Dieu seul, ne mi'rite point d'ado- que tout le peuple ne
jections des ariens, et
ii. ïcvi, i-ation de notre part. Comment donc est-il dit encore une fois témoin de l'avantage qu'il
fiit

du Fils, que les anges et toutes les vertus l'a- remporterait sur ceux de cette secte. Saint
dorent et le louent continuellement dans le Fulgence d'abord dillicidté de répondre à
fit

•I. iixi,
ciel? Il est dit encore que tous les rois de la un dont il savait à peine le contenu.
écrit,

terre l'adoreront, et que toutes les nations le Pressé cependant par Trasamond il lui ,

serviront. Serait-il adoré des hommes et des adressa trois livres que nous avons encore ,
anges, s'il n'était pas de la substance d'un et qu'il composa à Carthage quelque temps

Dieu? Ce Père rapporte un grand nombre après le précédent.


de passages pour prouver la divinité du Fils 2. Il commence le premier livre par faii'e Anaiy.o du
n -, , , 1 , , . P'emior livre,
et du Saint-Esprit, entre autres celui delà pre- ressouvenir ce prince de la façon dont il lui p«eo9.
"'• mière Épître de saint Jean, où il est dit // y : avait ordonné de témoignant qu'il
l'écrire,
en trois qui rendent tèmoiynage dans le ciel, le ne s'était rendu
à ses ordres que par ,

Père , le Verbe et le Saint-Esprit, et ces trois la crainte qu'on ne l'accusât d'un dédain or-

sont une même chose. Il y en ajoute un de saint gueilleux, ou de défiance de sa foi. Car ((
cap. i.

Cj'priendans son Épitre de l'Unité de rt'fjlise, je ne doute point, lui dit-il, Prince très-
et finit sa réponse en disant que nous n'ado- clément, que vous ne sachiez que c'est à
rons pas un Dieu composé '
de trois parties, peu près la même chose parmi les chré-
mais que conformément à la règle de la foi
, tiens de renoncer la foi, ou de ne vouloir pas
apostolique, nous confessons que le Fils est la défendre. » Il témoigne partout un grand
coéternel h son Père, né de lui sans commen- respect pour Trasamond, quoique hérétique
cement parfait comme lui et d'une puis-
,
et persécuteur de l'Église et le loue surtout ,

sance égale; que le Saint-Esprit est Dieu, de son application à s'instruire de la religion.
qu'il n'est diÛ'érent ni du Fils ni du Père, et « On a vu rarement jusqu'ici, dit-il, qu'un

qu'il n'est confondu ni dans l'un ni dans roi barbare occupé du gouvernement de ses
l'autre. L'Esprit du Père et du Fils est un et états, fût touché d'un désir si ardent d'ap-

le même, et quoiqu'il procède tout entier du prendi-e la sagesse. Ce ne sont d'ordinaire m.

Père, il est néanmoins tout entier dans l'un et que des gens de loisir, ou des romains, qui s'y
dans l'autre, sans être divisé dans les deux, appliquent si fortement. Les barbares se font
étant inséparablement commun à tous les gloire d'ignorance , comme si elle leur était
M Pu:?., deux. Avant d'envoyer cet écrit au roi, saint propre. Mais il lui fait remarquer que la
» in.

Fulgence l'examina avec plusieurs habiles recherche de la vérité n'est un grand bien que
gens. Ce prince le lut, sans en être touché. lorsqu'on la recherche sincèrement. Après 17.

Mais le peuple, à qui on l'avait communi- ce préambule il remarque que presque tou-

verum non dubitamus hominem processisse. Ibid., Sunctwn quoque Spirilum non aliud fatemur esse
pag. 65. quam Deum, nec a Filio, nec a Pâtre diversum, nec
' Non ergo ex tribus partibus unum colimus in Filio, nec iti Paire confustim. Unus est enim,
Deum, sed apostoticœ fidei regiilam retinenles, atque idem Patris et Filii Spiritus, totus de Pâtre
perfectiim et consempiternum Filium, de perfecto procedens, totus in utroque consistens, nec est di-
et seinpiterno Pâtre, sine initia genitum, et potes- visus in singulis, quœ inscparabiliter est utrius-
tate non imparem, et natura fatemur œqualem. que communis. Fulg., ibid., pag. 68.
,

20 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


les les h(?résies ne sont venues que faute qu'elle a été plus blessée par le péché que
d'avoir bien compris le m^•sl^^p do l'Incarna- le corps, puisqu'elle était, ii raison de son
tion. Les Lérétiqiies qui ont erré sur ce mys- intelligence, plus capable do résister an ten-
tère, ou ne l'ont pas cru comme il est, ou ne tateur. D'où il suit que l'homme entier ayant
l'ont pas cru du tout. Les manichéens, ne été blessé par le péché. Dieu a aussi sauvé
jiouvant pas s'imaginer qu'au Pieu eiît pris l'homme entier, en le prenant : afin que l'on

une véritable diair, parce qu'ils la croient coinuit que le créateur de l'homme on ('-tait

naturellement souillée, et d'un mauvais prin- devenu le réparateur, .\quoi il faut ajouter, C«f. w
cipe, ont mieux aimé croire que la chair dans que la qualité de Médiateur que l'Écriture
Jésus-Christ n'en avait que l'apparence, plu- donne à Jésus-Christ, suppose nécessaire-
Cap. T. tôt que la réalité. Il leur oppose le témoi- ment qu'il est Dieu parfait et homme par-
gnage de l'apôtre saint Jean, conçu en ces fait. Aussi l'Évangéliste, après avoir établi
termes Tout esprit qui confesse que Jisus-
: sa divinité, en disant: Au commencement J .n. 1,

C/trist est venu datis une chair véritable, est était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le

de Dieu. Lt tout esprit qui ne confesse jxis que Verbe était Dieu, établit ensuite son huma-
Jésus-C/iri:t est venu dans la chair, n'est jmnt nité, en ajoutant Et : le Verbe aété fuit chair, Cip. ivt

de Dieu : Photin ne niait


c'est l'Antéchrist. et il a habité parmi nous. S'il a été fait chair,

point que Jésus-Christ fut né d'une Vierge, disaient les hérétiques, il n'a donc point eu
ni qu'il eût pris d'elle une véritable chair; d'âme. Saint Fulgence répond que l'Ecri-
mais il sootenait qu'il n'était pas Dieu, ne ture, en parlant de l'homme entier, se sert
concevant pas qu'il put être né substantiel- quehpiefois du nom de chair, et quelquefois
lement de Dieu le Père, et qu'il se fût en- du seul terme d'«mf." Toute chair , àxl Isaie
Cap. Ti. suite fait chair. Saint Fulgence fait voir, par vei'ra le salut de Dieu, c'est-A-dire l'avènement
ces trois premières paroles de l'Evangile, du Sauveur. Et Moïse en marquant le nom-
Joio. I, 1. selon saint Jean Au commencement était le
: bre des descendants du Jacob qui entrè-
Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était rent avec lui en Egypte, dit qu'Us étaient en
Dieu que,
naissance du Verbe est éternelle,
la tout soicanteet quinze âmes. D'ailleurs Jésus-

qu'il est une personne distinguée de celle du Chiist parle lui-même de son âme en beau-
Op. Tii. Père et de la même substance. Il y avait d'au- coup d'endroits. Et saint Pierre, dans les 3
Alt.
. 31.
11,

tres hérétiques qui niaient également que Jé- Actes des apôtres, la distingue en termes ex-
sus-Cliiist bit Dieu et homme ; et d'autres près de son corps.
qui rejetaient sm- la divinité tout ce qui doit 3. Le second livre à Trasaraond a pour
Sfrn.nl II

C*p. X, i:
se rapporter à la nature humaine dans Jésus- titre De l'Immensité du Fils de Dieu. Mais
:

X, XI, XII yf. s;i.

>MI. Christ. Pour réfuter toutes ces hérésies, et saint Fulgence ne laisse pas d'y traiter en-
établir en même temps la foi catholique sur core de la réparation du genre humain par
l'Incarnation, ce Père entreprend de montrer le sang de Jésus-Christ, d Quel homme, dit-il, C,. 1.

qu'il y a en Jésus-Christ, médiateur de Dieu aurait pu être le médecin du genre humain,


et des hommes, deux natures parfaites, unies tous avant tiré leur orisine d'une racine cor-
en une seule personne. Il le fait, en alléguant rompue? Les anges ne pouvaient point répa-
un grand nomhre de passages de l'Ecriture, rer la chute de l'homme, puisqu'eux-mèmes
où l'on voit qu'il y a trois choses en Jésus- avaient été capables de tomber par leur na-
Christ : la chair, l'àme raisonnable et la divi- ture. Il n'y avait donc que la vertu divine,
nité. Il s'applique pailicuhèrement ù montrer c'est-à-dire le Fils de Dieu qui est la vertu
qu'il a une âme raisonnable. Il demande à et la sagesse du Père, qui piit rétajjlir l'hom-

ceux qui le niaient si l'âme n'a point été


, me après sa chute, comme il a empêché par
créée de Dieu ou si elle n'a point été viciée
, son secours la chute des anges qui ont per-
parle péché, ou si elle est d'une nature plus sévéré dans le bien. Le Fils étant Dieu par
vile que le coips, ou euDn si Dieu ne pouirait nature, il est aussi immense et éternel.
pas la guérir de sa blessure. On ne peut dire Comme le Père est dans le Fils, le Fils est

que l'àme n'ait point été créée de Dieu, ni dans le Père. Cette unité naturelle prouve
qu'il soit impossible à Dieu de la guérir de la l'égalité de ces deux personnes, qui est telle

phiie qu'elle a rerue par le péuhé. Il ne se- que l'iulini a engendré l'infini, et que l'in-

raitpas moins alisurdc d'avancer qu'elle est liui est né de l'infini, sans que le Père ait
d'une nature inférieure au corps, puisque rien perdu de son immensité. Le Père a tout
c'est elle qui lui donne la vie. Il parait aussi fait par le Fils, autrement l'on ne pourra^
[Vl' SIÈCLE.] CIIAPITHI': I. — SAINT FULGENCE UE RUSPE. 21

pas dire qno le Fils est la vertu, la sagesse engendré de père ni mère que c'est pro- ;

et la main ilc Diou, ni qiw tontes choses ont prement de Jésus-ChrisI, dont Melchis('dech
été faites par le Fils; ce ipii est contraire à a été la figure, qu'il est dit, qu'il est sans père

rFcriluie qui donne les noms de sagesse,


lui et sans mère ;puisqu'en tant que Fils de
de vertu et de main, et qui nous assure que Dieu, il est né sans mère et qu'en tant que
;

rien tle tout ce qui est fait n'a été lait sans filsde l'Homme il est né sans père. Saint
,

lui. Quelqu'un dira peut-être Il est écrit : Fulgence explique ensuite divers passages ,c.p. tm.
que le Verbe était au commencement, mais de l'Écritm-e qui paraissent contraires <i

non pas avant le commencement. «Cette ob- l'immensité du Fils, en disant que, quoi-
jection, dit saint Fulgencc, ne peut tomber qu'il soit substantiellement partout, il n'est
clans l'esprit que de ceux qui n'enleudcnl pas également dans tout; qu'il est partout
pas la force du terme commencement, qui par sa puissance qu'il n'est pas partout par
;

doit se rendre par éternel, cela seul devant sa grâce, mais seulement dans ceux <i qui il
passer pour princii)e et pour commence- la donne, et en qui il opère. Que l'Ecriture u,

ment qui n'a rien de préexistant. Que si


,
établit clairement l'immensité du Fils, lors-
l'on objecte que, de ce que le Fils s'appelle qu'elle dit qu'il est la splendeur delà gloire
•>>, lui-même le commencement, sa naissance doit du Père, le caractère de sa substance, et s»i>. m, 26

aussi avoir un commencement il s'ensuivra ; qu'il soutient tout par la puissance de sa nbr. 1,3.

que le Fils doit avoir aussi une fin puis- ,


parole que s'il est dit que le Fils est des-
;

'iS. qu'il dit dans l'Apocalypse Je suis le com- : cendu du ciel ce n'est pas par un mou-
,

mencement tt la [in. Alors que répondra-t- vement local, en sorte qu'il soit tellement
on à ce que dit saint Jean dans sa pre- descendu selon la substance de sa divi-
. V, mière Epitre Le Fils est le vrai Dieu, et
: nité, qu'il n'ait plus été dans le ciel, lors-
la vie éternelle ? Il faut donc dire avec l'É- qu'il est descendu sur la terx'c que l'Écri- ;
caj. «.

glise catholique et apostolique', que Jésus- ture n'emploie ces façons de parler à l'é-
Christ est nommé la fin ,
parce qu'il sei-a gard de Dieu, que pour se proportionner h
éternellement, uon-sculoment dans la suIj- la faiblesse de uotre esprit qu'au surplus il ; G.n«. xi.ô.

stance , selon laquellené naturelle- il est est dit également du Père, qu'il descendit
ment éternel du Père mais encore dans , pom- voir la tour de Babel et du Père et : jr„„. m-,
'

celle qu'il a prise dans le temps de sa mère ;


du Fils, comme aussi du Saint-Esprit, qu'ils '
'

et qu'on lui donne avec vérité le nom de feront leur demeure dans le cœur de ceux
principe, parce que, selon la substance di- qui aiment le Fils. Les trois personnes de la •

vine, il est coéternel à celui qui l'a engendré. Trinité viennent et s'en retournent d'une
On peut dire encore que Jésus-Christ est le manière qui nous est incompréhensible, et
principe , parce que les choses qui n'étaient qui marquent de leur part, non un mouve-
pas, ont eu par lui leur existence; et qu'il est ment de lieu en lieu, mais les effets de leur
la fin, parce que plusieurs choses qui ont com- bonté envers les hommes. Quoique remplis- cip. <i.

mencé d'être, ont par lui d'être toujours, n saut tout par leur immensité, il est dit qu'ils
On objectait qu'il y avait aussi des créa-
,
viennent chez quelqu'un, lorsqu'ils daignent
uAr 711,3. tures sans commencement, comme Melchi- se manifester à lui et qu'ils s'en éloignent,
:

sédecli, dont dans l'Épitre aux Hé-


il est dit lorsqu'ils cessent de lui communiquer la lu-
breux, qu'il a été sans père, sans mère, sans mière de leur amoui-. Mais Dieu n'est pas
généalogie, et qu'il n'a eu ni commencement, pour cela absent localement, lorsqu'il aban-
ni fin de sa vie. Saint Fulgence répond, qu'il donne avec justice celui qui n'est pas digne
n'appartient à aucune créature d'être sans de le posséder comme il n'est pas présent
:

commencement, toutes ayant été faites de localement à celui qu'il visite par un effet de
rien; que l'on ne doit point prendre à la lettre sa miséricorde, lorsqu'il l'en a rendu digne ;

ce qui est dit de Meichisédech, Adam étant le il faut juger de la présence, ou de l'avène-

seul d'entre les hommes qui n'ait point été ment des trois personnes de la Trinité, com-

' Veritas est catholicœ atque apostolicœ fidei dit sine fine perpetmim. Sic eum ideo juste prœ-
relinenda, quœ sicut Christum propterca finem dical, reracilerque principium, quoniam in dirina
nominal, quia non solum in illa suhstantia qun quam liabet subslantin, genituri seiiiper asserit
natus est naturaliler sempiternus ex Paire, sed coictenmm. Lib. II ad Trasam., cap. v.
eliani in ea quam in temporc sumjtsit ex maire, cré-
HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
vertu do Jésus- '"'
me on jupe de ce qui est dit de leur repos. nés. Il enseigne que par la
'

Dieu ne se reposa point après avoir créé le Christ, qui guérit l'hémorroïsse, il ne faut
monde, comme s'il eût beaucoup fatigué en cntendjc autre chose que la guérison mira-
cif m. le créant. La création s'est faite par sa vo- culeuse de cette femme par la vertu de ojuxt. «

lonté seule, ainsi que le dit le Psalmiste : Dieu, et non pas qu'il sortit du Sauveur une
Il a fait tout ce qu'il a voulu, dans le ciel, sur vertu distinguée de lui, n'étant pas conceva-
la terre, dans la mer et dans tous les al/lmes. ble comme une vertu sort d'une vertu que ;
i»i

La venue et la descente de Dieu n'ont donc sou immensité parait, en ce que, selon l'E-
rien de local , ces façons de parler ne ser- criture, U connaît les plus secrètes pensées Jun. n,:

vant que pour nous faire voir que Dieu a de l'homme et en ce qu'il dit lui-même
; :

bien voulu nous faire part de ses grâces et Personnne n'est monté au ciel que celui qui est ibib. u.l

de ses lumières. Saint Fulgence explique descendu du ciel, non' que sa nature hu- ]

» "• dans le même sens le terme de monter. Il est maine soit répandue partout mais parce ,

dit dans saint Jean, que Jésus-Christ répon- qu'étant fils de Dieu et fils de l'homme , jkd. ni.i
j<Mi>.<i,i7.
(jji à Marie Ne me touchez pas, car je ne suis
: vrai Dieu, né du Père, comme il est viai
pas encore monté vers mon Père. Mais il est homme , parce qu'il est né de l'homme , il
uTiii
"."* ^^ aussi dans saint Matthieu que Jésus- ,
remplit selon sa divinité, qui n'est renfermée
Christ s'étant présenté devant Marie et les dans aucun lieu, le ciel et la terre , quoi-
autres saintes femmes elles lui embrassè-
, qu'alors il fut localement sur la terre, selon cap. ivm.

rent les pieds et l'adorèrent. « Comment, dit son humanité. Parla distinction de ces deux
ce Père, Jésus-Clirist aurait-il refusé à Ma- natures, on explique comment il est \Tai de
rie de le toucher, sous prétexte qu'il n'était dire que Jésus-Christ viendra sur les nues ,

point encore monté à son Père, et lui aurait- que toute chair le verra qu'il est monté au
, ap<ic.i.i,i

il accordé la même grâce un moment après, ciel à la vue de ses apôtres , et qu'il est le a.i ,,>

si l'on devait prcndi-e terme de


à. la lettre le Dieu vrai et vivant qu'il habite dans les
,

monter. Jésus-Christ, en refusant à cette fem- cœurs des fidèles par la foi. Saint Fulgence i Tko ».i,i
'
me de le toucher, parce qu'il n'était pas en- tire sa dernière preuve de l'immensité du i6.'
'

core monté à son Père, la reprenait tacite- Fils et des autres personnes de la Trinité,
ment de ce qu'elle croyait inférieur au Père de la forme du baptême. Selon le précepte
celui qu'elle pleurait comme mort et en lui ; du Seigneur-, le baptême doit être conféré
permettant quelque temps après de le tou- au nom du Père du Fils et du Saint-Esprit.
,

cher, il voulait la convaincre de la vérité de Si donc les trois personnes de la Trinité c«..j'

cip. iiT, sa résurrection. Dans la première appari- sanctifient dans le baptême, il est évident
tion il a insinué à Marie, qu'elle devait le que le baptême, s'adniinistrant dans toutes
croire égal à son Père et dans la seconde,
; les parties du monde en un même temps,
qu'elle ne pouvait point douter de la résur- les trois personnes y doivent être présentes ;
rection du corps qu'elle avait vu mettre dans et dès lors on ne peut constester l'immen-
le tombeau. » Il montre que le terme élever, sité au Fils, comme au Pore et au Saint-Es-

lorsqu'on parle de Dieu dans les saintes prit autrement il faudrait ôler le nom du
:

Écritures, doit s'expliquer dans le sens que Fils de la forme du baptême.


nous donnons au tenne de sanctifier dans A. Dans le troisième livre saint Fulgence An,!,

l'Oraison dominicale. Comme nous y deman- revient au mvstère de l'Incarnation, dont "• » t">^-
ition.l.

dons, non pas que Dieu soit sanctifié, mais il avait déjà traite avec assez d'étendue dans c.;-

qu'il nous donne la grâce de sanctification, le premier. Il y attaque surtout ceux qui
ou que son nom soit sanctifié dans nous enseignaient que la Divinité avait souffert :

par nos bonnes œuvres de même lorsque , d'où il suivait qu'elle avait été détériorée par
nous demandons que Dieu soit élevé, nous son union avec la nature humaine dans
demandons de l'être nous-mêmes par le Jésus-Clirist.Le but de ce troisième li\Te
progrès dans l'intelligence des choses divi- est donc de montrer qu'il y a en Jésus-Christ

« A'cmo ascendit in cœlum, nisi qui de cœlo des- revus ex homine, licet secundum veram humani-
cendit Filius hominis qui est in cœlo : non quia Inlem sunm locntitcr, tune cssel in terra, secun-
humana Christi subslnnlia fuissel uliique di/Juiia, dum dirinilnlmi tainen, quie nullatcnus loco
sed qtioniam unus idcnique Dei Filius alquf ho- conlinetur, cwlum totus impkrel et terram. Lit'. I
minis Filius verus Deu-f ex Pâtre, sicul homo ad Trasim., cap. xvii. .
[Vl" SIÈCLE.] niAPITRR I. — SAINT FUÏ-r.ENCE DF. IIUSPE. 2:j

deux natures, ilonl l'uuo qui est la divinité delà mort, il l'a élcinto elle-même. C'est
il l()uj(uii'S été impassible; et l'autre qui est toutefois le seul et môme Jésus-Christ' quia
la nature humaine, a soullert mort; et la fait et soull'ert tout cela, ]virce que la nature
"• que CCS deux natures sont unies en Jésus- divine et la luitiue hinnaine ont dcuuMin; dans
Clirist en une seule poi sonne, chaque iialuie un et même ChrisI, Dieu n'ayant point ('té

conservant les proiiriétés. » Nous croyons ,


confondu dans l'homme, mais uni à l'hom-
dit ce Père ,
que le Fils de Pieu '
est né îivant me de manière qu'il a donné dans la mê-
;

tout commencement, de la substance du me persoime des niar([iies de l'existence de


Père, qu'il est Dieu do Dieu, et Seigneur de ces deux natures; de la tlivinité par ses mira-
Seigneur; qu'il n'est pas de rien, mais du cles, de l'humanité par les infirmités de sa
Père; et qu'il n'est point d'une autre nature, chair. C'est pourquoi l'Apôtre appelle le
parce qu'il n'y a rien eu de cocternel ù seul et même Jésus-Christ crucifié , et la
Dieu, qui ail pu donner naissance au Fils. sagesse et la vertu de Dieu : Nous prêchons , i co.. 1,23,

Que la personne du Père soit autre que celle dit-il, JésHS-Cltrist crucifié, qui est un scan-
du Fils c'est ce que le Fils déclare en plu-
, dale aux Juifs , mais qui est la force de Dieu
>'"' • sieui's endroits de l'Evangile : Je ne suis pas et la sagesse de Dieu à ceux qui sont appelés.
seul , dit-il, 7nuis nwn J'ire qui m'a envoyé est Le commerce de notre Uédemplion deman-
avec moi : que la substance du Père soit la dait que celui qui devait en être le niédialciu-
même que celle du Fils, c'est encore ce que fut vrai homme et vrai Dieu mais de ma- ,

loan.iii,»!,
Je pjig déclare en disant Celui qui croit en: nière que, les deux natures étant unies en
moi, ne croit pas en moi, mais en celui qui une personne. Dieu ne fût pas confondu
m\i envoyé : et celui qui me voit , voit celui dans l'homme, ni l'homme dans Dieu. Car
qui m'a envoyé. Il n'y a donc qu'un Fils en- aucun homme n'aurait été propre pour
cai .
ni.
gendre de la nature du Père qui est appelé ,
vaincre l'ennemi du genre humain, si dans
unique ou scid engendré. Comme il est Jésus-Christ, médiateur de Dieu et des hom-
insépai'ablc - du Père, à cause de l'unité mes, il y avait eu quelque chose de moins
de leur nature, il ne peut être confondu que l'homme, ou que l'homme, que Dieu
avec le Père à cause de la propriété de avait pris eût été consumé par son union
,

loan. 1, 12. sa personne. Il est vrai que le Fils a donné avec la divinité. En effet la nature humaine
à tous ceux qui l'ont reçu, le pouvoir ne pouvait être consumée dans sa répara-
cir.ii-. d'être faits enfants de Dieu. Mais ce ne tion puisqu'une partie
; c'est-à-dire celle ,

sont que des enfants adoptifs qui n'ont de qui est condamnée ne sera pas consumée
,

commun avec le Fils unique que le nom et par l'éternité des supplices. Dieu a donc été ca;.. vu.

la gloire; mais non pas la nature ni la di- fait homme sans aucun changement de sa
V, v:. gnité. Étant vrai Dieu, il s'est fait homme; substance on ne peut pas diie qu'une
; et
mais en prenant la forme d'esclave il est , partie de la divinité soitdemeurée dans le
demeuré plein de grâce et de vérité. Devenu Père, et l'autre dans le sein de la Vierge.
passible par son Incarnation et sujet à la Le Fds est demeui-é dans le Père tout ce
mort, il n'a pas senti comme Dieu l'aiguillon qu'il était pour être fait dans le sein de la

' Credimus Dei Filium ante omne prorsus ini- suhjaccns; vere mortmis, mortem non sentiens
tium de Patris substantia genilain, Dcum de Deo, sed exstinguens. Bœc aulem cnncta unus Christus
Dominum de Domino ; non ex nihilo, quia de Pa- et gessit et pertulit, qui in uno eodrmque Cliristo

ire : von ex alla nalura, quia aliquid fuit coœ- vera divinitatis veraque humanilatis nalura
,

lerniim Deo, iinde origo Filio prœstarelur... Ad permansit, dum Dcus non confusus homini, sed
liane dislinctionem géminée personœ, et professio- unitus, sic in una persona utriusqve naturœ per-
nem unius subslantiœ in Pâtre et Filio pcrdocen- manentis indicia demonstravit vt verus Deus et ,

dam, ipse Filius dicit : Qui crédit in uie, non cré- plenus veris dirinisque virtutibus in homine cla-
dit in me, sed in enm qui uiisit lue et qui vidct : reret assumpto, et reritas infirmilatis l)umanœ ve-
me, videt eum qui me misit. Lil). 111 ad Trasimond., rnm plenumque tiominein monstraret in Deo.
cap. ni. Propler quod beatus Àpostohis jinum eumdemque
* Sicut inseparabilis est unitate naturœ, sic in- Cliristum, et crucifixum prœdicat, et Dei rirtutem
confusibilis permanet proprietate personœ. Ibid., sapientiamque pronuntiat, dicens : Nos autem
cap. ni. priEdicamus Cliristum crucifixuu), Judîeis quidem
5 J7;iMS idemque Christus Dei et hnminis Filius scandalum ipsis autem vocatis Christuui Dei et
,

qui et scmetipsum exinanivit, et plenus gratice ve- Dei sapientiam. Ibid., cap. vi.

ritatisque permamit, vere passus, passioni non


,

24 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


Cip. rwt. Vierge tout ce qu'il n'était pas. Le remède montre que lorsque saint Pierre dit dans les
de notre infirmité demandait que comme Actes que Dieu a oint de l'Esprit Saint et df
l'unilé de nature demeure dans le Père et
' force Jésus de Nazareth , cela doit s'entendre Cap. Ilii M
XtV,

le Fils, l'unité de personne demeurât en de la nature hvmiaiire, elle seule étant dési-
Jésus-Christ; et que comme la distinction gnée par le nom de Nazareth où en effet
personnelle ne fait pas deux substances dans elle a pris sa naissance. 11 distingue encore

le Père et le Fils, la distinction des deux les autres choses qui doivent s'atlriltuer à la

natures ne fit pas deux poi-sonnes en Jésus- nature humaine, à l'exclusion de la divine.
Clirisl. Et encore, que comme l'unité de Les pleurs que Jésus-Christ versa sur La-
nature ne confond pas le Père avec le Fils, zare; le trouble qu'il ressentit en son âme h ITI.

de même l'unité personnelle ne confondit la veille de sa passion; toutes les infirmités

pas l'homme avec le Verbe; et que de même de son enfance l'accroissement de son âge
,

qu'à cause de l'unité de nature, le Fils uni- et de sa sagesse tout cela appartient à la
:

que ne peut jamais être séparé du Père de : nature humaine, quoiqu'on les dise de Jésus-
même aussi à cause de l'unité de personne Christ à cause de l'unité de personne dans
l'homme ne puisse être séparé de Uicu qui les deux natures. C'est encore de la nature

se l'est uni. Mais cela devait se faire de telle humaine que l'on doit entendre ce qui est
sorte qu'encore que le Christ ne puisse être dit dans l'Kpître aux Hébreux que Jésus ,

divisé ni confondu le seul et même Christ


, qui avait été rendu pour un peu de temps
fit en même temps, étant véritablement Dieu inférieur aux anges, a été couronné de
et homme ce qui appartient à Dieu et à
, gloire et d'honneur à cause de la mort qu'il
l'homme. L'Apôtre marque clairement l'une a soufferte. Dieu par sa bonté ayant voulu
iicor. iiti,
et l'autre nature, lorsqu'il dit Encore qu'il : qu'il mourût pour tous. Les mouvements de Cap. III.

ait été cnici/ié selon la faiblesse de la chair, joie, de tristesse, d'ennui, de crainte, appar-
il vit néanmoins par la vertu de Dieu. tiennent visiblement à la nature humaine,
cp. ii.i. 5. Après avoir ainsi établi la distinction de môme que le désir que Jésus-Christ té-
des natures et l'unité des personnes en moigna de manger avec ses disciples avant
Jésus-Christ, saint Fulgence répond aux sa passion; mais quoiqu'il ait eu les infir-
objections de ceux qui soutenaient qu'en- mités de notre nature, il les a eues volontai-
core que la Divinité soit impassible en elle- rement, comme il a souffert volontairement
même, elle avait néanmoins souffert depuis la mort. C'est ce qu'il témoigne dans saint

sou union avec la chair. Il prouve par divers Jean lorsqu'il dit J'ai le /Muroir de quitter
:

iiCf.r.1,13. passages de lÉcriture, qu'elle est égale- la vie, et j'ai le jwuvoir de la reprendre.
ment immuable en elle-même et unie à , Au reste ce n'est ni dans son âme ni dans sa Cap. ixii.

II«br. I. 10, l'homme dans Jésus-Christ; que n'étant sus- divinité, mais dans son corps seul qu'il est
II.
ceptible d'aucun changement dans le Père, mort. L'Évangile le dit clairement lorsqu'il
elle n'en peut être susceptible dans le Fils ,
rapporte que Joseph d'.Vrimathie demanda
le temps ne pouvant rien ajouter à ce qui à Pilate d'enlever le corps de Jésus, et que
est immuable de sa nature, ni en rien dimi- Pilate lui ayant permis, il enleva le corps JoiD. \ti,;o.

nuer. Il montre qn'ii cause de l'unité de per- de Jésus, l'embauma et l'ensevelit. Néan-
sonne, on dit de Jésus-Christ que le Sei- moins , à cause de l'unité de personne, on
gneur de gloire a été crucifié, et l'Auteur de doit dire que Dieu' n'a jamais abandonné
la vie mis à mort. Mais, en expliquant ce qui l'homme qu'il a pris dans le aein de la
est propre à chacune des deux natures il , Vierge, ni à la mort, ni dans le tombeau.

' Hcec enim infirmitatis nostrœ medela poscebat, tus; sic tamen, ut quamvis Chrislus nec confundi
ut, sicnt naturatis unitas in Pâtre manet et Filio, possrt aliqnando, nec dividi: unus tamen atque
sic personalis unitas manerel in Clirislo; et sicul idem Cliristus ; et e.T reritalr pnssionis hnnianw,
personalis dislinctio dtias non focil in Paire et quœ noslrn fucrant redderct : cl ex verilale im-
Fiho substantias, sic luituralis discrelioduas non ]iassilnlitnlis ditin(r, quœ sua fueranl Iribueret.
faccret m
Cliristo ptrsonas; ac riirsus, sicul uni- Lit), m ad Trasam.. cnp. vni.
las 7iaturalis Palrem non confundit et Fitium, Propter unitaiem verojersonee, quoniam Deus
'

sic unitas personalis hominem mm


confunderel et hominem quem ex Virginis utero suscrpit nec in ,

Verlium : cl qurniadmodum n gcnitore Dco per morte, nec in sepulcro deseruil, propterea Joan-
uiiilaUni nalurœ nunqunm srgrrgnri polcst uni- nes adjrcit : llii er{;o propter pnrasopveii Jiidn'u-
genilus Filius, sic a susceptore Deo per vnilatem ruin, rpiia jiixUi crat luuuuuientuin, posueruDl Jc-
pcrsomr nungiiam poasri lionio scparari suscep- fuin. I,il\ III, rap. xxv.
[VI' SIÈCLE.] CHAPITRE I. — SAINT FULGENCE DE RUSPE. 25

C'est pourquoi rHvnni^t'IisIc ajoute que que ses adversaires avaient été vaincus par
ibM. (1.
Joseiili mil .h'sus (huis un s(''puli'ro tout neuf son premier ('ciit, c'cst-ù-dire par ses ré-
peisouue n'avait iMicore t'té mis. Saiut
oi'i ponses anx dix objections des ariens, et que
""' Fu'gcnce rapporte plusieurs passages du les raisons que l'évêque Pinta lui avait oppo-
i^lV.
Nouveau Testament qui marquent cette uni- sées étaient tout à fait vaines.
té de personnes et ajoute ([u'en enns(5-
,

quence de celte unité, on dit que le Fils de § IV-


Dieu est mort, quoique la Divinité soit im- Lettres de saint Fulgence sur le vœu
I5JII. passible en elle-même. Il répète une seconde
de continence. ,
fois que' la divinité de Jésus-Christ n'a point
mu. abandonné son corps dans le sépulcre, ni 1. Une jeune femme s'iilant trouvée ré- „î?„7,'i',;j.''°

son âme dans les enfers, et que c'est sa di- duite à l'extrémité, dans une maladie, avait
vinité qui a empèclié la corruption de son embrassé la pénitence par l'imposition des
corps dans le tomljcau, comme elle a empo- mains suivant la coutume de l'Église. Le
ché que ràuio ne fût sensible à la douleur vœu (le continence était annexé à cette sorte
de l'enfer n'étant pas juste qu'une chair
: de pénitence mais la femme, pour l'exécu-
;

exempte de la corruption du péché, en res- tion de ce vœu dépendait de la volonté de


,

sentit dans le tombeau ni qu'une âme , son mari. Comme il était jeune lui-même et
exempte de l'eschnaj^e du péelu», soullVit qu'il ne croyait point pouvoir vivre dans la
quelque chose dans l'enfer. Ou ne peut pas continence, voyant que sa femme avait re-
dire que la nature humaine h laquelle le couvré la santé, il consulta saint Fulgence
Fils de Dieu s'est uni, ait été tout entière sur la manière dont il devait se comporter
dans le tomlicau ni dans l'enfer. Jésus-Christ avec elle. Ce Père ne nous a point fait con-
ne fut dans le tombeau que selon sa chair, naître ce jeune homme. Il parait seulement
et son âme seule descendit aux enfers. Ce qu'il demeurait en un lieu assez éloigné,
Père finit son troisième livre par une récapi- puisque les mauvais temps de l'hiver l'a-
tulation qui renferme ce que l'on doit croire vaient empêché de lui faire passer sa ré-
siu- l'Incarnation du Fils de Dieu, et par un ponse aussitôt qu'il l'aurait souhaité. Sa let-
détail des erreurs qui se sont élevées sur ce tre est aussi sans date. Ainsi l'on ne peut en
mystère, disant que tous ceux qui y persé- marquer le temps. On l'a mise toutefois la
véreront jusqu'à la mort, seront infaillible- première de celles de saint Fulgence dans
c.p. xM.T, ment condamnés. Il dit aussi quelque chose l'édition que nous suivons. Le jeune homme
des hérésies qui ont attaqué la divinité du lui avait demandé quelles règles l'on devait
Saint-Esprit, etmontre qu'il est vrai Dieu, garder dans l'usage du mariage, et si une
n'y ayant que Dieu seul qui puisse sancti- personne mariée était obligée de garder un
fier dans le baptême, répandre la charité vœu de continence.
dans le cœur de l'homme, et habiter dans 2. Sur la première
A
demande le saint répond
^
Anaijsf d«
celio leltre,

les fidèles. Il prie Dieu de rendre le roi que l'usage du mariage non-seulement n'est fe "•*
point mauvais en lui-môme, mais encore qu'il R*^'»' ""
Trasamond attentif à la parole de vérité et ,,

de l'éclairer de façon au Fils de


qu'il croie que selon l'Apôtre le lit nuptial
est permis, et "«s'-

Dieu, et qu'il honore Notre-Seigneur Jésus- est sans tache quand le mariage est traité
Christ de la même manière qu'il honore le avec honnêteté; que le même apôtre, en ap-
Père. Le roi admira la réponse du saint pelant devoir conjugal, l'obligation que les
évêque, mais il n'osa plus lui faire des ques- époux contractent à. cet égard, fait bien voir
tions. Un évêque du parti des ariens répli- qu'ils ne peuvent se refuser mutuellement
qua à de saint Fulgence. Nous n'avons
l'écrit ce devoir et qu'en même temps ils le peu-
,

plus cette réplique, ni la réponse que le vent sans crime. Mais saint Fulgence dit que
saint lui opposa, dans laquelle il montra, l'usage du mariage doit avoir pour fin la gé-
r»ig Vil., selon la remarque de l'auteur de sa Vie, nération des enfants', et non le plaisir; que
ea[>. ixill.

1 Nec carni suœ defuit, cum animam suam in non contingeret inferni, quam servitus nequivit
inferno dol re non sineret, nec animam suam in tenere peccati. Ihiil., cap. xxxi.
inferno deseruit, cum in sepulcro suam a mmew 2 Justilia utendi conjugii hœc est, ut non cx-
corruptione servaret. Dignum namque fuit ut plendœ suhslituendœ prolis obtentu,
lilndinis, sed
carnem sepulcri non corrumperel locus quum ,
sibi coitjuges congruo lempore misceantur. Fulg.,
peccati non corrupit affectus; et animam dolor Epist. 1, pag. 145.
2G HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
toutefois ce plaisir n'est pas un crime sem- vœu de continence, et cela sans le consen-
blalile à celuide l'adulli-rc mais que c'est
;
tement de l'autre, elle devait regarder ce
toujours un poché léger qui s'cflace par la vœu comme téméraire , et rendre le devoir
prière ' et par les bonnes œuvres. 11 veut avec une chaste sincérité, à celle qui n'avait
qu'aussitôt après la naissance des enfants, on point fait vœu. Il leur représente à l'un et à
'
leur procure une réj-'énératiou spirituelle l'autre la nécessité des bonnes oeuvres, en

par sacrement du baplêmc. Il enseigne


le leur disant que s'ils ne peuvent vivre dans
que dans le mariage diminue les
la fidélité la continence, ils ne peuvent se dispenser
fautes que l'on y commet par fragilité, et de faire l'aumône, de pratiquer la justice, de
qu'elle en obtient le pardon, pourvu qu'elle veiller ;\ la bonne conduite de leurs domesti-

soit accompagnée des œuvres de miséri- ques, d'élever leurs enfants dans la crainte
corde, qui ont tant de pouvoir dans la reli- du Seigneur, et d'être plus attentifs à leur
gion chrétienne, et qui y sont si essentielles donner une bonne éducation qu'à leur ,

que non-sculcmcnt ceux qui vivent dans le amasser des richesses.


mariage, mais ceux encore qui gardent le
célibat, doivent les pratiquer pour recevoir
§v.
la récompense ou de leur fidélité ou de leur Lettres à Galla et à Proha.
virginité. Il met la fornication au nombre
des crimes qui fciment l'entrée du ciel, sur- l. Saint Fulgence était dans son second L«nic-

tout dans les personnes mariées. exil, lorsqu'il apprit que Galla, fille du con-
3. A vœux que l'on a faits à
l'égard des sul Symmaque , venait de perdre son mari
pllr tes wcux. Dieu , Fulgence décide, d'après les
saint qui était aussi consul, et avec lequel elle
écrivains sacres, que l'on ne peut se dispen- n'avait pas vécu un au entier. Le diacre qui
ser de les accomplir. Mais il soutient que le lui apporta cette nouvelle, lui apprit aussi
vipu de continence fait par une des person- que Galla avait résolu de demeurer veuve.
nes mariées ne peut pas o]>liger l'autre, ni Il lui écrivit donc, et pour la consoler de la

dispenser celle qui a fait vo:;u de lui rendre mort de son mari, et pom* l'instruire des de-
le devoir conjugal, parce qu'il n'est pas per- voirs d'une veuve chrétienne. Il commence
mis aux personnes mariées de faire vœu de sa lettre par l'éloge des vertus de son mari,
continence, n'ayant pas leur corps en leur ne doutant point que Dieu ne l'eût enlevé
propre pouvoir. C'est pourquoi il met de la dans la Heur de son âge pour le faire jouir
diii'érence entre le vœu d'une vierge et d'un bonheur éternel. Il en prend occasion
d'une veuve, d'avec les personnes mariées, de la consoler de sa mort, lui disant avec
disant qu'il est libre à celles-là de faire vœu l'Apôtre qu'elle n'avait pas lieu de s'attris-
de continence, mais que celles-ci ne le peu- ter comme font les autres hommes qui
vent que d'un commun consentement, dans n'ont point d'espérance; parce que la mort
le désir d'otl'rir à Dieu sur l'autel de la foi ne nous enlève point les fidèles, mais seu-
un sacrifice en odeur de suavité. Ces prin- lement ceux qui ont vécu en ce monde dans
cipes posés, il conclut que si les personnes les ténèbres, c'est-à-dire dans le crime. Car,
qui l'avaient consulté s'étaient engagées una- les hommes de cette condition lorsqu'ils ,

nimement par vœux à la continence ', elles entendront dans les sépulcres la voix du
devaient la garder et que si elles se sen-
; Fils de Dieu ne ressusciteront point à la
,

taient tentées quelquefois des désirs de la vie connue les justes, mais à leur condamna-
chair, elles devaient recourir au secours de tion. Il lui représente que Dieu n'accorde
la divine pour en obtenir la
miséricorde ,
point son royaume suivant
la ditl'érence des
grâce 'de résister à la tentation mais que ; âges, mais à la vertuqu'une longue vie n'est
;

s'il n'y avait qu'une des deux qui eut fait point précieuse devant ses yeux, mais celle-

' Conjiigalus si in uxore sua, naturali duntaxat ' Et siquidem continenliampari vorislis assensu,

usu, aliquantulum intemperatus exccdal, non so- teniiremvcstrœdileclionis ctim Dei timorc servate:
litm scilicel gcneralionem quœrens, sed aliquando et si quando carnisinfirmitas mentem piit.ial.ani-
libidini carnix obedicns; hoc quidem sine culpa mus ad auxilium divinœ iniseralionis occurrat,
non fncit; talii autcm culpa cilius bcnc operanti ncc cédai libidini. Sirero continenliaw unus ves-
atquc nranli remillilur. Ibid. trum sine alterius rovit asstnsu, temerarie sevo-
' Cum nnla fueril proies diluendam celcrius spi- vi-'fse cngnoscul, et dcbitum cnnjugi casla siiioe-
rilali generalione non ncgligat. Ibid., pag. 146. rilalc redhibcat. Ibid., png. 119.
[vr SIÈCLE.] CHAPITIIE 1. — SAINT FULGENCE DE lUJSPE. 27

1;\ seule que l'on a passée dans les bonnes œu- qu'elle avait oublié sa naissance, vivant dans
vres, ne fiit-clle que de peu de durée. Il passe les humiliations, all'eclant de servir tout lo
de h\ au devoir des veuves et après lui avoir monde, se refusant pour ainsi dire le néces-
dit (juc la viryinilé est supérieure eu dignité '
saire alin d'en noinrir les pauvres, et cmplo-
au uiariape, il lui fait considiher la viduit(! yaul les vêtir ce d(mt elle aurait pu se vê-
i\

où elle se comuie un don de Dieu,


trouve , tir elle-même, contente de ce qu'il y avait de

<jui veut l'élever par degrés à ce qu'il y a plus vil. Il luiconseille donc, qu'encore qu'elle
diMueillcur. Il roniaïquii que la foi et les nni- lui soit supérieure par l'excellence de la vir-

vres de miséricorde iloul les chrélieus doi- ginité, de la prendre pour compagne dans la

vent s'occuper n'ont lieu qu'en celle vie, et non pratique de toutes les autres vertus de mé- ;

pas en l'autre que Dieu nous donne quel-


;
priser avec elle la noblesse de son exfraction,
quefois certains biens qui ne peuvent par eux- qui est le foyer de l'orgueil de s'appliquera
;

mêmes nous rendre licureuxni malheureux, la prière, au jcilne et à l'aumône mais dans ;

comme sont les enfants, les richesses cl la toutes ces bonnes teuvrcs d'éviter la vaine
santé que c'est pour cela qu'il les donne aux
;
gloire, on cherchant non les louanges des
bons aux méchants, et qu'il les ôle quel-
et hommes, mais de plaire Dieu enfin de ne("i ;

quefois aux uns et aux autres que si Job a ;


pas s'attribuer à elle-même ses bonnes œu-
clé heureux, lorsqu'il vivait avec justice et vres, mais à la grâce de Dieu. ciSoyez persua-
piété dans l'abondance, il a été encore plus dée", lui dit-il, qu'il ne peut y avoir en vous
heureux et plus juste, lorsqu'il fut réduit à aucune faculté de vouloir, ni de faire le bien,
une extrême pauvreté que l'Évangile nous ;
si vous ne l'avez reçue par un don gratuit de

représente deux hommes, dont l'un qui était la divine miséricorde que c'est Dieu qui opè-
;

le mauvais riche, a été malheureux quoique re en vous le vouloir elle parfaire selon qu'il
comblé de richesses et dans une parfaite san- lui plaît. En vous disant néanmoins que vous

té, et l'autre nommé Lazare était heureux ne devez rien attribuer à votre propre vertu,
quoique pauvre et couvert d'idcères. « Ces je ne prétends point dire que vous deviez
sortes de biens, continue saint Fulgence, ne vous méfier en quelque chose de la bouté et
peuvent donc nous rendre véritablement heu- du secours de Dieu. 11 est fidèle dans toutes
reux par l'usage que nous en faisons et il ; ses paroles, et saint dans toutes ses œuvi'es.
est toujours avantageux de les mépriser, Il ne vous refusera pas son secours dans ce

quand, dans le mépris que l'on en fait, l'on monde, ni la récompense dans l'autre. Ne
a en vue la gloire de Dieu, et non pas de cessez pas de vous entretenir de ses divines
plaire aux hommes. Il en est de même du ma- paroles, et mettez tout votre plaisir dans la
riage. On peut le contracter avec une bonne lecture des livres saints. »

intention, et le mépriser de même. Susanne 2. Saint Fulgence marque dans la lettre .u^""" p"J'.
s'est rendue recommandable par la chasteté dont nous venons de parler, qu'il en avait •^iph-'».

conjugale. Judith et Anne l'ont été davantage écrit ' une à Proba, sœur de Galla. Il était
en vivant dans la viduité mais Marie a fait ; donc naturel de placer celle-ci la première.
beaucoup mieux en gardant une virginité en- Cette illustre vierge avait souvent pressé le
tière. » Il propose à Galla l'exemple de ces saint évêquo par le ministère d'un Serviteur
,

deux veuves célèbres par lems vertus, l'une de Dieu, nommé Tutus, de lui donner quel-
dans l'Ancien Testament, l'autre dans le Nou- ques discours en l'honneur de la virginité ,
veau et celui de Pi'oba sa sœur, qui, après
; et où il fût aussi parlé de l'humilité chré-
avoir consacré à Dieu sa virginité, vivait dans tienne. Le saint évêque trouva d'aboi'd que
Rome avec tant d'édification, qu'il semblait cela était au-dessus de ses forces considé- ,

' Àtlamen a muliere mipta mulier innupta et Deus in verbis sttis, et sanctus in omnibus opcri~
virgo, non parra gradus dignitatc, discernilur. bus suis : nccauxilium den''gabit in hoc sœ-
tibi
Fulg., Epist. 2, pag. 134. culo, nec prœinium subtrahet in futuro.. .. Num-
'Firmiler Une nullam tihi facullalem inesse quam cesses a divinis eloquiis, et totain delecta-
passebonœ voluntatis aut operis, nisi id gratuilo tionem cordis tui Scripturis sanctis indulge. Fulg.,
munere dicinœ miserationis accepetis. Scito ergo Epist. 2 ad Gallam, pag. 161.
Deum in te opemri et velle et pcrftcere pro hona 3 Disponinms de jejunio et oratione aliquid scri-

xoluntate Ncc quia dixi, nihilte deberepropnœ bere ad sororem tuam sanctam Christi cirginem
assignare virtuti, ideo tibi est de dicina virlute ac Probam, sicut in epistola quam ad eam nuper
pictate in aliquo diffidendum. Fidelis est enim dedi mea pollicitatio continetur. Ibid., pag. 139.
,,

28 HISTOIRE GILNÉR.\LE DES AUTEURS ECCLÉS1ASTIQLT:S.


rant qu'il n'y a rien de mieux par rapport plaire à Jésus-Christ son époux , et non pas
au corps que la virpinilé, ni de plus suMime aux hommes ; qu'elle se garde de l'orgueil

par rapport à l'âme qu'une fidèle humilité. qui est le commencement et la source de
Mais dans la confiance que Proba oblien- tous les péchés. Il marque qu'il y a deux

drait elle-même de Dieu, par ses prières, la sortes d'orgueil dans les personnes qui font

grice d'exécuter ce qu'elle demandait de lui, profession de piété. L'une en méprisant la

il l'entreprit. « Celui, lui écrit-il, qui a fait vie des autres en attribuant à ses
, l'autre

tout ce qu'il a voulu ', est le même qui, par propres forces quelque chose de leurs bon-
un don de sa grâce, vous a consa-
gratuit nes œuvres. Il dit qu'une vierge qui tombe
cré vierge pour lui-même et sa grâce est , dans l'un ou l'autre de ces excès n'est point
donnée sans aucun mérite précédent, afin une vraie vierge de Jésus-Christ qui n'admel
qu'on lui en rende de continuelles actions de à son lit nuptial que les humbles et qui en ,

grâce dans une pure humilité de coîur.


,
chasse les superbes. Il conseille donc à Pro-
C'est le Fils unique de Dieu, et le Fils unique ba de ne jamais se comparer aux autres,
d'une Vierge, le seul époux de toutes les mais à elle seule, et de s'occuper tellement
vierges sacrées, le fruit, l'honneur et le don de ses propres infirmités, qu'eUe ne cherche
de la sainte virginité. Consenez donc avec .point à se llatter des défauts des autres.
soin le dépôt qui vous a été confié; et jugez Pour lui faire sentir le danger de la vanité

par le nom même


de vierge, qui vient de il rapporte une partie des Psaumes xxxvii
celui de vertu, du mérite d'un si grand bien et XXIX. Le prophète avait dit dans celui-là :

que vous avez, parce que Dieu vous a ac- Les gémissements de mon cœur ne vous sonl
cordé de l'avoir en faisant que vous lui
, point cac/tcs, o mon Dieu, et tous mes désirs sont
consacriez votre virginité. » Saint Fulgence devant vous. « Celui qui parlait ainsi, dit sain!
fait voir que le don de la virginité lorsqu'il Fulgence, avoue qu'il s'était élevé ' quel-
renferme l'intégrité de l'âme et du corps, est quefois de ses forces et de sa santé, lorsqu'il
plus grand que tous les autres dons, sans dit dans l'autre Psaume J'ai dit dans mmt :

prétendre toutefois que le mariage soit un abondance ,


je ne serai jamais ébranlé. Mais
mal. Ali contraire, il le reconnaît pour l'ou- parce qu'en parlant ainsi il avait été aban-
vrage de Dieu, et l'appelle même un don de donné de la grâce divine et qu'il avait suc- ,

Dieu quoiqu'il le croie beaucoup au-des-


,
combé dans son infii-mité, il ajoute en re-
sous de la virginité. Il fuit un parallèle des coniuiissant sa faute C'était Seigneur , par
: ,

avantages de la virginité et des inconvé- un pur effet de votre bonté que vous m'aviez af-
nients du mariage. Il montre en même fermi dans l'état florissant oh j'étais. Atissitôt
temps quelle doit être la vie d'une vierge que vous avez détourné votre visage de dessus
pour pouvoir se promettre tout le bien qui moi, j'ai été tout rempli de trouble. Et afin de
est attaché à son état. Il veut qu'elle fuie montrer que nous devons sans cesse de-
les délices du siècle, soit dans le boire soit , mander humblement le secours de Dieu
dans le manger, soit dans les vêtements ; quoique nous l'ayons déjà eu, il ajoute Je :

qu'elle mortifie sa chair par des jeûnes et crierai vers vous. Seigneur, et j'adresserai à
des abstinences modérés, en sorte qu'elle mon Dieu mes prières. Or personne ne pi-ie ,

en soit affaiblie, et non pas épuisée qu'eUe ; et ne demande quand il croit qu'il ne lui man-

donne aux pauvres ce qu'elle retranche de que rien ou, qu'il croit pouvoir conserver pai
ses aliments ;
qu'elle cherche uniquement à ses propres forces ce qu'il a. Au contraire

' Yirginem sacram te sibi munere gratuito fe- cens : Domine, in bona volunlale tua pr.'cslilisli
cit, qui omnia quiEcatmiue voluit fccit : a quo docori meo virluleui : avorlisli facieiu luani a me
ideo gratia nuUis prœccdentibus mentis datur, ut et factus funi nonturbalus. Et ul oatenderet adju-
illi semper gratiarum aclio pura cordis humilitate torium divinœ gratiœ quamvis jam habilum liu-
reddatur. Hic est autein unigenitus Dei Filius, mililer esse sine inlcrniissione poscendum, Itoc
umgenitus etiam Virginis filius, unus omnium quoque subnectil Domine, elaniatio et aJ
: Ad le,

sacrarum sponsus, sanctœ rirginitaiis fructus, Dcum niinini deprccabor. Kemo autem depreca-
decus el munu-t. l-:pist. 3 ad Probam., pag. IGo. lur el rogal qui non aliquid se cognoscit minn.<s
» Islenitlem quilwc dicebat.falctursealiqurndo habcre, aul quod Itabel suatanluni polesl virtutf
taiiquam de virlute .<aniliilis elaluin; dicitenim servare. tiiiisyHi.s iijiturcl hcnc/icium rogal et ad-
in alio Psalnio : V^m dixi in fihiindîiutia luea, uon juloriiim pugilat, neccsse csl ul el cvidenliani »««•
niovebor in a;lenuini. El gmVi /toc dicens, adjuto- imhecilliltilis el egeslalisagnoscal. l'ulg. t'/iist. 3 ,

rio divinœ graliit fueral désertas, sequilur di- ad Probam, pag. 17*.
[Vl' SIÈCLE.] GflAPITnE I. — SAINT FULGENCE DE RUSPE. 29
coliii ([iii (lomaiidc du secours rocnmiait sont (les dons de nien ([ii'il fiiiil lui deman-
('vidonimciil ol sa lalMt-sso nt sa pau\ rcli^. » der; aucun iKunme ne pouvant ni jinnser
Sailli l'^ilii;oiico l'ait voir :\ l'rolja que les an bien ni le faire de (pielque naliire qu'il
,

I)lus ^aaiuls saints ne sont pas en co monde soit, sans le secours gratuit de Dieu, ainsi
sans allliotions qn'ils y sont souvent agités
;
que l'enseigne l'ApiUrc dans son Épitre aux
de prandes tentations, cause de la révolte
ii Philippiens. Encore donc que nous ayons
de la ("liair contre l'esprit riuc ce n'est pas ; des motifs de rendre grâces à Dieu pour ses
riiuhistrio ni la force de l'iiomiuo qui les bienfaits, nous devons toutclbis le prier sans
délivre de la loi de péché, qui est dans leurs cesse pour obtenir de lui de nouvelles grâ-
membres, mais la seule grâce du Sauveur '
ces parce que tandis que nous sommes eu
,

qui ne se donne qu'aux humbles, et gra- cclUi vie, comme nous ne pouvons être sans
tuiteuiout; que cette grâce est tellement don- péché, aussi ne pouvons-nous pas rendre
née aux humblc3 qu'on ne peut pas même
,
une soumission parfaite à ses divins com-
être humble sans elle; qu'elle est donnée de mandements.
Dieu alin que nous commencions ii être hum- 4. Saint Fulgence avait écrit une troi- itur»»
bles, et que nous ne cessions pas de l'èlre ;
siènie lettre à Proba, où il traitait de l'orai- pe^du.!'""'"'

eiï sorte qu'elle fait que nous soyons hum- son et du jeûne. Nous ne l'avons plus. Il en
!>les, et que nous persévérions dans l'humi- dit quelque chose dans sa lettre* à Galla.
liîé qu'elle ne serait jamais elle-même de-
;

venue l'épouse de Jésus-Christ par l'intégrité § VI.


de sa foi et de sa chair, si elle ne l'eût aimé Lettres à Eucjyppius, à Théodore et à
en méprisant le vanités du siècle mais aussi ;
Venantie.
qu'elle ne l'aurait pas aimé, s'il ne l'eût jiré-
veiuie de son amour, et ne lui eut encore 1. La lettre à Eugyppius est une nfponse i-ourc an-

donné gratuitement de l'amour pour lui- celle qu il en avait reçue, et un remercî- m E.,gv|,piu=,
'"^"
même. ment du présent que cet abbé lui avait en-
Lpltro fiiia-
iTiimv h Hro-
3. La seconder lettre à Proba est une ins- voyé. Pour mieux lui en témoigner sa re-
la, {>ag. 17 i.
truction sur la prière et la componction de connaissance, il lui fit présent de ses trois
cœur. L'une cl l'autre étant un don de Dieu, livres à. Monime, en le priant de lui en dire
saint Fulgence exhorte cette vierge à les de- son sentiment. Il parait qu'il pria aussi Eu-
mander à Dieu comme essentielles à un
, gyppius de lui faire copier quelques livres
chrétien. La componction de co;ur excite dont il avait besoin. Toute la lettre qu'il lui
l'att'ection de la prière, et une humble prière éciivit roule sur la charité qu'il dit n'être
mérite le secours de Dieu. La componction autre chose que l'amour même. Il n'eu est
de cœur fait attenlion à ses plaies; la prière pas de cette vertu comme des autres affec-
demande le remède de la santé. Quelque tions de l'homme. Il peut souhaiter d'avoir
avancés que nous soyons dans la vertu, en beaucoup d'argent ou autres choses tempo-
ce monde, il nous reste toujours des progrès relles, sans en avoir en effet. Il peut souhai-
h faire jusqu'à ce que nous soyons arrivés à ter même certains dons spirituels, comme
la possession de la céleste patrie. Nous celui des langues, de la prophétie, sans les
avons toujours des ennemis à combattre au avoir ; mais
ne peut désirer ni aimer la
il

dedans et au dehors, et les armes les plus en même temps. Saint


charité, sans l'avoir
propres pour les vaincre, sont les larmes, la Fulgence met donc le domicile de cette
prière, l'humilité de cœur. Mais ces armes vertu dans le cœur d'un homme de bonne

' Ab Imc loge peccati, non virtus cujuslibet ho- talitertalisponsomipsisses.si non eum contempla
minis fortis, non inditstria sapientis, sed sola li- vanitate sœculi dilexisses: nec tamen eum fuisses
bérât gfaiia Sulvatoris, quœ non nisi huniilibus atiqualenus dikctura, nisi fuisset gratuita sponsi
gratis datur Deus eiiira superbis resistit, lui-
: dilectioneprœventa. Dixiautem. te prœventam non
milibus autem dat gratiam. Verumlnmen liœc gra- solum qua ille te dilexit.sed eiiam dilec-
dilectione
tta sicut nonnisi huinilibus datur, sic hinnilis tione, quam gratis ut a te diligeretur, infudit.
tibi
homo esse non potest, nisi delur. Datur enim tit Epist. 3 ad Probain, pag. 175.
hiimiles esse incipiant, et datur lit huniiles esse 2 Disponimus de jejunio et oratione aliquid
non desinant. Gratia igitur Dei facit nt et Inimi- scribere ad sororein tuam Probani. EpUt. 2,
les simus et huniiles perseverare possimus Ne- pag. 139.
que vero fidei veritate carnisque integritate spiri-
, ,

30 IlISTOinE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLKSIASTIOLTi:S.

volontd. Mais il ne veut pas que l'on juge de juif ni de gentil d'esclave ni de libre
,

de la bonne volonté par l'action même; l'in- ni d'homme, ni de femme, n'étant tous qu'un
tcnlion de celui qui apit doit décider de sa en Jésus-Christ cependant la conversion
;

bonté; parce que ce n'est pas ce que fait un des puissants du siècle contribue beaucoup
homme, mais la fin pour laquelle il agit, aux conquêtes et aux acquisitions de Jésus-
qui fait connaître sa volonté. Christ. Si la crainte qu'on a d'eux en fait
Ltinï
Théodor«
2. Un sénateur nommé Tliéodore, qui trembler plusieurs à la vue de leur conver-
,

,
pif. IS6. avait été consul en oOo, s'était donné tout à sion plusieurs recourent à la miséricorde di-
Dieu, el avait embrassé la continence avec vine. D'où il arrive qu'ils en entraînent beau-
sa femme. II paraît que parmi les œuvres de coup avec eux dans la voie du salut, ou dans
piété qu'il prati(juaif, il exerçait particuliè- leur perte. Les grands du monde doivent
rement l'hospilalilé ;
qu'il avait bien reçu donc s'attendre à être punis sévèrement, si
quelques ecclésiastiques qui étaient allé de par leurs mauvais exemples ils sont aux au-
Sardaigne à Rome qu'il s'était entretenu;
tres une occasion de chute ou à de grandes
;

avec eux de saint Fulgencc, dont la réputa- récompenses, s'ils leur donnent l'exemple
tion était grande ; et qu'il avait même té- d'une sainte vie. Car, qui est celui qui ne
moigné souhaiter de recevoir quelques let- méprisera pas une petite maison en voyant
tres de sa part. Romulus écrivit aussi à saint un sénateur mépriser un palais bâti de mar-
Fulgence pour lui faire part de la conver- bre? Qui est celui qui, pour acquérir les
sion de Théodore, et du désir qu'il avait de biens célestes, ne méprisera pas les terres-
recevoir de ses lettres. Ce furent là les mo- tres, en voyant un consul romain se hâter
tifs qui engagèrent le saint Docteur à lui d'arriver au ciel par le mépris des richesses
écrire, quoiqu'il no l'eiît jamais vu. 111e con- temporelles?» Saint Fulgence fait remarquer
gratule d'avoir rompu tous les liens qui le que c'est en lui qu'a été accompli cette pa-
tenaient attaché au siècle, et d'avoir foulé role du Piophète Ce changement est l'ou-
:

aux pieds un monde qui le foulait lui-même vmge de la droite du Très-Haut et que com- ,

à ses pieds lorsqu'il l'aimait. Il relève l'avan- me par la miséricorde de Dieu qui a opéré
tage que l'Église lire de la conversion des en lui, il avait di'j.'i appris à ne point se glo-
grands, en ce que leurs exemples sauvent rifier dans l'abondance de ses richesses, il

avec eux plusieurs personnes. « Car, encore ', lui restait encore de ne point se confier dans

dit-il,que Jésus-Clirist soit mort également sa propre vertu, ni d'attribuer à ses propres
pour tous les fidèles, et qu'il leur ait fait part forces le mépris qu'il faisait des honneurs du
d'un égal bienfait de la Rédemption puis- ,
monde, pour le ciel,
le désir qu'il se sentait

que, selon r.\pôtre, tous ceux qui ont été dans l'accomplis-
et le plaisir qu'il trouvait
baptisés en Jésus-Christ, ont été revêtus de sement des commandements de Dieu. «Vous
Jésus-Christ, et qu'il n'y a maintenant plus n'auriez point tout cela^, dit-il, si vous ne

' Quamris enim CliriKltts irqualiter sit prn cunc- ncre graluilœ dnnalionis accipercs : non hoc hn-
tis lidelihus mortnuf: el œquale cunctis benelicium mini dal nalura, sed gralia : non hoc ex quali-
redetiiptionis iiiipenderit , diccnie Apostolo : Qiii- lale condilionis hvniaiiœ habetur sed ex benigui-
ciiinque in Chrislo bnptizati cstis Omucs ciiim tatc divinie illuminalionis acquiritiir... Ilujus
vos uniim estis in Cliristo Jcsii. Galat. ni, 27, (rt- graliw adjutorium seniper eslnobis a Deo poscen-
men cotiversio potenlium sœcuii mulltim militai duin : sed ne ipsum quod poscimus, noslris viri-
acquisitiotnbns Chrinli... in taiium tremore p!u- bus assignenius : neque enim haberi polesl ipse
rijiii cnniremiscunt, et in taiium conrersionc mnlli sullem oralionis alferlu», nisi divinilus fuerit at-
ad aubsidium diiinœ confugiunl. lia
?»ixera()0"i.s IribulU'S. Ul crgo desideremus adjutorium gratiœ,
(U ul qui sunl in sœcuii culmine constiluti, aul hoc ipsum quoque opus esl gratiœ. Ipsa namque
plurimos secum perdant, aul secum mullos in via incipil infundi ul incipinl posci; ipsa quoque
,

salulis acquiranl. Magna taies aul poina manel amplius infundilur cum poscenlibus dalur. (luis
,

si multis prœbeanl malœ imitalionis laqueum; rero polesi graliam poscere nisi relit? Sed nisi in
aul gloria, si mullis oslendanl sanclw conrersa- eo Dcus ipsam rolunlalem operelur, relie nulla-
lionis exemplum. Quis enim non parvam despiciat tenus poteril Propter quod beatus Apostolus, non
cellam, qunndo senaUir despicil domum. marmo- solum bona opéra hominum, sed eliam bonam
ratain? (juis «on lerrena ccmlemnens ad acqui- rolunlalem Deum in mibis operari testatur, di-
rendaca'lcslia sibi co)isulal, quando ad co'lum cens: Uinis est euim qui iipcratur in vobis el vclle
rnmanus consul Icrrenorum corilemptu fcslinal? et pcrfitere pro Ixiua voluiitate. Kulj,'., Episl. 6 ad
Fulg Episl. 6 ad Tlirod., pa;;. ISG.
, Theod., pag. 188.
' ftœc omnia nullalonis Itabercsnisi a Dca mu-
[Vl" SIÈCLE.] CII.\PITUE I. — S.MNT FULCENCE DE RUSPE. 31

l'aviez reçu gratuitomiMil tU- Dimi. Ces clio- tcnlion à ces paroles de Jésus-Christ : Ce ne '-°=- »"•
ses ne sont point un don de lu nature, mais sont point les saints, inuis tes malades qui ont
do la p:r;\ce on ne les possède point par la
; besoin de médecin, u Si notre médecin est ha-
qualitii de la condition humaine mais on , bile , dit saint Fulgence, il peut guérir tou-
les acquiert avec le secours de la lumière tes nos inlhinilés ; si noire Dieu est niis('ri-

divine. Nous devons le demander sans cesse cordieux, il peut remcttn! tous nos péchés.
ù Dieu, et ne pas même attribuer h nos pro- Cette bonté n'est pas parfaite, qui ne sur-
pres forces la prière que nous faisons A ce monte pas médecine par-
tout le mal, ni la
sujet; puisque nous ne pouvons pas même faite ItH-squ'ily a des maladies qu'elle ne
avoir le désir ou raH'eclion de la prière, si peut guérir. Quel péché, je vous prie, peut
Dieu ne nous la donne. Or désirer le se- , être irrémissible, puisque Dieu est propice à
cours de sa grâce, c'est l'ouvrage de -la toutes nos iniquités, ainsi que le dit le Psal- pmi.ch, i,
î» y, *•
grâce même elle commence â nous être
; miste?Ou pouvons-nous croire qu'il y ait en
donnée alin que nous commencions par la nous dos maux incurables, puisqu'il est dit
demander; elle augmente dans nous à me- que le Seigneur guérit toutes nos langueurs?
sure que Dieu l'accorde à nos prières. Mais Peut-être dira-t-on que ceux-là peuvent être
qui peut demander la grâce s'il ne le veut î sauvés, qui, après avoir commis des péchés,
Et toutefois si Dieu n'opère en nous la vo- méritent d'en obteuii- pardon par le bap- le

lonté même nous ne pouvons vouloir. C'est


, tême mais que les péchés que l'on commet
;

pourquoi l'Apôtre dit que Dieu opère en nous après avoir reçu ce sacrement, sont irrémis-
non-seulement les bonnes œuvres, mais sibles. Mais n'est-ce pas h des baptisés que
aussi la bonne volonté. » Il exhorte Théo- l'apôtre saint Jean disait dans sa première
dore à la pratique de l'humilité chrétienne, Épitre Mes petits enfants, je vous écris ceci
:
uo .n,

à laquelle seule la vie éternelle est promise ; afin que vous ne péchiez point ; que si néan-
â s'occuper des saintes lectures afin d'ap- moins quelqu'un pèche, nous avons pour avocat
prendre dans les livres saints à se connaître, envers le Père, Jésus-Christ qui est juste. Car
et qui il devait être; et à faire de bonnes c'est lui qui est la victime de pi'opitiation pour
œuvres devant Dieu et devant les hommes. nos péchés. Quelque grand que soit donc le
Il lui souhaite et à sa vénérable mère, de péché, Dieu peut le remettre k celui qui se
même qu'à sa femme qu'il appelle sa sœur convertit mais celui-là se ferme la porte de
;

i\ cause qu'ils vivaient en continence, la pro- 1indulgence qui désespère de la rémission


tection de l'inséparable Trinité. de ses péchés. »
=op- 3. Ce fut aussi à la prière d'un de ses Ce Père fait consister la conversion du pé-
V f-
i«s. amis nomme
Juniims que saint Fulgcnce cheur dans deux choses, savoir, qu'il espère
écrivit à Venantie. Nous n'avons plus la let- le pardon en faisant pénitence de ses péchés,
tre de Junilius nous savons seulement qu'il
; et qu'il fasse pénitence de ses péchés dans

y saluait le saint évèque de la part de cette l'espérance du pardon. « Car souvent, dit-il,
femme, qii'on ne connaît point d'aillem-s. La l'ennemi du salut ôte l'espérance à celui qui
réponse de saint Fulgence est intitulée]: De se repent, ou la pénitence à celui qui espère
la Vraie pénitence et de la réti'ibution future. Il le pardon. Judas fît pénitence de son péché,

y pose pour principe qu'aussitôt cpie la cha- et toutefois il perdit le salut, parce qu'il n'es-
rité habite dans le cœur de l'homme, le pé-
' péra point que Dieu lui ferait miséricorde. Il

ché ne le domine plus; et qu'elle fait non- y en a d'autres qui ne craignent point la jus-
seulement éviter les péchés présents, mais tice de Dieu, parce qu'ils espèrent tout de
encore pardonner les passés. Il taxe d'im- sa bonté. Leur espérance est vaine c'est de ;

piété et de sacrilège les pécheurs obstinés et ceux-là que l'Apotre veut parler dans son
endurcis, qui, à la vue de leurs crimes et Épître aux Romains, lorsqu'il dit qu'ils seront
d'une longue vie passée dans les désordres, justement condamnés pour avoir dit Pou?-- : Rom. m, s.

se persuadent qu'il n'y a point de miséri- quoi ne ferions-nous pas le mal afin qu'il en ar-
corde à espérer pour eux, et tâchent de le rive du bien ? Il est donc évident que la péni-
persuader aux autres ; ne faisant point at- tence est vaine, lorsqu'on désespère- de l'in-

' Hœc charitas ulii hahitare cœperit, non per- facil ritari, quin etiam prœterita facit omnia re-
mittit doiiiinari peccatiim ,sed cooperit mxiltitu- hurari. Idem., Episl. 7, pag. 190.
dinein peccatorum : nec solum prœsentia peccata ' His indiciis eiidenter agnoscimus inanitcr ho-
,

33 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


dulgence ; et que c'est inutilement que l'on nous, nous un motif de difféier notre
soit
espère la rémission de ses fautes, lorsqu'on pénitence au contraire, il nous exhorte à
;

KtKii.iiii, n'en fait pas pénitence. » Il prouve par le té- nous convertir au plus tôt, sans différer de
moignage d'Ézéchicl, qu'il n'y a aucun temps jour en jour, de peur que la colère de Dieu
dans la vie où l'homme ne puisse se convertir; ne vienne à fondre sur nous inopinément. »
en sorte qu'on peut dire que la pénitence n'est
jamais tardive devant' Dieu à qui tout est § MI.
présent, le passé comme le futur. Si la lon-
Livre de la Foi orthodoxe à Donat.
gue durée des péchés était capable de vain-
cre la miséricorde de Dieu, Jésus-Clirist ne 1. Donat, à qui est adressé le livre de la ou»iiin<iu

serait pas venu dans le dernier âge du mon- Foi orthodoxe, que l'on met pour la huitième imrt \ d».
"
de pour en ôter les pécliés, et le sauver. Il lettre de saint Fulgence, était un jeune hom-
"^^
EpisL "
8 ad

apporte en preuve de la miséricorde de Dieu me ,


après s'être appliqué à l'étude des
qui ,
"'•

la parabole du Samaritain, et dit que comme lettres humaines


faisait son occupation or- ,

il n'y a aucune plaie ' incurable à notre Mé- dinaire de la lecture des livres saints. 11 y
decin, il n'y a aucun temps où la médecine cé- cherchait à nourrir son âme, la ferveur de sa
lestepuisse manquer. Dieu se réjouit toujours foi le mettant au-dessus des plaisirs du corps.
de notre conversion', et il n'y a point de S'étant trouvé avec des ariens , ils lui pro-
temps, pendant que nous sommes en cette posèrent un argument par lequel ils préten-
vie, qui ne soit propre à notre conversion. daient montrer que le Père est plus grand
C'est ce qui parait par ces paroles de la se- que le Fils. Donat qui n'était pas encore as-
II pti. m, coude Ëpitre de saint Pierre Le Seigneur n'a : sez instruit dans la science des divines Écri-
point retardé l'accomplissement de sa promesse, tures ne put répondre à la difficulté mais
, ,

comme quelques-uns se l'imaginent ; mais ilnous ilen demanda la solution à saint Fulgence.
attend avec jMtieme, ne voulant point qu'au- 2. Ce Père le loue d être demeuré ferme
ca livre, piç.
cun mais que tous retournent à lui par
jjérisse, dans la foi, sans s'être laissé ébranler par la
la pjénitence. Cela parait encore par la para- force d'un argument dont il n'avait pu don-
bole du père de famille qui envoya des ou- ner la solution et pour le mettre en état de
;

vriers ;\ sa vigne, à diverses heures de la répondre dans la suite aux dilficuJtés que
journée, qui marcpient les divers degrés de les hérétiques pourraient lui faire sur les
l'âge de l'homme, dans lesquels Dieu nous mystères de la Trinité et de l'Incarnation,
invite à la pénitence en différentes manières, il lui en donne une explication exacte.
par les tribulations, par les infirmités, afin « Croyez , lui dit-il ,
que la sainte Trinité
qu'ayant abusé de la sauté du corps pour pé- c'est-à-dire le Père le Fils et le Saint-Es- ,

cher, nous apprenions à nous en abstenir prit est un vrai Dieu qu'elle est d'une seule ;

dans l'infirmité. Saint Fulgence met une dif- nature d'une seule essence , d'une seule
,

férence entre posséder les biens de cette vie toute-puissance bonté éternité et immen- , ,

et les recevoir, et entre soullrir les maux de sité; en sorte que lorsque vous entendez dire
cette vie et les recevoir. « Ceux-là seuls, dit- un seul Dieu Père, Fils et Saint-Esprit, vous
il, reçoivent Jes biens en cette vie qui en font conceviez qu'il n'y a qu'une nature dans la
leurs délices, et y mettent leur félicité ceux- ; Trinité et lorsque vous entendez nouuner
;

là reçoivent les maux en cette vie, qui les la Tiinité, vous reconnaissiez que les trois
souffrent en patience dans la crainte de Dieu, personnes du Père du Fils et du Saint-Es- ,

et dans l'espérance des biens éternels. Il ne prit sont une même divinité. Car il y a trois
veut pas que la patience de Dieu envers persoimes, le Père, le Fils et le Saiut-Esprit :

minem pwnitrre, si dum


pœnitentia geritur.indul- nec tempus hominis quaindiu in hac vita est, po-
grnUa desperatur. frustra indulgentiain sperari
et suit, quo propiliari conversa non possit : imo
sinepeccalorumpœnilentia. Fulg.,£'pi«<. 7,pag.l92. tempus omne prœsentis rilœ contersioni nnstrœ
' l'œnileutia numquam estnpud Deum
sera in , cugiwscitur députasse. Bcatus eniin Petrus dicit :
cujus conspeclu !:emper pro prœKcnlibus hubcntur Non lardât Dumiiiu;-, etc. lliiJ., pag. 194.
tani prœterild quani futura. IhiJ., pag. I'j3. Très enim persona" suni
' Pater et Filius et ,

' Sicut crgo medicn nostro nulla est incuriihilis Spiritu^ Sanclus: idco Trinilas dicitur. Sed una
plaga, ita nec in aliquo vulnere, nec in aliquo substanlia est Patris cl Fitii et Spirilus SancH:
lempore cœlestis polesl dcficere niedicina. IbiJ. ideo ipsa Trinilas unus Deus veraciler a fidclibus
' Semper aulem dcleclalur coniersione nosira , prœdicalur. Fulg., L:pisl. 8, pag. 198.
[VI" SIÈCLE.] CHAPITRE I. — S.\INT FULGENCE DE RUSPE. 33
c'est pour cela que l'ou dit Triuili; mais ; est tellement vrai Dieu que le Père ne l'est
C(unnic il n'y a qu'une substance du l'ère, pas davantage. Mais parce que le Fils, né do
du Fils et du Saint-Esprit c'est pour cette , la nature de Dieu le Père, est aussi né de la
raison que la Trinité est appelée vérilaljje- nature de la Vierge, sa mère, et qu'en con-
nient un seul l)i(;u par les lidèles. (Ju'il y s(''((u<Mue il est vrai Dieu et vrai homme, ou
ait trois personnes, c'est ce que l'iM-.rilnre doit dire de lui qu'il est égal au Père comme
^
Jom. ïi.i, ilitclairement Je ne suis pas seul, dit le Sau-
: Dieu et comme homme inférieur au Père.
,

veur dans saint Jean, mais mon Père qtci m'a Il lui est égal selon la nature dans laquelle
envoijè est avec moi. Et en parlant du Sainl- il est le ci'éaleur des aiig(!s ; il lui est infé-
iMti. KIT,
Esprit, il dit : Je prierai mon Pt't-e, et il mus rieur selon la nature dans laquelle il est le
donnera un autre amsolateur, savoir, l'Esprit rédempteur des hommes. »
de vérité. Il a commandé aussi que l'on bap- 3. La vraie foi, dit-il, nous enseigne
(I Sniiodeia-

tisât les nations au nom du


du FWs et Père , aussi que le Saint-Esprit est Dieu. Comment 2i«''
'

du Sainl-l']sprit. On ne peut pas dire néan- pourrait-on le nier, puisque le l'rophète lui p>^'-"^"',

moins qu'il y ait trois dieux, i\ cause de l'u- attribue la création de toutes choses, et que iP";|<:"' »»•

nité de nature des trois personnes. Et parce l'Apôtre déclare, que nous sommes le temple *•

qu'il ne peut y avoir de diversité dans la na- du Saint-Esprit, en la même manière que
^ ,
' '"'•'"i m
et VI, vj.
ture de la Trinité, c'est pouniuoi il y a dans nous le sommes du Père et du Fils? Comme
les trois personnes une égalité suLstantielle, nous avons été faits à l'image de la Trinité,
à raison de l'unité de leur nature quoique ,
le Sauveur a voulu que nous soyons renou-
chacune ait ses propriétés distinctes. » Saint velés dans le baptême, au même nom de la
Fulgence rapporte divers passages de l'Écri- Trinité. Ainsi c'est le même Dieu Père, Fils
ture sainte, pour montrer que la Trinité est et Saint-Esprit, qui, par sa toute puissante
un seul Dieu. Mais parce que les hérétiques bonté, crée les hommes, et justifie les pé-
soutenaient que ces passages ne s'enten- cheurs par sa miséricorde toute gratuite. »
dent que d'une seule personne il les presse , Saint Fulgence reconnaît qu'il est si essen-
par ces raisonnements « La loi de Dieu ne : tielde nommer les trois personnes de la Tri-
permet point aux fldèles d'adorer deux dieux : nité dans l'administration du baptême, qu'il
il faut donc qu'ils croient que le Père et le déclare que ce sacrement' serait nul, si l'on
Fils ne sont naturellement qu'un seul Dieu ;
omettait le nom du Fils ou du Saint-Esprit.
ou qu'ils ne reconnaissent point le Fils pour Voici les règles qu'il donne àDonat, pour lui
Dieu, ou qu'en le reconnaissant pour Dieu ,
apprendre à distinguer l'erreur d'avec la vraie
ils refusent l'adoration au Père. » foi « Il n'y a, dit-il, qu'un Dieu en trois per-
:

Comme les ariens ne niaient point la di- sonnes, dont la nature est la même. Si donc
vinité du Père, mais seulement celle du Fils, vous voyez quelqu'un confesser l'unité de
il allègue contre eux ces paroles de saint Tlio- nature du Père, du Fils et du Saint-Esprit,
joan. xï,!8. mas Mon Seigneur et mon Dieu. 11 fait encore
: mais néanmoins soutenir qu'il n'y a aussi
un autre argument « Si le Fils, dit-il, n'é-
: quune personne, regardez-le comme un hé-
tait point un seul Dieu avec le Père, il ne se- rétique sabellien. Si vous en trouvez quelques
rait point de la même nature que lui et s'il ;
autres qui confessent tellement trois person-
était d'une autre nature , il serait indubita- nes ,
qu'il veuillent aussi qu'on reconnaisse

blement créature. Or, s'il était créature, l'É- trois natures,ne doutez pas qu'ils ne soient
criture sainte ne nous commanderait pas de ariens. quelqu'un confesse que la na-
Si
l'adorer.Il y a plus c'est qu'elle le nomme
, ture du Père et du Fils est la môme, et qu'il
I joan. V, expressément Dieu: Nous savons, nous dit enseigne que celle du Saint-Esprist est diffé-
saint Jean, Cfie le Fils de Dieu est venu , et rente, en sorte qu'il avoue que le Fils est
qu'il nous a donné l'intelligence, afin que nous égal au Père, et qu'il dise que le Saint-Es-
connaissions le vrai Dieu , et que nous soyons prit est seul moindre et inférieur, celui-là
en son vrai Fils ; c'est lui qui est le vrai Dieu est infecté de l'hérésie de Macedonius, et
et la vie éternelle. Il suit de là que le Fils, doit être rejeté comme hérétique par tous
selon sa nature divine , n'est pas moindre les fidèles. » Il ajoute que pour ne point tom-

qrie son Père, mais égal au Père, parce qu'il ber dans les hérésies des manichéens, des

' Mysterium autem redemptionis humanœ mdla tipiritiLS Sancti Vncabutum subtrahatur. Fulg.,
ralione per/lcilur, si in baplisiiw cet Filii, vel Lpist. 8, piig. 205.

XI.
34 HISTOIRE GENÉHALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
photiniens, des ariens, des nestorieiis, et des qu'elle était descendue aux enfers, et res-
eutycbéeiis sur rincarnalion, il faut recon- suscilée le troisième jour. Saint Fulgence
deux natures en Jésus-Clirist,
naître qu'il y a fait voir que la Trinité est indivisible et dans
sans confusion en une scide personne
iHiies ;
ses opérations et dans sa nature. « Elle est
de manière que la nature que le Fils a du indivisibledans ses opérations, dit-il, puis-
Père n'est point confondue avec celle qu'il a que toutes les trois personnes opèrent insé-
prise de la Vierge que Jésus-Christ n'a ja-
;
parablement, aucun ouvrage n'ayant été fait
mais eu deux personnes, parce que c'est le parle Père, sans que le Fils et le Saint-Esprit
même Dieu, lils unique, qui est né du Père se- ne l'aient fait aussi. » Il rapporte sur cela
lon la divinité ', et d'une Vierge selon la chair. un grand nombre de passages de l'Écri-
Ps.1. uni, «C'est le Verbe Dieu, dit il, qui est né de ture. Un des plus précis est celui où Jé-
Dieu, et le Verbe qui étant fait chair est sorti, sus-Christ dit dans saint Jean : Tout ce giie Join. T, 19.

C'est le comme un époux, de sa chambre nup- le Pèrefait, le Fils le fait de même. Or on


tiale, même qui, ayant conservé la propriété voit par un autie endroit que ce que le ,

des deux natures, a été crucifié selon la fai- Fils fait, il le fait dans le Saint-Esprit, dans
Hcor. xiii, blesse de la chair, et qui vil par la vertu de lequel il dit lui-même qu'il chassait les dé-
Dieu. exhorte Douât à s'appliquer à la
» Il mons. La Trinité est inséparable dans sa na- Cap. IT.

lecture des saints Pères, pour se confirmer ture, puisqu'elle est une. Il est certain d'ail-
de plus en plus dans la doctrine de la foi. leurs que Dieu est charité, et qu'il y aurait de
la folie à dire que la charité est séparable ,
§ vni. puisque c'est elle qui lie d'un amour insépa-
rable ceux qui étaient divisés auparavant.
Livre contre le Sermon de Fastidiosm.
Ce Père montre ensuite qu'il n'y a que le
Lettre da 1. On rapporte au retour de
Fulgence saint Verbe qui se soit incarné, dire que la Tri-
Vicinr X faÏDt
FulgeDCe,[^ag.
dans sou Eglise de Ruspo, après la mort de nité entière s'est fuite chair, ce serait tom-
£68.
Trasamond qui arriva en 523, son livre con- ber dans l'hérésie des salelliens, qui n'ad-
ti'c un arien nommé Fastidiosus. Cet homme mettaient en Dieu qu'une seule personne et
avait d'abord été moine, et ensuite fait prê- une seule nature. « L'Église catholique, dit-il,
tre ; mais, ayant quitté la vie monastique et divinement inspirée * et instruite de la vé-
les fonctions de prêtre pour mener une vie rité de la foi, enseigne qu'il n'y a qu'une na-

licentieuse, il avait aussi abandonné la foi ture de la Tiinité, mais aussi elle sait donner
catholique, et s'était jeté dans le parti des il chaque personne ce qui lui est propre. Or
ariens. Il en soutint ouvertement les erreurs, elle croit que c'est le Fils seul qui s'est fait

jusqu'à les prêcher publiquement. Un de ses homme pour nous racheter. La raison en est,
discoui's étant tombé entre les mains d'un que le Fils a pris un corps et une ànie, non
nommé Victor, celui-ci l'envoya à saint Fid- dans l'unité de nature, mais dans l'unité de
gence avec une très-humble, dans la-
lettre personne, qui n'est pas la même dans le Fils
quelle il de réfuter Fastidiosus, se
le priait que dans le Père et le Saint-Esprit. Comme
recommandant en même temps aux prières donc l'unité de personne n'a pas fait qu'il y
du saint évêque qu'il savait s'intéresser de-
,
eût deux personnes en Jésus-Christ, quoi-
puis plusieurs années à son salut. qu'il y eût deux natures, elle n'a pas non

2. Les catholiques assuraient que la Tri- plus rendu l'Incarnation commune à la sainte
livre À Vicier,
fiç. 3(0. nité était indivisilile et inséparable. Fastidio- Trinité. L'Incarnation est bien l'ouvrage de
sus qui les ajjpelait homousicns, en inférait la Trinité mais elle est particulière à la per-
;

qu'il fallait dire, selon eux, que toute la Tri- sonne du Fils qui s'est revêtu seid de la
Cap. II.
nité était incarnée, qu'elle avait soullort la chair. » Pour donner quelque jour à ce rai-
mort, qu'on l'avait mise dans le tombeau. sonnement, saint Fulgence dit, qu'il est claii*

* Non confunditur natura, quant Dei Filius ha- unus quiscrcata utriusquepropriclate natura; ; et
belex Pâtre, cuni ea nalura quam idem Drus cnicifixiis est ex iiirirmilale,et vivil ex virlute Dei.
snmpsit ex Virgine. Sed nec haliuit Cliristus duas Fulg., Epist. 8, piif;. 2(17.
aliqitnndo pemonas, quia idem Dfus unigenilus et ' Catliolica vero Ecclesia, divinilus inspirala,
sccundum diviuilatem nains esl de Paire, cl secun- teneiis fîdei verilalem, sicut norit unam ualuram
dum C'irnem firoccssil ex Virgine. Et qui y,erbuin sanclœ Trinilatis assercre, ita caulissime sua Iri-
Deux 7ialus eut de Deo, idem Verbum caro facinm bnil unicuiquc personiF. Fiilg., lib. Contra Fasli-
lanquaiu sponsus processil de tlialamo siio. Ipse diosuHi, cap. II.
,,

[VI' SiÈttE.] CHAPITRE I. — SAINT FULGENCE DE RUSPE. 35

(juc l'unitë de nature et la trinité do per- ce n'était pas Dieu qui avait créé les mou-
sonnes en Dieu, sont niaM|iii''es dans ces pa- ches, les scorpions, ni les autres animaux
Gones I. :c. rôles de la Gcni^-so faismis r/imnme à notre
: venimeux; mais (|u'ils élaieid l'ouvrage du
ii)iiif/c et rcssoii/ilaiice, l'écrivain sacré ayant à di'-nion depuis sa élude. Tout le monde s'op-
dessein nicMé le sinyulioravec le pluriel, l'un, posa à celte proposition il fut convenu , et
pour de nature dans Dieu
sij;niiier l'unité ,
que l'on consulterait saintFulgence , tant
l'autre, la pliualilé de peisonnes. L'imasc sur cet article, que sur celui de l'Incarna-
selon laquelle l'hounuc a (Hé formé uiarcjue tion. Scarilas lut chargé d'en écrire au saint
l'iioiuuie intérieur, qui renferme trois choses évoque qui lui répondit par un livre qui
,

naturellement, savoir la mémoire, l'intel- est intitulé de l'Incarnation du Fils de Dieu.


ligence et et encore que ces
la volonté ; 2. Saint Ful"ence, après y avoir établi les
•-
„/ uwçdo
riDcarn«lioD,
. , ,

trois ne soient pas des personnes


clioses mêmes principes que dans le livre precé- p"6.*«ii.

subsistantes, elles se trouvent néanmoins dis- dent décide que c'est du Fils seul que l'on
,

tinguées l'une de l'autre. L'application qu'il doit dire qu'il s'est incarné, et que c'est pour
fait de cet exemple, est comme la pensée, cela- que l'Évangéliste saint Jean a dit Nous :
'""• ' "•

qu'il ap[)clle notre verbe, a besoin pour avons vu sa gloire comme du Fils unique du
être manifestée au dehors du son de la voix Père, étant plein de grâce et de vérité. Le Fils
corporelle de même le Verbe divin a été
: dit lui-même Dieu a tellement aimé le mon-
:
Join.n'.i».

fait chair, pour pouvoir être vu des yeux du de qu'il a donné son Fils unique , a finque qui-
corps et manié des mains; et de même que conque croit en lui ne périsse point , mais qu'il
la voix, dont le verbe intérieur est com- Car Dieu n'a pas envoyé son
ait la vie éternelle.
me revêtu, lui est propre, quoique les au- Fils dans le monde pour condamner le monde
tres facultés de l'âme aient part à sa mani- mais afin que le monde soit sauvé par lui. Ce-
festation ainsi le Fils de Dieu s'est seul in-
; lui qui croit en lui n'est pas condamné, mais
carné, quoique l'Incarnalion soit l'ouvrage de celui qui ne croit pas est déjà condamné, parce
toute la Trinité. « C'est, dit-il, le Fils seul qui, qu'ilne croit pas ati nom du Fils unique de
dans la chair qu'il a prise, a soutfert, a été Dieu. Le Sauveur , comme le fait remarquer
mis dans le tombeau, et est ressuscité. Uien saint Fulgence, se nomme trois fois Fils en
de tout cela ne peut se dire du Père ni du cet endroit, et deux fois Fils unique. Il assui'e
Saint-Esprit, parce que la personne du Fils en même temps qu'il a été envoyé du Père
n'est pas la même que celle du Père et du pour sauver le monde. « Si la Trinité dit-il ,

Saint-Esprit. » Saint Fulgence ajoute, que, fût venue elle-même dans la chair, le Fils ne
si Fastidiosus n'avait pas misérablement se dirait pas envoyé du Père. Or Jésus-Christ
abandonné cette foi, il pourrait encore espé- n'a pu mentir il faut donc croire que dans la
:

rer le salut mais que l'ayant niée et de vive


; Trinité une personne a envoyé, c'est-à-dire
voix, et par ses actions, il n'était pas surpre- le Père, et que l'autre a été envoyée, c'est-à-
nant que corrompu dans ses discours et
, dire le Fils. Le Père a envoyé la vérité qu'il
dans sa conduite, il fût devenu rcanemi de a engendrée il a envoyé la sagesse dans la-
;

la lumière. quelle il a fait toute chose il a envoyé le Ver- ;

be qu'il a produit. » Saint Fulgence veut que


§ IX. l'on distingue deux avènements dans le Fils

ri Scwilas ,
de Dieu, disant qu'il vient autrement lorsqu'il
Lettre de saâit Fulgence et à
est envoyé du Père, et autrement lorsqu'il
Ferrand, diacre.
vient avec le Père. « Lorsqu'il vient envoyé du
Leiiro do 1. Un nommé Scarilias s'élant trouvé à ta- Père, dit-il, c'est dans une nature cjui le rend
Mini Fuigcn- ble chez im qui s'appelait Even-
catholique ,
inférieur au Père, et même un peu au-dessous
tus, lamatière de la conversation tomba sur de la nature des anges, c'est-à-dire, dans la
le mystère de l'Incarnation. Un de la compa- nature humaine, et il n'a été envoyé qu'une
gnie avança que ce n'était pas le Père, mais seule fois de cette sorte pour la rédemption
le Fils qui s'était incarné. Un autre dit en du genre humain. Mais, lorsqu'il vient avec
général qu'un Dieu en trois personnes s'é- le Père, au Père, et on ne peut dire
il est égal

tait fait chair pour nous délivrer de la servi- combien de venu en cette manière,
fois il est

tude à laquelle nous avions été réduits par parce qu'on ne peut les nombrer. C'est de cet
la prévarication d'Adam. Après qu'on eût avènement que le Fils dit dans saint Jean :5« Jû,h. ut

fini sur cette matière, mi trcisièuie •li' qne quelqu'un m'aimr, il gardera ma parole, et mon
,,

36 HISTOIRE GENERALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.

Père l'aimera, et nous ciendronsù lui et nous fe- aux hommes, en les faisant souvenir qu'ils
rons en lui notre demeure. Le Saint-Esprit est ne sont blessés des animaux que par une
colombe
aussi sous la forme d'une suite de la peiue due à leurs transgressions
venu ; ;

mais ne lui a pas été uni personnellement,


il
que cela parait visiblement en ce que les ,

n'ayant pas été fait colombe, comme le Fils a


animaux à quatre pieds, les plus grands et
sous les plus forts, comme sont les chameaux,
été fait chair. La figure de la colombe,
a apparu marquait que c'était par les chevaux, les bœufs, et les éléphants,
laquelle il

que nous devions recevoir la charité sont encore soumis à l'homme, tandis qu'il
lui
est quelquefois ému et ébranlé lui-même par
comme ce don fut marqué dans la suite par les
sous lesquelles il apparut le la morsure d'un petit insecte qu'il pourrait
lang:ues de feu ,

la Pentecôte. Si la Trinité s'était


faite facilement écraser de deux doigts. Saint
jour de
chair, comme par la participation de la Fulgence dit donc qu'il n'y a aucune na-
chair nous sommes faits fri'res de celui qui ture mauvaise, soit qu'elle soit animée soit ,

nous ne serions pas seu- qu'elle ne le soit pas. Qu'A l'égard des in-
est fait chair, dès loi-s
lement les enfants de Dieu le Père, mais en- sectes qui s'engendrent de la corruption

core les frères de toute la Trinité. C'est une des chairs et des fruits on peut dire que
,

giande absurdité de dire que le Père est né Dieu ne les a pas formés dans les six pre-
dans temps, lui à qui il est propre de tou-
le
miers jours de la création mais qu'il a don- .

te éternité de n'être point né, et


d'avoir en- né l'être aux choses dont ils devaient ensui-
gendré. Il est donc de la vraie foi de croire te être formés. Il met cette diÛ'érence entre
les péchés des justes et ceux des méchants,
que ce n'est ni le Père , ni le Saint-Esprit
mais le Fils seul, qui, né de Dieu le Père, est que ceux-là se font par* la nécessité de l'in-
aussi né seul de la Vierge Marie. Llncarna- firmité, au lieu que les autres sont l'ellet d'une

tion ne lui est point commune avec le Père mauvaise volonté. « Dans les justes, dit -il, la
et le Saint-Esprit quoique d'une ,
même na- volonté de pécher n'est pas suivie de l'eflet ;

parce que la personne du Fils n'est si le désir du péché nait d;ins eux par infir-
ture,
point commune au Père et au Saint-Esprit.» mité il est surmonté par la grâce de Dieu. Les
,

Saint Fulgence dit en termes exprès que le méchants, au contraire privés du secours de
,

Saint-Esprit' procède du Père et du Fils, et la grâce, divine sont précipités par leur mau-
qu'il lui est propre de n'avoir point engen- vaise volonté où leur mauvaise cupidité les

dré de n'être pas né.


et entraîne. C'est pour cela que les fautes des
Sotte da lU
rro de l'Iaur-
Sur la seconde question ce Père dit,
3.
saints sont appelées des péchés , et non pas
que l'Écriture nous assurant que Dieu a fait des crimes, péchés pour lesquels ils sont tel-

toutes choses, et que rien n'a été fait sans lui, lement repris et châtiés par le Père, qu'ils ne

il faudrait donner un
démenti à l'écrivain sa- sont point condamnés par le Juge. Ce n'est
cré, si l'on voulait soutenir que les mouches, pas que la correction ne soit une suite du ju-
Jmq. 1, 1,9,
les scorpions et autres insectes ne sont
point gement, mais c'est la suite d'un jugement
l'ouvrage de Dieu. » C'est, dit-il, Dieu qui a paternel, par lequel Dieu juge et châtie mi-

formé lui-même, dans le temps de la création, séricordieusement ses enfants pour les sous-
tous les animaux que la terre et les eaux traire au supplice de la damnation éternelle.»

produisent , comme il a fait les cieux ,


la Il compte pour un péché de? justes le rire de
terre et tout ce qu'ils contiennent. » Il mon- Sara, qui marquait qu'elle doutait de la pro-
tre par l'assemblage des parties du scorpion messe que l'Ange lui avait faite qu'elle au-
qu'il n'a rien qui ne puisse tourner à la louan- rait un tils et pour un crime des méchants
;

ge du Créateur; que le venin même qu'on l'orgueil d'Agar envers sa maîtresse.


attribue à cet animal devrait servir de leçon 4. Le diacre Ferrand proposa à saint Ful- Leiir» t

• Proprium est Spirilus Sandi quod nec genuit mala voluntas quo duxerit prava cupiditas. Idto
ipse necnatus est. Sed de genilore geniloque pro- culpœ snnclorum peccata dicuntur esse, non cri-
De Incarnat., pag. 107 et -408.
cedil. Fuit;., lib. mina, pro qiUbus sic corripiuntur a Paire et non
Peccata justorum sunt ex nece-^sitateinfirmi-
' condemnanlur a Judice : quœ taiiien correptio
talis; peccata iniquorum sunt ex inlentione pessi- perlinel ad judicium, sed pntermtm. quo Deus /S-
mœvoluntalis. In illis .<tic peccati reperilur esor- tio^ suos miseticordiler et judicnt et flagellai, eos

tus, ut non subsequalur effeclus. Quia elSi per , a supplicio sempilcrnœ damnaiionis cripiat.Fulg.,
infirmitalcm nascilur, ]ier Dei gralinm superalur. lilii De Incarnat., piig. 427.

Illos auteni gratiœ privalos auxilio, précipitât


,

[Vl' SIÈCLE.] CHAPITRE I. — SAINT FULGENCE DE RUSPE. 37


p:cncc uno question an sujet du hiiplt-mo d'im lut? N'est-ce pas un obstacle pour lui h la vie
lOthiopion, iY celto occasion. Un joun(i liom- éternelle d'avoir été privc'^ de l'usage de la
nic de cette nation, esclave d'un clircMicn ', voix? Car je ne vois pas comment uno per-
venu des exti'(5uiitus d'une province iiaibaro sonne en âge de raison peut être justifiée
où il n'avait ni reçu le bapICme, ni été dclai- par la confession d'autrni, cela ne convient,
ré des lumières de la i,'râc(! de J('sus-Chrisl, ce me seinltle, qu';uix enfants qui n'ont que
avait depuis éïé instruit dans la relifiion par le péclni originel.» A celte question Ferrand

les soins de ses maîtres on l'avait mené à ; en ajoute une autre savoir si cet Éthiopien
,

l'Eglise, et mis, selon la coutume, an rang eût été sauvé, quand même il n'aurait pas
des catliécura^nes. Aux approches de la fêle reçu le baptême; ce qu'il avait fait précé-
de l';\qnes, il fut inscrit entre les compétents, demment pouvant, ce semble, lui mériter
reçut toutes les instructions qui regardent la grâce de l'expiation. Il demande encore
nos mystères, fut exorcisé après le scrutin pourquoi l'on ne baptisait point les morts
solennel, renonça au démon suivant qu'il , dont la foi et la dévotion pour le baptême ont
était d'usage, apprit le Symbole parc(eur cl ét(' connues pendant leur vie, et qui n'ont pas

le récita tout haut devant le peuple. Après recule baptême parce qu'une mort précipitée
quoi on lui donna la formule et l'explication les a enlevés de ce monde. Il demande enfin
de l'Oraison dominicale. Instruit de tout ce s'ilne nuisait point aux baptisés de ne pas
qu'il devait croire , et comment il devait manger la chair du Seigneur, ni de ne pas
prier, on le préparait au baptême, lorsqu'il boire son sang, quand ils mouraient subite-
fut saisid'une grosse fièvre. Mais comme il ment entre le baptême et la communion , le j<„„, „, u.
restaitpou de jours jusqu'au Samedi-Saint, précepte du Sauveur étant précis Si vous ne : mn. xri,

cjuoique la lièvre augmentât jusqu'à le met- mangez la chai?- du Fils de l'homme, et ne bu-
tre en danger de mort, on le garda pour vez son sang, vous n'aurez point la vie en vous.
être baptisé avec les autres. A l'heure du 5. SaintFulgence, avant de répondre à la
BépoDse h
pramlèra
baptême solennel il fut porté à l'Église, pour la première question montre par l'autorité
,
question.

y être régénéré et recevoir une vie nouvelle. de l'Écriture, que la foi dans les adultes doit
Mais comme il n'avait plus ni voix ni mou- , précéder le baptême, et que, soit qu'ils
vement, ni connaissance, et qu'il ne pou- soient baptisés soit qu'ils meurent sans l'a-
,

vait répondre aux interrogations du prêtre ,


voir été, ils seront indubitablement condam-
on répondit pour lui, comme on fait pour les nés, s'ils n'ont pas cru. Sur ce principe il
enfauts. Il reçut donc le baptême, et mourut déclare que non-seulement ceux-là seront
peu de temps après, sans qu'il donnât aucun damnés qui meurent sans baptême mais ,

signe de connaissance qu'il eût reçu ce sa- encore tous les hérétiques; parce qu'encore
crement. Je demande dit Ferrand à saint
i(
, qu'ils aient été baptisés selon la forme de
Fulgeuce, ce que l'on doit penser de son sa- l'Église , ils n'en ont pas la foi ; celle qu'ils

1 Religiosi cujusdam
viri famulus œtate ado- , cum subito violentis invaditur febribus et crescente
Mlhiops, ex uUimis credo barba-
lescens, colore lethali infirmitate turbatur. Persuasit dierum,
rœ provinciœ partibiiit, xibisicco solis igneicalo- brevitas ut ad fontem cum
cœteris abluendus dif-
re fascanlur, addiiclus, salutaris lavacrinecdum ferretur, sive potius servaretur. Hora exoptata
fuerat aspergine mundalus. aut micante Chrisli cunctis advenerat in qiia populus, acquisitionis
gratia dealbatus. Hic ergo dominorum ftde- Redemptori suo per baptismum consepultus, vitam
lium diligentia, sacramentis ecclesiasticis im- veterem poneret et novam resurrectionis fidem
buendus ad Ecclesiam traditur; fit ex more ca-
,
innovatus assumerct. Tune ille in extremô halilu
tkecumenus. Post aliquanluin nihilominus tem- constitutus, sine voce, sine motu, sine sensu, nihil
poris, propinquante solemnUate Paschali, inter valens sacerdoti interroganti respondere, defe-
competenles offerlur, scribitur, eruditur. Univer- renlium manihus adportatur ; et pro eo, v obis quasi
sa quoque religionis catholicœ reneranda mys- pro infante respondentibus, mente absentissimus
teria cognoscens atque pcrcipieiis, celebraio so- accepit baptismum, qucm se accepisse, post pau-
lemniter scrutinin perexorcismum contra diabo- lulum mortuus, in hac prœsenti arbitror vita,
lum vindicatur; cui se renunliare conslanler, nescieit. Quœso nunc xilrum nihil ad œternam
fient hic coiisuetudi poscebat, auditiirus Symbo- beatitudincm consequendam vox ablata nocuerit...
lum profitetur. Ipsa iiisriper sancti Syinboli verba quomodo namque potuerit œtas illa rationis ca~
memoriter in conspectii fidelis populi clam i-oce pax aliéna confessione purgari, non video. Nonne
pronuntians piatti regulam Doininicœ orationis
,
solos parvulos rite credimus offerentium fide sal-
accepit. Simulqtie jnm et quid crederet, et qnid vari, quos originali lantinn novimus iaiquitate
oraret intelligcns ,
(xUxiro baptismali parabatur, damnari? Ferrandus, Epist. 11 adFulg,
, ,,,

38 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


ont n'dtanl qu'une foi feinte, et la charité connaissance, nous disons sans crainte qo'il
n'étant pas en eux ; c'est pourcpioi ils ne peu- est sauvé parce que telle est la vertu du sa-
:

vent être appelés fidèles , étant plutôt enne- crement de baptême qu'elle elTace non-,

mis de Ce Père décide ensuite que


rÉtîlise. seulement le péché originel, mais encore
l'on ne peut douter du salut du jeun(> Ktliio- tous les autres péchés commis avant cet

pien ayant eu la fui et le sacrement du


:
régénération. C'est ce que dit saint Paul :

baptême, il en avait aussi reçu l'eti'et. « Sa Par le jugement de Dieu nous avons été con- Bom. T, It.

foi, dit-il, avait précédé; il l'avait confes- damnés pour un seul péch'\ au lieu que nous
sée publiquement eu prononçant le Symbo- sommes justifiés par ta grâce après plusieurs
le. Rien n'a donc pu empêcher qu'il ne reçut péchés; et c'est aussi la foi des fidèles, aucun

l'etlet de ce sacrement qui consiste dans la ne doutant' que, le péché originel étant re-
régénération. La perte de la parole ne lui a mis dans le baptême les péchés de la vo-
,

pu nuire, puisqu'il n'avait pas changé de sen- lonté propre ne soient aussi elTacés. »
timent, n Saint Fulgence apporte en exem- 6. Sur la seconde question saint Fulgence
Il
Bépome
B«cooâe

ple le baptême de l'eunuque de la reine de répond qu'encore que cet Éthiopien eût eu
,
<i"«»uon

Candace. « Tout ce que le diacre Philippe de- la foi, il n'aurait pas été sauvé s'il n'eut reçu

manda de lui, dit-il, fut de croire de tout son le baptême, parce que Jésus-Christ nous de-

cœur. La confession de foi de l'eunuque pré- mande l'un et l'autre pour le salut. «Le che-
céda, et aussitôt le diacre lui administra le min, dit-il, qui conduit est la confession de la
baptême. Pourquoi donc la perte ' de la parole foi ', mais le salut est dans le baptême. Or

aurait-elle nui à ce jeune Éthiopien, puis- comme dans cet âge la foi ne lui aurait servi
qu'il l'heure du baptême on ne devait plus de rien sans le baptême, de même le bap-
l'interroger sur la foi qu'il avait auparavant tême lui aurait été inutile s'il n'eût pas eu la
confessée, en récitant le Symbole? La con- foi, et s'il ne l'eût confessée. »

Nous B^pooM
fession des autres, continue saint Fulgence 7. Il dit sm- la troisième question « i
:
U lroi>iime

ne lui aurait servi de rien à cet âge ', si la ne baptisons' point les morts, parce que tout i<""""'

sienne n'avait précédé ; au lieu qu'elle lui péché, soit originel, soit actuel, se trouvant
a parce que la charité de ses frères a
servi', commun à l'àme et à la chair , aucun n'est
achevé, en répondant pour lui, ce qu'il avait remis si l'àme est séparée de sa chair ,

commencé lui-même en croyant et en con-


, parce que, selon saint Paul, chacun doit être
fessant publiquement sa foi. Comme donc il jugé suivant ce qu'il a fait dans son corps
a cru quand il connaissait, et qu'il a reçu le soit le bien, soit le mal. D'ailleurs la chair ne
sacrement étant encore en vie, quoique sans peut point être baptisée sans l'âme, parce que

' Kon hoc vtique fuit hora baptismatis interro- * Via salutis fuit in confessione salus in bap- ,

gamlus, quod esl anlea in Symboli proniintia- tismale. Aani, in illa œtale, non sulum ei con-
lifiiie confessus. Hihilitaquc illi ad œternain bea- fessio sine baptismale, nihil prodesset, sed nec
,

titudinem consequ ndam vox ablala nocuit, qui ipsum baptisma non credenti neque confitenti nul-
qu'tmdiu potuil, in ipsa fidei confessione perman- latenus pro/iceret ad salulcm. Ibid.
pag. 221. ' Jlortuos aulem propterea non baptisamus
sit. Fulg.,£|)iS<. 12,
* Ideoisiiim recte dicimus sine dubitatione sal- quia omnc peccdlu m sive originale sire actuale,
valum. quia et intclligens credidil, et quod cre- quia simul esl aniinœ cantique commune, nihil
didit propria confessione firmavit deinde quam- : et eorum dimitlitur si n sua carne anima separetur:
vis jam non intelliyens, tamen adliuc vivens, sa- Onines enira nos uianifestari oportet ant« tribunal
cramentuni sanctœ regeneralionis accepit. Nam Christi, ut recipial uuusquisque propria corporis
per sancti baptismatis sacramentum, illa vita est, proulgessit, sive bouiiin sivc nialum. Caro quoque
peccttti originalis ne-Tibus absoluta, quœ fucrat sine anima non potest baptizari, quia nec re-
cjusdem peccati rinculis obligala. Et quia fanlu missionem peccalorum accipere, nom res quœ
esl virtus sancti baptismatis ut ubi vitam inre- non vivit, sicul peccare, ita pœnitenliam peccati
nerit in qua illud originalis peccati vinculum hnbere non potest... Igitur et si fuit cujusquam
solval, omniaque super adjecta repereril, secun- fiventis volunlas fidelisque devolio; qui tamen
juita illud Apos-
dtp nalii-iliitis bene/icio diluât, defunrlus est sine bapli.smntis sacranunto, ideo
toli Àsnm }\\(\\(Àam ex uao in conilcmnatioiicm,
: nwrtuus baptizari non putuit, quia ab illo cor-
grati-T aulem ex nuillis delictis in jnslificnliono. pore anima cujus fuit volunlas /idelis devotioque
digneillum crcdimus'esse salvatum. lliid., pag. 222. discessit... Illa wystcria quir iihte baptisma in
' Illo autem originnli peccain dimisso, (uncta Ecclesia gcruntur, concipi spiritalcm hominent
peccata, quœ propria rnluntale conlra.rcrat, di- faciunl, non renasci. Ibid., pag. 22t,
missa fuisse nemo fldelium dubitat. Fulg., Epist.
12, pag. 223,
,

[Vl'' SIKCLi:.] CIIAIMTHE I. — SAINT FULGENCE DE IIUSI'E. 39

sans l'ànie no peut recevoir la ri'niissioa


clic et que l'on ne doit pas croire que celui-là a
(les pdclu's môme que ce qui est sans
: car do été privé de la participation du pain ou du
vie ne peut pcclicr, de niènie aussi ne peut calice, qui, étant dans l'unité du corps de Jé-
recevoir le pardon du ijcché. Qnchpie gran- sus-Chi'ist, est sorti de ce inonde avant d'a-
de qu'ait donc é[é la volonté de i-cccvoir le voir mangé ce pain et bu ce calice. C'est en Vlnir». Ilh.
x.\.\ii;hi.o«-
Ijaplônic, si l'on vient à mourir sans l'avoir conséquence de cette doctrine que l'on a cU*. inif. 314,
lam. VU.
re(;u on ne peut le recevoir apri'-s la mort
, cessé depuis plusieurs siècles de donner mô-
parce que l'âme de qui iMait celle hotmc vo- me aux enfants l'eucharistie avec le bap-
lonté est séparée du corps. Les mystères qui tême.
baptême 9. Le même diacre Fcrrand proposa à
^utre Icltro
se passent dans l'I'^glise avant le
(]a Fcrrnnd à

mais Mlnt Fulgen-


font bien concevoir l'homme spirituel, saint Fulgencc cinq autres ([ucsiions le ,
cc,pa^. 'J)A.
ils ne le l'ont pas rcnailre. Ainsi il faut s'en priant en même temps de lui envoyer le li-
tenir constamment aux canons des Pères qui vre de la Foi à Pierre, la lettre à Jean de
veulent que les malades, qui ne peuvent ré- Tharse, et celle à Proba. Le livre à Pierre
poudre pour eux-mêmes, soient baptisés sur était donc déjà écrit, lorsque Fci'rand con-
la foi de ceux qui témoignent qu'ils veu- sulta saint Fulgencc pour la seconde fois.
lent l'être. Les Pères ont bien conçu que ce- 10. Fcrrand demandait, en premier lieu, satat Fulgro*
ce & la pre-
lui-là n'est point coupable, qui a été cmpê- si, la Trinité étant inséparable, parce qu'elle )i iùrc »iues-
on,ias.22J
cbé par la perte de la parole de témoigner n'a qu'une même nature, une même opéra- 1

sa voloulé, et qui n'a rien fait d'ailleurs pour tion, et une même volonté, on peut dire que
marquer qu'il avait changé de seuliuient » . les trois personnes sont séparaljles. Saint
Il veut que l'on s'en rapporte d'autant plus Fulgence répond que la Trinité ne serait pas
à leurs décisions, que l'Église étant la co- inséparable, si les personnes pouvaient el-
I liniolti. Ml, lonne et la base de la vérité elle ne peut
'
, les-mêmes être séparées. 11 fait donc voir
35.
rien décider que de vrai par rapport ;\ l'ad- que tous les attributs qui conviennent à une
ministration des saints mystères de notre des trois personnes, conviennent aussi aux
rédemption, et de la réconciliation du genre deux autres, à l'exception des propriétés re-
hvmiain. ne peut dire qu'elles
latives, et qu'ainsi l'on
8. A l'égard de ceux qui meurent avant soient séparables de même qu'il n'est pas
,

la quatrième
d'avoir reçu le corps et le sang de Jésus- permis de les confondre. « Qu'on montre, dit-
Cbrist, saint Fulgencc dit qu'il ne faut point il,quelques termes qui soient tellement pro-
en être en peine. « Que fait-on, dit-il, dans pres à une personne qu'ils ne conviennent
le sacrement du baptême, sinon que ceux pas à une autre. Comme il n'est pas pos-
qui croient deviennent les membres de Xotre- sible d'en trouver, il faut convenir que les

Seigncur Jésus-Christ, et que par l'unité de trois personnes sont d'une même et insé-
l'Église ils appartiennent à son corps 1 Puis parable nature, si l'on en excepte, comme
donc que nous sommes tous un môme pain on vient de vous le dire, les termes relatifs de
et un même corps, chacun de nous com- Père et de Fils et de Saint-Esprit. » Il cou-
mence de participer à ce pain, lorsqu'il com- firme sa réponse par les témoignages de saint
mence à être membre du même corps, c'est- Ambroise, et de saint Augustin, qui. confor-
à-dire de Jésus-Christ ce qui se fait dans le
; mément aux livres saints ont enseigné c[ue
baptême. » Ce Père apporte en preuve an les trois personnes n'étaient point sépai-a
sermon de saint Augustin aux nouveaux bap- blés, parce qu'elles sont unies nécessaire
tisés. Après quoi il conclut que l'on - ne peut ment Tune avec l'autre par l'unité de nature.
douter en aucune façon que chacun des fidè- H. La seconde question de Ferrand était la
Béfonse 4
secondo
les ne soit participant du corps et du sang de savoir, si l'on peut dire que la divinité que^lioa, pag.
210.

de Jésus-Christ lorsqu'il devient, dans le


, de Jésus-Chi'ist est née, qu'elle a souffert,
baptême, membre du corps de Jésus-Christ, qu'elle est morte, comme ou dit que le Fils

1 Quia Ecclesia veraeiter columna et firmamen- dum, tune tmumquemqtie fidelium corporis, san-
tum veritatis ab Aposlolo noncupalur, quidquid se- guinisque dominici participeiv- fieri quando in
cundiim ipsius Ecclesiœ constituta in sanctis inijs- baptismale membrum corporis Cliristi efjlcitur, nec
teriis redemptinnis et reconciliationis humanœ, alienari ab illopanis calicisve consortio, etiamsi,
inlra eain datur et accipilur,firmaveritate datiir^ antequam panem illtim comedat et calicembibal,
firma veritate percipitur. Fulg. Epist. 12, pag. 224. de hoc sœculo in unitate corporis Christi consti-
2 Arbiiror nec cuiquam esse aUquatcnus ambigen- tutus abscedat. Ibid. pag. 227.
40 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
de Dieu a souffert
est ne, qu'il est
qu'il ,
Tjle-t-elle pas mai-quer que le Fils règne seul
mort. Saint Fulgence répond puisque, se- : avec le Père, et que le Saint-Esprit n'est pas
lon Ferrand, en disant que la divinité éternel? Cela serait visiblement contre l'ar-
de Jésus-Clirist a souil'ert, on sous-enteu- ticle de la foi par lequel nous confessons l'u-

dait dans sa chair, cette expression ne porte


,
nité du règne du Père, du Fils et du Saint-
aucun préjudice à par laquelle l'É-
la foi Esprit. Saint Fulgence lui répond « l'Église :

glise catholique croit etenseigne que la di- catholique ne prie pas en vain le Père par
vinité du Fils de Dieu est impassible et im- le Fils; parce que le Fils, fait homme, est le
muable. 11 rapporte quelque passages de l'E- médiatem- de Dieu et des hommes, et prêtre
criture, etquelques autres de saint Augus- étemel selon l'ordre de Melchisédech qu'il ;

tin, de Gclase, de saint Ambroise et de saint est entré par son propre sang dans le sanc- ,

Léon, pour montrer qu'on s'est quelquefois tuaire, c'est-à-dire dans le ciel, où il est à la

servi de termes ou semblables ou équiva- droite de Dieu et prie pour nous. C'est donc
lents. parce qu'il est en même temps le prêtre et
Bfpcnu! I 42. Ferrand demandait, en troisième lieu, l'hostie,que nous prions le Père par lui.
It uois^èica
qoMtion.pae. si l'âme de Jésus-Christ connaît parfaitement D'où vient que quelquefois nous disons dans
la divinité, et s'il se connaît lui-même, en la même prière ' : Par le prêtre éternel, vo-
tant qu'homme, de la même manière que le tre Fils Notre-Seigneur Jésus-Christ. » Les
Père, le Fils et le Saint-Esprit se connais- ariens qui ne pouvaient s'empêcher de re-
sent mutuellement. Saint Fulgence répond, connaître que l'Église en disant Gloire au
qu'il serait très-dur etentièrement éloigné Père et au Fils, le confessait Dieu comme
de la de dire que l'àme de
pureté de la foi, son Père, avaient changé cette formule, et
Jésus-Christ n'a pas une pleine connaissance disaient Gloire au Père par le Fils, parce
:

de sa divinité, avec laquelle nous croyons qu'il ne croyaient pas que le Fils fût Dieu.
qu'elle n'a fait naturellement qu'une per- Comme il y avait encore des hérétiques
sonne que, selon saint Jean, ime des préro-
;
qui niaient dans Jésus-Christ la vérité de
jmd. iiM. gatives de Jésus-Christ est que Dieu ne lui la chair, les saints Pères avaient ajouté,
donne pas son esprit par mesure; que saint avec raison, dans cette prière, les termes
Ambroise a enseigné clairement que l'àme de prêtre éternel. En effet lorsque nous ,

de Jésus-Christ a une pleine connaissance disons que nos prières sont ofîertes à Dieu
de toute la divinité, et que, si l'on disait que par le prêtre éternel Notre-Seigneur Jé-
l'àme de Jésus-Christ n'a pas une entière sus-Christ, nous confessons en lui la vérité
connaissance de sa divinité, il faudrait dire de la chair humaine. Car tout pontife, dit ud.r. r, i.

aussi qu'elle n'a pas en elle toute la sagesse saint PaiU, étant pris d'entre les hommes, est

et toute la vertu. Ce Père décide donc que établi pour les hommes en ce qui regarde le
,

l'on peut dire que l'âme de Jésus-Christ a culte de Dieu, afin qu'il offre des dons et des
une pleine connaissance de sa divinité mais il ;
sacrificespour les péchés. « Mais continue ,

ne veut pas décider si l'on doit dire que l'àme saint Fulgence, lorsqu'après avoir dit dans
de Jésus-Christ connaît sa divinité, comme cette prière Votre Fils, nous ajoutons Qui
: :

la divinité se connaît elle-même. 11 parait vit et règne dans l'unité du Saint-Esprit, nowsi

croire que l'àme de Jésus-Christ connaît au- faisons mention de l'unité de nature dans le
tant que la divinité, mais non pas de la mê- Père, le Fils et le Saint-Esprit comme pour ,

me manière. montrer que le même Jésus-Christ, qui, eu


Ré,„„„ t 13. La quatrième question regarde la qualité de prêtre, prie pour nous, est d'une

q.f.uVi.TprE! prière dans laquelle le prêtre disait presque môme nature avec le Père et le Saint-Esprit.
**'
dans toutes les Églises d'Afrique que le Fils ' Ces mêmes paroles ' Dans l'unité du Saint-
:

règne avec le Père dans l'unité du Saint-Es- Esprit, montrent que nous croyons l'unité
prit. Cette formule, disait Ferrand, ne sem- de nature du Saint-Esprit avec le Père et le

' Quare ergo in oraliotiibus sacerdotum : Pcr ' Nam bene nosti, nonnumqitam dici: Per sacer-
.lesuin Ctiristiim Filiuin tiium, Uominum noslniin, dotem œlcrDum Filiuin luinn, Doininum nostruiu,
qui tecuui vivit et régnât in tiiiitate Spiritus Saiic- Josum Cliriftum. Ibid., pag. 2.")8.
ti, per universas pêne Africœ regiones catholica ' Cm m vern in unitale Spirilus Sanrii dieimus,
dicere consuevil Ecclesia, tanquam solus Filins unam naluram Spiritiis Sancli cum Paire Filio-
cum Pâtre possideat regtium in unitate scilicet que monstramtis. Ibid., pa);. 2U0.
Spirilus Sancli. Fulp., lipist. 14, pag. 257.
[VI" SIÈCLE.] CHAPITRE L — SAINT FULGENCE DE RUSPE. 41

Fils. Or, runifd de nature dans ces Irois per-


sonnes qu'est-cUe iuitro chose qu'un seul §X.
Dieu en trois personnes; et que signific-t-
Lettre à Jean et à Vénérius.
elle, sinon l'unitd do règne dans ces trois
personnes? La diversité de nature peut 1. Fausto de Riez sur la
Les livres do ,
lhi„.i.
Jean cl «0
marquer la diversité de puissance dans un grâce, ayant été rendus publics à Constan- J','j"'î,''^"„'|'j'

règne mais où il y a une unité naturelle de


; tiuople y causèrent beaucoup de bruit,
,
ou saMaiBoo.

règne, là est aussi une même puissance de parce qu'il y établissait des principes tout
régner. contraires à la doctrine de l'Eglise sur cette
«,>!'""• » 14.Par la cinquième question le diacre matière. Jean, archimandrite, et Vénérius,
q..«iion, fjg. bcrrand demandait comment on devait en- diacre, envoyèrent ces livres à saint Ful-
tendre ce que dit saint Luc, eu parlant de la gence. Ils écrivirent en même temps aux

Cène du Seigneur, que Jésus prit première- évoques relégués en Sardaigne par Trasa-
ment le calice, qu'il le donna i\ ses disciples, et mond pour leur marriucr ce qu'ils trouvaient
,

Lue. un, n. qu'ayant pris ensuite le pain, il dit : Ceci est de mauvais dans l'ouvrage de Fauste. Ils
mon coi-ps; que prenant après avoir soupe le expliquaient eux-mêmes leur doctrine sur
calice, il Ce calice est la nouvelle
dit alors : la grâce et sur la prédestination. Nous n'a-
alliance en mon sang, lequel sera répandu pour vons plus leur lettre et nous n'en connais-
,

vous. Est-ce, disait Ferrand, un calice donné sous le contenu que par ce qui en est dit dans
deux fois, ou sont-cc deux diflërents cali- la réponse que leur firent les évoques d'A-
ces? Saint Fulgence répond que quelques frique, par la plume de saint Fulgence. Quoi-
interprètes soutiennent que c'est un seul et qu'ils eussent reçu la lettre de Jean et de
unique calice donne une seule fois par Jé- Vénérius, étant encore en exil, ils ne répon-

sus-Christ à ses disciples et que c'est par ; dirent néanmoins qu'après leur retour en
anticipation que saint Luc dit d'abord que Afrique, qui arriva aussitôt après la mort de
Jésus-Christ le distribua ;\ ses apôtres mais ; Trasamond qu'on met le 28 de mai 323.
que selon d'autres le même calice fut donné 2. Il n'y eut que douze évêques qui sous- ^^f^^f,"""/^!

deux fois. Ce Père convient que ces deux crivirent à cette réponse. Saint Fulgence n'y ^'jg;'»- f"?-

interprétations sont catholiques et il pen- ; mit pas son nom, peut-être parce qu'il avait
che beaucoup pour la seconde, dans laquelle déjà répondu en particulier à Jean et à Vé-
il trouve plusieurs mystères, entre autres nérius par les trois livres de la Prédestina-
que la double distribution du calice signifie tion et de la grâce, qu'il leur avait adressés,
les deux Testaments la première l'Ancien,
: avant de leur écrire au nom des évêques
et la seconde le Nouveau. « C'est, dit-il, pour d'Afrique. Car ces trois livres sont cités dans
cela que, dans la même Cène, Jésus-Christ
'
cette lettre de même que les livres contre
,

mangea la pâque judaïque, qu'il était néces- Fauste, que saint Fulgence avait écrits à leur
saire d'ofi'rir, et qu'il donna le sacrement de prière.
son corps et de son sang, qu'il fallait instituer Les évêques d'Afrique témoignent à
3. „;^„'';^',;,\.''''

pour le salut des fidèles. Quoique ces deux Jean à Vénérius que, si leur lettre les avait
et
Testaments paraissent diûërents par la célé- réjoais, elle leur avait aussi causé de la tris-
bration des sacrifices, puisque dans l'un on tesse qu'elle leur avait donné de la joie,
;

oilrait un agneau, et que dans l'autre, Jé- en leur apprenant qu'ils pensaient saine-
sus-Christ, qui était figuré par cet agneau, ment sur la doctrine de la grâce de Dieu et ,

s'est offert lui-même la foi en est néan-


, causé de la douleur, en leur marquant que
moins la même. Car il n'y a qu'une foi ^ du quelques-uns des frères voulaient élever le
Nouveau et de l'Ancien Testament. Par elle libre arbitre de l'homme aux dépens de la
les anciens Pères croyaient les promesses grâce. Ils remarquent que Dieu le permet
que nous croyons aujourd'hui accomplies ainsi , afin de faire connaître davantage la
en nous. « force de la grâce, parce qu'on ne la connaît

' Propterea et in eadem ccena et judaicum pas- 2 Quippe una est fides Novi et Veteris Testa-
cha comedit, quod oportebat o/ferri, et sacramen- menti. Bœc in antiquis Patribus credebat pro-
tum corporis sui et sanguiais dédit, quod ad sa- missa, quœinnobis jam crédit impleta. Ibid.,pag.
liUem fidelium oportebat institui. Fulg., EpistAi, 268.
png. 264,
, ,

42 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


point, on ne l'a reçue, et qu'on la combat
si du péché originel, par un juste jugement de
tant qu'on ue l'a point parce que sans elle
;
'
Dieu mais leurs adversaires , c'est-à-dire
;

on ne connaît aucune vérité, en sorte qu'il les semi-pélagiens prétendaient qu'Ésaii était
est comme nécessaire que l'homme lui ré- la figure du peuple j uif, qui devait être con-
siste ou par paroles ou par actions. Car l'ef- damné pour œu\Tes futures,
ses mauvaises
fet de la grâce de Dieu dans Tbomme est et que Jacob que Dieu
figurait les gentils,
qu'ayant rcru le don de la foi et de la charité, devait sauver à cause des bonnes œuvres
il fasse paraître dans ses paroles une bonne qu'ils feraient à l'avenir. Les évèques d'A-
doctrine et qu'il s'applique à faire de bon-
,
frique disent qu'on ne doit pas rejeter cette
nes (Ouvres. C'est donc de Dieu que nous dernière explication ; mais aussi qu'on doit
vient toute la grâce de la bonne doctrine et reconnaître dans Esaii et dans Jacob le choix
des bonnes œuvres, comme c'est de lui aussi que Dieu fait des uns par une bonté toute
que nous recevons même la bonne pensée ;
gratuite, et la réprobation qu'il fait des au-
afin que nous apprenions à nous glorifier tres par une juste pourquoi
sévérité. C'est
dans le Seigneur, et non pas en nous-mô- ajouleut-ils , comme qu'Ésau il est certain
^n^ Cor. m, mes; puisque c'est lui qui, selon l'Apùtre, a été un vase de colère, et Jacob un vase
nous rend capables même de la bonne pen- de miséricorde on doit croire certainement
,

sée. Les évèques d'Afrique infèrent de là qu'Ésaii, avant d'être condamné, avait mé-
que, s'il y en a quelques-uns qui, n'ayant rité avec justice la colère de Dieu, et que
pas reçu la grùce, ne savent pas même qu'ils Jacob pour être sauvé a reçu gratuitement
ne l'ont point, ceux qui ont reçu de Dieu le don de la miséricorde prévenante. Donc ,

cette grâce doivent d'autant plus en pren-


, celui-ci, justifié gratuitement par la grâce de
dre la défense qu'ils voient qu'elle n'est pas Dieu, a été destiné â la gloire, et celui-là, par
donnée à tous, lis conviennent qu'il y a avant une juste colère de Dieu, a été préparé à la
la grâce un libre arbitre ' dans l'homme ;
peine en sorte que Dieu a montré dans Ja-
;

mais ils soutiennent qu'il n'est pas bon, parce cob la miséricorde de sa bonté gratuite et ,

qu'il n'est pas éclairé qu'ainsi si la grâce


;
dans Ésaii le jugement d'une juste sévérité.
n'est point donnée on ne peut pas dire que
, 4. A l'égard des enfants, ils enseignent '
Sallo
mIjsc.
i

le libre arbitre soit bon. Il en est, disent-ils, que l'on doit s'en tenir A la règle de la vérité
du libre arbitre sans la grâce, comme de l'œil catholique : savoir, que celui qui est baptisé
sans la de même donc cjuc lœil a
lumière ; est sauvé, et que celui qui meurt sans bai>-
un besoin continuel de la lumière, pour qu'il tême est damné àcause du péché originel.
puisse même apercevoir la lumière , de mê- Ils disent sur la grâce que * celui-là n'en
me aussi le libre arbitre de l'homme ne peut pense pas dignement qui croit qu'elle est
pas même connaître la grâce si celte grâce , donnée â tous les hommes puisque non- ,

divine ne lui est donnée par le Saint-Esprit. seulement la foi n'est pas commune à tous,
Jean et Yéuérius avaient dit dans leur let- mais qu'il y a encore des nations à qui l'I-;-
tre qu'Ésaû et Jacob n'étant pas encore nés, vangile n'a point été annoncé Commeiit, dit :

celui-ci avait été choisi par une miséricorde r.\pôtre, invoqueront-ils celui en qui ils n'ont
toute gratuite, cl celui-là condamné à cause point cru? £t comment o-oiront-ils en lui, s'ils

> Ouandoquidem ipsa gralia nullatenus agnos- tholicœ régula veritatis ; quia parvulus qui bap-
cilur nisi detur: guœ quamdiu non est in homine, iizatur, gratuita Dei bonitate salralur ; qui vero
lamdiu necesse est ut ei aut sermone repugnet, sine baptismale nwritur, propter originale pec-
aut opère. Episcopi Afrieani , Episl. ad Joan. calum damnalur. Iliid., pajr. 272.
pag. 270. * De gralia vero non digne sentit quisquis eam

' Ànte largitatem quippe gratiœ est in homine pulal omnibus hominibus dari, cum non solinii
qiiidcm libertini arbilrium, sed non bonum, quia non omnium sil fides, sed adhuc nonnullœ génies
non illitminatum. Proinde, nisi gratin detur, bo- inieniantur a4 qims fidei prœdicaiio non perve-
mim ipsum arbilrium non liabetur. Sic namque nil. Apnslolus aulem dicil: Qiiomodo iuvocabunt
est ipsum liberum liomini^ arbitrium, sicul est in iniL'in uon crcdiilcruul elc. Kon ilaque gralia ?

oculus sine luce... Sicut ergo corporis oculus sem- omnibus datur, quandoquidem ipsius gratiœ par-
per indiget lumen accipere, ut ipsum lumen possil ticipes esse non possunl, qui fidèles non sunl.nec
aspicere; sic et libero arbitrio hominis nuUa po- possunl credere, ad quns invenilur ipse fidei au-
teslgratiœ suffragari cognitio, nisi detur ipsius dilus minime pervenisse. Ipsa vero gralia quibus-
gratiœ spirilalis infusio. \hU\., pag. 270. cunique datur, non (equaliler datur, sed seouii-
' De parvulis vero indubitanler trnenda est ca- lium luciisuraiu Uuuatioui? Clirisli. //ifj., pag. :;7J,
[VI' SIÈCLE.] CIIAriTllE I. — SAINT FULGEN'CE DE RUSPE. 43
n'en ont point entendu jMrler? Comment en en- droits de l'Écriture : C'est Dieu qui of/ire en I']|ni|r.ll,f3.

tendront-ils jjarler, si personne m leur prèclie? nous le vouloir et le faire, et : Si voiis voulez et
I,ii grilcc n'osl ddiic point iloiini'e i'i Ions, puis- si vous m'écoutez, vous mangerez les biens de la
(|ue ceux-là n'eu pciivciil èlio p;iilici|);iiils, terre, par celui-ci
Opérez votre salut avec
:

uc sont point lidMes, et que ceux-là ne


(|iii crainte et tremblement : car c'est Dieu qui
peuvent croire à qui l'on ne trouve point que opère en vous le vouloir et le faire selon qu'il

la parole de la foi se soit fait entendre. La lui plaît. Parce que l'homme ' a le libre ar-
grùce même n'est pas donnée également à bitre, Dieu lui donne des préceptes pour les
tous ceux à qui elle est donnée mais elle ; accomplir, mais sou libre arbitre n'en est
E|.lo est donnée à chacun de nous selon la mesure pas capable s'il n'est aidé de Dieu. De cette
du don de Jésus-Christ. Le salut de l'homme ' manière l'homme connaît, en entendant le
est tellement l'cU'et de la miséricorde de précepte qu'on lui fait, qu'il doit agir, mais
Dieu qu'il l'est aussi de la volonté humaine, qu'il doit à Dieu tout le bien qu'il veut et
Uol.r.
mais eu sorte que c'est la miséricorde qui qu'il fait: Que Dieu, dit l'Apotre, vous appli-
SI.

prévient et la volonté qui suit. La seule mi- que à toute bonne œuvre, afin que vous fassiez
séricorde de Dieu donne le commencement sa volonté, lui-même faisant en vous ce qui lui
du de l'homme y coopère
salut, la volonté ;
est agréable. Ils regardent comme une absur-
la miséricorde en prévenant la volonté di- dité ce que Jean Vénérius avaient écrit
et
rige son cours, la volonté humaine en obéis- que les semi-pélagiens appelaient vases de
sant, suivie toutefois de la miséricorde, court miséricorde ceux qui, en ce monde pos- ,

à la récompense. Ils disent que, pour bien sédaient quelque dignité sécidière ou ec-
entendre ces paroles de l'Apôtre // fait mi- : clésiastique, et vases d'ignominie les clercs,
séricorde à qui il lui plaît, il endurcit qui il les mohies et les laïques. Ils disent que ce
lui plaît, il faut faire attention à celles qui ne sont pas les dignités qui ont les vases
suivent : Le potier n'a-t-il pas le pouvoir de d'honneur, mais la charité. Sur la question
faire de la même masse d'argile un vase destiné de la prédestination, ils s'en tiennent à ce
à des usages lionorables, et un autre destiné à des qii'en dit saint Paul, savoir que tous ceux-là
usages vils et tionteujv ? parce qu'il en est de sont ' prédestinés que Dieu veut sauver, et
Dieu à l'égard de la masse corrompue des disent que l'Apôtre n'emploie le terme de
hommes comme du potier à l'égard de la tous que parce que, dans les deux sexes, il
masse d'argile. C'est une grâce que le potier y eu aura de toutes les conditions, de toutes
fait à ce vase de le destiner à des usages ho- les nations et de tous les âges qui seront sau-
norables, c'en est une que Dieu fait à l'hom- vés. « Car ajoutent- ils la volonté du Dieu
, ,

me dans sa miséricorde. Le ju-


qu'il choisit tout puissant s'accomplit toujours, parce que
gement qu'il exerce envers celui qu'il endur- sa puissance n'est sm-montée en aucune ma-
cit, c'est-à-dire qu'il abandonne, est juste nière. Car c'est lui qui a fait tout ce qu'il
parce qu'il le traite selon ses mérites. Au a voulu dans le ciel, sur la terre, dans la
reste -, quand il est dit que Dieu endurcit mer et dans tous les abîmes et à la volonté ,

qui il lui plaît, ce n'est pas qu'il pousse per- duquel personne ne résiste. » Ils remarquent
sonne au mal, seulement il ne le retire pas que ce n'est que des adultes dont il est dit
de son iniquité. que Dieu vivifie la volonté pour la rendre
Sulle da I ! S. Ces évêques concihent ces deux en- bonne et active, afin qu'ils coopèrent eux-mê-

' Digne ulrumque tenelur si ordo reclus serve- cepta liberum arbitrium idoneum nullatenus efp.-
lur (liriaw miscricordiœ et voluntatis htimanœ, citur nisi divinilus adjuvetur. lia fil ut se operari
ul nia pru'veniul, hwc sequalur, sala Dei miseri- debere homo cognoscat, dum prœceptum accipit,
cordii inilium saiulis conférât; fui demde volun- et Deo se sciât semper omne bonum debere, quod

tas kominis coopcratrix suœ salutis exsistat, ut vull ac facit. Ibid., pag. 274.
misericnrdia Dei pra'veniens voluntatis Irumanœ * Omnes autem pnedestinati ipsi sunt quos vult

dirigal cursum, et humana voluntas obediens, Deus salvos fieri. Qui propterea omnes dicuntur,
eadeni miitcricordia sul)se(juente currat,ad prœ- quia in ulroque sexu ex omni honiinuni génère,
vium. lîpiscoiii Afiicaui, Epist. ad Joan., pa^. 2TS. grndu, œtate et conditione salvantur. Semper
2 Deus aut m obdurare dicitur, iton quia ad quippe voluntas Dei omnipolentis impleiur, quia
iniquitatem compellit, sed cum ab iniqnitate non polestas ejus nullatenus vincitur : ipse est etiim
eripit : quod, qnia jtislus est, juste facit. Ibid. qui omnia quœcumque voluit fecit in cœlo et in
3 Quonium habet homo liberum arbitrium, au- terra, in mari et in omnibus abyssis, et cujus vo-
dit pra'cepta quœ faciat: scd ad implenda prœ- luntati nemo resistit. Ibid., pag. 271.
, ,

44 HISTOIRE GÉXÉR.VLE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


mes à leur salut mais qu'à l'égard des enfants,
; nés, ne périra jamais mais que la volonté
,

dans lesquels la volonté ne peut être boni- de Dieu s'accomplira pleinement en eux. Dieu
fiée, il faut dire qu'ils sont sauvés par l'opé- lui-même les sauvant par sa grâce et les fai-
ration de la grAce sainte. Ils enseignent que sant arriver à la connaissance parfaite de la
le libre arbitre, qui était sain et entier dans vérité, parla lumière qu'il répandra dans leur
le premier homme, est maintenant comme esprit. Ils citent le passage du pape Hor-

ébranlé par sa propre infirmité dans les en- misdas en faveur de saint Augustin, et deux
fants de Dieu, mais qu'il est relevé et forti- ouvrages de saint Fulgence sans le nommer :

fiépar la grâce dont Dieu les gratifie. Ils di- savoir , ses trois livres de la Prédestination et
sent, sur la question touchant l'origine des de le Grâce, et les cinq qu'il avait écrits con-
âmes, ou qu'il faut la traiter sans aigreur, ou ' tre Fauste. Ce qui fait voir qu'il n'écrivit cette
n'en point parler du tout, parce que, soit qu'el- lettre au nom des évêques relégués en Sar-
les viennent par propagation soit qu'elles ,
daigne qu'après leur retour. Car il était lui-
soient créées pour chaque corps, ce qui n'est même de retour dans son Kglise lorsqu'il
pas clairement exprimé dans les saintes Écri- écrivit ses livres de la prédestination et de la

tures on ne doit faire de recherche sur cette


,
grâce, comme le témoigne l'auteur de sa vie.
matière qu'avec beaucoup de précaution
surfout à cause que les fidèles peuvent igno- § XI.
rer ce qui en est, sans courir aucun danger Lettre des évêques d'Afrique aux moines de
pour la foi, mais que l'on doit croire que les Scythie.
âmes de tous les enfants qui naissent con-
tractent le péché originel, et que le sacre- \ Nous avons déjà remarqué que les moi-
.

ment du saint baptême est nécessaire à tous nes de Scythie, députés à Rome pour y faire Sfilhi»

pour rompre le lien du péché d'origine. Vou- ea SaMii


approuver leur proposition Un de la Trinité :
î'7.
J.«ç.

lant ensuite apprendre à Jean et à Vénérius a souffert, n'ayant point trouvé dans cette
avec quelle chanté ils doivent traiter leurs Église l'appui qu'ils en espéraient, s'avisè-
adversaires, ils lem- disent : Dememez fer- rent de consulter les évêques relégués en
mes et inébranlables par la grâce de Dieu dans Sardaigne par Tiasamond, roi des Vandales.
la foi véritable, et conservez-la dans toute Ils leur adressèrent donc, en 521, un écrit en

sa pureté.Témoignez à ceux, qui sont d'un forme de lettre sigm; de quatre d'entre eux :

sentiment contraire au vôtre une charité , Pierre diacre, Jean, Léontius, et im autre
sincère, et ne désespérez pas de leur con- Jean. C'était comme une profession de foi
version; car celui qui ignore aujourd'hui la où ils déclaraient que sur l'Incarnation ils
vérité sur quelque point particulier, la con- s'en tenaient à la décision du concile de Chal-
naîtra peut-être demain , Dieu la lui faisant cédoine, admettant deux natures en Jésus-
connaître. L'Écriture ne dit-elle pas que dès Christ unies en une seule personne , sans
,

le moment que Dieu veut une chose , il la mélange ni confusion et sans aucun chan-
,

peut exécuter? Adressons luidonc nos priè- gement. En conséquence ils reconnaissaient
res pour eux , enfin qu'il opère en eux la que la sainte Vierge est véritablement mère
connaissance des vérités qu'ils contestent. de Dieu. Mais ils disaient que, la chair étant
Ayons pour eux des sentiments de charité et devenue propre à une personne de la Trini-
d'amour dont Dieu nous tiendra compte et té, on pouvait dire a^n'unde la Trinité a souf-
doit nous récompenser un jour, pleinement fert, en sa chair, et non
qu'il a été crucifié
convaincus et entièrement persuadés qu'au- pas en sa divinité. Outre le concile de Chal-
cun de ceux qui sont écrits dans ses décrets ' cédoine ils faisaient profession de recevoir
,

éternels pour être du nombre des prédesti- ceux de Nicée, de Coustantiuople et d'Éphèsc

Quwstionem vero animarum aut lacitam de-


' busque necessarium esse sancti baptismatis sa-
bemus relinquere, aut sine contenlione Iraclare ; cramenlum, quo dirumpitiir peccnli originalis
quia sive ex propagine venianl, sive novœ singulis vincnlum. Episc. Afrii-., Epist. ad Joan., pag. 275.
corporihus fiant, quod sanctarum Scripturariim ' Scienles quoniam in cnnspcctu Dci quisqui^
auctoritas n<m manifeste prouuntial, cum caulela de numéro prœdestinalorum fuerit, non peribit,
débet inquiri maxime qxiod sine fidci deirimenlo
: et in oninibM.v volunlas Omnipolentis implebitur,
potest a fidelibus ignorari. Jllud prœcipiie ohscr- ut per gratiam salri fiant, el agnilionem verUatis,
vandum est et tenendum nascenlinm parvulorum Domino illuminantr. percipiant. lbi<l.

animas nexu, peccali originalis obstriclas. omni-


,,

[Vl'" SIKCLE.] CHAPITRE I. — SAINT FULGENCE DE IIUSPE. 45


;ivcc les de saint Léon, et de con-
lettres Dieu n'est donc ])oint dans Jésus-Christ
damner tous ceux qiu; le Sainl-Siôge a rôgn- comme il était dans los prophèlos et dans
lirii'iuout comlainnùs. Sur la niàce, ils sui- les patriarches. 11 a pris l'iioiumo onlier pour
vaiiMil ladoctrine de saint Auf;ustin , re- réparer en lui tout ce qu'il lui avait donné
connaissant avec ce Pore que l'iiomnic qui dans la création. » Saint Fulgence dit de la
avait d'abord été créé avec
une entière li- chair ^ de Marie, qu'elle a été une chair de
luuté de faire le bien et le mal, élant deve- pi'ché, ayant été conçue comme los autres
nu par son péché esclave du péché mémo ,
hommes; mais que la chair que le Verljo a
n'avait pu être délivré que par la grâce de prise dans elle n'a eu que la l'essemblance
Jésus-Christ que sans celle grâce il ne peut
;
du péché c'est-A-dire la mortalité. Il ajoute
,

plus penser ni désirùr aucun bien; qu'elle que celle bienheureuse Vierge n'esl devenue
le fait agir non par une nécessité de vio-
, more de Dieu par aucun mérite humain,
lence, mais par une douce insinuation du mais par un eûet de la bonté divine que ;

Saint-Esprit qu'ainsi c'est de Dieu que vien-


: Dieu en mourant selon la chair a détruit en
nent et le commencement des bonnes pen- nous une double mort, celle du corps et celle
sées, et le consentcmeut au bien, do môme do l'âme l'une, en nous faisant ressusciter
:

que les bonnes actions. Ils appuyaient celte par sa grâce de la mort de l'inGdélité; l'au-
doctrine des passages des Pères et des con- tre, en faisant ressusciter nos corps.
ciles, et tinissaient par xni anathèmc ;\ Pela- Le Verbe, avant de se faire homme, n'é-
3. '"
f"""'''
'"'•°'
ge, A Célcslius, k Julien, A leurs sectaleurs, tait point le Christ. Il ne l'a été que lorsque,

et nommément aux livres que Fauste de Riez prenant la forme d'esclave, il s'est anéanti
avait écrits contre la vérité de la prédestina- lui-même. Au contraire la chair de* Jésus-
lion. Christ n'a jamais été sans le Verbe, ni con-
2. Jean, diacre, porteui-de la lettre des moi- çue personnellement. Elle a pris dans le Ver-
'
:at»* dii\
nes de Scylhie, la rendit aux évoques exilés, be-Dieu sou commencement personnel. Ce
, , ag. SUi.
qui chargèrent saint Fulgence d'y répondre n'est point la Trinité qui s'est incarnée, c'est
on leui-nom. Quinze d'entre eux souscrivirent le Fils seul, c'est- A-dire une personne' de

à cette réponse. Saint Fulgence la commen- la Trinité, Jésus-Christ, Fils


unique de Dieu,
ce en disant que de l'homme en cette
le salut qui est Dieu sur toutes choses. Dieu parfait,
vie consiste dans une foi pure ef droite en et homme parfait. « C'est pour nous en con-
Dieu, qui opère par la charité. Puis, après vaincre, dit-il, qu'il a ordonné A ses apôtres
avoir rapporté quelques passages de la pro- d'aller enseigner les nations et de les baptiser
fession de foi de ces moines sur l'Incarnation, cm nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit
il établit la doctrine des deux natures unies nous enseignant par cette forme du baptême
en une seide personne en Jésus-Christ, mon- qu'il a prescrite lui-même que nous ne de-
,

trant que le Fils de Dieu s'est non-seulement vons point séparer les natures dans le Fils
,

fait chair, mais qu'il a pris celle chair dans ni croire que la nature humaine n'ait point
le sein de la Vierge en sorte qu'il est vrai
: eu de part à l'œuvre de notre rédemption
,

de dire que la bienheureuse ' Marie a conçu ni admettre deux personnes en Jésus-Christ;
et enfanté Dieu le Verbe en tant que fait chair. puisque c'est le môme Fils de Dieu Noire-
« C'est le même, dit-il, qui est Dieu et hom- Seigneur Jésus-Christ qui a créé le monde
,

me, la nature humaine ayant été si admi- et qui a répandu son sang pour nous. C'est
rablement unie au Verbe, lorsqu'il s'est fait pour cela que quiconque est régénéré dans
homme, qu'elle n'a point une seconde per- le baptême au nom du Père du Fils et du ,

sonne. Car c'est la nature humaine^ qui a Saint-Esprit, est baptisé en la mort et au
été unie à la divinité et non la personne.
,
nom de Jésus-Christ, afin qu'il paraisse évi-

' Beata Maria Deum Verbuni: secundum quod Sed Verbum illud sine carne Deus œtcrnui
^

caro faclum est, et concepit et peperit. Fulg., Epist. fuit, caro aulem Christi sine Verbo non solum
17, rag. 290. Christus aliquando non fuit, sed nec personaliter
* Accessit Deo humana substaïUia, nonpersona. conceplu fuit. Ibid., pag. 293,
Ibid., pag. 291. 5 Igitur non Trinitas, sed solus Filius, id est
' Caro Marice quœ in iniquitatibus humana so- una ex Trinitale persona Christus Dei Filius
lemnitale fuerat concepta, caro fuit utique pec- unicus, ut nos salvos faceret, carne conceplus
cati, quœ Filium genuit in simiUtudinem carnis et natus est de ventre Virginis matris, Ibid.,
'
peccati. Ibid., pag. 292t pag. 296.
,

46 rriSTOiRE GÉXÉnALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


demmcnf que nous sommes ensevelis par le et l'un et l'autre sont passés li ses descen-
bapti'me avec celui au nom duquel il est dants. Dire , comme faisaient quelques-uns,
constant que nous sommes baptisés. » Saint que les enfants ne contractent point le pé-
Fulgence assure que telle est la croyance de ché originel, c'est nier que leur chair soit
l'Église romaine, le sommet de l'univers; et une chair dépêché, ce qui est contre la doc-
celle de tout le monde clirélien, ajoutant trine expresse de l'Apùtre ; c'est dire qu'il j"»"- '

que cette Église a reçu cette foi des deux n'y a aucune dillerence entre leur chair et
grandes' lumières saint Pierre et saint Paul, celle que unique de Dieu a prise dans
le Fils
dont elle possède les corps, et qui l'ont l'un le sein de
la Vierge; c'est dire encore que les
et l'autre illustrée par les rayons de leur enfants n'ont pas besoin du secours du Sau-
doctrine. Saint Pierre dit en cflcl dans les veur, et c'est tomber conséquemment dans
Aci. ii,3«.
Actes des apôtres Que chacun de vous soit
: l'hérésie de Pelage. Si les enfants naissent
baptisé au nom de Jésus-Christ jKivr obtenir la sans péché, il n'y a rien en eux (pii puisse
Bon,. Ti, 3.
rémission de vos jn-chcs. Et saint Paid : Ne sn- être purifié par la régém-ration spirituelle,
vez-vousjMS que nous tous, qui avons été bapti- et c'est en vain qu'on leur confère le bap-
sés en Jésus-Christ , nous avons été baptisés en tême pour la rémission de leurs péchés. Tou-
sa mor/? Jésus-Christ a non-seulement eflfacé tefois ce baptême est donné uniformément'
nos iniquités par sa mort mais il nous a en-
, aux enfants comme aux adultes afin que ,

core rendu la faculté des saintes pensées que l'on connaisse qu'ils ont tous la tache du pé-
Dieu avait accordées au premier liommc dans ché originel. C'est la foi seule du Rédemp-
sa création. Car cetliomme, dit-il, qui avait
<( teur, qui nous délivre de ce péché d'origine,
été créé exempt- de la nécessité de pécher, et il nous en délivre non à cause de la foi
étant tombé dans le crime et ayant perdu
, qu'il trouve en nous mais par celle qu'il
,

par sa chute la santé de son âme, il a perdu nous donne car la foi n'est pas de nous
:

en même temps le pouvoir de penser Dieu. iy elle est un don de Dieu. Paul, lorsqu'il était
Il a oublié de manger son pain, et étant dé- un blasphémateur et un persécuteur', n'a
pouillé du vêlement de la foi, et tout cou- pas été aidé delà grâce de Dieu, parce qu'il
vert de blessures que lui avait faites la con- voulait croire mais afin qu'il voulût croire,
;

cupiscence de la chair, il était tellement de- il a reçu le don de la grâce prévenante,


meuré accablé sous la servitude du péché ,
qui trouva dans sa volonté non pas un com-
qu'il n'auraitjamais pu avoir aucun com- mencement de foi mais le blasphème la
, ,

mencement de bonne volonté, s'il ne l'avait cniauté, les outrages et l'ignorance avec
reçu de Dieu, qui le lui donne gratuitement. l'incrédulité. Car, depuis que le premier
Par la chute du premier homme la mort est homme " s'est volontairement souillé par le
donc entrée dans le monde avec le péché ; péché, et s'est assujetti en péchant à mille

' Propterea omnis qui in nomine Patris et Filii miter infanlibus mnjoribusque confertur vt om~
et Spiritus Sancti sacrnmento sanctœ régénéra- nibus originalis inesse peccati mactila cognosca-
tions alHuitur, nonnisiin Christi morte ac nomine lur. Ibid., pag. 303.
baptizatur, ut eiidenler apparent illi nos conse- ' Cm m ergo Paulus esset blasphemus et perse-
puttos esse per baptismum inmorte, in cujus une cutor contumeliosus, non ideo est ndjiitus Dei
et
constat nomine baptizatos.Qund, duorum magno- gratia, quia credtre roliiit; sed ut credere rellet,
rum luminarium, Pelri scilicel, Paulique vcrbis, donum gralim prœrenientis acrepit, quœ in ejus
tanquam splendcntibus radiis illustrata, eorum- roluntate non aliqnod credulilatis initium, sed
quc decorata corporibus romana, quœ mundi blasphemium, sœvitiam, cnniumelias et ignoran-
cacumrn est, tenet et docet Ecclesia. lolusque cum tiam in incrediilitale reperit. Iliiii., pag. 30G.
ea chrislianus orbis. Fui?., Epist. 17, pag. 298. ' Ex quo enim primus liomo naluram suam vo-

* Peccans itaquc illc qui sine peccandi neccssi- luntarie viliarit. atque oppressif ita crcrit in-
,

tate creatus est, in co quod animœ sanilalem de- firmilas, ut nisidirinœ gratia- medicamento prw-
linquemln perdidit, ctiam itla cngitandi quœ nd vcnlurn in unoquoque hominc sanetur atque ad-
Deum pertinent, amisit prolinus facullatem. Ohli- juvelur liberum indesxnenter arbitrium, sit qui-
lus est enim manducare panem suiim, et expolia- dem liberum, non tamen bonum : sit liberum, non
lus vestimenlo ftdei carnalinmque conrupiscen- tamen rectum: sit liberum, non tnmen sanum :
liarum vulneribus sauciatus, sic jacuil nppressus sit liberum, non tamen jiistum : el quanlo magis
ditione peccali, ut nullalenus aliqnod bonce ro- a bonitale, rectiindine. sanitnte, jusiitiaque lilie-
tuntatis inilium habere poluissel, nisi hoc Deo rum. tanio magis nifi/ihVr, perrersitatis. infirmi-
gratis douante sump&isset. IMd., pag. 300. tatis atqw iniquitatis mortifera serritute capli-
' Quod baptismalis sacramenlum idco unifor- tum ; Qui enim farit peccaluni fcrviis esl |ipri'ali,
[Vl' SIÈC/,E.] ClTAPrmH I. — SAINT FULGKNCE DK IIUSPI-;. M
iiiliiinilrs, sa faiblossc est devenue si gran- conserve. Saint Fulgoncc fait voir que Dieu,
de i[ii(', si lo libre arbitre ilo cbaqno bonimo en donnant la foi à (|uelf|iies-uns , lors((u'il

eu pailiciilicr n'esl j^néri cl ii't>st aiib'^ ]iai' la refuse ."i d'autres, ne f:iil pdinl acceplidU
celte gi'Acp il peut bien être libre, mais il
, de persoime, puisqu'il use à l'i'gard des hom-
110 sera ni bon, ni droit, ni sain, ni juste; mes, comme un potier l'égard d'une masse ;'i

et plus il est ainsi atlrancbi de la bonté, de d'argile dont il fait tantôt un vase d'honneur,
la santé, delà droiture et de la justice, plus el lanlnt un vase d'ignominie. Il avoue que
il est asservi et sujet i\ la servitude niorlello l'on peut dire en un sens que l'bomme peut
de la malice, de l'injustico, de la faiblesse croire naturellement, quoiqu'il lui soit donné
et de riuitjuité, suivant celte parole de saint de Dieu de croire étant évident qu'il est
;

jMn. vui,
du créé pour croire parce que par la foi la na-
j,.;in ; Celui qui iimwwt le péc/ié est esclafc ,

n rnr. Il,
j)^cltè;c{ cette autre de saint Pierre: Quicon- tiu'c humaine est renouvelée de sa vétusté ,

que est vaincu , est esclave de celui qui l'a vain- cl qu'il est même contre la nature de l'hom-
cu. Ainsi, tant que
pécbé n^gne dans l'bora- le me de ne pas croire en Dieu puisque son ;

nie, il un libre arbitre, mais


a, A la vérité, incrédulité ne lui vient pas de la création ,

qui est libre sans Dieu, et non pas libre sous mais de la transgression volontaire du com-
l'empire de Dieu; c'est-à-dire libre de la mandement de son Créateur. 11 enseigne que
justice , et non pas libre sous la grâce ; et lorsque l'Apôtre dit qu'il y a des peuples
dès lors il est libre, mais d'une liberté misé- qui font naturellement ce que la loi com-
rable et esclave, n'ayant ptiint été délivré mande, cela doit s'cnlendre des peuples fi-

pai" lagrâce toulc gratuite d'un Dieu qui fait dèles et convertis ,
qui , sans avoir la lettre
Bom. viso. miséricorde. C'est ce que saint Paul nous de l'Ancien Testament, en exécutaient les
fait entendre clairement par ces paroles : préceptes par la grâce du Nouveau que la ;

lorsque vous étiez esclaves du péc/té , vous étiez coimaissance de Dieu cl la foi ne servent ,

dcms une fausse liberté à l'égard de la justice. de rien sans la charité et que si Dieu ne ;

Quiconque donc est libre à l'égard de la jus- donne pas la foi à tous, il faut adorer en cela
tice ne peut point faire des œuvres de justi- la profondeur de ses jugements se conten- ,

ce parce que tant qu'il est esclave du pécbé


: ter de reconaîlre qu'il exerce gratuitement
il n'est capable que de pécher. Or il n'y a sa miséricorde envers ceux qui sont sauvés;
que la grâce de Jésus-Cbrist notre libérateur adorer sa justice à l'égard de ceux qui sont
qui puisse nous délivrer de cette servitude condamnés, et chanter avec un cœur contrit
du pécbé. » et humilié la justice et la miséricorde du Sei-
^suiie, lu;. 4. Celte liberté, qui ne naît pas du libre gneur qui nous montre dans les vases de co-
arbitre de l'homme, mais qui est donnée par lère, destinés à la perdition, que nulle ini-
la miséricorde gratuite de Dieu, prend son quité ne peut plaire à sa justice, et qui nous
commencement de la bonne volonté, comme dans sa conduite envers les vases
fait sentir

notre vie prend le sien de la foi, laquelle ne de miséricorde que sa bonté peut remettre
naît point de notre volonté, mais nous est tous les péchés à qui il lui plaît. En expli-
donnée par le Saint-Esprit. C'est cet Esprit quant ces paroles de saint Paul Dieu veut : \
Ti™

Saint qui forme Jésus-Christ dans le cceur qus tous les hommes soient sauvés, et qu'ils par-
des fidèles selon la foi, comme il a formé viennent à la connaissance de la vérité , il sou-
Jésus-Christ selon la chair dans le sein de la tient que ceux-làtrompent qui prétendent
se
Vierge. Loin que la grâce détruise le libre que saint Paul .suppose en cet endroit une
arbitre ', elle le guérit ; elle ne l'ûte pas, volonté générale et égale de sauver tous les
mais elle le corrige, l'éclairé , l'aide et le hommes. « Ceux qui soutiennent, dit-il ^,

eta quo quisdevictus est, huic et servus addictus peccati servus, nonnisi ad serviendum peccato
Régnante igitur peccato, habet quidem lihe-
est'? reperitur idoneus. Ab isia servilute peccati nemo
rwm arbitrium, sed liberam sine Deo, non libe- liber efficitur, nisi qui liheratoris Christi gratia
rum sub Deo, id est, liberum juslitia, non lihe- tiberatur, ut scilicel liberalus a peccato servus
rum sub gratia, et ob hoc pesslme atque scrvili- fiâtDeo. Fui?., Epist, 17, pag. 307.
ter liberum, quia non rfratuito miserentis Dsi 1 Gratia humanum non auferlur, sed sanalur;
immere liberatum. Hoc Àpostolus evidenter insi- non adimitur, sed corrigitur, illuminalur. adju-
nuât, dicens : Cum enim servi essetis peccati, li- vatur atque servaiur arbitrium. ibid., pag. 309.
beri fuistis justitiae. Servire igitur justitiœ non - Illud vcro apostolicum ubi dicitur d.' Deo :

potest qui jusLiliœ liber est: quia quamdiu est Oui vult omnes homines salvos fieri et ad aguitio-
,

4S HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUT:S.


que celte volonté de Dieu regarde aussi bien les hommes, n'excite ni ne change leur vo-
les réprouvés que n'entendent point
les élus, lonté, mais l'attend, comment donne-t-il le
comme il faut le texte de TApôtre. Us ne salut éternel aux enfants qui meurent aus-
font point assez d'attention à cette parole si sitôt après le baptême sans avoir attendu
,

certaine de l'Écriture, qui, pour nous assurer ni trouvé en eux une bonne volonté ? Com-

de la toute puissance de Dieu, nous dit // : ment en condamne -t-il d'autres, qui sont
a fait tout ce qu'il a voulu dans le ciel , sur la morts sans baptême au supplice éternel
,

terre, dans la mer et dans tous les abîmes. Qu'au- sans avoir trouvé en eux aucune faute d'une
ront à répondre, ajoute-t-il, ces personnes mauvaise volonté? Il appelle ces ennemis de
qui croient que la volonté de Dieu par la- la grâce, non les défenseurs, mais les trom-

quelle il veut que tous les hommes soient peurs du libre arbitre; et il ajoute '
: «Quand
sauvés, est égale envers ceux qui doivent être donc on parle de tous que Dieu veut
ceiLX
rachetés, et envers ceux qui doivent être dam- sauver il faut l'entendre de manière que
,

nés, lorsqu'on leur demandera comment il nous ne nous imaginions pas que per-
se peut faire que Dieu veuille que tous les sonne ne puisse être sauvé que par la volonté
hommes soient sauvés, et que tous cependant de Dieu ni que la volonté d'un Dieu tout
,

ne pas? Répondront-elles que Dieu


le soient puissant puisse n'être pas accomplie, ou que
attend la volonté de l'homme, afin que la quelque chose en puisse empêcher l'elJet en
récompense soit justement donnée à ceux quelque manière que ce puisse être. Car
qui veulent le bien et que ceux qui ne le
, tous ceux que Dieu veut qu'ils soient sauvés,
veulent pas, soient justement condamnés ? >>
sont indubitablement sauvés et personne ,

Saiut Fulgence fait voir par le discerne- , ne peut être sauvé sinon ceux que Dieu veut
ment que Dieu fait entre les enfants, combien qu'ils le soient, et il n'y en a aucun qne
cette réponse est frivole ;
puisque l'on ue peut Dieu veuille qu'il soit sauvé, qui ne le soit
pas dire que le bon ou le mauvais usage de en eil'et parce que notre Dieu a fait tout
,

leur volonté soit la cause ou de leur salut ce qu'il a voulu faire. Tous ceux donc
ou de leur damnation. Si Dieu, pour sauver que Dieu veut qu'ils soient sauvés, sont ef-

nem veritatis venire, nonsicut oportet intelligunt, fieri, sic intelligere debemvs ut nec aliquem pute-
qtii hanc Dei voluntatem sicul in vasis misericor- mtts salvum fieri pos.'ie nisi voluntate Dei, nec
diœ, sic et in vasis irœ accipiendam pulant, mi- existimemus voluntatem omnipotentis Dei, aut in
nus considérantes veracissiinam Scriplurœ sen- aliquo non impleri, aut aliquatemus impediri.
tentiam, qu<B divinœ commendans omnipotentiam Omnes enim quos Deus vult salvos fieri sine du-
voluntatis : Omnia, inqiUt, quaecumque voliiit fe- bitatione salvantur, nec possunt salvari nisi quos
fecit in cœlo et in terra, in mari et in omnibus abis- Deus vult salvos fieri. nec est quisquam quem
sis... Proinde hi qui voluntatem Dei qua omnes Deus saivari velit, qui non salvetur : quia Deus
homines vuU salvos fieri, œqualent circa redi- noster omnia quaecumque voluit fecit. Ipsi omnes
mendos damnandos exislimant, cum inlerrogati
et iitique salvi fiunt quos omnes vult salvos fieri :

Deus omnes homines salvos fieri


fuerint cur velil quia hœc salus non illis ex humana voluntate tias-
nec tamen omnes salvi fiant, quid re^pondebunt? cilur sed ex Dei bnna voluntate prœstatnr. Ve-
An itlud quod vestra eos dicere testatur epistola, rumtamen in his omnibus Iwminibus, quos Deus
quia Deuscxspectat hominis voluntatem ut œquum , rull salvos faccre, non totum oninino genus si-
sit involentibus prœmium, in noientibus autem gnificatur hominum, sed omnium universitas sal-
justa damnatio? Sed ut prnlixitatcm vitantes randorum. Ideo autem omnes dicli sunt, quia ex
omittamus alla quœ possunt pro veritate fidei huic omnibus hominibus omnes istos divina bonitas
pravœ sententiœ replicari, intérim testimonio con- salvat, id est, ex omni génie, conditione, œtate,
vincantur atque confundantur non loquentium ex omni lingua, ex omni provincia. In his omni-
hominum, sed tacentium parvulorum.. In eis nam- bus ille sermo twstri Redemptoris implelur. quo
que nec bona voluntas est, ut œquum sit in vo- ait: Cum exaltatus fncro a terra, omnia traham ad
lentibus prœmium; nec mala.ut sit in noientibus meipsum. Quodrion ideo dixit quia omnes omnino
justa damnatio. Si ergo ad salvandos homines trahit, sed quia nemo snlvus fil. nisi quem ipse
sicul isti volunl, non excitât, neque mutât, sed Iraxerit. Sam et alibi dicit: Nemo potest vcnire
exspectat hominum voluntates, quomodo infanti- ad me, nisiPater qui misit me traxcrit eum. Item
bus qui baptisantur, et in eadcm infantia moriun- alibi: Onine quod dédit mihi Pater ad me veniet.
lur, dnnat ceternam salutem, quoruyn bonam nec m ergo sunt omnes quos vult Deus salvos fieri et
exspectat nec inienit voluntatem? Item alios quo- ad agnilionem veritati» venire. Est autem fami-
mndo sine baptismale morluns œternis cruciati- liari divinis eloqiiiis, ul omnes nonnumquam di-
bus dnmnat, cum in eis nullam culpam malir vo- tamen omne humanum genus in ipsis
canl, nec
luntatis inieniat ? lliiil., paj.'. 318. omnibus semper inlelligi debere commoneant.
' Quocirca itlos omnes qxtos Deus vuU salvos Ibid., pag. 'Jùl et 322.
[Vl° SIÈCLE.] CriAPITHE 1. — SALNT FUI.GENCE DE RUSPE. 4!)

lectivcmcnt sativi's, parce qiio ce n'est jininl Il appelle iloiu' liiiis cpiiconipio est appelé du
par leur propre viiloiiti', mais par la volmité SeigiKMir. Il est ditdans h's Psaumes que ton- ,
'""i- •'>"•
de Dieu qu'ils oMii'iuiciil le saliil. Ainsi tes les nations, que Dieu a faites, viendront,
quaml ou parle de Idiis les Ikiiiuikîs (pie qu'elles l'adoreront, et qu'elles glorilieronl
Dieu veut sauver, ou lui doit jias entendre son nom ; et toutefois Jésns-Christ dit t\ ses
absolunieul et eulit'reineut tout h; K<'"if 1'"- apôlres : Vous serez hais de toutes les nations à MjhIi.i.ïî.

niain, mais seulement la totalité de ceux qui cause de mon nom. L'I'Jcriture est-elle donc
seront sauvés, que l'Écriture appelle du contraire à elle-même ? A Dieu ne plaise !

nom do tous, parce que c'est d'entre tous Mais elle a compris sous le terme de tous,
les hommes que la divine l)onté choisit tous ceux qui dans les nations devaient se con-
ceux qui sont sauvés, c'est-à-dire qu'elle vertir, et glorifier parleur foi le nom du Sei-
les prend de toute nation de toute condi- , gneur; et tous les incrédules, qui, dans les
tion de tout Ape de toute langue, de toute
, , mêmes nations , devaient
par persévérer
province. C'est dans tout cela que cette pa- leur impiété dans du nom de Jé-
la haine
role de nolie Hédempleiir est accomplie : sus-Christ. Nous lisons dans l'Épltre aux coios.. 1,10

JoaD. Quand on m'aura élevé de la terre je tirerai Colossiens que tout a été créé par le
,
ai.
tout à moi ; non pas qu'il tire absolument à Fils daus le ciel et dans la terre, les cho-
lui tous les hommes sans exception mais ; ses visibles et les choses invisibles et au ;

parce que personne n'est sauvé, sinon ceux même endroit, qu'il a plu
au Père de récon-
que le Fils tire h lui. Car il dit encore ail- cilier par lui toutes choses avec soi, ayant
leurs Personne ne peut venir à moi, si mon
: pacifié, par le sang qu'il a répandu sur la
Père qui m'a envoyé ne le tire. Et encore : croix, tant ce qui est dans la terre, que ce
Tout ce que mon Père m'a donné viendra à moi. qui est dans le ciel. Dira-t-on que Jésus-
Ce sont donc là tous ceux que Dieu veut Christ a pacifié tout ce qui est dans le ciel
sauver, et faire venir à la connaissance de la et sur la terre? S'il en était ainsi, il faudrait
vérité. » de deux choses l'une ou nier que le diable :

Saint Fulgence prouve par un grand nom- ou les anges ont été créés par Jésus-Christ,
bre d'exemples tirés de l'Écriture , que le ou dire qu'il les a réconciliés par le sang de
root de tous, ou totts les hommes, ou toutes les sa croix. L'une et l'autre de ces deux proposi-
nations, ne doit pas toujours s'entendre tions sont insoutenables, et il n'y a pas moins
d'une totalité entière, absolue et sans excep- d'impiété à dire que le diable n'a pas été
tion « Car autrement, dit- il, on serait obligé'
: créé par Jésus-Christ, qu'à croire qu'il a eu
d'avouer que le mensonge se trouverait mê- part à la réconciliation de Jésus-Christ. » A
me dans la parole de Dieu. Il est dit daus le l'occasion de ce passage, saint Fulgence don-
iaSI. 11,29. prophète Joël Je répandrai mon esprit dans
: ne une autre expfication à ces paroles de l'A-
les derniers jours sur toute chair ; prophétie pôtre Dieu veut sauver tous les hommes
: a De :

que saint Pierre dit avoir été accomplie dans même qu'on dit que^ toutes choses ont été
les cent vingt personnes sur lesquelles le créées par Jésus-Christ, parce qu'il n'y a
Saint-Esprit descendit en forme de langues rien que le Père n'ait créé dans son Fils et
de feu. Le même apùtre disait aux Juifs :
par sou Fils, de même, dit ce saint évêque,
Ad. II, 38 8t Faites pénitence, et que chacun de vous soit bap- on doit dire que tous sont réconciliés avec
tisé au nom de Jésus-Christ pour obtenir la ré- Dieu en Jésus-Christ et par Jésus-Christ, parce
mission de vos péchés, et vous recevrez le don du qu'il n'y a aucun homme qui soit réconcilié

Saint-Esprit. Car la promesse a été faite à avec Dieu autrement que par la croix de Jé-
vous , et à vos enfants , et à tous ceux qui sont sus-Christ. Par cette règle ainsi appuyée sur
éloignés, autant que le Seigneur en appjellera. l'autorité des divines Écritures, nous devons

' Dicil Dominus per prophetam Joël: In novis- nihilest quod non per Filiuin et in Filio
siuit, qtiia
simis diebus etViimlam de Spirilu ineo super om- creaoerit Pater. El omnia per ipsum atque in ipso
nem carueni. Quod in cenlwm viginti hominibus, reconciliantur,q%iianullus est hominum qui sine
in qtios Spirilus Sanctus linguis igneis venil, fac- cruce Christi reconviliationis beneficium conse-
tum beatus Pelrus ostendit. Si ergo hic omiieni qualur. Ex hac igiluf régula, quœ cœlestibus in-
carnein oinnes oinnino putareriinus homines in- serta nwnstratur oraculis, sicintelligamus omnes
telligi, incipiet, quod absit, mendax œstimari ser- homines quos vult Deus salvos fieri, ut noveri-
mo divinus. Ibid. mus otnnes qui salcantur, nonnisi ex ejus gra-
2 Omnia ergo per ChrisCum et in Christo creata tuila bonitate salvari. Ibid., pag. 312.

XI. 4
,

50 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


entendre de que Dieu veut sauver
telle sorte, dans l'altération sensible dos parties du
tous les /lommes, que nous sachions que de corps, et dans sa si'-paration d'avec l'âme.
tous ceux qui soûl sauvés il n'y en a pas un Ce principe posé, il répond que Jésus-Christ,
qui ne soit sauvé par la bonté gratuite du ayant pris une nature sujette à la mort, a
Seig-neur. Saint Fulgence Onit par une réca-
ii aussi été sujet à la faim , à la soif et à la fa-
pitulation de ce qu'il avait dit sur le mystère tigue ,
qui sont des faiblesses inséparables
de l'incarnation et sur celui de la grâce. « A d'une nature sujette à la mort, et qui cau-
quoi il ajoute que Dieu qui a créé l'homme, sent la mort même, puisque par la soif, la
lui a préparé par le décret de sa prédestina- faim et la fatigue, se fait la dissolution du
tion, la foi, la justification, lapersévérance corps d'avec l'àme. Il iijoute qu'il a encore
et la gloire ; quiconque ne reconnaît
el (juc été sujet à la corruption qui consiste dans
point la vérité de la i)ré(lestination par la- la mort, puisqu'il est mort réellement mais ;

quelle saint Paul dit que nous avons été élus qu'il n'a point essuyé celte autre sorte de
en Jésus-Christ avant la création du monde, corruption qui entraîne une si grande alté-
ne sera point du nombre des élus, et n'aura ration des parties, que le corps est réduit en
point de part au salut, s'il ne renonce à cette pourriture et en poussière , étant ressuscité
erieur avant de mourir. » 11 dit néanmoins le troisième jour, toutes les paities de son
que l'on ne doit point cesser de prier pour corps entières; que depuis sa résurrection
ces sortes de personnes afin que Dieu les , il est absolument incorruptible par l'union
éclaire par sa grâce qui fait fructifier la pa- inséparable de son âme avec son corps, qui,
role divine; parce que c'est en vain qu'elle par la gloire dont il jouit, est comme spiri-
frappe nos oreilles, si Dieu par un don spiri- tualisé. Il cite sur cela un témoignage de
rituel n'ouvre l'entendement de l'homme in- saint Augustin tiré de sa lettre à Consentius.
tériem'. A l'égard de première sorte de corruption,
la

il aucun lieu dans Jé-


soutient qu'elle n'a eu
§ XII. sus-Christ, n'ayant contracté ni péché origi-

Lettre au comte Régin. nel, ni péché actuel que pendant sa vie mor-
;

telle il n'a point été sujet aux passions qui


.
comteJ'"«/l
Brpia
!• Le comte Régin *-'
avait écrit à saint Fui- préviennent causent des trou-
la l'aison et

Jcum!"
''"''
gence pour le consulter sur deux points. Le bles involontaires et que s'il a quelquefois
,

premier de doctrine, savoir si le corps de soufl'ert les impressions de la tristesse et des


Jésus-Christ était corruptible ou s'il était de- autres infiiinilés de notre ftme, c'a été vo-
meuré incori'uptible. Le second de morale, lontairement de sa part, pour nous montrer
regardait la vie que doit mener un homme qu'il nous prêterait son secours dans de sem-
engagé dans la profession des armes. Nous blables ai'llictions que nous soutirons néces-
n'avons jilns la lettre de ce comte. Saint Ful- sairement.
gence ne lépondit qu'à la première de ses
questions, la mort l'ayant empêché de satis- § XlII.
faire à la seconde. Régin s'adressa donc au
Livre de la Trinité à Félix.
diacre Ferrand qui l'instruisit sur ce qu'il
souhaitait par une lettre que nous avons en- 1. Félix, (jui est qualifii- notaire, se trou- p.iiJ*'"?,^',
core. vait souvent avec des hérétiques qui tû- f"'*""-

B«pni..(. Je 2. Ce qui avait engagé Régin à consulter chaient de l'engager dans leurs erreurs. Vou-
lui
>ali Fulccn- . _, , ., ...
, ,
ce » Bi-sin, saint Fulgence sur la corruptibilite ou Ini- lant non-seulement éviter les pièges qu'ils
lii;. 323,
corruptiliilité du corps de Jésiis-Clirist était , lui mais les ramener
Icndaioiit à cet ellel,
la dispute élevée depuis quelque temps en- lui-même de la foi catholique, il
à la vérité
tre les eutycliéens d'Orient, les uns soute- pria saint Fulgence de l'instruire exactement
nant que le corps de Jésus-Christ avait été de la doctrine orthodoxe sur la Trinité. Fé-
incorruptible dès le moment de sa concep- lix avait encore spécifié, ce semble, quelques
tion; les autres qu'il avait été corruptible autres articles sur lesquels il avait besoin
avant sa passion, et qu'il était incorruptible d'instruction car outre celui de la Tjrinité
:

depuis sa résurrection. Saint Fulgence dis- suint Fulgence traite encore de ce qui re-
tingue deux sortes de corruption, l'une du garde anges cl l'homme.
les
péché, qui renferme la concupiscence et le 2. « Laque nous voulons vous faire con-
foi . }-'J" "
péché môme ; l'autre du corps, qui consiste naiire, lui répondit le saint évoque, est celle
J^.'j,^*'"'
,

[vr SIKCLE.] CHAPITRE L — SAINT FULC.ENCE DE IIUSPE. M


par qui les paliiafclms, les prophMcs et les mémo chose, parce que l'essenci' (hi l'ère;,

apôtres ont été justifiés, et les martyrs cou- du Fils et du Saint-Esprit n'est pas dill'érentc.
ronnés; celle (pio la sainte Ef^lise, répandue Si elle l't'tait, le Fils ne serait pas véritahle-
par toute la terre a professée jusqu'ici, et
, mcut engendré du Père, et le Saint-Esprit
no procéderait pas du Père et du Fils. Il y a c«p. m.
qu'ont enseignée successivement les évo-
ques qui se sout assis à Rome dans la chaire donc trois coéternels, consubstanticls et coes-
cip. 1. de saint Pierre, ou à Anlioclio à Alexan- ; sentiels. Quand on a demandé aux saints Pè-
drie dans la chaire de saint Marc ; ;\ Éphèsc res ce qu'étaient ces trois, ils n'ont pas osé
dans la chaire de saint Jean, et ;\ Jérusa- dire que c'étaient des essences, des substan-
lem dans celle de saint Jacques. Contraignez ces ou des natures, de peur que l'on ne crût
donc les ariens, les douatistes, les nesto- qu'ils avaient diverses essences, ou natures
riens et les autres hérétiques de communi- ou substances; mais ils ont dit trois person-
quer avec ces Eglises auxquelles les ap(Mres nes et une essence, afin que l'unité d'essence
ont présidé. Ils ue veulent pas y consentir, marquât l'unité de Dieu, et que les trois per-
parce qu'étant divisés de l'unité de l'Eglise sonnes marquassent la Sainte Trinité. Cette
par leur foi erronée, ils ont mieux aimé faire Trinité inséparable et immuable n'admet
". un parti, d 11 dit encore que cette foi est la mê- point trois dieux comme elle n'admet point
me que celle dans laquelle Félix avait été ré- trois essences, ou substances ou natures. »
généré autrefois en croyant au nom du Père Saint Fulgence allègue, pour prouver la Tri- 'J-

et du Fils et du Saint-Esprit. 11 explique cette nité des personnes en une seule nature, les
foi en disant « Le Père n'est pas le Fils', le
: passages que l'on rapporte communément,
Fils n'est pas le Père, le Saint-Esprit n'est et il en use de même pour établir la divinité
ni Père Étant trois, quel est je vous
ni Fils. , du Fils et du Saint-Esprit. Et, pour faire con-
pi'ie, le nom
unique du Père, du Fils et du cevoir cette unité de nature en trois person-
Saint-Esprit, dans lequel il faut que uous nes, il donne divers exemples tirés des choses
soyons baptisés, sinon le nom de la Divinité créées. «Tout corps, dit-il, soit grand, soit pe-
qui ne peut être triplé ? Car encore que nous tit, a un nombre départies, une mesure et un

disions que le Père *est Dieu, que le Fils est poids; il ne peut être sans ce nombre, sans
Dieu, que le Saint-Esprit est Dieu, nous ne ce poids et sans cette mesure, et là où se
disons pas ti-ois dieux, parce qu'il est écrit : trouve l'un des trois, les deux autres s'y trou-
Deui. ïi,». Ecoute, Israël, Seigneur ton Dieu est un. U
le vent nécessairement. Dans l'âme de l'hom-
est donc un en nature, non en personne, car me se trouvent la mémoire, le conseil et la
autre est la personne du Père, autre celle du volonté, l'un des trois ne peut être sans les
Fils, autre celle du Saint-Esprit. Le Père n'est deux autres. » Il cite un Père qui avait mar-
engendré d'aucun, le Fils est engendré du Pè- qué également ces trois choses dans l'àme,
re, le Saint-Esprit procède du Père et du Fils. en disant lorsqu'il priait Dieu: «Que je me
Ces noms relatifs fout la Trinité, les essen- souvienne de vous, que je vous conçoive,
tiels ne se triplent pas. Toutefois quelque que je vous aime. »
Suite da li-
nom que vous prononciez de ces trois dans 3. Sur l'incarnation, il dit qu'elle n'appar- vre de la Irl-
Dite,
la sainte et souveraine Trinité, il signifie une tient point à toute la Trinité, mais au Fils

• Pater Filius non est, Filius Pater non est, summaque Trinitate dixeris. unum idemque si-
Spiritus Sanctus nec Pater nec Filius. Et cum gni/icat. ^on est diversa Pati-is et Filii et Spiri-
ires sint, quod est, rogo, nomen unum Patris et tus Sancti essentia. Quod si esset nec veraciter
,

Filii el Spiritus Sancti, in quo nos oporteat bapli- Filius a Pâtre gigneretur , nec Spiritus Sanc-
nomen deitatis quod tripli-
zari. nisi illud scilicet tus a Pâtre Filioque procederet... Ergo sunt tria
cari Quamvis enim dicamus Patrem
non polest ? quœdam coœterna, consubstantialia, coessentia-
Dium, Filium Deum, Spirituni Sanctum Deum, lia. Sed cum quœreretur a Patribus, et dicere-
iamen non dicimus très deos, quia scriptum est: tur, quid tria ? ]\'ec essentias, nec substantias, nec
Audi, Israël Domiaus Deus tuus uuus est. Vnus
, naturas dicere ausi sunt; ne aligna forte diversitas
est igilur Deus in nalura, non in persona ; quia crederetur essentiarum. aut naturarwn, aut sub-
alia est persona Patris, alia Spiritus Filii, alia stantiarum : sed dixerunt très personas, unam
Sancti. Pater a nullo est genitus
Filius a Pâtre , essentiam uti una essentia declararet Deum
:

est genitus, Spiritus Sanctus a Pâtre Filioque unum, autem personœ Sanctam Trinitatem
1res
procedens est. Ista relativa nomina Trinitatem ostenderent. Fulg., lib. De Trinit., cap. ii et in,
faciunt. Essentiatia vero nullo modo triplican- pag. 329 et 330.
lur; quodlibet de his nominibus in illa sancta
52 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
pas permis de croire que le Pè- du Sauveur, mais alors ce libre arbitre était
c... r,. seul, n'étant
soient faits liomme, porté au mal et non au bien. C'est pourquoi
re ou lo Saint-Esprit se
comme homme. Il ap- il a i.esoin d'être délivré par la grâce, afin
ni ([uils aient sou(l'erl
Saint-Esprit son apparition qu'il veuille et qu'il puisse faire le bien, se-
pelle mission du
de langue de feu, et lon ce que dit un des Pères, qu'il faut que la
en forme de colombe et
grâce prévienne l'homme, lorsqu'il ne veut xn
met cette dill'érence entre la mission du
Cip.
il

du Saint-Esprit, que celle-ci n'a pas encore, afin qu'il veuille; et qu'elle le
Fils et celle
suive lorsqu'il veut, afin qu'il ne veuille pas
été que pour un temps, au lieu que la mission
inutilement. Ainsi avant que l'homme ait la
du Fils qui consiste dans son union pei-son-
toujours. foi, mal; et
a le libre arbitre, mais pour le
nelle avec la nature humaine durera
il

puissance de la lorsqu'il a la foi, il a le libre arbitre pour lo


V,,:. Il enseigne que c'est par la

Trinité que toutes choses ont été créées, que


bien mais après qu'il a été délivré par la
,

excellents grâce de Dieu. » Il distingue avec saint Au-


les anges sont les premiers et les
créés, qu'une partie d'entre eux gustin la grâce des deux états, en disant
des êtres
qu'.\.dam, avant son péché, avait une grâce
sont déchus de leur état pour n'avoir pas
voulu faire la volonté de leur Créateur, et par laquelle il pouvait avoir la justice s'il l'eût
qu'en conséquence de leur désobéissance ils voulu mais que la grâce par laquelle les
,

seront punis dans les flammes éternelles, hommes sont rachetés de la masse de perdi-
parce cpi'il était en eux de persévérer dans la tion est plus forte, puisqu'elle fait que l'hom-

béatitude dans laquelle ils avaient été créés, me si bien, qu'il aime avec
veut et qu'il veut
que les autres, pour s'être attachés à leur tant d'ardeur qu'il surmonte par la volon- ,

Créateur, ont acquis une béatitude encore té de l'esprit, la volupté de la chair. Il en-

plus grande, de laquelle ils ne pourront ja- seigne que tandis que nous sommes en ce
,

mais déchoir, leur volonté étant tellement monde, nous ne pouvons y être sans péché,
fixée au bien qu'il ne lui est plus hbre de mais qu'après le baptême il nous reste un
vouloir pécher, ni de le pouvoir. Saiut Ful- moyen de les etfacer qui est la pénitence que ;

gence dit que quelques grands et doctes per- ceux-là se trompent beaucoup qui croient pou-
sonnages ont assuré que les anges étaient voir commettre impunément des péchés sous
composés de deux substances : l'une qu'ils prétexte qu'ils fout quelques aumûmes aux
appellent esprit incorporel, par lequel ils sont pauvres, qu'il faut faire des aumônes mais ,

sans cesse occupés de la contemplation de auparavant quitter le vice. Il dit aussi quel-
Dieu; l'autre corporelle avec laquelle ils ont que chose des diflércuts degrés de gloire que
de temps en temps apparu aux hommes. Dieu, les hommes posséderont dans le ciel, en pro-

pour réparer la perte des anges tombés du ciel portion des mérites qu'ils se seront acquis
par leur désobéissance, a créé l'homme, en par leur vertu sur la terre. Il établit com-
le formant de corps et d'âme. L'âme de l'hom- me certain que tous les corps des hommes,
me est raisonnable et immortelle. Il aurait mê- soitceux qui ont été consumés par le feu ou
me été immortel selon le corps, s'il n'eût pas dévorés par les bêtes, ou engloutis dans les
péché mais en punition de son péché son
,
eaux, ressusciteront en \m moment, chacun
corps est devenu sujet à la mort. Pour le ra- dans leur propre sexe que les bons jouiront
;

cheter, le Fils unique de Dieu s'est fait chair, dans le ciel d'une félicité éternelle avec Dieu,
alin défaire les fonctions de médiateur entre et que les méchants seront punis par des sup-
Dieu et les hommes. Ce n'est donc poiut en plices qui u'aurout point de fin.
. lui-même que l'homme doit se glorifier s'il est
§XIV.
délivré, mais daus le Seigneur de qui il a reçu
tout ce qu'il a. « Nous ne disons point pour Les deux livres de la Rémission des péchés.
cela ', ajoute ce Père, que le genre humain
ait perdu son libre arbitre, car il avait sou { L'auteur de la Vie de saint Fulgence rap-
.
Ilt'IUlMii D ù -

pL'Ctié-, ecnl'
libre arbitre avant d'être délivré par la grâce porta à son Stecond exil ses deux livres de la ven Itn Gil.

Kechocdicimus, quod liberum urbitrium per-


• Dei prœveniat nolentem ut velil ; subsequatur vo-
dideril humanum genus. llabel enim antequam Icntem, ne frustra relit. Ac sic Iwmo antequam sit
Ubereivr gralia SaUaloris, ad inalum, non ad (idclis habel liberum arbilrium ad malum habct ,

bonuiii proclive; iiuapropUr ipsuiii liberum arbi- fidelis liberum arbitriuni et ad bonum, gralia Dei
trium gratia Uei liberalur, ulbonum velit et pos- scilicet liberatuin. Fulg., lib. De Trinil. , cap. x,

sit. lia entm quUliim ex Pulribus ail quod gralia pag. 336.
[vr SIÈCLE.] CHAPITRE I. — SAINT FULGENCE DE UUSPE. 53

/Irmiasinn des pMiês. Il les composa pour par lein-s désordres. Mais c'est inutilement
rc'pondro ii la consiillation tl'iiii homme de qu'ils cherchent h apaiser le juste Juge par
pi^ti^ Enlhymius qui di^sirait sa-
noinmi! h'ur'S paroh\s, tandis f|u'ils irriloul sa colère
voir qui sont ceux h qui Dieu louict les pé- parleMrsniauvaisesailions.Il faut donc que le

chés eu cette vie, et si par sa loiite-[)uissancc pécheur pleure en même


temps ses fautes et c»r. tm.
il ne les remet pas quelquefois aux morts qu'il se convertisse.» Ce Père mot parmi les
après cette vie. pi'chés dont on doit faire pénitence ceux que

pre.""o"rhïr'o",
2. Saiut Fulgcuce explique dans son pre- l'on a commis par ignorance, en quoi il s'auto-

"^Kiii'^T.
mier en quoi consiste la rémission des
livre rise des exemples de David et de saint l'atd,

péchés. «Par elle, dit-il, Dieu arrache de la qui ont l'un et l'autre demandé pardon des
puissance des tén(Nbres ceux qu'il transfère péchés qu'ils avaient commis par ignorance. -

dans le roj-aume de son Fils par elle, ils sont ;


Il met cette diflV-rence entre rimpi('té et l'ini-

délivrés de la peine éternelle pour jouir d'u- quité, que l'impiété renferme ou l'infidé'lité
ne joie qui n'aura point de fin par elle, ils ou une foi dépravée en ce sens les infidèles
:
»"
;

sont déchargés du poids, c'est-^-dire du pé- sont des impies, parce qu'ils ne croient pas
ché qu'ils ont contracté dans leur naissance, en Dieu, et les hérétiques peuvent aussi être
de même que de ceux qu'ils ont commis dans regardés comme impies, parce que leur foi

leur jeunesse. Elle est telle que, pour nous n'est pas véritable. L'iniquité se dit de tou-
l'obtenir, le Fils unique de Dieu s'est fait tes les actions qui souillent les mœurs. Ainsi,
T. bomme et a rcipandu son sang. » Il dit que, la conversion, pour être agréable devant Dieu
pour parvenir à la rémission des péchés, trois doit renfermer en même temps la vraie foi et
choses sont nécessaires bonnes œu-
: la foi, les la bonne vie.« Mais ce n'est que dans l'Église im
vres et le temps en sorte qu'on ne peut l'ob-
, catholicpie seule', dit-il, que l'on donne et
tenir si quelqu'une de ces trois choses vient que l'on reçoit la rémission des péchés. C'est ,„
Ti. à manquer. 11 ne laisse pas d'avancer que cette Église que l'Époux appelle lui-même son
la seule conversion du cœur, quand elle est unique colombe; c'est elle qu'il s'est unique-
vraie, peut obtenir de Dieu la rémission des ment choisie, qu'il a fondée sur la pierre, à
péchés, mais de la manière qu'il s'explique laquelle il a donné les clefs du royaume des
dans la suite, il veut que cette conversion soit cieux, et la puissance de lier et de délier les
II. accompagnée de pénitence, en quoi il s'auto- péchés, selon que la Vérité même l'a promis
i>.i.xji,i-.. rise de ces paroles du Prophète: Si vous êtes à saint Pierre, en disant Vous êtes Pierre,
:

convertis et si votis gémisse: si<r vos fautes, voiis et sur cette pierre je biUirai mon hglise. tjui- i».

serez sauvés. « Ce n'est pas sans raison, ajou- conque se trouve hors de cette Église qui a
te-t-il,que l'Ecriture dit ces deux choses né- reçu les clefs du royaume des cieux n'est ,

cessaires pour obtenir le salut car il j- en a : pas dans la voie du ciel, mais dans la voie
qui, etl'raj'és à la vue de leurs péchés en gé- de l'enfer, soit qu'il demeure sans baptême,
missent dans la prière, et qui toutefois ne comme les païens, soit qu'il l'ait reçu au
Cap'!"'. quittent pas leurs mauvaises habitudes. Ils nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, s'il

avouent leurs fautes, mais ils ne cessent d'en persévère dans l'hérésie. Car encore que
commettre. Ils s'accusent humblement devant quelqu'un soit baptisé au nom de ces trois
Dieu, mais ils continuent de faire les mêmes personnes, soit au dedans, soit au dehors de

péchés qu'ils ont confessés avec humilité. Ils l'Église, il n'acquerra point la vie éternelle
demandent un remède au médecin, et ils ren- par le mérite du baptême, s'il ne finit sa vie
dent leur maladie incurable en l'augmentant dans le sein de l'Église catholique. Quicon-

In sola ergo Ecclcsia catholica datur et acci-


1 Spiritns Sancti baptizatus perseverel, hœreti-cus.
pitur remissio peccatornm, qnam ipse sponsus Neque enim per baplismi merilum adipiscitur -ve-
unam esse dicit columham suam vnam electam , ram vitam, si quis in nomine Patris et Filii et
suam, qiiam super pelrain fundavit cui claves , Spirit^is Sancti sive intra Ecclesiam, sire extra
regni cœloruvi dédit, ctii etiam poteslntem lirjandi, Ecclesiam baptizatus, non tamenintra Ecclesiam
solvendique coitccssit, sicut bento Pctro veritas catholicam terminaril hanc vitam : neci'ivrt per
ipsa veraciter repromiltil, dicens : Tu es Petrus, ecclesiastici baptismatis sacramenttim qui non
et super liaiic petram tPdifioabo Ei'clesiam ineam. tenuerit ecclesiasticœ fidei cliaritatisque consor-
Ab hac Ecclcsiii quœ claves regni cœlorum accepit, tium. Ille enim salralnr sacramento baptismatis,
quiaquis foris est non cœli l'iam graditur, sed
, quem intra Ecclesiam catlioUcam vsque ad obi-
inferni; non snlnmsi remaneat sine baptismopa- tnni prœsenlis vitœ tenuerit unitas charilatis.
ganus,sed eliam Si in nominc Palris et l'ilii et Fui},'., lib. De Rem. pecca'., cap. mx.
I
54 HISTOIIIE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
que ne gardera pas le lien de la foi et de la même, selon saint Paul, tout ce qui ne vient
charité ne vivra point par le sacrement du pas de la foi est péché. Il entreprend de Rom.
SI.
Cjp- XI*.
baptême. Celui-là seul sera sauvé par ce sa- montrer que la rémission des péchés n'est
crement, que l'unité de la charité aura retenu accordée' qu'à ceux qui en ce monde ont
dans l'Église catholique jusqu'à la mort. fait pénitence. Saint Pierre dit dans sa j" p»"-
Néanmoins, dans le siècle présent, les justes seconde Épitre, que le Seigneur n'a point
et les pécheurs sont mêlés ensemble dans l'É- retardé l'accomplissement de sa promesse,
glise catholique '
par la communion des mê- comme quelques-uns se l'imaginent mais ;

mes sacrements de la même


et la profession qu'il nous attend avec patience, ne voulant
foi, mais non pas par la ressemblance de leurs point qu'aucun périsse, mais que tous retour-
mœurs et de leur conduite en sorte qu'on : nent à lui par la pénitence. Comme ce n'est f'p. "•

peut dire que les méchants y sont de corps seulement que dans ce monde que Dieu nous
et non de cœur qu'ils en professent la foi,
; attend à pénitence ce n'est aussi que dans
,

mais qu'ils n'en font pas les œuvres.» Il trou- ce monde que la rémission de nos péchés
ve dans l'arche de Noé la figure de l'Église nous est donnée. Si l'on pouvait faire dans
catholique, de même que dans la maison de l'autre une pénitence fructueuse, cet apôtre
Raab. « De même, dit-il que tous ceux qui
, ne dirait pas que Dieu attend les pécheurs
ne se trouvèrent ni dans l'arche, ni dans avec patience, parce qu'il ne veut pas qu'au-
la maison de cette femme, périrent; ainsi Rom.
cun périsse. « Mais, dit-il, qui sont ceux dont il i».
tous ceux qui ne sont point dans l'Église ca- ne veut pas la perte ? Ce sont ceux qu'il a con-
tholique périront éternellement. » Sur quoi il nus dans sa prescience et qu'il a prédestinés
rapporte un passage de saint Cyprien, qui a pour être conformes à l'image de son Fils.
XX11 tlxxiti. dit aussi que l'arche était la figure de l'É- Aucun' de ces prédestinés ne périt. Car,
glise, et l'eau du déluge la figure du baptê- gid peut }vsister à la volonté de Dieu ? Ils sont
me. Il exhorte donc tous ceux qui sont hors donc prévenus gratuitement par la miséri-
de l'Église d'y rentrer au plus tôt, en leur corde de Dieu avant la fin de leur vie. Leur
promettant le pardon de leurs péchés s'ils y cœur est touché d'une componction humble
rentrent avec une vraie foi et le cœur con- et salutaire Dieu lui-même les convertit et
;

trit. Il combat en passant ceux qui niaient leur inspire des sentiments de pénitence, se-
que l'Église eût le pouvoir de remettre les lon qu'il l'a ordonné dans les desseins éter-
péchés, soutenant qu'il n'y en a point qu'elle nels de sa miséricorde entièrement gratuite à
ne puisse remettre; et que le péché qu'elle leur égard, afin qu'étant convertis ils ne péris-
n'aura pas remis en ce monde ne pourra pas sent point, mais qu'ils aient la vie éternelle.
être remis en l'autre. Selon ce Père, le pé- C'est d'eux, sans doute, qu'il faut entendre ces
ché contre le Saint-Esprit, que l'Écriture dit paroles de saint Paul : Dieu veut que tous les 1 Timotlj. it,

n'être pas rémissible, est l'impénitence fi- hommes soient sauvés, etqu'ils arrivent à la
nale. C07inaissance de la vérité. Car du moment que
AnolT'c du dans le premier livre
3. Api-ès avoir établi celui qui a fait tout ce qu'il a voulu, veut ce-
ffrn.iH liTrp,

que la rémission des péchés ne s'accorde la, c'est-à-dire que les élus soient sauvés, il
Cip. 1.
que dans l'Église catholique et h ceux qui , fait toujours ce q>i 'il veut, sans que rien puisse
joignent les œuvres à la foi, parce que de y mcttie obstacle. Ainsi ce que veut la vo-
même que la foi est morte sans les œuvres, lonté immuable et invincible du Tout-Puis-
Jar II, t7. ainsi que nous l'apprend saint Jacques, de sant, s'accomplit en eux ; et comme cette vo-

' Inlra caihnlicam quippe Ecclesiam in prœ- beanl tilam œlernam. Hi prncul dubio sunt om-
setxli sœculo jusli eliniqui tcnenlur admixli, sa- 1105, quod secunduin heati Pauli prœconixim Deus
cramenlorum scilicet communione , non morum, vult salvos fieri agiiitioncm vi>ritati.< venire.
cl iii

id est, societate creduUtatis, non similitudine con- Utiia enim ille hoc qui omnia quœcumqu^
viill
versationis. Aon ergo corde scd corpore , quia voluit fccil, quod vnU sempcr insupcrabililer fa-
profcssinne non opère. Ibid., oap. xvn*i, jing. 374. cil. Hoc xtlique in eis impiclur, quod omnipoten-
' Isl07'um nemo périt : voliiiitati aut'-iii pjus tis Vci roliintas incontmulahilis cl insuperabilis
quis rcsislit ? /s<i (inle fmem pnvsenliœ vitœ Dei habrl : cujus si ut mulari roluntas non polcst m
miserimrdia gratis prœveniunlur; ipsi corde con- disposUione , ila nec prohiheiur, ncc impeditur
Irito et humiltati) snhibhlcr coniptingunlur : cl polcstas in opère : quia ncc n qnilalem illius va-
ouinc» ad pœniUnliam divino minière convcrtun- let quisquam juste reprelundcre, ncc misericor-
lur (id quam sunl divinilus prwdeslinuii pcr gra-
: diam ipsius polesl aliquis obviare. Lib. Il, aip. n,
tuilam qraliam, ut conversi non perçant, scd ha- pag. 381.
[VI" SIÈCLE,] CHAPITRE I. — SAINT FUI.GEXCE DE RUSPE.
loiité divine n'est sujclto'à. aucun clmnge- qui sème dans In chair, recueillera dans la
niciitdans l'ordre do ses rt'solutions et de ses chair la corruption ; et celui qui sème dans

de.'^seins, de même elle ne peut être ni re- l'esprit, recueillera dans l'esprit la vie éter-
tardi5e, nf cmpèchiie dans leur exécution ;
nelle. Saint Fulgcnce
~ rapporte
'^
divers autres c«P' «. ».
^ XI, Xtl,XIIICt

parce que, de nn^nie que personne ne peut passages de la .sainte Lcrituie, pour mon- »"•

accuser ni reprendre la justice de ses dé- trer qu'on n'obtient la rémission des pé-
crets, de même personne ne peut mettre chés qu'en cette vie, et cpae tous ceux qui
obstacle aux elTets de sa miséricorde, » mourront en état de péché, seront damnés :

Cap. III. 4, Saint Fuli^on^e objecte ([u'il est dit dans ce qui fait voir qu'il ne parle que des péchés
Sap. T, 1, le livre de la Satresse, qu'au jour du juj;c- qifuionnent la mort à l'àme, et non des pei-
ment les méchants seront surpris d'éton-
, nes qui peuvent rester expier aux justes. ft

nement, en voyant contre leur attente les Il cite la parabole du mauvais riche et de

justes sauvés, eux dont la vie leur par.iissait Lazare, qui prouve évidemment qu'après
une folie, 11 réjiond que l'on ne peut en infé- cette vie les bons ne peuvent passer au lieu
rer que le salut doive être accordé en ce jour de la demeure des méchants, ni les méchants
à ceux qui ont passé cette vie dans les cri- an repos des bienheureux. Il dit qu'il y a >v.

mes; mais seulement que le salut que les cette dillerence entre la pénitence des élus
impies n'avaient poizit espéré, a été accordé et des réprouvés, que la tristesse de ceux-là,
aux justes, qui l'avaient mérité dès cette vie qui est selon Dieu, produit pour le salut une
par leurs vertus. Les impies n'oht point de pénitence stable , en sorte qu'étant péni-
salut à espérer, parce que selon la parole du tents eu ce monde, et véritablement conver-
Sap. III, II. Sage L'espérance de ceux qui rejettent la sa-
: tis, le salut éternel leur est donné dans l'au-

gesse et l'instruction, est vaine : leurs travaux tre ; au lieu que la pénitence de ceux-ci ne iicr. t.i,

sont sans fruits, et leurs œuvres soiit inutiles. cesse pas même dans laulre monde, parce
Cap. r. L'Écriture montre assez clairement que l'au- qu'ils ne l'ont pas faite en cette vie. Car il
un temps de pardon, mais
tre vie n'est pas ne faut pas s'imaginer que tovis ceux qui
Bccl. T, 8. de vengeance, lorsqu'elle nous dit Ne dif- : confessent leurs péchés en obtiennent la ré-
férez point de vous convertir au Seigneur, et ne mission, lorsqu'ils ne les confessent que de
remettez point de jour en Jour : car sa colère bouche; Dieu, qui connaît le fond des
éclatera tout d'un coup, et il vous perdra au cœurs, ne faisant point attention aux paro-
II Cnr. Ti| iourde la vengeance; etl'Apûtre, après avoir les. Saûl, repris par Samuel, confessa son ^i »••?• ^'i

marqué que cette vie est le temps auquel péché, tout saisi de crainte cependant il :

nous devons travailler à notre salut, dit que n'en obtint point le pardon, parce que son
II Cn, dans l'autre nous paraîtrons devant le tribu- cœur n'était pas droit devant le Seigneur, La
10.
nal de Jésus-Christ, pour y être jugés selon raison qu'en donne ce Père, c'est que la
nos œuvres. D'où saint Fulgeuce conclut confession qu'il avait faite de son crime ',
que la vie éternelle ne nous sera point don- avait pour principe la crainte du châtiment
Cip. VI, née dans le siècle futur, si dès celui-ci nous qu'il avait mérité, et non Ihorreur du crime
n'avons obtenu la rémission de nos fautes : qu'il avait commis, « Il nchaïssait point, dit-il,

parce que, dans ce jugement, la miséricorde son péché, mais il craignait une peine qu'il

ne justifiera pas l'impie, mais la justice dis- ne voulait pas ne détestait pas son
souÛ'rir : il

tinguera le juste de l'impie, selon qu'il est crime, mais il était saisi de crainte à la vue
Psal. I, 6. écrit dans le psaume x* Le Seigneur inten'oge
: de la vengeance divine qui allait tomber sur
Galat. YI,7. le juste et V impie. Ne vous trompez pas, dit sa tête, David % au contraire, repris par le
l'Apôtre, l'homme ne recueillera que ce qu'il prophète Nathan, confessa son péché et en
aura se>7ié. Vous ne recueillerez en l'autre obtint le pardon, parce qu'aussitôt il quitta
vie que ce que vous aurez semé en celle-ci. le désir du péché, et etlaça par la pénitence
Cap.
cl VIII,
VII, Ce qu'il exprime, en ajoutant Car celui : celui qu'il avait commis, »

' Ad Saiilem increpandum cum propheta Sa- fersione culpavit sed ad prœsens divini furoris
,

muel advenisset, ille pcrterritus peccatum suum percussus terrore contremuit. Lib. II De Rem.
confessus est, nec tamen est iiidulgentiam conse- peccat., cap, sv, pag. 398.
culus qui,! cor cjus non erat coram Deo, Illa
: 2 David conversus peccandi protinus abjecit de-
enim peccati conl'cssio ex timoré fuit supplicii, sideriitm, et pœnileiulo ipse suum punivit admis-
non ex horrore peccati. Non odivit quod fecerat. sum. Ibid.
sed timuit quod nolebat nec culpamsuam con-
:
56 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
c«p. «rr. 5. «La confession des péchés', dit-il, devient avaient rapporté les mauvais sentiments que
"
donc utile, lorsque le péclieur, après avoir quelques-uns, qui faisaient toutefois profes-
confessé ce qu'il avait fait de mal ne le fait , sion de la religion cathoiiiiue , avaient rela-
plus à l'avenir, et lorsqu'il s'applique à sur- tivement à la prédestination et sftr la grâce.
passer par ses bonnes œuvres le mérite de Dans le premier livre, ce Père se propose
2. *"•'?
livre,
Boai. V, !o. ses crimes passés : afin que, selon l'Apôtre, de montrer que la prédestination est purement ff- '»*

où il y avait eu une abondance de péchi\ il gratuite. « L'iiomme dit-il, avait été créé
,

y ait une surabondance de grâce. » Saint Ful- tel, qu'il pouvait ou pécher ou ne pas pécher

gence blâme la conduite de ceux qui, ne par sa propre volonté c'est pourquoi il a été
:
Cip. u

connaissant pas la vertu de la pénitence, se justement puni pour avoir péché volontaire-
repentent tellement de leurs fautes, qu'ils ment, n'ayant été contraint de pécher par au-
n'en espèrent point le pardon, et dit qu'en cune nécessité naturelle du corps ni de l'âme.
désespérant de l'obtenir, ils ne font qu'aug- Par ce péché volontaire de l'âme, l'homme est
menter leurs péchés ; que telle fut la péni- devenu sujet à la mort. Tout le genre humain
tence de Judas que ce traître eut le temps
,
a été enveloppé dans la prévarication du pre-
d'obtenir la rémission de son crime, et que Jé- mier homme, et conséquemment dans la ser-
sus-Clirisl qui est mort pour les impies ne lui vitude à laquelle son péché l'avait réduit. Jé-
aurait point refusé le bénéfice du pardon, s'il sus-Cluist, seul médiateur de Dieu et des hom-
ne se fût ôté à lui-même, par sou désespoir, mes, a été exempt de cette servitude, dans
iip. XIII. le moyen de le mériter. Pour prouver en- laquelle les enfants mêmes sont compris, par-
core qu'il n'y a que cette vie où l'homme homme, la con-
ce qu'encore qu'il soit né vrai
puisse opérer son salut , le saint évéque cupiscence de la chair n'a eu aucune part à
rapporte ce qui est dit dans l'Évangile des sa naissance, étant né du Saint-Esprit. Aussi
dillcrentes heures auxquelles le Père de fa- sa mère est demeurée vierge depuis son en-
mille envoya des ouvriers travailler à sa vi- fantement, comme elle l'était avant de l'avoir
gne. Il prétend que ces ditlurentes heures conçu. Car il n'était pas convenable que Dieu
marquent les ditlërents âges du monde et qui, en créant la chair humaine, lui avait ac-
des hommes, disant qu'en tout- temps de la cordél'intégritcde la virginité, l'otât à la chair
vie présente, tout péclieur véritablement de laquelle il voulait naître. Mais afin qu'il y
converti à Dieu, en obtient aussitôt la rémis- eût une surabondance de grâce, où il y avait
m. sion de ses péchés ; mais aussi que person- eu une surabondance de péché, Jésus-Christ
ne ne sort avec sécurité de cette vie, si n'a pas seulement effacé le péché, par lequel
avant de la finir il ne renonce à l'iniquité. le premier homme a souillé toute la race, mais
il a fait encore que tous les autres péchés

§ XV. que nous commettons de nous-mêmes sont


Des trois livres de la Vérité, de la Prédestination remis par sa grâce à ceux qui croient en lui.
et de la Grâce de Dieu. Par le jugement de Dieu, dit l'Apôlre, nous Boin. r, 16.

avons été condamnés pour un seul péché, au lieu


oct.jion do 1. Saint Fulircnce, de retour en Afrique, que nous sommes justifiés par la g race après plu-
(eriueu 521. après la mort de Trasamond arrivée au mois sieurs /x-c/tés. Celte grâce de Dieu par laquelle
de mai de l'an 523, composa trois livres pour nous sommes sauvés n'est donnée à personne
établir la vérité de la prédestination et de la en vue d'un mérite précédent, comme ce n'est
grâce de Dieu, contre ceux qui prétendaient pas non plus en vue des mérites que Dieu sé-
Cip.>. que les dons delà divine bonté dépendaient pare les uns de la masse corrompue, tandis ^
"''•
de la qualité des actions des iiommes en sorte : qu'il y laisse les autres. La bonté de Dieu
que Dieu ne leur fit aucune grâce qu'ils ne toute gratuite éclate dans ceux à qui il fait
l'eussent méritée, et qu'il n'eût prévu qu'ils miséricorde, comme la justice paraît dans
la mériteraient, s'il leur conservait la vie. Il ceux à qui il ne la fait pas, parce qu'étant
adressa ces livres à Jean et à Vénérius qui lui coupables, ils mérileni d'être punis. » L'argu-

' Tune ergo prodesl peccali confessio, si con- ' In quacnmque rita' prœsentis a'iate omnis
fessiis peccntum quoi mule feccral, ultra non fa- iniquus aut in(pius loto corde fueril conrersus
,

cUU et biiuoruiH studio njiernm pnvIiTilorum


: ad Dcum, staiiui praterilvnim omnium remis-
criminum mcrila superare coittendul : ut secun- sionem accipicl pcccaloruin. Ibiil., cap. .wiu, jMig.
duin Àpostoli dicluin , iibi îiliiiiidavit lU'iMaituui ,
4UI.
gii|n;rabuiiilitgraliii. lliid., cuii. .\\i, |>U(;. 39a.
[vr SIKCLE.] CFIAPITRE I. — SAINT FHF.r.ENCIi; DK UUSPE. r>7

ment sur lequel saint Fulgence presse le plus tre les elfetsde sa miséricorde graluilc, [mis'
ponr montrer que la prédestination est pure- qu'ils étaientcoupables d'un môme péché? »
ment gratuite, est tiré de l'oxeinplc des en- Saint Fulgencc n'pond, sans vouloir appro-
fants dont les uns mourants aussilôt après foutlir les jugements incompréhensibles de
avoir reçu baptême sont sauvés, et les au-
le Dieu, que ces deux enfants ne sont ni tous
tres prévenus par la mort avant d'avoir reçu tieux délivrés, ni tous deux condamnés, par-
Cip. VI.
ce sacrement, sont damnés. Il soutient qu'il ce que Dieu qui ne peut ni voidoir, ni faire le
n'y a aucune ditlV'rencc de mérite (]ui fasse mal, a voulu par une juste sévérité que l'on
que lie ilcux enfants, l'un soit choisi et l'autre exigeât de l'un sa dette, et par une bonté
réprouvé; et que si l'on a égard à la volonté' gratuite, que la dette fut remise à l'autre.
des parents, ceux qui sont chrétiens ont dé- Ce Père, comparant ensuite la cause
3. c^-

siré avec beaucoup d'empressement ([ue letu' des enfants qui meurent sans baptême, avec
enfant fut baptisé, et (pie toutefois leur lils celle des adultes qui meurent dans l'inlidé-
étant prévenu parla mort avant d'avoir reçu lité n'y trouve point de ditl'ércnce h cer-
,

le baptême, il est condamné au feu éternel; tains égards. « La cause des adultes ', dit-il,
tandis qu'un enfant qui est né de parents infi- et des enfants qui achèvent le cours de la
dèles, et quiconircleurvolonté aété conduit vie présente dans l'intidélilé avant d'avoir
A la grâce du baptême, est fait héritier de Dieu reçu le baptême est la môme quant à la
,

et cohéritier de Jésus-Christ. « Qu'est-ce que participation du péché originel. Les uns et


Dieu dit-il avait prévu de fulur dans ces
, , les autres passeront de cette vie dans le feu
deux enfants qui devait empêcher que la
,
éternel, qui est préparé au diable et à ses
charité paternelle ne pût servir de rien à l'un, anges parce que la cédule par laquelle la
;

et faire qu'une cruauté ennemie profitât beau- malice du séducteur les tient soumis à sa
coup à l'antre ? Qui est-ce qui peut pénétrer la puissance, n'a pas été effacée par la miséri-
profondeur de ces jugements de Dieu? Mais corde du Sauveur. Dieu rendra à chacun se-
aussi qui est-ce qui ne reconnaîtra pas ici la lon ses œuvres en sorte que non-seulement
;

miséricorde de la bonté gratuite, et la jus- ils brûlent, à cause du péché originc^l, dans

tice de la divine sévérité? N'y ayant rien de le feu éternel, où les enfants mêmes qui
méritoire dans les actions de ces deux enfants, sont morts sans avoir reçu baptême, et le

ni aucune différence de cause dans leur ori- qui n'ont ftiit aucune action bonne ou mau-
gine, il est évident qu'ils ont été l'un et l'au- vaise, doivent brûler; mais encore ils souf-
tre liés par les liens du péché originel ; mais il frent, eu punition de leur mauvaise volonté,
n'est pas connu pourquoi ils n'ont pas tous les des peines d'autant plus grandes, qu'ils ont
sM'. deux été délivri'S. Pourquoi, dira quelqu'un. ajouté au premier péché un plus grand nom-
Dieu, n'a-t-il pas* fait sentir à l'un et à l'au- bre d'iniquités qui leur sont propres, » 11 dit

* Si vero parentum consideretur volunlas, illi rcatus obstrinxerit? Cui, salva incomprehensibili
qui christiani sunt ul eorum filius baptizaretur
, altitudine judiciorum Dei, respondemus ideo non
sollicite volueriinl, concurrcrunt,
instantissiine ulrumque liberatum ess' vel ulrumqiie damna-
quorum tamen filius aniequam haplizaretur morte tum quia Deus qui malum nec velle polest ali-
,

prœventus, a-ternis est igiiibus deputnlus : ille ve- quando nec facere, ab uno jusla seviritate debi-
ro qui de inftdelibus natus esl,conlrarolunlatem tum prœcepit exigi. altericcro graluitn jussit bo-
parentum perductus ad gratiam baplismi, factus nitule dimitti. Ibid., rap. xni, pag. 448.
est hœres Dei et cohœres Chrisli. Quid in liis prœ- ' Causa vero majorum atque parvulorum qui
x'idit Deus futurum, ul uni nihil conferre posset sine baptismale cursum vitœ prœsentis in infide-
charilas parentalis, et alteri multum crudelitas litateconsummant, quantum attinet ad commu-
prodesset hostilis ? Quis istam profundilatem judi- nioncm originalis peccali, una est; etexhacutri-
ciorum Dei penelrare valeat Quis non tant' n hic
.'
que ibunt in ignem œternum qui paratus est dia-
et misericordiam gratuitœ bonitalis, et justiliam bolo et angclis ejus, quiuineis chirographum quo
divince severitalis agnoscat ? Ubi enim duorum sihi eos deceploris
nequiiia suhdidit, Salvatoris
parvulorum, nec in actilnis aligna sunt mérita, gratin non in eo est majorum causa
dclevit. Sed
nec in origine dissimilis c(tusa, manifestum qui- detevior, quia rationis utendœ facultatc percepta,
dem nobis est quod ambo fuerint originalis pec- respuiinl aut negligiint regeneralionis salutare re-
cali vinculis obligati, occuUumvero cur non rim- médium, sine quo non solum regno potiri nequi-
bo fuerint absohiti. Vulg., \ih. De PrœdesC, chikxm, bunl, quin elinm gravioribus suppliciis suhjace-
pag. 447. bunt... quanio amplius propria' iniqvilalis adji-
* Dicet aliquis cur non ambobus largilus est ciunt. Ibid., cap. xiv, pag. 449.
Deus graiuitam misericordiam cum iinus ambos ,
;

58 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


qu'aucun chrétien ne doit douter que la grâ- elle-même qui se fait connaître, qui se fait
ce ne prévienne ceux à qui le péché originel aimer et demander.» Saint Fulgence appuie
ou les péchés actuels, sont remis; que ceux- cette doctrine par divers passages de l'Kcri-
là se trompent beaucoup qui s'imaginent que ture, en particulier par ce qui est dit dans
la grâce est donnée également à tous les les Proverbes, que c'est le Seigneu7' qi/i pré- PrOT. Tlll
».
hommes; que les saints Pères que Dieu a il- pare la volonté, et qui nous donne consé-
luminés par sa griice prévenante afin qu'ils qucmment le commencement de la foi, selon u,. in

crussent, et qu'il a ensuite remplis de son que Jésus-Christ l'enseigne lorsqu'il dit à
esprit, afin qu'ils enseignassent aux autres, l'Église, dans le Cantique des cantiques Vous :

suivant en toutes choses la vérité de la pré- viendrez, et en commençant par la foi, vous avan- CaoU ir, S,

dication apostolique, ont très-certainement cerez. CePèrc ajoute, que c'est une chose cer-
connu et ont donné à connaître dans leurs
' taine et dont personne ne doit douter, que
livres etdans leurs lettres que la grâce de Dieu nous ne pouvons ni avoir la foi ', ni croî-
n'est pas généralement donnée à tous les hom- tre dans la foi après l'avoir reçue, si celui
mes, parce que Dieu la donne gratuitement. que saint F'aul appelle l'auteur et le consom-
Selon le saint évéque, la grâce dont Dieu ' mateur (le notre foi, ne nous donne cette foi
Cip.x<'>
fait part aux vases de miséricorde , com- précieuse, ne la fait croître en nous après Belir. III. l
«11.
mence par l'illumination du cœur elle ne ; nous l'avoir donnée, et ne la mène jusqu-'à sa
trouve dans l'hommo aucune bonne volonté ;
dernière perfection, après l'avoir ainsi aug-
mais c'est elle qui forme la bonne volonté mentée en nous. « La volonté humaine', dit- c»r. "m.
même. «C'est elle, dit-il, qui nous cherche la il, peut bien avant que d'avoir la foi mériter

première, afin que nous la cherchions et nous ; par eUe-même le châtiment et la punition,
ne pouvons ni l'accepter, ni la rechercher mais jamais elle ne pourra par elle-même
par nos désirs, si elle-même ne produit ce mériter la foi. Et afin que l'on n'attribue
consentement et cette recherche dans notre point Ri différence des grâces aux mérites
cœur. Nul homme ne peut désirer cette grâ- ou aux actions humaines, saint Paul nous »«•

ce ou la demander, personne même ne la enseigne que la grâce donne elle-même le


pourra connaître, s'il ne la reçoit auparavant commencement des mérites. Il y a, poui-suit-
de celui qui la donne avant toute bonne il, diversité d'oj/érations surnaturelles, tnais il
œuvre, et avant même toute bonne volonté, n'y a qu'un Dieu, gui opère tout en tous.
afin qu'elle prépare la bonne volonté de C'est un seul et un même esprit qui opère I Cnr. TU t,
E gt II.
l'homme, qu'elle la lui inspire, qu'elle l'é- toutes ces choses , distribuant à chacun se-
claire, qu'elle l'excite, qu'elle la conserve et Ion qu'il lui plaît. » Saint Fulgence fait voir
qu'elle la perfectionne. Ainsi, pour que la que le commencement de cette grâce salu-
grâce de Dieu soit connue de l'homme, pour taire ne consiste donc pas dans les forces
qu'elle en soit aimée, qu'il la désire et qu'il de la nature, ni dans les préceptes de la loi,
la demande, il faut qu'elle soit avant toutes mais dans l'illumination du cœur parce ;

choses donnée à cet homme qui ne la con- que les préceptes peuvent bien se faire en-
naît point, ne l'aime poiut, ne la désire cl ne tendre aux oreilles de la chair mais ils ne ,

la demande point. C'est donc celte grâce peuvent pénétrer jusqu'aux oreilles du cœur

' ni enim sancli Patres, apostolicœ prwdicatio- gua semper maneat, ipsa prœparet, ipsa donet,
nis tenentes per omnia verilatem , certissime ce- ipsa illuminet, ipsa excilel, ipsa conservel, ipsa
gnoverunt cognoscendum quod libris et epistolis re- consumet. Ul ergo gratia Dci cognoscatur et
liquerunt, gratiam Dei non omnibus hominibus gc- diligatur, desiderctur, ac posluletur, prius dona-
neraliler dari. Iliil)., caji. xv, pag. 450. tur homiyii non cognoscenti, non diligenti, non
' Ista gratia quam Deus rasis misericordiœ desideranli, neque postulanli. Ipsaitaque se facil
gratis donat, ab illuminalUme cordis incipit, et cognosci, diligi , desiderari, poslutari. llùb., cap.
hominis volunlatem non bonnm invenit ipsa, sed XV et XVI, png. 430.
facit; atqxie ul eligalur, ipsa prius eligil, neque ' Cerlum est igitur /idem in nobisnec esseposse,
suscipitur aul diligitur.nisi hoc ipsa in corde lio- nec cresccre, nisi illc nobis eam Iribuat, tribiilain
minis operelur. Ergo et susceplio et desiderium augeat, auclam pcrficiat, quem auctorem, con-
graliœ opiisipsius eslgraliœ. Islam gratiam nul- summatnremque fidei apostolica pro/itelur auc-
lus liominum desiderare relposcere sed iiec co- , toritas. Iliid., cap. xvii, pag. 452.
gnnsccrepoterit, nisi cam prius ab illn accipiat * Uumana volunlas priusquam accipiat pdem,
gui eam nullis prœcedenlibns operibus aut olun- i punilioncm per seipsam polesl mereri, non fidem.
talibus bonis ad hoc largitur, ul volunlalein in Ibid., cap. xvui, pag. 453.
,

[VI° SIÈCXE.] CHAPITRE I. — SAINT FULGENCE DE RUSPE. 50


si la grAce spirituelle ne les y fait entendre. avertis de ledemander celui qui nous loi\

C'est elle qniopoie' et la liiniièicctle saint, connnande et nous ne pouvons pas même
;

atin que l'iiommc <[ii'cllo prévient connaisse le demander à Dieu, s'il ne forme dans notre
que les préceptes de la loi, qu'il écoutait emur la volonté de le demander. » Ce Père c.p.i.

non-seulement sans fruit, mais à sa condam- rapporte un grand nombre de témoignages


nation, lorsqu'il n'avait pas le pouvoir de de ri*;criture, par lesquels il parait ' claire-
les accomplir, sont saints, justes et bons; ment que le libre arbitre de l'honnne est de
mais aussi afin qu'il reçoive la charité, par telle nature que, soit qu'il s'agisse de com-
laquelle il puisse aimer et pratiquer ce qu'il mencer quelque bien, il ne le peut faire s'il

connaît. Ce Père répète ce qu'il avait déjà n'est prévenu de la grAce; soit qu'il s'agisse
dit souvent, que la jjrâce n'est pas donnée à de l'achever, il ne peut encore y réussir si
tous, et la raison qu'il en donne, c'est que la la grâce qui l'a prévenu ne l'aide jusqu'à la
foi n'est pas commune à tous. fin. Saint Fulgence fait voir que c'est aussi "
Le dessein de l'auteur dans le second
4. de Dieu que nous vient le dessein et la vo-
livre est de montrer que le libre arbitre est lonté de prier; que la volonté de l'homme xnour.
non-seidemcnt dans les bons, mais encore suit toujours la grâce de Dieu qui la précè-
dans les méchants; avec cette différence que de que c'est elle seule * qui a rendu Paul
;

dans les bons il est aidé et élevé par la grâce fidèle, d'infidèle qu'il était; que Paul a tou-
du Rédempteur, au lieu que dans les mé- tefois cru volontairement, et travaillé volon-
chants il est délaissé et puni par l'équité et tairement à l'œuvre du Seigneur mais qu'il ; \n.
la justice d'un Dieu vengeur. « Dieu, dit-il, en n'aurait pu ni croire, ni travailler, s'il n'a-
nous disant, par un de ses Prophètes, que si vait reçu d'en haut le don de la grâce qui a
nous voulons l'écouter, nous serons 7-assasiés travaillé en lui et avec lui. « C'est là, dit ce
des bieju de la (erre ; et que si nous ne le vou- saint évêque, la doctrine des Pères catholi-
lons pas, et si nous l'irritons contre 'nous, ques ' ils l'ont reçue des apôtres. On l'en-
;

l'é/jée nous dévorera, marque clairement le seigne sans aucun doute dans l'Église, et
libre arbitre de l'homme, et que le vouloir elle a toujours été suivie, par les évoques
et le non-vouloir est au pouvoir de notre vo- grecs et latins, d'un commun consentement
lonté. Mais lorsque l'Apôtre dit que c'est et sans partage, confirmés les uns et les au-
Dieu qui opère en nous le vouloir et par- le tres, dans ces sentiments, par l'infusion du
faire, selon qu'il lui plaît, il montre que la Saint-Esprit. » 11 ajoute que c'est pour la dé- stmi.

volonté de l'homme a besoin d'être dirigée fense de la même doctrine que saint Augus-
par la grâce de Dieu pour vouloir le bien, et tin a tant travaillé contre les pélagiens et les
d'être aidée de lui pour le faire. Eu nous autres ennemis de la grâce , et il invite ceux
commandant de vouloir le bien, on nous
* qui désirent sincèrement le salut éternel à
montre ce que nous devons avoir mais ; lire les écrits de ce Père. Il parait extrême-
parce que nous ne pouvons pas même avoir ment surpris de la comparaison que quel-
ce vouloir de nous-mêmes nous sommes , ques-uns faisaient du don de la grâce avec

' Operatur ergo gratia et illuminationem in ho- ad inchoanda quœ bona sunt nihil possit, nisi
minibus et salutem vt mandata legis, quœ do-
: ipsum gralia divina prœvenerit, sive ad perfi-
nec liomo implere nonpoteral, non tantum i/iuti- cienda nullatenus sibi sufflcerevaleat, nisi gralia
liter, sed etiam damnabililer audiehat, adjutorio qua prœvcnitur, eadem jugiter adjuvetur. Ibid.
gratiœ prœventus, non snlum sancta et justa et cap. xvin, pag. 463.
bona esse noverit, verum eliam cfiaritatem acci- ' Ut esset Paillas ex infideli fidelis, sala gralia
piat, qua possit et deligere et implere quoi dixit. operala est... atque ila volunlarie quidem Pau-
Ibiil., cap. XX, pag. '454. lus credidil volunlarie abundnntius illis om-
,

* Dumergo pra-cipitiirnobis ut velinius, osten- nibus laboravit ; sed et credere ei laborare non
ditur quid habere debcamus ; sed quia id ex nobis posset, nisi desupcr donum gratiœ in se ac
habere non possumus, admonemur ut a quo nobis secum operanlis acciperet. Ibid., cap. xvi, pag.
datur prœceptum ab ipso petamus auxilium.
, 470.
Quod lamen non possumus poscere, nisi Deus in ^ Bœc ilaque catholicorum Patrum aposlolicis

iwbis operetur et velle. Fulg., lib. Il De Prœdest. instilulionibus trodita permanet in Ecclesiis sine
cap. IV, pag. 4fil. aliqua dubitalione doctrina, quam grœci latini- ,

^ Ilisaique hujusmodi leslimoniis, quibus tam que ponti/ices, Sancti Spiritus infusiune firmati,
nnvum qvam vêtus refertum est iestamenlum, uno atque indissociabili semper lenuere conseimt,
taie esse hominis demonstratur arbitrium, ut sive Ibid., cap. xvni, pag. 472.
,,

60 HISTOIRE GÉXKRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


les dix marcs d'argent que le père de fa- personnes, et que loin de regarder comme
mille douna à ses serviteurs, pour les faire un sujet de joie et de complaisance, ce com-
Lut xn.ij, profiter pendant son absence, ainsi qu'il est ble de grandeur où pour un
il se voit élevé
rapporté dans l'Évangile. Il leur fait voir que peu de temps, il une vraie et
s'étudie pai-
cette paraljûie ne peut pas même autoriser sincère humilité à donner l'exemiilc d'une
leur doctrine, puisque ce père de famille ne vie sainte et édifiante. De même un empe-
reçut aucun gage de ses serviteurs, et qu'au reur ' n'est pas un vase de miséricorde des-
contraire Dieu nous donne et sa grâce et le tiné h la gloire, parce qu'il a reçu la souve-
gage du Saint-Esprit, comme le dit l'Apô- raine puissance sur la terre ; mais il le sera,
iicor. T, t, tre dans ses Epitrcs. Il rejette aussi ce que si, étant élevé sur le trône de l'empire, il vit
disaient les mêmes ennemis de la grâce, que dans orthodoxe ; si, pénétré d'une vraie
la foi
les vases d'honneur dont parle l'Apôtre mar- humilité de cœur, il soumet et fait servir à
quent les grands, les riches et les puissants la sainte religion le faite de la dignité roya-
Rrb». 1,11 du siècle; et les vases d'ignominie, les le; s'il aime mieux servir Dieu avec crainte
clercs, les moines et tous les laïques. 11 sou- que commander h son peuple avec orgueil ;
tient que cette idée est fausse, et que saint s'il modère sa sévérité par un esprit de dou-
Paul a parlé des prédestinés et des réprou- ceur; si sa puissance est accompagnée de
ctf.an. vos. Il dit, à cette occasion', « qu'en ce mon- honte; s'il se l'ait plus aimer que craindre ;
de n'y a point dans l'Église des dignités
il
s'ilsonge au bien de ses sujets s'il exerce ;

supérieures à celle de l'évèque, ni dans le tellement la justice qu'il ne néglige la mi-


siècle aucune dignité au-dessus de celle séricorde; si, sur toutes choses, il se sou-
d'un empereur chrétien. Mais il ne faut pas vient qu'il est fils de la sainte mère l'Eglise
s'imaginer, ajoute-t-il, que chaque évêque catholique, et qu'il doit faire servir sa puis-
soit un vase de miséricorde, préparé pour sance à lui procurer partout le monde le re-
la gloire, dès qu'il est élevé à la dignité pos et la paix. Car l'attention que les princes
épiscopale. Non, mais il le sera, si, plein de chrétiens ont poin- le bien de l'Eglise, les
sollicitude pour le troupeau commis à ses rend plus grands et plus Uorissants que les
soins, continuellement sur lui ; s'il
il veille combats pour le maintien de leur puissance
lui prêche la parole de Dieu s'il l'exhorte ; temporelle, en quelque partie du monde que
avec instance, à temps et à contre-temps ; ce soit. Ce n'est donc point, continue saint
s'ilemploie les répréhensions, les prières, Fulgence, par aucune dignité du siècle ou
les corrections; s'il instruit avec soin et une de l'Église, mais par la foi qui opère par la
patience infatigable, et qu'il n'entreprenne charité, que chacun devient un vase d'hon-
point par une orgueilleuse usurpation de neur par le don de Dieu, qui fait miséricor-
gouverner avec un esprit d'empire et de do- de. Le Sauveur n'appelle pas heureux ceux
mination mais si, au contraire, remph de
; qui possèdent les dignités ou séculières ou
la doctrine et des écrits des apôtres il se , ecclésiastiques, mais les pauvres d'esprit,
rend un modèle de vertu pour toute sorte de ceux qui ont le cœur pur, qui ont faim et

> Quantum pertinel ad hujus temporùi vitam humililate prwditus culmen regiœ dignitatis
,

constat (plia inEcclesia uemo pojitifice polior, et in sanclœ religioni subjicial ; si magis in timoré
sœculo nemo christiano impcraiore celsiorinveni- serviat Deo, quam in tumore dominari populo
tur. Seil non ideo quilihet epUcopus vas miscri- delcctetur ; si in eo lenitas iracundiam miliget ,

cordiœ puletur gloriam prœparatum, qui pon-


in omet benignilas potestatcm ; si se magis diligen-
li/icali nnlitia
fiingitur; sed si pro grege sibi dum quam metuendum cunctis exhibcal : si suh-
credilo sollicitits semper invigitct, prœdicet ver- jcclis !:atubriter consulat si juslitiam sic teneat
-.

bum, inslct opportune, importune, arguât, obse- vt misericordiam non relinquat : si prœ omnibus
crel. increpel. in omni patieutia et doclrina; nec se snncta' matris Ecclesiœ calholicœ memineril
sibi dominatum supcrbus usurpare contendal plium, ut ejuspaci atque tranquillilali per wii-
sed aposlolicis informaliis eloquiis, exemphtm se vcrsum mnndum prodesse facial suum principa-
cunctis exliibeat nec si ultius altiludinis cnlta-
; lum. Magis cnim cliriiitianum regitur ac propa-
lum gaudeat temporale fasligium, sed si se
sibi gatur imperium dum ecclesiasticos slatuit, per
,

humili corde fidelibus prœbeal bonœ coniersalio- universam terram consulilur, quam cum in parte
nis exempluui. Iliid., cap. 22. quarumque Icrrarum pro temporuli securitate
• Clenienlissimus quoque imperalor non ideo pugnalur. Non crgo per quamlibcl saruliaul Ec-
est vas vtisericordia- prœpnralum in gloriam, clesiir digniintem, sed per ftdrm quœ per dilectio-
quia apicem tcrret>i princtpalus accepil, sed si in nrm operalur. vnusquisque vas in honorem, dono
impcriali culmine recta jide vivat, et vera rordis Uci miHTanlis elJicitur. ll>iJ. cap. xxu, iiag. 477.
,
[Vl" SIÈCLE.] CIIAPITIIE I. — SAINT FL'LGENCE DE RUSI'E. Gl
soif do la juslico. l)ira-l-on ([uc rempL-rcui' de, afin que nous fussions saints et irrépréhensi-
Goiisluntin t'iait un vase do misthicordo, et btes devant ses yeux. « La certitude ('IitucIIc ',
(|ii'Aiit(iitii; et l'aiil (''taieiit des vases d'igno- dil-il, de cette pi('destiiiatioii divinr' es! si as-
iiiinie? Que J'em|iereui' Tliéoduse élail un surée, non-seulement par rapjjort aux œuvres
vase de miséricorde destiné à la {jloire, et qui y conduisent , mais encore par rapport
que Jean le Tliébaïen, moine de profession, aux [leisonncs qui doivent y avoir part, qu'il
sans l'avis duquel il ne livrait jamais de ba- ne peut arriver que quelqu'un de ceux qui ap-
taille, parce (ju'il le reyaidail comme l'ora- partiennent à ce nombre heureux perde la
cle de Uieu, était un vase de déshonneur? grâce du salut de même qu'il ne se peut
;

Il n'y a. personne ipi oserait nier que les faire qu'aucun de ceux qui n'y sont pas com-
saints évèiines Innocent do Rome, Alhanasc pris y ari'ivc. Car devant Dieu qui sait tou-
,

d'Alexandrie, llilaire de Poitiers, Aui;ustin tes choses avant même qu'elles arrivent le ,

d'IIippone et un içraud nomln'C d'autres qui nombre des prédestinés n'est ni douteux ni
ont l'ait paraître leur zèle pour l'Église dans incertain comme l'etlet des œuvres qu'il a
,

la défense de la foi, soient des vases de mi- ordonnées, ne peut l'être. Et celui qui choisit
séricorilc; mais y aura-l-il quelqu'un d'assez et adopte les élus pour ses enfants en Jésus-
ennemi de la foi et de la charité pour oser Clirist, en doit connaître le nombre d'une ma-
appeler vases d'ignominie Paul, Antoine, nière certaine et assurée, lui qui a réglé tou- Sap. XI, 21.

Jean, Hilarion, Macaire et tant d'autres so- tes choses avec mesin-e, avec nombre et avec poids,

litaires- célèbres par la pureté de leur foi et r Écriture. C'était les élus que
ainsi que ledit
de leurs mœurs? » Dieu promettait à Abraham lorsqu'il lui di-
S. Saint Fulgence traite encore de la pré- sait : /{egardez le ciel, et compte: les étoiles si GOD.
destination dans le ti'oisième livre où il fait , vous le pouvez ; c'est aiiisi que Je multiplierai vo-
voir que ceux que Dieu a prédestinés à la tre race. C'est d'eux dont il est dit dans le pro-
gloire le sont aussi aux bonnes œuvres par
,
phète Daniel : En ce temps-là tous ceux de vo- Dàu.

lesquelles ils doivent mériter cette gloire. Il tre peuple qui seront trouvés écrits dans le li-
dit qu'il est important d'instruire les fidèles vre seront sauvés. C'est à eux que Jésus-Christ
de ce qui regarde cette doctrine afin que ,
adresse la parole quand il dit Réjouissez-vous :
-luc. %,ia.

lorsque l'on connaît que la prédestiualion di- de ce que vos noms sont écrits dans le ciel. C'est
vine est une préparation éternelle de la grâ- d'eux qu'il est dit encoie dans Daniel Ceux :
doi.. mi.
ce, on attribue à la même grâce les efi'ets de
^'
qui en auront instruit plusieurs dans la voie de
cette prédestiualion, qui sont la vocation, la la justice, brilleront comme des étoiles dai^s toute
juslillcation et la gloire. Car le Seigneur nous l'éternité. C'est d'eux enfin qu'il est dit dans le
a élus en Jésus-Christ avant la création du mon- Psaume cxivi", maispris dans un sens spirituel:

' Cujus prœdesiinationis ila manet wterna fir- dicilur de Deo : Qni numerat multitudinem stel-
niitas, et firma œlernilas, non solum in dispesi- larum, et omnibus eis nomina vocat. Proinde
tione operum, verum etiam in numéro persona- qui numerat multitudinem slellarum, non potesl
ruin; ulnec de illius pleailiidine quispiam saluiis suorum ignorare numerum fUiorum. Illi ergo
œternœ graliam pcrdal, nec exlra illius numeri numéro nec aliquis addilur , nec aUquis àe-
quantitalein ad donum salutis wternœ perveniat. miltitur; quia idem numerus secundum proposi-
Deo enim qui scit omnia anteqnam fiant, sic non tu/m Dei prœdestinanlis impletur. fiam quia se-
est incerlus prœdeslinatorum numerus, sicutdis- cundum propositum voiunlulis suœ Deus sanc-
positorum operum diibUis apiid eum non inveni- tos suos prœdcslinavit, de quo scriptum est :
tur e/fecius. Apud se habct cerlissimumnumerum Quia omnia qutecumque voluit, fecit : ita ne-
prœdeslinatorum ille qui eos in adoptionem filio-
,
mo polest ejus mutare prœdeslinationcm, sicut
rum per Ckristum prœdestinavil : quia iii mensu- nullus polest ejus vinccre volitntalem. Quod si
ra et numéro et {joudere cuucta disposuit. Ipsos numerus ille certus non est apud Deum, aut divi-
enim promisit Abraliœ dictns : Respiue iu cœluiQ, na scientia fallUur, aiU voluntas divina mulalur,
et uumera stellas, si potes diuumerare eas, et di- aut divina virlus advtrsila!e qualibet superalur.
xit. Sic erit semeu tuum. Et crtedidit .\brabain Deo, Quod si aliquid horum soU pos.-iuiU impii dicere,
et reputatum est ei ad justitiam. De his dicitur Do/- aut forte nec impius aliquis audet hurum dicere
nieli prophelœ Et in tempore illo salvus erit po-
: aliquid; nemu dicinani prœdestinatiunem neget :
polus tuus oiuuis, qui inveuietur scriptus in libre. Quandoquidem illius Dei prœdestinalio verapror-
Ipsis utique Salvalor noster ait : (laudete quia stis asserilur, cujus et scientia irreprehensibilis,
Domina vestra scripta sunt in cœlis. De his in libro et voluntas incommutabilis, et virlus insuperabi-
suncti Danielis dicilur : Qui ad juàtiliam erudiuut lis invenitur. Fulg., lib. 111 De Prœdest., cap. iv
,
uiultos, fulgebuut quiisi ftellée in perpétuas a'tcrni- pag. 183.
tales. Isli spirilaliler inleUigunlur in Psalmo, ubi
62 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES,
P..I. ciLfi, // sait le nombre prodigieux des étoiles , et il les promis une longue vie, fond('e sur cette p.i.

cannait toutes jtar leur nom. Celui qui coniple rôle : l\e veuillez plus chercher les choses néces-
la multitude des étoiles ne peut ij^norer le saires à la vie, ne doit rien faire. Nous lisons
c«p. t. nombre de nombre nul
ses enfants. Or, de ce que Dieu ajouta par sa bonté quinze années à iv r.oe. t
n'est retranche, comme nul n'y est ajouté ; la vie du roi Ezéchias. Ce prince sur la certitude
parce que le nombre est rempli selon le dé- que Dieu lui avait donné de prolonger sa vie,
cret de Dieu qui a prédestiné ses élus. Ainsi devait-il pour cela dire qu'il lui était inutile de
celui dont il est écrit qu'iV a fait tout ce qu'il boire et de manger, ou de penser aux autres
a voulu, ayant prédestiné les élus selon le besoins de la vie ? Comme donc l'amour de la ctp. n;.

décret de sa volonté, personne ne peut chan- vie fait chercher les choses nécessaires pour
ger l'ordre de cette prédestination, comme la soutenir, de même la grâce que Dieu nous

personne ne peut empêcher l'efTet de sa vo- a préparée par sa prédestination, fait que
lonté. Que si le nombre des prédestinés n'est nous travaillons, que nous prions et que nous
pas certain et assuré de la part de Dieu, il veillons. » Ce Père ajoute que c'est à ceux qui v.n.

faut donc reconnaître ou qu'il se trompe nient la prédestination, d'eu eflacer la doctri-
dans ses connaissances, ou que sa volonté ne des Épîtres de saint Paul, où il a non-seu-
est sujette au chanirement, ou que sa force lement enseigné la prédestination, mais en-
et sa puissance peuvent être surmontées. core ordonné de la prêcher avec confiance
Mais, comme il n'y a que des impies qui et vérité.
osent avancer ces choses, et qu'il y en a 7. En s'expliquant sur cette proposition n.

même parmi les impies qui n'oseraient les de saint Paul : Dieu veut que tous les hommes
soutenir, que reste-t-il à conclure, sinon que soient sauvés, il dit premièrement qu'il est né-
personne ne doit nier la prédestination divi- cessaire' que la volonté du Tout-Puissant
ne, puisqu'il ne peut arriver que cette prédes- s'accomplisse en toutes choses ;
qu'ainsi tout
tination de Dieu ne soit véritable et assurée, ce que veut celui à la volonté duquel rien
lui dont la connaissance est certaine, la vo- ne résiste, ari-ive parce que la puissance de
;

lonté immuable, et la puissance invincible. » Dieu étant égale à sa volonté, il ne veut rien
Cap. VI, 6. «11 serait très-mauvais de répondre que qu'il ne le puisse faire. Il dit en second lieu

si la prédestination a lieu, nous ne devons qu'il y a bien des choses que Dieu pourrait

ni prier, ni veiller, mais faire toutes les vo- faire, que néanmoins il ne fait pas mais ,

lontés de la chair, puisque si nous sommes qu'il n'y a rien qu'il veuille faire, et qu'il ne
prédestinés, nous serons infailliblement sau- fasse pas. Etant donc certain que tous les
vés. Cette réponse ne peut être apportée, hommes ne sont pas sauvés, il dit qu'il faut
parce que la grâce qui nous a été préparée entendre le terme de tous dans la proposi-
par la divine piédestination, nous est donnée tion de saint Paul, en ce sens, que Dieu veut
de Dieu afin que nous veillions, que nous qu'il y ait des hommes sauvés de toutes les
priions, et que nous ne cherchions point à nations, de tous les âges, de toutes les condi-
fBom. iiii, satisfaire la chair dans ses désirs déréglés. tions, de toutes les langues « Ce qui renfer-
: x.

Or, comment se pourrait-il' faire que quel- me, dit-il, des élus d'entre les maîtres et d'en-
qu'un reçût la grâce et qu'il ne fit point les tre les serviteurs ; d'entre les rois, et d'entre
œuvres de la grâce, elle-même opérant les soldats,en un mot de toutes sortes d'état.»
en lui ? Car la grâce est donnée par le Saint- Il prouve que Dieu n'a pas voulu le salut de

G.:tL T, s» Esprit et les fruits du Saint-Esprit sont la


;
tous les hommes en particulier, puisque se-
" "' ckarité, la joie, la paix, la patience, l'humanité, lon l'Evangile il n'a pas voulu le faire con- Mtiii.xi,!i

la bonté, la foi, la douceur, la tempérance. Ainsi naître à des hommes qui auraient cru en lui,
donc dire : Si l'homme est prédestiné, il ne s'ilsl'eussentconnu. «Que si l'on répond, (iil-il, cip. n.

doit ni prier, ni veiller, c'est comme si on que le Sauveur n'a pas voulu se faire connaî-
avançait qu'une prsonne à qui Dieu aiu-ait tre h quelques-mis, parce qu'il connaissait lui-

* Quomodo enim fieri potesl ut gratiam quisque impleatur. Fit ergo quidquid ille voluerit, cujus
accipial et opéra gratiœ,ipsa gralia in se opérante, roluntali nemo resislit : nec enim potestas Dei
non facial? C.ratia quippe per Spiritum Sanctiim minor est quam voluntas; el ideo iiihil inrenilur
dalur; fructus autem Spiritus est cliarilas, gau- relie, quod non possil facere. (Jiurdam quidrm
dium, pax, touganiinitas, etc. Ibid., cap, vi, pag. Deus facere posscl el nonfacit. Mhil eal tanien
485. quod fieri velil aliquando,nec faciel. Ibid., cap. ix,
• Yolunlas Omnipolenlis nec esse e^^l in cmmibus pag. 488.
[VI" RIliCLE.] CITAPITRE I. — SAINT FULGENCE DE IIUSPE. G3
mriiii' la (liircU' t\r leur fd'iir, il est loiijdiirs gence composa depuis son second retour en f»' » Piorr» :
.
P . ,. '" "lï*' l'on
vrai que Dieu n'a pas voulu lu salut do tes AliKiiic, c ('st-i'i-dae, depuis l'an *
o^.'J ,
'
celui 5*'-
do
'^"''i)'"
C4) Ii\r0|
'
endurcis. Comiuo on connaît ceux (ju(? Dieu (jui est intitulé : De lu Foi, on de ta Kîujk de p'i!-"'"-

veut sauver par la cour.aissanco qu'il leur la vraie foi. Il est adressé à un laïque nommé
donne de son Évangile; on connaît aussi ceux Pierre, (jui, allant k Jérusalem, et craignant
qu'il ne veut pas sauver par le refus qu'il leur d'être surpris par les hérétiques dont r( Irient
fait de la piédiealion decenièuie Kvanyile.)) était rempli, souhaitait avant de partir, d'a-
Saint Fulgence traite ensuite de la dill'érenco voir une règle de foi qui eu contint tous les
de l'état du premier homme et du nôtre. « Le articles, afin de savoir ce qu'il devait croire,
premier liomme avant son péché jouissait, et éviter de tomber par h'i dans les pièges des

dit-il, d'une liberté si pleine et si entière, hérétiques. Saint Fulgencc le loue de son
qu'il ne sentait rien qui lui résistât. 11 était zèle pour la pureté de la foi, en lui repré-
sain et heureux. Il avait toutefois besoin du sentant que sans cette vertu il est impossible
secoui's de la grâce mais cette grâce était
; de plaire à Dieu, la foi étant le fondement '^"f- '•

telle qu'il pouvait s'en servir, ou ne pas s'en de tous les biens, et le commencement du
servir, demeurer avec son aide dans l'état salut de l'homme. Il lui dit de se souvenir
de droiture et de justice où il avait été créé, en quelque lieu qu'il se trouvera, qu'il a été
ou abandonner cet état par sa propre volonté. baptisé au nom du Père, du Fils et du Saint-
Maisdepuis le péché, le libre arbitre del'liom- Esprit, et qu'il doit conséquemment croire
me est inlii'uie: devenu esclave du péché, il de tout son cœur que le Père est Dieu, que
a besoin d'une grâce prévenante qui le dé- le Fils est Dieu, que le Saint-Espiit est Dieu,
livre et le fortifie, et qui le rende victorieux c'est-à-dire, que la sainte et ineffable Trinité
dans les combats que la chair livre à l'esprit.» est un seul Dieu. « Car, ajoutc-l-il, il n'y a
"• 8. Saint Fulgence examine après cela la qu'une même essence ou substance, ou na-
question de l'origine de l'âme, sur laquelle ture du Père, du Fils et du Saint-Esprit,
Jean et Vénérius l'avaient aussi consulté. Il quoique personnellement le Père soit autre
y avait là-dessus deux opinions: les uns di- que le Fils, le Fils autre que le Père, et le
saient que l'âme est créée et mise en même Sitint-Esprit autre que le Père et le Fils. » Il
temps dans le corps pour qui elle est créée prouve l'unité d'un Dieu en trois personnes
'de Dieu; d'autres soutenaient que l'âme est par ces paroles de la Genèse Faisons V liomme : Gecès. i, 20.

' produite par la propai;ation comme le corps. à notre image et ressemblance ; et par celles d'I-
Le saint évèque, miitant la retenue de saint saïe qui entendit les séraphins crier : Saint,
Augustin, qui, ayant à traiter la même ques- saint, saint est le Seigneur Dieu des armées, isai. vi,3.

tion, l'avaitlaissée indécise en avouant qu'elle « Comme nous croyons, dit-il, que le Fils seul
était au-dessus de ses lumières, se contente est né, la foi catholique nous enseigne aussi .c^j.. n.

défaire voir que ces deux opinions ont l'une né se ul selon la chair; en sorte que c'est
qu'il est

et l'autre leurs difficultés qu'en suivant la


;
le même Fils de Dieu, Dieu lui-même, qui est né

première, on a peine à concevoir comment du Père avant tous les siècles selon sa nature
se contracte le péché originel, mais qu'il divine, et né dans le temps selon la nature hu-
n'est pas plus aisé de dii'e comment se fait maine. Celte double naissance est d'un même
la génération des âmes. Il se borne donc à Fils de Dieu la naisance divine selon laquelle
;

répondre que nous devons croire que l'ùme il estcoéternel à son Père; la naissance hu-

n'est pas un corps, mais un esprit qu'elle ;


maine selon laquelle le Fils de Dieu s'est a-
n'est point une portion de la substance de néanti en prenant la forme d'esclave dans le
'• Dieu, mais une créature qu'elle n'est point
;
sein de sa mère. C'est selon cette forme qu'il
mise dans le corps comme dans une prison a été crucifié, mis dans le tombeau ;
qu'il est
pour ses péchés passés mais qu'elle y est
, ressuscité et monté au ciel quarante jours
mise, selon l'ordre de Dieu, pour l'animer et après sa résurrection, d'où il viendra â la fin
le faire vivre, et qu'étant unie à la chair, elle des siècles juger les vivants et les morts. »
contracte le péché originel, dont elle est pu- 2. Croyez donc, continue saint Fulgence,
(I
,„.

rifiée par le baptême. que le Christ, Fils de Dieu, c'est-à-dire une


personne de la Trinité, est vrai Dieu, en sorte
§XVI.
que vous ne doutiez pas qu'il ne soit né de
Du livre de la Foi.
la nature du Père. Croyez aussi qu'il est vrai
; Il 1 . On met parmi les ouvrages que saint Ful- homme, en sorte que vous ne doutiez pas
,

64 HISTOIRE GÉNÉR.VLE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


qu'il n'ait une chair comme tous les autres dans de damnation où le pi'ché les
l'étal
liommes, etnon pas une chair d'une nature avait réduits; que le commencement' de la
iliUerente, soit céleste ou aéiieune. Mais en- bonne volonté et de la bonne pensée ne vient
core que la chair de Jésus-Christ soit de mô- pas de nous, mais de Dieu qui nous le donne :

me nature que celle des autres hommes, elle ce qui parait par le diable et ses anges qui ,

a toutefois été courue et est née sans péché, depuis qu'ils ont été précipités dans les té-
ayant une origine ditférente de celle des au- nèbres inférieures par suite de leur chute,
tres hommes. Comme il est né selon la chair' n'ont pu et ne pourront avoir aucune bonne
dje la sainte Vierge Marie, elle est aussi vérita- volonté. 11 enseigne que les impies comme
blement mère du Fils unique de Dieu. Il y a les justes ressusciteront, avec cette ditl'é-
donc deux natures en Jésus-Christ, mais unies rence que les justes seront changés, et que
en une seule personne sans confusion et sans les impies ne le seront pas; c'est-à-dire, que
division. C'est par le Fils seul selou la chair les corps des uns et des autres ressusciteront
que nous avons été réconciliés mais ce n'est: mais que les corps des impies ne seront
pas par lui La Trinité
seul selou la divinité. point changés, conservant toujours leur cor-
nous a réconciliés avec elle-même par l'incar- ruption et leur ignominie au lieu que les
;

nation du Fils qui est l'ouvrage de la Trinité». corps des justes deviendront spirituels, in-
Ci-l"iJ 3. Après avoir instruit Pierre sur les mys- corruptibles et glorieux; que Dieu n'a donné
tères de la Trinité et de l'Incarnation, il dit aux hommes que le temps de cette vie pour
qu'il doit croire que tous les autres êtres, soit acquérir la vie éternelle et pom- faire une
spirituels, soit corporels, sont l'ouvrage de pénitence fructueuse, et que la pénitence,
Dieu qui les a créés de rien que les êtres ;
en quelque temps de la vie qu'on la fasse, est
spirituels et intelligents subsisteront éteruel- utile pour la rémission des péchés quels
lement parla volonté du Créateur; qu'il a qu'ils soient, pourvu cpi'elle soit accompa-
créé ces êtres de telle manière qu'ils fussent gnée d'une douleur sincère d'avoir péché,
obligés de l'aimer plus qu'eux-mêmes, les et qu'on renonce de tout son cœur aux pé-
ayant fait ce qu'ils sont sans aucim mérite chés passés; que toutefois la pénitence n'a
précédent de leur pari; que les anges, ayant d'etfet que dans l'Kglise catholique, à qui Dieu
été créés libres et en pouvoir de mériter leur a donné en la personne de saint Pierre le
béatitude avec le secours de la grâce, ou de pouvoir de lier et de délier; qu'aucun homme*
déchoir de leur état bieuheureux par leur ne doit, dans l'espérance de la miséricorde
faute, une partie a été conQrmée dans l'a- de Dieu demeurer longtemps dans le péché,
moiu- de Dieu qu'elle ne peut plus perdre ;
puisqu'il l'égard même du corps, personne ne
et l'autre périra par une aversion volon- voudrait être longtemps malade dans l'espé-
taire pour Dieu, qui sera punie des peines lance de guérir un jour; que comme la miséri-
élerncUes; que l'homme, qui avec la liberté, corde de Dieu reçoit et absout ceux qui se con-
avait reçu de Dieu dans sa création le don vertissent, sa justice rejettera et punira les
de l'immortalité et de la félicité, est déchu endurcis. Ce sont ceux-là poursuit-il, dont
« ,

de cette prérogative par sou péché, et s'est il pèchent contre le Saint-Esprit,


est dit qu'ils
assujetti lui et toute sa postérité à la mort et et qu'ils ne recevront la rémission de leurs
au péché; que Dieu n'a pas néanmoins per- pé.chés ni en ce moude ni en l'autre. Dieu,
mis que toute la masse du genre humain pé- pour nous donuer le moyen de parvenir à la
rit éternellement, mais qu'il en a délivré gloii'B, a institué des sacrements eu dillerenls
plusieui-s par sa grâce, laissant les autres temps. Depuis ' l'institution du baptême au-

* Ista causa est qua Deus factus est filius Vir- Christo sanguinem fundunt, nec regnitm cœlorum
ginis Mariœ,et Jlaria Virgo fada est maler uni- potest guisquam accipere, nec vitam a'tcrnam.
gcniliDei. Fulg., lib. De Fide, cap. u. jjag. 508. Quiasiie in calholica, sive in hœresi quacumqtie
' Uonœ quoquevoluntatisel cugitalionis inilium vel schismale quisquam in nomine Pairis et FilH
non liomini ex seipso nasci, sed divinilus prœ- et Spiritu.i Sancti bopli^mi sacraiiientum accepe-
parari et Deus evidenler ostcndit,
Iribui in eo rit, iutegrum sacramentum accipil; sed salulem
quod neque diahulus, neqve uliquis angelorum quœ virtus est sacramenti, non habebil si extra
ejiis ex qxto ruinœ illius merilo in hancsunl infe- catlwlicinn Ecclesiam ipsum sacramentum habue-
riorem delrusi caliginem, bonam poluit aut po- rit. Ergo ideo débet ad Ecclesiam redire non ut
teril resumere voluntalein. Iliiil., pag. Sll, cap. ui. sacramenlum baplismatis iterum accipial, quod
' Ahsqve sacinniento baptismutis, prœter eos nemo débet in qii"libcl hominc baptizato repctcre :
qui in Ecclesia caUwlica sine baptismale pro sed ut in socielate catliolica vitam œlernam ac-
[Vl' SIÈCLE.] ClIAriTIll': I. — SAINT FULGKNCE DE lUJSPE. «.•S

cnii ne peut nirivor an royaume des cicux, liaitcnt de servir Seigneur sans empê-
le

sans recevoir ce sacronioiit dans l'Kglise ca- chements, fuient mariage, s'abstiennent
le

tholique, ou sans rt'paiulre sou sang pour Jé- de la chair et du vin autant que la santé du
sus-Christ. Tout homme donc, qui reçoit le corps le leur permet, non que ce soit un pé-
baplc^nic an nom du Pi-rc, et du Fils cl du ché d'avoir une femme (car c'est' Dieu qui
Saint-Esprit, soit dans la foi talliolii(ne , soit a institué et béni le mariage dans les pre-
dans l'hérësie dans le schisme
, soit re- ,
miers hommes) ou de boire du vin, ou de
çoit à la vérité le sacrement, mais il ne re- manger de la chair; mais ils agissent ainsi
çoit pas le salut qui est la vertu du sacre- parce qu'ils sont persuadés que la virginité
ment, s'il le reçoit hors de l'Kgliso catholi- est piéférable au mariage, et que l'absti-
que. C'est pourquoi il doit retourner à l'É- nence des viandes et du vin rend un genre
glise catholique non pour y être baptisé une de vie plus pure. Les secondes et les troisiè-
seconde fois, ce qui n'est pas permis; mais mes noces ne sont pas même défendues,
pour recevoir la vie éternelle dans la société mais elles doivent être chastes , l'exci's dans
catholique , n'étant pas possible d'acquérir l'usage légitime du mariage n'étant pas
la vie éternelle sans demeurer dans l'unité exempt' de péché véniel. Quant à ceux qui
de cette Église, quelques grandes aumônes ont fait vœu de continence, s'ils se marient
que l'on fasse et quand même on répan-
, ils commettent un crime de damnation par

drait son sang pour le nom de Jésus-Christ. le violemeut de la foi qu'ils ont donnée à
Il en est de même des œuvres de miséricorde, Jésus-Christ. Mais ceux-là posséderont le
elles ne servent de rien pour le salut lors- royaume dos cieux * qui est promis aux
qu'on les fait hoi-s de l'Église catholique; si saints, qui, sachant qu'une chose est permise
ce n'est ' peut-être qu'elles diminueront la et qu'eUe peut contribuer au progrès d'une
force des tourments, mais elles ne placeront meilleure vie font vœu librement de l'ob-
,

personne au rang des enfants de Dieu, si elles server, et l'obsen'ent en efJet avec fidéUté et
ne sont faites dans l'Église catholitpe. Le sans retard. Car Dieu rendra la récompense
baptême même ne sutht pas pour le salut, du royaume céleste, qu'il a promis à qui- ,

l'eùt-on reçu dans l'Église catholique, si, conque l'emplira les vœux qu'il lui aura
après avoir été baptisé, l'on vit mal. Ceux faits. »

mêmes qui vivent bien doivent s'appliquer 4. Saint Fulgence réduit ensuite tout ce Arlîclos do
roi.poï.SJ.
aux œuvres de miséricorde, parce qu'encore qu'il a dit à (juarante articles qu'il estime
que leurs péchés soient légers, ils en com- être autant d'articles de foi. Il les commence
mettent quelques-uns chaque jour, pour les- tous par ces paroles : Tenez pour certain et
quels les justes et les saints doivent dire pen- ne doutez nullement. Voici ce qu'ils contien-
dant tout le temps de cette vie Remettez- : nent de plus remarquable : « Nous devons te-
nous nos dettes, comme nous les remettons à nos nir pour certain que le Père '",
le Fils et le
débiteurs.Et parce que ces sortes de péchés Saint-Esprit sont natm-ellement un seul Dieu
légers se commettent même dans l'usage des au nom duquel nous sommes baptisés; et
choses permises, c'est pour les éviter que les que la sainte Trinité est naturellement un
humbles serviteui's de Jésus-Chi-ist, qui sou- seul et vrai Dieu étemel et sans commence-

expiât... qui si et eleemosynas largas facial et pro rum, habebit nonnullum sed veniale peccatum.
nomine Christi etiam sanguinem fiindat, pro eo Ibid.
quodin hac vita non teiiuit Ecclesiœ cathoiicœ uni- * Tune unusquisque regnum ccelorum quod
tatem, non habebit œternam salutem. Ibid., pag. sanctis promittitur, possidebit, si... quodscit esse
519. licitum et ad profectum melioris vilœ pertinere
> Sicut sine Ecclesiœ cathoiicœ societate, nec cognoscit, et Ubenter voveat et celeriter reddat...
baptisnms alicui potest prn(tesse,nec opéra mise- Omni enim voventi Deo et reddenti quod vovit,
ricordiœ, nisi forte ut mitius torquealur,non la- ipse quoque Deus reddet cœlestis regni prœmia
men ut inter (ilios Dei deputetur : sic intra ca- quœ promisit. Ibid., pag. 52t.
tholicam Ecclesiam per solum baptismum vita 5 Firmissime tene cl nullatenus dubites Patrem
wterna non acquiritur, si posl baptismum maie et Filium et Spirilum Sanclum unum esse natu-
vivatur. Ibid., pag. 520. raliter Deum in cujus nomine baptizati sumus...
' Conjugium inprimis hominibus Deus et ins- id estsanctam Trinitatem esse solum naturali-
tuit et benedixit. Ibid., pag. 520. terverum Deum... sine initio sempiternum... in-
' In talibus et si fuerit aliquis conjugalis ex- commutabilem... rerum omnium visibilium alque
cessus , qui tamen legitimum non violet to- invisibilium creatorem. Ibid., pag. 521, 522.
IX.
6U HISTOIRE GKXÉHALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
ment, immuable et crëateur
de toutes les fert pour nous en sacrifice à Dieu lui h qui, ;

clioses visibles et invisibles que la nature


; avec le Père et le Saint-Esprit, les paliiar-
du Pt're. du Fils et du Sainl-Espiit est une
'
ches, les prophètes et les prolres ollVaienl dos
et la même, mais qu'U y a trois personnes ;
sacrifices d'animaux dans TAncien Testa-
que le seul Dieu Fils, c'est-à-dire, une per- ment dans la nouvelle loi la sainte
et à qui
sonne de la Trinité est Fils du seul Dieu Père, Eglise catholique ne cesse d'otl'rir par toute
et que le Saint-Esprit qui est aussi une per- la terre le sacrifice du pain et du vin ipie le ;

sonne de la Triuité n'est pas du seul Père, Verbe fait chair a toujours ' conservé la même
mais ensemble l'Esprit du Père et du Fils ; chair selon laquelle il est né de la Vierge que ;

que le même Saint-Esprit' qui est un Espiit c'est dans celte chair qu'il a été crucifié, qu'il
du Père et du Fils, procède du Père et du est mort, qu'il est ressuscité, qu'il est monté
Fils que la Trinité est un Dieu immense par
; au ciel, qu'il est assis àde Dieu, et
la droite
sa vertu et uon par son poids, et qu'elle qu'il viendra juger les vivants et les morts ;

comprend toutes les créatures, soit corpo- que Dieu est le souverain bien; qu'il n'y a
relles, soit spirituelles, par sa vertu et par rien de créé qui ne soit bon de sa nature ;
sa présence. Xousdevons' tenir pour certain que le mal n'est que la privation du bien.
qu'une personne de la Tiinité, c'est-à-dire. D'où il suit qu'il n'y a que deux maux pour
Dieu le Fils né seul de la nature du Père, et la créaliue raisonnable, l'un par lequel elle
d'une et même nature avec le Père, est né s'est éloignée volontairement du souverain
dans la plénitude des temps d'une vierL'e, et bien par le péché, et l'autre qui consiste
que le Verbe a été fuit chair que comme il ; dans la peine éternelle dont elle sera punie
est Dieu parfait, il est aussi homme parfait, malgré elle. Nous devons tenir pour certain
ayant pris la véritable chair du genre humain qu'il n'y a aucune créature qui soit de même
et une âme raisonnable, sans péché; qu'il y a nature que le Créateur que l'état des saints
;

en Jésus-Christ deux natures unies insépara- anges est immuable, en sorte qu'ils ne peu-
blement, mais sans coid'usion: la nature divi- vent déchoir de leur béatitude; que les es-
ne, qu'il a en commun avec le Père, selon ce prits célestes et l'homme sont les seuls à qui
«ju'il dit Mon Père et 7noi sommes vnc même
:
Dieu ait accordé la raison ;
qu'Adam et sa
chose , et la natuie humaine, selon laqueUe ce femme ont été créés sans péché et avec le
Dieu incarné dit Mon Père est plus gi'and que
:
libre arbitre par lequelils pouvaient pécher
moi;qyni le Dieu Verbe fait chair n'a qu'une ou ne pas pécher qu'ils ont péché par leur
;

personne de su divinité et de sa chair; que propre volonté et non par nécessité que par ;

la chair de Jésus-Christ n'a pas été concjue leur péché la nature humaine a été tellement
dans le sein de la Vierge avant son union changée en mal qu'elle est devenue l'esclave
avec le Verbe, mais dans le même temps ; du péché et de la mort que tout homme qui
;

que le Fils unique de Dieu fait chair s'est of- est conçu par la voie 'ordinaire du mariage

Firmissime teiie et nullatenus dubiles Patris


'
tum, id est Verbum Deum, habentem scilicet sine
et Fila cl SpirUus Sancli unam quidem esse na- peccato veram nostri generis carnem et animam
turam, très vcro esseperson<is...solum Deum Fi- rationalem... Verbi, quod caro factum est, duas
lium, id est, unam ex Trinilate personam, solius naturas inconfusibiliter atque inseparabiliter
Dei l'atris esse Filium ; Spiritum vero Sanctum permanere : unam divinam quam habet cum PO'
ipsum quoque unam ex Trinitate personam non tre communem , secundum quam dicit : Ego et
solius Patris, scd simul Patris et Filii esse Spi- Pater uiiuin sumus; alteram kumanam secundum
ritum. Ibid., pag. S22, 523. quam ipse Deus incarnatus diril : Pater major
* Firmissime tene et nullatenus dubites eum-
me est. Deum Verbum carnem factum unam ha-
dem Spiritum Sanctum, qui Patris et Filii unus bere divinilatissuœ carnisque personam... Car-
spirilus est, de Pâtre et Filio procedere... Trini- nem non sine ditinitate conceptam in utero
Christi
tatem Deum immensum esse virtute non mole; , Virginis, priusquam susciperetur a Verbo : sed
et omnem creaturam spiritulem atque corpora- ipsum Verbum Deum suœ carnis acceplione con-
lem virtute ejus et prœsentia contineri. Ibid., ceptum. Ibid., p,ig. 523,524 et 525.
pag. 523. ' Firmissime tene Verbum carnem factum eam-

' Firmissime tene et nullatenus dubites unam


dem humanam carnem semper reram habere, qua
ex Trinitate personam, id eut Deum Filium qui de Virgine Verbum Deus natus est, qua crucifixus
de natura Dei Patris solus natus est, et uitius et mortuus est, qua resurrexil et in cœlum as-
ejusdem 7mlurœ cum Pâtre est. ipsum tn pleni- cendil, et in dextera Dei sedet, qua etiam ventu-
tudine temporis de Virgme natum. Yerbum car- rus est judicare vivos et mortuos. Ibid., pag. 526.
iiem factum... sicul de Deo pâtre pcrfectum Deum, ' Firmissime tene non solum homines jam ra-
xta de Virgine maire perfeclum hominem geni- tione utenles, verum etiam parvulos, qui sive in
[VI* SIÈCLE.] CHAPITIŒ I. — SAINT FlJLdENCK DK UKSl'lS. 67

naît avec lo pdcliL^ oriifincl ; que noii-seiilc- par leur naissance; que pcrsonnt^ ne peut,
menl ceux (|iii mil rusaf;'e de raison, mais eu ce monde, faire pénitence, si Dieu no l'a
oncorc les eiil'anls, soit qu'ils ineiireiil tians écliiirr- et converti par sa misi^ricorde gra-

le sein de leur luèrc , soit qu'ils ineuront tuilt;;que l'iiouimc peut lire les livres saints
a[)rès Ctrc nés, seront punis du sup[)Iicc du ou entendre la ])ai()le divine de la bouche
feu éternel, s'ils sortent de ce monde sans de quelques prédicateurs que ce soit, mais
avoir reçu le sacrement de haplème ;
parce qu'il ne peut obéir aux divins commande-
qu'encore qu'ils n'aient ])ninl do péclii's pro- ments, si Dieu ne le prévient par sa grâce
pres ils ont contracté la damnation du péché de manière (pi'il croie de cœur ce qu'il en-
originel par leur conception et Iciu- nais- tend des oreilles du corps, et qu'ayant reçu
sance charnelle. » de Dieu la bonne volonté et la vertu il,

5. « Nous devons croire certainement que veuille et puisse faire ce fjuc Dieu lui com-
Jésus-Christ viendra juger les vivants et les mande; que toutes les choses passées, les
morts, pour glorifier ceux qu'il a justifiés présentes et les futures, sont invariablement
gratuitement par la foi en cette vie, et à qui connues de Dieu; qu'ainsi, il a conuu avant
il a accordé la persévérance dans la foi et la tous les siècles ceux à qui il devait donner sa
charité de la sainte mère l'Eglise, pour les grâce par la foi ', sans laquelle personne n'a
rendre semblables aux anges, selon qu'il l'a pu être délivré de la coulpe du péché tant
promis, et les faire arriver à un état de per- originel qu'actuel, depuis le commencement
fection dont ne pourront jamais déchoir;
ils du monde jusqu'à la fin que tous ceux que
;

comme il viendra aussi pour envoyer le dia« Dieu, par une bonté toute gratuite, fait des
blc et ses anges dans le feu éternel, et avec vases ''de miséricorde, et qui ont été pré-
eux les hommes injustes et impies; que la destinés de Dieu avant la création du monde
résurrection de la chair sera commune aux pour être du nombre de ses enfants, ne peu-
bons et aux méchants, avec cette ditlérence vent périr : de même qu'aucun de ceux qu'il

que les bons seront changés, c'est-à-dire que u'a point prédestinés à la vie étemelle ne
leurs corps deviendront immortels et incor- peut, en aucune manière, être sauvé. Car la
ruptibles, au lion que ceux des méchants ne prédestination est la préparation du don

changeront pas; qu'excepté ceux (jui don- gratuit par lequel l'Apôtre dit que nous
nent leur sang pour le nom de Jésus-Christ, avons été prédestinés pour être les enfants
et qui par là sont baptisés dans leur sang, adoptifs de Dieu par Jésus-Christ.
aucun homme n'aura la vie éternelle s'il , Nous devons croire fermement que le bap-
n'a obtenu la rémission de ses péchés dans tême peut être' non-seulement dans l'Eglise
le baptême; qu'outre le baptême, les adul- catholique, mais encore chez les hérétiques
tes doivent encore faire pénitence de leurs qui baptisent au nom du Père et du Fils et
péchés, et professer la foi catholique selon du Saint-Esprit que toutefois il ne sert de
;

la règle de la vérité; mais que le baptême rien lorsqu'il est conféré hors de l'Eglise,
sutlit pour le salut aux enfants qui ne peu- quoiqu'on ne doive point le réitérer ; qu'ainsi
vent croire par leur propre volonté, ni faire tout homme * qui est baptisé hors de l'Église
pénitence pour le péché qu'ils ont contracté catholique ne peut être participant de la vie

uteris matrum
vivere incipiunt et ibi moriuntur, quos Deus prœdestinavit ad regnum cœlorum, nec
sive jam
de matribus nati sine sacramento snncli quemquam eorum quos Deus non prœdestinavit
baptismalis quod datur in nomine Palris, etc., ad vitam, ulla passe ralione salrari. Prœdesti-
de hoc sœculo transeunt, ignis œterni sempiterno natio enim illa gratuitœ donalionis est prœpara-
supplicio puniendos. Quia, etsipeccatum propi-iœ tio, qua nos Àpostoius ait pr(edestinatos in adop-
actionis nullum habuerunt. originalis lamen pec- tionem filiorum per Jesum Christum. Ibid.
3 Firmissime tene sacramentum. baptismatis non
cati damnalionem carnali conceptione et nativi-
(ale Iraxerunt. Ibid., pag. 527. solum intra Ecclesiam cailwlicam, sed etiam apud
Firmissime tene Deum anle omnia sœcula hœreticos qui in nomine Patris et Filii et Spiri-
scire quibvs esset per fidem gratiam largiturus, tus Sancti baptizant, esse passe; sed extra Ec-
sine qua nemo poluit ab initia mundi usque in clesiam cathoUcam pradesse non passe : ideo et
finem a realu peccati iam originalis quant actua- si ab hœreticis in nomine Patris et Filii et Spi-
lis absolvi. Ihid., pag. 629. ritus Sancti fuerit datum, venerabiliter agnoscen-
Firmissime tene omnes quos vasa misericor-
' dum et ab hoc nullateiius iterandum. Ibid.
diœ graiuita bonitate Deus facit, ante conslitutio- ' Firmissime tene omnem extra Ecclesiam ca-
nem mundi in adoptionem fiUorum Dei prœdtsti- thoUcam baptizatum parlicipem fieri non passe
natos a Dec neque perire passe aliquem corum
: vitœ wternœ si ante finem vitœ hujus, catholicœ
HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
éternelle, si, avant la fin de sa vie, il ne mières, mais encore les secondes el troisiè-
rentre dans cette Église et ne s'y incorpore. sièmes noces; enfin que l'Église catholique
Car nous ne voyons point au temps du dé- est semblable à une aire ' dans laquelle les

luge qu'il y ait eu quelqu'un qui se soit sau- pailles sont mêlées avec le grain jusqu'à la

vé liors de l'Arche. On doit donc conclure fin des siècles, c'est-à-dire les bons avec les
de là que non-seulement tous les païens,
' méchants par la communion des mêmes sa-
mais qu'encore tous les juifs, les hérétiques crements; que ce mélange se rencontre dans
et les schismatiques qui meurent hors du tous les états, soit des clercs, soit des moi-
sein de l'Ét^lise, sont précipités dans les flam- nes, soit des laïques qu'on ne doit pas
;

mes éternelles préparées au diable et à ses abandonner les bons à cause des méchants,
anges; qu'encore qu'un hérétique ' ou un mais tolérer les méchants à cause des bons,
scbismatique ait été baptisé au nom du Pè- autant que la raison de la foi et de la charité
re, du Fils et du Saint-Esprit, qu'il fasse de le demande, c'est-à-dire, s'ils ne répandent

grandes aumônes, et qu'il soutire même la point dans l'Eglise les semences de leur per-
mort pour le nom de Ji'sus-Christ, tout cela ne fidie, ou s'ils n'excitent pas les frères à des

lui est d'aucune utilité pour le salut, s'il per- actions mauvaises par leurs pernicieux exem-
sévère dans l'hérésie ou le schisme, qui con- ples ; étant certain qu'un homme qui croit et
duisent à la mort. Nous sommes encore obli- qui vit de l'Église catholi-
bien dans le sein

gés de croire que le salut n'est pas pour tous que ne peut être souillé par les péchés de
ceux qui ont été baptisés dans l'Église catholi- ceux qui vivent mal, pourvu qu'il ne consen-
que, mais pour' ceux-là seulement qui, après te point à leurs mauvaises actions, ou qu'il
le baptême vivent bien, en s'abstenant des
, ne les favorise pas. n
vices et des concupiscences de la chair que ;
6. Saint Fulgence dit à Pierre de fuir,
^.^^^
Atlle>
i

les justes ' et les saints ne peuvent être en comme une peste et comme un hérétique,

'•' ot tu

'^
ce monde sans péché ; qu'ainsi il est néces- quiconque enseignera contrairement à ces
saire que tout homme travaille à eU'acer ses quarante articles de foi. On en trouve un qua-
péchés, jusqu'à la fin de sa vie, par les au- rante et unième dans quelques imprimés.
mônes, les jeûnes, la prière et les larmes; Mais les manuscrits n'en comptent que qua-
que toute créature de Dieu est bonne, et que rante et le saint évéque lui-môme dit en
,

si les serviteurs de Dieu s'abstiennent de la termes formels qu'il a conclu son traité de
chair ou du vin, ce n'est que pour mortiûer la Foi après le quarantième article, ajou-
leur corps, et non pas qu'ils les croient im- tant que le loisir ne lui avait pas permis d'en
mondes; qu'encore qu'il soit mieux de vivre mettre davantage. D'ailleurs ce quarante ,

dans la continence, le mariage est bon, et et unième article n'a aucun rapport avecice
que Dieu a institué non-seulement les pre- traité. Seulement, il y est parlé au commen-
,

non redditus atque incorporatus Ecclesiœ...


ftierit tam (eternam , sed eos qui percepto baptismale
iN'om et in diebusdiluvH neminem legiinus extra recte viDunt, id est, qui se abslinuerunt a vitiis et
arcam potuisse nalcari. Il)i(l., pag. 529. concupiscentiis camis. Ibid.
' Firinissime tene non solum omnes paganos ' Firmissime tene etiam justos alque sanclos
sed etiam omnes judœos et omnes hœrelicos, at- homines sine peccalo hic neminem vivere posse :
que schismaticos, qui extra Ecclesiam catholicam semperque omni homini esse necessarium el pec-
finiunt prœsenlcm vitam, in ignem œlernum itu- cata sua usque in finem ritœ prœsentis eleemosy-
ros, qui paratus est diabolo et angelis ejus. Ibid., nis. jejuniis, oratione, vel lacrymis dihiere. Ibid.
pag. 530. Firmissime lene aream Dei esse catholicam
»

' Firmissinie tene quemlibet hœreticum sive Ecclesiam et intra eam usque in finem sœatli fru-
schismaticum in nomine Patris et Filii et S/iiri- mento mixlas paleas conlineri, hoc est bonis ma-
tus Sancti baptizatum, si Ecclesixe catliolicœ non los sacramentoru)n comnntnione misceri el in :

fuerit aggregatus quantascumque elcemosynns


, omni pi-ofessione sive clericorum , sive monacho-
fecerit, etsi pru Christi nomine etiam sangninem rum, sive Inicorum esse bonos simul et malos :
,

fuderil, nullatenus passe salvari. Omni enim ho- ncc pro malis bonos deserendos. sed pro bonis
inini qui Ecclesiai culliolicw non lenet unitnlem malos, in quantum exigil fidei et charitalis ratio,
iieque baptismus, neque eleemosyna quamlibet lolerandos, id est, sive in Eccksia nullius perfx-
copiosa, neque mors pro nomine l'IirixH suscepta diœ semiita spnrgunt vel fralres od aliquod
,

pro/icere poteril ad salutem, quamdiu in eo vel malum opus morlifera imitatione non ducunl :
hœretica vel schisiiinlica pravilas persévérai quw nec posse aliquem intra Ecclesiam calholicani
ducil ad morlem. Ihid. rerle credentem, beneque viventem, aliéna unquam
' Firmissime (t;'c non omnts, qui inlra Eccle-
maculari peccalo, si cuiquam peccanli nec con-
siVijH callioUciim bapUzantur, accepluros esse vi- senlionem prœbeat, nec favorem. Ibid.
, ,

[vi° SIÈCLE.] CHAriTRE I. — SAINT FULGENCE DE RUSPE. 69


cpmcnl, do la Tiinit(5 et do rincarnalion : nité dos personnes en Dion. Il finit par un
mais cola môino ost iino prouve qu'il ne doit précis de ce que la foi callioiiquo enseigne
point faire partie du livre adresse^ A l'ierro, sur la Trinité et sur l'Incarnation.
où ces deux articles sont traités fort aulon^'. 2. Nous avons dix sermons parmi les vrais somon. .it

ouvrages do saint Fulgence. Le premier est «.p»;. iio.

§ XVII. inlilul(5 Des Dispensateurs ou des Économes


:

Du livre de la Foi contre du Seirpicur. La matière en est tirée de la


l'évcquc Pinta ,
parabole de l'ICvangilo, où il est dit Qui est : i."c. m.u.
de quelques Homélies, et des livres contre
le dispensateur fidèle et prudent que le maître
Fabien.
établira sur ses serviteurs, pour distribuer à
1.0 IlTro dti
1. L'aulcnr de la Vie de saint Fulqencc ', chacun, dans le temps, la mesure de blé qui lui
Fol roii'ro
la, u u<>i
en parlant des trois livres que ce saint adres- est destinée? Saint Fulgence fait voir que la
Il I p nil
&3t.
9 f sa à Trasamond, dit que ce prince en fut si qualité de dispensateur appartenait non-seu-
étonné, qu'il n'osa pins lui faire do ques- lement aux apôtres, mais qu'elle appartient
tions; qu'un évoque arien, nommé l'inta, encore aux évoques qui sont chargés, par
répondit à ces trois livres, et que saint Ful- leur ministère, de dislribuer à chacun le
gencc lui répliqua par un ouvrage particu- pain de la divine parole, figuré par la mesu-
lier. Nous avons un écrit qui porte le nom re de blé dont parle ri'>angile. Il y montre
de saint Fulgence, avec le titre de Réponse aussi qu'il n'est personne qui ne puisse ac-
à Pinta. Mais ce ne peut être celui que ce complir le précepte de l'aumône, parce que
Père composa contre cet ëvèque arien. Saint Dieu ne l'ordonne que suivant les facultés
Fulgence, au rapport^ de l'auteur de sa Vie, d'un chacun, et que dans ceux qui n'ont
faisait voir, dans sa réplique à Pinta, que rien, leur bonne volonté supplée. Le second i-n;. wi.

les ariens avaient été terrassés dans ses trois sermon traite des deux naissances de Jésus-
livres ;\ Trasamond et que les raisons que
,
Christ. Selon la première, il est né du Père
Pinta lui avait opposées étaient vaines. On avant tous les siècles. Selon la seconde, il
ne voit rien de tout cela dans l'écrit qui nous est né de la Vierge dans les derniers temps.
reste; il n'y est parlé ni des livres à Trasa- Il fait voir que l'Incarnation est une grande

mond, ni de la l'éponse de Pinta la sainte Écri-


; preuve de l'amour de Dieu pour les hommes ;

ture y est d'ailleurs citée d'après une version et, comparant le premier homme avec le se-

diU'érente de celle que saint Fulgence a sui- cond, c'est-à-dire Adam avec Jésus-Christ,
vie dans ses ouvrages. C'est l'ancienne Ita- et Eve avec Marie, il fait voir que si Adam a
lique que suit cet auteur, au lieu que saint souillé le monde par son péché, Jésus-Christ
Fulgence cite ordinairement l'Écriture sui- l'a purifié par son sang et par sa grâce et que ;

vant la version Vulgate. On voit aussi, par si le diable s'est servi d'Eve pour nous ôterla

l'explication que l'auteur de la Réponse à vie, l'ange est venu à Marie pour lui annoncer
Pinta donne du terme consubstantiel, qu'il ne que la vie nous serait rendue. Le troisième
savait pas le grec, puisqu'il dit que ce ter- sermon est en l'honneur du martyr saint
me ' signifie une seule substance, au lieu qu'on Etienne. Le saint évoque y dit que la chari- 55,.

doit le rendre par de même substance. Saint té servitd'armes à ce soldat de Jésus-Christ


Fulgence ne serait point tombé dans cette et que ce fut par la force de cette vertu qu'il
faute, lui qui, dès sa jeunesse, avait appris si vainquit la cruauté de Saul; de manière qu'a-
parfaitement la langue grecque, qu'il la par- près l'avoir eu pour persécuteur sur la terre,
lait comme
s'il eut été élevé en Grèce. Au il mérita de l'avoir pour compagnon de sa
reste, cet ouvrage n'est presque qu'un tissu gloire dans le ciel. Il traite trois sujets diffé- y,

de passages de l'Ecriture, rassemblés sous rents dans le quatrième discours : de la fête


différents titres. Dans l'un, on rapporte les de l'Epiphanie, qu'il appelle Manifestation,
passages de l'Écriture qui prouvent l'unité parce qu'en ce jour le Fils de Dieu s'est ma-
de Dieu; dans l'autre, ceux qui marquent nifesté aux Mages de la mort des Innocents
;

l'égalité du Père et du Fils; et dans les sui- et des présents que les Mages offrirent à Jé-
vants, ceux qui rendent témoignage à la di- sus-Christ, lorsqu'ils vinrent l'adorer. Il dit

vinité du Fils et du Saint-Esprit, et à la Tri- que si le Sauveur s'enfuit en Egypte pour

Vita Fulg., pag, 23. ' Homos namque imus ousia, substantia grœco
Ihid. seriHOne appelhitur. Pag. 535.
70 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
éviter 1.1 fureur d'Hérode, ce ne fut point premiers mots ne sont pas toutefois les mê-
par aucune crainte humaine, ni par aucune mes dans cette édition et dans celle des œu-
nécessité, mais par une dispcnsation divine, vres de saint Fulgence; mais il n'y'a point
afin que, dans le temps, il pût être attaché de différence dans le reste du discours. Le p.;. 511.

à la croix sur laquelle il devait répandre le dixième est sur ces paroles du prophète Mi-
sang de notre rédemption; que ceux qui ellée : Je t'apprendrai, â homme , ce que c'est

doutent de la divinité de cet enfant s'en con- que le bien, et ce qui t'est utile, c'est d'agir sui-
vaincront en faisant attention' à l'étoile qui vant la justice, et d'aimer la miséricorde. Saint
précéda les Majics, et leur montra le che- Fulgence veut que tout homme agisse envers
min : car cette étoile n'avait jamais paru soi-même comme les jugesde la terre agissent
jusque-l.'i. Cet enfant venait de la créer et de envers ceux que l'on traduit devant leurs tri-
la députer aux Mages qui venaient l'adorer. bunaux comme coupables. Ils renvoient l'in-

Il ajoute que par les trois présents ditl'ércnts nocent, et punissent selon les lois ceux qui
qu'ils lui oiïrirent, on peut confondre les hé- sont convaincus du crime. « Soyons nos pro-
résies qui se sont élevées sur l'Incarnation, pres accusateurs, continue-t-il, examinons
r.f. ;„a. parce prouvent que Jésus-Christ est
qu'ils les replis les plus secretsde notre cœur, et
vrai Dieu, \Tai roi, et vrai homme. Le cin- condamnons que nous avons fait de
tout ce
quième discours est sur la charité. L'auteur mal. Punissons nos fautes par une sincère
y enseigne que nous la devons à tous et en pénitence. Voilà le jugement que Dieu veut
tous temps à ceux que nous connaissons et
, que nous rendions contre nous-mêmes. Il
à ceux que nous ne connaissons pas, h nos demande encore rpie nous fassions justice
amis et même à nos ennemis que la chari- ; aux autres, c'est-à-dire que nous ne leur fas-
té' s'augmente dans nous à mesme que la sions rien de ce que nous ne voudrions pas
cupidité diminue, qu'elle rend libre celui que qu'on nous fît mais, au contraire, que nous
;

l'amour du monde ne tient point captif, et leur fassions ce que nous souhaitons nous
qu'elle est la racine de tous les biens, comme être fait à nous-mêmes. A l'égard de la mi-
M6. la cupidité est la racine de tous les maux. Le séricorde, on peut faire voir en deux maniè-
sixiènie, qui est sur saint Cyprien, nous re- res qu'on l'aime ; l'une, lorsqu'on reprend
présente en peu de mots su constance, son celui qui pèche, et qu'on lui accorde le par-
zèle, sa vigilance pastorale, sa charité et la don quand il promet de se corriger; l'autre,
grandem- de sa foi. Le septième a pour ti- lorsqu'on donne à l'indigent ce dont il a
tre Du Larron crucifié avec Jésus-Christ. 11
: besoin.»
n'est ni si grave ni si bien soutenu que les
précédents. Le huitième est sur la fête de la § XMII.
6C9. Pentecôte. L'auteur s'y fait cette objection :
Fabien.
Des livres contre
« Si quelqu'un vous dit Vous avez reçu le :

Saint-Esprit, pourquoi ne parlez-vous pas 1. Saint Fulgence s'étant trouvé avec un Lw lirrfi
conirf Fal'
toutes sortes de langues? A'ous lui répon- arien de queUjuc léputation, nommé Fabien, »oip«iJ'ui.

drez que vous parlez toutes sortes de lan- ils entrèrent en dispute sur divers points de
gues, parce que vous êtes dans le corps de religion, particulièrement sur la Trinité et
Jésus-Christ, c'est-à-dire dans l'Kglise, qui sur l'Incarnation. Au sortir de la conférence,
parle toutes sortes de langues. » Je ne sais si Fabien répandit dans le public plusieurs dis-
cette réponse est digne de saint Fulgence. cours sous le nom de saint Fulgence, disant
510. Le neuvième, qui est un éloge de saint Vin- qu'il s'étaitexpliqué de cette sorte dans l'en-
cent, martyr, n'est pas de saint Fulgence, tretien qu'il avait eu avec lui. Comme il n'y
mais de saint Augustin, parmi les sermons avait rien de vrai dans tout ce que Fabien
duquel il se trouve dans le cinquième tome avait attribué à saint Fulgence. ce Père en
de la nouvelle édition, au nombre 276 ; les entreprit la réfutation dans un long ouvrage

Hinescis veram hujHS Pueri deitalem, aUende


' • Tniitum rero augetur eharitas gu€.nlmn fueril
slKllaui in cœlo fulgenlem, Magu^ pra'cvd('nlc7n et iiiimiiiiiln ciipiililas, et illuiii faeil clitirtias .icin-
iler igitoranlibus oslcndcnlcm. llu-c slilta nun- per liberum guem iwti tenuerit cupidilas mundanu
quniii aille (ijiparuil, ijuia iiunc eaiii Puer isle crea- caplivuiii. Charilas est raiti.r omnium bonoriim,
vitel mtigis ad se l'enicnUbus prœviam dtpulavil. cupidilas est nidix omuiuii: malorum. HiTiu. 5,
Fulg., Serm. i, pag. 501. pag. 565.
[vr SIÈCLE.] CHAPITRE 1. — SAINT Fl'LCENCE DE RUSPE. 71

qu'il divisaen douze livres. Il no nous en amour ne changeant point d'objet, il ne peut
resteque des frayraents, qui ont été donnés cesser de se porter vers comme
vers lo
lui,
au public par le Père Cliitllct, et iinprimi>s bien immuable. Le désir des anges marque
dans le recueil des Œuvres de saint Ful- l'aclivili! de leur amour.

gence. 4. Dans le troisième livre, l'auteur distin- ,.'•'"• ""'

ri.'*'iTr!
^- ''''premier livre avait pour litre Du : guait ce qui est propre à chaque personne de '''•

.".
Tf, 1-E.
Trh-Ilaut, du Consolateur, de la qualité d'en- d'avec ce qui est commun aux trois
la Trinité
voyr, de docteur et de juge. Saint Fulgoncc y personnes. «Il est propre auPère, dit-il, d'en-
faisait voir que le Fils est Dieu, Très-Haut, gendrer, au Fils d'être né, au Saint-Esprit de
et la vie comme le Père, et que tout ce que procéder du Père et du Fils; mais l'immen-
le Père fait, le Fils le fait aussi que Dieu
;
sité est un attribut commun au Père, an Fils
le Père peut être appelé consolateur, pnis- et au Saint-Esprit; les trois personnes sont
iic.r. i,j, que saint Paul l'appelle le père des miséri- un seul Dieu; mais on no peut pas dire que
cordes, et le Dieu de toute consolation que ; le Père soit Dieu du Fils, si ce n'est à raison
les otlices de juge, de docteur et d'envoyé, de la nature humaiue à laquelle le Fils s'est
conviennent au Père et au Saint-Esprit, quoi- uni. Il est Père du Fils selon la nature divine,
que le nom d'ani^o du grand conseil se dise et non pas son Dieu. Au contraire, Jésus-
proprement du Fils. La raison qu'en donne Christ est véritablement notre Dieu, nous
saint Fulgence, c'est que Dieu le Père a lui- qui sommes chrétiens, et qui ne reconnais-
même annoncé aux hommes la venue de sons point d'autre Dieu que lui mais il n'est
;

son Fils pour leur salut, ainsi qu'on le lit pas le Dieu des manichéens, qui soutiennent
A.io..iv,in. dans la prophétie d'Amos. Il montrait dans qu'il n'a pas donné la loi. Il n'est pas le
le même livre qu'il y a deux natures en Jé- Dieu des Juifs, qui au lieu de le regarder
sus-Christ unies en une seule personne en ; comme un Dieu vivant, plein de gloire, le
sorte que c'est le même qui est Fils de Dieu regardent comme un homme mort depuis
et Fils de l'homme; que l'erreur des nesto- longtemps. Il n'est pas le Dieu des ariens,
riens, condamnée par l'Éulise, consiste prin- qui ne le croient pas un Dieu de même na-
cipalement en ce qu'ils enseignent qu'il y a ture que sonPère. Il n'est pas le Dieu de tous
en Jésus-Cluist deux personnes, comme il y ceux qui ne pensent pas calholiquement. »
a deux natures, disant qu'une de ces deux 5. Le culte que nous devons à Dieu, faisait um qo». ,

personnes appartient au Fils de Dieu, et l'au- la matière du quatrième livre. Saint Fulgence 5^2-
tre au Fils de l'homme. y faisait voir par l'autorité de l'Écriture, que
LWrfc'ond, 3. Voici cc que saint Fulgence enseignait le Père, le Fils et le Saint-Esprit, sont éga-
dans le second livre Le Saint-Esprit gémit ou
: lement adorables. Il y distinguait le culte de
demande pour nous lorsqu'il nous inspire de latrie ou d'adoration, de celui de dulie, di-
gémir nous-mêmes pour nos fautes, et de sant que le premier ne convient qu'à Dieu,
nous adrçsserà Dieu mais on ne peut pas
; et que le second peut convenir aux créatu-
dire qu'il gémisse véritablement, parce qu'é- res, selon ce que dit saint Paul Assujettissez- c.iia v, ;?,
;

tant Dieu, il n'est sujet à aucune misère qui vous les uns aux autres par une charité vraiment
lui donne lieu de gémir Jésus-Christ, néan-
: spirituelle, parce que Jésus-Christ est Dieu et
moins, prie pour nous comme homme et en sa homme tout ensemble. « Lorsque, dit-il, nous
qualité de prêtre d'où vient qu'il est dit dans
; disons de lui qu'il est Fils de Dieu, nous ne
I josn. 11,1. la première Épitre de saint Jean Nous avons
: séparons pas l'humanité de la divinité, à
pour avocat auprès du Père, Jésus-Christ, qui cause que c'est la môme personne qui est
est juste. Mais si Jésus-Christ demande com- Dieu et homme. D'où vient que le Sauveur se
me homme, il a de quoi nous donner comme dit tantôt Fils de Dieu, tantôt Fils de l'hom-
Dieu. 11 est dit , dans la première Épitre de me? Parce que c'est le même qui est Fils de J«n.n,r.
iipnr.1,13, saint Pierre, que les anges désii'ent de coiuiai- Dieu et Fils de l'homme. Quoique le nom nib- '".' 's-
tre le Saint-Esprit ; et dans saint Matthieu, d'Esprit se dise quelquefois du Père et du
M=iih..tti.i, qu'ils voient continuellement la face du Père. Fils, celui du Saint-Esprit ou d'Esprit-Conso-
"'
Serait-ce que le Saint-Esprit fut plus grand lateur estrései'vé à la troisième personne. Le
que le Père? Non. C'est au contraire pour Saint-Esprit est Dieu comme le Père et le
marquer leur égalité. Les anges voient con- Fils, et nous sommes le temple non-seule-
tinuellement la sainte Trinité, et ils souhai- ment du Père et du Fils, mais aussi du Saint-
tent toujours de la voir, parce que leur Espi'it, en sorte que nous lui devons le culte
,

72 HISTOIIIE GENERALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.


de latrie comme au Père et au Fils. De là qu'il dira tout ce qu'il aura entendu. Saint
^^ent que l'Église catlioliiiue qui est le tem- Fulgence dit que cet endroit, au lieu d'être
ple (le la sainte Tiiuité, ne cesse di- lui ollVir contraire à la divinité du mar-
Saint-Esprit,
un sacrifice spirituel. que qu'il est de même nature avec le Père
dans le cinquiè-
6. Saint Fuliicnce traitait et le Fils; qu'il entend le Père et le Fils par-
193. me de la qualité d'imat^e donnée au
li\Te, ler, comme le Fils voit ce que le Père fait

Fils, montrant qu'il est tellement l'image du et comme il dit lui-même Je dis ce que j'ai
:

Pore, qu'il est aussi de même nature; que le vu dans mon Père. Or, par cette façon de
Fils n'imite pas le Père dans ses œuvres, et parler, le Fils se disait égal au Père d'oii ;

n'en fait pas de semblables, mais qu'il fait ab- les Juifs prirent occasion de le vouloir faire
solument les mêmes ainsi qu'il le dit lui-mê-
, mourir, parce qu'en disant que Dieu était
iota, T, 19. me dans saint Jean Tout ce que le l'ère fait,
: son Père, il se faisait égal à Dieu.
le Fils aussi le fuit comme lui. Pour donner à 9. Le huitième livre était intitulé De la : »re nol-

Fabien un exemple de la Trinité dans les Mission du Fils du Saint-Esprit. Fabien


et
choses créées, ce Père lui proposait l'âme hu- avait comparé la mission du Saint-Esprit à
maine, dans laquelle on distingue trois clio- celle des anges. Saint Fulgence, pour faire
ses la mémoire, l'intelligence et la volonté.
: sentir le faible de cette comparaison, montre
7. Il prouvait dans le sixième, que le Fils que l'immensité étant un attribut du Saint-
me, |i<s. (,U2.
est coéternel au Père que le Père a pu l'en-
;
Esprit, puisque, par toute la terre, on baptise
gendrer sans commencement, parce que la en son nom, et que tous les fidèles sont scel-
natui e de celui qui est sans commencement, lés de son sceau; c'est une preuve qu'il est
n'ayant pas commencé d'êlre, n'a pu non Dieu, et tpi'ii ne passe pas d'un lieu à un au-
plus commencer d'engendrer; que l'homme tre comme les anges. «Sa mission, dit-il, est Ei'bc ,

a été fait non d'une seule personne


à l'image bien ditl'éreute de la leur. Ils sont envoyés
divine, mais de toute la Trinité; qu'il y a en pour faire ce qui leur est commandé de la part
Dieu trois personnes en une seule nature ;
de Dieu mais le Saint-Esprit, comme Dieu,
;

que comme le feu n'est pas antérieur à sa comble de ses g races et de ses bienfaits ceux
splendeur, de même le Père n'est pas anté- qu'il veut. S'il n'était pas de même nature
rieur au Fils ni au Saint-Esprit; que la sa- et de même puissance que le Père et le Fils,
gesse, c'est-à-dire, le Fils, est la splendeur serait-il nécessaire pour la validité du bap-
de la lumière éternelle qu'ainsi ii est éter- ;
tême, de le nommer avec le Père et le Fils ?
nel lui-même, n'y ayant point de splendeur Sa mission n'est donc autre que la collation
delà lumière éternelle qui ne soit éternelle, de ses dons. Si donc, de ce qu'il est dit en-
LitTfl fcp- 8. Dans
septième, qui avait pour titre
le : voyé, on en infère qu'il passe d'un lieu en
liùme, !-.
t>iu. De l' Egalité et de l'unité du Saint-Esprit avec un autre, il faudra dire la même chose du
le Père et le Fils, saint Fulgence établissait Père et du Fils, qui, selon l'Évangile, vont
la divinité du Saint-Esprit par divers passa- et font leur demeure dans celui qui garde
ges de l'Écriture. Il y demandait, ainsi qu'il leur parole. Mais c'est par la grâce que Dieu
l'avait déjà fait dans le second livre, com- habite dans les fidèles, et c'est aussi par la
ment on devait entendre ce que dit saint commuiiicaliondes dons du Saint-Esprit que
I l'clr. 1,12. Pierre, que les anges désirent de pénétrer le Saint-Esprit nous est envoyé. Lorsque
le Saint-Esprit. Pénétrer en cet endroit ne nous offrons le corps et le sang de Jésus-
signilie autre chose que connaître et que , Christ *, nous demandons ce qu'il a deman-
l'on ne jjcut douter que les anges qui, se- dé pour nous, lorsqu'il a bien voulu s'ollrir
Matib.zritl, lon l'Evangile , voient toujours la face du pour nous; savoir, que nous soyons un tous
10,
Père, ne connaissent aussi le Saint-Esprit, ensemble, comme il est un avec son Père.
qui n'est ni moindre ni plus grand que le Et lorsque, dans la bénédiction ' de la fon-
Jo»n. XVI, Pèie. 11 est dit dans saint Jean que l'Esprit taine baptismale, nous demandons l'avéue-
13.
de vérité ne parlera pas de lui-màne; mais ment du Saint-Esprit, nous ne demandons

' Boc nobi.1 poscimus cum


corpus et sanguinem Spirilum Sanchim tanquam localriii ejus posca-
Chrùti o/leiiniti.^, qitod nobis popnscil quaiido se mus uilic/Uum , sed in Deo l^alre scicnics Sipirilus
pro nobis offcrre dignalus est CItrislus. Fiag. 28, Sancii naturalitir esse origincm, ab ipso Veo l'a-
hb. VIII, Conlra Fabiau., pag. 619. trespirilalisdoni poscimus In rijil (item, nominc rjus
' ni in foHiisbi'.iiediclionc, non sic miUi petimus nuncupante doua ejujs. Il)iii., Krag. 19, png. 62

[VI" sifeci.E.] aiAl'ITltlî I. — SAINT FlILr.E.NCE DE RUSPE. 73

pas son av(^noinont local mais sachant qu'il ;


ble; la sainte Église catholique n'offre point
tiro natiii'ollcraent son orip;ino du Pi'rc, nous aux personnes, mais ensemble
le sacrifice jrnn. IK,
Jrn J~i.
M
Mallh, il,
(Icnianilons au Pl'vo miMU{\ la collation des j'i toute la sainte Triniti-, et, comme lors- I»,

lions (lu Saint-l!]s[iiit, en nommant ces iloiis (pr(!l!o adresse ses piières i\ la personne du
tlu nom mémo du Saint-Espril. Il faut ontcu- Père, elle invoque en môme temps toute la
drc par cos dons, les sept esprits do Dieu, sainte Trinité de : même lorsqu'elle sacrilio
que saint Joau dit, dans son Apocalypse, être au Père, elle sacrifie aussi^'i la Trinité. Lors-
envoyés par toute la terre. Toute mission que, dans nos actions de grâce, nous nous
n'est pas toujours apparition. Le Saint-Es- adressons au Père et au Fils, alors nous con-
prit n'a apparu que deux fois l'une en for- : sidérons le Fils selon sa divinité; et quand
me de colondjo, l'autre en forme do lanf:;ues nous rendons griice au Père par le Fils,
de feu; mais il est envoyé souvent sans qu'il nous le considérons comme homme. Mais
paraisse. La mission des anges n'est pas non parce qu'il est constant qu'il n'y a qu'une
plus toujours sous une figure sensible; ce nature de la sainte Trinité ', c'est avec jus-
n'est que quand Dieu leur ordonne. Le dia- tice que les fidèles terminent les psaumes et
ble ne fut point envoyé h Job, il lui fut seu- los hymnes par ime mènjc glorification du
lement permis de le tenter. » Père, du Fils et du Saint-Esprit.»
iO. Le titre du neuvième livre est De : Dansle dixième livre saintFulgence con-
11 . I.ivro dlxiè.
mn, l'Og. 6^2.
VInvocntion de la Sainte Trinité. Fabien ob- tinuait h faire voir que ce qui est dit de la per-
jectait que toutes les oraisons et les prières sonne du Père dans le Symbole des apôtres,
communes, même l'Oraison dominicale, s'a- convient aux autres personnes de la Trinité ;

dressaient cl personne du Père.


la seule qu'ainsi, c'est du Fils comme du Père qu'il est
Saint Fulgence n'en disconvient point, mais dit dans ce Symbole qu'il est tout-puissant et
il soutient que la Trinité entière est honorée créateur du ciel et de la terre. Il définit le
dans l'invocation d'une seule personne. Il Symbole un pacte ou abrégé ^ de la doc-
rapporte quelques passages de l'Écriture, trine chrétienne, et ne doute pas qu'il ne soit
dans lesquels il prétend trouver qu'Abraham des apôtres. Il ajoute « Comme il convenait :

a invoqué en même temps le Père et le Fils. de confesser non - seulement le mystère


Il en cite un où saint Etienne invoque Jésus- de la création, mais encore celui de la ré-
Christ seul; et ajoute que, dans les prières demption du genre humain ce Symbole ,

que nous adressons au Père, nous concluons fait aussi mention de l'incarnation du Fils

toujours par le nom du Fils et du Saint-Es- de Dieu, de sa naissance de la Vierge Ma-


prit, comme si nous disions au Père de nous rie par l'opiiratioa du Saint-Esprit de sa ,

accorder par son Fils ce que nous deman- mort, de sa sépulture et de sa résurrection :

dons, comme il a fait par son Fils que nous après quoi nous faisons profession de croire
fussions; aussi saint Paul assure, d'une voix au Saint-Espril, qui est l'Esprit du Père et du
prophétique, que quiconque invoquera le nom Fils, et qui pi'ocèdede l'un et l'autre; en sorte
du Seigneur sera sauvé. Il donne encore l'ensei- que le symbole rend témoignage à la divini-
gnement suivant : « Bien cpie l'Incarnation té du Fils et du Saint-Esprit comme à la di- ,

soit l'ouvrage de toute la Trinité, on ne peut vinité du Père, en montrant que le Fils et le
pas dire que Jésus-Christ soit le Fils de la Saint-Esprit tirent leur origine naturelle du
Trinité mais selon sa divinité il est Fils du
; Père. Il fait aussi mention de la sainte Église
))

seul Père, et selon son humanité Fils de catholique, pour nous apprendre qu'elle est la
la seule le nom de Jésus-Christ
Vierge Mario; maison de Dieu, la cité éternelle du Rédemp-
n'est pas le nom
de l'homme seul, mais aussi teur; et que quand l'on n'est point dans sa so-
le nom de Dieu et il se prend néanmoins
; ciété ni uni avec elle, on n'obtient point la ré-
quelquefois dans l'Écriture pour marquer mission de ses péchés, et on ne parvient point
irlh.n, la nature divine seule, quelquefois la nature par la résurrection de la chair à la vie éter-
humaine seule, et souvent les deux ensem- nelle, mais au supplice d'une mort éternelle.

' A'a?n quia unam naturam constat esse sanc- ' Est autem symbolum quoddam verum pactum
tœ Trinilati-i, dignum est utuna gloria Patri et veraque coll'jtio in cujus brevit.ate totius creduli-
Filio et Spiritui Scincto dicalura fidelibus inhym- lalis chrislianœ summa consista. Lib. X, pag.
nis et psaliiiis. Fulg., lib. IX Contra Fabian., 632.
frag. 3i, pag. 642.
.

74 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


Le dernier fragment du dixième livre, est et Saint-Esprit de procéder du Père et du
du
une récipitulation des divers ar<?uments que Fil*. Dans toutes ces propriétés il ne se fait
saint Fulgence avait apportés dans tout l'ou- aucune séparation de la nature divine, elles
vra ixe, pour étal)lir la divinité du Saint-Esprit : ne servent qu'à faire connaître les personnes.
« Les œuvres du Père et du Fils, dit-il, lui sont Nous n'avons point d'autre connaissance de
communes, c'est lui qui a alTermi la vertu des ce livre, à moins que ce ne soit le même que
cieux, les anges désirent de le connaître, il ce Père composa à la prière du prêtre Abra-
est descendu sur Jésus-Christ au moment de gila. Celui-ci était intitulé : Du Snint-Esprit ,

son baptême ; ce sacrement s'administre en et saint Fulgence y faisait voir par un grand
son nom comme en celui du Père et du Fils, nombre de passages de l'Écriture, que le
ou plutôt le nom de ces trois personnes est Saint-Esprit est un seul Dieu avec le Père et le
un et le même. C'est lui qui nous confère Fils. Il ne serait pas surprenant qu'il eût par-

la grAce d'adoption, nos corps sont son tem- lé dans cette ouvrage de la procession du

ple, c'est en son nom que Jésus-Christ chas- Saint-Esprit, puisqu'il en parle en beaucoup
sait les démons enfin, il remplit par son im-
;
d'autres endroits. Cependant, Hincmar etRa-
mensité le ciel et la terre.» Ce sont là les preu- tramne ' citent de lui un livre des Questions
ves que saint Fulgence apporte de la divinité sur la procession du Saint-Esprit. On peut
du Saint-Esprit il prétend que dans les en-
;
donc croire que ce Père avait écrit un ou-
Ael. Il, ^<i. droits du livre des.\ctes des apôtres, où il est vrage particulier sur cette matière.
Act iiii.i;. ditque plusieurs avaient été baptisés au nom 2. Saint Isidore* de Séville fait mention

Ael. I, 17, du Seigneur Jésus, il faut entendre sous ce d'un livre qui contenait le rapport de ce qui Alirislli.

Ad. xtx, I. nom '


personnes de la Trinité, parce
les trois s'était passé dans une conférence où saint

qu'il ne peut y avoir de ditl'erence naturelle Fulgence avait disputé sur la foi en présence
de nom dans la Trinité où la nature est une, du roi Trasamond. Ce livre n'est pas venu
et parce que saint Pierre qui est dit avoir bap- jusqu'à nous , non plus que celui du Saint-
tisé au nom de Jésus-Christ, ne pouvait avoir Fsjjrit adressé à Abragila, et dont il est parlé
agi contre la doctrine de son Maître, qui a dans la \'ie de saint Fulgence.
ordonné de baptiser au nom du Père, du Fils 3. Il est aussi fait mention dans cette Vie Lptire atz
CarlhariDoi»
d'une excellente lettre de ce saint évéque imiitii-j"-
et du Saint-Esprit.
aux catholiques de la ville de Carthage, dans f"';''*"L,
§XLX. laquelle il découvrait tous les artifices dont LtTrM
Fah:fD,
eonlr^
eni >
trc Faii.ti-, «1
les ennemis de la foi usaient pour les sédui- fm't.
Des ouvrages de saint Fulgence que nous n'avons contre

re de deux livres où il traitait du jeune et


;
plus.
de la prière pour l'instruction de la vierge
,

Hincmar, archevêque de Reims, et Ra-


1. Proba; de deux lettres écrites au nom des
(,'iirJlior8 5iir
la i-riifcï«irn Iramue, moine de Corbie, répondant l'un et évéques relégués en Sardaigne à une fem- ,
du SalDI-K'.
Iiil, Hg.(C3. l'autre aux objections des Grecs, citent deux me de condition nommée Stéphanie, et dont
passages tirés du livre des Questions sur la un arien , nommé Fastidiosus , avait trans-
procession du Saint-Esprit, sous le nom de crit plusieurs choses dans un discours qu'il

saint Fulgence. Il enseigne dans ces deux pas- avait fait contre la foi catholique; et d'une
sages, que tout ce qui appartient à la nature lettre àun évêque nommé Jean apparem- ,

divine ' est commun aux trois personnes, de ment de Tarse, où saint Fulgence prouvait
telle manière que chaque personne a quel- que la douceur chrétienne ne permettait pas
que chose qui lui est propi-e c'est le propre
; de livrer un coupable aux juges séculiers;
du Père d'engendrer, du Fils d'ôtreengendré, de dix livres contre Fabien, et de sept Hvres

' Sed attende quiddixeril Christus aijus doctri- veniatur, quo proprie unaquœque persona nosca-
ttam veraciler lenuit l'etrus. In nomine quippe tur.Samproprium Patris dicimus esse quod genuit;
Patris et Filii et Spiritus SancU génies baptizari propriu m dicim us Filii esse quod soJiw de solo Pâ-
debere prœcepil. Hoc prœceptum Peints lenacissi- tre nalus est; proprium Spiritus Sancii, quod de
me cuslodivil... et quod docuit bapdzari in nomi- Paire Filioquc procedit. In liis vero propriis nul-
ne Jcnu Chrisli, in uno bniitizaiil nomine Patris la est nalurœ separatio, ned qua-dam pirsonalis
et Filii et Spiritus Sanili. Niilla esl cnim in Tri- agnilio. Fulg., hb. De Spiritus Sancti processione,
nilale diversitas naturalis nominis, ubi cit ipsa pag. 663.
unilas naturalis. Ibid., lib. X, pag. 661. » Ibid.
' Sic ipsa natura commune tri-
tutum quod est * Isjilorus, Uist. nat. de Scriptor. ecclesiast.,
bus invenilur esse personis, ut aliquid lamen, iii- cap. XIV.
, ,

[VI' siÈCLK.] CHAI'irilb; I. — SAINT FULGENCE DE lllJSPE. 73

F.iv
.iirn K.i
m..
li-
contre Fiiusle de Riez. Tous ces dcrits sont ù faux lenom de ce Père. Il n'est pas en ef-
perdus, ù la n^serve do quel(incs fragments fetvraisemblable (pie saint Fulgence, après
des livres contre Fabien, et de ce que Fasti- avoir composé un livre sur la prédestination
diosus avait copié des lettres A Sti^plianie. et la grAce, pendant son exil en Sardaigue,
Nous avons encore perdu son vérital)le traité comme le dit Théophile lleynaud, en ciU
contre l'évoque Pinta. compose! trois autres sousle même titre, aus-
Soriiion *iir 4. Il avait sans doute fait beaucoup plus sitôtaprès son retour en Afrique, pour satis-
U Circoud-
de discours que nous n'en avons de lui. Ou- faire aux questions que Jean et Vénérius lui
tre ceux dont nous avons parlé plus haut, il avaient proposées. Ajoutons que la doctrine
y en a un sur la Circoncision, qui est diicnede de ce traité est contraire à celle de saint Ful-
lui. On y
reconnaît son style et sa doctrine gence sur la grâce et la prédestination que ;

son attention h prendre la défense de la foi l'auteur possédait même si peu cette matière,
sur la Trinité et sur l'Incarnation en toute qu'il raisoime tantôt en demi-pélagien et ,

occasion, soit contre les ariens, soit contre tantôt suivant les principes de saint Augus-
les manichéens et son zèle pour l'unité de
; tin. Son style n'a pas non plus la netteté de
l'Église,qu'd appelle, comme dans ses au- celuide saint Fulgence.
tres ouvrages, la maison de Dieu. Des quatre-vingts sermons qui se trou-
2. Sprmon«
mfnl at-

lîimon ^iir 5. Le sermon sur la Purification de la vent dans ['Appendice, il y en a (jnelques-uns Fiil pt
its
nca
rt ».iirl

U Puriflca-
M.
|)nn. Il n>'t Sainte Vierge est moins éloquent que le pré- qui sont do saint Augustin, et qui se lisent
;
de 8,iinl
Fii'pen«,pos. cédent d'ailleurs, la fête de la Purification
: sous son nom dans la nouvelle édition de ses
n'était point établie en Occident du vivant de œuvres. On ne sait point de qui sont les au-
saint Fulgence. L'auteur la regarde comme tres, si ce n'est que la plupart paraissent d'un
aussi célèbre que celles de la Nativité de Jé- autem" africain ; ils sont précédés d'une pré-
sus-Christ, de la Circoncision et de l'Epipha- face, qui est sans doute de celui qui a fait le

nie il dit que quelques-uns la croyaient


; recueil de ces discours, croyant qu'ils étaient
même la plus illustre de toute les solennités de saint Fulgence; c'est une fortchétive piè-
de l'année, et que tous les fidèles assistaient ce, tant pour les pensées que pour le style.
à la célébration des mystères, tenant un cier-
ge allumé en leur main. La fête de la Puri- § XXI.
iication fut établie A Antioclie en 527, l'an-
Jugement des ouvrages de saint Fulgence. Ca-
née d'après le tremblement de terre qui ren- talogue des éditions qu'on en a faites.
versa une grande partie de cette ville mais ;

on ne commença à la célébrer à Constanti- 1. La vertu et le savoir de saint Fulgence di*=


Jnptîfrent
i^rrils ito

l'orne- f.int Fulgca-


nople que l'indiction cinquième du règne de le rendirent également la gloire et
Justinien, c'est-à-dii-e en o4i, d'où elle passa ment de l'Église d'Afrique. Vrai disciple de
ensuite dans le reste du monde chrétien. saint Augustin il ne se contenta point d'en
,

[Le cardinal Mai a publié tome I Biblio- épouser les en imita la con-
sentiments, il
rF.iti)i.iDio.
thec. Nou., pag. 494-490, un discours sur l'E- duite, et il fut commedéfenseur de la
lui le

piphanie non encore édité ; il l'a trouvé dans grâce de Jésus-Christ contre les demi-péla-
plusieurs discours manuscrits du Vatican, giens, et de sa divinité contre les ariens. Son
sous le nom de saint Fulgence, mais il ne se style est moins pur et moins châtié que ce-
pi'ononce pas sur son authenticité.] lui de son maître; mais il est net et facile.

Il montre partout beaucoup de vigueur et de


§XX. force d'esprit, soit dans ses expressions, soit

Des écrits faussement attribués à saint dans ses raisonnements, et met les matières
Fulgence, les plus abstraites dans un si beau jour, qu'il
les rend inteUigibles aux esprits les moins
Traité de la 1. Théophile Raynaud s'estdonnéde grands pénétrants. Toutefois, soit dans la crainte de
Prédestina-
lioD et de 11
erâcc, j'a-.â,
mouvements pour persuader au public que ne les avoir pas assez développées, soit je
ID Aji[ tnduc.
le traité de la Prédestination et de la grcîce ne sais par quel autre motif, il les explique
que l'on regardait depuis longtemps comme souvent de ditlérentes manières ce qui lui ,

un ouvrage supposé était véritablement de


, occasionne des redites et le rend trop dill'us
saint Fulgence. Mais ses raisons n'ont con- et trop abondant. On voit par plusieurs de ses
vaincu personne, et l'on a continué démet- écrits, surtout par ce qui nous reste des li-
tre ce traité parmi les écrits qui portaient vres contre Fabien, qu'il se plaisait dans les
7G HISTOIUE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
traitait avec en 1634,
rius, Père Chifflet, en 1649 et
et le
questions épineuses, et qu'il les
1636 en ont de même. Le livre de la
fait
beaucoup de subtilité. Quand il décide, c'est ,

Foi' adressé à Pierre, a été inséré dans VAp-


toujours en s'appuyaut sur l'autorité des di-
était très-instruit. jicndice du sixième tome de saint Augustin.
vines Écritures dont il Il

L'édition la plus complète est celle de Paris,


alli'gue aussi les témoignages des Pères, par-
ticulièrement de saint Augustin. Il donne pour en 1G84, in--4i>, chez Guillaume Desprez. L'é-
maxime, et il la suivait lui-même que dans ,
diteur a revu les ouvrages de saint Fulgenco
qui forment quelque sur plusieurs manuscrits, et mis au bas du
toutes les questions '

texte les leçons variantes que le Père ChifiQet


doute par leur obscurité, il faut s'en tenir
à leurs défmitions Dieu les ayant éclairés
,
lui avaitcommuniquées, après les avoir ti-
gratuitement par sa grûce prévenante afin ,
rées lui-même de la bibliothèque de la Char-
qu'ils crussent et les ayant ensuite remplis treuse-aux-Portes, dans divers manuscrits.
;

atin qu'ils enseignassent les Il ne manque à celte édition que quilques


de son esprit ,

autres. notes critiques , tbéologiques et historiques,


2. Nous ne connaissons point d'édition des et plusd'ordre dans l'arrangement des ou-
îC* HUtr«£rî.
vrages de saint Fulgence car on n'y a suivi
Œuvres de saint Fulgence, plus ancienne que :

cellede Bâle, en 1556; on en fit d'autres en ni l'ordre des temps, ni celui des matières;

la même ville, en l.i66 et 1587 à Anvers, en ;


elle est d'ailleurs assez exacte,en bon pa-
1374; à Cologne, en 1G18; à Lyon, en 1G33 ,
pier et en beaux caractères. La Préface n'est
1632 et 1671, avec les ouvragesdu pape saint point de l'éditeur; on y voit quels sont les
Léon. Ils se trouvent aussi dans le neuvième véritables ouvrages de ce Père eu quel ,

tome de la Bibliothc'qw des Pères, imprimée temps ils ont été écrits, ceux que nous n'a-
dans cette ville, en 1G77. Le traité de l'In- vons plus, et ceux qu'on lui a faussement
carnation a été imprimé séparément dans le attribués.

vingt-septième tome de cette bibliothèque. [L'édition de Paris a été réimprimée à Ve-


Le Père Sirmond donna quelques opuscules nise, en 1742, in-folio, et dans la Palrologie
de ce Père, eu 1G22 et en 1643; Caméra- latine, tom. LXV.]

CH.4P1TRE II.

Saint Rémi, évêqac de Reims, et apôtre des Français.

[Écrivain latin, 535.1

1 . Au milieu des persécutions que l'Eglise de baptême. Son père se nommait Emile. Il de-
nii. TerS 1 âQ
Reims eut à de la part des Huns et
soutlVir meurait dans le château de Laon, où il prati-
des Vandales, Dieu, par un effet admirable de quait avec Cilinie, sa femme, toutes sortes de
sa providence, lui préparait un soutien et un vertus. Il parait qu'on iieut fixer la naissance
consolateur daus la personne de saint Rémi. de saint Rémi vers l'an 439, puisque dans une
Un solitaire, nommé Montan, qui vivait dans lettre qu'il écrivit en 512, il dit qu'il avait
les exercices de la piété aux environs de la alors cinquante-trois ans d'épiscopal, et que
ville de Laon, auiioura sa naissance à Gilinie, selon l'opinion commune il n'avait que vingt-
dont l'âge avancé ne lui permettait plus d'es- doux ans quand il fut élu évoque de Reims.
pérer d'être mère mais l'événement justifia
: On lui donne deux frères ; l'un nommé Prin-
la prédiction du solitaire. Cilinie, au bout de cipe, qui fut évoque de Soissons le nom de :

neuf mois, eut un fils qui fut nommé Rémi au l'autre n'est pas connu. On sait seulement

' DijjUMii est, fratres charissimi, uf in singuHs- dia Dei gratis illuminavitut crcderent, et sequr:'^
qnibusque senlentiis in qtiibus cujusdum iiubilo iiistruxi( spiritalilcr ut docercnt. Fulft., lib !>'•
I

obscurilatis ambigiinus, :-anctorum Palntm dcfi- l'nvdr.tl., cap. .w, ymg. WO.
nitionibus hœreamus quos prmveniens viisericor-
:
[vi« SIÈCLE.] CIIAPITltE II. -. SAINT RÉMI, ÉVftQUE DE REIMS. 77
qu'il s'cngaf^oa dans le mariage, et qu'il ciil l'onction do ses discours car il était iialunl-
:

pour fils saint Loup, qui est compté parmi les Innent éloquent, et avait l'esprit i^xceilent.
évoques de Soissoiis. Il faut rapporter ici ce que saint Sidoine Apol- Sl'tnn. lili,
VIII K,.l<l.
2. L'éducation de saint llémi répondit la ;'i linaire en dit dans une lettre à Principe de
ntlnn "' noblesse de sa naissance, et h la piété de ses Soissons, où il fait l'éloge de ces deux frères :

pore et mère. Il fit des progrès considérables « J'ai piis plaisir, lui dit-il,
d'examinru' avec
dans 1rs lettres humaines et dans la vertu. quelle tlignité vous remplissez l'un et l'antre
Souvent il se dérobait de la compagnie de ses les obligations de l'épiscopat. La maison do
proches pour vaquer à la prière et ;\ la lec- l'ancien pontife Aaron peut à peine être com-
ture des livres saints, se retirant à cet cQot parée ;\ celle de votre père. En approchant
en un lieu secret du cliàteaii de Laon, qu'on des saints autels, vous n'y olfrez point un feu
regardait encore du temps d'Hincmar avec étranger, mais l'encens d'une agréable odeur
vénération. L'amom- de la perfection le por- avec les victimes de la charité et de la chas-
ta ù quitter la maison paternelle pour aller teté. Combien de fois n'avez-vous pas enchaî-
vivre dans une solitude éloignée, où, n'ayant né parla vertu de vos discours ceux qui, com-
que Dieu pour témoin, il s'abandonna à la modes taureaux indomptés, refusaient de su-
ferveur de son zèle, redoublant ses jeûnes, bir le joug de la loi sainte ? Combien de fois
ses veilles, et ses prières. n'avez-vous pas inspiré l'amour de la pureté à
li csl fn't
3. Ce fut de cette retraite qu'on le tira pour d'autres, qui comme des animaux lascifs, s'a-
éifOqofl de
hi-iii.s , ^crb le mettre sur le siège épiscopal de Reims, va- bandonnaient aux plaisirs les plus infâmes ?
lia ICI.
cant par la mort de Bennade. C'était vers l'an Combien de fois n'avez-vous point porté par
461, dans la vingt-deuxième année de son vos exhortations les pénitents à gémir de
fige. Les canons de l'Eglise demandaient un leurs fautes devant Dieu? Combien de fois n'a-
âge plus avancé pour un évoque ; mais il y vez-vous point obligé des perfides à mettre
a des vocations extraordinaii'es, et l'Eglise bas toute dissimulation, à se déclarer pour
ne s'est point toujours astreinte à ses pro- la saine doctrine, à faire publiquement pro-
pres Quoique saint Paid défende d'or-
lois. fession de la vraie foi, à suivre la voie du
donner évêqueunnéophite, on ne laissa pas salut, et à espérer la vie éterueUe, en les fai-
de choisir saint Ambroise pour évoque de Mi- sant passer du schisme, de l'hérésie et de
lan, dans le temps qu'il n'était que catéchu- l'hypocrisie, à l'amour sincère de la vérité ? »
mène. Dieu justifia le choix qu'on avait fait 3. L'éloge que saint Sidoine fait des écrits se=,crits,

de saint Rémi par une lumière céleste dont il de saint Rémi, dans une lettre qu'il lui écri-
l'investit au moment que l'évêque qui le con- vit, est d'autant plus considérable, qu'il est le
saûrait répandait sur sa tête l'huile sainte. seul auteur contemporain qui en ait parlé, et
Sa rniidulfo 4. Sa conduite pendant son éplscopat fut ad- que ces écrits n'existant plus, nous ne pou-
mirable, étant toujours occupé ou à la prière, vons en juger par nous-mêmes. Saint Sidoine
ou à la méditation de l'Écriture, ou à l'ins- n'en marque ni les titres, ni les sujets ; il se
truction de son peuple, ou à la conversion contente de dire qu'Us étaient en plusieurs vo-
des infidèles, ou à combattre les hérétiques. lumes, et qu'ayant trouvé moyen de les avoir '

On le comparaît à saint Paul pour le feu et par un homme d'Auvergne qui gagna par ar-

' Qtiidam ab Àvernis Belgicam pelens,pnstqiiam ma, conjunctionumque perfacetarum nexa cœsif
Rhemos advenerat scribam tuum seu bibliopolam
,
ris insolubilibus: sed nec liinc minus lubrica et
prelio ofpcio re demeritnm, copiosissimn, velis no- lœvis ac modis onniibus erotundata : quœque lec
lis, declamalionum luarum schedio emunxit. Qui loris linguam inolfensam decenter expédiai, ne
redux nobis atqiie oppido gloriabundus, quippe salebrosas passa juncturas, per cameram palati
perceplis tôt voluminibus quidquid detiilerat ,quan- volulala balbutiai. Tota denique liquida prorsus et
ductilis, veluti cum crysiallinas cruslas,autony
guam mercari paralis, promunere ingessit. Curœ
mihi fuit, iisque quistudent, cum merilo lecluri- chintinas non impacto digiius ungue perlabitur :
remus.plurima tenrre, cinida transcribere. Om- quippe si niliil eum rimosis obicibus exceptum
nium assensu pronnntiatum, pauca nunc passe tenax fractura removetur. Quid plura ? Xon extat
similia dictari. Elenim rarus aul nuUus est cui ad pra'sens vivi honiinis oratio quam perilia tua
» meditaiuro par assl'tial dispositio per causas, po- non sine labore iransgredi qneat, ac supervadere.
sitio per litteras, compnsitio per syllabas; ad hoc
Unde el prope suspicor Domine papa propter
, ,

opriartunitas in eïemplis, fidcs in testiinoniis,pro- eloquium exundans atqne inefj'abile fvenia sit dic-
prietas in rpilhelis, urbanitasin figuris.virlus in toj te svperbire. Sed licet bono fulgens ut cons~
cientiœ, sic dielionis ordinatissime ; nos tibi ta-
argumenlis, pondus in sensibus, flumen in verbis,
fulmen in clausulis. Structura vero forlis et, flr- men minime sumus refugiendi, qui bene scripta
78 HlSTOmK GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
pent ou autrement le secrétaire de saint Ré- il ponr cela suborner ceux à qui vous les au-
mi, tout son soin, après les avoir reçus, fut riez confiés. ))

(le s'a])plir[uor avec ceux de ces gens qui fai- G. On ne peut donc douter que saint Ré- c«n«vii.. i

saient profession d'étude, de les lire et de mine se soit rendu célèbre dans les Gaules, *"!;•

les transcrire mais qu'il ne se trouva per-


; autant par sa doctrine et par son éloquence
sonne d'entr'eux qui écrivit avec autant de que par sa piété. Mais ce qui donna le plus
grâce et de perfection qu'il y en avait dans d'éclat à son épiscopat, fut la conversion du
l'oritrinal. Il loue en frénéral la justesse de roi Clovis et d'un grand nombre de Français.
ses discoiu^, qui se soutenaient partout avec Ce prince, qui était fils de Childéric, lui avait
autant de solidité que d'agrément, la gran- succédé dans la royauté en 481, étant âgé
deur de ses sentiments, la force de ses ex- d'environ quinze ans. Dans le dessein 'd'étein-
[M-essions, la convenance des exemples qu'il dre la puissance des Romains dans les Gaules,
rapportait, la fidélité et l'exactitude des té- où ils dominaient depuis Jules-César, il livra
moignages dont il appuyait ses raisons, le bataille à Siagrius gouverneur des Gaules,

choix des épilhètes, la grâce et la politesse des pour les Romains, qui faisait sa résidence
figures, la force des raisonnements. 11 ajoute ordinaire à Soissons, et le vainquit. En 493,
que y coulaient comme un Ueu-
les paroles Clovis épousa Clotilde, fille de Chilpéric, et
-

ve, et que les conséquences portaient coup nièce de Gondebaud, roi des Bourguignons.
comme la foudre que chaque partie était
;
Elle était chrétienne et catholique, quoique
lollcment liée l'une avec l'autre, que le tout son oncle et toute la nation des Bourgui-
qu'elles formaient se soutenait parfaitement ;
gnons de l'arianisme. Clo-
fissent profession
que la structure en était si coulante, le style vis étaitencore païen mais il ne laissait pas :

si délicat etbeau, qu'on pouvait le com-


si d'avoir beaucoup d'égard pour les chrétiens,
parer h une glace de cristal Lien polie, sur la- d'épargner les églises et d'honorer les saints
quelle l'ongle coule sans sentir la plus petite évèques. Le premier fruit de son mariage
inégalité. « Que dirai-je davantage? contiimc- avec Clotilde fut un fils. Cette princesse, vou-
t-il, il n'y a point dediscom-s d'homme vivant lant le faire baptiser, en prit occasion d'ex-
k présent, que le vôtre ne puisse aisément horter le roi à quitter le culte des faux dieux
éclipser, et peu s'en faut qu'il ne me vienne pour n'adorer que le créateur de l'univers.
en pensée, pardonnez-moi, seigneur évêque, Son discours ne persuada point Clovis mais ;

cette expression, qu'il est difficile que tant de il ne s'opposa point au baptême de son fils,

mérite ne vous inspire quelque vanité. Mais qui mourut portant encore l'habit blanc,
quand même la pureté de votre conscience, c'csf-à-dire dans la même semaine où il
qui égale votre éloquence, vous mettrait au- avait été baptisé. Le roi, touché de cette
dessus des atteintes de l'orgueil, vous ne de- mort, en rejeta la cause sur le baptême que
vriez pas rebuter les louanges que nous vous son fils avait reçu, disant que si on l'avait
donnons, puisqu'encore que nous ne soyons consacré ù ses dieux il ne serait pas mort. Il
pas en état d'écrire rien qui mérite d'être eut ' un second fils, que la reine fit aussi
loué, il ne nous est pas libre de ne pas louer ce baptiser, et nommer Clodorair. Quelque
qui est bien écrit. N'appréhendez donc pas temps après il tomba malade : ne
et le roi,
à l'avenir notre jugement, qui n'a rien de doutant point qu'il ne dut mourir comme son
mordant ni de satyrique et si votre modes-
; frère, des repioches amers à Clotilde de
fit

tie vous empêche de nous faire part de la doc- l'avoir fait baptiser mcais l'enfant guérit par
;

trine renfermée dans vos écrits, où nous pou- les prières de lamère. Elle ne cessait de
vons trouver de quoi nous enrichir, nous ne presser le roi de renoncer au culte des ido-
négligerons rien pour vous les enlever, et les, et toujours sans succès, jusqu'à ce que,
nous consentirons volontiers qu'on aille les se trouvant en péril d'être entièrement dé-
prendre jusques dans votre cabinet, fallût- fait par les Allemands dans la bataille do

laudamus, et si laudanda non scribinins, quocirca bis ac subornanlibus, effraclorum manus arguta
desine in posterum noslra declinare juilicia quœ poptilabitur. Siilonius, Episl. 7, lib. IX.
nil mordax, nihilque niinanlur increpnlorium. > Gromir. Turon., lit). Il Ilist. Franc, caii. xxvi.
Alioqui sidislulerii noslram sterililatem facundis ' Ibid., cap. xxviu, et lib. III. cip. xxix.

fœcundare coUoquiis. aucupabimur nundittas in- • Ibid., cap. XXX.


Volanlum; el uUro scrinia tua, connivcnlibits no-
[VI° SIÈCLE.] CHAPITHE II. — SAINT RÉMI, ÉVÊQUE DK REIMS. 7»

Tolliiiic, il promit, on ëlcvaiit los yeux au vers l'Église, le clergé précédait avec les
rirl, fiup si Jt'sns-Clirist, que CInlihIc diiçait croix et les saints Évamriles, en rhantantdes
('Iro if! Fils du Dieu vivant, lui iloniiait la litanies. L'évéque conduisait Clovis par la
vicloirc, il croirait en lui et se ferait bap-
'
main, suivi de la reine et du peuple. Le roi,
tiser en son nom. A peine avait -il fait frappé de cet appareil, dit à saint Rémi Mon :

cette promesse que les Allemands, tournant père, est-ce ta le royaume de Dieu que vous me
le dos, commenc(''ront à fuir et ;\ demander jirumelle:? Non, ré[)ondit le saint évèque, ce
quartier. Celait la quinzième ainiëe du rè- n'est que le commencement du chemin pour
gne de Clovis, etran^DOdeJiisus-Christ. Au y arriver. Dans l'action du baptême, il lui
retour de cette expédition, qui s'était faite dit Baissez la tète, fier Sieambre
: adorez ce '',

près de Cologne, le roi, en passant ù Toul, que vous avez brûlé, et brûlez ce que vous avez
emmena avec lui un saint prêtre, nommé
* adoré, lui faisant comprendre par là qu'il de-
Védastus ou Woast, atin qu'il l'instruisit en vait respecter les temples du Seigneur, et
chemin et le préparât au baptême. La reine, jeter au feu les idoles qu'il avait adorées si

de son côté, fit venir saint R(''iin', qui continua longtemps. Il baptisa ensuite Albollède, sojur
de l'instruire, en lui représentant qu'après le du plus de trois mille Français. Le roi
roi, et

vœu qu'il avait fait si solennellement, il ne avait une autre sœur, nommée Lantilde,
pouvait plus se dispenser d'embrasser la re- qui, quelque temps auparavant, avait em-
ligion cbrctienne. « Je ue délibère plus là- brassé la religion chrétienne, mais qui, sé-
dessus, lui répondit le roi, mais il reste une duite par quelques hérétiques, était tombée
dilliculté, qui est de faire agréer le cliange- dans l'arianisme. Saint Rémi, l'ayant retirée
ment que je projette h mon peuple et à mon de l'erreur, la lui fit abjui-er; puis il l'oignit
armée. » Il assembla donc ses soldats et les du saint chrême, et l'admit ainsi à la com-
principaux de la nation, qui, touchés de munion de l'Eglise.
Dieu, s'écrièrent d'une voix unanime, qu'ils 8. Albollède ne survécut pas longtemps , H'.';" 'î

quittaient de bon cœur les dieux mortels, et à son baptême. Clovis, qui l'aimait, fut vive- J;,';;j|'„'"op.'

qu'ils étaient prêts à suivre le Dieu immor- ment touché de sa moi-t, ce qui engagea ,1,'^'°"^^^',
'"*"
tel, que le saint évéqiie Rémi prêchait, saint Rémi à écrire à ce prince une lettre de
nnumojc On prépara
7_ tout pour le baptême du consolation où il lui représente qu'Alboflède
roi et des Français, en attendant, saint
et, étant morte dans des sentiments aussi chré-
Rémi et le prêtre Védastus continuaient de tiens, il y avait plus de sujet de se réjouir de

les instruire, leur faisant observer, suivant sa mort que de s'en attrister; que Dieu ne
la coutume de
l'Église, quelques jours de l'avait enlevée de la terre que pour la placer
jeiine et de pénitence. Plasieurs évêques se dans la gloire, et lui donner la couronne
rendirent à Reims pom" cette solennité, qui qu'elle méritait pom" lui avoir consacré sa
fut fixée, non à Pâques, comme le dit Hinc- virginité que des chrétiens ne doivent point
;

mar, mais à la Noël, ainsi que le marque ' pleurer celle qui a mérité d'être la bonne
saint Avite, évêque de Vienne, dans sa let- odeur de Jésus-Christ; qu'elle doit, au con-
tre au roi Clovis. On avait* paré magnifique- traii'e, faire leur joie, puisque, par le crédit
ment les rues, depuis le logis du roi jusqu'à qu'elle a auprès de son époux, elle peut ob-
la cathédrale, qui était éclairée d'un grand tenir des secours à ceux qui en demandent.
nombre de cierges composés d'une cire mê- « Ainsi, mon seigneur, ajoutait le saint évè-
lée d'essences exquises, qui en s'exhalant que, bannissez tout chagrin de votre cœur,
avec la fiamme rendaient une odeur mer- afin que votre esprit, jouissant de toute sa
veilleuse. Saint Rémi
prendre le roi à alla tranquillité,vous continuiez de gouverner
son palais, d'où l'on marcha en procession vos États avec votre sagesse ordinaire. Que

* Greg. Turon., lib. II Hist. Franc, cap. xxvi. remarque ; Ùocet porro, quod hactenus ignoravi-
' Ibid.. in Append., pag. 1340, et Bollaud., ad mus in vigilia Natalis Domini celebratum Ctodovei
diem 6 fcbruarii. baptisma, non in vigilia Paschœ quod Bincmarus
' Igilur qui celeber est natalis Christi, sit et Rhemensis falso sibi et rerum nostrarum scripto-
vestri, quo nos sciUcet Christo, quo Christus or- ribus persuaaerat. Ibid.
tus est mundo, in quo vos aniinam Deo, vitam ' Gregor. Turon. ,

]>rn>spniihii!i. fnmam posteris cansecrastis. Avitus, 5 On que les Sicambres ëtaieut des peuples
croit
Kpist. 41, tom. Il, Op. Siimoiid., pag. 83, 84. Le au-delà du Rhiu, et compris parmi les Français,
PÈreSirmond qui nous a donné cette lettre, fait cette dont Clovis était roi.
80 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
les peuples, dont vous êtes le chef, et dont lesjeunes gens à vos parties de plaisirs, trai-
le couvernement vous est confié, ne vous tez de vos affaires avec les vieillards si vous
voient point dans la tristesse, eux qui par voulez régner heureusement, et passer pour
vous sont accoutumés A vivre dans la pros- un prince grand et généreux. »
périté. Soyez vous-même votre consolateur, 10. Clovis en étant venu aux mains avec lettre it
1 lut ^
et ne permettez point que le chagrin trouble Alaric défit son armée près de Veuille en Poi- t*')"»' _''"

la sérénité de votre àme. Dieu même, le roi fou, le tua lui-même, conquit presque toute JJ;',
,1;",°''^

du ciel, se réjouit d'avoir appelé à lui votre l'Aquitaine, et s'avan(;a jusqu'à Toulouse, ',°,^.VL''"u*

placer dans sa gloire avec les enleva les trésors d'Alaric qui '•*• ""
sœur pour la d'où il faisait

choîurs des vierges. » Saint Rémi recomman- sa demeure ordinaire en celle ville. C'était
dait à Clovis le prêtre Maccolus, porteur de en 507 et 508. Quand la guerre fut finie avec
sa lettre, disant qu'il serait allé lui-même les Goths, il écrivit une lettre circulati'e aux
tâcher de le consoler, sans l'extrême rigueur évêques des Gaules pour les avertir de répé-
de l'hiver. Celte lettre est sans date. ter ce qu'on pouvait leur avoir enlevé pen-
Lfitre de
Mlnl «cm 4
9. Il n'y en a point
•' •
non plus à la seconde let- dant la guerre, et même de demander la li-
, : , . .
ciois. iihj.
ii-e (me le saint mais on voit
evêque lui écrivit, berté des captifs, soit clercs, soit laïques. Il mit
que ce prince se préparait alors a la guerre toutefoispourcondition, qu'ils ne répéteraient
contre les Goths, qui occupaient encore une que ceux qu'ils connaissaient, et que, pour
partie des Gaules, qu'ils infectaient de l'a- éviter la fraude, ils scelleraient de leur an-
rianisme. Ainsi on peut la rapporter à l'an neau les lettres qu'ils écriraient à ce sujet. D
506 ou 307. Le dessein de Clovis fut approuvé finit sa lettre en se recommandant à leui-s

de tous les Français.Mais avant de l'exécuter, prières. Il parait, par la lettre ' sj-nodale du
il défendit à toute son armée de piller les
' premier concile d'Orléans, qu'il s'était as-
vases sacrés des églises, ni de faire aucune semblé par ordre de Clovis. Nous n'avons
insulte aux vierges ou aux veuves consacrées plus la lettre qu'il écrivit à ce sujet aux évo-
h Dieu, aux clercs, à leurs enfants, à leurs ques de son royaume. On ti'ouve dans le Spi-
domestiques ou aux serfs de rj]glise. Saint cilége et diinsV Appendice des Œuvres de saint
Rémi l'ai donnait des avis snr le gouverne- Grégoire de Tours un diplôme de Clovis pour
ment des peuples que Dieu soumettait à sa la fondation du mouastère de Mici au dio-
puissance. «Choisissez-vous, lui dit-il, des con- cèse d'Orléans, adressé à l'évêque Euspice,
seillers qui fassent honneur à votre dignité dans lequel ce prince l'exhorte, comme évé-
et qui soutiennent votre réputation. Honorez- que diocésain, quelques autres du royau-
et

les prêtres, etprenez toujours leujs conseils. me dénommés dans ce diplôme, de protéger
Le bien de vos états dépend de la bonne in- ce monastère avec ses dépendances. Ce prince
telligence que vous entretiendrez avec eux. mourut en 511, dans la quarante-cinquième
Relevez et soulagez vos peuples et vos ci- année de son âge et la trentième de son rè-
toyens, consolez et secourez les affligés, pro- gne.
tégez les veuves, nourrissez les orphelins et 11. Quelque temps avant la mort de Clo- „,„,'-'^;';;i"J

faitesen sorte que tousvos sujets vous aiment vis, saint Rémi avait, à sa recommandation, 'IfJ'jî,"-,..',.''"

et vous craignent, que toutes vos paroles et élevé à la prêtrise un ecclésiasti(]ue nommé j;^^ t.'i^J'X

vos ordonnances soient accompagnées de Claude. Il de tomber dans une fau-


lui arriva l°'^-^[^^°;,

justice. N'exigez rien des pauvres ni des te qui ne pamt pas assez grande à saint Ré-
étrangers que la porte de votre palais soit
;
mi pour méritej-la déposition. Il se contenta
ouverte à fous ceux qui iront pour vous de- donc de le réconcilier à l'I'^glise par la péni-
mander la justice; que personne ne sorte tence. Trois évêques des Gaules: HéracJe,
mécontent d'auprès de vous; que les grands évoque de Paris, Théodose d'Auxeire et Léon
biens que vous avez hérités de vos ancêtres de Sens désapprouvèrent sa conduite, pré-
soient distribués de façon qu'ils servent à tendant qu'elle était contraire aux saints ca-
racheter les captifs et à les délivrer de la nons, et se plaignirent ù lui-même par une
servitude; que tous ceux qui se présentent lettre commune de ce qu'il s'était relâché à

devant vous ne s'aperçoivent point que vous l'égard de Claude, d'une manière qui avilis-
les recevez comme des étrangers. Admettez sait son caractère. Le saint, sensible à ces rc-

> In Appeiuiice Operum Gregorii Tiiron. paj.'. » ïom. IV Condl., pag. 1404.

1327, et loin. IV Cuncil., pan. 1012.


[Vl" SIÈCLE.] CIIAPITaE II. — SAINT RÉMI, ÉVOQUE DE REIMS 81

proches, criil devoir jtislifuu' sii conduile. Il jinidiction de l'évêque de Reims. Comme
leur (.écrivit donc, que s'il iiviiil oi-doiiiic piè- elleconline avec le diocèse do Tongres ou de
tre celui pour lequel ils l(5inoij^niiieiil tant de Liège, Foulques ne se vit pas plutôt en pos-
ini^pris, ce n'avait cté par aucun nuitif d'in- session de son si('ge, que, sans se donner le
térêt,mais la pricro et sur le téiuoij^na.ue
i'i loisir d'en examiner les di-uits, il onloiuui
d'un grand roi, qui méritait bien que l'on eût des prêtres et des diacres pour l'église de
pour lui des égards, puisqu'il était et le pré- Mouzon, y établit un archidiacre, un primi-
dicateur et le défenseur de la foi catiiolique cier, et s'ap[)ropria certainsrevenus dépen-
dans son niyaumc qu'en disant (pie ce prin-
;
dants de cctt(( église. Saint informé du
iténii,
ce avait fait élever (>laude à la préirise contre procédé de Foulques, l'en reprit vivement,
les canons, ils s'arrogeaient eux-mêmes l'au- mais sans s'écarter des règles de la charité,
toritédu Souvcrain-Pnntife, pour prononcer ne pensant qu'A obliger ce nouvel évoque à
sur une matière où il s'agissait de condamner se cout(înir dans les bornes de sa juridic-
le procédé du maître des peuples, et le père tion, et à se conduire avec plus de prudence
de la patrie, et le vainqueur des nations ;
et de retenue. Il lui représente qu'au lieu de
qu'à l'égard du sacrilège dont Claude était lui faii'e injure en usurpant ses droits, il au-

accusé, il les avait priés de trouver bon qu'il rait dû commencer son épiscopat par lui

expiât cette faute par la pénitence qu'en


;
donner avis de son ordination que si avant ;

cela il que suivre les règles pres-


n'avait fait d'être élu évêque, il ne connaissait point les
crites dans les Ecritures où nous lisons que canons de l'Église il était de son devoir de
,

la pénitence délivra les Niuivites de la ruine s'en instruire aussitôt après son élection;
dont ils étaient menacés; que le saiut Pré- mais que s'il en était instruit dès lors, la
curseur avertit les peuples d'effacer leurs pé- faute qu'il avait commise en faisant des or-
chés par de digues que
fruits de pénitence ;
dinations dans un diocèse étranger , était
saint Jean, dans l'Apocalypse, enjoignit aux beaucoup plus grande ,
que les taxes ou les
évèques d'Asie de réformer par la pénitence redevances qu'il avait exigées des habitants
ce qu'ils avaient fait de mal dans l'adminis- de la ville de Mouzon ou de ceux qui en cul-
tration des Eglises. « Mais, ajoule-t-il, il me tivaient les terres, marquaient trop d'avidité
parait par votre lettre, que vous appréhendez pour les biens temporels, et que cette avi-
plutôt que ce prêtre ne se convertisse et ne dité donnait lieu de croire qu'il recherchait
vive, quoique vous ne puissiez ignorer que plus les biens de l'Eglise que l'épiscopat.
le Seigneur a dit Je ne veux point la mort
: Enfin il lui déclare qu'il a déposé les prêtres
du pécheur, mais plutôt qu'il se convertisse et et les diacres qu'il avait ordonnés contre le
qu'il vive. N 'est-il pas plus expédient de suivre prescrit des canons. 11 semble vouloir por-
la volonté du Seigneur, que de nous en écar- ter cette affaire au jugement des évêques.
ter ? Il ne nous a pas établis pour dominer Mais peut-être que Foulques ne l'attendit
sur les peuples avec hauteur, mais pour les pas, et qu'il se désista de ses prétentions sur
conduire avec douceur, et plus pour édilier le spirituel et le temporel de la ville de Mou-
les fidèles que pour leur faire sentir les effets zon et de son territoire, qui dépendent en-
d'un zèle trop violent et trop amer. » Il se core aujourd'hui de l'archevêché de Reims.
plaint de ce que ces trois évêques voulaient 13. Le diacre Hormisdas ayant été élu Lettre iz
fnini R.-nil au
le rendre responsable de certains etlets qu'un pour succéder au pape Symmaque, mort le pape florniis-
d^s : elle ost
nommé Celse avait confiés à Claude, et de 9 juillet de l'an 514, saint Rémi lui écrivit ferdue. ïom.
IV Concii,
la personne même de Celse qui avait dispa- aussitôt pour le congratuler sur son exalta-
ru. «Vous ne me demandez, leur dit-il, des tion. Nous n'avons plus celte lettre mais ;

choses impossibles que pour avoir occasion nous avons la réponse d'Hormisdas, dans la-
de me traiter avec plus d'indignité, et vous quelle en déclarant saint Rémi son vicaire
poussez la raillerie jusqu'à me reprocher le et son légat dans tout le royaume de Clovis,
nombre de mes années en me traitant de ju- qu'il appelle son fils spirituel, il le congra-
bilé, parce qu'il y a cinquante-trois ans que tule de ce que par un eUet extraordinaire de
je suisévêcpje. » la grâce, et par des miracles comparables à
12. ne paraît pas moins de vigueur dans
Il ceux qu'ont faits les apôtres, il avait depuis
la lettreque saint Rémi écrivit à Foulques, peu converti et baptisé ce prince avec toute
évêque de Tongres. En voici l'occasion : la nation des Français.
L'église de Mouzon avait toujoui-s été de la 14. Nous apprenons d'Hincmar et de Flo- Saint KÉmi.

