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Antonin Artaud (1896-1948) et le

théâtre de la cruauté
Manifeste pour un renouveau théâtral
Le théâtre et son double
• Notre idée pétrifiée du théâtre rejoint notre
idée pétrifiée d'une culture sans ombres, où
de quelque côté qu'il se retourne notre esprit
ne rencontre plus que le vide, alors que
l'espace est plein.
• Mais le vrai théâtre parce qu'il bouge et parce
qu'il se sert d'instruments vivants, continue à
agiter des ombres où n'a cessé de trébucher la
vie
Le théâtre comme ébranlement des
sens
• Je propose un théâtre où des images physiques
violentes broient et hypnotisent la sensibilité du
spectateur pris dans le théâtre comme dans un
tourbillon de forces supérieures
• Une vraie pièce de théâtre bouscule le repos des
sens, libère l’inconscient comprimé, pousse à une
sorte de révolte virtuelle. Comme la peste, le
théâtre est donc un formidable appel de forces
qui ramènent l’esprit par l’exemple à la source de
ses conflits.
Le théâtre de la cruauté
• « Théâtre de la cruauté » veut dire théâtre difficile et cruel
d’abord pour moi-même. Et, sur le plan de la représentation, il
ne s’agit pas de cette cruauté que nous pouvons exercer les
uns contre les autres en nous dépeçant mutuellement les
corps (…) mais de celle bien plus terrible que les choses
peuvent exercer contre nous. Nous ne sommes pas libres. Et
le ciel peut encore nous tomber sur la tête.
• Si le théâtre essentiel est comme la peste, ce n’est pas parce
qu’il est contagieux, mais parce que comme la peste il est la
révélation, la poussée vers l’extérieur d’un fond de cruauté
latente par lequel se localisent sur un individu ou sur un
peuple, toutes les possibilités perverses de l’esprit.
Nouveau théâtre, nouveau langage
• Briser le langage pour toucher la vie, c’est faire ou refaire
le théâtre.
• Faire la métaphysique du langage articulé, c’est faire
servir le langage à exprimer ce qu’il n’exprime pas
d’habitude : c’est s’en servir d’une façon nouvelle,
exceptionnelle et inaccoutumée, c’est lui rendre ses
possibilités d’ébranlement physique, c’est le diviser et le
répartir activement dans l’espace, c’est prendre les
intonations d’une manière concrète absolue et leur
restituer le pouvoir qu’elles auraient de déchirer et de
manifester réellement quelque chose, c’est se retourner
contre le langage et ses sources bassement utilitaires, on
pourrait dire alimentaires, contre ses origines de bête
traquée, c’est enfin considérer le langage sous la forme
de l’Incantation.
Eugène Ionesco (1912-1994) et le
Nouveau Théâtre
Ionesco: théâtre de la dérision,
théâtre de l’insolite
• On a dit que j’étais un écrivain de l’absurde; il y a
des mots comme ça qui courent les rues, c’est un
mot à la mode qui ne le sera plus. En tout cas, il
est dès maintenant assez vague pour ne plus rien
vouloir dire et pour tout définir facilement. Notes
et contre-notes, 1962.
• Je peux dire que mon théâtre est un théâtre de la
dérision. Ce n’est pas une certaine société qui me
paraît dérisoire, c’est l’homme. Notes et contre-
notes, 1962.
Pour en finir avec les idéologies
C’est précisément le conformiste, le petit-
bourgeois, l’idéologue de n’importe quelle
société qui est perdu et déshumanisé. S’il existe
quelque chose qui a besoin d’être démystifié, ce
sont les idéologies qui offrent des solutions
toutes faites (qui sont des alibis provisoires des
partis parvenus au pouvoir) et que, en plus, le
langage cristallise, fige.
Pour en finir avec les conventions
dramaturgiques
• Pas d’intrigue, alors, pas d’architecture, pas
d’énigmes à résoudre mais de l’inconnu
insoluble, pas de caractères, des personnages
sans identité (ils deviennent à tout instant le
contraire d’eux-mêmes, ils prennent la place
des autres et vice-versa): simplement une
suite sans suite, un enchaînement fortuit, sans
relation de cause à effet (…). Notes et contre-
notes,1962.
L’hyperthéâtre ou l’antithéâtre
• Je me suis dit que (...si) la valeur du théâtre était dans le
grossissement des effets, il fallait les grossir davantage
encore, les souligner, les accentuer au maximum. Pousser
le théâtre au-delà de cette zone intermédiaire qui n'est ni
théâtre, ni littérature, c'est le restituer à son cadre propre,
à ses limites naturelles. Il fallait non pas cacher les ficelles,
mais les rendre plus visibles encore, délibérément
évidentes, aller à fond dans le grotesque, la caricature, au-
delà de la pâle ironie des spirituelles comédies de salon.
Pas de comédies de salon, mais la farce, la charge
parodique extrême. (…) Mais revenir à l'insoutenable.
Pousser tout au paroxysme, là où sont les sources du
tragique. Faire un théâtre de violence: violemment
comique, violemment dramatique."
L’authentique restauré par le théâtre
• L’essence du théâtre, c’est le grossissement.
Pour dépasser ce domaine crépusculaire qui
n’est ni la vie ni le théâtre, nous devons
exagérer, pousser nos personnages, nos
histoires et même nos décors au-delà des
limites du vrai et du vraisemblable, afin
d’arriver à quelque chose qui soit plus vrai que
la vie elle-même ; l’image amplifiée et
théâtrale de la vie qui plonge profondément
sous la surface de la réalité.
L’angoisse, la solitude, l’insolite –
questionnement métaphysique
• J'ai voulu exprimer le malaise de l'existence, la
séparation de l'homme de ses racines
transcendantales, j'ai voulu dire également que, tout
en parlant, les hommes ne savaient pas ce qu'ils
voulaient dire et qu'ils parlaient pour ne rien dire, que
le langage, au lieu de les rapprocher les uns des autres,
ne faisait que les séparer davantage, j'ai voulu
exprimer le caractère insolite de notre existence, j'ai
voulu parodier le théâtre, c'est-à-dire le monde, et que
ce que j'ai écrit a été évidemment, en partie, une
parodie, peut-être même la parodie de la parodie.
Un au-delà de l’absurde
• Tous mes livres, toutes mes pièces sont un appel,
l’expression d’une nostalgie, je cherche un trésor
enfoui dans l’océan, perdu dans la tragédie de
l’Histoire. Ou si vous voulez, c’est la lumière que
je cherche et qu’il m’arrive de sembler retrouver
de temps à autre. C’est la raison pour laquelle je
fais de la littérature, c’est aussi la raison pour
laquelle je m’en suis nourri. Toujours à la
recherche de cette