XI, (j
82 HISTOIRE GENERALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
cooroDd on doard qu'il se tint un concile dans les Gaules par sa bouté a daigné se faire et notre pro-
COBCI'f. Tttll
IV C«u OÙ saint Rémi fut invité de se trouver. Ce chain et notre frère.
n'était donc pas à Reims, puisque c'aurait Nous ne connaissons point d'autre con-
13.
'alal Hé(
été à lui à inviter les autres. Un évèque cileoù saint Rémi ait assisté. Mais il est re- S« mort
(11.
arien, qui était un çri-and sophiste, et si rem- marqué dans les actes de la Conférence de
'

pli de lui-même qu'il se croyait en état de Lyon, qui se tint vers l'an 500, que l'exem-
confondre les évêques catholiques par ses ple de ce saint évêque, qui, après la conver-
raisonnements philosopliicpies, était de l'as- sion de Clovis, détruisait partout les autels
semblée. .\ucun des évêques présents ne des idoles, et étendait la foi par la multitude
voulut parler avant l'arrivée de saint Rémi. de ses miracles, excita plusieurs évêques à
Aussitôt qu'il parut, tous se levèrent par s'assembler pour essayer de réunir les ariens.
honneur, la réserve de l'évèque arien. La
.'i Il mourut, suivant l'opinion la plus commune,

peine suivit de près son insolence. Comme le treizième jour de janvier de l'an 53.3, âgé
le saint passait devant lui, il se sentit tout à d'environ quatre-vingt-quatorze ans, dont il

coup frappé d'une paralysie qui lui ôta dans en avait passé soixante-douze dans l'épisco-
le moment l'usage de la parole. Tout le pat. Il se fit un grand nombre de miracles à
monde s'attendait que saint Rémi, ayant fini son tombeau, où son corps est encore au-
de parler sur la matière qui faisait le sujet jourd'hui tout entier dans l'abbaye de son
du concile , l'arien prendrait la parole ;
nom à Reims.
mais ne put en proférer une seule. Alors
il 16. De tous les écrits de saint Rémi il ne
reconnaissant sa faute, il en demanda par- nous reste que les quatre lettres dont nous
don par signes, en se jetant aux pieds du avons parlé on les trouve dans les Recueils
;

saint, qui lui parla en ces termes « Au nom : des conciles, à la suite des ouvrages de saint
de Notre-Seigneur Jésus-Cbrist, vrai Fils du Grégoire de Tours, et dans l'Histoire de la
Dieu vivant, si vous avez véritablement les métropole de Reims, par dom Guillaume Mar-
sentiments qu'on doit avoirde sa divinité, par- lot, prieur de Saint-Nicaise *. Ces lettres en
lez et confessez hautement ce que l'Église ca- supposent d'autres, et on ne peut guère dou-
tholique en croit. » A ces paroles l'hérétique , ter qu'il n'en ait écrit à saint Sidoine Apolli-
qui d'aiicn superbe était devenu catholi-
, naire, à saint Avite de Vienne, et à d'autres
que humble et soumis, confessa publique- grands hommes de son siècle de qui il en
ment tout ce que l'Église catholique croit de recevait. On a dit longtemps qu'il en avait
la divine et inséparable Trinité et de ITu- reçu une de saint Benoit pour le prier de
carnation de Jésus-Christ promettant qu'il ,
s'employer auprès du Seigneur, afin d'en
ne quitterait jamais cette croyance. C'est obtenir la délivrance d'une jeune fille qui,
ainsi que saint Rémi, après avoir puni cet depuis son enfance, était violemment tour-
homme oigueilleux, à cause de son infidé- mentée du démon. Mais on n'a attribué cette
lité, lui rendit par la vertu de Dieu la santé lettre saint Benoit
«^ que sur l'auloritë
,

de l'ûme et du corps, faisant connaître à d'Hincmar, qui parait n'avoir pas bien pris
tous les prêtres du Seigneur qui étaient pré- la pensée de Fortunat. Cet auteur avait rap-

sents, et à tous ceux qui dans la suite en- porté dans l'histoire de la vie de saint Rémi,
tendraient parler de cette merveille, com- que le père de cette fille, qui était de la pre-
ment ils devaient se comporter, tant à l'é- mière condition, et allié, ce semble, au roi
gard de leurs frères qui se révolteraient con- Alaric, l'avait conduite à Rome au tombeau
tre Jésus-Christ ou contre son Église, qu'a- de l'apôtre saint Pierre dans l'espérance
vec ceux qui reconnaissant leur faute, re- qu'elle y serait guérie mais que', de l'avis
;

tourneraient sincèrement à Jésus-Christ, qui du béni serviteur de Dieu , qui veillait à la

1 Providente Domino Ecclesiœ suœ et inspirante tament de saint Rémi, tom. X, pag. 80S-808, et dans
pro salule domini Remigii, qui
lolius genlis, cor leloiucXXVdela Palrologie latine, d'aprisCalLiml,
ubique altaria deslruebat idolorum et veram fi- etd'aprc's les Actes de la province ecclésiastique de
dem potentfr cum multiludinc signorum ampli/i- Reims, (idilés par ordre de M(;r Gousset. fl.'cdileur.J
cabal, faclum est ut episcnpi plures congrega- ' Tune parentes ejus et ipsius benedicti servi
renlur, si fieri ut ariani, qui religionem
possel, Dei et Àlarici régis Gotliorum a/falibussuffragati
chrislianam scindebant. ad unilalem passent re- cum a-grola sobole ad sanclissimum H migium
verli. Tom. IV Concil., pag. 1318. antintHem pervenerunt. Fortunat.in Vita S. Hemi-
* Ou les trouve aussi dans Gallaad, avec le Tes- gii, Mabillon., tom. 11 Annal, pag. 61.
,

[Vl" SIÈCLE.] CIIAriTUE 11. — SAINT UÉMI , ÉVÈQUK UE UEIMS. 83

garde de ce tombeau, et sous la protection CCS deux pièces qui n'ait été on usage dans le
d'Alaric, roi dcsGotlis, il l'aviiit euimcndc do sièclede saint Uémi, ou parmi les Français,
Home à Reims, pour la pr(''senler à saint Ui5- ou dans les États voisins qu'il faut bien que ;

nii, qui on était L'\èi]ue. llincmar a l'ait du les dates voulues par mises
les lois aient été

mot de béni, qui dans Forlunat est atljcctif, dans ces deux tcslamenls, puisqu'elles 'sont
un nom appellaliret propre. Il est sans ap- rappelées à la lin et que si le saint évoque
;

parence que saint Benoit t'ùt alors en assez y a rapporté les miracles que Dieu avait opé-
grande rc'pntaliou de miracles, pour qu'on rés par son ministère, il n'a rien dit de plus
lui renvoyât des possédés, qui n'aui-aicnl pu que saint Paul, qui n'a pas cru devoir lais-
être délivrés au tombeau de l'apôtre saint ser ignorer aux fidèles qu'il avait été ravi au
Pierre il est môme fort douteux qu'il connût
; troisième ciel; ni que saint Romain, qui, au
GrcîOr. Tu-
alors saint Réiui, ni qu'il en fût connu, puis- rapport de saint Grégoire de Tours, ne fai- r>noQHls la
Vitid l'uliiiix,
qu'il avait tout au plus vingt-sept ans lors de sait point difliculté de raconter les guéri- cap. t, j a^'.

U5I.
la mort d'Alaric; étant né vers l'au 480, et sons miraculeuses faites par l'imposition de
ce prince étant mort en 507. ses mains et par la vertu de la croix. Aussi
•17. Nous avons deux testaments sons le les plus habiles antiquaires jeroivont ces
3«lUt Uc-
nom de saint Uémi l'un beaucoup plus long
; deux testaments sans aucune difliculté. Dom
que l'autre. Le premier est rapporté dans le Mabilion * les cite plusieurs fois dans sa Di-
septième livre des Formules anciennes du pré- plu7natique et dans ses A7malcs. Ils sont en-
sident lirisson ,
qui l'avait lire des écrits coi'e citéspar M. Ducange. Mais ce qui met, Ul.c-
Cill,.
d'IIiucmar et de Flodoard, et des archives ce semble, la chose hors de doute, c'est que
de l'église de Reims. 11 doutait si peu de son les églises de Reims, de Laon d'Arras, et ,

authenticité, que, voyant qu'on ne l'avait en- plusieurs autres dénommées dans ces testa-
core donné que traduit en français par M. du ments, jouissent encore aujourd'hui de tous
Chcsne, il aux étrangers
crut rendre service les biens qui leur ont été légués par saint

de imprimer en latin. Dom Guillaume


le faire Rémi et que quand on a voulu les leur con-
;

Marlot, grand prieur de Saint-Nicaise, nous tester, elles ont été maintenues dans leur
a donné le second, qui est moins orné et plus possession par l'autorité de ces testaments.
simple. Ils commencent et finissent tous les Saint Principe, évéque de Soissons, y est rap-
deux de la même manière et sont signés , pelé en sa qualité de frère de saint Rémi
des mômes téiuoius. Saint Rémi dit à la fln , et on sait par saint Sidoine
,
qu'il était en ,

de chacun, qu'après avoir fait et signé son efl'et son frère. On y rappelle aussi Loup
testament, il avait légué à la Basilique des évéque de Soissons depuis la mort de son
saints martyrs Timothée et Apollinaire, un père, et le prêtre Agricola, tous deux ne-
plat d'argent du poids de six livres pour les veux de saint Rémi. Ce sont eus qu'il fait
fi'ais de son tombeau. Quelques savants ont ses légataires universels avec l'église de
contesté ces deux testaments sur certains Reims donné à cette église un vase
. Il avait
termes qui s'y trouvent, et qu'ils prétendent d'argent d'une grandeur extraordinaire, dont
n'avoir pas été en usage dans le siècle de présent à son bap-
le roi Clovis lui avait fait
saint Rémi , et sur ce que l'on ne trouve ni tême, en ordonnant à Loup, son neveu, d'a-
dans l'un, ni dans l'autre, ni le jour, ni le voir soin qu'on en fit un encensoir et un ci-
mois, ni l'année, ni le nom des consuls sous boire en forme de tour ornée de difl'érentes
H.rici, lesquels ils ont été faits. Us disent encore figures, et que l'on y gravât trois vers' qu'il
cin'ons.' qu'il cst liors d'apparence que le saint évo- avait lui-même fait graver sur un autre ci-
que ait vanté, comme on fait dans le plus long boire ou calice qu'il avait légué à l'église de
testament les miracles qu'il avait opérés.
, Laon Ce ciboire se conserva * dans l'église
.

Mais on soutient qu'il n'y a aucun terme dans de Reims jusqu'au temps d'Hincmar, oîi on

' Peractum Rhemis die et consule supradicto. redimeret pretio argentei calicis, quos de potes-
Brisson. de FormuL, pag. 770, et Marlot, pag. 185. lale teiiebrarum redemerat effusus sanguis cali-
- Mabilion, tom. 1 Annal. pag. 63. dans sa Di- , cis, Christi videlicet passionis. Hincuiarus, in Vila
plomatique , pag. 274 et 275; et Dugange, verb.: Remigii.
Missoriuin. ' Uauriat hinc populus vitam de sanguine sacro
' Quod vas ad nostra usque tempora perdura- Injeclo œtei'mis qiiem fudit vulnere Christus.
vil donec fusum in redemplionem datum est Remigiusreddit Domino sua vota sacerdos.
christianorum, ut a ministris diaboli liormanis Uiucmarus, ibid.
u HISTOUIE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
l'employa, après l'avoir fait fondre, au rachat dix-neuvième chapitre de la Règle de saint
des captifs faits en Champagne, dans l'iniip- Benoit, que saint Rémi n'avait ni vue ni pu
tion des Normands. La foi de saint Rémi sur voir : Appliquons-nous tellement à psalmodier,
Bfcfrd.,
la présence réelle du corps et du sang de que notre esprit s'accorde avec notre voix. On XIS.

Jésus-Christ était clairement exprimée dans cite encore dans ce Commentaire d'autres

ces vers, par lesquels il invitait le penple à ' écrivains postérieurs à saint Rémi savoir , :

venir puiser dans ce calice le sang que Jé- Cassiodore, saint Grégoire le Grand et le vé-
sus-Christ avait fait couler de ses plaies pour nérable Rède. D'ailleurs le manuscrit de la
lions donner la vie. Bibliothèque de Sainte-Cécile n'est pas d'un Tom.
EiM.
[Plusieurs savants doutent que les dnnx âge à faire une foi entière et indubitable; il
testaments soient de saint Hémi. Le Pî-rc n'est que de l'an 10G7 , indiction cinquième,
Suyskens, dans les Acla sanctomm, parait plus de cinq' cent trente ans après la mort
avoir démontré que le pins ample est une de saint Rémi. Je ne sais même si le notaire
pièce supposée. L'abbé Bye, savant bollaii- Ugolin a été exact dans son certificat. L'ins-
diste, a fortifié les preuves du Père Suys- cription du manuscrit porte simplement ',
kens d'une dissertation intitulée Réponse aux : que Rémi étant à Reims a expliqué les Épl-
Mémoires de M. des Roches, Bruxelles, 1780, trcs de saint Paul d'une manière claire et élé-
in-8. L'abbé Ghesquière a démontré la mê- gante. Ce Rémi n'est point qualifié évéque.
me chose dans les Acta sanctoj-um Bclgii *.] Il faut donc entendre cette inscription de
LcCfttBfncn'
•llril'Ué
18. Villalpand fit imprimer à Rome, 1598, quelque autre écrivain du même nom qui
ie"i°'.!"'d«
sous le nom de saint Rémi, évéque de Reims, aura demeuré eu cette ville; et on ne peut
•"'•
un commentaire sur les Kpitresde saint Paul. mieux raiipliijuer qu'à Rémi, moine de Saint-
D l'avait tiré d'un manuscrit du monastère de Germain d'Auxerre célèbre par plusieurs
,

Sainte-Cécile; et pour constater au public que commentaires sur l'Ancien et le Nouveau Tes-
ce commentaire portait le nom de saint Ré- tament, que Foulques, archevêque de Reims,
mi, évéque de Reims, il en fit dresser un appela en cette ville pour y enseigner les bel-
acte par un notaire delà Chambre-Apostoli- les-lettres et la théologie sur la fin du neu-
que, et mit cet acte entête du Commentaire. vième siècle. Villalpand objecte que si le
Villalpand ajoute dans sa Préface qu'il avait Commentaire sur les Épitres de saint Paul Vilt.lpi
vu d'autres manuscrits dans les bibliothèques était de Rémi d'Auxerre ou de quelque moi- Dm. « I

Plull.
du Vaticanet du Mont-Cassin, où ce Com- ne bénédictin, il aurait, en citant la Règle de VU!
P«t. pig
mentaire était aussi attribué à ce saint évo- saint Benoit, qualifié ce saint, son maître ou
que. Saint Sidoine Ai)oliiiiaire qui avait eu en son père et n'aurait pas manque; de parler
,

main plusieurs volumes des écrits de saint Ri'-- de l'état monastique en divers endroits où il
Tom. VIII mi, ne parle que de discours ou de déclama- était naturel d'en parler. Mais ces attentions
BIbl. Hil.,
|.>g. 10S«. lions. Il n'insinue pas même qu'il eût expliqué ne sont pas du goût de tous les écrivains. Ils
quelque partie de l'Éciiture; et ce qui fait voir savent témoigner dans l'occasion leur respect
que le Commentaire sur les Epitres de saint pour leur législateur, et leur zèle pour leur
Paul n'est pas de lui, c'est que l'auteur, en état; mais ils ne rafl'eclenl point i\ tout pro-
interprétant cesparolcsde l'Epître aux Ephé- pos. [Les Commentaires sur les Kpîtres de
l;^^.ei. t, siens entretenez-vous de psaumes d'hymnes
: , saint Paul sont reproduits au tome CXXXI,
et de cantiques spirituels , cite cet endroit du col. 47 et suiv. de la Patroloyie latine.]

' Ces vers se trouvent dans le tome I.XV de la observations sont tirées dulDictionnaire de Felter,
Patrologic latine, avec l'épitaphe du roi Clovis, édition de M.M. Simonin et Colloinbel. ('tVdiïfur.y
qu'on dit avoir été composée pur saint Hémi. [L'é- ' Remigius Rhcuiis exposuit Epistolas sancti
I diteur.) Pauli apostoli scrmone luculento. Tom, VIII Bibl.
* Voyez Oudinj Supplem. ad Boll. pag, 135. Ces Pat., pag. 888.
, J

[VI' SliCLE.] CHAPITIIE m. — EUGIPPIUS ET FEURAiND. 85

CHAPITRE III.

Engippins, abbé de Lucullane [avant l'an 567], et Ferrand, diacre de

Carthage [vers l'an 547.

[Écrivains latins.]

; o„, „„,,
1. Eugippius, célèbre dans l'Église par son la chargeant des ornements de l'éloquence
'vW-' savoir et sa d'abord moine dans le
|)iétii, fut humaine, oterait la connaissance des vertus
monastère de Saint-Séverin près de Favia-, du saint àlous ceux qui n'étaiont((ue peu ou
ues, dans la Noriquo. Ce qui le piMsiiadc point instruits des h(;lles-lcttros. Il pi'it donc
c'est qu'il assista
;\ la mort de ce saint abbé le parti de les envoyer au diacre Paschase
en -482 qu'il accompagna ' son corps lors-
;
qui les lui avait demandés, uniquement pour
qu'on le transporta eu Italie en 188, et qu'il les lire. Mais, Eugippius en lui envoyant ses
raconte diverses choses do
lui dont il avait été mémoires, lui écrivit une lettre que nous
témoin. Le corps de saint Séverin, après avons * encore, dans laquelle il le priait d'en
avoir demeuré dans le duché d'Urbin jusque composer lui-même l'histoire de saint Séve-
vers l'an 493, fut porté, à la prière d'une da- rin, sans écouter les sentiments que son hu-
me napolitaiue nommée Barbarie, au châ- milité avait coutume de lui suggérer. Il le
teau de Lucullane, entre Naples et Pouzoles, conjurait par la même lettre de ne point ou-
où l'on bâtit im monastère sous le nom de blier dans cette histoire les miracles que Dieu
Saint-Séverin, pour y loger ses disciples, avait opérés, soit dans la translation des re-
qu'Odoacre avait transportés en Italie avec liques du saint, soit à Lucullane, disant qu'il
les peuples de Norique, en 488. Marcien
la pourrait les savoir exactement d'un nommé
fut, ce semble, premier abbé de ce monas-
le Deogratias, qui en était fort bien instruit, et
tère, et* Eugippius après lui. qu'il lui envoyait. Il remarquait qu'il n'avait
Il é«rii I. 2. U arriva sous le consulat ' d'Imnortunus, rien mis dans ses mémoires qui pût faire
ris de sa: m ^

'S°T«m ?
c'est-ti-dire en 309, qu'un laïque de qualité connaître ni la famille, ni pays dont saint
le
i.n.p.e,w. adressa h un prêtre une lettre où il faisait la Séverin avait tiré sa naissance, parce que
vie d'un moine d'Italie, nommé Basilice.qui son humilité lui avait toujours fait cacher
s'était sanctifié dans le monastère de Titas, aux bommes ce qu'il était et d'où il était ;

montagne voisine de la ville de Rimini. Ce mais que son langage faisait juger qu'il était
prêtre communiqua cette lettre à plusieurs né latin. Le diacre Paschase, ayant lu les mé-
personnes qui en tirèrent des copies. Eugip- moires d'Eugippius, jugea qu'ils étaient di-
pius l'ayant lue, témoigna à quelques servi- gnes de voir le jour en l'état qu'il les avait
teurs de Dieu qu'il ne fallait pas laisser dans mis que l'éloquence des plus habiles ne
;

l'oubli les grandes actions de saint Séverin. pouvait y rien ajouter; que le style simple
Le laïque qui avait écrit la vie de Basilice, in- et facile, dont ils étaient écrits, les rendait
formé des discours et des désirs d'Eugippius, bien plus capables d'édifier l'Église qu'ainsi ;

lui écrivit aussitôt qu'il était prêt d'écrire il ne croyait point devoir y toucher. Pas-
aussi celle de saint Séverin, s'il voulait lui chase en donne une autre raison, qui est que
fournir des mémoires. Eugippius dressa des l'on rapporte toujours beaucoup mieux ce
mémoires, tant sur ce qu'il avait appris par qu'on a vu soi-même, que ce qu'on a appris
des témoins oculaires ou digues de foi, que des autres, et qu'Eugippius ayant été disci-
sur ce qu'il avait vu lui-même; mais il sen- ple de saint Séverin avait plus de facihté
,

tait beaucoup de répugnance à. confier une si que personne de faire connaître les vertus
belle matière à un homme du monde, qui en de son maître dont avait éprouvé la soli-

> Vita Severinl apud Bolland, ad diem octavam "' Engipp. Epist.
ad Paschas. Tom. I Jan. Bol-
januarii. land. pag. 184.
* Isidor. De Scriptor. Eccles., cap. xm. » Jbid.
HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
dite par une longue suite d'années. Paschase lettres, il était bien rempli de la science de
prouve l'ntililé que l'on retire de l'histoire mais
l'Écriture sainte. Cassiodore l'avait vu,
des vies des saints, par l'impression que le ilne dit pas en quel endroit. Sigebert dit
récit de leurs vertus fait sur l'esprit de ceux qu'Eugippius vivait du temps de Pelage se-
qui l'entendent, et par l'attention que saint cond et de l'empereur Tibère Constantin,
Paul a eue de faire aux Hébreux un élog-e c'est-à-dire vers l'an 380.Ce qui a donné lieu
raccourci des grands bommes de leur na- de distinguer l'Eugippius dont il parle de
tion. Eugippius suivit le conseil de Paschase, l'Eugippius qui écrivit, en 5 il, la vie de saint
et publia la vie de saint Séverin telle qu'il Séverin, et qu'Isidore de Séville met sous
l'avait écrite, que nous l'avons aujour-
et l'empire d'Anastase. Mais il est visible que
d'hui. Elle est divisée en douze chapitres, Sigebert s'est trompé, puisque Cassiodore,
dont le dernier renferme l'histoire de la qui avait vu l'Eugippius, auteur du Recueil
translation de son corps de la Norique en des sentences de saint Augustin, le môme dont
Italie, et depuis dans le monastère de Lu- parle Sigebert, était mort avant l'an 567,
cullane. Les liollandistes ont mis à la tète de âgé de plus de quatre-vingt-treize ans. Il est
cette Vie les deux lettres d'Eugippius et de donc inutile de distinguer deux abbés du
Paschase. Elle avait été donnée avant eux nom d'Eugippius.
par Yelsérus et par Surius; mais ils l'ont 4. C'est le même qui a composé tous les ..^""i-,'
revue sur de nouveaux manuscrits. [On la ouvrages dont nous venons de parler, à qui î;„'d'4''Éo5Îj
""
trouve au tome LXIl de la Patrologie latine, saint Fulgence adressa un traité en forme '

col. H53-1200.] Nous l'avons en français de de lettre sur la charité, comme potu- le re-
la traduction de M. d'Andilly. mercier des eulogies ou petits présents qu'il
BiEio aïii- 3. Saint Isidore de Séville, qui parle de
'
lui avait euvoyés, et à qui Ferrand, diacre
gij.flUS,
cet écrit d'Eugippius, lui attribue une règle de Carthagc, écrivit aussi sur l'unité de na-
pour les religieux de son monastère, qu'il ture et d'essence en Dieu, et sur les deux
leur laissa, dit-il, à sa mort, comme par tes- natures en Jésus-Christ. On a imprimé la j„„_ _
tament uous ne l'avons plus. Mais saint Isi-
: lettre de Ferrand dans l'Appendice des OEu- J°l'-'
'"f

dore ne dit rien du Recueil tiré des œuvres vres de saint Fulgence.
de saint Augustin, dans lequel Eugippius 5. Ses autres lettres ont été imprimées à
fait des extraits des sentiments et des pen- Dijon, en 1649, par les soins du Père Chif-
sées de ce saint Docteur, dont il a compo- llet; et depuis dans le neuvième tome de
sé un ouvrage divisé en trois cent trente- la Bibliothèque des Pères, à Lyon, en 1G77.

huit chapitres. Ce Recueil a été imprimé en [Dans Galland, tome XI, pag. 317-398, et
deux tomes Bâle.'ien 1542; ;\ Venise,
, dans la Patrologie latine, tome LXV, parmi
en 1343, [et dans la Patrologie latine, au les Lettres de saint Fulgence, et dans le
tom. LXII, col. 349-1088, avec nue observa- tome LXMI, où l'on trouve les autres ou-
tion de Basnage sur Eugippius]. Il est adres- vrages de Ferrand, d'après Galland.] Fer-
sé à la vierge Proba. Cassiodore ' et Sige- rand se nommait aussi Fulgence. Victor de
bert de Gemblours regardaient cet ouvrage Tunes dit qu'il (lorissait la sixième année
comme très-utile, parce qu'Eugippius y avait après le consulat de Basile, c'est-à-dire en
ramassé ce qu'on aurait eu peine de trouver 547. Mais nous avons fait remarquer qu'il
dans une bil)liothèque entière. Il paraît que était en relation avec saint Fulgence de Rus-
Cassiodore ne jugeait pas moins favorable- pc, mort en 533 cl il faut bien que, dès cette
;

ment les autres écrits d'Eugippius ' , puis- année-là, il ait été en réputation de savoir,
qu'il en conseillait la lecture *, disant que, puisque ce fut à lui que le comte Réginon
quoiqu'il ne fût pas fort habile dans les belles- s'adi'cssa pour apprendre de lui de quelle

' Isidor., De Scriploribus eccles., cap. m. ùrum quidem non vsqne adeo sœcnlnrihus litleris
' Ca?sii)(i. De Divin, lectionibits, cap. xxiii. Si- criidiluin; sedScriplurarum divinnriim leclione
gcbertus, De Scriitlorib. ecclcsiasl., cap. x.\xix. plcnissimitm. Hic ad parenlem noslram Probam,
' Le Dictionnaire de Kellcr signale une Vie de virgincm sacram, ex operibus sancli Aiiguslini
saint Augustin deFavian :ellc est inséii^c daiisHol- vahie beatissimi quiViliones ac sentrniius uc di-
lauilus ooninie étant l'oeuvre d'F.iigippiiis; M. Mi- versas rcs deporans in uno corpore nercssaria
gne n'a pu trouver cet écrit. fL'c'dilcur.) iiimis dispensalionc collgil, et in trcccntis Iri-
* Convenu ul presbyleri Eugippii opéra neces- genla octo capitulis coUncavit, Cassiodor., De Di-
sario légère debealis, quem nos quoque vidimus, vin, kclion., cap. xxui.
[vr SIIX.LE. CHAPITRE III. — EUr.IPPIUS ET FERRAND. 87

manière devait vivre un liiunnio do guerre ,


dats qui vinient le consulter sur leur devoir,
n'ayant pu recevoir d'insiruction li'i-dessus de mettre bas les armes et d'éviter les com-
de sainl Fulgeucc, ;\ «jui il en avait écrit bats, de ne s'appliquer qu'à la prière mais ;

quelque temps avant sa mort. il leur ditN'usez point de violence, ni de


:

irriDd au C). Ferrand tlonne ;\ R(''L;inon sept refiles ', fraude envers personne; et eonlcntc^vous de vo-
Hà' ~
qu'il ro|::;arde comme pour rendre tre paie. Ces avis sont également pour un
.11 lu
B. Tom. IX siillisaulcs

t.
un homme de guerre spirituel et bon chré- général d'armée. Il faut qu'il puisse dire à
tien '. La première est de croire que le se- ses soldats avec autant de vérité et de con-
cours de la prAcc de Dieu est ni^cessairc pour fiance que disait Sanmél à ceux qu'il gou-
chaque action, comme l'Apùlre le reconnaît vernait : Me voilà présent; qui de vous peut I nefft xr.

lui-même, lorsqu'il dit C'est par la grâce de : m'accuser de lui avoir enlevé son bœuf ou son
Dieu que je suis ce que je suis. La seconde ,
âne, ou de m'étre servi de mon pouvoir pour lui
de faire en sorte que sa vie soit un miroir nuire ou l'opprimer, ou de m'étre laissé gagner
où ses soldats voient ce qu'ils doivent faire par des présents? Il tant aussi qu'on lui répon-
eux-mêmes. La troisième de ne pas souhai- , de, comme les Israélites répondirent à ce pro-
ter de commander aux autres mais de leur , phète : Voui n'avez nui à aucun de nous, vous
être utile. La quatrième, d'aimer la républi- n'avez opprimé personne vous n'avez rien reçu de ,

que comme soi-même. La cinquième, de pré- nos Ferrand blâme, dans l'explication
)nai7is. n

férer les choses divines aux choses humaines. de la troisième règle, les généraux d'armée
La sixième, de n'être pas trop juste, c'est-à- qui, en fatiguant les peuples par leurs exac-
dire de ne pas exercer la justice avec trop tions, les font succomber, et ne laissent à
de sévérité, mais de la tempérer par la dou- leurs successeurs que des gémissements et
ceur et par la miséricorde. La septième, de des larmes. Il veut donc qu'ils aient égard à
se souvenir qu'il est chrétien. Quoique ces la situation des lieux que non-seulement ils ;

règles soient claires par elles-mêmes, Fer- ne fassent tort à personne, mais qu'ils em-
rand ne laisse pas cependant de les expliquer pêchent que les autres n'en fassent; surtout
avec beaucoup d'étendue. Il rappelle à la pre- qu'ils veillent à ce que ceux à qui ils don-
mière, par laquelle il défend àRéginon d'at- nent quelque accès auprès d'eux, ne vendent
tribuer à ses propres forces les événements point les grâces. La raison de la quatrième
où il se sera conduit avec courage, avec sa- l'ègle est que Réginon, en aimant la républi-
gesse et avec bonheur, les sentiments d'hu- que comme lui-même, lui procurera autant
milité que Moïse tâcha d'inspirer au peuple qu'il sera en lui tous les avantages qu'il sou-
d'Israël, à la veille d'entrer dans la Terre- haiterait pour lui-même la paix, la tranquil- :

Promise, en ces termes Ne dites pas dans : lité, l'abondance. Il rapporte les marques
votre cœur. 'c'est ma propre vertu, c'est ma pro- de charité et d'amour que Moïse et David
pre puissance qui m'a fait faire une si grande donnèrent à leurs peuples, en demandant à
action ; mais vous vous souviendrez du Seigneur Dieu de pardonner à ces peuples, ou de fai-
31.
votre Dieu, parce que c'est lui qui vous donne re tomber sa colère sur eux-mêmes. Sur la H Rc^.XLlf,
17i
la force de faire de si grandes choses. Et ces cinquième règle, il dit que ce comte doit em-
paroles du Prophète -.C'est le Seigneur qui ap- ployer son autorité pour faire triompher la
prend mes 7nains à combattre, et mes doigts à foi catholique; et, à cette occasion, il lui
faire la guerre. Il fonde la seconde règle sur adresse une profession de foi, où il fait voir
ce que l'exemple d'un chef d'armée a iniîni- qu'il n'y a qu'un Dieu en trois personnes ;

ment plus de force pour porter les soldats à la que la natm-e divine est la même, sans aucune
vertu, que son autorité et son pouvoir. « Saint ditférence, dans le Père, le Fils et le Saint-
Jean-Baptiste , dit-il, n'ordonna point aux sol- Esprit ;
que ce ^ qui distingue les personnes

' Gratiœ Dei adjiHorium tibi necessarium per ^ La fin de cet Opuscule a été donnée par Ang.
actiis singulos crede dicens ciiin Apostolo : Gratia
. Mai., dans le Spicilegium rom., tom. IV, pag. 573-
Dei sum id quod suru. 2. Vita tua spéculum sit 377. f L'éditeur.)
uhi milites videanl quid agere debeant. 3. Non 2 Ubi hoc tantummoJo recipit dislinctionem
prœesse appelas, sed prodesse. 4. Diligc rempu- quod ad invicem sibi sunt, Pater scilicet ad Fi-
blicam sicut teipsiim. 5. Humanis divinaprœpone. lium, Filius ad Patrem, Spirilus Sanctus ad eos
6. Noli esse mullum justus. 7. Mémento te esse de quibus et cum quibus et spiritîis et sanctus
christianum. Ferraud., Epist. ad Reginon., tom. est,lut ipse soins in Trinitate appelletur Sanctus;
IX Bibi Pat., pag. 494. propriumque sit Patris generare, proprium Filii
88 HrSTÛIRE GÉNKRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
y a entr'elles, du
divines, est le rapport qu'il foi,de peur d'ofifenser les fidèles de ces lieux
Père au Fils, du Fils au Père, et du Saint-Es- par l'obseiTation de quelques rils sacrés qui
prit au Père et au Fils parce qu'il est propre
;
leur soient inconnus. La sixième règle porte

au Pèred'engcndrer, au Fils de naître, et au qu'ilne faut pas être trop juste, c'est-à-dire
Saint-Esprit de procéder des deux, comme qu'un chef ne doit par toujours sui\Te la ri-
étant l'Esprit du Père et du Fils; que le Fils en gueur de la justice mais employer tantôt la
;

se faisant homme a tellement pris la vérité de sévérité en punissant le crime, tantôt les me-

notre substance, qu'il n'a pas doublé la sin- naces et quelquefois le pardon, suivant les
gularité de sa personne, en sorte qu'encore différentes circonstances ; dissimuler certai-
qu'ily deux natures en Jésus-Christ, il
ait nes choses tolérer quelques abus, en punir
;

n'y a qu'une personne que le Seigneur Jé- ;


d'autres légèrement pardonner quelques fau-
;

sus est le même qui est nommé Fils dans la tes à la prière des prêtres. « Une justice rigou-

Trinité parfaite, lorsque nous sommes bapti- reuse, dit-il, rend terrible un général d'ar-
sés au nom du Père, duFilsctduSaint-Esprit; mée mais quand il est sévère en tout temps
;

qu'il est en même temps grand et petit, im- en et toute occasion, il ne fait que des infidè-
passible et passible,véritablement et propre- les au lieu qu'en tempérant la rigueur parla
;

ment de Dieu le Père, véritablement et


Fils bonté il se fait aimer ; et en se faisant aimer
il fait plus de bien à la république qu'en se
proprement Fils de la Vierge Marie, médiateur
de Dieu et des hommes à cause des deux na- faisant craindre. » Pour expliquer la septième

tures, dont l'une lui est commune avec Dieu, règle Souvenez-vous que vous êtes chrétien, il
:

et l'autre avec nous qu'il n'a pas commencé


;
fait un parallèle des préceptes de la loi an-

d'être Dieu en naissant de la Vierge, mais qu'il cienne avec ceux de l'Évangile La loi défen- :

a pris d'elle une chair véritable qu'il doit ;


dait de tuer, l'Evangile défend même de se

venir juger les vivants et les morts, condam- fâcher. La loi permettait de haïr ses enne-
ner les incrédules, sauver ceux qui croient, mis, l'Évangile ordonne de les aimer, et de
si toutefois ils ont persévéré dans l'Eglise prier pour ceux qui nous persécutent, ne nous
catholique, et s'y sont purifiés de leur péchés, laissant espérer le pardon de nos fautes, qu'à
l'Eglise catholique étant le lieu où le bon
' condition que nous les pardonnerons à ceux
Médecin guérit nos plaies. Ferrand exhorte qui nous ont offensés.
Réginon à travailler à la conversion des hé- 7. Il semblait qu'après la lettre de saint
rétiques qui pourraient se trouver dans son Léon et les décrets du concile de Chalcédoine,
ère de U
armée, et à répandre les semences de la vé- l'hérésie d'Eutychès était tellement abattue, fS- 602-

rité dans les pays où la vraie religion ne se- qu'il n'était plus nécessaire de l'attaquer.
rait point connue, s'il se trouvait en guerre Cependant AnatoJius, diacre de l'Église ro-
avec de semblables nations, ou qu'il eût be- maine, cnL;ai:ea Feirand à la combattre de
soin d'y conduh'e ses troupes d'être exact i ;
nouveau. Eutychès niait que le Verbe eût
tenir sa parole et son serment, soit qu'il s'a- pris la nature humaine dans le sein de Ma-
gisse de faire grâce à l'ennemi, ou au cou- rie toujours vierge, et en conséquence qu'il
pable, ou d'accorder aux siens la récompen- fût consubstantiel à sa mère en sorte que, ;

se mais d'être extrêmement réservé à jurer,


; ne reconnaissant point deux natures en Jésus-
, suivant ce précepte de l'Évangile Ne jurez : Christ, il en retranchait absolument une. D y
en aucune sorte, contentez-vous de dire : Cela en avait d'autres qui ne pouvaient se persua-
est, ou : pas; de consulter en toutes
Cela n'est der xjiie, n'y ayant qu'une personne en Jésus-
choses la sainte Église; d'être obéissant aux Christ, il fût composé de deux natures. Ce sont
prêtres du Seigneur, de ne rien faire sans là les deux erreurs que Ferrand se propose de
leur avis, et de se conformer partout aux réfuter dans sa lettre à Anatolius, qui est sans
lois et aux canons de l'Eglise. Il lui conseille date. «S'il était vrai, dil-il, comme le disent
de suivre * les usages des Eglises où il se les hérétiques, que la chair du Verbe de Dieu
trouvera, pourvu qu'elles professent la vraie était étrangère à celle de la Vierge, ce serait

nasci, proprium Spiritus Sancti de nlroquc pro- ' Tu vero, vir sapiens, Ecdesiw ad quant per-
cedere. Fi'Trumlws, Epist. ad Iteginoii.,. toiii. IX veneris, si approbas fidcm, seqiicre coiisuetudi-
Bibl. Palrum., jiag. <fl8. nem : nec unurpcs aliquam sacri ritus facere iw-
' Calholica Ecclesia statio est ubi vulnera nos- vitatem. Ibid., pag. 500.
ira bonus ilcdicus sanat. Iliiii., p.ng. 499.
[Vl' SIÈCLE.] CHAPITRE HT. — EUOn'PIUS ET FERRAND. 8!)

sans raison qno l'on assurerait que le Fils tlo Et comment pouvait-il leur être semblable
Dieu est aussi fils Car coniiueiit
de l'iioranie. en substance, si ce n'est en se faisant chair
le Fils de Dieu serait-il naturellement le lils de la chair mémo do Mario?» Ferrand mon-
de riioniiue s'il ne lirait pas son origine de tre après cela que l'unité de personne dans
riiouime ? Or, il ne tire pas son origine do Jésus- Christ n'emporte pas l'uniti; de subs-
I Tlmolb. Il,
riuiiume, si, conçu dans le sein virginal de tance. 11 est, dil-il, selon l'.Vpôtre médiateur
<(

Marie il n'a pas tiré la chair de la chair


, de Dieu et des hommes il est donc néces-
;

même ? N'est-il pas dit dans l'Évangile que saire qu'il soit Dieu et homme, n'y ayant
jMiT. , II. le Vvrbe a été fuit chair 1 Si vous ujo deman- point de uK'diateur qu'entre deux personnes,
dez d'où il a ëté fait chair, saint Paul vous elles fonctions de nii'diateur étant de réunir
Gai«t, iT, répondra pour moi Lorsque tes temps, dit cet
: les personnes divisées. S'il n'y a qu'une na-
apôtre, ont été accornplis. Dieu a envoyé son ture en Jésus-Christ, elle lui est conAaune
Fils formé (finie femme. Si le Vcrhc a éti' fait avec Dieu le Père, ou avec les hommes car :

Bom.i.s. chair d'une femme, il est induhilable que la elle ne peut être commune à Dieu et aux
chair du Verbe a été prise d'une femme. Mais hommes. Or, Jésus-Cluisl est d'une même
poui'quoi le même apûtre dit-il que le Fils substance avec le Père, ou consubstantiel,
de Dieu est né selon la chair du sang de Da- ainsi que parle le Concile de Nicée il y a donc
:

vid ? Comment serait-il de la race de David, une substance, ou une nature en Jésus-I^.hrist
s'il n'était né selon la chair de la Vierge Ma- qui lui est commune avec le Père. Mais pour
rie, qui était elle-même de la race de David ? être médiateur entre Dieu et les hommes, il
De même que Marie descendait de David, de ne sntlit pas qu'il soit un avec Dieu, il faut
même Jésus-Christ tirait son origine de la encore qu'il soit un avec les hommes Je leur :

G lai ni, chair de David. Saint Paul dit encore que les ai donné la gloire que vous m'avez donnée, di-
promesses de Dieu ont été faites à Abraham et sait le Sauveur à son Père au moment de sa
à sa race, c'est-à-dire, à l'un de sa race qui est passion, afin qu'ils soient un, comme nous
Jésus-Christ. Quo peut-on dire de plus évident, sommes un. Je suis en eux, et vous en moi.
de plus clair ? L'Apôtre ne
dit-il pas que le Comment Jésus-Christ est-il dans le Père, et
Christ est de la race d'Abraham, comme il comment est-il en nous? Il est dans le Père,
avait dit qu'il est de la race de David A cause parce qu'il n'y aqu'une substance du Père
de Marie sa mère ? C'est à ceux qui ne veu- et du Fils il est dans nous, parce qu'il a pris
:

lent pas reconnaître que le Verbe se soit fait une substance de même nature que la nôtre.
chair de la chair de Marie, à nous apprendre On ne peut donc pas dire qu'il n'y a en lui
comment le Christ est de la race d'Abraham, qu'une substance il y en a deux, une dans
:

et comment il delà race de David.))


a été fait laquelle il est une même chose avec le Père;
Ferrand dit ensuite que la chair de Jé- l'autre dans laquelle il est une même chose
sus-Christ est entièrement sainte, ayant avec nous. » Les eutychéens disaient qu'il n'y
été purifiée par son union avec la divinité, avait qu'une nature en Jésus-Christ qui était
en sorte que la nature de notre chair se trou- composée de la divinité et de la chair: Ferrand
ve dans la chair de Jésus-Christ, mais non pour montrer l'absurditéde cette réponse, dit
pas la coidpe de notre nature. Il montre qu'il qu'il s'ensuivrait, ou que cette nature ne serait
était de la justice de Dieu que l'auteur de la pas la nature du Père, et que dès lors on ne
mort fût vaincu en Jésus-Christ par la même pourrait pas dire que le Fils lui soit consubs-
chair qu'il avait surmontée dans Adam, et tantiel ou que si c'est la nature du Père,
;

que cette chair qui était sans péché mourût la Sainte Vierge est non-seulement la mère
pour nous di'livrer de nos péchés. « D'où vient, du Fils, mais encore de toute la Trinité.
dil-il, que saint Paul, traitant du mystère de 8. Les ariens objectaient ordinairement
l'Incarnation dansl'Epitre aux Hébreux, dit : que si le Fils était un avec le Père, il suivrait
ueir. 11
^^ "^ *'^*^ P"* rendu le libérateur des anges, de là que le Père avait souffert, et consé-
" mais de la race d'A brakam. C'est pourquoi il quemment la divinité. Ferrand répond avec
a fallu qu'il p'it en tout semblable à ses frères, les catholiques, que le Père et le Fils sont
pour Dieu un pontife compatissant
être envers un en substance, et non en personne qu'il ;

et fidèle en son ministère, afin d'expier


les pé- n'y a qu'une nature du Père et du Fils, mais
chés du peuple. Or comment Jésus-Christ au- qu'autre est la personne du Père, et autre
rait-il pu être en tout semblable à ses frères, la personne du Fils; que le Fils, en se fai-
s'il leur avait été dissemblable en substance ? sant homme, a tellement pris la nature hu-
90 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
maine qu'il ne s'est fait qu'une personne de sens dans lequel cet apocrisiaire la prenait.
lachair et du Verbe, ces deux natures de- 11donne trois raisons poui- lesquelles quel-
meurant disting-uécs l'une de l'autre ; qu'ain- ques-uns doutèrent de la catholicité de cette
si, ce n'est pas la Trinité qui a soull'ert, mais proposition. La première, c'est qu'il leur pa-

le Fils seul, qui est né et a soutl'ert selon la rût qu'en disant qu'un de la Trinité a souf-
nature humaine h laquelle il s'est uni. « Par fert, on distinguait celui qui avait soutfert de

la naissance de la chair' en Jésus-Christ, dit-il, la Trinité même, comme on distingue l'hom-

le nombre des substances a augmenté en lui ;


me de la ville où il demeure. La seconde, de
mais la singularité de la personne est de- peur que l'on ne ciùt que la substance mê-
meurée. D'où vient qu'encore qu autre soit me de la divinité pût devenir passible. La
la nat^ure de la divinité, et autre la nature troisième, dans la crainte qu'un sophiste, qui
de l'humanité, il ne se fait pas de la Trinité demanderait, quel est celui de la 'l'rinité qui
une quaternité, parce que la Trinité est des a soutfert, et à qui on répondrait: C'est le Fils,
personnes, et qu'il n'en est demeuré qu'une n'en inférât de cette réponse, ou que la Trini-
en Jésus-Christ. Il suit encore de là que Jé- té est une trinifé de Fils, ou qu'il est le Fils

sus-Christ est un et toujours un à cause de de la Trinité. Il fait voir que ceux qui crai-
la singularité d'une personne, qui en lui ne gnaient qu'en reconnaissant Marie pour véri-
peut être divisée ni sous-di visée, ni doublée, tablement et proprement mère de Dieu, on
quoique nous croyons qu'il est de deux na- ne fut obligé de dire qu'elle était consubs-
tures et dans deux natures. C'est selon la tantielle à la divinité, craignaient sans fonde-
iMi.. X, 30. nature divine qu'il dit : Mon Père et moi som- ment, parce que celui qui naît est toujours
mes une même chose. C'est selon la nature hu- consubstantiel à la personne de qui il naît,
joan. I. , maine qu'il dit : Mon Père est plus grand que et que le Verbe ayant pris de Marie une sub-

moi. Parce que le Fils, selon la divinité, n'est stance par laquelle il lui est consubstantiel,
pas créature', mais créateur; il est un de la c'est ainsi qu'il est né d'elle. On peut dire

Trinité. Et parce que le même Fils a bien que Marie a engendré' la divinité du Fils,
voulu souflrir selon l'humanité, on peut dire mais incarnée, parce que l'homme mortel ne
à cet égard, qu'un de la Trinité a soutfert. » pourrait engendrer la divinité éternelle sans
Par où l'on voit que Ferrand approuvait la la chair. Mais si l'on se contente de dire que

proposition des moines de Scythie : Un de la Marie, toujours vierge, a proprement engen-


Trinité a souffert. que c'est la même
Il croit dré l'humanité, et non pas la divinité, il pa-
chose que si l'on disait Dieu a soufl'ert. Il
:
raîtra en quelque manière qu'elle a engen-

ajoute que cette proposition ne renferme au- dré un pur homme qu'elle n'a pas néan-
;

cune ambiguïté, parce qu'il n'est personne moins engendré de cette sorte, puis qu'elle
qui ne sache que c'est le Fils qui a souffert, a engendré proprement le Verbe fait chair.
ainsi que l'Evangile le déclaie partout. Il con- Il faut donc confesser que Marie est vérita-

vient que l'Apocrisiaire d'Eutychès avança blement la mère de Dieu-Christ, pour ôter
cette proposition dans le concile de Chalcé- tout soupçon sur la réalité de la chair en
doiuc, et qu'elle y fut rojelée, parce que les Jésus -Christ. Ferrand, après avoir détruit
Pères de cotte assemblée firent moins d'at- l'hérésie des eulychéens, revient à la propo-

tention à la proposition en elle-même qu'au sition des moines de Scythie Un de la Tri-


:

' Crevit ergo per nativitatem carnis in Christo Taie est itaque, qu-anlum credo :Vnui est de Tri-
numerus substanliarum, singularilas vero per- nitatc passus, quale est dicere : Deus est passus.
sonœ perseveravit. hicirco quannis alia sit na- Ibid.
tura divinilatis, alia humaiiitnlis, non sil Irini- ' lia igitur proprie, sicut veraciler. Maria

las illa qualernitas ; quia personanim est trini- divinilatem Filii genuit, sed incarnatam : sine
tas, quœ in Christo una permansit. Unus est carne enim divinilatem sempiternam generare
proinde Ckrislus et semper unus propler unius non posset homo mortalis... Si dixero: Maria
personœ singularitalem, qua-in eo nec dividi, nec semper virgo prnphe genuit humanitutem, non
subdividi, nec duplicari polesl, quamvis ex dua- proprie genuit divinilatem videbilur suh aliquo
,

bus et in dunbus credatur esse naturis. Ferraud., modo honiineni purutn genuisse quem nullo modo
Epist., ad Anatol., Tom. IX Bibl. l'ai., pag. 505. ita gcnuil quia Yerbum carnem factum proprie
Fihus ergo secundum divinilatem, quia non
« genuit. Recte ergo dicimus : Maria reraciter est
est creatura sed creator, unus est de Trinitatc; et mater Dei Cliristi, ut non essel suspicio phanla-
quia ipse secundum Itumanilalem dignatus est siœ. Fcrraud., ibid., pag. 508.
pâli, propler hoc unus de Trinitatc dicitur passus.
[vi" SIKCI.E.] CnAPITRE m. EUGIPPIUS ET FEIIFIAND. 91

nitc a soii/p'vt. Il voiil qu'avant de l'avancor, turc humaine, sulisistcnt depuis leur union.
Ldltro i S«.
on reconnaisse qu'en Dieu il n'y a qu'une iO. Il traite la môme matière dans la let- v^rn Kclinla*.
1lr{iieh Coni-
nature et trois personnes, dont une, savoir tre qu'il écrivit à Sévère, scholastiqiic ou lnntfno{il6.
lOJ.HOO.
le Fils, sans cesser d'cMre Dieu, s'est fait avocat h Couslanlinople. Après avoir rap-
lioninie, est ne', et a soull'crt;que l'on con- porté les erreurs des sabelliens et des ariens
fesse que le Fils ait soull'ert dans la nature sur la Trinité, il propose la croyance de l'É-

qu'il a prise de sa mère seul et sans le Père glise apostolique, disant qu'elle confesse
et le Saint-Esprit; et non pas dans la nature, contre Sabellius, trois personnes en Dieu, et
selon laquelle il est Dieu, et un avec le Pî-rc coulre Arius, une seule substance ou nature,
et le Saint-Esprit; que l'on ne peut dire que n montre aussi que Jésus-Christ est vérita-
la divinitd du Fils ail souffert, parce que c'est blement Dion, et pour prouver qu'il n'y a en
sa chair qui a soull'ert, et que celle cliair ap- lui ([u'une seule personne, il ;illègue la forme
partient personne du Fils, qui n'est point
i\ la du ba[)téme, et fait ce raisonnement « Si la :

commune au Père ni au Saint-Esprit. Il veut personne do Dieu et de l'homme en Jésus-


que l'on confesse encore qu'il y a deux na- Christ n'est pas une et la même, quelle est
tures en Jésus-Clirist, et que l'on fasse pro- donc la personne que l'on nomme dans le
fession de suivre les décrets du concile de baptême, lorsque l'on nomme le Fils? S'ils
Chalcédoine et la doctrine de la lettre de saint disent que c'est la personne du Fils de Dieu,
Léon, en ajoutant que, par l'incarnation du comme ils ne confessent pas que le Fils de
Fils de Dieu, la Trinité n'a pasausmenté en l'homme soit le même que le Fils de Dieu,
personnes, parce que la personne du Fils est il suit de là que la grrice du Médiateur est
demeurée dans sa singularité après l'union ôtée du sacrement du baptême, et que notre
de la nature divine avec l'humaine. A l'égard réconciliation ne se pas dans ce sacre-
fait

de celui qui avancerait que la bienheureuse ment, puisqu'elle ne peut se faire sans le
Marie a proprement engendré Dieu, Ferrand Médiateur. S'ils disent que c'est la personne
demande qu'il confesse auparavant que la du Fils de l'homme cpje l'on nomme dans la
divinité du Fils de Dieu, déjà née du Père, forme du baptême, ce ne sera donc pas au
n'a pu naître proprement qu'en prenant une nom de la Trinité que nous serons baptisés,
chair humaine et une àme raisonnable, c'est- puisqu'on ne peut pas dire que la Trinité soit
à-dire l'homme entier et parfait; et que cette nommée où l'on ne nomme pas la personne
naissance temporelle n'a point donné le com- du Fils de Dieu, mais seulement celle du Fils
mencement à la divinité, mais à la chair, qui de l'homme. » Ferrand rapporte un grand
n'a commencé d'être qu'en commençant nombre de passages qui prouvent qu'en
d'être unie à la divinité. Jésus-Christ il n'y a qu'une seule personne,
u-ue «u 9. Nous n'avons pas en entier la lettre que quoiqu'il y ait deux natures. « Il est dit, dit-
JïSs^ajS' Ferrand écrivit à l'abbé Eagippius '. Il éta- il, dans saint Jeao Personne nest monté au
:
Joan. m, 13,

blit, dans ce qui nous reste, l'unité de sub- ciel que celui qui est descendu du ciel, savoir le
stance en Dieu et la trinité des personnes, Fils de l'homme, qui est dans le ciel. Com-
en opposant sur ce sujet la croyance des ca- ment cela se peut-il faire, si ce n'est pas la
tholiques aux erreurs des ariens. Il montre même personne qui est descendue du ciel,
aussi contre les nestoricns qu'il n'y a en Jé- et qui y est montée ? On voit, par le psaume
sus-Clu'ist qu'une seule personne de Dieu et Cix, que Jésus-Christ est Fils de David, et
de l'homme, et contre les eutychéens, que Seigneur de David. Cela fait voir clairement
les deux natures, la nature divine et la na- qu'il n'y a en Jésus-Christ qu'une personne,

' Angélo Ma'i a retrouvé celte Épître et l'a p\i- Esprit procède du Père et du Fils; il dit à la fin de
bliée dans le 3= volume Scriptor. veter., pag. 169- sa lettre que Jésus-Christ, le Prêtre éternel, a lui-
185. Ferraod j- expose d'abord nettement l'iiérésie même enseigné à son Église, à offririons les jours
arienne qu'il réfute en détail, tandis qu'il y combat le sacrificede la messe pour les vivants, pour les
sommi'.rement plusieurs autres hérésies, celles des morts et en mémoire des martyrs. Voici ce pas-
photiniens, des manichéens, des patripassiens, des sage Christits Ecclesiam siiam docuit in quoli-
;

nestorieus, des eutychéens, dont l'erreur venait de dianis sacrificiis hanc custodire regulatii ut pro
naître. 11 nous fait connaître incidemment, uu nom- peccaioribus sive adhuciu terra laboranlibus, si-
mé Adveutitius. Celui-ci avait envoyé un discours ve jam de sœculo recedenlibus orationem faciat,
arien à saint Augusiin, qui en fait une longue ré- pro martyribus vero gratiarum déferai actio-
futation. Ferrand rappelle de nouveau que le Saint- nem. Ibid., pag. 183. [L'éditeur.)
92 HISTOIRE GÉNER.\LE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
autrement il ne pourrait être en môme temps tre de l'Église romaine, informés de la con- lip* et 1 Antl

Fils de David et Scia^neur de David. » De tous damnation des trois chapitres dans le con-
ces passages Ferrand conclut que le Verbe, cile de Constantinople, écrivirent à Ferrand
en se faisant chair ', a uni les natures et n'a pour le prier de leur marquer ce que l'on
pas doublé la personne qu'il a uni les na- ;
devait penser sur cette atlaire, après qu'il
tures de façon qu'elles ne sont point con- en aurait délibéré avec l'évéque de Carthage
fondues et ne le seront jamais, en sorte que et les autres évêques les plus éclairés de
la divinité n'a point été changée en l'huma- l'Afrique. 11 paraît qu'ils ne doutaient pas
nité, ni l'humanité absorbée par la divinité; que la condamnation des trois chapitres
mais que chaque nature, demeurant en son n'eût été faite par la suggestion des acé-
entier, faisait les fonctions qui lui étaient phales contre le concile de Chalcédoine, et
propres, se faisait connaître par ses œuvres, la lettre de saint Léon. Ferrand fut assez
et était de son nom, sans être
appelée longtemps sans leur faire de réponse; mais,
distinguée personnellemeut. Il combat ceux voyant que les évêques d'Afrique ne se dé-
qui ne reconnaissaient qu'une seule na- claraient point, il répondit, en son propre
ture en Jésus-Christ, depuis l'union de la nom, (ju'il ne lui paraissait ' point expédient
nature divine avec la nature humaine. Il de blâmer ce qu'avaient fait les évêques as-
montre, par l'exemple de l'homme, qu'un semblés à Chalcédoine, ni d'examiner de nou-
composé de deux natures peut bien avoir un veau la lettre d'ibas, qu'il croyait y avoir
nouveau nom, sans que les deux natures été approuvée, de pour qu'en formant quel-
soient confondues, l'âme spirituelle de l'hom- que doute sur les décrets d'un concile reçu
me n'étant point confondue avec son corps, sans aucune difficulté dans toutes les Églises
et ces deux natures étant distinguées l'une d'Orient et d'Occident, il ne perdît tout à
de l'autre depuis leur union. « S'il n'y a, coup son autorité, et que fous ses décrets
ajoute-t-il, qu'une nature en Jésus-Christ, ou touchant la foi ne fussent révoqués en dou-
elle est répandue partout, ou elle est dans te. «Tout ce qui a été une fois arrêté, dit-il,
un lieu fixe et déterminé. On ne peut pas dans le concile et l'assemblée des saints Pè-
dire qu'elle soit répandue partout, puisqu'il res, doit toujours demeurer ferme et stable. »
est dit que Jésus-Christ ressuscita le troisiè- Il compare l'Eglise catholique à une fontaine

me jour d'entre les morts, et qu'il monta au scellée, qui ne peut jeter par une môme ou-
ciel. On dira encore moins qu'elle est fixée verture de l'eau douce et de l'eau amère, et
à un certain puisque Jésus-Christ, qui
lieu, qui conséquemment n'a pu, par la bouche
est la sagesse de Dieu, pénètre en cette qua- de ses évêques, proférer des définitions de
lité, et remplit tout par l'immensité de son es- foi, et approuver dans Ibas une doctrine

sence, disposant tout avec douceur; et que, contraire : «Ce qu'elle aurait fait, ajoute-t-il,
lorsqu'il se sépara, selon la chair, de ses dis- de cet évêque avait été favorable à
si la lettre

ciples, il leur promit d'être avec eux jusqu'à l'hérésie de Xestorius; puisque, non-seule-
la consommation des siècles. Jésus-Christ est ment cette lettre n'a pas été ' condamnée
doncpai'tout, comme Verbe de Dieu, mais il dans le concile de Chalcédoine, mais qu'elle
n'est pas partout comme homme, c'est-à-dire y a été reçue. A[)pliqucrons-nous à nos Pères
selon son âme raisonnable et sa chair, avec cette maléiliclion du Prophète Malheur à :

lesquels il est un tout. » vous qui donne: aux ténèbres le nom de lumiè-
H . Pelage et Anatolius, diacres l'un et l'au- re. On dira peut-être que leiu- foi était or-

Carnem suscipifiido naluras aditnavit, non


' senlenticim, ne Synodus venerabilù! apud omnes
personam duplicarii. ?iaturas plane adumivil, Ecclcsias Oricnlis eC OccidenUs ptr annos lam
sine confusione pcrmancnles, et in sœcula per- plurimos sine aliqua dubitatione /irmata, perdal
mnnsurœ. Sic eniin adiinttvil, ul nec divinilas in subito rererentiam xuam: nec possil in dejinilio-
humanilatem mutarelur, nec humanitas a divi- nibus /idei robur inflcxibile custodire, si cvrperit
nitntc absorberelur ; sed ulraque iidiuraincolu^ ex âliqua parle fragilis uul reprelicnsione digna
mis custixlila suis offlciis ulerelur, suis optribus conrinci : quidquid scmel slaluilur in concilio el
agnosceretur, suis nominibus rocarelur : verum- congrcgatione sanctornm l'utrum, perpétuant de-
tamen personis propriis von di^tinguerelur. bel oblinerc jugiter firmilatem. Episi. ad l'elag.,
Epist. ad Sevfruiii, pas. 511. pag. 515.
' Non expedil anliquorum Palrum, qui Chalcc- ' Epistolam damnare notuerunt, imo etiam
dnnensi noscunlur interfuisse concilio, vilupe- suscipere volucrunt. rurrand., Epist. ad Pelag.,
rari deliberalionem relraclarijiidiciuni, muUiri
, pag. 515.
[VI" SIÈCLE.] CHAPITRE m. — EUr.lPPIUS ET.FEnRAND. «j;j

thodoxe, mais qu'ils ont rpçn mal .'i-propos bien prendre le sens, l'ayant appris de la bou-
la Icllro d'Ibas; mais (jui pciil soiiUVir une che nièuie (le celui qui a dicte'' la lettre. J']n-
somlilahle ri'[)orisi'? Oiic leur aurait-il servi fin (]uelle raison aurions-nous de croire que
d'anallK'inatiscr Ncstorins et Eutycli6s, s'ils cette lettre puisse favoriser Nestorius, dont
avaient reçu une lettre qui fill favorable aux l'auteur a anathématisé de vive voix cette
blaspliùmcs de Nestorius? S'ils l'ont rerue hérésiarque en notre présence par notre ,

par une faute qui ne va pas


i;::nnranoe, c'est ordre, et de manière que nous l'avons ouï?
moins (ju'à aucanlir leur nutorili'. Mais s'ils Il a de plus reçu la lettre de saint Léon, et

l'ont reçue avec connaissance de cause, et il a souscrit avec nous à la confession de la

pensant toutefois le contraire de cette let- vraie foi. » Forrand ajoute, que si l'on croit

tre, ils se sont rendus coupaltles du crime de que l'erreur de Nestorius soit cachée dans
fiction, et donneront occasion aux ennemis la lettre d'Ibas, cela ne peut nuire ni aux

de la foi de lus accuser d'avoir favorisé l'er- grands, ni aux petits, puisque l'erreur de
reur de Nestorius, en même temps qu'ils la Nestorius fut condamnée publiquement dans
condamnaient. » Ferrantl soutient donc qu'il le concile de Chalcédoine qu'on ne peut non
;

n'y a en ni ignorance ni dissinudalion A l'é- plus alléguer, pour rejeter cette lettre, les
gard de la lettre d'Ibas, et que, n'y aj-ant au- différents d'Ibas avec saint Cyrille, puis qu'ils
cune partie du concile de Chalcédoine digne se sont réconciliés depuis, et qu'ils sont morts
de repréhension, on doit regarder, comme dans la communion l'un de l'autre, et qu'en-
l'ouvrage du Saint-Esprit, tout ce qui s'y est suite de leur léconciliation, Ibas et tous les au-
passé. Il représente les évêques de ce con- tres évoques orientaux ont été renvoyés dans
cile sortant de leur tombeau au jour de la leurs sièges, en présence de l'empereur Mar-
résurrection, et demandant, en présence de cien, et du Siége-Apostolique qui a la pri-
'

Dieu, à ceux qui rejetaient la lettre d'Ibas, mauté dans toute l'Kglise, représenté par ses
<iuelles raisons ils avaient de ne la point re- légats. «Qu'est-ce qui sera stable ', dit Fer-
cevoir comme catholique. «Serait-ce, dit-il, rand,si ce que le concile de Chalcédoine a éta-
parce que le vénc'rable Ibas a blâmé saint bli est révoqué en doute ? » Il cite un endroit de
("<yrilled'Alexaudrie?Mais le même Ibas a fait la lettrede Capréolus, évéque de Carthage,
connaître qu'il avait depuis communiqué avec à l'empereur Théodose, et une autre de celle
saint Cyrille. S'il était répréhensible pour qu'il écrivit au concile d'Éphèse, où il dit qu'il
avoir mal parlé de saint Cyrille, n'est-il pas n'y aura plus rieu de stable daus les choses
digne de pardon pour s'être réconcilié avec divines et humaines, si l'on examine de nou-
l'évêque d'Édesse et les autres évêques
lui? Si veau ce qui a été décidé depuis longtemps
orientaux ont censuré les chapitres, ou ana- dans les assemblées des évoques. Il avoue
thématismes de saint Cyrille, parce qu'ils ne que s'il y avait eu quelque accusateur de la
lesentendaient pas, c'est un efl'et de l'infir- lettre d'Ibas dans le concile de Chalcédoine,
mité humaine mais en recevant ces chapi-
; il aurait peut-être pu ' appeler du jugement

tres, lorsque saint Cyrille les eut expliqués, du concile. Mais à qui? Il n'y avait point de
ils ont donné des marques d'une charité vrai- juge supérieur dans l'Église puisque cet ,

ment sacerdotale, sans porter aucun préju- accusateur avait eu devant ses yeux les lé-
dice à la vérité. S'il y a quelques endroits gats du Siége-Apostolique, avec le consente-
.dans la lettre d'Ibas, qui, à cause de leur ment duquel tout ce que ce concile a défini
obscurité, semblent contraires aux règles de doit passer pour irrévocable, comme étant
la vraie foi, on doit s'en rapporter à nous d'une force et d'une autorité invincible. Il
qui avons été plus en état que personne d'en ajoute, que si l'on* rétractait ce qui avait

* Ibi fuit in legalih suis Sedes Apostolica, pri- Sentiente, quidquid illa deflnivit eynodus , accepit
matum tenens universalis Ecclesiœ. IbiJ., pag. 516. robur invictum- Ibid., pajr. 316.
* Quid erit firmum, si quod statuit Chalcedo- * Haheo dicere : Si relractenlur ChalcedonensiS
nense concilium vocalur in ditbium ? Ibid. concilii décréta, de Mcœna synodo cogitemus ne
^ Si tune aliquis accusator Epistolœ, cujus ca- simile detrimentum patiatur. Universalia conci-
tholica esse dictatio claruit, ad majora judicia lia, prœcipue illa quibus romance Ecclesiœ cojl-
provocaret, appellationi forsilan sccunduin con- sensus accessit, secundœ auctoritatis locum posl
siietudinem locns pateret. Sed quo irel ? Àut ubi canonicos libres tenent. Sicut legentibus Scriptii-
majores reperiret in Ecclcsia judices ? Ànle se ha- ram divinitus inspiratam non licet aliquid repre-
bens in legatis suis Àpostolicam Sedem,qua con- hendere, quamvis minime valeant altitudinem cas-
;

94 HlSTOmE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


élë statue dans le concile de Clialcédoinc, il prêchent la vraie foi mais qu'ils ne doivent
;

était à craindre que l'on n'en fit autant à pas obliger les autres î\ les signer, ni à les
ré},'ard du concile de Nicée; que les conciles embrasser avec une soumission aveugle que ;

généraux, ceux-hï surtout que l'Eglise ro- de l'Église à qui Dieu de-
les saints docteurs ,

maine a approuvés, ont une autorité que puis les apôtres, a donné le talent d'ensei-
l'on peut appeler la seconde après celle des gner les catholiques, et de combattre les hé-
livres canoniques; que comme il n'est pas rétiques, nous ont laissé leurs écrits, sans les
permis à ceux qui lisent l'tïcriturc divinement avoir fait souscrire de personne ;
que c'est
inspirée, d'y reprendre quelque chose, quoi- un privilège réservé aux canoniques
livres
qu'ils ne puissent pas pénétrer la profondeur et aux décrets des conciles généraux, de n'ê-

des oracles célestes : de même il n'est per- tre ni réfutés ni rejetés de personne, mais

mis à personne de douter de la vérité des d'être embrassés et reçus de tout le monde.
décisions des conciles, confirmées par l'an- La conclusion de la lettre de Ferrand est,
tiquité et observées par la postérité, ni de re- que l'on ne doit admettre aucune' révision
fuser de leur obéir. Il continue ainsi « Que : du concile de Chalcédoine, ni des autres con-
sert-il d'être en
' dispute avec les morts, ou de ciles semblables, et qu'il faut observer en
cause des morts? Si quel-
ti'oubler l'Église, à entier ce qu'ils auront décidé il défend d'ac-
;

qu'un claut encore en vie est accusé et con- cuser les morts, de susciter à leur occasion des
damné, et qu'il vienne à mourir avant d'avoir disputes entre les vivants et il veut que per-
;

mérité d'être absous, il ne peut plus être sonne ne puisse donner à ses propres écrits,
absous par le jugement des hommes. Au en obligeant les autres d'y souscrire, une
contraire celui qui ayant été accusé et en- autorité que l'Église catholique ne donne
suite absous, est passé au Seigneur dans qu'aux seuls livres canoniques.
la il ne peut plus être con-
paix de l'Église, 1:2. Le diacre Ferrand nous a laissé une dei
canûn« in
damné par jugement des hommes. Ce-
le Collection des canons des conciles tant d'O- CODCiir!' Ju-
remeols do
lui qui, étant accusé, meurt dans le sein de rient que d'Occident. C'est une des plus an- «rril. de 1

ruid.
l'Eglise, avant que sa cause ait été exami- ciennes que l'on connaisse parmi les Latins.
née par les évéques il doit être censé ré-
, Elle est composée de deux cent trente-deux
servé pour le jugement de Dieu, de manière canons, dont toutefois il ne donne pas le
qu'aucun homme ne puisse prononcer une texte entier, mais seulement le sommaire et
sentence contre lui. Si Dieu lui fait donc l'extrait, marquant ù la fin de chacun, de
miséricorde, notre sévérité ne pourra lui quels conciles ils sont tirés, et s'ils se trouvent
nuire ; Dieu lui a préparé des supplices,
et si dans un seul ou dans plusiem-s conciles. 11 y
l'indulgence dont nous usei'ons à son égard en a beaucoup des conciles provinciaux cl
ne lui servira de rien, n Ferrand insistant nationaux d'Afrique, de Nicée, d'.\ncyi'e,
,

sur ces paroles de saint Paul Ne vous élevez : de Laodicée, d'.\ntioche, de Gangres, de
point au-delà de ce que vous devez dans les sen- Sardique, de Constantinople; mais la plupart
timents que vous avez de vous-mêmes, mais te- sont sur des matières de discipline, ce qui
nez-vous dans les bornes de la modération, dit donne lieu de croire que Ferrand composa
qu'il peut être permis ii des particuliers de cette Collection par ordre de Boniface , évo-
dire et d'éci'ire leurs iieutiments, tandis qu'ils que de Carthage, aussitôt après le rappel des

leslis oraculicomprehendere ; sic omnino nec ali- judicio reservatus. De hoc nullus homo potett
ter concilia quœ
vetusta l'irmovit, et ctistodivit nianifestam proferre sentenliam : cui si Deus
devola poslerilas, obedieitliam de nobis exigunt, indulgentiam dedil, nihil nocet nostra severilas
nullum relinquenles dubitandinecessilatem. Ibiil. si supplicium prwparavit nihil prodest nostra
,

' Quid prodest cum dormieiitibus hnbere certa- benignilus. Ibitl.


men, aul pru dormienlibus Ecctesiam perlurhari ? ' Dignelur ilaque beaiitudo veslra très istas
Si quis adliuc in corpore morlis hujus accusalus régulas diligenter altcndire, ut concilii Chalcedo-
et dnmnalus, antequum mereretur absohi de nensis vel similium nulla relractatio pateat; sed
sœculo raptits esl, absolvi non potesl ulterius quœ semcl slatuta suni, iutfmerala serventur:
huinano judicio. Si quis accnsalus el dbsoiutus, ni pro mortuis fralribus nulla generentur inter
in puce Ecclesiœ transivit ad Dominum, condem- vivos scandala; ut nullus libro suo per subscrip-
nari non potesl humuno judicio. Si quis accu- tioiicsplurimoruuifdure velil. aucloritalem quam
satus, ante diem saccrdotalis examinis, rcpCnlina solis canonicis libris Ecclesia deluM. iUid.
vncalione prœventus est, inlra sinum malris pag. 517.
Ecclesiai conslilulus divino inlclligendum est
,
[VI' siÈaE.] CHAPITRE IV. — AnTlIEN, LAURENT DE NOVARRE, ETC. 95

ëv(^(liios par Hildciic, pour i'(H;il)lir lu ilisci- sango. Crcsconius, dans sa Préface sur son
pliiic dans los églises il'Arriqiic. 11 cite aussi des canons ciic la Collection de Fer-
Alirc(j('' ,

dans celte Collection les épitrcs ddcriitales rand. Avant le p6re Chifllet, Achillcs Sta-
des papes, nommément de saint Sirice. Celte lius avait donné ù Home en 1578, une partie
CoUeclion l'ut im[iiiinéc à Taiis en 1598, des écrits do ce diacre, avec nue lettre à
avec de Cri'scoiiiiis; en lUOi), avec l'an-
celle Anselme, arcli('véc|ue de Milan mais cette ;

cien Code de l'Éj^lisc romaine par Denys-le- ne peut être de Ferrand, puisqu'Ansel-
lettre
Pelit;et en IGGl dans la Hiblollièque du me, évèque, n'a vécu que dans le ix° siècle.
DroitCanon ancien, par Jull'elle, en deux C'est aussi sans raison iju'on a attribué ii Fi'v-

volumes in-fol. La Vie de saint Fulgwice raiid trois livres de Vigile de Tapso contre
porte daus les manuscrits le nom de Fer- les erreurs de Nestoriusel d'Eutycliès. Nous
rand mais nous avons fait remarquer (jue ce
; avons parlé dans l'article de saint Fulgenco
Ferrand paraissait être un des disciples du des deux lettres que Ferrand lui écrivit l'une ;

saint, qui l'avait accompai^né dans ses voya- au sujet du baptême d'un Ethiopien qui ,

ges ce qu'on ne peut dire du diacre de Car-


; étant cathécumène avait perdu l'usage de la
tilage. Ses lettres sont écrites avec beaucoup parole et la présence d'esprit, en sorte qu'il
de feu; mais le style en esl aisé, simple et n'avait pu répondre dans l'action du bap-
concis. Celle qui esl adressé au comte Ilégi- tême; l'autie toucliant la Trinité, l'Incarna-
non fut imprimée à Strasbourg en 1516, iu-8, tion, de participer au corps
et la nécessité
sur un manuscrit de la bibliotlii-que d'Hir- et au sang de Jésus-Christ.

CHAPITRE IV.

Adrien, Laurent de Novarre, Marcellin, Elpidins, Gilles, Orientius.

[Écrivains latins du M" siècle.]

Airin. 1. On ne sait point au juste en quel temps imprimera Augsbourg, en 1601, avec les no-
Adrien llorissait. Ussérius croit que c'était tes de David Haschélius, à qui cette édition
vers l'an 533. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'il est dédiée. Elle a paru depuis dans le neu-
est plus ancien que Cassiodore, qui parle ' de vième tome des Critiques sacrées [de Péarson,
lui dans un de ses ouvrages, où il le joint à d'où elle a passé au tome XCVHI de la Palro-
Ticonius, donatiste, à saint Augustin, à saint logie grecque, avec traduction latine des édi-
Eucber, et à Jumilius, parce qu'ils avaient teurs, et notice tirée de Fabricius, col. 1273-
tous donné quelques règles pour l'intelligence 1311.] Pbotius, qui avait lu cet écrit d'A-
des divines Écritures, et expliqué, par diverses drien -, dit qu'il est très-utile pour ceux qui
comparaisons, ce qui paraissait inintelligible. commencent à étudier les divines Écritures.
L'importance de ces ouvrages avait engagé Dans les éditions, dont nous venons de par-
Cassiodore à les recueillir avec soin. Mais il ier, on a eu soin de citer à la marge tous les

ne dit point s'il avait tiaduit, ou fait traduire endroits, soit de l'Ancien, soit du Nouveau
de grec en latin ce qu'Adrien avait fait sur Testament, allégués dans l'ouvi'age d'Adrien.
Lauréat do
cette matière. Nous ne l'avons aujourd'hui 2. Sigebert de Gemblours^ dans son traité Novarre.
qu'en grec, sous le titre à'Inti-oduction à la des Écrivains ecclésiastiques attribue à Lau-
sainte Écriture, Marquandus Fréhérus la fit rent un livre intitulé des Deux temps , dont

' Primum est posl hiijus operis instituta ut ad tionis causa formantes, per exemplorum diversas
introdiictores Scripturœ divinœ quos postea refe- similitudines intelligi faciunt quœ prius clausa
remus, sollicita mente redeamus, id est, Tico- manserunt. Cassiod., lib. De Divin, leclion., cap. s.
nium donalistam sanctiim Augustinum de doc-
,
^ Lecta est Àdriani lutroductio in sacram Scriji-

trina christiana, Àdrianum, Eucherium et Jumi- turam, utilis liber m' qui ad eam primum aggre-
lium, quos sedula curiositate collegi: ut quibus diunlur. Phot., cod. 2, pag. 3.

eral similis intenlio inuno corpore adunati coJi- ' Sigebert, De Script. Eccles., cap. cxx.
ces clauderentur. Qui modos elocutionum explana-
96 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
le premier s'était écoulé depuis Ad;im jus- convient à l'auteur de l'homélie sur la Cha-
qu'à Jésus-Christ, cl dont le second doit durer nanée. Il y mention de ses adversaires
fait ,

depuis Jésus-Christ jusqu'à la fin du monde. et s'y plaint de ce que par leur malice, lui et
Il ne dit pas quel était ce Laurent, se conten- ceux de son parti avaient été maltraités. Le
tant de remarquer que la douceur de ces dis- temps et le lieu où il pronon(;a ce discours
cours lui avait fait donner le surnom do Mil- marquent que ce fut au retour de son exil
lifluvs ou Mielleux. Il ajoute qu'il avait fait après la victoire que Tliéodoric remporta sur
aussi des homélies mais il n'en marque pas
;
Odoacre. Car il le prononça la nuit* et dans
le sujet. Marfrarin de la Bipne qui fait Lau- la place publique. Enfin cette homélie à toute
rent évèque de Novarre , dit qu'il fut trans- la fluuceur de style que Sigebcrt relève dans

féré de cette ville en celle de Milan, dont il celle des Deux tetnps ou. de la pénitence.
le compte pour le vingt-cinquième évèque. 3. Dans celle-ci Laurent distingue deux Ho.-»6;i

Il conjecture que c'est ce Laurent dont En- sortes de péchés, et deux manières de les
uode de Pavie a fait un si bel éloge dans la
Diction ou discouis qu'il envoya à Honorât,
'
remettre le péché
'
; d'Adam ' qui est passé
par la voie do la génération à tous ses des-
11 }*^"j;'.;^ï

r-f-
ID*D« ,
le la

|;;'',X1„ J
.

évèque de Novarre pour la Dédicace de l'E- cendants et le péché que chacun commet
;
J^°^
j"''

glise des Apôtres. La Bigne donne à ce Lau- par ses propres actions. Ils sont remis l'un
rent le livre des Deux tetitps ,
qu'il intitule : et l'autre par le bajitéme mais les péchés ;

Homélie sur la jxnittnce^ parce qu'en effet elle propres se remettent aussi par la pénitence.
roule presque entièrement sur cette matière. L'auteur appelle le péché d'Adam ' le péché
Il lui en donne une seconde sur l'aumône, du monde. De la façon dont il s'explique sur
qui, dans les manuscrits, porte le nom de lavertu du baptême, on dirait que son senti-
Laurent et qui est de môme style que le li-
, ment est qu'après l'avoir reçu chacun est
vre des Deux temps. Dom Mabillon* lui en at- devenu à soi-même une source continuelle de
tribue une troisième sur la Chananéc, qu'il a force et de doctrine, en sorte que le minis-
trouvée jointe dans un manuscrit au livre tère des prêtres, et le secours de la grâce
des Deux temps. Il adopte la conjecture de la ne sont plus nécessaires. « Aussitôt, dit-il',
Bigne, et l'appuie d'une autre diction d'En- que vous êtes sorti des sacrés fonts, on vous
nodè pour le jour anniversaire de l'installation a revêtu de l'habit blanc, on vous a oint de
de Laurent sur le siège de Milan. Ennode y l'onction mystique, puis l'invocation de la
loue la patience de cet évoque dans les per- sainte Triuilé ayant été faite sur vous, il est
sécutions qu'il avait eues à souffrir de la part venu sur vous une triple vertu qui vous a
de ses ennemis, et dans l'exil où il avait été rempli d'une doctrine nouvelle. Dès lors
envoyé par Odoacre après la prise de Milan. Dieu vous a constitué votre propre juge et
Il témoigne que son retour en cetto ville lui votre arbitre il vous a donné une telle con-
;

avait rendu la joie, et fait tarir les larmes de naissance, que vous pouvez apprendre de
ses habitants. Ennode dit au même endroit vous-même le bien et le mal, et distinguer
que Laurent, dans le concile de Home, assem- entre le mérite et le péché. Et parce que, de-
blé pour l'all'aire de Symmaque, réprima par meurant dans les liens du corps et de ses
la douceur et le miel de ses discours l'impé- membres, vous ne pouvez être libre du pé-
tuosité des menaces de ceux qui avaient en- ché, ni vivre exempt de faute après le bap-
trepris la déposition de ce pape. Tout cela tême, il a mis eu vous-même le remède dont

« Eiinod. Diction. 2, pag. 1736. fiicta est super te invocalio, et venit super le trina
* Mdhinun., Aualect.,iiiie. 560, cdit. Par. 1723. virtus quce tas novum
nova perfudit doc-
liac
' Eniiodhis, Diction., pag. 1732. trina. Exinde teipsum staluit tibi judicem et ar-
* IJomilia de Chananœa, llabilloD., Analtcl., bilriuui, deditque tibi notitiam ut possis ex te
p.ig. 55. discere bonum et malum meritum
, id est intcr
' Peccatum nwndi quid eut ? Diiiclum Adam et peccatum. Et quia non paieras mancns in mem-
fer traduceni seniinis ad filios deioluttun. I.iiii- bris corjiorisque conipagc liber cxistere a pec-
rent., hom. de Pœnil., tom. IX Bibl. Fat., pag. cato,immunisque a noxa, posl baptismum rc-
4C5. medium tuum in teipso stotuit, remissioncm in
* Ex illa die illaque hora qua egressus est de arbilrio luo posuit ut non qua-ras sacerdotem
Invacro, ipse fons jugis et diulurna re-
tibi (s cum nécessitas ftagi' •ori/.j sed ipse jam ac si
iiiissio. Aon opiis Itahes doctore non dcTlra sa- , scitus per-^'picuusque magister errorcm tuum in-
ccrdotis. Mox vl ascfndisti de sacro fonte, vesli- tra te entendes et peccatuni luum pœnitudine
liis es veste alba et unctits es unguenlo mystico : abluas. Ibid., pag. 466, 467.
, ,

[vi« SIÈCLE.] ADRIEN, LAURENT DE NOVARRE, MARCELLIN, ETC. 'J7

vous avez besoin, laissant la rémission Je du feu de la foi, il ditù Jésus-Clu'ist Je m'en :

vos fautes à votre libre arbitre, en sorte que vais donner la moitié de mon bien aux pauvres.
dans la nécessité vous n'avez pas besoin de Comme s'il avait dit Je vois maintenant, je
:

recourir au prétie. Mais vous pouvez do connais ce que je dois faire. Mon Sauveur,
vous-même, comme un maître expérimenté, c'est de vous et non de moi-même que vient la
corriger l'erreur qui est dans vous, et cllacer correction et l'amendement de mes mœurs. »
votie pécbé par la pénitence. Ainsi que la Laurent cite cet exemple, et celui de la fem-
dureté de ccrnr, le désespoir, la paresse ces- me pécheresse, pour engager les pécheurs à
sent, la fontaine ne tarit jamais, l'eau est au ue point désespérer de leur salut, mais à re-
dedans, l'ablution est au pouvoir du libre courir à Dieu qui est toujours prêt à les re-
arbitre, la sanctification dans l'industrie, la ré- cevoir. Quant A ce que
auteur qu'un
dit cet
mission dans l'ail iiudance des larmes » Mais baptisé qui tombe dans péché après le le
Laurent s'expliiiuo dans la suite. 11 fait voir baptême n'a pas besoin de recourir au prê-
au pécheur qu'en vain il compterait sur ses tre, il ne veut, ce semble, dire autre chose,

propres mérites, sur la force de son àme, et sinon qu'il sait de lui-même, pour l'avoir ap-
la vigueur de ses entrailles qne debout au- ;
pris dans les instructions qu'on lui a données
jourd'hui, demain il tombera, s'il n'y prend avant le baptême, ou dans la semaine du
garde qu'il veuille ou ne veuille pas, que son
;
baptême, qu'il est obligé de faire pénitence,
Ame est souvent embarrassée dans les fdets et que la pénitence est un moyen pour ef-
du corps qu'elle n'en est pas délivrée par
; facer les péchés commis depuis le baptême.
'
elle-même, à moins que, secourue de la grâce C'est ]iourquoi il ajoute : « Ne cherchez plus
de Dieu, elle ne s'adresse à lui par la péni- Jean-Baptiste; n'allez plus au Jourdain :

tence en sorte qu'elle puisse dire avec le


; soyez-vous à vous-même Jean-Baptiste. »
Prophète Mon ûme s'est échappée, comme un
: Dans l'Homélie surl'aumùne, Laurent
4. Hom.Mcsnr

passereau du filet des pécheurs; le filet a été la comme un remède ellicace aux
représente ix Bib.:'i'ai!

brisé avec le secours du Seigneur, et j'ai été dé- plaies de notre conscience, et capable de
livré. L'âme était arrêtée dans le filet; elle' rappeler l'âme des portes de la mort; com-
s'en est échappée, non par ses propres forces, me la racine de tous les biens , ajoutant
mais par le secours divin. C'est dans le mémo qu'elle comble le juste de mérites, qu'elle
sens qu'on doit entendi'e ce que Laurent dit absout le pécheur de ses péchés, et le sou-
dans le même discours, immédiatement après lage même dans ses maladies. Il enseigne que
avoir rapporté ces paroles de saint Paul : c'est par une providence particulière que tous
Qui me délivrera du corps de cette mort? « La les hommes ne naissent pas également dans
vie', est entre vos mains; la victoire est dans les richesses. « Ceux, dit-il, qui en abondent
votre libre arbitre si vous avez voulu, vous
: n'en font que trop souvent un mauvais usage
avez vaincu si vous ne voulez pas, vous de-
; en les faisant servir à leurs passions déré-
meui'erez vaincu. Celui qui veut vaincre fait glées. Dieu a mis auprès d'eux les pauvres,
des ellbrts : celui qui désespère perd la vic- afin qu'ils leur servent comme de fontaine,
toire.«Toutes ces façons de parler n'excluent où ils puissent se purifier des taches de leurs
point le besoin de la grâce; elles n'ont pour péchés. ))Il explique ces paroles de Jésus-

but que d'animer le pécheur à travailler à la Christ : Lorsque vous donnerez l'aumône, que 1,^,11, ,., 3
correction de ses vices et à faire pénitence votre main gauche ne sache point ce que fait vo-
de ses fautes. D'où vient qu'en parlant en- tre main droite, de la vaine gloire que l'on
suite de Zacbée, il dit que « le Seigneur de- doit éviter dans les œuvres de miséricorde
meura' chez lui, et inspii-a dans son âme le feu Dieu en devant être la fin, et non le désir de
delà foi, et la seci-ète ardeur du Saint -Esprit, plaire aux hommes.
de façon que, brûlant de l'amour de Dieu et 0. U prononça, comme on l'a déjà dit, Hoir.éiiciur

' In laqueo hœrebat anima, ereptaest nonisuis ut amore Dei et calore fidei flagrans talia verba
ciribus, sed dicino prwsidio. Ibid., pag. 467. depromeret : Domiue, eece dimidium bonorum
* Vita in manu est, Victoria in arbilrio est. Si nii;ûruiii do pauperibus... lanquam si ita diceret:
voluisti, vicisH. Si nolueris, victus relinqueris. Modo vidi, modo cognovi : Saluator, non ex me ,
Qui mit vincere conaticr tU vincat, qui desperat sed ex te fada est correclio mea. Ibid., pag. 469.
amisil Victoria m. Ibid. ' NoUte jam quœrere Joannem neque Jorda-
^ Mansit apud illum Christus, inspiravit illi nem, ipsc tibi esta Baptista. Ibid., pag. 467.
ignem fidei, Spirilus Sancti occuUum ardorem
XI.
,

98 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


. outi»;». son discours sur la Chanande, la nuil et '
566. Aussi la Chronique de Marcellin, dans
NMoii, fs- dans la place publiijue. Il fait voir, par les l'édition d'Anvers,par Antoine Schnnhovins,
instances réitérées de cette femme, que l'on chanoine de Bruges, ne va que jusqu'en 334.
doit toujours demander ^ Dieu jusqu'à ce C'est la première de toute-. Celle de Panvi-
que l'on ait obtenu l'etlet de sa demande ;
nius s'étend jusqu'à la dernière année de
mais qu'il ne sufBt pas de lui demander de l'Empire de Justinien, parce qu'ily a compris
bouche, que le cœur doit aussi faire entendre la continuation de la Chronique de Marcellin
sa voix que tous les lieux sont propres à la
;
par quelque auteur inconnu. Les autres édi-
prière, quand on sait se recueillir en soi-mê- teurs en ont usé de même mais en faisant ;

me; la place publique, le bain peuvent nous passer le tout sous le nom de Marcellin.
servir de temple. Ces trois homélies sont Le Père Sirniond qui a donné cette Chronique
d'uu style simple et coupé. plus correcte et plus entière en 1619, à Paris,
6. On met ordiuairement - le comte Marcel- a eu soin de distinguer ce qui était de Mar-
6CTIU. liu au rang des écrivains ecclésiastiques, cellin, et ce qu'on y avait ajouté. C'est sur
parce qu'il a renfermé dans sa Chronique plu- son édition qu'on l'a mise dans le neuvième
sieurs faits intéressants pour l'Eglise. Tri- tome de la Bibliothèque des Pères à Lyon, en Tom.
Dp SlnnuDi
thème le qualifie de chancelier de l'empereur 1677. Elle se trouve encore dans le recueil w . IX Bi
Justinien. par Cassiodore, qu'il avait
11 parait, des œuvres de ce Père, à Paris, en 1696, [et i-«t

exercé cet emploi, des le temps que Justinien dans le tome LI de la Patrologie latine, col.

n'était que patrice. Cela ne l'empêcha point 9i3.] Il dans cette Chronique des
est parlé

de s'appliquer à divers ouvrages pour l'utilité assemblées que saint Grégoire de Nazianze,
publique. Cassiodore ' marque quatre livres maître de saint Jérôme, faisait dans l'Église
de géographie, où, comme il le dit ailleurs, deSaintc-Anastasie, à Coustantinople, dans
Marcellin ' faisait la descriplion des villes de le temps que les ariens s'étaient emparés de
Coustantinople et de Jérusalem, avec une la grande église de cette ville des conciles ;

grande exactitude; marquant la route qu'il de Const<antinople,cn381 d'Éphèse, en'i.30; ;

avait suivie en allant d'une de ces villes i\ et deChalcédoine, en4ol dabrigandage d'E- ;

l'autre. Cet ouvrage n'est pas venu jusqu'à phèse en 449; des évêques de Rome, Da-
nous. Mais nous avons sa Chronique précé- mase, Sirice, Anastase et autres juscpi'à Pe-
dée d'une petite préface, où il dit qu'il l'a lage de saint Ambroise, qui y est appelé la
;

commencée <i la première année de l'empe- forteresse de la foi; de saint Jean-Chrysos-


reur Théodosc, et conduite jusqu'au consu- tôme et de ses successeurs dans le siège épis-
lat de Magnus, c'est-à-dire jusqu'en .518, ce copal de Constantinople; de Théophile d'A-
qui fait un espace de quarante ans; que de- lexandrie; de saint Épiphane et de plusieurs
'
puis il a ajouté à sa Chronique seize autres autres évoques d'Orient; de la découverte
années, à commencer depuis la première de des reliques de saint Etienne, premier mar-
l'empire de Justin jusqu'au quatrième con- tyr, par un saint prêtre nommé Lucien qui
sulat de Justinien, qui fut en 534. Il y a ap- écrivit en grec la relation de cette décou-
parence qu'il ne conduisit pas plus loin sa verte du transport de ces mêmes reliques à
;

Chronique, et qu'il mourut en cette année-là Gonstanlinoplc, par Eudoxie, femme de Théo-
n'étant pas vraisemblable qu'il eût disconti- dose; de saint Augustin; de l'invention du
nué de rapporter les principaux événements chef de saint Jean-Baptisto par deux moines
du règne de son maître, s'il eût vécu plus qui étaient allés par dévotion à Jérusalem ;

longtemps. Car Justinien ne mourut qu'en et de son transport à Emèse, où il fut trou-

Scrmocinaixlihua nobis sommis recesxil a vo-


' * Idem porro Marcellimts Conslanlinopolila-
bis nox transfudil se in diem.
; convenlua fo- nam civitnloii et urbem riicrosolymitanam minu-
rensis ! Putest cnim in hic esse conventus Eccle- tissima narralione descripsit. Cassiodorus , ibid.,

sia: Fecil nox in foro Ecdesiam. png. 53. cap. xsv.


* Aiionyinus Mellicensis de Scriplorib., Eccles., » I.ucinnus,presbijter, vir sanctus, cui revelavU
cap. Lvi. Mir.-Kus de Scriplorib., Eccles., oaii. cxi.. Veiis, /lis con.'iulibns Ilonorio I, et Tlieodosio,
llarcellinus qualuor libros de lewporum qua-
' locum sepulchri reliquiantm sancti Siephani,
cl

lilaiibus et posiiionilnis locorum pulclierrima primi miirlyris ipsam rcrelalionem


, scripsit
proprielale conficiens, ilineris sui trumilem lau- grœco sermone ad omnium Ecctesiarum perso-
dabitiler pcrcurrit. Cassiodorii!', Delnslitul. div., nas. IMarri'l., in Chronico, nd iio. 415.
cnp. XVII,
[xrsùxix.] ADRIEN, LAUllENï DE NOVAUlll MAliCICLLlN, E'J'C. !)9

vii '
tic nouveau sous le pontifical d'Uranius pidius avait une maison à Arles infestée par
en 453, par le prêtre Marcelle; de saint Pros- les démons. Saint Césaire' la bénit, et aussi-
por de Gcnnadc de Cons-
et (le SCS écrits ; tôt l'infestiition cessa.Nous avons une lettre
taniiudple, et do ses Commonlaires sur Da- de saint Avit évèque de Vienne
, Elpidius ;'i
,

niel; de la perséculion des Vandales en Afri- dans " laipielle il le prie d'employer ses ta-
que de Jean d'Antioche et de ses écrits con-
;
lents dans la médecine jiourle ri'tablissement
tre les eutycliéens;de saint Flavicn et de sa du lîls d'un seigneur gaulois nommé Célcr;
constance dans la foi; delà division des l\sli- et quatre d'Eunode de Pavie, où l'iivè'que lui

ses d'Orient et d'Occident; des brouilleries parle de diverses maladies dont il était aflli-

arrivées dans l'Église de Constantinople à gé. Dans l'une, qui est la quatorzième du neu-
l'occasion de cette proposition : Un de la vième livre il marque que Dieu avait permis
,

Trinité a <;o)(/jcrt; et de plusieurs autres faits qu'il fût dans les bonnes grâces de 'J'h('odo-

qui font voir que le comte Marccllin s'était ric °, afin que l'état ecclésiastique qui était
intéressé à transmettre à la postérité ce qui alors dans sa décadence, no péril point eu tièrc-
lui avait paru de plus remarquable dans les ment. Dans la huitième lettie du huitième li-

événements qui avaient quelque rapport <i vre, il loue'" l'éloquence d'Elpidius et sa gran-
^
l'histoire de l'i-ldise. On le qualifie comte de facilité às'exprimer, témoignant beaucoup
d'Illyrie, quoiqu'il ne se donne pas lui-même d'empressement pour recevoir de ses lettres.
ce titre. L'anonyme de Méleth' le fait romain « Il ne trouva pas, dit-il, d'autre moyen d'en

de naissance. avoir, que de lui en écrire lui-même, ne dou-


7. Dans les Gaules, RusticusElpidius se ren- tant pas qu'Élpidius ne dût y répondre, n II
dit célèbre par son savoir et par sa piété. ne nous reste toutefois aucune lettre d'Elpi-
Quoique diacre de l'Église de Lyon, il ne lais- dius, ni à saint Avit de Vienne, ni àEnnode de
sait pas de s'appliquer à la médecine. La ré- Pavie. Ce dernier, dans la vingt et unième
putation qu'il s'acquit dans cet art le fit con- lettre du neirvième livre, se plaint à Elpi-

naître à Théodoric, roi des Ostrogoths, qui dius de ce que passant à Milan il ne s'y était
voulut l'avoir auprès de lui. Ce prince était point arrêté, et qu'il en était sorti avec au-
arien, mais il ne refusait point son estime aux tantde rapidité que .s'il eût eu les ailes d'Icare,
évoques ni aux autres ministres de l'Église sans l'avoir même fait saluer. 11 semble lui
catholique. Elpidius se conduisit h la cour reprocher de n'en avoir agi ainsi que parce
avec beaucoup de sagesse et de modestie , ne qu'à l'exemple de ceux qui se trouvent tout
faisant rien qui fût contraire k son état. Il sut à coup dans la faveur des puissants du siè-
même par ses bons oûices gagner l'amitié ' cle, il avait oublié ses amis.
et la conGance du roi ce qui le mit en état , 8. On a imprimé dans la Bibliot/irqne des écrits d'EI-
pidiDS.

de servir ses amis. C'était à luiqu'Eunodede Pères, dans le Recueil des poètes chrétiens , à
Pavie se croyait ' redevable de la bienveil- Bâle, en 1562 ; et dans le Recueil des poé-
lance de Théodoric. Elpidius, ayant conçu sies attribuées à Lactance et à Marbaudus,
le dessein d'embellir Spolète, en réparant les à Leipsick deux poèmes d'Elpidius tous
, :

ruines de plusieurs édifices de cette ville, ce les deux sont en vers hexamètres " Le .

prince lui en accorda la permission, en rele- premier est composé de soixantedouze vers
vant °, dans les lettres qu'il lui fit expédier à cpii forment vingt-quatre strophes, chacmie

ce sujet, son mérite et ses longs services. El- de trois vers où l'auteur traite de divers
,

noc igitur venerabile caput sub Uranio me-


' ' Sein quia Deux propiLius Ubi sic graliaM in-
moratœ'Emisenœ episcopo civitatis per Marcellum vicli frincipis cnntulit ut htimilitas ecclesiaslica
presbyterum coiistat invenlum, Vincomelo et Opi- non periret. Eunodius, lib. IX, Epist. 14.
linne consulibus. mense februario die 24, média '" Quibiis modis fraternitatemtuam ad scriben-
jejiuiiorum paschaliiun sepHinana. Marcel., ibid. dum quave arte sollicitem, quando liomo verbo-
.1(1 ;iii. loS. runi locuples in me siléntia peregrina custodis.
2 Miroeus, ubi supra, cap. cxl. Cassiodor., ubi Elegi ut te loqui loquendo faciam et illam Alli-
supra. cam eruditionem ad epistolas alia garrulilatc
3 Anonynius Mellicensis, cap. LVi. producam. Enuod., lib. VIII, Epist. S.
* Cyprianus, in Viln Ctrsarii, lib. I, num. 21. " Ces lieux poèmes se trouvent dans le tome LXII
6 EÏinod., lib. IX, Epist. 14. de la Patrologie latine , après la Bibliothèque des
« Cassiodor., lib. IV, Epist. 20. Pères de Lyon ils sont traduits dans les Portas
;

' Oyprian., in Vila Cœsarii, ubi supra. chrétiens, par M. Félix Clémeut, Paris, 1837. {I.'é-
« Avitus, Epist. 35. diteur.)
100 mSTOIRE GÉNÉRAI.E DES AUTEITIS ECCLÉSIASTIQUES.
points historiques de l'Ancien et du Nouveau disent pas clairement. En tout cas ce poème
Testament, maïqnant en même temps les n'est pas venu justju'à nous. On trouve h la
mystères sijfuiliés dans l'Aiitien et accom- suite des deux poèmes d'Elpidius cchii que
plis dans le Nouveau. Par exem[»le, après Sédulius a fait en vers éh' iaques; c'est une
avoir rapporté dans la première strophe la comparaison de l'Ancien Testament avec le
séduction d'Èvc, dans le paradis terrestre, Nouveau. Il est mis dans la Bibliothèque des
par le serpent, il rapporte dans la seconde Pèns sous le nom du consul Ast('rius, et il y
l'annonciation du mystère de l'Incarnation a des manuscrits qui l'attribuent à Claudien
faite à la Sainte Vierge par le ministère de Mauunert. Mais Bède en fait auteur Sédulius.
l'ange. Après avoir parlé dans la septième Si on l'a mis sous le nom d'Aslérins, ce n'est

de la confusion des langues à la tour de Ba- apparemment que parce qu'ayant trouvé ce
bel, il raconte dans la suivante comment, au poème parmi les papiers de Sédulius déjà ^1^°'
ffj ton

jour de la Pentecôte, saint Pierre et les au- mort, .\stérius eu fit faire des copies, comme '

tres apôtres parlaient diflérentes langues. de ses autres ouvTages en vers, et les rendit
La neuvième comprend l'histoire de la vente publiques.
de Joseph par ses frères. La dixième marque 9. Saint Césaire, évéque d'Arles, idlant à i.>iw gi

de quelle manière le traître Judas, pousse par Rome, se fît accompagner d'un abbé nommé
un mouvement d'avarice vendit Jésus-Christ Gilles, gaulois de naissance, qui gouvernait
aux Juifs. 11 fait dausla onzième et la douziè- un monastère dans la Gaule Narbonnaise et ;

me le parallèle de l'immolation d'Isaac avec du prêtre Messien qui lui servait de secré-
le sacrificede Jésus-thiist sur la croix. 11 taire. L'abbé Gilles présenta avec Messien

trouve dans la treizième et la quatorzième du ^ eu son propre nom, au pape Sjmmaque, une t»™. i
**
rapport entre la manne et les caillesdonnées supplique que nous avons encoie, dans la- ^°ù"'

miraculeusement aux Israélites, et les sept quelle ils demandent l'un et l'autre que l'É-
pains dont Jésus-Christ rassasia quatre mille glise d'Arles soit maintenue dans ses privi-
hommes. La quinzième et la seizième com- lèges qui lui avaient été accordés par le Saint-
parent Moïse, montant sur la montagne de Siège, en particulier que i'évèque d'.Vix fût
Siuaï pour y recevoir la avec Jésus-Christ
loi, tenu de venir a Arles quand il y serait man-
prêchant aux peuples sur la montagne. Les dé par révoque de cette ville, soit pour les
huit strophes suivantes renferment diilerents conciles soit pour les autres affaires ecclé-
,

points d'histoire du Nouveau Testament. Le siastiques. Il parait que cette supplique n'était
second poème traite des bienfaits' de Ji'sus- que pour appuyer celle que saint Césaire
Christ envers les hommes en commençant à avait présentée lui-même à Symmaque. Ce "''•

la création du monde, et en finissant à la pape lui n'-pondit par une lettre datée du
mort qu'il a soutl'ert pour notre salut sur H juin de l'an 514, où il confirme les pri-
l'arbre de la croix. y ajoute quelque chose
11 vilèges de l'Église d'Arles, avec pouvoir ;\
du règne des bienheureux dans le ciel, com- saint Césaire d'assembler les évèqiies des

me étant une suite des bienfaits du Sauveur. Gaules et d'Espagne quand il en serait be-
Quelques-uns ont cru qu'Elpidius avait com- soin. »

posé un tioisième poème pom- soulager sa " de Gemblours met Orientins','


10. Sigebert
f
,
.'"'""";'
«que d t

douleur en une certaine occasion mais les ; ou, comme il l'appelle, Orentius, parmi les ^Hi.rïVi!
deux vers sur lesquels ils se fondent ' ne le écrivains ecclésiastiques pour avoir composé
p,',",,jf.8Î

'
Bine eliam nostro nugata est schéma dolori, Premièrement, il paraît, par les Actes du saint,
Gairula mendcsis fingens satyromala musis. que les Bollundistcs ont donnas, qu'il était cvôque
FJpi.i., Carm. de Cliiifli bcmficiis tom. I.\ Bibl.
,
d'Anch, (Bolland, ad diem, l mai, p. Cl, tom. Il,
Pair., png. 4C3. Bilil. Labb., p. 596); qu'il y avait encore des piïcns

' Voici ce que dit, d'une manière plus exacte, dans sou diocèse, et qu'il en convertit un ^raud
doin Ceillier dans uu autre volume : nombre qu'Aélius et Littorius, pi'nt'ranx de l'ar-
;

Eu parlant d'Orient, dans le seizième volume mée romaine, étJUit venus altaqurr Thèodoric, roi

de cette histoire, p. 18», nous avons dit, que sui- des (lOths, qui remuait alors dans la ville de Tou-
vant l'opinion la plus conimuni", on le faisiiit es- louse ce prince iirien qui ne se sentait pas assez de
;

pnpnol de naissance, et évoque d'KIvire et nous ; forces pour résister aux euuemis, envoya I'évèque
n'avons fait mention que d'une partie de son poème Orient en ambassade vers ces deux (lènéraux jiour
imprimé à Anvers, en 1600, avec les n^^U^ traiter de la paix iju'Aétius le re(;ut hnuorable-
;

tin Uelrio. ent mais que Littorius, n'ayant ténioi^'né pour


;

Il faut retoucher ces deux a JljîViuo du mépris, eu fut puni par ceux-là mêmes
[VI- SIÈCLE.] ADRIEN, LAURENT DE NOVARRE , MARGELLIN, ETC. 101

un poème en vers hdroïqiios, intitulé Mi'- : appelle les siècles de la basse latinité, d'appe-
moirc on avortissciuciil aux tidcles. I^'upiiiion ler vers héroïques tons ceux qui n'étaient
lii plus coumiunc l'ait Orioiiliiis cs[iaj;iiol do point lyriques. Le poème d'Orientins renfer-
naissance et évoque d'Elvire. On trouve, en me de très-bejles instructions sur les devoirs
cilet, HU évf^qup tic ce nom qui souscrivit en de l'homme envers Dieu et envers le prochain.
qualitû d'évc'(|uo do ccllo ville au coiicilo de Four engager l'homme à l'amoiu- de Dieu ,
Tarragoue en ulC. Il i)ai'ail d'ailleurs, par il fait voir en détail de combien de bienfaits

Fortunat, dans la Vie de saint Martin de Dieu l'a comblé, tant par rapport au corps
Tours, et par saint Sidoine Apollinaire, dans que par rapport ti ITime. 11 insiste tellement
la douzic'iuc lettre de sou neuvième livre, sur la nécessité de cet amour, qu'il assure
qu'Orientius élail espagnol. Ce qui peut em- que Dieu ne demande autre chose, et qu'il
barrasser, c'est que le poème que nous avons sullit à l'homme ' de rendre amour pour

sous le nom d'Orentius est en vers élégia- amour. U règle la conduite que nous devons
(pies, c'est- ù-dirc hexamètres et pentamè- tenir à l'égard de noire prochain sur cette
tres, au lieu que celui dont parle Sigebcrt maxime « >ie faites pas A autrui ce que vous
:

était en vers hexamètres, ou comme il le ne voulez point qui vous soit fait à vous-mê-
dit', en vers héroïques. Mais c'était l'usage, mes, et faites aux autres ce que vous voudriez
ilans le siècle de Sigcbcrt, c'est-à-dire dans que l'on vous fit. d II s'explique nettement sur
le onzième et le douzième siècles, que l'on la manière dont nous ressusciterons, disant '

à qui il avait refusiî 1.1 paix, c'est-à-dire parles Tou- vices.Il fait voir l'incoDstanee des biens temporels
lousaius, eutru les iiiaius île ijui il élail toiiibr'. Ci/tte pour lesquels on se donne tant de peines, et l'a-
ambassade que l'un met vers l'an 439, soiill'rirait vantage qu'il y a à leur préférer des biens éter-
lieaucoup de ne savait par le té-
dilTieiillés, si l'on nels. C'est à ce sujet qu'il décrit les calamités qui
moignage de Salvien ', q>ie les Goths dans leurs désolaient les Gaules; les incursions des barbares,
guerres avec les Romains, di!pult;rent souvent des les guerres, les incendies, la famine. Il passe de là
évoques catholiques pour leur demander la paix. à la description des supplices destinés aux méchants
Les auteurs de Xn Nouvelle Gaule chrétienne-, fout dans l'enfer, et à la félicité dont les justes jouiront
également saint Orient, évèque d'Aucli; mais ils dans le ciel. L'ouvrage porte le titre de Commoni-
préleudeut que ee fut en 323, et qu'il gouverna torium ou d'avertissement.
celte église jusqu'en 3G4.1ls se fondent sur un mo- U est suivi de quelques petites pièces de poésie,
nument qui ne paraît être que du xu= siècle. Les qui roulent toutes sur des matières de piété sur :

actes produits par les Uollandistes, sont plus an- la naissance du Sauveur, sur les divers nomsqu'on
ciens; et quoiqu'ils ue soient pas originaux, on lui doune, comme de Vertu, de Sagesse, de Verbe,
peut s'y arrêter préférablemcnt au monument de d'Époux, de Fleur, de Pierre, d'Agneau, etc. sur la ;

l'Église d'Auib, d'un âge postérieur. Dans une, il explique les


Trinité, sur l'Incarnatiou.
L'édition du Poème d'Orient par Martin Delrio, noms propres ou impropres qu'on donne à .lésus-
n'eu coiupreud que le premier livre. Outre celle Chrisl. On t'appelle Lion, parce qu'il est le roi des
qui parut à Anvers, chez Joachim Trogner eu 1599 rois, comme
le lion l'est des bêtes féroces. U est
ou 1600, on eu fit deux à Salamanque, l'une eu 160-J, nommé Sagesse, parce qu'il est la règle de la vie ;

in-4, chez Antoine Taberniel et une seconde eu ;


et Doigt de Dieu, à cause que c'est par lui que la
1641. 11 en parut une troisième à Leipsick, eu lOul, loi de Dieu a été écrite. Vient ensuite un poème de
in-8. avec les notes d'André llivinus. fuis ce poème louanges, où l'auteur entre dans le détail des créa-
fut imprimé dans la Biblotlièque des Pères à Colo- tures qui louent Dieu; puis des formules de prières
gne, en 1618, et dans celle de Paris et de Lyou. Dom au nombre de vingt-quatre. Le manuscrit de Tours
Martèue ayant recouvré l'ouvrage entier dans ua n'a fourni que la première et la vingt-quatrième. On
manuscrit d'euviron SOO ans, le publia avec quel- ne sait ce que les autres sont devenues. La Vie ou
ques autres anciens opuscules, à Rouen en 1700, les actes d'orient, se trouvent dans le second tome
in-4., et en 1717, dans le cinquième volume de ses delà Nouvelle bildiolhèque du Père Labhe et dans
Anecdotes. Le Poème d'Orient est cité par Fortu- les Dollandislcs au premier jour de mai. i>

nat, de Poitiers ', dans le livre de la Vie de saint 1 Conimonilorium fidelibus scripsit métro he-

Martin, et par Sigebert de Gemblours son nom se ;


roico, ut mulceat legcnlem suavi breviloquio. Si-
lit à la tète de l'ouvrage, dans le manuscrit de l'É- gebert., cap XXXIV.
glise de Tours, d'où ou l'a tiré pour le donner au - Suljlcit ut Dominum servus amalus âmes.
public, et à la fin du second livre'' en sorte qu'on ; Pag. 877.
ne peut se méprendre sur l'auteur. Ce second livre ' Ora; color, sanguis, venœ, cutis, ossa, capilli
est une invective contre la vaine gloire, le men- ut nunc lahunlur, sic ilerum venient...totum ade-
songe, la gourmandise et l'ivrognerie dont il fait rit, toium dicersa ex parte coibit... pars volucri
une peinture capable de donner de l'horreur de ces aut pisci, pars lanialu feris. Ibid.

1 Salïian.. lib. VII De Providenlia. 4 Ul prccaiores viccens Ortenllus omnes,


3 Gallia CbrisliaDa cova, ton). I, j'ag. 'A'i.
SsQCtorum TCQiam promercor procibus.
3 Marteo. Prolog. Id poë:ii. Onci.l., loin. V .^necdot,, pag. 18.
102 HISTOIRE ui:n!:rale des auteurs ecclésiastiques.
que ce sera dans le même corps, avec les paix qu'il veut que nous ayons toujours non-
mêmes veines, le môme sani;, la même cou- seulement dans boucbe, mais aussi dans
la

leur, la même peau, les mêmes os, les mê- le cœur, fallùt-il sacrifier nos ressenti-
lui

mes cbevcux, les mêmes membres, soit qu'ils ments. Il semble qu'il manque quelque cho-
aient ëlë réduits en poussière dans le tom- se et qu'Orientius combattait encore les pé-
beau, soit qu'ils aient été dévorés par les chés de gourmandise, de paresse, d'orgueil
bêtes ou mancés par les poissons, en sorte et peut-être quelques autres, mais les ma-
que dans le même corps où nous avons fait nuscrits ne portent que ce que nous avons
le bien et le mal, nous serons ou punis ou dans les imprimés. Ce poème a de la dou-
récompensés selon le mérite de nos actions. ceur, les vers en sont coulants et les matiè-
Il tire des preuves de la résurrection, de la res traitées avec beaucoup de netteté. Mar-
révolution qui se fait annuellement dans la tin Delrio le fit imprimer à Anvers, en 1600,
nature, où nous voyous les arbres, qui dé- avec des notes de sa façon qu'il soumet à la
pouillés de leui-s feuilles pendant l'hiver, censure de la sainte Eglise apostolique, ca-
paraissent morts, revivre au printemps et , tholique et romaine. On l'imprima depuis à
donner des fruits eu automne. Ensuite Orien- Salamanque, en 1644, avec les mêmes notes,
tius invective contre les vices d'impureté, et ensuite dans le huitième tome de la lii-
d'envie, d'avarice, et finit son poème par les blothègue des Pères, à Lyon en 1677 [dans
;

avantages de l'aumône, montrant qu'il ne le tome X de la Bibliollièque de Galland, avec

faut pas attendre à la mort pour donner, uue notice, et dans le tome LXI de la Patro-
parce qu'alors on ne donne que ce qu'on ne lotjie lutine, d'après Galland.]
peut plus retenir. Il fait auesi l'éloge de la

CH.VPITRE V.

Epipiane scholastique [écrivain latin], Thodore lecteur [écrivain grec].

[Vers l'an 535.]

Ej)t;.banp Épiphaue, que l'on a surnommé scho-


1. avec le nom d'auteur, et toujours suivant la
icbAl Astique.
lastique, apparemment parce qu'il faisait les version d'Épipliane, qui parait assez fidèle et
fonctions d'avocat, était itahcn de naissance, assez exacte. On avait déjà en latin les deux
et très-habile dans les langues latine et grec- livres de Vllistoire ecclésiastique d'Eusèbe,
que. Cassiodore, qui connaissait ses talents, traduits par Rufin, qui y eu avait ajouté deux
l'engagea '
à traduire en latin les Histoires autres, dans lesquels il comprenait ce qui s'é-
ecclésiastiques de Socrale, de Sosomène et tait passé depuis la vingtième année du rè-

de Théodoret, afin, dit-il, que la Grèce ne se gne de Constantin jusqu'à la mort du grand
vantût pas de posséder seule un ouvrage si Théodose, c'est-à-dire jusqu'à l'an 395. L'ilis-
admirable et si nécessaire à tous les chré- Joire trijxirtite servit de continuation à celle
tiens. Quand Épiphane les eut traduites, de Hufin. Le scholastique Epiphane mit aussi
Cassiodore en fit un seul corps d'histoire di- en latin les Commentaires de Didyme sur les u.i.di'.I^J;
"" " '"
visé en douze livres, à qui il donna le nom Proverbes de Salomon et sur les sept Épitres ''

d'Histoire fri/xtrtite. Mais en réduisant en un canoniques, de même que ceux de saint Epi-
corps les histoires de Socrate, de Sosomène phane sur les Cantiques. Mais il ne nous res-
et de Théodoret, il ne s'assujettit point à les te aucune de ses versions, si ce n'est celle
rapporter en leur entier et dans le même qu'il fit des histoires de Socrate, de Soso-
ordre qu'elles avaient été écrites. Il prit de mène et de Théodoret à la prière de Cassio-
chacune ce qui lui paraissait meilleur, citant dore, et celle de la collection des A/y/VrM si/-
à la marge les endroits d'où il les prenait, nodales écrites à l'empereur Léon, l'an 438;
pour la défense du concile de Chalcédoinc.
' rasfiodor., Prwfat.iv Pi.<!(or.(nparti7.,pag.l89. Celle collection, qui se tro\ive dans le qua-
et Inslit. diiin., cap. .\mi.
lit). trième toiue des Conciles du Père Labhc, a
,

[vr SIKCLE.] ÉPIPHANE SCHOLASTIQUE, THKOnORE LECTEUR. 103

été donnée plus correcte et avec quelques par Nicépliore on rapporte quelques
Calliste,

iui^uKMilatuMis par M. Baluzo, sur un uia- endroits cités par saint Jean Damascènc ,

lui.scrit (le lleauvais et siu' un aulre ilo l'Ab- par le septième concile et par d'autres. Dans
bayo de Corbic, tous les deux très-anciens le passage que saint Jean Damascène rap-

et d'environ huit cents ans. porte du quatrième livre de Vllistoire ecclé-


TModor. 2. On ne%ait pas d'où était Théodore, qui siastique de Théodore cet historien met fort
,

*" au long un événement que Victor de Tunes


;"'•
a aussi travaillé sur l'histoire. y a quel-11

ques preuves qu'il était papiilaj^onien, mais raconte en peu de mots sur l'année 498. Un
elles ne sont pas certaines. 11 lit dans l'Église arien, nommé Olympius, blaspliémant dans
de Constantinoplc les fonctions de lecteur, et le bain public du Palais d'Hélène à Constan-
il parait qu'il ne parvint pas à un plus haut tinoi)le contre la Sainte Trinité, pc'-rit aussitôt
ilogré, puisque le nom lui en est demeuré. misérablement par la main d'un ange, qu'il
Suidas dit qu'il avait écrit l'histoire de l'E- vit lui verser trois seaux d'eau bouillante, ou

glise depuis Constantin jusqu'à Justinien ;


'
de feu sur le corps il en mourut, quoiqu'il fût
;

mais il faut lire .lusiin au lieu de Justinien, alors dans un bain d'eau l'ioidc. On lît^ un ta-
à mohis que Tluodore n'ait écrit quelque bleau représentant ce miracle par ordre de
chose de plus que ce que nous avons de lui. l'empereur Anastase, et on le mit dans le lieu
Il composa d'abord une Histoire tripartite, même où la chose était arrivée. Les ariens,
qui n'était qu'une compilation de Socrate, que ce miracle fâchait beaucoup obtinrent ,

de bosomène et de Théodoret. 11 la divise en d'Eutychien, concierge de ce palais en lui ,

deux livres, premier commence à la


dont le donnant de l'argent, qu'il ùtâl le tableau sous
vingtième année de Constantin, et le second prétexte de le nettoyer. Mais Anastase l'y
tinit à l'Empire de Julien. Cet ouvrage est en fit remetti-e. Théodore ajoute qu'outre le
manuscrit, à Venise,-dans la Bibliothèque de tableau fait par ordre de l'Empereiu", on en
Saint-Marc. On ne l'a pas encore mis sous voyait un autre fait par Jean, diacre et dé-

presse. Léo Allatius en avait eu un exemplaire, fenseur de l'Kglise de Saint-Étienne, proche


d'où M. de Valois a tiré un grand nombre de du Palais d'Hélène, homme extrêmement
dillérenles leçons pour les histoires de Socra- zélé pour la foi de la consubslantialifé ;
qu'il

te, de Sosomèue et de Théodoret. A ces deux y avait le nom et même la demeure de tous
livres, Théodore, lelecteur, en ajouta deux au- ceux qui avaient été témoins des blasphè-
tres de son propre fonds, commençant le pre- mes d'Olympius et de sa mort, en particulier
miei' où Socrate avait fini, et conduisant le se- de ceux qui avaient soin du bain que ce ta- ;

cond jusqu'au règne de Justin l'Ancien, c'est- bleau se voyait encore dans le temps qu'il
à-dire jusqu'en 318. Nous n'en avons plus écrivait. Théodore dit que les catholiques
qu'un extrait publié en grec et en latin sous qui ouïrent les blasphèmes d'Olympius, le
le nom de Nicéphore Calliste. Il suit avec voulaient tuer ; mais qu'ils en furent empê-
assez d'exactitude l'ordre des temps jusqu'à chés par Magnus, prêtre de l'Église des Apô-
la mort de l'empereur Anastase. Mais il y a tres, qui était un homme admii-able et un
moins de suite dans le reste de l'ouvrage, vrai servitem" de Dieu. Cet historien avait
qui semble être un nouvel extrait tiré ou de marqué l'année du miracle et le nom des
Théodore même, ou peut-être de quelque consuls, mais saint Jean Damascène a omis
auti-e historien, puisque Théodore y est cité l'un et l'autre, disant seulement que la chose
lui-même. Outre l'extrait de Théodore, fait était arrivée sous le 23 du mois de décembre

» Le tome VU du Spicilegium romanum, pag. 29 labri parte afflgereiur.Porro Jonnnes quidam dia-
et 32 de la préface, coutient en grec uu fragment sur conus et sanctœ illius Ecclesiœ Stephaniprimi mar-
la cause du suhisme des studites qui, d'après leur tyrisnomine dicatœ defensor, vir, si qiiis alius, se-
elief Tlitiodore, se séparèrent pour quelque temps lumprodogmate consubstanlialitalis luemlo nus-
des patriarches Tarasius etNicéphore ;
c'est un pré- quain non exserens, ipso quoqiie non pingendam
cieux fragment d'iiistoire ecclésiastique. Voir Bou- modo, scdut eorum qui illic lavabunlur nomina
uetty, table alphabétique des auteurs profanes et et ubi ipsorum quisque habitaret, adscribendiun

ecclésiastiques découverts par Mai. {L'éditeur.) curavit; insuper et illorum qui aqiias minislra-
2 die 23, mcnsis decembris,
Sub hoc consulatu bant nomina subjecit. Atqui hœc quidem imago ad
lerribileingensque miraculuin contiyit quod om- hoc usque tempus rei gestœ fidem< facit. Dauias-
nium aures perculit... Ubi vero res isla ad impe- ccu., Orat. 3, de imaginibus pag. 377, e.r Ilist.
,

ratoris Anaslasii aures pervenit, jussit ut mira- Eccles. Theodor., tom. IV.
cdlum cûloribus in tabula depiolor in superiori
104 msTomii: générale des auteurs ecclésiastiques.
le jour même de \oiil. Le fait
c'est-.'^-dire Fils, dans le Saint-Fsprit : mais que l'eau

estencore attesté par Tliéopliane, par Sui- qui était dans les fonts s'écoula à l'heu-
das, et il est rapporté dans l'Histoire mélan- re même; Barbas s'enfuit et dit à tout le
gée par Adon cl par Sigebert. D y en a qui monde ce qui était arrivé. Timothée, évo-
qu'au lieu de Théodore on doit
pr(''tcndent que de la même ville pour les catholi-
Théodorct dans le texte de saint Jean
lire ques, ordonna ' que les fidèles réciteraient
Damascène. Mais ils n'ont pas fait attention en toutes leurs assemblées le Symbole de
que Théodoret, étant mort avant le règne Nicée, au lieu qu'on ne le récitait aupara-
d'Anastase, n'a pu rapporter un événement vant que le jour du Vendredi-Saint, lorsque
qui se passa sous ce prince. Il faut donc l'évoque instruisait ceux qui devaient rece-
convenir que ce miracle a été rapporté par voir le baptême, n Tliéodore raconte qu'il
y
Théodore, le lectciu-; et que par le quatrième avait sur la frontière de la Perse et des In-
livre de son Histoire, d'où saint Jean Damas- des un fort nommé Tzundader que Cava-
cène dit qu'il l'a lire, on doit entendre le de, roi de Perse, souhaitait de réduire à
second des deux livres qu'il ajouta aux deux son obéissance, parce qu'il apprit qu'il y
de l'Histoire tri/xirtite qu'il avait composée avait dans cette forteresse beaucoup d'ar-
à la prière de l'évéque ou d'un prêtre de gent et de pierreries. Il eut d'abord recours
Gangres en Paphlagonie, en se servant des aux enchantements des mages et à la magie
histoires de Socrate de Sosomène et de
, des juifs, pourchasser de ce lieu les démons
Théodoret. qui, à ce qu'on disait, gardaient le fort;

c.qoiii» ^- On peut remarquer ce qui suit, dans l'A- mais cette tentative n'ayant pas réussi, de
fr.J^rX: hrégé de l'histoire de Théodore, fait par Ni- l'avis de quelques personnes, il implora la
loir. de Kéo.
céphore Callisle que l'impératrice Eudoxie,
: puissance du Dieu des chrétiens. L'évéque,
étant allée à Jérusalem, envoya à Pulchérie ayant donc assemblé les'fidèles, célébra les
le portrait de la Sainte Vierge, peint par saint saints mystères, y participa, les distribua au
Luc '; que Pulchérie mourut après avoir fait peuple, chassa les démons, par la force du
quantité de saintes actions, et avoir donné signe de la croix, et mit Cavade en posses-
tout son bien aux pauvres; que l'empereur sion du fort. Ce prince, étonné du miracle,
Marcién, son mari, loin de désapprouver son donna à l'évoque le premier rang que les
testament, fournit libéralement les fonds né- manichéens et les juifs avaient tenujusque-l;i
cessaires pour l'exécuter. « Du temps du pa- dans la Perse, et permit h ses sujets de faire
triarche Gennade, dit-il, il y eut un peintre profession de la religion chrétienne. Almon-
dont la main sécha en punition de ce qu'il dare, pi'ince des Sarrazins, ayant embrassé
avait osé peindre le Sauveur sous la forme la loi de Jésus-Christ, Scvèrelui envoya deux
de Jupiter; on le doit représenter sous une évêques de sa secte pour l'engager dans
autre ligure, et lui faire des cheveux clairs l'erreur. Mais ce prince, par une inspiration
et crêpés; à Constanlinople, sous le pontifi- de Dieu, reçut le baptême de ceux qui sou-
cat du même Gennade, il arriva un incendie tenaient le concile de Chalcédoinc; et comme
donl Marcien économe de l'église arrêta
, , ces deux évoques le pressaient toujours
le cours avec le livre des Évangiles , par ses d'embrasser leur doctrine, il usa de l'artifice
prières et par ses larmes, Deutérius pour- ,
suivant pour leur eu faire voir la fausseté. Il
suit-il, évoque des ariens de Conatantinople, feignit d'avoir reçu des lettres par lesquel-
au lieu de dire les paroles (jue le Sauveur les on mandait que saint Michel archan-
lui

nous a enseignées, eut la hardiesse de dire, ge était mort. Los deux évoques lui ayant ré-
en baptisant un homme nommé Barbas ' : pondu que cela n'était pas possible « Com- :

Barbas est baptisé au nom du Père, par le ment donc, leur rcplicpia-t-il, Jésus-Clirist

'Pulcheriœ Eudoxia imaginem llalris Christi Barbas vero arrepta fuga- exivit, et miracuhim
quamLucas aposlolus pinxerat llicrosoltjmis mi- hoc ciinclis significavil. Tlieodor., lih. Il Uisl.
Sil. Tlieodor., Hb. I Uisl. ' Timolhetis ab cnniris rogatits symholum fidei
' Deulerius episcoims arianorum Conslantino- trecentorumdecem eloclo Palntmpersingulas sy-
poli cum Uarbartun quemdam, sicdictum, hapli- naxes dici curavit, cum anlea semel ttiiilum in
zarel, rcprobala elcorrupla dominica Iradilione, anno in Parasceva, scilicel dominicœ passionis,
ausus est inter baplizandum dicere Uajilizatur : tcmpore quo episcopus caleckisabal, recitatum es-
Bnrl:a5, in nomino l'.itris fer Filium in Sancto set. IbiU.
Siiiritu; quo dicta aqua in colymhelhra cvanitit.
[vi" SIÈCLE.] HPIPHAXE SCIIOI>ASTI0UE THI'OnonE LECTEUR. , 103
n-t-il pu mourir sur la croix, s'il n'a pas ecclésiastique. L'extrait donné par Suarez
doux iiiihiros, puisqu'un augo no saurait ni dans ses notes aux ouvrages de saint Nil,
mourir ni nu'me soull'rirîi) Lns ôv('(jups, ne p. 614 énumère les L'ujjositions de la foi.
,

pouvant ri'|)li(iucr h cet ai'guniont, se retirè- Timoihée compte onze expositions. La pre-
rent confus. Deux autres évèqucs, dont l'un mière est celle de Nicée la deuxième celle ;

était orthodoxe, l'autre arien, entrèrent un d'Antioche ; la troisième est celle qui fut
jour en dispute. L'arien savait l'art de rai- présentée ;'i l'empereur Constant par ceux
sonner; mais l'orlliodoxe n'ayant que de la qui étaient avec Narcisse dans les Gaules;
piété et de lafoi, proposa à son adversaire laquatrième est celle qui fut envoyée par
de renoncera la dispute, et de se jeter tous Eudoxe h ceux qui étaient dans l'Italie.
deux dans le feu pour reconnaître par cette L'auteur compte trois expositions de Sir-
épreuve lequel des deux soutenait la vérité. mium, dont la première fut lue h Rimini
L'arien refusa cette condition mais l'orllio- ; après le consulat d'Eusèbe et d'Hypatius. La
doxe se jeta dans le feu, conféra du milieu huitième expositionfut faite a Sélcucus par
des flammes avec l'arien, sans sentir aucune ceux qui étaient avec Acace. La onzième
incommodité. Théodore parle de la transla- et dernière fut faite à Constantinople, avec
tion d'un grand nombre de reliques à Cons- l'addition qu'on ne pouvait point dire qu'il
tantinople savoir de celles de saint Timo-
, y eût en Dieu subsistance et essence. Théo-
tliée, de saint André, de saint Luc, de saint dore ajoute u Ulphilas, évéque des Gbths,
:

Jean Chrysostùme, et de sainte Anastasie. L souscrivit d'abord h cette Exposition, car


dit qu'on trouva, dans l'Ile de Chypre ', le précédemment il avait embrassé la foi de
corps de saint Barnabe, apôtre, sous un ar- Nicée, suivant en cela l'exemple de Théo-
bre qu'il avait sur sa poitrine l'Évangile de
;
phile, évéque des Goths, qui avait assisté
saint Mathieu, écrit de la main de saint au concile de Nicée et avait souscrit à ses
Barnabe même que les habitants de cette
;
décrets.] Le président Cousin a traduit en
ile obtinrent pour ce sujet que leur Eglise français l'Histoire de Théodore.
ne dépendrait plus de celle d'Antioche et ; 5. Aubert le Myre ' met Théodore, le lec- En ;.ie

teur dans le xiV siècle, disant qu'il vivait vers ''"" » '*"'
que l'empereur Zenon mit cet Evangile
dans l'église de Saint-Étienne bûtie dans , l'an 1320; ce qui est une erreur grossière,
l'enclos du Palais. puisque saint Jean Damascène, qui écrivait
Édiiions iio 4. h'Bistoire de Théodore le lecteur fut , , dans le vm" siècle, cite l'histoire de Théodore,
110 lil>loiro. .

imprimée à Pans, en 1544, avec celles d Eu- ainsi qu'on l'a dit plus haut. L'opinion com-
sèbe, de Socrate, de Sosomène et des au- mune est qu'il vivait vers l'an 520, et qu'il
tres historiens grecs, par les soins de Robert finit son Histoire avant le cinquième concile
Etienne, mais en grec seulement. On l'impri- général, c'est-à-dire avant l'an 533, à cause
ma en grec et en latin à Genève en 1612, et du titre de sainte mémoire ^ qu'il donne à

encore à Paris en 1673, de la version et avec Théodoret, dont les écrits, ni la personne ne
les notes de monsieur Valois. [Les extraits furent point épargnés dans ce concile. Ce
I
qui nous restent de l'Histoire Ecclésiastique qui le prouve mieux, c'est que Théodore
de Théodore, sont reproduits d'après Valois qui parle souvent du concile de Chalcédoine,
et Suarez,au tome LXXXVI de la Patrologie ne dit rien de celui de Constantinople, que
grecque, col. 157-2280, avec deux notices : nous connaissons sous le nom de cinquième
l'une tirée de Mai', Biblioth. Nova, tome VI, général. Aurait-il oublié ou négligé de par-
p. 152 et l'autre tirée de Fabricius dans la
;
ler d'une assemblée où il se passa tant de
notice de Mai. On retrouve la Préface que choses remarquables ?
Théodore avait mise à la tête de son Histoire

' Reliquiœ Barnabœ apostoli inventœ sunt in gelium autem illud Zenon in Palalio sub atia co
Cypro sub arbore ceralen, liabenles sub pectore rona condit. Tlieod. lib. [I Hist.
ecangelium Malthœi mantiipsius Barnabœ scrip- 2 Vixitautem Theodorus Anagnosles sive Lec-
tum : qua occasione Cyprii viclores vaserunt ut i tor sub annxitn millesimum Irccenlesimum vice-
Metrnpolis ipsorum liherum habeat episcopalum, Si'mi/m. Aubertus, ia Auctu aria, cap. ccccxxvu.
^ Tlieodoret. V.Tles. Proleg., pag. 20.
nec Antiocheni episcopi jurisdictionisubsit. Evan-
,

106 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.

CHAPITRE VI.

Sévère de Sozople, Jean de Scythople, Basile de Cilicie, Jean d'Egée, Jean et

Epiphane de Constantinople, [Épiphane de Chypre].

[Écrivains grecs Ju vi« siècle.]

Sivcre 1. L'hérésie cutychdcnne trouva dans Sé- Nous n'avons plus cet om-rage. Celui de
Soiople.
vère un si zélé défenseur, qu'elle l'a regardé Lampécius était intitulé : Testament. Sévère,
comme son second fondateur. Il était de So- obligé de sortir d'Alexandrie , se retira *

zople, ville de Pisidie. Né avec un esprit '


avec les siens dans
monastère de l'abbé
le
lurbident et inquiet, on le vit souvent chan- Néphale, qui avait depuis quelque temps
ger de sentiment et toujours prêt à brouiller. quitté la secte des acéphales pour se réunir
La première religion qu'il suivit * fut celle du à l'Église catholique. Les disputes qu'il excita
paganisme, dont on prétend ' qu'il ne se dans cette maison l'en firent chasser par les
délit jamais entièrement. De Sozople il passa moines avec beaucoup d'autres qui suivaient
à Béryte pom- y apprendre l'éloquence du les mêmes errem-s que lui. C'était en 310.
barreau et y étudier les lois. Il ne Lorna pas La même année, il alla à Constantinople,
1;\ son application il apprit encore la magie.
; autant pour chercher de l'appui à ceux de
On lui en lit des reproches. Pour s'en mettre sa secte, que pour se plaindre' des mauvais
à couvert, et éviter les châtiments de sa vie traitements qu'il avait reçus de la part des
déréglée, reçut ' le baptême à Tripoli, en
il catholiques. Plusieurs de ceux, qu'il avait
Phénicie, dans l'Église de Saint-Léouce séduits, le devancèrent dans cette ville;
martyr. Mais avant que la semaine de son d'autres l'y accompagnèrent, faisant en tout
baptême fût écoulée, il renonça à l'Église près de deux cents '"moines venus d'Orient.
catholique dans laquelle il l'avait reçu, et L'empereur Anasfase le reçut avec honneur,
se jeta dans le parti des acéphales. S'élant lui et ses moines qui, se sentant appuyés de
retiré dans un monastère composé de moi- la puissance impériale, jetèrent le trouble
nes de cette secte, situé entre Maïume et dans Constantinople. Us y tenaient" des as-
Gaza, il y embrassa l'état monastique. Les semblées particulières, baptisaient en secret
principaux maîtres qu'il eut dans l'impiété et en public tous ceux qui prenaient parti
eutychéenne fuient Marnas et Uomain qui ''
dans leur secte. Sévère, qui avait "plusieurs
gouvernèrent successivement le monastère fois anathématisé Pierre Mongus, ne rougit
d'Éleuthérople en Palestine. Etant allé ° à point alors de se joindre à ceux de sa com-
Alexandrie avec plusieurs des acéphales, il munion et lorsqu'on lui en faisait des re-
;

y mit le trouble dans l'Église. Les divisions proches il répondait que ce n'était point
,

qu'il causa parmi le peuple allèrent jusqu'à Mongus, mais Pierre d'.\paméeà qui il avait
former une guerre civile. Mais il pensa en dit analhème. La réunion de tous ces enne-
être la victime, et il ne put éviter que par mis de la vérité avait pour but de ruiner le
la faite la punition qu'il avait méritée. Les concile de Chakédoine, et de faire déposer
alexandrins l'anathémalisèrent avec ceux de Macédonius qui en prenait la défense. Ma-
sa suite , et prononcèrent contre eux toutes cédonius dit " anathème à tous ceux qui se
les censures ecclésiastiques. Il parait que déclareraient contre ce concile. Dorothée,
Sévère était dès lors prélre dans sa secte. moine d'Alexandrie '\ composa un écrit assoe

Du moins l'était-il ' quand il réfuta l'écrit cnllé pour soutenir les décrets de Ghalcédoi-
d'un nommé Lampécius, prêtre messalien. ne, et le présenta à Magna, femme du frère de

' Tom. V Concil., pag. 121. — - Ibid., pag. 40. III, cap. xxxui. — 9 ibid., cap. xliv. — '» Toiii. IV
— ' Ibid., pag. 120. — ' Evagr., lib. III, cap', xxxui. Concil., pag. IU4. - " Tom. V Concil., pag. 124.

— ' Liberalus, caj). xix. — ^ Tom. V Concil., pag 1! Libérât., cap. .\ix. — " Tlieoplian., in Chro-
121.— ' Photius, Cod. 52, pag. 41. — ' Evagr.,'lib. nog., pag. 104. — " Ibid.
,

[Vl* SIÈCLE.] SIÏVÈnE SOZOPLE , JEAN DE SCYTHOPLE , ETC. I(»7

l'empereur Anaslase, qui était demeurée évôtpie de Hiéraple, les avait trompés, on
conslante dans la foi catliolique. Nous n'a- au parti des eutychéens. Sévère,
les attirant

voHs plus ce livre. Anaslase le lut mais le ; pour se venger de ceux (pii refusaient de
trouvant plus fort et mieux ti'availh; qu'il ne s'unir ;\ lui, fil, par le ministère des ulliciiU'S

le pensait, il relégua Dorothée à Oasis, fai- de l'empereur Anaslase, charger de chaînes ''

sant des railleries sur son ouvrage, parce qu'il et bannir en divers endroits un grand nom-

l'avait intitulé Tra(j(kUe di' l'clnf présent des


: bre d'évêques, d'ecclésiasti(]ues et de moines.
choses. 11 arriva en 311 une sédiliou à Cons- Deux évêques, Cosine d'Epiphanie et Sévé-
tantinople ù roccasion du Trisagion. Sévère, rien d'Aréthuse, choqués des lettres synodi-
qui était alors en cette ville, écrivit sur ce ' ques de Sévère, se séparèrent de sa commu-
sujet à Soierie de Césarée, en Cappadoce, nion, et lui envoyèrent, à Autiochemème, im
piétcndaut que c'était Macédonius qui avait écrit par Icqnrl ils le déposaient de l'êpis-

excité ce luniulte. Liljérat fait mention de copat. Aurélius, archidiacre d'Epiphanie,


plusieurs autres lettres de Sévère contre Ma- pofteur de cet écrit, craignant les violences
cédonius et contre le concile de Chalcédoine. de Sévère, se déguisa et prit les habits d'une
Ily en avait une à Flavion d'Anlioche, une femme. Il parut devant Sévère, ayant un
à Maronas, lecteur, une troisième aux évé- voile qui lui couvrait entièrement le visage,
ques Élcusin etEutychius, et une quatrième pleurant, et jetant de profonds soupirs. En
à Œcnménius, avocat d'Jsaurie. Il assurait cet état, il lui donna l'acte de sa déposition,
dans ces que si l'on voulait auathé-
lettres comme s'il lui eût présenté une requête.
matiser le concile de Clialcédoiue, tous les Après quoi se glissant dans la foule, il se
acéphales se réunii-aient à l'Église. Flavieu sauva avant que Sévère eût pu savoir ce que
d'Anlioche, qui, pour apaiser les eutychéens contenait l'écrit. Anaslase informé de ce qui
irrités contre lui avait anathématisé en , s'était passé, ordonna à Asiatique, comman-

pleine Église ce concile, ne laissa pas d'être dant des troupes dans la Phénicie, de chas-
déposé par les eutychéens mêmes en .t12. ser les deux évêques de leurs sièges. Mais
-Anaslase en étant informé envoya aussitôt ce prince, sur les sages remontrances de cet
Sévère s'emparer du siège d'Anlioche ce : officier, changea de sentiment. L'évêque Sé-

qu'il fit ' au mois de novembre de la même vérien signa *, en 536, la requête que Paul
année. Le jour de son ordination*, il ana- d'Apamée, dans la seconde Syrie, présenta
thématisa le concile de Chalcédoine, et dé- contre Sévère à l'empereur Justinien. Élie
clara en même temps qu'il recevait VHénoti- de Jérusalem, pour avoir refusé les Synodi-
(fie de Zéuon qu'il entrait dans la commu-
;
qi/es de Sévère, fut déposé ^ et banui à Cuila,

nion de Timothée de Constantinople et de dans l'Arabie sur le bord de la mer Rouge.


Jean d'Alexandrie. Il mit dans les Diptyques L'empereui" Anastase, étant mort en 318,
le nom de Pierre Mongus et toutefois il re- ; Justin, son successeur, commanda, dès '" la
çut à sa communion Pierre d'Ibérie et les première année de son règne, que l'on arrêtât
autres acéphales ,
quoiqu'ils continuassent Sévère, et qu'onlui coupât la langue, en hai-
de se séparer de Dans
l'Église d'Alexandrie. ne des blasphèmes qu'il prononçait chaque
les Synodiques qu'il envoya aux évêques de jour contre le concile de Chalcédoine. Vi-
son patriarchat, et aux autres pour leur don- talien, maître de la milice, et Irénée, comte
ner avis de sou intronisation, et pour leur d'Orient, furent chargés de l'exécution de
demander leur communion, il anathémati- cet ordre. Mais Sévère, averti, s'enfuit d'An-
sait ^de Chalcédoine, et tous ceux
le concile lioche au milieu de la nuit. Dans une lettre
qui enseignaient qu'il y a en Jésus-Christ où il décrivait la manière dont ou l'avait
deux natures, avee leurs propriétés. Ces Sy- chassé de son siège, il se plaignait de la ri-
nodiques ne furent pas reçues de tous. Julien gueur avec laquelle Irénée avait exécuté sa
de Bostres en Arabie, Epiphaue de Tyr, commission, disant que cet otlicier avait fait
et quelques autres les rejetèrent. Les Isau- garder tous les chemins de peur qu'il ne
* dirent anathème à Sévère
res et à ceux qui s'échappât. Évagre " témoigne qu'U y avait
le suivaient reconnaissant que Xénaïas
, des personnes qui assuraient que Vitalien

• Evagr., lib. III, cap. xliv. — 2 Libérât., cap. six. "


Theophan., in Chronog., pag. 107. ^ Tom. — V
— ' Evagr., lib. III, cap. sxxui. — > Libérât., cap. Concil.. pag. 105. —
«Tom. VII Concil, pag. 89.
XIX, et tom. V Concil., pag. 121. — '=
iCvagr., lili. '" Evagr., lib. lY, cap. iv.
Ui, cap. xxxni. — ^ /jjd., cap. xxxi. " Ibid.
108 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
avait demandt* la langue de Sévère, pour se corps de Jésus-Christ demeura dans le tom-
veneer des di-clamalioii'; qu'il avait faites beau; voilà le second jour. Il y resta depuis
contre Environ huit ans après la mort
lui. le soir du samedi jusqu'au lever du du
soleil
de l'empereur Justin, c'est-à-dire en 535, dimanche; voilà le ti-oisième jour. Quoique
Sévère, ayant appris qu'/Viitliime, évéque de de ces trois jours il n'y en ait qu'un d'entier,
Trébizonde, avait été transféré sur le siège on ne laisse pas de compter trois jours, en
de Conslanlinople, en la place d'î-^piphane prenant une partie pour le tout. Nicéphorc
mort cette année-là, vint en cette ville avec vu deux* lettres de Sévère, l'u-
Calliste avait
quelques-uns des principaux de la secte des ne à l'empereur Justinien, l'autre à Théodo-
acépbales, savoir Pierre, chassé d'Apamée,
: ra, sa femme. Il y a des auteurs qui lui attri-
et un moine syrien nomiué Zoara. Ils y cau- bueut un li\ re des Itites du baptême et de la
sèrent beaucoup de désordres, et les abbés communion, à l'usage des clu'éticns de Syrie,
catholiques de Constantinople en portèrent imprimé en syriaque et en latin à Anvers, en
leur plainte au pape Au;apef. Le Pape vint 1572, par les soins de Guido Fabricius. Mais
sur les lieux, où ayant exyminé les plaintes cet éditeur lui a fait porter le nom de Sévère,
formées contre Sévère, il le ' condamna, et patriarche d'Alexandrie. Ce qu'on cite des
avec lui Pierre d'Apamée et Zoara. On ne autres écrits de Sévère est tiré des Chaînes
sait ce que Sévère devint depuis. L'empereur sur l'iùcriture, ou de quelques Recueils des
Justinicn, dans une constitution adressée au passages des anciens sous le nom de saint
,

pati-iarche Mennas, ordonna ' que les écrits Jean Damascène. Galéus cite quelques-uns de
de Sévère seraient bridés, et défendit de les ses discours sm* Isaïe. Sévère avait composé
transcrire sous peine d'avoir le poing coupé. un livre sous le titre d'Ami de la vérité, mais
Ecrits de 2. Ils étaient en très-grand nombre, com- où en ellél il s'appliquait a établir l'erreur et
SÉTère.
me on le voit parle catalogue qu'en a donné le mensonge. Il y réfutait tous les témoigna-
domMonlfaucon, dans celui des' manuscrits ges des Pères que l'on avait coutume d'ap-
de la bibliothèque du chancelier Séguier, qui porter, pour prouver que les deux natures
marque sous le nom de Sévère, patriarche sont unies indivisiblement dans Jésus-Christ
d'Antioche chef des acéphales, des homé-
, en une seule personne. Il en apportait d'au-
lies.des apologies des ouvrages de contro-
, tres qu'il avait corrompus et altérés. A l'é-
verse, des lettres, des commentaires sur cer- gard des passages qu'il n'avait pu corrom-
tains endroits de ri'Àriture et quelques au- , pre ou auxquels
, il ne pouvait répondre il ,

tres écrits. Ses homélies furent ' traduites en les rejetait comme tirés d'ouvragessupposés.
syriaque et distribuées en trois tomes dont , Cet écrit était, ce semble, pour contre-ljalan-
le premier eu contenait quarante-trois; le se- cer celui que Jean de Césarée avait fait pour
cond quarante-sept ; le troisième trente-cinq, la défense du concile deClialcédoine. Comme
en tout cent vingt-cinij. Anastasesinaïte rap- Jean s'autorisait dans cet écrit des Pères qui
porte " que Sévère donnait des
l'explication avaient enseigné une doctrine conforme à
trois jours de la sépulture du Sauveur. Il com- celle de ce concile, Sévère en composa un au-
mençait le premier au moment de sa mort, tre où il prétendait montrer que l'évcque de
,

disant que son âme était dès-lors descendue Césarée avait altéré plus de deux cents pas-
aux enfers, qu'ainsi l'on pouvait dire que dès sages de ces Pères. Les monophysites, répan-
cette heure qui était la neuvième du ven-
, dus dans l'Egypte et dans l'Orient, faisaient
dredi, Jésus-Christ avait été dans le cœur ou tant de cas du livre de Sévère qu'ils le préfé-
dans le sein de la terre. Il restait encore trois raient à l'Evangile de saint Jean, et qu'ils
heures de ce jour, depuis la neuvième jus- n'admettaient aucun témoignage des Pères
qu'à la douzième; parce que, suivant le pré- avant d'avoir vu ce que Sévère en avait dit.
cepte de la loi, les Juifs comptaient leur jour Anasiase sinaïte' parle fort au long de cet ou-
de fêle d'un soir à un autre. Depuis le soir vrage, dont il rapporte plusicui's endroits. Les
du vendredi jusqu'au coucher du soleil, le Syriens ont " encore aujourd'hui les écrits

' Tom. V Concil., pa;;. 14.


> Ibid., pag. 266. — gerunt. Il croit qu'il est l'muvre d'HésIcbius, jirê-
— " Bililiot. Sogneriuna
pag. S3-68. * Asse-
,
— Ire de Jérusalem. L'auteur y parle aussi du salibal
mani, Bibliul. Orient., pag. i!)i, loin. I. et de la variété des cxeinpluires de l'Évaugile selon
' Anaslas. Syuaïla Quœal. 152. [Galland a pu-
. saint .Man.l
blié, au tôine de sa Uiblioth. Script, vet. pag. 221-
.\I " Nieephor., lib. XVII Ilist., cap. vin.
227, cet l'crit sous le iioui de Concordanlia Evan- AnastasiusSyuaïta iii Oilego, \i[>. Lxvii.
gelislarum circa ea quœ in sepulcro Uomini cou- ' Moriuus, Prœfal. ad ordin. Jacobilarum.
[vi« siKCLE.] SfivftTlE DE SOZOPLE, JE AN DE SGYTIIOPLE, ETC. 109

de ce faux pnlriarclic on p;r;iii(l(' vimumu- de saint Antoine; deux sur sainte Droside,
lion, jusf|ii';\ l'appeler lii liOiiclie de Ions les et une sur saint Tlialléiaiis. 11 n'y a rien dans
doctotiis. "Nous aurons lieu de parler une ces opuscules (juc d'orthodoxe et d'édifiant.
seconde foisde Sëvère dans l'article des Con- Les homélies de Sévère étaient au nombre
ciles cit! Constanlinople et de Jérusalem où il de 128, sur lesquelles 43 ont été- perdues, et
fut condamne. les autres existent en syriaque dans la Bi-
[Angëlo Mai a publié plusieurs ouvrages bliothèque du Vatican, d'où le savant Cardi-
on fragments de Sévère d'Anlinclic. Voici ce nal espère les tirer et les publier; elles furent
qu'en ilit M. lionnetly 1° Fi'agments de'
: — traduites en syriaque par Jacob d'iulesse,
ses écrits contre Julien d'Halicarnassc , en suinonmié le Traducteur, lequel mourut en
latin {Spicilegium ronianum, tom. X). Sé- 710. Il existe en outre, en syriaque, un im-
vère un de ceux qui combattirent avec
fut portant ouvrage du même Sévère contre Ju-
le plus do science ce Julien d'IIalicarnasse, lien, évêque d'Halicarnas.se, chef de la secte
vers 510, chef de la secte des incorruptibles, des incorruptibles, c'est-à-dire de ceux qui
qui prétendaient que le Christ n'avait pas soutenaient que, avant sa passion et sa mort,
soufl'ert eb n'était mort qu'en apparence. Le le corps du Christ était incorruptible ; on y
Cardinal a tiré cet ouvrage d'un codex copte, trouve un grand nombre de textes inédits
avec l'aide d'un maronite, Franeois Malié- que M"' Mai nous promet de publier. — 9°
sébo. L'ouvrage est de longue haleine. L'é- Hornilia de sancta Dcimatre scmperqiœ virgine
diteur a tratluit d'abord le commencement Maria (S. R. X. 212), traduite du syriaque,
en entier ( 1C9-194 ), puis il s'est contenté éloignée de ces explications symboliques ou
d'extraire les passages où étaient cités des flguratives de la Bible, mises en vogue parles
témoignages inconnus des Pères, parmi les- — 10° Fragments des
écrivains protestants.
quels saint Cyi'ille et le pape Jules (194-201). Commentaires sur saint Lue, eu grec (Classis
— 2° Fragments grecs qui ne se trouvent atwtoresX. 408-457 470-473). — 11° Com-
et
pas dans la Clinîne des Pères grecs, publiés mentaiie sur le chap. 2 des .\ctes des apôtres,
en grec et en latin par Junius à Londres,
, , la Pentecôte (457-470). On y trouve d'excel-
éa 1637 et en latinj, ;i\ Venise, en 1587
;
,
lents passages, tels que celui contre les phan-
par Comilolus, dont le Cardinal relève plu- tasiastes et les manichéens (412-5 14); celui où
sieurs erreurs (201-7:28). — 3° Fragment il reconnaît le corps et le sang du Seigneur
d'une de Théodore (m. 722-
lettre à celle cachés sous les espèces eucharistiques ( 438-
728 ). —
4° Fragment de sa lettre à Jean, ar- 439). —
12° Extrait d'un Commentaire sur
chevêque d'Alexandrie, de la secte de Théo- Z>ame/ (Script. Veter 1. 30). —
13° Lettres
dore (728-729). —
0° Discours prononcé de- à Ammonius le scholastique et à l'évêque
vant l'empereur Anastase I"qui le favorisait Maron (33-39).]
(728-730). — 6° Formule de la vraie foi, a- 3. Jean ^de Scythople, scolastique, au lieu i,»"'!''''^''''

dressée à l'ami de Dieu l'empereur Anas- , de prendre, comme avait fait Sévère, le parti
tase et que celui-ci voulut faire passer com-
, de ceux qui avait abandonné l'Église, écri-
me une loi dans l'Eglise (731-738). Tous — vit contre eux, nommément contre Eutychès
ces opuscules de Sévère sont remplis de l'hé- et Dioscore, qui refusaient de reconnaître
résie des monophysites dont il fut le soutien. deux natures en Jésus-Christ. Son ouvrage,
Les manuscrits arabes contiennent un bien que nous n'avons plus était distribué en
,

plus grand nombre de fragments de cet au- douze livres. composé à


11 l'avait la prière
teur, et sur cette erreur, qui, née au v° siè- d'un patriarche nommé Julien, que l'on croit
cle, est encore vivace dans l'Orient. — 7° être le même qui gouvernait l'Eglise d'An-
Fragments de ses écrits perdus, en grec : tiochc vers l'an 476, et quimourut de douleur
S. V. IX (725-741). Les fragments donnés de voir cette Église, dont il était légitime pos-
ici sont extraits d'une Chaîne des Pères sur sesseur, ravagée par Pierre-le-Foulon, célè-
Isaïe et Ézéchiel. —
8° Quatre homélies tra- bre eutychéen cpii, appuyé de l'autorité de
duites du grec en syriaque et du syriaque en Basilisque, s'était emparé par force de ce
latin, publiées ici en latin (742-750). Le sujet siège. Jean de Scythople écrivait d'un style
de ces homélies est une sur les louanges
: pur et clair, se servant de termes convena-

' T,ible alphabétique analytique, etraisonnéed


es [L'éditeur.)
auteurs découverts et édités par le cardinal Mai. s
Photius, Cod. 95, pag. 250.
,

110 HISTOIRE GÉNÉRALE ITES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


blés à son omTage. Il combattait fortement de manichéisme d'avoir ré-
qu'il l'accusait ;

l'erreur, et n'abusait point îles lémoig-nages duit lecarême à trois semaines d'avoir per- ;

de l'Kcriture, se servant de raisonnements mis qu'on mangeAt de la volaille pendant ce


de logique quand l'utilité de sa cause le de- temps-là; d'avoir observé des cérémonies
mandait. L'auteur qu'il réfutait dans son païennes d'avoir trop donné à ses plaisirs
; ;

écrit n'avait pas mis son nom au sien; il s'é- de n'avoir pas altendu pour communier que
tait caché adroitement sous ce titre Trai- : achevé, et d'avoir pris les saints
le sacrifice fût

té contre Nestorius, dans le dessein de sur- mystères aussitôt après l'Évangile, pour al-
prendre les simples et de les engager à lire ler plutôt se mettre à table. Basile avait di-
son ouvrage sans méfiance. Pliotius, de qui visé son ouvrage en seize livres. Les treize
nous avons pris tout ce que nous venons de premiers, qui étaient en forme de dialogue,
rapporter de Jean de Scythople, conjecture combat [aient ce que Jean avait dit dans son
. que l'auteur du Traitv contre Nestorius était premier livi-e contre les erreurs d'Eulychcs
Basile de Cilicie, parce (pie depuis il composa et de Dioscore. Les trois derniers form.iient
un autre écrit, en forme de dialogue, contre un discours suivi, dans lequel Basile attaquait
l'ouviage de Jean de Scythople. « Ce dialo- ce que Jean avait dit dans ses second et troi-
gue, ajoute Photius, était digne de la religion sième livres. Le but de l'ouvrage de Basile
de Basile, c'est-à-dire de l'hérésie des euty- était de combattre l'union personnelle des
chéens dont Basile était partisan, n Jean de deux natures en Jésus-Christ, et de montrer
Scythople écrivit aussi avec autant d'érudi- qu'il est nécessaire d'admettre deux fils, l'un
tion que de piété pour la défense du con-
' fils de Dieu, l'autre fils de Marie. C'était se dé-

cile de Chalcédoine. Il n'en est rien venu jus- clarer ouvertement pour l'hérésie de Nesto-
qu'à nous. rius. Basile toutefois ne le nommait pas; mais
B«ic de 4. Il ne nous reste rien non plus des écrits il louait Diodore de Tarse et Théodore de
de Basile de Cilicie. 11 était prêtre de l'Eglise Mopsueste. Il ne condamnait pas non plus
d'Antioche dans le lemps que Flavien en occu- clairement saint Cyrille; mais il disait que
pait le siège, etqu'Anastase gouvernait l'Em- Jean de Scythople, contre qui il écrivait,
pire. l\ avait composé une flistoire ecclésiasti- s'appuyait principalement sur les douze cha-
(/î/e divisée ^ en trois livies, dont le premier qui pitres ou anathématismes de ce Père, parti-
commençait en 450 , époque à laquelle Mar- culièrement sur le douzième, dans lequel il
cion fut élu emperem-, finissait à la mort de parle de Pieu, comme ayant soufl'erlla mort.
saint Simplice, évoque de Rome, arrivée eu Si Basile de Cilicie est le même que celui

483. Le second renfermait ce qui s'était passé que ''Suidas dit avoir été évoque d'Irénople,
depuis Zenon jusqu'en S18, année où l'empe- il faut lui atlribuer encore un traité contie
reur Anastase mourut. Le troisième racontait Arcbélaiis, prêtre de Colonia. Suidas n'en
l'élection de Justin à l'fc]mpire, avec quelques dit pas le sujet mais il assure que ce Basile
;

circonstances du commencement de son rè- ressemblait à celui de Césarée en esprit et


gne. Pour preuve des faits qu'il avançait, en vertu ; ce qui, ce semble, est une preuve
Basile rapportait les lettres que des évoques suffisante pour distinguer le Basile dont il
s'étaient écrites mutuellement ce qui cntlait : parle, de Basile, prêtre d'.Vntiochc, quoiqu'ils
beaucoup sa narration, la coupait, en inter- aient été l'un et l'autre de Cilicie; l'un par
rompait le fil, et la rendait obscure et em- sa naissance; l'autre, parce qu'il étaitévéquc
barrassée. Ce n'était pas là son seul défaut: d'Irénople, ville de Cilicie.
le style en était peu poli et fort inégal. L'ou- 5. Photius ' parle d'un autre historien j,., d'ft-
**''
vrage de Basile contre Jean de Scythople ne nommé Egée qu'il dit avoir été pi'ètre, et de
Viilait pas mieux, il était écrit' d'un style bas, la secte des nestoriens ". Il avait écrit l'his-
et plein de fautes. Ce n'élail presque qu'un toire ecclésiastique de son siècle en dix li-
composé de sophismcs et d'invcclivcs. Il l'a- vres, dont les ciuq ]Hemiers commençaient
vait dédié à un nommé Léonce, qui lui avait au règne du jeune Théodose et à la naissan-
persuadé de l'cnlreprendrc. Entre les inju- ce de l'hérésie de Nestorius, et finissaient à
res dont il chargeait Jean de Scythople, Pho- l'année de la déposilion de Pierre-le-Foulon
tius fait remarquer qu'il l'.ippelait chicaneur ; c'est-à-dire, en 477 et 478, ou peut-être en

• Pliotius, Cnd. 23), pag. 890. — ' Idem, Cad. ' il y n ici faute des oopistcs; il faut
Kviilpinniciil
i2, paft. 27. -» Iiiem, Cod. 107, pag. 282 et 283. lirp dos oulyclKiou?. Voypz le vol. VIII, pag. HK, et
Suidas, ia fasilio. — • Phctius, CoJ. 41, pag. 27. '•i-dcs?ou9, pag. Ml. (L'édileur.J
[w siiccLE.] SliViÏRE DE SOZOPLE, JEAN DE SCYTIIOPI.E, E'Iï:. 111

484 : carPieiTC-le-Foulonfut coniliunn(5 plus nouça que le lendemain, qui était le seizième
d'une fois. Le style de Jean d'I-^iii^o ëlail net jour de juillet 518, on célébrerait la mémoi-
et fleuri. En parlant du concile d'Eplièse, il re des saints évêques qui s'étaient assemblés
rapportait exactement ce qui s'y était passé, à Cludcédoinc, et qui, avec ceux de Conslau-
mais il faisait voir ;\ l'occasion du faux con- tiiiople el d'Eplièse, avaient contiinn' In Sym-
cile tenu en la mémo ville, appelé onlinairc- bole de Nicée. Il fit mettre dans les Diidyqnes
ment le brigandage d'Kphèse, son attache- les noms de ces trois conciles et celui de Ni-
ment pour rh('>r<'sie, on donnant des éloges cée, ensemble les noms d'Eiiphémius et de
à cette asseiulilée, i\ Dioscoi'(\ et ;\ ses secta- Mac(''donius, ses préd(''cesscurs, et celui du
teurs. Il hlâmait au conta-aire le concile de pape saint Léon. Pour autoriser ce qu'il avait
Clialcédoinc, dont il rapportait aussi les actes. fait, il assembla un concile de quarante évê-

11 composa '
mémo un écrit exprès pour en ques, qui se trouvaient h Constantiuo[ile. Il

combattre les décrets. .\ l'égard d(>s cinq y fut ' ordonné que la mc'moirn des patriar-
derniers livres de ?,on Histoire Pliotiiis ne , ches Eu|ihémius et Macédonius serait réta-
nous en a rien appris, parce qu'il ne les avait blie; qu'on annulerait toutes les procédures
pas lus. Il ne nous reste des écrits de Jean faites contre eux, et que l'on dirai! h Sévère,
d'I'^géc qu'un seul passage lapporti! dans la faux évoque d'Aulioche nu anatbème l'ter- ,

cinquième action ^ du second concile de Ni- nel. Ensuite le patriarche Jean écrivit tous ;\

cée, et un dans le second livre de VHistoire les métropolitains, pour leur faire part du
de Théodore, lecteur, qui dit que Jean d'l']gée résultat du concile, dont il leur ' envoya les
était de la secte des eutycbécns. Il rapporte' Actes, les priant de les confirmer. Il nous
d'après lui, que l'empereur Anastase tira de reste deux de ces lettres, l'une* Jean, pa- î^i

Sévère un écrit, par lequel il lui promettait triarche de Jérusalem; l'autre à Épiphane,
avec serment qu'il ne condamnerait point le évêque de Tyr. Elles sont très-courtes, parce
concile de Chalcédoine; que néanmoins le que les Actes du concile qu'il y avait joints
jour de sou sacre, il le condamna publique- suffisaient pour donner une pleine connais-
ment dans l'Église, à l'instance de ses par- sance des affaires qu'on y avail traitées. En
tisans, qui étaient comme lui de la secte des S19, les légats, que le pape Hormisdas avait
acéphales. euvoyés ;\ Constantinople pour la réunion des
Ce prince en agit tout autrement arec
6. Églises d'Orient avec celles d'Occident, étant
Jean de Cappadoce, prêtre de Constantinople, arrivés, Jean de Constantinople reçut le For-
et syncelle de Timothée, patriarche de cette mulaire qu'ils devaient faire signer à tous
ville. Celui-ci, qui avait été substitué Macé- .'i ceux qui voudraient se réunir. Il voulut d'a-
donius envoyé en exil à Gangres, étant mort boi-d faire son acceptation en forme de lettre ;

le 3 avril ol7, Jean de Cappadoce'fut ordon- mais, après quelque contestation avec les lé-
né ' à sa place le 24 du même mois. Mais, gats, il convint de mettre seulement ' une
avant son ordination, Anastase lui fit con- petite préface au libelle ou au Formulaire tel
damner le concile de Chalcédoine. Le peuple, que le Pape l'avait envoyé. Il déclarait dans
au contraire lui demanda avec de grandes
, cette préface qu'il était entièrement d'accord
instances d'anathématiser Sévère. Jean de- , avec le Pape, qu'il recevait les quatre conci-
puis la mort d'Anastase arrivée le 9 de juil- les, et condamnait tous ceux qui avaient con-
let 318, n'eut aucune peine à satisfaire le peu- trevenu en quelque manière que ce fût à
ple, Il dit^ anatbème à Sévère en présence de leurs décrets, ou qui s'eflbrçaient d'en retran-
douze évéques et comme il n'avait condam-
; cher la moindre syllabe. Il décrivit de sa main
né le concile de Chalcédoine, que parce qu'A- leFormulaire du Pape et le souscrivit, en da-
nastase l'y avait contraint, il déclara devant tant sa souscription du 28 de mars 519, sous
tout le peuple assemblé -dans l'Église, qu'il le consulat de Justin et d'Eutharie. La même
reconnaissait tous les conciles qui avaient année il au pape Hormisdas pour le
écrivit '"

confirmé la foi de Nicée, principalement ceux congratuler sur la réunion des Églises, en lui
de Constantinople, d'Eplièse et de Chalcédoi- faisant honneur de cet ouvrage. Dans une
ne. Il fit plus, à la demande du peuple ilau- , autre lettre, datée du quatorzième des calen-

' Photius., Cod. S5, png. 47. ^ Tnm. VII — Con- ' Tom. V Concil ,
pag. 179, 182. - « Ihid., pag.
cil, pag. 369. —
3 Tlieodor. Lector. lib. II. IG2, lfi3. — T Ihid., pag. lS(i. - 8 iMd.,pag. 186.
Theoplian., in Chronog., pag. 112, el VirtorTu-
' » Toui. IV CodC!'/, pag. 14S0.
ucns., inC/iroHi\,,p.'ig. 337. 1» ThWI
10 Ihid., i.orr
pag. I/.01
1491.
112 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
des de février, sous le consulat de Vitalien et en latin cinq
• lettres qu'il écrivit à ce pape,

de Rustique, c'est-à-dire du dix-ncuviôme de tant pour lui donner avis de son ordination,
janvier de l'an 320, il marquait 'au Paiic que que pour lui déposer sa croyance, et lui dé-
la fête de Pâques devait se célébrer cette clarer qu'il condamnait tous ceux dont le
année-là le 19 d'avril. Jean mourut vers le Pape avait défendu de réciter les noms dans
même temps, ayant occupé le siège de Cons- les Dyptiques. En 523 le pape Jean étant
,

tantinople, environ trois ans. venu à Constantinople', le patriarche Épi-


Éplphane, 7. Son successeur fut le prCtre Épiphane, phane M'invita à faire l'oUice mais le Pape
;

Con>UntiOD-
pi. (K) jpla<
son sjTiceUe. Il fut élu par l'empereur Jus- ne l'accepta qu'après qu'on lui eût accordé
Udetb'ii-'re.)
tin, du consentement des évéques, des moi- de s'asseoir à la première place. Épiphane
nes et du peuple. .Avant de parvenir à l'é- mourut en Tt'Aa. [Les lettres à Hormisdas se
piscopat il avait été chargé de l'instruction trouvent parmi les lettres de ce pape, tome
des catécluimèncs dans l'église de Constan- LXXll de la Patrologie latine col. 497, 307,
,

tiuople.L'ApocrisiaircdeDorolliée,évôquede 523. La sentence portée par Épiphane et par


Tliessaloniijue, ayant demandé, en 319, aux le concile assemblé contre Sévère et Pierre,
Vojei l'«r* légats du pape Hoimisdas, des députés pour se lit au tome LXXXVI de la Patrologie grec-
t<cledu paie
HoriDUdvt recevoir les libelles ou souscriptions au for- que, col. 783-786, d'après Mansi, tom. VIII
mulaire de ceux qui voudraient accepter la Concit., pag. 1137. Assémani énumère qua-
réunion, Épiphane, n'('tant encore que prêtre, rante - cinq canons parmi les œuvres d'E-
fut envoyé avec l'évêque Jean, un des légats, pipliane de Constantinople, tora. I Biùl.
et le comte Licinius. Il accepta lui-même, de- orient. pag. 619. A. la suite de la sentence
,

puis son élévation sur le siège de Constan- rapportée dans la Patrologie grecque, on trou-
tinople, les conditions de la paix conclue par ve une exposition des préséances des patriar-
Jean, son prédécesseur avec le pape Ilor-
, ches et des métropohtains, par Épiphane de
misdas, et les ratifia dans un concile qu'il Chypre. Elle est publiée d'après Constant
tint dans sa ville épiscopale, où il reçut aussi Porph., lib. Il De Aulœ Byzantitiœ cœretnon.,
les décrets de Cbalcédoine. Nous avons de lui édit. Bonn., tome I, pag, 791.]

CH.VPITRE VU.

Saint Jean I [526], saint Félix IV [529], saint BonifaceII[531], saint Jean II [535]

et saint Agapet [ 536], évêqnes de Rome.

1. Le pape saint Jean 1" du nom, avait suc- dres donnés contre les ariens, et leur faire
Saint leso
I*', pap«, en
cédé à Hormisdas, le treizième d'août de l'an rendre leurs églises. Saint Jean y alla accom-
e23.

323, après une vacance de scptjours.il était* pagné de quatre sénateurs, qui tous avaient
natif de Toscane, et fils de Constantius. Son été consuls. Toute la ville de Constantinople
épiscopat fut de deux ans neuf mois et dix- alla le recevoir jusqu'à douze milles, avec

sept jours. Il arriva en 325 que l'empereur des cierges et des croix. L'empereur Justin se
Justin, par un grand zèle pour la religion prosterna devant lui, et voulut être couronné

chrétienne, voulut obliger les ariens à se con- de*^ main. Le Pape, à l'invitation du patriar-
consacrer leurs églises à l'u-
vertir, et faire che Epiphane, célébra l'oflice solennellement
sage des catholiques. Théodoric,roi(l'Ralie, en latin le jour de Pâques, et communiqua
qui était arien, irrité du projet de Justin, avec tous les évoques d'Orient excepté Ti- ,

menaça de traiter de môme les catholiques mothée d'Alciandrie, ennemi déclaré du con-
en Italie, et de la remplir de carnage. Il cile de Cbalcédoine. On n'oublia rien dans
obligea» donc Pape d'aller lui-même a
le Constantinople pour faire honneur au Pape:
Constantinople pour faire révoquer les or- la joie y fut universelle, parce que les an-

< Tom. IV Concil; pap. 1521. ' Lib. Pontifical., tom. IV Concil. pag. IGOO.
' Ibid., |.a).'. 1537, 1545, 1546, 1555.
1534, » Ibid.
' .MareelliniC/ironic, ad an. 525.
,

[vi' sifccr.E.] CIIAPITllK VII. — S.VTNT JlîAN I, SAINT FKLIX IV, ETC. 1I.T

cions des Grecs assuraient que depuis le tiiiuuii' 1.1 précédente, une compilation tirée
grand Constantin on ne
et saint Sylvestre , en [)arlie (les lettres de saint Léon, et en par-
se souven.iit pasijm! le Vicaii'e de saint l'ierrc! tie do la seconde Kpitre de saint Paul aux Cn-
fui venu tians la Clii"ïce. Le pape .lean avec les rinlliiiMis; qu'elle estcontraire à la vérilc'" de
(|uatre sénateurs qui l'accompagnaient, ayant l'histoire, en ce qu'elle suppose que le pape
repn^senté i\ l'empereur Justin le péril dont Jean, au lieu de demander l'empereur Jus- .'i

l'Ilalie était lueiuicée au cas que les ordres lin la rt'vocaliou de son édit contre les ariens,

qu'il avait doniu'-s contre les ariens l'iisscnl connue Théodoric l'en avait chargé, aiuait
exécutés, en obtint la révocation, et par k\ au contraire contribué à l'exécuter, en fai-
l'Italie fut délivrée. Cependant le roi Tliéo- sant faire lui-même en Italie, ce que Justin
doric '
lit mettre en prison les deux plus il- avait ordonné de faire dans l'Orient et ;

lustres sénateurs, Symmaque et Hoëce, son qu'elle tend à déshonorer la mémoire de ce


gendre, accusés l'un et l'autre de crimes d'É- pape, en le faisant passer pour un homme
tat. Boëce fut arrêté ;\ Pavie et mis h mort de mauvaise foi. Il s'était engagé de la part
vers l'an 32.5; Symmaque eut le mèuie sort. du roi d'Italie, A empêcher que les ariens ne
Ce prince lit encore arrêter le pape Jean à fussent d('^pouillésde leurs églises en t)rienl;
sou retour avec les quatre sénateurs appa- ;
la lettre suppose qu'il fit tout le contraire;
remment comme complice de Boëce et de que non-seulement il ne demanda point que
Symmaque, c'est-A-dire, de vouloir soute- les églises fussent conservées aux ariens
nir la dignité du sénat contre les entre- mais (ju'il aida à les leur ûler en les consa-
prises de Tiiéodoric. Mais Théodoric, crai- crant à Constantinople et ailleurs pour les
gnant l'indignation de Justin n'osa les , catholiques. D'ailleurs on fait faire au Pape
f.iire mourir il se contenta de les tenir
: en dans celte letlre ce raisonnement ridicule :

une rude prison oii le pape Jean mourut le « J'aiconsacré des églises des ariens à Cous-
27 mai 326. Son corps fut transporté de Ra- tanliuople, au désir de Justin, prince catholi-
vcnne à Rome et enterré à Saint-Pierre. Il
, que consacrez-en en Italie, malgré l'oppo-
:

est honoré dans l'Église comme un martyr. sition de Théodoric, prince arien.» Saint Gré-
Nous avons deux lettres sous son nom, goire de Tours 'dit qu'aussitôt que Jean eut été
que l'on regarde comme supposées ^ La pre- placé sur le Saint-Siège il consacra plusieurs
mière, qui est adressée à l'archevêque Za- églises des ariens pour les catholiques : ce
charie, est composée des paroles des lettres qui irrita tellement Théodoric qu'il en-
le roi

d'Innocent I", de Zosime, de Symmaque, et voya des gladiateurs par toute l'Italie avec
du cinquième concile tenu à Rome sous le ordre d'égorger tous les catholiques qu'ils
pontilicat de ce dernier. La date en est faus- trouveraient. L'anonyme donné par M. de
se car elle est du quinzième des calendes
: Valois à la suite d'Amien Marcellin, raconte
de novembre sous le consulat de Maxime et la chose autrement. Il dit ' que le roi Théo-
d'ÛIybrius , c'est-à-dire du 18 octobre 323. doric, informé de
de l'empereur Justin
l'édit
Or, Olybrius ne fut point consul cette année- pour chasser les ariens de l'Empire, envoya
lù, ce ne fut qu'en 326. La seconde est aux le pape Jean à Constantinople pour détour-

évèques d'Italie qu'il exhorte à défendre la ner ce prince de l'exécution de cet édit;
foi catholique contre <!es ariens, et à consa- mais que Justin ayant persévéré dans sa ré-
crer leurs églises comme on le faisait en
, solution, Théodoric fit mettre le Pape en pri-
Orient. EUe est datée du troisième des ides son à son retour à Ravenne. Il semble que
de juin sous le consulat de Maxime et d'O- dans la variété des opinions sur ce fait, il
lybrius. Cette date est fausse, puiscjue Maxi- vaut mieux s'en tenir à ce qu'en dit Anastase
me et Olybrius ne furent pas consuls ensem- le Bibliothécaire, qui assure que le Pape ob-

ble. Maxime le fut en 523. Mais Jean n'ayant tint de l'Empereur ce qu'il lui demanda de

été fait pape qu'au mois d'août de cette année, la part du roi d'Italie, et que, par là, celle
il ne put écrire eu cette quahté le troisième province fut délivrée des maux dont Théo-
des ides de juin, c'est-à-dire le onzième de doric l'avait menacée.
ce mois. Il faut ajouter que cette lettre est, 2. Le s\iccesseur de Jean siu- le Sainl-
IV, i«l.o.

• Libérât., Pontifical., ibid. ' Gregor. Turonensis, lib. I De Gloria martyr..


' On le tniuve Jau3 Mansi, tom. VIII, col. COS- cap. XL, png. 7(J6.

G07. (L'éditeur.) * Ibid. in Notis. cap. xl, lil). I.

XI. 8
,

HISTOIIŒ GÉNÉRALE DES AUTECTS ECCLÉSIASTIQUES.


Siège fut Félix IV, du ' pays des Samnitcs, noncs de février, c'est-à-dire du troisième
fils de Castor. Le roi Théodoric le choisit' de ce mois. Elle confirme un règlement que
après une mûre délibér;Uion car, encore : saint Césaire avait fait ou plutôt renouvelé,

qu'il ne fût point dans l'Église catholique, il perlant défense d'élever à l'épiscopat cens
ne voulait pour évoques que des personnes qui n'avaient pas auparavant servi dans le
d'un mérite distingué. Le sénat de Rome ap- clergé. Ce règlement était appuyé non-seu-

prouva le choix que ce prince avait fait de lement sur les anciens canons de l'Église, et 1 Tlm
Félix. Ainsi il fut ordonné le 12 juUlet de l'an sur l'autorité de saint Paul qui défend à
556. Théodoric ne survécut que trois mois au Timolhée d'imposer l'-ghement les mains à
pape Jean se voyant près de mourir, il fit re-
;
jKTsoitne; mais encore sur la fâcheuse expé-

connaître pour roi des Goths AthSlaric son pe- rience que l'on avait que quelques-uns de
tit- fds qui n'était Agé que de huit ans. Nous
ceux que l'on avait promus au sacerdoce,
avons ' une de ses lettres adressées au sénat sans les avoir auparavant éprouvés suflisam-
de Rome dans laquelle il témoigne avoir pour ment, avaient mené une vie toute séculière
agréable l'élection qu'ils avaient faite de ce- depuis leur promotion. Le Pape donne aussi
lui que Théodoric avait désigné pour évêque pour raison de confirmer ce règlement, la
de Rome. Félix mourut après trois ans et diflicullé qu'il y a d'enseigner les autres
deux mois de pontificat. [Il est honoré comme quand on ne s'est pas doniié le temps d'ap-
sain!.] Il avait bûli dans Rome, en un lieu ap- prendre, et do savoir commander quand on
pelé la rue Sacrée, l'église de Saint-Cùme et n'a pas appris à obéir.
S^lm Ro
Saint-Damicn, de Saint-Satur-
et rebâti celle 3. .\près la mort de Félix IV, arrivée le hco II, i-a'
'

nin, mîirlyr, qui avait été consumée par les 12 d'octobre 529, on élut pour lui succéder
llamines. Dos trois lettres que nous avons
'
Bonifacc 11', Romain de naissance, et fils de
sous le nom de Félix IV, il y en a deux qui Sigisvult, qui était de la race des Goths. Il
sont rejetées Comme apocryphes, savoir les fut ordonné le quinzième jour du même
deux premières l'une est adressée ù tous
:
mois dans la Basilique de Jules mais en mê- ;

les évoques, l'autre ù Sabine. Elles sont tou- me temps, un autre parti choisit un nommé
tes les deux datées du consulat de Larapa- Dioscore, qui se fit ordonner dans la Basili-
dius et d'Oreste la première des calendes
:
que de Constantin. Le schisme ne dura que
de mars, du 1" de ce mois de
c'est-;\-dire vingt-neuf jours, Dioscore étant mort le dou-
seconde du 11 des calendes de
l'an 530; la zième de novembre suivant. On croit que
novembre, c'est-à-dire du 21 octobre de la le roiAthalaric donna occasion à ce schis-
môme année, neuf jours après la mort de me en voulant, à l'imitation de Thi''odoric ,

Félix, car mourut le i2 du même mois.


il avoir part à l'élection d'un pape. Quoi qu'il
Ces deux lettres ne sont que des lambeaux en soit, Boniface fit analhématiser Dioscore
de celles de Sirice, d'Innocent, de saint Léon, après sa mort puis ayant assemblé un con-
;

de saint Grégoire, auxquels on a joint un cile, il y fit passer un décret qui l'autorisait à
long passage du troisième livre des Rois, se désigner un successeur. En vertu de ce
et qiielques autres tirés du premier chapitre décret, signé des évoques, il les obligea de
de l'Ecclésiastique et de l'Épître aux Ephé- reconnaître le diacre Vigile. Mais ce décret

siens. La troisième a passé quelque temps fut cassé dans un concile qui se tint quelque
sous le nom de Félix III, parce qu'elle était temps après, comme étant au déshonneur
datée du consulat de Boëce, qu'on suppose du Saint-Siège et contraire aux saints ca-
être arrivé en 487; mais il n'arriva qu'en nons. Boniface s'avoua même coupable de
510, seul temps auquel saint Césaire, à qui ce qu'il s'était nommé pour successeur Vi-
cette lettre est adressée, était déjà évêque. gile, et brûla en présence de tous les évo-

Un ancien manuscrit au lieu de Boëce porto ques, du clergé et du sénat, le décret qu'il
Manorlius qui fut consul en 528, la vingt- avait fait passer pour s'autoriser à ce sujet.

cinquième ou même la vingt-septième année Boniface on 531, un concile à Rome, où


tint,

de l'épiscopat de saint Césaire. La date de les plaintes d'Élienne de Larisse fm-ent exa-

la lettre du pape Félix est du troisième des minées. Les évéques d'Afrique lui firent une

• Lib. Poniif., tom. IV Concil., pag. G19. Toin. IV Concil., pag. 1G50 etseq. [DansMausi
> Caâfioilur., lib. III Var. Ejiist. «5, pag. 231, tom. VIII, col. 6u8-tiC9.]
lom. 1 E<lil. Vend. an. {li'i. - » Iliid. 5 Lil>. Ponlifical.. tom. IV Concil, pag. 1682.
[vi- siKCLE.] CllAPITRR \U. — SAINT JEAN I, SAINT FÉLIX IV, RTC l\l

d('putalion pour obtenir de lui iiuo conslilu- Les censures d'Eulalius sont précédées du
tion qui obli:;cùt IMvâquo de CarUiaj^e do Formulaire qu'Hormisdas fit souscrire pour
faire tontes choses av(îc le conseil du Siége- la réunion mais il n'y est pas en entier elles
; ;

Aposlolique. lléparatus était alors évoque do sont suivies d'un long fragment de la lettre
Cartilage. Le Pontitical* met la mort de saint du môme Pape, qui fut lue dans l'action cin-
Bonifacc au 17 d'octobre de l'an 531 d'au- ; quième du concile de Constantinople' sous ,

tres la mettent dans le mois de décembre de Mennas; en sorte que cette requête est un
la même année. On trouve dans les Recueils ramas de ditféronts morceaux. La date seule
des conciles une lettre de ce pape h Kula- en prouve la fausseté, puisqu'elle est du
lius, évôcpie d'Alexandrie, par laquelle il lui troisième consulat de Justinien, qui n'arriva
fait part de la réunion de l'évèque de Car- qu'après la mort de Boniface IL Mais on ne
thage avec l'iiglise romaine, supposant que, peut former aucun doute sur la lettre de ce
dès le temps d'Aurèle, évoque de cette ville, pape il saint Césaire d'Arles. Cyprien, diacre
'
l'Église d'Afrique n'était plus dans la com- de cette Église, en fait mention dans la Vie
munion de celle do Rome. Cela seul suffit de ce Saint. C'est d'ailleurs une réponse ;\ la
pour prouver la supposition de cette lettre, lettre que ce saint évèque avait écrite i\ Fé-

puisqu'il est constant que rÉglisc d'Afrique lix,prédécesseur de Bonifacc, pour le prier
n'a pas cessé nu moment d'être unie de de confirmer, par l'autorité du Saint-Siège, la
communion avec les papes Bonif.icc l", Cé- doctrine de la grâce prévenante, en décla-
lestin et tous les autres qui ont gouverné rant que c'est elle qui nous inspire le com-
l'Église de Rome jusqu'à saint Bouiface IL mencement de la foi et de la bonne volonté.
Pourne rien dire des lettres de saint Léon et Saint Césaire se crut obligé de s'adresser
des autres pa[)es aux évoques d'.\frique, il l;\-dessusau Saint-Siège, parce que quelques
suftira de remarquer ici que Symmaque ,
évèques des Gaules soutenaient que l'on de-
qui occupait le Saint-Siège quelques années vait attribuer le commencement de la foi à
avant Boniface II, envoyait tous les ans aux la nature et non pas' à la grâce. Le prêtre et
évèques d'Afrique relégués en Sardaigue par abbé Arménius fut porteur de cette lettre,
le roi Trasamond, de l'argent et des habits. qui est datée du huitième des calendes de
Non-seulement il leur écrivit *, mais il leur février, sous le consulat de Lampadius et
envoya encore des reliques de saint Nazaire d'Oreste, c'est-à-dire du 28 de janvier 330. Il
et de saint Romain. Il faut ajouter que l'on parait, par le commencement de cette lettre,
ne connaît aucun évèque d'Alexandrie qui que saint Césaire en avait écrit deux sur le
ait porté le nom d'Eulalius que cette lettre
;
même sujet, l'une à Félix IV, l'autre à saint
n'est qu'un tissu mal assorti de divers en- Boniface mais avant qu'il sût son élévation
II,

droits de celles de saint Léon, d'Hormisdas, au pour le prier de presser Félix


pontificat,
et même de saint Grégoire, postérieur à Bo- de lui faire réponse. Elles sont perdues tou-

niface II, et que l'imposteur qui l'a fabriquée tes deux. Le pape saint Boniface dit dans la
n'a eu en vue que de ternir la mémoire de sienne que les Pères, surtout saint Augustin et
saintAugustiUjdesaintFulgence, de saintEu- les Papes ses prédécesseurs, ont prouvé avec
gène de Carthage et de* tant d'autres grands tant d'étendue que la foi même est un don
évèques, qui ont souffert dans la persécution de Dieu, qu'il n'ètaitpluspermis d'en douter,
des Vandales, en les faisant passer pour des ni à lui de s'étendre sm- cette matière; d'au-
schismatiques, et conséquemment indignes tant que Césaire lui-même avait démontré ,

d'être honorés dans l'Église. Il faut porter le cette vérité par plusieurs passages de l'Écri-
même jugement de la requête qu'on sup- ture rapportés dans sa lettre qu'il y avait
;

pose avoir été présentée à Boniface II par marqué que les évèques des Gaules assemblés
Eulalius, dans laquelle il excommunie tous en concile à Orange, étaient convenus unani-
ceux de ses prédécesseurs ou de ses succes- mement que la foi par laquelle nous croyons
seurs, et tous autres qui auraient attenté ou en Jésus-Christ est conférée parla grâce pré-
qui attenteraient aux privilèges de l'Église veuaute de Dieu, et que, sans le secours de
romaine. Pouvait-ou prêter à un évèque un cette grâce, nous ne pouvons rien faire de
langage et des prétentions plus ridicules ? bon selon Dieu, ni le vouloir, ni le commen-

' Lib. Pontifical., tom. IV Concil., pag. i682. ' Tom. V Concil., pag. iâl.
» Apud Eunod., lib. II Epist. 14. * Cyprian., iu Vita Cœsar., lib. I, num. 33.
110 IIISTOIRF- GÉNf:RALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
ccr , le Sauveur ayant dit : Sans moi vous ne que promettait quelque chose par sol-même
sauriez rien faire. «11 est donc '
ceilain et ca- ou par une personne interposée, pour obtenir
tholique, ajoute le p ipe Ronifacc, que dans un évêché, le contrat serai! déclaré nul* avec
tous les liieas dont la foi est le chef, la misé- restitution de ce qui aurait été donné, .\tha-

ricorde de Dieu nous prévient lorsque nous laric permet néanmoins aux olliciers de son

nevou]onspas,arniquenousvoulions; qu'elle palais, de prendre jusques à trois mille sous


est dans nous lorsque nous voulons, et qu'elle d'or pour l'expédition des lettres, lorsqu'il y
nous suit afin que nous persévérions dans le aura de la dilliculté touchant l'élection du
loi. LTui. bien.» Il prouve celte doctrine par divers pas- Pape, à condition que les olliciers riches n'eu
M«.<cii.
sages de l'Écrilure, et dit qu'il ne peut assez prendront rien du tout, puisque c'est du bien
s'étonner qu'il y ait encore des personnes des pauvres. Mais à l'égard des autres pa-
qui pensent coutrairciuent ;\ cette doctrine triarches, lorsqu'il sera nécessaire d'expé-
et qui, infectées d'une ancienne erreur, attri- dier aussi dans le palais, des lettres pour leur
buent à la nature ce qui est un bienfait de la élection, les officiers pourront prendre jusgups

Rom. 11. grâce de Jésus-Christ, l'auteur et le consom- à deux mille sous ; mais, pour les simples évè-
mateur de la foi. Il laisse à saint Césaire de ques, on se contentera de distribuer au petit
réfuter lui-même les sentiments erronés con- peuple cinq cents sous. Q permet encore à
tenus dms une lettre qu'un certain prêtre toutes sortes de personnes, pourvu qu'elles
lui avait communiquée, ou que cet évèque soient d'une probité connue, de citer devant
avait ensuite fait passer à Rome, espérant les juges des lieux ceux qui auront reçu de
que Dieu, par son ministère, changerait telle- l'argent pour- une élection, accordant au dé-
ment les cœurs des ennemis de la grâce, lateur la troisième partie de la somme que
qu'ils conviendraient que leur changement l'on pourra recouvrer. Par une autre lettre *,
provient d'elle, lorsqu'ils se sentiraient dispo- adressée au préfet de Rome, le roi ordonna
sés à confesser ce qu'ils niaient auparavant, que son édit et le décret du sénat contre la
c'est-à-dire que toute bonne volonté vient simonie, seraient gravés sur des tables de
de la grâce et non de la nature. marbre que l'on placerait à l'entrée du par-
s. m jmo 4, Saint Jean II, surnommé Mercure, romain vis de Saint-Pierre.
II
uc dol»i''Al de naissance, lîls de Projectus et prêtre du ti- o. Au mois de juin de l'an 533, l'empereur L.IU
IbaUtîc. Ca-' .'et n
Ld!!'îiL. 1.x tre de Saint-Qément, succéda à Boniface II, le Justinien envoya àRomeHypace, archevêque
eiVc t^'.'is»! 22 janvier, la seconde année d'après le consu- d'Éphèse, et Démétrius, évêqne de Philippcs,
COB- \

lat d'Oreste etdeLampadius, c'est-à-dire en avec uue lettre oîi, après avoir assuré le pa- r,.i.

532. Quelque temps après son ordination, un pe Jean de tout le respect qu'un fils doit à
défenseur de l'Église romaine se plaignit à son père, et du désir sincère qu'il avait de
Atlialaric que, pendant la vacance du Saint- voir tous les évêqucs dùrient parfaitement
Siège, quelques-uns saisissant avidement la unis avec le Saint-Siège il lui donnait avis
,

circonstance du temps avaient, pour se fai- que quelques personnes, mais en fort petit
re récompenser des brigues qu'ils faisaient nombre, niaient que Jésus-Christ, Fils uni-
pour l'élection, extorqué des promesses sur que de Dieu, qui est né du Saint-Esprit et
les biens de l'Église, pour lesquelles ou avait de Marie mère de Dieu toujours vierge et ;

exposé publiquement en vente jusqucs aux qui a été crucifié, fut un de la sainte et con-
vases sacrés. Le roi voulant remédier à ses substautielle Trinité, qu'on dût l'adorer avec
abus écrivit au pape Jean une lettre qui de- le Père et le Saint-Esprit, que le même fût
vait être commiuiiquée à tous les patriai-chcs consubslantiel à nous selon l'iiumanité et
et aux Églises métropolitaines, où régnaient consubstantiel au Père selon la divinité. 11
apparemment les mêmes abus, portant que paraissait à l'Empereur que ces sortes de
son intention était qu'on observât un décret personnes étaient infectées de l'hérésie de
du sénat, fait du temps du très-saint pape Bo- Xestorius, distinguant avec cet hérésiarque
niface, par lequel il était dit que, si quicon- deux fils dans Jésus-Christ, le Verbe de Dieu

> Cerlum est enim alque catholicum quia in me. El Misericordia vaen cum ipso est. El
alibi :

omnibits bonis, quorum caput est fuies, noienles ilerum : ejus subsoqiictur me. Et
Sliseriroriiin
nos adhuc inisericordia divina prœvenial, ut ve- I'aulu%: Quis prior dédit ei, et relrilitiplur illiî
limus insil in nnbis cum volumus sequalur
, , Qiiouiau) ex ipso et pcr ipsum et iu ipso suul om-
eliain ul in fide duremu^, sicut David propheta nia.
dicil : Ueus luous, misericûrJia cju.^ prtpvenict « Ibid. Epist. Ifi.
,,

Ivi" SIÈCLR.] CHAPITRE Vil. — SAINT JEAN 1, SAINT Fl'lLIX IV, ETC. 117

et le Cliiisl. Il rccdiiiiall que lous les dvi^ques pas un de la Sainte 'J'rinité, et que Marie n'est
lie l'Église catholique et apostolique, avec les pas proprement mère de Dieu. Jean II fit ce
;iliiii''s des saints monastères, tenaient une qu'il pid pourles ian\encràla saine doclrine.

iloiliine contraire pour niai(iner (|iielie


; et, mais les voyant opiniâtres dans l'erreur, il

était la sienne, une profession de foi


il fait rehisa de les admettre à sa communion, et
dans laquelle il déclare que Jésus-Cluisl, Fils les sépara de l'I'iglise catholique, jusf[u'ii ce
unique et Verbe de Uieu, né du Père avant qu'ils en eussent embrassé la foi et condam-
lous les siècles et né du Saint-Esprit et de ne; leurs erreurs, en piianl toutefois l'Empe-
Marie mère de Dieu dans les derniers temps, r(Mir de leur accorder sa communion et sa
est une des personnes de la sainte et con- bienveillance, si, à l'avenir, ils voulaient re-
substantielle Trinité; qu'il nous est consubs- venir à l'unité de l'Église. Il fait l'éloge d'Hy-

tantiel et passiljlc selon son humanité, et pace de Démétrius, envoyés de Justinien,


et
consubstanticl au Père et impassible selon sa mais il ne dit rien des présents qu'ils avaient

divinité ;
qu'il est véritablement et propre- apportés à l'apôtre saint Pierre qui consis- ,

ment Dieu, et qu'ainsi la sainte et glorieuse taient en un vase d'or du poids de cinq livres
Vierge Marie est proprement et véritable- entouré de pierreries, deux calices d'argent
ment mère de Uieu, non que le Verbe ait de six livres chacun deux autres de quinze,

pris son commencement d'elle; mais par- livres, et quatre voiles tissus d'or. y en a qui
ce qu'il est descendu du ciel, et qu'il est né ont voulu contester ces deux lettres celle de :

d'elle selon la chair. 11 ajoute qu'il reçoit les Justinien au pape Jean, et celle de ce pape à
quatre saints conciles de Nicée, de Cons- Justinien; mais outre qu'elles ne renferment
tantinople, d'Ephèse et de Chalcédoine, assu- aucuu caractère de supposition, elles sont ci-
rant que tous les évêques d'Orient en faisaient tées l'une et l'autre dans des monuments que
de même. Après quoi il prie le Pape, pour personne ne conteste savoir dans la lettre ,

ferm-U' la bouche à quelques moines qui ne de ce même pape' aux sénateurs romains, et
pensaient pas sainement sur la foi, de lui dans la Constitution ^ de Justinien à Épiphane,
adresser des lettres et au patriarche de Cons- patriarche de Constantinople.
taulinoplc, où il déclarerait qu'il les recevait 6. Après le départ des députés de ce prin- Leiire du
^
... 1 , r^pe Jean aux
à sa communion, et tous ceux qa\ confes- ce, le nape
'L L
sauit Jean écrivit aux sénateurs de sénaicurs
m iDS,
m-
tO:il.
^

condam-
saient les articles ci-dessus, et qu'il Rome, Aviénus et autres dénommes dans iv concu.

nait ceux qui ne les approuvaient pas. Le l'inscription de sa lettre pour les instruire ,

Pape, dans sa réponse qui est du 8 des calen- suivant leur désir, de la réponse qu'il avait
des d'avril, sous le consulat de Justinien pour faite à l'Empereur. «Justinien notre Ois' nous

la quatrième fois et de Paulin, c'est-à-dire


, a marqué, leur dit-il, qu'il s'était élevé une
du 2o de mars 334, loue le zèle que Justiuien dispute sur ces trois questions, savoir : Si
témoignait pour la foi, et son respect pour Jésus-Christ peut être appelé une personne
le Saint-Siège. 11 approu\e ensuite sa confes- des trois de la Sainte Trinité; s'il a souffert
sion de foi, disant que la doctrine qu'elle en sa chair, la divinité demeurant impassi-
renferme est celle que tous les Pères et les ble ; et si la Sainte Vierge Marie doit être
évoques de Rome ont enseignée, et que qui- . nommée proprement et véritablement mère
conque en professe une contraire se déclare de Dieu. Nous avons approuvé la foi de l'Em-
lui-même séparé de la sainte communion et de pereur comme catholique, et montré que ce
l'Église catholique. Le Pape parlait princi- qu'il a dit sur chacune de ces propositions
palement de Cyrus et d'Euloge, qui avaient estconforme à l'Écriture et aux Pères. » Le
été envoyés à Rome du monastère des acé- Pape rapporte ensmte les passages de l'É-
mètes, pour soutenir que Jésus-Christ n'est criture et des Pères, qui autorisaient ces

» Tom. IV Concil., pas. 1731. DominÎDci noslri Maria semper Yirgo debeat ap-
« Justin., lib. Vil Cod. Prohavimus in his calholicam imperatoris
pellari.
3 Justinianus imperator, filins noster, ni ejtis fidem, el ita esse prophelis et aposlolicis vel pa-
Epislolœ tenore cognovistis de kis tribus orta , trum exemplis evidcnter ostendiinus nnuin ex
cerlamina fuisse significa fil : Ulrum unus ex Tri- sancta Trinitate Chrislum esse, hoc est unum de
nitate Chrvstus et Dnus nnstcr dicipossil hoc est , tribus sanctœ Trinitatis personis sanctam esse
una de tribus personis Sa)iclœ Triiiitalis sancta personam sive subsistenliam evidenter ustendi-
pcrsona : an Deus Chrislus carne perlulerit iin- mus. Joan., Episl. ad sénat., pag. 1751.
pussibili Deilale : an veraciter et proprie maler
,

118 HISTOIRE GENERALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


propositions. Saint Aufîustia est le premier clercs, ni au temporel de Jean IIl'Église.
des Pères qu'il cite, disant '
que l'Eglise ro- joignit à sa lettre à saint Césaire une hste des
maine en suit et en observe la doctrine sui- canons contre les évêques condamnés par les
vant les décrets de ses prédécesseurs. Après conciles de la province savoir le septième ;

quoi il rapporte des témoignages de plusieurs chapitre de l'Kpitre décrélale du pape Sirice
autres anciens docteurs de l'Église, des deux à Hymérius de Tarragone le 25' et le 29' des ;

saints Grégoire de Nazianze et de Nice, de Canons apostoliques le quatrième et le (juin-


;

Proclnsde Constantinople, de saint Cyprien, zième d'Antioche, et le neuvième de Nicée.


de saint Cyrille, de saint Léon, de Léporius A la suite de la lettre de Jean II à saint Cé- Ibld IT

et de Gélase. Il déclare ensuite que l'Église saire d'Arles, on en a mis une autre dont
romaine a condamné les moines acémètes, l'auteur est inconnu, et que quelques-uns
qui ont paru évidemment être dans l'erreur croient être saint Césaire même, qui porte
de Nestorius. C'est pourquoi conformément , en tête plusieurs canons sur la même ma-
au canouf? qui défend à un clirétien de par- tière , c'est-à-dire , contre les ministres des
ler ni de communiquer avec un excommunié, autels, coupables do queUpie crime capital.
il avertit les sénateurs de ne pas leur parler, Pour ce qui est de la lettre h Valère, attribuée
et de n'avoir rien de commun avec eux. Le à Jean II, c'est un composé de fragments ti-
pape Jean, en approuvant la proposition de rés des écrits d'Ilhace à Varimade, et de ceux
l'empereur Justiuien, qui revenait à celle des de saint Léon. Le style eu est diÛërent de
moines de Scytliie ne fit rien de contraire
, celui des lettres du pape Jean, et la date des
à ce qu'avait fait Hormisdas, son prédéces- consuls en est fausse '.

seur car ce pape ne condamna ni cette pro-


: Jean eut pour successeur saint Aga-
8. Saint s» -

position, ni ceux qui la soutenaient Seule- . pet' romain de naissance, fils du prêtre Gor-
ment il témoigna du mécontentement de leur dien il fut ordonné le 4 de mai de l'an 535, et
;

conduite et des troubles qu'ils avaient exci- tint le Saint-Siège onze mois et dix-huit jours.
tés dans Rome. Dès le commencement de son poutificat il fit
LcMro An
Mint Jrao &
7. Vers l'an 534, le pape saint Jean reçut des brûler au milieu de l'Église, en présence de
Tni' "tqucs lettres de saint Césaire d'Arles et do quelques tout le monde, les formules d'anathèmes que
t"^'t'k,èî. autres évoques des Gaules, en plaintes con- le pape Boniface II avait exigées des évoques

ir Hg. i*i°t
treConluméliosus, évêque de Riez, convain- et des prêtres contre la mémoire de Dios-
''^'-
eu de plusieurs crimes, de son prnpi'e aveu. core, son compétiteur. L'empereur Justiuien
Le Pape écrivit sur cela trois lettres; l'une à ayant appris son ordination, lui envoya sa
saint Césaire, l'autre aux évéques des Gaules, confession de foi, avec une lettre par laquelle
la troisième au clergé de Riez, dans les- il le priait de conserver dans leurs dignités

quelles il dit qu'il avait interdit Conlumélio- ecclésiastiques les ariens convertis; et de
sus de toutes ses fonctions, et ordonné qu'il faire son Vicaire, dans l'Illyrie, l'évoque de
serait renfermé dans un monastère pour Jusiinianée, ville deDaidanie, que ce prince
faire pénitence, après néanmoins en avoir avait fait bâtir auprès du village où il était
demandé lui-même la permission aux évo- né.
ques, par une requête où il confesserait son 9. Le pape saint Agapet répondit à l'empe- LctIrfS
rnlnt A^aT>ei
péché, la requête datée du jour de sa de- reur par deux lettres ditférentes. Dans l'une il Jti-titii.n,

mande, avec les noms des consuls. Le Pape approuve la confession de foi que ce prince
charge saint Césaire de l'exécution de cet or- lui avait envoyée, et qui était la môme qu'il
dre, et aussi de nonmicr, en la place do Con- avait envoyée par les évoques Hypace et
tuméliosus, un visiteur pour l'administraliou Déméirius; il y déclare encore qu'il ne souf-
de l'Église de Riez à condition qu'il ne se
, frira point que Cyrus et les autres moines
mêlerait que de la célébration des saints mys- acémètes soient rétablis dans la communion
tères, sans loucher ni aux ordinations des de l'Église, à moins qu'après une satisfaction

• Ilem sanctuit Auguslxnns cujus docirinam se- admnnere non desino ut rorum ctiain simpHcem
cumiiim firccccssoriun meoriiin slatula romana coUocutionem vitetis, nihiUjue vobis cuvi eis œs-
$equilur et serval Ecclesia. Ibid. limalis esse commune. Iliiii., pag. 1751.
*Acœmetas monachos qui nestoriani evidenter » lAh. Pontif., tom. IV Concil ,\ing. 1785.
npparueranl romana damnai Ecclesia, a quibus ' On trouve les lettres de Jean
11 dans Mansi
vos proplcr canonem qui cum excoinmimicalin »niTi. VIII, col. îOl-SIl, et lom.
dans lo de la LWI
chrhHanum nec loquincc communicare perniiUit, Palrotogie latine, eol. n et suiv. [L'éditeur }
[Vl" SIÈCLE.] CHAPITRE VII. — SAINT JEAN I. SAINT FÉLIX IV, ETC. liO

canonique, ils n'aient cnibrassi) la doctrine qucs fut qu'on ne devait pas, en recevant les
.-ipostoiiqne. Dans l'aiitro, il remercie Jusli- évêques ariens convertis, les conserver dans
iiicii des conipliiuents de congratiilalioa (lu'il leurs dignités. Mais, avant que de statuer sur
lui avait faits sur son élévation au poiitilicat, cette afl'aire, ils crurent devoir consulter le
cl le félicite liii-nième sur ses victoires et sur Saint-Siège. Us le consultèrent encore sur
ses conquêtes. Il loue aussi son zèle pour la cette autre question : Si l'on pouvait laisser
réunion des ariens mais il lui représente qu'il
; dans le clergé ceux qui, étant enfants, avaient
ne doit ni ne peut rien faire contre les ca- reçu le baptême de la main des ariens. Ils
nons des Porcs et les décrets du Siégc-Apos- demandèrent aussi au Pape que les évoques,
toii(]ue, qui défentlent de promouvoir aux les prêtres et autres clercs d'Afrique qui
ordres les hérétiques réconciliés, et de les passeraient dans le pays qui est au del;\ de
conserver dans le rang qu'ils occupaient la mer, sans lettres testimoniales, fussent
avant leur réconciliation. Il ajoute que si traitéscomme hérétiques. Le diacre Libérât,
ceux, dont ce prince lui a parlé, souhai- chargé de porter h Home la lettre synodale
tent d'embrasser véritablement la vraie foi, des évoques d'Afi-ique, ayant été contraint
ils doivent se soumettre aux règles de l'É- à cause de l'hiver de retarder son voyage, on
glise et que s'il leur reste de l'ambition,
; reçut en Afrique, avant son départ, la nou-
c'est une preuve que leur conversion n'est velle de la mort du pape Jean II, et l'ordi-
pas solide. Justiuieu avait demandé que l'af- nation d'Agapet. Ce qui obligea lléparatus,
faire d'Etienne de Larisse qui avait imi>loré
,
évêque de Carthage d'y joindre ime lettre
la protection du Saint-Siège sous le pontifi- de congratulation pour le nouveau Pape.
cat de Boniface, au sujet d'un jugement Agapet, dans sa réponse à la Lettre syno-
lendu contre lui par Epiphane de Constan- dale des évêques d'Afrique, les félicite d'être
tinople, fût terminée par les légats du Pape délivrés des mains des hérétiques leur té- ,

à Constantinople Agapet promet d'en com-


; moignant qu'il avait partagé avec eux les af-
mettre l'exécution à ceux qu'il devait en- lliclions et les maux dont ils avaient été ac-
voyer incessamment eu cette ville mais il ; cablés. Il décide qu'à l'égard des évêques
déclare qu'il recevait dès lors à sa commu- ariens convertis, il faut s'en tenir aux an-
nion Achille pour lequel l'Empereur s'était ciennes règles de l'Eglise, et se contenter
employé. «Vous excusez, lui dit -il, l'évèque de les recevoir à l'Église catholique en quel-
Epiphane de l'avoir ordonné, parce que ça que âge en quelque manière qu'ils aient
et
été par votre ordre mais Epiphane devait
; été de l'hérésie arienne, sans les
infectés
vous représenter lui-même ce qui était du admettre dans le clergé, ni leur y conserver
au respect duSaiut-Siége, sachant avec quel aucun rang et que, pour éviter les inconvé-
;

zèle vouj en défendez les privilèges. » Il re- nients de la vie vagabonde, il convient que
met à l'envoi de ses nouveaux légats à Cons- les évêques et les autres clercs étrangers ne
tantinople, de faire savoir k l'Empereur sa soient point reçus sans montrer par écrit la
résolution sur l'ordinxtion d'Achille qui avait permission de leurs supérieurs le bon ordre ,

été fait évoque de Larisse en la place d'É- et les canons le voulant ainsi. Cette lettre
tienne, et sur l'Evêque de Justinianée, que est du 9 septembre 333. Le même jour, le
Justinicn demandait pour Vicaire du Saint- pape Agapet en écrivit une en particulier à
Siège dans riUyrie. Cette lettre est du lo Réparatus, évêque de Carthage, dans laquelle
octobre 533. il reconnaît sa prééminence sur tous les
10. Quelque temps auparavant, il en avait évêques d'Aùique, le rétablissant dans tous
écrit une aux évéques d'Afrique à cette oc- les droits de métropolitain, que ses ennemis
casion. Ces évêques, assemblés en concile au pouvaient lui avoir ôtés.
nombre de deux cent vingt-sept, pour tra- H. îvousavons deux lettres de saintAgapet s-in(
Lcllrcs t
Cr?airc
d'Ares , pas.
vailler au rétablissement de l'ancienne dis- à saint Césaire d'Arles. Il témoigne , dans 1738.

cipline, négligée et presque abolie pendant la première qui est du 10 juillet 538, qu'il
les persécutions des Vandales, se trouvèrent était entièrement disposé à lui accorder ce
embarrassés sur la manière dont il fallait re- qu'il lui avait demandé pour le soulagement
cevoir les évêques ariens qui se convertis- des pauvres, mais que les Constitutions de
saient. Si l'on devait les laisser dans leurs ses prédécesseurs lui défendant d'aliéner
charges, ou les recevoir simplement à la les fonds de l'Église romaine, sous quelque
communion laïque. L'avis commun des évê- prétexte que ce fût, il ne pouvait y coutre-
V
I2U HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
venir, étant oblitré, pour la considération du ces schismatiques. Ce prince qui avait déjà
jugement de Dieu, d'observer inviol;il)lement repris l'.^frique sur les Vandales, résolut de
tout ce qui est ordonné par l'autorité d'un reprendre l'Ilalie surThéodat, roi des Goths.
concile. Il y joignit le canon qui défendait Celui-ci,épouvanté des menaces de Justinien,
celle aliénation, afin que saint Césaire ne écrivit ' au Pape et au sénat, que s'ils ne fai-
crût point qu'il le refusait par quelque motif saient en sorte de détourner l'Empereur d'en-
d'intérêt et d'attaclicment aux biens tempo- voyer une armée en Italie, il ferait mourir
rels. La seconde lettre, qui est de même date, les sénateurs avec leurs femmes et leurs en-
regarde l'atl'aire de Contuméliosus. Quoique fants. Agapef , obligé de se charger de cette
jugé par les évèques de France, ce dernier en- négociation, et n'ayant pas de quoi faire
suite d'une lettre du pape Jean II, avait appe- sou voyage, engagea ' les vases sacrés de
lé au Saint-Siège de leur jugement. Il semble l'Éslise de Saint- Pierre pour une somme
qu'il se plaignait aussi de ce que, nonobstant d'argent qui lui fut prêtée parles trésoriers
son appel, les évèques mettaient leur sen- du prince, et dont il leur donna sa promesse.
tence il exécution. Le Pape écrivit donc à En arrivant dans la Grèce on lui présenta'
saint Césaire qu'il eût mieux fait d'en sus- un homme qui ne pouvait ni se lever, ni par-
pendie l'exécution jusqu'à ce que la cause ler. Le Pape, voyant la confiance de ceux qui
de Contuméliosus eût été jugée de nouveau, le lui avaient présenté, dit la messe, prit en-
ou du moins de lui permettre de se retirer suite le malade par la main et le fit marcher
de lui-même, sans l'enfermer dans un mo- en présence de tout le monde puis, lui ayant ;

nastère pour y subir toute la sévérité de la mis dans la bouche le corps de Xotre-Sei-
discipline. Il veut que l'appel ait lieu, pro- gneur, il lui rendit l'usage de la parole. Il
met de déléguer des juges pour examiner fit son entrée à Conslaniinople le 2 février

ce qui s'était passé en celte allaire de la 336, accompagné des cinq évèques, ses lé-
part des évèques, et ordonne que, jusqu'au gats, qu'il avait envoyés l'année précédente,
jugement qui interviendra, Contuméliosus et de qu('l(pies clercs de l'Église romaine,
demeure suspens, qu'on lui rende son bien, qu'il avait emmenés avec lui. Il reçut avec
en sorte qu'il ait une subsistance sullisante, honneur ' ceux que l'Empereur avait en-
sans pouvoir toutefois ni disposer du bien voyés au -devant de lui, mais il ne voulut
de l'Kglise, ni célébrer la messe, et que l'on point voir le nouveau patriarche Authime.
nomme un visiteur à sa place pour l'adminis- Étant ensuite allé rendre sa visite à Justinien,
tration de son Eglise. il entama l'allaire qui faisait le sujet de son

Lt,!r«"ini 12. Épiphane, patriarche de Constantino- voyage mais il ne put obtenir de détourner
;

ii'n.uoùio- pie, étant mort en 333, l'impérabice Tliéo- la guerre d'Italie à cause des grandes dépen- »
dora lui fit donner poursucccsseurAntbime, ses que le fisc avait faites à ce sujet. Agapel
évêque de Trébizonde. Quoiqu'il passât pour se réduisit donc à traiter des all'aires de reli-
catholique, il était, aussi bien que celle prin- gion. Pressé par l'Empereur et par l'Impéra-
cesse, ennemi du concile de Chalcédoine. Son trice de recevoir la visite d'Antliirae, il y con-
ordination ranima tellement les acéphales, sentit, ;\ condition que cet évêque donnerait
que les principaux de cette secte savoir , : une confession de foi calholiquc par écrit et ,

Sévère, faux patriarche d'Antioche, Pierre, qu'il retournerait à l'Église de Trébizonde,


chassé d'Apaniée, et le moine Zoara vinrent étant impossible, disait-il', qu'un évêque
à Constanliuople, où ils tinrent des assem- '
transféré demeurAt dans le siège de Constan-
blées particulières, et baptisèrent plusieurs tiuople. Les piésents, qu'on lui otfrit en secret,
personnes. Les abbés catholiques de cette ne purent le Uéchir, non plus que les mau-
ville envoyèrent- Home pour avenir le pape
<i vais traitemenls dont on le menaça. Au con-
Agapel de tous ces désordres, ayaut' parole traire, il vint ;\ bout de persuader à l'Empe-

de l'Empereur qu'il ferait exécuter ce qxie le reur de faire déposer Anthime qui aima ,

Pape auiait ordonné canoniquement contre mieux retourner à Trébizonde que de faire

' Tora. V Concil., png. 22. ' Gicgor., lib. III Dialog., cap. iii.
"
' Ibid., pag. 31. Libérât, in Breviar., cap. .\xi.
» Ihid. ' Impossibile esse aiebal translatilium hoini-
* Libérât., in Breviar., c.ap.'xxi. nfm in ilta sede permanere. Libcrut. iu Breviar.,
' Cassiodor., lib. XII Variar. episl. 20, pag. 183. cap. \xi.
, ,

[VI' SlhCLE.] CHAPITRE VIII. — DENYS LE PETIT. 121


(iiivertoiuent profession de la foi catholique. furent lues dans le concile que .lustinien fit

On iHtil ' i\ sa place Mennas, que le Pape tenir en cette ville le second jour d<; mai '.VM'i.

consacra de sa main dans l'Église de Sainte- Agapet, après les avoir reçues, les commu-
Marie. Mennas recevait le concile de Chalcd- niqua c^ l'Empereur. Il y en avait une de la
doine, ilolailcatliolicine, et connu jiar son sa- part des évoques d'Orient et de Palestine
voir eH'int('';;rité de ses mrnurs. Le Pape avait qui se trouvaient iï Constautiuo|)le : et une
tenu nn concile à Constantinoplc pour juifcr de Marien tant en son nom que des autres
,

Anthinie. Il en marqua le résultat h Pierre, abbés de Constantinople et de ceux de Jé-


,

évè(]ue de Jihusalem par une lettre syno-


, rusalem et d'Orient qui étaient venus en cette
dale* où il dit qu'Aiithime ayant usuipc le ville. L'iuie et l'autre c(uit(;uaient des plaintes
siège de Constanlinople contre les canons, contre les acéphales. Mais, avant qu'on eût
et refusé de quitter l'erreur d'Eutychès, il pu examiner, il tomba malade et mourut
les
l'avait d(''claré inditînc du nom de catliolique le 22 avril 336. Il s'était * préparé quel-
et d'évèqne, jusqu'à ce qu'il reçût pleine- ques jours auparavant à retoiuner en Ita-
ment la doctrine Vous devez,
des Pères. « lie, ayant déclaré le diacre Pelage, son Apo-

ajoute-t-il, rejeter de même les autres que le crisiaire auprès de l'Empereur. Son corps
Sainl-Si(''iie a condamn('es. Nous sommes sur- fut transporté de Constantinople k Rome, où
pris que vous ayez approuvé l'injure faite ;\ il fut enterré à Saint-Pierre. La lettre à Au-

l'Église de Constaulinople, au lieu de nous thime qu'on lui attribue est visiblement sup-
en avertir; nous l'avons réparée par l'ordi- posée. Le commencement est tiré d'une lettre
nation de Mennas, qui est le premier ' de d'Hormisdas, et presque tout le reste de la
l'Eglise Orientale depuis saint Pierre, qui ait lettre quatre-vingt-dix-septièmede saint Léon.
été ordonné par les maius de notre Siège, n Elle est datée des calendes de mai sous le ,

Agapet relève cette circonstance comme ca- quatrième consulat de Justinien et celui de
pable de donner de l'éclat k la dignité à Théodat, c'est-à-dire, du premier mai .53-4
laquelleMennas avait été élevé non-seule- , auquel le pape Jean II, prédécesseur d'Aga-
ment aux dt'sirs des sérénissimes empereurs; du pape saint
pet, vivait encore. [Les lettres
mais du consentement unanime du clergé et Agapet se trouvent reproduites dans Mansi,
du peuple. Le Pape, pendant son séjour à tome VIII, col. 843-60 et dans le tome LXVI
Constantinople , reçut diverses requêtes qui de la Patrologie latine, col. 31.]

CHAPITRE VIII.

Denys surnommé le Petit-

[Écrivain latin, 540.]

Denys, surnommé le Petit à cause de


1. l'étude de l'Écriture sainte lui en avait acquis
sa était moine de profession, et prê-
taille, une si grande intelligence, que, lorsqu'on lui
tre de l'Église romaine. Quoique scythe de demandait l'éclaircissement de quelque diffi-
nation, il avait les mœurs et la politesse des culté, il répondait sur-le-champ, quelqu'em-

romains. Peut-être était-il venu à Rome étant barrassée cpie fut la question. Mais ce qui lui
encore jeune avec les moines de Scythie ,
faisait le plus d'honneur, c'est qu'il répré-

au sujet de la proposition Un de la Trinité : sentait dans sa vie toute la perfection qu'il


a sou/fert. Il savait le grec et le latin possé- ,
avait apprise dans les livres saints. Entre ses
dait si ^ parfaitement ces deux langues qu'il vertus on remarquait surtout son atTabilité à
traduisait également, en lisant, le grec en l'égard de tout le monde , ne refusant point
latin et le latin eu grec. Son application à de se trouver dans les conversations des

' Tom. V Co/ici;., pag. il, et Lib. in Brevario unquam orientalis Ecrlesia s^lscepit episcopum
cap. XXI. — ' Tom. V Coiieil., pag. 47. manihus nnstrœ sedis ordiiiatum. Ibid.,pag. iiO.

'Et hoc diqnitati ejus additum esse credimus, ' Libérât, in Brerinrio, cap. xxil.
quod a temporibuf l'ctri iiposluli, nullum alium 5 Casî'.orlor., l'b. Dir. instit., cap. xxiu.
122 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
personnes du siècle mais il s'y faisait admi-
; pes depuis Sirice jusqu'à Anastase II. Sa rai-
rer par sa modestie, par sa retenue et par sa son de commencer à Sirice, fut qu'il ne trou-
douceur. Son humilité était si grande, qu'il va aucune lettre décrétale des Papes avant
aurait cru faire un crime de se préférer aux son pontificat. Le Code de Denys fut adopté
derniers des ser\ileurs ,
quoiqu'il fût ditrne par l'Église romaine aussitôt qu'il parût, et
d'être honoré de la familiarité des princes. il y fut regardé comme une règle de la dis-

Il avait coutume de verser des larmes lors- , cipline Mais il fut quelque
ecclésiastique.
qu'il voyait les gens du monde s'abandonner temps sans être gém-ralcmcnt dans
rcc^u

à des joies indiscrètes ; mais il était mortifié toutes les Églises d'Occident. On continua en
sans sinandarité, jeûnant sans faire des re- France de se servir de l'ancienne CoUection
proches à ceux qui ne jeûnaient point. Lors- des canons, à laquelle on avait ajouté des
qu'il mangeait, c'était toujoui-s avec sobriété, canons tirés des conciles des Gaules. Dans
usant des mets les plus communs. Sa doc- l'alfaire de Contuméliosus, les évêques ne

trine était puie et conforme en tout aux rè- trouvaient dans leur Code sur le sujet de la
gles des Pères. Cassiodore, qui connaissait déposition d'un évêque accusé de crimes,
son mérite, l'engagea t\ enseigner avec lui la qu'un canon du concile de Nicée et quelques
dialectique, à quoi employèrent l'unet l'au-
ils canons des conciles particuliers qui s'étaient
tre plusieurs années. Mais cette occupation tenus en France. Mais le pape Jean II, con-
n'empêcha pas Denys de travailler divers <i sulté sur cette alTaire, en .").3i, par saint Cé-
ouvrages qui ont été très-utiles à l'Église. saire d'Arles, joignit ii sa réponse des extraits
Bède le Vénérable, le qualifie abbé de la ' du concile d'Antioche, dos Canons apostoli-
ville de Rome mais ce n'est pas une preuve
;
ques et des lettres du pape Sirice, qui étaient
qu'il ait été supérieur d'une communauté mo- pris du Code de Denys le Petit. Dans l'alfaire
nastique car on peut lui avoir donné ce nom
: dePrt'fextat, le roi Cliilpéric envoya aux évê-
ou cette qualiti-, comme on la donnait en ques un Recueil de canons auquel on avait
,

Orient aux simples moines, lorsqu'ils s'étaient ajouté ceux qui portent le nom des apôtres.
rendus recommandablcs par leurs vertus et Ce Recueil n'était donc point celui de Denys
par leurs mérites au lieu que ceux que nous
; le Petit, autrement il aurait été inutile d'y

appelons abbés et supérieurs étaient connus joindre les canons attribués aux apôtres,
chez les Grecs, et distingués par le titre d'ar- puisqu'ils y étaient insérés. Mais, en 803, le
chimandriles ou d'hégumènes. Il moumt en pajjc Adrien \" cnvoja à Charlemagne le Code
odeur de sainteté vers l'an 310. Cassiodore, de Denys le Petit, et depuis ce temps-la il fut
de qui nous avons pris ce que nous venons reçu dans tout le royaume avec force de loi.
de dire de Denys, témoigne ' espérer d'être Il est remarquer que ce code était plus am-
.'i

aidé de ses mérites et de ses prières auprès ple que celui de Denj's, parce qu'on y avait
de Dieu. ajouté les Épitres décrétales des papes Hila-
2. Le plus considérable des ouvrages de rus, Simplice, Ilormisdas et Grégoire. Ce Code
Denys le Petit , est le Code des canons qu'il ainsi augmenté fut imprimé à Mayence en
composa tant des conciles d'Orient que d'Oc- 1323, et h Paris en 1609, sous le titre de Code
cident. On avait déjcà quelques traductions de l'Eglise romaine. Nous lavons encore dans
Son Code, des coucilos tenus chez les Grecs; mais elles la bibliothèque canonique de Justel, impri-
étaient fort défectueuses. Denys en fit une mée à Paris en 1661 mais on y a distingué
;

nouvelle renfermant les canons apostoliques ce qui appartient au Code de Denys le Petit
et ceux des conciles que l'on avait insérés d'avec les Prcrctales qu'on y a ajoutées de-
dans le Code de l'Église grecque, qui com- puis. [Les frères Ballérini, De Antiij. collect.
prenait cent soixante-cinq chapitres. Il
y joi- canon, t. Ill 0pp. Leonis ont donné une
,

gnit lescanons du concile de Chalcédoine, et description détaillée de la collection de De-


ceux des conciles de Sardique et d'Afrique nys lo Petit, d'après des manuscrits. Gal-
qui étaient dans les anciens Codes de l'Église land, t. I, Sylloye a publié cette collection.]
romaine. Il fit plus afin qu'il ne parût point
: Le Code de Denys est précédé d'une préface
avoir négligé quelques monuments intéres- en forme de lettre adressée à Etienne, évêque
sants pour la discipline ecclésiastique, il fit de Salone, à qui il rend compte de son travail,
entrer dans son Code les Décrétales des pa- marquant qu'il l'avait entrepris à sa sollicila-

' Be<la, De Tempor. rat., cixp. xlv. Ca^siodor., ubi supra.


,

[vr SiftCLE.] GHAPITIIEVIII. — DEiNYS LE PETIT. 123

iion, et i\ celle du pièlro Laurenl,son ami. Lo rencontré avec eux dans la composition de
Code commence [)ar les canons des apôtres; ce cycle. La plupart des chronologistes ont
suivent ceux do Mcc'o, d'Ancyre,de Néocosa- cru (jue Denys le Petit n'avait fait que re-
rde, de Gaiij^res, d'Anlioclie, de Laodicée en loucher au cycle ])ascal de Victorius, el qu'il
riirygie, de Gonstanlinople, de Chalcëdoiue, en avait fait un autre de quatre-vingt-quinze
de Saidi([iio, do GarlhaiiO et de divers con-
, ans pour continuer celui de saint Cyrille d'A-
ciles d'AtVi(iiie. On trouve après cela la let- lexandrie, qui Unissait à l'an 531, de Jésus-
tre du Concile péuéral d'Afrique au pape Christ. Il parait, par une de ses lettres', qu'il
Boniface, celle de saint Cyrille d'Alexandrie avait fait deux cycles, l'un pour continuer celui
au sujet des exemplaires authentiques du de saint Cyrille, qu'il commençait où ce Pcro
Symbole de Nicée; la lultrc d'Atticus de Gons- avait fini, c'est-à-dire en 332 inclusivement,
tanlinople, sur le même sujet, avec le Sym- celui de ce saint évéque finissant k 531, com-
bole de Nicée et les canons do ce concile ; et me on vient de le dire. Mais, en continuant
la lettre du concile d'Afrique an pajie Céles- ce cycle, il en changea l'époque et au lieu ;

tin. L'édilion de Justi'l met après cela la let- du nom odieux de Dioctétien, qui avait été un
trede saint Cyrille d'Alexandrie contre Ncs- cruel persécuteur, il aima mieux mettre le
de ce même évéque k Nestorius
torius, celle nom de Jésus-Christ, et compter par les an-
avec les douze anatliématismes parce que ,
nées de l'Incarnation. Et parce que ce cycle
Denys le Petit les avait l'une et l'autre tradui- de quatre-vingt-quinze ans ne suffisait pas
tes du grec. 11 donne ensuite les Epitres dé- pour qu'après la révolution de ce nombre
crétales de Sirice, d'Innocent, de Zosime, de d'années, toutes les nouvelles lunes el toutes
Boniface, de Gëlestin, de Léon I", de Gëlase les fêtes mobiles tombassent au môme jour
et d'Anastase. Elles se trouvaient toutes dans du mois et de la semaine, et qu'après l'écoa-
le Code de Denys; en sorte qu'il contenait les lemcnt du cycle de quatre-vingt-quinze ans,
Décrétâtes des Papes depuis l'an 383 jusqu'en il aurait fallu en faire toujours un nouveau

498. Denys adressa cette collection particu- d'un pareil nombre d'années, Denys le Petit
lière des décrétales à Julien, prêtre du titre en composa un autre de cinq cent trente-
de Sainte-Anastasie, par une préface dans deux ans, que l'on peut regarder comme un
laquelle il fait l'éloge du pape Gélase, comme cycle perpétuel, parce qu'en effet, après sa
étant d'un grand mérite devant Dieu. révolution, toutes les nouvelles lunes et toutes
Cjflc d' Te- 3. Nous avons déjà remarqué que Yicto- les fêtes mobiles se rencontrent aux mêmes
rjîlo l'e'ii.
rius avait trouvé que le cycle lunaire des jours du mois et de la semaine, auxquels elles
dix-neuf ans, dont se servaient les Grecs se rcncontraieut à la premièje année de ce
était plus sur que ceux des Latins, et que le même cycle. Denys le commence à l'ère de
multipliant par le cycle solaire de vingt-huit l'Incarnation. Mais on croit qu'il y a faute
ans, il en avait fait un canon pascal de cinq dans son calcul, et qu'il a prévenu de quatre
cent trente-deu.t ans. Les Grecs avaient' un ans la véritable année de l'Iacarnation.
semblable cycle longtemps avant Victorius, 4. Denys écrivit deux lettres surlaPâque,
•^ -1 ' Lollro do
comme on le voit par George le Sy ncelle qui en l'une à l'cvêque
^
Pétrone, en 523, l'autre à
'
P:"i' ^"' i»
PAquo, apud
attribue un de cinq cent trente-deux ans à un Boniface, primicier
l
des notaires, en 326. El- ^"'^"''".'îî;
' ' dis. [ta?.48o
moine égyptien nommé Anien; etparPhotius les ont toutes les deux un rapport essentiel p„,u,'îi„"iiJ;

qni parle d'un cycle de cinq cent trente-deux à l'ouvrage qu'il composa sur la même ma- IXyfm. ''«p!

"'^'
ans, composé par Métrodore, le même, com- première qui paraît y avoir
tière, surtout la
me l'on croit, que la Chronique de saint Jé- servi de préface car c'est dans celle-là qu'il
:

rôme met sous le règne du grand Constan- parle de ces deux cycles, et de la raison qu'il
tin. Ainsi il faut ou que Victorius ait pris son eut de mettre le nom de Jésus-Christ' à la
cycle sur celui des Orientaux, ou qu'il se soit place de celui de Dioclétien, que saint Cy-

' Vide Pagi Dissert, de Periodo grœco-romana, cletiani,quorum quintum cyclumnecessario no-
tom. 1, pag. 4, 5, 6. bis prœposuimus. sed ad nostrum primuvi cy-
* Hoc monemus quod eyclus iste nonaginla cliim, quein nos ab anno ducentesiino quadrage-
quinque annoruin, qtiem fecimus, non per om- siino octavo ejurdem Diocleliatn incepiinus, lec-
nia in seipsum recertitur : et ideo post eipedi- lor accurrat. IMd., pag. 6, cl Dionj-s. Lpist. ad
lionem nonaginta quinque annorum, non ad Petron, apuJ Bueherium, pag. 486.
quintuin cyclum aamii Cyrilli, qui iiiccpit ryclos ' Nos a ducentesiino quadragesimo octavo anno

siin^ ab rtnvn renfsimn qiiinqunge.Hmo tertio Dio. ejusdem tyranni potiusquam principis (Diode-
,

124 HISTOmE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


lille d'Alexandrie avait mis au sien , suivant quatorzième de la lune tombait un samedi,
la coutume de son temps et de son pays. Il ce qui, dit-il, arrive une fois dans quatre-
dit dans la môme lettre, qu'il s'attacbcra in- vingt-quinze ans alors on doit faire la PA-
,

violablement au statut du concile de Nicée, que le lendemain, dimanche; c'est-à-dire le


qui porte qu'à l'avenir, pour trouver plus onzième des calendes d'aviil, ou le 22 de
aisément le premier jour de la lune et en , mai-s, qui sera le quinzième de la lune. Il
suite son quatorzième, l'on se servira du cycle rapporte le canon de Nicée et celui d'An-
de dix-neuf ans, nommé en grec Ennea de- : tioche, qui défendent de célébrer cette fête
cateride, comme le plus commode de tous les avecles Juifs, qui la célébraient toujours le
cycles, parce qu'au bout de ce terme les nou- quatorzième de la lune en quelque jour de ,

velles lunes reviennent h quelque chose , la semaine que ce fût et un passage de la


:

près, aux mêmes joui-s de l'année solaire. Il lettre de saint Léon à l'impératrice Pulché-
regarde ce statut comme l'ellet de l'inspira- rie, où toutefois il n'est point question du dé-

tion de Dieu, et remarque que tous les ca- cret de Nicée sur la Pâque mais sur les li- ,

tholiques qui ont depuis écrit sur la Pâque, mites des diocèses. Il fait mention de la lettre
s'y sont attachés, sans s'en éloigner en au- de saint Protère sur la Pàque, qu'il avait,
cune façon. Denys remarque ensuite que la dit-il, traduite du grec, et insérée dans son

PAque devant selon l'ordi-e de Dieu, se cé-


, ouvrage avec plusieurs arguments qu'il avait
lébrer dans le cours du premier mois il , empruntés des Kgyptiens qui ont travaillé
est important de savoir en quel temps com- sur la même matière.
mence ce premier mois, et en quel temps il 5. Outre de saint Cyrille à Nés-
les lettres e/'f.t;','.

flnit. Comme la loi de Moïse ne s'explique torius et contre Nestorius, celle de saint Pro- ' '
"
pas nettement sur ce point les Pères de Ni- , tère au pape saint Léon, et les canons du
cée ont fixé le commencement du premier Code de l'Eglise grecque, Denys traduisit en
mois au renouvellement de la lune depuis le latin le livre de saint Grégoire de Nice, inti-
huitième des ides de mars jusqu'au jour des tulé De la Formation de l'homme. Il dédia
:

nones d'aviil, et le quatorzième de la lune cette traduction au prêtre Eugippius, par une
depuis le douzième des calendes d'avril jus- lettre que nous avons encore, où il fait en
'

qu'au quatorzième des calendes de mai en ; peu de mots l'éloge de saint Grégoire, et où
sorte que le premier mois ne devait jamais il se plaint de la presse où le mettaient les

commencer avant le huitième des ides de fréquentes conférences qu'il était obligé d'a-
mars, c'est-à-dire avant le huitième de ce mê- voir avec les savants de Rome. Cette version
me mois; et que le quatorzième de la lune, eu fut imprimée à Cologne, en 1573. Elle l'avait
laquelle on devait faire la Pâque ne devait , été à Bâlc dès l'an 13G2. Mais on ne trouve,
point se trouver avant le douze des calendes ni dans l'une ni dans l'autre de ces éditions,
avant le 21 mars
d'avril, c'est-à-dire parce : la lettre à Eugippius, ni la Préface de saint
que le mois
dont le quatorzième de la lune
, Grégoire de Nice sur son traité de lu Forina-
se trouverait avant le 21 mars, devrait être tion de l'homme. Dom Mabillon a inséré ces
regardé comme le dernier de l'année, et non deux pièces parmi ses Analectes. Denys tra-
pas comme le premier. La remarque que duisit encore la IVe de saint Pacùme, abbé,
fait ici Denys se réduit à dire, que le pre- llosweide lui a donné |>lace dans son Recueil
mier mois dont
quatorzième de la
est celui le des vies des Peics, imprimé à Anvers en 1613
lune arrive après l'équinoxe du printemps, et 1G28. Les deux discoiu-s de saint Proclus,
c'est-à-dire le 21 de mars ; et que si ce qua- évêque de Constaulinople, l'un à la louange
torzième de la lune arrive avant l'équinoxe , de la Mère de Dieu contre les blasphèmes de
on doit faire la Pàque après le quatorzième Nestorius, et l'autre pour la défense d'Alba-
de la luue du mois suivant, qui sera alors le nase de Perrha, furent aussi traduits en la-
premier mois selon la disposition de la loi. tin par Denys, de même que sa lettre ou to-
C'est pour cela que la Pàque ne doit jamais me aux .arméniens. Ces deux discours se trou-
être célébrée ni avant le 22 mars, ni plus vent parmi les Œuvies de saint Proclus
tard que le 23 avril. Denys ajoute, que si le imprimées à Home en 1630; et la lettje aux

tianij inchnniiles, noluimus circulia nnflris me- Jefu ChriaU (innoriim tempora pripnotare. Ibid,
moriii l'i impii el prrsccutoris innecterc sed ma-
: ' Mal>illi)n. Analecla, pag. 59.
gU elegimus ab Jncamalione Domini nostri
.

fvi» siKCi.K.] rilAriTUE IX. SAINT CKSAinR, KVftoUE D'AllLKS. 12:5

Annénieiis dans la mitUotlwquc des Porcs, à les. Dciiys l'iiclrcssii ruhlMÎGuudcnce. Du-
l'i

Paris, en 157.1, cl encnre ailleurs. Denys dc^- C!mj;o la III iiiiprimcr Paris en l()(i3, iu-4°,
i'i

Féliiien. La la siiilc (lu ii-iili' liistnriqiie tlii clief de saint


dia celle dernière Iraduelinn ;"! <i

dernière que nous eiinnaissions de Ini est ,I('an-I{a[)lisli". l'I'oiis les oiiviviircs ih; l)(Miys le

celle de riiisloiro de l'invenlion du clicl' de PcUit se tidiiviMil iiii tome LXVII de lu l'alro-

sainlJcan-naplislc, écrite parl'abbc Marseil- logie latine, col. cl suiv.J

CHAPITRE IX.

Saint Césaire, évêqiie d'Arles.

[Père latin, 5i2.1

vait dépourvu d'abbé. Il le gouverna pen- Nn :,.!).

ARTICLE I". dant trois ans, au bout desquels Éonius, qui


sentait approcher sa fin, déclara à son cler-
IIISTOIUE DE SA VIE.
gé et ;ï son peuple qu'il avait jeté les yeux
1. Ce né dans le territoire de Châ-
saint, sur saint Césaiie pour son successeur, afin
10 .-Il 4iu; lons-sur-Saône en 470 d'une famille distin-
, de rétablir la discipline ecclésiastique qui
%ct;us.
guée par sa vertu, la pratiqua lui-même dès s'était relâchée. A la mort d'Éonius, suint
sa plus tendre jeunesse. N'étant âge que Césaire, sachant qu'on voulait le mettre sur

d'environ sept ans, il se sentait déjà tant de le siège d'Arles, se cacha dans des sépulcres.
compassion pour les pauvres, que lorsqu'il Il en fut tiré et ordonné évêque de cette ville
C;r ar. Vila, Mnliillon.
An'ia. I,:,. I,
lili. 1, niitii.
en rencontrait de mal vêtus, il leur donnait étant âgé de trente ans. Ennode de Pavie qui nu m. iS.
:t I..I». I Ac-
S.
l.ir.

)U-aoi: icti
Or.l.
ses habits , disant, lorsqu'il retournait à la vivait alors, dit que saint Césaire brilla sur
'

pJi-.l5;i.
maison paternelle, que les passants l'avaient le chandelier de l'Église, entre les évêques de
dépouillé. A l'âge de dix-huit ans, il pria saint son siècle, comme le soleil brille entre tous
Sylvestre, son évêque, de lui couper les che- les astres du firmament. Il fut en eô'etle res-
veux, et delui changer d'habit pour l'engager taurateuret le soutien de la discipline, le père
au service de Dieu. Ce que l'évêque lui ac- et le protecteur des orphelins le nourricier ,

corda, l'admettant en même temps dans son des pauvres. Sa vie fut un modèle de ver-
clergé. Saint Césaire après y avoir passé
, tus.
deux ans, poussé par le désir d'une plus La première chose qu'il régla fut l'Office
3. Sa cODduile
pend, ni ïon
grande perfection se relira secrètement au
, divin. Il ordonna que les clercs chanteraient
monastère de Lérins, pour y vivre sous la tous les jours l'office de tierce, sexte et noue
conduite de l'abbé Porcaire. Il s'y distingua dans l'Église de Saint-Étienne afin que les ,

par ses austérités et par son exactitude A rem- pénitents el les autres laïques pussent y assis-
plir les devoirs de l'état monastique. L'abbé ter. A l'égard de l'office de prime, on ne le C.'-ar. V I

le jugeant capable d'emplois, lui donna ce- disait que le dimanche, le samedi et les fêles
lui de cellérier de la maison. Quelque temps solennelles. Il obligea aussi les séculiers à jm m.
inj.
après iil'envoya à Arles pour le faire traiter chanter comme les clercs des psaumes, des ll'î; C.^-^a^.

d'une maladie que ces mortiticalions lui cantiques et des hymnes pour les empêcher
avaient causée. de causer dans l'église. Les uns chantaient en
Il oC (IcTé 2. Éonius, qui avait succédé à saint Syl- grec, les autres en latin, soit à cause deâ étran-
4 ijiacoDai,
la [irâtrise, vestre dans le siège de l'Église d'Arles, était gers, soit'^parce que le grec fût encore en usa-
"- 4 l'épis-
.
il, en 501. parent de saint Césaire. L'évêque le deman- ge dans ce pays oùles Grecs avaient fondé Mar-
da à l'abbé Porcaire, l'ordonna diacre, puis seille et tant d'autres colonies. Mais il exhor- Casar.

prêtre, et le chargea ensuite de la conduite tait ses peuples à ne pas seulement chan- Ap;n'iid. Aug,
cl :Uini'. i:,^t
du monastère d'une île voisine, qui se trou- ter de bouche, mais à conformer leurs pen-

' Tu cœteros velut soli$]magnitiidine astris mi- Epist. 33, pag. 1591.
noribiis comparala transgredcris. Ennod., lit). IX « Fleury, lib. XXXI, png.liS, tom. Vil.
126 HISTOIEE GÉNÉRALE TES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
sées et leurs mœurs aux p.iroles qu'il? pro- mariaee, il ordonna que, trois jours avant d'en
nonçaient, et à rejeter les distractions avant user, ils recevraieut dans l'Église la bénédic-
Ci«ar Vlla, de se prosterner pourl'oraison. Pour se don- tion du prêtre. Sa maison fut toujours ouver-
llb. I, DlUDt
37. ner lui-même tout entier à la lecture et à la te ^ tous ceux qui s'y présentaient, exerçant
prédication, il se déchargea sur des écono- l'hospitalité à toute heure et sans distinc-
mes et des diacres du soin du temporel. tion envers les étrangers clercs ou laïques.
Lorsqu'il n'était point appliqué .à l'un ou à 11 lit môme construire un logement commode
l'autre de ces exercices, ou à. la méditation pour les malades nécessiteux, oùl'onfournis-
des vérités de la religion, il avait auprès de , sait abondamment à leurs besoins. Pour lui',

lui un lecteur qui lui lisait ou les Livres saints il contiima depuis son épiscopat le même
ou ceux des anciens Pères. Ces lectures con- genre de vie qu'il avait mené étant moine.
tinuaient môme pendant ses repas. Il prê- 4. Tandis qu'il n'était occupé qu'à remplir
<é dctiut t
chait les dimanches et les fêles; et quand il les devoirs de l'épiscopat, Licinien, l'un de roi Alaiic

ne le pouvait, il y suppléait en faisant lire, ses secrétaires, fit dire au roi Alaric qu'il fai-
par des prêtres ou par des diacres, ses pro- I
sait tous ses efforts pour soumettre la ville

« pres sermons ou ceux de saint Ambroise et et le territoire d'.\rles aux Bourguignons. Le


31. de saint .\nc:ustiu. Qudquf's évoques se plai- saint évoque faisait tout le contraire, priant
gnirent qu'il confiait aux piètres et aux dia- jour et nuit à genoux pour la paix des na-
cres le ministère de la prédication contre , tions et le repos des villes en général. Mais
l'usage du temps. II leur répomlit : « S'ils peu- Alaric, sans se donner le loisir d'examiner
vent lire les paroles des prophètes, des apô- si l'accusation était fondée, envoya saint Cé-

tres et de Notre-Seigneur ils peuvent bien


, saire en exil à Bordeaux. C'était vers l'an
lire les nôtres. «Souvent il faisait lire des ho- 505. Pendant qu'il y était, le feu prit dans
mélies à matines et ii vêpres, afin que person- la ville, et le peuple, qui connaissait la ver-
ne ne manquât d'instruction. Pour en don- tu du saint évêque, accourut vers lui, lui

ner à ceux-mêmes qui n'étaient pas de son criant de l'éteindre par ses prières. Il se pros-
diocèse, il envoyait quelquefois de ses ser- terna en oraison devant le lieu de l'incendie
mons aux évoques éloignés, soit dans les qui s'éteignit aussitôt. Le roi .\laric reconnut
Gaules soit en Italie et en Espagne. II en
, son innocence, lui permit de retourner à son
donnait encore à ceux qui le venaient voir. Église, et ordonna que son accusateur serait
, ViU, Il n'y avait rien d'affecté dans son style il : lapidé. On élait prêt de l'accabler de pierres,
DUII).
était simple et à la portée de ses auditeurs. lorsque le Saint, informé de la sentence, ob-
Il disait que les discours trop étudiés n'é- tint par ses prières qu'elle serait révoquée.
taient bons que pour les savants, et n'aimait A son retour à Arles, le peuple vint au-devant
point la mauvaise délicatesse de ceux qui de lui, portant des cierges et des croix, et
craignaient plus de pécher contre la pureté chantant des psaumes.
du langage que contre la pureté des mœurs. 5. En 506, saint Césairc présida* au con- Il ••ti:l':«
no cog^llb ea
Nuoi. 31. Dans ses discours, il attaquait les vices com- cile qui se tint à Agde dans
mois de sep- le 6M.

muns et dominants, s'altachant particulière- tembre. Il s'y trouva vingt-trois évêques dont
ment à détruire les restes des superstitions plusieurs étaient sous la domination d'Ala-
païennes, c'est-à-dire, les sortilèges, les au- ric ce qui donne lieu de croire qu'il avait
:

gures honneurs que l'on rendait


et certains obtenu permission de ce prince de les convo-
aux arbres ou aux fontaines. La menace la quer en concile. L'année suivante, 507, il CpMr. Vitl.
)lh. I l:uiii.
plus terrible dont il usait quelquefois pour commença à bàlir un monastère mais l'ou- ;
,

tS, 18, 31, 33.

rendre les peuples attentifs aux vérités qu'il vrage ayant été interrompu par le siège que
leur prêchait, était la famine prédite par un les Français et les Bourguignons mirent de-
prophète, et qui consiste non dans la disette vant Arles, on ne put le finir que vers l'an
de la nourriture corporelle, mais dans la pri- 512. Saint Ccsairo en donna la conduite à
Lili. I,
3z.
vation de la parole de Dieu. Il n'ordonnait Césarie, sa sœur, qu'il avait instruite à .Mar-
aucun diacre qu'il n'eût atteint l'âge de trente seille dans les exercices de la vie monasti-
ans et n'eût lu au moins quatre fois tous les que. 11 composa pour elle une Règle dont uous
livres de l'Ecriture sainte. A l'égard des per- parlerons dans la suite.
sonues du siècle qui s'engageaient dans lo 6. Il arriva, pendant le siège de la villo lICKl^CcSli
d« ooUTO&a.

' Fortun., lib. V, cap. l. « Tom. IV Concil., pag. 1381 cl 139*.


[vi* SIÈCLE.] CFIAPITRE IX. SAINT CfeAinii;, ÉVftOUK D'AIILES. 127
d'Arlos parles Français cl les noiir2;iiii;nons, beaucoup de Après l'avoir entre-
jiolitesse.
qu'un jeune clerc, parent de saint Ci^sairo, tenu sur do la ville d'Arles et les Gotlis
l'état
craignant d'élre pris avec la ville, descemlit qui y demeuraient il le renvoya disant A
, ,

de luiit par le ninr avec une corde et se ren- ceux de sa cour «Dieu punisse ceux qui ont
:

dit aux einuMuis. Les Gotlis qui étaituit de- fait faire iiuilihuneut un si long voyage h un
dans en ayant été informes, se 'étirent sur
, si saint homme. J'ai tremblé à son entrée;

le saint dvôque avec le peuple sikliticux et il a un visage d'ange, et il n'est pas permis do

les juifs, disant qu'il avait envoyé son parent penser mal d'une personne si respectable. »
pour livrer la ville. Ils ne voulurent point Le roi lui envoya;i son Ingis unbassiu d'argent
écouter ses dt'feuses, le tirèrent de la uiai- du poids de soixante livres avec trois cents
son de l'Eglise, et le gardèrent dtroitement sols d'or, en le faisant prier de s'en servir
dans le Palais, rejoins de le jeter la nuit pour l'amour de lui. Mais le saint évoque
dans le Rhône, ou de l'enferuier dans le clià- fit vendre le bassin publicpiemenl, et délivra

teau du Germe, qui est aujourd'hui la ville plusieurs captifs; ce qui engagea les séna-
de Beaucaire. Mais les assiégeants ayant em- teurs et les riches de la ville à lui envoyer
pêché le passage de la banpie où l'on avait de grosses sommes, pour être distribuées par
mis le saint évèque, les Gotlis, oblig(;s de le ses mains. Il guérit dans la même ville le fils
ramener, le cachèrent si bien danslel'alais, d'une veuve, qui s»rvait sous le Préfet du
qu'aucun catholique ne pouvait savoir s'il Prétoire, et qui, avec ses gages , donnait à
était en vie'.Qucliiues jours aprè-s on décou- sa mère de quoi subsister.
vrit, par une lettre qu'un juif avait jetée du 8. De Raveune, saint Césaire alla à Rome Il va 1 llo.

côté des enuemis, que ceux de cette nation où sa réputation et le bruit de ce miracle
invitaient les assiégeants à planter leurs échel- l'avaient précédé. Le pape Symmaque, qui Niun. 20.
lesde nuit au lieu où il serait de garde, i\ la occupait alors le Saint-Siège, c'est-à-dire eu
charge de garantir les juifs de la captivité et 513, lui donna le Pallium, et permission à
Hii::i. 16. du pillage. Le juif, auteur de la lettre, fut ses diacres de porter des dalmatiiiues, com-
convaincu et puni et saint Césaire justifié
, me ceux de romaine. Car les dia-
l'Église
et mis en liberté. Les assiégeants, ayant été cres ' et les évêques mêmes ne portaient
Tom. IV
contraints de lever le siège, les Gotbs firent encore que des tuniques à manches étroites. Cnncîl. j.af.
I2ÎÔ,
1204,
sur eux un grand nombre de captifs, dont on Le Pape confirma encore tous les privilèges 13UÙ, lUIO.

remplit jusqu'aux églises. Comme ils man- de l'Église d'Arles, dont quelques - uns lui
quaient de vivres et d'habits, le saint évèque étaient contestés par l'Église de Vienne, et

y pourvut avec l'argent qu'Éonius, son pré- chargea saint Césaire de veiller sur toutes
décesseur, av.iit laissé au trésor de l'Église. les affaires ecclésiastiques des Gaules et d'Es-
n ôta même celui dont les colonnes et les pagne, avec pouvoir d'en assembler les évê-
balustrades étaient ornées et donna jus- , ques quand il le jugerait nécessaire, et d'em-
qu'aux encensoirs, aux calices et patènes, en pêcher qu'ils ne fissent le voyage de Rome
disant « Notre-Seigneur a fait la Gène dans
: sans sa permission.
un plat de terre, et non avec de la vaisselle 9. Le saint évèque, de retour dans son Il rctouroo
ft Arics. Sa
d'argent on peut bien donner les vases pour
; diocèse, versl'an oI4, continua à l'édifier par inor( on -ilJ,

racheter ceux qu'il a rachetés par sa propre sa vie et par ses discours. Il y tint un con-
vie. Ceux qui trouvent mauvais que l'on i-a- cile en 524, et assista à quelques autres qui
chète les serviteurs de Jésus -Christ aux dé- se tinrent dans la suite, savoir : au concile de
pens de ses vases, ne voudraient-ils pas eux- Carpentras, en 527 à ceux d'Or£y]ge et de Va-
;

mêmes être rachetés à ce prix, si le même lence, eu 529 et au second concile de Vaison,
;

malheur leur arrivait?» tenu le 7 de novembre de la même année.


7. Saint Césaire fut accusé une troisième Ses infirmités qui le faisaient souvent paraî-
fois, etmené sous bonne garde à Raveune, tre à demi-mort, s'augmentant de jour en
par ordre de ïhéodoric, roi des Ostrogoths, jour, il vit que sa fin approchait. Alors il

auquel la ville d'Arles était soumise. Arrivé demanda à ses disciples combien il y avait
à Ra venue, il alla saluer ce prince qui, voyant jusqu'à la fête de saint Augustin, et dit :

un homme si intrépide et si vénérable, se « J'espère en Notre-Seigneur que ma mort


leva, se découvrit et lui rendit son salut avec ne sera pas éloignée de la sienne, car vous

' Fleury. lib. XXXI Ilisl. ecclés., tom. VU, pag. 178. Et S. Gregor., lib. VII Episl. 113.
428 HISTOIRE GKNÉllALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
savez ', combien j'ai toujours aimé sa doc- pour y être récités par les évèques qui n'a-
trine très-catliolique. » Il se fit transporter vaient pas apparemment enx-mèmcs le don
dans monastère des filles qu'il avait fondé
le de la parole. On ne peut donc douter qiTil
trente ans auparavant, saclianl que la crainte n'ait composé un très-grand nombre de dis-

de sa mort les jetait dans de grandes inquié- cours, et qu'encore qu'il nous en reste beau-
tudes, jusqu'à leur faire perdre le sommeil coup, la plupart ne soient perdus, ou attri-
et la nourriture. Après avoir tàcbé de les bués à d'autres auteurs. Il y en a environ
consoler, il les exhorta à garder fidèlement quarante sous son nom dans la liibliuthi'fjKe
la règle qu'il leur avait donnée, les recom- des Pères, et cent deux dans l'Appendice du
mandant par son testament et par ses lettres cinquième tome des Œuvres de saint Au-
aux évèques ses successeurs, au clergé, aux gustin, qui comprend ses sermons. M. Baluze
gouverneurs aux citoyens de la ville d'Ar-
et en a fait imprimer séparément quatorze,
les, afin ne fussent in-
qu'à l'avenir elles qu'il croyait n'avoir pas encore vu le jour,

quiétées de personne. Leur ayant donné sa et qui ont été mis dans le vingt-seplie-

bénédiction et dit le dernier adieu, il re- me volume de la Bibliothèque des Pères de


tourna à l'Église méti-opolitaiuc, et mourut Lyon, en 1677. Il s'en trouve encore quel-
entre les mains des évèques, des prêtres et ques-uns dans les Recueils des conciles, et
des diacres, le 27 août 542, la veiUe de la dans celui de Barrali. Mais il ne faut pas
fête de saint Augustin. Ses vertus le firent s'imaginer que ce soit autant de sermons
regretter de tout le monde, des bons et des dilTérents. Les Homélies puljliées en 1069 par
mauvais chrétiens, et même des juifs. Sa vie M. Baluze, se trouvent parmi celles que l'on
fut aussitôt après écrite en deux livres, dont a mises dans VApjjendice des sermons de saint
le premier, qui est adressé à l'abbesse Césa- Augustin ; et il y en a encore beaucoup de
rie, la jeune, eut pour auteur Cyprien, évo- celles qui ont été imprimées dans le huitiè-
que de Toulon, avec deux autres évèques, me tome de la Bibliothèque des Pères. U en
Firmin et Viventius. Le prêtre Messien et le faut dire autant des Homélies que Barradi a
diacre Etienne écrivirent le second. Ils données, et qu'il suppose avoir été pronon-
avaient tous été disciples de saint Césaire cées en présence des moines de Lérins.
et témoins de ses vertus et de ses miracles. 2. La plupart des discours de ce Père ont II) OUI «I
•<lrll'U(> i
Au(:u>lin.
été attiibués à saint Augustin, quelques-uns S.
I
A ml'ri>lM
ARTICLE II. à saint Ambroise, et d'autres à Eusèbe d'É- et t d dulroa

mèse *. Les auteurs de la nouvelle édition


DES ÉCRITS DE SAINT CÉSAIRE d'ARLES.
de saint Augustin se sont donné la peine
d'examiner quels étaient les véritables ser-
§1-
mons de saint Césaire, et ils ont été guidés
De ses sermons recueillis dans /'Appendice de dans ce travail par les règles les plus solides
ceux de saint Augustin. de la bonne critique, fondée sur l'autorité
des manuscrits, sur la conformité du style,
ri««>LP« d 1. Nous avons vu qu'aussitôt que saint l'usage familier de certains termes, les cir-
tkia CtUin
Césaire eut été élevé à l'épiscopat, il se dé- constances des temps et des lieux, et sur la
chargea, à l'exemple des apôtres, de l'adnii- doctrine et la méthode. Ces deux cents homé-
nistiation des aflaires temporelles, sur des lies qu'ils lui attribuent, ou portent son nom
diacres et des économes, pour se donner dans les manuscrits, ou sont de son style,
tout entier à la prédication de la parole de qui est d'autant plus aisé à connaître, qu'il
Dieu; qu'il*ivait les fonctions de ce minis- lui est propre et singulier. Il est simple, net
tère si à cœur, que, non content de prêcher sans aucune all'ectation, accommodé à la
dans les assemblées qui se faisaient le matin portée des moins instruits. Sa doctrine est
et le soir, il composait encore d'autres dis- partout conforme à celle de saint Augustin ;

cours qu'il envoyait en d'autres provinces, ou voit dans tous ses discours la même mé-

* Confido in Domino quori meum transilum non ejusobitus tempore sequestrari. Cœsar. Vita, lib. II,

longe Uivisurus est ab ipsius : qui ut ipsi nostii, nuiu. 35.


quantum dilexi ejus catholicissimum sensum tan- ' Ou encore
i\ un EusM^e, t'vôque dans los riaii-
tum me etsi iliscrepanlem meritis minime lamen , l'^s.\oycz Histoire Ultéraire de la France, touic II,
reor dislaniia longior» deposilionis meœ diem ab I>ag. 301 cl Buiv. Le tome LXWI de la Patrologie
[vi" SIÈCLE.] CIIAriTlVE IX. — SAINT r.H.SAinR, livftQUIî D'AULl'^S. 42!)

tliode pour les commencer cl pour les Unir. (lenous-mêmes, c'cstà-dire do nos vices, do
Il en est pon où il ne fasse une rc'capilnia- nos mauvaises liahilutles, pour ne plus pren-
lion de ce qu'il avait dit; il use dans quel- dre do i)laisir que dans la pratique do la
ques-uns do certains termes, qu'on ne trouvo vertu. La matière du second discours est
p«T.li).
que rarement ailleurs, mais dont il se sert prise de l'ordre que Dieu doima au mènK!
dans sa Uèglo pour les vicri,'es de son monas- patriarche de lui immoler une vache ou un
tère. Tel est le mot ' de canava pour mar- bélier, on une chèvre de trois ans. Saint Cé-
quer le cellier, et de canavaria pour signifier saire dit que toutes les nations qui croient en
le coUtirier. Enfin ces cent doux discours ont Jésus-Christ et qui y croiront un jour, sont
un rapport visible au style, aux termes, aux enfants d'.Vbraham, non en naissant de lui
pensées de ceux qu'il lit dans les conciles selon la chair, mais en imitant sa foi. Il se
qu'il convoqu i et auxquels il présida. Nous plaint de ce que toutes les fois que le prêtre,
avons remarqué plus liant que lorsque sa san- en célébrant le sacrifice, avertissait les fidè-

té ne lui ixuinetlait pas de prèclier, il faisait les d'élever leur cœur en haut, il y en avait
lire ou ses propres discours, ou les sermons peu qui,en répondant qu'ils l'avaient tourne
de saint Ambroise ou de saint Augustin. vurs Dieu, le fissent avec vérité et avec con-
Dans ceux qu'il composait lui-raôme, il em- fiance. 11 traite, dans le troisième, du maria-
Sorm.3,
pruntait quelquefois non-seulement les pen- ge d'Isaac avec Rébecca, qu'il dit avoir été
sées, mais aussi les termes de ces deux Pè- la figure de celui de Jésus-Glirist avec son
res et de Fauste de Riez et c'est peut-être
; Église. Le quatrième est touchant les deux 'ïej;ii. i,
pag. se.
là la vraie raison pourquoi les copistes, qui enfants que Rébecca portait dans son sein,
ne trouvaient pas son nom à la tète de Jacob et Esaii. Il dit que comme ces deux
ces discours, ont attribué ;ï saint Ambroise enfants ' luttaient l'un contre l'autre dans le
et à saint Augustin certains discours de saint sein de leur mère, il y a de même dans l'É-
Césaire, où ils remarquaient les termes et glise deux peuples qui sont toujours opposés
les pensées de ces deux saints évèques. Au les uns aux autres, les bons et les méclianis.
reste, ses boraélies furent tellement estimées, «S'il n'y avait, ajoute-t-il, dansl'Église, que
que vécu depuis y al-
les écrivains qui ont des bons ou des méchants, il n'y aurait qu'un
laient puiser, comme fait lui-même
il avait seul peuple mais parce que l'on trouve
:

quelquefois dans celles de saint Augustin. dans l'Église des bons et des méchants, qui
C'est ce que l'on peut voir en les comparant se combattent mutuellement, savoir les hum-
avec celles de saint Éloi et de Raban Maur. bles et les superbes, les chastes et les adultè-
Le premier discours
3. est sur la vocation res, les miséricordieux et les avares, ils sont
d'Abraham marquée dans le douzième chapi- deux peuples figurés par Jacob et Ésau. Les
tre de la Genèse. L'auteur y pose pour princi- bons s'efforcent de gagner les méchants pour
pe, ce qu'il répète souvent ailleurs, que l'An-
S.Tm.l.t/.ni
les engager à la vertu; les méchants, au
V Operurii

cien Testament a été la figure du Nouveau, et


AiirusliDi in
A)<^oii(l. i.-i'^'t
contraire, cherchent la perte des bons eu ta-
que ce qui s'est passé alors matériellement chant de les engager dans le mal.» Il trouve
dans la personne des patriarches, doit se fai- dans ce qui se passe aujourd'inii entre les
re spirituellement en nous; qu'ainsi le com- gentils et les Juifs l'accomplissement de cette
mandement que Dieu fait à Abraham de sor- prophétie : L'aîné servira le puîné ; « Car, dit-

tir de son pays, de sa famille et de la maison il, les Juifs, qui sont le peuple aine ' figuri!
de son père, marque que nous devons sortir par Ésaii, servent évidemment le peuple pnî-

grecque, col. 461-566 contient trois notices sur Eii-


, jugiler adversantiir. Si enim aut soli mnli aul soH
sèbe (l'Émèse; 2» trois discours édités eu fiTec et eu boni esscnt, unus popiilus esset : quia vero in
latin par Jean Chrétieu Guillaume Augusti; seule- Ecclesia et boni inveniuntur et mali; lanquaia
ment on a mis par mégarde le discours sur le diable in ventre spiritalis Rebecc(B duo pnpuli cnllidun -
et sur l'eufer parmi les écrits d'Eusèbe d'Alexandrie. tur, humiles scilicel et superbi. ca.tti et adulteri,
Ibid., col. 383 et suiv. 3" des fragments dogmati-
; misericodeset cupidi. Boni enim lucrari voliint ma-
ques recueillis par Augusti, et des fraguieats exé- ins, mali autem extinguere cupiunl bonns. Cœsar.,
gétiques d'après différentes Cbaîues. {L'éditeur.) Serm. i, pag. 21.
' C:esar. Regul. ad virgin., cap. xxs, et serra., ' Quomodo ergo populus major serviat minori,

In Àppend. August. lit, num. 2; 270, num. 5 et 271, qui hoc diligenter attendit, in chrintianis cel in,
num, 1. Judœis agnoscit. Major enim et senior pupulus
* Sicul duo parvuli in utero Rebeccœ collide- Judœorum jtiniori, id est populo chrisliano ser-
bantur, sic cl in ulcro Ecclesiie dun sibi pnpuli vireprobatur; dum per totum mundum librosdi-
XI. 9
130 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
né, qui sont les gentils convertis à la foi de du jour à la prière et à la lecture, afin de pou-
Jésiis-Ciirist, lorsqu'ils portent partout le voir participer dans la solennité de Pâques
monde les livres de la loi divine pour l'instruc- à l'autel du Seigueur, et y recevoir son corps
tion de toutes les nations. En etl'et, les Juifs et son sang, non à sa condamnation. Le cin-

sont dispersés par toute la terre afin que ,


quième et le sixième sermon sont sur le pa-
lorsque nous voulons inviter quelque infidèle triarclie Jacob. Saint Césaire remarque que

à la de Jésus-Christ en montrant que le


foi les mariages des patriarches se sont souvent
Messie a été annoncé par tous les prophètes, contractés auprès des puits et des fontaines,
et que cet infidèle faisant dilliculté de nous qui étaient les figures du baptême, par le-

écouter, en soutenant que les livres de la loi quel Jésus-Christ devait purifier l'Église, son
divine sont de nous et non pas du Saint-Es- épouse, de toutes sortes d'iniquités. Les trois S«rtn.e,7,

prit, nous ayons dans le moment celte répli- suivants contiennent un parallèle entre le pa- ]^- "• *»

que certaine à leur faire Si vous doutez de


: triarche Joseph et Jésus-Christ, dont Joseph
la vérité des livres qu'on vous allègue, voilà était la figure. Il dit que les interprètes ne
les livres des Juifs, nos ennemis, que nous s'accordaient pas sur le prix de la vente de
n'avons pu ni écrire ni changer lisez -les.
, : Joseph par ses frères; que dans quelques
Et lorsque vous aurez trouvé dans ces livres versions on hsait vingt pièces d'argent, et
la même chose que dans les nôtres, rendez- dans d'autres trente. Il trouve dans celte va-
vous, ne soyez plus incrédules, mais fidèles.» riété la dilTéreuce des degrés d'amour que
Sur la fin de ce discours, saint Césairc exhor- les chrétiens auraient pour Jésus-Christ les :

te ses auditeurs à la pratique de la vertu, par- uns l'aimant plus, les autres moins. Il donne
r«s. )j.
ticulièrement dans le saint temps de Carême, pour raison de la sévérité dont Joseph usa
il les engage surtout <i se trouver exactement envers ses frères, qu'il voulait par là les en-
auxollicesde la nuit', de tierce, de sexte et gager à la confession de leurs crimes et à en
de none à vivre dans la continence pendant
; faire pénitence. Il en tire une moralité pour
tout le Carême, et même jusqu'à la fin de la la correction fraternelle, disant qu'à l'exem-
fête de Pâques, c'est-à-dire jusqu'après TOc- ple de ce patriarche, nous devons tellement
tave adonner aux pauvres ce que dans un
; reprendre ceux de nos frères qui ont péché
autre temps ils auraient dépensé pour leur contre nous, que nous cherchions à les cor-
dîner; à conserver la paix avec tout le mon- riger de leurs fautes, et non pas à satisfaire
de, et à réconcilier même ceux qui étaient notre haine. Il parait, par la tin du huitième
en dissension à recevoir les étrangers, en
; discours, qui est le troisième sur Joseph,
ne rougissant pas de leur laver les pieds, un qu'il aurait souhaité s'étendre davantage sur
chrétien ne devant pas rougir de ce que Jé- ses vertus, mais qn'il abrégea afin de donner
sus-Christ a fait; à faire l'aumône chacun aux pauvres, qui étaient pressés de travailler,
selon ses facultés, et à employer une partie le temps de faire leur ouvrage. Il prêcha

vinœ legis ad inslruclionem omnium genliumpor- lis, ad concordiam revocale. Peregrinos excipite,
tare cognoscitur. Ideo eiiim per omnem terram nec vos pigeât eorum pedes abluere. Son erubes-
Judœi dispersi sunt, ut cum aliquem paganum nd cat exerccre christianus, quod implere dignatus
fidem ChrUti voluerimus incitare, et ab omnibus est Chrislus. Cum bona voluntnle pauperibus se-
propketis ipsum Chrislum esse annuntiatum tes- cundum vires vcslras eleemosynas erogate : liil.i-
tamur; et ille resistens dixeril, a nobis potius rciu eniiu datorcm diligit Deus. /mpedtnien/a mun-
quam a Spiritu Sancto libros divinœ legis esse di, si ad integrum non poteslis abgcindere, vel ex
conscriplos ; nos habeamiis unde eum rednrguere parte aliqua temperate, ut lectioni vel orationi
certa rationepossimus dicentes ei : Si de meis libris possitis insistere : ut in sancto exceptorio pec-
tibi dubilatio nascilur, ecce Judœorum librns, uti- toris veslri spiritale rinum, id est, verbum Dei
queinimicorum nostrorum, {quos certum est, quod abundintius reponentes, repudiatis omnibus cri-
ego conscribere vel immuiure non putiU) ipsos re- minibus atque peccalis, cum libéra et sincera cons-
Uge; et cum in ipsis hoc inveneris, quod et in cientia Deo servire possitis : et cum sancta solem-
meis, noli esse incredulus, sed fidtlis. Ibid. nitas paschalis advenerit, charitatem non solum
' Attenliust amen rogo et admoneo, fralres, ut ad
cum bonix, scd etiam cum malis fideliler retinen-
vigilias malurius surgere siudeatis, ad tertiam, les, cum gaudio exsultalionis mundo corde et cas-
ad sextam, ad nonam fideliler veniatis. CastHa~ tocorpore ad altare Domini possitis nccedere, et
tem ante omnia per lolam quadragesiutam et us- corpus et sanguinem ejus unusquisque vesirum
quead finem Paschœ etiam cum propriis uxoribus non ad judicium animœ sua; merealur acciprre.
custodile.Qiiodpransurieratis,paupcribuserogate. Ibid., pag. 22.
Paccm et ipsi habetc, et qv"^ diimnles agnoveri-
,

[Vl" SIÈCXE.] (JIIAPirilK ]\. — SAINT CfeAlRE, KVftOUE D'ARLKS. 131

ilonc ces discours eu un jour ouvrier. Lo égard no fit nutro chose que de le laisser dans
lendouuiin il reprit la môme iiiaticrn, et mon- l'état où il l'avait trouvé. Dieu aurait pu amol-

tra ([uo, ('(iniiiK! aprî's la murl de Joscpli, les lir son (Meur, en le chùliant ce qui paiail en :

Israi'liti's se niulliplièreiil, ainsi qu'il (>st dit ce que Pharaon témoigna du re[>oiitir toutes
dans le livre de l'Exode, de môme les chré- les fois que Dieu l'aflligea et qu'il retomba
;

tiens se sont inuUipliés aprrs la mnrt do Jé- dans son endurcissement autant de fois que
sus-Christ. Il enseigne (pi'cilant (li'livr('s jiar Dieu le d ('livra des plaies dont il l'avait frappé.
lu gr;\ce du baptême de tous nos péchés, « Quel est donc, ajoute saint Césaire, le
nous devons, avec le secours de Dieu, tra- sens'' de ces paroles J'endurcirai son cœur,
:

vailler A toutes sortes de bonnes œuvres, sinon, lorsque ma grdce lui sera ôtée, son
parce qu'il no suQil pas que le creur soit vide iniquité l'endurcira?» Pour rendre la chose
de maux, si on ne le remplit de biens. sensible il propose cet exemple
, « Toutes :

4. Le dixième, qui a pour matière les dif- les fois que l'eau glacée par un grand froid
férents entre les Israélites et les Ej^yptiens, reçoit l'impression de la chaleur du soleil,
fut pi'ononcé quelques jours avant la fête de elle reprend sa première fluidité mais aus- ;

P;\ijucs. On y
voit que le diable no persécute sitôt que le soleil disparait de nouveau, elle
que les bons et non pas les mauvais, parce se glace et s'endurcit une seconde fois do :

qu'ils sont ses amis et qu'ils font toujours sa même la charité de plusieurs se refroidit et
volontiî; qu'il persécute les bons par le mi- se glace par le froid des péchés mais lors- ;

nistère des méchants en sorte qu'il est vrai


;
que la chaleur de la divine miséricorde sur-
de dire que le diable a ses ministres, comme vient, cette glace causée par les péchés se
Dieu a les siens Dieu par les hommes sages
: dissout. C'est cette chaleur dont il est dit dans
fait tout ce qui est bon; et le diable par les l'Ecriture : // n'y a personne qui se mette à
mauvais, fuit tout ce qu'il y a de mal. Il y couvert de sa chaleur. »

a deux discours sur Moïse. On peut remar- Le quatorzième est touchant les espions .Sorm. lA,

quer dans le second, que l'on ne donne le des Israélites envoyés dans la terre promise,
nom 'de chrétiens qu'à ceux qui, étant régé- et les raisins qu'ils en apportèrent. Il fut
nérés au nom de Jésus-Christ, sont morts prêché aux approches do la fête de Pâques;
dans l'Eglise catholique et que tous ceux
;
et à l'occasion de ces raisins saint Césaire ,

qui ne sont point dans cette Église mais , exhorte son peuple à se préparer par les
dans quelque secte particulière, en portent le jeûnes, les veilles, les oraisons, les aumônes,
nom; que les uns sont appelés donatistes, et par une pureté de corps et d'esprit, à
les autres manichéens les autres ariens, et
, boire le cahcedu salut dans cette solennité.
d'autres photiniens. Dans le treizième il ex- 11 fait dans le quinzième, que la sentence
voir
plique ces paroles de l'Exode Le Seigneur: que Dieu prononce quelquefois contre les
endiuxit le cœur de Pharaon. Pourquoi, di- pécheurs, n'est point irrévocable, lorsque
saient quelques-uns, l'iniquité est-elle imputée ces pécheurs se convertissent; mais aussi
à Pharaou, puisqu'il est dit que le Seigneur qu'il leur est bien plus facile de guérir leurs
avait endurci son cœur? Avant de répondre, plaies, quand elle sont récentes, que lors-
saint Césaire met pour principe que dans un qu'elles sont invétérées. Dans le seizième ser-
Serm. 16,
pécheur le désespoir vient de la considéra- mon, qui regarde l'entrée des Israélites dans pa;. 61;.

tion du grand nombre de ses péchés, et que la Terre-Promise, ce Père montre que ce fut
du désespoir nait l'endurcissement. Il sup- avec justice qu'ils en chassèrent les Chana-
pose que Pharaon était dans ce cas: d'où il néens, soit à cause qu'ils en étaient illégiti-
infère que son endurcissement n'était point mement en possession , l'ayant usurpée sur
lui effet de la puissance de Dieu, qui à son les descendants de Sem , fils aîné de Noé
' In Ecclesia catholica defuncti, id est, Christi enim quotiens nimio frigore aqua constringitur,
nomine omnes qui nati fuerint, appellanlur chris- solis calore superveniente resolvitur, etdiscedente
tiani.In hœreUcis vero, aliidonalistœ, alii mani- eodem sole ilertim obduratur : ita nimirum pec-
chœi, alii ariani, aliipholiniani dicuntur. Cœsar., catorum frigore refrigescil charilas multorum, et
Serin, il, pag. 40. veliit glaciesobduranlur; etciuti eis iterum cator
» Quid est autem quod dixit Deus : Ego indurabo divinœ misericordiœ supervenerit, resolvuntur;
cor ejus, nisi ciim ab illo ablata fuerit gratia mea, ille utique calor de quo scriptuin est : Nou est qui
obdurabit illum nequitia sua? Et ut hoc euiden- se abscondat a calore ejus. Cicsar. Serm. 12, ,

tius possit agnos:i, aliqiuim similitudinemde ré- pag. 46.


bus visibilibus charilativestne proponimus.SiciU
132 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
à qui elle avait été donnée en partage ; soit les souffrances des justes en cette vie, seront i«« s,r„

à cause des crimes inouïs dont


it ils s'étaient pensées dans l'antre, et les supplices
récompensées
souillés, et dont Dieu les voulait punir, en dont les méchants seront punis éternellement
s.rni. n, leurolant cette terre. L'ordre queJosaédonna pour les plaisirs passagers dout il ont joui
(j;. «a.
pour le passage du Jourdain, et le renverse- dans ce uKuide. Le vingt-neuvième traite des
ment des murs de Jéricho font la matière du deux voies, dont l'une mène au ciel l'autre .

Sem». 1^,19, dix-septième. Les dix-huit et dix-neuf regar- en enfer. Saint Césaire y dit, que non-seule-
dent l'histoire de David. On y voit que, le joiir ment Jésus-Christ nous attend dans le para-
qu'ils furent prononcés on avait lu dans l'K-
,
dis, mais qu'il nous aide encore pour y aller;

glise quelque chose des livres des Rois. Suint que si le diable sévit contre nous, Jésus-Christ
S/Tfn, Sfl. Césaire trouve dans les trois inclinations nous console que le démon ne nous otfre
;

que prophète Elle fit, pour ressusciter le


le que de vaines douceurs dont l'effet est de
,

fds de la veuve, une ligure des trois immer- donner la mort à notre àmc au lieu que ;

sions qui se pratiquent dans le sacrement du Jésus-ChrisI eu nous exhortant à la vertu,


,

Sirro.îl.!!, baptême par lequel nous ressuscitons. 11 y a nous promet une félicité éternelle.
>ri. il, iv 5. Le sermon sur cet endroit de saint Mal-
9» et ><s. quatre discoure sur Elisée. Le saint remarque
dans le premier, que si ce prophète fit dé- thieu Malheur aux femmes qui seront grossies
:

vorer par deux ours quarante-deux enfants, ou nourrices en ce temps-là, est une compila-
ce fut pour imprimer aux anciens du respect tion du commentaire de saint .\uguslin sur
pour prophètes, qu'ils méprisaient aupa-
les le psaume trente neuvième. On le croit avec

.25,
ravant. Dans le vingt-cinquième qui est sur assez de vraisemblance de saint Césaire. L'au-
,.r. Il»
ces paroles Que votre main gauche ne sache
: teur prouve que l'accomplissement des an-
jmnt ce que fait la droite , il en fait l'applica- ciennes prophéties, ne nous laisse aucun lieu
.'.Utib. Ti, 3.

tion aux bonnes œuvres, particulièrement à de douter que celles qin regardent le juge-
l'amuône, voulant qu'on la fasse tellement en ment dernier ne s'accomrilissent aussi. Le
public, que l'on ne cherche point à s'attirer trentièm.e porte le nom de dans
saint Cé.saire
par là l'estime des hommes, mais seulement deux anciens manuscrits. Il a pour malièrela
à plaire à Dieu. Il explique dans le même parabole des dix vierges. Le saint en Qt un
sens ce que l'Evangile ajoute Lorsque vous : second sur le même sujet pour la féie des
voudrez prier, entrez en un lieu retiré de voire vierges. Des deux,Holsténius n'en a fait qu'un
tnaison. Jésus-Christ ne défend pas les prières qui est imprimé dans l'Appendice du Code drs
publiques où tout le peuple fléchit les genoux règles par saint Benoît d'Aniane, et dans I
•.

avec l'évoque mais il nous défend tout autre


; Supplément de la Bibrolhèque des Pères, à
motif, soit dans nos prières, soit dans nos Lyon en 1G77. Saint Césaire dit, que les vier-
jeûnes, soit dans nos aumônes, que celui do ges, qui avec ' le sccoiu's de Dieu coiisers'ent
fflrtn. 26, nous procurer la vie éternelle. Le vingt-sixiè- leur corps chaste, doivent travailler de toutes
|>a;. IJD.
me regarde la défense qui nous est faite t/e ne leurs forces, avec sa grâce, à la purelé de leu;-
jiKfr personne, alin ijae nous ne soyons pas àmc, en évitant les longs discours, la médi-
.. vr,7. jugés nous-mômes. « Il y a toujours du dan- sance, le murmure, l'euvie et l'orgueil; ou
ger, dit- il, à juger notre prochain dans des obéissant avec humilité, en vaquant ;\ la priè-
choses qui sont connues de Dieu seul c'est
'
; re, à la lecture; en se levant avec ardeur pour
à lui qu'il en faut laisser le jugement. Mais assister aux veilles de la nuit, soit qu'elles se
nous pouvons, et nous devons même repren- fassent dans l'oratoire, ou en tout autre lieu ;

dre nos frères, quand leurs fautes sont publi- en consolant les aflligés, en reprenant Io>
ques et notoires, mais avec charité et avec désobéissants. Les trente-unième et trenl,--
amour, haïssant le vice et non le pécheur.» deuxième discours sont sur ces paroles de \'l'.-
f«r.n. >7,
]i s'applique dans les vingt- septième et vangile : ]'enez, les bénis de mon l'ère, ]>osh'1<'z
''* .. ai,
^4,1111. -8, HSi vingt-huitième à montrer les avantages dont le royaume; retirez-vous, maudits, allez au feu

' De istit rébus quœ sunt Deo notœ et nnbis tn- «ar., Serm. 26. pag. 121.
cognitœ, periculnse nnslros proxiinos juilicamus. ' Virginesquœ inlegritatem corpori.t, Df.o nuxi-
De ipsis enim Doiiiinm; dixit : Nolili' jinlicare ut lianle, cii-stodiutU, tolis Dei adjnto-
viribus cum
non jiidiceiniQi. De ilUs vero quœ aperta sunt et no laborare conlendatil, verbusilatem fiigere, dc-
publica mala, judicare et redarguere, cum cliari- tracliitncm, murmuralionem rcspuere, etc., Cm-
lalc liiine.i et a.mrc r' pi^v-i<r>^i^ et debenius: sar., Uom. 30, paj;. 139.
oUio habentes non ho,nincin, sed peccnlum. de-
[VI' siiiCLE.J CHAPITRK IX. — SAINT CKSAIIIE, ÉVÈQUE IVARLKS. 133
Prrni <'to-ne/. Saint C(îpairc' rcmarfjnp, qu'aux tor- dit quo trompent qui s'imaginent
ceux-l.'\ se
lU.
iiR's de Jiisus-CInist, nous sommes pii^ilesli- qu'en bAlissant sur le fondement, qui est Jé-
iK's i\ la itloire du non ])as au feu do
ciel, et sus-ChrisJ, des péchés capitaux, ces péchés-
l'enfer, qui est préiKin^ au dc-nion el A ses an- là mêmes peuvent être puriliés par le feu
cres, niiiis non |);is l'uitius. 11 loinaniuc^ encore passagerdu purgatoire. Il soidient que quand
que, quoi(jue la sentence ([ui coiulanmera aux l'Apolrc ajoute (Juc celui dont l'ouvrage sera
:

llauinics (;lernellcs les catholiques qui n'au- brûlé, ne laissera pas d'être sauvé, quoiqu'en
ront pas l'ail de lionnes (vuvres, regarde éga- passant par le feu, cela ne doit 's'entendre (pie
Icmcnl les juifs, les païens cl les licTcliques; des péchés légers. Il fait à celte occasion une
(pic ceux-ci toutefois ne seront pas appe- ' éniimération de ces deux sortes de péchés.
lés au jujiement, parce qu'ils sont d(''j;'i juges Par les capitaux il entend le sacrilège, l'ho-
à cause de leurincrëdulilé. A quoi il ajoute, micide, l'adultère, le faux témoignage, le vol,
(pie ceux-uièniesqui croient, ne doivent point la rapine, l'orgueil, l'envie, l'avarice, la co-
se tlatter d'obtenir le salut par leur foi seule, lère,quand elle dure longtemps; l'ivrogne-
parce qu'il ue suffit pas ' de porter le nom rie,quand on en fait une habitude. Tous ces
de chri5tien, si l'on n'en remplit les devoirs. péchés demandent d'être expiés en ce mon-
Dans le trento-lroi^i^•nle, il fait consister la de par une longue pénitence, par de grandes
justice parfaite, àne point faire aux autres ce aum(jnes, et en cessant de les commettre.
que nous ne voudrions pas qui nous fût fait; Celui qui en a été dominé ne peut ^ être pu-
à souhaiter à tous les hommes, ce que nous lilié par le feu passager. Il sera tourmenté
nous souhaitons à nous-mêmes; et ;\ aimer dans les llanmies éternelles, sans qu'il y ait
pour l'amour de Dieu, non-seulement nos aucun moyen de l'en délivrer. Ce Père suppo-
amis, mais encore nos ennemis. Il ne croit se néanmoins que le pécheur, après avoir dé-
pas qu'on puisse apjieler ' paix véritahlc, testé ses péchés, aura le temps d'en faire pé-
crile qui ne nait pas de la racine de la cha- nitence et de les ellaccr, soit par des aumô-
rité. Parlant dans les deux suivants sur le nes, soit par d'autres bonnes œuvres. Il met
miracle fait aux noces de Cana, où l'eau fut au rang des péchés légers, d'excéder au
changée en vin, il dit, que le plus grand mi- delà du besoin dans le boire, dans le manger,
racle est la conversion du pécheur, puisque dans le parler, de refuser durement à un pau-
l>ar ce changement l'homme, de pourriture vre importun de dîner étant en santé lors-
,

(pi'il était, est élevé à l'état des anges, et tiré que les autres jeûnent, de se lever tard pour
de la corruption de la terre pour cire placé assister aux prières de la nuit, d'user du
dans le ciel. Il déclame dans le treide-sixième mariage dans d'autres vues que d'avoir des
contre ceux qni ditféraient leur baptême, pour enfants, de négliger de soulager les prison-
continuer à vivre dans le dérèglement. Le niers, ou de visiter les malades, ou de récon-
trente-septième contient l'explication de ce cilier ceux qui sont en discorde, de s'entre-
passage de la première Epitre aux Corin- tenir de discours fabuleux, soitdansl'Église,
thiens : Personne ne peut poser d'antre fonde- soit hors de l'ÉgUse. Ces péchés et une infi-
ment que celui que f ai mis, quiest Jésus-Christ; nité de semblables, dont les justes même,
que si Von bâtit sur ce fondement avec de l'or, en ce monde, ne sont point exempts, sont du
lie l'argent, des pierres précieuses, du bois, du nomljre de ceux dont l'Apcjlrc dii que le feu '

fiin, de la paille,' l'ouvrage de chacun paraîtra, leur servira d'épreuve, si nous ne les avons
et le jour du Seigneur déclarera quel il est, par- pas effacés en cette vie par les œuvres de la
ce qu'Usera découvert par le feu. Saint Césaire pénitence, par les prières, par les jeûnes, par

' Advertite quia regmim cœlorum nobis prœ- Ipse autPin salvus erit, sic tamen quasi per ignem,
desiinatum est, gehenna autem non nobis sed non capilalia sed minuta peccata purgantur. Ca?-
diabolo privparata est. Caesar., Ilom. 31,pag. lit. sar., Hom. 37, pag. 185.
' Adjudiciumnon ue/iiu/ij nec pagnni, nec hœ- ^ Quicumqne aliqua de
istis peccalis in se domi-
relici nec judœi : quia de ipsis scriptum est :
, nari cognoverit, nisi se digne anendaverit, et si
Qui non crédit jam jiidiciitu? est. Ibid. habuerit spalium, longo temporepœnilenliam ege-
' !\'ihil prodestguod aliquis christianus vocatwr rit; et Uirgas ekemosynas erogaverit et a peccalis
ex nomine, si hoc non ostendil in opère. Ibid., purgari non
ipsis abslinuerit; illo Iransilorio igné
l)ag. 142. poterit, sed œterna illam flamnia sine ullo remé-
' non est dicendn pax quœ de radiée chari-
Islo, dia cruciabit. Ibid.
tatir! non consurgil. Ca>sar., Hom. 33, paj,'. 159. ' Quidijuid de istis peccntis a nobis rcdcniplum

^
Illo transitorio igné de quo divit Aposlolus : noti fuerit; illo igné purgandum est de auo diril
,

134 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


les aumônes, et surtout en remettant les of- de ne point présumer de leurs mé-
les justes
fenses à ceux qui ont péclié contre nous. Saint pécheurs de ne point désespérer
rites, et les
Césaire veut que nous travaillions sans ' cesse du pardon de leurs péchés, mais aussi de ne
à efl'acer ces péchés même léffers, de peur pas différer d'en faire pénitence.
que leur grand nombre ne vienne enfin à 6. Les deux discours intitulés, de l'avéne- Sarm. ii.t
I.«I.iiO,Jl
nous précipiter dans l'abîme. Comme on pou- ment du Seigneur, sont pour exhorter les fi-
vait lui objecter, qu'il importait peu de pas- dèles de se disposer à célébrer dignement
ser parle feu du purgatoire, pourvu que l'on le jour de la naissance du Saaveur , et à y
jouit ensuite de. la \ie éternelle; il prévient recevoir son corps et son sang. D leur dit
cette objection et répond qu'elle n'est point qu'ils doivent songer à orner leurs âmes
fondée, parce que le feu du purgatoire ' sera d'autant de vertus, «ju'ils prendraient de soin
beaucoup plus difficle à soutenir, que tou- d'orner leurs maisons, et de se parer eux-
tes les peines que l'on peut sentir et même mêmes s'ils avaient à recevoir quekpie roi

s'imaginer en celte vie. Les remèdes qu'il de la terre ;


qu'à l'approche de cette solen-
prescrit pour les péchés légers sont de les ra- nité comme des autres de l'année, il con-
cheter, en visitant les prisonniers, en récon- vient' aux personnes mariées
de vivre dans
ciliant les personnes divisées, en jeûnant les la continence , et à tous de racheter leurs
jours marqués par l'Église, en lavant les péchés par des aumônes que s'il leur est ;

pieds aux étrangers, en assistaut fi-équem- permis en ces jours de fête de régaler leurs
ment aux veilles, en donnant l'aumône aux amis et leurs voisins il faut que ce soit par ,

pauvres et aux passants, en pardonnant à des repas sobres et modestes , en sorte qu'il
nos ennemis. Il regarde ces pratiques comme reste toujours de quoi subvenir aux besoins
insuffisantes pour etlacer les pécliés mortels, des pauvres et des indigents. L'homélie sur
i«e. m-
voulant ' qu'on y ajoute les larmes, les gé- l'Epiphanie traite des dispositions que l'on
missements, de longs jeûnes, d'abondantes doit apporter à la célébration de cette fête.
aumônes; qu'on s'éloigne de soi-même de la Nous avons trois discours de saint Césaire smn. tin

sainte table; qu'on passe un long temps dans sur le Carême. Dans le premier, il conjure «<W9'

le deuil et la tristesse, et qu'on fasse même ses auditeurs de se rendre de bonne heure
une pénitence publique. Il fait voir dans le pendant tout ce saint temps aux veilles de la
•. IJÔ.
trente-huitième sermon, que la charité est la nuit, et aux heures de tierce, de sexte et
racine et la source de toutes les bonnes œu- de noue, s'ils n'en sont empêchés ou par
vres, et que d'elle dépend le bon usage des inlirmité ou par quelque motif qui regarde

&f rm. 39|


biens de cette vie. Dans le trente-neuvième, l'utilité publique ou par quelque raison
,

il montre que si Dieu est miséricordieux en- importante de ne pas se contenter des lec-
;

vers nous dans cette vie, il nous fera sentir en tiu'es qui se faisaient dans l'Eglise, mais d'en

Serm. «1, l'autre lesell'ets de sa justice et dans le qua-


;
faire encore de [larliculières dans leurs mai-
VI- «H.
rantième , que la charité est la fin de la loi sons; d'employer les quarante jours de jeû-
puisque si l'on a la charité, l'on possède Dieu, ne à amasser de quoi nourrir leurs âmes
et qu'en possédant Dieu, on a tout. Il fait pendant tout le reste de l'année; de déro-
une fort belle antithèse entre les biens qui ber chaque jour quelques heures à leurs af-
sont produits par la charité, et les maux qui faires temporelles, pour ne s'y occuper que

sont les suites de la cupidité ; en avertissant de Dieu. Il condamne dans le second le jeu'

Àposlolus : Quia in igné revelabitur, et si cujus lum addendœ sunt lacrymœ, gemitus,
sufPcit; sed
opus arserit Uetrimentum jiatietur. Ibid. continuala tongo tempore prolracta jejunia,
et
' El ideo continuis orationibus et frequenlibus largiores eleemosynm erogandœ, ullro nos ipsos
jejuniU< H largioribus eleemosynis, el prœcipue a communione Ecclesiœ renwrentes, et pacniteii-
per indiilgenliain eorum qui in nos peccant, assi- tiam eliani publicam agentcs. Ibid., png. 187.
due redvmantur; ne forte simul collecta cumulum Qiiotidiescumque aut dits natalis Domini, aut
''

faciant el demerganl animam. r.a,'sar., ibid. reliquœ fe.ttivitules advcniunt, ante plures dies,
' Sed : ^'on pertinct ad me quandiu,
dicit aliquis non solum abinfelici roncuhinarum consortio,sed
moras habram, lamen ad fitam œtcrnam per-
si eliani a pro/iriis uxoribus abstinete. Coesar., Honi.
renern. Aci'io hoc dicit, fraties, quia, ille purga- 42, p:if.'. 211.
torius ignis durior erit, quam
quidquid polest in ' Tcmpns quod nobis furiosus tabula /wrftM so-
hoc sœculo pivnarum aut cogitari, aulvideri, aut lebal auferre, Icctio divina incipiat occupare.
genliri. lliid., p.ig. 18G. CxsuT., nom. 45, pag. a.'iO.

' Pro capitalibus vero crinniiibus non hoc so-


VI' SIECLE. CHAPITRE IX. — SAINT GÉSAIUE, ÉVÊQUE D'AllLES. 135

do cIl's pour lequel on fénioignait trop d'ar- Christ même, en


pratiquant les vertus do pa-
deur, et la délicatesse dans les nicls , disant tience, de douceur, d'iunnilité dont il nous
qu'ilno servait de rien d'avoir jeûné tout '
a donné l'exemple; que beaucoup do per-
le si ensuite on accablait son âme
jour, ou , sonnes peuvent à raison de leurs infirmités
par un exe^s do iionrrilure , ou par des ali- s'excuser de jeûner, de veiller, et de faire
ments trop délicieux. Il dit dans le troisiè- d'autres œuvres de piété comme étant ou
me, que nous devons jei"iner de manière que au-dessus de leurs forces ou de leur pouvoir ;
iig. j I.

nous donnions aux pauvres ce rpie l'on nous mais qu'on ne peut donner d'excuse légiti-
aurait dans un autre temps préparé pour me de ne point aimer Dieu, ni le prochain ,

diner, au lieu de nous en réserver le prix. après le précepte qui nous en est fait dans
11 regarde du pauvre qni reçoit des
la main ' la loi ;
qu'il ne sert de rien ;\ un clerc , .'i im
riches comme de Jésus-Christ qui
le trésor , moine, à une religieuse, d'être chaste de
met dans le ciel ce qu'on lui donne, de peur corps, si leur cœur est livré ti l'impureté ;

qu'il ne périsse sur la terre. Il ne veut pas qu'une femme chaste et humble est préfé-
que ceux qui se trouvent réduits à la der- rable à une vierge orgueilleuse; qu'une per-
nière pauvreté, s'attristent dans l'impossibi- sonne qui se sent la conscience ' chargée de
lité où ils sont de faire eux-mêmes Taumô- quelque crime doit la purilierpar les jeûnes,
ne; disant qu'ils en remplissent le précepte par les prières, par les aumônes, et s'ap-
par la bonne volonté qu'ils ont de la faire procher, après cette préparation de l'Eucha- ,

^7'k"û''
^'''® étaient en état. On voit par les deux ristie n'y ayant pas à craindre que Dieu
,

sermons qu'il a faits sur les litanies ou les bannisse du banquet éternel, celui qui, pour
trois jours des Rogations, que cette dévo- la correction de ses mœurs, s'éloigne volon-
tion était dès lors établie dans toutes les tairement et par un sentiment d'humilité,
églises du monde ' , et qu'on les regardait de l'autel de l'Église. Il était défendu à ceux
comme des jours destinés k guérir les plaies que l'Église excommuniait pour un crime,
de l'âme par pénitence et par la prière.
la de boire de manger, de parler avec les
'',

On dans le jeune ', dans le chant


les passait fidèles.Mais cette excommunication n'était
des psaumes, dans l'oraison et dans de sain- point irrévocable l'Église recevait dans son
;

^
tes lectures. Le repas y était modique sein les excommuniés, quand ils avaient sa-
comme en Carême et il y avait chaque jour
; tisfait. C'était l'usage * que les hommes la-

dans l'Église^des assemblées publiques dont vassent leurs mains avant d'approcher de
i«i,..io,sii,
personne ne pouvait se dispenser. Des cinq l'autel pour y recevoir l'Eucharistie les fem- ;

j'ii''scqr^'
discours suivants il y en a deux sur la fête
, mes la recevaient sur un linge bien blanc
des martyrs, un sur celle des vierges, et deux qu'elles tenaientdans leurs mains.
sur la dédicace d'une église, ou la consé- 7. Le cinquante - quatrième sermon est r.
Serm. 6i
3»3.
cration d'un autel. Saint Césaire y enseigne sur le Symbole et sur la nécessité des bon-
qu'on peut en cette vie méiùter la félicité, nes œuvres. Saint Césaire le commence par
mais non pas la posséder qu'on peut imi- ; des termes et des façons de parler qui ont
ter non-seulement les martyrs , mais Jésus- beaucoup de rapport au Symbole qui porte

• Nihil prodest tota die longum diixisse jej-w- ' Vnusquisque consideret conscienliam suam;et

iiium, si postea ciboruin suavitate vel niinietate qiiando se aliquo crimine vulneratum esse cogno-
anima obruatur. Ibid., pag. 231. verit,prius, orationibus, jejuniis vel elecmosynis
^Maiius pauperis]gazophylacium esl Christi, qui studeat mundare conscienliam suam et sic Eucha-
quod accipit, ne pereat in terra, in cœlo reponit. risliam prwsumat accipcre... Qui eiiim reatum
Caesar., Serm. 46, fiag. 233. suum agnoscens, ipse se humiliter ab altari Ecclc-
' In isti^ tribus diebtis, quos regulariler in loto siœ pro emendalione vitce removere voluerit, ab
mundo célébrât Ecclesia, nullus se a sancto con- œterno illo convivio excommunicari penitus non
ventu subducat. Caesar., Serm. XI, pag. 297. timebit. Caesar., Hom. 52, pag. 376.
' Sine dubio peccalonun suorum vulnera dili- ' Quidprojicitnr, et manducare et bibereetcum

git, qui in istis tribus diebus jcjunando, orando hnminibus loqui non potest, et habet spem utite-
et psallendo medicamenta sibi spiritualia non re- rum mertalur ad Ecclesiam revocari. Ibid.
quiril. Cfesar., Serm. 48, pag. 299. s Omnes liri quando ad allare accessuri sunt
5 Conviviolanobis eliam quadragesimali ordine lavant manus suas, et omnes mulieres nitida ex-
prœparemus, et magis legendo, psallendo vel hibent linteamina ubi corpus Christi accipianl.
urando. animabus nostris spirituales epiclasquam Ibid.
rorporales requiramus. Cœsur., Serw. 47, pag.298.
,

13G UISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


le nom de saint Alhanase. D y disting:ue voir', avec le secours de Dieu de mépriser ,

ilaiiemcnt les deux natures en Jésus-Christ, ou d'acquiescer au mal qu'il nous conseille.
reconnaissant qu'il est égal à son Père se- On voit par le cinquante-septième, qu'on 5*™. n.

lon la divinité, et moindre que le Père se- disputait, avec beaucoup d'animosité, sur le
lon l'humanité qu'il a prise de Marie tou- salut de celui qui meurt aussitôt après avoir
jouis vierge avant et après son enfantement, reçu la pénitence. Saint Césaire, avant de dé-
cl dont la vie a été sans aucune tache ni cider la question, distingue trois manières
contagion de péché. A l'égard du Saint-Es- d'arriver à cette pénitence précipitée. « La
prit, il déclare que nous devons croire qu'il première, dit-il, est, quand un chrétien ne
procède ' des deux, c'est-à-dire du Père et commet point de péchés capitaux, ou qu'il en
du Fils. Il dit aux fidèles' qu'ils doivent cha- fait pénitence aussitôt après les avoir com-
que année donner aux églises et aux pau- mis, s'occupant dans la suite de toute sorte de

M-es la dîme de tous les fniits qu'ils auront bonnes œuvres, et rachetant même les pé-
Srnn. tS| pu recueillir. Il enseigne, dans le cinquan- chés légers dans lesquels il lui arrive de tom-
te-cinquième qui est sur le jugement der- ber. Un fidèle de ce caractère qui meurt ,

nier, que les péchés passés ne nuisent point, sans avoir auparavant reçu la pénitence ,

si l'on ne prend point de plaisir aux pré- sort heureusement de ce monde, parce qu'il
sents; mais il s'explique aussitôt en disant l'a pratiquée pendant toute sa vie. La secon-

que comme il ne sutlit pas au juste d'être de ' est lorsqu'un chrétien a commis des pé-
juste, s'il ne persévère dans la justice jus- chés légers et même des mortels, mais com-
qu'à la fin, de même l'iniquité ne nuit point me par ignorance et dans l'espérance d'en
au pécheur, si, avant demourir, il l'a effacée faire pénitence, sans se livrer au péché avec
ou par des aumônes, ou par la rigueur de dessein de n'en faire pénitence qu'à la fin
la pénitence. L'homélie qui est la deux cent de sa vie ; s'il la demande avec de grandes
cinquante-deuxième dans l'Appendice est en instances et beaucoup de gémissements dans
partie de saint Augustin, et en partie de saint ces derniers moments, fermement résolu, au
SiTin. &6. '.;ésaire. Il établit dans le cinquante-sixième cas qu'il revienne en santé, de passer le reste

il nécessité de confesser ses péchés non-


, de ses jours dans les travaux de la péniten-
seulement à Dieu, mais encore aux hommes ce, nous pouvons et nous devons croire que
de piété et craignant Dieu. Sur ces paroles Dieu lui l'cmettra ses péchés, selon ce qui
-
est dit dans Ëzéchiel En quelque jour que le
J^eol I6i
. ,
de l'iCpitre de saint Jacques Confessez vos: :
Einin

unies l'un à l'autre, et priez l'un pour l'autre pécheur se Convertisse, toutes ses iniquités serotil

afin que vous soyez guéris, il dit que Dieu nous mises en oubli. La troisième est celle d'un
a ordonné de les confesser, non qu'elles lui homme qui vit habituellement dans le dé-
fussent inconnues, mais afin que les confes- règlement, espérant que la pénitence qui lui

sant dans ce monde, nous n'en recevions pas sera accordée à la mort , ell'acera tous ses

la confusion dans l'autre. Il réfute l'erreur de péchés. Si cet homme n'est point dans une
ceux qui rejetaient les péchés des hommes ferme résolution de rendre le bien d'autrui
sur les constellations ou sur un mauvais
, de pardonner à ses ennemis d'effacer ses ,

principe; et montre que quelle que soient fautes par ses larmes et de faire d'autres œu-
les attaques du démon, il est en notre pou- vres de pénitence , au cas qu'il survive , il y

• Credatunusquisquefidelis qiiod Films œqualis ut eliamsi aliquis quamdiu vixerit, non solum
est Patri secundum divinitalem, et minor est Pa- parva, sed forte eliam capilalia commiltat pec-
trg secundum humanitalcm carnis, quant denos- cata; el lamen mala ipsa ignoranler quasi spe
trn'assiinipHl, id est... ex Maria Yirgine quœ vir- pœnitentiœ agat, nec idco animam suam ad pcc-
go ante parlum et virgopo^l parium semper fuit, cala relevet, ul adillam pœnitcntiam se reservet,
et absque conlagione vel macula peccati perdu- et in Iransitu suo cum grandi humilitate el cor-
ravit... Spirilus vcro Sanclus ab ulroque proce- dis contrilione, cum rugitu vel gemitu ipsam pœ-
dens. Cœsar., Hom. 54, pas. 399. nitcnliam pelai, et hoc definitis-fime in corde suo
• Décimas annuis singulis de omni fruclu quod deliberet, ut si evaserit, quamdiu vixerit, loto cor-
colligilis Ecclesiis el paupcribus erogale. Ibid., de el lotis viribus fructuosam pœnilenliam agat...
pag. 400. possumus el dcbcmus credere quod ci Dotninns
' Dat qvidem ille consilivm ; sed Dec avûciliante omnia dignelur peccala dimitlere, secundum il-
nostrum est rcl eligerc, vil repudiare quod sugge- lud propheticum .•PeceatoriiKjuacuniquc die coa-
rit. Cioar., Serm. 5fi, pag. 416. versiis fiieril, inuue siniquitalps ejus oblivioni tra-
• Sccundus moduv csl iupradictœ pœnitenliœ, deutur.l'ttg. 419.
[Vl" SIÈCLE.] CHAPITIIE IX. — SAINT CÉSAIRE, HVÈQUE D'ARLES. 137

u toute apparence qu'il sera du nombre do les croyant propres faciliter l'instruction
.'i

ceux A qui Jdsus-Clirist dira : Allez, maudits, des peuples. Il les exhorte à recourir à la S«riii. 61,
(liins le feu éternel. Si un lioininc dispose do confession ' de leurs pi-ché-s, pour en obte-
cette sorte, uie demande la pcnilence, ajou- nir le pardon et airiver au port ile la i)éni-
,

en âge de la rece-
te saint (.îésaire,'et s'il est tcnce, comme ceux qui se trouvent dans un
voir, je puis bien la lui donner, mais je ne
'
vaisseau brisé par la tempête, recourent à
puis lui donner ime entière sécurité, Dieu une planche pour se tirer d'une perte inévi-
.«cul connaissant avec (piols sentiments cet table sans ce secours; de ne point se fier'
lionime demande la pénitence. » ni sur leur Age, ni sur leur santé, parce
Les sept discours suivants traitent aussi qu'on travaille toujours trop tard à son salut,
de la pénitence et de la rémission des pécliés. quand on est incertain de vivre. C'était en-
(JnoiqLie saint Césaire ne doute pas que la core l'usage de son tcnqis, que * les person-
pénitence même tardive ne soit utile, quand nes des deux sexes demandassent la péni-
Soi tu. elle est accompagnée de douleur, de repen- tence publique, et qu'elles confessassent leurs
tir, d'aumônes, il fait voir qu'il y a autant de péchés devant toute l'assemblée. L rend grâ-
danger que de témérité à reculer celle que ces h Dieu de la colère que les pécheurs té-
l'on doit l'aire des péchés commis, puisque moignaient dans ces occasions contre eux-
personne ne peut s'assurer d'une longue vie; mêmes. Ils paraissaient couverts de ciliées,
et qu'un grand nombre sont morts sans avoir marquant par ce vêtement qui est composé
reçu eu ce monde le remède de la pénitence, de poils de chèvre et de poils de bouc, qu'ils
<pi'ils s'étaient Haltes de recevoir à la fin de se croyaient hors du nombre des agneaux,
leur vie. Il dit à ceux que la grandeur de c'est-à-dire, des tidèles. Ce Père convient''
leurs crimes fait désespérer du pardon, qu'ils qu'il était en leur pouvoir de faire secrète-
ne connaissent point la toute-puissance du ment pénitence de leurs fautes; mais il croit
Médecin céleste. Et pour leur prouver qu'il qu'ils ne demandaient de la faire en public,
est également miséricordieux, il leur apporte que parce que, considérant le grand nombre
l'exemple de David, de Manassés et de la pé- de leurs péchés, et ne se jugeant pas en état
cheresse de l'Evangile, à qui un regret sin- d'y satisfaire par eux-mêmes, ils avaient re-
cère obtint la rémission de très-grandes fau- cours aux prières de tout le peuple. Deman-
tes. 11 ajoute que le sacrilège Achaz aurait der la pénitence publique c'était demander
,

même obtenu le pardon des siennes, s'il eût d'êti'e excommunié aussi chassait-on de l'É-
;

persévéré dans les sentiments d'humilité glise ces sortes de pénitents, après les avoir
Scrni. 60, qu'il témoigna d'abord. « Qui est l'homme ,
couverts de ciliées. Us ne demandaient d'être
dit ce Père à ceux qui négligent de se puri- excommuniés que par ce qu'ils se croyaient
lier des péchés qu'ils commettent chaque indignes d'approcher de l'Eucharistie, vou-
jour, qui laisse ses chevaux les pieds conti- lant qu'on les séparât quelque temps du saint
imellement dans le fumier? N'avons-nous autel, afin qu'ils pussent parvenir avec une
[)as soin de nettoyer nos maisons et les éta- conscience assurée à l'autel qui est dans le
ijles où nous logeons nos bestiaux?» C'est là ciel, et participer même en cette vie au corps
une des comparaisons familières de saint Cé- et au sang de Jésus-Christ après s'être " pu-
saire il en apporte souvent de semblables,
; rifiés de leurs fautes par les humiliations, et

' Pœnitentiam illi darc possum, integram se- medium salutis suœ semper tardus est, qui vilœ
curitatem tiare non possum. Deus tamen quiom- suœ incertus est. Ibid., pag. .127.
nium conscientias novit et imumqueinque secun- ' Quotiescuwque aliquem de fratribusvel soro-

dum suum meritum judicabil, ipse scit qua fide ribus nostris pœnitentiam publiée videmus petere,
aut qua iiUentione uniini pœnitentiam pcliil. Cae- magnam in nobis ipsis Deo inspirante compunc-
sar., Ho m. 57, jiag. 410. tionem divini limoris possumus et debemus ac-
' Admuneo contestor til qui se cognoscit de
et cendere. Cxsav., Hom. 62. pag. 427.
littore continenliœ, tempestate libidinis in pela- ^ Et ille quidem qui pœnitentiam publiée acce-
gum lu.ruriœ fuisse jactutuin et castitalis incur- pit, poterat eam secretius agere : sed credo con-
risse naufragiuiii, peccatoruin confessionem, va- siderans mullitudinem peccatorum suorum videt
lut tabulam fraclœ nacis velociter appréhendât : se contra tam gravia mala solum non passe suffi-
ut per ipsamde abysso ac profundo luxuriœ pos- eere ; ideo ailjutorium totius popuU cupit expetere.
sit evadere, et ad portum pœnitentiœ perveiiire. Ibi.i.
C.Tsar., Hom. 61, pag. 426. ''
Et hoc attendue qund qui pœnilenliam petit,
» Kon sanitali credentium csl, non œtati. In re- excowwmicari se suppUcat. Denique ubi accepit
138 HISTOniE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
par la soustraction de ces divins mystères. de faire, parce qu'elle est le soutien et la
Pendant le temps de leur pénitence, ils s'abs- base de toutes les choses, soit divines, soit
tenaient de vin et de chair, et ils ne devaient humaines. Pour qu'elle soit entière, elle doit
pas même' manger de viande après leur ré- renfermer la croyance de l'accomplissement
conciliation; mais se contenter de légumes, des promesses et des menaces de Dieu. Mais
d'herbes et de petits poissons, soit lorsqu'ils ellen'est vraie en nous que lorsque nous
mangeaient dans leurs maisons, soit ailleui-s. accomplissons par nos œuvres ce que nous
"' Ces crimes soumis à la pénitence publique, avons promis de vive voix. En vain dirions-
étaient l'homicide, le faux témoignage et le nous que nous croyons ce que Dieu nous ap-
parjure, les sortilèges, les divinations et l'im- prend de la béatitude et des supplices de
S«nn, "• pudicité. Certaines personnes qui se persua- l'autre vie, nous ne faisions nos efforts
si

daient que pour aller au ciel il suffisait de ne poui' mériter la vie et éviter la mort éter-
point faire de mal, disaient quelquefois qu'el- nelle. L'activité de notre foi doit paiaitre

les souhaitaient d'être trouvées telles à lamort surtout dans l'accomplissement des promes-
qu'elles étaient sorties des eaux du baptême. ses que nous avons faites dans le baptême.
Saint Césaire ne disconvient pas que celui- Ou nous y a demandé ' si nous renoncions
là ne soit sauvé qui meurt aussitôt après son au diable, à ses pompes et à ses œuvres. Et
baptême sans avoir eu le temps de faire de
, nous avons répondu, nous ou nos parrains,
bonnes œuvres; mais il soutient* qu'il ne si nous étions encore enfants, que nous y re-

suffit pas à celui qui a vécu plusieurs années noncions. Mais si nous manquons à de telles
depuis son baptême, de n'avoir point fait de promesses, peut-on compter que nous gar-
mal, et que c'est pour lui un grand mal de n'a- derons celles que nous faisons aux hommes?
voir point fait de bien en ayant eu le temps, Le prêtre présentait ^ à celui que l'on devait
et de n'avoir pas fait de progrès dans la vertu. baptiser un papier qui contenait la formule
(1Le baptême', dil-il, a évacué en nous tous des renonciations pour le souscrire ce qu'il ;

les maux, mais nous devons, en agissant avec faisait après avoir répondu qu'il renonçait au

la grâce de Dieu nous remplir de tous les


, démon, à ses pompes et à ses œuvres. Saint Sarm .

biens, de peur que contents du sacrement du Césaire, après avoir montré dans le soixan-
seul baptême, sans nous occuper des bonnes te-sixième, qu'il ne sert de rien de porter le
oeuvres, l'esprit immonde qui a été cliassé de nom de chrétien, si l'on n'en remplit les de-
''•
nous par la grâce de Jésus-Christ, ne revien- voirs, les détaille en ces termes « Soyez en :

ne, et nous trouvant vides de bonnes œuvres paix avec votre prochain, et travaillez à la ré-
n'amène avec lui sept esprits plus méchants tablir entre ceux qui sont en discorde. Fuyez

que lui, et que le dernier état de cet homme le mensonge, évitez lo parjure comme la

ne devienne pire que le premier. » mort éternelle. Faites l'aumùne aux pauvres
Sens '^, 8. Le soixante-cinquième discours traite de suivant vos facultés. Portez " vos otirandes à
|«g. »IJ.
la foi. D'après saint Césaire elle tire son nom l'autel pour y être consaci'ées car un hom- :

pœnitentiam, cooperlus cilicio foris ejicitur. Ideo vero qui longutn tempus Vivendi et cetatem passe
enim se excoinmunieari rogat, quia ad percipierv- bene operandi habuit, non sufficit ei otiosum esse
dam Eucharistiam Domini indignum esse se jw- a malis, si eliam a bonis volueril esse otiosM.
dicat. El proplerea aliquamdiu se ab isto altari CiEsar., Hom, 64, pag. 452.
alienum vuU fieri, ut ad illud altare quod in cœlo ' Per bapti-iinuin vacuati sumus omnibus ma-
est inereatur cinn secura conscientia percenire. lis ; sed Dei gratia bene agenda debemus repleri
Propterea se a communione corporis et sanguinis oinnibui bonis. Ibid.
Christi quasi reum et .impium cuin grawli rêve- ' Interrogamur in baptismo ulrum abrenuntie-
rentia vult removeri, ut per ipsam humilitatein vius diabolo, pompis et aperihus ejus: tt abre-
tandem aliquando ad communionein inereatur nuntialuros nos voce libéra respondcmus : quud
sacrosincti altaris accedere. Csesar., Hom. 62, quia infantes per se minime pro/itcri possiinl, pa-
pag. 428. rentes ipsorumpro eis fidejussores existunt. Serin.
> Etian reconciliatus pœnitens, ubicumque, aut 65, pag. 431.
insuo, aut in aliéna convivio, olera, aut legumina, ' Quando inlerrogatus est : Abrenuntias diabolo,
aut pùtciculos invenirepotuerit, aliam carnem non pompis et operibus ejus Tune ei sacerdos subs-
.'

débet accipere. Ibid., pag. 429. cribendum pactum obtulit. (Jun)tdo aulem respon-
' Ipsi soli sufjlcit talem esse qualis de baptismi dit : Àbrenunlio, tune subscnpsil. Cajsar., Serm.
sacrainento processil, qui statiin post acceptum 65, pag. 434.
baptismum de hac luce migraveril, nnn habuit ' Anie omniasecundum vires eleemosynas pau-

spnliun in quo se bonis operibus exerceret ilte; ptribus exhibcle: ohlationes quw in allario con~
[VI" SIÈCLE.] CHAPITRE IX. — SAirW CKSAIHK, ! VÈQUE IVAIILES. 13'J

"•
me doit roiipir do communier de l'ollVando Le soixante-huitième est adressé aux
cc'dcnl. ^,^_^°^^-

il'aulrui, quand il peut en fournir lui-môme. compétents, c'est-à-dire à ceux qui deman-
Que ceux qui sout pu pouvoir fournissent des daient le l)apl6me. Il veut qu'ils s'y prépa-
cierges ou de l'huile pour les lumières. Sa- rent on pai-douiKuit à leurs ennemis, eu res-
chez par cœur le Symbole et l'Oraisou domi- tituant le bien d'autrui, en faisant pénitence
nicale : apprenez-les à vos enfants. Sachez de leurs péchés, en usant très-sobrement de
que vous ii'pondrez h Dieu de ceux que vous vin, et par la pratique de la vertu. Il dit à

avez levés des fonts du baptême. C'est ])our- ceux, qui devaient les lever des fonts du bap-
quoi ayez-en un soin égal ù celui que vous tême, de les engager à bien vivre et par leurs
devez avoir de vos propres enfants repre- ;
exemples et par leurs paroles puisqu'ils ;

nez-les, corrigoz-les, afin qu'ils vivent sobre- contractaient pour eux un pacte avec Jésus-
ment, chastement et avec piété. Vivez vous- Cluistdans le sacrement de baptême, par le-
mêmes de façcm que vos enfants, en vous quel ils promettaient qu'ils renonceraient au
imitant, aillent au ciel et non en enfer. Que d(''mon, h ses pompes et à ses œuvres. Il y a sotm. 00,70,

ceux qui sont préposés pour juger des dilli- huit discours sur la charité et l'amour cjue 7sJ 7'6, 'p.g'.

cultés et des procès, le fassent avec équité, nous nous devons mutuellement, même a
qu'ils ne prennent point de présents pour nos ennemis. On y trouve plusieurs endroits
opprimer l'innocent. Que nul ne s'enivre, et tirés de saint Augustin. L'auteur donne pour

que celui qui invite un antre ;\ manger ne le exemples de l'amour des ennemis dans l'An-
presse point de boire au deh^i du besoin, de cien Testament le patriarche Joseph qui
,

peur qu'il ne perde son àmc et celle de celui combladebiens et de caresses ceux qui avaient
qu'ila invité. Venez à l'église chaque diman- voulu le mettre à mort; le roi David, qui ne
che. Si les malheureux Juifs observent le voulut point tirer vengeance de son ennemi
sabbat avec tant d'exactitude, qu'en ce jour qui l'avait maudit en face. Il dit à ceux qui
ils ne font aucune œuvre terrestre à plus : regardaient l'amour des ennemis au-dessus
forte raison les chrétiens doivent-ils, le jour de leurs forces, et qui ne pouvaient suppor-
du dimanche, vaquer à Dieu seul, et venir à ter les injures, de jeter les yeux sur les tour-
l'église pour le salut de leurs âmes. Priez-y ments atroces que tant d'hommes, tant de
pour vos péchés, n'y causez pas, écoutez avec femmes, tant d'enfants et tant de jeunes fd-
attention les divines lectures. Rendez aux les délicates ont endurés pour le nom de Jé-
églises la dîme de vos fruits. Que celui qui sus-Christ. enseigne ' que l'amour des en-
Il p^, ,,-2.

était superbe devienne humble; que celui qui nemis n'est pas un simple conseil, mais un
volait commence à donner aux pauvres de sa précepte dont personne ne peut se dispen-
propre substance. » Il exhorte ses auditeurs à ser; que pour s'en rendre la pratique facile,
abolir entièrement les restes d'une supersti- ilne faut que se souvenir que Dieu veut bien ^.._

tion païenne, appelée du. petit cerf, qu'il avait nous pardonner nos fautes, encore qu'elles
déjà détruite lui-même en bonne partie dans soient incomparablement plus grandes que
Arles mais il se plaint de ce qu'ils en prati-
; celles que les hommes commettent contre
quaient une autre, qui était de s'abstenir de nous. Il est vrai que les plus grands saints,
tout travail le jeudi, en l'honneur de Jupiter, comme Moïse et Élie, ont quelquefois vengé »i"-

tandis qu'ils ne faisaient peut-être aucune des injures mais c'étaient des injures faites
;

difficulté de travailler le dimanche. à Dieu et non à eux-mêmes; et ils ne les ont


sem, 67, Le sermon soixante-septième est sur la dis- vengées que conduits par l'esprit de Dieu,
r'ï. 138.
tinction desbons et des mauvais chrétiens. qui les animait. Saint Césaire ^ croit coupa-
C'est à peu près la même chose que le pré- bles d'un grand péché ceux qui, se trouvant

secrentur offerte. Erubescere débet homo idoneus tes nolite verbosari, sed lectiones divinas patien-
si de aliéna otHatione communicaverit. Qui pos- ter audite.... et décimas de fructibus vestris ec-
sunt aul cerenlas aut nienm qund in cicindilibns clesiis redditr. Caesar., Serm. 66, pag. 136.
mittatur, exibeanl. Symbolum vel Oraiionem do- ' Dominus in Evangelio, ut inimicos diligere de-
minicam, et ipsi lenete, et filiis vestris ostendite. beamus, non dédit co)isilium, sed prœceptum. Cae-
Filins quos in baptismo excipitis, sritote vos fide- sar., Serm. 73, pag. 453.
jussores pro ipsis apud Deum e.rtitisse. Et ideo ^ Scivit Spiritus Sanctus nonnuUos homines qui

tam illos qui de iwbis nati sunt quam illos quos cum ad aliquos honores aul divitias undecumque
de fonte excipitis semper casliqate atque corri- acquisitas pervenerint, ila parentes suos despi-
gile,ut caste, juste et sobrie vivaiit.... Omni die ciunt ut eos nec vider e dignenlur. Quod si fece-
dominico ad ecclesinm cnnrmite, %>,. ecclesia slan- rinl, non solum peccatum, sed eliam grave cri-
110 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURiS ECCLÉSIASTIQUES.
dans l'abondance ou élevés aux honneurs, offertes aux idoles; qu'en vain celui qui en
méprisent leurs parents pauvres, jusqu'à re- mange voudrait s'excuser en disant qu'il s'esl
fuser de les voir. Il veut que les parents pau- auparavant muni du signe de la croix;
vres soient les premiers dans la distribution que c'est comme s'il faisait le signe de la
des aumônes. La raison qu'il en donne est la croix sur sabouche, et qu'il s'enfonçât une
nous ne donnons pas aux autres pau-
(jiie, si épée dans le cœur. Il invective ensuite contre
vres, d'autres leur feront la charité; mais de semblables abus dans le soixanle-dix-neu- ^'
que si nous ne la faisons pas à nos pauvres vième discours, principalement contre cer-
jiarents, il est ditlicile que d'autres la leur tains remèdes superstitieux que les femmes se
strm.1t, fassent. Il prêcha le sermon sur l'obligation communiquaient les unes aux autres pour la
' '" de payer les dîmes des fruits, quelques jours guérison de leurs enfants. « Il serait beau-
avant la Saint-Jean. Il les regarde comme '
coup mieux *, leur dit-il, et aussi plus salu-
dues, et appelle envahisseurs du bicnd'autriii taire de courir à l'église dans ces maladies
ceux qui refusent de les pa^-er. Par un reste dangereuses, d'y recevoir le corps et le sang
de superstition païenne, on avait en coutume de Jésus-Christ, de s'oindre elles-mêmes et
à Arles de se laver le matin ou la nuit dans leurs enfants de l'huile bénite, qui, selon
les fontaines, ou dans des marais, ou dans l'apùtre saint Jacques, leur procurerait la ré-
des Heures, le jour de la Saint -Jean. Saint mission de leurs péchés et la santé du corps. »
Césaire défend cet usage. Il s'élève aussi Les sermons soixante-dix-neuvième et qua- .«r

'' «««11»,
contre les chansons profanes, disant qu'il est tre-vingtième tendent i\ empêcher le peuple de
indécent de proférer des chants dissolus et sortir de après la lecture de l'Évangile
l'église
amoureux de la même bouche qui reçoit le et avant de la célébration des mystères.
la fin
corps de Jésus-Christ. Les auteurs de la vie de saint Césaire rap-
y. Saint Boniface, évêquedeMayence, cite portent qu'ayant vu un jour quelques-uns des
lediscours soixante-dix-huitième sous le nom fldèles sortir de l'église, avant qu'il eût prê-
de saint Augustin. Mais le style fait voir qu'il ché, il les arrêta en leur disant que lorsqu'ils
estde saint Césaire. L'auteur y traite des au- seraient devant le tribunal de Jésus-Christ,
gures et de diverses autres superstitions païen- il ne leur serait point permis de se conduire

nes, sur les jours que l'on sortait de sa maison ainsi et que pour couper court à cet abus,
;

on qu'où y revenait. « Sans vous arrêter, dit- il ordonna de fermer les portes de l'église
il, ù de semblables observations, contentez- aussitôt après qu'on avait lu l'Évangile. Le
vous toutes les fois que la nécessité vous obli- concile d'.\gde, que ce saint présida, défen-
ge de voyager, de vous siguer au nom de Jé- dit, par un canon exprès, aux laïques de sortir

sus-Christ, et de réciter ou le Symbole ou l'O- de l'église avant d'avoir reçu la bénédiction


raison dominicale. Après quoi mettez-vous en de l'évêquc à la fin de la messe. Saint Césai-
cliemin avec confiance que Dieu vous aide- re eulreprend donc, dans ces deux homé-
ra, n II dit que quelques bouues œuvres que lies, de montrer que les chrétiens ne devaient

l'on fasse, elles sont inutiles au salut de ceux point sortir de l'église les jours de diman-
qui ajoutent foi aux augures et aux autres ches ' et de fêtes solennelles, avant que l'on
divinations; qu'il n'est pas permis aux chré- eût fini la célébration des mystères. L'abus
tiens de prier sur les foataines, ni d'avoir n'était pas général. Ceux qui avaient de la
dans leurs campagnes des autels ou des ar- piété restaient jusqu'à la fin; mais d'autres,
bres où l'on vienne faire des vœux; que ce et en assez grand nombre, peu attentifs au
n'est pas un moindre mal de n'oser brûler ces de leur âme, sortaient au moment que
salut
arbres après qu'ils sout tombés; que c'en est 11 y eu avait
l'on avait fini les saintes lectures.
un bien plus grand de manger des viandes même qui s'amusaient à causer pendant ce

men se aimisixse nondiibitent.... Si quis ergo idn- nolueril res aliénas invasil. Cœsar., Serm. 77,
nexis est, parentes habueril pauperes :
si aliqiios pas. IGI.
ipsis prius necessaria Iribital, et sic iiidigenlibus ' (Jiiantum reclius et snlnbrius eral ul. ad ec-
extraneis elcemosi/n im [aciat : quia reliquis pati- clesiam currerent. corpus et sanguinem Christi ac-
perihus si lit. non dederUt. dabit niiiis : parentibus ciperent, oleo ben^dielo se et suos fidctiter perunge-
vero tuis pauperibiis. si tu niliil largitus fueris, elsccundum quodJacobus aposlolus dicil, non
rent;
difficile est ut nlius largialur. Cîesar., Serm. 76, solum sanitalem corporum,sedeliamremissinncm
ing. 458. accipereni prccalorum. dî-'ar., Ilom. 79, ptifr. 405.
' Decimœ ex debilo requirunlur, et qui cis dure ' Kngo vos, fratres ckarissinii, ut quoliens aul in
[VI* SlfcCLE.J ciiAi'iTiu-: i\. — SAINT ciisAïui':, kvêquh: D'AHLES. l/il

temps, et qui, non contents de ne pas écouler tera l'Oraison dominicale, qui est-ce qui dira
eux-môines co qu'on lisait cmiiôdiaiLMit les , avec humilité et vérité : /Icmetlez-nous nos
antres de proliter de la lecture. Ils se se- dettes, comme nous les remettons à nos débiteurs'!
raienl rendus imiius cdupahles eu s'abstenunt Si ceux mômes qui demeurent dans l'église,

de l'assemblée. Le saint leur fait renianjuer lorsqu'on fait celle piièr(;, ne remcttcnl pas
que la messe ne consiste pas dans ki lecture les dettes h leurs déijiteurs, ils trouvent dans
des livres saints, mais dans l'oblation des cette oraison non un remède, mais un juge-
dons, et dans la consocralinn du corps et du ment contre eux, en faisant le contraire de
sang du Seigneur. nOn peut lire, ilil-il, dans ce qu'ils tlisent, et ne cessant de rendre le
'

les maisons particulières les écrits des pro- ma! pour le mal en vain ils crient au Sei-
;

pliMcs, des apôtres, des dvangélislcs, ou les gneur Délivrez-nous du mal. Si ceux qui,
:

entendre lire par d'aulres, mais on ne peut étant dans l'église lors de la récitation de
voir,el entendre la consécrationdiicorpsetdu celte prière, se trouvent en danger de n'en
sang du Sauveur que dans la maison de Dieu. point obtenir l'etl'et, parce qu'ils ne veuleiil
Donc, celui qui veut célébrer la messe en en- pas accomplir ce qu'ils ont promis, que pen-
tier l'avantage de son âme, doit demeurer
i'i seront d'eux-mêmes ceux qu'une insalialile
dans l'église, le coi'ps dans une postiirehum- cupiditi's ou que l'amour de ce siècle rctical si
ble, et le cœur contrit, jusqu'à ce que l'on enlrelacés, qu'il ne leur permet pas de rester
ait récité l'Oraison dominicale, et que l'on une beure entière dans l'église? Ainsi, qu'au-
aitdonné la bénédiction au peuple. Si pres- cun de vous n'en sorte qu'après la fin des
'

que tous sortent après la lecture de l'Évan- divins mystères. Celui qui, sans l'attendre ',

gile, ;\ qui le prêtre dira-t-il : Elevez vos ne craint et ne rougit pas d'en sortir, se rend
cœurs ? Comment cexxx qui sont sortis et qui coupable de deux fautes; la première, en
sont de corps et d'esprit au milieu des places abandonnant les saints mystères la secon- ;

publiques , répondront-ils qu'ils ont leurs de, en attristant le prêtre qui les célèbre, et
cœurs élevés vers le Seigneur? ou comment qui s'intéresse pour lui. La bénédiction ' que
s'écrieront-ils avec une crainte mêlée de l'on y donne au peuple n'est pas d'un hom-
joie : Saint , saint , saint , béni suit celui qui me, quoiqu'elle se donne par son ministère ;

vient au nojn du Seigneuri ou quand on réci- et on doit la recevoir, avec autant de reron-

die dominico, aul in aliis majoribiis festivita- qualiter cum tremore simulel gaudio clamahanl:
tibus missœ nullus de ecclesia discedat, do-
fiunt. Sanctus, sauctiis, panctiis, benedictus qui veuit in
uée divina mysteria compleantur. Et quamvis nomine Dornini? Àut quando Oralio dominicu di-
multi sint, de quorum fuie et devotione gaudeamus, citur, quis est qui humiliter et veraciter claniet:
sunt lamcn plures de sainte animœ suœ minus Dimitte uobis débita nostra sicut dimittiiuus debi-
cogitantes, gui leclis dieinis lectionibus, statim toribus nostris? Cum enim eliam illi qui in ecrle-
de ecclesia foris exeunl, cum tanien etitim dum sia se continent, si non dimiserint débita debilari-
ipsœ lectioncs leguntur aliqui ex illis ita otiosis bus ad judicium magis quam ad remedium ora-
,

et sœcularibus fabulis occupanlur, ut eas necipsi tionem dominicam proferunt ex arequam implore
audianl, nec alias avdire permillant. Isli laies non probantur in opère : et sine causa dieunt:
minus a nabis culparentur, si ad ecclcsiam non Libéra uos a malo. Si ergo eliam illi periclilun-
venirent.-. Si diligenter attenderitis, cognoscctis tur[qui intus su)it si implere noluerinl quod pro-
quia non tune fiunt missœ, quando divinœ lectio- millunt, quid de se cogitant illi quos aut insn-
ncs in ecclesia recitantur sed quando munera , tiabilis cupiditas aut amor sœculi istius[ita deli
offerunlur, et corpus vel sanguis Damini canse- net implicatas ut eos unius horœ momento sUire
cratur. Aam lectianes sive praphelicas, sive apos- in ecclesia non permittat? Caesar.. Ilom. 80, [iif.
laiicas, sive cvangelicas eliam in domibus veslris 468.
aut ipsi légère, aul alias legentes audire potestis: ' Nullus ex vobis de ecclesia discedat, 7iisi mm
consecrationem vero corporis vel sanguinis Do- divina mysteria ad inlegrum fuerint celebrata.
mini non alibi nisiindoino Dei audire, rei videre Ibid.
poteritis. Ideo qui vull missas ad inlegrum cum 5 Qui de ecclesia non perexspectatis missis cita

lucro aniniœ tuœ celebrare, usquequo Oratio do- discedere nec metuit , nec rubtscit; dupliciler se
minica dicatur et benediclio populo detur, humi- peccare non dubitet, dum divina mysteria deserit.
liato corpore et coinpunclo corde se débet in ec- et sacerdatem pro se sollicitum contristat et de!<-
clesia contiuere. Cum enim maxima pars papuli, picit. Cfesar., Ham. 81, pag. 470.
imo quod pejux est, pêne omnes, recitatis lectioni- Benediclio vobis non ab hamine sed per honii-
'

bus, exeunt de ecclesia, cui dicturus est sacer- nem datur, grato et pio animo humiliato cor- ,

dos: Snrsuui corda? Àut quomodo sursum seha- pore, et corde compuncto, rorem divir.œ bencdic-
bere caria re^jiondere possunt, qui deorsum in tionis accipile. Ibid., pag. 471.
plaleis et corpore siuiul et corde discedunt? Vel
142 fflSTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSL\STIQLT:S.

naissance que de piété, le corps humilié et 11 répète plusieurs fois que l'usage du maria-
le cœur contrit, comme une rosée de la bé- ge, quand il n'a pas pour fin la génônition
nédiction divine, n des enfants est un péché qu'un adultère qui ;

Saint Césaire exhorte ses auditeurs à faire meurt sans avoir cessé son mauvais com-
part à leurs voisins, et à leurs parents qui merce, et fait pénitence, va en enfer; qu'on
n'auraient pu se trouver à léglise, des ins- doit penser de même de ceux qui entretien-

tructions qu'ils y ont reçues, disant que com- nent des concubines ; que ces sortes de cri-
me il serait cou|ial)le s'il négligeait de les mes ne sont pas moins défendus aux hommes
instruire , ils le seront aussi s'ils négligent qu'aux femmes que celui ou celle qui n'e<t
;

de communiquer aux autres ce qu'ils ont pas vierge, ne mérite point la bénédiction
serm.gi, appris. Le sermon quatre-vingt-deuxième est nuptiale (pi'il ne peut y avoir aucun pré-
;

*^'"" texte de violer la foi du mariage, ou de vivre


une instruction sur la prière. « Ce que nous
devons, dit-il, demander à Dieu en toultemps, dans l'incontinence, parce qu'il n'y en a
pour nous et pour tous les autres, est que point de ne pas craindre Dieu qui défend ces
Dieu daigne nous accorder ce qu'il sait être crimes et qui commaude la chasteté. Il ne
,

profitable à notre ûme. Mais avant toute au- croit point que l'on doive communier après

tre prière, nous devons lui adresser l'Oraison les accidents qui arrivent même invcîlontai-

dominicale, n'étant pas douteux qu'il n'exau- rement, si l'on n'a soin d'en témoigner à
ce une prière qu'il a lui-même instituée, w H Dieu sa douleur, et si l'on ne se purilie par
est à remarquer dans la vie de saint Césaire l'aumône ou par quelque jeûne si la sauié
qu'il obligea les laïques à chanter à haute le permet. Il conseille à ceux qui se sont fait p«j. «a.

voix des psaumes et des hymnes, <i l'imita- nue mauvaise habitude du vin, de s'en dé-
s«rn. 8j, tien des clercs. Il fut longtemps à établir cet faire petit à petit comme ils l'ont contractée.
pic
usage mais enfin il en vint à bout, comme
; Comme qu'ils ne se
quelques-uns disaient
i
m,i"'i'"''^„'^;
on le voit, par l'homélie quatre-vingt-troisiè- souciaient pointdu royaume du ciel, et qu'ils
"•
me qu'il fit le jour de rÉpiphanie. Elle roule ne désiraient que le repos éternel il leur :

entièrement sur le chaut des Psaumes, sur répond tpi'd n'y a que deux endroits ' où
lesquels il fait quelques remarques généra- l'on aille, et qu'on n'en connaît point un
les. Il conjure ses auditeurs de conformer troisième que celui qui n'aura pas mérité
;

leurs mœurs à la sainteté de ces cantiques, de régner avec Jésus-Glu'ist, périra sans au- «s.

de pratiquer les vertus qui y sont recomman- cun doute avec le démon.
dées, et de fuir les vices qu'ils détestent. Les 10. On peut faire les remarques suivantes s«rm.os,

deux sermons suivants sont sur la manière de daus les onze derniers sermons de saint Cé-
psalmodier et de prier. Toutes les fois que saire, mis dans VApjjendice des Œuvres de
''"^v^i"'
les ministres de l'autel avertissaient les fi- saint Augustin. Comme il y a des pauvres co-
dèles d'incliner leurs tètes, ou de lléchir
'
léreux et orgueilleux, avares et voluptueux,
les genoux*, tous devaient le faire, s'ils n'en à qui la pauvreté ne sert de rien pour le
étaient empêchés par quelques infirmités ; ciel, y a aussi des riches humbles et doux
il

et baisser du moins la tête lorsqu'ils ne pou- à qui les richesses ne sont point un obstacle
vaient fléchir le genou, pour ne pas ressem- au salut, parce qu'ils en usent sans y avoir
bler au pharisien, qui debout faisait l'éloge de d'attache c'est par l'orgueil que les anires
;

sc'n..e6,«7, ses propres mérites. Les six sermons suivants sont tombés du ciel dans l'enfer Dieu reçoit ;

in-i'.».' sont contre les péchés d'impureté et d'ivro- les pécheurs aussitôt qu'ils retournent à lui
gnerie. Saint Césaire veut qu'onlui défère ceux par la pénitence; la cupidité n'est jamais
qui se rendraient coupables d'adultère ou sans orgueil, ni la ciiarité sans humilité ; ce s»™, m.
d'autres crimes semblables, quand, après les que nous devons nous en
n'est point à Dieu
avoir repris en secret, ilsne se corrigentpoint. prendre, mais à nos propres iniquités, lors-

' Quotiens m
altario oralur, et vos iiiclinate qua in/irmitate non potest genua ftectere, vel dor-
capita vestra... non vobis sit lahnriosum capita sum curvare, vel caput non pigeât inclinare, Id.,
inclinare. Cœsar., Serm. 84, pag. 475. Serm, 85, pag, 476.
* Dum fréquenter allendo, diacono clamante: ' yemo duo loca sunt.et tertius non
sedecipiat,
Flectaiiius pimua, maximam partem video velut est ullus. Quicum
Christo regnare non mcrueril,
columnas ereclas stare conspicio ; quod christia- cum diabolo absque ulla dubitatione peribil. Cx-
nis non expedit, nec licet: non enim propter nos, s;ir., Uom. 91, pag. 495,
sed propter vosdiaconus clamât... Et qui pro ali-
,

[VI" SIÈCLE.] CHAPITRE IX. — SAINT Cl': SAlllH, ï^:vftOUE D'ARLES. U:i

fjiKi nous sommes affligtis do i,Mi(M'ros, de S(!- si'ivc'u'or avec S(icurilé, mais s'en retirer au
chcrcssos, de morlalilés et d'aiili'os Ih'iuix, plutôt et en faire pénitence. L'on peut dire
tels qu'on en soullVit ;\ Arles dans le temps en quehjue sorte, que les orgueilleux, les
qne les Fiançais en firent le sii^gc ; les peu- envieux, les adultères sont possédés du dé-
ples '
(int droit d'exijjtcr do leurs pasteurs le mon. Saint Ci'saire s'exprime ainsi ;ï l'occa-
Son... 94, pain de la parole divine ;et ceux-ci no peu- sion d'un (uiergumèue, qui, ledimanche pré-
vent le leur refuser sans injusiice ; ils doivent cédent, avait épouvanté les fidèles pendant
aussi l'otlrir à ceux qui en ont du d(^goùt, la célébration des mystères.
et les presser de le recevoir. Les (idèlcs doi-
vent entendre cette divine parole avec res- § n.
pect et dans une posture diicentc, assis, ou Des Homélies de saint Césairc recueillies dans la
s-™. os debout, et non pas couchés par terre. Les Ribliollihme des Pères, et par M. Baluze.
""'•
prêtres ne doivent point craindre; de prêcher
la vorilë en des termes durs, lorsiju'il en est 1. Des quarante-six homélies imprimées Sormnns
IlibllolM-
dfl
Il

besoin, pour dmouvoir les pécheurs, ni de sous nom de saint Césaire dans la Biblio-
le ijuedos P£re^,
CI du Hcenc.i
an M. Uoluzo,
Serin, 96,
les reprendre avec force. La parole de Dieu thèque des Pères, il y en a vingt-trois' que l.n|.ri .1164 dons
og. B05. l'Ait i>endlc0
étant la lumière et la nourriture de notre l'on a mises dans l'Appendice du ciiiquièrao do Halut Au-
^'"'"'
S.'riH. 97, âme, persoinic ne doit se dispenser de l'on- tome des Œuvres de saint Augustin, parce
[a?. CUH.
teudrc ou de la lire. Dieu, par im ellct de qu'elles portaient son nom, soit dans d'an-
sa miséricorde, a permis qu'en ce monde la ciennes éditions de ses ouvrages, soit dans
condition des hommes fût inégale, qu'il y quelques manuscrits. Nous venons de don-
eût des pauvres et des riches, afin que les ner le contenu de ces vingt-trois discours, de
uns se sauvassent par la patience, et les au- même que des quatorze homélies publiées
tres par l'aumône ce qne les riches reçoi-
; par M. Baluze, sous le nom de saint Césaire,
vent des pauvres, est beaucoup au-dessus de et que l'on a aussi attribuées quelquefois à
Sera. 98, ce qu'ils
'
leur donnent ils leur donnent inie;
'
saint Augustin. Il ne reste donc à parler que
;. 513.
pièce d argent, un morceau de pain, un vê- des vingt-trois autres sermons dont toulo- ,

tement, et ils reçoivent de Jésus-Christ, un fois les huit derniers ne paraissent pas être
royaume, la vie éternelle, la rémission de de saint Césaire.
leurs péchés les riches qui refusent la sub-
; 2. 11 y en a cinq sur la Pâque, dont le pre- Serm. 3, i,
E, 0, 7, l.ii..,
sistance aux serviteurs de Dieu, occupés mier paraît imparfait. Ce saint y représente 1\
K(r.
billiolli.
] af. 8.'l

Sera. 99,
aux veilles, aux lectures saintes, aux prières, l'étonnement et la terreur dont les démons el Su.;,

> siu.
ressemblent à l'ormeau et autres arbres in- furent frappés à la descente de Jésus-Christ
sorm. 100, fructueux, qui n'ont que des fouilles. L'on dans les enfers. 11 trouve la figure de la Pà-
peut distinguer trois sortes d'aumônes, utiles que et du baptême dans ce qui se passa à la
toutes les trois pour le salut, dont la pre- sortie d'Israël d'Égyte, lorsque Dieu en retira
mière consiste h donner aux pauvres ce ce peuple par le ministère de Moïse. En
qu'on a de superflu; la seconde, dans le effet, par la Pâque qui signifie passage
, ,

pardon des injures; la troisième, dans l'a- nous passons de la servitude à la liberté
sorm.im, mour du prochain; néanmoins l'aumône ne de l'iniquité à la justice, de la mort à la vie,
suliit pas a ceux qui vivent dans le crime il ; de la coulpe à la grâce; et nos péchés se
est nécessaire pour obtenir le pardon de trouvent tellement submergés dans le baptê-
leurs fautes, qu'ils quittent l'habitude du pé- me figuré par la mer Rouge, qu'il n'en \«e 3J3.

'
sot.i..io3, ché, et qu'ils changent leurs mœurs; et si reste pas un seul. Cette fontaine sacrée
"""
l'on ne doit point désespérer du pardon de nous purifie même du péché d'origine du ,

ses péchés, on ne doit point non plus y pei-- péché de notre premier père, que nous con-

' Qiiotiens vobis verbum Dei fuerit tardius prw- de M. Baluze sont les 21, 28, 57, 60, 62, 65, 69, 73,
dkattiyin, nolile exspeclnre ut vobis uUro debea- 74, 75, 81, 90, 91, 92 de saint Césaire dans l'Appen-
mus ingerere; sed etiam vos ipsi quasi rem vobis dice de saint Augustin.
jure debilam. fideliter a nohis ac sitienter exigite. 3 Primuinillud originale debitum sacri fontis
Ctesar., Hom. 94, pag. 302. unda evacuavit. Illud siiigulare delicluiii jiriini
Les liomijlies de la Bibl'othèque des Pères qui
' parentis interemit .. nec jam obnoxii esse possunt
se trouvent dans VÀppendice de saint Augustin, primœ origini secunda nalivitale nali. Cipsur.,
sont les 1, 2, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 19, Serm. 3 de Pasclia, pag. 823.
20, 21, 22, 23, 2i, 23, S'!, 31, 37, 39. Le? quatorze
lu HISTOmE GiiNCIlALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
tractons en naissant, nous y sommes entiè- mort par la transgression d'Adam, Dieu, en
rement nettoyés, absous, renouvelés: en se faisant homme, nous a rachetés de la mort
sorte que ceux qui reuaisscnt dans cette eau que nous méritions par une mort qu'il n'é-

salutaire n'ont plus aucune tache île leurpre- tait pas obligé de subir; et parce qu'il devait
I"V. «Si. mière naissance. « Jésus-Christ, dil-il, fipuré dérober à nos yeux le corps qu'il avait pris,
par l'afrneau pascal de la loi, est le vérilahlc et le placer dans le ciel, il crut nécessaire, au

airneau que nous devons manger dans une


' jour de la Cène légale, d'instituer le sacre-
même maison c'est-à-dire dans l'unité de
, ment de son corps et de son sang, afin do
l'Église. Donc, les ariens et tous les autres perpétuer la mémoire du mystère qu'il avait
hérétiques, étant séparés de l'Église, ne man- oUert une fois pour notre rédemption , et
gent point cet agneau dans une même mai- qu'il nous fût toujours présent par sa grâce.

son; et dés lors ils ne peuvent être sauvés; C'est pour(pioi il nous assure ' que sa chair
comme ceux-là ne le furent pas qui ne se est véritablement viande, et son sang un vé-
trouvèrent point avec Noé dans l'arche dans ritable breuvage ce dont nous ne pouvons
:

letemps du déluge. Mais que veut dire l'É- douter, puisqiie l'auteur du don est lui-même
crituie lorsqu'elle nous ordonne de manger témoiu de la réalité et de la vérité de ce don.
l'agneau pascal avec ses pieds ? Sinon que C'est lui qui ,
quoiiiue prêtre invisible, con-
nous devons confesser que Jésus-Christ est vertit par sa puissance secrète les créatures
vrai Dieu et vrai homme; qu'il est engendré visibles en la substance de son corps et de
de Dieu et né de l'homme. N'imaginons rien son sang, en disant Prêtiez et mangez : ceci
:

de corporel dans la manière dont il est en- est mon corps; et, par une seconde sanctifica-

gendré du Pure. C'est une lumière qui pro- tion Prenez et buvez : ceci est mon sang. Com-
:

cède d'une lumière. Quand vous allumez une me au commandement de Dieu les cieux, les
lampe auprès d'une autre lampe, le feu de la mers du néant par une
et la terre sont sortis ,

seconde est le même que celui de la premiè- semljlable puissance la vertu de sa parole
,

re. Si vous considérez la personne dans le ordonne, et l'etl'et suit aussitôt. Peut-on ti-op
Fils, elle lui est propre si vous faites atten-
;
relever la grandeur des bienfaits opérés par
tion à la nature , elle lui est commune avec l'eflicacité de la bénédiction divine ? Jugez

le Père. deux dammes dans


D vous parait par ce qui s'est passé en vous-mêmes, vous
les deux lampes mais ces deux feux n'ont
;
qui êtes régénérés en Jésus-Christ, qu'il n'est
qu'une même nature. Devenus sujets à la ni nouveau ni impossible que les choses tcr-

* Uic est ille agmts qiiem in una domo come- esse 7ion debeat, quod in Christi substantiaiu Ur-
dere ex lege prœopiiiiur. Quiil est in una domo? rena mortalia commutantur, teipsuni qui jam
et
Id est in unitate Ecclesiœ jubemur carnes ejns in Cliristo es regeneralus, inlerroga, dudum alie-
assumere. Ariani ergo et divers(e hœreticorum nus a vita, peregrinus a misericordia, a sahUis
perversitates, nnri in tuia illnm comedunt dnmo. via inlrinsecus exulabas. Subito iniatus Christi
Quod idco sicut in diluvio non salvatus est, tiisi tcgibus, et salutaribus mysleriis initiatus, in cor-
qui inler arcam fuit invenlus: ila dirersw fidei pus Ecclesiœ non videiuio sed crcdendo Iransisli,
homines extra Ecclesiœ domum non hahenKs et de filio perditionis adoptivus Dei occulta ficri
agnum qui est Christus, salci esse non possunt. puritate meruisti... Sicut ergo sine corporaUsen.<u
Cœsar., Ilom. G de l'ascha, lom. l\ liibt. tatr., subito novam indulus est dignitaltm, cl sicut hoc
pag. 824. quod in te Dcus maculata detersit, ita cum revc-
^ Undc mérita cœlestis confirmât autoritas : rendum altare cibis satiandus ascendis, sacrum
Quia caro inca vcre est ciljus, et sangiiis meus vere Dei tui corpus cl sanguinem fide respice, honore
est polus. Recédât ergo omne infidelitatis amhi- mirare, mente conlinge, cordis manu suscipe, cl
guum quaitdoquiilein qui nuctor est muneris ipse maxime hauslu, inleriori assume... Quod corpus
etiam teslis est verttatis. lyam invisibilis sacerdos saccrdote dispensante tantum est in exiguo quan-
visibiles crealuras in substantiam corporis et tum esse constat in toto. Quod cum Ecclesiu su-
tanguinis sui, terbi sui sécréta potestate conver- mil fidelium, sicut plénum in universis ita inle- ,

tit, ita dicens : Accipile et édite hoc est corpus


: grum esse prohalur in singulis... Si forte esum
meuui. Et sanctificatione repetita: Accipile et bi- punis esuricntibus apponeremus, non ex toto per-
bite, liic est sanguis meus. Ergo ad nulum prœci- veniret ad singulos, quia particulalini et minuta-
pientis Doinini, repente ex nihilo suhstilerunt ex- tim portionem suam unusquisque prœsumeret.
celsa cwloruni, profunda ftucluum, vasla lerra- De hoc vero pane cum assumilur nihil minus ha-
rum. Pari potenlia in spirilualibus èacramenlis bent singuli quam unicersi. Tolum unus ; totum
verbi prœcipit virtus et rei servit cffcctus. Quanta duo; totum plurcs sine diminuUone percipiunt:
itaque celebranda bénéficia, vis divinœ benediclio-^^^ quia benedictio hujus sacramenti scit dialribui :
nis operalur ; quomodo libi novum climpossibile ^^ nescit dislributione consumi... Quidautem mirum
vr SIKCLli. ] ClLU'lTllE IX. — S.UNT CÉSA-IIIE, ÉVftQlIE D'ARLES. 145

rcslres cl pdrissaWci? soient cliangi's en la 3. Ce saint évoque fut prié par le supérieur Sorin.ll

substance de Jësus-Clirisl. Vous aviez depuis d'un monastère, de faire ifiie exhortation .\
longtemps perdu le droit h la vie; vous n'a- ses religieux. Il ne se lendit qu'avec quel-
viez point do part h la miséricorde ;
vous que sorte de répugnance h ses instances, sa-
ëtiez comme exilés
de la voie qui conduit au chant (pi'il ne pouvait rien dire ces saints;'i

salut. Aussitôt que vous avez été initiés aux moines, ne missent déj;ï en pratique.
qu'ils

lois de Jésus-Christ, et renouvelés par ses Il se contenta donc de les exhorter à persévé-

mystères salutaires, vous êtes passés, non rer dans la vie édilianb; qu'ils menaient, leur
d'une uuiilièro visible, mais par la foi, dans disant d'après l'Evangile, que le salut n'est
,

le corps de l'Église, et, par une pureté inté- promis qu';\ ceux qui persévèrent courageu-
rieure, vous (Mes devenus de fils de perdition sement dans le bien jusqu';"» la fin. Il remar-
enfants adoplifs. De même donc que, sans que qu'il y a deux édifices et deux cités que
vous en apercevoir par les sens du corps, l'on bâtit dès le commencement du monde.
vous êtes revêtus subitement d'une nouvelle « L'une, dit-il, a pour architecte Jésus-Christ;
dignité, et purifiés de vos taches ainsi lors- :
l'autre ledémon. L'une est b;ltie sur le fon-
que vous montez à l'auttil pour vous y rassa- dement de l'humilité, afin qu'elle puisse s'é-
sier des viandes, considérez des yeux de la lèvcr d'une manière solide; l'aulre, qui n'a
foi le corps et le sang de votre Dieu témoi- , que l'orgueil pour base, tombera malheureu-
gnez del'étonncment par votre respect, tou- sement. Les humbles bâtissent avec Jésus-
chez-le de l'esprit recevez-le de la main du
, Christ; et les orgueilleux avec le démon : car
cœur, et prcnoz-le pour vous en repaître sur- on ne dislingue les enfants de Dieu et les
tout intérieurement. Le corps qui vous est enfants du diable que par l'humilité et par
donné par la dispensation du prêtre est aussi l'orgueil. » Saint Césaire conjure ces religieux
grand dans une partie qu'il l'est dans le tout. de s'attacher fortement â cette vertu, et d'en
Lorsque l'assemblée des iidèles le prend, il faire lacompagne inséparable de l'obéissance
est parfait dans tous, et chacun le reçoit tojt dont ils faisaient profession. Il leur représen-
entier. En quoi il se trouve bien ditlerent des te que l'orgueil dans un laïque est un pé-
autres aliments :nous présentions un
car si ché ;
^ dans un reli-
mais qu'il est un sacrilège
Scr
morceau de pain à plusieurs personnes qui gicux. Il fit un autre discours à la prière de pag. s»;

eussent faim, chacune d'elles ne le mange- l'abbé de Lérius, dont il fait un grand éloge
rait pas en entier , parce qu'elles se le divi- sans le nommer. Il fait aussi l!éloge de ses
seraient par parties h proportion du nombre moines et de l'ile de Lérius, d'où il dit
de celles qui en mangeraient. Mais décevrai qu'où avait tiré un grand nombre de prêtres
pain, chacun en a autant que tous ensemble, et d'évèques. Il reconnaît qu'il y avait lui-

un seul le mange tout entier, deux le pren- même reçu l'éducation et la nourriture spi-
nent tout entier, plusiem-s le prennent tout rituelle et corporelle pendant un assez long
entier sans aucune diminution, parce que la temps. Témoin ocidaire des vertus qu'on y
bénédiction de ce sacrement peut bien être pratiquait, il ne demande autre chose à ces
distribuée mais elle ne peiit être consumée.
; rehgieux que de soutenir, par une exacte ob-
Est-il surprenant que Dieu change par l'effi- servation de leurs devoirs, la grande répu-
cacité de sa parole, ce qu'il a créé par la tation qu'ils s'étaient acquise presque dans
même parole ? Il parait même que le miracle tous les endroits du monde, depuis l'Orient
n'est pas si grand de changer en mieux ce qui jusqu'à l'Occident, en leur faisant remar-
est déjà créé, que de le créer de rien. Saint quer que si les travaux de la vie monasti-
Césaire rapporte plusieurs passages de l'É- que étaient difficiles à supporter, ce n'était'
criture pour prouver le changement du pain que lorsqu'on ne s'en faisait point d'habi-
et du vin, au corps et au sang de Jésus-Christ ; tude ou pour dire plus vrai qu'on ne les
;
,

et la nécessité qu'il y a de les recevoir dans croyait impossibles, qu'en s'imagiuant pou-
le baptême pom' avoir la vie éternelle. voir en venir à bout par les seules forces

est si ea qum verbo potuit creare, posait verbo tantur, laboriosa esse videntur. Et ut verius di-
creata coniertere ? Imo jain minoris videlur esse cam, tamdiu iiiipossibilia judicantur, quamdiu
miracuU, si id quod ex nihilo agnoscilur condi- huinanis viribus impleri passe putanlur. Cum re-
disse, jam conditum, in melius mutare valeat, ro o Deo oblineriel per Dei gratiam impleri passe
Ca>sar., ibid., hom. 7, pag. S25, 826. credunlur, nec dura, nec laboriosa, sed ieria et
' Sed hœc omnia donec
in consueludinem mil^ suavia corn probantur. Cœsar., Efom. 23, pag. 845.
XL 10
146 HISTOmE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
de la nature. « Mais, ajoule-t-il, lorsqu'on que, comme la chair ne peut vivre sans l'âme,
croit qu'ils sont supportables avec la grâce les vertus n'ont point de véritable vie sans
de Dieu, qu'on espère l'obtenir, dès lors
et la charité.
S«rmoD)
ces exercices, quelque pénibles qu'ils parais- o. La trente-huitième homélie est intitu- faatfemtat «t.
tnt'UisA M.ol
sent, deviennent doux et légers, et cessent lée : Des Douze moyens d'obtenir la 7-émission C6saira.

d'être durs et pénibles. » de ses péc/iés. Ce


qu'un fragment de
n'est
Serm r.Sfl, 4. Nous avons
six homélies sur les devoirs quelque traité ou instruction spirituelle. Ces S«rm. 18,
19, 30. 31. 3i,
de monastique. Le style ne permet
la vie moyens sont le baptême, la charité ou l'a-
point de douter qu'elles ne soient de saint mour, l'aumône, l'abondance des larmes, la
Césaire. Il marque dans la deuxième que les confession de ses crimes, la componction du
moines à qui il parlait habitaient une ile voi- cœur, la mortification du corps, la correction
sine, apparemment d'Arles; puisque le mo- des mœurs, l'intercession des saints, les
nastère, dont il était abbé, n'était pas éloigné œuvres de miséricorde, le zèle du salut du
«le cette ville. Il dit au commencement de la prochain, le pardon des injures, le martj're.
sixième qu'il l'avait faite à la prière du su- Il n'existe aucune preuve que cette homélie Sorra. 35,

périeur de ce monastère. Comme il ne fait soit de saint Césaire. La trente-neuvième

pas la même remarque dans les autres, il est porte le nom de Félicitarius, évoque d'Arles,
à croire qu'il ue composa celle-ci que depuis de même que les deux suivantes. Ce peut
qu'il fut évèque et qu'il prononça les cinq
; être une faute des copistes, qui au lieu de
autres dans le temps qu'il était abbé. Ce sont Cfpsarius, auront mis Félicitarius. Elle traite
des exhortations à la charité, à l'humilité, à du jour du jugement dernier, et le style a la S«riii.(lt, II,
it, i^. en.
l'obéissance, à la pénitence et au combat des simplicité de celui de saiut, Césaire. La qua-
passions, à la correction des mœurs, au mé- rantième n'est qu'un tissu de passages de la
pris des biens et des plaisirs du monde, à la sainte Ecriture sur l'aumône. On trouve dans
mortification des sens. Rien ne lui paraît plus la quarante-unième, qui est sur les dîmes, ce
utile que la pensée du jugement dernier, que qu'en dit saint Césaire dans la soixante-dix-
le souvenir des fautes passées, que la dou- septième homélie, pai'mi ceUes qui sont dans
leur de les avoir commises, que la crainte VApjKndice des Œuvres de saint Augustin.
Strni. (1,U.
continuelle d'en commettre à l'avenir. Il con- Cette homélie ne parait pas digne de saint Cé-
seille aux moines l'assiduité à l'oraison et à saire. La quarante-deuxième est d'un auteur
la lecture la vigilance sur eux-mêmes pour
; plus récent que lui, puisque l'on y cite saint
se conserver purs et chastes; la sobriété, la Grégoire. La quarante -troisième et la qua-
douceur, la modestie, la sincérité de cœur, ranlc-(iuatrième sont attriliuécs A saint Au-
le zèle dans le service de Dieu, la soumis- gustin. Mais elles ne sont ni du style de ce
sion à la volonté non - seulement de leurs Père, ni de celui de saint Césaire on peut :

anciens et de leurs égaux, mais aussi de ceux porter le môme jugement de la quaraule-cin-
qui leui" sont inférieurs en âge. Je ne sais si quième, qui est une exhortation faite â des
ce ne serait point de ces homélies que veut moines et par un moine. La quarante-sixième
parlerGennade ou un supplé-
celui qui a fait a pour litre Doctrine de saint Macaire, pour
:

ment au Catalogue des hommes illustres, lors- ceux qui vivent dans les monastères. On n'y
Ton. XXVIl
qu'il dit '
que saint Césaire a composé divers voit rien du génie ni du style de saint Cé- Bill.l><l. 1.:;.

opuscules très-beaux, très-agréables, tiès- saire.


M.
Scrm.W,ÎC, utiles et même nécessaires aux moines. Les A la suite des quatorze Homélies de saint
t»^-.
ton».
trente-cinquième et trente-sixième dansla^i- Césaire, publiées par M. Baluze, on eu a
bliotkpque des Pères sont encore des exhorta- mis deux dans Supplément de la Diblio-
le

tions à des moines et à des clercs. Saint Cé- tlif'ijuc première est contre
des Pères, dont la
Tôni. VUI
saire fitdernier à la prière d'un abbé. Il
le les personnes mariées qui commettent des Bl'll'ih. l'ii.
Ml.
fait voir dans l'un et dans l'autre que tous adultères; et la seconde, sur le mépris de la |«t.

les exercices extérieuis de la vie spirituelle vie présente. Celle-là parait avoir été prise
doivent nécessairement être accompagnés de la seizième hoiuéliedcsaint Céfairc sur le
d'humihté, de charité, de soumission, parce même sujet celle-ci est luie compilation de
:

divers endroits des écrits de saint Jérôme,


de saint Augustin et de saint Grégoire le
• Cœsarius Arelatensis scripsit egregia et grata
latUe mo;iut7iis necessaria opuscvli GiMiiiad. Grand. Elle ne peut donc être de saint Cé-
et
iu Calalog., cap. lxxxvi. saire.
, .

[vi- sikLE.] CIIAPITRE IX. — S.MNT CÉSAIllE, ÉVftQUE D'ARLES \M


que de mourir dans cette séparation. Il dit
§in. dans le même discours que Di(!ii n'est point
facile accorder ses grâces, de peur que les
l'i

De quelques autres homélies que l'on a attri-


hommes n'en fassent peu de cas. La cin- Tom. VI m
buées à saint Césaire. MIolli. Pal
quième homélie dans Eusèbo d'Émèsc, qui r«p. eu tt
«iq.
iiliisicius lioiiK'lics ilans l'Appen- fait le quatrième sermon dans Barrali, In si-
Ilrniillrsal- 1. II y a
CAajiiro.
dice du ciiKiiiième tome tics Œiivrcs de saint xième, la neuvième et la dixième aux moines
Augustin. Elles ont quolquelbis passé sous paraissent être de saint Césaire toutes ces ;

le nom
de saint Ci'saire, maison n'a point de homélies sont des exhortations A la pratique
preuves solides de ces lio-
qu'il soit l'auteur des vertus chrétiennes et des observances
mc'lies. Telles sont leshomélies sur le serpent monastiques.
11. V o?. d'airain et la verge miracidensc de INIoïse ;
-I.lu Ap-
le premier verset du Psaume cxxxv°, et le troi-
§IV.
101,1' 5.
sième chapitre des Proverbes; sur la femme Des Règles de saint Césaire.
forte, et sur l'Église, à l'occasion de ce qui
en est dit dans le trente-unième chapitre du 1 Dans le Code des règles, nous en trou- saintntelcs do
C6salie
I-.I). même livre sur la femme pécheresse dont
;
vons deux de saint Césaire imprimées ensuite pour les
na pour les et
iiioi-

IHS.
U est parlé dans saint Luc sur ces paroles ;
dans le huitième tome de la Bibliothèque des roligieusos. .

du douzième chapitre de la première aux Pères; l'une pour des religieux, l'autie pour

257.
Corinthiens Si l'un des membres souffre,
: des religieuses. Téride, neveu du saint, et
tous les autresmembres souffrent avec lui ; sur abbé d'un monastère dont le nom ne nous
le jeûne ilu Carême, et sur le jugement der- est pas connu, écrivit ' la Règle pour les re-
nier. La plupart de ces homélies se lisent ligieux sous la diction de son oncle, de qui il
sous le nom de saint Césaire dans quelques fut chargé de la répandre en divers monas-
*
manuscrits mais, en d'autres, elles portent
;
tères. Saint Césaire écrivit lui-même celle

le nom du saint Augustin et quoiqu'à en ;


pour les religieuses, du moins cette partie
juger par le style on puisse assurer qu'elles qu'il appelle Bécapitulation. Le saint évêque

ne sont point de ce saint Docteur, on n'y commcnrait à bâtir un monastère de filles,


trouve pas non plus assez de conformité lorsque la ville d'Arles fut assiégée, vers l'an
avec celui de saint Césaire, pour les lui at- S07 il y travaillait même de ses mains. Mais
;

tribuer avec certitude. les barbares en ayant ruiné une grande par-
nous a donné dix-huit sermons
2. Barrali tiepour prendre les bois, il ne put l'achever
de saint Césaire, qu'il dit avoir été prononcés qu'après la levée du siège. Il joignit au mo-
devant les moines de l'abbaye de Lérins. Il nastère une grande éghse partagée en trois :

y en a plusieurs de ce nombre qui se trou- le milieu dédié à. la Sainte Vierge; un des


vent dans le sixième tome de \a Bibliothèque côtés à saint Jean; l'autre à saint Martin. Il

des /•«•«« parmi les homélies attribuées à Eu- fitpaver toute l'éghse de grands coffres de
sèbe d'Emèse, dans le huitième tome parmi pierres taillées exprès pour la sépulture des
celles de saint Césaire, et dans l'Appendice religieuses. Césarie, sa sœur, fut la première
du Code des rè(//es par saint Benoit d'Aniane. supérieure de ce monastère. Elle s'était for-
Barrali donne également à saint Césaire et mée auparavant dans les exercices de la vie
à Faiiste de Riez, le Discours aux moines, monastique à Marseille, dans un monastère
imprimé dans le huitième tome de la Biblio- de filles, fondé comme l'on croit par Cassien ;

thèque des Pères, après les deux livmsduLibi'e mais parce que les règlements qui s'obser-
arbitre et de la Grâce. Il ne peut cependant vaient dans les différentes communautés, soit
être que de l'un des deux et il y a toute appa- ;
de filles soit de moines, n'étaient point uni-
,

rence qu'il est de saint Césaire on y voit son : formes, saint Césaire, pour fixer le genre de
style et ses maximes. Il y parle de l'excom- vie de son nouveau monastère , composa la

munication monastique qui consistait à sé- ,


règle qu'on y devait suivre.
Analisa dé
parer un frère désobéissant ou de mauvaises 2. Elle est divisée en quarante-trois ar- la lêïle l'our
les Reli^iou-
mœurs, du corps de la communauté. Rien ne ticles, dont voici les plus remarquables. Celle scs. Cod, B(g.
Ijoi', 14, l.ail.
paraît plus triste et plus fâcheux à ce Père qui, après avoir quitté ses parents et renoncé

' Cod. reg., part. 2, pug. 54. » Ibid., part. 3, pag. 25.
118 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
î.nioiti.VllI
B>l>:i..r,. Cal.
au monde, s'iitait engagée à vivre dans le mo- nature qu'il n'empêchât point l'attention à la
j.^. SU et
nastère pour y éviter, avec le secours de Dieu, lecture que l'on y faisait ; ce travail n'étant
SC(|.

les occasions du péché ne pouvait en sortir


, permis que pour ôter l'envie de dormir en ces
jusqu'à la mort. Aussi l'éprouvait-on pen- heures-là. Si quelqu'uned'ellesselaissaitaller
dant un an avant de lui donner l'habit. Du- à l'assoupissement, on l'obligeait à se tenir de-
rant ce temps, elle demeurait sous la conduite bout pendant que les autres étaient assises. Le
d'une des ancienues, qui n'oubliait rieu pour travail ordinaire était en laine. Chaque jour «„„. n,

s'assurer de la vocation de sa novice. Après on distribuait à chacune la tâche qu'elle de-


cette épreuve, il était au pouvoir de la supé- vait remplir. Toute propriété était défendue, t:.

rieure de lui donner l'habit de la religion, et même dans les habits. On gardait le silence
de lui accorder un lit dans la chambre com- pendant les repas, afin d'être plus attentif
mune où toutes les religieuses couchaient. à la lecture. C'était à celle qui présidait à la „
S'il se présentait des veuves ou des femmes table commune de pounoir aux besoins de
qui avaient quitté leurs maris, apparemment chacune et quand il était nécessaire de de-
;

de leur consentement, on ne les admettait mander quelque chose, ce devait être plutôt
pas qu'elles n'eussent disposé de leurs biens par signe que de la voix. Après Dieu toutes i-.

par écrit, afin qu'à l'avenir elles n'eussent devaient obéir à la mère du monastère. Elles
plus rien en propre. On en usait de môme à apprenaient toutes à lire et à écrire , et fai-
l'égard des filles mineures. Il n'était permis saient chaque jour deux heures de lecture ,

à aucune religieuse, pas même à l'abbesse, depuis six jusqu'à huit heures du matin. Le '

d'avoir une servante à soi mais, dans le be-


; reste du jour elles travaillaient à divers ou-
soin, elle pouvait se»faire soulager par quel- vrages, ne parlant que quand il en était be-
qu'une des jeunes. On recevait mais avec , soin. On hsait pendant une partie du travail „_
peine, les petites filles de six ou sept ans, qui se faisait en commun, après quoi chacune
pourvu qu'on leur vil des dispositions à ap- méditait ou priait. Celles qui possédaient
prendre les belles - lettres, et à obéir. Mais quelques biens dans le monde, les offraient
on tie prenait point des pensionnaires soit , humblement à la supérieure, en entrant dans
qu'elles fussent de qualité, ou non. Le choix le monastère ,
poui- l'utilité de toutes ; mais
du travail des mains ne dépendait pas des re- comme celles qui n'y apportaient rien ne
ligieuses; c'était à la supérieure de le pres- devaient pas y chercher ce qu'elles n'auraient
crire à chacune d'entre elles, suivant qu'elle pas eu dans le monde de même aussi cel- ;

lo trouvait utile. Aucune n'avait ni chambre, les qui apportaient quelque chose ne de- ,

ni armoire, ni rien qui fermât. Elles cou- vaient pas s'en orgueiUir, ni en prendre oc-
chaient toutes en diûerents lits, mais dans casion de mépriser les autres.

N'tiin. (f,49,
une même chambre. Les vieilles et les in- 3. La /îèf/le recommande le soin des in-
ei io
lai.
BËcapItu*
Duin. "im
firmes avaient une autre chambre commune firmes. Elle établit un proviseur ou intendant
où elles demeuraient. Les lits étaient simples, pour les atlàircs du dehors. Elle défend sous zi.

sans aucun ornement aux couvertures , et des peines grièvesauxrefigieuscsparticuhè-


leurs habits blancs. Leur coiti'urc ne pouvait res de recevoir en secret des lettres, ou des
excéder la hauteur d'un pouce et de deux présents de qui que soit, ni d'en envoyer,

Hum, ».•),
bgnes. Jamais elles ne devaient élever leur sans la permission de l'abbesse. C'est elle qui
voix en parlant, ni causer, ni travailler pen- ordonne la discipline, c'est-à-dire, la llagel-
dant la psalmodie, ni sen-ir de marraine dans lation, même en présence de la communauté,
le baptême. On reprenait celles qui venaient contre celles qui se trouveront coupables
tard à l'Olfice divin. Si elles ne se corrigeaient de fautes publiques, comme d'avoir usé do «.
pas, après avoir été averties une seconde et termes injm-ieux et de reproches envers leurs
troisième fois, onles séparait de la communion, sœurs, de les avoir fiappées, ou d'avoir volé
ou de la table commune. On séparait aussi de quelque chose dans le monastère. Elle veut j^

la prière commune ou de la taijle,cellesqui,au que l'abbesse, qui doit veiller non-seulement


lieu de s'humilier de leurs fautes, entrepre- au salut des âmes mais encore à la con-
,

naient de les excuser ou refusaient d'obéir. servation des biens du monastère, et aux
Chacune devait ser\ir à son tour, soit à la cui- besoins de la vie, rende politesse pour poli-
sine, soi t dans les autres olUces|du monastère, tesse aux personnes du dehors et qu'elle ,
^
excepté la supérieure. Le travail que celle-ci fasse réponse à toutes les lettres des fidèles ;
prescrivait pour les veilles devait être de telle et que celles qui sont chargées du soin du
,

[VI' SIÈCLE.] CITAPITnE IX. — SAINT CI^^SAIHE, ÉVÊQUE D'ARLES. 149

vostiairc , fournissont atix sœurs les babils mais toujours de l'agrément de l'abbesse. Il
nécessaires : ils daieiit de laine; el les reli- y avait un |)arloir pour recevoir les visites;
gieuses les faisaient elles-mômes. S'il restait l'abbesse ne devait y aller qu'accompagnée
des vivres an delà du besoin journalier, on de deux ou (rois somu's, les autres avec une
les enfermait sous la clef. Il y avait une ca- aucieunc. Il était défendu de donner à nian- ««m. jo,

viste cliarj;ée de ilistribuer le vin aux sœurs ger àpcrsoinie, pas même à l'évéque du lieu,
suivant leurs besoins et il u'était pas permis
; ni au proviseur du monastère. On le pouvait,
à celle qui en avait reçu par présent de le dis- mais rarement, à des femmes de la ville, re-
tribuer, ni d'en prendre pour elle-même. Non- commandable» par leurs vertus et par leuraf-
seulement on accordait les bains <i celles qui feclion pour le monastère. A l'égard des fem-
étaient malades mais encore on les obligeait
; mes étrangères qui venaient ou pour recher-
d'en user lorsque les médecins l'ordonnaient cher leurs filles, ou pour rendre leur visite
ainsi mais on ne les permettait point ;\ celles
: il était au pouvoir de l'abbesse do les inviter
qui étaient en santé. Le soin des infirmes à manger. Si quelqu'un voulait voir sa fille, n.
était confié à une sœur sage, qui savait ac- ou sa parente, on ne lui refusait pas de parler
corder l'observance régulière avec la charité avec elle, pom'vu que ce fût en présence d'une
et la condescendance qu'on doit aux malades. ancienne. L'abbesse ne pouvait se dispenser de
Si la nécessité le demandait, et la supérieia-e manger avec la communauté, à moins qu'elle
le jugeait à propos on faisait une cuisine
, ne fut malade ou occupée légitimement. Il 3,.

à part pour les infirmes. 11 y avait aussi des était de sou devoir de prévenir celles qui,
sœurs chargées du soin de la cave, du vestiaire, étant d'une faible complexion, ne pouvaient
de la bibliothèque, des outils nécessaires à dif- soutenir les jeûnes et les autres austérités, et n,.

férents ouvrages qui se faisaient dans le mo- qui néanmoins avaient honte de lui exposer
nastère Celles qui s'en acquittaient négligem-
. leurs besoins. Pour éviter les continuelles
ment étaient punies. Lorsqu'il arrivait que importunités des pauvres, elle devait charger
l'abbesse excommuniait une de ses religieu- le proviseur de leur faire distribuer les au-

ses pour quelque faute, on la séparait de la mônes que monastère était en état de faire.
le

communauté et on la mettait dans le lieu que


; Comme il permis à aucune religieuse
n'était
l'abbesse ordonnait, pour y vivre avec une des de donner quelque chose du monastère, il
sieurs les plus spirituelles, jusqu'à ce qu'elle leur était encore défendu de rien recevoir,
eût obtenu le pardon par sa pénitence. Mais même de leurs parents, qu'avec la permission
lorsque l'abbesse ou la supérieure avait excé- de l'abbesse, ou à son absence, de quelqu'au-
dé en traitant avec des paroles trop dures tre supérieure de la maison. Quand ou don- 3,.

celle qui avait fait une ne devait


faute, elle nait des habits neufs à une religieuse, elle
point lui en faire d'excuse, de peur que cet devait rendre les vieux, siellen'en avaitplus
acte d'humilité envers une personne qui lui besoin, afin de les donner aux pauvres, ou à
était soumise ne diminuât son autorité. C'é- des novices. Ces habits étaient de laine blan-
tait donc à Dieu seul qu'elle devait demander che. Il n'était pas permis d'en porter de noirs
pardon de l'excès qu'eUe avait commis. ou d'une autre couleur. On ne gardait aucun
4. Outre l'abbesse qui était regardée comme tableau dans l'intérieur du monastère, et on
la mère du monastère, il y avait deux autres ne permettait aucune peinture après les mu-
supérieures, à qui toutes les religieuses de- railles, ni dans les chambres. Les ornements
vaient obéir, l'une qui avait le nom d'inten- mêmes de l'église n'étaient que de laine ou
dante, l'autre de primicière. 11 n'était permis de toile, sans broderie ni Ueurs; seulement
33, 31
à personne, soit homme, soit femme, d'en- on y mettait des croix de couleur noire ou
trerdans l'église du monastère, si ce n'était à blanche. Si l'on en offrait de plus précieux,
des évèques, des abbés ou des religieux de on les vendait au profit du monastère, ou on
vertu connue pour y faire leurs pi'ières ou
, ; les faisait servir à l'usage de la basilique de
au proviseur, au prêtre, au diacre, au sous- la Sainte -Vierge. Au reste il était expressé-
diacre et à deux lecteurs, pour la célébration ment défendu aux religieuses de recevoir au-
de la sainte messe bien moins leur était-il
; cun habit soit des clei'cs soit des laïques,
, ,

permis d'entrer dans l'intérieur du monas- fussent-ils parents, pour les teindi-e, les cou-
tère. L'évéque le pouvait toutefois en cas de dre, les laver, ou les garder, sans une per-
nécessité, de même le proviseur, et les ou- mission expresse de l'abbesse.
vriers pour les réparations des bidiments. o. L'expérience ayant fait connaître à saint Bécif-iuia-
130 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
'""<™"T"°- Césaire que cette Rèqle u'ctait point dans sa jeûne on donnait trois portions, et deux seu- |

î>t!îrJ' c.i5'
peifectiou," y ajouta une seconde partie
il lement lorsque l'on dînait. Aux jours des [

lî" wm!^?ii ^o"s le litre de Récapitulation, qui conlieut grandes fêtes on ajoutait quelques portions,
r«;.'°8-!'6.''"'
diverses additions à la première partie, et soit à diner, soit En été comme en
à souper.
quelques cluingements. Elle est composée de hiver, on servait deux portions à diner et
viiigt-un articles; mais on convient que les trois à souper; mais les jeunes religieuses

deux derniers ont clé tirés de la Règle de n'en avaient que deux. Jamais on ne servait
saint Benoît, et ajoutés après coup. Les six de viandes à la communauté. A l'égard des
premiers ne prescrivent rien qui ne soit dans inflrmes on leur donnait de la volaille, et non
la R!-<jle. Le septième marque la hauteur des de grosse viande, si ce n'est que dans quel-
coill'ures, ainsi que nous l'avons rapporté. Il ques maladies désespérées l'abbesse crût de-
est dit dans le huitième, que lorsqu'il se pré- voir en user autrement. Dans le dix-huitième
sentera une postulante, on lui lira plusieurs article, saint Césaire recommande aux reli-
fois la règle dans le parloir, et qu'on ne l'ad- gieuses de prier pour lui, pour ses succes-

meltra dansle monastère que lorsqu'elle aura seurs et pour les fondateurs du monastère,
promis lihremcnt d'accomplir le contenu de dans les otiices, soit du jour, soit de la nuit.

la Règle. Le neuvième veut que l'abbesse tien- Il dans le dernier article qu'il avait fait fer-
dit
ne les clés des portes pendant le repos. Le mer certaines portes, pour une plus exacte
dixième lui ordonne de pourvoir aux besoins clôture, et défend de les ouvrir à l'avenir, sous
de ses sœurs. Il est dit dans le douzième, quelque prétexte d'utilité que ce soit. A ces
qu'après la mort de l'abbesse, les religieuses dix-neuf articles on en a ajouté deux autres,
doivent choisir pour lui succéder celle qui tirés, comme nous l'avons dit, de laR'^glede

aura le plus de vertu et de talent pour le saint Benoit. Le premier regarde lacellerière
gouvernement, sans avoir égard dans leur du monastère, et le second la portière. Telle
choix, ni à la qualité de la naissance, ni à la est la Règle de saint Césaire, la plus ancienne
parenté. Le treizième est une exhortation à que l'on connaisse avoir été faite pour des reli-
l'observation de la règle. Il est défendu dans ligieuses cloitrées. Césarie la jemie, abbesse
le quatorzième de rien reli-ancher de cette Ré- du monastère de saint Césaire, la communi-
capitulation que saint Césaire dit avoir écri- qua vers l'an 356 à sainte Radégondc, qui la
te et souscrite de sa main, ni d'y rien chan- fit pratiquer - et la pratiqua elle-même dans

ger; permettant aux religieuses de résister, le monastère de Sainte-Croix qu'elle avait


en ce cas, à leur abbesse, avec le respect con- fondé à Poitiers.
venable; et de recourir 'aux lettres du très- 6. La Règle que saint Césaire établit pour |„'*'^,';„''„'°'
saint l'ape de Rome, pour s'autoriser dans le les moines est moins étendue. Elle porte ^^ j, \'^\
"'
maintien de l'observance. Il laisse à la pru- quelquefois le nom de Téride, parce que ce
dence de l'abljcsse de régler les jeunes depuis prêtre, qui était disciple du saint évéque,
la Pentecôte jusqu'au premier jour de sep- l'avait écrite sous lui, et qu'il avait eu ordre
tembre; mais ilordonne que, tout ce mois et de la répandre dans les provinces. Elle est
celui d'octobre, les religieuses jeûneront le divisée en vingt-six articles, dont voici le
lundi, le mercredi et le vendredi; et, depuis précis On ne recevait personne dans le mo-
:

le premier de novembre jusqu'à Noël, tous les nastère, qu'il n'eût dessein d'y persévérer
jours, hors les fêtes et le samedi. Il prescrit jusqu'à la on ne lui donnait pas l'ha-
mort, et

sept jours de jeûne avant l'Epiphanie, et de- bit monastique n'eût disposé par écrit
qu'il
puis ce jour jusqu'au Carême, le lundi, le mer- de tous ses biens, soit en faveur de ses pa-
credi et le vendredi. Au
jour de Noël et de rents ou du monastère, afin quil n'eût plus
l'Epiphanie, les veilles se continuaient depuis rien en propre. Si ses parents vivaient en-
la troisième heure de la nuit jusqu'au jour; core, on attendait leur mort pour l'obliger à
voilà ce que contient le quinzième article. disposer des biens qu'il avait. D les donnait
Le seizième marque ce qui regarde les repas alors à l'abbé, ne s'en réservant rien il lui ;

et la quantité de mets que l'on devait ser- donnait aussi tout ce que ses parents lui en-
vir à la conununauté. Dans tous les jours de voyaient. Si toutefois il en avait besoin, l'abbé

' Ex noslro pcrmissu in hnc parte cam reve- siudete. C.Tsar. iu Rerapit., nuin. 13.
renlia et gravitate re!<istile,el hwc fieri nuUa ra- » Marlen.. Tom. I Anecd., pag. 4. et Fortunal.,
lione jiermiltalis : .ixt secundum gacram sanclis- lit). VIII, pnp. IV.
simi Papa: urbis Roinœ vos munire in omnibus
[vi° siÈaE.] CnAPITHE IX. — SAINT CIÏSAIHE, ÉVOQUE D'ARLES. 131

lui en laissail l'iisncrc; s'il n'en avait pas be- fois l'assemblée jinur
la prière, ot que, dans

soin, on en liisposait pourl'ulililiWIe la com- do chacime, un d(!la communau-


l'iiilcrvalle

ininianté. Tonti'lait foninnin dans le mon.is- té fasse uiU! leclure en présence de tous. 11
lèrc. Les moines n'iivaient ni chamlno parti- manpie dans la distribution de l'Otlice les ré-
culière, ni armoire, ni rien qui fermât. Tons pons et les anlionncs qu'on devait réciter,
(Icmenraient ensemble ilansnne cliambrc. Il suivant l'ordre du Psautier, les chapitaux et
leur ('lait (U'icnilu de jurer, ni ilo maiuliro per- les psaumes ; il met douze psaum(!s [)Our les
sonne : si (juelqu'iin était trouvé a mentir, on samedis et les diuianclu^s, et les fêtes;, trois
lui imposait une pc'nitencc réç;nlière. 11 n'é- antiennes et trois leçons une des prophè- :

taitpas A leur ponvoirdc se cbnisir un travail tes, une de l'Apôtre et une de l'iîlvangile. Il
particulier, mais ils devaient taire celui qui ordonne six messes ou collectes, c'est-à-dire
était ordonné par le snpé'rienr. Il leur était dos prières communes pour chaque dimanche
défendu de parler pendant la psalmodie, de de l'année. Depuis Pâques jusqu'au mois do
môme que pendant le repas; et alin de don- septembre, les religieux jeûnaient le mercre-
ner de la nourriture ;\ l'âme pendant qne le di et le vendredi seulement mais depuis le ;

corps prenait sa n'fection, c'était l'usage de mois de septembre jusqu'à Noël ils jeûnaient
lire pendant que les antres mangeaient. L'en- tous les jours. Ils jeûnaient aussi les deux
trée dn monastère était absolument défen- semaines qui précédaient le Carême, excep-
due aux femmes. On appelait les frères aux té le jour du dimanche, jour auquel il n'est
divers exercices par le son de quelque ins- pas permis déjeuner à cause de la résurrec-
trument. Ceux qui venaient lard étaient pu- tion du Seigneur. Le jour du dimanche était
nis de leur paresse en recevant sur la main
, aussi excepté des jeûnes du Carême. Depuis
jilusieurs coups de férule. Il n'était pas per- lejourde iVoël jus(jiraux deux semaines qui
mis de répondre lorsque l'abbé, ou le prévôt, précédaient le Carême, les religieux jeû-
ou quelqu'un des anciens, faisait la correc- naient les lundis, les mercredis et les vendre-
tion. S'il arrivait que deux moines, irrités l'un dis les jours déjeunes, on donnait trois por-
:

contre l'autre, usassent de paroles dures, ou tions et deux seulement aux joiu's que l'on ne
qu'ils eussent ensemble quebiue dispute, ils jeûnait pas. Il était défendu d'avoir auprès
devaient se demander pardon mutuellement de soi de quoi boire et manger hors la cham-
avant le coucher du soleil, dans la persua- bre commune pour la réfection. Celui qui se
sion que la prière de celui qui est en colère excommunié pour quelque faute était
trouvait
n'est pas reçue de Dieu, et qu'il ne lui est pas renfeimé dans une chambre où avec un , ,

permis de s'approcher de la sainte commu- ancien, il s'appliquait à la lecture jusqu'à ce


nion. En tout temps les moines s'occupaient qu'ileût obtenu le pardon. La volaille et la
à la lecture jusqu'à l'heure de tierce, ensuite grosse viande étaient défendues à ceux qui
ils travaillaient des mains, suivant l'ordre de se portaient bien; mais on donnait aux infir-
l'abbé. On ne devait rien faire à son insu, ni mes tout ce qui leur était nécessaire. A la fin
recevoir, ni écrire des lettres sans sa permis- de cette Règle, saint Césaire exhorte en peu
de pourvoir à la nourriture
sion. C'était à lui de mots ses religieux de rendre do continuel-
et au vêtement de ses religieux, étant juste les actions de grâces à Dieu, de les avoir
que ceux qui ne devaient rien avoir en pro- retirés du monde pour les appeler au port
pre reçussent de leur abbé les choses néces- du repos et de la religion de penser sans ;

saires. On devait avoir un grand soin des in- cesse à l'état qu'ils avaient quitté et à celui
firmes, afin de leur procurer un prompt réta- qu'ils avaient embrassé; et de se tranquilliser
blissement. tellement sur leur passé, qu'ils ne s'occupas-
7. Saint Césaire exhorte les religieux à sent que de leur avenir, en se persuadant que
nr l'0:fice
s'acquitter avec joie et bonne volonté, des les péchés, que nous avons commis, renais-
exercices de la vie monastique, et à mettre sent pour ainsi dire aussitôt,si nous n'avons

leur émulation à se surpasser les uns les soin tous les jours d'en faire tarir la source
autres en humilité, en charité, en patience, par nos bonnes œuvres.
en douceur, en zèle pour l'Oifice de Dieu et 8. On a mis à la fin de la Règle de saint Dlscf.ups
aux relîgicu-
dans la pratique des autres vertus. Il règle Césaire aux religieuses,
^
une exhortation à !«<-cod.°R
pari. 3, J.,

ensuite l'olfice divin, voulant que dans les peu près semblable, mais beaucoup plus lon-
veilles, depuis le mois d'octobre jusqu'à Pâ- gue. Le commencement est entièrement dans
ques, ils disent deux nocturnes et fassent trois les mêmes termes. Ce qu'il ajoute est pour
4S2 HISTOIRE GENERALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
les engager à vivre dans la sobri(5t(?, à n'ai- longe la psalmodie plus qu'à l'ordinaire dans
mer le luxe, ni dans les vêtemeuts. ni dans l'assemblée, se trouver la première à l'égli-
les repas mais aussi à ne point alFecter de
; se et n'en sortir que la dernière ; être la pre-
s'iiabiller tnip pauvrement, ni ù pousser trop mière au travail et ne le quitter que la der-
loin leur abstinence; à s'appliquer à la lec- nière; user des mêmes aliments et de la mê-
ture des livres saints pour tirer de ces sour- me table que la communauté, sans en affecter
ces divines l'eau du salut ; à se rt^jouir plu- de particuliers, ni de mieux apprêtés; de
tôt de l'état humble de de la la religion fpic n'affecler point non plus de la singularité
noblesse do leur extraction, si edcctivement dans ses babils, et de ne cluM-cber à surpasser
elles étaient d'une naissance distinguée dans les autres que dans la vertu. Saint Césaire
le monde ; à joindre ;\ la lecture et à la priè- recommande surtout à Oratorie de garder
re le travail des mains, sachant que saint l'égalité, soit dans la distribution des tra-
Paul a dit, ne doit point manger
que celui-là vaux, soit dans les marques d'amitié et de
qui ne veut point travailler; à bannir de charité, et de n'aimer pas plus celles dont
leur chambre tous les ornements superflus, les façons ou le visage ont plus de grice,
et h s'appliquer tellement à conserver lem* mais seulement dont la vie est plus
celles-là
corps pur, qu'elles évitent toutes les occa- vertueuse de mêler de la gravité et de la
;

sions de souiller leur ûme par le péché. Il douceur daus ses discours de ne parler ;

est remarqué • dans la vie de saint Césaire, qu'autant que la circonstance du temps et
qpi'il y avait des religieuses de son monas- des affaires le demande de donner avec ;

tère qui s'occupaient à écrire en belles-let- gaieté à celles qui représentent leurs besoins,
tres les livres saints. et d'adoucir par des paroles de politesse et
de bonté ses refus, lorsqu'elle ne croira pas
§ V. devoir leur accorder ce qu'elles auraient de-
Des Lettres de saint Césaire. mandé; de prendre avec elle deux ou trois
des sœurs les plus parfaites, lorsqu'elle se
Lettre l O-
ntnrio. Co<l.
1. Nous mettons au nombre des lettres trouvera obligée de traiter dans le particu-
Hri.
II.),-.

|3g. 31.
1,
l'instruction que saint Césaire envoya à Ora- lier des affaires du monastère; enfin, d'agir
torio, abbesse du monastère d'Arlue, bâli en tout pour Dieu, de s'en entretenir et de
sur la côte de la mer, par Nazaire, abbé de penser souvent à lui.
Lérins. Elle est en effet en forme de lettre, et 2. On croit que c'est encore à Oratorie
LrltreAnpfl
lltiço. II.WI

porte ce titre dans le Code des règles de saint que s'adresse luie autre instruction, qui com- 1-art. .1, l'«t-
T.. 01 IDIH

Benoît d'Anianc. Le saint évèque y traite .\XVI1


mence par ces paroles de l'Épitre aux Ro- l'ai, pig
Bil'l
3o"
des qualités que doivent avoir les religieuses mains profondeur des trésors de la sagesse
:

qui sont chargées de la conduite des âmes. et de la seience de Dieu! Mais ce sentiment ne
Elles doivent prendre soin du temporel des paraît point soutenable, puisque cette ins-
monastères, mais s'occuper beaucoup plus truction est mot pour mot la même que celle
du spirituel ne doiuier aux atlaires exté-
; dont nous venons de parler, si l'on en excep-
rieures que le temps nécessaire, et passer te une trentaine de lignes qui en font le com-
aussitôt à la prière ou à la lecture; se ren- mencement et quelques autres qui se trou-
dre le modèle de toutes sortes de bonnes vent vers le milieu. 11 est donc plus vraisem-
œuvres, afin d'engager celles qui leur sont blable de dire qu'elle s'adresse à quclqu'au-
soumises à les pratiquer d'avoir soin, lors- ; tre vierge consacrée à Dieu, et que saint Cé-
qu'il est besoin de donner de vive voix aux saire se servit pour l'instruire, des mêmes
sœurs queltjues instructions, de ne leur pres- paroles qu'il avait employées daus sa lettre
crire que ce dont on leur donne l'exemple. à Oratorie. 11 fait paraître au commencement
Ilveut aussi qu'une supérieure, avant d'im- de celle instruction une grande humilité, et
poser quelques morlilicalions à sa commu- n'omet rien pour diminuer l'idée avanta-
nauté, éprouve par ellc-mèrae si l'austéiilé geuse que sa r(''putalion avait fait concevoir
en est supportable par cxcuipie, s'il est de
: de lui a cette vierge. Il y avait peu de temps
la piudence de leur prescrire des jeûnes ou qu'il était élevé à l'épiscopat lorsqu'il lui
des abstinences au delà de la /iègle cl de la écrivit.
coutume. Elle doit aussi, lorsque l'on al- 3. Il nous reste deux lettres de saint Cé- Lrlt Ml t
C» jtlf. nu.
saire à Césarie sa sœur, abbesse du monas- C] al ei.
' C.-csar. VU. lib. r.nuro. 33. tère qu'il avait fondé à .\rlcs, et à toutes les
[vr" SlfXLE.] CHAPITRE IX. — SAINT CfeAlItK, lîVftQOE D'Ani.KS. ir,.\

religieuses do sa coinnniiiauti^. Ci'sarie s'oc- l'exactitude avec laquelle il avait représen-


Ciii)alt assidûment de la leeluro des livres té aux lilles do son monastère les devoirs
saints, et do la méditation des vërit(5s qu'ils de leur l'tat.

roiil'ciniPiit. Connue elle élait donc parla il e- •4. A la suite de la sixième lettre du pape
dlreourit do
nient inslrnih^ de ses devoirs, ce ne l'ut qu'a- Jean II, à saint Césaire, on trouve un dis- MiDt C'Miret
Ton. IV Con-
vec peine que le saint évoque lui écrivit sur cours très-pathétique pour l'exécution des oll. pag. tTtSt

ce sujet, et dans la vue seule de la conduire anciens canons sur la pénitence. Quoiqu'il
à uni! plus grande perfection. La première ne porte point le nom de saint Césaire, il
chose qu'il lui recommande et à ses reli- n'est presque pas douteux qu'il ne soit do
gieuses, est de savoir quelle est la volonté lui. On y reconnaît son génie, son style, son

de Dieu, de s'informer exactement de ce


et zèlepour la discipline ecclésiastique. Le saint
qui peut ou lui déplaire ensuite
lui plaire ; y combat particulièrement ceux qui voulaient
(le combattre foitemenl contre le vice de que les clercs lUîposés pour les mêmes fautes
l'orgueil, afin qu'ayant déraciné cette tète qui avaient occasionné la déposition de Con-
de tous les péchés, les autres soient plus fa- tuméliosus, pussent être rétablis dans leur
ciles .'i détruire. Il lui recommande aussi ministère. Saint Césaire traite cette indtd-
cette humilité sincère que Jésus-Christ nous gencc d'une fausse piété et d'une fausse mi-
a enseignée de ne se laisser jamais em-
;
séricorde, parce qu'il n'est pas permis de
porter à la colère ou d'en réprimer les pardonner à un coupable dont l'exemple ,

premiers mouvements aussitôt qu'ils com- peut entraîner un grand nombre dans le dé-
mencent A se faire sentir; de bannir entiè- sordre. Il s'autorise en cela des canons de
rement l'envie de savoir se taire et parier
;
Nicée, des Églises d'Afrique et des Gaules,
propos, parce qu'il est des temps et des cir-
î"! des écrits de saint Cyprien et de saint Chry-
constances où il n'est point permis à une su- sostôme, et d'une lettre de Fauste de Riez,
périeure de se taire ; d'éviter toute familia- sur le célibat des clercs, qui n'est pas venue
rité avec des personnes d'un sexe diil'érent, jusqu'à nous.
et même de ne s'en souvenir que dans une 5. Nous avons parlé dans l'article du pape
5<iiut
Hti]iiPtc?do
Cd^airo
prière très-pure de ne point les regarder eu
;
Symmaque de la requête que saint Césaire fM [lape Swn-
nia']ue. Toiii.
face, à moins que ce ne soit des prêtres et des lui présenta pour demander la condamnation IV. Concil.,
pnf 1J57.
lévites d'une vertu éprouvée, et en qui l'a- de plusieurs abus qui avaient cours dans les
mour de la charité habite; de ne pas pren- Gaules, où l'on ne faisait guères de ditlicultés
dre plaisir dans la douceur de la voix d'un d'aliéner les biens de l'Église et même de s'en
lecteur, de peur qu'il n'en rejaillisse quel- emparer et où l'on admettait souvent dans
;

que impression fâcheuse sur les autres sens le clergé, des laïques, sans les avoir éprou-
du corps. La seconde lettre, excepté le com- vés en la manière prescrite par les canons.
mencement et la fin, est la même que l'ex- Le Pape répondit à sa recpiête par une dé-
hortation générale aux religieuses, impri- crétale datée du 6 novemlire, sous le consu-
mée dans le Code des^ règles, h la suite de lat de Probus, c'est-à-dire l'an 513. Saint Cé- IMd. l^aç.
1303 11 1310.
la Règle que saint Césaire a écrite pour des saire, étant à Rome la même année, obtint
fdles. Quelques-unes disaient qu'elles n'a- par une seconde requête présentée au mê-
vaient point d'éloignement pour les hom- me pape, la conservation des privilèges de
mes, parce qu'elles voulaient avoir de quoi l'Église d'Arles, conformément aux règle-
vaincre. Saint Césaire leur dit que l'on doit ments faits par saint Léon, comme on le voit
résister de toutes ses forces contre les autres par la lettre du pape Symmaque aux évê-
vices, mais qu'à l'égard de l'impureté le , ques des Gaules, en date du 13 novembre
moyen le plus sûr est d'en fuir l'occasion. 513. Par une autre lettre du 11 juin 514 , le
Cette lettre a été imprimée dans le huitième même pape ordonna, à la requête de l'abbé
tome de la BiOliot/ièque des Pères, sous le ti- Egidius, et de Messien notaire de saint Cé-
,

tre de Lettre à certains Germains d'où elle , saire, que ce saint évêquc veillerait sur tou-
est passée dans le vingt-septième volume de tes les affaires ecclésiastiques desGaules et
la même bibliothèque, mais sans ce titre, et d'Espagne ,
qu'il en assemblerait
les évê-
avec la même clause qu'elle a dans le Code ques, lorsqu'il en serait besoin, et qu'ils ne
des règles. Saint Césaire y dit que cetle lettre, pourraient venir à Home sans sa permission.
lorsqu'il paraîtra devant le tribunal de Jé- Il ordonna aussi que l'évêque d'Aix serait
sus-Christ, lui servira de témoignage de tenu de venir aux mandements de saint Cé-
,

151 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


saire, soit pour les conciles, soit pour les au- voix, aient lieu.Il témoigne un grand désir

tres afTaires ecclésiastiques. que maison du sous-diacre Auguste serve à


la

LeiireiBo. Quclqucs aunées auparavant, c'est-à-


6. loger le proviseur du monastère, et que ces
i.«".'c;.°".'i, dire vers l'an 306, on tint à .\gde un concile filles n'aient à l'avenir d'autre proviseur, et
""^ '
de plusieurs évêques. Ruricius, évéque de qu'il n'y ait pointde prêtres pour la Basili-
Limoges fut invité à s'y rendre mais soit ;
que de Sainte-.Marie, que du choix de l'ar-
que la lettre d'invitation ne lui eut pas été chevêque d'.\rles, qu'il conjure par la sainte
rendue, soit qu'il eût d'autres raisons de ne et inséparable Trinité d'empêcher que ledit
point se trouver à cette assemblée, il n'y monastère ne soit inquiété dans la jouissance
vint point. Saint Césairc, qui avait présidé à de ses biens, de ses immunités et de ses pri-
ce concile, eut quelque peine de n'y point vilèges. Il entre dans le détail de certaines
voir l'évêque Ruricius, dont il respectait terres, vignes et redevances qu'il lui avait

et la vertu et le mérite. Il paraît que Ruri- données, voulant que si, par le malheur des
cius lui en écrivit une lettre d'excuse. Mais temps, ce monastère venait à être détruit
saint Césaire ne reçut point cette lellre, dont tous ces biens et autres qu'il spécifie, revien-
il voulut bien rejeter la faute sur la négli- nent à la mère , de qui
Église il paraît qu'il

gence du porteur. C'est ce qu'il témoigne les avait tirés avec consentement des frè-
le

dans celle qu'il écrivit à cet évêque, en lui res, c'est-à-dire du clergé, pour en faire do-
donnant avis que l'on avait projeté de tenir nation à son monastère. Il fait aussi quel-
un autre concile à Toulouse l'année suivante. ques petits legs à l'abbesse Césarie, et à
Il chargea de sa leitre le prêtre Capillutus quelques autres personnes, recommandant
qu'il recommande à Ruricius, en disant qu'il tous ses domestiques à l'évêque son succes-
espérait recevoir de lui la réponse au retour seur.
de ce prêtre. 8. On ne peut guères douter que le nom- ftcrll
ninr O! '•Ira
7 u faut mettre parmi bre des sermons et des lettres de saint Cé- qui wnt
T.si.mfr.1
A
les écrits de saint dus.
Al* -ami C'.
l'iro. coj.
Césaire son Testament adressé aux r prêtres saire n'ait été beaucoup plus grand que ce
"s. t»rt. T,
l'f. 53 et aux diacres de TEglise d'Arles, et à l'ab- qui nous en reste. Les lettres de plusieurs
besse Gésarie, qu'il avait lui-même faite su- papes qui lui sont adressées, supposent clai-
périeure du monastère des filles établies à rement des réponses de sa part, ou qu'il leur
Arles, n le commence en souhaitant la pais à avait écrit. L faut dire la même chose des
cette Église. Après quoi il déclare qu'il veut, lettres de saint Ruricius de Limoges, d'En-

qu'après sa mort, le monastère de Saiut-Jean, node de Pavie, et de saint Avit de Vienne,


le môme que celui des filles qu'il avait fon- adi'essées à ce saint évêque. Nous n'avons
dé, et dont Césarie était supérieure, demeure ni celles qu'il leur avait écrites, ni les répon-
sous la puissance de l'évêque d'Arles, et soit ses qu'il devait leur avoir faites. Il n'en reste
l'héritier de tous ses biens. Et dans la crainte qu'uue adressée au premier. Nous avons aus-
que quelques-uns de ses parents ne vins- si perdu la lettre que saint Césaire écrivit au

sent à inquiéter ce monastère ou l'évêque pape Félix IV, en lui envoyant le résultat du
son successeur, il veut que n'ayant possédé, second concile d'Orange, tenu en 529. Par
étant évéque, aucuns biens de sa famille, ils cette lettre, il demandait au Pape la confir-
se contentent de ce qu'il leur avait donné mation des décrets de ce concile. Félix étant
pour les reconnaître. Il prie son successeur, mort pendant qu'Arménius, porteur de la
à cpji il donne le nom d'archevêque, de vou- lettre de saint Césaire, était en chemin pour

loir bien recevoir de lui les habits dont il se Rome, Boniface U, à qui elle fut rendue, fit
revêtait aux fêtes dont on lui
de Pâques , et ce que saint Césaire souhaitait à l'égard du
avait fait présent. Il lui lègue aussi quelques second concile d'Orange par une lettre da-
autres vêtements, lui laissant la liberté de tée du 23 janvier 530. Quelques-uns ont at-
distribuer les autres, tant à ses clercs, qu'aux tribué à saint Césaire un ouvrage sur la grAce
laïques, peut-être à ceux qui l'avaient servi. et le libre arbitre. Il en est parlé dans l'article
Il ordonne que les autres donations qu'il pou- de ce saint' ajouté au Catalogue de Gennade.
vait avoir faites, soit par letli'e ou de vive Mais l'auteur de cet article ne dit pas que

' De gratia quoque et libcro arbilrio edidil tes- lia preveniril. Quod opus eliam papa Félix per
liinonia diviiiarum ScriiHuranim cl snndorum suam epislolam roboravit, et in lalius promnl-
Pdirum judiriis munila, ubi doccl hoiniiiem uihil gavit. Ucuniul. iii Cal:il.,cap. lxxxvi.
de proprio agere buiii passe, nisi eum divina gra~
[vi'sii:r.i.E.] CHAPITRE IX. SAINT CÉSAinn, ÉVÊQUE D'AULES. 153

saint Ciisairo ait coaiposc un dcrit exprès sur exorde et une pérfu-aison pour en faire un
mais seulement qu'il avait discours. Mais il parait qu'il n'usait de celte
cette matière :

recueillides tt$moi;inag;cs derKcriturc, forti- liberté que quand il n'avait pas assez de loi-
fiés par rautorité des l'ères, pour montrer sir ou assez de santii pour en composer de
que riiomme ne peut de lui-même faire au- lui-même.
cuu bien, s'il n'est prévenu de la grice de 2. Les Homélies de saint Césaire, après

Dieu. Ce qu'ajoute cet écrivain que le Pape avoir été souvent confondues parmi celles de cé'"i

coiilirma par de nouveaux passages, l'ou- saint Ambroise et de saint Augustin, ont été

vrage de saint Césaire, fait voir ce semble, ,


recueillies dans V Apjicndirc Au cinqaihmc vo-

qu'il faut enleudre par cet ouvrage, les dé- lume des amvres de ce Père à Paris, en 1683,
crets du coucile d'Orange que saint Césaire et dans l'édition d'Anvers ou d'Amsterdam,

avait envoyés à Home pour y ètrecontirmés, en 1700. Pour les distinguer aisément d'un
et non pas un écrit particulier de ce saint grand nombre d'autres homélies dont les
évéque ; si ce n'est qu'étant très-instruit sur auteurs sont incertaius, l'on a mis le nom
cette matière, et fort versé dans la lecture de saint Césaire à la marge de chacune des
des écrivains sacrés et ecclésiastiques, il ait homélies qui sont de lui, et en tête les rai-
lui seul fourni la matière de ces décrets. Il sons de les lui attribuer. Ce recueil contient
est vrai qu'on n'y cite que des passages de cent deux homélies de saint Césaire, parmi
l'Écriture ; mais il est certain aussi qu'ils lesquelles se trouvent les quatorze que M. Ba-

sont composés des propres termes des Pères luze fit imprimer à Paris en 1GG9 la plupart ;

de l'Église, nommément de saint Augustin; de celles que nous avons dans le huitième et
ainsi que Binius '
l'a remarqué dans ses No- le vingt-septième tomes de [aBibliothh/uedes
tes sur ce concile. Pères à Lyon, en 1677 et quelques-unes du
;

premier tome de la Chronologie des saints et


§ VI. Ao7nrnesi7/;«/?'es de l'abbaye de Lérins, par Bar-
rali à Lyon, en 1613. Les autres données par
Jugement des écrits de saint Césaire : éditions
Barrali sont des discours faits à des moines ; et
qu'on en a faites,
y en a beaucoup de ce genre dans les huitiè-
il

Tout plaît dans les écrits de saint Cé-


1. me et vingt-septième tomes de la Bibliothèque
saire.Le style en est uni, net et simple les ;
des Pères. A l'égard des discours ou lettres à
pensées nobles, mais d'un tour aisé les rai- ;
des religieuses, on les a insérés dans le Code
sonnements solides et concluants; les exem- des règles, imprimé d'abord à Rome, en 1661,
ples persuasifs, et toujours à la portée de puis à Paris, en 1663, et ensuite à Lyon, en
ceux pour qui il écrivait. Il n'affecte ni ter- 1677, dans le huitième tome de la Biblio-
mes extraordinaires , ni figures trop recher- thèque des Pères, avec les Règles de saint Cé-
chées. Son éloquence est toute naturelle. saire tant pour des religieuses que pour
, ,

Quand combat les vices et qu'il exhorte à


il des moines. La Règle pour les religieuses se
la vertu il se contente de montrer d'une
, trouve aussi dans les Annales du Père le
manière très-simple, mais pathétique, la lai- Cointe, sur l'année 336, avec des notes. Elle
deur du péché, et de faire l'éloge de la vertu; fut donnée pour la première fois au public
de donner de l'horreur de l'un par les suites par Etienne Moquot à Poitiers, en 1621, avec
fâcheuses qui sont inévitables , et d'inspirer quelques éclaircissements de François Mei-
de l'amour pour l'autre par la vue des biens nard sur certains termes de cette Règle qui
qu'elle procure. Il s'appuie partout de l'au- sont très-obscurs. Stellortius la fit réimpri-
torité de l'Ecriture qu'il avait étudiée avec mer à Douai, en 1626, dans sou Recueil inti-
soin, et quelquefois des témoignages des Pè- tulé Fondements des ordres; et BoUandus
:

res grecs et latins, dont il avait lu les écrits. dans premier tome des Vies des saints du
le
On voit qu'il s'était particulièrement arrêté à mois de janvier. Pour ce qui est du Testament
ceux de saint Augustin dont il fait profes- , de saint Césaire, il se trouve dans le Code des
sion d'êU-e disciple. Non-seulement il en suit règles, dans V Histoire des archevêques d' Arles,
la doctrine il en emprunte aussi les pen-
, par Saxi dans les Annales ecclésiastiques de
,

sées et les termes, et quelquefois des endroits Baronius, sur l'an 308, et dans celles de Fran-
entiers , auxquels il ne fait que joindre un ce par le Père le Cointe, sur l'an 342. Les
Actes ou décrets du second concile d'Orange,
' Tom. lY Concil, png. 1675. auxquels on peut dire que saint Césaire eut
156 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
le plus de part, ont été Iradiiifs en fiançais sermons, les homélies les opuscules et les ,

et imprimés eu cette langue, cliez Piquet, à épîtres de saint Césaire; on doit cependant
Paris, en IGio, par les soins d'Audré Dabil- remarquer qu'on renvoie les sermons au
lon. tom. V de saint Augustin dans VAppendire.
[Le tome XI de Galland contient les 14 ho- Ses sermons ont été traduits en français par
mélies publiées par Baluze , les Règles et l'abbé Dujal de Villeueuve Paris 1760 2 , , ,

quelques autres ouvrages. On trouve dans vol. in-12,]

la l'atroloyie latine, tom. LXVII, col. 997, les

CHAPITRE X.

Saint Benoît, patriarche des moines d'Occident.


[543.)

Nal*MDto 1. Saint Benoit', notre législateiu-, naquit nes gens qui venaient à Home pour y faire
de e^lQt Bo-
u'M, vprï l'an vers l'an 480, dans le territoire de Norsie, au- leurs études d'y demeurer au delà de leur
,
im. Son édu.
canon. Annal. trefois ville épiscopale de la province de Va- vingtième année.
Bcncd.|jag. 3.
lérie, maintenant de l'Ombrie, dans le duché 2. Il demeura trois ans dans la caverne Il d^iiiftnr

de Spolète. Saint Grégoire ne dit point * de de Sublac sans que personne en sût rien
, ,
b'iir. Ai
BMiPd. Ml
quels parents il était né il marcpie seule- ; excepté un moine romain qui l'ayant ren- M. Ion. tom.
lat:. 3. cl An
ment qu'il était de condition libre, ce que contré auprès de cette solitude et ayant ap- ord.
DC-i.
S,
Idlll.
B(
1

le Martyrologe de Florus entend d'une fa- pris son dessein, lui promit le secret, le re- r»r. KU, fel I

mille noble. Pierre diacre ' est le premier qui vêtit de l'habit monastique et lui donna tous
nous apprenne, que son père se nommait les secours qui dépendaient de lui. Romain
Eutrope, sa mère Abondantia, et son aïeul demeurait dans un monastère voisin sous
Jiistinien d'où quelques-uns ont inféré que
; un abbé nommé Théodat mais il se déro- :

saint Benoit dcsccuiilait de l'empereur Justi- bait quelquefois et portait à certains jours
nien opinion insoutenable, puisque ce prin-
: ce qu'il se retranchait de sa portion à saint
ce était Tluace de naissance, de basse condi- Benoit. Comme il n'y avait point de chemin
tion, et qu'il ne vint au monde qu'après saint pour arriver h sa caverne du côté du mo-
Benoît. Aussitôt qu'il fut en âge d'apprendre nastère de Théodat Romain attachait le
,

les belles-lettres, on l'envoya à Rome; mais pain i\ une longue corde avec une clochette
voyant la^ corruption de ceux cpii les étu- pour avertir Benoît de le prendre. Vivant
diaient avec lui, il se retira secrètement de ainsi dans sa grotte sans aucun commerce
cette ville, et s'étant dérobé h la poursuite de avec les hommes il ne savait pas même
,

Cyrilla, sa nourrice, qui l'avait suivi, il vint à quel jour il était. Il arriva que la fête do
un lieu nommé
Sublac, à quarante milles de Pâques de l'an 497, un prêtre d'un lieu assez
Rome ,s'enferma dans une caverne
où il éloigné, ayant préparé à manger pour lui-
fort étroite. On rapporte sa retraite A la pre- même, Dieu lui fit connaître par révélation,
mière année du règne de Théodoric, roi des le lieu où était son serviteur qui mourait

Goths en Italie , c'est-à-dire à l'an 494 qui ,


de faim il le trouva à grande peine mais le
; ;

était la quatorzième ou la quinzième de saint saint solitaire, étonné de l'arrivée de cet hôte,
Benoit, .\ussi saint Grégoire dit qu'il était en- ne voulut point lui parler qu'après avoir
core enfant, et l'abbé Bertarius', qu'il avait à fait ensemble la prière. Leurs discours rou-

peine atteint l'âge de puberté. Ce([ui est vrai lèrent sur les choses de Dieu et du salut. Le
est que suivant l'édit de l'empereur Valenti- prêtre, après en avoir parlé quelque temps,
nien le Vieux, il n'étaitpas permis aux jeu- invita Benoît manger, lui disant que c'était
;\

' On peut voir la heUr vAui\c do M. de Mouta- * «"îreg., lib. Il Vialog.^ enp. i,

lenihnrt sur fii}\nt nnioit, nu Imiio fl, livre Kf des 3 Petr., lil». De VirisiUnHr., cap. i.

Moines d'Occident. {L'éditeur.) ^ bertar., iu liymuo de Sancto Bencdiclo.


,

[vi' siÈaE.] CIIAPITHR X. — SAINT BENOIT, PATRlAltCIIE. irn


lo jour do Pilques auquel il no lui clait pas qu'il était ^ table, on lui présenta à bénir le

permis de jeûner. Ils nianj^èrenl ensemble de premier verre qui était pour lui, tous sui-
ce que le prêtre avait apportii et, leur repas
;
vant la coutume du monastère, tenant en
fini, le prètro retourna ;\ son éjj;lise. Vers le main leurs verres pour être bénits en même
mémo temps, des pâtres trouvèrent lienoît temps. Benoit étendit la main et fit le si^^no
caché dans sa caverne, et le voyant couvert de la croix aussitôt le verre, dans lequel
:

d'une peau de brebis dans des broussailles, ils était le breuvage de mort, se cassa comme
le prirent pour une bètc mais lors(ju'ils con-
; s'il y eût jeté une pierre. L'homme de Dieu

nurent que c'était un serviteur de Dieu ils , comprit aussitôt ce que c'était et se levant ;

le respectèrent. II y en eut même plusieurs de table, il dit aux moines, d'un visage tran-
qui, gagnés par ses discours, quittèrent leurs quille ((Que le Dieu tout-puissant vous par-
:

mceurs brutales, et embrassèrent la religion donne mes frères pourquoi m'avez-vous


, ;

chrétienne. Depuis ce temps-hï il comracnra voulu traiter de la sorte ? ne vous avais-je


à être connu des peuples du voisinage. Plu- pas prédit que vos mœurs et les miennes no
sieurs le venaient voir et lui apportaient de pourraient s'accorder? allez chercher un su-
la nourriture; pour les remercier, il nourris- périeur qui vous convienne; vous ne m'au-
sait leurs âmes de diverses instructions salu- rez plus à l'avenir. » Leur ayant ainsi parlé,
taires. Le démon en fut envieux. Un jour, il retourna dans sa solitude, persuadé qu'en

Benoît étant seul, le souvenir d'une femme restant plus longtemps avec des religieux
qu'il avait vue, excita en lui une tentation si indociles, non-seulement il ne pourrait les
violente qu'il fut près de quitter sa solitu-
,
faire changer de conduite mais qu'il serait ,

de. Mais Dieu secourut son serviteur. Benoît, lui-même en risque de déchoir de sa fer-
revenu à lui-même et rougissant de sa fai- vem".
blesse , se jeta pour éteindre les feux de la
,
De retour à Su-
4. C'était vers l'an 510.
a
II
^
Tcla irno
'rlii udo.
Ulit d lUIO
tentation, dans un tas d'orties et d'épines blac, il avec lui-même sous les
s'y entretint il
monnslè res
>

'

vers Ihh ,20.


qu'il aperçut auprès de lui, s'y roula long- yeux de celui qui pénètre les secrets du Tom TAti n»l«
1

1

temps à nu de sorte qu'il en sortit tout en
,
cœur les plus cachés, presque toujours occu- P«?. '

sang. Le fruit qu'il retira de cette victoire, pé de la prière, de de la médi-


la lecture et
fut que depuis il n'eut plus de pareilles ten- tation des livres saints. Ses vertus et ses mi-
tations à combattre. racles lui attirèrent tant de disciples qu'il bâ-
3. Son nom étant devenu fort célèbre tit douze monastères, en chacun desquels il

plusieurs quittèrent le monde et se rangè- mit douze moines sous la conduite d'un ab-
rent sous sa conduite.. A quelques distances bé soumis à sa correction. On connaît en-
de Sublac, il y avait un monastère dont l'ab- core les lieux et les noms de ces monastè-
bé étant mort, tous les sutïrages de la com- res; mais si l'on en excepte celui de Sublac
munauté se réunirent à lui donner Benoît et celui de Sainte - Scholastique autrefois ,

pour successeur. Les religieux vinrent le Saint-Côme et Saint-Damien les autres ne ,

trouver et le pressèrent avec beaucoup d'ins- sont aujourd'hui que de simples oratoires.
tance de se charger de leur conduite. Il le La réputation de saint Benoît passa d'abord
refusa longtemps, disant que leurs manières à Rome, d'oîi elle s'étendit dans les provin-
ne pourraient s'accorder avec les siennes : ces les plus éloignées. Les plus nobles de
mais fatigué par leurs importunités, il con- cette ville et les personnes de piété vinrent
sentit enfin à être leur abbé. Comme il vou- le voir dans sa solitude. Quelques-uns même
lait les corriger et les obliger de vivre con- lui donnèrent leurs enfants pour les élever,
formément à leur état ils se repentirent
, non dans la science des arts vains et inutiles,
bientôt du choix qu'ils avaient fait de lui, mais, pour les former dans la vertu et dans
le regardant comme un homme sans expé- la piété. Équitius lui donna son fils Maur, âgé
rience, peu propre à conduire les autres, dur de douze ans, et le patrice Tertullus son fils
et sans miséricorde. Ils dissimulèrent néan- Placide, encore enfant deux sujets de grande
:

moins leur colère dans les commencements; espérance. Les Actes de saint Placide rappor-
mais voyant qu'il ne relâchait rien de sa sé- tent ceci à l'an S22.
vérité, et leur paraissant insupportable de 5. Dans cette année et pendant les sui- It en Util
letix sur lo
quitter leurs anciennes habitudes , ils pri- vantes, saint Benoit opéra plusieurs merveil- Mont - Cs«;ii

rent unanimement le parti de se défaire de les que les auteurs de sa vie ont eu soin de AnaaI. FuTn',
1=6. (il.

lui en lui donnant du vin empoisonné. Lors- rapporter. Il demeurait, en ô28, dans un de
158 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
ses douze monastères, qui avait vue sur le lac le temple même d'Apollon , et un de saint

de Sublac, ou qui n'eu était pas éloigné, Jean à l'endroit où était l'autel des idoles, et
lorsque le jeune Placide y allant puiser de se mit à instruire de la vraie religion tout le
l'eau, tomba lui-même dans le lac dont l'eau peuple d'alenlour. 11 travailla après cela au
l'emporta loin de terre, environ la portée logement de ses religieux, n'ayant point d'au-
d'un trait. Saint Benoit ayant eu connaissan- tre architecte que lui-même, et point d'au-

ce de cet accident, appela Maur et lui dit de tres ouvriers que ses moines. On met la fon-

courir vite au secours de cet enfant. Maur dation de ce monastère vers l'an 529. En
ayant demandé à son abbé sa bénédiction, arrivant; sur le Mont-Cassin, il y trouva un
ainsi qu'il était dès lors de coutume, courut ermite nommé Martin, qui lui céda la place.
jusqu'à l'endroit où l'eau emportait Placide, Ce solitaire avait coutume, dans les commen-
et l'ayant pris par les cheveux que l'on ne cements de sa retraite, de s'attacher avec une
rasait point encore alors jusqu'à la peau, il chaîne de fer afin qu'il ne pût aller au delà
le retira sain et sauf des eaux. Sitôt qu'il fut de sa longueur; mais il ne prit plus cette pré-
à terre , il regarda derrière lui, et voyant caution depuis que saint Benoît lui eut don-
qu'il avait marché sur l'eau, il fut étonné né cet avis salutaire « Si vous êtes serviteur
:

d'avoir fait ce qu'il n'aurait jamais osé ten- de Dieu, que ce soit la chaîne de Jésus-Christ
ter. De retour dans le monastère, il raconta qui vous tienne attaché et non pas une chaî-
la chose à saint Benoît, qui attribua ce mi- ne de fer. »
racle, non à ses propres mérites, mais à l'o- 6. Le nombre de ses disciples augmentant
liflru.. loi,
béissance de son disciple. Maur, au contraire, de jour en jour, saint Benoit leur donna une 1 AddiL h'
neiî. [>«£.
l'attribuait au commandement de son maître, règle qui fut trouvée si sage que, dans la suite St'>

soutenant qu'il ne pouvait pas avoir part à des temps, on la reçut dans tous les monas-
une chose sans s'en aperce-
qu'il avait faite tères d'Occident ; elle admet sans distinction
voir. Placide décida la contestation en di- , les enfants, les jeunes gens et les adultes,
sant : <c Lorsqu'on me lirait de l'eau, je voyais les pauvres et les riches, les nobles et ceux
sur ma tète la melote , c'est-à-dire le man- qui sont de basse condition, lesesclaves et les
teau de l'abbé, et lui-même qui me tirait. » libres, les doctes et les ignorants, les laïques

La melote était une peau de mouton que les et les clercs. Les parents rendaient moines
moines portaient sur leurs épaules. Placide leurs enfants en les otl'rant au monastère;
avait alors environ quinze ans d'où vient : mais les adultes s'engageaient dans l'état
que saint Grégoire, en parlant de cet événe- monastique par une profession volontaire.
ment miraculeux, l'appelle enfant. Quelque Ceux - là pèchent donc contre la Règle de
temps après, saint Benoit, cédant à l'envie saint Benoît, qui ne reçoivent dans leurs mo-
d'un prêtre d'une église voisine, nommé Flo- nastères que des nobles àTexclusion de ceux
rentins, qui s'imaginait que la grande répu- qui sont d'une condition ou basse ouservile.
tation du saint abbé nuisait à la sienne, lais- On voit que saint Augustin pensait de même
sa tous ses mnnastères sous la conduite des là-dcssus, et que son sentiment était que l'on
supérieurs qu'il leur avait donnés, et vint à ne pouvait, sans un grand péché, refuser'
Cassin, petite penchant d'une
ville sur le l'entrée des monastères même aux esclaves,
haute montagne dans le pays des Samnites. aux gens de la campagne et au commun du
n y avait sur le sommet de cette montagne peuple, pourvu toutefois que ceux qui étaient
un ancien temple d'Apollon, que les paysans en servitude eussent obtenu la liberté de
adoraient encore , et, tout autour, des bois leurs maîtres. La raison qu'il donne de cette
consacrés à l'idole, où ils faisaient des sacrifi- conduite est que l'on a vu souvent des per-
ces. Ce fut là que saint Benoit fixa sa demeu- sonnes de ces sortes de condition se rendre
re. 11 brisa l'idole, renversa l'autel, coupa les illustres et recommandaljlcs par leur piété et

bois , bûtit un oratoire de saint Martin dans leurs autres grandes qualités Dieu ayant
:

* leniunt plerttmque ad liane profissio-


A'uîiC eTlilcrunt. Kam propterea infirma mundi elrgit
nem Dei et ex conditione sertili ; vel
servitutis Deus ut cnnfunderet fortia, et stulta mundi cicgil
eliam liherti, vel propler hoc a dominii-- liberali ut confundtrcl sapientes ; etignol>ilia mundi et ea
site Itbcrundi, et ex vilarusticana, et plchcio la- quœ non sunt, tanquam sint, ut ea quœsunt tva-
bnre^ tanto utii/ue felicius, quanlo furtius edu- cuentur : ut non glorirtur omnis carocoram Dca.
cati: qui si non admiUaiitur, grave deliclum est. Aiiyust., De Oper. monach., cap. xxu.
MuUi enim ex eo numéro lere magni et, imitandi
[VI' siKCLE.l CHAPITRE X. — SAINT BENOIT, PATUlAltCIIE. 159

choisi les moins supcs scion le monde pour la Sicile. On


a imprimé i Messine, en 1691,
confondre les sages; les faibles pour con- l'Histoirede l'invention et de la translation
fondre les puissants; les plus vils et les plus de ses reliques et de celles de ses compa-
nu^prisahlos pour dt'lniiie ce qu'il y a de plus gnons. Elles avai(!nt été trouvées à Messine,
grand, afin que nul homme ne se glorifie de- dans l'Église de Saint-Jean-Baptiste, dès l'an
vant ajoute que les gens de la campa-
lui. Il 1G88. Nous avons les Actes de leur martyre;
gne ceux qui sont accoutumes h vivre du
et mais on convient qu'ils ont été interpolés.
travail de leurs mains sont d'autant plus pro- La mission de saint Maur en France par
pres à l'étal monastique qu'ayant été élevés saint Benoît, à la prière d'un é vèque du Mans,
durement, ils en peuvent plus aisément sup- est attestée par Amalaire et par Adrévald,
porter les austérités. La Jtt'gle de saint Benoit moines de Fleury, qui vivaient l'un et l'autre loir. I An.
Dttl Doiiad ,
ne fait point mention des frères Convers, dans le neuvième siècle; par une charte de
c'est-à-dire des religieux qui n'étaient occu- Louis -le -Pieux, où saint Maur est appelé
pés qu'aux ministères extérieurs. Ils n'ont été abbé de Glanfeuille et disciple de saint Be-
admis dans les communautés que vers le xi° noît, et où il est dit que ce saint l'avait en-
siècle. voyé en France; par saint Odon, abbé de
7.11 n'y avait pas longtemps que l'on avait Cluny né dans le neuvième siècle et mort
,

commencé à bâtir le monastère du Mont-Gas- dans le dixième; par Adalbert, évêque de


sin, lorsque le patrice Tcrtullus y vint dans Prague qui dans le même siècle fit un
,
, ,

le dessein de voir ce nouvel édifice ;mais plus voyage en France pour en voir les plus célè-
encore pour y voir son fils Placide, et Maur bres monastères et par quantité d'écrivains
;

que saint Benoit y avait amenés avec lui. des siècles suivants. L'inscription trouvée sur
Quelques historiens le fontaccompagnerdans son tombeau, en 883, porte qu'il était venu
ce voyage parplusieurs nobles romains, nom- en France sous le règne du roi Tliéodebcrt,
mément par Boëce, célèbre par ses vertus, c'est-à-dire vers l'an 342. Brouvérus, dans
son savoir et la dignité de consul qu'il avait le livre, des Antiquités de Fulde, dit que l'on
exercée avec éclat. Mais il était mort dès l'an conservait dans un monastère de Tours la Rè-
523, par l'ordre du roi Théodoric qui, sous de gle que saint Benoît avait écrite de sa propre
fausses accusations, lui avait fait souITrir de main, et qii'il avait donnée à saint Maur lors-
grands tourments, et ensuite fait trancher la qu'il l'envoya en France; et qu'à la fin de
tête. Tertullus fit une donation solennelle des cette Règle on lisait la signature de ce saint
biens qu'il avait aux environs de ce monas- législateur en ces termes Code du pécheur
:

tère, et d'un grand nombre de terres de son Benoît, qualité que les hommes de piété et
patrimoine dans la Sicile. Il paraît qu'il y même les évêques prenaient dans le sixième
avait près de Cassin un monastère de filles ,
siècle.
sm- lequel saint Benoit avait inspection et 9. Un homme de condition, nommé Théo- SlIntUrnotl
prédit Idrililiû
autorité, puisqu'ilen excommunia deux pour probe, que saint Benoît avait converti et qui du inoiiaolèio
Cns,
quelques fautes qu'elles avaient commises. avait beaucoup de part à sa confiance, étant "''''• i°E' "^

Mais on ne sait pas si ce fut là que sainte un jour entré dans sa cellule, le trouva qui
Scholastique sa sœur, se consacrai Dieu, ou
, pleurait amèrement, mais non pas dans le
dans quelque autre maison près du Mont- temps de sa prière où il avait coutume de ré-
Cassin. Saint Grégoire nous apprend seule- pandre des larmes. Il s'arrêta longtemps, et
ment qu'elle s'était vouée à Dieu dès l'en- voyant que celles qu'il versait alors venaient
fance, et qu'elle vivait dans un monastère de la tristesse, il lui en demanda la cause.
proche de celui de son frère. «Tout ce monastère que j'ai bâti, lui répon-
8. On rapporte à l'an 334 la fondation du dit le saint, et tout ce que j'ai préparé avec
monastère de Téracine, danslaCampanie. Il beaucoup de travail et de soin pour l'usage
fut bâti sur les terres d'un homme de piété des frères, a été livré aux profanes par le ju-
qui avait prié saint Benoit de lui envojer gement de Dieu. A peine ai-je pu obtenir le
quelques-uns de ses disciples. Il en envoya salut des personnes. » L'accomplissement de
d'autres en Sicile avec saint Placide d'au- ; cette prophétie se vérifia quaranteans après,
tres en Espagne et en diverses provinces. lorsque les Lombards, faisant la nuit une ir-
Saint Placide finit ses jours par le mar- ruption dans le monastère du Mont-Cassin,
tyre que lui firent soutlnr les Barbares, le ruinèrent entièrement.
qui, vers l'an 541, firent une irruption dans 10. Ce fut vers l'an 541 que saint Benoît
,

IGO HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


«oirnii.1 B». propbtilisa de la sorte. L'année suivante, il ne sera plus habitée. » Saint Benoit lui répon-
pr<''dit les calamités qui devaient agiter vio- dit Non, la ville de Rome ne seia point dé-
: (I
LT' ÉfMd'
lée, as-';, lemmeut de Home. Bélisaiie ayant
la ville peuplée par les barbares mais elle sera bat-
;

quitte ITlalie, les Gotliscn devinrent les maî- tue de tempêtes, de foudres et de tremble-
tres une seconde fois, sous la conduite de To- ments de terre; elle s'aflaiblira comme un
tila, qui était devenu leur roi, après la mort arbre qui sèche sur sa racine.» Saint Grégoi-
d'Hildibalde. Totila ayant ouï dire que saint re rend témoignage à l'accomplissement de
Benoit avait l'esprit de prophétie, voulut, en cette prophétie, disant que de son temps la

passant d;ins la Campanie, s'en convaincre ville de Rome ne présentait qu'un spectacle
par lui-même. 11 vint ;\ sou monastère, mais atl'rcux, ses murs étant dt-truits, ses maisons
il lui fit savoir auparavant qu'il allait venir. renversées, et la plupart des églises ruinées
Pour l'éprouver, il se fil précéder d'un de ses par des tempêtes et des tremblements de
écuyers nommé Higrgon, à qui il fit prendre la terre.

chaussure et les habits royaux qui étaient de 1 1 . Le môme pape nous apprend que sainte „,„,
"g"

pourpre, et le fit accompagner de trois sei- Scholastique venait une foisl'an voir son frère, ^°
,;,;-i,[;,'

gneurs, qui étaient le plus ordinairement près qui, accompagné de ses disciples, allait la re- J ?\„'';,i.'^|
*'"' "''
de sa personne, nommés Vult, Uudéric et Bli- cevoir à quelque dislance de son monastère
din, avec des écuyers et un grand cortéj^e. dans une métairie dépendante du Mont-Cas-
Higgon étant ainsi entré dans le monastère, siu, autant pour lui éviter la peine de mon-

saint Benoit qui était assis, l'ayant aperçu ter sur le sommet de la montagne, que parce
de loin, lui cria «Mon fils, quittez l'habit que
: que c'était déj;\ l'usage que les femmes n'en-
vous portez, il ne vous appartient pas. n Rig- trassent point dans les monastères d'hom-
gon se jeta par terre épouvanté d'avoir vou- mes. Après avoir passé la journée à louer
lu tromper le saint. Tous ceux de sa suite en Dieu et à s'entretenir des choses saintes
firent autant, sans qu'aucun osât approcher, ils mangèrent ensemble sur le soir dans le

après qu'ils se furent relevés. Ils retournè- même lieu où ils avaient coutume de se ren-
nèreut aussitôt trouver Totila, à qui ils racon- contrer. Gomme ils étaient encore à table et
tèrent eu tremblant de quelle manière leur qu'il se faisait tard, la sainte pria son frère

tromperie avait été découverte. Alors le roi de ne la point quitter celte nuit, afin de pou-
vint lui-même trouver le saint abbé, et dès voir parler ensemble de la joie céleste jus-
qu'il le vit, il se jeta par terre sans oser en qu'au lendemain matin. Saint Benoit le re-
approcher. Saint Benoit, qui était assis, lui fusa, ne croyant pas devoir passer la nuit

dit de se lever; et voyant qu'il n'osait, il ac- hors de son monastère. Le temps était fort
courut et le releva lui-même. Il lui reprocha serein. Sainte Scholastique, voyant qu'elle

sa cruauté ; et ce priuce lui ayant peut-être ne pouvait lléchirla volonté de son frère, fit .^
demandé ce qui devait lui arriver, le saint Dieu sa prière avec tant de larmes qu'elle
luiparla en ces termes «Vous avez jusqu'ici : obtint ce qu'elle souhaitait. Il s'éleva tout à
commis beaucoup de mal, et vous en com- coup un orage violent, mêlé d'éclairs, de ton-
mettez tous les jours; cessez enfin de faire nerre, et d'une pluie si abondante que ni
tant de crimes et d'injustices. Vous entrerez saint Benoit, ni les frères qui l'accompa-
à Rome, vous passerez la mer, et après avoir gnaient, ne purent mettre le pied hors de la
régné neuf ans, vous mourrez le dixième. » maison. Le saint demeura donc malgré lui,
Tout cela fut accompfi dans la suite. Totila et passa la nuit avec sa s(eur en s'enlreteuant

fort épouvanté, lui qui était la terreur des au- de choses spirituelles. Le lendemain ils re-
tres, sortit du monastère, après s'être recom- tournèrent chacun chez soi. Toutes les reli-
mandé aux prières de l'homme de Dieu. De- gieuses n'observaient pas alors une chMure
puis ce temps-là il fut beaucoup plus doux et si exacte que celles qui suivaient la règle do
plus liumain ce que l'on aperçut particuliè-
:
saint Césaire. Il y en avait à qui il était per-

rement dans le siège et la prise de Naples, mis de sortir quelquefois pom* des causes
où il traita les captifs avec une bonté (pic l'on raisonnables; et tel était apparemment l'u-

ne devait pas attendre d'un barbare et d'un- sage du monastère de sainte Scholasli(jue.
ennemi. Quelque temps après, saint Benoit Trois jours après celte entrevue, sainl Be-
s'enlretenanl avec l'évéque de Canose, des noit étant dans son monastère, et levant les
ravjigcs (Je Tolila, cet évêque disait en parlant yeux, vit l'ùine de sa sci-ur entrer dans le

de Rome : « Ce roi la rainera en sorte qu'elle ciel en forme de colombe. Ravi de sa gloire,
[Vl* SifeCLE.] CHAPITRE X. — SAINT HRXOIT, PATRlAnr.IlE. 161

il rfiiidil grâces à. Dieu, dc-dara sa mort à ais(ïde prouver qu'elle soit arrivée en 543,
ses rclifiieux, et les envoya pniir n|iporlerlo et ce n'est que par des conjectures que l'on
corps son monastère, et le mettre dans le
l'i avance qu'elle suivit de près la veiuie du roi
tondicau qn'il avait pn'pnrë pour lui-même; des Goths au Mont-Cassin.
afin, dit saint Grégoire, que la mort ne sépa- 12. Sa mémoire a toujours été depuis en t:\Kf /.t
, > ,•
' 1 1..'. i- it . "'"' Benoît :
rât pas les corps dont les esprits avaient tou- grande vénération dans 1 li,glise ou on a re- 1 •• iitsi».

jours été unis en Dieu. Saint Benoit ne sur- gardé comme ^ un homme digne de Dic\i et
vécut pas longtemps à sa sœur. La mémo rempli du Saint-Esprit; c'est à lui que. l'or-
année, qui était 5-43, il prédit sa mort;\ quel- dre monastique, déjà chancelant en Occident,
ques uns de ses disciples qui demeuraient est redevable de sa splendeur. Il en renou-
avec lui, en leur recommandant le secret ; et vela la discipline, la fortifia autant par son
à d'autres plus éloignés, leur donnant des si- exemple que par sa Règle, qui a été louée
gnes pour la connaître. Six jours a vaut qu'elle dans les conciles ' comme ayant été dictée
arriv;Nt,il fit ouvrir son tombeau. Aussitôt il par le même Esprit qui a dicté les canons
fut saisi d'une lièvre violente; et comme elle de ces assemblées d'où vient qu'elle est
:

allait tous les jours en augmentant, le sixième communément appelée la Règle sainte. Elle
jour il se fit porter' dans l'Oratoire, se pré- est l'ondée principalement sur le silence et la
para ù la mort en recevant le corps et le sang retiaite, l'iiumilité et l'obéissance*.
de Jésus-Christ, et levant les yeux et les 13. Saint Benoit l'a divisée en soixante-
mains au ciel, entre les bras de ses disciples treize chapitres, précédés d'une préface ou logue.

qui le soutenaient, il rendit l'esprit en priant, prologue, dans lequel il exhorte ceux qui dé-
le samedi 21 de mars oi3, la veille du di- sirent de la pratiquer, à demander à Dieu
manche de la Passion, environ la soixante- son secours par des prières ardentes et réi-
troisième année de son âge. Il fut enterré térées; à sejpré parer pour entrer dans le che-
dans l'Oratoire de Saint-Jean-Baptiste, qu'il min qui mène à la vie, par les mouvements
avait bâti à la place de l'autel d'Apollon. d'une foi sincère, et par la pratique des bon-
Quelques-uns ont avancé sa mort jusqu'à l'an nes œuvres, sans lesquelles on n'arrive ja-
530 mais ils n'ont pas fait attention que ce ne
; mais à cette vie bienheureuse. Il veut que,
fut qu'en 542 qu'il reçut la visite de Totila, craignant Dieu, ils ne s'élèvent point de va-
comme on voit par Procope dans son troisiè- nité à cause de leur bonne vie; mais qu'en
me livre de la Guerre des Goths. Cet auteur dit reconnaissant que tout ce qu'ils ont de bien
encore dans quatrième, que Totila mourut
le procède de la grâce du Seig-neur, ils glori-
la onzième année de son règne, ladix-liuitiè- fient Dieu qui produit en eux les bonnes ac-
me de la guerre des Goths, c'est-à-dire en 532, tions, et disent avec saint Paul : C'est par la
au mois d'août. Or, saint Benoît lui avait pré- grâce de Dieu que je suis ce que je suis. Il
dit qu'après avoir régné encore neuf ans il déclare que sa Règle est comme un école où
mourut le dixième. Il s'était écoulé un espace l'on apprend à sei-vir Dieu, et que son des-
de neuf ans et quelques mois entre le mois sein est de n'y ordonner rien qui soit trop
d'août de l'an oo2et le temps de la prédiction rude et trop difficile; mais, parce qu'il pou-
de saint Benoît ce qui ne s'est pu faire qu'en
; vait s'y rencontrer quelques points un peu
mettant au mois de mai de l'an 342 l'entre- austères, la raison et la justice le voulant
vue de ce saint avec Totila. Au reste, quoi- ainsi pour pm'ifier l'âme de ses vices, il aver-
qu'on ne puisse mettre l'aunée de la mort tit qu'on ne doit point s'en effrayer, étant
de saint Benoit avant l'an 342, il n'est pas indubitable que l'on trouve toujours l'entrée

' Sexto die in Oratorium deferri voluW, ubi Spiritus per beatuni Benedicttim codem Spiritu,
exitum suum dotninici corporis et sanguinis jht- quo et sacri canones cunditi sunt,X\e'^u\Am mona-
ceptionecommiuiiuit. Gregor., lib. Il Dialog., cap. ckorum ediderit, de hvjusmodi sunt décréta. Con-
xxxvu. o.W. Durian. 2, tom. VI Concil. Harduini, pag.
154,
* Surrexit in monaslico ordine snnctus Benedic- anno 874.
tus, vir Den digiiiis, Spiritii Sancto plenus... iste * La Ri'gle de saint Benoît commentée se
trouve
in religione ferventissimus, lîegulam suis, dictante daus le tome LXVI de la Palrologie latine, col.
Spiritu Sdncto ,prœscripsit, et ordinem nionusti- 125, avec la Vie de saint Benoit eu grec et en la-
ciim jam tune vacillanteni renovavit et firmavit. tin, les opuscules autbeutir|uos et suppose's du saint,
Anselin. Havelb. iu Saxouia episcop. Toiu. XIII et les monuments qu'on joint à ses_ouvrages. (L'é-
Spicilegii, pas,. 112. diteur.)
' Hœc a sanctis canonibus antequam Sanctus
Xi. M
162 HISTOIRE OÉXliRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
de la voie du salut diroito, lorsque l'on com- point dissimuler les fautes de ceux qui pè-
mence d'y marclier. «Mais, ajoule-t-il, à me- chent, et toutefois il doit se contenter de re-
sure que l'on fait des prosnès dans l'oliscr- prendre de paroles pour la première et se-
vance régulière et dans la foi, le cœur ve- conde fois ceux qui ont les inclinations plus
nant à s'ouvrir et à s'étendre par la douceur nobles et l'esprit plus docile. A l'égard des
incllable de l'amour, on court avec joie dans superbes, des désobéissants et des opiniâ-
le chemin des commandements de nieu; et tres, sa conduite doit être dilférente: il faut
si l'on persévère à pratiquer la doctrine de (fu'il les châtie de verges, ou de quclqu au-
Jésus-Christ jusqu'à la nK)rt dans le monas- tre punition corporelle,sachant que l'insensé
tère, on participera parla patience aux souf- ne se corrige point par de simples paroles.
frances du Sauveur, et on méritera enûu d'a- Il est aussi de son devoir de s'accommoder

voir part il son royaume. »


aux manières de ceux qui lui sont soumis,
Qo»lr« sor- 1-4. .\près ce préambule, saint Benoît com- tâchant de gagner les uns par des caresses,
lei d« moine*.
mence sa Hèyle par la distinction de quatre les autrespar des réprimandes, ceux-là par
Cap. I. sortes de moines. La première est, des cé- des exhortations. Qu'il ait surtout plus d'at-
nobites qxii vivent dans une communauté tention au salut des âmes qu'aux choses
réglée sous la conduite d'un abbé. La se- temporelles, se souvenant qu'il est écrit que
conde, des anachorètes ou ermites, qui après rien ne manque à ceux qui craignent Dieu.
s'être éprouvés longtemps dans un monas- Ilno peut dans des allhiros d'importance se Cap. III.

tère, se retirent dans un désert pour mener dispenser d'assembler la communauté, d'en
seuls une vie encore plus parfaite que celle proposer le sujet, et de demander l'avis de
que l'on mène dans les communautés. La chacun, même des plus jeunes, parce que
troisième qui est très-pprnicieuso, est celle Dieu révèle souvent aux jeunes ce qui est
des sarabaïtes, qui demeurent deux ou trois mieux mais après avoir mûrement examiné
:

ensemble, ou même seuls, vivant leur fan- .'i leurs avis, la décision doit dépendre de lui,
taisie, sans suivre de règle et sans pasteur et tous sont obligés de lui obéir. Dans les

qui les gouverne. Ils témoignent par leur moindres choses il lui sulUt de consuiler les
tonsure qu'ils se sout consacrés à Dieu; anciens. Dans l'élection d'un abbé, la com-
mais ils font voir par leurs actions qu'ils lui munauté doit avoir égard à la sagesse et à
sont aussi infidèles qu'ils sont encore atta- la doctrine du sujet, et non pas an rang qu'il

chés au monde. La quatrième sorte de moi- lient dans le monastère. L'obligation où il

nes comprend les girovagues ou vagabonds, est de plus profiter que de présider, demande

qui courent continuellement de monastère qu'il soit docte, et qu'il entende bien l'Écri-

en mimastère, sujets à leur bouche et à leurs ture sainte, afin qu'il puisse tirer des ensei-
plaisirs. Ce sont les pires de tous. gnements, tant de la loi ancienne que de la

Ouailles et 15. C'est uniquement pour les cénobites nouvelle; qu'il soit chaste, sobre, miséricor-
rnnellnn? de
VuUU et àf.'^
que saint Benoit a écrit sa Jîègle. L'abbé dieux; qu'il haïsse les vices, et qu'il aime
mfrts 5u|.É-
r'O'TS du mo- choisi pour les gouverner doit toujours se les frères ;
qu'il les reprenne avec prudence
Ul.tirc.
souvenir qu'il est chargé du gouvernement et sans excès; qu'il travaille plus à se faire

des âmes, et qu'il doit en rendre compte au aimer qu'à se faire craindre ;
qu'il ne soit ni

jour du jugement, où se fera un examen ri- turbulent, ni inquiet, ni trop soupçonneux,


goureux de sa doctrine etdel'obtiissance de parce qu'autrement il ne serait jamais en
C%p. I'. ses disciples; qu'il doit leur enseigner la ver- repos. S'il arrive que la communauté choi-
tu, encore plus par ses actions que par ses sisse pour abbé une personne qui en dissi-

paroles, afin qu'en expliquant de vive voix mule les vices et les désordres, l'évoque dio-

aux i)lus inlelligciits les préceptes de l'Évan césain, ou les abbés doivent pourvoirai mai-

gile, il les repn'scnle par ses œuvres à ceux son de Dion d'un dis])ensateur plus lidèlc :

qui sont plus simples cl plus grossiers. Il ne car c'était à l'évêque ou aux abbés à ordon-
doit faire acception de ])i!rsounes dans le ner celui que la communauté avait choisi.
monastère; n'aimer point l'un plus que l'au- Dans quelques monastères le prieur ou pré-
tre,excepté celui qu'il trouvera le plus ver- vôt était ordonne' par l'évêque, ou par les
tueux; ne point préférer le noble à celui qui abbés qui ordonnaient l'abbé nuhne ce qui :

a été de condition sei-vile, s'il n'y en a quel- lui donnait quelquefois occasion de se re-

que cause raisonnable : étant tous un en garder comme un second abbé, et de causer
Jésus-Chri.^t, soit libres, soit esclaves; ne des dissensions dans la communauté. Pour
VI" sikc.i.E.] CHAPITRE X. — SAINT ISENdlT, l'A'l'ItLXnCHE. If.:i

obvier i\ cet abus, saint Benoit veut que l'aL- ne la lui accordait que lorsqu'il persévérait
bi^ailon son pouvoir l'entière disposiliou de couslaïunient dans sa demande, l'uis on le
son monastère; que ce soit lui qui ('tablisso mellail pour ijuelques jours dans le logement
des doyens et même le prieur, pourvu qu'il des hôtes, ensuite dans celui des novices, où
fasse ce choix avec le conseil dos anciens. il méditait, prenait sou repas et son sommeil.

Le prieur est chargé par la Khjlc de faire On confiait sa conduite quelque ancien i^i

avec respect tout ce que l'abbé lui coninian- propre il àmos, qui examinait avec
gagner les
"•
le. L'otlice des doyens est de veiller sur dix soin tontes ses actions pour savoir s'il cher-
moines, soit pendant le travail, soit pendant chait Dieu avec sincérité s'il se portait avec ;

les autres exercices; leurs mœurs et leur zèle à l'office divin, à l'obéissance et aux
capacité iloivent èlre telles que l'abbé puisse autres morliiicalions humiliantes. L'ancien
avec assurance leur confier luie partie de sa l'avertissait aussi de toutes les peines qui se
charcre. C'est pourquoi on ne doit point les rencontrent dans le chemin du ciel. Si, après
choisir selon le rangcpi'ils tiennent,. mais se- deux mois !e novice persévérait, on lui lisait

lon le mérite de leur vie, leur science et Iciu' la Iti-filc par ordre et de suite, en lui disant :

sagesse. (i Voilà la loi sous laquelle vous voulc/C com-


foci. r^ .lu 10. Outre les officiers pour le gouvernement lialtre; si vous pouvez la garder, entrez ; si

du monastère, la lî('<jlc en marque d'autres vous ne pouvez, retirez-vous librement. »


le
^'-
pour le service ordinaiie. Elle veut que celui Au bout de six autres mois, on lui lisait en-
que l'on choisit pour cellérier soit sage, d'un core la Rèfjle, et une troisième fois au bout
esprit miîr et discret, sobre, et qu'il exerce de quatre mois. Après un an de persévérance
avec douceur envers toute la communauté, on le recevait, s'il promellait de garder tout
l'office de père ;
qu'il ait soin de toutes clioses, ce que la lH'çjk ordonnait. Il faisait sa profes-

sous les ordres de l'abbé qu'il donne aux reli- ;


sion dans l'Oratoire, en présence de toute la
gieux les choses dont ils ont besoin, sans les communauté, promettant la stabilité, la con-
attrister, rebutant avec mépris; qu'il
en les version de ses mœurs et l'obéissance. Il ré-
preime soin des malades, des hôtes et des digeait par écrit sa promesse, ou ne savait s'il

pauvres qu'il traite les biens du monastère


;
écrire quelqu'un
,
à sa prière l'écrivait pour
avec le même respect que l'on traite les vases lui, mais il la signait de sa main et la mettait

qui servent au saint autel; qu'il ne se laisse sur l'autel. S'il avait quelques biens, il les
aller ni à l'avarice , ni fi la prodigalité , et distribuait aux pauvres avant de faire pro-
qu'il fasse tout avec discrétion et avec me- fession, ou les donnait au monastère par un
sure. Dans les grandes communautés on lui acte solennel sans se réserver rien du tout.
,

donnait des aides, afin qu'il pût remplir plus Alors on le revêtait des habits du monastère,
^^,1. aisément les devoirs de sa charge. L'abbé et on gardait peur les lui rendre,
les siens
commettait à quelqu'autre de bonne vie et s'il arrivait en sortit. Néanmoins
qu'un jour il

de bonnes mœurs, le soin tant des outils, que on ne lui rendait point sa promesse que ,

des habits et autres choses semblables, dont l'abbé avait soin de retirer de dessus l'autel:
il retenait lui-même un mémoire ,
pour se elle devait être gardée dans le monastère. Si c>i.. lu.

souvenir et de ce qu'il donnait, et de ce qu'il quelque personne noble otirait son fils à Dieu
recevait lorsque les frères se succédaient
, dans le monastère, et que l'enfant fût en bas
les uns aux autres dans l'exercice de ces âge, le père et la mère faisaient une semblable
emplois. La propriété était défendue à tous, promesse, ' qu'ils enveloppaient de la palle
jusques dans les moindres choses, un livre , ou nappe de ï'aulel, avec leur oiirande et la
.x-,M. (les tablettes, un poinçon à écru-e. Mais on main de l'enfant. Les parents ne pouvaient
leui' accordait l'usage de tout cela. rien donnera l'enfant, mais seulement au

""',t',:î'""
Celui qui se présentait pour entrer dans
l"?- monastère par forme d'aumônes ou de re-
le monastère n'était reçu qu'après que l'on connaissance. En ce cas, ils en faisaieut
.|i. i .!•. avait éprouvé sa vocation. On le laissait pen- nue donation authentique, en se réservant,
dant quatre ou cinq jours frapper à la porte; s'ils voulaient , l'usufruit pendant leur vie.
on lui en refusait l'entrée avec mépris, cl on Ceux qui étaient pauvres faisaient simple-

' Si quis de nobilihus iiffetl filiiim xuiim Deo ipsam pelitionem, et moiiiim pueri iiuoliant in
in wonasterio, si ipse puer miiture wUitc est, l'U- palla altaris, et sic cum offerant. Itcytil., cap,
reiites eji(s faciant pctilioncm : et cum ohlniione LIX
164 HISTOIRE GÉNÉllALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
ment leurs promesses par écrit, et présen- turne que nous appelons Matines, sera em-
taient leur enfant et leur offiande eu présence ployé par les religieux à apprendre les psau-
Ca;. u. de témoins. Si quelqu'un de l'ordre des prê- mes, ou à les méditer, ou à qiu'hpie lecture
tres demandait d'être reiju, on ne le recevait nécessaire. Depuis Pâques jusqu'au premier Cap. Tl

qu'après l'avoir mis aux épreuves s'il per- : jour de novembre, c'est-à-dire pendant l'été,
sévérait et promettait de garder la Règle, on on disposera l'heuie de Matines en telle sorte
l'admettait dans la communauté, où ou lui qu'on puisse commencer Laudes au point du
donnait la première place après l'abbé, par jour. Chatpie jour, à Matines,on chantera
respect pour le sacerdoce. Aloi-s il faisait les douze psaumes qui seront précédés du qua-
bénédictions et célébrait la messe, mais tou- tre-vingt-quatorzième et d'une hymne que
jours avec dépeudance de l'abbé, étant sujet, saint Benoit nomme ambrosienne , parce
comme les autres, à la discipline régulière. (pie la plupart sont de la composition de

On accordait un rang médiocre aux autres saint Ambroise. Après six psaumes tous ,

ecclésiastiques ,
quand après leurs épreuves après l'au-
les frères, étant assis, liront l'un

ils avaient promis de garder la Règle et la tre trois leçons', à chacune desquelles on

stabilité. Du reste chacun tenait dans le mo- dira un répons, dont le troisième se ter-
nastère le rang de sa réception, à moins que minera par le Gloria. Ensuite on dira six
l'abbé n'en disposât autrement, eu égard au autres psaumes avec Alléluia, puis une le-
mérite de la pei-sonue. Ainsi celui qui était çon de l'Apôtre que l'on dira par cœur, avec
veim au monastère à la seconde heure du le verset et la litanie, le Kyrie
c'est-à-dire
jour tenait un rang inférieur à celui qui était de la nuit. En été,
eleison. Ainsi finira l'office

venu à la première, de quelque quaUté et de on dira le même nombre de psaumes, mais


quelque âge qu'il fùl. Les plus jeunes ren- comme les nuits sont plus courtes, on ne
daient honneur aux anciens, en les appelant hra point de leçons dans le livre et au lieu ,

noriTies , c'est-à-dire pères , se levant devant des trois leçons ordinaires, en on dira une
eux, leur cédant la place, et leur demandant par cœur de l'Ancien Testament, qui sera
la bénédiction. Les anciens appelaient les suivie d'un répons bref. Les leçons des Vi-

jeunes leurs frères. Les petits enfants, et giles ou matines seront de l'Ecriture Sainte,

ceux qui étaient un peu plus âgés se tenaient de l'.Vncien et du Nouveau Testament, ou des
aussi selon leur rang dans l'Oratoire. Si im re- explications qui en ont été faites par les plus

ligieux étranger demandait l'hospitalité on , célèbres docteurs de l'Église et les Pères or-
le gardait en qualité d'hùle autant de
temps thodoxes. Les jours de dimanche on se lè-
qu'il souhaitait, pourvu qu'il se conlenlùt de vera |)lus matin, et, après avoir chanté six
l'ordinaire qu'il y trouvait, et qu'il ne trou- psaumes et le verset, tous étant assis, on
blât point le monastère par ses superlluités. lira quatre leçons avec leurs répons, et au
S'ilreprenait ou remontrait rpielque ciiose, quatrième seulement, celui qui chantera di-
l'abbé recevait ses avis; et si l'on était édilié ra le Gloria, au commencement duquel tous

de sa conduite, on le priait de demeurer dans se lèveront pour rendre hoimeur à la Sainte

le monastère, et il était au pouvoir de l'abbé Trinité. Après ces leçons, on dira par ordre

de donner un rang un peu plus élevé,


lui six autres psaumes avec leurs antiennes et

s'il
Mais l'abbé ne devait
l'en trouvait digne. leur verset, auxquels on ajoutera quatre au-
jamais admettre un moine d'un autre monas- tres leçons avec leui-s répons. Puis trois

tère connu sans le consentement de son


,
cantiques tirés des Prophètes, et quatre le-
abbé, ou sans lettres de recommandation. çons du Nouveau Testament. Après le qua-
18. Voici quelle est la disposition de l'Of- trième répons, l'abbé commencera l'hymne :

Vins.
fice divin, tant pour le jour que
pour- la nuit : Te Deum laudamus, laquelle étant achevée,
((Durant l'hiver, dit la Règle, c'csl-i\-dirc de- il lira la leçon de l'Évangile, à la fin de la-

puis le premier jour de novembre jusqu'à Pâ- quelle tous ayant répondu Amen, il ajoutera
:

tJïi. VIII.

ques, on se lèvera à la huitième heure de la de suite l'hymne Te deccl laus ; puis la bé-
:

nuit, c'est-à-dire à deux heures.


L'abbé lui- nédiction étant donnée, on commencera les
même aura soin de sonner l'Oflice divin, ou Laudes. »

de conimetlre cette charge à un religieux si «Aux fêies des saints et aux autres solen-
exact, que chaque chose se fasse à son heu- nités, rollice des Matines se fera comme le di-

re. Ce qui restera de temps


après les veilles manche, excepté psaumes, les antiennes
les

de la nuit c'cst-à-dirc
,
après l'oUicc de noc- cl les leçons propres du jour. S'il arrive qu'on
[vi" sii'icr.E.J CFTAriTRE X. — SAINT DENOIT, PATniATtr.lTK. lOE

so soit love trop Ind, on iil)i'(''p;cra qiielquo Missœ siiit ou missii' fiant , c'esl-^i-dire que
clioso on dos vf'pons pour diro.
(les h'cjoiis l'Office étant achève!, on renvoyait ceux qui
toujours les Landes au point du jour. Miiis y avaient assisté. Les psaumes ipTil pres-
on usera île tontes sortes de préciuilions crit pour les heures du jinir et de l;i nuit

pour cmpiîchcr que cet accident n'arrive, sont les mômes que nous récitons encore
et celui qui en aura ('té la cause par sa m'- dans notre Ordre. Il avertit que si la distri-
plij^ence en fera une juste satisfaction dans bution qu'il a faite des psaunu's pour les Of-
l'Oratoire. An\ /jiiides du Jiniaïu'.lie, ou dira fices, tant lie la nuit que du jour, ne plaît
les psaumes lxvi, i,, cwii, lxii avec le canti- pas ti quelqu'un, il peut les distribuer au-
qiio : /Jeneclicite et le psaume Laudaté; une
: trement, pourvu que chaque semaine on di-
leron de r.\pocaI}'pse par cœur, le répons, se le Psautier en entier, contenant cent cin-
une iiynuie tle saint .\nil)roise, le verset, le quante psaumes; et que tous les] dimanches
cantique : licnedicius, la litanie, et l'on linira on le recommence à Mutines. « C'est le
It'i.» Saint Benoit marque en détail les psau- moins, dit-il, que nous puissions faire, puis-
mes que l'on devait dire clia(iue jour de la que nos Pères le disaient fout entier chaque
semaine, et vent qu'outre les psaïuncs, l'on jour, selon que nous l'apprenons de l'his-
dise un cantique des PropliMes, selon
tiré toire de leur vie. n Quoiqu'il ne prescrive Cr,,..

l'usage de ri'iglise romaine'. Il veut aussi point d'autres prières, il suppose clairement
que celui qui pi-éside au chreur dise tout que les religieux s'appliquaient d'eux-mêmes,
haut, h. la fin des Matines et des Vêpres, l'O- en certaines heures, i l'oraison mentale,
raison dominicale afin que si quelqu'un, lorsqu'il dit qu'elle doit être courte et pure,
avait quelques peines contre un autre il , si ce n'est qu'on la prolonge par les mouve-
soit e.Kcité ;\ pardonner les injures, selon la ments d'une inspiration particulière et de la
promesse qu'il en fait, lorsqu'il dit dans cette grâce divine. « Mais, ajoute-t-il, en com-
prière « Pardonnez-nous nos oli'enscs, com-
: munauté on fera toujours l'oraison courte,
me nous les pardonnons à ceux qui nous et le supérieur ayant fait le signe, tous se
ont otl'ensés. » Aux autres heures de l'Office lèveront ensemble en silence , après avoir
il suffira de dire tout haut la derinore partie fait larévérence à Dieu.» 11 était toutefois
de cette oraison, afin que tous ensemble ré- permis, hors le temps de l'Ollice, d'entrer
pondent Sed libéra nos à malo. On com-
: dans l'Oratoire et d'y prier, non à voix haute,
mencera les heures de Prime, de Tierce,' de mais avec larmes et pureté de cœur. C'est
Sexte cl de None par le verset Deus in adju- : la disposition qu'il demande dans ceux qui
toriiim. Après quoi l'on dira l'hymne propre prient. « Si, dit-il, lorsque nous voulons par-
à chacune de ces heures, trois psaumes, une ler de quelque chose à des personnes de gran-
leçon, le verset et la litanie, et on finira. Si de qualité, nous ne le faisons qu'avec humi-
le nombre des religieux est assez grand, on lité et révih-ence, combien plus devons-nous

les chantera avec antiennes s'il ne l'est ; oll'rir nos prières à Dieu, qui est le Seigneur de

pas, on se contentera de les psalmodier. A l'univers, avec une profonde humilité et une
Vêpres, on dira quatre psaumes avec antien- dévotion toute pure, sachant que nous no
nes, puis une leçon de l'Apôtre, un répons, serons pas exaucés pour la quantité de nos
une hymne de saint Ambroise, le verset, le paroles, mais pour la pureté de nos cœurs
cantique : Magnificat, la litanie , l'Oraison et la componction de nos larmes. »
dominicale, et on finira. A Complies, on dira 19. Après les Oihces divins, le reste de la TraTall
maîDS, et
des
loc-

trois psaumes, sans les chanter et sans an- journée devait être employé au travail des !"«!.

tiennes suivra l'hymne de cette heure, une


: mains et à la lecture des bons livres. De- cap. xivnt,

leçon, le verset, la litanie, la bénédiction, et puis Pâques jusqu'au premier d'octobre, les
on finira. Saint Benoît, pour marquer la fin religieux, sortant le matin, travaillaient h ce
de chaque Office, se sert de ces paroles : qui était nécessaire, depuis la première bcu-

' Canliciim unumquodqtie die suo, ex Prophe- nem, qua dicunt: Dimitte nobis débita uostra, si-
tis, romana, dicnlur. Plane
sicul psallit Ecclesia nos liimittimus debitoribiis nostris, purgent
ciit et

agenua matulinavel vespcrtina non transeat ali- se ab hujusmodi vitio. Cœleris vcro agendis, ulU-
quundo nisi in uliinio per ordinem Oratio donti- nia pars ejus oralionis dicalur, ul ab omnibus
nica, omnibus atidienlibus, dicahir a prioreprop- respondentur ; Sed libéra nos à malo. ReguL,
ler scandalorum spinas quœ oriri soient in mo- cap. xni.
naslerio: vl convenli peripsius orationis sponsio-
IGU HISTOIRE GKN'KRALE DES AUTEURS ECCLKSIASTIQUES.
rc jusqu'à la quatiicme, c'csl-à-tlirc depuis qui étaient occupés à ditTércnts exercices
six heures jusqu'';» dix ; après ces quatre pour se trouver à Compiles, api'ès lesquelles
heures de travail, ils s'occupaient à la lec- il n'était ])lus permis à personne de parler,

ture jusques vers Sexte. Après Stxte, se le- sinon pour quelque ui'cessité, ou par l'ordre
vant de table, ils reposaient sur leurs lils en de l'abbé. Le dimanche, tous vaquaient à la Ca)'. ^1 II.

silence. Mais, quelqu'un voulait lire, on


si lecture, excepté ceux qui étaient chargés de
ne l'en enipèchnii point, pourvu qu'il le fil divers offices. S'il s'en trouvait qui ne pus-
sans troubler les autics. On disait iXone plus sent méditer ni lire, on les obligeait de faire
tôt que de coutume au milieu de la huitième quelque ouvrage, afin qu'ils ne demeuras-
heure, c'est-à-dire à une heure et demie, sent pas oisifs. On prescrivait aussi des tra-
puis on travaillait jusqu'à Vêpres: ce qui fai- vaux plus faciles à ceux qui étaient faibles
sait environ sepl heures de travail par jour, et délicats. Ceux qui travaillaient trop loin
avec deux heures de lecture. « Que si, ajou- de la maison pour revenir à TOratoiie aux
te saint Benoît, la nécessité du lieu, ou la henires accoutumées, se mettaient à genoux
pauvreté, oblige les religieux à recueillir au lieu du travail, et récitaient leur Office
eux-mêmes leurs fruits, qu'ils ue s'en attris- avec crainte. Ceux qui étaient eu voyage le
tent point, parce qu'ils seront véritablement disaient aussi en particulier aux hernies pres-
moines, lorscju'ils vivront du travail de leurs crites, comme ils le pouvaient. Personne ne

mains, comme ont fait nos pères et les apô- choisissait son travail, il était imposé par les

tres. Que tout néanmoins se fasse avec me- supérieurs et ceux qui savaient des métiers
;

sure, à cause des faibles. » Mais depuis le pre- ne pouvaient les exercer qu'avec la permis-
mier^d'octohre jusqu'au commencement du sion de l'abbé et en toute humilité. Si quel-
Carême, ils s'occupaient à]Ia lecture jusqu'à qu'un d'eux s'élevait par vanité, prétendant
la seconde heure complète, c'est-à-dire jus- être habile dans son art, et s'imaginaut ap-
qu'à Imit heures du malin. Alors on disait porter quelque utilité au monastère, on lui
Tierce, puis tous travaillaient jusqu'à ^Vo/îp.- interdisait l'exercice de son art, qu'il ne pou-

ce qui faisait sept heures de travail tout de vait reprendre si l'abbé ne le lui ordonnait

suite. [Au premier coup de Noue, chacun quit- de nouveau, après avoir reconnu qu'il était
tait son ouvrage pour se tenir prêt aus(!cond plus humble qu'aviparavant. Si l'on vendait
coup. Après le repas, on s'appliquait à_la lec- quelque chose de l'ouvrage des artisans du
ture ou à apprendre des psaumes. Eu Carê- monastère, ceux qui en étaient chargés ne
me, la lecture durait depuis le matin jusqu'à pouvaient rien retenir du prix pour eux, ni
Tierce, et le travail depuis neuf heures jusqu'à l'augmenter au delà de la valeur par un es-
quatre heures après midi. Au commencement prit d'avarice mais ils étaient obligés de don-
:

du Carême, chacun prenait un livre de la Bi- ner ces ouviages un peu à meilleur marché
bliothèque pour le lire de suite. Pendant les que les séculiers, afin que Dieu fut glorifié
heuies de la lecture un ou deux des an- , en tout. La distinction que saint Benoit fait
ciens, choisis à cet etl'et, faisaient la revue des artisans d'avec ceux qui ne l'étaieut pas,
du monastère, pour voir si quelqu'un dor- montre que le commun des moines n'était
mait ou s'amusait à causer et à interrompre que de simples ouvriers, et que les plus no-
les autres. Aux jours où l'on ne jeûnait pas, bles se réduisaient par humilité au rang '

les religieux, aussitôt après le souper, s'as- du plus bas peuple, qui n'avait pas besoin
sayaient tous en un même lieu, où l'un d'eux d'étude pour cntendie la langue latine, parce
lisait les conférences, ou les Vies des Pères, qu'elle était encore vulgaire. Ces artisans
ou quelque autre livre d'édification; mais étaient simples laïques, il parait même qu'il
non pas de Moïse, ceux de Josué
les livres y en avait peu alors qui fussent initiés dans
et des Juges, ni les livres des Rois, dont la les ordres sacrés. Mais comme on recevait
lecture n'aurait point été utile en cette des clercs et des|prêtrcs dans le monastère, et
heure-là. Si c'était un jour de jeûne, on fai- que l'habit était commun à tous, ils n'étaient
sait celte assemblée un peu après les Vèjjrcs, distingués que par la tonsure '. Les minis-
et on lisait quatre ou cinq feuillets, autant tres sacrés avaient les cheveux rasés jusqu'à
qu'il en fallait pour donner le temps à ceux la chair : les autres les portaient plus longs.

' l'Iciiii , liv. XX.MI Ilist. cccks, ,


jiag. 305, ' M;il)illiiii, tiiiii. I Annal., pag. 57.
Umi. Ml.
[vr siKcr.K.] CIIAI'ITHE X. — SAINT nENOlT, PATniAltCHE. I(i7

Ilahiu do 20. On (Iniiniiil lies liahils ;uix nidiiips siii- des lits consislail eu une |)aillasse, luin cou-
oiurs.

vaiil lii (|ii;ilili- (lu pMvs plus ciiaud nu ]ilus verlure de laine et un clicvel. Cliaciiu iivait
Cgip.xit'.

;»p. i.t. fioicl. Sainl licnoii estimu (pic dans les lieux son lit ;
moines rouciiaieut tous en
mais les

tempérés il sullisail que chacun eût «ne cu- un même lieu, au moins dix ou vingt enscra-
cullo et une tunique, la cucullo plus épaisse l)le, si la communauté était nombreuse. Une

pour riiiver, plus rase pour l'élé, et iiusca- lampe brûlait toute la nuit dans le dortoir ;

pulairc pour le travail. C'était depuis long- et il y avait t(nijours quelque ancien dans

temps riiabit ordiuairc des pauvres et des chaque chambre pour observer la conduite
gens de la campagne. 11 ne marque point la des autres. Us dormaient tout vêtus, m(;me
couleur de ces v("'l(Mnonts; mais l'usage an- avec leur ceinlure, pour être toujours pnMs
cien est que la cucuUi; et le scnpulairc fussent i\ se lever pour l'Olllce. Les jeunes n'avaient

noirs, et la tunique blanche. Elle se met- point leurs lits proclics l'un de l'autre, mais
tait immédiatement sur la chair. La cuculle ils étaient mêlés avec ceux des anciens; et,

avait un capuce, et enveloppait les épaules, se levant pour aller ù l'Olllce, ils s'éveillaient
descendant sur le reste du corps. Cet habil- doucement l'un l'autre pour (jter toute ex-
lement devint, pour sa commodité, commun cuse aux paresseux.
à tout le monde dans les siècles suivants et ; 21. La ^èjr^e ordonne pour chaque repas D«i«iionr.

il a duré dans l'Europe jusques ' vers le xv" deux portions cuites, afiu que celui qui ne
siècle.Xon-seulcment les clercs et les gens pourrait manger de l'une mangeât de l'au-
de mais les nobles même et les cour-
lettres, tre s'il se trouvait des fruits ou des herbes
;

tisans portaient des capuccs et des chape- nouvelles, on ajoutait une troisième portion, cap ^««ii.

rons de diverses sortes. Le scapulaire avait le terme de pulmentarium, dont elle se sert,
aussi un capuce. Les moines s'en servaient signifie proprement des légumes cuits en étu-
pendant le travail, parce que dans ce temps vées, ou des grains réduits en bouillie; mais il
ils (jlaient leur cuculle, qu'ils reprenaient paraît, par les Actes de sainte Salaberge et Mohii. lom.
'"'° p'^"
aussitôt aprèspour la porterie reste du jour. par d'autres anciens monuments, que l'on ,,,; •

A la suite des temps les moines ont porté le servait aussi aux moines des œufs et du pois-
scapulaire non-seulement pendant le travail, son. On ne leur donnait qu'une livre de pain
mais durant tout le jour, ne se servant de la par jour, soit qu'on fit un repas ou deux.
cuculle que pour les Olfices divins et de sem- Lorsque l'on devait souper, le cellérier ré-
blables exercices. Chacun avait deux tuni- servait la troisième partie de cette livre pour
ques et deuxcuculles, soit pour changer pen- la rendre au souper; mais il était au pouvoir
dant la nuit, soit pour les laver. Ils les pre- de l'abbé d'augmenter la portion s'il y avait
naient au vestiaire commun,
et y remettaient quelcpie travail extraordinaire. La livre ro-
les vieilles. Ils y en prenaient aussi de meil- maine était de douze onces, et la livre mar-
leures que celles qu'ils portaient ordinaire- chande de seize. On ne doute point que saint
ment, lorsqu'il leur arrivait de sortir du mo- Benoit n'ait eu une mesure particulière pour
nastère : mais ils étaient obligés après leur ses monastèi'es. Ce qui le prouve, c'est que
retour de les remettre au vestiaire après les Charlemagne voulant rétablir la discipline
avoir lavées.On doiniait aux pauvres les ha- monastique dans les monastères de France,
bits moines rendaient lorsqu'ils en
que les envoya au Mont-Cassin pour en rapporter le hj""""^!,''
recevaient de neufs. Les étoffes dont on les poids de la livre de pain et la mesure de l'hé- XXXIX, pas,
S13S17.
habillait, étaient celles qui se trouvaient dans mine de vin. Si ce prince eût voulu que l'on
le pays k meilleur pris. L'abbé était chargé se servît pour l'une et pour l'autre de lame-
de veiller que les habits ne fussent point trop sure romaine, il aurait sans doute envoyé à
courts pour ceux qui devaient s'en servir, Rome, et non pas au Mont-Cassin. Quelques-
mais d'une juste longueur. Pour ôter tout uns ont cru que la livre à l'usage de ce mo-
sujet de propriété, il donnait à chacun toutes nastère était de trente onces, parce que celle
leschoses nécessaires, c'est-à-dire, outre les que l'abbé Théodemar envoya à Charlema-
habits et les chaussures, un mouchoir, une gne fut estimée dans le concile d'Aix-la-Cha-
ceinture, un couteau, une aiguille, des ta- pelle trente sols. Mais il est plus vraisem-
blettes et un poin(;;on à écrire. La garniture blable qu'elle no pesait que quinze onces ou

' Floriil. apuil MartHU., CommeiUar. in Rcgul., Marlcii., ibid., pau'. 702.
fa\\. LV, p;ig. 097.
1U8 HISTOIUE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
environ. Car saint Benoit veut que la livre n'en était empêché par maladie ou par quel-
de pain (|ii'on dunii;iit aux roli^iciix fut de que occupation plus utile. Une heure avant

Mal.lllni bon poids. A l'égard do .riieuiine de vin, l'o- le re|)as, les semainiers prenaient chacini un
Pri'f.l. 1 I

pinion la mieux fondcîe est qu'elle était de coup à boire et du pain sm* leur portion ordi-
Brncd-rlln.
dix-huit onces. On en donnait douze A diner naire, afin qu'ils eussent moins de peine en
et six à souper; et lorsqu'on ne faisait qu'un servant les religieux pendant le repas. Mais
repas, on la servait tout entière. Si le tra- aux jours solennels ils dill'éraient cette petite

vail ou chaleur l'exigeait on augmen-


la , réfection jusqu'après la messe, parce qu'ils
tait cettemesure. Au reste saint Benoit n'ac- y recevaient avec les autres la sainte Eucha-
corde l'usage du vin que dans les lieux où il ristie. Celui qui sortait do semaine nettoyait
en croissait, ou bien dans les monastères qui toutes choses le samedi, et prenant avec lui
avaient le moyen d'en acheter. Il défend la celui qui devait entrer en semaine, ils la-
chair d'animaux à quatre pieds, hormis ;\ vaient eux deux les pieds à tous les religiuux,
ceux qui sont ou forl faibles ou malades. 11 et rapportaient au cellérier les vases de leur
défend aussi de donner aux enfants une aussi oilice nets et entiers, que le même cellérier
grande quantité de nomriture qu'aux person- mettait de nouveau entre les mains de celui
nes âgées, voulant que tous évitent les excès. qui entrait en semaine.
Depuis le jour de Pâques jusqu'à la Pente- 22. Saint Benoit veut qu'on serve les ma- 1.0^ m '!•
des: Ici'tiMo»!
côte les moines dînaient à Sexle et soupaient lades comme si personne même de
c'était la Tm viV'S"-

le soir ; mais depuis la l^enlecôte et durant Jésus-Christ mais il vent aussi que les ma-
;

tout l'été ils jeûnaient le mercredi et le ven- lades, considérant que c'est pour l'honneur
dredi jusqu'à Ao«e, à moins que le travail de de Jésus-Christ qu'on leur rend service, n'at-
Ca;-. \x\FU
la campagne ou la chaleur excessive ne les tristent point les frères en leur demandant
eu empêchât. Les autres jours, ils dînaient à des choses non nécessaires. Il y avait une
Sexte,comine dans la cinquantaine de Pâques. chambre particulière pour les malades, et un
Depuis le troisième de septembre jusqu'au religieux craignant Dieu, diligent et soigneux
commencement du Carême, ils mangeaient pour les servir. Ou leur permettait l'usage de
toujoujs à None, et pendant le Carême ils ne la viande et des bains toutes "les fois qu'il
mangeaient qu'à i'hein-e de Vèp7'es, qui de- était à propos mais on n'accordait que rare-
;

vait tellement être réglée qu'on n'eut pas be- ment le bain à ceux qui étaient en santé,
soin de lumière durant le re[)as. En Carême principalement aux jeunes. Lorsqu'on était
chacun otlïait, de son- propre mouvement et averti de l'arrivée de quelque hôte, le prieur
avec la joie du Saint-Esprit, quelque chose de ou quelques religieux le venaient recevoir
sa portion accoutumée, c'est-à-dire, qu'il re- avec toute sorte de charité et de respect. On
fusait à son corps quelque partie du boire, le menait ensuite à l'Oratoire, puis on hii
du manger, du sommeil cl de ses entretiens : donnait le baiser de paix. On faisait eu sa pré-
mais il devait déclarer à son abbé ce qu'il se sence quehjue lecture pour son édification.
proposait d'oli'rir à Dieu, atin que sa mortifi- Le supérieur rompait le jeûne, si ce n'en
cation fut )-(igl(!e par sou ordonnance, et ai- était un qui fût ordonné par l'Eglise. L'ahbii

dée de ses prières. On faisait toujours la lec- dounait à laver les mains à l'hôte, et tant lui
ture pendant le repas, et le lecteur était que toute la communauté lui lavaient les
choisi chaque semaine dans la communauté; pieds. Après quoi l'abbé mangeait avec lui,
en sorte que hvs religieux ne lisaient point appelant tels frères qu'il lui plaisait, pourvu
chacim à leur tour, mais ceux-là soulemeul qu'il laissât toujours à la communaut(' un ou

qui pouvaient édilier ceux qui h.'s écoulaient. diîux (les anciens pour maintenir la discipli-
Le lecteur semainier prenait un coup à lioire ne. L'abbé avait sa cuisine et sa table à part
et un peu de paiu avant do lire, soil par res- pour être en état de recevoir les hôtes à tou-
pect pour la Siiint(! communion, c'est-à-dire, te heure sans incommoder la comnuniauté;

pour la sainte Eucharistie qu'il avait reçue à et tous les ans on doimait la charge de cette

la messe soit de peur qu'il n'eût trop de


;
cuisine à deux frères en état de se bien ac-
peine a soutenir le jeûne. La lecture finie, il quitter de cet ollicc. Il y avait aussi un reli-
prenait sou repas avec les senniiniers de cui- gieux chargé du soin de la chambre des hô-
sine et les serviteurs de table car les moi- : tes, oi'i l'on mettait des lits eu sullisance et

nes se servaient les uns les autres, et aucun proprement accommodés. Mais personne no
n'était dispensé de servir à la cuisine, s'il leur parlait sans ordre, excepté cehii qui était
,

[Vl' SIÈCLE.] CUAPITHl': X. — SAL\T BENOl'l', l'ATlU.VRGillC. iO'.i

Cf. .> (lostiné h les recevoir. Il était l'pnleraent (1»5- psaume ou autre partie de l'Ollice, étaient
feiulii i\ tous les relin-joiix de recevoir, sans chàli(!es l<Î!(èrenu>nl lorsque le
coupable en
l'ordre Je l'abbd, ni lettres ni présents de per- devant tous. La /t''/jle ap-
faisait satisfaction ctp. »i.v.

sonne, pas même de leurs parents, et de sortir pelle excommunication toute séparation de
sans sa permission de l'enclos du monastère. la couununanlé, et celle séparation t'Iail pro-

Les moines, que l'alihé envoyait dehors, si; porlionni'e par le jugement do l'abbé aux
recommanilaient à ses prières, et à celles do fautes commises. Celui qui, poui- ipielipie
tons les frères. On faisait toujours commé- faute h'gèro, était privé de la table commu-
moration des al)scnts après la dernière orai- ne, ne commençait point de psaume ni d'an-
son de rOflice et lorsqu'ils étaient de retour
;
tienne dans l'I^giisc, et ne récitait point de
ils demeuraient prosternés dans l'Oratoire leçon jusqu'à ce qu'il eût satisfait. Il ne pre-
sur la fin de chaque heure de l'Ollice, deman- nait aussi son repas qu'après les religieux, à
dant i\ tous les frères leurs prières pour ob- l'heure et en la quantité que l'abbé ordon- ,,,..

tenir de Dieu le pardon des fautes qu'ils pou- nait. Mais celui qui en do gran-
était tomlié
vaient avoir faites durant leur voyage. Il leur des fautes devait être privé tant de la table
était étroitement di>fendu de rien dire de ce commune que de l'olHce du chœur. Person-
qu'ils avaient vu ou entendu au dehors, ces ne ne lui parlait, et il était séparé de tous,
sortes de rapports causant beaucoup de mal. même dans le travail, persistant dans les lar-
Pour ôter aux moines tout prétexte de sortir mes de la pénitence, et considérant cette pa-
du monastère, il devait être bâti de telle ma- role terrible de saint Paul Celui qui est cou-
: i co imh. v.

nière qu'on eût au dedans, s'il était possible, pable (le ce crime est livre au démon pour mor-
toutes les choses nécessaires, l'eau, le jardin, tifier sa chair, afin rjiie son âme soit sauvée au

le moulin, la boulangerie et les commodités jour du Seigneur. L'application que fait ici
pour les métiers ditl'érents. La porte était saint Benoit de ces paroles de l'Apùtre, donne
gardée par quelque sage vieillard, qui savait lieu de croire qu'il parle d'une véritable cen-
porter une parole et rapporter la r.'ponse. sure ecclésiastique. Il ajoute que le moine
Sa chambre était proche, atin que les surve- qui est excommunié de la sorte prendra seul
nants le trouvassent toujours présent. S'il son repas en la quantité et à l'heure que
avait besoin d'aide, il prenait avec lui quel- l'abbé aura jugé à propos; qu'il ne sera point
que jeune frère. On donnait aussi des aides béni de ses frères et qu'où ne bénira poiut
aux autres olliciers du monastère qui en la portion qu'on lui donnera. Il n'était per-
avaient besoin. mis à aucun religieux de parler ni d'écrire à
23. Il n'était pas permis à un religieux l'excommunié sans un ordre exprès. Celui
d'en défendre un autre ou de le prendre sous qui faisait le contraire subissait la même pei- c»i. ix^i.
sa protection, fut-il sou proche parent; ni de ne d'excommunication. L'abbé devait avoir j^,,,.

frapper ou excommunier quelqu'un de sa pro- un grand soin des excommuniés, et envoyer


pre autorité. Cela regardait l'abbé ou celui à comme en secret des sages anciens pour les
qui il en avait donné le pouvoir. Mais tous exciter à une humble satisfaction. S'ils ne se
avaient soin de veiller sur la conduite des en- corrigeaient point, on les châtiait avec des
fants, et de les tenir sous une boime disci- verges, et enûa on les chassait du monastè- j,,,,.,

pline jusqu'à l'âge de quinze ans. Au delà re, de peur qu'ils ne corrompissent les au- „,,..

de cet âge, personne ne pouvait les châtier très. Celui qui était excommunié de l'Oratoi-
sans le commauJeuient de labbc. S'il se re et de la table commune, poui' quelques
trouvait quelque moine désobéissant ou vio- grandes fautes, satisfaisait en cette sorte :

lateur de kl Règle, les anciens l'avertissaient Prosterné en terre devant la porte de l'Ora-
en secret une ou deux fois, selon le précepte toire, durant la célébration du service divin,
du Seigneur. S'il ne se corrigeait point, on il gardait un profond silence ; mais, se tenant
le reprenait publiquement devant tous. Si, la tète contre terre et le corps étendu , il se
après tout cela il demeurait incorrigible
, jetaitaux pieds de tous ceux qui en sortaient,
on l'excommuniait, si l'on jugeait qu'il com- ce qu'il continuait jusqu'à ce que l'abbé ju-
prit la grandeur do cette peine. Mais s'il geât qu'il avait satisfait. Lorsque l'abbé lui
était endurci, on le punissait de peines cor- commandait de venir, il se jetait à ses pieds
porelles, c'est-à-dire de jeûnes ou de verges. et à ceux de tous les frères, afin qu'ils prias-
Les moindres fautes, comme étaient celles sent pour lui. Alors, si l'abbé l'ordonnait, on
que l'on fiiisait en manquant dans quelque le recevait dans le chœur, sans néanmoins
,,

170 IIISTOIIIE Gl5Ni;:HALK DES AUTEUllS ECCF.KSIASTIQUES.


qu'il lui pormis d'enlonncr aucun psau-
fiil ment que saint Maur quitta h* M(uit-Cassin
me, de aucune leçon ou de faire quelque
lire pour aller dans les Gaules; et uu billet qu'il lui

autre fonction jusqu'à ce que l'abbé le lui eût écrivitaprès son départ, en lui envoyant des
permis. A la fin de toutes les lieurcs de rOtQ- reliques renfermées dans un coU'rc d'ivoire
ce, il se prosternait à la place où il était, et où y avait eutr'aulres trois particules de la
il

satisfaisait de la sorte, jusqu'à ce que l'abbé vraie croix. Il est remarquédansTlùstoire que

lui ordonnât de ne plus continuercetle satis- saint Maur emporta aussi avec lui un exem-
faction. C'était aussi à l'abbc de prescrire le plaire de la Règle, écrit de la main même de
temps de la peine imposée ceux qui n'é- ;\ sou auteur, avec le poids de la livre de pain et
taient excommuniés que de la table commu- la mesure de l'hc'minc de vin que la Rî'gle veut

Cjt. nK. ne. On recevait de nouveau le religieux qui que l'on donne par jour à chaque religieux.
était sorti du monastère ou qui eu avait été 2G. On nous a donné diverses autres pièces *<«'i> i*»»-!

chassé par sa faute, pourvu qu'auparavant il sous le nom de saint Benoit,^ qui
J
sont com- ï°*',.' ^'•i,
l'ffoolt» Ton 1

promit de n'y plus rctomljcr. Ayant été ainsi munément rejelées comme
supposées et }.^,
,""'''^;

reçu, on le plaçait au dernier rang pour éprou- écrites plusieurs années après sa mort. La
ver son humilité. S'il sortait encore, on pouvait première est une lettre adressée à saint Ré-
le recevoir jusqu'à une troisième fois; mais mi, archevêque de Reims, pour le prier de
après cela la porto ne lui était plus ouverte. di'livrpr une possédée du démon, en ofl'ranl
iiuiT. Saint Benoît finit sa Règle eu disant qu'il pour elle à Dieu le saint sacrifice. Outre que
l'avait dressée pour donner, à ceux qui la le style est différent de celui du saint abbé
pratiqueraient des principes d'iuie vie hon-
, on convient aujourd'hui qu'il y a faute dans
nôtc et quelques commencements des ver- Ilincraar, et qu'il a mal rendu le texte de
tus religieuses; qu'à l'égard de ceux qui ten- Fortunat, le premier auteur de la VVe de saint
daient à la perfection, ils en trouveraient les Rémi. Fortunat ne dit point que saint Be-
règles dans les Conférences àcCusûcii. les Vies noît ait envoyé cette possédée à saint Rémi
des Pères, et dans la /iègle de saint Basile. Il mais seidcmcnt que les parents de la fille, qui
est clair qu'il avait puisé lui-même dans ces s'étaient présentés au tombeau de l'apôtre
sources pour se perfectionner et pour former saint Pierre à Rome, voyant qu'elle n'y avait
la liègle qu'il nous a laissée. point été délivrée, étaient passés de là àReims Molitllon.
l'itn. I Aoiial.
Éiopedn 2i. Elle est écrite avec beaucoup de net- avecdes reconiuiaudations du béni serviteur pjf. 61.

cic-ostnigie. tetc et de prudence, haïut Gregou'e-le-Graud de Dieu, qui veillait à la garde des reliques
y renvoie ceux qui désirent savoir quelle
' de cet apôtre. Ce qui fait voir clairement l'er-
a été la vie de ce saint législateur, disant reur d'IIiucmar, qui au lieu de prendre le
qu'il n'avait pu oascigner aux autres que ce mot de béni pour un adjectif, en a fait le nom
qu'il avait pratiqué lui-même. Gùme de Mé- propre do saint Benoît. La seconde pièce est
dicis, grand duc de Toscane, la lisait assidue- un éloge de saint Placide, où on rélève sa
mont. Comme on lui eu demandait un jour constance dans les supplices qu'il eut à souf-
la raison -, il répondit (ju'il en trouvait les frir pour la foi. Il fait partie de la Vie de ce

préceptes si remplis de discrétiou, qu'ils lui saint dans Surius, qu'on dit avoir été écrite
paraissaient très-propres pour lui aider à par le moine Gordien, disciple de saint Be-
gouverner ses sujets. Il institua même uu noit. Mais le grand nombre de fautes dont
ordre de chevaliers, à qui il donna pour rè- celte IVecst remplie l'ont fait rejeter comme
gle celle de saint Benoît. une pièce sans aucune autorité, et composée
L^riro ei
2o. La /lèi/lc cst Ic scul monument qui
"^ ^
nous longtemps après par uu imposteur qui s'est
rtaton do

'i"',ul
reste de lui, si l'on en excepte une petite, mais donné la qualité de disciple de saint Benoit,
J'iL/n^Mi!'
'cndre exhortation que ce saint abbé fit à ses et fait mal à propos le compaguou de saint Molli, Ititd.

r>g. bc.
religieux pour essuyer leurs larmes au mo- Placide dans son voyage eu Sicile.

' Yir Dri liencdictus scripsit monachorum Rc- Elritriœ dux, cur assidue I\ognlain sancti nenc-
gulam prœcipuam, scrmone luculen-
diacrelionf. dicli versarel in manibus rcupondii i»tud se fa-
,

tam. Cujwi si qiiis iielil subUUus mores, vilam- ccrc quod scilicel ex lam prudcntihus snncli Pa-
que cognoscere, potcsl in cadcm insliluUone llc^ulaj Iris prœscriplionibus ad populos suœ /idri con-
omnes mnijisli'rii illiiis actus inrenire quia ; credilos volds nccommodala média cnpcrel. Is
sanctus vir nnllo modo
pnluil aiiler dnccre, i/uam est, qui suh eadem Hogula Ordiurm equilum iiir-

vixil. lirfg. lil). Il Dialog., cap. xxxvi. slituit. lix TliniiK« (ialt'ti lihro nul iiisscribiliir : fte-
5 Inlerrogalus- Cosmiis! de Medicis ma g nus ligiosus, cnp. i.
,

[vr siKn,i;.| CIIAITI'III'; XI. — KIMIIIICM, PATltlAltCllK D'ANIKHIIII.;, ÎCTC 171

CHAPITRE XI.

Ephrcm ', patriarche d'Antiochc [vers l'an 546], saint Barsannphc , anachorète

[vers l'an 550], Enstathe le moine [an Vl siècle].

1. Kplircm -, quoique syrien do nation et vengeait l'honneur de saint Léon et de sa


É,.,.
de langage, possédait assez bien la langue lettre à Flavien contre les termes indécents
grecque. Apr6s avoir passé par diverses char- de ceux de celte secte et y soutenait l'usage
,

ges de la magistrature, il parvint A la dignité du Zéuobius, séparé de l'Eglise,


Tris'ujiun.

de comte d'Orient. Il en était revêtu dès l'an prenait pour prétexte de son schisme de ce
526, lorsque la ville d'Antioche, ou du moins que l'on avait divisé depuis peu cette for-
la plus grande partie de cette ville, fut ren- mule de louange. Mais Ephrem faisait voir
versée par un tremblement de terre' arrivé que les Orientaux attribuaient cette louange
le 20 du mois de mai, qui était un vendredi, à Jésus-Christ et qu'ainsi ils ne péchaient
,

vers sept heures du soir. Plusieurs person- pas lorsqu'ils ajoutaient à ces paroles: Saint,

nes furent enveloppées dans les ruines de saint , saint ,Qui est crucifié pour
celles-ci :

Eupbra-
cette ville, cnlr'autrcs le palriarche nous que ceux de ConstanSinople et les Occi-
;

sius. Les grandes libéralités qu'Kphrcm fit dentaux, raiiportanl celle louange à la sainte
dans cette occasion, à ceux d'Antioche pour et consubstautiellc Trinité, ne pouvaient souf-
soulager leur misère, les Dt penser à lui pour frir que l'on ajoutât Qui est crucifié pour
:

remplir le siège épiscopal de leur ville que ,


nous, de peur qu'il ne parût que les trois per-
l'on nommait ' déjà Théopolis; il était non- sonnes divines fussent sujettes aux soull'ran-
seulement très -libéral envers les pauvres, ces; que dans plusieurs églises de l'Europe
. mais il avait encore un grand zèle pour la re- on mettait à la place de ces mots Qui est :

ligion catholique, dont il prit la déi'ense par crucifié pour nous, ces autres Sainte Trini- :

plusieurs écrits en grec, dont Pholius nous té, ayez pitié de nous. D'où il concluait que
a conservé des extraits ^. les uns et les autres, s'accordaut parfaite-
2. Il ne parle que de trois ouvrages d'l'> ment dans les autres dogmes de la religion,
phrem, parce qu'il n'eu avait pas vu davan- on ne pouvait, sur ces différents usages, qui
tage; mais il suppose clairement qu'il y en ne touchaient point au fond du mystère de
avait uu plus grand nombi-e. Les trois qu'il l'Incarnation, les accuser de penser différem-
avait vus étaient entièrement pour la défen- ment les uns des autres sur ce sujet. Il en
se des dogmes de en particulier du
l'Eglise, concluait aussi que l'on avait eu raison, de-
concile de Chalcédoine, dont les eutychéens puis un certain temps, de défendre d'ajouter
et les acéphales ne cessaient de combattre au Trisagiun ces paroles Qui est crucifié pour :

les décrets *. Il paraît que le premier livre nous parce que les hérétiques acéphales
,

était un recueil de diverses pièces. La pre- qui prenaient cette proposition en un mau-
mière lettre était adressée à un nommé Zé- vais sens, en prenaient aussi occasion de
nobius, scholastiqne ou avocat d'Émèse in- , maltraiter les fidèles catholiques. Photius re-
fecté de l'hérésie des acéphales. Éphrem y marque qu'i^phrem, dans la même lettre et

• On ne sait pourquoi l'auteur doune à cet iSvèque Léon: ce même fragment est reproduit avec traduc-
le uom do saiut uous l'avons suiiiiriuié. {L'éditeur.)
;
tion latine au tome IV de la Bibliotheca Nova,
2 Photius, Coilic. 228, pag. 77 i. pag. G3. Les Scriptores vetçres du même t^dileur,

s Clironic. Kdessen., tom. 1 Bibliotlt. orient., tom. VII, eontienuentun fragment du livre III Con-
pag. 41t. tre Se'vtre, un fragment d'un discours sur ces paro-
» Fvagr., lib. IV Uist., cap. VI. les de l'Apôtre Omnia experlus sum absque solo
:

Phot., Cod. 228, pag. 774.


5 pecc«(o, et plusieius fragments du Discours sur la
8 Angd'lo Mai a pulilii'; eu grec dans les Classici perle. Tons ces fragmenis sont réimprimés au tome
auctores, tom. X, uu fragment de l'Apologie du LXWVI de la Palroloqie grecque, col. 2099-2110,
eoucile de Cliakédoine et de l'Épitredu pape saint avec une Notice tirée de Fabricius. (L'éditeur.)
172 HISTCHHE GliNl'jRALE DES AUTEUUS ECCLÉSIASTIQUES.
dans SCS autres écrits, compte pour le cent raient dans le désert ; une troisième où il

soixante-sixième canon, celui qui est le se- faisait voir Actes du jugement syno-
que les
cond du premier concile de Conslantinopic, dal d'Antioche ne renfermaient rien que
avouant qu'il ne sait qui pouvait avoir in- d'exact sur les dogmes de la foi une qua- ;

duit ce Père dans cette erreur. Ephrem re- trième adressée à .\nthime, où, après avoir
marquait, dans le premier chapitre de sa approuvé la sentence rendue contre lui dans
lettre, où il entreprenait la défense de celles ce concile d'Antioche, il témoignait consen-
de saint Lfon, tant h Flavien qu'à l'empereur tir qu'on le reçût à la communion de l'Égli-

Léon, qu'il ne fallait pas comparer ce que ce se, pourvu qu'il condamnât la personne d'Eu-
Pape avait dit de l'Incarnation, avec ce que tycbès et ses erreurs; une cinijuième à Do-
les anciens Pères avaient dit de la Divinité, mitien, sur la manière dont les deux natures
mais avec les endroits où ils ont parlé de sont unies en Jésus-Christ, montrant qu'elles
l'Incarnation. Après quoi il démontrait que étaient unies eu une seule et même person-
saiut Léon a reconnu, dans ces deux lettres, ne, en sorte qu'elles ne faisaient pas deux
que c'est le même qui est Fils de Dieu et Fils personnes, comme Pierre et Paul en font
de riiomme en sorte que, par l'union des
; deux. Dans la sixième, qui était à Syncléti-
deux natures en une seule personne, il est que de Tarse, il rapportait plusieurs passa-

passible et impassible, immortel et sujet à la ges des Pères, entr'autrcs de saint Cyrille et
mort qu'il y a condamné nettement Nesto-
;
de saint Grégoire de Nazianze, pour montrer
rius, et déclaré qu'on devait le priver de la qu'eux et les Pères de Chalcédoine avaient
communion de l'Église pour avoir osé dire reconnu l'union des deux natures en une
que la Bienheureuse Vierge n'est pas mère seule personne. Dans la septième, adressée
de Dieu, mais seulement mère de Thomme, à Anthime, évêquedeTrébizonde, il combat-
que ce saint Pape appelle, dans ces lettres, tait l'eri'eur d'Eutychès, et donnait beaucoup

en termes exprès, Marie mère de Dieu et ; de louanges à Justinien, comme à un prince


cela d'une manière plus expresse que n'ont pieux et catholique. Il y combattait aussi les
fait avant lui les Pères de l'Église. Il prou- évéques du faux concile d'Éplièse, qu'il ap-
vait, dans le second chapitre, que les expres- pelle un brigandage, disant qu'ils avaient
sions dont saint Léon s'est servi pour mar- enseigné, comme Eutychès, qu'avant l'union
quer la ditférence des natures et des opéra- il y avait deux natures en Jésus-Christ, mais

tions, étaient conformes à celles de saint Gré- une seulement depuis l'union. La huitième
goire de Nysse de Jules romain, et à la doc-
, était écrite à un persan, nommé Brasès, qui
trine de saint Cyrille; qu'en un mol, il n'avait l'avait prié de lui expliquer le mystère de la
rien dit qui marquât (jue les natures ne fus- sainte tl consubslaulielle Tiinité par les pa-
sent point unies en une seule personne. Il fai- roles seules de l'Écriture. Eplirem lit ce qu'il
sait voir dans le troisième chapitre que les ,
souhaitait et ne produisit dans cette lettre
termes employés par ce pape pour marquer la d'autres passages que de l'Ancien et du Non-
distinction des deux natures en Jésus-Clirist veau Testament. Mais dans la neinièmo, qui
ne signifiaient pas qu'il y eut deux Fils, mais est adressée à des moines dont les sentiments
seulement deux natures unies d'une union in- n'étaient point orthodoxes, il tâche de les ra-
séparable, n'ayant,employé sur cette matière mener à la saine doctrine, en leur montrant
que des façons de parler usitées dans l'Écrilu- par les témoignages des saints Pères, les
l'C et dans les Pères, nommément dans saint opérations différentes des deux natures en
Ignace, dans saint Alhauase, dans les deux une seule personne. Il y ajoute qu'il sullil de
tîrégoire et dans saint Basile. Épbrem rappor- croire que Marie est mère de Dieu, et qu'elle
lait, dans les cinquième chapi-
quatrième et est demeurée vierge. La dixi '"me lettre était

tres, les diverses expressions de ces Pères et la Synodiqiie d'un concile tenu par Ephrem

quelques-unes d'Isidore de Péluse, montrant coutre Synclétique, évoque de Tarse, et con-


que celles que les hérétiques censuraient tre lemoine Etienne, son syncelle qui s'é- ,

dans saint Léon étaient toutes semblables. taient tous deux laissés entraîner par quel-
s.iii.d« 3_ A la lettre écrite à Zéuobius, Ephrem ques écrits dans l'erreu:' d'EuIychès. U l'tait
prfinier liTre

' en joignait plusieurs autres, dont il y en marqui'danscette lettre qiie Synclétique avait
'l^t^it'i.'"

avait une l'empereur Jiistinicn, dans la-


;'i été contraint d'abjurer son erreur avant la lin
quelle il faisait l'éloge de la piété de ce du concile, où l'on avait fait voir que saint
prince une touchant les moines qui demeu-
;
Cyiiile, en disant qu'il n'y a qu'une nature du
[viVsiiVcxE.] ClIAPlTnK XI. — KPIIHEM, PATRUncWE D'ANTIOCIIK. ETC. 173
Vcrbo incarné, avait prif? le Icnne ilo nnhtre et dans sa Eidoge; de saint Amphi-
lettre h
pour celui de personne; qu'en d'autres en- loque d'Iconc, et de saint Ambroise, Dans
dioils de ses ('ciils il reconnaissait ehiiieinout son second traité, ÉpIirem répondait h ces
deux natures; el que telle ('lait la dneirine de cinq questions du scholasliiiue Anatolius;
l'l';i.;lisc. Celte lettre était suivie d'une autre la première Si Jésus-Christ est encore chair?
:

A Magnus, ($vè([uc dodans laquelle


B(5rée, la seconde Comment, étant descendu d'A-
:

É[»lneni justifiait la doctrine du quatrième dam il peut être immortel? la troisième:


,

C(UK'ile i;('néral, c'est- i"i- dire de Gliali'doi- Quelles preuves l'on peut alléguer que saint
ne, savoir que Jésus-Christ est compose; de Jean l'évangélistc ne soit pas mort? la qua-
deux natures et montrait que l'on n'avait
; trième : Comment Adam, s'il a été créé im-
fait usage de cette proposition // n'y a qu'une
: mortel, a pu ignorer ce qm' lui était utile ? la
nnlnrc du Verhe incarné, que contre ceux qui cinquième Quel est le sens de ces paroles
:

séparaient les natures, et non pas contre ceux de Dieu Voilà qu'Adam est devenu semblable
:

qui les distinguaient, mais en reconnaissant à nous? Sur la première question, il prouve
qu'elles étaient unies en une seule personne. par divers passages de l'Ancien Testament,
Il y avait une douzième lettre au moine Eu- que J/'sus-Christ a eu une véritable chair, et
noïus sur la corruptihilitc et l'incoiruptihi- par divers endroits du livre des Actes des
lité, où Eplirem prouvait que les Pères s'ac- apôtres, qu'il conservée depuis sa résur-
l'a

cordaient parfaitement sur cet article; et rection. A quoi


ajoute que le sentiment una-
il

qu'ils avaient enseigné unanimement (pi'A- nime des docteurs, est que Jésus-Christ est
dam, avant sa chute, avait eu une chair in- venu dans la chair, qu'il y est encore, et qu'il
corruptible, mais qui d'ailleurs était en tout doit la conserver jusqu'à son second avène-
semblable à la nôtre. Ces douze lettres étaient ment. Il enseigne sur la seconde, que Soit que
suivies de huit sermons le premier sur la
; l'on dise qu'Adam ait été créé mortel ou im-
fête des Prophètes; le second sur celle de mortel, n'en est pas moins vrai que ce n'est
il

Noël; le troisième sur les jeûnes de l'année; pas Dieu qui a fait la mort, mais que l'hom-
le quatrième pour les catéchumènes ; le cin- me 'qui est libre de sa nature s'est livré lui- ,

quième sur la fête de saint Michel archange même à la mort par son péché, pouvant ne
qu'on célébrait ù Daphné, faubourg d'An- pas mourir, n'eût pas péché. Il répond à
s'il

tioche le sixième sur le Carême le septième


; ; la troisième, que l'on sait par tradition que '

sur un dimanche de Carême le huitième aux ;


l'apôtre saint Jean n'est point mort, non plus
néophites dans les quatre premiers jours de qu'Elie et Enoch, en disant que l'on peut ap-
leur baptême. puyer ce sentiment sur ce que Jésus-Christ
so^cni II-
4. Le second livre d'Éphrem
^ contenait qua-
^
dit à saint Pierre, qui lui demandait, que
tre li Ki.lircil),
i^iç. -«li.
tre traités. Il justifiait dans le premier traité deviendrait cet apôtre Si je veux qu'il de-
:

certaines expressions de la lettre de saint meure jusqu'à que je vienne, que vous im-
ce
Cyrille à Successus, d'où il prenait occasion porte ? Que l'on ne peut pas néanmoins con-
de combattre l'hérésie des sévériens, mon- que saint Jean soit immortel, mais
clure de là
trant que ce Père, dans cette lettre comme seulement inférer qu'il a été réservé avec
dans tous ses autres écrits, reconnaissait en Enoch et Elle pour le second avènement de
Jésus-Christ deux natures unies sans confu- Jésus-Christ. Il s'objecte qu'Eusèbe de Césa-
sion en une seule personne. En effet, saint rée, a marqué dans son Histoire ecclésiasti-
Cyrille, pour expliquer l'union des deux na- que, que saint Jean a vécu jusqu'au règne do
tures, se servait, dans sa lettre à Successus, Trajan, par où il semble fixer le temps de
de l'exemple de l'homme, où le corps et la mort de cet apôtre. Mais il répond que cet

l'âme, qui sont deux natures différentes, historien ne parle que des années que saint
sont unies en une seule et même personne. Jean est resté sur la terre que l'Écriture ;

Ephrem confirmait cette doctrine par plu- marque également le temps qu'Enoch a vécu
sieurs passages des Pères, nommément de en ce monde, et que de môme qu'on ne peut
saint Grégoire de Nazianze, d'Eustathe d'Au- en conclure que ce patriarche n'a point été
tioche, d'Anliochus de Ptolémaïde, de saint transporté avec son corps, on ne peut non
Cyrille, dans son Commentaire sur saint Jean, plus inférer la même chose de saint Jean

' Virginem aulem Joaniiem sic superesse, ut Evangelio habetur, in hune sensum trahitur.
Enoch et Eliam, truditione habemus, et quod in Eplirem apud Pliot,, Cod. 229, pag. 798.
ni HISTOIRE Gl'^NKRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES. t
sur ce quen dit Eusèbe qu'au reste, ceux ;
connaissait que cinq qui se fussent servi de
qui ont laissé par écrit l'histoire de la vie cette façon de parler // n'y a qu'une nature :

et des actions de cet apôtre, racontent qu'il du Verbe incarnée, savoir saint Grégoire de'

disparut tout d'un coup. Nous n'avons plus Néocésarée, saint Alhanase, le pape Jules,
ces Actes. Éphrcm ajoute que cette ques- saint Cyrille d'Alexandrie et Eréchthius. Ce-
tion n'appartient pas à la foi', mais qu'il pendant il faisait voir qu'ils avaient reconnu
est toujours avantageux dans ces sortes , les deux natures, et que quand ils avaient

de disputes, de prendre le bon parti. Il dit, dit :i'nc nature du Verbe incarnée, ces Pères
sur les deux autres questions d'Anatolius, avaient pris le mot de nature pour celui de
qu'il n'y a pas lieu de s'étonner qu'Adam, personne. Nous avons remarqué ailleurs que
quoiqu'il eut été créé immortel, n'ait pas Léonce de Bysance regardait comme suppo-
connu ce qui lui était avantageux, puisque sées les lettres qu'Ephrem cite du pape Jules, ,

même et que l'on devait porter le même jugement


=
la au diable et à
ctiose est arrivée
ses anges qui avaient été créés immortels ; du Discours sur la consubstantialité, qu'il al-
qu'à l'égard de ces paroles Voilà qu'Adam : lègue dans le traité suivant. Il n'y a plus de
est devenu semblable à nous, elles sont une raison de lui attribuer le livre de l'Union des
ii-onie dont Dieu s'est servi pour reprocher deux natures en Jésus-Christ, qu'on ne con-
au premier homme sa faute que l'Ecriture ;
naît point d'ailleurs. Gennade et Honorius
parle souvent de semblables reproches que qui parlent de Jules, ne lui donnent point
Dieu fait aux péciicurs ou que si l'on veut ; cet écrit, et il ne lui est attribué par aucun
ne pas prendre ces paroles dans ce sens, on autre écrivain , avant Ephrem d'Anliochc.
peut dire que Dieu parlait en cet endroit, Dora Contant - rapporte un passage d'une
suivant la fausse imagination d'Adam, pour cinquième lettre du pape Jules, où il est
le couvrir de honte de ce qu'il avait osé ten- parlé de l'union de la divinité de Jésus-
ter de devenir semljlablc à lui. Christ avec son humanité, remarquant qu'il
Le troisième traité d'Ephrem, renfermait était tiré d'un traité apologétique, composé
un grand nombre de passages, tirés des ou- par un Arabe, en faveur de l'hérésie des
vrages des Pères qui ont vécu avant le con- eutychéens; et qu'il n'y avait pas lieu de s'é-
cile de Chalcédoine, pour montrer que le dé- tonner que l'auteur l'eût cité comme d'une
cret qui fui fait, touchant les deux natures cinquième lettre de Jules, parce que, sui-
et l'unité de personne, ne contient point une vant le rapport de Léonce de Bysance, les
doctrine nouvelle, puisqu'elle est la même sectateurs d'Apollinaire en avaient composé
que celle que tous ces anciens écrivains ont sept sous le nom de ce pape. Ephroni conti-
enseignée. Il citait saint Pierre d'.Mexandrie, nue dans le quatrième traité qu'il compo-
,

saint Athanase, saint Basile, saint Cyrille de sa pour retirer de l'erreur certains moines
Jérusalem, les trois saints Grégoire de Néo- d'Orient qui croyaient que la Divinité avait
césarée, de Xazianze et de Nysse, saint .\m- souU'crt, à montrer par plusieurs passages des
philoque, saint Ambroise, saint Chrysostôme, Pères, qu'il y a en Jésus-Christ deux natures
saint Épiphane, Proclus, Paul d'Emèse, Atti- ditrérentes, la nature divine et la nature hu-
cus de Constantinople, et saint Cyrille d'A- maine, et qu'elles ont chacune leurs opéra-
Vojri tcni.
lexandrie. 11 citait encore les livres de saint lion. 11 en rapporte un d'Ephrcm de Syrie , , 3.'.

Denys l'Aréopagite, le quatrième livre de lu tiré de son livre de l'Incarnation et de son ,

Foi et de l'unité d'IIilaire!, évéque] de Caba- Discours sur la perle évangélique. 11 cite aussi
les ; les écrits de Cyriacus, qu'il disait avoir les lettres de saint Siméon ,
qui fut tué dans
assisté au concile de Nicée, en qualité d'évc- une l'ile de
sédition arrivée à Cion, ville de
que de Paphos quelques lettres du pape
;
Célébos en Asie une de saint Baradat à
, ;

Jules, avec un livre de l'Union de la divinité et Basile, évoque d'Antioclie; une autre adres-
de ta chair en Jcsus-C/irisf, et un traité d'Ei'é- sée à l'empereur Léon cl une quatrième de ;

chlhius. Mais de tous ces écrivains, il u'en Jacques à l'évèquc Basile.

' Vnnm rernnaluiam Yerbiincarnalam contra tiiiii liis rrrfci's ; l'nam appcUarr decci, ne jiolius
^csl<lriuru adiluccns Ctjrillus, non lollil divisio- canfilcri Verdi iialuram cl hyposlasin incarna-
nriii naliirtinim, scd dualitalem liijpostasi'um. tam. Iliiii., i>n^'. 81 i.

l'hiil., |ln^. Kll. Abittilur nalura; ni)nti)it: jiro liy- * Coulant., Episl, décret, in Appcud., png. 82.
(Mii'Uii'i Alhanabius Kiii^lolu t^d Juliuuuiu aposlu-
[vi° SIÈCLE.] CIIAPITHK XI. — i;PIII)KM, PATiUAUcnK n'ANTinr.HK, v:\r.. n.-.

iitfniccii.
.1.0 (lr<i:i-
5 pliolins ne rannorld
I
rien ni du Inti- lettre d'Ibas, et de
de Théodoret con-
l'écrit
' " ''""
sit'-nie livro d'I'.pliroiii tr.\iitiui'lic, ni des dis- Ire les douze analhèums de sain! Cyrille, fin
couis (|u'il avait vus ilo que lui : ce (jui l'ail obligea tous les évéqucs à y souscrire. Mucl-
luuis n'en avons aucune connai.'^sance. Vers qucs-iins en firent dilliculté Épliiem d'An- :

l'an 53U cet i5vèque lit un voyas^'c en Pales- tioche fut de ce immbre; mais, voyant qu'on
tine avec Eusèbe ileCyziqno, Hypacc d'i'J- le menaçait de le chasser de son siège il ,

plièso et le diacre Pelade, pour ladi'position y souscrivit. Il inourui quelque temps après,
de Paul d'Alexandrie. .\ sou relour ', six moi- et eut poui- successeur Donmus. Les extraits
nes oi'tliodoxes, chassés de leur Laurc par que Photius nous a conservés des livres
l'abbé Gélase, vinrent ;'i Aiitiochc lui racon- d'Éphrem font voir qu'il était très -versé
ter ce (pii était arrivé. Ils lui montrèrent les dans la leclurc des écrits des l'ères, et qu'il
livres d'.\nlipater de Bosrc. Le patriarche, y était théologien.

ayant lemarqué les erreurs d'Origènc, infor- [7. Saint Barsanuphe passa quchiues an- saim n„.

mé de tout ce que les origénistes


d'ailleurs
'1
nées dans
1 . 1
monastère de Saint-Seridon,
le
r, . .

si-
(nnti(.lio, un...
'>'<•""

avaient fait à Jérusalem, publia une lettre tué près de Gaza, en Palestine, où vécurent
synodique, par laquelle il condamna la doc- en mêmetemps que lui, Jean le prophète,
trine d'Origène. Le moine Nonmis et les au- le bienheureu.x Dorothée et saint Dosithée.

tres origénistes, soutenus de quelques évè- L'amour de la contemplation le porta, en


ques, voulurent contraindre Pierre, patriar- 3iO, à se renfermer dans une cellule ccardie,
che de Jérusalem, d'ôter des diptyques le afin do n'avoir plus de commerce qu'avec
nomd'l-lphrem d'Antioche. Pour faire cesser Dieu. Ce fut là qu'il écrivit un traité contre
le tumulte que Nounus et les siens avaient les moines qui étaient tombés dans l'origé-
excité, le patriarche Pierre ordonna secrète- nisme. Les Grecs avaient tant de vénération
ment aux abbés Sophrone et Gélase de lui pour la mémoire de ce saint qu'ils mirent
présenter une requête, où ils le conjurassent son image dans la grande Église de Gons-
de ne point ûler des diptyques le nom d'É- tantinoplc, près de celles de saint Antoine et
phrcm. Ils le firent, et Pierre envoya leur re- d'Éphrem. Saint Barsanuphe est honoré le G
quête à l'Empereur, en lui marquant les dé- de février, avec la qualité de premier pa-
sordres que les origénistes avaient faits à tron, à Oria,prcsdeSponto, en Italie, où ses
Jérusalem. reliques furent transférées dans le lx" siècle.
Il fondam- Quclques anués après, c'cst-à-dirB, vcrs
6. Son Office se trouve au même jour dans les
l
ire- en l'an oiC, Théodore de Cappadoce, voulant Synaxaires des Grecs. Le cardinal Baronius
venger l'honneur d'Origène, et diminuer en a inséré son nom dans le Mm-tijrologe ro-
même temps le crédit du concile de Chalcé- main sons le M d'avriP. La doctrine de Bar-
'
doine, entreprit de faire condamner Théo- sanuphe sur les opinions d'Origène, d'Éva-
dore de Mopsueste qui avait écrit contre Ori- gre et de Didyme se trouve au tome LXXXVI
gène, et qui semblait avoir été approuvé par de la Patrolofjie rjrecque, avec une notice de
ce concile. Il représenta * donc à l'empereur Galland et une autre de Fabricius, col. 887-
Jiistinien, que pour ramener tous les acé- 902. Galland montre que saint Barsanuphe
phales, il ne s'agissait plus que de condamner a écrit son traité vers l'an SiO, sous le pon-
Théodore avec ses écrits, et la lettre d'Ibas :
tificat d'Aurélien, évèque de Gaza.]

parce que ce qui les choquait davantage, dans [8. Eustathe le moine est un écrivain du ki.-i.iic ;«

le concile de Chalcédoine, était qu'on y avait VI' siècle. AngéloMaïa publié * en grec une
donné des louanges à Théodore de Mopsues- lettre de ce moine à Timothée le scholasti-
te, et déclaré Ibas orthodoxe. Ce prince, ne que, probablement faux évoque d'Alexan-
le
s'apercevant pas de l'artifice de Théodore de drie. L'auteur des deux natures con-
y traite
Cappadoce, fit publier un édit en forme de tre Sévère, monophysite. C'est un savant trai-
lottie adressée à toute l'IOglise, portant con- té contre les monopbysifes. Il est reproduit
damnation des Trois-Chapitfes, c'est-à-dire au tome LXXXVI de la Patrologie grecque,
des écrits de Théodore de Mopsueste, de la col. 901-942.1

' Vita S. S,ib;c, pag. 3Gi et 3G.';. ^ Voyez Vie des sainls par r.odoscanl. (L'éditeur.)
- r'acuLidu.-;, lil). IV, cap, iv; Victor Tiiii. ad an. * ScriiJt. celer, nova, coll. toui. Vit, pa;;. 277 et
519, et Fucuud., lib. IV ad Jlociin., cap. iv. 291.
176 HISTOIRE GÉNÉHALF, DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.

CHAPITRE XII.

De Procope de Gaza, et d'an commentatenr anonyme snr l'Octatenqne.


[Vers l'an 54C.1

procopo da 1. Procope, surnommé de Gaza, d'une ville cope surl'Octatcuque ce qui comprend né-
:

"dTj''.r*D°éî
'^^ ^*^ nom, en Pliénicie, où il faisait sa de- cessairement le livre de Rulh. Le même Pho-
j'i>ui"""'i'"
lï't'ure, se rendit célèbre sous les règnes de tius parle de son commentaire sur les livres
>* u'Ûm'. Justin et de Justiuieu. Il était sophiste de des Rois et des Paralipomènes, et sur la pro-
profession, c'est-à-dire, rhéteur; mais il pa- phétie d'Isaïe, remarquant qu'il y traitait les
rait qu'au moins dans ses dernières années matières avec autant d'étendue, que dans ce
il se donna tout entier ;\ l'étude de l'Ecriture qu'il avait écrit sur l'Octatcuque, sans toute-
sainte. Pour en acquérir plus facilement Tin- fois fairede digressions inutiles, la longueur
lelligence, il lut '
non-seulement les diver- de ses explications ne venant que de ce qu'il
ses versions qui avaient cours dans l'Eglise, y rapportait souvent les divers sentiments
mais aussi les commentaires des Pères ortho- des commentateurs sur une même chose. Il
doxes sur l'Écriture, et les homélies des hom- s'en faut bien que ce qtie nous avons de lui
mes de piété sur le même sujet. Il mit par sur les livres des Rois et des Paralipomènes
écrit ce qu'ils avaient dit de particulier dans soit aussi étendu que ses autres commen-
leurs explications des livres saints, copiant taires. Ce ne sont proprement que des scho-
jnsqu'ù leurs propres termes, sans s'embar- lies, dans lesquelles il donne en peu de mots

rasser si leurs explicatioas étaient confor- le sens de la lettre. .\.ussi Jean Meursius qui

mes : ce qui composa un volume immense. nous a donné cet ouvrage, l'a intitulé Scho- :

11 l'abrégea en retranchant ce que plusieurs lies; ce qui donne lieu de croire que ce n'est

avaient dit sur une même matière, lorsqu'ils qu'un extrait de ce qu'avait vu Pholius. Le
s'étaient rencontrés, et en expliquant en peu Commentaire sur /saie est dans le goût de ce-
de mots les contrariétés qui se trouvaient lui sur rOctateuque. Dans l'un et dans l'au-
entre eux. Il crut que, de cette façon, l'on au- tre, Procope explique le texte en divers sens,

rait dans son recueil un corps parfait de com- et marque les dillerences des versions d'.\-
mentaires, d'où l'on pourrait tirer, comme quila, de Symmaque, de Théodotion et des
d'une seule source, l'explication de toutes autres. 11 les marque aussi dans son commen-
les Écritures. Pour plus grande clarté il ajou- taire sur les Rois elles Paralipomènes, où il
tait quelquefois du sien à ce qu'il avait trouvé cite souvent Josèphe, les Septante, le texte
dans les autres, mettant toutefois la réussite hébreu, l'interprétation des noms hébreux
de son travail dans le secours qu'il attendait d'Eusèbe de CJsarée, un dictionnaire hé-
de Dieu. braïque' et les élymologies romaines ou la-
Siti.nii. 2. Nous avons de lui un commentaire très- tines. Ses commentaires sur l'Eptatenquc ,

ditlus sur l'Eplaleuque, c'est-à-dire, sur les sur les Rois et les Paralipomènes ne sont pas
cinq livres de Moïse-, sur Josué et sur les Ju- suivis, et quelquefois il n'explique qu'un ou
ges. On avait apparenmient encore son Com- deux versets d'un chapitre mais sur Isaïe
;

mentaire sur le livre de Uulli du temps de l'ho- il ne laisse presque rien passer.
1*''. t'"Si puisque cet écrivain enaltribue un à Pro- 3. II pose pour principe que celui qui veut ' f ndioilf
«^'It

•l'rocop. Proleg. Comvient. in Gencs. et le Cantique des cantiques a été publié en grec
•Le Commenlaire sur la Genhc avait i\.é donné par Maï. Un les trouve traduits en grec et en latin
en latin par Gcsuor; Maï l'a <li>iiué en pref dans le au tome LXX.VVII do la Patrologie grecque, coL
tiiiiic VI de ses Classici auclorcs. La Chaîne grec- 1210-1780.
que publiée à Leipsik en l'i'i, contient plusieurs ' /« Tliecoc t;i (tictio:wiio hebraico expnnitur
variantes et plusieurs fragments inédits snr les li- pulsalio et clangor tubarum. Hrocop., in III Ucg.

vres de Moïse, sur Josué. les Juj,'C3, les llois elles e.ip. XIV.

Paralipomènes. Le Commenlaire sur les Proverbes ' Oporlet eum qui operam dalurus est Scrip-
[VI'" SlKf.l.K.I CKAPITIIK XII. — l'ROCtlI'K 1)H(JAZA. rn
s'ap|ili([ucr à l'étiido de ri']critiire sainte, no du de manger de tous. Il remarque (pie la jj;^""'''"'''

doit point regarder ce qui est dit, comme ve- prophétie faite dans le livre de l'Kxodc, tou-
nant de lu part des linminos, mais remonter chant la destruction des idoles, ('lait ac-
pins liant et croire t'ermenicnt fjiie les sacrés complie lorsqu'il écrivait, puisque ceux, qui
dogmes qui y sont dtablis tirent leur ori^nne auparavant les adoraient ii genoux, ne ces-
de Dion même qni nous les a transmis par saient d'en combattre le culte ;
que Dieu ne
le canal des lioniines. Il dit nettement qne révélait pas tout li ses prophètes, et que iMJ.iiaï.

Moïse est l'auteur du livri; ih; la (ienèsc; et souvent il leur cachait des choses qu'il leur
pour donner A ce législateur tout le cr<''dit était utile d'ignorer; que , selon quelques
ni'cessaire, ilremarquer qu'il a vu Dieu
fait interprètes, Samuel apparut véritablement iniii,.iR«j.

même autant que l'oeil de l'honune en soit


,,11 non que
a Saiil,
1 .* , . 1. • n • '"1'' XtTll',
la l'ythonisse 1 ait fait appa- ^'e»^
capable, et ([ue Dieu lui a parlé' l'ace à face, railce, mais parce que Dieu le fit voir ;\ ce
comme un ami a coutume de parler ;\ son prince. Procope semble approuver' le nii'ii-

ami. Il ajoute que ce législateur avait connu songe ollicieux, comme valant autant que la
par inspiration divine les choses passées, les vérité, par la bonne lin que se propose ce-
présentes et les futures. Il combat fort au lui (]ui le dit. « Il faut, dit-il, examiner le des-
long l'opinion des Grecs toncliaut l'éternité sein et le but des bons et des nuichants, et
du monde, montrant que si le monde est éter- juger par de la bonté ou de la malice de

nel, par une suite nécessaire, on doit avouer leurs actions. Peut-on ne pas reprocher h
qu'il est aussi sans principe attribut qui ne : Ih.'rode d'avoir dit vrai dans le meurtre de
convient qu'à Uicu seul. (]omme Procope avait saint Jcan-Captiste ? Et ne lui eût-il pas été
de la figure du monde une idée toute difft'ren- plus utile de mentir, après avoir juré une
te de la nôtre, il ne croit pas qu'il y ait des ' chose illicite, que de commettre ce meur-
antipodes , disant que s'il y en avait, Jésus- tre?» C'est ce qne dit cet auteur pour justifier n Beg.
32 et Hii|.
Christ n'aurait pas manqué d'aller leur prê- la manière dont Chusaï, ami de David, se

cher l'Kvaugile, et faire à leur égard ce qui conduisit envers Absalon qui s'était révolté
convenait pour le salut du genre humain. On contre son père. Procope convient que quel-
voit que de son temps les interprètes ne s'ac- ques interprètes désapprouvaient la dissimu-
cordaient pas sur l'époque de la periràssion lation dont Chusaï usa envers Absalon, en
accordée à l'homme de manger de la viande ;
lui otlrant des services qu'il semble n'avoir
mais il paraît adopter le sentiment de ceux pas voulu lui rendre. Pour lui il croit que
qui enseignaient qu'il avait'été permis d'en l'on peut interpréter en bien sa conduite,
manger dès le commencement du monde -. parce qu'il avait pour but de maintenir Da-

« Il n'est pas probable, dit -il, qu'Abel eût vid dans la possession de ses droits et de ses
offert à Dieu des sacrifices d'animaux dont ,
états. Au reste la doctrine de Procope, sur
il aurait eu lui - même horreur de manger les matières agitées dans son siècle, est très-
;

et comment dès avant le déluge, Dieu au- orthodoxe. Il reconnaît qu'il n'y a en Dieu
rait-il fait la distinction des animaux mon- qu'une seule substance divine ^ du Père du ,

des et immondes, s'il eût également défen- du Saint-Esprit, et qu'une opération.


Fils et

turœ sacrœ, non accipere illa quce ibi trnduntur, les illius sœculi abstineant carnium esu. qua ra-
quasi proveniant ex hominibus... linnil^r crcdat tione quœdam munda, quœdum immunda nuncu-
necesse est illa sacrosancta dogmaia ex ijjso ori- pantur. Idem, ibid., paf<. 100.
ginem suiiiere, Deo, et inde per hoiiiiiies quasi ^ Ignorantes mendacium, quod bonum finetn
canales ad nos promanare. Procup., Prœf. in pra-positum habet, veritati œquipollere. Bonorum
Gènes. enim et malorum consilium, et scopus inquiren-
Nec decet ut credamus aliquam terrain infra
' dus est, et sic inveniemus, ulruin bonum an ma-
nos coli noslro orbi oppositam tiarn si antipodes : lum sit. Quis enim veritatem Herodis. in cœde
forent, cerle Christus eo quoque profectus esset, Joannis Baptistœ, non merito reprehenderet ?
et cœtera qiiœ pertinent ad salutem humani gene- Cum enim illicitam' rem jurasset, satius fuisset
ris ibi perfecisset. lilem, tu Gènes., caji. i, pag. 19. mentiri, quem ccedem facere. Procop., in II Reg.,
^ Si esus carnium non in usu fuit, quare tra- pag. i;!9.
ditiir ovium paslor fuisse Abelus ? Et quare vic- * Focit Deus fimianipntuui quœ non obiter in- :

tiinisex ovili petiCis placavit Deuin, si ipse illis terjecM sunt : roluit enim ostendere non alium
vesci aversabaiur? ijuare imperatur Noacho ut {(vli esse opificem, quam eum qui jusserit coclum
bina et bina compellat in arcam de mundis etim- fieri. Haud enim alius imperabat et alius creabat:
mundis, postea vero septem et septem ? Si morla- utrumque prœstabul Deus, nempe divina subs-
XI.
I

478 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.


En sorte, que lorsqu'il est/lit dans l'Eci ilure : Jésus-Christ, puisqu'il a dit lui-même : Sam
(jue le firmament soit fait, il ne faut pas s'i- moi, mus
ne jMuvez rien faire. Procope sur le
maginer qu'il y ait de la dilléreuce entre ce- second verset du chapitre seizième du qua-
lui qui a fait le lirmamont, et celui qui a trième livre des Rois, où nous lisons qu'A-
commande qu'il se fit ; d'où vient que le Fils chaz consacra son lils, le faisant passer par
ditdans l'Évangile Mon Père, depuis le com-
: le feu, suivant la superstition des idoles des

menremenl du monde jusqu'aujourd'hui, ne cesse nations, dit que l'on voyait encore de son
jmnt d'agir, etj'ayis aussi incessamment comme temps ' des restes de celte erreur et que, ;

lui : paroles qui marquent une opération dans quelques villes, on allumait une fois
commune au Père et au Fils. En expliquant l'année des bûchers au milieu des places
ce que Dieu dit à Moïse : Prenez de l'eau du publiques, et que non-seulement les enfants,
fleuve, répandez-la sur la terre sèclie, et tout ce mais aussi les hommes faits passaient au
que vous aurez puisé du fleuve se changera en travei'S de ces feux et dansaieut autour; et

sang, il enseigne que le Verbe de Dieu était que les mères dont les enfants n'étaient pas
représenté par cette eau ' qui marquait que assez forts pour passer eux-mêmes au tra-
comme l'eau tirée d'un fleuve est de même vers de ces bûchers, les portaient sur leurs
n;ilure que le lleuve même, ainsi le Fils est bras au milieu des flammes, comme pour les
de la même substance que le Père, c'est-à- purifier et les garantirde maux.
dire, qu'il lui est consubslantiel, étant vie de [4. Le tome VI des Classiciauctores de Maï, OuvrffM
piii>ii< 1"
vie, et lumière de lumière. Ce qui est ajouté renferme un abrégé d'un choix d'exégèses W. m»'
dcrcli'nsion de l'eau sur la terre signifiait l'Iu- sur la Genèse, par Procope'. Procope nous
cariiation du Verbe. Procope dit ailleurs que apprend lui-même qu'il avait exécuté deux
Jésus-Christ est composé ' de deux natures, grands travaux sur la Genèse dans le pre- ;

l'une divine et l'autre humaine et que c'est ; mier, il avait rassemblé sur chaque question
selon celle-ci' qu'il est prêtre; qu'encore les citations des anciens Pères ecclésiasti-
qu'il deux natures' en Ji'sus-Chiist il
y ait , ques sans y rien changer. Dans le second
demeure néanmoins un et indivisible par l'u- qui était un abrégé du premier, il se con-
nion de ces deux natures que nous suivons ;
tentait de donner uue analyse du sentiment
Jésus-Cluist' partout où il nous mène, soit des Pèies. C'est ce dernier travail que pu-
que nous nous éloignions, soit que nous nous blie ici Mgr Maï. Il renferme des données
approchions. Notre premier éloignemeut se fort importantes, soit comme dogme, soit
fait, lorsque nous passons de l'infidélité à la comme critique biblique. L'auteur y traite
foi le second, du vice à la vertu
: le troi- : successivement, et avec jjcaucoup d'érudi-
sième, de l'imperfection ;\ la perfection do tion, de la nature du monde, de la naissance
la vie, et il ne faut pas s'imaginer que tout de l'homme, de son libre arbitre, du péché
cela se fasse en nous sans le secours de , originel, du premier homicide, du déluge,

lanlia Patris, Filii et Spirilus Sancli. Ke igilur etindivisus manet utrisque naluris unitis. Idem,
lihiperegrinum cideulitr fi ileinceps audias Filium in Gènes., cap. xvii, pag. 132.
Vei corum quœ fada sunl esxe opificem. Inquit ' Chrislum, quocumgue nos ducat, sive receden-
enim : Pater meus aj Jioe iisque tempiis operatiir, tessive accedentessequimur. Prima aulem discessio
et ego operor. Qiiod ail : Ad hoc usque tempo- anobis ab inftdelitaU adfidem fil, secunda avitio
perpeiuilatcin operis vel conlinuam ope-
ris, etc., ad virtulem, terlia ex imprrfeclione ad pcrfec-
rationcm dénotai. Verum operatur et opeior, tioneni... A'ec vcro dira Christi opt'm fieri cogi-
operationis conniiunem socielalem edocent. l'ro- landum esl, cum ipseniet : Sine, me nou quicquam
cop. in Gènes., c.ip. l, p.ig. 22. agerc potesti?, dicat. Idem, in i\um., pag. 393.
' Vnius Dei seriiio representabatur per aquam ' Kt filios suos traduxit per igiicm videtur si- :

quœ cj II s rei S!'/»i""i. Num aqua e ftumine accep- gnificarespeciem erruris qui ad noslra usque tem-
ta significavil l'ilium ejusdem cuin l'aire essf sub- pora percenit. In quibuidam enim urbibus semel
slanliœ, id esl consubslanlialein. Idem., in Exod., in anno accensas jiyras per platcas quidam ins-
cap. IV pag. 228. pexerunl et per iî/n.s- Iransilienles et sallanlcs,
• Kam ex diiabus compoititus esl Chrislus na- non pueros modo, scd etiain viros. Infantes on-
turis, suhtdi il spi.'isa: tiœc humana, illa di-
e.r tem a matribus geslalos per flnmmam, niinirum
vina c.s(. Idem, in Exod., pag. 21l.i. prnpter depulsionem nuiloruni, el luslraiionem.
' Qitod ti'rn Filius, nempe Chrislus, sacerdos Idem, lili. IV yîc!;.,cap. xvnr, [Kig. 311.
dirilur, intelligeeum secundum humanilalem esse ' Voir les Annnirs de philosophie tome X.MII ,

nai-erdolcm. Mein, ni Gènes., cjip. xv, paR. 122. de la Collection. {L'àtitcur.)


* Licel diiir in Chrislo sinl naluro', lamcn unus
Ivi" SIÈCLE.] CnAlMTOE XII. — PROCOPE DE GAZA. 179

de raccioisscnicnt et do la dispersion du me les précédentes sur le manuscrit d'Augs"

genre liiiniain. rroco[)e vivait au vi" siècle, bourg. Nous avons aussi en grec et en latin
c'est doncla docliine de ce siècle et des pré- les Commentaires de Procope sur le prophète

cédents (lu'il nous représente; on y trouvera Isaïe, imprimés ;\ Paris, en io80, sur un ma-

en outre de bonnes leçons du te.vtc grec pui- nuscrit du cardinal de la Rochefoucault, par
sées dans les I/vxnjtles d'Origène. Nous re- Jean Curlérius. Le mémo commentaire se
grettons que le savant Cardinal n'ait pas tra- trouve marmscril dans la Bibliothèque du
duit cet Opuscule en.latin. Le môme volume duc de Bavière, à Munich, et dans la Biblio- o,„i„,i„.„

des Clnssici aiictorcs renferme des fragments thèque de Saint-Marc, à Venise. On cite un liim.""""'
sur le Caulii.jue des cantiques. Celte explica- autre manuscrit de la Bibliothèque de Leyde
tion est sculcmcnl ascétique, fort inférieure où l'on trouve quelques lettres de Procope
au Commentaire sur la Genèse , aussi il n'est de Gaza. Elles n'ont point encore été ren-
pas certain qu'elle soit de Procope. (348-378). dues publiques. A l'égard de celles qu'on lit,
Dans le neuvième tome on trouve 1° Une : sous le nom de Procope sopliislc, dans le Re-
explication sur les Proverbes, c'est une e.xpli- cueil grec d'Aldus, on n'a aucune preuve
cation morale et mystique, d'après les Pères, qu'elles soient plutôt de Procope de Gaza,
des Proverbes de Salomon en grec ;
2° Une que de Procope de Césarée, tous les deux
collection des commentaires de divers Pères ayant porté le nom de sophiste'. [Mais les
sur le Cantique des cantiques. Les pièces dont manuscrits qui les contiennent portent ex-
Procope donne des extraits sont d'un ano- : pressément le nom de Procope de Gaza.]
nyme, d'Apollinaire, de Cyrille d'Alexandrie, Photius ' attribue à celui de Gaza des Méta-
de Didyme, d'Kusèbe de Césarée, de Gré- p/t7'ases ou exjilications des vers d'Homère.

goire de Nysse, d'Isidore, de Rilus, d'Origè- L'éloge qu'il en fait, nous donne lieu d'en Turrhp. er.

ne, de Philon Carpathius , de Procope de regretter la perte. Turrien cite ces commen- rS."lvf'°.°w
"'
Gaza, de Théodore!, de Théophile.] taires sur les Proverbes, et ils sont cités par
Procope a imité dans ses Commentai-
5. Jean Curtérius dans sa Préface sur Isaïe ;
res ' brièveté et la beauté de ceux de
la mais ils n'ont pas encore été mis sous presse, '^"''
P'''-

Théodoret mais son style est trop poli et


; non plus que le Commentaire sur les douze
trop orné pour un commentaire qui demande petits prophètes, que l'on dit avoir été tra-
moins de travail et d'ornements. Ceux qu'il duit par le Père Garnier, dans le dessein de ^^'^•

a faits sur l'Eptateuque ont été imprimés en le rendre public. Gotfroid Oléarius, ayant
latin à Zurich en 1553 fol. de la traduction
, trouvé très-défectueuse la version que Con-
de Conrad Clausérus, qui en avait trouvé le rad Clausérus à faite des Commentaires de
teste grec dans uu manuscrit de la Biblio- Procope sur l'Eptateuque, en a donné une
thècjue d'Augsbourg. Il s'en trouve encore nouvelle sur un manuscrit grec, qu'il a en-
uu en cette langue dans la Bibliothèque du richie de notes. Nous ne savons point s'il l'a
Vatican, et un dans celle de Leyde. C'est faitimprimer. [La plus grande partie du to-
sur le même manuscrit que Clausérus a me LXXXVII de la Palrologie grecque , col. 1
donné en latin les commentaires de Procope pag. 20930, contient tout ce qui nous reste de
sur Josué, les Juges, les livres des Rois et les Procope. Les Œuvres de Procope sont divi-
Paralipomènes, à la suite des commentaires sées en trois parties et renfermées en trois vo-
snrlescinq livres de Moïse. Mais en 1620, Jean lumes. La première partie comprend 1° Une :

Mem'siusfit imprimer le texte grec des scho- notice sur Procope tirée de Fabricius. 2° Une
liesde Procope sur les Rois, et les Paralipo- dissertation de Jean Chrétien Gotlieb Er-
mènes à Leyde, in-4. La traduction latine est nesti sur les Commentaires de Procope ,
pu-
de Lavalérus et d'Hambergérus et faite com- , bliée ;\ Leipsik, en 1783; une préface de

' Maxime ad Thcodoreli brevitatem, venusta- pureté et la finesse du style que dans ce qu'elles
temque assurgit... diciio ab eo est optime quidem coutieuueut. Ces cent trois lettres sont traduites
exculla, sed comptior aliqiianto quam commen- en latin au tome L.\.\.XVI1 de la l'atrologie. col,
tarii prudiorem formam deceat. Phot., Cod. 206, 2177-2792. (Véditeur.)
pag. 527. ' Est item liber ejus integer homericonim vei-
* Viugt-deux autres épîtres ont été publiées en suum -Metapbrases variis dicendi formis coinmu-
grec, eu 17 lu, in-8,à VenUe,el Augélo JUiï eu a publié talœ, quœ summam viii cum dicendi factillatem,
aussi eent trois autres en grée seulemeut, parce tiim de<d(imitandi rim salis qucant ustendere.
que leur mérite consiste beaucoup plus dans la Piiot., Cod. lUO, pag. 338.
180 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Mai'. Viennent ensuite commentaires. On yles Il parlait de la Genèse et
véritable écrivain.
trouve d'abord son commentaire sur la Genèse de l'Exode, mais seulement en passant, s'é-
avec la traduction de Gesuer, et le texte grec tendant beaucoup sur la description du ta-
publié par Mai avec plusieurs leçons et frag-
, bernacle. Il parcourait aussi les écrits des
ments tires de la Chaîne de Leipsi k; 2° les com- prophètes et même ceux des apôtres. U avan-
mentaires sur l'Exode, le Lévitifpie, les Nom- çait que grandeur du soleil est de deux
la
]>res, le DeutérononiP, le livre de Josué, les climats, que les anges ne sont point dans le
Juges, les livres des Rois, les Paralipomèues ciel, mais au-dessus du firmament et qu'ils ,

d'après la version latine de Gesner et avec ont leur demeure parmi nous; que Jésus-
les tirés de la Chaîne de Leipsik
fragments ;
Christ montant de la terre au ciel, était resté
3° lecommentaire sur les Proverbes de Sa- entre le ciel et le firmament et que c'est ce
;

lomon avec le texte grec publié par Mai, et que l'on appelle le royaume des cieux. C'est
unevei"sion latine donnée par les éditeurs de tout ce que nous savons de cet ouvrage, qui
la Patrologie. n'est pas venu jusqu'à nous. Il était divisé
La seconde partie contient : 1° le commen- en douze livres, dont les six premiers étaient
Cantique des cantiques, texte grec
taire sur le adressés ii Pamphyle, le septième à Anasla-
d'après Mai et version latine par les édi-
, se, le huitième à Pierre. L'auteur n'avait dé-

teurs on y a joint des fragments de ce même


: dié les quatre derniers à personne. Il assurait
commentaire d'après un autre manuscrit ;
dans septième, que les cieux ne soulFri-
le

2° un commentaire sur le prophète Isaïe, d'a- ronl point de dissolution. Dans le huitième
près l'édition de Jean Curtérius 3° les épî- ;
il expliquait le cantique d'Ezéchias, et ce
tres, texte grec, d'après Mai, avec une traduc- qui est dit de la rétrogradation du soleil. U
tion laline des éditeurs de la Patrologie. Dans marquait dans le même livre qu'il avait ex-
la troisième partie on reproduit 1° Le pané- : pliqué le Cantique des cantiques. Ce com-
gyrique de l'empereur Auastase; ce discours mentaire est perdu.
est donné en grec d'après Villoisson, tom. II [7. Choricius, disciple de Procope de Gaza, ^1.'',°'^''^
^^
Anecd. grœc, pag. 28 et suiv. 2° la descrip- ; exerça lui-même l'art de rhéteur sous Justi- '''"

tion de la basilique de Sainte-Sophie, d'a- nien le Grand et égala son maître par le
,

près l'édition de Combéfis; 3° la Monodie nombre et l'élégance de ses écrits. J. A. Fa-


ou lamentation sur Sainte -Sophie renver- bricius en a publié deux dans le huitième
sée par un tremblement de terre. Elle est volume de sa Dibliothèqne grecque. Le premier
reproduite d'après Iriartc, Catalof/ne des ma- est un discours sur la mort de Procope la ;

nuscrits grecs, in-ïoL, pag. 264 et suiv. Ma- ,


traduction est de Wolf: l'autre est sur le
drid, 1769.] général Somnius; la traduction est de Guil-
commcDia-
ïcur aDonymo
c. Ou peut jjoiudre h Procnpe un commen-
i
laume de Hertoge. Harlès, dans la nouvelle
!ur lotiaico-
que. Piioliu^,
tatcur anonyme sur l'Octateuque,
.^ a
puisqu'au ' 1 1
édition, a oublié ces deux écrits : il promet-
Lod. 36, pg.
rapport de Pliotius il écrivait sous le règne tailde les donner dans les suppléments; mais
de l'empereur Justin. Son ouvrage était in- les suppléments n'out point paru. Villoisson,
titulé : ou explication de
/.ivre des chrétiens, dans le tnme 11 des Anecdota grœca, Venise,
rUclali'uqiie. On ne sait qui était Pamphyle, 1781, in-4°, a mis au jour, un discours funè-
à qui il l'avait dédié. Le style en était bas, bre sur .Marie, mère de Marcien évêque de ,

et la construction au-dessous du commun. Gaza, et d'Anastase, évêque d'Éleuthéropolis;


Avec cela l'auteur avançait quantité de pa- et un autre discours ou déclamation d'un ty-
radoxes insoutenables et plusieurs inepties rannicide qui demande une récompense pour
qui n'auraient pas dû se trouver dans un avoir tué un tyran. Villoisson a enrichi ces
écrit aussi sérieux. Il disait entre autres que discours de noies savantes ils sont précédés
;

le ciel ne sont pas d'uue ligure


et la terre de plusieurs autres fragments extraits de
ronde; que le ciel est en forme de voùlc ou Miiraire Chrysocéphalus. Iiiarle, dans le Ca-
d'arc, que la teire est [ilus longue d'un côté talugue de la bibliothèque de .Madrid indi- ,

que de par ses extré-


l'autre, et liée au ciel que un manuscrit qui contient dix-neuf dé-
mités; que tous les astres se meuvent par le clamations inédites de Choricius et quelques
ministère des anges, et plusieurs auti«s cho- aulrcs écrits. .Vngélo Mai a publié dans le
ses semblables ce quia fait dire à Photius
: tome V du Spiciieg. roman., pag. 410-463;
que cet anonyme devait être plutôt reganh- quel(]ues déclamations, des descriptions, des
comme un hommcî fabuleux que comme un dictions, une ('•pilaphc ou oraison d'un jeune
[vi« SIÈCLE.] CHAPITRE XIII. — JOBHJS, MOINE D'OHIENT. 181

liomniP, un païK'çyriqiio. La profaio du miV ciili-o autres cliosos cuii-iousns la dcsniplion

uie\oluuie,pat;. xxvii, iTiireiinc tiois seiilou- d'une liorlo^o cl d'une pcinUuc de la ville
CCS do Choricius. Dans ces pai'ties on trouve de Gaza, pag. 423.]

CHAPITRE XIII.

Jobias, moine d'Orient.

[Écrivain grec du vi" siècle.]

iobtus 6eri> 1. 11 j' a toute apparence que le moine Jo- divines Écritures attribuent la création de
v«ll .nnt !•
i4ntf de Jus* bius llorissait sons l'empire de Jnsliiiicu, toutes choses, comme on le voit dans le pre-
Udn.
puisqu'il t'crivit contre Sévère, faux patriar- mier chapitre de l'I-^vangile selon saint Jean, Joan, xtlt.

che d'.\ntioclie et chef des eutycbéens, ana- et dans les Epitres de saint Paul aux Romains Rom, xr, 36.

thémalisé plus d'une fois sousrègne de ce


le et aux Hébreux. Il demande pourquoi la ver- Ilclir. 1,2.

prince. Ce qui nous oblige encore à le mettre tu, la gloire et la puissance étant une et la
vers ce temps-l<i, c'est qu'il parle des écrits même dans la Sainte-Trinité il est dit dans
,

attribués à saint Denys l'Aréopagite, dont on l'Ecriture et dans les Pères que le Père a tout
n'avait pas ouï parler avant la Conférence fait pour le Fils, et non pas que le Fils a tout
des catholiques avec les sévériens,en 533. fait pour le Père. Il répond que c'est parce

S« <crll>. 2. Il ne nous reste rien de son traité con- que le Fils est appelé la droite, le bras, la
Fkol. CmI.
m, pag. &7S, tre Sévère; mais nous avons un grand nom- sagesse, le Verbe et la puissance du Père.
bre de fragments de celui qu'il avait intitulé : (( Mais pourquoi, ajoute Jobius, la rédemption
De l'Incarnation du Seigneur, divisé en neuf du genre humain ne s'est-clle pas faite par un
livres. Jobius l'avait entrepris ù la prière d'un ange ou par un homme? « A quoi il répond :

homme célèbre par sa vertu, qu'il ne nomme Les hommes ont tenté plusieurs fois cette ré-
pas. demption, comme on peut s'en convaincre
Ce qae eon. 3. Dans premier et le second livre, s'é-
le par les soins que Moïse et les prophètes se
tttnl l« livro
rie rlocerei- tant proposé de montrer pourquoi le Fils sont donnés pour procurer le salut aux Juifs;
lln> HlieLobl
s'était fait homme, et non pas le Père ou le mais que, leurs efforts n'ayant pas été capa-
Saint-Esprit, il en donne pour raison que le bles de sauver même un seul peuple, il leur
Fils, portant le nom à' Image du Père il con- , eût été impossible de racheter tout le genre
venait qu'il vînt réformer l'image de l'homme humain et de lier le fort, c'est-à-dire le dé-
et lui rendre la raison qu'il avait perdue, de mon, qui s'en était rendu maître que d'ail-
;

façon qu'il était entièrement penché vers les leurs l'on ne voit pas comment un homme
choses charnelles et terrestres. Il appuie cet- souillé lui-même aurait pu purifier ceux qui
te preuve sur ce que le Sauveur s'était trou- étaient coupables comme lui; que la rédemp-
vé, aussitôt après sa naissance, dans une tion ne convenait pas plus à un ange, à qui
étable, entre des bœufs et des ânes sur la ; il n'appartenait pas de mener en triomphe

parabole du filet jeté dans la mer, qui prend les puissances spirituelles, puisqu'élant de
toutes sortes de poissons, dont il dit que môme nature qu'elles, il n'aurait pu se faire
l'homme ne diÛere en rien depuis que, par obéir. Si saint Michel, disputant avec le dia-
le péché, il est devenu comme irraisonnable. ble pour le corps de Moïse, qui était un hom-
Jobius apporte encore d'autres raisons qui ne me juste, n'osa pas le condamner avec exé-
paraissent pas plus solides. cration, comment un ange aurait-il pu nous

litre,
TroUlème
ptg»
A. Il en donne une meilleure dans le troi- rendre enfantsadoptifs?L'autcurexamine, en
6>S.
sième livre, en disant qu'il était convenable passant, pourquoi les eaux de la mer llouge
que celui qui avait créé et formé l'homme, le se divisèrent au passage de Moïse, d'Élie et
réformât et le renouvelât après sa chute. Car, d'Elisée, et pourquoi les eaux sur lesquelles
encore que le Père et le Saint-Esprit soient Jésus-Christ marcha ne se divisèrent point. La
créateurs comme le Fils, c'est au Fils que les raison qu'il donne de cette différence est que
182 HISTOIRE GÉNliinALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
les eaux qui se divisèrent au passage des nir méchant, c'aurait été le priver de son libre
prophètes marquaieut les deux parties dout arbitre, et conséqucmment lui ôter le moyen
l'homme est composé, le corps et l'âme; et de mériter. Il répond , à la seconde, que no-
que celles qui ne se divisèrent point sous Jé- tre condition aurait été plus fâcheuse qu'elle
sus-Christ signiliaient l'indivisibilité de la di- n'est, si nous eussions été faits semblables
vinité. Cette solution, et plusieurs autres sem- aux anges, qui, depuis leur péché, sont sans
blables, justifient le jugement que l'iiotiusa espérance de leur pardon, puisqu'ils ne peu-
porté de l'ouvrage de Jobius, en disant que vent en faire pénitence, au lieu que nous
l'auteur n'y donnait pas des solutions' bien pouvons obtenir parnos travaux la rémission
fortes aux dilliculti's qu'il se proposait, et qu'il de nos fautes. « Il est vrai, ajoute-t-il, que
se contentait de ce qui pouvait satisfaire en nous tombons facilement dans le péché mais ;

apparence, sans approfondir la vérité. aussi nous nous en relevons facilement. Dieu
ihifl. [jj. 5. Jobius passe à une autre question : nous ayant laissé plusieurs moyens de faire
Pourquoi Dieu n'a pas racheté les hommes pénitence et donné toute notre vie pour
,

par sa divinité seule? Il en donne plusieurs la correction de nos mœurs ce qTi'ii n'a
:

raisons, dont la meilleure est que Dieu ne pas accordé aux anges. » Il dit encore que
nous ayant pas rachetés par sa divinité seu- ceux qui voudraient que Dieu eut créé l'hom-
le, nous devons croire qu'il n'a pas du le fai- me nécessairement bon réduisent sans y ,

re. Il montre qu'encore que Dieu soit tout- penser, l'homme à la condition des animaux,
puissant, il y a des choses qu'il ne peut pas en lui ôtant le libre arbitre, parce qu'il n'ap-
faire, parce que ce serait un défaut ou une partient qu'à une nature irraisonnable d'agir
imperfection de le faire. Par celte raison, Dieu nécessairement.
ne peut changer, il ne peut cesser d'clre bon, G. Jobius, dans le seizième chapitre (car F^.I34.
ni faire que ce qui est vrai soit faux. L'auteur il avait divisé son ouvrage en neuf livres et
avance que la rédemption de l'homme est une en quarante-cinq chapitrés) se proposait cet-
chose plus excellente que sa création, parce te question :,Pourquoi Dieu a-t-il fait l'homme
que la création s'est faite parune seule parole, de deux parties qui ont chacune une nature
au lieu que la réformation du genre humain dillérenle? Photius remarque que Jobius ne
ne s'est faite que par l'opération du Créatem- se tirait pas bien de cette dilBculté, se con-
môme qui par là nous a donné une mar-
,
tentant de rapporter les paroles des Pères,
que plus particulière de son amour poumons, et de dire qu'il était nécessaire que la subs-
jwn.iii, ic. ainsi que le dit l'apotre saint Jean Dieu a : tance terrestre fût ornée par l'union d'une
tellement aimé le monde qu'il a donné son Fils substance spirituelle, et que c'est pour cette
unique pour ta vie du monde. Il ajoute que raison que l'homme est composé de corps et
c'est avec raison que le Verbe s'est fait hom- d'àme. II revenait ensuite à la question de
me, et que cela était même nécessaire pour l'Incarnation, et demandait pourquoi le Ver-
notre salut, puisque tous les autres moyens be s'était fait chair. «Ça été, répondait-il, en
employés jusque-là avaient été inutiles. Les partie pour nous donner l'exemple de la ver-
prophètes, les princes du peuple, les mira- tu, en partie pour nous délivrer de la servi-
cles opérés sous leurs yeux, les bienfaits de tude du péché et nous rétablir dans notre
Dieu, ses menaces, les supplices dont il avait liberté, et eu partie afin d'ellacer le péché
puni les pécheurs, rien de tout cela n'avait qu'.\dam nous a transmis ' et qui avait com-
pu changer eu mieux le genre humain. Mais me eiïacé en lui l'image de Dieu, en l'acca-
pourcpioi, s'objecte Jobius, Dieu a-t-il permis blant d'une foule de passions charnelles. »
que l'homme devienne mauvais? Que ne le Jobius citait, à cette occasion, un passage

créait-il bon nécessairement ? ou enfin que ne d'une homélie de saint Grégoire, surnommé
le faisait-il semblable aux anges? Il résont la le théologien. Il remarquait, après cela, que

première objection en disant que si Dieu eut ce qui est commun aux personnes de la Sain-
fait l'homme bon, de façon qu'il ne pût deve- te-Trinité était souvent attribué, dans l'Écri-

' Ad hwc quandoquidem Adam, victus, Dei in se


• Non ita etiam recte in solutionibus procedit :

nain ut maxime
soliUiones in plerisque vesliget: imaginent innumeris carnù passionibus obruit,
in quihiii'dnm intérim solailliiiuie apparct. spe- et ad posteros noxam tranumisit, idcn carnem

cics sati.ifacit, ut nikil altius ad cerliorcm veri- Doniinus induit, .lob. apiid IMn'l., piig. r>!)l.
tatem pcnclrcl. l'hot., f oJ. 232, pag. 578.
[vi' siicci^.] ClIAriTllE. Mil. — JUUIUS, MOlNli D'OnnîNT. 183
ture, h uiiG personne en parliculicr; et qu'en- s'attachassent point aux choses visibles, mais
core que puissance de crder fùtcomiinuie
la qu'ils élevassent les yeux de leur esprit au-
au I*ère et au Saint-Esprit, l'Écriture l'atlri- dessus de tout ce qui est joint ù la matière.
Jniail au Fils, ciunme elle allrihuo quelque- Le dix-neuvième chapitre contient les
7. l'if. tas.

fois au Pi'^rc la r('(louiptioii (lu jrcnro humain, raisons qui ont empêché Moïse de parler do
(pioiquc ce soit le Fils qui l'ait opérée en se la création des anges. L'une, parce qu'il n'é-
faisant homme. En général, le Père est con- crivait que pour les hommes l'autre, parce :

sidéré dans l'Ancien ïestanient, comme


, qu'il voulait faire connaître le Créateur de
la cause première de toutes choses; le Fils l'univers par ses ouvrages sensibles et la ;

comme la chose agissante; le Saint-Esprit troisième, de peur qu'on ne crût que les an-
comme celle qui donne k l'être sn perfection. ges avaient créé le monde, s'il eût parlé
Jobius s'étendait beaucoup à montrer que le d'eux avant de parler de la création du
Saint-Esprit donne la pcifeclion; d'où il in- monde même comme en cfFct plusieurs des
:

férait que pour cela que les catéchu-


c'était Hébreux ont aux anges la création
attribué
mènes se revêtaient de blanc pendant les de toutes les choses qui sont dans le monde.
sept jours qui suivaient le baptême. Il mar- Il semble dire que c'est pour détruire cette

que en peu de mois tout ce qui se passait à leur erreur, que Dieu n'a point permis que les
égard. «On les baptise d'abord, dit-il '; en- anges apparussent aux hommes pendant les
suite on les oint d'huile puis on leur fait
;
trois premiers âges du monde, et il soutient
part du précieux sang, après quoi on les ad- qu'ils n'ont été connus des hommes qu'après
met i\ la communion du pain, n II établit, par les promesses que Dieu fit à Abraham sur
l'autorité de saint Luc et de saint Paul, l'u- le Messie, qui devait naitre de sa race. Dans
sage de donner premièrement le sang de Jé- les vingtième et vingt-unième chapitres qui
sus-Christ et ensuite son corps, en remar- composaient le quatrième et le cinquième li-
quant toutefois que le même apôtre, en d'au- vre, 'Jobius s'appliquait à faire voir qu'il était
tres endroits, parle du pain avant de parler plus convenable que le Fils, qui est l'immua-
du calice, et que la coutume de l'Église est image du Père, se fit homme
ble et naturelle
de présenter aux fidèles premièrement le pour nous racheter et nous purifier de nos
pain et ensuite le vin. Il ne faut pas s'éton- péchés.
ner que Jobius 'nomme pain et vin le corps 8. commençait son sixième livre, au
Il

et le sang de Jésus-Christ, puisqu'en même chapitre vingt-deuxième, où il examinait


temps il donne le nom de snng précieux h ce cotte question Pourquoi l'on attribue au
:

qu'il appelle vin, et qu'il nomme corps du Fils les qualités de créateur, de rédempteur
Seigiicnr ' ce qu'il avait appelé ;w/«, imitant et de juge ? Ce qu'il enseigne sur celte ma-
en cela les façons de parler de l'Apôtre dans tière se réduit à dire qu'encore que ces
sa première Lettre aux Corinthiens, où il dit : qualités conviennent également au Père et
icor. n,!6. I\"cst-il pas vrai que le calice de bénédiction au Saint-Esprit, on les approprie néanmoins
que nous bénissons communion du sang de
est la par excellence au Fils. Il traite au même
Jésus-Christ, et que pain que nous rompons
le endroit du rang des personnes de la Trinité,
est la communion du corps du Seigneur ? Car et après être convenu que cette matière sur-
nous ne sommes tous ensemble qu'un seul pain et passe l'intelligence humaine, il dit qu'il faut
un seul coi'ps, parce que nous participons tous à s'arrêter à l'instruction que Jésus-Christ nous
vn même piain. Jobius remarque que, lors de a donnée en la personne de ses apôtres, aux-
la consécration des mystères, on tenait aux quels il disait : Allez, enseignez toutes les na-
deux côtés ' de ceux qui les célébraient, des tions, en les baptisant au nom du Père, du Fils
éventails qui étaient la vue de ces m.ystères, etdu Saint-Esprit « Paroles, dit-il, qui mar-
:

afin que ceux qui devaient être initiés ne quent bien qu'en parlant des personnes de

' Primo baplizamur, deinde ungvento xingi- positum est : ideo qtii ab ttlroque latere sacris
mur, inde prelioso sanguine digîiamur. Sic pror- operantibus adstant, flabeUa supra oblata ibi
sus el mos est hœe adumbrans abluit primo: horrenda mysteria agitare, ut n- sinant initiâtes
aqua eos qui consecrabanlur ; mox induit el cin- rébus visis inhœrere, sed eos mentis ouulis supra
git; deinde confert olei unctionem et tumsangui- onine id, quod cum maleria conjunclunt est, sm-
ne axpergit, atque ad panis sumptionem adducit. blalos, l'aciunt per ea quœ videnlur ad invisi-
Idcin, pag. 395. bilem contempla tionem ascendere. Job., pag. 607.
' Çum corpus dominictim 'in sacra mensa pro- = Ibid.
IRi HISTOIRE GKNER.U,E DES AUTEUnS ECCLESIASTIQUES.
la Trinité, on doit mettre en premier lieu le rent, dit-il, ;\ cette conduite l'un pour adou-
:

Père, en second lieu le Fils, et eu troisième cir l'esprit des Juifs, l'aulie pour nous donner
lieu le Saint-Rsprit, sans que l'on puisse pré- l'exemple d'humilité. » Jobius, cite du martyr
tendre que la nature divine soit' susceptible saint Ignace, le passage où il est dit que le
en elle-même de supériorité ou de sujétion, prince de ce monde, c'est-à-dire le démon, ne
de division ou de singularité parce que le : connaissait pas la virginité de Marie, la con-
nom et l'unité se disent de la substance, et que ception du Sauveur, ni qu'il dût être attaché
la divinité est au-dessus de toute substance.» à la croix. Il s'étend sur la ditférence de la
11 cite en cet endroit le treizième chapitre manière dont nous connaissons en cette vie la
du livre des Aoms dicins, sous le nom de saint Trinité, d'avec celle donlcile sera connue des
n.w-vi,. Denys rAréopasitc, et dit en parlant du nom bienheuieux dans l'autre et sur les raisons
:

<•»•
de Saint que l'on donne à chaque personne, que l'on peut alléguer, pour expliquer com-
que saint Proclus,de Constantinople, ordonna ment il y a, tant dans le Nouveau que dans
que le Trisagion serait chanté avec cette ad- l'Ancien Testament, des endroits très-diffici-
dition Fvrt et immortel.
: les a entendre toutefois il parait croire qu'il
:

'•'• "'•
y. Sur la fin du sixième livre, et dans tout n'eu est ainsi, que parce que, s'ils étaient si
leseptième, Jobius traite de la Trinité, dont faciles à comprendre pour tout le monde, on
ilcherche des figures dans les Psaumes et en aurait moins de respect et de vénération.
dans les autres parties de l'Écriture. A l'oc- « D'ailleurs, ajoute -t -il. Dieu ayant obligé

casion des mouvements de la terre dont il y l'homme depuis sou péché à un travail péni-
est parlé, il remarque trois changements : ble, il doit l'employer non-seulement à ga-
l'un qui s'est fait de l'idolâtrie à la counais- gner ce qui est nécessaire pour la vie du
sauce du vrai Dieu par la loi l'autre de la ; corps, mais encore pour celle de l'àme. »
loià l'Evanjiile, qui nous a donné la con- 10. Il se propose deux questions dans le '''î' "'•

naissance du Fils et du Saint-Esprit ei le ; huitième livre. La première est, que si l'on


troisième qui ne se fera qu'en l'autre vie, où prouve qu'il y a en Dieu une personne du
nous aurons une conuaissauce parfaite de Verbe, parce que Dieu ne peut être sans
la Trinité, autant que notre nature en est raison; comment ne suit-il pas de là qu'il y
capable. enseigne que, si l'Écriture ne
Il a dans ce Verbe même un autre Verbe, et
nous a d'abord connaître que le Père, ça
fait aussi un Verbe dans le Saint-Esprit, puis-
été pour- détourner les hommes du culte des qu'ils sont Dieu l'un et l'autre Photins con- 'l

faux dieux, et surtout le peuple grossier, les vient que cette objection est très-dillicile à
plus inlelligcuts ue pouvant douter que lors- résoudre, et qu'encore que Jobius y ait ré-
qu'on nommait Dieu le Père, ce terme n'em- pondu en treize manières, il ne l'a fait que
portât avec soi l'existence d'un Fils. Il montre faiblement. Il ajoute que quand ses réponses
par plusieurs raisons, que le Père ne devait seraient capables de satisfaire des personnes
point s'incarner, et en donne d'autres qui ex- qui ont de la piété et de la religion, elles
pliquent pourquoi le Fils ne s'est pas fait n'en inspireraient point à un homme con-
homme dès le commencement du monde. Il in- tentieux qu'au contiaire, elles lui donne-
;

siste particulièrement sur ce qu'il n'était pas raient plutôt occasion de tourner en raille-
convenable d'apporter un si grand remède aux ries nos saints mystères. L'autre question est

maladies des hommes, et qu'il en fallait qui de savoir pourquoi le Fils et le Saint-Esprit
les guérissent peu à peu. Il insisle encore sur procédant également du Père, l'un est ap-
le danger qu'il y aurait eu que les idolâtres, pelé Fils et l'autre Saint-Esprit, et non pas
en voyant un Dieu-Homme, ne s'opiniâtras- tous deux fils. Il répond que les hommes ex-
sent davantage dansleurcidte superstitieux. priment comme ils peuvent les diirérences des
Il remarque que le Sauveur, eu conversant personnes divines, quoiqu'ils ne les compren-
parmi les hommes, se servait de paroles nent pas qu'au surplus, l'usage de nommer
;

humbles, pour leur cacher les rayons de sa génération l'origine du Fils, clprocession celle

divinité, se contentant de l'établir par ses du Saint-Esprit, et d'appeler l'un Fils, l'autre
œuvres miraculeuses. «Deux motifs l'engagè- Saint-Esprit, est fondé sur l'Écriture et sur

' Ipsa fecundum se divine natura neque jircé- localur. ^'umerus siquiriem et ttnilas de sitbslan-
poni, neque siihjici npla rsl. sed supra omuem tia dicuntur : divinitas vern siibslanlinm supcrut
lam numeri, iiuam siiigiilarilalis nolionem co^ iinicersam. Idem, p.ig. tiiiM.
fvi" srÈci.E.] CHAPITRE XlII. — JOBIUS, MOINR D'ORIENT. \HÔ

les (.'ci'its des saints Pi'tos, qui ont parhi ainsi. du salut, qu'il a, à cet elTet, fait annoncer
!«. 0.1. il. Il demande tlans le neuvième livre, dans toute la terre. Ensuite il tiaite de l'état
comment il peut ètic vr'ai ([iie nous soyons dans leipiel les anges et l'honmie ont été
snjKM'ieurs en dignili' anx anges par la gr;\ce créés, et de la chute d'une partie de ces
que nous avons acquise, et que nous leur anges et de celle de riininmo. Puis s'étant
serons égaux dans le temps de la résurrec- pro]iosé d'examiner pourquoi Dieu a racheté
tion? .\ quoi il répond que la nature humaine, riiduime en se faisant homme |)Our eux, et
depuis qu'elle a été unie i\ la Divinité par n'a pas racheté les
anges il en donne pour ,

l'incarnation du Verbe, et placée à la droite raison que l'homme, étant composé de deux
du Père, surpasse à cet égard tous les anges natures, l'une spirituelle et l'autre matérielle;
en dignité et que si nous devons leur être
; celle-ci étant moins parfaite et ayant natu-
semblables ;\ la résurrection, c'est qu'alors rellement du penchant vers le mal il était ,

le genre humain ne sera plus assujetti la .'i raisonnable que Dieu lui prêtât du secours et
servitude du corps, qui sera comme spiritua- laperfectiomu\t; qu'il n'en était pas de même
lisé. 11 trouve dans les paraboles de l'enfant de nature dos anges qui avait été créée
la

prodigue et des cent brebis, la figure des parfaite. « Pourquoi, demando-t-il encore, les
auges et des hommes, disant que ceux-là anges bons et mauvais sont- ils demeurés ir-
sont représentés par le fils aîné du père de révocablement dans l'état qu'ils ont choisi
famille, et ceux-ci par l'oufant prodigue. La dès le commencement les uns dans le bien
,

seconde question qu'il se propose dans ce et les autres dans le mal? Pourquoi le Sau-
livre, est de savoir comment Jésus-Christ veur a-t-il dit, que le feu était préparé au
est mort pour tous les hommes, puisqu'il y diable et à ses anges, encore qu'il y ait tant
en avait une infinité de morts avant sa ve- d'hommes qui devaient être punis?» Il répond
nue. A cela il répond que Jésus-Christ a non- à la première question «L'immutabilité des
:

seulement prêché l'Évangile à ceux qui vi- anges, dit-il, dans le parti qu'ils ont embrassé,
vaient de son temps, mais qu'il est descendu vient de ce qu'étant d'une nature simple et
aux enfers pour le prêcher aussi aux morts ;
non composée, ils nepeuvent changer. » Il dit
et que ceux d'cutr'cux (pii avaient bien vécu sur la seconde, qu'il est écrit que le feu est
et qui ont cru en lui ont été sauvés. Il en préparé au diable et à ses anges, parce qu'é-
donne une autre raison, qui est que la ré- tant une fois pervertis par leurpropre volonté,
surrection étant le terme où la vertu doit ils ne donnent aucune espérance de change-

recevoir sa récompense, et la croix de Jésus- ment au lieu que l'homme peut changer de
,

Christ donnant toute la force h cette résur- mal en bien. C'est à raison de l'endurcisse-
rection, il suit de là que Jésus-Christ est ment du diable dans le mal qu'on nous obli-
mort pour tous ceux qui participeront alors ge dans le baptême à renoncer à Satan et à
au salut. En expliquant après cela ces pa- ses œuvres, afin que, conservant la haine qui

^^
M1111..K, rôles de Jésus-Christ Je ne suis pas venu
: doit être entre nous et lui, nous ne nous lais-
appeler les justes, mais les pécheurs à la péni- sions pas surprendre par ses artifices. Jobius
tence, il dit qu'on ne doit pas croire que le se propose encore quelques autres questions
Sauveur se soit exprimé ainsi, comme s'il auxquelles il ne répond pas plus solidement
eût voulu distinguer la multitude des hom- qu'aux précédentes '. On voit par son ouvra-
mes, partie en justes et partie en pécheurs, ge qu'il était homme à s'embarrasser de beau-
dont il aurait négligé les uns et appelé les coup de questions inutiles, mais qu'il n'avait
autres, puisqu'il est certain qu'il est le com- pas le talent de les résoudre nettement, et
mun Sauveur de tous, et qu'il les a tous ap- que s'il avait de l'érudition et de l'intelligence
pelés en, leur permettant de jouir du fruit dans les Livres saints, comme Ip témoigne
de la rédemption, et d'embrasser la doctrine Photius^, il n'en faisait pas toujours usage.

' Angélo M.iï a publié en grec un autre fragment en grec au tome .\ du Spirilcgium roma:uim,
ilu même ouvrage, Classici auctores, tom. X.pag. p. 132.Plusieurs autres fragments qu'on lit dans
601-G04. Ce fragment est reproduit avee notice tirée Photius sont au tome CIII de li Patrologie grec-
de Faliricius, au tome LSXXVI de la Patrologie que. [L'éditeur.]
gfecqtte, col. 3313-3319. On trouve aussi, ibid. un - Rectw religionis est amans, et diligentiœ non
autre fragment grec d'une Confession de foi ortho- conlemnenda', atque in sacrarumprœterea Scrip-
doxe de Jùbius. Gallaud l'avait donné en latin au tura.-um commentatione insigniter exercitaius.
tome XIII de sa Bibliothèque, p. 7U2. Mai l'a publié Phot., Cod. 227, pag. 578.
,,

186 HISïOIllE GKNHUALE DES AUTEUHS ECCLÉSIASTIQUES.

CHAPITRE XIV.

Cosme d'Egypte, snrnommc indicoplenste.

[Écrivain grec au vi« siècle.]

Co-me. nfà 1. Cosme, surnommé indicopleusle de sa tion, c'est-à-dire en 535, auquel Timothée
A Ifxanilrie
l'r.. r in To| o- navigation dans les Indes, était égyptien, né mourut. Le seul moyen de lever celte con-
Ini». II Col. à Alexandrie. Il fut d'abord marchand, et, trariété est de dire que Cosme ayant retou-
lect. Palrum,
MoDtrauc. Fi. tout occupé de son négoce, il s'embarqua ché plusieurs fois son ouvrage changea ,
risils 1707.
1«E- ' pour en Klliiopie, dans les Indes et les
aller quelque chose dans les dates des endroits
autres pays d'Orient, où il espérait faire des qu'il retouchait ;
qu'il laissa celles du onziè-
gains considérables. Quoique engagé dans me mises d'abord, n'aj'ant
livre, qu'il avait
le négoce il ne laissait pas d'être instruit fait aucun changement en cet endroit mais ;

dans les sciences, autant que son siècle le qu'ayant retouché son second livre, il y mit
permettait. La vue d'un état plus tranquille une nouvelle date, relative au temps auquel
et où il pourrait vaquer plus sûrement à son il y fit (juelque addition.

salut lui lit abandonner son commerce pour 3. Sa Tupoyrap/tie chrétienne est divisée Ell« est di-
r\tit m doQ.
embrasser l'état monastique. Il proQta de en douze livres. Piiotius qui en parle sans u livres.
,

son repos pour composer divers ouvrages, en nommer l'auteur, dit que les six premiers
dont le seul qui soit venu jusqu'à nous est livies étaient dédiésàun certain Pamphyle; Pbol., G' 11.

36.
intitulé : La Topograp/ife chrétienne. le septième h Anasthasc; le huitième à Pier-
Sa Topoprn- 2. Il semble marquer l'année en laquelle re, et que les quatre autres n'élaieiU adres-
pbîe cbrctifn-
ne. Lili, II, il la composa , lorsqu'il dit, dans le second sés à personne. Cela se trouve de môme
p>e. HO,
livrede cet ouvrage, qu'il y avait vingt-cinq dans nos exemplaires. Dom Moutfaucon nous
ans qu'Élesban, roi des Égyptiens, avait fait a donné l'ouvrage entier, à la réserve du
sonexpéditiou sur les Homéritcs celte expé- : dernier feuillet du douzième livre sur un ,

dition arriva en 522. En y ajoutant les vingt- manuscrit de Florence qu'il croit être du
cinq années qui s'étaient passées depuis x" siècle. Il en cite d'autres, mais impar-
lorsque Cosmc écrivait son second livre , il faits, un de la Bibliothèque impériale, et un

s'ensuivra qu'il y travaillait en 3-47 sous le de la Bibliothèque de Vatican. Celui-là ne


règne de Jastinicn. Ce qui rend cette épo- contient qu'une petite partie de la Topographie
que ditlicile à soutenir, c'est que, dans le chrétienne. Le douzième livre manque dans
dixième livre du même ouvrage, il parle de l'autre. [Le tome XI de la Dibliotlihqitedes an-
T.Ibi X, pifi Théodose, patriarche d'Alexandrie, qu'il ap- par GiWanii, reproduit la To-
ciens écrivains,
3J0.
pelle nouveau schismatique, comme demeu- pographie chrétienne avec une notice sur Cos-
rant à Constantinople où il était allé après
, me. Le tout à reparu dans le tom. LXXXVIII
avoir un séjour fort court à Alexandrie;
fait de la Palrnlogie grecque col. 9-476. La no-
,

et de Timothéc son prédécesseur, qui, dit-


, tice tirée de Galland est suivie d'une autre
il, est mort depuis peu. Or, ceTimolhée, que empruntée à Fabricius.]
Cosme nomme le Jeune pour le distinguer 4. Le dessein de Cosme dans cet ouvrage Dc'ie'n do
ccl'>uii3fe.
de Timothée Elure, mourut en 333 et Théo- : est de combattre l'opinion de ceux qui don-
dose, son successeur fut, après environ un an nent au monde une figure spliérique, et qui
et quatre çaois d'épiscopat envoyé en exil , conséquemmenl admettent des antipodes. Il
l'an 536, pour n'avoir pas voulu souscrire au croyait avec la plupart des anciens que la
concile de Chalcédoine. 11 paraît donc que figure du monde était plaie et que le ciel ,

Cosme écrivait son onzième livre vers l'an fait en forme de voùle, joignait ses deux

533, puisque, lorsqu'il y travaillait Théo- , extrémités à celles de la terre. Ceux qui pen-
dose n'avait pas encore été envoyé en exil, saient ainsi tournaient en dérision l'oiiinion
et qu'il s'était seulement retiré à Constanti- contiaire ,
qui est aujourd'hui reçue unani-
nople ce qui arriva peu après son ordina-
: mement, et rendue évidente parles démons-
,

[vr SIÈCLE.] CHAPITRE XIV. — COSÎME D'i:r,YPTR. 187

Initions des aslrononips. Voici de quels ar- 5. Toutes les preuves apporte pour
qu'il ccqu'.i,.
guments Cosme pour la combattre
se servait : l'établir se réduisent h celles que nous ve- w.T.r'i;;
<(Eii siiiinosant la rondeur de la ti>rre, dit-il, nous (h; ihuiuer. 11 no s'agit donc ])his que iTcom'iy"
il faudrait dire qu'il y a de ses habitants qui de rapporter ce qu'il y a d'intéressant dans
sont opposes diamcitralemcnt.les uns aux au- son ouvrage. Il le commence par l'invocation
""''
tres, et qu'ils marchent pieds contre pieds ; du nom de Dieu le Père, le Fils cl le Saint- l^^ ''
qu'il en est de même des pluies qui, dans ce Esprit, reconnaissant que la Divinité adora-
système, doivent tomber les unes contre les ble et consubstantiello, est une en trois liypos- ,
aiili'cs ; ce qui est contre la droite raison. D'ail- tases ou personnes. Il enseigne qu'avant le uh. ii,p.ç.
""
leurs l'Écriture nous représente dans Isaïe, déluge l'usage de la chair était interdit; et
le cielen forme d'une voiito dont les extré- que si on lit dans l'Ecriture qu'Abel gardait
mités posent sur la superficie de la terre et ; les troupeaux, ce n'était que pour en avoir le
dans Job comme une pierre en forme de lait et la laine, et pour offrir à Dieu des sa-

carré. Elle dit encore que le ciel et la terre crifices en holocauste de ce qu'il y avait de
contiennent toutes choses ce qui ne peut : mieux dans ses troupeaux. « Mais pourquoi,
être vrai eu supposant la terre d'une figure s'objecte-t-il, Abcl choisissait-il les brebis les
sphérique, car alors ce serait le ciel qui con- plus grasses, s'il ne devait pas en manger? » A
tiendrait tout , et la terre même, n Cosme cela il répond que devant être brûlées en-
ajoute à ces raisons que le tabernacle que tièrement suivant la nature de ce genre de
Moïse construisit par l'ordre de Dieu, était la sacrifice, les plus grasses convenaient beau-
ligure de ce monde. « Or, dit-il, ce tabernacle coup mieux. Étant à Adules, ville maritime i'j;. uo.
était un carré long; le monde est donc cons- d'Egypte, vers l'an 322, il vit à l'entrée de
truit de cette manière. » Ces raisonnements la ville une chaire de marbre blanc précieux
donnent lieu à cet auteur de parcourir un et travaillée avec beaucoup d'art, sur la-
grand nombre d'endroits de l'Écriture par- , quelle il y avait une inscription en lettres grec-
ticulièrement de la Genèse, de l'Exode, des ques, qui renfermait l'histoire du règne de
Prophètes et des Apôtres. Il propose un au- Ptolémée fils, d'un autre roi du même nom
tre argument qu'il croit sans réplique qui ,
et delà reine Arsinoé. Elesban, alors roi des
est que Dieu, dès le commencement, a pré- Axumites, curieux d'avoir cette inscription,
paré aux hommes des demeures tant pour donna oi-dre au préfet de la ville d'Adulés
cette vie que pour la future, savoir, la terre de la lui transcrire. Celui-ci en chargea Cos-
et le ciel. Or, dans la supposition que la me avec un autre négociant nommé Mennas,
terre est ronde, le ciel ne peut être la de- qui depuis se fit moine à Raïthu, et qui était
meure des bienheureux n'étant pas possi-
, mort lorsque Cosme écrivait son livre. Cosme
ble que la vie bienheureuse puisse s'accor- après avoir transcrit l'inscription, en donna
der avec la volubilité des cieux autour de la une copie au préfet, et en garda ime pour lui.
terre. Ses adversaires répondaient que la On lisait à la fin de cette inscription que Ptolé-
terre et les cieux que nous voyons seraient mée avait dédié cette chaire à Mars, la vingt-
détruits à la fin des siècles, et qu'alors Dieu septième année de son règne. Cosme croit
en formerait de nouveaux. Cosme répliquait que ce prince était du nombre de ceux qui ré-
que Jésus-Chrisfavait été introduit dans ces gnèrent après Alexandre le Macédonien. 11 i.t.

cienx ce qu'il prouvait par un grand nom-


: parle, de l'Empire romain, comme du plus
bre de témoignages de l'Écriture et des Pè- considérable qui ait été dans le monde mais ;

res; et que c'était là aussi que l'on devait ce qu'il relève le plus enlui, c'est qu'il est le
inti'oduire les bienheureux. En disant que premier qui ait embrassé la foi de Jésus-Christ.
le monde est d'une figure plate et que la , Cette foi fut ensuite portée dans la Perse par
superficie de la terre est carrée et oblongue, l'apôtre Thadée, comme on le voit dans la
il dit en même temps que sa longueur de première Epitre de saint Pierre, où il est
l'Orient à l'Occident est le double de sa lar- dit: l'Eglise qui est dans Babylone, vous sa- iPoir. r,

geur, qu'il prend du septentrion au midi. Il lue. Une autre prérogative de l'Empire ro-
avait appris cette doctrine d'un vieillard nom- main, et qui marquait bien sa puissance,
mé Patrice. était que toutes les nations ' recevaient ses

' Cum ipsorum [Romanorum] numismate, om- loco ah extremis terrœ usque ad oppositos fines,
nes gentes comniercium exercent, et in quovis iliud admittitur : mirantibiis talem monetam
,

188 HISTOIRE GENERALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


monnaies, et qu'elles s'en servaient dans le du monde, il dit qu'il y avait une infinité

commerce, n'y en ayant point d'aussi lielles d'églises dans la Perse, des évoques, un grand
p«;. 150. dans tous les autres royaumes. Cosme croit nombre de chrétiens, plusieurs martyrs et
que les antres sont employés h divei-s offices des moines. Il assure que l'on voyait encore JJk- v, i*-.

corporels; que les uns meuvent l'aii', les au- de sou temps les vestiges des roues des cha-
quelques-uns la lune et les as-
tres le soleil, riots de Pharaon, depuis Asserloin jusqu'aux
tres, et qu'ily en a aussi qui préparent les bords de la mer Rouge où son armée fut
nuées et les pluies; qu'Adam, ayant mangé noyée; que pendant que les Israélites furent
du fruit défendu le sixième jour de la se- dans le désert. Dieu se servit du repos qu'ils
maine, vers midi, c'est pour cela que le Sau- y avaient pour leur faire apprendre les let-
veur est mort le même jour et à la même tres, qu'il avait lui-même enseignées à Moïse;

,53_
heure, pour nous racheter que l'on doit ; qu'étant sur les lieux il asait vu aux endi'oits
confesser qu'il est Dieu parfait, et homme des stations ou demeures différentes des Hé-
parfait y a des archanges administra-
; qu'il breux dans ce désert, de grosses pierres des-
teurs députés à la garde de chaque nation et cendues des montagnes, sur lesquelles on
de chaque royaume, et que chaque homme '
voyait écrit en lettres hébraïques Départ d'un :

a un ange gardien ce qu'il prouve par cet


: tel endroit par une telle tribu, en tel mois,
Aci. t:i, 1-. endroit des Actes où les apcMres, en parlant telle année ; que les voyageurs de son temps

de saint Pierre qu'ils croyaient dans la pri- avaient coutume de faire de semblables re-
son, dirent, en l'entend.inl frapper h la porte : marques dans les hôtelleries par où ils pas-
C'est son ange; et par cet autre de saint Mat- saient que les lieux où les Israélites avaient
;

^juiik. mil,
thieu : Les ayiges de ces enfants voient sans cesse passé étaient remplis d'inscriptions que l'on
la face de mon Père qui est dans le ciel. voyait encore; qu'ils avaient commimiqué l'u-
lit. nt, 6. Il croit encore que les anges ont été sage des lettres aux Phénicieus leurs voisins, Ptg. f^nx,
P-g.i-i.
créés en même temps que le ciol et la terre ; dans le temps que Cadnius régnait à Tyr;
que Moïse a écrit par l'inspiration du Saint- que ce prince avait communiqué cet usage aux
Esprit; qu'il est le premier écrivain du mon- Grecs, d'où il est passé à toutes les nations.
de; qu'avant lui on n'avait pas l'usage des Il remarque ' que personne n'est baptisé sans *'••

lettres; que c'est Dieu qui les lui a apprises faire auparavant profession de croire en la
sur la montagne de Sinaï. En quoi Cosme se Sainte-Trinité, et à la résurrection de la chair;
trompe évidemment, puisqu'avant que Dieu et que sans le baptême aucun n'est admis au
donnât la loi à Moïse sur la montagne de Si- nombre des fidèles et des chrétiens que Dieu ;

naï, il lui avait ordonné de mettre par écrit n'a fait sa demeure dans les prophètes, qu'en
la victoire remportée sur les Amaléciies, ainsi partie et qu'à certains égards ; mais qu'il est
^"
qu'on le lit dans le dixseptiôme chapitre de tout entier, pleinement et universellement
l'Exode. Il rapporte sur la foi d'autrui, que dans Jésus-Christ, qui né de Sem, fils de
est
les Perses célébraient encore chaque année Xoé, selon la chair. Il enseigne que David
la solennité de Mithra ou du soleil qu'ils ado- est ' l'auteur des cent cinquante psaumes;
raient dieu, en mémoire de ce
comme un qu'il les a composés par l'inspiration du Saint-

176. qui était.arrivé sous le règne d'Ézéchias, à Esprit; qu'ils sont en vers, et propres pour
'"•
qui Dieu donna pour signe de sa convalescen- être chantés eu musique et,au son des ius-
175. ce la rétrogradation du soleil. En pailant de trumenis. D'après Cosme ^ Moïse est auteur du
l'état du christianisme dans toutes les parties Pentaleuque; Josué du livre qui porte sou

cunclis hominibus alque regnis : quia in aliis ratur,nec fidelis esseprœdicatur. Cosiiia;, lib. V,
quihuxcumque regnis similis non coinparel. Cosm. pag. 208.
lib. Il, pag. 148. ' l'osi Moysen excitavit Deus Daridcm, qui U-

' Ohservnndum porro etiam hnminem quewH- hrutn conriiiiuivil cenlum qninqunginta psalmo-
bel angelum comilem el cuslodem haberc. Iliid., rum a Spiritu Sancio motus, ut mctrice secundum
pag. 157. hehraicœ. linguœ idinmn carmcn ederet, ac citm
' Pcrtiili' regione, ecclesia;
/;i tiita infinitw melodid et rytiimo, inslruinenlis rnnïs, et canli-
sunl episcopi ileni clmsli'viique populi magtio
, cis, ipsos modularelur. Ibi<i., lib. .\, pag. 22J.
numéro, martyres multi, monachi. lib. III, pag. * Pentaleuchum Moyses scripsil... Jtsiis simililer
Hit. lihrum suum... .Siz/omm item proprioit libros
'h'emo hcplizalnr, quin prius Sanctam Trini- descripsit, Proverbia, Cantica, Ecclesiasien, Ibid.
tem et nostrœ carnU resurreclionem se credere pag. 2.J9.

confitealur : alms nec cum chrislianis annume-


,

VI'' SlKCLi:. CIIAI'ITUI': XIV. — CUSxMli iJ'iaiYl'TI';, IH'J

nom; Saloinon tlos Piovcrbos, dcsC;inli<jiics voir : de saint Jacques, la [iremièrc


l'Epllre
et de rKcelL'siusle ;que saint l'aulc'crivit '
eu de saint Pierre et la première de saint Jean.
héliiou ri'4iilic ([ii'il adressa unx llcbrenx, Il y a dans tout ce discours de Cosme peu
et ((u'ollc l'nt traduite en f^rec, on |)ar saint d'exaclilude et il se trouq)e manifestemeut,
;

Luc on par saint Clément qne saint Matthieu ;


lorsqu'il dit qu'aucun des anciens n'avait
composa aussi son lOvangilc eu Iiébieu; qne conmienté ces Epitres. Nous avons vu que
l'on donnait aux nouveaux baptisés le corps Didyme les avait expliquées tout entières.
et le sang de Jésus-Christ; que quoicpie les Saint Jérôme le dit expressément. Cassio- c.xioii. j»

Juilslisent Moise et les prophètes, ils ne com- dore 1 assure aussi, et ajoute que samt Clé- vén.pag. mi.

prennent pas ce qui a été pi-édit du premier ment d'Alexandrie avait commenté la pre-
Llb.VI,|»6. avènement du Sauveur; que les hérétiques mière de saint Pierre, la première et la se-
qui nient que la nature humaine en Jc'îsus- conde de saint Jean, et celle de saint Jac-
Cluist soit parfaite, qu'elle ait une àmc rai- ques que saint Augustin a laissé un com-
;

soniuible, ou qui nient qu'il soit Dieu et égal mentaire sur celle-ci, et dix sermons sur la
!>;. !7i. au Père sont déchus du salut éternel
, première de saint Jean. Nous n'avons plus
dont l'espérance réservée à ceux-là seuls qui le canon des Écritures que Cosme attribue

croient qu'il n'y a qu'un Dieu en trois liypos- à saint Irénée, si toutefois il en a l'ait un. A
tases ou personnes, du Père, du Fils et du l'égard de saint Athanase, il fait un canon
Saint-Esprit, et confessent que la Sainte-Tri- dans sa trente-neuvième Épître festale, et il

nité est tonsuljslanticlle, et d'une égale puis- y met les sept Epitres catholiques entre les
sance et dignité. livres dont l'autorité n'était pas douteuse.
LU.. Vil,
Après avoir cité presque tous les livres
7. Il est surprenant que Cosme, qui cite plu-
canoniques dans le cours de son ouvrage, il sieurs fragments de ces Épitres festales dans
déclare qu'il passe sous silence les Épitres son dixième livre, n'ait pas fait attention à ce
catholiques, disant que l'Eglise, dès les pre- canon. Quant à ce qu'il dit que ces sept Épi-
miers temps, les mettait au rang des Écri- tres n'étaient point reçues généralement, il
tures douteuses. La preuve qu'il en donne pouvait dire la même chose de quelques au-
est que ceux qui ont commenté les Livres tres livres de l'Écriture qui enliu ont été re-
saints, n'ont tenu aucun compte de ces Epi- connus pour canoniques, de même que ces
tres que ceux qui ont dressé les canons
;
Épitres, par un consentement unanime de
des divines Écritures, n'y ont point mis ces l'Église, et placés dans le canon. Cosme re-
Epîtres, et qu'ils les ont placées parmi les marque que le prêtre, après avoir prié dans
livres d'une autorité incertaine, savoir; saint la célébration des mystères pour les fidè-
Irénée, Eusèbe de Césarée, saint Athanase, les vivants priait aussi ^ pour les morts
, ,

saint Amphiloquc et Séverin de Cabale. Il


, en demandant à Dieu de leur accorder le
ajoute que plusieurs disaient qu'elles étaient repos, et de ressusciter leur chair au jour
non des apôtres, mais de quelques prêtres qu'il avait résolu de le faire, suivant ses pro-
particuliers; qu 'Eusèbe de Césarée assurait messes qui ne peuvent être fausses.
que la seconde et la troisième de saint Jean 8. Entre les Pères dont il cite les ouvra- Lit.. x.isg.
étaient d'un prêtre de ce nom, dont le tom- ges, pour montrer qu'ils pensaient comme
beau se trouvait à Ephèse, de même que ce- lui sur la figure du monde il met Phi- ,

lui de saint Jean l'évangéliste que cet his- ; Ion, évêque de Carpathie, à qui il attribue un
torien, de même que saint Irénée, ne recon- commentaire sur le Cantique des cantiques, et
naissait que la première de saint Pierre et la sur l'ouvrage des six jours de la création.
première de saint Jean comme étant véri- , Philou disait dans le premier, que le Fils de
tablement des apôtres; que d'autres admet- Dieu' avait pris l'homme par son incai-na-
taient aussi celle de saint Jaccjues mais que ; tion mais qu'en échange, il s'était depuis
;
Vnve, lom.
quelques-uns les recevaient toutes; qu'on donné V'' *'"»' -"•
l'homme, en lui donnant sa sainte
;'i

n'en trouvait que trois chez les Syriens, sa- chair à manger à la communion. Il met en-

• Hebrœis Paulus, utpote hebrœus , hebraice tiant... pro mortuis vero sic : Animœ hujus. Do-
scripHt : in Grœcam vero linguain translata ejus mine, requiem concède, ressuscitans quoque car-
Epistola fuit vrl a Luca, ut fertur, vel a Clé- nem ejus, yua die decrevisti secundum veras tuas
mente, ximiliterque Ecangelium secundum Mat- promissiones. Lib. Vil, pag. 299.
Iku'Uiii. Ibid., pag. 2o3. ' Filius Dei hominem accepit, ac ipsi
postea vi-
* Sucerdoles precuntes de o/l'crcnlibus pronun- cissini sanclam carncni suum comedcndam ad
\<M HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Plf. J31. ccre Théodose , successeur de Timotbce-le- facile de la voir de leurs yeux et d'en consi-
Jcune, dans le siège d'Alexandrie, et Timo- dérer toute la structure. » C'est aussi dans
thëe lui-môme. Il rapporte trois passages de les Livres saints que les mêmes écrivains
troissermons dill'érents de Thëodose, et six Chaldéens, les Mèdes et lesPei-ses ont puisé
de six sermons de Tiniothée'. Dans le qua- ce qu'ils savaient des événements arrivés sous
trième qui fut prêché daus l'Église de Quirin lerègne d'Ézéchias, du temps de Jouas et de
à Alexandrie, "Timothée dit de Jésus - Chiist, la captivitéde Babylone. » En parlant de la
que parce qu'il' était Dieu et homme tout en- version faite par les Septante, il dit que Pto-
semble, il a prouvé l'un et l'autre par ses œu- léméePhiladelpbe, informé parTryphonPha-
vres, en sorte que cela ne pouvait être ignoré lérus de ce que contenaient les livres des Pu- x'.
de ceux qui en étaient témoins, a II a donné, Juifs, conçut le dessein de les faire traduire,
dit-il,des preuves de sa di^^nité en guéris- et envoya demander des inter-
qu'i cet eflet, il

sant les lépreux, en rendant la vue aux aveu- prètes au grand prêtre Éléazar mais Cosme ;

gles, en fortifiant les membres des paralyti- met ici Tryphon au lieu de Démétrius, com-
ques, et en donnant la vie aux morts. C'est me lisent Aristhée, Philon, Joseph et plu-
pourquoi il dit avec assurance Mon Père et : sieurs autres. On ne peut pas dire qu'il se
moi sommes une même chose. Il n'a pas voulu soit trompé par la ressemblance des noms,

non plus laisser ignorer qu'il était homme, puisqu'il n'y eu a aucune entre Démétrius
pour détruire l'erreur de ceux qui croient et Tryphon. C'est donc de sa part une faute

qu'il n'a eu qu'un corps fantastique, et qu'il de mémoire, si ce n'est qu'il ait eu un exem-
ne incarné qu'en apparence. Il a prou-
s'est plaire défectueux de cette histoire.
vé qu'il était vraiment homme, en s'assujet- 10. Il ne faut pas omettre ce qu'il dit sur Llb. V, l^t.

tissant à toutes les passions que l'infirmité le vingt-neuvième chapitre du Deutéronome,

de la chair entraîne nécessairement avec où nous lisons que, pendant les quarante
elle et quine sont nullement des suites du années que les Israélites furent dans le dé-
péché comme la faim, la soif, la fatigue, le
:
sert, leurs vêtements et leurs souliers ne s'u-

sommeil. » sèrent point. Cosme soutient que cela ne doit


LIb.Xt,
9. Cosme emploie son onzième livre à fai- point se prendre à la lettre, comme le veu-
X14.
re la description des animaux les plus rares lent les interprètes, surtout les Juifs; mais
qu'il avait vus dans les Indes et dans l'Kthio- que Moïse ne veut dire autre chose en cet
pie. Il y parle aussi des poissons de mer, endroit, sinon que rien ne manqua aux Israé-
entre autres du dauphin et de la tortue, lites dans le désert parce que des mar-
,

dont il dit avoir mangé et de quelques ar- ;


chands venus d'ailleurs leur fournissaient
brisseaux qui portent des graines odoriféran- les choses nécessaires. « Comment, en eflet,
Llli. XII, tes, comme du poivre et du girolle. Dans le ajoute-t-il, les enfants nés dans le désert
isf. Ï40.
douzième livre, il rapporte les noms des an- auraient-ils pu se vêtir et se chausser? Il n'y
ciens écrivains profanes qui ont cité quel- avait aucune proportion entre leurs corps et

que chose des livies de Moïse et des Pro- ceux de leurs parents, et dès lors les vête-
phètes. «Ceux, dit-il, qiii ont écrit l'histoire ments et les souliers de ceux-ci devenaient
des Chaldéens, ont parlé de la tour que les inutiles à leurs enfants. Comment aussi au-

descendants de Noé construisirent avant de raient-ils pu faire chaque jour de nouveaux

se disperser dans toutes les parties du mon- pains de propositions si des marchands
,

de. Ils pouvaient, continue-t-il, parler avec étrangers ne leur avaient amené des blés?»
certitude de cette tour, puisqu'il leur était Mais quoique le raisonnement de Cosme ail

communionem iribuit. Philo Carpalli : Comment. mundat, ccecos illuminât, paralilicos roboral,
tîi Canlic. apud Cosuiaui ludkoplasl., lib. X, pag. mortuis vitavi elargilur: quodque maximum est,
329. diserte et cum /iducia dicit : Ego el l'alor unuui
> Le tome III du Spicilegium romanum, pag. suinus. (Juod autem etiam homo sit, neque id
"09-" 12, conlienl uu fragment d'une homélie sur iti m latere rult el ignorari, ut eos inde prœver-

CCS panilcs: Jésus autem [aligaUts est itinere et lerel et frangeret qui eum pkantastice advcnisse
sedit. Ce frafimcnt complète celui que Cosme avait putant; dum clare et aperle passionibus se sub-
piihlié. (L'Mteur.) dit: at quibus passionibus f lis scilicet quwprop-
» (,)uia una Deus el homo ipse est, utrumque ter infirmitatem, 4ion propler peccatum, carni

simul ex operibus compruhalur, ita ut spectalo- familiares sunt; esuriem dico, sitim, somuum,
rihus non latere possU. Aiim quod natura Deus defatigationem. Timoth, Aloxaudr. apud Cosmam,
sil ex operibus el signis ostendilttr, dum leprosos lib. X, pag. sa.
[Vl* SIÈCLE.] CHAPITIIE XV. — COSiMIC D'I^CYI'TI']. r.ii

quelque vraisemblance, il faut s'on lonir au ïnèiiie([iril l'avait achevé avant qu'il eût com-
scnlimcnt conmiun, qui veut que ce soil par iiuMiié son liuitième livre de In Tnjmijraphie

lui niiraclo que les viHcuinuls et K's souliers chrétienne : cecommentaire est perdu. Quel- Lit. V, po;.
3»;.
des Ildbreux ne se soicut pas déchirés pen- ques-uns croient apercevoir dans ce qu'il dit
dant les quarante années qu'ils passèrent de riïvangile de saint Luc au cinquième livre
11, w. dans le désert. Il place le paradis terres- de sa Topogi-aphie qu'il avait comn}cnlé cet
,

tre dans une terre qu'il siqipose être au Evangile. Nous n'y avons rien trouvé qui
delà de l'Océan. 11 croit que le père de puisse appuyer cette conjecture. Mais il pa-

'"°' s'^'n' Jean-Baptiste était grand- prêtre. Il re- rait d'ailleurs qu'il avait expliqué cet Évan-
li'! r^t.
marque qu';\ Jérusalem on célébrait la nais- gile, puisqu'au rapport de Cave l'on voit en-
sance du Sauveur le jour de l'Epiphanie, core Préface qu'il avait mise à la tête do
la

c'est-;\-direle6 de janvier; mais que l'Éjilise ce commentaire. On dit que l'on conserve de
dès les premiers temps craignant qu'en cé-
,
lui dans la Bibliothèque impériale ' une dis-

lébrant ces deu.'C solennités en un même sertation pour prouver que la figure du mon-
jour, l'une ou l'autre ne tombât dans l'ou- de n'est pas ronde, mais plate et dans cel- ;

bli, ordonna qu'à l'avenir l'on mettrait douze les ^ du Vatican et de M. Colbert, un com-

jours d'intervalle entre la fête de Noël et celle mentaire sur les endroits les plus difficiles
de l'Epiphanie. des Psaumes,, avec une préface où il exa-
LiTrci
Cwma

qui
II. Avant de travailler à la Topographie mine plusieurs choses nécessaires pour l'in-
It ytrdus.
chrétienne, Cosme avait fait nn traité' de telligence des Psaumes et un autre com- ;

cosmographie générale, où il faisait la des- mentaire sur paraphrase ' qu'Apollinaire


la

cription de toutes les terres, tant en deçà a faite sur les mêmes Psaumes. Il y a ap-
qu'au delà de l'Océan. Ce qu'il pouvait y parence que la Préface sur les Psaumes est
avoir d'intéressant dans cet ouvrage, étaitce la môme que celle dont parlenf^r'risius et

qu'il y rapportait des provinces de l'Ethiopie, Possevin, puisqu'il est rare qu'un même au-
de l'Arabie et de l'Inde, sur lesquelles ni Stra- teur mette deux préfaces difl'érentes à un
bon, ni Ptoléméc, ni aucun des anciens ne même commentaire. Léon Allatius' donne à
pouvaient nous donner tant de lumières que CosmehChronir/ite d'Alexandiie on ne sait :

lui, qui avait vu tous ces lieux par lui-même, sur quel fondement, le compilateur de cette
et qui en avait examiné avec soin la situa- Chronique, ayant écrit sur la fin du règne de
tion, lescoutumes, et ce qu'il y avait de rare l'empereur Héraclius vers l'an 630,longtemps
en plantes et en animaux. Ce traité n'est pas après la mort de Cosme.
venu jusqu'à nous Cosme l'avait dédié à un
: 12. Le style de Cosme est simple et peu des ouvrages

de ses amis nommé Constantin. Nous avons châtié. Il traite les matières sans ordre et sans '^' '^''

perdu aussi ses Tables astronomiques ^ qu'il méthode. Tout le mérite de son ouvrage pa-
avait envoyées au diacre Homologus. 11 mar- dans la candeur avec laquelle il
raît consister
quait dans ces Tables le cours des astres re- rapporte les choses qu'il avait vues, et dont
lativement au système qu'il avait adopté. la plupart sont très-intéressantes pour l'his-
Théophile lui avait ' demandé un commen- toire des pays qu'il avait parcourus.
taire sur le Cantique des cantiques. Il dit lui-

' Àdeant lectores tomum a nabis elaboratuin Theophilus a nobis expetierat, quemadmodum et
ac Christi amanli Conslantino nuncupatxim ; ubi comperendinabam. Nunc au-
ipse nosli, liactenus
universa terra lalius descripla est, tam ea quœ tem eo absolulo opère, tuam petHionem implere
ultra Oceanum sita est, quam hœc cum omnibus ordiar. Cosmas, lib. VIII, pag. 300.
regionibus. Cosmas, lib. I.pag. 113. * Lambecius, tom. III, Commentarior. in BibliO'
* Quœranlilem tubulain et delineationem uni' lliecam Cœsar.
versi et aslrorum molus quam nos confecinuis 6 Ducangf iu Gloss. mediœ et in/imce grœcitatis,

ad exemplum organicœ exterorum spliœrœ, at- verbû indicopleustes, jjag. 516.


quc librum quem ea de re editum a nobis ad re- ^ Idem, verb. Fone, pag. 1717.

ligiosissimum diaconum homologum misimus ' Léo Allât, De Consensu utriusque Ecclesiœ de

evolvant. IbiJ., pag. 114. Purgatorio, pag. 9i2. Vide Prœfat. Beruardi
' Ego vero quoniam Cantici canticoriim inter- Montfaueoa in Cosmam; Cave verb. Cosuias; et
pretationem, Deo juvante, completitrus eram, Oudin, tom. I, pag. 1414.
quam cviinnunis ac mirabilis 'amicus noster
192 IIISTOmE Gl':Nt:RALE Ui:S AUTEURS ECCLLSIASTIQUES.

CHAPITRE XV.

Silvérins [538] et Vigile [555], papes.

SIMrics i Les Romains ayant appris sur la fin de


.
Silvérius était accusé d'intelligence avec les
éln fpt eu
SM. l'an 5.36,que le pape Ap:apot était mort à Goths; et le second, de s'être rendu odieux à
Consfantinople choisirent pour lui succé-
,
Théodora eu refusant de com-
l'impératrice
der Silvérius sous-diacre, fils du pape Hor- muniquer avec Antilime, patriarche de Corts-
PrcT. . lom.
misdas. Anastase parle de Silvérius comme tantinople. Le premier de ces prétextes était
V Contil.^-t.
d'un intrus dans le Saint-Siège. Ayant ga- une calonmie car il passait pour constant
:
"!, et M<r-
celUD.IoLliro*
gné par argent le roi Théodal, il aurait obli- qu'un avocat nommé Marc, et un soldat de
cir. »d AD.
la garde prétorienne appelé Julien, avaient
gé le clergé de Rome de le choisir, mena-
çant de mort ceux qui lui refuseraient leurs composé sous le nom de Silvérius, de faus-
sutliages. Mais Libérât, auteur du temps, et ses lettres adressées au roi des Golhs. Aussi
ainsi plus digne de foi qu'.\jiâstase qui écri- Bélisaire n'insista que sur le second. 11 fit ve-

vait longtemps après, suppose clairemeut nir le Pape au palais, où lui et sa femme
que l'élection de Silvérius f\it libre et cano- Antonine, confidente de l'Impératrice, s'ef-
nique. Du moins est-il certain que le clergé forcèrent de lui persuader secrètement d'o-
et le peuple romain le reconnurent pour leur béir à cette princesse, de renoncer au con-
évêquc t'gitime. Cependant l'impératrice cile de Chalcédoine et d'approuver par écrit

Théodorîr, ayant fait appeler Vigile, diacre la doctrine des hérétiques, c'est-à-dire, d'An-

de l'Église romaine, qui était demeuré à Con- thime et de Sévère. Silvérius n'ayant pas
stantinople depuis la mort du pape Agapet, voulu se rendre à cette proposition, se re-
arrivée le 22 avril de la même aifliée 536, tira à l'Figlise de Sainle-Marie-Sabine. Béli-

lui promettre secrètement d'abolir le con-


fit
saire le fit inviter une seconde fois à venir

cilede Chalcédoine, et d'écrire à Théodose au palais, en lui promettant sûreté avec ser.
d'Alexandrie, à Anthime et à Sévère, pour ment. 11 y vint ; mais demeura inilexible. On
témoigner qu'il approuvait leur foi s'enga- , le manda une troisième fois, et quoiqu'il vit
geant, à ces conditions, de lui donner sept qu'on voulait le surprendre, il ne laissa pas
cents livres d'or, et un ordre pour Bélisaire de venir, après avoir recommandé ses all'ai-
qui le ferait ordonner pape. Vigile donna à res à. Dieu. Un le fil entrer seul, et depuis ce
l'Impératrice toutes les assurances qu'elle moment ne le virent plus.
les siens

souiiaitait.Il partit donc de Constanlinople 3. Le lendemain Bélisaire ayant assemblé

avec un ordre adressé a Bélisaire, et avec les les prêtres, les diacres et tout le clergé de
sept cents livres d'orque Théodora lui avait Rome, leur ordonna de se choisir un autre
LHierat..
données. Mais à son arrivée à Rome, il trouva pape. Quelques-uns balancèrent sur ce qu'ils
SU. lUd.
Silvérius en possession du Saint-Siège. 11 prit avaient à faire; d'autres résistèrent en fai-
donc Ravennes où Uélisaire
le parli d'aller à sant sentir que la chose n'était point propo-
était alors avec une puissante armée. Vigile sable mais l'autorité de Bélisaire l'emporta.
;

lui montra l'ordre de l'Impératrice, lui pro- Vigile fut ordonné pape le 22 novembre, el

mettant deux cents livres d'or, s'il voulait le Silvérius envoyé en exil à Patare, ville de la

faire ordonner pape à la place de Silvérius. province de Lycie. Aussitôt que Vigile eut été
II ni frfU-
2. Bélisaire, après avoir pris Naplcs, s'a- ordonné, Bélisaire le pressa de lui payer ses
jéd'.Dleili;-*!!-
ee iTe*; it»
vança vers Rome, qui se rendit le 10 décem- deux cents livres d'or, et d'accomplir la pro-
(iollit.

bre de l'an 536, principalement à la persua- messe qu'il avait faite à l'impératrice Théo-
sion de Silvérius. Mais l'année suivante 537, dora d'approuver par écrit la foi d'.Vnliiime.

LiUtal. il>i<l.
Viliges que Goths avaient choisi pour
les ne voulait point s'y résoudre, tant par
Vii;ilc

leur roi ù la place de Théodat, en vint faire la craintedes Romains, que par avarice. U
le siège. Bélisaire profita de cette occasion arriva cependant que l'évèque de l'alare in-
pour faire réussir les desseins de Vigile; et il formé par Silvérius môme des mauvais trai-
en prit deux prétextes, le pieniier fut que tements qu'un lui avait faits, alla trouver
,

[Vl' SIÈCLE.] • CnAPITRE XV. — SILVI^.UIUS ET VIG1T,E, PAPES. 193

l'empereur Justinicn, qu'il menaça du juge- des consuls, dans lesquelles cet imposteur s'est
ment de Dieu pour avoir ainsi chassé de son presque toujours trompé. Celle Vigile est.'i

siège le tlief d'une si grande église, disant' datée du consulat de Rasile, (pii ne l'exerça
qu'il y avait plusieurs rois en ce monde, mais point sous le pontiticat île Silvérius: l'autre
qu'il n'y avait qu'un pape suj- l'iiglise de tout du consulat du Justinien pour la cinquième
le monde. L'Empereur, qui ne savait rien de Bèlisaire qui ne fut pas non plus
fois, et
des oïdies que Théodora avait donnés, com- consul dans le temps ([ue ce pape occupait
manda que renvoyé ;\ Rome;
Silvi'rius fût le Saint-Si(''ge.La lettre \igile est un re-
rt

que l'on informât de lavérité des lettres proche continuel de son ambition , et de ce
qu'on l'accusait d'avoir écrites aux Gotlis ,
qu'il était parvenu à s'emparer du Saint-
que s'il étaitcouvaiucu d'en être l'auteui-, il Siège force d'argent. On y fait prononcer
i'i

demeurât évèqne dans quelipi'aiilro ville et ; contre lui et contre ses complices une sen-
que s'il se trouvait qu'on les lui eût suppo- tence d'anathème et de déposition par Silvé-
sées, il fut rétabli dans son siège. Le diacre rius dans un concile de plusieurs évoques.
Pelage que le pape Agapet avait déclaré La lettre à Amator suppose que Silvérius en
avant de mourir, son apocrisiaire auprès de avait reçu une de cet évêque dans le temps
l'Empereur, étant gagné par l'Impératrice, fit de son exil. Silvérius, dans cette réponse, lui
tous ses efforts pour empêcher l'exécution fait im détail de tout ce que l'on avait fait

de l'ordre donné par Justinien, et le retour pour le dépouiller de son siège, en l'avertis-
de Silvérius à Rome. Mais il n'eu vint point sant qu'il avait renouvelé les anciens statuts
à bout; ce que l'Empereur avait commandé qui défendent de recevoir en témoignage,
fut exécuté, et Silvérius fut reconduit en contre les évéques, des personnes suspectes
Italie. Vigile en fut ell'rayé, et craignant au ou ennemies. 11 parle dans la même lettre du
retour de Silvérius d'être chassé de son siè- concile qu'il avait assemblé contre Vigile; et
ge, manda Bèlisaire de lui livrer Silvérius;
;"i il insinue qu'il l'avait assemblé comme il
qu'autrement il ne pourrait exécuter ses pro- avait pu dans le lieu même de son exil. Le
messes. Ce fut de cette façon que Silv('uius diacre Libérât ne dit rien de tout cela, et l'on
tomba entre les mains de deux défenseurs et n'en trouve rien ailleurs.
de quelques autres serviteurs de Vigile, qui le 5. Après la mort de Silvérius, Vigile, pour Vlîl.'ojpare
en :13X. Lilo-

menèrent dans l'ilede Palmaria, où Ils le lais- accomplir la promesse qu'il avait faite à l'im- rai. iii

cap.xxit.
Bre>.,

sèrent mourir de faim, le 20 juillet o38, après pératiice Théodora, donna à Antonine, femme vconcii.pat,

avoir tenu le Saint-Siège pendant deux aus. de Bèlisaire, une lettre pour Anlhime de Cons-
4. Nous avons deux lettres sous son nom tantinople, Thèodose d'Alexandrie ^ et Sé-
l'une à Vigile qui y est qualifié faux pape, et vère d'Antioche où il leur déclarait qu'il
,

l'autre à Amator, évêque d'Autun ^. Mais on tenait et avait toujours tenu la même foi
convient qu'elles sont toutes les deux sup- qu'eux : mais il les priait de tenir la lettre
posées, et de la main de Mercator. Cela pa- secrète , de parler de lui au contraire comme
raîtnon-seulement par la conformité qu'elles d'un homme qui leur était suspect, afin qu'il
ont avec son style, mais encore parles dates put achever plus sûrement l'ouvrage qu'il

* SedSilverio venienie Pataram venerabilis epis- Ces opuscules reproduits au tome LXXXVI de la
copus civilatis ipsius venil nd Imperutorem, et Patrologie grecque, col. 277-286, sont remplis des
judicium Dei contestatiis est de tantœ sedis epis- erreurs des nionophysites; mais on y trouve un beau
copi cxpulsione, multos esse dicens in hoc mundo passage sur la présence réelle " Si quelqu'un dit
:

reges, et non esse unimi sicut ille vnus papa su- qu'il y a passion, mort ou corruption dans le corps
per Ecclesiam lolius mundi. Liber, in Breviar., et le [irécieux sang du Christ, que nous élevons
cap. xxn, tom. V Concil., pag. 773. sur l'autel lorsque nous en accomplissons la litur-
* Elles sont reproduites dans le tome LXVI de gie en commémoration de sa mort et de sa pas-
la Patrologie latine, col. 79 et suiv. avec une no- sion, qu'il soit anathème : Si quis dixerit, in sa-
tice sur Silvére, tirée du l'onlifical. (L'éditeur.) cra corpore pretiosoque sanguine Christi, quœ
' On a de Théodose d'Ale.xaudrie quelques frag- svper altare exlolHmus dum ipsorum lilurginm
ments théologiques rapportés par Mai, Spicileg. perficiiuus, mortem ejus ac passionem comine-
rom., p. 711-721, savoir: l°im fragment de la lettre morunles, passionem aut mortem aul corruplio-
écrite à Sévère, patriarche d'Antioche, lors de sa nem intervenire, anathema sit.» Pairù\.,ibid., cul.
promotion au patriarchat d'.ile.Kaudrie; 2» uue let- 282, dans au peuple d'Alexandrie. Quel-
la lettre
tre au peuple d'.Vlexandrie pendant son exil ; ques autres fragments y sont reproduits d'après
3° une lettre sur la Trinité et contre les ariens. Galland, Maï et Cosmas. [L'éditeur.)

XL 13
,

Iflt ITTSTOmE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECC LEST ASTIQUES.


avait commencé. Lilvrat qui rapporte ce fait, lanlin de Laoïlicée et les autresdéfenseurs do
ajoute que Viirile joignit à cette lettre une l'hérésie d'Eutychcs; en promettant toutefois
confession de foi dans laquelle il rejetait les d'accorder la pénitence et la communion à
deux nature-; en Jésus-Clirist, et la lettre de ceux d'entr'eux, qui, se repentant de leurs
saint Léon, soutenant qu'on ne devait pas égarements, embrasseront la foi établie tant
dire deux natures mais que Jésus-Christ est
,
dans ces conciles que dans les lettres des évo-
composé de deux natures et disant ana- ;
ques du Siège apostolique. Il ajoute que tous
thème à ceux qui ne confessaient pas une ces hérétiques ayant été déjà suffisamment
personne, une essence, ou qui distinguaient condamnés, il avait cru pouvoir se dispenser
celui qui avait fait des miracles d'avec celui de répondre à la déclaration que Mennas lui
qui avait souffert. Il anatliématisait en par- en avait donnée dans sa lettre. Après quoi
ticulier Paulde Samosate, Diodorede Tarse, il supplie l'Empereur ' dene point soulïrir que

Théodore de Mopsueste, et Théodoret avec , les privilèges de la chaire de saint Pierre


tous les sectateui's de leur doctrine. Ayant soient diminués en quelque chose par les ,

ainsi écrit secrètement aux hérétiques acé- artifices des méchants et de ne lui envoyer
;

phales, il demeura en possession du Saint- que des personnes catholiques et irréprocha-


ibid. i;j. Siège. Mais il paraît qu'ils ne lui gardèrent bles dans leur foi et dans leurs monirs. Vi-
point le secret, puisque sa lettre et sa pro- gile chargea le patrice Dominique, porteur de
fession de foi tombèrent entre les mains de saletti-e, de quelques commissions secrètes
Libérât qui nous les a conservées. 11 semble pour Justinien, et qui, ce semble, regardaient
aussi qu'elles vinrent à la connaissance de les moyens de pacifier l'Église.
l'empereur Justinien. 7. Le Pape chargea aussi le palrice Domi- i«tic*i

vigi^'i'" ^f-
G. Ce priuce, trouvant mauvais que Vigile nique d une lettre pour le patriarche Mennas, ye.Mi.

KToii? V ne lui eût point écrit suivant la coutume où U le félicite de ce qu'en recevant les quatre
co_iicii. pig.
a„ç;gjt,jt après son élévation au pontilicat, et conciles généraux, il s'était acquitté de la
n'eut point répondu à la lettre du patriarche promesse qu'il avait faite au jiape .\gapet le
Mennas, où il faisait une déclaration de sa foi, jour de son ordination et de ce qu'il avait
;

lui envoya le patrice Dominique avec des reçu de môme les lettres de saint Léon, di-
lettres, où après avoir témoigné son atta- sant que rien ne pouvait lui faire plus d'hon-
chement à la véritable doctrine, il laissait neur que de ne point s'éloigner de la doctrine
entrevoir quelque méliance sur la foi de Vi- des évoques de Rome. Il marque que les
gile et sur sa conduite à son égard. Le Pape, archives de l'Église de Constantinople étaient
dans sa réponse fait l'éloge de la piété de
, remplies des lettres que saint Léon avait
l'Empereur, et de son attachement à la foi éta- écrites aux évoques de Constantinople, qui,

blie dans les conciles do Nicée de Constan- , de leur côté, en avaient écrit aux papes. En-
tinople, d'Ephèse et deChalcédoiue. Ensuite suite il confirme l'anathème que Mennas

il déclare lui-môme qu'il n'en avait point avait prononcé contre Sévère d'Antioche, et
d'autre que celle que les évéques de ces
' Pierre d'Apamée, contre .\iitliimeet les autres
quatre conciles ont professée, et que saint schismatiqnes, en oO'iant néanmoins la pé-
Léon et ses autres prédécesseurs ont autori- nitence et la communion à ceux qui pren-
s''Cpar leurs lettres et par leurs décrets ;
draient le parti de se réunir, parce que '
qu'en conséquence il analhiJmatise tous ceux Notre Sauveur n'est pas venu pour perdre
qui tiennent une doctrine contraire, nommé- quelqu'un, mais pour sauver tous les hom-
ment Sévère l'eutychéen, Pierre d'Apamée, mes par sa bonté. Ces deux lettres, qui sont
Anthime intrus dans l'Église de Constanli- datées du quinzième des calendes d'octobre
nople, Zoara, Théodose d'Alexandrie, Cons- sous le consulat de Justinien, c'est-à-dire du

' lîœc ergo quœ de fi/le n palribus sanctonim e\].,i:pist. i, pas. 316.
quatuor sijnoiiorum et n designalis hcatœ rccor- » Suppliciler preramur ut nulliiis subrepentis
dalionis papa: Leonis F,|ii.'lolis, alque a supra insidiis priiitegin Sedis heati Peiri aposloli chris-
tcriptoruin noxlrorum prwdrces.<nrum coiislilulis tianissimis trmpnrihus veslris in aliquo permit-
sunl veneruhililer defmita, per nmnin nos se- talis imininui. lliid., ii.nfr. 317.
quenles. analheninlisamus ros quicinnque de l'idri ' Quia Ri'Ueniplor noster non venil aliquem
ejus exposilioiie lel recliludine, aul dispulnre, p rdcre, sed omnes pro sua pietate salvare.
perverse, aut infideliter dubitare tenlaveriiU. Yi- Eiiisl. 5, pag. 319.
[Vl* SIÈCLE.] CHAPITRE XV. — SlLVKmUS ET VICILK, PAI'IÎS. 1!

m septembre Sifl, étaient souscrites do la archives de l'Eglise de Rome, par lesqiu-ls il

main du pape Vigile , cl iU\ cclit! du i)alrice pouirait apprendre ce qui avait été décidé
Douiiiiiifiu^. sur celle matière, poui' cliariun ordre et pour
Lotir»
ProfuluruM,
li

8. (Judiiiuc N'i^ilc ue diil pas (Mii' icf^a i'd('! les dill'crents âges. Il l'avertit iK'-autuoins
.Uia|:ti«.ILId. cominepapc l(''t;iliMU" (MMuiaul la vie doSilv(5- qu'il lui de diminiKM' leur pé'ui-
sera libre
I»!!. Jll.
rius,ou uc laiss;iit pas copcndaut de le con- tence â proportion de leur ferveur, en lui
sulterde divers endroits. Nous avons encore faisant remarquer qu'il ne devait pas les re-
sa n'ponse il Profiiturus, évôfjnc de Uraj^ue cevoir ])ai' l'iinposilion des mains, doni on
en Lusilanie, dal('e de Home le tr(jisiènic se sert pour faire descendre le Saint-Es[)rit,
des calcTulos do juillet, sous le consulat de mais par celle (juc l'on emploie pour récon-
Jean c'est-ù-dire le 29 juin de l'année 53G
, ,
cilier les pénitents et les rétablir dans la
vingt-et-un jours avant la mort de Silvé- sainte communion. Il marque dans le qua-
rius. Les collections ordinaires des conciles trième, que la consécration d'uiu! nouvelle
lisent Eutlicrins, an lieu de Prolulurus. Mais église se faisait par l'aspersion tie l'eau bé-
B«luiO| (ûiiit
Couclt, i&g.
M. Baluze montre, par le témoignage de nite ou exorcisée ; et que lorsqu'une église
plusieurs anciens manuscrits, et des Actes était rebâtie sur les anciens fondements, il

du concile de Drague, cpi'il faut lire Profu- n'était pas besoin de


consacrer de nou- la
turus, qui fut en cU'et évèrjue de Brague. veau; qu'il sullisait d'y célébrer la sainte
Celte lettre est divisée en plusieurs articles, messe. Dans le cinquième, il désigne le on-
qui forment autant de décrets. ])ans le pre- zième des calendes de mai pour le jour de
mier. Vigile condamne ceux qui,i\ l'imitation la Pâque suivante, et dit que l'ordre des

des pi'iscillianistes, s'abstenaient de l'usage de prièi'cs do la messe est toujours le même,


laviande, comme défendue et mauvaise par excepté quelques petites additions que l'on
elle-même, quoiqu'ils alTectassent de s'en faisait aux join-s solennels, pour en faire une
abstenir sons prétexte de dévotion, et les mémoire particulière; c'est-â-dire que l'on
compare aux manichéens. Il montre par l'au- ne changeait rien au canon de la messe, si
torité de l'Écrilure que rien de tout ce que ce n'est qu'après le Communicantes on faisait
Dieu a donné à l'homme pour sa nourriture, mémoire delà fête du jour et des saints que
n'est mauvais, quand on le prend avec ac- l'on y célébrait. Il ajoute qu'il envoyait des
tions de grâces; et il ajoute que comme on reliques à Profuturus, sans marquer de quel
ne doit point blâmer une abstinence qui est saint elles étaient. défend dans le sixième,
11

agréable à Dieu, on doit condamner celle sous peine d'être chassé de l'Église de Dieu,
qui a pour motif l'exécration des créatures de baptiser en une seule personne de la
du Seigneur. Il ordonne dans le second, que Trinité ou en deux ou en trois Pères, ou
, ,

le baptême solennel s'administrera suivant en trois Fils, ou en trois Saints-Esprits, vou-


les règlements du Siège apostolique que ;
lant que, selon l'ordre de Jésus-Christ, le bap-
l'on se conformera à l'usage de timles les tême fut conféré au nom du Père et du Fils
églises catholiques, qui, à la fin de chaque et du Saint-Esprit. Le septième porte qu'il
psaume, rendent gloire au Père et au Fils et n'est pas douteux que l'Eglise romaine ne
au Saint-Esprit, en mettant la conjonction et soit le fondement, la forme et le principe des
entre chaque personne c'est que quelques-
: autres églises, qui, ainsi que tous les fidèles
uns n'en mettaient point entre le Fils et le le savent, ont tiré d'elle leur origine parce :

Saint-Esprit, comme si ce ne fût qu'une seule qu'encore que tous les apôtres aient été choi-
personne. Le Pape réfute cette erreur par la sis de la même manière la prééminence a ,

formule du baptême, où, suivant le précepte néanmoins été accordée à saint Pioire sur
de Jésus-Christ, nous invoquons séparément tous, ce qui l'a fait nommer Céphas, comme
lePère et le Fils et le Saint-Esprit, en met- étant le chef et le prince de tous les apôtres;
chaque personne.
tant la conjonction et entre et qu'il est nécessaire que ce qui a précédé
Le troisième regarde ceux qui, ayant
article dans le chef, suive dans les membres qu'ain- ;

été baptisés dans l'Eglise, avaient reçu un si l'Eglise romaine a la primauté entre tou-

second baptême de la main des ariens, et tes les églises qu'on doit lui communiquer
;

depuis demandaient de levenir à' l'Église les causes qui regardent la personne des
catholique. Pour instruire Profuturns de ce cvcques, et les affaiies importantes de l'É-
qu'il devait faire en ces occasions, il lui en- glise et que les ap[)cllatiiuis de ces mêmes
;

voie les règlements ecclésiastiques tii-és des causes doivent lui être réservées. Ce dernier
196 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
article qui regarde la primauté do l'Eglise obtenu consentement de l'Empereur par
le
romaine ne se trouve point dans plusieurs l'entremise de Bélisaire, le Pape écrivit
anciens manuscrits, non plus que l'arlicle une seconde lettre à Auxanius, datée du
précédent où il est parlé de la forme du bap- 11 des calendes de juin, la quatrième année
tême. Ils finissent la lettre au cinquième après le consulat de Basile, c'est-à-dire le
article à la fin duquel Vigile fait à l'ro-
, 22 mai oio, par laquelle il le faisait son vi-
futurus un compliment semblable à celui par caire dans les Gaules, avec toutes les préro-
lequel se linisseni ordinairement les lettres. gatives attachées à cette qualité l'une ;

Mais ces deux articles se lisent dans la Col- lui donnait pouvoir d'examiner et terminer
lection qui porte le nom d'Isidore, et dans les causes des évèques du royaume, en se
celle des conciles du Père Lalibi; : on ne les faisant assister d'autres évi^ques en nombre
BiiD», M lit point dans l'édition de M. Baluze. suflisanl, à condition toutefoisde renvoyer au
Minl
i.«ire t 9. Ce mort de Silvérius
fut aussi avant la Saint-Siège les questions de foi et les causes
uéïa.ra

vcoMiiHï'. *ï^'^ ^^ ™' Théodebert pour


écrivit à Vigile majeures, après les avoir instruites sur les
"*•
le consulter sur lu pénitence que l'on devait lieux et l'autre obligeait les évèques à pren-
;

imposer à celui qui avait épousé la femme dre de lui une lettre formée lorsqu'ils vou-
de son frère. Modéric, ambassadeur du joi, laient sortir du pays. Vigile lui recommande
fut porteur de cette lettre, et chargé appa- de prier pour l'empereur Jnstinien , l'impé-
remment de la réponse. Nous ne l'avons plus, ratrice Tliéodora et le patrice Bélisaire ; et
mais Vigile écrivit en cette occasion à suint d'employer tous les moyens qui conviennent
Césaire, évoque d'Arles, de s'informer de la à un évoque pour entretenir la paix entre
qualité du fuit, et de la disposition du péni- l'Empereur et le roi Childebert. Il lui accorde
tent, pour instruire ensuite le roi du temps né- l'usage du pallium, comme il avait été ac-
cessaire à une telle pénitence. La raison qu'il cordé par le pape Symmaque à son prédé-
eut de renvoyer cette adaire à saint Césaire, cesseur, en le chargeant de faire part de sa
fut qu'il était à propos de commettre aux lettre à tous les évèques. Par une autre let-
évèques qui étaient sur les lieux, la mesure tre du môme jour, le Pape donna commission
de la pénitence et l'ordre que l'on devait y à Auxanius de juger l'atl'aire de Prétextât,
garder, afin que, eu égard à la disposition en prenant avec un nombre compétent
lui
du pénitent, ils pussent aussi accorder l'in- d'évêques. Vigile écrivit en même temps aux
dulgence. Vigile chargea saint Césaire de évèques du royaume de Childebert et à ,

prier Théodebert d'empêcher de semblables ceux qui avaient coutume d'être ordonnés
désordres à l'avenir, et celui et celle qui s'é- par l'évêqne d'Arles, pour les exhorter à re-
taient ainsi mariés, de continuer d'habiter counaitre .\uxanius en qualité de son vicai-
ensemble. La lettre est du 3 mars, sous le re, à lui obéir et à prendre de lui des lettres
consulat de Jean, c'est-à-dire de o38. formées quand ils seraient obligés de faire
Ai...Jio"'iM *0- ^^ suivante est datée du 15 des calen- des voyatres un peu longs. Il déclare sus-
ptg. 321.
des de novembre après le consulat de Ba-
, pens de la communion de leurs frères les
du 18 octobre 5-43, environ
sile, c'esl-cà-dire évèques qui refuseront d'obéir à celui d'.\r-
quatre ans depuis la mort de Silvérius. Elle les, et de se trouver aux conciles qu'il aura
est adressée à Auxanius, successem* de saint indiqués, voulant qu'en cas d'inlirmité ou
Césaire dans la chaire d'Arles. Cet évêque', de quelque autre empêchement légitime ils
aussitôt api'ès son ordination, avait envoyé envoient de leur part un prêtre ou un diacre.
à Home le prêtre Jean et le diacre Térède H. Auxanius n'ayant occupé que très-peii LfltrcS /
rtlltn
pour en donner avis au pape Vigile à qui il , de temps le siège épiscopal d'.Arles, on élut Jam^'îI
"*'
demandait en même -temps le pallium. Le pour lui succéder Aurélien, à qui le pape Vi-
Pape, quoique disposé à lui accorder volon- gile accorda le même pouvoir qu'à son pré-
tiers sa demande, voulut auparavant avoir le di'cesseur, et aux mêmes conditions, sur le
consentement de l'Empereur, pour lui mar- témoignage avantageux du roi Childebert,
quer le respect qu'il croyait dii à sa foi et à et du consentement de l'empereur Jnstinien:
sa piété. Il fait dans cette lettre l'éloge de c'est ce que l'on voit par les lettres qu'il lui en
saint Césaire, invite Auxanius à l'imiter dans éciivit et aux évèques des Gaules, en date du
ses vertus et dans sou attachement aux dé- dixième des calendesdeseptembre,la cinquiè-
crets du Saiul-Siége. Dix-huit mois après, me année après le consulnt de Basile, c'est-à-
ayant reçu les ordres du roi Childebert, et dire le 23 aoùl de l'an 5-iG.
[VI* SIÈCLE.] CHAPITRE XVI. — AHATOll, POÈTE CimÉTIEN. 197

12. Le pape Vigile écrivit beaucoup d'au- lie laissa pas de se conformer c^ ce qui y fut
tres Icltros, et quelques trailt's qui out rap- di'cidé touchant la condaumalioa di-s Tniis-

port h du cluquièuie cducilo géné-


l'Iiisldire Cluipitixs.Après quoi partit d(! Constanti-
il

ral, et qui en font méiue partie; ainsi nous nople pour l'evcnir h. llotuo, et mourut de la
remettons h en parler en cet endroit. Quoi- pierre k Syracuse, en Sicile, le 10 de jan-
qu'il eût proposé la tenue de ce concile pour vier S33, ayant tenu le Saint-Siège pen-
terminer les difliculh's i[u'il y avait enlrelcs dant seize ans et demi compter depuis
, ;'i

évèqucs au sujet des Trais-C/nipili-cs, et qu'il la mort de Silvérius. [ Les lettres et décrets
se trouvât alors à Constantinople il refusa , de Vigile se trouvent au tome LXIX de la Pa-
d'assister à ce concile en personne; mais il trolûfjle latine, col. 9 et suiv.]

CHAPITRE XVI.

Arator, poète chrétien-

[Écrivain latin, 551.)

1. Pendant que Vigile était à Rome, le 6 man-Moutier, dans laquelle, faisant allusion
avril 344, Arator lui présenta dans le sanc- à son nom, il dit qu'il avait ileuri dès sa jeu-
tuaire de l'Eglise du Vatican, son poème nesse en donnant aux vieillards des précep-
des Actes des apôtres, composé en vers hexa- tes pour les conduire dans la voie du ciel.
mètres et divisé en deux livres. 11 se trouvait Fortunat parle de l'ouvrage d'Arator dans la
là ime grande partie du clergé de Rome : Vie de saint Martin, et il en est aussi parlé Ri(;pbprt. de
Script. Bc''\e^,
c'est pourquoi le Pape en fd lire sur-le-champ dans le livre des Ecrivains ecclésiastiques de cap. xxxvliit

plusieurs endroits ,
puis donna le poëme à Sigebert de Gemblours.
Surgentius, primicier des notaires, pour le 2. Arator, après avoir publié son poëme Se!«
Tom.
écrits.
X BihI.
mettre dans les archives de l'Église. Mais à Rome, l'envoya dans les Gaules à un de ses Pal. [aj. 125,
et tom. Poet.

tout ce qu'il y avait à Rome de gens de let- amis, nommé Parthénius, afin qu'il le rendit cliriJl. Basl-
leiC, an. lotir..

tres ayant prié Vigile de le faire réciter pu- aussi public. Nous avons la letlre qu'il lui
bliquement , il en ordonna la lecture dans écrivit sur ce sujet en vers élégia-
: elle est
l'Eglise deSaint-Pierre-aux-Liens, où se ren- ques. Parthénius est qualifié dans l'inscrip-
dirent plusieurs ecclésiastiques et laïques, tion, maître des Le Père
Offices et patrice.
tant de la noblesse que du peuple. Aratoi' ré- Sirmond l'a fait imprimer
premier sur un le
cita lui-même les vers, à l'imitation des an- manuscrit de la Bibliothèque de Reims, à la
ciens poètes, qui avaient contume de réciter suite des œuvres d'Ennode de Pavie, d'où
publiquement leurs vers. Il le fit en 4 jours elle est passée dans le dixième tome de la
dill'érents, parce que les auditeurs y prenaient Bibliothèqne des Pèi'es. Le poëme sur les
tant de plaisir, qu'ils l'engageaient souvent Actes des apôtres en rend tellement l'his-
à répéter les mêmes endroits en sorte qu'il ; toire qu'on ne laisse pas d'y trouver plusieurs
ne put chaque jour lire que la moitié d'un circonstances tirées des autres livres du Nou-
livre. Il avait été comte des domesliques, ou veau Testament. 11 y en a même de l'Ancien,
capitaine des gardes, et comte des choses pri- parce que l'auteur les croyait nécessaires
vées, c'est-à-dire intendant des domaines pour donner plus de suite à son ouvrage. Il
de l'Empereur mais ayant renoncé au mon-
; semble dire que saint Pierre et saint Paul '
de, il avait embrassé l'élat ecclésiastique, et ne souffrirent pas le martyre le même jour
il était alors sous-diacre de l'Église romaine. de la même année, mais en deux années dif-
C'est ce qu' Arator lui-même témoigne dans férentes opinion qui ne lui est pas parti-
:

une des deux épîtres dédicatoires en vers culière, puisqu'on la trouve dans Prudence
élégiaques, adressées au pape Vigile. Il y re-
connaît aussi qu'il l'avait eu pour maiti'e ' Non eadem, tamen una dies, annique voluto
Idld, dans l'étude des dogmes de l'Église. L'autre Tempore sacravit repelilain passio liicem,
épitre dédicatoire est à Florien, abbé de Ro- Arat., lib. Il, lom, J Bibl. Pat., pag. 141.
198 mSTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
et dans quelques autres anciens. Maisie pape envoyé en députation auprès d'Athalaric, roi
Gélase, dans sondt-cret sur les livres apocry- des Gollis, le fil comte des domestiques pour
phes, rejette ce sentiment, soutenant que ces reconnaître le succès avec lequel il s'était
deux apôtres '
reçurent la couronne du mar- a(îT[uiffé de son ministère; et dans la lettre
tyre àRome en même temps et le même jour. qu'il lui écrivit', il dit qu'en cette occasion

Forlunat trouve de l'éloquence ' et de l'airré- Aralor avait fait usage du torrent de son
mcnt dans le poème d'Arator: il faut bien éloquence.
que le clerg:é de Rome et les gens de lettres [Le? lettres et les deux livres des .\ctes
de celle ville, devant qui il le récita, en aient de s apôtres se trouvent dans la Bibliotlwque
jugé de même, puisqu'ils l'obligèrent de ré- des anciens écn'vaitis par Galland, tome Xll.
,

péter souvent les mêmes endroits, tant ils y Mais kl meilleure édition est celle d'Arntzen,
avaient pris de plaisir; mais aujourd'hui que avec des prolégomènes et des notes, 176'J,
nous vivons dans un siècle plus épuré, on ne in-8. Elle est reproduite au tome LXVUl de la
trouvera pas les vers d'Aratorassez coulants J'atrologie latine, col 45 et suiv.
ni assez élevés. Le roi Théodorlc, qui l'avait

CHAPITRE XVII.

Pontien, évêquc d'Afriqne [540], et Anrélien, évêqne d'Arles, écrivains latins

[546]; nn anonyme, écrivain grec.

L<tin d« L'empereur Justinien ayant composé


1. sont morts. en serait autrement s'ils vi-
Il
PoQticn ft

}'f 1,
Ju^tiai»n.
(, A rour un ouvrage pour la condamnation des Trois- vaient : condamnerions avec justi-
nous les
Tftiti. V Cou- Chapitres c'est-à-dire des écrits de Théodore
, ce, si, étant repris de leurs erreurs, ils refu-
r.l. («ï. SU.
de Mopsueste, de ceux de Théodoret et de la saient de s'en corriger et de les condamner.
lettre d'ibas à Maris persan, l'adressa en Mais maintenant à qui ferions-nous signifier
forme d'édit ou de lettre à toute l'Église, la sentence que nous porterions contre euxî
sous le titre de Confessisn de foi. Les évo- Que nous servirait-il d'entamer une guerre
ques dWfrique le reçurent comme les au- avec des morts ? 11 ne peut nous revenir au-
tres, et trouvèrent que ce prince n'y ensei- cune victoire du combat que nous leur livre-
gnait rien de contraire à la foi. Mais Ponlieii, rions. D'ailleurs ils sont présentement juges
l'un d'entre eux, ne pouvant se résoudre à par le véritable Juge, de la sentence duquel
condamner des personnes qui étaient mortes il n'y a point d'appel. » Pontien supplie donc
dans la communion de l'Église et don! il TEmperenr de ne jjoint troubler la paix de l'É-
n'avait pas vu les écrits, fit sur cela une ré- glise, de crainte qu'en cherchant à faire cpn-
ponse à l'Empereur où il disait qu'il crai- damner ceux ne fasse
qui sont déj;\ morts, il

gnait beaucoup que sous prétexte de con- mourir plusieurs vivants qui retuseront d'o-
damner Théodore de Mopsueste Théodoret , béir à ses ordi-es, et qu'il ne se voie lui-niê-
et Ibas, l'on ne fit revivre l'hérésie euty- jne obligé de rendre compte de sa conduite
chéenne: « Si leurs écrits, ajoutait-il, étaient à cet égard, à celui qui viendi-a un jour ju-
venus jusqu'à nous, et qu'il s'y trouvât quel- ger les vivants et les morts. [La lettre de
que chose coutrc la règle de la foi, nous Pontien se trouve au tome LX\1I de la Pa-
pourrions en juger, sans condamner princi- trologie latine, col. 995.]
palement ceux qui en sont auteurs, puisqu'ils 2. Quelque temps après , le bruit se ré- S.Auiil

Qui Patihts non diverso, sicttt hœretici gar-


' tun., lit). I De Vila S. Kartini.
riunt, sed hiw lempnre, uno codtmque die gln- ' Sedmérita tua excmpli.<i pntius laudabili-
lit

riosa morte cuw Pelro in urbe Roma cnronutus bus (isicramtts, jurât repclere pnmposam legnlin-
est. Ola?. iii Décret. nem ijttiim non eommunibus verbis, sed tnrrenli
' Surtis iiposlolicw, qiiœ genta vocanlur, etac- eloquenlia' fliimine peregisli. Cassiml., lil>. VU!
tus fiicuiiili) eloquio vales sulcavit Aralor. l"or- Variar. episl. li.
[Vl° SIÈCLE.] CHAPITRE XVII. — PONTIEN, AUHÉL1EN, ETC. lîCJ

Tj'^tio J'Ar-
pandil dans Ips Gaulos, (jiin le pajio AiLfilc nouveau monastère, est divisée en cincpianlc-
avait l'ait, tï l'oLuasioii des 'J'niis-('/iiijii/irs, six articles,dont voici les plus remarqua-
quelque chose contre les décrets des papes bles: Celui qui était reçu dans le monastèi'e Num. s

ses prëdécesseiirs, et contre les quatre con- ne pouvait jilus eu sortir le reste de ses jours,
cilesgénéraux. Saint Aurélien, cvèque d'Ar- et la clôture en était si exacte, qu'il n'était Cod. rogular
pnj. 01.
en écrivit et ce pape pour le délioui-
les, lui ; permis àaucun laïque d'entrer dans la mai-
per lui fil réponse do ne point se troubler son, ni dans l'église, mais seulement dans le
ni lui ni les autres évêques des Gaules, des parloir. A l'égard des femmes, soit religieu- Num, H.
fausses lettres et des fausses nouvelles qu'ils ses, soit séculières, il était défendu absolu- 1-.

pourraient recevoir; et d'être assurés (ju'il ment de leur parler, etdelcur [jcrmeltrel'en-
garderait iuviolableniont la foi de ses Pères. tréc de l'Église, fussent-elles prochesparcntes
VCnn- Quand l'Empereur nous aura
Tont.
:ll.pag. IGS.i
Il ajoutait : « de l'abbé, on des moines. On donnait à tous 5, 4!>.

cougédiés nous vous enverrons une per-


, ce qui leur était nécessaire pour leur vête-
sonne qui vous instruira de tout C(> qui s'est ment et poin- leur nourriture : ainsi tout ce
passé : ce que nous n'avons pu faire encore que les religieux recevaient de leurs parents,
tant à cause de la rigueur de l'hiver qu'à ou de leurs amis, restait au pouvoir de l'ab-
cause de l'état où l'Italie est l'éduite. » Il bé, qui en disposait ou en faveur de Celui à
charge saint Aurélien d'engager le roiChiUle- qtd on l'avait donné, s'il en avait besoin, ou
Lert à empêcher que les Goths qui étaient en- pour l'usage de la communauté. Lorsqu'on
trés dans Rome avec leur roi, ne tissent rien leur donnait des habits neufs, ils rendaient
dans cette ville au préjudice de l'Église, sons les vieux, que ou à l'usage
l'on faisait servir
prétexte qu'ils étaient d'une autre religion: de ceux qui étaient nouvellement reçus, ou
« Car, disait-il -, il est digne d'un roi catlioli- à l'usage des pauvres. Pour éviter le vice
que comme le vôtre, de défendre de tout son de propriété les cellules des moines ne fer-
,

pouvoir la foi et l'Eglise dans laquelle il a été maient point à clef, et ils n'avaient point
baptisé.» La lettre du Pape est du 29 avril d'armoires où ils pussent enfermer quelque
550. Il avait reçu celle de saint Aurélien le chose. On ne recevait point il'cnfant qui n'eilt
14 juillet 5i'J: nous ne l'avons plus. au moins dix ans, ni d'esclave qu'il n'eût été
RCgle do 3. Ce saint avait, ainsi qu'on l'a déjà ditplus aflranchi, et qu'il ne fût muni de lettres de
AiirilleD.
haut, succédé à Auxaniusdans le siège épis- son maître. Ceux qui étaient chargés de
copal d'Arles en 545. Deux ans après il fonda, quelque otlice en recevaient les clefs de des-
dans la même ville, un monastère pour des sus l'autel ou l'Evangile, pour les faire sou-
hommes, par les libéralités du roi Cliildebert. venir qu'ils devaient rendre compte à Dieu
Cette fondation, qui se fit le quinzième des de leur ministère. Les ornements de l'au-
calendes de décembre , la sixième année tel ne devaient point être de soie, ni d'or,

après le consulat de Basile, c'est-à-dire, le ni chargés de pierres précieuses. Pendant


17 novembre 547 fut confirmée parle pape , les leçons de Matines, les religieux s'occu-
Vigile, ainsi qu'on peut le voir par une lettre paient de quelque travail manuel, comme de
de saintGrégoire à Vigile, évè(pie d'Arles. On faire des cordes ou des nattes, afin de s'eui-

mit dans l'église du monastère des reliques pécher de dormir. Mais si c'était un jour de
3-, 2-,
de la vraie croix de Notre -Seigneur Jésus- dimanche ou de fête, on ordonnait a celui
Chvisl, de la Sainte Vierge, de saint Jean- qui se trouvait avoir sommeil, de se lever
Baptiste, de saint Etienne, de saint Pierre et pendant que les autres étaient assis. Il ne leur
de saint Paul, de saint Jean, de saint Jac- était pas pci-mis de se parler en secret, sur-

ques, de saint André, de saint Philippe, de tout la nuit, ni de parler à un excommunié,


saint Thomas, de saint Barlhélemi, de saint sinon à celui que l'abbé en aurait chargé.
Matthieu et de quatre autres apôtres, de saint Si la faute d'un religieux était de nature qu'il

Genès, de saint Symphorien, de saint Bau- fallût le punir de verges, on ne pouvait lui

dil, de saint Victor, de saint Hilaire, de saint en donner plus de trente-neuf coups, sui-
Martin et de saint Césaire. La Règle, que vant la loi de Moïse. Aucun ne pouvait être
saint Aurélien donne aux religieux de ce élevé au sacerdoce ou au diaconat, sans le

'
Dignum est enim, et catholico sicut est, régi dere. Vigil., Epist, ad Anrelian., toru. V ConciL,
conveniens, ut ftdem Ecclesiam in (/«a Deus il-
et pag. 558.
lum voluit baplizari, omni debeat virlute defen-
,

200 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


consentement de l'abbé. S'il s'en trouvait vêqueenquel lieu fallait enterrer le mort'
il

d'assez méritant pour être élevé à l'épis- Si l'évêque refusaitde le dire, alors on invi-
copat il devait sortir seul du monastère
, tait des clercs de quelque église que ce fût,
,

saus prendre un moine pour compagnon. pour faire les obsèques, et on leur faisait
On srardait le silence à table , et l'on ne quelques petits présents. Saint Aurélien finit
manquait jamais de faire la lecture pen- sa Règle par ces paroles qui marquent bien
dant le repas, afin que l'àme et le corps re- son humilité Aurélien pécheur j'ai institué
:

çussent en même temps leur nourriture. cette Règle au nom de Jésus-Christ. A la suite
Hors le cas de maladie, il n'était pas permis de l'Acte de fondalion de son monastère, on
à l'abbé de man^jer ailleurs qu'au réfectoire lit une partie des diptyques ou tables sacrées

commun. On n'y servait jamais de viandes; qui étaient en usase longtemps après la
mais on accordait aux infirmes de la volaille, mort de saint Aurélien. On y fait mention
el a la communauté du poisson en coitains des fidèles morts el vivants, et dans la mé-
jouis de fêtes, ou quand l'abbé le trouvait :i moire des saints on fait celle des martyrs et
propos. La Règle ne prescrit aucuns jeunes des confesseurs , dont il y avait des reliques
depuis la Pentecôte jusqu'au 1" septembre, dans l'église du monastère.
les laissant à la disposition de l'abbé. Depuis 4. Saint Aurélien donna aussi une Règle
ce jour jusqu'au 1" novembre, les moines
les. IbiH. j»s.
à des religieuses. Elle est divisée en qua- 39, ptrl. i.

jeûnaient trois fois la semaine le lundi , le , rante articles, et adressée aux vénérables
mercredi et le vendredi. Depuis le i" no- sœurs du monastère de Sainte- Marie, établi
vembre jusqu'à Noël, ils jeûnaient tous les dans la ville d'Arles. Le prologue et tous les
jours, excepté le samedi et le dimancbe : ce règlements sont les mêmes, et presqpie mot
qui s'observait aussi depuis l'Épipbanie jus- à mot, que dans la Règle pour les moines, à
qu'à Pâques, à l'exception des grandes fê- l'exception de certains endroits qui ne con-
tes, du samedi et du dimanche. Car c'était venaient pas à des filles, tel que celui qui
Msbll. lom, l'usage, non-seuleînent en Orient, mais aussi parle de l'ordination. On a joint à cette Rè- ibia. i.»?.i-,
1ADQ..1 pagi
11». parmi les Gotbs, de rompre le jeûne le sa- gle une lettre de Jean , évêque d'Arles, vers
medi et le dimanche à cause de la sainte
, la fin du vil' siècle , où après avoir reconnu
communion que en ces deux
l'on recevait que cette Règle a pourvu sulfisamment à ce
jours. DepuisPâques jusqu'à la Peutecùte on qui regarde la quantité et la qualité des ali-
Num.înri-j. ne jeûnait que le vendredi. Tous les moines ments et des habits, il défend à ces filles de
apprenaient à lire et lisaient depuis Prime
, boire etde manger, soitavec des hommes, soit
jusqu'à Tierce. On
voit, par tous ses règle- avec des femmes religieuses ou laïques, pa-
ments, que saint AurcHicn avait devant les rentes ou étrangères :en leur accordant
yeux la Règle de saint Benoit et de saint toutefois de leur ofliir quelques rafraîchisse-
7. Césaire, lorsqu'il composa la sienne. Cela ments par oIBce de charité. Les deux Règles
parait encore plus par les articles où il dé- de saint Aurélien se trouvent dans le Code
fend de recevoir et d'écrire des lettres, sans dressé autrefois par saint Benoit d'.\nianes,
la permission de l'abbé; d'avoir auprès de et donné au public par Holsténius, et dans
Num.: ?. 10, sou Ut de quoi manger ou boire de jurer, ; les Annales du Père le Cointe vers l'an 348.
11,12,13,
de donner des malédictions à iiersonne; de o. Dom Ruinart nous a donné, d'après
MiDI Auréllpn
mentir, de se coucher sur sa colère, de frap- Fréhérus et Duchesne une lettre de saint
,
ft Tb*oHfbcrl.
1d A[>|><0i1,

per quelqu'un. C'est encore d'après la Règle Aurélien au roi Théodebert ce n'est qu'un
:
G'fg. Ti. on,

de saint Benoit, qu'il prescrit l'oflice de Com- compliment à ce prince sur ses belles quali-
plies inusité auparavant a l'égard des au- : tés, en particulier sur son affabilité.
Il «J-IHA
tres oUlces, il a suivi un ordre tout diÛ'érent 6. Au mois d'octobre de l'an SAO, saint
eoDCilr d Or-
de saint Benoit. Il met beaucoup plus de Aurélien assista au cinquième concile d'Or- letD». Tom V .

Cnncil. pa^.
psaumes. Il règle la longueur des leçons léans où il souscrivit après saint Sacerdos
, 390 Sa moil
on 651.
pour chaque nocturne sur la ditférence du, de Lyon qui y présida. Dans quelques ma-
caractère dont les Lecfionnaircs élawril écrits, nuscrits la souscription de saint .\urélien
et sur la dillérence longueur ou de la Jjrié-
de la est avant celle de saint Sacerdos ce qui
:

velé des nuits. S'il arrivait que quelqu'un des prouverait qu'il aurait présidé à ce concile.
frères mourût, on veillait tour à tour auprès Suivant l'inscription que l'on trouva sur son
du corps pendant la nuit pour l'aire des priè- tombeau en 1308, dans la chapelle de Saint-
HoIUikI. id
res cl avant del'entci'rer, on demandait àl'é-
; Nizier à Lyou il mourut dans cette ville le
,
,

[Vl" SIÈCLE.] CHAPITRE XXm. — SAINT VUTÎNTIOLE, LÉON, ETC. 201


ii»m 10 iiinii, seizi^mf' des calendes de juillet , la onzit^mo le un codex palimpseste de
Cardinal sur
année après le consulat de Justin, c'cst-iï- du couvent des hasiliens de
la hibliotlièque
dire le seizième jour de juin 352; car Juslin- Giotto-Ferrata. L'auteur parait avoir vécu
le-Jeunefut consul seul on ."liO. .Villeursqu'j'i sous Justinien qu'il appelle plusieurs fuis notre
Lyon, on couiptail ilepuis le consulat de Ba- maître ; il a servi de guide, ou plutôt a été
sile qui fut consnl ^ul en oil , et le dernier souvent copié par Jean Malalas dont l'histoi- ,

de tous ceux qui se trouvent dans les Fasles re se trouve dans les Historiens byzantins. Ces
ro7nains. fragments sont précieux en ce qu'ils contien-
[Les ouvrages qui nous restent d'Aiirélien nent plusieurs faits nouveaux, rectilicnt plu-
sont reproduits aux tome LW'III de la Pa- sieurs autres historiens et montrent la sour-
trologie latine, col. 3ii3 et sniw, d'après la ce où ceux-ci ont puisé. La première ligne
Co'/ec^f'oH d"lIolsl(''ni us.] donne un nouveau témoignage aux miracles
onvm-da 7. [Dans le tomo IIdu Spicilegium roma- arrivés loi-s de la reconstruction du temple :

niim, pag. 1-28, .\ng. Maï a publié, en grec et (Ices prodiges ayant été annoncés à l'empe-
en latin quatre fiagments, historiques qui se reur Julien, il cessa d'en ordonner la réédi-
rapportent aux règnes de Julien d'.\rcade , ,
lication. » Ces fragments sont reproduits au
de Théodose et de Justinien de ."{Gi <à 365. tome LXXXV, de la Patrologie grecque-latine,
Ces extraits historiques ont été trouvés par col. 1806-1824.]

CHAPITRE XVIII.

Saint Viventiole, évêqne de Lyon [540] ;


Léon, archevêque de Sens ; Tro-

janns, évêqne de Xaintes; saint Nioétins, évêqne de Trêves.

[vers l'an 566], et Mappinins, évêqne de Reims [550].

[Écrivains latins.]

1. Nous avons déjà parlé plusieurs fois de plus qu'un fragment. Au mois de septembre
saint Yiveutiole, soit à l'occasion des con- de la même année il se trouva au concile ,

ciles où il en parlant du mo-


a assisté , soit d'Épaone. ' Il en tint lui-même un à Lyon
nastère de Condat ou Condatiscon où il , avec dix des évèqiies de cette assemblée
passa une grande partie de sa vie. Son savoir qui l'avaient suivi. Le détail de ses autres
et ses vertus le firent élever au sacerdoce ,
actions n'est pas connu non plus que l'an- ,

et ensuite à l'épiscopat. Il semble que saint née, ni le jour de sa mort. Nous avons cinq ATir.,Ep!.|.
17,52, 51t,t>0,

Avit de Vienne pressentit qu'il y parviendrait lettres de saint Avit de Vienne qui lui sont C4.

un jour, lorsqu'en le remerciant d'une chai- adressées mais aucune de ses réponses. Il
,

se dont il lui avait fait présent, il lui sou-


, y a seulement parmi les lettres de saint Avit
haita en i-econnaissance un siège épiscopal. im billet de saint Viventiole par lequel il ,
Eplsl. 33.

Ce fut sur celui de Lyon qu'on le plaça. Il y l'invite à la solennité de saint Just '. Ago-
était déjà au mois de mai de l'an 317, puis- bard ' l'un de ses successeurs témoigne
, ,

qu'il assista en qualité d'évêque de Lyon à que l'on voyait encore de son temps, c'est-
ladédicace de l'Église d'Agaune et qu'il y , à-dire dans le ix' siècle, quelques-uns de
prononça un discours, dont il ue nous reste ses écrits qui étaient des preuves de sa doc-

' 11 adressa aux é vêques de la province de Lyon une cujus doctrinœ fuerit, non solum ipsius, sed et
lettre assez courte pour les couvoquerau concile d'É- aliorum de eoscripta testantur. Agob. DeJudaïc.
paone. On trouve cette lettre au tome LXVlIde la siiperst., num. i.

Patrologie latine, col. 993. (Elle a (-Xé communi- 3 Ou


trouve dans Galland, tome X, et dans la
le

quée d'après uu manuscrit de Toulouse. (l'e'i/ifeiir). Patrologie latine, tome LIX, parmi les QEuvresde
* YivenUolus Ecclesiœ Lugdunensis episcopus, saint .'Vvit, col. 272. (L'éditeur.)
,

202 HISTOIRE GÉNltllALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


triue et de son érudition. Il ajoute, que di- puisqu'en cette année Constitut , évêque de cil. ULU,
vers écrivains en avaient fait l'éloge, mais il Sens, assista au cinquième concile d'Orléans.
ne en quoi ces écrils consistaient.
dit point 3. Trojanus ou Tropliianus , évêque de Tiojipnt é-

Léon, areli><
2. Léon, archevêque de Sens, n'ayant pu Xainles, différent d'un évêque dumèmenom te.. S« lt't<r>.

S«as.
Tom. V Cnn.
se trouver au second concile d'Orléans qui se qui gouvernait cette Église sous Clovis eu cil., |>i(. S7«.

tint au mois de juin de l'an 333, y députa de 508 nous est connu par l'éloge que saint
,

Tom. IV sa part le prêtre Orbalus. Mais il assista au


CoDcil., Me. Grégoire de Tours ' fait de ses vertus, et par
17(9.
troisième, qui fut tenu dans le mois de mai une lettre qu'il écrivit à Eumérius, évêque
ToiD. V,[ac. de l'an 538. Il y en eut un quatrième dans la de Nantes, qui assista au (jualrième concile
303.
même ville l'an o-41. Léon ne put s'y rendre, d'Orléans en 341. Eumérius lui envoya quel-
parce qu'il était mal alors avec le roi Cliilde- ques diacres de son Eglise chargés d'une
Uld., Jif. bert. Ce prince, sollicité par le peuple de Mc- lettre, dans laquelle il le consultait sur ce
Imi d'y érif^cr un évèché, et bien aise lui- que l'on devait l'aiie à réf;ard d'un enfant qui
même de distraire cette ville du diocèse de ne se souvenait point d'avoir été baptisé,
Sens, parce qu'elle était de son royaume, mais seulement d'avoir eu la tête enveloppée
écrivit à Léon pour lui faire part de la re- d'un linge, comme on a coutume d'envelop-
Fn Apprnd. quête des habitants de Melun. Léon répon- per celle des malades, lorsqu'ils reviennent
Oftpr (irrifor.
Turou. ]3g. dit à ce prince avec respect, mais avec fer- à la santé, de peur que le froid ne leur occa-
meté, qu'il ne lui convenait pas de consentir sionne une rechute. Trojanus répondit que ,

au démembrement de son diocèse; que si si ce jeune homme' ou tout autre que lui ne

ces peuples le demandaient, on devait les se souvenait point d'avoir été baptisé, il de-

regarder plutôt comme des déserteurs que vait l'être sans aucun délai, pourvu toute
comme des fidèles qu'il était du devoir d'un
;
fois qu'on ne put prouver par aucun autre té-
prince de ne point écouter des demandes qui moii:nage qu'il eût reçu le baptême. [La let-
tendaient jeter le trouble dans l'Ë^dise, et
ii tre de Tiojanus se trouve au tome LXVII de
à y causer des scandales; que s'ils alléguaient la l'atrolofjie lutine, col. '.103.]
Saint Grégoire de Tours a S>lDt Me<-
pour prétexte de l'érection de ce nouvel 4. fait aussi
T'*»'-.
évêché, qu'il ne faisait pas exactement la vi- l'éloge de saint Nicétius. 11 raconte qu'il vint il

Gr*«. Toron.
Vit.. Hd.
site de l'Église de Melun, ou qu'il n'y en- au monde avec un cercle de cheveux autour uii. ZTII.

voyait personne de sa part , ils devaient de la tête, d'oii l'on jugea dès lors qu'il était
savoir qu'il n'y avait point en cela de sa destiné à la cléricaturc. Ses parents le mirent
faute, parce que les chemins lui en étaient fort jeune dans un monastère situé dans les
fermés de tous côtés; que, sans cela, il ne étals du roiThierri, pour y être instruit dans
manquerait pas, qnoiqu'âgé et infirme, de les lettres et dans la piété. Ses progrès daus
faire pour l'Église de Melun ce que les saints l'une et dans les autres le tirent choisir pour
canoiis exigeaient de lui. Il avertit Chil- remplacer l'abbé qui avait pris soin de son
deberl que si, contre les canons, queUpies éducation. On ne sait pas le nom de ce mo-
évoques entreprennent d'établir sans son nastère. Mais ce qui l'ait juger qu'il était dans
consentement un évéqne à Melun, il en por- le royaume de Thierri, c'est que ce prince
tera ses [ilainles au Pape ou au concile, et avait pour Nicétius une vénération parti-
qu'il se sépare;a de communion, tant d'avec culière. En 327, il le fit ordonner évê(|ue de
ceux qiii auront ordonné, que d'avec celui Trêves. ClotaircI" qui avait succédé àThéo-
qui aura été ordonné. Cette lettre se trouve debcri, lils de Thierri, exila le saint évêque,
dans le Recueil des conciles du Père Sirmoud qui ne revint dans son église que sous le rè-
dans la Gaule chrétienne de messieurs de gne de Sigebcrt, qui avait succédé a une
Sainte-Marthe dans l'Appendice des œuvres
, partie des étals de son père. Saint Nicétius
Cnoc
To
!.
ti. IV
pi|,'.

de saint Grégoire de Tours, et ailleurs. [On la assista, en 333, au premier concile de Clei"- tviî, et loin.
V, |X|t. 891,
trouve dans Galland, tome Xll, pag. 30, avec monl, et, en 349, à un autre concile qui se tint «Ot el >l •

une notice sur Léon. Le tout est reproduit dans la même ville. 11 s'était trouvé la même
au tome LXVllI de la Pulnilogie latine, col. année au cinquième concile d'Orléans et ;

Tom V Corj-
10 et seq.] Léon était mort dès l'an 549, deux ans après, c'est-à-dire en 331, il fut

• Magna: virlutis fuit bcalns Trujanus anlis- tum fuUsc non rccolil, nec ab alia persona id
tes. (îrcg. Turou. !ib. De Gloria confessorum, cap. facliim fuisse probatur, baplinnium absiiue ulla
LIX. dilalioue pevcipiat. Trojaii. fpi.s.'. ad Eiinicr., tom.
' Slatutum novcris ul quicumque se bapliza- V Concil., pag. 378,
[VI* SIKCLE.] CITAPITÏÏE XVni. — SAINT VIVRNTIOLE, LÉON, ETC. 203

présent an second de Paris, où l'on examina pour leurs reliques nn ni frrnnd respect qu'ils
l'allaire de SalFarac, évoque de cette ville. ne font [)oint de difliculté de les enlever fur-
Il en convoqua lui-inèuic un dans la ville do tivement, et que de l'autre ils lâchent d'a-
'J'oul au sujet de (]uelqucs insidles (]u'il avait néantir la foi (pie ces disciples ont prôchée,
reencs île certaines personnes contre qui il et qu'ils refusent d'entier dans les églises
avait prononcé une sentence d'excommuni- où l'on rend un culte ii leurs ossements; ou
cation pour avoir contracté des mariages in- que s'ils y entrent, ce n'est qu'en secret. Il
cestueux. Il fit aussi paraître son zèle contre propose un second argument qui était enco-
les erreurs des ariens et des eutycliéens. re plus à la portée de ces barbares, en le ti-
3. Nous avons de lui deux lettres sur ce ' rant des miracles qui se faisaient dans les
)odn« ntt« ,

V Coo- sujet, dont la première est adressée « Clodo- églises des catholiques, au lieu qu'il ne s'en
. >3;.
sinde, princesse catholique, et dont le mari opinait point dans celles des ariens. « Que
nommé Alboin, roi des Lombards, était in- le roi Alboin les envoie, dit-il, à l'Eglise de
fecté de l'arianisme. Ce prince s'était fait une Saint-Martin dont on fait la fête le 11 no-
grande réputation de valeur mais il s'in- : vembre osent y entrer, ils y verront
; s'ils

quiétait peu du salut de son âme , l'ecevant encore aujourd'hui avec nous les aveugles
tous ceux qui étaient capables de l'en éloi- recouvrer la vue, les sourds l'ouïe, les muets
gner et de le conduire en enfer, c'est-à-dire, la parole, les lépreux et tous autres malades
les ariens à qui il ajoutait foi. Saint Nicétius la santé. I) Il les renvoie encore €i l'Eglise de
combat leurs erreurs dans sa lettre, montrant Saint-Germnin d'Auxerre, à celles de Saint-
qu'il n'y a qu'un Dieu en trois personnes ^ ; Hilaire et de Saint-Loup, où il se faisait
que c'est pour cela que Jésus-Christ a ordon- journellement tant de miracles, qu'il ne pou-
né de baptiser au nom, et non pas aux noms vait les rapporter tous, Il marque en parti-
du Père, du Fils et du Saint-Esprit, moulrant culier que ceux que les démons possédaient
qu'il n'y aqu'un Dieu et non pas trois, et que et tourmentaient, en les tenant suspendus
le Fils est Dieu comme le Père. Comme les en l'air, étaient délivi'és, et confessaient la
Goths étaient dans les mêmes sentiments sainteté de ces évèques. « Opèrent-ils les mê-
que les ariens, il les combat par eux-mêmes, mes merveilles dans les églises des ariens ?
*
et dit, que leur conduite ne se soutient pas; Non, parce qu'ils ne permettent pas eux-mê-
puisque d'un côté ils ont en vénération les mes que Dieu et ses saints y habitent un :

douze disciples de Jésus-Christ, qii'ils ont démon n'en exorcise pas un autre. Que di-

' Les lettres et les opuscules de saint Nicétius cam, confmgunt vel cœcos, qui cœci a nativitate
ont été recueillis p.ir Gallaud, tome XII, pag. 7G9, esse videntur. Quid dicam, cum inde illiiminatos
avec une notice sur le saint évèque.Le tout est repro- conspicimus, ad propria, Deo niiseranle, sanos
et
duit au tome LXVIII de la Patrologie latine.col. 361 reverti videmus? Xum quid dicam adhuc de do-
et seq. (L'édUeur.) mino Germano, Hilario vel Lupo episcopis? Ubi
' jYec dubites très in personis, nain unus in tanta mirabilia hodie apparent, quantum nec di-
Trinilate agnoscilur. Et ideo ad discipuloi suos cere verbis valeo : ubi tributnnles, id est, dœmo-
dixit : Ite baptizate ia nomine Patris, et l'ilii, et
, nia habentes, in aéra suspensi torquentur.et do-
Sptriius Sancti iti nomine dixit, non in nomini-
: minos quos dixi esse'confitentur? Auniquid in
bus, quin imam Deitatem dixit non très. Nicet., ecclesiis eorum sic faciunl ? Kon faciunt, quia
Epist.ad Clodosind., tom. V Concil., pag. S'M. Deu-m et dominos sanctos ibi habitare non sen-
' Quid nos ire pcr singula necesse est ? Ad duo- tiunl, dœmon dœmonem non exorcizat... Quid de
decim discipidos quos habuit, veniamus, quia ipsi domino Remigio et domino Hedardo episcopis.
Gothi hodie ipsis venerationem impendunt, et re- quos tu, credo, vidisti? Non possumus lunla ex-
liquias eoritm furtim toUunt : sed nihil ibi habent, ponere, quant i mirabilia per illos Deum videmus
quia /idem eorum annullare prœsiimutil. Quidest facere. .iudisti ab avia tua domina bonœ memo-
quod in basilicis eorum corpora ipsoriim hodie ve- rie Clodhilde, qualiter in Franciam venerit, quo-
nerantur, non ingrediuntur ? Quid est quod nihil modo dominum Chlodoveumad legem catholicam
ibidem pra'sumereaudent,nisifurtive....Uic siju- adduxeril; et cum esset Itomo astutissimus, noluit
bel addomiiiuni Murtinum per festivitatemsuam, acquiescere, antequam vera agnoscerel. Cum ista
quam undecima die facit november, ipsos mit- quœ supra probata cognovit, humilis ad do-
dixi,
lat et ibisi audent aliquid prœsumant, tibi cœcos
: mini Martini limina cecidit, et baptizari se sine
hodie illuminariconspicimus, ubi surdos audilum, mora permisit. Qui baptiznlus quinta in hœre-
ctmutos sanilatem recipere. Nam quid dicam de licos, .ilaricum vel Gundobaldum reges, fecerit,
leprnsis, aut de aliis quam plurimis. qui quanta- audisli; qualia bona ipse vel filii ejus in sœculo
cumque debilitute percussi sunt, ibidem per sin- possederunt, non ignoralis. Tom. V Concil., pag.
gulos annos alii et alii sanantiir ? Fartasse di- 835.
204 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
rai-jede saint Rémi et de saint Médard que rer haute voix qu'il renonce à l'erreur, et
i\

vous avez vus, comme je crois ? Il n'est pas qu'il anathématise Nestorius et Eutyehès, en
possible de raconter tous les prodiges que lui déclarant nettement à lui-même que tou-
Dieu opère par eux à nos yeux. Vous avez te l'Italie, l'Afrique, l'Espagne et la Gaule
ouï dire à votre aïeule Clotilde, comme elle analhématisaient son nom depuis la publi-
vint en France et de quelle manière elle cation de son édit. Cette lettre lui fut rendue
convertit le roi Clovis à la religion catholi- par un prêtre nommé Laclance, qui était
que. Comme il il ne vou-
était très-habile, venu dans les Gaules visiter les saints lieux,
lut point se ne connut la vérité.
rendre qu'il et qui était allé jusqu'à Trêves.
Mais ajant été témoin des miracles dont nous 7. Jusqu'en 1659, on ne connaissait point TralU d«
ailDI Nlcilnt
venons déparier, il se prosterna humblement d'autres écrits de saint Nicétius que les deux
à la porte de l'Église de Saint-Martin et se lettres dont nous venons de parler; la pre-
fit baptiser sans délai. Vous n'ignorez pas mière , écrite vers l'an 563 et la seconde
les avantages qu'il eut depuis son baptême vers l'an 565. Mais dom Luc d'Achéri donna Tfm.Iirfpl.

contre les rois Alaric et Gondébaud , héré-


dlcc. t^. 1.
dans le troisième tome de son Spicilége deux
tiques; et quels biens il posséda en ce mon- petits traités qu'il ne doute point être de
de, lui et ses enfants, n Saint Nicétius con- saint Nicétius, tant à cause de la conformité
jure Clodosinde de lire cette lettre au roi, du style avec ces deux lettres, qu'à cause
son mari, et de travailler de tout son pou- du témoignage de saint Grégoire de Tours,
voir à sa conversion, en la faisant souvenir qui nous apprend que ce saint fut élevé dès
<le ce que dit saint Paul, que l'homme infi- son enfance dans les exercices de la vie mo-
dèle recevra le salut par la femme fidèle. nastique, et que ses vertus et son savoir le
Letlro de
S. Niciliot i
6. Il nous reste une autre lettre de saint firent choisir pour remplir les fonctions
l'emi-erêuf
JuïtlDICQ.
Xicétius à l'empereur Justinien , dans la- d'abbé. On voit, en etfet, que l'auteur de
Ti m. V Com.
Cil. le;. 83:>.
quelle il l'exhorte d'une manière très-vive, ces deux traités vivait en communauté, et
et avec toute l'autorité que
lui donnait son qu'il en était le chef. Il y a des manuscrits
zèle pour la religion et un épiscopat de où ils portent le nom de Nicétas, évoque
près de quarante ans, à renoncera l'erreur des Daces; mais dans celui de Saint-Germain-
qu'ilavait embrassée, sur la fin de son règne. des-Prés, ils sont sons le nom de l'évcque
C'était l'erreur des incorruptibles, rejetons Nicétius. Il parait, par le commencement du
des eutycliéens, qui enseignaient que le premier traité, que le saint en avait fait d'au-
corps de Jésus-Christ était incon-uptible, en tres mais il n'en dit pas le sujet. Son but,
; C>p. I.

sorte que depuis le moment qu'il avait été dans cclni-ci, est de faire voir l'utilité des
formé dans le sein de sa mère, il n'avait été veilles que les moines passaient ordinaire-
susceptible d'aucun changement, ni d'aucune ment dnnslechant des psaumes, dans la lec-
altération, pasmciue des passions naturelles turcdes livres saints et dans la prière. « Dieu
et iunoccnles, comme sont la faim et la soif. dit-il, qui, par sa providence, a pourvu à tous
Ce prince, pour établir cette nouvelle erreur, les besoins a donné le jour
de l'homme, lui
donna un édit pour la faire approuver de pour pour se reposer de
travailler, et la nuit
tous les évêques ceux qui refusèrent furent
: ses fatigues. Mais combien n'y en a-t-il pas,
maltraités. Saint Nicétius lui demande pour- ajoute-t-il, qui prennent quelques heures sur
quoi il prenait la défense des hérésies de Nes- leur sommeil , soit pour plaire à ceux qui
torius et d'Eutychès, après qu'elles avaient sont au-dessus d'eux, soif pour leur intérêt
été anathéniatisées. Il le rappelle à la foi particulier? Si l'on ne fait pas un reproche à
qu'il avait professée à son baptême, où il avait ceux qui veillent pour se procurer les ali-
reconnu un seul Fils en deux substances, ments et les vêtements nécessaires, sera-tril
avec le Père et le Saint-Esprit, et non pas permis d'en faire à de saints religieux qui,
deux Fils. II prouve par les paroles de Jésus- pour recevoir de Dieu quehjues récompen-
Christ même qu'il n'est qu'une même chose ses, passent une partie de la nuit à chanter
avec son Père, et prédit àjustinicn que s'il est ses louanges, à le prier et à se nourrir de
trouvé au dernier jour dans les mêmes- sen- pieuses lectures? On trouve néanmoins des C>p. ii,Ii(.
t.

timents qu'il professait alors, il doit s'atten- hommes qui critiquent ces usages, mais ce
dre <i descendre dans les parties inférieures sont des hommes qui sont sans religion et
de la terre. Pour l'engager i'i se préserver sans foi. Connnent des actes de piété pour-
d'une fin si fâcheuse, il le conjure de décla- raient-ils être du goût des impies? S'il s'en
[VI* SIÈCLE.] CHAPITRE XYIIl. — SAINT VIVENTIOLK, Ll^JON, ETC. 'iO.-j

trouve parmi les callinliqucs qui rp;^'anlpnt que l'abondance n'cmpôrho l'altention dans
ces veilles coiiuiic inuliles, ce sont ou îles le temps des veilles. Sur (|uoi il cite ces pa-
paresseux, ou des dormeurs, ou des vieil- roles d'un évoque qu'il ne nomme pas « De :

lards, ou des infirnies. Si ce sont dos pa- même que la fumée met en fuite les abeilles,
resseux, qu'ils rougissent en voyant l'clope de même les vapeurs qui viennent d'une
que Salomon donne à la fourrai pour sa dili- noui'riture mal digérée chassent les dons du
gence cl son exMClidide au travail. Si ce sont Saint-Esprit.»
des dormeurs, qu'ils s'éveillcnt;'i la voix doTl^ Dans le traité du Bien de la nsalmodir
8. T"" '* >"

criture ijui menace de pauvreté et d'indii;cn- qu promet sur la fin du précédent, il dit
il ,.
i''»'""":i».

ce ceux qui aiment mieux se livrer au som- qu on ne connaît personne avant Moïse qui ail '•

meil que de se lever pour travailler. Si ce chanté à Dieu des cantiques et que Moïse est ;

sont des vieillards, c'est h tort qu'ils se plai- le premier qui a institué des clueurs composés

gnent, puisipTon ne les presse point d'assis- des deux sexes pour chanter les louanges du
ter aux veilles : leur Age néanmoins ne les Seigneur; qu'après Debbora, femme il-
lui,
dispense point de prier Dieu avec ferveur ; lustre ,
fit les mêmes mais que
fonctions ;

et s'ils ne peuvent point veiller debout, ils toutes les poésies de Moïse ne sont pas de
doivent le faire étant assis. Si ce sont des même genre et que celles qu'il composa par
;

infirmes, qu'ils ne reprennent point dans les forme de testament quelque temps avant sa
autres ce que la faiblesse de leur corps les mort ne contiennent que des prédictions fâ-
empêche de faire eux-mêmes, et que pour cheuses pour les Israélites, au cas qu'ils vien-
suppléer à ce défaut, ils se souviennent du draient à abandonner le Seigneur leur Dieu.
Seigueur, étant couchés sur leur lit du : Il ajoute que depuis l'on vit parmi les Israé-

moins ne doivent-ils pas regarder, comme lites non-seulement des hommes, mais aussi

un fardeau trop pesant, do donner une par- des femmes remplies de l'Esprit divin, chan-
tie de la nuit deux fois la semaine, c'est-à- mystères; et que David reçut ce don
ter les
dire le samedi et le dimanche, pour l'em- do Dieu dès son enfance, en sorte qu'on peut
ploj'er au service de Dieu, et afin de se pu- le regarder comme le prince des chantres et
rifierdes taches qu'ils auront contractées comme le trésor des vers faits en l'honneur
pendant les autres cinq jours. » de Dieu. Saint Nicétius remarque qu'il n'y a
Cp, m, Saint Nicétius montre l'antiquité des veilles rien dans les Psaumes qui ne tende à l'utilité,
par des témoignages tirés d'Isaïe et des Psau- à l'édificalion et à la consolation du genre
mes de David et passant de l'Ancien Testa-
;
humain, de quelque condition, de quelque
ment au Nouveau, il fait voir l'usage des sexe et de quelqu'àge que l'on soit; que les
veilles par l'exemple d'Anne, fille de Pha- enfants y trouvenl du lait, les jeunes gens de
nuel ,de Jésus - Christ , de l'apôtre saint quoi louer, et ceux d'un âge avancé des leçons
Pierre de saint Paul et de Silas que l'on
, ,
,
pour régler leur vie; que les femmes y ap-
entendit au milieu de la nuit chanter des prennent la pudeur; que les orphelins y trou-
c»j- "• hymnes dans la prison. Il dit sur l'utilité et vent un père, et que les rois et les juges de
la douceur des veilles, qu'on la sent mieux la terre y apprennent ce qu'ils doivent crain-

par la pratique qu'on ne peut l'exprimer, dre; qu'enfin les Psaumes renferment tous
parce que c'est par le goût que l'on juge lespréceptes de l'Évangile et tout ce que les
combien le service de Dieu est doux et agréa- prophètes ont prédit car on y voit la géné-
:

ble. Le Prophète met la félicité de l'homme ration de Jésus-Christ selon la chair, la voca-
en ce monde h méditer jour et nuit la loi du tion des Gentils à la place des Juifs les mi- ,

Seigneur. Il est saus doute avantageux, dit le racles du Sauveur, sa passion sa résurrec- ,

saint évèque, de la méditer pendant le jour, tion, son ascensiondans le ciel où il est à la
mais on fait le plus agréablement et plus effi- droitedu Père, son second avènement et le
cacement la nuit, où l'esprit n'est point oc- jugement terrible qu'il prononcera sur les
cupé d'une infinité de soins qui l'occupent vivants et les morts. Ces cantiques que chante cap.n.pa?.
°'
péhdantle jour. C'est pourquoi Nicétiusveut, l'Église catholique plaisent à Dieu lorsqu'on

qu'eu veillant des yeux nous veillions aussi les chante pour sa gloire, et surtout avec une
du cœur, et que, dans les prières que nous conscience pure. Le saint évêque remarque cap.m.pas.
'°'
faisons à Dieu, l'esprit accompagne nos paro- que le .Nouveau Testament a eu aussi ses can-
les. Il exhorte à ne prendre de la nourriture tiques , savoir , celui de Zacharie ,
père de
au repas du soir qu'avec médiocrité, de peur Jean-Baptiste, et d'Élizabelh, sa femme; ce-
206 niSTOIllE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
lui des anges à la naissance du Sauveur, et ture. Nous avons deux lettres 'de Florien,
celui «les enfants a l'onlréc de Ji^sus-Clirisl abhé de Roman-Moutier, adressées à saint
dans la \illc de iiTusalcui. 11 remarque en- Nicétius avant qu'il fût évêqiie : ces lettres
core que l'usaire était dans les veilles d'en- ne sont des éloges de ses veitus, jiaiticu-
(jue

tremêler le cliant des Psaumes avec la prière lièremenl de sou exactitude à remplir tous
et la lecture des livres saints, afin d'engrais- les exercices de la vie monastique. Les ré-
ser, pour ainsi dire, notre Ame par celle va- ponses de ce saint ne sont pas venues jus-
riétéde mets spirituels, comme onr<'jouitdes qu';\ nous.
convives par la diversité des aliments qu'on Vers l'an 551, saint Nicétius, étant déjà
9. Mappltjlii-.
évAtlue i'
leur présente. « Ne nous contentons donc évoque de Trêves, reçut quelques insultes Hriiii- :
lelirei.To:
pas, dit-il, de clianter de bouche ces divins pour s'être opposé à desmariages incestueux. Coocll., ;

«0..
cantiques, chantons -les aussi de co::ur, en Le roi 'l'héohalde indi(]ua h celte occasion DncLe^D*.

nous occupant des vérités qu'ils contiennent, un concile AToul auquel il invita Mappinius,
sans laisser aller notre esprit à des pensées évêque de Reims. Celui-ci n'ayant pas reçu
étranfrcres. Que le ton môme de notre voix la lettre de ce prince, ne se trouva point à

n'ait rien de ces exclamations de théâtre, l'assemblée. Tliéohalde lui en écrivit une
qu'il convienne à la sainteté de notre reli- seconde qui fui aussi sans effet, jiarce que
gion et qu'il soit propre à exciter en nous la Mappinius la reçut trop tard. Mais, fâché de
douleur de nos péchés. Il faut toutefois que n'avoir'pas été invité au concile par saint Ni-
nos voix s'accordent et ne soient point dis- cétius même, il lui en fit des reproches assez
sonuantes, et que l'on se rencontre tellement vifs dans une lettre, où il lui disait que la

dans le chant et dans la prononciation, que concorde et la bonne intelligence qui doivent
tous commencent et finissent en méinc temps réf^'ner entre les évêques, exigeaient de lui
et d'un même ton de voix, à l'imitation des cette inviiation, d'autant qu'il lui convenait
trois jeunes hommes jetés dans la fournaise, beaucoup mieux qu'au prince de l'instruire
qui, selon le témoignage du prophète Daniel, du sujet de la convocation de celte assem-
chantaient d'une seule bouche ce cantique : blée. Il ne laissait pas de témoigner à saint
Vous êtes béni, Seiijiiciir Dieu de nos pères. » Nicétius combien il était sensible aux peines
Saint Nicétius est d'avis que celui-là se taise qu'on lui f lisait; ajoutant qu'il se serait ren-
dont la voix ne peut s'accorder avec celle du à Tout dans le temps marqué, s'il eût re-

des autres. Mais il veut que quand on psal- çu assez tût les lettres du roi, sachant bien
modie, tous le fassent, que tous prient aussi qu'on doit obéir à ses ordres lorsqu'ils ont
à l'heure de l'oraison commune et que lors- ; pour objet le bien de l'Église. La lettre de
que l'on a fait le signe pour la lecture, tous Mappinius se trouve dans la Collection des
l'écoutent avec attention, sans s'appliquer à conciles du Père Labbe, dans les Recueils de
des prières particulières, qui doivent être Fréhérusct de Duchesne, dans VApiiendice
renvoyées à un autre temps. Il trouve une des œuvres de saint Grégoire de Tours, dans
grande utilité à faire précéder la prière de l'Histoire de la métropole de Reims, par dom
la lecture, parce que l'âme, remplie des véri- Marlot, [et dr.ns le tome LXVIlIde la Putro-
tés qu'elle a ouïes, s'en occuitc pendant l'o- logie latine, On y trouve aussi
col. 43, 4i.] Mirlol, llb.
II Uld. Rc
raison ; pourmontrcr combien l'unanimité
et une lettre ;\ évêque de Metz, dans
Villicus, iiiiii..
i«j.
3li el MM).
dans la prière et dans tous les autres exerci- laquelle Mappinius loue sa grande dou-
ces de piété est agréable à Dieu et dans l'es- ceur, son zèle et sa vigilance pastorale. Il
y
prit de l'Église, il dit que c'est pour engager dit' que ces paroles de Jésus-Christ à saint
les fidèles à cette unanimité que le diacre' Pierre : Paissez mes brebis, ne regardent pas
les avertit ù haute voix dans l'église du mo- seulement les apôtres , mais tous ceux qui
ment qu'il faut prier, fléchir les genoux, sont revêtus de la dignité épiscopale. Il prie
chanter des psaumes et écouter la lec- Villicus de lui marquer le prix des porcs dans

' Iden enim el diaconus clara voce in domo Dei Une ?pn!e est rapportée dans lo tome LXXlWc
'

sancti prœcimii admonel cunclos, ut sivc orando. la Palrologie latine, col. 917. (L'éditeur.)
sive iiillectenilis geiiibus, sive in psallendo, sive ' Licel sanclo Pctro hoc a Domino dictum lega-

in lecltonibus sollicite audiendis, unitas srrvrliir mus: l'asie ovos lueas, sed ad cunclos gui sacer-
ab omnibus; quia unanimes liomines diligit Deus dotale funguntiir ofjîcium perlinet pra-scns sen^
et in sua domo cas (ilicilliabilare. tiicel. De Bono tetilia. Mappinius, episl. ad Villicuni Melensem,
psalm., toiu. III Spicilcg., pag. 12. toiu. I Uisl. Remens., lib, 2, cap. xx, pag. 214.
[vi«siKCLE.] CHAPITRE XIX. — CASSIODORE, CIUNCELIEn, ETC. 207
<• lorriloircde Mclz, afin ilo lui piivnvorl'ar- vinj,'t-(Ioiix ans, ri (jii'il iiioiinil vrrs I'an5fi0,
Ci'ul iiécossairo pour en at'lictcr. Ccito loi- apivs l'aviiir cmicliio par li's lilx'raliti's des
tro. dt« mànn' quo la pivcr'diMilo , est écrile princes. Ainsi il siiivécnt h saint Xicdtius (jiii,
d'un style net et coulant. On dit ijnc Mappi- suivant l'opinion commnnc, mourut vers l'an
nius gouverna l'iijjlise de Reims pendant 5(JG.

CHAPITRE XIX.

Cassiodore, chancelier et premier ministre de Théodoric, roi d'Italie,

et ensnite abbé de Viviers.

[Écrivain latin, 500.]

ARTICLE I.
2. Tels furent les ancêtres de Cassiodore S:. n,u-ar.
'''°
HISTOIRE DE SA VIE. qui vint au monde dans la ville de Squillacci, "o.'"'

^. C'est du que nous


roi 'riK'odnrJL' nièruo capitale de l'Abruzze, sur le bord de la mer
apprenons de la maison de Cas-
la •j:ran(l(Mir de Sicile. Le temps de
sa naissance n'est pas
siodore , et l'ancienuoté de sa noblesse. Ce bien certain mais à en juger par les grands
;

prince dit qu'elle était '


ti-ès-illustre autant emplois qu'il exerça sous Odoacre, roi des
par les dignités de la robe, que par la pro- Hérules,et ensuite sous Théodoric, il faut la
fession des armes qu'elle s'était rendue re-
;
mettre au plus tard vers l'an 4G!J autre- ,

coramandable soit dans l'empire d'Oiieut, ment faudrait dire qu'on lui aurait confié
il

soit dans celui d'Occident, et qu'elle s'était les principales charges de la cour dès l'âge
distinguée avec éclat dans les sénats de Cons- de treize ou quatorze ans ce qui est sans :

tanlinople et de Rome. Ses biens étaient si vraisemblance. Outre le nom de Cassiodore


considérables- qu'elle pouvait mettre sur qui paraît avoir été propre à sa maison, il

piedet entretenir des armées entières. L'aïeul portait aussi celui d'Aurèle ; et il prend en-
de Cassiodore qui portait le même nom, fut core dans presque toutes ces lettres le sur-
revêtu du titre d'illustre dignité considé- ,
nom de sénateur, auquel il joint quelquefois
rable dans l'Empire romain. Il donna des la qualité de préfet du Prétoire. Né dans un
preuves de sa valeur en délivrant à la pointe climat heureux* pour l'esprit et pour les
de l'épée la Sicile et l'Abruzze de l'invasion mœurs, de grands progrès dans toutes
il fit

des Vandales. Son père eut ' tout ensemble sortes de science et de discipline. Il excella
les dignités de tribun, de notaire ou secré- dans la grammaire, la rhétorique, la dialec-
taire d'Etat sous l'empereur Valentinien El, tique, la musique, l'arithmétique, la géomé-
ce qui lui donnait entrée dans les conseils et trie, l'astronomie, les mathématiques. Il don-
les secrets du prince. Ce fut aussi sur lui na depuis des leçons sur ces ditférents arts;
qu'il jeta les yeux pour l'envoyer en am- et, voulant joindre la pratique à la spécula-
bassade avecCarpilion, fils d'Aétius, général tion, il se rendit si habile dans la mécani-
des armées romaines, vers Attila, roi des que qu'il faisait des lampes perpétuelles qui

.
Huns, qui, par ses victoires, faisait trembler s'entretenaient d'elles-mêmes, et des horlo-
tout l'Empire. La viergeProba,sreurde Galla, ges de plusieurs façons. R poussa ses re-
fdie de Symmaqne, était encore parente de cherches^ jusque sur l'agriculture, et sur
Cassiodore, qtd conscquemment était alliée de découvrir les fontaines et les sources
l'art

à ce patrice si célèbre par sa naissance, son cachées, et de juger de la qualité de l'eau


savoir, sa probité, sa foi et ses autres vertus. avant de l'avoir goûtée. Son traité de l'Ame

' Cassiodor., lih. 1 Varinr. epist. ' Cassioiliir., lib. XII Variar. cpist. 13.
2 Ibi'1. etlib. [\Epist. 23. 5 Cassiodor. Institut, divin., caj>. xxx, et lib. Xll,
' Ibid. Epist. 14, et Hb. 111 Epist. 55.
208 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
est une preuve qu'il savait fort bien traiter lorsque Cassiodore, qui ne doutait point qu'il

cette matière, et qu'il était aussi instruit de ne dut l'obéissance à Théodoric. s'employa
l'analomie, dont il parle dans cet ouvrage de tout son pouvoir pour apaiser cette ré-
avec volte dès sa naissance. Il en vint à bout, et
par occasion. Nous verrons dans la suite

quel soin ils'appliqua à l'étude des livres cette action qui n'avait eu d'autres motifs

saints. Il ne parle jamais de ses maîtres, que la charité, lui tint lieu d'un grand mérite
mais il en avait un excellent dans la per- auprès de Théodoric. C'était en 494; ce prince
sonne même de son père, que le roi Théo- n'avait alors qu'environ dix-neuf ans; mais

doric représente comme un homme sage et ses grandes qualités le rendaient digne de

vertueux. l'Empire. Pour s'y maintenir, il était néces-


Il e«( ftll
Odoacre, devenu roi d'Italie, après avoir
3. saire de s'assui'cr de la paix du cùté d'Anas-
eomlc de* do-
maiots près
tué Oreste, et déposé Auguslule en 476, con- tase, successeur de Zenon, dans l'empire d'O-
l'.B 4^0 par
Ouoacre.
fia à Cassiodore , dont il connaissait le mé-
rient. Théodoric jugea donc à propos de lui

rite, la dignité de comte des Revenus parti- écrire une lettre fort respeclueusc, et il se

culiers et afin que son autorité ne fût pas


:
servit de la plume de Cassiodore. Cette let-

bornée à une simple intendance sur les do- tre eut le succès que le roi en attendait :

maines particuliers du royaume, il étendit sa nous l'avons encore dans le recueil ' des let-
juridiction en lui attribuant la connaissance tres de Cassiodore. Théodoric lui donna en

des excès auxquels la brutalité des hommes 308, le gouvernement de r.\bruzzc et de la


les emporte quelquefois; c'est-à-dire qu'il Lucanie mais, pom- ne point se priver de
;

confia à ses soins et à sa vigilance la chas- l'avantage qu'il espérait de sa présence*, il


teté des vivants et la sûreté des morts, ainsi le rappela à la cour et le fit questeur. Cassio-
que Cassiodore lui-même s'explique. Il s'ac-
' dore était oncore jeune alors mais le roi ,

quitta de cette charge importante avec une n'en avait pas moins l'esprit en repos au mi-
maturité' au-dessus de son âge; la tempé- lieu des soins du gouvernement, parce qu'il

rance et la modération furent les principes se tenait assuré de la capacité et de la fi-

de sa conduite, que les passions de la jeu- délité de son minisire. Quelque


inviolable

nesse liC dérangèrent jamais. Odoacre le fit temps après il lui donna la charge de grand
ensuite comte des Libéralités royales'; et, se maître des Offices ou du palais, puis celle de
voyant paisible dans toute l'Italie en 488, il préfet du Piétoire. et enfin la dignité de pa-
lui laissa la libre admiuislraliou de la Justice trice. Cassi;;doie était déj;î revêtu de cette

et de la polico. Odoacre, après plusieurs vic- dernière dignité, lorsque ce prince lui écrivit

toires sur les Ru:;;ens, peuples de la Germa- pour rappeler auprès de lui, d'oùapparem-
le

nie, vers la mer Baltique, fut attaqué par mcnt quelques affaires considérables l'avaient
Théodoric, roi des Goths, qui lui déclara la éloigné pour un temps. «Nous prenons tou-
guerre à la sollicitation de rerapereur Ze- jours' un extrême plaisir, lui dit Théodoric,
non. Théodoric gagna sur lui trois batailles, à voir ceux qui ont trouvé moyen d'enti-er

l'assiégea dans Ravenne, et feigi.ant qu'O- dans notre estime pour leurs glorieuses ac-
doacre avait conspiré contre sa personne, le tions. Le soin qu'ils ont de s'étudier ^ la
fitmettre à mort dans un -rand festin au- vertu nous répond de l'amour et du zèle
quel il l'avait invité depuis ia paix qu'ils qu'ils ont pour nous. C'est pourquoi nous

avaient faite ensemble. Celte mort, qui arriva vous invitons de venir à notre cour, afin
en 4'J3, fut scaisiblc à Cassiodore, qui ne s'en qu'elle reçoive un noiivcl ornement par vo-
consola que dans l'espérance qu'elle le met- tre présence, et que vous receviez aussi un

trait en liberté de renoncer aux aû'aires pu- nouveau degré de gloire par les regards fa-
bliques. vorables de voire prince. Vous méritez qu'on
ThéodorU
l'emploie u« EU
4. Il se retira sur les terres qu'il avait vous recherche avec cmpre^semcnt, après
le mioistire.
dans la Calabre. A peine y que les Si-
fut-il, que vous avez mis notre règne dans une si
ciliens, portant impatiemment joug de le haute réputation, et que vous lui avez pro-
leur nouveau roi, coururent aux armes pour curé tant de gloire. Vous avez orné la cour
le secouer. D'autres peuples suivirent leur par linlégrilé de voire conscience. Vous avez
exemple, et la guerre était prèle à slallumcr. procuré aux peuples un profond repos. Vous

• Cassioi]., lib. Y! Fonn. 8. — ' Cassiodor., lib. I


' Lib. I Yariar. Epist. \. - • Lib. I Episl. 3.

Yariar., Epist. 4.— » Lib. VI Fonn. 7. - « Lib. L\ Epist. 24. — ' Lib. III Epist. 28.
[Vl" SIÈCLE.] CTTAPITRE XIX. — CASSlonORK, CIIANCEMKIl. 209
avez acquis d'autant plus d'estime dans le daicnt les côtes, afin de n'âlre point à char"
monde, qu'on sait que vous ne vous êtes ja- ge aux provinces, et de ne point épuiser l'é-
mais vendu, quol([U(^ prix qu'on vous ait of- pargne. Atlialaric, prenant de joui' eu jour
i'eilpour acheter votre faveur liàtez-vous : plus (1(' couliauco eu Cassiodore, lit ;\ sa solli-
doue de venir. » Il parait que ïliéodoric no citation plusieurs actions .de piété, de justice
l'appelait avec tant d'empressement que pour et de sagesse. Il ordonna en particulier que
riionorer encore du consulat, qu'il exeri^a toutes les all'aires (jui legardaient les clercs
en elli'tenSl'i. Cassiodore, après avoir passé de l'Eglise roniaitio fussent portées devant
par tous les degrés des dignités de l'État et le l'ape, qiù serait charm'; de donner des
de la cour, ue devait plus souhaiter que de commissaires, ou de ju';er lui-même les pio-
goûter en repos les fruits de ses études. cès. Les paroles de ce rescrit sont remarqua-
Mais Théodoric ne pouvant se passer de lui, bles de la part d'un [)riui;n arien. « Nous
le lit une seconde fois t;i;nid maître du pa- sommes', dit-il, d'autant plus redevables à
lais. Ce prince jugeant bien que ce n'était
,
la divine miijesté, que nous avons reçu d'elle
plus nue charge honorable pour Cassiodore lie plus grands biens que tout le reste des
api'ès avoir été consul, ue voulut pas lui hommes. Il est vrai que nous ne pouvons
commander conmie roi de l'exercer, mais il rendre à Dieu lien qui égale ses bienfaits.
l'en pria comme ami ; et Cassiodore s'y sou- Cependant il veut bien nous tenir compte de
mit : il l'exerçait encore lorsque ce prince ce que nous faisons eu faveur de ceux qui le
mourut en 5^3. servent. C'est pourquoi ayant mûrement con-
sou successeur, avait au plus
5. Atlialaric, sidéré l'honneur qui est dû au Siège aposlo-
u. dix ans lorsqu'il commença à régner, et il y li((ue,nous ordonnons que quiconque est de-
avait peu d'apparence que les Goths, peuples mandeur contre un clerc de l'Église romai-
belliqueux, voulussent obéir aux ordres d'un ne, se pourvoie d'abord devant le bienheu-
enfant, et moins encore ;\ ceux d'Amalason- reux Pape, afin que sa Sainteté en ordonne.»
the, sa mère. Mais cette princesse, qui avait U fit une autre ordonnance^pour les appoin-
d'excellentes qualités et un génie supérieur, tements des professeurs de grammaire, de
sut maintenir les peuples dans le respect et rhétorique et de droit dans laquelle il di- ,

la soumission. Dès première année du rè-


la sait « Si nous enrichissons les comédiens qui
:

gne d'Athalaric Cassiodore écrivit au nom


, ne servent qu'aux divertissements que ne ,

de son maître à l'empereur Justin pour lui devons -nous point faire pour ceux à qui
demander sa protection. Il écrivit eu même nous sommes redevables de l'honnêteté des
temps au sénat et au peuple de Rome pour mœurs, et par qui sont formés les esprits
leur donner part de son élévation au trône, qui servent d'ornement à la cour?» Tous les
et il y eut des ambassadeurs envoyés pour peuples souhaitaient depuis longtemps la pré-
recevoir les serments ordinaires. Il adressa fecture du Prétoire à Cassiodore. Atlialaric
une quatrième lettre au clergé de Home l'éleva à cette dignité en 334 en lui faisant ,

pour le remercier de ce qu'il avait reçu pour par' lettres des excuses obligeantes de ce
pape FéUx III, que Théodoric avait établi sur qu'il avait élé si longtemps à satisfaire là-

la Chaire de saint Pierre après la mort de dessus les empressements de ses peuples. Ce
Jean. Le roi, pour ne rien oublier de ce qui prince écrivit* en même temps au sénat de
pouvait l'all'ermir sur le trône, se fit encore Rome, qui il disait « Il semble que nous
.'i :

recommander aux prières des évéques ca- ayons comblé de bienfaits ce grand séna-
tholiques, quoiqu'il fit profession de l'héré- teur, qui possède toutes les vertus dans un
sie arienne dans laquelle il avait été élevé. souverain degré, qui est si riche par l'inno-
Cependant Théodat, prince du sang du côté cence et par l'intégrité de ses moeurs, et qui
de sa mère, entretenait des intelligences se- est déjà rassasié d'honneurs. Cependant si
crètes avec l'empereur Justinien, successem- nous pesons son mérite nous jugerons que ,

de Justin et il avait traité avec lui pour le


;
nous demeurons encore redevables de toutes
reudi-e maître de la Toscane. Cassiodore dis- les dettes dont il semble que nous soyons ac-
sipa tous ses mauvais desseins et non con- , quittés. Car que peut-on donner en échange
tent de payer de sa personne , il entretint à de toutes les obligations dont on lui est rede-
ses dépens les ti-oupes des Goths qui gar- vable, puisqu'il est la gloire de nos jours, et

'Lib. VIllEpls^ 24. ^ihii\., Epist. 21. » Lib. 1X„ Epist. 24. Ibiil., Epist. 23.

M. 14
,

210 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


tant de louanges h son prince. » Mais tandis ilcomposa dans la suite son livre intitulé :

que les peuples et les rois mettaient leur con- De la Miinière d'enseigner les lettres divines,
fiance eu la sagesse et en l'exiituiencc de qui est une espèce d'inlioduction l'étude .'i

Cassiodore, lui seul, se défiant de ses forces, de l'Ecriture sainte. Il fut plus aisé h Cas-
écrivait au Pape et aux évoques' pour leur siodore de pourvoir aux besoins temporels
demander le secours de leurs prières, et leur des Romains, chez qui il rétablit l'abondan-
recommander les besoins de l'IOtat. Les ex- ce, de même que dans la Ligurie et d'autres

cès auxquels Athalaric s'abandonna depuis provinces qui se trouvaient dans la disette.
Il fit diminnerl'imposition des tailles et en fit
qu'il se fut soustrait à la conduite des gou-
Lib. XII
E|Ul. îi.
verneurs qu'Amalasontlie lui avait donnés. décharger ceux qui avaient été réduits la .'i

abrégèrent ses jours qu"il termina la neu- pauvreté par des années stériles, trouvant
vième année de son règne, âgé seulement de que c'était une conduite cruelle de dem^in-
dix-neuf ans. C'était en o3i. Cette princesse der des subsides à ceux qui sont eux-mêmes
avait déjà pris quelque mesure avec l'em- dans la nécessité de mendier, et de les for-
pereur Juslinien pour se étirer à Constau-
i cer de donner les choses dont ils ont un
linople; mais la mort d' Athalaric lui fit chan- pressant besoin.
II fait Tcn.
ger de dessein, et penser à mettre Théodat L'empereur Justinien, indigné de la
7. dr« le» y-^t
«•fr«< dr I É-
sur le trône, pour eu partager avec lui l'au- mort d'.\malason(he se pii'para à la venger f)(c4 do S« nU
t'iLire CD 0.16.
torité. Théodat l'accepta avec joie, et il vé- par la guerre ([u'il résolut de l'aire à Théo-
cut pendant quelque temps avec Amalason- dat. Il dissimula d'abord le dessein de son

the dans une intelligence qui marquait une armement; mais Théodat, ne pouvant dou-
confiance mutuelle. Mais, ne pouvant plus ter que Juslinien, aprèsavoir réduit la Sicile,

surmonter la haine qu'il avait conçue depuis ne poursuivît plus loin ses conquêtes, lui fit
plusieurs années contre cette priuces.-e dont demander la paix par le sénat et par le pa-
Procop. de il prétendait avoir été maltraité, il la fit
met- pe Agapet, qu'il obligea pour cet ell'et d'al-
Bel'» Go:b.
ut;. IV, et tre en prison dans un château au milieu 1er A Coustantinople. Le Tape se mit en de-
Joniandcs,
cap. uz. d'une île de Rolsène en Toscane où il la fit , voir d'obéir ; mais, manquant d'argent pour
ensuite étrangler lorsqu'elle était dans le un si long voyage, il ne put en obtenir
bain, sur la fin de l'an 534, ou au commen- qu'en donnant en gages aux trésoriers de
cement de la suivante. l'Épargne les vases sacrés de l'Église de
,

Csssiodnrd
6. Cependant les troubles qui s'étaient éle- Saiut-I'ierre. Cassiodore l'ayant appris, fit
Eeose h tlK*
llr de? écoes
vés dans l'Église depuis le concile de Chal- sentirau roi l'indignité de cette action, et Lll.. XII,
& Rome j.our E|>lti.Stl.
les saintes lot-
cédoine duraient toujours. Cassiodore et dix envoya ordre aux trésoriers de rendre les
irez.

des principaux du sénat, prièrent le pape vaisseaux sacrés, et de les faire rapporter
Jean de s'expliquer sur les difficultés qui avec respect par les maiiis des diacres. Il
occasionnaient ces troubles. Le Pape leur ordonna encore que l'on rendit aux procu-
répondit, et après leur avoir expliqué ce que reurs de l'Eglise de Saint-Pierre l'obligation
l'on devait penser sur le mystère de l'Incar- du Pape. La négociation de Constantinople
nation, il leur recommanda de n'avoir aucu- fui sans ell'et les armées de Juslinien furent
:

ne communication avec acémètes, parce


les victorieuses partout, et Théodat déposé par
qu'ils étaient nestoriens. Cassiodore ayant les principaux officiers de san armée, comme
remarqué pendant son séjour à Rome, que indigne de gouverner. Vitigès qu'on lui dou-
l'on s'y portait avec une ardeur extrême A na pour successeur, le fit tuer près de Ra-
l'étude des lettres profanes, et qu'il n'y avait venue, où il se relira lui-même pour se ]ué-
point de maîtres publics destinés à ensei- parer à la guerre. Cassiodore fut maintenu
gner les saintes Écritures, pensa à établir en sous ce nouveau roi dans la charge de pré-
cette ville, à ses frais, des chaires de profes- fet du Prétoire; mais, après en avoir rcm-

seurs dans les écoles chréliemies, afin de pli quelques mois les fonctions il prit le ,

procurer par là le salut des âmes. Il proposa parti de se retirer dans un monastère,
8. il avait dt'jà vécu i)rès de soixante et « rii.ic daw
..doi« r..i..
son dessein au pape Agapet qui avait suc-
tto lnoDl^tèr•.
cédé à Jean H, en îi33; inaisles guerres, qui dix ans, et en avait passé plus de cinquante
commencèrent dès lors h désoler l'Italie, en dans les emplois les plus importants de la
empêchèrent l'exéculion. Pour y suppléer, cour et de l'Ktat. On met sa relraile vera
l'an 539, eton ne peut la mettre plus tôt
, j^j,j j^i EpUii. 2 3.
puisqu'en 538 il faisait encore les fonctions
I
[Vl' SlfXLE.J CHAPITRE XIX. — CASSIOnonE, CIIANnELIEIl. 211

do pr(4ct du PriUoire, commo on le voit p;ir fin de son Vtwc de l'Institution: « II.Iloz-vous"

lii villgt-dl'^lxi^u]c loltro du douzii'iue livre. dit-il, mes cliers frères, de faire de gramis
Il y iiviiit loufitcmps qu'il se le^'aidait com- progrès dans science des saintes Écritu-
la

me engagements liono-
captif iiu milieu des res, et animez -vous-y en considérant que
raliles monde les mal-
qui l'allacliaiont au : c'est pour vous remplir do doctrine que j'ai

lieurs de l'Italie lui préseutèrcnt une occa- amassé un si grand nombre de livres, et des

sion favorable de le quitter, pour ne i)lus livres bien conditionnés et si bien choisis.»
si

penser qu'à son salut dans le repos et dans Il enseignait hii-mémc ses religieux mais, ;

la retraite. Ceux qui l'ont voulu faire passer ne sulUsant pas pour un aussi pénible tra-
pour une retraite forcée, n'ont pas fait at- vail, à cause de son âge avancé et de diver-

tention qu'il n'avait rien .'i craindre, ni de ses occupations indispensables, il se cher-
la part des rois d'Italie, à qui il avait tou- cha un excellent collègue dans la personne
jours été très-utile et très-agréable; ni de la de Denys le Petit. C'est le sens que l'on don-
part des peuples qui l'avaient toujours chéri ne ' ordinairement aux paroles de Cassio-
comme leur père; ni de la part de l'empereur dore mais il parait que Denys le Petit était
;

Justinien qui connaissait parfaitement son mort avant la construction du monastère de


mérite. Il choisit pour se retirer un monas- ne survécut pas assez long-
Viviers, et qu'il
tère qu'il avait fait bâtir auprès de Squillacci, temps au changement de vie de Cassiodore
connu sous le nom de Castel dans les Let- pour avoir enseigné ensemble la dialectique
tres de saint Grégoire le Grand, et sous le
* pendant plusieurs années. En effet, Cassio-
nom de Viviers, parce que Cassiodore fit un dore parle de Denys comme déjà mort dans
monastère double l'un au bas de la mon-
: son livre de l' Institution, qu'il fit peu après sa
tagne pour des cénobites, l'autre pour les conversion, ainsi qu'il le témoigne lui-même
ermites sur le haut. Il faisait lui-même pro- au commencement de son traité de VOrtho-
fession de la vie religieuse dans ce monas- graphe. Il faut donc ou que Denys ait en-
,

tère. Non-seulement Paul, diacre, l'appelle seigné en un autre temps avec Cassiodore,
moine* dans son Histoire des Lombards, mais ou qu'on retarde la mort de Denys.
il se met lui-même clairement au nombre 9. On ne voit nulle part que Cassiodore Mort de
Casâîodor«>,
des moines, lorsqu'il dit dans sa Préface sur ait prescrit aux moines de son monastère .cisl'an 5G3.

l'Explication des Psauriics « Dieu nous fasse : l'observation de la Règle de saint Benoit.
la grâce d'être semblables à des bceufs infa- 11 leur recommande de garder avec
soin les
tigables pour cultiver le champ de Notre-
,
Règles de leur précepteur, c'est-à-dire de
Seigneur avec le soc de l'observance et des leur abbé *, les instituts des Pères et ceux
exercices réguliers. » Il établit deux sortes de Cassien ', en les avertissant toutefois de
de moines dans ce double monastère, les les lire avec circonspection dans les endroits
uns pour mener, à Viviers, la vie cénobitique; où cet auteur s'est éloigné de la vraie doc-
les autres pour pratiquer les exercices des trine, et qui ont été réfutés
par saint Pros-
anachorètes dans la solitude de Castel. Mais, per. Il ne
pas de se rencontrer très-
laisse
avant d'en envoyer dans ce désert, il avait souvent avec saint Benoit sur divers points
soin de les exercer et de les éprouver dans de l'observance monastique, marquant com-
le monastère de Viviers. Pour donner à ses me lui sept heures' différentes, destinées à
religieux les moyens de s'instruire et les la psalmodie pendant la journée à quoi il ;

rendi-e capables de servir ensuite l'Église par joint les nocturnes ou les veilles de nuit. Il
leurs travaux et par leurs écrits, il fit venir ordonne aussi le chant des Compiles pour
à Viviers la nombreuse bibhothèque qu'il terminer ' toutes les actions de la journée.
avait à Rome, et apparemment encore celle Il recommande, comme saint Benoit * le soin
qu'il s'était faite étant à Ravenne, et les aug- des étrangers, des pauvres des malades, et
menta toujours depuis tpnt qu'il vécut. 11 faut et il y a un chapitre entier de son Institu-

l'entendre s'expliquer lui-même là-dessus à la tion adressé aux religieux chargés du soin

» Lib. \U Epist. 31, 33. * Quapropter omnes quos monasteriisepta con-


* Paul, diac, lib. I, cap. xxv. clandunt,ta7n Patrum régulas, quam prœceploris
Qui mecuin dialecticam legit, et in exemplo
' proprii jussa sercale. Ibid., cap. xsiii.
gloriosimagisteni plurimos aiinos vitam sitam ' Ibid., cap. XXIX.
Domino prœstanle transegit. Cassiod., lib. /;w£if. • Id. inPsal. csvi, vers. 164.
divin., cap. xxni. ' Id. in Psal. xcx.— ' Ibid.. cap. xxxn.
212 HISTOIRE GÉNÉHALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
des malades, comme
y en a dans la Règle
il

de saint Benoît. donc très-vraisembla-


Il est ARTICLE n.
ble que Cassiodoie, ou connaissait cette Rè-
DES ÉCRITS DE CASSIODORE.
gle, ou qu'il était informé de ce qui se pra-
tiquait dans le monastère du Mont-Gassin.
§ 1-
Nous n'avons aucun historien du temps qui
nous apprenne l'année de sa mort. 11 nous Des Lettres de Cassiodore.
assure lui-même qu'il avait quatre-vingt-
Lrllrt
treize ans lorsqu'il mit la main à son traité i . Le plus considérable des ouvrages de Cas»lutjor
de r Orthographe. Si donc il est né en 469, Cassiodore, dans le temps qu'il était chargé ^„.
netc,
lia.
ce fut en 562 qu'il composa cet ouvrage. du poids des aflaires sous les rois d'Italie, est
Mais ce ne pas le dernier, et on prétend
fut le recueil de ses lettres. Ses amis furent long-
depuis à un calcul ecclésias-
qu'il travailla' temps à le presser d'en faire un corps et de
tique pour trouver le jour de Pâques, les le rendre public , dans la persuasion qu'il
épaeles et les indictions. Du moins est-il pourrait être utile à la postérité pour la con-
certain qu'après avoir achevé son livre de naissance de l'histoire de son temps. « On
i Orthographe, il eut encore assez de loi- accorde, leur répond-il, neuf années entières
sir pour revoir ses premiers ouvrages et y aux auteurs jiour composer leurs ouvrages,
ajouter quelque chose comme on le voit, et jene puis pas même trouver des moments
^1 dans son livre de l'Institution où il parle pour travailler aux miens. Sitôt que j'ai pris la
de celui de l'Orthographe écrit longtemps plume, on m'étourdit à force de clameurs, et
après. je me vois pressé de tant d'endroits que je ,

Élog* da iO. Mais en quelque temps qu'elle soit ar- ne puis achever tranquillement ce que j'ai
Cissiodore.
rivée il y a tout lieu de
,
croire qu'elle fut commencé. L'un me fatigue par des sollici-
j)récieuse devant Dieu. Les écrivains du vin' tations importunes, l'autre vient m'accabler
siècle l'ont qualifié' bienheureux d'autres ; du poids de l'extrême misère qui le presse;
l'ont placé parmi les confesseurs ', disant d'autres mêmes m'environnent et m'assiè-
c[u'après avoir beaucoup brillé par la sain- gent de discours séditieux et pleins de fureur.
teté de sa vie et par sa science dans les let- Parmi tous ces embarras qui me permettent
tres divines et humaines, il vivait après sa à peine de parler, comment voulez-vous que
mort par les miracles qu'il opérait. 11 a eu je trouve le loisir de dicter et d'écrire avec
cet avantage* entre tous les docteurs de l'E- politesse? Des inquiétudes inexplicables ne
glise, d'avoir été honoré des plus éminentes me moindre repos pendant les
laissent pas le
dignités du siècle , et de s'en être acquitté nuits ayant ;ï donner ordre que toules les
,

avec toute l'intégrité, la religion et la piété villes soient suftisamment pourvues de mu-

imaginables, ayant toujours défendu la cause nitions de bouche. Ainsi je me vois contraint
de l'Église catholique avec fidélité quoique ,
de parcourir en esprit toutes les provinces,
les rois qu'il servait tissent profession de et de prendre garde si l'on exécute les ordres

l'arianisme. d'avoir quitté la cour'


Heureux que j'ai donnés. » Ses amis ne disconvenaient
et les affairesdu monde pour se disposer par point que son temps ne fût extrêmement par-
la vie pénitente à comparaître devant celui tagé par tous les embarras et par toutes les
qui examinera si sévèrement la vie des mi- inquiétudes inséparables des charges dont il

nistres des princes, et qui les jugera, non faisait les fonctions avec tant d'assiduité etde
par les raisons d'État mais par les vérités
, suffisance « Mais, disaient-ils
: cela ne doit ,

de son Évangile, dont pour l'ordinaire ils font pas vous détourner de mettre au jour ce que
si peu de compte 1 nous demandons de vous. Rien ne vous sera

« Baron., ad ann. 862. * Auctor iste {Cassiodorus) inler omnes doeto-

• Jlujus locum firophetùe beatus Cassiodorus res ecclesiasticos dignilalum sa'cularium honore
ita déclarât. Alcuiu. in Psal. XL. summa cum integrilate, religioneque et pielate
> Cassiodorus confessor ex senaloremonachus... prœfulsit. Quamvifenim reges yt/s esseni ariani,
fitœ sanclilate adiiiodum effulgrns, divina et lin- !;)«(• lamen fiilclissime perpétua tenore catholicœ
7nana litUratura pollens, nonnulla perulitia Ec- iVc/cstiT parles défendit. Coch\.Episl.a4 Thomam
clesiœ Dei digessit... sepultus in miraculis liiit. Morum Angliœ cancel.
l'ulr. De Natal., yi^. 28u, edit. 1519. ' Anliquus commenlarius in Psalnos.
[vi« SIÈCLE.] CHAPITRE XrX. — CASSIODORE, CHANCELIER. 213
plus glorieux que d'avoir donné au public ,
l'épiscopat l'évoque d'Augusta accusé par
parmi tant do travaux et d'atlaires, des ou- ses clercs d'avoir voulu trahir sa patrie. Les
vrages aussi cliiiiios d'iMn' lus (jup les vôtres.» accusateurs étant du clergé, Théiidoric no
Cassiiulnrn n(^ pouvant ri'sister ;\ de si pres- voulut point les punir lui-nièmc; mais il les
santes instances, couseiilit;'i publier le recueil renvoya h l'évcque de Milan leur métropo- ,

de ses semble qu'avant d'en être


lettres. Il litain, pour leur faire leur procès, sachant
sollicit(5, il mises en ordre, et
les avait déji\ que cet évêque était observateur des lois do
qu'il en avait même retouché nnc bonne par- l'Eglise. Ce prince dit à cette occasion ' qu'on
tie mais qu'il n'avait pas encore doimé la
; ne doit pas juger légèrement ceux qui sont
dernière main à cet ouvrage; il est divisé en élevés à une dignité aussi considérable que
douze livres qu'il intitula: Z>i'w?'ses, soit à cause l'épiscopat, et qu'il faut à peine croire d'eux
des divers sujets et de la variété de la ma- les crimes les plus connus. Cette attention
tière, soit à cause des ditl'érentes personnes est remarquable dans un prince arien. 11 y I.oltro IS ,

p»b-. 10.
auxquelles elles sont adressées ou au nom , a deux endroits dans la seizième lettre qui
desquelles elles ont été écrites soit parce , ne le sont pas moins l'un où il dit qu'il :

qu'ayant été oldigé d'en écriie au nom de comptait entre les avantages de la royauté
plusieurs persoinies, il en avait varié le style le bien qu'il pouvait faire par humanité et

suivant la condition de ceux pour qui il les par miséricorde l'autre, où il avance qu'un
;

écrivait et à qui il les adressait. En effet, il prince augmente ses richesses à mesure que,
y en a à des rois, ;\ des empereurs, h des sé- négligeant l'argent qui ne mérite que du
nateurs, à des évêqucs et à de simples par- mépris, il acquiert les trésors de la réputa-
ticuliers, comme à des architectes, à des ou- tion, qui sontplus dignes de son estime. Il dit L.-Mro
P"S- 11.
vriers en marbre , à des médecins , à des dans la trentième lettre, que le devoir d'un
juifs. bon prince est non-seulement de punir le
Los cloq 2. Les cinq premiers livres ne contiennent crime, mais d'en retrancher aussi les occa-
•niicrs 11-

que les lettres du roi Tliéodoric, et on y sions. D est parlé dans la trente-cinquième I.rltre 33,
|ag. 1«.
trouve peu de chose qui intéresse notre d'un poisson nommé en latin rémora , qui
sujet. Nous ferons toutefois remarquer que arrête les vaisseaux au milieu de leur navi-
dans laseconde du premier livre où il reprend gation et d'un autre appelé torpilla
; qui ,

im nommé Théonius chargé de fournir à la engourdit la main du marinier cpii le tou-


cour la pourpre nécessaire pour les vête- che, encore que ce ne soit qu'avec quelque
ments royaux ce prince fait une fort belle
, instrument. On voit par la trente-septième ,
Lcllrc 37,
png. n.
description de la façon de teindre les étoffes que les Goths ne doutaient pas qu'il ne fût
avec la pourpre, en expliquant ce que c'est. permis à un mari de mettre à mort l'adul-
« On en a trouva, dit-il, le secret à Tyr par le tère qu'il trouvait avec sa femme ces peu- :

moyen d'un chien, qui, pressé parla faim, se ples, comme nous l'avons vu dans Salvien ,

jeta sur quelques coquillages que la mer étaient très-cliastes et ennemis de toutes ,

avait poussés sur le rivage. En ayant broyé les libertés contraires à la pudeur. La troi- Lettre 3, liv.
n, pag. S3.
quelques-uns avec les dents, on vit sa gueule sième du second livre est un éloge d'un gau-
teinte d'une merveilleuse couleur. Ceux qui lois nommé Félix, que Théodoric avait élevé
en furent témoins firent usage de ces co- au consulat, et de son père, dont les mœurs,
quillages pour teindre des étoffes. L'animal, l'érudition et l'éloquence l'avaient fait pas-
renfermé dans ces coquillages, conserve son ser pour un Caton. Quoiqu'il fût mort depuis
sang six mois après sa mort et pour l'expri- ; plusieurs années la mémoire de ses vertus
,

mer après un si long temps on se sert de , était encore fraîche; «parce que, dit Théodo-
pressoirs faits exprès. » Il marque dansla neu- ric, les belles qualités d'un homme ' vivent

vième lettre adressée à Eusforge, évêque de encore après lui, et que ce qu'on fait de glo-
Milan de faire rétablir dans l'honneur de
, rieux ne vieillit point avec le temps.» La hui- Lettre S, 'ag.
2ô.

' Nihil in lali honore fepiscopatus) temeraria est œquilatem nioribus talibus imponere, quem
cogilalione prœsumendnm est, ubi si proposito novimus traditioncm ccctesiasticam custodire.
crcdiliir, etiam tacilus ab excessibus excusatur. ïheodor., lih. I Ejnst. 9, pa;;. 1.

Manifesta proindè criiniiia in talibus vix capiunt * Bona durare nonint post liominem; et quud
fidem... Sed quoniam et ipsi impugnatores cleri- gloriose gerilur, fine tcmporis non tenelur. ThcO'
catus vomine fungebaiitur.ad sanctitalis vestrce dor., hb II Episl. 3, i)ag. 23.
judicitim cuncta transmisimus ordinanda, cujus
,

214 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


tième est très-honorable aux évoques que , et de n'accroître sa puissance que pour aug-
Théodoiic dit être les plus propres à rendre menter la félicité de ceux qui lui sont sou-
LMIre ItJ
la justice par leur équité, qui ne sait faire mis. La quatorzième est adressée à l'évèque
acception de personne. Aussi ce prince s'a- Aurigène, à qui Théodoric renvoie la suppli-
dressa-t-il à l'évèque Sévère pour distri- , que d'un nommé Julien qui se plaignait de
buer des sommes considérables à ceux qui ce que les sujets de l'évèque lui avaient en-
avaient soutlert quelques dommages par le levé son bien.d Si l'exposé est vrai, lui dit-il,
Ltitt passage de ses troupes. Il appelle dans la
il>id.
'"•
punissez-en l'auteur sans délai parce que :

dixième letti-e le mai-iage un sacrement '


le mal s'augmente quand il dure, le remède
qu'on ne peut profaner sans une témérité cri- est d'en accélérer la correction.» dans Il dit
rH> *'.
Lritrî '••
minelle. Par la dix-septième il décharge un la vingt-septième qu'un juge n'est digne *
prêtre de la ville de Trente, tiommé Butiliem, de son nom qu'autant qu'il observe les lois
du paiement de ce qu'il devait au fisc mais ; de la justice d'où il le tire , l'orgueil n'étant
il défend en même temps de faire payer à pas propre pour lui conserver un titre qui
Lrltre IT|
d'autres ce que ce prêtre devait, « de peur, n'est fondé que sur l'équité. La trente-sep- I«5- »8.
dit-il que la grâce qu'on fait à celui qui l'a
, tième est une plainte à l'évèque Pieire sur
méritée ne tourne au dommage de l'inno-
,
ce qu'il retenait la portion de bien qui ap-
Ltlirt 1?, cent; ce qui fait horreur à dire.» Dans la let- partenait à son frère. Théodoric lui dit que
Ibid.
tre dix-huitième il regarde comme une cho- c'était à lui, en sa qualité d'évèque, de ter-
se messéante à un évèque il'ctre convaincu miner cette affaire, et qu'en cas qu'il le re-
publiquement par la perte d'un procès, d'eu fuserait, il l'appellerait à son tribunal. Apro- m. 5v.
avoir entrepris ou souteim qui ne fussent nien, du nombre des illustres, et comte des
Lrfire *'•
pas justes. Il dit dans la vingt-septième que domaines , avait donné avis au roi Théodo-
p.C-81.
les rois ne peuvent commander à personne ric qu'il était arrivé à Rome un homme qui
d'embrasser une religion, parce que l'on ne avait le secret de trouver des eaux et d'en
"> croit pas* par contrainte. Dans la vingt-neu- faire venir dans les lieux les plus arides,
vième adi-essée à un sénateur, nommé Adila, afin qu'on puisse ensuite les habiter. Le roi
qui avait la garde des terres et des fiefs de témoigna beaucoup de joie de voir durant
la Sicile, Thi'odoric lui recommande de veil- son règne des expériences de cet art, « dont
ler à la conservation des biens que 1 Église nous lisons dit-il les préceptes dans les li-
, ,

de Milan possédait dans cette ile, disant que vres des anciens.» Il donne lui-même lesmar-
la paix et la tranquillité des sujets fait la gloi- ques d'où l'on peut conjecturer que l'eau et
re du prince et que les personnes qui ap-
, la source ne sont pas éloignées; savoir, lors-
partiennent à l'Eglise et les biens qui eu
, que l'herbe est fort verte, que les arbres
dépendent, méritent une protection particu- montent à une hauteur extraordinaire, qu'il
lière en vue de Dieu qui pour cette atten-
, , croit dans ce lieu des joues, qui aiment l'eau,
Lcllrc 3?, tion, nous fait miséricorde. On voit par la des cannes, des roseaux, des peupliers et des
trente-huitième ,
qu'il mettait au rang de saules. « Une autre marque , ajoute-t-il, est
ses plus grandes richesses le pouvoir qu'il quand après avoir exposé à l'air de la laine
avait de rendre heureux ,
par le moyen de sèclie pondant la nuit, et l'ayant mise sur la
ses tiéoors, une infinité de misérables ; et, terre en la couvrant de quelfjues vaisseaux ,
parla première du troisième livre, qu'il était on la trouve humide le matin ou quand le ;
m, p.E. .

persuadé que la justice rendait les rois plus soleil étant levé on voit voler près de la terre
Ullre
forts et plus redoutables h leurs ennemis. Il une grande quantité de petits moucherons. A
était aussi persuadé, comme il le dit dans l'égard de la pi'ofondeur de la source, on la
la onzième que rien n'est plus glorieux à
, conuait en observant à quelle hauteur s'élève
un roi ' que de rendre ses sujets heureux. une certaine vapeur qui sort de terre. U y a

' Nec dissimulari potest vt illiud humani gcne- et libcrtatis Dominus jugiier potest crescere si
ris procreabile sacra menlum scelerata temeritale sibi subjectos sludeal ampliare. Lib. 11 Episl. 11,
profanetur. Ibii!.. Epist. 10. pag. 41.
* Jleligioncm imperare non possumus, quia ne- ' Taindiu judex dicitur, quamdiu et jicsliis pit-
mo cogilur ut credal invUus. Lib. II Epist. 27, tatur : quia nonten quod ab œquitate sumitur,
pag. 31. pcr superbiam non lentlur. Lib, III Epist. 27,
Quid enim tam regium,quam fecisse felicemt
' p.ifj. 40.
Bénéficia siquidcm sunl, quœ régna sublimant ;
[Vl* SIÈCLE.] CHAPITRE XIX. — CASSIUDORE, CHANCELIER. 215

encore des signes auxquels on jupe de la crétaires, do référendaires ou maîtres des


quiililédes eaux avant de les avoir éprou- requêtes, de pri'fets des vivres, ou déju-
vées. Car celles qui jaillissent du coté du ges préposés pour fixer le prix du pain'et de
lovant ou du midi sont douces, claires, lé-
,
veiller à ce qu'il fût bon et de poids de
;

gères et bonnes pour la santé. Celles au comte des médecins, ou premier médecin;
contraire qui coulent vers le couchant ou de consulaires qui étaient envoyés dans les
le septentrion sont fort fraîches
mais trop ,
provinces avec une autorité presque égale à
pesantes et trop épaisses.
Ce prince ordon- » celle des consuls d'intendants des provinces,
;
^

ne h Apronicn de fournir à cet homme des de comte des Goths à qui il appartenait de
,

deniers de l'Eparnuc de quoi subsister, et terminer les affaires que ces peuples avaient
de lui chercher pour compaf^non un ouvrier avec les Romains de ducs de la Uh(Uie ou
;

habile dans les mécaniques et dans l'hydro- du pays des Grisons, préposés à la garde des
liqne, qui puisse faii-e monter les eaux qu'il frontières de l'État de ce côté-l;ï; de premier

.KT.Vvrw' ""™ découvertes. Il exhorte dans la Ireute- architecte ou surintendant des bâtiments; de
*••
unième du quatrième livre l'évèque Hmi- , capitaines du guet, soit de Rome, soit de Ra-
lien A achever un aqueduc (jn'il avait entre- yonne, établis pour la sûreté des citoyens;
pris de rétablir par l'autorité royale disant , de tribuns des plaisirs, qui étaient chargés de
que par cet ouvrage il imitera Moïse qui retrancher des spectacles tout ce qui pouvait
tira d'un rocher des fontaines abondantes être contre l'honnêteté; de défenseurs des

pigM'.™
"'
V°^^' étancher la soif du peuple d'Israël. Il villes,qui en étaient comme les maires. Dans liI' vr,

dit dans la quarante-deuxième qu'il n'y a ,


la formule du vicaire de Rome, il est parle m-
point d'orphelins dans les états d'un bon d'un prince cardinal de Rome qui suivait tou-
prince parce qu'il est le père commun de
. jours le roi. Parmi les formules des permis-
tous ceux qui n'en ont point, et que la vraie sions on en trouvait de dispense d'âge, que
noblesse qui ' n'est contestée de personne ,
le roi accordait pour rendre capables d'agir
est celle qui vient de la vertu et des bonnes et de contracter ceux qui, n'étant pas en âge

II, 'v""
!"' ™'"-i'i's- Il ajoute qu'on ^ goûte plus agréable- de le faire selon les lois, avaient toutefois la
"'• °
ment les bienfaits qui n'ont rien coûté à prudence et la maturité nécessaires pour ce-
la; d'autres pour rendre valide un mariage,
Lrliro
pa^'. 78.
ir,,
obtenir; et qu'une loi n'a rien ' de trop dif-

Lollro ta licile, quand le prince est le premier à s'y et les enfants qui en étaient nés habiles à
soumettre. succéder, et une pour légitimer un mariage
Cl
Livres
vu.
VI 3. Les sixième et septième livres sont com- contracté avec une cousine germaine, ou la
posés de ditl'érentes formules, soit de brevets fille de la tante maternelle. La plupart de ces

et de provisions des charges et des dignités formules sont semées de maximes de morale
de la cour et de l'Etat, soit des permissions qui et de politique. Il est k remarquer dans la Lil..
fArm. 2,
VU,
fjlg.
devaient s'accorder au nom du roi. La pre- première du septième livre, que lorsqu'il s'a- IU3.

mière formule est du consulat. Les suivan- git * de prononcer sur la vie des hommes, les
tes sont des dignités de patrices de préfets , juges doivent temporiser, parce qu'il n'en est
du prétoire, de préfets de Rome, dont la ju- pas de la sentence prononcée en cette occa-
ridiction s'étendait l'espace de cent jets de sion comme des autres que l'on peut corri-
pierre au delà de cette ville de questeurs ; ,
ger avec le temps; qu'd faut donc que le
de grands-maitres du palais, de comtes des glaive corrige, s'il est possible, tous les cou-
libéralités du roi, de comtes de sou patri- pables par la crainte qu'il imprime; mais
moine, de ceux que l'on appelait grands; ce que l'innocence y trouve du secours, les lois
n'étaitqu'un simple titre d'honneur, sans au- ayant autorisé le glaive pour se défendre. Il Ibid., roriTi
3, paf, llll.

cun appoinlement. Il y a aussi beaucoup est dit dans la troisième, qu'on ne défend
d'autres formules pour des dignités moins pas une cause par la force du bras, mais par
considérables, comme de celles de vicaii-es l'évidence du droit.
ou lieutenants de Rome, de notaires ou se- 4. Les lettres du huitième et du neuvième 3, p^jç.'iot'"'

1 Bœc est indubitata noMlitas. qtiœ moribus cipetn. Epist. 18, pag. 79.
probatur ornata. Lib. V Epist. 12, pag. "7. * Cunclator esse débet qui judicat de salute.
- Dulciora sunt bénéficia que nullis difficuUati- Alia scnlenlia polcsl corrigi: de vila transactum
bus obtinentur. Kpist. 15, pag. 78. non palilur immutari.Lih.Wl, form.l, pag. 103,
' Kulli gravis estjussio, quœ constringit et prin-
216 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
li\Tes sont toutes du roiAtlialaricà l'excep- voya l'affaire à Cassiodore, afin qu'il s'infor-
tion de
onzième du huitième livre, qui est
la mât du dommage que l'inondation avait causé
d'un patrice. et adressée au sénat de Rome. à ces fdles, et (ju'il le réparât de façon qu'el-

','w.'
^^ piince dit dans la dixième que les glo- les pussent tirer quelque utilité de leurs ter-
rieuses blessures' sont des éloges qui n'ont res. Il lui ordonna aussi à la demande du
,

pas besoin de bouches pour les publier; même prince, d'empêcher qu'une dame de
elles sont le langage propre de la v.ileur qualité, nommée Véranilda, qui avait quitté
'•<• quand on les a reçues dans le combat. Atha- l'arianisme pour se faire cathoUque, ne fût
laric disait à un ofiicier qui avait servi avec maltraitée par ceux de sa nation. La raison
honneur sous Théodoric, et à qui il donnait que Théodat rend de sa conduite à cet égard,
la dignité de questeur « Donnez-moi des
: est que Dieu, tolérant plusieurs religions dif-
marques de votre fidélité enm'avertis.sant du férentes en ce monde, ne pouvait contrain-
bien que je suis obligé de faire, et élevez- dre ses sujets à une seule.
vous avec courage contre les entreprises des 5. Dans le dixième livre sont comprises ub.x,EpM.
•'**''•
méchants. Un bon prince permet toujours les lettres écrites au nom d'Amalasonthe, de
qu'on lui parle pour la justice; au contraire, Théodat, de la reine Gudéline, sa femme, et
la marque certaine d'une cruauté tyranui- du roi Vitigès. Théodat dit, dans celle qu'il
que, est de ne vouloir point entendre parler écrivit au sénat de Rome, qu'il avait foutes
des lois anciennes. J'emploie volontiers ces choses en son pouvoir, mais qu'il ne se croyait
excellentes paroles de Trajan Recevez cette
: rien permis que ce qui était digne de louange.
charge, et servez-vous de l'autorité qu'elle vous La vingt-septième qui est du même prince
, , Kpui. r,
'
^'^'
donne, ou jjour la république et pour moi Je si est un ordre à Sénator préfet du Prétoire
, ,

gouverne en prince équitable, ou pour la répu- pour soulager les provinces affligées de la
blique contre moi, si je m'éloigne de mon de- guerre et de la stérilité, surtout la Ligurie et
voir.Considérez donc ce que j'exige de vous, le pays de Venise, en faisant distribuer des
etsachez que je ne crois pas pouvoir me per- blés aux peuples de la campagne, n'étant pas
mettre quoique cliose contre la justice. » juste que ceux qui cultivent les terres et dont
' -«• Athalani_ disait dans une autre occasion que les travaux avaient rempli les greniers, mou-
le règne d'un prince reçoit un de ses plus russent de faim. Vitigès, successeur de Théo- Epui. 32 «
'^^'
grands ornements de la lionne conduite des dat, en écrivit une à l'empereur Justinien ,

juges et des autres officiers qu'il a établis ; pour lui demander la paix, et une aux évo-
que comme c'est ce qui lui fait un nom célè- ques de ses étals poui- leur demander le se-
bre dans toutes les nations, c'est aussi ce qui cours de leurs prières.
soutient son trône, ses ennemis étant sur- 6. Il n'est pas difficile de reconnaître au U"« n,
montés avec plus de succès par les bonnes style des lettres dont nous venons de parler,
mœurs que par les armes, et ceux que le ciel qu'elles sont presque toutes de Cassiodore,
prolègi; ne pouvant avoir d'ennemis heureux. quoiqu'elles portent le nom des princes dont
''• Il parle d'une fontaine' miraculeuse dans la il était le ministre. Celles des deux livres sui-

Calabre, appelée Marcilliane, dont les eaux vants sont écrites en son nom propre, comme
croissaient prodigieusement la nuit de Pâques préfet du Prétoire, excepté la treizième du uitr.ioSé.

lorsqu'on commençait à donner solennelle-


,. . ,
j
onzième livre, qui est au nom du sénat de
... ml de fioine.

ment le baptême suivant l'ancienne coutume. Rome. Il joint partout le nom de sénateur à
L'empereur Justinicn avait recommandé au sa qualité de préfet, ce qui donne heu de
roi Théodat certaines religieuses qui se trou- croire que ce nom lui était propre comme
vaient hors d'état de payer les tailles, parce celui d'.\urèle. Ces deux livres sont précédés
que les terres pour lesquelles ou les Icui- de- d'une préface dans laquelle il dit assez claire-
mandait avaient été ruinées par une inonda- ment qu'il était auteur des lettres contenues
tion suivie de la stérilité. Le roi Théodat ren- dans les dix livres précédents, et qu'après

' Vtdnera, opinio inseparabilis, siiic assertore altum unda prosiliens aquas suas non per mea-
prœcunium prupria lingua virtutis. Lib. VIII
, lus soUtos dirigil, sedin nltituilinem ctimulumijue
Epist. in, png. 120. transmillit. Erigitur hrutum rlementum sponte
' Veniaiims nd illud singulare mttnu^ sanctum- sua, el quadam devnlione solemni prirparat se
que miraculum: nnm cumdie sacralœ noctispre- miraculix, iil sancli/icutio wajestalis possit os-
cem baplismati.1 cœpcril sacerdos effundere, et de leiidi. Lib. VIII Enist. 8, pa?. l31.
ore sancto sermonum fontes emanare, mox in
[VI* SIÈCLE.] CHAPITRE XIX. — CASSIOnOIlE, CHA.NCELIER. 217

avoir parle en personne des rois, il conve-


la ilsn'ont osé risquer luie bataille contre les
en la sienne propre clans les
nait <iu'il parlilt Gotlis, quoi(pie leur coutume soit d'attaquer
deux suivants. Comme on aurait pu être sur- lespremiers leurs ennemis et de couiii- au
pris qu'il eut écrit si pende lettres étant pré- combat avec ardeur. Gassiodore l'ait dans la
fet du Prétoire, il eu donne pour raison qu'il même lettre l'éloge du patrice Libère, pré-
avait été aidé dans les fonctions de cette fi't des Gaules.
charpie par Félix, homme
également rccom- 7.Dans la lettre suivante qui est adresséeau pifc'
Lellri- tu
Jpia,
1»E. IC2.
luandable par la pureté de ses mœurs, par pape Jean, Cassiodore reconnaît que c'est par
son savoir et par son éloquence ce qui mar- ; sesjeûnes, et ceux du clergé, queles peuples
que que Félix avait partagé avec lui le soin ontété ou délivrésou préservés de la famine,
d'écrire les lettres et de faire les réponses né- qu'ils ont, par leurs larmes précieuses devant
cessaires. La première des lettres de Cassio- Dieu, banni la tristesse publique, et que c'est
dore est adressée au sénat de la ville de Ho- par les prières des saints que l'État s'est vu
me, pour le prier de rendre grâces au roi promptement déchargé d'un fardeau qui
Athalaricet à la reine .\malasonthe, sa mère, l'accablait. Toutes ces considérations don-
de ce qu'ils l'avaient honoré de la charge de nent la confiance à Cassiodore de supplier
préfet du Prétoire. Il représente cette prin- le l'ape d'otirir à Dieu ses prières, pour la
cesse comme partageant son affection et sa conservation des princes. Il lui demande de
tendresse maternelle entre le j'eune roi Atha- prier en particulier pour lui, afin que. Dieu
laric, son fils, et ses sujets qu'elle aimait luiouvrant l'esprit, la face de la vérité se dé-
comme ses propres enfants, comme étant d'un couvre à ses yeux de peur que le corps et
,

génie supérieur à tout autre, et en vénération les sens ne le remplissent de ténèbres. « De-
dans tous les royaumes et dans tous les états mandez, que je me montre dans
ajoute-t-il,
du monde. » Sa vue , dit-il, imprime le res- les fonctions de juge un digue enfant de l'E-
pect; sa parole charme et ravit en admiration. glise catholique. Étant le père commun, vo-
Quelle langue peut-on nommer qu'elle ne tre amour n'a point de bornes. Il est de vo-
sache parfaitement? Elle parle grec aussi pu- tre honneur de procurer la sûreté et le repos
rement qu'on parlait autrefois à Athènes ;
aux peuples chrétiens dont la garde vous a
elle brillerait parmi les plus célèbres ora- été donnée de la part de Dieu. Nous n'avons
teurs latins que Rome ait produits elle pos- ; entre nos mains qu'une partie des affaires ;
sède toutes beautés
les richesses et toutes les mais tout généralement vous est confié.
de sa langue maternelle elle surpasse tous
; Quoique que je sois juge du palais, je me
ceux qui excellent en quelque art ou en quel- ferai toujours gloire d'être votre disciple,
que science, ayant une parfaite connaissance persuadé que je fais bien lorsque je ne m'é-
des lettres qu'elle regarde comme un orne- loigne point de vos règles. C'est donc à vous
ment plus riche que le diadème ; elle sait ter- de m'aider de vos conseils et de vos prières.
miner en peu de mots les procès les plus épi- Rome, qui fait l'admiration de tout l'univers,
neux, conduire les atl'aires de la guerre sans doit accorder son affection à ceux qui la ré-
rien perdre de sa tranquillité d'esprit, garder vèrent. Sous la protection des saints apôtres
et faire garder aux autres un grand secret, nous n'avons rien à craindre, pourvu que le
quand il s'agit des aÛaires qui regardent le Pontife qui tient leur place ne nous refuse
bien public , en sorte qu'on voit les entre- pas le secours de ses prières, n Cassiodore
prises exécutées avant qu'on sache qu'elles appelle dans cette lettre confession, la partie
aient été résolues dans le conseil. » Il ajoute de l'Église où l'on avait mis sous l'autel les
que, ses armées, par le bon ordre qu'on y ob- reliques des deux apôtres saint Pierre et
servait, ont été la terreur des peuples voisins, saint Paul.
et qu'elles ont fait sentir leur valeur à ceux 8. Il écrivit aux évêques d'Italie pour les Lettre aux
évoques d'Ita-
qui ont osé attaquer leurs frontières; que les supplier d'ordonner' un jeûne, afin d'obte- lie, paf. 163.

Français ces conquérants fiers de tant de


, nir par la voix puissante de la pénitence et
^^ctoiresremportées sur plusieurs peuples de l'humilité , la conservation des princes et
barbares, out été mis en désordre dans une la paix; d'être eux-mêmes les consolateurs
grande expédition, et qu'ayant été attaqués des veuves et des orphelins, contre les en-

' Vos deprecor ut indicto jejunio Domino sup- regno protendat, et i>onet quieta tempora. Cas-
plicttis qui vilam principum nostrorum florenti siod., lib. XI Epist. ', pag. 163,
.

218 HISTOmE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


. treprises des horomes violents, sans toute- de la levée de ces deniers pour satisfaire
fois renverser les lois de l'État par un excès leur avarice par des voies indirectes ,
qu'il

de piété de tendresse; de donner à leurs


et appelle une industrie détestable, prometliint
peuples des avis si utiles et si ellicaces, qu'il ne de récompenser ceux qu'il saurait s'être
reste plus rien à faire pour les jupes du siè- comportés avec honneur et en gens do bien.
cle de bannir de cliez les clirétiens l'avari-
; L'édit qui est joint à cette lettre contient plu-
ce, les larcins, la mollesse et tous les autres sieurs belles maximes, entre autres, qu'il est
vices, en les assurant que s'ils ne cessent inutile que ceux qui rendent la justice, le fas-
point de prêcher et d'exhorter, les peines et sent gratuitement, s'ils permettent à ceux qui
les supplices ne cesseront point. Il leur de- les servent de recevoir de l'argent, et qu'une
mande de lui donner en amis tous les avis loi n'a point de force, lorsqu'elle n'est point

qu'ils jugeront nécessaires pour sa conduite. soutenue de l'exemple de celui qui l'a faite.
Amb^«''?ft 9. Il y a deux lettres à Ambroise du rang n écrivit une seconde lettre aux juges des vt. ite.

*^' "''
des illustres, et ce semble, vicaire de Ro- provinces pour les exhorter h rendre la jus-
me, dans lesquelles il lui recommande de tice aux peuples, et à leur faire observer
pourvoir aux besoins publics, et surtout de les lois, leur enjoignant de lui envoyer tous
secourir au plus tôt le peuple romain, qui ceux qui auraient méprisé leur autorité, et
était dans la disette des choses nécessaires à qu'ils n'auraient pas eu la force de punir. Il
la vie. A Dieu ne plaise, lui écrit-il, que je
(' en adressa une autre au chancelier Béatus
mange jusqu'à me rassasier, tandis qu'il y pour lui marquer de la part du roi, de four-
aura un seul des Romains qui aura faim! Je nir à un de ses domestiques nommé Davus,
regarde leur indigence comme la mienne toutes les choses nécessaires au rétablisse-
propre. Je ne saurais me réjouir que la tris- ment de sa santé sur le mont Laclarius où il
tesse ne soit bannie de leur ville. » était allé pour prendre l'air.
10. La lettre à Jean est pour lui notifier 12. Afin de contribuer au soulagement des Édu r»
it,u,Yh>mt- ^ Sier le pH
lier, i.E. 161.
qu'il. le Créait chancelier; c'est pourquoi il peuples il fit rendre un édit dans lequel il
, ,
"•« ,''"'*"

l'avertit des devoirs de son ministère et de spécifia toutes les denrées, avec leur prix,
sa charge, qu"il appelle une espèce de mi- qui était que
les vendeurs n'y perdaient
tel

lice domestique. C'était aux chanceliers à rien, et qu'ils


y gagnaient raisonnablement.
présenter au préfet ceux qui avaient obtenu Il portait une amende pécuniaire pour les

de lui audience, à leur servir d'iutcrprètc contrevenants, et même la bastonnade, pour


dans le Ijesoin et h exposer leurs requêtes.
, mettre un frein à la cupidité par la crainte
Ils étaient tenus au secret, et obligés d'expé- de la perte du bien et des supplices cor-
dier gratuitement les ordonnances des pré- porels ; et comme ceux qui tenaient les
fets; leur nom venait des chanceaux ou des hôtelleries prétendaient que cet édit ne re-
balustrades faites en façon de treillis, où ils gardait que les citoyens et non pas les étran-
se tenaient, a la porte des princes et des gers, à qui par cette fausse interprétation ils
préfets du Prétoire; leurs clôtures étant ou- vendaient les vivres au delà du prix fixé, il
vertes de tous les côtés et percées partout en donna un second par lequel il était or-
,

de petites fenêtres on les voyait de tous les


, donné aux hôteliers de se conformer au pre-
endroits, de manière que ce qu'ils faisaient mier, sous les peines qui y étaient portées;
dans leurs chanceaux ne pouvait êti-e caché. l'amende pécuniaire était de six sols d'or.
u:tr,»i,.o.
le« jogps des
11. Les tailles ou les subsides se pavaient Un geulilliommc, envoyé sur les lieux, devait
. . , ,
pro.iDce», ordinairement en trois quartiers, c est a-dire fixer le prix des choses de concert avec les
,

lie quatre mois en quatre mois. Cassiodore bourgeois et l'évêque.


écrivit en 53-4 aux officiers des provinces
, 13. Vers l'an 536, le sénat de Rome écri- , "f"
de faire payer exactement ces tailles aux vit fi l'empereur Justinien.pour le prier d'ac-
\J^,\7^
temps marqués, et de lui envoyer chaque corder le paix au roi Théodat. Le sénat fait
fois des registres de leurs recettes pour les de ce prince une éloge magnifique. Je faisant
mettre dans les Archives de l'État; il les passer pour le plus savant et le plus sage
avertit en même temps de ne point abuser des rois des Romains. «C'est, ajoute-t-il', la

» si adfiuc minus est, bealorum apostolo-


Ouod difse prohanUir ah hoslibus, gwd eril quod eo-
rum Pelri atque Pauli petitio sanctissima cogite- rum nierilis testernon trilmnt jirindpatuJi. Cas-
lur: iwm qui securilatem romanam sœpe drfni- fioil., lib. XI i:pist. 13,pag. I(i7.
[Vl' SIÈCLE.] CMAPITllE XIX. — CASSIODOllE, CHANCELIEU. 219

prière que nous f;iit Rome par la bouche do gens de guerre faisaient (pu-lquca ravages
ses sénaleurs, et si cela ne vous louche pas, dans les provinces, il le réparait, soit par la
écoutez la voix dos bienliciirotix apôlros dimiiiulion des tailles, soit en distribuant
Pierre et Paul, qui vous ilouiaTuk'nl j^ràcc des sommes considc'rables. Si les juges des E(il>t. t.

poui' une souvenl di'fciuiuo


ville (pi'ils oui si provinces s'acqnitlaienl mal de leurs fonc-
contre les ennemis qui onl été assez lémé- tions, après les avoir avertis, il déclarait à
raires pour l'attaijuer.» ceux qui avaient amassé de l'argent pour
Ullro à 1-4. La lettre .'i Gaiuliosus contieul une fort rachet(!r leurs crimes par de grosses som-
(•AlKtil'SUÏ 01
ux Ligi>riOD<i| belle description de la ville do Cûme sur mes, que leurs richesses mal acquises ne
f«S. 168.
r.Vdda. Dans la première des deux que Cas- leur seraient d'aucun secours; qu'au con-
sindorc ('rrivit aux Liguriens, il leur dit que traire il serait leur persécuteur, parce qu'il
le roi Vitic;rs hMirfaii [iréseut de cent livres ne savait i)as remettre des fautes pour de
d'or |)our subvenir aux besoins des peuples, l'argent dans la pensée où il était que ce se-
,

Epl<t.-.
principalement des citoyens d'Asti , à la rait faire un trafic du crime. Il parle dans une
charge de distribuer cette somme suivant les autre lettre d'un vin odoriférant qu'il avait
du LesSuèves, EpM.7 ol
besoins des nécessiteux. parait que ce fut acheter pour
I

Il fait la table roi.

à l'occasion de la famine, qui affligea la Li- ayant fait une incursion chez les Vénitiens,
gurie, en 538 ; hom-
elle fut si cruelle que les il fit remjBttre une partie des tailles. Il
leur
Grop. Magn, mes s'cntremangeaient. Deux femmes tuè- en exempta aussi pour un temps la Ligurie,
lib, III Dul.
rent dix-sept hommes pour s'en nourrir ; el- à la charge que les habitants l'apporteraient
les en attaijuèrentun dix-huitième qui les fit eux-mêmes dans lescotfrcs du roi au terme
mourir elles-mêmes. Il promet dans la se- qu'il leur fixa. Il punissait d'ailleurs très- EpiM. 10

conde lettre qu'il fera cesser les plaintes sévèrement ceux qui négligeaient de payer
qu'on lui a portées sur les poids et mesures, les tributs dans le temps. Et parce qu'il sa-
en punissant sévèrement ceux qui seront vait (]ue les bienfaits des princes diminuent et
trouvés en contravention. A la suite de ces s'altèrent en passant par des mains étrangè-
deux lettres se trouvent plusieurs formules res à moins qu'elles ne soient biens nettes, il Episl. II.

de ditïérentes dignités dont les préfets du , prit connaissance de la manière dont se fai-
Préliiire doimaiuul les provisions au nom du sait la distribution des vivres que le roi avait
roi. Il conférait ordinairement l'oDice de pré- accordés aux Romains, et donna ordre à
torien le jour de Noël. Les lettres à Lucius et Pierre que personne n'en profilât que les vé-
;i Anatolius regardent les appointements ritables Romains, à l'exclusion des esclaves et
attachés à deux de ces dignités. de tous ceux qui n'avaient pas droit de bour-
I..-Mr.-. ! 15. Cassiodore nous apprend dans sa let- geoisie dans Rome. Ayant été informe que des
Jraii L[ h Vl
laljrn. pa^ tre à Jean, la manière de faire le papier, officiers, sous le nom de maîtres des comptes,
I7i ir->.
dont il fait voir que l'usage est infiniment retranchaient aux éghses une partie des li-
E[-lsl. 12,
préférable aux ccorces d'arbres sur lesquel- béralités du roi, il fit donner un édit qui pri- pag, 180.

les les anciens écrivaient. La lettre qu'il vait des honneurs de la milice et de la no-
écrivit à Vital ien est pour lui ordonner de blesse ceux qui à l'avenir commettraient de
faire payer aux Lucquois et aux Calabrais semblables fautes, et qui portait confiscation
le cens qu'ils devaient annuellement en ar- des biens qu'ils avaient acquis par ces sortes
gent à ta ville de Rome, au lieu des bœufs de voies, qu'il regardait comme des atten-
et des porcs qu'ils lui donnaient auparavant. tats commis contre Dieu en la personne de
Il finit son onzième livre par une formule de
Epl!l. 14,
ses ministres. Il écrivit à Anastase, chance- pag. 182.

pardon accordé à plusieurs personnes déte- lier de Lucauie et de Calabre, de ne plus ti-
nues dans les prisons. rer, même à prix d'argent, des blés de la
•LT-r XII.
Lettres & des IG. Les premières lettres du douzième livre ville deRcggio,à cause de la stérilité de son
cli^n-^cliers el
b des Juges de regardent le maintien de la police dans les pro- territoire.
pn- minces, Lettres à
p»f. 175.
vinces et dans les armées; et, afin de mieux dansia quinzième lettre
17. Cassiodore fait, Maxime, pag.
181-183.
contenir les soldats dans leurs devoirs, Cassio- à Maxime, la description de la ville de Squil-
dore veut que tous leurs besoins leurs soient lacci sa patrie, et des viviers qu'il avait fait
fom'uis, en sorte qu'aucune maison, pas même creuser au pied de la montagne sur laquelle
la sienne, ni celle du roi, ne soient dispensées était situé l'un de ses deux monastères, appelé

F.p;.i. I, a, (le contribuer à leur subsistance. Lorsque, Castel. Dans la dix-neuvième, il donne ordre à Episl. 13.
3 ni. paf. 183.
malgré ces précautions, il arrivait que les un autre Maxime, vicaire de Rome, de prépa-
220 HlSTOmE GÉNÉRALE DES AUTEITIS ECCLÉSIASTIQUES.
rer tout ce qui diait ndcossaire pour l'entrde sont dans de grandes inquiétudes lorsqu'ils
r.f'.,t », solennelle du roi dans cette ville. Il ordonne, voient l'ordre des choses changé car il. :

dans la vinfctienie à Thomas et à Pierre, tré- n'arrive rien sans cause, et le monde n'est
soriers de l'Épargne, de faire reporter par pas gouverné ni conduit par hasard, mais
les mains des diacres de l'Église de Saint- par les sages conseils de Dieu. Si donc nous
Pierre les vases sacrés' que le pape Agapet sommes étonnés lorsque nous remarquons
avait été obligé d'engager, et de rendre en que les rois renversent ce qu'ils ont eux-
même temps aux procureurs de cette Église mêmes rétabli, quand ce ne serait qu'un
l'obligation de ce saint pape. Cussiodore dit changement dépende conséquence, comme
qu'en cette occasion le roi Tliéodat rencliérit lorsqu'ils s'habillent d'une autre manière
sur que le peuple romain avait ad-
la piété qu'ils n'ont coutume quelle doit être no-
;

mirée autrefois dans Alaric, qui ayant su que tre frayeur et notre surprise lorsque nous ,

ces mêmes
vaisseaux sacrés avaient élé pris observons tant de changements considéra-
dans le sac de Rome, les fit reporter en cé- bles dans le premier des astres, que nous
rémonie à l'Église de Saint- Pierre par les voyons privé de sa lumière et de sa chaleur;
mains de ceux qui les avaient enlevés. dans la lune et dans les étoiles"; » La stérilité Kpit.
'"'' '"'
Di.„l^["/n^
18. La
Déusdédit, greffier à Ra-
lettre à eut lieu, 'et les Vénitiens s'étant trouvés dans
Hs- 1»3. '
venne, est remarquable par le détail qu'il la disette, il leur fit distribuer des vivres, et
fait des avantages et des devoirs de cette remettre les tributs, regardant comme une
charge. Par leur office, les greffiers Pont les conduite cruelle de forcer les peuples h
gardiens dépositaires des droits de tout le donner les choses dont ils ont un pressant be-
monde. Il les mettent h couvert des incen- soin." Ce serait, continue-t-il, vouloir exiger
dies, des vols et de la négligence des parti- des larmes pour tribut, que de charger d'im-
La foi publique dont ils sont autori-
culiers. pôts un peuple qui est dans l'impuissance de
sés les met en état de réparer les pertes les payer. »11 paraît que le Milanais souffrit
Eplil. »7,

d'un cbacun en sorte que l'on peut regar-


, aussi de la famine. Cassiodore y fit envoyer

der leur armoire comme la fortune, le refu- de grandes quantités de blés; mais, afin que
ge et la sécurité de la république. L'bérilier la distribution s'en fit avec équité et à pro- ,

y trouve sans beaucoup de peine ce que ses portion de l'indigence, il en confia le soin h
ancêtres lui ont conservé. Comme on a re- Dacius, évêque de Milan, dont il connaissait
cours aux actes du gretl'e, on peut dire en la vertu. La lettre qu'il lui écrivit sur ce su-
quelque sorte que le greffier décide plutôt jet est suivie d'un édit dans lequel, après
les procès que ceux qui sont préposés pour avoir fait part aux Liguriens de la victoire
en connaître. Cassiodore exhorte donc Déus- que le roi avait remportée sur les Bourgui-
dédit remplir avec honneur les devoirs de
.'i
gnons et les .\llemauds, il leur dit que ce
sa charge, sans se laisser gagner par argent ; prince, faisant attention à leur indigence,
àdonnerrt ceux qui demandentdescopies des leur avait fait remise de la moitié des tributs
actes anciens de son greffe, maisftn'en point et ouvert ses greniers pour les soulager.
faire de nouveaux; il lui recommande d'avoir
soin de sceller toutes ses expéditions d'un an- §n.
neau imprimé sur la cire; de gardcraussiune De ri/istoire ecclésiastique apjjelc'e tripnr-lite,
si grande uniformité dans son écriture, que
de la Chronique, du Cumput pascal , et de
ses copies ne diffèrent en rien de l'original.
l'Histoire desGoths.
Lefire h 19. L'altération des saisons, en o.3(>, lui
ayant fait prévoir quelques révolutions dans i. L'Histoire triparlite est ainsi appelée,
ofi-i. 2ô,p.s.

la production et la maturité des biens de la


.11 . '1
c. -lu.fwi
IB'"»"»
parce qu elle est composée de celles des trois mpnn».
Mil""" ™
terre, il écrivit à Amliroise de faire de gran- auteurs grecs Socrate Sozomène et Théo- ,

des provisions sur les récoltes de l'année doret. Cassiodore les fit traduire tontes les Ci-im rr».

précédente. Sur quoi il dit Les hommes : (( trois en latin par son ami Kpiphane,
* *
afin que
'
mptriii. i«f.
' piig. 189.

Quapropter nostra prcvceptione commoniti,


' in hisloria nostra magnn intcntione relitlimiis.
et regia jussione securi, sanciorum fasa cum Nam cum rex Alaricus urbis lionuf deprirdnliDiie
obligalione chirographi acloribu.i sancU l'etri satiat'is, apostoli l'elri vasa suis defertiilihus
apnsloli, sine aliqua dilalione diffnndite. Optala exccpisset, nwx ul rei cnusam habita inlerrogn-
referantur manibus levilarum miniileria tnlo tione cognoril, sarris liminibus deporlari diri-
orbe narrandd. Huperatum est exemplum qnod pienlium mnnibus imperaril. Kpisl. iO, png. 183.
[Vl* SIÈCLE.] CIIAIMTRE XLX. — CASSIODORE, CHANCELIER. 221
l;i ne se
Grince vantrit pas de posséder seule sur le témoignage de Sosom^ne, que ni l'é-
un ouvrage si ailniiialjlc et si lu'ccssaire ti vêque, ni aucun autre ne prêchait et n'en-
tous lesclirotiens. Lorsqu'elles furent tradui- seignait publiquement dans l'Église de Ro-
tes, il en forma un seul corps d'histoire, me. Il a exposé de bonne foi ce qu'il avait
divisé eu douze livres, choisissant des trois trouvé dans son oiiginal pourquoi lui en ;

ce qui lui paraissait de meilleur, se servant ferait-onun reproche?


tantôt de l'une, tanlùt de l'autre, sans répé- 2. Cassiodore nous a laissé une autre his- ClirflDlque
do Clytiodore,
ter ce qui était rapporté par plusieurs de ces toire, mais extrêmement abrégée, sous le I.ig. 3.-,;.

hisluriens. Pour éviter la confusion, après nom de Chronique: il la dédia au roi Théo-
avoir divisé son histoire en chapitres, il y doric ainsi il la composa, étant encore dans
:

mit des titres, et eut soin démarquera cha- les embarras du siècle. On a prétendu qu'il
que chapitre d'où il avait tiré ce qu'il y ra- n'avait pas apporté à cet ouvrage toute l'exac-
contait. Il y en a qui ont accusé le traduc- titude nécessaire, et qu'il s'y était trompé
teur l'^piphane de n'avoir su ni le grec ni le dans ce qu'il a dit des consuls depuis l'em-
latin, et de s'être mépris dans une chose es- pereur Tibère jusqu'à Dioclétien. Àlais qu'a-
sentielle en traduisant le mot li'/iypostase t-il pu faire de mieux que de s'en rapporter
par celui de substance, au lieu de subsistance. à ceux qui, avant lui, avaient traité la même

Mais si l'on ne peut disconvenir que le style matière avec l'aiiplaudisscment du public?
d'Kpiphane ne se sente de la barbarie de S'il a mis le consulat de Junius Brulus une

son siècle, on croit pouvoir assurer qu'il a olympiade plus|tôt qu'il ne fallait, c'est pour
rendu l'original grec assez exactement. Aussi avoir suivi Eusèbe, qui a fait la même faute.
M. de Valois ne s'est guères éloigné de cette On doit même rejeter sur les copistes celles
traduction dans celle qu'il a donnée des trois qui se rencontrent dans ces sortes d'ouvra-
historiens grecs. A l'égard du terme d'/iypos- ges, où il leur était aisé de changer les chif-
tase, si Épiphane ne l'a pas rendu exaciement fres, soit par ignorance, soit par faute d'at-
en latin, c'est une faute qu'on ne doit point tention. L'alfcctatiou des empereurs à retenir
faiie difliculté de pardonner à un homme presque toujours le consulat, a aussi occa-
dont la profession était celle d'avocat, et non sionné beaucoup de méprises à ceux qui ont
pas de théologien. Au reste, ce n'était pas à traité cette matière. Ils ont fait un au '
de
Cassiodore à corriger»de semblablas fautes, 'consulat de ce qui en faisait plusieurs, ne
puisque, par la confiance qu'il avait en son faisant pas attention que c'était le même
traducteur, il pouvait supposer qu'on lisait prince qui retenait le consulat plusieurs an-
ainsi dans l'original grec. Il y aurait plus d'ap- nées de suite. Dom Garet a eu soin, dans la
parence de lui reprocher d'avoir suivi Socra- dernière édition, de rétablir les consuls sur
te dans ce qu'il dit, qu'à Rome on jeùuait les anciens auteurs et sur les tables des plus
tous les jours durant trois semaines avant habiles chronologistes. Cassiodore entreprit Cassiod,
Pâques, excepté le samedi et le dimanche ; sa Chronique par l'ordre de Théodoric qui Frïf.inClro.
ic. pag. 3ai.
puisqu'étant en Italie, il ne pouvait ignorer était bien aise de se trouver en qualité de
qu'à Rome le Carême ne fut de six semaines. consul à la suite de tant de grands hommes,
Mais il est évident qu'il y a faute en cet en- qui avaient été revêtus de la même dignité.
droit ;car on lit de suite ces paroles On :
Ilcompte depuis le commencement du monde
jeûne à Rome tous les samedis, et à plus forte jusqu'au consulat de ce prince 57:21 ans;
raison les samedis du Carême dans un
; et depuis Adam jusqu'au déluge 2243 ans; de-
ancien manuscrit de l'Abbaye de Lire en puis le déluge jusqu'à Ninus,premierroi des
Normandie, de même que dans la première Assyriens, 899 ans. Après les rois des As-
édition de l'Histoire tripartite, au lieu de syriens, dont la monarchie ne dura que 852
ti'ois semaines de jeûne avant Pâques, on lit ans, il met les rois latins du nom de Latinus
six semaines. Ajoutons que Cassiodore a pu qui fut le premier. Ce
en la vingt-
« fut, dit-il,
laisser le terme de trois semaines, qui se trou- cinquième année de son règne que la ville de
vait dans l'Histoire de Socrate, pour ne faire Troie fut prise. Ce prince eut pour successeur
aucun changement dansle texte de cetliisto- Énée qui s'était retiré auprès de lui après
rien, quoiqu'il sût parfaitement qu'à Rome on
jeûnait pendant six semaines. Cette solution
Lib. IX. * Qui continuis consularibus fecerat longum
. xxxtx. peut servir de réponse à une autre difficulté quevulam et sine discrimiyte anntim. Pliu. Pane-
que l'on fait à Cassiodore, d'avoir rapporté gyr. Trajan.
HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
la prise de Troie, et h qui il avait donné sa lenr premier éclat et en faisait voir dix-sept
fille en Ces princes, au lieu de la-
niaiiapre. générations entières depuis qu'elle possédait
tins, se nommaient romains depuis que Uo- le sceptre ; il y avait ramassé en un corps ce

niulus, qui avait bâti Rome, fut monté sur qui était épars en plusieurs livres. Jornandès
le Irùne. Leur monartliie finit à Tarquin-lc- ou Jordanus, évéque de Ra venue, fit un
Superhe, sous règne duquel l'ythagore se
le abrégé de cette histoire à la prière de Cas-
rendit recommandablc par son savoir. Aux telliiîs, à qui il le dédia. La peine qu'il té-

rois succédèrent les consuls: ils étaient ordi- moigne' avoir eue dans ce travail, peut ré-
nairement deux, mais ils n'avaient le gouver- pondre de ce qu'il en avait coûté à Cas-
nement de la république que pour un an. Les siodore pour faire cette Histoire: et de b.
premiers consuls furent Junius, Brutus etTar- capacité de son génie, qu'un ouvrage de
quinius Collatinus. Sous le consulat de Len- cette nature ne rebutait pas dans le temps
lulus et de Marcellus, Jules César, après qu'il ét^t chargé des plus grandes affaires
avoir vaincu Pompée, prit le nom d'Empe- du royaume. V Abrégé de Jornandès est dis-
reur romain. » Cassiodore en compte qua- tribué en soixante cl:apilres dont le dernier
rante-huit jusqu'à Anastase, qui est le der- conduit VHistoire des Goths jusqu'à la mort
nier empereur dont il parle dans sa Chroni- de Vitigcs, leur dernier roi, et jusques au
que, qu'il finit par le récit des actions les mariage de Mathasonte, sa veuve, avec Gei^
plus éclatantes de Tbéodoric, roi d'Italie. Ce main, frère de l'empereur Justinien, c'est-à-
prince donna en mariage sa fille Amalasonthe dire, jusqu'en l'an 540 ; ce qui montre que
à Eutharic qui fut consul en 519. La môme Cassiodore mit deux fois la main à VHistoire
annéeThéodoric fit de grandes magniliccnces des Goths ,
qu'il n'avait pu conduire d'abord
à Rome et à Ravcnne. Cassiodore ne pousse que juscju'au règne de Théodoric et qu'il la :

pas plus loin sa Chronique. Ce qui est une conduisit depuis au delà de celui de Yitigès,
preuve qu'il la composa en cette année. puisqu'il parle d'un fils posthume, né de ce
Comimt 3. Dans le dénombrement qu'il fait au com- prince et Ue Mathasonte, en qui les maisons
jascxl dfl
mencement de son traité de l'Orthographe, des d'Amales el des Anices furent réunies. [L'ou-
ouvrages qu'il avait composés depuis sa con- vrage de Jornandès a été donné en français
version, Cassiodore ne dit rien du Comput sous ce titre De la Succession des royaumes
:

pascal que nous avons parmi ses œuvres. et des temps et de l'origi'ne des actes des Goths,

D'où l'on conjecture qu'il ne l'avait pas en- par Jornandès ; traduction nouvelle par
core écrit alors c'est-a-dire en oG2. 11 le fit
,
M. Auguste Savagner, Paris, Panckoucke,
pour trouver le jour de Pâques, les épactes, 1842, in-8.]
les îndictions, les années bissextiles, le cycle
de dix-neuf ans. Dans ceComput il commence §m.
l'ère chrétienne à l'incarnation de Jésus- Du Cominentaire de Cassiodore sur les Psaumes.
Christ et non pas h sa naissance, devançant
ainsi d'un an l'ère vulgaire qui ne com- i. Après que Cassiodore se fut défait, étant ej vi
11, Ufiip» et à
à Uavenne, des embari'as. des honneurs et i»"" •"
-1
1 1 ,

mence qu'à la naissance du Sauveur.


4. Ce fut aussi sous le règne de Théodoric du som des atl'aires séculières qui
^ sont ton- i"'"»""
l'siumes.
,'•
Ici

que Cassiodore composa l'Histoire des Goths jours accompagnées d'un plaisir nuisible, il

divisée en douze livres nous n'avons plus


:
chercha son repos et sa consolation dans la
cettehistoire; c'étaitun ouvraged'une grande lecture des Psaumes. Il n'en eut pas plutôt
recherche. Il y tirait de l'oubli ' les anciens goùlé le miel spirituel qu'il s'y plongea toui
rois des Goths qui n'étaient plus connus il y ;
entier, par luvidité d'en rechercher les

rétablissait la race royale des Amales dans mystères, comme il arrive à ceux qui sont

> Telendil se eliam Cassiodorus in anliquam anle dispersum. Alhnlar. rcx, Epist. 25, ad Seiia-
prosapicm noslraiii, kclione diScens quod vix , tum urbis Homtv. pa^'. 145.
imijorum nolilia cana relinebat. Iste regcs Go- • De brevialionc Chronicorum, suades ut nos-

tltorum longa ohli:ione celalos, latibulo vclusta- tris verbis (ttiodecim Cassioduri loluniina de ori-
tis cduxil. Isic Amalos cuni generis .sm clarilate gine acluque Getarum ab olini usqtte nunc per
resliluil : evidenter osicndcns in dtcimam septi- generalionrs regesque descendenic, in unum et
inam progeniein slirpemnos liabere regalem.Ori- hocparvo lihcUo coarcleni: dura salis impcria et
ginein gotliicam liisturiain fecit esse rouiaiiam, tanquam ab eo qui pondus hujus operis sciri
quasi in unam coronam germen ftori-
coltigeiis nolU, imposila. Joruaudes, Prxfat. iu Uist. Go-
dum, quod per liberorum campos passim fuerat thor., pag. 371.
[Vl* SIÈCLE.] CHAPITIIE XIX. — CASSIOnORK, CHANCELIER. 223

r. In l'Ml.
poss(>(los d'un violpiit ilcsir. Et pour so (16- !i(''réliques no leur fournissait ])oint
;
qu'il
. Iltl»g. ili)iiima;j:er de rainortmiie ([ii'il avait l'iu'ou- d'armiîs pour défendre leurs erreurs; ([u'il
Vi'u' dans les occupations du sicde, il s'ap- ('•lait parfailement catlioliquc, et qu'il biillait

pliqua à se remplir agréablement des vérités dans l'Eglise comme un liomme éclairé de la
salutaires renfermées dans ces divins canti- lumière céleste. Il ne le suivit pas toutefois
ques. Il trouva d'abord un obstacle dans leur dans sa manière de lire; l'Iicriture. Ce l'ère
obscurité, ce qui arrive ordiuaircuieut aux s'était servidans son explication desPsaumes
conmicnçants, parce que le sens en est em- de la version latine faite du grec, parce qu'il
barrassé par la diversité des personnes qui n'avait pas encore celle que saint Jérôme lit
y parlent, et voilé par des paraboles et des sur l'hébreu. Cassiodore eut recours à celle- \\M. flC»!-
tloil. l'r.urit.
tiguics. Cela l'obligea de recourir aux Com- ci qui en usage dans l'Église romaine.
t'tait In l'.-i .

mentaires de saint .\iigiislin; mais, y ayant Il eut de plus recours aux exemplaires hé-

trouvé une abondance infinie de matières, breux, et consulta les personnes savantes
qu'il compare à une mer, il crut i[ue dans la dans la langue hébraïque, suitoul pour re-
dilliculté de retenir tout ce que ce Père avait jeter les versets. Il semble, dans un endroit

dit, il était à propos de l'abréger. Toules les de sa Préface ' dédier son ouvrage au Pape,
explications qa'il avait données des Psaumes en le désignant sous le non de Père apustuli-
étaient divisées dans le sixième siècle en que, terme consacré pour signifier le Pape ou
quinze décades ou quinze parties composées du moins un évoque des grands sièges ;

cliacnne de dix psaumes. Cassiodore les ren- mais la chose n'est pas certaine. Ce Com-
ferma dans un seul volume, en les abrégeant, mentaire fut le premier ouvrage * que Cas-
mais il ne faut pas le regarder comme un siodore composa depuis sa conversion ainsi ;

simple abréviateur de saint Augustin. Il dit il faut le rapporter à l'année qui suivit la
lui-même qu'il ajouta, à l'abrégé qu'il en fit, prise de Ravenne, c'est-à-dire, à l'an 439 ou
de nouvelles découvertes, dont il rend toute environ.
la gloire à celui qui donne la vue aux aveu- 2. Il fait un grand éloge des Psaumes, des Remarquer

gles la parole aux muets et l'ouïe aux


, beautés, des lumièi'es qu'ils renferment; de les l*ïauii>tï.

sourds. Il se servit encore de ce qu'il avait la douceur, de la vertu qu'ils respirent; de


trouvé de mieuxdans les écritsd'Ûrigène,de leur remarque que c'était l'usage
utilité, et

saint Cyprien, de saint Athanase, de saiut de l'Église de les chanter aux veilles de la
Hilaire, de saint Ambroise, do Didyme, de nuit, à l'ollice du matin que nous nommons
saint Jérôme, de saint Léon et de quebpies les Laudes à Prime à Tierce, à Sexte, à
,

autres. C'est la remarque que le vénérable iVûï?eet à Vêpres. Après quoi il fait diverses
Bède fait sur ce Commentaire ' qu'il appelle observations générales, comme pour servir
excellent. Quoiqu'il fût renfermé dans un de prolégomènes à son Commentaire.\.s. pre-
seul volume, Cassiodore le partagea en trois mière est sur le terme de prophétie qu'il dé-
pour la commodité de ses religieux et il ; finit en dilférentes manières celle qui paraît ;

voulut que l'on en gardât toujours un exem- la plus exacte est conçue en ces termes La :

plaire fort correct dans la bibliothèque, afin prophétie est une façon de parler avec gran-
que s'il s'était glissé quelques fautes dans deur et avec vérité, façon qui est inspirée de
les autres, on put recourir à celui-ci pour Dieu, et non pas inventée ni enseignée pur
les corriger. La raison qu'il eut de préférer les hommes Car : ce n'ajjoint été par la vo-
les Commentaires de saint Augustin, c'est lonté des hommes, dit l'apôtre saiut Pierre,
qu'outre qu'il trouvait dans son abondance"^ que les prophéties nous ont été anciennement ap-
une grande exactitude;! traiter les matières, portées, mais ça été par le mouvement du Saint-
il savait qu'il ne donnait jamais prise aux Espi'itquc les saints hommes de Dieu ont parlé.
' In exposilione Psalmorum, quam egregiam unde se passent aliqua colluclnlione dcfendere :
fecil Cassiodorus, diligenler intuitus est quid totus cnlhuUcus, tolus orlhodoxus invenilur. et
Ambrosius, quid HiUtrius, quid Àuguslinus, quid in Ecclesia Domini suavissimo nitore resplen-
Cyrillus, quid Joannes, quid cœteri Patres dixe- dens, superni luminis clarilate radiatur. Cassio-
runt. Beda, lib. II, in Esdram, cap. vu. dor. Prie fat. in Psalm,
* Est eiiim Àugustiniis litteraruin omnixim ma- 3 Quocirca, Pater, apostolica lua
invitatione
gister egregius ; et quod in uberlale rarum est, provocatus abyssos divinas ingrediar. Ibid.
cautissiinus disputator. Decurril quippe lanquani ^ Post Coiiiiiieuta PsaiLTii, ubi conversionis
l'ons purissimus, nulla fœce poUuLus : sed in in- meœ tempore primum studium laboris impendi.
tegritate fldei perseverans nescit hœreticis dore,
, Prœf. ia Orthograpli.
224 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQL'ES.
L'esprit de prophétie n'est pas néanmoins chantre n'oserait les qualifier autrement que
inamissible, et quelquefois le Saint-Esprit, de David, quoiqu'ils portent en tête d'autres
l'inspirateur des prophètes, otl'cnsé par des noms ; et par le ti^moignage de saint Augus-
péchés même de fragilité qu'ils avaient com- tin. .\ quoi il ajoute, que
s'il y eu avait quel-

mis, se relirait d'eux, et ne les inspirait de ques-uns qui fussent véiitablement d'.\saph,
nouveau qu'après qu'ils l'avaient apaisé par de Moïse ou de quelqu'autre que de David,
leur pcnitence. C'est ce que saint Jérôme ils seraient cités sous leur nom dans l'Écri-
UieroD. in
ElMh.
xxxr.
c«p.
montre par plusiears manières de parler ture, comme on cite les Evangiles sous les
Apad. Cas- d'Ezéchiel. Élizée avoua aussi que le Sei- noms de saint Matthieu, de saint Marc, de
siod. Pncr. iD
fMl. pneur lui avait caché la douleur de cette fem- saintLuc et de saint Jean.
me qui vint le prier de ressusciter son fils. 4.remarque en troisième lieu, que ces
Il coio««i.

Mais parce que Jésus-Christ a toujours été termes, pour la m, que on rencontre sou- I ponr u oa,

exempt de péché, le Saint-Esprit s'est reposé vent dans les titres des Psaumes, peuvent s en- i»»

sur lui invariablement. Cassiodore croit que tendre en deux manières la première pour ;

l'on peut mcllre au rang de ceux ;\ qui Dieu marquer qu'une chose est conduite à sa fin
accorde le don de prophétie, ceux qui ont et sa peifection; la seconde, que cette fin
il

reçu de lui le don d'intelligence pour bien est Jésus-Christ même, parce que, selon l'A-
expliquer les divines Eciilures. pôtre, il qu'en lui nous
est la fin de la loi, et

Auteur àcf- 3. Sa seconde remarque regarde les di- trouverons la fin et la consommation de no-
Puiim«s : di-
TPr^cs maniè- vers instruments que l'on employait parmi le tre bonheur, ce qui doit nous le faire aimer
res da \tâ
cbaoïer. chant des Psaumes, les dillcientes manières comme notre souverain bien. Parlant ensuite
de les chanter, et celui qui en est l'auteur. de l'instrument appelé psahérion, et de la
Il met au nombre de ces instruments les signification du mot à^psaume, il dit que le
harpes, les cymbales et les trompettes. psaltérion est, au rapport de saint Jérôme,
Quelquefois l'on chantait les Psaumes avec la un instrument de musique creux, fait de bois
voix humaine seule en d'autres occasions
; en forme de delta, qui se louche avec un ar- D.Diei,iii. r,

avec les seuls instruments, et souvent on chet; il est parlé du psalléi ion dans Daniel, et ".rlirp." n.

mêlait les voix humaines avec le son des dans les Paralipomènes.
instruments. Cette diversité de voix et de son 5. Ensuite Cassiodore explique la différen-
eDtrpHyauRK-,
faisaitensemble des accords merveilleux de ce qu'il y a entre psaume, cantique, psaume- MDtiquo ,elc.

musique, qui, selon Cassiodore, signifiaient cantique et cantique-psaume. Le Psaume est


que toutes les langues se réuniraient un jour ce qui se chante sur les instruments seuls;
dans une même foi pour composer l'I'jglise ca- le cantigue ce qui se chante de la voix natu-
tholique. « On trouve souvent, dit-il, à la tête relle seule ; le psaume-cantique est une sym-

des Psaumes lesnomsd'Asaph,d'Idithun,des phonie où les instruments de musique com-


enfants de Coré, et de quelques autres, non mencent, et où les voix humaines suivent; le
pas que ces psaumes fussent d'eux, comme cantique-psaume se commence par Icsvoixhu-
quelques-uns leprétendent, mais parce qu'ils maines en chœur, et se continue par les ins-
étaient les principaux chantres et musiciens, truments de musique qui se mêlent aux voix.
comme les directeurs de la psalmodie, et pré- Il dit que de la diversité de ces hymnes vient

posés sur tout ce qui devait composer cette la dillcreiice de ces inscriptions et des litres
sorte de mélodie.» Cassiodore cite quelques que l'on trouve ;\ la tête des Psaumes. Ils en
passages du Nouveau Testament, où les ont d'autres fondés sur certaines actions sin-
Psaumes sont indistinctement attribués à gulières que l'on doit expliquer moralement.
David ; d'où il en est seul au-
infère '
qu'il Tel estle titre Pour les jiressoirs ; et cet au-
:

tçur ce qu'il prouve encore par la croyance


; tre Le premier jour de la semaine.
:

commune de l'Éulise, où, lorsqu'il s'agit de 6. Par le terme diapsalma, saint Jérôme Ce que e'i

«luo
chanter quelques psaumes, le lecteur ou le entend une continuatiou de psalmodie, parce

' Unde probatur universos Psalmos non mul- nisi Psalmos David. Quod si essent proprii, id est
torum exislere, sed lantum ipsiux D'ivid quem a aut Asaph aul Mnysi, eorum nomina utique prœ-
Domino conslal esse nomiimtum. Usus qunque dicarentur; siciit cl in Evangetiis fit, quando
Ecclesiœ catholicœ Spirilus Sancli inspiratione aul Marci, aut Lucœ, aut ilattluvi, aut Jonunis
generaliler et immobiliter lenet, ut qiiicumque vocabiilo prnnuntiautnr. Quodeliam secutus pa-
eorum cuntamiusfueril. qui diverse nomiiieprœ- riler Auguslinus congruenter omnes psalmos di-
notanlur, leclor aliud prœjudicare non audeat cil esse Davidicos. Cassiodor., Prœf. in Psal.
[Vl' SIÈCLE.] CIIAIMTRE XIX. — GASSIODOUE, CHANCELIER. 228

«lue ce terme signifie en h(''l)icu ton Jdns. chaque psaume il se proposera quelques hé-
Saint Augustin le prend dans un sens con- résies ;\ coudnittre.
traire, disant que lorsqu'on trouve le mot 10. Il s'étend beaucoup A relever l'élo- Der6;o-
qtifncAdff rb*

diapsalma dans l'iidbreu, c'est pour marquer quence des livres saints. « Le langage de (anViil'Br en
er tur^,
dit

une pause ou discontinualion du dianl. Il ri'crilme, dit-il, est chaste, d'une cerlitudo celte desPiin*
semble que cette explication soit plus du goîit iut'aillilile, d'une vérité ét(!rnellc et imnma-

de Cassiodore que la première. bie, pure, utile, remplie de force et propre à


7. Saint Jérùnie a divisé le Psautier eu cinq opérer le salut comme on le voit parle psau-
livres, en quoi il a été suivi par beaucoup do me cxviii", où le Piophète dit au Seigneur l'Écriture, des :

personnes. Mais saint Hilaire n'a point admis Votre parole m'a dunné la vie. C'est une lampe |'Ég1!'so."'
cette division, croyant qu'il était plus conve- qui éclaire mes pieds, et une lumière qui me fuit
nable de ne point partager les Psaumes en voir les sentiers oh Je dois marcher. Vraie lu-
plusieurs livres, soit parce que dans l'iié- mière, parcequ'ellenemucommandc rien qui
breu ils ne forment qu'un seul volume, soit ne me donne la vie, qu'elle ne défend que ce
parce que dans les Actes des apôtres il n'est qui est nuisible, qu'elle me détourne de l'a-
parlé que d'un seul livre des Psaumes. Cas- mour des choses terrestres, et me persuade de
siodore adopte ce sentiment; et s'il a divisé ne m'atlacher qu'aux célestes. Sous des paro-
le Psautier en trois parties, ce n'a été que les Irès-communcs, l'Ecriture renferme de

pour la commodité de ses religieux, alin que profonds mystères. Mais sa simplicité même a
trois pussent le lire en même temps. Chacune de la grandeur. Sa vertu est telle qu'elle s'est
de ces divisions renfermait cinquante psau- fait recevoir dans toutes les parties de l'uni-

mes, comme il le marque au commencement vers. Eu deux mots, elle nous fait connaître la
de sa préface. nature inetlable de Dieu Celui qui est, dit
:

Cnmi'eiil il 8. 11 fait remarquer qu'il est parlé de Jésus- Moïse m'a envoyé. Toutes ses paroles sont
,

Ji-.i- - 1,1,11-1 Christ en trois manières dans les Psaumes; remplies de sens, quand on se donne la peine
(1..U4 los l',au-
qu'il y en a qui ont rapport à son humanité; de les approfondir. Pcut-ou douter de sou élo-
d'autres à sa divinité, le déclarant égal et co- quence, puisque la vraie ' éloquence consiste
éternel au Père et quelques-uns où il est re-
;
à exprimer les choses en des termes propres
présenté comme le chef et la tète de l'Eglise. et convenables ?» Il dit à la louange du livre

Sur quoi il renvoie aux règles de Ticbonius, des Psaumes, qu'il n'y a point de sujet de con-
ajoutant qu'il était nécessaire que Jésus- solation que les hommes n'y puisse trouver;
Christ fût représenté sous ces trois aspects que c'est un trésor cpii profite et augmente
dans lesPsaum<^p, pour nous faire connaître toujours dans un cœur pur; que ceux qui
qu'il y a en lui deux natures, l'iuie divine, pleurent y trouvent de quoi se consoler, les
l'autre humaine, et que nous fussions en état justes les motifs solides de leur espérance, et
de répondre aux hérétiques qui combattent ceux qui sont en péril un refuge utile que ;

sa divinité par des passages qui doivent lorsque nous les chantons, il semble, comme
s'entendre de sa nature humaine. le dit saint Aihanase à Marcellin, que les pa-

9. .\près ces remarques générales, Cassio- roles du Saint-Esprit deviennent les nôtres

dore propose la méthode qu'il veut suivre et s'accommodent à tous nos besoins. Cassio-

dans tout son commentaire savoir qu'il ex- :


dore avait dit auparavant, en parlant de la
pliquera le titre du psaume, qu'il le divisera psalmodie qui se fait dans les veilles «Pen- :

en toutes ses parties, pour éviter l'embarras dant le silence de la nuit, la voix des hom-
que pourrait causer la diversité des matières mes éclate dans le chant et par des paroles
;

et des personnes qui se rencontre quelque- chantées avec art et mesure, elle nous fait
fois dans un même psaume qu'il l'expliquera
;
retourner à celui de qui la divine parole nous
ou selon le sens littéral et historique, ou se- est venue pour le salut du genre humain.

prophétique; en Il ne se forme qu'une seule voix de tant de


lon le sens spirituel et qu'il

fera connaître la fin et le but, particulière- personnes qui chantent, et nous mêlons no-
ment par rapport à la morale, c'est-à-dire tre musique avec les louanges de Dieu chan-

par rapport à la faite des vices et à la prati- tées par les anges, quoique nous ne puissions

que de la vertu ;
qu'il fera des observations
sur le nombre des psaumes,
lorsqu'il y aura
' Eloquentia siquîdem estadunamquamque rem
quelque chose de mystérieux renfermé dans conipetens et décora locutio. C.issiod., Prœfat.
ce psaume enfin que dans le sommaire de
; in psalm., cap. xv, pag. 5.

XI. 13
,

226 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


pasles cnlcndrc. 1)11 joint à ces ('locres celui de au pontificat , c'est-.^-dire depuis l'an 392
l'Eglise calbolique, » qui seule, dit-il, commu- plus de quinze ans au moins depuis la mort de
nique la vie de la grûce et la sanctificatiou, Cassiodore. La seconde se prend de la dilfé-
en n^parant, par ses sacrements, le genre hu- rence du style. La troisième du silence de
main qui s'était perdu par ses propres fautes. Cassiodore sur cet ouvrage, dont il ne dit pas
Hors d'elle , comme hors de l'arche qui en un mot dans sa préface sur le livre de l'Ortho-
était la figure, on ne peut qu'être submergé. grajj/te,'où il fait le dénombrement de tous
Pure dans sa doctrine, elle n'est souillée d'au- les livres qu'il avait composés depuis sa con-
cune erreur, quoique nécessitée à vivre en ce version. S'il eût travaillé surle Cantique des
monde parmi les méchants. Elle est plus lui- cantiques iimnédiatement après avoir expli-
sante que le soleil, plus blanche que la neige, qué les Psaumes comme on veut l'inférer
,

sans aucune tache ni ride. » Le Commentaùs des dernières paroles' de ce commentaire;


de Cassiodore est divisé en douze parties, se- eùt-il négligé d'en parler et de placer cet ou-
lon l'ordre et le sens des Psaumes, qui repré- vrage dans son Catalogue, immédiatement
sentent Jésus-Clirist et son ïlglise en ditfé- après celui qu'il a composé sur les Psaumes?
rents états. C'est ce qu'il explique en douze Une quatrième raison est que Cassiodore suit vi«d« i

pour servir de Prolégomènes à


petits articles ordinairement la version des Septante, ce iv.w'-t
son commentaire. que ne l'ait pas l'interprète du Cantique des
cantiques. Il faut ajouter que ce commenta-
§IV. teur parle si clairement des deux opérations
Du commentaire sur le Cantique des cantiques
en Jésus-Christ, et les prouve avec tant de
attribué à Cassiodore. soin, qu'on peut croire qu'il a vécu ou du
temps de la naissance du monothélisme, ou
i>,^,!"ucln-
1- A
la suite du Commentaire sur les Psau- depuis que cette hérésie eut fait du bruit dans
1,^/°' ^nV ^"^^' 0" ^ ™'s di'iis la nouvelle édition un l'Église, Le Seigneur, dit-il, opérait' ce qui
(i

"»• commentaire sur le Cantique des cantiques était convenable à la divinité en sorte qu'il ,

qui dans plusieurs manuscrits et dans une


, accomplissait aussi ce qui était de son hu-
édition d'Allemagne, ;\ Fribourg, en 1338, manité, sans cesser de faire ce qui appar-
porte le nom de Cassiodore. Il lui est aussi tenait à la divinité car l'opération de la di-
:

attribué par plusieurs écrivains qui, dans leur vinité est distinguée en Jésus-Christ de celle
catalogue des auteurs ecclésiastiques ont , de la nature humaine. Avait-il faim? avait-il
donné celui des Œuvres de Cassiodore. Il peut soif? pleurait-il? soutfrait-il de la lassitude?
lui-même avoir douué occasion de le mettre enfin, a-t-il pu être crucifié et mourir? C'était
sous son nom en disant sur la fin de son
, autant d'opérations de la nature humaine.
(, P;f^""^,|,°
Commentaire sur les Psaumes : « Examinons Mais lorsqu'il ressuscitait les morts et qu'il
"• à présent les paroles de Salomon, que l'on guérissait les malades, lorsqu'il se ressuscita
sait avoir été déjà expliquées par divers in- lui-même, c'était manifestement autant d'œu-
terprètes. 1) Mais, quoi(]ue cet ouvrage né soit vres de la divinité. »
pas indigne de lui, puisiju'il y en a peu où le
texte du Cantique des cantiques soit expliqué § V.
avec plus de netteté et de précision, il y a
Du livre de l'Institution aux lettres divines.
cependant de fortes raisons pour croire qu'il
n'en est point l'auteur. La première est que 1. Cassiodore, sensiblement touché de ce oecasio»!

l'on y cite les explications de saint Grégoire qu'il n'y avait point à Rome de maîtres "'"'°

le Grand sur les Evangiles, ouviagc que ce publics destinés à enseigner les divines Ecri-
saint ne commença que depuis qu'il fut élevé tures , pendant que les auteurs profanes y ci»
Prif. io

• llaclenus quœ ad expositionem Psalmorum divinitatis et humanilnlis. Kam quod eSuriehal,


perlinrre videhunlnr, decursa sunt : nunc Saln- qund sitiebal, quod flebat, quod Inssabiilur, quod
monU dicta videamus, quw proprios exposilurcs ad ullimuni crucifigi et mori paierai, humaniln-
htthere nosctiiitur. Cassind. inpsul., yiv^. 'nu. lis opéra iranl; quod i^ero morlun.^ .luscilalial,
' (Juin sic Dominus npenibnlur ea quœ divini- quod nmnilnis inftrnunilihus succurrrbat, quod
tatis ernnl, ul nihiloiuuius pcrficcret e quw erant
i
seipsuin a morluis rtssuscilnbat, evidentUsima
humnnitatis, 7wn rctinquenl ea
el quœ eraiil di- tranl opéra divinilatis. Comment, in Caul. cant.,
vinilaiis. Dtslincta esl cnim operatio in ChrisCo cap. V, vcrc. H, pag. 497.
[vi° SIÈCLE.] CHAPITRE XIX. CASSIODORE, CHANCELIER. 2i>7

jm^iiui. t.r. (Haicnt expliques par des maiircs très-célè- propre travail, l'intelligence de l'Écriture ,

Lrcs, fil tout son possil)le,avec le saint pape consulter les saints Pères qui l'ont expli(piéc ;

Agapet, pour établir on cette ville, h ses frais, savoir, entre les Grecs Clément d'Alexan-
,

des chaiiTS de prol'cssouis dans les écoles drie, saint Cyrille, évoque de la ménu" ville,
chrétiennes, à l'iniitalion de ce qui s'était saint Chiysoslôme saint Grégoire de Xa-
,

pratiqué autrefois à Alexandrie, et de ce qui zianze et saint Basile mais parce qu'il écri-
;

se pratiquait encore alors dans la ville de Ni- vait pour des Lalins, il marque qu'il parlera
sibo, en Syrie, où l'Hcriturc sainte était ex- dans la suite amplemmit des Pères (jui ont(!crit
pliquée aux juifs, ce (jui devait, à plus forte en cette langue. Il convient que quelques-
raison, se pratiquer chez les chrétiens. Mais uns, sans tous ces secours, sont devenus sa-
les guerres funestes et les troubles de l'Italie vants dans l'Écriture sainte, et il dit, d'a-
ne permirent point d'exécuter un si loua-
lui près Cassicu et saint Augustin, (pie des per-
ble dessein, comme on l'a déjà remarqué. Ce sonnes en ont reçu de Dieu l'intelligence par
fut pour y suppléer en quelque sorte qu'il de ferventes prières; mais il est d'avis de
entreprit, dans les premières années de sa re- suivre la voie commune, d'apprendre et de
'

traite, de donner une introduction à l'étude se faire instruire, de peur de tenter Dieu, ce
de récriture sainte, dans le livre qu'il com- qui n'empêche pas qu'on n'ait recours aux
posa sous le nom d'Institution aux lettres lumières du Saint-Esprit et qu'on n'adresse
divines. Son dessein, dans cet ouvrage, est de à Dieu ces paroles du Prophète qui, quoique
Dunnez-moi V intel- PsmI. CWIII,
donner les principes de la science de l'I^cri- déjà si éclairé, lui disait :

ture sainte, et même des lettres humaines , ligence, afin que j'apprenne voscommandements
non en suivant les lumières de son propre et votre sainte loi. Les lumières que Cassio-
esprit, mais en s'attachant à la doctrine des dore avait puisées dans l'Écriture soit par ,

anciens Pères, dont les commentaires sur les son travail, soit par la prière, ne l'empêchè-
livres saints conduisent efficacement , selon rent pas de coUationner quoique dans un
,

lui, à la contemplaliou de Dieu. Pour garder âge déjà avancé, tout l'Ancien et tout le Nou-
quelque ordre dans la lecture de l'Écriture veau Testament sur plusieurs manuscrits. Il
sainte, il pense qu'on doit commencer par imita dans cette révision ou nouvelle édition
apprendre de mémoire tous les Psaiimes, en de l'Ecriture, ce qu'avait fait saint Jérôme
les lisant dans des exemplaires fort corrects, pour les distinctions des versets, les points et
de peur de prendre les fautes des copistes les virgules, et il fit garder autant qu'il put
pour le texte même de l'Écriture; il exhorte les règles de l'orthographe dans un temps ,

aussi à apprendre par cœur toute l'Ecriture, où elle n'était pas encore bien réglée chez
disant qu'il avait vu des personnes devenues les Latins, quoiqu'elle le fût déjà chez les
si habiles par ce moyen, que lorsqu'on leur Grecs. s'appliqua surtout à bien rendre le
Il

proposait quelques questions sur le sens d'un texte du Psautier, des Prophètes et des Épî-
passage, en citaient plusieurs autres
elles tres (le saint Pa(d, parce qu'il s'y rencontre

semblables dont le rapport des uns aux autres de plus grandes difficultés que dans les autres
faisait voir comment on devait les entendre. lisTes de l'Écriture.
« En etlet, dit-il, il arrive souvent que ce qui 2. Après ces remarques générales, Cas- Premier \o«
lume.
est obscur dans un livre de l'Ecriture, est siodore commence son livre de l'Institution
énoncé en termes plus clairs dans d'autres, par indiquer des Pères, que l'on
les écrits
et il faut expliquer ce qu'il y a de moins clair doit lire sur chaque livre de l'Octatcuque, Écri(s des
Pères qu'OQ
par ce qui l'est davantage. C'est ainsi que c'est-à-dire sur les cinq livres de Moïse, Jo- dojl sur
lire
rOi^laleuque,
saint Paul a fait dans son Epitre aux Hébreux, sué, les Juges et Iluth. Saint Basile a fait neuf î>p-
609.
où il explique les prophéties de l'Ancien Tes- homélies sur le commencement de la Genèse,
tament par l'accomplissement qu'elles ont eu qui ont été traduites en latin par Eustathe.
dans le Nouveau. » Cassiodore dit ensuite Saint Ambroise a aussi expliqué l'ouvrage
que l'on doit, après avoir acquis, par son des six jours ; mais Cassiodore préfère ce

' ticet hmc fuerint stupenda miracula. et om- mini polius incurrere videamur... Nam et David
nia possibilia credenlihus approbentur, non nos cum esset in lege Dominijugiter ocrupatns lumen ,

tanten dehere talia fréquenter expelere, sed in clamabat ad Dominum dicens Da ruihi iut<>l- :

usu communis doctrinœ salins permanere : ne lectum ut discam mandata tua. Prœfat. in lib.
cum illa quœ sunt supra nos audactcr exquiri- Inslit., pag. 509.
vxus, culpam tentationis contra prœceplum Do-
22« HISTOIRE GÉNKHALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
que saint Augustin a écrit sur ce li\Te en- posé vingt livTes sur Jérémie, mais qu'il
tier, soitdans ses ouvrages conbe les mani- n'en put recouvrer que six, quoiqu'il eût fait
chéens, et en particulier dans ceux qu'il a chercher les autres avec beaucoup de soin.
écrits contre Fauste, soit dans ses livres des 11 ne s'en donna pas muins pour avoir les

Confessions et ailleurs.Il propose à lire sur Conmienlairesde saint Ambroise sur les Pro-
le même ceux que saint Ambroise à
livre phètes, et, n'ayant pu les découvrir, il re-
faits sur les Patriarches, les questions de commanda à ses frères de les chercher.
saint Jérôme sur la Genèse, l'ouvratre de Nous n'en avons point de ce Père, et on ne
saint Prosper divisé en cent quarante-trois sait même s'il en a fait ; Cassiodore ne l'as-
titres et les Homélies d'Ûrif;ène, qu'il dit être sure pas.
très-éloquentes. Mais parce que ce Père avait 5. Le quatrième volume était composé du o^irum»,
* ïbluiiie.
été condamné depuis peu par le pape Vigile, Psautier et des commentaires de saint Hi-
pourempécherqnc ses religieux ne s'égaras- laii-e, de saint Ambroise, de saint Jérôme,

sent en les lisant, Cassiodorc marque les en- de saint Augustin ot de saint Athanase mais !:'" '" ' "•
~ :
lier, oft, IV,

droits dangereux et tous ceux qui lui parais- de tous ces Pères, il n'y avait que saint Au- i-t-'"»-

saient suspects ; il détaille le nombre de tes gustin qui eut expliqué tous les Psaumes. A
homélies sur l'Octateuque excepté celles , l'égard de l'ouvrage sur les Psaumes adressé
qui étaient sur le livre de lluth, parce qu'il à Marcellin, Cassiodore veut, sans doute,
ne put les trouver; pour y suppléer, il en- parler de de ce Père à Marcellin ;
la lettre
gagea le prêtre Bellator à faire un commen- aussi ne l'appelle-t-il qu'un petit livre. ;U
fit dans un ou-
taire sur ce livre; ce qu'il parle du Commentaire qu"il avait lui-même
vrage divisé en deux parties, qui fut joint composé sur les Psaumes, reconnaissant qu'il
aux Homélies d'Origène, sur les livres pré- avait beaucoup emprunté a saint Augus-
cédents. Cassiodore fit un recueil de toutes tin. Ily faisait voir que les maîtres des scien-
ces pièces, qu'il eut soin de faire relier en- ces séculières ont enrichi leurs éciits de di-
semble c'est ce qu'il appelle le premier
: vers endroits des Psaumes. Il renouvelle
volume de sa Bible, qu'il avait partagée en l'ordre qu'il avait déjà donné dans sa pré-
neuf. face sur les Psaumes, de laisser dans la bi-
Seco ^o*
lutnct
i<l
3.
Il rassembla dans le second tout ce bliothèque le volume du Psautier, avec les
qu'iltrouva d'ex|)lications sur les livres des Commentaires, pour servir à corriger les
Sur k-. Roi!,
cap. I, pag. Rois et sur les Paralipomènes. Il plaça à la fautes qui pourraient se glisser dans les dif-
Eli.
tête de ce Recueil quatre homélies d'Ori- férentes copies à l'usage des frères. Leur
gène; les réponses de saint Augustin aux Psautier était divisé en trois parties ou trois
six questions de saint Siniplicien, évêque de volumes pour leur commodité.
Milan les trois questions que saint Jérôme
; 6. Dans le cinquième volume étaient les Chi.k
avait envoyées à Aboudantius, et quelques ouvrages de Salomon, dont le premier est le
autres endroits des ouvrages de ces deux livre des Proverbes, qui a été commenté par g^r t„
Pères, qui ont rapport à l'histoire des Rois, Didyme. Epiphane, ami de Cassiodore, a tra- û\^r""iM-
de même que de ceux de saint Ambioise. Il duit ce Commentaire du grec en latin. Saint
ne tniuva qu'une seule homélie d'Origène sur Antoine appelait Didyme l'aveugle clair-
les Paralipomènes,parce qu'il n'avait pas
et voyant, parce que la privation de la vue ne
trouvé ces livres ni ceux des Rois divisés l'avait pas empêché «le se rendre habile dans
par chapitres et par titres, il les divisa lui- la plupart des arts et des sciences. Cassiodore
même en mettant un titre à chaque cha- dit que cela lui aurait paru impossible, s'il
pitre. n'avait vu lui-même un nommé Eusèbe, ve-
Tro iiimt '
folunio.
4. Le troisième volume renfermait tous nu d'Asie, quoique aveugle dès l'Age de
qui,
les Prophètes, avecles courtes notes de saint cinq ans, avait rempli sa mémoire de tant
Sur lei Pio-
pbète«. up, Jérôme, que Cassiodore dit être fort utiles d'auteurs et de tant de livres, qu'elle lui te-
III, ^tg. (Il,
pour les commençants; elles étaient suivies nait lieu de bibliothèque il les possédait si
;

de dix-huit livres du même saint Jérôme sur parfaitement, qu'il marquait exactement les
Isaïe, de six sur Jérémie, de quatorze sur endroits ([u'il en citait, et il était si instruit
Ézéchiel, do trois sur Daniel et de vingt srr de toutes les sciences, qu'il en expliquait tou-
les [leliîs Proiihètes. Cassiodore
y juii^nit tes les diflicuilés avec beaucoup de clarté.
quatorze honiéiios d'Origène, traduites par Cassiodore apprit de que la ligure du ta-
lui
saint Jérôme. U dit que ce Père avait com- bernacle et du temple de Jérusalem, res-
[vi" SIÈCLE.] CHAPITRE XIX. — CASSIOnORE, CnANCEURR. 229

semblait ti cello du ciel. Co fut sur le plan un passage pour ]irouver la résurrection,
(ju'Eusi'l)!' lui on (liiuna , qu'il lo lit dessiner dans les mémos tenues que nous le lisons dans
il;iiis un i;riuul livre. Lo vénoiiiblo Itèdo s'est hi Vulgate. On avait de snn temps un com-
réglé sur cette peinture du temple dans le mentaire anonyme sur Job, qu'il Jugo, par la
livre qu'il a fait du Temple de Salomon. Le ressemblance du style, être de saint Ililaire;
niènui Eiisèbo découvrit i\ Cassiodore plu- il y avait aussi des notes de saint Augustin

sieui's mystères signifiés par les ornenionls sur le méiuo livre. Lo prêtre Bellator lit des
du grand prêtre dans l'ancienne loi il lui ; commentaires sur les livres de Tobie, d'Es-
apprit aussi un grand nombre d'anciens ou- thor, de Judith, d'Esdras et desMachabées;
vrages dont il n'avait point ouï parler. Cassio- savoir, cimi livres sur Tobie, six sur Estlier,
dore, en reconnaissance de ce service pria , sept sur Judith, et dix sur les deux livres
Dieu de taire abandonner à Eusèbe l'bérésie des Machabées ; il de joindre
se contenta
desnovatiens dont il était infecté, et de lui aux deux d'Esdras, deux homélies d'Origène
faire embrasser la vérité de la foi catholique. qu'il traduisit en latin.
Il conseille délire les Conmientaires do saint 8. D.ins lo septième volume qui contenait
Toinmc.
Jérôme et ceux de Victorin d'orateur de- , les quatre Évangiles, Cassiodore indiquait les
venu évêque, sur l'Ecclésiaste, qui est le se- auteurs qui les ont expliqués avec le plus de 1«S. iU.

cond livre de Salomon. Le troisième est le succès. Il nomme sur saint Matthieu, saint
Cantiqnedcs cantiques. Ha été expliqné par Jérôme, saint Ililaire et Victorin, le même
Origène en deux homélies que saint Jérôme qu'il dit avoir commenté de l'Ecclé-
le livre

traduisit en latin. Rtifin expliqua aussi le Can- siaste; sur saint Luc, saint Ambroise; sur
tique des cantiques; mais seulement jusqu'au saint Jean, saint Augustin, qui, outre ses trai-
quinzième verset du second chapitre. Saint tés sur cet évang(''liste, a fait une concorde
Epiphane expliqua ce livre tout entier. Ce des quatre Evangélistes. Avant lui, Eusèbe
commentaire qui était très-court, fut mis en de Césarée avait fait quelque chose de sem-
latin par le scolastique Epiphane. On croit blable dans un ouvrage intitulé De la Diffé- :

que le commentaire que Cassiodore attribue rence,ou des varinticms des Évangiles. Cassio-
ici à saint Epi[)hane, est d'un nommé Phi- dore ne désigne aucun interprète sur saint
Ion, que ce saint évoque ordonna évêque de Marc.
Diiiliè.ncvo-
Carpathe, en Chypre; c'est du moins à lui 9. Il avait trouvé des notes sur treize Epî- latnc.

que Suidas l'attribue, et non pas;\ saint Epi- tres de saint Paul, qui étaient si estimées,
Dos E|1rtpB
phane. Cassiodore lit relier en un seul volume qu'on au pape Gélase « Car
les attribuait :
des !»iiôtrfl*,
pair. 51V.
tous ces commentaires avec le Cantique des c'est, dit- il, la coutume de revêtir de l'auto-
cantiques. Il remarque que saint Jérôme rité d'un grand nom ce qu'on veut faire pas-
croyait que le livre de la Sagesse était d'un ser pour bon.» Mais ayant lui-même examiné
nommé
savant juif Philon, et non do Salo- ces notes, il remarqua qu'elles étaient infec-
mon, comme on le dit ordinairement ; il en tées de l'hérésie pélagienne. Pour ne point
parle toutefois ensuite des trois livres précé- priver ses frères de ce qu'il y avait de bon
dents, disant que le prêtre Bellator l'avait dans cet ouvrage, il retrancha tout ce qui lui-
expliqué en huit livres, et que saint Augustin parut mauvais dans l'explication de l'I^pître
et saint Ambroise en avaient aussi dit quel- aux Romains, laissant aux plus habiles de
que chose dans leurs homélies. A l'égard du ses religieux le soin de corriger l'explication
livre del'Ecclésiastique, que saint Jérôme dit des autres Ëpitres sur un autre commentaire
être l'ouvrage de Jésus, fdsdeSirac, Cassio- anonyme qu'il avait trouvé, et qui n'était,
dore convient qu'il est si clair, que l'on n'a comme le précédent, que sur treize Epitres
pas besoin d'interprète pour l'entendre. Il de saint Paul. Quanta l'Épitre aux Hébreux,
divisa tous ces livres par chapitres afin d'en il ne trouva rien de mieux, pour en faciliter

faciliter la lecture aux commençants. l'intelligence, que de faire traduire les tren-
7. Le sixième volume était intitulé : Des te-quatre homélies de saint Clu-ysostôme. Il
lit'iie.

Agiographes. On y trouvait d'abord le livre employa à cette traduction son ami Mucien,
L)es Apto;
fhp*, tut.
de Job traduit en latin par saint Jérôme sur qui parait être le même Mucien contre qui ,

l'hébreu. Cassiodore remarque après ce Pè- Facundus écrivit sur l'atfaire des Trois-Chapi-
re, que la poésie, devenue le langage du tres. Cette traduction se trouve encore dans

Saint-Esprit, et la dialectique la plus exacte, quelques bibliothèques de Paris. Cassiodore


sont employées dans ce livre. Il en rapporte fitaussi traduire en latin, les explications de
230 IIISTOraE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
saint Cldmenl d'Alexandrie ?ur la première latin par ses amis, les cinquante-cinq homé-
Épitre de ?aint Pierre, sur les deux premiè- liesde saint Chrysostôme sur e livre qu'il i

res de saint Jean, et sur celle de saint Jac- avait trouvées en grec. Il parait qu'il y avait
ques. Il
y joignit un manuscrit qui contenait sur l'Apocalypse un commentaire de saint
ce que saint Augustin a écrit sur la même Jérôme, et une explication couile des endroits
Épitre de sainl Jacques, et ce qu'il a dit sur les jilus dilliciles par Victoiin. Il faut re-

la première de saint Jean dans dix sermons, marquer que Vigile, évèque africain, avait
où il s'étend particulièrement sur la charité. écrit sur le règne de mille ans dont il est
Ayant trouvé presqu'en même temps un parlé dans l'.^pocalypse et que Tichonius, ,

exemplaire du commentaire de Didyme sur donaliste, n'avait pas mal réussi à expliquer
les sept Épitres canoniques, il le fit encore tra- certains endroits de ce même livre. Mais parce
duire en laliu par Épiphane. Il donna encore qu'ily avait d'autres endroits de son com-
à ses frères des noies fort courtes sur toutes mentaire infectés de ses erreurs, Cassiodorc
les Épitres de saiul Paul. On attribuait ces mit des marques dans cet ouvrage pour dis-
notes à saint Jérùme. Il fit venir d'.Vfrique tinguer ce qu'il y avait de bon d'avec ce qui
un autre commentaire sur les mêmes Epi- en était mauvais. Il dit aussi que saint Au-
tres que Pierre, abbé dans la province de gustin a expliqué plusieurs endroits de l'A-
Tripoli, avait compose des seuls passages de pocalypse dans ses li\Tes de la Cité de Dieu,
saint Augustin, sans y rien ajouter du sien, et que depuis peu, Primase, évèque en Afri-
mais avec une si giande liaison des passa- que l'avait expliquée eu cinq livres avec
,

ges les uns avec les autres, qu'il semblait exactitude, et qu'il y en avait joint un sixiè-
que ce fut un ouvrage suivi de ce Père. 11 se me où il faisait voir ce qui rendait un hom-
donna beaucoup de mouvements pour trou- me hérétique.
ver de petites remarques, qu'on disait avoir 11. Après avoir désigné tons les commen- j„,J/„Và"iî'.
été faites par saint Ambroise sur les mêmes laleurs que l'on pouvait lire sur chaque li-
'^J^,'.,".''
Épitres-; mais il parait qu'il ne put les dé- vre de l'Écriture sainte , Cassiodore recueil-
couvrir. Comme toutes ses explications n'é- liten un corps les écrivains dont les ouvra-
taient pas fort étendues , il en fit ramasser ges étaient intitulés Introduction à l'Ecri-
:

de plus amples; savoir, celles qu'Origène ture parce qu'ils y donnaient, pour ainsi
,

avait faites sur l'Epître aux Romains en vingt dire la clef qui en ouvre les mystères et
, ,

livres, que Rufin réduisit à dix en les tra- qu'ils eu découvraient les ditlercnls sens.
duisant ; celles de saint Augustin sur la mê- Ceux qu'il nomme sont Tichonius, donatiste :

me Épitre, mais qui ne sont point achevées; saint Augustin, dans ses livres de ta Doctrine
ses questions à Simplicien sur celte Épitre ;
chrétienne; Adrien, Eucher, et Junilius. évè-
ses commentaires sur celle aux Galates, et que d'Afrique. Il veut que si ces introduc-
ceux de sainl Jérôme sur la même Épitre, teurs ont passé quelque chose l'on ait ,

et sur celle à Philémon. Il fit chercher par- recours aux commentateurs qu'on lise avec ;

tout les commentaires qu'on disait que saint soin les maîtres catholiques qui ont décidé
Jérôme avait faits sur les autres Épitres de les questions dilliciles; que l'on aille cher-
saint Paul, sans pouvoir les déterrer. Il en cher, jusques dans les lettres des Pères, l'ex-
trouva un de sainl Chrysostôme sur ces mê- plication qu'ils y ont donnée de certains en-
mes Épitres, qu'il mit dans une même ar- droits ; et qu'enfin, l'on entre souvent en
moire avec les autres manuscrits grecs, afin conférence sur les dilhcultés de l'Écriture
d'y avoir recours lorsque les explications des avec des vieillards éclairés et consommés
latins ne seraient pas assez étendues. Il con- dans l'étude. 11 convient qu'il avait appris
seille <» ses frères de ne pas négliger les ou- par cette voie beaucoup de choses et en
vrages des modernes, lorsqu'ils ne trouve- peu de temps; ce qu'il ne croyait pas fai-

ront pas de quoi se satisfaire dans ceux des sable avant de l'avoir expérimenté.
anciens. Telles sont les remarques de Cas- 12. Il parle ensuite des (pialre premiers i,,"'"!""»!'
p'*-"5-
siodore sur le liuitième volume. conciles généraux qui ont allermi les fon-
Kratlèm» 10. Le neuvième et dernier volume de la déments de notre foi qui en ont établi les
,

bc. Âiiô.de Bible, selon le partape qu'il en avait fait, vérités et nous ont appris à nous garantir
,

iAiot«i(«e, contenait les Actes des apôtres et l'.Apoca- de la mauvaise doctrine des hérétiques. Ces
lypse de saint Jean. Pour avoir un commen- conciles sont ceux de Nicée de Constanli- ,

taire sur les Actes, il avait fait traduire en nople, d'Éphèsc et de Chalccdoinc. Il ne dit
,

[vi* sikcLE.] CIT.VPITRR XIX. — CASSIODORE, CIIANCELIEn 2;tl

rien du second de Constanfinoplo, appch' lo rait on chnnjfor la significalion qui a sou-


cinqui(''me g(!ni''ral parce (lu'appaieinincnt
,
vciil rappurt à qiicNiuo clidsc de raystdriciix.
il écrivait son livre de l'Institution avant 11 encore de changer les noms
leur iléleiul
l'an 353 , auquel ce concile fut tenu. Il mar- par d'aulres synonymes, ni même les cxprcs-
quc qu'il avait t'ait traduire en laliu le volu- sions qui sont contre les rendes du la gram-
'

me circulaire du concile de Chalcédoine ;


maire; la raison (pi'il en donne est que ces
c'est-à-dire comme il l'explique , le volume termes nous font mieux entendre le sens de
qui renfermait les lettres de tout le monde, l'Écriture qui est assez belle d'elle-même,
,

ou plutôt celles que les évêqucs avaient (-cri- sans emprunter de l'éclat aux arts libéraux ;

tes pour la contirmation du concile de Chai- et quene doit pas regarder comme cor-
l'on

cédoine, et que l'empereur Léon avait fait roaipus et impropres, des termes que l'on
recueillir en un corps. sait par le témoignage de plusieurs manus-

13. Cassiodore donne après cela, le canon crits être ceux que Dieu a inspirés aux
,

des livres de l'Écriture en remarquant que ,


écrivains sacrés. 11 rapporte plusieurs expres-
saint Jérôme avait traduit sur l'hébreu tous sions familières aux écrivains sacrés, et mar-
les livres de l'Ancien Testament, en les divi- que comment on doit les entendre. Laver «

sant par versets afin qu'il fut plus aisé de


,
ses mains, dit-d, c'est n'avoir point de part
faire en lisant sa version , les pauses et les à quelque chose. Le terme une fois, signifie ,

ponctuations nécessaires pour en compren- résolution constante et immuable: celui de


dre le sens. Il rapporte deux autres canons jurer, quand il est attribué k Dieu, veut dire
de l'Écriture ; l'un de saint Augustin , et seulement confirmer. Le terme de pieds se ,

l'autre selon l'ancienne version ; et un troi- prend [lour l'action. » Il fait remarquer que
sième , suivant la traduction des Septante. lorsque des noms se trouvent employés dans
Saint Augustin voulait que, lorsqu'il y avait un cas ou dans un genre contraire aux rè-
faute dans les traductions latines, on recou- gles de la grammaire, il faut les conserver
rût au texte grec cela engagea Cassiodore
;
tels qu'ils se trouvent dans le plus grand

à procurer à ses frères un exemplaire grec nombre des manuscrits que si toutefois il ;

de l'Écriture afin que rien ne leur man-


, se trouvait quelques expressions absurdes ,

quât pour en acquérir le vrai sens. il faudrait les corriger ou sur la version
14. Après avoir donné indistinctement à grecque des Septante revue par saint Jé- ,

tous ses frères des règles pour lire utilement rôme ou sur les traductions latines que ce
,

les divines Écritures, il s'adresse aux plus Père a faites sur l'hébreu. Quant à l'ortho-
habiles d'entre eux ,
qu'il avait chargés de graphe il renvoie ses frères au traité qu'il
,

revoir les exemplaires des livres sacrés, et avait fait sur cette matière ce qui pourrait ;

d'en corriger les fautes. Il veut que pour donner lieu de croire qu'il avait fait ce trai-
s'acquitter dignement d'un travail si impor- té avant le livre de V Institution: mais nous
tant, conservent les idiolismesou les pro-
ils avons déj-l remarqué que Cassiodiore, après
priétés de la langue hébraïque ou grecque avoir composé le livre de l'Orthographe , re-
et lesmanières de parler qui sont consacrées vit tous ses ouvrages. Il put donc ajouter à
dans l'Écriture, et ne sont point dans l'u- son Institution aux divines Ecritures, ce qu'il
sage commun. II les renvoie sur cela aux dit ici du livre de V Orthographe, où il fait
livres que saint Augustin a faits sur les cinq mention expresse de celui de l'Institution.
livres de Moïse, celui de Josué, et celui des Ilexhorte ses frères à poursuivre le travail
Juges, dans lesquels il traite des différentes qu'il avaitcommencé sur l'Ecriture et à ,

façons de parler qui sont propres aux saintes amasser autant qu'ils le pourraient, des trai-
Écritures. Il leur défend aussi d'altérer les tés sur ce sujet. 11 dit à ceux qu'il avait char-

noms hébreux, soit d'hommes, soit de lieux, gés de corriger et revoir les manuscrits, d'i-

comme sont ceux de Setli, d'Llnoch, de Noé, miter la main de l'écrivain , afin que rien
de Sion, d'Oreb, d'Hermon et autres sem- n'en gâtât la beauté, et de considérer atten-
blables parce qu'en les déclinant on pour-
, tivement" que ce qu'il leur confiait, était l'u-

' îiec nia verbn tangenda sunt, qtiœ interdum Institut., cap. xui. Slaneat ubique incorrupta lo-
contra artem quidein humanam posila r^periun- culio quœ Deo placuisse cognoscitnr, ita ut fui-
tur ; sed auctoritate muUontm codicum vindi- gore suo niteat, non humano desidcrio carpenda
canltir ; corrumpi siquidem nequeunt, quœ ins- subjaceal. ibid.
pirante Domino dicta noscuntur. Cassiodor. De ' ConsidenUe qualis vobis causa commissa sit;
232 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
tilité commune des clm'tiens , le trésor de marf\T, afin que ses actions ne fussent pas
l'Église et la lumière des unies, au-dessous de ses paroles. Il joint à ces il-
cbipiue
iri.p»:. El». ,
15. n fait admirer la dnuceur des divines lustres écrivains le prêtre Eiigyppius, abbé
E«».eii« Ecritures la suite des événements qu'elles du monastère de Saint-Séverin, proche de
,

nili'iTpèr'-''"
représentent, l'utilité de ses connaissances, Naples, qui, après s'être rempli de la lectu-
la solidité de sa doctrine , la beauté de ses re de l'Écriture sainte et des ouvrages de
préceptes et de ses ordonnances. Ensuite il saint Augustin, en composa comme un corps
propose à SCS frères l.i lecture des saints de théologie, divisé en trois cent trente-
Pères qui ont travaillé à la défense de la foi huit chapitres, réduisant en un seul volume
contre les hérétiques, ou à maintenir la dis- ce que l'on aurait à peine trouvé dans une
cipline de l'Église. Les ouvrages qu'il nom- grande bibliothèque. Il dédia cet ouvrage h
me sont les treize livres de saint Hilaire sur la vierge Proba, la même à qui saint Ful-
la Trinité, les traités de saint Amltroise à gence adressa deux traités de la Virginité.
l'empereur Gratien; les quinze livres de Il
y joint encore Denys le Petit, dont il loue
saint Augustin sur la 7'rinilc; le livre de la la vertu et le savoir.
Foi composé par l'évèque Nicctius les li-
, ; iG. Afin que ses religieux fussent à cou- Ch4p. :

•I ixiv,
vi-es des Offices de saint Ambroise ceux que ; vert de toute surprise de la part des héréti-
pour fe pM
saiut Augustin a composés sous les titres de ques, il leur ordonne de lire encore les Actes nmnir c<.ii||
la ktrtllqiii
la Vraie religion de la Doctrine chrétienne
, ,
des conciles d'ÉphèseetdeChalcédoineavec
du Combat chrétien, du Miroir, de la Cité de les lettres que les évêques avaient écrites
Dieu et de divers autres marqués dans le
, pour marquer qu'ils en adoptaient la doc-
Catalogue de Possidius auquel Cassiodore , trine et les décrets ; tous ces monuments
ci..p. ini, renvoie. Il leur conseille aussi la lecture de étaient entre lem-s mains. Il leur ordonne de
'""' ' '
diverses histoires du rapport à la
,
qui ont rejeter tout ce qui a été fait par des auteurs
religion comme sont les livres des An-
, suspects, qui s'éloignent des règles commu-
tiquités juives, par Joscphe, que l'on peut re- nes et de des Pères, regardant
la doctrine
garder comme un second Tite-Live ceux ; comme l'origine de l'erreur de tout aimer
qu'il a écrits sur la captivité des Juifs; VHis- dans un auteur suspect, et de vouloir défen-
toire Ecclésiastique d'Eusèbc avec la conti- dre indistinctement tout ce que l'on y trouve,
nuation de Rulfin celles de Socrate de ; , car il est écrit Eprouvez tout, et approuvez
:

Sozomène, de Théodoret, d'Orose et de Mar- ce qui est bon.

cellin; les Chroniques d'Eusèbe, de saint Jé- 17. La cosmographie ou la géographie Cbip.
1>« la tiifr^rf

rôme et de saint Prosper, avec civile de Mar- pouvant être très-utile à ceux qui étudient fr.ph .
l-

cellin ; les Catalogues des hommes illustres l'Écriture sainte, parce qu'elle leur donne la
de saint Jérôme et de Gennade de Marseille. faculté de connaître la situation des lieux
Cassiodore avait mis tous ces livres dans sa dont il est parlé dans les livres sacrés, Cas-
bibliothèque, avecles traductions latines de siodore recommande à ses frères de lire les

ceux qui avaient été écrits originairement en meilleurs géographes dont il leur avait laissé
grec. Il reconnaît que ce fut par ses soins les écrits. Il nomme l'orateur Julius, le même
que l'on traduisit les livres des Antiquités apparemment du fils de
qui fut précepteur
ck'p^
*"v''
y"'i'<?* de Josèphe. Il fait l'éloge de la plupart l'empereur Maximin. L'ouvrage que Cassio-
ixii.i.c.i.i. (jgg auteurs dont il conseillait la lecture, en- dore avait de lui sur la cosmographie était
tre autres de saint Hilaire, de saiut Cyprien, si e.xact qu'il ne laissait rien à désirer sur
de saint Ambroise, de saint Jérôme, do saint cette matière. Les mers, les îles, les monta-
Augustin. Il dit de saint Cyprien qu'après '
gnes les plus fameuses, les provinces, les
avoir soutenu dans la foi par ses prédica- villes, les fleuves, les peuples, fout cela y
tions ceux qui chancelaient, relevé ceux qui était détaillé. Il nomme encore la description
étaient tombés, et conduit jusqu'au martyre que le comte Marcclliu avait faite de Cons-
les confesseurs , il était devenu lui-même tanlinople et de Jérusalem ; la Fable de De-

ulilitas chrislianorum, thésaurus Ecclesiœ, iu- fessorcs ad martyrium usque perdu.ril


f Et ne

men animarum. Cassiod., De Institut., cap. xv, minor prœdicationibus suis, ipse quoque
esset
pa«. ri)9. marlyrii corona decorntus est. Iliid., cap. x\x,
' illc dubiiantes non pertulit lahi, lap-
Quantos pnfr. 521.

soi vern Hrmissimn. prœdicalione solidavit, con-


[VI' siici.E.J CHAPITRE XIX. CASSIODORE, CHANCRLIEU. 2,33

nys, et la Géographie de Ploloradc « qui, rlit- et mémo des poissons. Cassiodore avait mis
il. parle si claiiemniit do tous les lieux du tous leurs ouvrages dans sa bibliolhèi|uo. Il

monde, qu'il scuiLlo en la lisant qu'on n'c>t trouvait cet avantage dans ces sortes d'exer-
iHrangcr nulle part. Ainsi demeurant toujours cices manuels, que l'on en pouvait tirer de
dans un uiénie lieu, ce qui est convenal)lo quoi noiu-iir les étrangers, et soulager les

aux moines, continue Cassiodore, vous i)ar- malades.


Chap. Xftx.
courez en esprit ce que tant de différents 20. La situationdu monastère de Viviers DefetIplIon'iQ
mûifn 16 » d-,
auteurs ont recueilli des travaux de l(Mirs les invitait à jiréparer beaucoup do choses V vic.s, I»;,*.

longs voyages. » pour les étrangeis et ponr les pauvres. Il y


18. Ce ne fut pas assez pour lui d'amasser avait des jardins arrosés do pliisieur.s ca-
ùtt ln«^rlii-

un grand nombre de livres, ni d'en marquer naux, et le voisinage du petit fleuve Pellèno
U3. le contenu à ses disciples; il voulut leur fournissait du poisson en abondance. Il était

épaigner la peine d'ouvrir plusieurs volu- aussi très-facile d'en tirer do la mer qui
mes, lorsqu'ils n'auraient besoin que d'un. étaitau bas du monastère, et de le conserver
C'est pourquoi il écrivit lui-même, mais en dans les réservoirs que Cassiodore avait fait
abrégé et on lettres rouges, au commeuce- creuser dans la concavité de la montagne. Il
ment de chaque volume, ce qu'il contenait. avaitaussi failconstruire des bains pourl'usa-
A la tête du volume où l'Octatcnqne était ge des infirmes, et avait fait conduire à cet
renfermé, il mit les trois premières lettres des fontaines d'une eau excellente à boire
etl'et

de ce nom Oct., et fit la m(^me chose l'égard .'i et salutaire à ceux qui usaient de ces bains.
des huit autres volumes de sa Bible. Il trouva le moyeu de tirer assez d'eau du
Chip. xxriii. 19. Sachant que la plupart des saints lleuve pour faire tourner les moulins de
D< l'élud( (Irs
laltraï humai- Pères avaient étudié humaines, et
les lettres Viviers sans les exposej- aux inondations.
Ma, ]»(. &i«.
que plusieurs d'enir'eux, comme saint Cy- Eu sorte que les religieux, ne manquant
prien, Lactance, Viclorin, Optât, saint Hi- d'aucune commodité dans l'enceinte de leur
laire, saint Arabroise, saint Augustin, saint maison, ne devaient point être tentés d'en
Jérôme, en avaient retiré de grands avan- sortir. Il passe de la description qu'il en fait
tages que Moïse même était très-instruit
;
aux écrits de Cassien, dont il leur conseille
dans toutes les sciences des Égyptiens, il la lecture pour connaître cpiels sont les vices
conseille l'étude des lettres profanes ii ses que l'on doit combatiro dès l'entrée en reli-
religieux, pourvu qu'ils le fassent avec mo- gion. « Cet auteur, dit-il, dépeint si natu-

dération, et dans la vue d'en tirer du secours rellement les mouvements déréglés de l'âme,
pour l'intelligence des livres saints. Il ajoute qu'il semble faire voir à l'œil, et même tou-
que si un tempérament froid qui glace le cher sensiblement aux hommes leurs pro-
sang dans les veines, comme parle Virgile, pres défauts et leurs excès, et les forcer pour
et qui assiège le cœur, empêche quelques ainsi dire à s'en donner de garde, au lieu
frères de devenir parfaitement savants dans qu'auparavant les ténèbres qui les environ-
les lettres sacrées ou dans les sciences naient les empêchaient de s'en apercevoir. )>

humaines, il faut qu'après y avoir fait un Il leur dit que si, après s'être suffisamment

progrès médiocre qui leur serve de fonde- instruits et formés dans les exercices de la
ment, ils prennent, selon que le dit le même vie cénobitique, ils aspirent à quelque chose
poète, leurs plaisirs dans les champs et dans de plus parfait, ils pourront aller mener la
les ruisseaux qui arrosent les plaines. Ce vie heureuse des anachorètes dans l'agréa-
n'est pas en effet une occupation contraire à ble solitude du Mont-Castel, qui ressemblait
l'état des moines de cultiver les jardins, de fort à la demeure des ermites, quoiqu'enfer-
labourer la terre, de se réjouir de l'abon- mée de murailles.
Cliap. XXX,
Psal. cxxrit, dance des fruits, puisqu'il est écrit Vous : 21. Entre tous les travaux des mains, il Des copiste*
2. antiquai-
ou
vivrez des travaux de vos mains^ et en cela donne la préférence h celui de transcrire des res, pag. 32..

vous serez bienheureux, et vous vous en trouve- livres, pourvu qu'on les transcrive lisible-
rez bien. Il indique à ces sortes de religieux ment et avec exactitude. La raison qu'il
les auteurs qui ont écrit touchant la maison donne de cette préférence, est que les moi-
rustique, et l'agriculture, savoir Gargilius, nes, en lisant et relisant si souvent les saintes
Martial , Columelle , Émilien. Ils avaient Écritures, ce qui est nécessaire pour les
traité de la manière de cultiver la terre, transcrire, s'en remplissaient l'esprit et s'en
d'élever des abeilles, de nourrir des pigeons instruisaient eux-mêmes, en même temps
,

234 HISTOIRE GÉNF:RAT,E DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.


qu'ils répandaient partout la doctrine sacrée d'huile; cl de diverses horloges dont les unes
comme une semonce céleste, qui fructifie marquaient les heures au soleil, les autres
dans âmes. U donne à cet art tous les
les par le moyen de l'eau qui imitait le cours
éloges qu'on peut lui donner, en disant que du soleil, et servait pour la nuit aussi bien
l'antiquaire prêche aux hommes delà main que potir le jour.
Cbnp. IXXI.
seule, qu'il leuraimonce le salut en silence, 22. Il dit à ceux qui étaient chargés du Dd «olD detl
qu'il fait la guerre au démon par la plume soin des malades, qu'ils doivent les soulager "^'_"'"' '**'

et par l'encre; que Satan reçoit autant de avec beaucoup de soin, dans la persuasion
blessures qu'un habile copiste écrit de paroles qu'ils enrecevront la récompensede celuiqui
duSeigneur. «Sanssortirdesa place, dit-il, il donne les biens éternels pour les biens tem-
court diverses provinces par le moyen de ses porels; que pour mieux remplir leurs olfi-
ouvragesquise répandenten divers endroits; ces, il est h propos qu'ils se rendent habiles
son travail est lu dans les lieux saints; les dans la médecine et dans la pharmacie en ,

peuples en entendent la lecture, et appren- étudiant la nature des simples et la manière


nent par là à se convertir et à servir Dieu de les mélanger. 11 veut néanmoins qu'ils ne
avec une conscience pure. Je n'ose presque mettent pas leur confiance dans la vertu des
dire qu'on ne peut le récompenser dignement herbes ni dans les conseils humains parce ;

de tant de biens qu'il procure par son art, qu'encore que la médecine soit établie de
pourvu toutefois (ju'il agisse avec une grande Dieu, c'est lui qui donne la vie. Il leur con-
pureté d'intention, et non par ambition ou seille de lire Vllerbier de Dioscoride oii ,

par cupidité. L'homme, par le moyen de cet toutes les herbes des champs sont peintes
art multiplie la divine parole; on écrit avec avec une propreté admirable et ensuite les ;

trois doigts des oracles prononcés par toute ouvrages d'Hypocrate de Galien et d'Au- ,

la Sainte-Trinité. On se sert de cannes et de rélius Cœlius, qu'il leur avait laissés dans sa
roseaux pour écrire des paroles célestes, bibliothèque.
afin d'employer contre le diable, ce que lui- 23. Lorsque Cassiodore son traitéécrivit ^^'V '^"''
même fit employer par ses ministres pour de V Institution Chalcédonius Géronce qu'il et
ni.i^j,*;,
outrager Jésus-Christ dans son divin chef, à qualitic hommes très-saints, étaient abbés de ?'."•"". :«:^

sa passion. Pour ne rien laisser à dire, les ses deux monastères, c'est-à-dire de Viviers
écrivains imitent, en
quelque sorte, Dieu et de Castel il paraît même qu'ils en furent
:

même, qui a loi de son propre


écrit sa les premiers abbés. Mais, quoique ce fussent
doigt.» Mais, afin que les religieux, occupés deux monastères à cause desditl'érenls exer-
à transcrire les hvrcs, s'acquittassent avec cices qu'on pratiquait dans l'un et dans l'au-
exactitude de ce travail, et qu'ils pussent tre, et à cause des deux abbés qui les gou-
même corriger les fautes d'orthographe qui vei'uaient, on jouvait en quelque sorle les
se seraient glissées dans les originaux, il les regarder comme un seul monastère, parce
renvoie à plusieurs anciens auteurs qui qu'ils étaient renfermés dans la même clô-
avaientécrit surrortliographc, etdont il avait ture. Dans l'exhorlalion qu'il fait à ces deux
ramassé ouvrages dans sa bibliothèque.
les abbés, il les avertit de disposer toutes choses
De ce nombreétait Velif'-ïusLongus, Gurcius avec tant de prudence qu'ils puissent, avecla
Valérianus, Pappirianus, Adamantins, .Mar- grâce de Dieu, conduire leurs religieux la fi

tirius, Eutycliès, Phocas, Diomède et Tliéoc- possession de la vie éternelle leur recom- ; il

tistus. Il donna encore h ses religieux d'ha- mande d'exercer surtoute chose l'hospilalité;
biles ouvrieis pour leur apprendre à lelier, ù de soulager les pauvres dans tous leurs be-
couvrir les livres, et à en enrichir la couver- soins, d'instruire dans les bonnesmœurs les
ture, afin que le dehors répondît h la beauté gensde la campagne, qui se présenteraient k
inestimable des sacrés ('crits qui étaient ren- eux poin- apiirendre à connaitn^ la vérité et le
fermés au dedans. Il se ilonna lui-même la chemin du salut ; d'éviter eux-mêmes l'oi-
peine de dessiner les dill'orentcs manières siveté ; de s'appliquer à la lecture des divi-
des couvertures de livres, pour que chacun nes Ecritures et des commentaires des plus
pùl clinisir celle rpii lui plairait davantage. célèbres iloclcurs de l'IOglise ; de lire aussi
Il pourvut aussi son monastère de lampes les Viesdes Pères et les Actes dos martyrs
perpétuelles, qui conservaient toujours leur pour s'exciter, à leur exemple, k la pratique
lumière, et se nouriissaient d'elles-mêmes de la vertu, sacliani que la couronne s'ac-
sans qu'on y touchai, ou qu'on les ronq)llt corde non-seulement k ceux qui répandent
[vi« SIÈCLE.] CHAPITRE XIX. — CASSIODORE, CHANGELIER. 235
leur sang pour la foi, ou qui surmonteut les pense pour amasser dos livres, qui se donna
tentations de la chair en vivant dans le cé- le plus de soin pour n'avoir dans sa biblio-
libal; mais aussi ;\ tous ceux qui, avec le se- thèque que des exemplaires comnls, ([ui
cours de Dieu, nioiliiiout leurs passions et eut le plus de zulo jjour faire copier les meil-
croient tout ce qu'il faut croire. <i Que celui leurs livres, et le premier qui en ait fait une
qui pèche moins, dit Cassiodore , en rende occupalion réglée des moines. Cette atten-
grâces ii Dieu, qui par sa miséricorde l'a tion, qui a produit de si grands avantages à
préservii de chutes ])lus fréquentes; mais l'I'-glise par la mul(i[)lication des manuscrits

que celui qui est lonibé plus souvent prie ,


que les moines des autre monastères trans-
Dieu continuellement, sans se défendre par crivirent depuis, à l'imitation de ceux de Vi-
de mauvaises excuses. Rien de plus insensé viers, était surtout nécessaire dans le temps
que de vouloir en imposer ;\ celui qu'on ue de Cassiodore, où la plupart des ouvrages
peut tromper.» des anciens auraient péri par les guerres
24. Cassiodorc finit son livre de l'Institu- dont l'Ilalie, la Sicile, l'Afrique et plusieurs
tion par une prière qu'il semble n'avoir dic- autres provinces furent affligées, s'il n'avait
tée que pour en donner une formule tous ;\ pris la peine de les faire transcrire.
ceux qui s'appliquent .à l'élude et à la lec-
ture : « Donnez , i\ ceux qui
Seigneur, §VI.
lisent et qui étudient, l'avancement et le
progrès. Accordez <i ceux qui cherchent l'in- Traité des Sept arts libéraux, dç l'Oraison, de
telligence de votre loi, le pardon et la rémis- l'Orthographe et des Tropes ou des figures.
sion de leurs péchés, afin que, désirant avec
tant d'ardeur d'arriver à la lumière et à la \. Le traité rfc's Arts libéraux suivit immé- Trail<i de I*
Grammaire ,

claire connaissance de vos saintes Écritures, diatement le livre de l' Institution, quoiqu'il pag. 0^8, cap.

nous n'en soyons pas empêchés par les ténè- eût dû, ce semble, le précéder, l'ordre vou-
bres et les nuages de nos fautes. Attirez-nous lant qu'on soit instruit dans les lettres hu-
à vous par la vertu de votre toute-puissance. maines avant de s'appliquer à l'étude de
Ne permettez pas que nous nous égarions l'Écriture sainte. Mais Cassiodore crut devoir
par notre propre volonté, après nous avoir donner la première place au livre de l'Institu-
rachetés de votre sang précieux; ni que tion, h cause de l'importance de la matière ,

votre image qui est gravée en nous soit dé- qui est beaucoup au-dessus de celle qui fait
figurée , et perde la beauté de ses traits, l'objet des Arts libéraux. Il en met sept dans
qu'elle ne peut conserver si vous ne la dé- son traité dont chacun fait un chapitre par-
fendez des insultes de l'ennemi. Qu'il lui suf- ticulier, savoir la grammaire, la rhétorique,
lisede nous avoir blessés mortellement dans la dialectique, l'arithmétique, la musique, la
la personne d'Adam, et qu'il cesse d'em- géométrie et l'astronomie. Voici ce qu'il dit
ployer de nouveaux moyens pour nous sur grammaire « Le nom de grammaire
la :

surprendre et nous tromper.» Puis, s'adres- vient d'un mot grec qui signifie lettre. Cad-
sant à ses religieux : « Hâtez-vous, leur dit- mus fut l'inventeur des lettres mais il n'en ,

il,de faire de grands progrès dans les scien- inventa que seize dont il fit part aux plus stu-
ces des saintes Ecritures. Animez-vous y en dieux d'entre les Grecs, qui, par la vivacité de
considérant que c'est pour vous remplir de leur esprit, inventèrent les autres.» Cassiodore
doctrine, que j'ai amassé un si grand nom- nomme, entre les auteurs qui ont écrit le
bre de livres et de livres si bien conditionnés mieux sur grammaire, Hélénus et Pris-
la
et si bien choisis. » cien, auteurs grecs, Pah'mon, Phocas, Pro-
Le témoignage que Cassiodore se rend h bus,Censorinet Donat, grammairiens latins.
cet égard ne pouvait être suspect à des per- Il s'arrête à ce dernier, comme au plus mé-

sonnes qui avaient sous leurs yeux la riche thodique et plus propie pour aider les com-
bibliothèque qu'il leur avait formée à grands meuçanls. 11 dit ipi'il avait lui-même fait deux
frais, et qui étaient témoins du soin qu'il livres de Commentaires sur Donat, et que
avait pris de n'y mettre que des livres utiles saint Augustin avait aussi écrit sur la même
et d'en orner tous les dehors et les couver- matière. Ce qui nous reste de Cassiodore
tures. Il est de tous les anciens écrivains ec- est imparfait; et nous n'avons plus le traité
clésiastiques celui qui s'appliqua le plus à de saint Augustin. Cassiodore parle aussi
faire tleurir les études, qui tit le plus de dé- d'un Recueil de figures au nombre de quatre-
236 HISTOIRE GÉNFTRAI.E DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
vinp:t-dix-huit, fait par un nommé Sacerdos : toutefois l'arithmétique pour la première,
ce ftecueil u'cst pas venu jusqu'à nous. parce que les autres en ont besoin pour faire
De larUto- 2. Il dit, en parlant de la rclhorique, que leurs opérations. Il rapporte, d'après Josèphe.
rlqoe . pig.
S31, cjp. II. trois choses font l'orateur
génie naturel, ; le qu'Abraham avait le premier donné aux
l'art et l'exercice; et que pour remplir la signi- Égyptiens connaissance de l'arithmétique
la

fication de son nom, l'orateurdoil enseigner, et de l'astronomie. A quoi il ajoute que les
toucher et contenter son auditeur. Il expli- saints Pères ont parlé avec éloge de ces
que toutes les parties de la rhétorique, et deux arts, et qu'ils en ont persuadé l'étude
propose à ceux qui veulent réussir en cet à plusieurs, parce que ce sont des moyens
art la lecture des deux livres de Cicéron, de nous faire passer de la connaissance des
commentés par Marias Yictorinns les ; choses corporelles à la contemplation des
douze livres des Institutions i\e Quintilien, et spirituelles. Il explique avec assez d'étendue
les trois volumes de Fortunalien, où cet au- ce qui rega)de l'arithmétique, et renvoie
teur s'expliquait avec beaucoup de netteté, aux différents traités qu'en ont fait chez lès
et ne disait que ce qui était précisément né- Grecs Nicomaque, et chez les Latins Apulée
cessaire. Cassiodore définit la rhétorique : de Madaure, et Boëce qu'il appelle homme
L'art de bien dii-e. magnifique. Selon lui, Pythagore estimait
Dg la ilia- 3. Il donne trois définitions de la philoso- tant l'arithmétique, qu'il avait coutume de
leeliqae, paç.
B36, cap. III. phie ; la première en disant qu'elle est la dire que Dieu avait créé toutes choses avec
science des choses divines et humaines, autant nombre et avec mesure et il croit que ce ;

qu'il est possible à l'homme; la seconde, en philosophe' avait emprunté cette pensée du
l'appelant ['art des arts et la discipline des livre de la Sagesse où nous lisons Vous ré- :

disciplines; la troisième,en la mettant dans glez toutes choses avec mesure, avec nombre et
la ressemblance de l'homme avec Dieu suivant avec poids.
que cela est possible à l'homme. Il l'appi'lle ?i. C'est nu même Pythagore qu'il attribue De
Un-
lu
ta|..
m

encore la méditation de la mort. « Cette phi- l'invention de la musique, sur le témoignage lag. Svb.

losophie, dit-il, convient aux chrétiens qui, d'un nommé Gaudentius, dont il avait fait
ayant foulé aux pieds les vanités du siècle, traduire les ouvrages par son ami Mucien.
doivent imiter ici bas la vie des bienheureux Ce philosophe en conçut l'idée sur le bruit
dans le ciel, afin de pouvoir dire avec l'A- des marteaux, et par le son que rendent des
l'h:!. m, 50. pôtre . Notre conversation et notre vie est dans cordes tendues lorsqu'on les touche. Cas-
le ciel. » Il remarque que les premiers philo- siodore cite divers auteurs qui ont tjaité de
sophes n'avaient point donné des règles la musique, entr'autres Censorin, Alipius,
pour les syllogismes ou autres raisonne- Euclide, Ptolomée, Albidus et saint Au-
ments philosophiques qu'on ;
les doit à Aris- gustin. Varron qui a aussi parlé de la mu-
tole, qu'il plus grand
regarde comme le sique lui attribue des eflets merveilleux, en
maître de la dialectique. Il parle des neuf particulier d'apaiser les mouvements des
livres de Varron sur la rhétorique et la dia- esprits violents et emportés ; ce qui revient
lectique, de l'inlroduction de Porphyre, des à la remanjue que fait Cassiodore que David
sept livres de Boëce sur celui d'Arislote qui délivra Saiil de l'agitation du malin esprit,
a pour titre : De l'Interprétation; d'un traité par l'harmonie de sa harpe. Il rapporte
d'Apulée dcMadaurcqui était aussi intitulé : qu'un médecin fort habile au jugement des
De l'Interprétation ; d'un livre de Marins Vic- anciens, nommé Asclépiade. remit un fré-
torin sur les syllogismes hypothétiques, et nétique en sou bon sens par le moyen d'une
d'un traité deTullius MarccUus sur le même symphonie. Mais il veut que l'on rejette
sujet. Il nous apprend qu'il avait lui-même comme fabuleux tout ce que l'on dit de la

composé d'amples commentaires sur le livre lyre d'Orphée et du chant des syrènes.
de l'Interprétation d'Arislote, et un livre de G. Il d('finit la géométrie: La dimension ou
la Division. mesure de la terre.11 s'étend peu sur cette l'a.L.
rap. '
"ini,
De l'arllh. 4. regarde l'arithmétique, la musique,
Il partie dont il se contente de donner les prin-
méllqii^, ti«ir*
BOX, ca|., I .
la géométrie et l'astronomie comme autant cipes, renvoyant ceux qui voudraient s'en
de parties des mathématiques, en mettant instruire plus à fond h ce qu'en ont écrit Eu-

' Credo Irahens hoc iniliuin ah illa sfnlenlin mcroel poiirfere disposnisse. Cassiod., De Arilh.,
jirnpitelali, qnœ dirit, omnin Dcnm mensurn.nii- cap. IV, piig, 5i3.
,

[vi' siKCLE.] CHAPITRE XIX. — CASSIOnORE, CHANCELIER. 237


clide, Apollonius et Arcliim^de. II remarqno traités de Donat, avec le Itocueil des tropcs et uu fleuret <Io
CEcntur*.
que Boi'cc avait on latin l'ouvrapfe
liacluit des figures de Saccrdos. Ce Tfeci^eiV contenait,
il'Euclitlo. 11 dit aussi pou do cliosps del'as- comme on l'a déj;'i dit, quatre-vingt-dix-huit
tronoiiiic (pi'il appcllo la loi des uslns, parce tropcs et autres figures. Cassiodore dit qu'elles
qu'ilsne savent se mouvoir, ni s'arrôter que n'étaient pas toutes de Sacerdos, et qu'il y en
selon les lois (luc le Créateur leur a pi-cscri- avait de Donat ; ce qui donne lieu de croire .aKiiod
Prjpf. In Mb.
les d'où vient que l'on regarde comme des
: qu'il avait choisi dans ces deux auteurs de De Onh. pir.
Ci7'., Mb.
et la
événements miraculeux lorsque le soleil s'ar- quoi faire un autre recueil, ou que Sacerdos Do Gniin rap.

rêta pendant trois heures par l'ordre de Jo- avait puisé lui-même dans le livre de Donat.
sud ; qu'il rétrograda de dix degrés sous le On trouve deux livres sur cette matière dans
règne d'Ezédiias, et qu'il fut obscurci pon- les éditions de Cassiodore et dans celles du
dant trois heures au temps de la Passion du viMK'rable Bèdc. Mais par un anachronisme
Sauveur. Il rejette comme contraires à la foi de deux cents ans ou environ, il est dit dans
les connaissances de l'astrologie judiciaire, toutes les éditions de Cassiodore, excepté
et cite sur cela le sentiment de saint Basile et dans celle de Nivelle à Paris, en 1589, qu'il
de saint Augustin. avait recueilli ces tropes des ('crits de Bède,
Dra Inilt
|i«rii«sd« ro* 7. On croit (jne le traité intitulé : De l'Orai- que l'on a confondu avec Sacerdos. Il est bien
, rai*uo, pttgt
Ml. son, où Cassiodore en explique les huit par- plus vraisemblable que Bède a pris quelque
ties, c'est-ù-dire le nom, les cas, les déclinii- chose du Recueil de Sacerdos qu'il trouvait
sons, le pronom, le verbe, l'adverbe, le par- avec les Œuvres de Cassiodore; de même
ticipe, la conjonction, la préposition et l'in- qu'Isidore de Séville, à qui l'on donne aussi
terjection, est un des deux commentaires un livre des Tropes.QcXm que nous avons parmi
qu'il dit'avoir faits surDonat. Ce qui le prou- les écrits de Bède se trouve dans un ancien
ve est le rapport que ce livre a avec celui de manuscrit de l'abbaye de Fleury, où il est
la Gntmmnire, et le titre ûc commetitaire qu'il attribué à Cassiodore et adressé à un diacre
porte dans un ancien manuscrit de l'abbaye nommé Galertus. Mais il est certain que le
de S.iint-Michel. On voit aussi que Cassiodore Recueil de Cassiodore s'adressait non à ce
y répond à quelques ditlicultés que l'on fai- diacre, mais aux moines de Viviers. D'ail-
sait sur certaines expressions de Donat à l'oc- leurs il est fait deux fois mention de saint
casion de la composition des noms. L'autre Grégoire le Grand dans ce traité; et on sait
commentaire de Cassiodore n'a pas encore que Cassiodore ne vivait plus lorsque ce saint
été rendu public. occupait le Saint-Siège. A quoi il faut ajou-
Traité de
8. Il âgé de quatre-vingt-treize - ans
était ter que le Recueil de Cassiodore renfermait
lorsqu'il composa son traité de l'Orthographe. quatre-vingt-dix-huit tropes, au lieu que le
Il y fut engagé par ses moines qui lui avaient livre qui se trouve dans le manuscrit de Fleu-
représenté qu'en vain ils auraient appris ce ry, et œuvres du vénérable Bède,
parmi les
que les anciens avaient fait, et ce qu'il y n'en contient pas la moitié. Pour suppléer
avait ajouté lui-même, s'il ne les instruisait au Recueil de Cassiodore que l'on croit perdu,
de la manière dont ils devaient transcrire le nouvel éditeur de ses écrits a ramassé un
leurs ouvrages. Il leur donne donc dans ce grand nombre de tropes et de figures, qu'il
traité toutes les règles de l'orthographe. Mai^, a trouvées dans son Commentaire sur les Psau-

ne voulant pas se faire honneur d'un ouvrage mes. Il par ordre alphabéti-
les a disposées
où il ne faisait qu'abréger ceux des autres, que et non content d'un exemple sur chaque
;

il nomme les auteurs de qui il avait emprun- figure, il en a mis quelquefois plusieurs pour
té, savoir: Gnéus Cornusus, \'eiléiusLongus, l'utilité du lecteur en sorte que le nombre
;

CurtiusValérianus,Pappirianus, Adamantins, des tropes qu'il a recueillies du commentaire


Martirius, Eutycliès, Césellius, Lucius Céci- de Cassiodore et de quelques autres endroits
lius, et Priscieu, le grammairien. Il marque de ses ouvrages, passe le nombre de cent
dans des chapitres séparés ce qu'il avait pris vingt. Trope est une figure par laquelle la
de chacun de ces écrivains. signification naturelle d'un mot est changée
9. 11 avait mis dans uu même volume trois
Des Iropes
eu une autre qui n'est pas propre. On lit, par Ca5siod», io

' Cujus Donati gemina Commeuta rcliquimus. anno œlatis meœ nonagesimo tertio. Domino ad-
Cussiod., De Grainm. cap. I, pag. 529. juvante peneni. Cussiod. Pricfat.in lib. De Orlho.
' Ad amanlissiinos orthographos discuUendos p.ig. 574.
238 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUl'EURS ECCLÉSIASTIOUES.
Psal. ni,['is.
n.
exemple dans le psaume troisième Levez- : bêtes est dans le sang qui leur tient lieu

vous, Si'igneiir; S'iinyz-moi, mun Dieu, Ce (i d'âme, au que l'âme de l'iiomnie, parce
lieu

n'est pas, dit Cassiodore, que l'on fasse lever qu'elle est immortelle, est entièrement dé-
Dieu comme s'ildoimaitou s'il était couché; gagée du sang; ce qui la faita])peler anaima,
mais c'est l'usage de l'Ecriture de se servir en c'est-à-dire si'pnré du sang ; d'où vient qu'a-
parlant de Dieu, dos façons de parler usitées près la mort du corps elle est aussi parfaite
parmi hommes. C'est donc dans un sens
les qu'auparavant. D'autres veulent qu'elle soit
figuré que David dit à Dieu Levez-vous, : appelée âme, parce qu'elle anime la subs-
pour dire: Venez au plus tôt à mon secours.» tance de sou corps et qu'elle le vivifie. Cas-
siodore distingue l'esprit de l'âme, parce que
§ VII. le terme d'es/ji-tt est un terme générique qui
se dit de Dieu, des anges et des puissances
Du traité de l'Atne.
de l'air, comme il se dit de l'âme. II fait ve-
En quel Cassiodore, après avoir donné au public
1.
nir le mot latin anhuiis, dont on se sert pour
tfmri» et à
qutfne occa-
les douze livres de ses Lettres, se promettait signifier l'esprit, du mot grec anemos, qui si-
».ciD u traité
• M fait.
un peu de repos, lorsque ses amis le pressè- gnifie vent, à cause de la promptitude de ses
rent de travailler à un traité de l'Ame et de pensées.
SCS facultés. Us souhaitaient qu'il leur apprît 3. Il enseigne qu'au sentiment des plus Cip. ii.D<-
d« ri-
floItloD

sur ce ce que l'on en trouvait dans les


svijet habiles on peut définirl'âme de l'homme une me ; *'le
S|ilnlaplle
esl
cl

auteurs sacrés et profanes. Ce traité leur substance particulière, spirituelle, créée de


' Immoitelle.

semblait nécessaire, parce qu'ils ne pouvaient Dieu, capable de donner la vie au corps, rai-
souQ'rir de se voir privés de la connaissance sonnable et immortelle, et qui peut se tour-
d'une substance par laquelle l'homme con- ner Teis le bien ou vers le mal : il prouve en
naît tant d'autres choses. Us ajoutaient que particulier toutes les parties de cette défini-
pour cire instruits de co qu'elle est, il ne fal- tion. Que l'âme soit créée de Dieu,
il n'y a
lait quela consulter elle-même et que pour- ;
aucune personne sage qui ou qui en
l'ignore

vu qu'on l'interrogeât, elle ne manquait pas doute, puisque tout ce qui existe est ou créa-
de nous répondre, étant toujours au milieu teur ou créature; l'âme de l'homme n'a pas
de nous. » Les sages, disaient-ils, ont fait aux la vertu de créer, au contraire elle a besoin

hommes un précepte de l'élude de soi-même; de Dieu pour exister; et elle est donc créa-
corainenl l'accomplir si nous ne connaissons ture et lient de Dieu son être. Cassiodore cite

pasmême les substances dont nous sommes sur cela deux passages de l'Écriture, l'un de
composés? Nous éludions avec. ap|)licalion l'Ecclésiaste, l'autre d'isaïe. Il montre qu'elle F.f.l. \p, T.
lui,L>ii,ie

le nature des éléments,


cours des astres, la est spirituelle, parce que tout ce qui existe

la cause des pluies, des tempêtes, des vents est ou esprit ou corps. « Il est évident, dit-
il, que tous les corps sont iJlendus ' en lon-
et des tremblements de terre, les raisons de
la piofonileur de la mer, les qualités et les gueur, en largeur et en profondeur; on ne
vertus des plantes; quelle excuse pouvons- conçoit dans l'âme aucune de ces trois di-
nous avoir pour nous dispenser de rentrer mensions elle n'est donc pas un corps, mais
:

en nous-mêmes, afin d'étudier et d'appren- un esprit. Malgré la compagnie du corps au-


dre ce qu'est notre âme? » Ce sont-là les rai- quel elle est unie, et qui semble l'appesan-
sons des amis de Cassiodgre pour l'engager tir, elle pèse avec curiosité les dill'éicntes

au traité dont nous parlons il est divisé en :


opinions des hommes, elle pense aux choses
douze chapitres. célestes, elle les examine, elle souhaite mô-
Anitlv«ft Hrt
clij-
2. La malii'ic du premier chapitre est de me de s'élever aux plus sublimes connaissan-
ce trnii -,

|,iTi. I l>ou.-
savoir pourquoi l'âme est ainsi ap|i(lie. L'au- ces de son Créateur; toutes ces choses ne
quut I Aruo c^l
lti«i a|>pet£a,
teur déclare que par le nom d'unie il n'entend peuv(!nl convenir (ju'â une substance spiri-

que celle de l'homme, parce que la vie des tuelle d'où vient qu'elle est avertie dans les
:

Anima hominisutveraciumdoclorum consen-


• * Hanc proindespirilalem suhsianliam proha-
litauctorilas, est a Ueo crcaUi, sjdriliilis, pro- bilis cluhsoluln ratio cnnfilttnr quia diim iimnia
:

pri ii/uc substanlia, stii corporis vivificalrijc, ra- ciirponitio tribus noveriinus lincis cuntineri, ton-
tioiiahilis (/uidem cl immortalis, sed in bunum gituditte, lalitudine, prufunditale, nihil laie pro-

maluinijnc converlibilis. Cassiod. Z>c Anima, cap. batur m anima reperiri. Ibid.

II, pag. i95.


[VI' SIÈCLE. CHAPITRE XIX. — CASSlOnOllE, CIIANCKMEn. 2.'J0

divines Écritures de mépriser toutes les cho- simple, est immortel : or, l'àme est simple de
ses visibles et scnsiliics do ce monde. La sa nature; elle est donc imuiorl(,'lle. » Il dit
preuve qu'elle anime et vivifie le corps, c'est encore « Toute nature laisounable qui se
:

qu'iuissitot qu'elle lui est unie, elle l'aime, meut elle-même, est immortelle l'âme rai- :

de ses maladies, elle craint


elle est af!lif,'ée sonnable se meut elle-même elle est donc ;

sa dissolution et se réjouit de sa santé, n immortelle. » Il ajoute ,


qu'étant faite à l'i-

r.assioilore explique counncniràme, p.ir son mage de Dieu, permis de penser


il n'est pas
union avec le coi'ps, sent seule la douleur et qu'elle soit sujette à la mort. Ou dira peut-
le plaisir que l'on attribue ordinairement au être, comment est-elle semblable à Dieu,
corps, et couimcut elle a des perceptions si puisqu'elle n'a pas le pouvoir de créer comme
ditl'érentcs du son, de la lumière, des cou- Dieu des êtres immortels? Cassiodore répond
leurs, des odeurs et des saveurs, quoique ce par cette compaiaison La peinture qui : (i

ne soit pas elle qui senounissedes aliments -nous ressemble, peut-elle imiter ce que nous
qui lui occasionnent ces sortes de sensations, faisons 7 n II donne pour une troisième preuve

et qu'elle ne voie et n'entende que par les de l'immort-ilité de notre âme, le plaisir que
organes du corps. La laison qu'il donne de nous trouvons à penser à l'immortalité, le dé-
ce qu'elle s'afïlige à la moindre blessure que sir que nous avons de nous faire une réputa-

reçoit un des membres de son corps, c'est ' tion qui aille au del.'i de notre vie, la crainte
qu'elle est substantiellement dans toutes ses des peines éternelles dont nous sommes fi'ap-
parties. «Si elle n'y était que virtuellement, pés, et le désir d'une immortalité bienheu-
dit-il , elle ne serait point sensible, lorsque reuse. Il convient que l'âme, quoique immor-
l'on couperait un des membres du corps : telle, ne laisse pas d'être susceptible de diver-
comme le soleil ne sent rien, lorsque l'on cou- ses passions, comme nous l'éprouvons tous
pe ses rayons, en les empêchant de pénétrer les jours ,
parce qu'elle est sujette au chan-
en quelque endroit. Elle est donc toute dans gement tandis unie au corps.
qu'elle est
toutes les parties de son corps; et on ne peut « Elle n'eu est pas même
exempte*, dit-il,
pas dire qu'elle soit plus dans l'une que dans depuis sa séparation. Elle voit, elle entend ,
l'autre. Ce qui n'empêche pas qu'elle n'agisse elle touche, non par les sensations du corps,

plus fortement en uu endroit, et plus faible- mais d'une manière spirituelle. Il serait ab-
ment dans un autre ; mais elle donne la vie à surde de dire qu'elle est moins libre, dégagée
tout le corps. Qui peut douter, continue-l-il, du corps, que lorsqu'elle était accablée de son
que l'homme soit raisonnable, quand on voit poids. » Cassiodore se sert de cette mutabi-
qu'il traite des choses divines,qu'il connaît les lité ou inconstance de l'âme, pour montrer

choses hmaincs, et les conduit avec sagesse, qu'elle n'est point une portion de la substance
qu'il apprend beaux arts? C'est en cela
les de Dieu, comme quelques-uns l'ont avancé
qu'il surpasse tous les animaux, qui ne sont ridiculement. 11 ajoute qu'elle n'est pas non
pas doués comme lui de la raison. » Il ap- plus une partie de l'ange, parce que l'ange
pelle raison l'action de l'esprit, par laquelle n'est pas de nature à être uni à la chair,
de deux choses connues nous eu inf-rons nue comme l'âme qui compose un tout avec elle.
troisième qui nous était auparavant iucon- Il rejette l'opinion de
ceux qui ont cru que
nue. C'est encore par la force et les lumiè- les âmes existaient longtemps avant leur
res de la raison que l'on a inventé les lettres union avec le corps, et qu'on doit l'invention
et les arts divers si utiles à l'homme. des arts aux idées qu'elles en avaient avant
Cassiodore prouve l'immortalité de l'àme cette union, et dont elles se sont souvenues
par le raisonnement qui suit n Tout ce qui
: depuis.
n'est point composé de plusieurs parties, mais 4. Cassiodore ne croit pas que l'âme soit
Ctijp. m,

' Si qtiod fartasse rulnus acceperit. statim con- • Anima vivit in se pnst hvjus sœculi amissio-
dolet, quia ubique siibstanlialiter inserta est. nem, sed œqvali mabilitale quœ UU altribufa
Quod si virtus ejiis tantutn essct, incisum digilum est. Videt, audit, tangit, ac retiquis sensibus effi-
non paierai condolere : sicut nec sal prohalur cacius valet : non juin ex parlibus suis hœc in-
quid quam sentire si ejus radins secare lentave- telligens, sed nwnia spiritualiter ex loto cognos-
ris. Tata ergnest in partiltussuis, nec alO/i ma- cens. Àliaquin obsurdum est putare, minus passe
jor, alibi ntinor est; sed alicubi intensius: alicubi liberam quam mole brulissimi curporis ingrava-
reinissius ; ubique tamen vitali intensione porri- tam. Ibiii., pag. 596.
gitur. IbiJ., pag. 596.
,

240 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQLTIS.


di II qiiiiit de la comme quelques-uns se
nature du feu, lorsque l'âme veut s'appliquer avec plus d'at-
itnmt,sH. le sont ima<riné, à cause de sa vivacité et de tention; la quatrième anime le corps; la cin-
la célérité de ses mouvements; il pense (ju'on quième est l'appétit du bien et d\i mal. Il en-
doit l'appeler plutôt lumière et il en donne , seigne que toutes les âmes sont semblables,
deux raisons : la première , c'est qu'elle est et que si elles ne font pas toutes les mêmes
l'image de Dieu, qui, selon l'Apôtre, demeure fonctions, ni dans lemême degré de perfec-
dans une lumière inaccessible, et qui, selon tion , que de ce que les corps
cela ne vient
saint Jean, est lui-même une lumière qui qu'elles animent ne sont pas également bien
éclaire tous les hommes. Il tire la seconde de organisés et disposés; les uns étant faibles,
la clarté et de l'évidence des idées de l'àme, comme ceux des enfants; les autres blessés
qui voit les choses clairement sans le secours en quelque partie, ou chargés de mauvaises
d'aucune lumière extérieure. Mais il convient humeurs, comme ceux des insensés. C'est ce
que la lumière de l'àme reçoit des accroisse" qu'il montre par l'exemple du feu, qui étant
meuls par la grâce de Dieu, qui lui fait com- dans le fond d'un vase fort étroit et couvert,
prendre plus facilement des secrets même n'a aucune force et s'éteint. Il ne veut donc
d'un ordre naturel, pas que l'on dise que les âmes des insensés
ciuf. 1», 5. Toute forme supposant nécessairement soient dilTérentes de celles des hommes sa-
deitme. pv. une superficie, et consequemment un corps, ges et raisonnables, ni que l'on pense que
et le corps étant de sa nature solide et pal- les âmes des enfants croissent avec eux. Ce
pable, Cassiodore soutient que l'dme, qu'il n'est pas l'àme qui croit dans les enfants,
avait prouvé plus haut être spirituelle de sa mais la raison, à mesure que l'âge leur don-
nature, n'a point de forme. Il s'objecte qu'il ne un plus long usage de la réflexion.
piiii. 11,6. est dit de Jésus-Christ, qu'ayant la forme de 7. Dieu, selon Cassiodore, est seul auteur tJ^'iS^
Dieu^ il n'a ]K)iut cru que ce fût pour lui une de l'âme. Il la donne à l'homme par le souffle ^"i*»-
usurpation d'être égal à Dieu. A quoi il ré- de sa bouche, c'est-à-dire par son comman-
pond que le terme de forme se prend en cet dement, n'étant pas permis de penser que
endroit pour la nature même de Dieu. Il s'ob- Dieu, qui est un être tout spiriliiel, ait une

jecte encore que l'Écriture semble attribuer bouche par laquelle il ait inspiré la vie à
des membres à lame, une langue, des mains, l'homme. Il remarque que quelques-uns
des doigts , comme on le voit dans la para- croient que les âmes des enfants sont
bole de l'Évangile, où l'âme du mauvais ri- engendrées de celles de leurs parents, de
che prie celle du Lazare de lui apporter une même que leurs corps sont enprcndrés de
goutte d'eau au bout de son doigt pour ra- ceux de leurs père et mère, ajoutant qu'ils
fraîchir sa langue brûlée de l'ardeur des flam- avaient donné dans cette opinion pour expli-
mes. Mais il soutient que l'Kcrilure n'emploie quer plus facilement la doctrine de l'Église
ces fa(;ons de parler que pour s'accommoder sur le péché originel, qu'elle croit être trans-
à la grossièreté de notre esprit, et pour nous mis par Adam à tous ses descendants. Il ne
faire connaître par les choses corporelles
,
réfute point ce sentiment, et semble vouloir
dont nous avons l'usage, les choses spiri- imiter la modestie de saint Augustin qui ni>
tuelles que nous ne connaissons pas : c'est voulut point se prononcer sur cet article. Il
dans le même sens qu'elle donne à Dieu des dit néanmoins que l'on doit croire ferme-

yeux, des oreilles, des mains, et d'autres ment et sincèrement que Dieu crée les âmes
'

membres qui n'appartiennent qu'à l'homme. et qu'il leur impute, par des raisons justes
Dm «Dm 6 Cassiodore distin''ue les vertus morales quoi(jue cachées, le péché du premierhomme,
',;;^';;'p",'J;
de l'âme, qui sont la justice, la prudence, la dont elles sont véritablement coupables, sj
^,pic-5S8«i
force, la tempérance, de ses vertus ou pro- l'on en excepte l'âme de Jésus-Christ qui a
priétés naturelles, qu'il divise en cinq avec été conçu du Saint-Esprit. ((Lui, dit-il, qui de-
les anciens philosophes. La première nous vait ellar er les péchés des autres, n'eu avait
rend les choses sensibles; la deuxième or- point sans doute né d'une vierge, il n'a rien
:

donne certains mouvements aux organes du tiréd'Adam, étant venu pour détruire le pé-
corps; la troisième leur commande le repos, ché d'Adam et le mal qu'il a causé. »

'Uoc autem tcraciter fixeque credendum est, dubio vcnit qui erat omnium pecrata aoluturus :

el Deum aniiunii crearc, et occulla qw^itam ratiO' coiiceplus mijslico inspira mine, natus ex x-irgiite, »
ne juslissime illis imputare, quod primi hominis nihil de Adam traxit qui ut Adœ malum vincert-
peccato leticanlur vbnoxw... Absqne peccalo sine lur, adienil. Ibid., cap. \n, pug. ô'j'j.
,

[VI' SIÈCLE.] CIIAI'ITIIE XIX. — C.\SSI0I)01U<;, C'.HA.NCKMKll. 2/.1

<S. 1! y a\ail des iiliildsnplu's (jui jilaraifiit contraire, celui (pii vit dans l'imioeencc '

le sit''u(! (le l'àiiie dans \e cdMir, où se l'or- après avoii' surmonté ses passions, sait se
mciilles esprits vitaux. (Jassiodoio cioit (|ii'(in fixer et s(! borner, il est maître do son corps;
peut le uicllre plus vraiscmblaljlciui'iil dans il u'olfeuse personne; il pardonne à ceux
la tCte, d'où l'iio ciniduil t'I f;ouvi'iiic l'iimu- ([iii l'ont olleusé il donne des marcpu-s de
;

lue. Eiitie plusieurs iais(uis (ju'il eu iloiuie, charité à ceux qui le haïssent; nulle tris-
celle qui parait la meilleure est, que lorsijue tesse ne l'abat; il ne craint pas la mort,
nous votdons penser attentiveaient à quelque parce qu'il la l'egardc comme le commence-
chose, nous sentons que cette opération se ment de son bonheur; ne s'échaulle point
il

fait dans la tête, et que l'âme pour s'aiipli- à contester; il est véridiquc dans tous ses
quer plus l'ortenuMit, l'einu', pour aiusidire, discours s'il enseigne, c'est sans arrogan-
:

toutes les ouvertures de l'endroit (piclle oc- ce ; il est libre avec humilité, sévère avec
cupe, c'est-i\-dire, tous les sens. chaiité, simple dans ses vêtements, sobre
Cap. tx.Do
y. Il lait ensuite la description des princi- dans le boire et le manger. Sans en être
pales parties du corps humain et de tous ses averti, l'on n'a pas de peine à reconnaître
sens, dont il marque l'usage et les i'oactiuns. celui que Dieu a comblé de tant d'avanta-
11 en prend occasion de faire admirer la tou- ges. » Cassiodore ajoute que ce n'est pas
te-puissance de celui qui l'a formé et dit ,
seulement parmi les hommes, que l'on en
que, quelque matériel et quelque gâté que trouve de ce caractère, qu'il y a eu aussi des
soit ce corps par les vices auxquels il est su- vierges et des veuves si portées à l'observa-
jet et par les différentes blessures qu'il a le- tion ifes commandements de Dieu, qu'elles
çucs, il ne laisse pas d'être employé dans de ont donné de grands exemples de patience,
très-nobles fonctions; que c'est le corps qui surmonté l'infirmité de la chair et remporté
chante les célestes cantiques, qui fait les la couronne du maiiyie. Pour montrer com-
martyrs, qui reçoit la visite de son Créateur ;
bien Dieu favorise ses serviteurs, il rap-
que c'est lui encore qui a reru la croix vivi- porte une partie des miracles opérés par
iiantc du Rédempteur, et qu'il devient même le ministère de Moïse, d'Elie et d'Elisée.
le temple de la Divinité, pourvu qu'il ne don- 11. Il mort La séparation de l'â-
définit la :
c« p.X ii.bo
IVta d. lAiiic
ne point retraite aux crimes. me d'avec Dans cet état, dit-il, l'âme
le co?-ps. a aprù 3 la moit,
lug. 003
10. 11 donne diverses marques auxquelles ne fait plus ni bien ni mal* mais seulement ;

on connaît les bons et les mauvais honmies: elle éprouve jusqu'au jour du jugement la
(1Ceu.K-ci, dit-il, n'ont jamais de joie qui ne douleur de ses mauvaises actions, ou elle
soitmêlée detrislesse; aussitôt quel'emporte- ressent la joie du bien qu'elle a fait. Mais
ment impétueux du plaisir les abandonne, ils au jour du jugement, ajoute-t-il, nous re-
tombent dans le chagrin. Tantôt leurs yeux cevrons l'entière récompense de nos œuvres
sont agités au delà de ce qui est nécessaire, bonnes ou mauvaises, chacun à proportion
tantôt ils les ont fixes. On les voit rêveurs, de ce que nous aurons fait de bien ou de
changeants, inconstants, irrésolus, inquiets, mal. Ce en quoi nous serons égaux^, c'est
soupçonneux, occupés sans cesse à s'infor- que nous ressusciterons tous dans un âge
mer de ce que les autres pensent d'eux. Ils parfait, en sorte qu'on ne verra plus ni en-
commencent des discours sans les achever : fants ni vieillards, ces diversités d'âges ve-
ils passent continuellement d'une occupa- nant d'un changement qui n'aura plus de lieu
tion à une autre et lors même qu'ils n'ont
: dansl'autre vie. » 11 fait une descriptioude l'é-
point d'aflaires, ils en paraissent accablés. tat bienheureux des saints dans le ciel, et des
Ils vivent dans des frayeurs continuelles supplices cpie les méchants endureront dans
quoique personne ne les moleste leur cons- ; l'enfer. Il regarde comme inutile d'examiner
cience leur tient lieu de sufiplice; ils sont quelles seront les causes de ces supplices
leurs propres bourreaux tandis que per- , éternels mais il ne doute pas qu'il ne puisse
;

sonne ne songe à leur faire de la peine. Au y avoir un genre de tourments qui fasse

' Cum fuerimus liac luce exuti... nihil boni impios dispar pœna constringit. /Etas plane om-
malique faciemus, sed usqite ad tempus judicii, nibus itna alque perfecla fvivra est: nam que-
aul de prwteritorum uctiium pracilate inœreinur, madmodum ibi eiit minor, iibi non crescilur? Aut
aut de operationis nostrœ probilate lœlainur. qtiure senex. ubi non dtficilnr? Mutabilitalcs islœ
Cassiod. De Anitim, cap. xn, pag. 603. ad inlerititm tendunt. L'num est quodcumque per-
» Nam et distans beutitudo bonos coniinet, et pituum. ihk\.
XI. IC
24â HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTIÎURS ECCLÉSIASTIQUES.
soiillVir sans cesse les damnés, sans aucu- jusqu'à nous. Mais M. le marquis MallVï nous
ne diminution de leurs rigueur.s, et que Dieu a donné depuis quelques années ses com-

ne se serve à cet ellet d'une substance pro- mentaires sur les Épiti-es et les Actes des
pre augmenter le sentiment de la douleur
.'i
apôtres, et sur l'Apocalypse.

sans donner la mort. « De combien de peines, 2. On trouve dans la Bibliothèque de Cam- ,„Ç;^f^'.;

dit-il. notre fimc n'est-ellc point


affliprce en bridge deux volumes sous le nom de Cassio- "«'<>'••

ce monde, el toutefois elle ne périt point ? Ne dore, dont l'un est intitulé: Des Offices ecclé-

voyons-nous pas de certaines montagnes qui siastiques, et l'autre : Sentences de Cassiodore

poussent sans cesse des llammes et qui néan- tirées de saint Cypricn. 11 y en a un troisième
moins subsistent toujours? La salamandre dans la Bibliothèque d'Oxford sous ce titre:
se nourrit de llammes et se rétablit par Étincelles des L'critures, Pierre des Noëls lui at-
la

chaleur du feu. On voit aussi certains petits tribue un livre sur la Trinité. Mais l'eu n'a au-
vers qui se nourrissent dans l'eau bouil- cune preuve que Cassiodore soit auteur d'au-
lante. Qui peut donc douter que le feu des- cun de ces ouvrages. Il n'en dit rien dans son
tiné au supplice des mécliants ne doive
être traité de l' (Jrtliograji/ie, oxi il donne le catalo-

élerncr? » Il finit son traité de VAme par une gue des écrits qu'il avait faits depuis sa con-
très-belle prière où il reconnaît qu'il n'y a version et il n'en est fait mention dans au-
;

rien en nous de digne de récompense que cun des écrivains qui ont traite des auteurs
Dieu ne l'y ait mis; et qu'il est infiniment ecclésiastiques dans le sixième ou septième
plus noble de le servir que de régner sur la siècle. 11 n'y a pas plus de fondement de lui

terre, puisque, par sa grâce, d'esclaves nous attribuer les Vies de saint Paphnuce, de
devenons enfants; d'impies, justes, et de cap- saint Spiridion et de quelques autres, rap-
tifs, libres. portées dans la première partie du h'-gen-
daire de Lipoman. Elles sont de Théodoref,
de Socrate et de Sozomène. C'est par erreur
§ VllI.
que Gesner a dit que l'on trouvait sous son
nom dans la Bibliothèque de l'abbaye de
Des livres de Cassiodore qui sont perdus, ou
Saint-Micliel, seize livres inlitulés: De Rerus-
qu'on lui a faussement attribués. tica ; on ne peut douter qu'ils ne soient de
Columelle qui en a écrit un pareil nombre
sur la même matière, ainsi que Cassiodore le
l. On voit' par la Préface de Cassiodore
Livres âo
Caesiodorequi
dit lui-iuéiuc dans le chapitre .xxviii de son
cent perdu».
sur les douze livres de ses lettres, qu'il avait
Institution. Nous avons fait voir plus haut
fait plusieurs panégyriques en l'honneur des
ne nous en reste rien, qu'il n'était point auteur du Commentaire sur
rois el des reines. Il
* le Cantique des cantiques. Quant au traité de
ni des douze livies de Y Histoire des Goths
l'Amitié, qui porte son nom dans quelques
dont il parle au même endioit. Il avait aussi
composé ' un livre de la Division, une com- manuscrils et dans quelques éditions, il est
pilation des titres ' et des sommaires de l'É- d'un style tout différent du sien, et l'Écriture
critnrc. intitulée Mémorial; un traité' *5 y est citée selon la Vulgate, que Cassiodore
Étytnoloyies, ini Recueil de la Grammaire de ne cite jamais. Il est attribué i\ Pierre de
Donat avec des commentaires un Recueil de ;
Blois da[is la dernière édition de ses (cuvres. Slropbl«. (4f.
116. odil. |«*
traités des fi(jures composés par Sacerdos; et il Les deux livres des Tropes et des figures im-
avait corrig»' un Commentaire sur t'Fpitre aux primés sous le nom de Cassiodore , sont
Romains, en retranchant ' tout ce qu'il y comme on l'a déjà dit, d'un écrivain qui
avait trouve de favorable à l'hérésie péla- vivait depuis saint Grégoire-le-Grand qui y

gienne. Tous ces ouvrages ne sont pas venus est cité.

' Dixinli eliam ad commendalinnem unitersi- ' PosI librum quoque tilulnrum yueiu de di-
lalis fréquenter rcfjinis ac regibus laudes. Cassio- vina Scriplura cnUcctum, Meinorialent volui
(lor. Pru-fat. in lib. Variar., pag 2. nuncupari. l'rn'fiU. in Orlograpti.
Gollwrum ' Post codicem iu quo arles Donati cum com-
> Dundecim lihris liisloriam deflora-
lis priisperilalibus condidisli. U>\(\. vtentis suis et librum de etymologiis et alium li-
» l^iHiirum nniniuin rntiontm in meo libro dili- brum Sarerdoii.<i de schemalibus coUegi. Ibid.
gentius expUravi, quem de Divisione conijiosui. • Pnsl crpositionem lîpistolw ad Itomanns,
lUi-iii, Uc Uialccl., pag. 5*6. unde pelagianœ liereseos pra citâtes amovi. lbi<l.
,

[VI" SIÈCLE.] CHAIMTIŒ XI.X. — CASSlUDOltl-:, CIIANCELIEK. 243


pas dans chemin qui conduit à la vie bien-
le
AHTICF^K lir. heureuse. Nous devons demander à Dieu par
des piières continuelles '
nos besoins, et
DE LA DOCTKIXE DE CASSIODORE.
tout ce qui est expéilii'ul [)our notre salut;

iiM"ili»!"" ^- " '"•* profonJour des divines Écrilure?, mais surtout l'intelligence de ses divines
dit Cassiodore, est cach('c sous des paroles si Écritures, parce que plus on les comprend,
communes, qu'elles sont remues générale- ' plus l'ûme trouve de plaisir à s'en entrete-
ment de tons les hommes. Que ces Ecritures nir. Elles ne rrnt'ermenf rien ' d'inutile et ;

soient divines, on en voit la preuve par ceux si l'on en prend bien le sens, il n'y a rien

mêmes qui ont écrites; puisque des


les qui ne nous puisse être de quelque utilité.
hommes qui plup u-t n'étaient pas savants
la Pour en prendi-e le vrai sens, il faut lire les
n'ont pu écrire des choses si élevées et éter- commentaires ' des saints Pères, et s'arrêter
nelles , n'avaient été remplis de l'es-
s'ils à ce qu'ils ont écrit leurs explications nous:

prit divin. Ce qui le prouve encore, ce sont servent pour ainsi dire d'échelle pour par-
les prodiges que Dieu a faits pour autoriser venir efticacement à la contemplation des
nos livres saints jusqu'ù ce qu'ils ont été ré- vérités que le Seigneur nous a révélées
pandus dans tout le monde et reçus dans dans les livres saints. Les Pharisiens inter-
toutes les parties de l'univers. Quoiqu'une rogés par Jésus-Christ ', de qui le Messie
lumière céleste brille - dans toutes les par- devait cire fils, et eux ayant répondu De :

ties de la sainte Écrituie, et que la vertu du David. Comment donc, reprit le Sauveur,
Saint-Esprit l'éclairé évidemment de ses David l'nppctle-t-il en esprit son Seigneur dans
rayons cela paraît néanmoins beaucoup
, la psaume cix ? » Cassiodore conclut de cet
plus dans les Psaumes, dans les l'crits des endroit que David est auteur de tous les
prophètes et dans les épltres des apôtres. On psaumes, et dit que l'usage de l'Eglise qui
y trouve de plus profonds mystères, et on croit fermement qu'ils sont en effet de ce
peut les regarder comme la forteresse de saint roi, est que ceux qui les chantent publi-
toutes les divines Écritnres. Elles sont ap- quement doivent les intituler : De David, quoi-
pelées lumière ' parce que Dieu nous les a qu'ils portent quelquefois en tète d'autres
données pour dissiper les profondes ténèbres noms.
de l'aveuglement des hommes et parce qa'h 2. Il applique aux hérétiques qui ensei- sur \, m
la favem- de lem' clarté nous dirigeons nos guent des dogmes contraires ' à ceux de """'i".

' Scripturœ divUiie sancta profunditas adeo men divinarum Scripturarum inteîlectus jugiter
communes sermones kabet, ni eam universi in- expetendus est, qui quanto plus percipitur, tanto
cunctantes admiltant. Eam rêvera esse divinam suaviorsanctis mentibusinvenitur.ihld. pag. 397.
hinc m'ixime datur intelligi, quod indocti siibti- 5 Nihil vacuum , inhil otiosum divinis titteris
lissima, temporales œterna non nisi divino re- continetur ; sed semper ad iitilitatem aliquam dis-
pleti Spiritii potuisse tradere sentiuiitur. Quoi citur, quod recii->simis sensibus salubriter hau-
miracula jugiter facta suntdonec Scriptura ipsa riatur. Cassiod. , De luatitul, cap. ssiv, pag. 523.
mvndi ambilum divulgata compleret. Vnde ad Quapropter. dilectissimi, indubitanter ascen-
^

probalionem pertinet maximam quia lex divina da!!:us ad divinam Scripturam per expositiones
per cunctas mundi partes cognnscilur fuisse sus- prnbahiles Patrum velut per quamdam scalam
,

cepta. Cassiod. Prœf. in Psal., \<ag. 6. visionis ut eorum sensibus provecti ad cnntem-
,

' Quamfis omnis Scriptura divina superna luce plationem Bomini efl'icaciter perienire mereamur.
resplendeat, et in ea virlus Spiritus Sancti eiiden- Cassiod. Prœf. in Institut, pag. 50S.
ter irradiet, in Psalterio tamen et Prophetis et ' In Evangelio, Pharisœis ipse Dominns dicit:

Epistolis apostolorum studium maximum laboris Ouomodo ergo David in Spiritu vocat euni Domi-
impendi : quoniam mihi visi sunt profundiores num.dieens: Dixit Dominus Domino meo, e<c. Vnde
abyssos commovere et quasi arcem tolius Scrip- probatur universos Psalmos non multorum exis-
turœ divinœ atque iiltiludinem gloriosissimam con- tantum ipsius quem a Domino constat no-
tere,sed
tinere. Cassiod. Prœf. in Institut. minalum. Vsus quoque Ecclesiœ catholicœ Spiritus
^ Scriptvram hene appellivit lucernam quœ , Sancti inspiratione generaliter et immobilitertenet
humanis usibus data est et ad depellendam noctis ut qnicumque horum cantandus fuerit, qui di-
profundissimam cœcitatem.... per ipsam siquidem verso nomine prœnotantur, Itctor aliud prœdicare
dum ad vitœ bonœ cursum instruimur , redis non audeat, nisi psalmos David. Cassiod. Prœf. in
gressibus ambulamus. Cassiod. in psal. cwiii Psal. cap. ir, pag. 3.

pag. 393. Erraverunt utique a ventre, qui contraria


*

* Quamvis universa quœ expediunt, continuis matri dogmata sunt secuti, nec alvum sanctam
precibus sinl à Domino postulanda ; maxime ta- pia dfvotione cenerantur : ipsi enim et falsa locuti
244 HISTOIRE GKNÉR.VLE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.

l'ÉçHse, et qui manquent de respect pour delà concu[)iscence; mais lorsque notre foi
lessacrés fonts dans lesquels ils ont été ré- est tiède, Dieu' s'endort pour aiusi dire à

générés, ces paroles du psaume Lvii Ils se : notre égai'd au lieu qu'il veille dans celui
;

sont égarés dès (ju'ils sont sortis du sein de leur dont la foi n'est point assoupie. Si nous ces-
mère; ils ont dit des choses fausses parce qu'ils sons de penser à lui, il cesse de nous défen-
se sont éloignés des saintes traditions de dre on en voit un exemple dans ce qui ar-
;

l'Église. A quoi il ajoute que les saints Pères riva dans la barque où il se trouvait avec
assemblés dans les conciles généraux ses disciples. 11 dormait pendant que leur
'

voulant venger l'injure que les hérétiques foi était dans la langueur; mais aussitôt

font il la foi, les ont condamnés par divers qu'elle fut ranimée, il s'éveilla et les délivra

décrets, et séparé de l'ICglise par le glaive du danger. »


Sar U 04(0.
divin les iuventeius de nouvelles hérésies, 4. « La vraie définition de Dieu, poursuit rt d» DltD.

lorsqu'ils les ont trouvés obstinés à les dé- Cassiodore, est de dire ' qu'il est infini dans
fendre posant pour règle que l'on ne de-
,
ses perfections c'est une vertu inexplicable,
;

vait plus proposer de nouvelles questions sur une j)iélé incompréhensible, une sagesse
la foi, mais se contenter de ce qui avait été ineffable. Quelques louanges qu'on lui don-
enseigné par les anciens Pères, et obéir à ne, elles ne seront jamais proportionnées à
leui-s décrets salutaires sans aucun dégui- la grandeur de son être et de ses perfec-

sement. « C'est de cette manière, dit-il, que tions, qui n'ont point de lin. Le Prophète
Ptal.ulKll,
ces saintes assemblées ont atfermi les sa- disait de Dieu, avec vérité Vous êtes de toute
:
i.
'
crements salutaires de notre foi. i> éternité et dans tous les siècles ; parce qu'il

3. Lorsqu'il s'agit de cette


(( foi, ajoute n'y a rien de passé, ni de futur par rapport
Cassiodore, l'homme catholique, quoiqu'a- à Dieu ; tout lui est présent, le passé comme
gité * par ne sait ce que
les tribulations, le futur. Ainsi, lorsque le même Prophète
c'est que de se laisser émouvoir par les plus lui dit : Soumiez-vous , Seigneur, ce n'est
pressantes nécessités. Car c'est dans la sain- point pour le faire ressouvenir, puisqu'il ne
te règle ' de la foi catholique que consiste la peut jamais rien oublier; c'est l'usage de
droiture du cœur; la iinesse trompeuse des David d'employer ' dans les prières qu'il
hérétiques, qui est toute tortue, et qui s'é- fait à Dieu, les mêmes façons de parler que

loigne beaucoup de cette règle, ne peut pas nous avons coutume d'employer lorsque
confesser Dieu. L'ardeur de la foi ' croit à nous prions les hommes. Nous pouvons
proportion qu'on diminue le feu et la chaleur avoir quelques connaissances' des actions

sunt qui ab ejus sanctis Iraditionibus erraverunt. sione subtrahitur; sicul initia navi factum est,
Cassioil. !ii psal, Lvn, \ia?. 18t. quando negligenlibus discipulis Dominus dormie-
• Dicamuf nunc quemadmodum universalia bttt ; sed ubi pdes eorum excitata est, Dominus

sanctaque concilia /idei nostru: salutaria sacra- quoque de somiio surre.rit, et stalim ab eis peri-
menla sulidaierinl, nam saucti.'itinn Paires inju- ctila marina submovil. Cussiod. in psal. cxx,
rium rectœ /idei non ferentes régulas quoque , pag. 409.
ecclesiasiicas ibidem slaluere maluerunl, et inveit- « Sic laudare Domintim ut quantum est ma-
,

tores novnrum tiirresum jierlinaces divino gladio gnus, non œstimcs e.rplicandum... Sieut nullo loco
perculcrunl decernentes nullum nllerius debere
, clauditur: itanec cloquentia qnamvis amplissima
novas incutere quwstiones, sed proliatorum vete- ejus possuiit prœconia terminari. Virtus incxpli-
rum auctorilale cnnlenlos, sine dolo et per/idia de- cabilis, pietas incomprelieusibilis,sapienlia inef-
cretis salutaribus obedire. Cassiod., De Institut., fabilis, cujus i-era (inem in sanctis
de/initio est,
cap. n. laudibus non habere. Id. in psal. ccuv, pag. 463.
' Vir cnlholicus licet importunis tribulationibiis ' Tu es competenler dicitur de Deo quia non ,

flucluet , in parte jidei nescit quibuslihet necessi- habel prœleritum nec futurum. M. in pMil. uxxxix,
tilibus commoveri. Cassind. in psal. xxv, [•afi. 81. pag. 290. Mémento illi dicitur. qui nihil aliquando
' Direcliu cordis est fidci catholicœ sancta ré- potuit oblivisci, nom enim ut ad memoriam rvdent
gula : quia Deum confileri non potest hœrelico- divinilns cnmmonetur , ante quem omne prœsens
rum dislorta versutia. Ul. in psa/. cxvrn, jia^'. 379. est pneteritum et futurum. Cassiod. inpsal.c.xxai,
*Tanlum enim crescil calor fidn , quantum pag. 428.
de flamma subtraclum fuent corpornli.,l\iU]., * Usus est Propheta; fréquenter per humanas

pag. 390. consuetvdines Domino supplicare. Ca.^siod. ihid.


» Dormilare dicilttr Dominas quando nos in ,
' /It/u-s ejus ex parle altqua quantum tamen

eju.t fidrIcpescimus : in que enim non dormit fi- ipseconcedit, potest nolitia noslra comprehendere;
des, rigilal CUrLHus. .Vom si nos ab ejus conlem- subtandam vero ipsius non pra'vatel indagare.
plaiione discedimus, ipse quoque a noslra defen- Id. in psal. cxLv, pag. 4G7. Deus potest dici quod
.

[Vl" SIÈCLE.] CHAPITRE XIX. CASSIfJDt (lit:, (.11 AXCELlEll 245

de Dieu, lorsqu'il vrut hicii ikhis l'iicconlcr; l'Mciiliire " dit, laiilôt d'une |icisc)niu!, ce
in.iis lionsne [louvoiis jiai-veiiir ;i coiii|ir('ii- (jiii est coniiniiii à toute la 'l'iinité ; tantôt
drc quelle est su nature et il nous est i)liis ; du Père, ce (]u'clle attriliue ailleurs au Fils;
facile de dire ce qu'il n'est pas, que de dire et qu'elle marque aussi quelquefois que plu-
ce qu'il est, cl d'aiipiofoiidir loule l'élendiie sieurs personnes opèrent ensemble. Au jour
de son être. C'est un lrès-L;iaiid [k'tIic' '
de du jugement, les ('lus ent(Midroiit de la bou-
dire que quelque chose lui soit imiiossihle, che du Fils ]hi('Z les bénis de mun l'ère;
:

lui qui a le souverain pouvoir de faire tout et les réprouvés Allez, maudits, au feu
:

ce (jui lui plaît. Soit qu'il pardonne au pt5- éternel. On voit en cet endroit le Père pro-
cliour ', soit qu'il le punisse, cela tourne noncer un jiigcMuent, que le Fils s'attribue,
également à sa gloire, parce que lorsqu'il lorsqu'il dit Le l'ère ne juqe personne, mais
:

pardonne \ il a égard à la créature qui est il a donné tout pouvoir déjuger un Fils. Mais

son onvrapo et quand il punit, il fait alti'ii-


; en un antre endroit, le Fils déclare qu'il
tion à nos niniivaisos actions, o agit conjointement avec sou Père ce qui ;

fnr II Tri-
5. « Nous devons croire, continue Cassio- doit aussi s'entendre du Saint-Esprit. 11 est
Bite.

dore, avec l'Église catlioliqne, que Dieu est dit ' du Père, qu'il sau\e les homuu.'s; mais

un * en trois personnes; le Père qui n'est point cela est dit aussi du Fils et du Saint-Esprit.
cngenilré.lc Fils qui est engendré, et le Saint- Ainsi, l'égalité en l'unité de l'indivisible Tri-
Esprit qui procède du Père et ilu Fils ;
que nit.', est prouvée, et par les paroles et par
cette Sainte-Trinité est coéternelle, égale- les actions. »
'
ment toute-puissante qu'en JésusClirist no- ;
6. (c Dieu éternel et immuable
Le Fils,

tre Sei2;iieur, les deux natures, la divine et dans sa nature, a daigné prendre la notre
l'humaine, demeurent unies en une seule pour renouveler le vieil homme, le rendre
personne , chaque nature conservant ses immortel de mortel qu'il était, juste de pé-
propriétés. Tout est commun aux trois per- cheur, et participant de son royaume, après
sonnes ^ à l'exception des noms. Toutes les qu'il en avait été exclu sa bonté l'ayant ;

atitres choses, c'est-à-dire la i.ature , la porté à ne pas dans ceux qui le re-
soufi'rir

puissance, l'éternité et antres semblables connaîtraient, la perte de son image, que


attributs leur sont communs. D'où vient que l'ennemi cruel avait voulu anéantir. Il n'y a

nonesl, non potest comprehendi quod esi. idem, banlur esse communia. Ideui, in psal. lxxi ,

in psal. r.xLii, pag. 436. pag. 277.


^ Illi audieiU: Venite, beuedicti Patris moi; islis
'Uoc in Dco gravissinvum constat esse pecca-
tum ut qnidquam illi impossibile dicatlir qui
, ,
vero dicelur : Ite in ignem feteriuun. /;( ul agnos-
summe valet efjicere, quod decernit iinplere. Id. cereshoc et PaVrem facere quod FiUus operalur,
in psal. Lxxvn, pag. 231. hic Patrem dicil inimicos ejus confundcre quod ,

* rtrasqiie res sive duin pareil, sive dum judi- Filium constat esse facturum. Ipse enim in Eoan-
cat, ad glorinm Domini perlinere manifeslum est. gello dicit: l'aler uuu jmJicat queimiuam: sed omne
M. inpsiil. rxin, pag. 307. judicium dédit l'"ilio. Sed Pains testimonio Filii
' Quuproider miserelur cum s^iam respicil crea- gloria decenler crponilur : iiani et alibi de unitale
turani, ddiiuial aittem cum nustra opéra intuelur. cooperalionis dicitur : Pulr-r meus usque modo
\A. in psal. cxxxmi, pag. i44. operalur, et ego operor quod eliam de Spirilu
;

*Tu (Ecclesia) inoffense cwicta complecleris : Sancto intelligi debcrc non dubiuin est. Cuosiod.
Patrem quipite docens ingenitum FUium yeni- , in psal. cxxxi, pag. 431.
tur)i Spirilum Sanctum de Pâtre et Filto proce-
,
>
Et gloriemuriu laude tua. Et intuere quod hic
dentem iiiiuiu Dcnm, Sanclam prœdicans Trini-
,
salvare dicitur Pater: legilur erium et Fiiium
tatem, cnœternam sibi et ccquulUer omnipolenlem, snlvare. ut est illud : Venit Filius hominis salvura
Doiiiinumque Christum manentem in divinilate farere ipiod perierat. Prcedicatur eliam salvare
sua et carne liumunilatis assuiitptœ, saiva unius Spirilum, ut est illud ad Tilum : Salvos nos fecit
cujusqiip naturœ proprietate, unarn conliteris esse per lavaei-um regenerationis et reMOvalionis Spiri-
personam. Oassiotl., Prœfat. in Pif(/.,pag. 7. tus Saueti. Sic indirisibilis Trinitalis a-qualilas
^ Scire autem dehemus ad distinguendas declu- alque unitas, verbis similibus
et et virtulibus in-
randfisque personas Sanctw Trinilalis sola hœc dicalur. lu psal. cv, pag. 343.
nomiua po.ise sufficere. Nam cum dixeris : Deus " Deus enitn œlernus atque incomniutabilis in

Paler Deus Filins, Deus Spiritun Sunclus ple-


, , sua nalura permanens dignalus est assuinere
nissime Sanclœ Trinitatis visus es déclarasse per- humanitalem noslram, ul velcrem hominem inno-
sonas. Ilœc enim noiidna,inSancta Trinitate sola varet, ni de mortali fucerel immoilalem de pec- ,

svnl pro/iria. Cœtera rero, id est nalura potes- ,


catore jusluin , de alienalo sui regni jubcret esse
tas, œternilas, omnipotenlia , et his similia pro- parlicipem : ne imagincm suam in confilentibus
246 HISTOIRE GÉNKRM.E DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
point eu d'intervalle entre l'union des deux Ce Père cite sur cela le témoignage de saint
natures. Dansl'orifrine '
mOme de l'Inrarna- Allianasc, de saint Ililaire, de saint .\m-
tion de Notre-Seigneur Jésus-CUiist, la sub- broise, de saint Augustin, de saint Jérôme,
stance divine a été unie ;\ l'humanité, comme de saint Cyrille, de saint Léon et du concile
l'auL'e l'avait prédit à la Sainte Vierge. Ces de Chalcédoine. Par une suite nécessaire, il
deux natures ' sont paifaites et unies sans enseigne que Jésus-Christ ' est seul Fils de
confusion en une seule personne dans Jésus-
Chrisl. Par l'une il règne; par l'autre il
Dieu par nature, au lieu que les saints ne le
sont que par grâce sans aucun
;
qu'il est seul i
sert la première a créé le monde
:
la se- ;
péché, et que que les autres ont
c'est p;ir I li

conde est créée. Celle qui a pris est impas- été purifiés de leurs péchés que c'est pour ;

sible ; celle qui a été prise est passible : car cela qu'il déclare que la chair ' qu'il a prise
nous devons, selon la doctrine des Pères, dans le sein de la Vierge Marie, et qu'il s'est
faire tomber les opprobres que Jésus-Christ rendue propre en l'unissant à sa divinité,
a sur sa natin-e hum.àne et attribuer
soutl'erts est une chair vivifiante Je vous dis, eii vé- :

les miracles qu'il a faits à sa nature divine. En rité, si vous ne mangez la chair du Fils de

dislint'uant ainsi par l'esprit les deux natures, iliomme, et ne buvez son sang, vous n'aurez
nous éviterons dans lesquelles
les erreurs point la vie en vous. « Car encore, dit-il, que
les hérétiques sont tombés au sujet de l'In- cette chair soit prise de la nature humaine,
carnation : caria divinité s'est tellement unie nous ne devons pas croire qu'elle soil comme
à l'humanité, qu'elle ne peut être confondue la nôtre, souillée pai* la contagion de quel-
avec l'humanité; ces deux natui-es demeu- ques péchés : c'est une chair adorable, sa-
rent unies sans confusion; quoiqu'après la ré- lutaire, vivifiante, qui remet les péchés à
surrection l'écononie de l'Incarnution ail été cause du Verbe, auquel elle a été unie. Jé-
glorifiée la vérité de l'humanité a subsis-
,
sus-Christ s'est oûert en sacrifice * pour- tous
té. »Cassiodore rapporte plusieurs passages les hommes, afiu que le monde reçut par
de l'Écritui-c, par lesquels ou voit que le ne méritait pas de recevoir
lui lu salut qu'il

Sauveur, pour prous'cr à ses disciples qu'il par ses propres œuvres mais on peut dire ;

était véritablement ressuscité, s'est laissé que s'il s'est montré * aux perfides, il ne
toucher par saint Thomaj, et qu'il a mangé leur a pas été donné, leur perfidie ayant
avec eux après quoi il ajoute «Il u'est donc
; : mis un obstacle au fruit de sa rédemption.»
pas permis de ne pas croire deux natures Cassiodore semble dire que l'on voyait en-
parfaites et unies en Jésus-Chiist puisque ,
core de son temps dans la ville de Jérusa-
lui-même l'a pjouvé eu tant de manières. » lem ', la plupart des instruments qui avaient

paleretur perire pius,quam annihilare voluit cru- plis vnluit de seipsa verilas prœdicare. \a psal. n,
delis inimicus. lu psal. cjx. pag. 359. p.ng. IG.
In ipsa incarnattonis origine Domini Christi
' ' per naturam esl Filins, sanctx
Ille fChristusJ
(licina subslaii'ia huiiiaiiUati juncla atque adu- , vero per grntiam. Ille sine aliqiio peccato isti ,

nala dtdaralur. sicul elab angelo Marin; semper per ipsum n pecialis prohantur exuti. In pwl.
virgini prophelalum est: Spintus SaucUis supcr- Lxxxviu, pnfî. 2Sl.
vt'uiet iu te et virlus Altissinii obrunibabit tibi : * Yita enim nostra quœ rêvera Deus esl qui ,

prnpterea quod uaseetur est te sauctuiu, vocabitur carnem sumptam ex Yirginf Maria sihi univit
Filins Dei. Casfioil. inpsat. xxi, pag. C8. lamque pro/iriam fecil rivifiratricem eam esse
,

- Duœ naturœinconfusie algue perfectœ in iina professas est ; sicut ait in i:vangelio : Amen, amen
personit siiut posilœ Domini Chrisli: quaruinest dico vobis, nisi inaiiiliH'avfrilis carnem l-'ilii ho-
ttna quœ régnât, el altéra quœ niinistrat : prima uiinis, el bibei'ilis cjus «au^niiium ,non babehifis
creatrix, poslerior creata ; et ideo quip asuuniijsit, in Vobis viUiui U'ieniam. Quœ
ex humana licrl
impasuihilis ; qxiœ vero est assnmpta pasfibilis. , natura sumpta sit, non tamen eani ut nnius ho-
i\am sicut Patres monent : Vemus injurias rurni, minis ex nobts estimare debemuspeccati alicujus
miracula Dirinitnti : discernnmux intellectu tfUu- cniitngianc pollutam.sed udorabilem.salutiferam,
rax. et noxios vitemus errorrs. Dirinitas enini sic riiifirntricvm, quœ peccata tiimiitit, propler Ver-
sihi hiinianitatem ndunavil ut nullatoms cum
, buin cui adnnala esl. lu pful. x.wiii, piifî. ii)\.
Itumanitate confundi possit , sed utraque iitcon- ' Se sacri/hium proomnihus ohtulil, ut salutem

fusa et adunata permanent. Quia lictl incarna- niniidux, quant suis operibus non merebatur, nc-
tionis diapensalin post resurrectionem glorificata ciprrel In psni. i., pap. I6i.
sit lamen in liunuinitatix reritate iiermansit...
,
* Pcrfiilis tnnlum appnruit. non etinm dntus.
yimium exiliale est duas 7iaturas perfectus atgve lu i)?3l. LX.\x:v, pas. 273.
adunalas in Christo non credere, quas toi exem- ' Ista quoque Jerusalnn ,
quœ adhuc in terris
[VI* SIÈCLE.] CHAPrmR XIX. — c.vssinnnuiî;, ciianceuiî». 2«
.'ftTvi ;\ I.i pasfsion du Siuivcui'; lu pi(Mro sur duquel nous avons cessé de faire le mal. BorrÉ;ii«.

lai]U('llo il s'iUiiil assis loisqu'il l'ul iiit(M'r(if;i5 7. 1/l'',L;lisC'i ne pmpoS'' rie^^ dit (lassiodo-

pur Pilate colonne à laquelle on l'ultii-


; la re qu'il ne soit expinlient de croire. Comme
,

rli;i liusqu'uu
tlai;ella la couronne d't'-
li! ; répandue ' par toute la Icrrc, ses ju-
elle est

pines (|u'ou lui mit sur la t(Me In rospau ou ; gements s'exercent aussi dans tout l'univers.
la canne dont on le fiap[ia sur lutcle; la (Juoi(pie fornuMî (le diveises nations
'
comme
croix ilu salut ù laquelle il fut attaché; la une couronne de dilléicntes tleurs, elle est
lance dont ou lui perçu le côté ; le sépulcre unique et ne peut être divisée à la volonté
où on le mit après sa mort. 1! parle aussi des hommes semblable k la tunique ' qui
;

i\^i la table sui' laquelle Cène avec ses


il lit la couvrait le sacré corps de Jésus-CInisl, et
disciples, et leur donna ainsi qu'à nous la
, , qui était sans couture et d'un seul tissu de-
communion de son corps de et de sou sant;- ; puis le haut jusqu'en bas, elle demeure en-
la piscine de Siloé, Oj^ure du sacré baptême; tière et inviolable par une stabilité perpé-

du cénacle où il entra, les pnrtes lermees, tuelle, li)ud('esur la force de son unité. C'est
pour se luire voir h. ses disciples et du lieu ; d'elle que la vérité a dit : Ij:s portes de l'enfer

de sa résurrection. 11 tire de tout cela diver- ne prêonndront point contre elle. Jésus-Christ
ses moralités, l^aus son Commvnli'ivv sur le en disant 'dans le psaume xxi° Délivrez mon :

psaume \\°, il s'exprime plus corrcctcracnt que ihite; ou à la lettre Délivrez mon unique de
:

les moines de Scylliie, eu disant que nous de- la puissance du chien, euleud par son unique,

vons croire' que le Sauveur, un de la Trinité, l'Église catholique, afin que l'on sache que
asouQ'ert, et non,comuie disaient ces moines: jiar le terme d'unité, il a réprouvé toutes

i'n de la Trinité a souffert. Il ri'duit a deux les doctrines nouvelles, et les lonciliabu-
points ' les instructions de l'Église sur la con- Ics des méchants, c'est-à-dire des héréti-
duite de notre vie : le premier, à: nous ëloi- ques, qu'il compare ici à des chiens, parce
f^ner tlu mal, parce que le pécheur ne peut pas qu'en etl'et, après être sortis de l'Église ca-
<oul d'un coup se porter à la praticjue des tholique, ils s'empressent à la mordre et à
*
vertus; le second, i\ faire le bien pour l'amour la lacérer. Ceux-là doivent être regardés

est, et typum gerit illius cœleslis arcani, in se- calori bonarum rerum repente esse non polest
cunda dicisione laudala est; merito ubi est tan- appetitus. Secundus, ut bona faciamus, propter
larum rerum doinicilium visuale vUiuttim. Ibi quod a vilupcrabili actione cessavimus. lu psal.
einm piscinam natatoriain in figura sacri baplis- Lvi, pug. in.
iiuitis ut ciirarct in/irmos desceiidens angélus Ecclesia nescit loqui, nisi
' quod expedit credi.
,

commovehat. Ibi Siloe (impcrante Domino) cœci PrcEfat. iu Psal. pag. 7.

teni-bras lavit, et damnatis oculis iucis donares-


* A'am sicut ubique dilalata est Ecclesia ita ,

tiluit. Ibi mensa Ctiristi ca'lestihus plena deliciis per orbem propngata sunl ejus sine dubilatione
spiritualiler saliiravil apostolos ; et ne nos ab judicia. lu psal. civ, pay. 3.36.
illu cœna niinqueremur inipasli, sacer calix et
s Constat enim de variis nalionibus Ecclesiam
communicationein nobis prœslilil et saiutem. Ibi Dnmini quasi ex diversis ftoribus, in una coronce
lapis durissimus vestigia piiKedemploris oslendil, specie esse formatam. In psal. Lix, pag. 188.
quando anle Pilatum judicem con^tilit audiendus. " Tunica vero illa quœ venit ad sortem ,
quœ
Ibi coliimna rcligati in se Dowini flagella lesla- ejus sanclilatem corporis ambiebat , quam dicit
tur. Ibi spinea curona cernilur, quam idio snlu- Evongelista desuper contextam fuisse per lotnm,
lari Dowino constat impodlanx. ul totius mundi caltioltca probntur Ecclet:ia^qn(P nullatenus hu-
aculei collecti frangerentur Ibiarundo servatur, .
mano discerpenda dalur arbitrio ; sed intégra at-
quœ t-apul Domini perçus it ut ipsum esse ini- que inoiolabilis divina semper largilate prœsta-
,

livm rerum terris omnibus rduitiaret. Ibi crux tur. IpSa est contexla desuper quam nemo divi- ,

gloriœ, loci yevercntiam consecra-


illa saiutis et dit nemo disrwnpit : sed perpétua, stabililate
,

vit. Ibi manel lancea, quœ la'.,:s Domini trans- firmissima in unilatis suœ robore persévérât ; de
qua ipsa Veritas dicit: Et porliE iuferi non prcEva-
foravit, ut nobis illius medicina succurreret. Ibi
credenteshodie ipsiuxsepulcra vivificani.Ibi resur- lebuut. In psal. Xl. pag. 70.
reclionis locus ad cœlos erehit corda lidelium.Ibi
>
Primo dixit : Eripu auimam lueam. Modo petit
Si n nie wonlium prœcipwts, ubi residentibus dia- liberari Ecclesia quœ est illi unica, id est catho-
cirnando clausisjanuis mirabiiiterSalva-
cipulisi'i lica, ut intelligatur doclrinas novas et conciUa-

tor iniratii; elcœlera quœ dives illapatria Domi-


bula perdilorum uuitatis rocabulo respuisse :
ni passione promeruit. lu psal. lxxxvi pat:. iT^. ,
hœreticos kic canibus comparons, qui cum de pe-
'
Cum credasunum ex Tri)iitatepassum.Cn^Mni\. iielralibus noslris e.teunl, Ecclesiam Dei mordere
in psal. XX, pag. ni. ac laccrare fc.'itinant. In psal. xxi, pag. 70. •
2 Dnobus modis vilam nostratn pia mater ins- " Ipai sunt filii alieniqui abEcclcsia mairecalho-
tituil. Primus est ut mala declinemus quia pec- ,
(tf()r!(m/((i6en(«rea;irnwei.Inpsol.(;xxxxiii,pag.i6i.
,

248 ISTOI RE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.


comme des enfants étrangers, qui sonl re- suprême degré du ministère ecclésiastique. 'iJ^'"'''"'-
gardés comme tels par l'Église, mère des L'évêque est a<[)[)i;U''sur-ins/tectcur,j>;ircc que
catholiques. Au reste ' , tout ce qui se fait d'unsiéçe élevé il garde comme pasteur vigi-
hors de son sein, ne peut se faire pour la lant, avec la grâce du Seigneur, le troupeau
gloire du Seigneur. Il est dit dans le psau- qu'il lui a confié. C'est pourquoi le nomd'éfé-
me ex vil* Nous vous bénissons de la maison
: que n'est pas tant un nom d'honneur que de
du Seif/ncur *, c'est-à-dire de l'Eglise catholi- travail, par l'oliiigation où est l'évêque de
que, de laquelle nous recevons le baptême veiller égalementsuilui-môme comme sur le

salutaire, la sainte communion, l'onction pu- troupeau dont il est chargi'-. C'était aussi l'u-
rifiante de l'huile sacrée, et toutes les vérita- sage de l'appeler 7>(?re\ en sorte que le fils de-
bles bénédictions. » venu évoque, était appelé le père de son père,
Cassiodore remarque sur cet endroit , que non par l'ordre de la naissance, mais de la
c'estavec fruit que le peuple fidèle reçoit la dignité. Les prêtres 'nous rendent Dieu pro-
bénédiction du Seigneur par la main des pice par les sacrifices qu'ils lui ollrent pour
évéques; et sur ces autres paroles du même nos péchés, comme la Divinité s'est rendue
p^i. civil, psaume Rendez cejour solennel par une assem-
: propice au genre humain, quand elle nous a
bléenombreuse jusqu'à la corne de l'autel, û d'il' donné Jésus-Christ pour prêtre et pour hostie
que l'on doit célébrcrles jours de fêtes ordon- tout ensemble. »
nées eu l'honneur du Seigneur et des saints; 9. "Il y a, poursuit Cassiodore, deux sacre- sor «•• "•

que les peuples les rendaient très-célèbres


',•
• .7,1 1 1*
nous délivrent' de la mort; 1 un est
» L
"^n"!!''
kipnm» n
<**

ments qui'
<ic

1 • f»6oiI«De* ; le
I
par de nombreuses processions qu'ils ac- ,
le baptême, dont la grâce nous conduit à la i-tcbeorip.DM

compagnaient de sentiments de pieté que ;


vie; car ce n'est pointparnosméritesquenous •"« *

le Psalmiste, en ordonnant delessolenniscr


y parvenons, mais nous y sommes attirés par
jusqu'à la corne de l'autel, semble condamner le bienfait de la miséricorde de Dieu, qui
ceux qui sortaient de l'Église aussitôt après pour empêcher que nous n'en soyons chas-
la lecture de l'Évangile, parce qu'en etlét sés par la grandeur de nos péchés, atfermit
ilsn'approchaient point de la corne de l'au- nos pas en nous tendant la main, comme il
tel,pour y recevoir le corps et le sang du fit ;\ saint Pierre pour le sauver du naufrage.

Seigneur, que l'on y distribuait dans les as- Le baptême nous rétablit dans la pureté * et
semblées solennelles. dans l'innocence qu'avait Adam avant son
snries roi. 8. (1 L'éplscopat ', dit Cassiodore, est le péché, parce qu'il efface non-seulement en

' Cœterum quidqiàd extra Ecclesiam catholicam grcgem, ipsius gralia suffragante ,
qua^i paslor
gerilur, nequaquam Dumiiii laudibvs applieatur. caulissinius alla sede cu^lodiat... Qunpropter no-
lu ijsal. cxvir, pag. 37i. nien istad non tam honoris est quani lahoris :
Benedicimus vos de domo Domini .. Ostenden-
» iMni qui alins speculnndos suscepil, se jugi débet
tes Domini benediclinnem dévoue plebiper antis- c.cciihationc conspicere. In psal. cviii, pag. 3r>4.

tiles salubrilcrdari.El ne hoc dubilanler accipe- ' Christus, Dominus dicitur David, secundum
res, dixil : De domo Uoiniui , etc. id est de Eccte- déliaient, qua creulor esl ipsius: quod ctiam in
sia calholica, unde salutarc bapirisma vaiit, unde hac noslra conversalione liodiequc conlingit ul ,

communicatio sancta prncedil , unde olei sacrait episcopus faclus, patris sui pater voceLur,
filius
unclione mundamur unde omnis denique bene-
,
non nasceiûii ordine , sed honore, lu psal. eu ,
diclio rera prœslalur. In psal. cxvii, pag. 376. pag. 3I>8.

' Constiluite diem soleiniiein etc. Psal. cxvii ,


Apte dicimus hoc de sacerdotibus, quolies per
^

27 , id est deliberata ciistodite senlenlia diem,


inimolala sacrificia peccalis nostris propUiam fa-
solemnem qui honore Domini et sanctorum con- ciunl Divinitalem... quomodo Divinilas prnpiliata
fessionc sacratus esl. ^n i.onfrcqueiilatioiiiluis, id est humano gencri, quando nobis et saccrdotem
est, processionihus crebris quas populi lurba ,
et hosliam ipsum contulilChrislum. lu psal. lxui,

condensai, et reddil celeberrimas riex'otione festi- pag. 199.


va. (juod vero addil : t'sqne ad cornu nltnris, ' Dii,o sunt sacramenta liberalionis noslrœ :
prohibentur aliqui forsilan fquod miUlis in usu primum quod nos per munus haptismalis rfucit
eslj auilita Erangelii leclionc dtscedere : nonenim ad ritam : non rnim illur noslris merilis perve-
ad cornu allaris accedtint, qui communicalionis nimus srd ijisius bénéficia n>iserationis aUrahi-
,

gratta non replcnLur. Hoc de islo altari xisnali ,


viur. Dcindc ne nos cjindc permittat cxpelli, qui
ntmihi vidftur, compeieuteraccipimiis, quod cor- gravihus ittiis probainnr onerali... ipse grcssus
pus et snnguinem Domini snlemni nobis freqiieii- nostros non sinil rowmoreri qui manuni suant
talione /arjidir. Cassiod. in psal. f.xvii, pag. 37(i. l'rtro ne mcigrretur e.tlen<lit. In psal. i.xv ,

EpiscnpalHS summus in licclesia gradus est.


'•
pag. 2U3.
Episcopus diclus super inspeclor, eo quod Domini " Istud lavacrum quod sic abltiU maculas pec-
,

[vi" SIÈCLE.] CHAPITHH MX. — CASSIODOUK. CIIANCKLII-:». 2t9


mais encore les pé-
nniis le pdclid oi'iirincl, aux degrés du ministère ecclésias-
ilill'é'rents

nous avons commis parnotrc propre


clu'S i|iic tii(iu'; mais nous la faisons piihliipicmonl
si

volonté, l.c pérlié (pie nous appelons orii^i- l)ar l'ordre de r(''vê(]uc, son jugL'iiu'nt de-
nel, provient en (pie^pie sorte notre nais-
'
vant être inviolable et diMiiiitif, [larce qu'il
sance, c'est-à-dire que nous le contractons le rend au nom
par l'autorité de Jésus-
et
dès le moment que nous sommes formés Christ, les canons nous défendent l'entrée
dans le soin de nos mères. Personne n'en est dans les honneurs occh'siasliipios. »
exempt; les entants y sont sujets de même Le psaimic (jue Cassiodore dit en cet en-
que tout le reste des hommes mais enfin ce :
droit pouvoir être répété par les pécheurs
péché s'etlacc parle baptême. C'était l'usage qui demandent indulgence, est le psaume l''.
autrefois de chanter le psaume XLi' à ceux Il parait, par ce qu'il ajoute, quelévèque le
que l'on allait baptiser afin que se défai- , récitait sur le pénitent qu'il mettait en péni-
sant de tous les sujets de tristesse que le tence publique. enseigne que les plus
Il

monde fournit, ils se hâtassent d'aller au Sei- saints ^, ne pouvant éviter entièrement le
gneur avec une entière pureté de cœur'. Ce péché en ce monde, quoiqu'ils y vivent avec
psaume est propre, en ell'et, à inspirer do beaucoup de retenue et de dévotion, il est
bons désirs. L'autre moyeu d'etfaccr nos pé- nécessaire qu'ils aient recours à la prière
chés est d'en faire pénitence, de les pleu- pour obtenir l'absolution de leurs fautes par
rer ' et de s'en donner de garde à l'avenir. la miséricorde de Dieu. Mais il entend par
La pénitence est utile dans tous' les temps ces péchés des fautes légères comme serait ,

de la vie, même h la mort', l'Évangile nous de tenir des discours inutiles, de trop s'oc-
apprenant que ce fut ;\ cette heui-e que le cuper du lendemain, d'être surpris de quel-
larron reçut sur la croix la rémission de ses ques pensées peu convenables et autres ,

fautes. Il est permis de demander * souvent choses semljlables. Il ajoute qu'un remède
à Dieu pardon de ses péchés, et d'en faire
le assuré contre le péché, est de se tenir en
''

secrètement et dans soi-même, une péni-


, la présence de Dieu que c'est un très-grand
;

tence continuelle. Cette sorte de pénitence péché " d'être occasion à quelqu'un d'en
n'empêche point qu'on ne puisse être promu commettre, comme ce n'est pas un petit mé-

catorwm, salutiferi baptismatis cognoscitur indi- ' Audiant qui pœnitentiam agere in vitœ suce

care purilatcm: nbi sic omnia et originalia de- termina pravn voluntate desperant, cum in evan-
licta, el propria admissa mundantur ; ut itlœ nos gclica leclione cognoscant latroni alfixo jam cruci
restituât puritati in qua priinus Adam noscitur momcntanea celeritate subversum. lu psal. lxxxv,
esse procreatus. In psal. l, pag. 160. pag. 275.
' Prœceniri diciinus. quando aliquid nos anti- Uunc psalmum licet iterare, nec nobis impe-
5

cipare dignoscitur ; ni est illc reatus originalis ditad honores ecclesiasticos expetendos : si vero
peccati qui nos antequam nascamur ub ipso , a sacerdole supra nos pœnilenliœ voto dicatur ;
conceplu reddit obnoxios. Unde Prophela : Ex guoniam ex persona datur, juste a canonibus
iniiinilatibus conccptus suiu In psal. xv, pag. 53. : vetamur ultra accedere. Quidquid enim inChristi
Oninis viveus. Psal. c:xLn 2. llominem significat , nomine percipimus inviolnbile nobis et definili-
.

gcneralem, ubi el infanlum rnta cmcluditur, qui vum decet esse judicium. Ita fil vt pœnitentiam
originali peccalo nisi aqoa regenerationis abluan- unumquemque et apud se liceat agere, et quando
tur obnoxii sunt. In psal. cxui , jiag. 4.'i7. (Jua-
, per sacerdotem data fuerit non nos permittat ,

propter ah originali peccato, unde usque ad sœ- ullerius ad ecclesiasticos honores accedere. In
culi finem vivens mitliis excipitur. In psal. xvui psal. L, pag. 165.
pag. Bl. Opinione qunque fertur aliquorum, quod * Num et sancti viri cum devota se conrersa-
Creator, sictit de corpore noslro semen carnir; tione tractare vidcantvr tamen culpas ex toto
,

educil, ila el rie anima; qualitate anitnamnovam declinare non possunt, quando et oliosus sermo
passe qcnerari ; qualenus originalis Mius peccati, reatus est et in crastinum cogitare peccatum est,
quod calholica con/itelur Ecctesia per traducem incongrua subito cogitatione compleri, et cœlera
Micli rea possit ostendi, nisi dono baptismatis hujusmodi. In psal. cxxix, pag. 425. Una ergo est
fueril absoluta. Cassiuilor. De Anima, cap. vu ,
securitas in hoc sœculo iHventi jugiler piis pre- ,

pag. :199. cibus inclinari; ut qui a culpa esse non Jiossu-


5 hodieque bunc psulmum boni desiderii
Jdi'o mus liberi,per munera pielatis mereamur ubsolvi.
suasorem alquei istitulorem. baptizandis congrue Ibid., pag. 424.
décantât Ecchsia ; quattnus a tristitia hujusmodi ' j\am qui illum {Deum) semper intuetur acie

olienati ad Dominum tota mentis puritate festi- mentis, nullitenus ad delicta coni^ertUur. In psal.
veut In psal. xxxxi, pag. 135. XV, pag. 49.
' Perfecta po'nitentiavst futuracavere peccata, * Unde apparet gravissiinum esse peccatum
el lugere prœterita. lu psal. l, pag. i(jO. quando aliquis occasionem prœbuerit, unde alte-
,

250 HISTOIRE GÉXl'RAI.E DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.


ritede donner avec le secours de Dieu, un charité et la pénitence. Il en ajoule un hui-
bon exemple aux autres que celui qui pè-
;
tième, qui est la communion du corps et du
che perd la grâce du Saint-Esprit", que la saug de Jésus-Clirist, lorsqu'on s'en appro-
fragilité liuniaiue ne peut conserver, lors- che dignement.
qu'elle pèche, D'où vient, ajoute-l-il, que
(i 10. Car il ne doute point que nous ne bu-
David qui avait sans doute connu qu'il avait vions * son sang et que nous ne soyons
perdu la p-rAcc du Saint Esprit, disait Dieu ti : nourris de son corps dans l'Eucharistie, et
licndcz-mni la joie de votre (jrûce salutaire? que ce ne soit à la sainte communion que
Il disait : Rendez, parce qu'il s'était aperçu l'on doive rapporter ce qui est dit dans l'É-
de je ne déehoi de grâce, dont en
sais quel criture : Dieu leur a donné le /xtin du ciel.
elTct on déchoit d'autant qu'on se rend ré- L'homme a mangé le fjain d"s anges, u Jésus-
préhensihlc dans sa conduite. » Cassiodore Cluisl, dit-il. prêtre éternel, selon l'ordre
de
regarde comme une suite nécessaire du pé- Melcbisédech ", a consacré son corps et son
ché originel ' les désirs illicites qui naissent sang salutairement dans la distribution du
en nous; mais il dit en même temps que pain et du vin, comme il le dit lui-même :

nous ne sommes point nécessités d'y con- Si L-ous ne mangez la chair du Fils de l'hom-
sentir, et que les saints, au lieu de s'y lais- me, et ne buvez son sang, vous n'aurez point
ser emporter, les répriment avec la grâce de la vie éterndle. Mais l'esprit de l'homme ne
Dieu par la pureté de leur coîur; qu'au sur- doit rien concevoir de sanglant, ni de cor-
plus, ce qui se trouve de défectueux dans ruptible dans cette chair et dans ce sang ;

les mouvements déréglés du cœur ou du mais les regarder comme la substance vivi-
corps, auxquels on n'a point consenti, s'ef- fiante et salutaire qui a été faite la propre
face par l'oraison sainte, c'est-iWire par l'O- substance du Verbe même, par laquelle sont
raison doiainicale et par le signe delà croix. accordés la lémission des péchés et les dons
Il dit que les anciens Pères' ont reconnu de la vie éternelle. C'est dans l'immolation*
sept moyens de nous procurer la rémis- solennelle du corps et du sang de Jésus-
sion de nos péchés, savoir le baptême, le Christ, et non dans celle des animaux, que
martyre, l'aumône, le pardon des injures, consiste le sacrifice de l'Eglise; et elle fait'
le soin que l'on prend de convertir ceux qui le sujet de l'assemblée des fidèles. C'est le
sont dans l'égarement, l'abondance de la corps du Verbe fait chair, appelé temple

rius conscientia pollualur : sicul necilla rcsparva abundantiameliaritatis: septimo,per pœnilenliam.


est, qiiœ juvanle Domino bonisprœslal exeinplum. Addenda qiioque est commu7Ucalio corporis et
In ps.il. Lxxin, pa^'. 23't. sauguinis Oomini nostri Jesu Christi; cum (amen
> l\^;^)|^e dixit, quia sibi nescio quid graliœ se/i- digne suscipilur. lu psal. vi, pag. 2i.
seral imniinutum ! (Juoniam ab illa gratia salu~ * Pancm
cœli dédit eis. l'aucin angolorum man-
tari tanlum quis recedit, quantum se rcprrliensi- dniMvil Imino. Toltim ad communionem sacram
hili coïiversalwne Iractavcrit. Kam cum dicit: conrenienler referlur, quando et rjus sanguiiiem
Rcdde milii la'litiam salutaris lui, gratiam se bibimus , e( de ejus corpore saginumur. In psjil.

Sidrilus Sancii sine dubio amisissc cognoveral i.xiv, pafj. 20).

quum fragilUas humana non pniest tiabere ctim ' Seqnilur : Tu es sacertlos in sternum seciin-
peccai. lu psal. l, pat;. ll)2. dum ordineiu Prophela promi-
.Melcliisedei-li. ifoc
2 Sunl illicila desideria, quce originalis peccali sisse Filio commémorât l'atrem : cuienim potcst
necessitale comniitlimus sed in eis comensu ani-
; reraciter et evidenter aptari yiisi Domino Saha-
mi non tencnntr , in islis mens heala non amhii- tori, qui corpus et sanguinem suum in pani.s et
lal, quœ dono Domini cordis probilale superan- eini erogatione salutariter consecrovit ! Sicvl
tur ut vcrbi gratia repente pnlclirum aliquid
, , ipse in Erangelio dicit : Nisi inanducaverilis cnr-
conrvpisrere, cibiim desideranter expelere bonis , M(!ni l'ilii liuMiiMis, et liihoritis cjns sniisnineni non
odoribus commoveri, iniqua subito suggestione lialjcbili.s vitiun œtcrnuni. Sed in ista carne ac
confnndi, et tiis similia quœ oratione sancta et sanguini nU cruentum, nil corruptibile mens hu-
cruci signnculo dcstruunlur : Un fit ul etpeccala mana coneipiat; sed vivificalricem subslontiam
sancti suggestione carnis liabeant ; et lamen dum atque salularem, et ipsius Verbi propriam faetam,
eis minime relaxatur effectus, ea non operari ve- per quim jieccalorum remissio , el adcrnœ vitœ
raciter lestimeutur. In psal. rxviii, pag. .378. donn prasiantur. In ps.il. cix, pay. 3o9.
Majores noslri sejitem modis peccala nobis
' " Sncrificium sanclœ Ecclesiœ non- hoslia pe- ,

dimiili possc dixeriinl : primo, per hapli-sinum : cudum sed iste ritus nccipiendus est qui nunc
,

secundo per passionem martyrii: tertio, per


,
ngilur rorjioris et sanguinis immolnlione so-
eleemosynnm : quarto, per hoc quod remitlimus Icmni quem veninrum prœvidebat. In pful. xix,
peccala fralribus noslris : qmnto,cum converterit pag. 62.
quis peccalorem ab errore viœ suœ : sexto per ,
' Uos dicil non sanguine pecudum , aut victi-
[vi'siKCLE.] CHAriTRE MX. — CASSIOPOnK, CTTANCEUER. -irA

dans l'Ecriture, que l'iîglisc ndoir '


Ions les qui nous aide, qui nous fortifie, qui nous
jours, loisqn'eilc ^l5v^re son corps el son couronne. » Pour en marquer l'ellicacilé ,

.sang parmi los sacrements do ce très-haut Cassiodore la compare aux llèclies ai'jues et
mystère. » Irès-puissantes donl il est parle' dans le psau-
11. « Quoique celle Église soit une, dit me XLiv, 6: « Les llèches aiguës, dit-il" ,

Cassiodore, elle ' a toutefois divers ollices sont les paroles du Sauveur ,
qui percent
dislinpuês par dittVrenls degrés d'honneur, d'une manière des
ulile et salutaire, le cnjur
et dont l'ordinalion esl aussi dillerenle; elle houunes. Ces mais pour
llèches bicsscnl ,

a des lecteurs, des sous-diacres, des dia- guérir; elles frappent, mais pour délivrer;
cres, des prêtres et des cvcqnes. » elles aballent, mais pour relever. Ces flè-
12. « Par le péclié d'Adam', dil-il encore, ches sont très-puissantes, parce qu'aucune
nous avons perdu la liberté de faire le bien, matière, quelque dure ([u'elle soit, ne leur
mais elle nous reste pour faire le mal, c'est-.''i- résiste quand Dieu lus lance de manière
,

dire pour abandonner notre Créateur et qu'il veut qu'elles produisent l'effet qu'il a
nous porter au crime. La grâce seule de résolu.!) En expliquant le psaume L", il com-
Jésus-Clnist nous peut rendre la liberté que bat ainsi les demi - pélagiens :Lorsque
«

nous avons perdue. Ceux-là écoulent' avec vous entendez dire' que le Seigneur pré-
soumission la loi de Dieu et de ses précep- vient, édifie, conduit et éclaire, sans qu'au-
tes, que Dieu fait lui-même écouter ceux- ; cuns mérites aient précédé, quel commen-
là ont des désirs saints et utiles à leur salut, cement pouvez-vous vouaattribuer qui vous
qui les re(;oivcnt de sa main bienfaisante et soit propre, sinon celui-là seul qui attire sur
libérale : car depuis que la nature humaine voire orgueil une juste condamnation ? Vous
a été corrompue par le péché, c'est Dieu opposez plusieurs autres passages pour prou-
qui met dans notre libre arbitre, le bien qui ver que les hommes ont d'eux-mêmes le
s'y trouve, et qui, par sa bonté, lui donne commencement de la bonne volonté, pour
de le pratiquer. Sa grâce, qui n'est appelée recevoir ensuite le secours de Dieu, en sorte
ainsi ' que parce qu'il la donne gratuite- que ce soit nous qui soyons la cause de son
ment, est la grâce de Notre-Seigneur Jésus- bienfait, et non pas lui-même ce qu'il :

Christ. C'est elle qui prépare notre volonté, n'est pas permis de dire. Si le commence-

marum consuctudine congregandos, sed immola- Gralia eiiim dicitur gratis data: Si autem
*

lione scilicet corporis et sanguinis sui quœ liiima- gratia ait Àpostolus
,
non ex operilius, alinquiu ,

nuni genu^ loto orbe celebrala salvavil. lu psal. gratia jam nou est gratia. Ipsa est quippe Domi-
XV, pa^'. 48. ni gralia, quœ nus prœpftrat, adjuvat, corroborai,
' Templtim sanctutn est Domwi heatw [ncar- et coronal. CassioJ. in psal. lxxxiv, pag. 271.
quem etiam nunc quolidie ^ Sagittœ accutœ sunl verbaDomini Salvatoris,
nationis adventus ,

adorât Ecclesia, dum corpus et sanguinem ipsiuii hominum corda saluUiriler infigenlia qute ideo ,

inter summi iiiysterii sacramenta vewratw lu vulncrant ut sanent ideo perculiunt ut libèrent,
,

jisal. i;xxxvn, pag. 44."i. ideo proslernu7tt ut erigunt... Pntcnlissimœ quia


' Distribuit aulem gradus Ecclesiœ qui officia nulla mis niatrria quamvis durissima probalur
ejus distincta ordinatione dixponit suvt eiiim in , ohsistere ,
quando eis insitutn est effectuin suœ
illa leclores, sunl subdiaconi, sunt diaconi sunt , volunlalis implerr. In psal. xxxxiv. pag. 142.
presbyleri, sunt episcopi ; et quainvis nna sit Ec- "
Cum audinlis prœrenire, œdifîcare, dirigere,
clesia , officia lamen contiiiet honorum varietate eterigere Doiniiium.absolrere et iUnminare nullis
distincta. In psal. XLvii, pag. 150. prœc denlilius merilis, quid ibi proprium cœpisse
Esl quidem in mnla parte execrahilis littcrttts
' cognoscilis, nisi illud Uintum unde prn veslra .tu-
arbitra, iit prœvaricalor Creatorem deserat, et perliin juste daivnemini ? Sed diritis forsitan pro-
ad vitia se nefnnda concertât. In bona vero parte phetam Isaiani sic liberum arbitrium comprnhare:

arbitriiim liberum .idam peccante perdidimus ,


volueritis bona terrte, comedetis, etc. Sed hœc
.'^i

ad quod nisi per Christi gratiam redire nnn pos- el his similia pcssima intenlione sentitis ut cre- ,

sumus, dicente Apostolo : Deus est cnim fjui ope- datis homines a semelipsis bonœ voluntatis ini-
ratiir in vobis et velle et perficere pro bona volun- tium sumere el post adjutorium divinitatis ac-
,

late. lu psal. r.wn, p.ig. a74. cipere : ut quod dici nef'as est nos scinius causa .

* IIU obedienter atidiunt quos ipse facit au- ,


ejus beneficii. Sia nobis essct bonœ
non ipse sui...
dire: illi pruficne cupiunt qui munus dicinitatis ,
voluntatis initium nos magis poneremus funda-
,

accipiunt: nam post litiatam liumani generis nienluw, uhi wdificaret Dominus, quod certenulla
naturam liberi arbilrii salutiferam partem el
,
potest mentis sanitas approbare. Qua proplcr de-
Douiinus tribuit, ei operationem ipsiii^ sua pie- sinite asserere quœ non potestis implere. In psal.
tate concedit. In psal. L, pag. t61. L, pag. 161.
252 HISTOIRE GKNKRALH DES AUTEUllS ECCLESIASTIQUES.
ment de la bonne volonté venait de nous, ayons la volonté de le prier, il se répand
nous jetterions nous-mêmes les fondements dans nous pour former cette volonté. Sa vo-
de notre salut, afin que le Seigneur élevât cation " précède tout mérite; elle ne nous
au-dessus de l'édifice, ce qu'on ne peut pen- trouve pas dignes, mais elle nous rend tels ;

ser ni approuver sans folie. C'est pourquoi, c'est pour cela qu'elle est gratuite, autre-

cessez de vouloii' établir une chose impossi- ment elle serait juste. C'est la bonne volon-
ble. » té de Dieu qui nous appelle et qui nous at-
Il cite contre eux ces paroles de saint tire. Nous ne pouvons rien penser ni faire

Paul Qui a donné à Dieu quelque chose le


: d'utile, si nous ne le recevons de l'auteur
premier jxiur en prétendre i-écom/jense? Ht cel- de la bonté. Il n'y a point de dilférence de
les de saint Jacques: Toute grâce excellente et méiite dans la vocation; elle est gratuite
tout don parfait, vient d'en haut, et descend du pour tout le monde H en est de même* "".

Père des lumières, « à qui, reprend Cassiodore, de l'élection personne ne peut se flatter
,

personne ne peut otlVir rien de bon, s'il ne


' d'avoir été choisi pom- ses mérites, pas mê-
l'a auparavant reçu de sa miséricorde, par- me les apôtres, à qui Jésus-Christ dit dans
ce que riiomme ' n'a rien de bon que ce l'Évangile Ce n'est pas vous qui m'avez choi-
:

qu'il a reçu du Seigneur, qui est le colla- si ; moi qui vous ai choisis, n
c'est

teur de tous les Itiens, et qu'il ne peut ni Cassiodore prenant i\ la lettre ces paroles
accomplir ' , ni même commencer le bien du psaume lV Vous les sauverez pour rien,
:

sans le secours d^e Jésus -Christ. Malheur dit qu'il est constant ' que les pécheurs sont
donc ' à ceux qui donnant trop au libre ar- sauvés pour rien parce qu'il ne l'est pas
,

bitre, pensent qu'il est en son pouvoir de moins que la conversion leur est donnée de
mériter quelques dons de Dieu. C'est Dieu Dieu par une bonté toute gratuite. « Qu'a-
qui nous donne de vouloir le bien, et qui vait, dit-il, mérité le larron, pour entrer si

l'accomplit en nous, afin que nous soyons vite dans le paradis? Qu'avait fait le publi-
dignes de ses récompenses. Qu'avez - vous, cain, qui sortit du temj)le absous tout à coup
dit l'Apôtre, que vous n'ayez reçu? Si vous de ses péchés.» Mais il n'exclut pas pour
l'avez reçu, pourquoi vous en glorifier comme cela les travaux de la pénitence, comme on
si vous ne l'aviez pas reçu ? Que Ihérésie pé- l'a vu plus haut. Ce qu'il veut dire, c'est que

lagienne cesse de renouveler ses calomnies. celui qui récompense le pénitent, est le mê-
Nous ne pouvons avoir rien de bon en nous- me qui lui donne la volonté de se conver-
mêmes, si nous ne l'avons eu de Dieu. Dans tir.

toutes sortes de bonnes actions ^ la grâce 13. Il enseigne qu'après la mort '", l'Ame dlé àe* Mini.
a,aot I* jnii(
de Dieu nous prévient , et afin que nous ne sera plus sujette aux sensations, qu'elle du jucentnt.

> Nullus Mi quidquam offertprimus quod bo- ' Domini omnc merilum praxcdit, nec
y'ocalio
num est, nisi hoc cœlesti munere concedalur. In invenit dignum sed facit ; iJto enim gratuita, alio-
ps.nl. XX, pag. 64. quin jusla dicerelur. Hiec est ergo bona volun-
» Xon eniin quidquam ex se prnbi humanilas tas quœ nos vocal et allruhil; nec quidquam
,

hahet , nisi quod a Domino bonorum omnium proficuum valemu.i cogilare vel facere, nist hoc
susceperit largitore. In psal. x, pag. 40. acciiiinmtis a bnnitatis autorc , sicul Aposlolus
' Rêvera soIujs est Chrislus sine quo bonum , dicil: Non cnini possnnius cogitarn aliquid a nobis

aliquod vcl incipere vel implerc imbeciltitas hu-


, quasi ex nubis , s£d suffirientia noslra ex Ueo est.
mana non prrrralet. lu psal. xin pag. il. In psal. V, pag. 23.
"
' Vœ iUis qui liane rcgulam déclinantes in ho- yuoriiani vuliiit mc,id est.quoniam me elegit,
minis putant arbitrin consistere ut mereatur ad , qtti gratis vocal universns. In ]>snl. xvir, pag. 5.'!.

aliqua Dei munera pcrvenire. Ipse enim donat, ' Sed Vide quid ail : ICIfgisti. ul hanc eleclionem
ut bona velimus:ipse perficit, ni ad ejus prœmia nemo suis merilis applicarel : sicul ipse in Evan-
pervenire possimus : quod Aposlolus lucidissime gclio di.xil: Non vus uiu elegistis
8ed ego elrgi ,

declaravit .'Quid antcm liabfis quod non acccpisti ? vos. In psal. LXIU, pag. i!(9.
Si aiiteiu arctipisti, qiiiil gloriaris quasi non accc- " ConsliU ergopro uiliilo peccalores salvos fieri,

Desinal rrgo pelagiann hicresis redivivas


peri.-;. quardo crrtuiii est convcrsionem gratuita largi-
suscilare ailvmniai. I^'iliil boni er nobismelipsis lale concedi. In psal. lv, pag. m. Quid enim me-
habere possumus nisi hoc a Domino sumpscri-
,
ruit latro ul sic paradisum relocUer iutroiret 1
mus. In psal. LVin, pag. 18j. (juiil jniblicanus qui repcnle dr Icmplo absolulus
' In omni hnno Domini gralia prœvenimur ; et criril ? Ipse drdil confis.-:ionis subilum vottim,
ut vclimus rogare, ipse se dignulur infundere. In qui donnvit et pnemium. Ibid.
psal. cxvui, pag. 379. " Aam eu m fuerimus hac luce imperio Creatorit
[Vl* SIKCLE.] CHAPITRE XI\. — CASSloliOlli;, ClIAXCKI.IKit, 253

n'(^xci'C(î qu'ù cause ilo son corps; (jifalors Cassioilmt! élait si persuadé ([ne les saints
clic no sera môme plus ni bien ni mai, (|uc jouissent dès à présent de la ndicité dans le

seuli'ini'nl elle i''i)rouveia luu' conlinnelle ciel, que dans son livre de l' Inslitulion il ,

douleur de ses mauvaises actions, ou ([u'elle invoque' Denys le Petit, ne doulant point
ressentira de la joie du bien qu'elle aura lait ;
(pi'il ne dans la gloire
l'iil auliement il ,

qu'elle demeurera dans cet état jusqu'au n'auiait [)innl eu recours il son interces-
jour du jugement, auqnel nous recevrons la sion.
récompense de nos univres bonnes ou mau-
vaises, quand par la voix du Seigneur, nous ARTICLE IV.

aurons été ou n'qjrouvés ou admis au royau- jugement des écuits de cassiodoue EDITIONS
me éternel. Mais il semble dire eu un autre qu'on en a faites.
endroit, ipie la gloire des âmes des saints
est suspendue jusqu'au jour du jugement 1. 'J'(mt esl intéressant dans les ouvrages ^
('* tcri'^ do
dernier. C'est en expliquant ces paroles du de Cassiodore. Ce sont on des maximes de '

psaume XXIV" Son ûme jouira des biens dnns


: la plus sage politique, ou des instructions de

son séjour: « La félicité, dit-il, qui est promi- morale la plus pure, ou des leçons pour s'a-
se aux saillis après la résurrect'on, ne sera vancer dans la connaissance des arts libé-
pas accordée' aux âmes des justes, sitôt raux ou des règles pour s'appliquer avec
,

qu'elles seront dépouillées du corps, ce qui fruit à l'étude des divines Écritures, ou un
n'empêche point le Propliôtc de dire que narré fidèle d'un grand nombre d'événements
l'âme du juste demeurera dans la jouissan- coiisidi'raliles de son temps. Il fut tout â la
ce des biens, parce que les âmes des saints fois grand politique, habile philosophe, sa-
se repaissent du plaisir de l'espérance très- vant interprète , excellent orateur, historien

certaine qu'elles ont de la récompense â ve- exact et bon critique. Ajoutons qu'il fut aussi
nir, quoique cette récompense soit ditlerée.» bon théologien puisqu'il s'est expliqué sur
,

11 dit ailleurs % que la gloritication de Jésus- la plupart de nos mystères, d'une manière
Christ, môme considéré comme chef de tous qui ne laisse rien à désirer. Son style se res-
les fidèles, a été dilférée pendant celte vie, sent toutefois de la barbarie de son siècle ; ses
et que la gloire de tous les fidèles est en- lettres surtout sont chargées de cadences,
core aujourd'hui suspendue jusqu'à ce qu'ils de rimes, de pointes, et de termes qu'on ne
arrivent la récompense de la résurrection.
i^i connaissait point dans la belle latinité. Mais
Mais il est aisé de voir que Cassiodnre ne la fécondité merveilleuse de pensées qu'on

parle en ces endroits que de la félicité par- y trouve leur noblesse, leur élévation, le
,

faite, qui est, comme il le dit lui-même, y;/'o- tour leur donne, ctiaccnt
fin et délicat qu'il

mise aux saints après la résurrection. « Cette en quelque sorte ces défauts. Ses Commen-
félicité, poursuil-il, empoi'te nécessairement taires en ont moins parce que le style en
,

celle du corps comme


de l'àme. Les celle est plus naturel et plus coulant son traité de :

saints n'en jouissent aujourd'hui que selon l'Ame est écrit avec beaucoup de netteté et
l'Ame et non selon le corps, qui attend sa d'érudition, demême que celui de l'Instifu-
récompense, et qui ne lui sera donnée qu'a- qui sera toujours un monument précieux
tion,
près la résiurection. Ainsi, leur félicité n'est pour tous ceux qui désirent s'instruire dans
pas encore consommée; elle n'est pas par- la science de l'Écriture sainte, ou qui ont
faite. Il en a été de même de Jésus-Chrisl intérêt de la procurer aux autres.
pendant sa vie sa glorification n'a été ditïé-
: 2. Les plus anciennes éditions des lettres
ses oiivr.'.^e
rce que par rapport à son coi-ps.» Au reste, et des autres ouvrages de Cassiodore sont

exuli, simul corporis appetitiones et imbecillitates modo (amen futiiri prœmii certissima spei delec-
ainittimus.... MMl
boni malique facienius , sed lalioiie iiascuiilur. lu p<al. x.'îiv, pag. 78.
vsque ad tempns judicii.aut de actuuin pruritate s
Ui'pulisli nns, sir/niftcdt distulisti
quia et ip- :

mwremur, aut de operalionis noslrœ probitate suni ad ghrificalwnem suam


constat esse dilatum,
lœtemitr. Cas?ioJ. De Anima, cap. xii, pag. Cl)3. cum in hac rila moraretur, et omnium fidelium
' Auiiiia ('jus in bonis Jemorabitur quia juslis , hodicque gloria suspendilur donec ad resurectio-
honiinibus exiitis corporenonstatiin perfecla bea- nis prainia veniatur. In psal. cvii, pag. 552.
titudo datur. quœ sanctis in resiirreclione promit- ' Intcneniat pro nobis qui nobiscum ororc
titur; anitnam tamen ejus dicit [Propliela] in bonis consueverat,ut cujus oralione hic sumus suffulti,
passe remorari, quoniam elsi adlmc prœniitt illa ejtis nuHC possimus merilis adjuvari. Cassiod. In
sunpensa sunt quœ ntc oculus hominis vidit....
,
Instil., cap. xxni.
254 HISTOIRE GÉNKRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
celles de Paris eu 1589 et 1509 on les réim-
: par les soins de Mariangélus Accursius. On
prima à Genève en 1009 et 1050. Les éditions peut consulter sur fous les ouvrages de Cas-
de Paris sont de Guillaume Fournier, pro- siodore la Préface de dom Gare! mais sur-
, ,

fesseui' en droit à Orléans, qui les a enrichies tout la Vie que dom Denys
de Sainte-Marthe
de notes. Brosséus a fait celles qui se trou- en a donnée en 1094, A Paris, chez Coignard.
vent dans les éditions de Genève. Doni Jean LcsCommentaires sur les épîtres des apôtres,
Caret en fit une nouvelle édition qui fui im- surleursactes et sur l'Apocalypse, ijui avaient
primée à Rouen en 1679 aux frais de Bil-
, été perdus pendaut plusieurs siècles, ont
laine et de Dezalliers, libraires de Paris elle ; été retrouvés par M. le mai quis Maffeï, dans
a été remise sous i)resse à Venise en 1729 ; la bibliothèque publique de Vérone, et im-
l'éditeur a mis eu lèle la Vie de Cassiodore, primés en cette ville en 1732. [ Les tomes
tirée de ses propres écrits, et une dissertation LXIX et LXX de la J'utrologie latine contien-
où il entreprend de faire voir qu'il a été reli- nent toutes les oiuvres de Cassiodore publiés
gieux de l'Ordre de saint Benoit. Cette dis- jusqu'à ce jour. On y retrouve les commen-
sertation est suivie de divers t('moit:na£;es taires publiés par Malleï, un fragment des
que plusieurs auteurs célèbres ont rendus au auteurs qui existaient l'époque de Cassio-
;"•.

savoir, et à la vertu de Cassiodore.Les douze dore d'après Maï, tom. V Spicileg. roman.
livres de l'Histoire tripartite parurent à la pag. 157-100. C'est un supplément au chapi-
suite de l'Histoire d'Eusèbe, traduite et con- tre XVI du livre de l'Institution de cet auteur
tinuée par RulUn, chez Frani^ois Réynault, et qui prouve que le chapitre imprimé est
sausdate. Il fuient mis eu français par Louis rempli de fautes. C'est un service rendu que
Cyanéus, et imprimés en cette langue en d'avoir ainsi rétabli le nom des auteurs et le
1508, chez Gille Gourhin. Panvinius Onu- titre des ouvrages qui existaient au temps
pbrius dans son Appendice sur les Fastes con- de Cassiodore. Ang. Mai a encore publié deux
sulaires à Venise eu 1558, a donné la Chro- autres fragments qu'on ne trouve point re-
nique de Cassiodore ses Commentaires sur
; produits dans la Patroloqie. Le premier est
les Psainiies furent aussi imprimés si'paré- un supplément au livre de A rt. et disripl. lib.
ment à Paris en 15^9; maison ne leuia pas litt.; il se trouve au tom. III des Clnssici nue-

donné place avec les autres écrits de ce Père tores, pag. 358, 3G4. Le deuxième fragment
dans le tome XI de la Dibliotlièque de Lyon. est tiré d'un discours qui est attribué à Cas-
Il y a une édition du traité de /"^?He avec les siodore, Scriptor. veter. collectio, pag. 43.]
douze livres des lettres à Ausbourgen 1533,

CHAPITRE XX.

Justinicn , empereur.

lÉcrivaiu grec, luort en uCG.)

1. Jusiiuien, fils de Sabbatius et de liigli- couronner avec sa femme Théodora, le pre-


de jii&tiuiuti.

niza ou Vigilantia, naquit dans la Dardanie mier jour d'avril. Justin ("tant luorl quatre
vers L'empereur Jusliu, souuuilo, le
l'ail 'i83. mois ajirès, Justinieii se trouva chargé seul
fit élever avecbeaucoup de soin, puis il l'a- du gouvernement de l'Empire il avait qua- ;

dopta piuir son lils. Eu 519, il le nomma rante-cinq ans lorsqu'il y parvint, cl en r(''gna
maître de la milice, et l'envoya en Orient trenlc-iKuif. Pendant tout s(ui règne, il fit pa-
avec une aimée (outre les Perses, sur les- raître un grand zèle pour la religion; maisca
quels il cul de l'avantage. Ayant été fait con- zèle ne fut pas toujours accompagné de pru-
sul en 521 il lit représenter à grands frais
, dence. Justiiiien causa beaucoup de maux à
des jeux et des spectacles pour illustrer son l'Église ])ar son impiii'tiide et ])ar sa curiosité
consulat. Il fui ensuite ('levé à la dignité de sur les matières de la religion. On le met or-
palrice. En 527, l'empereur Justin se sentant dinairement au nombre des écrivains ecclé-
près de sa mort, le déclara Auguste, et le lit siastiques parce (pi'il a laissé quantité de
,
[Vl- S1KC1.E. CHAPITRE XX. — JLSTI.NIEN, KMPKriEUll. 255

inouiiiuciils qui concernent la loi et la disci- Sainte-Sophie, au deii'i de soixante prêtres,


pline de l'Eglise, ([noii|u'ils soient moins son de cent diacres, de quarante diaconesses ,

ouvratîc f|iie celni des plus famenx juris- de quatre-vingt-dix sous-diacres, de cent dix
consultes , et des principaux olUciers de son lecteurs, de vingt-cinq chantres et de cent dix
Empire , ou des évèques qu'il employa à portiers. Il y avait plusieurs clercs qui, mé- fie. IT.edit.

ce travail. prisant les églises pour lesquelles ils avaient Wr. .^n lO.'t
apud Vitrij.
l^titj
iD-lliiicn
lie

:
2. Dès le commencement de son rèpne, il été ordonnés, employaient toute la protec-
Corp^dudroUi
forma le desseiude réformer les lois romaines. tion qu'ils pouvaient avoir pour passer à un
A cet ellet, il fit composer un code des cons- clergé plus nombreux. Cela leur est défen-
titutions choisies des empereurs précédents. du, parce qu'on ne pouvait douter que leur
L'ordre eu fut donné en 528 et exécuté en , démarche n'eût pour motif l'ambition ou l'in-

529. Il fit ensuite un corps de tous les ou- térêt. Il défendu de multiplier le
est aussi
vrages les plus utiles des anciens juriscon- nombre des clercs au delrt de ce qu'il en
sultes, dont toutefois il se contenta de tirer faut ordinairement pour le service de \'E-
des extraits, qu'il fit rant^er sous cert-ùns ti- glise. Si elle a du superflu après avoir fourni
tres. Il donna A ce recueil le nom de Di- à ses besoins, on doit l'employer à la nour-
gestes ou de l'nndoctcs. (.In fut trois ani à le riture des pauvres, ou en d'autres œuvres de
composer, c'est-;\-dire depuis le 13 de dé- ,
piété. Lorsque quelqu'un voulait bâtir un
cembre de l'année 530, auquel l'ordre eu fut monastère, il ne le pouvait cpi'auparavaut il
donné, jusqu'au seizième du même mois de n'eût fait venir l'évêque du lieu pour consa-
l'an 533 qu'il le confirma et le publia. Ce fut
,
crer l'endroit, par la prière et en y planlaut
pour servir d'introduction aux Digestes ({w'W le signe de notre salut c'est-à-dire
, une ,

tu composer les quatre livres des Institutes. croix. A l'égard de ceux qui se présentaient
Ayant ensuite fait corriger le Code des lois pour être moines, avant de leur donner l'ha-
choisies des empereurs, publié en 529, il en bit monastique on les éprouvait toujours
,

donna en 334 une édition plus parfaite qui ,


dans leur habit du monde pendant lequel
;

est celle que nous avons aujourd'hui. Le plus temps il était permis à ceux qui les revendi-
célèbre des jurisconsultes qu'il employa à quaient comme esclaves, de les reprendre,
ces ouvrages, était le questeur Tribonien, pourvu qu'ils donnassent des preuves du do-
Proeop Mb.
Dt Bll. Pcr^.
homme très-savant, mais si attaché à l'argent, •maine qu'ils avaient sur eux; mais les trois
Mp. ixiv, que les historiens du temps disent qu'il ven- ans écoulés, il n'était plus permis <à personne
ttr, el Sui-
its in Trtl>o>
dait la justice , et qu'il faisait ou supprimait de les tirer du monastè; e. Lesmoines devaient
tous les jours de nouvelles lois, suivant les demeurer dans une même maison man- ,

intérêts des particuliers. Justinien le consi- ger ensemble, et coucher en un même lieu,
dérait autant pour son savoir que parce qu'il mais chacun dans un lit particulier, afin qu'ils
lellattait disant qu'il ne mourrait point, mais se fussent mutuellement témoins de la régu-
qu'il serait enlevé au ciel en corps et en âme : de leur conduite. Il était toutefois per-
larité
car Tribonien était païen. mis aux anachorètes d'une vertu éprouvée
N0Te;ies d«
lu«tiotpQ.
3. En 533 , Justinien donna plusieurs lois de demeurer seuls. Quand il arrivait qu'un
pour l'Eglise, sous le titre de Novelles, parce moine quittait son monastère pour mener
qu'elles étaient postérieures à la publication une vie privée il y
, laissait tous les biens
de son Code. en donna d'autres sous le
Il qu'il avait apportés en entrant. Un homme
même titre pour l'État, tant en cette année ou une femme qui entraient dans un monas-
que dans lessuivantes nous en avons en tout ; tère, pouvaient disposer de leurs biens avant
cent soixante-huit. Le moine Mathieu, dans sa d'y entrer mais s'ils y entraient sans en
;

préface sur la Collection des consfitutionsecclé- avoir disposé, leurs biens appartenaient au
siastiques grecques^ en compte cent soixante- monastère à l'exception de la quatrième
,

dix de Justinien , ce qui fait voir qu'il nous partie qui était laissée aux enfants ou de
,
;

en manque deux encore n'est-on pas sûr , la dot de la femme si c'était un homme ma-
que toutes celles que nous avons sous le nom rié. Si quelqu'un quittait son monastère pour
de Justinien soient de lui. Voici en peu de passer dans la milice ou à un autre genre de
mots ce qu'elles contiennent d'intéressant vie il ne pouvait reprendre ce qu'il y avait
,

par rapport à la discipline de l'Église. apporté, ni entrer dans d'autres services que
Ce qu'elles A. Il ne devait pas y avoir dans la grande celui des juges de provinces. Un moine qui
MotlenDentda
reiurqadljlc. église de Constantinople qu'on appelait de ,
passait d'un monastère à un autre n'emportait
256 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTOURS ECCLÉSIASTIQUES.
rien avec lui et on ne trouvait pas bon que
;
blii|nes. Juslinien renouvelle la défense qu'il

les abbés reçussent les moines d'un autre au delA


avait déj;i faite d'ordonner dos clercs
monaslère, pour ne point autoriser une vie du nombre établi par la fondation dans cha-
vagabonde et inconstante. Lorsqu'un moine que Église. La raison qu'il en donne est que
avait mérilé d'être admis au clergé, il lui le nombre des clercs s'était tellement aug-
était défendu de se marier; s'il le faisait, on menté que, les revenus de l'Église ne pou-
le chassait de son église comme ayant désho- vant sultire à leur pension, plusieurs avaient
noré sa première profession. C'était à l'évê- été obligés d'hypothéquer leurs fonds ou de
que du lieu à choisir l'abbé ou l'abbesse les aliéner, ce qui les avait réduits à l'indi-
d'un monaslère et dans ce choix il ne de-
,
gence. Il (it une autre loi portant défense *L
I>e.

vait point avoir égard au rang ou à l'anti- d'aliéner les biens des églises, étendant celte
Nowl.
quité ; mais seulement au mérite. Les ordi- défense aux monastères et aux hôpitaux. Il
nations des évoques et des autres clercs déclara qu'il sciait permis aux princes et
étaient réglées par les canons. Outre les et non à d'autres d'échanger contre Ti^glise
bonnes mœui'S et la bonne réputation Jus , un immeuble d'égale ou de plus grande
tinien demande que celui que l'on veut or- valeur; que l'emphytéose des biens ecclé-
donncr n'ait point d'enfants, et qu'il n'ait siastiques ne pourrait être perpétuelle et

point donné d'argent pour acquérir l'épis- qu'elle serait liornée au preneur, à ses en-
copat ;
au moins passé six mois dans
qu'il ail fants et petits enfants qu'on pourrait rece-
;

le clergé ou dans un monastère, qu'il soit voir en usufruit un bien ecclésiastique, h la


instruit des dogmes de l'Eglise et des ca- charge de donnera l'Eglise un immeuble de
nous, et qu'à son ordination on l'interroge pareil revenu, et que l'un et l'autre demeu-
s'il veut y conformer sa vie. La peine de reraient à l'Église après la mort de l'usufrui-

celui qui était parvenu à l'épiscopat par tier; qu'on pourrait hypothc-quer les biens
simonie, est la peiie de la dignité même de l'Église généralement, mais non par hy-
que l'on avait voulu acquérir, et de celles pothèque spéciale; qu'il ne serait permis
que l'on possédait déjà. Ceux qui avaient d'aliéner les vases sacrés que pour la ré-
reçu de l'argent étaient obligés de le res- demption des captifs, et que les monastères
tituer au profit de ri:t;lise. Que si l'on for- où il y avait des oratoires et des autels ne
mail opposition à l'ordination d'un évoque, , pourraient être vendus, échangés ou donnés
on ne j)Ouvait pas passer outre que l'on n'eût pour être tournés à des usages profanes,
examiné les motifs de l'opposition. Un évo- comme il s'était pratiqué en Egypte, nommé-
que ne peut être absent de son diocèse au ment à Alexandrie et dans quelques autres
delà d'un au. Si l'aliairc intéresse son église, endroits de l'Empire.
et demande ime plus longue absence, l'évo- 5. Justinicn chargea les évêqucs de veil- No.fl.
»>|. bi.
que la fera poursui%Te par quelqu'un de son ler à l'exécution d'une loi qui regardait la
clergé. Il ne peut non pins venir à la cour levée des Irihnls, et de déclarer les magis-
sans le congé de son métropolitain ni avoir trats qui feraient leur devoir, et ceux qui ne
audience de l'Empereur qu'il n'ait aupara- le foraient pas; voulant qu'après que la loi
vant communiqué son affaire au patriarche qu'il avait donnée à cet etfet auiait été pu-

de Constantinople nu aux apocrisiaires de la bliée, elle fût gardée dans l'Église avec les
province. Pour ce qui est des prêtres et des vases sacrés, et gravée sur des pierres pour
autres clercs, on ne doit point en ordonner être allichéeaux portiques des églises, afin
qui ne soient savants et de bonnes mceurs, que tout le monde en eût connaissance. Le
qui n'aient été mariés qu'une fois, qui serment que tous les gouverneurs des pro-
n'aient point do coniubiues ni de femmes vinces devaient prêter en entrant dans leur
veuves pour épouses. Les diacnnc^ses, soit chaigo portail oulr'antres, qu'ils jniaioni par
vierges ou veuves, auront passé cinquante le Dieu toul-puissaint et son Fils unique

ans; s'il ariiveque parquelque nécessité l'on Notre-Seigneur Jésus-Christ, par le Saint-
en ordonne (le plus jeunes, elles entreront Esprit et par la glorieuse Marie, mère de
danstjnolipie ninnaslèi-e. Les autres demeu- Dieu toujcuns vierge, par les (pialre lOvan-
reront seules, ou avec leur père, leur fils ou giles qu'ils tenaient en main, el par les
leùis frètes. Les clercs qui quitteront leur étal saints archanges Michel el Cîabriel, qu'ils

et l'habit de la cléricalure, seront réduits à parderaioni lidélilé à l'empereur Juslinien


sei-vir lesmagislrals dans leurs fonctions pu- et à sa femme Théodora ; déclarant en outre
[VI' SIÈCLE.] CHAPITRE XX. — .inSTIiNMEN, EMPHREUR. 2.")7

qn'ilH communiquaient avec la Irès-saintc tributs. défendit en môme temps aux lië-
Il

Kfiliso Dieu catli(ilii|ue et a()ostoli([nc.


lin r('li<piesde baptiser, et d'avoir ni maisons
No«i.ix, Par une autre lui, co prince accorda à l'K- ni lieux de prières, conservant à l'Églisf; de
y:liso romaine, le privilège (ruiiiî prescrip- Cartilage tons les droits et immunités dont
tion de cent ans, au lieu de trente, ([ue les «;lle jouissait aiiticfois.
lois précédentes lui avaient donnée. Celte (i. Il permit à l'Église de la Résurrection
N..»f|. XL,
1 If -.'1 1.

prérogative s'étendait également à toutes de la ville de Jérusalem, de vendre les mai-


les églises d'Occident ; et Justinien l'avait sons qu'elle avait dans la ville, pour pouvoir
aussi accordée â celles d'Orient ; mais la subvenir aux grandon iliqK'uses (pi'elie fai-
loi qu'il donna ;'i ce sujet fut abrogée depuis, sait pour exercer
rhos|)italit('^ envers les pè-
et réduisit la prescription des iiiens de
il
y allaient de toutes les parties du
lerins qui
l'Église à quarante ans. il avait fait bâtir monde. Le concile de Constantinople, sous
dans la Dardanie où il était né, une grande Memias, en 536, ayant dit anathème à An-
ïi.p.g. -7. ville qu'il nomma la première Justinianà', thime, à Sévère, à Pierre et à Zoara, Justi-
pour la distinguer des autres villes auxquel- nien confu-ma ce jugement par une consti-
les il avait donné son nom. Il y établit un où
tution, il leur défendait d'entrer dans
évêché avec la qualité de métropole, sou- Constantinople, ni dans aucune ville consi-
mettant à l'archevêque de ce lieu, les deux dérable. 11 ordonnait de plus que les écrits
Dacies, la seconde Mysie, la Dardanie, la de Sévère seraient brûlés, avec défense de
province de Prévale, la seconde Macédoine les transcrire, sous peine d'avoir le poing
;vi,pig. 9f,
(,[ ja seconde Pannonie. Soit que les lois coupé. La même loi portait défense à tous
qu'il avait déjà faites pour retrancher le hérétiques, principalement aux sectateurs
grand nombre de clercs inutiles, et qui deve- de Nestorius, d'Eutychès et de Sévère, de
naient à charge aux églises et au peuple, troubler la paix de l'Église par des assem-
fussent mal observées, ou qu'il crût néces- blées illicites, et l'administration illégitime
saire de prendre d'autres mesures pour dé- des sacrements. Ce prince trouvant qu'il
charger les églises, il en donna une nouvelle était assez dur aux enfants de se voir enle-
par laquelle il défendit d'ordonner des clercs ver leur père et mère par la mort, sans qu'il
221, «c LU-,
pour la grande Église en la place de ceux leur en coûtât encore de l'argent pour les pag. 2G0.

qui mourraient, voulant qu'au cas que le faire enterrer, pourvut aux frais des funé-
nombre s'en trouvât au-dessous de la fon- railles en mettant certaines impositions
,

dation ou du besoin, on en prît de cetix qui sur les boutiques de la ville de Constantino-
étaient surnuméraires dans les autres égli- ple. 11 destina onze cents de ces boutiques à
xiii,p.E.
^^ ggg_ j^jaus la Novi-lle où il traite des causes fournir ces frais, mais il les exempta pour
de la dissolution des mariages, il en distin- cette raison de toutes les autres charges. Cha-
gue de deux sortes. Il appelle les premières que lit, c'est-à-dire chaque corps, lorsqu'on
ex bona gratia, c'est-à-dire, de bonne volonté, le portait en terre, devait être accompagné

lorsqu'il est à présumer que les deux parties de huit religieux qui précédaient le convoi,
consentent à la dissolution de leur mariage. en chantant des psaumes, et de trois aco-
Il marque plusieurs cas où cela pouvait ar- lytes. Des onze cents boutiques, il y en avait
river. Les autres causes sont de rigueur, huit cents qui fom-nissaient les fossoyeurs
parce que la dissolution s'en fait contre le nommés doyens on lecticaù'es ; ou les tirait
gré, ou pour le crime d'une des deux par- de tous corps de métiers à qui ces bou-
les

ties, comme lorsque l'une ou l'autre sont tiques appartenaient. Les trois cents autres
convaincues ou d'adultère, ou d'homicide, boutiques donnaient seulement de l'argent
ou de poison, ou de quelqu'autre crime de pour les gages ou les honoraires des re-
xixvir
fOI. cette nature. Un nommé Théodore, ayant ligieux et des acolytes qui faisaient les en-
été envoyé à Constantinople par le concile terrements. Ainsi il n'en coûtait rien ans
de Carthage de l'an 535, pom- demander à parents, si ce n'est qu'ils voulussent d'eux-
l'Empereur la restitution des biens et des mêmes ajouter quelques dépenses extraor-
droits des églises d'Afrique usurpés par les dinaires pour faire les funérailles avec plus
ariens pendant la persécution des Vandales, de pompe. la manière de
Il régla aussi
ce prince ordonna que toutes les terres de l'Église et du paie-
l'aliénation des biens
usurpées sur les églises d'Afrique leur se- ment des dettes, et permit les échanges de
raient restituées, à condition de payer les biens et les baux emphytéotiques entre les

XI. n
2o8 HISTÛIIIE GÉNÉRALl:: DES AUTEUnS ECa.ÉSIASTIQUES.
enlises, pounu que
tout cela se fit ]iar un causes qui regardent les religieux ou les re-
NoTfl.Lll^l,
déciel et avec connaissance des juges. Il ligieuses déclare celui qui est fuit évoque,
i

LU, |«S, ; ita.iii


défendit do lien exiger des nouveaux clercs soustrait à la puissance paternelle, et ordon-
pour leur entrée dans le clerfré de quelque ne que dans les matières civiles les clercs
église que ce fiil, periiK^llant toutefois de seront traduits d'al)ord devant le tribunal de
recevoir ce qu'ils avaient coutume de don-
nmii ft-
l'évèque, et ensuite devant les juges laï- iat.

ner, lorsqu'ils étaient admis au clergé de ques ; que si c'est une cause criminelle, les
la grande Église. Il ordonna que lorsque les juges civils en connaîtront, mais qu'ils
clercs quitteraient réglise qu'ils desservaient, ne pourront condamner le cou|)able qu'il
ils seraient dès ce moment privés des émo- n'ait auparavant été déposé par son évoque,
luments ordinaires, et que l'ou en ferait h qui il appartiendra seul de connaître des
jouir ceux qui seraient mis A leur place. fautes des clercs, lorsqu'elles ne mériteront
ixm..
Quant aux fondateurs des églises, il ne veut que des peines ecclésiastiques. Il donne 3tl.
i-r.

pas qu'ils puissent y mettre des clercs de aussi pouvoir aux évêques d'obliger les ju-
leur autorité seulement il leur accorde le
: ges de rendre justice aux parties, et déjuger
droit de les présenter à l'évèque. Four ré- même, quand les juges seront suspects. Par eu i»'-
Sio.
primer les entreprises des schismatiqnes, il une loi de l'an 541, il ôte aux femmes hé-
fit défense de célébrer le saint sacrifice <i rétiques le privilège d'être préférées aux
Constanlinople dans les oratoires des maisons autres créanciers du mari, pour la répéti-
particulières, sinon par des clercs députés tion de leurs dots et par une autre de la ;

par lo patriarclie de cette ville, sous peine même année, il compte l'bérésie entre les
de confiscation de la maison où l'on aurait causes légitimes que les parents peuvent
[JE. offert le Il y a une constitution
sacrifice. avoir de déshériter ceux qui„ étant catholi-
particulière pour rfiglise de Mysic, qui porte ques, auraient eu droit à leur succession. Il III, ptg. l?'..

permission à cotte Eglise de vendre les ter- y en a une autre qui abroge la Novcllc par
res, les maisons et les vignes, dont les reve- laquelle accordé cent années de
il avait
nus n'avaient point été destinés ù certains prescription. à quarante, à ciiuse
Il la réduit
usages par les donateurs. de la dillicullé qu'il y aurait de trouver des
UCTII,
!8I.
pair*
Par une autre loi do l'an .538, Justinien
7. témoins pour un si long espace de temps.
défendit de bâtir aucune nouvelle église, Quoiqu'il eùl déjà donné plusieurs consti-
avant que l'évèque eût fait sa prière au lieu tutions au sujet de l'aliénation des biens de
destiné, et qu'il y eût planté la croix en pro- l'Église, il en donna une nonvelle, où il

cession, poui' rendre la cliose publiipie, et traite des diverses manières dont ces biens
avant que le fondateur fût convenu avec peuvent être aliénés, mis en emphytéose,
l'évèque du fonds qu'il voulait donner pour donnés à loyer, et hypothéqués.
le luminaire, les vases sacrés, et l'entretien 8. Nous avons trois autres lois de l'an

des ministres. Celui (|ui rétablissait une an- Sil la


; première, qui est du 20 février,
cienne église tombant eu ruine, passait pour regarde l'ordination des évêques. Il y est dit
fondateur. La même loi règle la manière que lorsqu'il s'agira de l'élection d'un évo-
dont se devait faire l'alii-nation des biens de que, les clercs et les premiers de la ville s'as-
l'Eglise, et défend aux économes d'envoyer sembleront et choisiront trois personnes;
aux évoques non résidants dans leur dio- que par le décret d'élection ils feront ser-
cèse, de quoi subsister à Cunstautinople, ment sur les saints Évangiles, qu'ils ne les
s^ils y font un séjour de plus d'une année. ont choisis par aucune vue d'intérêt , mais
1
Ce prince en donna une aulie pour intorpn:- unicjucnieut à cause de leur mérite que le ;

ter celle qui dii^Mulail aux njoiues de dis- consécraliMir choisira l'un des trois, qu'eu-
poser de leurs biens en faveur de ceux qui suite il lui fera donner sa profession de foi

étaient entrés en religion avant que cette par écrit, puis réciter la formule de l'obla-
loi IVil publi(;e. Il déclare valables les dona- tiou, celle du baptême et les autres prières

tions faites avant la publication de celle Lu ;


solennelles, que l'iUn devait apparemment
et nulles toutes celles <pii se sont faites de- savoir par cœur qu'il fera aussi serment
;

puis, posant pour principe que l'on se dé- de n'avoir rien donné ni promis pour être
pouille du domaine et de la propi'iélé de évèque que s'il arrivait qu'on l'accusai, le
;

tut, pi'i son bitui par la professinn niuna^liqne. 11 cousécraleur serait obligé de faire droit sur
311.

renvoie aux évêques la connaissance des l'accusation, et même de poursuivre d'ollice


[Vl" SIÈCLE.] CHAPITRE XX. JCSTIXIEX, EMPEREUR. 239
l'infornialion dans trois mois, si l'accusateiir pas personnes qui eussent les qualités
trois

sf! (h'sistait. Il est ordonne par la môme loi requises, de n'en choisir qu'une on deux,
(le tenir tons les uns des conciles au mois de voulant que si ceux (pii ont droit d'élire ne
juin ou de septembre, pour y traiter toutes font pas leur décret dans six mois, l'élection

les mali^res eccUSsiastiques. Hors le temps soit dévolue â celui qui a droit de faire l'or-

des eonciles, l'évéquc peut être accusé de- dination. Celui qui aura été ordoimé contre
vant le métropolitain, et les clei'cs et les ces Wvules, sera chassé du siège épiscopal,
moines devant révè([ue. La seconde loi est interdit pour un an et ses biens confisqués
,

du ISniars: elle porte que les décrets des au de l'église dont il aura été élu évé-
profit

quatre conciles généraux de Nicéc, de Cons- qnc. S'il se trouve que celui qui aura formé
lantinojile, d'Kplu'sc et de Chalcédoine au- o[)position à l'élection d'un (vôque soit con-
ront la même force que les saintes Ecritures, vaincu de calomnie, il sera hanui de la pro-
et tiendront lieu de loi; que le Pajie est le vince où il avait son domicile. Elle défend
premier de tous les évêqnes, et après lui, la simonie, sous peine de déposition, tant
révè([uc de Constantinoi^le. Elle maïqne la pour celui qui donne que pour celui qui re-
juridiction do l'évéque do Justiiiianée sur çoit ou qui sert d'entremetteur, s'ils sont

ceux de Dacie, de Prévale, de Dardanie, de clercs; et de confiscation de la somme au

Mysie de Pannnnie comme vicaire du


, , profit de l'Eglise. S'ils sont laïques, ils paie-
Saint-Siège, suivant la détiuition du pape ront le double A l'Église et toute promesse
;

Vigile et ajoute que l'évéque de Carthage


;
faite à cet égard sera de nulle valeur. La loi

et les autres évèquos jouiront des privilèges peiniet néanmoins de donner pour la consé-
attachés à leurs sièges ;
que leurs biens se- cration, suivant les anciennes coutumes, et
ront exempts des impositions extraordinai- non au delà. Le Pape et les quatre patriar-
res ;
qu'on ne pourra leur opposer que la ches de Constanlinople, d'Alexandrie, d'Au-
prescription de quarante ans ;
que les legs tioche et de Jérusalem, pourront donner aux
faits h Dieu tourneront au proflt de l'église évèques, et aux clercs, à leur ordination,
du domicile du testateur; que l'évéque sera vingt livres d'or; les métropolitains et les
en droit de les faire exécuter; qu'ils ne se- autres évèques cent sous d'or, et trois cents
ront point sujets à la quarte falcidie, c'est-à- au notaire et autres otUciers de l'évéque
dire à la quatrième part que l'héritier insti- consécrateur. Les clercs pourront aussi don-
tué pouvait retenir sur les legs faits par le ner, selon la coutume, aux ministres de l'é-
testateur; et que les administrateurs d'hôpi- véque, de qui ils reçoivent l'ordination,
taux seront mis au rang des tuteurs, et su- poLirvu que la somme n'excède pas le revenu
jets aux mêmes lois. Elle ordonne encore d'une année. Voilà l'origine des Annales.
que celui qui a commencé à bâtir une église Celui ordonné évêque se trouve par
cpii est
ou une chapelle sera obligé de l'achever, cette dignité
atfranchi non-seulement de
mais elle défend aux hérétiques d'en bàlir et toute servitude, mais aussi de la puissance
aux particuliers de leur vendre des biens où paternelle. Il ne peut être tuteur, et ce pri-
il y a une église ou une chapelle bâtie, et vilège est eucore étendu aux moines; mais
aux évèques de tester du bien qu'ils ont ac- les prêtres et les autres clercs peuvent l'être,

quis depuis qu'ils sont élevés à l'épiscopaî. s'ils acceptent la tutelle volontairement. Ils

il cxAti, y. La troisième loi, qui estplus ample que ne peuvent néanmoins prendre des fermes
les précédentes, est datée du 1" mai. Après ou des commissions, ni se charger d'aucune
avoir répété ce qui avait été réglé sur les atiaire temporelle si ce n'est pour les égli-
,

ordinations des évèques, elle ajoute que ce- ses ni s'absenter de celle où ils servent qu'a-
:

lui que l'on choisit pour l'épiscopat ne doit vec des lettres de leur métropolitain. Il leur
pas moins avoir que 33 ans qu'on peut ; est encore défendu de quitter leur ministère,
élire un laïque à condition qu'il sera clerc pour reprendre l'état séculier, sous peine
pendant trois mois, pour s'instruire avant d'être privés de toutes charges et dignités, et
son ordination de la discipline ecclésiastique, d'élre assujettis au service des villes. Défense
et de tout ce qui appartient au ministère aux évèques et aux clercs de jouer ou regar-
quotidien de l'Église, n'étant pas convena- der jouer aux tables, c'est-à-dire, aux dés,
ble que celui qui doit enseigner les autres ou d'assister a aucun spectacle, sous peine
reçoive des leçons après son ordination. de trois ans d'interdit. Il n'est permis, pour
Elle permet qu'au cas que l'on ne 'trouverait quelque cause que ce soit, d'appeler les
260 HISTOIRE (JKNÉUAL UKS ALTKUHS ECCLÉSIASTIQUES.
évoques à comparailre malgré eux devant sans la présence de l'évêque et de son
lesjuges séculiers. Si deux évêques d'une clergé, et sans les croix de Le
l'Eglise.

même province ont ensemble quelques dif- reste de cette loi qui est composée de qua-
ficultés, lisseront jugés par le mélro|iolitain rante-quatre chapitres regarde les religieux
assisté des autres évêques de la province, et les religieuses. L'abbé doit être élu, non

et pourront en appeler au patriarche seule- pour sou antiquité, mais pour sa vertu, et il
ment. Il en sera de même si un particulier doit être choisi par les moines les plus sa-
clerc ou laïque a une allaire contre son évê- ges, qui feront serment sur les saints Evan-
que. Le métropolitain ne pourra être pour- giles (le n'avoir aucun égard dans leur élec-

suivi que devant le patriarche. Les clercs et tion à l'amitié particulière, ou à quelqu'au-
les moines en matiéie civile, seront d'abord Ire motif de cette nature, et de n'avoir en vue

poursuivis devant l'évêque, et au cas que que le bien du monastère et le maintien de


les parties acquiescent au juicemcnt, il sera la discipline. Celui qui se présente pour être

mis à exécution par le juge du lieu. Si l'une religieux ue doit en recevoir l'habit qu'au
des parties réclame dans dix jours, le juge bout de trois ans, après lequel temps per-
examinera la cause s'il continue la sentence
; sonne ne pourra |)lus le répéter. Les moines
de l'évêque, son jugement sera sans appel; doivent demeurer tous dans un même lieu,
s'il l'infirme, il sera permis d'en a])ppler mais coucher dans des lits dillerents. S'il y
suivant la coutume. En matière criminelle a des vieillards ou des infirmes, ils pourront
il sera au choix de l'accusateur de poursui- avoir des cellules séparées, éloignées de la
vre les clercs devant l'évêque ou devant le demeure commune. La même chose devra
juge séculier. S'il s'adresse d'abord à l'évê- s'observer dans les mouastères de filles ;

que, après que l'accusé aura été convaincu elles auront aussi leurs monastères séparés
et déposé, le juge séculier le fera prendre, de ceux des moines. Si l'on fait un legs ou
et le jugera selon les lois. S'il commence par une donation à une personne, à condi-
le juge, l'accusé étant convaincu, le juge tion de se marier ou d'avoir des enfants,
communiquera le procès à l'évêque, qui dé- cette condition sera censée accomplie par
posera l'accusé s'il le trouve coupable, afin l'entrée dans la cléricature ou daus un mo-
que le juge séculier le punisse suivant les nastère. Les biens de celui ou de celle qui
lois. S'il ne le trouve pas convaincu, il ditlé- entre dans un monastère, appartiennent de
rera la dégradation, l'accusé demeurant en droit au monastère, à l'exception de la légi-
état, et fera conjointement avec le juge rap- timité des enfants en ont. L'entrée en
s'ils

port du procès à l'Empereur. Pour ce qui esl religion résout les fiançaillesen rendant les
des causes ecclésiastiques les juges sécu-
, arrhes, et même le mariage en rendant à la
liers n'en doivent pas connaître. C'est aussi femme ou au mari ce qu'on en aura reçu. Dé-
devant l'évêque que l'on doit poursuivre les fense aux parents de tirer leurs enfants des
économes des églises et les administrateurs monastères, ni de les déshéi'iter pour y être
d'hopiiaux pour eu qui regarde leur Jliarge; entrés. Les ravisseurs des religieuses ou
mais il leur est permis d'appeler de l'évêque des diaconesses, seront punis de mort, et
au métropolitain, et ensuite au patriarche :
leurs biens appliqués à l'église ou au mo-
c'est que ces économes et ces administra- nastère. Si un moine passe de sou monastère
teurs étaient clercs. Les évêques députés et à un autre, il ne pourra en rien emporter, et
les apocrysiaiies des églises qui foui leur ré- sera puni par l'évêque. Il est défendu à tout
sidence dans la ville royale, ou auprès des laïque, princi[>alement aux gens de théâtre
métroiiolitains et des patriarches, ne peu- de piendre l'habit de religieux ou de re-
vent être poursuivis pendant le temps de ligieuses par dérision, sous peine d'exil et
leur députation, suivant le privilège accordé de pujiition corporelle. Les religieuses peu-
à tous ceux qui sont chargés d'allaires publi- vent se choisir un prêtre ou un diacre
ques. 11 permis de tirer les moines
n'est point pour gérer leurs all'aires ou leur porter la
ni les religieux de leur monastère pour com- sainte conununion, pourvu que l'évêque de
parailre devant lesjuges; ils doivenlse défen- qui elles dépendeut l'ait approuvé couune
dre par procmeur. Défense aux clercs d'a- étant d'une fui pure et de bonnes mœurs ;
voir des femmes étrangères, et aux diaco- mais il ne sera [luinl permis à celui qu'elles
nesses de deuHîurer avec des hommes sus- auront choisi de deiueurer daus le monas-
pects, et aux laïques defuùe des processions tère.
rvi° SIKCLK. CIIAPITRK XX. — JFSTIMEN, EMPEREUR. 201

Nov. r.tniii 10. dnnno ciumuc iino loi pour


Jiistinion s'oxplii|uo sur les principaux points de doc-
le lionpnuvoninnent dos monastères, dans lriu(ïde l'Eglise calholiqiro. coiutnençant par
laqnp[le il lôpoio une partie dos r(''j;lciuents ce que l'on doit croire sur la Sainle-Tririité.
qu'il avait dôji'i faits dans les précédentes. Il prend pour règle le symbole de Nicée, or-

r,ollo-oi dt'IVnd aux moines de sortir de lonr donnant do chasser tous ceux qui pensent
monasiore, et aux SL^culiers d'y entrer, vou- coiitrairoment i\ co symbole, et do rendre les
lant qn';\ cet otVet l'abbé mette à la porte dos ('•glises h tons les évoques qui (Mi prfifessent
anciens moines d'une probité connue pour la foi, suivant en cela les lois faites sur ce
enipoclier l'un et l'autre. Elle leur défend sujet par les empereurs Gratien, Théodose,
d'avoir rien en ]in)pre, et veut qu'après (pi'ils \alontinieu ot ses autres prc'dé-cossein-s. Il

auront récité tous ensemble r()liic(^ divin, ils ordonne do brûler les do Porphyre con-
livres
s'emploient à la lecture de l'Écriture sainte. tre la religion chrétienne, et ceux de Nesto-
Kilo interdit l'entrée des monastères des rius contre le mystère de l'Incarnation. Il dit
femme* aux liommcs sous quol([ue pr('texte auathome à Nestorius, à Eutychès, Apol- .'i

que ce soit, et aux femmes l'enirée des linaire et ù leurs sectateurs et pour donner ;

monastères des hommes. Elle excopte le cas des preuves de sa catholicité, il fait une pro-
de sépulture dans les monastères de filles, fession de foi qui est en eQet orthodoxe, mais
permettant d'y faire entrer des fossoyeurs il ne s'explique que sur la Trinité et sur l'In-

à condition que les religieuses ne paraîtront carnation, parce que c'étaient alors les ma-
point devant eux, et qu'ils seront reçus ;\ la tières les plus contestées. Quoiqu'il eût com-
porte et reconduits parl'abbesse avec la por- battu autrefois la propositiofi des moines de
tière. ceux qui sont cliarg-és
Elle enjoint k Scylhie : Un de la Trinité a souffert, il l'a-

des monastères de veiller au maintien du bon dopte ici, en reconnaissant qa'iin de In Tri-
ordre et de la discipline. Elle règle aussi les nité le Verbe de Dieu, s'est incarné. Mais il
,

pénitences, voulant qu'on les proportionne ne l'emploie que dans l'Exposition de sa foi
aux fautes, et peimettant de cbasser les in- au pape Jean. Il y fait profession de recevoir
corrigibles. Ce prince défendit les assemblées l'autorité des quatre conciles généraux, en
particulières des hérétiques, sous peine de la manière que l'Église romaine les recevait.

confiscation des maisons au profit de l'Eglise. Il traite ensuite des privilèges, des biens et

Il usage des divorces par le-


rétablit l'ancien des droits des églises. Sur quoi il rapporte
quel il permis aux personnes maii('es
était les ordonnances de ses prédécesseurs. Puis
de se séparer d'un consentement mutuel, ilpasse à ce qui regarde les évéqties et les
sans aucune autre formalité, en se donnant autres clercs, les administrateurs des hôpi-
toutefois l'un et l'autre un libelle de divorce. taux, les moines, rapportant sur chacun ce
Il défendit sous des peines très-rigoureiises qui en avait été ordonné par les empereurs,
de faire des eunuques, et parce qu'on ne le et ce qu'il en avait dit lui-même dans ses
faisail que pour les vendre plus chèrement, liescrits. Dans l'un de ces rescrits daté du Lih.
m. 3
I Cod.
De
Episc. les- »2,
il déclara libres tous ceux qui auraient souf- i" mars de l'an 328, adressé à Atarbe, il or- pag. 46.

fert celte injure. Il accorda aux Juifs, ou, donne qu'à vacance du siège épiscopal les
la

comme porte le texte, aux Hébreux, la per- habitants de la \ ille choisiiont trois personnes

mission de lire la Bible en hébreu et en latin dont la foi et les mœurs soient connues, afin
suivant l'hébreu, mais il leur défondit de se que l'on choisisse le plus digne que l'élu ;

servir d'une autre version que de celle des ne doit avoir ni enfants ni petits enfants, de
Septante ou de celle d'Aquila. Quanta ceux crainte que les soins de sa famille ne le dé-
qui étaient de la secte des sadducéens il , tournent du service de Dieu et de l'Église, ou
leur défendit de tenir aucune assemblée, qu'il ne tourne au profit des siens ce qui a

parce qu'ils onseinnaient qu'il n'y aura ni été donné pour les pauvres fpi'il ne sera;

résurrection ni jugement. Il parait qu'il les point permis aux évéqucs de disposer par
accusait aussi de croire que ce n'était pas testament, donation ou autrement, des biens
Dieu, mais les anges qui avaient formé le qu'ils auront acquis depuis leur épiscopat, si

monde et tout ce qu'il contient. ce n'est qu'ils les aient eus par succession
Cf qu'il ; a
du rennniiia-
Les Aoivllcs de Justinien réglaient,
11. de leiu's père et mère, oncles ou frères qu'en ;

lile

Code de
tliin5 le
J)i>-
comme on vient de le voir, presque toute la ce cas, tout le reste appai-liendra a leur égli-
lîn.^n sur 1rs
niatière> ccclc- discipline ecclésiastique de son temps. Il lit se, étant visible que ceux qui lui ont donné,
Sl^ïliqucs.
plus dans le premier livre de son Code, où il l'ont fait en considération du sacerdoce;
262 HISTOIRE GÉNÉRALE DKS AUTEUHS ECCLÉSIASTIQUES.
qu'après la mort des évoques les économes communié par vous, si c'est un métropoli-
rendront compte de ce qu'ils auront laissé par son métropolitain s'il n'est qu'é-
tain, et
afin de l'appliquer au profil des églises; que vcque. Nous ne leur imposons point de pei-
ces économes rendront compte chaque an- nes pécuniaires, de crainte que le dommage
née ù l'évèque, et que s'ils meurent avant ne retourne sur les églises. » Il y a ensuite
de l'avoir rendu, leurs héritiers en seront d'autres lois qui regardent la séparation des
tenus ; que les administrateurs des hôpi- monastères d'hommes d'avec ceux dcsUlles,
taux ne poujTont disposer de ce qu'ils auront les enfants des prêtres, les diacres et les
acquis pendant le temps de leur administra- sous-diacres, lesdonation< pour causes pieu-
tion; que tous leurs acquêts appartiendront ses, l'élection et la confirmation d'un abbé
aux hôpitaux qui, avec l'excédant des reve- ou d'une abbesse, l'enlèvement des filles,
nus n(''cessaircs pour l'entretien de ceux qui veuves ou diaconesses consacrées à Dieu et
sont nourris, seront employés à acquérir de plusieurs autres matières (|ui concernent la
nouveaux fonds. Ce prince défend de rien juridiction ecclésiastique. Il ordonue.de dé-
prcndi-e pour les ordinations de tous les mi- poser un évoque qui aura réitéré le bap-
nislros de l'Eglise, évèques, chorévècpjes, vi- tême, et rapporte sur cela les lois d'Honorius,
siteurs, prêtres, etc., non plus que pour l'é- de Théodose de Valentinien, de même que
et
tablissement d'un économe, défenseur de sur la défense aux chrétiens de contracter
l'Eglise ou administrateur d'hôpital, sous des mariages avec les Juifs et de graver ou
peine à celui qui aura donné ou reçu à ce peindre le signe de la croix sur la terre, sur
sujet, d'être déposé ou privé de sa charge. un caillou ou sur le marbre. Il maintient les
Il veut que tous les clercs chantent dans immunités ecclésiaslitjues, et le di'oit d'a-
chaque église les offices de la nuit, du matin sile dans les églises, conformément aux an-
et du soir, c'est-à-dire les Mutines, les Lau- ciennes lois de ses prédécesseurs.
C« qu'il
des et les Vêpres, n'étant pas convenable que 13. En oi6,y eut à Constantinople quel-
il
ta «ujrl
fdit
d<i

les clercs consument les biens de l'Église sans Ctrtme.


ques difl'érends au sujet du jour de Pâques.
rien faire, et qu'ils portent le nom de clercs Le peuple, persuadé que ce devait être le
sans en faire les fonctions. Il dit qu'il est ab- premier jour d'avril, fil le dernier jour gras
surde que les clercs obligent des mercenai- le dimanche 4 février, car les Grecs com- Tl.i-oir In
Clirf>n'>Er> ^"1

res à chanter à leur place, tandis que plu- mençaient leur abstinence après le dimanche nn. 5a6, J
Ri'.

sieurs laïques assistent aux offices par dévo- que nous appelons la Sejsagésime, et qu'ils
tion, et ordonne à l'évèque de chasser du nommaient le dimanche gras. Mais l'Empe-
clergé ceux qui ne seront pas assidus au ser- reur, mieux informé, ordonna que l'on vendit
vice pour satisfaire à l'intention des fonda- encore de la chair toute la semaine jusqu'au
teurs. dimanche suivant, 11 février, ti cause que
im.hfK}, 12. Le second rescrit qui est adressé h. Pâques ne devait être (pie le 8 avril. Les bou-
Lpiphane, patriarche de Constantinople, et chcr< tuèieut et étalèrent, mais personne
daté du 21 lévrier, regarde la résidence des n'acheta ni ne nuingea de vinnde.On célébra
évoques. Comme leur absence était cause toutefois la Pâque au jour que Justinieu l'a-
que le service divin se faisait négligemment, vait ordonné, et il se trouva que le peuple
que moins bien gouvernées,
les églises était avait trop jcinui d'une semaine. Ce qui en-
et qu'ils consumaient en frais de voyages gageait les Grecs à coniuiencer le Carême
leurs revenus l'Empereur ordonne à Épi-
, api'ès le ditnanchc de la Sexagésime, c'est
phane de notifier à tous les métropolitains qu'ils ne jeûnaient point les Samedis non
de sa ([('-pendance, que ni eux ni les évèques jiIms que les tlinjaiulies, excepté le Samedi-

d(! leurs provinces ue quittassent point leuis Saini. Mais |)euilant toute la semaine de la
églises pour venir à Constantinople sans un Sexagésime, leur abstinence ne consistait
ordre particulier de la cour, quelque atlaire que dans celle de la chair; ils man'jeaient
qui survint mais qu'ils eussent à envoyer
; des luita^^es et des (i>ufs, nu lien que depuis
un ou deux de leurs clercs pour déclarer les le dimanche de la (Juinquagésime, ils s'abs-
raisons qu'ils auraient de venir en cette ville. tenaient non-seulement des œufs et des lai-
« Si nous trouvons, ajoute Justinien, que tages, mais encore du poisson et de l'huile.
leur piésence soit nécessaire ici, nous leur Ainsi ce n'était jji-opicmeiil ipi'en celte .se-

oi'donnerons de venir. Celui qui conticvicu- maine qu'ils eommenraieiit le jeune rigou-
dr.i encourra notre indignation et ser;i ex. reux du C.iièine.
[Vf SIÈCLE.) CHAPITRE XX. — JUSTIXIEX, KMI>KRRUR. 263

iU< JustiiiPII.
Nous avons plusieurs autres t'crits de
14. (iS églises, tant h Constanlinople que dans
S> n<or[ cQ
rpinpcrcur Justiiiicu ', .«avoir, un long /ùlit l'Asie Mineure et les autres parties de l'Em-
cimtre Orit/èiw, un .uitre pour la coniiauina- pire, 10 hôpitaux et "23 monastères. Les Grecs
tioii lies '/'rois-C/iapilivs, adressé en forme do font nii'uioire de lui dans leur Mcnoluf/n au
lellrc et de confession de foi i\ toute l'IOglise. 2 août. Ses lois, ses édits et ses lettres sont

Cet édit soutlVit de li-ès-grandcs dillicullés, d'un style grave et majestueux. Nous aurons
parce qu'un grand nombre d'évèques refu- occasion de ]i:iiler encore de lui en faisant
sèrent d'y souscrire, dans la persuasion que riiistoire du cinquième concile général tenu ,

c'i'tait contrevenir au concile deCliakédoiue. à Gonstantinoplit en 533.


De ses deux lettres, l'une est au concile de 13. [Le tome LXL\ de \a l'alroloijic latine ' in™ .ic

Constantinoplc sous Mcnnas, et l'autre au contient avec plusieurs autres écrivains, les "'""
concile tenu en la même ville contre les Trois- écrits suivants de Justinieu 1° le livre con- :

Les liistorieus du temps - ont tlit


Cliapitres. tre Oriiji'iK en grec et en latin; 2° la Confes-
de ce prince qu'au lieu de s'appliquer à la sion de la véritable foi contre les Trois-Cliapi-
guerre dans le temps qu'il en ('tait besoin trcs; 3° la lettre au saintsynode contre Théo-
pour coni|uérir l'Italie, il employait la plus dore des Alopsueste ;i" la lettre contre les dé-
grande partie de son temps à exaujiuer les fenseurs de ce dernier. Les autres écrits re-
dogmes des chrétiens, à de vaincs spécula- hgieux de Justinieu, ses Nouelles, sont dans
tions et à des curiosités sur la nature divine ;
letome LXXII de la l'airologie latine au sup-
qu'il passait une partie des nuits avec les plément du VI' siècle. Le tomeLXXXVI de la
plus vieux évèques à feuilleter les livres qui Palruluyie y!-er(ji/e, col. 943-1132, renferme

regardaient la religion. Sa curiosité le lit une notice sur Justinien d'après Cave, le
tomber dans l'erreur des incorruptibles, et il traité contre Origène, l'épître contre Théo-
donna sur ce sujet un édit ^ où il disait que dore de Mopsueste, la constitution contre
le corps de Jésus-Cluist, dès sa naissance, Anlhime, Sévère, Pierre et Zoara, d'après
n'était susceptible d'aucune altération, pas Mansi le traité contre les Monophysites d'a-
;

même par les passions naturelles comme près Mai, un fragment de l'épître à Zode, pa-
la faim et la soif; de manière qu'avant sa triarche d'Alexandrie, u'aprèsMaï, un décret
mort comme après sa résurrection, il man- de Justinien à l'abbé du mont Sinaï, d'après
geait sans aucun besoin. Ce prince mourut Tischendorf. Toutes ces pièces de Justinien
la quarantième année de son règue, l'an sont reproduites en grec et en latin.]
366, âgé de 8i ans. Il fit bâtir ou réparer

' Le tome VII Scriptor. vêler, collectio de M.iï, Jl.Bonuetty, est eu outre précieux parle grand nom.
pap. 292-315, contient en prec le traite de .lustinien lirede passages inédits des l'ères qu'il nous fait
contre les Monophysiles. Ou y remarque un ëtla- connaître. {L'e'diteur.)
taiit témoi;.'nage sur l'ortliodoxie ijerpétuelle des 2 Procop., lib. 111 De Belle Goih., cap. xxxv et
poutifes romain?, taudis qu'au eoutraire il y a eu tant xxxiu : Anecdol., cap. xvui.
et
dbérétiqut'3 sur les autres sièges pitriarebaux. Le 3 Evagr. lib. IV, cap. xxxix, et TheopUan., ad
voici en grec : xXXi. -i^v ô.^Ôtiv y.'/l kX-nOu-if/ /J.;y.pl an. 536, pag. Ifi2.

STJ/«^«ï oispiÀscfav (?i)|ày, pag. 304. Cet opuscule, dit


26-4 HISTOIHE GKNÉllALli: DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.

CHAPITRE XXI.

Dacins, évêqne de Milan; Justinien et Jnsto, évêqnes d'Espagne; Aprigins, évêqne

de Badajoz, [écrivains latins] ; Arétas, évêqne de Césaréc ; Agapet,

diacie de Constantinople , Constantin le diacre.

[Écrivains grecs, vers l'an 535.]

Daciu», l'T.*. 1. Ces évêques se rendirent recomman- ses nommé Rustique;


aux questions d'un
qus de MlliQi
dables sous le règne de Justinien. Dacins, dont première était sur le Saint-Esprit; la
la
évêque de Milan, se tronva à Constantinople seconde contre les bonosiaques qui ensei-
vei-s l'an 530 , lorsque le pape Vigile con- gnaient que Jésus-Christ n'était Fils de Dieu
vint avec ce prince que personne n'entre- que par adoption, et non par nature. Il faisait
prendrait rien au sujet des Fnts-C/inpitrcs, voir dans la troisième réponse qu'il n'est
jusqu'à la décision du prochain concile; il point permis de réitérer le baptême de Jésus-
fut même témoin de cette convention avec Chrisî; et dans la quatrième la distinction

Dal. ci['. IV.


Mennas de Constantinople, Théodore deCé- qu'il fallait faire du baptême de saint Jean
sarée et quelques autres évêques grecs et d'avec celui de Jésus-Christ. La cinquième
latins. On rapporte de lui qu'étant à Corin- était pour montrer que le Fils est invisible
tlie il délivra une maison des spectres que comme le Père. Cet ouvrage n'est pas venu
les démons y faisaient paraître et qui la ren- jusqu'à nous.
daient déserte. Ce fut à que Cassiodorelui 3. Mais nous avons le Commentaire que qae dTifol.
s'adressa pour distribuer des vivres au peu- Juste son frère, évêque d'Urgel, a fait sur le

ple dans un temps de famine. On lui attribue Cantique des cantiques, dans lequel il donne
une CAroni^w des événements remarquables d'une manière très-claire et très-suivie le
Tom. An.
I
lut., \t£, 1 et
arrivés à Milan. Elle n'a point encore été sens spirituel de ce livre. Il en fait lapplica-
Tom. IX
imprimée. Mais don Mabillon, curieux desa- son Église, que Salo-
lion h Jésus-Christ et à Bltil. l'st l^ag.
-31.
voir si elle était véritablement de Dacius, et mon représente sous les termes d'époux et
ce qu'elle contenait, fit écrire sur cela au bi- d'épouse. En expliquant ces paroles Ceux :
Il,,l, |Jg.
bliothécaire de l'Église métropolitaine, qui qui gardent les murailles m'ont enlevé mon w
répondit que cette Chronique était écrilc sur manteau, il dit cfuc cela s'est accompli quand
un parchemin; qu'elle était de six cents ans; les ennemis de la vraie foi ont démoli en-
qu'elle n'était pas toute d'une même main tièrement les églises ;
qu'ils ont bmié les
ni d'un même auteur; que la première par- aidels avec les saints évangiles et les autres
tie était de Landufle-l'Ancien la seconde , livrescanoniques; qu'ils ont mis en prison
et la troisième de Landulle-le-Jcune d'où il : les prèticsdu Sciuncur, ou qu'ils les ont
était évident que Dacius n'en était point au- condamnés aux mines; el lorsqu'ils ont ôté à
teur que l'on trouvait toutefois son nom
;
la ;i l'Eglise le moyen d'otl'rir le sacrifice, de
tète de cette Chronique, mais d'une main ré- baptiser cl de donner la communion aux fi-

cente qu'il n'y était fait aucune mention de


;
dèles. Il mai(|ue en un autre endroit qu'en
Tv.
la famine arrivée sous le pontificat du pape renaissant en Jésus-Chrisl dans baptême, le le

Silvérius, qu'elle n'allait pointan delùdu viu° péché originel qui nous es! communiqué par
siècle, et finissait au xi' à l'an 1067.
, la gi'néralion, est effacé. Juste compte deux
iofl'olMI,
. ..'.lue de Vl-
2. Justinien fui, selon Isidore de Séville, cents versets dans le Canlicjue des cantiques;
irnee.
évoque de Valence en Espagne, sous le rè- ce qui fait voir qu'il n'était point divisé
gne de Théodius, vers l'an 535. Il avait trois en chapitres dans les exemplaires dont il so
frères nés de la môme mère que lui, (pii fu- servait.On Irouveun évêque di-ce nom dans
i-idor. D« rent tous évêques et autcuis. 11 écrivit un le second concile de Tolède, et on ne doute
iitt'^.Iitrl'iî! traité ou un livre contenant diverses lépon- point (jue ce ne soit celui dont nous parlons.
[vi* SIÈCLE.] CHAPITRE XXI. — DACIUS, KVftQUE DE MILAN, ETC. 26S
Son C(n)iinenlairc(u\. iiuprimé ii Ilagiicnaii en atliihué ii un prêtre de la môme église, ni la
lo20, d'où il csl passé clans \csOrtfinduj:ogra- raison que d'autres ont eue de douter si

p/tcs, puisilaiis le tome ix° de la liUilinthèque Arétas en avait été évè<pie, pnis<in'il dit en
des Pcirsde Lyon. Il y en a aussi niio édition termes exprès qu'André ' l'avait gouvernée
i\Haie en Saxe, en 1G17, par Georges Hosliiis, avant lui ; ce qui, ce semble, uianjue claire-
qui y a joint ileiix lettres sous le nom île ment (ju'il gouvernait lui-môme l'Eglise de
Juste, l'une pape Scrgiu.s et l'antre ii
;iu ; Césarée, Inisipi'il écrivaitson Commentaire.
Juste, diacie, qui l'avait engagé à compo- Il le composa sur d'André, son pré-
celui
ser ce Cominentuire. La prcuii('>re doit être décesseur, dont ilde temps en
rapporte
regardée comme supposée, puisque le pape temps les explications. Mais il eut recours
Scrgius à qui elle est adressée n'occupa le aussi aux écrits dos anciens qui avaient cx-
Saint-Siège que sur la fin de del'an C.S7, plus pli((U(' l'Apocalypse en entier ou en partie. Il

cent ans après la mort de Juste d'Urgel.Dans cite souvent saint Grégoire le théologien, et
leSpicilége de don d'Achéry, où cette lettre Eusèbe de Césarée, et quelquefois saint Jus-
se trouve ', elle est inscrite Au pape Si/rga,
: tin, à qui il donne le nom de Grand. Il donne

qui est apparennnent le même que Sergius. le sens littéral et spirituel de ce livre, qu'il
L'auteur y dit ([u'il lui envoyait un Commen- explique d'un bout à l'autre avec autant de
depuis peu sur le Canti-
taire qu'il avait fait netteté que le texte le permet. Son Commen-
que des cantiques. Les deux autres frères de taire est divisé en 72 chapitres au lieu que ;

Justinien se nommaient Nébride et Elpide. l'Apocalypse n'en a que 22 dans nos Bibles. Il
On "ne sait d'où ils étaient évêques, ni sur remarque que quelques-uns ont nié qu'elle
quel sujet ils avaient écrit. On voit un Né- fût de l 'apôtre saint Jean mais qu'il n'y a pas
;

bride, évèque d'Égar dans le second con- , lieu d'en douter, en la comparant avec l'É-
cile de Tolède. vangile et la première Epitre de cet apùtre;
4. Aprigins, évêquc de Badajoz, ville de que d'ailleurs elle lui est attribuée par saint
l'Espagne dans l'Estramadure , homme sa- Grégoiie le théologien, par saint Basile, par
vant et éloquent, fit, vers l'an 540, un com- saint Cyrille, par Papias, par saint Irénée et
mentaire sur l'Apocalypse de saint Jean, d'un par saint Hyppolite qui sont des témoins di-
style noble, où il donnait à ce livre un sens gnes de toi. Au verset 2 du chapitre I" où
fort spirituel. Isidore de Se ville qui l'avait saint Jean dit qu'// a rendu témoignage de
lu, dit qu'Aprigius lui paraissait avoir mieux tout ce qu'il a vu, quelques exemplaires ajou-
réussi dans l'explication do l'Apocalypse que taient: £t tout ce qu'il a oui, tout ce qui est, et
la plupart de ceux qui avaient écrit avant tout ce qui doit se faire à l'avenir: c'est la re-
lui. Nous n'avons plus ce Commentaire, mais marque d'Arétas. Il entend par les sept égli-
LoaïsD, dans ses notes sur le Catalogue d'Isi- ses auxquelles l'Apôtre adresse la parole,
dore, témoigne avoir vu un commentaire ma- toutes les églises de l'univers qui sont unies
nuscrit sur l'Apocalypse écrit en lettres go- en ce monde par une même communion. Il

thiques, composé de ceux que Victorin, Isi- crte les paroles que l'on attribue à saint De-
dore et Aprigins avaient fait sur le même li- nys, lorsqu'à la mort de Jésus-Christ le so-
vre. Aprigins composa divers autres ouvra- leil enseigne que nos prières
s'obscurcit. Il

ges, dont nous ne savons pas même les titres. étant présentées à Dieu par les anges qui
Il tlorissait sous le règne du roi Théodius. veillent sur nous, elles en deviennent ' plus
3. On met vers le même temps Arétas, agréables et d'une meilleure odeur, particu-
évèque de Césarée en Cappadoce, dont lièiement les prières des saints qui sont déjà
nous avons un Commentaire sur l'Apoca- bonnes en elles-mêmes. Il parait prendre à la
lypse *. Je ne sais pourquoi quelques-uns l'ont lettre ce qu'on lit dans quelques prophètes,

' La lettre au pape Sergius et l'explication mysti- au conimenceuient du siècle suivant. {L'éditeur.)
que sur le Cautique d' s cantiques, avec une notice ' Andréas qui ante me Cœsareœ Cnppudociie
sur l'auteur par Fabricius, se trouve au toujeLXVn episcupalumlortisusest. Conunent. in Apocal.cap.
de la Patrologie latine, col. 961 etsniv. {L'éditeur.) tom. l\ Bibl. Patr.
XXI. i.ag. 7fil,
Voyez l'article que D Ceillier consacre de
* * preces Deo ab angelis qui nabis
.S'aHc(oru)7i
uouveau à Arétas dans le volunie XIX de l'an- prœsunl offeruninr : quœ natura quidem bonw
cienne éditiou, pas- 591-592, xu de la présente fragranliœ sunt, sed melioris fragrantiœ eœ red-
édition. L'opinion la plus vraisemblable est que duntur per angeli qui eus porrigit auxilum. Cap.
Arétas a vécu vers la fin du cinquième siècle ou XXI, pag. 700.
206 HISTÛinK GKNKIIAI.R DES AUTEURS ECCLÉSU\.STIQUES.
que le jugement dernier se fera sur la terre, élever par la prospérité ;
que lorsqu'il s'agit
signifiée par la vallée de Josaphat parce ,
de la justice, le riche et le pauvre doivent
qu'il y a eu plusieure combats donnos dans être traités également, et qu'il est digne de
cette vallée. Il parait encore croire que l'Anté- l'attention d'un souverain que les ims n'abon-
christ viendra des pays orientaux de la Peree dent pas en biens, tandis que les autres sont
où la tribu de Dan s'est établie. Ce Commen- réduits à la mendicité que pour gouverner
;

taire fut imprimé en grec à Vérone en 153^ dignement, il faut qu'il se rende redoutable
et 13(58, cl à Paris en 1621 avec les Cummcn-, à ses ennemis par sa vertu, et aimal)le à ses
l'if.-r.j.
(g-^^g d'Œcuménius, sujets par des sentiments d'humanité qu'il
fet à Oxford en iSiO ;

dans le tome Vlll de la Chaîne de Chamer.] doit traiter ses domestiques comme il désire
'". Il se trouve en latin dans le tome d'être traité de Dieu que n'ayant personne
IX de la ;

Bibliothèque des Pères i\ Lyon en 1677, de la en ce monde qui puisse le ciuilraindrc à l'ob-
traduction de Maxime Florentin, moine du servation des lois, c'est à lui à s'en faire une
Mont-Cassin. Surins nous a donné au 13 no- obligation. Agapet l'exhorte à fuir la com-
vembre un discours lalin d'Arétas en l'hon- pagnie des méchants, parce qu'en les fré-
neur des saints martyrs Samone, Carie et quentant il est comme nécessaire de soutfrir
Abibus. et d'apprendre le mal au lieu qu'en vivant
;

.r.^.TcoQs- 6. L'on a mis à la suite du Commentaire avec les bons, on apprend à les imiter, ou
n.u.0,1,.
d'Arétas dans la Bibliothèque des Pères 62 ,
du moins à se corriger à ne confier l'ad- ;

avis importants donnés à l'empereur Justi- ministration des alfaires qu'à des hommes
nien, par un diacre de l'ÉgUse de Constantino- de probité, comme devant rendre compte à
ple nommé Agapet, que ce prince avait sans Dieu des malversations de ses ministres ; ii ne
doute consulté pour savoir de quelle maniè- se regarder comme bien atfermi sur le trône
re il devait se comporter dans le gouverne- que lorsqu'il aura trouvé le secret de com-
ment de l'Empire. On les imprima en grec et mander à des hommes qui lui obéiront vo-
on lalin à Venise en 1309 à Bâle en 1318, , lontiers; à récompenser la vertu, afin d'en-
à Herbonne en 4603, à Franker en 1608, à gager les méchants à changer de voies ; à
Francfort en 1639, à Leipsick en 1669. Ils garder l'équité dans ses jugements envers
ont aussi été placés dans les Orthodoxngra- ses amis et ses ennemis à plus aimer ceux
;

pties, dans le tome II de VAuctuarium de qui lui demanderont que ceux qui lui ofl'ri-
Fronton -le -Duc, [dans Banduri Imjxrium , ront des présents à se rendre autant supé-
;

orientale, et dans Galland, lome XI, p. 233, rieur aux autres par la grandeur et la beau-
d'où ils ont passé dans le lome LXXXVI de té de ses actions que par sa dignité et par
la Pafrologie grecque, col. H33-H86, avec sa puissance à s'occuper des moyens de
;

notices tirées de Galland et de Fabricius.] plaire à Dieu de qui il a reçu le sceptre de


Agapet représente à Justinien que Dieu l'Empire; h implorer souvent son secours,
l'ayant élevé à la plus sublime dignité de la persuadé que celui qui est protégé de Dieu
terre, il doit l'honorer avec plus de zèle que surmonte aisément ses ennemis, et met à
tout !e reste des hommes; qu'étant chargé du couvert ses sujets de leurs insultes à imiter ;

gouvernail, il doit veiller à ce que le vais- Dieu dans ses largesses, en donnant libéra-
seau de la république ne soit point brisé par lement à ceux «pii out besoin à faire misé- ;

les Uots de l'iniquité; vou-


qu'en tout il doit ricorde à ceux de qui il aurait reçu quel-
loir et agir de manière à plaire ù celui de ques injures, se souvenant qu'il demande
qui il a reçu la puissance que pour rendre
;
lui-même à Dieu pai-don de ses fautes à ;

Dieu attentif à ses demandes, il doit l'être considérer que si les particuliers sont dignes
lui-même à celles de ses peuples que lors- ;
de supplices pour leurs mauvaises actions,
qu'un particulier pèche, le mal en retombe c'est une faute à un prince de ne pas faire
sur lui seul, mais que toute la répu]jli(|ue se même le bien enfin à s'amasser dans le
;

ressent des péchés du prince qu'il est de ;


ciel une abondance de richesses par ses bon-
son devoir de ne point se laisser aller aux nes ojuvres, en se souvenant que la mort ne
discours des llatteurs, et d'écouter au con- respectant point la splendeur des dignités
traire avec plaisir ceux qui lui donneront mondaines, il sortira un de cette vie pour
de bons conseils que la constance est une
; aller rendre compte en l'autre de toutes ses
qualité essentielle à un prince qui ne doit actions.
point se laisser abattre par l'advei-sité, ni 7. [Dans le septième concile général, le-
[m' siècle.] CHAPITRE XXI. — riACIUS, l'^VI^OITR riK MII,AN, KTC. 267

nu i"» Nii'('(>, l'nii 787. pniir l;i ili^'cnso de; pauégyriipie doit .-illirci- l'alIcrirMin et l'es-

saillies iiiiauos, on lut un IVimnicnl do Coiis- lime des hommes instruits (pii aiiiieul l'an-

tanlin, diacre, g;irdi(Mi ili-s cliarlos et ,jiii,'0 li(piité et les grands souvenirs du christia-
des canses eccldsiasliqucs do l'i<'ulise de nisme. ))

U^rul-.tlon
Constanlinnple, k la lonanpe des saints mar- 8. Voici la manière énergique dont Cons-
tyrs. Ce Gonslanlin, dont aucun auteur ne tantin réfute le sym))olisme païen «Que ">'*"" :

donne la vie, paraît avoir vécu sous Jusli- vous aussi, ilisent les martyrs, et par ima-
nien, vers le vi' siècle. On regrettait vive- gination ou par allégorie, vous représentiez
ment de ne pus posséder ce magnifique lé- symboliquement les dieux sous la forme hu-
raoignaii'e de la foi de rKi^lise ; or, c'est pré- maine, nous le comprenons; mais pourquoi
cisément ce que et nous pouvons
le savant, vous faites-vous un dieu h tète de chit^n un ;

le dire , heureux cardinal


rinfatigal)le et dieu avec des cornes ou avec des pieds d'ani-
Mai a découvert dans la bibliothèque du Va- mal; un dieu moitié homme moitié bcte; un
tican. Ce panégyrique est comme une liis- dieu hermaphrodite enfin, tandis que les idées
tnire sommaire des persécutions. L'auteur y des choses divines, alors même qu'où veut leur
expose les questions posées par les tribu- donucrune forme sensible, doivent conserver
naux païens, les réponses et les discussions une entière dignité, si nous ne voulons abso-
des martyrs avec leurs juges ; les diU'érents lument compromettre les espérances de notre
genres de tourments qu'ils ont soufferts, les Et n'est-il pas impie, et tout à fait in-
salut'?

généreuses exhortations des martyrs, leur digne d'hommes raisonnables, de désigner


condamnation l'i mort, leurs actions de grâ- Dieu sous de honteux symboles, d'imposer
ces, les exhortations qu'ils adressaient aux l'aspect d'un chien à l'essence excellente et
païens, l'éloge et la force des martyrs. L'au- première, et d'alioyer ainsi, s'il est permis

teur termine par une exhortation aux fidè- de le dire, contre la Providence? Pour nous,
les, par la dédicace aux martyrs du Christ. dire que Dieu est plus vieux ou plus jeune,
C'est une de ces découvertes qui doivent c'est dire une chose détestable car ce lan- :

consoler le savant éditeur de ces travaux. gage ne convient qu'aux créatures tempo-
Les Annales de philosophie ont donné une relles. Mais, dans l'essence éternelle et qui
traduction de ce précieux discours dans leur n'a poiut commencé, il n'est rien qui se
tome XI (3" série). Le traducteur est M. Lo- puisse mesurer par les proportions humai-
rain. Voici comment il juge celte pièce im- nes; cl encore bien que, à cause de l'infir-
portante u Une composition, à laquelle on
: mité de notre nature, nous donnions quel-
faisait l'honneur de la citer publiquement quefois à Dieu, et non sans convenance, des
dans un concile universel, devait avoir une noms humains. Dieu n'en est pas moins au
puissance et une renommée contemporai- delà de tous les temps, au-dessus de tout
nes. De plus, il s'attache à cette relique re- commencement de toutes les propriétés
et
trouvée ce genre de puissant intérêt que que l'on peut concevoirdans les choses
l'on applique toujours, indépendamment des créées. Si donc nous voulons faire un noble
tftches de lu forme, aux monuments des pre- et sincère usage de notre raison, nous ne
miers siècles de ri']glise, dans ces temps où concevrons pas le Père sans le Fils, ni le
le christianisme était si fervent, si coura- Fils sans le Père de même que nous ne
;

geux, si noble, si convaincu, si magnanime. concevons pas le feu sans son écla!, ni le so-
Qui n'a pas fait celle expi'rience en lisant leil sans ses rayons, pour exprimer des cho-

les l'èies? Malgré quelques étrangetés de ses incompréhensibles, autant qu'il est pos-
style, malgré le jeu des subtilités grecques, sible, sous une brève image, infiniment en-
et quelques métaphores violentes et intra- core éloignée de la vérité. »

duisibles, il y a, dans le panégyrique, du 9. C'est en ces termes qu'il fait l'éloge des ÉiO£0 Jos
mThrs.
mouvement, de l'énergie, de l'élan, une for- martyrs « saintes âmes ô corps sacrés
: ! !

me dramatique et animée. Le dialogue en- ô précieux et divin trésor, plus inestimables


tre les juges et les chrétiens est original et que l'or et le topaze! demeures du Christ,
s'élève jusqu'à l'éloquence. Enfin, comme habitacles de l'Esprit, vases des vertus Oui, !

étude littéraire, comme expression histori- vous retrouverez un jour, après la décom-
que des plus hautes pensées, des idées, des position de ce misérable mélange, tout ce
passions, des mœurs, du style d'une épo- qui vous appartenait dans les éléments maté-
que grecque et clirétienne, la découverte du riels dont se formait voire corps à sa nais-
268 HISTOIRE GÉNKRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
sance ; mais vous les recouvrerez sanctifiés Vous avez la beauté du corps dans la mor-

par la récompense immortelle que vous au- tificationdes désirs et votre force a été la
;

rez reçue! multitude bienheureuse! charité dans la faiblesse et la mort. »


splendeur multiple qui éclate comme dans 10. « En quelques heures, vous avez ac-
une âme unique Quels cliauts de tiiomplie
! compli de plus péniljles travaux dans la vigne
vous célébreront dignement, ô vous dont la de Dieu, que ceux à qui l'on donne le nom de
victoire a surpassé les forces de la nature ! patriarches. Vous vous êtes placés, par vos
De quels trophées de mémoire éternelle, de œuvres, au-dessus de votre premier père :

quels [isaumes, de quels hymnes, de quels car vous avez gardé les commandements du
cantiques ceindrons-nous vos
spirituels Christ. Vous avez oÛert au Seigneur un sa-
fronts, comme
de magnifiques couronnes im- crifice plus saint que celui d'Abel, l'holo-
mortellemcnt fraiches et vertes. Vous avez causte de vos âmes. Aussi avez-vous été
honoré vos parents , selon le précepte é\an- transportés vers une immortalité plus belle
gélique car vous avez par vos soutl'ran-
:
,
que celle d'Hénoch, sur une arche plus so-
ces , effacé la honte de vos ancêtres, déli- Hde que celle de Noé, composée qu'elle est
vré vos pères du déshonneur, et rendu à la avec lesmatériaux incorruptibles de la ver-
nation humaine la joie à la place du deuil. tu. C'est dans celte arche que votre âme
Vous avez changé la terre en ciel , et vous s'est préservée de réloulfemcnl des idoles.
êtes comme l'ardent serein , comme l'au- Abraham a reconnu le mystère de la Trinité
rore de la justice, et comme des étoiles qui dans son type, mais voilé encore et couvert
brillent en tout lieu ; car tous les pas que d'ombre mais vous, dans les combats que
;

vous faites sont dans la voie di'oite des vous avez soutenus, pour la Trinité, vous
saints commandements. Ni un père désolé, vous êtes faits, d'une voix retentissante, les
ni une mère s'arrachant les cheveux, ni des héros éclatants de la vérité. Votre sacrifice
enfants poussant des cris de douleur, ni des a été supérieur à celui d'Isaac, et par votre
parents éplorés, ni des amis gémissants, meurtre vous avez accompli un rite sacré.
rien n'a pu amollir votre fermeté. Vous n'a- Par la sincérité de votre but. vous avez sur-
vez pas seulement combattu avec vos persé- passé la vie loyale de Jacob. L'excellence de
cuteurs , vous avez encore lutté avec la na- votre vie a été, selon le saint précepte, sem-
ture elle-même, et vous avez vaincu cette blable à l'innocence des colombes. C'est
invincible nature qui fléchit et attendrit jus- vous qui avez bâti l'Église, comme un illus-
qu'aux bètes féroces, jusqu'à la cruauté des tre édifice, en présentant .'i Dieu le Père la
leptiles empoisonnés. Vous avez vaincu la pieuse ofi'rande de vos blessures, et en im-
nature qui commande tyranniqucmont à molant sur l'autel, au lieu d'un chevreau,
tous les êtres vivants, par une force inté- l'humilité de votre corps. C'est pourquoi
rieure, partout et toujours nécessaire. Et vous avez reçu de Dieu la bénédiction, c'est-
cependant vous avez formé entre vous, ô à-diie la vie éteruelle. \'ous avez vaincu Jo-
martyrs, une parenté léciproque par les seph en chasteté, vous qui avez repoussé la
liens de vos communes soulfrances, et vous doctrine des faux dieux, doctrine corrompue
vous êtes intimement unis en mêlant votre dans ses actes comme dans ses images, et
sang au sang dans une communion de sup- qui avez abondonné à des tyrans débauchés
plices. Ni la soif des richesses, ni l'amour et pervers le vêtement qui vous enveloppait,

des félicités, n'ont atl'aibli votre amour en- c'est-à-dire votre corps. Toutes les épreuves
vers Dieu; pour vous, la probité dans la foi de Job, vous les avez subies; et, de plus
a remplacé l'or, et l'esprit d'humilité vous a que lui, vinis avez enduré les supplices jus-
tenu lieu de toutes les richesses. L'opprobre qu'à la mort elle-même. Vous avez eu un
du Christ a eu plus de prix à vos yeux que plus grand honneur que Moïse : car, après
les trésors du monde car votre regard
: avoir reçu et gardé la loi de grâce et de vé-
s'est attaché sur la récompense future, et rité, vous avez traversé, à pied ser, l:i mer

vous saviez bien que vous possédiez dans les de l'idolâlrio rougic de votre sang, el vous
cieux une essence supérieure et impérissa- êtes arrivi's dans le pays de promission,
ble. Au lieu des vanités de la gloire, vous dans la céleste Jérusalem. El déjà, aupara-
avez choisi l'ignominie pour le Christ an ; vant, vous aviez prouvé vos forces à vos en-
lieu des joies folles, la contrition du coMir; nemis par le grand nombre de signes el de
au lieu de la satiété du cœur, la continence. miracles qui avaient éclaté dans le désert,
[vi-sitcLE.] CHAPITRE XXI. — DACIUS,
S, ÉVI'IOLIE DE MILAN, ETC. 2G9

c'est-'"i-(lir(5 (huis la vio religieuse; et par 11. (( Aussi n'nandr/.-vniiK sur vos frères l'rijro um

votre luoil, vdiis avez ('cras(' el ('((uille sous uiuî part de la que vous pmsez
s|il('nd(Mir

vos [iicils les serpents insidieux (|ui [)onrsui- dans le sein th; la lumièr(! spirituelle. Car
vaient les hoiuines de leurs morsures veni- vous êtes préposés à l'égard du genre hu-
meuses. de la robe d'.Aaron, faite de
.\u lieu main tout entier, comme les tuteurs des
vous vous êtes rcv(Mus, eoni-
iiiaiu d'Iioiuuie, âuies, les méd(!cinsdcs corps, la colonne ilc
me il sied aux saints de la justice du (ilirist.
, la toi, la consoniination du sacerdoce, la ré-

Ce n'esl point dans le sang des agneaux, mission des péchés, le fondement et l'appui
mais dans votre propre sang, que vons avez de l'Église, le remède des maladies, le re-
lavé voire peuple. Au bruit de vos dogmes, j)Os des voyageurs, le gouvernail des navi-
comme au son retentissant de la trompette, gateurs, la ressource des indigents; vous
sont tombées les murailles des impies, les soutenez ceux qui combattent, vous relevez
villes ennemies, les langues parleuses et ceux qui tomheni, vous rendez le courage à
la vainc sagesse de vos adversaires, et vous ceux qui se ]iiaignent, vous guidez ceux qui
avez plus célcMires que le clief Josué.
ét(^ s'égarent, vous gardez ceux qui marchent
Vous vous êtes montrés encore de plus dans chemin, vous êtes la consol-i-
le droit

saints et plus grands ministres de Dieu que lion des affligés, et pour tous un puissant
Samuel car ce n'est pas votre mère qui vous
: secours et un ferme appui d'inébranlable
a otlerts ;\ Dieu, c'est vous-mêmes qui vous espérance. »

êtes donnés, et vous ne vous êtes pas livrés 12.Et vous, ô brebis saintes qui nous
« Kiimriation

pour vivre, mais pour mourir, afin de vivre écoulez, si nous sommes résolus h honorer
dans l'éternelle vie. Ce n'est pas avec une dignement les martyrs, soutenons des luttes
fronde, comme David, mais avec une pierre pareilles aux leurs, résistons aux séduisan-
réprouvée par les bommes, que vous avez tes tlatteries des passions, et répandons un
fait tomber aux pieds du Cbrist le symboli- déluge de larmes, comme ils ont versé des
que Goliath intellectuel. Après avoir, par ruisseaux de sang. Que le jeûne réduise no-
vos périls, brisé la tête du démon orgueil- tre corps, et comprime les vils instincts de
leux, comme des triompbateurs victorieux la matière. Que les ai-deurs des vices soient
et couronnes de leurs brillants exploits, étouffées sous l'inextinguible lumière des
vous êtes enfin entrés dans les portes du bonnes Tranchons pieusement
actions. la

ciel, par un essor plus sublime que celui tyrannie de l'impiété et du péché avec le

d'HIie : portés par vos vertus comme par un glaive à double tranchant de la doctrine et
char divin, et appuyés comme sur des ailes de la vraie foi , et laissons nos lèvres annon-
sur la force de vos œuvres, votre ascension cer librement la juste loi de Dieu, do sorte
a été plus facile et plus durable que celle du que, après avoir imité, dans tous les temps
Prophète assis dans son char. Et mainte- de cette vie, les luttes des martyrs, nous
nant, enfin, avec le chœur innombrable des obtenions un prix égal à celui qui leur fut
anges, et dans l'immense assemblée des pre- donné. »
miers-nés des hommes, vous présidez aux [La l'atrologie grecque, tome LXXXVIH,
chœurs célestes devant le véritable taber- col. .477-328, discours du diacre
reproduit le
nacle. » Constantin avec la version latine d'Ang. Mai.]
270 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECGLESTASTIQUES.

CHAPITRE XXII.

Zachavie , évêque de Mitiîène [après 536J ; Théodore et Cyrille, évêques

de Scythople.

[Écrivains grecs du vi« sii'cle.li

Zieliarlc, l.Zachaiie, surnomme scliolastiquc, ou avo- de Vd Pafrologie grecque, col. 1044, d'après
évCque dt Ui-
ItlèDA : sf:
cat, de profession qu'il en faisait, éliulia les
la
Galland.]
«ni...
belles-leltresà Alexandrie, avec le philosoplie Pour montrer que le monde n'est point
Amraonius. Et.mt passé delà àBérylc, il s'y éternel,
il dit que cela parait évidemment
appliqua à l'étude de la jurisprudence. Sa par sa nature même qui est composée de
vertu et son savoir le firent ensuite appeler différentes parties sujettes à la dissolution ;

Toui. IV
CiDCll.
au gouvernement de l'Éulise de Mitili'uc. Il ce qui ne sérail pas s'il était éternel. Il
JjJi^.

assista, en qualité d'évèque de cette ville, au ajoute qu'en le disant coélernel à Dieu, il

concile de Constanlinople en 530, sous le, faut aussi le dire égal à Dieu en honneur;
patriarche Mennas, et fut un des commissai- ce qui est impie, puisqu'on ne peut, sans
res députés pour chercher Anthime, lui si- impiété, rendre à un corps matériel, sensi-
gnifier ce ijui avait élé fait contre lui, el le ble et visible, le même honneur qu'à un être
citer à comparaître devant le concile dans qui, non-seulement ne peut être, à cause de
trois jouis, en lui offrant le pardon s'il vou- son infinité, renfermé dans un lieu, mais
lait satisfaire à ce qu'on demandait de lui. qui est encore supérieur à tous les êtres que
On ne sait combien d'années Zacliarie sur- nous connaissons. Les philosophes païens
vécut à ce concile. Nous avons de lui deux répondaient qu'eu soutenant le monde éter-
traités, l'un est un dialogue sur la création nel, ils ne prétendaient pas pour
qu'il fût
du monde, dans lequel il fait voir contre les cela dans le même degré d'honneur que
philosoplies païens, que le monde n'est Dieu. L'ombre du corps, disaient-ils, estco-
«

point éternel, qu'il a été créé, et qu'il peut élernelleau corps, et toutefois il ne s'ensuit
être détruit à la volonté de celui qui l'a for- pas que l'ombre et le corps soient dignes
mé de rien il composa ce] dialogue, étant
: d'un honneur égal.» Zacbarie répond que
encore à liérylc. L'autre est une rcfiilatiou cet exemple no prouve licn. Premièrement,
du sentiment des manichéens sur l'existence parce que l'ombre suit nécessairement le
de deux principes, l'un bon, l'autre mau- corps, qu'il le veuille ou non. Or, on ne
vais. Le premier de ces traités fut imprimé peut dire que le monde soit nécessairement,
à Leipsick en lCo4, en grec et en latin, delà en sorte qu'il existe même malgré la vo-
traduction de Jean Tarin avec les A'otes de lonté de Dieu autrement ce serait mal à-
;

Barthins. Il se trouve aussi dans le tome I" propos que l'on donnerait à Dieu le nom de
de VAuctiiarium de Fionlon-le-Diic, et avec cause. En second lieu, ce n'est pas le corps
la P/iiloailic d'(ti ii;tMie, inqiriinée à i'aiiscn sou! qui produit l'ombre, c'est aussi la lu-
1G18 et 10:2 i. L'autre, qui a été traduit par mière, étant nécessaire pour faire ombre,
Turrien, se litautoine \ des Anciennes leçons que le corps se trouve à côté de la lumière,
de Canisius, mais seulement en latin. On les de façon qu'il se trouve entre la lumière et
a mis tous deux dans le tuine IX de la Bi- l'ombre. Les philosophes se récriaient sur
bliothkpie des Pères à Lyon, en 1077 mais ; la beauté de l'univers, sur les proportions,

le Dialogue sur la création du monde esl de sur l'harmonie de ses parties. Zacbarie leur
la version de Gilbert Génébrard, professeur demande, s'ils ne trouvaient pas en particu-
royal de la lani^iuc hébraïque A Paris. [Ces lier que l'homme l'ùt dans sa consliuclion

deux traités se Irouvenl aussi dans Galland, quelque cho<e d'admirable; et, passant de la
tome XI, page 2UG, et dans le tome LXXXV figure du corps aux qualités de l'esprit, Q
[vi« SIÈCLE.] CIIAlMTItK XXII. — Z.\C.II.MUJ :, KVKOI E |)H .MITILIC.VE, ETC. 271
leur tleiuaiulc encore s'ils ne trouvuicnt pas la lettre qu'écrivit
A ce sujet Siméon, évoque
beaux Soerale, Platon, Alcibiade et Aristote. des chrétiens en Peise, à Siméon, ;,l,l,é
de
Coiniuc ils ne pouvaient en disconvenir, il Gabula, la sixième année de Justin. Le xvii"
conclut que, tous ces ^'rands luiminos étant chapitre contient un prologue de saint Mara
morts, il n'y a pas plus do raison d'attribuer ou Marin, évêque d'Amida, sur l'Évangile et
au monde l'éternité, qui est un attribut pro- sur l'économie de Jésus-Christ en sonhicar-
pre et essentiel à Dieu. Le traité conlvi; les nalion. Le xviir' traite des évc''netn('nts qui
Miinic/icens est tr^s-court ; mais en même curent lieu sous l'empereur Juslitiien. Le .\i.\."
teuii)s très-métapbysiijue et très-eniljarrassé. contient un extrait de l'Kpitrede Juhen à Sé-
Les nianicbéens admettant deux principes, vère et de l'Épitre de Sévère à Julien. Maï
l'un bon et l'autre mauvais, il fallait néccs- fait observer que les deuxième et troisième

saircnuMit qu'ils lussent opposés. C'est dans livres de Vllistoire d'Hvagie contieimcnt
celle supposition que Zacliarie vaisonne plusieurs fragments en grec de Vllistoire ec-
ainsi : « Si vous dites que le bien est une de Zacharie. L'éditeur a donné en
clésiastique
substance, qu'il est un principe, qu'il est in- syriaque les fragments sur l'origine de Home
né, non engendré et éternel, il faut nécessai- et sur ses édifices, mais il ne les a pas tra-
rement que vous disiez que le mal n'est point duits en latin parce qu'il ne les croit pas
une substance, qu'il n'est point un principe, l'œuvre de Zacharie ', d donne cependant
qu'il est engendré et temporel car si le bien : la traduction de quelques fragments dans la
elle mal avaient toutes ces cboses commu- Préface du x= volume. Dans l'énuméralion
nes, ne seraient pas contraires.» Il ajoute
ils des édifices qui ornent la ville de Rome, on
qu'ils ne peuvent pas même dire que ces remarque « vingt-quatre églises des apo-
deux principes soient contraires en substan- ((très, deux magnifiques basiliques où habite

ce, parce qu'il n'y a rien de contraire à la l'Kmpereur.et où s'assemblent tous lesjours
((

substance, si ce n'est par rapport à ses mo- (lies sénateurs; quatre-vingts grandes sta-
difications et à ses accidents : d'où vient « lues des dieux en or et soixante-six d'i-
qu'il n'y a rien de contraire à Dieu qui est le ci voire; quarante-six mille six cent-trois mai-
premier parce qu'il est bon
et le seul bien, (i sous ;
mille sept cent quatre-vingt-dix-sept
substantiellement, et qu'en lui les modifica- «palais; mille trois cent cinquante-deux
tions et les accidents n'ont point de lieu. «fontaines; trois raille sept cent quatre-
[On trouve, dans le tome X delaScript. vet. « vingt-cinq statues d'airain d'empereurs et
nova cullect., pag. 332-360, et dans le tome «d'autres chefs; vingt-cinq statues d'airain
LXXXV de h\ Pdtrolo'jie grecque, col. 1143- «offrant !a figure d'Abraliam, de Sara et des
1178, dix-neufchapitres en syriaque, de l'Bis- «rois delà famille de David, que "Vcspasien
toire ecclésiastique composée par Zacharie et «avait apportées à Rome, après la ruine
qui est perdue, avec des fragments sur les ori- « de Jérusalem, avec les portes et les au-
gines et les édifices de Home. Le même ou- «tres monuments de cette ville; trente-et-
vrage est traduit en latin, <i la page 361-388. «un théâtres; deux maisons destinées aux
Les fragments commencent à la mort de Xes- «accoucheuses, quatre pourles accouchées;
torius. On y parle ensuite de Dioscore, de Pro- « deux ceut quatre-vingt-onze prisons; deux
tère, de Juvénal de Tliéodose, de Pierre
et « cent-ciuquante-quatre latrines près des
ibérien, qui devint évêque de Gaza, du moi- « lieux destinés aux jeux publics ; trente-sept
ne Salomon, de la mort de Zenon et de l'élé- « portes ; le tour de la ville a vingt-et-un mille
vation d'Anastase. Le cliapitre viii traite de « six cent trente-six pieds, ce qui fait quatre
la vision de Jean le scbolastique, frère de Do- « mille pas, etc., etc."»
nat, au sujet de l'empire d'Anastase au ix'= ; 2. [Théodore succéda à Théodose, évêque i-^lTt'V.
il est question du siège de la ville d'-\iaida de Scytople, qid avait assisté au concile de Je- g''r°|'ifL«i''^I;
en Mésopotamie par les Perses; le x" parle rusalem tenu sous Pierre, patriarche de cette sïii. '^ "
du rachat de cette ville. La fondation de la ville,contre .\uthime et d'autres hérétiques.
ville de Dara, Alarin d'.\pamée, l'éclipsé de Il aux oiigéuistes dans les tumultes
se joignit
soleil qui ariiva à ceite époque, Ariane, qui eurent lieu après la mort de saint Sabas.
femme de Zenon et ensuite de l'empereur
Auastase font matière des chapitres xi et
la
' Pag. 388, uote. [L'éditeur.)
XVI. Dans celui-ci l'auteur raconte le martyre 'Voyez Talili' alpliabéliiiue iles auteurs découverts
des saints confesseurs homérites, et il donne pur le cardiual Mai, par Buunetty. (L'Éditeur.)
212 HISTOIRE GÉNÉRALE DES ALTEUttS ECCLESIASTIQUES.
On a de lui un écrit sur les erreurs d'Origène. comme il avait appris celle de la vie de saint
Théodore, levenu à de meilleurs scnlimenls, Euthymius dans le temps qu'il demeurait
pn'seiita cet écrit vers l'an ;")33 ;\ Justinienet dans son monastère.
iiux patriarches Eutychès, Apollinaire, Doui- 4. Nous l'avons dans le tome II des.^/onK- Il <rrll
\\* At Mil
ninus et Eustocbius. Montraucon In publié ments de l'Eglise grecque, imprimés à Paris,
verr 1 aa Âb
d'après un luannsciil de la Hibliollièfiiie Cois- en IC81, par les soins de M. Cotelier. Saint
lin. On le trouve dans le tome LX.XXVI de la Euthymius naquit sous le règne de l'empe-
Patrologie grecque d'après Galland, Biblioth. reur Valence, d'une manière toute miracu-
vet. l'ut., tome XI, pag. 204. Les savants ne leuse. Sa mère qui se nommait Dionyse, af-
s'accordent pas entre eux pour décider si fligée de se voir stérile, alla avec Paul son
Origène a vraiment enseigné toutes les er- mari, à l'Église du martyr saint Polyeucte,
reurs signalées dans cet opuscule.] qui était pioche de la ville de Mélilène sur
3. Les moines de la Laure de saint Sabas, l'Euphrate, où ils faisaient leur demeure. Us
Scilbo|.l>.
ne pouvant soufTrir que les évêques de Pa- prièrent l'un et l'autre le saint mnrtyr de
lestine eussent condamné Origène, eu ap- leur obtenir de Dieu un fils, promettant de le
prouvant les actes du cinquième concile dans consacrer à son service. Leurs prières furent
Eulh. V.I.I-
celui qu'ils tinrent à Jérusalem en 354, se exaucées. Dionyse conçut et enfanta un fils
10... 11 M..-
num. Cotet., séparèrent de la communion de l'Église ca- sous le quatrième consulat de Gratien, c'est-
tholique. Quelques etlbrts que fit le patriar- à-dire en 375. A l'âge de trois ans, sa mère
che Eustochius, il ne put les ramener, et il le consacra à Dieu entre les mains d'Olréius,
fallut employer l'autorité de l'empereur Jus- évoque deMélitène, qui, lorsqu'il fui en état
tinien, qui les fit chasser, et de leur Laure d'apprendre les lettres, le mit sous la disci-
et de toute la province. Il mit à leur place pline d'un bon maître. Euthymius fut ensuite
120 moines catholiiiues, du nombre desquels mis au rang des lecteurs, et après qu'on l'eut
était Cyrille, surnommé de Scythople, du fait passer par tous les degrés du ministère
nom d'une ville de Palestine, où il avait pris ecclésiastique, il vint à Jérusalem dans la
naissance. A l'âge de seize ans, il commen- vingt-neuvième année de son âge. Il passa
ça dans cette ville même à pratiquei- les exer- 60 ans dans la solitude, et mourut âgé de
cices de la vie monasti(iue. Il en sortit quel- 89 ans, la seizième année du règne de l'em-
que temps après pour aller à Jérusalem visi- pereur Léon, c'est-.''i-dire l'an 473. Cyrille re-
ter les saints lieux. Sa mère, eu partant, lui marque que saint Euthymius, ayant lié ami-
ordonna de se mettre sous lu discipline de tié avec un nommé Tliéoctiste qui menait ,

saint Jean-le-Silencieux, qui, après l'avoir comme lui la vie solitaire, ils se retiraient
gardé quelque temps, l'envoya au monastère ensemble ' chaque année dans le désert, huit
de saint Euthymius; il y fut reçu au nombre jours après la fêle des Lumières, c'est-à-dire
des moines par l'abbé Léonce, qui avait été de rE|iiphanie, et qu'ils y demeuraient jus-
chargé du gouvernement de ce monastère qu'au jour de la fête des Palmes, occupés
vers l'an 542; il passa delà dans la Laure de pendant tout ce temps à converser avec Dieu
saint Sabas, près deTbécué, qu'on appelait dans la prière et dans la méditation, sans au-
la nouvelle, pour la distinguer de la grande cun commerce avec les hommes; que ce
Laure, qui portait aussi le nom de ce saint. Il
y temps écoulé ils s'en retournaient chacun
avait déjàdeuxansqu'ilydemeurait, lorsqu'il dans leur cellule pour se préparer à la fête
entreprit d'écrire la vie de saint Euthymius et de Pâ(iues, et olfrir i\ Jésus-Christ ressusci-
celle de saint Sabas. Ainsi, c'était veis l'an tant d'entre les morts, les présents d'un cœur
ye. 339. 556, puisqu'il n'alla dans cette nouvelle Lau- pur, infiniment plus précieux que l'or que les
re que quelque temps après la tenue du cin- Mages lui olfrirent à sa naissance que saint ;

(]uièuie concile général assemblé à Conslan- Euthymius ne trouvait pas bon que les moi-
linople. Il avait eu pendant ce séjour, le moyen nes de la communauté, et surtout les jeunes,
de s'informer des circonstances de la vie de alfeclassent de se distinguer dans le monas-
saint Sabas, auprès de ceux qui en étaient tère,en jeûnant plus longtemps qu'il n'était
instruits, pour en avoir été témoins oculaires, d'usage dans la communauté, parce qu'il

' Quoi annis proficiscebantur, oclavo die posl per precalionem ; et lotum lempus quod interce-
festum I^uuiiuuiii separali quidcm ab oiiini hu-
, debat trnnsigenles m solitudine doncc adveniiset
,

inano cuntubcrmo,cum Dcoaulem sulo versatiles dies festus Palmarum. Eulh. Vila, pag. 210.

Il

kl
[vi* sikcLE.] CIIAPITIIE XXll. — ZAC.HAHIK, KVftgUK UK MITIFilNE. 273
pai'iiissail qu'eu cpliiilssiiivaioiit leur propre cette assemblée, était la même qui avait été
volouté, et (|u'il y avait ilu ilaiiperquc la va- proposée par les trois conciles précédents,
uil('' u't'iil part il cetio morlilitaliou. Il parle savoir de Nicée, de r,onslanliun|ile et d'H-
:

lie la perséciiliou excili'e par les luayes de plièse ; de Clialcédoiiie, loin de


et ([ue celui
Perse coulre les clirélieiis sur la fin du réj;ne diiiHici dans les dogmes de Nestorius, recon-
il'lsdegcrde, et du baptùiuc d'uu [)riuee des naissait deux natures en Jissiis-Christ, sans
Sarrasins, iiomuit'^ Aspéljèle, h ipii ou cliau- aucune division de pcisoiuies, suivant la
{jea le uoui daus ce saereiuiuit, eu lui diui-
'
doctrine de saint Cyrille. Eudoxie, sollicitée
luuU celui de l'ierrc. 11 dit que l'icrre, évo- par son frère \'alère de rentrer dans la com-
que des Sarrasins, ëtant venu voir suint Eu- munion de l'iiglise catholique, voulut aupa-
tliyiuius, eu allant au concile gémirai d'E- ravant avoir la-dessus l'avis de saint Euthy-
plièse, il lui conseilla de se joindre à saint mius; et sachant qu'il n'entrait point dans '"e-s'i-

Cyrille d'Alexandrie, et ;\ Acace de Mélitène, les villes, elle fit b.ltir une tour au plus haut
et de faire, au sujet de la loi, tout ce quij ces du désert d'Orient, à trente stades de sa Lau-
deux évèques trouveraient bon. Dans une re vers le midi, afin de pouvoir l'y entretenir.
grande sécheresse accompagnée de stérilité, Le saint vieillard qu'elle avait envoyé cher-
les peuples voisins de la Laure de saint Eu- cher par Cosme, gardien de la croix avec le
tliymius sachant qu'il en sortait pour se reti- chorévêque Anastase, vint à la tour, et après
rer dans le désert au temps accoutumé, ac- avoir donné sa bénédiction à l'Impératrice, il

coururent en foule au-devant de lui, portant' lui dit : « Ma


prenez garde à vous dans
tille,

des croix en main, et chantant de bouche et la suite; les malheurs qui vous sont arrivés
de cœur A'i/rie eleison. Il s'excusa de prier
: en Italie (il parlait de la mort violente de
pour eux, se regardant comme un pécheur; l'empereur Valentinien son gendre, de l'ir-
mais ne pouvant se refuser à leurs instances, ruption des Vandales, de la captivité de sa
il entra avec quelques moines dans un ora- fille Eudoxia et de ses petites-filles emmenées
toire, et se mit à prier avec larmes, proster- à Cartilage) ne sont arrivés que parce que
né contre terre. Il tomba à l'heure même vous vous êtes laissée séduire k la malice de
une pluie abondante que la terre en fut
si Théûdose. Quittez donc cette opiniâtreté dé-
imbibée, et que les ruisseaux qui s'étaient raisonnable, et outre les trois conciles œcu-
trouvés à sec, recommencèrent à couler en méniques de Nicée contre Arius, de Cons-
:

abondance. Il avait soixante-quinze ans lors- tantinople contre Macédonius, et d'Éphèse


(|ue l'on assembla le concile deChalcédoine. contre Nestorius, recevez aussi la définition
Etienne et Jean, deux de ses disciples qui y de celui de Chalcédoine. Retirez-vous de la
avaient assisté, lui en apportèrent les décrets communion de Dloscore, et embrassez celle
avec diligence, pour savoir s'illes accepterait, de Juvénal » c'élait le patriarche de Jérusa-
:

voulant se régler eux-mêmes sur sa conduite. lem. Eudoxie exécuta tout cela comme si elle
Ayant reconnu qu'ils ne contenaient rien en avait reçu ordre de Dieu même. Elle re-
que de conforme à la foi catholique, le bruit tourna aussitôt à Jérusalem, et par le moyen
de son acceptation se répandit aussitôt daus des prêtres Cosme et Anastase, elle se réu-
tout le désert, et tous les solitaires auraient nitau patriarche et a l'Église catholique. Son
suivi son sentiment, s'ils n'en avaient été dé- exemple fut suivi d'une grande multitude de
tournés parle moine Théodose, homme d'une moines et de laïques. Ce fut aussi saint Eu-
doctrine et de mœurs corrompues, le même thymius qui engagea un célèbre anachorète,
qui s-'empara depuis de l'Église de Jérusa- nommé Gérasime, à se séparer delà commu-
lem, et qui engagea l'impératrice Eudoxie nion de Théodose, et à consentir h la défini-
dans l'hérésie d'Eutychès. Il fît son possible tion de foi du concile de Chalcédoine. Géra-
pour y engager aussi saint Euthymius, en le sime mourut en 474. Il pratiquait une absti-
faisant déclarer contre le concile de Ghalcé- nence si rigoureuse pendant sa vie, que pen-
doine; mais le saint abbé n'en voulut rien dant le Carême il ne prenait '
d'autre nourri-
faire, soutenant que la doctrine établie dans ture que celle qu'il recevait en participant

' Euthymius Àspebetum baptizat, Pelruiii Irans- décantantes. Euth. Vita, pag. 256.
nominnns. Ibid., pag. 221. ' Ipsum dicebant tanli fecisse
abstinentiam, ut
- ConjXmt ad eum muUitudo numerum exce- quadraginla illns dies jejtinii .vine ciho transi-
deiiS, cruces habentes in manihus et Kyrie eleison geret ,
contentus sola sacranientorum participa-
de more non tantum are sed etiam labiis cordis
, tione. Eiilh. Vita, pag. 278.

XI. 18
, ,

'J74 iiisTomiî gem:uale des AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


aux saints uiyslères. Saint Eutliymius était occupations des moines était d'aller couper
!•»£. »M. mort lies l'aiinée précédente. Ce fut le pa- du bois dans le désert, et de l'apporter au

friaitbe Anasla^^c qui fil ses funérailles, ac- monastère. Sabas plus grand et plus fort que
conipagué d'uiiCTaïul nombre de clerc;;, en- les autres, en portait davantage.
trois fois

tre lesquels étaient Cluvsippe, garde de la Un moine nommé Jean ayant obtenu de Thé-
croix, et le diacre Fidus. Celui-ci s'étanl em- octiste d'aller ù .\lesandrie, régler quelques
barqué en iTO pour porter à l'empereur Ze- allaircs temporelles de ses parents, demanda
non les lettres deMartyriu?, snccessenr d'.\- Sabas pour l'accompagner. Il y fut reconnu p«j. -'.111

nastase dans le siéjre de Jérusalem, lit nau- par son père et sa mère qui s'étaient établis
frage la nuit. Se voyant en danger, il invo- en cette ville depuis plusieurs années. Ils

qua saint Eiilhymius, qui lui apparut niar- voulurent l'obliger à changer de profession,
cbaut sur la mer, lui ordonna de retourner, et voyant qu'il s'en défendait fortement, ils

et d'aller ensuite ti sa Laure pour en faire un le prièient d'accepter du moins vingt pièces
monastère. Fidus obéit, raconta à Martyrius d'or pour son voyage. Sabas pour les con-
ce qui était arrivé. Le patriarche se souve- tenter, en prit trois, qu'il remit .'i son retour
nant de la prophétie du saint sur le change- ù l'abbé Théoctiste. A l'âge de trente ans, il

ment de sa Laure en monastère, chargea Fi- passa dans le où il demeurait seul


désert ,

dus de l'exécution. Il changea en réfectoire dans une caverne mais le samedi il revenait
:

l'ancienne église, et en bâtit une nouvelle, au monastère, apportant son ouvrage qui
où Martyrius transféra de ses propres mains, était de cimpianle corbeilles. Quelques an-
les reliques du saint. Cyrille emploie le reste nées après il changea de demeure, et s'éta-
de la vie de saint Euthymius à décrire ce qui blit dans une autre caverne qui se trouvait,

se passa de considérable à l'égard de ce mo- près le torrent de Cédron. Plusieui-s étant


nastère, et des abbés qui en curent le gou- venus pour se mettre sous sa discipline, il
vernement. Il parle de plusieurs miracles dressa au milieu du torrent un petit oratoire,
opérés par l'intercession du saint, comme et un autel consacn-, etlois.ju'il venait quel-
en ayant été témoin, ou comme les ayant que prêtre, il le priait d'y ollVir le saint sacri-
appris de personnes dignes de foi. fice, son humilité l'ayant empêché jusques-là
Vie Je silot
Salas.
S. Les mêmes pei'sonnes qui l'avaient en- de rerevoir l'oidination; mais quelque temps
gagé à écrire la Vie de saint Euthj-mius le, , après. Sallusle, patriarche de Ji-rusalem
pressèrent de donner celle de saint Sabas. Ce l'ayant envoyé chercher, l'ordonna prêtre.
dernier vint au monde en 439 dans une
, 11 vint ensuite à la Laure du saint, en dédia
'

bourgade du territoire de Césarée en Cappa- l'église et ayant dressé un autel dans la


,

doce , nommée Mutalasque. A l'âge de huit conque il le consacra en mettant dessous


,

ÎM. et \'i- s. ans il entra dans le monastère de Flaviane plusieurs reliques des i)lus célèbres martyrs.
Ml-x,lom.lll
MoDOm ) Co- qui n'était pas éloigné du liou de sa nais- C'était en iOI, la première année du règne
Irl, ^^. â^t
sance. Il apprit en peu de temps le Psautier, d'Auastase, et la cinquante-troisième de saint
et tous les exercices de la vie monastique. Sabas. Daus même temps
le il reçut dans sa

Après un séjour de dix ans à Flaviane, il ob- Laure un arménien nommé Jérémie, avec
tint permission de son abbé d'aller à Jérusa- ses deux disciples, Pierre et Paul, et leur
lem. Elpide qui gouvernait le monastère de donna un petit oratoire avec permission d'y
21C.
saint l'assarion, l'y reçut. De là il passa dans faire l'olUce en leur langue le samedi et le
le désert où demeurait saint Euthymius, qui, dimanche; mais, dix ans après, voyant qu'un
le trouvant trop jeune pour demeurer avec grand nombre d'autres arméniens s'étaient
les anachorètes, l'envoya au monastère situé joints il eux, il les tranféra de leur petit ora-
au bas de sa Laure, et dont Thcoctisfc était toire dans l'Église de Théoctiste que Snlluste
abbi'. Sabas se dépouilla entre ses mains de avait dédiée, et leur permit d'y faire leur of-
tout ce qu'il avait, eu se donnant tout à Dieu: fice. ;\ condlion - qu'après qu'ils auraient lu
il se livra avec ardeur à tous les exercices de ils passeraient dans
l'Evangile en leur langue,
p. été, se trouvant toujours le premier à l'é- Grecs au temps de l'oblalion,
l'Église des
glise, et n'en sortant que le dernier. Une des pour communiquer avec eux aux saints mys-

' Àrchiepiscopus ad Laurain reuit et Eccksia


, toruin ac victoriis clarorum martyrum \was
reliquii
Theoctista dedirata, sunclificulmn allure in con- deposuil. Vila Sali., pa^. 217.
clia n Veo cundila defixil, sub nuo plurimas sanc- ' Armenios a parvo oratorio Iranstulit, ulpsai
[VI" siKCLE.] CIIAPITIIK XXM. — ZACIFAlt li:, P;vftQUE DE MITILI'LNE. 275
Ii'tos. De celle manière, Il's arnu'iiii'iis ciHci- voyage : « Je suis venu, lui répondit le saint^
biaicnt st'piii'éraenl la piemic'io [lartie de la prcmièi'euicnl pour baiser les |)iedsd(! votre
messe qui esl pour riiistiuctidii et se réii- , [)ii'li'' ; ensuilc pour vous su|q)lierau nom de
iiissaieiil pour le saerilice. Quel([ues-uns do de Jiirnsalein, et de notre saint
la saiiib! cili!

ces arméniens cliantaieiit le Trisiigiun avec arclievè(]ue, de donner la paix aux l'glises,
36.-:.
C. l'acUlition de Picrre-Ic-Foiilon Qui est ci'uci- : et de ne point troubler le sacerdoce, alin que

fii'
j>niir 7mtis. Le saint vieillard leur ordonna nous puissions jirier lrani(uilleim.Mit, jour et
de le clianler en grec sans celte addition, nuil, pour votre sérénité', n L'empereur lui
suivant l'ancienne tradition de l'Église catho- lit (loiuirr mille sous d'or,sachanl qu'd et
lii]Me. Il ordonna aussi que l'assembh'c pour voulait passer l'hiver à Conslautinople, il or-
le sacrifice se fcMit le samedi dans l'IOglise donna au palais toutes
ipi'on le laissât entrer
de Théoolisle, et le dimanche dans celle de les fois qu'il se présenterait sans se faire ,

la Mère de Dieu mais que dans l'une et dans


; annoncer. Quelques jours après, Anastase l'os-^oo.

l'autre, l'on ferait des veilles continuelles de- l'ayant fait venir, lui dit qu'Élie, archevêque
puis le soir jusqu'au malin, les jours de di- de Jérusalem, avait seul empèclu; de con-
manche. Deux ans après, c'est-à-dire en cert avec Flavien d'Autiochc, que les décrets
493, saint Sabas voyant sa Lanre beaucoup du concile do Chalcédoine ne fussent ana-
augmentée, bâtit un monastère A une lieue thiimalisés avec celui de Sidon qu'il avait ;

de li\, en un endioit iiommii Castel. 11 les de plus refusé de consentir à la déposition


quitta l'une et l'autre pour un temps, croyant d'Eiiphémius et de Macédonius, tous deux
devoir céder ;\ des faux frères ,
qui s'étaient nestoriens ; cpie pour ces raisons , il voulait
révoltés contre lui au nombre de soixante. qu'il fûtchassé de son siège, et qu'on mît à
Mais sachant qu'ils s'étaient retirés près de sa place un homme orthodoxe. Il lui parla
ïh<''uui'! dans des cellules abandonnées, dont aussi d'une lettre qu'Élie lui avait écrite, et
on composa depuis la nouvelle Laure, il alla où il disait : « Nous rejetons toute hérésie
les trouver, et les ayant gagnés par des mar- qui a introduit quelque nouveauté contre la
ques de sa charité il leur bAtit une église
, foi orthodoxe, sans recevoir ce qui a été fait

par les bienfaits du patriarche Elie et leur , ù Chalcédoine, à cause des scandales qui en
donna pour supérieur un nommé Jean le , sont arrivés. Il croit, ajouta ce prince, nous
premier de ses disciples. Il était alors dans avoir trompé par là; mais nous voyons bien
la soixante-neuvième année de son âge. qu'il est le défenseur du concile de Chalcé-
iiii SoUii
ïnvdji; i 6. Elie avait succédé à Salluste dans le doine, et de l'hérésie de Nestorius. » On ne
j^
miiiTi ur
itasu vers siège de Jérusalem, en 493 nous avons de ; sait en quel temps Elie avait écrit cette lettre;
i'U. II

lui une lettre adressée aux moines delà Laure mais il parait que ce fut avant le concile de
pour les assurer que saint Sabas, leur père, Sidon. Saint Sabas répondit qu'Élie rejetait
n'avait point été dévoré par des lions comme également la division de Nestorius, et la con-
ses ennemis le disaient. Ce patriarche l'en- fusion d'Eutychcs, et que marchant au mi-
voya, vers l'au 311, à Constautinople, avec lieu par le chemin de la foi catholique, il

quelques autres abbés, pour résister à Sé- suivait la doctrine de saint Cyrille. L'Empe-
vère, et aux autres hérétiques qui dominaient reur promit qu'à sa considération, il n'ordon-
en cette ville ù la faveur de l'empereur Anas- nerait rien contre l'archevêque, et lui ayant
tase. La lettre qu'ils présentèrent à ce prince encore donné de sa main mille pièces d'or ,

de la part d'Élie portait a Je vous envoie


,
: il le renvoya en Palestine. Saint Sabas em- 355^

l'élite des bons et fidèles serviteurs de Dieu, ploya l'argent qu'il avait reçu à Constautino-
des supérieurs de tout le désert, entr'autres ple , à bâtir une église eu l'honueur de saint
le seigneur Sabas, la lumière de toute la Pa- Cosmeet de saint Damien, dans le lieu de sa
lestine. »Anastase les reçut avec bonté, et naissance, prenant à cet effet sa maisonpater-
leur accorda à tous ce qu'ils lui demandèrent nelle. Cependant Flavien d'Antiochefutchas- j^^

pour l'intérêt de leurs monastères puis s'a- ; , se de son siège, et Sévère, chef des acépha-
dressant h saint Sabas, qui lui paraissait com- les,mis à sa place. Sévère rejetait le concile 3as.:m

me un ange , il lui demanda le sujet de son de Chalcédoine, lecevait le faux d'Éphèse, et

modiw regulam,dialecto armeniorum, in Eccle- xibus armenicaliiigua inter se recitare ; tenipore


siaaDeo constructa exsequerenlur, maiulavitque aiUem divinw oblalionis cum iis qui grœca Ungua
Us Evangelium et reliquam officii seriem iasyiia- utebautur convenue. Vita Sab., pay. 204.
,

276 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


foulenait qu'après l'incarnalion, il n'y avait que sous votre règne il se soit élevé un si
,

on Jésus-CIirist qu'une nature. L'empereur grand orage contre la sainte cité dont la ,

Auaslase, voulant maintenir sur le siège


le suite a été que l'on a chassé avec violence
(l'Anliochc, y envoya des officiers avec beau- les évoques, les ministres sacrés, et les soli-
eoup d'argent pour gagner le peuple. Sé-
,
taires, en les traînant au milieu des villes,
vère adressa partout ses lettres synodiques. et des lieux impurs et profanes, pour les
I^lie de Jérusalem fut du nombre de ceux obliger à des choses qui blessent la foi. Si !>«. 3IC

qui ne voulurent pas les recevoir. Sévère les c'est à cause de la foi que l'on' attaque ainsi
lui renvoya avec quelques clercs et des offi- la sainte cité ,
qui est l'œil et la lumière de
ciers de l'Empereur. Saint Sabas l'ayant ap- tout le comment prétend-on nous
monde ,

pris, vint à Jérusalem avec les autres abbés apprendre notre créance cinq cents et tant
du désert et chassa de la ville les porteurs
,
d'années après la venue de Jésus-Christ ? Il
des lettres de Sévère, h qui les moines et le parait évidemment que la réformation que
peuple assemblés devant le Calvaire, dirent l'on veut introduire dans la foi est la doc- ,

1^.310. auathème à haute voix. Anastase, informé trine de l'Antéchrist, qui veut troubler la
qu'Elie avait refusé sa communion à Sévère, paix des églises. L'auteur de tous ces maux
en fut si irrité, qu'illc chassa de Jérusalem, et est Sévère dont nous rejetons la commu-
,

mit A sa place Jean, fils de Marcien, qui pro- nion, en vous suppliant d'à voir pitié de Sion,
mit d'embrasser la communion de Sévère; la mère de toutes les églises. Fallut-il souf-

mais par respect pour saiul Sabas, et pour les frir la mort jamais on ne pourra nous obli-
,

autres pères du désert, qui le supplièrent de ger à communiquer avec les ennemis de l'É-
ne point recevoir Sévère à sa communion et glise et des quatre conciles que nous rece-
,

3'2- de ne rien faire contre le concile de Cbalcé- vons comme les quatre Évangiles. Pour vous
doine; il manqua à sa parole et au lieu de ; en assurer, nous disons anathème à Nestorius,
communiquer avec Sévère il dit anatlièuic , qui divise Jésus-Chris! , et à Eutychès, qui
eu pleine assemblée à Nestorius, à Eutycliès, confonil la divinité et l'humanilé. » L'Empe-
à Sévère et à quiconque ne recevait pas le
,
reur ayant reçu celte déclaration ,fut con-
>u. concile de Chalcédoine. Tout ce qui se passa seilléde garder le silence et de se tenir en
en celte occasion ayant été rapporté à l'Em- repos, i\ cause que Vitalien, irrité de ses par-

pereur il prit le parti d'envoyer en exil le


,
jures, avait recommencé la guerre. Ainsi le
patriarche Jean Théodose et saint Sabas
,
patriarche Jean demeura paisible sur le siè-
les deux chefs de tous les moines. Ceux-ci ge de Jérusalem.
à qui la nouvelle en fut apportée de Jéru- 7. Il lie le tint que pendant sept ans el Slinl Saba>
rail liO <4câDd
salem, assemblèrent tous leurs disciples, et neuf mois, depuis l'an 517 jusipi'en 523, au- Toy»»r« k CoDî-
Untiuû'.lc co
Ul.
d'un commun consentement, ils écrivirent quel il mourut. Pieire, son successeur, et les
une protestation qu'ils envoyèrent ci Anas- évéques de sa dépendance, prièrent saint
tase. Elle était eu forme de requête, et por- Sabas d'aller à Conslantiuople demander à
311. tait en substance « Le Dieu de toutes choses
: l'empereur Justinien une remise des im-
et notre Seigneur Jésus-Christ, Fils unique positions pour la première et seconde Pa-
de Dieu, vous a donné le sceptre de l'Empire lestine qui avaient été ravagées par les etf '•"•

pour procurer la paix à toutes les églises ; Samaritains, en 530. Le saint, qiioiqu'âgé de
mais surtout h la Mèie des églises en la- , qualre-viiigt-freize ans, se mit en chemin au
quelle le grand mystère de notre rédemp- mois de l'année suivante 531. L'Em-
d'aviil

tion à été accompli. Nous en avons reçu la pereur, que Pierre avait informé de c6
foi par la croix de Jésus-Christ par sou sé- ,
voyage, envoya au-devant de lui ses galères ;

pulcre et par tous les lieux saints que l'on


,
avec Epiphane,
elles sortirent le patriarche

adore. Nous l'avons reçue dès le commence- Hypace, évèque d'Éphèse, et un autre évo-
ment par les oracles des prophètes, et de la que nommé Eusèbe. Ils prirent saint Sabas
Louche des apôtres nous la conservons ; et le présentèrent à Justinien. Ce prince à
entière, et nous la conserverons toujours par qui Dieu ouvrit les yeux, apercevant sur sa
la grâce de Dieu, sans nous laisser effrayer tète une grande lumière en forme de cou-
par ceux qui la combattent, ni emporter par ronne, courut se prosterner devant lui, lui
tout vent de doctrine. Vous y avez été nourri baisa la tète el reçut sa bénédiction. L'Em-
vous-iuèmc, et c'est dans cette créance (pie pereur lui oU'rit des revenus pour la subsis-
3IC. vous avez reçu l'Empire. Il est donc étonnant tance de ses moines mais le saint abbé;
[vr SIÈCLE.] CIIAPITHE XXII. — z.\cnAiui ;, ÉVI>.OUE DE MITILI>-NK. 277
r('pondil qiin loiir partagn ôtait le Sciajneur; avoir de la vie do saint Sabas'
fait l'histoire

qu'il lie lui (lomniulait aulrc riiosn que la dé- fait des révolutions qui arrivèrent dans
celle
Pag ;U3. cliarge des Irihiils pour les lid6les de Pales- sa LaïU'e, sous l'abbi' Mi'litas et ses succes-
tine, et le rétaljlisseiiieiil des l'glises hrùlées; seurs. Il rapporte aussi (piantilt- de miracles

un secours pour les clirotieus ([uiavaieni iSté faits par l'intercession du saint abbé.
pillés et réduits c^ un petit nand)re; l'établis- iVest aussi do lui que
8. ^
nous avons la vodomini
, ,
wnait-lo Silon-
senieiit d'un hôpital à. I(''rnsal('ni pour l(;s ma- Vie do sami Jean, dit le Silencieux, impri-
' '
;',7'-
,''""';
1 III ninii, ad
lades étranyeis; ([u'il le [iriail eucoi'e d'ache- lui'e parmi les Actes des saints de JJollandus.
M^^pùdiJôS;
ver le hàtimcnl de l'I'lglise do la Mère de Dieu, au 1.'} de mai. Le saint vivait encore lorsque
commencé par le patriarche Elie, et de l'aire Cyrille de Seythople en écrivit l'histoire; il
construire un château dans le désert, au-des- marque que saini Jean avait alors cent qua-
sous de ses mouaslcres, cause des incur- ;"!
tre ans, et ([U(' maigri' ce gi^and^ige, il avait
sions des Sarrasins. « Je crois, ajonta-t-il, toujours le visage gai, et l'esprit vif. Il était
qu'en récompense de ces bonnes œuvres, né h Nicople, en Arménie, le 8 janvier de
Dieu ajoutera à vos états l'Afrique, l^ome et l'an loi, de parents riches et chrétiens, qui
le restede rcnipire d'Houoriiis (pie vos jiré- rélevèrent dans la piété. Api'ès leur mort,
décesseurs ont perdu, ù la charge toutefois ayant partagé leur succession avec ses frè-
que vous délivrerez les églises des trois hé- res, il se consacia ;\ Dieu k l'âge de di.K-huit

résies, d'Arius, de Nestorius et d'Origène. n ans, et bâtit, dans le lieu de sa naissance,


L'Empereur lui accorda toutes ses deman- une église en l'honneur de la Mère de Dieu,
des, et donna tous les ordres nécessaires à avec un monastère, où il se renferma avec
cet égard. Un jour qu'il en doimait au ques- dix autres personnes qui pensaient comm ^
teur ïribonien, saint Sabas qui accompa- lui i\ travailler ;\ leur salut. Dix ans après, Pag. 231.

gnait ce prince, se retira à l'écart pour réci- l'évèque de Colonie, en Arménie, étant mort,
ter les Psaimies
île David, et les autres il en fut choisi évèipie, et consacré malgré
prières de de Tierce. Jérémie, diacre
l'ollice sa résistance. L'épiscopat n'apporta aucun
de la grande Laure, un de ses disciples, lui changement î'i son genre de vie. Il pi'atiqua,
dit « Mon père, puisque l'Empereur est si
: étant évèque, les mêmes austérités qu'il
porté à accorder vos demandes, pourquoi le avait dans le monastère. Son
oliservées
quittez-vous? Mon iils, lui répondit le saint beau-frère, gouverneur de l'Arménie, au
vieillard, ils font leur devoir, faisons le nô- lieu de le seconder dans l'administration de
tre. De retour en Palestine au mois de
1) sou diocèse, y mit le trouble, empêchant ^

•tÛQ'J â '>ï(flE6'
septembre de la même année 5^1, il puljlia les ecclésiastiipies de s'acquitter des fonc-

à Jérusalem les ordres de l'Empereur, puis tions de leur ministère, violant le droit d'a-
à Césarée eti\Scythople, d'où étant revenu sile, et commettant diverses violences. Le
visiter les Saints-Lieux, comme pour leur saint évêque, obligé d'en porter ses plaintes
dire adieu, il retourna à la grande Laure, à l'empereur Zenon, lit pour cela le voyage
où il tomba malade au commencement de dé- de Constantinople. vec l'aide du patriarche .A.

cembre. Mais sachant par révélation qu'il Kuphémius, il obtint justice de ce prince,
mourrait dans peu de jours, il appela les puis ayant mis ordre aux de son aff'aires

Pères de la Laure, et leiu' donna pour abbé diocèse, et agréer sa démission, il re-
fait

Mélitas de Béryte, l'exhortant à conserver nonça à l'épiscopat, et passa en Palestine


les traditions de ses monastères, qu'il lui pour y vivre dans un plus grand repos.
donna par écrit. Il demeura quatre jours C'était en 4fll, la dixième année depuis son
sans rieu prendre et sans voir peisonne. Le ordination. Il s'arrêta dans l'hôpital de Jé-
samedi au soir, qui était le cinquième jour rusalem où il demeura longtemps, priant
de ce mois de l'an 531. il demanda et reçut '
Dieu avec larmes de le conduire en un en-
la communion, après quoi il espira, en di- droit propre à son salut. Dieu lui fit connaî-
sant ces paroles du Psaume Seigneur :
,
tre que ce serait dans la Lanre de saint
je recommande et remetsmon nnte entre vos Sabas. Il y alla : le saint ablié le reçut sans
, mains. Il était âgé de 94 ans. Cyrille, après savoir qui il était, le mit sous l'obéissance

Cumqneclipstransegissel qitatuornihil sumev-


' tremo dixil Domine in manns luas commemlo
: ,

do ctim inillo congressus, vespere sabhali pe-


et , spiritum meum, animnm r'didilA'Hn Sab., pag. 3"J3.
lita communione atque accepta , postquam pos-
278 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
de l'dconome, qui l'occupa aux emplois les à lui de ce qu'il lui avait rr-cliéceqpi'il était.
plus bas et les plus pénibles. On le cbarirea Je^an se voyant reconnu voulait quitter la
ensuite du soin de recevoir les hôtes ;
pi'.is, Laure mais tout ce qu'il put obtenir, fut
;

saini Sabas, reconnaissant en lui des dons que le saint abbé n'en parlerait à pei-sonne.
extraordinaires de Dieu, lui donna une cel- Four lui, il se renferma dans une cellule,
lule écartée, pour }• vivre dans la contempla- où il demeura pendant quatre ans dans un
tion. Il y passa trois ans. Durant les cinq parfait silence il n'en sortit qu'une seule
;

premiers jours de la semaine, il ne voyait fois pour aller à la dédicace d'une église

personne, ne prenant [las même de nourri- proche de la Lauie, paru; qu'il ne put se
ture mais le samedi et le dimanche il allait
;
dispenser d'aller saluer le patriarche Elie
à l'étrlise avant tous les autres, et en sortait qui en faisait la cérémonie. La révolte qui
le dernier. Sa ferveur et sa componction survint dans cette Laure, ayant obligé
étaient si grandes, qu'il ne pouvait retenir saint Sabas à en sortir pour se retirer du
ses larmes, lorsqu'on oHrait le sacrifice
'
Coté de Scylhople, le biouheureux Jean,âgé
^'"
non sanglant. Les frères en étaient dans une alors de cinquante ans, passa d.ins le dé-
confusion mêlée d'admiration, en voyant en sert de Ruba, où il demeura neuf années,
lui ce don des larmes, et ils eu louaient n'ayant de convei-sation qu'avec Dieu, et ne
Dieu de qui il l'avait reçu. Les trois ans de vivant que des fruits et des racines qu'il
sa retraite écoulés,il fut fait économe de la trouvait dans cette solitude. Saint Sal>as l'y
Laure, qui reçut par son ministère de grands vint trouver, et le ramena à sa Laure, qui
p.f. Ml, accroissements. Saint Sabas pensa à le faire jouissait de la tranquillité depuis l'éloignc-
ordonner piètre, et le conduisit à cet etl'et à ment des rebelles; il y resta même depuis
Élie, patriarche de Jérusalem. Sur le témoi- la mort du saint abbé, et il y était encore

gnage qu'on lui i-endit des vertus de ce so- lors(juc Cyrille vint à Jérusalem pour visiter
*""
litaire, il voulut l'ordonner lui-mcmc mais ;
les Saints-Lieux. Il passa de là ^ la Laure

le saint le voyant prêt à commencer cette de saint Sabas, parce qu'il avait reçu ordre
fonction, demanda à lui parler eu secret ;
de sa mère de prendre avis du bienheureux
alors il lui découvrit qu'il était évcque, ci Jean pour ne point se laisser entraîner à
que la vue île ses péchés l'avait obligé à quelque doctrine pernicieuse. Il en reçut di-
fuir dans la solitude pour y attendre la mi- verses inslructions, et fui témoin de quel-
séricorde de Dieu. Élie, pour favoriser son ques miracles qu'il opéra. Il eu rapporte
humilité, dit ci saint Sabas, que ce religieux d'autres sur la foi d'aulrui. Quant aux com-
lui avait fait connaître en secret certaines bats que le saint avait soulenus pour la dé-
choses qui ne lui permettaient pas de l'or- fense do la vérité, Cyrille laissa ii d'autres
donner, lui recommandant de le laisser dans le soin de les raconter. Surius n'avait donné

le silence sans (ju'il fut inquiété de personne. cette Vie qu'en lalin Heuschéiiius et Pape-
;

Ce saint abbé extrêmement aflligé de l'avoir biock imprimer en grec et en latin.


l'oul fait
présenté pour être élevé au sacerdoce, pria Nous avons aussi en ces deux langues les
Dieu avec de grandes instances de lui faire Vies de saint Eulhyiuius et de saint Sabas
connaître ce qui l'en avait éloigné. Il l'niqtrit dans les iMimmuents de rk'giiar grecque, pnr
dans une vision où J)i(ïu lui révéla que Jean M. Colclii-r; i-lles sont en latin seulement
était un vase d'élection, qui était honoré du diins Surins; la pieinièie ;iu iO janvier',
caractère épiscopal. Saint Sabas se plaignit la seconde au 5 décembre. '

' Tanta vero et aderat compnnclio ut ipse re- gui lidclinnt gratiam lacrymarinn, ohsIupeseereHt
hemcnter lairymnrrtur in (empare, incruenti sn- el Inudarcnl Deum datorem donorum.\Ha&. Joau.,

crificii, cl non polcral se conlinere : adeo ul l'alres


n

[vi« siÈciE.J CITAPIinK XXII!. — SAINT GIVÉGENTIUS, ARCilEVÈQUE, ETC. 279

CHAPITRE XXIII.

Saint Grcgentius L554J, archevêque de Taphar ; Nounosus et Eutychien.

[Écrivains grecs.]

Ce <]ti'.i 1. Saint Grégentius ne nous est guère con- portes du ciel s'ouvrirent, et que Jésus-
ntt ilo 5.1.

nu que par un Dialogue qui porte son nom ;


Christ apparut à toute l'assemblée, se pro-
mais dont l'autorité n'est pas l)icn assurée. menant sur une nuée couleur de pourpre.
Tniii VI. Il y est tlil qu'il fut archevi'quc do Tupliar, Ils'arréla auprès de l'archevêque sur un
B'M. Pol.ixii.'.
lOll). ville célèbre dans l'Arabie Heureuse où les bout de la nuée, n'étant élevé au-dessus du
roisdes Homériles faisaient ordinairement peuple qu'environ de deux cents coudées, ce
leur ileuunue; (pi'il gouverna l'IIgiisc de qui le rendait visible à tous. Herhan, rempli

Taphar dans le même Icnqis qu'.X'orauiius do frayeur, étail dans le siliuice alors il vint :

régnait sur ces peuples que ce prince fai-


;
une voix lie la part du Seigneur, qui s'adres-
sait tout par le conseil de cet archevêque ;
sait aux Juifs eu ces termes : C'est à la prière
qu'Abramiiis mourut la Irenlicuic année do de l'archcvèqae r/ue j'apparais à vos yeux, moi
sou règne, et que saint Gn'gcntius le suivit que vos pires 07it eruci/ié. Tiuis cnteudironl cette
de près, ayant occupé aussi pendaut trenlo voix qui les remplit de frayeur; mais tous ne
ans le siège épiseopal de Taphar. On fait virent pas Jésus-Christ; il fallut le ba|)téme
connueucor le règne d'Abramius la défaite '.i pour ouvrir les yeux aux Le premier
Juifs.
de Duuaan, par Hicsbaan, roi il'Auxume en d'entr'eux qui le reçut eut aussitôt les yeux
l'^lliiopie, c'est-à-dire, î\ l'an 524 et on rap- ; ouverts. Ce nouveau prodige eut plus d'effet
porte à la même année le commencement que le [uemier. Tous se liient baptiser, et
de l'épiscopat de saint Grégentius, ce qui virent ce qu'ils ne voyaient point auparavant.
oblige de mettre la mort de l'un et de l'autre Qu'appelle-l-ou histoire fabuleuse, si cells-là
en 534, en donnant trente ans de règne à n'eu est pas une? Uieu a accordé aux apô-
Abramius, et trente ans d'épiscopat à saint tres le don des miracles. Il s'en est fait un
Grégentius, selon l'auteur du Di<i/u(juc' ; mais nombre iidini à la couversion des infidèles.
pmcop., lib.
1 De Ilt-I. il ne s'accorde point avec Procope qui, de- Mais ou nu lit nulle part que ceux que Dieu
l'c s cap. XT
puis la défaite de Duuaan, usurpateur du a employés à ce ministère aient prié Jésus-
royaimie des Homérites, leur donne plu- Christ de se faire voir à ceux qu'ils entre-
sieurs rois jusqu'à l'an 554. prenaient de convertir. Ils parlaient diverses
Lfl Di.ilo;uc
$oii< la nntn de regarder ce Dialogue
2. Cette raison a fait langues, ils guérissaient les malades, i-es-
."lot (îréfen.
Iiit-p.^r.il( uiio comme une pièce supposée et de même na- suscitaient les morts, chassaient les démons,
pièce siippo-
ture que la Dispute que nous avons sous le et faisaient d'autres miracles, qui, selon la
nom de saint Athanase.avec Arius, qui est promesse de Jésus-Christ, devaient accom-
rejctée de tout le monde comme apocryphe; pagner la prédication de l'Ilvangile. Jamais
mais il y en a encore d'autres preuves. Her- aucun d'eux n'a tenté ce que l'auteur du
bau, qui dans le Dialogue prend la défense de Dialogue attribue à saint Grégentius, qui ne
la religion juive contre le christianisme, de- pouvait ignorer que Jésus-Christ avait refusé
mande à saint Grégentius de lui faire voir de descendre de la croix, quoique les Juifs
Jésus-Christ, qu'il disait être monté au ciel promissent de croire en lui s'il eu descendait.
depuis qu'il mis à mort par les
avait été Il faut ajouter que cet auteur, en faisant
Ton.. VI Juifs. Le saint évoque croyant que de ce mi- parler Herban pour la défense des Juifs, lui
Blbl.Hal.pa;!
1113». racle dépendait la conversion d'Herban et de fait tirer avantage du 37' verset du troi-

ceu.v. de sa suite, se met en prièie, demande sième chapitre de Baruch, que l'archevêque
.1 Jésus-Christ de se manifester à ce peuple. avait cité sous le nom
de Jérémie. En quoi Il.id.
10113.

O, à peine le roi Abramius, les grands sei- il se trompe doublement parce que non- ,

gneurs de sa cour, eileschrétiens qui étaient seulement les Juifs ne croyaient pas que le
présents, eurent-ils répondu Amen, que les ; livre de Baruch fut de Jérémie ; mais ils ne
,

280 HISTOIRE GI'JNKRAI.E DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


recevaient pas même ce livre comme cano- en 527, qui fut la première année du règne
nique, ainsi que saint Jérôme nous en as- de Justinieu puisqu'r>lesbaan, après avoir
;

Ploi. Co^.l
sure dans sa Pnfnce sur ce proplièto. Il pa- défait Dunaan, roi des Homérites, en 52i, [.IJ.6 01 ..

rait au surplus que l'on n'a intitulé ce Dia- ne tarda pas embrasser l'état monastique,
.'i

logue de saint Grégentius, que parce


du nom ainsi qu'on le lit dans les Actes du martyre

qu'on suppose qu'il conféra en elïct avec de saint Arétas, dont le fils succéda à Éles-
Herban, docteur juif mais on ne peut le lui ;
baan dans le loyaume d'Auximie. Le but de
attribuer on l'état que nous l'avons. Il y est la légation de Nonnosus était d'engager Caï-

loué en 50 endroits, et il y est parlé de sa sus A prendre la piéfo- lure et le gouverne-

mort cl de sa sépulture. C'est donc l'ouvrage ment de la Palestine. Nonnosus réussit dans
d'un anonyme qni sachant, ou feignant' sa négociation où il essuya mille dangers de

qu'il y avait eu une dispute sur In religion perdre la vie. Caisus vint h Constantinoplc,
entre cet archevêque et Herban, en présence amenant avec lui un nombre infini de ses

du roi des Homérites, l'a rapportée en l'ajus- sujets, et reçut de l'Empereur le gouverne-
tant à sa façon. L'ouvrage est divisé en qua- ment qu'il lui avait fait offrir. Nonnosus écii-

tre parties, parce que la dispute continua vit l'histoirede sa légation. On l'avait encore
pendant quatre jours. Ou l'imprima à Paris, du temps de Photius (jui en donne quelques
en 1.586, de la traduction et avec les notes extraits, en remarquant qu'elle était rem-

de Nicolas Goulu, professeur royal de langue plie de quantité de faits incroyables et qui

grecque, ii Paris Fronton-lc-nuc lui donna


;
tenaient beaucoup du fabuleux. Nous ne l'a-

place dans tome I" de son Anrtmrium,


le vons jilus. Il y parlait d'une certaine espèce
imprimé aussi à Paris, en 1624. On le trouve d'hommes extrcuiomcnt petits et tout noirs,
encore dans le tome I" de la Bibliothèque dont la nourriture ordinaire était les huîtres
grecque et latine des Pères, de la même ville, et les ])oissons que la mor jetait dans l'île

et dans le tome VI de la Bihliot/ièqm de


qui leur servait de demeure.

Lyon, [et dans le tome LXXXVI de la Pa- 5. Eutychien, clerc de l'Église d'Adan dC'll lli
de ta ! fu-
trologie grecque, col. 021-782, d'après Gal- dans la seconde Cilicie , écrivit, sous l'em- sion lie ?

TUo| bilr.

land, Vefcr. Patr. hibl. tome XI, p. 590.] pire de Justinieu, l'histoire de la conversion

3. Lamhécius met entre les manuscrits de et de la pénitence de saint Théophile , éco-


M>ii»l(> nom (•«

saint GK-i;cii- la Ribliotlièque de Vienne un Code de lois nome do la même église.


Sou évêque l'ayant
lius.
faitespar saint Grégentius sous le nom d'A- dépouillé injustement de son emploi il eut ,

bramins, roi des Homi-i'ites. Ce Code qui n'a recoiM-s au démon pour y rentrer; et lui

pas encore été rendu public est divisé en donna cet oll'ot un billet signé de sa main
;\

vingt-trois titres. Les Grecs en parlent dans et scellé de son sceau, par lequel il reniait
U»»'.Iib.V
vas- Il'I.
leurs Menées, et il en est aussi pailé dans le Jésus-Christ et sa mère. Frappé de l'énor-
Dialogue entre ce saint archevêque et Her- mité de son crime, il en fit une sévère péni-
ban. Le premier titre traite de l'homir idc ;
tence. Il obtint même par dillV-reulos prières

le second des enchantements, du faux té- h la Sainti' \iorge que son billet lui serait
moignage et du vol le troisième de la for- ;
rcnilu par le démon. Eutychien, pour don-
nication le quatrième de l'adultère. [M. Mi-
;
ner du poids à une histoii'e si extraordinaire,
gne a reproduit, tome L.XXXVI do la Patro- assui'o tju'il ('lait m' dans la maison do saint
logie grecque, col. .'Î67-021, \es Lois des Ho- Tlu'ophile, qu'il l'avait servi dès sou bas Age,

mérites, d'après lioissounade, tom. V.Awcd. et qu'ayant été contiiniellement auprès de


gjv'c.,[). 63. Ces lois se trouvent aussià la tin lui, il ou ouï tout ce qu'il en racon-
avait vu
du ]«' vol. dcVIfislnire de la littérature ara- tait. Nous ne connaissons pi-rsonue (]tn' ait
be,par de Hamer.] cité cette histoiri- avant saint Pierre Damien'
Nonnosus, fils du prêtre Abraham, fut
4. et saint Reruanl. Elle l'a été depuis par
*cr* !o> Siirr»- envoyé par l'ompereui- Justinieu versCaïsus, salut Honavonture, pai- .Mbcrl-lo-Crand, par
•III». le* Auxa*
m les II •• commandant dos Sarrasins, ensuite vers Fidbort de Chartres, et jiai- quelques autres.
llo(n''"'"i'C''»

Élesbaan, roi d'Auxume, puis vers les Ho- Surius et Bollandus l'ont insérée dans leurs
'
mérites. il faut donc mettre sa députation Itccvcih au l février. On la trouve en grec

' fiallaud, lom. .M, DM. tel. l'ai., p. xxu <lc lii * Damian. Sitiu, île Snl. Mariiv. Bernard. 8orm.
p lé l'a II.' et 509, ii'osi; se proïKniciT sur l'aïUlu'ulii iti!, in vr.rba \pnsl. ctalii. Apnil Boll. «(/ diem 4 febr.
vuycz l'ulrol. grecque, loin. LXXXVI, l'ol. 5G3 et •1 I.anil).,lil). Vlll,;ia(<. "«.
siiiv. (tVdifeur.)
,

[Vl* SIÈCLE.] CH.VPITIU'] XXIV. — JLINn.IlîS, l'IllMASK, ETC. 281

dans los iniiniiscrits de la Bililiotliôqiic im- lui par l'culromise d'un juif inaf,Mcicu ; l'ap-
périalc. l.a traduction quo nous avons est paiitinii de la Sainte Vie,ri,'e tenant en main
altiihut'P i\ Paul , diacri! di; l'ûfiliso di; Na- le ljill(!t qu'il avait ilonné ati dialjle; et plu-
plcs, le in(Mno qin,an rapport de Sij;<d)nrt de sieurs autres circonstances de cette histoire
tioinlilours ', a traduit du i^icc on latin la dniment lieu de la regarder comme ayant
Vie de sainte Marie d'l5f;ypto. Si le roi Char- été embellie et amplifiée. Elle est plus am-
les à qui Paul dc'ilia sa ti'aduction, est (;har- pli;dans Mi'IaplirasIe q le dans la traduction
lemaunc, tiiuune l'a eiu on ne peut \'nssius, latine du tliacre Paul Henschéuius a donné
;

douter de l'antiquité de de la con- l'hislniro la môme histoire eu vers hexamètres qu'il ,

vei'sionde saint 'riiéopliile; mais je ne sais si conjecture être de la façon de Marbodns qui,
elle en doit paraître |)lus aullienliipi(\ Les d'archidiacie d'Angers fut fait évériue de ,

grands colloques que l'on fait ternr à Tlico- Rennes en Bretagne dans le xi' siècle. [Ou
pliile avec la Sainte Vici'ge , mère de Dieu ; la trouve au tome clxxi de la l'utruloijie la-

l'appareil avec lequel le diable se montre à tine, col. Io93-1603.]

CUAPITRE XIIV.

Jnnilius, évêqne d'Afrique [550J ;


Primase, évêqne d'Atirumct [555J ;
Bellator

et Mucien [vers le même temps],

[Écrivains latins]

Jïriiniiis : Nous ne connaissons Jnnilius que parce


1. de leur eu approfondir les mystères. Primase
qu'il est fait mention dans Cassiodore', et
en pressa Junilius de rendre public ce qu'il
par l'éci'it qu'il a composé sous le titre Des : avait appris de Paul. Il le fit en deux livres
Parties de lu loi dii'ine. C'est une espèce d'iu- qu'il mit en forme de itialogue entre le dis-
Iroduction à l'étude de l'Hcriture sainte ciple et le maître. Le disciple propose les
adressée à Primase, évèque d'Adrumet, ville questions, le maître les résout *.

de la province de Bysacène eu Afrique. Ils 2. La science de l'Écriture est divisée en Anaiy.o do


se? trrîl-: lili.

s'étaient ' trouvés ensemble à Go'.istantino- deux parties


^
dont l'une a pour
'^
objet la su-
/
•'
i

do
(i«s
la
punies
loi divi-

ple dans le temps de la tenue du cinquième nerlicie ou l'écorce de l'Ecriture. La seconde "•-,
l'"'"-
x
i Bibl. Pal. pni;.
^ ^

concile général. Comme ils s'entretenaient Consiste dans la connaissance des choses 2'•"

sur des matières de doctrine Primase de-


, mêmes qu'elle nous enseigne. La connais-
manda il Junilius s'il ne connaissait person- sance de la première partie se réduit à cinq
ne parmi les Grecs qui fut versé dans l'in- articles, savoir à la nature du livre
: à Mtn ,
Cap. t.

telligencc des livres saints, et qui eût assez autorité, à son auteur, à la manière dont il
de zèle et il'anleur pour en instruire les au- est écrit, et à l'ordre dans lequel il doit être
tres. Junilius répondit qu'il avait vu un per- mis. Junilius entend par la nature du livre ,
san nommé Paul, qui avait étudie à Nisibe ,
ce dont il est composé c'est-à-dire qu'il est
,

on y avait uue école publique, où l'on ap-


il . ou historique, ou prophétique, ou figuré, ou
priMiail l'I'lcriture sainte, comm(! il y en avait simplement instructif. L'historiipie contient
ailleurs pour apprendre la grammaire et la le récit des choses passées il y en a dix-sept :

rhétorique qu'il avait la de ce Paul cer-


;
de ce genre dans le canon de l'Kcriture la :

taines règles qu'il avait coutume de donner Genèse, l'Exode, le Lévitique, les Nombres,
à ses disciples pour les diriger dans leurs le Deutéronome, Josué, les Juges, llulh, les

études voulant qu'ils sussent avec quelle


, quatre livres des Rois, les quatre Evangiles
méthode ils devaient lire l'i'xriture avant , et les Actes des apùtres. Il rejette ^, comme

'
Sigeb. De Script, ecci. cap. 69. ' On trouve l'ouvrage de Junilius dans le tome X
- Ca-.^ind. De In^lit., ia|i. x, pas. ot'i. de Gallaurl etdans li' tome LXVIII de \siPitrologie
3 .liiuil. Prœfal. ad Primas., tnm.X, Bibliot. Pat. UiUne, col. u, avec la notice de Gallaiul. [L'éditeur.)
pag. 340. " Quare hi libri Paralipomenon duo Job I. ,
282 lllSTOmE GK-NliRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
n'étant pas du canon deux des Parali- , les titres, comme
sont les quatre Évangélistes,
pouiùnes celui de Job , deux d'Esdras , les , et d'autres, par la tradition des anciens.
le livre d'Esthcr, les deux des Macliabées C'est par cette voie que nous savons que
el celui de Judith. La raison qu'il en donne, Moïse est auteur duPenlateuque; Josué, du
c'est qu'au lapport de saint Jérôme ces li- livre qui porte son nom; Samuel,
et riu pre-
vres n'avaient pas chez lus Hi'breux la même mier livre y en a quelques-uns
des Rois. Il

autuiité que les précédents. Il déliuit la pro- dont les auteurs sont entièrement inconnus,
cr-K-. phélie « La manifestation
: des choses ca- '
comme le livre des Juges, celui de Ruth, le
chées passées présentes ou futures faite
, , , troisième et le dernier des Rois ce que Ju- ;

par inspiration divine » et compte dix-sept ; nilius croit être arrivé par un effet de la Pro-
livres piopliétiques, les Psaumes, les quatre vidence, afin que l'on ne juge point de l'auto-
grands Prophètes et les douze petits, lemar- rité d'un livre par le mi'rite de son auteur,
quant que l'on doutait beaucoup ' chez les mais par la grâce du Saint-Esprit (|ui seul
Orientaux de la canouicité de l'Apocalypse donne autorité aux livres canoniques. Entre '-^f-

T de saint Jean. La manière d'écrire prover- ces livres, ajoute-t-il, quelques-uns sont écrits
biale est, selon lui, une façon d'écrire tigu- en vers hébreux, comme les Psaumes, le li-
rée qui dojme autre chose à entendre que vre de Job, l'Ecclésiaste et quehpies endroits
ce qu'elle signifie à la lettre, et qui donne des Prophètes les autres en prose. Si ceux
;

des avis pour le présent. C'est de cette sorte qui sont écrits originairement en vers, ne
que sont Proverbes de Salomon,
écrits les conservent pas même mesure dans les
la
l'Ecclésiaste et la Sagesse de Syrach c'est- , traductions, c'est que la chose n'est pas
à-dire l'Ecclésiastique. Quelques-uns ajoutent possible, si l'on ne change les termes et la
le Cantique des cantiques et la Sagesse. C'est construction de l'original. Pour ce qui est
aussi a ce genre d'écrire que l'allégorie a de l'ordre des livres de l'Écriture, c'est le
rapport, parce qu'elle se tire ou d'une mé- môme dans Junilius que dans nos exemplai-
iapliore ou d'une parabole
, ou d'une com- , res. Il remarque que le but de l'.Vncicn Tes-
paraison, ou d'une manière de parler pro- tament est d'annoncer sous des ligures ce
verbiale. La simple instruction regarde la qui devait arriver dans le Nouveau et que ;

". foi ou les mœurs


temps présent. II|iour le le dessein du nouveau est de nous inspirer
eu est traité dans l'Ecclésiaste, dans les qua- de l'amour pour la gloire de la béatitude
torze épitres de saint Paul, dans la première éternelle.
de saint Pierre, dans la première de saint Après avoir expliqué ce qui regarde
4.
Jean qui sont les seules que Junilius sem-
, il passe au fond des
l'extérieur de l'Ecriture,
ble recevoir en remarquant toutefois que
, choses qu'elle enseigne, en remarquant
plusieurs reçoivent aussi les cinq autres épî- qu'il y a des noms qui conviennent à l'es-
tres, qu'on appelle canonù/ues. sence, d'autres qui couviennentaux person-
""' 3. Il distingue divei-s degrés d'autorité nes de la Trinité qu'entre ceux-ci quelques-
;

dans les livres de l'Ecriture. Ceux-là sont uns les marquent précisément, et d'autres
d'une autorité parfaite, qui sont du nombre conséquemmeut, parce qu'ils signifient les
des canoniques ceux qui ne sont pas mis ; opérations qu'on leur attribue. Les noms
dans le canon universellement, mais seule- qui désitrucnt l'essence, sont : Dieu, Sei-
ment par plusieurs, sont d'une moindre au- gne'ir, Adaiiui, Le
SuOaol/i, Helei ou Ilrloi.
torité les autres qui n'y sont mis de per-
; terme de Tuut-Puissant, se lapportc à l'opé-
sonne, n'en ont aucune. On connaît les au-
'
"•"' ration et se dit de Dieu couséqueinmeat;
'

teurs des livres saints, ou par les titres, ou parce que dès lors qu'il est Dieu, il est font-
par le commencement de leurs ouviages ;
puissant. Les noms de J'rre, de Fils et de
c'est de cette sorte que l'on connaît les Snint-L'sj/rit marquent préci;séraenl les per-
écrits des Prophètes et des Apôtres. Il y en sonnes, qui sont aussi quelquefois désignées
a d'autres que l'on ne connaît que par les par certaines oiiéralions qu'on leur aiti-ibuc

Es'lrœ duo, Judith I, Ef!ther I Mnchahœnrum ,


' Prophetia mt rerum latentiuin, nul prœsen-
duo non inler cnnoiiicas Scripturas cnrnnit ? iium, (ttil fuhirarum ex dirina inspiraliimc wa-
Quonwin apud Uehnros i/uot/ue super liac dijfc- nifeslotin. Iliiil. nip. iv.

rentia lecipiebantur, sicul Uieronymus cœUrit/ue 'Cœtenim de Joniinis Àpncalypsi apudOrien(a~


teslanlur. Juuil. lib. I, cap. ni. lesadmodum dubilatur. lliiil.
,

[VI* SltaK.j CHAPITRE XXIV. — JtlNlMUS, PitIMASK, ETC. 283


('iMiiniimi'nionl dans rilciiliirc ; ([ti(ii(|ii'ollcs méchants, et qui, dans lécomiiensc
l'auli'c,

ildivtMil iiiissi s'(Mil(\ii(lr(i lies iiiilrcs ])('rson- leurs victoires. 11 demande encore comment caii

nos , comme lorsqu'il est dit dans l'Kpitro l'on prouve que les livres de l'Église catho-
I Cor. aux Coriiilliicns : ]'oiis rtcs le temple du Si'iiil- lique sont divinement inspirés'? Sur quoi il

Lac* )'• L'uprit; et dans saint Luc : Le S(ii»t-/:^!tjj)it dit que cela se prouve ^ i)ar leur vérité' nu"'-

si/rviendra eu enus. La grâce, qui on ces deux me, par l'ordre des choses qui y sont rappor-
endroits est désignée sous le nom du Saiiit- tées, par l'accord admirable des préce])tes
Lsprit, lui est attribuée nommément, parce qu'ils renferment, par la simplicité do leur
que nous ne le représente comme
l'Écriture style, par la pureté de leurs termes, par la
le sanctillcateur de nos ùmes, et comme qualité et la condition de leurs auteurs, n'é-
l'auteur des dons spirituels, quoiqu'ils soient tant pas possible que des hommes aient écrit
égaleiuent du Pèn; et du Fils. D'où vient des choses divines, que des personnes gros-
que Jésus-Christ dit aux apôtres Allez, : sières et sans éloquence aient, sans l'inspira-
lia/jlisez toutes les ',:alw>i$ au nota du l'ère et tion du Saint-Esprit, écrit des vérités si su-
du Fils et du Saint-L':tj)rit. blimes. « Le succès de leur prédication, dit-

Ani'jse du
•«-oi>d ;ivi«,
5. Junilius traite dms le second livre, de il, est encore une preuve de la vérité de ce

la création du monde, de manière dont


la qu'ils ont annoncé. Leur doctrine, quoique
J' ppiiicnt tlii

Dieu le gouverne, de la loi naturelle et de lirèchée par des gens méprisables et en pe-
des accidents qui arrivent aux
la loi écrite ; tit nombre, a été reçue de toute la terre, a

clioses naturelles, et de ceux de la volonté redressé les sentiments des philosophes, con-
Cp. " de l'homme. La santé et la maladie, dit-il, la fondu ceux qui en professaient une contraire.
!C.|

vie et la miu't sont des accidents qui regar- Enfin l'accomplissement des prophéties rap-
dent les choses corporelles. Les bonnes et les portées dans ces livres en a prouvé évidem-
mauvaises pensées sont des accidents de la ment l'autorité; et Dieu l'a confirmée par
volonté, qui toutefois ne lui arrivent pas des miracles continuels jus(ju'à ce qu'ils ont
sans elle ;
parce qu'il y a en nous m\ discer- été reçus des nations infidèles. 11 n'est plus
nement naturel du bien et du mal, et que besoin aujourd'hui de prodiges pour leur
nous nous portons volontairement vers l'un donner de l'authenticité; c'en est un sullisant
I
ou l'autre. La loi nous instruit mais la '
; de ce reçus de tout le monde. »
qu'ils sout
grâce nous prépare, nous aide, nous fortifie, Junilius montre après cela que la foi est au-
nous couronne. Ensuite il fait voir que Dieu dessus de la raison, mais qu'elle ne lui est
s'est choisi un peuple particulier pour le pas contraire; quoiqu'elle nous soit néces-
rendre heureux dans le siècle futur, et à saire pour comprendre ce que les lumières
cette occasion il traite des figures de la loi de la raison ne peuvent atteindre.
et de l'accomplissement des prophéties tou- L'ouvrage estécrit avec beaucoup de métho-
chant Jésus-Christ. 11 traite aussi des pro- de, et d'uuemanièrc très-claire et très-suivie.
phéties qui l'egardenl la vocation des gentils, 6. Primase, à qui il est dédié, se trouva à rtiiiM'
évPtuc d'A-
et de leur accomplissement ;
puis il se fait Constantiuo[>le dans le concile que le pape fjl.Tjrà»
cette question : « Qu'était-il besoin de créer Vigile y tint contre Théodore évéque de Gé- ciia|«reT,

le siècle présent, si tout ce qui s'y fait a rap- sarée en 531. 11 était encore en cette ville eu
port au siècle futur?» Il répond que Dieu en 533 lorsqu'on y assembla le cinquième con-
a ordonne ainsi, afin que les bieidieureux cile généial. Quoiqu'invité plusieurs fois d'y
eussent lieu de glorifier de plus en plus le assister, il le refusa ; mais il signa avec plu-
Seigneur qui aide les bons en ce monde sieurs autres évoques le décret que le Pape
pour leur faire remporter la victoire sur les avait présenté à l'empereur Justinien, dans

Ipsum quidem spontancum moHun lex qui-


1 prœdicationis virl.us yuain dam prœdicaretur
,

dem erudit gratta autem prœparat adjuvat


:
, {licet a paucis dcspeclis) obtiniiit. Àccedunt his
corroborait, coronat. .Iiuiil. lili. I. oap. xu. teslipcalio contrariorum, ni sibyllarum vel phi-
* Vndeprobamus libros religiohis nostrœ divina losophorum expulsio adversariorum , utilitas
,

esse vispiratione conscriiitos f Ex multis, quorum conse(iucHlium, e.vilus eonim quœ per accepla-
primum est, ipsius Scripturœ verilas ; ileinde ordo tiones et figuras et prœdictiones quœ prœdicta ,

rerum-, consonanlia prœceptorum, modus loculio- sunl ; adpostremiun, miraculajugiler factadonec


nis sine ainbUu ,
purUasque vcrborxim. Additur Scrvplura ipsa citsciperetur a gentibus. De qua
conscribenliuui et prœdicantiuni qualitas: quod Iwc nunc ad proximum sufflcil miraculum quod ,

divina ho mines , excelsa viles, iiifucuiidi subtilia ab omnibus suscepta cognoscilur. Junil. lib. Il ,
,

non nisi divino repkli Spiritu tradidvssenl ; tum cap. XXIX.


284 HISTOIRE GI:N1':RALE des auteurs ECCLESIASTIQUES.
lequel, cil condarunant les erreurs attribuées un sens spirituel, ne considérant dans ce livre
à Tlu'odore d", Mopsueste, Tlioodorct et iï ft que deux sociét(''s, celle des bons et celle des
Ibas, il épargnait lciu~s poi-sonncs. Ce décret méchants, la récompense des uns et la peine
estappelé le Constitutum du pape Vigile. Les des autres, Jésus-Christ et sou Église et ;

évoques qui, après la décision de ce concile, quoiqu'il donne quelquefois le sens de la

refusèrent de condamner les Tnns-Chnjjitres lettre il ne s'altache point ;\ montrer la suite

furent maltraités. Primase fut d'abord relé- des événements que Jean a eus en wie.
.saint

gué dans un monastère; mais, ayant aban- Il fait à la fin de son commentaire une ri^ca-
donné la défense des Trois-Cliapitres, il devint I)itulation de tout co qu'il y avait dit ; afin

primat de Rysacènc,sa province, il la place


la que le lecteur puisse plus aisément se re-
de Uoéce. Mais il fut ensuite déposé par les présenter le plan sur lequel roulent toutes
scbismaliques de la môme province, c'est-à- ses explications.
dire par les défenseurs des Trois-Clwpitres. 8. Nous apprenons de saint Isidore de Sé-
<!r. Corn.
7. Nous avons de lui un commentaire sur ville ' q>ie Primase avait écrit trois livres dcx
n)C0tidrC3*

l'Apocalypse cité par Cassiodore ', et un sur Ilirésies, où il expliquait ce que saint Augus-
les Épîtres de saint Paul, dont Cassiodore tin avait laissé imparfait dans son ouvrage
ne dit rieo-. On n'en trouve rien non plus sur la même matière; faisant voir dans le
dans Isidore de Séville mais son silence ;\ ;
premier ce qui rend un homme hérétique;
cet égard ne fait pas preuve, puisqu'il ne dans le second et dans le troisième, à quoi
parle pas même du commentaire de Primase l'on connaît les hérétiques. Cet ouvrage est
sur l'Apocalypse. Celui qu'il a fait sur les perdu. Quelques-uns ont cru le retrouver
Épitres de saint Paul est tiré en partie des dans le Pi-ffàcstinatus, donné au public par
écrits de saint Augustin et de saint Âmbroise, le Père Sirmond en 1043 et 169G. Mais le

et du commentaire qui porte le nom de dessein de l'ouvrage de Primase et sa doc-


saint Jérôme. Il fut imprimé séparément à trine sur la grâce, qui est celle de saiut Au-
Lyon, on I3i3, in-S», par les soins de Jean gustin, n'ont rien de commun avec le Prœ-
(îagncux, tliénlogien de Paris, qui dédia cette dastinaliis, dont l'auletu' * était infecté de

édition au roi François I". réimprimé Il fut l'hérésie pélagienne, et dont le dessein a été
A Bàle, en 1544, et depuis dans le tome X de de donner une suite des hérésies depuis Si-
la /iiljliitl/ikjue df:s PèrfS à Lyon, en 1677, mon le magicien jusqu'aux prédestinatiens;
avec le connroutaire de Primase sur l'.Vpo- et non pas de montrer, comme a fait Pri-

calypse '. Celui-ci est adressé k Castor qui mase, ce qui fait un hérétiijue, et à quoi
l'avait demandé à Primase, et il est divisé en l'on reconnaît qu'il est hérétique.
cinq livres. L'auteur recounait ' qu'il a com- 9. On neconnaît le prêtre Rellator nue n'i.i.r:.»

posé ce commentaire de divers endroits des parce que on en lit tiaus les écrits de Cas-
1

écrits de saint Augustin, mais surtout de l'ex- siodore car il ne nous reste rien de cet an-
;

plication que Ticbonius le doualistc a donnée leur. Il avait composé ' un commentaire snr
de r.Vpocalypsc en rctrancbant toutofuis ce
; le livre de Rulli, divisé en deux volumes,

qu'il y disait de favoral)lc h sa secte, contre que Cassiodore joignit au Recveil des ou-
l'unité de l'Eglise catholique et beaucoup ; vrages d'Origène sur l'Eptateuque, expliiiué
de choses inutiles qui ne servaient h rien en huit 'livres, celui de la Sagesse, et com-
moins qu'h expliiiuer le texte de l'Apôtre. menté ' les livres de Tobie, d'Esther, de Ju-
Nous avons paihi ailleurs* de ce cummen- dith et des Macliabéi's. Il y avait cinq livres
tairc de Tichonius. Celui de Primase est fort sur Tobic; six sur Esther; sept sur Judith,
étendu. A l'imitation de saint Auirustin et et dix sur les .Macliahées. 11ne fit point de
de Tichonius, il y explique l'Apocalypse en commentaires sur Esdras ; mais il traduisit

' Cîissiniî. De Inxtil., c.ip. ix, pafr. .'il.l. e/)i,«co/)H»i , crplicnns in pis i/und nlini hratu^l
' l'rim.is. l'rœfdl. in Apocdl. toiii. X liibliol. Aufiiislintis in lihrn iKvresron iwperfevlum morte
Pair., paf,'. 287. intervenienle reliqiKral: in primo oslenitrnx.i/nid
' Voyez tniii. V, ii.if,'. 104, iKiuvoDe i5(lilion. hœreticum faciai; secundo et tertio digerens, (/iiirf
* Les Comiiienlaires de l'riiii.ise se lisent nu iKrreticum deinonstrcl. Isiilor. Dr Viris illust.
tome I.WIII, (1)1. im lie l.i l'atrotogic latine avec Clip. IX.
uiio iiiilii e psr Cave. {L'éilileitr.) 6 Viiyez liim. XI, pnp. .UT et .'t3<.

' componnil scrnione scUola^lico de


l'riinasitis ' Cassiiiil. De Institut., cnp. i.

hœresibus librus 1res dircclos ad Forlunalum * Ibid., inp. V. — ' Ibid., cap. vi.
.

[VI* SIÈCLE.] CIIAJ'ITIŒ XXV. — FACUNDUS KT UUSTKJUE. 28.')

cil laliii les doux lioiiuUi(!s grccijucs d'dii- les Trins-CItitpitirs. Mu('ion les traitait de
gèuo. Cassiodore parlo de cet ccriviiiu eu si;liisuiali([U('s, et om])l()yait contre eux les
dos Utuk.'s fort liduoralilcs, ra[)|i('laiit nu UH'uics raisons dont saint Aufrusliti s'(;tait
piôtro '
lios-iuliKicux et sou auii' Nous n'avons de
servi coulrc les doiiatistes.
Miul
t«ill).
y en avait un autre nomnid Mucien
10. Il l'ouvrage de Mucien que ce (jun l'on en
qu'il estimait ' pour son (Hoipienec. Ce fut trouve dans la n'ponsc que Facundus y a
do lui dont il se servit pour traduire en latin faite car on ne doute point (pu; Mucien,
:

les trente-(iualre lioniélies de saint Clirysos- dont parle Cassiodore, ne soit le même que
tùme sur l'Kpilro aux Hébreux. Nous avons Mocicn contre lequel Facundus a écrit. Le
encore cette traduction imprimée à Cologne, temps, le nom, la profession font voir que
en 1530. Ce Mueien est, comme l'on croit, le c'est une même
personne. Le changement
mèmt' qui écrivit contre les évoques d'Afri fait dans une lettre de son nom peut venir

que qui s'étaient séparés de la communion de l'inadvertance des copistes


du jKipe Vigile depuis qu'il avait condamné

CH.4PITRE XXV.

Facundus, évêque d'Hermiane [547], et Rustique diacre de Rome [549].

[Écrivais latins.]

Farundiis
d'HoiiiilaDe, 1. L'empereur Justinien, après avoir en- fendeurs des Troh-Chajiitres, indignés de ce
d^-r. ii.i'ur dus
Tiois'Lliaiiî. voyé en Afrique son édit pour la condamna- condamnés, se retirèrent de sa
qu'il les avait
très.
tijii des Trois-CItapitres, c'est-à-dire des écrits communion. Facundus qui jusque-là avait
de Théodore de Mopsueste, de ceux de Théo- tenu secret son ouvrage pour la défense des
doi-et et de la lettre d'Ibas voulut pour lui , Trois-Chapitres, le rendit public, et l'adressa
donner plus de crédit engager le pape Vigile même à l'empereur Justinien.
qui se trouvait ;\ Conslaulinople en .347, à les 2.l'écrivit dans la persuasion où il était
Il oumpe
condamner. Vigile avant de se rendre tint que ou ne pouvait condamner les Trois-
1 >">"• iii»"«

un concile d'environ 70 évêques, qu'il pria


,
/-!/ .'1-1
Lhapitres qu au préjudice de la foi orthodoxe
,. .
^" douze li-
"«=•

de donner chacun leur avis par écrit. De ce et de l'autorité du concile de Chalcédoiue.


nombre était Facundus, évêque d'Hermiane, C'est ce que témoignent clairement saint
en .\frique dans la province de Bysaccne.
, Isidore de SéviUe ' et Victor de Tunes ". Son
Comme il avait déj;\ composé un ouvrage ouvrage est divisé en douze livres, et chaque
pour la défense des Trois-Chnpitres, il donna ' livre en plusieurs chapitres. Mais cette sou-
pour réponse l'extrait qu'il en fit. Les autres division n'est point originale elle est de la ,

évêques, ayant aussi donné leur avis par façon des éditeurs qui l'ont faite pour la fa-
écrit, le Pape donna le sien le 11 avril .348. Il cilité des lecteurs.
Anulyïe du
y condamnait les Trois-Cha/jilres sans pré- , 3. Facundus approuve dans son premier premier livie.
judice du concile de Chalcédoiue, et à condi- livre la confession de foi que l'empereur Jus-
£ditPiiris,act
IC:iG, (OUI. Il
O^er. SinliOQ.
tion que i)ersonne ne parlerait plus de celte tinien avait faite à Constantinople, en S33, et di, pag. idO.

question ni de vive voix, ni par écrit. Le dé- envoyée dans les diverses provinces de
avait
cret de Vigile connu sous le titre de Jiidi-
, son empire, remarquant que ce prince ne pou-
culiiiit ne contenta personne mais les dé-
, : vait condamner plus nettement les hérésies

' De Institut., c.ip. i.— - Ihid., cap. iv.


Cassioil. Viris itlust. cap. xvui.
— ' Jliid., vin.— ' FiKtund. Prœfat., pag. 400.
cap. Post consutatum Bcisiliianno 10, lihri duode-
*

' facundus Henuiitnensis episcopus duodccim cini Facundi Uenniunensis Erclcsiœ episcopi re-
libros jiro defensione Triuni Capilulorum scrip- fulsere. quibus ecidentissinte declaravit Tria Ca-
sit . quorum f:lijlo elicuit jirœfata Tria Capitula ùi pitula in pra'scriptione fidei catholicœ el aposio-
prœscriplinne aposioUcœ fidei et Chalcedoncnsis Ucœ concilii CIvilcedonensis fuisse damnala,
synodi impugnalioue fuisse dainnala. Isidor. De Victor Tua. iii Clironico.
286 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
de Nesloriusel d'Eut3-cliès qu'en reconnais- de l'erreur desnestoriens, il n'est pas néces-
Op sant, comme il faisait, qu'un de la Trinité saire de condamner la lettre d'Ibas, qu'il suf-
a été crucifié, que la Sainte Vierge est vérita- fit de reconnaître qu'un de la Trinité a été

blement et proprement mère de Dieu, et qu'il crucifié pour nous, que la bienheureuse Ma-
y a deux natures en Jésus-Christ. Mais il rie est appelée véritablement et proprement
soutient que ce soûl les eutychéens qui ont mère de Dieu, et qu'il y a deux natures en
invenli' la condamnation des Troh-Cliajjitrcs Jésus-Christ, la nature divine et la nature
Cap. III.
pour doiuicr atteinte à l'autorité du concile humaine. y avait des calholiqucs qui no
Il

de Clialci'-doiue et que les orijrénisles, lâ-


; voidaient pas que l'on dit Un de la Trinité :

chés de ce que l'Empereur avait condamné a souffvrt ; mais


Une personne de la Tri-
:

Origène, s'étaient joints à eux, n'osant atta- nité. Facundus convient que l'une et l'autre

quer ouvertement ce concile. Il prouve ce (!c ces propositions ont un bon sens mais ;

par l'aveu de Domitien, évcquc d'Aucyre,


fait que la dernière n'exclut pas assez formelle-
dans une lettre au pape Vigile. Le diacre ment l'erreur de Nestorius au lieu que la ,

Lilu'rat assure la même chose. Puis conti- première est plus conforme aux faijons de
nuant à s'adresser à l'Empereur : « Les ori- parler de l'Kcrilure. Car l'apùtre saint Jean,
génistes, du nombre desquels était ce
dit-il, en parlant du Père, du Fils et du Saint-Es-
Domitien* ont avancé que tous les euty- prit, dit : Il y en a trois qui rendent témoi-
chéens, ennemis des décrets du concile de gnage dans la terre, l'esprit, l'eau et le sang,
Chalcédoine, coinmmiiqneraienl avec rEjj;li- dési^nant le Père par Vcsprit, le Fils par le
sc, l'on condamnait la lettre d'Ibas, en
si sang, et le Saint-Esprit par ['eau : Et ces
niant que ce concile l'eût approuvée. Ils t7'ois, ajoute-t-il, sont une même chose. Puis
avaient en cela inlcntion de surprendre les donc que celte proposition : Un de la Trinité
iunorants, afin que lorsqu'on montrerait, a été crucifié, est plus conforme au langage
comme il est très-facile, que le concile a '
de l'Écriture, que celle-ci : Une personne de
reçu cette lettre, nous n'eussions plus rien la Trinité a été crucifiée, et qu'on no doit pas
à ri'pondre aux eutychéens, qui accusent le disputei' sur les ternies, quand on con-
concile de ncslorianismo. d vient de la chose, comme le dit saint Gré-

Facundus ajoute que c'est sous ce faux goire do Xaziaiize, il vaut mieux employer
prétexte de réunion que l'on a accordé aux lapremière façon de parler; d'autant que la
eutychéens uon-sculeuiout d'anathémaliser seconde est d'un usage récent, le terme de
la lettre d'Ibas, mais encore ses approba- personne n'ayantcommencé à être employé,
teurs que pour s'opposer à cette entreprise
;
que depuis la naissance de l'hérésie de Sa-
ils commencèrent par expliquer sa foi sur bellius. Facundus remaniue en passant' que

l'Incarnation de Jésus-Christ, sachant que quand saint Pierre dit dans les Actes des
c'est la coutume des eutychéens d'accuser de apôlres : Faites pénitence, et que chacun de
nestorianisme tous ceux qui défendent lu vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ, pour
vérité contre eux. Il dit que pour se justifier obtenir la rémission de vos péchés, cela ne doit

'
Ut cum j)oslea, i/nod facillimum erttl sala Spiritr.s s.Tiii;li, baplizali mihi videnlur. Sec me«-
gesloruni prolalione, suscejifa fuisse ab illo con- daciler diclum, quod absil, cxistimo : Uaitizclur
cilio Jbœ Eiiislolnmonslrarelur, nil jam suiieres- uiiusc[nisqMe vcslnun in nouiiiir .lesu Cliristi, aiil
sel quod ciitychianis de ncsloriano dogmale sem- quia baplizali sunl quidam innomiiic Domini Jesu,
per illitil infamnnlibus respondere possemus. quoniam cerlissime in nowiiie Jcsu. bnptizahant
fiiiîuiiil. lit). 1, lap II. apiisloli, et si non in solius Domini Jcsu. id est
'Quod auleiH in nomine Domini Jesu M qitos Filii nomine baplizabanl, vcruin cliam in l'alrùs
menioruvimns hapli'ali narraninr, non eo crc- cl Spirilus Sancli. Ac pcr hoc arbilror, quod cum
dendum arhitrnr, quia non in noniinp Palris et baptisma celebrarctur, in ipsis quoque sacratis
Filii cl Spirilus Sancti baplizali sunt, lit etiam i)erbis servabatur illa forma baplismi: in narra-
in ipsis sercurehir l'crbis a Domina cimslilula ad discrelioncm aliorum
lione vcro su/ficiebal,
forma buptisiin; sed quia hoc eral insinuandum baplismatum, solius Domini Jcsu faccre luenlio-
quod baplismo noio fuerint baplizali; snUkere nem. PropUrca rcro credo, quod de omnium
judicalum esl ad discrelioncm ipxius nori baplis- tritim personarum commemoratinnc, Domini Je-
inisohim nome» Domini Jcsu mcmorare. quod su nomen ad insinuanilum novum baplismum
neque in baplismo Joannis, ncquv in aliis baplis- magis assumplum esl, quoniam ipsi con^epelimur
mis juduici rilui inlcrscrebaiur. Cœteruni iUis pcr baplismum in »ior/em. Faciuul. lil>. I, va|i. ui.
sucratis verl'ix, id esl : lu uoiniiif l'atii:- «HKiliiel
fvi" sif:r.i,E. CIIAIMTIIK XXV.— FAi:ilNI)rS Ki' IIIISI'IOI ii.S7

s'(Mit(Mi(lri' (|iip ]i;ir opiidsilioii au I)a;iir!iue contre eux l'auloriU' de ce dernier concile
(le saint Joaii cl aux |)iii'iliraliiuis di's Juifs, dans Icipii'l il ilil (pie l'Esprit de Dieu a par-
et non par cxclusinu do riiivocalion des au- lé ;
ci't aigunuMit lui parait si'ul suflisant,
tres personnes de la Sainle-Trinil(';. Il ne parce (pie ces hénîtiques faisaient proftîssion
donte point «[ue ceux dont il est parlé dans de suivie la doctrine '
établie i\ Ephèse. Ils

les Actes n'aient été baptisés au nom du apportaient tjuelques passages d'une lettre
Père et du Fils et du Saint-Esprit, et que les du pa[)e Jules, et des écrits de saint Cyrille
apiMres n'jiienl nliservi; dans l'adiniiiislratiou d'Alexandri(!, pour appuyer leur sentiment
du liaplème la l'ornie prescrite liaus l'Kvan- sur l'unili; di^ nature en Jiisus-Christ. F'acuu-
gile mais il croit qu'il suffisait X riiistorien
; dus répond que la lettre de Jules i'i Prosdoce
sacré de marquer ce jionveau baptême sous parait une pièce supposée ;
qu'à l'égard de
le nom seul de Jésus-Chrisl, pour le distin- saint Cyrille, il est hors de vraisemblance
guer des anties liaptèmcs et ([u'il s'est plu-
; qu'il ait été dans deux sentiments contraires
tôt servi du nom de Jésus-Christ que des sur l'incarnatiou ;
que quand cela serait, il

autres personnes de la Trinité, parce que faudrait plutôt suivre ce qu'il a enseigné
nous sommes ensevelis avec lui par le bap- avec d'Ephèse auquel il présida,
le concile
noin. V!, 4. ti>rae pour mourir au pécln;. Il ne comprend que ce dans des écrits particuliers;
qu'il a dit

pas comment quelques-uns qui voulaient qu'enfin les Urientaux qui trouvaient de
passer pour catliorKiuesen condamnant Nes- l'ambiguïté dans quelques-unes de ses ex-
cip. IV. torius, l'ei'usaient île diie que la Sainte Vierge pressions, lui ayant fait demander par Paul,
est véritablement et proprement mère de évè([ue d'Émèse, s'il confessait que Jésus-
Dieu, et il t'ait voir qu'elle l'est en eÛ'et. Il Christ est un en deux natures. Dieu et homme
ajoute qu'on peut dire aussi que Dieu est le tout ensemble, il témoigna avec joie qu'il
Père d'nn homme crucifié, sans qu'il suive pensait ainsi qu'en conséquence, il écrivit
;

delà i{ue la divinité ait pris naissance d'une une lettre à Jean d'Antiocbe, où il disait que
vierge, ni qu'elle ait été crucifiée. Sur quoi Jésus-Christ, Fils unique de Dieu, est Dieu
il de la rétractation de Lépo-
cite le libelle parfait et homme parfait composé d'un ,

rius que les évéques d'Afrique ne voulurent corps et d'une âme raisonnable, né de Dieu
point admettre à la communion de l'Église le Père avant tous les siècles selon la divi-
qu'il n'eût confessé par écrit que Jésus-Christ, nité ; et né de Marie selon l'humanité dans

Fils de Dieu, est ué proprement du Saint-Es- les derniers temps ; consubstantiel au Père
prit et de la Vierge Marie, Dieu et homme ;
selon la divinité, et consubstantiel à nous
chacune des deux natures, la nature divine selon l'humanité.
cap.vi.
et la nature humaine, conservant ses pro- Les eutychéeus et les acéphales disaient
^_
priétés natm-elles. Il prouve que l'on doit que de même que la nature humaine est
reconnaître ces deux natures en Jésus-Christ composée de deux natures, savoir, de l'âme
et qu'on ne doit pas dire, comme faisaient et du corps de même aussi la nature de
:

I
les eutychéeus. Une nature composée de la Jésus-Christ est composée de la divinité et
divinité et de l'humanité; parce que n'ayant de l'humanité qu'ainsi on doit confesser
;

qu'une nature quoique composée de deux qu'il est de deux natures, mais non dans

autres, il ne serait plus consubstantiel, ni à deux natures. Facundus répond que la com-
no us, ni à son Père. paraison de l'àme et du corps unis en cha-
Pacundus distingue deux partis dans la que homme est imparfaite, parce que ces
secte des eutychéeus les ims suivaient tou-
;
deux parties étant de leur nature faites l'une
tes les erreurs d'Eutychès : c'étaient piopre- pour l'autre, ne font qu'une seule nature
ment les eutychéeus. Les autres s'en éloi- qui est la nature humaine qu'on peut bien ;

gnaient en quelque chose ; on les appelait dire que l'âme unie à la chair compose une
acéphales, ou mouophysites, parce qu'ils seule nature mais qu'on ne saurait dire
;

n'admettaient qu'une nature en Jésus-Christ. sans blasplirme, que la divinité, qui de sa


VI. Les uns et les autres refusaient de recon^ nature est inconvertible, compose une seule
naître le concile de Chalcédoineoù leur hé- nature avec l'humanité qu'il n'y a qu'une ;

résie avait été condamnée, de même que chose en quoi la comparaison de l'âme et
^ dans le concile d'Ephèse. Facundus allègTie du corps unis puisse avoir lieu c'est que ,

comme l'âme et le corps sont unis en une


' Voyez tom. III, pag. 380. même personne, la nature divine et la na-
S88 HlSTOIllE GÉNÉRALE DES AUTEUUS ECCLÉSIASTIQUES.
ture liimiaine sont unies en une seule per- les saintsPères de l'E-rlisc, noiumi^nient par
ADpiitt. Es- sonne. C'est ce qu'il confirme par un pas- suint Jean Chrysostôme, par saint Grégoire
cbirid , CA, I
sage de saint Augustin, où nous lisons ;
de Nazianze, et après sa mort par Domnns
« Du moment (jue ' Jésus-CIuist a commen- d'Antioclip, et par un sj-node entier de l'O-

cé d'être liomme, il n'a point été autre (pie rient assenildé en celte ville. « C'est encore

Fils de Dieu, et Fils unique, et Dieu lui dans la vue d'anéantir le concile de Chalcé-
même, à cause que le Verbe qui s'est fait doine que les eulycliéens ou leurs partisans

honune, est Dieu; en sorte qu'ainsi que cha- voulaient faire condamner les écrits de Théo-
que liomme, savoir, l'ûine raisonnable et le dorct coiilie saint Cyrille, parce qu'en ctl'el

corps, n'est qu'une personne ainsi Jésus- :


Théodoret avait assisté à ce concile, eu part
Christ Verbe et homme, n'est qu'une per- à ses décrets, et pris la défense de la lettre
sonne. ))
de saint Léon contre Eutychès. D'autres que
Anilyae du
4. Outre l'édit contre les Trois-Chapitres, Tliéodoret, ont écrit contre saint Cyrille mais ;
secoDd lîTrci
ptg. 440.
Justinien avait composé un écrit où il préten- les acéphales ne les ont point fait analhéma-

dait montrer qu'ils étaient condamnables. tiser, parce qu'ils n'avaient pas été présents
Cap. • C'est cet ouvrage que Facundus réfute dans au concile de Chalcédoine.
son second livre. Pour le faire avec plus de Venant au fond de la lettre d'Ibas, Facuii- Cip.

liberti', il'dissimule que ce prince eu soit l'au-


dus montre que la raison piiiieipale pour la-
teur, et suppose partout qu'il est de la façon quelle on l'attaquait, était la distinction nette

des acéphales, qui, pour lui donner de l'au- et précise qu'il y fait des deux natures en la

torité, l'avaient publié sous le nom de l'Em-


personne de Jésus-Christ; qu'en vain ses en-
pereur. Il dit qu'un écrit de cette nature était
nemis prenaient pour prétexte de la condam-
absolument inutile, ou plutôt nuisible à l'E- ner, que saint Cyrille y était maltraité, puis-

glise dont il venait troubler la tranquillité par qu'ils ne demandaient pas que l'on condam-

des questions aussi vaines que dangereuses ;


nât tous ceux qui ont écrit contre saint Cy-
rille, comme Gennade de Constantinople et
qu'ily avait de l'irrévérence à vouloir traiter
de nouveau ce qui avait été statué dans le Isidore de Péluse dont la réputation était

concile de Chalcédoine dont les décrets ,


beaucoup plus grande que celle d'Ibas; qu'il
étaient reçus depuis environ cent ans du con- était visible qu'ils ne cherchaient qu'à atl'ai-

sentement de toute l'Église; qu'il était aussi blir parla condamnalion de cette lettre l'auto-

inutile de discuter les écrits de Théodore de rité du concile de Chalcédoine; qu'on ne peut

Mopsueste mort depuis longtemps dans la la condamner, parce que ce concile après

paix, c'est-à-dire dans la communion de l'É- l'avoir examinée, n'avait pas jugé à propos

glise; que s'il y avait quelques erreurs, on de la censurer; et que d'entreprendre le con-
devait les imputer à la fragilité humaine, et traire, c'était agir contre les décisions du
ne pas s'emporter contre lui avec autant de pape Léon, et les conciles d'Orient qui
suint

fureur qu'on le faisait, puisque s'il eut encore ont déclaré que tout avait été réglé avec tant

été en vie il n'aurait pas même été permis de sagesse et de iirudence dans le concile de
de le condamner qu'après l'avoir averti une Chalcédoine, qu'il n'était pas permis d'y tou-
et deux fois, et en cas seulement d'opiniâ- cher, soit en y ajoutant, soit en y retranchant
treté de sa part. " On n'attaque sa mémoire, quelque chose. « Les acéphales disent, ajoule
ajoule Facundus, que parce qu'il est parlé de Facundus, qu'ils attendent la décision du
lui avec éloge dans la lettre du vénérable pape Vigile qu'ils ont consulté; mais inutile-
litas, reçue comme orthodoxe dans ce concile. ment le Pape ne combattra pas les décisions
;

C'est là le ennemis de
mowui que les cette de saint [,éon et de ses autres pi'édécesseurs
ussembiéc ont trouvé pour en détruire l'au- qui ont aiqirouvé le concile de Chalcédoine.

torité. Mais ils n'ont pas fait attention que Ce n'est point pour détruire * les sentiments
Théodore a aussi été loué de son vivant par de ses Pères, mais pour les soutenir etlesdé-

Ex quo esne hoiuo cirpit, non aliud cwpit c.ise


'
' Quia non in destruclionem palrrnm sen-
itle

homo </«(///! Dii Filiiix, et hoc nniciis jiroplcr potius in defensionem alqur ultionem,
teiiliir, scil

Veuiii illn susceplo cnro faclum


Verlium, qiiod primant arcepil et nuiximam potestiilem : nec
Dtus: ut quemailiiiodum est una per-
esl, uli(]He aliquid contra rrrilatem, sed pro veritate plus
tona quiUbel homo, anima scilicel ralioiuilis et r«'(f)i.s .suis consacerdotibus potesl. Funiiid. lib.

caro: ila sil una prrsona Christus, ]'i'ibum vl Il, ra|l. VI.

homo. August., in Enchir., cap. ïxxvi.


[VI" STKCt.E.] CITAPITRE XXY. — FACUNniTS, lUISTTQTTE, ETC. 280

fcnihc qu'il a rcrii la prciiiioii! et la jiliis drie, et dit ipie ce qu'il a repris d;ms TIh'o-
grande [iiiissancc; n'ayant iei;ii comme oiix dnre de Mopsueste se tiouve avoir ('té ensei-
de pouvoir que pourla vt'rilé, et non contre gné et par le pape saint Léon dans sa lettre
la vcritô. » Il conjure Justinion d'an'éler ces il .luvénal dcli'rusalem, et ])arsaint Alhanase

sortes de disputes, en lui re[)résenlanl que dans son troisième livre contre les ariens.
si l'on permet unede traiter de nouveau,
fois Il rappoi'te un grand nombre de passages
ce qui a été dt'cidé d'un consentement com- des écrits de Théodore qu'il explique dans
mun do louleriOglisc, il n'y aura jamais de lin un sens catholique.
da)is les disputes. Il ra]iporte quehpies en- ti. Dans le (|uatrième livre, il demande aux Analjfe du
r|Finlripriie ii-

droits des lettres de s;iiiit I, ('on dans lesquels entyelu-ens pourquoi ils suivaient saint Cy- Me, |a.-. COf.

ce saint pape approuve tout ce qui s'était rille dans les reproches qu'il avait faits à
fait ù Clinleédoine sur les matières de la foi. Théodore, et qu'ils ne h; suivaient pas dans Caj). r.

AbiIjtïc <la 3. 11 entreprend dans le troisième livre la la façon oulrageantc dont il avait traite'' ^aillt
>ic, !)««. 4C1). justification de Tliéodtn-e de Mopsiiesle, mon- Chrysostùme, disciple de Théodore, et Dio-
trant qu'on ne peut le condamner sans ac- dore de Tarse, qui a été loué par les Pères
Op. I.
cuser d'erreur le concile de Chalcédoinc qui cl par lus princes catholiques, et qui n'a été
non-seulement ne condamm-, mais l'a point condamné que par les apoUinaristes et par
qui a souffert la lecture delà lettre d'ibas où Julien l'Apostat : « Peut-être, dit-il, n'ont-ils

il est parlé de Théodore avec éloge. Il fait épargné ces deux grands parce hommes que
voir qu'encore que Théodore ait été le maître qu'ils n'ont point assisté
au concile de Chal-
de N'estorius, il était d'un sentiment contraire cédoinc comme par une raison contraire
,

sur l'incarnation. Ayant défendu la loi de ils ont condamné Théodore pai'ce qu'on
y
l'Église sur cet article contre Paul de Samo- avait lu la lettre d'ibas qui parlait de lui avec
sate, défendue par avance contre
il l'avait honneur. » Il fait voir que Théodore ayant
Nestorius qu'il est clair par les écrits ciui
;
eu sur l'Incarnation la même croyance que
nous restent de Théodore, qu'il a rejeté- l'er- Diodorc de Taise, son maître ils devaient ou ,

reur de Nestorius; le symbole déféré par le les condamner tous deux ou n'en condamner

prêtre Carisius au concile d'p]phèse, lui est aucun des deux que le pape Vigile, ayant ap-
;

faussement attribué, et quand il seraitde lui, pris la condamnation des Trois-C/iapifrcs,\d

ce que le concile n'a pas décidé il n'a pas , désappi'ouva et se sépara de la communion de
été condamné avec son auteur. y a quel- S'il Mennas de Constantinople qui y avait sous-
ques endroits diliiciles dans ses écrits, ils sont crit le premier ;
que la plupart des églises
susceptibles d'un bon sens ; c'est sans rai- d'Occident s'opposèrent aux entreprises des
son qu'ils l'on! accusé d'avoir nié que la acéphales sur ce sujet, ne doutant point que
Sainte Vierge fût mère de Dieu, puisqu'il dit leur dessein ne fût de diminuer le crédit du
en termes exprès que Dieu le Verbe s'est concile de Chalcédoine. Facundus prouve
uni à l'homme dès le moment qu'il a été for- tous ces faits par des monuments authenti-
mé dans son sein; ils n'ont pas mieux ren- ques. 11 y eut même plusieurs cvèques d'O-
contré en l'accusant d'avoir enseigné que le rient, savoir : Zoële d'Alexandrie, Éphrem
Verbe n'a pas habité autrement dans la na- d'Antioche, Pierre de Jérusalem, et même
ture humaine qu'il a prise, que dans plusieurs Mennas de Constantinople, qui refusèrent de
saints et dans les prophètes, ce qui ne faisait souscrire mais l'Empereur en gagna bon
;

pas une uuion personnelle des deux natures, nombre, les uns par des présents, les autres
puisque Théodore en parlant de cette habi- par des menaces. Ceux qui résistèrent cons-
tation dit qu'elle s'est faite d'une manière
' tamment furent envoyés en exil. Facundus
non commune, mais excellente, selon la- rappelle ce prince au serment qu'il avait fait,
quelle nous disons que les deux natures ont dans le baptême, de garder inviolablemeut
été unies en une seule personne. Il vient en- le dépôt de la foi, et les évêques prévarica-

suite il l'autorité de saint Cyrille d'Alexan- teurs à l'obligation que leur impose le minis-

' Item accusant eum illi quod sic habitasse dicitevm non secundwm communein habitatio-
di.Terit Deum Verbum in ussumpta hniuinis na- nem inhahilasse, sed juxtn quantdam excellenlem
tura. sicut habilavil in multis sanctis alqiie pro- secundum quant etiam ailtinari dicimus utrasque
phtlis, non ut adunalis utriaque naturis una fie- naturas et unam juxla iidunalionem effectani
ret ex eorum adunalione persona. Jpse autem esse personam. Facuud. lib. Ill cap, n.

XI.
HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
slxlim* liTTf,
tère de détromper les princes de la terre, lettre d'Ibas, a suivi l'exemple de l'Écriture
engagés dans de fausses
loi-squ'ils les voient qui juge du tout parla plus grande et la meil-

démarches par les arlitices des méchants. leure partie : car quoique cet évéque eut Ca^. I,

Ar.«!y^e do
einqutàino lu
7. Facundus entreprend de montrer dans une mauvaise opinion de saint Cyrille dont
Tre, p«It> I3t. le cinquième livre que la lettre d'Ibas a été il ne connaissait pas bien la croyance, cela

Cap. !•
rerue et approuvée dans le concile de Chal- ne devait pas empêcher le concile de rece-
cédoiue, dont il rapporte la déclaration qui voir sa lettre comme
orthodoxe, puisqu'il y
est conçue en ces termes « Suivant ce qui : reconnaissait deux natures uuies dans Jésus-
a été dit par les révérendissimes évéques, Christ en une seule personne doctrine que :

nous connaissons que l'innocence d'Iljas a saint Cyrille enseignait aussi, encore qu'en
été démontrée, et nous remarquons par la écrivant contie Nestorius, qui séparait trop
lecture ' de sa lettre qu'il est orthodoxe ; les deux natures, il n'ait pas assez insisté sur
c'est pourquoi nous jugeons qu'il doit re- leur distinction. Il ajoute que les orientaux
couvrer l'honneur de l'épiscopat, et son avaient pensé d'abord de saint Cyrille comme
église d'où il a été chassé injustement. Mais Ibas, et que toutefois cela ne l'empêcha pas
ces paroles sont des légats du Siège apos- de souscrire à leur confession de foi, lors-
tolique qui" opinèrent les premiers. Maxime qu'il se réunit avec eux, et que les orien-
d'.\ntioche et Eunomius de Nicomédie fu- taux de leur cûté, de même 'ju'lhas, approu-
rent de même avis. Justinien avait avancé, vèrent la foi de saint Cyrille parce qu'ils ;

dans son édit contre les Trois-Chapitres, s'accordaient surle capital de la foi, quoiqu'ils
qu'lbas n'avait osé avouer que la lettre qui s'exprimassent en des termes dillércuts. Fa-
"• portait son nom fut de lui. Les eutychéens cundus compare leur dilférend à celui qui
soutenaient même qu'il l'avait désavouée. avait régné auparavant entre les Grecs et
Facundus prouve par les actes
le contraire les Latins au sujet des trois hypostases. Ce
de la procédure instruite par Pholius de Tyr ditlérend ne consistait que dans les termes,
'"• et Eustathe de Béryle. Il prouve aussi que les uns et les autres reconnaissant trois per-
Théodoret et ILas avaient pris séance dans sonnes en Dieu et une seule substance. Ce
le concile de Chalcédoine aussitôt après avoir qu'il infère de cette comparaison, c'est que
. ditanathème à Nestorius, ce qui se fit dans les gens sages, n'ayant point taxé d'hérésie
la huitième action, et non pas seulement ceux qui n'admeltaient qu'une hypostase,
après la condamnation d'Eulychès et de ni ceux qui eu admetlaiciit trois, il fallait
Dioscore, comme le soutenaient les acépha- garder la même équité envers Ibas, et ne pas
les. Leur but en cela
était de montrer que, juger sa lettre hérétique, à moins qu'on ne
n'ayant ni l'un ni l'autre souscrit à la défini- prouv;\t qu'elle cnnlenait le nestorianisnie.
tion de fui du concile de Glialcédoine, on 9. Il est vrai qu'il y disait qu'en Jésus- AnaljMi du
Mfkliènc li-

n'en pouvait tirer aucun avantage pour les Christ il n'y a qu'une vertu; mais en parlant vra, pas. C^w

iT. justiGer. Mais Facundus fait voir que saint ainsi il ne niait pas qu'il y eût deux natures, Ci[>. I.

Léon n'a pas seulement approuvé cette défi- mais il snulonait qu'il n'y a qu'une persoii-
nition de foi, mais aussi tous les actes et 111'. (In lil dans les .\cles des apôtres : Toule aci.iv.ss.

tous les décrets du concile, excepté l'entre- /(( uiiiltitiide de ceux qui croyaient n'était qu'un
prise d'Anatolius de Constantinople sur les cœur et qu'une âme, ne pourrait-on pas dire
sièges patriarchaux d'AhixanJric et d'An- aussi n'y avait qu'une verludans la per-
(pi'il

»• tioche : d'où il conclut (pie la lettre d'Ibas sonne par le don do laquelle celle mullitudo
ayant été approuvée si solennemcnt, il n'é- n'était qu'un cœur et qu'une âme ?0n objecte
tait plus permis d'exiger qu'on en démontrât qu'lbas avait dit que la condamnation de Nes-
la catholicité, parce qu'autrement ce serait torius s'étaitfaite sans examen. Facundus Caj. II.

en vain qu'on assemblerai! des conciles, et répond qu'lbas ne l'a point désapprouvée,
que l'on dirait que les disputes y ont été ter- mais qu'il a seulement trouvé mauvais que
minées, puisqu'elles seraient interminables, l'on n'eût pas attendu les orientaux. 11 con-
si on voulait toujours les examiner de nou- vient au surplus qu'lbas a pu se tromper dans
veau. lejugement de Nestorius, comme Anatolius
Au.i,!e dn
^ Lg concile en déclarant orthodoxe la comme saint Athanaso
à l'égard de Dioscore,
A l'égard deTimothée, disciple d'Apollinaire,
• Lecla ejus epist'ola, cognoiiinuis euin esseor- comme le concile de Palestine et le pape Zo-
tlwdoTum. Facuiul., lili. V, cap. i. simc i\ l'égard de l'élage et de Céleslius
[VI* SIÈCLE.] CHAPITRE XXV. — FAnrXDUS, nUSTlQUR, ETC. 291
Ctp. ir. mais il rejette, comino un fait avanctî sans porte est ialcttur de Jt-an et de son concile à
prcuvo, ce que les aci'pliales liisaicnl : qii'I- rempeiPurTIiéodose-le-Jeunc. Ils y fbntj'iilo-
bas avait 6lé conliaint parle concile de Chal- ge de Théodore de Mopsueste, de son savoir,
cëdoine d'anathéuiatiscr Neslorius, et qu'il de son zèle, de sa piété, de sa sagesse ver- :

l'avait excusé auparavant ce fait étant d'ail-


; tus qui lui avaient attiré et l'estime des
leurs détruit sullisanunent dans la lettre évoques, et celle du Grand Théodose qui ai-
où Ibas accuse Neslorius d'avoir écrit des mait à l'entendre prêcher et à s'entretenir
livres pernicieux et qui causaient du scan- avec lui. La quatrième preuve de Facundus cjp. ».
dale, parce qu'il y niait que
bienheureuse la est tirée de la lettre du même Jean d'Antio-
Marie fût mère do Dieu. Photius, Eustalhe che et de son concile h saint Cyrille d'Alexan-
et Uranius, donnés pour juges ;\ Ibas., le soup- drie, dans laquelle ils disent «On nous a aussi
:

çonnaient si peu d'être dans les intérêts de présenté un autre tome composé des extraits
Neslorius, qu'ils ne se pressèrent jamais de de Théodore, autrefois évoque deMopsue.-;e,
lui dire anathèmc. Le concile de Clialcé- que l'on voulait faire anatbématiser. En
doine ne crut point non plus que la mau- ces extraits, nous reconnaissons qu'il y a des
vaise opinion qu'Ibas avait eue de saint Cy- passages douteux, et qui peuvent recevoir
rille fut une raison de condamner sa lettre. un autre sens que celui qu'ils présen-
Facundus convient qu'il y disait que le tem- tent; mais il y en a de plus clairs. A l'égard
ple, et celui qui y habite, est un seul Fils, de ceux qui sont obcurs, nous en trouvons
Jésus-Christ; mais il montre que ces paroles de semblables dans les anciens, à qui la con-
au lieu de signifier, comme le voulaient les damnation de ceux-ci porterait préjudice. A
acéphales, qu'autre est la personne du tem- quelle confusion n'ouvi-e-t-on point la porte,
ple, et autre la personne de celui qui y habile, si ou permet de combattre ce qu'ont dit les

signifiaient tout le contraire ; et que cette Pères qui sont morts ? Autre chose est de ne
proposition revenait à ce que Jésus-Christ di- pas approuver quelques-uns de leurs senti-
, n, 99. sait aux Juifs, en ;iarlant de son corps : Dé- ments , autre chose de les anatbématiser ,

molissez ce temple, et Je le rétablirai dans trois quand on n'étendrait pas l'anathème sur les
jours. Il convient encore que Théodore de personnes. Quel avantage ne donne-t-on
Mopsueste est loué dans cette lettre; mais il point aux nestoriens, si l'on condamne avec
soutient que ce n'a pu être une raison de la eux de tels évêques? Ne sait-on pas ce qui a
condamner, puisque saint Chrysostôme et obligé Théodore à parler ainsi, pour com-
saint Grégoire de Nazianze ont aussi fait l'é- battre les hérétiques, lui qui était le défen-
loge de Théodore. seur commun de tout l'Orient? C'est la né-
10. Après avoir pris la défense d'Ibas et cessité des temps qui l'a contraint à se servir
m. Cko. de sa lettre dans le septième livre et les pré- de certaines expressions parce qu'il les
,

cédents, il passe à l'apologie de Théodore croyait plus propres pour combattre les ad-
•^l. de Mopsueste. Il la fonde, premièrement, versaires de la foi. n II renvoie à la réponse
sur les témoignages de Jean d'Antioche et de saint Cyrille au concile d'Antioche, où il
des évoques d'Orient assemblés avec lui, .qui défend non-seulement de condamner la per-
après avoir examiné les propositions que sonne de Théodore, qu'il appelle un homme
l'on taxait d'hérésie dans les écrits de Théo- admirable, mais encore ses écrits, regardant Facnnd. lib.
111, cap. Ti
dore, trouvèrent que les anciens Pères de comme un crime d'insulter aux morts, même rag. 500,501,
50!.
l'Eglise en avaient avancé de toutes sembla- laïques, à plus forte raison à ceux qui ont
bles d'où il résultait qu'on ne pouvait con-
: flni leurs jours dans le ministère épiscopal.

damner Théodore, sans leur porter préju- Ensuite il rapporte la lettre sjmodale de
dice, n dit en second lieu, qu'on alléguait Domnus, successeur de Jean dans le siège
mal à propos contre lui le témoignage de d'Antioche, où il invective fortement contre
saint Proclus évêque de Constantinople
, ,
Eutychès qui avait osé anathémaliser Théo-
puisque cet évêque, dans sa réponse h Jean dore de Mopsueste et Diodore de Tarse, « l^s cap. r.

d'Antioche et aux autres évcques d'Orient, colonnes de la vérité dit-il, et les défen-
,

avait dit nettement que dans son tome aux seurs de la vraie piété, qui ont employé leurs
Arméniens il n'avait point parlé d'anathéma- talents à combattre tons les héréticfues. »
tiser Théodore, ni aucun autre après sa mort, Et parce que les acéphales objectaient que n.
et qu'il n'avait pas même nommé Théodore saint Cyrille avait changé de sentiment à
dans cet écrit. La troisième pièce qu'il rap- l'égard de Théodore, et qu'après l'avoir
292 niSTOIRE GÉXÉnALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
loué, il avait depuis écrit contre lui Facun- , tures ;
qu'il est Dieu et homme' par nature, cip.

dus répond, qu'en supposant saint Cyrille visible humaine invisible


selon la nature ,

contraire à lui-même, sou jujjement ne peut selon sa nature divine Théodore regar- ;

C«p. TH.
nuire à Théodore, qu'ainsi l'on doit s'en rap- dait comme une folie de dire ' qu'il y a deux
porter aux Pères qui vivaient du temps de Fils, ou deux Christs, ou deux Seigneui-s, à
Théodore, plutôt qu'à saint Cyrille, étant ;\ cause qu'il est de deux natures, parce que
présumer que s'il eut été suspect d'hérésie, ces deux natures sont unies en une seule
ils ne l'eussent pas dissimulé, au lieu de lui personne sans confusion s'il a employé ;

donner des louanges, le regardant comme la comparaison de l'homme ' composé de


un évoque mort dans la communion de l'É- corps et d'ûme, ce n'a été que pour faire
glise, et avec l'honneur de l'épiscopat. voir l'uuité de personne on Jésus-Christ, et
AniN'fl 4o
tiCUYJèiiiv It. 11. Facundus répond dans le neuvième non pour confondre les natures; qu'au reste,
*ie, yiç 6'.6t
livre aux passages que les acépliales objec- lesanciens Pères se sont servis de la mê-
taient des écrits de Théodore, pour montrer me "comparaison on ne peut l'accuser d'a-
;

Cap. I. qu'il avait été dans les erreurs des sahel- voir voulu, comme les manicliéens, détruire
liens, des ncstoriens et des manichéens. Il l'autoritédes prophéties, puisqu'il s'est ap-
montre qu'on ne peut l'accuser d'avoir en- pliqué dans ses ouvrages à en faire voir l'ac-
seigné avec Sabellius, que le Père, le Fils et complissement en Jésus-Christ.
le Saint-Esprit ne font qu'une seule et même Facundus établit pour règle, que c'est par
personne, puisqu'on expliquant le psaume ces passages clairs qu'il vieirt de rapporter,
XLiV, il dit qu'il est de la piété ' et de la re- que l'on doit expliquer ceux qui sont obs-
ligion de tellement glorifier le Fils unique curs et ambigus, comme il est d'usage de le
de Dieu, que l'on l'endc aussi au Saint-Es- faire à l'égard des autres Pères. Il a lui-
prit l'adoration qui lui est due. Loin d'en- même besoin d'explication dans ce qu'il dit
seigner que Jésus-Christ est un pur homme, sur l'Eucharistie car en voulant excuser
:

il confesse clairement qu'il est le Dieu de Théodore de Mopsueste qui avait enseigné
l'irnivers, et que rien n'est comparable à avec quelques anciens que Jésus-Christ a
ce qu'il a fait ; contrairement ù l'hi'résie bien voulu recevoir l'adoption des enfants,
de Nestorius, il enseigne que Jésus - Christ * reçu la circoncision et le sacrement
lorsqu'il a
n'est qu'une seule personne en ses deux na- de baptême, il soutient* qu'on peut appeler

' Quid iiaque invenietur majus his quœ a » Hoc intérim item personu idem ipseinvenitur,

Christo fada sunt in tanta mtaidi commutatione nequaquam cunfusis nalurif. sed propter aduna-
omnibus agnoscenlibiis, Deum universorum et tionem quœ fada est adsumpti ad assumriitem.
pietalis alque virlutis diligentiam habere festi- Ihiil. Ilinc autem cognoscantsemi-eutichiani.qun
nantium, et glorificaïUium quidem Dei unigeni- intenlione dicatur ab aliis Patribus, quos putanl
tum, exhibenlium vero SancloSpirituicondignam in duabus Christum negasse naturis, quia sicul
adorationem. Faciind., lib. I.\, cap. r. animii et corpus unum homincm faciunt, itn ex
- Ventto quoque sequentin ejusdem psalmi in- divinilate cl huuinuilatc unus est Chrislus. iJuoU
terprelans dicit Proiitcrca unxit te Dciis, Beus
: hoc (ib fis non ad naturœ. sed ad personœ yolius
tuus. De Deo vero hœc denuo dici manifeslum est : nnituteni dicalnr quando etiam Theodorus,
:

sed quia hiec Deo Palri non conveniunl : l'ropterea queni nesloriunum criu>inantes, negare tion pos-
unxit te Ueus Deus tuus, clarel de rcliquo qtiud sunl in duabus Christum prwdicasse naluris, hac
hoBC deChrislodicanlur. In quo mirabililer etna- utalur simililudine, quum suœ pulant dementiœ
luras diiisit, et personœ unitatem demnnslravit. conrenire. Iliid., rap. iv.
Et naturas quidem diiisit in eo, quod diversarum ' Adoptionem quoque filiorum suscepisse Chris-

inlelligentiarum declaralivas voces emisit. Mul- tum, si anliqui dodores Ecclesiœ dixisse mons-
tfi/m enim di/fert ab iiivicem : Sedes tua, Ueiis, in Irarcnlur, nec ipsi, nec oninis Ecclesia, quœ taies
siBcuUim sa.'ciili, et: Propterea unxit te Deus Deus doclorcs habuit, judicuri deberet hœrelica. Amn
tuus. l'nitatem vero ostendil personœ, ea quœ siicrami'nlun) adoplionis suscipere dignalus eut
diversa sunt colligens in unilalem personœ. Itiid. Chriitus, cl quando circumcisu^ esl, et quando
' Dnminus cnim Chrislus erat quidem ri Deus bitptizatus est: et potest sacramenlum adoplionis
et.^omo, ulrumque secunduin naturam simililer i udopliii nuncupari : sicut .facramcntum corporùi
ex altero quidem apparens, ex aUero vero, ut cl sanguinîs ejus, quod est in pane et in poculo
pote secundum naluram divinam, invisibilis ex- eonsecrato, corpus ejus et sanguinem dicimus,
lan.1. Il)id., cap. u. non quod proprie corpus ejus sil panis, et pocu-
' Neque enim,si duas n/ituras dicanivg, nécessi- lum sanguis: sed quod in se mysterium corpotis
tas 710S ulla consiringit, aul duos diiere ftlios, ejus, siiitguini.sque cunlineant. Ilinc et ipsc Do-
aul duos homincs, aul iluni: Cliristos : quoniam minus benedidum panem et calicem, quem disci-
hoc pulare exlremœ est amntliui. Ibid., cap. m. pulis tradidit, corpus et sanguinen^ sxmm t/'oco-
[vi" siÈaE.J CHAPITRE XXIV. — FACUNDUS, IIUSTIQUK, ETC. 2t>3

adopdonle sacreinoiit inôincd'adoplion, com- l'on vnn'hMil inférer de la comparaison ([u'il


me le sacrement du corps et du saiij^- d(! Jésus- l'ait cnlK^ le sacrement du ba|)lèinc et le sa-
Christ, <|iii est dans le pain et le calice consa- crement de riùicharislie, (pi'il n'a pas cru
crés, est appelé son coi])s (d son san^,', non (pio à la présence réelle il ne nie point que les
:

ce pain et ce calice soient pro[)i'ement corps lidèles reçoivent réellement le corps et le

el san;;;, mais parce qu'ils contiennent le mys- sang de Jésus-Christ; au contraire, il le sup-
tère de ce corps et de ce sang. (( C'est pour pose, en disant que ceux ipii reçoioenl le su-
cela, ajoute-t-il, que Jésus-Ciirisl avait ap- crciiicnt du corps et du san(j, reçoivent le corps

pelé le pain et le calice qu'il avait bénits, de Jésus-Christ; mais aussi il n'insiste point
son corps et son sanç; et que comme l'on
; sur cette vérité, parce qu'il n'en était pas
dit fort bien que les lidèles qui reçoivent le question. ne s'agissait, comme on vient
Il

sacrement du corps el du sang, reçoivent le de que de moutrer que le Sauveur


le dire,

corps de Jésus -Clirist de même l'on a pu


: en recevant le baptême, avait reçu l'adop-
dire que Jésus-Christ ayant reçu le sacre- tion des enfants contenue dans les sacre-
ment de l'adoption, a reçu l'adoption.') Pour ments, comme les fidèles reçoivent le corps
prendre le vrai sens des paroles de Facun- et lesang de Jésus-Christ en recevant les es-
dus, il faut remarquer qu'il y a deux choses pèces visibles du pain et du vin qui en sont
dans l'Eucharistie, le sacrement et le corps la figure et le saci-ement.
de Jésus-Christe et que l'esprit peut s'atta- Nous joindrons à cette explication celle
cher au sacrement séparément du corps de d'un passage d'Origène que nous n'avons
Jésus-Christ, quoiqu'on puisse aussi consi- point éclairci dans le temps, parce qu'il n'é-
dérer l'un et l'autre comme joints ensemble. tait pas entier dans l'édition de Génébrard,
Le sacrement pris séparément n'est pas le ni dans les précédentes. On l'a rétalii dans
corps de Jésus-Christ, mais il le coutienl; et la nouvelle, sur l'autorité de deux manus-
pour nous servir des termes de cet auteur : crits, dontl'un est du neuvième siècle, l'autre
« Le pain et le calice (c'est-à-dire cet objet du douzième. « Dieu '
le Verbe, ditOrigène,
extérieur qui s'appelle pain et vin dans le n'appelait pas le pain qu'il tenait en ses mains,
langage commun), n'est pas proprement son corps, mais parole dans
le mystère de
la
corps et sang, mais il contient le mystère de laquelle ce pain devait êtrerompu. Il n'ap-
ce corps et de ce sang..., » en sorte, « qu'on pelait pas non plus le breuvage visible, son
dit fort bien que les fidèles qui reçoivent le sang, mais la parole dans le mystère de la-
sacrement du corps et du sang, reçoivent le quelle ce breuvage devait être répandu: car
corps de Jésus-Christ. » Facundus, dont le que peut être le corps et le sang du Dieu
dessein était uniquement de justifier cette Verbe, sinon la parole qui nourrit, et la pa-
expression : Jésus-Christ a reçu l'adoption des role qui réjouit le cœur
cet ? n A prendre
enfants, ne s'attache qu'au sacrement sépa- endroit d'Origène dans le premier sens qu'il
rément du corps de Jésus-Christ, parce qu'il oU're à l'esprit, on dirait qu'il n'a point pen-
n'y avait que cette considération qui fit à son sé sainement sur le mystère de l'Eucharistie.
sujet, et il en forme ce raisonnement « Le :
Mais siprend bien sa pensée, on verra
l'on
sacrement de l'adoption peut être appelé «rfo/j- qu'il ne éloigné de la foi de l'É-
s'est point
tion, comme le sacrement du corps et du glise sur ce sujet, et qu'U l'a lui-même éta-
sang de Jésus-Christ, qui est dans le pain elle blie plusieurs lois dans ses écrits. Il distmgue^ n, pas. ;ô6.

calice consacré, est appelé son corps et son ici avec quelques anciens, trois choses dans
sang. » Or Jésus -Christ a reçu le sacre- l'Eucharistie l'espèce ou apparence exté-
:

ment d'ado|)tiou dans sa circoncision et dans rieure et sensible la substance intérieure


;

son baptême. Ou peut donc dire qu'il a reçu et cachée qui ne s'aperçoit que des yeux de
l'adoption, « comme on dit que les fidèles la foi et une certaine signification mystique
;

qui reçoivent le sacrement du corps el du du sacrement, ou un lapport que l'Eucha-


sang de; J('sus-Christ, reçoivent le corps de ristie a avec la parole de Dieu. Il parle de
Jésus-Christ. » Ce serait mal à pro[ios que l'espèce ou apparence sensible quand il dit:

vit.Quorirca siciit Christi /idetes sacramentum liorum suscepissp. lliiil., cap. v.


corporia el saiiguiiUs ejiis accipienles corpus et Son eniin paiiem illuin visibilem quem tenebat
'

sanguinein Chrisli recte dicunlur nceipere; aie cl iii inanihus corpus xuuiii diccbat Deus Verbuni,
ipse Ckrislus, soci'uinenluin adnpiitjnni filiuruM scd vi'rbum in. cujus myaierio j'aeraL punis ille
cnin su-nepis^ct puluil reclr diri aduplumcin ji-
, l'raiiijcndus. Kcc poluni, iHum visibilem saunai-
294 mSTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
« Dieu le '
Verbe n'appelait pas son corps, baptisés ayant participé à la table du Sei-
le pain visible qu'il tenait en ses luains, ut gneur la nuit précédente, qui était celle de
il ne disait pas non plus que breuvage le Pâques, il n'était pas possible qu'on ne leur
visible fût son sang, n Quelques lignes au- eût expliqué ce qu'ils y avaient reçu, mais
paravant il avait marqué la substance intd- ce qu'elles sont dans leur signification mys-
rieure et cacbée en disant ' : « Ce pain (jue tique. C'est pourquoi il ajoute: «Ces choses'
Dieu le Verbe dit être son corps, et ce breu- sont appelées sacrement, parce qu'autre
vage qu'il confesse Et un être son sang ; » chose que nous voyons, et autre chose
est ce
peu plus bas a Jésus fait voir ' , en don-
: ce que nous concevons. Ce que l'on voit a
nant à ses disciples ce pain, que c'était son une espèce corporelle ce que l'on conçoit ;

propre corps. » Et encore « Il enseignait : a un fruit spirituel. Si vous voulez donc con-
ses disciples ' qui avaient célébré la fête cevoir le corps de Jésus-Christ, (signifié par
avec leur Maître, reçu le pain de bénédic- le sacrement, et auquel les espèces ont rap-
tion, et mangé
le corps du Verbe, et bu le port) écoutez l'ap'itre saint Paul : Vous êtes
calice, à rendre grâces au Père pour toutes le corps de Jésus-Christ et ses membres. » C'est
ces choses. » Enfin, dans cet endroit, il donne comme si ce Père leur av;iit dit' : Ces choses
aux paroles de l'institution de l'Eucharistie, sont appelées sacrement parce que l'on y
une signification mystique, en disant que voit une chose y en conçoit une autre
et l'on :

Jésus-Christ appelait le sacrement, la pa- on y voit le pain, on conçoit le corps de Jésus-


role qui nourrit ^ et la parole qui réjouit le Christ mais ce corps de Ji^us-Clirist qu'il
;

cœur de l'homme. Saint Augustin distingue, faut entendre comme la chose signifiée par
comme Origène, trois choses dans l'Eucha- le sacrement, n'est pas le seul corps naturel;
ristie ; l'espèce extérieure sous la figure du c'est le corps de Jésus-Christ tout entier,
pain et du vin ; la substance intérieure, qui c'est-à-dire le chef et les membres appelés
est le corps de Jésus-Christ, et la signification le corps mystique. Écoutez ce que dit l'A-
mystique qui représente le corps de Jésus- pôtre : Vous êtes le corps de Jésus-Christ. Or ce
Christ tout entier, c'est-à-dire le chef avec rapport que vous ne trouvez pas entre pain le
ses membres, qui s'appelle corps mystique et le corps de Jésus-Christ considéré seul,
de Jésus-Christ. C'est dans le sermon 272, vous le trouverez entre le pain et le corps de
aux nouveaux baptisés, qu'il s'explique ainsi : Jésus-Christ joint à ses membres, c'est-à-dire
« Vous avez, leur dit-il, déj;\ vu la nuit pré- entre le pain et le corps mystique, parce que
cédente " ce que vous voyez présentement
, de même que le pain visible se fait de plu-
sur l'autel de Dieu, c'est-à-dire le pain et le sieurs grains réduits en un corps, de même
vin mais on ne vous a pas encore dit ce
; le corps mystifi\ie do Jésus-Christ, qui est
qu'étaient ces espèces, ce qu'elles signifiaient, de plusieurs membres réunis
l'Église, se fait
et combien celles dnut elles sont sncrement ensemble sous leur chef qui est Jésus-Christ.
sont grandes et excellentes. » Le but de saint On voitpar là qu'Origène et saint Augustin
Augustin est donc de leur apprendre dans ne diUerent entr'eux dans l'explication de
ce discours ce que ces espèces sont, non dans l'Eucharistie, qu'en ce qu'Origène dit (ju'elle
la nature ou la réalité, puisque ces nouveaux est le symbole ou le sacrement de la parole do

non snnm verbum in cujus myslerio


dicebal, scd timus pnnem et maïutucaveranl corpus Verbi, et
potus fveral effiindcndiis. Nam corpus Dei
ille biberanl cnlicem, gratiarum aetionis pro his om-
Verbi auL saiiguis, quid aliud esse paient, nisi nihns bymnum dicire Patri. Ibid.
verbum quod nulrit, et verbum quod lœlifical cnr? ' lliid., iibi supra, paf;. 898.

Origcn., tract. 35, in Mallh., pag. 898; éd. de l'.i- • //oc quod vidclis in altariDei, eliam transac-

ris, année 17in. ta nocte ridislis sed quid esset, quid sibi icllet,
,

1 Ibid. quam mnguœ rci sacramentum continvrcl non-


' Panis is(e qucin 7Ji'u,s- Vcrbutii corpus suum dum audisds. .\iij;risl.,sprm. 272, img. 1103, lom. Y.
esse fntetur, verbum est iiutrilnrinm aniniariim... "
/.s((f, fralres, idco diruntur sair.iinenla, quia

et polus islc queui Deus Verbum sanguinein suum in eis alind videlnr, aliud iniclligilur : quod vide-
fatetur, verbum est potaiis el inebrians corda. tur speciem hiibel corporatem, quod inlclligitur
Ibid. fructiim habel .^pirilalcm. Corpun ergo Chrisli si
' Oslendit quando eos (discipulosj lioe pane nu- vis inlelligere, Aposlolum audi dicenlem fidelibits:
tril, prnprium esse corpus. Iliid. [ing. 899. Vos auteui eslis lorims Cliristi ot nieiiilini.
* Deinde docchat discipulos qui festirilatem cc- * Voyez tom. III de la Perpétuité de la foi, pag.

lebraveranl cum uiagislro cl acceperanl benedic- 13i.


[Vl° SIÈCLE.] CHAPITRE XXV. ~ FACUNDUS, RUSTIQUE, ETC. 295
]1ion ; Pt saint Aiitjiistin, qu'elle est le sym- vient que les évèquos de ce concile , voyant
bole ou le sacicuient du corps mystique de «pi'Ibas avait été condamné
sans être en- '

Jésus-Christ qui est l'église; mais ils n'ont ni tendu s'écrièrent k Ils ont mal fait de l'a-
, :

l'un ni l'autre favorisé la doctrine contraire voir condamné contre les canons. Ce qui
à celle de la présence réelle ; au contraire, est fait contre un absent est mal, nous le
ils l'élalilissent en distinguant la substance disons tous. Quand en effet les erreurs de
intérieure, le tVuit inté-rieur, de l'espèce TlH'odorc auraient été manifestes, comment
cxti'rieure, en appelant le
et pain corps de pourrait-on s'assurer qu'il ne les avait point
Jésus-Christ, cnrns du Verbe de Dieu. r('tract('es etne s'en était pas repenti, du
i-2. Le dixièmes livre est encore employé à moins mort
à la Or le Seigneur n'a donné
'?
diiiènie livre,
P«E. îll. la justification de Théodore deMopsueste. Eu à son Eglise aucun pouvoir sur les morts ;

supposant qu'il y ait, ditFacundus, quelque elle ne peut ni les lier ni les délier. Ce n'est
Cap. I,
chose à reprendre dans ses licrits, le concile que sur les vivants qu'elle exerce son auto-
de Clialcédoinc a pu ne pas le condamner, ou rité d'où il suit qu'on ne peut blâmer le
:

parce qu'il a ignoré qu'il y eût des endroits concile de Chalcédoine de n'avoir pas con-
blâmables dans ses ouvrages, ou parce qu'il damné Théodore quoiqu'il le crût répré-
,

a cru qu'ils y avaient élt" insérés par ses en- hensible, parce qu'il n'était plus sur la terre,
nemis, et qu'on pouvait leur donner un bon le seul endroit où il pouvait le lier. Aussi les
sens. On voit d'ailleurs par une lettre de saints ont décidé que n'étant pas au pou-
'

Jean d'Antioche, que Théodore sachant que voir des évêques de juger ceux qui sont
l'on reprenait quelques façons de parler morts avec honneur, il en fallait réserver le
dans ses écrits les avait corrigés de lui-
, jugement au Juge des vivants et des morts.
même, ce qui prouve que s'il s'était quel- On n'a jamais condamné saint Athanase
quefois trompé, il n'avait point été opiniâtre pour avoir excusé saint Denys d'Alexandrie,
dans l'erreur, ni conséquenament hérétique. l'un de ses prédécesseurs ,
qui s'était toute-
Mais au vrai les endroits que l'on lui re-
, fois exprimé dans des termes très-durs au
prochait, ne contenaient point d'erreur; sujet de la nature du Fils de Dieu, qu'il sem-
seulemeut il u'avait point parlé avec assez blait dire être d'une substance différente de
d'exactitude et de circonspection; mais sup- celle du Père, et même créature; ni saint Cap. Tl.

posé même qu'il eût avancé des propositions Basile pour avoir pris la défense de saint
erronées, Ibas a pu le louer à cause de son Grégoire Thaumaturge, dont les expressions
savoir, et qu'il était persuadé que ce qu'il y pouvaient paraître favoriser les ariens et les
avait de défectueux dans les ouvrages de sabelliens ni saint Hilaire pour avoir justi-
;

Théodore, y avait été mis parles hérétiques, fié le concile d'Antioche dans la suppres- ,

etqu'en étant informé, il l'avait corrigé lui- sion du terme de consubstantiel, et des ex-
même. Combien de louanges n'a-t-on pas don- pressions peu convenables dans le concile
nées à saint Cyprien, quoiqu'il ait soutenu ,
de Sirmium. S'il a été permis à ces grands
et en particulier, et avec sou concile, contre évêques d'excuser des hommes que l'Eglise
la doctrine de l'Église, que l'on devait re- avait constitués en dignité pourquoi ne le ,

baptiser les hérétiques? Théodore ne fut pas sera-t-il pas d'excuser aussi Théodore? Ses
même accusé dani; le concile deChalcédoine; ennemis en le condamnant sont tombés
, ,

et quand on l'aurait accusé, le concile n'au- dans quatre défauts i° ils ont anathématisé :

rait pas dû condamner un homme mort dans une personne morte dans la paix et la com-
la commuuion de l'Église '
,
puisqu'il n'est munion de l'Eglise en quoi ils ont péché ,

pas même permis de condamner un homme contre les sentiments des saints Pères et le
vivant , mais absent qu'auparavant on ne
,
jugement de toute l'Église ;
2° En l'anathé-
l'ait repris et averti de se corriger : d'où matisant ils ont dit anathème à tous ceux

' Si autem superstitem non ante admrinilum, , nnverujit; quœ adversus absentent fada sunt,
alqne cnrrepttim damnare non deberemus absen- evacuenlur. Hœc omnes dicimtis. Nemo condem-
tem : quomodo sancta synodus, tel si apud eam nat absentem. Ibid.
Theodorus accusaretur, juste damnare mortvuin ^ Quuprnpter eliam beali Patres de/inierunt,
posset? Lilj. X, cai). iv. quia non nostrum est judicare eos qui honorais
Propter quod i)i ea/leni sancta synodo pro re-
- defuncti sunt, sed solius judiw vivorum et nwr-
verendissimo Iba damaverunl episcnpi, sœpe di- tuorum. IbiJ,
cenles, maie fecerunt qui eum prœtercanonesdain.-
296 HISTOIRE GÉNÉKALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
qui l'ont approuvé, et même à rEj;lise qui a séparés de la communion de l'Église et obs- ctf..

communiqué avec Théodore, ce qui est évi- tinés dans leurs erreurs, et des catholiques
demment contre les règles de la justice et qui sont dans l'erreur, ou par ignorance, ou
contre l'usage de la discipline ecclésiastique; faute de bien comprendre les choses mais ,

3° Ils ontgénéralement condamné tous ses qui demeurent dans une entière soumission
dogmes, sans faire attention qu'on ne pou- h l'Église. « Ce n'est pas, dit-il, l'ignorance*
vait lui refuser d'avoir pensé en beaucoup qui reud hérétique, à moins qu'elle ne soit ac-
de choses comme on pense dans l'Église compagnée de contumace et de résistance
catholique -i" Ils ne se sont pas contentés
;
obstinée à la doctrine de la vérité; c'est de
de condamner ceux qui sont de son senti- soutenir et de défendre opiniâtrement l'er-
ment mais ceux-là encore qui en ont été
, ,
reur. Or cette opiniâtreté ' ne se trouve
,

sans distinction de ceux qui pouvaient avoir point dans tous ceux qui sont dociles à la
changé de sentiment. voix de l'Eglise, qui se soumettent à son au-
13. Dans le onzième livre, Facundus rap- torité, qui sont disposés ii apprendre d'elle

Vf. m. porte plusieurs endroits des écrits de saint la vérité, quoiqu'à cause de leur incapacité,

Eustathe d'.\ntioche de saint Athanase de


, ,
ils n'aient pu encore la concevoir ni la coa-

Ci[i. VMl. saint Ampblioque, de saint Grégoire de Nys- naitre. On ne doit donc point les appeler hé-

se, de saint Chrysostôme et de saint Cyrille rétiques cette quahticalion odieuse ne doit
;

d'Alexandrie, pour montrer qu'ils ont em- s'appUquer' qu'a ceux qui par esprit d'orgueil
ployé les mêmes expressions que l'on re- s'obtiuent à défendre l'erreur, qui s'inter-
prend dans Théodore de Mopsueste.La con- disent à eux-mêmes les moyens de connaî-
clusion qu'il tire de ce parallcle est, que si tre ce qu'ils doivent suivre ;
qui étant aver-
l'on excuse uu défaut d'exactitude dans le tisde leurs égarements refusent avec mépris
langage de ces anciens écrivains, parce que d'acquiescer à la vérité et qui aiment mieux ;

vivant (à l'exception de saint Cyrille) avant être séparés de l'Eglise ou y demeurer ca- ,

la naissance de l'hérésie de Nestorius, ils ne chés, que de changer leuis mauvais senti-
se sont pas exprimés avec la même réserve ments. La conséquence qu'il tire de celte
I)

qu'ils auraient observée, s'ils eussent écrit distinction est que Théodore de Mopsueste ,
depuis; il faut avoir le même égaid pour ayant marqué sa docilité par la rétractation
Théodore de Mopsueste plus ancien que qu'il avait faite de certains endroits de ses

Nestorius, el ne pas reprocher au concile écrits qu'on lui avait objectés comme repré-
lie Chalcédoine d'en avoir eu pour lui. Il hensibles , on ne doit point le condamner
donne pour règle que (juand on trouve des comme hérétique.
erreurs dans les écrits des Pères, on doit Il passe de là à l'autorité du concile de
les excuser par la bonne intention et ne , Chalcédoine, contre laquelle
il dit qu'il n'est

pas les croire pour cela hérétiques parce ;


plus permis de revenir, ni d'examiner de
qu'on n'est pas héréli(jue simplement jiour
'
nouveau ce qu'il a décidé
soit à l'égard de ,

s'être trompé, ou par ignorance l'attache- : la lettie pour toute autre chose
d'Ibas , soit

ment seul à Teneur rend hérétique. qui intéresse la foi ; ce qu'il prouve par di-
Am';se
doiir une
14. Continuant a établir la même règle vers passages des lettres de saint Léon et ,

dans douzième livre, il fait voir qu'il y a


le par l'édil de l'empereur ft^arcieii à qui l'on
beaucoup de diUerence entre des hérétiques était redevable du salut de l'Empire et de la

' A'im quia non ignnrantia, scd obstinalio fn- dodrina d fideshabet Eeclesiœ, qiinmvis non per-
cil hœrcticum. I.ib. M, cap. vu. ferte oniiiin de iisdem sapial vel loquatiir; quia
' Scire igitnr dehemus, quod hœrelicum non lumen suœ scietitid' «on concidil, et multa in qui-
facial ignoranlia, qum doclrinœ rerilalis eoiitii- hus errai aul dubitat, ab Ecclesia rectiv leneri
inai^non est, xed potius ohstinata dcfensio fiitsi- non dubitat, ubi positus relut in scola reritatù!,
talis. Lili. XII, c-ap. I. quod est hœreticus, sed perficiendu^ potius disci-
' Quocirca ownes, qui in disciputatusunt reri- jiulus. Il)id.
lalis, et semetipsos rulioni dociles, el subjcetos * Non igiltir liœresis dicenda est, nisi rontra-
iiuclnrittili prrrhenl Ecclesiiv, si aliter sapianl de diclio superborum pervicax, quw sibi ne aliud
his, quorum (ide mundaiilur, vol propler ineapa- sapial iiilerdiril. ri admonila conlemnil arquies-
cem siiam intrltigentiain, tel nnnus rem nniniiid- cere lerilali. Ilta wagis conlumaciler ah Eccle-
vertendo qnam opus est, impie prociil dvhio lan- sia separari deliijil, vel in ea dolose lalere quam
quam hirrelicos e.Tecrantiir. Qui euim slatiiil in pravam mulare sentcntiam. Ibid.
corde suo firmus hoc credere, quod in latibus
,

[vi* SIÈCLE.] ciiAi'rriit; xxv. — facundus, uustiquk, ktc. iJ!J7

C"r. Ml. ]i;iix de l'église. Il prouve oiicoreparr;iulorité nalioii. Fiicundiis ëtail mal iili' Idi'sipic l'ex-
lie l'iiii et (le l'autre, ([ue les piiiiccs, ilaiis les près arriva, et si allàihii, (piCncore (|u'il lijl
matières (|ui concennMit la foi , doivent l'o- dans un temps de jiMuie, il ne [louvait res-
béissance et soumission aux décisions des
la ter jusqu'à la troisième heure du jour, c'est-
('•vêques, et ne doivent point en nsnrper les à-dire jusqu'à neuf heures du matin sans
droits que l'empereur Léon a doinié l'exem-
;
manger. Il entreprit toutefois de réfuter Mu-
ple de cette oliéissance, de même qiu; Mar- ciiîn mais il ne put le faire avec beaucoup
,

cien, et que Zénou ayant entrepris de déci- d'étendue, parce qu'il n'avait pas les livres
der sur la foi par son Hénotique avait intro- , dont il aurait eu besoin pour traiter la ma-
duit un lourf et fâcheux scliismc dans l'Iy^Ii- tière comme il convenait. C'était vers l'an
se, dont elle fut agitée pendant près de iiua- ooo ou 530.
rante ans, savoir depuis le pontificat de Fé- 16. H s'applique principalement à mon- \inlv.n ilo
ce llïrc. Toni,
lix III jusqu'à celui d'Hormisdas, sous lequel trer que Mucien abusait de l'autorité de n Op S:ri.i.

les églises d'Orient se réunirent avec celles saint Augustin, comme Fauste de liiez en
il'Occident. Facundus prend de là occasion avait abusé dans ses écrits sur le libre arbi-
d'instruire Justinien, en lui remontrant avec tre, faute à l'un et à l'autre d'entendre les
heancoup de discrétion, que Zenon n'avait écrits de ce Père
y avait beaucoup de
; qu'il
donné dans ces éfiaremenis que pour avoir dilfércnce entre cause des donatistes et
la
été séduit par des llatteurs qui lui persua- celle des Trais-Chapitres ; que du temps des
daient qu'il était plus sage que ses prédé- donatistes il ne s'agissait que du schisme,
cesseurs, et que tous les évoques qui avaient au lieu qu'il s'agissait présentement de la
jamais été. Il l'exhorte à suivre l'exemple foi.Pour montrer doue que lui et les autres
du grand Théodose dans sa soumission aux évêques d'Afrique avaient eu raison de se
évêques, en lui disant que ce prince ne séparer de communion d'avec les évêques
croyait point acquérir ' le salut éternel par qui avaient condamné les Trois-Chapitres, il

la puissance temporelle qui le constituait au- dit que ceux-ci ne l'ont pu faire qu'en se
dessus des prêtres du Soigneur mais par ; joignant aux hérétiques qui ont sollicité
la soumission i{n'\\ devait à leurs décisions cette condamnation qu'en condamnant le
;

ajoutant qu'd y avait tout lieu de croire que concile de Chalcédoine, et qu'en anathéma-
s'il y avait encore un évéque du zèle et du tisant les Pères de l'Église, qui ont ou com-
mérite de saint Ambroise ou verrait aussi , posé ce concile, ou approuvé ses décrets ;

des Théodose. et que dès lors s'étant séparés d'eux-mêmes


15. Facundus ne se contenta pas de pren- de l'Eglise, on ne peut reprocher aux évê-
dre par écrit la défense des Trois-Chapitrcs; ques d'Afrique de n'être plus avec eux en
il les défendit encore de vive voix. A'oyant communion. Il restait à Facundus de mon-
qu'on les avait condamnés dans le concile de trer que ceux qui condamnaient le concile
Chalcédoine, il rompit la communion avec de Chalcédoine étaient dès là même séparés
les évêques qui avaient rendu cette senten- de l'Église. II le prouve par l'exemple de la
ce. Pour l'en punir, Justinien l'envoya en condamnation d'Acace, évéque de Constan-
exil. On n'en sait pas le lieu. Ceux qui pen- tinople, qui entraîna celle de presque tous
saient comme lui l'envoyèrent consoler; les évêques d'Orient, soit parce qu'à l'imi-
mais, c'était en etl'et, pour l'engager à répon- tation d'Acace ils ne recevaient pas le con-
dre à un écrit de Mucien ou Mocien, dont le cile de Chalcédoine, soit parce qu'ils com-
but de montrer, par un grand nom-
était muniquaient avec les ennemis déclarés de
bre de passages de saint Augustin, qu'il ce concile. «La sentence, dit Facundus, que
fallait méchants dans l'Église,
souti'rir les le Saint-^iége prononça contre Acace et con-
sans se séparer de leurcommunion. Mucien tre les autres évêques qui en recevaient point
comparait aux donatisles ceux qui dans l'af- les décrets de ce concile, subsista depuis le
faire des Trois - Chapitres s'étaient séparés pontificat de Félix III jusqu'à celui d'Hor-
d'avec les évêques qui avaient ou condamné misdas, sans qu'il se trouvât personne qui
ces Trois-C/iapitres, ou souscrit leur coudam- prétendit, comme Mucien, qu'il fallait tolé-

' Pie admodum credens, et sapienter inleUigens, jectus. Unde credendum est, quia si nunc Deus
quod non ex temporali potestate, qua fuerat aliquem Amhrosium suscilaret, eliam Theodosius
etiam sarerdotihits Un prœponitus, sed ex eo per- non decssct. Ibi'l., cap. v.
venire posset ad vitam, quod illis erat ipse suft-
298 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
rer les méchants et ne point rompre la com- qui n'en a pas été frappé ; vu surtout que
munion avec eux. Est-ce donc que l'on n'avait suivant la doctrine du pape G(Mase, ou plu-
pas connaissance des écrits (jue saint Augus- tôt du concile de Home, il est défendu de
tin avait composés contre les donatistes? condamner après leur mort ceux qui ont liui
non; mais c'est que la cause des donatistes leur vie dans la paix de l'Église, étant plus
n'était pas de même nature que celle des à propos de les laisser au jugement de
Trois-Clidjiitres. » Facundus ajoute que saint Dieu. »

Hilaire se sépara aussi de communion d'a- 17. Facundus traita encore la question des Lcllrc de Fa*
CuDdab poDr
des
vec ceux qui tentèrent d'anéantir l'autorité Trois-Cliapitresdans une lettre qui a été d'a- l« d«fcti.-r
Trou •Cliapl.

(lu concile de Xicée, et que plusieurs autres bord donnée par dom d'Achéry dans le to- Ires, pie. 8ii,
el lom. m
évé(]ues catlioliqu(!s eu lirenl de même. II me 111 de son Sj/icilcr/e, ensuite par le Père Splcll. L>acbe-
htol.

soutient que l'Église d'Afrique ne s'est point Sirmond. Elle est intitulée De la fui catho- :

séparée d'avec les ennemis du concile de lique. Ceux qui avaient condamné les Trois-
Clialcédoine, mais qu'elle a seulement és'ilé Chapitres disaient qu'ils pas ne laissaient
de communiquer avec ceux qui avaient déjà d'être unis dans la môme
dans l'admi- foi,

été séparés de l'Éf^lise pour leur opposition nistr-Uion du baptême et dans l'ordre de la
à ce couc'le et qu'il y a plus de lieu de re-
; célébration du saint sacrifice, avec les défen-
procher aux évoques d'Afrique d'avoir trop seurs des mêmes T?'ois-Chapitres, et que leur
tardé à se séparer, que de l'avoir fait avec diirérend à cet égard ne portait aucun pré-
précipitation, comme Mucien les en accu- judice :\ la foi de l'Église. Facundus sou-
sait. 11 rapporte ce qu'il avait dit dans le tient que cela ne peut être, parce qu'on ne
concile que le pape Vigile assembla h. Cons- peut condamner la lettre d'ibas où la foi sur
tantinople en o47 la sentence d'excommu-
; les deux natures unies en une personne dans
nication que ce pape prononça contre Men- Jésus-Christ est nettement exprimée, sans
nas qui avait le premier souscrit à la con- approuver le dogme des eutychéens et des
damnation des Trois-Chapitres ; le décret de acéphales les principaux moteurs de la
,

Vigile appelé Judicatum, où il condamnait condamnation de cette lettre et consë- :

les Trois-C/iapilres sans préjudice du concile queramont sans enseigner avec lui qu'il n'y
de Clialcédoine, soutenant qu'il ne s'était a qu'une nature en Jésus-Christ; qu'en vain
laissé aller à la publication de ce décret que ils se llattent de garder le symbole de l'É-

par des motifs purement humains et la let-


; glise catholique, et les articles de foi qu'il
tre de Sorcius à Boéllius primat de la pro- contient, puisque contrairement à l'article
vince Bysacène, où il dit anatbènie h Eut}'- qui réserve au Fils de Dieu le jugement des
cbès et à tous ceux qui ne reçoivent point le morts, ils l'usurpent eux-mêmes, en jugeant
concile de Clialcédoine, ou qui anatbémati- et en condamnant des évèques catholiques
senl la lettre d'ibas, reçue dans ce concile. morts dans la communion de l'Église. Il les
11 convient que le pape saint Etienne ne accuse de n'avoir donné dans la condamna-
rompit point la communion avec saint Cy- tion des Trois-Chapitres que par des vues
prien et quelques autres évèques d'Afiique d'ambition et d'intérêt, et après s'être laissés
dans la dispute sur la rebaptisation; et il en corrompre par des présents et des promes-
donne pour raison qu'il n'était intervenu ses llaltcuses de la part des moteurs de cette
jusques-là aucune sentence d'excomumni- condamnation d'après lui l'atTaire des Trois-
;

cation de la part du Pape; mais qu'il me- Chn/iilres n'est pas, comme le disaient quel-
naça d'en porter une contre quiconque ose- ques ignorants, particulière à Ibas, à Théo-
rait à l'avenir rebaptiser ceux qui avaient dore et à Théodore! elle regarde également
;

été baptisés par les hérétiques; ce qui sup- tous les évèques dont la doctrine a été ap-
pose clairemeut que saint Etienne était du prouvée clans le concile de Clialcédoine, et
sentiment qu'on pouvait se séparer de com- tous ceux qui depuis sout morts dans la
munion de ceux qui erraient dans la foi et ; communion de l'Eglise catholique. Il leur
qu'il était permis de demeurer uni avec demande si avant de condamner ces trois
ceux qui n'avaient pas encore été soumis à évèques, on les avait interrogés pendant
l'aiiatliéme. C'est pourquoi il ajoute «Quoi-
: qu'ils vivaient, repris, corrigés et avertis
que je condamne les nestoricus, parce qu'ils suivant couliune de l'Église, et l'ordre de
la
sont séparés de l'Église par l'anatlième, je la discipline, comme on en agit envers Arius
uc condamne pas Théodore de Mopsuesle dans le concile de Nicéc, envers Maccdouius
[vi« SIÈCLE.] CIIAPITIIE XXIV. FACUNDUS, RUSTIQUE, ETC. 2f)'J

(liuis le envers
concile de Constanlinoplc, Spicilége. Toutes ces pièces ont passé dans
Nesloriiis dans celui d'Epliose, envers Kiily- le tome X
de la /iihlintliique des /'ères de
chès et Dioscore tlans le coiu'ilc de C.liaki'- Lyon, puis dans le Ikcuril des o'uvres du
dnine. Counne ils ne pouvaient rien pronver Père Sirmond il Paris en iO'Jti, [dans le tome
de semblable, il leur oppose les actes du con- XI de la Bibliiith!'(pte de Galland, et de là dans
cile d'Anlioche et de celui de Clialcédoine où le tome LXMI tle la Putroluf/ie lutine, col. 521

Ibas Tbéodore de Mopsueste et Tliéodorel


, et suiv.j
ont été déclarés orthodoxes, et où le premier l'J. Facundus ne fut pas le seul qui écri- Sfbullen it
nu.ll'iae, dia-
cres do Rome,
et le dernier ont été rétablis en conséquen- vit contre la condamnation des Trois-C/ui- leur écrit con-

ce dans leurs sièges. Il leur demande encore pitres : ils trouvèrent des défenseurs même tr.< la

Dation
condem*
des
Trois Chapl*
si le concile de Clialcédoine est orthodoxe dans le clergé de Rome. De ce nomljre fu- trcs.

ou non : « Si vous répondez, dit-il, qu'il est rent Rustique et Sébastien, tous detix dia-
orthodoxe, vous êtes donc vous-mêmes hé- cres de cette Église, et confidents du pape
rétiques, puisque vous condamnez ce qu'il Vigile. Ils se déclarèrent contre son Judica-
a approuvé vous n'êtes pas moins héréti-
; tum dès le commencement de l'an .'iiO, et
ques si vous répondez que ce concile n'est mandèrent à plusieurs évoques, entr'autres
'

point orthodoxe, n Ce qu'il dit des auteurs à saint Aurélien, évèque d'Arles, et à Valen-
de la condamnation des Trois-Chaiiilrcs, il linien, évêque de Tomi dans la Scythie, que
l'applique à ceux qui leur sont unis de sen- ce pape avait abandonné le concile de Clial-
timent et de communion. Répondant ensuite cédoine. Ces deux évèques lui en ayant écrit
i\ ce qu'ils alléguaient ,
qu'ils otl'raienl le pour s'informer de la vérité, Vigile répondit
même sacrifice que les défenseurs des Trois- à saint Aurélien qu'il n'avait rien fait contre
Chdpitrcs, il leur fait l'application de ces pa- les décrets de ces prédécesseurs, ni contre
Gcn , tT, 7- roles de Dieu à Caïn : 6i wus offrez bien, les quatre conciles généraux qu'il pouvait,
;

vous en serez récompensé ; si vous offrez mal, comme les autres évèques des Gaules, s'as-
ruus trouverez aussitôt la peine de votre péché. siu'er qu'il garderait inviolablement la foi

11 avoue que rien n'est préférable à la paix, des Pères. Il se justifia aussi des calomnies
et il cite sur cela ce qu'en dit saint Augustin ;
de Sébastien et de Rustique dans sa réponse
mais qu'on ne peut l'avoir avec les hé-
il dit à Valentinien de Tomi, en le priant de ne
rétiques ni avec les schismatiques, ni avec plus recevoir de leurs lettres, parce qu'il les
les Juifs, ni avec les païens; qu'au reste avait déjà séparés de sa communion , et

celte paix a été rompue' par les auteurs de qu'il était résolu de les juger canonicpement,
lacondamnation des Trois-Chapitres, et qu'ils s'ilsne venaient bientôt à résipiscence. En
peuvent en y renonçant rétablir cette paix. voyant qu'ils continuaient à le calom-
effet,

Jucement 18. Nous ne savons point que Facuudus nier, il rendit contr'eux une sentence ' con-

ail composé d'autres ouvrages. On voit par çue en forme de lettre, et adressée à eux-
iiuo^ <iu OD en
ceiLX dont nous venons de parler, qu'il écri- mêmes. S'adrcssant d'abord à Rustique, il le

vait avec beaucoup de feu et de véhémence, fait souvenir qu'il avait lui-même demandé la
et qu'il ne laissait rien échapper de ce qui condamnation des Trois - Chapitres, jusqu'à
regardait son sujet. Ildonne un tour à ses vouloir que l'on déterrât les os de Théodore
raisonnements qiii les rend plausibles mais ;
de Mopsueste poiu' les brider; qu'il n'avait
il y en a dont il est aisé d'apercevoir le fai-
prononcé son Judicatum qu'après avoir pris
ble, autant parce qu'il en pousse trop loin son avis qu'il l'avait pressé de le donner
;

les conséquences, que parce que les princi- non-seulement à Mennas à qui il était adres-
pes n'en sont pas solides. Le Père Siimond sé, mais qu'il en avait fait lui-même des

lit imprimer en 1629 les douze livres de Fa-


copies pour les envoyer en Afrique que le ;

cuudus sur cette matière, et celui qu'il com- Samedi-Saint, jour auquel le Judicatum fut
posa contre Mucieu ils furent réimprimés ;
publié dans l'Église, il y avait fait ses fonc-
en 1675 à la suite d'Optat de Milève, par les tions de diacre, et dit à l'évêque Julien que

soins de Philippe le prieur, qui y ajouta la l'on n'avait pu mieux faire. Le Pape lui fait

lettre intitulée De la Foi catholique, qui :


encore d'autres reproches puis, après en ;

avait déjà été insérée dans le tome III du avoir fait aussi au diacre Sébastien, il lui

' Tom. V Concil., pag. 558-559. ' Ibid., pag. 550.


300 HISTOIRK GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
dit : avez loué publiquement notre
(1 Vous ' eu égalemeut part à l'écrit préicnté a Justi-
Judicatum à Constanlinoplp, tlismt en pré- nieu contre les J'rois-C/mpitres. Il n'est pas
sence de tout le clergé qu'il était venu du venu jusqu'à nous '.
ciel, et que vous aviez trouvé à Rome les 20. Mais nous avons celui de Rustique
écrits de Tlicodore de Mopsuesle remplis de couti-e les acéphales c'est un dialogue qu'il
: Ici Jlf [ilt*lM.
Ton.. X niM.
blasplièmcs. Mal{,'ré cet aveu et l'altaclie- composa sur ce de la dé-
qu'il avait ouï dire Ilr. 1*5. JSO.

menl que vous m'avez témoigné depuis en finition de foi du concile de Chalcédoine,

continuant de faire vos fonctions de diacre, tant à Constantinople qu'à Alexandrie et ,

et de mander à ma table avec Rustique, vous à Antinous dans la 'Thébaïde. Le dessein de


'
avez cliangé de conduite, et communiqué l'auleur est de montrer qu'il y a deux natures
avec ceux qui ont écrit contre le Judicatum. eu Jésus-Christ, unies en une seule pei-son-
D'où il suit que vous êtes comme eux excom- ne, en sorte que c'est le même qui est Fils de
muniés suivant les canons. Vous vous êtes Dieu et Fils de l'homme c'est ce qu'il prouve
:

encore attribué ' l'autorité de prêcher ce ;


par divers raisonnements et par plusieurs
que les personnes de votre ordi-e n'ont ja- passages de l'Écriture et des Pères. Il remar-
mais fait gans la permission de l'évêque. que que l'hérésie de Nestorius ne consiste pas
Vous avez écrit faussement par toutes les en ce que cet évèquea appelé Marie mère du
provinces que nous avions combattu le con- Christ, mais en ce qu'il a nié qu'elle fût mère
cile de Chalcédoine d'où il est arrivé un
;
de Dieu et que pour juger de ce qu'il y a
;

grand scandale, parce que ceux qui ne con- de mauvais dans la doctrine de Xestorius, il
naissaient pas votre malice, et recevaient vos faut en faire un parallèle avec les lettres
écrits comme de diacres de l'Eglise romaine, que saint Cyrille a écrites contre lui ; que
y ont ajouté avec simplicité. Vous avez de-
foi n'y ayant jamais eu d'union permanente et
puis osé avancer dans un écrit donné à l'Em- indivisible de deux natures raisonnables en
pereur, que saint Léon, notre piédécesscur. une seule personne, on ne peut donner
a autorisé les erreurs de Théodore de Mop- d'exemple de celle qui s'est faite de la nature
sueste. » Vigile ajoute qu'il les a attendus himiaine avec la nature divine en Jésus-
l'un et l'autre dans l'espérance qu'ils rentre- Christ; que l'incarnation n'est point com-
raient en eux-mêmes ;
qu'il les a fait avertir mune aux Irois personnes de la Trinité, mais
deux fois, sans qu'ils aient voulu l'écoutei-; à celle du Fils seulement que le Fils ne pro- ;

que contraint d'en venir à la punition, il les cède pas du Saint-Esprit, et qu'on ' ne sait
déclare, en gémissant, privés, par l'autorité pas bien si le Saint-Esprit procède du Fils
de saint Pierre, de l'honneur etdu ministère comme du Père ; qu'on ne peut ' point dire
du diaconat, leur oll'rant toutefois le pardon que l'on adore le Fils de l'homme avec le
en cas de résipiscence de leur part, à la Filsde Dieu, la coadoratiou ne se disant
charge qu'après sa mort personne ne [Kjurra que des trois personnes de la Sainte-Trinité ;

les rétablir. Il parait par le contenu de cette mais que comme la divinité a opéré des mi-
sentence que Sébastien et Rustique avaient racles par la chair, elle est aussi adorée par

' Tom. V Concil., paR. 552. » Ibid., 554. — soulever nne controverse ardente moins d'un siè-
' Àdjecislis execranda superbia, qucc nec legun~ cle après la tenue du coucile et eu présence des
tur ,nec sine sui ponlificU jussione aliqunndo originaux conservés daus les mou.istères des acé-
ordinis vcslri homines prœsunipserunl auclori- mètes, à Couslautinoplc et à Chalcédoine. fL'e'di-
lalem vobis prœdicalionis contra omnem consue- teur.J
tvdinem vindicare. Ibid., pag. 554. ' Vtrum tero a Filio eodem modo qun a Paire

* Rustique loinpiis.! des uolessurleconcile (II! Clial- procédai SpirihisSanclus uondum perfeite hulieo
cédoiue où il établit nue couiparaisou qui seulTéru- nalisfaclum. lluslic. Cont. Aceph. \»m. \ liibl.
dit modcrue entre les exemplaires lalius et grecs lie Pat., p.ig. ;n6.
te concile. Ces notes ont été publiées par Baluze, Coll. « ^on Coadoralur Filio Dei Filius
lied dicere :

novaConcil. ,p:i(i.9:ii-lH2. iJuin l>ilra les a reprodui- hominis non nùm coadoranlur l'n Sancla Tri-
:

tes d'une manière pluscorrecte el plus complète (laus nilale, nisi persona lanlnmmodo ; divinilas vero
le ijuatrièuic volume du Spicikgium solem., p.ip. aiiul miracula operala esl per carnein, sic ado-
192 ù 221. 11 parait assez vrai.-^emblable que Itusti- ralur per carnem, et adoramus omnes crueein
quc Gt ce travad de couccrl avec Véréiuudus dout cl per ipsam illum cuju^ est crux non lauien :

il cite des l'Xlrails. Ces notes, au nombre de sept critcem condorare dicimur Chrislo, nec per hoc
'•eut cioquaule, louclicnt à tous les points de po- nna esl crucis el ChriHi nnlura. Ibid., pag, 369.
lémique, d'iiibloirc, de paléographie que pouvait
,

[Vl" SIÎXLE.] CHAPITRE XXV. — FACUNDIIS, TWSTIOUE, RTC. 30i

la cliiiir; qu'on prut nous adorons


dire qiio avec Sébastien !i l'empereur Justinien. I^c
Ions la croix, cl par la croix celui de ([ui est Pitilnfiiie contre les iici'/jliiiles se trouve; dans

la ci'oix; mais non que l'on adore la croix V Aiilidiite coii/ri' tes hérésies, imiirinii- à Itàlc

avec J(5sus-Ghrist, parce que la nature de en 15^8; dans VJJérésiologie, en la même


la croix n'est pas une avec la nature de Jé- ville en 1550, avec les Notes de Simlérus ;

sus-Christ. Nous adorons donc, dil-il, le


<( '
dans le /leeneil de divers éerits des Pi/res leori-
corps do Ji'.sus-Clirist, selon qu'il osl l'crit tre Eiitijeiws et Nesttirius à Zurich en 1571
dans le Psaume xcviir Ador-ez l'cscnheau de
: dans le tome X de la Bibliothèque des Pl;res
ses pirds, c'esl-A-dirc la terre non que nous ; h Lyon en 1677, [dans le tome XH de la Bi-
adorions le corps par lui-même ou pour lui- bliothèque de Galland, et de h'i dans le tome
môme, comme s'il était Dieu, mais par la lAVd de la Patrologie latine, col. 1103 et
chair et par le corps ou par l'humanité nous suiv.]. Le style en est assez net.
adorons Dieu qui s'est fait chair. Par une 21. Victor de Tunes dit ''
que les d(''fen- oit
DénéiintUfl
avoir
cniîlre lu^
semljlable raison, ri^£;lise adore sans aucu- seurs des Trois-C hojiitres, s'étant assemblés
I

>U .Cl,.|,i-
I. Lettres
ne coiilradiction par toulc la terre, la croix en Rlyrie, la neuvième année après le con- évéquos
rriqiie.
et les clous qui ont servi d'instruments à la sulat de Basile, c'est-à-dire en 550, ils y con-
passion de Jésus-Christ, ;\ cause de celui damnèrent Bénénatus, évêque de la pre-
qui a été percé de ces clous et attaché ù cette mière Justinienne ennemi déclaré des
,

croix. )) Rustique fait valoir contre les acé- Trois-Chupitres ce qui donne lieu de croire
;

phales l'autorité du concile de Chalcédoine, qu'il avait publié quelques écrits sur cette
^
disant qu'elle sutfit seule, ce concile ayant matière nous n'en avons point d'autres
:

été confirmé de toutes les Églises, comme il connaissances. Il ajoute que l'année suivante
était aisé de le voir, tant par les lettres cir- 551 les évoques d'Afrique condamnèrent
,

culaires sous le règne de Léon, que par en- dans un concile le pape Vigile, et le séparè-
viron deux mille cinq cents lettres des évo- rent de la communion catholique parce ,

ques sous l'empire de Justin


, après le , qu'il avait condamné les Trois-Chupitres ; ils

schisme de Pierre d'Alexandrie et d'Acace lui otl'riront toutefoisde se réconcilier avec


de Constantinople. H cite un discours qu'il lui au cas qu'il se repentît. Nous n'avons

avait fait contre ' les acéphales et les nesto- plus les lettres qu'ils envoyèrent à l'empe-
riens, et promet * un traité pour la défense reur Justinien, par Olympe Magistrien, dans
des Trois-Chapitres ; ce qui fait voir (jue le lesquelles ils prétendaient montrer l'injus-
Dialogue dont nous parlons est antérieur à tice de la condamnation des Trois-Chapilres.
ce traité, le même sans doute qu'il présenta

' Nonne scriplum est : Et aclorate scabellum salis quœ numéro superat universas, quœ loties
pedum ejus? hoc vcro est terra. Adoralur enim cunctarum Ecclesiaruin consona sententia confir-
corpus quod (le terra est : non nt per semetipsum mata est, tam per encyclicas epistolas régnante
nut proptcr semetipsum adorctur ulDeus; sed ut Leone quam' per llbellos saccrdotum' forsaii duo-
per corpus et per carnem sive humanitatem Deus, rum millium et quingentorum, imperantc Jusli-
Verbo qui inhumunatus est, coadoretur... et clavos no, post schisnia Pétri Alexaiidrini et Àcacii
quibus con/ixus est et lignum venerabilis crucis, Constantinopolitani. Ibid., pag. 382.
omnis per totum munduin Ecclesia absque ulla ' Ibid., pag. 377.
contradictione adorât- \hiil., pag. 373. * Ibid., pag. 331.
* Sufjlceret tibi unica auctorilas synodi univer- 5 Victor. Tun., in Chron. ad. an. 550.
302 HISTOIRE GÉNÉRAI.E DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.

CIIAPITUE XXVI.

Victor de Tunones 15661, Libérât, diacre de Carthage [vers 556]

Victor de Capone [550].

[Écrivains latins.]

vkior àt 1. Yicloi- de Tunones ou Tunes était lui- blasphémant dans un bain d'eau froide con-
fenstor '
dw mêmc uH zôlé défenseur des Trois-C/iapi/res. tre la Sainte-Trinité, y fut consumé par un
ire...sesi£riis.
jj racontc que'
quinzième année d après
la feu du ciel dirigé par le ministère d'un ange;
le consulat de B .sile, c'est-à-dire en .536, il fut qu'un évoque de la même secte, ayant osé
Ijattu et mis en jirison, puis relégué dans le changer la forme du baptême en disant Bar- :

monastère de Mandia, ensuite à Egée, île de las le baptise au nom du Père/xir le Fils dans le

Mauritanie, en troisième lieu à Alexandrie, Saint-Esprit, l'eau qui devait servir au baptê-
avec Théodore de Cabarsusi, qui avait pris me disparut, et le vase dans lequel elle était se
comme lui et plusieurs autres évèques d'.Afri- cassa; ce que voyant le catéchumène courut
que, la défense d'Ibas et de Théodore!. Vic- à ri'glise catholique et y fut baptisé qu'à ;

tor et Théodore, étant arrivés à Alexandrie, Alexandrie et dans toute l'Egypte Dieu auto-
furent mis d'abord dans la prison prétorien- risapar un miracle les décrets du concile de
ne, puis dans celle du cliâteaude Dioclétien. Chalcédoine, en permettant que ceux qui ne
Ils en furent tirés, et après des conféren- voukiient pas le recevoir fussent possédés
ces dans le prétoire pendant quinze jours de des démons, qui les agitaient si violemment,
suite, on les envoya en prison dans un mo- que privés de l'usage de la parole humaine,
naslèie de l'ordre de Tabcnnes, qui était ù ils jappaient comme des chiens, et se man-

Canope, à douze milles d'.Uexandrie. Saint geaient les mains et les bras. Il donne tout
Isidore de Séville * atlrihue à Victor de Tu- entière, de même que le diacre Libérât, la
nes une Chronique qui commençait à la créa- lettre écrivit à Théodose d'Alexau-
que Vigile
tion du monde et finissait à la première année drie, à Anlhime de Constantinople et à Sé-
du règne de Justin-Ie-Jeune, c'est-à-dire en vère d'Antioche, où il leur déclarait qu'il te-
5f)G. Nous n'en avons plus qu'une partie qui nait la même foi qu'eux, en les priant dé la
commence 'au dix-huitième consulat doThéo- tenir secrète, et au contraire de feindre qu'il
dose-le-Jeune, c'est-à-dire à l'an -444, où saint leur était suspect. Il met la naissance du
Prosper avait liiiila sienne. Victor s'applique Sauveur en l'année 43 de l'empire d'.Vuî-niste,
particulièrement à rapporter ce qui appar- comptant depuis cinq cent vingt-sept ans jus-
tient à l'histoirede l'hérésie eutychéenne, et qu'à la première année du règne de Jiislin-
l'afTaire des Trois-Chapitres; mais il met aussi le-Jeuue où il finit sa Chronique. Ainsi il y a
les événements considérables arrivés dans de la liiirércnce entre son calcul cl le notre,
l'État ou dans l'Éghsc, en les plaçant selon puisque nous mettons le commencement ;du
l'ordre des consulats. Il dit en parlant de la règne de ce prince en 566 auquel Jusiinien
persécution qu'Hunéric, roi des Vandales, son prédécesseur mourut le 1 \ novembre.
excita en Afrique, que ce tyran lit couper la Nous avons la Chronique de Victor dans les
langue à uu grand nombre de confesseurs, Anciennes le^vns de Canisius imprimées à In-
qui ne laissèrent pas de consers'er l'usage do golslad en 1600 et années suivantes, depuis
la parole [lendant tout le temps qu'ils vécu- à Anvers en 172."). dans le Trésor des temps de
rent, et que la plupart d'entre eux étaient Scaliger, [dansle touieVIIde Galland, et delà
I venus à Constantinople, dont les habitants dans le tome LXVIII de la Patrologie avec la
pouvaient rendre compte de cette merveille. notice de (ialland.]
1
II raconte qu'un arien, nommé Ulympius, 2. En 53o, Réparât, successeur de Boniface LlUrtl,

' VicUir Tuu. in Citron, ad an. 556. ' Victor Tunou., lom. 1 Leclion. Canis. eUit. An-
* Isidor. De Vir illusl. cap. xxxviii. tuerp. au. 1723, pag. 32i,
[vi" SIÈCLE.] CHAPITRE X\\\. — VICTOR DR TUNONKS, LIRÉRAT, ETC. 303
ier».ioCar. (laiis Ic sië.LfC dc Ciii'Hiaf^e, p| les autrns (5vû- en disant qu'on ne devait pas nommer Marie,
qiu's d'Ariiquc an uombii; de deux ceiil dix- mère de Dieu; que Nestorius fut le seul qui
sept, s'étaiit assemblés pour travailler au ne voulut point condamner ce blasphème;
rétalilissement de la discipliue, crurent qu'ils qu'au coulraire il l'autorisa jtar ses discours, c.p.v.n.
devaient avant toutes clioses consulter le ce qui occasionna de grandes disputes dans
Saint-Siège sur la manière dont on devait re- l'Eglise, et la tenue du concile d'Éphèse où
cevoir les évèqucs ariens (pu se faisaient ca- Nestorius fut condamné et d(;posé. Libé-
tholiques. Ils d('']nilèrciit ù deux évo-
cet ellct rât parle ensuite de la division qui survint
ques, Caïus et Pierre, et un diacre do l'l']glise entre saint Cyrille et Jean d'Anlioche, de
de Cartilage nommé Libérât. Celui-ci avait '
l'ordination de Maximien de Constantinople,
déj;\ été à Rome du temps de l'aflaire des et de la réunion de Jean et des autres orien-
moines acémMcr.jSousle pontificatdeJeauII. taux avec saint Cyrille; des lettres que ce i.

Il fît beaucoup d'autres voyages depuis, l'oc- ;\ dernier écrivit pour montrer l'unité de Jésus-
casion des Trois-Ckapitres, dont il avait pris Christ endeux natures; des mouvements que
la défense; ce qui lui donna lieu de recueillir lesdéfenseurs de Nestorius se donnèrent au-
quantité de monuments qui concernaieut près des évêques d'Arménie pour faire con-
VJ/istoire de l'/Icrcsie dc Nestorius et d' Euty- damner les personnes de Diodorc
écrits et les
d'apprendre plusieurs faits très-iuté-
c/ics, et de Tarse de Théodore de Mopsueste; de
et
ressants, soit ' dans les conversations parti- ce que saint Proclus, successeur de Maxi-
culières qu'il eut avec des personnes d'auto- mien dans le siège de Constantinople. répon-
rité, soitpar la lecture des Actes des conci- ditaux Arméniens qui l'avaient consulté sur
les, soitpar les lettres des évéques dont il de Théodore; des lettres que Jean
les écrits
trouva le moyen d'avoir des copies. Il eut d'Antioche écrivit pour la défense de cet évo-
aussi communication d'une //(s^iVe ecclésias- que; de l'accusation formée contre Ibas, évo-
tique traduite nouvellement du grec en la- que d'Édessc, par ceux de son clergé, et de
tin. Ce fut à Alexandi'ie qu'il la trouva, mais leur réconciliation faite par le ministère de
il ne dit point qui en était l'auteur. De retour Photius de Tyr et d'Eustathe de Béryte
,

de ses voyages et délassé de ses fatigues, il qu'on leur avait donné pourjuges. Après quoi xi.xtih.
profita dc son loisir pour faire part au public il marque la naissance de l'hérésie euty-
des connaissances qu'il avait acquises, et en chéenne, ses progrès, sa condamnation dans
donna une suite sous le titre àc Mémoire, ou le concile de Constantinople sous Flavien,
A' Abrégé de l'histoire de l'hérésie àe Nestorius qui en était évêque les violences de Dios-
;

et d'Eutychès. 11 la commence à l'ordination core dans le brigandage d'Éphèse pour la


de Nestorius, c'est-à-dire en 42 i, et la con- soutenir, et comment elle fut anathématisée
duit jusque vers l'an 333. Le style eu est très- à Chalcédoinc avec son auteur et ses parti-
simple et même inégal parce que l'auteur
, ,
sans. Ensuite il entre dans le détail des trou-
s'assujettit souvent à copier les auteurs grecs bles qu'ils causèrent dans l'Église d'Alexan-
et latins dont il avait fait des extraits. Mais elle drie infectée plus qu'aucune autre de l'héré-
n'en est pas moins intéressante à cause d'une sie eutychécnne. Il dit aussi quelque chose
quantité de faits qu'on ne trouvepoint ailleurs. de VHénotique de Zenon, et des persécu-
\n«iTse de 3. Elle est divisée en vingt-quatre cliapi- tions que Macédonius souffrit de la part de
iiiniiiuié:
nioire ou
très,f y compris
-J L
v
u
voit que
la préface.
r ±
Nes- On l'empereur Anastase. C'étaitl'usage 'à Alexan-
^

o'nc'ii^T'
torius avait puisé les principes de son héré- drie que le nouvel évêque veillât auprès du
up. LIT. "'
gig dans celles de Paul de Samosates et d'A- corps de son prédécesseur, mît sa main droile '"'

pollinaire;que le prêtre Anastase, son syn- sur sa tête, l'ensevelit lui-même; puis met-
celle et son confident, prêchant un jour à tant à son col le pallium de saint Marc ' prit
Constantinople, scandilisa toute l'assemblée possession de son siège. Timothée étant mort.

' Liber, m Brev., cap. xi. * Le tome III du Spicilegium romanum, pag.
- Prœfat. in Brev., toia. V Concil., pag. 740.
Id. 7H-72I; contient: i" un fragment de la lettre écrite
' Consuetudo qiiidem est Alexandriœ illum qui à Sévère, patriarclie d'Autiocbe au temps de sa
,

defuncto succedii e.rcubias super defuncti corpus promotion au patriarcbat d'Alexandrie 2» une au- ;

agere, manumque dexieram ejus capili sua impo- tre lettre du même au peuple d'Alexandrie pendant
nere, et sepulto manibus siiis accipere colla suo son exil 3" une autre letfre du même sur la Tri-
;

beati Marci 'pallium, et tune légitime sedere. Li- nité et contre les ariens. Ces opuscules, dit M. Bon-
bérai, in Brev., cap. xx. uetty, sont remplis des erreurs monopbysites, mais
304 HlSTOllŒ GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Théodose' fut ordonne aussitôt en sa place; d'avec l'intilulation de la lettre dont parle le
mais le peuple qui n'avait point eu de part h sixiènie concile. A quoi il faut ajouter que
son élection, l'oinpi'clia de faire les funérail- Libérât avait dit auparavant que Vigile s'é-
les, le chassa del'Kiilise, et intronisa Gaïen, taitengagé à Théodose, .Xnthime et A Se-
i\
c»p. ^im
qui était de la secte dos phanlasiastcs ou in- vère. Théodose d'Alexandrie, ayant été en-
corruptibles. A Conslantinoplc, le patriarche voyé en exil, Paul, abbé de l'ordre de Taben-
Epipbane étant mort, l'impératrice Théodora nes, fut élu pour lui succéder. Le diacre Pe-
fit transférer sur ce siège Antliime, évoque lage qui le connaissait pour orthodoxe pril sa
de Tréliizondc, ennemi du concile de Chalcé- défense auprès de l'Empereur, contre quol-
doine de même que cette princesse. Le suc- ques-ims des moines qui le méprisaient. 11
cesseur de Boniface dans le Saint-Siège fut n'occupa pas longtemps le siège d'.\lexan-
Jean II, surnommé Mercure, h qui succéda drie, ayant été exilé à Gaza en Palestine, sous
Agapct, archidiacre de l'Église romaine. 11 prétexte qu'il avait eu part au meurtre du dia-
oliligea Anthime de quitter l'Église de Cons- cre Psoïus, dont toutefois Arsène fut con-
Cr- ""• lantinople, ii qui il donna pour évèque Men- vaincu. Zoïlefut ordonné à sa place. Quelque
nas, en le consacrant de sa propre main temps après, le diacre Pélageque l'Empereur
dans la Kasilique de Sainte-Marie. Quand on avait envoyé à Jérusalem, étant de retour à
eut appris à Home la mort du pape Agapet Constanlinople, des moines de cette ville le
arrivée dans le temps qu'il se disposait à y vinrent trouver avec des articles extraits des
retourner de Constanlinople. on lui donna livres d'Origène, pour l'engagera se joindre
""' pour successeurSilvérius; mais l'impératrice ileux pour en obtenir la condamnation au-
Théodora qui favorisait toujours Anthime, fit près de Justinien. Pelage qui n'aimait point
choisir pour pape Vigile, à la charge qu'a- Théodore de Césarée, parce qu'il était un
près sonélection il écriraità Anthime, àTiiéo- des défenseurs d'Origène, s'employa volon-
dose d'.Mexandric et à Sévère d'Antioche. tiers, et obtint avec Mennas de Constanlino-

Libérât raconte tout ce qui se passa il l'occa- ple une sentence contre Origène, et les en-
sion de l'élection de Vigile de la part de l'im- droits de ses écrits qu'on avait déférés. Elle
pératrice, et de Bélisaire qui était chargé de fut envoyée an pape Vigile, à Zo'ile, patriar.
la procurer, et il joint ;\ce récit la lettre de che d'Alexandrie, à Ephrem d'.\ntioche, et
Vigile à ces trois évoques acéphales. Nous à Pierre de Jérusalem, qui y souscrivirent

voyM r«ru- l'avons rapportée ailleurs. Nous remarque- tous. Théodore de Césarée pour venger Ori-
vifiie.
cie
j.Qjjg seulement ici, que c'est sans raison que gène, entreprit défaire condamner Théodore
l'on a prétendu que le sixième concile géné- de Mopsucste qui avait beaucoup écrit contre
ral a déclaré supposée par les hérétiques eu- Origène. Il allait cet effet voir Justinien, qu'il vie

tychéens la lettre que Libérât rapporte sous trouva occupé à écrire contre les acéphales;
le nom de Vigile. Celle dont parle le concile ilen détourna ce prince, lui disant qu'il y
était - adressée ù Jusiinien et à Théodora; avait un moyen plus court de les ramener.
au lieu que la lettre rapportée par Libérât ' « Ce qui les offense le plus, dit-il, dans le

est adressée aux seigneurs et christs, Sévère, concile de Chalcédoine, c'est qu'il a reçu les
Anthime et Théodose, ainsi qu'on lit dans louanges de Théodore deMopsuesIe, et qu'il
Victor de Tunes. Libérât ne nomme point ces a déclaré orthodoxe la lettre d'Ibas, quoi-
trois évèques dans l'inscription de la lettre. que nestorienne. Si l'on condamne Théodo-
Il met simplement Aux seigneurs et christs;
: re avec ses écrits et la lettre d'Ibas, ils rece-
ce qui fait toujours une ditlërence essentielle vront le concile comme corrigé et purgé de

on y trouve lin 1>i\tu passapte sur la présence réolle. Irnlngie grecque, ool. 277-216, avec quelques frag-
" Si (luelqu'un dit qu'il y a passion, mort ou cor- ments tirés de Uiillanil et de Mai. (L'éilitcur)
niplioii «I.ins 11' coiiis Pl siug du Clirisl
11! pn'i'ii'iix Aiuilhtntn libro qui dicilur: .Menna! nd Vigi-
'

que ijous élevons .«ur l'autel lorsque uous en ac- liuin, e/ qui eum /inxenml sive scripscrunl: ana-
coniplisgous la litiir(,'ie en roiiiiuémoratiou île sa tlicma UlicUis qui dicunlur facli fuisse a Vigilio
niort et de sa jiassion, qu'il suit aiiathèuie Si quis : ad Justiuidnum cl ad Tlieodoram divo" memoriœ
dixerit m sacrn corpore pretiosoque saitfiuine qui suiil dcuiDiisIrnli. Art. îi, sext. syiiodi.
quie super allarc erlnlUimis duin ipsoriim lilnr- ' Doiiiiuix et Dei Salialuris noslri
chrislis
ijiam perficimus, mnricm ijus oc passionem com- cliariliile cuiijunrlis fralrihus Theodosin, Anlhi-
meinordiiles passioiiem nui murtefii, aul corrup- iiin et Sereio epinriipis, Vigilius episcopus. Victor

lioncm iiilcrvenire nnalhema sil. l'uj/. 710. Ces Tuii., iii Citron.

passages soûl reproduits au tome Lxxxvi de la Pa- » Sigeb. De Viris illusl., cap. xx.
[vr SIÈCLE.] CFIAI'lTItK XXVI. — VICTOll IH-: Tl'XoXKS, I.lUKll.Vr, etc. 303
ce (lu'il avilit (le ([('rccliicux. d l/niiipcrcui' trouvcul dans une Chaîne sur les quatre
<[iii 110 s'a|)('rcevait pas di; l'arlilicc, doima ;\ l'À'angiles, ipie Feiiard<!nt avait manuscrite.
li'urs prières un étlit pour la coiulaiiinalion Il les en a tirés pour les mettre à la lin du
tics 'J'ritis-Chapitres, oiirtMiiiant dans cot odit troisième livre de sain! Irént'e contre /rs hé-
Tlit'oddi'ot cause de sou c'cril contre les
, ;\ résies, dont il donna une édition à Paris, en
an;illi('Uialisuies de saint Cyrille, avec Ilias l.">73. au tome de
[Ces ])assages se trouvent
et Tlii'odore. Libérai termine Ihsun /lis/ dire, la /'ii/nildi/ic, A la fin du
ci-dessus indiqué.
disant qu'il était inutile de s'élciulre sur les mèiu(! volume on trouve un fragment sur le
récompenses que l'on donnait à ceux qui ap- Cycle jiascal d'après Uède *. Le père d(Jm
,

prouvaient la condamnalion des Trois-Chn- Pitra a publié au tome I du Spicilegiurn so-


pitrcs, et les mauvais traitements que l'on Icsmense, pag. 203 et suiv., plusieurs frag-
faisait ceux qui refusaient de les
souH'rir à ments inédits des ouvrages de Victor de Ca-
condamner. Il ajoute seulement, que le scan- poue y en a qui sont tirés de son ouvrage
; il

dale lui tel, ([ue Théodore de (lapiiadoce di- intituli'; : Schiilies sur la Genèse, qui avait été
sait lui-même depuis, que Pelage et lui mé- composé à l'imitation d'Origène. Parmi ces
ritaient d'être brûlés vifs pour l'avoir excité. fragments, l'on remarcpie deux passages
Nous avons deux éditions du Ih-eviuviuiii de de saiut Polycarpe, extraits de son livre des
Libérât; l'une à Paris en 1073 avec des notes Réponses quelques extraits d'Origène, qui
,

et des dissertations du père Garnier; l'autre nous signalent quatre nouveaux ouvrages
dans le tomeV des Conciles du père Labbe, de ce Père, savoir 1° un ouvrage intitulé : :

page 740. M. Crabbe l'a donné aussi avec un n-zpifiii'^v qui contenait au moins quatre li-

supplément ou appendice ilans le tome 11 de vres 2° le livre de la Pùque ; 3° VEpitre à


;

son édition des Conciles, page 121 On ne trou- . Gobar intitulée la onzième; i" l'Epître à saint
ve point ailleurs cet appendice. [Galland dans Firmilien, évêqne de Césarée. Saint Basile
son tome XH a reproduit le Bi-eviarii/m, il est est cité pour un sermon tout à fait inconnu
aussi dans le toui. LXVUI, col 903 et suiv.de la sur les dogmes et pour un autre pareille-
Palrologie latine, avec notes du pèreGarnier.] ment inconnu sur ces paroles Igneni veni :

Victor, fv,-.
qiid de (-a-
4. Nous ne savons autre chose de Victor, ^
mittei'e in terrain. On trouve ensuite vingt-
nïL
""' sinon • qu'il était évêqne de Capouc, et qu'il trois fragments de Diodore de Tarse sur
composa un Cycle pascal, dans lequel il pré- l'Exode, des scholies extraits de différents
tendait que Victorius s'était trompé, en mar- sermons de Sévérien de Cabales, un court
quant la fêle de Pâques de l'an 433, le 17 extrait du livre (/;/ Paradis ou des Paroles des
d'avril, au lieu qu'on devait la céb'brer le vieillards sur l'humilité de Joseph, et enfin un
23 du même mois. Le vénérable Bède -nous autre fragment' sans nom d'auteur.
a conservé quelques fragments du Cycle de Dom Pitra donne ensuite des extraits du
Victor. Cet écrivain ayant trouvé par hasard livre de Victor de Capoue, intitulé : Liber
une Harmonie des évangiles, douta d'abord reticvlus seu de uvca Noe. C'est un ouvrage
si elle était de Tatien ou d'Ammonius; mais tout à fait nouveau, dont le nom même était
il se déclara pour ce dernier, sur des raisons inconnu et ditUcile à comprendre. Ces frag-
qui n'étaient point solides '. Trouvant quel- ments sont suivis d'une Chaîne sur les quatre
que embarras dans cette Harmonie, Victor y évangélistes le savant bénédictin pense ce-
;

ajouta certaines mar(jues pour distinguer ce pendant que cette Chaîne est plutôt de Jean,
qui appartient à chaque évangile et ce qui , diacre, que de Victor de Capoue. Les Capi-
est dit par un ou par plusieurs. C'est ce qu'il tules sur la résurrection ont été cités par Jean,
explique lui-même dans la préface qu'il a diacre, et par l'abbé Smaragde. On en trou-
mise à la tète de cette Harmonie, que l'on a ve un extrait dans le Spicilége, pag. 34 de
imprimée dans le tome II de la Bibliottièqae la Préface. Le diacre Jean rapporte un frag-
des Pères à Lyon en 1677 [et dans la Palro- ment assez long sur le cycle pascal, com-
logie latine, tome LXVIll.] On attribue à Vic- posé par Victor de Capoue; on le trouve
torde Capoue la traduction de quelques pas- pag. 290 et suiv. du Spicilége.]
sages de l'Épître de saint Polycarpe, qui se

' Sigeb. De Viris illust., cap. xx. ' Voyez tom. Il, pag. 492.
' Beda, De Rat. temp., cap. xux, et tom. 11 De * Beda vener. De Rat. temp., cap. xlix. (L'édi-
jEquinoct. vernali. teur.)

XI. 20
306 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.

CHAPITRE XXVIl.

Saiut Fortunat [avant l'an 576], Easèbe évêque d'Antibes [avant l'an 573],

saint Germain évêqne de Paris [576] , Mérérius évêqne

d'Angonlême [vers l'an 570].

[ÉcrivainB latins.l

SainI Fnt-
luual, É\^ue.
i. On donne communément le titre d'évê- dans les Gaules. Ces omissions sont plus
qiie 'A 'saint quoiqu'on ne sache
Fortunat ,
d'un étranger, qui ne savait les choses qu'à
ni le lieu* ni le temps de son épiscopat. Il demi, que d'un homme qui avait demeuré
était né à Verceil, d'où il passa en France,
' longtemps ;\ Poitiers, et qui en avait été fait

où il lia amitié avec saint Germain, évêque évêque, comme nous le dirons de Venance
de Paris. On le fait auteur de la Vie de saint Fortunat. A l'égard du second livre, qui n'a
Marcel, évêque de cette ville ; d'autres la aucune liaison avec le pi-emier, il est de Ve-
croient de Fortunat, évêque de Poitiers : nance Fortunat, qui le composa vraisembla-
rien l.'i-dessus de bien assuré. Saint Gré- blement pour suppléer ce qui manquait ft

goire de Tours la cite' sans en nommer l'au- dans le premier celui-ci est dédié à Pas-
:

teur, au lieu ({n'en parlant de celles de saint cencc, évêque de Poitiers, en 557, à la priè-
Séverin de Bordeaux, de saint Aubin d'An- re de qui il avait été composé. C'est au mê-
gers, de saint Maurille et de saint Germain me évêque que Venance Fortunat adressa le
de Paris, il en fait ' honneur h Fortunat de second livre. On les trouve l'un et l'autre
Poitiers. Saint Grégoire ne croyait donc pas dans la nouvelle édition do saint Hilaire.
que la Vie de saint Marcel fût de p-ortunat dans Surius et dans Bollandiis, au 3 janvier
de Poitiers; aussi le style n'en est pas le [et dans le tome LXXXVIII de la Patrologie

même que des autres vies dont nous ve- latine, col. -437, d'apI^s l'édition des œuvres
nons (le palier. Jean Muuérat, dans ses notes de saint Hilaire. publiée Paris, en 1603.] ;^

sur le Martyrologe d'Usuard qu'il donna en 2. Bollandus nousa donné au 22 du même eo^^i.jm.

l-iao, marque qu'il passait pour constant, mois, l'iiistoire de la translation des corps î^'itriÛ.

de son temps, qu'elle était de Fortunat, né des saints Vincent, Oronce et Victor, mar- Boiunj., u
A Verceil. Il la composa aux instances de tyrisés ii Gironne, en Espagne, dans la pcr- oir'pii.sM',

saint Germain, évoque de Paris, à qui il la sécution de Dioclétien. Cette histoire poile
dédia. Les miracles en occupent la plus le nom d'Eusèbe, qui se dit successeur d'E-

grande partie, et les faits qu'il y raconte ne lhi''riiis, évêqne d'Anticias ou Anlimia. Dom

sont fondes que sur ce qu'il en avait appris MabiUon ' croit <[ue c'est Antibes, et son
par tradition. On la trouve dans Surius au opinion parait d'autant mieux appuyée que
1" de novembre. La conformité du style l'on trouve un Élliérius, évêque d'Antibes,
lui a fait aussi premier ,livre
attriljuer le qui souscrivit au concile qui se tint à Or-
de la Vie de saint Ililuire, évoque de Poi- léans, en 5il , et que le mot .1 ntimid' a beau-
tiers. On en donne une autre raison assez coup ]>liis de rapport rt Antibes qu'à toute
plausible , c'est l'inexactitude de l'auteur autre ville. Les copistes au lieu à'Antibicr,
dans le récit de plusieurs faits qui étaient ont pu mettre facilement ytn//'»n('ff?. Eusêbe
d'eux-mêmes dignes de remarque. Car on composa de celle translation sur ce
l'histoire
n'y dit rien du concile de Bcziers, de l'af- qu'il en avait appris par une traililion orale
faire de Saturnin d'Arles, ni de ce que saint qui s'était conservée depuis le temps de Mar-
Hilaire lit à Milan, après avoir rétabli la foi cellin, évêque d'Embrun, jusque vers le mi-

' Ueuanl.. in Martyr., pafs. .Tin ' r.rcB. Tiiron., iwg. 9:!2,I28I. "J77, 211.
' <;rcg. Tiinin., piig. 972. ' Mubil. lib. V Annal. Dened., pag. U2
,

[vi« SIÈCLE.] CnAPITRK XXVII. — S.\INT FORTUNAT, EUSEBE, ETC. 307

lien du vi" siècle : car Kusi'.'he ne vivait royaume de Cbildobert, il travailla an réta-
plus en 573, comme on le voit par le qua- blissenuMil de la discipline et des mœurs.
trième concile de Paris, auquel Optai, évo- En 559, il fit la dédicace ' de l'église de Sain-
que (r,\nlilics, souscrivit en celte anm-e. Ku- te-Cioix, <|U(! le roi avait fait bâtir, et lui ac-
sèbe ajoute ;\ l'Ifislnire de lu Irniislation des corda un irexcmption cette égli-
privilc'^ze :

murti/i-s, que dans un con-


s'élaul rencontré se est quelquefois appelée de Saiut-VincenI ;

cile avec un al)l)é espajrnol, qui était venu mais depuis la mort de saint Germain, elle
dans les Gaules pour l'utilité des Églises porta son nom, comme elle le porte encore
d'Espagne, il obtint de lui les Actes de leur aujourd'hui. Le saint donna pour abbé au
martyre qu'eu ayant trouvé le style trop
; monastère qui en dépendait, un religieux
grossier, il le retoucha pour le rendre plus de grande vertu nommé Dorothée qu'il
, ,

supportable. C'était sans doute leur ùter une avait eu pour disciple dans le temps qu'il
partie de leur mérite; mais Eusèbe ne pous- était lui-même abbé de Saint-Symphoricn
sait pas ses vues si loin il ne chercbaitqu'à : d'Autun. Au mois de novembre de l'an 566,
augmenter le culte de ces saints, en donnant il se trouva au second concile de Tours °, où

;\ leurs Actes \in meilleur air qu'ils n'avaient il souscrivit à la lettre que les évêques de

dans La pureté de ses intentions


l'original. cette assemblée écrivirent à sainte Rade-
paraît évidemment dans sa façon simple et gonde, en réponse de ceUe qu'ils en avaient
naturelle de raconter les cboses. La transla- reçue. Quelque temps après, le roi' Cher-
tion, dont il a fait l'histoire, n'est pas la pre- bert ayant, contre les règles de l'Église
mière il y en avait eu une autre longtemps
; épousé Marcovèse qui portait l'habit de re-
auparavant, d'Espagne à Embrun il en est : ligieuse, et ensuite Méroflède, sa sœur, du
parlé dans les Actes mêmes des martyrs ce ; vivant d'Ingoberge, sa femme, saint Ger-
qui fait voir que nous ne les avons pas tels main l'excommunia jusqu'à ce qu'il eût levé
qu'ils était'ut sortis du grefïe de Gironne. le scandale qu'il avait donné par cette al-

Ces Actes mettent la mort de Vincent, d'Û- liance illégitime. Il assista *, vers l'an 571, à
ronce et de Victor en la septième année de la dédicace de l'église de Saint-Vincent, du
l'empire de Dioclélien et de Maximien, c'est- Mans. En 573, il tint un concile ° h Paris,
;\-dire en 291,llulliu étant gouveincur d'Es- où avec les évêques qui y assistèrent, il cher-
pagne. cha les moyens de réconcilier les deux rois
SaiDi G«r- 3. La mort de saint Germain, évè(]ue de Chilpéric et Sigebert divisés par une guerre
tivl,^"^" Paris, arriva le 28 mai de l'an .576 il était : civile celui-ci ayant appelé à son secours
:

né dans '
d'Autun sur la tin du
le territoire les Barbares d'au delà du Rhin, saint Ger-
v° siècle, vers l'an 496; Agrippin qui en était main prévoyant les suites fâcheuses de l'en-
évéque, l'avait élevé au diaconat en 533, trée de ces troupes dans le royaume, écrivit
et trois ans après au sacerdoce. Il y avait à la reine Brunehaut, femme de Sigebert,
dans cette ville un monastère sous le nom pour l'engager à porter les deux rois à la
'".
de saint Symphoricn; Nectaire, successeur paix
d'Agrippin, eu donna le gouvernement à Il savait que cette princesse avait beau-
4. Leur, de
. , salai Germam
saint Germain. Ses vertus et ses miracles le coup de pouvou' sur lesprit de son mari, et àiareineB™.

rendirent bientôt célèbre il prédit la mort : que la haine qu'elle portait à Frédegonde,
au roi Théodebert, et ' elle arriva dans le femme de Chilpérii; avait grande part à ,

temps qu'il avait marqué. Le siège épisco- cette guerre un de ses ecclésiastiques,
:

pal de Paris étant venu à vaqpier, il fut choi- nommé Gondulphe, fut porteur de cette let-
si pour le remplir vers l'an ooo la piété du : tre. Saint Germain y décrit en des termes

clergé ' et du peuple de cette ville reprit un très-touchants les misères du royaume dé-
nouvel éclat sous son pontificat. Il tint, en chiré par les guerres et désolé partout, prin-
557, un concile *, où avec divers évéques du cipalement aux environs de Paris. 11 ne dis-

' Mabil., tom. I Act. Ordin. S. Bened., pag. 234. 1» On trouve au tome LXXII de la Palrologie la-
' Ibid., pag. 236. — » Fort. lib. Il, caij. x. — * tine ce qui uous Germain,
reste des écrits de saint
Tom. V Condi., pag. 818.— 'Mabil., lib. V Annal., avec une notice d'après la Gnllia christ., sa Vie
pag. 134-135. — 6 Tom. V Concii, p.ig. 863. — ' par Fortunat, et un appendice contenant diffé-
Greg. Turon., lib. IV Hisl., cap. xxvi. — * Mabil., rents monuments liturgiques tirés de Mabillon, de
lib. VI Annal., pag. 139. — » Tom. V Concii., pag. Muratori, de Martène. {L'éditeur.)
920.
308 HISTOIRE GÉXÉKALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
simule point à Brunebaut que le bruit était viendrez victorieux. » Sigebert méprisa des
général, que c'était par sou conseil et à ses avis si salutaires. Mais arrivé près de Douai,
instances que Sigebcrt faisait la truerre ;
qu'il il fut massacré [lar deu\ assassins envoyés
avait peine à se le persuader, la rejetant par Frédégonde, femme de Chilpéric. C'était
plutôt surl'énonnité des péchés des princes; en 575. Saint Germain * mourut le 28 mai
mais qu'il était de riionneur de la reine de de l'année suivante. Chilpéric qui s'occupait
'
détromper le public à cet égard, en portant ef- quelquefois de poésie, fit son épitaphe, où
ficacement le roi son mari à donnei' la paix à il relève son zèle pour le salut de son peu-
Chilpéric, son frère. Il insinue qu'il en avait ple, et l'amour que son peuple avait pour
parlé ou écrit à l'un et à l'autre, sans avoir lui. 11 parle aussi des miracles qui se fai-
pu réussir à les réconcilier, parce qu'ils saient à son tombeau, où les aveugles re-
s'excusaient tous deux d'être la cause de couvraient vue, et les muets la parole.
la

o. 11 est dit ' au commencement d'une


LUi.r£i« de
ces divisions, il veut donc que ce soit à g Germl n.

elle que l'on ait obligation de la paix et ; expHcation de la liturgie, donnée en 1717
pour l'engajçrcr à la procurer il lui repré- , par dom Martènc', que saint Germain, évc-
sente d'inicôlé combien elle y est intéres- que de Paris, avait écrit sur cette matière.
sée pour elle-même et pour ses enfants, une Tout concourt à nous persuader que celte ex-
guerre de longue durée ne pouvant qu'être plication même est de ce saint évêque 1° h :

funeste à l'Klat et ii ceiLx qui eu sont les quelle fin aurait-on remarqué dès la premiè-
maîtres et de l'autre, coml)ien est bonteusc
; re ligne de cet écrit que saint Germaui a
la victoire sur un fi-ère, puisqu'elle est né- traité de la liturgie, s'il n'était pas de lui, ou
cessairement suivie de la ruine de leur pro- si ce n'était pas un abrégé d'un plus long
pre maison et de l'héritage que leurs parents tiaité (ju'il avait fait sur ce sujet ? Il est assez
leur ont laissé, au lieu de les conserver ;\ ordinaire aux écrivains qui écrivent sur une
leurs enfants, il lui remet devant les yeux matière, de remarquer que d'autres l'ont
que Gain pour avoir tué son frère Abel, en déjà fait avant eux; mais ils font du moins
futpuni sévèrement de Dieu que les fières ; connaître qu'ils entreprennent quoique chose
de Joseph, pour lavoir vendu par jalousie, de nouveau : on ne dit ici rien de sembla-
devinrent comme ses esclaves
qu'Absalon ; ble. On marque simplement que saint Ger-
fut mis à mort pour avoir tué son frère, et main a écrit sur la liturgie, comme si l'on
tenté d'ôter le royaume à David son père. 11 voulait dire que l'explication suivante est de
la conjure par l'exemple de la reine Esther lui. 2° Dom Martène l'a trouvée dans le
de s'employer au salut du peuple, afin de monastère de Saint-Syinphorieu d'Aulun,
mériter, comme elle, l'honneur de l'avoir ovi saint Germain avait été établi ablx- par
sauvé, et de réponcUc de façon ù sa lettre, Nectaire, évêque de cette ville il était na- :

qu'il ait tout lieu de s'en ri^jouir. Le saint évo- turel que l'on eût plus de vénération pour
que avait chargé GondiUphe de dire quel- les écrits de saint Germain dans ce moîi.ns^-
ques autres choses à la reine, mais toutes ses tère que dans d'autres, et qu'on les y con-
démarches furent inutiles : Sigebert ne vou- servât avec plus de soin. 3° Cette ex[ilica-
lut rien écouter. Il vint à Paris avec sa fem- tion est très-ancienne, et au plus taid du mi-
me et ses enfants; mais comme
il était près lieu du VI' siècle, puisqu'on y voit encore les
d'en partir pour aller assiéger Chilpéric dans prièics que le diacre récitait sur les caté-
Tournay, et le faiie mourir avec toute sa fa- chumènes avant de de l'Église
les faire sortir
mille, saint Germain,;'» qui ne cacha point il avec les infidèles usage qui ne subsistait
;

son dessein, lui dit « Seigneur ', Dieu est un


:
plus dans les églises de France au vir siè-
grand maître, qui ne peut approuver ces cle, puisqu'alors il n'y avait plus d'infidèles
haines et ces vengeances; et si outre la vic- dans cet i;tat. i" Elle a été composée dans
toire vous cherchez à répandre le sang de un temps où la liturgie gallicane n'avait pas
votre frèie, vous devez appréhender la colère encore fait place à la fiturgie romaine ce :

du Tout-Puissant. Si au contraire, vous épar- qui arriva sur la fin du vin* siècle , lors-
gnez la vie de votre frère, vous vivrez et re- que Gharlcmagne. à la persuasion du pape

' ViU Radeg. et Greg. Turon., lib. IV, twg. J9t ' Ap>i(l Aimoiniini, lili. III, rn\i. ivi.
*l 575. ' Germanus episcopus Parisiiis scripsit de MiS'
• Mabil., lit', VI Atinal., p.i^-. 108. sa. .Martel)., loin. V Anecd., pag. 91.
J

[VI" SIÈCLE. CHAFITIIE XXVU. — SAINT FORTUNAT, EUSfOltl':, RTH. 300

Adrien, fit ce cli.iiic;cment dans les c^gliscs res des sept dons du Saint-Esprit. Aussiifll

de son niyaume. fi" La durotiWlu slyle et les (pu! l'on voyait pai'aître le livre du saird
tei'nies Ijarbarcs dont elle csl ceniposéo, sont Evangile, le clerg('' chantait à voix claire le

encore une preuve de son antiquité. 7'risii(/i(in : puis U^ diacre, montant sur l'am-
Anil;>o do (î. Elle est divisëe en deux parties dimt , bon (pu était un lieu élevé au-dessus du
co'lo liirçic.
limi.
I

V Anof. la première regarde la cu'li'liralion de la chd'ur, lisait riivangilc. Aux prennères pa-
P«g* 91 cl léq. messe on la commenrait pai- une anticii-
: roles le chdMir répondait: Gloria tibi. Domi-
ue, que nous appelons Inlruït. Pendant que ne, pour imiter les anges, qui à la naissance
le chœur la chantail, le célébrant représen- du Sauveur chantèrent en présence des pas-
tant la personne de Ji-sus-Cluist sortait de , teurs Gloria in exeehis Deo. La lecture do
:

la sacristie et montait à l'autel, où, après ri%vangile finie, pendant que le diacre re-
que le diacre avait fait faire silence , il lisait portait le livre de l'Evangile le chœur ré- ,

la profaceau peuple pour l'avertir de se pétait le Trisaijion non en grec comme la , ,

lu'éparer en se puriliant de toute mauvaise


, première fois, mais en latin Sanctus, :

pensée, ;\ écouter la parole de Dieu, et à 7. Alors l'évêque, lorsqu'il avait le don sunodoia
'"^'
célébrer dignement la solennité du jour. de la parole, faisait un discours au peuple ox"^"'

Ensuite il saluait le peuple en disant Que : pour lui expliquer ce qu'on avait lu soit de ,

le Seigneur soit lot/jours avee vous ; à quoi on l'Ancien soit du Nouveau Testament. S'il
,

répondait L't avec votre esprit, afin que le


: n'avait point la facilité de parler, il chargeait
célébrant fut d'autant plus digne de bénir de cette fonction quelqu'autrc personne ha-
le peuple, qu'il recevait lui-même la béné- bile ou il faisait lire par les prêtres ou par
,

diction de tout le peuple. Suivait une courte les diacres quelques homélies des saints Pè-
prière que l'on disait en grec et en latin res. Mais il devait tellement mesurer ses dis-
pour marquer l'union des deux ïestamenls : cours qu'ils fussent à la portée des plus
,

que l'on répétait trois fois


c'était le Sanctus, : grossiers, et qu'ils ne déplussent point aux
l'évcque commençait, le cbieur poursuivait. plus éclairés. Les catéchumènes, les juifs,
Après quoi trois enfants chantaient ensem- les hérétiques et les païens qui désiraient
ble Kyrie eleison, comme pour désigner les
: de s'instruirepouvaient assister à ces dis-
trois âges du monde, avant la loi, sous la cours. Les diacres récitaient sur les caté-
sous la grâce. L'on ajoutait le canti-
loi, et chumènes accoutumées, suivant
les prièi'es
que de Zacharie Dvnedictus Doininus Deus
: l'ancien de l'Eglise, pendant lesquelles
rit

Israël , qui se chantait à deux clneurs. Le l'évêque demeurait prosterné devant l'autel.
lecteur lisait ensuite les prophéties et pour, Le prêtre une collecte puis
disait ensuite :

en marquer l'accomplissement il lisait les , les diacres ou les portiers faisaient soi'tir de
endroits des Épltres de saint Paul qui y l'église tous ceux qui n'ayant pas encore ,

avaient du rapport, afin que l'on vit que c'é- reçu le baptême, n'étaient pas initiés aux
tait le même Dieu qui avait parlé dans les mystères. Ils étaient aussi chargés de veiller
pi-ophètes et dans son apôtre. Au temps pas- qu'aucun de ceux qui n'étaient pas dignes
cal on lisait les Actes des apôtres, l'Apoca- de participer au corps et au sang de Jésus-
lypse, et les Actes des martyrs aux jours de Christ, ne restilt dans l'église, lorsqu'on le
leurs fêtes c'était un motif à ceux qui les
: consacrait. Pour s'y préparer dignement,
entendaient lire de louer Dieu de la cons- tous les assistants demeuraient dans un pro-
tance qu'il avait accordée k ces saints dans fond silence formant sur leur visage le si-
,

leurs soutfrauces. Ces leçons finies des en- , gne de la croix, afin que les mauvais désirs
fants chantaient le cantique des trois jeunes n'entrassent point par leurs yeux la colère ,

hébreux dans la fournaise il parait qu'ils ; par leurs oredles et qu'il ne sortit de leur
,

le chantaient par manière de répons la rai- ; bouche aucun mauvais discours. C'était un
son d'en charger des enfants était d'imiter ancien usage de ne point célébrer la messe
ce qui se passa à l'entrée triomphante du solennelle que l'on ne mît sur l'aiïtel la
,

Sauveur à Jérusalem, où des enfants chan- sainte Eucharistie consacrée dès le jour pré-
taient Hosanna, fils de David. Le diacre
: cédent. Tout le peuple étant prosterné , un
venait après cela précédé de sept porte- diacre apportait le corps du Seigneur '
dans
chandeliers avec leurs cierges allumés, Qgu- un vase en forme de tour, et c'était la figure

> Corpus vero Doinini iden deferlur in turribus quia monumenlum Domini in simililudinem tur-
,

310 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


que l'on donnait ordinairement ces sortes .'i cœur vers Dieu, et pendant qu'il la rompait
de vases, parce qu'on était persuadé que le et la mêlait, le chœur chantait une antienne,

tombeau dans lequel le corps de Jésus-Christ comme il avait fait lors de l'oblation. L'au-
fut mis après sa passion était creusé en for- teur remarque moment de la frac-
* qu'au
me de tour. « On consacrait aussi son sang tion de quelques anciens Pères
l'hostie
daus un calice, parce que le Sauveur l'avait avaient vu comme un ange de Dieu qui avec
consacré lui-même dans un calice la veille un couteau coupait les membres d'un en-
de sa passion, en disant \'oici le calice de : fant resplendissant de gloire, et qu'il rece-
mon sang, le mystère de la foi, gui sera rcj/an- vait son sang dans un calice, Dieu leur ayant
du jMur plusieurs pour la rémission des péchés : accordé ce prodige afin qu'ils assurassent
,

car le pain est transformé en sou corps , et avec plus de fermeté que la parole du Sei-
le vin en son sang , selon qu'il le dit lui- gneur était vraie, lorsqu'il disait que sa chair
même Ma : chair esC véritablement viande, et était une nourriture et son sang un breu-,

mon sang est véritablement un breuvage. Il a dit vage. La confraction était suivie de l'Orai-
du pain C'est 7non corps ; et du vin C'est
: : son dominicale et de la bénédiction que
,

mon sang. Or on mélc l'eau avec le vin ,


révoque donnait au peuple, cet honneur lui
ou pour moûlrer l'union du peuple avec le étant réservé par les canous cette bénédic- :

Seigneur, ou parce que l'eau sortit avec le tion était longue, parce qu'elle était compo-
sang du côté de Jésus -Christ. » L'Euch.'t- sée de trois oraisons, an lieu que les sim-
ristie se consacrait sur une palene sous , ples prêtres n'en récitaient (ju'unc, lorsqu'ils
laquelle était un corporal de toile de lin bénissaient. Elle consistait dans ces termes :

qui posait sur une nappe aussi de lin : Que la foi et la charité, et la communication du
tout cela en imitation des linceuls dans les- corps et du sang de Jésus-Chrit soient toujours
quels on avait enveloppé le corps du Sau- avec vous. Ou distribuait après cela TEucha-
veur dans le tombeau. La tour qui renfer- rislie au peuple. Pendant ce temps-là le

mait l'Eucharistie était couverte ' d'étoile chœur chantait le SjTnbole pour exprimer ,

de soie et ornée d'or et de pierreries à


, , sa foi sur la Trinité le Symbole est désigné
:

l'exemple des voiles qui couvraient le taber- ici ' sous le terme de Trecanum ; c'était ce-

nacle. Après la consécration on chantait lui des apôtres. Dans le Missel des Mosara-

trois fois Alléluia, pour marquer comme


: , bes il est dit qu'on le récitera avant la com-
on l'a déjà dit du Ayrie eleison, les trois âges munion : la liturgie gallicane le met après ;

du monde. On récitait ensuite les diptyques, on lui a substitué depuis le symbole de Cons-
c'est-à-dire les noms des fidèles défunts; tantiuople. L'.Vuteur cite la lettre de saint
'

puis pour marque d'une mutuelle charité on Jude, apôtre. Il remarque que ' saint Mat-
se donnait le baiser de paix. Le célébrant thieu fut le premier qui écrivit l'Évangile de
avant de rompre et de mêler la sainte Eu- Jésus-Christ, et qu'il l'écrivit eu Judée et en
charistie avertissait le peuple d'élever le hébreu; que les autres livres du Nouveau

ris fuit scissum in pelra, et intus leclum ubipau- mysteria in Chrisli prœcesserunt stigniaïa. Ibid.
savit corpus dominicum, unde surrexit nx glo- »Confractio vero et commixtio corporis Dnmi-
riœ in iriumphum ; sanguis vero Chrisli ideo spe- ni Inntis mysteriis declnrala anliquitus sanctis
cialiler offertur in calice, quia in taie vasum Patribus fuit, ul dum sacerdos oldalioncin con-
consecratum fuit mysterium Eticharistiie pridie frangercl, vidcbalur quasi angélus Dei membra
quain paterelur Duniinus, ipso dicente : Ilic est fxtigenlis pueri cuUro concœderr ; et sanguiucm
calix saiiguiuis me\, mysleriuin fidei qui prn iiiul- rjus in calicem excipiendo colligire, ut i-cracius
tis effuiidetur in rL-missiouern peccatonini. l'unis direrent vcrhum, dicente Domino carnem eju.'^ esse
vero in corpore, et vinum transformalur in san- cibum et sanguiucm esse polum. Ibid., pag. 9G.
guine, dicente Domino de corpore suo: Caro cniiu ' Trecanum vero quod psalletur, signum est cc^

mea vere est oibus, et sanguis iiicus vere est po- Iholicœ fidei de Trinitalis credulilale procedcre.
tus. De pane dixil : Hoc est corpus uieum et de ; Iliid.

vino Ilic sanpuis meus. Aqua aulrm ideo misctur,


:
' Quod lestimonium Judas apostolus frater Ja-
vel quia decet populo unilum esse cum Domino, cobu, in Kiiislola suacommémorai. Ibid., pni:. 91.

vel quia de lalere Chrisli incruce sanguin muno- ' Aius vero antc pruphelia pro hoc canlatur in
vit ri aqua. .Marten., loin.V Ànecd., pap. 9.'). gru'ca lingua. quin pru'dicalio iVori Teslamenli
' Scrico auleui ornalur, aut anro,vclgemmis, in munao per qroca lingua processif, excepta
uia Doniinus Huisie in titbtrnaculo fieri vela- yiiillliirn apostiilo, qui prinius in Judirn lîvange-

mina ju.ssit ex aura, iarinto, et purpura corro- liuni CUrisli lichrais litleris edidil. Ibid,
que bis linclo et, bysso relorta : quia omnia illa
[\T SIÈCLE.] CHAPITllE XXVIl. — SAINT FORTUNAT, EUSfïIRE, ETC. 3i<
Testament ont ëté écrits en grec , et que d(^ lapureté intérieure ils mettaient par"
:

c'est en cette langue que l'évangile a été dessus une étolc. L'évèque et les prêtres
ainionci^ dans tout le monde. portaient une chasuble vA un manipule ils :

s.ii'-dM. Hans la seconde partie, saint Germain


8_ ceignaient leurs aubes avec un cordon blanc;
"• donne l'explication et l'origine dos antien- mais les diacresne ceignaient pas la Peur,
nes, des répons et des cantiques cpie l'on ré- la laissant suspendue et flottante.
citait aux Ollices de l'iîlglise. 11 y traite aussi 0. Forlunat' fait mention d'une lettre de un,c d«

des ornements à l'usage des ministres et des saint Germain â Flamir, abbé de Chinon, en i-inM^'abw
rits usités dans l'administration des sacre- Touraine mais il ne nous apprend point ce
;

ments. L'anlicnnc est ainsi appelée , dit-il, qu'elle contenait il dit seulement que Dieu
:

parce qu'on la dit avant le psaume qu'elle an- s'en servit pour opérer un miracle.
nonce|: c'est pourcpioil'anticnnc était ordinai- 10. On met encore au rang des écrits de Prwutom
rement un verset tiré du psaume mêmeon ; cet eveque le l'nvuégc qu u accorda au mo- irH^^^ "•«^"J»
le terminait toujours par la glorification de nastère qui porte aujourd'hui son nom dans "'"i"-

la Sainte -Trinité. Le répons tire son origine un des faubourgs de Paris. Ce Privilège '
du cantique que Marie, sœur de Moïse, clian- est cité par Gillemar, écrivain du xi" siècle,
ta après le passage de la mer Rouge Mario : et rapporté tout entier par le moine Aimoïn:
commençait et le peuple répondait. Le Sanc- on en conserve même l'original dans l'ab-
tiispu le Trisagion se chantait en tout temps ;
baye de Saint-Germain, où il est écrit sur
mais en Carême on ne chantait point les l'écorce, et souscrit de saint Gei'main de ,

cantiques Benedictus, et Bencdicite omnia


: : saint Nicée ou Nizier, de la reine Ultrogotte,
opéra Domini, ni \' Alléluia; et le baptistaire des deux princesses ses filles et de plusieurs
demeurait fermé. Il entrait du baume dans évêques. Il porte que ce monastère sera
la consécration du saint chrome, c'était une exempt de toute autre juridiction que de
espèce de résine qui coulait d'un arbre nom- celle du roi, et qu'il aura la liberté de choi-
mé de son écorce
lentisque par l'incision : sir son abbé. M. de Launoy en a contesté

on croyait que de ce bois que l'on


c'était l'authenticité. Mais M. de Valois en a pris la
avait formé la partie de la croix où les mains défense ', et a montré que le roi Childebert,
du Sauveur furent attachées avec des clous. qui avait obtenu un privilège à peu près
On oignait du chrême les catéchumènes et semblable du pape Vigile, pour un monas-
ceux que l'on baptisait ceux-ci dans leur : tère qu'il avait bâti à Arles et pour un hô- ,

baptême étaient vêtus de blanc. Avant de pital qu'il avait fondé à Lyon, pouvait bien
leur administrer, et alors qu'ils étaient au s'être employé pour procurer encore de plus
rang des compétents, on leur faisait appren- grands privilèges à l'abbaye de Saint-Vin-
dre le Symbole. C'était l'usage de couvrir de cent, aujourd'hui Saint-Germain, bâtie dans
rouge le livre des Évangiles, comme fignrc du sa ville capitale et auprès de son Palais.
sang de Jésus-Christ. Dès le milieu de la nuit Dom Robert Quatremaires a aussi répondu
de Pâques, on reprenait tous les cantiques de aux raisons de M. de Launoy avec tant de
joie que l'on avait supprimés pendant le Ca- solidité, que * dom Mabillon s'est cru dispen-
rême, et tout le peuple tîdèlc mangeait l'a- sé de traiter de nouveau cette matière, qu'il
gneau, c'est-à-dire la chair et le sang de Jé- croit hors d'atteinte.
sus-Christ. Il semble que pendant le temps H. Il est parlé clans saint Grégoire* de uc,(w\«!,

pascal, le voile qui couvrait la tour où l'on Tours et dans Fortunat, de Mérérius, évê- ' '
po^isme
écrits
:
spt
soal

réservait l'Eucharistie était chargé de son- que d'Angoulême, mais il n'y est rien dit de !«'''"'•

nettes, comme autrefois la tunique du grand- ses écrits. Si l'on en croit un évrivain" du
prètie. L'évèque ne se servait que d'habits XII' siècle, cet évéque joignait à une grande

blancs dans l'administration du baptême et éloquence beaucoup de savoir et il avait ;

dans la solennité de Pâques. Le pallium ou même composé divers ouvrages qu'on disait
rational enveloppait son cou et descendait se trouver alors dans la Bibliot/ièque de
sur sa poitrine. Les aubes à l'usage des dia- Cluny c'est tout ce que nous eu savons.
:

cres devaient aussi être blanches, en signe On met la mort de Mérérius vers l'an 570.
» MabH., tom. I Act. Ordin. S. Bened., pag. 2i2. ' Mabil., lib. V Annal., pag. 137.
' Mabil., Annal. Bened., pap. 137. Aimon., lih. III, ' Greg. Tiuon., lib. V, pag. 37. Fort. fib. III, cap.
cap, u. IV.

' Yales., Discept. de basil., pag. 33. 6 Labb., tom. il Nov. biblioth., pag. 260,
312 HISTOIllE GÉNl'^RALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.

CHAPITRE XXVHl.

Saint Ferréol évêque d'Uzès, saint Domnole évêque dn Mans [576],

saint Félix évêqne de Nantes L582J, Chilpéric roi

de France.

[Écrivains latins.]

lértl.
Saint F«r.
é»*Tu»t l.La Règle que saint Ferrt^ol composa pour mande est l'obéissance, qu'il appelle le fon- i> bw. «,
dTii<.
1*1*0 une
t......
r*. le monastère d'hommes qu'il établit à Uzès, dément de toutes les autres. Ensuite il leur C'.d. rgai'.,"

pie des
moine:.
tiour
est le seul motif de lui donner rang parmi ordonne un grand respect pour l'abbé, vou-
les écrivains ecclésiastiques. Après avoir été lant qu'ils l'aiment comme leur père , et
élevé en cette ville, sous les yeux deRurice, qu'ils le craignent comme leur maître. A c»,-.. i-ti.

son grand oncle, qui en était évêque, il fut l'égard de la charité mutuelle, il dit qu'ils

choisi lui-même pour remplir ce siège épis- doivent dans leurs paroles,
la faire piiraitre

copal, vacant par la mort de saint Firmin, comme dans ; que leur cœur
leurs actions
arrivée en 333. Il trouva beaucoup de Juifs doit être exempt de haine et de ressentiment

dans son diocèse. Dans la vue de les ins- et qu'il n'en paraisse aucune marque au

truire, il mangeait quelquefois avec eux, et dehors. Il n'était permis à aucune personne
leur faisait des présents. Ses ennemis tour- du sexe d'entrer dans le monastère, ni aux
nant eu mal sa conduite, le rendirent sus- religieux de leur parler, sans la permissiou
pect au roi Chihlebert qui, sans approfomlir de l'abbé, et en présence de deux des frères.
la chose, lomanda ù Paris, où il leretintpen- Celui qui se présentait pour être reçu dans le
daut trois ans. Convaincu enfin de son inno- monastère était un an, ou du moins six mois
cence, il le renvoya k son Eglise, chargé de aux épreuves, avant d'être admis dans la
préseuls. Quelque temps après son retour, communauté. On lui lisait la R'-gle, afin qu'il

le saint évêque fit construire à Uzès un mo- connut engagements qu'il


(jueis étaient les

nastère d'hommes sous l'invocation de saint aucun


voulait contracter. Mais on n'admettait
Ferréol, martyr. Il y avait déjà en Occident esclave, ni aucun moine d'un autre monas-
plusieurs règles monastiques, comme celles tère, sans la permission de son abbé; ni un

de saint Gésaire, de saint Benoit, de saint clerc sans l'agrément de son évêque. C'était ji-m.

Aurélien. Il en prit diverses pratiques, et en une obligation à un moine de savoir lire et


ajouta de particulières pour son monastère ;
d'apprendre le Psautier par cœur, fût-il des-
formant du tout une Rèçile qui porte le nom tiné, comme il était ' alors d'usage, à garder
de saint Ferréol ; elle est citée par saint Gré- les troupeaux. Ouli'e la psalmodie publique
goire de Tours', par saint Benoit d'Agnane qui se faisait en commun, chacun oUïait à
et par l'abbé Trithôme. Saint Ferréol, avant Dieu des prières des louanges en parti-
et
de la rendre publique, la soumit à la cen- culier. Ou n'exemptait personne des veilles

sure de Lucrèce, évoque de Die, à qui il l'a- de la nuit, si ce n'était en cas d'infirmité ou
dressa. 11 marque dans la Préface, qu'il avait de nécessité. Us avaient tous des vêtements
Lâti ce monastère dans la confiance que eu sullisance aucun de superllu. Il était d'u-
:

les serviteurs de Dieu, à qui il donne ordi- sage dans plusieurs monastères ', tant en
nairement le nom de religieux, lui obtien- Orient (]u'en Occident, d'y instruire des ca-
draient par leurs prières la rémission de ses téchumènes, et de les baptiser saint Ferréol :

péchés. le retranche dans le sien, cl ne veut pas


Aoiij.c do 2. La première vertu qu'il leur recom- même que ses moines servent de parrains

' Greg. Tiiron., lib. VI tlisl., cap. vu. Boiindict. ' M.iliil., lili. V Àniinl., piig. 130.
Aniaii., in Conc. reg., img. 9C. : Trillifiii. lili. De ' .M.ibil. Ubi supra.
Proyr., monuch., cap. v.
[vi« SIÈCLE.] CIIAIMTliE X.WIII. — SAINT FEURKOL, ÉVÈQUli, KTC. :J13

(l.iiis le baptême, pour leur ôler toutes sortes tre plusieurs édifices de.piél(; ipi'il lit cons-
de liaisons avec les parents de l'enfant. truire pendant son épiscopat, on met l'ab-
L'abbé seul avait une cluunbrc séparée. Aux baye de Saint-Vincent, où il l'ut eutcrn- après
jours des l'êtes diîs martyrs on lisait leurs sa mort qui arriva le 1" dcc(!iubre ."iSl. Il
'"r- ^' M. .Votes. Les reliiïieux, soit au dehors, soit au eut part à la lettre que le concile de Tours
dedans du monastère, ne pouvaient se dis- écrivit " à sainte Iladegondc en confirma-
penser de va([uer à la lecture des livres tion du monastère qu'elle avait fondé à Poi-
saints. Ils avaient aussi certainesheures pour tiers, et à une autre lettre circulaire à toute
le travail des mains. L'heure de la lecture la province de Tours, pour en exhorter les
^^vl- ('tait depuis le matin jusqu'à Tierce. Jusqu'à peuples à détourner par de bonnes œuvres
cette heure il n'était permis ni de boire ni les maux dont ils étaient menacés. On les
de manger. L'usage du linge sur la chair nue exhorte entr'autrcs choses à payer la dime '

était défendu; on ue permettait pas non [)ius de tous leurs biens, même des esclaves, ou
d'habits odoriférans, ni qui eussent de l'éclat à donner à l'évêque pour la rédemption des
s;i„. dans la couleur. Tout devait être dans la captifs, le tiers d'un so d'or pour chacun'. de
" '"xvMi. simplicité et la modestie. La /(Vy/Zc interdit la leurs enfants, au cas qu'ils n'eussent point
chasse aux moines, et à l'abbé le pouvoir de Les Bollandistes ont donné deux Bc,ii..ddi.ra
serfs.
lie mettre en liberté les esclaves du monas- Vies de saint Domnole; l'une écrite par un boeaMi.
„„.ii. 1ère. Il était obligéde servira la cuisine trois prêtre du Mans, contemporain du saint l'au- ;

l'ois de Pâques,
l'année, les jours de Xocl, tre est sans nom d'auteur : l'une et l'autre font
et de la fête du patron du monastère, c'est- mention du chef de saint Vincent, martyr,
à-dire, de saint Ferréol martyr, et de laver et d'une partie du gril de saint Laurent, don-
souvent les pieds aux frères et aux étran- nés par saint Domnole à l'église de l'abbaye
gers, à l'imilalion de Jésus-Christ, et pour de Saint-Vincent du Mans. La dernière Vie
,,v,x donner bon exemple aux religieux. Saint rappelle aussi le testament que le saint évo-
i'erréol prescrit diverses pénitences pour les que fit en faveur de la même abbaye il est :

fautes, et ordonne qu'au premier jour de adressé à tout le clergé de l'église du Mans,
chaque mois, on lise sa Règle en présence de et signé de trois évêques, saint Domnole, saint
toute la communauté. Saint Benoit d'Agnane Germain de Paris, et Andonéus d'Angers, de
l'a insérée dans son Code., et le père Le Cointe sept prêtres et cinq diacres; la date est de la
dans les .1 nnales ecclésiastiques de France. [Ou onzième année du règne de Chilpéric, c'est-

la trouve au tome LXV de la Palrulogie la- à-dire de l'an 372. A cetestameutsaint Dom-
tine.] Il parait par saint Grégoire de Tours '
nole joignit un codicille rapporté par dom
que saint Ferréol avait fait un recueil de ses Mabillou parmi les Actes des évoques du Mans. ^^f'^''\'^^^-_

lettres à l'exemple de saint Sidoine : il n'en On trouve le testament dans BoUandus au i


j- <"» «'

est venu aucune jusqu'à nous. 11 faut, ce 16 de mai, et dausle Supplément des conciles
semble, le distinguer du prêtre Ferréol, dont de France par M. La Lande. [Tous les écrits
on trouve quelques sentences dans un livre qui nous restent de Domnole se trouvent au
iutitulé : De Officio rectoris Ecclesiœ, imprimé tome LXXIl de Va Palrologie latine, col. 629.]

à Cologne en 1531. de saint Féhx, évêque


4. Fortunat'' a fait ^
SimtF«iu,

accompli. Illustre par ^^


FMni Dom. 3. Nous Domnole par
couuaissons saint de Nantes, un éloge ^^'^^'jy-

r'MaMtTct les Actes du second concile de Tours, où il sa naissance, il l'était encore plus par ses
.d'avi/rô assista en5G7, en qualité d'évèque du Mans. vertus, par son éloquence et par son savoir.
11 avait cte auparavant abbe de baïut-Lau- 11 possédait si bien la langue grecque, qu'on

rent', à Paris. Mais Clotaire l'eu tira pour le eût dit qu'elle lui était naturelle. Il était

mettre sur le siège épiscopal du Mans. En- poète et orateur, et avait, ce semble, fait'

' Greg. Turon., lib. VI Ilist., cap. vu. filios, per unumquemque singulos tremisses in
« Id., ibid:, c.np. IX. —
Tom. V Conciî., pag. 868.
' episcopi manu concédât, quod possit in captivo-
' Comriinnemus ut Àbrahœ documenta seclan- rum redemptionem conferri. Tom. V CunciL, pag.
tes, décimas in omni facultate non pigeât pro re- 868 et 869.
liquin quœ possidetis consenandis olferre... Hor- 5 Fort., lib. III, cap. iv-vni.
lamur ut umtsquisque de suis mancipiis décimas " Hoc quoque quod delectabiliter adjecistis : Me
persolvere non recusel... quod si mancipia non Dnmnœ mea> KLadigundas muro cliaritatis inclii-
sint, et fuerint aliqui habenles binos aut ternos sum ; scia quidem non ex mets meritis, sed ex ilUxts
,

314 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


en vers le panégyrique de sainte lladcgoude: ont enseignée après les apôtres, comme saint
w.inr»».
"
Grflff,
llb,
nous ne l'avons pas. Il est parlé de quelques- Hilaire et saint Eusèbe de Verceil ; croyez ce
unes de ses lettres dans saint Grégoire de que vous avez vous-même confessé au bap-
Tours, h qui elles paraissaient trop pleines tême. «Je sais bien, lui dit le roi en colère,
d'amertume : il en rejette lu faute sur ce que quTIilaire et Eusèbe sont mes plus grands
ce saint les avait écrites sans avoir été bien ennemis en cette matière. » Saint Grégoire
instruitdu sujet qu'il y traitait. Il y accusait lui représenta, qu'il devait craindre d'oll'en-
d'ambition le frère de saint Grégoire, nommé ser Dieu et ses saints, et ajouta « Ce n'est :

Pierre, qui était diacre ; et disait qu'il avait pas lePère qui s'est incarné, ni le Saint-
été tué en punition de ce qu'il avait lui- Esprit, mais le Fils c'est lui qui a soull'ert,
:

même un évêque pour parvenir h l'épis-


tué et non pas le Père ou le Saint-Esprit cette ;

copat. Ces lettres ne sont pas venues jusqu'à distinction de personnes ne s'entend pas cor-
nous. Saint Félix était marié lorsqu'il fut poiellement, comme vous pensez, mais spi-
choisi évéque de Nantes, vers l'an 541). Il rituellement. Chilpc'iic peu satisfait de l'é-
))

assista au troisième concile de Paris en 537; vêque de Tours, fit lire son écrit à Salvius
au second ^
Tours en 366 et au quatrième ; évêque d'Alby, qui en eut tant d'horreur, que
de Paris eu 573. On met sa mort en 382, et s'il avait pu atteindre au papier, il l'aurait

la trente - troisième de son épiscopat qui ,


d('chiié. La résistance de ces deux évèques RrocTuma.
* Iib. VI, cap.

était la soixante-dixième de son âge, étant arrêta le roi, et le fit changer de dessem. Ce '<">
né vers l'an 312. prince fit; aussi des hymnes à l'imitation de
cuiréric, 5. Je ne sais si l'on doit mettre au rang Sédulius, des Messes ou des Collectps, qui ne
•««triis. des ecrivams ecclésiastiques le roi Cliilpcne, furent point approuvées. Saint Grégoire qui
pour un fort mauvais traité qu'il composa avait vu le recueil de ces hymnes distribué
ii^'^'V"'""'
"^^' en deux livres, dit qu'il n'observait point
sur des matières de théologie, et qui a péri
avec son auteur. La vanité eut plus de part dans ses vers la quantité des syllabes, met-
dans cet écrit que le zèle de la religion. Le tant des longues pour des brèves, et des
dessein de ce prince était d'y établir certains brèves pour des longues. Nous avons vu plus
moyens de finir les difficultés agitées depuis haut qu'on lui attribuait l'épitaphe de saint
longtemps dans l'Église sur les mystères de Germain , évêque de Paris telle que le ,

la Trinité et de l'incariialion à cet etlet, il : moine Aimoïn l'a rajiportée. D'autres pré-
concerta un Édit, par lequel il ordonnait tendent qu'elle est de Fortunat,et quelques-
qu'à l'avenir l'on nommerait la Sainte-Trinité uns qu'elle n'est point si ancienne. La flu de
simplement Dieu, sans distinction de per- Cliilpéric fut funeste un soir au retour de
:

sonnes, disant qu'il était indigne de Dieu de la chasse, comme il descendait de cheval,
lui donner le nom de personne, dont on use s'appuyani de main sur l'épaule d'un de
la

en parlant des hommes. Il soutenait que le ses courtisans, un assassin le perça de deux
Père est le même que le Fils et le Saint- coups de poignard, dont il mourut à l'ins-
Esprit, et qu'au langage des prophètes, des tant, après avoir régné vingt-deux ans, de-
patriarches et de la loi, il n'y avait point de On dit de lui qu'il
puis l'an 362 jusqu'en 38'i. crrp. hu.
distinction entre le Père, le Fils et le Saint- n'avait jamais aimé personne sincèrement ;
Esprit. Avant de publier cet Ixlit, Cliilpéric qu'aussi il ne fut aimé de personne, ce qui
le montra à saint Grégoire de Tours, en lui parut bien à sa mort : car il serait demeuré
disant qu'il voulait que lui et tous les autres sans sépulture, Malulphe, évêque de Seu-
si

évéques de son royaume embrassassent cette ils, touché de compassion, ne lui eill rendu

croyance « Quittez-la, lui répondit le saint


: ce dernier devoir.
évoque, et suivez celle que les docteurs nous

consueludine, quam circa cwiclos novit itnpendirr, iiierui qnnd in fjns gralia jam percepi. Sfd qui
colligalis.el meu prrsona panegyricum
quantum in de me panw magna depingilis, quœro de magnis
poelice langitis, lantum in ejiis laudis hUloriam maxima prœdicelis. Ibid., caj). iv.
reiulistis. Tamen in veslris verbis illud relegere
,

[vi- SIÈCLE.] CHAPITRE XXIX. — SAINTE IIADEUONDE, HEINE, ETC. 315

CHAPITRE XXIX.

Sainte Radcgonde reine de France [587] et sainte Césario abbesse de

Saint-Jean d'Arles.

[ÉcrivaiDs latine.]

1. Hemiaufroy, roi de Turingo, ayant éié couvrit d'un voile. Saint Médard à la vue
dôfaiteii 531 par les rois Thierry ut Clolaire, d'une action si hi'roïque, assuré d'ailleurs
la ville de Turinge qui donnait le nom au du consentement de Clotaire, lui imposa les
royaume dont elle était la capitale, fut mise mains, et consacra diaconesse, quoiqu'elle
la

au pillage et réduite eu cendres, et les habi- n'eût pas encore l'âge requis par les canons.
tants furent menés en esclavage. Clolaire 2. Sainte Radegonde retira sur une
se Kllf Mlit
un monastire
dans ce pillage fît mettre en sûreté dans sa terre que le roi lui avait donnée en Poitou, à l'oiliers.

lente, une nièce d"Hermanfruy, tille de Ber- où elle commença à vivre d'une manière
lliaire qui avait été roi d'une partie de la beaucoup plus austère qu'elle n'avait fait jus-
Turinge, et mis à mort par Hermanfroy ' que-là, ne vivant que de pain de seigle et
*

dans la vue de s'emparer de tout le royau- d'orge, d'herbes et de légumes, et ne buvaut


me. Elle se nommait Iladegonde, et pouvait que de l'eau son lit était un cilice sur de la
;

alorsavoir douze ans. Clotaire la fit conduire cendre. Tous ses revenus étaient employés
en France, ' élever à Athies, maison royale, au soulagement des pauvres, qu'elle servait'
en Vermandois, et l'épousa quand elle fut de ses mains. Elle portait sur la chair une
en âge. Les délices de la cour n'atl'aiblirent chaîne qu'un saint prêtre nommé Julien lui
point sa piété. Elle redoubla ses jeiiues, ses avait donnée; en échange, elle lui faisait
aumônes, ses prières, ses austérités, portant elle-même des habits. Elle passa de sa terre
sous ses habits précieux le cilice pendant à Poitiers, où elle fonda et bâtit un monas-
tout le Carême ; ce qui ' faisait dire au roi tère par l'ordre' et les libéralités du roi :

qu'il épousé une religieuse plutôt


avait elley assembla une communauté de filles à
qu'une reine elle en avait en elTet la voca-
: qui elle donna une abbesse, de qui elle vou-
tion, et trouva le moyen de la suivre. Cette lut elle-même dépendre en tout. Sa princi-
princesse avait un frère qui avait été amené pale occupation, après la prière, était la lec-
avec elle en France : Clotaire Tayaut fait ture : elle lisait' les écrits des Pères grecs
tuer injustement dans le temps qu'il prenait comme ceux des Pères latins, tirant de ces
des mesures pour se retirer à la cour de sources de quoi instruire' les religieuses
Constantinople auprès d'un de ses parents du monastère, et éclairciv les difficultés qui
elle profita de cette occasion pour qsitter se rencontraient dans les lectures, qui se fai-
son mari, et vintàNoyon prier saint Médard saient en commun. Elle attira à Poitiers le
de lui couper les cheveux et de lui donner , fit son aumônier et
prêtre Fortunat', dont elle
l'habit de religieuse. Sur le refus qu'eu fit le son directeur. Cependant le roi Clotaire fei-
saint évêqiie, parce qu'elle était mariée, et gnit un voyage de dévotion à Saint-Martin de
que les grands de la cour s'y opposaient, Tours mais sou véritable dessein était d'al-
;

elle se coupa elle-même les cheveux et se ler à Poitiers, reprendre sainte Radegonde

' Greg. Turon. lib. III, cap. rv. • Greg. Turon., lib. IX, cap. XLil.
' Mabil., tom. I Àct. Ord. S. Bened., pag. 319. ' Fort., lih. VllI, cap. I.

' Ibid., pag. 320, et Greg. Turon., lib. III, cap. vu. 8 Tom. I Aclor., pag. 328.
' Greg. Turou., ibid. 9 Fortuu., lib. VIII, cap. l.

5 Tom. I Aclor., pag. 320.


,

316 HISTOIRE GÉNÉRALE DES ALTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


el la lamener à la cour. Sur l'avis' qu'elle les placerdans son monastère, au chant des
en eut, elle ccrivit à saint Germain, cvcque Psaumes avec les honneurs convenables.
et
de Paris, pour le prier d'en dissuader le roi L'évèque n'eut aucun égard à ses prières :
Le saint, ayant lu la lettre, se prosterna il monta à cheval et alla se promener à sa
aux pieds de Clotaire en plcui-ant devant , maison de campagne. La sainte, aflligée, se
le tombeau de saint Martin, et le conjura de pourvut auprès du roi Sigebert, qui chargea
la part de Dieu, de ne point aller à Poitiers. Euphrone, archevêque de Tours, de faire
Le roi se laissa llécbir; mais en même temps, cette cérémonie. 11 porta en l'absence de l'é-
il se prosterna lui-même aux pieds de saint vèque Mérouée, les reliques dans le monas-
Germain, le priant que Hadegonde obtint de tère avec un grand appareil de cierges, d'en-
Dieu le pardon de ce qu'il avait entrepris cens et de psalmodie. Ce fui à cette occasion
par mauvais conseil. Le saint évoque fit à que le prêtre Fortunat composa l'hymne que
cette occasion le voyage de Poitiers, et obtint nous chantons en l'honneur de la croix, et
sans peine de la reine ce que le roi soubai- qui commence par ces paroles : Vexilla ré-
tait. Ce fut sans doute en celte occasion gis prudcunt.
'

que saint-Germain bénit' Agnès que sainte Quelques mouvements que sainte Ra- mùu
0.
'

Hadegonde avait fait abbesse de son mo- degonde se donnât, elle ne put regagner les
nastère. bonnes grâces de l'évèque de Poitiers ce ;

f^J'"\l,"ô»"' 3- ^'ous n'avons plus la lettre qu'elle écri- qui lui fit prendre le parti de se mettre sous
Toureen566.
^jj ^^^^ évêques assemblés à Tours, en 566, la protection du roi. Elle crut aussi devoir n'.^Vx."!"!
pour leur demander la confirmation de ce chercher de la protection à son monastère .Momlvc...
monastère et de la discipline qu'elle y fiii- auprès de tous les évêques de France. C'est
.sail observer conformément à la /{èyle de pourquoi elle leur adressa son testament en
saint Césaire d'Arles mais la réponse du con-
; l'orme de lettre, dans laquelle elle les prie
cile est parvenue jusqu'à nous. Les évêques, avec larmes, au nom du Père, du Fils el
cl
après avoir loué son zèle, lui accordèreut du Saint-Esprit, d'employer tout leur pou-
toutes ses demandes
en ordonnant ' que , voir pour empêcher qu'après sa mort, les
toutes les de leurs diocèses qui se se-
filles biens qu'elle avait donnés à ce monastère,
raient retirées dans son monastère n'au- , de même que ceux qui lui avaient été lé-
raient plus la liberté d'en sortir; tjue celles gués par quelques - unes des sœurs, et qui
qui feraient le coutraiie, seraient excommu- lui avaient été confirmés par les rois Cher-
niées et anathématisées; que si elles venaient bert, Gontran, Chilpéric et Sigebert, ne lui
à se marier, tant elles que les maris sacri- fussent ôtés par quelque personne que ce
lèges et les compfices, seraient sujets à la fût, soit prince, soit évêque ;
qu'.\gncs
même peine, jusqu'à ce qu'ils se séparassent qu'elle avait élevée comme sa fille et fait
pour faire pénitence.
Les évêques du concile bénil- abbesse de ce même monastère, ne
obligèrent leurs successeurs à maintenir cet- fut dépouillée de cette qualité que pour la
te discipline, sous peine de leur en répondre conférer à une autre, et qu'après son décès,
au jugement de Dieu. les sœurs ne fussent privées du droit de se
Eii.a.m,r.
()« du hoi» do
4 Quoique sainte Hadegonde élit déjà des choisir elles-mêmes une autre abbesse. Elle
i' iv'n,J,TÙ'r
leliques de plusieurs saints dans l'église de les conjuiait aussi de maintenir, de toute
ju5i.li.
gQjj monastère ', elle envoya avec la permis- lem- autorité, les autres privilèges de cette
sion du roi Sigebert, à qui Poitiers apparte- maison et de veiller à ce que la Règle de saint
nait, des clercs en Orient, pour demander Césaire y fut exactement observée, et sur-
de sa part à l'empereur Justin du bois de la tout par rapport à la clôture. Enfin, elle leur
vraie croix. Ce prince lui eu donna un mor- demandait de lui accorder la sépulture dans
ceau, orné d'or et de pierreries, avec plu- l'église qu'elle avait commencé à bâtir à
sieurs reliques des saints, et des livres de Poitiers sous l'invocation de la Sainte .Mère
l'Évangile ornés de même. Aussitôt qu'elle de Dieu, et où plusieurs des sœurs étaient
sut que les reliques approcliaicut de Poitiers, déjà enterrées. Elle signa te testament de sa
elle pria Mérouée, qui en était évoque, de propre main, et le mit dans les aixhives de

' BandoDivia ou Bandouiina, in Yila S. Radeg. ' Uand. iii Vita Radeg., nnni. 17, 18, el Grcg.
* Greg. Turon., lih. IX, cap.
xui. Tiirou., lib. 1 De Glor. martyr., cap. v.
' Tom. m Concii, pag. 8Î2.
[VI' sifccLE.] CHAPITRE XXIX. — SAINTE nADEfiONnE, HEINE, ETC.
317
l'c^glise. Saint Grégoire île Tours l'a insi'ré avait (l(! la llhéralili' des rois de quoi Caire
dans lo livro X° île son //istiiiri', d'où il est rauinône, rncoimnande do la l'airo
nllc Jni
jiassi' dans los Itcciirih (1rs ajiiri/cs, dans les aliiMidaMiineul. Puis, venant au
gouvernc-
Aniidlcs do Bai'oiiiiis et dans celles d'Aqui- uirntde son nouveau monastère, elle l'aver-
taine, par Jean liouchcl. Il est dans ce der- tit de n'y recevoir aucune fdle, à
qui ello ne
nier recueil souscrit de quelques ëvfiques; fasse apprendre les lettres et le Psautier
par
ce que doni Ruinart, dans ses Notes sur saint Cd'ur, l'assurant on même temps que l'ob-
Gréy;oire de Tours, regarde comme une ad- servalion de /{èyk de saint Ccsaire, dont
la
dition faite après coup. Pour obtenir une co- elle lui envoyait un exemplaire, lui procu-
pie de la licfjle de saint Césaire, dont il est rerait et h ses filles, la possession de la féli-
park^ dans ce tcslament, sainte Iladefjoude cite éternelle. Elle lui conseille
de modérer
écrivit \ saiutc Césarie, al)besse de Saint- ses austérités, disant qu'une abstinence trop
Jean, à Arles. Nous n'avons pas cette lettre. rigoureuse la mettrait non- seulement bors
Mais on nous a donné depuis quelques an- d'i'tat de gouverner sa communauté
mais ,

nées la réponse de sainte C('sarie, sur nu qu'elle l'obligeiait enfin de s'accorder des
manuscrit de M. le piésident Bouliier. soulagements qui tiendraient quelque chose
I.. Ha ù, 6. Celte sainte, quoique de même nom des délices du siècle, et h ne pouvoir plus
faillie Ci^4Aii
à «flinle Haùi
'.
que la sœur de en est dill'é-
saint Césaire, suivre les heures des repas prescrites par la
goado.
rente. Celle-b'i était morte dès avant l'an /%/(', qui doit lui servir de modèle en tout :

524 celle-ci vivait encore après l'an .5tJ0.


; <(
y a, ajoute-t-elle, des religieuses tièdes
11

, Mais on ne peut mettre la lettre qu'elle écri- et négligentes qui s'imaginent avoir rempli
vit à sainte Radegonde plus tard qu'en 363, toutes les obligations de leur état, quand
puisque l'année suivante cotte princesse écri- elles ont quitté l'habit du siècle pour
pren-
vit aux évèques du concile de Tours pour les dre celui de la religion. Ce changement peut
prier de confirmer l'établissement de son se ftiire en un moment mais nous devons
;

monastère à Poitiers et la di?cipline qu'elle y employer fous les moments de notre vie k
faisaitobserver suivant la fièfj/e de saint Cé- travailler avec le secours de Jésus-Christ à
saire; ce qui suppose clairement que sainte la correction de nos mœurs. » Elle
insiste
Césarie lui avait déjà envoyé cette Règle. beaucoup sur le danger qu'il y a pour des
Sa lettre à sainte Radegonde est une exhor- religieuses de converser familièrement avec
tation ;\ la pratique des vertus religieuses, des honnnes; parce qu'encore qu'elles ne
dont la première est de demander assidue- se sentent coupables de rien, elles ne
i)Ou-
ment à Dieu de nous enseigner lui-même à vent s'assurer de ne point contribuer à la
connaître sa volonté, et de diriger nos pas perte de ceux avec qui elles conversen de la
dans la voie de ses commandements; la se- sorte. Elle veut qu'elle ait une charité égale
coude, d'écouter avec autant d'attention la pour ses sœurs, et qu'elles s'entr'aiment
parole de Dieu lorsqu'on lit les saintes Écri- elles-mêmes, soit qu'elles soient nées riches
tures, que les grands du
en ont lors- siècle ou pauvres. Cette lettre, qui est solidement
qu'on leur fait la lecture des ordonnances écrite, est adressée aux saintes Richilde et
des rois de la terre la troisième, de rendi-e
;
Radegonde ce qui donne lieu de croire
:

grâce à Dieu des bienfaits qu'on eu a reçus. que Richilde, que l'on ne connaît point d'ail-
Elle lui représente que quelqu'avantage leurs, était abbesse du monastère de Sainte-
cpi'elle puisse retirer de la Itèylc de saint Ce- Croix, avant que sainte Radegonde en eût
saire qu'elle lui avait demandée, elle en re- donné le gouvernement à Agnès. Fortunat a
tirera beaucoup plus de la lecture de l'Evan- fait en peu de mots l'éloge de sainte Césa-
'

gile dont la doctrine est au-dessus de celle rie. Sa lettre se trouve dans le premier to-

des hommes, et infiniment plus précieuse ;


me des Anecdotes de dom Marténe, à Paris,
-mais qu'elle ne doit pas s'arrêter simplement en 1717,
à ce que Sauveur a enseigné qu'il est en-
le ;
7. En S73 sainte Radegonde ' écrivit de ,. Leiired»

core nécessaire de suivre et d'imiter les son monastère de Poitiers aux deux rois eondê aii,"r.°3

exemples qu'il nous a donnés, soit de pa- Chilpéric et Sigebert, pour les engager à ?PV"° ""
,, -t .,.
C O b7). Sa mort
tience, soit des autres vertus. Sachant qu'elle mettre bas les armes qu'ils avaient prises '°°'"-

'
Fort., lib, Vlll, cap. iv. * Band. in Vita Radeg.
,

318 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


l'un contre l'autre. Ses lettres que nous n'a- fonction .'i Mérouée, évéque du lieu. Elle fut

vons plus, furent aussi inutiles que l'avaient enterrée, comme elle l'avait soubaité, dans
été les instances que saint Germain, évoque l'églisede Sainte-Marie, aujourd'hui deSain-
de Paris, avait faites sur le même sujet au- te-Radegonde. Mais parce que celte église
près de Frédégonde et de Cliilp<^ric son mari. n'avait pas encore été consacrée par la bé-
La sainte mourut le 13 aoûl, la douzième an- nédiction de l'évèque, saint Grégoire, de l'a-
née du règne de Childebcrt, qui est l'an 587. vis de plusieurs personnes considérables
A la nouvelle de sa mort ' saint Grégoire de consacra un autel dans cette église, persuadé
Tours se rendit à Poitiers et la trouva dans le que Mérouée ne le trouverait pas mauvais.
cercueil ayant ses religieuses autour d'elle
, Nous avons la Vie de sainte Rndegonde par
au nombre d'environ deux cents, dont il y la religieuse Bandonivie. dans le premier
en avait qui étaient des princesses de sang tome des Actes de l'Ordre dcsaint Benoit : elle

royal, d'autres, fdles de sénateurs. Saint Gré- avait été témoin oculaire de la plupart des
goire voyant que l'évcque de Poitiers était faits qu'elle raconte. [La vie de sainte Rade-
absent et occupé à faire la visite de son dio- gonde par saint Forfiinal de Poitiers, le Tes-
cèse, flt les funérailles ; mais après avoir mis tament de la sainte et le décret des évéques
le corps dans la fasse, et fait la prière, il se se trouvent au tome LXXII, col. G31 et suiv.]
retira sans couvrir le sépulcre, laissant cette

CHAPITRE XXX.

Saint Gildas abbé de Ruis, saint Fridolin abbé de Saint-Hilaire à Poitiers

[année incertaine dn Vr siècle].

[Écrivains latins.)

1. On convient qu'il y a eu deux Gildas en pour condisciples saint Paul et saint Samson
de Mint Gil'
rfi.. Sun rdu-
caliot). Il est
Angleterre ; l'un surnommé Albanie qui, né qui furent l'un et l'autre élevés h l'épiscopat
rail prttre.
en 425, fit profession de la vie solitaire près dans la Gaule Armorique, le premier à Léon;
de Glaston ou Glasscubourg, jusqu'en5l2au- le second à Dol. 11 fut lui-même élevé au sa-

quel il mourut, et fut enterré dans l'Église de cerdoce. Son zèle pour le salut des âmes le
ce lieu ; l'autre surnommé le Sage, et quel- lit passer dans la province septentrionale de

quefois Badonic, parce qu'il vint au monde la Grande-Bretagne, où il convertit un grand

en 520, qui fut l'année de la victoire qu'Ar- nombre de païens et d'hérétiques puis il ;

turus, roi des Bretons, remporta sur les Sa- passa en Irlande, où il rétablit la pureté de la
xone, près de de Badon. Ce ne fut pas
la ville foi et de la discipline. Il y bâtit aussi plu-

de sa naissance, ' mais Ar-


là toutefois le lieu sieurs monastères dont il fit autant d'écoles
cluid ou Uunbritton en Ecosse. Ce Gildas eut pour former les jeunes gens dans les sciences
pour père un nommé Caunus, lioniuie de dis- et dans la vertu. Ensuite il alla â Rome visi-

tinction et de piété, qui prit un grand soin de ter le tombeau des ai>ùtres, saint Pierre et
son éducation. Le désir de se former de plus saint Paul; et de là h Ravenne où était celui

en plus dans la vertu l'engagea à se raeltre de saint .\pollinaire. Après avoir satisfait à
sons la discipline de saint llildut ou Eilut, ses dévotions, il vint dans les Gaules, et fixa
abbé au pays de Galles, qui était' Irès-babilc sa demeure dans la cote méridionale de la
dans les sciences divines et humaines c'est : petite Bretagne, près de Vannes, où il bâtit
à lui que l'on rapporte l'établissement de la le monastère de Ruis qui subsiste encore
,

vie monastique en Angleterre. Gildas eut aujourd'liui sous son nom.


mourut dans
Il y
une heureuse on ne
vieillesse le 29 janvier,
sait de quelle année. Si on lui a donné le sur-
' Greg. Turon. De Glor. conf-, cap. cvi.
• Mabil., tom. 1 Acl. Ord. S. Bentd., pag. 139 cl
nom de IJadonic, parce qu'il était né dans le
seq. — • Ibid., ijug. 108. temps du combat entre les Bretons et les
[vr SIÈCLE.] CHAPITRE XXX. — SAINT (".ILDAS, Anil|!: DE nUlS. 319

Saxons auprès de la villo de Badoii ou de ncmi, leur inclination aux guerres civiles,

la nioutaRue de Badon ce combat s'i'tant ;


leur éloignement pour la vérité et pour la
doiinu', suivant les t^crivains aiii^Iais, en îilO, paix, leur penchant au mensonge. On ne
il est nocessaiir (le mellre sa mort plus tard consultait plus le Seigneur dans l'éleclion
que où plusicuis la fixent, puisqu'alors il
r)G3, des rois on élevait ;\ cette diguité ceux que
;

n'aurait eu que cinquante-cinq ans ce qui : l'on connaissait pour les plus cruels. 11 suf-
ne se peut dire d'un homme qu'on convient fisait à un roi d'avoir de la douceur et de

être mort dans uti Age avance^. Ussérins la ' l'amour pour la vérité pour encourir la dis-
recule jusqu'en 570; d'autr(>s la mettent ''
grâce de ses sujets, et pom- être regardé
après l'an 581, où ils prétendent qu'il com- comme le destructeur de l'Etat. Telles étaient
posait les ouvrages que nous avons de lui. les dispositions des Bretons lorsque les Pietés
Ils consistent eu quelques canons de disci- les attaquèrent et les vaincpiirent. La guerre
pline, et en deux discours sur la ruine delà fut suivie de la famine, et de la peste qui
Grande-Bretagne et sur les dérèglements du dépeupla tout le royaume. Jusqu'à l'année
clergé. du siège du mont Badon, que Gildas dit être
MIDIf-"!',
,
'''
(iililrii,
2. Ouelques-ims
^ X
ont contesté ces deux celle de sa naissance, la Bretagne avait été
discours à saint Giidas, soit parce qu'ils sont sagement gouvernée les rois, les évoques, :

remplis de fautes contre la vérité de l'his- les ecclésiastiques, les monastères, le peu-
toire, soit parce que l'auteur s'y adresse à ple, tout était dans l'ordre. On le renversa
plusieurs princes comme s'ils eussent vécu quelque temps après si ouvertement, que
dans le même temps, quoiqu'il soit certain les nations voisines disaient » La Bretagne :

qu'ils se sontsuccédés dans le gouvernement a des rois, mais ce sont des tyrans elle a :

de la Grande-Bretagne soit enfin parce ; des juges, mais ce sont des impies; elle a
qu'il ne rend pas bien les termes de la lan- des guerriers, mais ce n'est que pour des
gue du pays. Mais on peut répoudre que des guerres civiles, n II décrit les crimes horri-
fautes de chronologie dans un discours ne bles dont Constantin, Conan, Vortipor, Eu-
sont pas toujours des preuves de sa suppo- néglns et Maglocus s'étaient souillés; leurs
sition que les cinq princes auxquels il s'a-
; meurtres, leurs sacrilèges, leurs adultères,
dresse, pouvaient avoir en même temps de leurs parjures. Il leur applique les reproches

l'autorité dans le royaume, sans qu'ils en les plus vifs des prophètes aux rois de Juda
eussent tous ensemble la principale, ou le et d'Israël, et les menace de la colère du
titre de roi ; et qu'il n'est point aisé de mon- Seigneur. Il rejette l'amertume et Ja diuelé
trer que Gildas
se soit trompé dans la signi- de ses expressions sur la nécessité de crier
termes du pays, puisque la lan-
fication des contre le vice, et d'invectiver contre les pé-
gue bretonne a eu comme les autres ses cheurs témoignant de son côté un désir
,

variations. Au fond, comment lui contester très-ardent de les voir rentrer en eux-mêmes
des discours qui sont cités sous son nom par et vivre conformément aux lois de l'Évan-
l'auteur même ' de sa Vie, par le vénéra- gile.
ble ' Bède, par Alcuin, et par un grand Ses invectives contre les désordres du cler-
nombre d'écrivains postérieurs, parmi les- gé de la Bretagne, ne sont ni moins vives ni
quels on peut compter Rapin Thoiras, dans moins amères. L'avarice, la supercherie, la la.. na.
premier livre de son Histoire d'Angleterre,
le gourmandise étaient des vices communs
An.ijse 3. Le premier de ces deux discours est
<io
parmi les ministres de l'Église. Les pasteurs
Sy'k't'' ^'^^" ^'^ ruine de la Grande - Bretagne
I.
les , ne laissaient pas de prêcher quoique rare-
pas. ^0-
mccurs corrompues dos habitants, leur ment, mais ils vivaient mal ils offraient :

mancjue de cœur quand il fallait aller à l'en- quelquefois le sacrifice, mais avec un cu^ur

» Usser. De Britan. eccl. prim., pag. 477, 90.S. malus mores populi, patriam perdiderunt. Alcuin.
* Radulph. de Diceto iu Indiculo viror. illust., Epist. ad Edith., tom. I! Lert. Canisii pag. 385. ,

pag. 432. IiUer alia inemtrrahilium seelerum facta quœ


' Mabil., tom. I Ad. Ord. S. Bened. ,
pag. 139, historiens eorum Breltonnm Gildas ftebili ser-
144, et BoUand, ad diem 29 januarii, pag. 380. moue describit, et hoc addebat, aut numquam
Legitur in libro Gildi BreUonum sapientissi-
*
genli Saxonum sire Anglorum secum Britanniam
vii,quod iidein ipsi Brettones propter rapinas et incolentium, verbum fidei prœdicandum commit-
aiaritiam principum, propter iniijuitatem et in- terent, Beda, lib. I Uistor. Àiiglor., cap. ïxn, pag.
justitiam judicum, propter desidiam et pigritiam 15, ton). III.
prœdicationis episcoporum, propter luxwiam et
320 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
souillé leur vie déréplée ne leur pernieltait
:
où ils furent réimprimés dans le même Re-
pas de reprendre ni de corrii;er les pécheurs : cueil en 1569. On les trouve aussi dans les
ils n'enseifmaienlquefaiblenu'nt l'obligation I/isldires calésiaslù/iws de In (irande-Iirefa-

de faire l'aumône, parce qu'ils ne donnaient fjne, et dans les lii/iliut/m/ufs dfs Pf-rca, fi Pa-
pas eus -mêmes une obole aux pauvres. Ceux ris, à Cologne et à Lyon [dans Galland,
;
toiiH-

qui paraissaient au dehors être exempts de Xn, page 191, et de là dans la Patinlogic lati-
défauts grossiers, ne faisaient point de diffi- ne, tom. LXIX, col. 327.] On a oublié dans l'é-

culté de donner ou de recevoir de l'argent dition des Pères Lyon la préface que Gil-
.•'i

pour l'épiscopat ou pour la prêtrise. Quels das avait mise à la lêle de ces deux discours,
secours les peuples pouvaient-ils attendre de dans laquelle il disposait ses lecteurs h lire
semblables ministres, plus dignes des llam- des choses aussi affligeaules, protestant qu'il
mes de l'enfer que de paraître au saint au- ne les avait écrites qu'après une délibération
tel ? Gildas convient que tous n'étaient point de i)lus de dix années, et lians la seule vue de
méchants au même degré, et qu'il y avait déplorer avec les gens de bien la ruine de sa
des évêques et des prêtres qui n'étaient patrie, et les désordres qui l'ont occasionnée.

point tachés de l'infamie de l'impureté, qu'il Ildonne à sou écrit le litre de Ijttre. La dis-
y en avrfit de chastes et de bons mais il ;
tinctionque l'on en a faite en deux discoure
soutient qu'ils manquaient de zèle et qu'ils ne parait pas être de lui la fin du premier
;

n'avaient pas assez de force pour défendre qui est liée naturellement avec le commen-
la vérité aux dépens de leur vie. Sur quoi, cement du second, fait voir que ce n'était
il leur met devant les yeux, la constance ad- originairement qu'un seul et même dis-
mirable de saint Ignace, évcque d'.\ntioche, cours, ou une seule lettre comme il l'ap-
dont il cile VÉpitre aux liomains ; et l'exem- pelle.

ple de saint Polycarpe, évêque de Smyrne, 4. Nous avons encore de Gildas quelques
iil.i!i fir It I
canons ou règlements de discipline dans un i.ciplrt I
et de saint Basile, évêque de Césarée, qui, >c. l.\ -, -

supérieurs à toutes les menaces et h tous les recueil de canons à l'usage de l'Église d'Hi- cil. !..(,•. «.

tourments, défendirent la vérité de la reli- bernie ou d'Irlande, donné par dom d',\ché-
gion jusqu'à la mort. Il rapporte un grand ry dans le tome IX de sou S/)icilége sur un
nombre de passages de l'Kcriture, où Dieu manuscrit de l'abbaye de Corbie. Les ca-
se plaint des mauvais pasteurs, de leur in- nons que l'on y trouve sous le nom de Gil-
dolence à enseigner les peuples, des mau- das sont au nombre de huit, dont le pre-
vais exemples qu'ils leur donnaient, les fai- mier porte qu'il faut réserver à Dieu !e
sant périr, faute de nourriture, et pour ne jugement des évêques, des prêti'cs et des
pas leur montrer par leurs actions le bien abbés, et que le mieux est de ne juger per- [••(,!.

qu'il fallait faire. Il semble dire que ceux-là sonne; le second, que l'abstinence des ali-
ne sont ni prêtres, ni évêques, (]ui ne rem- ments corporels est inutile sans la charité;
plissent pas les fonctions de leur ministère ;
et que ceux qui ne font ni de longs jeûnes
mais on voit par ce qui précède et par ce ni de grandes abstinences, mais qui ont le
qui suit, qu'il ne veut dire autre chose sinon cœur pur, sont préférables h ceux qui tirent
que, ne faisant point ce qui est de leur char- vanité de leurs mortifications; le troisième,
ge, ils en sont indigues, et qu'il leur serait que la vérité est recevable de quel(]ue bou-
plus avantageux de la céder à de plus di- che qu'elle nous vienne; le quatrième, qu'on
gnes, qui recherchassent dans l'épiscopat, ne doit pas condamner les princes pour des
non le moyen de s'enrichir, mais d'être uti- fautes légères; le cinquième, que chacun
les au salut des peuples. doit demeurer dans l'état au(ju(>l Dieu l'a ap-
Les deux discours de Gildas furent im- pelé. Les clercs Ii-landais portaient une ton-
primés pour la première fois à Londres en sure toute différente de ceux de l'Église ro-
152.J, par les soins de Polyilore Vergilc qui maine se faisant raser la tête d'une oreille
,

y joignit une piéface de sa fai^-on. L'édition à l'aulie. Saint Gildas remarque (jue ce n'é-
de Bâle en lo^^ n'est qu'une réimpression tait pas seulement dans cet usage qu'ils se
de celle de Londres. Il en parut une autre distinguaient des romains; mais en tout,
en la même ville en 1,"GS. Josselin, secré- jusquesdans la liturgie. Ace canon, qui est
taire de Matthieu, archevêque de Cantorbéry, le septième, le Recueil où il se trouve en

la procura. On leur avait donné place, dès ajoute un de saint Patrice qui enjoint aux
J'an 1.j:J."), dans les Orthodoxograp/ies à Bâle, Irlandais de porter une tonsui'e semblable

{
[vi" SIÈCLE.] CHAPITHE XXXI. — JANUARIN, PRÉTEXTÂT, ETC. :i'2l

colle qui triait en usago dans l'Érrlise roniai- fut adressé


h Ilutilius Nnmantius, vers
iu\ I.c sixième défend h ceux qui ont le pou- l'an 4l(t,Innstemps avant la naissance de
voir d'excommunior, d'en nser avec précipi- saint Gildas. Ce poome se trouve A la fin des
tation. Le lniili(''nio est contre ceux qui Ciimi'dies do Pl.uilo.
se croient ju.sle.s, parce qu'ils ionl quel- "). Il faut tlire iciun mot de saint Fridolin
ques bonnes œuvres, mais qui ne le sont que Dempster et quelques autres mettent au ^<i>Rt. Illluiro
1 l'nlllor?.

pas, en etl'et, parce qu'ils manquent do cha- rauf,' (les écrivains ecclésiastiques : il était
rité pour leurs frères. Le recueil do ces ca- Irlandais d'origine. Ayant pass('! la mor il

nons parait avoir été foit dans le luiitième vint s'établir ù Poitiers, où il rétablit le mo-
siècle par un clerc nommé Arbédoc. Il en nastère de Saint-IIilaire, dont il fut ensuite
rapporte quantité d'autres tirés des divers abbé. De Poitiers ° il passa dans le royaume
conciles d'Irlande, on particLilior de ceux d'Austrasie où il bâtit divers monastères le :

qui s'élaient tenus du vivant de saint Patrice. dernier fut dans une du Rhin proche la
ile

Le huitième sous le nom de Gildas suppose ville d'Augslz, appelé Sechinghen qui est ,

que ce saint abbé avait écrit plusieurs let- aujourd'hui un Chapitre de chanoinesse. On
tres nous n'en avons aucune, il s'en trouve
; uicl sa mort sur la tin du sixième siècle. Les
des fragments ', dans un manuscrit de la bi- écrits lui attribue sont un livred'A'.i/i'o;--
qu'on
bliothèque de M. Gotton. Baléus * lui attri- tations un autre d'A vis aux moines ; un d'Ins-
;

bue un livre de sermons qu'il dit être extrê- truction aux peuples d'Augstz, et un qua-
mement satyri(jues, et un traité île l'Immor- trième rfcs /Ic^cs de suint Ililaire : msiis on
talité de l'âme. Us n'ont pas encore été ren- n'apporte " aucune preuve que ces ouvrages
dus publics. Il y a quelques autres ouvrages soient de lui. Il n'est parlé de Fridolin dans
dont on veut qu'il soit auteur, enli''autres, aucun des anciens qui ont travaillé sur les
nue Histoire des actes des Bretons; maison auteurs ecclésiastiques. On sait seulement
soutient ^ qu'elle est de Xennius. Ce serait par le témoignage de Gogon, l'un des mi-
le déshonorer que de lui attribuer certaines nistres du roi Sigebert en 363, qu'il était
prophéties qui portent le nom de Gildas. Le savant et que son savoir était' connu dans les
poème intitulé : Querulus, que quelques-uns palais des princes, où il y en avait apparem-
lui donnent * ne peut être de lui, puisqu'il ment quelques monuments.

CHAPITRE XXXI.

Januarin moine de Saint-Anrélien d'Arles [après l'an 553] , saint Prétextât

évêquc de Ronen [586], saint Véran évêqne de Cavaillon [après l'an

589], Antmonde évêqne de Tonl [à la fin dn VF siècle].

[Écrivains latins.]

1. Tout ce que de Januarin, c'est


l'on sait eut quelque part au gouvernement de ce
qu'il avait de saint Florentin,
été disciple monastère, puisque dans les diptyques qui
premier abbé du monastère que saint Auré- se trouvent ensuite du titi-e de fondation
lien fonda à Arles par les libéralités du roi dans Code des règles, il est nommé entre
le

Childebert. Il semble qu'après la mort de les pères ' et les instituteurs de cette mai-

saint Florentin, qui arriva en 333, Januarin son. Le corps de saint Florentin ayant été

1 Cave, Histor. lilt., pag. 350. « Boll. ad diem 6 mart., pag. 439.

2 Ibid. — 3 Ibid.
''
De ctijvs Fridnlini doctrina regum sunt or-
'•
Labbe, tom. VIII Bibl. Pa(r., pag. 707. nata palatia. Duchesne, tom. I, pag. 844.
5 Mabil., lib. Vlll Annal., pag. 221.
» Cod. regul., pag. 69.

XL 21
,

322 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


transféré, en 388, de l'Église de Sainte-Croix dont saint Grégoirede Tours dit ' que le style
dans celle de Saint-Pierre, par les soins de est assez tolérable et convenable eu plu-
l'abbé Constantin, Januarin flt à cette occa- sieurs endroits à ce genre d'écrire. Il y a
sion réi)itap]ie de ce saint qiiu Ton voit en- aiipaience que Prétextai avait travaillé sur
core sur son tombeau. Elle est composée de la liturgie nous n'avons plus ces prières. On
:

trente-sept vers acrostiches, dont les lettres sait seulement que, rappelé de son exil après
initiales forment ces mots Florentinus abbas : la mort de Chilpéric, il assista en 383 au se-

hic in puce ijuiescit. Amen. Januarin ne s'est cond concile de Mâcon, qu'il lit lui-même la
point oublié dans cette épilaphe il s'y re- : lecture de ces formules en présence des évê-
commande aux prières du saint, de même ques que quelques-uns les approuvèrent, et
;

que le SLidplcur qui l'avait gravée et qui que d'autres, ce semble, on plus grand nom-
avait orné le tombeau, et deux moines du bre, ne les trouvèrent pas de leur goût ,
même monastère. Bénigne et Hilarin. Baro- parce qu'il n'y avait pas suivi les règles. Il
nius a rais cette épitaplie dans ses Annules; fut assassiné, en 386, dans le chu-ur de son

Saxi, dans l'Histoire des évêques d'Arles; cl le Église un dimanche au milieu de l'office. La
Père Le Cointe, dans les Annales de France, reine Frédégonde fut soupçonnée de ce
sur l'an 53 J. meurtre, parce qu'on ne doutait pas qu'elle
u.(!î,'"*.rci.t
2. On ne peut mettre plus tard qu'en 534 n'eût été le premier mobih^ de la condamna-
n»°cn: ul l'épiscopat de saint Prétextât, puisqu'en tion de Prétextât sur qui elle avait déchargé
*"'"
cette année il souscrivit au troisième con- une partie de la haine qu'elle portait à Bru-
cile de Paris, le second des métropolitains. nehaut dont cet évèque était ami. L'Eglise
Sa bonté, ou si l'on veut sa simplicité, l'enga- l'honore comme martyr au 24 février.
gea dans une affaire dont il eut tout le temps 3. Parmi les évêques qui assistèrent avec 4^"
J,"^;
>"
de se repentir. Il avait de la tendresse pour lui au second concile de Màcon, en 383, on jjjljj" =

Mérovée qu'il avait autrefois tenu sur les compte saint Vérau, évoque de Cavaillon ;

fonts de baptême; gagné, d'ailleurs, par des il était né vers l'an 328. En 387 il leva * des

sollicitations de Bruueliaut, veuve de Sige- fonts de baptême le lils de Cliildebcrt II ;

bert, roi d'Austrasie, il les maria en face de deux ans après le roi Gontran'Ie nomma
l'Eglise, quoique Mérovée fût neveu de cette avec deux autres évêques pour informer de
princesse par son mari. Ce mariage était vi- l'auteur du meurtre de saint Prétextât. La
siblement contre les canons. Mais ce ne fut môme année, c'est-à-dire en 589, il fit ' ré-
pas la seule faute que l'on reprocha à Pré- ponse avec neuf autres évêques à ceux du
textât on l'accusa encore d'avoir marié
;
premier concile de Poitiers, au sujet des
Mérovée contre la volonté du roi Chilpéric, troubles arrivés dans le monastère de Sainte-
son père. Cité devant un concile de qua- Croix en la même ville, approuvant tout ce
rante-cinq évêques, qui tenaient leur assem- qui avait éti- fait dans cette assemblée. Nous
blée dans l'église de Saint-Pierre à Paris, avons letlc réponse, dont nous aurons lieu
aujourd'hui Sainte -Geneviève, il s'accusa de parler ailleurs. Nous avons aussi sous le
coupable, suivant en cela l'avis des évêques nom de saint Véran un petit écrit sur la con-
de cour; se jeta aux pieds du roi, et dit qu'il tinence des prêli-es', ou plutôt l'avis qu'il
mettait toute son espérance en sa miséri- ouvrit sur ce sujet dans (juelques conciles ;
corde. Chilpéric ordonna aux évêques de le il porte qu'il y a de l'indécence que le même

déposer de l'épiscopat tous souscrivirent à


: clerc fasse les fonctions de mari et de prê-
cette sentence. Prétextât fut mis en prison, tre, et qu'il passe du lit conjugal à l'autel,

et de là envoyé enune de ces iles


exil à où il doit offrir, non-seulement pour ses pé-
que l'on appelle Jersey et Guernesey, près de cliés, mais aussi pour ceux du peuple. « Si

Coutance en basse Normandie. Ce fut là le prêtre Sadoch, dit-il, refusa * de donner à

qu'il composa certaines formules de prières. IJavid et à ceux de sa suite les pains de pro-

' Prœlexlalus nrationes i/uus in exilio positiis ' Ihid., lib. VIII, cap. XXXI.
scalpsil, coram episcoiiU recilavit. Quœ ijuilms- ' Ibid., lib. IX, cap. XLI.
dam placuerant, a quilntsdam vero quia nitem " (Jn le trouve au lome LXXII ib' la Palrologie
minime secutus fueral. reprcltendebanlur. Stylus latine, col. TOI. (L'i'dileur.)
lamen per loca ecclesiasUcus et ralionabilis eral. « Si sdccrdos Sadoch non pnu.<t panr.i proposi-
Ciregur. Turoii., lili. VIII, vint. .\x. lionis iradidit quam se et pueras suos David jam
* Ideiu, lib. IX, cap. iv. lerlio die mundos esse a mulieribus fateretur
;
VI" SIÈCLE.] CHAIMTIIK XXXII. — SAINT AIINAIUE, liTIENNE, ETC. 32:{

position jusqu'A ce qu'ils l'eussent iissurd mcllre A la postérili' la mémoire de ses ac-
qu'ils avaient i^arili! la conlincnce depuis tions, et rendre [)lus solennel l'olUce que Ton
trois jours, quel est le piètre qui osera, faisait dans l'higlisc érigée sous son nom
après les souillures des passions, consacrer dans un des faubourgs de la ville. Dom Ma-
la chair sans tache de l'Aftiicau qui est of- billou entend par ces écrits, la Vie de saint
ferte pour le salul du monde?» Saint Vérau Kvro. Il fait les rpuian|uos suivantes :
1" il est
propose aux évèiiues de prendre dans les dit dans cette \ ic que ce saint évèque, étant
monastères de leurs diocèses des moines de à ChiVlons-sur-Saônc , trouva trois prison-
vertu et de probité pour remplir les fonc- niers dans les fers; 2° qu'Adrien, h qui il
tions de clercs, disant qu'il était plus utile ;\ en tlemanda l'élaugissement, le lui ayant re-
l'Eglise d'avoir un petit nombre de bons mi- fusé, il l'obtint de Dieu par ses prières. Se-
nistres, que d'en avoir beaucoup de mau- lon Mabillon, il y a faute dans l'anonyme qui
vais, et dont la conduite déshonorait le mi- a donné les Actes des évêques de Toxtl ; pre-
nistère ecclésiastique. nant Adrien pour l'empereur de ce nom, il
4. Aulmonde, treizième évêque de Toul, s'est imaginé faussement que saint Èvre vi-
composa sur la fm du vi» siècle quelques vait dans les commencements du ii" siècle,
écrits etdes répons en l'honneur de saint tandis ijne par Adrien il faut entendre le
Èvre, l'un de ses prédécesseurs, pour trans- juge (le Cliàlons ou le gouverneur.

CIIAPITHK XXXn.
Saint Aunaire évêqne d'Auxerre [586 1, Etienne prêtre d'Auxerre, Sédatns

évêque de Béziers, saint Yrieix abbé d'Atane [591 1,

Contran roi de France [593].

[ÉcrivalDS latins.]

s.iDt An. I, Saint Aunaire ou Aunacaire assista au cond, autres de suite. Il désigna aussi
et les
dAuMrr..si couclle dc Paris, en 373, au premier de Mâ- les églisesd'Auxerre où les processions de-
lellre au prO- i l '

Bépoo''M°'d'E'-
''O"' ^" ^^^' ^* ^ ^^ autre qui se tint en la vaient se terminer « Le premier jour de
:

iieiin..
même ville quatre ans après. Il eut part janvier à Saint-Cermain le premier de fé- ,

aussi à la lettre que


évêques qui se trou-
les vrier à Saint-Amatu ou Amateur, le premier
vaient auprès du roi Contran, écrivirent aux de mars à Saint-Marien, et ainsi des autres.»
évêques du premier concile de Poitiers. Nous Il régla encore la manière de célébrer les

avons de lui quarante-cinq décrets qu'il lit '


Vigiles dans l'Église cathédrale de Saint-
dans un concile, où il avait appelé sept abbés, Etienne, partageant les clercs et les moines
trente-quatre prêtres et trois diacres. Les ac- pour faire ces fonctions tour tour il y a <^ :

tes de ce concile sont datés de la dix-septiè- des vigiles marquées pour chaque jour, hors
me année du règne de Chilpéric, de Jésus- le samedi. Sa vénération particulière pour
Christ 578. Aunacaire en fit confirmer les saint Amateur et pour saint Cermain, lui fît

statuts par le roi Contran. Le même évêque' naître le dessein de faire écrire leur Vie. Il

régla les processions que l'on devait faire s'adressa pour ce sujet à un prêtre nommé
tous les jours de chaque mois dans les pa- Etienne, qui était venu d'Afrique dans les
roisses de son diocèse la ville d'Auxerre
: Caules, et qui fut reçu depuis dans le clergé
qui était comptée pour la première, devait d'Auxerre. Etienne écrivait en prose et en
marcher le premier jom- Appoigny le se- ; vers. Aunacaire avait déjà eu, ce semble,

quisimmaculatas Agni carnes ad salutem mundi ' Tom. V Concil., pag. 906.
prœstitas, post passionwn inqvinainenta vel etiam * Iliilor. Ànlisiodor.
epiic, cap. XXIX, tom. I

auUeal consecrare ? Tom. V Concil., pug. 919. BibUolh,. Labb., pag. 420, 421.
3i4 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
des preuves de son savoir en l'un et l'autre que en écrivit ' une seconde qui est encore
genre d'écrire. Voulant donc contenter les perdue il donnait avis an Pape du progrès
:

esprits, dont les uns sont portés pour la que la religion catholique faisait dans les
prose, les antres pour la poésie, il écrivit
'
Gaules, où l'on bâtissait grand nombre de
à Etienne de mettre en prose la Fie de saint nouvelles églises. Pelage lui dit dans'' sa ré-
Amateur et on vers celle de saint Germain. ponse, que puisque lui et les autres évêques
Etienne, quoi(]iie persuadé de son incapaci- des Gaules avaient une même foi avec l'É-
té, répondil^qu'il ferait ce que le saint évèque glise de Rome, ils devaient aussi s'intéresser

demandait de lui, en le priant humblement par leurs prières à lui procurer la paix et
de lui pardonner les fautes de langage qui la tranquillité. Cette lettre est du 1" novem-

lui échapperaient, et la rusticité de son style : bre, la cinquième année de l'empire de Mau-

c'est sur le témoignage de ces dcu.\ lettres rice, indiclion ciiuiuièmc, c'est-à-diie de l'an

que les Bollandistes reconnaissent le prêtre 58G. [Ces dilitirentes pièces se trouvent avec
Etienne pour auteur de la Vie de saint Ama- une notice tirée de la Gallia cliristiatia, au
teur qu'ils nous ont donnée au 1" mai sur tome LXXn de la Patrolotjie latine, col. 759].
SMili»,
plusiem's manuscrits. Elle est mêlée de quan- Le nom de Sédatus, évèque de Béziers,
2. évCque de bé-
liers »t-5
se lit parmi les souscriptions des évêques du
;

tité de appartiennent à l'Histoire


traits qui «chu.

de saint Germain, écrite par le prêtre Cons- concile tenu à Tolède, eu 589, et parmi cel-
tance mais Etienne les a mis en son style
;
les du concile de Narbonne, assemblé le 1"

qui est très-mauvais, et qui n'a rien du sim- novembre de la même année. On lui attribue
ple et du naturel que l'on doit toujours em- une homélie sur l'Kpiphanie, imprimée dans
ployer dans ce genre d'écrire. On ne sait le onzième tome ' de la Bihlidth'pque des Pères

point s'il écrivit en vers la Vie de saint Ger- [et dans le tome LXXII de la Patrologie latine,

juaiu, comme Aunacaire l'en avait prié : ce col. 7G!tetsuiv.]. Elle est d'un style simple et
qui donne lieu d'en douter, c'est que' le net, tel qu'il convient à des homélies. Sédatus
moine Eric en composa une dans ce goùt-l;\ explique dans un sens spirituel les trois mys-
vei-s le L\^ siècle, à la prière de Lothaire, tères que l'on célébrait en ce jour: l'adoration
abbé de Saint-Germain d'Auxerre. On trou- des mages, le baptême de Jésus-Christ et le

ve dans le cinquième tome des Conciles deux' changement de l'eau en vin aux noces de Ca-
lettres du pape Félage à Aunaire car c'est : na. Il explique le retour des mages par un au-
ainsi qu'il l'appelle. La première est datée tre chemin, de la conduite dift"érente que nous
du o octobre de la septième année de Ti- devons garder, lorsque nous nous conver-
bère, à compter depuis l'an 574, qu'il fut tissons à Dieu. L'orgueil nous a fait tomber,
déclaré César, ce qui revient à l'an 580. Le il nous relever par l'humilité, qui seule
faut
Pape loue Aunaire du désir qu'il avait eu de peut nous faire rentrer dans le paradis, d'où
faire le voyage de Rome, s'il n'en eût été le péché de vanité nous avait exclus. Le
empêché par les mouvements des troupes cent trentième sermon dans VAppendice de
ennemies, c'est-à-dire des Lombards qui saint Augustin porte le nom de Sédatus, mais
étaient entrés en Italie. Il lui reproche dou- il n'est pas du même style que le précédent.

cement de ne s'être pas assez intéressé au- Ce n'est qu'un composé de plusieurs frag-
près des rois de France pour les engager à ments de divers sermons il fut prêché le 1"
;

prêter du secours à l'Église de Rome, dans janvier. Le cent vingt-neuvième dans le mô-
un temps où elle avait tout à craindre de la me Appendice est encore sur les calendes de
part de ces barbares, et il l'exhorte à les janvier, et du même auteur. [Les écrits de
empêcher du moins, autant qu'il serait eu Sédatus qui nous restent sont dans le tome
lui. de faire une alliance avec eux. Il ajoute LXXII de la Patrologie latine, col. 769 et suiv.
qu'il lui envoyait les reliques qu'il avait de- et daus le tome V, part. 2% col. UX)1-1003.]
mandées conjointement avec le roi Cliildc- 3. Ce fut saint Nicel', évèque de Trêves,

Siio( Yrirli
'Ud'AUu:
bert II. Cette lettre dc Pelage était une ré- qui forma saint Yricix dans la science des ta» écriu.

ponse à la lettre qu'il avait ' reçue d'Aunaire, saints et dans l'intelligence des livres sacrés.
et qui n'est pas venue jusqu'à nous. Cet évo- Après l'avoir suffisamment instruit, il l'ad-

' Aunar. Epistola apud Bolland., toin. I .Mail, » Toiii. V Concil., pag. 934. — » Ibid. — « Toni.
pag. 50. V Concil., fm(j. 9:U.— ' Ibid.
• .Sli;i)li. Epist., ibid. » T.iiii. XI JHbl. Pat., piig. nt!)8.

» llulteau, toui. Il Uist. occid., iwg. 587, 588. » Greg. Turon., Yila Pat., cap. xvii.
[VI" SIÈCLE.! CHAPITRE XXXll. — SAINT AUNAIIIE, ETIENNE, ETC. 323

mil diins le clergé et l'ordoima prêtre. Jo- quiconque s'opposera l'exécution de ses
;'i

coude son père tMant mort, il s'en retourna volontés el de celles de IN'lagie sa mère,
à Limoges, lieu de sa naissance, pour con- qui souscrivit aussi ;\ ce testament. Les té-
soler IV'lagie, sa mère. Au bout de (incique moins, qui y souscrivirent, sont Alstidius ,

temps, il embrassa le paiti do la rclrailc, et Calpurnius, Léon, Nectaire; el Aideltiiis on ;

bûlit le monastère d'Atane connu depuis , le trouve* dans les Anaicctcs de dom Mabil-

sous le nom
de Saint-Yrieix. On marque • lon, à la suite de la Vie de saint Yrieix écrite

qu'une de ses principales occupations était par saint Grégoire de Tours el ailleurs. Ce
de li-auscrire des livres, dont il faisait [iré- saint fait ''mention d'un second testament que

sent aux paroisses voisines de son monas- saint Yrieix fit qiiclqni's jours avant sa mort,

tère. 11 mourut dans le mois de juillet de l'an par lequel il établissait saint Martin et saint

391, âgé de plus de quatre-vingts ans. Plu- ililaire pour ses héritiers ; nous ne l'avons
sieurs années avant sa mort, il écrivit son pas : ce n'était apparemment qu'une confir-
"
testament de sa propre main il est datij de : mation du premier. Saiut Grégoire de, Tours
la veille des calendes de novembre, la onziè- écrivit la Vie de saiut Nicet en partie sur ce

me année du règne de Sigebert h qui Li- qu'il en avait appris de la bouche de saint

moges appartenait , c'est-à-dire du 31 octo- Yi'ieix qui avait été son disciple. Ce fut en-

bre 572. Le saint déclare dès le commence- core sur son témoignage ' qu'il rapi)orle plu-
ment, que ce testament lui est commun avec sieurs miracles de saint Julien, martyr, et de
Pélagie sa mère, saine, comme lui, d'esprit saint Martin. [La Vie et le Testament de saint
et de jugement, et maîtres de leurs biens ;
Yrieix se trouvent parmi les nnivres de saint
que la crainte d'une mort imprévue les a Grégoire de Tours, au tome LXXI de la Pa-
portés l'un et l'autre à disposer de leurs pos- trologie latine, col. 773 et suiv.]

sessions, et qu'ils ont fait signer ce testa- 4. Le second concile de Màcon en 585, (lomran roi

ment par un nombre compétent de témoins. avait recommandé l'observation du diman- iç f. Tom.' v
Après quoi il ajoute, que si à l'avenir quel- che qui était fort négligée il avait défendu ;
™i-

qu'un entrepi'enait d'y donner atteinte, soit de plaider ce jour-là, sous peine de perdre sa
en vertu de quelques nouvelles lois, soit à cause, et de se mettre en nécessité d'atteler
cause de quelque loi ancienne qui lui aurait des bœufs, sous peine aux pajsans et aux
été inconnue, soit pour quelque :iutro i.iisun, esclaves de coups de bâton. L'intention de
il entend qu'il vaille du moins comme un co- ce concile était que l'on passât ce saint jour
dicille. Puis, s'adressant à saint Martin, il dans le chant des hymnes et des louanges de
l'institueson héritier universel, en donnant Dieu que chacun se rendît à l'église la plus
;

toutefois des biens considérables h son mo- proche de sa maison pour y prier avec lar-
nastère d'Atane, mais ;\ la charge d'être sou- mes, et tendre ses mains vers le ciel pour
mis à la basilique de Saint-Martin de Tours. en recevoir du secours; enfin que conformé-
Comme il avait témoigné - choisir sa sépul- ment à ce qui en est dit dans la loi et dans
ture dans l'oratoire de Saint-Hilaire, il con- les Prophètes, ce jour dans lequel nous
jure prévôt de Saint-Martin et les moines
le avons été délivrés de l'esclavage du péché,
d'Atane ' par le corps et le sang de Jésus- fût pour nous un jour de repos et de sancti-
Christ, de faire célébrer à perpétuité et en fication. Le roi Gontran, dans le royaume
tout temps, le jeudi, les Matines dans ledit ducpiel ce concile avait été assemblé, en
oratoire et ensuite la messe en l'honneur de confirma les canons par une ordonnance
ces deux saints. Il entre dans le détail de datée du 10 novembre, la vingt-quatrième
tous les vases d'or et d'argent, des voiles, année de son règne, c'est-à-dire en 583. Il
nappes et autres ornements qu'il lègue, mar- s'arrête piincipalement à ce qui regarde la
quant le prix de chacun; et donne la liberté sanctification du dimanche et les autres so-
à un grand nombre d'esclaves des deux sexes lennités de l'année, voulant que les évéques
mariés et non mariés, disant anathème à et les juges de son royaume, à qui son or-

• Mabil., lib. VIII Annal., pag. 223. tiitiu.i et missa sanctorum domnorum a mona-
' Grcg. Turon. in Yita Aredii, eap. xsxiv. chis ibidem revocelur. Greg. Turou., pag. 13 li.
' Adjuramxi^ prœposilum sancti Martini el mo- 5 Mabil. Analect., pag. 208.
nachos Alanenses per corpus et saiiguineiii Do- ' Greg. Turon., lib. X, cap. SXIX.
mini nostri Jesu Christi, ut in oratorio sancti " lil. De Vitis Pal., cap. xvii.
Uilarii quinta feria omni tempore malurius Ma- "
lil. De sanclo Jul., cap. xl.
326 HISTOmE GÉNKOALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
donnance est adressée, veillassent soigneu- grandes pertes ; et étant rentrées sur les

sement ce qu'elle fût observée dans tous


<'i
terres de France, y continuèrent le pil-
elles

ses points. Il dit aux évêques qu'ils ne se- lage, comme elles avaient fait dans le pays

ront point exempts de péché, s'ils négligent ennemi. Ce n'était partout que meurtres,

de corriger et de reprendre les prévarica- que brigandaires, qu'incendies les églises ;

teurs, comme lui-même ne se croyait pas à mêmes ne furent point épargnées. Contran,
couvert de la colère de Dieu, de qui il avait indigné du mauvais succès de l'entreprise,
reçu le royaume , s'il manquait de sollici- et de la licence des soldats, résolut d'inten-

tude envers ses sujets. Il représente aux ju- ter le procès aux généra ;ix mêmes, qui se

ges séculiers la nécessité que leur imposent réfugièrent à Autun, dans l'église de Saint-
leurs charges de suivre exactement les rè- Symphorien. Le roi y vint le 22 août 583,
gles de la justice et de l'équité, dont la prin- qui était le jour de la fête de ce saint, et
cipale est de contenir les peuples dans leurs nomma quatre évêques avec quelques sei-
devoirs à l'égard de Dieu, pour cela, u C'est gneurs de sa cour, pour faire rendre compte
ajoute ce prince, que nous ordonnons de aux généraux de leur conduite. Ils sortirent
célébrer les jours du dimanche, auxquels de leur asyle sur la parole qu'on leiu- donna
nous honorons le mystère de la résurrec- qu'ils auraient la liberté de se justifier. Le

tion, et toutes les autres solennités où tout roi leur fil de grands reproches sur les dé-

fe peuple s'assemble dans l'église selon la sordres qu'ils avaient commis ,


principale-

coutume. Nous voidons qu'en ces saints jours ment sur les incendies et le pillage des égli-
tous s'abstiennent de tout travail corporel, ses, sur la manière indigue dont on avait
hors d'apprêter à manger. dD défend même ti'aité les reliques des saints martyrs pour
la plaidoirie, et veut que les prévaricateurs, emporter l'or, l'argent, et les pierres pré-
sont du nombre des clercs, soient punis
s'ils cieuses de leurs châsses ; sur les mauvais
suivant les canons; et que s'ils sont laïques, traitements qu'on avait faits aux prêtres et
on les punisse selon la rigueur des lois civi- aux ecclésiastiques puis il ajouta « Faut-U
;
:

les. Le droit d'asile avait aussi été confirmé s'étonner si nos guerres ont des succès mal-
par le huitième canon du concile dent nous heureux, elles sont plus contre Dieu que con-
venons de parler Contran fut le premier à
: tre les ennemis de l'État. Nous brûlons les

Grep.Tiiron.| l'observer religieusement. Célébrant à Châ- églises que nos ancêtres ont bâties, nous
IX, up.
lib.
lons-sur-Saone, la fête de saint Marcel, lors- trempons nos mains dans le sang des minis-
qu'il s'approchait de pour commu-
l'autel tres de l'autel, pour lesquels ils avaient tant

nier, un homme s'avauça, comme pour lui de respect et de vénération. Je suis respon-
parler mais dans l'empressement où il était
;
sable à Dieu de tous ces désordres, et pour

de faire son coup, un couteau lui tomba des en détourner le châtiment, je n'épargne-
mains. 11 fut arrêté aussitôt et on trouva ,
rai pas les vôtres. » Celui des généraux qui

qu'il en tenait encore un autre. Conduit hors était chargé de répondre pour tous les au-

de l'église et mis à la torture, il confessa tres, montra qu'il n'y avait point de leur

qu'il avait été envoyé pour tuer le roi, et faute dans tous ces excès que depuis long- ;

que l'on avait choisi l'église pour cet atten- temps il n'y avait aucune discipline dans les
tat, parce qu'il n'y était pas gardé comme armées que le soldat était eu possession de
;

ailleurs. Il déclara les complices, qui furent mépriser les ordres des ducs et des comtes;
punis de mort; mais le roi lui donna la vie, et que s'il arrivait quelqu'un d'entr'eux
;'i

parce dans l'église. A la


qu'il avait été pris de vouloir empêcher le pillage, il n'était
Tom. V Con-
ni., p«g. 553,
suite de V Ordonnance de Contran, on a mis point en sûreté de sa vie que si l'on entre- ;
et hrtg. Tu-
roo..nl'.VIll
dans le cinquième tome des Conciles un long prenait de faire quelque exemple de sévé-
ca]>. xxA.

passage de saint Grégoire de Tours, qui rité, aussitôt il s'élevait une sédition dans le

contient une partie du discours de ce prince camp qn'culin la trop grande bonté du roi
;

aux généraux de son armée, à cette occa- empêchait que les généraux ne fussent maî-
sion." Il s'était chargé de la guerre contre tres de leurs troupes à cet égard. Toute la

les Espagnols, et il avait fait entrer sou ar- colère du prince aboutit à déclarer qu'à l'a-

mée dans le Languedoc, se promettant d'en- venir on punirait de nioil tous ceux qui con-
lever toutes ces provinces aux Coths; mais treviendraient aux ordonnances qu'il avait

pour discipline des troupes. Suit


cette guerre ne lui fut pas avantageuse. Ses faites la
^^ u. VCo-

troupes contraintes de se retirer, firent de dans le même tome des Conciles, le traité de «"•• (*(. î'.J
[Vl* SIÈCLE.] CJIAIMTRK XXXIll. — PI^-LACK I, PAPE 327

paix entre Gonti'jui et Gliilil(^berl : il l'ut pro- bert et Gliilpéric 1", Il mourut le 28 de mars FrMo-,-.,ln
Clirnn r«(i.n
jette dans d'Audlau, en Alsace, au-
la ville de l'an .393, et fut enterré dans l'église de Almun,llli,]il
cnp. LUX,
trefois ville iinpôriiilo, et conclu an mois de Saint-Marcel, ;\ Gliftlons, oi'i il avait fondé un
novembre de l'an 387, en pn'senro dtî plu- monastère , psalmodii; perpé-
et établi la

sieurs ëvèques et des grands du parti des tuelle, comme Sigismond avait fait
saint
deux rois. Le but de ce traité fut d'assurer dans le monastère d'Agaune. Quelques an- Tnm. vcir
'" '"^' "°
la succession de Contran .'i Childebert, et nées avant sa mort, il avait fait assembler '

d'ôlcr tous les sujets de brouilleric que la un concile de dix-sept évéques à Valence, à
mort précipitée do Gliilpéric avait causée. qui il demanda la confirmation des dona-
Les deux rois jurèrent à. la fin de ce traité, tions faites ou k faire aux Lieux-Saints, soit
par le nom du Dieu tout-puissant, par l'in- par lui, soit par Clodeborge et Clodchilde
séparable Trinité, et par le terrible jour du ses filles, consacrées à Dieu, Le concile lui
jugement, d'en observer tous les articles qui accorda ses demandes, nommément à l'égard
Gold^sl.loiiii peuvent se réduire à dix ou onze. On attri- des donations faites aux églises de Saint-
1 CiQ!>l. tni*
|«r.
f.f. IJ,
bue au roi Gontran quelques autres lois, Marcel, de Ghûlons, et de Saint-Symphorien
tom. Ill, (t^'t
603, 61^.
mais ce ne sont que des canons des deux d'Autun il défendit sous peine d'anathème
;

conciles de Màcon ou des fragments de, aux évoques des lieux, et aux rois, de rien
quelques discours de ce prince rapportés par ôter ou de diminuer de. ces biens à l'avenir.
saint Grégoire de Tours. Contran était fils Saint Grégoire de Tours attribue à ce prince
de Glotaire I" et d'Ingondc. A la mort de des miracles, même de son vivant, et l'Eglise
son père, arrivée en 361, il en partagea les l'a mis au nombre des saints.

États avec ses trois frères, Charibert, Sige-

CHAPITRE XXXIII,

Pelage r, pape [559],

Pilaga, dli,
ère de l'Egli- 1. Pelage, romain de naissance ', fils de Pierre évoque de Jérusalem, |et Hypace d'É-
se Ttiniaino ,
Jean, qui avait été vicaire du préfet du Pré- plièse. Paul fut déposé, et Zo'ile mis à sa
liao|)iet'nS:l6*
toire, fut un des clercs de l'Eglise de Rome place. Pelage passa d'Antioche à Jérusalem,
que le pape Agapet mena avec lui à Gons- d'où il vint à Gaza. Après son retour à Gons-
tantinople, en 536, Gomme il se disposait à tantinople, quelques moines de Palestine,
retourner en Italie vers le mois d'avril de la qu'il avait vus en passant, lui apportèrent
même année, il le déclara * son apocrisiaire des extraits des livres d'Origène, le priant
auprès de l'empereur Justinien. Pelage as- de leur aider à en poursuivre la condamna-
sista au concile que Mennas, patriarche de tion auprès de l'Empereur. Pelage n'eut
Constantinople, tint en cette ville le 2 mai point de peine de se prêter à leurs désirs,
suivant. Il favorisa autant qu'il dépendit de parce qu'il était opposé à Théodore, évêque
lui l'élection de Vigile, que l'impératrice de Césarée en Gappadoce qu'il savait être ,

Tliéodora fit mettre sur le Saint-Siège après origéniste, mais qui avait beaucoup de cré-
la mort d'Agapet, arrivée le 22 avril précé- dit à la cour, S'élant donc joint ' au patriar-
dent; et sachant que l'Empereur avait donné che Mennas, ils poursuivirent ensemble la
ses ordres pour le renvoi du pape Silvérius condiujination d'Origène, qu'ils obtinrent
à Rome, courut eu diligence pour empê-
il d'autant plus aisément, que Justinien * ai-
cher que ces ordres ne fussent exécutés. mait décider sur la religion.
à
2. Vers l'an 340, ce prince l'envoya ;\ An- 3, En
543, Pelage retourua à Rome, après relourDu
IfMi'ne, '"5 tioche, avec commission d'aller à Gaza pour un assez long séjour à Gonstautinople, où il ^me ot Hé-
Tollla.

ôter le pallium à Paul d'Alexandrie et le dé- acquis une grande faveur auprès de
s'était '

poser. Il avait avec lui Éphrem d'Antioche, l'empereur Justinien, L'année suivante 346,

' Tom. V Concil., pag. 787. 3 Liljer. ibid., cap, xxin, — * IbUl.
- Libérai, in Breviar., cap. xxu. ^ Procop, lib, 111 De Bello Golh., cap. xvi.
328 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Tolila qui avait pris Rome par intelligence solennelle de l'Église de Saint-Pancrace à

le 17 décembre, étant venu faire ses prières cellede Saint-Pierre,où('lantariivé au chant


clans l'Église de Saint-Pieirc, Pelage s'avan-
des Psaumes et des cantiques spirituels, il
ça vers lui, tenant l'Évangile entre ses mains,
monta sur l'ambon, et tenant les saints Évan-
Seigneur, épargnez les vôtres. » giles et la croixdenotreSeigneur sursa tête,
et lui dit :

Tolila lui répondit, en lui insultant » Vous : il jura publiquement qu'il n'était point cou-
donc à présent en posture de sup- pable du ciime dont on l'accusait, et qu'il
venez '

pliant? C'est,— répartit Pelage, parce que n'avait fait aucun mal au pape Vigile le :

Dieu m'a soumis à vous mais, Seigneur, épar- ;


peuple parut satisfait. Après quoi Pelage pria
les assistants de concourir avec lui a ban-
gnez vos sujets. » Le roi se rendit à ses priè-
nir la simonie des ordinations, depuis le der-
res, défendit aux Goths de tuer pei-sonne, et
d'insulter aux femmes mais il leur permit ;
nier degré du ministère ecclésiastique jus-

le pillage.
qu'au premier, afin que l'on ne promût à l'a-
Il écrit cur 4. Cependant Théodore de Cësarëe se pré- venir que des personnes de probité connue
Troj^CU-
et instruites dans l'ouvrage de Dieu. Il donna
Irs
JiilfC--. valut de l'absence de Pelage pour se venger
de la cond^mnalion d'Origèue, par celle des en même temps l'intendance des biens de
I Trois-Chapitres. L'édit qu'il avait obtenu de l'Église a Valcnliii, sou nutaiie, homme crai-
Justinien sur ce sujet étant passé jusqu'à gnant Dieu, qui lit restituer à toutes les églises

Rome, Pelage et un autre diacre de cette les vases d'or et d'argent et les voiles qu'on
église, nommé Analolius,
' écrivirent à Fer- leur avait enlevés. Il avait commencé à bâ-
l'Église des apôtres saint Phili|)pe et saint
rand, diacre de Carthage, de délibérer sérieu- tir

sement sur cette affaire avec son évêque, et Jacques lorsqu'il mourut le 2 mars 339, après
évêques. d'Afrique les plus zélés trois ans et dix mois de pontificat.
les autres
et les mieux instruits et de lui faire savoir;
6. Nous avons seize lettres ' sous son nom, Sf leltrf>
Tom V CoL-
ce qu'ils auraient résolu en commun. Pelage dont la première, qui est adressée au pape cil. jmj. IM.

Vigile, est datée du consulat de Jean et de


et Anatolius ne dissimulaient pas dans leur
lettre, que la condamnation des Trois-Cha- Narscs date qui en fait seule voir la suppo-
:

pitres n'eût été faite par la suggestion des sition, puisque c'était l'usage alors de dater

acéphales contre le concile de Chakédoine et d'après le consulat de Basile, qui tombe à


contre la lettre de saint Léon à Flavien. l'an 341. Ce pape ne date pas autrement les

II «ffompa- 5. Pelage fut du nombre de ceux que le lettres qui sont certainement de lui. Depuis

Vi^ilfl k ' ans* pape Vigile amena avec lui à Constanlinople Basile, on ne trouve plus de consulats suivis.
lanllnoplo en
uU. Il est é^u en 347. Il l'accompagna aussi à son retour C'est pourquoi la manière de compter chez
pajin fn 55S.
Sa mort en en 353 mais Vigile mourut à Syracuse en
;
les Romains par les consulats, établie depuis
533.
Sicile le 10 janvierdelà même année. Après le commencement de leur république, cessa

trois mois de vacance. Pelage fut élu pour lui en cette année, et on compta dans la suite
succéder. Soupçonné d'avoir eu part aux par les années du règne de l'Empereur et
mauvais traitements qu'on avait fait souUrir les indictions, en y ajoutant pendant quelque

à son prédécesseur, et d'être complice ' de temps les années qui s'étaient écoulées de-
sa mort, il ne se trouva point d'évêques qui puis le consulat de Basile. Cassiodorc dans
voulussentl'ordonner, sinon Jean, évêciuede sa Chronique compte jusqu'à vingt fois, ou
Pérouse, et Bonus de Férenliu avec André, vingt années d'après le consulat de Basile. Il

prêtre d'Oslie. Cette ordination extraordinai- faut ajouter que la lettre qui est intitulée :

re, qui se fit le 10 avril 333, lui attira l'aver- De Pélatje à ^'if/ile, n'est qu'un
de pas- tissu

sion du peuple. Il y eut même plusieurs des sages do la trenlc-cin([uiènic lettre de saint
plus gens de bien , des plus sages et des plus Léon, et des traités d'Itace contre Varimade.
nobles (jui se séparèrent de sa communion, Le dessein en est de montrer que le Père et
pour le soupçon d'avuir été cause de la mort le Filsne sont qu'un seul Dieu.
de Vigile. Pour s'en purger, Pelage, de l'avis La seconde let'rc est au [latrice Narsès,
7. L«llro> su
Ivïirirf» N»r-
du patrice Narsès qui commandait pour l'Em- commandant pour l'Empereur en Italie. Pe- s^-. p»p. '91.

'
pereur en Italie, ordonna une procession lage le prie de prêter son secours h deux de

' Procop., lili. m fle Bello Golh., cnp. xx. des fmamonts de lettres et les lettres npticrypheg
• Faciiiiil., lil). IV, cap. ni. an Irmie LXIX de la Patrnlogie. ool. 331 et fiiiv.
9 Lib. l'onlif., tom. V Concil., pag. 787.— ' ftiid. {i:<'dilrur.)
' Ou lea trouve avec \iue uotice par Auasla:;e,
[Vl" SIÈCLE.] CIIAPIXnK XXXIII. — PELAGE I, PAPE 329

SCS lëgnts, Pierre, prôlre, cl Projectiis, no- laissait se glorifier de leur rusticité au mé-
taire do l'Église romaine, qu'il envoyait pris du Siège apostolique : « S'ils avaient,
pour proct^ilcr contre doux évèqiics, Thra- ajoute-l-il, quelque dilliculté sur lejuge-
ciufi et Maximilien, qui troublaient l'ordre ment du concile universel qui s'est tenu à
des églises en s'appro|)riant tous leuis n;- C"nst;intiuo|)le au sujet des 'frois-C/iojtitres,
veuus. Il représente i\ Narscs qu'en aidant ils devaicnl suivant l'usage envoyer au Siège
de son pouvoir i\ réprimer ces deux évoques, apostolique quelques-uns d'entr'eux capa-
ilne doit point craindre de tomber dans bles de proposer leurs raisons, et d'entendre
quelque faute, puisque; les lois divines et les nôtres ; et non pus fermer les yeux pour
luimaincs veulent que la puissance sécu- déchirer l'Eglise, qui est le corps de Jésus-
lière sévisse contre ceux qui troublent ini- Christ. » Comme il savait que la piété du
quement la paix de l'Église, et qui ne lui palrice était accompagnée de timidité, il le
sont plus unis. Il souhaite qu'ils soient punis rassure, en lui disant qu'il ne doit pas ap-
sur les lieux, ou qu'ils soient envoyés à préhender d'user de son pouvoir contre les
Rome pour y recevoir la peine due à leurs schismaliques, puisqu'il y a '
mille exem-
fij. 75!. excès. C'est encore à Narsèsquela troisième ples et mille constitutions qui autorisaient
lettre est lui dit qu'il ne
adressée. Pelage les puissances publiques à punir les schis-
doit point aux vains discours de
s'arrêter matiques non-seulement par l'exil, mais en-
ceux qui accusent l'Église d'exciter une per- core par la confiscation des biens, et par de
sécution quand elle réprime les crimes et dures prisons. Narsès fit ce que le Pape avait p^ .^^

cherche piocurer le salut des âmes; qu'on


i\ demandé de lui; mais les scliismatiques,
ne persécute que lorsqu'on contraint à mal pour se venger de sa conduite à leur égard,
fmre qu'autrement il faudrait abolir toutes
;
l'excommunièrent. Il eu écrivit au Pape qui


les lois divines et humaines qui ordonnent lui témoigne dans sa réponse qui est la ,

de punir les méchants, et de récompenser quatrième lettre, combien il est sensible à


les gens de bien qu'il est clair par les Écri-
;
l'injure qu'on lui a faite. Il lui fait envisager
tures canonicpies que le schisme est un mal cet affront, comme un etlèt de la Providence
qui doit être réprimé, même par la puissance pour le préserver du schisme de ces évêques.
séculière; et qu'il n'y a aacun doute que En même temps il l'exhorte à punir cet at-
ceux-là ne soient dans le schisme qui se sont tentat, et à envoyer les coupables à l'Empe-
séparés du Siège apostolique, et qui s'effor- reur, nommément Euphrasius, l'un des évê-
cent d'élever un autel contre l'Eglise univer- qiies scliismatiques ,
qui avait commis un
selle. 11 cite les décrets du concile de Chalcé- homicide et un adultère ; et Paulin , évêque
doine contre les schisraatiques. et ce qu'en d'Aquilée, qu'il traita d'usurpateur, et qu'il
a dit saint Augustin lui-même dans son Ma- dit devoir être privé du nom et du rang d'é-
nuel à Laurent. Ensuite il réitère la prière vêque à cause de sou schisme c'était l'évê- ;
„,_
qu'il avait déjà faite à Narsès, d'envoyer sous que de Milan qui avait ordonné Paulin. Com-
bonne garde à l'Empereur ceux qui faisaient me cette ordination était contraire aux ca-
de semblables entreprises le faisant sou- ; nons. Pelage presse Narsès dans sa cinquiè-
venir du zèle qu'il avait fait paraître pour la me lettre de les envoyer tous deux sous
religion, lorsque nonobstant les hostilités des bonne garde à l'Empereui-; parce que celui-
Goths etdes Frfincs dans i'Istrie et la Vénétie, ci ne pouvait être évêque, ayant été ordonné
il n'avait pas souffert que l'on ordonnât un contre l'ancienne coutume et que celui-là ;

évêque à Milan jusqu'à ce qu'il en eût écrit devait être puni pour avoir fait une ordina-
à l'Empereur et reçu ses ordres; et avait tion contre les rèt-des. Pélasre s'explique „
fait conduire à Ravenne l'évêque élu et ce- plus clairement dans une autre lettre où il
'"•

lui qui devait l'ordonner, en les faisant pas- dit que l'évêque de Milan n'avait pu ordon-
ser l'un et l'autre au milieu des ennemis. ner Paulin, à cause qu'il était lui-môme
Le Pape lui fait des reproches, mais avec po- schismatique et que d'aillems pour l'or-
;

litesse, de ce que pouvant réprimer les évê- donner légitimement il aurait fallu qu'il l'or-
ques de Ligurie, de Vénétie et d'Istrie, il les donnât dans sa propre Eglise, c'est-à-dire.

' Mille alla exempta et constituliones sunt qui- proscriplione reruni et dura custodia per piibli-
bus eoidenter agnoscitur, ut facienles scissiiras cas polesUUes debeanl coerceri. Epist. 3, pag. 793.
in sancla Ecclesia, non solum exUiis sed etiam
330 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
dans parce qu'encore que
celle d'Aqiiilée : tez ' pas mon nom suivant la coutume, dans
l'ëvèque de Milan d'Aquiléc eussent
et celui les saints mystères, puisque tout indigne que
dû se faire ordonner par le Pape, néan- j'en suis, c'est en moi que subsiste à présent
moins à cause de la longueur du chemin, la fermeté du Siège apostolique par la suc-
l'ancien usage était qu'ils s'ordonnassent cession de l'épiscopat? Mais de peur qu'il ne
mutuellement, mais à condition que le con- vous reste à vous, et aux peuples confiés à
sécrateur viendrait dans la ville du consa- vos soins, quelque soupçon sur notre foi, je
cré, soit afin qu'il fut plus assuré du con- souhaite que vous sachiez que je conserve
sentement de l'Eglise vacante soit pour , celle que le concile de Xicée a confirmée par
montrer que l'évêque qu'il consacrait ne lui son autorité, qui a été établie parla doctrine
serait point soumis. Pelage dit dans sa lettre des apôtres, et expliquée dans les conciles
à Narsùs qu'il n'a jamais été permis et
'
de Constantiuople, d'Éphèse et de Chalcé-
qu'il ne le sera jamais, d'assembler un con- doine, sans y avoir rien ajoute ni retranché ;
cile particulier pour examiner un concile et que j'anathématise quiconque veut affai-
général, mais que si l'on a quelque difficulté blir en partie, ou révoquer en doute la foi
sur ce sifjet l'on doit consulter le Siège
, de ces conciles, ou le tome du bienheureux
apostolique pour lever les doutes que l'on Léon, évèque du Siège apostolique, confirmé
pourrait avoir sur ce qui a été décidé dans dans le concile de Clialcèdoine. Enseignez
le concile général. donc avec un esprit de douceur, comme il
Lettre aux 8. Les évèques de Toscane , Gaudèce, convient i des évèques, ceux qui sont dans
é»ê^tic* de
ToïUDe, p3^. Maximilien, Géronce, Juste, Térencien, Vi- l'ignorance, et employez tous les moyens
791.
tal et Laurent avaient écrit au pape Pelage nécessaires pour les retirer de l'erreur. Si
par Jourdan, défenseur de l'Église romaine, après vos avis il reste du doute à quelqu'un,
dans le dessein de lui faire approuver le qu'il se hâte de venir à nous, afin qu'ayant
schisme qu'ils avaient fait au sujet àes'T7vis- connu la vérité par nos instructions, il ren-
Cha/iilres. Pelage, étonné d'une semblable tre dans l'unité de l'Église. » Cette lettre est
proposition, la rejeta avec d'autant plus de du 15 des calendes de mars, la quinzième
raison que ces évèques s'étaient même sé- année après le consulat de Basile, c'est-à-
parés de la communion du Pape, dont ils ne dire du 16 février 356.
récitaient plus le nom dans les sacrés dip- 9. La lettre suivante est sans date; mais il Letlrelteut
le leu^le de
tyques. Il leur fait voir par le témoignage de paraît qu'elle fût écrite en même temps que pj !>{•

saint Augustin que le foudement de l'Eglise la précédente, puisqu'elle y est jointe dans
étant posé sur le Siège apostolique, ceux-là les anciens manuscrits. Le pape Pelage l'a-

sont nécessairement dans le schisme, qui ne dressa à tout le peuple de Dieu, engagé ce
veulent plus avoir de communion avec l'évê- semble, dans le schisme avec leurs évèques.
que de ce Siège, ou qui n'en reconnaissent Il y f;iil profession de recevoir ' les quatre
plus l'autorité « Comment donc, ajoule-t-il,
: conciles généraux, tous les canons reçus par
ne croyez-vous pas être séparés de la com- le Saint-Siège et les lettres de ses prédéces-
munion de tout le monde, si vous ne réci- seurs, depuis le pape Célestin jusqu'à Aga-

' nec Ucebil particularem


JVec licuil aliqiiando dalionis papw Celestini, Sixli, et prœ omnibus
synodum scd quolien aliqxia de uni-
cintgref/are : beati Leunis, nec non eliam successorum ejus
rersdU isynoilo aliquibux duhitatio iinscilur, ad Uilarii, Simplicii, Felicin, Getasii, Ànastasii, Syui-
rcrijiiendnm deen qiind non intelligiinl rationem, machi, Donnisdœ, Joanuis Fcticis, IJnnifacii,
,

ad apostolicam sedem jiro rccipicwla rations coii- Joannis allerius, cl Àgnpeti, pro defensionr fi-
vcniant. Kjiist. :i, paj;. 104. dei cathulicœ, et pro firmitatc supra scriptnrum
* (Juomodo vos ab universi orbis cotnmunione quatuor synodoruin, et contra hœreltcos, tam ad
separatos ease non crfditis, si niei inler sacra principes, quani ad episcopos, tel quosliliet alios
mysleria secundum consurtudini'm nominis me- per Urientcni et Illyricum alque Ddrdaniam.alias-
moriam relicelU in quo licet indigna, Aposlolicœ qne prorincias diversis temiioribus niissas, invio-
sedis pet successiontin episcopaius prasenli lem- labiliter, adjuvante Christo Vomino noslro, tue
pore videlis consislere firmilatem? Epist. 6, pag. cuslodire profiteur; et omîtes quos ipsi damnavc-
701. runt, Itahere damnalos; et quos ipsi receperunt.
' Sed et canones qu»s Sedes apostolicasuscrpit, prœcipue renerabiles episcopos Tlieodoretum et
sequor et venernr, et Deo adjuvante defendo, ne- Ibam, nec inter orthodoxos renerari. Epist. 7,
guc vel de hac professione relicere, aiil discedere pag. 795.
aliquando promittv. Lpislolas eliam bealw rccor-
[Vl" SIÈCI.P,.') nuAPiTiiE xxxm. — pelage i, pape. :m
pot, cl d'honorer comme
orthodoxes les yi5- et les évoques des Gaules étaient contents
luirablcs évoques Tiiéodoret et Ibas, témoi- de sa profession de foi,
gnant être disposé de rendre compte de su 11. Un la trouve dans la Ictti'O que Pi;!age ,„, ''"'cud'"-

écrivit le 11 décembre de l'au '"'"•s-"»-


foi ù tous ceux qui lehii demundcraient ; se au roi .^j.'ifi

faisant un devoir de suivre ce que l'apôtre Cliihlebert. Ce prince lui avait envoyé une
saint Pierre a ordonné à cet égard. 11 recon- ambassade pour lui demander des reliques
naît que cette foi est en lui par la miséri- des apcjlres saint Pierre et saint Paul et de
corde de Dieu; el il la croit si véritable qu'il quelques autres martyrs, et en même temps
souhaite delà conserver toute sa vie, cl d'ê- la (jualité de vicaire et le pallium pour Sa-
,

tre présenté avec elle au tribunal de Jésus- paudus. Ruffin,chef de cette ambassade, dit
Christ : disant anallirme à qui pense, croit el au pape (jue quelques-uns avaient ri'pandii
proche le contraire. des semences de scandale en se plaiguaiit ,
*"'•

I.MIr , » s,. dO. Les deux lettres suivantes sont adres- que l'on avait donné atteinte à la foi catho-
'"^-
79Ti

sées à Sapaudus archevêque d'Arles la
, : lique. Il pria aussi Pelage suivant l'ordre ,

première n'est qu'une lettre d'amitié par la- qu'il en avait du roi Childebert, de d(;clarer
quelle le Pape lui témoigne son désir d'être qu'il recevait en tout le tome ou la lettre

en relation avec lui la seconde est une ré-


; de saint Léon ù Flavien, ou d'envoyer lui-
ponse à celle de Sapaudus. Cet évêqne avait même sa confession de foi le Pape répondit :

chargé Félix, porteur de sa lettre de s'expli- aux trois demandes du roi par trois lettres
''"
quer de vive voix sur certaines choses avec ditlereutes. Il dit dans la première, que de-
le Pape on ne sait de quoi il était question.
: puis la mort de l'impératrice Théodora, il
Il y a trois autres lettres à Sapaudus. Dans n'y avait plus de disputes sur la foi en Orient;
Ff. 7.5.

l'une Pelage le presse de lui écrire sur sou qu'on avait seulement examiné quelques ar-
iutrouisatiou, comme il avait fait ù ses pré- ticles hors la foi dont l'explication lui pa-
'
,

décesseui's , et d'engager le patrice Placide raissait trop longue pour être renfermée
son père à envoyer à Rome des habits el des dans une lettre que pour lui mettre l'es-
;

lits pour le soulagement des pauvres et à , prit en repos à lui et à tous les évêques des
employer pour cet etlet les revenus des Gaules, il anathématisait tous ceux qui s'é-
biens que l'Église romaine possédait dans loignaient en quelque façon que ce fût de la
(.on. les Gaules. Dans l'autre il le déclare son vi- foi que le pape saint Léon avait enseignée

caire dans tout ce royaume, à l'exemple de dans ses lettres, et que le concile de Chalcé-
ses prédécesseurs, à la charge de remplir doinc avait suivie dans sa définition de foi.
cette place conformément aux saints canons, Il prie donc le roi et les évêques de son
aux règles des Pères et aux décrets du Saint- royaume de ne faire aucune attention aux
Siège il ajoute que pour honorer sa nais-
: vains discours que répandaient les amateurs
sauce et son mérite personnel, il lui accorde des scandales : « L'empereur Justinien, ajou-
l'usage du pallium. La troisième est pour a détruit toutes les hérésies tpii jus-
te-t-il ,

lui recommander les Romains que la crainte qu'à son règne avaient à Constantinople
des ennemis avait contraints de se réfugier lems évêques et leurs églises avec de grands
fil.'
on France il le fait encore souvenir d'en-
: revenus et quantité de vases précieux : il

voyer à Rome des habits pour les pauvres. leur a ôté leurs églises etdonné tous leurs
Toutes ces lettres sont datées d'après la biens aux catholiques. Ceux qui sont demeu-
quinzième et la seizième année du consulat rés dans leurs erreurs s'unissent entr'eux et
de Basile, c'est-à-dire de l'an So6 et 557. La font tout leur possible pour troubler et divi-
raison qu'avait le Pape de presser l'envoi ser l'Église cathohque. Pendant tout le temps
des habits pour les pauvres, est que par les que nous avons été à Constantinople, ils ont
ravages des ennemis l'Italie était réduite à envoyé ici en Italie des lettres sous notre
une si grande extrémité que les plus hon- nom, où ils avançaient que nous disions que
nêtes gens et ceux qui avaient autrefois du l'on avait altéré la foi orthodoxe. Mainte-
bien n'avaient plus de quoi subsister ni nant ils produisent encore contre nous des
même se couvrir. Le Pape priait aussi Sa- lettres sans nom afin que les auteurs n'en
,

paudus de lui marquer si le roi Childebert soient pas connus. Ce sont surtout les nes-

,v
' Quirdam capitula extra fidem fuerunt agilata, plecli sermone. Epist. 10, pag. 798. Il paraît que
de quibus longum est, ut epistolari possint com.- cela s'cnteud des Trois-Chapitres.
,,

332 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


loriens de Constantinople, qui prétendent en un corps dans le sein de Marie par l'opération
vain n'être pas éloignés du sentiment du du Saint-Esprit que cette chair a été animée
;

concile de Chalcédoine du pape Léon,


et d'une âme
raisonnable, et qu'étant véritable-
puisqu'ils ont l'un et l'autre condamné Nes- ment né de la Sainte Vierge, elle est véritable-
torius en ce qu'il enseignait deux natures sé- ment mère de Dieu, parce qu'elle a enfanté le

Ptf. 700. parées et divisées. Ici même ils ont tâché Verbe de Dieu incarné que l'union s'est faite
;

de séduire quelques évoques simples, qui de la nature divine avec la nature humaine en
ne savent pas les premiers éléments de la une seule personne, qui est celle du Fils; en
foi, qui n'entendent pas la question, et ne sorte que c'est le même qui est Fils de Dieu et
comprennent point quel grand bien c'est de Fils de l'homme consubstantiel au Père se-
,

ne pas s'écarter de la foi catholique. Ce qui lon la divinité consubstantiel à nous selon
,

nous a fait soull'rir de longues persécutions l'humanité, en tout semblable à nous excepté
à Constantinople c'est que nous avons té-
, le péché; que les deux natures depuis leur

moigné que ce que l'on avait agité dans les union sont demeurées indivisibles, parce qu'il
alfairesde l'Église du vivant de l'impératrice n'y a qu'un Clu'ist, qui est en même temps
Théodora, nous était suspect. Pour ce qui Fils de Dieu et Fils de l'homme mais aussi ;

est de l'empereur Justinien il n'a permis en qu'elles n'ont été ni confondues ni changées
aucun temps que l'on violât la doctrine éta- l'une en l'autre parcelle union, parce qu'elles
blie dans le concile de Chalcédoine et dans ont chacune conservé toutes leurs propriétés;
les lettres de saint Léon. Pelage finit cette
)i qu'à raison de cette union personnelle, nous
lettre qui est du 11 décembre 556, en disant disons que Jésus -Christ a souffert dans sa,-
qu'il avait déjà envoyé par des moines de chair, et qu'il est impassible selon sa divi-
Lérins les reliques des saints apôtres et des nité.Pelage s'explique aussi sur la résurrec-
martyrs, et qu'il envoyait encore par Homo- tion des morts,en disant que tous ceux qui
bonus sous-diacre de l'Église romaine, celles sont nés d'.\dam et d'Kve, ou qui en naîtront
que les ambassadeurs de Childebert avaient jusqu'à la consommation des siècles, res-su-s-
SOI. demandées. Il marque dans la seconde let- citeront dans la mêmecomparaî-
chair, et
tre qu'ayant trouvé dans les archives de son tront devant le tribunal de Jésus-Christ pour
Église ,
que ses jirédécesseurs avaient ac- y recevoir la récompense ou la peine éter-
cordé aux arclievcipics d'Arles la cpialité de nelle qu'ils auront méritée suivant leurs bon-
vicaire du Pape dans les Gaules, et le pal- nes ou mauvaises actions. Dans la lettre :\
liiim, il accordait l'un et l'autre à Sapaudus. laquelle est jointe cette confession de foi, il

La troisième lettre contient une confes- dit au roi qu'il avait déjà déclaré dans une
sion de foi où le Pape explique fort au long de ses autres lettres, qu'il recevait en tout
les mystères de la Trinité et de l'Incarna- colhî de saint Léon à Flavien. 11 y a une pij.«c>i

«03. tion. Il dit sur la Trinité qu'il n'y qu'un Dieu quatrième lettre de ce pape à Childebert, où
en trois personnes le Père le Fils et le
, , il recommande à ce prince de maintenir Sa-

Saint-Esprit que le Père est tout-puissant


;
paudus dans SCS droits de Vicaire du Saint-
éternel, non engendré que le Fils est do la
;
Siège dans les Gaules. 11 parait que cet évo-
substance du Père, engendré de lui avant que s'était plaint à Rome, de ce que sans
tous les siècles, sans aucun commencement ;
égard à ses droits, le roi avait voulu le faire
qu'il est égal , coéternel et cousubstantiel à juger par un autre évêque, qu'il avait lui-
celui qui l'a engendré ;
que le Saint-Esprit même ordonné.
est tout-puissant, égal au Père et au Fils et
, 12. Outre ces lettres, Luc Ilolstéuius en a
de
Fntftmenlt
(]tif1qu4«
consubstantiel à l'un et à l'autre; qu'il pro- donné quelques autres sous le titre de Frag- nitf»
An
|-ltr|tj
pa|.« P4lH
cède du Père sans commencement de temps, ments^ parce qu'il n'y en a aucune qui soit fc, ilg.WS.

et qu'il est l'Esprit du Père et du Fils. Il entière. La première est à Jean, patrice le :

prouve l'unité de nature dans les trois per- Pape l'exhorte à ne point communiquer avec
sonnes divines par la forme du baptême les schismatiques, et de regarder comme il-
qui, suivant le préceple de Jésus-Christ, est légitimes les ordinations des évèques qui se
administré au nom et non pas aux noms
, faisaient parmi eux. La raison qu'il en donne,
du Père du Fils et du Saint-Esprit. Puis
, c'est qu'ils sont séparés de l'Église catho-
venant au mystère de l'Incarnation, il con- lique, qui est une, et seule fondée sur les
fesse qn'unn personne de la Trinité, c'est à- apùtres, par qui la foi a été répandue dans

dire le Fils est né selon la chair, en prenant toute la terre. La seconde, à Viatorel à Pan-
[Vl" SIÈCLE.] CllAIMTRli; XXXIV. — JEAN III ET PELAGE U, PAPES. 333

crace, est aussi pour leur inspirer l'éloigne- de son diocèse, nommé
Pancelle pour y ,

meiit dos scliismaliijues, disaiil avec saint mettre de sainte Cantiane, mar-
les reliques
Auiîusliii, (ju'dii peul avec sriri'ti'. d{''loslcr tyre, à la charge (pic personne n'atu-a ('((• '

tout parti que l'on sait ne point communi- enterré en ce lieu que Maxime fondcia c(,'tte
;

quer avec l'Ef^Iise universelle, soit qu'ils s'en église en lui donnant des biens sullisants,
soient séparés par simplicité ou par igno- tant en terres, qu'en argent; que l'on ne
Epl.c..1,,, rance de cause. Il répète dans la troisième, pourra y construire un baptislaire, ni nom-
7ïi.
au patrice Valérien, une partie de ce qu'il mer un prêtre cardinal ou en titre po\ir la
avait dit au patrice Narsès, touchant la con- desservir; mais que Maxime sera obligé,
duite de l'Eglise envers ceux dont elle pu- lorsqu'il voudra y faire célébrer la messe,
nit les crimes pour les obliger à rentrer dans de demander à l'civèque un prêtre cet ef- .'i

la voie du salut; ce qui nis peut passer pour fet sans qu'aucun autre qui aura ('lé nom-
;

Par. Sud. une persécution. Dans la ([uatrième, il don- mé par lui, puisse célébrer dans celle église.
ne avis au patrice Céthégus, qu'il avait or- A ces conditions, le l'ape permet à ?]leu-
donné tni évéque Catanue, le troisième
;\ thère de la consacrer, mais sans messes pu-
jour d'apros son arrivée à Rome mais qu'il ; bliques. Il accorde sous les mêmes charges
avait dill'éré pendant un an l'ordination de h l'évèque Astère de consacrer l'oratoire que
celui de Syracuse, parce qu'il était marié, et l'abbé "Vindimus avait fait bâtir dans l'en-
qu'ayant femme et enfants, il y avait du ceinte de son monastère, près des murs de
danger que les biens de l'Eglise n'en souf- l'Église de Salerne. Les fragments des cinq
frissent du préjudice que voyant toutefois
;
lettres suivantes regardent des alTaires par-
que ceux de Syracuse n'en voulaient point ticulières qui ne sont pas connues. La der-
élire d'autre, parce qu'il ne s'en trouvait nière est à Laurent, évoque de Centumcelle;
point dans cette église, il avait cru devoir le Pape l'exhorte d'examiner soigneusement
passer par-dessus ces considérations, et l'or- la vie et les mœurs de trois personnes, dont
donner, après lui avoir fait donner une dé- l'une devait être ordonnée prêtre, l'autre
claration de ses biens, et promettre qu'après diacre, et la troisième sous-diacre dans la
sa mort, il ne de
laisserait rien des Liens même ville, suivant les lettres de l'Empe-
directement ni in-
l'Église à ses parents, ni reur; et d'avertir le prêtre de ne jamais"^
directement. U consent par la cinquième, célébrer les saints mystères sans y faire mé-
qui est h l'évèque Éleufhère, que le diacre moire du pape et de l'évèque diocésain.
Maxime bAtisse un oratoire dans un endroit

CHAPITRE XXXIV.

Les papes Jean III [572] et Pelage II [590.

1. Le successeur de Pelage dans le Saint- l'église des apôtres saint Philippe et saint
Siège, fut Jean III, surnommé Catellin, fils Jacques que son prédécesseur avait com-
d'Anastase, du rang des illustres. Il acheva mencée, y fit ^ peindre divei'ses histoires et

' Et ideo, frater charissime,


si in tua diœcesi cerdoteullatenus prœsumatur. l'ag. 809.
memorala constructio jure consistit, et nidhun - Caieat sibi presbyter ille nunquam se sine
corpus ibidem constat humanum, percepta prius noslri et lui nominis recitatione sacra mysteria
donatione légitima lel possessione itla et illa, celebrare. Itid. jiag. 810.
prœstanies liberos a fiscalibus titulis solidos tôt, ' Domnus Pelagius et domnus Joannes novœ

gestisque municipalibus allegatis, prœdictum ora- magnitudinis Ecclesiam apostolorum a solo œdi-
torium absque missis piiblicis solemniter conse- ficantes, historias diversas, tum in musivo, qtiam
crabis; Ha tamen ut in eodem loconec futuris tem- in variis coloribus cum sacris pingentes imagini-
poribus baptisterium coyislruatur, nec presbyte- bus, et mine usque hactenus a nobis venerantur.
rum constituas cardinalem ; sed quoliens missas Adriau. epist. ad Caroliim Magnum, tum. V Concil.
ibi forte maluerit, a dilectione tua noverit pos- pag. 788.
tulandum, qualenus nihil taie a quolibet alio sa-
334 HISTOIRE GI^NRRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
de saintes images, partie en mosaïque, par- par le concile de Vaison, en 529. [II existe
LIb. Pon-,
loir. V Ci.lic 1.
lie avec dos couleurs, et eu lit la dédicace. une autre de Jean III elle est adres-
lettre :

1-»E. «1».
U augmenta cl rétablit les cimetières des sée à Pierre, évêque de Havenne, et par la-
martyrs, et donna ordre que tous les diman- quelle ce pape lui accorde l'usage du pal-
ches l'église de Latraii y fournirait le pain, lium. Elle se trouve dans les Misceilanea de
le vin et le luminaire. Ce fut sous son ponti- Baluze, dans Mansi, tome III. On trouve les
ficat que les Hérules tirent des ravages dans lettressupposées dans la Patrologie latine,
la Toscane et dans d'autres parties de l'Ita- tome LXXII. Dom Pitra a publié dans le pre-
lie; mais Narscs qui commandait pour l'Em- mier volume du Spicikf/ivm Sulesmense, un
pereur les subjugua, après avoir tué leur exposé sur l'Hi'ptaleuque, fait par Jean, en-
LU. P. m. roi. Il défit aussi les Lombards qui étaient core diacre. Le savant bénédictin pense qu'il
lom VCi>ne"i
,.,5. i.ll,»i:., entrés en Italie sous la conduite de leur roi est question du Pape qui nous occupe, et non
PI m uoli*.

I>*. 12!. Alboin. Jean mourut le 13 juillet de l'an


III d'un autre Jean écrivain du ix* siècle, qui
572, après avoir ordonné en deux ordina- a laissé une Vie de saint Grégoire. Cet ex-
tions, au mois de décembre, trente-huit prê- posé contient des extraits des anciens Pères
tres, treizç- diacres et soixante-un évêques. sui'les livres de Moïse, de Josué et'des Juges.
Leilre Tan-
Mifieol allrl-
Nous avons sous son nom une lettre
2. On y trouve cités saint Clément, pape; saint
liuée k Jean
III. Ton. V
aux évêcpies de Germanie et des Gaules, Polycarpc, Ulpien , Origène, saint Hippo-
CODCII.
iU,
Jh^g.
qui fournit elle-même des preuves de sa sup- lyle, saint Pierre d'Alexandrie, saint Ililaire
position. La première se tire de la date qui de Poitiers, Tichonius, Tliéodore d'Antioche,
[Lettre véri-
table et eti'O- est du 14 des calendes d'août, Justin, consul saint Basile, Didyme, saint Grégoire de Na-
lé ftur l'ilep-
uteuque.] pour la sixième fois et Narsès, c'est-à-dire ziauce, Diodore de Tarse, saint Ambroise, Sé-
du 10 juillet 572. Or, il y avait déjà cinq vérieu de Cabales, saint Jean Cbrysostôme,
jours que ce pape était mort, et depuis l'an Ruffin,saint Jérôme, saint Augustin, saint
541 les papes ne comptaient plus par les con- Eucher, saint Victor de Capoue, Pacatus,
sulats. La seconde preuve est qu'on y avance, nom ignoré entièrement, les Pères du dé-
contre le sentiment unanime des anciens, sert, un anonyme. ]
que saint Lin et saint Clet n'ont été que des 3. La mort de Jean III fut suivie d'une Pria^e n :

«p. iellrc. &


chorévêques, qui aidaient saint Pierre dans vacance qui dura dix mois, après laquelle Grvrnire il à
AuDacair,
le ministère épiscopal en tout ce qu'il leur on élut Benoit, surnommé Bonose, romain iil.. l'cillC.

lorn.VOncll.
ordonnait, sans en avoir jamais eu l'autorité de naissance, dont il ne nous reste aucun
ni la dignité. Une troisième preuve est que écrit. On lui donna pour successeur, en 577,
toute celte lettre roule sur les chorévêques, Pelage II, aussi romain, fils de Vinigilde. Les
qu'elle suppose avoir été très-communs dans Lombards tenaient alors Rome assiégée ce ;

l'Allemagne dans les Gaules ce qui ne pa-


et ; qui fut cause qu'on n'attendit pas l'ordre
rait point parles histoires du temps. 'Ajoutons de l'Empereur pour la consécration du nou-
que ce n'est qu'une compilation des lettres veau pape. Quelque temps après son élec-
du pape Innocent I, de ceUes qu'on a suppo- tion il envoya à Coustantinople Grégoire,
sées au pape Damase, et de ceUes de Zosime, diacre de TÉglise romaine et depuis pape,
et de saint Grégoire le Grand, postérieur à pour demauder du secours à ce prince con-
II,iJ..l Jean III. Il y en a une autre] beaucoup plus tre les Lombards, qui ravageaient l'Italie.
courle, donnée sous le nom de ce même pa- Tibère régnait alors. Il avait été déclaré n,,
Jean
pe, par Jean de Rose, et adressée à Édalde, empereur par Justin et coui-onné le 26 sep- ^k. in mi.
archevêque de Vienne : celle lettre est Sans tembre de l'an 578. Pendant que Grégoire wp,*x"""
'

date. On y avance, contre la vérité de l'his- négociait ce secours à Coustantinople, Pe-


toire, que l'Église de Vienne a été fondée lage lui écrivit que les Lombards conti-
par un disciple de saint Paul, et que c'était nuaient leurs ravages dans l'Italie contre le
l'usage à Rome de partager les reliques des serment qu'ils avaient fait de s'en abstenir ;
apôtres, au lieu que l'on se contentait d'en- qu'il fallait donc presser l'Empereur de don-
3,|1,. S.1.
voyer des linges qui eussent louché le plus n<'r en cette occasion des marques de sa
près leurs corps. Il paraît encore qu'Kilaldc bonté, et d'envoyer du moins un maître de
avait de l'inquiétude sur la liturgie qu'il de- la milice ou un général d'armée, l'exarque
vait suivre, comme si l'Église gallicane n'a- de Ravcnne pouvant à peine sutlire à la dé-
vait pas eu la sienne, ou qu'elle se fût peu fense du pays qui lui était confié. Celle let-
embarrassée delà régler. Le contraire parait tre est du 4 octobre 584 la suivante fut:
[vr SIECLE..] CllAI'lTItl!; WXIV. — JEAN 111 El' l'ELAUE 11, l'APES. a35

l'icrite le 5 du nu-'mo inois de I;i soplii-ine ([ui avait approuvé le concile do Chalcédoine :

imiu'i^ de reiiiporcur 'rihèit-, c'esl-;i-diro de- «Ce pape, bon tout


disaient-ils, a trouvé
puis qu'il eut élé l'iiil C(''s;ii-, cl ainsi en ."iSU. ce qui s'est l'ait dans ce concile il a donc ;

Elle est adrestiéc à Auuucairc, évèqued'Aii- aussi approuvé tout ce qui s'y est dit en fa-
xerre, que PL'lay:o prie d'engager le roi des veur des Trois- Chapitres. » Pelage leur ré-
FiaïKjais ;\ secourir Home, et de le détourner pond que suint Léon n'a approuvé que ce
d'avoir aucune, intelligence avec ;les Lom- que les Pères de Chalcédoine avaient di'cidé
bards. 11 y en a une seconde à cet évêque : sur la foi, et qu'il a été persuadé que ce qui
nous en avons parlé ailleurs. regardait les personnes de Théodore, d'Ibas
ls aiit 4. Élie, patriarche d'Aquilée, qui faisait et de Théodorel, pouvait être examiné de
d 1-
sa résidence à Grade, et les autres évèques nouveau. Il rapporte sur cela un passage de
d'Istrie persévéraient dans le schisme pour la lettre de ce saint pape où il confirmait les

la défense des Truis-C/iupitres. Le Pape sou- décrets de Chalcédoine, et un autre de sa


haitait ardemment de les eu retirer, et il lettre à Maxime, évêque d'.\ntioclie. Il eu

leur aurait écrit sur ce sujet dès le commen- allègue ensuite de saint Augustin et de saint
cement de son pontiticat, si les hostilités des Cyprien, pour les convaincre qu'étant hors
Lombards ne l'en eussent empêché. Aussi- de l'Eglise par le schisme, ils étaient consé-
tôt donc que l'exarque Smaragde eut fait la queniment hors de la voie du salut. C'est
paix et rendu la Irauquillitc à l'Italie, Pe- pourquoi il les exhorte de revenir au plus tôt
lage écrivit à ces évêques pour les exhorter à l'unité de l'Église catholique, etd'euvoyer
de se réunir à l'Église. Mais afin que les à Rome de nouveaux députés pour s'éclairer
mauvaises impressions qu'on pouvait leur et traiter de leur réunion, ou de s'assem-
avoir données de sa foi ne fussent pas un bler à Ravenne pour y entrer en conférence t„„. v c„n.
avec les autres évêques, promettant d'y en- "'•i'"?-"^-
obstacle à cette réunion, il leur déclai'e
qu'il n'en a point d'autre que celle des qua- voyer quelqu'un de sa part pour y tenir sa
tre premiers conciles généraux, auxquels place. Cette seconde lettre n'ayant pas eu
ses prédécesseurs avaient présidé par leurs plus d'eil'el que la première, le pape Pelage
légats et qu'il recevait en tout la lettre de
; leur eu écrivit une troisième beaucoup plus
saint Léon à Flavien, disant anathème à ample. Saint Grégoire qui n'était alors que
'

quiconque euseignait une autre doctrine. diacre l'appelle un livre, et il parait par le
Il les presse de lui envoyer des députés de témoignage de Warnéfride - dans 1' Histoire
leur part pour lui exposer leurs doutes, des Lombards, qu'il l'avait lui-même compo-
avec promesse de leur témoigner toute sorte sée. Pelage commence cette lettre par le dé-
de bonté, et de les renvoyer quand ils le dé- tail des maux qui sont les suites inévitables
sireraient. Cette lettre fut portée en Islrie . du schisme après quoi: il voir que c'é-
fait
par Rédemptus, évêque, et Quodvultdéus, tait sans fondement que les évêques d'Istrie
abbé du monastère de Saint-Pierre de Rome. s'imaginaient que tout ce qui s'était fait
Tout l'eBet qu'elle produisit, fut qu'Élie et sous l'empereur Justinien pour la condam-
ceux de son parti envoyèrent des députés, nation des Trois-Chapitres, tendait au ren-
avec un écrit où ils ne répondaient point à versement du concile de Chalcédoine. Ces
ce que Pelage leur avait dit sur la réunion évêques objectaient que saint Léon, dans sa
et sur les moyens d'éclaircir lem-s doutes ; 78" lettre à l'Empereur de ce nom, déclarait
eu sorte qu'il parait que leurs députés n'a- qu'il n'osait mettre en question ce qui avait
vaient d'autre commission, que de porter été défini dans ce concile.
leurs lettres. 11 leur eu écrivit une seconde Ils encore d'autres lettres de ce
citaient
où il se plaint de leur procédé, principale- pape où il même chose. Pelage en
disait la
ment de ce que celles qu'il avait reçues convient mais il soutient que saint Léon ne
;

d'eux étaient infectées de diverses erreurs, parlait que de la définition de foi du concile
et de ce qu'ils y avaient allégué plusieurs de Chalcédoine, et non des causes particuliè-
passages des Pères, qui ne faisaient rien res qui y forent examinées. 11 le prouve
à la question, et dont il paraissait qu'ils n'a- par la 58" lettre de ce pape à Anatolius, évê-
vaient pas compris le sens. Il s'agissait sur- que de Constantinople, à qui il fait voir qu'il
tout des passages de la lettre de saint Léon ne pouvait s'autoriser du privilège par le-

' c.reg., lib. 11 Epist. 36 ad Episc. Bibemiœ. * Lib. 111 De Gestis Longob. caj). x.
336 HISTOIRE GENERALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
quel ce concile accordait le second rang à produire quelques endroits des lettres de ce
l'évêque de Constantinople, puisqu'il n'avait pape, où il se fut expliqué ainsi mais que ;

point été assemblé pour régler le rang des ceux qu'ils avaient apportés défendaient ,

évêques, mais uniquement pour terminer seulement de traiter de nouveau la défini-


les ditlicultés qui s'étaient élevées dans l'K- tion de foi, sans défendre en aucune façon
H.E.CI9.
gijgg jy sujet de la foi. Pelage donne la mê- de condamner les morts infldèles; qu'au «V- cn.
me raison à ce que les évêques d'Istrie ob- reste il ne se souvenait pas que saint Léon
jectaient, que suivant les lettres circulaires eût traité en quelques endroits de ses écrits,
d'un grand nombre d'évèques, il n'était pas la question si l'on doit condamner les morts.
permis de changer une syllabe, pas même Ensuite prouve qu'on le peut, par la lettre
il

la moindre leltre des décrets de Chalcé- de saiut Augustin au comte Boniface, où il


«si. doine. Les évêques schismatiques disaient est dit, que si ce que l'on objectait conli-e
encore « Nous avons appris du Siège apos-
: Cécilien était vrai, il serait permis de l'ana-
tolique et des archives de l'Kglise romaine, à tliématiser quoicjue mort et par l'exemple;

ne point recevoir ce qui s'est fait sous le du concile d'Éphèse qui a condamné le^^m-
règne de Justinien contre les Trois-Chapi- bole de Théodore de Mopsueste avec sa per-
Ires. Norts savons aussi que dans les com- sonne. Ces deux faits étant bien constatés,
mencements que cette atl'aire fut agitée, le Pelage rapporte plusieurs passages des écrits
Saint-Siège, tenu par le pape Vigile, et les de Théodore pour montrer qu'étant remplis
évêques de toutes les provinces latines, d'erreurs on a été en droit de les condamner
s'opposèrent fortement à la condamnation et de le condamner lui-même. 11 remarque

de ces Trois-CImpitres. » Pelage répond que en passant que l'on disait qu'il avait com-
les évêfpies latins n'entendant pas le grec, posé plus de dix mille livres ; comme quel-
ont connu trop tard l'erreur dont il était ques-uns pouvaient répondre que l'on dou-
question, et que plus ils ont eu de fermeté <i tait qu'ils fussent tous de lui, il passe ii d'au-

la défendre jusqu'à ce qu'ils connussent la tres preuves, et cite la requête des évêques
vérité ,
plus les évêques d'Istrie devaient d'Arménie à Proculus, évêque de Constanti-
avoir de facilité <i les croire quand ils se sont nople contre Théodore de Mopsueste, où ils
rendus «Vous auriez raison, ajoute-t-il, de
: le disent infecté des erreurs de Paul de Sa-

mépriser leur acquiescement, s'ils l'avaient mosate, de Photin et de plusieurs autres;


donné avec précipitation avant d'être bien les lettres de Jean d'Antioche, de saint Cy-
éclairés; mais après avoir tant souffert et rille de Jérusalem, de Rabbula, évêque d'E-

combattu si longtemps jusqu'à se laisser dessc , V/Jistoire ecclésiastique d'Hésychius,


maltraiter, vous pouvez croire qu'ils n'au- prêtre de Jérusalem, et la loi de Théodose-
raient pas cédé tout d'un coup, s'ils n'a- le-Jeune, et de Valentinien, qui tous ont
vaient reconnu la vérité. » Il cite l'exemple condamné les erreurs de Théodore avec
de saint Paul qui ne se converlit qu'après celles de Nestorius.
que Dieu eut permis qu'il résistât longtemps 11 traite après cela de la lettre d'ibas, qu'il

à la vérité ; celui de saint Pierre qui changea dit être toute entière contraire aux décrets
de sentiment et de conduite sur l'observa- du concile de Chalcédoine, montrant qu'on
tion des cérémonies légales; celui de Dieu ne peut la soutenir sans condamner égale-
môme qui se repentit d'avoir oint Saiil pour ment le concile d'Hphèse, approuvé par ce-
roidans Israël ; et dit qu'il ' n'est pas blâ- lui de Chalcédoine. Pelage pour prévenir

mable de changer de sentiment, mais d'en l'objection que les évêques schismatiques
changer par inconstance et que quand on
; auraient pu lui faire sur ce qu'Ibas fut recon-
cherche constamment la vérité, sitôt qu'on nu pour catholique dans le concile de Chal-
la conuait, on doit changer de langage. cédoine, et que sa lettre n'y avait point été
Élie d'Aquilée et les évêques de son parti condamnée, répond qu'ils devaient connaî-
objectaient que saint Léon était de sentiment tre où finissait le concile de Chalcédoine.
qu'on ne doit point condamner les morts; ((Nous savons tous, ' leur dit-il, que dans un
sur quoi Pelage leur dit que c'était à eux à concile on ne fait jamais de canons qu'après

' A'on enim mutatio senteiitiir,sed incomtantia mulet? Pelag. cpisl. ad Eliam. Tom. V ConcU.,
sensus in culpa est. Quando ergo ad cngnilionein pag. C22.
recti. iiilrntio incoinmutaliili.i permaucat. quid * Omnes namquc novimus, quod in synndn
obslat, si ignoranliam sutim deserens, verba pcr- numquam canones, nisi pcraclis definilionilius fi-
,

[W SIÈCLE.] CHAPITRE XXXIV. — JKAN III KT PKLAGlî U, PAPES. 331


les définitions de
Prenez garde que; la
foi. sista au concile, n(' nous en rapporta que la
prolossion do dans la sixieiim
foi est aciievi'c déliniliou de foi. > Il infère d(! I.i cpu^, ce qui se
uclioii du c'ontili" de Clialcodoine, puisque lit depuis la sixième action n'('tant pas de la
dans la septième on dresse les canons, et que même autorité, on ne doit point hl.lmer ceux
dans les actions suivantes on ne traite que qui soumettent la lettre d'Ibas 'i un nouvtil
des all'aires particnliiMes. Comme vos dci)u- examen, parce qu'ils la croient hérétique.
tés le ri''vo(iuaicnt en doule, nous le leur Surlo troisième clia|)itre, le pape dit (iNous :
cj
avons fait voir en plusieurs exem[)laires. Si ne condamnons point tous les écrits de ïhéo-
'

l'on examine même attentivement, on trou- doret, mais seulement ceux où il combat les
vera que les canons n'appartiennent pas à la douze anathéuiatisuies de saint Cyrille. Nous
septième action, ainsi (ju'on le cioit, mais ;\ recevons, et nous lespectons sa personne :

la sixième, caron n'y amis ui la date du jour quant ses autres ouvrages, nous les rece-
;\

ou de l'année, ni les noms des présents ce : vons et nous nous en servons même contre
qui montre que c'est la suite de la même ac- nos adversaires.» Les évoques d'Istrie objec-
tion. On voit que la cause de la foi était finie taient que Jean d'Antioche avait donné de
dans la sixième action, par les souscriptions grandes louanges dans une de ses lettres à
des évêques, et par la prière qu'ils font à Théodore de Mopsueste. Pelage conteste ce
l'empereur de les renvoyer. Dans ce qu'ils fait; mais en le supposant vrai, il dit qu'on

règlent ensuite sur les atl'aires particulières, doit faire plus d'attention à ce que le concile
il n'y a point de souscriptions. La plupart d'Éphèse saiut Cyrille et le prêtre Hésy-
,

des exemplaires grecs du concile ne contien- chius ont avancé contre Théodore, qu'i'i ce
nent que six actions avec les canons et dans ; que Jean d'Antioche a écrit en sa faveur. 11
les lettres circulaires à Ijempereur Léon. Aly- remarque - que quelquefois les méchants ont
pius, deCésarée enCappadoce, dit : «Je vous été loués par les bons; qu'Eusèbe de Cé-
déclare que je n'ai point lu ce qui a été fait à sarée, le plus célèbre d'entre les historiens,
Chalcédoine au sujet des allaires particuliè- a loué Origène, le plus mauvais de tous les
res et Tlialassius, mou prédécesseur, qui as-
; hérésiarques ;
que saint Grégoire de Nysse

dei,nisi perfeclis synodalibus geslis habeantur,ut tur, non qui résidèrent, describuntur procul du- :

servalo ordine, cuin prius synodiis adi/idein corda bio cum non consueto exnrdio cœptœ sunt, quia
œdificel, lune per régulas cauonum mores Ecclesiœ prœcedenti actioni subnexa< sunl demonstralur.
aclusque coiuponat. Vigilanti ergo cura respicile, Quia vero in aclione sexta fidei causa perficilur,
quœ {leg.quia) in sexta illiiis actione sanctœ fidei ipsa episcoporum omnium generali subscriptione
professio consummatur : moxque in seplima ad declaratur. Kam qui post subscripserunt senten-
inslUulioiiem jam lidelium régula canonum figi- tiam, cwncla quœ de fuie agenda fueranl, finila
tur ; ulterioribus vero actioinbus nihil de causa testatisunt. Unde et in causis post specialibus,
fidei, sed sala negolia privala versanliir. Quod nudis lantiiinnwdo verbis loquuntur; atque ea
cum responsales leslri ila esse ambigerent, curœ quœ decernentes dixerant, nulla supposita sub-<-
nabis fuil ex prolatis mullis hoc codicibus de- criptione firmaverunl. Qui reverendissimi epis-
monstrare ; nos lamen hac de re nunquam dubi- copi ila in actione sexta omnia quœ de fide
tari posse credidimus, quia et eadem séries sic se agenda fueranl, cognuscebant ; ut, sicul illic scrip-
insinuai, ul credi aliter cotitradicat. Prinium qui- tum est, clamarent : Supijticamus. dimitte nos ;

dein, quia fsicut dictuin est) dum definila fideire- pie Imperator, dimitte nos,... Aly plus Leoni Augus-
gula in aclione sexta ostenditur, ordo causœ in- te ait : Vestrie pietati siguilico, quia ea quideiu
dical, ut in actione suhjuncta canoMim forma se- quae partlculariter examinata sunt atque gesla a
queretur. Secundum rero est, quia et in actiunis sanctis episcopis in Cbalcedouensi civitate colleclis,
sextœ terininumjam canonum normaprœlibatur, non legi. Neque enim a sanolae memoriae tuni;
dum illic a principe veneriibilibus episcnpis dici- episccpo Thalassio, qui interfuit sancto concilio,
tur Aliqua sunl capitula quœ ad honorem ves-
: aliquid liuc amplius est allatura ei liis quse gefta
trw reverentice vobis reservavimus, justumexisti noscuntur sed tantummodo definitionom expo-
;

mantes, hœc a vobis regulariter per synodum sin- sitam ab illo sancto concilio, ab eo delatam iu-
gula firnari, etc. Prœlibatione itaque sextœ ac- spexi. l'elag., pag. 629, 630, 631.
tionis ostenditur, quia jure constitutiones cuno- Neque enim Theodoreti omnia scripla damna-
'

num non nisi in septima continentur. Quid enini mus, sed sola quœ contra duodecim Cyrilli capi-
supererat quod perfecla fidei professione fieret tula... scripsisse mon.<lratur...ejus et personam re-
nisi ut quorunidam fidelium actiones illicilas cipimus... et cum synodo Theodoreium profilen-
sancta synodus positis regulis judic tret? Quam- tem recta veneramur. Alla vero scripta illius non
vis si solerter aspicimus, canorium regulaspositas solum recipimus, sed eis etiam contra adversa-
non, sicul putalur, in septima, sedintexlas sexcœ rios utimur. Ibid., pag. 631 et 633.
aclioni invenimus. ^am cum in eisdem consliiu- - An non et malos a bonis aliquandn laudatos
tionibus sanciendis non dies, non iinperium pvni- novimus ! Quid namque in hœresiarcliis Ori'gene
338 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
l'a aussi loué, el que Jérôme avait pour
saint rite de saint Pierre tout ce qu'ils avaient fait
lui tant d'allcction, qu'il semble avoir été son dans leur convenlicule, ne croyant pas que
disciple. » Ce pape finit sa lettre en exhor- cette assemblée méritât le nom de concile.
tant les évèques scliisinatiques à se réunir Il établit le pouvoir des clefs donné à cet
aux orthodoxes; il les fuit ressouvenir qu'en- apùtre, et la nécessité du consentement de
core que saint Cyprien ait été dans l'erreur l'évèque de Home pour la tenue des conciles,
sur la rebaptisalion il ne s'était point séparé
, défendant à ces évêques d'en tenir de sem-
delà communinn de toute l'Éiilise, et il prie blables à celui 011 ils s'étaient trouvc's, sous
le Seigneur de leur inspirer le désir et l'a- peine d'être privés de la communion du Siège
mour de la paix. On ne voit point qu'Élie ait apostolique. Il déclare que les prédécesseurs
embrassé la jiaix avant sa mort, qui arriva du patriarche Jean, et Jean lui-même, lui
quoique temps après. Il eut pour successeur ont souvent écrit de leur propre main, et aux
dans le siège d'Aquilée un nommé Sévère, autres évêques de Rome, avec protestation
qui prit aussi la défense des Trois-C/inpitres. devant Bien de ne rien entreprendre jamais
Le un t
JoiD, évoque
5. En 589 il y eut un concile à Constantino- contre le Siège apostolique, et de n'usurper
do conblantl-
ple, où Grégoire, patriarche d'Antioche, ac- aucun de ses privilèges, consentantd'êtreaua-
cusé d^Kiceste par un laïque, fut déclaré in- thèmes s'ils manquaient à leur promesse que ;

nocent. Jean surnommé le Jeûneur, patriar- leurs lettres étaient conservées exactement
che de Constantinople, avait convoqué ce con- avec leurs sceaux et leurs signatures dans les
cile, etil en avait pris occasion pour se don- archives de l'Église de Rome, et que s'étant
ner le titre d'évcque universel. Sitôt que le liés eux-mêmes par le lien de l'anathème

pape Pelage eu fut informé, il cassa tous les pour le cas de prévarication de leur part, il
actes de ce concile, excepté ce qui regardait lui avait paru inutile de les excommunier. Il
la cause de Grégoii-e, et défendit ' à l'archi- avertit néanmoins Ic^ patriarche Jean de cor-
diacre Laurent son nonce auprès de l'em-
, riger au plus tôt son erreur, s'il ne voulait être
pereur, d'assister à la messe avec Jean. 11 excommunie! et privé de la communion du
écrivit encore une lettre circulaire ù Jean et Siège apostolique el de tous les saints évêques.
à tous les évêques qu'il avait appelés au con- n Ne faites', ajoute-t-il, aucune attention au
cile. Il la commence ^ par se plaindre de la nom d'èvè(pie universel qu'il a usurpé illi-

témérité de ce patriarche, qui, contre l'auto- cilement, et n'assistez à aucun concile qu'il
rité du Siège apostolique de saint Pierre, à qui aura convoqué sans l'autorité du Saint-Siège,
seul il appartient par privilège de convoquer si vous voulez persévérer dans la commu-

des conciles généi-aux et de les confirmer, nion de ce siège, et dans celle des autres évê-
en avait convoqué un sous la présomption ques. Aucun des patriarches ne s'est donné
qu'il était évêque universel, dont en eilet il un titre si profane. Si le souverain patriar-
prenait le titre dans la lettre de convocation. che le prenait, il ne pourrait le faire qu'au
Ensuite il déclare qu'il a cassé par l'auto- préjudice des autres patriarches. Mais à Dieu

deterius, el quid in historiographis inveniri Eu- principis, el Domini Salvaloris voce, qtia bea'to
sebio honorabilius potcst ? El quis nostrum ncs- Pelro polestatem ligandi atque soliendi ipse Sal-
cial in libris suis quanlis Origenem Eusebius valor dedil, qua- eliam potesliis in sticcessoribus
prœconiis alloUall... An non el Gregorius Nynsiv ejus indubitanler transivit. prœcipio omnia quœ
episcopus .. magnis Origenem laudihus pnvfcrl? ibi slaiuislis, etvana. et cassataesse, itauldein-
An non elllieronymus... lanlo erga Origenem fa- ceps nunquam nppareant, »iee venlilenlur. Pclag.
vore inlenditur, ut pêne di^cipulus ejus esse vi- Epist. ad Juan., pag. 91!t.
deat-ur? Ibid., pag. C3.S cl 634. — ' Grog., lib. tV Universaliliitisquoque nomen quod sibi illici-
<'
,

Episl. \\\\], xxxviii, pag. 1187, 1191. te usurpavit, nolileaUendere, neccoculioneejiis ad


' Relalum est ergo ad AjioslolicamscdeinjJnan- synodum, abfq>ic auctoritale Sedisapostnlicir. un-
nem Conslanlinopolilanum epUcopum universd- quam venite, si Aiioslolicœ sedis el cictcrorum epis-
lein se subscribcre, rosque ex hac sun prd'suinp- roparumcoinmunione vullisfrui. Kullus enimpa'
tione ail synodum conrocare gtneralem, cum ge- Iriarcharum hue lam profano vocubulo unquam
neralium synodoriim couvnrandi auctnrilas Apo^- ulalnr : quia si suinmus palriarclui unirersalis di-
tholicœ stdi bcali Pétri siugulari privilegio sil citur.pairiareharumnumenctrterisdcrugalur.Sed
tradila, el nuUa unquam synodus rata legatur absii a fidelis cujus quam mente, hoc sibi rel velle
quœ Aposlolica auctoritale non fuerilfnlta. (Jtia- quem/iiam arripcre, unde honorrm fratrum suo-
propter, quidquid in prwdiilo vestro convenlienlo ru m i mniinuere e.r quanlttlacu mque parle V idealur.
{quia synodus luUler prœsumpta esse non pnlvit) (iiiapropler charitasvcstra neminem unquam suis
etatuUlis,ex auctoritale sancli Pétri apostolorum - in epislolis universalem nominel. Ibid., pag. 949.
[vi" siKCLE.] CHAI'JTllE XX.\1\ . — JKAN 111 ET l'ÉLAGE 11, PAPES. 339
ne plaise que quelqu'un s'altribuc une qua- fenscurs de l'Église, parce que les fondions de
lité qui diminue on quclqiu' paille riu)nneur cette charge sont très-diUërentes des exerci-
que l'on doit rendre la dignité de ses frè-
i\ ces de la vie monastique, u Un moiuc,
y est-il
res. Que personne donc d'entre vous ne qua- vivre dans la retraite et dans le repos,
dit, doit
lifie dans ses lettres qui que ce soil d'évèque occupé de la prière cl du travail des mains ;

universel.» Il les prie de s'intéresserpour que le défenseur au contraire doit connaître do


l'honneur du clergé ne soufl're point d'altéra- toutes les causes, de tous les actes qui regar-
tion de leur temps, et que jamais le siège de '
dent l'ICglise, et entrer dans tous ses procès.
Home, qui, par rinslilulioii du Seigneur, est Ainsi il est plus i^ propos d'élever un moine
le chef de toutes les Eglises, soit privé ou au sacerdoce, lorsiju'il en a l'Age et le mé-
dépouillé de ses privilèges. rite, que de le mettre défenseur. » Par le se-
Ces évéques avaient consulté le pape Pe- cond décret, le Pape permet h l'évéque Flo-
lage pour savoir de combien de villes épisco- renliii d'ordonner diacic un homme qui, après
pales devait composée une province.
être avoii- perdu sa femme, avait eu des enfants
Le Pape répond, qu'encore que celte ques- de sa servante. Cette dispense était contre
tion ait été traitée sullisammeut par ses pré- les canons; aussi Pelage ne l'accorde qu';'i
décesseurs, il cro}-ait devoir décider qu'on cause delà disette de sujets pour le clergé,
peut doimcr le titre de province ;\ celle qui disant que non-seulement on avait peine à
a dix ou onze villes, un roi, des puissances en trouver qui méritassent d'être ordonnés,
inférieures, un évêque avec dix sutl'ragants, mais que l'espèce d'hommes manquait aussi.
ou onze évèques pour juger toutes les causes, Il veut au surplus que la servante soit mise

tant des évéques mêmes, que des prêtres et dans un monastère pour y vivre en conti-
des villes situées dans celteprovince.il ajoute nence. Le troisième décret est sur l'ordina-
que, si dans chaque province il s'élève quelque tion d'un évèqiie pour l'église de Carmes. Le
diUiculté sur laquelle les évéques ue s'accor- diacre Elpidius avait été choisi d'un consen-
dentpas entrceux, elle sera portèeenpremier tement unanime Pelage veut donc qu'on le
:

lieu au siège majeur; en second lieu, au con- fasseau plus tôt partirpour Rome, pour y re-
cile de la province mais que les causes majeu-
; cevoir l'ordination épiscopale. Dans le qua-
res et les questions difficiles seront portées, trième, adressé à Cresconius, il défend aux
suivant la coutume,au Siège apostolique Cette évoques de Sicile d'exiger plus de deux sous
lettre est du premier de mars de l'an 387. des paroisses de leur dépendance, et d'obli-
6. Il y en a trois autres sous son nom la : ger les prêtres ou le clergé de ces paroisses
première à l'archevêque Bénigne, où l'on dé- de leur préparer des repas au-dessus de leurs
fend la translation des évéques d'une église facultés.Le cinquième et le sixième sont pour
à une autre; la seconde aux évéques d'Italie, maintenir l'usage où étaient les clercs d'être
où il est défendu de recevoir une accusation jugés par des juges ecclésiasticpies, confor-
contre un évêque et la troisième aux évé-
; mément auxlois civiles. On ne peut douter que
ques d'Allemagne et des Gaules, où il est ces décrets ne soient très-anciens, et nous ne
parlé de neuf Préfaces usitées à Rome dans, voyons rien qui puisse empêcher qu'on ne
la célébration des divins mystères. Mais on les croie du pape Pelage II. Il mourut le 8
convient que ces trois lettres ont été sup- fèvi'ier de l'an 590, d'une maladie conta-
posées par Isidore, et qu'elles ne sont qu'un gieuse qni avait commencé à Rome au mi-
tissu de passages tirés des écrits de saint lieu du mois de janvier de la même année.
Augustin, de saint Prosper, d'Ennode dePa- Son pontificat fut de douze ans et près de Lib. PoD*
lir. 10m. V
vie des papes Zosime, Hilaire, Léon, et de
, trois mois, pendant lesquels il fit divers ou- Concil., pag.
9;iO,
quelques autres. vrages considérables, dont un fut de rebâtir
7. On a mis à la suite de ces lettres quel- l'église de Saint-Laurent. Il orna le sépulcre
ques décrets qui sont cités sous le nom du de ce saint et celui de saint Pierre de tables
même pape par Yves de Chartres et par Gra- d'argent. En deux ordinations au mois de dé-
tien. Il est dit dans le premier, que l'on ne cembre, il ordonna pour l'Église romaine
doit pas choisir les moines pour les faire dé- quatre-vingt-deux prêtres et huit diacres;

' Orale, fratres, ut honor ecclesiaslicus nostris siarum, privilegiis suis usqiiam careal aiil expo-
diebus,non evacxietur : nec unquam Romana sedes, lielur. Ibid., pag. 950.
quw instituente Domino caput est omnium eccle-
340 IIISTOmE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
eten divers lieux il ordonna quarante-huit LXXII de la Patrologie latine reproduit les
évêques pour les églises d'Italie. [Le tome lettres et les décrets de Pelage II ,
col. 701.]

CHAPITRE XXXV.

Timothée prêtre de Constantinople. Anonyme snr la réception des manichéens.

Anonyme qni écrit contre les manichéens.

[Écrivains grecs.]

Timoibée,
de
\ . On nous a donné plusieurs fois en srrec tiser leur propre erreur, et toutes celles qui
prïtrc
coosi«nt.T>o- et en lalin un traité intitulé De la Manière
.' ont jamais été dans l'Église. Il met dans la
Monuni.coui.
différente de recevoir ceux qui se présentent a première classe les tascodruges hérétiques ,

la sainte Église Catholique et Apostolique. 11 de Galatie, ainsi appelés, parce qu'ils


poi'te le nom
de Timothée, prêtre de la avaient coutume dans leurs prières d'appuyer
grande église de Constantinople, et garde du un doigt de la main droite sous leur nez ;

trésor. Jean, prêtre de la même église, l'avait les marcioniles, les encratites, les valenli-
prié de le composer, et c'est à lui que ce niens, les basilidiens, lesnicolaïtes, les mon-
traité est adressé. On n'y trouve rien qui en tanistes, les manichéens, eunomiens, les
les

fixel'époque seulement il paraît certain


: paulianisles, les photiniens, les melchisédé-
que Timothée l'écrivit avant la naissance du ciens, et plusieurs autres dont il décrit en
monothélisme, puisqu'il ne dit rien de cette peu de mots les erreurs. Il veut même que p.p. m.
hérésie, et qu'il finit son Catalogue iiCoWaàcs les pélagicns et les célestiens soient reçus
acéphales , et aux diveises branches qui dans l'Eglise par le saint baptême, disant
sont sorties de cette secte, ou de celle des qu'oufrc,leurs erreurs particulières, ils étaient
ibid.pog. eutychieus. De la manière dont il parie du encore infectés de celles des neslorieus et des
cinquième concile général sous l'empereur manichéens. La secotade, selon lui, comprend
le temps
Justinien, on dirait qu'il écrivait dans les quartodécimains, lesnovatiens, les ariens,

où il y avait encore beaucoup de dillicultés les macédoniens, les apollinaristes. Il fait


surla réception de ce concile. Pour lui, il en voir en détail en quoi chacun deux errait
reçoit tous les décrets, et lui donne, comme contre la foi. Les méléciens, les nestoricns,
aux quatre précédents, le titre de concile les euty chiens et les acéphales sont de la troi-
universel. • sième classe, c'est-rt-dire de ceux que l'on
Co que cn- 2. Timothée met trois classes de ceux qui se contentait d'obliger à anathémaliser leurs
llenl le lniil«
de Tlmoll-f-e. viennent <i l'Église catholique la première : erreurs avant de les recevoir à la communion
Ibl(l.,|.ag.3;7.

est de ceux qui ont besoin, pour y entrer, de de l'Eglise. Il donne après cela le détail des
recevoir le saint baptême la seconde com- ;
dili'érentos sectes d'acéphales, remarquant
prend ceux que l'on y reçoit sans les bapti- sur les marcianisli's, ainsi appelés de Mar-
ser, et en les oignant seulement de l'huile cicn de Trébi/.onde, qu'ils enseignaient ipic
sainte dans la troisième sont ceux qui ne
;
la communion du sacré corps et sang '
de
reçoivent ni le baptême, ni i'nnrtion sainte, Jésus-Ciuift, notre vrai Dieu, n'était ni utile
mais qu'on oblige uniquement d'aualhéina- ni nuisible à ceux qui la recevaient digne-

'
liera sacri corporis et sanguinis Christi veri mm sil res indifferens. Proiiide isli ca non su-
l)n noslri sanclam perceplionrm, nihil aitjurare wunl cum liinore ac /Me, velul vivifica, et lan-
dirunt, aul lœdirc eos qui digne vel indignf com- tjuam quœ sinl ac es.ic credanlur incarnait llet.

miinicuiil: qnodque, ob id solum. nenio unquam TiiiKilli. J)c liccepl. hwrct.. pii},'. <03.
separnri d lirai ah ecclcsinslicu cmiiinuiiionc,
[Vl° SIÈCLE.] Ctl.M'lTRli: XXXV. — TIMOTKKK, IMIÈTRK, VAT.. ;),,

nuMit ou indignement; qiie celle cliose étant ample dans le manuscrit .sur l(;i|ucl il l'a
iiulill'érente, on no devait jam;iis séparer donnée, que dans l'édition qu'on en avait déjà
(le la roininimion ectlésiaslii|iie ci'uxi|iiis'ap- faite à Paris. Tollius a enrichi son
((iitinn
prdcliaient de dans tic mauvaises dis-
l'ault'l d'un grand nombre de noies, qui répandent
positions et qu'en consé(juenccde ces prin-
;
beaucoup de lumière sur le dogme des ma-
cipes, ils ne participaient point au corps et nichéens, sur leurs auteurs, sur leurs livres
au saug de Jésus-Christ avec foi ni avec et sur les cérémonies usitées dans l'É"lise
crainte, ne les legardant |)as connue vivifians, lors(iu'on les y recevait. Ils commençaient
l'ag. 133.

ni, comme ils soûl el qu'on les croil, le corps par aiiathi'maliscM' toutes les extravagances
p»8. 406. et le sang de Dieu fait chair. Il compte di- et les erreursde Manès, disant anathème en
verses sectes à qui l'on donnait le nom do particulier à ceux qui ne reconnaissaient
hésitants, à cause qu'ils hésitaient de com- pas que Jésus-Christ est Uicu-Verbe fait hom-
muniquer avec 1 liglise catholiciuc, |)arce me, en prenant un corps dans le sein de
qu'elle avait reçu le concile de Clialcédoine Marie, mère de Dieu, toujouis vierge; qu'il
avec le môme respect que les trois conciles est mort véritablement dans la chair, et qu'il
4„_ précédents. On trouve dans le Recueil d'un est ressuscité le troisième jour. Ils anatlié-
certain Nicon, que l'on ne conuait pas d'ail- malisaieut ensuite ceux qui soutenaient que
leurs, une partie de ce traité. Le père Com- le malheureux Manès était l'Esprit consola-
be6s l'a donné en grec et en lalin dans le teur el de vérité, que le Seigneur avait pro-
second tome de son Auctuarium avec des mis d'envoyer à ses disciples ceux qui en-
;

notes le manuscrit siu' lequel il l'avait fait


: seignaient que les hommes sont de la même
imprimer ayant paru défectueux à M. Cote- substance que Dieu, qu'elle passe d'un corps
lier, il en fit une nouvelle édition sur un à im autre, et ceux qui niaient qu'il fut en no-
autre manuscrit plus correct. Ce traité est tre puissance de devenir bons ou mauvais. On
eu latin dans les anciennes Bibliothèques des les obligeaitencore de condamner tous les
Pères, et en grec dans le Recueil de Meur- livres desmanichéens, savoir le livre des :

sius, à Leyde en 1619. [On le trouve en grec Epîtres de Manès l'Évangile qu'ils appe-
,

et en latin dans le tome LXXXVI de la Putro- laient vivant, le Trésor de la vie, le livre des
logie grecque, avec une notice sur Timothée, Mi/stcrcs, dans lequel ils s'eti'orçaient de ren-
extraite de Fabricius, col. 9-74.] verser la loi et les prophètes, VHeptalogue
3. Les recherches exactes qui furent faites composé, par Agaplus, le livre de la Sagesse
des manichéens, tant par les papes saint dont Aristocrite était auteur, et où il entre-
Léon, Gélase, Symmaquc et Hormisdas, que prenait de montrer que la religion des Juifs,
par l'empereur Justin, Hunéric, roi des Van- des Grecs et des Chrétiens était la même ; le
dales, et Cabadc, roi de Perse, ne laissent livre des Apocryphes, et un recueil des paro-
aucun lieu de douter que quelques-uns les et des faits mémorables de Manès. Enfin
n'aient quitté leurs erreurs pour embrasser ils disaient anathème à quiconque parle mal

la foi catholique, et que l'on n'ait dressé de la Croix, ou qui a en horreur la communion
quelques formules de la manière dont on de- du vénérable corps et s^ng de Jésus-Christ,
vait les recevoir dans l'Église. Jacques Tol- ou qui méprise le baptême elles saintes ima-
lius nous a donné de longs fragments d'une ges, ou qui rejette les qua'tre Évangiles elles
de ces formules sur un maaudcrit de la Bi- Epitres de saint Paul.
bliothèque impériale, en faisant remarquer Après tous ces anuthèmes prononcés par
que le commencement et la fin de cette for- celui qui se présentait pour èlre reçu, ou par
mule ne s'y trouvent point, mais qu'il est un inlerprète, le diacre avertissait le peuple
facile de suppléer à ce qui manque à la fin, de se mettre en prière, et alors le prêtre ré-
par VEucologe et le Rituel des Grecs, qui citait une oraison, de laquelle le
à la fin
traitent en eliet de la façon de recevoir les peuple répondait amen. met-
Aloi-s le prêtre
manichéens à l'Église. Il remarque aussi, tait le nouveau converti au rang des chré-

d'après Lambécius, que ces fragments peu- tiens non baplisés; le lendemain il lui don-
vent servir beaucoup à peifectionuer VUis- nait place ixirmi les catêcbimiènes, et faisait
toire de l'hérésie des manichéens, composée par prières avec les insufflations, les
sur- lui les =""

Pierre de Sicile, imprimée à Jngolstad en exorcismes, les impositions des mains ordi-
1604 par les soins de Mathieu Radérus. Il naires. Ensuite, il bénissait l'eau, et y ré-
ajoute que cette formule est du double plus pandait de l'huile sainte par trois fois en
,

342 HISTOmE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.


forme de croix après quoi, prenant nu bout
; puisqu'il y est dit, en parlant du manichéen
de ses doigts de celte buile sacrée, il en oi- converti, que s'il ne sait pas ' le grec, il ré-
gnait le front, la poitrine et les épaules de pondra ou par un interprète, ou par son par-
celui qu'il allait baptiser. Un diacre ou un rain, s'il est encore enfant. Elle servait éga-

lecteur l'oignait par tout le corps ce qui ; lement à la réception des pauliiiens, c'est-à-
nr- 173. étant fait, l'évêque le baptisait en disant: dire de ceux qui suivaient les erreui-s de Paul
Un tel est baptisé au nom du Père^t du Fils
'
de Samosate.
et du Saint-L'sprit, le plongeant dans l'eau, [4. Le cardinal Mai a publié au tome IVde la

et l'eu retirant, à chaque fois qu'il pronon- Bihliotheca novn, deuxième partie, p. 79, les
çait le nom d'une de ces trois personnes. La Disputes du manichéen Photin avec le chré-
cérémonie du baptême achevée, on chantait tien Paul, texte grec et version latine. Il a trou-
le psaume qui commence par ces paroles : vé ces Disputes dans un ancien manuscrit du
n:. Bienheureux ceux « qui les iniquités sont re- Vatican. D'après le titre, ces dialogues ont eu
mises. L'évêque récitait ensuite une prière lieu par l'ordre de Justin et de Justinien Augus-

dans laquelle il demandait à Dieu d'accor- te , c'est-à-dire en o27. La première dispute


der au nouveau baptisé le sceau des dons du est sur la création des âmes la deuxième ;

Saint-Esprit, et la communion du corps et est sur les deux principes des manichéens, la
du sang de son Christ. Cette oraison finie, il troisième est sur les Écritures du Nouveau
oignait le baptisé de l'huile sacrée, en faisant Testament; viennent ensuite la proposition
un signe de croix sur son front et sur ses de Photin et la réponse de Paul, les blasphè-
yeux, et l'admettait à la sainte communion. mes du manichéen, les propositions du chré-
"' Huit jours après, l'évêque lui ôtait les habits tien contraires à ces principes. Cet écrit est
blancs qu'on lui avait donnés le jour de son reproduit au tome LXXXVIII de la l'atrolugie
baptême. On ne peut douter que cette for- grecque, col. 529-578.]
mule n'ait été écrite originairement en grec,

CHAPITRE XXXVI.

De la Chronique d'Edesse et d'nne antre anonyme.

ChrODlque
l. On ne sait point qui est l'auteur de la se , d'où il semble avoir tiré tous les monn-
auteur îd-
I1D
COUDU.
Chronique d'Edesse, ni eu quel temps il a menls dont il s'est pour composer sa
servi
vécu ; mais on ne peut douter qu'il n'ait été Chronique. Car il en emploie la plus grande
catholique, puisqu'il fait profession de rece- partie à faire le catalogue des évoques de
voir les quatre première conciles généraux ,
cette ville, et à rapporter ce qui y était ar-
pj^cbroDiroti
et qu'ij ceux qui faisaient dilliculté
rejette rivé d'intéressant. Il se sert dans son calcul
"*•
de reconnaître l'autorité des conciles d'É- de l'époque des Gi-ecs, que l'on appelle aussi
phèse et de Chalcédoiue. Il ne dit rien du des Séleucides ou Syro-macédoniens , qui
cinquième général et ne pousse pas sa , précède l'ère chrétienne de 309 ans.
Chronique au delà de l'an .^40 de Jésus- Selon cette Chronique la ville d'Edes-
2. ,
C. I.r
eliroo ritr

Christ ce qui donne lieu de croire qu'il ne


: se commença d'avoir des rois à l'an 180 de tlrnt ttr
manju»!';

vivait plus lors de la tenue de ce dernier l'ère des Grecs , c'est-à-dire cent vingt-neuf
concile. Peut-être aussi n'en a-l-il pas l'ait ans avant l'ère vulgaire de Jésus-Christ, qui Bll.l. •>•.

l«f. :»-.
mention parce qu'il n'en avait rien trou-
,
selon la même Chronique, naquit l'an 309
vé dans les archives de l'Église d'Edes- de l'ère des Grecs. Elle parle d'Abgar, qui fut

'
Baplizatur talis in nomine Patris, et Filii et cieril, tel per susceptorem suum si puer fucrit,
Spirilus Sancti, pa«. 173. sacerdos iterum conveuienlia adhibel. Ibid., pug.
* i'hi liœc vel ipse dùrerit qui ad Eccksiam ac- 11!).

ce$seril, velper inlerpretein, si grâce loq^li nes-


[vi- SIÈCLE.] ciuriTru:: xxxvi. — ciiiu )NI(JUE D'iiDESSE, ETC. 343

Pag. iJi, le dix-iicuvièmo roi d'Kilesse; mais elle ne informé que l'on en avait mis les Actes dans
dit rien de sa prùtendue lettre à Jésus-Christ. lachâsse de sainte Euphémie, martyre les ,

KUc met en i202 de l'ère vidj^aire une inon- en fit tirer en SU [)our les faire brûler ;

dation si considi'rahle i\ Kdesso, que le pa- mais en fut détourné! par les llammes qui
il
1>15. (07.

lais du roi et l'éylise de la ville on furent sortirent de celte châsse, lorsqu'on l'ouvrit.
renversés, et qu'il y périt environ deux mille Tliéophane raconte la chose un peu dinércm-
3UJ.
hommes dont plusieurs furent surpris par
, mcnt. Justinien, plus zélé poui- la foi catho-
les eaux, étant endormis dans leur lit. Mâ- lique, fit mettre ce concile avec les trois pré-
nes, chef de la sotte qui porte sou nom, vint cédents dans les sacrés diptyques. Sous le
au monde en 2i0. Quoiqu'il y ait eu à Édes- règne de ce prince, Asclépius évèque d'IO-
3.j;. se plusieurs évèqiies avant Conon, c'est tou- desse chassa les moines orientaux et leurs
tefois par lui que l'auteur commence le ca- adhérents, qui refusaient de reconnaître l'au-
talogue des évoques de cette ville. Son suc- torité du même concile. Quelques années
cesseur fut Saadès qui gouverna depuis
,
après, cet évèque, voyant que sa ville épis-

39J.
l'an 313 de Jésus-Christ jusqu'en 32i. L'an- copale avait été presque détruite par une
née suivante on tint à Nicéc un concile do inondation, en fut si ellVayé qu'il se retira à
trois cent dix-huil évoques. Saint Jac<iues ,
Antioche , oi'i il mourut au bout d'environ
3„j évèque de Nisibe, mourut en 338. En 351) la soixante - dix jours. C'était la quatrième
ville de Nicomcdic l'ut détruite par un trem- fois qu'Édesse avait été ravagée par les
blement de terre. En 373 les ariens chas- eaux la première fois, sons l'empereur Sé-
:

sèrent de l'église d'Édessc le peuple catho- vère kl seconde, sous l'empire de Dioclé-
;

lique, qui trouva le moyen d'y rentier en tien la troisième, sous Honoiius et Théo-
;

378. En 381 il se tint à Constantinople un dose la quatrième, sous Justin. L'évoque


;

concile de cent cinquante évoques. En 394 Euphrésius, auprès de qui Asclépius s'était
le corps de saint Thomas apôtre fut tranféré retiré, périt en 326 dans un tremblement de
401. à Édesse, et mis dans la grande église qiie terre qui renversa un giand nombre de mai-
l'on avait dédiée sous son nom. En 413 Rah- sons de la ville d'Autioche. La Chronique
bulas fut élu évèque d'Edesse : ce fut lui d'Edesse par le récit de l'irruption que
finit

qui bâtit par ordre de l'Empereur l'éi^lise Chosroës, roi des Perses, fit sur les terres des
de Sainl-Étienne qui était auparavant du
,
Romains en 340, sans avoir aucun égard aux
Sabbath c'est-à-dire une synagogue des
, traités de paix qu'il avait faits avec eux.
Juifs. En -i^l saint Jacques souffrit le mar- Suit une des rois et des évêques d'F^des-
liste

tyre dans la persécution de Yararanes roi , se, tirée Chronique de Ucnys.


de la

des Perses. L'auteur de la Chronique met le 3. On en trouve une à la suite de celle Cl(roni(]us
anoiivine-
concile d'Éphèse k l'an 742 de l'ère des d'Ejiscbe et de Marcellin, qu'on croit avoir Ad c;ilcem
Clron.Euseb.
Grecs, ce qui revient à l'an 431 de l'ère com- été écrite vers les commencements du vi'^siè- pas- ".«dii,

mune le manuscrit portait 7 14 d'où il sui-


: ; cle, parce qu'elle ne conduit le catalogue 2"-i'»<i-

vait que ce concile ne se serait tenu qu'en des empereurs Romains que jusqu'à Anas-
(oa. 433, contre la teneur des actes mêmes mais ; lase qui régna depuis l'an 491 jusqu'en
,
r^g. le.

celte faute, qui venait visiblement de la part 518. Ce n'est qu'une compilation des Chro-
des copistes, a été corrigée dans l'imprimé. niques d'Africain, d'Eusèbe, de Castor et de
Sous l'épisLopat d'Iljas, Sénator donna à une quelqueslautres anciens, que l'auteur a mises
des églises d'Édessc une grande table d'ar- en latin, et souvent sans en prendre bien le
gent, pesant sept cent vingt livres et Ana- ; sens, parce qu'il ne savait le grec que très-
tolius, préfet de la milice fit couvrir (l'ar-
, imparfaitement d'où vient qu'd a passé
:

gent la châsse qui renfermait les reliques de plusieurs choses intéressantes, n'étant pas
saint Thomas apôtre. La réputation du pape assez habile pour les bien rendre en sa lan-
m. saint Léon s'étendit jusqaes dans l'Osroën- gue. Pour suppléer en quelque sorte à ce
ne, de même que celle de saint Siméon Sty- défaut, il est tombé dans un autre, en mê-
lile, dont la Chronique d'Edesse met la mort lant ses conjectures et ses propres idées
en 439 en le qualifiant de saint. L'école
, avec ce qu'il avait trouvé dans les anciens
établie en cette ville pour l'instruction des chronologistes. Son ouvrage, quoiqu'écrit
Perses qin embrassaient la religion chré- d'un style barbare et peu correct, ne laisse
tienne fut supprimée en 489. L'empereur pas d'avoir sou utilité par rapport aux ex-
;„;. Anaslase, ennemi du concile de Chalcédoine, traits qu'il y rapporte de divers ouvrages qui
, ,

344 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


n'existent plus. 11 commence sa Chronique k roi Ht'-rodes,après avoir ordonné de mettre
la création du monde, et donne de suite les ;\ mort tous les enfants au-dessous de deux
générations d'Adam et de ses enfants, et cel- ans, envoya ses ministres A Zacharie pour
les des enfants de Noc, marquant le partage lui demander où il avait caché Jean, son

qu'ils firent de la terre, et les nations qui sont fils, avec menace de le tuerlui-mèmo, s'il ne

nées d'eux. D rapporte les noms des diver- le découvrait; qu'ayant refusé de le faire, Za-

ses provinces qui furent habitées par les charie fui misa mort à la pointe du jour, étant
enfants de Sem les juges des Hébreux, de-
; auprès de l'autel; qu'Elisabeth, voulant sous-
puis qu'ils eurent passé le Jourdain; les traire son tils à la cruanté d'Hérodes se ,

rois des Romains et des autres nations; ceux sauva dans les montagnes et que, ne trou- ;

des Juifs et des Perses ; les princes des prê- vant pas où le mettre en siireté, elle pria
tres; les rois des Assyriens, de Corinthc et que la montagne s'ouvrît pour la recevoir,
de Macédoine, des Mèdes et des Egyptiens ;
elle et son fils ce qui fut fait aussitôt. Il
;

les consuls et les empereurs. Il dit quelque suppose visiblement un autre prodige, sa-
cbose des persécutions excitées contre VVi- voir que cette montacae se rouvrit pour ren-
glise pas- Dioctétien; de l'invention de la dre saint Jean, puisqu'il raconte ensuite la
Croix de notre Seigneur par sainte Hélène, manière dont Hérodes le fit décapiter. Il ap-
mère de Constantin du concile de Nicée et
; pelle Bala la servante qui servait de portière
de son s^^nbole de la ti-anslation des reli-
; chez Caiphe, prince des prêtres et avance ,

ques de saint André et de saint Luc à Cons- plusieurs autres faits semblables qu'il avait
tantiuople et des ravages que les ariens fi-
; apparemment puisés dans quelques livres
rent dans l'Église. Il compte o50() ans depuis ai)t)cryphcs; ce qui marque son peu de choix
Adam jusqu'à la naissance du Sauveur; daus les matières dont il composait son ou-
donne aux mages qui vinrent l'adorer les vrage, mêlant ensemble le bon et le mau-
noms de Bitliisarea, de Melchior et de (la- vais.
thaspar. Un ne sait où il avait appris que le

CHAPITRE XXXYII.

Julien évêque d'Halicarnasse , Pomitien évêqno d'Ancyrc [écrivains grecs]

Vérécnndns évêqne d'Afrique [écrivain latin] , Panl le Silentiaire ,

Eustratius prêtre de Constantinople [écrivains grecs]

Cogitosns [591].

Jti])«n
licaroaue
d'U*
: %t*
L'empereur Anastase n'ayant pu enS'"^-
1. son siège, comme ennemi déclaré de ce con-
*«'^">
Il
ji.éj.-
ggj.Macédonius, évéque de Constantinople, cile. Julien se relira avec Sévère, chassé
Lecli Lit<er«i.
in Hr.or à communiquer avec les ennemis du concile aussi d'Antioclie, h Alexandrie, où ils fuient
ctp.x xLrfint
De ïectii, ict. de Cbalcédoine, bien moins encore à le con- bien rcrus par Tiraothi'e, évêque de celle
S.
damner lui-même, excita contre lui les moi- ville. Il arriva enlr'aulres, pendant leur sé-
nes schismalii]ucs et les magistrats de la jour A Alexandrie, unedispule sm- lacornip-
viUe, pour l'attaquer a\<,o de grands cris et liliilili' du corps de Jésus-CIirisl. Julien sou-

des injui'es lorsqu'il passerait par les lues tint l'incorruplibililé contre Sévère, de vive
de Constantinople. Julien, évêque d'Halicar- voix el par écrit ; et il est regardé comme
nasse, et le moine Sévère, quoiqu'ennemis le chef de la secte des incoi'riqifiblcs, qui
l'un de l'autre, se prêtèrent également au n'i'tail (]u'un rejelon de l'hérésie des Euly-
désir du prince. Mais après la mort d',\nas- cliiiMis. un Commentaire
Julien eciivil aussi
lase, Justin, son successeur, s'élant déclan- sur Job; ne nous en reste que quelques
il

pour ceux qui recevaient le concile de Cbal- Ir.ignie.nts dans une Chaîne grecque sur Job,

cédoine, fit chasser Julien d'Halicarnasse Je imprimée à Londres eu 1G37. Julien est en-
[VI* SIÈCLE.] CITAPITRE XXXVII. JULIEN, DOMITIEN, ETC. 3t5

coro cité dans une Chaîne grecque snr le quos bibliques, chantés de son temps dans
xvii» cliapitro do saint Jean; mais comme il les églises d'Afrique. Un grand intérêt litur-

n'y est point ([nafilié d'(''vè(|ue d'Ilalirainas- gique s'allaciie donc tout d'abord a la s('rie
se, on donte qne ce soit le même dont nous de CCS prières vém-rables, qui snnt le can- :

parlons. Ses écrits contre Sévère no sont pas tique de l'F^xodo, celui du Deutéionome, la
venus jusqu'iï nous. prière de Jérémie, l'hymne des trois enfants,
Domlllrtii 2. Farundus nous a conservéïin fragment
' le canli(iue d'Ezéchias, celui d'IIabacuc, la
:,r d'»n-
du libelle ou do la requête qne Domitieu prière de Manassès, le cantique de Jouas et

adressa au pape Vigile au sujet de la con- le chaut triomphal de Débora que l'on ne ,

damnation d'Origène. On y voit que les ori- rencontre que rarement dans les anciens
génisles, irrités de ce qu'on avait condamné Lertionnaires. Ces cantiques sont reproduits
Origène cherchèrent h s'en venger par la
, d'après l'antique version nommée italique,

condamnation des Trois-Chapitres. Cela leur qui se trouve par là même enrichie de frag-
réussit. Mais Domitien, et Théodore Cappa- ments depuis longtemps perdus. Le com-
docicn, surnommé Escidas, son ami, ne pu- mentaire suit la métliode familière à saint
rent refuser de condamner enx-mèmei^ Ori- Augustin ; la lettre y est expliquée souvent
gène, quoiqu'ils en fussent les principaux avec rigueur, mais en laissant toujours la
défenseurs. Ils acquirent l'un et l'autre tant place la plus abondante à ces applications
de crédit k la cour, qu'ils devinrent tous allégoriques et morales que l'enseignement
deux archevêques, Domitien d'Ancyre, -et de l'évêque d'Hippone a consacrées. On y
Théodore de Césarée en Cappadoce Do- ; remarque des passages précieux sur des
mitien avait été auparavant " abbé de Saint- points importants de doctrine tels que le ,

Martyrius. purgatoire, le péché originel, la justifica-


3. L'un des plus obstinés parmi les évê- tion, la grâce, les prérogatives de l'Eglise,
év*qiie d An-
ques d'Afrique à défendre les Trois-Chapi- etc. L'auteur fait allusion à des faits con-
crils
tres fut Vérécundus, évêque de Jonque dans temporains, et surtout à la persécution des
la Bysacène il mourut ' en So2 à Chalcé-
: Vandales, vers l'an 538. Il cite de savants
doiue dans l'asile de Sainte-Euphémie, où auteurs classiques et d'anciens Pères, saint
il s'était réfugié depuis son exil. On lui at- Jean Chrysostome entre autres, saint Jérô-
tribue ' deux petits écrits en vers, l'un sur me, dont il mentionne les versions comme
la résurrection et le jugement, l'autre inti- une œuvre récente et en termes remarqua-
tulé De la Pénitence, dans lequel il pleurait
: bles. Ce commentaire n'existe que dans un
ses propres péchés. Loaisa dit ^ avoir vu ce seul manuscrit conservé à la Bibliothèque
dernier; mais on ne l'a pas encore rendu de l'Université de Leyde, que le Gouverne-
public. [ ' Dans son tome IV du Spicileghnn ment hollandais a généreusement mis à la
Solesmense, D. Pitra consacre une disserta- disposition des bénédictins fi-ançais, en per-
tion préliminaire à faire connaître Vérécun- piettant qu'il fut envoyé jusqu'à l'abbaye de
dus. Les renseignements se réduisaient jus- Solesmes.
qu'à présent à sa signature au bas d'une Vérécundus, devenu évêque de Jonca, prit
du pape Vigile, à une courte mention
lettre une part active à la controverse des Trois-
faite par le pape Adrien 1", et à quelques li- Chapitres, et se rendit à Constantinople vers
gnes de Victor de Tunes et de saint Isidore ; 530. Il partagea tous les rudes combats du
mais des recherches minutieuses ont permis pape Vigile contre les fantaisies théologi-
au savant bénédictin de donner une idée as- ques de Justinien. Eu touchant à cette dis-
sez complète de sa vie et de ses écrits. Prê- cussion confuse et violente, la dissertation
tre savant et versé dans l'Écriture sainte et préliminaire que nous résumons jette sur
les traditions des Pères, Vérécundus consa- plusieurs points un jour nouveau. Nous
cra ses veilles, comme saint Jérôme, à com- avons surtout remarqué une pièce inédite
menter les saints livres pour l'édification du de la plus haute importance. C'est une sorte
peuple chrétien. Il eut l'heureuse idée de de profession de foi, savante, raisonnée et
choisir un sujet rarement ù'aité : les canti- d'une forme très-solennelle, que le pape Vi-

' Facund. lib. I, cap. u. et lib. IV, cap. iv. 5 Ibid., in noti?.
* Vita S. Sali., num. 83. « Tout ce qui suit est tiré de VVnivers, 10 avril
' Victor Turon. in Chronico. 18S8.
* Appcnd.ad IsidorumBe Sc?-tpfor. Eecles., cap. vi.
. ,

346 inSTOTRE GKXrÎRALE DES AUTEURS ECCLfiSlASTIQUES.


gile paraît avoir piiblic-e en prenant posses- qui ne tarda pas ix recueillir la récompense
sion du Siéfie apostolique,comme pour de son courage par un triomphe éclatant sur
dissiper les légitimes alarmes que son élec- les intrigues du palais.
tion pouvait donner. Alors le j^rand débat Ce fut probablement dans ces dernières cir-
des Trois -Clmijilns s'ouvrait à peiue. La constances que l'évèque de Jonca exécuta un
cpiestion s'y trouve posée en termes qui dif- abrégé des Actes du concile de Chalcédoine,
fèrent de la solution défmitive. On sera ten- dont il put avoir sous les yeux les titres origi-
té d'y voir une nouvelle preuve des varia- naux. Cet abrégé, venu jusqu'il nous et tout A
tions reprochées au pape Vigile. Mais le faitinconnu, figuredansle volume nouveau du
lecteur impartial reconnaîtra que ce pape, Spicilége.Il est suivi de poésies mentionnées

une fois devenu légitime resta constam-, par saint Isidore, dont la forme rliyllimique
ment digne de sa haute élévation et que , rappelle exactement les poésies de Coinmo-
dans cette controverse, qui troubla les meil- dien, et d'un certain nombre d'inscriptions
leurs esprits, il suivit toutes les phases de africaines récemment publiées. DomPitray
la discussion avec une prudence une me-
, joint un long et curieux poëme sur le juge-
sure et une justesse que l'astuce des Grecs ment dernier, attribué à Vérécundus par
ne put mettre en défaut distinguant tou-
: Arévalo , à tort selon toute apparence. Il

jours'les principes des faits elles faits des per- méritait toutefois d'être publié, etcomplète il

sonnes, sauvant l'orthodoxie, et en condam- les traditions que l'on a remarquées dans le
nant des erreurs incontestables, gardant les poëme de Commodien, insi-rées au premier
ménagements dus, par exemple, à un hom- volume du Sjiiciléf/e. Ce dernier poëme était
me aussi méritant que Théodoret, surtout mutilé sur la fin. Une nouvelle étude du ma-
ne permettant jamais la moindre atteinte au nuscrit unique de Middle-Ilill a permis de
concile de Chalcédoine qui jusqu'au bout
,
restituer presque intégralement les quarante
fut sourdement attaqué par le parti domi- derniers vers. Le savant éditeiu- donne aussi
nant à la cour de Justinien. Ce parti, fu- les Variantes d'un manuscrit, par lesquelles
rieux de ne rien obtenir, en vint à des extré- se trouvent restituées et corrigées plus de
mités inouïes dans l'histoire des persécu- quatre cents vers des Instructions du même
tions de l'Eglise. Un vieillard, un réfugié que Commodien ,
publiées depuis longtemps
protégeait un droit d'asile réputé inviolable, mais avec des imperfections qui les rendaient
un Pape enfin se vit assailli par une soldates- inintelligibles.]
que insolente, que commandait le neveu de 4. Paul , surnommé Cyrus Floms, et ap- i...,i
Fiorui : se»
l'Empereur; ces forcenés, le tirant par les pelé le Silentiaire, parce qu'il remplissait
cheveux et la barbe, bii firent subir mille cette dignité daus la courdcl'emperem' Justi-
brutalités, et un autel de Saint-Pierre, con- nien, fit en vers la description du temple de
tre lequel il s'cHait appuyé, faillit s'écrouler Sainte-Sophie, que ce prince avait fait bâtir
pendant cette lutte. Demeuré libre un mo» à Constantinople. Ce poëme a été imprimé
ment, Vigile ne se releva que pour lancer en grec et en latin à Paris en 1670, par les
l'excommunication contre le patriarche de soins et avec les notes de Charles du Fresne,
Constantinople et les auteurs de ces violen- à la suite de V Histoire de Cinname [et dans le
ces. I>e nom de A'érécundus, avec ceux de tome XI de la Collectinn des Historiens de
douze autres évêques figure noblement au
, IJyzancc, Venise, et dans la nouvelle édition
bas de ce grand acte de vigueur pontificale. de cet ouvrage imprimée h Bonn en 1829,
Vérécundus accompagna encore le pape Vigi- d'où elle a passé au tome LXX.Wl de la Pa-
le dans la fuite clandestine qui leur permit de trolofjie grvcfji/e avec une notice tirée de Fa-
se retirer A Chalcédoine, dans l'église même britius, col. 2111-2223. On trouve à la suite

de Sainte-Euphémie, où s'était tenu le con- la description de l'ambon, que Paul débita


cile n-cumcnique. Selon le témoignaue d'un dans la maison du patriarche après le grand

compatriote et d'un contemporain, Victor de poëme, et les vers sur les thermes de Pythias.
Tunes, Vérécundus exilé, et proscrit par On les a tirés de Rrunck tome III Analerfa,
,

l'empereur Justinien, mourut en 532 dans p. ill]. .Vgathias le Scolaslique dit', en par-
cet asile, peut-être à côté du pape Vigile, lant de l'écrit de Paul Cyrus, qu'il était tra-

' Videntur mihi qiKv île temple scripsit tanlo giimenluni ipsiiin est admirabiliuji. Apath. lib. V
majore et taborc tlscienliarcfcrla, quanta cl ar- De Justin., pag. 106, edil. Vcuel. an. 1729.
[\r SIÈCLE.] CHAPITRE XXXVII. — .lULlEN, DOMITIEN, ETC. ,'{47

vaille avec autant d'art cl ilt; savoir, (juc litionsdes anges faites h la sainte Vierge, à
l'mivraiic qui en faisait le sujet était admi- Zacbarie, i\ Gédéon, à Abraliam, qui étaient
liiblo qu'il y relevait reiuplacemcnt de ce
;
telles, que ceux qui ils apparaissaient sa-
;\

temple, la justesse de ses pioporlions la , vaient l)i(;n que c'i'laicnt des anges. Saint p»e a^i'

beauté de ses vestibules , descendant jus- Antoine vit aussi l'âme du bienheureux Paul
qu'au détail des divers métaux qu'on avait au milieu du chœur des patriarches et des
employés pour l'orner. II lui attribue di- prophètes. Saint Basile représente les qua- r,2.

vers autres écrits qu'il ne nomme pas, mais raute martyrs, comme occupés à la défense
qu'il dit être dignes d'éloges et d'estime. de la Cappadoce. La Vie de saint Nicolas, m.
Eiislruliir, 5. De la manière dont Eustratius, prêtre do évêque de Myre, rapporte une apparition de
jirAtrp do
l'iiglisede Constantinople parle d'Euly- ,
ce saint à l'empereur Constantin et au pré-
pl* : -c^fcrit-:
too Irailé do chius qui en était patriarche, on ne peut fet Ahlabius, pour les obliger de faire sortir
rF.U(d(l>ne
pris celle
douter ' qu'ils n'aient été contemporains. de prison trois généraux d'armées. Mais quel
re ; 'opr.
XXVII Bill.
«Le grand Eutycbius, archevêque de Cons- est le séjour des âmes sorties de leurs corps?
F«l.,l..g.lfi.
tantinople, m'est, dit-il, un chef sacré et res- Eustratius, après avoir rapporté sur cela quel- 390.

pectable en tout. » L'amour qu'il lui portait ques passages de saint Basile, de saint Gré-
l'engagea à en écrire la Vie, que Surius et goire de Nysse et de saint Athanase, dit que
Papebrock ont fait imprimer dans leurs Re- les âmes des saints sont reçues dans le ciel,
cueils au mois d'avril. Mais c'est plutôt une et que celles des méchants sont vagabondes

oraison funèbre qu'une Vie ordinaire te qui ; dans l'air, cherchant un lieu de repos, et n'en
est encore une preuve qu'Eustratius la com- trouvant point.
posa quelque temps après mort d'Euty-
la La troisième question qu'il se propose est 38i.

chius, arrivée le 5 avril 38:2. Nous avons de plus intéressante, savoirs! les âmes des dé-
lui un autre écrit intitulé De VEtat des morts
: funts reçoivent quelque utilité des prières et
après cette vie. Léon Allatius lui a donné place des supplications que les vivants font pour
dans son livre rfw Consentement des Eglises d'Oc- elles. Il établit d'abord l'usage de la prière

cident et d'Orient sur le Ptu-r/atoire, impnmé à et des sacrifices pour les morts, par l'auto-

Rome en i6oo, et depuis dans le tome XXVII rité du second livre des Machabées, de l'é-

de la Bibliotlièque des Pères. Eustratius se pro- pitre de saint Paul aux Hébreux, et des livres
pose trois choses dans ce traité la première, : de saint Denis l'Aréopagite, par le Testament
de montrer que l'âme, soit des bienheureux, de saint Ephrem, par la cinquième cathé-
soit des malheureux, pense et agit après chèse mystagogique de saint Cyrille de Jé-
qu'elle est séparée de sou corps c'est ce qu'il : rusalem, par le discours d'un évêque d'A-
prouve par un grand nombre de passages de lexandrie qu'il ne nomme point, fait exprès
l'Écriture où nous lisons que les saints inter- contre ceux qui ne voulaient pas que l'on
cèdent pour nous que les esprits des justes
; offrît des saci'itices pour les morts et par un
;

bénissent le Seigneur; que le sang des mar- endroit du Commentaire de saintChrysos-


tyrs crie vers le ciel pour demander ven- tome sur saint Matthieu. Il en tire cette consé-
geance contre ceux qui l'ont répandu que ; quence, que Dieu ayant prescrit et autorisé
ceux d'entre les morts qui meurent en J.-C. les prières et les sacrifices pour les morts, on
^
sont bienheureux. Tout cela ne pourrait ne peut douter de leur utilité. Photius dit
avoir lieu, si les âmes séparées de leurs corps qu'il avait lu dans le traité d'Eustratius, que
s'endoi-maient d'un profond sommed. La se- Gamaliel, maître de saint Paul, avait cru en
conde est de faire voir que les âmes, qui ont Jésus-Christ, et reçu ensuite le baptême, avec
souvent apparu aux hommes, ont apparu dans Nicodème, des mains de saint Jean et de saint
leur propre subsistance il en donne pour
: Pierre, et avec le fils de Gamaliel, nommé

preuve l'apparition faite à saint Grégoire Ahbus; que les Juifs, ayant appris le bap-
Thaumaturge, dans laquelle saint Jean l'É- tême de iXicodème, le maltraitèrent si violem-
vangéliste, sous la forme d'un vieillard, lui ment, qu'il mourut quelque temps après de
découvrit le mystère de la \Taie religion, aux ses plaies. Eustratius ne rapporte point tous
instances de la Mère du Seigneur, qui lui ap- ces faits de lui-même, mais comme faisant
parut sous la tîgure d'une femme les appa- ; partie de l'Histoire de l'invention des i-eliques

' Planius hoc ipsimmagnus Eutychiiis archie- in omnibus sacrumqiie caput. Eustrat., tom. XXVIt
piscopus Conslantinopolitanus cenerandum mihi Bibl. Pat., pag. 372.—^ Pliot. Cod. 171.
,

348 HISTOIRE GÉNÉRAL DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


de saint Etienne, de Gamaliel et de Nicodème, les murailles de cette église; ce qui n'était
p;\r le prêtre Lucien. Le même Pliolius, en point en usage dans les églises d'Irlande au
donnant le précis du traité d'Eustratius, ré- commencement du vi"- Mais on peut
siècle.
duit à trois propositions tout ce que cet au- répondre qu'on ne parlait plus la langue
teur prétend y établir d'où qiielijues-uns : latine dans sa pureté en Irlande dès les v"
ont conclu qu'Eustratius avait composé trois et VI" siècles, comme on peut le voir par les
traités sur l'état des âme.s après cette vie. Il Actes des conciles que nous en avons rap-
n'y a rien de tout cela. Ce n'est qu'un seul portés, et par quelques écrivains irlandais
traité, où, comme nous venons de le dire, il qui ont vécu dans ces siècles qu'à l'égard
;

établit que les âmes, après leur dissolution des images, on en voyait dans les églises
d'avec le corps, agissent et apparaissent quel- d'Orient et d'Occident dès les V et vi' siècles.
quefois , et que les prières et les sacrifices L'image d'Acace de Constantinople se trou-
leur sont utiles. C'est encore sans fondement vait dans presque toutes les églises de cette
qu'on tire des paroles de Photiiis qu'Eustra- ville. Dans une qui était près de l'arsenal,

tius a fuit reloge du saint martyr Théodore : cet évêque y était peint à l'endroit le plus ET>tr., III.

il n'en est rien dit dans Pliotius. Eustratius' apparent. Théodore remarque que, lorsque
cite quelque chose du discours en l'honneur Timothée Litrobulbe, qu'Anastase avait fait ^^^^
de ce saint martyr; mais il le cite comme ordonner évêque de Constantinople, entrait " '•"
de Chrysippus, prêtre de Jérusalem. II cite ^ dans les églises, il en faisait ôter les images
encore im discours du patriarche Eutychius de Macédonius, avant d'y commencer l'of-
sur la manière dont les natures inteUigentes fice. Dans un concile tenu à Tours en 566,

sont dans un lieu. Nous n'avons plus ce dis- il fut ordonné que le corps de notre Seigneur,

cours. D servait à montrer que l'âme est spi- sur l'autel, ne serait point mis au rang des
rituelle. Le style d'Eustratius n'est pas bon ;
images, mais sous la croix. Nous avons vu
mais il est clair. plus haut que le pape Jean III fit peindre
C'>eiln.*us 6. Nous mettons Cogitosus parmi les écri- plusiem'S histoires, partie eu mosaïque, par-
ses écrits.
vains du VI' siècle, parce qu'il se dit neveu' tie avec des couleurs, dans l'église que Pe-

de sainte Brigide abbesse de Rildar en Ir-


, lage I, son prédécesseur, avait commencée.
lande, à sept ou huit lieues de Dublin, dans Ennn,quoiqu'on puisse entendre des miracles,
la province de Leinster, morte, selon Sige- faits dans l'église de Sainte-Brigide, les ver-

bert, en 518, ou en 521 selon Martin le Po- tus de la sainte dont Cogitosus dit avoir été
lonais. Cogitosus en écrivit la Vie, en partie témoin, cela peut s'entendre aussi des actes
sur ce qu'il avait appris de la sainte ' par les de vertu qu'il lui avait vu faire avant sa
anciens qui l'avaient vue, et eu partie sur le mort car il y joint ' ensemble les miracles
:

témoignage de ses yeux. Ceux cpii veulent qu'elle avait faits de son vivant et ceux ,

que cet auteur n'ait écrit que longtemps qui s'opéraient à son tombeau depuis sa
après la mort de la sainte, disent qu'il faut mort. Ce dernier sens est d'autant plus rece-
entendre ce témoignage des miracles qu'il neveu de la sainte. Au reste,
ble, qu'il se dit
avait vus s'opérer dans l'église qui portait le la Vie qu'ilen a écrite est très-différente de
nom de Brigide ; et que ce qui fait voir en- celle que Surius en a donnée au I" février.
core mieux que Cogitosus n'a vécu que dans Celle de Cogitosus se trouve parmi les an-
lc3 siècles postérieurs, c'est qu'ouli'e la bar- ciennes leçons de Canisius [et dans le tome
barie de son style, propre à ces siècles, il LXXIl de la Patrologie latine, col. 773].
parle des images et des histoires peintes sur

« Toin. X Bibl. Pat., pag. 378. (juam sarcinam dcponerel carnis, virlutes pluri-
' Ibid., pag. 372. mas operata est, sed largitas divini muneris in
' Orale pro me Cogiloso nepote culpabili. Vil. suo monasterio, ubi ejus veiierabile requiescil
Brig., Ibid., pag. 424. corpus, semper operari virtules non cessai, quas
* Pauca de pluribus a majnribus et peritissi- nos virlutes non solum audiviinus sed eliam ,

mis tradila, sine vtla nmhiguitatis caligine, pa- oculis nostris vidimus. Idem, in Vit. Brig., pag.
tefacere censeo. Idem, in Prolog. 422.
'^
Non solum autem in sua vila carnali, ante-
[VI» SIÈCLE.] r.IIAPlTRE XXXVni. — AGNELLUS, GOUDIEN, ETC. MQ

CHAPITRE XXXVIII.

Agnellas [vers l'an 556], Gordien, Simplice |570J et Colamba

ou Columbaii [598]

ll^crivains Intiiis.l

Agaciii., : 1. Agnellus, né d'une condition noble ot sur quoi il dit que, comme
ne peut pointl'on
"«'niu>! ' o*n.' très-riclie, ayant perdu sa femme, omljrassa diviser le lleuve de la fontaine d'où il prend

p il", rï'. 606- l'état ecclésiastiqne, et fut fait diacre par sa source, c'est aussi inutilement que les
l'archevêque de Ravenne. Son premier em- ariens prétendent diviser le Fils de Dieu
ploi dans cet état fut de prendre soin de d'avec le Père, de qui le Fils tire son origine.
l'église de Sainte-Agathe en cette ville , ; Les ariens objectaient ces paroles du Fils :

mais l'archevêque Maximien étant mort Mon l'ère est plus grand que mui. Agnellus
vers l'an boo, Agnellus fut choisi pour lui dit à Arménius de leur répondre, que le Fils

succéder. Il trouva le moyen, par la mé- est moindre que son Père selon la forme
diation de Narpès qui commandait en Ita- d'esclave, dans laquelle il s'est anéanti ;'mais
lie pour l'empei'cur Justiuien, de faire réu- qu'il est égal à son Père selon la forme de
nir au domaine de l'église de Ravenne tous Dieu. Cette lettre se trouve dans l'Antidote
les biens des Goths. Lesiariens avaient cons- contre les hérésies, à Râle, en 1528 dans le ;

truit plusieurs églises, qu'ils avaient souillées huitième tome de la Bibliothèque des Pères à
par leurs cérémonies Agnellus les purilia, : Lyon [et dans le tome LXVII de la Patrologie
en }• établissant le vrai culte de Dieu. On latine, col. 385, où elle est reproduite d'après
met sa mort à l'an 556, ce qui parait un ter- Galland, qui la donne au tome XII de la Bi-
me bien court pour tant de belles actions. Il bliothèque des anciens Pères, avec une notice],
nous reste de lui une lettre à Arménius, 2. On ne met le moine Gordien parmi les 0»rdien,au*
leitr sufipn^é.
dans laquelle il s'applique principalement à écrivains ecclésiastiques, que parce qu'on Vide Matiill.
lih. III An-
établir contre les ariens la cousubstantialité le suppose auteur des Actes du martyre de nal. p3g. rc,
lib. IV.
du Père et du Fils. Il paraît que ces héréti- saint Placide, disciple de saint Denoît mais ;
p"^- si

ques faisaient tout leur possible pour infec- cette opinion, qui a eu cours pendant quel-
ter Arménius de leurs erreurs. Un nommé ques siècles, est aujourd'hui rejetée pres-
Martin, qu'Agnellus appelle son frère, s'a- qu'unanimement : il ne faut que lire les Ac-
dressa à lui pour donner à Arménius les ins- tes qui portent le nom de Gordien, pour en
tructions nécessaires, et le fortifier dans la connaître la supposition. L'auteur, qui se
foi. La première chose qu'il demande de lui, donne pour compagnon du voyage de saint
est de croire qu'il y a un Dieu et la seconde, ; Placide en Sicile, se trahit lui-même, lors-
de savoir ce qu'est Dieu. Il définit Dieu, qu'on marquant le nombre des Papes qui
comme Dieu s'est défini lui-même en par- ont confirmé les donations faites par Tertul-
lant à Moïse, et prouve par cette définition lus en en compte quarante-neuf
Sicile, il

que|Dieu est immuable, éternel; que, comme depuis Vigile ce qui


fait voir que l'impos-
:

il a toujours été Dieu, il n'a jamais cessé teur vivait sous le pontificat de Jean VIll,
d'être Père, et conséquemment, que son Fils qui mourut dans le mois de décembre de
lui est coéternel. Il ajoute que du Père et du l'an 882, après dix ans de siège, et ainsi près
Fils procède une vertu, c'est-à-dire le Saint-
'
de trois cent quarante-huit ans après la mis-
Esprit et que ces trois personnes n'ont
; sion de saint Placide en Sicile.
qu'une même nature, ou, comme il dit, une 3. Le troisième aljbé du Mont-Cassin, de- SimpHc*,
même puissance de subsister. Il compare le puis saint Renoît, fut Simplice, qui succéda
allié
CassîH.
du Mont.

Père aune fontaine, et le Fils à un lleuve :


dans celte dignité à Constantin, avec lequel

* Ex Pâtre Filiits, ex Paire et Filio procedtt Spiritus Sanclus. Agnell. Epist ad Armenium.
330 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
-'"t.i"*'' il avait (^ti5 ëlevë. moine du
Pierre Diacre, comme le plus considérable. Saint Columba
!°V' ^'\?i!
nième monas-tèro, que Simplice répandit
dit en fut abbé et comme il était prêtre, ce
;

AoIi'.'i.',''^*V
partout la liègk de saint Benoît, et qu'il en monastère fut dans la suite gouverné par un
laur.î.
jj^if une partie en vers. On les trouve dans prêtre qui en était abbé, et à qui toute la
Haëftène, ot dans le Code des t-rr/les imprimé province était soumise, même les évêques,
à Paris en 1K63. Simplice mourut vers l'an par un usage extraordinaire. On remar-
î»"0, après avoir gouverné le monastère de que que ses successeurs ne se conformaient
Mont-Cassin pendant environ dix ans. pas aux autres églises pour l'observation de
coiumU: 4. Columba on Columban surnommé , la Pâ(jue parce qu'étant extrêmement éloi-
,

B^uiib. III l'Ancien, pour le distinguer


' *
'^ d'un abbé de gnés du reste du monde, ils n'avaient point
Mis!., •^p. Il
Miii.. ',,«p. même nom qui se rendit célèbre dans le de connaissance des décrets que les con-
\'n' siècle, Ijâlit au commencement durègiie ciles avaient faits sur cette matière. Le saint
de Justin-le-Jcune le monaslère célèbre de vécut trente-quatre ans depuis son passage
Dermarrli en Irlande, d'où il était oiiginairo. dans la Grande-Bretagne, et mourut en 598,
En 365, voulant se soustraire à la fureur du le 9juin, auquel l'Eglise honore sa mémoire.
roi Dermici.us qui pensait à le faire mourir, Il fut enterré dans l'église du monastère
il passa dans la Grando-Bretafinc, où il prê- de Hy. Wara'us, dans son premier livre des
cha la foi aux Pietés septentrionaux, séparés Fo-imim irlandais, attribue à saint Columba
des méridionaux par d'affreuses montagnes. une liègle pour ses moines, une hjnnne à
Il établit im second monaslère dans une île la louange de saint Kieran, abbé, et trois
de la Bretagne nommée lly ou IIii, au nord autres sur divers sujets. [Le tome LXVI de
dellilande, et au coucliant de l'Kcosse. Ces la Patrologie lutine, col. 997-993, reproduit
deux monastères en produisirent plusieurs une Ji(>gle attribuée à saint (Columban.]
autres, dont celui deHy fut toujours le chef,

CHAPITRE XXXIX.

Saint Martin de Dnmc archevêque de Bragne.

(Écrivain latin vers l'an 580.]

Siint Mar- 1. Ce saint était originaire de Pannonio. qu'il avait hérité le nom et les mérites de
tin (-st fait ab-
l'é de Du nie, Élantencorejeune,ilfit un voyage en Orient, saint Martin de Tours.
piiH arcb'vC-
que de Br.i- dans le dessein de visiter les Saints-Lieux. 2. Nous avons de saint Martin de Bragne saint
Écrits do
Martin
Use rendit si habile dans les sciences, qu'au' une Collection de canons qu'il adressa h Niti- àf llragi
CDlleclioD
e. >a
de
jugement de de Tours, il sur-
saint Grégoire gius, évêque de Lugo, le même qui présida caoonf.

passait tous ceux de son siècle. A son re- au concile tenu en cette ville en 572 par les
tour, il passa dans la Galice, où il fut chargé évêques de la province. Il marque dans la
du gfiuveriu'mont du monastère de Dume, Préface de cette Collection, que les canons
et ensuite choisi évèque de Braguc. En 572, faits par les anciens Pères dans les conciles

il tint un concile dans l'éghse de sa métro- d'Orient, ayant d'abord été écrits en grec,
pole avec douze évêques des deux provinces ont été dans la suite altérés, tant par le dé-
de Galice, c'est-à-dire, deBraguo el de Lugo. faut des traducteurs latins, que parla négli-
Il mourut après environ vingt ou trente ans gence ou l'ignorance des copistes que c'est ;

d'épiscopat, le 20 mars, vers l'an 580. C'est pour cette raison qu'il a travaillé à les ren-
à lui que Fortunat a adressé* les premiejs dre plus corrects, soit en mettant dans une
vers de sou cinquième livre il dit de lui ; plus grande clarté ce que les traducteurs

In tanlum se litleris iinbitit, tit viilH secun-


' ' Martirii inerilis cum Domine nobilis lnvres.
dns suis Irmporibits Itubcretur. <!reg. Turon., lili. l'orluual, lili. V, uuuj. 1.

V, Clip. XXXVIII, iiaf.'. 2i7.


[Vl° SIÈCLE.] CnAPITRE XXXIX. — SAINT MARTIN DE DUME. arji

ont rendu oliscurt'mcnl, soit en rt^liil)lissant aussi que le sel de ses discours n'ait rien de
avec trop
les textes qu'ils avaient clianj,n's mordant. « Soyez, ajoute-t-il, gracieux en-
peu de précaution. Sou Recueil est divisé en vers tous; ne llattcz personne; soyez fami-
deux parties, dont la première re|,Mrde les lier avec peu, et équitable envers tout le

évèques cl tout le clergé la seconde les , monde. » Il lui fait remarquer que la justice
laïques. Son dessein dans cette division était esl une loi divine, et le lien delà société hu-

de mettre les lecteurs en étal de trouver maine que, pour la pratiquer, il faut non-
;

sans peine les canons qui les intéres>ai(!nl ;


seulement ne rien prendre à autrui, mais
ils sont en tout au nombre de quatre-vinj;!- encore lui restituer i:e qu'on lui aurait ôti'-.
quatre. On trouve ;\ la tèle de chacun l'eu- 11 ne met point de diirereuce entre assurer
droil d'où il a été tiré, c'est-à-dire, des con- une chose, et jurer qu'elle est véritable;
ciles c(nnpris dans l'ancien Code de l'I^glise mais il ne s'exprime ainsi que par ra|)[)orl

inilverselle , et des conciles d'Espa^jne que au dont en ell'et la parole doit tenir lieu
roi,

l'on avait tenus jusqu'alors.Le premier ca- de serment. 11 semble encore approuver le
non, qui regarde l'élection d'un évoque, esl mensonge dans des occasions pressantes,
le treizième du concile de Laodicée. Le se- pourvu qu'on s'en serve, non pour assurer
cond est le quatrième de Nicée, et a pour une chose fausse, mais pour melti-e à cou-
titre : De Le col-
l'Ordination d'un évèque. vert la vérité; il parait néanmoins par la
lecteui' suit la même méthode dans tout le suite, qu'il ne veut dire autre chose, sinon
, Ton. V Cou. reste. Sa Collection se trouve dans les divers qu'il esl permis quehjuefois de taire la vé-
Recueils des conciles, et dans l'Appendice du rité. « Lorsqu'il y a, dit-il, une cause hon-

premier tome de la liibliollwque canonique nête, le juste ne publie point son secret il ;

(le Justel, à Paris, en ItiCl. tait ce qu'il faut taire; il dit ce qu'il faut
Livr,>»j:i- 3. Mironde Galice, avait isouvent
.
'
roi dire. »
i«o. roi de . , . 1 1 1 • ï
o^i' c T prie sauit Martni de lui donner des nislruc- 4. A la suite de ce traité on en trouve un i-i.re d»
X H.M l'ji.,
m-i*i-
'. .,
lions sur la manière dont il devait se con-
,
.... autre dans le même tome de la Bibliothèque
^
Mii-urs,

duire. Le saint évêque lui adressa pour ce des Pères, intituléDes Mœurs : c'est un tissu
:

sujet, vers l'an uCO, un traité des quatre ver- de maximes morales, également propres à
tus cardinales, qu'il intitula Formule d'une : former l'homme dans la vertu, et dans les
vie honnête. On
imprimé dans le dixième
l'a devoirs de la société civile. En voici quel-
tome de la Bibliothèque des Pères, mais sans ques-unes, Avertissez vos amis en secret
(c :

l'Épître dédicatoire au roi. On la trouve faites leur éloge en public. Ne demandez


dans le dixième tome du Spicik'ge de doni point ce que vous refuseriez à un autre : ne
Pig. 6»c. Luc d'Achéri. Cet évèque dit, en parlant de refusez point ce que vous demanderiez vous-
la prudence, que celui qui possède cette même. Servez-vous plus souvent des oreilles
vertu est toujours le même, mais qu'il sait que de la langue. Lorsque vous voulez dire
I
s'accommoder au temps, suivant la diver- quelque chose dites-la à vous-même avant
,

sité des des circonstances. Sur la


atl'aires et de la dire aux autres. » Saint Isidore de Sé-
magnanimité ou la foi'ce, il enseigne que ville ne nomme point ce petit traité mais il ;

celui qui est véritablement magnanime, ne fait mention 'd'im volume de lettres du saint

croit jamais qu'on lui fasse injure. « Il dira, évêque, dans lesquelles il donnait des pré-
ajoute-t-il, de son ennemi « 11 ne m'a pas : ceptes pour la pratique des vertus et la fuite
« nui, a eu dessein de me nuire » et
mais il ; des vices peut-être que ce traité, qui est
:

lorsqu'il l'aui'a en son pouvoir, il se croira extrêmement court, n'est en effet qu'une
bien vengé d'avoir été en état de se venger.» lettre de ce recueil.
Les instructions qu'il donne au roi sont re- 5. On cite de saiut Martin un livre (/e /'O?'- Amres
'

marquables. Il lui conseille de ne laisser ja- gueil et de l'humilité ; un autre de la Colère, Manio.

mais sortir de sa bouche aucune parole dés- adressé à l'évêque Wictimirus; un troisième
honnèle, et démêler tellement l'enjouement de la PCique une lettre à l'évêque Bouiface
;

avec le sérieux, que cela se fasse sans pré- sur les trois immersions du baptême et une ;

judice de sa dignité et de la pudeur. 11 veut contre les superstitions. [Le tome El des

1 quidem ego ipse legi librum de Diffe-


Cuixis nem et conservationem fidei, etc. \3i1lor. De Script,
reutiisquatuor virtutum; et aliud volumen Epis- eccles., cap. xxn.
tolarum, in quibus hortatur ad vitœ emendaUo-
302 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
CIdssici auctores de Mai, pag. 379-384, con- de Dume dans
la Galice, dont il fut le fon-
tient uu fragment d'un ouvrage de saint dateur et premier abbé. Dans une inscrip-
le
Martin ; ce fragment est sur l'origine des tion en vers • qu'on lisait dans l'église de
idoles'.] ce monastère on lui fait l'honneur d'avoir
,

Le cardinal d'Aguirre ', qui avait trouvé donné par son ministère la connaissance du
tous ces écrits dans un manuscrit de l'église vrai Dieu aux peuples d'Allemagne, de la
de Tolède s'était engagé à les rendre pu-
, Saxe, de la Thuringe, de la Pannonie, de la
blics, avec le traité intitulé Formule de la : Bourgogne de la Dacie , et de beaucoup
,

vie honnête, et un ^and nombre de senten- d'autres provinces. Il n'est rien dit de tout
ces des Pères d'Egypte, traduites en latin cela dans son épilaphe , mais il y est fait ''

par le même évêque. Nous ne savons pas mention du lieu de sa naissance , de ses
s'il a tenu sa parole'. Ces sentences des Pè- voyages au delà de la mer, de son établis-
res d'Kpypte se trouvent ' dans V Appendice sement dans la Galice et du soin qu'il prit ,

des Vies des Pères, par Rosveide. La plupart du culte du Seigneur et des rits sacrés de ,

regardent ceux qui pratiquent les exercices l'Église. [Les écrits de saint Martin de Dume
de la vig- monastique mais il y en a aussi ; sont reproduits au tome LXXll de la Patro-
plusieurs qui peuvent être très-utiles à tous logie laitue, col. 17-32, d'après Galland, qui
les chrétiens qui veulent se perfectionner les a publiésau tome XJi de sa Bibliotlièque
dans la vertu. Voilà tout ce que nous savons avec une notice sur l'auteur. On y trouve
des ou\Tages de saint Martin. Saint Isidore sept opuscules savoir: 1° les formules de la
,

de SéviUe dit de lui*, qu'il avait enseigne la vie honnête ; 2° l'écrit sur les mcewrs; 3° l'o-
foi catLoIique aux Suèves convertis de l'hé- puscule contre la jactance ;
4° sur la superbe ;

résie arienne , atiernii les églises, bâti des 5° sur l'humilité ; 6° sur la colère ; T sur la
monastères et composé des livres remplis
, Pâque. Us sont suivis de trois petites pièces
de préceptes et de maximes de piét('. Il faut de vers.]
mettre aux nombre de ces monastères celui

CHAPITRE LX.

Entychins [582] et Jean le Scholastiqtie [575] patriarches

de Constantinople.

[Écrivains grecs.]

Euljcblu*! 1. Eutycllius', né en Phrygie vers l'an té, Eutychius, reprenant son premier dessein'
p«lri»irliO à'i
C«D^liiDl<lliJ- SI 2, fut envoyé à l'âge de douze ans à Cons- embrassa la vie monastique dans un monas-
pl«.
tantiiiople pour y étudier les belles-lettres. tère de la ville d'Amasée : il avait alors trente
Dans le temps qu'il y était occupé, il conijut ans. Environ dix ans après, c'est-à-dire en
Vîu Eiil.-
le dessein de se faire moine. L'évêque d'A-
chti apu<1 Bol-
332, l'évêque d'Amasée, se trouvant malade,
lard, ad diciii
masée, en ayant été averti, le mit dans son le députa à Coustantinople ,
pour tenir sa
clergé, et le lit passer par tous les degrés du place dans le cinquième concile géuéral. Le
ministère ecclésiaslique, jusqu'à la prêtrise patriarche Menuas, chez (pii il logeait, dit
inclusivement. 11 le destinait même àl'épisco- un jour à son clergé, en parlant d'Eutychius :

pat; mais comme il changea ensuite de volon- Ce moine sera mon successeur. Dans une

' Voir la préface de Mai, pag. H. * De Script, eccks., cap. xxu.


Isidor.
' Kolitia Concilior. Itispan., pag. !)2. " Tom. X, Bibl. Pat., pag. 386.
' Ils ont élé publiés par Jean Tamay Salosar dans ' Ibid.
son martyrologe espagnol, loin, il, pag. .'în-328. De Kulycliius a le litre de salnl parmi les Grecs ;
'

là ilsout passé dans le tome XII de la Bibliotliè- Baronius recounait qu'il l« mérite. Voyez Pnlrot.
que des ancicus l'èrcs de lialland. (L'édileur.) grecque, lom. LXXXIX, col. 2270 et 2389. {L'édi-
* l'ag. 7C6. teur,)
[vi« SIÈCLE.! CHAPITRE XL. — EUTYCHIUS KT JEAN LE SCHOL ASTIQUE. 353

cfirS".'""..'.^
cniifériMico qiio l'on tenait en présence de les hérésies au rapport d'Iùistratius qui a
, ,

l'eiupeieur Justinien, on agita la question écrit sa Ces deux fragments, quoique


Vie.
qiiiavait rapport à celle qui devait faire la courts, sont très-importants, dit M. Bonnetty,
matière du concile, savoir si l'on peut con- dans sa table alphabétique des auteurs di;-
j.ii.,').!."'''
damner les morts. Eutycliius soutint l'allir- eouverls par le cardinal Mai. En elïel, dans
mative, et la prouva par l'exemple du roi le premier, Eutychius réfute d'abord les
Josias, qui fit déterrer et brûler les os des quartodécimains, qui célébraient la P;lque à
idolâtres. Justinien, et la plupart de ceux qui la manière judaïque; puis il s'élève contre
étaient présents, furentcharmés de cette ré- les aquariens ou hydroparastates c'est-:"!- ,

ponse, parce qu'ils pensaient de même. Le dire ceux qui n'employaient que l'eau dans
patriarche Mennas étant donc mort quelques le saint sacrifice , et qui s'excluaient , com-
jours après, l'Empereur lui donna pour suc- me il le dit, du corps du sang du Sauveur.
et
cesseur Eutychius de l'aprément du clerf^é
, Il enseigne qu'il faut offrir le vin mêlé avec
et du sénat il avait quarante ans, lorsqu'il
: l'eau, suivant la tradition du Sauveur, et ré-
fut ordonné patriarche de Constantinople. fute par L'i lesArméniensIschismatiques, qui
eii.,'°iiin.33s! Aussitôt après son intronisation, il donna au n'emploient que le vin, s'appuyant sur les
pape Vigile sa profession de foi, en le priant fausses traditions de leurs ancêtres qui ne ,

de venir présider au concile, et d'y confir- peuvent être comparées à la tradition ve-
mer la paix des Églises par l'examen et le nue du Seigneur Jésus. — Dans le second
jugement de la question des Trots-Chapitres. fragment Eutychius s'élève aussi contre
,

Le Pape ayant refusé de s'y rendre Euty- , une dangereuse coutume qui existe chez les
chius première place avec Apollinaire
tint la Grecs et les Arméniens schismatiques, et qui
d'Alexandrie, et Domnin d'Antioche. 11 alla consiste à vénérer la matière oUerte pour
même avec ces deux patriarches inviter Vi- l'Eucharistie, mais non encore consacrée:
gile à assister à la seconde session. Sa sous- coutume qu'a si souvent blâmée l'Église ro-
cription aux Actes de ce concile renferme maine. — Mais ce qui surtout nous rend
sommairement la sentence qui fut rendue très-précieux ce second fragment, c'est qu'il
iiK.''"' contre les Trois-Chapitres. L'Empereur ayant nous a conservé un témoignage très-expli-
voulu obliger le patriarche de souscrire en cite du grand Athanase sur la présence
564 à l'édit qu'il avait publié pour la dé- réelle dans l'Eucharistie il est tiré de son ;

fense de l'erreur des incorruptibles, Eutychius discours aux baptisés, titre qui ne se trouve
résista fortement à ce prince, en lui remon- pas dans ses œuvres imprimées. Voici ses
trant qu'il suivait de cette doctrine, que l'In- paroles « Le baptisé verra les lévites por-
:

carnation n'avait été qu'imaginaire. « Com- tant le pain et le calice du vin, et prépa-

ment, disait-il un corps incorruptible a-t-il


, rant la table sacrée avant que les prières ;

été circoncis, ou nourri du lait de sa mère? (( et les supplications soient commencées,


Comment a-t-il pu sur la croix être percé il n'y a que le pain et le calice ; mais,
par les clous et par la lance ? On ne peut le dès que les grandes et les merveilleuses
nommer incorruptible qu'en ce qu'il n'était ,
prières sont accomplies, alors le pain de-
souillé d'aucune tache du péché et qu'il ne , ce vient corps et le calice sang de Notre-Sei-
fut point corrompu dans le sépulcre. » Tous « gneur Jésus-Christ '. n Et un peu plus

lesetfortsqu'Eutychius fit pour désabuser ce loin : (I Arrivons à la confection des mystè-


prince aboutirent à le faire envoyer en exil. « res ; là est le pain, là est le caHce, les-

Un se saisit de lui, lorsqu'il venait d'achever « quels, en eflet , tant que les prières et les

le saint sacrifice et on l'emmena dans un


, (( supplications ne sont pas achevées ,
con-
monastère, dépouiUé de tout excepté de , te servent simplement leur nature ; mais
son pallium. [Le cardinal Mai a publié deux « aussitôt que les grandes prières et les
fragments sur la Pâque et sur l'institution de « saintes suppfications sont montées au ciel,
l'Eucharistie (S. V. LX, pag. 623-623.) —Il « Verbe descend dans le pain et le calice,
le
parait que ces fragments appartenaieut aux <(et son corps est formé -. » On ne peut voir
discours qu'il avait composés contre toutes rien de plus précis que ces témoignages qui

> '
0^;c zohi UAra-i ftpunai à/JTOus, xai itoznpto^ tôts yiveroti o âupTOi cûfia.' ,
xai rb mr-npto» ai/J-c «u
oîvou, xai Tiôivra; Si riiv fl^sànï^av xai Sîov oûna tV.£j(ai y.jpiou rt)iùi Iri^oû Xpi^tov. Script. veteres. lom. 1\,
xai 5siiTs<î vivoïwi, ^liô; èïTiw «,OT(Jî xaî To TroTii.oioV pag. li^j. Paliol. grac. toiu. LX.WVl, col. 2402.
Tsieiw»" to,m /iU77/i5ic^v oOto,- 9
Wàv (îè 57rtTsA£îeù(jiv ai /i£y«i«t xai 6'xup.v.<:0u.l sùz»'. » '
EÀOu/*-:v irti ri)»

XI. 23
, ,

334 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


nous donnent la foi du iv' siècle, saint Atha- « et se rendirent sur la montagne des Oli-
nase ayant été consacré archevêque d'A- (1 ves , avec des nous
cantiques , aiusi
lexandrie en 326, et étant mort en 373. Nous H après la participation du corps et du sang
y retrouvons aussi la foi du vi' siècle par le i( sacrés, nous rendons grâces et nous
témoignage d'Eutychius qui, outre la cita- ,
Il nous retirons chacun dans nos demeu-
tiou qu'il fait ici d'Atlianase, s'exprime ainsi II res *. »
lui-même Le Clirist s'est immoli;
ailleurs; » Ces fragments si précieux font désirer que
H lui-même mystiquement dans le temps l'on retrouve un jour les autres discours
où, après la Cène, recevant le pain, il d'Eutychius. —
[On trouve un autie fiagment
u rendit grâce, l'offrit et le bénit, se mêlant aux pages 488-493, Classici oiictores, tom. X.
« lui-même au type; semblablcment, pre- Tous ces diUi-rcnts fragments ont été re-
n nanl le calice du fruit do la vigne, et ren- cueillis par Mai Bihliot/i. nova , tom. IV ,
.

« dant grâces, et l'olfrant à Dieu le Père, il pag. 34 et suiv. forment le discours sur
Ils
(I dit Prenez, mangez ; prenez buvez : ceci
:
, la Pàque et sur l'Eucharistie, qu'on a ainsi
« est mon coi-ps; ceci est mon sang. Tous le- presque en entier. Il est reproduit au tome
tt çoivent donc le saint corps et le précieux LXXXVI de la Patrologie grecque, col. 2389-
« sang, quoiqu'ils ne reçoivent qu'une par- 2402, avec une traduction latine et un aver-
« tie du type, car il est divisé indivisible- tissement du Cardinal.]
« ment entre tous à cause de la commix- 2. (m ordonna à la place d'Eutychius, Jean Jean le?^'

« tion. '
» — Eutychius
explique ensuite ce le Scholastique, syrien de naissance, et apo-
taUiqUC.
Iriirebe
C«DIUOlln
;

mystère par l'exemple d'un cachet dont tou- cisiaire d'Antioche. Le nouveau patriarche kriL-
tes les empreintes viennent d'un seul t\-pe assembla quelques évoques pom-e.xaminer les
qui demeure immuable, et par l'exemple de requêtes présentées contre Eutychius. Les cri-
la voix qui est une, la même et indivisible, mes dont on l'accusait, étaient de se servir
soitdans celui qui parle , soit dans l'air qui d'onction, de manger des viandes délicates, de
la transmet, soit dans les oreilles de tous prier longtemps à genoux (peut-être les di-
ceux qui l'entendent; puis il conclut ainsi : manches). Cilé par trois fois, il repondit tou-
E.if.m..i\
« Que personne donc ne mette en doute jours que, si ou le jugeait canoniquement, et
« qu'après le sacrifice mystique et la sainte si on lui rendait son clergé et sa dignité, il
Il résm-rection , l'incorruptible , l'immortel comparaîtrait et prendrait ses accusateurs
CI le saintcorps et sang du Sei-
vivifiant mêmes pour témoins. condannièrent par Ils le
« gneur, enfermé dans les types par l'œu- défaut; puis on transféra dans une
île de la
le
« vre du Sacrifice, que personne dis-je, ne , Propoutide, d'où il fut contiiiitau monastère
c( mette en doute que, de que dans même d'Amasée, qu'il avait gouverné avant d'êti'6
<i les précédents exemples n'imprime sa , il évêque. Il y demeura douze ans, c'est-â-dire
« vertu aux mêmes types et ne soit en réa- depuis oG3 jusqu'en n~to auquel Jean le ,

lilé tout dans chacun de ces types. Car Scholastique mourut


(1
le dernier jour d'août.
i( dans le corps même du Seigneur habite Il portail le nom de Scholastique, parce qu'il
« corporellement, c'est-à-dire substanlielle- avait fréquenlé le barreau, étant avocat à
« ment la plénitude de la divinité du Ver-
,
Anlioche. élevé au sacerdoce dans la
Il fut
« be de Dieu. Mais la fraction de ce pain même où il Ot aussi les fonctions d'a-
ville,
« vénérable signifie la mort : c'est pour- pocrisiaire. Ce fut pendant ce temps-là qu'il
« quoi a été appelé la Pàqite désirée, com-
il
composa une Collection de canons des dix
II me l'auspice du salut , de l'immortalité et conciles précédents. Us avaient déjà été re-
« de la science parfaite : et de même qu'à cueillis dans l'ancien Code de l'église uni-
« cette époque ils sortirent tous de la Cène, verselle; mais ils y étaient sans ordre. D'ail-

âpzoi xal toDto t6 Ttorripioi, ôioy oïmui v-i^o-l "«! ixs»(«t /ui'jSTixViy Upoj/rfia.» xai TJ)» à/iav àyà»T««(v, xal à8à-
•/r/iïasi, âv Si ai /xr/aiat r^ai, xal ai
ipCki. liil •
iz varoy, xc<(i âytoy, xat ^uionohv 9ù/ia xai a'/ix toO Rue/ou,
ây(ai c«»iac àvaTre/ipeisi, xaraCa^ysi i Aoyi; e(f rè» Kp- iiv tùv tÀarrov
TcT{ ayrtTvnoi; ivriQijJiîvov^ itpo-jtr/titv ^
TO» xai t4 Jioni^co», xai -/ht-an axiroû « nCi/ix, Ibid. X'jif ^ùQupufiiviat n»p'/.otr/fiLârttv rÔLÇ oUitaç ivxitOfi.6fl,
' Ex//({aj tauTo» r& ànirmtf ÔAo» oàv âîtaj t4 /waOa.1 ot^va,u£({, àAÀ ôXov iy oXoti lû^siïxcvdai* èy avrâ
«yw» CÙ/J.U xai TO ti/iw» ai/ia nû Kupisj Sl/trtu, xàv « yàp Tû x-joixxdi çûpcuTt xarotxG? Tràv rb n/ripùifAtt xfii
/«é,oo; TOnTviï Silnrai' /itplynat yào à/AipUrvi 4» ârt«ei, OtiriiTOi rov Ai'/ov xai ©loO ffcauxrfxùf , ôitkp iniv
iti. Tf,y l/intîi'. Clnssici auclores, loin. X, pag. oùmiiùf.etv... Classici auct. toui. X, pag. 491. Pa-
490. Palrol.grwc. tuui. LXX.WI, rnl. 239S. trol., ibid. ac supra.
' Mr.iiif ovj à//j.i69i*a» ixirw ri (Xj.fl-x,»TO» /urà. t*.v
I

[VI" SIÈCLE.] CHAPITRE XL. — EUTYCHIUS ET JEAN LE SCHOLASTIQUE. iiSo

leurs, ce Code ne renloriiinil que les canons /Ji/)liiit/iè//nc canonique de Justel, A Paris, en
des conciles de Nici.'e, d'Ancyie, de Néocë- lU()i. Nous n'avons plus sa Catéchèse, où il

sarée, de Gangre, d'Antioche, de Constan- établissait le dogme catholique de la sainte


tinople, tl'l'-phèse el de Clialcédoine. Jean et consubstantielle Trinité. Photius dit '(pi 'il

ajouta dans sa Collection les canons des apô- la composa sous


règne de Justin-le-Jeuiic,
le
tres, lesvingt-un de Sardique, et les soixaute- indiclion première, c'est-i\-dire, en 568; et
liuilde VBjûtre canonique de saint Basile. Il qu'elle fut depuis réfutée par l'impie et im-
les distribua sous cinquante titres, où, sans bécile Pliilo])onus.
garder l'ordre des temps, il se contenta de Après la moi-t de Jean le Schoiastiiiue,
3. "<"' 'K"-
lychiu" en
suivre celui des matières, rapportant de suite lepeuple de Constantmople demanda, avec ""
^J;,„=
les divers canons sur un même sujet, pour de grands cris, le retour d'Eutychius. L'em-
la facilitédes lecteurs ce que n'avaient pas
: pereur Justin l'ayant accordé, le patriarche
fait ceux qui avant lui avaient donne des remonta sur son siège le 3 octobre 577, aux
recueils de canons. Le pape Nicolas l" cite acclamations de foute la ville. Comme c'é-
la Collection de Jean le Scholastique dans tait un dimanche, il célébra la messe A
'
sa lettre au patriarche Photius, h qui il dit Sainte-Sophie, où les fidèles s'empressèrent
qu'il est surprenant que les canons de Sar- tellement à recevoir la communion de sa
dique lui fussent inconnus, puisqu'on les main, qu'il la distribua depuis Tierce insqu.' à v-u r.ui;c!..

trouvait parmi les cinquante titres dont la None, c'est-à-dire pendant six heures. Quel- «i" diëm^'o
"''"'
Concorde des cations était composée. Or on ne que temps après son retour, il publia un
connaît point d'autre Concorde des canons écrit que nous n'avons plus, où il disait
chez les Grecs, qui renferme ceux de Sardi- qu'après la résurrection, notre corps ne se-
que, que celle de Jean le Scholastique. Ce rait plus palpable, mais plus subtil que l'air :

patriarche fit depuis un abrégéde cette c'était un reste des erreurs attribuées à Ori-
Concorde, intitulé Nomocanon, auquel il
: gène. Saint Grégoire, qui était alors à Cons-
ajouta, sur chaque titre, les Novelles de l'em- tantinople eu qualité d'apocrisiaire ou de
pereur Justinien ce qui prouve qu'il ne mit
: nonce apostolique, se crut obligé de résister
la main à cet ouvrage que depuis que ce au patriarche ils entrèrent en conférence '
:

prince eut pris le gouvernement de l'empire, sur ce sujet. Saint Grégoire lui objecta les i.uc. xur,
^''
et qu'il fut lui-même monté sur le siège paroles de Jésus-Christ à ses disciples : Tou-
épiscopal de Constantinople. Balsamon*cite chez, et voyez qu'un esprit n'a point de chair
cet abrégé dans ses notes sur le premier ca- ni d'os. Eatychius répondit, que notre Sei-
non du concile de Constantinople appelé m gneur le fit pour leur ôter le doute de sa ré-

Trtillo, mais sans en nommer l'auteur. Il est sunection. « Cela est surprenant, reprit saint
attribué à ïhéodoret dans un manuscrit de Grégoire, que pour ôter le doute à ses disci-
la Bibliothèque du Roi. Mais dans tous les ples, Jésus-Christ nous ait donné heu de
autres, le Nomocanon porte le nom de Jean le douter. » Eutychius ajouta, que le corps du
Scholastique.il est d'aiBeurs hors d'apparence Sauveur était palpable, quand il le montra
que Théodoret eût mis dans une collection à ses disciples; mais qu'il devint plus subtil,
de canons ceux des apôtres et de Sardique, après confirmé leur foi. A cela saint
qu'il eut

que les Grecs ne recevaient pas encore de Grégoire répondit que, suivant l'Apôtre, nt,n.v<,%

son temps, et qui ne se trouvaient pas dans Jésus-Christ ressuscité ne meurt plus ; d'où il
l'ancien Code, dont on se servit dans le con- inféra qu'il ne lui est arrivé aucun change-
cile de Chalcédoine, auquel il assista lui-mê- ment après sa résurrection. Eutychius ob- ilw.xv,
'''"'

me. EnQn, le style du Nomocanon est tout jecta encore qu'il est dit, que la chair et le

de celui de Théodoret. Ces deux


différent sang ne posséderont point le royaume et Dieu.
Jean le Scholastique ont été
collections de La réponse de saint Grégoire fut, que la

imprimées à la tête du second tome de la chair et le sang se prennent dans l'Écriture

' Quomodo non sunt pênes vos canones Sardicen- non receplœ sunt, el alias quasdam leges ex Di-
ses, quando inter quinquagiiita titulos quitus gestis ac Codice continent. Balsam. in primum
Concordia canonum apud vos texitur, ipsi quo- Can. Concil. in Trullo. [Voyez sur Jean le Scho-
que reperiantur ? Nicolaus 1, Epist. ad Photium. lastique l'addition à la fin de ce XI' volume.]
3 Pliùt. Cod. 75, pag. 163.
« Nomocanou quo in quinquagiiita titulos
,

leges elcanones redegit el reliqua quœ Justiniani Gregùr., lib. XIV, Moral, in Job, cap. xxis,
'•

Novellas, quœ exokverunl, ut quœ in imperio


356 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
en deux manières: ou pour la nature humaine tant plus qu'elle n'avait eu que peu de secta-
en elle-même; ou pour la corruption du pé- teurs. Il ne nous reste de ce patriarche ' que
ché. Après avoir apporté des preuves de sa lettre au pape Vigile, où, après avoirdécla-
cette distinction, il conclut que, dans la uloire ré qu'il recevait les quatre conciles généraux
céleste, la chair resterait, mais délivrée des et les lettres des Papes, nommément celles
infirmités de cette vie. Eutj'chius s'étant de saint Léon, il l'invitait à venir présider
obstiné dans son opinion, saint Grégoire au concile assemblé pour l'examen et la dé-
rompit tout commerce avec lui. L'empereur cision de la cause des Trais-Chapitres. [Cette
Tibère, qui avait succédé à Justin en 578, lettre est reproduite au tome LXXXVl de la
voulut les entendre l'un et l'autre sur la mê- Patrologie grecque, col. 2501-2406, d'après
me matière et après avoir pesé leurs rai-
; Mansi.] Le prêtre Eustratius fait mention '

sons, il délibéra de faire brûler le livre


'
d'un discours d'Eulychius sur la manière
d'Eutj-chius. Au sortir de la conférence, tous dont les natures raisonnables sont dans un
deux tombèrent malades. Saint Grégoire re- lieu, et il en rapporte un fragment. Nous ne
cou\Ta la santé mais Eutychius mourut
; savons rien autre chose de son livre de la Ré-
quelque telnps après, un jour de dimanche, surrection des morts,que ce que nous venons
5 avril 582. Ainsi ce fut en cette amiée que d'en rapporter d'après saint Grégoire-le-
se tint la conférence. Quelques-uns de ses Grand. [La Vie de saint Eutychius, par Eustra-
amis, qui étaient allés le visiter, rapportèrent' tius, est reproduite au tome LXXXVl de la
à saint Grégoire, que quelques moments avant Patrologie grecque, col. 2273-2.390. Elle est
sa mort, il disait, prenant en leur présence la suiviede son discours sur la Pùque et sur
peau de sa main : Je confesse gue nous ressus- l'Eucharistiedont nous avons parlé plus
: cet aveu fut cause
cilerons tous en cette chair haut, et est précédée d'une notice tirée de
que saint Grégoire
ne poursuivit plus l'er- Fabricius, et d'une autre tirée des Bollan-
reur dans laquelle Eutychius avait été d'au- : distes.]

CHAPITRE XLI.

Grégoire [593j et saint Anastase [598], patriarches d'Antioche.

[Écrivains grecs.]

^. Anastase patriarche d'Antioche s'étant de la part des Arabes du désert ; mais il sut
• bbé du nioDl
bina, [tui* [)a- rendu odieux à l'empereur Justin, autant si bien se défendre, qu'il procura à son mo-
trirrcte d'AD-
Un«be.
E«if r. lit. V
pour lui avoir refusé de l'argent quand il lui nastère une paix solide. 11 était homme
UisL, up. VI.
en avait demandé, que pour l'avoir traité de de beaucoup d'esprit, d'une grande pénétra-
peste du genre humain, fut déposé de l'é- tion, ferme, courageux, et d'une industrie
piscopat et chassé d'Antioche. Ce prince le merveilleuse ce qui le faisait réussir eu tou-
;

fitremplacer par Grégoire, qu'il lira à cet tes ses enlreprises. Ses lib(''ialilés étaient si
effet d'un monastère du mont Sin.i, dont il grandes, que toutes les fois qu'il paraissait
lui avait déjà donné le gouvernement. Gré- eu public, il avait autour de lui une foule de
goire avait pratiqué la vie monastique dès sa monde, outre les personnes qui le suivaient
jeunesse dans le monastère des Byzantins, ordinairement. Le peuple, faisant plus de cas
aux environs de Jérusalem et il s'y était tel-
;
de lui que de tous les princes, courait pour le
lement distingué, qu'il en avait été élu supé- vuirct pour l'entendre parler : car il avait tout
rieur, ayant à peine de la barbe. Il fut chargé ce qui était nécessaire pour se taire aimer et
depuis de gouverner le monastère de Pharan, estimer des hommes un extérieur agiéable, :

d'où Justin le lit [lasserà celui du monlSina. une ailmirable de parler, une grande
facilité I
Pendant qu'il en fut abbé, il se trouva exposé vivacité d'esprit. Quoique d'un naturel ar-
à de grands périls, jusqu'à souteuir un siège dent et un peu porté à la colère, il ne lais-

' Gri-g. Mil. .\IV Moral, in Jnh., coji. xxrx. ' 1\ V Concil.
l. 338
pnR. 338.
'*"
,

' Greg. ibid. "-'^'


* liuslrat. tmii .WVII Dibl. Vet. Pair., pag. 372.

4
[VI" SIÈCLE.] CHAPITRE XI, I. GIIEGOIIIK ET ANASTASE. 357
saitpas d'avoir boaucoup de iloiucur cl de Ta pas |K'rmis, c'est peut-être autant
ville lie
modestie: s'il laissait paiailro quclciue ('mo- pour faire éclater le courage des Romains
tion, il l'apaisail aussitôt. Il oubliait aisé- d;iiis la défaite des Perses, que pour faire
ment les injures, avaitune grande compas- connaître l'ardeur du zèle dont vous brûlez
sion pour les pécheurs, et le don des larmes. pour le service di; l'Emiiire, en montrant que
La pr(!niièro année de son pali'iarcliali les la colère ou la haine ipie vous avez conçue
hahitants de la grande Arménie, ayant se- contre vos généraux, n'empêche pas que vous
coué le joug des Perses qui les maltraitaient ne préfériez le bien de l'ICtat <i toute autre
au sujet de la religion chrétienne, députèrent considération. Voyons donc maintenant ce
à l'cniperenr .lusliu, le suppliant de les rece- qu'il ya à faire. L'Empereur vous offre d'ou-
voir pour sujets, afin qu'ils pussent servir regarde le zèle et le cou-
blier le passé, et
Dieu avec plus de liberté. Justin les reçut, et rage que vous avez fait paraître dans le com-
traita avec eux. Chosioëss'en plaignit; l'Eiu- bat, comme des marques certaines d'un re-
poreur ré;>ondit qu'il ne pouvait abamlonncr gret sincère de votre faute. Il vous assure de
des chrétiens qui avaient recours à des chré- l'amnistie et des eflets de sa clémence, en
tiens. La guerre s'alluma entre ces deux disant que s'il a plu à Dieu d'accorder la vic-
princes. Les Perses ravagèrent les terres des toire à l'affection que vous avez eue pour le
Homains, et s'avancèrent jusqu'à Antiochc bien de l'Empire, ne peut se dispenser de
il

qui fut abandonnée de presque tous les ha- suivre son jugement. Le cteur du roi est dans
bitants; le patriarche s'enfuit, et l'Empereur la main de Dieu; il le tourne comme il lui
fut tellement consterné de tous ces événe- plaît. Suivez donc mon avis, et ne laissez pas
ments, en perdit l'esprit ceci se pas-
qu'il : échapper l'occasion qui elle ne
se présente :

sait vers l'an 57:2. Tibère son successeur ré- revient plus quand une fois partie,
elle est
tablit les affaires de l'Empire les Perses fu- : comme si elle avait dessein de se venger, par
rent vaincus, et Cbosroës, contraint de fuir de- ce moyeu, du mépris qu'on a fait d'elle.
vant les armées romaines, en mourut de cha- Imitez l'obéissance de vos ancêtres, aussi
K^g.iiKvi m-in en 589. Grégoire, accusé sur divers bien que leur valeur, afin qu'on ne puisse
chefs par Astérius comte d'Orient, se justifia vous accuser d'avoir dégénéré d'aucune de
si bien qu'il fut renvoyé absous. Ce comte leurs vertus. C'est par cette obéissance et par
périt dans un tremblement de terre arrivé à cette valeur, qu'ils ont réduit l'univers sous
Antioche la même année mais Grégoire ; la puissance des consuls et des empereurs.
s'en sauva. Quelque temps après, l'empe- Maulius Torquatus couronna la valeur de
reur Maurice le chargea de ramener au de- son fils, et punit sa désobéissance car, pour :

voir l'armée d'Orient qui s'était révoltée. On achever heureusement les grandes entrepri-
savait l'autorité qu'il s'était acquise sur les ses, il faut que la conduite des chefs soit sui-
soldats en donnant de l'argent aux uns, des vie de la soumission des soldats sans cet :

habits et des vivres aux autres, lorsqu'ils heureux assemblage, on ne saurait jamais
avaient été enrôlés et qu'ils avaient passé sur rien exécuter d'extraordinaire. Croyez-moi :

ses terres. Il assembla donc les principaux de sans différer, suivez les avis d'un évêcpie, qui
l'armée à Litarbe, à quinze lieues d'Antioche, est plus propre que personne à ménager la
et, quoique souffrant d'une indisposition qui réconcihation de l'empereur et de l'armée.
ne lui permettait pas de se lever de son lit, il Faites voir par votre promptitude à déférer
les harangua avec tant de force, en accompa- à mes avis, que vous n'avez point agi par un
gnant son discours de larmes, qu'il les chan- esprit de révolte, mais par un juste ressen-
gea en un moment. timent des mauvais traitements que vous
Son diswois 2. « Romains autant d'eflet que de nom, aviez reçus. Si vous refusez de revenir, j'au-
aux soldais , i-i •! •) • • j •

rom»in«. leur dit-u, >


i avais cru que vous viendriez
'
me rai du moins satisfait à l'inclination que j'ai
E>-.e. iib.vi .
1.', .
pour vous et à l'aftectien qui m'attache aux
.
me communiquer
.

iiiM ,-ap. III. trouver pour 1 état présent


de vos affaires, et pour prendre avec moi intérêts de l'Empire; mais c'est à vous à con-
une résolution conforme 'i l'affeclion que j'ai sidérer où se terminent ordinairement les
pour vous, et dont je vous ai donné des as- entreprises des rebelles et des usurpateurs
surances dès le temps que j'apaisai vos injustes de la domination légitime. Comment
divisions, et que je prévins les mauvaises sortirez-vousdecetembarras? Il n'est paspos-
suites qu'elles pouvaient avoir, en vous en- sible que vous demeuriez unis. Vous ne sau-

voyant des vivres. Mais, si la Providence di- riez avou- de vivres, ni jouir des autres com-
358 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
nioditës que la mer procure à la terre, sans ses, et l'Empereur voulut que Grégoire les
prendre les armes contre les chrétiens, et accompagnât. Nicéphore a rapporté ' ce dis-
sans vous porter à d'horribles excès. Quelles cours de Grégoire d'après Évagre, mais en
en seront les suites? Si vous vous dispersez, y changeant les termes. [lise trouve dans le
la justice de Dieu vous poursuivra en tous tomeLXXXVllI de la Patrologie grecque, col.
lieux. Accordons-nous, et considérons ce qui 1883-1880, d'après Galland.)
est plus avantageux, et pour l'État, et pour 3. Nous avons un autre discours du même Di««»ir.wr

nous; et que la circonstance de ce temps, évêque, sur la sépulture de Jésus-Christ, et «™?ÏÏkmt'"


Aatrci
consacré à la mémoire de la passion et de la sur les femmes qui aclietorent des parfums coan.

résurrection du Sauveur, serve à notre ré- pour embaumer son corps. Il le prononça
conciliation. » dans le cimetière qui était hors de la ville
Après que Grégoire eut parlé de la sorte, d'Antioche. Ce n'est presque qu'un tissu des
les soldats,émus comme si Dieu les avait paroles de l'Évangile, qu'il paraphrase en y
touchés, demandèrent à sortir pour délibérer mêlant de courtes explications. Il marque ea
ensemble sur ce qu'ils avaient à faire puis ;
un endroit les cérémonies' qui se prati-
ils vinrent dire à l'évêque qu'ils se remettaient quaient au baptême l'onction sainte et la,

entre ses mains. II leur proposa de deman- communion du corps et du sang de Jésus-
der Philippique pour général, suivant l'in- Christ en un autre, que la divinité, depuis
;

tention de l'Empereur; mais ils répondirent son union ' avec le corps et l'âme de l'hom-
qu'ils s'étaient engagés par un serment so- me, ne les a jamais abandonnés, pas même
lennel à ne le reconnaître jamais. Alors Gré- le corps lorsqu'il était dans le tombeau, où

goire leur dit sans hésiter; « Je suis évèque elle le garantit delà cori-uplion. Ce discours
parla miséricorde de Dieu: j'ai le pouvoirde nous a été donné par le Père Combefis ' [et
lier et de délier sur la terre et au ciel » et ; par Galland, t. XII de la Bibliothèque des
il leur rapporta les paroles par lesquelles le Pères.]
Sauveur conféra autrefois ce pouvoir à ses [Le cardinalMai en a publié un sur le bap-
apôtres, voulant leur faire entendre qu'il tême de ce [. Il Bihlioth. nova Patrum,
saint,
pouvait les absoudre de leur serment. Les p. 5.53 et suiv. Mais il n'a pu découvrir qu'une
soldats y consentirent. Il fit des prières pour ancienne version de ce discours, œuvre, à ce
les réconcilier à Dieu ', puis il leur donna le qu'il croit, d'Anastase le Bibliothécaire. Il a
corps de notre Seigneur; et ayant fait éten- été plus heureux pour un autre seimon sur
dre sur l'herbe des nattes où ils s'assirent, il les paroles : Celui-ci est mon fils bien-aimé,

les traita tous à souper, quoiqu'ils fussent au en qui j'ai mis mes complaisances. Il l'avait dé-

nombre de deux mille. C'était le lundi de la jà donné en grec au tome X des Classiciauc-
Semaine-Sainte et il s'en retourna le lende-
;
tores, p. 560-570, et il l'a reproduit en grec
main, après être convenu avec eux, qu'ils s'as- et en latin dans la Biblioth. nova, pag. 5fiO-
sembleraient dans le lieu qui leur paraîtrait 570, après le sermon sur
baptême, dont le

convenaljle. Ils vinrent eux-mêmes à Antio- il est la continuation lit au com-


: car on y
che, où l'évêque avait fait ve lir l'hilipi i juc. mencement, que l'orateur avait prêché le di-
Les soldats se mirent h genoux devant ce gé- manche précédent sur le baptême de Jésus-
néral, prenant pour intercesseurs ceux qui Christ, et qu'il n'avait pas eu le temps de

venaient de recevoir le baptême. Ensuite ils finir; mais qu'il allait traiter cette même ma-

marchèrent sous sa conduite contre les Per- tière. Jeau le Moine, qui vécut du temps do

' Cwn autem etiam illi in hac re acquiescèrent befis, pag. 846.
supplicationibus ac precibus, Detim placavit, et * Cumergo corpus illius a morte teneretur
sic
immaculatum illius corpus porrigens, eral enim quemndmodum voluit corporis Dominus, aninui-
renerandissima dies dominica Passioni vicina, quc Salvatoris, evangclizatura animabus carum
eunclos, circiler duo millia, ad percipi ndnm do- redrmptinnem, ocius ahiissrl, essrtque ejus Dei-
minicam cœnam ohiter in grnmine acrumbere fe- tas ulriquecnmes inu.fquam enin> aliquandn deitas
cil, ac deinde sequenti die reiersus est. Evagr. lib. post unitmein ahhumanilate discessit], qui» eterat
VI Hist., cap. XI r. in cœlis adernique impalibiliter scpulcro, suum
' Niccph. lib. ,\VIII Hist., oap. .w. ipsius iiuinmenlnm a corruplione serrans in-
' Ipue regeneralns Spirilus Sancliunguenlo un- nn.rium. Ibid., pag. 329.
gil. Ipse cnruin nutricius efjicilur et cibus. Oreg. nouib., tom. I Àuctuar., p«g. 821, Paris, an.
'•

Hom. inmulieres unguent.: toni. Àucluarii Com- I 1(118. Dibliotli. vet. Pat. tome .\II, pag. 823 et »e<i.
[vr SIÈCLE.] Cn.\PITRE XLI. — r.RÉGOIRE ET ANASTASE. 3o9
l'ompercnr Ht'raclius, cUe un
passasse du der- discours de la ])ouche d'un prince païen,
nier discours'. Mais Loquicn se liompe en connue autrefois il ])rédit l'avenir parla bou-
l'altribunnt ;\ saint Griigoirc de Nyssc. On che de Ualaam, qui était un faux prophète.
pputy roiuarqucr une tW's-belle doctrine sur Grégoire, en ayant obtenu permission de
la divinilt- et j'hiinianilt'- de Jésus-Cbrist. On l'Empereur, alla visiter les solitudes de la
y trouve aussi parlaitomcnt enseii;nde la pri'- frontière, où les erreurs de Sévère avaient
sence réelle dans l'Eucharistie '.] fait de grands progrès. Il convertit des
Gr*çoiie«si 4. En S93, OrécTGire fut envoyé h Cliosroës, bourgs entiers, et ramena beaucoup de mo-
rno m 53J. roi des l'erses qui 1 admira ',
. et pour la ^
nastères ;\ l'unité de la foi. Il accourut de
Si mon. *

beauté des présents qu'il en reçut, et pour là pour assister


' la mort de saint Siméon-
.'i

la sagesse de ses conseils. Ce prince, de Jeune; mais il arriva trop tard. Il


Stylite le
son côté, lui fit présent d'une croix enri- mourut lui-même quelque temps après, de
cbie d'or et de pierreries, que rinipéi'atrice la goutte dont il était fort tourmenté. On met
Tbcodora, l'eninie do Justinien, avait autre- sa mort en 59.3. Évagre finit son histoire en
fois donnée à l'église de saint Serge mar- disant qu'il avait recueilli en un volume
tyr, et que Chosroës, aïeul de celui-ci, avait quantité de lettres, de relations, d'ordon-
depuis enlevée avec quantité d'autres tré- nances, de harangues et de disputes, et que
sors. Il lui donna encore une autre croix, sous le nom de Grégoire,
les relations étaient
avec une inscription grecque qui portait, évcque d'Antioche.
qu'ayant obtenu de saint Serge (dont il avait 5. Quoiqu'Anastase ' eût été chassé d'An- s. >oa,ia.,,
pal ri arc ha
ouï dire qu'il accordait tout ce qu'on lui de- tioche par lerapereur Justin, et peut-être dAmio-ije.

mandait) la défaite de Zadespras son enne- encore par les intrigues de Jean, patriarche
mi, il avait en reconnaissance fait faire cette d'Alexandrie, et de Jean de Constantinople,
croix pour être envoyée à l'église du saint son consécrateur, qu'il avait taxés dans sa
martyr. Grégoire ayant reçu ces deux croix, réponse à la lettre synodique de Jean d'A-
lesmit en ellet dans cette église. Chosroës y lexandrie, il ne laissait pas d'être reconnu
envoya depuis d'autres présents, entr'autres pour patriarche d'Antioche par l'Eglise ro-
une patène et un calice à l'usage des saints maine. Saint Grégoire-le-Grand lui envoya ',
mystères, une croix pour être dressée sur la comme à Grégoire, la lettre synodale qu'il
sainte table, et un encensoir; le tout d'or; écrivit du concile qu'il tint à Rome en 591.
avec une inscription sur la patène, où il di- 11 écrivit même à l'Empereur pour obtenir

sait, qu'encore que les lois du paganisme lui que, si on ne lui permettait pas de retourner
défendissent d'épouser une chrétienne il , à son siège, on l'envoyât du moins à Rome,
avait toutefois épousé Sira qui l'était, dans avec l'usage du pallium, pour célébrer la
l'espérance que la dévotion qu'il avait en- messe à Saint-Pierre avec le Pape. Mais Gré-
vers saint Serge lui servirait d'excuse qu'il ; goire étant mort, Anastase rentra dans son
avait prié le saint martyr d'obtenir à Sira église vingt-trois ans après qu'il en avait été
,

un enfant avec promesse en cas qu'elle


, , chassé, c'est-à-dire en 593. Il la gouverna
conçût, de donner à l'église du saint la croix jusque vers l'an 598, auquel il mourut après
que cette princesse portait au cou qu'ayant ; avoir occupé le siège patriarcal d'Antioche
su qu'elle était enceinte, il avait, au lieu de pendant seize ans à deux reprises premiè- :

cette croix, qui ne valait que quatre mille rement onze ans, à compter depuis 561 jus-
trois cents slatères, envoyé cinq mille statè- qu'à 572 qu'il fut chassé; puis cinq ans, de-
res, avec les autres présents dont nous ve- puis son rétablissement en 593. Saint Gré-
nons de parler. Évagre qui rapporte tous
, goire lui écrivit plusieurs fois, tant pour le
ces faits, remarque que Dieu tira de bons consoler dans ses adversités, que pour le con-

• 0pp. S. Joannis Damasceui, tom. Il, pag. 113, 3 Evagr. lib. VI Hist., cap. xviii et xxi, et Theoph.
édit. de Lequien. lib. V Hist., cap. siv.
* Si dixi'rit Hoc est corpus meuin quod pro vo- ' Evagr., ibid., cap. xxn-xxiv.
bis fraugitur in remissionem peccatorum, spéciale ' Anastase 1 ou l'Ancien a toujours eu le titre et
corpus ab ipso vobis ostensum, spéciale quod ro- les honneurs réservés aux saints, comme l'ont dé-
bis sumptiim esl ejus proprium et pro vobis con- montré les Bollaudistes. Voyez, tome LXXXIX de
tritiun. Si dixerit : Hio est sauguis meus, de ejus la Patrologie grecque, col. 1299-1310. On a eu tort
qui cobiscum loquitur sanguine cugitate, non de de le confondre avec Anastase le Siiiaïte, qui a vécu
alio prœter ipsum. Patrol. grœc, tom. L.KXXVlll, plus tard. (L'édileur.)
col. 1879. (L'éditeur.) « Greg. lib. IX Epist. 21 et 27.
360 HISTOIRE CÉXÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
graluler sur son retour ;ï Autioclie. U en Sainte-Vierge, assurant que le Fils unique de
parle toujours avec resi)ect, en louant sa Dieu par nature ' a pris dans elle une chair
charité et en se recommamlant à ses prières. consubstantielle à la nôtre. U demande, dans
Il marque clairement dans ses lettres, qu'il '
le discours sur la Transfiguration, pourquoi

en avait reçu d'Anastasc, et que ce patriar- Jésu.s-Christ ne


avec lui que trois apô-
prit
che avait eu le désir d'aller à Rome. tres? (1 pas juste, répond Anastase,
11 n'était

Se» écriu. 6. Anastase était trè?-hahile dans la scien- que Judas fût spectateur de si grands mys-
Di^c»<lI* -r
l'AnoOnrU- ce des divines Écritures, et très-versé dans tères, ni qu'il fut seul exclu
de ce spectacle,
lion et I*
TraofSeurt- la langue latine. Ce fut lui que l'empereur de crainte que, voyant qu'on lui préférait les
tloD, tnm- I
A u cl ua r) t Maurice ' chargea de traduire en grec le autres apôtres, il n'en prit occasion de tra-
CoiDtieSK,; ag.
8.0. Pastoral de saint Grégoire pour l'usage des hir son Maître. »
églises d'Orient. Dans le second concile de 7. Steuartius a fait imprimer cinq autres
Nicée, en 787, on lut un endroit de la lettre discours, que personne ne dispute à Anas- Toa>

d' Anastase à un certain scholastique ou avo- tase, patriarche d'Antioche. Ils ont depuis ""•

cat, dans laquelle il distinguait ^ l'adoration été réimprimés, par les soins de M. Basnage,
que nou^ rendons à Dieu, d'avec celle que dans le premier tome des anciennes Leçons
nous rendons aux anges et aux hommes, en de Canisius. Ces cinq discours ne font qu'un
ce que nous ne servons que Dieu seul. On y corps dont le titre général est Des Dogmes :

lut aussi un endroit d'un des sermons sur le de In vraie foi. Dans le premier, qui est sur
sabhat, où, parlant du culte des images, il di- la Trinité, il dit qu'il avait déjà beaucoup
sait qu'en l'absence de l'Empereur nous
' écrit cl parlé dans les églises sur les dogmes
adorons son image au lieu de lui mais qu'en ; de notre religion, et que s'étant appliqué
sa présence, l'adoration de son image est des sa plus tendre jeunesse à n'avoir siu- la
superllue. Nous avons encore trois de ses foi d'autres sentiments que ceux des saints

discours, donnés par le Père Combefis et , Pères, il était sûr de ne s'être pas égaré sur
avant lui par Meursius, mais seulement en ce sujet dans ses écrits, ni dans ses discours.
grec deux, sur l'Annonciation de la Sainte-
: Ilavait donc peine à traiter de nouveau des
Vierge et un, sur la Transfiguration du Sau-
;
matières sur lesquelles il s'était souvent ex-
veur. On voit dans le premier, que la fête de pliqué mais il lui fallut obéir à ses amis qui
;

l'Annonciation se célébrait le 23 mars, le le pressèrent de leur expliquer les dogmes


même jour que le premier homme avait été principaux de la foi. Il commence par le
créé car Anastase croit que Dieu a com-
: mystère de la sainte Trinité, montrant, par
mencé l'ouvrage de la création le 20 mars, à les premières paroles de l'Évangile de saint
l'équinoxe du printemps et il en conclut ;
Jean, que le Verbe est Dieu, et par celles-ci

qu'il étaitconvenable que Dieu se fit chair de Jésus -Christ, rapportées par le même
pour réparer l'homme, le même jour qu'il évangéliste Si je ne fais pas les œuvres de
:
j„

l'avait créé. Il cite la quarante- troisième mon Père, ne me croyez pas ; mais si/e les fais,
oraison de saint Grégoii'C de Nazianze à , quand vous ne voudriez pas me croire, croyez
qui il dit que l'on donnait le nom de Théo- à 7nps œuvres, que le Fils de Dieu est con-
logien. Dans le second discours, il donne substautiel à son Père, n'y ayant point' de
plusieurs fois le titre de mère de Dieu * à la plus forte preuve de la cousubstantialilé du

' Indicat mihi suaiissima sanetilas vestrn, dum abest imperator, imago ejus pro ipso ado-
quodmecum, si fieriposset,sine charla et calamo ratur ; cum vero jam primens fuerit superfluum ,

loqui voluissel, et dolel quod nohis Orientis pcne est, di'serlo primitivo, ador are imaginem. Ibid.
et Occidenlis spatium interjacet. Greg. lib. VII " l'uctn es nxater non puri haminis, aut alictt-

Epis t. 3. jus prophetœ,aut Deum in se hospitem habenlis;


« Idem. lib. X Epist. 22. sed vera .Mater magni Dci ac Salvaloris nostri
' Sancli Annstasii episrnpi Thcopoleos epislola Jcsu Clirisli. Anasias. Serm. i in ,l>i/imi(. lom. 1
ad quemdam scholnslicum, per quam respundit : Auclnarii Comliefis, pa;,'. 8ti;<.
Nevio o/fendalur adnrationis signi/icativne. Adn- * lluminum opifcr factvs est homo. malrem
ramus enim Iwmiues et snnctos angelos : non la- sihi ex nnliis cnmpnraiis, ipue uiiicus per nnluram
men servimus itlis : Diiinimiiii ciiini, inquit Mni- Pei l'ilius carnem in en nnbis consubslantiaUm
ses, Deum tiinni lulorabis ft illi soli service.. Apud as!<umens. Ibid., >'t tmii. VI Ilibl. Pal. conciotml.
Boit., (iil (liiiii 21 nprilis, pîif;. 8.'i3. Ciimhcfis.
Smicli l'alris nostri Anastasii ad Simennem
*
'
Alisolnla dcmnnsirntio rsl, et qiiœ su/Pcit
epitcopum Bostrw sermo deSabbalho: sicutenim, el refelli non potest, consubstantialitalis eadem
[VI' sifccij;.] CHAPITHE XT.l. — GIII^: GOinE ET ANASTASE. 301
D«our»»ur
l'(''ie et du Fils, que l'identik' de Umii- oik'- Le dessein du second discours est d'é-
S. rineireon*.
crt)t.,
lalion : car pas
il que le Fils l'ail
n'est dit lablir riiiiineiisiU- de Dieu, k qui quel- 417.
^.B^'.

lies œuvres semblables celles du Père, mais ;\ ques-uns vmiiaicnl donner des bornes, jns-
qu'il fait les mêmes. Il prouve aussi que le qu'iï préteiulr(! qu'il n'était point dans ce

Saint-Esprit est consubstantiel au Père et au monde. Anastase leur fait ce raisonucineut :

Fils ; qu'il est appelé Esprit ,


parce qu'il (( L'opération en Dieu est inséparai)le de sa
procède du Père au lieu que le Verbe est
;
substance. opère dans tout le monde, puis-
Il

appelt- Fih parce qu'il est engendré du


,
qu'il l'a créé, et qu'il le conserve à chaque

Père; mais que la dillerence d'origine n'em- instant; il est donc subslantiellcment dans
portant point une différence de nature, le P^- le monde entier. Être borné, poursuit-il, c'est

re, le Fils et le Saint-Esprit sont d'une même le propre des créatures corporelles. Dieu

substance, trois personnes en un seul Dieu. n'est pas créé, ni corporel ; il ne peut donc
Il donne pour exemple l'iiomme, qui est un être borné, ou limité par certaines bornes.
dans sa nature, et qui est toutefois infini en D'ailleurs il est écrit que l'esprit du Seigneur
nombre. « De même, dit-il, que le Père est remplit toutela terre; que l'on ne peut point

lumière et vie, le Fils et le Saint-Esprit sont se sauver de devant sa face que, soit que ;

vie et lumière d'où vient que l'Écriture dit


;
l'on monte dans le ciel, il y est soit que l'on ;

l'un et l'autre, tantôt de toute la Trinité, tan- descende dans l'enfer, il y est encore. Un dira
4ôt de chaque personne en particulier. Les peut-être qu'il est indécent que Dieu soit
noms de Seigneur et d'Esprit sont aussi com- daus des lieux ou dans des créatures, pour
muns aux trois personnes, comme il l'est au lesquels l'homme même a de l'éloignemeut.
Fils et au Saint-Esprit d'être envoyé. La dif- Mais il n'y a rien de créé qui ne soit l'ou-
férence des noms n'est pas une preuve de la vrage de Dieu; et comme les rayons du so-
(lilférence de nature. Comme le Père n'est leil ne contractent aucune tache en passant

pas Dieu précisément h cause qu'il est Père, par des lieux infectés, il en est, à plus forte
on ne peut contester la divinité au Fils parce raison, de même de Dieu. »
qu'il n'est pas Père ; il en est de même du 9. Anastase fait envisager la chute du pre- Di.-cour> 'iir
l'incarnslioa ,

Saint-Esprit. Mais le Père est Dieu, le Fils est mier homme, commela cause de touslesmaux I>as. KO.

Dieu, le Saint-Esprit est Dieu, parce qu'il et commeToccasion de l'incarnation du Fils de


est éternel, incréé, immuable, incorrupti- Dieu, qui ne voulant point laisser périr l'hom-
ble, auteur de la vie et créateur de toutes me qu'il avait formé, s'est fait homme lui-
choses. La Trinité n'admet point d'inégalité. même pour le racheter. C'est ce que cet évê-
S'il est dit dans l'Écriture que le Père est que se propose d'établir dans son troisième
plus grand que le Fils, cela doit s'entendre discours. Il trouve, dans l'union de l'àme avec
à raison de l'origine que le Fils tire du Père, le corps, un exemple de l'union de la divi-

et non par rapport à la substance qui est la nité avec l'humanité en Jésus-Christ : union
même dans le Père et dans le Fils. On peut qui s'est faite sansmélange ni confusion des
dire aussi que le Fils en tant qu'homme est deux natures, le Verbe s'étantuni tout entier
moindre que son Père, mais non en tant à toute la chair qu'il s'était formée de celle
cpi'engendré de lui avant tous les siècles, n delà Vierge, et à l'âme raisonnable, sans le
Anastase n'examine point comment le Verbe secours des causes ordinaires de la généra-
est engendré, ni comment le Saint-Esprit tion, et par la seule vei'tu du Très-Haut; en
procède; il dit que ce sont des questions sorte qti'il nous est consubstantiel selon son
qu'on ne peut approfondir sans danger. humanité. « Car ce qu'il y a de plus^ admi-

Patris et Filii operatio. Quœ enim videt Patrem turnlem servat, perinde ac si per se solum exis-
facientem, facit Filius : non qualia facit. sed qitœ teret, non facta alterius cum aUero unione, cum

facit. Anastas. Orat. 1 De Trinit., pap. 439. alioqui una sil hypostasis. Chiistus igitur est
' Eamdem igitur subslantiam diciinus sanctœ quod ex unione harum naturarum existit, non
Trinilatis.Trinitateni dicimus non subslantiarum, habiludo, sed idipsttm, quod ex his substantiis
sed personarum : ununi Deiim profitemur non constat : immo ipsœ substantiœ, et non divina
nutnero, sed natura sed natura. iVon enim quod absqtte humana, neque rursus bumana absque
est omnino unum numéro, omnino etiam est unum divina, sed uiriusque inseparahilis unio:quam
natura... Homo unvs est quidem natura: in/ini- non dicimus faclam ad imilalionem liquidorum,
tus aiUem numéro. Ibid., pag. 440. quw inler se mixta in aliud quid mutantur, sed
- Boc est in hoc mysterio admirabile, quod ad similitudinem proposilam animœ et corporis,
utrumque eorum,qu(.v coierunt, proprietatem na- ex quibus animal ralionis particeps homo consti-
302 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
rable dans ce mystère, dit-il, c'est que les lesexprimer, ni l'intelligence humaine les
deux nature? qui se sont unies, gardent cha- comprendre. » Anastase réfute ceux qui di-
cune leurs propriétés naturelles, comme si saient que la Trinité s'est incamée, et montre
elles n'étaient point unies, quoiqu'il n'y ait par l'autorité de l'Écriture, qu'il n'y a que
qu'une seule personne. Jésus-Christ est ce la personne du Fils. Il dit assez clairement
composé qui résulte de l'union des deux na- que le Saint-Esprit ^ procède du Fils. Sur la
tures union si inséparable, que la nature di-
: fin de ce discours, il annonce le quatrième,
vine ne peut être sans la nature humaine, qui traite de la passion du Sauveur.
ni celle-ci sans la nature divine union qui : 10. La passion du Sauveur, dit ,\nastase,
(I

ne s'est point faite h l'imitation des liqueurs avait été prédite parles prophètes longtemps
qui se mêlent ensemble, et composent par avant qu'elle arrivAt; et elle était nécessaire
ce mélange une nature toute difTérente mais ; autant pour la gloire de Jésus-Christ que pour
en la manière que l'union de l'âme raison- le salut du genre humain. D'où vient qu'a-
nable avec le corps constitue la nature de près sa résurrection, il disait .1 ses disciples :

l'homme. jQuoique les natures unies en Jé- Toute puissance m'a été donnée dans le ciel et
sus-Christ soient différentes, cela étant né- sur la terre : paroles qui montrent, dans les
cessaire pour la manifestation du mystère, circonstances où prononça, que sa mort
il les
iln'y a qu'une personne, qui est celle du sur la croix était cause de la gloire dont
la
Verbe c'est toujours le même Fils de Dieu,
: il jouissait après sa résurrection. Mais s'il a
même après l'Incarnation. Encore donc que souffert, ce n'est que selon son humanité.
lanature qui a pris chair soit difl'érente de C'est toutefois Dieu ' qui a souffeit, mais la
la nature qui a été prise par le Verbe, ces divinité est demeurée impassible. Les dou-
deux natures ne diffèrent point quant la .'i leui s '
étaient les douleurs de la chair ; les mi-
personne, qui est la même dans deux natures racles appartenaient à la divinité; mais la chair
différentes. Telle est la doctrinede tous les en tirait sa gloire, parce qu'elle était la chair
théologiens de tous les docteurs de l'K-
et du Verbe de Dieu ,
qui s'attribuait aussi les
glise catholique; ils enseignent que c'est le soutfrancesde lachairàiaquelleils'étaituni.» i

même qui est Dieu et Homme. Nousadorons ' Anastase commence son cinquième
11. DiKomid
un seul et même Christ, qui étaitDieu avant discours par les preuves de la mort de Jésus- uon.p.'j.Téî.
'

l'incarnation, qui est demeuré Dieu après Christ rapportées dans l'Évangile, où nous u, «.
l'incarnation, qui s'est uni à une substance lisons que les soldats rompirent les jambes
différente pour sauver ce qui lui était con- dps deux larrons, mais qu'étant venus k Jé-
substantiel selon la chair, à laquelle il s'est sus, et l'ayant trouvé déj;\ mort, ils ne lui
uni. C'est pourquoi nous reconnaissons en rompirent pas les jambes que Joseph ayant ;

lui deux générations diQ'érentes il est en-


'
: demandé son corps pour l'ensevelir, Pilate Mattb.xxv
6^.
gendré autrement de son Père, autrement de s'étonna qu'il fut mort sitôt; et que les prin-
sa Mère; mais c'est toujours le
même, quoique ces des prêtres, pour s'assurer du sépulcre où
engendré différemment car la différence ; on l'avait mis, en scellèrent la pierre, et y
des substances unie? forme des générations mirent des gardes. Il remarque que tous ces
différentes; si admirables néanmoins l'une et témoignages de la mort du Sauveur ont été
l'autre, que le langage humain ne peut bien mis par écrit par un eflet de la Providence,

tuilur... Elsi enim sunt diversœ nalurœ ex quibus namque ex Pâtre genilus est, et aliter ex Matre.
unitus est ad manifcstationein mysterii, una ta- Ibid.
men est hypostasis : eadem enim proprietas hy- ' Ipse a quo Spirilus Sanetus procedit. de ««ip-
postasis mansit Filio Hiam incarnalo. Fitiusenim so teslimonium veritati prœhel, qui sripsum et
rursus est etiam secundum carnem. Quare nalii- quod in se est cognoscit. Ipse cuini, inquil Eian-
ra quidem di/ferunt a^sumens et assumpta, hypos- gclisla, scicbat (luiil cssel in tiouiine. Pag. 4.'i7.

tasi vero minime. Sic dicimus esse tinam hypns- ' /;( est quidiin Deus qui palilur, non capienle

tasim nalurn differcnlium, omnibus Iheologis et pasfioncm dirinitate. (Irat. l, i)ag. 450.
Ecclesiœ doctnribus approhanlihus, qui euirdem ' Erant pnsston^'s prœcipue quidem et iniprimis

afprnuinl esse Deum et hnminem. Orat. 3, pa»;. carnis : quatenus vero eas sihi adnbuebal erant ,

4.52.
ejus, qui carnem nssumserat miracula vero ini- :

• Unum et eumdem Christum adoramus qui primis eranl Dei itrbi : simul aulvm cum hix
erat anle incarnutionem Deus, et mansit Deus cnro glnrificabalur, quia scilicct Verbi Dei eral.
posl incarnationem. Il)i(!., pag. 45t. Ibid., iwij. 461.
• Vnfle duos generaliones esse credimus : aliter
[Vl" SIÈCLE.] CHAPITRE XI,I. — OnÉGOlRE ET ANASTASE. 303

afin que l'on ne pût douter do sa résurrec- net qu'il y en a deux


' : l'une divine, et l'au-
rpction, attesti5e d'ailleurs par l'ange qui ap- tre humaine. Il admet trois hypostases; mais
déclare (jue, sous ce terme, il entend la per-
parut aux femmes, par les soldats qui f;ar- il

daient le sépulcre, par Icslinges qui envelop- soun(! confessant qu'il y a en Dieu trois per-
;

paient son corps, et qui furent trouves dans sonnes, et une seule substance, essence ou
le tombeau, par de fréquentes apparitions à nature. Au contraire, il admet en Jésus-Christ
ses apôtres, qui eurent la permission de le deux natures, et uneseule hypostaseou per-
louclier et de manger avec lui, et la joie de sonne. Il s'explique clairement sur la divinité

le voirmonter au ciel. du Saint-Esprit, mais il ne procéder le fait

12. Le discours sur les trois carêmes porte que du Père. [Cet abrégé est au tome LXXXIX
dans un manuscrit de la Ribliothèque du Roi de la Patrologie grecque, col. 1399-1404, parmi
le nom d'Anastase, patriarche d'Autiochn ;
les œuvres d'Anastase le Patriarche, dont il
mais je n'y trouve ni son style, ni son génie. est question dans ce chapitre.]
15. Évagre ' dit qu'Auastase, lorsqu'il se
OwvrflCCS
L'auteur, pour montrer que l'on doit faire (I'Adqs a^cqui
sont lej'lii^,
deux carêmes, outre celui de quarante jours trouvait dans des conversations sérieuses, ou qui n'odt
fnf. encore él6
qui précède la fête de Pâques, emploie l'au- et où il était obligé de parler, expliquait mprinios.

torité d'un livre apocryphe nommé L'iti- : les questions les plus dilliciles avec autant
néraire de saint Philippe, livre rempli de fa- de subtilité que de solidité ;
que l'empereur
bles; il compte sept conciles généraux jus- Justinien ayant écrit pour la défense de l'er-
qu'ici son temps. On n'en connaissait que reur des incorruptibles, Anastase prit contre
cinq en 398, qui fut l'année de la mort d'A- ce prince la défense de lafoi dans un écrit,

nastase. [Gallanil a publié ce discours au où prouva par des arguments clairs et in-
il

tome XII de la Biblioth. Pat., et il est repro- vincibles, que le corps du Sauveur a eu ses
duit dans la Patrnlngie grecque, tom. LXXXIX, propriétés naturelles, comme les corps des
col. 1389-1398. Gallaud l'avait pris dans Cote- autres hommes, qu'il a été sujet à la cor-
lier, tom. III, Monum. eccles. grcec, p. 423.] ruption, et que cette doctrine est celle des
13. On ne peut non plus lui attribuer les apôtres et des Pères. Il écrivit la même cho-
Réponses aux questions des orthodoxes, don- seaux moines de la première et de la se-

nées en latin par Gentien Hervet, sous le conde Syrie, qui l'avaient consulté sur ce
nom d'Anastase, évêquede Nicée, et en grec sujet, confirmant sans cesse les fidèles dans
et en latin par Gretser, sous le titre de la résolution de défendre la vérité, et répé-
Dux rio", c'est-à-dire de guide du chemin. tant chaque jour dans l'Église ces paroles
On y cite les canons du concile in Trullo tenu de saint Paul Quand un ange du ciel vous
:

à Consfantinople en 692, et saint Nicéphore, annoncerait un évangile différent de celui que


patriarche de cette ville, mort en 828. Il est nous vous annonçons, qu'il soit anathème. Ses
dit dans la réponse à la 117° question, qu'il remontrances furent écoutées avec respect,
y avait sept cents ans que les ariens étaient et suivies presque généralement. Comme il
chassés des lieux saints. apprit que Justinien avait dessein de l'en-
14. Aubert le Mire et quelques autres at- voyer en exil, il composa un discours pour
tribuent à Anastase-le-Jeune, successeur de prendre congé des habitants d'Antioche.
celui dont nous parlons sur le siège d'An- Tout y était admirable l'élégance des ter- :

tioche, Y Abrégé de la foi imprimé dans les mes, la beauté des sentiments, le choix des
Bibliothèques des Pères, de Paris, de Cologne passages de l'Écriture et des histoires qu'il
et de Lyon. D'autres en font une compilation rapportait; mais il ne le prononça point,
composée partie des écrits de saint Cyrille parce que Dieu frappa l'Empereur d'une
d'Alexandrie, partie de ceux d'Anastase manière invisible, dans le moment où il dic-
d'Antioche. Il paraît, en effet, que l'auteur tait l'ordre pour envoyer Anastase en exil. Il
écrivait depuis la condamnation du monothé- ne nous reste rien de ces écrits, ni du discours
lisme car il fait une question exprès sur le
: qu'il fit ' ta son peuple en 593, lorsqu'il ren-
nombre des volontés en Jésus-Christ, et dit tra en possession de son siège le P. Labbe ;

' Quoi naturales vohmtates et actiones in Chris- Potum quœrere, iter facere, fatigari. Tom. XI
to pro/iteris ? Duos : vnam
divinam, alteram hu- Bibl. Pat. Liigd., pag. 1046.
manam. Quœ est voluntas divina? Purgarelepro- Evagr. lib. IV, cap. iL-iLt.
-

sos ; ul serventur omnes homines et ad veriiatis Nioeph. lib XVIIl, cap. LXiv, et Labb. Biblioth,
'

notitiam pcrveniant. Quœ est voluntas humana ? nova, pag. 82.


364 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
dit l'avoir vu manuscrit dans la Biblioth^que jugé par un laïque, mais seulement par un
du Roi. Anasfase en fit un autre vei-s le ' ëvêque. Ils citent ' aussi sous son nom et
même temps sur la paix, le mercredi de la sous celui de saint Jean de Damas plusieurs
Semaine-Sainte; il est manuscrit ' dans la Bi- questions sur la foi, des églogues ascétiques
bliotlièque Impériale (de Vienne). Sa lettre et des définitions; mais on n'a pas d'autres

à un scolaslique fut citée dans la quatrième preuves que tous ces écrits soient de lui; et
action du septième ' concile général. On y cita il y a apparence qu'ayant été en réputation

aussi son discours sur le Sabbal, adressé à de savoir, plusieurs écrivains postérieurs
Siméon de Rostres. [Ce fragment est rap- ont pris son nom pour donner cours à leurs
porté au tome LX.WIX de la Patrolngie grec- propres productions. La Bigne compte parmi
que, col. 1405-1406, avec un fragment de les écrits d'Anastase qui n'ont pas encore vu
VÈpitre à Sergius, ibid. col. 1403-1408.] le jotir, deux livTCS de la Construction de
Saint Maxime '
parle d'un livre d'Anaslase l'homme ; V Eloge de l'I-'gijpte; un traité con-
dont Grelser nous a
contre Jean P/iiloponvs, tre ceux qui disent qu'il y a trois essences
donné fragment dans sa préface sur le
un. ou natures dans les personnes divines, et
Guide du chemin. Nous n'avons plus ni sa deux livres contre les Juifs. Turrien les a
version grecque du Pastoral de saint Gré- traduits en latin; mais l'auteur de ces deux
goire, ni aucune des lettres qu'il écrivit à ce li\Tes vivait longtemps après Anastase pa-
Pape, ni le discours ' qu'il fit en son bon- triarche d'Antioche, puisqu'il compte huit
neur. Il en avait fait ' sur la Visitation de cents ans et davantage depuis la prise de
Marie, sur le dimanche des Rameaux, sur la Jérusalem par Tite et Vespasicn. Le traité
décollation de saint Jean, et un à la louange qui a pour titre Contemplation mystique des
:

de saint Nicolas. On les trouve manuscrits souffi-ances de Jésus-Christ ,


parait être la

dans la Bibliothèque du Roi, de même qiie même chose que celui d'.\nastase leSinaïte,
la dispute des évèques chrétiens avec les intitulé : De la passion et de l'itn/xissibilité de
Juifs, dans laquelle Aphiodisien, officier du Jésus-Christ.
roi de Perse, avait été constitué pour juge. en
16. I^es cinq discours sur la foi, traduits
Anastase y était présent. Mais cette Dispute latin par Turrien, furent imprimés pour la
est remplie de contes fabuleux, indignes de première fois à Ingolstad en 1616, in-4», dans
ce patriarche. D'ailleurs Arénatus, qu'on le Supplément de Steuartius aux .Anciennes

suppose avoir été alors roi de Perse, ne le leçons de Canisius et depuis, dans le neuviè-
;

fut que depuis la mort d'Anastase. Entre me tome delà Bibliothèque des anciens Pères,
plusieurs passages des Pères sur les deux à Lyon en 1677, et dans la nouvelle édition
opérations en Jésus-Christ cités dans le , des Leçons de Canisius, à .envers, en 1723.
concile de Latran en 649, il y en a un de Mais dès l'an 1336, ils avaient été traduits
l'écrit d'Anastase pour la défense de la let- par Tilmannus, et imprimés à Paris, et en-
tre de saint Léon Flavien, où il dislingue '
i^i suite dans les Bibliothèques des Pères pu-
clairement les deux natures et les deux opéra- bliées en cette ville. Meursius donna en
tions, en reconnaissant toutefois qu'il n 'y avait grec les deux discours sur l'Annonciation
dans Jésus-Christ qu'une seule personne (jui dans le recueil de ses Mélanges divins, à
agissait, la même étant Dieu et homme. L'hu- Leydeenl619.NousIesavonsenlatin dans le
manité prenait de la nourriture et croissait la ;
neuvième tome de la Bibliothèque des anciens
divinité ressuscitait les morts Jésus- Christ : Pères de Lyon, dans le sixième de la Biblio-
faisait l'un et l'autre. Divers ' manuscrits thèque des Prédicateurs du Père Combefis et ,

donnent à Anastase une Démonstration publi- dans le premier de son .Auctuarium, [et dans
que, où il prouvait qu'un prêtre ne peut être le tome .\II de Galland, d'où ils ont passé au

' rbid. —
« Umb., lib. VII, pag. 168. tix humanilati, ut condecel, non in conpusionem.
' Tora. Vil Concil., pag. 247 et 249, Damasc. Oral. sed in unUionem. InconfusiB ergo (iuiv quidem
2 et 3 De imag., pag. 344-386. sunl operaliones.sicuti essentiœ. Cnus autcm ope-
* Ma.xim. loin. Il, pag. 121, 123, 120. rator, Dcusparitcrqueelhomo rxistens. Ana^Uia.,
s
Laïul). lib. VIII, pag. 423. in Concil. Laleran. Acl. 5, pag, 308, loui. \ I Labb.
' Mlatius, lil). De Simeuu., pag. 104. Labbffus, elloui. III WorduiHi, pag.88u.
Bihlioth. mii,s., pag. H2 et 1370. s Lauili. lil). 111, i)ag. 196, Bihl. Coislin., pag.
' Sicut enim nulriri et cremeiUari non est Dei- in:;; Labbîrus, Bihlioth. Nov., pag. 82.
tatis, ita suscilare morluos non est humaiiiln- ''
Lamb. lib. Vlll, pag. 336; lib. V, pag. 105.
tis : ulraque tamen ejusdem Deilalem lemperan-
Vr SIKCLE. CIIAPITIIE XLII. — SAINT GllWîOIRE DE TOUllS. 305

touio LXXXIX de la Palroloi/ie (/ira/iie, col. [Tous les écrits de saint Anastasc sont re-
13()0-13'J8.]On y trouve aussi le discours produits au tome LXXXIX de la Patroloijic
sur la Traiisfif;iii'atii)n, dn nu'-iiio que dans le l/rcci/iic, col. 1288-l'*08, avec notices liri'es

neuvième lonie do la Jii/ilwi/iryne <li's ancicus de (iailaiid, de Falnicius, une vie de saint
Pères de Lyon, et dans le septième volume de Anastase d'après les BoUandistes.]
la Bibliothl'tjue des Prklicatenrs. Il manque
quelque chose A la Ini de ce discours.

CHAPITUE XLII.

Saint Grégoire évoque de Tonrs '

|595].

moire de quantité de fables dont ils sont


ARTICLE PREMIER. remplis.
2. Loisqu'il fut en âge, saint Avit l'or- Il e'I nr.
HISTOIRE DE SA VIE. t'rinnt; di^iCie.
donna " diacre. Frappé des merveilles qu'il
1. Il faudrait être étranger dans l'histoire, avait ouï raconter de saint Martin, il s'en
pour ignorer combien saint Grégoire de Tours entretenait sans cesse, parlait continuelle-
s'est rendu recommandable dans le sixième ment de ce saint, faisait partout son éloge.
siècle de l'Église par sa vertu, par son sa- Sa trop grande application ;\ imiter ses ver-
voir et par le grand nombre de ses écrits. tus lui causa une fâcheuse maladie, dont ne
L'auteur de sa vie, que l'on croit être saint croyant pouvoir guéi'ir que par l'interces-
Odon, abbé de Cluni et qui pouvait en
,
sion de ce saint évêque, il entreprit le voya-
être bien instruit, puisqu'il avait été long- ge de Tours, où il recouvra en effet la santé,
temps dans le clergé de l'Ëglise de Tours ^, 3. Il était sorti depuis peu de cette ville, Il eti fiil
é>êi)uo ie
nous apprend qu'il naquit en Auvergne de lorsqu'Eupbronius, qui en était évêque, mou- Tours en Wii
ou Itli,
parents riches et nobles que son père se
;
rut. Le clergé, la noblesse et le peuple de-
nommait Florent, et sa mère Armentarie ;
mandèrent Grégoire pour lui succéder. Tous
que Léocadie, son aïeule, descendait du connaissaient son mérite. Ils députèrent à la
martyr Vestius Épagathus, célèbre par sa foi, cour de Sigebert, roi d'Austrasie, pour faire ap-
qu'il scella de son sang avec les autres mar- prouver leur choix. Grégoire s'y opposa, mais
tyrs de Lyon, ainsi qu'on le lit dans le cin- Sigebert et Brunehaut l'engagèrent à accepter
quième livre de l'histoire d'Eusèbe de Cé- l'épiscopat. Il fut sacré ^ par Gilles, évêque
sarée. On met la naissance de Grégoire au de Reims, le 22 août S72, suivant l'autt^ur
30 novembre de l'an 544. Il reçut les premiè- de sa vie, ou en 573, selon qu'il le dit lui-
res teintures de la vertu et des sciences de même dans le dixième ' livre de son histoire,
saint Gai, évêque de Glermonl, son oncle où il met son élection en la 172* année de-
paternel. Ensuite il passa sous la discipline
'
puis la mort de saint Martin, et la douzième
de saint Avit, successeur de saint Gai, qui, du règne de Sigebert, ce qui revient à l'an
lui trouvant de la disposition pour les scien- 573.
ces, lui donna des maîtres capables de le 4. Le poète Fortunat * félicita les ci- Sji coDiluite
leudaui son
former. Se sentant moins d'attraits pour les toyens de Tours dans un poème qu'il leur ip^cotai.

poètes et les autres auteurs profanes que adressa où, en relevant leur bonheur
, il ,

pour les écrivains sacrés, il fit peu d'usage faitde leur nouvel évêque l'éloge le plus
des premiers, se contentant d'en * prendre ce pompeux, puisqu'il le compare à saint Atha-
qu'ils avaient de bon, sans se charger la mé- nase à saint Hilaire, h saint Grégoire de
,

' La nouvelle vie de saint Grégoire de Tours 3 Ibid. num. 6, et Fortunat, lib. V, cap. iv.

par Lévêque de Laravaillère, Académie des inscrip- ' Ibid. num. 6. — ^ Ibid. num. 7 et S.
tions, tome XXYl pag. 598, ne laisse rien à dési-
,
6 Ibid. num. 11 et Fortunat, lib. V, carm. 2.
rer pour la discussion des faits. ' Gregor., lib. .\, num. 31, pag. 538,
* Udo in Vita r.regor. Turon, num. 1. ' Fortunat ubi sup.
366 HISTOIRE GENERALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Nazianze, à saint Ambroise, à saint Martin, luidonner des noms de personnes comme un ft

à saint Augustin, à saint Césaire. La foi et homme, saint Grégoire lui remontra qu'il de-
la piété du clergé ci du peuple prirent de '
vait quitter cette doctrine, et suivre celle que
nouveaux accroisseiueuts sous la conduite les docteurs de l'Église nous ont enseignée
de Grégoire. 11 étendit ses soins jiisques sur après les apôtres; qu'en vain il s'imaginait
les temples matériels du Seigneur, s'occu- que le nom de personne était indigne de Dieu,
pant à réparer les églises ruinées de son qu'il ne se prenait pas dans un sens corpo-
diocèse et à en bâtir de nouvelles. Il rétablit rel, comme il le pensait, mais spirituelle-
entièrement sa cathédrale, qui était l'ouvrage ment.
de saint Marlin. Il y avait peu de temps G. La même année 577, ou selon
d'autres en '"' •«"•*

qu'il était évoque, lorsqu'il reçut la visite 580, on fit un procès au


saint évéque prévenu i',^',.,*"^
d'im saint solilaire, nommé Sénoch, qui s'é- d'avoir ' accusé la reine Frédégonde d'adul-
tait établi dans un oratoire près de Tours, tère avec Bertrand, évèque de Bordeaux;
où il servait Dieu avec trois moines. La ver- l'accusât on fut discutée dans le concile de
tu de Sénoch lui avait attiré la confiance des Biaine, et saint Grégoire pleinement justifié.
fidèles. Ils lui apportaient de l'argent, qu'il Il parle 'en un endioit de son histoire de
distribuait aux pauvres, ou qu'il employait deux disputes réglées qu'il eut sur la divini-
à délivrer ceux qui étaient arrêtés pour det- té du Fils avec deux ariens, Agilan et Oppila,
tes. L'afflueuce des malades, qui venaient à ambassadeurs du roi d'Espagne à la cour de
lui pour être guéris, lui fit prendre la résolu- France. Il les convainquit, maisnelesconverfit
tion de ne plus voir personne. Saint Grégoire pas,du moins sur-le-champ; ma is.\gilan, étant
lui conseilla de no s'enfermer que depuis la de retour en Espagne et y étant tombé ma-
*
Saint-Martin jusqu'à Noël et pendant le carê- lade, embrassa la religion catholique. Il eut
me, suivant l'usage de plusieurs autres soli- une troisième conférence sur la foi avec un juif
taires. Il détourna aussi un saint moine, nom- nonuué Prisquc, en piéseuce du roi Chilpé-
mé Léobard, de changer de demeure, hr re- ric. Le juif, accablé par une foule de passa-
montrant que le dessein qu'il en avaii était ges des psaumes et des prophètes, se trouva
lin artifice du démon. Pour l'en convaincre, muet mais il demeura endurci.
;

il lui envoya ' les livres de la Vie des Pères 7. Eu 588, Childebert envoya ' saint Gré- " ' '
•n™,*

'" '"'•
et V Institution des moines^ ce semble, de Cas- goire à Gontran, roi de Bourgogne, pour lui
sien, dont la lecture fixa son inconstance. faire ratifier le traité d'Andelau, fait pour
Léobard ' s'occupait ù tailler des pierres dans ôter tous les sujets de brouiUerie, que la moi l

la montagne, h faire du parchemin, et quel- précipitée de Chilpéric avait causés. Ce traité


quefois à écrire, pour se délivrer des mau- avait été fait l'année précédente, le 27 no-
vaises pensées. vembre. Les réponses que lui fit ce prince
«i'c'fd!"". ^- ^^ ^"^"^^ saint Grégoire assista au con- marquent clairement qu'il l'avait envoyé lui-
ris«ns;7.
cile que Chilpéric tinta Paris contre Prétex- même quelque temps auparavant en ambas-
tât, évoque de Rouen. U fut le seul qui prit sade vers Childebert. Ce fut aussi sur lui que
hautement ' la défense de l'accusé, et qui l'on jeta '"les yeux pour pacifier les troubles
s'opposa aux exécrations dont le prince vou- que Chrodielde et Basine avaient excités
lait qu'on se servît en déposant Prétextât. dans monastère de Sainte-Croix de Poi-
le
Sa fermeté dans cette occasion lui gagna tiers,dont elles étaient religieuses la com- ;

l'estime de Cliilpéiic, quelque fâclié que fut mission lui en fut donnée en 590 par le roi
ce prince de trouver de la résistance à ses Childebert. Il rapporte assez" au long la dis-
desseins. Mais ce ne fut pas la seule fois qu'il pute qu'il eut avec un prêtre de son clergé
en éprouva de la part de l'évéque de Tours. sur la résurrection des morts. Il répondit h
S'étant avisé " quelque temps ajirL's Je faire toutes ses objections, et, joignant la force des
un édit portant ordre de nommer la sainte raisons à l'autorité des divines Écritures, il

Trinité sans aucune distinction de personnes, le ramena au sentiment de l'Église.


parce qu'il lui paraissait indigue de Dieu de 8. Vers l'an 594, il fit un voyage à Rome, iiTi i n.
,

mo tn 594.

' Odo in vila, uuui. 12, 13. — 'Grcgor. VitœPaU, ' ld<>m, lit). V, c.-ip. xuv, ctlib. VI, cap. XL. —
cap. XX, pug. 1253.— » Ibid. — » (;reg. Turoii.lib. « Ideui, lib. VI, cap. v. — » Ideiii, lib l.\, cap.
V, cap. XII, et lib. Vit, cap. XVI. —' Idem. lib. V, XX. — "o Lib. .\, cap. XV. — " Idem, lil). X, lap.
caj). XLv. — « Oregor. Turou. lib. V, oap. L. xni.
J

[Vl' SIÈCLE. CHAPITIIE XLII. — SAINT GUÉGOIIIE DE TOUllS. 3G7


OÙ saint Grégoire, élu pape depuis quelques travailléavec le plus de succès sur l'histoire l'hi.rotr» ee.
el6i'a.tlqiie<l0
anuces, le rt\ut avec honneur. 11 l'introilui- de France, conviennent que c'est à saint Gré- *«'lir fin'-L'Ol.
r^ de Toum.
sit lui-môme' dans la Confession de saint Pier- goire de Tours que l'on est redevable de la
re, où l'ayant laissé en prière, il se retira à connaissance que nous avons des premiers
côté, en attendant qu'il l'eiil aclicvée. Alors, rois de la nation, et des principaux événe-
considérant d'uni' [)art la taille de notre saint ments de leurs règnes. Ils appellent les dix
évêque,qui était très-petite, et de l'autre les livres de ce Pèio le fond de notre histoire,
grâces et les talents dont Dieu l'avait couihlé, el ne regardent que comme des commentai-
il dit en liii-uième ,
qu'il était surprenant les sur ces livres, ce qu'ils ont écrit sur le
que Dieu eût renfermé de si grands dons même sujet. Il neserait pas possible, eu effet,
dans uu si petit corps. L'évéque de Tours, de parler des commencements de la monar-
se tournant, le visage tranquille, du côté du chie fran(;aise sans le secours de cet écri-
pape C'est, lui dil-il, IcSeigneur qui nous a
: «c vain, qui a, par-dessus ceux qui ont écrit après
faits tels que nous sommes, nous ne nous lui, cet avantage, qu'il n'a lien mêlé de fa-
sommes pas faits nous-mêmes pour lui, il ; buleux dans son histoire. 11 ne fait pas, com-
est le mémo dans les petits et dans les me eux, descendre les Français des transfu-
grands. » Le Pape, étonné qu'il eut décou- ges de Troyes. 11 se borne à rapporter de
vert sa pensée, l'eut en grande vénération; leur origine ce qu'il en avait lu dans les au-
et pour lui en donner des marques et hono- teurs contemporains, Sulpice Alexandre, Re-
rer l'Église dont il était évéque, il lui fit pré- né Profuturus Frigéridus, et l'historiographe
sent d'une chaîne d'or. Orose. Ce dernier est connu, les deux autres
9. De retour en sa ville épiscopale, il y ne nous le seraient pas sans saint Grégoin;
mouiut à l'âge de cinquante-un ans, l'an de Tours, qui les cite.
595 le 17 novembre, après vingt-deux ans
, 2. Son histoire, dans quelques manuscrits, Quel es( 1o
titre de celle

d'épiscopat. L'auteur de sa vie ne lui en est intitulée Histoire ecclésiastique des Fran-
:
hi-lotre. En
ti' ol leii]i>9

donne que vingt-un ce que l'on regarde :


de ï été
çais; en d'autres. Histoire des Finançais; quel- (fiitc.
comme une faute, ou de sa part, ou de celle quefois : Faits mémorables des Français, et
des copistes. Avant de mourir, il ordonna sa plus souvent Chroniques. Le premier titre est
sépullure en un lieu où il pût être foulé aux celui que l'on a gardé dans la nouvelle édi-
pieds par les passants, et où l'on ne put, à tion, imprimée à Paris par les soins de dom
cause du besoin public, décorer son tombeau. Thierry Ruinart, en 1699. Elle y est à la tète
Mais le clergé de Tours lui éleva, depuis, un de tous les ouvrages de saint Grégoire, ap-
mausolée à la gauche du tombeau de saint paremment parce qu'elle en est le plus con-
Martin. Les écrits qui nous restent de lui sidérable car on ne peut douter, ce semble,
;

sont VHistoire ecclésiastique des Francs en


: qu'elle n'en soit le dernier selon l'ordre
dix livres ; sept livres des Miracles, et un hui- des temps, puisque ce Père y rappelle sou-
tième de la Vie des Pères. Il avait fait un vent ses autres écrits , et qu'il ne la cite
Commentaire sur les Psaumes, dont nous n'a- nulle part. Il faut ajouter qu'il fait dans la ^
vons plus que quelques fragments, et un Trai- conclusion de cette histoire l'énumération
té des Offices, qui est perdu. Saint Odon relève de tous ses ouvrages. Ou pourrait objecter,
en lui un esprit de douceur, des mœurs pures, qu'en parlant, dans le trentième chapitre du
une d'humeur, un grand zèle pour
égalité livre de la Gloire des Confesseurs de saint ,

une charité qui s'étendait jusques


la religion, Austremoine, il dit qu'il avait déjà parlé de
sur ses ennemis, et une humilité profonde. ceux qui l'avaient accompagné dans sa
mission en France mais cela n'a point
;

ARTICLE n.
un rapport nécessaire avec son histoire ec-
DES ÉCRITS DE SAINT GRÉGOIRE DE TOURS. clésiastique : c'est avec le chapitre vingt-sep-
tième du même où
avait en effet dit
livre, il

§1- quelque chose de la mission de saint Martial


de Limoges. Il avait aussi parlé de saint De-
L'Histoire ecclésiastique des Français.
nis de Paris et de saint Saturnin dans le pre-
Ulilltéile
i. Ceux qui ^ dans le dernier siècle ont mier livre de la Gloire des Martyrs. Quelques-

• Odo in vita Gregor. num. 24. Turon.


' Valois et Le Coiute, et Prœf. in nov. edit. Greg. 3 Lib. X, pag. 537.
368 HISTOIRE GHNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
uns ont cru que saint Grégoire n'avait pas perpétuelle de Marie, et avance, sur l'autori-
donné de suite toute sou histoire, et qu'il n'en té de quelques anciens qu'il ne nomme pas,
publia d'abord que les sis premiers livres. que r.4ntechrist inti'oduira la circoncision, et
Ce qui rend cette opinion probable, c'est que qu'il placera sa statue dans le temple de Jé-
Frédégaire n"cu connaissait pas davantage, rusalem, pour y être adorée de ceux qu'il
et que voulant continuer dans sa chronique aura séduits. C'est, ajoute-t-il, ce que le Sei-
l'histoire de ce Père, il commence à la mort gneur a prédit par ces paroles Vous verrez : luiu.. xin,

de Chilpéric, où finissent ces six premiers li- l'abomination de la désolation dans le lieu saint.

Tres. On cite aussi divers manuscrits qui Après ce préambule il donne en abrégé
,

n'ont que ces six livres ; mais il y en a d'au- toute la suite des temps depuis la création
tres que l'on croit de la tîn du sixième siècle, du monde jusqu'à la mort de saint Martin,
où l'on trouve un fragment du septième li- en s'altachant à ce qu'il en avait trouvé dans
vre. Quoi qu'il en soit, cette histoire a sou- les chroniques d'Eusèbe, de saint Jérôme.
vent été altérée par les copistes mais nous ; d'Orose et de Victorius. Quant à ce qu'il rap-
l'avons aujourd'hui dans sa pureté, le texte porte des premiers apôtres des Gaules, saint
en ayant été revu et corrigé sur un grand Photin, saint Trophime, saint Paul, saint De-
nombre d'excellents manuscrits. nis, saint Martial, saint Saturnin, il l'avait
Premier
ire de I
li-

Uis- 3. Saint Grégoire la commence par une appris, ou de leurs actes, ou de la tradition

'tt'^ul'iê peintm-e très-triste de la décadence des des peuples. Son premier livre contient le

îî^!'i!°""' beaux-arts dans toutes les villes de France. récit de ce qui s'est passé pendant l'espace
Les persécutions que les païens et les héré- de cinq mille cinq cent quarante-six ans.
tiques avaient faites à l'Église n'étaient que 4. Il commence le second ù l'épiscopat de s^„j |„„^
"''
saint Brice, qui succéda à saint Martin sur
'**'
trop connues on n'avait point oublié les guer-
:

res que les princes s'étaient faites mutuelle- le siège épiscopal de Tours en 3'J7, et le fi-
ment: elles se rallumaient tous les jours. On se nit à la mort de Clovis, arrivée en oH. Quel-
souvenait de la constance des martyrs dans ques critiques en ont rejeté le premier cha-
les tourmentsqu'ils avaient soufferts pour la pitre, ne pouvant se persuader que saint
foi. On vu des gens de bien fonder et
avait Martin ait eu pour successem- un homme que
doter des églises, et des perGdes les dépouil- les historiens du temps ont fait passer pour
ler ensuite de ce qu'elles avaient de plus un adultère, coupable de plusieurs autres
et
précieux. Mais la littérature était tombée il ; crimes. Mais ilde répondre, que l'Église
sullit

ne se trouvait plus personne qui fut capable de Tours, fondée sur une tradition cons-
de transmettre, soit en prose, soit en vers, tante, reconnaît saint Brice pour un de ses
tous ces événements à la postérité. La plu- évoques, et qu'encore qu'il ait été accusé
part en gémissaient mais personne ne se
; de diverses fautes, il fut néanmoins déclaré
mettait en devoir de remédier à ce désordre. innocent par le pape Zosime, comme on le )

L'ignorance du beau langage était telle que, voit dans sa lettre quatrième à Aurèle de
s'il se fùl trouvé quelqu'un qui écrivit avec Carthage et aux autres évèques d'Afri-
élégance, il n'auiaitété entendu que de peu que. Il décrit dans les chapitres suivants la
de monde il fallait un style grossier et rusti-
; peisécution des Vandales, les guerres entre
que, pour se faire entendre du grand nombre. les Saxons et les Romains, l'avènement du
Voilà le que dit ce Père dans la préface de son roi Clovis à l'empire des Français, sa con-
histoire. Ce ne fut qu'au défautde quelquemeil- version, son baptême, ses ditl'érends avec
Pij.B. «'.s, leur écrivain, qu'il l'entreprit. Il convient du Gondebaud, roi de Bourgogne, et avec Ala-
Ml, 11^3,995
peu d'exactitude et de la barbarie de son style, ric. Il donne la suite des évêques de Tours

et il en demande excuse à ses lecteurs. Mais et de Clermont. Il parle de la construction


il les assure de sa fidélité à rapporter les de plusieurs églises considérables, comme
dogmes que l'on enseignait dans l'Kglise ; et de celles de Saint-Étienne à Metz, de Saint-
afin qu'ils n'eussent aucun doute sur ses sen- Symphorien à Autun, de Saint-Martin àTours,
timents, une profession de sa foi, qui est
il fait où il dit que la leine Crotechilde ou Clotildc
en substance même que celle du symbole
la se relira après la uKu't de Clovis, pour y vi-
de Nicée et de celui de Coustantinople, mais vre dans les exercices de piété auprès du
plus étendue. 11 y dit nettement que le Saint- tombeau de saint Martin.
Esprit procède du Père et du Fils il y éta- , 5. Le troisième livre comprend ce qui s'est *""
..^J""'
'

blit l'immortalité de rame et la virgfliité passé depuis le commencement du règne ""


,

[vr SIÈCLE.] CHAPITRE XLIl. — SAINT URÉCOIRE DE TOURS. 369

dos qufilrc enfants do Clovis, Thierry, C1<1- (le iialions, subjugué do pays? Pour venir à
doniir, Cliilclcbcrt et Clotuire, jusqu'à la mort bout do tout cela, il n'avait ni or ni argent
de Tliéodebcrt ei; .'iiS. Saint Grégoire rap- au que vous avez de grands trésors.
lion

pelle en peu do mots, dans le prolotjue les , Vous avez des magasins de blé, do vin ot
prospëritiis dont le règne de Clovis fut ac- d'Iiuilo, de l'or et de l'argent en abondance.

compagné, et les disgrâces d'Alaric, roi des Il ne vous manque qu'une chose, c'est la paix,

Visigolhs, qui était arien, pour montrer que et ce défaut vous mot dans l'indigence de lu

Dieu comble morne des faveurs temporelles grâce de Dieu. Pourquoi l'un de vous en-
les princes(jui font profession do la vraie lève-t-il ;\ l'autre ce qui lui appartient? Fai-
foi, et qu'ilpermet que ceux qui en sont en- tes réflexion à ce que dit l'Apotre : Si vous
nemis soient dans l'adversité. Ce livre est in- vous mordez et vous dévorez uns les autres, les coiai. v, i

téressant par la variété dos matières. Outre prenez garde que vous ne vous consumiez les uns
ce qui reganle les enfants de Clovis, il traite les autres; et à ce que dit l'historien Orose,
des rois de Thuriuge, d'Espagne et d'Italie. en parlant dos Carthaginois, que tandis qu'ils
'''j'"
6. Il en parle encore dans le quatrième , avaient été unis, leur ville et leur l'épubli-
où il dit aussi ipielque chose des comtes de que avaient été florissantes, et qu'elles n'a-
Bretagne de Iti révolte des Saxons, do l'ir-
, vaiont été détruites , après avoir subsisté
ruption des Lombards en Italie, de l'éléva- pendant sept cents ans que pour s'être dé- ,

tion de Justin sur le trône impérial, et de sunies. » Ce cinquième livre renferme l'his-
plusieurs autres événements qui paraîtraient toire d'environ cinquante-quatre ans, depuis
éti'angers i\ son dessein, s'ils n'avaient de la le règne de Childebert second, successeur et
liaison avec l'histoire des rois de France. Ce fils de Sigebert, jusqu'au concile de Braine,
livre commence à la mort de sainte Glotilde, où saint Grégoire, accusé par Leudaste d'a-
et au règne de Clotaire roi d'Austrasie , ,
voir mal parlé de la reine Frédégonde, se
et va jusqu'i'i la mort de Sigebert, son fils et purgea par serment de cette calomnie. Un
son successeur, aaivée en 573. On trouve des endroits les plus intéressants de ce livre
encore dans ce livre, comme dans tous les pour l'histoire ecclésiastique de France dans
autres, quantité de traits de l'histoire ecclé- le vi^ siècle, est le détail de la procédure contre
siastique, des conciles , les vies des saints Prétextât, évêque de Rouen. Nous en avons
évèques et des saints solitaires, les fonda- donné le précis dans l'article du cinquième
tions de monastères, le culte des saints et concile de Paris en 377. 11 y est aussi parlé de
de lem'S reliques en sorte qu'on doit regar-
; la persécution que les ariens firent soufirir
der cet ouvrage de saint Grégoire comme aux chrétiens d'Espagne sous le règne de Lé-
une histoire ecclésiastique et civile. vigilde, et d'une dispute que saint Grégoire
•''';<'
7. Dans la préface du cinquième livre, eut avec un arien sur le mystère de la Trinité.
l'auteur déplore les malheurs de l'État et des 8. Le sixième livre commence à la sixième Shlème II-

peuples, causés parles guerres presque con- année du règne de Childebert II, c'est-à-dire
tinuelles entre les trois fils de Clotaire, Gon- à l'an 381, auquel ayant rompu la paix avec
Iran, Chilpéric et Sigebert. Clotaire avait eu Gontran son oncle, roi de Bourgogne, il con-
un quatrième fils qui était l'aîné de tous, clut un traité d'alliance avec Chilpéric, roi
nommé Charibert. Il eut le royaume de Pa- de Soissons ; il finit à la mort de ce dernier
ris Gontran, celui d'Orléans Chilpéric, ce-
; ; prince, qui fut assassiné en 584 à Chelles,
lui de Soissons et Sigebert le royaume
; , en revenant de la chasse. Son fils Théode- Gtég. Ilb. V,
cap. At^.
d'Austrasie. Les deux aînés aimaient la paix ; bert avait été tué dans une bataille en 576 ;

mais Chilpéric et Sigebert étaient d'une hu- Chilpéric, persuadé que Gontran-Boson, l'un
meur trop martiale pour le repos de leurs des deux capitaines qui commandaient l'ar-
sujets. C'est donc à eux principalement mée de Sigebert, était auteur de cette mort,
que s'adressent ces paroles de saint Grégoire résolut de la venger. Celui-ci se réfugia dans
de Tours : « Plût à Dieu, princes, que vous de Saint-Martin à Tours. Le roi, en
l'église
ne fissiez la guerre que comme vos aïeux, étant informé fit avancer ses troupes
, et ,

et que, conservant la paix entre vous, vous sommer cette ville de se rendre. Comme
vous rendissiez redoutables à vos voisins. elle n'avait ni garnison, ni munitions, elle
Souvenez-vous de Clovis, celui qui a com- oQ'ritde se soumettre à des conditions tolé-
mencé à conquérir les états que vous possé- rables. Rocolène, l'un desgénéraux de Chil-
dez. Combien a-t-il défait de rois dompté , péric, demanda pour première condition ,

XI. 24
370 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEmS ECCLÉSIAS'nOLTES.

qu'on lui livrerait sur-le-cliiimp Gontr:in-Bo- levant les mains au ciel, il dit « Seigneur,
:

soii.Les députés de la ville répoudirent que pourquoi m'avez-vous renvoyé en ce séjour


la chose n'était point faisable; que l'église . ténébreux? » 11 se leva pail'aitement guéri,
de Saint-Martiu était un asile inviolable; sans toutefois vouloir parler à qui que ce fût.
qu'en livrant Boson, on iiiitcrait le saint qui Mais trois jours après, il raconta que deux
y faisait tous les jours des miracles, et qui anges l'avaient enlevé au ciel où il avait vu
le jour d'auparavant avait guéri un paraly- la gloire du paradis, soit en songe, soit en

tique que s'il entreprenait de profaner ce


;
vision surnaturelle. Saint Grégoire prend Dieu
lieu saint, que les Visigoths, tout hérétiques à témoin qu'il avait ouï cette histoire de la

qu'ils étaient, avaient respecté dans le temps bouche même d^sainl Salvi, qui fut ensuite
qu'ils avaient cette ville eu leur puissance, tiré de sa retraite pour être fait évêque d'Al-
il attirerait peut-être sur lui et sur le roi bi, où il mourut en 583. C'est là que saint

même la malédiction de Dieu. Ce général Grégoire commence son septième livre ; il le


menaça la ville et le pays des dernières finit à la guerre civile que les Tourangeaux

exlrénnités, si on ne lui livrait Boson ; et sur se firent la même année, à l'occasion d'un
le refus q^t'ou en fit, il commença à faire enfant qu'Austregisile avait tué, et dont Si-
abattre une maison qui appartenait ;\ l'église charius voulut venger la mort. La famine se
de Saint-Martin. Boson ne sortit point pour fit sentir presque par toute la Gaule. 11 y eut

cela de son asile. Pour l'en tirer, Chilpéric des tremblements de terre, des signes ex-
s'avisa d'un expédient singulier mais qui , traordinaires dans. le ciel on vit les arbres
;

ne lui réussit pas. 11 écrivit une lettre à saint lleurirpendant l'hiver, et les vignes produire
Martin où il lui demandait si c'était un pé-
,
des raisins, mais d'une mauvaise venue; il
ché de tirer par force Boson de l'église, et parut un géant, dont la taille surpassait de
le priait de lui répondre là-dessus. Le dia- deux ou trois pieds celle des hommes les plus
cre Baudegile, chargé de porter cette lettre grands. Une femme esclave, qui avait l'esprit
au tombeau du saint, y mit un papier blanc de Python, obtint sa liberté par les grands
sur lequel il espérait que saint Martin met- profits qu'elle faisait à son maitre. Ceux qui
trait sa réponse mais étant retourné au bout
: avaient perdu quelque chose, ou souffert
de trois jours, il trouva le papier sans réponse quelque dommage, venaient à elle; ils en
et sans écriture. Chilpéric y envoya d'autres apprenaient le nom du voleur ou du malfai-
gens pour tirer serment de Boson, qu'il ne teur, où il était allé, ce qu'il avait fait de son
sortirait point de l'asile sans sa permission. vol, où il l'avait caché. Ayant gagné beau-
Hoson le jura, tenant la nappe de l'autel. coup d'or et d'argent, elle se vêtit magnifi-
Gre;. llb.YI,
Ily avait un grand nombre de juifs dans quement; le peuple, quand elle paraissait
le royaume de Chilpéric. Ce prince donna en public, la prenait pour une divinité. Saint
ordre d'en baptiser plusieurs, qu'il tint la Airic, évêque deVerdun, informé de ce qu'elle
plupart sur les fonts de baptême. Mais ces faisait, la fit venir, l'exorcisa, oignit son front

juifs, n'étant lavés que de corps et non de de l'huile sainte; le démon qui la possédait
cœur , retournèrent pour la plus grande se déclara, mais il ne voulut point sortir.
partie à leur perfidie. Cette femme, abandonnée à elle-même, se re-
Septième )t-
9. Avant de commencer le septième livre, tira auprès de la reine Frédégonde.
vie, fȣ. 3JU.
saint Grégoire parle de saint Salvi, qui après lu. Les années suivantes furent aussi mar- ,,""^';'5-'i't

avoir vécu longtemps dans le siècle, le quitta quées par des événements extraordinaii-es.
pour s'enfermer dans un monastère, dont il Les inondations fréquentes ravagèrent les
fut élu abbé quelque temps après, voulant
: campagnes, et les pluies continuelles rendi-
vivre dans une plus grande perfection, il de- rent l'été semblable à l'hiver. Deux îles de
meura seul dans une cellule écaitée, où il la mer fui-ent consumées par le feu du ciel

ne laissait pas de répondre aux étrangers qui avec tous les habitants et tous les bestiaux.
le venaient voir. Ktant tombé malade, l'accès Les eaux d'un étang spacieux, auprès de lu
de sa fièvre fut si violent, qu'il passa pour ville de Vannes, furent changées en sang à

mort. Un le lava, on le revêtit, on le mit sur une aune de hauteur. La ville de Paris fut
un brancard, et on passa la nuit en prières jiresque réduite on cendres, à l'exception des
auprès de lui. Le lendemain matin, on s'aper- églises, et des maisons quileur appartenaient.
çut qu'il lemuail, <t qu'il scniblail s'éveiller Une feuime avait pi<'dit cet incendie trois
d'un pniloud sommeil. Il ouvrit les yeux, et jours auparavant, et avait averti le peuple de
[Vl' SIÈCLE.] CHAPITRE XLIl. SAINT GIlliGOIRE DE TOURS. 371

se sauver : on se mo(iii;i (rclh". C'est ce que poila (pie l'année précédente 589, les eaux
racoiilc saint Gn^goire dans le liiiilii''me livre, (In Tibre s'étaient tellement (Millécs, qu'elles

qu'il coininence an voyaj;o que le roi Gon- couvraient la ville de Home; ce qui causa

tran fità Orléans au mois de juillet de l'an la ruine d'un grand nnndjre de maisons, en
585, et qu'il coniluil jwsqu'A la moit de lAÎvi- particulier des greniers de l'Église, et la plus
pilde, roi d'Kspa^iie, aiiivée en 587, la dixiè- grande partie des blés qui y étaient en ni-
me année de son règne. 11 y parle aussi serve. Au mois do février de l'an 590, le pape
du second concile de MAcon, de l'excommu- Pelage fut emporté par une maladie conta-
nication d'Ursicin, évoque de Caliors, pour gieuse. Le diacre Grégoire, élu unanimement
avoir re(;u Gondebaud, ennemi déclan; de pour lui succéder, fit un discours au peuple,
Contran et de ^as:^assinat de l'rétextat, évo-
; à qui il représenta que nous devons crain-
que de Roueu. L'esclave qui avait faille coup, dre au moins les fléaux de Dieu quand nous
avoua à la question qu'il avait reçu de la les sentons, puisque nous n'avons pas su les
reine Frédégonde cent sous d'or pour faire prévenir. Il le finit en indi(iuant une proces-
cette action, cinquante de l'évcque Méla- sion à sept bandes, qui devaient se rendre le
nius, et cinquante de l'archidiacre de Rouen. mercredi suivant à Sainte-lMarie-Majeure.
Sur quoi le neveu de Prétextât, tirant son Saint Grégoire de Tours rapporte ce qui se
épée, mit en pièces l'assassin. Molanius avait passa à l'élection de ce saint Pape, le détail
été mis à la place de Prétextât pendant sou de la procession ou litanie qu'il indiqua, en
exil. Frédégonde le rétablit sur le siège de remarquant que pendant cette procession,
Rouen après la mort de cet évêque. il mourut en une heure quatre-vingts de
M. Le commencement du règne de Réca- ceux qui y assistaient mais que cette cir-
;

rèdc, fds et successeur de Lévigilde, fait ce- constance n'empêcha point le nouveau pon-
lui du neuvième livre, qui finit aux troubles tife d'exhorter le peuple, et de prier jusqu'à

excités dans le monastère de Sainte-Croix de ce que la maladie fût éteinte. Il passe de |là
Poitiers, en 589, par Clirodielde, fille du roi au traité que Childebert fil avec l'empereur
Cliérebert, et par Basinc sa cousine, fille du Maurice, et à son expédition contre les Lom-

roi Chilpéric, l'une et l'autre religieuses de ce bards qui étaient entrés en Italie. Il donne
monastère. Saint Grégoire donne tout le dé- la suite de cette guerre, et des autres que
tail de cette atlaire, avec plusieurs pièces ori- ce prince entreprit depuis. Ensuite il parle
ginales qui regardent l'établissement de cette de la dispute qu'ileut lui-même avec un des
maison par sainte Radégonde. Nous aurons prêtres de son église sur la résurrection des
lieu d'en parler au long dans l'article des corps de l'absolution de Chrodielde et de
;

conciles, où l'on travailla k terminer ces Basine; de l'emprisonnement de Gilles, évo-


troubles suivant les canons. En cette année, que de Reims; de la sentence de mort ren-
ledimanche que l'on appelait alors Pàque due contre pour avoir trempé dans une
lui,

close, etque nous appelons l'octave de Pû- conspiration contre la vie du roi Childebert,

que ou Quasimodo, il tomba une pluie si pro- et des variations qu'il y eut en Occident sur
digieuse avec de la grêle, que dans l'espace le jour de la célébration de la Pâque en 595,
de trois heures l'on voyait couler de grands qui fut l'année de la mort de Childebert.
fleuves par les plus petites ouvertures des Plusieurs dans les Gaules célébrèrent cette
vallées; les arbres, après avoir donné leurs solennité le quinzième de la lune. A Tours
fruits, fleurirent de nouveau en automne, et on ne la célébra que le vingt-deuxième et ;

produisirent des pommes comme auparavant, il qu'en ce jour les fonts miracu-
se trouva
et au neuvième mois les rosiers fleurirent leux d'Espagne se remplirent à l'ordinaire.
une seconde fois. Mais l'abondance des eaux Vers le même temps, on 'vit dans le Gevau-
causa beaucoup de dommage aux moissons. dan un fanatique, qui se disait le Christ. Il

12. Le dixième livre commence à la quin- avait avec lui une femme, qu'il nommait Ma-
zième année du règne de Childebert, de Jé- rie. Il guérissait les malades, prédisait l'ave-
LUi. I Do sus-Christ 590. Un diacre de l'église de Tours, nir, le tout avec le secours de la magie. Plu-
îloria Mar»
que envoyé à Rome, en revint
le saint avait sieurs se laissèrent séduire. Les uns lui don-
cette année-là avec des reliques des saints naient de l'or et de l'argent, les autres des

martyrs, Paul, Laurent, Pancrace, Chry- habits. L'évêque du lieu envoya des hommes
santhe, et de quelques autres, que le pape résolus et vigoureux, pour savoir de lui ce
Pelage II lui avait données. Grégoire rap- qu'il prétendait faire. Un d'eux, feignant de
,

373 mSTOIRE GÉNÉRALE DES ALTEI'RS ECCLÉSIASTIQUES.


lui baiser les genoux, le perra de son coute- n'ont rendu témoignage à Jésus-Christ que
las. La femme de ce fanatique avoua dans par la sainteté de leur vie. et non par l'elfu-
les supplices tous les prestiges dont ils s'é- sion de leur sang. Ce qui engagea le saint
taient sen-is l'un et l'autre pour séduire la évèque à composer cet ouvrage, fut le désir

populace. A Limogi^»*, ])iusieurs, pour avoir d'édilier l'Église et d'instruire utilement les
méprisé le dimauciie, et fait en ce saint fidèles, en leur faisant connaître la perfec-
jour des œuvres sen'iles, furent consu- tion de la foi par l'exemple de ceux qui en
més par le feu du ciel. Saint Grégoire fi- ont eu une parfaite. Il voulait encore les dé-
nit son dixième livre par le Catalogue des tourner de la lecture des fables du paganis-
évoques de Tours, avec un abrégé de leur me, dont les poètes ont farci leurs vers. Ce
vie. Il compte pour le premier saint Gratien, qu'il en dit, quoiqu'en peu de mots, fait voir

qu'il dit avoir été envoyé par le Pape, la qu'il les avait lus, mais qu'il en avait conçu

première année de l'euipire de Dèce. c'est- du mépris, et qu'il craignait d'en être répri-
à-dire eu 2'é'J, et ainsi par le pape Fabien. mandé puni devant le tribunal du souve-
et

Il marque sur Eustocbius, cinquième évo- rain Juge, comme l'avait été saint Jérôme.
que de Tours, les jeûnes et les veilles qu'il Regardant donc tout ce que les poètes ont

avait ordonnés pour certains jours de l'an- dit des faux dieux, comme des choses qui
née dans son diocèse après quoi il fait le ;
n'avaient aucune réalité, il prit le parti de
détail des églises qu'il avait lui-même ré- traiter des sujets plus solides, et de puiser
parées, ou construites; des reliques dont ce qu'il en dirait, dans des livres dont l'au-
il avait fait la translation; des oratoires qu'il torité ne pouvait être suspecte, c'est-à-dire
avait consacrés; des ouvrages qu'il avait dans les évangiles mêmes.
composés. Il met en piemier lieu les dix li- 2. Ce en cent sept chapitres,
livre est divisé cc q.:i ri

vres de son histoire, quoiqu'ils aient été écrits dont les trois premiers sont sur la naissance, ii%r.d"'.-."

les derniers. Il recommande ;\ ses succes- les nu racles, la passion,


*
la résurrection et as- I "i»t- \it-
d* s -e

seurs d'en avoir un grand soin, et de ne pas cension de Jésus-Christ. L'auteur rapportelà- r."Mi.ic,|j

permettre qu'on en retranche ou qu'on y dessus ce qu'on en lit dans l'Kcriture. Mais, ^^^'-'f '- "•

ajoute quelque chose. Suit la supputation à l'occasion de l'étoile qui apparut aux ma-
des temps, depuis la créaliou du monde jus- ges, il raconte sur une tradition peu fondée,

qu'à la vingt-et-unième année de son épis- que les pèlerins qui vont à Bethléem, voient
copat, qui comprend selon lui l'espace de dans un puits, qui est proche de la caverne,
5814 ans : ce qui montre qu'il suivait le cal- cette même étoile, lorsque la pureté de leur
cul des Grecs. Mais il n'est pas toujours cœur les en rend dignes. Il est le premier
d'accord avec lui-même sur la chronologie ,
des anciens qui ait dit que la sainte Vierge
T..m. op. soit qu'il ait suivi des calculs différents soit ,
fut après sa mort enlevée en corps et en
ytnA., pas. qu'il
* y
'^
ait fautc dans les manuscrits. Dans àme dans le ciel*. Pour ce qui est des autres ,,.
USA.
celui de M. Pilhou ,au heu de 5814, on ht 5707. circonstances de sa mort, il les avait tirées
de l'écril faussement attribué à Méliton de
Sardes, intitulé : Du Passage de la bienheureuse
Livre de la Gloire des Martyrs. Marie. Voici encore ce qu'on remarque dans y.

LiTTe dft U 1. Ce traité n'est pas, non plus que l'his- ce livre. Sainte Radégonde, ayant obtenu de
TiLiIra dol
Marljrra. toire des Français, placé dans la nouvelle ('di- l'empereur Justin du bois de la croix, le plaça
tion selon l'ordre chronologique; saint Gré- dévotement dans son monastère de Poitiers,
goire ne le composa (ju'après avoir liui le avec quantité de reliques des saints mar-
second livre des miracles de saint Martin tyrs et confesseurs, qu'elle flt venir d'O-
qui y' est cité deux fois, et que l'on a m'an- rient. Tous li's mercredis et vendi-edis, on
nu)ins mis à la suite du livre de la Gloire des adorait la croix. Celle dévolion attira un
Martyrs. Mais il parait que l'éditeur s'est at- grand concoui's de peuple à l'église de ce l

taché à l'ordre des matières, et qu'il a cru monastère, et il s'y fit plusieurs miracles.
plus convenable de pailcr dos miracles de Saint Grégoire en rapporte dont il |)rcud
,

Jésus -Christ, et de la gloire des martyrs, Dieu à témoin. 11 compte quatre clous (jui
avant de raconter les mci-veilles de ceux qui servirent à attacher le Sauveur sur la croix ;

' Greg. lil). De Gloria Martyr., [mg. "13 et 81fi. crnyame. Saint flréfîoirc n'est donc i>ns le piemier
' Le .Missel Kiillicnu et lo Xlis.-cl (jullinnic en u^nge qui en ail parlé. {L'édileitr.)
ou.\ vi"-' et Ml': siècles, expliquent clairement celte
,

[VI" SIÈCLE.] CHAPITIIE XLII. — SALNT GIIEGOIRE DE TOURS. 373

un A chaque main un à cIuuhk^ pied. Des


et ment il avait t'té garanti du feu : il répon-
ctp. Tr. en jeta un dans
(iiiatie L'Unis, saiiile IIiHi'iu; dit qu'une femme ([ui était assise, tenant un
la mer pour la rendre plus calme Constan- ; enfant entre ses bras, dans l'église où il
tin en prit deux |iour mettie dans le mors avait mangé du pain, l'avait couvert de son
de sou cheval; il lit attacher le (lualrième i\ manteau pour le préserver des llammes. On
son casque de guerre. La lance, le roseau, instruisit la mère de l'enfant dans la foi ca-
la couronne d'épines, et la colonne à laquelle tholique, et tous deux furiMil baptisés, avec
le Sauveur fut attaché lorsqu'on le flagella, plusieurs Juifs de la ville. Il parait que saint El»;., Mil.
IV , fip.
conimuniquaicnl de grandes vertus à tout ce Grégoire avait pris ce lait dans l'hi.stoire >.\xvl.

"'• où
qu'où en approchait, (hi montrait encore ecclésiastique d'I^vagre il est rapporté,
la lance à Jérusalem sur la fin du vii° siècle, mais plus au long et avec quelque dill'é-

ainsi que nous l'apprenons d'Adamnanus rencc. On peut y lemarquer deux choses
moine écossais qui écrivait alors. Quant
,
considérables : la première, que le pain que
à la tunique sans couture , saint (-Irégoire l'enfant dit avoir reçu dans l'église, est ap-

VIII. dit qu'on de sou temps dans


la conservait pelé par saint Griigoire ', le corps et le sang
une châsse de bois, dans la ville de Galatée, du Seigneur ; la seconde, que c'était l'usage

ù cent cinquante milles de Constantinople, dès lors -


de mettre dans l'église l'image de
en une église nommée des Suints-Arc/taiiges. la Vierge, et de la représenter tenant son
Elle fut apportée en France sous le règne fils entre ses bras. Il ajoute, que s'étant ren- Cap. VI.

de Charlemagne, et placée dans le monastère contré dans un voyage aufirès d'une mai-
d'Argenlcuil, où la sœur de ce prince et sa son qui était toute en llammes, il avait élevé'
I. fille étaient religieuses. C'était l'usage en contre le feu sa cioix pectorale où il y avait
Orient, que loisqu'il restait beaucoup de par- des reliques de la sainte Vierge et des apô-
licides du corps de Jésus -Christ après la tres, et qu'aussitôt le feu avait cessé d'agir.
communion, l'on envoyait chercher des en- La croix pectorale n'était point un ornement
fants innocents, de ceux qui fréquentaient particulier aux évèques; l'usage était com-
les petites écoles, pour les leur faire consu- mun d'en porter au cou, remplies de reli-
mer. Il arriva qu'un certain jour où l'on cé- ques des saints. Le saint parle d'une fiole
lébrait la messe dans une église de la Sainte- du sang de saint Jean-Baptiste, recueilli par
Vierge, on fit venir avec les autres un en- une dame Gauloise qui se trouva à Jérusa-
fant Juif, fils d'un vitrier. Il participa au lem lors de la décollation du précurseur de
corps et au sang de Jésus-Christ, s'en re- Jésus-Christ; elle la rapporta dans sa patrie,
tourna fort joyeux, et raconta à son père ce et la mit dans un autel qu'elle fit ériger à
qui s'était passé. Celui-ci, oubliant sa ten- Bazas avec une église à l'honneur de saint
dresse paternelle ,
jeta son enfant dans sa Jean. Il parle aussi d'un pouce et de quel-
fournaise, qu'il remplit de bois plus qu'à l'or- ques autres reliques du même saint des ;

dinaire, afin que en fût plus violent.


le feu guérisons miraculeuses de lépreux, lorsqu'ils
La mère, infoi-mée de l'événement, courut se lavaient dans l'endroit du Jourdain où le
pour délivrer son fils. Mais la tlamme, se ré- Sauveur avait été baptisé ; d'une statue de
pandant au dehors du fourneau, l'empêcha Jésus-Christ faite d'ambre jaune, dans la ville
d'en approcher. Alors jetant à terre sa coif- de Panéade d'une image du même Sauveur
;

parmi la ville les cheveux é[iars,


fure, elle alla qui, ayant été percée par un Juif avec un
déplorant son malheur. Les chrétiens acrou- dard, rendit du sang; d'une apparition faite
rurent au bruit, et étant venus à la fournaise, à un prêtre, dans laquelle il lui fut ordonné
ils trouvèrent l'enfant qui n'avait reçu aucun de couvrir un crucifix qui était entièrement
mal, et l'en tirèrent. Us y jetèrent l'auteur nu d'où l'on croit qu'est venue la coutume
:

du crime, qui y fut aussitôt consumé et ré- de peindre les crucifix avec un périsome, ou
duit en cendres. On demanda à l'enfant com- une robe qui descend jusqu'aux pieds.

' Ad participationem gloriosi corporis et sau- 3 Tune extractam e pectore crucem elevo con-
guinis Dominici, cum aliis infantibus infans ju- tra ignem : mox
in aspectu .'anctarum reliquia-
daus accessit. Greg. lib. ] DeGloria Martyr. ,cni). x. rum ita cunrius ignis obstupuit ac si non fuisset
* ilulier quœ in basilica illa tibi panent de accensus. Ibid., cap. u. Ilujus beatœ Virginis re-
mensa accepi, in cathedra residens, parvulum in liquiai cum sanctoruni apostolorum in cruce aii-

sinu geslal infanlem, hœc me paUio suo,ne ignis rea positas exhibcbam. Ibid.
voraret, operuU. Ibid.
374 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Dd marljre
Saint Grégoire rapporte après cela ce
de* ApA(r*>,
3. sacrificateursdans les entrailles des victimes
T,9,af,
|1S.
>zrii-xxsiii.
qu'il savait du martyre des apôtres saint Jac- laconnaissance de ce qui devait lui arriver.
ques, saint Pierre, saint Paul, saint Jean, L'un d'eux s'écria que la présence de quel-
saint André, saint Thomas et saint Barthé- ques profanes faisait fuir les dieux, et con-
lémi. Il dit que ordonna aux
saint Pierre jura l'Empereur de s'informer s'il n'y avait
clercs de porter la tonsure, en quoi il est pas là quelqu'un qui eût été baptisé et oint
suivi des écrivains du moyen âge que cet ; de baume. Alors un de ses officiers se pré-
aptjlre fut enterré dans le Vatican que son ; senta, et jetant ses armes à terre, professa
tombeau était orné de quatre-vingt-seize co- à haute voix qu'il était chrétien, et qu'il n'a-
lonnes d'une grande beauté; qu'il y en avait vait Cessé d'invoquer le nom de Jésus-Christ
quatre à l'autel; ce qui faisait cent en tout, pendant que les sacrificateurs immolaient
sans compter celles qui soutenaient un ci- aux faux dieux. Ce prince épouvanté se sau-
boire au-dessus de son tombeau, c'est-à- va du temple à son palais, sans être suivi de
dire un tabernacle en forme de tour qui le pei'sonne. Mais tous les assistants, pénétrés
couvrait que les linges et les vêtements
; d'une crainte salutaire, louèrent et glorifiè-
que l'on aJ)procIiait de ce tombeau en rece- rent Jésus-Christ Notra-Seigneur, en levant
vaient une vertu qui rendait la santé aux les yeux et les mains au ciel. Lactance ra-
malades que saint Paul souifrit le martyre
; conte à peu près la même chose dans son
le même jour que saint Pierre, mais seule- livre qui a pour titre De la mort des j^rsé-
:

ment un an après; que saint Jean, après culeurs.


avoir achevé sa carrière, entra tout vivant 5.Le poëte Prudence a aussi décrit le De S. Cal-
fleuelde<]ocl.
dans le tombeau qu'il se fit lui-même cou-
; martyre de saint Cassien, dont saint Gré- quea autres
martyr", fait.
vrir de terre ;
qu'il coule encore de son tom- goire ne dit que peu de chose. En général, Cap.XLiii.
beau une manne semblable à de la farine il s'applique plus dans cet ouvrage à recueil-

(on lit la même chose dans la seconde vie de lir les miracles qui se sont opérés aux tom-

VIUS. Vil- saint Villibald, écrite dans le huitième siè- beaux des martyrs dont il parle, ou par l'at-
libild, Dnm.Sf
3. partem£cuI> cle); que riiuile qui découle de celui de saint touchement de leurs reliques, qu'à donner
3 Beoedictia.
Andi-é à Patras, où il soufl'rit le martyre, a le précis de leurs actes. 11 mêle dans ce ré-
une odeur comme un composé d'aromates ; cit la dispute d'un catholique avec un arien
que dans le lieu où saint Thomas fut enterré sur le mystère de la Trinité. Apres beaucoup
d'abord, il y a une lampe qui ne s'éteint ja- de paroles et de raisonnements de part et
mais, sans qu'il soit besoin d'y mettre de d'autre, on convint de l'épreuve du feu. Elle
l'huile, ou quelque autre liqueur. réussit en faveur du catholique, et l'arien
De 4. Des aptjtres, saint Grégoire passe aux
E'iTn^
lalnt
et de
dcmcina confus, ayant la main brûlée jus-
quelqu"'
Ire»
aii-
ilarlrrs.
martyrs. 11 commence par saint Etienne, dont qu'aux os pour avoir voulu tenter ce que le
lis- '5*.
XXtIT, XSXT,
"P. il dit que conservait une fiole de sang
l'on catholique avriit fait sans en ressentir aucun
lUTlII.
dans de Bouiges; on l'y voit encore
l'église mal. Il y rapporte aussi la manière miracu-
aujourd'hui. 11 suit, dans ce qu'il dit du pape leuse dont un prêtre, nommé Épachius, fut
saint Clément, ct"" qu'on en lit dans les actes puni, poin- avoir osé célébrer les saints mys-
qui portent son nom, mais que l'on regarde tères après avoirdéjeûné. Il pronon(;a les pa-
comme supposés. 11 fait la même chose à roles de la consécration, il rompit le sacre-
l'égard de saint Chrysanthe. 11 convient qu'il ment du corps du Seigneur, le distribua aux
s'en est rapporté h la tradition des fidèles autres; mais ne put entamer avec ses dents
il

en ce qu'il raconte de saint Jean, évêque et la particule du saint mystère qu'il avait prise
martyr, parce qu'il n'avait pas les actes de pour lui , et fut contraint de la jeter. Ce
son martyre. L'anonyme donné par M. de traité est fait sans méthode. Le saint n'y
Vallois avec Ammicn Marcellin, est préféra- suit point l'ordre des temps. Il parle des
ble à tous les autres qui ont écrit sur ce su- martyrs selon qu'ils se présentaient à sa mé-
jet.Pour montrer quelle est la force et la moire, ou qu'ils étaient placés daas son ca-
vertu dela foi et du nom des chrétiens, saint lendrier.
Grégoire rapporte, d'après Prudence dans
§111.
son livrecontre les Juifs, intitulé ordinaire-
Livre II du martyre, des miracles et de la
ment Apothéose, ce qui arriva Dioclétien ;)

gloire de saint Julien.


dans le temps qu'il s'occupait à faire des sa-
crifices à ses dieux, et h chercher avec Ics 1. Ce livre est une suite du précédent;
. ,

[vr SIÈCLE.] CIIAriTIlE XLII. — SAINT GHI^XiOinE DE TOdHS. ,•«7.5

m«'i)r»jfS. aussi lo coinptc-l-oii second delà pour le


Jollotli ."A* rc-
'»• Gloire des Martijrs. Ilsaint Gré-paraît que §iv.
goire do Tours ne traita sé[iai('in(!nt do saint
Livre de la Gloire des Confesseurs.
Julien, martyr ;\ Brioude en Auvergne, qu'à
cause de la quantité des miracles opérés, ou 1 En suivant l'ordre des anciens manus- I.Wrt do II
r.lotra de»
à son tombeau, ou par son inlercession.il crits, il faudrait mettre ce livre lo deinier; Confe.seum.

avait, ce semble, mis à la tête de ce livre et saint Grégoire l'appelle lui-même' le hui-
les actes de son martyre, le tilrc en est une tième. Il paraît toutefois qu'il l'éci'ivit après'
preuve, puisqu'il porte De lu passion, des :
la Vie de saint Martin, et quelques chapi-
vertus et de la gloire de sairtt Julien. Il est tres' des Vies des Pères. Mais il peut ne l'a-

vrai que le premier chapitre contient en voir compté que pour huitième parce 1(î
,

abrégé l'histoire de la passion du saint, telle qu'il l'avait revu et corrigé le dernier de
qu'on la trouve dans les actes mais ce n'est ;
tous, à l'exception de son Histoire, qui est
qu'un précis; et dans deux anciens manus- constamment le dernier de ses ouvrages.
crits les actes sont rapportés en entier,
, On voit par le chapitre quatre-vingt-quin-
après les quatre premières lignes de ce cha- zième, cpii a pour titre De saint Médurd de :

p«t, i»6s. pitre. Dom Ruiu:!rt les a mis à la l\\\ des teu- Soissons, qu'alors Charimir, qui eu 388 succé-
vres de saint Grégoire. Vers l'an 302, il s'é- da à saint Airic dans l'évêché de Verdun,
leva une violente persécution contre les chré- était référendaire du roi Childebert II. Le
tiens de la part des païens. Saint Julien brû- livre de la Gloire des Confesseurs fut donc
lait de zèle pour répandre son sang en l'hon- écritavant cette année-là, plus de trois ans
neur de Jésus-Christ mais sachant que la ;
avant le dixième livre de l'Histoire, qui ne
persécution s'approchait de Vienne, lieu de Huit qu'en .^i'Jl à la mort de saint Yrieix, ab-
sa naissance, aux instances de saint Ferréol, bé en Limousin.
et suivant le précepte deTÉvangile, ilse sauva 2. Saint Grégoire avait commencé son li- Ce que con-
fleiil ce livre,
dans une autre ville où il demeura caché,
vre de la Gloire des Martyrs par celle de p^s*»'-

quelque temps. C'était à Brioude eu .\uver- Jésus-Christ; il commence celui de la Gloire


gne. La persécution l'y suivit, et il y soull'rit des Confesseurs par un chapitre où il traite
le martyre par le glaive. Son corps resta à de des anges. Puis il raconte les mi-
celle
Brioude mais ou envoya sa tête à Vienne,
;
racles opérés aux tombeaux ou par l'at- ,

qui fut placée dans la loême église où était touchement des reliques d'un grand nom-
le corps de saint Ferréol. bre de saints et de saintes, évêques abbés, ,

s. Juli.r
Les miracles qui s'opérèrent au tombeau
2. solitaires, prêtres, reclus, vierges, femmes ,

II, «i.ii:.
de saint Julien furent suivis de la conversion dont rapporte ordinairement quelques ac-
il

d'un grand nombre d'idolâtres. 11 y eut des tions de piété, avec les noms des lieux où ils
paralytiques guéris, des sourds qui recou- se sont sanctifiés, et ont travaillé à la sanctifi-
Cao; xu.
vrèrent l'ouïe , des aveugles à qui la vue cation des autres. 11 pouvait avoir eu aisé-
fut rendue. Pierre , fière de saint Grégoire , ment connaissance des merveilles qu'il rap-
fut délivréde la fièvre, en faisant mettre, porte ,
parce qu'elles s'étaient passées la
autour de son cou, de la poussière qui était plupart dans diverses provinces des Gaules,
proche du tombeau du saint. Saint Grégoire dans Touraine dans l'Auvergne dans le
la , ,

lui-même fut guéri d'un mal de tète que lui Berry, dans le Limousin dans le Périgord ,

avait causé un coup de soleil , en répandant dans l'Angoumois dans la Saintonge dans , ,

sur sa tète de l'eau de la fontaine où les le Poitou. Ce qu'il dit, dans le chapitre ving-
bourreaux avaient plongé le chef de saint tième, de la consécration d'un oratoire est Cap. vx,
XTxii.xxxtr'i Julien. Ces merveilles tirent naître à plu- remarquable. On passait la nuit dans le ''

siem's le désir d'avoir de ses reliques. On chant des psaumes le malin on consacrait ;

en transporta à Reims et même en Orient. l'autel on portait dans cet oratoire des re-
;

Saint Grégoire en apporta à Tours, et quoi- liques des martyrs au milieu des cierges ,

qu'elles ne consistassent que dans les fran- allumés les reliques étaient couvertes de
;

ges de la nappe qui couvrait le tombeau de nappes et de quelques autres ornements.


saint Julien, elles opérèi-ent divers miracles. Les prêtres et les lévites assistaient à la cé-

' Greg. Prœfat. in lib. De Glor. Conf. * Qua diligenter composila et altari ex more
' Ihid., pag. 910. — 3 Ibid., pag. 915, 926. localo, ad basilivain sanclam vigiliis noclem unam
,

376 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


rémonie vêtus d'aubes les plus honorables ; qui se faisait par degrés ', et à mesure qu'ils c .-. lv

de la ville et le peuple s'y trouvaient, et dans donnaient par des miracles des preuves de
la procession qui se faisait de l'église où l'on leur sainteté. C'en était une grande preuve,
avait pris les reliques à l'oratoire que l'on quand le tombeau s'élevait de lui-même
devait consacrer, on portait beaucoup de comme il arriva à celui de saint Droctovée,
cip. jji.. croix. Il dit , en parlant de l'abbé Maxime , premier abbé de Saint-Germain-des-Prés.
qui s'était retiré à l'Ile-Baibe pour y vivre Alors, on dressait un autel sur leur tom-
inconnu, que se voyant découvert, il prit le beau.
parti de retourner a son pays ', emportant 3. Deux personnes mariées, qui n'avaient i.xr.

avec lui le livre des Évangiles avec un ca- point d'enfants, laissèrent à l'Eglise leur
lice et une petite patène, le tout suspendu à succession. Le mari mourut le premier, et
son cou. C'est ce que saint Grégoire appelle fut enterré dans la basilique de la sainte
le ministère quotidien parce que Maxime
, Vierge. La femme y alla pendant 'un an en-
était prêtre, et qu'il avait besoin de tout cela tier faire de fréquentes prières, célébrant
pour la célébration des saints mystères. 11 tous les jours la messe (c'est le terme dont
ajoute qu^ comme il passait la Saône, le ba- se sert saint Grégoire pour dire qu'elle y as-
teau fut submergé mais que Dieu n'ayant
; sistait), et faisant offrir le sacrifice pour la
pas voulu laisser périr ce qui lui appar- mémoire de son mari, persuadée qu'il en
tenait, Maxime fut sauvé du naufrage avec recevait du soulagement à cliaque fois
,

N^ir. tout ce qu'il avait sur lui. Dans le trente- qu'elle offrait pour lui quelque chose au Sei-
unième cbapitre, il fait mention de l'usa- gneur. Elle fournissait aussi le vin pour les
ge où étaient ' les prêtres, même en voya- sacrifices qu'on offrait dans celte église ;

ge, de se lever la nuit pour vaquer à la mais quoiqu'elle assistât tous les jours à la
prière. Il raconte ' du prêtre Sévère, qu'a- messe, elle ne communiait pas chaque fois :

i. yant bâti deux églises et mis dans cha- ce qui donna lieu à un sous-diacre de rete-
cune des reliques des saints, il avait cou- nir le vin qu'elle donnait, et d'y suppléer par
tume tous les dimanclies de dire la messe du vinaigre. La femme, s'en étant aperçue
dans ces deux églises quoique assez éloi- ,
en un jour de communion, réprimanda le
gnées l'une de l'autre, et d'en orner les mu- *•""•
sous-diacre, qui se corrigea. 11 est remar-

railles de Heurs, daus le temps des lis. On que dans de saint Simplice, évêque
l'article
voit, parce qu'il rapporte un peu après, que d'Aulun, que voyant un jour les païens, qui
l'ancienne manière de canoniser les saints restaient encore dans son diocèse, conduire
était d'élever la terre de leurs tombeaux, ce parmi les campagnes l'idole de Bérécynthia,

ducentes mane vero venientes ad cellulam, ai-


; nisset, celebratis missis in «no loco, ad alium
tare quod erexeramus sanctificavimus. Rcriressi- pergebat. Erut ntitem inter ulrasque Ecclesiaf:
que ad basUicam, sanclas ejus iMartmi) relùjUias spatiuni qunsi millium viginti. Hoc ei opus erat
cum Satuniiiti JuliaiUque marlyruin vtl etiain pcr singulos dies Dominicos. lbi<I., cap. l.
beali lUiiiii exindc solemniler radianlibus cereis ' Qui cum mullorum annorum currxculoinhis,

crucibiis que admovimuK. Eral autem sactrdoium ubi sepulti suiit, loculis quiescerent, scissum nur
aclevilarttm ijtalbisvestibus non miiiimus chorus per pnvimenium qxiod cnlce atque comminula
el civium honnratorum ordo practarus ; sed et testa qua^i silice durissima fusum erat, uniiw
populi sequenlis ordinis nwgnus coiivenlus.Cnm- sepulchri cacunu n apparuit : quo paululum ele-
que sancla pignora, palliis ne mappis eiornaUt, valo, lellus scissa apicem ollerius palefecil, illo-
in excclsum defcrremus, perveniiiius ad oslium que emicante, seculus est tertius tumulus : qui
oratorii. Lib. De Gloria Confess., cap. xx. nunc, juxla inilium ostensionis suœ, gradatim éle-
Dum Ararim Iransire cuperet, nave implela,
'
vant ur super terrain; sed 7iunc jam prinius, liber
demcrgilitr, ac ipsc sacerdoa pelago operilur. lui- a mole tcrrenii, liberum se prwstal lisibus liuma-
bens ad collum cum Eviingelionim lihro ininiste- nis.Duo adhuc sequunlur ; sed aniiiis singulis
rium quotidianum, id est piilenulam parram cum proficiunt ad egresstiin. IMd., cnp. lu.
calice. Iliiil., cnp. xxii. ' Mulier vero per annum inlegrum ad hoc tem-

» Qua mansiorie accepta juxla morem


sacer- pluin drgcns assidue orationi racabat, célébrons
dotum, nocli' ab ulralu suo consurgens orationi quolidie mifsarum solcntnin el offcrens oblatio-
,

adalilil. Ihid., cap. xxxi. neni pro memoria viri : non diflisa de Domini mi-
Severus in rure donius Serciaccnsis, quod in
' quod haberel di'fu7iclus requiem : in die
sericordia,
ejus sessione subsislchal, Ecctesiam œdificauit ; qua Oomino oblationeni pro ejus anvnn itclibas-
exindc itcrum in alia rilla (Uiud irdificaitt tcm- sel,sciiiper scxlarium fViccli fini pru'hens in sa-
plum Dei, ulruutquc tiimen sanclorum reliquiis crï/iciitm basilica; sancla;. Ibid., cap. lxv.
communivil. Cum aulem dies Dominicus adve-
[Vl* SIÈCLE.] CHAPITRE XI.II. — SAINT GRÉGOIRE HE TOURS. 3-7

nionlde sur un chariot ,


pour la conserva-
tion de leurs champs et de leurs viçnes ,
§v.
chantant et dansant devant ce simulacre, il Des miracles de saint Martin.
pria Dieu de dissiper l'aveuglement de ce
peuple cl qu'aj-ant fait le signe de la croix
; 1. Les miracles que saint Martin avait faits
sur la statue, cette divinité fut renversée par do son vivant étaient d'un poids d'autant
,
ton clercé,

terre, sans que les bœufs qui menaient le plus grand pourall'ermir la foi des chrétiens,
chariot pussent se mouvoir de leur place : qu'il s'en faisait tous les jours de nouveaux à
ce qui occasionna la conversion de ces infi- son tombeau. On y voyait des boiteux guéris
dMcs. 11 leur était ordinaire de porter leurs et marcher avec
liberté, des aveugles recou-
faux dieux dans les campagnes pour les ren- vrer vue, des possédés délivrés de la tyran-
la
dre fertiles. A Reims, dans une peste qui nie du démon; toutes les maladies y trouvaient
désolait la ville, on porta en procession le leur guérison. y avait, dès avant saint Gré-
Il

suaire ou la nappe qui couvrait le corps de goire ,


un livrede la vie de saint Martin;
saint Remy, et la calamité cessa. Celte pro- Paulin et Sévère-Sulpice avaient aussi écrit
cp. ,,„,, cession fut accompagnée du chant des psau- sur ce sujet, l'un en vers et l'autre en prose :

mes ; les cierges '


que l'on portait allumés, mais ils n'avaient pas loat dit, et il s'était

étaient attachés à la croix. Saint Ursin, évô- passé beaucoup d'événements considérables,
.uii. que de Bourges, fut enterré dans un champ depuis qu'ils avaient fini leurs ouvrages.
de la ville ' avec le reste du peuple, les ha- Saint Grégoire, profitant de ce qu'ils avaient
bitants de cette ville ne sachant pas encore écrit, composa un recueil des miracles de
que les évêqiies en ces occasions méritaient saint Martin, qu'il a distribué en quatre li-

des attentions plus particulières que les vres.


simples fîdMes, qu'il était défendu d'enter- 2. Si ce n'est pas une faute de copistes, P:i!ii;ler
vre (les
li-
iiii'rt-

u.Tri,, rer ailleurs que dans les campagnes. Un il s'est trompé en attribuant h saint Paulin rles do
Martin,
?ainl
[a;;.

homme qui avait tué son frère, fut condam- de Xole en vers des vertus de saint
six livres
né par le prêtre pénitencier parcourir les t\ Martin. L'auteur avait appris une grande
lieux saints pendant sept ans, ceint de cer- partie de ce qu'il en rapporte, de saint Per-
cles de fer. Charlemagne défendit ces sortes pétue sixième évéque de Tours depuis
,

de pénitences; mais on ne laissa pas d'en saint Martin ce ne pouvait donc être saint
:

voir des exemples depuis. Paulin de Noie, contemporain de ce saint.


icTin. 4. Saint Grégoire raconte qu'il avait ap- Il y a plus, c'est que cet écrivain loue sou-

pris d'un abbé, qui l'en avait assuré même vent saint Paulin de Noie. Ces six livres sont vojei
huitièmeTolii-
i^

avec serment, qu'un solitaire faisait cuire attribues dans un manuscrit à Paulin de Pe- n,.. pag. 39oi

dans un chaudron de bois les légumes et rigueux. Samt uregou-e commence son pre-
tout ce qu'il préparait à manger, soit pour mier livre par le récit des merveilles qui ar-
lui, soit pour les étrangers qui le venaient rivèrent le jour de la mort de saint Martin,
voir, et que le feu ne l'endommageait point, qu'il met à la quatre-vingt-unième année de
quelque ardent qu'il fût. En parlant des ob- son âge, sous le consulat de Césaire et d'At- cnp m.

sèques de sainte Radégonde, il nous apprend tiens, au milieu de la nuit d'un dimanche. Elle
que l'usage' était de faire bénir les cime- fut révélée presqu'à l'instant à saint Se vérin, "
tières avant d'y enterrer personne
, et , évéque de Cologne, et à saint Ambroise,
d'y mettre un autel où l'on ofi'rait le sacri- évêque de Milan. La translation de ses reli-
fice pour les morts mais que ces bénédic-
,
ques par saint Perpétue, l'un de ses succès- v .

tions étaient réservées à l'évêque diocésain. sem-s, fut aussi accompagnée de prodiges.

' Accensisque super cruces cereis alque cerofe- sacerdotali benedictione sacratus. Tune cives, et
ralibus, dant voces in canticis, circumeunt ur- reliqui viri honorati qui ad exsequias beatœ re-
bem cum vicis. Ibid., cap. lxxix. ginœ convenerant, imperant parvitati me œ die en-
' Oui migrans a sœculo.incampo interreliqua tes : Prœsume de charitate fratris tui, et benedic
sepulchra populorum sepulturœ locatus est. !\on altare illud. Confidimus enim de ejus benevolen-
enim adkuc populus iUe inteliigebat sacerdotes tia quod molestum non ferai si feceris, sed inagis
Domiiti venerari, eisquevenerenliam debitam ex- gratiam referai. Prœsume, precamur, ut caro
hibere. Ibid., cap. lxxx. sanctœ sepulturœ reddatur.Et sic ab Mis injiinc-
' Quid faciemus, si episcopus urhis non adve- tus, altare in cellula ipsa [sacravi. Ibid., cap.
nerit ? Quia locus ille quo sepeliri débet, non est cvi.
378 HISTOmE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Saint Grégoire n'en rapporte qu'une partie, de la fête de saint Jean, pendant que tout ci?-^'<<-

parce que personne ne s'était donné la peine le peuple assistait à la messe, une servante
de les mettre par écrit mais il entre dans
; alla dans un champ de son maître, qui était
le détail des miracles qu'il avait vus lui- bourgeois de la ville de Tours. Dieu la pu-
même, ou qu'il avait appris de personnes nit sur le moment de cette prévarication,
dignes de foi. Il marque le nom, l'âge, la par un feu qui lui dévorait tout le corps et
Car.'iitiKii. qualité des muets, desaveugles etdesautres la chargeait de pustules. La honte et la dou-
iuOrmes guéris au tombeau du saint, ou par leur l'engagèrent à recourir à l'intercession
la vertu de ses reliques. Le roi de Galice, de saint Martin elle passa quatre mois pros-
;

XI. dont le fils était en danger de mort, envoya ternée à son tombeau, et en fut guérie. Saint
par ses amis autant d'or et d'argent que son Grégoire, ressentant à la tempe gauche un '

fils pesait; mais cette oflVande fut sans effet, mal si violent, que l'abon-
qu'il craignait
parce que ce prince était arien. Il embras- dance de ses larmes ne de lui fit sortir l'oeil
sa la foi de la consubstanlialité, bâtit une la tète, alla faire sa prière dans l'église de
église en l'honneur de saint Martin, et envoya Saint-Martin puis ayant appliqué le voile,
;

de nouveaux députés avec de plus grands qui pendait devant le sépulcre du saint, sm-
présents. Ils remportèrent en Galice des re- l'endroit de la douleur, elle se dissipa à l'ins-

liques du saint, c'est-à-dire une partie d'un tant. Trois jours après, la tempe droite fut
manteau de soie qu'ils avaient mis pendant attaquée de même : le saint employa le même
quelque temps sur son tombeau. L'enfant remède, qui opéra aussitôt. Au bout de dix
fut guéri, et les peuples se convertirent. La jours il se fit ouvrir la veine, croyant que son
x'i. reine Ultrogothe, pour être témoin des guc- mal était venu d'une trop irrande abondance
risons miraculeuses qui se faisaient à Tours, de sang, et qu'il se ser litdissipé dans le temps,
après avoir passé une partie de la nuit et du s'il eût pris celte précaution. C'était, comme
jour en prières et répandu beaucoup de lar- il remarque, une pensée qui lui avait été
le
mes, fit son offrande et célébrer des messes suggérée parle démon. La saignée occasionna
en l'honneur de saint Martin. Dans le mo- le renouvellement de la douleur aux mêmes
ment même qu'on les disait, trois aveugles, endroits. Il courut h la basilique du saint, de-
qui depuis longtemps priaient aux pieds du manda pardon de la mauvaise pensée qu'il
saint évêque, recouvrèrent la -NTie. En 563, avait eue fit toucher à ses tempes le voile
,

Cty- TXXIi, saint Grégoire, plusieurs années avant qu'il qui couvrait le tombeau de saint Martin, et
fut évêque de Tours, y fit un voyage pour s'en retoui-na chez lui en pleine santé.
obtenir au tombeau du saint la guérison Le vrai moyen d'obtenir des grâces par
4. ^^^^^<:
'

d'une fièvre, qui ne lui laissait plus envisa- la médiation de ce saint, était de prier avec '"p'„L
ger que la mort. Ceux qui le conduisaient, ferveur, de s'humilier de ses fautes, de les
voulurent souvent le faire retourner sur ses pleurer, d'en demander pardon, d'en gémir
pas. Il persévéra, vint à Tours et fut guéri. du fond du cmur; alors la joie succédait aux
Src nd V.» 3. Attaqué en 573 de la dyssentcrie, il en larmes et à la tristesse, la guérison ii la ma-
1lt,faf.\ttH,
Cap. I, fut délivré par une potion où il avait fait ladie, lepardon la faute. C'est ce que dit
i\

entrer de la poussière du tombeau du même saint Grégoire, pour l'avoir vu en d'autres, et


saint. Il ne recourut toutefois à ce remède, expérimenté en lui-même. Parmi le grand
qu'après avoir éprouvé en vain tous ceux de nombre de miracles qu'il rapporte, nous nous
la médecine. Justin, son beau- frère, fut arrêtons volontiers à ceux qui se sont opérés
guéri de la fièvre en buvant un verre d'eau sur lui-même l'incrédulité ne peut raisonna-
;

où l'on avait délayé quelques particules blement refuser de se rendre à de pareils té-
d'un cierge qui avait été allumé sur le. tom- moignages. Comme il était h table, un jour
beau de saint Martin, et que saint Grégoire déjeune, à l'heure ordinaire de le rompre,
y avait pris et envoyé au malade. Gonti-an on servit un poisson le saint le bénit parle ;
c.|.,i.

Boson évita un naufrage, en recourant lui signe delacroix.il arrivaen mangeant qu'une
ou les siens, à la protection de saint Martin. arête s'attacha à son gosier; elle était longue
Un enfant mort, faute de nouriiture, ressus- et aigiie, ce qui, outre la douleur, lui ùta la
cita aussitôt qu'on eut fait toucher ses vête- facilité de parler, et empêchait la salive do
ments au tomhcHU du saint. Il vécut long- passer. Tous les cll'orts que lit l'évêque pen-
temps depuis, et il vivait encore lorsque dant trois jours, soit en toussant, soit en cra-
saint Grégoire racontait ce miracle. Le jour chant, no purent lui faire rejeter cette arête.
.

[Vf SIÈCLE.] CHAPITRE XT,n. — SAINT GRIÎGOlllE DE TOURS. ."17!)

Il eut recours h son romi'do ordinaire. Il se ces quatre livres. 11 est plus vraisemblable
rendit au lonil)cau de saint Martin, et, pros- qu'elles ont été tirées du Traité des OIHces
terné sur le iiavt', il pria le avec lar-
saint de l'Eglise, qui n'est pas venu jns(ju'à nous.
mes, lit toucher le voile, qui couvrait le tom-
beau, à sa gorge et ;\ toute sa tête; dans le §VI.
moment il se trouve débarrassé de l'aréle,
,

sans s'apercevoir ilc quelle façon elle était 1 Il parait par le prologue que saint Gré- ^,., ^\.}',\''
sortie. Il raconte sur le rapport de Florcn- goire a mis à la tête des Vies des PÀres, qu'il hs-oh.
Cap. VIII. lius, l'un des envoyés du roi d'Espagne au ne travailla à cet ouvrage, qu'après avoir
roi Chilpéric, qu'un enfant, qui était fils uni- achevé tous ceux où il s'était proposé de re-
que, avait été ressuscité devant un autel où cueillir les merveilles opérées aux tombeaux
il y avait des reliques de saint Martin sur ; des martyrs et des confesseurs. 11 en cite
le rapport de sa propre mère, qu'ayant été néanmoins quelques endroits dans le livre
attaquée d'un mal violent à la jambe, dans intitulé De la Gloire des Confesseurs ; et dans
:

le temps au monde, elle en fut


qu'elle le mil sa préface sur ce traité, où il fait le Catalo-
guérie trente-quatre ans après an tombeau gue de ceux qu'il avait déjà composés il met ;

du saint, quelque temps après l'ordination en septième lieu le livre De la Vie des Pères,
de son fds d'où il est naturel de conclure
: et en luiitième, celui De la Gloire des Confes-
que saint Grégoire était âgé de trente-quatre seurs. Au contraire, dans le dixième livre de
ans, lorsqu'il fut élu évoque de Tours. Dans son histoire, il place le traité De la Gloire des

un voyage qu'il fit à Cavaillon, il guérit de Confesseurs avant les Vies des Pires. On ne
la ûèvre l'évèque de Clermont, en lui faisant peut guère lever cette contrariété, qu'eu di-
bou-e de la poussière du tombeau de saint sant qu'il avait déjà recueilli quelques vies
Martin, après l'avoir délayée dans de l'eau. des Pères, lorsqu'il composa le livre De la
Il s'en servit pour la guérison de plusieurs Gloire des Confesseurs, mais qu'il n'acheva la
autres malades qu'il trouva en son chemin. Vies des Pères, et ne la mit dans l'ordre où
QnalHèma En 389, Pallade, évêquede Saintes, lui
5. nous l'avons aujourd'hui, qu'après avoir fini
ïlTTt, p«?.
1115.
Cap. Tiii.
demanda des reliques de saint Martin, pour son écrit De la Gloire des Confesseurs.
les mettre dans l'église qu'il venait de faire 2. Ces Vies sont renfermées dans vingt ,|„^J 3^°, "J;
construire à l'honneur de ce saint dans sa chapitres, mais il y a des chapitres qui con- ^; Lo°i"uin.°'

ville épiscopale. Saint Grégoire eu donna, et tiennnent les vies de plusieurs saints. C'est
au bout de trois mois il reçut une lettre de là qu'ont puisé ceux qui, dans les derniers
Pallade, où il l'assurait qu'il s'était fait dans siècles, ont fait des collections des vies des
cette église un grand nombre de miracles ;
saints, comme Lippoman, Surins, Bollan-
que trois paralytiques y avaient recouvré dns quelques autres, ne trouvant point
et
l'usage de leurs membres, deux aveugles la d'écrivains plus anciens que saint Grégoire,
'•
vue, et douze fiévreux la santé. Dans le temps ou qui leur parussent plus dignes de foi. Les '-''''•

que Platon, l'un des disciples de saint Gré- premiers saints dont il parle, sont saint Lu-
goire, était évéque de Poitiers, le feu prit à picin et saint Romain ; ils étaient frères.
une maison voisine de celle de l'église, et Celui-ci fonda le monastère de Condat dans
les flammes se répandaient déjà sur celle-ci, le mont Jura, celui de Lauconne, et un troi-
lorsque Platon élevant contre le feu une sième que l'on nomma depuis Romain-Mou-
boite où il y avait de la poussière du tom- tier, dans le canton de Berne. Les deux frè-

beau de saint Martin, arrêta tout à coup res gouvernaient ensemble ces monastères.
l'ipapéluosité de cet élément, etfit cesser l'in- Comme ils manquaient souvent du néces-
cendie. saire, saint Lupicin alla trouver Chilpéric,
Ora)i«D en 6. Ces quatre livres des miracles de saint roi de Bourgogne, qui faisait sa demeure à
l'koDDCur de
MIbI Martin, Martin sont suivis, dans la nouvelle édition, Genève, pourlui demanderde quoi faire sub-
pag. lOtO.
d'une prose et d'une oraison en l'honneur de sister ses moines. Ce prince lui oÛ'rit des
ce saint évêque. La prose contient un précis terres et des vignes. Le saint les refusa, ne
de sa vie l'oraison a pour but d'obtenir de
; croyant pas qu'il convînt à des moines de
Dieu par son intercession, et par la considé- posséder des biens temporels, qui ne pou-
ration de ses miracles, la guérison des ma- vaient que leur donner des pensées d'or-
ladies de l'âme. On n'a aucune preuve que gueil. Chilpéric leur donna donc des lettres,
l'une et l'autre aient jamais fait partie de en vertu desquelles ils recevaient chaque
380 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
année cent boisseaux de blë, trois cents me- plus recommandable. Faisant dansnne grande
sures de vin, et cent sous d'or pour leurs vê- sécheresse les processions des rogations pen-
tements. Saint Romain fut enterré à quel- dant les trois jours qui précèdent r.\scension
que distance d'un monastère de filles appelé du Sauveur, au troisième jour le peuple, qui
laBaume, et saint Lunicin dans l'église du avait confiance en ses prières, lui demanda
même monastère. 11 se lit à leurs tombeaux de leur prescrire une antienne à chanter.
plusieurs miracles. L'évêque se prosterna, au milieu de la place
s. lllld'.nf,
3. Saint lllidius avait été élevé et instruit publique, pria longtemps avec larmes, et se
L^p. M.
dans sciences ecclésiastiques par saint
les levant de terre, il ordonna pour anticune les
Avit, évêque de Clermont, à qui il succéda paroles que Salomon adressa {l Dieu dans Il p«'«iip.
Ti, le.i'.
dans l'épiscopat. La réputation de sa sainteté une semblable calamité. L'humble prière de
le fit appeler à Trêves par le tyran Maxime, saint Quintien se fit entendre du Tout-Puis-
dont la fille était possédée du démon. Il la sant, et à l'instant il tomba une pluie abon-
délivra. Maxime, pour reconnaître ce bienfait, dante qui arrosa tout le pays.
lui oûrit beaucoup d'or et d'argent. Le saint 5. Ce que saint Grégoire dit de plus re-
Mp. s.
l'en remercia mais il supplia ce prince d'é-
; marquable de saint Portien, est qu'étant es-
changer en or un tiibut que la ville d'Auver- clave d'un barbare, il se réfugiait souvent
gne payait en vin et en blé ce qui lui fut ac- : dans un monastère pour éviter par la mé-
,

cordé, à cause de la rareté de ces deux es- diation de l'abbé les mauvais traitements
pèces dans l'Auvergne. Il fut enterré dans de son maître qu'ayant été mis en liberté,
;

une église qu'il avait fait bâtir, et qui porte il fut reçu dans ce monastère, puis admis
encore le nom de sain'. lllidius, ou Allirc. dans le clergé et ensuite fait abbé
,
qu'en ;

Saint Grégoire rapporte Uelui divers miracles 523 le roi Théodoric qui faisait alors la
, ,

dont il avait été témoin. Il raconte de saint guerre en Auvergne, accorda à saint Por-
Abraham, qu'ayant à donner à manger A tien, en considération de ses vertus et de

l'évêque de Clermont et à une grande com- ses miracles la liberté de plusieurs captifs.
,

pagnie le jour de la fête de saint Cirique, un 6. du nombre des captifs ;


Saint Gai fut
moine de sa communauté lui représenta qu'il mais on n'obtint pas sa liberté, parce que
n'y avait pas assez de vin dans le monastère le roi voulut qu'il le suivit dans ses voyages.

pour tant de monde le saint se mit en


: D était do Clermont. Voyant que ses parents
prières; le vin se multiplia de façon que tous pensaient à le marier, parce qu'ils n'avaient
Sldon. lik en eurent abondamment. Nous avons l'épi- point d'autres enfants il alla au monastère
,

taplic de ce saint par saint Sidoine Appolli- dcCournon, à six milles de la ville, prier l'ab-
naire, qui lui altrilnie plusieurs miracles. bé de lui couper les cheveux. L'abbé le re-
s. Qnlnlicn, 4. Dans le temps que les Goths occupaient fusa, jusqu'à ce qu'il eût le consentement
r3;i. 17.

de Rhodez, saint Quintien, qui en était


la ville de ses parents. L'exprès envoyé à cet ell'et
évêque, fut soupçonné de vouloir la livrer ayant rapporté que son père y consentait,
aux Français. Les Goths, pour s'en venger, l'abbé lui donna la tonsure '
cléricale ,
qui
résolurent de le tuer mais il prévint l'exé-
; était autrefois la même
pour les moines que
culion de leur mauvais dessein par la fuite. pour les clercs. Les abbés' donnaient com-
Enplirasius, évoque de Clermont, chez (jui il munéiiuMit la tonsure cléricale et l'on don- ,

se relira avec les plus fidèles de ses servi- nait souvent aux moines le nom de clercs.
teurs, le reçut avec beaucoup d'humanité, Saint Quintien ayant un jour oui Gai chanter,
lui donna des terres, des vignes et des mai- le mit dans son clergé. Ses belles qualités
sons. Trois mois après, Euphrasius étant le firent connaître de Théodoric qui le me- ,

mort, le roiTliéodoric, sachant que saint Quin- na avec lui Cologne. Saint Gai, indigné des
;'i

tien avait été chassé de son église à cause superstitions païennes qui se faisaient dans
de lui, le fitordonner évêque de Clermont. Il un temple de cette ville y mit le feu et se , ,

était savant, mais sa vertu le rendait encore sauva. Les païens voulurent le tuer mais le ;

' Tune ahbns isia nuntii.i referenlibns discrns, conferrc consucvissc, eaiidemque olim fuisse mo-
puerum clericiim fecil. Grc^or. De Yitis Pat., rnp. nachorum ac clericonim lonsuram, monachos
VI. (lenique sœpiiis clericorum nomine fuisse desi-
' Ex hoc aliisque jmssim Gregorii locis infert gnalos. Not. iu liuiic locuiu, pag. 1169.
Thomassinus abbales olim tonsuram ckricalem
Vl' SIÈCLE.] CHAPITRE \I.I1. — SAINT GllEGOlllE DE TOURS. 3«i

roi les apaisa. Après mort de saint Qu'ri-


l;i choses dont il avait ét(': témnin. 11 en rap-
tien, saint Gai évôinu' de Clerniont.
fut clinisi porte d'autres, tirées de la vie du saint,
On comparait sa iloiicciir dans le y:ouvcriie- qu'KIliérins, évêque de Lyon, avait fait écrire
menl ù celle de Moïse. Il soutirait sans se par un clerc de son église. On la trouve
plaindre les injures les plus atroces. Voyant dans le Paxlhius illustratiis du père Chidlct,
la province d'Arles ravagée par la peste , il et dans Bollandus au second jour d'avril.

en préserva son ilioci'^se, en onlnmiant de Saint .Nizier présida au concile tenu à Lyon
longues processions au milieu du Carèmo. Il en 5G0.
«. Palrocle,
fut pleuré à sa mort non-seulement par les
, 9. Dans les chapitres suivants, saint Gré- ttlHt cap. IX.

CdMes des deux sexes, mais aussi par les goire do Tours donne la vie de saint Patro-
juifs qui assistèrent à ses funérailles avec
,
cle, à qui il attribue la fondation de deux
des llambeaux allumés. monastères : l'un de filles, à Néris; l'autre
s. C.rttfU 7. Vers l'an 539, saint Grépnire se ren- d'hommes, appelé Colombiers, dans l'archi-
rp, fvti;uo il«

dait recommandahle par sa piété et ses au- de Montlucon de saint Friard re-
p; être ; ,
s. Fri.rd r.c-

Tr.
tres vertus. Il était de race de sénateurs, et dus, fiai passait tout le lour à chanter les i<">' >''™>

avait été quarante ans comte d'.\utun ren- , louanges de Dieu h prier et jï travailler des
, , ^'e- '•

dant une exacte justice à chacun et pu- , mains, pour avoir de quoi fournir aux besoins
nissant les malfaiteurs avec tant de sévérité, de la vie ; —
de saint Caluppan, aussi reclus : x,.

que peu échappaient de ses mains. Après la il fut souvent attaqué par les démons, qui

mort de sa femme nommée Armentaire il


, , lui apparaissaient sous la figure de serpents,

fut choisi évêque de Langres. On marque mais il les mettait eu fuite parle signe de la
parmi ses mortifications , que tandis qu'il croix, ou en prononçant l'Oraison domini-
faisait serviraux autres du pain de froment, cale; —
de saint Émilien, ermite, et de l'abbé ,,,.

il en mangeait d'orge, et qu'il ne buvait que Biachion. Le premier, ayant quitté ses pa-
de l'eau, en même temps qu'on servait du vin rents et tous ses biens se retira dans la fo- ,

aux convives, prenant toutefois des précau- rêt de Pontgibaud en Auvergne, où il vécut
tions pour empécliei' qu'on ne s'aperçut de seul avec les bêtes sauvages recevant tou- ,

celte distinction. Son fils Tétricus, qui fut sou tes ses consolations de Dieu, tiavaillant con-
successeur, voyant le grand nombre de mira- tinuellement de ses mains ou vaquant à la ,

cles qui s'opéraient à son tombeuu trans- , prière. Il mourut à l'âge de quatre-vingt-dix
féra son corps au milieu de l'abside de l'é- ans laissant tout ce qu'il possédait à Bra-
,

glisede Saint-Jean, qu'il fit bùtir. Saint Gré- chion. Celui-ci, ayant obtenu de Rachinilde,
goire assista en 517 au concile d'Épaône et fille de Sigivaldus qu'il avait servi étant
,

au premier de Lyon en 535 au premier de


, jeune, un grand terrain y bâtit un monas- ,

Clermont, en 538 au troisième d'Orléans,


et tère. Il en sortit pour aller à Tours, où il en
par le prêtre Evantius, son député. bâtit deux autres. Il était doux dans ses pa-

s. Nitifr, 8. L'évéché de Genève étant vacant, ou roles, et caressant, mais si sévère contre les
éH<}u«
jeta les yeux sur un homme de condition,
Cil

IJB, «1. transgresseurs de la règle ,


qu'il semblait
nommé Florent, pour le remplir. Il en dit la quelquefois être cruel.
nouvelle à sa femme Artémie
posa, disant qu'elle portait
,
qui s'y op-
dans son sein un
10. Les premiers
...
saint Lupicin pratiqua
.
exercices de piété que
»
tarent de demander
,
Vil s.
s upitin,
Marlus, s.
scu«ii, cap.

évêque. Elle mit au monde un fils, à qui l'on l'aumône dans les maisons des gens de bien, iv-'

donna dans le baptême le nom de Nizicr. Il et de la distribuer ensuite aux pauvres. De-
fut de bonne heure instruit dans les sciences puis il s'enferma dans une cellule, où il ne
ecclésiastiques, admis dans le clergé, et fait vivait que de pain et d'eau, qu'on lui appor-
prêtre à l'âge de trente ans. A l'étude il joi- tait par charité. Il passait le jour et la nuit à

gnait le travail des mains. Sacerdos, évêque chanter des psaumes. Pendant qu'il en chan-
de Lyon, étant mort à Paris Nizier son ne-
, tait de jour, il portait sur sa tête une pierre

veu fut élu pour lui succéder, de l'agrément si grosse, que deux hommes auraient eu de

du roi Childebert et du peuple de la ville. Il la peine à la les'er. La nuit il s'appliquait


était extrêmement chaste, aimait les églises, des pointes sous le menton, afin de s'empê-
faisait beaucoup d'aumônes, et vivait comme cher de dormir. Ces mortifications lui occa-
vivent les vrais serviteurs de Dieu. Saint sionnèrent sur la fin de ses jours un crache-
Grégoire de Tours, qui avait été sous sa dis- ment de sang. Les malades accouraient à sa
cipline étant jeune , raconte de lui plusieurs cellule, et il les guérissait , soit en les tou-
382 HISTOmE GltXltRALE DES AUTEURS ECCLÉSTASTIQUES.
chant, soit en faisant sur eux le sipme de la Grégoire joint dans un même chapitre deux "
l^^"*"'
abbés, Ursus Léobat. Ursus, ayant '""•'
croix. 11 prédit sa mort trois jours avant et b.'iti

qu'elle arrivât; pendant cetintervalle il ouvrit un monastère dans le diocèse de Tours en .

sa porte tous ceux qui le vinrent voir, et leur


.1
un lieu nommé Sénevière, en donna le soin .'i

donna le liaiser de cbarité, en se congratulant Léobat, et en bâtit un autre A Loches, où


d'être au moment de se voir délivré des em- avec ses religieux il travaillait des mains
op. iir. pêcbemenls du siècle. Saint Martius fut aussi pour subsister. Dieu lui accorda le don de
célèbre par ses vertus que par ses miracles ;
guérir les malades et de chasser les démons
sobre dans le manger, il faisait de grandes de son vivant et après sa mort.
aumônes veillait et priait souvent rejetant
,
, 12. accorda la même grâce à sainte Mo-
11 ^s*'»'» *>-

les mauvaises pensées aussitôt qu'elles nais- négonde, recluse à Tours. Elle avait eu de *'«•

saient. Il s'était creusé une cellule dans le son mariage deux filles qu'elle aimait ten-
roc, où il prenait son repos après le travail drement. Dieu, voulant se l'attacher, lui ôta
des mains ; là il recevait de temps en temps ces deux objets de ses complaisances, ce qui
les aumônes de quelques personnes de piété- la jeta dans l'accablement. Elle s'en releva,

n y assembla forma dans la


des moines, qu'il dans la crainte que Dieu ne lui fit un crime
perfection, et leur bàlit un monastère avec de son affliction excessive; mais résolue de
&,r IV. un oratoire, où il fut enterré. Saint Sénoch quitter le monde pour toujours , elle s'en-

en avait réparé un auprès de Tours, où l'on ferma dans une cellule, où une jeune ser-
disait que saint Martin avait fait ses prières. vante venait lui apporter à manger ; c'était

Il invita saint Euphrune, alors évèque de de la farine d'orge, dont elle pétrissait elle-
cette ville, à en venir faire la bénédiction. même son pain avec de l'eau passée au tra-
Le saint, après en avoir consacré l'autel, vers de la cendre. Elle vécut longtemps de
ordonna Sénoch diacre. Il servit Dieu en ce la sorte, priant sans cesse pour ses péchés
lieu pendant quelque temps avec trois moi- et pour ceux du peuple, jusqu'à ce que se
nes, vivant dans une grande austérité. En voyant abandonnée de la fille qui la servait,
Carême il augmentait son abstinence ne , et ne pouvant plus résister aux importunilés

pienant par jour qu'une livre de pain et une que lui causait sa réputation elle quitta la ,

livre d'eau encore son pain n'était-il que


:
ville de Chartres, lieu de sa naissance, pour

d'orge. Il allait nu-pieds , même l'hiver , et se retirer dans une autre cellule auprès de
portai! une chaîne de fer aux pieds , aux Tours. Elle y fit comme dans sa première
,

mains et au cou. Depuis il se retira seul dans demeure, toute son occupation de la prière
une cellule, où les fidèles lui apportaient et de la contemplation des choses divines,

souvent de l'argent, qu'il distribuait aussitôt veillant et jeûnant sans cesse. Son mari, in-

aux pau\Tes. Lorsque saint Grégoire fut ar- formé des merveilles que Dieu opérait par
rivé à Tours saint Sénoch vint le voir et
,
; son ministère, la vint voir , et la ramena à n

après l'avoir salué il retourna dans sa cel- ,


Chartres, où il de conli-
lui laissa la liberté j

lule. Il mourut âgé de quarante ans. Comme nuer ses exercices de piété mais après quel-
:

on célébrait la messe sur son tombeau le que séjour en cette ville, il ne put lui refuser
trentième jour, un mendiant qui avait les la faculté de retourner dans sa cellule à Tours,

membres retirés, fut guéri en baisant le drap à cause de la grande dévotion qu'elle avait

mortuaire, envers saint Martin. 11 se forma auprès d'elle


s ven.»s
n.Saint Venant avait été marié fort jeu- une communauté de filles, qui cherchaient à
ne; mais étant venu Tours, les mu-acles .'i
profiter de ses exemples et de ses instruc-
qui se faisaient au tombeau de saint Martin, tions. Sa nourriture élait, comme on l'a dit,
lui firent prendre la résolution de servir
du pain d'orge et de l'eau les jours de fêtes,
;

Dieu dans le célibat. Il embrassa donc la vie elle buvait un peu de vin mêlé d'eau. Son
lit consistait dans une simple natte, qu'elle
monastique où il fit tant de progrès que
, ,

l'abbé qui donné la tonsure et l'ha-


lui avait étendait sur la terre ou sur des ais.

bit monastique étant mort il fut mis à sa


, ,
Le dernier des Pères dont saint Grégoire s. uou.j,

place. Saint Grégoire rapporte de lui plu- donne la vie, est saint Léobard, natif d'Auver-
sieurs miracles, disant qu'il en avait ouï ra- gne. Pressé par ses parents, il s'engagea dans
conter un plus grand nombre. Nous ne ré- le mariage, quoiqu'il ne fiit pas seul d'en-
s. Hiciuu», néterons point ce que nous avons dit ailleurs fants; mais après leur mort, il quitta le mon-
T.*..i, «p. Je saint .Nicétnts, evêque de Trêves, samt de, et alla se renfermer dans une cellule pro_
[Vl' SIÈCLE.] CHAPITRE XLII. — SAINT GUÉGOIUE DE TOURS. ;J83

cln; do Mannoulier, pour être ii poi'tëe du feclion des btunics ceuvres; que ceux dont
toinliciiii (le sailli Marliii. Le seul mélier le litie Pour ceux ([ui seront elumijvs,
est :

des moines de Mariuoudei' était, comme le doivent s'inliMpréter du changement de la


témoigne Sévère-Sulpice, de faire du par- synagogue en l'Église de Jésus-Christ. Le
chemiu. Salut Léohaid s'en occu[)a, joi- dernier des deux fragments donnés par dom
gnant à ce travail la lecture des divines Ecri- Mabillon, paraît être la conclusion do tout h;

tures, surtout des psaumes de David, (pi'il conuuciilaire ; c'est une exhortation à la pia-

avait appris par cœur étant jeune, mais qu'il tique de la vertu et à la fuite des vices. Il fi-

avait oubliés. Un des moines qui demeuiaient nit par la doxologie.


Do» miraclei
avec lui ayant eu une difliculté avec les voi- 2. L(; livre des Miracles de l'apfMre saint dftS. Acdr6,

sins, il vint eu pensée à saint Léobard de André porte, dans un manuscrit de l'abbaye
changer de demeure. Comme il s'en ouvrit ;\ de Sainl-Germain-des-Prés à Paris, le nom
saint Grégoire qui était venu le voir, le saint de saint Grégoire de Tours. Le prologue et
évoque le détourna de ce dessein, qu'il lui lit l'i'iiilogue sont assez de son génie et de son

envisager comme une tentation. Il était d'une stylo; et ce qui semble décisif, c'est que
- qu'il était né le jour
conversation fort douce, priait assidimient l'auteur dit de la fcte
pour les rois et les peuples, et pour tous les de cet apôtre, c'est-à-dire le 30 novembre,
ecclésiastiques craignant Dieu. Il ne laissait qui est le jour de la naissance de saint Gré-
croître ni sa barbe ni ses cheveux, pour ne goire. Il est vrai qu'il ne compte point ce li-
point donner dans l'afl'ectation de quelques- vie parmi ses ouvrages; mais, outre qu'il a
uns à cet égard. Ses jeûnes ses veilles, ses , pu le composer après son Histoire, où il fait
travaux l'ayant épuisé, il pria saint Grégoire le catalogue de ses écrits, il pouvait aussi ne

de Tours de lui apporter les eulogies c'est- , pas regarder le livre des miracles de saint
à-dire du pain bénit, ou des restes de ce qui André comme son propre ouvrage, puisque
avait été ofifert sur l'autel il en mangea et
;
ce n'est qu'une compilation de la Vie de cet
but un verre de vin, après quoi il prédit le apôtre imprimée sous le nom d'un certain
jour de sa mort. Abdias, qui se disait évoque de Babylone.
D'un gros recueil de miracles saint Grégoire
§ VIU. en fit un petit, où il n'a rapporté que les faits
Des Commentaires sur les Psaumes, des mira- miraculeux qui lui ont paru devoir trouver
cles de saint André, des Actes de saint Ju-
croyance auprès des lecteurs, et en être lus
lien, et de l'histoire des sept Dormants.
avec quelque satisfaction. Ce livre est divisé
en trente-huit chapitres, y compris la pré-
Dans l'éuumération que saint Grégoire
i. face et la conclusion, qui sont tout ce que
faitde ses ouvrages ', il met un livre de Com- l'on peut attribuer à saint Grégoire dans cet
mentaires sur les Psaumes. Il ne nous en ouvrage '.
reste que trois fragments l'un donné par : 3. Il n'y a rien de lui non plus, que la pré- LÎTro du
nisiljre de S.
Thomasius sur un manuscrit du Vatican, où face, dans le livre du Martyre de saint Ju- Julien, Tjag.
1366.
ce Père explique dans un sens figuré les di- lien encore n'est-on pas assuré que les ac-
;

vers titres que portent les Psaumes; les deux tes qu'on nous en a donnés dans la dernière
autres ont été trouvés par dom Mabillon dans édition, soient ceux dont saint Grégoire s'est
un ancien recueil de passages sur les vices servi, et dont il a tiré ce qu'il dit de ce mar-
et les vertus. On conserve ce recueil dans la tyr dans le livre de ses miracles.
bibliothèque de Saint-Martiu de Tours. Saint 4. En parlant de saint Jean l'Évangéliste I.'HisL.li-o
dei s <pi Doi-
Grégoire dit en général, que tous les psau- et de Marie Magdeleine, enterrés à Éphèse,
mes où il est parlé de la fuite de David, et il dit * que l'on y voit aussi le lieu de la sé-

des persécutions qu'il souffrit de la part de pulture des sept Dormants, et promet de dire
ses ennemis sont des figures de la passion
, quelque chose de leur martyre. Il en fait un
de Jésus-Christ que les psaumes qui sont
; chapitre ^ exprès, où il raconte qu'ayant été
intitulés : Pour la fin, s'entendent de la per- menés en présence de l'empereur Dèce, ce

' In Psalterii tractatim librum unum com- garde cet ouvrage comme douteux, sans donner de
mentalm sum. Lib. \ Hist.. pag. 537. raisons de sou doute. (L'édileur.)
' In illiiis natali processi ex matris utero. Cap. ' Lib. De Gloria Martyr., cap. xxx, pag. 734.

xsxvni, pag. 1264. 5 Ibiil., cap. xcv, pag. 826.


' l'"esseler, InstU. Pair., tom. II, pag. 906, re-
384 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
princp, qui avait excité une cruelle persécu- gue à la vie de saint Mauriile, évêque d'An-
tion contre l'Église, essaya en diÛërentes gers, que celui qui écrivit cette vie, se char-
manières de les faire renoncer à Jésus-Chrisl ; gea aussi d'écrire celle de saint Aubin, évê-
les trouvant fermes, il leur donna du temps que de la même ville. Or, il est dit dans un
pour prendre leur parti pendant son absence. manuscrit do l'abbaye de Percy en Bourgo-
Ils se retirèrent dans une caverne, d'oîi l'un gne, d'environ huit cents ans, que la vie de
d'eux sortait tour h tour pour aller clierclicr saint Aubin fut écrite par saint Grégoire, évê-
de quoi vivre. Au retour de l'Empereur, ils que de Tours; il est donc naturel de lui at-
demandèrent ù Dieu de les délivrer des tribuer encore celle de saint Mauriile. Mais
mains de ce persécuteur. Us furent exaucés, il n'y a pas de doute que la note du manus-

et s'endormirent tous sept dans le Seigneur. crit de Percy ne soit fautive, et que l'auteur
Dèce, l'ayant appris, fit murer l'entrée de la de ces vies n'ait vécu longtemps après saint
caverne, afin qu'ils mourussent de faim ; mais Grégoire, quoiqu'il en prenne le nom. Il dit
un chrétien, voulant conserver leurs noms à dans sa lettre, qui est adressée à saint Ger-
la postérité, les grava sur une lame de plomb, main, évêque de Paris, que ce prélat exi-
qu'il jeta.'dans lacaverrc avant qu'on l'eût geait de lui qu'il rétablît dans leur pureté
fermée. Saint Grégoire avait tiré ces cir- les Vies de saint Mauriile et de saint Aubin,
constances de leurs actes, qu'il mit lui-même écrites par Fortunat, et qui se trouvaient al-
en latin à l'aide d'un interprète syrien. Il pa- térées par la négligence et la malhabileté
raît que venue jus-
cette traduction n'est pas des copistes. Comment saint Grégoire de
qu'à nous, et que les sept Dormants dont on Tours, qui était contemporain de Fortunat,
montre les reliques à Marmoutier, sont dif- pouvait-il parler ainsi? Rajoute que, Fortu-
férents de ceux qui reposaient à Éplièse du nat ayant raconté dans ces vies plusieurs
temps de siinl Grégoire; du moins ;]eurs faits qui pourraient paraître incroyables aux
noms sont enlièremenl dillerents, et leurs infidèles, il les supprima. Etait-ce là le ca-
actes ne s'accordent point. Ceux que ce saint ractère de saint Grégoire? N'eu a-t-il pas ra-
avait traduits en lalin, mettaient leur mort conté lui-même un grand nombre dont les
I2TI.
fidèles mêmes ne font poiut difficulté de dou-
l'ag.
sous Dèce ceux que nous avons, la mettent
;

sous Dioclétien et Maximien. A la tête de ter? On croit donc avec vraisemblance que
ceux-ci, on lit une lettre de saint Grégoire à l'auteur de ces deux Vies est celui que Rai-
Sulpice, archevêque de Bourges, mais elle non, évêque d'Angers, chargea de les corri-
n'est point du style de ce père. Photius' avait ger vers le commencement du dixième siè-
lu les actes du martyre des sept Dormants: cle, et que, pour donner plus de poids à son

il les nomme Maximilien, Jamblique, Mar- travail, il a emprunté le nom de saint Gré-
time, Denys, Exacustidien, Antonin et Jean, goire de Tours.
et met leur martyre sous Dèce. Leurs noms, 2. Surius nous a donné une antienne qui,
dans saintGrégoirc de Tours, sont Maximien, dans son manuscrit, porte le nom de saint etd«u(D[ <•

Malch, Maitinien, Constantin, Denys, Jean et Grégoire. Elle est à l'honneur de saint Mé-
Sérapion. Il s'accorde dans le reste avec dard, et de saint Gildard son frère, tous deux
Photius. Ils racontent l'un et l'autre que éïêques. C'est si peu de chose, qu'on aurait
sous le règne de Théodose le Jeune les sept pu se dispenserde l'attribuer à saint Grégoire.
Dormants ressuscitèrent, Dieu ayant renvoyé Celui-ci parle souvent de saint Méùard, de sa
dans leurs corps l'esprit de vie et que ce ;
mort, de ses reliques, de ses miracles. licite
ce miracle arriva pour confondre l'erreur même un livi'e ' des merveilles de ce saint
des sadducéens, qui se renouvelait dans le évêque mais il ne dit point qu'il ait écrit
;

pays. Saint Gri'goire est le premier des Ld- quelque chose de lui.
Vl.d.
lius qui ait parlé de cet événement. 3. Nous avons deux Vies de saint Yrieix, Y.UI<,
li-3.
abbé en Limousin, données toutes deux au
§ VIII. public par dom Mabillou l'une sur un ma-
:

Des Vies de saint Mauriile, de saint Yrier ou nuscrit de l'abbaye de Gall, dans le quatrième
Yrieix, et de quelques autres écrits attri- tome de ses Aîialectes; l'autre dans le pre-
bués à saint Grégoire de Tours. mier volume des actes de l'ordre de saint
u vif «cS. 1. On voit par la lettre qui sert de prolo- Benoît. Celle-ci est d'un style plus simple et

« l'buliiis, Cod. 27;i, png. 1399. • Greg., lib. De Gloria Conf., cap. xcv.
rVI* SIÈCLE.] CHAPITRE XLII. — SAINT GllKGOiaR DE TOUIIS. :i85

plus naturel que la première, et moins char- pression, et qu'au lieu de Nicolas il faut lire
gée de miracles elle eu finit le narre à ce-
; Nicet, dont, en eflet, saint Grégoire a donné
lui qui se lit aux obsèques du saint. (1 sem- la vie. A des Gestes ou [""aits mémo-
l'iîgard
ble donc qu'on ne peut la regarder comme rables des Fran(jais et de Dagobcrt, on con-
un abrégé do l'autre, qui est beaucoup plus vient que l'auteur est un moine de saint De-
longue, et qu'elle doit plutôt passer pour nis, qui écrivait après saint Grégoire.
originale. La plus longue est attribuée à saint
Grégoire dans le manuscrit de saint Gai, et § IX.
c'est pour cela qu'on l'a imprimée A la suite De quelques ouvrages de saint Grégoire qui son/
des œuvres de ce Père mais il est hors ;
pei'dus.
d'apparence que saint Grégoire, ayant donné
la vie de saint Yrieix dans le dixième livre 1. Vi\\\.rfi\(is Commentaires sur les psaumes. Trjiis do*

de son Histoire, l'ait donnée encore eu par- nous avons perdu le traité des Offices de

ticulier. D'ailleurs, on ne voit nulle part que l'Église, que saint Grégoire met* lui-même
ce saint évêque ait été sur la fin de ses jours au nombre de ses ouvrages dans le dixième
visiter le tombeau de saint Yrieix. Ce saint livre de son histoire. Il avait encore mis"
était mort en 591, saint Grégoire mourut en une préface à la tète d'un traité des Messes,
595 or, l'auteur de cette vie avait vu de
:
'
composé par saint Sidoine Apollinaire. Nous
ses yeux les monuments des njiracles opérés n'avons ni la préface, ni le traité. La perte do
par saint Yrieix depuis sa mort, c'est-à-dire sa traduction des actes du martyre des sept
im grand nombre de chaînes de toutes fa- Dormants est moins considérable puisqu'il ,

çons, que ceux qui avaient été délivrés de nous en a donné l'extrait dans son livre ' de
la captivité par son intercession, avaient ap- la Gloire des martyrs. On cite un manuscrit

portées à son tombeau. de la Bibliothèque de Vienne qui contient ,

*• Saint Grégoire, en parlant des actes que l'histoirede Glovis et de ses enfants, par saint
erttt *°lîri-
™jto»s.ert.
piiateenvoya à Tibère pour lui rendre Grégoire de Tours; mais ce n'est apparem-
compte de ce qui s'était passé à la Passion ment qu'une compilation de ce que ce Père
et depuis, dit* qu'on les voyait encore de a dit de ces princes dans son Histoire géné-
son temps. Ils étaient très-communs daus le rale des Français.
second siècle ; ceux que nous avons sont
supposés. Le catalogue des manuscrits du ARTICLE m.
roi d'Angleterre marque ' de semblables ac- DOCTRINE DE SAINT GRÉGOIRE DE TODRS.
tes sous le nom
de saint Grégoire, distri-
bués en quatorze livres, et tirés tant des 1.Quelques soins queles apôtres desGaules gj°^;'^
^'^

Évangiles que des écrits des Pères. On ne se fussent donnés pour détruire entièrement
I sait ce que c'est que cet ouvrage. Saint Gré- les superstitions païennes avec le culte des

goire, dans sa préface sur le livre de la idoles, elles se maintini'ent encore longtemps.
Gloire des martyrs, promet de parler des mi- La plus commune était celle de mettre en
racles de Jésus -Christ; il le fait en peu de usage certaines pratiques pour connaître
mots et en trois petits chapitres. S'il eût fait l'avenir.On n'avait plus recours au vol des
un ouvrage tel que l'annonce ce catalogue, oiseaux, ni i l'examen des entrailles des
aurait-il oublié d'en parler dans l'énuméra- victimes la religion chrétienne et les lois
;

tion de ses écrits, ou ne l'aurait-il composé des Empereurs ne souffraient rien de sem-
que sur la fin de sa vie ? Peut-être a-t-on at- blable. On imagina une espèce de divina-
tribué à ce saint évêque les Actes de Piiate, tion d'autant moins odieuse, qu'on la cou-
qu'il dit que l'on voyait de son temps l'er- ; vrait du prétexte de religion. C'était d'ou-
reur serait grossière. Nous ne dirons rien vrir quelque livre de l'Écriture, et de tirer
de la vie de saint Nicolas, dont Messieurs de du premier verset de la page qui se présen-
Sainte-Marthe font auteur saint Grégoire de tait une assurance de ce qui devait arriver.

Tours. Il est visible que c'est une faute d'im- Mais cette façon même de chercher dans

' Pag. 1308.— ' Greg. lib. I Eist., cap. xxui. ' De cursihus eliam ecclesiasticis unum librum
' De Jesu, Christi gestis libri XIY, ex Evange- condidi. Greg. lib. X Hist., cap. xxxi.

liorum et sanclorum Patrum libris excepti. Bib. 5 Ibid., lib. Il, cap. sxn.
Reg. Àngl., pag. 122. '^
De Gloria Martyr., lib. I, cap. xcv.

XI. 23
386 HISTOIRE GftNKRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
l'avenir n'était pas inconnue aux païens on ; saint Paul et les Évangiles, en convenant
ne qu'en changer d'objet. Spuilicn ra-
fit que chacun lirait à la m»sse l'enilroit sur le-

conte qae l'empereur Adrien angmait quel- quel il serait tombé à ron\crture du livre.

quefois de l'avonir par le premier vers qu'il Le livre des Prophètes fut le premier que
rencontrait à l'ouverture des poésies de Vir- l'on ouvrit; les premières paroles qui se pré-
'"''
gile. Nous avons rapporté les canons des sentèrent étaient celles-ci : Parce que ma vi-

conciles d'Agde en 506, du premier d'Or- Qne, au lieu de porter de bons raisins, n'en a
léans en 511, de celui d'Auxerre en 585, où produit que de mauvais, j'en arracherai la haie,
cette espèce de divination est défendue. exposée au pillage, .\yant ensuite
et elle sera

On l'appelait le sort des saints. Saint Gré- ouvert les Épiires de saint Paul on lut , :

goire en a mis dans son histoire plusieui's ]'ous savez bien vous-tnémcs que le Jour du Sei- „'<;,^!
'"
exemples, sans s'expliquer sur ces soi-tes de gneur doit ven ir comme un voleur de nuit ; car,
pratiques, ni témoigner qu'elles eussent été lorsqu'ils diront : i\ous voici en paix et en li-

défendues dans quelques couciies. Le pre- berté, ils se trouveront surpris tout d'un coup.

mier qu'il rapporte est du roi Glovis. Ce ' On vint après cela au livre des Évangiles, tpii

prince, ayant passé la Loire vers l'an 500, portait Quiconque n'écoufe point mes paroles,
:

envoya des présents au tombeau de saint sera semblable à un homme insensé qui a bâti
Martin, avec ordi-e à ceux qui les portaient sa 7naison sur le sable, /m pluie est tombée, les „"':'

de prendre garde aux paroles de l'Écriture fleuves se sont débordés, les vents oyit soufflé, et
que l'on chanterait à l'ottice, lorsqu'ils entre- sont venus fondre sur cette maison, et elle a été
raient dans l'église. Rien de plus heureux renversée, et la ruine a été grande. On augura
que ce qu'ils entendirent : le chœur, quand mal du de Chramne. Ce prince, après
sort
ils entrèrent, chantait à haute voix ce verset avoir obtenu miséricorde de son père, se ré-
du Psaume xvii' : Vous m'avez donné des for- volta une seconde fois contre lui, lui livra

ces poui- combattre, et vous avez mis sous incs une bataille , la perdit , et contraint de se
pieds ceux qui s'élèvent contre moi. Vous m'a- sauver dans une chaumière, il y fut brûlé
viez fait voir le dos de mes ennemis, et vous avez vif avec sa femme et ses deux filles par ,

exterminé ceux qui me haïssaient. Aussitôt ordre' de Clotaire. Nous avons parlé plus
ils se mirent à genoux pour rendre grâces à haut de ce que fit Chilpéric pour connaître
Dieu d'un si bon augure, et après avoir fait si Gonlran-Boson n'avait point tué son fils

leurs otl'randes au tombeau du saint, ils s'en Théodebert. Nous ajouterons ici que Méro-
retournèrent, pleins de joie et d'espérance, vée, voulant connaître s'il parviendrait au
rendre compte au roi de ce qu'ils avaient trône ', mit trois livres sur le tombeau de
entendu. Clovis présenta la bataille à Alaric, saint Martin le Psautier les Rois et les
, ,

le tua et mit son armée en déroute. En 536, Evangiles, et que, veillant toute la nuit, il

Charibert et Gontian', fils du roi Clotaire, pria le saint apprendre ce qui lui de-
de lui

étant allés en Auvergne pour contenir dans vait arriver qu'au bout de trois jours qu'il
;

le devoir Chramne leur fière, le menacè- passa de suite en jeunes, en veilles et en


rent, en cas qu'il refusât de se soumettre, prières, il s'approtha du tombeau et ouvrit
de lui livrer bataille, disant qu'ils en avaient le livre des Rois, dont le premier vei-set de

ordre de leur père. Chramne, usant de stra- la page qu'il trouva portait Parce que vous :

IX. 9. qu,
tagème, les contraignit de prendre en grande avez quitté le Seigneur votre Dieu fiour suivre eoian.

hâte le chemin de Bourgogne, les y suivit, les dieux étrangers, il vous a livré aux mains
assiégea et prit Châlon, et s'approcha de Di- de vos ennemis. L'endroit du livre des Psau-
jon. Le jour qu'il arriva devant celle ville mes fut : La prospérité oli vous lis avez éta-
était un dimanche. L'évèquedu lieu, iKiminé blis leur est devenue un piège : Vous les rtccî

Tétricus, et les autres ecclésiastiques, cu- renversés dans le tcmfis qu'ils s'élevaient, t'itm-
rieux de savoir ce qui arriverait à ce prince niint sont-ils tomlfi'S dans la dernière désola-

rebelle, qu'ils ne traitaient point cependant tion ? Ils oui manqué tout d'un coup ; ils ojit

en ennemi, mirent de coniert trois livres jx'ri à cause de leur iniquité. Il trouva dans
sur l'autel, les Prophéties , les llpitres de l'Évangile : Vous savez que la Pàque se fait

' Grp«. lili. Il //iVi/., cap. xxwn. « fiiip. Tnriii). lili. IV, cap. .XX.

* Tiruf.'. lili. I\ , laii. XVI. ' M. lib. Y, cap. Iiv.


[VI' SIKCLE.J ClIAl'ITllE XTJI. — SAINT (lIlKdOIHE DE TOURS. 387
dans deux jours, et que le Fils de l'homme sera Vierge. Ce n'est pas non [lius le Père qui a
lirré ]wnr être crucipc. Mi5iovëe, ne voj'ant sotill'ert, ni leSainl-Espril, mais le Fils, afin
rien f|iio do fimoslo dans ces réponses, se que celui qui avait pris chair dans W. monde,
mil à pleurer. Sa mort suivit de près, ayant fût de mènu' olVert pour le monde. Au reste,
eus Iralii et assassiné par les liabilanis de quand on emploie le nom de personne pour
Térouanne qui lui avaient otlert une re-
, marquer la Trinité, ce n'est pas dans un sens
traite dans leur pays, et les clefs de leur corporel, mais s[)iritucl. d
ville. Ces sortes de diviiialions, après avoir 3. Nous ne connaissons aucun écrivain A«*fimjilinn
^•^ b taiolu
été en usai;e pendant plusieurs siècles mal- ecclésiastique avant saint Grégoire de Tours, VI.TS.1 ; .e,

pré la défense des conciles , furent entîn


.,,.., K
qui ait dit en termes " aussi formels que lui,
• i> 1 1 . Imigei, celles
o« a-'"-
de 4
abolies '
par le tmisième capitulaire de Cliar- que la sainte Vierge ressuscita aussitôt après Atsires.

lema^^ne, en 78'.). sa mort, et qu'elle fut enlevée en corps et


Dwiiii* .la Dans le symbole crue saint Grégoire a
2.
•'
en âme dans le ciel, pour y jouir à jamais
J>.u.-C;l,r,.l. . : -1 .
mis au commencement de son .T-
, •

«.vvio,. .1,1 Histoire il , de la félicité avec les justes. Ce sentiment


pjro « du confesse (rue Jésus-Christ' est le Verbe du prévalut tellement dans les églises d(^ France
nduvtru. Père, par qui toutes choses ont ete faites; au siècle suivant, que l'on fil mémoire de
que procède du Père et du
le Saint-Esprit cette assomption dans l'ollicc de la messe,
Fils, auxquels il est consubstantiel en na- ainsi qu'on le voit dans le troisième livre de
ture, égal en toule-puissance coéteruel en , la Liturgie Gallicane. Dès le vi" siècle, on

essence; que la sainte Trinité subsiste dans exposait ° son image dans les églises, où
la distinction des personnes, celle du Père elle était représentée assise tenant un en- ,

étant autre que celle du Fils, et celle du Fils fant entre ses bras, c'est-à-dire son fils. C'é-
autre que celle du Saint-Esprit; mais que tait aussi l'usage d'y mettre l'image '
de Jé-
ces trois personnes ont une même divinité ,
sus-Christ peinte sur des tables , el de l'at-
une même puissance, une même essence ;
tacher dans les maisons particulières. Il ar-
que la bienbeureuse Marie est demeurée riva qu'un juif, qui en avait vu une dans
toujours viercfe après son enfantement ' com- une église, la détacha et l'emporta dans sa
me auparavant que l'âme est immortelle, ; maison dans le dessein de la brûler. Avant
sans qu'elle soit une partie de la divinité; d'en venir à l'exécution , perça d'un
il la
entln tous les articles de foi qu'ont confessés dard aussitôt le sang '
; coula de l'endroit
lesPères de Nicée. « Ce n'est point, dit-il, le avec tant d'abondance que les habits du
,

Père * qui s'est fait cbair, ni le Saint-Esprit, juif en furent couverts. Craignant que son
mais le Fils afin que celui qui était Fils de
, crime ne fût connu il cacha l'image. Mais
,

Dieu devint, pour la rédemptiou du genre les chrétiens, suivant les traces du sang ré-
humain, fils de l'homme et naissant d'une pandu, allèrent dans sa maison, et l'ayant

' Vt nullits in Psalterio, vel in Evangelio, vel tus, sed Filius ut qui carnem adsumpserat in
:

in aliis rébus sortirr prcrsnmat, nec dioinatioves mundo, ipse ojferretur pro nnmdo. De personis
aliquas observare. Capil. 3, cnp. iv. non corporaliter, sed spiritaliter sentiendum est.
' Credo Cliristum /iuHc Verbum esse Patris, per Id. lib. V, cap. XLV.
quem fada sunt oinnia... Credo Spiritum Sanc- » Diiuculo levaverunt apostoU cum lectulo cor-
tum a Pâtre et Filio œqualem et processisse... pus posueruntque illud tu monumento, et
ejus.
semper cum Pâtre et Filio coœternum Deum, custodiebant, ipsum adventum Domu iprœstolan-
consubstantialein nalura, œqualem omnipotentia, tes. Et ecce adstitit eis Dominus, su-'eptumque
consempiterniim essenlia. Credo hanc Trinitatem corpus sanctum in nube deferri jussil in naradi-
sanctam in distinctione subsistcre personarum, et suni, ubi nunc resumpta anima, cum eleclis ejus
aliam quidem personam Patris, aliam Filii, aliam exultans, œlernilatis bonis nullo occasuris pne
Spiriltis sancti in qua Trinitate unam deitatem,
; perfruilur. Id. lib. I De Gloria Martyr., cap. iv el
unam potentium imam
essentiam esse confiteor.
, IX.
Greg. lib. 1 Hist. in Prologo. ' Mulier quœ in ba.'^ilica illa, uhipaneni demen-

' Credo beatam Mariam, ul virginem anle


par- sa accepi, in cathedra residcns, parculum in sinu
tum ita virginem et post partum. Credo ani-
, gestat infantem, hœc me paliio suo, ne ignis vo-
mam immortalem, nec tamen partent habere di- raret, operuil. Ibid., cap. s.
vinitatis : el omnia qxiœ a trecentis decem et octo ' Ut ejus iChristi) imaginem ad commemoratio-

episcopis Mceœ
consiitula sunt, credo fideliter. neni virttitisin tabulis visiiilibus pictam per ec-
* lion'Pater adsumpsit carnem, neque Spiritus clesias et domos adfigunt. Ibid., cap. xsii.
Sanctus, sed Filitis; ut qui crat Dei Filius ipse . " De lulnere ubi imago Iransfossa fuerat, san-

ad redemplionem hominis lilius huberelur et guis cl]lu.vil. Ibid.


Virginis. Kon Paler passus, neque Spiritus Sanc-
388 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
trouvée dans un coin de sa chambre, ils la ger les réfugiés à demeurer toujours dang
rapportèrent à l'église. Saint Jean Daiuascè- où plusieurs choses nécessaires à la
l'église,

ne, dans son troisième discours sur les ima- vie, commede dormir et de manger, n'eus-
ges, raconte qu'un Sariasin ayant percé d'une sent pu se faire avec bienséance. Ils avaient
Théodoie martyr à
flèche la statue de saint permission de faire venir des vivres dans leur
Damas, sang sortit de la plaie. On conser-
le asile, et c'aurait été violer l'immunité ecclé-
vait encore dans les églises les images ' des siastique en empêcher. On don-
que de les
apoires, et afin que les fidèles ne s'y trom- nait à l'église principale le nom de cathé-
passent point on mettait au bas de chaque
, drale', d'ancienne, de mère, de grande. Il
tableau le nom de l'apôtre qu'il représen- y avait des églises desservies' par un seul
tait. On en usait de même à l'égard des clerc. Si on y répandait '" le sang humain,
images des autres saints. Les églises étaient elle était interdite ; il appartenait A l'évoque
en dedans soutenues de colonnes ornées de de connaître du délit, et de punir ceux qui
maibre ' et de diverses peintures à la mo- l'avaient comznis en le privant de la com-
,

saïque. ,• munion de l'Église. Saint Grégoire nous a


Egh-Pf
leur» dédira*
; 4. Quand on en bâtissait de nouvelles, conservé les dimensions, ou plutôt le plan
Ce», leurs or>
iipiiii^nu, le
l'évèque les consacrait'; il en consacrait entier de celle que saint Perpétue, son pré-
re^ptct qu'oQ
leur nadait.
aussi l'autel, y mettait des reliques des saints, décesseur, fit bâtir sur le tombeau de saint
célébrait la messe et finissait la cérémonie
, Martin elle avait " cent soixante pieds de
;

par la prière. On fêtait * annuellement le longueur sur soixante de large, et quarante-


jour de leur dédicace, celui de la translation cinq pieds depuis le pavé jusqu'A la voùle.
de quelques reliques considérables et le , Le presbytère était percé de trente-deux fe-
jour de l'ordination des grands évéques. Les nêtres, et la nef de vingt; ce qui faisait en
murailles des églises étaient ornées de ta- tout cinquante-deux. La nef et le presbytère
pisseries', et leurs portes de voiles. C'était ° étaient ornés de cent vingt colonnes. Il y
un usage paimi les gens de piété de baiser avait huit portes, trois dans le presbytère,
les portes des églises avant d'y entrer, et cinq dans la nef.
beaucoup plus ancien que
cet usage était 5. Lorsqu'on apportait des reliques à quel-
saint Grégoire de Tours. Elles avaient le que église, on allait '- au-devant avec des
droit d'asile', surtout celle de Saint-Martin cierges allumés et des croix pour leur faire
à Tours ce droit s'étendait jusqu'aux parvis
; honneur. L'évèque les faisait mettre d'abord"
des églises, aux maisons des évêques, et à sur l'autel , ou sur l'au-
puis il L's plaçait,
tous les lieux renfermés dans leurs encein- ou dans la cavité" de l'autel, ou dans
tel ",

tes : extension nécessaire pour ne pas obli- quelque lieu élevé à l'opposite du presby-

* Videns autem scppius in oratorio Htteran su- '" Sauciantur mnlti gladiis, respergilur sancto

per iconicas apnslolorum reliquorum<iue saiicto- httniano cruore basilica, oslia jacitlis fodiuntur
rum esse conscriptus, excinpluvit eoi in codice. et cnsihus, algue ad ipsuni sepulclirum ttla ini-
Greg. Yil. Pat., tap. .xii. qua desœviunl. Quod dum vii niitignlur, locus
Agrœcula Cabillonensis episcopus Ecclesiam
' oflicium perdidit, dnnec ista oninia ad Régis tio-
fiibricavit, quant columnis fuleivii, variavit mar- tiliam peri-enirent ; hi rero ad ]iriTsenliani prin-
innre, musivo depitixil. (!reg. lib. Y, cap. xlv. cipis properantes, non recipiuntur in graliam :
* Ad beuedicendiim Ecclesiam acccssi, sacravi sed ad episcopum loci itlius remitti eos jussum
altare, decerpsi fila de linleo sancli Mcelii, locavi est, ut si de hoc facinore culpahiles invtniren-
in templo ; dictis missis, facta oratione, discessi. tur, non convenienter sociarentur cemmunioni
Id. Yit. Pal., cap. vni, num. 7. Lib. V Hi.tt., cap. ixxill.
* Lib. Il Ilisl., cap. xiv, cl lib. vi, cap. xi. " Lib. Il Hi.<<l.. cap. xiv.
* Lib. De Gloria Confess., cap. lv, et lib. 1 De " Episcopus comnionel populum cvm accensis
Uirac. S. Martini, cap. lui. cereis ad porlam tisque procedere... dehinc su-
« Id. lil). IV De Mirac. S. Marlini, cap. \]\;Cl\ry- btatas reliquias usque ad snnctam ecclesiam cum
nostoui. Uom. 30 in 2 ad Corinlh.; Prudentius in
; magïw honore) drportnl.] De miraculis S. Julia-
hymno de S. Laurenlio ; Patilin. in nataliC', de ni, cap XXXIII. Mane autem facto, sacerdos, ad-
.S. Felice. Foituiiat. lib. IV, De Vila S. Martini.— monitis riiibus, cum crucibus et cereis ad ocrur-
' (Jrep. lib. I.\ Hiil., cap. m et i.xxvni ; lib. De Gloria sum sanclarum reliquiarum dcrnlissimus pmpe-
Confess., laji. lxvii ; lil.. IV Hisl., cap. u, m cl iv. rat. Lib. I De Gloria Martyr., cap. xuv.
» Lib. V Ilisl., cap. iv : lib. Il De Mirar.. S. " Lib. IX, cap. vi, et lib. De Mirac. S. Juliani,
Martin., rnp. xxv, not. 4; lib. Il Ilisl., cap. xvi j
cap. XXXIV.
lib. III De Mirac. Martini, c;i[<. xiv.
S. '* Lib. Il De Gloria Martyr., cap. xx»iv.
* Lib. I De Gloria Martyr., cap. lxiv. " Vit. Pat., cap. 15, num. I.
, .

[Vl« SIÈCLE.] CHAPITIIK XLll. — SAINT GRÉGOIRE DE TOUIIS. 380


tèrc '. Mais ces reliques ne se voyaient point attacher les mains, et deux pour attacher les
à. nu; elles (!liii(Mit orilinairemont renfer- pieds. On employait le signe de la croix dans
ini^cs dans des cliilsses ', surtout i[uand c'é- le sacrement de la confirmation, que l'on con-
tait des ossements car ou appelait reliques
; férait encore alors avec le bai)tème car il :

(les saints, non-seulement leurs corps, mais est dit que saint lU^ny, ayant fait faire ;\ Glo-
leurs vêtements , les linges ' , les nappes vis sa profession et confesser un Dieu
de foi,

que l'on mettait sur leurs tombeaux , les tout-puissant personnes le bapti-
en trois ,

rierges et les lampes y allumait (jiie l'on sa au nom ' du Père', du Fils et du Saint-
la poussière que l'on eu tirait, les Heurs et Esprit, et qu'ensuite il l'oignit en faisant le si-
les herbes qui leur avaient touché l'eau , gne de la croix sur lui. Le roi Récarède ',
d'une fontaine où l'ou avait lavé quelqu'un ayant quitté l'arianisme, fut réconcilié avec
de leurs membres. La manière de vérifier l'Eglise calholiqueeu recevant le signe de la
les reliques des saints, lorsqu'on manquait croix avec l'onction du saint chrcîme. C'était
de preuves de leur authcuticité, était * d'ex- encore l'usage général de l'Eglise de bénir '"
poser au feu les linges ou les draps qui les avec le signe de la croix les sacrés dons que
enveloppaient, et de demander à Dieu dans l'on ollVait sur l'autel, et ce que l'on servait"
des prières publiques que ces linges ou
,
à table. y avait même" au-dessus de l'au-
Il

draps fussent consumés par les flammes en tel une croix qui y demeurait en tout temps;

cas que les reliques ne se trouvassent pas elle était quelquefois travaillée avec beau-

véritables. S'ils résistaient au feu on ne , coup d'art, et de matière précieuse.


doutait plus de la vérité des reliques. Les 7. En 577, qui était la seconde année du Dlfflctilléj
tOT la l'Ai|ue ;

personnes de piété " se munissaient dans de règne de Childebert, et y eut une dispute sur Fcnis tiapris.
maii\ mjracu-
longs voyages de quelques reliques des la Fàque. Rome avec l'Orient, suivant le cal- l«ui en Ei.
pajno.
saints, ne fût-ce que de la poussière de leurs cul" des Alexandrins et de Denis le Petit, la
ossements ou de leurs tombeaux, et elles en célébra le 25 avril. L'église de Tours et quel-
recevaient du secours dans les divers dangers, ques autres de Gaule la firent le 14 des ca-
soit lorsqu'elles se trouvaient attaquées par lendes de mai, c'est-à-dire le 18 avril, selon
des voleurs, ou exposées au naufrage. le cycle de Victor; d'autres avec les Espa-

6. On adorait' le bois de la vraie Croix deux gnols la célébrèrent le 21 mars, le jour mê-
fois la semaine, le mercredi et le vendredi. me de l'équinoxe. Il se trouva par l'événe-
Plusieurs anciens parlent des clous trouvés ment que l'Église de Tours avait fait la Pâque
avec la croix du Sauveur; mais aucun ne dit au jour qu'on devait la faire, parce que les
si clairement que saint Grégoire, ' que ces fonts miraculeux d'Espagne se remplirent le
clous étaient au nombre de quatre, deux pour 18 avril. Les évêques delà Gaule furent divisés

' Lib. VU Hist., cap. xxsi. perta est Hierosolymis, quarta et sexta feria ado-
' Tum Mummolus elevari ad parietem scalam ratur. Lib. De Gloria Mart., cap. v.
jubet, eraiil enim reliquiœ in sublimi parietis "
Clavorum Dominicorum quod quatuor fuerint,
contra aliarium in capsula recondilœ, diaconum hœc est ratio : duo sunt affixi in palinis, et duo
suum scandere prœcepit; qui per gradus scaii- in plantis. Ibid., caji, vi.
dens scalœ, apprehendens capsam, tremore con- ^ Igitur rex, omnipolentem Deumin Trinitate
cussus est. Ibid. confessus, baptisatus est in nomine Patris, et Filii,
» Greg. Turou., pag. 1013, 961, 895, 1040, 388, et Spiritus Sancti, delibalusque sacro chrismate
128$, 879. cum signaculo crucis Chnsti. Lib. 11 Hist., cap.
* Missale Remense antiquum , in append. Op. ÏXXl
Crpg., pag. 1.166. " Richandus intelligens veritatem, se catholicœ
» Pater meus nuper junctus conjugio voluit se legi subdidil, etaccepto signaculo beatœ crucis cum-
sanctorum reliquiis communire, pelivilque a quo- clirisinatis unctione, credidit Filium Dti œqualem
dam sacerdote ul ei a Uq nid de eiidem indulgeret, Patn. Ibid. lib. I\, cap. xvii.
qiio scilicet,in viam longinquam abiens, lali prœ- "> Ventumque est ut sanctwn munus juxta mo-
sidio tutaretur. Tune inclusos in lupino aureo rem catholicum signo crucis superposito benedi-
sacros cineres circa eum posuit; sed ignarus vir ceretur. Vit. Pat., c:ip. xvi, nuin. 2.
nominum beatorum, referre solitus eralse a mul- •1 Lib. III De ilirac. S.Martin., cap. i.
tistune erulitm periculis ; natn et violentias la- "Peiutebat autem super ipsum allare crux ho-
tronwn et pericula fluminum sœpius se evasisse locrysa eleganti opère facta. De Mirac. S. Julian.,
horum virtulibus lestabatur. Greg. lih. \De Gloria cap. iLiii.
Martyr., cap. lixxiv. '» Greg. lib. V, cap. xvii.
' Çrux Dominica quœ ab Uelena Àugusta re-
390 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
en 390 '
sur la même solennité. La plupart, l'heure 'de tierce, c'est-à-dire à neuf heures.
suivant le cycle de Victor, la célébrèrent le Le célébrant devait être' à jeun, et les assis-
7 des calendes d'avril, quinzième de la lune, tants " dans le silence. Un diacre était chargé
c'est-à-dire le 26 de mars, les autres le 2 de les en avertir. On disait la messe, non-
d'avril, le vingt-deuxième de la lune, crai- seulement ' les dimanches, mais aussi les
gnant de faire la Fàqiie avec les Juifs, s'ils la jours de.fêtes '"
des martyrs, et quelquefois
faisaient le quinzième jour de la pleine lune. en l'honneur des autres saints" qui n'avaient
A Tours, on la fît le vingt-deuxième de la pas répandu leur sang pour la foi, ou en ac-
lune, et il se trouva encore qu'en ce jour les tions de grâces pour la d. livrance " d'une
fonts baptismaux se remplirent en Espagne. ville, ou pour le repos" des défunts. Le saint

C'était en une ville uommée Osser ou Oser, ;\ prêtre Séverin disait " deux messes chaque
quelque distance de Séville. Les fonts baptis- dimanche, mais dans deux églises dillëren-
maux, qui étaient composés de marbre orné tes, et fort éloignées l'une de l'autre. Il était
de sculptures, se remplissaient' d'eux-mêmes, contre les canons" d'en dire trois, fut-ce sur
et quoique, l'eau s'élevât au-dessus des bords Les jours de diman-
trois autels ditférents.
du vaisseau, et qu'on la vît Uotter de côté et che, on commençait la messe par la lecture
"
d'autre, elle ne s'extravasait pas; l'évèque la des prophéties, des évangiles et des épitres
sanctiliait parles exorcismes et par l'infusion de saint Paul ce qui faisait trois leçons. Aux
;

du saint chrême; après quoi les fidèles en fêtes des martyrs ", on en ajoutait une qua-
remplissaient des vases qu'ils emportaient en trième qui était tirée de leurs Actes. Ces le-
leurs maisons pour en arroser leurs champs çons " finies, lorsque le moment d'otfrir le
et leurs vignes; en quelque quantité qu'ils en prendre
sacrifice était arrivé, le diacre allait
prissent, les fonts ne diminuaient point mais ; le vase, en forme de tour, où l'on conservait
l'eau commençait à décroître aussitôt que le le sacrement du corps du Seigneur, et le met-
premier enfant avait reçu le baptême; et tait sur l'autel. Il paraît qu'il prenait celte
tous étant baptisés, elle s'écoulait sans que tour dans un lieu séparé de l'Eglise, c'est-à-
l'on sûtcomment, comme on ne savait pas dire dans le sacraire. L'usage qu'on faisait du
non plus de quelle manière elle avait rempli sacrement qu'elle contenait, était d'en mêler
les fonts baptismaux. Il y eu avait ' aussi à les espèces avec celles que l'on consacrait de
Embrun dans le Dauphiné; mais l'eau ne se nouveau. Le célébrant, après avoir prononcé
comblait pas comme dans ceux d'Osser en les paroles sacrées ", rompait le sacrement
Espagne. du corps du Seigneur, en mangeait, et le
Kiicliari^li''. 8. La Pâques où l'on
nuit de la veille de donnait pour être distribué aux autres. Tous
loF Morts. administrait le baptême solennel, on célé- ne communiaient pas chaque fois qu'ils as-
Jirait les divins mystères, marqués dans saint sistaient au saint sacritîce; luie femme même
Grégoire sous le nom * de messe aux au- ; de piété, qui le fit olfrir chaque jour pendant'"
tres jours on les célébrait ' le matin, \ers un au pour le repos de l'âme de son mari,

' Lit). .\, cap. xini. ' Pal., cap. vin. nura. 11.
Yil.
> Mirum diciu. piscinam quam reliquerant va- ' Lih.
1 De Gloria Martyr., cap. lxxxvu.
cuatn, reperiunt pUnaiii et Un cumulo alliorc rc- » Lib. Vil llist. Franc., cap. vui. ' Ibid.

{erlam, ulsokt supra ara modiorum Irilicum ad- '" Lit). De Gloria Martyr., cap. xxxvi.

gregari : tidpasi/i/e liuc illuc lalices fliictuare ,


u Ibid., cap. (.xxv.— " Lih. De Gloria Martyr.,
Jiec parlent in diversam defluere. Tune cum e.Tnr- cap. xui. —
" Lib. IV, cap. XL, et iiti. De Gloria
cismo sai.ctificatuiii, roimpersiim desuprr cliris- Conf., cap. LXV. —
" Ihid., cap. L.— '» Lib. V, cap.
inaomnis populus pro d' volume havrit, et vas L. —" Lib. IV Bisl. Franc, cap. xvi. " Lit). I —
plénum dorni pro satvahone reporta'., agros vi- De Gloria Martyr., cap. lxxivi.
neasque as]}ersione .<aluherrima lulaturus. El cum " Lecta passione cum reliqui.^ leclionibus quas
exinde nmltiludo (uitphoraruin sine collecta nu- canon snrerdolulis tem]ius od sttcrificium
inve.rit,
méro haurialur, nunquam lawen vel cuniulum offerettdum advenif, ucceptnque turre diaconus in
viinuil : licet uhi infans jiriiints inlinctus ftieril, qua iiiy.iterinm Dominici corporis hahtbatur,ferrt
mox aqua reducilur, et Ixiptizatis omniinis, lym- co'iiil ad nstinm, iiigressusque templum ut eam
phis in se reversi-i, ut inilio produnlur nescio, altari superponeret. Ibiii.
ita et fine claudunlur ignaro. Liti. De Gloria Mar-I
" Expltcitis verbis sacris, confracto Dominici
tyr., cap. XXIV. corporis sncrameulo,el ip.'ie sumpsil, et aliis dis-
' Lit). De Gloria Cnnf, cnp. LXix. tribuil edendum. Itiiil., rnp. lxwvii.
' Lit). Il Di Gloria Mar/7/r., cnp. xsxiv. "> Mulier per annum integrum ad hoc templum

' Lit). I De Gloria Martyr., cap. xc. degen^, assidue oralioni va,calat célébrons quo- ,
[Vl° SIÈCLE.] CIIAPITIIE XLII. — SAINT (iHÉGOlHE DE TOLHS. 391
Jnur du Dl-
et qui fournissait ;\ cctellel le vin ni^cessaire, 9.Ceux mômes qui ne communiaient pas manrtio, corn-
mp on le (•ne-
s'abstenait tle temps en temps de la sainte étaient obligés au jeOnn ' jusqu'après la I Util.
'
communion. Saint Gi'Cfi;oire pailo ' souvent m(!sst! les jours de dini.uiche. On nommait

des messesqui! l'on célébiait pour losdiH'unls, ainsi le prcnnier jour de la semaine ('u l'hon-

de celle en particulier qui se disait pour eux neur de la résurrection de Notrc-Seigneur.


"
le Irenlièmc jour depuis leur mort. Los mes- En ce jour le peuple assistait aux veilles

ses enriionncui'des saints avaient leurs prc- de la nuit, et aux laudes, c'est-à-dire à l'of-
faces'paiticulières;dansl'éfj;lisedo Tours, tous Oce du matin. On le choisissait aussi pour la
'
ceux qui assistaieat à la messe cliantaionl ' consécration" des évoques. Toutes œuvres
à haute voix l'oraisou dominicale, à la ma- serviies y étaient défendues. Les gens'" ma-
nière des Orientaux. Quand le crime n'était riés devaient le passer dans l;i continence,
pas constaté, il était ' à la liberté des lidèles et dans le clianl des louanges de Dieu. Les
"
de s'approcher de l'autel poui' communier ;
fidèles n'approchaient de la communion
l'évoque s'en rapportait en ce cas à la cons- qu'après la fin de la messe. Tous buvaient
cience de chacun, laissant la chose au ju- le sang de Jésus-Christ dans un même ca-
gement de Dieu et des saints. Les laïques re- lice au lieu que chez" les ariens, il y avait
;

cevaient de sa main une particule de l'Eu- un calice pour les rois, et un autre pour le
charistie, et s'en communiaient eux-mêmes. peuple. C'était la coutume de s'abstenir du
C'eslainsi que Cautinus, évèque de Clcrmont, travail " des mains dès le soir du samedi,
en usa envers le comte Eulalius, accusé de par respect pour le dimanche suivant elle ;

parricide sur un bruit public, mais dont cet durait encore dans le ix° siècle eu sorte ;

ollicier se prétendait innocent. On voit par que, depuis le coucher du soleil, il n'était
cet endroit de saint Grégoire de Tours, que pas même permis de faire du pain. Le jour
l'on désignait l'Eucharistie sous la seule es- du jeudi saint ''', on lavait les autels et les
pèce du pain; que l'on ne donnait pas tou- tombeaux des saints; l'eau qui y avait servi
jours l'Eucharistie sous une forme certaine, guérissait souvent les malades.
Les Mi-
et que l'on communiait sous une seule es- 10. évoques se faisait " du
L'élection des nistres do l'E-
^"*"
pèce, quoique l'ordinaire fût de communier consentement du clergé et du peuple mais ;

'^ la
sous les deux, comme il le déclare, lorsqu'il ils ne pouvaient être consacrés qu'avec

dit que nous prenons notre propre condam- volonté du roi. On portait l'acte de l'élection
nation, quand nous recevons le corps et le au roi, qui en conséquence écrivait au mé-
sang de Jésus-Christ avec une conscience tropolitain pour lui donner et à ses compro-
souillée par le péché. Sanctum Doinini cor- vinciaux le pouvoir de consacrer l'élu. Cette
pus et sanguinem ctim, simus actu polluti, ad disposition, qui se trouve en beaucoup d'en-
jiidicium sumimus. Lib. I De Gloria Martyr., " des ouvrages de saint Grégoire, est
droits
cap. uoxvi. conforme au dixième canon du cinquième

tidv' missarum solemnia, et o/ferrns oblationem accède propius et sume tibi eucharistiœ particu-
pro memoria viri non diffisa de Domini miseri-
: lam, atque impone ori tuo; eril enim Deus res-
cnrdia, quod haheret defunclus requiem in die pector conscientiœ luœ. At ille, accepta Eucharis-
qua Domino obiulionem pro ejiis anima delibas- tia, communicans abscessit. Lib. X, ca[i. vin.

set, semper sextarium gazeli vini prœbens in sa- s


Lib.111 Hist. Franc, cap. xv. — « Lib. 1, cap.

criftcium basilicœ sanctw. Sed subdiaconus ne- XXII. — ' Lib. 111, cap. XV De Mirac. S. Juliayii ; cap.
quam reservans gulœ gazetum acetum vehe- , IX et lib.I De Mirac. S. Martini, cap. iv et lib. III,
vientissimum offerebat in calice, muliere 7wn tem- cap. XXII.— s Lib. IV Hist., cap. xxxv.
per ad communicandi graliam accedente. Lib. De « Lib. 11 De Mirac. S. Martini, cap. XL.
'" Ibid., cap. xxiv.
Gloria Conf., cap lxv.
• Pag. 182, 947, 948, 1227. " Mutier vidua expletis celebratisque missis ac-
' Pag. 1016, 1047. cessit ad poculum salutare. Lib. Il De Mirac. S.
' Lib.1! De Mirac. S. Martini, cap. xxx. Martini, cap. lxv.
' Tune episcopus Cautinus permisit eum (Eu- " Consueludo arianorum est ut ad altarium ve-

lalium) cum cœteris speclare solemnia. Verum nientes de alio calice rcgcs communicent, et de
ubi ad comniimicandum ventum est et EuUilius alio populus minor. Lib. III Hist. Franc, cap.

ad/iltariuni accessi.^'set, ait episcopus : Rumor po- .XXXI. — >» Lib. m De Mirac. S. Martini, cap. xixi.
puli parricidam te esse proclamât. Ego vero •» Ibid. lib. Il, cap. Li, et lib. III, cap. xxxiv.

utrum perpetraveris' hoc scelus, an non.ignoro : 'S Vit. Pat., «ail. xvn.
idcirco in Dei hoc et beati nwrtyris Juliani sta- i« Ihid. et li'i. I.\ Hist., cap. XXIII.

tuo judiciù. Tu vero si idoneus es, ut adseris, " Charimerem referendarium cum consensu ci-
392 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
concile d'Orléans, où nous lisons de leurs églises par les hérétiques, étaient
: « Il n'est

point permis d'acheter l'dpiseopat envoyés pour gouverner celles qui se trou-
; mais l'é-

vêque doit être consacré par le métropoli- vaient vacantes ce que l'Église a toujours :

tain et ses comprovinciaux, suivant l'élec- approuvé. Mais il nous apprend que les
tion du clergé et du peuple, avec le consen- évéques se désignaient quelquefois leurs
tement du roi.» Marculphe nous a conservé successeurs avec l'agrément du roi, et que
'

des actes d'élections faites par le peuple et ce fut de cette sorte que saint Nizier fut fait
,

présentés au roi, et des décrets donnés en évêque de Lyon, saint Sacerdos l'ayant ' de-
conséquence par les rois pour la consécra- mandé, dans une maladie, -.m roi Ghildebert,
tion de l'élu. Il ne laissait pas d'arriver quol- qui y consentit. Maurilon, évoque de Cahors,
quefois que les rois' cassaient les élections prévoyant les diflicultés qu'il y aurait dans
faites par le clergé et par le peuple soit à l'élection de son successeur '
, choisit lui- ,

cause qu'elles n'étaient point unanimes, soit même Ursicin, qui avait été référendaire de
parce que la personne élue ne leur était la reine Ultrogothe. Félix, évêque de Nantes,

point agréable il y en eut même qui pas-


;
se trouvant en danger de mort appela ' les ,

sèrent de la cour au siège épiscopal par la évéques de son voisinage, et les supplia de
seule autorité du roi, et sans attendre les consentir au choix qu'il avait fait de Burgun-
suffrages du clergé et du peuple mais le dion son neveu pour remplir sa place. Les
;

nouvel évêque les leur demandait en arri- évéques ayant donné leur agrément, Bur-
vant dans son église. Cette discipline, qui gundion alla prier saint Grégoire de venir à
n'était point connue dans les premiers siè- Nantes pour son ordination. Le prélat refusa
cles s'établit insensiblement sur la fin du
,
d'y aller disant qu'il ne pouvait consacrer ,

sixième. Les évéques s'y opposèrent, comme évêque Burgundioa tant parce qu'il n'avait ,

on le voit par le cinquième concile de Paris pas l'âge requis par les canons, que parce
en 614, dont le premier canon porte, qu'à la qu'il u'était pas permis de donner un suc-
place d'un évêque mort on ordonnera celui cesseur à un évêque de son vivant. Tou-
qui sera choisi par le métropolitain avec ses tefois comme il y avait des exemples du ,

comprovinciaux, le clergé et le peuple de la contraire il conseilla à Burgundion qui ,


,

ville, et gratuitement. Mais le roi Clotaire II, n'était pas encore dans le clergé, de com-
dans son édit pour l'exécution des canons mencer par se faire tonsurer de se faire ;

de ce concile apporta cette modificatiou k


,
ensuite ordonner prêtre, et de se rendre as-
celui dont nous venons de parler L 'évêque : sidu à l'église puis l'assurant qu'après cela
<i
;

i;lu par les évéques le clergé et le peuple


, il lui serait facile d'être élevé à l'épiscopat
,

sera ordonné par ordre du prince que s'il après la mort de son oncle. Ce n'est pas que
:

est tiré du palais, il ne sera ordoimé que pour l'on parvînt au sacerdoce sans avoir passé
son mérite. » Saint Grégoire ne fait aucune par les degrés inférieurs du ministère ecclé-
mention d'évêques transférés d'un siège n un siastique. Saint Grégoire dit le contraire à
autre, si ce n'est de ceux qui, étant chassés Burgundion « Mon lils, lui dit-il, il est écrit :

vium rcgalU decrevit auloritns fieri aacerdotem. propinqui erant, supplicat ut consensum quem
I.il).IX //lit., cnp. xxMi. Decedente urbis Treveri- in Burgundionem nepotrm suum fecerat, suis sub-
cœ sacerdole eum fNicetiumJ ad rpiscopnlum
, scriptuinibus roborarent. Quod cum fnclum esset,
jiissil accersiri Theudoricus rex, cunique dato eum ad me dirigunt. Eral lune Hurgundio quasi
consensu popvli ac décréta régis ad ordinanduiu annorum viginti quinque. (Jui veniens rogal ut
fi viris summo apud regem lionore jinvditis ad- accvdens usque !^annelas episcopum eum in lo-
ducebatur. Vil. Pal., 'ap. xvn, nuin ). Plcno ré- cum avunculi sni qui adhuc supersieserat, tonsu-
gis el popiili suflragio Sictlius episcopns Lugdu- ratum consccrarc deberem. (Juod ego abnui, quia
nensis ordiuatus fiiil. Ibid., cap. vni, nuin. 3. canonihus non conrenire cognovi. Consilium ta-
' In Append. op. Greg., png. 1354. nicn privbui dicens : llabemus in canonibus scrip-
' Prwf. in op. Greg. tum, fili, 7ion passe quemquam ad episcopatum
' Rogo ul Is'icedus preshyler nepns meus eccle- accederr, nisiprius ecclcsiasticos gradus régula-
siœ Lugdunensi subtiluahir episcnpus. Resipondil ritvr sortiatur ; tu ergn rei ertcre illuc, et pete u(
rex Childeberlus ; fiât volunlas Dei. El sic plcno i]isc ijui te elegit debeal lonsurare. Cumque pres-

régis el populi suflragio episcopus Lugdunensis bylerii honorem] acceperi.i, ad fcclesiani assiduus
ordinatus fuit. Vit. Pal., cap. vm, iiuiii. 3. esto, el eum ewn Deus migrare voluerit. tune
' Lib. V Iltsl., cap. ,\Liii. facile episcopalem gradum ascmdes. Greg., lib. VI,
• Félix episcopus Nanneticœ civitatis graviter cap. .w.
œgrotare cœpit. Time vocatis ad se episcopis qui
[vr SIÈCLE. CHAPITRE XLll. — SAINT GRllGOIHE DE TOURS. 393

dans les canons, que personne ne peut arri- d'incontinence, plusieurs clercs avaient leurs
ver à l'iSpiscopal, h moins qu'il ne passe par lits dans la chambre '" même où l'évèque

tous les degrés occlôsiuslicjues. n El s'il ne couchait. Outre les fonctions épiscopales ,

nomme en cet endroit que la prêtrise , il ils étaient comme les autres clercs astreints

ninniue ailleurs' le lectorat.lo sous-diaconat à la récitation dus heures", que nous appe-
et le diaconat. La consécration d'un ëvéque lons canoniales. 11 y avait des monastères
appartenait de droit au métropolitain de la soumis i\ leur juridiction ",mais il yen avait "
province mais on ne suivait pas toujours
;
aussi d'exempts. Il y avait de certaines cau-

cette loi à la rigueur. Saint Avit ' de Cler- ses dont les évoques seuls'* connaissaient, à
mont Metz par ordre du roi Sige-
fut sacré à l'exclusion des juges laïques.
bcrt, et saint Grégoire à Reiras ' par Gilles
,
11. Les causes des évêques étaient exa-
évèquc de cette ville. L'on n'en tît des re- minées dans les conciles mais on les as- ;

proches ni à l'un ni ii l'autre. On coupait semliiait ordinairement par ordre, ou du

les cheveux à ceux que l'on admettait dans moins avec l'agrément '* du roi. Contran en
le clergé mais dans les premiers siècles
;
indiqua " un pour savoir la cause de la mort
leur tonsure n'était point en forme de cou- de Prétextât, évêque de Rouen qui avait ,

ronne ce ne fut que vers le sixième du


; ; été poignardé en 586, dans le chieur de son
moins n'en trouve-t-on rien dans les anciens église un jour de dimanche au milieu de
, ,

écrivains ecclésiastiques avant saint Gré- l'otlice. On ne sait si ce concile s'assembla.

goire qui raconte ' que saint Nicétius, évê-


,
On en assemblait lorsque la foi se trouvait
'''

que de Trêves, parut dès sa naissance des- en péril ou qu'il s'élevait quelque hérésie
,

tiné à la cléricature parce qu'il vint au


,
nouvelle, ou lorsqu'il s'agissait de la réforme
monde avec une ceiuture de cheveux autour des mœurs et de la discipline. Ce fut dans
de la tête. Ce qui montre que vers l'an 300, un concile que saint Grégoire " se purgea
auquel saint Nicétius vint au monde, la ton- de l'accusation formée contre lui d'avoir ,

sure cléricale en forme de couronne était mal parlé de la reine. Comme le principal
en usage. C'en était un de baiser' la main témoin était uu sous-diacre les évoques le ,

des évêques, parce qu'ils conféraient le Saint- rejetèrent disant qu'on ne devait pas croire
,

Esprit par l'imposition de leurs mains. Les un inférieur contre un évêque. S'il arrivait
rois les envoyaient souvent 'pour être leurs qu'un évêque fût condamné dans le concile,
médiateurs chez les princes avec qui ils il pouvait " en appeler au saint Siège. Mais
étaient en guerre ils les ' députaient ils les
; , il paraît qu'il en demandait la permission
invitaient ' à manger. Ceux que l'on élevait au roi.
'
à l'épiscopat étant mariés se séparaient , 12. Les peines que les conciles ordonnaient Cf usure- fr-
rl'^sia'iîqoes.

de leur femme et pour éviter tout soupçon


; contre les coupables étaient ordinairement ,
iL'rdils.

' Lector decem annis fui ; t)» subdiaconatus of- huit.Qua exacta, in strato sua quievit, habens circa
fiào quinque annis ministravi ; diaconalui vero leclum suum rnultos lectulos clericorum. Lib. VI,
quindecim annis mancipatus fui;presbyterii ho- cap. XXXVI.
nore jam viginli annis polior. Cato presbyter " Nulla prorsus de Deo erat mentio , nullus
apiul Greg., lib. IV Hist. Fianc, cap. vi. omnino cursus memoriœ habebatur. Lib. V, cap.
' Lib. IV, cap. XXIV. XXI. Saiut Grégoire parle de deux évêquef déré-
• Fort. lib. V, carm. 2. glés, Salùnius et Sagittaire. La note sur cet en-
* Mcelius cum partu fuisiet effusus, omne ca- droit porte Sic vocabantur horae canonicœ. Ho-
:

puJ ejus, ut est consuetudo nasceixtium infantum, die dicereinus Nulla erat eis cura recitandi bre-
:

a capillis nudum cernebatur : in circuitu vero viarii.


modicorum pilorum ordo apparuit, ut putarei " Lib. l.\, cap. XL.
ab eisdem coronam clericorum fuisse signatam. " Pat., cap. vni, num. S.
Vit.
Greg. Vit. Pat., cap. xvii, num. 1. "
Lib. L\, cap xx.
' In Prologo, lib. 11, pag. 42. "
Sine nostra scientia synod^ile concilium in
« Lib. IX Hist., cap. xx. — ' Ibid., cap. xxxvni. regno nostro non agatur. Sigebert, 111 Epist. ad
» Lib. Vin, cap. ) et m. Vesiderium, pag. 1352.
' Apud Arvernos post Stremonium primus épis- <« Lib. IX, cap. xi — " Ibid.
copus Urbicusex senatoribus conversus
fuit, ,
<« Greg.,V, cap. 50.
lib.

uxorem habens ; quœ juxta consiietudinem ec- " At illi, euin adhuc propitium sibi regem esse
cUsiasticam, remota a consortio, religiose vive- 7ios.«en£, ad eum accedunt implorantes se injustt

bat. Lib. I, cap. xuv. reniolos, sibique Iribui licentiam ut ad Papam


*' Reversusque domum sacerdos cœnœ discu- urbis Romœ accedere debeant, Lib. V, cap. ixi.
,

39 i HISTOIRE GÉNl':nALE DES AUTEURS ECCLfelASTIQUES.


'
l'excommunication. Lciulasfe ,
vconvaincu laimes. Le matin, il s'approcha des lampes
dans le concile de Draine d'avoir calomnie qui pendaient à la voûte de l'église , el avec
saint Grégoire excommunié de toutes
, fut un l)àton qu'il tenait , il les cassa toutes, en
les églises. Cliarii)ert fut ' excommunie par disant : « On n'allumera point ici de lumière,
saint Germain évcque de Paris pour deux
, ,
jusqu'à ce que Dieu se venge de ses enne-
mariages contractés, du vivant de son épouse mis, et rende les biens de sa maison. »

légitime avec deux sœurs Mérollède cl


, , 13. Un seigneurnommé Dacco, ayant quitté
Marcovèse. Celle-ci mourut quelque temps le service du roi Cbilpéric, fut pris par le duc "^
futc» t CCh,
qol '
étalri

Dracolen. qui mena au tm


après son mariage sa mort fut regardée ; le roi, après lui avoir "°^'"°/^',

comme une punition du mépris qne Chari- promis avec serment qu'il ne serait point at-

bert avait fait de l'excommunication por- tenté à sa vie. Dracolen, contre sa promesse,
tée contre lui. Saint Nicet ', évèque de Trê- persuada à Cbilpéric de faire mourir Dacco.
ves, refusa de célébrer les saints mystères Celui-ci, voyant qu'ilnepouvait éviter lamort,
en présence du roi Théodehert qu'il avait ,
demanda pénitence à un prêtre, à l'insu
' la

séparé de la communion pour ses crimes. Il du exécuté après l'avoir reçue. On


roi, et fut

en sépara ' aussi souvent le roi Clotairc voit en cette occasion la confession.'! l'article

sans se mettre en peine de l'exil dont ce de la mort, et la pénitence secrète, Dacco


prince le menaçait. C'était l'usage que les n'étant plus en état de l'accomplir publique-
excommuni('s' sortissent de l'église lorsque ment. Un y voit encore que l'on n'accordait
l'on commençait l'oblation. A Paris '.l'église pas la pénitence sacramentelle à ceux qui
de Saint-Denys ajant été profanée par des étaient condamnés à mort, puisqu'il la fallut
meurtres et du sang répandu on cessa de , cacher au roi. Cet usage dura en France jus-
faire l'office, et les coupables furent excom- qu'au règne '"de Charles M. Le référendaire
muniés jusqu'à ce qu'ils eussent satisfait. Marc, qui avait amassé de grands trésors par
A Aix', l'évéque Francon se voyant injuste- des voies injustes, se voyant dangereusement
ment condamné par le roi Sigebert qui lui ,
malade, se coupa" les cheveux, demanda la
avait ôté une terre de l'Église, et l'avait con- pénitence, et l'ayant reçue, mourutaussilôt.
damné à une amende de cent sous d'or, se On par le douzième canon du concile
voit

prosterna en prières devant le tombeau de d'.Agde, qu'on avait coutume en France de


saint Métrias, et dit : « Grand saint, on n'al- couper les cheveux à ceux qui étaient en pé-
lumera point de himinaire et on n'y
ici , nitence.
chantera point de psaumes, que vous n'ayez li. On les coupait aussi à ceux" qui quit-
Monltlts.
vengé vos serviteurs de vos ennemis, et fait taient le siècle pour entrer dans des monas-
rendre à l'Église les biens usurpés par vio- tères. Sainte Papule, voyant que ses parents
"
lences. B Après avoir ainsi parlé avec effu- s'opposaient au dessein qu'elle avait de se
sion de larmes, il jeta des épines sur le tom- faire religieuse, passa dans le diocèse de
beau et ayant fermé les portes de l'église
, ,
Tours, où elle entra dans un monastère
il en mit encore à l'entrée. Léon, évéque d'hommes, après s'être coupé les cheveux, et
d'Agde, sous la domination des Goths ', vou- avoir prisun habit d'homme. Elle s'y rendit
lant attirer la vcngcnce divine sur comte le sirecommandable par ses vertus, que l'abbé
Gomacliaire , arien ,
qui avait usurpé une étant mort, les moines jetèrent les yeux sur
terre de l'Église , el menacé de maltraiter ellepour en faire leur abbé; elle le refusa.
l'évéque, vint à l'église de Saint-.\ndré , se Son séjour dans ce monastère fut de trente
prosterna en prières , célébra les vigiles , et ans mais trois jours avant sa mort elle se fit
;

passa la nuit à psalmodier et à répandre des connaître. Les moines la mirent entre les

< Lib. V, cap. L. — ' I.ili.lV, cnji. sivi, se penilus non erofunim, a presbytero, rege net-
' A'on hic hodie missarum solemiiia cnnsum- cieiitc, pœmtevliam accepit. Qua accepta inter' .

mabunlur, iiisi prirali commimione prius ahs- fecttis est. Lib. V, cap. xxvi.
eedant. Vit. Pat., cap. xvn, lumi. 2. «0 Mabil., Sœcul. m. Bénédictin., part. 1, nuui.
* Sed et Clolharitim regcm Mcetius pro injus- 24.
tis operibus fwpius eiconimunicavit, cxiliumquc " Marcus referendarius... subito lalerxs dolore
to minitante nunquam cul lerrilus. Ibid. detenlus capvt tolondil, alque pœnilentiam acd-
• Ibid.— ' Lib. V.cnp. xxxiu. picns. spiritum exhalavit. Lib. \\. cap. 26.
' Lib. De Gloria Conf., rnp. lxxi. " GrcK. lib. De Gloria Conf., cap. xvi.

« Lit.. I De Gloria Martyr., cap. lxxix. Ibid.
» Jlle Dacco cum vinctus ilttineretur el eerneret
.

[Vl" SIÈCLE.] CHAPITRE XLII. — SAINT GRKGUIRE DE TUUIIS. 395


mains dos femmes, pour lui rendre les de- de engager dans leclcrgé.Chararic'", dé-
les
voirs ordinaires do la sépulture. Les femmes trôné par Clovis, fut aussitôt ordonné prêtre,
n'entraienl point dans les monastères d'iinm- et son fils (lia'T(\ Le pères'eninitiiiiant quel-
mes, pas même dans leurs églises. Il en
'
que temps après avec son fils de leur malheur
était de mémo des hommes à l'égard des mo- commun, ce jeune prince, pour le consoler,
nastères de filles. La clôture dans le monas- lui dit «Ces cheveux que l'on m'a coupés ne
:

tère de sainte Radégonde a Poitiers était si sont que des feuilles et des branches d'un
exacte, que l'on ne permit point aux hom- arbre vert ([ui repoussera avec le temps; et
mes d'y entrer pour l'enterrer; on en * en- il ne tiendra pas à moi (jue celui qui nous a

leva le corps hors du monastère, pour le mis en'cet état, 'ne périsse bientôt.» Clovis, à
porter dans une église de la ville et les re- ; qui ces paroles imprudentes furent ra[)por-
ligieuses, i\ qui leur règle défendait di; sor- técs, envoya sur-le-champ couper la tête à
tir, se mirent sur les murs
sur les tours, et ces deux malheureux princes.
où elles continuèrent à pleurer et ii gémir IG. Saint Grégoire rapporte".'! l'empire de c™ '»"•

sur la mort de leur ancienne abhcsse. Les Décela missmn des sept evêoues (lui nrê- !• i« ' i tir

abbesses ', comme les abbés, étaient bénites chèrent de Jésns-Chrisi dans les Gau-
la foi ''"'»'•

par les évoques. Quelquefois on observait *


les. Saint Gatien fut évêque de Tours, saint

dans un même
monastère d'hommes plu- Trophime d'Arles, saint Saturnin de Tou-
sieurs règles à la fois,comme celles de Cas- louse, saint Denis de Paris, saint Austremoine
sien, de saint Basile et de quelques autres. de Clermont, saint Martial de Limoges; mais
R..r 1^. Bol, 15. Quoique le roi Gontran eût deux filles, ilreconnaît que la foi y avait été prêchée au-
Chlodoberge et Clotilde, il choisit ' pour son paravant, puisqu'il y met" des martyrs dans
successeur Ghildebert son neveu, iparce que, la persécution d'Antonin. Il dit ailleurs ", en
selon le soixante-deuxième article de la loi parlant de saint Saturnin, qu'il avait été or-
salique publiée par le roi Clovis vers l'an donné par les disciples des apôtres ; ce qui
487, non-seulement la succession ti la cou- parait le mettre en contradiction avec lui-
ronne ne regardait pas les RUes ni les fem- même, puisque du temps de Dèce il n'y avait
mes, mais elles n'avaient ' aucun droit aux plus de disciples des apôtres. Mais on avait
terres des nobles de la nation, ni même à coutume de donner cette qualité à ceux qui
tontes les terres de conquête, telles qu'é- professaient la même doctrine que les apô-
taient presque toutes celles de la monarchie tres avaient enseignée à Rome ".
" française en deçà du Rhin. Saint Grégoire de
Tours, ni Frédégaire son abréviateur, ne ARTICLE IV.

disent rien de Pharamond, que l'on regarde JUGEMENT SUR LES ÉCRITS DE SAINT GRÉGOIRE DE
ordinairement comme celui qui a jeté les fon- TOURS ÉDITIONS QU'ON EN A FAITES.
;

dements de la monarchie française; mais ils


parlent de Claûgion, de Mérovée et de Chil- 1. Après ce que nous venons de rapporter
''
p.^'Siroi'îo

déric, à quiils donnent poursuccesseur Clovis, des éciits de saint Grégoire, on ne peut dou-
*
qui, le premier, forma ' un royaume de toutes ter de leur utilité. Ils ont des défauts, on en
les provinces des Gaules, dont il transmit la convient; mais ils ne sont pas d'assez grande
possession à ses descendants. Lorsque ce importance pour décréditer un si saint évê-
prince eut persuadé aux soldats de le recon- que, ni détourner de la lecture de ses ouvra-
naître pour leur roi, ils rélevèrent sur un' ges. Ses expressionssont dures, dit-on, et peu
bouclier, cérémonie ordinaire chez les Fran- correctes, son style bas et rustique, on ne
çais dans le couronnement de leurs rois; ils peut le lire sans dégoût et sans ennui il cite ;

lui hommages, et se soumi-


rendirent leurs des histoires apocryphes, il en donne pour
rent à sa domination. Ils pratiquaient une certaines qui ne le sont pas il avance com- ;

autre cérémonie dans le détrônement des me vrai ce qui est faux il relève des faits
;

rois, qui était de leur couper les cheveux, et peu intéressants, et charge sa narration de

' Pat., cap. i, num. 6.


Vil. —
' De Gloria Conf., '"Ibid., cap. XLi. — " Lib. I, cap. xxvrn.
cap. cvi. —
» Lib. IX, cap. xui. * Lib. X, caj.. — " Ibid., cap. XXVI.
XXIX. —
* Lib. V, cap. xvui. —
" Histoire de France " De Gloria Martyr., cap. XLvni.
par le père Dauiel, Tom. 1, pag. 9. " Voyez tom. VIII, pag. 12.5, notes 3, 4 et 5.
le
' Greg lib. II, cap. ix, x, xi. xn. Voyez aussi le supplément à la fin de ce volume,
' Ibid., cap. xxvn. — ' Lib. II, cap. XL. (Léditewr.)
396 HISTOIHE GKNÉnAI.E DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
circonstances inutiles; il est tombé dans di- le récit des faits, ni disconvenir qu'il ne les
verses erreurs de chronologie ; enfin, cré- rapporte avec quelque sorte d'agrément.
dule jusqu'à l'excès, il donne pour miracles 2. Nous ne voudrions pas garantir tons les 5;< rrfdolia
fUil-r-Me et*
des événements fort ordinaires : voilà ce miracles qu'il rapporte; mais il y aurait aussi
qu'objectent contre les écrits de saint Gré- de la téméiité à les rejeter sans distinction.
goire, ceux qui veulent en allaiblir l'auto- Il faut suivre la règle de saint Au-
en cela
rité •.
gustin, qui aimait mieux croire que les ^

2. Mais la rusticité de style qu'ils lui repro- événements miraculeux, que l'on racontait de
chent, était moins la sienne que celle de son son temps, surpassaient la porti'C de ses lu-

siècle. Ne dit-il ' pas qu'alors les lettres mières, que de les accuser de fausseté, ou
étaient non-seulement tombées en France, de les mettre sur le compte de quelque per-
mais même personne qui s'y
qu'il n'y avait sonne trop crédule. Il assure 'qu'il s'en fai-
appliquât, ni qui fût en état de conserver à sait un si grand nombre de son temps, qu'il
la postérité, soit en vers, soit en prose, des n'était ni aisé de les connaître tous, ni de ra-
événements. qui méritaient de lui être trans- conter tous ceux qu'on connaissait. L'Église
mis; que les bons auteurs n'étaient entendus dans le sixième siècle n'en avait pas moins
que de peu de personnes, et que tout ce besoin que dans le cinquième, soit pour pro-
qui n'était pas écrit d'un style grossier et curer la conversion des infidèles, soit pour
rustique, était au-dessus de l'intelligence de atlermir la foi des fidèles. Les nations bar-
la multitude ? Il s'excuse lui-même en vingt bares avaient tellement inondé l'Europe,
endroits sur la grossièreté de son discours; qu'il ne se trouvait prosqu'aucun pays à
et nous devons l'en croire, quand il nous as- couvert de leur domination c'était ou des ;

sure que ce n'est que dans la vue de servir païens, ou des ariens, dont la plupart n'é-
le public, qu'il a surmonté la répugnance taient chrétiens que de nom. En vain au-
qu'il se sentait pour écrire, avouant qu'il rait-on tenté de leur faire changer de reli-
n'en avait pas les talents. Qu'on lise les lois, gion par l'autorité des divines Pllcritures, ou
les lettres et les diplômes des rois de son par des raisonnements; il fallait des miracles.
siècle, on n'y trouve pas un style plus no- Clovis, au milieu de la prospérité, ne pense
ble, ni plus élevé, ni plus correct, ni une la- point à quitter ses dieux; il est délivré d'un
tinité plus pure. On doit même dire qu'il a danger imminent par un miracle, aussitôt il

poussé son humilité trop loin, en se disant se fait instruire dansla vraiefoi,il l'embrasse.
peu instruit des beautés de la langue dans Totila, roi des Goths, inflexible aux prières
laquelle il écrivait. Il y a dans ses écrits un des évêques qui le conjuraient de cesser ses
grand nombre d'endroits où l'on voit qu'il hostilités, peu sensible aux infortunes d'une
avait profité de la lecture des auteurs de la infinité malheureux qu'il persécutait
île

bonne latinité, et qu'il n'était pas même cruellement, s'adoucit à la vue d'un miracle.
étranger à la langue grecque, à laquelle il 11 en fallait pour empêcher les simples de se

a quelquefois recours, pour en tirer l'étymo- laisser si'duirc par les artifices des héréti-
logie de certaines expi'essions latines. For- ques, qui employaient tantôt les caresses,
tunat, qui connaissait sa capacitc", loue' son tantôt les menaces et les supplices, pour les
éloquence son érudition. Quiconque aura
et obliger à quitter l'Église catholique. Les mi-
lu ses écrits sans préjugé, ne pourra pas ne racles étaient nécessaires surtout contre l'hé-
point estimer sa sincérité et sa naïveté dans résie des sadducéens ,
qui se renouvelait

' Voyez Saint Gn^iioire de Tours cinns le tome I studium a nohis, nec reperilur in pop^ilis. gui
de Défense de l'Hglise, par l'abbé r.orini, pag.
la gesia prirsenlia promvlgare posait pagiiiis. m
581. Cet habile critique veiipc ce saint évêqiie de* l'rologn in lib. X lliH., pa;,'. 2.
caloMinies que lui ont imputée.' quelques histo- " Flurens in sludiis... dulcis, facuruie. Fort. lib.
rieni? imidernes il finit son travail par le .juge-
: V, carm. 13 et 2:t.

ment qu'a porté pnr l'Histoire des l'Yancs M. de 'iîallem faleri res ittas esse aUinres. quant ut
Barante. dans la Bingraphie universelle de Mi- a me poasint atliitgi, qnnm lemrre definire illa
chaud : « Ce qu'on y remarque toujours, c'est un falsa miractila, aul ab hominc nïmii creduio cf-
caractiTe de bonne foi et un jiiKeuient libre et ficln. Aug.
courapi'ux des princes faibles et féroces qui mê- ' Tarn multa etiam istit temporibus fiunt tiit-

laient leurs noms aux malheurs de la France, n racula.ut nec omnia cngnoscere, née en, qutr co-
(lyditeur.) gnoscimus, enumerare possimus. Aug. lib. I, Re-
' Vw diebm nostris ,
quia periit litlerarum tract., uuiu. T, pag. 20.
[Vl* SliCLE.] CHAPITRE XLIl. — SAINT GRKGOIRE DE TOURS. 397

alors. Au reste, saint Grégoire de Tours n'est témoin de la plupart, ou les avait appris de
pas le seul qui ait fuit un recueil des miracles gens qui lui paraissaient dignes de foi. Sou-
arrivés, soit de son temps, soit dans les siè- vent il |)rend Dieu A témoin de la vérité des
cles antérieurs. Saint Gréf^oire-le-Grand en fails qu'il raconte. Il ne voulut ' pas ajouter

composa un.divisi' en (|uatrc livres, où il rap- foi ce qu'on lui avait dit do l'huile qui bril-
l'i

porte les événements miraculeux oi)érés jiar lait dcvanl la vraie Croix dans l'église de

ï'iutercession des saints d'Italie. Victor de Sainte -Croix de Poitiers sans diminuer,
Vite raconte aussi les prodi;;cs que Dieu opéra quoiqu'on y puisât pour en euqiorler dans
en Afrique pour la couiiiiuation de la foi or- les maisons, qu'il n'eût vu le miracle de ses

thodoxe. Les évéques catholiques qui eurent yeux. Il piit * la mémi' précaution pour s'as-
une conférence k Lyon avec les évéques surer de plusieurs autres prodiges, avant de
ariens, en présence du roi Gondebaud, les transmettre à la postérité. S'il n'a pas
étaient si assurés que Dieu ne leur refuserait toujours lapporté des miracles éclatants,
pas des miracles pour a[ipuyer la vérité qu'ils c'est qu'il s'était proposé de rendre compte

défendaient, qu'ils ollVirent à ce prince de principalement de ceux ' dont les autres
remettre la décision de leur cause à saint écrivains n'avaient point parlé, et qui étaient
Just '
: Si nos raisons ne peuvent les convaincre, demeurés comme inconnus. On convient
lui dirent ces évéques, nous ne douions point qu'il donne quelquefois pour miraculeuses

que Dieu ne confirine notre foi par un miracle. des guérisons qui ne pouvaient être que l'ef-
Ordonnez que 7ious allions tous au tombeau de fet des causes naturelles; mais elles pou-
saint Just, que nous l'interrogions sur notice foi, vaient être aussi une suite de l'intercession
et Boniface (évèque arien) sur la sienne, et des saints. Il suffit qu'elles aient été opérées

Dieu prononcera ce qu'il approuve par la bou- à leurs tombeaux, ou k la suite de l'attouche-
che de son serviteur. Nous avons rapporté ail- ment de leurs reliques, pour qu'on ne puisse
leurs que évèque de Trêves',
saint Nicet , accuser saint Grégoire de nous avoir donné
renvoyait ' Alboin, roi des Lombards, aux mi- pour de vrais miracles ce qui n'en était pas.
racles qui se faisaient tous les jours dans les 4. Les fautes de chronologie qu'on lui Fanion (fe
cliroTioIflgio.

églises de Saint-Martin, de Saint-Germain reproche regardent d'anciennes histoires, ^iT '"


,

d'Auxerre,de Saint-Loup de Troyes, de Saint- qu'il avait tirées de ceux qui avaient écrit
Remide Reims, de Saint-Médard, et que ce avant lui. Il est plus exact dans les faits ar-
prince, après en avoir été témoin, se con- rivés de son temps; aussi la plupart de nos
vertit. Si les miracles n'avaient pas été as- annalistes français n'ont-ils fait que le co-
y auraient-ils renvoyé des
surés, les évéques pier, en donnant un peu plus d'ordre que lui
princes barbares ou ariens, pour les con- aux divers événements qu'il raconte. Joseph
vaincre de la vérité de noire religion? En Scaliger Nicolas le Fêvre
, précepteur de .,

quelque nombre que soient ceux que rap- Louis XIII Jean Chifflet Monsieur Biguon
, ,
,

porte saint Grégoire, il faut conveuir qu'il a les messieurs de Sainte-Marthe, ne connais-

été plus modéré en ce genre, que plusieurs saient point d'historien ti'ançais plus fidèle ,

écrivains des vies des saints. Il se contente plus exact ancien que saint Gré-
, ni plus
d'en rapporter un ou deux de chaque saint goire de ' Tours; ils l'ont appelé la lumière
dont ilil ne s'étend que sur ceux cjui
parle ; de l'Eglise de France autant par son érudi-
se faisaient au tombeau de saint Martin, et à tion que par sa sagesse et la sainteté de sa
,

celui de saint Julien de Brioude. Il avait été vie, et le prince des historiens de la nation.

« Tom. IV Concil., pag. 1321. et antiquissimus. Faber in Schediasmate. Grego-


« Tom. V Concil.. pag. 833. rius Turonensis, quo digniorem Itistoricum non
• Lib. Mirac, cap. v.
I habemus, multis in lacis a Marculfo lucem acci-
* Il Mirac. S.Mart., cap. xxxu.
Lib. pit. Biguon, Pnrf. in Marculf. Formulas. Sanctus
Àliqua de sanclorum miraculis , quœ haete-
' Gregorius antiquissimus et ftdelissimus Franco-
nus lalueriint, pandere desideraris. Greg. Prolog. rum liistoricus. Chiffletius iu Dis(;iiisilioue. Sanc-
iû lib. Mirac. I tus Gregorius, Ecclesiœ gallicanœ lumen, de histo-
' Magna Gregorio gnitia, qui in tanto negleetu ria ecclesiastica rebusque Francicis bene meritus.
hisloriœ anintuin ad hœc scribenda appulit... nos SamuKirtliani iuGallia Christiana.Grfporium, qjiem
neque meliorem neque vetustiorem in Historia historicorum nostrorum principem agnosco et
Francorum habtmus. Joseph Scaliger, lib. VI De lande dignissimum judico. Valesius, Prœf. ad
emendal. temporum. Gregorius Turonensis epis- tome H Rerum Francicarum.
copus diligenlissimus hisloriai nostrce scriptor
398 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIOUES.
5. A l'ëfrard de sa doctrine, elle ne s'é- l'autre de la Gloire des Confesseurs. Ces deux
Il M.
loigne en lien de celle de l'I-^glise. Nous traités avec tous les autres écrits de saint
,

avons vu comment il s'expliquait sur le mys- Grégoire, excepté son Histoire et les lies
tère de la Trinité et de l'Incarnation , sur des Pères, furent publiés à Cologne chez Ma-

l'immortalité de l'âme. Il n'est pas moins terne Cholin en 1583, in-8. L'Histoire et les
orthodoxe sur le mystère de la Grâce, dont deux livres de la Gloire des Martyrs et des
il enseigne la nécessité ', et sur le péché
'
Confesseu7-s parurent la même année ii Paris,

originel qu'il dit


,
nous être remis par le avec le Recueil des anciens auteurs ecclé-
baptême. siastiques, par Laurent la Barre. Jusques-lft

Edition i!o 6. Son Histoire des Français fut imprimée on n'avait pas eu tous les ouvrages de saint
séparément à Paris en 1561, chez Guillaume Grégoire dans un même volume on les in- ;

Morel, avec la chronique d'Adon de Vienne; séra tous dans le tome VII de la Bibliothèque
à Bàle en 4568, chez Pierre de Perne, par des Pères, à Paris en 1589, d'où ils sont

les soins de Matthias Illyricus; à Paris en passés dans celles de Cologne de Paris et ,

1610, chez Nicolas du Fossé, avec diverses de Lyon. L'édition de Jean de Balesdens, en
pièces qui 'regardent l'Histoire de Touraine, 1640 à Paris n'est pas si complète puis-
, ,

elles deux livres de l'Histoire de Geoffroy, qu'on n'y trouve pas les dix livres de l'His-
duc de Normandie, par Jean, moine de Mar- toire. La dernière et la meilleure de toutes

moulier à Hanaw en 1013 dans le Recueil


; ,
est celle de dom Thierry Ruinart, à Paris

des monuments de l'histoire de France, par chez Muguet en 1699, in-fol. L'éditeur, avant
Marqiiard Fréhérus à Paris en 1636 dans ; ,
de la mettre au jour, avait revu et corrigé
le premier volume des Historiens français ,
le texte de tous les ouvrages de saint Gré-

par André Duchesne. Antoine Dadin lit im- goire sur un grand nombre de manuscrits
primer en 1679, à Toulouse, chez Jean de la de France et d'Italie, et sur les anciennes
Pesche , un volume entier de notes et d'ob- éd liions dont nous venons de parler. C'est
servations sur l'Histoire de saint Grégoire. ce qu'il nous apprend dans une longue pré-
Nous n'avons point d'éditions séparées des face, où, après avoir fait voir la nécessité
livres de la Gloire des Mai-tyi's et des Corifes- d'une nouvelle édition, il donne le catalnuue
seurs; mais,en 1623, on en détacha la vie de des écrits de saint Grégoire tant de ceux ,

saint Gai évéque de Clermout qui fut im-


, ,
qui sont venus jusqu'à nous, que de ceux
primée à Francfort en un volume in-12. Jé- qui sont perdus marquant, autant qu'il est
;

rôme Clicthoue ayant recueilli quelques possible, le temps et l'occasion de chacun.


opuscules de ce Père les fit mettre sous , Il montre contre le Père Le Cointe, qu'il n'y

presse à Paris chez Jean Marchant, en loll, a rien dans les dix livres de l'Histoire des
en un volume in-4. Cette édition comprend Français qui ne soit de ce Père et pour don- ;

les quatre livres des Miracles de saint Martin, ner plus de jour à certains endroits dilliciles,
le traité de la , celui des
Gloire des Martyrs il entre dans le détail de tout ce qui peut
miracles de avec quelques
saint Julien , servir à la connaissance de l'ancien gouver-
autres monuments. Josse Bade publia en la nement des Français de leurs mœurs, de ,

même ville, l'année suivante 1512 les dix ,


leurs usages, de la façon dont se faisaient
livres de l'Histoire des Français, avec la chro- les proclamations des rois, les élections des

niijue d'Adon de Vienne, en un volume in-fol. évêques, leur ordination celle des autres ,

On y trouve aussi les Vies des Pères, et le clercs de la manière dont on célébrait la
;

traité de la Gloire des Confesseurs. Tous ces liturgie, dont on administrait les sacrements,

ouvrages furent réimprimés à Paris en 1522, dont on récitait l'ollice divin. Il traite aussi des
par le même imprimeur. Guillaume Morel droits et des immunités des églises. Il fait

qui en 1561 avait donné les dix livres de


,
,
l'apologie de saint Grégoire, accusé de trop

l'Histoire des Fraiirais, publia en 1563 les de crédulité ensuite il donne divers éclair-
;

deux traités, l'un de la Gloire des Martyrs, cissements sur ce qui regarde Frédégaire,

'
Bonœ eliam volunlati noslrœ ipse salubrem qnœrendum. Lib. De Gloria Conf., cap. cxii.

effectum indulgeal, quia nisi ipse (rdifiraverit do-


' Sutficit salis ine nb ohgmali peccalo baptis-

muni, in tuiium Itiboranl qui atlificant eam. LU). mr) satulari scwel ablulum fuisse. IMt. V, lap.

I Ilisl. Franc cap. xiv. Sinl lucra vcslra divinœ


,
XXXIX. AoH potesl Sunclus Spirilus, idtm Deus, m
majvslatis graliw... El hoc ipsum a Dumini est peclore fanatico el originalts crimiuis labe iiifcclu
misericordia poscendum non propria virlule, descendcre. Ibid., cap. xliv.
[Vl* SIÈCLE.] CIIAIMTIIE XLIII. — MARIUS D'AVANCHES, ETC. 39a
son abréviateiir. Celte préface est suivie de saint Grégoire de Tours, et le supplément
la Vie du saint tiv(^quo par saint Odon, alibd de Frédégaire et les a fait im|)rimer avec
,

de Cluni et des témnijifiiages avaiila:,'eiix.


, des notes de sa façon, ;\ Paris on 1008, 2 vol.
rendus à saint Gn'j,'oiic par les ('crixaiiis in-S. [M. llenii Hortlier a fait paraître une
qui ont eu occasion de parler do lui. Dom traduction nouvelle de l'Histoire ecclésias-
Ruinart donne après cela les Annales de tique dos Francs, 2 vol. in -8, chezDidot;
France, tirées des anciens auteurs, de saint Paris I8(i(). Elle est suivie d'un sommaire des
Grégoire et de Frédégaire et les conduit
, autres ouvrages de saint Grégoire précédée
depuis l'an 2o3juS(iu'à Cliarleniagne. 11 joint de sa Vie écrite au x' siècle, par Odon, abbé
aux dix livres de l'Histoire des Français, l'a- de Cluni. En 1857, il avait publié chez Jules
brégé que Frédégaire a fait des six premiers Renouard les livres des Miracles et autres
livres, puis sa chronique, avec ses quatre opuscules de Grégoire de Tours, revus et
continuateurs. L'Appendice aux ouvrages de collationnés sur de nouveaux manuscrits et
ce Père contient un grand nombre de mo- traduits pour la société de de Fran-
l'Histoire
numents qui y ont du rappoit, ou qui peu- ce, texte et traduction française en regard.
vent répandre des lumières sur l'histoire de Sauvigny avait donné une traduction de Gré-
France, sur son ancienne liturgie, et sur la goire de Tours dans ses Essais historiques
langue usitée alors dans les Gaules. [L'édi- - sur les moeurs des Français, 1783 et suiv.,
tion de Dom Ruinart a été reproduite avec 10 vol. in-8 et in-4. L'histoire de France écrite
des améliorations, des corrections etde nou- par Grégoire de Tours, avait été traduite, pour
velles notes dans le Recueil des Historiens de la première fois, par Claude Bonnet, Paris
France, par Dom Bouquet, tome II et dans , 1610, in-8. lia paru en Allemagne, eu 183'J,
le tome LXXI de la Patrologie latine, dans deux ouvrages sur saint Grégoire, l'un du
un meilleur ordre : les notes qui étaient à docteur Rriès, Z)e ftrj/. Tiirun. episcop., Vita
la fin sous le nom d'additions sont mises ici et scriptis, Breslau , chez Hirt ; l'autre du
à lem- place naturelle. L'Histoire des Francs, docteur Lobell, piofesseur à* Bonn, Grégoire
souvent éditée, l'a été encore d'une manière de Tours et son temps, Leipsick chez Broc- ,

parfaite en 183(5-1841, à Paris, deux tomes kaus. Le premier de ces ouvrages est une
in-8,par J. Guadet et N. R. Taranne, avec critique de Grégoire historien ,le second ,

une traduction française en regard, avec est une peinture complète du temps de Gré-
des notes et des observations.] goire, pour laquelle l'auteur a emprunté ses
Monsieur de Maroies abbé de Villeloin,
, couleurs aux œuvres mêmes de saint Gré-
a traduit en français l'Histoire de France de goire.]

CHAPITRE XLIII.

Marins évêqne d'Avanches [596], Tétérins clerc de l'Église

d'Anxerre, Rotérins historien.

L'histoirene nous fournit aucun détail de tembre 581. Il est surprenant qu'il ne l'ait

la vie de Marius. Nous savons seulement pas poussée plus loin, puisqu'il ne mourut
qu'il naquit à Autun vers l'an 332; qu'à qu'en 596, dans la soixante-quatrième année
l'ûge d'environ quarante-trois ans il fut élu de son âge. Il prend, à l'imitation de saint
évêque d'Avanches, ville de Suisse dans le Prosper les consulats pour époques des
,

pays de Vaux, en 373, et qu'il assista au faits qu'il rapporte, ne commençant à mar-

second concile de Màcon assemblé en 583, quer les indictions qu'en l'an 523, auquel
par l'ordre du roi Contran. Le siège épisco- Flavius Anicius Maxime fut consul. Sa Chro-
pal d'.\vanches ne subsiste plus il a été , nique contient principalement ce qui s'est
transféré à Lausanne. Le seul écrit qui nous passé dans le royaume de Bourgogne vers le
reste de Maiius, est une Chronique abrégée lac de Genève et lesconfinsd'Agaune. Elle met
depuis l'empire d'Avitus en 433, oîi finit en 363 l'éboulement d'une grande monta-
celle de saint Prosper, jusqu'au mois de sep- gne dans le Valais, qui causa la ruine de plu-
,

400 HISTOIRE GÉNÉR.ME DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


sieurs endroits, et fit enfler si prodigieusement Amateur, évêquc dAuxerre, en avait trans-
leseaux du Rhône, qu'elles rebroussèrentjus- porté les reliques dans son église ayant ,

qu'à Genève le pout et lesraoulins de vette


;
trouvé le moyen de les avoir dans un voyage
ville furent renversés, plusieurs églises et vil- qu'il fit en Orient avec un homme de con-

lages furent détruits, et un gmnd nombre de dition nommé Savin c'est ce que dit Télé-
:

personnes noyées. Monsieur Dnchêne, quia rius dans la préface de sa relation. Il se don-
inséré cette Chronique dans son Recueil des ne dans l'inscription le titre de Sophiste,
historiens fraui;ars, y a joint l'ouvrage d'un
' terme qui signifie qu'il joignait à l'étude de
inconnu, qui en est une continuation. Elle va l'éloquence la profession de philosophe;
jusqu'àla quarantième année de Clotaire II, la mais il se qualifie aussi serviteur des saints
quatorzième de l'empire d'Hcraclius, c'est-à- dont il rapportait les miracles d'où il est :

DomRuiuartàplacédans
dire jusqu'à l'an 023. naturel de conclure qu'il était un des clercs
l'Appendice ' des œuvres de saint Grégoire qui desservaient l'église où leurs reliques
de Tours, ce que cet anonyme dit de la mort reposaient, c'est-à-dire de l'église d'Auxerre.
funeste de Brunehaut reine de France, femme Nous n'avons de lui que la préface de son
de Sigebert, roi d'.\ustrasie, parce que per- ouvrage, trouvée dans un manuscrit ' de la
sonne ne l'a mieux circonstanciée de la : bibliothèque Barberine à Rome. Mombri-
manière dont il la rapporte, elle fait hor- cius l'avait déjàdonnée dans son second
reur; et toutefois il fait passer Clotaire, le tome, mais moins complète. On ne sait point
seul auteur de celte mort, pour un prince en queUc année Tétérius écrivait .il parait ;

humain et débonnaire. [La Chronique de seulement que ce fut depuis que l'on eut
Marius a été réimprimée dans le tome II du transféré à Nevers le bras de saint Cyr, puis-
Recueil des historiens de France par dom qu'il parle de cette translation.
Bouquet dans Gallaud avec une notice
; , 3. On n'est pas mieux informé du temps
tome XII, d'où elle a passé dans le tome LXXII où a vécu Rotérius, dont le nom ne nous
de la Patrologie latine, col. 791 à 802 avec la serait pas même connu s'il n'en était fait,

continuation.] On attribue avec quelt[iie vrai- mention dans la vie ' de saint Sévère d'Agde,
semblance à Marius, évéque d'.Vvanches, la écrite dans le vu" ou vin' siècle. Cet écrivain
Vie de saint Sigismond rapportée par les , donne à Rotérius une histoire des règnes de
Bollandistes au ' premier jour de mai elle ; diverses nations étrangères ,dans laquelle
est assez du style de sa chronique et les , il décrivait les ravages que lesHuns, sous la
faits sont racontés à peu près de même dans conduite d'Attila, leur roi, avaient causés
ces deux écrits; il y a néanmoins des varia- dans les Gaules ,
principalement à Agde
tions dans les noms propres, mais elles peu- qu'ils avaient détruite. Cette histoire était
vent venir de l'inadvertance des copistes. écrite d'un style noble et coulant ; il n'en
TéUriiH, 2. C'est encore au premier de mai que les est rien venu jusqu'à nous. Catel dans son ,
clttt <tc IK-
Bollandistes parlent d'une relation des mi- histoire du Languedoc fait Rotérius auteur
,
itrre.
racles que Dieu opérait à Auxerre par les de la vie de saint Sévère, ce qui n'est pas
reliques des saints martyrs Cyr et Julitte. vraisemblable puisque cette vie contient
,

Ils avaient souffert à Antioche mais saint ; l'éloge même de Rotérius et de ses écrits.

CHAPITRE XLIV.
Dyname patrice [601].
6a tijoanie,
1. Il semble par saint Grégoire de Tours, Le premier, nommé Évance, fut envoyé en
M>étud«i,»i a
que la ville ' d'Arles aitdonné naissance à ambassade par le roi Childebert II vers
Dyname. Après s'être rendu habile dans les l'empereur Maurice, en 788 avec Hodégi- ,

humaines il s'engagea dans


lettres , le ma- silde et le duc Grippon mais il fut ' fui' ;

riage avec Euchérie , dont il eut deux fils. dans une émeute populaire à Carlhage, où

• Duch^ne, tom. I, pag. 216. » Mabil., in Ord. S. Benedicti, tom. I, pag. S6i
' Greg. Turon., Append., 1351.— ' Tom. 1, pag. 86. cl scq.
^ Tom. I Maii liolland., pag. 51, Dum. 8, e( ai * Greg. Turon., lib. X, cap. n.
diem iGjunii, jiag. 20, uum. 17, 18. ' Greg., lib. X, cap. n.
[VI° SIÈCLE. CHAPITRE XLIV. DYNAME, PATRICE. 401

ils avaient relAché pour att(!iulr(i un veut l'a- croit avoir été' l(i fiènî de Dynamo, et do
voialile. Dès l'an 581, Dynamo avait olo fuit le i)r(il(''ger contre les malins es[)rits et
pouveiiicur' do la l'mvcnco, avec la dignité contre la malice des hommes. « Vous ne
de Patrice, qui aux gouver-
était allectôe alors devez pas, ajoule-l-ii, être surpris, si vous
neiiis de n<)urs,>oj;iic etù ceux de
Provence. la avez à soutenir les coutradiclions et les
2. Il ahusa de son autorité pour mettre lioubles il(! quelques ennemis ijui cherche-
successivement sur le siège épiscopal d'Uzès, ront à vous traverser après la mort de votre
après la mort de saint Ferréol, arrivée eh frère; il fiiut vous résoudre à supporter les
581, .\lbin ' qui avait été préfet , et le dia- maux de la part des hommes, dans une
cre Maicel. Il mit aussi le trouble' dans terre qui est ('tianfière pour vous, si vous
l'église de Marseille, dont il fit chasser deux voulez jouir des véritables biens dans votre
fois révoque Tiiéodore. Ses violences lui patrie, c'est-à-dire dans la terre des vivants.
firent perdre les bonnes grâces du roi Cliil- La vie présente est un voyage en pays étran-
debert mais le roi Gontran * les lui fit ren-
; ger, et le voyageur, (pii soupire après sa pa-
dre quelque temps après. trie, se regarde le lieu de son exil
dans
I doviout
riipiii ri-, 3. Dynamo changea de conduite, et, dans comme dans un lieu de supplice, quelque
la vue de vivre chrétiennement, il demanda' agrément qu'il puisse y ajouter mais, pour ;

au pape saint Grégoire des avis et des livres vous, Dieu a permis qu'outre les soupirs et
pour son instruction. Il dota des monastères", les gémissements qu'exprime de votre cœur
et se chargea du soin du patrimoine de saint l'amour de votre patrie à laquelle vous as-
Pierre dans la Provence; ce qu'il fit depuis pirez, l'oppression que vous souffrez de la
l'an 303 jusqu'au mois de septembre de l'an part des liommes vous fasse encore gémir.
S9o,que saint Grégoire envoya 'eu Gaule le Vous devez regarder cela comme un effet de
prèti-e Candide pour le gouverner mais, pour : la conduite de Dieu sur vous, qui, en même
marquer à Dyname sa reconnaissance, il lui temps qu'il vous attire à lui par l'amour qu'il
envoya' une croix où il y avait de la limaille vous inspire, permet que le monde vous
des chaînes de saint Pierre, et, aux quatre chasse, vous repousse et vous donne de l'é-
extrémités, des particules du gril de saint loignement pour lui par les tribulations
Laurent. Dyname, depuis ce temps-là, quit- qu'il vous suscite. Continuez donc à exercer
ta le monde avec Aurèle pour vivre dans la l'hospitalité, appliquez-vous à la prière avec
retraite, où il s'occupait des merveilles que larmes, faites plus d'aumônes qu'auparavant,
Dieu avait opérées par les saints, et du soin quoique vous ayez toujours pris beaucoup
de les transmettre à la postérité. Ce fut dans de plaisir à en faire d'abondantes. »
ces pieux exercices qu'il mourut en 601, n'é- L'épitaphe de Dyname lui est commune
tant âgé que de cinquante ans. Quelques- avec Eucliérie sa femme ils furent enterrés ;

ims ont ' prétendu qu'après avoir renoncé l'un et l'autre dans l'église de Saint-Hippo-
aux charges séculières, il avait été fait prê- lyte à Marseille. L'âge d'Euchérie n'est pas
tre de l'église de Marseille, puis évêque d'A- marqué ; mais il est dit que Dyname mou-
vignon, et qu'il n'était mort qu'en 627, après rut après " dix lustres, c'est-à-dire à cin-
vingt-deux ans d'épiscopat; mais son épita- quante ans. Son se nommait Dy-
petit-fils

phe, composée par son petit-fils, ne lui name comme que ce fut par ordre
lui ; il dit

donne que cinquante ans de vie elle ne dit ; de son père qu'il composa cette épitaphe.
rien ni de sa prêtrise ni de sou épiscopat, et A. Pendant sa retraite, Dyname composa ^
''\^""J'J
la vie de saint Mari ou Marins, abbé de Bo-
sonsuio.
la lettre que saint Grégoire écrivit à Aurèle
sur la mort de Dyname ne permet pas de la dane ou Benon, au diocèse de Sisteron en
mettre plus tard qu'en 600 ou 601, puisque Provence, mort vers le milieu du sixième
cette lettre est de ce temps-là. Ce saint

siècle. Nous n'en avons plus aujourd'hui
pape y prie Dieu de consoler Aurèle, qu'on qu'un abrégé, donné par les BoUandistes au

' Greg., lib. VI, cap. vu.— ' Id., lib. X, cap. vn. junx, Marlyris Hippolyti limina sancta tenent...
— ' Ibid., cap. XI et xxiv. — ' Id., lib. IX, cap. xi. Luslra decem felix tulerat posl terga maritus,
5 Greg. M., lib. \\\,Epi$t. 36. — « Id. lib. VI, Cum dedil liavc sedcm morte sttprema dies... Dy-
Episl. 6.— ' Id., lib. Vil, Epist. 33. — « Id., lib. 111, namius pana lacrymanshœc carmina fudi, ^o-
Epist. 33. —
Gallia cliristiaua nova, tom. I, 799,
* mcn uvi referens, pâtre jiibeitte, nepos. Duchêue,
867. —
1» Greg., lib. IX Episl. 7U. toiu. I, pag. 519.
" Dynamius hic nain pariterque Eucheria con-
XI. 26
402 HISTOIRE GHXÉllALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
27 janvier, et par dom Mabillon dans le pre- l'arapportée au 27 novembre, et Barali au
'

mier tome des Actes de l'ordre de saint Be- second tome de la Chronolo<:ie des Ilommes
noit. Cette vie était chartréc de miracles. de l'abbaye de Lérins. Celte seconde
illustres
L'abrévialeur, craignant d'ennuyer le lec- Vie est adressée à l'évêque Urbique, à qui
teur, crut devoir en supprimer une partie;
'
Dyname proteste qu'il n'avancera rien que
peut-être avait-il aussi en vue de rendre plus sur des relations authentiques. C'est de celte
courtes les leçons du bréviaire : car l'abrégé, Nie qu'on a tiré la matière des hymnes fai-
telqu'on nous l'a donné, a été tiré d'un an- tes en l'honneur de saint Maxime, imprimées
cien bréviaire où il était divisé en neuf le- dans la Chronologie de Lérins. Fréhérus et'
çons. Dom Mabillon * a joint à cet abrégé Duchesne nous ont donné deux lettres de
une espèce d'bomélie qui (onlient le récit Dyname la première est adiessée à an de
:

de plusiem-s miracles faits à ForcuKjuier, où ses amis, à (jui il témoigne le plaisir qu'il
le corps de saint Mari lut transféré sur la tin avait de recevoir des siennes; la seconde
du IX' siècle, ou au commencement du x". à Villicus, évèque de Metz, auprès de qui il
L'auteur d|^ cette homélie était bénédictin et s'excuse d'avoir tant tardé à exécuter une
moine d'un monastère de cette ville, comme commission dont il l'avait chargé. Étant
on le voit par l'allusion qu'il fait au chapitre jeune, il se mêlait de faire des vers; Fortu-
LTiii de la règle de saint Benoit, où ceux qui nat, à qui il en envoya, les trouva ' de son
en font profession promettent à Dieu et au goût. A sou tour, il adressa deux poèmes,
lui
saint, dont on a les i cliques dans le monas- dans lesquels il l'invitait de venir à la cour
tère, la conversion de leurs mœurs et la sta- du roi d'Austrasie. Fortunat y demeurait
bilité. Sigebert ' de Gemblours fait mention pour lors, et Dyname à Marseille, qui était
de la Vie de saint Mari écrite par Dyname. une des villes de son gouvernement. Dyname
Il écrivit Maxime, abbé
aussi celle de saint n'a\ait pas mis son nom à la tête de ses vers,
de Lérins, évéque de liiez; il l'a-
et ensuite mais Fortunat l'y reconnut. Il ne nous en reste
vait faite assez courte, faute de mémoires ; aucun. Le style de Dynamo est trop étudie,
mais Urbique, l'un des successeurs de saint ce qui le rend souvent obscur et embarrassé.
Maxime, lui en ayant fourni de plus amples, [Les deux lettres avec notice par Fabri-
il travailla de nouveau cette Vie, qu'il mit «-n cius, la vie de saint Marins et celle de saint
foime de panégyrique, afin qu'on la lût tba- Maxime, sont reproduites dans le tome LXXX
que année au jour de la fêle du saint. Surius de la Patrologie latine, col. 23-40.]

CHAPITRE XLV.

Saint Fortnnat évêqne de Poitiers, Bandonivie religieuse de Poitiers

[sur la fin du VP siècle.]

Etudes ôc For- i. Paul Diacre ' fait naître Fortunat dans avait à Havenne une basilique en l'honneur
le voisinage de Généra, dans le ville d'Italie de saint Paul et de saint Jean, et dans cette
Trévisan. Il ne dit rien de sa famille mais il ; égliseun autel de saint Martin, devant le-
ajoute qu'il fut élevé h Ravcnnc, et qu'il y quel nn allumait une lampe pour donner du
étudia avec succès la grammaire, la rhéto- jour. Foi'tunat et Félix sou ami, qui étaient l'un
rique et l'art poétique. Fortunat eut moins et l'autre tourmentés d'une grande douleur
de goiit pour la" philosophie; mais il prit aux yeux, prirent de l'huile de cette lampe,
quelque teinture de la juiis|uudence. Dans s'en trottèrent \cs yeux, et furent guc'ris sur-
un âge fort avancé, il n'avait encore lu au- le-champ. Depuis ce lemps-lA, Fortunat fut
'
cun des écrits des Pères de l'Eglise. Il y si rempli de vénération pour saint Martin,

' Vila Marii. nuiii. .\, toui. I, art. edit Venet., " Forlunal, lili. VI, cap. XI et Xll.
pag. ion. — ' lliid. ' P.iulus, lib. li Uùt. Longoliard., num. 23.
» Sigelj., De Viris illust., cap. cxiv. — * l'.ig. IJO. Fortunat, Carm.,
» lib. \,cl lib. 1 De Vila Uaf'
• Frelii.Tus, Ilisl. Franc, toui. 1, jmg. 195; Du- Uni.
chesne, tom. I, pag. 859. » Paulus ubi supra.
[Vl" SlfeCLE.] CIIAPITIIK XLV. — SAINT FOIITIINAT DE l'OITIEUS, ETC. 403

qu'il abandonna l'Ilalic pour passer en Fran- ville, alla prier sur son lomljcau et pour ;

ce, au tombeau du saint ëvûque. Il fit ce ne point laisser ignorer ses vertus à la pos-
voyniïP quoique N'mps avant que les Lom- térité, il en fit l'éloge dans ime ('pitaplic

bards fissent une irniiillon en llalie, et ainsi qu'il C(unposa à Poitiers même, ù la [)rière

avant l'an 5(18. Félix ne le suivit point, par- d'Afier, abin' de Sain'.-Hiiaire, où Fortmiat
ce qu'il avait clé fait évéque de Triivise. avait été inhumé. Il y relève " la beauté de
2. Fortunat prit sa roule par le royaume son génie la pénétration de son esprit, la
,

d'Anstrasie, où il fut bien reru par le roi Si- douceur de ses vers, et le service qu'il a ren-
geberl; il y était en 505. Son esprit, son sa- du ;\ l'i^glise en écrivant les vies de ceux
voir et sa vertu le firent chérir de [ilusieurs qui l'avaient édifiée par l'éclat de leur sain-
grands de la cour, et de plusieurs saints évo- teté, et congratule la France de conserver
ques; mais il lia une' amiliii partictdière un si précieux dépôt. Le titre de coryphée
avec Sii;(iald, à qui le roi avait donné com- des poètes, qu'il lui donne, ne peut se soute-
mission de défrayer Fortunat, et de le con- nir qu'en le comparant aux autres poètes de
duire partout où il souhaiterait d'aller. Après son siècle.
quelipie séjour la cour de Sigcbcrt, il alla à
i\ 4. Le plus considérable des ouvraircsdeFor-
° t^ccm te
poésies dlvl.
Tours pour satisfaire sa dévotion envers saint lunat en veis est un recueil de poésies sur di-
*
*« " ""'om-
vres. Livre I,
Martin. Il y fit connaissance avec saint Eu- vers sujets il est divisé en onze livres, et dé-
; ',°i"\ ^

'"•
J '
L.ioth. Pal.,
phrone, évéque de cette ville, et depuis avec dié à saint Grégoire, évéque de Tours, qui le f5^,'i„''f 'ij^"
saint Grégoire, qui en fut élu évéque en 373. lui avait demandé. Il eut de la peine à consen- «"i"- '«n.
ne Tours il vint à Poitiers auprès de sainte tir à le rendre public, parce qu'il avait com-
Radégonde, qui, ce semble, l'avait- demandé posé les poèmes qui y sont rapportés, ou eu
au roi Sigebert pour avoir soin de ses affai- voyageant au milieu des barbares, ou au mi-
res. Elle le fit, en effet, son aumônier et son lieu des neiges, ou en d'autres temps où le

chapelain mais avant de recevoir le sacer-


; froid et la fatigue rendaient sa veine poétique
doce, Fortunat s'y était préparé par l'étude presque froide et languissante aussi il le ;

de la science ecclésiastique, qu'il avait négli- prie de garder ce recueil pour lui seul, ou
gée jusqu'à son arrivée à Poitiers. de ne le communiquer qu'à des amis sages
3. Le siège de cette ville étant devenu va- et prudents. Le premier livre commence par
si fail
I de
cant par la mort de saint Platon, l'un des un poème en l'honneur de Vital, évéque de
disciples de saint Grégoire de Tours, Fortu- Ravenne il est suivi de Celui que Fortu-
;

nat fut choisi pour le remplir. Platon avait nat composa à l'occasion de l'église que le
été fait ' évéque de Poitiers en 592, il mourut même évéque avait bâtie dans la même
en 599 Fortunat était donc fort avancé en
; ville sous l'invocation de saint André, et où

âge lorsqu'il parvint à l'épiscopat, étant né il avait mis des reliques de saint Pierre et
au plus tard vers l'an 530. Saint Grégoire de de saint Paul, de saint Sisinue de saint ,

Tours ne le qualifie jamais que* de prêtre, Alexandre, de sainte Cécile et de quelques


parce qu'il était mort avant que Fortunat autres martyis. Il y en a un sur la cellule
fût évéque mais Baudonivie ^ religieuse
; , bàlie à l'endroit où saint Maitin avait donné
de Sainte-Croix à Poitiers, Paul Diacre, et Si- une partie de son manteau à un pauvre
gebert de Gemblours, lui donnent la qualité pour l'en revêtir un sur la dédicace de l'é-
;

d'évéque en quoi ils ont été suivis par le


; glise de Saint- Vincent, où un possédé du dé-
moine Aimoin et par d'autres écrivains pos- mon avait été délivré, aussitôt qu'on eut
térieurs. On ne sait point de combien d'an- apporté dans cette église les reliques du
nées fut son épiscopat. L'église de Poitiers saint martyr. Les autres sont, ou des des-
l'honorait comme saint dès le viii' siècle. criptions d'églises, de lieux et de rivières,
Paul, diacre d'Aquilée ,
passant par cette ou des éloges de Léonce, évéque de Bor-
'Vita Forlunati a Brovero, cap. m. ^ Ingénia clarus, sensu celer, ore suavis, eu-

'Yita Forlunali a Brovero, ibid. jus dulce melos pagina mnlta cnnit, Fortunatus
' Ruinart in nolis ad lih. IV De Miraculis S. apex i-alum, venerabilis aciu, Àusonia nalus, hoc
Martini, cap. xxxii, pag. 1133. tumulatur humo. Cujus ab ore sacro sanclorum
* Oreg. Turon., pag. 995, 1016, 1017. gesta priorum Discimus : hœc monstrant carpere
» Mabil., Act. Ord. S. Bened., tom. I, pag. 309 ;
lucis iter. Feiix quœ tantis decoraris, Gallia, gem-
Sigebert, De Vir. illust., cap. slv ; Paulus, Hint. iiiis. Luinine de quarum nox tibi tetra fugit.IIos

Longob., lib. XI, uuqi. 23 ; Aymon., lib. 111 De Gest. modicos feci plebvio carminé lerxus, ISe tuus in po-
Franc., cap. xui. puUs, Suncte, lateret honor. Yila Fort-, pag. .526.
4n.i HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIOraS
dcaux. n avait renouvelé régli«c de Saint-Eu plise de Paris était teinte du sang de Jésus-
peiiulie diverses images' sur les Christ il remarque qu'elle prenait ' jour par
liopc, et fait ;

murailles en avait bâti d'autres tout à neuf,


; il des fenêtres vitrées. Il coniimsa son poème
une entr'autres en l'honneur de la sainte en l'honneur du clergé de Paris lorsque ,

Vierge, où il avait nii? ' les vases nécessai- saint Germain en était évèque. C'était dès

res pour conserver le corps et le sang de Jé- lors l'usage que les ministres de l'autel fus-

sus-Christ. sent vôtus de' blanc dans leurs fonctions.


L.c Ml,
5 Qn r^
second livre l'hvmne
j^jg jjins le Launebodc avait bâti une église ii Toulouse
Pange au nombre des poèmes de For-
lingiia en l'honneur de saint Saturnin Fortunat re- :

tunat, quoiqu'il v ait plus 'de raison de l'at- lève dans le neuvième poème cette œuvre
tribuer à Claudien Mamert les six autres ;
de piété et l'attention continuelle de ce saint
premiers poëmes de ce livre sont en l'hon- homme à nourrir les pauvres et à les vêtir ;
neur de la Croix le quatrième, le cinquième
;
en quoi il dit qu'il était secondé par sa fem-
et le sixième sont acrostiches : le dernier est me, qui vivait également dans les exercices
figuré eij-forme de croix, et tous lestroisont de la vertu. Le douzième est sur un baptis-
demandé beaucoup d'art et d'attention. For- tère que saint Sidoine, évêque de Mayence,
tunat y dit nettement * qu'il adore la croix en avait fait construire ; le poète y reconnaît
tout temps, qu'il la regarde comme le gage que Dieu, par les ' eauxméiiicinales du bap-
certain de son salut et qu'il la porte avec lui tême, noius rachète de la mort du péché
comme sou refuge dans ses besoins. 11 y a que nous avons contracté par notre origine.
toute apparence qu'il composa ces poëmes Le même évêque une église de
avait bâti

ii l'occasion du bois de la Croix que sainte Saint-Georges: Fortunat dans le treizième fait

Radégonde obtint de l'emperenr Justin pour poème l'éloge de ce martyr, en insinuant


son monastère de Poitiers. 11 en faut excepter qu'il était mort par le supplice* du feu, après

le troisième poëmc, qu'il lit pour une église avoir auparavant souHert la prison, la faim,
de Tours que saint Grégoire avait dédiée la soif, le froid et divers autres mauvais trai-

sous le titre de la Croix. A l'égard du Vexilla tements pour la foi de Jésus-Christ. Il rap-
Régis , personne ne doute que cette hymne porte dans l'éloge de saint Hilaire les vic-
n'ait été faite pour la cérémonie de Poitiers ;
toires qu'il avait remportées sur les ariens,

les deux dernières strophes ne sont pas les et de vive voix, et par écrit dans celui de ;

mômes dansFortunat que dans l'ollice de l'E- saint Médard, plusieurs miracles opérés à
glise il y a aussi quelques changements dans
;
son tombeau. 11 fait saint Maurice' chef de
la seconde. La plupart des autres hymnes la légion thébéenne. [A la fia du 111° livre

ou poëmes du second livre sont a la louange de l'édition de Luchi, réimprimée dans le


de plusieurs saints évèques, comme de saint tome L.V.VXVIll de la J'atrotogie latine, on
Saturnin de Toulouse, de saiut Mamice et trouve une pièce de vers en l'honneur de
de ses compagnons, de saint Hilaire de Poi- saint Martial Les principales traditions du
:

tiers, de saint Mcdard de Noyon les autres ;


Liniousiu sur le compagnon de saint Pierre
sont sur divers sujets. Le dixième est un et l'apùtre de l'Aquitaine. Ce poème est tiré

éloge du zèle et de la piété du clergé de d'un manuscrit du commencement du Xii'


Paris, et le onzième une description de l'é- siècle, qui renferme un passionnairc et porte

glise de celte ville. Fortunat la compare au ce titre Vers de Fortunat sur la vie de
:

temple de Salomou, disant qu'elle le sur- saint Martial, a/n'itre du Christ. Les éditeurs

passait, en ce que les ornemenis de ce tem- des Anecdotes liltci-aircs avaient di'jA pu-
ple n'étaient que matériels, au lieu que l'é- ))lié ce poème, Rome, 1783, vol. IV, pag.

' Sumpsil iiiiiigincds paries simulandn figuras, ' Prima capit radins vitrcis oculala senculhs.
t/uœ neque trcln prius, liiuc iiwdo picla vilcnt. Ui'ul., Ilymii. II. — " tlli jum senio,ta»ien hi bene
Forluiiiil., lili. I, Carm. 13. veslibus albtnl. IMd., Ilyiun 10.
«iluneribusi/ue piis dotasti altaria Chrisli,
'
Traxil ongoiiecem de semint;sed Pater orbis
Cum lua fiisa fcrunl risceru sancta Dri. Sam Purgacil medicis crimina mortis aquis. Iliiii.
cruor el corpus Doiinni Itbamina sunimi, nie iiii- //l/HI»., 12.

nisleriutn, te Iribuente ïenit. Ibid. Carm. \:>. ' Carcere, cnde, famé, vinclis, siti frigore, ,

» \ iiJe loin. X, [.ag. 35.1. pamwis, Coufessus Christum duxil ad astra ,

* Crux Crui est quant sempcr


mihi cer(a sntux, caput. Iliid., Ilijmn. 13.
adoro,Crux Domini meaim.Crux niilii refugium. •yiio, pic ilauriti, dtictor legionis opimm, Tra-
J.il.. Il, lliJinii.U. xisli fortes subderc colla viros. Ibid., llymn. 15.
,

[VI" SIÈCLE.] CHAPITHK XLV. — SAINT F(tHT[JNAT DE POITIKRS, ETC. 403

433. Ces vers avaient 6US envoyés de Roino lion, qu'elle emprunte, sans s'en diuiter, à
cil lOfiO au piTO nonavciiliiic-Saiiil- Aiiia- la de son siècle. D'ailleurs, ces
barharii!
lilo, par l'liilip[)e ilo Itulx'is, cliaiidino ar- vers se trouvent dans un luanuscrit de la
chiviste de Saint-Jean-de -Latran, qui les plus haute anti(iuité, conservé dans les ar-
avait tirés d'un manuscrit sur parclie- chives de Saint-Jean-de -Latran on les lit ;

uiin très -ancien, un passion-


leni'erinant encore dans ua manuscrit du couvent de la
naire ou sancloral dans lt;([uel on lit C(!s Miut'rve que le savant Bréniorul attribue au
vers de Fortuuat en tète de la légende de viir' siècle ou au plus tard au ix". Croi-

saint Martial, ])ar Aurélien. Le père Bona- ra- 1- on que ces vers aient été composés
venture a public ces vers dans son picaiior sous le nom deForlunat,du vii'siècleau ix"?
volume sur saint Martial, sans savoir qu'ils Mais à celle époque tout à l'ail barbare, on ne
fussent de Fortuuat. L'abbé Uouard, dans savait pas faire des vers d'une telle éh'gaucc
un voyage l'ait à Rome au mois de juillet et d'une pareille latinité. Ces vers portent le
1853, a trouvé ces mêmes vers à la Biblio- cachet d'une époque latine, d'une époque où
thèque du couvent de la Minerve dans ini encore Virgile etCicéron.uDans
l'on (Hiuliail
vieux manuscrit que le savant Bicmond V Appendice le savant auteur compare les
,

général des Dominicains, allirmait remon- vers de c^ poëmc avec les autres œuvres do
ter au viii° siècle ou au plus tard au IX^ Fortunat; 11 y remarque les mêmes pensées,
Comme ces trois manuscrits, de Florence, les mêmes tourimres de phrases, les mêmes
de Saint-Jeaii-de-Latrau et de la Mineive of- expressions rares et particulières à ce poète.]
frent quelques légères variantes, en les cor- (j. Le troisième livre est composé de trente- Llvn
Même,
rigeant l'un par l'autre, M. l'abbé Arbellot, sept lettres, partie en vers, partie eu prose;
dans sa dissertation sur l'apostolat de saint elles sont presipie toutes à des évoques avec
Martial, Paris, Victor Didron, 1833, 1 vol. qui il était lié d'amitié. dans le neu-
Il traite

in-8, pag. 73 , est arrivé à donner une édi- vième du mystère de la résurrection c'est de ;

tion irréprochable. Ces vers l'ont mention là que l'on a tiré la première strophe du répons
de la race de saint Martial de la tribu de que l'on chante dans les processions le jour
Benjamin, de sa prédication à Rome a\ec de Pâques, et qui y est répétée par manière de
saint Pierre, de son apostolat égal à celui de refrain; elle commence par ces mots Salve :

saint Pierre, de sa mission dans les Gaules fcsla dies. Dans la dixième, il relève l'industrie
et de sa sépulture A Limoges. Sont-ils au- de Félix de Nantes, qui avait su aplanir une
thentiques ? Sont-ils sortis de la plume de montagne pour changer le cours d'une ri-
Fortuuat ? « Mais dit M. Arbellot
, pour ,
vière, et donner pur là aux peuples le moyen
donner un démenti au titre qu'ils portent de vivre, en leur donnant des terres à culti-
sur un manuscrit qui date du commence- ver. Il parle dans la onzième des forteresses
ment du xii° siècle, il faudrait de très-gra- que Nicet, évêque de Trêves, avait construi-
ves raisons, il faudrait démontrer claire- tes sur les bords de la Moselle. Il fait dans
ment que ces vers ne sont pas dans le style la quatorzième la description du pays Mes-
de Fortunat et qu'ils ne portent pas son ca- sin, et des deux rivières dont il est arrosé, la
chet litléiaire. Or, bien loin de la, ces vers Moselle et la Seille; la ville de
il représente
portent tellement sa marque, que des sa- Melz comme bien fortifiée. La
vingt-neuvième
vants italiens, tels que Bandini qui les a dé- est un éloge de saint Ayric, évêque de Vei--
couverts dans la bibliothèque de Florence, dun, qui, avec les dépenses qu'il faisait pour
monseigneur .^maduziii qui les a publiés h le soulagement des pauvres, trouvait encore

Rome eu 1783, l'illustre cardinal Luchi qui le nio}ende rétablir les anciennes églises et
les a insérés dans son édition romaine de d'en bâtir de nouvelles. Il loue aussi, dans la
Fortunat en 1786, n'ont pas émis le moin- trentième, son savoir et son assiduité à ins-
dre doute sur leur authenticité. C'est, en ef- truire son peuple. On voit par la trente-
fet, le geure de Fortunat ; c'est le style du deuxième, que l'abbé Paterne l'avait prié de
VI'' siècle, c'est la facilité de ce poète qu'on corriger un livre, qu'il parait que Fortunat
a appelé avec raison le dernier des poètes avait écrit de sa propre main, et où il s'était
latins. C'est sa manière, c'est-à-dire une glissé des fautes qu'd avoue lui être assez
certaine jH-éteution à l'élégance (|ui, ne sait ordiiuiires. Il était du côté de Nantes, lors-
pas toutefois se débairasser d'une certaine ([u'il écrivit à Drucon, diacre de l'église de

rouille, d'un certain embarras de construc- Paris; cette lettre est la trente-deuxième,
,

-406 mSTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


Les trois suivantes sont aussi h des diacres, que mais Fortunat y reconnaît qu'on ne
,

et ne sout que des lettre* d'amitié. peut louer les ministres de Jésus-Christ dans
"'• Ou trouve dans le quatrième livre vingt- la conversion des peuples, sans louer Jésus-
irifmj" îîgi
*'*
huit épitaplies, dont les dix premières sont Christ même qui inspire ' la bonne volonté,
pour divers évêques de France, les autres qui donne le parfaire, et sans qui il ne se fait
pour des personues de conditions différen- rien de bien, puisque c'est lui qui remplit de
tes. Il y en a une, qui est la vingt-cinquième, ses lumières les prophètes et les prédica-
pour la reine Tliéodécliikle, femme de Clia- teurs, afin qu'ils engendrent la foi dans le

ribert il en est parlé dans saint Grégoire


;
'
cœurde ceux qui les écoulent. Cette foi con-
de Tours. siste à croire ' qu'il n'y a qu'un Dieu en trois

qi.um7 ^" ^' ^'' première lettre du cinquième livre personnes, le Pèie, le Fils et le Saint-Esprit,
"'•
est adressée à Martin, évêque de Dume en qui ont un même droit, une même puissance.
Galice. dans ce pays-là, lorsqu'on y
Il était Abiaham, qui connaissait que ces trois per-
apporta au roi Théodémir des reliques de sonnes étaient égales en tout, et ne faisaient
saint Martin de Touis, et ce fut lui qui don- qu'un même Dieu, lava les pieds à trois, et
na aux Sùèves de Galice la règle de la foi. For- n'adora et ne pria qu'un seul. Fortunat s'é-
tunat lui décerne pour ce sujet de grandes tait proposé de composeï- un acrostiche qui

louanges, l'appelant apôtre de la Galice, et fût en autant de lettres que Jésus-Christ a


le prie d'intercéder tant pour la reine Radé- passé d'années sur la terre, et de renfermer
gonde et Agnès abbessc de Poitiers, que
, dans ce poème l'histoire de la création de
pour lui, auprès de saint Martin. Cette lettre riiomme, de sa chute et de sa rédemption;
est en prose mais la seconde au même évê-
; cela ne lui fut point aisé, mais il en vint à
que est en vers. Fortunat y marque les pays bout. Il l'envoya à Syagrius, évêque d'Autun,
où les apôtres avaient annonce l'i^vangile; à qui il écrivit une lettre en prose pour lui
saint Pierre à Rome, saint André en Adiaïe, leudre compte de son travail, et de la ma-
saint Matthieu en Ethiopie, saint Thomas en nière de lire cet acrostiche. Les autres let-
Perse, saint Barthélemi dans les Indes, saint tres n'ont rien d'intéressant ; la plupart sont
Paul en Illyrie et en Espagne. Il suivait en adressées à saint Grégoire de Tours, pour le
cela l'opinion de plusieurs anciens. Il fait remercier des présents qu'il en avait reçus,
honneur à saint Martin de Tours d'avoir été ou pour lui recommander des personnes
l'apôtre des Gaules, sans dire qu'il en ait été qui allaient ti Tours.
le premier. Fortunat parle dans la même let- 9. Les douze poèmes du sizième livre sont un» ^in

tre du monastère de Poitiers, et de la règle presque tous sur des matières profanes. Le
de saint Césaire qui y était établie il recom- ; second est l'épilhalame du roi Sigebertetde
mande à l'évoque Martin Agnès, qui en était Brunehaut. Fortunat le composa pour le
abbesse, et sainte Radi'gonde, qui l'avait jour même de leurs noces, qui furent célé-
fondé. La troisième lettre est aux citoyens de lirées en 5(35; ainsi il était dès lors en Aus-
Tours, qu'il congratule sur le choix qu'on trasie dans la cour de ce piince. Le quatrième
avait fait de saint Grégoire pour leur évê- est remarquable par les louanges qu'il y
que; il le compareAthanase, h saint
à saint donne au roi Charibert, ou Caribert; saint
Basile, et aux plus grands évè(|ues des siè- Grégoire de Tours n'en avait publié que les
cles précédents. Il en fait encore l'éloge dans vices, sui'Iout sou incontinence, qui le Ut ex-
les trois distiques qui viennent ensuite il pa- ; communier par saint Germain, évêque de
raît qu'on l'avait prié de les faire pour être ré- Paris. Fortunat relève ses vertus, le faisant
cités pendant l'ollice au jour de la naissance, passer pouiMin prince sage, modéré, équita-
ou peut-être de l'ordination de saint Grc-gcire. ble, zélé pour lajiistice et l'observation des

La cinquième regarde la conversion des juifs, lois, libéral, honnête, l'oracle de son con-

faite par le ministère d'Avit, évêque de Cler- seil, amateur des lettres, et qui parlait aussi

raont ; elle est suivie de l'éloge de cet évè- facilement le latin que le français. Le sixième

' Lib. IV IliH.. caji. xxvi. ^ Est Dcus, alla fides, unus lrinus,ct triims

' In veiterabilihvs famviis, operator opime vnits. l'frsonis prnpriis slal tribus uiitis nprr...
Cfiiideccl ul setnpi.r laus tuu, Christc, sonet, liis- i\((»i Voter
il (jenilus qtiuquf Siinctiis S]iir\ius
,

piruiis (i)iiiiiuiii, roluiii effeclunniue miimtraus, idcir Sic tribus est iinuin jus, npus, urdo, Ihro-
;

El shie qiio iiullum prœvatct ense bonutn... I.u- mis... fAbrahntiii Trcs ivlct injutilcs, uttum vene-
mine perspicuo facuiittanspiclora radiwi, Vt po- riitus adorai, Inum tuce rogat, 1res quoque pelv9
pulis geneycnl visverasoiula fiileiii.\À\>.\.Epist.j. lavai. Uiid., Epist. 5.
[vi" sifxi.E.] CHAPITRE XLV. — SAINT FORTUNAT DE POITIKRS. 407
("st t'-ln^o de Rprlliocliililo, de su modes-
1111 donne la première place i\ la sainte Vierge,
lie, de sa prudence, de son amour pour les puis aux patriarches, aux prophètes, aux
pauvres. Le scpli^me regarde le mariage de apôtres, aux martyrs et aux vierges. Il mar-
Oîilsiiindo avee C.liilpc^ric elle ('l:iil lilie d'A-
: que les •ndroits où
croyait qu'(-laienl morts
il

thaiiagilile,roi dcs^'isigotlls en Ks[iaL;iie ; elle les apôtres et les cvangi'listes et la plupart des
quitta, comme sa sœur Brunchant.riuh'ësie martyrs les plus connus; saint Pierre et saint
arienne pour embrasser la foi catholique. Paul à Rome, saint Jean i\ l'iphèse, saint An-
um .fp. 10. Tout ce qu'il y a de plus intt'ressant dr('' en Achaïe, les deux saints Jacqiu^s dans la

M>. dans le septième livre, composé de trrînte-un Terre-Sainte, saint Philippe à llii'iaple, saint
poëmes, est le parallèle, qu'il fait dans le Thomas h Édesse, saint Barthélémy dans les
douzième, des sages et des savants du pa- Indes, saint Matthieu àNaddaver, lieu à pré-
ganisme avec les vrais chrétiens. Il n'est sent inconnu, saint Simon et saint Jiide dans la
resté !\ ceux-là qu'une vaine réputation ;
Perse, saint Marc et saint Luc en Kgypte, saint
ceux-ci jouiront d'une félicité éternelle dans Cyprienen Afrique, saint Vincent en Espagne,
le ciel, et seront même honorés sur la terre, saint Alban en Bretagne, saint Victor ;ï Mar-
parce qu'il n'y a point de salut à espérer,
'
seille, saint Genès à Arles de même que saint
point d'honneur solide et permanent, qu'en Césaire, saint Denis à Paris saint Symphorien
se rendant par la vertu agri'able à Dieu, A Autun, etc. Ilconfesse que Dieu, en se fai-
qui est un en trois personnes. On peut encore sant homme, n'a pas été changé en la chair
remarquer ses deux distiques sur la brièveté dont il s'est revêtu; mais qu'il a pris des
de la vie. Tout passe dans un momcul, nous ^ membres humains sans aucun "
changement
devons donc nous attacher aux biens qui ne de sa part, ne s'étant incarné que pour être
périssent jamais ; soyons (jquitables envers vu comme homme parmi les hommes. Jésus-
tous, cultivons la paix, aimons Jésus-Christ : Christ est un en deux natures, et vrai dans cha-
cherchons des délices dont nous puissions cune, c'est-à-dire vrai Dieu et vrai homme,
jouir éternellement. égal à sa mère par son humanité, égal à son
Lure hui- 11. Il fait, dans le premier poëme du hni- père par sa divinité. Il n'a rien confondu de
'

"I- tième livre, le détail du lieu de sa naissance ce qui lui appartenait, mais
il s'est uni tout

et de ses ditt'érentes demeures jusqu'au ,


ce que nous avions, excepté le péché c'est ;

temps où il s'attacha au service de sainte Ra- du Père qu'il lire sa divinité, comme de sa
dégonde, dont il décrit la vie, telle qu'elle la mère son humanité. Très-haut par son origine
menait dans le monastère de Poitiers. Il parle, du Père, anéanti par celle qu'il tire de samère,
dans le second, de la peine qu'il avait de il est moindre que son Père par la naissance

quitter cette sainte pour aller rendre visite à qui le rend égal à sa mère. Fortunat rapporte
saint Germain de Paris. Le troisième est un les prophéties et les figures qui annonçaient
hymne sur la nativité de Notre-Seigneur. Le la venue de Jésus-Christ, etmontre qu'elles
quatrième et le cinquième sont ;\ la louange ont été accomplies en lui. Il donne à la sainte
de Jésus-Christ, de sa sainte' Mère, qu'il ap- Vierge les plus magnifiques titres, comme
pelle Mère de Dieu, et en l'honneur de la d'autel de Dieu, d'ornement du paradis, et
virginité, qui seule a été digne de ' mettre -de gloire du royaume céleste; à quoi il ajoute
au monde le Tout-Puissant, et qui est si ex- qu'elle sera bénie à jamais, et son nom tou-
cellente en elle-même, que les expressions ' jours honoré. dans le sixième poëme,
Il dit
manquent pour en exprimer tout le mérite. que les récompenses promises aux vierges
Fortunaty fait une description admirable de tiennent ' le premier rang après celles qui
l'assemblée des saints dans le ciel, où il sont dues aux apôtres, aux prophètes et aux

' Est tamen una sains, pia, maxima, dulcis et " Virginitas felix, nuUis œqtiandaloquelis.Uiid.
ampla Perpehio trino passe placere Deo. Lib. VI, " Kon Deus in carnem est versus, Deus accipit
Hymn. 12. artus,Non se permutans, sedsibi membralevans:
' Vita brevis honiinum, fugiunt prœsentia re- Cujus non poleral deitas per aperta videri, Vela-
rum: Tu cote qutv potins non moritura manent. nien sninpsit, carne videndus homo Unus in am-
Erige justitiam, cote pncem, dilige Christnm. Ex- babns}iatnris, rerusinipsis, /Equalis matri hinc
pele dctici<(s. guas sine jine géras. \h'ul. Ilymn. 27. , par drildlc l'alri; No>i sua confundens, silii nos-
' Inde Dei genilrix, pia Virgo Maria coruscat. tra, sed omnia neclens (Juem sine peecntn gignit
Lib. VIII, Hymn. 4. iilerque virum... De Pâtre sublimis, de denitrice
* Virginitas {dix, quœ partuest digna Tonan- huinilis. Lib. Vlll, Hymn. 5.

tis. Ibid. ' Intir aposlolicas actes sacrosqxie prophelas


408 HISTOIRE GI^NÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
martvrs. Les six suivants sont A la louange Père, mais au pluriel noire Père, parce que

de sainte HadëLrondo, et les douze derniers nous ne devons pas prier pour nous seuls,
en l'honneur de saint GrL'goirc de Tours. On mais en général pour tous nos frères, dont
voitpar le neuvième, que la sainte employait nous ne devons jamais nous séparer, étant
lesprémices des fleurs du printemps à en
'
tous les membres d'un même corps, qui est
orner les autels; par le onzième, qu'elle s'en- l'Eglisede Jésus-Christ. Mais pour avoir droit
fermait pendant un mois chaque année avant d'appeler Dieu notre Père, il est nécessaire
de Pâques, pour s'y préparer. Parmi r]ue nous croyions en Jésus-Christ, et que
la fête
lespoëmes adressés à saint Grégoire, il y a nous le reconnaissions pinir ce qu'il est,c'est-
une lettre par laquelle Forlunat lui recom- .Vdire vrai Dieu et vrai homme Dieu n'est ;

mande la cause d'un prêtre qui avait besoin donc point le père des ariens, des juifs, des
pliotiniens, des manichéens, des saljelliens,
de sa protection.
de Chilpéric dans le
12. L'éloge qu'il fait ni des autres hérétiijues, qui n'ont pas une
Livre neo*
ne sutlit
livre est si général, qu'il foi pure en Jésus-Christ. Pour nous qui con-
679. neuvième
mauvaises impressions fessons sur ta terre que Jésus-Christ est fils
pas pour.détruire les
que les historiens du temps ont données de de Dieu, nous avons un Père dans le ciel. En
ce prince, et il faut dire la même chose de disant (jue votre nom soit sanctifié, nous ne

celui qu'il fait de la reine Frédégonde, son prétendons point que l'on puisse ajouter à la
épouse. Fortunat fit les épitaphes des deux sainteté de Dieu; nous demandons seulement

tUs de Chilpéric, Dagobert etClodobert, dont que son nom soit béuiet loué continuellement
le premier expira auprès du tombeau de
partout en toutes sortes de langues, et que

saintMédard, où on l'avait porté dans l'es- ceux-là même qui sont encore dans l'infidé-
pérance d'obtenir sa guérison, et fut enterré lité, le connaissent, pour louer et bénir son

à Saint-Denis; le secondent sa sépulture saint nom. Lorsque nous prononçons ces pa-

dans l'église des saints Crépin et Crépinien. roles Que votre règne arrive, elles ne doi-
:

Les sixième et septième poëmes sont une ré- vent pas nous induire à douter que Dieu ait
ponse à la lettre que saint Grégoire de Tours toujours régné partout, et que son règne

lui avait écrite en vers. Le neuvième est un soit éternel, mais nous faire souhaiter que

éloge de Sidoine, évèqiie de Mayence. Dans le royaume qu'il nous a promis nous soit

le seizième, il fait celui du général Clirodin. accordé par Jésus-Christ notre médiateur;
13. Le dixième livre commence par l'ex- en sorte que nous ne mettions notre espé-
LlTre dlxiè-
ire, pBg^> 583,
plication de l'Oraison dominicale: le style en rance ni dans les richesses, ni dans aucune
est beaucoup plus uet, plus coulant et plus chose créée. De même, quand nous deman-
naturel que celui des autres écrits de Fortu- dons que sa volonté soil faite, ce n'est pas que
nat en prose, ce qui donne lieu de croire que quelqu'un puisse résister à sa volonté, ou
c'est un des discours à son peuple, où il ne empêcher que le Tout-Puissant ne fasse tout
cherchait qu'à l'instruire. « Il n'appartenait ce qu'il veut la fin de cette prière est que la
;

qu'au Fils de Dieu de nous apprendre a bien volonté de Dieu soit accomplie en nous, et

prier le Père, puisque * le Père est tout en- qu'il en procure lui-même l'accomplisse-
tier dans le Fils par l'unité de substance, et
ment, parce que notre adversaire s'opposant à
qu'ainsi le Fils connaît mieux le Père, que nos bons désii-s, nous ne pouvons les accom-
plir en faisant la volonté de Dieu, s'il ne nous
ne l'ont connu les patriarches ni les prophè-
Dieu notre Père dans aide de son secours. Mais quelle est la vo-
tes. Nous appelons
prière, parce qu'en renaissant dans les lonté de Dieu? Elle nous est marquée dans
celte
le Déralogue ; Jésus-Christ nous l'a enseignée
eaux sacrées du bapléine, nous devenons les
enfants de Dieu, non par natu re, comme l'est
'
dans son Évangile. Cette volonté pous étant
Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui est né de la connue, nous n'avons plus d'excuse pour
substance du Père, mais par adoption et par nous dispenser de la faire. Jésus-Christ disait
mon ;\son Pèie « Que votre volonté se fasse, et
grâce. Nous ne disons point au singulier
:

suhsInnliiT, non confuMone personœ, suhjectum


Proxima marlyribus prœmia virgo tenet. Ibiil.,
liabehal hoc nosse. Lili. I, nuiii. I.
llymn. G.
otloreu, ' Sed licet non simus de eo Pntre.sic Filii.quo-
At vos non vnbii, sfd Chrislo fertis
'

Texis- wniln persona Dntuini nnstri Jrsii Chrisli, quia


lins qurn/ur primitias a'I pia templudalis,
illr de ipsius suhslaiilin nains est. nos aulem rfi-
lis rnriix nllnri'i frsln curoiiis. Ilii.l.. Ilijmi.
giiiilus est creure de terra: allamen,pcr gratiam
9.
' enim, in i/uo Pater est lotus unilnln Vnigenili, nos effici meruimus adoplivi. Ibiil.
l'ilius
,,

[vi- SIÈCLE.] CHAPITRE XLV. — SAINT 1> UllNUNAT DE POITIEHS, ETC. 409

11(111 la mienne. » Comment' donc l'homme seigneur de lu cour, nommé Numulènc.


pousset-il son orj;ueil jusqu';'!dircque lu vo- dont deux sont pour le consoler de lu mort
loulo qu'il a du bien lui vient de lui-mûme, et de sa tille; puis une autre à l'église de Tours,
non pas lie Dieu? Si la bonne volonté est de que de rétablir; ensuite
saint Cirégoire venait
riioiuuie.sans qucDieulalni ait inspiiiM!, (lue le récit de plusieurs miracles ()])i;rés par
le chrétien dise donc dans l'oraison domini- saint Martin deux poèmes à la louange du
;

cale : Que ma volonté se fasse, puisqu'elle est roi Childebert et de la reine Brunehaut la ;

bonne. Mais Dieu ne plaise que qucitiu'un


à description d'un voyage que Fortunat avait
le présume ainsi; qu'il prie au contraire ((ue l'ait sur la Moselle depuis Metzjusiju'à An-
la volonté de Dieu se fasse dans l'homme, et deruach dans l'évêché de Cologne un poème ;

non la volonté de l'homme, qui n'a pas le en l'honneur d'une église où l'on révérait
bon vouloir si Dieu ne le lui inspiie, selon particulièrement l'archange saint Gabriel
t'Mimi qu'il est écrit : Mon Dieu, votre misévicurde et où il y avait des reliques de saint Georges,
me préviendra. Ce n'est donc pas la volonté de saint Cosme et de saint Damien et d<! ,

ile^l'homme qui prévient Dieu; c'est Dieu qui quelques autres martyrs; un à la louange
prévient l'iiomme, lors même qu'il ne veut d'Armentarie, mère de saint Grégoire, qu'il
pas. Fortunat prouve celte vérité par divers compare à la mère des Machabées , soit

passages des épiiresde saint Paul. Il est ad- pour sa vertu soit pour le nombre de ses
,

mirable que Dieu, après nous avoir ensei- enfants un au comte Sigoald, où il fait l'é-
;

gné dans les trois demandes précédentes à loge de l'aumône parce que ce seigneur
,

ne soubaiter que des biens spirituels, nous était chargé d'en distribuer de la part du
apprenne dans la quatrième en demander à. roi Childebert. On y voit aussi que Sigoald
de temporels, en disant Donnez-nous notre : avait fait un pèlerinage au tombeau de saint
pain quotidien ;mais c'est que ce pain quoti- Martin pour la santé de ce prince. Les au-
dien nous est nécessaire en cette vie pour tres poèmes sont sur diverses matières.
en acquérir une éternelle. Ce pain n'est pas iA. Le onzième livre contient vingt-cinq ,„J;''"s.°"'*

seulement celui qui est destiné à la nourri- petitspoèmes, qui sont ou des remercîments
ture de notre corps; c'est encore celui qui à sainte Radégonde ou à l'abbesse de son
nourrit notre âme, c'est-à-dire Jésus-Christ mouastère pour des présents que Fortunat
,

même. La demande suivante -.Remettez-nous en avait reçus ou des compliments sur le


,

nos dettes, est non-seulement pour en obtenir jour de leur naissance. 11 marque dans le
la rémission, mais aussi pour nous entrete- quatrième, qu'd s'était joint à Agnès pour
tenir dans des sentiments d'humilité ce- ; engager la sainte à boire un peu de vin dans
lui-là n'ayant pas sujet de s'élever, qui prie ses intiimités , et qu'il l'avait pressée sur ce
pour le pardon de ses péchés. Nous ne pou- sujet, par la considération de l'avis que saint
vons l'obtenir qu'en pardonnant aux autres; Paul avait donné h Timothée dans un cas
c'est une loi que nous nous imposons nous- semblable. Il leur adressa deux autres poè-
mêmes, eu disant : Comme nous les i^emet tons mes, où il fait la description de deux de ses
à nos débiteurs. Mais pourquoi au sortir du voyages. Tous ces poèmes sout précédés de
baptême et de la communion du corps de Jé- l'explication du Symbole qui est dans le ,

sus-Christ, demandons-nous que nos péchés même goût que celle de l'oraison domini-
nous soient remis, si ce n'est parce qu'à rai- cale. Il enseigne ' avec les anciens Pères ,

son de notre faiblesse nous ne pouvons con- que les apôtres composèrent ensemble ce
server notre innocence, si Dieu ne daigne symbole avant de se séparer, afin que la

nous garder par sa grâce?» L'explication règle de la foi qu'ils prêcheraient en diffé-
de la dernière demande est restée ina- reuls pays se trouvât la même partout.
chevée. Suivent trois lettres en prose à un » Elle est appelée Symbole , dit Fortunat

• Et homo quare tam superbusest, ut volunta- juxta illud: Deu3 meus, misericordia ejus praeve-
tem siH ex se esse dicat ad boyium, et non potius niet me. Ergo non voluntas hominis prœvenit
Dei esse imcnus lestelur ? Quod si bona voluntas Denm, sed Dei vnsericordia prwvenit hominem
ex homine eut sine Dei inspiralione, dicat ergo non volenlem. Lib. X, nuiu. 1.
> Adhuc in unoposili apostoli hoc inlerseSym-
Christianus in oralione, Fiat voluntas men, quo-
niam hona est. Sed absit ut hoc aliquis confileri bolum, unusijuisque quod se)isit dicendo, condi-
piasumal; immo magis deprecelur ut fiât volun- dcrunt. ut discedentes ab invicem hanc, regulam
tas Dei in homine, non voluntas liominis, quœ per onines génies œqualiler prœdicarent. Lib. XI,
bonum velie non habel, nisi Dominus inspirel, uuiu. 1.
,

410 HISTOIIIE G!':N1-:IIALE des auteurs ECCLESIASTIQUES.


parce qu'ils conférèrent ensemble sur la ma- les oracles des prophètes, qui ont aussi pré-
nière de la rédifrer et Jugement, parce que ;
dit son ascension et sa gloire dans le ciel.
par elle on juge de la droiture de la foi. Nous En disant que nous croyons au Saint-Esprit,

y faisons d'abord profession de croire en nous achevons la confession de la foi en la

Dieu, terme qui signifie une substance éter- sainte Trinité , reconnaissant qu'il y a un
nelle car Dieu est sans commencement
: Père, un Fils, et un Saint-Fsprit que nous ,

sans fin simple incorporel incouapiéhen-


, , , exprimons en termes dilforents ', pour mar-
sible.Nous l'appelons Père, parce qu'il a quer la distinction des personnes. Nous fai-
véritablement un Fils qui est de même na- sons aussi profession de croire qu'il n'y a
ture que lui, et qui lui est égal en tout. En qu'une seule Église, comme il n'y a qu'une
vain chercberail-on comment s'est faite cette foi, qu'un baptême la rémission des péchés,
;

génération inconnue aux anges


: elle est ,
ne doutant point que Dieu, qui a pu former
comme elle la été aux prophètes; le Père l'homme d'une masse de boue, ne puisse
seul en connaît la manière, avec le Fils qu'il le purifier de ses péchés et la résurrection ;

a engendré nous devons la croire et non


: , de la chair, prédite par les prophètes, n
pas l'approfondir. Le nom de Jésus signifie Quehiues-uns croyaient que, parles vi-
sauveur en hébreu celui de Christ , oint ; ;
vants qui seront jugés au dernier jour, il
l'un et l'autre se disent de Jésus-Christ, parce faUait entendre les justes et par les morts ,

qu'il est notre Sauveur, et qu'il a été oint les pécheurs; d'autres, ceux-là qui seront
Pontife éternel. Nous disons qu'il est Fils encore en vie lors du second avènement du
unique, à cause qu'il l'est en efi'el, et qu'il Sauveur, et ceux qui auront déjà subi la
n'a rien qui le puisse faire comparer avec mort et seront ensevelis. Fortunat croit que,
les créatures, qui ne sont que parce qu'il les par les vivants et les morts, il faut entendre
a tirées du néant. Les hommes sont appelés les âmes et les corps, parce qu'ils seront
filsde Dieu par grûce et par adoption Jé- , également jugés.
sus-Christ est Fils de Dieu par nature; né 15. SaintGermain ' gouvernait encore u. <ii..ir.

du Père avant tous les siècles, il est né de l'église de Paris, lorsque Fortunat composa v.f j, ^n
Marie dans les derniers temps, sans avoir ses quatre livres de la Vie de saint Martin ;
s»'-

contracté aucune tache de péché, ayant été c'était donc avant le vingt-huitième de mai
conçu dans le sein de sa mère par l'opération de l'an 57G, auquel saint Germain mourut.
du Saint-Esprit, qui a été le créateur de sa Ils sont écrits en vers, à la réserve de l'épllre

chair ce qui prouve la divinité du Saint-


: dédicatoire, qui est en prose; elle est adres-
Esprit. Il a soutfert sous Ponce-Pilate dans , sée à saint Grégoire de Tours à qui il rend ,

toutes les circonstances que les prophètes compte de son travail. Ce saint l'avait prié
avaient marquées longtemps auparavant. Sa de mettre en vers la vie qu'il faisait de saint
mort a été notre salut sa croix la marque , Martin mais il s'y prit trop tard. Fortimat,
;

de son triomphe. Il a choisi ce genre de '


sans attendre l'ouvrage de saint Giégoirc,
suppHce pour nous délivrer du péché ori-
,
eut recours à celui de Sévère-Sulpice, à ses
ginel, qui était la source de tous nos maux. Dialogues au livre de la Vie de saint Martin,
et
C'est avec raison que les apôtres ont mis qui sont tous en prose Fortunat en fit (jua-
:

qu'il était mort sous Ponce-Pilate, afin que tre livres en vers. Paulin de Périguoux avait

le temps de sa passion fût certain et incon- fait la même chose avant lui mais Fortunat ', ;

testable. Sa descente aux enfers n'emporte qui ne l'ignorait pas, quoiqu'il semble le
aucune ignominie y en a-t-il pour un prince
;
confondre avec saint Paulin de Noie, voulut
qui entre dans les prisons non pour y res- , apparemment satisfaire sa dévotion, en tra-

ter, mais pOur en faire sortir ceux qui y sont vaillant sur la même Il donne de matière.
détenus? Jonas, renfermé trois jours dans le suite toutes les circonstancesmarquantes de
ventre de la baleine figurait le temps que , la vie de saint Martin ses combats avec les
,

Jésus-Christ devait demeurer dans le tom- hérétiques, ses voyages pour le bien de l'E-
beau. Il en est sorti le troisième jour, suivant glise ses miracles
, son respect pour les
,

'Ergo ail hoc elegil Chrisluf principale suppli- ^ Inile Piirisiiicam placiilc prripcrntiis ad arcem,
cium lit hominein absolveret originnli pecctilo,
, (Jtiam modo Gennanus régit. Lib. IV, pa).'. G12.
qund eral principale tormcntum. Ibiii. ' Intercède, precar, retiiam. rir adepte eoro-
' Ul fiai distinctio personanim, vocabnla sc- niim... Inter et ipse Deum alque reum medialor
cernunlur. Ibid, adesto. Ibid.
[Vl* SIÈCLE.] CHAPITRE XI.V. — SAINT FOUTUNAT DE PolTIKllS, ETC. ill

prôtros qui les lui faisait piéfcivu- aux mis ,


l'inipiM-atricc Sophie. Fortunat loue ce prince rliU. roc, Til ;

cl on.
ses prëdiclions, les atlaqu(!s (ju'il eut à souf- sur la pureté de sa foi, sur son attachement
frir de la part des démons dont il fut tou- aux décrets du^concile de Ghalcédoinc, et sur
jdurs victorieux, sa charité envers les pau- le rappel des évoques exih's pour avoir pris

vres et les captifs, ses discours de piété les , la dcU'cnse de la vérité. Il semble faiie' hon-

visions dont Dieu le favorisa, son pouvoir neur particulièrement l'impératrice Sophie
;\

sur les éléments et sur lui-même. 11 finit sa du présent envoyé à sainte Rad('!gonde; c'é-
Vie en le suppliant d'être sou intercesseur tait un morceau considérable d(! la vraie

aupri'^s de Dieu, et de lui servir même de croix, et il n'oublie pas de nianiuer combien
médiateur, pour en obtenir le pardon de ses grande était la vénération de cette sainte
péchés puis, s'adressanl à son propre ou-
;
pour ce bois précieux, qu'elle adorait en fai-
vraf^e, il lui ordonne d'aller d'abord A Tours, sant des vo'ux à Dieu pour la prospérité de
où reposaient les reliques de saint Martin ;
ceux qui le lui avaient envoyé. Suit un
de passer de là ;\ Paris, dont l'évcque était poëme à Artachis, cousin germain de sainte
saint Germain; puis à Reims, où était le Radégonde, sur la mort d'Hermanfroy, son
tombeau de saint Rémi ensuite à Noyon ; ,
oncle et père d'Artachis : Thierry, roi d'Aus-
lieu de la sépulture de saint Médard et de , trasie, l'avait fait jeter du haut d'une muraille
continuer son chemin par l'Austrasie la , dans un fossé, où il avait expiré sur-le-champ.
de Venise, et par di- 18. Ce sont là tous les écrits de Fortunat Ej Igrammo
Souabe, le Tyrol, l'État & la Toiiaago

verses villes d'Italie jusqu';") Ravenne. Sans recueillis par Rrowère, et imprimés dans le de
n.
CbJlOobert

V^lilloa-,
doute que Fortunat avait dans tous ces en- dixième tome de la Bibliothèque des anciens Ar.iVct,, (l 'P.
3«7, edil.
droits des personnes avec qui il était lié d'a- Pères. ie ne sais pourquoi l'on n'y a pas inséré 1723. et lom,
1, Aoalect,,
mitié, et à qui il était bien aise de commu- une épigramme à la louange du roi Childebert 1 Qg, 366,

niquer ce (|u'il avait écrit en l'honneur de n, donnée en 1673 par dom Mabillon sur un
saint Martin. Ces quatre livres ne lui coû- manuscrit de l'abbaye de Saint- Vannes de
tèrent que deux mois de travail; aussi con- Verdun, deux ans avant la un de l'impres-
vient-il qu'ils n'ont pas toute l'exactitude sion de cette Bibliothèque; elle est en qua-
qu'il aurait pu leur donner, en mettant plus torze vers élégiaques, qui ne sont que des
de temps à polir ses vers. jeux de mots. Fortunat s'y nomme, et recom-
Po«ni8 sur 16. Dès l'an 531, Thierry, roi d'Austrasie, mande à ce prince un nommé Audulphe.
i'e Ir'Tbarin- après avoir vaincu Hermaufroy, roi de Thu- [Un trouve cette épigramme dans le tome
ge, jag. 613.
ringe, s'était rendu maître de tout le pays ;
LXXXVllI de la Patrologie latine, col. 334 et
la villede Thuringe qui en était la capitale et suiv.]
donnait le nom au royaume, avait été prise, 19. Entre les Vies des saints ^ qu'il com- Vies des
S.iim- compo-

mise au pillage et réduite en cendres, et les posa, nous connaissons de saint Ger- celle sées prr
tJD-t,
For-

habitants avaient été emmenés en esclavage. main ' évéque de Paris, imprimée dans '
En 553, Clotairo se soumit les Saxons et les Surius, dans Bollandus et dans le premier
Tliuringiens, et en se les soumettant il mit tome des Actes de l'ordre de saint Benoît,
tout à feu et à sang dans la Thuringe. La des- traduite en français par Jean Jallery, curé
truction de ce royaume fait le sujet du poëme de Villeueuve-Saint-Georges au diocèse de
de Fçrtunat il y fait parler sainte Radégonde,
; Paris, et mise sous presse en cette ville en
nièce d'Hermanfroy , et la représente pleurant 1623 celle de saint Aubin évêque d'An-
;

la perte d'un État qui lui avait donné nais- gers ', qui se trouve encore dans Surius ^,
sance , et celle de tous ses plus proches pa- dans Bollandus et dans le premier tome des
rents enveloppés dans la ruine de leur pays. Actes de l'ordre de saint Benoît; celle de
17. Le poëme suivant est à la louange de saint Paterne, évéque d'Avranches, qu'il l'é-
Ju?lin le Jeu.
no, cl à Ana- l'empereur Justin le Jeune et de son épouse crivit à la prière de Marcien, abbé d'Ansion,

>
Regina posceiHe sibi Radegttnde Toringa, Prœ- fusa precatur, Temporibus largis ut tibi constet
iuilnptalœ muiiera sacra crucis.. glorin suinma apex. Pag. 614.
tibi,rerumsalor alque redemptnr, quod tenct au- ' Les Vies des saints écrites par Fortunat se
gustnin celsa Snpliia gradiim... Per te crux Do- trouvent au tome FjXXXVIII Je la Patrol»gie la-
minitotum sibi vindical orhein. Hune piostrata . tine, toi. 437 et suiv,— 3Greg. Turon,, lili. V, Hist.,

loco supplex Radegundis adorât, El restro impe- cap. vni, —


* Surius et Bolland,, ad rfiem 28 maii.

s Greg., Turou. De Gloria


rio tempora longa rogat... A'ec inbis pereat quod Conf., cap, xcvi,
Radeguvdis amat... Assiduo cantu quœ pulvere 6 Ad diein 1 martii.
412 HISTOIRE Gi:Xi:ttALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
aujourd'hui Suinl-Jouin en Poitou nous l'a- : mencemenls du x' siècle. On n'a rien de bien
vons à du second loine des Actes de
Ja lin assuré sur l'auteur de la Vie de saint Marcel
doniMabillon, et au 16 avril des Bollandistes. évéque de Paris; les uns l'atlribuent à For-
Surius n'eu a donné qu'un abrégé qu'on tunat de Poitiers, d'autres à un évéque Ou
croit avoir été fait pour servir de leçons dans même nom, dont le siège épiscopal n'est pas
l'office du saint. La vie de sainte lladéj^onde connu. Saint Grégoire de Tours, parlant du
est divisée en deux livres dans le premier cette Vie, la cite saus dire de qui elle était,
tome des Actes bénédictins le premier est : ce (ju'il ne fait pas quand il cite quelque ou-
de Forlunat, plus au fait que personne des vrage de Fortunat; elle est d'ailleurs d'un
actions de cette sainte; le second de Baudo- style plus simple et plus naturel que n'est
nivie, relif^ieuse du monastère de Poitiers, celui de Fortunat de Poitiers. Cette ditl'é-
qui crut devoir rendre publiques plusieuj-s rence de style qui se remarque dans l'an-
circonstances que Forlunat avait omises. Le cienne Vie de saint llilaire, évêque de la
Père Labbe a fait imprimer, dans le second mémo ville, fait qu'on en attribue le premier
tome de £a Bibliothèque des Manuscrits, une
' livre à Fortunat, que nous venons de dire
vie de saint Arnaud, évêque de Rliodez. Su- être l'auteur de la Vie de saint Marcel, et le
rius en avait déjà donné une partie au second a Fortunat de Poitiers, qui l'aura fait
quatrième jour de novembre, sous le nom comme en supplément â ce qui mancjuait
de Forlunat elle est assez de son style
:
;
dans le premier livre ils portent l'un et
:

mais on ne peut la lui attribuer qu'en sup- l'autre le nom de Forlunat. A l'égard des
posant que Fortunat avait passé par lUiodcz Actes de saint Denis, évé(jue de Paris, dont
dans le cours de ses voyages, puisque l'au- M. Bosquet fait auleui- Forlunat de Poitiers,
teur de cette rie ' dit avoir été témoin, avec ils paraissent écrits sm- la lin du vu' siècle
toute la ville, d'un miracle fait au tombeau ou au commencement du suivant on en ;

du saint. On donne encore à Forlunat un juge ainsi parleur- conformité avec la Vie de
abrégé delà vie de saint Rémi, qu'on lit dans saint Gaudence, évêque de Novare, écrite
Surius au 1'^' octobre, et la Vie de saint Mé- sous le règne de Pépin-lc-Bref, qui com-
dard, évéque de Noyou; nous l'avons dans mença en 752 '. On ne voit pas sur quel
dans le tome VIII du Spiciléije de dom d'A- fondement ou a donné à Forlunat "la Vie de
chéry, et dans les bollandistes au 8 juin elle : saint Lubin, évêque de Cliarlres elle n'est :

fut écrite sous le règne ' de ïhéodebert, pe- point de son style c'est vraisemblablement
;

tit-fils de Sigebert. Un auteur du \V siècle


'
l'ouvrage de quelque clerc de celle église
attribue à Fortuuat la Vie de saint Gildard, qui, pour contribuer au culte déjà établi,,'au-
et de saint Médard son frère. Elle a été in- ra écrit sa vie et ses miracles, afin qu'on put
connue aux écrivains des siècles précédents ; eu au jour de sa fête. Cette Vie
faire le récit
mais après le témoignage de saint ' Grégoire se trouve dans premier tome defe Actes de
le

de Tours, nous ne pouvons douter que Fortu- l'ordre de saint Benoît, dans le second de la
nat u'ait travailli^à une Vie de saint Sévcriu, Bibliothèque du Père Labbe, en partie dans le
quoiqu'elle ne soit pas venue jusqu'à nous. La recueil deM.Duchène,toute entière dans les
Vie de saint Maurille, évéque d'Angers, n'est Bollandistes au 1-4 mars [dans le t. LXXXVUI
pas de Fortunat, comme l'a cru Tritlième, de lu l'atruluijie latine, col. ooO et sui^.]
trompé par une lettre faussement attribuée '20. (^utre la Vie de saint Sévcriu, dont

à saint Grégoire de Tours, où il est dit que saint " Grégoire de Tours fait honneur à
Fortunat avait, à sa prière, retouché les Vies Forlunal, nous avons perdu les hymnes qu'il
de saint Aubin et de s;iint Maurille; uiais avait compusécs pour toutes les fêles de l'au-
de" Rainon, évêque d'Angers dans les tum- uée. Paid Diacre ' el Sigebert '" en font mon-

« Pag. 474. — « Ibid. pag. 480. — ' Tum. VIII des Vies de saints. [L'éditeur.) — « Greg. Turou.,
Spicil., pag. H96. — ' MaUil., AnaUcla, fol., pag. De (ihrin Conf., cap. xlv.
222. — " fireg. l)e Gloria Conf., cnp. ilv. * J-'ortunatus Marliiii riUim
quatuor libris he-
* Tillftinoiil, llisl. eccles., louie X, pag. 784. roico vcrsu intexuil, el mulla alia, maxiniei/ue
' Ces Actes se trouvent au tome L.\XXVIII de la ftijmnos singularum fesliKilulum, et prcrcipuc ad
Palrologic laitue, col. a75 et suiv., avec une ai)- an.icos versiculos, nuUi poetiiruw secundus,suuvi
précialioii île iloiu Lucbi, ijiii esi assez d'avis de el diserlo Kcrmone coiitposmt. l'aulus Uiacoiiue,
le» attribuer i Kortiiual, à cause <lu style, à cause Jlist. ioiigohnrd., Iib. Il, iiuni. 2:J.

delà li.iisou de l'auteur avec saint llcriuaiu de l'a- '" Scriiisil metrice hymnos singularum festivi-
ris, el du ijuu applii;atiou couliuuuUe & composer lalum. Sigeb., De Virù illusl., cap. iv.
[VI* SlfecLE-l CHAPITRE XÎ.V. — SAINT FORTl^NAT DE POITIERS, ETC.
lion, ot, la nianii-rc dont ils en pailonl,
par qu'obscurité et moins d'harmonie. La des-
on que CCS liynincs liaient on f^rand
voit cription (pi'il fait de son voyage par eau de

nombre; Tritlième en comptait jiisrju';\


'
Metz \ Andernach, fait voir que son vrai
soixante-tlix-sepl. Il s'en trouve parmi ses talent était d'écrire en ce genre. On lui re-
poi'mes, entre aulies poui' les fêtes de Noël, proche avec raison plusieurs fautes contre
(le Pâqnes, de la Sainte-Croix ; mais elles pa- la prosodie et contre la pureté de la langue

raissent étrangt'res an recueil dont parle Paul latine, souvent il fait brève ' une syllabe qui
Diacre, et semblent faire partie de ses livres. Il est longue de sa nature, d'un verbe passif il
parait aussi que l'on doit distinguer les des- eu fait un actif, d'un singulier il en fait un
criptions que Fortunat l'ait dans ses poëmes pluriel il
; défigure les mots, en retranche
de quelques-uns de ses voyap;es, d'avec l'i- ou y ajoute, suivant le besoin de la mesure
tinéraire que Sigcberl • lui attribue il était ; de ses vers. Les éditeurs ont mis h la suite
en vers et contenait le détail de ce qu'il de ses poëmes un givuid nombre d'exemples
avait vu ou fait dans le voyage qu'il fit d'I- de ces sortes de licences poétiques. Ses
talie dans les Gaules, en passant par le écrits en prose, tels que sont ses préfaces
royaume d'Austrasie. Cet écrit n'est pas ve- et ses lettres, sontd'un style dur et embar-
nu jusqu';\ nous mais il nous en a été don-
; rassé', ilbeaucoup plus clair et plus doux
est
né une idée dans sa lettre h saint Grégoire, dans ses ouvrages dogmatiques c'était le
:

et à la fin de son quatrième


de la Vie livre génie de son siècle, d'embrouiller quand on
de saint Martin. Platine le fait auteur d'un voulait écrire avec éloquence.
traité intitulé l'Art de 7-cgne}\ adressé au roi [Quelques petites pièces adressées à sainte
Sigebert nous n'avons rien sur ce sujet dans
; Railégonde et k sainte Atmès sur un repas,
les écrits qui nous restent de Fortunat. Le sur des fleurs, sur des châtaignes, sur des
Spicilége de dom d'Acbérj en cite un sous le œufs et des prunes, sur du lait et d'autres
titre de Mediefas Fortunati ; mais ce n'est friandises ont fourni à MM. .\mpère, Guizot
qu'un recueil de ses poëmes auquel l'on et Thierry l'occasion de calomnier Venance
a donné ce titre. Nous avons remarqué ail- Fortunat. Ces historiens ne voient en notre
leurs qu'on ne pouvait attribuer à Lactance poêle qu'un homme adonné aux plaisirs de
i^vide ^lom. le poëme qui a pour titre Du Phénix, puis- la table. Rien n'est plus faux que cette as-
qu'il y était parlé d'Apolloncomme d'une sertion. Quand on
lit Fortunat, on sait à
divinité véritable, et Du Phénix comme d'un quoi s'en tenir sur son goût pour les frian-
prêtre admis aux mystères de ce faux dieu. dises. Il a plu aux historiens que je viens de
Ces raisons sufl:sent pour ne pas le donner citer de donner ce nom au goût que le poète
à Fortunat, à qui Barthius et quelques au- accuse pour le pain, le lait, le beurre et les
tres l'ont attribué. autres mets du même genre. Ajoutons que le

des
Juïement
tciirs lie
un de ces génies heureux
21. Fortunat était nombre des pièces badines composées par
Fflriunal. à qui en coûte peu pour dire de belles cho-
il Fortunat est extrêmement restreint, compa-
ses outre cette facilité surprenante qui rè-
; rativement au reste de ses poésies. Quoi qu'en
gne dans ses vers, on y trouve une simplicité disent ces critiques, on chercherait en vain
facile qui ne bande point l'esprit, et surtout dans ses opuscules théologiques de quoi le
une grande douceur. Il fait toujours voir charger sur le fait de l'incontinence on y;

quelque chose de nouveau, rarement il est lencontre quelques métaphores en tout temps
copiste; il ne se copie pas lui-même; il est permises à tous les écrivains et employés
presque toujours original. On ne laisse pas par eux sans qu'ils soient devenus pour cela
de distinguer aisément les vers qu'il faisait justiciables d'aucune censure. La malveil-
sur-le-champ, sans elfort et sans méditation, lance seule a pu entendre au propre ce que
d'avec ceux auxquels il apportait plus d'é- Fortunat ne dit qu'au figuré. Enfin, l'erreur
tude ; ceux-ci sont plus tleuris et remplis de capitale de MM. Ampère, Guizot et Thierry
plus d'agrément, il y a dans ceux-là quel- est de voir un évoque dans le poète qui

' Ilijmnorum septitnginta liher septem unus qui bestiola: caligosus pro caliginosus
: celehratura
incipit : Àgnoscat nmne sacrUnm. Tritliem., De pro celebranda; butyr pro butyrum ; debaccho
Script, eccles., cap. ccxiic. pro dehacchor duces pro dux; mirari passive;
;

' Scripsit metrice Hodœporicum suum. Sige- fumulare pro faniulnri: urgnet pro urget mis- \

bert, iibi supra. cam pro iiiiscebo pcrferor pro pcrfero ; prœco-
:

' A producit in anachoreta. TUcit bestola pro niandus pro prœconandus, etc.
4U HISTOIRE GKNKRAT^E DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
adressa des poi^sies badines A sainte Radé- du SjTubole. Avec le secours de toutes ces
gonde et à sainte Agnès; Forlunat n'était pas éditions et de plusieurs manuscrits, Browé-
même prêtre quand il écrivait il ne le de-
; rus en entreprit une nouvelle, qui vit le jour
vint vraisemblalilement qu'en 587, après la pour la première fois à Mayence en 1603
mort des deux saintes; mais il était piquant avec des notes de sa façon, ensuite en 1617;
d'accuser un prélat de la légèreté du reste c'est celle que l'on a suivie dans les Biblio-

très-innocente d'un intendant, et c'est ce que thèques de Paris en 1624 et 1644, et de Lyon
ces historiens ont fait'.] en 1677. L'éditeur a mis en tète la Vie de
Édiuor» le 22. Le quatrième poëme de son huitième Fortunat, et les témoignages que les écri-
hvre se trouve dans le second Recueil des vains postérieurs ont rendus à sa capacité,
poètes chrétiens, par Georges Fabricius, avec avec le dénombrement de ses ouvrages.
quantité d'autres de ses poésies tirées de Quelques soins que Browérus se soit donnés
ses autres livres on l'a aussi inséré dans le
; pour perfectionner son édition, elle parut
Chauir ou Corps' des poètes latins. Son ex- imparfaite au père Labbe, son confrère, ijui
plication (^ l'Oraison dominicale et du Sym- en promit une nouvelle. Il est mort sans
bole se trouve dans les Orthndoxosraphes avoir tenu sa parole. [La meilleure édition
en 1553, 1569, et dans la Bibliothèque des des écrits de saint Fortunat est celle qu'a
Pères, à Paris, en 1575. On trouve aussi plu- donnée Mich.-Ang. Luchi, bénédictin de la
sieurs de ses poésies avec les hymnes de Congrégation du Mont-Cassin, Rome, 1786-
Prudence en un volume in -4, imprimé à 87, en deux parties, in-4, avec préface et pro-
Wittemberg on 1313, et avec celles de Ju- légomènes. Elle est reproduite dans le tome
vencus, de Sédulius et d'Ara lor, ù Bàle en LXXXVIII de la Putrologie latine. La pre-
1337, par les soins de Théodore Puiman. Le mière partie contient l'édition de Browérus,
poëme sur la résurrection, qui est le neu- la deuxième donne les Vies. On y lit aussi \'£x-

vième du troisième livre, parut à Paris en jjûsitiun de la fui catholique, trouvée sous le

1616, avec les annotations de Cassandre; à nom deFortunatdansun manuscrit, et publiée


Wittemberg en 1627, avec les notes de Bu- par Muratori, Anecdot., tom. II, Milan, 1608,
chner, et en beaiuonp d'autres endroits. 11 pag. 212-217, et réimprimée dansGalland, Di-
y en a une édition avec le commonlaire de blioth., tom. XII, pag. 317-318. Cette expo-
Buschius, où l'on n'a marqué ni le lieu de sition nefait qu'exposer le Symbobe connu

l'impression, ni l'année, Les deux derniers SOIS le nom de saint Athanase.


Les auteure
poèmes du onzième livre, qui regardent les de l'Histoire France littéraire la refu-
de la

voyages de Forfunat, se lisent à la suite des sent à Fortunat, à cause de la netteté du


ouvrages de saint Sidoine, par Élie Vinet en style Luchi partage ce sentiment. Voyez
;

1332, et dans celle de Jean Savaron en 1598. Patrolog. latine, ibid., col. 583 et suiv.
Jean Marchant mit sous presse, à Paris, en Un Appendice nous donne des vers incon-
1511, les quatre livres de la Vie de saint nus aux premiers éditeurs. Il contient des
Martin en y joignant ce que Sévère-Sul-
, vers adressés à Radégonde et à Agnès ; ils

pice a écrit sur le même sujet, et quelques oui été trouvés dans un manuscrit de la Bi-
opuscules de divers écrivains. Outre les édi- bliothèque royale par M. Guérard, et publiés
tions latines de la Vie de sainte Radégonde, par lui dans le tome XII des Notices sur les

dont nous avons parlé, il y en a une en fran- ntumtscrits.


çjiis, à Poitiers en 1327, de la traduction de La seconde pièce est tirée dn tome IX du
Jean Bouchet. Toutes ces éditions de For- Spiciteg. rom. de Mai. C'est une épigramme
tunat sont incomplètes la première où l'on
; sur Theudichilde.
ail recueilli tous ses hymnes est de Ca- Les poèmes de Fortunat ont été édités à
gliari en Sardaigne. en 1573. On en fit une Cambrai dans la collection Poetœ ecclesias-
seconde en la même ville l'année suivante tici, chez Hurez, in-I2, 1822. Quatre de ses

1374, qui fut remise sous presse :\ Venise eu hymnes ont été traduites en français dans les
1378, puis à Cagliari en 1384, ensuite à Co- Poètes chrétiens, par M. Félix Clément.]
logne en 1600; ces deux dernières renfer- 23. Baudonivie, qui nous a donné un sup- u.iùe^.i

ment l'explication de l'Oraison dominicale et ph'ment k la lie de samle Radégonde écrite !'»ni«»; S"
^ ^ étrilf. Vie d«
]MV Fortunat, était religieuse du monastère ""'' ,'^'":

' Note de la 3" édition de Uorbaclier, tome l.\,


que celte sainte reine avait fondé à Poitiers, s.''Bfn?dfc'°'

pag. 350 [L'cdileur.) —' Tom. II, pag. 488. et elle avait été élevée sous ses yeux. Témoin •"•• ^''•-
,

[vr SIIXXK. CIIAriTHE XI.Vl. — lÔVAGRK ni^:PIPII.\NIE, ETC.


oculaire qu'elle était de plusieurs de ses gran- chement du cilice qu'elle portait ordinaire-
des Mctioiis, et instruite on par la sainte, ou ment. Le en fait est si grave, si
récit i[u'ellc

par d'autres, do ce qu'elle n'avait pas vu cllo- simple et si naturel, qu'on ne peut refuser

méme, l'abbesse Dédimie et les autres reli- d'y ajouter foi. L'abbesse Dédimie, à qui elle
gieuses de la couimnnaulé la cliarp;èi'onl de adressa son ouvrage, avait succédé; h Leu-
mettre par écrit ce qu'elle savait de sainte bovère dans le gouveru(!ment du monastère
Hadégonde ; elle s'en détendit sur sou inca- de Poitiers, et celle-ci à .\gnès, qui en fut la
pacité, mais il Il n'y a rien au-
fallut obéir. première abbesse sous sainte Radégonde. Il
dessus des sentiments d'humilité et de mo- ne parait par aucun endroit que Baudonivie
destie qu'elle fit paraître, et dans son refus, ait occupé cette place. Elle remarque que,

et dans son obéissance. Elle avait en main lorsqu'on portait en terre le corps de la
la Vie que Fortunat avait composée mais ; sainte, les ministres chantaient Alléluia ',

elle savait aussi que cet homme apostolique, et que de dessus les murs du
les religieuses,

c'est ainsi qu'elle l'appelle , n'avait passé monastère, ne répondaient à ce chant de


sous silence un grand nombre de circons- joie que par des lamentations. C'était l'usage
tances édifiantes de la vie de sainte Radé- autrefois de chanter Alléluia dans les obsè-
gonde, que pour n'être pas trop diffus. Elle ques, et il subsiste encore aujourd'hui par-
s'attacha donc uniquement ;\ rapporter les mi les Grecs, surtout dans les funérailles des
fiiits qu'il avait omis, et à ne rien ri'péter de prêtres. Elle remarque aussi que c'était la
ce qu'il avait rapporté c'est pourquoi elle
;
coutume des monastères ' aux environs de
passe tout ce qui regarde sa naissance et son Poitiers, de venir dans cette ville le jour de
mariage avec le roi Clotaire. Ce qu'elle re- la fête de saint Hilaire, et d'y célébrer les
lève le plus en elle, est l'exemple qu'elle veilles jusqu'à minuit, qu'à cette heure tous

domiait à ses sœurs dans le temps même les abbés, à la tète de leur communauté

qu'Agnès était leur abbesse. Jamais elle s'en retournaient à leur église réciter l'of-
n'ordonnait rien qu'elle ne l'eût fait la pre- fice de la nuit. Parmi les miracles qu'elle
mière. Si elle recevait la visite de quelque -raconte, celui-ci est remarquable : les' ma-
serviteur de Dieu, aussitôt elle l'interrogeait lades qui allaient au tombeau de la sainte,

sur son genre de vie; et si elle apprenait de y recouvraient la sauté, fussent-ils désespé-
hii quelqu'exercice de piété qu'elle n'eût pas bu un verre d'eau
rés, aussitôt qu'ils avaient
encore mis en pratique, elle l'y mettait d'a- dans lequel le gardien du sépulcre avait
bord, et exhortait les autres à en faire de trempé une partie de lu nappe qui était au-
même. Elle établit dans son monastère l'u- dessous. [On trouve au tome LXXII de la
sage de lire la parole de Dieu pendant le Patrologie latine, col. 651 et suiv., la Vie
repas de la communauté. Baudonivie rap- de sainte Radégonde par Fortunat, et sa
porte plusieurs miracles que la sainte fit continuation par Baudonivie. La Vie écrite
de son vivant, et d'autres qui s'opérèrent par Fortunat se trouve aussi dans le tome
après sa mort à son tombeau, ou par l'attou- LXXX\1II de la Patrologie latine.]

CHAPITRE XLVI.

Évagre d'Epiphanie historien ecclésiastique [après l'an 593J,

Jean d'Asie on d'Éphèse.

1. On ne peut mettre la naissance d'Éva- étudiait la grammaire* dans les petites éco-
gre plus tard qu'en 333, puisqu'en 542 il les. Ce fut en cette année que la ville d'A-

Gemitumpro alléluia reddebant.Vit.Rad.,-p.'ilîi.


' ^Quis inale habens.quamvis vila dei:peralus,si
Et quia mos est in festivitate beati Hilarii re-
^ pallain subteriorem custos ejusJem sacri sepul-
liqtiis nionasteriis circiimcirca proj:imis quœsunt chri intinxit in calice aqiiœ et dédit ei febrici-
,

ibi,usque in mediani noctem vigilias celebrare : tanli poculinn non statiin ut bibit ante sacrum
,

de média nocte itmisquisque abbus cum suis ejus sepulchrum. morbus recessit? Iliid., i)ag. 317.
fralribus ad smim rêver titw monasterium cur- > Evag., lib. IV, cap. ssvi.

sum celebrare. Ibid.


,'

416 HlSTOmF. GÏ^XÉRALE DES AUTEl'RS ECCLÉSIASTIQUES.


pâmée, se voyant à la veille d'être ravagée gné pendant l'espace de cinquante-deux ans
parCbo'îroës.roi des Perses, chercha son sa- presque par toute la terre, en se répandant
lut dans un morceau de la vraie Croix, dont tour h tour dans les ditt'érentes parties do
elle était dépositaire. Il était de la frrandenr' l'univers Evagre y perdit sa femme, quel-
,

d'une coudée, enfermé dans une châsse de ques-uns de ses enfants, de ses parents et
bois ornée d'or et de pierreries trois prê- ; de ses esclaves. Il était alors dans la cin-
tres en avaient la srarde. Les habitants d'A- quante-huitième année de son âge; ainsi
pamée le considéraient comme leur plus sur c'était vers l'an .'598. Il avait été lui-même
rempart, on le montrait tous les ans en pu-
et attaqué de cette maladie étant dans ses pre-
blic à un jour marqué. Craiiinant donc la per- mières éludes; il la décrit au long, assurant
fidiedu roi de? Perses, ils prièrent Thomas, qu'on n'en avait jamais vu de semblable, ni

leur évoque, de leur montrer la Croix, pour de si longue durée.


l'adorer encore une fois avant de mourir. 3. Plusieurs années auparavant, c'est-A- ,''|'.*.""';

L'évéque marqua le jour auquel on ferait dire vei-s l'an 589 , Grégoire, évêque d'An- ;;;;;i;
;|'

cette cérémonie, afin que les peuples d'alen- tioche ayant été accusé de divers crimes ' , "^,'_""

tour eusîÇnt le temps de s'y rendre. Les pa- Astérius, comte d'Orient, fut chargé d'exa-
rents d'Évaffre', qui étaient d'l!!piplianie, miner l'atl'aire, et après lui le comte Jean
ville de Syrie en .\sie sur le Farfar, s'y rendi- qui lui avait succédé. Celui-ci, au lieu d'agir
l'y menèrent. Aussitôt
rent avec les autres et en juge, se déclara partie en atBchant pu- ,

qne Thomas eut découvert la Croix, et qu'on bliquement que siquelqu'un voulait accuser
eut commencé à la porter par toute l'église, l'évoque , il recevrait sa plainte. Grégoire
on vit au lambris une grande lumière qui sui- appela à l'empereur et au concile ; ce qui
vait la Croix à mesure qu'on avançait l'évo- ; l'obligea de faire un voyage à Constanli-
que semblait lui-même être suivi d'uni grand nople il mena avec lui Évagre pour lui ser-
;

feu qui éclairait sans brûler. Cette merveille vir de conseil, comme il s'en servait ordi-
dura autant que la cérémonie, et fut regar- nairement. L'aflaire fut examinée , et termi-
dée comm.e un présage de la conservation née à l'avantage de l'évêque.
de la ville. En effet, Chosroës se cententa d'en 4. Il est vraisemblable que ce fut à An- n '" '

tirer de grandes sommes d'argent, et d'en- tioche qu'Lvagre écrivit son Histoire ecclé-
i.^^'-";
lever le trésor de l'église; mais il y laissa siastique, cette ville étant devenue son séjour j_'^'^^-

le bois de la Croix h la prière de l'évêque. ordinaire. en la douzième année


Il la finit
En mémoire du miracle, on mit un tableau du règne de l'empereur Maurice, c'est-à-dire
dans le lambris de l'église, qui le représen- en ?>93. Ce prince, pour l'en récompenser,
tait, pour l'apprendre a ceux qui n'en avaient lui "accorda deux charges, celle de trésorier
pas été témoins. de 1 Empire, ou de questeur, et celle de pré-

iirpéqoHin 2. Évagre
r après
l
avoir étudié les belles-
, fet. Il y a donc toute apparence qu'Évagre
le barreau ; Il '

,e u.ii..t.
lettres, s'appliqua à l'étude du droit, et fit vécut encore quelques années depuis qu'il
les fonctions d'avocat à .\nlioche , d'où lui eut achevé son histoire. Ce fut lui qui donna
est venu le nom de Scolastiqne. Il se maria avis A l'évêque Grégoire de la maladie de
en cette ville avec une jeune fille mais la ; saint Siméon-Stylite le Jeune; il avait été
joiede ses noces fut troublée par un événe- le voir, et avait éprouvé par lui-même (|ue
ment tragique. C'était le jour de la nouvelle ce saint' prédisait l'avenir, et connaissait les
lune*, auquel tous les habitants d'Antiocbe pensées secrètes.
avaient coutume de faire des réjouissances 5. L'histoire d'Évagre est divisée en six ,^',7,

publiques, et d'interiompre à cet etfet leiu's livres; il la commence où Socrate et Théo- f^*^^'",-

occupations ordinaires. A la troisième heure dorcl ont fini la leur, c'est-t'i-diie au concile '"'•

de la nuit, un tremblement de terre, accom- d'Ephèse , où Neslorius fut condamné en


pagné d'un bruit horrible ébranla tonte la , 431 , comme on vient de le
et la conduit,
ville, renversa ijuanlilé de maisons, et ruina dire, jusqu'à douzième année du règne
la

plusieurs parties de l'église. Quelques anni'cs de l'empereur Maurice, dont on fixe le com-
après, la ville d'Antiocbe ayant été atteinte mencement au treizième d'août 593. 11 se
par une* maladie contagieuse qui avait ré- servit de celles qu'avaient composées avant

' l'rocop.. De liello Persico, cap. v. —


« Evag., * /tW.,lib. IV, cap. xxix. — »Evag., lit). V, caii. vu.
lib, IV, cap. XXVI. — » Evag., lib. V, cap. vui. — — «Evag., liu. VI, cap. ixiv. — '/d.,lbid.,cap. xxni.
,,

[Vl" SIÈCLE.] CIIAIMTHK XLVI. — ÉVACJHE D'KPIPHANIE. •417

lui Piisciis, Kiistliatc d'Isiiiplmnip, Zacliaric, me jour; d'auti'es s'enfermaient seuls dans
l'iDcopo et Jean. Ce deinier Icriiiiiiail la des cellulessi basses cl si étroites, ((u'à peine

sienne h la seplicine année de Justin l'An- ilspouvaient s'y tenir (liîhout ou s'y coucher.
ticn, c'os(-i\-diio en tt'-l'i. Los douze cliapilics Il y en avait qui s'cxposaiciil pr(;s(|u(' mis
du premier livre île l'Hisloirt! d'hh'agre re- aux aideursdu soleil et à la rigueur du froid.
gardent ce qui se passa dans le concile d'É- Quelques-uns , mais en petit nombre, après
phèse et depuis contre Nestorius, la déposi- s'être élevés ]iar le long exercice des vertus
tion d'Eutyrliès dans un concile de Cons- au-dessus des passions, retournaient dans
tanlinople sous Fhivion , évéque de celte les villes où ils feignaient d'avoir per-
,

ville, et son rdlalilisscment dans le Brigan- du l'espiit pour vaincre la vaine gloire
dage d'Éplièse. 11 remarque que s'il s'est que Platon dit être la tunique que les plus
élevé des disputes dans l'Eglise an sujet de sages ôtent la dernière. Le premier livre
la foi, elle n'en a point été altérée que Ions ; finit la mort de l'empereur Théodose.
i\.

les catlioliijuos étaient d'accord sur les points 6. Le second commence à l'élévation de sofomi r.
vre, cap. i et
fondamentaux de la religion, tous adorant Marcien à l'Empu-e. Evagre raconte comment "i-

rendant gloire à l'unité, tous


la Trinité, tous il
y parvint, les soins qu'il se donna pour la
confessant que Verbe est Dieu, et qu'ayant
le convocation du concile de Chalcédoine, cequi
été engendré avant tous les siècles, il a pris se passa dans ce concile, et il n^oublie pas
une seconde naissance dans le sein de sa ledécret qui y fut fait, portant que le siège
mère ; que les dilUcultés qu'il y a eu sur archiépiscopal de Constanfinople ou de la ,

ce sujet ont éclairci la vérité, et relevé par nouvelle Rome, aurait la prérogative sur les
occasion l'éclat de l'Eglise. 11 donne ensuite autres sièges orientaux, parce que la nouvelle
la vie miraculeuse de saint Siméon Sty- Rome tient le second rang après l'ancienne.
lile l'Ancien, celles de saint Isidore de Pé- Il parle après cela de diverses séditions ar- ck. iv ei

luse, de Synésius, évéque de Cyrène, de rivées à Alexandrie et à Jérusalem, des sté-


saint Ignace martyr, et de la translation de rilités, des ftimines et des maladies conta-
ses reliques sous l'empire de Théodose. Il gieuses qui afiligèi'ent les deux Phrygies
môle à l'histoire de l'Église quelques événe- les deux Galaties, la Cappadoce , la Cilicie,
ments profanes l'iiTuption d'Attila en Ita-
: la Palestine et plusieurs autres provinces,
lie, les guerres dans cette province et dans de mort de Valentinien et de Marcien, de
la
la Perse, l'embellissement d'Au- de la ville la prise de Rome, du massacre de saint Pro-
tioche, le mariage de Théodose avec Eu- tère évéque d'Alexandi'ie de l'élection de ,

doxie, le voyage de cette princesse h An- Timothée Élure et de sou bannissement


,

tioche et à Jérusalem, où elle fonda des mo- par ordre de l'empereur Léon du règne ,

nastères et des laures. Évagre prend occa- d'Anlhémius d'Olybrius et de quelques


,

sion de ces établissements pour décrire le autres en Occident de la mort de Léon et


, ,

c.p. 1x1. genre de vie des moines de la Palestine. Les de son successeur à l'Empire. Evagre fait en m,,,
uns vivaient en communauté, sans posséder cet endroit un abrégé des actes du concile de
en propre quoi que ce fût pas même leurs ,
Chalcédoine, et finit par là son second livre.
habits un se servait un jour d'une tuni-
: 7. Il remarque au commencement du troi- Trouèmo

que et d'un manteau, dont un autre se sieme, que lempereur Zenon ne lut pas plu- «q.

servait le jour suivant, ainsi la tunique et le tôt en possession de l'autorité souvei-aine,


manteau étaient à tous, ou plutôt nétaient qu'il se plongea dans les plus sales débau-
à aucun. La table était commune on n'y ,
ches, s'imaginant follement qu'il n'y avait
servait rien de délicat les herbes et les lé-
: que les personnes de basse condition qui
gumes en faisaient tout l'appareil encore : dussent rougir de leurs crimes et les cou-
n'en mettait-on qu'autant qu'il en fallait vrir du voile des ténèbres que les princes ;

pom- satisfaire la nécessité de la nature. Ils ont droit de les commettre en public et aux
priaient aussi en commun le jour et la nuit, yeux des hommes. Ce n'est pas , ajoute cet
s'imposant d'ailleurs hors le temps de la historien ,
par le commandement que l'on
prière un travail si continuel, qu'ils étaient exerce sur les autres , qu'on mérite le titre
sur cette terre comme des morts qui n'ont d'empereur; c'est par celui qu'on exerce sur
point encore de tombeaux, Ils passaient quel- soi-même, par l'empire que l'on prend sur ses
quefois deux ou trois joui's sans manger; passions, par l'émiuence de ses vertus, par
quelques-uns ne mangeaient que le cinquiè- le bon exemple que l'on donne aux peuples,
XI. 27
418 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
Zenon étant devenu odieux, même à ses pro- cusations que Zosime avait formées contre
clies, à cause de ses excès, Bapilis(iue s'eui- l'emjjereur Constantin, nommément d'avoir
para de l'empire rappela Tiniotliée Elure
, ,
établi le premier l'impôt nommé chrysuryyre,
condamna le concile de Clialccdoine, ren- qui se levait sur les personnes de basse con-
dit à l'église d'Alexandrie le titre de patriar- dition, et même sur les femmes débauchées,

chaie, que ce concile lui avait ôté. Il ne lais- et d'avoir fait périr misérablement Crispe son

sa pas de condamner Nestorius et Eutyciiès; fils. Sur le piemicr chef, il dit qu'il est hors

mais il défendit toutes disputes à l'avenir de vraisemblance qu'un prince aussi libéral
sur ce sujet, et toute convocation de conciles. que Constantin, ait imposé un tribut si in-
Son règne ne fut pas long. Zenon, rétabli fAme.Sur le second, il allègue le témoignage
surletrùne, donna un édil d'union, dont on d'Eusèbe de Césaréc, auteur contemporain,
fit la lecture dans l'église d'Alexandrie, et qui ne pai-le de Crispe qu'avec éloge; ce
alors tous les liabitants se réunirent à l'É- qu'il n'aurait pas fait, si Constantin eût en

glise catholique. Cet édit d'union appelé , quehiue raison de faire mourir un fils qu'il
Hénotiquc, qui était adressé 'i fous les évo- avait fait César. Il justifie aussi les motifs
ques peuples d'Alexandrie, d'E-
et à fous les qu'eut Constantin d'embrasser la religion
gypte, de Libye et de la Penlapole, causa chrétienne, et montre que, depuis son éta-
beaucoup de troubles dans les l"-glises d'O- blissement, l'Empire, au lieu de déchoir,
rient, parce qu'encore qu'il contint une doc- s'était accru.

trine catholique en apparence, il y avait un 8. Après la mort d'.\naslase, Justin, natif O""!'

venin caché, qui consistait en ce qu'on n'y de Thrace, se revêtit de la robe impériale. «i-

recevait pas le concile de Chalcédoine comme 11 eut pour successeur Jusiinien son neveu.

les trois précédents, et qu'il semblait au con- Les principaux événements du règne de ces
traire lui attribuer des erreurs. Plusieurs évo- deux princes sont rapportés dans le quatrième
ques y souscrivirent d'autres le rejetèrent.
, livre d'Évagre. Ils furent l'un et l'autre dé-
Pierre le Foulon, rétabli sur le siège d'An- fenseurs du concile de Chalcédoine. Justin
tioche, signa VHcnotujui', et dit anatlième au fit arrêter Sévère, évêque d'Autioche, parce

concile de Chalcédoine Martyrius de Jérusa- ;


qu'il disaitanathème à ce concile; mais l'é-
lem, et Pierre Mongus, évoque d'Alexandrie, vêque parvint a se soustraire par la fuite. La
en firent autant. Acace de Constantinople ,
ville d'Autioche, sous le règne de ce prince,

pour avoir coiiimimiqué avec eux, fut séparé fut désolée par des incendies et par des trem-

delà communion du pape Félix. La sentence blements de terre; Éplirem, comte d'Orient,
du Pape fut suivie d'un schisme de la part la soulagea dans sa détresse. Les habitants,

des Églises d'Orient ; la division y fut si gé- par reconnaissance, le choisirent pour leur
nérale, qu'il n'y avait presque plus de com- évêque. Ébranlée deux ans et demi après par
c»p. m. munion des évoques entre eux. Evagre en- un second tremblement de terre, la ville chan-
tre, à ce sujet, dans quelijues détails; après gea son nom en celui de Théopolis, et reçut
quoi il passe aux alfaires de l'Empire sous le de grands bienfaits de la part de Justin. Ua
règne d'Anastase il parle de la défaite des
; moine nommé Zosimas, à qui Dieu avait ac-
Isauriens, de l'accord fait entre les Scénites, corde; le don de prévoir l'avenir, connut ce
peuple barbare, et les Romains; de la prise tremblement de terre au miment où il arri-
de la ville d'Abida en Méscipotaniie par les va, quoiqu'il fût lui-uiême très-éloigné d'Au-
Perses, de la fondation de celle de Daras ]iar tioche. Comme ilallait un jour à Césarëe,

l'empereur Anasiase, ainsi nommée, parce menant avec lui un àne qui lui portait son
que Darius avait été défait en ce lieu par bagage, un lion, qui se rentonira sur le che-
Alexandre, fils de Philippe, roi de Macé- min, enleva l'àne, le conduisit dans une forêt,
doine; de la muraille (pie le même prince elle mangea. Zosimas qui l'avait suivi, dit au
lit construire dans la 'i'hrace elle était de : lion: Je ne saurais plus continuer mon voya-
(I

quatre cent vingt '


stades, s'étendait d'une ge, n'étant ni assez jeune, ni assez fort jiour
mer à l'autre, et servait i"i fermer le passage porter mon bagage; si tu veux donc que je
aux étrangers qui dans l'Em-
se répandaient poursuive mon chemin, faut que tu m'ai-
il

pire, soit par le Pont-Euxin, soil par les Pa- des. » Le lion s'ajjprocha en le caressant,
lus-Méotides, 11 réfute en peu de mots les ac- comme pour lui oll'iir son service. Le moine
mit son bagage sur le dos du lion, qui le
' La staiJc est de cent viugl pas p<!onW-lriques. mena jusqu'à la porte de Césarée. C'est là
[VI* SIÈCLE.] CHAPITUK XLVI. — lîVAGRn; D'EPIPHANIE. A\9
peiit-ôtrc une de ces histoires où Casaubon '
cela, deux galeries du côté de l'occident, et
(lit iiii'Kvagre a t(''moipiu' liop do crt'diililL^. desveslihidesdeméincari-liiloctMie.» Hvagre Cr)[), MXV.
Il av;ince, d'api^s l'iiisloiioii l'itudix', ([iie raconte que dans le temps qu'Kpiplianc était
les Maures sont desceiulanlsdcsGcrgési'cns, patriarche de Constantinople, comme il était
des Jébiiséens et îles autres nations vaincues resté un jour une grandi; quantité de pains
par Josué, et qu'avant de riiiitler leur pays, ces consacrés, il envoya, suivant la coutume,
peu|iles avai(Mit fail graver sur deux colon- quérir des enfants innocents dans les i)eti-
nes lie marbre blanc, proche d'une l'onlaine, tes écoles, pour les faire consommer, et que
Cip. mil cette inscription « C'est nons qui avons
: parmi ces enfants il se trouva le d'un ver-
fils

(Hé chassés de notre pays par Jésus le vo- Ses parents lui
rier juif. ayant demandé à son
leur, de Xavé.
fils II parb; de la prise de
<t retour jtourquoi il revenait si lard, il leur dit
Home et de l'invasion de l'Italie parïhéodo- ce qui s'était passé, et ce qu'il avait mangé
ric, et du retour de cette province sous la avec Le père en fureur lia son fils
les autres.
dominationdeJustinien, parla valeur du gé- et le jeta dans sa fournaise. La mère affligée
néral liélisaire; de la conversion des Hern- le cberchait par toute la ville au bout de trois :

ies et de quehiues autres peuples barbares rt jours elle vint à la porte de la verrerie, appe-
la foi chrétienne; de la contîance du géné- lant l'enfant par son
nom. Il répondit du four-
ral Narsès en la protection de la sainte Vierge; neau, et la mère, ayant rompu les portes, le
de la ruine delà ville d'Aulioclio; de la ma- trouva debout au milieu du feu, sans qu'il eût
nière dont la ville de Sergiopole, assiégée reçu aucun mal. On lui demanda comment il
par les Perses, fut secourue par saint Serge avait été pn'servé de l'activité des llammes;
martyr, dont on y conservait les reliques il qu'une dame vêtue de pourpre venait
dit
dans une châsse couverte d'une lame d'ar- souvent apporter de l'eau pour les éteindre, et
gent; des églises construites par l'empereur qu'elle lui donnait à manger quand il avait
Justinien, particulièrement de celle de Sainte- faim. La mère et le fils furent baptisés, et celui-
Sophie, dont il donne les dimensions en ces ci mis dans le clergé. Mais le père, ayant re-
xjs. termes : « La longueur depuis la porte qui est fusé de se faire chrétien, fut pendu au quar-
vis-à-vis de la voûte au-dessous de laquelle tier de Sycé par ordre de l'empereur Justi-
on otlVe le sacrifice non sanglant, jusqu'à nieu, comme homicide de son fils. Nous avons
l'endroit où l'on offre ce sacrifice, c'est-à- déjà rapporté uiie histoire à peu près sem-
dire jusqu'à l'autel, est de cent quatre-vingt- blable, et remarqué qu'au temps de Nicé-
dix pieds; la largeur du septentrion au midi, phore Calliste, c'est-à-dire dans le quatrième Nicopiior.,
lib. xva,
de cent quinze pieds, la hauteur depuis la siècle, la coutume de donner aux enfants les CAp. XXY.

clef du dôme jusqu'au pavé, de cent quatre- restes de l'Eucharistie durait encore à Cons-
vingt pieds; la largeur de chaque voûte est tantinople. Le quatrième livre de l'Histoire
de (le nombre manque dans le texte), d'Évagre finit par un précis des actes du
et la longueur, de l'orient à l'occident, de concile de Chalcédoine.
deux cent soixante pieds la largeur de l'ou- ; 9. Il commence le cinquième par l'avéne- Liv'B cin-

verture par où le jour entre, est de soixante- ment de Justin le Jeune à l'Empire. Quoique
quinze pieds; le dôme est élevé sur quatre déréglé dans ses mœurs, ce prince conserva
piliers aux deux côtés de la grande voûte,
; la foide l'Église sans y donner aucune at-
c'est-à-dire de la nef, sont des colonnes de teinte il publia même un édit pour le
; rap-
marbre de Tliessalie, qui soutiennent des pel des évêques exilés sous le règne de Justi-
galeries qui ont des colonnes semblables; nien son oncle; mais depuis il chassa Anas-
c'est de ces galeries que l'impérati-ice assiste tase du siège d'Antioche. On mit à sa place
à la célébration des mystères aux fêtes so- Grégoire, dont nous avons parlé plus haut.
lennelles. Les coloniffes qui sont du côté de Justin eut des guerres à soutenir contre les
l'orient et de l'occident, sont placées de telle Perses; ses revers le firent tomber dans une
sorte, qu'il n'y a rien qui borne la vue ; les frénésie qui lui ôta le jugement. Tibère, son
galeries hautes sont soutenues par des co- successeur à l'Empire, en rétablit les affai-
lonnes et par des voûtes, qui donnent à tout res. Justin, avant de quitter la dignité im-
l'ouvrage une beauté achevée il y a, outre :
périale, l'en avait revêtu, et dans un moment
lucide que Dieu lui accorda alors, il dit à Ti-
' Casaubon, ExerciCat., 13, mmj. 31, ad Daro- bère : «Ne vous laissez point éblouir par l'é-
nium. pag. 258. clat de la robe de pourpre, ni par la magni-
420 HISTOIBE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
ficence de ces ornements qui frappent les autre volume quantité de lettres, de rela-
sens. J'ai été assez imprudent pniir m'y lais- tions, d'ordonnances, de harangues et de
ser prendre, et par la je me suis attiré de disputes, et que les relations étaient sous le
grands maux; réparez mes fautes parla dou- nom de Grégoire, évéque d'Antioche. Ce re-
ceur de votre pouvcrnomont. Puis, envisa- )) cueil n'est pas venu jusqu'à nous on croit :

geant les magistrats qui étaient présents : qu'il renfermait nn discours de Grégoire à
« Gardez-vous bien, ajouta-t-il, de suivre leurs l'empereur Maurice sur la naissance de son
conseils, ce sont eus qui m'ont mis dans l'é- fils Théodose.

tat où vous me voyez. » Il dit encore d'autres 11. Le style d'Évagre n'est pas sans agré- '

choses qui excitèrent l'admiration des assis- ment il a de l'élégance et de la politesse;


:
dEvif r«.

tants, et qui leiu- tirèrent les larmes des yeux. mais il est quelquefois t)-op diffus, et coupé CD a Tallcs.

Tibère vainquit les Perses, leur enleva des par des digressions qui font perdre la suite
trésors immenses, et retourna dans ses l'ta'.s de son discouis. L'avantaue que cet histo-
cliargé de gloire. Chosroès, ne pouvant sur\ i- rien a sur la plupart de ceux qui ont écrit
vrci'il'iufapiic d'une retraite honteuse, mou- avant lui, c'est qu'il n'a donné aucun lieu
rut misérablement, laissant son royaume à de le soupçonner dans sa foi. Robert Etien-
Hormisdas son fils. Tibère ne régna que qua- ne fit imprimer le texte grec de son Histoire
tre ans. Maurice, qui avait été général de ses h Paris, en 1544, sur un m.'inuscrit de la Bi-
armées, lui succéda. Son élévation au trône bliothèque du Roi. Chrisloiihorson le mit en
fiit précédée de divers présages de sa future latin, et le donna en ces deux langues à Ge-
grandeur; Évagre en rapporte plusieurs nous ; nève, en 1612, avec l'histoire de Théodoret.
Cap -tx'* donnerons celui-ci Une nuit que Maurice
: L'(''dition grecque et latine de Paris, en 1673
présentait de l'encensa Aniioclie devant l'au- est de Henri de Valois. [Elle a été réimpri-
tel de la sainte Vierge, dans l'église qu'on mée à Cambridge, en 1720, avec des notes
appelle église de Justinien, le voile de l'au- de Héading cette édition a été reproduite à
;

tel parut tout en feu comme il s'en montrait


; Turin en 1748, et à Venise en 1765, avec les
très-surpris, l'évèque Grégoire qui était pré- histoires ecclésiastiqnesd'Eusèbe,de Socrate,
sent, l'assura que c'était un signe par lequel de Théodoret de Sozomène h Oxford en
, ,

Dieu lui faisait de magnifiques promesses. 1845, dans le tome LXXXVl de la Pafrologie
Évagre donne à la fin de son cinquième livre, latine, avec une notice tirée de Fabricius,
un catalogue dos histoiicns sacrés, ecclésias- col. 2405-29001. Nous l'avons en français de
tiques et profanes, où il reconnaît que Moïse la traduction de M. le président Cousin.
est le plus ancien auteur que nous ayons. 12. L'histoire de l'Église n'a pas moins à j»nii«>i(
Litre sît'ê-
fne. cap. et
Le sixième livre commence à la pre-
10. attendre que la Patrolonie des investigations »"°r la i» d'.'
l

mière année du règne de Maurice, et finit à auxquelles se livre depuis plusieurs années
la douzième, c'est-à-dire à l'an 593. Ce prince, l'infatigable M. Cureton sur la collection si
non content de porter la couronne impé- riche dos manuscrits de Nitri:i, acquis par
riale, s'en rendit dipne en se remplissant l'es- le Musée britannique. Nous en donnions la
prit et le cfcur des vertus qui doivent carac- preuve à propos des D'ttres jxiscnles de saint
tériser un empereur. 11 dt'fit les Perses, Athanase. .Aujourd'hui nous annonçons l'ap-
donna dans ses États au jeune Chos-
retraite parition récente d'un texte fort curieux qui
roès, fils d'Hormisdas, le traita comme son sort des presses d'Oxford, et nous indiquons
propre fils dans ses Ktats. Ce-
et le rétablit par avance le caractère tout spécial de ce
lui-ci, en reconnaissance des faveuis qu'il document inc-dit qui va compléter les anna-

avait reçues du ciel par l'intercession des les des Eglises d'Ûrieut pendant une période
saints martyrs, fit de grands présents aux courte, il est vrai, mais très-agitée.
églises. En même temps Naaman, prince des Jusqu'à ces derniers t«>mps, on savait peu
Sarrasins, embrassa la foi avec toutes les de choses sur le rôle qna joué au vi« siècle
personnes de sa suite. Au sortir du baptême Jean d'Éphèse ou d'Asie, évêquc d'ailleurs
il fit fondre inie Vénus d'or dont il donna la célèbre des jacobites de r,\sie intérieure, et
matière aux pauvres. Évagre, en finissant on ne connaissait de son ouvrage d'histoire
son histoire, dit qu'il avait recueilli dans un ecclésiastique que des fragments tirés par

• Stylus Evagrii non ingralus, tamelsi inler- docirinœ veritate cceteris historicis accuratior
(iufn redundare quodam modo videatvr : certe in est. l'iiiil., coii. 29.
[vi« sifccxE.] CIIAPITUK XLVI. EVAGRE D'EPIPHANIE. 421
Assc^mnni, de la r.liroiiitiuo de Denys de Tel- de quatorze ann(''es (.i71-.">8.')). Il y a beaucoup
nialiar cl de celle de Itar-lléhi'a'us. L'érudi- d'imv^alilés ilans la composition, parce que
tion chrétienne va èlre en posscssiim de la les cha[iilros des dill'éreiits livrets ont été ré-
parlie la plus importante de cet ouvrage de digés à plusieurs époques, puis retouchés et
l'écrivain uionopliysite le texte syriaque est
; arrangés dans leur ordre présent. L'auteur,
publié par M. Curelon qui se pi'opose d'en au chapitre xxx du livre I''', s'excuse ii ce su-
donner lui-même une traduction an},daise jet, en faisant retondjer sur les [)ersécutious
avec une introduction qui résumera tout ce auxquidlesil a été eu butte pour ses opinions
que l'on sait do l'auteur. Celte importante théologiques, les répétitions et les contradic-
publication a paru sous le titre suivant Tlie : tions qu'on pourra découvrir dans son livre.
tliird finrt iif t/ie ccclesinsliail historij uj John- Malgré ces réserves préalables, on ne peut
bishop of E'phesiis , now first éditai bij Vil- méconnaître le prix du document mis au j(jur
liam Cureton, Oxford, 1853, 1 vol. gr. in-4. par M. Cureton: ilfournit un supplément fort
Plusieurs indices font reconnailrc dans l'au- utile aux faits déjà connus touchant plusieurs
teur de rouvrafj;e syriaque, nommé « Jean all'aires célèbres dans l'histoire de l'Église

évèque d'Éplièse, n le même Jean d'Hphèse orientale et spécialement dans celle de


,

ou d'Asie au(iuel les écrivains syriens en réfè- Constaulinople il;parle d'événements jus-
rent fortsouvent. Le titi-ed'évéqued'Asiequ'il qu'ici entièrement ignorés en Europe. Il est
prend lui-même dans son histoire se justitie vrai que Jean, qui est monophysite déclaré,
parla déuouiiuation de diocèse d'Asie don- écrit avec un esprit de parti très-marqué, et
née à la juridiction des évéques d'iîphèse, qu'en quelques occasions il se montre trop
ville qui a été capitale des provinces occiden- crédule; cependant son récit emprunte un
tales de l'.Ysie. En d'autres endroits, Jean se intérêt considérable à cette circonstance
nomme lui-même « briseur des idoles » et ce- qu'il a été non - seulement contemporain,
lui « qui est au-dessous des païens. » C'est bien mais encore témoin oculaire des faits et ,

le même personnage qu'Évagre cite comme même acteur principal dans plusieurs des
son compatriote et son parent : le terme au- scènes qu'il décrit. C'est assez dire que les
jourd'hui connu de sou histoire coïncide défenseurs de la science religieuse auront àte-
avec la période sur laquelle Évagre a dii le nir compte des assertions de l'auteur syrien,
consulter. Jean, qui était natif d'Amad euMé- et à contrôler sérieusement les déductions
sopolamie, a écrit en syriaque son ouvrage que la critique moderne prétendra en tirer.
historique tiui a pour titre, dans la langue Un mot sur l'authenticilé du texte com-
originale, le seul mot d'Eccb'^siastique , et plétera cette courte notice : L'édition de M.
qu'il désigne à la fln du premier livre par Cureton se fonde principalement sur un ma-
par les termes « d'Histoire de l'Église, n Le nuscrit syriaque qui provient de la collection
texte récemment publié est intitulé : troisiè- apportée d'Egypte en Angleterre, en i8i3,
me partie, parce que Jeau avait écrit aupara- par M. Tattam, et qui se compose de 139
vant un ouvrage sur l'histoire ecclésiastique feuilles in-4, écrites à deux colonnes d'une
en deux parties et en douze livres. Cet ou- main très-ferme. Ce manuscrit est complété
vrage, qui commençait au temps de Jules- en quclijues chapitres par un autre manus-
César, aboutissait à la sixième année du rè- crit du même fonds, qui porte une date ser-
gne de Justin le Jeune, neveu de l'empereur vant à tixer l'âge de tous les deux. Comme il

Jiistinicn, c'est-à-dire à l'an 882 de l'ère est constant que deux volumes ont été
les
d'Alexandrie, 371 de Jésus-Christ. Dans la copiés par la même main, on peut ajouter
troisième partie de son ouvrage, distribuée foi a l'indication qui est consignée à la On du
en six Jean manifeste l'intention de
livres, second, et d'après laquelle ils ont été exécu-
poursuivre la même
histoire pour l'instruc- tés une centaine d'années après l'achève-
tion de la postérité. L'espace de temps dout ment de l'ouvrage; on lit, en etlet, à la fin
Jean a traité l'histoire d'une manière sans du second manuscrit « Que le copiste Per-
:

doute plus développée s'étend jusqu'à l'an gonna a tîni sa tâche au mois ador de l'an
896 des Grecs, l'auoS-T du Seigneui-. Comme 999 des Grecs,» c'est-à-dire au mois de mars
cette dernière date est la plus récente que de l'an 688 de l'ère chrétienne. Nous avons
M. Cureton ait rencontrée dans le texte tout donc sous les yeux un texte tiré d'un des
entier, on a lieu de croire que l'auteur n'a manuscrits anciens et authentiques portés au
pas conduit sou travail au delà d'un terme X' siècle de la Syrie dans le désert de Scété.
422 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
Enfin, ce qui ajoute à l'éclat de la nouvelle ture plus moderne et plus cursive. employée
publication de M. Curelon, due à la lihéia- surtout par les Maronites. Les amis de l'éru-
litéde l'université d'Oxford, c'est l'emploi dition et de la paléocrrapliie orientales sau-
d'un caractère syriaque gravé tout exprès ront gré aux directeurs de la belle imprime-
pour cette édition; des types nouveaux ont rie d'Oxford, d'avoir consacré un corps spé-
été calqués sur les lettres anciennes de l'es- cial de caractères à cette littérature chré-
pèce dite esti-aïujelo, qui sont usités dans tienne de la Syrie dont l'étude va renaître
tout le fonds des manuscrits originaux de dans les écoles savantes de l'Europe. On n'a-
Nitria.D.> la sorte, l'imprimerie académique vait rien tenté de semblalile depuis que la
d'Oxford est à même de reproduire les mo- I'ropaf;ande a fait exécuter les grands carac-
numents de la littérature syriaque avec des tères estrangelo, qui ont servi avec succès à
caractères plus grands et plus simples, que l'impression des Acta Murlijrum Orientalium
les types en usage qui ont été tirés de l'écri- vers le milieu du siècle passé '.

CHAPITRi: XLVIl.

Saint Léandre évêque de Séville |603J, Jean abbé de Biclar L590J.

[Écrivains lalius.l

s. u»-'rc, 1. Saint Léandre, fils de Sévérien et de saint Léandre pour demander du secours à
'xrtcrtr.n Turtuve, frère aine de saint Isidore de Sé- l'empereur Tibère, et en même temps il
11 utrmtnÉ- \ille, naquit à Cartliagène en Espagne; le traita avec le gouverneur du peu de troupes
mariage de Sanclia, sa tante paternelle, avec que ce prince avait en Espagne. Toutes ses
Théodoric, roi des Ostrogotlis, fournit une précautions furent inutiles : Lévigilde cor-
preuve delà no])lesse de son extraction. Dès rompit gouverneur par une somme de
le

sa jeunesse il embrassa la profession monas- trente mille sous d'or, et, ayant marché con-
tique, qu'il pratiqua longtemps; ensuite il fut tre son fils, le contraignit de se réfugierdans
mis sur le siège épiscopal de Séville. Il l'oc- une église, d'où, après l'avoir fait dépouiller
cupait vers l'an 58:2, lorsqu'Herménégilde, de tout, il l'envoya en exil à Valence c'était :

fils de Lévigilde, roi des Visigolhs en Espa- en 383. Saint Léaudie, arrivé à Constantino-
gne, vint faire sa résidence en cette ville. ple, y trouva un nouvel empereur, Tibère
Ingunde, femme d'Herménégilde, était ca- (tant mort le 14 d'août 582. après avoir dé-
tholique. Elle pressa son mai'i d'embrasser claré César Maurice commandant de ses ar-
la même foi il s'en défendit; mais instruit
: mées. On ne sait point quel fut le succès de
par saint Léandre, il quitta l'avianisme, et son ambassade il parait seulement par saint
:

reçut à la' conluniation le nom de Jean. Gréiioire de Tours, que l'empereur proté-
Lévigilde son père ayant appris sa conver- gea' Herménégilde; mais cet historien con-
sion, s'en vengea sur les catholiques, ban- vient que sa révolte contre son père était il-
nissant les uns, dépouillant les autres de légitime et contre la loi de Dieu, le cas de
leurs biens; plusieurs furent mi'* en pris(ui, l'hérésie n'étant pas un motif suffisant un .'i

où ils périrent de faim ou jiar divers sup[ili- fils pour attaquer son propre père, moins
ces; grand nombre d'évéques furent relé- encore pour chercher A le faire mourir. Saint
gués, les églises privées de leurs biens et de Léandre lia une amitié particulière A Cons-
leurs ijriviléges. tantinople avec saint Grégoire, qui fut depuis
2. Herménégilde, informé que In roi sou pape, et qui y faisait alors les fonctions d'a-
dfur & Conï' père envoûtait à sa vie, chercha de l'appui pocrisiairc ou de nonce apostolique. Cette
linople.
dans la cour de Constantinople. Il y envoya amitié élai t fondée non-seulement ' sur la con-

' Tout ce qui regarde Jean d'Asie est emprunli; peratoris patrem ad se cum exercitu venire co-
aux Annales de Philosophie, louic VIII, h" séné, gnovit, cnnsilium iniil qualitcr repelleret atitne-
pa((. 21U-2i3. C'est l'ii'uvre de M. F. .Nùve. (l'édi- cnrvl : nescicns miser Judiciun) sibi imiiiiiicre di-
teur.) limiiii, ijiii ri/iitra gcnitorein i/tiutnlibel htereticuin
' Dum chrisinaretur , Joannes est roritatus. Idlia ciKjUnrcl ll'iil., cap. xi.iil.
liren. Tiiiiiii., lil>. V,<"i|i. xwix. * Isiil., Ue Sirip. erclcs.. cip. xwiii. Iticlar in
" Jyilur cum llrrmi'iisgildus sulaliu /cfdi.- iwi. l'Uronicu ad an. liH'J.
[vi» SIÈCLE.] CHAriTin': xlvii. — saint LKANDltE DE SEVILLK, ETC. A23

lorinik^ de la lansueclde l;i itiofL-ssioninonas- ne doit pas craindre grand nom-


la mort, et
li<|iie qirils suivaient l'un et l'antre, luiiissur bre de lettres familières aux évoques ses
celle des inieuis et des ineliiialintis. Va) l'ut à confrèies. Il avait encore travailb- aux otli-
la piière de saint Li^aiulre que saint (ii(''gi)ire ces de l'Kglise, fait deux éditions des Psau-
composa ses commentaires sur le livre de mes avec des oraisons et composé des ,

Job.Il lui envoya depuis le pallium, mais ;\ chants agréables pour les prières et pour les
ccuidilion (juil ne s'en serviniit (jue lorst|u'il Psaumes que l'on disail dans la céhibration
ccl(5brerait la messe. d(;s saints mystères. On a pris de là occa-
ii.>i rn- 3. L'évèuue
*
de Sévillc, de retour dans su sion de lui attribuer la liturgie, ou la messo
TOJf en *\il ,
CD .i8v.
ville épiscopale, éprouva avec les autres évo- mozarabique, qui est l'ancienne liturgie d'Es-
ques catlioliijues la fureur ilu roi Lévit^ilde. pagne. Quelques-uns en ont fait auteur saint
Ce prince venait de faire mourir son iils Isidore son frère. Ils peuvent y avoir contri-
Herménégilde, qu'il n'avait pu ramener à la bué l'un et l'autre mais ils ne l'ont point
;

perfidie arienne. Il envoya en exil saint faite en l'état que nous l'avons aujourd'hui,
Lcandre qui l'en avait détaché mais sou , puisque leurs noms se lisent dans le canon
exil ne fut pas de longue durée car Lévi- : de la messe avec ceux de saint Ililaire, de
gilde étant tombé malade la même année saint .\tbanase, de saint Ambroise, de saint
586, et se voyant à l'extrémité, lit venir le Augustin et de saint Fulgence. Le cardinal
saint évèque, lui recommanda son Iils Réca- Xiniénès fit imprimer cette liturgie à Tolède
rède qu'il laissait pour successeur, le priant en 1504; elle se lit, mais imparfaite, dans le
de lui faire ce qu'il avait fait a son frère vingt-septième tome de la Bib/iollièf/ne des an-
Herménégilde, c'est-à-dire de le faire catho- cicnsPères. [Le tome LXXXV de la Patrulogie
lique. La chose arriva de même Hécaréde : latine et le suivant comprennent les liturgies
se fit instruire, et ayant l'econnu la vérité, raozarabiques longtemps usitées en Espagne.
il reçut le signe de la croix avec l'onction Le premier volume comprend le missel mixte,
du saint chrême, c'est-à-dire le sacrement d'après l'édition du père Leslée, jésuite, qui
de confirmation. y a joint de longues notes. Voici la division
iipp.!ido 4, Saint Léandre donna avis de cette con- de l'ouvrage 1° Préface en forme de dis-
:

au rond 10 de
swiie.msoo. vei'sion au pape saint Grégoire, par une let- sertation par le père Leslée 2° Calendrier ;

tre qu'il lui écrivit en 590, pour le féciliter mozarabique ;


3° Le missel divisé en deux
sur son élection. La même année, il tint un parties : le dominical , et le sanctoral ou
concile à SéviUe avec sept auties évêques. fête des saints ; les principaux chants
y sont
11 mourut en 003, et eut pour successeur notés. —A on trouve un Appendice
la suite

saint Isidore son frère, qui l'a mis dans son cfui contient une messe de saint Pelage, com-

Catalogue des écrivains ecclésiastiques, avec posée vers 930, un ancien calendrier, un ca-
une liste de ses ouvrages. lendrier gothique espagnol. Une table des
Ses Ecrits. Le premier cst coutre les ariens; saint
5. ' matières termine le volume. Le suivant com-
Léandre le composa pendant son exil, c'est- prend le bréviaire gothique d'après l'édition
à-dire en 086. Il était divisé en deux livres, d'Ant. Lorenzana, archevêque de Tolède; en
dans lesquels il faisait paraître qu'il élnit voici les principales divisions ; i° Préface
très-instruit dans la science des divines écri- de Lorenzana 2° Le calendiier et le bré-
;

tures, découvrant tous les subterfuges des viaire gothique; 3° Le psautier; 4° Les canti-
ariens, confondant leurs erreurs avec beau- ques 5° Les hymnes G° Les heures canoni-
; ;

coup de force et de solidité, montrant ce ques 7° Le commun des saiuts 8° Le sanc-


; ;

que l'Église catholique enseigne contre eux, toral ou office des saihts.]
et en quoi elle dilïere des sectes hérétiques 6. Il nous reste de saint Léandre une let- ^?» ui-<, \

dans sa doctrine et dans ses mystères. Cet tre à sa sœur Florentine, '
intitulée : Institu- ^f^
iif^.
p»^-
pari. 3,

écrit n'est pas venu jusqu'à nous. Nous tion des Vierges et du inépris du monde. Ho!s- r-s- »', 'i-

avons aussi perdu un autre petit ouvrage où ténius l'a donnée dans le Code des lîèijles de

ilrapportait les objections des ariens, et y saint Benoit d'Auiane, à Paris, en 1663,
joignait des réponses; plusieurs lettres au d'où on l'a fait passer dans le douzième tome
pape saint Grégoire, une sur le baptême, de la Bibliothèque des anciens Pères [ei dans le
une autre à son frère pour montrer qu'on tome LXXXU de la Patrologie latine, col. 871
et siiiv. Elle est piécédée ici d'une notice
' Iskl. llispaleus., I^f Siry<(. <'((7t's., caji. xxvui. par Cave]. Florentine avait demandé à son
434 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
frère quelle succession il lui laisserait en mou- vue des jeunes hommes dont les mœurs
ne sont point chastes ils ne peuvent faire
rant saint Léaudrc, y ayant fait réliexion,
;
;

sur votre cœur et votre imagination que des c«i .m.


ne trouva rien qui fiit digne d'elle dans la
impressions dont les suites sont toujours
possession des biens de la terre, parce qu'ils
Comme elle avait fait dangereuses, soit de jour, soit de nuit. On
sont tous péri^^sables.
profession de virginité, il lui parut que ce doit aimer les hommes pour Dieu dont ils

de meilleur, était de
lui laisser sont l'ouvrage, et non pour la beauté du
qu'il pouvait
lui suggérer le moyen d'augmenter
la ré- corps. A l'égard du boire et du manger, il "•

compense qu'elle devait attendre de sa vir- en faut user modérément, et non au delà du
apprenant à s'attacher entiè- besoin ni rechercher des mets sans les-
,
ginité, en lui
quels on peut vivre. Si la faiblesse de la
rement à Dieu, qui est l'héritage des justes
et l'époux des vierges. « Ce n'est pas
penser santé exige des soulagements, que l'esprit dm. m
sagement, lui dit-il, que de préférer le monde ne se relâche en rien. Daniel n'eut que du
qui a été racheté par le sang de Jésus-Christ, mépris pour les mets qu'on lui servit de la
table du roi il vécut de légumes. Quand cup ».
à Jésus-Cririst même celui qui rachète est ;
:

plus estimable que ce qu'il rachète. Les vier- vous aurez à parler à un homme, que ce
qu'elles sont telles soit en présence de deux ou tiois de vos
ges ont cet avantage ,

qu'elles ont été formées des mains de Dieu. sœurs. Jésus -Christ n'eût pas parlé seul
Le premier homme ne s'est perdu, et avec avec la Samaritaine, si ses apôtres n'eus-
lui tout le genre humain, qu'en ne voulant
sent été obligés de s'absenter pour aller
plus être ce que Dieu l'avait fait. Les vierges acheter de quoi ; manger
ils n'eussent pas

sont la première portion du corps de l'E non plus été surpris de le voir seul avec une
glise. Quelle gloire n'ont-elles point à espérer femme, si sa coutume n'eut été contraire.

dans le siècle futur, pour n'avoir pris con- Partagez votre temps entre la prière et la lec-

seil ni de la chair, ni du sang, et pour s'être ture. Sivous travaillez des mains, ou si vous
conservées pures de toute corruption?» Saint prenez votre repas, qu'une autre vous lise
Léandre entre dans le détail de tous les quelque chose pendant ce temps-là. Cher-
avantages de la virginité, et des dangers aux- chez dans la lecture de l'Ancien Testament
quels s'exposent celles qui, par de valus or- un sens spirituel, surtout dans le Cantique
nements , cherchent à plaire aux hommes. des cantiques, qui est une flgure de l'amour
Il convient que le mariage a aussi ses pré- de Jésus -Christ pour son Église, et dans
rogatives, ne fût-ce que celle d'engendrer des rileptateuc(ue c'est-à-dire les cinq livres
' ,

vierges, et de faire naître des enfants pour de Moïse, et ceux de Josué, des Juges et de
le ciel ; mais il soutient que les dangers en Ruth que l'on défendait autrefois aux per-
sont très-grands et en grand nombre , soit sonnes trop charnelles, comme pouvant leur
pour cette pour l'autre. Il en fait la
vie, soit être plus nuisibles qu'utiles. Proportionnez

description après quoi il donne à Floren-


;
les jeûnes à la force du tempérament et à

tine et aux vierges qui vivaient avec elle en la violence des passions; le jeûne est un

communauté, une règle de vie qu'il distri- moyen de dompter la chair et de la soumet-
bue en vingt-un chapitres, dont voici le pré- tre a res[)rit. Si vos inlirmités ne vous per-

Cip. cis. Fuyez la conversation des femmes en- mettent point d'observer un jeûne si rigou-
gagées dans le mariage, elles ne vous par- reux, vous ne pécherez point, mais vous re-
leront que des objets de leur amour et de garderez comme au-dessus de vous celles
leurs désirs en vain elles parailront ap-
; que l'infirmité ne dispensera pas de la loi.
prouver votre institut, ce ne sera qu'une Au reste, que celle qui par sa santé est en
feinte de leur part pour vous séduire plus état de la suivre, ne se scandalise point des
aisément et pour vous inspirer leurs sen-
: égards que l'on doit avoir pour celles qui se
timents. Fuyez également toute familiarité portent moins bien que celles - ci leur
;
.1

avec les hommes quelque réputation qu'ils,


tour s'humilient pour leur infirmité et ,

aient de probité de fréquentes visites de


; qu'elles aient de la douleur de ne pouvoir
leur part leur feront tort et à vous. C'est faire ce (]ue font les autres. L'excès dans le
un mal de donner lien aux autres d'en prMi- vin est un crime mortel une viertre donc :

scr de nous, et deux personnes de dill'é-


renl sexe ne sont pas ensemble sans danger; < Aiilrefiiis lu livre de Itiitli ne faisiiit 1(11 uu iivec
mais évitez avec beaucoup plus de soin la celui lie» Jugos.
[Vl" SIKCLE.] CHAPITRE XLVIl. — SAINT LÉANDRE DK SÉVILLE, ETC. 42,j

qui est en sant^, fera bien de s'en al)Sfenir; vaut être en commun, l'une ne doit pas s'iip-
celle qui estd'une santé faible ou malade, proprier ce qui appartient également aux
peut en user avec la niodt'ration que saint autres. S'il est permis aux hommes charnels

Paul prescrit i\ Tiinotliée elle doit aussi


: de jurer pour ôter tout soup(;on île fraude,
user du bain unicpieincnt pour le rétablisse- il ne l'est pas aux personnes spirituelles:
ment de sa santé, tout autre motif le rend lors même qu'elles sont assurées qu'elles
dangereux, surtout quanti on le prend pour disent vrai elles doivent se contenter de
,

avoir la chair plus belle. La joie que donne dire : cela est, ou cela n'est pas ; tout ce qu'elles
une bonne conscience, est celle qu'elle doit ajouteraient de plus ne pourrait venir que
,

Cip. XX.
chercher les joies mondaines ne doivent
; du malin esprit. « N'atTectez point de parler
pas être de son goût la tristesse qui est
; {\une de vos sœurs en particulier, à l'exclu-
selon Uieu leur est préférable , c'est celle- sion des autres ce qu'il est utile ù l'une de
:

li\qui rend heureux et qui mérite des con- savoir, ne l'est pas moins à toutes. Si ce que
solations. Saint Léandre veut que sa sœur vous lui dites est bon pourquoi ne pas le ,

ait im amour égal pour toutes ses sœurs, communiquer aux autres? S'il est mauvais ,

sans distinction de personne, la qualité do vous ne devez ni le penser, ni le dire h per-


sei'vante de Jésus-Christ étant commune à sonne. Saint Léandre finit sa règle en con-
toutes, toutes étant baptisées et recevant jurant sa sœur de persévérer dans l'état
ensemble le corps et le sang de Jésus-Christ ; qu'elle avait embrassé et après être sortie,

mais A l'égard des besoins, il lui conseille de sa famille et de son pays, à l'imitation
de les proportionner aux infirmités de cha- d'Abraham, de ne pas regarder derrière elle
cune, donnant plus à celle qui a de plus à l'exemple de la femme de Loth, de peur que
grandes infirmités, les biens demeurant en ses sœurs ne voient en elle ce qu'elles de-
commun k toutes. S'adressant h sa sœur en vront éviter.
7. Nous ne répéterons point ici ce que
de
particulier, il l'exhorte à conserver en tout Dis<'our>
LéaoJr'!
S.
tur la convPr-
temps une égalité d'âme, soit daus l'adver- nous avons dit ailleurs du discours que fit ïion de Goths.
.lutrement de
sité, soit dans la prospérité dans la pau- , saint Léandre sur la conversion des Goths :
snD stylo S> a
épilaplm
vreté et dans l'abondance, à fuir les titres il fait partie du troisième concile de Tolède,

d'honneur, k se regarder comme la servante tenu en 389. [Il est reproduit d'après Mansi
de toutes. La mère de Jésus-Christ, dit-il, n'é- au tome LXXII de la Patrologie latine, col.
tait riche que dans le Seigneur, et Josepli,son 894 et suiv.] Le saint évêque souscrivit le
époux, réduit à gagner sa vie en travaillant troisième aux décrets de ce concile, en qua-
à des ouvrages en fer. Il ne permet ni ne
'
lité de métropolitain de la province Bétique.

défend à Florentine l'usage de la viande, Son style, quoique concis et sentencieux,


sachant qu'elle était d'une santé faible mais ; est fort net. On a mis à la fin de sa règle une
il ordonne à celles qui se portent bien de épitaphe qui lui est commune avec son frère
Cod. Reeiil.
s'en abstenir ; il est d'avis qu'elle passe le sœur Florentine ils étaient
saint Isidore et sa ; P'g. 108, paît.
3.
reste de ses jours dans le monastère oii elle tous trois enterrés dans un même endroit,
était entrée,parce qu'encore qu'elle y ren- saint Isidore au milieu des deux. [Cette épi-
contrât quelq'ue sujet de tristesse par la dis- taphe se lit daus la Patrologie latine, ibid.
corde ou les murmures qui pouvaient y naî- col. 893].
tre, elle y trouverait toujours des exemples 8. Jean de Biclar eut part, comme saint rlar.
Jpan de Bi-
^OS

de vertu à imiter. La vie commune des mo- Léandre, aux persécutions que le roi Lévi- tcrils.

nastères a pris son origine dans les premiers gilde fit soufi'rir aux catholiques d'Espagne.
fidèles ,
qui avaient tout en commun ; cette H était de la ^ nation des Goths, né àScalabe
vie est préférable à la vie privéeque mènent ou Santaren, dans la province de Lusitanie.
certaines -lierges qui demeurent seules dans Étant jeune, il alla à Constantinople, d'où,
les villes où elles ne laissent pas d'être oc-
, après s'être rendu habile dans les lettres
cupées de plaire par la propreté de leurs grecques et latines, il revint en Espagne au
habits, et des soins de lem' ménage, qui les bout de dix-sept ans dans le fort de cette
,

détournent des choses de Dieu. Il appelle persécution. Lévigilde voulut l'obliger â em-
vol ce qu'une religieuse possède en propre à brasser l'hérésie arienne ; et le trouvant
rinsu de la communauté, parce que tout de- ferme dans la foi catholique, il le relégua à

Cerle faber {errarius fuisse legilur. Cap. xiv. * IsUi., De Script, eccles., cap. xxxi.
,

i26 HISTOIRE GKNÉllAL DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


Darcelouc. Jean \- passa dix anni'es, pen- sius et de Basnage. Galland s'est servi du
dant lesquelles il eut beaucoup à souUVir des préférence de l'édition donnée par Scaligcr
de la violence des ariens. Ensuite
artifices et en !606, à Amsterdam, dans le T/wsaurus
ilfonda un monastère dans les vallées des tem/jorum. Il cite deux autres éditions, l'une
Pyrénées, nommé Biclar, où ayant assem- de François Schott, Hispania illustratn, lora.
blé une communauté, il lui donna une règle lY; l'autre du cardinal d'Aguirre, Concil.
très-utile, non-seulement ;\ ses moines, mais tom. IL] On trouve dans cette chro-
Jlig/jan.,

à toutes les pei'sonncs qui craignent Dieu. nique des empereurs, des rois d'Es-
la suite

Nous n'avons plus cette règle. L'abbé Jean pagne et des papes, et les faits les plus
fut depuis élu évèque de Girone. L'année de remarquables arrivés dans l'Ktat et dans
sa mort est incertaine. Il nous reste de lui l'Église.Jean de Biclar parle de l'assem-
une Chronique abrégée, qu'il composa pour blée des évêqucs ariens tenue à Tolède par
continuer celle de Victor de Tunone, com- ordre du roi Lévigilde, où il fut ordonné que
mençant ;ï la première année de Justin le les catholiques qui passeraient de l'Église
Jeune, q*"ii est l'an,jGG, et finissant à la hui- dans la secte arienne, ne seraient point re-
tième de l'empereur Maurice, et à la qua- baptisés qu'on se contenterait de leur impo-
;

trième du roi Récarède, c'est-à-dire à l'an ser les mains, et de leur donner Ja commu-
Tom.
LoclioD.
I,
Ca-
589. Canisius l'a donnée parmi ses Leçons nion. Il fait aussi mention du concile assem-
anciennes imprimées à Ingolslad, et depuis à blé en la même ville sous le roi Récarède, où
Anvers par les soins de Basnage, [et dans ce prince présenta sa profession de foi, et où
le tome Xn de la Bibliothèque de Galland, se fit la réunion des Goths à l'Église catho-
avec une notice. Le tome LXXII de la Pufro- lique, après qu'ils eurent abjuré leurs er-
logie latine reproduit cette édition, qui est reurs.
beaucoup plus correcte que celles de Cani-

CHAPITRE XLVUI.

Jean le Jeûnenr patriarche de Constantinople [595] [écrivain grec], Licinien

évêqae de Carthagène [584J, Sévère étfêqce de Malaga [vers

le même temps] [écrivains latins].

Jp.in le JoiV 1. Six jours après la mort du patriarche et pénilcute pendant son épiscopal semble ,
neiir, [lat
é'Iî'de'Toi's Eutychius, arrivée le 5 avril 582, ou élut
**
être une troisième preuve qu'il avait fait
lnnliiio;le, in
pour lui succéder sur le siège de Constan- profession de la vie monastique avant d'être
tinople, Jean, diaci'c de la grande église de admis dans le clergé de Constantinople par
cette ville, surnommé le Jeûneur. La réputa- le patriarche Eutychius. Les Grecs' le font
tion de savoir et do vertu qu'il s'était acquise, originaire de cette ville , et ajoutent qu'il
réleva à celle dignité, qu'il remplit en vrai y exerça d'abord le métier de sculpteur.
pasteur, employant tous ses levenus et tous Dans un concile tenu h Conslantinople en
ses soins aux besoins do. son troupeau, ])on- SSn, Jean prit le litre d'évéque universel le ;

danl lui-même les commo-


qu'il se refusait iï pape Pelage II en ayant été informé ", cassa
dités de la vie, et vivant dans une abstinence les actes de ce concile, et défendit à l'archi-
conlinuiiUe et dans un jeûne très-rigoureux, diacre Laurent, qui était son nonce auprès
d'où lui vint apparcmuient le siu'iiom de Jeû- de i'Einiierptir, d'assister i\ la messe avec le

neur, il est qualifié de moine dans un dis- patriarche Jean. Nous verrons dans l'ai-licle

cours sur la pénitence, dont on le fait au- de saint Grégoire , successeur de Pelage
teur; et Jean Diacre, qui écrivait dans le ([uelles fiH-ent les suites de celte alfaire. Elle
ix° siècle, le qualifie de môme. Sa vie dure
'
n'cnqièciia pas que saint Grégoire n'adres-

' Jn.iiinc8l)iac,lil). \\\DcVitnS.Greg.,n\\m.'\. toire iin>n.isli(|nr il'Orieiil, lib. IV, ciip. xvu.
* Méiitjcs nu K>iijii(l jciiii- (U Fcjili'iiibn:, on l'His- > fireu-, lil). V, Liiisl. ;8.
,

[vC SIÈCLE.] CHAPITRE XLVIII. — JEAN UE CONSTANTINOPLE, ETC. i27

sAt i^i Jean, comme aux auties patriarches triarche, il déchira l'obligation , et fit porter
d'Orient, les lettres synodales du loiicile qu'il au palais pauvres
ces' meiiliies, dont il fai-
avait assemblé à Home en îiill. Deux ans sait plus de cas que de l'or et de l'argent. Il

après il lui écrivit une lettre en particulier, couchait sur ce petit lit pendant le Carême.
pour Ini recommander Sabinien , iju'il en- 2. Saint Isidore de Séville n'attribue ' d'au- kt u d«

voyait en qualité do son nonce ù Constanli- très écrits a Jean le JeTineiir, qu une lettre sur •""
nople. 11 lui avait écrit deux autres lettres le baptême à saint Léandre, son frère et son
au sujetd'un prêtre nommé Jean, et de ijuel- prédécesseur sur le siège épiscopal de cette
qnes moines d'Isaurie accusés d'hérésie ville, dans laquelle Jean ne disait rien de

dont l'un, qui était prôtre et se nommait nouveau, et ne faisait que lapporter les sen-
Anasiase avait reçu des coups de bâton
,
timents des anciens sur les trois immersions.
dans l'église de Constantiuople. Le patriar- Nous n'avons plus cette lettre, mais on nous
che Jean répondit qu'il ne savait ce que c'é- a donné d'autres ouvrages sous le nom de
tait ; sur quoi saint Gréifoire lui dit dans la
'
Jean, savoir une homélie assez longue sur
:

lettre dont il avait chargé Sal)inien : « J'ai été la pénitence, la continence et la virginité,

fort surpris de la réponse que vous m'avez une sur les faux prophètes et les faux doc-
faite si vous dites vrai, qu'y a-t-il de pire
;
tcm's, un pénitenliel et un discours où il
que de voir les serviteurs de Dieu ainsi trai- prescrivait l'ordi-e que l'on doit garder dans
tés, sans que le pasteur qui est présent en la confession de ses péchés. Les deux home- ^><><: '.<»"•

sache rien ? Mais si vous le savez, que répon- lies sur la pénitence et sur les faux prophè-

sip,>, II. drai-je à cela, tandis que l'Écriture dit : La tes ont souvent été imprimées parmi celles
bouche qui ment tue /'«m<? ? Est-ce là qu'abou- de saint Chrysoslome, mais on est enfin con-
tit votre abstinence? Ne vaudrait-il pas mieux venu qu'elles ne sont point de lui le style ;

voir entrer de la chair dans votre bouche, de la seconde est bas et rampant, l'auteur ne
que d'en voir sortir un discours faux où l'on savait pas même sa langue naturelle, ou du
se joue du prochain? Dieu me garde d'avoir moins il en ignorait les règles, puisqu'on y
de vous cette pensée. Ces lettres portent trouve plusiem-s fautes contre la grammaire.
votre nom mais je ne crois pas qu'elles
;
Elle ne peut donc faire honneur ni à saint
soient de vous elles sont plutôt de ce jeune
: Chrysoslome ni à Jean le Jeûneur la pre- :

homme qui est auprès de vous qui ne sait ,


mière vaut beaucoup mieux. Dom Montfau-
encore rien des choses de Dieu, qui ne con- con, qui a cru avec Vossius et Fearson qu'elle
naît pas les entrailles de la charité , et que était de Jean, ne l'a point mise dans son édi-
le monde accuse de plusieurs crimes. Si tion des œuvres de Chrysoslome mais
saint ;

vous continuez à l'écouter, vous n'aurez elle se trouve dans premier tome de celle
le
point de paix avec vos frères. » On voit par de Morel, et dans le septième de celle de Sa-
une autre lettre* de ce pape que Jean con- ,
vilius. Le Pénitenticl a été imprimé par les
tinua jusqu'à sa mort de prendre le titre de soins du père Morin, à Paris en 1631, sous
patriarche universel; car cette lettre est du le nom de Jean le Jeûneur. Ce père doute
1" janvier de l'an 395 et Jean mourut au , toutefois qu'il soit de ce patriarche, parce
mois de septembre de la même année, après qu'on y rencontre plusieurs choses qui sont
treize ans et cinq mois d'épiscopat. L'em- d'un siècle postérieur au sien. On ne connais-
pereur ' Maurice lui avait prêté une somme sait pas, en effet, dans le vi= siècle trois ca-
considérable dont Jean lui avait fait une
, rêmes dans l'Église, communs aux laïques et
obligation qui portait hypotlièque sur tous aux clercs un avant la fête de saint Phi-
:

ses biens mais après sa mort ce prince ne


; lippe, un avant la fête des douze apôtres, le
trouva chez lui qu'une couchette de bois, troisième avant Pâques. L'auteur du Péiii-
une mauvaise couverture de laine et un , tentiel les * marque tous trois il vivait donc ;

manteau tout usé. Admirant la vertu du pa- après le vi° siècle. Il est parlé de ces trois

' Greg., Epist. 53, lili. III. In quo nihil proprium ponit, sed tan-
tislitem.
» Greg.Jib. VII, E7)is(. 4. tuinmodo antiquorum Patrum replient de trina
' Theophyl., lib. VII, cap. vi. mersione senteiiUas. Isid., De Script, écoles., cap.
loannes Grœco eloquio edidil de sacrameiito
* x.wi.
taplismalis rescniduin ad beiUiv recordalionis ' Decernimus aulem sœcularibus ut a carne
doininum inetim el piu'decesaorem Lcandrum aii^ abslini'iint dudbus quadragesimLi, sancli scilicei
, ,;

428 HISTOIRE G1';NI':IIALE des AUTEUllS ECCLESIASTIQUES.


carêmes dans un '
traité qui porte le nom d'A- même à qui le gouvernement des âmes n'est
nastasc le Sinaïte, mais ijui n"en iicut être pas conlié, et une doctrine qui s'accorde
puisqu'il fut écrit après le ' septième concile parfaitement avec celle des plus fameux doc-
général, c'est-à-dire après l'an 787, sur la teurs de l'Église, saint Hilaire, saint .\m-
fin du VIII' siècle. Le Pénitentiel attribué à broise, saint Augustin, saint Grégoire de Na-
Jean le Jeûneur peut être du même temps. zianze ; ce qu'il prouve en rapportant les
Le père Morin doute éjxalement que l'autre termes de quelques-uns d'entre eux, en par-
opuscule qu'il a fait imprimer sous le litre ticulier de saint Hilaire, de saint Ambroise
de Méthode de confesser ses péchés à son jière et de saint Augustin; mais comme ce saint
spirituel, soitdu patriarche de Constantino- pape défendait dans ce livre d'ordonimr
ple penche <i croire que ce n'est ([u'un
; il évèque un homme sans science, Licinien
extrait du Pénitentiel rédigé en une instruc- dit avec beaucoup d'humilité que dans ce ,

tion familière, ce qui a beaucoup de vrai- cas on aurait dû l'exclure de l'épiscopat


semblance. Les Grecs du moyen âire n'ont puisqu'il se reconnaissait du nombre des
pas laissé d'attribuer ces deux opuscules à ignorants, et qu'il faudrait en exclure beau-
Jean le Jeûneur, comme on le voit par di- coup d'autres qui n'avaient pas les talents que
vers manuscrits grecs qui portent son nom ;
saint Grégoire demande. «Ne suflirait-ilpas,
Lambécius en cite plusieurs dans le qua- ajoute-t-il, pour être élevé à ce degré d'hon-
trième hvre ' de sa bibliothèque. [Le tome neur, de savoir Jésus-Christ, et Jésus-Christ I. Cor.

LXXXVUI de la Patrologie grecque reproduit crucifié? iii cela nesutlit pas, je ne vois point
le Pénitentiel, le sermon sur la Confession qui pourra être évèque, en supposant néces-
et la Pénitence, le sermon sur la Pénitence, saires toutes les quahtés que vous exigez dans
la Continence et la Virginité, col. 188'J et votre livre pour l'épiscopat.» Il marque que
suiv.] l'on avait soin dans l'église d'Espagne d'ex-

éTèqus dti
3. Xous ne savons de Licinien que ce que clure du sacerdoce les bigames mais dans ;

Ses
saint Isidore de Séville nous en a appris. Il la frayeur que lui avait causée le Pastoral de
«cnls.
Isidor. de
Scrir-E-eles.,
était évèque de Carthagèue et savant dans , saint Grégoire il le prie de lui écrire quel-
,

cap. JtiiA.
les saintes Ecritures. Entre plusieurs lettres ques mots de consolation, craignant que le
qu'il il y en avait une sur le sacre-
écrivit, manque de sujets ne l'ait engagé à ordonner
ment de baptême, d'autres à l'abbé En-
'
prêtres ceux qui n'avaient pas peut-être
trope, qui fut depuis évèque de Valence. toutes les qualités requises. 11 s'excuse sur
Saint Isidore ajoute qu'il n'avait pas con- le besoin, disant que,ne voulait or- si l'on
naissance d'autres fruits de son travail et donner que ceux qui en sont dignes par la
de son industrie; que Licinien lleurit sous réunion de tous les talents qui forment de
l'empire de Maurice, qu'il mourut à Cons- grands évêques, la foi ne serait plus prè-
tanlinople empoisonné, comme ou le croyait, chée, ni le baptême administré (l'Apotre
par ses ennemis, ce qui ne pouvait nuire à toutefois ordonne l'un et l'autre.) 11 faudrait
son àme, puisqu'il est écrit Quand le juste : aussi faire cesser la célébration des saints
mourrait d'une mort précipitée, il sera dans le mystères, qui ne se fout que par les prêtres
repos. Il nous reste une lettre de Licinien au et les ministres de l'Hglise. Saint Léandre,
pape saint Grégoire, dans laquelle il lui té- évèque de Séville, avait fait voir à Licinien les
moigne combien il était content de la lec- jl/ora/e.'i de saint Grégoire surJob.s.ans lui don-

ture de son livre des Règles, c'est-à-dire de ner le temps de les lire il prie donc le Pape de :

son Pastoral saint Léandre l'avait fait con-


: les luienvoyer, parce qu'il n'était pas con-
naître aux Églises d'Espagne. Licinien trouve tent des homélies d'Origène sur ce sujet
dans ce livre d'excellents préceptes sur la mises en latin par saint Hilaire de Poitiers,
pratique de toutes sortes de vertus, non-seu- Il lui demande aussi ses autres ouvrages de
lement pour- les évêques, mais pour ceux morale, dont il faisait mention dans sou Pas-

Philippi et sanctorum duodecim apostolorum. In • Id servalum ftnl a sanctis patribus et seplem


magnn autem qtiadragesima si fieri pntest a pis- cnnciliis generatibus. Ibid., pag. 430.
cibus sœculares ahslinebunt prwler sabbalha et » Uinlii'iius, lit). IV, pag. 196, etlih. V, pag.23fi,
dominicas... oleo vero monachi. I'<ruit. pag. , .'t lib. VIII, pag. 472.
89. ' Cnjus Liciniani nonnull(U legimus epislolas

' Aiiafl. Siuaïln. Traclatu de tribus quadrage- de sucnimenti) denique baplismatis unain. Isid.,
siiiiis, loiu. III ilonumenlor. Cotelerii, pag. 420. !ib. De Scriph eccks., cap. xxil.
[VTT" SIÈCLE.] CHAPITRE XLIX. — SAINT OnÉGGIRE LE fiRAND, PAPE. 42-.)

toral. Il finit pn ces termes : (( Que Pien con- Les témoignages de saint Jérôme,
jfictions.
serve en Sidilé vol re^ cou ronnf \tonr rinslriic- de saint Augustin, de Claudien qu'on qua-
tion de l'Église. » C'était un litre d'honnenr lifie d'homme très-disert et qui a écrit trois
que les évéqncs donnaient au Pape, comme livres sur l'incorporalité de l'âme, sont invo-
on le voit par saint Aiii;iistin et piiisimirs qui's. La seconde lettre est adressée à Vin-
anciens, nommément par- Kniinde dans une cent, évèque de l'iled'Iviça, autrement Klju-
de ses lettres au pape Symma(juc. La lettre sus. Elle est contre ceux qui croyaient que
de Licinicn se trouve dans le second livre des des lettres étaient tombées du ciel sur le
lettres de saint Gréiîoire où elle est la cin- , tombeau de saint Pierre h Homo.]
quante-(]uatri('Mno. [On la trouve aussi dans 4. Sévère, évèque de Malaga, ami et col- Stvir». h:.
(]iie do Mul.f
le tome L.XIl de la Patrolngic latine, col. 681) lègue de Licinien, fleurit et mourut sous le Ku Si>s icrits

et suiv. avec deux autres lettres éditées d'a- rcïnc de empereur Maurice. Il écrivit un
1 '''"'• ""
. , i>:ripfor. Ec-
près les manuscrits de Tolède. La première petit traite contre Vincent de Saragosse, qui des.
'

est écrite par Licinicn et Sévère le Petit nu avait quilté l'Eglise catholique pour passer
diacre Epipliane on y montre que les anges
; dans le parti des ariens, et un livre sur la
et les ihnes douées de raison sont des es- virginité à sa sœur, intitulé l'Anneau. Ces :

prits, et qu'ils n'ont pas de corps. On prouve deux écrits sont perdus.
cette vérité par l'Écriture on y réfute le.s ob- ;

CHAPITRE XLIX.

Saint Grégoire le Grand, pape et doctenr de l'Église [6041.

tendresse envers son père et sa mère, Attirer


ARTICLE I". leurs portraits ,
que l'on conserve encore à
HISTOIRE DE S.\ VIE.
Rome avec le sien dans une petite chapelle de
Saint-André. On ne donne que des conjectu-
1. La ville de Rome fut le lieu de la nais- res sur l'année de sa naissance, et elles se ré-
f'Iro CD -*!'.
kio éJuca-
sance de saint Grégoire ; son père se nom- duisent h en 540. Dès son enfance il
la fixer
<0D.
mait Gordien et sa mère Sylvie.
, Ils étaient fut instruit avec tant de soin dans toutes
*

l'un et l'autre également considérables par les disciplines et dans tous les arts libéraux,
la noblesse de leur naissance et par la sain- qu'il n'y avait personne qui ne lui cédât
teté de leur vie. Gordien était du nombre en érudition dans Rome. D avoue ^ toutefois
des sénateurs, mais il renonça aux dignités qu'il ne savait pas le grec mais ses lettres, ;

du siècle pour embrasser l'état ecclésias- surtout la quarante-cinquième du treizième


tique. On dit ' qu'il fut fait diacre régio- livre, font voir qu'il avait très-bien étudié
naire, c'est-à-dire l'un des sept diacres car- les lois. D'un esprit et d'un jugement mûr,
dinaux, qu'on nommait régionaires à cause dans * un âge peu avancé il écoutait avec ,

que Rome
ayant été partagée en sept quar- attention les paroles sentencieuses des an-
tiers ou régions cbacim de ces diacres
, ciens, et lorsqu'il entendait dire des choses
avait soin dans son quartier des pauvres dignes d'être retenues, il les gravait profon-
et des hôpitaux appelés diaconies. Sylvie se dément dans sa mémoire. Il mettait ' son plai-
retira dans un monastère proche le portique sir à converser avec les vieillards, pour pro-

de saint Paul nommé Celle-Neuve. Saint


, fiter de leur sagesse.

Grégoire par un etfet de sa piété et de sa


,
2. Les Lombards venaient de ravager l'I-

• Incolumem coronam vestram ad eriidiendam ' Joan. Diac, lib. IV De Greg. VU , nuin. 43,
Ecclesiam suam sancla
Trinitas Dcus conserrare et Baronius ad an. 604.
dignetur. Licwi., Epist. ad Greg. Papani, tome 11, ' Paiilus Diac, num. 2.

pag. 622. (iVorœ edit.', 5 Greg., lil). VII, Epist. 32.


' Erigalparvulos implorata toronœ veslrœ mi- ^ Joan. Diac, lib. 1, num. 3.
seratio. Eunod., lib. IV, Epist. 22, ad Symmachum ' Greg., Dialogo 1, cap. ix.
Papam.

%
430 HISTOmE GÉNI^.RALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
i,r«i.ord.R^ talie, en dépouillant les églises, tuant les ne savait que, toute l'Italie étant alors dans
prêtres et les evéqucs, et laissant paitout des le trouble par les ravages des barbares, il

marques de leurcriiautii et Je leur avarice, n'était pas sur de demeurer partout ailleurs

lorsque saint Grégoire fut obligé de prendre qu'ù Rome, défendue et protégée par les
part aux atl'aires de la république. On lui apôtres saint Pierre et saint Paul, comme
donna la charge de ' préteur, c'est-à-dire de saint Grégoire le répète souvent dans ses

principal magistrat de la ville pour la justice lettres. Il est inutile de s'étendre beaucoup
civile. Ce fut pendant qu'il exerçait cette à montrer qu'il fit véritablement profession
charge, qu'il souscrivit, avec plusieurs per- de monastique, puisqu'il assure lui-
la vie

sonnes de qualité, à la confession de foi que môme a eu pour supérieur dans le


°
qu'il

Laurent, évêquc de Milan, avait présentée monastère de Saint-André l'abbé Valentin, et


au pape pour la condamnation des Trois- qu'il dit ailleurs qu'il avait vu Maxime moine

Ce pouvait * être vers l'an 374,


C/iapitres. lorsqu'il l'était lui-même'; siint Grégoire de

dans premières années de l'épiscopat de


les Tours, et Jean Diacre, sont formels là-des-
Laurent, sous le pontiikat de Benoit sur- sus. La règle qu'il professa fut celle de saint

nommé 'Bonose. Quelqu'éloigné que saint Benoit on pourrait en apporter un grand


:

Grégoire du luxe et du faste, il se crut


fut nombre de preuves; mais il sullit de remar-
obligé, pour faire honneur à sa charge, de quer que les religieux qu'il envoya pour con-
porter des habits de soie tout brillants d'or
' vertir l'Angleterre, poitèrent avec eux cette
et de pierreries. Il avait dès lors résolu de se règle, et qu'ils l'y établirent : or ils étaient
donner à Dieu ; mais il se persuadait qu'il du monastère de saint André, où ils vivaient
pouvait le servir également au milieu des avec saint Grégoire, et pratiquaient une
grandeurs des embarras du monde ainsi
et : même i ègle. Eussent-ils porté avec eux une
différa - 1 - il longtemps son eutière conver- autre règle que celles qu'ils suivaient? Saint
sion. 11 s'accuse de cette faute dans im en- Grégoire s'appliqua tellement à mortifier son
droit de ses ' écrits. corps par le jeune ' et par l'étude des livres
Il qDille
monde it
le
.0 Étant devenu, parla mort du sénateur
3. saints, qu'il s'all'aililit l'estomac, et qu'il tom-
retire dan5 ua
Gordien son père possesseur- des grands
,
bait en syncope s'il ne prenait souvent de la

biens de sa famille, en fonda six monastères


il ' nourriture. Ce qui l'affligeait le plus, était de
en Sicile, leur donnant des terres et des fonds ne pou voir jeûner le samedi-saint, jour auquel
autant qu'il était nécessaire pour la subsis- tout le monde jeûnait ^, même les enfants.
tance des religieux. Il en établit un septième Il demanda A Dieu avec beaucoup delîirmes'",
k Home dans sa propre maison, sous le nom de pouvoir jeûner au moins ce saint jour.
de Saint-André, qui existe encore. Il était oc- Quelque temps après il se sentit fortifié, et ne
cupé par des moines grecs du temps de Jean pensa plus ni à la nourritui-e, ni à la mala-
Diacre, après l'avoir été par des religieux de die. Sa nourriture ordinaire était des légu-
saint Benoit; il appartient présentement aux mes crus " que sa mèi-e Sylvie lui fournis-
Camaldules. Ce dernier monastère fut celui sait; elle les lui envoyait trempés dans une
qu'ilchoisit pour le lieu de sa retraite. D y prit écuelle d'argent, qu'il fit un jour donnera
l'habit monastique, et vécut premièrement un pauvi'e, n'ayant plus autre chose en
sous la tliscipline del'abbe Hilarion, puis sous main.
l'abbé Maximien, qui fut quelque temps après Passant par le marché de Rome, où
4.
fait évéque de Syracuse. Il pourrait paraî- l'on avaitexposé en vente des marchandises de. Ariklax.

tre suiprenant que saint Grégoire ait choisi arrivées depuis" peu, il aperçut des escla-
sa propre patrie pour y vivTC caché, si l'on ves d'une blancheur et d'une beauté singu-

• Greg., lib. IV, Epist. 2. in monasterio frater Antonius nomine, vivehal.


' .Mabil., Mus. Italie, loiiie 1, p.ig. 11. Ibiii., lib. IV, cap. XLvii. Filium suum nowine
» Paulus L)inr., nuiii. ^. Maximum, quem ipse jam monachus monaclnim
* Prœfat. Moral, in Job. vidi. Ibid., cap. xxxviii.
' ijreg.Turun., lil). X, rap. i; Joan. Diac, lib. I, ^ Greg. Turon., lib. X,cap. I; Joan. Diac, lib. I,

auiii. 5, etPaulus Uiai;., niim. 5. mim. 5, 6 cl 7.


• Silere non debeo quoi de hoc vira, abbalc ' Joau. Uiiic, lib. 1, num. 7. — • Ibid.
quondam meo, revtrendisitimo Valentino narrante •o Greg., Diatogo 3, cap. xxxiu.
agnoii. Greg., lib. I Dialog., cap. iv. J!ic mihi in >i Joan. Diac, ubi sup., uuin. 9.
mottaflerio posilo valde fainiliaris juitgcbatur. >* Joau. Diac, lib. I, num. 21 ; Ucda, lib. Il lli.tl.
Ibiii., Ijb. III, cap. xxxvjii. ^aln quidam mecum Angl., cap. I.
[vil' SIÈCLE.] CHAPITRE XLIX. — SAINT GUÉGniIlE LE GRAND, PAPE. 4.31

lièrcs. 11 ileniaiula an iiiairhaiitl (|ui les avait du moins l'annt'e suivante, lorsque Tibère,
auienrs pour 1rs vt-iulie, df. ([uc] pays ils après la mort de
Justin, gouvernait seul
étaient, et d'où ils venaient. «De l'Ile de Bre- l'Enqjire. 'd'usage que les Papes eus-
Il était
tagne, ri'pondil-il, dont tous les lia bilanls sont sent toujours un nonce à la cour impériale ;

beaux de visagi\et aussi hicn faits. » « Ca'.h in- et quand


y inaui|uaient, les empereurs en
ils

sulaires sont-ils chriîtiens?» demanda saint faisaient des plaintes. Saint Grégoire emme-
Grégoire. « Non, répliqua le marchand, ils na 'avec lui [)lusieurs moines de sa commu-
sont encore païens. » « (juel dommage, dit le nauté, pour continuer avec eux les exercices
saint en soupirant, que de
si beaux visages de la vie monasfi(iuc, (d s(; remettre parleur
soient sous la puissancedu démon!)) En in- compagnie de l'agitation des atfaires tempo-
terrogeant encore le marchand, il apprit relles.
qu'ils étaient de la nation des Anglais. Ce 6. Eutychius, patriarche de Constantino- Il r<M-lo
nu j/uliiuictio

nom lui parut convenable à ces peuples, à ple, avec (jui sa charge l'obligeait de com-
Kii'v.hiu.
la rail charger
. ri

do .inliiiiutil,
cause qu'en s'en faut peu qu'il ne si-
latin il muniquer souvent, était dans l'erreur au su- en ,»i.

gnifie un ange,
que ces Anglais lui parais-
et jet de nos corps après la résurrection, croyant
saient d'une beauté angélique. 11 sut, par la qu'alors ils ne seraient plus palpables, et
suite de sa conversation avec le marchand, qu'ils deviendraient plus subtils que le vent
que ces jeunes esclaves étaient de la province et que l'air le plus pur; il avait même publié
de Dcïri, à présent dans le duché d'York. un pour établir son sentiment. Saint
écrit
Aussitôt il alla trouver le pape Benoît, le pria Grégoire lui résista, ne croyant pas devoir
d'envoyer dans la Bretagne des ministres de soutl'rir que cette hérésie s'établit sous ses

!a "parole de Dieu, et s'otl'rit lui-même. Le veux dans la ville impériale, d'où elle pour-
l'ape y consentit; mais le peuple romain, rait se lépandre facilement dans tout l'em-
averti du départ de saint Grégoire, se plai- pire. Il eut avec le patriarche des conféren-
gnit à haute voix de l'éloiguement d'un hom- ces particulières, et une où l'empereur Tibère
me si nécessaire à la ville, et demanda son fut présent. Ce prince, ayant pesé les rai-
rappel en criant, lorsque le Pape passait pour sons alléguées de part et d'autre, résolutde
aller k l'église de Saint-Pierre : Vous avez of- faire brûler le livre d'Eutychius. Ce patriar-
fensé saint Pierre, vous avez détruit Rome en che, au sortir de cette conférence, tomba
laissant aller Grégoire. Benoit étonné de ces malade, et se voyant à l'extrémité, il dit *, en
cris, envoya promptemeut des courriers pour prenant la peau de sa main en présence de
le rappeler. Il avait déjà fait trois journées, ses amis « Je confesse que nous ressuscite-
:

et il pressait ses compagnons d'avancer, pré- rons tous en celte chair. » Il mourut leo avril
voyant ce qui arriverait; mais contraints de 582, et l'empereur Tibère le 3 août de la
prendre quelque repos, à l'heure de midi, à même année; ce qui fait voir que ce fut
cause de leur lassitude, ils furent devancés aussi en cette année que saint Grégoire eut
par les courriers qui les obligèrent de retour- avec Eutychius les conférences dont nous
ner. venons de parler. Il nous en a donné l'abrégé
5. S. Grégoire, de retour à Rome, continua dans ses Morales sur Job, en expliquant ce
. i Con-
à gouverner son monastère. Le Pape, voyant passage Je serai de nouveau environné de la
: j,,i,., x.t

ses progrès dans la vertu, l'ordonna l'un des peau qui me couvre. Pendant qu'il était encore fi'irJ.',',',. -.i

sept diacres de l'Église romaine soit pour , àConstantinople, il s'y répandit le bruit qu'on ™n., i.'i,,

lui servir à l'autel, soit ' pour lui venir en aide y semait de nouvelles erreurs, par lesquelles
dans l'administration des affaires ecclésias- on enseignait qu'il était permis de séparer
tiques, qui avaient besoin de reprendre une les personnes mariées sous prétexte de re-
uouveUe face car les diacres avaient alors
; ligion; que le baptême n'efi'açait point entiè-
la principale part au gouvernement de l'É- rement les péchés; qu'après avoir fait péni-
gliseaprès l'évèque. Quelque temps après, le tence de ses fautes pendant trois ans, on
pape Pelage II, qui avait succédé à Benoit, pouvait s'abandonner au désordre tout le
mort le 30 juillet de l'an 377, l'envoya à Cons- reste de sa vie sans crainte d'oll'enser Dieu,
tantinople en qualité d'apocrisiaire, ou de et que si l'on forçait ceux qui tenaient de
nonce apostolique. C'était vers l'an 378, ou semblables doctrines à prononcer anathème

' Greg. Turon., lib. X, cap. ii.


s Joan. Diac, lib. I, mim. 26,
« BeUa, lib. II HisL. cap. i. » Greg. Dialogo 14, cap. xxix.
432 HISTOIRE GKNKRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
contre quelques-uns de ces articles, cet ana- connaissance de la commnnauté, on chercha
tlième ne leslierait pas. Théoctiste, sreur de dans toutes les boites, et on trouva enfin les
l'empereur Maurice successeur de Tibère, trois pièces cachées au fond d'une boite

fut accusée d'être de cette nouvelle secleavec remplie de drogues. Saint Grégoire, saisi de
plusieurs autres personnes; mais saint Gré- douleur de voir qu'on avait commis une si
goire proteste qu'ayant vu celles à qui on im-
' grande faute contre la règle qui défend
putaitune si mauvaise doctiine, il n'avait re- aux moines d'avoir rien en propre, défendit
connu en elles aucune des erreurs qu'on leur au prieurde son monastère, appelé Précieux,
imputait; que mi-prisant les bruits qu'on ré- de permettre à qui que ce fût d'aller voir le
pandait coutre leur r(^putation, il avait tâclié malade sous prétexte de le consoler, excep-
de désabuser le public prévenu à leur désa- té à son frère, à qui il avait ordonné de lui

vantage, et que pour cela il leur avait donné répondre, s'il demandait pourquoi on l'aban-
part à son amitié.eu même temps qu'il prenait donnait ainsi , que ses frères l'avaient en
soin do les défendre contre leurs accusateurs. horreur, à cause de l'argent qu'il avait ca-
Il rompo't 7. 11 employait tout le temps que ses af- ché, afin qu'il sentit sa faute et la pleurât du
ses UoraLes
faires liîi laissaient libre, à étudier l'Écri- moins à l'article de la mort. La chose arriva
ture, ett^ en donner aux autres l'intelligence.
comme saint Grégoire l'avait prévu. Juste

Saint Léapdrc, évèque de Séville, était alors étant près de mourir, pria qu'on assemblât les

à Constantinoplo pour le service du prince frères, mais on lui refusa cette grâce, et on lui
Herménégilde, fils de Lévigilde, roi des Vi- en dit la raison. Dieu le toucha dans ce mo-
sigotlis en Espagne. Il lia une amitié très- ment, et il mourut dans les gémissements
'
étroite avec saint Grégoire qui, à sa prière de la pénitence. Le saint abbé, qui n'avait
et aux instances de ses frères, composa ses usé de cette sévérité que pour donner un
Explications morales sur Job. Saint Grégoire exemple i\ la communauté, poussa la chose
sut aussi se faire aimer des plus grands de plus loin, et pour imprimer davantage la ter-
la cour et des plus grands évêques d'O- reur et déraciner le vice de la propriété il ,

rient, entre autres d'Euloge, patriarcbe d'A- commanda qu'on fit uue fosse dans le fumier,
lexandrie les empereurs mêmes le respec-
:
qu'on y portât le corps du mort, et qu'on
taient. Maurice l'estima jusqu'à ' le faire jetât sur lui les trois pièces d'or, en même

parrain d'un de ses enfants. 11 était donc en- temps que tous les frères crieraient Que ton :

core à Constantinople en 583, Constantine argent périsse avec toi et qu'ensuite on le


,

qui avait épousé Maujice en 582 au mois couvrit de terre. Le corps de Juste demeura
d'août, n'ayant pu avoir d'enfants plus tôt ainsi pendant trente jours, au bout desquels

qu'au mois de mai 583. 11 y était même en saint Grégoire, touché de compassion, dit au

584, comme on le voit par une lettre que


' prieur de commencera oll'rirle sacrifice pour
lui adressa le pape Pelage, datée du 4 octo- lui, et de continuer durant trente joui-s ù

bre de cette année. otl'rir l'hostie salutaire, pour obtenir son ab-

Il re»i.ni 8. De retour à Rome vers l'an 585, il fut solution et sa délivrance. Saint Grégoire mar-
ft Uonie en
r.jr.. est fait
obligé de se cliarger du gouvernement de que ° encore plus clairement, dans un dé-
t\u de S.
son monastère de Saint-André à la place de cret du concile de Latran qu'il avait été
,

Maximien, élu depuis peu évêque de Syracu- abbé du monastère de Saint-André.


Il ml
se. C'est ce qu'il est naturel de conclure d'un y. Cela ne l'empêcha pas d'aider le pape
Pelage II en plusieurs affaires ecclésiasti- *er re K
fait qu'il raconte dans le quatrième
" livre
Irt».

de ses Dialogues. 11 y avait dans ce monas- ques il en fut le seoétaire comme saint Jé-
;

tère un religieux nommé Juste, fort liabile rôme l'avait été du pape Damase, et on con-

en médeciue. Juste étant tombé malade, dé- vient que les trois lettres au sujet de la con-
couvrit à son frère, nommé Copieux, qui daumation des Trois-Chapitres, adressées A
exerçait la médecine dans la ville, et qui Elle, archevêque d'Aquilée, et aux évèqucs

l'assistait dans sa maladie, qu'il avait cacbé d'Istrie, sous le nom de ce pape, sont du

trois pièces d'or. La cbose étant venue à la style de saint Grégoire. Paul Diacre les lui

> Greg., lib. XI, Epis/. 4.'>. » Lib. IV Dialog., cap. Lv.
• (Jreg., Prœfat. iii Job, uinii. 1 et 2. ' Qiiam necessarium monasleriorum quieti
sit

• Grcg. Tiiroii., lib. X, cap. l. anleactum uos offlcium quoii in re-


connincere...
• Jouii. Diiài-., lib. I, cap. xxxu. gimine monaslerii cxhibuimus informai. Greg.
[vu" sitcLE.] CHAPITRE XLIX. — SAINT GRÉGOIRE LE GRAND, PAPE. /,:t.3

alliilme ilans le troisic'iuo livro do l'IIistniro lettres, envoya h l'Empereur le décret d'é-
il

des Lombards, en cemarnuant (]ii'il n'était leclion. Maurice rendit grâces à Dieu de ce
que diacre lorsqu'il les ëcrivit. qu'il lui donnait occasion de rendre jusiico

10. An mois de novembre de l'an 58t>, le au mérite d'une personne qu'il chérissait; il
l'iniH'Jai'Oii
Tibre s'enlla '
si [irodigiensement i[ii'il passa conlirma le décret tl'éleclion et ordonna ,

itinrt (l>i l*3[io


par-dessus les murailles de la de Ho-
ville de mettre au plus tôt Grégoire en posses-
Féli^i 11, ou
me, inonda plusieurs quartiers, renversa sion de la chaire de saint Pierre. Le saint,
un fi^rand nombre d'édifices considérables, informé qu'on avait intercepté ses lettres A
et fit tomber les greniers de l'Eglise ; ce l'Empereur, et jugeant que ce prince donne-
qui entraîna la perle de plusieurs milliers rait une réponse contraire à ses désirs, se

de muids de blé qui y étaient eu réserve, et fit ' enlever de Rome par des marchands,

occasionna la disette dans Rome. L'inonda- d(''guisé et enfermé dans une manne d'osier,

tion fut suivie d'une grande quantité de ser- puis il alla se cacher dans des bois et dans
pents (jui vinrent se jeter dans il en le Tibre; des cavernes mais il fut découvert ', ramené
;

parut un, entre autres, longue et comme une h Rome, et consacré solennellement, dans
grosse poutre. Ces serpents furent emportés l'église de Saint-Pierre, le 3 septembre 5'JO.
dans la mer, où l'eau salée et la grande agita- Nous avons ^ encore la profession de foi qu'il
tion les firent uiouiir; mais les vagues les reje- fit dans cette cérémonie. Un diacre de saint

tèrent sur le rivage où ils se pourrirent, et cor- Grégoire de Tours, qui s'était trouvé à Rome
rompirent ensuite l'air par la puanteur qu'ils lors de la mort du pape Pelage, et qui avait
répandaient. On croit que ce fut la cause de été témoin de l'ordination de saint Grégoire,
la peste dont Rome fut désolée quelque temps en raconta, à son retour en France, toutes
après, c'est-à-dire au milieu de janvier de les particularités.
l'année suivante 590. Le pape Pelage II fut 1 2. Il était d'usage que ' les papes, au com- Il
concile,
lient
eo
un

attaqué des premiers, et ce fléau de Dieu, mencement de leur pontificat, envoyassent 591: enviie,
en Opicnl .ïes
lourei syno-
Eicebkl.ix, selon la menace du prophète Ézéclnel, se tît aux patriarches, pour marque de commu- dale-.

d'abord sentir dans le sanctuaire, d'où le nion une lettre qu'on appelait synodale,
,

mal se répandit sur toute la ville. Le Pape parce qu'ordinairement ils l'écrivaient à la
moui-ut le 8 février de la même année, après suite de quelque assemblée des évêques voi-
douze ans et près de trois mois de pontificat. sins les patriarches et autres évêques des
;

S. Gr^gnl.»
e«i élu
H. ne pouvant demeurer sans
L'Eglise grands sièges en écrivaient de semblables
i>a|'Vt
pasteur, le clergé, le sénat et le peuple ro- au Pape. Saint Grégoire tint un concile an
main élurent ', d'un consentement unanime, mois de février de l'an 591, d'où il écrivit "
lediacre Grégoire. Il s'en défendit, se croyant ses lettres aux quatre patriarches d'Orient,
indigne de cette place, et craignant, en pre- à Jean de Constantinople, à Euloge d'A-
nant le gouvernement de l'Église, de rentrer lexandrie, à Grégoire d'Antioche, à Jean de
dans la gloire du monde qu'il avait quitté. Jérusalem, et à Anastase d'Antioche. La
Les empereurs, depuis qu'ils eurent recon- raison d'en adresser aux deux patriarches
quis l'Italie sur les Gotbs, prenaient beau- d'Antioche, et de nommer même Grégoire
coup de part A l'élection des papes; le dé- avant Anastase, était que Grégoire possé-
cret de l'élection d'un Souverain-Pontife n'a- dait depuis longtemps l'église de cette ville,
vait lieu, qu'autant qu'il était confirmé par qu'Auastase ne l'y troublait pas, qu'il était
l'Empereur, et qu'il y donnait son agrément. lié de communion avec tous les évêques d'O-
Saint Grégoire, qui comptait sur l'amitié que rient et d'Occident, et qu'en refusant de le
Maurice lui avait témoignée à Constanlino- reconnaître, le Pape aurait troublé la paix
ple, lui écrivit pour le conjurer de ne point de l'Église. Il ne pouvait, d'ailleurs, s'empê-
approuver le choix qu'on avait fait de lui; cher d'écrire à Anastase, qu'il savait avoir été
mais Germain, préfet de Rome', préviut son dépouillé " injustement de son siège il avait ;

courrier, et l'ayant fait arrêter et ouvrir ses même écrit '"


à l'empereur que, si on ne lui

' fireg. Turon., lib. X, cap. i, et Greg., lib. III » Greg., lib. I, Epist. 21, et lib. VU, Epist. 4; et
Dialog., cap. xix. Martyr. Roman, ad diem 3 septemb.
' Joan. Diac, lib. I, num. xixix. 6 Joau. Diac , lib. Il, num. 2. — ' Greg., lib. IX,
• Greg. Tiirou., lib. X, cap. i. Epist. o2. — « Greg., lib. 1, Epist. 4 et 25.
' Paulus Diau., uum. II. » Greg., lib. I, Epi$t. 26.- '» Id,, lib. I, Epist. 2S.

XI.

rii
,

434 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


permettait pas d'y rentrer, il lui fût du chant ecclésiastique fonda une école de ,

moins libre de venir à Rome avec l'usage chant, fit dresser un antiphonaire qui com-
du palliuui, pour célébrer la messe ^ Saint- prenait tout ce qui se chaulait en notes à la
Pierre avec le Pape. Dans ces lettres, saint messe, augmenta le luminaire cl K- nombre
Grégoire déclare qu'il reçoit les quatre pre- des ministres , fit des règlements touchant
miers conciles généraux, et qu'il porte le les ornements dont ils seraient revêtus en
même respect au cinquième, rejetant toutes servant à l'autel ; enfin il n'omit rien de ce
les personnes que ces conciles ont rejetées, qui était nécessaire pour célébrer les saints

et recevant toutes celles qu'ils ont reçues: mystères avec une pompe convenable.
Son alUD*
c'était condamner ouvertement les Trois- 14. Aprèsavoir réglé sa maison et l'Eglise lion |iuui us
K;ll>eftda dr*
Chapitns. Nous verrons dans la suite com- particulière de Rome, il étendit sa sollici- bor>, «D .'9 1 .

Lieu de mouvements il se donna pour ré- tude pastorale sur les églises de Sicile qui
duire ceux qui refusaient d'en souscrire la lui étaient soumises plus particulièrement

condamnajion. que les autres parce qu'elles étaient du


,

Con(!ullc âe 13. Le premier changement que saint Gré- nombre des suburbicaires que le concile de
«alc( Grcgoire
goire fit dans la maison du Pape, fut d'en Nicée ' déclare dépendre de l'évêque de
l'ODliticat, iD
5?0. retrancher' les laïques qui avaient coutume Rome suivant l'ancienne coutume. Il aver-
,

tit les évêques de celte île de tenir des con-


de la composer. Il ne voulut auprès de lui
que des clercs et des moines, soit pour le ciles tous les ans, et nomma ' le sous-diacre
servir soit pour en composer son conseil
,
: Pierre ,
qui avait l'administration du patri-

de ce nombre furent Pierre, diacre, avec le- moine de en Sicile, pour prési-
saint Pierre

quel il composa ses Dialogues Patérius, qui ; der à ces assemblées eu qualité de son lé-
fit depuis une compilation de ses ouvrages ; gat. Informé qu'Autarit, roi des Lombards ,

Jean défenseur de l'église romaine


,
qu'il ,
avait défendu que les enfants de celle nation

envoya en Espagne pour rétablir Janvier fussent baptisés dans l'église catholique à
dans le siège épiscopal de Malaga ; Augus- la fête de Pâques 590 il écrivit ' à tous les ,

tin ,
prieur du monastère de Saint-André ; évêques d'Italie, après la mort de ce prince,
Mellite , dont il se servit pour la conversion arrivée le 3 septembre suivant, d'avertir les
des Anglais Marinien, moine du même mo-
;
Lombards doul les enfants avaient été bapti-
nastère, h qui il donna l'archevêché de Ra- sés par les ariens de les faire réconcilier à
,

venne; Probe et quelques autres dont il la foi catholique, pour éviter la colère de
connaissait la vertu et le savoir. Il menait Dieu, qui continuait à se déclarer par une
avec eux la vie comnmnc sans rien négli- ,
grande morlalité. Il prit aussi soin des égli-
ger des devoirs de sa dignité, 11 invitait sou- ses d'Afrique, troublées encore par les restes

vent les pauvres h sa table, et n'y admettait des manichéens et des doualisles. Genuade
que rarement les riches et afin que ceux-là ;
était alors patrice et exarque d'Afrique.

fussent assistés avec plus de soin, il ne con- Saint Grégoire l'exhorta ' à réprimer forte-

fia l'administration du patrimoine de l'Kglise ment ces hérétiques, disant qu'ils ne man-
qu'à des ecclésiastiques, se persuadant que, quaient jamais de s'élever contre l'Église
n'ayant point de famille ils adopteraient , quand ils en trouvaient l'occasion. Les guer-
plus aisément les pauvres. Tandis que sa res avaient ruiné plusieui-s églises, de ma-
santé le lui permit, il nourrissait son peuple nière qu'elles ne pouvaient plus entretenir
de de Dieu. Il nous reste un grand
la parole de prêtres pour administrer ' la pénitence
nombre de ses homélies sur divers endroits aux mourants, et le baplême aux enfants ;

de l'Évangile, et sur le prophète Ezécliiel. il les unil à d'autres églises qui n'avaient

Il retrancha * plusieurs choses de l'Ordre ro- pas tant soull'erl. Il prit la défense des mo-
main donné par le pape Gélase, et y lit quel- nastères* contre les vexations des évêques
ques changements. Il ordonna des stations et pourvut autant qu'il fut en lui aux né-
, ,

et des processions dans le même ordre qu'on cessités spirituelles de ceux mêmes qui s'é-

les a observées depuis. Il perfectionna le taient séparés de l'Église, ou par l'hérésie,

I Joan. Diac, lil>. Il, uum. li. » I(i., Episl., lib. I, Epist. n, elJoau. Diac, lib.

• Ihiii., iiuiii. n et S('(|. Il, iiiiin. 50.

• Coiicil. Mcan., cuii. (i.


« (;rug., lib. I, Epist. 72.
» Orfig., hb. I, lîjiùlC. 1.
' Id., lib.l, Epist. 8 eH5.-" M, ihiii., Epist. 12.
,

[vir SIÈCLE.] CIIAI'ITHE XLIX. — SAINT gri':g(jiiik lk grand, pape. 4.35

ou par le schisme, voulant qu'on hasarcl;\t '


pourvoyant aux besoins
ciers et les soldats,
plutôt quelque chose en recevant les iiéré- des pauvres soulageant les blessés conso-
, ,

ti(|U(>s :\ la comimuiinn, lorsqu'ils iloiuande- lant les veuves qui pleuraient leurs maris
raiout ;'(
être rcconciliiîs, que do les cllarou- tués par les Lombards, et les pères et mères
chcr par trop de rii;iieur. 11 usa surtout de (jui venaient de perdre leurs enfants. Il dé-

condescendance ;\ l'égartl de ceux que l'af- crit les hostilités de l'armée ennemie dans
faire des Trois-Clinpitres avait engages dans la dernière homélie sur Ezéchiel, et dans
le schisme ; il fit môme tîciater sa douceur une l'empereur Maurice. La ville
letli'e ' à
envers les juifs , en écrivant * ;\ l'dvèque de de Rome nepas prise les ennemis, con-
fut ;

Terracine de leur laisser la liberté de s'as- tents d'une somme considérable d'argent
sembler dans le lieu qui leur avait été ac- se retirèrent. On met ordinairement cet
cordé de son consentement, pour v célébrer événement en o9.ï mais l'exarque de Ra- ;

Tous ces faits sont datés de la


leurs fêtes. venne ayant pris Pérouse en 39:2, il n'est pas
première année du pontificat de saint Gré- croyable qu'.\gilulphe ait tardé silongtemps
goire. à se venger, et à reprendre les places qu'on
iHombcma. La sccoudo proscuta des aftaires
laite * c.ni^o
J5 lul A
lui avait enlevées de mauvaise guerre.
nùik'"" on
heaucoup plus diliiciles h soutenir , à cause IG. La même année 392, l'empereur
v^
Mau- ^
do I
'^'"'
„ empereur
'"'•
de guerre des Lombards, et des maux
la rice avait fait publier un édit ,
portant dé- "ê"lés",„iTi;
qu'elle causa k 1 Italie. Romain patrice et ,
fenseii ceux qui auraient exercé des char- ?,lj, '^l''î,'j'',î

exarque de Ravenue voulant profiter de , ges puliliques, d'entrer dans le clergé ou fi'»°ai'ie"»"i°

quelque mésintelligence qu'il voyait entre dans des monastères, et à tous ceux qui '^533!°'"°'''

les Lombards, avait rompu brusquement la étaient marqués à la main comme soldats
paix, et pris ensuite plusieurs de leurs villes, enrôlés, d'embrasser la vie monastique. Saint
nommément Pérouse, par la trahison du duc Grégoire, à qui l'Empereur fit rendre cet édit
Maurision qui y commandait pour le roi par un de ses écuyers nommé Longin, ne
Agilulphe. Ce prince ne fut pas longtemps put dans le moment faire de réponse parce ,

sans se plaindre. Ariulfe, duc de Spolète, qu'il était malade; il attendit jusqu'au mois
vint jusqu'à Rome à la tête d'une bonne ar- d'août de l'an 393. Il approuva dans sa let-

mée pour attirer Romain au combat mais


, ; tre la première partie de l'édit, qui défen-
celui-ci, n'osant se mettre en campagne de- dait de donner place dans le clergé à ceux
vant un ennemi si formidable, laissa faire qui étaient obligés de rendre compte de
aux Lombards tant de désordres que saint ,
quelque administration, disant que ces sor-
Grégoire ' en tomba malade de chagrin. Il tes de gens voulaient plutôt changer d'em-
informa l'archevêque de Ravenne du danger ploi que quitter le siècle, et qu'ils ne s'en-
où était Rome afin qu'il portât l'exarque à
, gageaient dans la cléricature, qu'afin de
faire la paix; et, pour en facihter la conclu- jouir des privilèges des clercs, et pour s'en-
sion il offrit de fournir des sommes consi-
, richir des biens de l'Église. L'édit même de
dérables. D'un autre côté, Agilulphe pressait ce prince était à cet égard conforme aux
, ,

la restitution de Pérouse, et des autres pla- canons et aux décrets ' de plusieurs papes ;

ces dont Romain s'était saisi. Voyant qu'on mais saint Grégoire trouve étrange l'autre
ne voulait point y entendre, il sortit de Pavie partie de l'édit, qui fermait l'entrée des mo-
avec une puissante armée, mit le siège de- nastères aux olticiers et aux soldats, qui y
vant Pérouse la prit fit trancher la tête à Mau-
, , trouvaient une retraite où ils pouvaient faire
rision, et marcha droit à Rome, laissant par- pénitence, et combattre les vices et les mau-
tout des marques de sa fureur et de sa ven- vaises habitudes auxquelles ils s'étaient
geance. Saint Grégoire expliquait alors à livrés étant dans les armées. Il ne laissa pas,
son peuple la prophétie d'Ézéchiel mais il ; après avoir représenté ses raisons à l'Em-
fut obligé d'interrompre le cours de ses ho- pereur, d'envoyer ^ son édit dans tous les
mélies sur ce prophète ,
pour donner les endroits de la chrétienté, suivant les ordres
ordres nécessaires à la défense et à la con- qu'il en avait reçus.
servation de la ville, encom-ageant les offi- 17. Sur la fin de cette année 593, ou au luherchs

« Greg., lib. I, EpUt. U. — ' Ibid., Epist. 35. ' Voyez la lettre du pape Innocent l'^'^à Victrice,
» Greg., lib. II, Indict. 10, Epist. 32. évê(jue de Rouen.
* Lib. V, Epist. 40. 8 Greg., lib. 111, Epist. 65.
436 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
do tfr»< ii«i commencement de la suivante , saint Gré- cilesgénéraux, sans parler du cinquième.
11 r«ln Ij, eo
193011 Mi. goire cbercba quelque repos dans la ichaile, Ilen écrivit une autre à Constance, pour être
pour y respirer un peu api-ès tant d'agita- montrée par lui aux trois évèques, dans la-
tions.Il choisit pour cet ellet son monastère quelle il déclarait que la profession de foi

de Saint-André, ne croyant pas devoir s'é-


' qu'il avait reçue de lui, selon la coutume,
loigner de Rouie dans ces temps fâcheux où ne faisait aucune mention des Trois-Chapi-
sa présence était nécessaire. Ce fut pendant trcs : ;\ quoi il ajoutait qu'il conservait la foi
cette retraite qu'il composa ses Dialogues du cinquième concile, sans oser rien oter ni
avec Pierre diacre, son disciple et son se- ajouter à sa définition.
crétaire. Il écrivit aussi plusieui-s lettres sur 18. Jean le Jeûneur, p:i!riarche de Cons- Démtw. de ^

oire

les ditlërentes atlaires de TÉglise. L'ordina- tantinople , avait pris le titre d'évêque œcu- ,";'/""

tion de Maxime, évèque de Sulone, lui don- ménique ou universel, dès le mois de juin p^'";""','

na de grandes inquiétudes il avait été mis ; de l'an 589, dans un concile tenu la même j,7,„",^„'

en possession de cette église à main armée. année en cette ville ce qui avait donné su- :

Saint Grégoire, qui ne savait pas que son jet au pape Pelage de casser' les actes de
élection, quoique peu canonique avait été , cette assemblée. Dans plusieurs " requêtes
confirmée par l'empereur Maurice, lui dé- présentées au Pape dans le concile de Chal-
fendit de célébrer la messe. Maxime fit lacé- cédoine, on lui donna la qualité d'évêque
rer publiquement la lettre du Pape, qui s'en universel. Paschasin la lui donna aussi dans
plaignit à l'Empereur, comme d'une injure le discours qu'il prononça en présence des
faite au Saint-Siège. Maxime eut ordre d'aller évêques du concile mais saint Léon ni au- ;

à Rome rendre compte de sa conduite il le : cun des papes ses successeurs ne voulurent
refusa. La fin de' cette allaire, qui dura sept s'en servir, de peur que, par ce titre fastueux
ans, fut qu'il se purgerait par serment de- et téméraire, ils ne parussent s'attribuer seuls
vant Marinien archevêque de Ravenne
, ;
l'épiscopat , et l'ôter à tous leurs fières. Le
qu'il ferait pénitence de sa désobt'issance, patriarche Jean pensait tout autrement; en
et que prosterné en terre, il demanderait
,
envoyant à saint Grégoire les actes d'un ju-
miséricorde. .\u milieu des chagrins que gement qu'il avait rendu contre un prêtre
Maxime lui occasionna, il reçut de la conso- accusé d'hérésie il prit presqu'à chaque li-
,

lation par la conversion de certains peuples gne la qualité de patriarche œcuménique.


de Sardaigne nommés Barbaricins, qui jus- Le saint Pape, pour garder l'ordre delà cha-
ques-li\ avaient été idolâtres. Il avait em- rité fraternelle, lui en fit parler deux fois

ployé à cet ouvrage salutaire l'évèque Félix, par le diacre Sabinien, son nonce à Consfan-
et' Cyriaque, abbé de Saint-.Vndré. Zabar- linople; ensuite il lui en ' écrivit, puis à
da, duc de Sardaigne, contribua beaucoup l'empereur Maurice et à l'impératrice Cons-
au changement de ces peuples, parce qu'il tantine. Il défendit à Sabinien * d'assister à
leur oITrit la paix a condition qu'ils se fe- la messe avec Jean; et parce qu'il ne dou-

raient chrétiens, llospiton, leur chef, fut le tait point que les patriarches d'Alexandrie

premier qui se soumit au joug de l'Evangile; et d'Antioche ne dussent s'intéresser à ré-


plusieurs suivirent son exemple. Vers le primer la prétention de C(!lui de Constanti-
même temps, saint Grégoire, ayant appris ' nople il leur écrivit une ' lettre commune.
,

que la reine Tliéodelinde s'était séparée de Tous ces mouvements furent inutiles Jean :

la communion de Constante nouvellement conserva '" le litre d'évêque œcuménique


élu évèque de Milan, sur ce que trois évè- jusqu'à .sa mort, qui arriva en 593. Cyriaque,
ques de la province lui avaient persuadé son successeur", envoya sa lettre synodale à
que Constance s'était obligé à condamner saint Grégoire. II semble qu'il y prenait aus-
les Trois - Chapitres , écrivit à cette piin- si le titre d'œcuméniquc, puisque ce Pape

cesse, pour l'engager à agréer l'ordination dit dans sa lettre à .\nastaîc d'Antioche ,

de l'évèque de Milan il se contenta dans ; qu'il n'avait pas " voulu, à cause de ce litre
sa lettre de louer les quatre premiers con- profane, rompre l'unité de l'Église, en re-

' Mabil., Analecla. loin. IV, jing. 497. Aclione 3 Concit. Chalc, pag. 396, 400, 405.
• Greg., lib. I.\, Episl. 79, 80, 81. • Greg., lib. V, Episl. 19.
» Orcg., lib. IV, Episl. 23, 24, 25. ' Greg., lib. V, Episl. 18, 20,21.- • Episl. 19.
• /(/., lib. III, Episl. 29, 30, 31. » Ibi.)., Episl. 43 — >» Greg., lib. VII, Episl. 4.
» Ureg., lib. V, Epiit. 43.; ibiJ., F.pist. 18, et " lbi<l., Episl. 5, 6. — " Ibid., Episl. 27.
,

[vu' siÈcu:.] CIIAPITRK XLIX. — SAINT C.Itl'XininK LE (illAM), PAPE. \[a

jotanl lu lettre et les nonces de Cyriaque. mes, le renvoya chargé d'une ' lettre, où il

Saint Grt5goirc tint nn concile à Home en leur ordonnait de poursuivre leur ouvrage
SOri.où, après divers règlements de disci- avec toute la ferveur et toute la diligence
pline, on jugea l'atlaiie des prêtres Jean et possibles, sous la protection et sous la con-
Allianasc. Le premier dtail prêtre de Clial- duite du Seigneur. Cette lettre est du 23
ccddine ; le second, prêtre et moine dn mo- juillet .')96. Ayant donc continué leur route
nastère de Tanmac, ou de Saint-Mile en Ly- et toute la Gaule
traversé ils arrivèrent ,

caonie. Celui-ci était accns(' d'avoir parlé dans Grande-Bretagne, aux côtes de la
la

contre la délinilion ilu concile d'I'^plièse ; ce- province de Kent, et prirent terre dans l'île
lui-là d'enseigner l'hérésie des maicianisles. de Tanet. Ils étaient au nombre de quaran-
Ils avaient l'un et l'autre été condamnés par te. Augustin députa vers le roi quelques-uns

des juges que Jean de Conslanlinople leur des principaux de sa ti'oupe avec ses inter-
avait donnés mais s'étant pourvus par ap-
; prètes, pour lui exposer le sujet de leur
pel au Saint-Siège, ils furent renvoyés ab- voyage. Le roi les écouta tranquillement,
sous parce qu'on les trouva orthodoxes et
,
, et leur ordonna de demeurer dans l'île où

qu'il fut prouvé par les actes mêmes du pro- ils étaient ,
jusqu'à ce qu'il pût aller les en-
cès que le patriarche avait envoyés ^ Rome, tendre et conférer avec eux : car il avait dé-
que les accusateurs de Jean ne connaissaient jà ouï parler de Son
la religion chrétienne.
pas l'hérésie dont ils l'avaient accusé. Saint nom Quelque temps après il
était Éthelberf.

Grégoire écrivit' sur ce sujet au patriarche vint à l'île de Tanet et manda Augustin ,

Jean à l'Empereur, et à Théotiste, parent


,
avec les siens mais il ne voulut leur don-
;

de ce prince. ner audience que dehors et au grand air


Il l'iivolo 19. En 596 il exécuta le projet qu'il avait parce qu'une ancienne prédiction lui faisait
Jd. i>.i5<lnn-
Dairos en An- formé depuis longtemps, d'envoyei' des mis- craindre que, s'il les écoutait à couvert dans
lïlfiorrp, eu
sac, 897, sionnaires en Angleterre. Il choisit pour su- une maison, ils ne le surprissent par quel-
périeur de cette mission Augustin, prieur ou que opération magique. Ils arrivèrent en
prévôt de son monastère de Saint-André de procession, portant une croix d'argent, et
Rome, ù cjui il donna pour compagnons plu- l'image du Sauveur en un tableau et chan- ,

sieurs autres religieux, avec ordre de lui tant des litanies, pour demander à Pieu leur
obéir comme à leur abbé. Quelque temps salut et celui du peuple pour lequel ils étaient
auparavant il avait fait acheter par Candide, venus. Ethelbert les ayant fait asseoir, Au-
recteur du patrimoine de saint Pierre dans gustin lui annonça l'Évangile, en lui décla-
les Gaules , un certain nombre d'esclaves rant que le seul zèle du salut de ce prince
anglais âgés de dix-sept à dix-huit ans, et et de toute sa nation les avait fait venir de
les avait fait élever dans les séminaires des Rome dans la Grande-Bretagne. Tout le suc-

monastères, afin qu'ils pussent être utiles à cès de cette première prédication fut que le
cette mission.Augustin et ses compagnons roi permit aux missionnaires de s'établir
partirent de Rome au mois de juillet, munis dans la ville de Doroverne sa capitale, au-
de diverses lettres de recommandation pour jourd'hui Cantorbéri, en leur laissant la liber-
les évêques de Gaule, chez qui ils devaient té d'attirer à la religion chrétienne tous
passer. Le Pape en avait aussi écrit à la ceux à qui ils pourraient la persuader. Éta-
leine Brunehaut et aux deux jeunes rois
, blisdans cette ville, ils commencèrent à y
Thierry etlhéodebert. Mais à peine les mis- pratiquer la vie des apôtres, s'appliquant
sionnaires avaient fait quelques jours de continuellement au jeune et à la prière, et ne
chemin qu'ils pensèrent à s'en retourner, dé- recevant de ceux qu'ils instruisaient, que les
goûtés par la diiiiculté du voyage, et désespé- choses nécessaires à la vie. Aux environs
rant de réussir à convertir une nation dont ils de la ville, à l'orient, était une église en
n'entendaient pas même la langue. Ils ren- l'honneur de saint Martin. C'était là que la
voyèrent Augustin cl Rome, pour représenter reine avait coutume de faire les exercices
toutes ces difticultés à saint Grégoire ; mais de sa religion les missionnaires en firent
;

ce saint Pape, qui savait par une longue ex- aussi le lieu de leur assemblée et de leurs
périence que les œuvres de Dieu sont sou- prédications, avec la permission du roi.
vent traversées par les conseils des liom- Plusieurs anglais emLiassèrent la foi le roi ;

' Greg., lib. VI, Epist. 15, 16, 17. « Lib. VI, Epist. SI.
438 HISTOmE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
lui-même crut, et fut baptisé. Son exemple tés qu'il avait envoyés à Rome. Il mit aussi
en attira un p:rand nombre mais ce prince ;
des moines dans sa cathédrale, et vécut
ne contraignait personne se contentant de,
avec eux dans la mo-
pratique des exercices
témoigner plus d'amitié à ceux qui se fai- nastiques, conformément * aux ordres de
saient baptiser. Alors il permit Je rétablir les saint Grégoire. Nous donnerons un plus long
ancienneséglises(carle' nom de Jésus-Clu-ist détail des suites de cette mission dans l'ana-
avait autrefois été connu chez les Bretons, lyse des lettres de ce Père.
au lieu que leur pays était demeuré impéné- 20. Il eut un nouveau sujet de joie au com- ConTrrï.on
iti Cnfti cl

trable aux Romains) et il donna aux mission-


; mencement de la huitième année de son pon- àe* Juifii, cl
Wt.
naires dans sa capitale un lieu pour établir tificat, par la conversion des idolâtres de
un siège épiscopal, avec des biens-fonds en l'ile de Corse; Pierre, évèque d'.^léria, en
suffisance. Augustin, voyant de si heureux fut le principal ministre. Saint Grégoire, in-
commencements, passa en France, afin de se formé du succès de ses travaux apostoliques,
faiie ordonner évèque par saint Virgile, ar- lui permit ' l'érection d'un évêché dans la

chevêque ii'.\rles, selon l'ordre qu'il en avait Corse, lllui envoya aussi une somme d'argent
reçu du Pape; après quoi, étant de retour en pour acheter des vêtements à donner à ceux
Angleterre, il baptisa, ti la fête de Noël de qui recevaient le baptême c'est-à-dire des ,

l'an 597, plus de dix mille .\nglais. Il envoya robes blanches, qu'on portait après avoir été
à Rome le prêtre Laurent avec le moine baptisé. Cette conversion fut suivie de celle
Pierre, deux de ses compagnons, pour infor- de plusieurs juifs dans le voisinage de Gei^
mer saint Grégoire de tout ce qui s'était genti.Le Pape, craignant qu'un trop grand
passé, et pour le consulter sur plusieurs dif- délai n'apportât quelque changement dans
ficultés qui se présentaient dans l'établisse- les nouveaux convertis, commanda ' qu'on

ment de cette nouvelle Église. Le Pape per- leur donnât le baptême à quelque dimanche
mit à Augustin, qui était seul évèque en An- ou à quelque grande fête, pourvu qu'aupa-
gleterre, d'ordonner lui seul d'autres évè- ravant on leur eût fait faire une pénitence et
cfues, le dispensant à cet égard des anciens une abstinence de quarante jours. Cette pé-
canons, qui ordonnent que l'évèque, qui nitence était pour éprouver leur bonne vo-
en consacre un nouveau, sera assisté de lonté, etpour leur faire essayer les rigueurs
deux autres évoques. 11 renvoya Laurent et de la vie chrétienne, afin qu'après l'avoir
Pierre, et avec eux plusieurs autres ouvriers embrassée, ils ne pussent se plaindre de la
évangéliques, dont les plus connus sont Mel- dureté de ses lois.
S. Gr^oir«
lite. Juste, Paulin et Rufinien, tous moines. 21. Saint Grégoire travaillait depuis long- Jiiocuro It
[«ii ivcc ks
Ce fut ' par eux qu'il envoya à Augustin des temps h faire une paix stable entre les Ro-
en.
livres, des vaisseaux sacrés, des ornements mains et les Lombards. 11 avait à cet elfet
d'église et le pallium, avec une lettre pour employé le crédit de l'empereur, négocié
l'encourager au travail, et l'avertirde ne point par lettres et par députés à la cour du roi
s'enorgueillir des miracles que Dieu opérait Agilulphe et de la reine Tliéodelinde. Ro-
par son ministère, et une autre pour le roi main, exarque de Ravenne, s'y était toujours
Éthelbert, qu'il congratulait sur sa conver- opposé, par pur entêtement, n'ayant ni as-
sion et sur celle de ses sujets. Le Pape éta- sez de valeur, ni assez de force pour faire
blit Augustin' métropolitain sur douze évê- tête au roi des Lombards. Cependant la paix
qucs qu'il lui ordonna de consacrer pour di- se fit, et on eu fut " redevable aux soins de
vers endroits, nommément pour la ville l'ablic' Probus et do Théodore, administrateur

d'York, si elle embrassait l'Évangile, vou- de Ravenne. Agilulphe signa et jura la paix
lant que cet évèque fût aussi métropolitain de bonne foi: mais Ariulfe, duc de Béné-
de douze évèques qui recevraient l'drdin.i- veut, ne la voulut jui-cr qu'à certaines con-
tiou de lui. Augustin fonda près de Cantor- ditions, sous lesquelles il se promettait d'op-
béri le monastère de Saint-Pierre et Saint- primer un jour Romains. Les Lombards
les

Paul, dont il fit abbé Pierre, l'un des dépu- pressèrent saint Grégoire de jurer aussi cette

' Brilannorum inaccessa Romanis loca, ChrLstn » Crrp., lib. Il, Ëpisl. 05, et Bcil. lib I, c.ip.

vero subdila. Tertulliaii., lib. Advers. Judœns, j.\t\. - * Grci;., lib. Il, Epist. 61.
cap. VII. (irc){., lib. VI, EpixI. 22.- « Ibid , Epist. 21,
< Bcd., lib. I Hisl. Angi, cap. xxx. — ' Greg., lib. IX., Epist. 98.
[Vir SIÈCLE.] CHAPITHE XLIX. — SAINT CnÉGOIllE LE GRAM), PAPE. 439
paix, mais il le refusa, disant qu'il n'était sus-Christ, abusant de certains passages de
qiie niéiliateiir entre le roi et l'exarque; il l'Evangile, où il parie comme s'il eût ignoré
promit toutefois de la faire signer en sou (]uelqiic chose. Quoiqu'il n'eût rien trouve
nom par un évoque ou par un aicliidiacre.
'
(pie (l'admirable dans l'ouvrage de ce pii-
«'.elte paix ne fut pas de longue durée. triarche, il voulut avoir part à la gloire qu'il
L'exarque romain ayant une seconde fois s'était acquise, en prenant la défense de la
rompu la paix ', le roi Agilulplie donna or- saine doctrine, et ajoutant ' ses réflexions et
dre au duc Ariulfe et aux Lombards de 'Tos- de nouvelles preuves à celles de saint Eu-
cane, de fatiguer, par des courses continuel- loge. Ayant appris, quelque temps après, qu'il
de Home et de Havenne. Le re-
les, les villes s'élevait un scandale à Thessalonique, à
tour de quelques ' schismatiques h l'unité de cause que Luc, prêtre, et Pierre, refusaient
l'Église, servit de lénitif h la douleur que de recevoir les décrets du concile de Chalcé-
causait au Pape l'infraction de la paix; mais doine, il en écrivit aussitôt â Eusèbe, arche-
cette réunion ne fut pas aussi entière qu'elle vêque de cette ville, pour l'exhorter à faire
aurait pu l'être, par l'opposition de l'évèque rentrer les deux opposants dans le devoir.
de Caprite et de quelque autres obstinés k Le 5 avril 601, saint Grégoire tint un
23. c„l'e,i',|°S'Ho°.
"'=''=°^'"-
la défense des Trois-Chapitres. concile à Rome, où se trouvèrent vingt-et-im
Maudirs i!« 22. Cependant saint GréRoire fut attaqué évêques et seize prêtres. 11 y fit une consti-
lO'i. violemment de la goutte aux pieds, ce qui 1 o- tution en faveur des moines, où il dit qu'ayant
bligeait de garder ' le lit, pouvant à peine lui-même gouverné des monastères, il sait '
rester levé pendant trois heures et célébrer la combien il est nécessaire de pourvoir à leur
messe. Sa maladie était quelquefois moindre, repos. Cet endioit foime, ce semble, une
quelquefois excessive mais jamais si faible , preuve sans réplique que saint Grégoire avait
qu'elle cessât, ni si forte qu'elle le fit mourir; été abbé du monastère de Saint-André avant
d'où il arrivait qu'il était tous les jours pro- de monter sur le Saint - Siège. La môme
che de la mort, et qu'il en était tous lesjours année il écrivit â Éthérius, évêque de Lyon,
repoussé et rejeté. «Que devons-nous faire, et à ' Arégius de Gap, pour les exhortera
disait -il * dans ces douleurs sinon nous , tenir un concile contre la simonie. Il leur re-
souvenir de nos péchés, et rendre grâces â commandait, dans la même lettre, plusieurs
Dieu, puisqu'il nous purifie en affligeant cette moines qu'il envoyait en Angleterre pour
chair qui nous a tant fait pécher? La peine soutenir la mission qu'Augustin y avait com-
présente, nous convertit, est la fin de
si elle mencée. Il écrivit la même chose à Virgile,
la faute précédente sinon, c'est le com-
; évéque d'Arles.
mencement de la peine suivante. Il faut donc 2-i. Quoique ses grandes infirmités lui ôtas- p,e„d"d'„°'ré-

bien prendre garde à ce que nous ne pas- sent l'espérance d'une longue vie, il entre- F"qaf'"es'..

sions d'an tourmenta d'autres, et considérer pritde réparer les basiliques de Saint-Pierre s!°-ïïuil À
la bonté de Dieu qui nous menace de la et de Saint-Paul. Dans ce dessein, il donna
mort, que nous méritons, sans nous la don- ses ordres au sous-diacre Sabin défaire abat-
ner, pour nous imprimer une crainte salu- tre dans le pays des Brutiens tous les bois
taire de ses jugements. Combien de pécheurs nécessaires, et de les faire embarquer pour
sont demeurés plongés dans leurs crimes Rome. La paix qui durait encore entre les
jusqu'il la mort, sanssoufl'iir seulement un Romains et les Lombards, était un temps fa-
mal de tète, et ont été tout d'un coup frap- vorable pour cette entreprise. Comme il fal-

pés et livrés au feu de l'enfer?» Ses infirmi- lait conduire ces matériaux par les
faire
tés corporelles ne raleutisfaient point son terres de l'obéissance d'Arogès, duc de Bé-
zèle pour la défense de la foi. Il lisait, étant névent, à qui le roi des Lombards avait don-
malade, les écrits que saint Euloge, patriar- né ce duché, saint Grégoire le ' pria de le
che d'Alexandrie, avait composés contre les trouver bon, et de faire même contribuer
agnoïtes, qui attribuaient l'ignorance à Jé- ses sujets à voiturer les poutres destinées à

' (".reg., lib. IX, EpUl. 98. ' Quant sitnecessarium motiusteriorum quieti
' Paulus Diac, lib. IV Hisl. Longob., eap. 21. conspicere... anlecctum nos officium, quod in re-
24, 25. gimine cœncbii exhibuimus informât. Tome V
« Greg., lib IX, Epist. 9 et 10. Concil., pag. 1607.
' Greg., lib. X, Epist. 33. 9 Greg., lib. W.EpiSl. 55, 56, 57.
» Lib. XI,£pist. 30. - • Lib. X, Epist. 39. » Greg., lib. XU, Epist. 20.
MO HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
ce bâtiment. Il écrivit sur le même sujet à Constantinople ii renoncer au titre d'œcumé"
M;uircncc, grand-maitre de la gondarnierie nique; mais la chose ne réussit qu'après sa
pour les Homuius; mais sou entreprise fut mort, lorsque Boniface fut monté sur la
traversée par la guerre qui recommença en ' chaire de saint Pierre. Phocas qui avait conça
Italie la même année 602. Il gémit devant pour de l'amitié pendant sa nonciature,
lui

Dieu des malheurs de cette province, et in- et qui n'était pas content du patriarciie Cy-
téressa ses amis à lui demander la patience riaque *, fut fort aise de trouver l'occasion de
dans de si rudes et si continuelles é[)reu- le mortifier en le dépouillant de ce vain li-

ves. La seule consolation qu'il reçut fut le tre.

retour de quelques évêques qui avaient fait 26. On


voit, dans les églises de Saint-Pierre
?
«'•mo
Grwolro,
,

schisme avec l'Église catholique au sujet et de Saml-Paul à Rome, deux tables de " «"•

des Trois-Chapitres, entre autres, de Firmin, marbre, sur lesquelles sont gravées les
cvêque de Trieste dans l'Istrie. D'un autre donations que saint Grégoire fit à ces basili-
côté, les Églises d'Afrique, dont la plupart ques pour l'entretien du luminaire. Les do-
des clercs ne vivaient pas selon les canons, nations faites i\ Saint-Paul sont datées du
lui donnèrent beaucoup d'inquiétudes. Il eut 25 janvier 604. Il mourut le 12 mars de la
aussi à réprimer des scandales dansl'IUyrie. môme année, accablé par ses infirmités et
La reine Brunehaut et le roi Théodoiic lui par son application continuelle aux affaires
envoyèrent des ambassadeurs pour diverses de l'Église il fut enterré sans aucune pompe,
;

all'aires, en particulier sur la paix qu'ils vou- selon qu'il l'avait ordonné % au bout de la
laient faire avec l'Empire. galerie de Saint-Pierre, devant une salle où
Mort de 25. Phocasenpritles rênes le 23 novembre saint Léon et quelques autres papes étaient
lVni|.rrour
M.iortcp, rn
li'i .'. N<iaf« de
602. Maurice n'était pas encore mort; mais inhumés. Son pontificat fut de treize ans,
S. Grcpoirc à
Lon'lanlino-
le nouvel Empereur le fit massacrer le 27 six mois et dix jours. On conserva avec son
VlCi en 603.
du même mois, et avec lui ses enfants et son corps son pallium, le reliquaire qu'il portait
frère. Saint Grégoire qui, sous le règne pré- au cou et sa ceinture. Le reliquaire était
cédent, avait discontinué d'envoyer des non- d'argent et fort mince. 11 s'était " fait peindre
ces à Constantinople, parce qu'ils y avaient dans le monastère de Saint-André avec son
été regardés de mauvais œil à la cour impé- père et sa mère, pour retenir les moines
riale, à cause de la contestation survenue au dans la ferveur de l'observance par la vue
sujet titre d'œcuménique, y en envoya
du de son portrait. Il avait la taille belle son vi- ;

ini sous Phocas, avec une lettre * pour ce sage tenait île la longueur de celui de son
prince, dans laquelle il le suppliait d'ajouter père, et de la rondeur de celui de sa mère.
foi à ce que le diacre Boniface, son nonce, Sa bai-be était médiocre, ses cbeveux noirs
lui dirait déplorable de l'Italie, et de
de l'état et frisés; chauve sur le devant avec deux ,

la ville de Home assiégée depuis trente-cinq petits toupets; la couronne grande. Son front

ans par les Lombards, et continuellement était beau, sa physionomie noble et douce,

exposée à leurs insultes. Il n'épargnait 'pas ses mains belles. 11 avait pour habit une pla-
1i;r louanges ;\ Phocas, soit afin do l'adoucir, nète chiUaigne sur une dalmatique, portant
soit afin de le rendre favorable àl'Ki^lise ro- de |)lns le [)allinm entortillé simplement
maine, soit afin de lui a])prendre parle bien autour des épaules, et pendant sur le côté.
(ju'il disait de lui, ce qu'il était obligé de De la main gauche il tenait l'évangile, cl de
faire. Cette lettre est du mois de juin de l'an la droite il faisait le signe de la croix. C'est

003, environ six mois après l'avénouiont de ce que nous appionons de Jean Diacre, son
Phocas à l'Empire. Les images de ce prince bistorien, qui avait apparemment vu le por-
et de sa femme Léonlia ayaut ' été appor- trait de saint Grégoire. Il n'aurait pas été si

tées à Rome dès le mois de mai, le Pape les facile de peindre ses vertus, son l'-galitt' d'â-
avait fait placer dans la chapelle de saint Gé- me dans la prospiirité connue dans l'adver-
sarius, au dedans du palais. 11 fit de nouvel- sité, son zèle ardent pour la gloire de Dieu,

les ' instances pour obliger le patriarche de sa charité tendre et atlentive pour son peu-

'
l'.nnlus Dinf,, Uist. Longoh., lit). IV, oap. ix. " f;rog., lib. XllI, F.Jiisl. tO. " Baron., ad an.
' \.\h. XMI, F.pist. 48. G06, paf(. 2.
' Joiiii. Drnc, lit). IV, nuiii. 2!^.
''
.loni). Dino., lib. IV, luiiii. 68.
*
Siinocalla, lib. VIII, cap. xv. • Id., iiuin. 8;i, 81.
J

[vu' SifXLE.] CHAPITRE XUX. — SAINT GRÉGOIRE LE GRAND, PAPE. 4*1

pic, son humilitë profonde, sa modestie, sa goiie, suivant l'ordre des temps, est son ••>fi"»» '••

leiupérance, sa prudence et tant d'autres bel- commentaire sur Job. Il ne l'entreprit pas r:r Job. vor»
ran :a2.
les qualités dont il fut orné. Saint IKIpplionse, do lui-même ce fut à la prière ' de saint
;

évèijue de Tolètle ', a dit de lui (jn'il avait sur- Léandre, évè(pie de Séville, et nu.x instances
passé saint Antoine en sainteté, saint Cyprien réitérées des moines de son monastère de
en éloquence, saint Aiignslin en sagesse, et Saint-André, qu'il avait menés avec lui à
qu'il avait possédé dans un degré si éminent Constauliiiople, lorsqu'il y alla en qualité de
les vertus des plus grands liommes, que nonce du pape Pelage. ,\près avoir donné
l'antiquité n'en pressentait aucun qui pût lui aux affaires, dont il était chargé, tous les
être comparé. Le titre de Grand, qu'on lui soins que demandait son ministère, il em-
donne communément dans l'Eglise, sullit ployait le reste de son temps en de saintes
seul pour faire son éloge '. lectures, et de salutaires entretiens avec eux ;

stsEeriis. 17. Lcs écrits qu'il a composés sont trente- c'est ce qu'il appelait ^ respiier en la com-
cinq livTcs sur Job, deux livres sur la pro- pagnie de ses frères, et reprendre tous les
phétie d'Ézéchiel, deux livres sur les Évan- jours une vie nouvelle. En le priant de leur
'
giles ; le Pastoral, quatre livres de Dialo- expliquer le livre de Job, ils demandèrent
gues et un grand nombre de Lettres divi- qu'après leur avoir découvert les profonds
sées en quatorze livres. Les commentaires mystères qui y sont cachés, il leur exposât
sur le premier livre des Rois, sur le Cantique le sens allégorique de l'histoire, et qu'en ti-
des cantiques, et sur les sept psaumes de la rant ensuite dos moralités, il leur apprit la
pénitence, quoique de saint Grégoire pour la manière de les mettre en pratique pour la
plus grande partie, ne peuvent lui être attri- conduite de la vie chrétienne, de fortiûer
bués dans l'état où ils sont aujourd'hui. On des témoignages et des autorités de l'Ecri-
ne peut aussi le regarder comme seul au- ture les vérités qu'il leur exposerait, et en
teur du Sacramentaire qui porte son nom il :
cas que les passages qu'il leur rapporterait
n'a fait qu'augmenter et réformer celui du fussent obscurs, d'y ajouter une explication
pape Gélasc '. particulière pour les éclaircir. Saint Gré-
goire avoue qu'ayant considéré la gran-
'

ARTICLE 11.
deur et la ditîiculté de cet ouvrage que jus-
DES ÉCRITS DE S.\INT GRÉGOIRE. ques-là personne n'avait entrepris, il en fut
effrayé ;
qu'il se ti-ouva accablé de lassitude,
§1- etsuccomba sous sa pesanteur mais qu'ayant ;

levé les yeux de l'esprit vers le souverain


De ses livres de morale sur Job.
distributeur de toutes les grâces, il fut incon-
- nrvfoire 1. Le premier des ouvrages de saint Gré- tinent persuadé que ce que ses frères de-

' Ita enim cunctorum merilorum claruit per- tion. Mais ces mutilations ou cavités que l'on re-
omnibus illuslrium
[eclione subliniis:. ut exclusis marquait dans la plupart des édifices, étaient plu-
virorum rationibus, nihil illi simile demonstret tôt louviage des étrangers attirés à Rome de tou-
antiquilas. Vieil enim sanclitale Antonium, elo- tes les parties du monde chrétien. Ils arrachaient les
quentia Cyprianum, sapientia Augiistinum Hil- ornements et attaches de bronze servant à fixer les
deplioDs., De Script, eecles., cap. i. pierres de taille, ou enlevaient, pour y chercher
* Un passage altéré du Poljj^ratique de Jean de quelques pièces de monnaie, les vases que les an-
Salisbury avait f.iit accuser saint Grégoire de l'in- ciens architectes mêlaient dans la construction de
cendie Je la bibliotlièque Palatine, fûudée par Au- leurs voûtes pour les rendre plus légères. Ce sys-
guste, c'est-à-dire de tout ce qu'elle conteuait en tème était bien éloigné de l'esprit de saint Gré-
ouvrages d'ancienne littérature. Cette erreur a été goire, qui recommandait à ses missionnaires en An-
souvent réfutée. On a démontré i]ue la bibliothè- gleterre de ne point démolir les temples païens et
que d'Auguste, brûlée sous Néron, rétablie par Do- de se contenter de les purifier. (L'éditeur.
' Dom Pitra a annoncé qu'il ferait paraître plu-
niitien et consumée de nouveau sous Commode,
n'existait point par conséquent sous saint Gré- sieurs pièces liturgiques et métriques de saint Gré-
goire. Le pillage de Rome par Alaric, et plus tard goire le Grand. (L'Editeur.)
par Genséric et Totila, avait dépouillé cette capi- ' Greg., Prœfat.in Job., seu Epist. ad S. Lean-
tale du monde de tout ce qui lui restait de plus dru m.
précieux. On a imputé également à saint Grégoire » Ibid.
la dégradation des monuments antiques de Rome, « Ibid.
>
ce Pape voulant, par cette censure, ôter à la vue Ibid.
des fidèles, des objets de scandale et de profana-
442 HISTOIRE GÉNKRALE DES .\UTEURS ECCLÉSI.\STIQUES.
mandaient de lui dans des vues aussi pures, des endroits obscurs pour exercer les esprits
ne pouvait être impossible. Il tommeni^a à '
des savants, elle en a de clairs pour ins-
leur expliquer de vive voix les premiers truire les simples. Il met du nombre de ceux
chapitres de ce livre, puis il dicta des ho- qu'on doit prendre à la lettre celui-ci Je n'ai :
„i°J;,""''
mélies sur le reste. Ayiiiit eu depuis plus point refusé aux pauvres ce qu'ils demandaient,
de loisir, il repassa tout l'ouvrage; il y ajou- je n'ai point fait attendre les yeux de la veuve,
ta beaucoup de choses, en retrancha quel- je n'ai point mangé mon jjain tout seul ; maie
ques-unes , en laissa d'autres sans y tou- j'en ai fait jxirt au pupille. Je n'ai point mé-
cher, et. mettant tout dans un meilleur or- prisé les jMSsants qui étaient mat habillés, ni
dre en un même style, il en fit un com-
et les pauvres qui étaient nus ; mais leurs c<^tes

mentaire suivi, divisé en trente-cinq hvres, que j'ai couvertes m'ont donné des bénédictions,
qu'il partagea en six volumes. et leurs corps ont été réchauffés ])ar les toisons

tel oli'-'"'
^' ^ nous fait' remarquer qu'il y avait de mes brebis dont je les ai revêtus. En effet, si
des choses qu'il traitait en peu de mots se- on voulait donner un sens allégorique à ces
lon la vélité de l'histoire, d'autres dont il paroles, on anéantirait toutes les œuvres de
recherchai! les sens allégoriques et figurés, miséricordeque ce saint homme a pratiquées.
quelques-unes dont il ne tirait que la seule Suint Grégoire suit ordinairement * dans ce
morahté, d autres enfin qu'il expliquait en comi'ientaire la version que saint Jérôme
ces trois manières. « Nous établissons *, dit- avait faite du livre de Job, et qu'il appelle la
il, d'abord riiistoire comme le premier fonde- nouvelle; mais lorsqu'il en est besoin, il cite
ment de notre discours ensuite par le sens ; aussi l'ancienne. La raison qu'il en donne,
allégoiique nous élevons le bâtiment de la c'est qu'étant assis sur le Siège apostolique,
foi, et par la moralité nous embeUissons qui se servait de l'une et de l'autre version,
tout cet pdifxe spirituel, comme avec des il était raisonnable qu'il eût recours à fou-
ornements el des peintures quelquefois ; tes les deux pour autoriser ce qu'il avançait
nous omettons l'explication de l'histoire, dans cet ouvrage. Quoiqu'il l'eut commencé
quand elle est claire, afin de venir plus tôt dès l'an 582, et l'eut bien avancé pendant son
aux endroits obscurs il y en a aussi qui ne
; séjour à Constantinople, il n'y mit la dernière
peuvent s'expliquer littéralement, parce que main que depuis qu'il fut pape. Ce fut dans
si on les prenait à la lettre, au lieu d'ins- ce temps-là qu'il l'envoya à saint Léandrc *,
truire ceux qui les lisent, ils les jetteraient non qu'il crût une chose digne de
que ce fût
Job. n, 13. dans l'erreur. Telles sont ces paroles Sons : lui être présentée, mais parce qu'il la lui
qui sont courbés ceux qui supportent la terre. avait promise. Il lui demande, dans la lettre
Job, sans doute, n'ajoutait pas foi aux vai- qu'il lui écrivit à ce sujet, et que l'on a mise
nes fables des poêles qui croyaient que le à la tête de tout l'ouvrage dans la nouvelle
globe de la terre était soutenu sur les épau- édition, de n'y pas chercher les feuilles,
les d'un géant. Il dit encore au fort de son c'est-à-dire les ornements superflus des pa-
job.Tîi.ii. affliction : Mon Ame a c/ioisi la susj>ension, et roles, que l'Kcriture interdit aux interprètes
mes Personne ne se peisuadera
os la mort. en leur défendant de planter du bois dans
qu'un homme d'un si grand mérite, cl qui le temple du Dieu lout-puissanl.
reçut, dès cette vie, le prix de sa patience 3. Aussitôt que ce Commentaire eut été ,„„„ J;,";;
de la main du Juge éternel, ait résolu, parmi rendu public, on s'empressa d'en avoir des [J,,,.'^"'"""'""

tant de maux, de finir sa vie par une mort copies, il y eut même des évoques qui le fi-
pleine d'infamie et de désespoir. » Saint rent lire publiquement aux ollices de la nuit,
Grégoire rapporte plusieurs autres passages entre autres Marinien, archevêque de Ra-
du livre de Job qui ne peuvent être enten- venne. Saint On-goire en eut de la douleur
dus dans un sens lillTTal, et cnnclut qu'il par unetlVl de l'humble sentiment qu'il avait
est nécessaire de leur donner qucli[ue au- de ses ouvrages. Il écrivit donc à Jean', sous-
tre sens plus juste et plus convenable. 11 diacre de cette église, de détourner Marinien
ajoute • qu'il y en a d'autres qu'on doit ex- de la lecture de ses commentaires sur Job
l)liquer litléralemenl pour conserver la vé- dans les assemblées, disant qu'ils n'étaient
rité de l'histoire, et que comme l'Écriture a pas assez à lu portée du peuple, et qu'ils

' Greg., Prœfal. in Job., seu Episl. ad S. Lean- • Ibid. - > Ibid. - ' Ihid. - « Ibid. « Ibid.
drum. >
Greg., fil). XII, £>is(. 2*.
[vu* siècLE.] CHAPITllE XLIX. — SAINT GRÉGOIRE LE GRAND, P.VPE. 443

IHUiviiient plutôt nuire i'i ilos iuiditciirs jicu ce coiul)al spirilnol.a * éciit lui-même l'his-
instruits, quo lour piolilor. Il lui coiisoilla ilo toire de sa victoire; (pi'on ne doit pas être
l'aire lire de pi ëféreuce des counnentairessur détourné d'embrasser ce sentiment, parce
les Psaumes, comme étant fort propres à ins- qu'il est parlé de Job dans ce livre en troisiè-
pirer la bonne morale aux séculiers. 11 par- me personne Joh a dit, Job n souffert, ceux
:

lait apparemment des commentaires de saint qui ont écrit les Livres saints ayant coutume
Augustin, ou de quelqu'autre père, sur les. de parler d'eux-mêmes, comme s'ils par-
Psaumes car on ne voit pas qu'il en ait
: laient des autres. Cela se voit dans Moïse,
composé lui-même. D'ailleurs il dit en gé- '
qui dit, au chapiti-e I" des Nombres : Moïse
néral à Jean de Uavenue, qu'il ne souhai- (Huit lupins doux qui fût sur dans la terre; et
'"
tait pas qu'on publiât dans le monde pendant saint Jean l'Évangéliste:rt'/!<«-/àe<aiV ledis- .J"'"-
sa vie, ce qui était échappé de sa bouche ou ciple que Jésus aimait. Il montre ensuite que
de sa plume. L'exemplaire que saint Gré- Dieu nous a proposé l'exemple de Job, pour
goire avait envoyé saint Léandre s'étant
;\ nous ùter toutes excuses dans nos pr(îvarica-
trouvé égaré après la mort de saint Isidore, tions : « Un homme sans loi l'a observée, n'y
son frère, Taïon, évêque ' de Sarragosse, a-t-il pas de quoi confondre la dureté et la

vers le milieu du vu" siècle, fut envoyé à malice de tous ceux qui, étant sous la loi, ne
à Rome par Chindasvinte, roi des Yisigotlis l'observent pas? Sa patience a mis le comble
en Espagne, pour en avoir une autre copie, à ses vertus; après le témoignage que Dieu
qu'il obtint avec assez de peine. Quelques- lui a rendu de n'avoir point péché dans ses
uns ont trouvé mauvais que ce saint Pape paroles, il y aurait de la témérité à reprendre
ail employé tant d'allégories et tant de mo- ses discours, comme trop rudes et peu mesu-
ralités daps cet ouvrage; mais ils n'ont pas rés, et quelquefois trop flatteurs pour lui. »Le
fait attention que le dessein de l'Esprit-Saint saint Docteur trouve dans la réconciliation
dans ce livre est de nous donner, en la des amis de Job avec lui, la figure du retour
personne de Job, un exemple singulier de des hérétiques à l'Église. «Les sacrifices des
patience dans les adversités, et un modèle hérétiques ne peuvent, dit-il, être agréables
des vertus chrétiennes, et que saint Grégoire à Dieu, s'ils ne sont offerts pour eux par les
ne s'y est pas tellement appliqué au sens mains de l'Église universelle, afin qu'ils re-
moral, qu'il ait négligé le littéral. Les Hé- çoivent le salut par les mérites de celle-là
breux ne le mettaient point parmi les livres même, contre laquelle ils ont si souvent lancé
historiques de l'Écriture, mais parmi les leurs parolesenvenimées et pleines d'erreurs ;

agiographes, c'est-à-dire cens dont la lec- c'est pourquoi il est dit qu'on oûiait pour les
ture édiQe davantage. amis de Job sept sacrifices, parce que, quand
Preinièra 4. Dans la préface générale sur son Commen- les hérétiques reconnaissent cet Esprit-Saint
r'iodu Corn*
'DIairo
!,
sur
loni. I,
taire, saint Grégoire, après avoir proposé les qui communique dons de grâce, et
les sept
Il

.
laii^ien.'
l-ns, laf.
dififérents sentiments sur l'auteur du livre de qu'ils le reçoivent en eux-mêmes, ils sont
Job, que quelques-uns attribuaient à Moïse, comme purifiés par sept oblations différen-
dit qu'il est fort inutile de rechercher en tes. Job, en recevant deux fois autant de
quel temps Job a vécu, et qui a composé le biens qu'il en avait perdus, nous figure le
livre qui porte son nom, puisque les fidèles double avantage que l'Église recevra dès
ne doutent point qu'il ne soit l'ouvrage du ' cette vie pour récompense de ses travaux
Saint-Esprit qui en a inspiré la pensée à dans la conversion des gentils et des juifs, et
l'auteur, et qui s'est servi de sa plume pour après cette vie, dans la béatitude de l'àme
faire passer jusqu'à nous des actions de ver- et du corps. » Après ces préliminaires, saint L;t.. i. pn.

tu que nous puissions imiter. Ce qui lui pa- Grégoii-e vient au texte de Job, qu'il expli-
rait le plus vraisemblable sur ce sujet, est que en trois manières dans le sens littéral,
:

que Job, qui a soutenu les grands eilbrts de dans le moral et dans l'aUégorique. «Le lieu

» Greg., lib. Xlt, Epist. 24. imitanda ad -nos facta transmisit. Greg., Prœfat.,
' Prœfat., edil. in lih. Job., pag. 21. in lib. Joh.
' Sed quis hcec scripserit value supervacne quœ- ' Arbitrari tamen verius possumus quod idem
rilur : cvm tamen auctor libri Spirilus Sanctiis heatiis Job qui cerlamina spiritalis pugnœ susti-
fidelUer credatur. Ipse igilur hœc scripsit., qui nuit, eliam consummatœ suœ victoriœ gesta nar-
scribenda diclavit Ipse scripsit. qui et in illius ravit. Ibid.
opère inspirator ej:tUil, et per scribetilis vocem
n\ HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
de kl demeure de Job est marqué // y avait : présent, il n'en est pas moins vrai qu'ils ne
un homme dans la terre de Uns, pays habité s'éloignent jamais ; ainsi ils voient toujours le
par des infidèles, afin que ce lui fût un plus visage de Dieu, ne laissent pas de venir
et ils
grand sujet de louanires d'avoir été bon par- à nous, parce qu'ils sortent pour cela du ciel
mi les méchants. L'Écriture in;irque le nom- selon leur présence locale, et cependant ils
bre de ses enfants lient sept fis et trois fil-
: conservent toujours en eux-mêmes, par une
les; et elle ajoute qu'il était fort soigneux intérieure contemplation le Dieu du ciel ,

d'offrir des sacrifices, et fort libéral envers d'auprès de qui ils étaient partis. Il est dit
les pauvres, pour nous donner une idée de que Satan se présenta aussi devant le Sei-
la grandeur de sa vertu, puisqu'il ne s'atta- gneur, ce qui n'est point aisé à comprendre,
chait point aux biens de la terre par la con- puisque selon l'Kvangile, il n'y a que ceux Maii.,v,8.

sidération de tant d'enfants. Plus attentif à qui ont le cœur pur qui verront Dieu mais ;

leur donner une sainte éducation qu'A leur il faut remarquer qu'il est seulement écrit
amasser des richesses, il dépensait encore q>ie Satan se trouva devant le Seigneur, et
son bien pbur les purifier de leurs péchés, non qu'il le contempla; il ne se présenta de-
en oil'rant des holocaustes pour eus lorsque vant la Majesté Divine qu'afin d'en être vii,
les jours des festins, qu'ils se donnaient les et non de la voir. Il parut en la présence de
uns aux autres, étaient passés. Offrir un ho- Dieu, mais Dieu ne parut pas en la sienne ;

locauste, c'est brûler entièrement l'hostie que un aveugle est éclairé des rayons du soleil, vk. m.
l'on immole. Nous offrons donc un holocauste, mais il ne voit point le soleil qui l'éclairé.
lorsque notre esprit est tellement embrasé du Dieu dit ii Satan D'on viens-tu? Dieu parle
: n-
feu de componction, qu'il lirùlo entièrement aux anges, lorsqu'il leur fait connaître inté-
notre cœur sur l'autel de l'amour divin, et rieurement sa volonté et les angos parlent ;

consume toutes les impuretés de nos pensées, ;\ Dieu, lorsque haussant leur vue au-dessus

qui sont comme les fautes de nos enfants. » d'eux-mêmes, ils s'élèvent vers lui par des
L'Écriture sainte ne se contente pas do transports ineffables de louanges et d'éton-
nous faire connaître les vertus des saints ,
nement. A l'égard du démon. Dieu lui parle
elle nous découvre aussi quelquefois leurs en quatre manières lorsqu'il le reprend de : "•
Pt.Trnl, in
m.. II,
fautes afin que
, nous représentant dans
, ses injustices, propose contre lui la
qu'il
pf.
3".
leurs victoires ce que nous avons à imiter, justice de ses élus, qu'il lui permet de tenter
elle nous fasse aussi connaître dans leurs leur innocence, ou qu'il lui défend de les
chutes ce que nous avons i^ craindre. tenter. 11 lui parle en la première, lorsqu'il
LiUIlipp. Elle dit, en parlant des saints anges, qu'é-
33.
lui dit ici D'où viens-tu? parce qu'il le re-
:

tant venus se présenter devant le Seigneur, prend de ses injustices. Le diable parle à
Satan se trouva aussi avec eux; et encore Dieu en trois manières, savoir lorsqu'il lui :

qu'ils voient sans cesse la face de Dieu, expose ses actions, ou qu'il accuse l'inno-
comment peuvent-ils contempler Dieu sans cence des élus par de faux crimes, ou qu'il
cesse, et être envoyés quelquefois pour le demande permission de les tenter. Il expose
salut des hommes? Pour rc-poudre i\ cette ses actions aux yeux de Dieu, qi:and il dit :

question, il ne faut que faire attention k la J'ai fait le tour de la terre. Il accuse l'inno-
subtilité et à l'excellencede la nature angé- cence des élus, quand il dit : !\"avez-vous pas
lique ; anges ne s'éloignent jamais de la
les environné comme d'nne forte haie sa jvrsonne et
présence de Dieu jusqu'à cire piivi'-s de la sa maison ? Il demande de tenter leur inno- «.
joie de le contempler inlérieuremont, puis- conce, quand il dit Etendez votre main sur
:

que, s'ils erdaient la vue bienheureuse de


] Ini. Le démon n'a de pouvoir de nous tenter,
leur Créateur, lorsqu'il les envoie, il ne leur qu'autant que Dieu lui en donne. La volonté
serait pas possible de n'pandre sur les aveu- de Satan est toujours injuste; mais la puis-
gles cette lumière qu'ils auraient perdue en sance qui lui est donnée ne l'est jamais,
s'éloignanl de Celui qui en est la source. Ils parce que Dieu ne lui permet qu'avec équité
assistent donc en la présence de Dieu en d'exécuter ce qu'il désire avec injustice. Le
même temps qu'il les envoie, parce qu'en tant sens de ces paroles Satan sortit aussitôt de
:

qu'ils sont renfermés dans un espace certain, devant le Seigneur, ne renferme rien de con-
et ne sont pas en tous lieux, il est vrai qu'ils traire i\l'immensité de Dieu elles signifient :

parlent et qu'ils s'éloignent mais en tant ; seulement que le démon qui était auparavant
()ur'. Dieu leui est toujours intérieurement lié, parce qu il n'avait pas le pouvoir de nuire •«
[vir SIÈCLE.] CILVPITRE XLIX. — SAINT GREGOIRE LE GRAND, PAPE. 443

A Job, fut en quelque sorte déchaîné contre à Job ses biens, ses enfants, sa santé, sans
lui, tit's (ju'il ohtiul pciuaission dv le lentcr. » avoir pu In vaincre, ralta(pia d'une manière
Sur ce qui csl dit, t\n'un jour que les /ils plus cuclu'e, eu eniployaul contre lui sa fem-

et les filles de Job buvaient et niaugeciienl clans me amis; mais leurs paroles ollensan-
et SCS
la viaison de leur frère aîné, saint Gi'égoire tes, et leurs douleurs excessives, du moins

remarque qu'il y a de certains temps i)lus en apparence, opérèrent un effet tout con-
propres et plus favorables au démon pour traire à leurs desseins. Celui qui veut conso- '"'e- "i-

tenter les liommes comme sont les grands


, 1er un affligé, doit mettre des bornes à
dou- la
repas, qui ne se font guère sans quelque leur qu'il lui fait paraître, de crainte qu'au
péché (ju'il se sert aussi du relâchement
; lieu d'adoucir l'esprit de son ami,ilnele [)orte
;. des supérieurs pour tenter les simjjjes, et jusqu'au désespoir par l'excès de l'aûliction
que c'est alors qu'il reçoit plus de pouvoir qu'il lui témoigne pour compatir à la sienne.
pour leur nuire qu'en etlet il commença ses
;
Il y a dans la suite de l'histoire de Job des pa-
•' ' pi~.
lu-- iv,
11.2.

combats contre Job, lorsque ses enfants se rôles qui ne sont conformes ni à la raison, ni
régalaient chez leurfrère aiué. Eu cxplii[uant à la piété telles sont celles-ci Périsse le jour
; :

ce qui est dit de Job, qu'(7 se leva cl déchira auquel je suis né, et la nuit dans laquelle on a
ses habits, et qu'ayant rasé les cheveux de sa dit : Un homme est conçu. Peut-on en effet
tète, il se prosterna contre terre pour adorer souhaiter qu'un jour qui n'est plus, périsse?
Dieu, il observe que l'insensibilité de cœur Saint Grégoii e conclut de là que Job ne nous
n'est pas le juste degré de la vraie vertu; exprime point littéralement ses pensées en
qu'il faut également éviter les deux excès de cet enchoit, et que celui-ci est du nombre
l'impatience et de l'insensibilité que Job, ;
de ces contradictions apparentes qui se ren-
par l'amour qu'il devait à son prochain, té- contrent dans la lettre de l'Ecriture, et qu'on
moigna de l'affliction à la perle de ses en- doit lever en leur donnant un sens spirituel.
fants, et que pour ne pas manquer à l'amour D croit donc que ces malédictions ne par-
qu'il devait à Dieu, il lui adressa ses prières taient pas de la chaleur d'un esprit ému, qui
au plus fort de sa douleur. Afin de modérer se laisse emporter à maudire des choses jus-
ses larmes par la patience, il considère quel tes et vérilables; mais que, considérant que
il était en venant au monde; et, pom- la con- ses amis, qui ne recherchaient que les pros-
server, il examine quel il sera en sortant du pérités temporelles, jugeaient de ses dispo-
monde, c'est-à-dire mi. Frappé par la perte sitions par les leurs, il fit éclater au dehors
de ses biens et de ses enfants, il change ses une voix pleine de douleur contre de sem-
afflictions en louanges Le Seigneur me l'a- : blables dispositions, comme s'il eût dit Pé- :

vait donnée le Seigneur me l'a ûté; que son nom risse cette espérance trompeuse que ce jour ;

soit béni, surmonlant par sa soumission et et cette lueur de fausses promesses se cou-

LiU ni, son humilité, l'orgueil de son ennemi. Lors- vrent .d'épaisses ténèbres. Quand la pros-
1.5. 7».
que Dieu permet l'affliction de ses élus, ce périté du monde nous rit, c'est comme le pog. m.
n'est pas toujours pour les punir de leurs jour; mais ce jour se change en nuit,
fautes, c'est souvent pour l'accroissement de parce que souvent la prospérité temporelle
leurs mérites; et en même temps qu'il parait conduit aux ténèbres des tribulations.
les abandonner aux tentations, il les pro- Les saints ont toujours plus appréhendé la ' ' -v. r«p.

tège en ne souffrant pas qu'ils soient tentés prospérité que l'adversité, parce qu'ils sa-
au-dessus de leurs forces. La vertu de Job vaient que, quand l'esprit est attiré par les
n'était d'abord connue que de Dieu, qui la charmes de quelqu'objet agréable, il se ré-
rendit publique pour être imitée de tous; il pand facilement au dehors; au lieu que,
fallait pour cela qu'il souffrît la tentation, quand l'homme extérieur se trouve affligé,
autrement il n'aurait pu donner aux autres l'intérieur se porte avec plus de liberté à
de si grands exemples de patience Je l'a- : rentrer en soi-même, pour y rechercher les
bandonne entre tes mains, dit Dieu à Satan, biens véritables.
7nais surtout gaj'deson âme; de sorte que Job o. Saint Grégoire commence la seconde ^
seconde par.

était comme retenu dans le cœur de Dieu partie de ses Morales au troisième verset du t^'- 1S2'.

par sa main toute-puissante, en même temps cinquième chapitre de Job. Il y explique


qu'il était livré entre les mains du démon. mystiquement ce que Job, sa femme et ses
Garder, en cet endroit, est la même chose que amis signiiient. Job, percé de plaies, est la
n'oser attaquer. Satau, après avoir enlevé figure du Sauveur percé de clous sur la
446 HISTOIRE GÉNÉRAI.E DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
croix sa femme, de toutes les personnes char-
;
d'impureté, ne laisse pas d'avoir encore l'i-

nelles qui dans l'É^'Iise servent au tentateur magination toute fatiguée des sales impres-
des hommes dansl'exi'cution de ses artitices sions qui lui en restent, parce qu'il se sou-
et de ses méchancetés ; les amis de Job, sont vient, quoique malgré lui, de ce qu'il a fait

leshérétiques qui font injure à Dieu, lorsqu'ils volontairement. 11 soutire maintenant comme
le veulent défendre contre les bons et les ca- une peine, ce qu'il considérait autrefois
tholiques. Mais lorsque le texte est suscepti- comme un plaisir et parce qu'il craint avec
;

ble de quelque autre sens, il le donne. 11 dit h raison de retomber dans les péchés qu'il a
ceux qui pourraient avoir quelque doute sur surmontés, il mortifie son corps par une abs-
LiKvii, les discours de Job, dont plusieurs parais- tinence si sévère, qu'il en devient tout défi-
pf. :ii.
saient sortir des bornes delà patience, qu'ils guré. Ceux qui le voient louent sa vie aus-
doivent les peser dans la juste balance du tère ; ces louanges lui inspirent de la va-
commencement et de la fin de son histoire, nité, ce qui dans deux extrémités,
le jette

où Dieu lui donne également des louanges : ou de retomber dans les feux de l'impudici-

ce qu'il n'iiurait pas fait, s'il eût été répré- té, en voulant rétablir son visage par l'abon-

hensible en quelque chose. N'as-tu imyit con- dance des viandes, ou detomberdansla vaine
sidéré mon serviteur Job, dit Dieu au démon gloire, s'il continue ses abstinences. Un autre,
joi,. i,«. dans le premier chapitre? //n'a /x»s son semWn- considérant quel péché c'est que le menson-
ble sur la terre. C'est un homme simple et juste, ge, prend la résolution de n'en dire jamais ;

quicrainiDieuetqui fuit lemal.E\,aipià»l'a\o\r mais parce qu'il arrive souvent qu'en disant
éprouvé en tant de manières, il reprend dans la vérité on décrie le prochain, la crainte

quarante-deuxième, qui est le dernier, ses


le de le blesser le fait retomber, sous couleur
Job. i.\amis, en leur disant Ioî/s n'avez jms bien parlé
7. : de piété, dans le vice de déguisement et de
devant moi, ainsi que l'a fait mon serviteur Job. dissimulation dont il avait voulu s'éloigner.

Saint Grégoire, dans l'explication de ces Quoique autre, tout embrasé d'amour pour
ui.vui, paroles du septième chapitre La vie de : son Créateur, s'étudiera, par l'assiduité de
''''"
l'homme est comme une milice sur la terre, son oraison, à détacher absolument son âme
dit que l'ancienne version au lieu de tni- de toutes les pensées de la terre, et à l'éle-
lice, lit tentation ; mais que ces deux mots ver au calme assuré de la paix intérieure ;

forment une même idée, parce que la ten- mais souvent, lorsqu'il s'efforce d'y arriver,
tation n'est autre chose que cette fâcheuse les images des choses basses et terrestres le

guerre que nous avons à soutenir continuel- repoussent et le rabaissent ses yeux, qui :

lement contre les ennemis de notre salut. ne jetaient de regards que pour pénétrer
Notre nature, tombée volontairement de l'é- cette lumière céleste, s'obscurcissent par les

tal d'innocence dans laquelle Dieu l'avait nuages des fantômes corporels que les sens
formée, se trouve dans la misère et dans la luireprésentent, de sorte que son Ame, las-
corruption en sorte qu'elle trouve en elle-
;
sée par les obstacles qui naissent de sa pro-
même sa peine et son mal, par le change- pre infirmité, ou languit dans une Iflche pa-
ment continuel auquel elle est exposée. Si resse, s'abandonne A l'oraison, ou voit
s'il

elle veut s'élever par ses désirs aux choses s'épaissirdevant ses yeux la noire fumée de
sublimes, elle en est aussitôt repoussée par ces fantômes corporels qui s'y élève s'il ,

sa mutabilité, et elle retombe misérablement persiste longtemps dans la prière. Job avait

en elle - même. II est vrai que l'homme ne donc raison de dire La vie de l'homme est
:
Pif. iit.

manque point de moyens de vaincre la ten- U7ie tentation sur la terre ; mais il n'en a pas
tation mais à peine a-t-il retranché ce que son
;
moins de comparer nos jours à ceux d'un
infirmité avait fait naître, que cette même in- mercenaire, qui souhaite que son temps fi-
firmité engendre de quoi retrancher de nou- nisse bientôt, afin d'obtenir le prix de ses pei-

veau c'est ainsi que sa vie est une milice


;
nes et de son travail, parce qu'en eflet l'hom-

ou un combat continuel. Paimi le plus bril- me sage considère la vie présente comme un
lant éclat de ses vertus, l'homme se trouve chemin, et non comme sa patrie comme le ;

toujours dans l'obscurité, tantôt par l'impor- temps de ses travaux, et non de sa récom-
tun souvenir de ses péchés, tantôt par les pense; et se cioit d'autant plus éloigné du
nuages des suggestions du malin cspiit, tan- prix éternel auquel il aspire, qu'il lui larde

tôt par le relâchement de sa ferveur. Tri qui davantage d'arriver ii la fin de sa vie mor-
a léprimc en lui-même les mouvements telle. Job ajoute Je n'épargnerai point ma
:
[vu* siÈaE.] CHAPITRE XLIX. — SAINT GIIKGOIUE LE GHANI), PAPE. i'n

bouche ;je parlerai dans la douleur pressante talions ne font que le peiner et le fatiguer,
de mon esprit. La douleur de l'espril fail ludu- cl qu'elles ne le surmontent point, il est hors

voir la lauf^ue pouz' coiubalti'C s(in péclié par de doule qu'au lien de le faire mourir par un
la voix d'uue sincère coiift^ssion mais sou- ;
consenlemenl iinpu(li(pi(', elles le maiiili(!n-
Ycnt les réprouvés confessent leurs péchés, nent dans l'humilité, parce que l'âme, recon-
sans se motlre en peine de les pleurer; les naissant sa faiblesse dans le fort des tenta-
élus au contraire ont soin d'ell'acer par les tions, met dans l'assistance
tout son recours
larmes d'une sévère pénilenco les pécln'-s divine, perd toute confiance en ses pro-
et

dont ils s'accusent. Celui qui raconte simple- pres forces de sorte qu'il arrive qu'elle est
:

ment son mal, et qui refuse de le pleurer, ne plus étroitement unie à Dieu par la chose mô-
fait que découvrir sa plaie au médecin, mais me qui la faisait gémir, craignant d'en être
il n'y applique pas le remède salutaire de la fort Nous sommes donc incapa-
éloignée.
douleur de l'esprit; ainsi il n'y a que la con- bles de reconnaîtrequand nous nous appro-
trition du cœnr qui puisse faire salulairement chons de Dieu ou quand nous nous en éloi-
sortir de la bouche la confession des péchés. gnons, tant que la fin des choses douteuses
I.il.lX, |o?.
Dieu est très -sage et très - puissant n'est point arrivée, puisque à l'égard des ten-
s'il vient à moi je ne le verrai point ; s'il
,
tations, il est incertain si elles nous tuent,
I'<. i07. s'en éloigne, je n'en saui'ai rien. « L'hom- ou si elles nous éprouvent, et que, pour les
me exclu des joies intérieures en jiunition dons de Dieu, on ne peut non pins savoii-
de son péché, a perdu la vue de l'àmc, et s'ils servent seulement de récompenses tem-

ne sait plus où le conduisent les pas in- porelles à ceux qui seront abandonnés pour
certains de ses mérites. Souvent il attribue l'éternité, ou bien s'ils nous soutiennent du-

à la colère de Dieu ce qui est un pur etfet rant cette vie pour nous conduire à celle qui
de sa grùcc, souvent ce qu'il considère
et est h venir. »
comme une grâce n'est qu'un effet de sa co- 6. La troisième partie, composée de six TroisM-ma
partie de:s Mo'

lère. Quelquefois il regarde les dons de faire livres, comprend l'explication du douzième Mies -iir Joli,
3CC.
lit
des miracles, comme
des grâces singulières; chapitre, depuis le sixième verset jusqu'au
cependant ces dons le font tomber par or- vingtième verset du vingt-quatrième chapi-
gueil, lorsqu'il veut s'en prévaloir. Il consi- tre. Saint Grégoire y est moins diflus que
dère aussi d'ordinaire les tentations et l'adver- dans les deux parties précédentes. Voici com-
sité comme un effet de la colère divine ; tou- ment il explique le quatorzième verset du
tefois, ce sont CCS mêmes tentations qui l'o- chapitre douzième : Si Dieu détruit, il n'y a LU.. XI,
3Tu.
bligent h veiller avec plus de circonspection personne qui édifie ; s'il renferme un homme, il

pour se maintenir dans la vertu. Qui ne se n'y a pei'sonne qui le puisse élargir. » Dieu dé-
croira bien avec Dieu, quand il est comblé truit, quand il abandonne le cœur de l'hom-
des faveurs du ciel ;
quand il reçoit ou le me ; il édifie, quand il le remplit des dons
don de prophétie, ou la science pour ins- de sa grâce : car il ne le détruit pas en le
truire les autres, ou la vertu de guérir les surmontant et l'abattant par l'elTort de sa
maladies? Néanmoins il arrive le plus sou- puissance, mais seulement en s'en retirant,
vent que, quand l'âme se relâche par une puisqu'il sutlit à l'homme, pour se perdre,
fausse confiance dans sa vertu, l'ennemi, d'être abandonné de son Créateur. D'où
qui est toujours prêt à la surprendre , la vient qu'il arrive souvent que les cœurs des
perce d'un trait imprévu ainsi ces mêmes; auditeurs n'étant pas remplis de sa grâce,
faveurs qui l'approchaient de Dieu pour un en punition de leurs fautes c'est en vain ,

temps, sans qu'elle prit soin de s'y conser- que le prédicateur les instruit et les exhorte;
ver, sont cause qu'elle en demeure éloignée et la bouche de celui qui parle est comme
pour toute l'éternité. Qui d'ailleurs ne, , muette, si celui qui inspire les paroles qui
se croira abandonné de la grâce de Dieu, se font entendre au de- au dehors, ne crie
lorsqu'après avoir donné quelque solide té- dans du cœur ;dans
ce qui fait dire â David
moignage de son amour pour la pureté, il im psaume Si le Seigneur ne bâtit lui-même
:
r,al. 126.1.

soutire denouveau les tentations de la chair, une maison c'est en vain que travaillent ceux
,

que ses pensées déshonnêtes ne sorteni point qui lu bâtissent. Et il ne faut pas s'étonner
de son esprit, et que ces images impures et si un simple prédicateur n'est pas écoulé

criminelles lui remplissent sans cesse l'ima- d'un co'ur réprouvé, puisque Dieu trouve
gination ? Cependant, quand toutes ces ten- quelquefois de la résistance dans les mœurs
448 HISTOIRE GÉNKRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
dépravées de ceux à qui il parle lui-même. vant Celui qui est aussi incorruptible; et
Gain fut averti de la propre bouche de son parce que l'homme ne saurait ressusciter de
Diou, et toutefois il ne fut point cliangé, parce lui-même, et qu'il n'y a que la toute-puis-
qu'en pMnition de son crime, Dieu l'avait déj;'i sance divine qui puisse opérer cet etfet, il
intérieurement abandonné, lorsqu'il le repre- ajoute : Vous tendrez votre main droite à
nait à l'extérieur, pour le convaincre et le l'ouvrage de vos nujins, en comme s'il disait
rendre inexcusable. C'est avec raison qu'il est termes plus clairs Votre créature, dans l'é-
:

dit ensuite S'il renferme tin homme, il n'y a


: tat de corruption et de misère où elle est n''-

personne qui le puisse élargir; car que fait un duite, ne prétend pouvoir arriver à cet état
homme qui vil mal, sinon de former une pri- d'incorruplion, que dans l'espérance d'y être
son à sa propre conscience, en sorte que la élevée par votre main toute-puissante, et d'y
corruption de son cœur le presse, lors même être affermie par la protection de votre
qu'il n'y a personne pour l'accuser ? Ainsi, grâce. Je sais que tnon liêdempteitr est vivant.

quand Di.eu, par nu juste jugement, l'aban- Job ne dit pas Créateur, mais Rédempteur,
à 'son aveuglement son iniquité, il afin de nous mieux marquer celui qui, après
doune et à
est comme renfermé en soi-même, sans en avoir créé toutes choses, s'est fait homme
pouvoirphis sortir, parce qu'il n'a pas mérité pour nous racheter de la servitude, et nous
la grâce de trouver les voies de se délivrer. a délivrés de la mort éternelle que nous
Le saint Docteur explique des opérations avions tous méritée. Les infidèles n'en croi-
de la grâce le verset suivant : S'il retient ses ront peut-être autre chose, sinon qu'il a été
eaux, toutes choses demeureront à sec; et s'il fouetté,, moqué, souffleté, couronné d'épi-
les lâche, elles bouleverseront toute la terre. nes, et qu'enfin on l'a fait mouru-; mais, moi
« On voit en effet tous les jours que quand une foi certaine, et je confesse
je crois avec
la terre du cœur de l'homme reçoit l'infusion hautement que mon Rédempteur, qui est
de cette eau divine, celui qui auparavant se mort entre les mains des juifs, est vivant
vengeait avec violence des injures tpi'il avait après sa mort. Je sais qu'au dernier jour je [.C t 3

reçues, les supporte ensuite avec une admi- ressusciterai de la terre, parce que le Seigneur
rable patience que celui qui auparavant ra-
;
accomplira en nous une résurrection pareille
vissait le bien d'autrui, donne libéralement à celle qu'il a fait premièrement paraître en

le propre; que celui qui auparavant


sien sa persoime. Je serai de nouveau environné de 1X-- «•
abandonnait son corps à toutes sortes de vo- ma peau expression par laquelle Job ôte
:

luptés, le mortifie par l'abstinence; et que tout le doute qu'on pourrait avoir d'une vé-
celui qui auparavant ne pouvait se résoudre ritable résurrection. Saint Grégoire donne
à aimer même ceux dont il était laimé, en en cet endroit l'abrégé des conférences qu'il
vientjusqu'à cette charité parfaite qui lui fait eut à Constantinople avec le patriarche Eu-
aimer ses ennemis mêmes; alors ou peut tychius, qui était dans l'erreur au sujet de
dire que cette terre est bouleversée par l'in- la résurrection des corps, s'imaginant qu'ils

LU: XII fusion de cette divine rosée. Pensez- vous deviendraient impalpables, et plus subtils
r. 3J«-
qu'un homme, étant mort, puisse revivre de que l'air et le vent. Il rétracta son erreur,
nouveau? Les saints parlent quelquefois com- étant au lit de la mort, où tenant en pré-
me en doutant des choses dont ils sont le sence de ses amis la peau de sa main, il dit
plus assurés, pour s'accommoder aux fai- hautement : Je confesse que nous ressusciterons P«S -.67.

bles, et se servent de leur langage, afin de ioh lève toutes les ditiicuités
en cette chair,
pouvoir ensuite fortifier leurs cœurs infir- qui pourraient rester dans l'esprit sur ce
mes ; c'est pruirquoi Job, après avoir parlé sujet, lorsqu'il ajoute : Je verrai Dieu dans
de cette manière douteuse, fait aussitôt pa- ma chair ;je le verrai moi-même, et non pas un
raître la fermeté de sa foi sur la résurrection autre, et mes yeux le regarderont, n
future, en ajoutant J'attends maintenant, à : 7. Dans la quatrième partie, qui comprend
i-artr, II:

chaque jour que je combats, l'heure de mon


XVII,
l'explication de la fin du xu\° chapitre jus- 11»

chanqement; puis, pour montrer ce qui se qu'au XXXII'" inclusivement, saint Grégoire
l'âf.lOT. passera alors, il dit : Vous m'ap/xllerez, et je continue à montrer que Job nous a ligure,
vous répondrai. L'homme répond à Dieu qui et par son nom, et par ses soutlrauccs, celles
l'appelle dans ce changement général, au- de notre Sauveur, et de son corps, qui est
quel étant délivré de cette vie de corruption, l'Eglise, car le nom de Job signifie af/Ugé ;
:

il se présente dans un état incorruptible de- or personne ne l'a plus été que celui dont il
,

[vu" SIÈCLE.] CIIAPITRE XT.IX. — SArVT GnÉGOlRR LE CRANn, PAPE. 449


''L1tl,4.
est éciit dans Isaïe : // a /m-lè nos langueurs, lulaires qu'il avait données. Il marque ses
et il a siiii/fcrl nos douleurs et nos tnaludies. Il actions en ajoutant : Je soulageais la nécessité

y coiitiiuie aussi i\ faire voir que les amis du pauvre gui m'appelait à son secours, et de
de Jiii) rppi'(''siMilent les luM'oti(iiics, (iiii,en l'orpliclin (pli n'avait point de protecteurs; j'at-
voulant preiulie en main les inti'ièls de tirais des liénrdictions de celui qui était prés de
Dieu, l'ollensent vth'ilableinent. Il Ir.iile du périr, et je consolais l'âme de la veuve.Ce sont
nombre des animes, montrant qu'il y en a là de grandes (euvres de miséricorde, de dé-
d'établis de Dieu pcuir le gouvernement livrer le pauvre de sa niisèi'e, d'assister l'or-

des nations et des empires, et que dans les phelin, de secourir celui qui est près de pé-
divers intérêts de ces états, qui sont quel- rir, de consoler le cfeurde la veuve. C'est le
quefois opposés, ils n'agissent que selon la propre des saints de cacher tout le bien qu'ils
souveraine éqnil(! et la volonté divine. Job font, pour ne pas tondier dans le vice de la
avait dit en parlant de Dieu : 6V',s- snhlats ne vaine gloii'c; mais il est des occasions où ils
sont-ilspas en grand nomire? Saint Grégoi- sont comme forcés de faire de bonnes œu-
re, qui entend par 1;\ les anges, dit qu'ils vres devant le monde, ou de raconter eux-
sont sans nombre k l'égard de la connais- mêmes devant les hommes celles qu'ils ont
sance de l'esprit luimain, qui ne sait pas faites mais alors ils ne le font que dans le
:

de combien est composée cette grande mul- désir que leur père céleste en tire sa gloire,
titude de l'armée céleste dont il est parlé et non pas eux-mêmes. Job ajoute J'exami- :

dans Daniel mais que le nombre des citoyens


;
nais avec gi^and soin les causes que je n'entendais
du ciel est tout ensemble et déterminé et in- pas, pour nous apprendre qu'il ne faut ja-
défini, afin qu'il paraisse que ce qn'il est très- mais juger des choses avec précipitation, de
facile à Dieu de compter, est souvent innom- crainte d'en juger témérairement et avant
brable aux bommes. Les anges sont appelés
(i de les avoir bien examinées, et ne nous
les soldats de Dieu, parce qu'ils combattent laisser pas émouvoir aux moindres choses
contre les puissances de l'air. On peut aussi que l'on nous rapporte, en ajoutant trop de
l'ag. ta:.
entendi-e d'eux ce qui est dit ensuite : Les foi à ce qui se dit sans être prouvé. Ceux qui LU,. XX,

colonnes du ciel tremblent, et sont dans l'èjjou- m'écnutaient, attendaient toutes 7nes paroles

vante au moindre signe de sa volonté; parce comme des sentences, et étaient dans le silence
qu'encore qu'ils voient Dieu sans cesse, ils et pour recevoir mes conseils. Ils
l'attention
tremblent d'une respectueuse frayeur en le n'osaient rien ajouter à mes paroles, et elles
contemplant; mais cette frayeur est plutôt dégouttaient sur eux. Ce terme, dégouttaient
un mouvement d'admiration que de crainte. figure le vrai et le juste tempérament de la
1.11.. i VI Dieu se jettei-a sur lui et ne l'épargnera pas. prédication, et comment la grâce des exhor-
Toutes les fois que Dieu corrige un pécbeur tations chi'étiennes se doit proportionner aux
par ses lléaux, il ne se jette pour ainsi dire besoins et A la capacité de chacun de ceux
sur lui que pour l'épargner mais quand le ; qu'on veut instiuire. Comme par ce qui est
pécheur continue à l'ofienser nonobstant ces dit précédemment, ils n'osaient rien ajouter à
tléaux, alors ce n'est pas pour l'épargner mes paroles, on loue le respect et la soumis-
que Dieu se jette sur lui, c'est pour le punir. sion des auditeurs, ce qui suit, et elles dé-
L'oreille qui m'entendait me donnait des béné- gouttaient sur eux, nous représente la ma-
pu}. 1,!0.
dictions, et l'œil qui voyait rendait témoignage nière sage dont les docteurs catholiques s'ac-
en ma faveur. Job, en parlant ainsi, fait assez quittent du ministère de la prédication car :

connaître quel il a été dans ses actions et celui qui instruit les autres ne doit leur rien

dans ses paroles : car l'on n'est pas encore dire qui soit au-dessus de leur intelligeni e
parfait dans ses actions, quand on pèche et de leur portée, et ne pas témoigner, en

dans ses paroles; et l'un n'est pas digne de prêchant aux ignorants, des choses trop éle-
louange dans ses paroles, quand on ne con- vées, et qui ne peuvent leur être utiles, qu'il
firme pas par ses actions ce que dit la langue. a plus de soin de paraître que de profiter à
Se voyant donc pressé par les aigres invec- ceux qu'il enseigne. J'ai fait accord avec tnes LIb. XXI,
las. 678,
tives de ses amis, il se justifie en ces deux yeux, que je ne penserais pas seulement à regar-
boses, disant que, par ses paroles et par ses der une plie. L'âme étant une substance invi-
actions, il a attiré à bon droit la vénération par elle-même aux
sible, n'est point sensible

de ceux qui l'ont \n et qui l'ont entendu. des choses terrestres et corporelles
plaisirs ;

Par ses paroles il entend les instructions sa- mais comme elle est intimement unie au
XI. 29
450 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
corps, les sens lui sont comme des ouvertu- lois même qu'ils sont obligés de le manifes-
''*?•"'•
où elle sort eu quel-
res et des passages par ter, comme ils agissent toujours par le mo-
que manière au dehors. La vue, l'ouïe, le tifde la charité qui anime, ils ne ressen-
les
goùl, l'odorat, le touclier, sont comme divers tent de joie que du profit qu'eu tirent leurs
canaux par lesquels l'àme se porte aux ob- auditeurs, et non de l'applaudissement et de
jets extérieure, ce sont comme des fenê- l'estime que cet éclat attire sur eux. Écoutez, ^^^t^'^
tres par où elle regarde les choses sensibles sages, mes paroles, et twis, savants, soyez at-
et, en les retrardant, elle les désire. C'est ce tentifs à ce que je dis. Il faut être bien pré-
81.^"*°' " qui a fuit dire au prophète Jérémie La mort : somptueux pour se figurer qu'il n'y a que
a monté par nos fenilrcs, elle est entrée dans les sages et les savants qui soient dignes
nos maisons. Quiconque regarde inconsidéré- d'entendre ce que nous disons. Un vrai pré-
ment par ces fenêtres corporelles, est sou- dicateur de la sagesse en parle bien difl'é-

vent attiré contre son gré par de dangereu- remment, sachant qu'il est redevable aux
ses délectations, et se trouvant insensible- savants et aux ignorants. Le présomptueux
ment gagpé par des désirs illicites, il com- ne veut être écouté que des savants et des
mence à vouloir ce qu'il ne voulait pas. Job sages, parce qu'il ne prêche pas pour ren-
qui, en juge très-équitable, présidait sur tous dre sages ses auditeurs mais il en clierche ;

ses sens, regardait de loin le péché avant qu'il qui le soient déjà, afin de faire éclater de-

y pût tomber, et fermait les fenêtres de son vant eux avec vanité sa capacité et sa doc-
corps ;\ la mort spirituelle, de crainte d'en trine. Il ne pense pas tant à instruire qu'à
être surpris. Afin donc de se conserver tou- paj'aître. Il n'est point inquiet si ceux qui
jours chaste, il fait un accoi'd avec ses yeux l'ccoutent en deviendront meilleurs et plus
de ne point regarder des beautés qu'il crai- justes, mais s'il en sera estimé plus habile et
gnait d'aimer, encore qu'il ne les eût pas plus savant. Dieu n'écoutera point en vain, et pjr'^j?"^ '*

regardées à mauvais dessein. En etlet, le le Tout-Puissant examinera la cause de chacun


poids de la chair qui nous attiie sans cesse en jjurticulier. L'Écriture marque ici deux
en bas est d'une pesanteur si prodigieuse, choses l'une, que Dieu n'écoute pas eu vain
:

que quand l'image de quelque beauté ter- ceux qui crient à lui et l'autre qu'il regarde
;

restre a pénétré par les yeux jusque dans le ceux qui soulfrent. 11 ne faut pas croire que
co^ur, il faut de grands efl'orts et de grands Dieu nous néglige, lorsqu'il dilfère de nous
combats pour l'en etfacer. Le moyen de n'a- écouter; souvent il arrive qu'il exauce nos
voir rien d'impur dans sa pensée, est de ne désirs, lorsqu'il ne nous en accorde pas si-
point regarder ce qu'il n'est point permis de tôt l'cllet, et que les choses dont nous de-
désirer. Job ajoute Quelle part Dieu pren-
: mandons proniptcment l'accomplissement,
drait-il de moi là-haut? comme s'il disait Si : trouvent dans le retardement un succès plus
je laisse souiller mon âme
par des pensées heureux et plus favorable. .Nos prières sont
impures, je ne pourrai jamais être l'héiitage exaucées, en cela même que Dieu semble
de Celui qui est l'auteur et le principe de ditl'érer exaucer nos désirs s'éten-
de les ;

toute pureté : car tous les biens que l'on dent à mesure que Dieu semble les négliger,
peut avoir sont inutiles, ne sont soute-
s'ils et en croissant de la sorte, ils se fortifient et
nus devant Dieu par le témoignage de la deviennent capables de recevoir leur véri-
chasteté, n table accomplissement. Le travail du com-
t.rti'°.'°'m° 8. « Après que les amis de Job eurent par- bat est prolongé, afin que la couronne de
îii.'"'
'"'•
lé, un jeune homme nommé Héliu dit Je : la victoire en soit plus riche et plus glo-
répmidrai aussi à mon tour, et je ferai con- rieuse. Quand donc le Seigneur n'exauce
naître ma science. Le parti des présomptueux pas proniptcment les siens, il les attire véri-
n'est pas tant d'être savant que de le paraî- tahlcmcnl à lui, lorsqu'il seujble qu'il les re-
tre, el tous leurs discours vont plutôt à faire pousse ; c'est un médecin intérieur el spiri-
une vaine ostentation de sagesse, qu'à la tuel, qui retranche dans le fond de l'Ame
posséder en eifet les saints prédicateurs,
; toute la corruption qu'il n'y peut soutl'rir,
au contraire, se contentent de contempler, qui fait sortir toute la pouirilure de noire
dans le secret de leur cœur, le don de lu- c(i;ur par le feu de la tribulatiou, et qui gué-
mière qu'ils ont reçu de Dieu, ils le goûtent rit d'autant mieux les maladies spirituelles,
au dedans, où ils l'ont recju, cl non au div qu'il ('toute moins la voix des malades. // lu. xxvri,
""*'
hors où ils sont oblijjés de le uianit'estcr et : considère ce qui est au-dessous de tous les cieiw,
(vil" SIÈCLE.] CHAPITRE xux.— SAINT r.niî;r,oiRK i,R r,nA\n, pape. /«rii

et sa lumière s'étendpisqu'aux extrémités de la compoMcliiiii, il l(!ur paiicd'iine manière bien


terre. Dion, qui gouverne les clioscs supiê- dilli'rc'nte dccelli! dont il le fait lorsqu'il les
mcs, n'al):iiulonno pas les inférieures, et le châtie par la rigueur de ses Ih-aiix, pour em-
soin qu'il prend des grandes choses ne l'empê- pêcher qu'ils ne s'élèvent de vaine gloire. La
che point do descendre jusqu'aux inoiiulres. première s'insiunn doucement dans l'âme,
Celui qui est présent partout et partout ésal pour la faire avancer dans le chemin de la ver-
dans ses dm'i'rontes opérations, n'est jamais tu; et l'aulre r('"piiuie et détruit fortement eu
diU'ércnt delui-même. Il regarde également elle ce (jui l'onipôche d'y avancer; l'une lui

toutes choses, et il règle tout également ;


apprend ce qu'elle doit rechercher, et l'autre
étant toujours présent partout, il n'est ren- ce qu'elle doit craindre. Dieu avait résolu de
fermé dans aucun lieu, et il n'est point ca- rendre au double h Job ce qu'il avait perdu ;

pable de changer par la diversité dos choses et pour empêcher que sa victoire ne le fit
sur lesquelles il étend ses soins. Il y en a tomber sousl'épée mortelle de la vanité, ou
plusieurs qui, entendant parler des merveil- de la complaisance eu lui-môme, il le reprend
les que les apôtres ont opérées, et n'en ici sévèrement, pour lui conserver la vie de

voyant point de semblables dans l'Ëglise, s'i- l'àme, en le tenant dans l'humilité Saviez- :
Lib.XXIX,
put'. 'J54.

maginent que Dieu lui a retiré sa grâce, ne vous, lui dit-il, quand vous deviez naître, et
ps.i. II, 10.
considérant point qu'il est écrit : Vous m'as- connaissez-vous le nombre de vos jours? Connais-
sistez à jn-ojios dans mes besoins et daiis mes af- sez-vous l'ordre du ciel, et en marqucrez-vous
flictions. Dans ces premiers temps, l'Église bien les raisons sur la terre ? Dieu parle ainsi à
avait grand besoin du secours des miracles l'homme, afin de lui apprendre qu'il ne se con-
pour s'établir, et se fortifier contre les maux naît pas soi-même; que sachant qu'il ne se
et les persécutions dont elle était alors com- connaît pas, il craigne que craignant, il s'hu-
;

battue; mais depuis qu'elle a glorieusement si milie et ne présume rien de soi; que ne pré-
dompté l'orgueil de l'infidélité, elle ne de- sumant rien de soi, il ait recours à l'assistance
mande plus de siunes extraordinaires ni de de son Créateur, et qu'étant mort pour avoir
miracles, mais seulement des vertus et de mis sa confiance en lui-même, il revienne
bonnes œuvres, quoiqu'elle ne laisse pas en- à la vie en recherchant le secours de celui
core à présent de faire paraître quelques mi- qui l'a formé. Alors Job, répondant au Sei-
racles par plusieurs d'entre ses fidèles, dans gneur, lui dit : Je sais que vous pouvez tout, et Lll). XXXV,
pas. UiS,
les occasions où ils sont nécessaires pour que nulle pensée ne vous est cachée ; c'est pour-
son bien et son avantage. La diversité des quoi j'ai parlé comme un insensé, et j'ai dit des
langues, dit saint Paul, est un signe, non choses qui surpassaient infiniment ma connais-
pour les fidèles , mais pour les infidèles ;
sance. Notre sagesse, en comparaison de la
quand donc il se rencontre qu'ils sont tous sagesse souveraine, n'est que folie Job avait :

fidèles, il n'y a plus de nécessité pour les parlé sagement aux hommes, mais ayant en-
miracles. » tendu les oracles de la bouche de Dieu, il
siiièmfpnr. Q. LaslxièmB partie comprend l'explication reconnaît encore avec plus de sagesse qu'il
xxvui, pȔ. du du livre de Job, depuis le vingt-hui-
reste n'est point sage. »
tième livre jusqu'au quarante-deuxième qui 10. Saint Grégoire finit ses Morales sur
drs
Conclusion
Morsios
sur Jot). Ju^o*
est le dernier. Le Seigneur, répondant à Job du Job, en conjurant tous ceux qui les liront de nient sur Gfit
ouvrage.
milieti d'un tourbillon, luidit : Qui est celui qui ne pas lui refuser le secours de leurs prières
mêle des sentences parmi des discours imperti- devant le tribunal du souverain Juge, et de
nents ? Si .Job eût été dans un état de santé
(I vouloir bien prendre soin de laver par l'eau
et de prospérité, Dieu lui eût parlé d'un lieu de leurs larmes, toutes les taches qu'ils au-
plein de calme et de tranquillité mais comme ; ront remarquées dans son cœur en lisant ses
il adressait son discours à une personne acca- écrits. Les réflexions que nous en avons rap-
blée de douleur et d'affliction par la perte de portées, suffisent, ce semble, pour donner
ses biens, la mort de ses enfants, les plaies au lecteur une idée de ce commentaire, et
dont son corps était couvert, les paroles im- pour le mettre en état de juger de l'édifica-
pertinentes de sa femme, et parles discours tion qu'en peuvent tirer ceux qui aiment à
injurieux de ses amis, il est dit qu'il lui parla s'instruire dans la science des saints. C'est
du milieu d'un tourbillon et de la tempête. pour ceux-là principalement que ce Père a
Car lorsque Dieu touche intérieurement le composé cet ouvrage; aussi ne s'y est-il

cœur de ses serviteurs par un sentiment de point emljariassé d'approfondir la lettre de


452 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
l'Écrilare, ni d'y parler avec ëlcgaace et avec causait, il n'aurait osé entreprendre un ou"
la dernière exactitude; il s*v est, comme il vrage si dillicile, si la grâce du ciel et l'ar-
le *
ditlui-même, peu arrête aux paroles, deur des désirs de ses auditeurs ne l'eussent
afin de s'attacher davantage aux choses. soutenu. Saint Jérôme ' s'était autiefois ex-
cusé de commenter ce même prophète, sur
§11- le trouble que lui avaient occasionné les

prophète Ézèchiel.
nouvelles de la désolation de Rome et de
Des Homélies sur le
l'Occident par les barbares. Voici comment
i. On met ordinairement les homélies de saint Grégoire décrit celle qui arriva dans le
Iles «or Eïr-
chlcl MDi da saint Grégoire sur la prophétie d'Ezéchiel en temps qu'il expliquait ICz('cliiel '. « Qu'ya-t-il
395, mais il scrohlc qu'on doit les avancer de encore dans le monde qui puisse nous plaire ?
trois ans, elles rapporter à l'an 592; car il Nous ne voyons que tristesse, nous n'enten-
est certain, par le témoignage de Paul Diacre, dons que gémissements. Les villes sont dé-
qu'il les prononça ' dans le temps qu'Agi- truites, les forteresses ruinées, la terre est
lulfe, roi âes Lombards, sortant de Pavie où réduite en solitude, et ces petits restes du
il faisait sa résidence ordinaire, vint avec genre humain sont continuellement battus
une armée puissante reprendre Pérouse, et des fléaux de Dieu. Nous voyons les uns en-
s'avança jusqu'à Rome dont il Dt le siège : traînés en captivité, les autres mutiles, les
or, cela arriva en 392, la même ' année que autres tués. Rome même, autrefois la maî-
Romain, patrice et exarque de Ravenne, tresse du monde, nous voyons où elle est
avait pris Pérouse sur les Lombai'ds, Agi- réduite; accablée de douleurs, abandonnée
lulfe s'étant * aussitôt mis en campagne pour par ses citoyens, insultée par ses ennemis,
reprendre les villes que Romain avait prises pleine de ruines. Où est le sénat? Où est le
sur lui contre la foi des traités. Dès le com- peu[ile? Que dis-je, des hommes? les édifices
mencement de son pontificat, saint Grégoire mêmes se détruisent, les murailles tombent.
avait fait plusieurs homélies sur les Évangi- Où sont ceux qui se réjouissaient de sa
les ; mais on ne placées qu'après celles
les a gloire ? où est leur pompe et leur orgueil ?

qu'il fit sur Ézèchiel, pour garder l'ordre des Autrefois ses princes et ses chefs se répan-
li\Tes de l'Écriture. daient par toutes les provinces pour les pil-

5<4
OoécriM'i 2. L'on écrivait pendant ° ses homélies ler, lesjeunes gens y accom'aient de tous
homélien
tendant qw'n
les [.rCcl>«if.
qu'il les prononçait. Les Romains, charmés côtés pour s'avancer dans le monde main- ;

S» ruinée, persomie
dt§;tril
présure
daus
de l'entendre, voyant qu'il ne lui serait pas tenant qu'elle est déserte et
(^i.Iusçruids prophète,
Irouiilej,
possible de leur expliquer tout le n'y vient plus chercher la i'orlune. Il n'y reste
le conjurèrent ' de leur- donner l'explication plus de puissants capables d'opprimer les
de la dernière vision ; mais dans le temps autres. » Saint' Bernard relève la présence et
qu'il se disposait ;"!
satisfaire leurs désirs, il la liberté d'esprit de ce suint Pape, au milieu

reçut la nouvelle que le roi .\gilulfe avait de tant de troubles et d'agitations, et en


passé le Pô pour venir faire le siège de Rome. même temps l'élégance et l'exactitude de ses
Cela ne l'euipôcha pas de commencer son explications.
explication, et d'entrer dans la profondeur 3. Saint Grégoire eut recoui-s à celles que Il »>«[ »fn1
du Cftiiin

des mystères cachés sous cette vision pro- saint Jérôme eu ne les
avait failes, mais il latr« d« ta)Dt
JérAnJC.
phétique, mais en avouant qu'au milieu des adopta point d'une manière servile il pense ;

agitations et des soius que cette nouvelle lui même assez souvent dilféremment de ce

' Vnde cl ipsa)n loquendi artem... scrvare dcs- " r.refr., PriT'/ar lib. Il in Ezèchiel, et Joan. Diac,
pexi...non melacismi collisionem fugio,non hnr- lib. VI, nuni. "G.
barismi confusionem derito. (Jre;;., Prœfat. Mo- Hieronjui., Epist. ad Eu^toch., prœpxa com-
ral, in Job-, Epist. missoria prwvia. ment. inSzechiel.
« Paiilns Diac, lib. IV Uist. longobard., lap. " e.rc;.'.. lib. XI in Ezèchiel. Ilom. 6.

VIII. ' Oliaidio urhi.i et barbaricus ensis cixHtim cer-

V, Lpht. 40; lib. IX, Kpisl.ÂH.


» r.rcp., lib. ricibns imminebot. fiumquid tamen istud lerruit
Statim Ticino egressus rex Pcrusiiim peliil...
' beaium papam Gregorium giiominus sapitnliaiii
hujus régis advciUu in tanlum beatus Oregorius scribcrcl in olio ! Eo nempe tempnris obscurissi-
papa exlerritus est,ui ab cxpositione templi de , niam et extremam partem
Ezechielis tam diligenr
quo Ezecliicl scripseral, dcsislerel. Pniilus Djac, ter quamelcganter exposuit. Bernard., De Con-
lib. IV HiM. Longobard., rap mil sideratione, lib. I, cap. ix.
» Joan. U;ai;., lil>. IV, uuui. 69, 70.
[vil» siixLE.] chapithe XLrx SATNT GniÔGOUIE I,K GRAM), l'AI'lî. 4S3
l'i'io, ol qiiclqiiofnis il lo ri'fiilp, iiiiiis avec Juda, jusqu'à ce que vienne Celui qui doit être
beaucoup ilo modcslie, et saus le nouimei-. ennii/é, et il sera l'attente dfs u/t/ions. Il eu use
Soi sont au uoui-
llos tout
honii^'
au
4. Ses homélies sut- l'',/,('cliiel ainsi, afin ([u'en voyant raccouiplissement
Moniltio d» les imprimés et les uia-
brc de vingt-iieux, do cette prophétie, nous ne doutions point
Jii^oniriit sur
cos lioiiiAllos.
miscrits n'en maniuent pas clavaiUago. KUes de la vérité des choses qu'il a rapportées
furent huit ans après recueillies en deux
'
comme déjà arrivées. Au reste, Dieu,
en ac-
livres; le premier en conlieut douze, et h» cordant î^i quelqu'un le don de prophétie, ne
second dix, dans lesquelles le saint Pape n'ex- lui (l(5couvre pas pour cela tout ce qui doit
plique qu'un chapitre de la dernière vision arriver : ce don est souvent borné. Elisée
d'I'Jzéchiel. C'est h; quarantième, dont il ne ne savait pas le sujetSuna-du cliagrin de la
donne même l'explication que jusqu'au qua- mite, c'est-à-dire la mort de son Dieu tils. IV Ilcj. IV,

rante-huitième verset; après quoi il dit à en use ainsi, afin que le prophète, se voyant
ses auditeurs : « Personne * ne doit trouver privé de certaines connaissances, sache que
mauvais si je cesse après ce discours. Vous celles qu'il ajui sont données d'en-haut. Dans
voyez tous que nos atTliclions sont aug- la seconde homélie, saint Grégoire donne

mentées, le glaive nous environne de toutes l'explication des cinq premiers versets de la
parts les uns reviennent ayant les mains
;
prophétie d'Ézéchiel, et il emploie les six Vng. im.
coupées, nous apprenons que les autres sont homélies suivantes à expliquer le premier
pris, et les autres tués. Quand on ne peut chapitre tout entier, où Ezéchiel marque l'an-
plus vivre, comment peut-on expliquer les née, le mois et le jour où il eut la vision ex-
mystères de l'Écriture? Que reste-t-il donc, traordinaire qui s'y trouve rapportée. Il en
sinon de rendre grâces avec larmes à celui fut si frappé, qu'il tomba le visage contre
qui nous frappe pour nos péchés? «Saint Gré- terre mais l'Esprit-Saint, étant entré en lui,
;

goire envoya ses vingt-deux homélies à l'é- l'atiermit divinement, en sorte que, s'étant
vèquc Marien, qui les lui avait demandées. relevé, il se trouva assez de forces pour se
Le style n'en est pas élevé, mais il convient tenir sur ses pieds c'est la matière de la
:

à des discours pour tout un peuple. Saint neuvième homélie, et le commencement du


Grégoire commence ordinairement par éta- second chapitre d'Ézéchiel. L'ordre que Dieu
blir le sens de la lettre, comme le fondement garde à l'égard de son prophète est admira-
des autres mais il s'applique plus particu-
; ble il lui fait voir d'abord comme une image
:

lièrement au sens mystique et moral, faisant de sa gloire, afin de l'humilier et de l'abattre ;

venir à son secours les endroits de l'un et ensuite il lui pai'le pour le relever; puis, en lui
l'autre Testament, qu'il croit les plus propres envoyant son Saint-Esprit avec une grâce su-
à éclaircir son texte. rabondante, il le relève et l'atiermit sur ses
Ce im'oHes 5. La première homélie traite de la pro- pieds. S'il ne se présentait à notre esprit
cOQttnnenl,
loni.
1174.
I, ttag. phétie en général, de ses diCTérentes ma- quelque chose de l'éternité, jamais nous ne
nières et des temps auxquels elle peut avoir tomberions le visage contre terre par le
rapport, au passé, au présent et au futur ; mouvement d'une véritable pénitence mais ;

car la prophétie ne regarde pas nécessaire- lorsque nous sommes tombés, la voix du
ment l'avenir, mais seulement les choses ca- Seigneur nous console, afin que nous nous
chées, en quelque temps qu'elles soient ar- levions pour faire de bonnes œuvres ce :

rivées. « On trouve une prophétie du passé que toutefois nous ne pouvons faire par no-
dans ces paroles de la Genèse : Au commen- tre propre vertu. C'est son Esprit qui nous
cement Dieu créa ; du futur,
le ciel et la terre remplit, qui nous fortifie, qui nous fait te-
dans Une vierge concevra et
celle d'Isaïe : nir fermes sur nos pieds, afin qu'après avoir
enfantera un fils, et une du présent, dans été prosternés contre terre par le regret de
Ji an. I, :!i. ce que dit saint Jean aux juifs Voilà l'a- : nos fautes, nous soyons fermescà l'avenir dans
gneau de Dieu, voilà celui qui efface les péchés la pratique des bonnes œuvres. Mais pourquoi
du monde. La vérité des événements passés celui qui parlait déjà ;\ Ézéchiel, lorsqu'il était
sertde preuve aux événements futurs. Moïse, abattu, ne lui permet-il de parler que lors-
après avoir raconté ce qui s'est fait au com- qu'il s'est relevé ? C'est qu'il y a des choses
mencement du monde, prédit ce qui se fera que nous devons écouter étant pi-ostcrnés
Gcnesi
XUX, 10.
dans la suite : Le sceptre ne sera point ôté de contre terre, et d'auties étant debout. Dieu

• Grcg., Prœfal., in EzeckicL l.ili. Il, Ilnin. in, iiay. 1130.


434 HISTOIRE GENERALE DES AUTEURS IXCLESIASTIQUES.
parle à celui qui est abattu, aiin qu'il se lève, une occasion de tomber encore d'une chute
et il parle à celui qui est debout, pour lui plus mortelle car un péché qu'on ne se
:

commander d'aller porter sa parole aux hom- hâte pas d'efiacer par la pénitence, peut de-
mes car on ne doit pas nous donner l'au-
: venir, par un juste jugement de Dieu, la
torité de prêcher aux autres, lorsque notre cause d'un nouveau péché, parce que, l'a-
propre faiblesse nous tient encore couchés veuglement du pécheur venant à croître, ce
par terre, de crainte qu'étant ainsi faibles, second péché est comme engendré par le
nous ne détruisions par nos œuvres ce que premier en sorte que l'accroissement des
;

nous pourrions établir d'ailleurs par nos pa- vices est déjà en lui comme un commence-
roles.Les trois homélies suivantes contien- ment de supplices car il arrive quelquefois
:

nent l'explication du troisième chapitre et que le même péché soit péché, la peine du
Er«W(i, fin commencement du quatrième. Fils de péché, et la cause du péché. » Les dix autres
l'homme, votre ventre se nourrira de ce livre homélies sont une explication de la vision
que je vous donne, et vos entrailles en seront qu'eut Ezéchiel d'une ville bâtie sur une
p.g. UM. remplies. U y en a plusieui-s qui lisent, et montagne, et tournée au midi. Saint Gré-
qui en lisant ne se nourrissent point beau- : goire avoue que ce qu'on en lit dans le qua-
coup entendent la vois du prédicateui-, mais rantième chapitre de ce prophète est très-
après l'avoir entendue, ils se retirent aussi ditiicilc à comprendre c'est pourquoi, ne ;

vides qu'auparavant. Ils mangent en appa- s'arrèlant presque point au sens littéral, il pu. 13m.
rence, mais leurs entrailles ne sont point en donne de mystiques, en expliquant cette
remplies, parce qu'encore qu'ils reçoivent vision de Jésus-Christ et de son Église, de
dans leur esprit l'intelligence de la divine la vie active et de la contemplative.
parole, ils négligent de la faire entrer dans
leur cœur comme dans leurs entrailles, lors- §m.
que, l'oubliant à l'heure même, ils n'ont pas Dss Homélies sur les Évangiles.
soin de pratiquer ce qu'on leur a fait enten-
dre. Ils mangent etne sont point rassasiés, i. Jean Diacre ', dit que saint Grégoire ,„ "fVJir.
quand, en même temps qu'ils écoutent les régla les stations à Rome, c'est-à-dire les 5i,'"j/„;"*"
'~'
paroles du Seigneur, ils désirent et les biens églises où se devait faire l'ollice chaque
I58Î. du siècle et sa gloire. Je vous ai donné, dit jour, soit dans les basiliques, soit dans les
Eiethiei, le Seigneur à Ézéchiel, pour sentinelle à la cimetières des martyrs, c'est-à-dire les égli-
maison d'Israël. Dieu déclare que celui qu'il ses où reposaient leurs reliques; que ce fut
envoie prêcher est comme une sentinelle, dans ces solennités qu'il fil ses quarante ho-
parce que celui qu'on charge du soin des mélies sur les évangiles; que, tant que sa
autres est ainsi nommé, afin que la force sauté le lui permettait, il prêchait lui-même,
du nom même qu'on lui donne lui fasse con- mais que, lorsqu'il n'en avait pas la force, il

naître ce qu'il doit faire, étant toujours, par faisait lire ses propres homélies par quelque
l'élévation de son esprit, comme en un lieu autre. Elles furent toutes reçues avec tanl
élevé pour veiller sur eux, et les tenir en sû- d'applaudissements, que l'on en fit quantité
reté : car on ne met point une sentinelle en de copies; mais comme elles ne se trouvèrent
un lieu bas, mais on la place sur quelque hau- pas suffisamment fidèles, saint Grégoire fui
teur , afin qu'elle puisse découvrir de loin oiiligé de les retoucher. Il en fit en même

tout ce qui vient. Quiconque est donc établi temps un recueil qu'il partagea en deux li-
sentinelle sur la maison du Seigneur, doit vres, dont le premier renferme les vingt ho-
être élevé au-dessus des autres par sa piété, mélies qu'il avait dictées à ses secrétai-
afin qu'il soiten état de les servir par la lu- res second, les vingt qu'il avait pronon-
; le

mière de sa prévoyance, Le Seigneur dit cées lui-même. Il les envoya à Secondin,


*
lud. jo. ensuite au Prophète Si le juste abandonne : évêque de Taormine en Sicile, avec une
sa justice et commet l'iniquité, je mettrai dc- lettre dans laquelle il se plaint en quelque
Pis. \m. vant lui une pierre d'ac/ioppenient ;'il mourra, façon de ce qu'on lui avait enlevé ses dis-
fiarce que vous ne l'avez pas averti. Les juge- cours avant qu'il les eût corrigés. Il compare
ments de Dieu sont terribles après avoir ; l'avidil»' de ces copistes à celle des gensalfa-

attendu longtemps le retour de celui qui a


péché, lors(|u'il voit qu'.ui lieu de se con- 1 Lilt. II, iinin. 18. - ' lin-p., Episl. ad Secund.
veitir il méprise sa patience, il lui préseule i'rwfal., in Etang., yan- li'ii.
[Vir SIÈCLE.] CHAPITHE XMX. —SAINT (îUliGdlItE I.K r.liAM), l'.vPE 455

mes, qui s'empressent de nianjçer les viandes homme des joies ilu dans
paradis, cl IoiuIm''

îivant (|ii'eiies soient bien cuites. C'était faire les téuMiies, est iHlair(i par la présence de

l'éloge (le ses auditeurs; mais il se rabais- son Sauveur, atin (]u'ii marche dans le che-
sait beaucoup Ini-inèuic, en comparant ses min de la vie par ses bonnes u;uvres, et qu'il
homélies ;\ des viandes i\ demi cuites. 11 aver- goûte, comme par avance, les joies que cause
tit Secondin de ne point trouver i\ redire au la vue de la lumière éternelle. La troisième

défaut d'ordre qui se rencontrait dans le re- est sur ces paroles de Jésus-Christ dans saint
Mmi.
cueil de ses liomélics, parce qu'on y avait Matthieu Celui-là est mon frère, ma sœur et
:
iC clMq.

eu égard aux temps auxquels il les avait ou nia mère, qui fait la volonté de mon Père qui
prêcbées ou dictées, et non ;\ la suite de l'é- est dans les cieux. Elle fut récitée dans la ba-

vanjïile dont, en etl'et, il avait e.vpliqué tan- silique de sainte Félicité, martyre, le jour de

tôt un endroit, tantôt un autre, sans on don- sa fête. Saint Grégoire fait l'application de
ner une explication suivie. 11 le prie de cor- ces paroles à cette sainte, qui, de servante
riger tous les autres recueils qu'il tiouvera, qu'elle était de Jésus-Christ par sa foi, en
sur celui qu'il lui envoyait, et dont on con- devint la mère en la confessant. La quatriè-
servait un exemplaire dans les archives de me a pom' matière l'ordie que le Sauveur
l'Église pour contenter ceux qui désireraient donna à ses apôtres d'aller prêcher l'Évan-
Malt. x.S.
en l'aire tirer des copies. Il ne sera pas inu- gile, excepté chez les Gentils et dans les vil-
tile de remarquer ici, qu'aux jours des sta- les des Samaritains elle fut prêchée dans
:

tions marquées par saint ("irégoire, on lit en- l'église du martyr saint Etienne. Saint Gré-
core aujourd'hui presque tous les mêmes goire remarque que Jésus-Christ, après avoir
eudi-oits de l'Évangile qu'il y avait expliqués, donné le pouvoir de prêcher et de faire des
tant l'Église est exacte à conserver ses an- miracles, nécessaires alors pour la conver-
ciens usages. y a toutefois quelque chan-
Il sion des peuples, ajouta Donnez gratuite-
:

gement pour lesdimanches de l'Avent; mais ment ce que vous avez reçu gratuitement; croyant
peut-être cela vient-il de la faute des copis- cet ordre nécessaire, parce qu'il prévoyait
tes, qui ont mis le second pour le premier, qu'il y en aurait à l'avenir qui feraient un
et le troisième pour le second '. commerce de la prédication, et qui cherche-
Homfiie. 2. La première homélie est sur le vingt- raient à contenter leur avarice dans l'usage
%rf, |,ag. unième chapitre de sauit Luc. bamt Gregon-e qu'ils feraient du don des miracles. Il traite
s,s,',,^",'i,.' la fît dans l'église de Saint-Pierre, le second à cette occasion des diverses espèces de si-
dimanche de l'Avent. Les guerres, les pestes, monie, et croit que, pour que celui qui con-
les tremblements de terre qui ravageaient fère les ordres sacrés en soit exempt, il doit
l'Italie et plusieuis autres provinces, lui don- non-seulement ne point recevoir d'argent
naient lieu de croire que le temps du juge- pour l'ordination, mais ne pas même y re-
ment dernier arrivait. Il prit donc occasion chercher quelque faveur humaine. Il dicta
de toutes ces calamités pour disposer son la cinquième pour être prononcée dans l'é-
peuple à se préparer à ce jour terrible, dont glise de saint André au jour de sa fête. La vo-
le Seigneur ne nous a ôté la connaissance, cation de saint Pierre et de saint André à l'a-
qu'afln qu'une crainte salutaire nous le fasse postolat, fait le sujet de ce discours Pierre : ((

envisager toujours comme fort proche, La et Audré abandonnent leurs filets pour sui-
seconde fut prononcée dans la même basili- vre le Sauveur, des le premier mot qu'il leur
Luc. XVIII, que le dimanche de la Quinquagésime. Elle dit; ils ne lui avaient pas encore vu faire de
3t.
est sur le dix-huitième chapitre de saint Luc, miracles; ils ne l'avaient pas même ouï par-
où nous lisons que Jésus-Christ, ayant pris ler de la récompense de la vie éternelle;
à part ses douze apôtres, leur prédit sa pas- toutefois, dès le premier commandement
sion, et qu'étant piès de Jéricho, il guérit un qu'il leur fait, ils ([uittent tout ce qu'ils pos-
aveugle. 11 compare à cet aveugle le genre sèdent. Combien de miracles n'a-t-il pas fait
humain qui, chassé par le péché du premier éclater à nos yeux? de combien de fléaux

' 11 paraît plus vraiseuiHable que les copiste? thieu sur l'entrée de Jésus-Christ à Jérusalem; on y
n'ont eu aucune part à ce cliangeineut. Cet usa^re lut ensuite lecommencement de l'Évangile selon S.
ijui subsistait au temps de saint Grégoire, a conti- Marc. C'est ce qui reculait aux deux dimanches sui-
nué nu moins jusqu'au temps de Charlemagne et , vants les évangiles qu'on a depuis rapportés au pre-
même jusqu'au xi\ f siècle. Dans ces premiers temps, mier diuiainhe etau second. Note de Tricalet dans
on lisait au premier dimauclic le lexte Uc saint Mat- la BiOliotli''iiLe porlalive des Pires. {L'i'ditcur.}

l
, ,

456 HISTOIRE GÉNKRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.


ne nous afflige-t-il point? Combien de mena- sus-Christ et enfant de Dieu. Il ajoute que
ces n'eniploie-t-il pas pour nous effrayer? saint Jean, en niant qu'il fût Élie, ou un
Après tout cela, nous le méprisons, nous pnqihètc , ne disait, rien contre la vérité
uéiilisreons de le suivre lorsqu'il nous ap- parce qu'eucore qu'il eût l'esprit et la vertu

pelle. On Qu'ont abandonne ces pè-


dira : d'Élie , il était différent de lui personnelle-
cbeurs, puisqu'ils ne possédaient rien? Mais ment , et qu'il n'était point un prophète de
il faut considérer en cela plutôt l'affection la manière dont l'avaient été les anciens,
avec laquelle ou donne à Dieu ce qu'on a, qui avaient prédit Jésus-Christ longtemps
que la chose même qu'on lui donne. Celui- avant son avènement, au lieu qu'il le mon-
là donc a beaucoup quitté, qui ne s'est rien ti-ait à ceux qui voulaient le voir. La huitiè-
réservé. Pierre et .\ndré ontmême renoncé me est sur la naissance du Sauveur, dont
au désir de posséder quelque chose. » La l'hîstoire est rapportée dans le second cha-
sixième fut préchée le troisième dimanche pitre de saint Luc. Cette homélie est fort ^'- "• '

de l'Avenl, dans l'église des saints martyrs courte, parce que, l'usage étant à Rome de
Pierre et Varcellin. Saint Grégoire y expli- dire '
trois messes le jour de Noël en difl'é-

qua l'endroii de l'Evangile selon saint Mat- rentes églises , il peu de temps pour
restait
thieu, où il est dit que saint Jean, ayant ap- l'explication du mystère. La neuvième re-
pris en prison les œuvres miraculeuses de garde la parabole des cinq talents, qui sert
Jésus-Christ, lui fit demander par ses disci- dévangile au joui- de la fête de saiut Syl-
3. pies Etes-vous celui qui doit venir ? « Ce n'est
: vestre. « Il n'est personne qui n'ait reçu de
pas que saint Jean doutât que Jésus-Christ fut Dieu quekpie talent, l'un l'intelligence, l'au-
le Messie, puisqu'il l'avait montré aux Juifs, tre le don de la parole celui-là des riches- ;

et qu'il l'avait mais il voulait savoû-


baptisé ; ses, celui-ci la connaissance de quelque art,
si, étant venu pour sauver les hommes, il un autre la faveur des personnes puissantes.
mourrait pour eux, et descendrait jusqu'aux Ce sont autant de moyens de se rendre utile
enfers pour en délivrer ceux qui y étaient aux autres, ei autant de talents dont Dieu
en captivité, afin que, mourant avant Jésus- demandera compte, il le demandera à celui
Christ, il put annoncer sa venue dans ces qui, élaut en pouvoir auprès d'uu homme
lieux souterrains, comme il l'avait annoncée riche, n'en aura pas profite pom- soulager la
sur terre. » Ou a marqué, à la tète des autres misère du pauvre. » Saint Grégoire explique
homélies, les églises et les jom-s où elles fu- dans la dixième l'évangile que nous lisons
rent prononcées ce qu'il est bon de remar-
; le jour de l'Epiphanie. 11 y fait sentir l'affreux "•" '

quer pour connaître les différentes stations aveuglement des juifs qui méconnaissent Jé-
établies par saint Grégoire. U y eu a pour sus-ClirisI, tandis que les nations infidèles,
les basiliques de la Sainte-Vierge, de saint et même tous les éléments, lui rendent té-
Sylvestre, de saint Pierre, de sainte .\gnès, moignage. Il y réfute aussi l'hérésie des pris-
de saint Félix martyr, de saint Paul, de ciUianistcs qui enseignaient que les astres
,

saint Jean de Latran, de saint Laurent, de présidaient à la naissance des hommes. Dans ,,
"'"'

saint Jean-Baptiste. la onzième, qui est une explication de la pa-


Hom. 7. », 3. Dans la septième homélie pour le qua- rabole du trésor caché dans un champ, il
9,10, IS. 13,
lus- itse. trième dimanche de l'Avent, saint Grégoire fait en peu de mots l'éloge de sainte .\gnès,

donne l'explication du témoignage que saint dont on célébrait la fête avec beaucoup de
Jean rendit à Jésus-Christ, et qu'il se rendit solennité. La douzième est encore pour la
à lui-même, en confessant qu'il n'était pas même fête il y explique la parabole des dix
:

15 le Christ, ni Elie ni piophète mais seule-


, , vierges. Sur ces paroles Veillez, jiarce que : ^
»'•"•
et î«q.
ment la voix de celui qui crie dans le désert. vous ne savez ni l'heure ni le jour il rapporte ,

Sur quoi ce saint Pape le loue de ce qu'il d'un nommé Chrysaorius , homme
l'histoire
trouvait sa joie dans l'accroissement du vrai superbe, avare et voluptueux, qui , se ti-ou-
Messie et son propre abaissement et dit , vant à riieure de la mort vit autour de lui ,

qu'en refusant de passer pour le Chiist, il les malins esprits sous des figures noires cl
devint, par l'Iiumble connaissance de sa fai- atlreuscs, qui s'empressaient de le conduire
blesse un des plus nobles membres de Jé-
, en enfer. Il demanda quelques heures de dé-

' ()uia, Inrgicnlc Domino, Hlissarum snlcmnia gclica Icclione von possiinius. Ilom. », pog.
UT ItoUie cclebialuri liumus, loijui tlin Oc evun- HUti
[Vir SlfcCLK. CHAPITRE XLIX. — SAINT GRÉCOIRE LE CillAXI), PAPE. 457

lai, mais il ii't'ii put obtenir, et mourut. Saint voir ouï lire souvent à de pieux religieux
(ii(''i;()irc elle le mCiuo fait dans le ([uatrir'me (|u'il rcciîvait chez lui ,
parlag('ant avec (!ux
[\\iv lie ses l)ialof;ues. Il traite encore tie la les aumônes i[u'ou lui faisait sous un porti-
vigilance dans la treizième lioun-lie ,
qui a que (]ui est sur le chemin (|iii conduit à l'é-

pour matière ce que tlit Jésus-Christ dans glise de Saint-Clément. dans la seiziè-
Il dit

i.iic.iri,r<. salut Luc Aye: dans vos mahis des lanijics iir-
: me, qui est sur l'évangile du premier diman-
dcnli's, parce que le Fils de l'homme viemlra à che de Carême, qu'on no peut cnliMidrc sans
l'heure que vous ne penserez pas. L'iivangile quelque horieur, (|ue le diable ail eu le pou-
m<u-que trois veilles ditférenles ou trois , voir et l'insolence d'enlever le Fils de Dieu
heures auxquelles le Seigneur peut venir, oii il lui plaisait tantôt sur le haut du tem-
,

c'est-à-dire à chacun des diltorents âges de la ple, tantôt sur une montagne mais que, si ;

vie. Sur cela saint Crénoire déclare, qu'on ne l'on considère ce que Jésus-Christ a bien
doit point se désespérer pour le temps passé, voulu soull'rir de la part des juifs et des sol-
puisque c'est pour nous convaincre de la pa- dats qui le crucifièrent, il ne sera plus éton-
tience admirable avec laquelle Dieu nous at- nant que, s'étant laissé attacher à une croix
tend, qu'il nous dit que, s'il vient ù la secon- par les membres du démon, il ait permis au
de veille ou à la troisième et qu'il nous , démon même de le transporter d'un lieu à
trouve veillant, nous serons bienheureux. un autre. « Ce n'a donc point été une chose
noilH'lioS 4. La quatorzième homélie est sur l'évan- indigne de lui d'être tenté delà sorte, lui qui
11, is, ic. n,
18, i:i, so, gile du second dimanche d'après Pâques, 'où était venu au monde pour être tué de la
!•«. U5i.
Jésus-Christ donne des marques distinctives main des hommes; il était juste qu'il vain-
du bon pasteur d'avec le mercenaire. « Ces quît nos tentations par ses propres tenta-
marques selon saint Grégoire ne s'aper-
, , tions comme il était venu vaincre notre
,

(;oivent Lien que dans les temps de troubles mort par la sienne. » Saint Grégoire ne comp-
Jii. II. \, n. et d'agitations pendant la paix le merce-
: te dans le Carême que trente-six jours d'abs-
naire, comme bon pasteur, veille à la gar-
le tinence et de jeûne, en ôtant les dimanches,
de de son troupeau sans le quitter mais si ; où l'on ne jeûnait point ce qu'il regarde ;

le loup vient s'il se présente quelqu'un qui


, comme la dixième pai-tie de l'année que ,

persécute, qui opprime les fidèles, c'est alors nous donnons à Dieu en nous mortifiant à
qu'on distingue le vrai pasteur d'avec le mer- cause de lui mais il veut que cette absti-
;

cenaire. Celui-ci s'enfuit, non de corps, mais nence soit accompagnée d'aumônes et que ,

de co:'ur n'ayant pas la foice ni le courage


, nous donnions aux pauvres ce que nous nous
de soulager son peuple, et de le défendre retranchons à nous-mêmes. La dix-septième
contre l'ennemi qui le maltraite; au lieu que homélie fut faite dans l'église de Latran en
celui-là résiste courageusement au loup à ,
présence de plusieurs évoques c'est pour- ;

l'injustice, pour en délivrer ses ouailles. » La quoi le Saint y entre dans le détail des prin-
Liir
cl 5cq parabole des semences, rapportée dans l'é- cipaux devoirs des pasteurs envers leurs
vangile du dimanche de la Sexagésime fait , peuples. Il veut qu'ils vivent d'une manière
le sujet de la quinzième homélie. Saint Gré- si pure, que tous ceux qui s'approchent d'eux

goire y fait voir que, comme il est néces- en rapportent la saveur de la vie éternelle ;
saire au laboureur d'attendre en patience qu'ils donnent à chacun les avis et les aver-
que la terre produise ses fruits, nous ne pro- tissements convenables ;
que leur zèle soit
duisons nous-mêmes aucun fruit de bonnes accompagné de douceur. Il leur fait de vifs
œuvres, si nous ne supportons avec patience reproches de ce que plusieurs d'entre eux
les défauts de notre prochain. Cela lui don- ne faisaient aucune difUculté de vendre
ne occasion de rapporter un exemple de pa- les ordinations, et de ce qu'affectant une vie
tience dont lui-même, avec toute la ville de sainte aux yeux des hommes ils ne rougis- ,

Rome, avaient été témoins. C'est celui de saint saient pas de commettre aux yeux de Dieu
Servule qui paralytique de tout son corps
, ,
des fautes considérables de ce que la plu- ;

dès sa jeunesse, rendait grâces à Dieu au part, s'adonnant aux soins et aux aûaires
milieu de ses plus grandes douleurs chan- , du siècle, négligeaient le ministère de la pré-
tant des hymnes jour et nuit en son hon- dication. Ne pouvant assez déplorer des abus
neur, ce qu'il continua de faire jusqu'à sa qui déshonoraient si fort l'Eglise, il emprun-
mort. Quoiqu'il n'eût point appris à lire , il te, pour les pleurer, ces paroles de Jérémie :

savait par cœur la sainte Kciiture, pour l'a- CommrnI l'or s'est-il obscurci? Comment a-t-il Jcrem.,
458 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLESlASTlQUh!^.
Lsment, ir, changé sa couleur qui était si belle? Comment Marie. La vinpft-deuxième, dans celle de Joit. XI, 1.

les du
pierres sanctuaire out-ellcs clé dis/jersées saint Jean appelée Constantine elle est sur ;

aux coins de foutes les rues ? Il rejette sur les l'évangile du samedi d'après Pâques. La vingt- I.tir.
1.
xxiT,

mauvais livèques la cause des calamitiSs pu- troisième, sur celui du lundi de P'iques Saint
bliques, et les menaces du terrible jugement Grégoire y établit deux vérités importantes :

Lnr. ^, 1
de Dieu. Il prit pour matière de cette homé- la première, qu'à la fin du monde les Juifs
lie l'endroit de l'Évangile selou saint Luc, se convertiront :\ la foi chrétienne ; la se-

où il que
le Seigneur choisit soixan-
est dit conde, que pour célébrer dignement la fêle
te-douze autres disciples qu'il envoya de- ,
de Pâques, il ne sulfît pas d'y recevoir le
vant lui deux h deux dans toutes les villes. corps et le sang de Jésus-Christ de bouche, l-H- 'SI*.

Grt;. M..ral.,
Mh. .XXIII, « Ces disciples, étant de retour, dirent à si l'on ne pratique en même temps des oeu-

Jésus-Christ, avec quelque sentiment de vai- vres de piété et de miséricorde, si l'on ne fait

ne gloire que les démons mêmes leur étaient


,
pénitence de ses péchés, et si l'on n'en quille
assujettis par la vertu de son nom. Le Sei- MS.
l'habitude. y établit encore la nécessité P«f. 1
Il

gneur , p;)ur abaisser l'enllure qui s'était d'exercer l'iiuspitalilé envers les étrangers,
élevée dans leurs cœurs, leur dit Qu'il voyait : par l'exemple des disciples d'Emmaiis, qui
satan tomber du ciel comme un éclair, voulant, contraignirent Jésus-Christ de demeurer avec
par la chute et la condamnation de celui eux, parce qu'il était tard. « Us mettent la '

qui est le maître de tous les superbes , leur taljledevant lui, ils lui présentent à manger,
apprendre combien ils devaient appréhender et reconnaissent dans la fraction du pain,
relèvement de la vainc gloire. » Cette homé- pour leur Dieu, celui qu'ils n'avaient point
lie finit par une prière dans laquelle le saint reconnu lorsqu'il leur expliquait les divines
Pape demande que les évéques soient aux Ecritures. » Ce Père explique de Tliglise mi-

yeux de Dieu, qui les a choisis pour pasteurs litante et de l'Église triomphante, les deux
des peuples, ce qu'ils étaient dans la bou- pèches miraculeuses que Jésus-Christ fit faire
che des hommes. Des trois homélies suivan- à ses apôtres, l'une avant sa passion, l'autre
tes, l'une est sur l'Evangile du dimanche de après sa résurrection. «Dans la première ils
Jom. VIII, la Passion, l'autre sur celui du dimanche de prirent tant de poissons, que les lllels se rom-
fi.

la Scptuagésime, et la troisième sur celui pirent ce qui figurait la rupture de funité,


;

du samedi des quatre-temps de décembre. et les schismes qui se forment dans l'Église
Luc. m, 1. Il entend par les dill'érentes heures auxquel- par la diversité de doctrines. Dans l'autre ils Paf. 161.'.

les le père de famille envoya des ouvriers à ne se rompirent point, quoiqu'ils fussent rem-
sa vigne les divers dges des hommes et
, ; plis de cent cinquante-trois grands poissons,
par le denier qui fut donné en salaire aux parce que la sainte Eglise des élus, figurée
l'ag. 1511,
1013. ouvriers, le royaume du ciel. «Tous reçurent par celte pèche, se reposant danr rétcrncUe
ce denier, c'est-à-dire une même récompen- paix de celui (pii l'a formée, ne peut plus
se, quoique leur travail eut été illégal, parce être déchirée par aucunes dissensions. Ce fui

que le royaume des cieux est toujours un saint Pierre qui tira le filet sur le rivage,
don de la bonne volonté de notre Dieu ù l'é- parce que le soin de l'Église lui était spécia-
gard de ceux qui ont liavaillé longtemps, lement confié. Cette homélie est sur l'évan-
i> Joan.xxl,!.

comme à l'égai'd des autres qui n'ont tra- gile du mercredi de Pâques. Dans la vingt-
vaillé que peu de temps. Il y aurait donc de Cinquième, que saint Grégoire prononça le
la folie h l'homme de se plaindre de Dieu jeudi de la même semaine, il insiste sur la
pour ce qui dépend de sa bonti- il doit se ; nécessité de la persévérance dans les bonnes
tenir heuieux d'avoir sujet d'espérer une (Buvres, à l'exemple de Marie-Magdeleine,
place dans le royaume des cieux n'y fiit-il , (]ui, pour être restée seule ù chercher Jésus-

que des derniers. » Clirist, fut aussi la seule A qui il se fit voir.

5. Le second livre comprend, comme on Saint Grégoire, dans toute cette homélie, ne
rond. Hoiiiô*
II» 31,32.23,
2>, », se, 37,
l'a déjà dit, les vingt homi'lies (pie saint Gré- fait (pi'une même personne île la femme pé-
goire prêcha lui-même. La vingt-unième est cheresse, de Marie so-ur de Lazare, et de Ma-
Marc. .XVI,
i.
sur l'Evangile du dimanche de PAcpies elle ; rie-Magdeleine ; pitisienis savants les dis-

fut prononcée dans la basilique de Sainte- linuuenl, et en font trois saintes différentes.

' ifrnanw ponunt ciliosofferunt, cl Deum, qvrm in panis fractionc cogtwsrunt. Unni. 2:i |inR.

in Sciiiiliirn' snmc erposilianc mm cngnoviTaiil, 1.139. t


[vil* SIÈCLE ] CHAPITllK XMX. — SAINT GRWiOIRE Lli C.llANU, PAPE. i.-l!)

Il montre dans la vingt-sixi^me, qui est pour pardonner nos ennemis, et de prier mémo
;'i

jo.„. »T, 11- (liuianclie ilc l'octave de Pi'niucs, que Jésus- pour eux, (juelques dommages iju'ils nous
Cliiist, ('tant sortidu sein de sa méie sans aient caus(''s. » 11 pronoinja la vingt-huitième
rompre sceau de sa virginité, a bien pu,
le homélie dans des saints martyrs Né-
l'église

fus. 1M3. après sa n'surrection, entrer dans le lieu où rée et Acliillée, le jour de leur tète. L'évan-
les disciples étaient assemblés, quoiiiue les gile qu'on y lisait était tiré du quatrième cha-

portesfussent fermées, de peur des juifs; que pitre d(! saint Jean, où nous lisons ipie le fils

i'«p. iô;.-. c'estde nous particulièrement qu'il est dit : d'un ollicier fut guéri ù Gapharnaùm par la
Heureux sont ceux qui ont cru sans avoir vu, parole seule de Jésus-Christ, quoiqu'absent.
parce qu'en eflet, sans avoir vu Jésus-Christ Saint Grégoire demande pourquoi le Sauveur,
dans la cliair, nous croyons en lui par une invilé d'aller guérir ce malade, refuse d'y
foi vive et animée de bonnes œuvres que ;
aller, au ne fit aucune dilUculté de
lieu qu'il

ce ne fut pas sans raison que Dieu permit le se transporter dans la maison du Centenier
doute de saint Thomas cet apôtre, convaincu
;
pour rendre la santé à son serviteur. Il ré-
par l'attouchement des plaies du Sauveur, pond que Jésus-Christ en a usé ainsi, pour cou-
était destiné à guérir en nous les plaies foudre notre orgueil, qui fait que nous respec-
de l'infidélité ainsi son incrédulité a plus
;
tons dans les hommes, non l'image de Dieu,
servi à ratïermissement de notre foi, que la mais les honneurs et les richesses, au lieu que
facilité à croire des autres apôtres. Il ne lais- nous devrions considérer ce que nous som-
sait pas d'y avoir, du temps de saint Grégoi- mes, et non pas ce que nous avons. Pour don-
re, des clii'étiens qui doutaient que nos corps ner à ses auditeurs du dégoût du monde et
dussent un jour ressusciter. Après leur avoir de ses vanités, il fait une vive description
demandé s'il est plus difficile à Dieu de ra- des calamités dont les provinces étaient aflli-
nimer un corps que de créer le monde entier gées, et de l'inconstance des biens et des
de rien, il leur donne divers exemples de faits plaisirs du siècle.
natirrels, qui sont des images de la résurrec- 6. La vingt-neuvième est une explication Uorn. 29,
30, :jl, 32,3:1,

tion future, entr' autres celui des semences de l'évangile qu'on litle jourde l'Ascension. 3^, pat;, 13 9.

qui, jetées en terre, y meurent, s'y pourris- Jésus-Christ, avant de monter au ciel, or-
sent, puis se reproduisent dans leur germe. donna à ses apôtres d'aller prêcher l'Evangile
juan.xT, La vingt-septième est sur le précepte de l'a- à. toutes les créatures. « Il ne prétendait pas
14, «te.
mour du prochain, et sur la prière. Quoique sans doute qu'ils dussent l'annoncer à des
Dieu nous ait fuit un grand nombre de com- bêtes brutes ou à des choses insensibles;
mandements, ils sont tous fondés sur la cha- mais, parce que toutes les créatures qui sont
rité, et en sortent comme d'une seide racine; dans le monde ont été faites pour l'homme,
sans la charité, on ne les accomplit pasvéri- et qu'il n'y a point de créature qui n'ait quel-
Fiig. i:ico. tablement. Il fit cette homélie dans l'église que chose de commun avec l'homme, sous le
de saint Pancrace, au jour de la fête de ce nom général de créatures, Jésus-Christ a en-
Psr. I5M. saint martyr. Les fidèles y étaient venus en tendu l'homme. Il peut aussi avoir eu en
foule les genoux en terre devant son tom-
; vue les gentils; cai- après avoir dit à ses
beau, ils frappaient leur poitrine, ils priaient apôtres : N'allez point vers les gentils, il

avec larmes. «Faites attention à vos prières, leur commande de prêcher sans distinction
leur dit ce Père voyez si vous demandez
; à toutes les créatures, juifs ou gentils. » La
au nom de Jésus-Christ, c'est-à-dire, si vos trentième est sur l'évangile de la fête de la
prières ont pour fin les joies du salut éternel. Pentecôte. Saint Grégoire y explique com-
Dans la maison de Jésus-Christ vous ne le cher- ment le Saint-Esprit descend sur nous, com-
chez pas lui-même, si vous ne lui demandez ment demeure en nous, eu quelle manière
il

que des choses tempore'les. L'un, 'dans sa il pom- nous, comment il nous enseigne
prie
prière, demande unefemme, l'autre unemé- intérieurement. « D'une même substance '

un
tairie, celui-là habit, celui-ci des aliments. avec le Père et le Fils, il est dit qu'il prie pour
Mail. vT, Lorsque ces choses manquent, il faut les de- les pécheurs, parce qu'il les fait prier, en leur
mandera Dieu mais souvenez-vous qu'il vous
; en inspirant le désir et la volonté. Il vient
ordonne de chercher premièrement le royau-
me et la justice de Dieu, et qu'il vous promet Qui ttniii» substantiœ cuni Paire et Filin exo-
'

toutes ces autres choses comme par surcroît. rari-pro delinqxn nlibus perhihetur, quia eos quos
vsg.ic.66. Les auties conditions de la prière sont do rcpkl cToranles faiil. Ilom. 30, pag. 157li,
400 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
dansle cœur de quelques-uns, mais il n'y de- sion pour les pécheurs, mais qu'ils ne lais-
meure pas; p.nrce que, contrits de leurs pè- sent pas de les traiter avec dureté, lorsqu'ils
ches, ils le temps
reçoivent avec respect; le les voient persévérerdansleurspc-chés. Pour
de la teutalion vient, ils oublient leurs bons expliquer ce qui est dit ensuite, (ju'i/ y mim Luc. \v, R.

propos ils retombent dans leurs pëcliés, le


, plus de joie dans le ciel [tour un seul jKcheur
I. i:..r. Il Saint-Esprit se retire. » Il fait, d'après saint qui fait pénitence, que pour quatre-vinqt-dix-
i cl !iq.

Paul, dt-nombroment des dons du Saint-


le neuf jvMes qui n'en ont pas besoin, il fait la
Esprit ;pour montrer de quelle force et
et comparaison <le cette joie avec celle que res-
de quel courage les apôtres furent remplis sent un officier lorsqu'il voit un soldat, après
après l'avoii'reru, il éiablit un parallèle de ce la faiblesse qu'il a eue de prendre la fuite,
que saint Pierre fut, lorsqu';\ la parole d'une revenir avec ardeur à l'ennemi, et l'atta-

servante, il renia Jésus-Christ, et de ce qu'il quer avec intn'pidité. L'olHcier reçoit en


était lorsqu'il dit avec fermeté aux magistrats cette occasion plus de plaisir du retour d'un
des Juifs, qui voulaient l'empêcher de prê- tel soldat, qu'il n'en a de la constance de

cher l'Évaii.uile « Il faut plutôt nb('irà Pieu


: ceux qui n'ont jamais lâché pied. Selon saint
qu'aux hommes. » La trente-ct-unième est Grégoire', la vraie pénitence consiste à pleu-
Luc.iiii.f. sur la parabole du Gguier. « Le père de fa- rer ses péchés, et à n'en plus commettre ;

mille, étant "venu trois ansde suite pour y car celui qui pleure ses péchés passés, et qui
chercher du fruit, et n'y en trouvant point, en commet de nouveaux, ou ne fait pas une
ordonna de le couper. Ces trois années peu- vraie pénitence, ou ne sait en quoi elle con-
vent siguifier les trois états ou âges dilTércnts siste. Euetlet, que sert-il de renoncer <i la

dans lesquels Dieu a fait connaître aux hom- volupté, si on se livre à l'avarice? Il rapporte
mes ce qu'ils lui devaient, et ce qu'ils de- la conversion et la pénitence d'un homme fort

vaient à leur prochain, sans que la plupart riche, nommé Yictorin, qui, après avoir pleuré l'a;. leiK.

aient fait ni l'un ni l'autre avant la loi, sous continuellement ses péchés dans la retraite
la loi et sous la grâce. Il les a instruits avant pendant plusieurs années, entendit, comme
la loi. connaissance naturelle; sous la
par la il était en prières, une voix du ciel qui lui dit

loi, en leur donnant des préceptes par le mi- que ses péchés lui étaient l'cmis.
nistère de Moïse; sous la grâce, en les ins- 7.Saint Grégoire prêcha la trente-cinquième noni6lln5
M, 3f..31, a»,
truisant lui-même. » Saint Grégoire explique homélie dans l'église de saint Mennas, mar- S9 rt (0, pi|
1612.
dans la trente-deuxième, qu'il prononra dans tyr. Il y explique toutes les persécutions que

l'église et Martinieu, mar-


des saints Processc les prédicateurs de l'Évangile et les défen-

tyrs, ceque c'est que de renoncer à soi-mé- seurs de la vérité devaient soulfrir de la part

,1, 25. me pour suivre Jésus-Christ; dans la trente- des ennemis de Jésus-Christ, selon qu'il est
troisième, qui fut prôchée dans l'église de rapporté dans le vingt-et-unième chapitre de
Saint-Clément le vendredi des quatre-temps saint Luc; mais il remarque que le Sauveur,

Tii, 30. de septembre, ce qui se passa pendant le en les avertissant de ce qu'ils auraient i\ souf-
repas que le pharisien Simon donna k Jésus- frir, les assurait de son secours, en promet-

Christ. Il confond encore dans celte homélie tant de leur donner une sagesse laquelle i'i

la femme pécheresse à qui ses péchés furent personne ne pourrait résister, et qu'il appor-
remis, avec Marie-Magdeleine, sœur de La- tait un grand adoucissement à le\n' peine par

zare et de Marthe. 11 remarque, au commen- l'espérance de la résurrection. Il dit à ses au-


cement de la trente-quatrième, qu'il prêcha, diteurs, qu'encore que en paix,
l'Église fût

le troisième dimanche d'après la Pentecôte, ils couronne du


avaient lieu de mériter la

dans de Saint-Jean et de Saint-Paul,


l'église martyre, non en répandant leur sang, mais
que de l'été étaient très-contrai-
les chaleurs en souHVant les injures, en aimant ceux dont
res ù sa santé, ce qui l'empêchait de prêcher ils étaient haïs, en recevant avec patience

aussi souvent qu'il l'aniait souhaité. Ses tous les événements fâcheux. Il donne pour
forces étant revenues, il fil un assez long exemple de patienceuuabbé nonnné' Etienne,
"• '•
discours sur l'évangile de ce jour, où il est des environs de Uiéti, qui, après avoir re-
dit que, les publicains et les gens de mauvaise noncé A tout ce qu'il possédait dans le
vie se tenant auprès de Ji'-sus pourl'écouler,
les phaiisiens cl les docteurs de la loi en ' Pœiiilentidm ngerc est, cl perprirata mala
niunnuraient. Il montre que ceux qui sont pliiiigrrc, cl plniiijeiiild non pcrpclrtire. llnni. 31,
véritablement. justes, sont pleins de r (inqias-
[vu" SIKCLE.] CHAPITRE XLIX. —SAINT GRliGOIRE LE GRAND, PAPE. 401
monde, s'exerça tellement à celte vertu, y a beaucoup d'appelés, mais peu d'élus. La
qu'il comptait pour ses amis tous ceux qui trente-neuvième contient l'exiilicalion des Lue. XIX,

lui t'aisaioul quelques iiisuUes. Dans la tieulc- malheurs que J''sus-Chris[ prcjdit à Jérusa-
sixicuie liomi'lie, qui est pour le second di- lem, aprèsipi'ill'eut regardée eu pleurant sur
manche d'après la Pentecôte, il donne l'ex- elle. Saint Grégoire ne s'étend que peu sur

plication de la parabole des conviés qui s'ex- le sens de la lettre, qui était connu de Ions
cusent de V(Miir au festin du pon; de famille, ceux qui savaient que cette ville avait été dé-
lien fait dois classes, mettant dans la pre- truite par Vespasien et Tite; mais il s'étend
mière les avares, dans la seconde les curieux, sur le sens moral, considérant dans la ruine
dans la troisième les voluptueux il distin- ; de Jérusalem celle des hommes charnels,
gue aussi ceux qui vinrent au feslin après y qui, tout occupés des plaisirs sensibles, ne
avoir élé invités, de ceux que l'on força d'y '
prévoient point les maux dont ils sont mena-
venir. Il entend par ces derniers, ceux à l'é- cés, etne font point attention aux ditférentes
gard desquels Dieu use de différentes afflic- manières dont Dieu les visite pour les enga-
tions pour les détacher des plaisirs et des ger ;\ rentrer dans les voies du salut. La
honnems du monde, qu'ils aiment avec trop quarantième est une explication de la para-
d'ardeur; iljes frappe par l'adversité, il per- bole du mauvais riche et de Lazare. « L'Évan- Luc. XVI,

met qu'ils languissent dans de longues ma- gile ne marque point le nom de ce riche,
ladies, qu'ils se laissent abattre par les in- mais seulement celui du pauvre contraire- ,

jures, alln que, convrJncus par eux-mêmes ment aux usages du monde, où l'on connaît
que le monde n'est qu'affliction et qu'incons- beaucoup plus les noms des riches que ceux
tance, ils se repentent de s'y être attachés, des pauvres. Il n'en est pas de même de Dieu,
et se convertissent à Dieu. Dieu nousaiipelle qui connaît les humbles, et qui ne connaît
en ditférentcs manières, par lui-même, par pas les supei'bes. Peut-être que ce mauvais
ses anges, par les patriarches, par les pro- riche aurait pu s'excuser de n'avoir pas sou-
phètes, par les apôtres, par nos pasteurs, par lagé Lazare, s'il ne l'eut pas vu exposé sous
nous-mêmes, quelquefois par des miracles, ses yeux, et portant le fardeau de la pauvreté
souvent par des tribulations, d'autres fois et de la misère ; mais Dieu voulut exercer
par la prospérité, d'autres fois par l'adver- en même temps deux sortes de jugements, Pjj. IC5:

sité. Que personne ne méprise sa vocation, et sur le même sujet, lorsqu'en mettant de-
de peur qu'après s'être excusé d'eutrerdans vant la porte du riche un homme si couvert
la salle du festin, la porte ne lui en soit fer- d'ulcères etsi nécessiteux, il aggravait par

mée quand il voudra y venir. La trente-sep- cette vue même la condamnation de celui qui
tième fut prêchée dans l'église de saint Sé- n'avait aucune pitié de son frère, et qu'en
bastien, au jour de sa fête. Saint Grégoire en exposant tous les jours aux yeux du pauvre
emploie une bonne partie à faire l'éloge de cet homme riche et impitoyable,
il mettait

Cassius, évèque de A'arni, qui vivait avec sa vertu de plus en plus à l'épreuve car :

tant de pureté, qu'il offrait presque chaque quelle tentation n'est-ce pas pour un pauvre
jour le saint sacrifice, s'otlVant lui-même à qui meurt de faim, de voir devant ses yeux
Dieu à la même heure
avec tant de componc- un homme riche, qui vit dans les délices et
tion, qu'il fondait en larmes. H explique de dans l'abondance? Mais, par un juste juge-
l'Église ce qui est dit des noces qu'un roi ment de Dieu, il arriva un changement bien
Mail.-^xt,!. m de son fils. Dans son sein, comme dans la étrange ; le riche devint le suppliant
de La-
salle du festin, se trou\ent des bons et des zare, et il put à son tour envier
de ce la table
mauvais; des personnes qui ont la robe nup- pauvre, lui qui l'avait vu auparavant souf-
tiale, d'autres qui n'enont point, c'est-à-dire frant de la faim et accablé de misère couché à
qui sont privées de la charité, qui est appelée sa porte. Ce riche, qui avait refusé de donner
robe nuptiale, parce que c'est par la charité les miettes qui tombaient de sa table, désire
seule que le Fils unique de Dieu s'est uni les à son tour une goutte d'eau, et ne peut l'obte-
Pas< I6t2. âmes des élus. C'est le sujet de la trente-hui- nir. » Saint Grégoire veut que les riches trem-
tième homéhe, où saint Grégoire prouve par blent au milieu de leur prospérité temporelle,
des exemples tirés de sa propre famille, qu'il de peur qu'elle ne soit toute la récompense
qu'ils aient à attendre, et que le souverain

' Quidam vero sic locantur, ul etiain compel- Juge, qui leur accorde en ce monde les biens
lantur. IIom.SG, in Eoang. extérieurs, ne les prive des intérieurs dans
463 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEl"RS ECCLËSIASTIOFES.
l'antre; que nous cherchions dans les pan- dans lesquels les Ninivites avaient vieilli ; le

\Tes, en leur faisant l'anitK'ine, des interces- larron effaça les siens à l'heure même de sa
seurs auprès de Dieu que, s'il y on a quel- ;
mort. Celui qui nous avertit de l'invoquer,
ques-uns d'entre eux dont les mœurs sont nous fait assez connaître qu'il veut pardon-
rcprëhensibles, ce n'est pas un motif pour ner à ceux qui l'invoquent. » A la suite de ce
leur refuser la nourriture dont ils ont be- discours, saint Grégoire ordonna des litanies
soin, mais une raison de les aider encore ou processions générales, et la cessation de
d'une antre manière, en les corritjeant de tous les travaux de la campagne et de tout
leurs d(5fauts par de salutaires rt^primandes. commerce pour le mercredi suivant.
la
DiseoDMfnr
RIATUitU,
8. On a mis A la suite desliomt-iies surles
1^. lUI. évangiles, celle que saint Gréifoire au peu- fit
§IV.
ple de Home en 590, quelques jours après la Du Pastoral de saint Grrégoire.
mort du pape Pelage la peste qui l'avait :

emporlf'- continuait de sévir avec une grande i. Aussitôt que saint Grégoire eut été élu P«»toril
6erit ta t-9fl.
Estime qu'où
violence. Saint Grégoire composa sur ce su- pape plusieui-s de ses amis lui écrivirent
,
CD f>ll.

jet un discours que saint Grégoire de Tours, ' pour l'eu féliciter. Jean, archevêque de Ra-
Jean et Paul Diacre nous ont conservé. Il venue mêla à ses compliments des repro-
,

commence ainsi : « Nous devons craindre du ches' sur ce qu'il s'était caché pour éviter
moins les lléaux de Dieu lorsque nous les l'épiscopal, lui qui avait tant de talents pour
sentons, puisque nous n'avons pas su les pré- en remplir dignement les fonctions. Ces re-
venir lorsque nous en étions menacés. Que proches donnèrent occasion à saint Grégoire
la douleur nous causent nous ouvre la
qu'ils de composer un ouvrage sur le devoir des
porte à une vraie conversion, et que la peine évêques, où, en expliquant ce qu'il pensait
que nous endurons brise la dureté de nos sur la grandeur et l'importance de leur char-
cffiurs. Voilà que tout le peuple est frappé ge, il justifie sa résistance à l'accepter. C'est

du glaive de la colère de Dieu, et que tous le Pastoral, si célèbre depuis dans toutes les
sont enlevés par une mort subite. Elle n'at- églises d'Orient et d'Occident. Saint Léan-
tend pas la maladie, et ne donne pas au ma- dre, évêque de Séville,à qui 'saint Grégoire
lade le temps de languir elle prévient et ; l'envoya, baisa en le recevant et le ren-
le ,

enlève le pécheur, sans lui laisser le loisir de dit public dans toute l'Espagne. L'empe-
recourir aux larmes de la pénitence. Con- reur Maurice en demanda une copie à Ana-
sidérez en quel état celui-là parait devant le tolius, diacre de l'église Romaine, nonce à

Juge terrible, qui n'a pas eu le temps de pleu- Constanlinople, qu'il fit traduire en grec par
rer ses péchés. Ce n'est pas une partie des Anastase patriarche d'Antioche ce qui le
, :

habitants qui périt tous tombent à la fois,


; rendit commun en Orient. Alfred, roi d'An-
les maisons demeurent vides, les pères et gleterre sacré à Rome en 872 le traduisit
, ,

les mères voient mourir leurs enfants ceux- ; en langue saxonne pour les Saxons occiden-
ci, contre l'ordre naturel, meurent avant ceux taux qui étaient sous sa domination, croyant
dont ils devaientétre les hérétiers. Recourons leur faire en cela un grand présent, comme
donc aux gémissements de la pénitence, tan- on le voit par la préface qu'il mit à la tôle
dis que nous pouvons expier nos fautes, sans de sa traduction, dont on montre encore des
attendre le moment d'être frappés. Rappe- exemplaires dans les bibliothèques d'Angle-
lons-nous le souvenir de nos égarements, et terre. La version grecque d'Anastase ne sub-
e(l'arons-les par l'amertume de nos larmes. siste plus. Il semble même que Photius',

Celui qui crie par la Ijouclie de son prophète : qui écrivait dans le ix" siècle, ne la connais-
Ex0Cli|p|, Je ne veux jmnt la mort du pécheur, ninis je sait pas, puisque, en donnant de gr-inds
lXXtll,ll.
demande ijv' il reconvertisse et qu'il vive, nous éloges au pape Zachaiie pour avoir fait tra-
l'ail naiire la confiance au milieu de nos crain- duire en grec les Dialogues de saint Grégoi-
tes. Que personne donc ne désespère à cause re et -plusieurs antres livres il ne dit rien de
de l'énormité de ses crimes une pénitence : la traduction du Pastoral. On le proposa

de trois jours a suffi pour effacer les péchés après les saintes Écritures et les canons des

' Crcg., Tiiron., lit). X, cnp. i ; l'aulus Diacou., « <iri(.'., Kpisl. ad Lcaiidrum, pog.
lili. ill Uisl. Longobard., cap. xxv; Joan. Uiacon., ' Priifnl. cditor.
lil). I, nuuL. 42. » l'bot. Cad. :i52, pag. 1399.
[vil* siftrxF..] CIIAIMTRE XI.IX. — SAINT GRI^COITIE LE fiRANn, PAPE.
coiuilos, dans le concile de Mayonco, eu fuir les faveurs et les grandeurs du siècle;
81.'{', h tous les évoques, pour y apprendre et en allant volontiers â la croix, ;\ aimer les
la manière de conduire leurs églises el leurs adversités. L'homme s'oublie dans les gran-
peu|)les. Celui de lleims de la même année; deurs et dans la ])rosp(;rité; il icvient ;'i lui-

fit lire h haute voix [)lusieiii's endroits du même, (piand


se trouve dans l'abjection el
il

Pastoral, afin que les pasteurs de cette égli- dans les disgrâces. Saiil, à qui la considéra-
se sussent comment ils devaient vivre et tion de sa propre indignité avait fait fuir la
avertir ceux ijui étaient sous leur conduite. (jualitéde roi, ne Itifiit pas plus lot, que son
Les évèques du troisième concile de Tours c(eur s'entia d'orgueil. Dès que David ne fut
ne croyaient pas qu'il leur fût plus permis plus dans l'allliction, il s'oublia jusqii'h faire
d'ignorer le Pastoral que les canons. Aussi, mourir le mari d'une femme pour laquelle il
Hincmar- archevêque de Reims dit que
, , avait conçu un amour criminel. La multitude Cili. IV.

de son temps lorsqu'on ordonnait les évè-


, des occupations inséparables de la charge de
ques, on leur mettait ce livre entre les mains, pasteur distrait souvent son esprit jusqu'à
ainsi que le code des sacrés canons, et ((u'on un tel point, que, se troublant et se confon-
leur faisait promettre de l'observer. Saint dant, il se trouve hors d'état de bien faire
Grégoire dit i[u'il l'écrivit au commencement chacune en [)articulier. Celte distraction ex-
de son ponlilicat, c'est-à-dire en 590. térieure lui fait môme oublier ce qui se passe
2. Il le divisa en quatre parties, dont la au dedans de lui; il pense h tout, excepté à
première est sur la vocation à l'épiscopat, afin lui-même. Embarrassé de tant d'occupations
que celui qui y est appelé, examine avec quel- qu'il rencontre en son chemin, il ne se sou-

les dispositions il y vient; la seconde, sur les vient plus de l'objet vers lequel elles doivent
devoirs d'un pasteur appelé légitimement au tendre. Cessant ainsi de chercher Dieu qui
sacerdoce ; la troisième, sur les Instructions était sa fin, en acceptant l'épiscopat, il ne
qu'il doit donner à son peuple; et la qua- faitplus de réflexions, ni sur ses pertes, ni
trième, sur les fréquentes réllexions qu'il est sur ses fautes. » Voilà ce que dit saint Gré-
obligé de faire sur sa propre conduite, pour goire, pour ôter aux imparfaits la présomp-
s'humilier des fautes qu'il peut avoircommi- tion d'entrer dans des charges qu'ils ne pour-
ses dans le gouvernement des âmes. raient remplir, et à ceux qui chancellent

la
Analyse de
preiiiiôro
3. S'il n'est point permis à un homme
<c dans les heux même les plus unis, le désir
Ïarlii',
I, fag.
toiii.

I.
d'enseigner un art qu'il n'a point appris, de s'engager à marcher sur le bord d'un pré-
quelle témérité ne serait-ce point à un igno- cipice. Mais il y en avait d'autres à qui l'a-
rant de se charger du ministère pastoral, vu mour du repos faisait fuir la conduite des
que le gouvernement des âmes est l'art des âmes, dont toutefois ils étaient capables par
Cap. I.
arts et la science des sciences? Les pasteurs leurs talents el par la pureté de leur vie. Il

sont lesyeux des peuples si ceux qui gou- : dit à ces derniers que, n'ayant pas reçu de
vernent manquent de lumières, ceux qui leur Dieu ces talents pour eux seuls, mais aussi
sont soumis ne peuvent que tomber dans pom- les autres, ils se privent eux-mêmes,
l'égarement. Il s'en trouve quelques-uns qui en ne songeant qu'à leur utilité particulière,
sont instruits dans la loi du Seigneur, mais des biens qu'ils voulaient s'approprier à l'ex-
dont les mœurs ne répondent point à leur clusion de toute autre personne. « Si Jésus-
savoir, qui détruisent par leurs actions ce Christ demanda à saint Pierre pour preuve
qu'ils établissent de bouche. C'est d'eux qu'il de son amour, qu'il prît le soin de paître ses JOjTI, <ï, IC,

Oiéc, V, 1,
est dit dans un prophète Les mauvais pi'è-
: brebis; comment ceux qui, possédant les
tres sont devenus à ceux sur qui ils étaient obli- vertus nécessaires à cet emploi, refusent de
ges de veille?-, ce que sont les fiiéges aux oi- s'en charger, peuvent-ils se flatter d'aimer
seaux parce que personne ne nuit plus dans
; celui qui en est le souverain pasteur? Des
l'Eglise, que celui qui, vivant mal, retient un pei'sonnes de ce caractère se rendent aussi
nom et un rang qui ne conviennent qu'cà une coupables en se refusant au saint ministère,
vie sainte. Jésus-Christ,qui était venu non- qu'ils auraient pu faire de profit en l'accep-
seulement pour nous racheter, mais aussi tant. Ceux qui refusent d'y entrer par un
Cap. ITT. pour nous enseigner, nous a appris, en fuyant sentiment d'humilité, s'ils sont véritable- Cap. VI.
la royauté que les hommes lui otlraient, à ment humbles aux yeux de Dieu, n'iront pas

Prœf. edU. Hiutmur, Prwfat. in opuscula.


464 HISTOIUE GÉXÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
jusqu'à refuser opiniâtrement les charges pour seul, ne pourra vaincre l'avarice,
lui

dont ils peuvent s'acquiller avec succès : deviendra le dépositaire des biens à
lorsqu'il

car on ne doit point regarder comme vrai- employer pour le soulagemeut des pauvres.
ment humble celui qui, connaissant que Dieu La maxime générale pour le saint ministère,
l'appelle ii la conduite des âmes, méprise est que celui qui a les vertus nécessaires pour
c.p. TU. son ordre en refusant de s'y soumettre. 11 y la conduite des âmes, l'accepte quand on l'y
en a même en qui on ne peut Màmer le dé- force mais que celui qui ne les a pas ne
;

sir du ministère de la prédication. Si Jéré- s'y laisse jamais engager, quand même on
Cip. I.
ji«,n. 6. mie, étant envoyé de Dieu, se défendit hum- l'y voudrait contraindre. Mais quel est celui
.,

blement d'aller où on l'envoyait, sur sa dif- que l'on peut forcer à se charger de la con-
ficulté de parler, et sur ce qu'il n'était encore duite des autres? U faut que ce soit un hom-
i»i.v.,8. qu'un enfant; Isaïe, au contraire, voyant me d'une vertu éprouvée, au-dessus des
Dieu en peine de trouver un homme pour avantages et des disgrâces du siècle, d'une
l'envoyer prêcher, se présenta devant lui, complexion assez forte poursoulenir le poids
en disant». Me voici, envoyez-moi. Moïse re- de sa charge, libéral envers les pauvres, in-
fusa d'abord la conduite du peuple de Dieu, dulgent autant que l'équité et la justice le
en ne considérant que sa propre faiblesse ;
demandent, compatissant envers les faibles,
mais, s'appuyant depuis sur le secours de assidu à la prière, et exempt de toutes les
celui cpii lui commandait, il se soumit avec imperfections figurées par les défauts corpo-
humilité. « rels qui, suivant la loi de Moïse, excluaient
Cap. riii. 4. A ceux qui, ne cherchant dans l'épisco- du sacerdoce. »
pat qu'à satisfaire leur ambition, s'autori- 5. Le premier
(1 soin de celui qui se trouve In wcrn J" p.r»
I ïl noUi.
saient de ces paroles de saint Paul Si quel- : élevé à l'épiscopat par les voies canoniques Ut, |jg. U.
m, I.

qu'un dcsire l'épiscoput, il désire une fonction et légitimes, est de dégager son cœur et son
sainte, saiut Grégoire répond saint Paul, espiit des créatures. Soyez pur, un pro- Caj>. 1.
: dit
I.al. LU, II.
après avoir loué ceux qui ont ce désir, les phète, vous qui avez à porter les vases du Sei-
épouvante aussitôt, en ajoutant qu'il faut gneur; car ceux-là proprement portent les
qu'un évèque soil impréhensihlc ; il louait le vases du Seigneur, qui, en vivant saintement,
désir de l'épiscopat dans un temps où les évo- se chargent de conduire jusques dans les ta-
ques étaient les premiers que l'on conduisait bernacles éternels les âmes de leurs frères.
au martyre; ainsi celui qui ne souhaite pasl'é- Ildoit, en second lieu, exceller au-dessus de
Dip. M.
piscopatdans le dessein de travailler pour la tous les autres dans la pratique des vertus,
gloire de Dieu, mais seulement en vue d'être afin que sa vie toute sainte soit comme une
honoré des hommes, ne recherche pas l'épis- voix continuelle qui enseigne aux autres à
copat dont parle l'apôtre. « En ell'et, ajoute le bien vivre. La parole pénètre le cœur bien
saint Pape, on ne peut pas dire que ce soit plus aisément, lorsqu'elle est soutenue par
aimer le sacré ministère en hi manière dont Iss actions, et qu'en même temps que l'on
saint Paul l'entend, que de n'y chercher qu'à prescrit aux autres ce qu'ils doivent faire en
dominer sur les autres, qne de vains hon- les instruisant, on leur en rend la pratique
neurs, que l'abondance de toutes choses. Ce facile par l'exemple. Comme il ne doit se Cap. III.

Père découvre l'ilhision dans hujiiellc tom- proposer clans ses discours que l'édification
bent la plupart de ceux qui désirent les char- et l'utilité des autres, la prudence et la dis-
c>p. II. ges ecclésiastiques. « Ils se flattent, en les re- crétion doivent régler ses paroles et son si-
cherchant, de la fausse vue du bien qu'ils lence; non-seulement ne doit rien dire do
il

se proposent d'y faire; mais ce n'est qu'un mauvais à ceux à qui mais ce qu'il
il parle,
voile dont ils couvrent leur ambition se- leur dit de bon, il le doit dire avec mesure et Cap. IV,

crète; ils s'imapinent aimer dans une bonne avec ordre, sans ennuyer ses auditeurs par
action ce qu'ils n'y aiment point véritable- la longueur indiscrète de ses discours. Il doit

ment : d'où vient qu'aussitôt qu'ils ont ob- tellement s'abaisser par un sentiment de
tenu ce qu'ils souhaitaient, ils oublient aisé- compassion vers ses inférieurs, qu'en pre-
ment toutes les belles idées du bien qu'ils nant soin de ceux qui sont faibles, il ne re-
s'étaient proposés de Le remède à
faire. tranche rien de «on apfilication à Dieu. La
celte illusion est de se juger soi-même par contemplation élevait saint Paul jus(pi'au
les actions de sa vie passée. Celui qui n'a pu troisième ciel; sa sollicitude pastoiale le ra-
se conlenler du bien qu'il avait tout entier baissait jusqu'à régler l'état des personnes
[vil» SIÈCLE.] CIIAPITIIE XLIX. — SAINT GRÉr.OIllE LE GRAND, PAl'K. 465

encore cbarnellcs. S'il arrive qu'en écoulant il ne doit point se laisser toucher du désir
les k-ntulluns des Ames faibles, il eu reijoivo de |)laiic aux hommes, parce ()ue celamonr-

liii-UH^nie (|iielqno impression, il ne iaiil puinL pro[ire rengagerait iurailliblciuonl dans des
qu'il se trouble, puisque, par un ellet de la comlesccudances basses et honteuses seu- ;

Providence, il sortira d'autant plus aisément lement il doit souhaiter d'être bien dans l'es-
de ses propres tentations, que sa charité le prit de ses peuples, afwi de pouvoir les en-
porte A écouter celles des autres, et;\ travail- gager plus aisément à aimer la vérit(;. C'est
ler à les eu ilélivrcr. Qu'il re|,Mrde comme danscettedisposilion(ju'était saint Paul, lors-
Cor. z,
ses égaux tous ceux qui ,font bien, et qu'il qu'il disait, d'une part, qu'il fâc/mit de plaire 1.

s'élève avec tout le zèle que la justice peut à tons en toutes choses ; et de l'autre, que s'il

inspirer contie les vices de ceux qui l'ont roulait plaire aux hommes , il ne serait [MS fî.llFtt. f, 10.

mal c'est ainsi que, sans avoir éf^ard h


: serviteur de Jésus- Christ. y a des fautes
Il

l'honneur qui est dû à sa dignité, il vivra qu'il faut dissimuler par prudence, mais en
avec les bons comme avec ses égaux, et faisant connaître qu'on a bien voulu les dissi-
qu'il ne craindra pas d'user de toute l'auto- muler, afin que ceux qui en sont coupables,
rité attachée à cette même dignité contre se voyant ilétouveris, aient honte de retom-
Isaî. tni,
ceux dont les mœurs sont déréglées. Il est ber dans les mêmes fautes. Dieu dissimula
nécessaire que ceux qui gouvernent se fas- ainsi les crimes de la Judée, mais en lui fai-
sent craindre de ceux qui leur sont soumis; sant connaître qu'il les avait vus. Il y a d'au-
mais c'est quand ils leconnaissent qu'ils ne tres fautes, même toutes visibles, que l'on
craignent pas Dieu. Saint Pierre ne permet doit tolérer à cause de l'indisposition deceux
pas à Corneille de se jeter à ses pieds, parce qui les commettent. Une
que l'on ou-
plaie
qu'il savait qu'il était bon et craignant Dieu. vre avant le temps, devient plus dangereuse
Ix'cez-vous, lui dit-il, ne faites point cela, je ne par l'inllammation que celte incision y cause.
suis (ju'un homme comme vous. Mais, lorsqu'il Un remède appliqué à contre-temps devient
trouve en faute Aaanie et Sapliire, il fait écla- inutile il perd toute sa force et sa vertu. Il
;

ter contre eux sa puissance. Le pasteur doit y a des fautes secrètes qu'il faut tâcher de
aimer son peuple, mais sans mollesse il ; découvrir avec adiesse, en jugeant de ce
doit le reprendre, mais sans aigreur; il doit qui est caché dans le cœur du pécheur par
avoir du zèle, mais sans emportement; il les dehors de sa conduite c'est, suivant le;
Ezecliieli
TIII, S.

doit avoir de la douceur, mais sans trop d'in- langage de l'Écriture, percer la muiaille ou
dulgence. La justice et la clémence doivent co'ur, y faire une brèche pour y découvrir
se trouver tellement unies en lui, qu'il n'y les abominations qui s'y font. 11 y a d'antres
ait rien dans sa fermeté qui ne soit capable fautes que l'on doit corriger avec douceur,
de gagner ceux qu'il conduit, et rien dans sa parce qu'elles sont des fautes ou d'igno-
douceur qui leur puisse faire perdre le res- rance ou de faiblesse. Celles qui sont de
pect qu'ils lui doivent. C'est aux séculiers à malice demandent des corrections rudes et
régler les aû'aires du siècle ; l'occupation du fortes, afin que celui que l'on instruit, ne
pasteur a un objet plus relevé, qui est le sa- connaissant pas encore l'énormité de sou
lut des âmes. 11 peut néanmoins s'engager péché, la comprenne par la véhémence de
quelquefois par charité et par compassion la correction; mais, comme il est ditUcile de
dans les affaires séculières, mais ne jamais tenir un juste milieu, et que la chaleur de
témoigner d'ardeur pour les rechercher, de l'invective porte quelquefois à l'excès, il est
peur que cet empressement ne le fasse des- nécessaire, dans ces occasions, que le pas-
cendre de la contemplation des choses les teur recoure lui-même au remède de la pé-
plus relevées à l'atl'ection des plus basses. Il uitence, pour obtenir de Dieu, par ses lar- Cap. I.

est même certaines occasions oii les pasteurs mes, pardon des fautes que le zèle pour
le

doivent se répandre au dehors pour procu- la défense de ses intérêts lui a occasionnées.

rer à leurs peuples les nécessités de la vie Tous ses devoirs étant marqués en détail
présente ils travaillent alors avec plus de
; dans les Livres saints, il ne saurait trop les
succès à leur avancement; au lieu que les lire et les méditer. »
Trosièm»
peuples auraient quelque droit de se dégoû- «Al'égard des instructions qu'un évoque
7. païUc, pag.
34.
ter de la parole de leur pasteur, s'il négli- doit à son peuple, il est nécessaire qu'il s'ac-
geait le soin qu'il doit avoir de les secourir. commode et se proportionne aux qualités et
6. (I Mais, en s'acquitlant de ses fonctions, aux dispositions de ceux qui l'écoutent; au-
XI. 30
46G HISTOIRE Gi':Ni':i\ALE DES AUTEURS ECCLESIASTIOCES.
Cap. Iicment il arriverait que ce qui profilerait de ne point excéder dans leurs commande-
:uix nus, serait nuisible aux autres au lieu: ments, et de ne point irriter ceux qui leur
qu'en se proportionnant à leurs besoins et à sont soumis ; à ceux-là de prendre garde que
leur portée, chacun trouve dans ses instruc- la vue des fautes de lem-s supérieurs ne les
C4(,. ».
tions ce qui lui est propre. Autre est celle porte à s'élever contre eux avec audace à ;

que l'on doit donner aux hommes, et autre ceux-ci, d'être vigilants et circonspects. Di-
donner aux femmes. On doit
celle qu'il faut tes aux serviteurs d'avoir toujours devant
prescrire aux hommes quelque chose d'as- les yeux la bassesse de leur condition, et
sez grand pour exercer leur vertu, et aux aux maîtres de se souvenir que Dieu ne les
femmes cpielque chose de facile, pour les a point faits d'une autre nature que ceux
gagner à i)ieu par douceur. Une correc-
la qui les servent. Exhortez ceux qui sont sa-
tion sévère remet jeunes gens dans le
les ges selon le siècle 'i oublier ce qu'ils savent,
bon chemin ; un avis donné avec humilité pour apprendre la science des saints; et ceux
aux vieillards les fait rentrer dans le devoir. qui sont simples, à apprendre ce qu'ils ne
Les pau\yes, n'élant que trop affligés de leur savent pas, et h se seivir de leur simplicité,
misère, méritent d"étre consolés; mais les que le monde appelle folie, comme de la

riches étant ordinairement superbes, il faut voie la plus courte pour arriver à la vraie
les rabaisser, en leur donnant de la crainte sagesse. Le seul moyen de réduire des per-
et de la frayeur plus ils s'estiment grands
;
sonnes d'une humeur hautaine et impudente,
et au-dessus des autres h cause des biens est d'user envers elles de réprimandes ai-
passagers qu'ils possèdent, mieux on fait de gres et fortes. Il n'en est pas ainsi de celles
leurparieravec empire et autorité. Aussi saint qui sont retenues et modestes; la moindre
Paul ne dit pas à son disciple Timothée de parole de douceur est capable de les faire
prier les riches de n'être point oigueil- rentrer dans leur devoir. Le défaut des ar-
leux, ni mettre leur confiance dans leurs i-i- rogants est d'être pleins de présomption par
chesses, mais de le leur ordonner. Ce n'est rapport à eux-mêmes
du mépris pour les et

pas qu'il ne faille quelquefois user envers autres ; de ne connaî-


celui des timides est
eux de douceur, comme lorsque l'esprit d'or- tre que leur infirmité ce qui souvent les ,

gueil les possède si fort, qu'ils en devien- jette dans une espèce de désespoir. On peut

nent presque fous. On peut encore, lorsqu'on corriger les premiers en leur montrant qu'ils
veut les reprendre, commencer par quel- ont mal fait ce qu'ils croient avoir bien fait,

ques paraboles éloignées convaincus sou-


;
afin qu'au lieu de pensent la gloire qu'ils

vent par le jugement qu'ils rendent eux-mê- avoir méritée, ils reçoivent une confusion
mes, ils se trouvent engagés à changer de salutaire et remettre les timides dans le
,

conduite c'est ainsi qu'en usa le prophète


: bon chemin en leur représentant quelques-
Nathan ù l'égard de David qu'il était ve-,
unes de leurs bonnes œuvres, afin que celte
nu trouver pour le reprendre de son cri- approbation qu'on leur donne fortifie en eux
me. La tristesse et la joie peuvent venir, ou le désir de bien faire, et qu'ils s'aperçoivent

des objets qui nous frappent, ou de l'hu- qu'on ne leui- parle du mal qu'ils ont com-
Cap. III. meur naturelle. Si l'on a donc i\ instruire des mis, que pour les exhorter à n'en plus com-
gens gais, il faut leur représenter la tristesse mettre.»
profonde que cause la damnation éternelle ;
8. Autres sont les avis adonner aux per-
<(

aux mélancoliques, la joie parfaite que Dieu sonnes impatientes, autres ceux qu'ont h re-
nous promet dans son royaume, et aux uns cevoir les personnes patientes. II faut dire ;\
comme aux autres, que les inclinations nalu- celles-là, qu'en se laissant aller si facilement
rellesn'étantpasfort éloignées des vices, ceux à rimpctuiisiléde leur esprit, il est à crain-
qui sont gais doivent appréhender de tomber dre qu'elles ne s'emportent, même contre
dans la débauche; les mélancoliques, dans la leur gré, dans beaucoup de désordres fâ-
colère. L'instruction qui convient à ceux qui cheux (ju'en s'abandonnant à des mouve-
;

sont dans la dépendance, ne convient pas ments violents qui les mettent comme hors
toujours h ceux qui sont dans les charges et d'elles -mêmes, il est difficile qu'elles con-
les dij^nilés. Recommandez aux premiers naissent ensuite le mal qu'elles ont fait pen-
une soumission hnuililc, une obéissance en- dant leurs emportements; que l'impatience
tière, le tout en vue du Sri.LMicur; cl aux se- l'ail perdre la charité, qui est la mère des ver-

conds, d'user modérément de leur autorité, tus ; qu'elle porte à l'arrogance ; enfin, que
fvii'" sif:f.i.E.l CHAPITRE XLIX. — SAINT (JIII'GOIRE LE GRAND, PAPE. /.fi7

la \'(ii'ité dit aux iSlus : Vous posséderez vos âmes terre on ne peut liop en souiïrir pour ac-
,

dans la patience. Les avis c^ donner aux per- quérir un héritage qui ne se perdra jamais;
sonnes patientes sont, qu'en souHViuit exté- que les peines et les ;iinictious conlrihuenl
rieurenieiil le mal ({u'oii leur fait, elles doi- à la sauté de l'âme en ce qu'elles la l'inil
,

vent prendre jfarde d'en couc(!voir du res- leiitrer et que Jc-Hus-Cliiist,


en elle-iru'-me ;

scnlinieut dans leur cceur; qu'elles doivent qui lave nos dans l'eau du baptême,
pi'clii's

s'applicpier h aimer ceux qu'elles sont obli- a soult'cri de plus grandes alflictions telles ,

gt5cs de supjiorler et {MouHer toute don-


, (pie les calomnies les outrages et la mort
, ,

leur qui pourrait les exciter ;\ se venger des même lui qui donne la vie aux morts. Il y
,
^"p- "'"

injures qu'elles ont reçues. Les envieux doi- a encore de la différence dans l'instruction
vent être traités dilleremment de ceux qui que l'on doit donner à ceux que la crainte des
veulent du bien k tout le monde. 11 faut dire châtiments engage à bien vivre, et celle qui
à ceux-ci, qu'il ne leur suffit pas de louer convient à cenx([ue leur endurcissement rend
les actions vci'tiicuses des autres, ([u'ils doi- incorrigihles. 11 faut remontrera ceux-là que,
vent aussi les imiter; et h ceux-là, qu'il n'y tandis qu'ils ne seront mus que par la crain-
arien de |)lus mallieureux au monde, qu'un te, ils ne goûteront point la douceur de la

homme qui, s'allliyeant tlu boulicur daulrui, vi'aie liberté que nous devons faire le lii(ni
;

devient plus méchant par la douleur qu'il pour lui-même, et que l'on se rend coupa-
en conçoit ;
que
par l'envie que la mort
c'est ble devant Dieu par le seul désir de comniel-
est monde ; que ce vice détruit
entrée dans le tre le péché. Pour ce qui est des endurcis,
tout ce qu'il y a de bon et de louable dans il faut les reprendre avec d'autant plus de
lin homme ce qui a lait dire au Sage, que
; force, que leur endurcissement les a rendus
quand le cœur est sain, la chair est pleine de plus insensibles et leur témoigner
, avec ,

santé et de vie, mais que V envie fait pourrir quelque sorte de mépris qu'on désespère ,

Cap. XI,
jusqu'aux os. A l'égard des personnes sim- de leur salut et toutefois leur remettre soi-
;

ples et naïves, on doit les avertir que, com- gneusement devant les yeux les sentences
me elles évitent utilement de tiomper les les plus sévères que Dieu a prononcées dans
autres par des mensonges, elles doiveut aussi ses saintes Écritures, afin que la considéra-
avoir soin de ne dire la vérité que lorsqu'il tion des peines éternelles les ramène à la

est utile de la dire, et ajouter à la vertu de connaissance d'eux-mêmes. La discrétion «iv.

sincérité celle de la prudence, parce qu'il doit régler nos paroles, mais nous ne devons
peut arriver que la vérité qu'elles diiaient point nous en interdire l'usage; parce qu'il
<i contre -temps, soit préjudiciable à quel- y a un temps de se taire, et un de parler :

qu'un. Il faut r( présenter aux personnes c'est donc un défaut d'être trop tacituiue ,

doubles, que la crainte qu'elles ont d'être et c'en est un autre d'être trop grand par-
découvertes fait qu'elles cherchent toujours leur; il faut garder un milieu. Le sage se lui- r c:cs.s«,

de mauvaises excuses pour se défendre ;


jxi jusqu'à ce qu'il soit temps de parler , c'cfI-

etiii,:'^.
que, suivant l'Écriture, on est d'autant plus à-dirc jusqu'à ce qu'il voie une occasion ru'i
r)

en repos et en sûreté, qtt'on est plus sincère dans il mieux de parler pour rendre service
sera
tout ce que l'oufait, et que c'est avec lésâmes au prochain, que de garder le silence. Être
simples que Dieu prend plaisir à s'entretenir. » trop réservé à se plaindre dans les disgrâ-
U. « On manière à ceux
doit parler d'une ces, c'est s'exposer à ressentir plus vive-
qui se portent bien, et d'une autre à ceux ment la douleur dans son cœur. Nous som-
qui sont malades. Il faut porter les premiers mes obligés de témoigner à ceux qui nous
à faire servir la santé de leur corps au salut font du que nous avons de nous
tort, le sujet
de leur âme par la pratique des bonnes œu- plaindre d'eux ; empêchera
celte plainte les
vres et consoler les seconds, en leur disant
; de nous nuire à l'avenir, et diminuera la vi-
qu'ils ont d'autant plus de sujet de se regar- vacité de notre affliction. Il faut remontrer
der comme les enfants de Dieu, qu'il les châ- aux grands parleui's les désordres oii ils sont
tie et les afiligeidavantage que s'il n'était pas ;
capables de tomber en se laissant aller à la
dans la disposition de leur donner l'héritage multiplicité des paroles, le compte qu'ils ren-
du ciel après les avoir châtiés, il ne leur en- dront au jour du jugement de leurs paro-
, ,

verrait pas des atilictions pour les instrui- les inutiles, c'est-à-dire, proférées sans une
re; que si les enfants du siècle soutl'rent tant juste nécessité ou sans qu'ils s'y proposent
,

de travaux et de peines pour les biens de la aucune véritable utilité. »


,,

•4C8 IIISTUIIIK GKNi:ilALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


Tip. Vf rt
10. Saint Grégoire exairinc ensuite de paix intérieure qui doit durer éternellement ;
suu.
quelle manière il faut instruire ceux qui sont qu'ilne faut pas trop s'y attacher, de crainte
lents à faire le bien, et ceux qui le font avec que cet amour ne rende l'Ame criminelle
précipitation; ceux qui sont doux, et ceux parce que plus on tire de satisfaction des
qui sont sujets à la colère les humbles et ; , choses présentes moins on a d'ardeur pour
,

les orgueilleux; ceux qui sont arrêtés h leur les éternelles, qui sont plus éloignées. — Pour c.,.

sens, et ceux qui sont changeants et légers; ceux qui sèment des discordes, et pour ceux
les personues sobres et celles qui sont su-
,
qui sont pacifiques; —
pourceuxqui n'ont pas
jettes latrourmaudise ceux qui font vo-
:i ;
l'intelligence des Livres saints, et pour ceux
lontiers l'aumône, et ceux qui ravissent le qui la possèdent, mais n'en parlent pas avec
bien d'autrui. «La règle, dans la distribution assezde respect et de soumission; pour ceux —
des aumônes est de donner h. ceux qui ont
, qui, ayant le talent d'annoncer aux autres la
besoin, et à proportion de leur besoin de ; parole de Dieu, n'osent le faire par un excès
ne point affliger l'esprit de ceux qui deman- d'humilité, et pour ceux qui entreprennent
dent, eif différant trop de leur donner; de de la prêcher sans en être capables. Il faut
ne point rechercher une louange passagère faire comprendre aux premiers, qu'en refu-
de la part de ceux i\ qui l'on donne ou qui , sant de nourrir les peuples atTamés de la pa-
sont présents de savoir tellement modérer
; role de Dieu ils font autant de mal que si
,

ses aumônçs, qu'on ne se mette pas soi-mê- ayant de l'argent dans leurs cotfres, du blé
me dans l'occasion de tomber dans l'impa- dans leurs greniers, ils négligeaient d'en as-
tience, en manquant du nécessaire pour avoir sister les peuples dans une pressante fami-
trop donné de racheter tellement ses iui-
; ne que celui à qui le père de famille avait
;

qiiités par l'aumône qu'on n'en commette


,
confié un talent poiu" le faire valoir en fut ,

pas de nouvelles, parce qu'autrement ce se- privé pour n'en avoir pas fait usage qu'Isaïe, ;

rait traiter avec Dieu comme si sa justice s'étant (ù dans son ministère en fut repris ,

était vénale, et s'imaginer qu'eu lui donnant fortement. On doit remontrer aux autres,
de l'argent après l'avoir olfensé ou peut , qu'en s'ingérant avant le temps dans un
acheter de lui l'impunité de ses crimes. La exercice qui passe leurs forces, ils se ren-
manière la plus utile de corriger ceux qui dent incapables de le remplir aussi digne-
ravissent le bien d'autrui, est de leur fiiirc ment qu'ils auraient pu faire , s'ils avaient
compicndre combien cette vie est courte et attendu un temps plus propre , et qu'ils se
passagère, et de leur rapporter les exemples fussent l'endus plus capables.»
de ceux qui après avoir mis tout en œus're
, 11. « n y en a qui réussissent dans la re-
pour s'enrichir en ce monde, n'ont pu y jouir cherche lies biens de ce monde d'antres ,

longtemps de leurs richesses, n Ce Père veut qui , n'y n'ussissanl pas , se laissent abattre
qu'on fasse sentir h ceux qui donnent de par les disgrâces. On doit avertir ceux qui
leur bien, et ne cessent toutefois de prendre prospèrent, de ne pas s'attacher A des biens
celui d'autrui, qu'il y a bien de la dillorence qui i)érisscnt et de ne pas changer les se-
,

entre faire des œuvres de mis(;ricorde pour cours que Dieu leur donne pour arriver au
racheter ses péchés et commettre des pé-
, ciel, en des obstacles qui les empêcheraient
chés pour faire ensuite des œuvres de misé- d'y parvenir; et ceux qui ne prospèrent pas,
ricorde que des œuvres faites de la sorte
;
de considérer que Dieu, en ne les abandon-
ne peuvent être appelées des œuvres de mi- nant pas ;\ leiu's désirs, les ti'aite avec la
séricorde, parce que la racine amère et em- même bonté, qu'un médecin fait un malade
poisonnée de la violence et de la rapine ne à qui il refuse bien des choses qu'il croit
peut produire le doux fruit de la charité. contraires h sa santé. L'avis à donner aux
Suivent les instructions pour ceux qui sont gens mariés est de se rendre tellement les
,

querelleurs, et pour ceux qui sont paisibles, devoirs mutuels, qu'en cherchant à se plaire
«n faut dire à ceux-li\ que, tant qu'ils ne se- l'un l'autre, ils songent sérieusement à ne
il

ront point unis par la charité avec le pro- point déplaire ;\ Dieu de supporter avec
;

cliiiin, ils ne pourront faiie aucune action ,


douceur les mécontentements et les déplai-
ni ofïriraucun sacrifice à Dieu qui lui soit , sirs qu'ils reçoivent réciproquement; de s'en-
agréable; et à ceux-ci qu'il y a une ditlV'-
,
tr'aider à se sauver et de considérer que ,
,

rence entre la paix de la terre et celle du n'ayant été unis ensemble fpie pour avoir
ciel; que celle-là n'est qu'un vestige de cette des enfants, ils ne doivent point altérer, par
[vir siKCLK.J CIIAPITai'] XLIX.— SAINT GRlir.OIIlli; LE GRAND, l'APE. 401}

la rcclierche du la voluplc' , la sainteté de sent, do ne pas les jeter dans l'abattement


l'iiiiiou conjugale. Saint l'aul on disant : par une trop givinde tei-nsur car souvent :

l'oKf ivitur la fornication, qiw cluique homme Dieu plein de miséricorde remet d'autant
, ,

vive avec sa femme , et chaque femme avec son plus facilement à l'àme les péchés de pen-
tnan\ n'a pas tant donnii une règle pour des sées qu'il n'a pas permis qu'elle les mit à
,

personnes saines, ([ne i)roposé des remèdes à exécution; et l'àme se dégage aussi d'autant
des malades; qu'il n'a pas l'ail un cnmiuau- plus aisément de ces sortes de péchés, qu'elle
dement ;\ ceux qui sont debout mais ollerl , s'y trouve moins fortement engagée, puis-
une litière ceux qui tombent, pour les em-
;\ qu'elle n'en est pas venue jusqu'à les ac-
pêcher de se briser contre terre. En ajou- complir. 11 arrive quelquefois à des pécheurs
tant Ce que Je vous dis c'est par imlulgenn
: , ,
de pleurer leurs péchés sans les quitter et ,

il insinue qu'il y a faute mais faute qui se , à d'autres de les quitter sans les pleurer.
remet d'autant plus aisément, qu'elle con- Ceux-là sont comparés dans l'Écriture à des
siste moins à faire ce qui serait absolument chiens qui, après avoir vomi ce qui les char-
défendu, (ju'A ne se modérer pas assez dans geait au dedans retournent à ce qu'ils ont
,

l'usage de ce qui est permis. Ceux qui ue vomi et se gorgeut de nouveau. Ceux-ci,
, 1. Idr. lir.

sont point engagés dans le mariage doivent quoique ne péchant plus ne sont pas puri- ,

se rendre d'autant [ilus fidèles à suivre la loi hés des péchés qu'ils ont commis s'ils ne ,

de Dieu ,
qu'ils sont plus dégagés des soins les pleurent d'où vient que saint Pierre di-
:

des choses du monde. S'ils se trouvent ten- sait aux persoimes efl'rayéesde leurs anciens

tés par la chair avec danger de se perdre ,


désordres : Fuites pénitence , et que chacun de
ils ont le port du mariage où ils peuvent se vous soit baptisé. Avant de leur parler du bap-
retirer car ils n'otl'ensent pas Dieu en se
: tême, il leur parle des larmes de la péniten-
mariant, pourvu qu'ils n'aient' pas fait vœu ce, pour leur apprendre qu'ils devaient se
d'entrer dans un état plus relevé. La fuite laver dans les eaux de leui's larmes, pour
de l'occasion est le remède qu'il faut pres- achever ensuite de se purilier dans celles du
crire ;\ ceux qui sont tombés dans des pé- baplème. Quant à ceux qui juslifieut leurs Cap.

chés de la chair. On doit représenter à ceux désordres il faut leur faire entendre qu'ils
,

qui ont vécu sans y tomber les récompen- , pèchent souvent plus par l'approbation qu'ils
ses que Dieu leur réserve, alin qu'eu les en- donnent à leurs mauvaises actions que par ,

visageant souvent, ils surmontent plus aisé- leurs actions mêmes, puisque, en les com-
Cap. XXIX. ment les ditlicultés des tentations. Ceux qui mettant il n'y a qu'eux qui font le mal au
, ,

gémissent pour des péchés d'actions, doivent lieu qu'en les louant, ils mettent en danger

faire en sorte que rien ne manque à leur tous ceux qui les écoutent d'en commettre
pénitence, puisque rien n'a manqué à leur de semblables. »
péché. Il y a trois choses qui contribuent à la 12. Le reste des instiuclions de s.iint Gré-

consommation du péché savoir la sugges- ,


goire regarde ceux qui tombent dans le pé-
tion la délectation et le consentement. La
,
ché, ou par surprise, ou avec délibération ;

première vient de notre ennemi la seconde , ceux qui tombent dans de petites fautes, et
se passe dans notre chair, et la troisième ceux qui, tâchant d'éviter les plus petites,
dans notre esprit. L'ennemi qui tâche tou- ,
tombent quelquefois dans de grandes ceux ;

jours de nous surprendie nous suggère le , qui ne veulent pas commencer de faire le
mal ;la chair se laisse aller au plaisir qu'elle bien, et ceux qui n'y persévèrent pas ceux ;

ressent ; l'esprit emporté par ce plaisir y


,
,
qui font le mal en secret elle bien en public,
donne son consentement. Ceux qui pleurent eiceux qui, se cachant pour faire lebien,|don-
les péchés de pensées doivent examiner , nenl occasion d'avoir mauvaise opinion d'eux
dans lequel de ces trois degrés de pécbés ils pur leur conduite extérieure. Le saint Pape
sont tombés ahn qu'ayant reconnu la na-
,
croit qu'il est souvent plus dangereux de tom-
ture de leur chute versent autant de
, ils ber dans une petite faute, que d'en commettre
larmes pour s'en relever. 11
qu'il leur faut une plus grande la raison qu'il en donne est,
;

est aussi du devoir de ceux qui les instrui- que l'on est plus facilement convaincu du mal
qu'ily a dans une grande f;:ute, et qu'ainsi
on s'en corrige plus aisément, au lieu que,
Sine culpa ad conjugium veiiiiml, si lamen
'

necdum mcUora voierunl. circ^., Pastor.3. part.,


ue reconnaissant presque point de mal dans
cap. xivn. les fautes légères, on continue à les com-
v

I
470 HISTOIRE GKNKRALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
avecd'aulanl plus de danper poiirle
Illettré, et crainte que l'impureté, qui est une suite né-
salut, petites fautes con-
que riiabilude aux cessaire de sa gourmandise, ne lui donne la
duit à n'avoir pas uièuie dlioireurdes gran- mort. encore d'une grande importance cp.
Il est »i-

Cif. i«T. des. il dit que, lorsqu'on a assez de vertu à un pasteur de ne rien dire dans ses instruc-
pour être au-dessus du désir des louanges, tions qui soit au-dessus de la portée de ceux
on commet une injustice à l'égard du pro- qui l'écoutent, de crainte que leur esprit,
chain, en cacliant à ses yeux une bonne œu- étant trop fortement appliqué, ne se lasse et -

vre dont il aiuait pu être édifié ;


qu'on en ne se dégoûte. Le pasicnr doit donc cacher
commet une autre en ne cacliant pas aux yeux les choses trop relevées, lorsqu'il parle devant
des hommes, autant qu'on le peut, ce qui plusieurs, et ne les découvrir qu'a un petit
peut être mal pris ou mal expliqué, parce nombre de personnes.»
qu'on donne occasion à ceux qui sont sujets 1-4. « Il doit surtout veiller avec grand soin <i"""*

a interpréter les choses en mal, de s'en au- sur lui-même, de crainte qu'après avoir ins- «°"-

toriser comme d'un exemple pour tomber truit et édifié les autres par ses paroles et
dans p^ché même.
le ses actions, il n'en prenne ?ujet de s'élever.
13. Après toutes ces instructions particu- Au premier mouvement df complaisance qu'il
lières, saint Grégoire en donne de générales, éprouve, il doit s'appliquer à considérer ses
qui regardent piincipalement les pasteurs. faiblesses, et à regarder non le bien qu'il a
'1 Lorsqu'ils ont à louer les vertus auxquelles fait, mais celui qu'il a négligé de faire, afin
ils veulent porter leurs auditeurs, ils doivent que son cceur étant comme abattu parle sou-
prendi'e garde à ne pas leur donner occasion venir de ses faiblesses, il se fortifie et s'affer-
de tomber dans opposés ainsi, eu
les vices : misse davantage dans la vertu aux yeux de
exhortant les avares à donner largement de Dieu, qui seul inspire les sentiments d'une
lem's biens, ils ne doivent point autoriser la humilité véritable.»
profusion excessive des prodigues et d'un ;

autre côté, doivent exciter avec tant d'a-


ils
V.
dresse les prodigues à user d'économie, que Des Dialogues de Saint Grégoire.
les avares n'en deviennent pas plus attachés
à leurs trésors. 11 en est de même de toutes 1. Une faut que lire ces Dialogues pour Salrl Gri-
poltx fft
leur de
les autres vertus qui ont des vices contraires. se convaincre qu'on ne peut les attribuer à
Une autre maxime est que, lorsqu'une âme d'antres qu'A saint Grégoire. On y voit en
l'st travaillée en même
temps de deux vices effet, que celui qui les a composés, était'
dont l'un est moins considérable que l'autre, moine, dans le monastère qu'il avait fondé;
il faut alors s'appliquer à guérir celui des qu'il en avait été ' supérieur, envoyé à' Cons-
deux qui est le plus près de donner la mort; tautinople pour y faire les fonctions de nonce
et si on ne peut le gui'-rir sans empêcher apostolique, puis élevé sur le ' Saint-Siège,
l'autre de sefortificr,ondoitlaissersefoitili('r et que dans ce poste même il avait fait au
l'un, pour remédier plus facilement à l'autre. peuple romain diverses ' homélies sur les
Un homme, en commettant des excès dans le Évangiles. Si tous ces traits ne conviennent
manger, est vivement pressé et presque vain- point à ce saint Pape, je ne sais qui ils pour- .'i

cu par l'impureté. Appréhendant les suites raient convenir. Ajoutons qu'il rapporte plu-
de ce combat, il retranche de sa nourriture; sieurs événements miraculeux dans ces ' Dia-
mais son abstinence lui devient im sujet de logues, qu'il dit avoir déjà rapportés dans ses'
vaine gloire. Il est visible qu'il y a en cet homélies que ses frères, c'est-à-dire, les
;

homme un vice qu'on ne saurait détruire religieux qui demeuraient auprès de lui, le
sans en laisser se fortifier un autre. Que faire? prièrent "d'écrire les miracles des Pères, ou
11 faut soulfrir que les mouvements d'orgueil des personnes illustres en piété qui avaient
se fortifient en lui ci l'occasion de son abi^ti- llcuri de son temps en Italie, et que ce fut

ncncc, puisqu'ils ne lui ùtcnt pas la vie, de pour les satisfaire qu'il écrivit à Maximien,

'
In prologo Ditilofj., et lit), lit, cnp. xxxiii, 1^
Litl. IV. CTp. XIV. XV, XVI, XIX, XXVII.
lit). IV, (-np. XXI, XXXVIIl, XLVII, l,v. " l.il). 1 Ditilog., cnp. vu ; lih. III, cap. vi.
'
' Ilialotj., lit). IV, (Nij). Lv. l.il). IV, rap XIV, llom. 37, 'M.
' IJuilog., lit). 111, lap. xxxvi. " Lil.. lit, Epi-st. 51.
* Lib. IV, cap. lvh.
y

[vu- SIÈCLE.] GIIAPIÏHt; Xl.lX. —SAINT Gni'lCOmK \.K (JUAxM), PAPK. i7l

évèqiie de Syracuse, île lui maudcr au plus contemporain de Grégoire I", en fait usage
de plusieurs saints porson-
tôt ce ([u'il savait dans ses Recueils, el que, suivant le témoi-
uiges, nomiuéuient de l'abbé Xuniiose. Il est gnage de ^ Paul Diacre, ils furiMit envoyés a
parle de ce Nounose dans le premier livre ' Théodelinde, reine des Lombards, par saint
dos Dialogues, et ce qui y on est dit est cons- Grégoire même. On objecte encore (pi'il n'est
fatt' parle téuioi;^'uai;ode rcvè([uc RIaxiniien. pas vraisemblable, ([u'un homme d'un aussi
Peut-on donc rcvoquer eu doute que ce li- grand mérite qu(! saint Grégoire, ait rempli
vre soit de saint Grégoire îPatérius, qui nous ses écrits de tant de visions et de miracles.
a laissé un recueil de passages tirés des écrits Sur ce pied -là, il faudra donc aussi rejeter
do ce Saint dont il avait été secrétaire, en' les quarante Homélies sur les lîvangiles ,

cite quelques-uns empruntés des Dialogues. puisqu'il y en a onze où il rapporte des évé-
Ils lui sont attribués par saint Ildéphonse', nements miraculeux, qu'il a pour la plupart
archevêque de Tolède, par Honorius d'Au- répétés dans ses Dialogues; il faudra reje-
tun, par le vénérable Bède, pai' Paul et Jean ter * plusieurs de ses lettres, et môme ses

Diacre, qui ont l'un et l'autre écrit la vie de Morales ' sur Job, où il parle souvent de mi-
saint Grégoire. Pliotius, qui les cite ' sous racles opérés par les petites clefs qui avaient
le titre de Viesdcn Pères d'Italie, dit qu'ils con- touché au tombeau de saint Pierre, et de
tiennent de bonnes instructions, et que les ceux que les religieux, qu'il avait envoyés
Grecs se trouvant privés de la lecture de ces en Angleterre, y avaient faits il faudra aussi ;

Dialogues, parce qu'ils n'entendaient pas le mettre au rang des apocryphes quantité d'é-
latin, le pape Zacharie,qui occupait le Saint- crits de TerluUien de saint Gyprien
, de ,

Siège eu 7 il, les traduisit en grec. Zacharie saint Athanase, de saint Hilaire, de saint
avait succédé à Grégoire III, et celui-ci à Gré- Sévère-Sulpice, et un grand nombre de Vies
goire il mort en 731 mais Photius les dis-
; de saints et d'Actes de martyrs, comme
tingue l'un et l'autre de l'auteur des Dialo- ceux de sainte Perpétue et de sainte Féli-
gues, en disant qu'il les avait écrits cent soi- cité, de saint Fructueux, et les Histoires d'É-

xante-cinq ans avant que Zacbarie fùtPape. vagre, de Procope, d'Agatbias, puisque dans
Son calcul toutefois n'est pas exact, puisque tons ces monuments il est parlé de visions
saint Grégoire n'a pu écrire ses Dialogues et de miracles : néanmoins on n'a jamais
plus tôt qu'en 593; ce qui ne ferait que cent contesté à Tertullien les livres de l'Idolâtrie
cinquante-huit ans jusqu'à la mort de Zacha- et des Spectacles, ni à saint Gyprien ceux
rie, arrivée en 732. Le pape Adrien, qui rem- de la Mortalité et des Tombés dans la per-
plit le siège pontitîcal vingt ans après Zacha- sécution, ni à saint Sulpice- Sévère ses Dia-
rie, attribue les Dialogues au même Gré- logues, ni à saint Athanase la Vie de saint
goire qui a écrit sur Job, qu'il distingue de Antoine, ni l'authenticité des Actes de sainte
Grégoire en donnant^ a celui-ci
II, le double Perpétue. Combien de visions et de faits mi-
titre de second et déjeune. raculeux dans les livres de l'Ancien et du
2. On objecte que ' Cedrène donne les Nouveau Testament ? On convient qu'ils sont
Dialogues à Grégoire II et que Georges , attestés par des écrivains inspirés de Dieu,
Scholarius a pensé de même mais Cedrène ; et que dès lors nous ne pouvons refuser d'y
n'ayant écrit que dans le xii° siècle, et Scho- ajouter foi mais, à considérer les faits en
;

larius daus le w" , leur témoignage n'est eux-mêmes, la plupart ont moins de vrai-
point recevable contre celui des écrivains semblance que ceux que rapporte saint Gré-
des vii% VIII' et ix" siècles, qui, écrivant la goire. Y en a-t-il dans le colloque d'Eve avec
plupart en Occident, étaient plus au fait de le sorpen;, dans le changement de la femme
ce qui s'y était passé que les Grecs. D'ail- de Lolh en une statue de sel, dans les dis-
leurs, ces Dialogues étaient connus avant le cours qu'on fait tenir à l'ânesse de Balaam?
pontificat de Grégoire 11, puisque Patérius, Jésus-Christ n'a-t-il pas dit Celui qui croit :

' Cap. \n.~- Patérius in


c3.-ç.iJosue; in Malth. 5 Tom. VU Concil, pag. 922, 949, 938, 956, 947.
cap. Lxsxu in Joan., cap. xxxiv.
;
6 Cedren., ton). I, pag. 4S6 Scholarius, Exposit.
;

' lldofous. De Scrip. Eccles., cap. i; Honorius, pro Conc. Florentino, cap. v, section. 16.
lib. 111 De Siripl. Ecctcs., cap. xxxu; Beda, lib. Il J Paul Diac, lih. IV Uislor. Longobard. ,e.a]>.\.

Histor., cap. i. 8 Lilj. XI, Episl. 28.


» Pliotius, Cod. 252. 9 Lib. X.WIl Ejcposil. in Job., cap. vi.
, ,

472 HISTOTRE GÉNÉRALE DES AUTCUllS ECCLESIASTIQUES.


en moi fera les œuvres que je fais, et en fera les mieux prouvés, après avoir pris toutes
encore de plus grandes? Lo temps de ces pro- les précautions nécessaires pour s'en assu-
diges est celui où il s'agissait de convertir A rer. 11 en avait vu lui-même quelques-uns ;

la foi des barl)ares, des idolâtres, des hcié- il ou de saints évo-


avait appris les autres,
liques. Im diversité des Itinyues est, dit l'Apô- ques, ou (le saints moines, ou do supérieurs
lic, un signe, 7wn pour les fidf-ies, mais jjour de monastères, ou de gens de condition il ;

Sur la lin du V siècle, et pen-


les infdèles. n'en raconte point sur des bruits populaires.
dant une bonne partie du vi", l'Ilalie la , Aussitôt qu'il eut achevé cet ouvrage, il en
France, l'Espagrne, et plusieurs autres pro- fit présent il la reine ' Théodelinde qui ,

vinces d'Occident, avaient cté en proie aux comme on le ci'oit, s'en servit pour la con-
Barbares, aux Gotlis, aux Ostroi^otlis, aux version des Lombards ses sujets, dont les
Visigotlis, aux Lombards, tous ennemis de uns étaient ariens, les autres païens. La plu-
la religion catbolique. Elles étaient encore part des miracles rapportés dans ces Dialo-
la plupart infectées de restes d'idolàlrie
;
gues avaient été opc'rés ou sur ceux de cette
l'AngleleïTe ne connaissait point d'autre culte nation, ou eu leur présence en sorte qu'il ;

que celui des idoles. Dieu, pour la consola- était aisé de savoir parmi les Lombards si

lion de son Église, suscita dans ces deux ces faits miraculeux étaient véritables puis- ;

siècles - 1;\ évêques et d'autres


de saints qu'ils ne pouvaient être fort anciens, ces

saints, qui se rendirent célèbres par leurs peuples n'étant entrés en Italie que depuis
vertus et leurs miracles. Saint Grégoire vingt-cinq ù trente ans. L fallait donc que
pressé par les personnes qu'il avait auprès saint Grégoire les crût de notoriété publique
tout ce qu'il put apprendre
di^ lui, lecueillil pour les leur raconter.
do leurs belles aciions, pour en conserver '5. Rien ne marque mieux l'applaudisse- Ce* Diolti-
gOW ï^n' l'ICB

la mémoire à la postérité. ment avec lequel ces Dialogues furent re- reçus
putlie.
*i'in.

3. Mais il avait surtout en vue de confir- çus, que les ditlérentes versions que l'on en
mer la foi des faibles sur l'iinmoilalité de fit. Nous ne répéterons point ce que nous

l'âme et sur la résurrection des corps, dont' avons dit de celle du pape Zacharie avant
plusieurs, même parmi les catholiques, dou- l'an 752. Sa version, qui était grecque, fut
taient. Il avoue avec beaucoup d'humilité, traduite en arabe avant l'an 800; on la con-
qu'il avait lui-même eu des doutes autrefois serve, écrite sur du parchemin, parmi les
sur ce sujet. Or, rien n'était plus propre â manuscrits d'Orient dans la Ribliothèque du
appuyer la foi de l'immorlalité de l'âme et Roi. L'auteur de cette traduction était un
de la résurrection des corps, que les miracles religieux nommé
Antoine , qui demeurait
et les prodiges opérés aux tombeaux des dans le monastère de Saint-Siméon. Au )X*
saints. Saint Augustin avait eniployi' le mémo siècle, Alfred le Grand, roi d'Angleterre, fit

moyen dans ses livres ' de la Cité de Dieu, traduire les mêmes Dialogues, avec le Pas-
où, après avoir japporlé grand nombre de toral de saint Grégoire, en son langage
guérisons opérées par les reliques de saint saxon, par Verfroy, évoque de Worchester.
l'Uiennc et des autres saints, il conclut que Celle version se trouve â Cambridge dans le
ces miracles rendent témf)ignage â la foi, collège de Saint -Benoît. On lit dans l'His-
qui enseigne la résurrection des morts. Ils toire de Charles VI, que ' Jean de France,
étaient aussi très-utiles pour la conversion duc do Berry, avait aclielé, le 9 juillet 1400,
des païens, qui, n'élant alors pour la iiliiparl, les Dialogues de saint Grégoire niiscn fran-
surtout en Italie, que des serfs rustiques on çais, pour le prix de quinze écus d'or, pri-
des soldats barbares, se laissaient persua- sés soixante sous parisis.
der plutôt par des faits merveilleux que ,
G. Saint Grégoire dit dans le quatrième* Il, fnreil

par des raisonnements mélapliysi(]uos. livre, qu'il y avait trois ans et plus qu'un I.9J k <ioel-
; :

le ocfflMiin

nie1c« que 4. An reste, saint (îrégoire ne rapiinile l'ail qu'il racfinle pendant l'hor-
était arrivé
S- GrV'goire jr
oUflm. dans ses Dialogues qiu' les faits (pi'il croyait rible ppsie qui ravagea Rome eu 5'.K); ainsi

Miilli cnim de resurrectionc duliilantes, sicnt


' » Aupust., lili. 1! ne Cirit. I)ei, r.ip. ix.
el nos aliquando ftiimns. Hrig., lt«m. LMii» Evan- ' I';iiiliis Iti.Tc, lili. IV tlisl. loiigobard., cnp. y.
gi'lia. Quia mullua iiitia sanclœ Ecclesiœ gre- ' UW\. lie f.liailes VI, tmii. I, piif.'. 82.
inium ro>i<litut(>s de vila nninue posl mnrlem ' Iii (d ijtinrjve uiorlnlitdlr qtiiv nnlt Iricnninm
carnis pcrpendo dubilare. UU. III Dialog., ea\\. txunc urhfiii rrhcminli^siiiiu clade vaslaïU. Lit.
xxxvui. IV, cnj). ,\.\vi.

[Vir SIKCLE ] CIIAPITHE XUX. — SAINT GRKGOIRE LE P.HANn, PAPE. 473


donc il l'écrivait dans la quatiit-mc année d'une vertu extraordinaire, t\u moins qui
lie c'cst-!\-dirfi en 593. 11 ex-
son pontificat, aient fait des miracles. » Saint (iri'goire lui
dans les ternies suivants l'occasion
|ili([U(> '
dit alors : » Le jour ne me sullirait pas, si
(ie cet ouvrage « lin jour, me trouvant ac-
; je voidais raconter ce que j'en sais, soit par
cablé par riui[)orlinulé de iiuol(iues gens du moi-même, soit par des témoins d'une pro-
monde, qui exigent de nous en leurs allaires bité et d'une fidélité reconnues. » Pierre le

ce (]ue nous ne leur devons poiut, je me re- pria de raconter quelques-uns de ces
lui

tirai dans un lieu écarté, on je pusse consi- faits, pour l'édilication de ceux qui sont plus

dérer librement tout ce qni me déplaisait touchés des exemples que de la doctrine.
dans mes occnpations. » Ce lieu de retraite * Saint Grégoire y consentit, et ajouta « Pour :

était son monastère de Saint-André. II con- ôter tout sujet de doute, je marquerai â cha-
tinue Comme j'y étais assis depuis quel-
: <i que fait ceux de qui je l'ai appris en quel- ;

que temps et dans un morne silence, mon ques-uns je rapporterai leurs propres paro-
cher le .diacre Pierre, qui m'était uni par
fils les, en d'autres je me contenterai d'en ren-
le lien de l'amitié depuis sa première jeu- dre le sens, parce que leur langage serait
i;esse, et s'était fait le compagnon de mes trop ' rustique, d

études sur l'Ecriture sainte, se présenta à L'ouvrage est divisé en quatre livres,
7. Ll^rc rre*
nier dr^ Ûii
moi '. Me voyant dans l'affliction, il me de- dans lesquels saint Grégoire continue son liipu,". \:t:.
1T,(|, lo:ri. II.
manda si j'en avais ï|uelqne nouveau sujet. dialogue entre lui et Pierre. Il commence le
Je lui répondis : Ma
douleur est vieille par premier par la vie et les miracles de saint
l'habitude que j'en formée, et nouvelle en ai Honorât, abbé d'un monastère qu'il avait
ce qu'elle augmente tous les jours. Je me établi à Fondi, qui est aujourd'Jmi une ville
souviens de ce que mou âme était dans le épiscopale de la Campanie en Italie. Il avait Cai'.

monastère, au-dessus de toutes les choses sous sa conduite environ deux cents moines,
jiérissables, uniquement occupée des biens auxquels il servait de modèle dans la prati-
célestes, sortant de la prison de son corps par que de toutes les vertus religieuses. IJ mou-
la contemplation, désirant la mort que la ,
rut vers l'an 530. — Saint Libertin, l'un de
plupart regardent comme un supplice, et'l'ai- ses disciples, et prévôt du même monastère
mant comme le moment de son entrée dans du temps de Totila, roi des Goths, se rendit
la vie et de la récompense de son travail. célèbre par sa patience. La vertu d'un —
Maintenant, ù l'occasion de ma charge pas- moine de ce même établissement, à qui était
torale, je suis chargé d'affaires séculières, confié le soin du jardin, était si grande, que
et après m'être répandu au dehors par con- les serpents lui obéissaient. — Saint Équice
descendance, je reviens plus faible en mon fut Père de plusieurs monastères dans Va- la
intérieur. Le poids de mes soufl'rances aug- lérie, aujourd'hui l'Abbruzze ultérieure. Se
mente par le souvenir de ce que j'ai perdu; trouvant fatigué dans sa jeunesse de rudes
mais à peine m'en souvienl-il car, à force : tentations de la chair, il s'appliqua à l'orai-
de déchoir, l'âme en vient jusqu'à oublier son avec plus d'assiduité. Ses prières furent
le bien qii'elle pratiquait auparavant. Pour exaucées, et depuis il ne ressentit plus au-
surcroît de douleur, je me souviens de la cune tentation semblable. Outre le soin des
vie de quel<iues saints personnages qui ont monastères d'hommes et de filles, il se char-
entièrement (quitté le monde, et leur éléva- gea de l'instruction des peuples, allant dans
tion me fait mieux connaître la profondeur les villes et les bourgades, et dans les mai-
de ma chute. Je ne sais, répondit Pierre, sons particulières. Félix, homme de qualité
de qui vous voulez parler car je n'ai pas ; de la province de Nursie, lui demanda un
ouï dire qu'il y ait eu en Italie des gens jour comment il osait prêcher sans avoir

Prologo in Dial., tom. 11, pag. 1,50.


'
dans la bouclie du peuple, en sorte que ces ex-
Mabil. tom. IV, Ànalect., pag. 497.
« pressions auraient été indécentes dans un ouvrage
• El non pas « J'avais près de inoi le diacre n sérieux. Fleury, liv. XXXV Hist. Eccle'siast., pag.
etc., comme l'a traduit D. Ceillicr. Le latin porte : 83, tom. VIII.
CuiH a/ptctus valde diu lacitus sederem. dilec-
et ' Le met hortnlanus, qui se trouve dans le texte,
tissinius fiHus meus Pi Iriis diaconus adfuil; et n'est pas un nom propre, comme l'a cru D. Ceil-
la tradufliougrecciue ; Kf-O^Jo^évou/iov... 7ra,5siri) /jLOt. lier; c'est ce que prouve la traduction grecque où
Grv'. m. 0pp. m, pag. 119- lôO , édit. Migue. nous lisons, col. 163, tom. 111, édit. Migne ôj tij t*!» :

{L'éditeur.] ToO KiiTou p^ovriJa ^v jtsïiijrsu/icvoj. (L'éditeur.)


' La langue latine était déjà fort corrompue
Mi HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
d'oiilro sacré, ni de permission de l'cvèque espace pour y planter un jardin. —
L'abbé
de Rome. Saint Équice lui répondit qu'il s'é- Anasfase, Boniface, évéque de Férente, For-
tait fait à lui-même ces objections; mais qu'un tunat, évêque de Todi, firent aussi divers
jeune homme lui ayant apparu la nuit et lui miracles, de même que Martyrius, moine de
ayant appliqué une lancette sur la langue, la province de Valérie, et le prêtre Sévère.
en lui ordonnant en même temps d'aller prê- — dans cette province, d'im-
C'était l'usage,
cher, il ne pouvait plus s'empêciier de par- primer le signe de la croix sur les pains,
ler de Dieu. Le bruit de ses prédications avant de les mettre au four ou sous la cen-
étant venu jusqu'à Rome, les clercs de cette dre, eu sorte qu'ils paraissaient coupés en
Eglise remontrèrent au Pape qu'il fallait em- quatre.
pêcher ce rustique et cet ignorant de prê- Le second livre contient l'histoire de la
8. SrcondlU:e
i>. Uiilogoc»,

cher, et le faire amener à Rome, afin qu'il viede saint Benoit, depuis son enfance jus- 1 »f. J0-.

apprit à connaître ce que c'est que la disci- qu'à sa mort. Devenu célèbre par ses vertus
pline ecclésiasiique. Le Pape envoya Julien, et ses miracles, il lui vint do toules parts un

défenseur de l'Église romaine, avec ordre de grand nombre de disciples, pour qui il b.Mit
l'amener avec honneur. Saint Écjuice, voyant douze monastères, mettant en chacun douze
Julien, rendit grâces à Dieu, qui le visitait moines sous un supt'iieur. Les plus nobles
par le ministère du Souverain-Pontife et ; de Rome lui donnèrent leurs enfants à éle-
ayant appelé ses frères, il fit préparer ce ver. Équitius lui confia son fils Maur, et Ter-
qui était nécessaire pour le voyage. Julien, se tuUus son fils Placide, encore enfant. Cédant
trouvant fatigué, refusa de partir le jour à l'envie d'un prêtre nommé Florent, il se
même de son arrivée; sur quoi saint Éijuice relira avec quelques-uns de ses moines sur
lui dit Vous m'atiligez si nous ne par-
: <i ; une montagne appelée Cassin, dans le pays
tons aujourd'hui, nous ue partirons point, n des Samnites, où il bâtit un treizième mo-
En eQ'et, le lendemain au point du jour, ar- nastère. Il avait laissé les douze autres sous
riva un courrier avec une lettre a Julien, la conduite des supérieurs qu'il leur avait
portant défense de tirer le serviteur de Dieu donnés. On voyait encore à Cassin un ancien-
de son monastère. Julien, s'élant informé temple d'Apollon, el, tout autour, des bois
de la cause de ce changement, apjjiit que le consacrés à son idole, où les paysans fai-
Pape avait été elfrayé en vision peulant la saient des sacrifices. Saint Benoit brisa l'i-
nuit ,
pour avoir donné ordre d'amener dole, renversa l'autel, coupa les bois consa-
l'homme de Dieu. On met la mort de saint crés, et dans le temple même d'Apollon bâ-
Cap.
Équice vers l'an 340. —
Il y avait auprès de tit un oratoire de saint Martin, et un de saint

la ville d'Ancône une église sous le nom de Jean, à l'endroit où était l'autel de l'idole,
Saiut-Étienne, dont un mansionnaire, nom- et par ses instructions il attira à la foi tous les

mé Constance, avait la garde. C'était un peuples du voisinage. Le démon s'en vengea


homme détaché de toutes les choses de la par diverses prévarications dans lesquelles
terre, et qui n'avait d'all'ection que pour les il engagea les moines de Cassin mais elles
;

biens célestes. La sainteté de sa vie était servirent à faire connaître que saint lieuoit
connue au loin. Un jom- que l'huile man- avait reçu de Dieu le ilon de prédire l'avenir,

quait dans cotte église, il remplit d'eau tou- et de découviir les choses les plus cachées.

tes les lampes, y mit des mèches à l'ordi- Le roi Totila, vofulant éprouver ce qui en
naire et les alluma; aussitôt elles se mirent était, envoya un de ses écuyei-s nommé Rig-

à brûler comme s'il y eût eu de l'huile. — gou, à qui il fit prendre sa chaussure et ses
Marcellin, évêque d'Ancône, arrêta un in- fit accompagner de trois
habits royaux, et le
cendie que l'on avait tenté inutilement d'é- seigneurs qui étaient ordinairement le plus
teindre, en se faisant placer par ses domes- près de sa personne, avec des écuyers et un
tiques à l'opposite des flammes. — Nonnose, grand cortège; pour lui, il s'arrêta assez
abbé du mont Soracfe, ne trouvant pasmoyen loin du monastère, et manda qu'il allait ve-

de l'aire déiilacer un roclicr d'un lieu où il l'-tait nir. Riggf>u étant eniré, saint Benoît, qui
besoin de faire un jardin pour l'usage de ses de loin
était assis, lui cria « Mon lîls, ijuit-
:

frères, recourut à Dieu, et passa la nuit en tez l'habitque vous portez, il ne vous ap-
prières sur le lieu même. Le malin, les frè- partient pas. Riggon cl tous ceux qui l'ar-
I)
Ti'i, ti. %
XI, >ll.
res étant venus, trouvèrent que le rocher cnmpagnaienl se jclèrenl par terre tout ef-
s'('lait l'Ioigué, el leur avait laissé un long frayés, cl, sans oser approcher, ils relour-
[vu» SIÈCLE.] CHAPITRE XLIX. — SAINT GlU'aiUIItK I.K (iLlAM), PAPE. Ho
m'-i'ont vers Tolihi, ù qui ils racontèrent en emmené en Afrique plusieurs captifs de la
tremblant comment avaient été décon-
ils ville de Noie, saint Paulin, n'ayant rien à. Caj^i II

xi-rts. Le roi vint lui-mèinc, et se jota aux donner à une pauvre veuve ipii lui deman-
[lieds du Saiiit, qui l'oxliorta à mettre lin à dait de ipioi racheter son lils, se lit esclave
ses injustices. Il lui prédit qu'il entrerait pour lui, après avoir été agréé en celle qua-
dans Rome, qu'il passerait la mer, et qu'a- lité par le gendre du roi de ces barbares.

|irès avoir régne neuf ans, il mourrait le Si ce trait de charité est du grand saint

dixième. 11 prédit aussi A l'évèquc Caiiosa Paulin, comme saint Grégoire semble le
(jue la ville de Rome serait battue de tem- dire, il s'est glissé visiblement une faute
Cn[). IV,
pêtes', de foudres et de tremblements de dans le texte de cette histoire, oîi l'on aura
terre, en sorte qu'elle s'afiaililirait comme mis les Wandales pour les Goths, qui en ef-

lin arbre qui sèciie sur sa racine. Dieu lui fet firent des incursions en Italie, et prirent
fit connaître la ruine de son monastère do la ville de Noie en -410. Les Wandales rava-
XVII.
Gassin, quarante ans avant qu'elle arrivât. gèrent aussi l'Italie; mais ce ne fut qu'en
Clip, x^xit
Il accorda h ses prières la résurrection d'un 431, l'année de la mort de saint Paulin.
enfant; il lui lit voir l'àme de sa sœur en- Saint Augustin, qui parle souvent de lui, ne
trant au ciel en forme de colombe, et celle dit rien de cette captivité volontaire, non
de saint Germain, évêque de Gapoue, portée plus qu'Uranius son panégyriste. On peut eu
par les anges, sous la forme d'une splièie faire honneur à son successeur, qui se nom-
ou d'un globe de feu. L'année même de sa mait aussi Paulin, et sous lequel il est fort

mort, il la prédit à quelques-uns de ses dis- possible que les Wandales aient pillé Noie
ciples, en donnant à cejjx qui étaient absents ou les environs. —
Le pape JeanI", envoyé
et éloignés, des signes pour la connaître. La en ambassade à Constantinople par Théodo-
veille de sa mort, il s'y prépara en recevant ric roi d'Italie, rendit la vue à un aveugle à
le corps et le sang de Notre-Seigneur. Le l'entrée de cette ville, en mettant la main
jour qu'elle arriva, deux moines, dont l'un sur ses yeux, en présence de tout le peuple
était dans le monastère et l'autre en était qui était venu au devant de lui. — Agapet,
éloigné, eurent la mémo vision ils virent : que Thcodat, roi des Goths, obligea aussi
un chemin couvert de tapis, et éclairé d'une d'aller à Constantinople, étant arrivé en
intinité de llambeaux, qui s'étendait vers Grèce, ou lui présenta un homme qui ne
l'orient depuis le monastère jusqu'au ciel. pouvait ni parler, ni se lever de terre. Il de-
Un pei'sonnage vénérable y paraissait, qui manda à ses parents, qui le lui avaient ame-
leur demanda pour qui était ce cliemin. Ils né, s'ils croyaient qu'il pût le guérir. Ils ré-

dirent qu'ils n'en savaient rien. « C'est, leur pondirent qu'ils en avaient une ferme espé-
dit-il, le chemin par où Benoît, le bien-aimé rance, vu la puissance de Dieu et l'autorité
de Dieu, esi monté au ciel. » Il se fit des de saint Pierre. Alors le Pape se mit en
miracles dans la caserne même de Sublac prières et commença la messe, api'ès la-
qu'il avait habitée.Une femme qui avait quelle, sortant de l'autel, il prit le boiteux
perdu y étant entrée sans le savoir
l'esprit, par main, le leva de terre, le fit marcher
la
après avoir couru jour et nuit les montagnes à vue de tout le peuple puis, au moment
la ;

et les vallées, les liois et les campagnes, en où il lui mit dans la bouche le corps de No-
sortit parfaitement guérie, et conserva jus- tre-Seigneur. sa langue fut déliée. Dacius, —
qu'à la mort sa présence d'esprit. Au reste, évéque de Milan, étant obligé d'aller à Cons-
ce ne fut pas seulement par ses miracles que tantinople pour la cause de la foi, passa à
l'homme de Dieu se rendit célèbre dans le Corinthe. Comme il une nombreuse
avait
monde il y acquit aussi de la réputation
; suite, il demanda qu'on lui préparât une
par sa doctrine, dont il a laissé des monu- maison assez vaste qu'il aperçut de loin;
ments dans sa Règle, qui est en même temps mais les habitants voulurent l'en détourner,
un t(''mo:gnege de la sainteté de sa vie, puis- en lui disant que le diable, depuis plusieurs
qu'il n'a pu. enseigner autrement qu'il n'a années, s'en était mis en possession. L'é-
vécu. vèque répondit que c'était pour cela même
T'O^sième
Hvro des Uia-
mention dans le troisième li-
9. Il est fait qu'il voulaity loger. R fut éveillé au milieu
lo;:ucs, psç. vre de plusieurs grands évêques et de quel- de la nuit par un liruil confus de voix de
S18.
ques papes. Après que les Wandales eurent toutes sortes d'animaux. Alors, reconnais-

476 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSL\STIQUES.


sant que c'était l'antique ennemi, il éleva la rent des Golhs. Cerbone, craignant pour la
voix, en lui disant : « C'est loi, malheureux, en
vie de ses hôtes, les cacha. Le roi Totila,
qui as dit : Je m'élèverai au-dessus des nuées tes ayant été averti, prendre l'évêque, et
fit

plus élevées,
et je deviendrai semblable au Très- l'exposa à un ours furieux, en présence de
i..i,i.T,ii, Haut. Ton orjrueil ta rendu semblable aux son armée; mais cet animal, oubliant sa fé-
porcs et aux souris, et, pour avoir voulu être rocité, vint lécher les pieds de Cerbone; ce
semblable à Dieu, tu es semblable aux bé- qui jeta tous les assistants et le roi même
tfs. A cette voix, le démon se relira con-
I)
dans l'admiration. —
Il y avait auprès de
Cif. zir.

cap.T. fus; et depuis, la maison fut habitable. Le Spolète un serviteur de Dieu, nommé Isaac,
voulant s'assuier si Sabin, évèque
roi Totila, que Dieu favorisait du don des miracles. Un
de Canosa, avait, comme on le disait, l'es- jour, des pèlerins se présentèrent à lui a
pritde prophétie, l'invita à cet effet à diner, demi nus, pour en obtenir de quoi se cou-
refusa de s'asseoir avant lui, et lui donna la vrir mieux. Le Saint les laissa lui exposer
droite. Comme domestique destiné à le
le leurs besoins; puis, appelant un de ses dis-
.'^ervir lui iftésentait une coupe où il y avait ciples, il lui dit en secret d'aller dans la fo-
du vin, le roi avança doucement la main, et, rêt voisine d'apporter les habits qu'il
, et
prenant la coupe, la présenta lui-même] à trouverait dans le creux d'un arbre. Le dis-
croyant qu'il ne s'en apercevrait pas.
Saiiin, ciple obéit, rapporta les habits, et les donna
L'homme de Dieu reçut la coupe, et, quoi- à Isaac. Alors il appela ces étrangers, et
qu'il ne vit point celui qui la lui avait pré- leur dit Prenez, voilà de quoi vous vêtir. »
:

.«entée, il dit : Vive la main elle-même. Le roi, Ils reconnurent que c'étaient les habits qu'ils
se voyant découvert, rougit; mais il fat Lien avaient cachés eux-mêmes, et s'en allèrent
aise d'avoir trouvé dans le saint évèque ce confus. —
Le moine Martin, s'étant retiré
»•• qu'il cherchait. —
Le même prince entrant dans le creux d'un rocher, obtint de Dieu
dans Narni, Cassius, qui en était évèque, qu'il y coulerait une fontaine, qui ne fourni-
vint au devant de lui. Totila, lui voyant une rait de l'eau que lorsqu'il en aurait besoin.
couleur de visage extrêmement haute, et ne Le démon, pourl'en chasser, introduisit dans
sachant pas qu'elle lui fut naturelle crut , la caverne un serpent, qui, pendant que le
qu'elle était l'efletdu vin. Dieu le ilélrompa Saint priait, se plaçait devant lui, et qui de
bientôt; car un de ses écuyers ayant été même s'étendait auprès de lui quand il se
possédé du démon, en pleine camiiagne, à couchait pour prendre du repos. Martin eut
la vue de toute l'armée, on courut aussitôt cette compagnie pendant trois ans. Quel-
à l'évêque, qui, par ses prières et par le si- quefois il mettait la main ou le pied dans la
gne delà croix, chassa aussitôt le démon. gueule du serpent, en lui disant « Si tu as
:

II. Frigidien, évèque de Lucqucs, changea par reçu le pouvoir de me nuire, je ne t'en em-
ses prières le lit de la rivière de Serchio, que pêche pas. » Le démon, vaincu par la con-
l(îs habitants n'avaient pu détourner après fiance du Saint, se désista, et le serpent se
de longs et pénibles travaux. Sabin, évè- — retira sur la montagne. —
Environ à qua-
({ue de Plaisance, ordonna aux eaux du Pô, rante milles de Rome, il y avait un jeune
qui désolaient la campagne, de rentrer dans moine, nommé Benoit, qui vivait séparément
leur lit; elles obéirent dans le moment. Il dans une cellule.. Les Goths, l'ayant trouvé,
avait chargé de cet ordre un de ses diacres, du temps de Totila leur roi, résolurent de le
qui n'en fit que rire. Le saint évèque envoya brûler avec sa cellule mais le feu ne con-
;

chercher un notaiie, à qui il dicta l'oidre en suma que ce qui était autour. Fâchés de n'a-
ces termes .Sabin, serviteur de Aotre-Scigneur
: voir pas réussi, ils jetèrent Benoit dans un
Jésus-Christ ; avertissement au Pô : Je te com- four où l'on avait mis le feu pour cuire du
mande, au nom de Jésus-Christ Notre-Sriyneur, liain, et en fernièi-onl l'eiitri'-i'. Benoit y resta
de ne plus sortir de ton lit dans ces endroits-là, jusi|u"au lendemain, sans que lui ni si's ha-
et de nejMint endommager les tei-i-es de l' Église. bits en fussent endommagés. —
Quarante :

Il ajouta, en parlant au notaire : « Allez, écri- paysans ayant refusé de manger des viandes
vez cet ordre, et jetez-le dansle fleuve. » Le otlèrtcs aux idoles les Lombards les tuè-
,

notaire obéit, eaux se relirèrenl à


et les rent, comme ils en tirent encore mourir

„ l'instant. —
Saint Cerbone de Populoniùm d'autres, <jui ne voulurent point adorer avec
avait donné l'hospitalité à des soldats; pen- eux la tête d'une chèvre qu'ils avaient sacri-
dant qu'ils étaient dans sa maison, sui-vin- fiée au démon. —
Un de leurs évéques, qui
[vii'siÈci.K.l (^.IIAPITRK XLIX. — SAINT GRl'lf.OinE LE ORANn, PAPE. 477
('lait arien, s'dtaiU emparé ù main armée l'Iimuiohile. Ceiuiracle fut suivi d'im antre.

d'une église dans la ville de Spolète, devint Sanctule gnéiit le Lombard et lui rendit
aveugle dans le moment même où il y en- l'usage de son bras, après Ini avoir l'ait pro-

tra, en sorte qu'il fallut le reconduire cliez mettre ne s'en servirait jamais pour
qu'il

lui. Ce miracle oliligea lesLombards res- ;\ metlre mort des chrétiens.


à llédemptus, — c.p. v„..„
pecter les lieux qui appartenaient anx ca- évèque de Férenle, fut averti dans une vi-
c.p. x^x,<. Ilioliques. — Dans la persécution des Wan- sion, par le saint Marlyr Eulychiiis, des ra-

dales, en AtVi(]ue, leur roi iinnéricfit couper vages que les Lombards devaient faire en
la langue à plusieurs évèqnes, qui ne laissè- Italie.

rent pas de parler librement, sans se ressen- Le but du qualrième livre est d'all'er-
10. ,,„ „,,,„„

tir de ce supplice. Saint Grégoire rapporte mir foi de quelques pei'sonnes, qui don-
la °;''
i'„'To.''°'

ce lait d'après un ancien évèque, de (pii il talent de l'immortalité de l'âme et de la ré- ^'''

l'avait appris lorsqu'il était nonce apostoli- sin-rection des corps. Comme ils pouvaient
^.^^

que i\ Conslantinople. 11 ajoute qu'un do avoir été induits dans cette erreur par ces
ceux qui avaient conservé l'usage de la pa- paroles du livre de l'Ecclésiaste -.Les hnmtnrs
,
I.cclcilast.
, ,

role a[)rès avoireu la langue coupée, étant meurent comme les Odes, et leur sort est fart i-(jnl, '" '''
tombé dans un péché d'impureté, perdit il fait voir que Salomon dans ce livre, ,

ausssitot La liberté de parler par un juste avance certaines choses par manière de ques-
vixvr. jugement de Dieu. —
L'abbé Maximien, qu'il tion, et qu'il en décide d'autres par les bi-
avait eu avec lui en cette ville pendant quel- mières de la raison et de la foi qu'il parle ;

que temps, ayant repris le chemin de Home, quelquefois au nom d'une personne encore
fut battu d'une furieuse tempête sur la mer attachée anx plaisirs du monde, et plus sou-
Adriatique; le vaisseau sur lecpiel il était vent au nom d'un homme sage, qui ne dit
prit eau avec tant d'aljondance, que lui et rien que de confoime h la vérité et anx rè-
ceux qui l'accompagnaient, n'attendant plus gles delà morale la plus pure. L'homme sen-
que la mort, se donnèrent le baiser de paix, suel et terrestre dit dans le cinquième cha-
et reçurent le corps et le sang de Jésus- pitre : // me semble qnHl est bon que l'honinie Kccles. V,
Christ; toutefois ils anivèrent à bon port à mange et boive, et qu'il jouisse de lu joie qui est
Crolone, le neuvième jour après la tempête, le fruit de son travail. L'homme vertueux
quoique depuis ce temps le vaisseau n'eut dit dans le septième : // vaut mieux aller à „^^ ^,„ ,_

pas désempli d'eau; mais, aussitôt que Maxi- une maison de deuil qu'à une maison de festin ;
mien en fut sorti, le vaisseau coula A fond, et il en marque l'utilité, en disant Lorsqu'on :
„,.j
iixni. — Les Lombards ayant un diacie, dans
pris va à une maison de deuil, on est averti de la fin
le dessein de le faire mourir, un prêtre de la de tous les hommes ;et celui qui est- encore en
province de Nm-sie, nommé Sanctule, qui vie, est excité àpenser ce qu'il feï-aun jour, et
était connu d'eux, vint leur demander sa li- ce qui doit lui arriver. Le libertin dit La mort :

berté et sa vie. Ils le refusèrent, mais ils de l'homme est la même que celle des bêtes, et
consentirent à le lui confier, à la charge leur condition est éqale.
j Comme l'homme meurt, ' „ ,
y^flfï. III,
que, s'il s'échappait, ils le feraient mourir à les bêtes meurent aussi ; les uns et les autres res- "•

sa place. Sanctule accepta la condition, et, pirent de même, et l'homme n'a rien au-dessus
voyant les Lombards endormis, il pressa le de la bête. Le Sage détruit ce sentiment, C!i
diacre de se sauver; le diacre, après quel- disant : Qu'a le sage de plus que l'insensé, et
que résistance, prit la fuite, et Sanctule de- qu'a aussi pauvre de plus que lui, sinon qtc'il
le
meura au même endroit; les Lombards, va au lieu oh est la vie? Par ces paroles, Salo-
voyant qu'il avait laissé échapper le prison- mon fait voir que le sage a quelque chose
nier, le condamnèrent lui-même à mon. Ils non-seulement au-dessus de la bête, mais
lui déférèrent le choix du supplice; mais il encore au-dessus de l'homme imprudent,
leur répondit qu'il était entre les mains du puisqu'il va au lieu de la vie, où l'insensé n'en-
Seigneur, qu'ils pouvaient le faire mourir tre point que l'on ne peut pas dire que la
;

de la manière qu'il permettrait. Ils résolu- mort de l'homme soit la. même que celle de
rent de lui trancher la tête. Sanctule, con- la bête, puisque celle-ci ne vit plus après sa
duit au supplice, environné de gens armés, mort, au lieu que l'honmic, môme après sa
se mit en prières, puis tendit le con au bour- dissolution, vit encore dans la meilleure par-
reau mais, après que ce barbare eut levé
;
tie de lui-même, qui est son âme. Pour ren-
le bras pour donner le coup, il devint roide dre son immortalité sensible aux hommes les
,

478 HISTOmE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


plus grossiers, il rappoile les apparitions faite justice. Il ajoute, qu'encore que les jus-

de plusieurs âmes, qui se firent ou dans le tes jouissent dès aujourd'hui de la gloire,

temps de leur séparation d'avec le corps, ou elle augmentera leur égard au jour du ju-
i\

C>p. UTIII.
quelque temps aprf's. Saint Benoit vit au mi- gement par celle qui sera accordée au coij.s
lieu de la nuit l'àme de saint Germain, évêque après la résurrection que, comme il est de
;

de Capouc, selever dans le ciel sous la for- la justice de Dieu de récompenser les bons

me d'un globe de feu.— Le moine Grégoire, dans le ciel, sa justice exige aussi que les
quoique dans un monastère fort éloigné de méchants soient punis dans l'enfer; qu'il est
celui où demeurait Spécieux son frère, vit aussi facile que le feu matériel agisse sur

son àme au moment où elle sortit de son l'âme, qu'il l'est que l'âme soit renfermée
corps. raconta sur-le-champ sa vision ù ses
11 dans un corps. —
Il avait appris de Julien,

confrères, alla au monastère de Spécieux, et défenseur de l'Église romaine, qu'un soli-


le trouva déjà enterré. Le prêtre Nursiu — taire d'une grande vertu avait eu révélalion

vit àriieuie de sa mort les apôtres saint Pierre de la mort du roi Théodoric, et vu ce prince
et saint Paul, qui l'invitaient à venir avec eux jeté dans la fournaise par le pape Jean et le
daasle cieîi —
SaintJuvénal etsaiut Kleulhère patriceSymmaque,qu'ilavait maltraités pen-
apparurent à Probus, évêque de Rièti, au dant son règne. — Il enseigne, surrauloiité
moment de sa mort. —
Tarsillc, tante de saint de parabole du mauvais riche et du La-
la

Grégoire, étant arrivée a une émiuente sain- zare, qu'en l'autre vie les bons connaissent
teté, Félix, qui avait été Pontife de l'Église les bons, et les méchants les méchants ;
que
romaine, apparat dans une vision, où il
lui quelquefois l'âme, à la sortie du corps, re-
lui montra la place qu'elle devait occuper connaît ceux avec qui elle a péché, et ceux
dans la gloire céleste, en lui disant :« Venez, qui ont été les compagnons de
ses bonnes
et je vais vous recevoir dans celte demeure œuvres sur quoi il rapporte l'exemple d'un
;

de lumière. » Aussitôt après, Tarsille tomba saint moine nommé Jean, qui, en ex[)irant,
malade d'une fièvre, qui la réduisit à l'ex- appela Ursus, moine d'un autre monastère,
trémité. Étant près d'expirer, elle vit Jésus qui en cflèt mourut à la même heure, comme
qui venait à elle. Alors, s'adressant aux per- ou l'apprit après s'en être informe exacte-
sonnes qui étaient autour de son lit, elle leur ment. —
Il en rapporte deux autres pour

dit à haute voix : » Retirez-vous, je vois Jé- preuves de l'immortalité de l'àme, l'un d'un
sus qui vient. » Comme elle avait les yeux at- religieux apjielé Pierre, l'autre d'un nommé
tachés sur le Sauveur, son âme sortit de son Etienne, qui était un homme de qualité.
corps, et à l'instant une odeur très-agréable Tous deux moururent et, après avoir vu les
se répandit dans toute la chambre. — Trois supplices de l'enfer, ressuscitèrent. Pien-e
ans avant que saint Grégoire écrivit son qua- se retira dans un désert, où il vécut dans une
trième livre des Dialogues, il y avait Homo i'i si grande pénitence, que si sa langue ne di-

un enfant accoutumé à blasphémer le nom sait pas qu'il avait été en l'autre monde

de Dieu il tomba malade, et les malins es-


;
l'austérité de sa vie le disait assez. Saint

prits lui apparurent. Etl'rayé, il cria à son Grégoire, en parlant de l'état où l'âme se
père d'empêcher qu'ils ne lui fissent du mal. trouve après la mort, dit que, quand elle n'est
Le père, voyant son fils tremblant, lui de- pas assez pure pour entrer aussitôt dans le
manda ce iin'il voyait. Il répondit: «DesMau- ciel, elle est retenue dans quelque lieu où

res sont venus qui veulent m'enlever. » Ayant elle achève d'expier ses fautes, et où elle

lait cette blasphéma, et mourut


réponse, il peut être soulagée par les prières des fidèlos,
dans le moment. —
Saint Grégoire prouve et principalement par le sacrifice de la mes-

par les miracles qui se font aux tombeaux se, pourvu qu'en cette vie elle ait miirité

des martyrs, après les opprobres qu'ils ont cette grâce par ses bonnes œuvies. Ce fiil par

reçus de leurs persécuteurs, que le mérite ses grandes aumônes que le diacre Paschasc,

de ['Cime ne se fait pas toujours connaître au qui, pour avoir pris la défense de l'antipa-

moment même de sa sépaiation d'avec le pe Laurent contre Symmaque, avait été mis
j-oips. —
ne doute pas que ceux qui sont
11 en puigaloire, en fut délivré par les piièros
"
parfaitement justes en sortant de ce monde, de Germain, évêque de Capoue. La faule de
ne jouissent tout d'abord de la félicité éter- Paschase, n'étant poiut un péché de malice,
nelle mais il croit qu'elle est différée i\ceux mais d'ignorance, pouvait être purifiée après

;

il qui il manque quelque degré de cette par- sa mort. 11 n'y a rieu d'assuré sur le lieu
[vii'siKCLK.J CHAPITRE XLIX. — SAINT GRKGOIHK \.E GIIANI), PAPIv ^79
ilo rciircr; mnis l'ICcrilure semble le placer meurent en péché mortel, la sépulline
sons lit icno. qu'on leur accorderait dans une église, no
Cip. ii.v. Comme la juie des bons ne liniia point, lerait qu'augmenter leur condamnât ion; c'est '^''- '"•

anssi les supplices des mécliants n'auront ce qu'il prouve par divers exemples. L'évé-
poinl (!o fin. Si l'on dit qm- Dieu n'a menacé que de liresse, ville située dans l'état de Ve-
les pécheurs d'une peine éleinollo (juc poul- nise, avait accordé pour de l'argent la si'-
ies obliger <1 s'abstenir de pécher, il faudra luilluredans l'église au patrice Valérien,
(lire aussi qu'il nous a fait de fausses pro- mort dans de mauvaises habitudes qu'il n'a-
messes pour nous attirer à la vertu. 11 pa- vait jamais voulu corriger. La même nuit
rait, dira-t-on, peu conforme h la justice de qu'il y fut enterré, saint Faustin, martyr,
punir par un supplice qui n'aura point de apparut au gardien de cette église, et lui
fin, une faute qui est finie et qui a des bor- donna ordre d'avertir l'évêque de jeter de-
nes; mais il faut faire attention que Dieu hors le cadavre de Valérien, sous peine, en
n'a pas égard seulement à l'action du pé- cas de refus, de mourir lui-même dans trente
ché, mais encore à la disposition du cœur jours. Le gardien n'ayant point voulu se
de l'homme, qui est telle, que s'il avait à charger de la commission, même après une
vivre sans fin, il pécherait sans fin; ainsi seconde monition, l'évêque, qui se portait
donc est de la justice exacte du souverain
il bien en se couchant, fut trouvé mort le ii- 1

Jujie que ceux qui, pendant leur vie, n'ont demain matin du trentième jour.
jamais voulu être sans péché, ne soient ja-
mais sans supplice après leur mort. On dira ARTICLE III.
encore que, lorsqu'un esclave fait des fautes,
son maître ne le fait battre que pour le corri- DES LETTRES DE SAINT GnÉOOIRE.

ger, et que les pécheurs livrés au feu de l'en-


fer ne pouvant se corriger, il est inutile de §!•
les faire brûler éternelloment. Saint Gré- Lettres du premier Livre.
goire répond que Dieu, étant juste, ne cesse
de venger les crimes, pour ne pas manquer \. On préfère ordinairement les lettres des «-''"?"«

à sa justice; qu'au surplus les supplices des grands hommes à leurs autres écrits, parce s!' gJ!' oi'r/.'

damnés augmenteront la reconnaissance des qu'elles en fontbeaucoup mieux connaître le


bienheiueux, qui verront en Dieu avec plus génie, et les qualités de l'esjjril et du co'ur.
de plaisir le bonheur qu'ils possèdent, en Saint Grégoire s'est si bien dépeint dans les
considérant dans les damnés les supplices siennes, qu'on n'a aucune peine à y trouver
qu'ils ont évités par un bienfait de la grâce le portrait qu'en ont fait ses historiens. On
divine. Mais si les bienheureux sont saints, y voit sa prudence admirable dans le gou-
comment ne prient-ils pas pour les damnés? vernement de l'Église, sa sollicitude pasto-
Dieu qui écoute les prières de ceux qu'il ai- rale, son zèle pour l'unité sa grandeur
,

me, les exaucerait sans doute. Les saints d'âme dans les adversités, sa tendre cTinrilé
prient pour leurs ennemis, répond ce saint envers les indigents et les malheureux, sa
Pape, lorsqu'ils peuvent les convertir et leur fermeté dans le maintien des lois, sa pro-
procurer une pénitence qui produise en fonde humilité, et toutes les autres vérins
eux des fruits de salut. Mais les damnés qui l'ont rendu recommandable. Le [regis-
ne pouvant plus se convertir ni faire une tre de ses lettres ne contient que celles qu'il
pénitence salutaire, les prières que les écrivit étant pape. On les a distribuées en qua-
saints feraientpour eux seraient inutiles ;
torze livres dont le dernier est impaifait,
et de là vient que nous ne prions ni pour c'est-à-dire qu'il ne renferme que les lettres
le diable ui pour les mauvais anges, que écrites pendant les six dei'niers mois du
nous savons être condamnés à des suppli- pontificat de saint Grégoire, au lieu que les

L, ces éternels. — Saint Gi'égoire pense qu'il autres contiennent; chacun les lettres d'une
y a de l'avantage pour ceux qui ne sont année entière; le premier celles de l'an 590,
point chaigés de péchés mortels en mou- le second celles de 391, et ainsi de suite jus-

rant, à être enterrés dans une église, par- qu'au 12 mars de l'an 604, ce qui fait treize
ce que leurs proches, en y venant et en ans et six mois, à commencer au mois de
voyant leurs tombeaux, sont portés à prier septembre de l'an 390, auquel il fut consa-
pom- eux; mais qu'à l'égard de ceux qui cré, et à finir au 12 mars 604. Elles sont da-
,

480 HISTOIRE GI-INKRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQU'ES.


tées des indictions, qui étaient un nombre tatde jouir du repos qu'il désirait; à Jean
de quinze années. Celte faron lic compter de Constantinople, de ce q\i'il ne l'aimait pas Cap. ».

était en usage dès le temps de saint Am-


'
selon la règle de la charité, puisqu'il n'avait
broise, et même auparavant; mais saint Gré- pas empêché qu'on lui imposât la charge de
goire est le premier des Papes qui s'en soit l'épiscopat, qu'il avait voulu lui-même fuir;
servi dans ses lettres. Il est aussi le premier et à Théotiste, soîur de l'Empereur, de ce
des évoques ' de Rome qui ait employé la qu'on chargé de plus de soins qu'il
l'avait
formule de serviteur des serviteurs de Dieu, n'en avait étant laïque, n L'orage de la ten-
et ses successeurs l'ont prise de lui, pour tation m'a jeté, lui dit-il, dans les alarmes et
imiter son liumilité. Mais cette formule n'é- les frayeurs. Quoique je ne craigne rien pour
tait pas nouvelle on la trouve dans quel-
; moi, je crains beaucoup pour ceux dont je
ques lettres de saint Augustin et de saint suis chargé. L'Empereur doit s'imputer tou-
Fulgence. Saint Ildophonse ' ne compte que tes mes fautes et mes négligences, jmnr
douze livres de lettres, et, c'est peut-être avoir confié un si grand ministère à une per-
sur son témoignage que dans les anciennes sonne si faible. » Les lettres au patrice Nar-
éditions ou u'eu compte pas davantage mais ; sès, et à Anastase, patriarche d'Antioche
aussi on y compte deux fois le second, et sont aussi des réponses aux compliments de
deux fois le septième, ce qui revient au nom- félicitation qu'ils lui avaient faits sur son
bre de quatorze. élection. Il dit à ce dernier « Quand vous
:

premier Uvre^ 2. Toutes les lettres du premier livre sont me nommez la bouche et le flambeau du Sei-
^t. OC. gneur, quand vous dites que je puis être
de la neuvième indiction, c'est-à-dire de l'an
590. C'était l'usage des Papes d'avoir un vi- utile à plusieurs, c'est le comble de mes ini-

caire dans la Sicile, dont les églises étaient quités de recevoir des louanges, au lieu des
plus particulièrement soumises au Sainl- châtiments que je mérite. Je n'ai point de
Siége, parce qu'elles étaient du nombre des termes pour vous marquer de combien de
suburbicaires, que le sixième canon de Ni- soins je suis accablé dans la place que j'oc-
cée assujettit ii l'évêque de Rome, suivant cupe. » —
L'église de Formies était tellement
l'ancienne coutume. Saint Grégoire nomma désolée par le malheur des temps, que le

pour cet oflice le sous-diacre Pierre, qui peuple et le clergé étaient réduits presque .'l

avait l'administration du patiimoine de saint rien. Saint Grégoire, pour doqner à Bacaude,
K[Isl. I, Pierre en cette ile. Il en donna avis aux évè- qui en était évéque, le moyen de se soute-
ques, en leur ordonnant de tenir des conci- nir, unit ;\ l'église de Formies celle de Min-

les chaque année à Syracuse ou à Catane, turue, avec tous ses revenus et tous ses pri-
pour le règlement des affaires ecclésiasti- vilèges. —
L'abbé du monastère de Saint-
ques de la province, pour le maintien de la Théodore, dans le voisinage de Païenne, en
discipline, et sur les moyens à prendre pour Sicile, s'était plaint de ce que les habitants
subvenir aux besoins des pauvres. Piei-re de- d'une terre de l'Église romaine voulaient
vait présider ii ces assemblées, comme légat s'emparer d'un bien appartenant à son mo-
du Saint-Siège. Il parait qu'il n'y avait pas nastère; saint Grégoire écrivit au sous-diacre
encore de métiopolitain dans la Sicile. Jus- Pierre, son vicaire dans cette province, d'aller
tin en était alors préleur. Un des devoirs de sur les lieux, et d'abandonner la prétention
sa charge était d'envoyer Rome la provi- ;"i do l'Eglise romaine, danslccas oii le monas-
sion de blé; l'hiver approchait, et il n'avait tère serait eu paisible possession depuis
encore rien envoyé. Saint Grégoire lui écri- quarante ans. —
Il reçut une requête do la

vit pour lui représenter que, si cette ville ve- part des juifs, qui fendait A les laisser en
nait, par sa négligence, A manquer de blé possession d'une synagogue qu'ils avaient à
dans un temps où elle n'en |iouvait tirer Terracine; sur quoi il écrivit aux l'vêqnes
d'ailleurs, bloquée comme elle l'étiiil parles Bacaude et Agnellus de voir si celle synago-
Lombards, il serait coupable de la mort de gue était, comme on le lui avait dit, si pro-
tout un grand peuple. — Il se plaignit à Paul, che de l'église, que les voix des juifs se mê-
scolastique, qui l'avait félicité sur son élé- lassent avec celles des chrétiens, lors(]u'ils
vation , de ce qu'on l'avait mis hors d'é- chantaient en môme temps; que s'il en était

' Aiiibro?. I Class., Epist. 23, num. 16. * lldopbotis., De Scriplor. Eccles., caii. i.

• Jnau. Uiac, lili. Il, iiiini. I.


[vu* SIÈCLE.] CHArrrnK xlix. — saint ORi^inomE lk ghand, pape. /iSl

ainsi, ils eussent à dtîsigaor un aiilii^ ciulroil (juc, loi'sf[ue vous paraîtrez devant le Soii-
aux juil's ilaus la inôiuo villo, où ils |>iiss(MiI veiaiu ,Iui;i>, vous puissiez lui pn'scntei' les
avec liberté piatiquer leurs C(5réiuoiiies, fruits de votre sollicilude pasloi'ale. — Il or- "(.im. ik,

avec défense toutelbis d'avoir des esclaves donna au sous-diacre Pierre de donner à un
chrétiens. — Jean,
évèque d'Orviéto, s'op- nommé Marcel, enfermé au monastère de
posait à ce que l'on dit des messes et entcr- Saint-Ailrien de Palcrme pour faire péni-
i;U les morts dans le monastère de Saint- tence, et à son valet, les vêtements et la nour-
Georges; Agapet, qui eu était abbé, s'en riture nécessaires; promettant de lui pas-
plaignit à saint Grégoire, qui défendit à Jean ser en compte tout ce qu'il aurait jugé ti pro-
de vexer k l'avenir ce monastère en quoi que pos de l(!ur doinier. chargea encore do
Il le

ce fût. — Il défendit aussi à Dominique, évè- mettre les prêtres dans les églises vacantes
que de Civita-Veccbia, de troubler la veuve de la Sicile, de prendre à cet effet les sujets
deZémarclius dans les fonctions d'une charge les plus dignes, soit du clergé, soit des mo-
([ue son mari avait exercée, et qui lui était nastères, et de les envoyer à Rome, après
nécessaires pour soutenir sa famille. s'être informé de leurs mœurs.
3. La lettre à Démétrius, évèquc de Na- 4. Dès le pontificat de Pelage II, Honorât, E|.isl. !'J,Cl
lib. II, F.,ist.
ples, est pour l'exhorter à recevoir avec archidiacre de l'église de Salone s'était , 18 cl £0.

beaucoup de douceur ceux qui, après avoir plaint du traitement que lui faisait Natalis,
eu quelques doutes sur la foi, demandaient sou évêque, pour se venger de ce qu'il l'em-
à être reçus dans l'Église catholique. Sur — pêchait, en sa qualité d'archidiacre, de don-
l'avis qu'où lui donna que l'église de Popu- ner à ses parents les vases sacrés confiés à
lonium était tellement aliundonnée, qu'on n'y sa propre garde. Le pape Pelage avait dé-
administrait ni la pénitence aux mourants, fendu i\ Natalis d'en conserver du ressenti-
ni le baptême aux enfants, il écrivit h Bai- ment contre Honorât, ou de le faire prêtre
bin, évéque de Roselle de prendi'e soin de
, malgré lui. Natahs, sans avoir égard à cette
cette église, en qualité de visiteur, d'y éta- défense, déposa Honorât dans un concile de
blir un prêtre cardinal et deux diacres, et sa province, et mit en sa place un autre ar-
trois prêtres dans les paroisses de la campa- chidiacre qui lui était plus dévoué,- puis il

gne. On nommait cardinaux les évèques, les ordonna prêtre Honorai. Celui-ci se plaignit
prêtres et les diacres titulaires et attachés à à saint Grégoire, à qui Natahs écrivit aussi
nue certaine église, pour les distinguer de pour justifier sa conduite. Le Pape lui fit ré- LU>. I,
EfSl. IJ.
ceux qui ne les servaient que pour un temps ponse en ces termes « Les actes que vous
:

et par commission. —
Sévère, évêque d'A- m'avez envoyés de votre concile, au sujet '.le
quilée, était à la tète des schismatiques qui la condamnation de l'archidiacre Honorât,
refusaient decondamner les Trois-Ckapitres: ne sont propres qu'à fomenter vos dilférenJs,
le Pape lui ordonna de venir à Rome avec puisque, en même temps que vous le dépo-
ceux de son parti, suivant l'ordre de l'Empe- sez du diaconat comme indigne, vous l'êle-
reur, pour assister au concile qui devait s'y vez malgré lui à la prêtrise. C'est pourquoi
tenir sur ce sujet. — Autharit, roi des Lom- nous vous avertissons de le rétablir dans sa
bards, avait défendu que les enfants de sa fonction; et s'il reste entre vous quelque dif-
nation fussent baptisés dans l'Église catho- férend, qu'il vienne ici , sur l'avertissement
lique à la fête de Pâques de l'an 3'JO. Dieu qu'il recevra, el envoyez de votre côté quoi-
l'en punit, etil mourut au mois de septem- qu'un pour plaider votre propre cause. »
bre suivant. Cependant les évèques ariens Dans sa réponse à Honorât, il lui ordonne de
baptisèrent ces enfants. Saint Grégoire écri- continuer ses fonctions d'archidiacre, et de
vit une lettre-circulaire à tous les évèques finir ce scandale, s'd était possible'; sinou, de
d'Italie, et il les chargeait d'avertir les Lom- venir incessamment à Rome, où Natalis de-
bards dont les eufants avaient reçu le bap- vait aussi envoyer une personne bien ins-
tême de la main des de les faire ré-
ariens, truite. Natalis n'obéit point; ce qui obligea Lil,. 11,
^'""' '"
concilier à la foi catholique, pour éviter la saint Grégoire de lui écrire une seconde let-
colère de Dieu, qui se manifestait par une tre, dans laquelle, après lui avoir fait des re-
grande mortalité. «Avertissez, leur dit-il, proches de ce qu'occupé à ses plaisirs, il
tous ceux que vous pourrez, et faites votre abandonnait le soin de son troupeau, ne
possible pour les attirer A la foi par la per- s'appliquant ni à la lecture, ni à la prédica-
suasion, et leur procurer la vie éteruelle, adu tion, il lui ordonne de rétablir Honorât, sous

XI. .'il
482 mSTOIllE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
peine d'être privé de l'usage du pallium, et, voulaient retourner dans le clergé d'où ils

en cas d'opiniâlrelé, de la participation du étaient sortis; — d'empêcherles femmes d'ha-


corps et du sang de Jésus-Ciirist, et luème biter avec des moines, et les abbés de recevoir f-v'"- ">•

de l'ëpiscopat. Quant à celui que Nalalis les enfants dans les monastères avant l'âge de
avait ordonné archidiacre au iiréjudiced'Ho- dix-huit ans. Ce règlement à l'égard des en-
noral, saint Grégoire le dépose de celte di- fants ne regardait que les monastères de
gnité, avec menace, s'il continuait d'en faire certaines lies, celle entre autres qu'on ap-
les fonctions, de le priver de la sainte com- pelle aujourd'hui de Sainte -Marie, et une
^ib. n, Ef, munion. Il chargea de l'exécution de ces or- nommée Palmariu, du côté de Terracine.
dres le sons-diacre Anionin, qu'il envoyait Anthime fut aussi chargé de faire délivrer
pour administrer le patrimoine de saint Pierre à l'abbé Félix, dont le monastère était situé
en Dalmalie, et lui donna deux letti-es, l'une dans ces îles, cinq cents livres de plomb.
pour les évoques de la province, h qui il fai- C. Au mois de février de l'an 391 saint Gré- ,

ib-d., Epiii. sait part de cette allairc, l'autre pour le pré- goire assembla un concile à Rome, d'où il ccri- "•

iwd.,K..i!i. fet Jobin,*(ju'i] priait do ne point protéger vit une lettre-circulaire aux quatre patriarches

Nalalis contre la justice. Natalis se soumit d'Orient. Il y en a cinq nommés dans l'inscrip-
enfin aux ordres du Pape, et corrigea ses tion , parce que encore qu'un nommé Gré-
,

mceurs. Néanmoins, il lui écrivit une lettre goire lut en possession du patriarchat d'.\n-
où il prétendait justifier sa conduite précé- tioche, lePape reconnaissait aussi .\uaslase,
dente, alléguant, pour autoriser ses dépen- que Justin avait chassé de ce Siège. Les au-
ses de table, divers passages de l'Écrilnre tres patiiarches étaient Jean de Constanli-
ibid., Kiisu mal appliqués. Saint Grégoire lui fil sentir uople, Euloge d'Alexandrie et Jean de Jé-
doucement dans sa réponse, que les festins l'usalem. Il témoigne dans cette lettre com-
que Natalis appelait repas de charité n'é- , bien l'épiscopat lui était ti charge, parce
taient pas de la nature de ceux qu'on l'accu- qu'il ue se croyait pas assez fort pour en
sait de donner. Au surplus, il remit à l'arrivée remplir tous les devoirs. U en fait le détail
de ses députés à juger son dillérend avec ll(Uio- à 1)011 près comme dans sou Pastoral puis ;

rat; mais cet évêquemourutavantladécisiou. il donne, suivant la coutume, sa profession


5. Dans diverses lettres à Anthime, sous- de foi, qu'il réduit aux matières contestées
2». diacre et recteur des patrimoines d'Italie, alors; déclarant qu'il recevait et révérait les
saint Grégoire le charge de soulager plu- quatre conciles généraux comme les quatre
sieurs personnes qui se trouvaient dans le évangiles; qu'il portait le môme respect au
besoin à cause des calamités publiques de ; cinquième, où la lettre qu'on disait être d'I-
donner à des religieuses de la ville de Noie bas avait été condamnée comme remplie
quarante sous d'or, deux sous d'or ;\ un prê- d'erreurs,où Théodore avait été convain-
tre nommé Paulin, qui demeurait dans le cu de diviser la personne du médiateur
monastère de Saint-Érasme, à côté du mont de Dieu et des hommes, et où les écrits
Soracte, et deux li deux moines servant un de Théodoret èontre saint Cyrille avaient
oratoire de Saint-Michel, dans le château de été réprouvés. U ajoutait : « Je rejette tou-
LucuUan ;
— d'oH'rir ù Patéria , tante du tes les personnes que ces vénérables con-
31. saint,quarante sous d'or pour la chaussure ciles ont rejetées, et je rc^-ois toutes celles
de ses domestii(ues, et quatre cents Lois- qu'ils honorent : que pense autre-
celui qui
seaux de blé ù Palatine, veuve d'Urbicus,
; ment qu'ils n'ont pensé, soit anallième mais ;

vingt sous et trois cents boisseaux ; ;\ Vi- que Dieu donne sa paix à celui qui embrasse
vienne, veuve de Félix, autant de don-
;
— la foi qu'ils ont enseignée. » — Il écrivit en ..^ j;_

(9. ner trente sous d'or par an à Palatine, fem- particulier à Anaslase d'Anlioche, pour lui

me du rang des illustres, ruinée par les de


faire jiart douleur que lui causait la
la

guerres continuelles; —
d'empêcher que charge iprun avait imposée, et pour lui
lui

^, les pauvres fussent opprimés, et le fils de recommander Boniface défenseur de l'É-


,

la veuve Sirica réduit en servitude et ;


— glise romaine, (pii devait lui rendre ses let-
de faiio restituer a la veuve Théddora la tres. — Dans celle qu'il adressa à Sébastien, .«.

„, maison de Pétrone son mari. —


Il lui or- évé(]iu! de Rliisinie, il dit qu'il avait deman-
^, donna de plus de réprimer l(!s moines vaga- dé à l'Empereur de permettre à Anaslase do
bonds, ou qui s'élaient mariérs, et les clercs venir j\ Rome avec l'usage du pallium, pour
qui, après avoir embrassé l'état monaauquo, célébrer avec lui lu messe A Saint-Piene. —
,

[vil'- srKCi.E.] CHAPITRE XI.IX. — SAINT GllÉlKlIllK LE GHANI), PAl'K. /.S3

r,i-i M. Ayant appris qu'Arislobule voulait mctlin dit-il, piirla douceur, la bonté, les exhorta-
eu prcc une de ses lettres, celle apparetn- lions, (pi'il faut appeler les infidèles à la re-
ment qu'il avait (^ciite aux quatre patriar- ligion chrétienne, et non jias les en éloigner
ches, il le pria de ne point s'attacher aux par les menaces et la terreur. »
=»• termes, mais au sens. Il envoya Andi'(;, ;\ 8. En élablissaut le sous-diacre Pierre son ei.i.i.3o,

du rani;; des illustres, une clef dans laquelle vicaire dans la Sicile, il lui donna ses ins-
I on avait enfermé de la limaille des chaines tructions par écrit. Il l'avertit depuis de les
de saint Pierre. Il l'assure que ces sortes de relire souvent, et d'avoir grand soin que les
clefs opéraient ordinairemeut des miracles, évêqties ne se mêlassent point d'all'aires sé-
et il l'exhorte ;"!
la porter à son cou pour en culières, si ce n'es! qu'il fût besoin de pren-
.11. être sancliiié. — 11 lit un semblable présent i dre la défense des pauvres; d'empêcher que
Jean, qui avait été consul, patrice et quas- les officiers de romaine ne vexassent
l'Eglise
ar leur. —
Sa lettre à Philippe, maître de la personne, par rapport aux biens, soit
soit
milice, est pour lui recommauder les all'ai- par rapport aux esclaves de restituer ce
;

res de l'Italie. Il lui dit que, s'il a accepté qu'il croirait avoir été enlevé injustement ;

pour lui obéir et ne point


l'épiscopat, c'a été de n'employer jamais la force pour mainte-
"• résister la volonté de Dieu.
;\ Le patrice Ho- — nir les droits de l'Église; de s'appliquer à se
main, exarque d'ilalie, retenait depuis long- faire aimer par son all'abilité envers tous, et

temps à Havenue Blandus, évèque d'Orla ;


de (h'iouiuer les évèques de venir à Puuno
ce qui rendait cette église déserte, et y oc- au jour de son intronisation, en remettant
casionnai! de grands maux parce que le ce voyage, s'il leur paraît nécessaire, à la
troupeau était sans pastmir, et que les en-
,

fête de saint Pierre, prince des apôtres. —


fants mouraient sans baptême. Il le prie Il lui ordonna de rassembler dans le menas- 41.

donc, ou de consentir A ce que la cause de tère de Saint-Théodore, à Messine, tous les


cet évoque soit examinée dans un concile moines que l'incursion des barbares avait
pour qu'on le punisse s'il est coupable, ou dispersés parmi la Sicile, et de leur donner
de le renvoyer à son église, s'il le croyait un supérieur capable de les conduire. —
innocent. Par un abus dont Pierre avait averti saint Gré- "
Erisi. 3., 7. Nous avons deux lettres de saint Gré- goirc, on diminuait aux paysans sujets de
tt Mb. XI, . , ,, . , •
u <
«pisi.30oi .1. gon-e a Venauce, qm, après avoir embrasse l'ÉL;lise le prix du blé dans les temps d'abon-

l'état monastique, l'avait quitté s'était ma- ,


dance. Le Pape lui répondit « Nous vou- :

rié, et exerçait la charge de chancelier d'Ita- lons qu'on les paie toujours suivant le prix
lie ; elles sont l'une et l'autre pour l'exhor- courant, sans déduire le blé qui périt par
ter ti reprendre l'habit et la profession qu'il les naufrages; nous défendons de leur faire
avait abandonnés. « Si mon zèle , lui dit-il fournir le blé h plus grande mesure que celle
vous est suspect j'appellerai toute l'Eglise
,
qui entre dans les greniers de l'Église, et de
en conseil, et je souscrirai sans peine ce qui .'i les oljliger h payer au delà du prix de leur
sera décidé d'un commun consentement. » Ijail ; et aiin qu'après noire mort on ne puisse
Venance ne se convertit point mais le ; les cliargerde nouveau, vous leur dounei'ez
sachant à l'extrémité, écrivit à Jean,
saint, le une assurance par écrit, qui portera la som-
évèque de Syracuse de le presser de nou- , me que chacun d'eux devra payer. A l'é-
veau de reprendre son premier état, sous gard de ce que le recteur du patrimoine pre-
peine d'être condamné éternellement au ju- nait sur ces menus droits, nous voulons que
K. gement de Dieu. —
Un juif, nommé Joseph, vous le preniez sur le prix du bail. Veillez A
s'était plaint au Pape de ce que Pierre, évè- ce qu'on n'use point de faux poids en rece-
que de Terracine après avoir chassé ceux , vant les paiements des fermiers. S'il s'en
de sa nation d'un heu où ils avaient coutu- trouve de faux, faites-les rompre et meitcz-en
me de s'assembler , voulait encore les chas- d'autres. 11 nous est aussi revenu que nos
ser d'un autre endroit où il leur avait per- paysans sont vexés dans le paiement du pre-
mis de tenir leurs assemblées. Saint Grégoi- mier terme de leurs rentes en sorte que, ;

re, trouvant qu'il y avait de l'injustice dans n'ayant pas encore vendu leurs fruils, ils
le procédé de Pierre lui ordonna de faire , sont obligés d'emprunter à gros intérêls.
cesser ces plaintes, et de laisser au juifs la Donnez-leur des fontte de l'église ce qu'ils
liberté de s'assembler au lieu où il avait per- ont emprunté à des étrangers, et vous les
mis qu'ils s'assemblassent « Car c'est, lui : recevrez d'eux peu à peu, selon qu'ils en
484 HISTUIKE GKNÉUAL DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
auront le moyen, de peur que les denrées Vous donnerez donc, pour être distribués
qui leur «illiraicnl pour s'acquitter ne suffi- aux pauvres, dix sous d'or, trente amphores
sent pas, si en les pressant on les oblige de ou mesures de vin, deux cents agneaux (les
les vendre à vil prix. » Il réforme ensuite anciennes éditions disent deux cents bois-
les droits excessifs attaclii;s aux mariages seaux de blé), deux orques ou vases d'huile,
des paysans, et les réduit h un sou d'or mê- douze moutons et cent poules, Ce qui fait ii

me pour les riches, et h quelque chose de voir qu'on faisait aux dédicaces des églises
moins pour les pauvres, voulant que cette des distributions, qui approchaient des aga-
j'cdevaiice tournât au profit du fermier, sans pes des premiers siècles. Par une autre — Epi-u c;.

entrer dans les comptes de l'I-lalise. 11 donne lettre, ordonne à Pieire de donner à un
il

à Pierre pour r('>gle générale de ne point nommé Pasteur, qui avait mal aux yeux,
souiller les coft'res de l'Église par des gains vingt-trois boisseaux de blé et onze de fèves,
sordides. Le droit qu'on exigeait pour les pour lui, sa femme et deux enfants. Il lui —
mariages était purement seigneurial, et une écrivit de donner le soin des procès et des

sorte de tribut sur ces paysans qui étaient autres aflaires extérieures du monastère de
demi-serfs. Il veut qn'à l'avenir les enfants l'abbé Jean h quelque séculier, afin que les
des entrepreneurs héritent do leurs pères, moines pussent rendre leur culte à Dieu
à l'exclusion de l'Église, et que s'ils sont en dans le repos, et que les biens qui leur ap-
bas-âge, on leur dounc des personnes sages partenaient ne dépérissent point de ;

qui aient soin d'eux et de leurs biens ; que prendre sous sa protection Cyriaque et sa
l'on punisse les coupables non par des
, femme, qui de juifs s'étaient faits chrétiens;
i.mendes pécuniaires, mais par des peiues — d'empêcher les évèques de Sicile de venir
corporelles , en donnant toutefois à leur à ilome avant l'hiver mais d'y faire trans-
,

compte un salaire à ceux que l'on emploiera porter à temps les blés nécessaires, et môme
pour les punir; que l'on renferme dans les au delà de la quantilé ordinaire, parce que
monastères 1ns plus pauvres, les prêtres et la moisson avait été peu con»idérable h Ro-

les clercstombés dans quelque faute, en les me, — et de faire restituer à l'Église de

obligeant à aider ces monastères de leurs Taormine tout ce qui lui avait été enlevé
propres biens, parce qu'il est juste qu'ils par de l'Église de Rome.
les officiers

contribuent ;\ l'entretien de ceux qui pren- 9. Les évoques chassés de leurs sièges

nent soin de les corriger. Depuis trois ans par les Barbares cherchaient des asiles jus-
on avait fait une loi aux sous-diacres dans que daus rillyrie. Saint Grégoire écrivit une
toute la Sicile de vivre dans la continence, lettre-circulaire aux évoques de cette pro-

suivant rpie cela se pratiquait dans l'Église vince pour les exhorter ii recevoir leui-s
,

de Rome. Saint Grégoire trouve cette loi confrères, a leur fournir toutes les choses
dure pour ceux qui s'étaient engagés dans nécessaires à la vie, en déclarant toutefois
le ministère sans se croire obligés i\ la con- que ces évêques dépouillés n'auront aucune
tinence. Il n'impose donc aucune peiue aux autorité dans les églises qui leur donneront
prévaricateurs mais il défend de les promou-
;
retraite, et qu'ils se contenteront d'y rece-

voir à un degré supérieur voulant que dans la


: voir leur subsistance. — Sur que les plaintes

suite les évoques n'ordonnent pour sous-dia- lui firent quelques de ce que,
juifs d'Italie,

cres, que ceux qui promettront de vivre daus lorsqu'ils allaient ;\ Marseille pour leur tra-

R règle dans la même lettre di- fic, on y baptisait un grand nombre des
le célibat.
verses atl'aires particulières, et fait plusieurs leurs, plus par force que par persuasion il ,

B|>|.|. U, donations en forme de charité. —


Dans une en écrivit à Virgile, évê(pie d'Arles, et à Théo-
autre adressée au même Pierre, il lui or- dore, évêque de Marseille. « Je loue, leur
donne de donner chaque année au fils de dil-il, votre intention ne doute pas
, et je

Godiscalque, pauvre et aveugle, vingt-qua- qu'elle ne snit fondée sur l'amour que vous

tre boisseaux de blé, douze de fèves et vingt portez à Notre-Seigneur; mais, si elle n'est

mesures de vin. —
11 y en a une qui regarde réglée par l'Écriture, je crains qu'elle ne
les dépenses qu'il devait fiiire h la dédicace nuise à ceux mêmes que vous voulez sauver,
d'une église de la Sainte-Vierge diuis le mo- et que venant au l)a])tême par nécessité,
,

nastère de l'abbé Marinien « Parce que


:
ilsne retournent avec plus de danger h leur
celle maison, lui dit-il, est pauvre, nous de- première superstition. Conlenlcz-vous donc
vons contribuer aux frais de la cérémonie. de lus prêcher cl de les instruire, pour les
[vu" SIÈCLE.] CIIAIMTHE XLIX. SAINT OllÉGOIllE LE GRAND, l'APE. 483

éclairer et los convcilir solidement : vous 10. Des quatre lettres ix Janvier, ëvéquo ei.i.i. 02.

en recevrez la récompense, cl avec la grclco de Cagliari eu Sardaignc, il y en a une où


de Dieu, vos exhortations les coniliiiront à saint Grégoire le prie de prendre la défense
Kfirl. (8. la réjfénéralion de la vie nouvelle. » La — d'une veuve de piété, nommée Catclla, et do
lettre ;\ Tlioodore, duc nu pri'IVl de Sardai- terminer lui-même ses procès, sans qu'elle
gne, est pour le prier de faire nieltre en ar- fût obligée de recourir aux tribunaux sécu-
bitrage une dilTiculté qu'un de ses officiers liers. Il lui recommande dans la seconde de i-j.

avait avec Julienne, abbcsse du monastère terminer par des arbitrages les affaires de
de Saint-Vitp, an sujet d'une terre (pii en Fompéiane. — La tioisiènie, qui est aussi en r,v,

dépeutlait. Il le prie aussi d'empêcher, au- faveur de Gatella, est peu ditl'ihente de la pre-
tant que les lois de la justice le demande- mière. — 11 dit à Janvier dans la quatrième fa.

ront, la cassation d'un testament fait par le de réprimer l'ambition du diacre Libérât, de
gendre de Pomptnane, qui avait fait de sa le mettre pour cet clfet le dernier.de tous les

maison un monastère. —
Celle au diacre diacres, et qu'au cas cependant où il donne-
Honorât est une plainte contre les vexations rait dans la suite des marques d'une plus
de Théodore, maiire de la milice dans la grande soumission, il pourra, s'il le veut, le
Sardaij;ne. Saint Grégoire charge ce diacre faire cardinal, c'est-â-dire le fixer au service de
de faire hVdcssus des remontrances auxEm- son Église, pourvu qu'il obtienne de son évê-
pcrem's, parce que Théodore avait agi con- que des lettres dimissoriales. — On voit des oo.

M ol 6?, tre la disposition de leurs édits. —


Il ordon- preuves de son désintéressement dans sa
na aux moines du IMont-Christ d'obéir à Ho- lettre à Félix, évêque de Messine, à qui il
rose, leur abbé, comme à lui-même ;au — dit :« Nous devons abolir les coutumes que

défenseur Symmaque de bâtir un monastère nous savons être à ctiarge aux églises, afin
dans la Corso de corriger les moines de ce-
; qu'elles ne soient point obligées d'apporter
lui de Gorgone, et d'empêcher les pi'êtres quoi que ce soit en ce lieu, d'où elles de-
de Corse d'avoir chez eux des femmes, à vraient plutôt recevoir. A l'égard des autres
l'exception de leurs mères et de leurs siKurs : clercs, vous devez leur envoyer tous les ans
quelques manuscrits ajoutent leurs femmes; ce qui est établi pour l'usage; mais pour
ce qui prouverait qu'on n'observait point nous, nous vous défendons de nous rien en-
dans l'Ile de Corse ce qui avait été réglé voyer à l'avenir. Nous n'aimons pas les pré-
dans divers conciles touchant la cohabita- sents, et, quoique nous ayons reçu les pal-
Couiil.
fii'ii. Can.
Ni.
.t
;
tion des prêtres avec leurs femmes. Il — mes que vous nous avez envoyées, nous les
A.alli
in; II Tuioo.
,na, manda à Félix, évêque de Siponto, de visi- avons fait vendre pour vous eu renvoyer le
C-.n. 12.
ter l'église de Canose, où, faute de prêtres, prix. Dispensez-vous du voyage de Rome ;
EiiUl 53.

on ne donnait ni la pénitence aux mourants, mais ne nous oubliez pas dans vos prières,
ni le baptême aux enfants d'y ordonner au
; afin qu'éloignés par la dislance des lieux,
moins deux prêtres pour avoir soin des pa- nous soyons unis en esprit par les liens de
roisses de la campagne, pourvu qu'il en la charité. » —Il y avait quelques person- Ta.

trouvât qui fussent dignes de ce ministère ;


nés en Sicile qui se disaient défenseurs du
— à Jean, évêque de Sorrento, de trans- Siège apostolique, et qui sous ce titre com-
porter les reliques de sainte Agathe mar- mettaient des exactions. Saint Grégoire aver-
tyre dans le monastère de Saint Etienne, si- tit les évêques de n'en reconnaître aucun
tué dans l'ile de Caprée ou Capri, à la charge qui ne fûtmuni d'une lettre de sa part, ou
de les placer dans un endroit où personne du recteur du patrimoine de l'Église de
n'ait eu jusque-là sa sépullnre; —
à l'évèque liiime.
Sévère, d'ordonner pour l'église de llimini 11. L'Église d'Afrique était encore infestée 74,

celui que le peuple aura choisi d'une voix par les l'estes des manichéens et des dona-
mianime sinon, de promouvoir à l'épisco-
; tistes.Saint Grégoire eut recours, pour le:^
pat celui que le porteur de sa lettre lui in- réprimer à Gennade patrice et exarque
, ,

diquera. — L'élection tomba sur Gcléati- de cette province. 11 le chargea eu même


nus. Le Pape ne voulut point l'agréer ; il or- temps d'avertir les évêques d'Afrique de ne
donna au clergé et au peuple de Rimini de pas choisir leur primat d'après le rang qu'il
procéder au plus tôt à l'élection d'un évêque, tenait, sans tenir compte du mérite, parce
en leur représentant le danger qu'il y avait à que Dieu n'a point égard au rang élevé des
laisser si longtemps leur Église sans pasteur. personnes, mais à leur bonne vie; de les
486 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
que
avertir aussi le primat ne doit point de- lui-même Martin pour évêque, que parce
meurer dans des villages, mais dans la ville qu'ils avaient négligé d'en choisir un. — Il Epui.«i

qu'ils choisiront, afin qu'il soif plus en état reprocha au clergé au peuple de Benagna
et
Flfnrj, de résister aux donatistcs. C'est que la cou- leur lenteur h se donner un pasieur; en at-
xxxv, tom. tume de NumiJie était de prendre pour pri- tendant qu'ils ne se fussent déterminés sur
VIII, p.!t. 32.
mat le plus ancien évoque selon le rang le choix qu'ils en devaient faire, il leur en-

d'ordination, et souvent c'était l'évêque d'un voya le prétie Honorât pour avoir soin de
village, ou nn homme peu capable. Le Pape leiu- Église. —
Il écrivit à Laurent, évêque "•

ajoutait « Si quelqu'un des évèques de Nu-


: de INIilan, d'envoyer une personne avec qui
midic veut venir vers le Saint-Siège, per- on pût finir la contestation mue entre eux
mettez-le, et empêchez qu'on ne s'y oppose. au sujet d'une somme d'argent que l'Église
Ce sera pour vous une granilc gloire aujirès de Milan répétait sur celle de Rome. Fé- — »'•

de Dieu, si par votre moyen les églises dis- licissime et Vincent, diacres de l'Église de
£|ilsl. persées se j-éunisseut. » —
Dans une autre Lamige, s'étaient plaints au Pape d'une
lettre, il donne de grandes louanges à Gen- grave injustice commise à leur égai-d par
uade de ce que, dans ses opérations militai- Argentius, leur évêque, qui, de plus, di-
res, il se proposait non l'cirusion du sang hu- saient-ils, avait, pour de l'argent, confié des
main, mais l'agrandissement de l'Église cl églises à des donatistes. Saint Grégoire écri-
de la religion chrétienne il lui rend grûces
; vit au moine Hilaire son cartulaire, qu'il
d'avoir repeuplé plusieurs endroits considé- avait envoyé en Afrique, d'avoir soin que
rables du patrimoine de saint Pierre, qui les évèques assemblassent un concile où l'af-
manquaient d'habitant?, en y en appelant faire fût examiuée, et de se charger de faire
des provinces voisines. —
Dans une troisième exécuter leur jugement. Le cartulaire n'était ««n, «n
''
lettre, il lui recommande un nommé Dro- alors que secrétaire gardien des chartes; >».
' '

culfe, qui était passé du parti des Lombards mais il avait juridiction dans les provinces
daus celui des Romains. — La lettre à Gau- où il était envoyé.
diosus, maître de la milice d'.\frique, est en7
core une lettre de recommandation en fa- §11-
veur d'un nommé Hilairc, que le Pape en- Livre second des Lettres de saint Grégoire.
voyait pour procurer du soulagement au.K
pauvres. —
Les évèques de Numidie, voyant l. Le second renferme les lettres que
livre
iju'il leur avait défendu de suivre leurs an- saint Grégoire écrivit pendant la dixième in-
ciennes coutumes au sujet de l'élection d'un diction, en la commençant au mois de sep-
primat, lui représentèrent qu'ils étaient dans tembre de l'an 591, c'est-à-dire à la se-
l'usage, depuis saint Pierre, de prendre conde année de son pontificat. —
Il écri-
llb.
Krii<l. t,
U.
pour primat le plus ancien. Saint Grégoire, vit A Pierre, notaire, de pourvoir aux né-
révoquant ce qu'il avait ordonné à cet égard, cessités des moines de Tropfea, s'il savait
leur accorda leur demande, à la charge de qu'ils fussent exacts au service de Dieu et
ne point élever ù la dignité de primat les à l'observation de leur règle, et de leur céder
évoques qui avaient été donatistes. Il en- — une petite terre dont ils avaient besoin; —
joignit à Léon, évècpie en Corse, d'aller vi- ;\ Project, évêque de Narni, de profiter de KlM. ..

siter l'église d'Alérie ', qui était comme aban- l'occasion de la mortaIiti> pour exhorter son
donnée depuis la mort de son évoque d'y ;
peuple à la pénitence, et les gentils à la foi
établir dans les paroisses de la campagne catholique; —
à Vélox, maître de la milice,
ib's prêtres et des diacres, autant qu'il en se- de conférer avec Maurilius et Vitalien sur les
rait besoin. Il y transféra depuis Martin, moyens de s'opposer aux desseins qu'Ariulfe,
évêque de Tainatcs ou Tamie, ville telle- roi des Lombards, paraissait avoir d'attaquer
ment ruinée par les guerres, qu'il n'avait Rome ou llavenne. —
Il fit donner en pro-

plus d'espérance d'y retourner. C'est pour pri(''t(' une communauté de religieuses, qui
.'i

cela qu'il est dit qu'il l'établit cardinal, com- demeuraient dans le monastère d'Eiiprépice,
me y devant rester toute sa vie. — Ildonne le jardin qui avait appartenu autrefois an

avis de cette translation au clergé et au peu- prêtre Félicien. —


Il ordonna A l'évoque de

ple d'Alérie, disant qu'il ne leur avait donné Messine de s'assurer d'une dot siiflisante pour
la desserte d'une église bâtie en l'honneur des

" Le tcjlc porte Saonensit ecclesiœ, (L'iditcur.) sainls Etienne et Pancrace, avant do la con-
[VII° SIÈCI-K ] CHAPITRE XLIX. — SALNT GIlliGOIllE LE GRAND, l'Al'H. i87
Episi, F.
sacrer. — F.;i nu clergé, aux no))lcs et
loLtro son siège épiscopal en un lieu plus sûr, et
au peuple de Naples, cslpuur leur orilouner plus à couvert des incursions des Barbares.
de choisir au plus lût, cl unaniuicmcul, un — Ayant été avei'ti que Paul, (pi'il avait ei.iii. n.

c'\c(iuo ;\ la place de Déaiétrius, déposé de agréi' p(uir évêque deNaples, pensait à quit-
'• ri'jiiscopat pour ses crimes. —
Il ('lalilil Maxi- ter cetli! ('glise,il l'exhorta à y deineurei', et

uiieu, évèque de Syracuse, son vicaire sur il continuer ses soins envers son troupeau,
toute la Sicile, avec pouvoir de terminer sur en l'assurant que le diacre Pierre, dont il lui
les lieux les moindres causes, se réservant avait rendu un bon témoignage, n'avait rien
les causes majeures et les plus dilliciles; ;i craindre de la part de ceux qui voulaient
mais il iléclara (pie cette prérogative serait lui nuire. —
Il confirma l'ordination de Jean, 22 ei 2\
attachée à sa personne, et nou à son siège. évêque de la première Justinienuc dans l'Il-
10. — Ensuite il lui écrivit de transférer Paulin, lyrie, le constitua vicaire du Saint-Siège, et
évoque de Taur en Cahibrc, au siège vacant lui accorda l'usage dupallium. Dans la lettre
de Lipari, malgré sa répugnance, avec or- qu'il lui écrivit sur ce sujet, il lui recom-
dre au clergé de cette Eglise de lui obéir. — mande d'user d'une telle modération envers
'
'
11 voulut toutefois que Paulin prit soin de ceux qui lui sont soumis, qu'il s'en fasse plus
visiter l'Eglise de Taur, autant de fois qu'il aimer que craindre; de punir les fautes en
" le jugerait nécessaire. —
Informé qu'il y avait père; de s'appliquer tout entier à gagner les
en Sicile im prêtre que sa vie rendait digne âmes à Dieu; de se souvenir qu'on n'est
de l'épiscopat, il ordonna à Maximien de le point pasteur pour se reposer, mais pour
faire venir en sa présence, et, après l'avoir travailler; de n'admettre dans le ministère
examiné et trouvé capable de remplir cette ecclésiastique que ceux qui en sont dignes,
dignité, de l'envoyer à Rome pour l'y faire et de ne rechercher dans les ordinations au-
5'-
ordonner. —
Il lui écrivit encore de consoler cun intérêt temporel, mais la seule gloire
un abbé nommé Eusèbe, et apparemment de Dieu. —
On voit par la lettre à Bènéna- 25.

de lever l'excommunication que cet évêque tus, évêque de Misène, que saint Grégoire
avait portée avec trop de précipitation con- voulait que l'évêque fût pris dans le clergé
' •
tre lui. Mais l'abbé refusa de rentrer dans la de la ville même, si cela était possible, et
communion de Maximien; ce qui fit peine à que l'évêque élu vînt à Rome se faire or-
saint Grégoire, qui le reprit de son orgueil, donner, avec le décret d'élection, signé de
et ne laissa pas de lui faire donner cent sous tous, et les lettres du visiteur qui avait pris
d'or par le sous-diacre Pierre. soin de l'église vacante et présidé à l'élec-
s-
2. Il représente à l'évêque Candide que, tion. — Il envoyait ordinairement des évê- Episi.se,
'"'
les l'ègles de la charité lui interdisant d'ajou- ques pour visiteurs, afin qu'ils fissent dans '

ter affliction à affliction, il ne devait pas re- les églises dont l'évêque était mort, les fonc-
fuser à un de ses clercs, qu'une maladie avait tions réservées aux évêques.
mis hors de service, les secours que son Eglise 3. L'empereur Justinien avait fait bâtir si.

accordait à ceux à qui la santé permettait de une église sur le mont Sina, sous l'invoca-
ociio. s'acquitter de leurs fonctions. — Le clergé tion de la Sainte Vierge, à l'usage des moi-
et lepeuple de Naples souhaitaient d'avoir nes qui vivaient sur cette montagne dans le
Paul pour évêque le Pape promet de le leur
; mépris des plaisirs et des richesses du siè-
accorder, apiès qu'ils auront éprouvé son cle, et dans ujie continuelle méditation de
zèle et sa capacité pour le salut des âmes. la mort. Leur vertu attirait la curiosité des
11. — Ilordonna à ceux de Népi en Toscane étrangers, qui allaient les voir pour en être
d'obéir h Léonce, qu'il leur envoyait pom' édifiés. Ruslicienne, dame de grande con-
12. prendre soin de leurs alla ires; à Castor, évo- dition, qui faisait sou séjour à la cour, fit

que de Himini, de consacrer l'oratoire qu'une part à saint Grégoire du dessein qu'elle
femme de piété y avait bâti en l'honneur avait d'aller visiter les Saints-Lieux ; elle
de la sainte Croix, pourvu qu'elle l'eût sulfi- tarda quelque temps de l'accomplir, et en-
13- samment doté; —
à Importunus, évêque fin elle en fit le voyage. Le saint, qui lui
d'Attclane, de donner le soin d'iuie paroisse avait fait il'abord des reproches de ce qu'elle
de son diocèse au prêtre Dominique, avec avait tardé de se mettre en chemin pour le
les fruits que l'on avait recueillis pendant la mont Sina, lui en fil ensuite de ce qu'elle
dixième indiction, c'est-à-dire en 51)1 ; — en était revenue avec trop de précipitation,
'*• et à Jean, évêque de Velletri, de transférer sans avoii' pris le loisir de contempler la
488 HISTOmE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
vertu de tant de solitaires, et de goûter les de ses infirinilés de corps et d'esprit, en lui
Lll). IV
i'I. M. douceurs de la retraite. Il ajouta qu'il crai- réservant une modique pension sur les re-

gnait qu'elle n'eût pas porté d'autres yeux venus de cette Église, dont il commit le soin
que les yeux du corps dans ces S:iints- Lieux, Jean, évèque de Havenne.
.'i Il —
établit Ep I 3'.

sans ouvrir ceux du cœur aux objets édi- Jean, évoque de Lissitane en Dalmatie, chas-
fiants, puisque leur vue n'avait point luinni sé de son siège par les ennemis, évèque car-
de son co;ur l'amour de la ville de Gonstan- dinal de Squillace en Italie , à condition de
Lib. V "> tinople et de là cour. — 11 l'exhorta à venir retourner à sa première église, si elle recou-
visiter le tombeau de saint Pierre A Home, vrait sa liberté. — A la requête de l'abbé
l'assurant, qu'avec la protection de ce prince Luminosus, il exhorta Castorius, évoque de
des apôtres, elle n'avait rien à craindre des Rimini, ii laisser à la communauté du mo-
armées qui inondaient l'Italie. Uiisticienne nastère situé dans la même ville le choix de
fit beaucoup de présents et de charités aux sou abbé, tout en lui confirmant U' droit d'or-
Lih,
i.M. Il
II.
églises et .aux pauvres. —
Elle envoya à donner celui qui aurait été élu d'un commun
saint Grégoire dix livres d'or pour le rachat consentement. Il lui défendit aussi de faire
des captifs, des voiles pour orner le tombeau l'invenlaiie des biens de ce monastère après
de saint Pierre, et des aumônes pour le mo- la mort de l'abbé, ou d'en prendre quelque

Efi'll'ii'î'"' nastère de Saint-André. Saint Grégoire em- partie que ce fût pour les donner à son Eglise,
ploya le crédit qu'elle avait auprès de l'Em- ou d'y célébrer des messes publiques de ,

pereur, pour traverser les mauvais desseins peur que le concours des peuples ne trou-
d'un nommé Béator. blât le repos des moines, et que l'entrée des
''
4. ordonna à Etienne, cartulaire qu'il
Il femmes ne fût pour les plus simples une oc-
avait envoyé en Sicile, de faire renfermer casion de chute et de scandale. Il donna —
deux moines qui s'étaient sauvés de leur mo- avis de ce règlement à l'abi)é Luminosus,
nastère, dont l'un s'était marié, et l'autre atin de le tranquilliser l'avenir sur les usur-
ii

avait repris rhabit séculier parce qu'un ; et pations qu'il craiLTuait de la part de son évo-
certain prétie voulait introduire de nouvel- que. —Il écrivit à Lucille, évèque de Malte,

les coutumes dans ce monastère contre la vo- d'obliger ses clercs de payer à l'Église le
lonté de l'abbé, il charijea Ktienne de l'en cens des terres qu'ils tenaient d'elle en Afri-

ti
Epi-i.ij,
lili. v.
empêcher.
'

Il y avait dans les leries de l'É-
"'
que. —
11 unit les églises de Cumes et de

Kfisi. :u. giise un grand nombre de juifs qui ne vou- Misène qui étaient voisines l'une de l'autre,
laient pas se convertir. Saint Gi-égoire écri- dépeuplées qu'elles étaient par le malheur
vit a Pierre, son vicaire en Sicile, d'envoyer des temps, et en donna le soin à Bénélatus.
des lettres par toutes ces leircs, avec pi-o- Cette union ne subsista pas longtemps ces :

messe de diminuer les renies a ceux qui se deux églises eurent dans la suite chacune
convertiraient, en sorte que celui qui payait un évéque, comme auparavant.
un sou d'or aurait une remise du tiers, et que 5. Jean, évéque de Ravenne, avait écrit
celui qui en payait trois ou quatre, eu paie- plusieurs lettres à saint Grégoire, qui n'avait
rait un de moins. Il ne craignait point que pu y répondre aussitôt, à cause qu'il était
cette diminution de ses revenus fût inutile, tombé malade. La première chose qu'il re-
parce qu'au cas même où les juifs ne se con- commande à Jean dans sa réponse, est do
vprliiaient pas assez sincèrement, leuis en- porter llomain, exarcpie de Havenne, ù la
fants seraient baptisés avec de meilleures paix , s'ollranl d'en traiter lui-même avec
Efin. 33. dispositions. — Léon , évéque de Catane ,
Ariulfe, duc de Spolèle. Il lui dit, en second
avait été accusé de plusieurs crimes. Saint lieu , qu'Arigis duc de Bénévenl s'était
, ,

Grégoire fit faire la-dessus diverses informa- joint à Ariulfe, et qu'il en voulait à la ville
tions, dont aucune ne chargea cet évùque; de Naples, qu'il fallait compter pour perdue,
mais, pour ne laisser aucun doute sur son à moins que l'exarque n'y envoyât prouipte-
innocence, il le fit jurer devant le tombeau ment un commandant pour la défendre. —
de saint Pierre qu'il n'était coupable d'au- 11 parai! que l'exarque n'en fit rien, puisque,

cun (les trimes dont on l'accusait après ; par une aiilro lettre, saint Grégoire ordonna
quoi il écrivit à Justin, préteur de Sicile, de aux soldats de Naples d'obéir au tribun Cous-
luidonner toutes sortes de mar([ues de cha- tanlius, qu'il envoya lui-même pour com-
3.. rite etdo respect. —
Il ôla à Caslnrius l'ad- mander dans celte ville. —
Jean de Havenne
minislraliou do l'Église de llimiui, à cause lui avait proposé d'envoyer quelque aumône
[vn" SifecLE.] CHAPITRE XI.IX. — SAINT GRlÎGOinK LE GRANn, PAPE. 489

à Si^vi'tp, palriarclic dos iSn^quos schisniali- — Saint Grégoire, ayant appris que les
Eplit.
l.il..

M.
v,

qucs d'istiic. « Vous ni! park'iit'Z pas ainsi, arcbevèciues de Haveiiue avaient porté le
lui n![ioiul io Pa|)0, si vous saviez les prc- ])allium aux processions des fêles de saint
scuts qu'il envoie !\ la cour contre nous ;
Jean-Baptiste , de saint Pierre et de saint
quand uichne il ne le ferait pas, nous devons Apollinaire, premier évoque de cette ville,
l'aire la cliarilii il ceux qui sont fidèles à l'K- accorda A Jean, par ])rovisioii, de le porter

gliso, avant de la faire ;\ ses adversaires. » h ces trois fêtes, et au jour de son ordina-
Il dit qu'il vaut donc mieux racheter les cap- tion ; mais, sans observer cette restriction,
tifs qu'on avait enicvds de la ville de Fano, ilcontinua de porter en tout temps hors
le

et envoyer à cet ctlet Claude, abbé do Saint- do r(5glise. — Sur cela le Pape lui écrivit IMd., Ei/I«l.

Jean de Classe près de Ravenne, avec quel- une IcHlrc très-forte, où il lui reprochait de
que aryent. Jean lui avait encore proposé faire voir par sa conduite, qu'il mettait l'hon-
de réitérer une ordination. Saint Grégoire neur de l'épiscopat dans l'ostentation exté-
répond (|u'il n'est pas plus permis do réité- rieure, et non pas dans l'intérieur, c'est-à-
rer l'ordination que le baptême; mais que, dire, dans la pureté des mœurs. Dans une —
si quelqu'un est parvenu au sacerdoce char- autre lettre il se plaint de ce qu'il avait ôtd
gé d'une faute légère, il doit en faire péni- aux moines leur demeure pour y loger des
LU,. V,
tence, et demeurer dans l'ordre qu'il a reçu. clercs, et même des laïques, et lui ordonne Kjiitt. I.

EfM.
i.ii..

56.
lit, — Onel<[iie temps après, Jean, sous prétexte de rétablir les choses dans leur premier
du séjour que les Empereurs avaient fait à état.
Ravenne, et de la résidence que les exar- Dominique évèque de Carthage, en écri-
6.
Efin.
Lil.. II,
7.

que y faisaient, voulut se distinguer non- vant à saint Grégoire pour le féliciter sur
seulement des autres évèques, mais aussi son élection, lui demanda la confirmation
des métropolitains, en portant le pallium, des pi'iviléges de son église. Le Pape lui ré-
même dans les processions. Saint Grégoire pondit que, comme il défendait ses propres
lliia., E|li^l. l'en reprit. —
Jean lui répondit par une let- droits, il conservait aussi à chaque Église les
tre fort soumise eu apparence, mais où il siens. 11beaucoup de choses sur la
lui dit

soutenait son dioit prétendu, et celui que charité, qu'il appelle la mère des vertus, el
ses prêtres et ses diacres s'attribuaient de qui a le double don de réunir les esprits el
porter même h Rome les manipules, c'est-à- les cœurs divisés, et de conserver l'union où
dire une serviette que les prêtres et les dia- elle la trouve. On l'avait informé que—
cres portaient lorsqu'ils servaient à l'autel. Maximien, évêque de Pudentiane, ville de
1,1.. III, — Le l'ape, peu content de cette réponse, Numidie qu'on ne connaît point aujourd'hui,
lui écrivit une lettre où il lui disait, en par- avait permis, pour de l'argent, d'établir de
lant des processions : « Comment se peut-il nouveau un évêque donatiste dans le lieu
faire que, dans ce temps de cendres et de même de sa résidence. Saint Grégoire écri-
cilices, au milieu des gémissements du peu- vit sur cela à Colomb, évêque dans la même
ple, vous portiez par les rues cet ornement, province, d'assembler, aussitôt après l'arri-
que vous vous défendez d'avoir porté dans vée du cartulaire Hilaire, un concile général
la salle secrète de l'Église Vous devez vous'?
pour examiner cette atlaire, avec ordre de
conformer à l'usage de tous les métropoli- déposer Maximien, s'il se trouvait convaincu
tains, ou montrer un privilège du' Pape, si du fait. Il était nécessaire d'agir avec vigueur
vous prétendez en avoir. Nous avons fait en cette occasion, parce que l'hérésie des
chercher exactement dans nos archives, et donatistes prenait tous les jours de nouveaux
nous n'avons rien trouvé. Nous avons inter- accroissements dans la Numidie, où, pour
rogé ceux qui ont été nonces de nos prédé- de l'argent, ils obtenaient la liberté de re-
cesseurs ù Ravenne, et ils ont nié absolu- baptiser plusieurs catholiques. — Dans une Er
Lib. IV,

ment que vous l'ayez ainsi pratiqué en leur autre lettre, il charge Colomb d'étoutfer ce
présence. Notre clergé nie aussi ce que vous mal dès sa naissance. En même temps il — I.i!..

K|. ^l. 7
IV,

attribuez au vôtre à l'égard des manipules ;


prie Gennade, exarque de Numidie, de pro-
nous le permettons néanmoins à vos pre- téger cet évêque en tout ce qui concernerait
miers diacres, mais seulement quand ils vous la discipline ecclésiastique. — Il écrivit di-
El
I.ib,
-1. r
VI,

servent. » Cette lettre fut sans elTet Jean : verses autres lettres à Colomb ,
qui mar-
employa la médiation de l'exarque et du quaient la confiance qu'il avait en lui, et
Ep
Lil..
ît. 2,
VU,

préfet d'Italie pour soutenir sa prétention. dans lesquelles il le chargeait de veiller à ce

»
,

190 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


i."s. VIII, qu'il n'v eût point de simonie dans le? or- que l'on ne trouvait pas toujours des sujets
E. wl. I '.
. .
^

dinalions, et qu'on n'ôlevàt point aux ordres qui eussent beaucoup de capacité, et que si
LIb.XII,
EplU. 9 M iS. sacrés les jeunes grens. — Il fit l'union de l'on ne voulait point se relâcher sur ce point,
l'église des Trois-Tabernes, qui était ruinée, il n'y am-ait quelquefois ni prédicateur, ni
à celle de Velletri, en donnant à Jean le pou- ministre du baptême , ni prêtre pour of-
I.lb. 1

EpUI. W. vcmement de l'une et de l'autre, cl le pou- frir le sacrifice. Il pria donc


saint Grégoire
voir de disposer, selon les règles, du patri- d'examiner si, en certains cas, on ne pou-
Lit..
Eplil. r,l.
I
moine de ces deux églises. — Sa lettre à vait pas employer dans le ministère des per-
tous les évéques regarde l'allaire des Trois- sonnes dont la science se réduisait à savoir
Chapitres.Cei^l pourquoi il faut supposerqu'el- Jésus-Christ, et Jésus-Christ ci-ucifié. 11 lui
les'adi'esse,nouà tousles évèiYucsdu monde, demanda aussi ses homi-lies sur Job ; il par-
mais à ceux-là seulement qui refusaient de lait dans sa lettre que le Pape avait
de celle
condamner les Trois-C liapitres ; d'où vient écrite à saint Léandre, évêque de Séville,
que dans iin manuscrit ancien, elle a pour sur les trois immersions du baptême.
titre : A tous les défenseurs des Trois-C hapi très.
Ilsavaient écrit au pape, pour se plaindre § ni.
des persécutions qu'on leur faisait souilVir. Livre troisième des Lettres de saint Grégoire.
Saint Grégoire leur témoigne qu'il avait reçu
leurs lettres avec plaisir, mais qu'il en au- Les lettres du troisième livre sont de la -
1. ILIb.
Eplil. 1.
rait beaucoup plus de leur refour à l'unité onzième indiction, c'est-.Wire de l'an 592.
de l'Égliseque les persécutions dont ils se
;
Saint Grégoire, ayant appris de l'abbé Jean
plaignaient ne pouvaient leur être utiles le lieu où l'on conservait la tunique de saint
parce qu'ils ne les soutiraient pas pour la Jean, écrivit h cet abbé de faire en sorte que
vérité que la condamnation des Trois-Cha-
;
l'évêque qui possédait cette reliipie l'appor-
pitres n'avait porté aucune atteinte à la foi, tât à Home eu cérémonie, accompagné de
et que, dans le cinquième concile général, son clergé. Jean Diacre dit que c'était la tu-
où il en fut question, on ne traita que des nique de saint Jean l'Évangéliste qu'elle ;

personnes, dont une savoir Théodore de, était de son temps dans l'église de Constan-
Mopsueste, avait donné lieu à sa condamna- tin, aujourd'hui Saint-Jean de Latran et ,
Io.li. M-.
t0T<. Lik 111,
lion par ses écrits, qui étaient évidemment qu'elle y beaucoup de miracles. Saint
faisait nain. »7.

contraires à la vraie foi. U ajoute qu'ils rai- Grégoire approuva par la même lettre le
sonnaient mal en disant que l'Italie n'avait choix que l'abbé Jean avait fait de Boniface
été si fort maltraitée, à l'exclusion des au- pour prévôt de son monastère. En celte —
que parce qu'elle avait erré
tres provinces, même année 592, Adrien, évéque de Thè-
en condamnant les Trois-C hapitres; qu'au bes, se voyant persécuté par les évéques ses
contraire les calamités qu'elle souffrait confrères, comme par des ennemis, vint à
étaient une preuve de l'amour que Dieu lui Rome pour y trouver de l'appui et se faire
portait, selon qu'il est écrit : Le Seigneur rendre justice. —
Il avait déposé deux dia-

châtie celui qu'il aime. Pour les détromper, cres de son Église, nommés Jean et Come,
il dit qu'il leur envoie le livre que Pelage, l'un pour un péché d'impureté, l'autre pour
son prédécesseur, avait écrit sur cette ma- avoir mal administré les biens de l'église.
tière; par où il faut entendre la septième Pour s'en venger, ils le poursuivirent devant
lettre de Pelage, et la troisième ;\ Ilélie et rKmpercur pour des causes civiles et crimi-
aux autres évéques d'Islrie. Celle-ci, ainsi nelles. Le premier crime dont ils l'accusè-

que l'assure Paul Diacre, était l'ouvrage de rent fut de n'avoir pas déposé Etienne, dia-
saint Grégoire même. cre de la même Eglise de Thèbes, quoique
KlIX. SI. évéque de Carlliagène en Es-
7. Licinicn, sa vie infâme ne lui fut pas inconnue; le se-
pagne, ayant lu son Pastoral, en conçut une cond, d';ivoir empêclii' <[u'on ne baptisât des
grande idée, parce qu'il en trouvait la doc- enfant!^ qui, en ellel, ('laienl miu-ts depuis
trine conforme à ce qu'avaient enseigné, sur sans baptême. Ll-lmpereur, suivant les ca-
le devoir des évoques, les saints et les an- nons, renvoya Adrien devint Jean, évoque
ciens docteurs de l'Kglise mais
; crut s'a- il de Laj'isse, son mcMropolitain. Les témoins
percevoir que ce saint Pape poussait trop prouvèrent bien la niauv.iise conduite du dia-
loin le s;ivoir qu'il exigeait de celui qu'on cre i;tieime, mais non qu'Adrien en eut été
doit promouvoir à l'épiscopat. Sa raison était informé; ils ne prouvèrent pas non plus qu'il
[vil» siÈcxE.] CHAPITllE XLIX. — SAINT GRliGOIUE LE fillANn, PAPE. 491
eût empêclië de baptiser lies enfants, et ils ne Notre- Seigneur, pour avoir méprisé l'ad-
doposèreiit sur ce lailciue d'après le rapport munilion ilu papi; P('lage, par laquelle il
des luèros dont les maris avaienl été cxconi- exemptait de la juridiction de l'évèque de
niunios pour leurs crimes. prouvé d'ail-
Il lui Larisse Adrien et son église; mais saint Gré-
leurs que les entants, qu'on disait être morts goire se contenta de renvoyer leurs contes-
sans baptême, l'avaient rcru i\ Iléniélriade. tations à la décision des nonces
(ju'il avait à

Jean de Larisso ne laissa pas de condamner Constantiuople, supposé que ces contesta-
Adrien sur ces deux chefs. Celui-ci appela tions fussent de moindre conséquence, ou de
de cette sentence à l'Empereur, c'était Mau- se les réserver, si elles étaieut plus considé-
rice; mais Jean, sans avoir ét^ard à son ap- rables; en attendant, Adrien dans
il rétablit
pel, le fit melire en prison, où il le coutrai- son siège, avec ordre à Jean de Larisse de
Ji^nit de donner par écrit son aciiuiesccmeut restituer àl'église de ïlièbes, sans délai, tous
à sa sentence tant pour le criminel que
, les biens sacrés ou profanes, meubles ou im-
pour le civil. Adrien donna cet acquiesce- meubles, qu'on l'accusait de retenir, et dont
ment en termes ambigus, qui lui laissaient il lui envoya le mémoire. Adrien se réconci-

ouverture à sa justiticalion. Il fit donc pour- lia avec ses accusateurs. —


Saint Grégoire, i^.' '•^'•

suivre son appel devant l'Empereur, et por- craignant qu'il n'y eût cpielque prévarication
ter tous les actes de la procédure faite par dans cet accord, envoya sur les lieux un
Jean de Larisse. Maurice commit, pour exa- diacre de l'église Romaine, pour savoir ce
miner cet appel, Honorât, diacre de l'église qui en était. —
Il fit aussi rappeler Florent, '•

romaine, et nonce à Constantiuople, avec évéque de Raguse, parce qu'il avait été en-
un de ses principaux secrétaires, nommé voyé eu exil sur des accusations non prou-
Sébastien. Le procès ayant été exactement vées et sans avoir été jugé par le concile de
discuté, Adrien fut renvoyé absous. On ob- la province; —
mais avant de le rétablir, il ^•

tint toutefois un second ordre de l'Empereur ordonna que sa cause serait examinée par
par lequel l'aO'aire fut renvoyée à Jean, cvê- les évêques, et son innocence reconnue.
que de la pi-emière Justinienne, primat d'Il- 2. Il consentit à ce qu'Agnel, évéque de '''"

lyrie et vicaire du Saint-Siège. Adrien ne fut Fondi, ville ruinée par les guerres, accep-
pas plus chargé dans cet examen que dans le tât l'évéchéde Terracine, sans toutefois sup-
précédent, et toutefois le primat Jean le con- primer le titre de l'église de Fondi, et sans
damna et le déposa de l'épiscopat. L'évèque décharger Agnel du soin qu'il en avait pris
de Thèbes en appela au Pape, et signifia son auparavant. —
Ceux de Naples avaient choisi ' >•

appel à Jean de Justinienne, qui promit d'en- pour évéque Florent, sous-diacre de l'église
voyer des gens à Rome pour soutenir son de Rome, qui ne pouvant se résoudre d'al-
jugement. Adrien s'y rendit en personne, et ler à Naples, prit la fuite pour éviter l'épis-
se plaignit à saint Grégoire des injustices copat. Saiul Grégoire en fut affligé; mais, ne
qu'il avait souffertes de la part de Jean de voulant pas laisser cette église sans évéque,
Larisse son métropolitain, et de Jean de il écrivit à Scholastique, juge de Campanie,

Justinienne son [irimat. —


Le Pape attendit d'assembler les principaux ou le peuple de
longtemps leurs députés, mais voyant que Naples, pour procéder avec eux à l'élection
personne ne comparaissait pour eux, il exa- d'un autre évéque à quoi il ajouta « Si vous
; :

mina les actes des procédures faites à leur ne trouvez personne dont vous puissiez con-
tribunal, et s'élant convaincu que leurs sen- venir, choisissez du moins trois hommes dont
tences étaient aussi irrégulières dans la for- la droiture et la sagesse soient connues, et
me qu'injustes dans le fond, il cassa la sen- les envoyez ici au nom de toute la commu-
tence du primat, en le condamnant à trente nauté peut-être trouveront-ils à Rome quel-
;

jours de pénitence, pendant lesquels il serait qu'un capable d'être votre évéque. » Voilà
privé de la sainte communion, sous peine un exemple d'élection par compromis. La
d'être puni plus sévèrement, s'il n'obéissait. lettre du Pape n'eut aucun effet. Il en écri- — 33.

11 se réserva à examiner plus amplement vit une autre quelque temps après à Pierre,
comment il devait être puni, pour avoir abu- sous-diacre de Campanie, pour presser le
sé du pouvoir qu'il avait dans l'Illyrie, peuple de Naples de députer deux ou trois
comme vicaire du Saint-Siège. A l'égard Rome, pour y choisir un évé-
d'entre eux à
de Jean de Larisse, il aurait mérité d'é- que au nom de toute la ville. Il le chargea,
ti-e privé de la communion du corps de par la même lettre, de les avertir d'apporter

.i'J2 HISTOIRE GKNKllALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES


tout le vestiaire de l'évèque, et l'arirent né- — Il envoya donc Jean, sous-diacre de l'é- Epltl. ».

cessaire pour sa dépense, parce qu'il devait glise romaine, à Milan, avec une lettre pour
être consacré à Rome, et en partir pour N'a- le clergé et le peuple, où il leur prescrivait
pies. Paul, évêque de Népi, avait pris soin de les règles qu'ils devaient suivre dans l'élec-

l'église de Naples pendant la vacance du tion d'un pasteur; —


parce que plusieurs
et,

siège; comme il souhaitait de s'en retourner Milanais s'étaient réfuiriés à Gênes pour se
dans sa propre église, le Pape le lui accorda, soustraire aux mauvais traitements des Lom-
en donnant onlre au sous-diacre Pierre de bards, il envoya Jean Gènes, avec ordre
à
lui faire délivrer, aux dépens de l'église de de les faire assembler, et en cas qu'ils s'ac-
Naples, cent sous d'or, et un petit orphelin cordassent unanimement à l'élection de Cons-
Epi" si.ei. à son choix, c'est-à-dire, un esclave. For- — lantius, de le faire consacrer évêque de Mi-
tunat fut enfin ordonné évêqiie de Naples; lan par les évoques de la province, suivant
ce fut lui qui consacra le monastère de l'ab- la coutume. —
Les habitants de Rimiui l'a-
besse Grfiticuse. Il souscrivit au concile de vaient pressé de leur donner pour évèque
Rome en 595. —
Saint Grégoire donna en Castorius; saint Grétioire eut peine à y cou-
toute propriété ;\ l'abbesse Flore un terrain sentii-, parce qu'il le trouvait trop simple pour

sulUsant pour bâtir un mouastère. Les — gouverner cette église Castorius en tomba
;

ariens emparés d'une église;


s'étaient le même malade de chagrin. Le Pape le retint
Pape, avant de la rendre aux catholiques, la donc à Rome, et commit Léonce, évècjue
consacra de nouveau, et y mit des reliques d'Lrbiu, pour avoir soin de l'église de Ili-
'

de saint Séverin, dont elle portait le nom. mini. —Il donna ordre â Marinien, abbé de

3. Après la mort de N'atalis, évèque de Sa- Palerme, et à Bénénatus, recteur du patri-


lone, saint Grégoire écrivit au sous-diacre moine de cette ville, de s'informer de la con-
Antonii), recteur du patrimoine de Dalmatie, duite de l'évèque Victor, et en cas qu'ils
de veiller fi l'élection d'uu nouvel évèque, le trouvassent coupable des fautes dont on
et d'avoir soin qu'il se fit ordonner à Rome. l'accusait, non-seulement de le priver de la
Il l'avertit de prendre garde surtout que les communion du corps et du sang de N'otrc-

présents ni les recommandations n'aient Seigneur, mais de l'enfermer encore dans un


aucune part dans cette élection, parce qu'il monastère pour y faire pénitence. Il en- —
serait dillicile que l'élu, après sou ordina- voya au patricc Dynamo une petite croix, où
tion, ne se prêtât aux volontés de ceux qui il avait fait enchâsser de la limaille des chaî-

auraient appuyé son élection, ce qui ne man- nes de saint Pierre et du gril de saint Lau-
querait pas de porter préjudice à cette éirli- rent. —Il conlirma la donaliou que le prê-

se, et de troubler l'ordre ecclésiastique. Il tre Jean avait faite par teslament pour l'é-
veut donc qu'il n'ait attention, dans le choix tablissement d'un monastère, où il transféra
d'un évèque, qu'à la bonne vie et aux bonnes une communauté de filles dout Bonne était
mœurs. — Il fit déposer l'abbé Secondin, abbesse. —
11 écrivit à Libertin, préfet de Si-

convaincu de crimes, et ordonnera sa place cile, de réprimer laltcntat d'un juif, nommé

Théodose, que la communauté du monastère Nasas, qui avait osé élever un autel sous le
de Saint-Martin demandait. Ayant appris — nom du prophète Élie, et porté par ses sé-
que Laurent, évèque de Milan, avait sans au- ductions sacrilèges plusieurs chrétiens à y
cune raison excommunié le prêtre Magnus, venir adorer. Nasas achetait aussi des escla-
il leva l'excommunication permit à Ma- ,
ves chrétiens, au mépris des lois, et il avait
gnus de faire ses fonctions et de communier, gagné par argent le gouverneur précc'ilcnl,

laissant à sa conscience, s'il se sentait cou- nommé Justin, qui l'avait laissé impuni. —
pable de quelque faute secrète, de l'expier Le Pape prie le préfet de vérifier tous ces
en secret. Laurent était mort lorsque saint faits, et de le punir de peines corporelles.

Grégoire écrivit à Magnus c'est pourquoi il ; Félix, défenseur, avait une esclave qui sou-
lechargea d'averlir le clergé et le peu])le de haitait se faire reli.i;ieuse. Saint Grégoir4^
procéder unanimement àrélecliiui d'un évè- chaigea le sous-diacre Pierre d'examiner s.i

que. Le choix tomba sur Conslantius, diacre vocation, bonne, de racln--


et, s'il la trouvait

de la même église de Milan. Le prêtre Ma- ter cette esclave, et de la mettre dans un
gnus fut chargé de porter le décret d'élection monastère entre les mains de personnes gra-
A saint Grégoire, qui, voyant qu'il n'était pas ves.
souscrit, craignit qu'il n'y eût de la surprise. 4. Sur les plaintes qu'on lui porta qu'un
[vw SIÈCLE.] CHAPITRE XLIX. — S.UNT GltlîlGOlRE LE GRAND, PAPE. 49'i

iioinmi^ Fëlix avait violô une vierge, il or- tème aux enfants. —
Cependant, le graml ki,i-

diiiiri.i, ou qu'on roblijicâl do l'i^pouser, on écuyer de l'empereur iMaurice ajiporta à


i|ii*iipi'('s l'avoir puni corpoicUcuicnt, ou R(Mne une loi (jui dc-feudait de recevoir, soit
r(Mifcrui:'il dans un inonastèio pour (pi'il dans le clcigc-, soit dans les monastères, au-
y
fil p('nitiMice, sans pouvoir en sortit' à moins cun de ceux qui étaient engagés dans les
de sa permission. Le plaignant était un dia- charges publiques, ou qui avaient pris quel-
cre (pii avait contracté des dettes poiu- se que engagemeiildans la milice. Ces derniers
laiheter des mains des barbares; comme il étaient aisés â reconiiaitre, parce qu'ils por-
se trouvait liors d'i'tat de les aciiuillei-, saint taient une marque imprimée sur la main.
Grégoire donna ordre au notaire Patilaléon Saint Grégoire reçut cet édit dans un temps
Bpisl.
de les payer. —
Celui-ci fut aussi chargé de où il était malade, ce qui l'empêcha d'en
faire avec Félix, évèque de Sipoute, un in- écrire aussitôt à l'Empereiu". Il dit, dans la
ventaire de tous les meubles de cette église, lettre qu'il lui écrivit depuis, qu'il
ne désap-
et de le reporter à Rome. —
Saint Grégoire prouvait pas que ce prince eût défendu de
n'était pas content de cet évèque, à qui il donner place dans le clergé :\ ceux qui
impidait en quelque sorte la faute de son étaient ojjligés de rendre compte de quelipie
neveu Félix, pour n'avoir pas veillé sur sa administration, et qui avaient exercé des
conduite. Il le rendit donc responsable de charges publiques, parce qu'il savait que la
l'exécution de la sentence qu'il avait rendue plupart d'entre eux ne s'engageaient dans la
ir,,H. contrelui. —
André, évèque de Tarente, avait cléricature que par ambition et par avaiice;
eu une concubine avant d'être admis dans le mais il trouva étrange qu'on fermât l'entrée
saint ministère. Il fut soupçonné depuis d'a- des monastères aux gens de guerre, qui
voir eu un commerce avec elle. Le fait n'é- avaient si grand besoin de pénitence, parce
tait pas certain. Saint Grégoire donna com- que c'était leur fermer l'entrée du ciel. Il de-
mission ù Jean, évèque dcGallipoli, de s'en mande donc à l'Empereur que ce qui leur
informer, et, s'il le trouvait vrai, d'interdire avait été permis jusque-là, le fût encore à
André de ses fonctions. Il y avait d'autres Il convient qu'il y en a plusieurs qui
l'avenir.
plaintes contre cet évèque, entre autres d'a- peuvent, sous un habit séculier, mener une
voir fait frapper cruellement à coups de bâton vie religieuse, mais aussi que la plupart ne
une femme du nombre de celles qui étaient im- peuvent être sauvés s'ils n'abandonnent tout ;

matriculées, c'est-à-dire, qui étaient nourries à quoi il ajoute que la puissance souveraine
et entretenues aux dépens de l'Église. Pour a été donnée aux princes sur tous les hom-
ce fait, saint Grégoire lui ordonna de s'abs- mes, afin que ceux qui tendent à la vertu,
tenir pendant deux mois de la célébration soient aidés et secondés par eux; que l'édit
des saints mystères. — Ses Adéo-
lettres à nouvellement publié paraissait contraire à
dat, primat de Numidie, et à Théodore, évè- cette disposition, puisqu'il déclarait nette-
que de Lilybée, sont pour les exhorter à ment, qu'après qu'on s'était enrôlé dans la
n'admetti'e au sacerdoce que des personnes milice séculière, il permis d'en-
n'était plus
d'ûge et de probité. trer dans la milice de Jésus-Christ, à moins
5. On avait commencé un baptistère dans d'avoir accompli le temps du seiTice, ou d'a-
l'église du monastère de Saint- .\ndré, ce qui voir été refusé pour faiblesse de complexiou.
était contre l'usage des monastères, et y ap- Il représente à ce prince les grandes faveurs

portait cpielques troubles. Saint Grégoire dont Dieu l'avait comblé en le faisant passer
écrivit donc à Secondin, évèque de Taormi- par tous les degrés d'honneur, de notaire,
ne, de le détruire, et de bâtir à la place un c'est-à-dire secrétaire d'iitat, de comte, de
autel pour y célébrer les saints mystères. — capitaine des gardes, de césar, d'empereur;
Il écrivit à Eutychius, évèque de 'l'indaro le pouvoir qu'il lui avait accordé sur les prê-
dans la Sicile, de continuer à travailler à la tres et. sur lesévèques d'où il conclut qu'il
:

conversion des idolâtres, en l'assurant qu'il ne pouvait sans ingratitude détourner ses
avait écrit au préteur de Sicile pour le pro- soldats du service de Celui de qui il avait
téger dans cette bonne œuvre. L'église de reçu tant de bienfaits. Il lui représente en-
Bénagna dans l'Ombrie était sans prêtres et core, qu'aucun de ces prédécesseurs n'avait
sans évèque le Pape chargea Chrysanthe,
; fait inie semblable ordonnance; qu'il était

évèque de Spolète, de pourvoir à ses besoins, dur de défendre d'abandonner le siècle, lors-
et daller en attendant administrer le bap- '•que ce siècle était sur sa fin; que si l'on dou-
,

•104 mSTOlRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSL\STIQLT:S.


tiiit qu'il y eût des soldais qui se fissent moi-

nes avec une droite intention, il était en état §1V.


d'en citer pliisieui-s de son temps qui avaient Livre quatrième des Lettres de saint
vécu avec tant d'édification depuis leur con- Grégoire.
yersion. que leur sainteté avait éclaté par des
miracles. Il conjure donc l'Empereur, ou de Après que Constantius eut été élu et con- K^M.t^

chanper cette loi, ou de la modérer par une sacré d'un consentement unanime évoque
nouvelle interprétation, l'assurant que, bien de Milan, saint Grégoire l'en félicita en lui ,

loin d'affaiblir parla ses armées qui combat- donnant les avis nécessaires pour la condui-
tent contre les ennemis de l'État, il les forti- te de cette église et en lui envoyant le pal-
,

fiera, en rendant plus nombreuses les ar- lium. Constantius, de son côté, avait envoyé
mées du Sei<rneur, dont les prières sont les au Pape sa confession de foi selon la cou- ,

armes les plus puissantes et les plus redou- >tume. Il n'y avait point parlé des Trois-Clia-
tables. Mais, pour marquer combien il était pitres; mais trois évêques de sa province,
soumis.aux puissances delà terre «J'ai en- : cherchant vraisemblablement h se séparer
voyé, Tui dit-il, votre ordonnance dans tou- de lui, firent courir le bruit qu'il s'était obli-
tes les parties du monde, après avoir pris la gé par écrit à condamner les Trois-C/iopitres,
liberté de vous représenter qu'eUe ne s'ac- et sous ce prétexte quittèrent sa commu-
corde pas avec la loi du Tout-Puissant; ainsi nion. Ils persuadèrent aussi à Théo- la reine

je me suis acquitté de ce que je devais des delinde de s'en séparer; elle veuve était

deux l'Empereur en pu-


côtés. J'ai obéi à d'Autarit, roi des Lombards; depuis la mort
bliant son édit; et jene mesuispas tù, lors- de ce prince, elle avait épousé Agilulfe, duc
uti:'. it. qu'il a fallu soutenir les intérêts de Dieu. » de Turin, qu'elle convertit à la foi catholi-
S. Grégoire eut recours aussi aux personnes que avec toute la nation des Lombards. Saint
qui avaient le plus de crédit ù la cour, nom- Grégoire, informé du procédé de ces trois
mément à Théodore, qui était le premier évêques écrivit en même temps deux let-
,

médecin de Maurice. Il avoue dans sa lettre, tres à Constantius. Dans la première qui ,

que Julien l'Apostat avait donné un édit était pour lui seul, il l'assure, qu'encore que

semblable mais il ne croit pas que ce prin-


;
Théodelinde se soit séparée de sa commu-
ce, ennemi de Dieu, doive servir de modèle nion, parce qu'elle avait été trompée il sa- ,

Lit'. Vl.l, à des empereui-s chrétiens. —


Soit que Théo- vait de bonne part qu'eUe ne tarderait pas
El..
dore eût employé son crédit auprès de l'Em- à y rentrer ; qu'il lui avait écrit sur ce su-
pereur, soit que ce prince eût été frappé des jet qu'à l'égard des trois évêques il ne
;
,

remontrances de saint Grégoire il modéra ,


doutait pas qu'ils ne dussent se repentir de
sa loi dans la suite, en permettant de rece- ce qu'ils avaient l'ail, aussitôt qu'ils auraient
voir les soldats à la profession religieuse, reçu sa Le Pape déclarait dans la se-
lettre.

après les avoir éprouvés par un noviciat de conde, qui était écrite pour être montrée aux
trois ans. — La dernière lettre du troisième évêques schismatiques qu'il n'avait été fait ,

livre est àDomitien, évéque de Mélitine et aucune mention des 7'ruis-C/iapitrcs entre
métropolitain d'Arménie, qu'il congratule de lui et Constantius. Il
y protestait en sa cons-
ce qu'il s'appliquait à l'élude des divines cience ,
qu'il conservait la foi du concile de
Écritures, et de ce qu'il avait prêché la foi à Chalcédoine sans oser rien ôlcr ni ajouter
,

l'empereur des Perses. Quoifpie ce prince à sa définition disant anathèmc à quicon-


,

n'en eût pas profité, il assure Domilien qu'il que croyait plus ou moins que ce que ce
ne sera pas moins récompensé de ses tra- concile avait décidé. Il ajoutait : « Celui Iqui
vaux un Élliinpien entre noir dans le bain,
:
n'est pas content de cette déclaration n'ai- ,

et il en sort noir; le baigneur toutefois reçoit me paj tant le concile de Chalcédoine, qu'il
le prix du bain. Il cite l'eiLplication spiri- ne liait l'Église notre mère, n Saint Gré- —
tuelle qu'il avait donnée du rapt de Dina, goire avait adressé i\ Constantius une troi-

rai)porté au chapitre xxxiv de la Genèse, et sième lettre pour la reine Théodelinde ;



soutient qu'on peut entendre ainsi cet en- mais cet évèque, sachant que le Pape y par-
droit de l'Écrilure sans déroger à la vérité lait du cinquième concile général-, ne jugea

de l'bistoire. pas à propos de la rendre A cette princesse


dans la crainte de la scandaliser. Sa con- —
duite fut approuvée de saint Grégoire qui ,
, ,

[vil* SIÈCLE.] CHAPITRE XLIX. — SAINT GRÉGOIRE LE GRAND, PAPE. 'M


lui envoya une autre lettre pour Tlit5odeliii- ques vivants des grands sièges, comme nous
(1(\ 011, so contenliint de louer les quatre y nommons le Pape.
lireuiiers conciles, il ne disait rien du cin- 2. L'n iiomuik'^ l']tiennc avait déclan; en KjI.i.j.

iiuième ; mais il exiiorlail cette reine ;ï écri- inouranl qu'il voulait (|ue l'on prit sur sa
re incessaïuincnl à Con.stautius pour lui té- succession les fonds nécessaires pour réta-
nioigner qu'elle agréait son ordination , et blissement d'un monastère ses héritiers ;

([u'elle embrassait sa communion. Ces let- ayant ni'gligé d'exécuter sa volonté à cet
tres, de même que toutes celles du ijuatriè- égard, saint Grégoire écrivit ;\ Janvier, évè-
me livre , sont de la douzième indiction ,
que de Cagliari, de les y contraindre en ,

de l'an 593.
c'est-i\-dire Le Pape, en par- — leur donnant l'année pour terme. — Il lui
''"

lant du concile de Conslantinople, que quel- ordonna aussi de députer un homme de pro-
ques-uns, dit-il, nomment le cinquième, di- biti;, tiré de son clergé pour prendre soin
,

sait i\ Constantius : u Vous devez savoir qu'il des monastères de filles, en sorte qu'elles
n'a rien' décidé contre les quatre précé- ne fussent plus obligées à l'avenir de sortir
dents; car on n'y a point traité de la foi, pour vaquer à leurs propres affaires vou- ;

mais seulement do quelques personnes, dont lant (lue. si quelqu'une dansétait loinljée
il n'y arien dans le concile de Chalcédoine; une faute considérable, il la fit renfermer
seulement après avoir fait les canons on
, , dans un autre monastère de filles dont la
agita quelque dispute sur ces personnes et , vie fut plus austère pour y faire pénitoiico
,

on l'examina dans la dernière action. » ,\in- dans les jeûnes et la prière. Il lui ordonna
si saint Grégoire ne comptait pour actes du encore de tenir chaque année deux conci-
concile de Chalcédoine que les sept premiè- les, et de faire mettre en liberté les esclaves

res actions qui comprenaient la définition


,
de juifs qui se réfugiaient dans l'église en
de foi et les canons, regardant tout le reste vue d'cmljiasser la foi catholique. Les prê-
comme des allaires particulières et sans ,
tres de l'ile de Sardaigne marquaient, à l'i-
conséquence pour ri<]glise universelle. — mitation des Grecs avec qui ils étaient en
Les citoyens de Brescia voulaient obliger relation, les enfants baptisés, sur le front,
Constantius de déclarer avec serment qu'il avec le saint chrême. Les évêques à qui ce ,

n'avait pas condamné les Trois- Chapitres. droit appartenait , suivant l'ancienne tradi-
Saint Grégoire lui écrivit sur cela « Si vo- : tion de l'Église , marquaient une seconde
tre prédécesseur ne l'a pas fait on ne doit , fois les enfants
sur le front avec le saint
pas vous le demander; s'il l'a fait, il a faus- chrême, lorsqu'ils leur donnaient la confir-
sé son serment et s'est séparé de l'Église
, mation. Saint Grégoire, trouvant de l'abus
catholique ce que je ne crois pas. Mais
, dans cette double chrismalion sur le front
pour ne point scandaliser ceux qui vous ont la défendit^ et, pour conserver aux
évêques
écrit envoyez-leur une lettre où vous dé-
, , leurs droits il ordonna que les prêtres ne
,

clariez avec anathème que vous u'alfaiblis- marqueraient plus sur le front avec le saint
sez en rien la foi du concile de Chalcédoine, chrême les enfants baptisés et qu'ils se ,

que vous ne i-ecevez point ceux qui l'aflai- contenteraient de leur faire l'onction sur la
blisseut, que vous condamnez tous ceux qu'il poitrine, afin que les évêques leur fissent
a condamnés, et justifiez tous ceux qu'il a ensuite celle du front. —
Ayant appris de- se
justices. Quant au scandale qu'ils prennent puis, que quelques-uns avaient été scanda-
de ce que vous ne nommez pas à la messe lisés de cette défense, il permit aux piètres
notre confrère Jean, évèque de Ravenne il , de aux baptisés l'onction du chrême
faire
faut vous informer de l'ancienne coutume sur le front au défaut des évêques disant
,
,

et la suivre. Sachez aussi s'il vous nomme à qu'il ne l'avait défendu d'abord, qu'eu
égard
l'autel car, s'il ne le fait pas, je ne vois rien
: à la coutume ancienne de l'église de Rome,
qui vous oblige à le nommer, » C'était donc qui réservait cette chrismation à l'évêque.
l'usage alors de nommer à l'autel les évé- On voit par là que les usages étaient dillé-

' De illa lamrn synodo quœ in Constantinopoli autem de fide aliquid gestum est, et de his per-
pnstmodum fada est, quœ a multis quinta noini- sonis de quibus in Chalcedonensi
concilio niltil
naiur, scire vos vulo quia nihil contra quatuor conlinctur ; sedpost expresses canones
fada con-
sanctissimas synodos conslitueril, vel senserit ; tenlio, et exlrema actio de personis ventila ta
quippe quia in ea de personis tantummodo, non est. Gr eg.lib. IV, Epist. 39.
496 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIAS'nQUES.
irnts sur ce point enlre les églises d'Occi- retrouverait, afin de pouvoir, au retour de
dent, comme ils le sont encore entre les la paix, les rendre à qui ils appartenaient; E|i-i. n.
Grecs et les Latins. — à Félix, évêque de Siponte, de restituer,
Epi-'i. 10. 3. Il aux dvêqnes de Dalmatie de
dofeuilit des denit.'rs de l'Église, douze sous d'or à
choisir sans son tousenlement un évcquc celui qui avait délivré pareille somme poui"
pour Saloue, leur accordant néanmoins pour le rachat du clerc Tribun. — Il donna a l'abbé

cette fois ce pouvoir, pourvu (pie tous les Maur et à ses moines l'église de Saint-Pan-
suÛ'rages se réunissent sur une même per- crace, afin qu'ils y fissent l'ollice divin sur
sonne, et que ce ne fiil pas un nommé Ma- le tombeau du saint martyr, à la charge

xime, dont on lui avait dit beaucoup de mal. aussi d'entretenirun prêtre pour la célébra-
'• — Il était d'usage dans l'Église de Rome de tion des saints mystères. Ce prêtre est ap-
partager en quatre les revenus, dont une pelé étranger, par opposition au prêtre car-
partie était pour l'évèque, une autre pour le dinal, qui était fixe, et attaché particulière-
clergé, la troisième pour les pauvres, et la ment à la desserte d'une église, au lieu que
quatrième^.pour la réparation des bâtiments l'étranger n'était que pour un temps il était;

de l'Église. Les évoques de Sicile suivaient nourri dans le monasière, d'où il recevait
ausssi cet usage, mais seulement pour les aussi de quoi sullire aux autres besoins de
revenus anciens de leurs églises, et ils tour- la vie.

naient à leur usage particulier tous les nou- 4. Les ariens s'étaient emparés, sous les

vi-aux. Saint Grégoire chargea Maximien de rois goths, de l'église de Sainte-Agathe, où


Syracuse de les obliger ;\ faire quatre parts, ils tenaient leurs assemblées, et l'avaient en-
tant des nouveaux que des anciens revenus richie de plusieurs donations. Cette église
de l'Église, et d'en faire une distribution ayant été rendue aux catholiques, saint Gré-
conforme aux canons. Il le chargea aussi goire commit l'acolyte Léon pour prendre
d'empêcher que l'on ne choisît pour abbé soin des revenus qui y étaient attachés, et

d'un monastère un clerc attaché à quelque pourvoir à ses réparations et aux luminaires.
église particulière, et qui ne fût pas moine, — En permettant aux évoques de Dalmatie
ou de l'obliger, en cas qu'il eût été choisi d'élire un évêque pour Salone, il avait exclus
abbé, de quitter l'église à laquelle il était nommément Maxime ils le préférèrent tou- ;

attaché pour vivre dans le monastère et


,
tefois à l'archidiacre Honorât, qui avait été
y faire les fonctions d'abbé de veiller à ; élu par le clergé de Salone. Maxime obtint
ce que l'on fit des inventaires des biens de un ordie de l'Empereur qui confirmait son
l'église après la mort de l'évèque, et que ces élection, et le fit exécuter à maius armées.
inventaires se tissent gratuitement de faire ; Saint Grégoire, informé de ces violences,
défrayer les visiteurs des églisffs, avec les lui écrivit pour lui déclarer, qu'il tenait pour
clercs de leur suite d'empêcher qu'on ne; subreptice ou pour faux l'ordre de l'Empe-
choisit pour abbesses de monastères de fil- reur : « nous n'ignorons ni vo-
Car, dit-il,

les, des personnes moins âgées que d'onvi- tre vie ni votre âge, et nous savons l'inten-
u. ron soixante ans; —
de punir le crime tion de l'Empereur, qui n'a pas coutume

d'un homme qui iivait enlevé la femme d'un de se mêler des affaires des évèques, pour
u. autre, et l'av.nit vendue ;
— de recevoir dans ne pas se charger de nos péchés. Nous ne
son église le diacre Félix, qui était revenu pouvons donc nommer ordination une ci-ré-
ù l'unité de l'Église, après s'en être séparé monie qui a été faite par des excommuniés;
„. pour la cause des Trois - Chapitres de ;
— et jusqu'à ce que nous sachions par les let-

faire rendre à Enplus les biens de sa mère, tres de l'Hlmpereur ou de notre nonce, que
qu'Eusanius son père avait retenus étant vous avez été ordonné véritablenuMit par son
évoque et dont il n'avait point disposé
, ,
commandement nous vous défendons , à,

II. étant mort sans testament. ordonna à — Il vous et à vos ordinateurs, de faire aucune
Janvier de Cagliari de seconder Théodosie fonction sacerdotale, ou d'approcher du saint
dans le dessein où elle était de faire de sa autel jusqu'à notre réponse
,
le tout sous ,

!(. maison un monastère au diacre Cyprien;


— peine d'auathèinc. d —
Il manda à Vcnance,

de ramasser les vases sacrés que divers prê- évêque de Luna ou la Magra, d'empêcher que
tres d'Italie avaient emportés avec eux dans les juifs n'eusseul à eux des esclaves chré-

leur fuite en Sicile, et de les remettre entre tiens, mais de permettre à ceux des chré-

les mains des évêques des lieux où ils les tiens qui cultivaient les terres des juifs, de
,

[vil» SIÈCLE.] CHAPITRE XI.IX. — SAINT GRÉfiOIllE LE GRAND, PAPE. 497

loin- (Ml payer Ips redevances onliiiaires. — rendre compte h certains temps en sorte ,

Epiii. -'S. 11 [laiait ([lie cet de fer-


i'vi'i|iie iiiaminait qu'ils ne disposassent de rien h son insu de ;

nielc^ ou qu'il avait allaiic iin peuple dif- i'i priver de la communion celui qui avait ac-
ficile, puisque, comme il ne pouvait le ré- cusé de crimes le prêtre Kpi[)liane, s'il ne se
duire à vivre suivant les r6gles de la disci- trouve point en étal de prouver ce qu'il avait
pline, le Pape fut obligé de le. faire seconder avancé contre lui; de punir d'abord cor-
!<,îi. par Constanlius, évèquc de Milan. On voit — porellement puis de mettre en pénitence
,

par les lettres qu'il écrivit ;\ Hospiton, duc le clerc Paul convaincu de nombreux ma-
,

des Barbaricicus, et ù Zabarda, duc de Sar- léfices, et coupable d'avoir quitté l'état clé-

daigne, combien il s'intéressait à la conver- rical pom' s'enfuir en Afrique de s'oppo- ;

sion de ces peuples, qui étaient cnc|^-e ido- ser à l'abus qui se glissait de prendre de
u. latres. — Ils occupaient une partie de la l'argent pour les ordinations les maria- ,

Sardaigne ; c'est pourquoi il pria les nobles ges et la bénédiction des vierges; de réta-
et les propriétaires des terres de cette île, blir dans la communion des saints mystères

de ne point empècbcr la conversion des ceux qu'on en avait piivés pour avoir épousé
paysans qu'ils occupaient ti les cultiver. « Ils des filles sorties de leurs monastères, pourvu
vous sont, leur dit-il, confiés pour vous ser- toutefois qu'ils aient fait pénitence de ce cri-
vir dans vos intérêts temporels afin que , me. Il remarque que, sui\'ant les canons, il
vous pi'ocuriez à leurs âmes les biens éter- n'était point permis de communiquer avec
nels s'ils font leur devoir, pourquoi ne fai-
: ceux qui étaient excommuniés.
t^p'"-'"-
tes-vous pas le vôtre? » Il envoya, pour con- 5. L'impératince Constantinc lui avait de-
vertir ces paysans, Félix, évéqiie en Italie, mandé chef de saint Paul ou quelque au-
le

et Cyriaque, abbé de Saint-Audié de Home, tre partie de son coips, pour mettre dans
parce que les évoques de Sardaigne n'étaient l'église que l'on bâtissait à l'honneur de ce
pas assez zélés, jusque - là que Janvier, évo- saint apôtre dans le palais de Constantino-
que de Gagliari, ni ,'tropolilain de la province, ple. Saint Grégoire lui fit réponse qu'il ne
avait des serfs de sa propre église qui étaient pouvait ni n'osait faii-e ce qu'elle lui ordon-
se. encore païens. Saint Grégoire lui en fit des nait, parce que les corps des apôtres saint
reproches, ajoutant dans sa lettre « Si je : Pierre et saint Paul étaient si redoutables

puis trouver un évêque de Sardaigne qui ait par leurs miracles, que l'on ne pouvait en
un paysan païen, je l'en punirai sévèrement; approcher, même pour prier, sans être saisi
et si ce paysan demeure obstiné dans son d'une grande crainte; que son prédécesseur,
infidélité, il faut le charger d'une si forte ayant voulu changer un ornement d'argent
taille, qu'elle l'obiige à entendre raison. » Il qui était au-dessus du corps de saint Pierre,
se plaint encore ;\ Janvier de ce qu'en Sar- quoique à une distance d'environ quinze
daigne on rétablissait en leurs fonctions des pieds, eut une vision terrible. « Moi-même,
clercs qui étant dans les ordres sacrés
, ajoute le Pape, j'ai voulu opérer qùelcpie
étaient tombés dans des péchés de la chair : amélioration près du corps de saint Paul :

ce qu'il défend absolument comme con- , comme il fallut creuser un peu plus à fond
traire aux saints canons, quand même ces auprès de son sépulcre, le supérieur du lieu
clercs auraient fait pénitence. Pour parer trouva quelques os, qui néanmoins ne tou-
à cet inconvénient, il veut que l'on examine chaient pas au tombeau, et les transporta
avec soin ceux que l'on ordonne ont gardé
si en un autre endroit eh bien il en mourut
; !

la continence pendant plusieurs années, s'ils subitement, après une triste apparition. Mon
ne sont point bigames, s'ils sont affection- prédécesseur, voulant faire quelque répara-
nés à l'aumône et à la prière. Il le charge tion près du corps de saint Laurent, comme
de communiquer sa lettre à tous les évé- on fouillait sans savoir précisément le lieu
j7. ques de sa dépendance. Dans une autre — où il était, on ouvrit tout d'un coup le sé-
lettre, il]lui ordonne d'établir, pour adminis- pulcre mais les moines et les mausionnai-
;

trateurs des hôpitaux des personnes de , res ou gardiens de l' église, qui y travaillaient,
bonne vie et d'industrie, qui fussent clercs mom-urent tous dans l'espace de huit jom-s,
et exempts de la juridiction séculière, afin pour avoir vu le saint corps, quoiqu'ils n'y
que les magistrats n'eussent aucun prétexte eussent pas touché. Sachez donc'. Madame,
de les molester,
ni de piller_les biens des pau-
vres; d'obliger ces administrateurs de lui '
Cognoscat autem tranquiUissima Domina quia
XI. 32
498 HISTOIRE GENERALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
que la coutume des Romains, quand ils don- eflcctivement les os des saints. » Saint Gré-
nent des reliques des saints, est de ne pas goire ajoute qu'au temps du martyre de
touclier aux corps, mais de mettre seule- saint Pierre et de saint Paul des fidèles ,

ment dans une boîte un linge que l'on dé- venus d'Orient répétèrent leurs corps en ,

pose auprès du corps saint qu'ensuite on ;


qualité de leurs concitoyens ; on conduisit
l'en retire, et l'enferme on avec la vénération ces corps il deux milles de la ville, et on
convenable dansl'église que l'on doit dédier, les plaça dans les catacombes; plusieurs
et il s'y fait autant de miracles que si l'on y de ces Orientaux s'étant mis en devoir de
avait transféré le corps. Voici ce qui arriva les tirer de là, il survint une tempête mêlée
du temps de saint Léon, d'heureuse mémoire : d'éclairs et de tonnerre qui les contraignit
les Grecs doutant de la vertu de ces reliques, de se désister de leur entreprise alors les ;

ce Pape se fit apporter des ciseaux, et cou- Romains, à qui Dieu avait accordé cette
pa le linge, d'où il sortit du sang, ainsi que grâce, sortirent de la ville, tirèrent les corps
le rapportent nos anciens. Non-seulement à des catacombes au lieu
et les transférèrent
Rome, mais dans on regarde
tout l'Occident, où ils en conclut qu'il y
sont aujourd'hui. Il

comme uni sacrilège de toucher aux corps aurait de la témérité, non-seulement à tou-
saints c'est pourquoi nous sommes fort
; cher à ces corps, mais même à les regarder;
sui'pris de la coutume qu'ont les Grecs d'en- que le commandement que lui faisait l'im-
lever les os des saints, et nous avons peine pératiice ne venait point d'elle, mais de ceux
à le croire. Quelques moines de leur pays, qui voulaient lui faire perdre à lui-même les
étant venus ici il y a environ deux ans, dé- bonnes grâces de cette princesse. 11 refusa
terraient de nuit des corps morts, dans un aussi d'envoyer à Constantine le suaire de
champ près de l'église de Saint-Paul, et ser- saint Paul qu'elle avait demandé ; la raison
raient les os ; étant pris sur le fait et inter- de ce refus était que, ce suaire étant avec le
rogés exactement pourquoi ils le faisaient, corps, il n'était pas plus permis de le tou-
ils confessèrent qu'ils voulaient emporter ces cher que d'approcher du corps mais afin ;

os en Grèce comme des reliques. Cet exem- de ne pas frustrer son pieux désir, il lui pro-
ple nous a fait d'autaut plus douter s'il est mit de lui envoyer incessamment quelque
vrai, comme on le dit, que l'on transpoi-te particule des chaînes que saint Paul avait

Rovianis consuetudo non esl, quando sanctorum apostolorum quid ego dicturiis sum, dum constel
reliquias dant, ut quidquam taiigere prwsumant quia eo tcmpore quo passi sunt, ex Oriente fidè-
de corpore; sed lanlum in pixide brandcum mil.- les venerunt, qui eorum ciriiora sicut civium
titur, atque ad sacratissima corpora Sai iloritm suorum repclcrcnt f quœ ducta usque ad secvn-
ponitur. Quod levatum in Ecclenia quw est dedi- dum urbis millinrium, in loco, qui dicitur rata-
candn, débita cum vem ratione recondilur et tan- ; cumbas, collocata sunt; sed dum ea exinde le-
tœ per hoc ibidem virtutes fiunt, ac si illiic spe- vare omnis eorum mulliludo conveniens nitere-
cialiter eorum corpora defcrunlur. L'nde conligit tur, ila eos ris tonitrui atque fulguris nimio metu
ut biata: recordationis Leonis Papœ tcmpore, si- Icrruit atque dispersit, ut tnlia dcnuo nullalenns
cul a majoribiis tradilur, dum quidam Gra-ci de attentare prwsumcrent; lune aulem excuntesRn-
talibiis reliqtiiis duliiltirenl, prœdictMs Pontifex mani, eorum corpora, qui hoc ex Domini pietale
hoc iiisum brundeum, altatis forficibus, incidcrit, meruerunt, letarerunt, et in loris quihus nunc
et ex ipsa incisione sanguis e^liixerit. In Romanis sunt condita,posuerunt...Sudjrium vero quod si-
namque vel totius Occidentis parlibus omnino mililcr transmitti jussistis,cum corpore ejus esl,
intolerubile est atque sacrilegnm, si sanctorum quod tangi non polesl, sicut nec ad (orpxtë
ita
corpora tangcre quisqnam fortasse voluerit.... illius accedi: sed quia sercnissimœ Dominw tam
prit qua rc de Crwcorum consuetudine, qui ossa religinsum deMderium esse vacuum non débet, de
levare sanctorum se asscrunt, vehementer mira- catenis qtias ipsc sanctus Paulus aposlolus in
viur, et vix credimus. Nam quidam monuihi eollo et inmanibus gestavil, ex quibus mulla mi-
Gra'ci hue antc biennium vcnientcs, noclurno si~ racula in populo demonslrantur parlem ali- ,

lentio, juxla Ecclesiam sancti Pauli, corpora quam robis transmitterc festinabo, si tamenhanc
morluorum in camp j jacentia effodiebant. alquc lolhre limnndo prwraluero: quia dum fréquen-
eorum ossa recoudehant, servantes sibi dum re- ter ex catenis cisdem multi venicntes bencdittiO'
cédèrent. Qui cum detecli, et cur hoc faccrenl di- nem petunt lit parcum quid ex limatura acci-
ligcnlir fuexient discussi, coufcssi sunt quod illa piaitt, assistil s<icerdns cum lima, et atiquibul
ussa ad Grœciam essenl tanquam sanctorum rc- ]icteiilibus ita concile ntiquid de catenis ipsis ex-
liquiiis portaturi. Kx quorum crfmplo, sicut culilur, nt mnra nulla sit ; quibnsdam rcro pc-
prndirlum est, major nobis dubiclas nata est, lenlilius, iliu per calenas ipsas ducilur lima, et
ulrum vcrum sit quod Iciure viracil(r oS!>a sanc- tanien ut aliquid indeexeatnon obtiiielur.liTe^.,
torum (licuntur. Vc corporibus vcro bealorum IV, Episl. 30, ad CoiisUuitiuam Aii{j(uslau].
lil>.
[vii« SIÈCLE.] CIÎAIMTRE Xl.IX. — SAINT GllKCOIIlK l.E GRAND, PAPE. 'r!)()

portées au cou et aux mains, cl ([ni faisaient doute, promellanl de les convaincre, ou de
l)Cancoup lic miracles, si Idulcfois il pouvait les laisser retourner en liberté.

en emporter tpiel']ue chose avec la lime :

« Car ou vient souvent dit-il, demander de ,


§ V.

cette limaille; l'évèque prend la lime, et Livre cinquième des Lettres de Saint Grégoire.
quelipu^l'ois il eu tire dos particules en un
moment, quelquefois il lime longtemps sans \. Toutes ces Lettres sont de la treizièuK! Bpisl. 3.

rien tirer. » de l'an 394. Dans celle


indiclion, c'est-à-dire,
K|i>r. 31. G. L'amitié que saint firégoire avait pour qui est adressée Venance, évoque de Luua,
;"i

Théoilore, médecin d(! l'Empereur, ne se bor- saint Grégoire lui ordonne de déposer pour
nait point h un simple commerce de lettres, toujours un prêtre, un diacre et un sous-dia-
ni des bienséances humaines elle avait un
i"! ; cre, coupables de péchés d'impureté, et de
objet plus solide, qui était son salut. Il reçut leur accorder la communion seulemeut par-
de lui une somme d'argent pour le soulage- mi les laïques, après qu'ils auraient l'ait péni-
ment des pauvres et le radial, des captifs. tence. Il ajoute qu'il lui envoie un habit pour
Après l'en avoir remercié, il lui reproche cha- une femme qu'il devait baptiser, et un exem-
ritablement de ce que, toujours occupé d'af- plaire de sou Pastoral pour
le prêtre Columb.
faires temporelles, il ne prenait pas le loisir — Dans une autre lettre àVenance, il lui ilit
de lire les divines Ecritures, (ju'il appelle les d'examiner s'il était vrai que le prêtre Satur-
paroles du Rédempteur, et la lettre de Dieu nin, dépq^é pour crime, eût célébré depuis
tout-puissant ;\ sa créature. « Si vous étiez, lui sa déposition; qii'en ce cas, il lui interdit la
tlit-il, (Uoigné de la cour, et qu'il vous vînt une communion du corps et du sang de Jésus-
lettre de la part de l'Empereur, vous n'auriez Christ jusqu'à la mort, où il recevrait seule-
point de repos, vous ne vous coucheriez pas ment le viatiqueque si le fait n'était point
;

sans l'avoir lue. L'Empereur du ciel, le Sei- vrai, et que Saturnin eût faitpéuilencc, il lui
gneur des homn;es et des anges vous a en- accordât la communion parmi les laïques. —
voyé des lettres où il s'agit de votre vie, et La lettre à Constantius, évêque de Milan, est
vous n'avez aucune ardeur pour les lire. Etu- encore pour punir quelques ministres de l'É-
diez, je vous en conjure, et méditez tous les ghse qui s'étaient rendus coupables de gran-
jours les paroles de votre Créateur, d Ensuite des fautes. —
Celle à Dominique, évêque de
il lui recommande Narsès, et, pour lui don- Garthage, est un éloge du zèle qu'il faisait
ner lieu de penser quelquefois à lui, il dit paraître contre les donalistes mais saint ;

qu'il lui envoie june cane avec deux de ses Grégoire y désapprouve le décret du concile
petits, qui étaieui apparemment remarqua- d'Afrique, portant-privation de biens ol de
bles par leurs plumages ou par quelque au- dignités contre les évêques négligents à lé-
31. tre endroit. —
Le patrice Narsès l'avait prié sister à ces hérétiques. Il regarde ce décret
de le recommander à Théodore. Saint Gré- comme contraire à la charité qui doit unir les
goire l'assm-a qu'il s'était acquitté de sa évcquos, et qui par celte union les met plus

»o. commission ;

Mais il n'eut aucun égard en de s'opposer ii l'erreur.
élal Ayant ouï —
à la letti-e que le scolastique Marcel lui dire qu'un médecin nommé Anastase se con-
écrivit en faveur de Maxime, élu, contre les duisait mal, il écrivit à Victor, évêque de Pa-
règles, évêque de Salone, et déclara que, si leime, de lui défendre l'entrée d'un monas-
Maxime osait célébrer les saints mystères, tère de filles. —
Sa lettre au diacre Cyprien,
il le priverait de la communion du corps et recteur du patrimoine de Sicile, est pour l'en-
,,, du sang de Jésus-Christ. — Il défendit à gager à travailler à la conversion des mani-
l'abbé Valentin de donner entrée aux fem- chéens et des juifs qui demeur.iient sur les
mes dans son monastère, comme on disait terres de l'Église. Il veut qu'il diminue les
de permettre à ses'moi-
qu'il l'avait fait, et rentes à ceux qui se convertiront, et qu'il les
nes de se donner des commères spirituel- en avertisse. —
Il lui écrivit encore au sujet

,3
les. —
Il parait par sa lettre ù Boniface, de l'élection d'un prêtre de Syracuse, après
homme de la première qualité, qu'il lui en la mort de Maximien le prêtre Trajan lui
;

avait écrit plusieurs autres sur des matièi'es paraissait être celui sur qui tomberait la plus
de religion, sans qu'il l'eût pu faire changer grande partie des suflrages, mais il ne le
de sentiment. Il le presse devenir à Rome croyait pas propre pour gouverner celle éali-
avec ceux qui étaient comine lui dans le se il aurait mieux aimé Jean, arclùdiacie de
;
500 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTELTÎS ECCLÉSI.\ST10UES.
Catane. Il dil donc à Cyprien de faire là-des- vanité pouvait produire, soit en troublant la
sus ce qui serait possible, ne doulaut pas que paix de ri;i;lise, soit endivisani les membres
Léon, évêque de Cataue, ne cédai ce sujet à de Jésus-Christ, taxant de nouveauté le li-

l'église de Syracuse; car les clercs étaient tre qu'il all'eclait de prendre, puisque en ef-
tellement attachés à une église particulière, fet ni les prophètes, ni les apôtres, ni aucun
qu'on ne pouvait les en tirer, même pour dos saints, ne s'étaient rien attribué de sem-
les faire évèqucs sans l'agrémenl du diocé- blable avant la loi, sous la loi et sons la
sain. grâce. Il ajoute qu'il savait apparemment
Ep.si. is-13. 2. Jean, patriarcbc de Conslantinople, que le concile de Chalcédoinc offrit cet hon-
ayant rendu un jugement contre un prêtre neur aux évêques de Rome, en les nommant
accusé d'hérésie, eu envoya les actes à saint universels mais qu'aucun ne l'a voulu rece-
;

Grégoire, dans lesquels il prenait presque à voir, de peur qu'il ne semblât s'attribuer
chaque ligne le litre de patriarche universel. seul l'épiscopal et l'ôter à tous ses frères.
Le saint Pape, pour garder les règles de la Après l'avoir exhorté â prendre des senti-
correction fraternelle, lui fit dire deux fois ments plus humbles, promet de lui répon-
il

par son nonce de s'abstenir de ce titre fas- dre sur l'aflairc des prèlres Jean cl Atha-
tueux puis il lui en écrivit une assez longue
;
nase. —Cependant Jean, patriarche de Cons-
lettre, datée du premier janvier de l'an ot)o, tuntinoplc, avait engagé l'Lmpereur à écrire
qu'il commence en ces termes u Vous vous
: â saint Grégoire en sa faveur. Sabinien, nonce
souvenez de quelle paix jouissaient les égli- en cette ville, se chargea de faire passer â
ses lorsque vous avez été élevé à l'honneur de Rome la lettre de ce prince, sans s'aperce-
l'épiscopal, et je ne sais comment vous osez voir de l'artifice du patriarche. Le Pape le i".

prendre un nouveau nom capable de scan- lui découvrit en lui disant Jean espère
: (i

daliser tous vos frères. Ce qui me surprend autoriser sa vaine prétention, si j'écoule
extrêmement, c'est que vous ayez voulu fuir l'Empereur, ou l'irriter contre moi, si je ne
l'épiscopal, et que maintenant vous en vou- l'écoute pas mais je marche le droit che-
;

liez user comme si vous l'aviez recherché min, ne craignant en cette affaire que Dieu
par un motif d'ambition. Vous vous décla- seul. Ne craignez rien non plus,; méprisez
riez indigne du nom d'évêque à présent, ; pom' la vérité tout ce qui paraît grand en ce
vous l'ambitionnez de telle façon que, mé- monde, et vous confiant en la grâce de Dieu
prisant vos frères, vous voulez le porter seul. et au secours de saint Pierre, agissez avec

Pelage, mon prédécesseur de sainte mémoi- une grande autorité. Puisqu'ils ne peuvent
re, vous écrivit sur ce sujet des lettres très-for- nous défendre des épées de nos ennemis, et
tes, où il cassa les actes du concile que vous qu'ils nous ont fait perdre nos biens pour sau-
aviez tenu en la cause de notre frère l'évèque ver l'Ktat, c'est une trop grande honte qu'ils
Grégoire, et défendit à i'arcliidiaci-e qui était nous fassent encore perdre la foi par le con-
son nonce auprès de l'Empereur, d'assister à sentement que nous donnerions à ce titre
la messe avec vous. Depuis qu'après sa mort criminel. » Saint Grégoire traite celte contes- Fitiir.,iii.

je suis appelé au gouveinemeut de ri'^glise, talion de question de foi, parce qu'elleclive- rBisi.Efci*».

je vous en ai fait parler par mes autres non- ment la foi ne permet pas de reconnaître un pig.' s;. '

ces, et maintenant par le diacre Sabinien, seul qui soit évêque, et duat les autres ne
auquel j'ai défendu d'assister à la messe soient que les vicaires; et il prévoyait les
avec vous en cas que vous continuiez à
,
suites funestes de l'ambition des évêques de
prendre ce vain titre et, parce qu'il faut
; Conslantinople, qui n'a que trop éclaté dans
loucher les plaies doucement avec la main les siècles suivants. — Saint Grégoire, en ré- Ki.ii.s*.

avant d'y porter le fer, je vous prie, je vous pondant h que l'empereur Maurice
la lettre
conjure, je vous demande avec toute la dou- lui avait éciite, loue son zèle pour la paix ;

.;eiir possible, de résister à ceux qui vous mais 'ne doutant pas que ce prince n'eilt
lîatlent et qui vous attribuent ce nom plein été surjiris par le patriarche Jean, il le lui

d'extravagance et d'orgneil. n II plaint le fait coimaîtrc, en lui disant que, sous un


sort de Jean, de n'avoir jni jusijue-I.-^ être cxtc'-rieur iuorlifi('', il cachait un esprit enllé
rappelé à des sentiments d'humilité, lui qui d'orgiu'il, et des dents de loup sous la faco
n'avait été élevé à l'épiscopal que pour en- de brebis. « La conduite et la jirimaulé de
seigner l'humilité aux autres, et lui lepn;- toute l'Église a été donnée, ajoutc-l-il, à
sente a\cc force ks suites lâcheuses que sa saint Pierre; toutefois on ne l'appelle pas
[vil" SIÈCLE.] CHAPITRE XLIX. —SAINT CRKOOIRE LE GRAND, PAPE. 501

apôlro universel. Tdiile l'Europe est livrée ques réglées auprès de l'Empereur par le
aux barbares, les villes sont détruites, les crédit des autres. « S'il en est ainsi, dit-il,
forlcresses ruinées, les provinces ravagées, que fais-je dans cette église? » —
Il était de
£(iiii. ta.

les terres incullcs, les idolâtres maîtres de l'inlérôt de tiuis les i)atriarch('s de réprimer la
la vie des fidèles évoques, qui de-
; cl les prétention do celui de Constantinople c'est :

vraient pleurer prosternés sur la cendre, pourquoi saint Grégoire écrivit une lettre
clierclient de nouveaux titres pour contenter commune à saint Eulogc d'Alexandrie et à
leur vanité. Est-ce ma cause particulière que saint Anastascd'Antioche, pour les exciter à
je défends ? n"est-cp pas celle de Dieu et de l'I*]- confondre unanimemenl l'orgueil de Jean. Il
!;lise universelle? Nous savons que plusieurs reprend cette contestation dès son commen-
évoques de Constantinople ont été non-seule- cement, racontant tout ce que Pelage et lui
ment hérétiques, mais hérésiarques, comme avaient fait pour empêcher ce patriarche de
Nestorius et Afacédonius. Si donc celui qui s'attribuer le titre d'évèque universel, sans
remplit ce siège élait évêque universel, toute avoir pu y réussir. « Ne donnez, leur dit-il,
l'Eglise tomberait avec lui. Pour moi, je suis jamais ce titre à personne dans vos lettres,
le serviteur de tous les évêques, tant qu'ils de peur qu'en accordant à un autre un hon-
vivent en évêques mais si quelqu'un élève; neur qui ne lui est pas dû, vous ne vous pri-
sa tête contre Dieu, j'espère qu'il n'abaissera viez vous-mêmes de celui qui vous est dû.
pas la mienne avec le glaive. .\yez donc la N'ayez sur ce sujet aucun mauvais soupçon
boulé de juger vous-même cette affaire, ou de l'Empereur il craint Dieu et ne fera rien
;

d'obliger Jean ;\ quitter sa prétention. Pour contre les préceptes de l'Évangile, ni contre
obéir à vos ordres, je lui ai écrit avec humi- les saints canons. Encore qu'éloigné de vous
lité et avec douceur s'il veut m'écouter, il a ; par de longs espaces de terre et de mer, je
en moi un frère entièrement dévoué sinon, il ; vous suis uni de cœur, et j'ai confiance que
aura pour adviu'sairc celui qui résiste aux vous êtes dans les mêmes sentiments à mon
superbes. I) égard. Unissons-nous donc pour combattre
Episi. 21. 3. Il Constan-
écrivit aussi à l'impératrice dans cet homme le mal de la vanité qui le
linc, pour l'exhorter à continuer de s'oppo- domine, afin de le délivrer de son ennemi,
ser aux entreprises du patriarche, qu'il dé- c'est-à-dire de son erreur le Tout-Puissant
:

peint comme un vrai hypocrite, et pour se nous aidera de son secours. Si l'on permet
plaindre de la protection que l'Empereur lui à Jean d'user du titre d'évèque universel,

accordait, ainsi qu'à Maxime de Salone. « Il on dégrade tous les patriarches et quand ;

est bien triste, dit-il, que l'on souffre patiem- celui qu'on nomme évêque universel tom-
ment celui qui veut être appelé seul évêque, bera dans l'erreur, il ne se trouvera plus d'é-
au mépris de tous les autres. Son orgueil ne vèque qui soit demeuré dans la vérité. Soyez
nous fait-il pas voir que l'avènement de l'an- constants à garder vos Églises telles que vous
techrist est proche ? Je vous prie, au nom les avez reçues : préservez de cette corruption
de Dieu tout-puissant, de ne pas permettre tous les évêques qui vous sont soumis, et
que votre règne soit souillé par la vanité montrez que vous êtes véritablement pa-
d'un seul homme ne consentez en aucune ; triarches de l'Église universelle. S'il survient
façon à ce titre pervers, et ne me méprisez quelque adversité, demeurons unanimes,
point dans celle alt'aire ;car encore que je le montrons même en mourant que ce n'est
mérite à cause de la grandeur de mes pé- pas notre intérêt particulier qui nous fait
chés, saint Pierre n'en a point qui puissent condamner ce titre. Comme nous n'avons
lui attirer un tel traitement sous votre rè- reçu notre rang que pour prêcher la vérité,
gne. )) Il rapporte ensuite les raisons qu'il il est plus sûr de l'abandonner pour elle,
avait eues de s'opposerà. l'élection de s'il est besoin, que de le conserver. »

Maxime pour de Salone, et la ma-


l'église î. Romain, exarque de Ilavenne, était ac-

nière dont il avait puni sa désobéissance et, ; cusé de protéger certaines filles qui, après
parce rpie rEmporeurlui avait écrit de rece- avoir porté longtemps l'habit et le voile de
voir Maxime avec honneur, il témoigne être religieuses s'étaient mariées. Saint Gié-
,

prêt à obéir à ce prince, mais en ne dissi- goirc liy en écrivit, pour le détourner de
mulant pas qu'il lui paraissait dur de rece- prendre part au crime dont ces personnes
voir honorablement un liomme prévenu de s'(Uaient souillées, ajoutant que les intérêts

tant de crimes, et de voir les causes des évè- de Dieu ne lui permettent pas de le laisser
502 mSTOIRE GÉM-.RALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Epi=i. 31. impuni. —
On voil par la letlie aux fermiers térêt de l'État et la perte «le l'Italie; croyez
du patrimoine de saint Pierre dans les Gau- aux ell'ots plus qu'aux paroles. Ne vous lais-
les, que ce patrimoine consistait plus en sez point aller aisément au mépris pour
si
" fonds de terre qii'en argent. Celle au — les évèques par la puissance terrestre que
scholastique Sévère est pour le prier d'en- vous avez sur eux mais soyez tellement ;

gager l'exarque de Ravcnne à faiie la paix leur maître, que la considération de celui
avec Agilulpbe roi des Lombards
, pour ,
dont ils sont les serviteurs vous porte à avoir
empêcher la ruine totale de plusieurs îles pour eux du respect. Ils sont quelquefois
''•
et de divers autres endroits. —
Il y en a une appelés dieux daus l'Éciilurc, et quelque-
à Forlunat, évoque de Xaples, où saint Gré- fois anges. » il rapporte l'exemple du grand
goire le charge de dédier un monasti'-re en Constantin, qui, ayant reçu des libelles d'ac-
l'honneur de saint Pierre et de saint Michel cusation contre des évèques, les brûla en
archange, et d'y envoyer des prêtres de son présence d'autres évèques, en leur disant :

Soirtm.
église pour la célébration des saints mystè- « Vous êtes des dieux établis par le VTui llli. I, car. 16.

res, eu réservant toutefois aux moines les Dieu allez juger entre vous vos propres af-
;

" oblalions des fidèles. —


11 envoya un exem- faires, parce qu'il n'est pas digne que nous
plaire des Évangiles à Élie, prêtre et abbé jugions des dieux; » et l'exemple des empe-
=>»• d'Isaurie. —L'empereur Maurice avait en- reurs païens, qui, n'adorant que des dieux
voyé aux pauvres de Rome, par un de ses de bois et de pierre, ne laissaient pas de
officiers, trente livres d'or. Le Pape l'en re- porter du respect à leurs prêtres.
mercia, en l'assurant qu'elles avaient été fi- 5. Saint Grégoire, sachant que les évê- Bpin w
dèlement distiibuées aux évèques chassés ques de Sardaigne nédigeaient d'instruire
de leurs sièges par les Lombards, aux pau- quelques idolâtres qui se ti'ouvaient dans
vres, et aux rchgieuses qui, fuyant de diver- cette île , y envoya un des évèques d'Italie ,

ses provinces pour éviter les mauvais traite- qui convertit plusieurs de ces infidèles. Le
ments des barbares, étaient venues à Rome juge continua d'exiger de ces nouveaux con-
chercher du secours et un asile. Saint Gré- vertis le droit que lui payaient ceux qui sa-
goire mil dans des monastères celles qui pu- crifiaient aux idoles pour en avoir la per-,

rent y trouver place; les autres demeuraient mission. Le Saint lui en fit des reproches,
ù paît et vivaient fort pauvrement. Il dit en- auxquels ce juge ne fit d'autre réponse si- ,

core à l'Empereur qu'on avait distribué la non qu'il avait acheté sa charge bien cher,
paie aux soldats, ce qui avait fait cesser les et qu'il ne pouvait la payer que par de tels
murmures, et attiré des actions de grAces, moyens. Il fil à l'impératrice Constantine des
et des vieux pour la prospérité de son rè- plaintes sur cela , comme aussi sur ce que
10. gne. — Dans une autre lettre à ce prince, l'îlede Coree était tellomeul accablée d'im-
il se plaint de ce qu'il avait traité de simpli- positions que les habitants avaient peine à
,

cité sa confiance aux paroles d'Ariulfe, roi y satisfaire en vendant leurs enfants, ce qui
des Lombards; c'était l'accuser de sottise les obligeait d'abandonner l'Empire et de
sous un nom plus honnête « J'avoue, lui
: recourir aux Lombards, de qui ils ne pou-
dit-il, que je le mérite car, si j'avais été
; vaient rien souU'rir de pire. Il se plaignit en-
sage, je ne me serais pas exposé ù ce que je core de ce qu'un nommé Etienne, cartulaire
souffre ici au milieu des armes des Lombards. de la nuirine s'emparait des biens de cha-
,

A l'égnrd de ce que j'ai dit d'.Ariull'e, qu'il cun mol tant des panonceaux aux terres et
,

était disposé h traiter de la paix avec la Ré- aux maisons sans connaissance de cause. Il
publique et de faire alliance avec elle, non- conjure cette princesse de s'employer au-
seulement on ne me cioif pas, mais ou près de l'Empereur pour faire cesser les gé-
m'accuse de mensonge. Je passerais volon- missements de ceux que l'on opprimait ain-
tiers sous silence cette moquerie, si je ne si. —Il se plaignait lui-même des mauvais u.

voyais la servitude de ma patrie croître h traitements de l'exarque de Ilavenne <lans ,

tous moments; mais je suis sensiblement af- une lettre à Sébastien évêque de Sirmiinu. ,

fligé de ce que, faute do croire mes avis, on « Sa malice, lui dit-il, l'emporte sur l'hosli-
laisse augmenter excessivement les (brccs lilé des Lombards, et nous sommes mieux

des ennemis. Pensez de moi. Seigneur, tout traités pur les ennemis qui nous tuent que ,

le mal qu'il vous plaira, mais ne prêle/. ]ias par les olliciers de rEm]iire dont les rapi- ,

facilement l'oreille à tout le monde sur l'in- nes et les fraudes nous consument d'inquié-
[vu» SIÈCLE.] CHAPITRE XLIX. — SAINT GHÉGOinE LE OHAND, PAPE. ')0.3

ludcs. » L'évèquo SiUjasIion nvait refiisi^ nii fier l'i'piscopat à dos personnes sans vertu
(H'ûclid qu'Anasta.so ,
palriaiclie d'Anlioclic, et sans science, rpii n'avaioni pas encore fait
lui avait oU'eil. Saint (in^oiro l'on loue ; mais les premiers exercices de la milice spirituel-
il le prie , pour le cas où il voudrait à l'ave- le. L'Austrasie, où régnait Childebert, s'é-
nir prendre soin de quelqii'I'j^lise par un tendait fort avant au delà du Rhin ; c'est
niotil'de c'liaril('' pour ses fi'èros d'en ])ren- , jiour colaque saint ("irégniie joint dans ses
dre une dans la Sicile, où il y on avait de i(Mlros laGermanie à la Gaule. Il accor- — i;,„ I,

E,.iM. »8. vacant(!s. —


Il refusa d'ordonner évéque un da l'usage du pallium à Marinien, évéque de
prêtre nommé Jnan, parce qu'il ne savait llavenne, à la charge de ne le porter que
pas le Psaulier jugeant par ce défaut qu'il
,
dans Ravenne seule, de s'en revêtir à la sa-
était peu soii,'noux dos choses do son iniriis- cristie avant de monter à l'autel, et de le
'•
1ère. —
Sa lettre à Pierre et à Provideulius, mettre bas dans la même sacristie au retour
évoques d'islrie, est pour les inviter à venir do la célébration des mystères. 11 l'ac- —
à Rome, où il promet, avec le secoiu's de corda aussi à Jean, évêque de Corinthe en ,

Dieu, de les Siitisfaire tollciuont sur leurs lui recommandant d'exiiipcr la simonie dans

doutes , qu'ils n'auront aucune peine à se toutes les Églises de sa dépendance. Sa —


réunir ii l'Eglise catholique. Il leur déclare lettre aux évoques d'Achaïe est sur le même
par avance qu'il n'a pas d'aulrc foi que celle sujet. Il Iftur fait remarquer qu'il n'est guère
qu'ont enseignée les (juatre premiers con- possible que celui qui a été ordonné pour
ciles généraux, et saint Léon son prédéces- de l'argent n'en demande aux autres pour
,

seur. les ordonner qu'ainsi il faut attaquer ce


;

S3. 6. Deux grands abus régnaient dans les mal dans sa source, en n'ayant aucun égard
Gaules et la Gei'raanie, savoir la simonie, el à l'argent ou à la faveur dans les ordina-
l'ordination dos néophytes. Saint Grégoire, tions, mais seulement au mérite et à la ver-
en écrivant à Virgile , cvêque d'Arles , lui tu des sujets.
recommanda la réformation de ces abus. Il le
lit aussi son viciûre dans les Églises de l'o- § VI.
béissance de Childebert , sans préjudice du Livre sixième des Lettres de saint Grégoire.
droit des métropolitains , et lui envoya le
pallium, avec ordre de ne s'en servir que \. Elles sont de la quatorzième indiction ,

dans l'éghse pendant la messe, k S'il ar-


et qui était la sixième année de son ordination,
rive, lui dit-il, que quelque évêque veuille de l'an S9o. Jean, évêque de
c'est-à-dire,
fau'B un long voyage, il ne le pourra sans Ravenne mort au mois de février de
, était
votre agrément. S'il survient quelque ques- la même année, après avoir fait un testa-

tion de foi, ou quelque autre allaire dillicile, ment qui causait du pi'éjudice à son église.
vous assemblerez douze évéques pour la ju- Les prêtres et les diacres s'en plaignirent
ger si elle ne peut être décidée, vous nous
; au Pape, qui écrivit à Marinien, son succes-
en renverrez le jugement, après l'avoir exa- seur ,
qu'il fallait distinguer dans ce testa-
i.i. minée. —
Le Pape donna avis à tous les ment l'église de Ravenne et
les biens de
évoques des Gaules qui se trouvaient dans le ceux que Jean avait acquis pendant son
royaume de Childebert, des pouvoirs qu'il épiscopat d'avec ce qu'il possédait en pro-
,

avait accordés à Virgile d'Arles, çn leur or- pre avant d'être évoque qu'il n'avait pu ;

donnant de lui obéir, de venir au concile disposer des premiers, mais seulement de
quand il les y appellerait, et de ne point ceux-ci, pour\T.i encore qu'il n'en eût pas fait
faire de grands voyages sans sa permission. d'abord une donation à son église. Il déclare
— Il écrivit aussi au roi Childebert, pour qu'à l'égard de ce que Jean avait donné à un
lui marquer qu'à sa demande il avait accor- monastère q\i'il avait bâti près de l'église de
dé le pallium à l'évèque d'Arles et pour le , saint Apollinaire, il voulait que cette donation
prier d'appuyer cet évêque dans la réforma- suiisistâten son entier, non parce qu'il en fai-
tion de la simonie et de l'ordination des sait mention dans son testament, mais parce

néophytes. Il en rend l'abus sensible, en di- qu'il lui'avaitpromisde son vivant qu'ill'agrée-
sant à ce prince que, puisqu'il ne donnait le rait.Xous avons vu, ou nous verrons plus loin,
commandement de ses armées qu'à des à l'occasion des conciles d'Agdeetd'Epaone,
gens dont il connaissait la valeur et l'cxpé- ((ue les anciens faisaient une distinction en-
l'ience il était contre le bon ordre de con-
, tre les biens propres aux ecclésiastiques , et
, -

504 mSTOinE GÉNIÎRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


af»i. «n 506, les biens qu'ils lecevaioiil de l'i^disn en leur qu'on envoie avec eux un prêtre pour les
Ei'""°" •" qualité de clercs pouvaient donner ceiix-
: ils baptiser en cas de maladie dangereuse. Saint
là, mais il ne leur était pas permis de dis- Grégoire préparait ces jeunes Anglais pour
poser de ceux-ci en faveur de leurs héri- la mission qu'il voulait envoyer en Angle-
tiers ; c'était l'église où ils servaient qui en terre. —
La simonie régnait dans l'Épire, epi«i «.

béiitait. — Gomme il y avait de la dilliculté comme dans beaucoup d'autres provinces.


dans l'élection de Marinicn , à la place du- Il en aux évoques Théodore, Démé-
écrivit
quel l'exarque voulait faire élire l'archidia- trius , Zenon et Alcissonus pour
Philippe , ,

EpL-i. i. cre Donat , que


on allé^na à saint Grégoire les exhorter à n'avoir égard dans les ordi-
Marinieu ne pensait pas bien du concile de nations qu'au mérite des personnes. — En 9.

Ciialcédoine. Mais le l'ape, qui le connaissait donnant lepalliumà Ponus, évoque de Mes-
poui' avoir vécu longtemps avec lui dans le siue, il lui dit de ne s'en servir que dans les
monastère, écrivit au clergé et au peuple lieux et dans les temps où son prédécesseur
de Ravenne que la foi de Marinieu était pu- s'en était servi, et de joindre à cet ornement
re, et qu'il recevait le concile de Ciialcédoi- extérieur la pratique de la vertu. Il dé- —
ne avec le même respect que les trois pré- fendit à Fortunat évêquc de Naples de
, ,

cédents. laisser traduire ses clercs devant les tribu-


2. y avait déjà plusieurs années que le
Il naux séculiers, voulant que s'ils avaient ,

patrice Dinamius gouvernait le patrimoine quelque affaire, il en prit lui-même connais-


de saint Pierre dans les Gaules lorsque , sance, ou du moins qu'elles fussent jugées
saint Grégoire en chargea le prêtre Candide. par des arbitres agréés de lui. La lettre —
D écrivit au roi Childebert et à la reine Brii- à Montanas el à Thomas, serfs de l'église
nehaut, pour le leur recommander. Dans sa de ISome, est une déclaration de la liberté
letti-e à celte princesse, il la loue de la bon- qu'il leur accordait; en conséquence, il leur
ne éducation qu'elle avait donnée au roi permet de jouir des legs que le prêtre (îau-
Childebert son Ois, qu'elle avait eu soin de diosus leur avait faits par testament.

faire instruire dans les principes de la foi Jean patriarche de (^onslantinoplc


3. ,

catholique il l'exhorte à l'aire plus, en l'en-


; avait envoyé à Home des députés avec des
gageant par ses exhortations à la pratique lettres, où il prétendait montrer qu'Atha-

des bonnes œuvres. II dit au roi qu'il est nase, prêtre et moine du monastère de Saint-
autant au-dessus des autres rois, que les Mile eu Lycaonie, et les moines ses confrè-
rois sont au-dessus des autres hommes ;
qu'il res , avaient parlé contre la définition du
n'est pas étonnant qu'il soit roi, puisqu'il yjen concile d'Kphèse pour le prouver, il avait
;

a aussi d'autres, mais que ce qui fait sa gloi- chargé ses députés de certains articles, com-
re, c'est d'être catholique, ce que les autres nu' extraits du même concile, portant ana-
rois ne méritent pas. « Vous avez, ajoute-t-il, thème à qui dirait que l'iune d'Adam mou-
tout ce dont les autres rois se font honneur; rut par sou péché, el que le diable entra
mais ils n'ont pas ce l>icn principal que vous dans le cunir de l'homme. Il avait aussi en-
avez, cl en cela vous les surpassez. Faites voyé un livre trouvé dans la cellule d'Atha-
que, comme vous leur êtes supérieur par la nase, qui contenait des hérésies. Saint Gré-
pureté de votre foi, vous soyiez aussi au-des- goire, ayant examiné ce livre, y découvrit
sus d'eux par vos bonnes actions, en vous ren- des dogmes des manichéens ; mais il y re-
dant favorable ù vos sujets et en ne les pu- , marqua aussi que celui qui avait fait des no-
nissant jamais sans connaissance de cause ,
tes sur ce livre pour en montrer les erreurs,
lorsqu'ils vous paraîtront avoir fait quelque était tombé dans l'hérésie pélagienne , et
faute. Nous vous avons envoyé des clefs do qu'il reprenait comme hérétiques des ju-o-

saint Pierre, où il y a du fer de ses chaînes, )>osilions catholiques, entre autres celle-ci :

pour les porter A votre cou, comme un pré- L'àmv d'Adam mourut Ayant j^iar son jkcIic,
servatif de tous maux. » Lorsque le piê- — examiné le concile d'Ephèse, et n'y ayant
Irc Candide fut arrivé il lui recommanda , rien trouvé de semblable, il lit apporter de
d'acheter des babils pour les pauvres, et de llavcune tni exein]ilaire 1res -ancien, qui se
jeunes .\nglais depuis l'Age de dis -sept à trouva entièrement ciuifornu^ à celui de Ho-
dix-huit ans pour les mettre dans des mo-
,
me. II fil entendre aux députés de Jean do
nastères et les instruire nu service de Dieu ;
Cousiantiuople, que cette proposition L'Ame :

mais, parce qu'ils étaient païens il veut , d'Adiim nidiinit i>iir son /x'r/it', ne devait pas
,

[vil" SIÈCLE.] CHAPITRE XLÎX. — SAINT GREGOIRE LE GRAND, PAPE. .-)03

s'expliquer de la ninil de l'âme dans sa sulis- traité injustement par l'évèque d(\ Ravenne,
tnucc, en sorte qu'elle eût cessé de vivre par pri'ih'cesseur <l(! Marinicn, il avait droit de
le péché mais de la perte (lu'elle avait faite
; suspecter encore son successeur; qu'au sur-
de l'innocence et de la béatitude; et que, si plus l'Eglise de Ravenne n'avait pas de pri-
Pelage avait soutenu que l'àmc d'Adam n'é- vihîges plus étendus que celle de Constanti-
tait point nuirte par son péché, ce n'était que nople, dont l'évèque Jean avait renvoyé au
pour montrer que nous n'avions pas été ra- Saint-Siégc l'alfaire qu'il avait avec le prê-
chetés par Jésus-Ciirist erreur que l'on con-
: tre Jean. — Il déclara à Maxime, usurpa- :ei'|i.2'>'

damna dans le concile d'Éplièse. Saint Gré- leur de de Salone, qu'il eût à venir
l'i'glise

j^oire, après avoir fait un détail de tout cela i Rome dans le délai de ti'cnte jours, et h
à « J'ai examiné avec soin
Narsès, lui dit : s'abstenir de la sainte communion jusqu'à
le conciled'Éphèse, et n'y ai rien trouvé tou- ce que son afl'aire eût été décidée, confor-
chant Adelphius, Sava et les autres, qu'on dit mément aux canons. —
Ceux de Salone soup- «'•.

y avoir été condamnés. Nous croyons ijue, çonnani saint Grégoire d'agir contre Maxime
comme le concile de Chalcédoine a été falsifié par une haine particulière, le Pape se jus-
en un endroit par l'Église de Constantinople, tifia, en protestant qu'il était prêt à le lais-

on a fait quelque altération semblable au ser en possession paisible de cet évêché. s'il
concile d'Ki)hèse. Clicrchez donc les plus an- pouvait montrer qu'il y fût parvenu sans si-
ciens exemplaires de ce concile , mais ne monie, et sans être coupable des crimes qui
croyez pas aisément aux nouveaux; les La- éloignent de l'épiscopat. —
Il protesta aussi

tins sont plus véridiques que les Grecs : car au clergé et an peuple de Zara, qu'il n'agis-
nos gens n'ont pas tant d'esprit, et n'usent sait dans cette affaire que par zèle pour la

10,
F.p
17
I iS' point d'impostures. » — Il ajoute, qu'à l'égard justice ; et en attendant que la cause fût fi-

(lu prêtre Jean, accusé de l'hérésie des mar- nie, il leur ordonne de se séparer de la com-
ciauistes par des personnes qui avaientavoué munion de Maxime, et de ne pas recevoir
ne pas savoir ce que que cotte héré-
c'était les saintsmystères de la main de ceux qui
sie, il avait trouvé sa profession de foi or- communiquaient avec cet intrus. Il manda — js.

thodoxe, et en conséquence, cassé la sen- à l'évèque Candide d'ordonner prêtres, avec


tence rendue contre lui par les juges que le le consentement de l'abbé, les moines qu'il
patriarche de Constantinople lui avait don- trouverait que leur piété et leurs bonnes
nés. Saint Grégoire écrivit sur ce sujet à ce mœurs rendraient dignes d'être élevés au
patriarche, à l'empereur Maurice, etàThéoc- sacerdoce ;

h Marinien, de ne rien entre- jn.

tiste,parent de ce prince. prendre sur les monastères de son diocèse


4. Sur l'avis qu'il reçut que Piménius, évo- contre la disposition de son prédécesseur;
que d'Amalfi dans la Campanie, ne résidait — à Secondin, de se hilter de procurer la 3o_

que rarement dans son église, et que son paix avec de faire de sa
le roi Agilulplie, et
mauvais exemple était suivi par plusieurs au- part des reproches à Marinien, de ce qu'ayant
tres, il écrivit au sous-diacre Anthcraede l'o- des habits, de la vaisselle d'argent, des celliers
bliger à la résidence, suivant les canons; s'il remplis devin, il ne donnait rien aux pauvres.
ne se corrigeait pas, de le faire mettre dans « Qu'il ne croie pas, dit-il, qu'il lui suffise

vu, iiu monastère, et de lui mander tout ce qu'il de lire, de prier et de se tenir en retraite,
aurait fait en cette occasion. Anthème — s'il n'est libéral envers les pauvres, et ne

dans une autre lettre, est appelé défenseur : fait des bonnes ceuvres de ses mains autre- ;

c'était un clerc destiné à exécuter les ordres ment, il n'a qu'un vain titre d'évêque.» On — „|_

du Pape pour l'utilité des pauvres. Mari- — répandit de nuit à Ravenne un libelle dilia-
nien avertit aussi saint Grégoire, que quel- niatoire contre Castorius, notaire et nonce du
ques-uns du clergé et du peuple de Ravenne Saint-Siège. Saint Grégoire écrivit sur cela à
se plaignaient de ce qu'on voulait juger à Marinien qui en était évêque, au clergé et au
Rome un dillerend, qui était entre l'église peuple de la ville, pour déclarer à l'auteur de
de Ravenne et Claude, abbé de Classe. Ce ce libelle, qu'il eût à soutenir publiquement
Pape répondit, que ceux qui se plaignaient les faits avancés contre Castorius, sous peine
n'étaient point au fait des canons, qu'ils di- d'être privé de la communion du corps et du
saient avoir été violés en cette occasion ;
sang de Jésus-Christ, et, même d'être frappé
que Claude avait eu droit de se pourvoir d'analhème, s'il lui arrivait, après cette dénon-
par devant le Saint-Siège, parce qu'ayant été ciation, de participer aux saints mystères. —
506 niSTOIlŒ GÉNl'^RALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
Eii>i. :i.\
Satliant qu'on aviiit iK'glij^é les ordres iiu'il ne pas les exposer â im voyage plein de pé-
avait donnés pour conversion des juifs et
la rils , dont le succès était inceilain. Le
et
des païens, il les renouvela, en ordonnant Pape renvoya Augustin avec une lettre à ses
à Fortunat, t^vêque de Naples, d'empêcher compagnons, où il leur ordonnait de lui
que les esclaves juifs ou païens qui témoi- obéir comme à leur abbé, et d'exécuter leur
gnaient le désir de se faire clirélicns, fus- entreprise sans écouter les discours des gens
sent vendus par leurs maîtres, et de les faire malintentionnés, les assurant qu'il souhai-
" mettre lui-même en liberté. — Il ordonna aussi terait pouvoir travailler lui-même avec eux
à Léon, évèque de Calane, de mettre en li- à celte bonne o-uvre. —
Il écrivit en même
T.fM. r.i,

berté les esclaves qu'il saurait avoir été cir- temps il divers évêques pour les leur recom-

concis par les Samaritains, sans rendre mê- mander : à Pelage, évêque de Tours, suc-
me à ceux-ci ce que les esclaves leur au- cesseur de saint Grégoire ; à S'rénus, de
3'- raient coûté ;
— et à Colomb, évêque de Xu- Marseille; à Virgile, d'Arles; h Didier, de
inidic, de veiller ce que les enfants ou les
;ï Vienne; à Sj'agrius, d'Autun; à Protais,
domestiques des catholiques ne fussent pas d'Aix, et ;\ Etienne, abbé de Lérins. Il loue
31 11 01. rebaptisés parles donatistes. S'étant in- — cet abbé du bon ordre qu'il entretenait dans
formé exactement des jours auxquels l'évo- sa congrégation, et le remercie des cuillères
que de Ravenne portait le pallium dans les et des assiettes qu'ils envoyées pour lui avait
processions publiques il régla que
, Mari- l'usage des pauvres. chargea aussi Au-— Il SI, H", Ï9.

nien ne s'en servirait qu'à la messe et aux gustin de lettres de recommandation pour
quatre processions solennelles. le patrice Arigius, pour les rois Théoderic
»6. 3. Il exhorta Félix, évèque de Pisaure, à et Tliéodebeit, et pour la reine Brunehaut.
retirer sa chaire épiscopale du monastère Il dans sa lettre h ces deux princes,
disait
de l'abbé Jean, et à ne plus y célébrer de qu'il avait ordonné à ses missionnaires de
messes publiques trouvant bon néanmoins
; mener avec eux des prêtres du pays le plus
qu'il y eiivoyût un de ses prêtres, pour y cé- proche d'.\ngleterre, par lesquels ils pussent
»a. lébrer les saints mystères. — Un homme connaître le génie de la nation, et se faire
marié, nommé Agalhon, ayant témoigné h aider dans leur ministère. Dans celle qu'il
saint Grégoire son désir de pasfcr le reste écrivit l'empereur Maurice par des évêques
il

de ses jours dans la retraite, le suint écrivit d'Afrique, il l'exhortait â punir ceux qui con-
à Urbicus, abbé de Sainl-Hcjmès à Falerme, trevenaient aux lois qu'il avait établies dans
de le recevoir dans son monastère, mais à cette province contre les donatistes, qui con-
condition que la femme d'Agathon embras- tinuaient d'engager dans leur secte les ca-
serait aussi le parti de la retraite, parce qu'il tholiques à prix d'argent; en sorte que la
n'était pas décent que l'une des parties unies foi se vendait publiquement en Afrique.
par le mariage quittât le siècle et que l'au-
»'• tre y demeurât. —
Il envoya h Pallade, évê-
Î5 Vil.

que de Saintes dans les Gaules, dos reliques {.iiTe septicme des jMtrcs de saint Grégoire,
pour la consécration de quatre autels, sa-
voir de celles de saint Pierre de saint
, , Tontes les lettres de ce livre furent
I.

Paul, de saint Laurent et de saint Panciace ('criles depuis le mois de septembre de l'an
qu'il avait demandi-es. Pallade avail lui- S'.Kl, ([ui ('lait la quinzième indiclion. Une

même fait bâtir celte église, et il y avail mis femme se plaignit ù saint Grégoire de ce que
to. treize autels. — Il envoyji aussi des reli- son mari, qui était clerc de l'église de Na-
ques de saint Pierre et de saint Paul la ;\ ples, l'avait quittée sous prétexte qu'elle n'é-
reine Ri'uuehaut par le prêtre Leupario, qui tait pas de condilion libre. Le contraire fut

était venu exprès a Rome [loui' ce sujet. pinuvé c'est pcnucpioi le Pape onlonna
: ;\

5"- (j. Augustin et ses compagnons en étaient Fortunat évê((ue de Naples, d'obliger le
,

partis vers le mois de juillet de l'an r)'jri. mari de cette fcnnue ;\ la reprendre, sans
Après quelques journé(îs de chemin, ils ri'- chenlier à l'avenir aucune raisiui de s'en sc;-
solurent de ne pas passer plus avant, décou- parer. —
Cyriaque, ayant été élu patriarche
ragés par la dilHculté qu'on leur lïiisait en- de Constanlinople après la mort de Jean dit
trevoir dans la conversion des Anglais. Ré- le Jeiïneur, envoya au Pape, suivant la con-
solus donc de.relnurner à Rome, ils renvoyè- tnnu-, sa lettre synodale conlenanl sa profi-s-
lent AuL Mslin pour prier sainl Grégoire do sion de foi. L'empereur Maurice lui écrivit
,

[vu" SIÈCLE.] CHAPITRE XU\. — SAINT GRÉr.OIRE LE GUANT), PAPE. 507

sur celte éleclion ; les trois ('vèiiuos Pierre, de ri';glisc. 11 qualifie d'/wnreusc mvuioire
Doniiticn et Eljiidiiis, qui avaient ordonne' Jean son prédécesseur ce qui fait voir que :

(lyriaque, eu donnèrent aussi avis. Saint les disputes qu'il avait eues avec lui sur le
(iréf,'oire reçut très-bien Georges prêtre, et titre d'évèque universel, n'empêchaient pas
Théodore diacre, porteurs de ces lettres, et qu'ilne rendit justice à ses vertus après sa
il les eût retenus plus longtemps Rome, si i\ mort. —
Dans sa réponse aux évèrjues qui El.l»c, 7.

la proximité de l'hiver ne les eût obligés de avaient ordonné Cyiiaque, il les reprend de
s'en retou)-ner. Il les chargea de deux lettres ce qu'au jour de celle ordination, ils avaient
pourCyriaqiie l'une publique, pour répon-
: crié : Rêjouissoiu-nouf en ce jour rjti'a fuit le
drc à sa lettre synodale; l'autre familière, Seif/neur, cette applicationde l'Kcriture ne
remplie de témoignages d'amitié car ils : devant pas se faire à la louange d'un hom-
s'étaient connus particulièrement dans le me vivant sur la terre; mais il l'excuse par
temps qu'il était nonce à Constantinople. Il le transport de joie qui l'avait produite. Il
dit dans la première, ([u'encore qu'on puisse les exhorte à prier, non-seulemeut pour Cy-
aimei' le repos, le travail est préférable quand riaque, mais aussi pour la conservation et
ilpeut tourner au salut de plusieurs; que la la prospérité de la famille impériale.
dignité d'évèque est inséparable de soins et 2. Par sa lettre à l'abbesse Respecta, saint K],i.i. n
d inquiétudes, parce qu'il n'est pas possible Grégoire lui donne toute l'autorité dans le

de bien gouverner le vaisseau dont on s'est monastère de Saint-Cassien, h l'exclusion de


chargé, sans s'occuper h prévoir les tempê- l'évèque diocésain et de tout antre ecclé-
tes qui peuvent le submerger, ou sans tra- siastique, avec le pouvoir pour les religieu-
vailler à les dissiper, lorsqu'elles se sont ses de ce monastère de se choisir une ab-
élevées; qu'il doit néanmoins tellement tem- besse mais il réserve à l'évèque de bénir la
;

pérer ses soins, n'en soit point accablé.


qu'il nouvelle abbesse, de célébrer la messe dans
11 approuve sa confession de foi mais il dit ; l'église du monastère au jour de sa dédi-
31, 33.
qu'elle ne suffit pas pour la conservation de cace, de commettre pour les autres jours de
la paix des cœurs ;
qu'il doit encore renon- l'année un prêtre pour la célébration des
cer au titre d'évèque universel, qu'il avait saints mystères, et de corriger, soit l'abbesse,
apparemment mis dans la lettre synodale, soil les religieuses, suivant les canons, si

puisque saint Grégoire en avoir été scan-


dit elles tombent dans quelque faute notable. —
dalisé. Il lui écrivit depuis plusieurs autres Il accorda à Fortunat, évêque de Fano, la
lettres contre cette prétention. 11 ajoute : permission qu'il lui avait demandée de
u Entre ceux que vous dites avoir été con- vendre les vases sacrés de son église pour le
damnés par les conciles généraux, vous nom- rachat des captifs ; et afin que personne ne
mez un certain Eudoxe, dont le nom n'est le soupçonnât de fraude dans cette vente, il
point connu parmi les Latins, ni dans les fit en présence de Jean dé-
voulut qu'elle se
conciles, ni dans les livres que saint Épi- fenseur. —
Pendant que Georges prêtre, et
phane, saint Augustin et saint Philastre ont Théodore diacre, députés de Cyriaque, pa-
écrits sur les hérésies; mais, si quelqu'un triarche de Constantinople, étaient à Rome,
des Pères catholiques l'a condamné nous , ilsavancèrent en présence de quelques dia-
le condamnons aussi avec vous. Les eudo- cres de l'Église romaine, que Jésus-Christ,
xiens furent condamnés dans le premier étant descendu aux enfers, en avait délivré
concile de Constantinople; mais l'Eglise ro- tous ceux qui l'avaient reconnu pour Dieu.
maine n'a pas reçu jusqu'à présent les actes Saint Grégoire ne fut averti qu'ils pensaient
de ce concile, elle n'en reçoit que la défini- ainsi, qu'après leur départ pour Constanti-
tion de foi contre Macédonius. » Dans la se- nople. Il leur écrivit donc pour les détrom-
conde lettre, saint Giégoire recommande à per, etleurfaiie voir que Jésus-Christ n'avait
Cyriaque le prêtre Jean et le moine Alhanase, délivré de l'enfer que ccux-li seuls, qui
l'assurant qu'ils étaient l'un et l'autre d'une avaient cru en lui, et qui pendant leur vie
doctrine orthodoxe. — Il félicita l'empereur avaient gardé ses préceptes, parce que, si

Maurice sur le choix qu'il avait fait de Cy- la loi seule avait été suffisante pour sauver
riaque pour patriarche de Constantinople dans la loi ancienne, et avant l'incarnation,
disant qu'il en connaissait le mérite, et qu'il cet état aurait été préférable à l'état de
s'était rendu digne de celle dignité par son grâce, où nous ne pouvons espérer le salut
expérience dans le maniement des aUaires que par une foi vive et animée par de bon-
j08 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
ncs œuvres. Il appuie celle doctriue de di- l'envoyer A Rome pour y être consacré. —
vers passages de l'Écrilurc, et d'un endroit Il avait été autrefois d'usage que les évê- IEiui. a.

du livre de Phila?tre sur les ln'rcsies, où il ques de Sicile vinssent à Rome tous les trois
met au nombre des hérétiques ceux qui di- ans; saint Grégoire, voulant les soulager, re-
sent que Notre-Seigaeur descendit aux en- mit ce voyage à chaque cinquième année,
fers, qu'il y annonça sa divinité à tous ceux et en fixa le jour kde saint Pierre,
la fête

qui y étaient détenu?, afin que, croyant en avec lui.


afin qu'ils la ci'-lébrassent

lui, ils fussent sauvés. 4. La sœur d'un nommé Catellus, après ^•

r.pi'f. 17. 3. Maxime, usurpateur de l'évèché de Sa- avoir été fiancée à Etienne, s'était retirée
lone, averti plusieurs fois par le Pape de dans un monastère de la ville de .Naplcs pour
venir ii Rome, s'en était excusé sur divers s'y consacrer h Dieu celui-ci prétendit être
;

prétextes. Le clergé et le peuple de Salone en droit de conserver la maison et les meu-


communiquaient avec lui, à deux ou trois blés de sa fiancée. Catellus en porta ses
personnes près; une partie du clergé et du plaintes à saint Grégoire, qui ordonna .-^For-
peuple de Jadéra ou Zara, en Dalmatie, avait tunat, évêque de Naples, et à Anthémius
embrassé sa communion, l'autre l'avait re- défenseur, de faire restituer le tout sans au-
jetée. Sabinien, leur évoque, avait d'abord cun délai. —
11 ordonna aussi an prêtre Can-

été du nombre des premiers; mais ensuite dide, recteur du patrimoine de saint Pierre
il abandonna Maxime, et touciié de regret dans les Gaules, de racheter quatre frères
d'avoir pris son parti, il voulait renoncer à qui étaient détenus par des juifs en qualité
l'épiscopat pour faire pénitence dans un d'esclaves à Narbonne. Grégoria, l'une —
nKmasIère. Saint Grégoire lui écrivit deux des dames de la chambre de l'impératrice,
lettres sur ce sujet dans l'une, il lui mande
: s'était confessée avec beaucoup de soin de

de venir à Rome avec les évèqucs qui, apr^s tous ses péchés; mais incjuiète si Dieu les lui
avoir été favorables à Maxime, avaient aban- avait pardonnes, elle écrivit à saint Grégoire
donné son parti, et leur promet l'absolution qu'elle ne cesserait de l'importuner, jusqu'à
de la faute qu'ils avaient faite on celle occa- ce qu'il l'eût assurée qu'il savait par révéla-
sion; dans l'autre, il lui déclare qu'il le rece- tion que ses péchés lui élaienl remis. Le
vait en sa communion et en ses bonnes Saint tâcha de la consoler par l'exemple de
grâces, et l'exhorte à reprendre la conduite la femme pécheresse, qu'il confond avec

de son église, et de faire rentrer dans le de- Marie sonir de Marthe, et lui dit, qu'aimant
1.1. VIII, voir tous ceux qui s'en étaient écartés. y Il Dieu comme elle le faisait avec autant de
y en a une troisième, où il lui dit de sur- ferveur que cette fcîmme, il avait confiance
monter par sa patience la haine que Maxime que l'on pouvait aussi lui appliquer cette sen-
lui portait, pour s'être sépan! de lui. Il dé- tence de Jésus-Christ licnuamp de {jcr/iés lui
:

cide dans la même lettre, que Sabinien ne so)}t remis, parce qu'elle a lieniicoiip aiinc.

devait plus admettre aux fonctions sacerdo- « Mais pour ce qui de vous
est, ajoule-t-il,

tales un prêtre qui ('tait tombé dans un cri- assurer qu'il m'a été révélé que vos péchés
me. — Il rélablil dans son grade et dans ses vous sont pardonnes, vous nie demandez une
fonctions un diacre nnnimé Martin, qui étant chose dillioile et inulile dilliiile, parce que
:

accusé de plusieurs fautes, avait prouvé son je suis indigue d'avoir des révélations; inu-
innocence, particulièrement en l'alteslanl tile, parce que vous ne devez point être sans

par serment sur le tombeau de saint Pierre, inquiétude an sujet de vos pécht^s Jusqu'à la
prince des apôtres. L'inscription de la lettre fin de votre vie, où vous ne pouriez plus les

((u'il lui écrivit sur ce sujet, le nomme abbé ;


pleurer. La sécurité est la mère de la négli-
mais il y a faute, car il n'est pas
pr.rait qu'il gence il faut que vous soyez en crainte
:

vraiseud)lable qu'un abbé fit dans son mo- peiulaut le peu de temps de celte vie, pour
nastère les fonctions de diacre, et qu'il en airiver à la sécurité- et à la joie l'teruelles. »

i:',iO, 21.
occupât la place. — Sur les inslances réité- 5. La de saini Gn'-goire à Théoclis-
lettre

rées de Caslorius, évêque de Rimini, ;\ qui te, sœur de l'Empereur, est poin- la congra-

sa santé ne permellait pas de faire sesjj^c- tuler sur son application à la lecture des
lions, il reçut sa démission, et permit rélcc- Livres saints, et à la niéditalion de.s v(''rilés

tion d'un autre évoque pour cette ville, en de la religion. Elle avait (pielquefois le don
chargeant Marinien, évêque de Ravenne, des larmes. Le Pape lui dit d'examiner
d'examiner le mérite de l'élu, et ensuite de quelle en est la cause; si elles viennent do
,, ,

[vir SitCLK.] CHAPITRE XLIX. — SAINT OREGOIIIE l.K T.RAND, PAPE. 503

la iiainio des peines cHeinelles, ou du di'lai [lape Pilage,avec 1(ï l'écit de cet événement
(les n'-ioinpenses célestes;parée qnv Idis- ,
miiarideux. — Saint Grégoire lit aussi jin!-
E^il.il

qu'oii csl altéré du désir de voir Dieu on , sent d'une clef où il y avait de la limaille des
est d'abortl frappé de crainte puis enllam- ,
chaînes de saint Pierre, h Théodori;, médecin
Mié d'amour. Alors, celle (jui ]tleurail dans de l'empereur Maurice. Théodore avait en-
la crainte d'être livrée aux su[iplices , ]ilcu- voyé plus d'une fois à Rome de grosses som-
le aussi de ce que l'on diU'ère à lui donner mes pour les pauvres cl le rachat des captifs.
place dans le l'oyaume. Il recommande à G. Dans une lettre à Anastase prêtre de
,

TJM'oetisIe de soigner l'éducation des jeunes J('rusalem , saint Grégoire le charge de tra-
l^rinces ilonl elle s'était cluir^éc , et d'aver- vailler A réconcilier son évoque avec le su-
tir les eunuques commis à leur garde de périeur du monastère de Néas, sifu('! dans la

leui' inspirer des sentiments d'un amour uni- même ville, remarquant qu'il était ordinaire

tnel,(^t d(! l)onté envers les peuples. Il la re- de voir l'évèque de Jérusalem en contesta-
mercie des ti'enle livres d'or qu'elle lui avait tion avec le supérieur de cette maison. —
envoyées, dont il employé la moi-
dit qu'il a Il pria Dominique , évoque de Carlhagc
tié i\ personnes nobles
raclieter plusieurs d'aider un abbé à contenir ses moines dans
que les Lombards avaient fait captives dans le devoir, et d'empêcher les autres évoques

la ville de Crotoue un an auparavant et , d'Afrique de les appuyer dans leurs désor-


l'autre moitié à procurer des couvertures de dres. Ils étaient tels, que lorsque l'abbé vou-
lit ù des religieuses qui soull'raient beaucoup lait les corriger, ils sortaient du monastère,

du dans les rigueurs de l'iiiver. « Elles


froid et couraient de province en province, no
sont, dit-il, au nombre de trois mille, et re- suivant d'autre règle que leurs passions. —
çoivent quatre-vingts livres par an des biens Ce saint Pape, répondant àEuloge d'Alexan-
de saint Pierre. Mais qu'est-ce que cela pour drie, qui , en parlant de la chaire de saint
mie si grande multitude principalement en ,
Pierre prince des apôtres, avait dit que
,

cette ville où tout est fort cher? Au reste


, ,
cet apôtre y était encore assis dans ses suc-
elles mènent une vie tellement sanctiliée par cesseurs, s'explique en ces termes sur cette
rabstinencc et par les larmes, que nous leur chaire , et sur la primauté de saint Pierre :

devons sans doute notre conservation en- , « Quoiqu'il y ait plusieurs apôtres, le siège
tourés que nous sommes des glaives des du prince des apôtres a prévalu seul pour
Lombards.» Saint Grégoire envoya à Tliéoc- l'autorité , à cause de sa primauté , et c'est

tiste une clef qui avait touclié au corps de le siège du même apôtre en trois lieux : car
saint Pierre c'est-à-dire, où il y avait de la
, il a élevé le siège où il repose, et où il a
limaille de ses chaînes et pour en relever ; fini sa vie présente ; c'est Rome. Il a orné
le prix il rapporte un miracle fait par l'at-
, le siège où il a envoyé l'Évangéliste son
touchement de cette clef. UnLombard, l'ayant disciple ; c'est Alexandrie. Il a all'ermi le
trouvée dans une ville au delà du Pô n'en , siège qu'il a occupé sept ans, quoique pour
tint aucun compte tant qu'il ne vit en elle
, en sortir ;
qu'un
c'est Anlioche. Ainsi ce n'est
qu'une clef de saint Pierre; mais la croyant siège du même apôtre,
dans lequel trois évo-
d'or il se mit en devoir de la rompre pour
, ques président maintenant par l'autorité di-
s'en servir à d'autres usages. Aussitôt le dé- vine d'où vient que je m'attribue tout ce
:

mon se saisit de lui, et au lieu de porter son que j'entends dire de bien de vous. Si vous
couteau sur cette clef il se l'enfonça dans , en entendez dire de moi, vous pouvez aussi
la gorge et périt sur-le-champ. Autharit
, vous l'attribuer, parce que nous sommes un
roi des Lombards était présent avec un , en celui qui a dit Qu'ils soient un comme nous : Joan. XTit*

grand nombre de pejsonnes de la secte des sommes un. » Il témoigne ùEuloge qu'il avait
ariens. Tous furent saisis de crainte, sans eu dessein de lui envoyer des pièces de bois ;

qu'aucun osât lever de terre la clef que ce mais que, ne sachant combien il eu avait be-
Lombard avait laissée tomber en mourant. soin, il avait eu honte d'en envoyer peu, et
Le roi fit appeler un nommé Minulfe qui ,
n'avait pu lui en envoyer beaucoup, faute de
quoique Lombard, était catholique, trés-as- vaisseaux propres à les porter.
sidu à la prière, et bienfaisant envers les
§ VIII.
pauvres. Minulfeprit la clef: Autharit, éton-
Livre huitième des Lettres de saint Grégoire.
né du miracle, en fit faire une semblable
d'or , et les envoya toutes deux à Rome au 1. Sui- la uouvelle des progrès que la foi Ei,isi. i.
, ,

510 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


catholique faisait parmi les idolâtres de l'ile depuis obtenu qu'elle fut modérée, il crut
de Corse par le minist^re de Pierre qui en devoir l'envoyer de nouveau aux évêques
était évêque, saint Grégoire lui écrivit pour d'IUyrie et de Sicile, parce
d'Italie, qu'ils

l'exhorter à continuer ses travaux apostoli- dépendaient de l'Empereur. Dans la lettre-

ques, en lui marquant de mettre en péni- circulaire qu'il leur écrivit à ce sujet, il les

tence pendant quelques joui-s ceux de cette exhorte à ne pas recevoir avec trop de pré-
Ue qui, après avoir été autrel'ois du nombre cipitation ceux qui sont chargés d'affaires

des Tidèles, avaient embrassé le culte des temporelles, de crainte qu'ils ne mènent
idoles, afin de leur donner le temps de pleu- une vie séculière sous l'habit ecclésiastique.

rer leurs fautes, et de persuader à ceux qui Il ajoute : « Que


s'ils se présentent dans les

n'avaient pas encore été baptisés, que l'on monastères, ne faut les y recevoir qu'a-
il

ne doit point adorer des statues de bois ou près qu'ils auront rendu leurs comptes, et
de pierre. Il lui envoya en même temps cin- que si les gens de guerre veulent faire pro-
quante soijs d'or pour acheter des habits fession de la vie monastique, on doit, avant

blancs à ceux qui devaient être baptisés de les admettre, examiner soigneusement
c'est-à-dire, aux pauvres car c'était l'usage
:
leur vie, et les éprouver suivant la règle pen-
de les dépouiller de tous leurs habits avant dant trois ans dans leur habit sécuHer; que
de les baptiser, et de les revêtir entièrement l'Empereur consent qu'ils soient reçus à ces

Epl<l
de blanc. —
Il ne put s'empêcher de verser conditions. Les trois années de probation
i>
NoTo:I.
filt. A\l; Ko-
TCll. I^.t, cip.
r.

des larmes en lisant dans la lettre d'Anas- étaient di\jà ordonnc'cs par les Novelles de XIXV.

tase ,
patriarche d'Antioche , le détail des Juslinien mais saint Grégoire n'y obligeait
;

maux dont il était accablé dans sa vieillesse. que les gens de guerre se contentant de ,

Pour l'en consoler, il le fait ressouvenir qu'il deux ans à l'égard des autres, pourvu que
occupait la chaire de saint Pierre, à qui Jé- pendant ce temps l'on examinât avec soin
sus-Christ dit ces paroles Lorsque vous serez :
leur vie et leurs mojurs « Car si les hommes :
Llb.X,

vieux, un autre vous ceindra et vous mènera où n'engagent, dit-il, qui que ce soit à leur ser-
vous ne voudrez pas. Il tâche de le fortifier vice sans l'éprouver, combien doit-on s'en as-
encore contre les hérésies qui s'élevaient, surer davantage pour de Dieu » 11le service !

dont les auteurs s'efforçaient d'énerver tou- donna avis à Amos, patriarche de Jérusalem,
tes les vérités établies dans les écrits des qu'un nommé Pierre acolyte de l'Église ,

prophètes, des évangélistes et des Pères, en romaine, avait pris la fuite pour éviter la
lui faisant espérer le secours de Dieu pour peine que ses fautes méritaient suivant les
les combattre et les renverser. Ces deux let- canons, et le pria de l'arrêter s'il allait en
tres et les suivantes sont de la première in- cette ville ou dans les environs, et de le

Etiii. n.-
de l'an 597.
diction, c'est-à-dire Il défendit — renvoyer à Rome sous boime garde. — Et alin
à Douinus, évêque de Messine, de rien exi- que Pierre n'abusât point dos choses sain-
ger pour le lieu de la sépulture des nifu'ts, tes , saint Grégoire avertit Amos qu'il lui

disant rpie si les Sichimites ne voulurent avait interdit la communion du corps et


rien recevoir pour la place où Abraham en- du sang de Notre-Seigneur jusqu'à son re-
terra sa femme Sara, à plus forte raison les tour, à moins d'être réduit à l'extrémité
évêques doivent-ils offrir ce service gratui- par maladie. —
H y a deux de ses let- 8, 0.

tement. — Dans sa lettre à Venance de Luna, tres pour contraindre une religieuse qui

il que devait fournir celui qui


détaille font ce avait quitté son monastère à y rentrer. ,

fondait un monastère mettant entre autres


;
Par une autre, il confirme la transaction
choses un calice d'argent pesant six onces, passée entre Candide, abbé du monastère
et une patène d'argent pesant deux livres. de Saint -André à Rome, et Maurentius,
Les patènes dans les premiers siècles étaient maître de la milice, au sujet des biens que
grandes et épaisses, parce qu'on y mettait Jean, frère de Maurentius et moine do ce
les oblations des fidèles. monastère, avait laissi-s en mourant. Il —
La môme année que l'empereur Mau-
2. établit un corps de défenseurs, à qui ildoiuia

rice donna une loi portant défenses à ceux la qualité de régionnaires. Outre le soin des

qui étaient engagés dans la milice, ou sujets pauvi-es, (jui était leur occupation princi-
à rendre des comptes, d'embrasser la vie pale, ils veillaient à la di'fense dos biens
monastique ou cléricale, saint Grégoire l'en- et dos droits do l'Eglise; souvent on les

voya partout pour êlic observée ; mais ayant envoyait dans les provinces pour y prcn-
[vil* SIÈCLE.] CIIAPITRK XI.IX. — SAINT GRKGOIRK LE GRAND, PAPE. .Ml
di-o soin dii palriuioiiio de s;iiiil Pierre. en rendant A ce monastère des devoirs de
Bpisi. is.
;{ Il y jiviiit pr^s do llavciine un monus- charité, ne doivent point lui être inconi-
tiTC d(''di(; Jean et à saint l-llieniio,
j'i saint iiKulos par leurs dépenses. Il lui écrivit — Ei. I. m.

dont Claude, ami de saint Gn'goirc, était une sccondo lettre pour lui recomman- ,

al)b(' on le nommait Classe. Comme il avait


: der l'abbé Claude qui revenait de Rome.
souttcrt beaucoup de vexations de la part 4. Ayant appris ([u'à Tcrracinc plusieurs
des évèques de Havennc, le Pape, qui savait refusaiont de monter la garde sur les mu-
par sa propre cxpi'-rionce, combien il cMait railles dans un temps d'hostilités, il manda
nécessaire de pourvoir au repos dos moines, ;\ révoque du lieu d'y obliger tout le monde,

défondit ;\ Marinion, évéque de Ravenne, et même les clercs, de quelqu'église qu'ils dé-
il SCS successeurs, de lieu diminuer dos biens, pendissent. — Il s'était glissé un abus par-
terres, revenus ou titres de ce monastère, mi les diacres de Catane, qui, voyant ceux
voulant que, s'il survenait quelque dillërend de Messine se sei-vir d'une espèce de chaus-
entre l'église de Havennectie monastère de sure particulière aux évoques, en mettaient
Classe, on clioisît des abbés, ou d'autres ar- aussi. Saint Grégoire le leur fit défendre,
bitres craignant Dieu pour le terminer ,
disant que si ceux de Messine en usaient,
promptement en présence des saints Evan- c'était par concession du Sainf-Siége, h l'ex-
giles. Il ordonna qu'après la mort de l'abbé, clusion de tous les autres diacres de Sicile.
son successeur serait clioisi par le consente- — Sa lettre à Eulogc d'Alexandrie est nv
ment libre et unanime de la communauté, marquable. Cet évêque lui avait demandé
et tiré de son corps que s'il ne s'y en trou-
;
les actes de tous les martyrs, recueillis par
vait point de capable, on le prendrait dans Eusèbe de Césarée. « Je vous rends grâces
les autres monastères que l'élu serait or-;
de m'avoir instruit, lui répondit saint Gré-
donné sans fraude ni vénalité qu'après son ;
goire, car avant votre lettre je ne savais pas
élection, on ne pourrait commettre à un au- si ces Actes avaient été recueillis; et à l'ex-

tre le gouvernement du monastère, sinon en ception de ce qu'on en trouve dans les li-
cas que l'abbé fût coupable selon les canons; vres du même Eusèbe, c'est-à-dire, dans son
que l'on ne pourrait ôter à l'abbé aucun de Histoire ecclésiastique , je ne sache point
ses moines malgré lui, pour gouverner d'au- qu'il y en ait, ni dans
de notreles archives
tres monastères, ou pour entrer dans le cler- Eglise, ni dans les bibliothèques de Rome,
gé mais que, si le nombre des moines était
; sinon quelque peu recueilli en un volume.
plus que suffisant pour l'otHce divin et le ser- Nous avons les noms de presque tous les
vice du monastère l'abbé pourrait oflrir
, martyrs, distribués par chaque jour, et ras-
pour le service de l'Église ceux (ju'il en croi- semblés en un livre, et nous célébrons des
rait digues, fi la charge que celui qui aurait messes en leur honneur. Mais ce volume ne
passé à l'état ecclésiastique, ne pourrait plus nous apprend point le détail de leurs souf-
demeurer dans le monastère, ni y exercer frances ou y voit seulement leurs noms, le
:

'
aucune autorité. 11 ordonna aussi que l'in- lieu et le jour de leur martyre. » Ce n'ôlait
ventaire des biens et dos titres du monas- donc qu'un calendrier ou martyrologe, et
tère, se ferait par l'abbé, aidé par d'autres vraisemblablement celui qui porte le nom de
abbés, et non par des ecclésiastiques et que ; saint Jérôme. Ce témoignage de saint Gré- Vide frtm.

toutes les fois que l'abbé de Classe désire- goire répand beaucoup de doutes sur les
rait de faire le voyage de Rome pour l'uti- Actes que uous avons aujourd'hui sous le
lité de son monastère, il n'en serait pas em- nom de plusieurs martyrs de l'Église de Ho-
pêché par l'évêque de Ravenne. Il assm'e me, comme de saint Clément, de saint Jean
Marinien que l'abbé Claude le verra volon- et de saint Paul, de sainte Agnès, de sainte Cé-
tiers dans son monastère, sachant que sa cile, et d'un grand nombre d'autres dont nous

visite ne lui sera point à charge mais, parce ; avons déjà parlé. Ceux de sainte Cécile sup-
que son prédécesseur y avait causé de gran- posent qu'elle soutirit à Rome dans le temps
des dépenses sous prétexte d'hospitalité, il que saint Urbain en était évêque; c'était donc
dit en général que les évéques de Ravenne, sous l'empire d'Alexandre, successeur d'Hé-

' Voyoz, sur cette assertion ili; D. Ceilliin-, ce qui note S, pus. 'i'JO à :iôt, et pag. 4ir,, noie 3. (t'édi'
en a été ilil, loin, l", iisj;. 357, noie I, et pag. 358, leur.)
note 4 ; toui. Il, piig. 102 à lOC; tom. III, pag. 40,
542 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
liogabale or, Alexandre ne pei-sécuta ja-
: dre, avec défense de toucher aux droits de
mais les cbrétiens. Il les souUrait, ainsi que ce monastère mais en l'esbortant à veiller
;

le témoigne Laiiipiidiiis son liislorien, c'esl-


' sur la conduite des moines. —
Pour recon- tpia. n.
à-diie, qu'il les laissait daus une rutièrc li- naître le présent que Léonce lui avait fait de
berté au sujet de la religion ce qui n'est : l'huile qui découlait de la croix du Sauveur,
point surprenant, puisqu'on croit que Mani- et du bois d'aloès, il lui envoya une clef dans
mée, sa mère, qui avait tout pouvoir sur son laquelle il y avait de la limaille des chaînes
esprit, était cliriMienne. Coininenl accorder de saint Pierre.
cette liberté qu'il donnait aux ciirétiens, avec
ce qu'on lit ' dans les Actes de celte martyre,
§IX.
que le pape saint Urbain, ayant été condam- Livre neuvième des Lettres de saint Grégoire.
né deux fois à la mort, était obligé de demeu-
rer caché liors de Home, parce que, si on {. Les premières sont du mois de septem- i.

l'eût trouvé, on l'eut l'ait brûler? Il faut ajou- bre, indiction deuxième, ou 308, et sont
ter que ces Actes sont remplis de miracles adressées à Janvier, évoque de Cagliari, en
extraordinaires, et d'autres événements qui Sardaigue. Il était alors fort avancé en Age,
Episi. 3c. ont peu d'apparence de vérité. Saint Gré- — mais aussi facile à émouvoir que s'il eût été
goire fit aussi part à Euloge d'Alexandrie des plus jeune; sensible aux injures, faible et
nouvelles qu'il avait reçues de la conversion facile à se laisser entraîner h de mauvais
i^cs Anglais, dont plus de dix mille avaient un particulier, il en-
conseils. Irrité contre
:rté baptisés à la fête de Xoél. Euloge lui avait voya, un dimanche au matin, renverser sa
aussi fait part de la conversion des héréti- moisson et y passer la charrue ; ensuite il
ques d'Alexandrie, et de l'union parfaite qui chanta la messe, puis il alla lui-même arra-
régnait dans celte Église. Saint Grégoire l'en cher les bornes du même champ. Saint Gré-
congratula ; mais, parce qu'en lui écrivant goire eut peine à croire à un tel excès; mais
il que suivant ses ordres il ne
avait dit , , s'en étant assuré par l'abbé Cyriaque qui
donnait plus au patriarche de Constantino- l'avait appris sur les lieux, il en fit à Janvier
ple le titre d'évcque universel « Je vous : une sévère réprimande, et excommunia pour
piie. lui dit le Pape, d'ùter ce terme dV- deux mois ceux dont il avait suivi les conseils
donner. Je sais qui je suis, et qui vous êtes : en cette occasion. —
Il écrivit à Vital, défeu- *•

\ous êtes mon par votre place, et mon


fi-ère seur de Sardaigne, de mettre cette sentence ;\
pcre par votre vertu. Je ne vous ai rien or- exécution et de faire réparer le tort. Il dé- — '

donné je vous ai seulement reprc-seuté ce


;
fendit au même évêque de rien exiger pour
qui m'a semblé utile encore ne l'avez-vous : le lieu de la sépulture, lui permettant seule-

pas observé exactement, car j'avais' dit que ment de recevoir ce qu'on otTrirait pour le
vous ne deviez donner ce titre, ni à moi, ni luminaire. —
Janvier ayant témoigné du re- *•

à aucun autre cependant au commence-


; , pentir de sa faute, saint Grégoire l'assura
ment de votre lettre, vous me le donnez à que les reproches qu'il lui avait faits au sujet
moi-même. Je voudrais me distinguer parla de la moisson renversée , ne venaient d'au-
vertu, non par des paroles, et je ne tiens cune aigreur, mais d'une charité fralernelle.
point à iionucur ce qui déshonore mes frè- Il le Ct souvenir, qu'en qualité d'évêque, il

res. Otons les mots qui enllent la vanité et était chargé, non du soiu des choses terres-
blessent la charité. » tres, mais de la conduite des âmes; qu'il
31. 5. Il Secondin, évêque de Taor-
écrivit à devait y mettre toute son application, et ne
mine, d'empêcher que des laïques s'empa- penser qu'à leur avantage, afin qu'il ne por-
rassent d'un monastère de la dépendance de tât point devaut Dieu le simple nom dévè-

celui de Caslel fondé par Cassiodore, mais


, que, qui, sans les mérites, ne servirait qu'à
d'avoir soin qu'on y envoyât des moines, sa condamnation. — Un des juifs de Cagliari, e.

afin que l'intention des fondateurs fût suivie. s'étant fait chrétien, s'empara, dès li> lende-
>i. — Jean, évêque de Scillitane, s'était emparé main de son baplême,c'est-à-dire le jour de

de quelques héritages du monastère de Cas- Pâques, de leur synagogue, et y mit inic


tel, sous prétexte que l'abbé les lui avait image de la Sainte Vierge, une croix ct ,

donnés. Saint Grégoire l'obligea de les ren- l'habit blanc qu'il avait reçu eu sortant des

Lampridius, wi vHa Alexand., pag. 121, 131. ' Apud Surium ad diem 22 nocemb.
[vu' sifccLE.] ClIAl'ITHl!: XLIX. — SAINT CIIÉGOIUE LE GRAND, PAPE. Mi
foiils. Saint Giëgoirc loua Janvier de n'avoir nuer de s'opposer à la réunion de ceux de
pas consenti à cette vinloiice, et l'exliorla son parti. — En même tenqis il ciiargea Ma-
^''''"' '"'

à faire ôter l'iina ,o cl la croix avec la vénc- rinien ihéque de llaveniie d'exhorter
, , l'é-
ralioii qui leur clail ihic, et à rendre la sy- vêque de Caorla à se réunir à l'iîglisc et ;'i

nagogue aux juifs, disant (|nc, comme les son peuple, voulant qu'en cas de refus il
loisne leur permettaient pas do bâtir do nou- ordonnât un autre évêijue pour cette; ville
,

velles synagognes, elles ne souHVnicnl jias et qu'il comptât


de Caorla dans sa pro-
l'ile

non plus qu'on les troublât dans la posscs- vince jusqu'à ce que les évoques d'istrio

,

'•'''' '•
sion des nnci(Mincs. Il déclara nul en , fussent revenus à l'unité catholique. Il le
vertu des lois impériales le testament do , chargea aussi de finir l'allaire de Maxime de
deux ahbesscs, parce que, ne possc'-dant rien Saloue, en jirenant pour adjoint, s'il en était
en piopro depuis qu'elles avaient embrassé besoin, Constantius, évêque de Milan.
l'état monastique, il leur était défendu de 3. La reine Brunehaut avait demandé le m,
disposer des biens qu'elles avaient apportés pallium pour Syagrius évêque d'Autnn. ,

au monastère. On disait, pour la défense de Saint Grégoire y consentit d'autant plus vo-
leur testament, que, quoique abbesses, elles lontiers, qu'il avait des obligations à cette
n'avaient pas porté l'iiabit monastique. Saint princcssepour la bomie réception qu'elle avait
Grégoire réponcl que le défaut d'habit n'a- faite à Augustin ù son passage pour l'An-
vait pas invalidi' leur engagement,
et ne pou- gleterre. Il savait d'ailleurs que l'Empereur

vait porter préjudice au monastèi-e qu'elles trouvait bon qu'il accordât le pallium à cet
avaient gouverné pendant plusieurs années; évêque mais il y avait deux obstacles à le-
;

mais que l'évêque qui les avait ordonnées ver avant de l'envoyer l'un que Syagrius :
,

ou bénites était en faute, pour leur avoir ne l'avait pas demandé lui-même suivant ,

donné la bénédiction dans un autre liabit l'ancienne coutume l'autre que celui qui;
,

que celui du monastère. Après avoir donc était venu à Home pour le recevoir, se trou-
pris l'avis de son conseil et des personnes vait engagé dans le parti des scbismatiques.
doctes de Rome, il ordonna à Janvier de Il y en avait, ce semble, encore un troisiè-

faire restituer au monastère tout ce qu'elles me, qui était que la reine ne l'avait pas de-
avaient donné ailleurs. mandé par elle-même, mais seulement par
' 2. Sa Vincent et A quelques au-
lettre h son envoyé, comme si elle eut appréhendé
tres évêqiiesde Sardaigne. est pour les ol)li- que saint Grégoire ne l'accordât pas à ses
ger à célébrer la Pâque au jour marqué par prières. Le Pape l'adressa au prêtre Can-
leur métropolitain, et à ne point entrepren- dide, recteur du patrimoine de saint Pierre
dre de longs voyages sans sa permission. Il dans les Gaules, afin que Syagrius le reçut
en exce[]te le cas où ils auraient avec lui de sa main, après le lui avoir demandé avec
quelques contestations alors il veut qu'ils
;
quelques évêques de sa dépendauce. Toutes
^- aient recours au Saint-Siège. Jean évo- — , ces formalités sont marquées dans la lettre
que de Caprite ou Caorla , voulant se réunir à la reine Brunehaut. Saint Grégoire la prie
avec son peuple à l'Église romaine, présenta ensuite de s'intéresser à bannir du royaume
sa requête à Callinique , successeur de Ro- lasimonie dans les ordinations, et à répri-
main dans l'exarchat d'Italie. Celui-ci la com- mer les scbismatiques, qui, sous prétexte de
muniqua à Justin, homme très-éloquent en , défendre le concile de Chalcédoine, cher-
qui il mais comme il était
avait confiance ; ,
chaient à se soustraire aux règles de la disci-

schismalique, il détourna l'évêque de Caorla pline ecclésiastique, et à vivre à leurliberté,


de la réunion. Le peuple qui la souhaitait,,
se confiant plus dans leur ignorance que
envoya au Pape demander un autre évèqiie ;
dans les lumières
de l'Eglise universelle et
sur quoi saint Gi'égoire écrivit à l'exarque, des quatre patriarches. Il rapporte, qu'ayant
qu'outre que l'ordre de l'Empereur toucliaut demandé à celui que la reine avait envoyé
les scbismatiques avait été surpris ne , et à Rome pourquoi il était séparé de l'Église,
portait pas qu'où rejetterait ceux qui vou- il avait avoué qu'il n'en savait rien, et qu'il
draient se réunir, mais seulement qu'on n'y lui avait paru n'entendre, ni ce qu'il soute-
forcerait pas ceux qui ne le désireraient nait, ni ce qu'on lui disait. Il exhorte encore
point. 11 pria Callinique d'éloigner Justin de Brunehaut à abolir les restes d'idolâtrie qui
son conseil, tant qu'il resterait dans le schis- se trouvaient dans les États des jeunes rois
me, parce qu'il ne mancfuerait pas de conti- Tliéodebert el Théoderic, dont l'un régnait
XI. J3
514 HISTOIRE GKNÈRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
en Austrasie et l'autre en Bourgogne. Dans eleison et Christe eleison, en le chantant avec
ces deux Étals, mais plus encore dans la Ger- plus de lenteur. Nous disons l'Oraison domi-
manie, jusqn'où s'étendait le royaume de nicale aussilijt après le can.n, parce que la
Tlu'odeberl, il y avait un i;rand nombre de coutume des apôtres était de n'en point dire
clirélicns qui, tout en fioijucntant les égli- d'autre pour la consécration du corps et du
ses, ne laissaient pas de rendre un culte aux sang, cl il m'a paru peu convenable d'y dire
démons, immolant aux idoles, honorant des une prière composée par un savant, et de ne
arbres, et sacrifiant des léles d'animaux; ce pas dire celle que Xotre-Seigneur a composée
qui déplaisait à Uieu, et excitait sans doute lui-même. Chez les Grecs, fout le peuple dit
sa colore sm- les peuples désolés par les in- l'Oraison dominicale; chez nous, il n'y a que
cui-sions des barbares. Il marque que le prê- le prêtre. En quoi donc avons-nous suivi les
tre Candide lui remettra de sa part le livre coutumes des Grecs? Nous n'avons fait que
qu'elle avait demandé. rétablir nos anciens usages, ou en introduire
Epi.i.iî. 4. Un homme, venant de Sicile,
dit à saint de nouveaux que nous cioyons utiles. Faites
Grégoire que quelques-uns des Grecs et des entendre toules ces choses, soit ;\ Calane, soil
Liitins murmuraient des divers règlements à Syracuse, à tous ceux que vous savez avoir
qu'il avait faits pour la réformalion de l'of- mui'muré sur nos changements. Pour ce
fice, et disaient : Comment prétend-il abais- qu'ils disent de l'Église de Constantinopie,
ser l'Église de Constantinopie, lui qui en personne ne doute qu'elle ne soit soumise au
suit en tout les coutumes? « Je lui ai deman- Saint-Siège, comme l'empereur et l'évoque
dé, dit saint Grégoire, quelles étaient ces de la même ville le déclarent continuelle-
coutumes; il m'a répondu: Vous avez or- ment; néanmoins, si cette Eglise on quelque
donné de dire alléluia à la messe hors du autre a quelque chose de bon, je snis prêt à
temps pascal; vous faites marcher les sous- imiter dans le bien mes inférieurs mêmes :

diacres sans tunique vous faites dire Kyrie


; ce serait une sottise de faire consister la pri-
eleison; vous dites l'Uraison dominicale in- mauté dans le dédaiu d'apineudre ce qui est
continent après le canon. Je lui ai répondu meilleur. » Saint Grégoire, en disant dans
qu'en tout cela je n'imitais aucune éghse ; cette lettre que les apôtres ne disaient point
car, à l'égard de Valleluia, on dit que c'est d'autre prière dans la consécration que l'O-
saint J(''rùme qui a introduit ici l'usage de le raison dominicale, n'exclut pas les paroles
chauler du temps du pape Damase, à l'imi- de l'Kvangite qui en conliennent l'institu-
tation de l'Église de Jérusalem c'est pour- ; tion. On voit en effet par saint Justin, qui '

quoi nous avons plutôt retranché quelque touchait au siècle des apôtres, que dès lors
chose en cela dans notre Église à la coutume le célébrant, ayant rc(,;u le pain et le calice,

que les Grecs y avaient introduite, qui était, faisait de longues prièies, qui étant ache-

ce semble, de chanter alléluia aux enterre- vées, lepeuplefidèle s'ccriaitd'une commune


ments et pendant le carême. Quant anx sous- voix : Amen. Amalaire dans son
traité des
',

diacres, l'ancienne coutume éiait qu'ils ne OlUces ecclésiastiques, avait conclu de cet
pnrUisscnt que l'aube, comme il |)arait par endroit de saint Grégoire, que l'oraison do-
vos Églises, qui n'ont pas rec^u celle coutu- minicale sutlisait pour la consécration du
me des Grecs, mais de l'Église romaine leur corps et du sang Jésus-Christ ; mais il se 'ré-
mère. S'ils marchent revêtus de tuniques, tracta deptjis.
cela vient d'un de vos évoques, je ne sais 5. La i\ Secondin, serviteur de Dieu
lettre Rp'"'-

lequel, qui les a fait marcher ainsi. Nous ne et reclus, ne peut être attribuée à saint Gré-
(Usons pas Kyrie eleison comme les Grecs : goire dans l'état où elle se trouve aujour-
chi.'zeux, lousie disent ensemble; chez nous, d'hui, et on ne peut douter qu'elle n'ait été
il n'y a que les clercs, le peuple répond seu- corrompue cl altérée, ou par Isidore Merca-
lement, et nous disons autant de fois C/irisIe tor, auteur des fausses décrélales, on par

eleison, que les Grecs ne disent point du tout. quelque autre écrivain du huitième siècle. Le
Dans les messes quotidiennes, nous passons style, en plusieurs endroits, en est dilTérent
sous silence certaines choses (jue l'on a cou- de celui de saint Grégoire, et il y a des dé-
tume de dire, et nous ne disons que Kyrie cisions qui sont toutes contraires à la doc-

« Justin., Apolog. H, png. OS, ly. Mabillou., in Ordinein Roman., ciip. xn.
• Aiiinlur., IJli. IV De Offic. ecclcs., cup. XX \f.
[vu» sitcLE.] CHAPITRE XLIX. — SAINT GRÉGtURK LE GRAND, PAPE. 815
liino conslanlc de ce Père et des itiicicns con- vres et leurs ornements, ne croyant pas pou-
ciles; telle est celle qui regarde les clercs voir leur faire rendre leurs synagogues mô-
qui ont fait pt'iiilciice aprî-s leur chute. La mes, parce que, encore qu'elles subsistas-
UUde (lit ' c|ir<iii |)(Uit les i<''tal)lir dans leurs sent, ri'vèque Victor les avait consacn-es
fondions et dans leur î^iade; saint Giéjioire pour servir d'églises, etque ce qui était une
<''tublit une disciiilinecontiaiie dans un grand fois consacré, ne devait plus retourner entre
nombre de ses ' lettres, et on ne voit nidle les mains des juifs. —
Li; primai de la pro- Eiift.tPi

part qu'il se soit relàcht' sur ce point. Il faut vince Bysacène élant accusé d'un crime,
ajouter, qu'en pailant jï Secondin, il se sert l'Empeieur ordonna par deux fois qu'il se-
de ces ternies l'otre Sainteté. Il les employait
: rait jugé par le Pape, suivant les lois cano-
en écrivant à des évêqnes, ou à des abbés niques; mais Théodore, maître delà milice,
qui étaient lionorés du sacerdoce, mais non à qui le primat avait d(jun('' dix livres d'or,
pas en écrivant à de simples moines, ou à empêclia l'exécution de l'ordre du prince.
des' abbés qui n'étaient pas praires. Cette Saint Grégoire, voyant qu'on s'opposait au
foule de [lassaues allégui's pour monlrerque jugement, ne voulut pas prtnulre connais-
l'on peut rétablir les cleics après leur chute, saute tle l'allaiie. L(! primai lui imi ('crivit, et
lors(]u'ils en ont fait pénilencc, est entière- ne fit aucune dilhculté de reconnaître qu'il
'

ment déplacée; siiint Grégoire n'était guè- était soumis au Saint-Siège sur quoi le Pape
;

res en état, accablé commme il l'était des dit dans la lettre à Jean de Syracuse « Je
:

douleurs de la goulte lorsqu'il écrivait cette ne sais quel évêque n'y est pas soumis, lors-
lettre, del'alonger par des cilalious inutiles qu'il se trouve en faute, quoique, hors de ce

et hors de propos. Mais ces additions ou al- cas, tous les évèques soient égaux ° selon les
térations ne doivent pas faire rejeter absolu- lois de rimmilité. » —
11 ordonna aux dé- co.

ment cette lettre, puisqu'elle est du nombre fenseuis du patrimoine de l'Église, d'empê-
des cinquante-quatre lettres de saint Gré- cher que les évoques ne demeurassent avec
goire que Paul Diacre envoya à Adélard, abbé des femmes, si ce n'est avec celles que les
de Corbie. Paul lisait dans cette lettre l'eu- canons permettent c'est-à-dire avec la mère,
;

dioit où il est parlé des images du Sauveur la lanle, la sœur, et autres qui ne peuvent
et de la sainte Vierge, Mère de Dieu. Cet en- être suspectes, et de les exhortera faire su-
droit fut cité aussi * dans le concile de Rome, bir la même loi aux clercs de leur dépen-
et par Adrien I" dans sa lettre à Charlema- dance. Il vent toutefois qu'ils n'abandonnent
gne pour la défense du second concile de point les femmes qu'ils pouvaient avoir épou-
-Xicée mais il manque presque dans tous les
; sées avant leur ordination, mais qu'ils les
manuscrits. gouvernent, en gardant toutes les règles de
E|.in 53. 6. Les clercs de l'église de Corne faisaient la chasteté. Illeurpropose l'exemple de saint
diiSculté de quitter le schisme pour se réu- Augustin, qui ne voulait pas même de pa-
nir, disant que le Papeleur était si peuaft'ec- rentes dans sa maison; mais sans les obliger
tionné, qu'il soutirait que l'Église romaine à l'imiter.
retînt des biens qui leur appartenaient. Saint 7. Récarède, roi des Goths, en Espagne, c'-

Grégoire, de leur disposition par


informé avait eu dessein de faire part h saint Gré-
Constantius évêque de Milan, lui écrivit que, goire de la conversion de ses peuples, qui
quand même l'Église romaine aurait un droit étaient ariens, dans le temps même qu'elle
acquis sm- les fonds de terre que ces clercs arriva; mais ne l'ayant pu que plus de trois
répétaient, il voulait bien les leur abandon- ans après à cause de divers incidents, il s'ex-
ner, pourvu qu'ils revinssent à l'unité de cusa de ce retard par une lettre, en lui en
l'Église. — Il fit donner aux juifs de Palerme voyant des présents pour l'église de Saint-
le prix des synagogues, et autres bâtiments Pierre, qui consistaient en un calice d'or orné
et terrains qu'on leur avait eidevés injuste- de pierreries, et en le priant de l'honorer de
ment, avec ordie de leur restituer leurs li- ses lettres, qu'il appelle des lettres d'or. U

' Pag. 968. * Tom. VI Concil., pag. 1462, et tom. VU, pag. 9Gi.
' Lib. IV, Epist. 26 ; lib. V, Epist. 3 eU -, Lib. 5 Si qxM culpa in episcopis iuvenitur, nescio
Vil, Epist. 12; lib. Vin, Epist. 24. quis et episcopus subjectus non sit. Cum vero
3 Lib. 11. Epist. 36; lib. Itl, Epist. 3; lib. VI, culpa non exiijit, omnes secundum ralionem hn-
Epist. 48. milUalis œquales sunt. Episl. 59, lib. IX,
âi6 UISTOIIIE GKNKRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
luirccomoianda aussi saiul Léaudre, évêque te que personne ne se mêlât des affaires de
Ei.i!l.l.O.
de Séville. —
Saint Gréfioire euvoya au roi monastères d'hommes ou rie filles, à l'excep-
Récarcde une petite clef où il y avait ilu 1er tion de l'évèquo du lieu ;

à Janv'ier de Ca-
E!>M. (û.

des chaînes de saint Pierre, et une croix qui gliari, d'invectiver fortement contre les ido-
renfermait du Lois de la vraie croix et des lâtres, les devins et les magiciens, et en cas
cheveux de saint Jean-Baptiste, et une autre qu'ils persévérassent, de contraindre par les
clef de saint Pierre. 11 joi^rnit à ces présents châtiments corporels ceux d'entre eux qui
une lellre, dans laquelle il relève avec de étaient esclaves, h se corriger; d'enfermer
grands éloges le zèle que ce prince avait et de mettre en pénitence ceux qui étaient
montré en procurant la conversion desGoths de condition libre, afin que la crainte des
ses sujets, qu'il dit toutefois être l'ouvrage peines fît sur eux une impression salu-
de la droite du Tiès-Haut. Quelque précieux taire; — à Eusèbe de Thessaloni(]iie, et h
que fût le présent qu'il avait fait à ^l'église quelques autres évèques qui étaient invités
de Saint-Pierre, saint Grégoire dit qu'il tirait à se rendre à Gonstantinople, de ne consen-
son principal mérite de celui qui l'avait fait, tir en aucune manière â ce que le patriarche
comme te fut la personne d'ALel qui rendit de cotte ville prit le titre d'é'vèque universel,
ses sacrifices agréables à Dieu. Il loue aussi et de ne rien faire dans le concile qu'on
Ilécarède de la constitution qu'il avait faite pourrait y assembler, qui fut préjudiciable c'i

contre les juifs, et de sa fermeté à refuser quelqu'un, ou contraire aux anciens canons.
une grande somme d'argent qu'ils lui offraient 9. Saint Grégoire, vaincu par l'importu-
K|.iM. C7,
79, SU, 81.
pour en obtenir la révocation; mais, crai- nitéde l'exarque Galliniqne, qui lui écrivait
gnant que l'eimemi ne prît occasion de ces continuellement pour Maxime de Salone,
actes de vertu pour lui inspirer de la vanité, renvoya cette atl'aire à Marinicn de Ravenne,
il l'exhorte à conserver avec soin les senti- le chargeant d'examiner si l'ordination de
ments d'une vraie humilité, et d'y joindre la Maxime était canonique, et de prendre avec
pureté de corps, et une grande modulation lui à cet ell'el Constanlius, évèquc de Milan,
dans le gouvernement de ses États. Il marque à qui saint Grégoire en écrivit aussi. Maxi-
qu'il envoie le pallium ^ Léaudre, autant en me, sachant l'ordre du Pape, se rendit Ra- i\

considération de son mérite, que de l'an- venne. Castoiius, cartulaire de l'Église ro-
cienne coutume; à (|uoi il ajoute qu'il n'avait maine, s'y rendit avec cette commission :

point demandé à l'Empereur le traité fait en- « Si Maxime, en étant requis devant le corps
tre sesprédécesseurs et l'empereur Justinien, de saint Apollinaire, di'clare par serment
comme il l'en avait chargé, parce qu'il savait qn'il n'est point coupable de simonie et des
que les archives de Gonstantinople avait été autres crimes, et s'il fait pénitence de sa dé-
consumées par flammes, et qu'il était plus
les sobéissance, vous lui donnerez, pour le con-
naturel de chercher ce traité dans celles de que nous avons écrite â son
soler, la lettre
son royaume. adresse.» Gastoiius ayant déclaré sa com- inan.fn.

8. Sur les plaintes qu'on lui avait faites mission, Maxime se prosterna sur le pave ma.
de la conduite de Lucilius, évèquc de Malle, au milieu de la ville, en criant «J'ai péchë
:

il ordonna k Jean de Syracuse de prendre contre Dieu et contre le bienheureux pape


avec lui quatre évèques, d'examiner ensem- Grégoire; » et diMucnra ainsi en posture de
ble les accusations formées contre Lucilius, pénitent pendant trois lieures. L'exarque
et de le déposer de l'épiscopat, en cas qu'il Calliuique, Castorius et l'évéque Mariuien y
fût convaincu de crimes; de déposer aussi accoururent ;et Maxime, s'étanl relevé, té-
les prêtres et les diacres ses complices, et de moigna encore devant eux de grands senti-
les envoyer dans des monastères jkiui- faire ments de pénitence. Un le mena au corps de
pénitence de priver de la communion du
; saint Apollinaire, où il jura qu'il était inno-
corps et du sang de Notre-Seigneur les la'i- cent de tout ce qu'on lui avait reproché tou-
ques qui auraient particiiié au mèuK? crime, chant rimpurcté et la simonie. —
Alors le Kr-i. u.-..

cl de ne leur rendre la communion qu'après caitnlaire Castorius lui donna la lettre du


une pénitence dont il le laissa maitie de ré- Pape, par laquelle il lui rendait la commu-
gler le temps et la manière. Il accepta le cas nion et ses bonnes grâces, et lui accordait lo
de danger do mort, auquel il ne devait point pallium, à la charge d'envoyer quelqu'un
leur refuser le vi.ilii|ii('. — 11 (-crivil à \'i- pour le recevoir, suivant la coiituino. Ce fut
lal, dél'enscui' de Surdaignc, de luire en sor- ainsi que se termina celle ull'uire, le vingt-
[vil" SIÈCLE.] CHAPITRE XLIX. — SAINT dlKOOIRE LE GRAND, l'APK. 817
six aoi\t de l'an 599. Lo Papo avait laissé i\ séparés de votre communion. Il nuit les rap-
Mariiileii 1(! jngi'iiifMil de la |)('Miil(<n(t' (|iie peler, et leur monder par ri'k'riture sainte
Maxime tlcvait faire, poiii- avoii' cûli'liri' la qu'il n'est pas permis d'ailorcr ce qui est fait
uipsse ëtnnt exconimuiiio. de main d'homme puis ajouter que, voyant
;

T.t'it.M.
|Q_ L'abbc Probiis , cjuc saint Gr(''s.':oirc l'nsagfî légilime des images tourné
en adora-
avait envoyé doimis loii|,'temp.s à .\^ilul|iiic, tion, vous en avez été indigné, et les avez
l'di lies avec lui un traité de
Loinbaids, lit fait briser. Vous ajouterez
vous voulez : Si
paix pour (pielipie temps, c'est-à-dire une avoir des images dans l'église pour voire
trêve. Tbéodorc, maire, ou l'un des prinei- insiruclion, comme c'est pour cela qu'on les
]iaiix majiislrals de Ravenne, y avait bean- a faites anciennement, je vous le permettrai
'^
' coup conij'ibué. —
Saint Grégoire l'en re- volontiers. Ainsi vous les adoucirez, et les
mercia en l'avertissant qii'Ariulfe n'avait
, ramènerez h l'union. Si quelqu'un veut faire
point juré la paix , comme le roi l'avait des images, ne l'en empêchez pas; défendez
promis, mais seulement sous une con- seulement do les adorer. La vue des histoi-
dition qui marquait de la fraude de sa res doit exciter eneux la componction mais ;

part. Il ajoutait que les envoyés du roi à ilsne doivent se prosterner que pour adorer
Home l'avaient beaucoup pressé de souscrire la sainte Trinité. Je vous dis tout ceci par
le traité mais que, pour n'être pas respon-
; l'amour que j'ai pour l'Kglise non pour af- ;

sable des infractions qu'il prévoyait, et de- faiblir votre zèle, mais pour vous encourager
meurer toujours médiateur entre le roi et dans votre devoir. »
l'exarque, il s'en était excusé en otfrant seu- 11. Dans les Gaules, on conférait les or- E,îei w..
lement de faire souscrire un évêque ou un dres sacrés par simonie, eu sorte que, sans
">*• archidiacre. —
11 ordonna à Fortunat, évê- examiner les mœurs, l'on ne jugeait di-
que de Naples, d'empêclier qu'à l'avenir on gne que celui qui offrait de l'argent, et qui
n'accoi'dàt le lop:ement aux soldats dans les pour cela même en était plus indigne. H
y
monasl^res de filles, et de travailler effica- avait aussi des ambitieux qui se faisaient
cement à rétablir la concorde entre les ci- couper les cheveux sitôt qu'un évêque était
"'^- toyens de sa ville épiscopale. Ayant — mort, et qui de laïques devenaient tout d'un
appris que Séréuus, évêque de Marseille, coup évoques. Les clercs conlinuaient en-
indiffné de voir quelques personnes adorer core d'avoir chez eux d'autres femmes que
les images de son église, les avait brisées et celles qui sont exceptées par les canons il ;

jetées dehois, il loua le zèle qu'il avait té- semble même que l'on néghgeait de tenir
moigné en empêchant que ce qui était fait chaque année des conciles, quoique cela eût
de la main des hommes ne fût adoré; mais été ordonné si souvent. Saint Grégoire se plai-
il le re[)rit d'avoir brisé ces images, qu'on gnit de tous ces abus à quatre des principaux
met, dit-il, dans les églises, afin que ceux évêques de ce royaume, Syagrius d'Aulun,
qui ne savent pas lire, voient sur les murail- Éthérius de Lyon, Virgilius d'Arles et Didier
les ce qu'ils ne peuvent pas apprendre dans de Vienne. Il leur repiésenta que, comme
les livres. « Vous deviez, ajoute-t-il, les gar- l'on devait amener au saint autel celui qui,
der, et détourner le peuple de pécher en quoique recherché, s'en éloignait, il en fal-
adorant la peinture. » Sérénus, doutant que lait reléguer bien loin celui qui s'empressait

la lettre fût de saint Grégoire, en négligea de lui-même d'y monter que ceux (pii achè-
;

les avis. Il ne laissa pas de marquer au Pape tent les dignités ne songent plus à celle pa-
qu'il l'avait reçue, et d'entreprendre de jus- role divine Vous avez -reçu gratuitement, don-
:
ma», s,
*'
tifier ce qu'il avait fait à l'égard des images. nez (/rafuitement ; que
troupeau ne peut
le
Lib.
Epi M. 1,1
XI, — Saint Grégoire réponse que l'abbélui fit recevoir aucun avantage de celui qui ose
Cyriaque, qui rendu sa première
lui avait prendre la place de mailie avant d'avoir été
lettre, était homme hors de tout soupçon ;
disciple, et que, quelque mérite qu'ait un
qu'il était inouï que jamais aucun évêque eût homme, il est nécessaire qu'il soit exercé
brisé des images; que cette considération aux fonctions ecclésiastiques dans tous les
seule aurait du le retenir, afin de ne pas pa- ordres diôërenis, avant d'être promu à l'é-
raître seul pieux et sage, au mépris de ses piscopat; qu'en vain on alléguerait la coutu-
frères. « Mais on dit, ajoute le Pape, qu'en me, puisque ce qui est mauvais doit être cor-
brisant ces images, vous avez tellement scan- rigé, et non pas pris pour exemple; que l'on
dalisé votre peuple, que la plupart se sont doit maintenir en visrueur les canons qui dé-
318 HISTOIRE GÉNI'.RALE DES AUTEURS ECCLESIASTIQUES.
fendent aux clercs engagés dans les ordres fendent de mettre un év/^que h la place d'un
Cnnrll.
sacrés, de loger avec dos feuinics ûfran- autre, de son vivant. Il n'y avait pas eu d'au- Ltigd can*

gères. Il les fait souvenir des anciens règle- tre raison de mettre uu évoque ;\ Turin du
ments touchant tenue annuelle des conci-
la vivant d'Ursicin, que parce qu'il avait été
les, et veut que, toute excuse cessant, ils emmené en captivité par les Lombards. —
Eflsl
s'assenibleut à la diligence de Syagrius et La lettre qu'il écrivit à saint Léandre, évê- 121.

de l'abbé Cyriaque, pour remédier h tous que de Séville, est une réponse à celle que
ces abus. Le Pape charge Syagrius de la te- saint Grégoire en avait reçue. Il en fit la lec-

nue du concile, par préférence aux évêqucs ture en présence de plusieurs personnes sa-
d'Arles et de Lyon, à cause de l'allcction ges et vertueuses qui, touclié'es des senti-
Eii.i. 108.
que le ^oi et la reine lui portaient ; c'est — ments d'humilité et de grandeur d'âme que
pourquoi il lui écrivit en particulier, pour saint Léandre y faisait paraître, ne purent

lui recommander le soin de ce concile. Il le lui refuser leur amitié et leur estime, quoi-
remercia en même temps des bons otlices qu'elles connussent point de visage. Le
ne le

qu'il avait rendus à l'évèque Augustin, et lui Pape se dans la sienne du fardeau de
plaint

envoya en reconnaissance le palliumqu'il de- l'épiscopat, disant qu'en montant au dehors,


mandait depuis longtemps. Pour en soutenir il était déchu au dedans, et qu'accablé de

la dignité, il donna à l'église d'Autunle pre- cette dignité onéreuse, son Ame contrainte à
mier rang dans la province, sans préjudice s'appliquer aux choses terrestres, était pres-
10'- de Lyon qui en était la métropole. lUécri-— que réduite la stupidité. U la finit en mar-
.'i

vit à Arégius, évéque de Gap, de se trouver quant qu'il lui envoyait le pallium, pour s'en
au concile que Syagrius devait assembler, servir pendant la céléliration des saints mys-
eu lui accordant par la même lettre, ainsi tères.

qu'à son archidiacre, l'usage des dalmati- 12. Le neuvième livre des Lettres de saint
109. ques. — Les plaintes qu'il fait dans la lettre Grégoire finit par celle que saint Golomban,
à la reine Brunehaut, sont ù peu près les abbé de Luxeuil, au sujet des dif-
lui écrivit

mêmes que dans celle qu'il adressa aux qua- ficultés qu'on le jour de la cé-
lui faisait sur
tre évéques. Il prie cette princesse d'ordon- lébration de la Pâque. Nous aurons lieu d'en
ner la tenue du concile pour remédier aux parler ailleurs. L'auteur de la Vie de sainte
abus des ordinations, et de donner un édit Salaberge assure que saint Grégoire répon-
portant défense aux juifs d'avoir des cscla- dit aux difficultés que saint Colomban lui

i!o. ves chrétiens. —


Sa lettre aux rois Thierry avait proposées. Cette réponse n'est pas ve-
et Théodebert est sur le même sujet. Il s'y nue jusqu'à nous.
plaint de plus de ce que les terres de l'Église
iM. payaient des tributs. —
Didier, évêque de §X.
Vienne, prétendait que le Saint--Siége avait jj^re dixième des Lettres de saint Grégoire.
autrefois accordé quelques privilèges à son
église, entre autres l'usage du pallium. Saint { . Saint Grégoire, après avoir
fait déposer
Grégoirefit chercher dans les arciiivesdo l'é- Lucillus, évêque de Malte, chargea Romain,
glise dellome, et n'y ayant rien trouvé, il ré- défenseur en Sicile, de faire resliluer à l'é-
pondit A Didier qu'il devait lui-même faire glise de Malte tout ce que Lucillus et Pierre
des recherches parmi les titres de la sienne, son fils en avaient emporté. Il permit à Tra-
et en cas qu'il trouvât quelque pièce, la lui en- jan, abbé d'un monastère de Syracuse, choisi

voyer pour l'instruire de ses droits. Il confir- pour remplacer Lucillus, de mener avec lui
ma, à la prière de Yirgilius, évêque d'Arles, quatre ou cinq moines de sa comnmnauté,
les privilèges que le pape Vigile avait autie- pour lui servir de consolation dans uu pays
fois accordés à un monastère d'hommes situé élranger, mais avec l'agn'ment de l'évêquc

116.
dans l'enceinte de cette ville. —
Il s'en'ploya diocésain, c'est-à-dire de Jean de Syracuse;
auprèii des deux rois Thierry et Théodebert, d'emmener aussi quelques jeunes esclaves
et de Syagrius d'.\u(un, pour faire resliluer qu'il avait achetés de son argent, et d'em-
à Ursicin, (';vêqu(! de 'l'urin, quelques églises porter les livres el les autres choses qu'il
de son diocèse qu'on lui avail ôlt-es, et poui" avait ou reçues de son père, ou achetées de-
le faire rétablir lui-même dans son siège, puis qu'il n'était plus abbé, voulant cpie loul
dont il avait été destilué sans aucun sujet, ce qu'il avail acquis pendant qu'il était abbé,
et coutiit la disposition des canons, qui dé- demeurât au monastère, à qui cela apparie-
[vil- SliiCLE.] HUAI'IÏIVI XLl.V. — SAINT GRftOOIRl!; LE GRAND, PAI'E. 519
iKiil lie tlioil. Celte lettre csl de l'an 590, in- dans la défense d'une même doctrine, et dit
Ël'Isl. 10,
<liction 111°. — La môiiie aiindc, ayant appris qu'en dans l'ouvrage qu'il lui avait
lisant,
i|u'iin évoque lie Sicile, noniiné Hasilc, fai- envoy(', les passages des Pères grecs, il lui
sait les fonctions tic |)rociir('ur dans le bar- semblait lire ceux des Pères latins, tant il
y
reau, où il s'occupait ;\ défendre des cau- avait de conformité dans leurs sentiments, et
ses connue l'un des dcu'niers, ou, selon d'au- dans la façon de les exprimer. Dans une — Epl-t.3).

Ires, qu'il rendait aux prétoires des services autre lettre, il confirme les réponses que le
tels qu'on pont en alleiulre du dernier des même i)atriarche d'Alexandrie avait df)nnées
otlicicrs, ce qui Ic^ retulait méprisalik;, il lui aux passages dont les agnoïtes abusaient,
litordonner par Romain, défenseur, de quit- savoir que Jésus-Christ avait cherché des
:
Knrr. xi,
1', ot XIII, Hl';
ter la Siciledans quatre jours, pour l'empê- figues hors de la saison; qu'il dit qu'il igno- .lo.-in. II, A, et

XI, :!,,
cher de déshonorer plus longtemps le sacer- rait le jour et l'heure du jugement qu'il dit ;

doce. —
11 obligea des religieux du terriloire ;\ la Vierge sa mère : (tn'jj n-t-il entre vous et
de Palermc à payer les tributs qu'on exi- moi ? Mon heure n'est pas eneore vernie ; qu'il
geait d'eux. —
Secondin, évoque de Taor- disait, parlant du Lazare mort : Oh l'aeez-
niiue, avait (Hé chargé parle Pape d'exami- voiis m/s?Il donne sur ces passages les expli-
ner de la femme d'un nommé Li'on,
l'aU'aire cations de saint Augustin, entendant avec
qui, se voyant soupçonnée d'adultère par son ce Père, par le figuier sans fruit, la synago-
nuiri, l'avait quitté et avait pris l'habit de re- gue, qui n'avait que les feuilles de la loi :

ligieuse, puis é'iait retournée avec son mari, car, en prenant ce texte à la lettre, on serai*
sans avoir auparavant consulté son évèquo. obligé de dire que Jésus-Ghiist avait été le
Cettefemme avait en cela fait trois fautes : plus ignorant de tous les hommes, qui sa-
lapremière, en se séparant de son mari sans vent fous le temps auquel le figuier porte
aucune formalité; la seconde, en changeant son fruit. A l'égard de l'heure et du jour
du
d'habit; et la en revenant avec
troisième, jugement, Jésus-Christ ne le connaissait pas
son mari avant que Secondin eût examiné comme homme, mais il ne pouvait l'ignore)-
l'atl'aire, suivant les ordres qu'il en avait re- comme Dieu consnbstantiel ii son Père. On
çus de saint Grégoire. Pour la punir, il la peut dire encore qu'il parlait en cette occa-
sépara, elle et sa famille, de la communion. sion à la manière des hommes, comme lors-
Sur qu'en lit le mari après s'ê-
les plaintes , que Dieu disait à Abraham Je commis main- : Gct!.22,12.

tre assurépar serment que sa femme ne Iciwnt (/ne vous craignez Dieu. Voici le sens
lui avait pas été infidèle, le Pape ordonna à de ces paroles à sa Mère Qu'y a-t-il entre :

Secondin de rendre la communion A la fa- vous et moi? Mon heure n'est pus eneore venue ;
mille de cette femme, et de ne pas tarder à « Pour le miracle que vous de-
c'esf-iï-dire :

la lui rendre à elle-même. mandez de moi, je ne vousi-econnais point,


2. Saint Eidoge d'Alexandrie avait mandé n'ayant point le pouvoir de le faire dans la
à suint Grégoire que des moines de Pales- nature que j'ai reçue de vous; mais lorsque
tine devaient aller à Rome pour savoir ce l'heure de ma
mort sera arrivée, je vous re-
qu'il pensait de l'hérésie des agnoïtes, c'est- connaîtrai pour ma mère, parce que c'est de
à-dire, de ceux qui attribuaient l'ignorance à vous que je tiens la nature qui me rend mor-
Jésus-Christ, abusant, poLir soutenir leur er- tel.» Si l'on infère de ces paroles de Jésus-
reur, des passages de l'Kvangile, où il parle Christ aux sœurs du Lazare Oh l'avez-vous :

comme s'il ignorait quelque chose ; et que le mis? qu'il ne connaissait pas le lieu de
diacre Anatolius, son nonci; à Constantino- sa sépulture, il faudra aussi inférer de ce
ple, de lui en écrire, et de lui
l'avait prié que Dieu dit h Adam Adam, ou ètes-vous? :

demander aussi son sentiment sur celte doc- que le Seigneur ne savait pas en quel lieu
trine. Le Pape lui répondit que ces moines Adam s'était caché après son péché. Saint
n'étaient point venus à Rome , qu'ils étaient Grégoire ajoute que les agno'ïtes, étant dans
allés à Conslautiuople, et qu'il fallait que son les mêmes principes que les nestoriens, ne
interprète eût mal l'eudu le sens de la lettre pouvaient, sans entrer en contradiction avec
d'Anatolius, puisqu'il avait envoyé à cenonce eux-mêmes, se déclarer pour les eutychiens,
depuis longtemps une réfutation de l'hérésie dont ils faisaient en effet partie. Il dit en-
des agnoïtes par les témoignages des Pères suite que sa santé ne lui avait pas encore
latins. l\ lémt}igne sa satisfaction à saint Eu- permis de répondre à l'objection que son
ojje de l'unanimité des Pères grecs et latins nonce à f'.ousiantinople prévoyait qu'on pour-
520 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
rail lui fairesur ce que Jésus-Christ, quoi- sait que son visage et non pas ses moeurs.
,

que éternel, a bien voulu se soumettre au Une consentit donc à son élection, que dans
temps, et qu'étant immortel il s'est soumis la supposition que sa vie passée était exemple
à la mort; qu'ainsi la sagesse de Dieu s'est de reproches qui le pussent exchue selon
chargée de notre ignorance, pour nous déli- les canons, et qu'il était propre pour le
vrer de l'ignorance. Il avcitit saint Euloge gouvernement et le maintien de la disci-
qu'on manquait à Rome de bons interprètes pline. Mais il assura ceux de Milan qu'il ne
grecs; que ceux qui y étaient, n'cnlendant consentirait jamais à l'ordination de celui
pas bien le sens, voulaient toujours tradui- que les Lombards avaient hoisi, parce qu'il i

re mot à mot, en sorte qu'on avait beaucoup ne croyait pas que l'on pût donner à saint
de peine à entendre leurs traductions. Ambroise un successeur élu par des héré-
EpiM. iî. 3. Saint Grégoire ne voulait pas que l'on tiques ;
qu'au reste ils n'avaient rien à crain-
rompît la paix avec ceux qui refusaient de dre de ces barbares, puisque les terres de
recevoir le concile de Chalcédoiue; mais, l'églisede Milan n'étaient point sous la do-
pour ôter fe scandale qu'ils pouvaient don- mination des ennemis, mais en Sicile, et en
ner aux fidèles, son sentiment était qu'on les divers autres pays sujets de l'Empire. —
obligeât d'anatliématiser, entre toutes les hé- Pour éviter tout relardeiueiit, il envoya aus-
résies, spécialement celles de Sévère et de sitôt le notaiie Pantaléon avec la commis- Ei>l!l. 3.

43. Nestorius. —
Lorsque, dans un monastère sion de faire sacrer Deusdedit. Celte lettre et
de filles, il n'y en avait point de capable pour les suivantes sont de l'an (>()0, indiction iv*.
être alibesse, en envoyait d'ailleurs, à la
il — La Conon, nouvellement élu abbé
lettre à
Cl. demande de l'évêque diocésain. 11 ne fai- — de Lérins, est une instruction sur la manière
sait point d'union de monastères de ditférents dont il devait gouverner ce monastère. « Que
diocèses, sans avoir aussi l'agrément des les bons, lui dit-il, vous trouvent doux, et les
c;. évèques diocésains. —
De son temps, le pcu- méchants sévère; gardez un tel ordre dans
l)le avait encore droit de sull'rage dans l'é- vos corrections, qu'il paraisse que vous aimez
lection des évèques; mais il se croyait lui- les personnes, et que vous haïssez les vices.de
même en droit d'exclure de l'épiscopat les peur que, si vous prétendez agir autrement,
sujets qu'il en jugeait indignes, ou parce vos corrections ne se changent en cruauté,
qu'ils ne vivaient pas assez chastement, ou et que vous ne perdiez ceux que vous vou-
parce qu'ils étaient usuriers, ou pour d'au- lez corriger, et qu'en enfonçant le fer trop
to- très défauts. —Eu .599, l'Italie fut affligée avant dans la plaie, vous ne nuisiez à celui
de la peste, mais elle fit de plus grands ra- que vous vous empressez de soulager. Mêlez
vages encoie dans r,\friqiie. 11 écrivit sur dans vos corrections la sévérité avec la dou-
cela à Dominique, évêque de Carthage, pour ceur, afin que l'amour détermine les bons \
lui représenter que Dieu ne nous punit par se tenir sur leurs gardes, et que la crainte
ces sortes de fléaux temporels, que pour apprenne aux méchants à aimer leur de-
nous faire mériter par notre patience des voir. )) —
Il écrivit au président de Sardaignc

biens éternels. Il veut qu'il se serve de de travailler avec l'évêque Victor à la con-
ce motif pour consoler les peuples frappés version des barbares qui restaient dans cette
"• de cette plaie. —
Informé que les termes île, et à leur procurer le baptême. Un lec- —
durs dont il s'était servi en reprenant Op- teur de l'église de Cagliari, nommé Kpi-
portuuus pour certaines fautes qu'il avait fai- phane, s'était proposé de faire de sa maison
tes, l'avaient jeté dans la tristesse et dans un monastère d'hommes. Janvier, évêque
l'accaMemenl, essaya d'apporter quelque
il de cette villi\ s'y opposa, parce que colle
lénilifrt sa douleur, en l'assurant qu'il ne lui maison était contiguë A un monastère de fil-
avait parlé ainsi que dans la vue de son sa- les. Saint Grégoire l'approuva dans son op-
lut, et non par aucun sentiment d'aigreur. position; mais il trouva bon que, les filles
étant transférées ailleurs, les moines pris-
§XL
sent leur place, ou s'établissent dans un au-
Livre onzième des Lettres de saint Grégoire.
tre monastère devenu viicant.
Après mort de Conslantiiis, évOque de
la 2. Les nouvelles qu'il reçut de la conver-
Milan, arrivi'e l'an fiOO, le clergé et le peu- sion des .\nglais lui causèrent, ainsi qu'à
ple de cette ville élinent pfiurlui succéder le tous les fidèles de la ville de Home, une joie
diacre Dcusdedif. Saint Grégoire ne connais- inexprimable. Il en félicila .\ngustin,par qui
[vif Riî:ci.E.] CHAPITRE XLIX. — SAINT GRliGOlilE Li-: GliAND, PAPE. 521

Dieu avait op(5ré cette meiveillc; mais, clc che du prêtre


^
Laurent et du moine Pierre, ^
"•'
loin.
-^*',\!'
Vlll,
qui étaient revenus d'Angleterre à Rome, les '"•
crainte que la graiulciir des miracles faits i"«-

par son niinistèi'e, dans la conversion do soulagements et les marques d(! cliarité que
ictle nation, ne une occasion de s'ou-
lui fut Ik'itlic ou AldiJjerge, reine d'Angleterre,

l.lier, il le lit ressouvenii' que, quand les dis- avait doiMiés à Augustin. Il l'en remercia par
-"'•
ciples disaient à leur divin Maître : Scigm-xr, une lettre, où il la compare à sainte Hélène, •'i'"

en votre nom les dcmonsmémes noitssont soumis, mère de Constantin, « dont Dieu s'est servi,
il leur réiKuulit : i\c vous en rejouissez jios, ré- dit-il, pour exciter les Romains à la foi chré-

jouissez-vous jjlulôt de ce que vos noms sont tienne, comme nous avons conliance qu'il se
écrits au Les noms de tous les élus y
ciel. « servira de vous pour faire sentir les elfets de
sont écrits, néanmoins ils ne font pas tous sa miséricorde aux Anglais.» Berthc, comme
des miracles; or, les disciples de la vérité ne on déjà remanpié, était française, et fille
l'a

doivent pas se réjouir d'un bien passager et du roi Gliérébert. Elle n'avait épousé Ëthel-
particuliei' pour eux, mais du bien qui leur bert, qui était païen, qu'à condition de con-
est commun avec tous, et dont ils se réjouis- server le libre exercice de sa religion, et elle
sent éterucllcmont. C'est pour cela que le avait emmené avec elle un évèipie nommé Lui-
Seigneur rappelle ses disciples, de la joie dard. Elle n'avait pas d'aboid travaillé à la
[iarticulière que leur causait le don des mi- conversion de son mari; mais elle y travailla
racles, il la joie éternelle en leur disant : ensuite efficacement avec Augustin, parce
/ié/ouissez-vous de ce que vos noms sont écrits au qu'elle était très-instruite. Saint Grégoire l'ex-
ciel. » Saint Grégoire veut donc que, tandis horte à afl'ermir Éthelbert dans le zèle de la
que Dieu agissait ainsi au dehors par le mi- religion, et à long temps
réparer ainsi le

nistère d'Augustin, il se jugeât lui-même sé- qu'elle avait différé de travailler à le conver-
vèrement au dedans, et qu'il s'appliquât à tir. Il la prie encore d'exciter son époux

se bien connallre lui-même. « Si vous vous à procurer l'entière conversion de ses su-
souvenez, lui dit-il, d'avoir oITensé Dieu par jets, en l'assurant que ses bonnes œuvres
la langue ou par les œuvres, ayez toujours étaient non-seulement connues à Rome, oîi

ces fautes présentes à l'esprit, pour répii- l'on priait avec ardeur pour sa conservation,
mer la gloire qui s'élèverait dans votre mais en divers lieux, età Constautinople, où
cœur, et songez que ce don des miracles ne on les avait portées jusqu'aux oreilles de
vous est pas donné pour vous, mais pour l'Empereur.
ceux dont vous devez procurer le saint. pensait à n.
3. Quoiqu'accablé d'infirmités, il

Moïse, ce grand serviteur de Dieu, étant, soulager les douleurs de ses amis. Ayant donc
après tant de miracles, arrivé à la Terre pro- appris que Marinien, évêque de Raveune,
mise. Dieu lui reprocha la faute qu'il avait l'un des moines de son monastère, qu'il avait
faite trenle-huit ans auparavant, en doutant retenus auprès de lui dans le commence-

s'il pourrait tirer de l'eau d'une roche. Com- ment de son pontificat, était malade d'un vo-
bien donc devons-nous trembler, nous qui missement de sang, il fit consulter les plus
ne savons pas encore si nous sommes élus? habiles médecins de Rome, et lui envoya leur
Vous savez ce que dit la vérité même dans avis par écrit. Ils ordonnaient tous le repos et

I, riOvangilc : Plusieurs me viendront dire en ce le silence.Ni l'un ni l'autre ne paraissant


jour-là : Seigneur, nous avons prophétisé en possibles tant que Marinien demeurerait à
votre nom ; nous avons chassé les démons et fait Ravenne, saint Grégoire lui écrivit de com-
plusieurs miracles; et je leur déclarerai que je mettre des personnes qui pussent célébrer
ne les ai jamais connus. Je vous parle ainsi les messes, prendre soin de l'évêché, exer-
pour vous humilier; mais votre humilité doit cer l'hospitalité, gouverner les monastères,
être accompagnée de confiance car, tout pé- : et de venir à Rome avant l'été, Ini offrant en

cheur que je suis, j'ai une espérance certai- même temps de prendre soin de sa santé, au-
tant qu'il en serait capable « Car, ajoute-
ne (jue tous vos péchés vous seront remis, :

puisque vous avez été choisi pour procurer t-il, les médecins disent que l'été est fort

la rémission aux autres, et donner au ciel la contraire à votre maladie, et il est très-im-

joie de la conversion d'un si grand peuple, n portant que vous retouiniez en santé à votre
Rien ne prouve mieux la vérité des miracles église; ou, si Dieu vous appelle à lui, que ce
d'Augustin, que ces avis si séiieux de saint soit entre les mains de vos amis. Si vous ve-
Flcn;», •'•
Grégoire. —
Le Pape avait appris de la bou- nez, amenez peu de gens, parce que vous
322 HISTOraE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
demeurerez avec moi dans l'évèdié, et que gouverné, que si cet apôtre en ciil été abbé.
vous fournira les secours néces- Saint Grégoire, ayant appris quelque E|i<i. a.
cette église 5.
saires. Au reste, je ne vous dissuade pas, temps après que Théoctiste patrice, so^ur de
mais je vous défends expressément d'entre- l'Empereur, était accusée de quelques er-
prendre de jeûner, les médecins étant d'avis reurs, et qu'elle sentait vivement un repro-
que le jeûne est très-contraire à ce mal je ;
che si injuste, lui écrivit une lettre de con-
vous le permets seulement cinq fois l'année solation, où il lui représente que, quand ou
ou aux prandes solennités. Vous devez aussi a dans le ciel le témoin de sa vie, on ne doit
vous abstenir des veilles, et faire prononcer pas craindre le jugement des hommes sur la
par un autre les prières que l'on a coutume terre que les bons ne peuvent éviter ici-bas
;

de réciter en bénissant le cierge pascal dans d'être mêlés avec les méchants, et que, com-
l'église de llavcnne, et commettre aussi à me plusieurs louent les bons au delà de
quelque autre les explications de l'Évangile, leurs mérites. Dieu pennet, pour les humi-
Ef il, <o. que les évèques font à Pâques. Dans une — lier, que les méchants les calomnient. "Vous

autre lettre, 'saint Grégoire lui défend encore ne devez donc, ajoute-t-il, vousenaflfligeren
de jeûner; mais, au lieu que dans la lettre aucune manière; mais, parce que vous pou-
précédente il avait restreint à cinq jours de vez faire cesser ce murmure, je crois que ce
l'année la permission qu'il lui donnait de serait un péché de le négliger. Nous devons
jeûner quelquefois, il lui accorde dans celle- mépriser le scandale de ceux que nous ne
ci un ou deux jours par semaine, en cas que pouvons contenter; mais, quand nous le pou-
sasanlé fût rétablie. vons arrêter sans pécher, nous le devons. » II
37 4. En Sicile, lorsqu'il arrivait que quel- conseille à Théoctiste d'appeler en secrel les
qu'un eût une difficulté avec un clerc, le dé- principaux de ceux qui murmuraient contre
fenseur romain la faisait terminer h son tri- elle, de leur rendre raison de sa créance, et

bunal. C'était agir contre la disposition des d'anathématiser devant eux les errcuis qu'ils
canons; c'est pourquoi saint Grégoire lui or- lui imputaient. « S'ils croient, lui dit-il, que

donna de laisser aux évoques la connaissance votre analhème n'est pas sincère, vous devez
des aliaircs des clercs, ou pour les décider même y ajouter le serment, sans croire cette
eux-mêmes, ou pour commellii; des juges; satisfaction indigne de votre rang, puisque
lui laissant toutefois la liberté d'èlru média- nous sommes tous frères, créés et rachetés
teur, lorsqu'un clerc ou un laïque aurait un par un même Maître. Saint Pierre ayant reçu
il. procès avec l'évêque. — Il se plaignit à le pouvoir délier et de délier, et de faire des

Rusticienne patrice, de ce qu'en lui écrivant miracles, n'opposa point son autorité à ceux
elle se qualifiait plusieursde sa ser-
fois qui se plaignaient de ce qu'il était entré chez
vante. « Comment, lui pouvez-vous
dit-il, Corneille, et ne leur dit point que ce n'était
vous appeler ma servante, vous dont j'étais point aux ouailles à reprendre leur pasteur;
vassal avant l'épiscopat, et qui, par les char- mais il les apaisa en leur rendant humble-
ges de l'épiscopat, suis devenu le serviteur ment raison. Si le prince des apc'ities, qui
de tous? Je vous prie, au nom de Dieu tout- opérait tant de prodiges et de miracles, en a
puissant, que ce terme de servante ne se agi ainsi, ^ plus forte raison, nous qui som-
trouve plus dans les lettres que vous m'écri- mes pécheurs, devons-nous, lorsqu'on nous
vez. A l'égard des présents que vous avez reprend, apaiser ceux qui nous reprennent,
envoyés à saint Pierre, ils ont été reçus en en leur rendant avec humilité raison de no-
présence de tout le clergé, et suspendus en- ire conduite. Quand j'étais à Constanlinople,
suite dans l'église. Je vois par vos lettres jilusicurs (ju'on accusait sur de tels chefs ve-

que vous souhaitiez qu'on les portât en naient souvent me trouver; or, je proleste
procession à l'église de Saint -Pierre en eu ma conscience que je n'ai jamais rien
chantant des litanies; cela ne s'est point trouvé en eux des erreurs (|u'on leur impu-
fait, parce que vos présents sont arrivés avant tait c'est pourquoi je m(''prisais ces dis-
:

votre lettre. » Celaient des voiles pour l'or- tours, je recevais familièrement ces person-
nement des autels, et pour couvrir, ce sem- nes, et m'appliquais à les défendre contre
ble, la boite où l'on conservait le corps leurs persécuteurs. On disait qu'ils rom-
de Jésus-Christ. Il la remercie des aumô- paient les niiiriagessous prétexte de religion ;

nes qu'elle avait envoyt'cs au monastère qu'ils soutenaient que le baplènic u'ôlait pas
de Suinl-André, qui était, dit-il, aussi bien eutièrcmcnl les péchés, cl que, si quelqu'un
[VTI'" SlfccI.E.J CHAPITRE XUX. — SAINT GRKGOIRK LE GRAND, PAPE. .^23

liiisail pdnitcnce pendant trois ans, il pou- en avait reçue. 11 y loue la l'ii d'IIézychius,
vait ensuite s'abanilonncr au poché; eiiliu, qui lui i)araissait si pure, qu'il ne doutait
que si on les conliaii;nait d'anatliémaliser pas qu'il ne lût du nombre de ceux qui tra-
(piolqu'une de ces ciTOurs, ils prétendaient vaillent a l'édification de l'Eglise figurée
(jne cet anatli^iue ne les oMigCiiit pas. S'il y par l'arche de iNoé. Il le loue encore de ce
a des gens ilaiis ces sentiments, il est certain qu'il n'admettait dans les ordres sacrés (jue

qu'ils ne sont pas chrétiens; je les anathé- lies personnes oithodoxes; mais il en rend

matise, moi, et tous lesévèqucs catholiques, grâces à Dieu et h l'empereur Maurice, si


et toute l'Eglise, parce qu'ils pensent et par- zélé pour la foi catholique, que les héréti-
lent contre la vérité. » 11 réfute toutes ces ques n'osaient ouvrir la bouche sous son rè-
errem-s l'une montrant par après l'auli-e, gne. La simonie ne laissait pas d'avoir grand
- 1>M
-I :_ ,. •! ,1.. .... l..r. .<rt-Kf.rto /-VAT'îaMf 'r»n flicnit
les églises d'Orient, où l'on disait
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. » _

que le mariage est in-


l'autorité de l'Kcriture
1 ; ..
cours dans 1

dissoluble, ce qui n'empêche pas que les que i^eisonne ne parvenait aux ordres sacrés
deux parties ne puissent d'un commun con- qu'en donnant de l'argent. Saint Grégoire
sentement faire profession de continence; conjure Hésychius de retrancher cet abus,
d'où vient que l'on a quelquefois pris des s'il avait lieu i Jérusalem, et d'oll'rir à
Dieu
cette marque de son zèle pour prémices d

hommes mariés pour leur coidler le gouvcr


nement de l'Église. Il prouve de même qu'il son épiscopat. Il l'e.xhorte encore à user de
n'y a aucun péché qui ne soit eilacé par le toute sa prudence pour apaiser certaines dil-

baptême, figuré par la mer Rouge, où tous ficultés qui naissaient de temps en temps en-
les Égyptiens furent engloutis sans qu'il en tre son église et celle de Néas. Il y a un en-
échappât un seul que, s'il était permis après ;
droit dans cette lettre où saint Grégoire sem-
trois ans de pénitence de s'abandonner au ble dire que celui '
qui est ordonné par si-
Ad Gain, péché, saint Paul ne dirait pas Celui qui : monie, ne l'est pas véritablement mais ce ;

sème dans sa chair, recueillera de la cliair la n'est pas là sa pensée. Il veut dire seulement

n,p.u..i, con-uption et la mort; et saint Piene : // leur que cette ordination n'est point légitime, et
M.
est arrivé ce qu'on dit d'ordinaire /lar un pro- que celui qui est promu de cette sorte peut
verbe véritable : Le chien est retourné à ce qu'il toujours être déposé, quand même il aurait

avait lui-même vomi, et le pourceau, après avoir joui plusieurs années de l'honneur de l'cpis-
été lavé, est retourné pour s'y vau- dans la boue copat. —
11 écrivit à Anatole, son nonce à Ei.iti.n.

trer de nouveau. 11 ajoute on ne peut douter : Gonstautinople, qu'il ne fallait point déposer
qnela vertu de pénitence ne soit très-clUcace Jean, évêque de la première Justinienne, à
contre le péché; mais ce n'est que quand elle cause qu'un mal de tète le mettait hors d'é-
eststable et persévérante, puisqu'il est écrit : tatde faire ses fonctions; mais lui donner un
I ^2. Celui qui persévérera jusqu'à la fui, sera sauvé. » administrateur, la maladie n'étant une rai-
11 peu à réfuter la troisième erreur,
s'arrête sou de déposition, ni pour cet évéque, ni
parce qu'il fallait n'être pas chrétien, pour pour qui que ce fût. — Agathosa s'était

croire qu'où pouvait par de vaines subtilités plainte a saint Grégoire de ce que son mari
éluder la foi'me des anathèmes de l'Église. s'était fait moine sans son consentement dans
.\ussi répètc-t-il qu'il n'a trouvé personne à le monastère de l'abbé Urbicus. Pour s'as-
Gonstautinople qui soutint ces erreurs. <iJe surer de la vérité du fait, le Pape commit
ne crois pas même, ajoute-t-il, qu'il y en eût, Adrien, notaire de Palerme, avec ordre de
car je les aurais reconnus; mais plusieurs l'informer si cette femme n'avait pas consenti
fidèles brûlent d'un zèle indiscret, et sou- à la retraite de son mari, etsi elle n'avait pas

vent font des hérésies en poursuivant de pré- promis elle-même de changer d'état. Dans ce
tendus hérétiques. C'est pourquoi il faut cas, il veut que le mari reste dans le monas-
avoir égard à leur faiblesse, et les apaiser tère, etque l'on contraigne la femme ac- ii

par raison et par douceur. Us sont sembla- complir sa promesse. Il veut encore qu'il soit

bles à ceux dont saint Paul disait : Je leur permis au mari de persévérer dans l'état mo-
7-endstémoignage qu'ils ont en effet du zèle pour nastique si sa retraite a été précédée du
,

Dieu ; mais c'est un zèle qui n'est point selon la crime de fornication de la part de sa femme ;

science, n mais, dans la supposition que la femme n'au-


6. La lettre à Isacius ou Hésychius, succes-
seur d'Amos sur le siège patriarchal de Jé- ' Talium sacerdotiimt in sacerdotio non depu-
rusalem, est une réponse à la synodique qu'il lalur. Epist. 46, lib. .\1.
524 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
rait point commis ce crime, et qu'elle n'au- d'Angers. Ce n'était pas que les missionnai-
rait point consenti an clianpemcnt d'état de res dussent passer chez tous ces évoques;
son mari, il ordonne qn'il lui sera rendu, de mais c'est que ceux qui n'étaient point sur
peur que la conversion do l'une des parties leur route ne laissaient pas de pouvoir les
ne soit une occasion de perte pour l'autre. servir beaucoup par le crédit qu'ils avaient
Il convient que les lois humaines autorisaient auprès des rois Thierry, Théodebert et Clo-
l'une des deux à dissoudre le mariage mal- taire, à qui le Pape les avait aussi recom-
gré l'autre pour cause de religion mais il ; mandés en leur écrivant pour la convoca-
soutient que la loi de Dieu ne le permet (Sas, tion d'un concile contre la simonie.
et qu'excepté le cas de fornication, il n'est 8. Augustin, en envoyant à Home le pré- '

jamais permis au mari de quitter sa femme, tre Laurent pour demander de nouveaux
parce que, depuis la consommation du ma- missionnaires, le chargea d'un mémoire où eiI" ci-

riage, ils ne font plus qu'un corps et qu'une il proposait diverses dillicultés ;'i saint Gré-
chair. Cette raison de saint Grégoire fait ^oir goire; ce saint y répondit par la même voie.
qu'en disairt que le mariage ne peut être dis- Elles sont distribuées en onze articles. Par
sous pour cause de religion, il l'entend d'un le premier, Augustin demande de quelle ma-
mariage consommé ce qui n'est pas contrai-
:
nière les évoques devaient vivre avec leurs uicrreç. i.

re à la pratique de l'Kglise, qui permet la dis- clercs, et comliien il de portions


fallait faire
solution d'un mariage non consommé, quand des biens de l'Église, ou des oblations des
l'une des deux parties veut entrer en religion. fidèles. Saint Grégoire répond, qu'il est d'u-
7. Il ordonna aux évoques de Sicile d'iudi- sage de faire quatre portions de tous les re-
61. quer deux litanies ou processions par se- venus de l'Église; la première pour l'évo-
maine, pour demander à Dieu d'être déli- que et sa famille, à cause de l'hospilalité; la
vrés de l'invasion des barbares, et d'exhor- seconde pour le clergé la troisième pour les
;

ter à cet effet les peuples à la pratique des pauvres; la quatrième pour les répaiations.
bonnes œuvres. —
Il fit à Didier, évéque de 11 ne prescrit point de règles générales sur

Bi. Vienne, de vives romonlrances sur ce qu'il la vie que les évoques doivent mener avec
enseignait la grammaire dans lesacadémies, lem-s clercs ; mais, parce qu'Augustin avait
et }' expliquait les auteurs profanes; ne été instruit dans la vie monastique, il lui dit
croyant pas qu'il lut de ladignilé d'un évo- de ne point se séparer de ses clercs, mais
que de chanter d'une même boucheles louan- d'établir dans la nouvelle église des Anglais
ges de Jésus-Christ, et celles de Jupiter. Il la vie commune de l'Église naissante, où per-
ne croit pas même que cette profession
'
sonne n'avait rien en propre. Il demande dans
convienne à uu laïque de piété. A la suite de le second si les clercs qui ne peuvent garder
on en trouve plusieurs à divers
cette lettre, la continence, peuvent se marier, et si, après uwnf. ».

autres évoques des Gaules, à Virgile |d 'Arles, à s'être mariés, ilsdoivent retourner dans le siè-
ÉthériusdeLyon, àArigiusde Gap, aux rois cle. .\ cela saint Grégoire répondque lesclercs

ec'rMtî; Thierry, Théodebert, Clotaire, et à la reine qui ne sont pas dans les ordres sacrés, et qui
ei, C3
Brunehaut, pourla convocation d'un concile, ne peuvent garder la continence, doivent se
où l'on travaillât à bannir la simonie des ordi- marier et recevoir leurs gages hors de la com-
nations. Il mande à Élhérius de Lyon qu'il munauté; mais qu'en fournissant à leurs be-
n'avait trouvé aucun de saint Irénéedans
écrit soins, il faut avoir soin qu'ils vivent selon la
les archives de l'Eglise romaine. Les progrès règle de l'Eglise, qu'ils chantent les psaumes,
que la foi faisait dans l'Angleterre deman- et que leurs mœurs soient pures; qu'i\ l'égard
daient des prédicateurs en plus grand nom- de ceux qui vivent en commun, il n'y a point
bre, que saini Grégoire n'en avait envoyé. de portions:! faire pour l'hospitalité, ni pour
Il fit donc paitii pour ce pays-ià quelques les pauvres, tout ce qui reste après avoir pris
moines avec le prêtre Laureut et l'ahbiS Âlel- le nécessaire devant être employé en onivres imm-s. >.

litus, à qui il donna des lettres de recom- pies. La troisième porte La foi étant une,
:

mandation pour les évoques de Tclon dans pouiquoi les coutumes des églises sont-elles
la province d'Arles, de Marseille, de Chalon- si dill'érentes? A Home, la manière de célé-
sur-Saône, de Metz, de Paris, do Rouen et brer les messes n'est pas la même que dans
' Et qunm grave nefanrtumquf sit rpisœpis les Gaules. « Vous savez, rc'poud saint Gré-
canere quoé ncc laico rehgiuso convenial, ipse goire, la coutume de l'I-lglise romaine où
considéra. Episl. 'M, lili. XI. vous avez été élevé; mais je suis d'avis que
[vil" SIÈCLE.] CHAPITRE XLIX.— SALNT GRÉr.OIllE LE GRAND, PAPE.
si vous trouvez, soit dans l'l']^lise nunainc, elle eu tolère fpielques-uns par douceur, clic

des Gaules, soit dans qncl(|ue


soit clans celle en dissimule d'autres par certaines consiiië-
autre, quelque chose qui soit plus agréable rations, pour les corriger plus facilement ;

!\ Dieu, vous le clioisissiez avec soin pour mais il faut avertir tous ceux qui vieniieul :\

l'élablii' dans la nouvelle I\L;lise des Aniçlais ; la foi, de s'abstenir de ces coujimctious illi-
car nous ne devons pas aimer les choses à cites; et s'ils y tombent ensuite avec con-
cause des lieux, maisles lieux cause des i\ naissance, il faut les priver de la commu-
bonnes choses. Choisissez donc de toutes nion du corps et du sang du Seigneur.
les Kglises les [uallipies saintes, |iieiises et 9. Dans le huitième article, Augustin Ar- •"Hmf l
• solides, et l'aites-eu un lecucil à l'usage des mande s'il (Uait besoin, dans l'ordinaliou
Anglais. » Le quatrième regarde le vol fait d'un évèque, qu'il se fit assister de plusieurs
à l'Kglise. La rt^ponse de saint Grégoire est, évoques, lorsqu'il ne pouvait en avoir que
ipie celui qui aura dérobé quelque chose h dilticilomenl ;\ cause de la trop longue dis-
l'Mglise, doit être puni selon la qualité de la tance des lieux. Saint Grégoire répond :

personne, mais toujours avec une charité pa- (I Dans des .Vnglais où vous êtes en-
l'église

ternelle qui ait pour but de corriger le cou- core seul évêque, il faut bien que vous en
pable, et de lui faire éviter les peines de ordonniez sans être assisté d'autres évo-
l'ciifer. Si celui qui a volé a du bien, il faut ques mais quand il viendra des évoques des
;

le punir d'une autre manière que celui quia Gaules , ils assisteront comme témoins de
volé n'ayant rien; il y en a d'autres qu'il faut l'ordination. A l'égard des évoques que vous
punir plus légèrement, d'autres plus sévè- ordonnerez en Angleterre, nous prétendons
rement les mis par une amende pécuniaire,
;
qu'ilsne soient point éloignés, en sorte que
les autres par des peines corporelles. Il faut rien ne les empêche de s'assembler, pour
obliger le voleur à restituer la chose déro- en ordonner d'autres, au nombre de trois
lo'crio^, b, bée, mais sans augmentation, afin qu'il ne ou quatre comme dans le monde on assem-
,

semble pas que l'Église veuille profiler de ble des personnes d('jà mariées pour pren-
sa perte. La question pi-oposée dans le cin- dre part h la joie des noces. » Saint Grégoiie
quième article, est de savoir si deux frères fait cette comparaison, parce qu'il regarde
peuvent épouser les deux sœurs. Celle du l'ordination d'un ëvéque comme un mystère
sixième est touchant les degrés de consan- par lequel l'homme est uni à Dieu. Il dé-
guinité qui empochent le mariage. Saint clare à Augustin, dans sa réponse à la neu- imc log.i,

Grégoire répond, que deux frères peuvent vième question, ne lui attribue aucune
qu'il

épouser les deux sœurs, puisqu'il n'y a rien autorité sur les évêques des Gaules au pré-
dans l'Écriture qui soit contraire à cette dis- judice de l'archevêque d'Arles qui, depuis
position que la loi romaine permet les ma- longtemps, avait reçu le pallium "des Papes
;

riages des cousins germains, mais que l'É- ses prédécesseurs. « Si donc, lui dit-il, il

glise les défend, comptant ce degré de con- vous arrive de passer en Gaule, vous devez
sanguinité [lour le second, en même temps agir auprès de lui pour corriger les évêques,

qu'elle permet de se marier au troisième et et l'exciter pas assez fervent


s'il n'était :

au quatrième que c'est un crime d'épouser


;
nous lui avons
de concourir avec vous
écrit

la femme de son père ou de son frère, c'est- PO'ir cet effet mais vous n'av'ez point de ju-
;

à-dire, sa belle-mère ou sa belle-sœur, et que ridiction sur les évêques de Gaule, et ne

ce fut pour avoir repris Hérode d'un ma- pouvez les réformer que par la persuasion
riage de cette nature, que saint Jean-Bap- et le bon exemple car il est écrit dans la
:

tiste eut la tête tranchée. Il dit dans sa ré- loi, que celui qui passe dans la moisson Biut, \Atii,

ponse au septième, qu'un grand nombre d'autrui ne doit pas y mettre la faucille.
d'Anglais ayant contracté avant leur con- Quant aux évêques de Bretagne, nous vous
version des mariages illicites, il fallait les en commettons entièrement le soin, pour
avertir de se séparer, par la crainte du ju- instruire les ignorants, fortifier les faibles et
gement de Dieu, sans néanmoins les priver corriger les mauvais, n C'étaient les évêques FIciTry, 11-
vre XX.WI,
de la communion du corps et du sang de des Bretons, anciens habitants de l'ile, chré- lirm. VllJ,
pa^. 210.
Notre-Seigneur, de peur qu'il ne parût qu'on tiens depuis longtemps, mais tombés dans

les punissait de ce qu'ils avaient fait par l'ignorance et la corruption des mœurs. Saint
ignorance avant d'être baptisés car eu ce :
Grégoire envoya à Augustin des reliques du
temps l'Église puuit avec zèle quelques abus, martyr saint Sixte, qu'il lui avait demandées
"26 HISTOTRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.

f oiu- les exposer à la vdnéiation des fidèles cette lettre que l'Kglise permet de se marier
d'un certain endroit, à la place des rcliqries au troisième degré de consanguinité, la Cl
d'un autre Sixte que ce peuple disait avoir demander aux archivistes de l'Église romaine
été aussi martyr, mais sans en avoir de preu- qui ne la trouvèrent pas; ce qui l'obligea
ves solides. Le Pape dit à Augustin, pour le d'en écrire à Xorthelme, archevêque de Can-
cas où il ne se ferait point de miracles au torbéii, qui l'avait sans doute dans les ar-
tombeau de ce Sixte, et que les anciens ne chives de son église, puisque le vénérable
se souviendraient pas d'avoir ouï raconter à Bède, qui écrivait vers le môme temps, l'a
leurs ancêtres les actes de son martyre, de rapportée dans ses ouvrages. Le pape Za- «»«• lit 1

ADgl.
fermer le lieu où il reposait, et d'empèclier charie en cita un passage dans le concile de «w»
les fidèles de continuera lui rendre un culte. Rome de l'an 7i3.
Cet article de la lettre de saint Grégoire 11. Vers le même temps, Quirice, évêquc niw.i.;

manque dans la plupart des manuscrits et d'Ibéric, proche le Pout-Euxin, envoya A Ro-
dans V Histoire d'Angleterre du vénérable me, au nom de tous les catholiques de la
Bèdc, où Je reste de la lettre se trouve. province, consulter le Saint-Siège si l'on de-
10. La dixième difficulté était de savoir si vait baptiser les évèqucs et les peuples qui
Id eno^.
10. 1
l'on devait baptiser une femme enceinte, et quittaient l'hérésie nestorienne pour rentrer
combien de temps après ses couclies elle dans l'ICglise catholique, ou s'il fallait se con-
était obligée de s'abstenir de l'entrée de l'é- tenter de leur profession de foi. Saint Gré-
glise; si elle devait s'en abstenir aussi dans goire lui répondit n Nous avons appris des
:

d'autres temps à cause de certains accidents anciens Pères, que ceux qui ont été bapti-
naturels, et s'éloigner de la sainte commu- sés dans l'in-résie au nom de la Trinité, sont
nion. Saint Grégoire répond que l'on peut reçus au sein de l'Kglise par l'onction du
baptiser une femme enceinte, puisque la fé- chrême, ou par l'imposition des mains, ou
condité est un don de Dieu qu'on peut en-
; par la seule prefession de foi; d'où vient
core la baptiser aussitôt qu'elle est délivrée, qu'en Occident on reijoit les ariens par l'im-
et l'enfant d'abord après sa naissance, s'il y position des mains, et en Orient par l'onc-
a danger de mort ;
qu'il n'y a point de temps tion les monophysites et les autres par la
;

réglé après les couches, où la femme doive seule profession de foi parce que le saint
;

s'abstenir d'entrer dans l'église, ce qui en baptême qui leur a été administré chez les
cA dans l'Ancien Testament devant s'en-
dit hérétiques reçoit en eux la foixc de les

s et îcq.
tendre dans un sens mystérieux quelle ne;
purifier, lorsqu'ils reçoivent eux-mêmes,
doit pas non plus se l'interdire dans le temps ceux-là le Saint-Esprit par l'imposition des
de ses acydents naturels, puisqu'ils ne peu- mains, grâce de leur réunion à
et ceux-ci, la
vent être imputés à péché, et que, par la l'Eglise en faisant profession de la vraie foi.
môme raison, elle peut s'approcher de l'Eu- On appelait monophysites ceux qui ne re-
charistie en ces jours-là, quoiqu'elle soit connaissaient qu'une nature en Jésus-Christ,
louable si elle s'en prive par respect mais ; comme les eutychiens. Mais à l'égard des
il veut que les maris s'abstiennent de leurs hérétiques qui ne sont point baptisés au
femmes tant qu'elles sont nourrices; à quoi nom de la Trinité, comme les bonosiens qui
il ajoute, qu'elles ne peuvent pas se dispen- ne croient pas Jésus-C'irist Dieu, et les ca-
ser de nourrir elles-mêmes leurs enfants, taphryges qui croient (jue Montan est le
l'usage contraire n'ayant été introduit que Saint-Esprit, il ne faut pas craindre de leur
pour favoriser l'incontinence. Il croit que réitérer le baptême, puisqu'ils ne l'ont pas
les illusionsnocturnes, quand elles n'ont reçu, celui qu'ils ont reçu ne pouvant passer
point été occasionnées par des péchés de pour vrai baptême, parce qu'il n'a pas élu
pensées le jour précédent, ne doivent em- conféré au nom de la Trinité. Les nestoriens
pêcher ni de communier ni d'odiir le sa- au contraire sont baptisés au nom de la Tri-
crifice. Augustin crut qu'il était néces- nité mais ù cause qu'à l'imitation des per-
;

saire d'instruire sur tous ces points l'église fides juifs, ils ne croient point l'incarnatinn
naissante des Anglais; mais il ne voulut s'a- du Fils unique de Dieu, il faut leur- appren-
vancer sur aucun sans avoir auparavant dre que le même Jésus-Christ est le Fils uni-
consulté celui qui l'avait envoyé. Saint Bo- que de Dieu et tout à la fois fils de l'homme,
B.nifM. nifacc, archevêque de Mavcncc, avant oui et les obliger de confesser publiqucnicnt
parler de ce- que saint Grégoire dit dans celte vérité, d'anathématiscr Xcstorius avec
fvM" sikt.E.T CIIAPITmî XLIX. — SAINT oni'T.nmE le cHANn, pape. r,9.i

tous SOS soclalcuis, v\ de promollre de re- parce (pi'elle regardait l'i'lablissemenl d( s


cevoir tuus les conciles f|iie ri!L;lise riM^iit. évèchés en Angleterre. Le Pape y dit « La :

Aldis vdiis (levez les admellri^ siiiis (lilliciillé, nonvelle I''glis(! tics .Anglais se ti'onvanl éta-

leur cdiiseivaiil inriue le laiij; (jifils avaient gloire de Dion, par son secours
lilie [)oui' la

dans leiii's éj^lises. pour les ramener plus l'u- et par vos travaux, nous vous accordons l'u-
cilement.» Saint Git'^oire appuie sa réponse sage du pallium seiUemcut pour la céh'ljra-
di^ tontes les preuves nécessaires pour tUa- tion des messes, à la charge d'élahlir douze
liiir le mystère de l'Incarnation confie les évê(iuesqnivous s(!ront soumis; en soi'leiitii"
nesloricns, afin que l'évèquo (Jiiirice eût en l'évèque de Londres soit toujours à l'avenir
main de quoi les convaincre, s'il en était be- consacré par son propre concile, et reçoive
soin. lepallium du Saint-Siège. Vous enverrez pour
'!"'• 12. Ililarns, sons-diacre de l'église de Na- évèqne à York celui (jue vous jugerez à pro-
lilos, avait calomnié Jean, diacre delà même pos, à condition que, si cette ville et les lieux
église, sans que Pascliase, qui en était évè- il ordon-
voisins reçoivent la parole de 13ieu,
que, se fût mis en devoir de pniiir le calom- nera aussi douze l'vèques, etsera métropoli-
nialcur. Saint (irégoire en écrivit à Anthé- tain. Nous nous ])roposons de lui donner h;

mius, qui, en sa qualité de défenseur et de pallium, et nous voulons qu'il soit soumis a
recteur du patrimoine de l'IOglise dans la votre conduite mais, après votre mort, il
;

Campanie, aurait dû s'inti'rcsser dans cette sera supéiieur des évèques qu'il aura or-
le

allaire. Il le reprend vivement de sa négli- donnés, sans dépendre en aucune manière


gence, et le charge d'avertir Pascliase de pri- de l'évèque de Londres. Le rang entre l'é-
ver Ililarns des fonctions de son ministère, vèijue de Londres et celui d'York se réglera
et après l'avoir fait frapper publiquement de suivant l'ordination, et ils agiront de concert
verges, de l'envoyer en exil, afin que celte p"our le biendelà religion. Outre les évèques
pmiition servit d'exemple aux antres. Il le ordonnés par vous et pai- celui d'York, nous
cliarge aussi d'exhorter de sa part Paschase voulons aussi que tous les évèques de Breta-
à être plus attentif aux devoirs de sa charge, gne vous soient soumis, en sorte qu'ils ap-
et d'élablii' dans sa maison des ollicicrs pro- prennent de votre bouche et do vos exemples
pres ;\ exercer l'hospitalité, et juger lesaf- i'i ce qu'ils doivent croire et pratiquer. » Saint
'• faires. —
Théodore, lecteur de l'église de Grégoire, inquiet du succès du voyage de e,ei,isi. -c.

Thessalonique, envoyé à Rome par Eusèbe l'abbé Mcllitus, lui écrivit pour lui faire part
son évèqne, confia à nn moine nommé An- de ses inquiétudes, et le charger de dire à
dré les papiers dont il était porteur, parce Augustin, aussitôt après son arrivée en An-
(ju'il le connaissait depuis longtemps. Ce gleterre, de ne point faire abattre les temples
moine, par un excès de folie ou de malice, des Anglais, mais seulement les idoles qui y
corrompil tellement la Icllre d'Eusèbe au étaient, et de se contenter de faire de l'eau bé-
Pape, que tout çutre qui l'aurait lue, aurait nite, d'en arroser ces temples, d'y dresser des
pensé qu'Eusèbe n'était ni orthodoxe ni même autels, et d'y mettre des reliqnes : car « si ces
doué de l'usage de sa raison. Il fit plus il ; temples sont bien bâtis, il faut, dit le Pape, les
composa divei's discours sous le nom de saint faire passer du culle des démons au service
Grégoire, qui no pouvaient que le déshono- du vrai Dieu, afin que cette nation, voyant
rer :semble même qu'il affectait d'y parler
il que l'on conserve les lieux auxquels elle est
grec. Le saint avertit de toutes ces choses accoutumée, y vienne plus volontiers et ;

l'évèque de Thessalonique, en le priant de parce qu'ils sont dans l'usage de luer beau-
faire supprimer ces discours, s'il lui en tom- coup de bœufs dans les sacrifices qu'ils of-
bait quelques-uns entre les mains, avouant frent aux démons, il faut accommoder à cet
qu'il n'entendait pas le grec, et qu'il n'avait usage, dans l'intérêt de leurs âmes, quelque
écrit aucun ouvrage, en cette langue. 11 lui solennité, comme celle de la dédicace de
recommande encore d'exiger une confession ces temples changés en églises, ou la fête des
de foi du prêtre Luc, dont on disait la doc- martyrs dont on y met des reliques, en leur
trine suspecte. permettant de dresser des tentes tout autour
13. Outre la lettre particulière qu'il écri- avec des branches d'arbres, et d'y célébrer ain-
vit Augustin pour l'éclaircissement dcsdif-
;\ si la fête par des repas modestes qu'au lieu ;

avait proposées, il lui en


ficullés qu'il lui donc d'immoler des animaux au démon, ils
adressa une qu'il devait rendre publique, les tuent pour les manger, et rendent grâces
,, ,

528 HîSTOraE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


à Dieu qui les rassasiera de ces viandes. En elle y persévérait, il n'y aurait ni concorde,
leur laissant quelques ri-jouissaiices sensibles, ni charité : la vie monas-
car qu'est-ce que
ilsera plus aisé de leur insinuer les joies tique, sinon le mépris du monde ? Et com-
intérieures ; car il n'est pas pos.^ibled'ùter à ment peut-on dire qu'on le méprise quand ,

des esprits inflexibles toutes leurs coutumes on aime l'argent ? Il le chargea en même
A la fois. On ne parvient pas d'un saut en un temps de retirer tous les écrits de l'abbé
lien élevé on y monte pas ;\ pas. C'est ainsi
;
Claude. C'était un recueil de ce qu'il avait
que Dieu eu agit avec le peuple d'Israël. Il se ouï dire à saint Grégoire sur les Proverbes ,

fitd'abord connaître à lui dans le temps qu'il le Cantique , les livres des Rois et l'Hepta- ,

était en Egypte, et, parce que ce peuple teuque. La raison qu'il eut de les retirer,
s'était accoutumé à sacrifier aux idoles, il fut que, se les ayant fait lire par l'abbé mê-

le laissa dans l'usage d'immolerdesanimaux, me, il trouva qu'il avait altéré son sens en
mais en le faisant changer d'objet, en sorte beaucoup d'endroits. Il donna encore com-
que ce qu'ils ollYaient auparavant aux idoles, mission au sous-diacre Jean d'empêcher
ils l'ofl'rissent au vrai Dieu. » Celte lettre est qu'on lut publiquement à Ravenne ses Com-
du quinzième des calendes de juillet, la dix- mentaires sur Job aux veilles de la nuit; di-
neuvième année du règne de l'empereur sant qu'il ne verrait qu'avec peine ses écrits
Maurice, la dix-huitième depuis son consu- devenir pubhcs de son vivant; qu'il valait
lat, indiction quatrième, c'est-à-dire, du dix- mieux lire dans l'église les Commentaires
septième de juin de l'an GOl. sur les Psaumes, apparemment ceux de saint
Augustin ou de saint Ambroise. U témoigne
§xn. du déplaisir de ce qu',\natolius son nonce ,

ilConstanlinople, avait donné à l'Empereur


Livre douzième des Lettres de saint Grégoire.
un exemplaire de son Pastoral, et de ce qn'A-
EriM.ii. Le comte Anion souhaitant de cons-
^. nastase ,
patriarche d'.\utioche, l'avait tra-
truire un oratoire dans son châtean saint ,
duit en grec. Dans la troisième partie de ses
Grégoire donna commission à Passivus, visi- Commentaires sur Job à l'endroit où il est ,

teur du diocèse dans lequel ce château se dit Je sais que mon Rédempteur est viviwt
: ,

trouvait, de consacrer cet oratoire, après l'exemplaire de Marinien de Ravenne ne


avoir examiné soigneusement s'il était suf- s'accordait pas avec l'original que l'on ton-
fisamment fondé, et d'y établir un prêtre seivait dans l'archive de l'Église i-omaine.

cardinal, c'est-à-dire un chapelain, pour y Saint Grégoire dit au sous-diacre Jean d'y
célébrer la messe autant de fois que le comie faire suppléer les quatre mots qui man-
le demanderait, ou que le concoui's du peu- quaient, et dont le défaut pouvait causer de
ple l'exigerait. Il spécilie toutes les condi- l'embarras aux Icsteurs.
tious de la fondation, entre autres, que per- 2. Il reçut, pendant le cours de l'an Gl)l,

sonne n'ait été inhumé dans l'endroit où diverses plaintes contre des«évêques d'Afri-
l'oratoire devait être construit. Cette lettre, que et d'ailleurs, dont les uns étaient accu-
de mêmeque les suivantes, est de l'indic- sés de simonie, les autres de cruauté envers
tion cinquième, l'an COl. —
Après la mort le ou d'autres crimes. Mais avant
clergé,
de Claude, abbé de ClassCj les moines priè- d'en punir aucun, il députait des évoques
rent saint Grégoire de leur donner pour su- pour s'informer du vrai. Si ces plaintes li I

périeur le moine Coustanlius. Le saint le causèrent du chagrin, il eut beaucoup de


refusa, parce que c'était un homme qui ai- joie du retour de Firmin, évoque d'istrie il ,

mait la propriété et qui faisait voir par sa


, l'unité. —
Comme il savait que cet évéque
conduite qu'il n'avait point le ca-iir d'un mancpiait de plusieurs choses nécessaires,
moine. Ils choisirent donc le lellérier d'un il l'assura qu'on ne l'abandonnerait iii>int
autre monastère, nomin('' Maur , dont ils (li- dans ses besoins et il lui envoya en alteii-
,

saient beaucoup de bien. Saint Grégoire dant un habit. —


U écrivit à Deusdedit
avant de l'approuver, ordonna à Jean, sous- évcque de Milan, que l'on ne devait iioiiit
diacre de Havenne, de s'informer de la vie iiKjuiéter les héritiers de Conslantius son
et des qualités de Maur, pour le faire en- prédécesseur, sur les legs qu'il leur avait
suite ordonner abbé par l'évéque Marinien faits par testament, parce qu'il était au pou-

et de prier cet évéqnc de lAcher de bannir voir d'un évoque de donner les biens qu'il

la propriété de ce monastère disant que si,


avait acquis avant sou épiscopal, quoi(iu'il
,

[vil» sitcLE.] CHAPITRE XLIX. — SAINT GRÉGOIllE LE GRAND, PAPlî. 320


ne prtt cnux dont il avait fait
<lisposf'r de. pas en ce jour se laver h^ visaj^e ; et s'il
Kplll. «0.
l'acquisilidii ('laiil l'voiitio. Le paliice Ve- — est permis d'y lavm- celle |)ailie du corps,
nantiiis l'avait piic- lio lui doiuipr uno expli- pour(|uoi pas le tout? Si l'on doit s'abs-
catiiin alli'goiiipio dti c(>rfaiiis laits de Sam- tenir, le dimanche, du travail terresirc
son. H s'on excusa sur son di'laut do sanlù ,
et en consacrer tout le temps à s'appli-
proniellaiit loul(>fois tie l'aire ce ([u'il souliai- ([uer à la prière, c'esf pour expier les né-
lail, en cas (pril se Ironvât assez de forces gligences des six aulres jours de la se-
pour cela. — 11 lit envoyer à un autre Vc- maine. » Quand il unissait des monastères Kl.ijI. 2.

nanlius, évè([ue de l'ih-onse, dcîs haiiils tl'lii- siliiés en dillérenls iliocèses, il le faisait sans

ver, pour le !;aianlir du froid dont il soid- pri'judice de la juridiction d(îs évèques. lia-
frait Iteanconp. — Su lellre A Eidoge, pa- sile évèque de Capoue informé qu'il vou-
, ,

triarche d'Alexandrie, est pour lui recom- lait unir le monastère de Crateras qu'il di- ,

mander quelf[nes mono[)hysites nouvelle- sait ètie de son diocèse, ii un autre qui était
ment couveitis qui étant dans le dessein
,
dans la ville do Na]>li's, s'y opposa. Le cier-
de venir à Itome craiu:naient (pielque vio-
, ge'' de Xaples, qui appuyait celte union, sou-

lence lie la ]iart île ceux dont ils avaient linl que Crateras n'avait jamais été de la dé-
abandonné les erreurs. L'un d'eux qui ,
pendance de l'Eglise de Capoue. La contes-
était moine, disnil (lu'il avait (Icm(niré dans tation ne finissant point saiul Grégoire ,

un monastère fondé par ses parents et de- , nomma des commissaires et comme il ré- ,

mandait que l'on ohlinfeàt les hérétiques qui sulta de leur rapport que les prétentions de
y étaient restés, ou d'en sortir , ou de se Basile n'étaient point fondées, l'union eut
réunir à l'Hylise catl)oli(iuo. Saint Grétioire, lieu. —
11 pei'mit au moine Adéodat, qui,

sans rien décider là-dessus ,remet le tout à avant de s'engager dans cette profession,
la prudence d'Eulogc, et ci son zèle pour la avait fait une donation verbale de ses biens
gloire de Dieu. au monastère où il était entré; de la ratifier
ensuite par écrit; voulant que celle dona-
§xni. tion demeurât ferme et stable, quoiqu'elle

Livre treizième des Lettres de saint Grégoire. n'eût été mise par écrit que depuis qu'Adéo-
dat s'était fait moine, parce qu'il n'y avait
Ces Lettres sont do l'an 602, indiction
\. point de loi qui défendit le contraire, et que
sixième la treizième année depuis son or-
, par cette nouvelle donation il n'avait fait
dination. Ayant appris en cette année qu'à que constater la première. 11 parait par —
Rome même quol[ues-uns semaient des er- la lettre à Janvier évèque de Cagliari que
, ,

l'eurs qui tenaient des superstitions juives, les abLesses des monastères héritaient de
défendant de travailler le samedi et de se , leurs parents et on ne trouve rien dans le
,

baigner le dimanche il adressa un mande- , droit romain qui soit contraire à cette dis-
ment aux citoyens romains, dans lequel il position; mais cela était défendu par la Piè- Re;. S. lic-
nediLt. cap.
fait voir que nous devons prendre dans un gle de saint Benoit, et par celle qui est in- L-CTr, et reir.
Magisl, n. c".
sens spirituel ce qui est dit dans l'i^criture tituléedu Maître.
de l'observation du sabbat, et qu'il y avait Quelque grande que fût l'inQrmité d'un
2. Epist.

même sons la loi certaines choses qu'il était évèque ou n'on mettait un autre à sa place
,

peimis de faire en ce jour ce qu'il prouve ; que de son consentement et alors on avait ,

par ces paroles de Jésus -Christ aux Juifs : soin de pourvoir à ses besoins des revenus
L-JC. Ml], Y a-t-il quelqu'un de vous qui ne délie son de son église, tant qu'il vivait. Saint Gré- —
bœuf ou son âne le jour du sabbat, et ne les tire goire accorda à la demande de la reine
de l'ùlable pour les mener bûire?l[ ajoute que, Bruuehaut divers privilèges pour les deux
s'il faut garder à la lettre le précepte du monastères, l'un d'hommes, l'autre de lîUes,
sabbat, il faut donc aussi observer la cir- et l'hôpital qu'elle avait fondés à Autun; et
concision contre la défense de saint Paul
,
;
afin que les évèques du lieu ne supprimas-
Ëllol. T, 3. mais « l'un et l'autre dit-il n'est plus ob- , , sent pas quelque jour ces décrets, il lui con-
servé que spirituellement. A l'étjarddu bain, seille de les faire insérer aux actes publics ,

si on veut le prendre par volupté nous ne , et de les conserver dans les archives roya-
le permettons en aucun temps; mais si c'est les, comme ils étaient dans celles de Home.
par néicssité, nous ne le défendons pas mê- Le Pape parle, dans la même lellre, d'un
me le dimanche: aulrement, il ne faudiait évèque nommé JVIennas, qu'il avait renvoyé
XI. 3i
,

530 HISTOIRE GÉNIÎRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQIT.S.


;ibsous, après lui avoir fait prtnivpi-pnn inno- punition
*
divine, même en ce monde. \u condi. a
TfïUo. i. Il

cence parscriueiil sur le corps de saint Pierre; reste , ces menaces se trouvent éL'ulenient «i^'<c<:.

de la manière de pourvoir à la desserte d'une dans le privilège d'Origny, et dans plusieurs J^;
'

église dont l'dvèque l'Iait habituellement ma- conciles. Ces privilèges portent ,
qu'après "°v,',i|.,
lade et de l'exclusion que les canons don- In mort de l'abbé ou du piètre de •°"*'
, l'hôpi-
nent aux bigames pour les ordres sacrés. — tal, le roi choisira le successeur, du con-
Efisi. -. Dans sa lettre au roi Thierry, il dit quelque sentement des moines, mais gratuitement ;

chose des privilèges qu"il avait accoi'dés en sorte qu'il ne recevra rien de l'élu ,
aux monastères et à l'hôpital d'Autun. — ni par lui-même, ni par quelque personne

8. Ces privilèges font la matière des trois let- interposée ; qu'en cas de plaintes, l'abbé ne
tres suivantes, dont la première est adres- pourra être déposé par lévéquc d'Autun,
sée à Sénateur, prêtre et abbé de rhô]iital que celui-ci ne soit assisté, pour le jni;er,
la seconde à Thalassia abbesse, et la troi- de six autres évèques qu'il ne pourra lui- ;

sième à Lupon, prêtre et abbé de l'église même être élu évêque de cette ville tout en
de Saint-Martin, dans le faubourg d'Autun. demeurant abbé , de peur qu'il ne détourne
C'était un monastère d'hommes, qui subsis- à son profil les biens de l'hôpital et que ;

tait encore [h l'époque de la révolution] sous l'évèque ne pourra ,sans son consentement,
la règle de saint Benoit. Ces privilèges, tels prendre quelques-uns de ses moines pour
qu'ils sont rapportés dans ces lelti-es, doi- les promouvoir aux ordres ecclésiastiques.
vent paraître incontestables à toute person- — Les privilécres pour le monastère de Sain- Eiim.h.

ne non prévenue. Saint Grégoire en fait te-Marie, dont Thalassia était abbesse sont ,

mention dans sa lettre à la reine Brunehaut; absolument les mêmes que pour l'hôpital.
ils se trouvent en mêmes termes dans.plu- Après la mort de l'abbesse, le roi devait en _i

sieurs manuscrits du Vatican ils sont cités ;


nommer une auli-e du consentement des re-
dans la Vie de saint Hugues, moine d'.-Vu- ligieuses , el gratuilement. Il était égale-
tun, écrite dans le x' siècle. Flodoard as- ' ment défendu à l'évèque ù .\utun de la dé-
sure que du temps de Charles le Chauve ,
,
poser, qu'il ne fût assisté de six évéques
Pardule évêquc de Laon voulant dresser,
, ,
pour la juger canoniquement. La même — ,0.

par ordre de ce prince, un privilège pour chose devait se praliijuer à l'égard de l'ab-
le monastère d'Origny,prit pour modèle ce- bé du monastère de Saint-Martin.
lui que saint Grégoire avait accordé à la 3. Nous avons déjà vu plusieurs fois que u.

reine Brunehaut. Quelques-uns trouvent saint Grégoire voulait que l'on se conleutàt de
trop sévères les peines qu'il décerne contre prêcher et d'instruire les ji^ifs, pour les éclai-
les violateursde ces privilèges. En etlet il , rer et les convertir solidement, .\yant donc
, évéques
les déclare, s'ils sont rois juges , ,
reçu des plaintes de la part de ceux de Na-
déchus de leurs dignités, privés de la com- ples qu'on les empêchait de célébrer leurs
,

munion du corps et du sang de Jésus-Christ, fêtes, il écrivit à l'évèque Paschase de leur


et dignes des peines éternelles, s'ils ne font laisser le libre exercice de toutes les céré-
pénitence. Mais peut-être que la reine Bru- monies qu'eux cl leurs ancêtres avaient pra-
nehaut l'avait prié d'apposer ces clauses à tiquées jnsques-li'i. — Il défendit aussi de r.

ces privilèges , comme le roi Cliildebert de- conliaindi-o l'abbé Urbicu.- il'accepler l'i-pis-

manda aux évoques du quatrième concile copat, ipioitiuil en eût le mérite. H dé- — 1:.

d'Orléans de défendre sous peine d'être sapprouva l'évèque Exupèrantius , qui avait
frappé d'un anathème éternel et d'être re- ,
osé construire el consacrer un oratoire dans
gardé comme meurtrier des pauvres, h tou- im autre diocèse que le sien, sans l'agré-
tes sortes de quelque dignité
de personnes ,
ment de l'ordinaire et mèuje y célébrer la
,

de toucher aux
et condition qu'elles fussent, messe. —
Il exhorta les évèijues de Sicile à u.

biens que ce prince avait donnés à l'hôpi- n'èlre point à charge à leui-s sujets loi-s- ,

tal de Lyon. On peut ajouter que, par ces qu'ils allaient dans les paroisses pour don-

clauses, saint Grégoire ne prétendait point ner la coidiruialiou aux enfants. (J^oi- — .5.

s'attribuerune juridictiou sur les puissan- (|u'il eut fait avertir Paschase évêque de ,

ces séculières en les menaçant de dépo-


,
Napics, d'être plus assidu i\ ses fonctions
sition mais seulement les nn'naccr de la
,
épiscopales, il n'en était pas plus vigilant
sur son li'ou|)eau, ne s'occupani que d'alfai-
« Fludiwrd., lib. III Uiilvi. iiemcns., caji. xwii. res Icinporellcs, en pailiculicr de f.iiie cuns-
[vu" sifccxE.] CIIAPITHE XI.IX. SAINT GRi:(;01RE LE GRAND, PAPE. "M
Iniiro lies vaisseaux. Il avait pcnlii dans ce prreur Maurice cela ne [)aralt pas moins
:

ni'j^dce plus dt^ ([iialre cciils sous d'or; et par la ré'ponse qu'il (il à Phocas, qui s'était
non conliMit d'aller Ions les jouis sur la uier, plaint d(! n'avoir point trouvé de nonce de
il s'y faisait accompagner d'un ou de deux sa part à Conslanlinople. — u Ce n'est pas, EplU. 38.

do ses clercs, ce qui le faisait mc'priser de lui dit-il, l'etTel de ma négligence, mais d'une
tout le luonde. Saint Gréiroire eu fit des rc- dure nécessité. Tous les ministres de notre
proclies h Antlu'niiiis , défenseur et recteur église fuyaient avec terreur une si rude do-
du patrimoine dans la Campanie, avec ordre mination, de manière qu'il n'était pas possi-
d'avertir de nouveau Pascliasc, en présence ble d'en obliger aucun d'aller A Constantino-
de plusieurs prêtres ou autres personnes ple pour demeurer dans le palais; mais de-
qualifiées; cl en ras qu'il ne se corrij^çeâl puis (|u'ils sont informés que, parla grâce du
point, de l'envoyer à Rome, pour y appren- Toul-Puissant, vous êtes parvenu ù l'empire,
dre de quelle manière un évoque devait se la joie qu'ils en ont, fait que ceux qui crai-
conduire. —
Par une autre lettre il chargea gnaient auparavant de se trouver <i la cour,
Anthémius (juoiqu'il ne fut que sous-dia-
, s'empi'essent d'aller se mettre ;\ vos pieds. »

cre, de roQionlrer le devoir aux évoques né- U lui recommande le diacre Bouiface, qu'il lui

gligents et de les envoyer à Rome s'ils ne


, , envoyait pour être son nonce, et le prie ins-
se corrigeaient pas après avoir été avertis. tamment de secourir l'Italie contre les Lom-
Le successeur de Maurice dans l'empire
4. bards, qui la désolaient depuis trente-cinq
fut Phocas, qui n'avait d'abord été que ccn- ans. — Saint Grégoire écrivit aussi à Léon-
lorion, puis exarque des centurions. Il fut tia, pour la féliciter sur son avènement au
couronné empereur le vingt-trois novembre trône; et après lui avoir souhaité la grûceet
de l'an 002, indiction sixième. Son image et la protection du Tout-Puissant, le zèle de
celle de l'impératrice Léontia furent appor- Pulcliérie pour la défense de la foi catholi-
tées à Rome le vingt-cinq avril de l'année que, qui lui fit donner
de nouvellele nom
suivante G()3. Le lergé et le sénat leur fi-
i Hélène par le concile de Chalcédoine, ill'ex-
rent les acclamations ordinaires, et saint Gni- horte prendre la défense de l'église de saint
;i

goirc les lit mettre dans l'oratoire de saint Pierre contre les ennemis. Quoique le but —
Césairc, au palais; ensuite il écrivit à Plio- principal de sa lettre à Cyriaque, patriarcht!
cas pour le féliciter sur son avènement à de Constantinople, fiît de lui recommander
la couronne. dans sa lettre, que Dieu,
Il dit le diacre Boniface, il en prit occasion de l'ex-

arbitre de la volonté des hommes, en élève horter à renoncer au titre superbe d'évêqne
quelquefois un pour punir les crimes deplu- universel.
sieuis, comme ii venait de l'éprouver lui- 3. Celle qu'il écrivit ù Eusébie patrice, qu'on
même; et que quelquefois, pour consoler croit avoir été la fille de Rusticienne, est une
plusieurs affligés, il en élevait un autre dont instruction sur l'obligation de s'occuper plus
la miséricorde les remplissait de joie. «C'est, de ce qui regarde l'âme que de ce qui regarde le

dit-il, ce que nous espérons de votre piété : corps. — En recommandant à l'exarque Sma-
Que les deux se réjouissent, que la terre tres- ragde résèque Firmin, qui avait quitté le
saille de joie, et que tout le peuple de la répu- schisme pour se réunir à l'Eglise, il l'avertit
blique, affligé jusqu'à cette heure, change sa que ïelquin ' consentait à une trêve de trente
t7'istesse enjoie. » Il exhorte ce prince à faire jours, si les Pisans voulaient l'observer; mais
cesser tous les désordi'esdu règne passé, les qu'ils ne l'avaient pas voulu. Dès le com- —
testaments suggérés, les donations extor- mencement de son pontificat, il avait défen-
quées, en sorte que chacun jouisse paisible- du que l'on exigeât des fermiers le blé â plus
ment de son bien et de sa liberté « Car il y : grande mesure que celle qui entrait dans les
a, ajoute-t-il, cette ditlerence entre les em- greniers de l'Église, et il avait ordonné de
pereurs romains et les rois des autres na- rompre tous les faux poids et toutes les faus-
tions, que ces derniers commandent à des ses mesures. Pantaléon, notaire, fit exécuter
esclaves, et vous à des hommes libres. » Cette cet ordre dans le territoire de Syracuse, où il
lettre est une preuve que saint Grégoire n'é- était recteur du patrimoine de saint Pierre;
tait pas content du gouvei-nemeut de l'em- mais à cause qu'avant lui d'autres avaient

' Les maïuiscrils porteut, les uns Cillanem, les porte Tilquinum, comme on 1',t imprimé depuis,
autres VardcinaUem ou VasacciUonem ; nucun ne (L'éditeur.)
532 lIISTOmE GÉNÉRALE DES AUTEUnS ECCLÉSLVSTIQUES.
exigé des fermiers une plus grande mesure gement rendu contre lui a été revêtu de
((uc celle dont on scscnait dans les greniers toutes les formalités ; si les témoins ont été
de l'Église, il le chargea de délivrer en secret dillèrents des accusateurs ; s'ils ont déposé

aux plus pauvres des fermiers ce que l'on pou- en sa présence et avec serment s'il a eu la ;

vait avoir exigé an delà cie la juste mesure. liberté de se défendre; quelle est la vie.
Loi* r«iir
l'iTimunité 0. Janvier, évèc]uc de Malgue en Espagne, la condition, la réputation des accusateurs
dea clercs.
se plaignit A saint Gi-ëgoire d'avoir été dé- et des témoins si ce ne sont pas des gens
;

posé et chassé de son siège par injustice et de néaul, ou des ennemis de l'accusé; s'ils
Episl. iZ.
par violence. Un nommé Etienne, aussi évé- ont parlé par ouï-dire, ou de science certai-
que en Espagne, mais dont le siège n'est ne si l'on a prononcé la «entence en pré-
;

point connu, fit les mêmes plaintes. Le Pape, sence des parties que si toutes ces formali-
:

ne voulant en juger qu'avec connaissance de tés n'ont point été tjbservées, et qu'fllieime
cause, députa sur les lieux le défenseur Jean n'ait point été convaincu d'un crime qui
pour régler ces deux atl'aires, et lui doiuia mérite la déposition ou l'exil, il doit être ré-
deux méiftoires en forme d'instructions, dont tablidansson église.» Saint Grégoire ordonne
le premier porte « S'il n'y a aucun crime
: contre ses juges, et contre tous ceux qui au-
prouvé contre l'évêque Janvier, qui mérite ront ordonné un évèque à sa place, les mê-
l'exil ou la déposition, il doit être rétabli mes peines (pie contre ceux qui avaient dé-
dans sou siège et dans son degré d'honneur; posé Janvier. Le second mémoire qu'il don-
et celui qui a été ordonné à sa place de son na à Jean le défenseur, est intitulé Cajji- :

vivant contre les canons, étant privé du sa- tulaire des lois impériales jMjur riiiimunité des
cerdoce, doit l'être aussi de tout ministère clercs. C'est un extrait des lois qui pouvaient
ecclésiastique, et livré à l'évêque Janvier, établir le droit des iirincipaux articles de sa
qui pourra le tenir en prison, ou nous l'en- commission, savoii-, iju'un pn-tre ne doit être
voyer. Quant aux évêques qui l'ont ordonné, jugé que par son évèque, ainsi qu'il est perlé
ou qui ont consenti à sou ordination, ils se- dans la Novellede Jnstinieu qui traite des évê- NOTC'h M
ront privés pour six mois de la comu)nuion ques, des clercs et des moines; (jue la violeuce
du corps et du sang de Noire-Scigneur, et commise contre un évêqne dans son église
feront pénitence dans un monastère; mais est un crime capital et public, comme celui
s'ils tomlient en péril de mort, on ne leur de lèse-majesté, comme il est déclaré au pre-
refusera j.as le viatique; si ces évêques di- mier livre du Code, titre sixième, constitu- C.(I«E;
(ICknc. I

sent que la craiute du magistrat les a fait tion dixième; que révê(jue ne doit point être ÎdI5 ; c( C
hrtwl. I.

consentir à la déposition de Janvier, en sorte traduit mîilgré lui devant le juge laïque, ni ITI.III. i.c
zixt.
qu'elle ne se soit point faite de leur libre jugé par les évêques d'uue autre province :

consentement, on abrégera le temps de la c'est ce que porte la Novelle de Justinien.


pénitence, et on en pourra modérer la ma- Et parce qu'on aurait pu répondre (pri-^lieune
nière. Si celui qui a usurpé le siège de cet n'avait ni patriarche ni métropolitain pour
iévêquc est mort, et qu'un autre ait été or- le juger, saint Grégoire prévient cette objec-
donné h sa place, la faute de celui-ci est tion, en disant qu'il pouvait être jugé, com-

moindre, parce qu'il semble avoir succédé à me il l'avait demandé, par le Siège apostoli-
un mort; ainsi il suflira de lui ôter le gou- que, qui est le chef de tou.es les Églises. H
vernement de l'église de Malgue, sans cpi'il rapporte aussi des extraits des lois qui dé-
puisse jamais y rentrer; mais il pourra être fendent de recevoir l'accusation d'un esclave
évèque dans une autre église vacante. A l'é- ou d'un serviteur contre son maître car on :

gard du magistrat dont il y avait plainte, il disait qu'Etienne était dans ce cas, cl que les

sera condamné à réparer tout le dommage témoins pi oduits contre lui étaient des gens
que l'évêque Janvier a soullèrt par sa vio- de vile condition siu' «juoi il cite l'authenti-
;

lence, et cet évê(iue eu sera cru sur son ser- que, qui a pour titre, des Témoins. Il ajoute : PiDiIrn.
•d Icccin i
ment. Mais si les choses se trouvaient dill'é- «Si l'on accuse Élieunedu crime delèse-ma- llta.

rentes du rapport qu'en avait fait Janvier, jeslé, il ne faut point s'arrêter A celte accu-
saint Grégoire veut que le défenseur Jean, sation, si sa vie passée ne forme là-dessus
après un soigneux examen, décide sui\aul aucun [irèjugé. A ces extraits le Pape joignit
les règles de l'équité et de la justice. Venant la sentence en faveur de l'évêque Janvier,

ensuite aux plaintes de l'évêque Etienne, il par laipielle il était déclaré innocent, et l'ë-

dit qu'il faut premièrement examiner si leju- véque intrus à sa place déposé. Elle cou-
[vil' sifeci-E.] CHAPITRE XI-IX. — SAINT GRIÎGOIUE LR GRAND, PAPR. r>,i3

flainniiil aussi les ëvôques (pii avaifiil on pari tiirus, évéque de Drague, l'appelle l'riôres
h sa (li'positioii cl à l'orflinalidii de l'iiilnis, raiinni(/iifs.

on la inanii'i'C qu'il l'avail iiiai'(|ii(' dans le 2. L'abbé Furtunat était venu à Rome F|.I'1. 6.

[irouiier mémoire. faire des plaintes contre l'évoque Goncoi'-


dius, qui lui avait ôté sans aucun sujet le
§ XIV. gouvernement du monastère des saints Lau-
Livre quatorzième des iMtres de saint Grégoire. rent et Zenon dans la ville de Césone. Quoi-
que la plainte de Fortunat parut fondée,
EfiM.;. 1. Ce dernier livre contient les lettres que saint Grégoire ne voulut rien décider sans
ce saint Pape (Vrivit en la seplif'nie indiclion, informations faites sur les lieux. Il en d(uiua

pendant l'année
C'est-à-dire (i()3 et le com- commission à Marinien, archevêque de lla-
mencement do (iOi, f[iii fut la dernière de venne, avec ordre de rétablir Fortunat, en
son ponlilicat. L'indolence el les inlirmités cas qu'il eût été déposé contre les règles, et
de Janvier, évoque deGap;liari,!occasionnaient d'avertir Concordius de ne rien changer aux
divers sujets de plaintes. Les hôpitaux do disijositions de son prédécesseur, par qui
cette ile étaient f(nl ni'gligés; on y donnait Foitunat avait été ordonné abbé. Vers le — i.

le gouvernement des monastères à des moi- même temps, le Pape reçut des plaintes
nes qui étaient tombés dans des fautes; Jan- d'41cyson, évèque de Corcyrc ou Corfou,
vier tirait de son cler;j:é tous les évoques qu'il contre Jean, évèque d'Eurie ou EvorieonEpi-
ordonnait pour les ('^dises vacantes sou- ; re, qui, contraint de quitter son siège parles
vent, quand il célébiait les saints mj'stèros, courses des barbares, s'était retiré avec son
il se trouvait si pressé de son mal, qu'après clergé dans la ville de Cassiope, en l'île do
lin long intoi'valic, peine pouvait-il revenir
i"! Corfou, ville qui était du diocèse d'Alcyson.
n l'endroit du canon qu'il avait laissé ce : Jean avait même apporté avec lui le corps
qui faisait que plusieurs doutaient s'ils de- de saint Donat, évèque d'Eurie sous Thcodo-
'"
valent communier de ce qu'il avait consa- sele Grand, et célèbre par ses miracles. Non
cré. Saint Grégoire écrivit sur tons ces poinis content de la retraite qu'Alcyson lui avait
il défonsour dans l'ile de Sardaigne.
Vital, donnée, il voulut depuis soustraire Cassiope
11 chargea de contier le soin des hôpitaux
le à sa juridiction, et y exercer l'autorité épis-
à l'économe et <i l'archiprctre de l'Église de copale, ayant surpris à cet effet un ordre de
Cagliari de veiller à ce que Janvier ne prit
; l'Empereur, qui appuyait sa prétention.
pas dans sa propre église tons les sujets né- Encore que cet ordre tut demeuré sans cflct,
cessaires pour remplir les églises vacantes, Alcyson s'en plaignit à ce prince, qui ren-
afin de ne la pas priver des personnes qui voya l'affaire à André, archevêque de Nico-
pouvaient y être utiles, disant qu'il avait poli, métropolitain de ces deux évêques,
écrit là-dessus à Janvier même; qu'àl'c'gard qui, avec connaissance de cause, maintint
de ceux qui, étant simples moines, étaient Alcyson dans sa juridiction sur la ville de Cas-
tombés en faute, ils ne devaient pas être siope. Saint Grégoire confirma ce jugement,
faits abbés avant d'avoir fait pénitence; que qui était fondé sur l'équité et la justice, les
toutefois ceux qui se trouvaient en charge canons ne permettant point à un évèque do
pouvaient y demeurer, s'ils paraissaient bien s'emparer des paroisses d'un autre; mais,
corrigés. Il le chargea aussi d'avertir ceux quoique l'ingratitude de Jean dût le faire
qui doutaient que Janvier eût consacré, lors- chasser de Cassiope, puisqu'il avait rendu à
que ses infirmités l'obligeaient de mettre Alcyson le mal pour le bien, il ordonna k
quelque intervalle dans la récitation du canon celui-ci de laisser Jean demeurer paisible-
de la messe, de communier hardiment, parce ment à Cassiope avec son clergé, à la charge
que la maladie du célébrant ne profanait pas de renoncer par écrit à sa vaine prétention
la bénétiictiou du sacré mystère. Il veut néan- et de retouner aEurie après le rétablissement
moins qu'il avertisse cet évèque de ne point de la paix. —
Saint Grégoire ne voulut point ».

paraître en public lorsqu'il se trouvera mal, rendre publique sa sentence, de peur qu'il
de peur de se rendre méprisable, et de scan- ne parût mépriser l'ordre de l'Empereur, qui
daliser les faibles. Saint Grégoire est le jire- autoiisait la prétention de Jean mais il ins-
;

mier qui ait appelé Camm de la


cette partie truisit de cette atlaire Buniface, son nonce h
liturgie qui sedit]après le trisagion owSanc- Gonstantinople, afin qu'il en informât aussi
ttis. Le pape Vigile, dans sa lettre •'i Profu- ce prince, et qu'ensuite il envoyât, de son
,

531 UISTOIRE GENERALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.


consentement, sa sentence sur les lieui pour lui otait la Hberlé de pirler, comme elle
la faire exécuter.11 dit à Bouiface de deman- pouvait s'en assurer par ses envoyés mais ;

der même à l'Empereur uu ordre pour l'exé- il promet d'y répondre aussitôt que Dieu lui

cution de cette sentence. aura rendu la santé en attendant il char- : ,

Epi.1.3.
3 ^pi-ès la jjjycl jg l'évtMjue d'Ancône, gea les députés de Théodelinde d'un exem-
on pour lui succéder Flo-
élut trois sujets : plaire des actes du concile tenu sous le rè-
rentin Rustique diacre de la
archidiacre. gne de Justinien , afin qu'en les lisant , elle
même Église, et Florenlius diacre de Raven- put reconnaître de tout ce qu'elle
la fausseté
ne. Saint Grégoire, qui s'était mformé de avait ouï dire contre le Saint-Siège et con-
leur mérite personnel, eu écrivit à un évê- tre l'Église catholique. Il ajoute « Dieu nous :

que nommé Jean, eu ces termes. » On nous garde de recevoir les sentiments d'aucun
a dit que l'archidiacre Florenlin sait l'Écri- hérétique , ou de nous écarter en quoi que
ture, mais qu'il est si accablé de vieillesse et ce soit de la lettre de saint Léon et des qua-
si ménager, que jamais un ami n'entre chez tre conciles nous recevons tout ce qu'ils
;

lui poury Dianger; que, de plus, il a fuit ser- ont reçu, et nous condamnons tout ce qu'ils
ment sur Évangiles de n'être jamais évé-
les ont réprouvé. » Saint Grégoire envoya au
que ; diacre Rustique est un homme
que le jeune prince Aldoalde une croix avec du
vigilant, mais qu'il ne sait pas les Psaumes ; bois de la vraie Croix et un Evangile dans ,

et que Florenlius, qu'on dit avoir eu tous une boite de Pei-se et à la |)rincesse sa sœur,
;

les suffrages, est uu homme fort appliqué. trois bairues orn.-es de pieries précieuses,
Mais, comme nous ne connaissons pas son priant Théodelinde de leur donner ces pré-
intérieur, rendez- vous prompiement à Ancô- sents de sa main, pour les faire valoir. Il la
ne avec notre frère Arméuius, visiteur de la pria aussi de rendre grâces pour lui au roi
même Eglise, pour vous informer exacte- son maii de la paix qu'il avait faite pour
,

ment des mœurs et des quaUlés de tous les l'Italie, et de l'exciter la conserver, comme;!»

trois, s'ils ne sont point coupables de crimes elle l'avait déjà fait.

qui éloignent de l'épiscopat, et si ce qu'on 5. Nous venons de voir que Jean, évêque
a dit d'eux est vrai. Si on choisit Florenlius, d'Eurie, en se retirant à Cassiope dans l'Ile

diacre de Ravenne, il faut avoir le consen- de Corfou y avait apporté le corps de saint
,

tement de sou évêque mais il ne doit pas


; Donat. Comme il ne pouvait le placer dans
le donner en vertu de noire mandement, de l'Eglise sans l'agrément d'.\lcyson évêque ,

peur qu'il ne semble que ce soit malgré lui. » diocésain, saint (îrégoire lui écrivit que Jean
"• 4. Théodeliiide, reine des Lomlwrds, ayant lui offrait un acte de non-pn-judice , et qu'à
fait baptiser son Qls Aldoalde le jour de Pi- cette condition permettre de
il devait lui
ques, qui, en 60.3, était le sept d'avril, elle en placer ce corps vénérable dans l'église de
donna avisa saint Grégoire, en lui marquant saint Jean. —
La lettre à P'élix, sous-diacre
qu'elle l'avait fait lever sur les fonts par et recteur du patrimoine d'Appia , contient
l'abbé Secondin, dont elle honorait la piété. le détail de tons les fonds de terre et autres
envoya par la même voie quelques
Elle lui revenus que saint Gri'goire doima à l'église
que cet abbé avait faits sur le cinquiè-
écrits de Saint-l'aul pour l'entretien des luminai-
me concile, en le priant d'y répondre. Le res on l'avait gravé sur une table de mar-
;

Pape témoigna sa joie à cette princesse de bre que l'on voit encore atlichée à une des
ce qu'un tils lui de ce qu'elle l'a-
était né, et murailles de la basilique de Saint-Pierre. JMD. D n.
COO. l'il>< II,
vait fait régénéicr dans les eaux du baptê- Jean Diacre fait nicuti(ui de celte table. Dum. 3U.

me, disant que la piété dont elle faisait pio- G. Félix ('vêquc de Messine
, avait ouï ,

fession ne permettait pas d'attendre moins dire que saint Gr<;goirc, en répondant aux
d'elle, que de mettre sous la protection tic dillicullés d'Augustin av;iil ilécidé que le ,

Dieu, dans l'Eglise catholique, renfiinliprelle mariage était i>erniis entre les parents au
avait reçu de lui. 11 l'cNhorle à l'tilever dans (piali-iènie degré. L'usage <;lail contraire à
la craiuh^ etdans l'amour de Dieu.alin que, Rome et eu Sicile où lu mariage était dé- ,

grand parmi les hommes par sa dignité il , feiulu jusqu'au septième degré de consan-
ne le soit pas moins aux yeux de Dieu par guinité et ci'l usage était fondé sur les dé-
,

ses bonnes o'uvres. A l'égard des écrits de rrets des papes et des conciles, nommément
l'abbé Secondin, il s'excuse d'y répondre de celui de Nicée. Félix demandait donc
sur sa maladie, qui êtail si violente qu'elle l'ouiquoi l'on avait excepté de cette règle
,

[vil" SIKCLE.] C[IAI'1TRE XLIX. — SAINT UUliGUlUE LE GRAND, l'AJ'E. X3S


Rcgln. an.
l'Eglise naissanto d'Angleterre. Il se plal- manuscrits. Ce qui pourrait embarrasser pond. Ad lll).
Keclohlii^t.
pnnit aussi au l'apo des vexations que les c'est qu'elle est adressée à Félix, évôipio (]'!

diwkjilm K,
cnf. XXX.
(ivèques Kdiill'i aient en Sicile de la ]iail des de Messine , ([ui était évèque de celte >ille
laïques. Knllii "il lui demandait si, dans le dès la lu-emière année du ponlilicat de
doute où l'on était que certaines églises eus- saint Grégoire, comme il paraît pai' la let-

sent clé consacrées, il était permis de les tre qu'il lui en dale de l'iudiclioii
écrivit
consacrer. Ce doute était fondé sur leur an- neuvième, c'est-fi-dire de l'an 390; or il Eplsl.
I. !..

iu.
I,

tiquité, et sur la négligence de ceux qui en était mort en 395, puis(|uc alors Donus était
avaient la garde. Saint Grégoire répondit sur évèque de Messine, ainsi qu'on le voit par
I-il.. M,
la première question que toute la ville de , la lettre que saint Grégoire lui adressa on Epiii. a.

Home pouvait hù lendre témoignage qu'il celte année. Félix ne pouvait donc le con-
n'avait permis aux .Vnglais le mariage au qua- sulter au sujet de ce qu'il avait ordonné
liièmc degré, que pour eux seuls et pour touchant les degrés de consangiiiaih! dans
un temps, à la charge que lorsque cette , sa lettre ;ï Augustin, éciite en GUI. Mais on
église se trouverait plus solidement établie, trouve deux évèques du nom de Félix, qui
les mariages y seraient défendus, comme ont g(uiverné l'i'^glise de Messine. Le pre-
ailleurs, jusqu'au septième degré de consan- mier succéda à Encarpus qui était déjà ,

guinité; que cette indulgence lui avait paru avancé en âge lorsque Pelage II lui écrivit
nécessaire dans les commencements où , en S80. Ce Félix eut pour successeur Do-
ces nouveaux convertis devaient être traités nus, quelque temps avant l'épiscopat de
avec la même attention que ceux dont saint saint Grégoire. .\ Donus succéda l'aulre Fé-
Paul dit ; Je ne uous ai nourris que de lait, et lix vers l'an 603 car Douus était encore
:

non pas de viandes solides , parce que vous n'en évèque de Messine au commencement de
étiez pas alors capables. Il répond sur la se- cette année, comme on le voit par la dix-
conde, que les évèques, étant les oints du huitième lettre du treizième livre, où ce saint
Seigneur, cl appelés les troues de Dieu ne . Pape lui recommande ainsi qu'aux autres ,

doivent pas être maltraités de paroles ni évèques de Sicile Adrien qu'il envoyait ,

Nlim. XI 1,8;
Psal. civ, 1j,
d'elTets par les princes ni par leurs sujets , ,
pour régir le patrimoine de Syracuse. On
K\od. XXII,
ni en [larticulier ni en public; ce qu'il
, pourrait objecter aussi que cette lettre est
prouve par divej-s passages de l'Écriluie : chargée de répétitions prou- inutiles, ce qui
soutenant que quand même les pasieurs
,
verait qu'elle a été altérée mais ces répé- ;

seraient réprébensiblcs dans leur conduite ,


titions sont assez fréquentes dans les écrits
ceux qui leur sont soumis ne seraient pas de saint Grégoire il répète souvent dans :

pour cela dispensés de leur témoigner du ses lettres ce qu'il avait dit ailleurs, surtout
respect. A l'égard de la troisième question, dans son Pastoral.
il kl résout en disant que, toutes les fois
qu'il y a du doute sur la consécration d'une § XV.
église c'est-.Vdire si l'on ne peut prouver,
,
Appendice aux Lettres de saint Grégoire.
ni par témoins ni par écrit qu'une église
, ,

ait été consacrée, il faut la consacrer et , 1 Nous aurions pu donner les extraits d'un
.
l'on
Poiirquoi
n'a pas
qu'on doit observer la même règle envers plus giaud nombre de lettres de saint Gré- dnnrê l'aua-
Ijse de toLles
leuros de
ceux dont on doute qu'ils aient été ou bap- goire mais nous nous en sommes abstenus,
;
les
saint Grégoi'
ro.
tisés ou confirmés parce qu'on n'est point
, par de répéter souvent les mêmes
la crainte
censé réitérer ce qu'on ne sait pas certaine- choses, ou d'en rapporter qui nous ont paru
ment avoir déjà été pratiqué , et que, si l'on peu intéressantes. Il y eu a un grand nom-
ne levait pas ce doute, il pourrait en résul- bre où il ne s'agit que de donner un visiteur
Jcn. nia. ter du scandale pour les fidèles. Jean Diaci'e à une église, de nommer un défenseur, ou
fou. LU'. II,
Qiini. 3T. rapporte une partie de cette lettre sous le quelques autres olîiciers pour une province
HÎDcmar.
Efisl, 37, 59,
nom de saint Grégoire. Hincmar la cite sou- oii l'église romaine avait du bien un lec- ;

Cl Iractùlii
dlvonio
do vent , et en rapporte au moins la troisième teur du patrimoine de Saint-Pierre en Sicile,
Lo-
thnrù.inlcrr')-
gai. -,, et
partie. Elle est aussi attribuée à saint Gré- en Gaule ou ailleurs d'imir des évêchés ou ;

q«a;-t. 7.
goire par Réginon, abbé de Prum, qni écri- des monastères de confirmer des donations
;

vait vers l'an 9(10 ; ainsi il ne parait pas ou des teslaments de termiuer des procès
;

qu'on puisse la lui contester : elle porte en- k l'amiable de donner des ordres pour l'é-
;

core son nom dans un grand nombre de lection d'un évèque de corriger des moines ;
536 nisTOïïiK gén:':rale des auteurs ecclkstastiques.
ou des religieuses de payer les dettes des
; anciennes édifions la quarante-quatrième
pauvres, ou de leur faire distribuer de quoi lettredu quatrième livre. Les autres décrets
les soulager dans leurs nécessités ; de tra- qui suivent dans l'Appendice, senties mêmes
vailler à repousser les Lombards ou à , faire que ceux du concile que saint Grégoire as-
la paix avec eux. L'analyse de deux ou trois sembla à Rome pour juger l'affaire de Jean,
lettres sur ces différentes matières , nous a prêtre de l'église de Cha!cédoine,qui, ayant "^f-'-'''-

paru suffisante pour faire voir aux lecteurs été condamné par Jean, patriarche de Cons-
quelle dtait la discipline de ce tem[)s-l;'i , de tantino[ilc, pour cause d'hérésie, en avait
combien de soins saint Grt'goire avait été appelé au Saint-SJége. Il ^'st fait mention de
occupé pendant son pontificat, et de quel ce concile dans les lettres «juinzième, seiziè-
travail il était capable malgré ses inlirmités me et dix-septième du sixième livre.
presque continuelles : car, quoiqu'il eût des 5. Saint Grégoire en assembla deux autres '*"
secrétaires, il dictait lui-même ou écrivait en GOl. Il fil dans le premier une cons- it s.

ses lettres, ce qui est sensible par la con- titiilion en faveur des moines; dans l'autre

formité de Icftr style avec ses autres écrits, il condamna le moine André, comme faus-

ceqnccco- 2. Elles sont suivies, dans la nouvelle saire. C'est ce qu'il marque dans la soixante-
lient
dite
ra['r*n-
»«i Ici-
»t.'
édition,
i i*
de plusieurs pièces nui y ont du
•• • ,i quatorzième lettre du onzième livre, adressée
"''''•
1238. rapport ou qui se trouvaient dans le re<.;is-
, à Eusébe de Thessalonique. Suit dans l'Ap-
tre que l'on en conservait dans les archives pendice l'acte de la satisfaction publique de
de l'Église romaine. On avait mis en télc son Maxime, accusé d'avoir été élu évêque de
symbole, qui se trouve en etlet au commen- Salone par simonie. Il s'en purgea par ser-
cement du recueil de ses lettres dans tous ment sur le corps de saint Apollinaire à
jonn. Di.- les manuscrits. Jean Diacre l'a aussi rap- Ravenne après quoi saint Grégoire lui par-
;

»"»".. 2.'" '


porté dans la Vie de saint Grégoire. Il est donna diverses fautes qu'il avait commises ,

plus étendu que ceux des apôtres et de Cons- et consentit i\ ce qu'il fût établi sur le
tantinople mais c'est la même doctrine,
, si('ge épiscopal de Salone, avec les hon-
l'ag. 123!. L'acte de déposition de Laurent, arcliidiacre neurs du pallium.
de l'Église romaine, et de subrogation d'Ho- 6. Les moines ne possédaient rien en ' ••- '-"

norat à sa place faisait dans les anciennes


, propre, et les lois leur défendaient de faire
éditions la première lettre du onzième livre. testament. Saint Grégoire dispensa de cette
La date est de la septième année du consu- règle Frobus, abbé de son monastère de
lat de l'empereur Maurice, non qu'il y eût Saint-André; mais il ne le fit qu'après l'avis
encore des consuls l'empereur Jusiinien , d'un concile, où assistèrent cinq évêques et
avait aboli le consulat en 541 mais les em- , dix prêtres. Les manuscrits portent qu'il l'as-
pereurs eu prenaient assez souvent le titre. senilila la treizième ou la quatorzième année
1231. 3. La Charte pour la grande litanie dans du règne de Maurice, indiction quatrième,
la basilique de Sainte-Mario, ne se trouve ce qui est une faute ; l'indiction (]uatrième
que dans peu de manuscrits et ce qui la ; se rencontre avec la dix-neuvième année de
rend douteuse, c'est que l'inscription met l'empire de ce prince : jiinsi il faut mettre
cette grande litanie dans l'église de Sainte- ce concile en l'an GOO. Probus y pri'-senta sa
Marie,^au lieu que dans le corps de la cbiirte requête, elle portail qu'ayant quitté le monde
clleest indiquéi; dans l'églisede Saint-l'icrre. depuis (juel(|ucs aniK-es, il avait résolu de
et qu'il n'y est pas dit un mot de celle (ii- demeurer seul dans sa cellule le reste de ses
Sainte-Marie. jours que pour cette j'aison il n'avait
; , ,

IM.I. vo;m 4. Nous avons fait voir ailli'iirs la fans- point disposé de ses bienr, sachant que son
"• "
seté du privilège qu'on dit avoir t;té accordé lils lui succéderait aussi bien ab intestat i\ae
par saint Grégoire au monastère de Saiut- par testament mais qu'étant un jour allé
;

.Médard de Boissons. (]e Pape tint un concile rendre ses devoirs à saint Grégoire avec les
à Home le cin(| juillet de l'an 593, <iui était autres, le Pape lui avait ordonné de prendre
le treizième de l'empire de Mauiice. Ce sont la cli;iri;e d'abbé dans le monastère de Saint-

les actes de ce concile que l'on a inlilulc's : Aiidrt', et qu'il avait été obligé d'obéir aussi-
pjp. iL3«. Décret (lesuinl Grégoire. Ils faisaient dans les tôt, sans avoir eu le loisir de disposer de son

' Qiiin ingrcdirnlihiis mnnasterium eonverteiuli rcs eorum fjnsdeiii monaslerii jurix finni, nprrln
gralia, iilleritm nulla sil letandi licentia : sed ul legis dffinilione decretnvi est. LiV. I.\, Epùl. 7.
[vu' SIÈCLE.] CHAPITRE XI.IX. — SAINT GRl':GOmE LE GRANH, PAPE. .^;.17

bien. Il concluait à ce qu'il lui fiU peiuiis aucune mais la voluphi seide. Il dcicla'
part,
d'eu clis[)oscr, afin, disait-il, (jue son oin'is- ra (pie, pour accomplir le jeùiu' ilu carême,
Siuico ne fût pas jirc^juiruialile à son fils, qui il ne siillisait i)as de s'abstenir de viande,
('lait i)auvre. Saint Gréf^oiio, après avoir fait qu'il fallait aussi faire abstinence de tout ce
retirer Probus pour délibérer sur sa requùte, qui vient de la viande, savoir, du lait, du
le fit rentrer, et lui accorda la liberlc'; de fromage et des œufs,'; que si l'on accoi-dait
disposer de tous ses biens, comme s'il ne fut l'usage du poisson, ce n'était que par ma-
[)oiut entré dans le monastère. nière de soulagement, et non pour satisfaire
7. On lit ensuite une formule de renoncia- la cupidité et la gourmandise. 11 bltlme les
nation auscliisme. Elle est datée deCoustanti- repas somptueux, et ceux qui, tout en s'abs-
n(i|ile le dix février, indictiou ciniiuièmc : ce lenant de viandes, chargeaient leurs tables
qui donne quelque lieu de croire qu'elle est des plus beaux poissons de la mer. A l'égard
de Firmin, évoque d'Istrie, qui en ce temps, du vin, il en permet l'usage modéré, disant
c'csl-A-dire, en 601, renonça au sciiisme ;
qu'il n'était pas plus permis d'excéder en
mais on ne peut douter que celle formule ou ce genre, qu'en toute autre matière qui re-
piomesse, comme elle est intitulée, n'ait été garde les plaisirs du corps. Le second frag-
altérée, puisqu'on y fait jurer par le Dieu ment est un éloge du pape Agapet, qu'on
tout-puissant, parles saints Évangiles, et par loue surtout d'avoir chassé de (^.onstantino-
le salut et le génie des empereurs. Ge n'était ple Anthime, qui eu avait usurpé le siège
point ainsi que les catholiques juraient. patriarchal. Le troisième est un règlement '"as. nfii.

<iNous ne jurons point par le génie de César, pour accorder l'entrée dans les monastères
disait TertuUicu, mais par son salul, plus
'
à tous ceux qui ont le domaine d'eux-mêmes ,

auguste que tous les génies, qui ne sont que suit ecclésiastiques, soit laïques, à la charge

des démons. » On a mis aussi dans l'Appen- de ne leur permettre des'y stabilier, qu'après
dice unejformule de la manière d'accorder le les avoir éprouvés suivant les canons, et
pallium à un évèque puis l'acte de couron-;
qu'autant qu'ils ne seront coupables d'aucun
nement de l'empereur Fhocas, depuis qu'il des ci'imes qui étaient punis de mort dans
eut fait mourir Maurice et ses fils en 602. Il l'Ancien Testament.
y est fait mention de l'ordre que saint Gré-
i;oire douna de placer l'image de Phocas dans
ARTICLE IV.

l'oratoire de Saint-Césaire au palais. DU SAGHAMENTAIBE DE SAINT GnÉGOlRE, ET DE


S. Suivent trois fragments dont deux ,
SES AUTRES ÉCRITS QUI REGARDENT LA CÉLÉ-
sont tirés de Gratien, c|ui les a cités sous le BRATION DE l'office divin.
nom de saint Grégoire, et le troisième se lit
dans le second livre de la Vie de ce saint par 1. On a remarque, dans l'article du pape sacramer

Jean Diacie. Ou voit par le premier, que saint tjelase, qu il avait compose des oraisons et Grégoire.

Giégoire, écrivant à Augustin, lui conseille des préfaces d'un style aisé,et, mis en ordre

ainsi qu'à tous les ecclésiastiques d'Angleter- non-seulement celles qu'il avait faites lui-
re de commencer le jcùue du carêmedès la môme, mais aussi celles qui avaient été com- Vnvcz lom.

quiuquagésime, afin d'ajouter quelquesjours posées par ses prédécesseurs, et que le re-
d'abstinence à cens que les laïques étaient cueil des Offices qui portait son nom 'était
ojjligés d'observer. Il aurait souhaité de faire distribué en plusieurs livres. Jean Diacre
quelques règlemeuls pour empêcher, ou du dit^ que saint Grégoire retrancha plusieurs
moins pour modérer l'avidité que les person- choses du recueil de Gélase, et qu'il en ajou-
nes du siècle témoignaient pour la viande le ta d'autres; qu'il recueillit le tout en un vo-
dimanche qui précédait le carême, jusqu'à lume intitulé : Liviv des Sacrements, ou Sn-
passer la moitié de la nuit à s'en remplir; cmmentaire, parce qu'il contenait les priè-
mais il en fut détourné par la crainte qu'ils res que le prêtre devait dire dans l'adminis-
ne devinssent plus mauvais, si on voulait tration des sacrements, et principalement
leur interdire cet usage, où la raison n'avait dans la célébration des divins mystères '.

' Tertullian., ni .-l;) logel.,rap. xxxii. prœtilulavU. Joan. Diacon., lib. II, nura. n.
Sed et GelasiLtnum codicem de Missaruin so-
* ' Le Sacramentaire de Gélase a paru à Venise
lemniis iiiulta subtraliens, pouca conrerlens, non- en 1748, tom. II de la Liturgie ancienne de Rome
niilla suiicradjiciens, in uniiis libclli votuiiiine ol dans le tome LXXIV de la Patrologie latine.
coarctavil, quod volumen Ubrum Sacramentorum (L'éditeur.)
538 HISTOIRE GÉNÉRALE DES AUTEURS ECCLÉSIASTIQUES.
La Florence de ce Sacrameiilaire d'avec ce-
il il solennels; le nombre de ces oUSciersct leurs
lui de Gélase consiste' surtout dans le nom- fonctions sont marqués dans les anciens or-
bre et la variété des collocles ou oraisons. dres romains, en cette manière pour le jour
Saint Grégoire n'ajouta au canon de la messe de Pûques.
MH>fl
que ces paroles Dis])osez de nos jours dans
: 3. Rome avait été divisée par .Auguste en tt*]e.

votre jiaix. Nous les disons encore aujour- quatorze régions ou quartiers; mais l'usage JCX.W !

VIII.
d'hui, et l'ordinaire de la messe est le mê- ecclésiasti(]ue les avait réduits .'i sept, sui- i.u,
ioi«. 1.

me que dans le Sacranientaire de ce Pape, vant lesquels étaient distribuées toutes les Mlkm
à la réserve des préfaces qui sont en moins églises et tout le clergé de la ville ; et ils ser- dlorm
n nn .

commencer par
;

grand nombre; mais celles que nous disons vaient tour i\ tour, â les IH ei -

Oido
sont les mêmes que dans son Sacramen- clercs de la troisième région pour le diman- lnro-1!
lullr^.
taire '. che, puis ceux de la quatrième pour le lun- 1 M t~ 'I .

D kliiballOD On y trouve d'abord l'ordre de la messe


2. di, et ainsi des autres. Tous les acolytes de
de ft S«rra*

tom. III, ti],


eu .uénér;»Jj elle commence parce que nous la troisième région se rendaient donc le di-
Crejor., IH'.
appelons Introït : c'était une antienne que manche de Pûqucs dès le matin au palais de
l'on chantait pendant que l'on entrait à l'é- Latran, et avec eux les défenseurs de toutes
glise, et que chacun y prenait sa place. Cette les régions. Le reste du clergé allait aussi
antienne variait suivant la ditl'érence des fê- dès le matin à l'église de la station, qui en
Mcmrd.ool.
1o buDC Itic.
tes. Ou en trouve dansl'Anliidioniei' de saint ce jour se faisait à Sainte-Marie-Majeure. Le
Grégoire pour toutes les fêles et dinianclies Pape et les principaux olliciers soilaieut à
de l'année, avec le commencement du psau- cheval, à cause de la longueur du chemin;
me que l'on chantait après cette antienne. les acolytes et les défenseurs l'accompa-
L'introït variait suivant la ditl'érence des fê- gnaient A pied. L'un d'eux portail à sa main
tes. 11 était autre aux jours de fêtes, autre le sain! chrême en une tîole couverte d'une
dans les messes quotidiennes, c'est-à-dire serviette; d'autres du palaisapportaient
que l'on prenait pour l'introït un psaume qui même de Latran les livres et les vases néces-
avait du rapport à la solennité du jour. On saires pour le service. Lorsque le Pape ap-
disait ensuite Kyrie eleison; puis, si c'é- prochait, les acolytes et les défenseurs qui
tait un évêqne qui célébrât, il tiis;iil le Glo- étaient de service ce jour-là, allaientau de-
ria in ejicelsis, encore n'était-ce que les di- vant avec de la station les
le prêtre titulaire ;

manches et les fêtes; les prêtres ne le di- diacres lui aidaient ù descendre de cheval,
saient qu'à Pâques. On ne (lisait ni le Gloria et il entrait d'abord dans la sacristie, h la
où il y avait
in excelsis, ni Allelviu, les j(jiirs porte de laquelle les diacres changeaient
des litanies ou processions, parce qu'on les d'habit. Celui qui devait lire l'évangile en
considérait comme des jours de deuil. En- ouvrait le sceau, et préparait l'endroit ;
puis
suite le céli'brant récilait l'oraison ou col- un acolyte le portait dans le sanctuaire, et
lecte du jour; ])uis il lisait i'ivpiti'e, qui était un sous-diacre le posait sur l'autel avec res-
tiréede celles de saint Paul; ensuite le (ira- pect. Pendant que tout cela se faisait, le
duel ou Alléluia. Ce qui étant achevé, il li- Pape changeait d'habit par les mains des
sait l'Evantrilc, l'otrertoire et l'oraison sur les sons-diacres; Idii donnait l'aube, qui se
lui

oll'randes; latiuelle étant achevée, il disait à mettait sur la chemise, un autre la ceintu-
haute voix la préface, qui était suivie du re, l'amict, la dalmatique de toile, la grande
Sanctiis, qu'il répétait trois fois. Suivait le ca- dalmatique et enfin la chasuble; le pri-

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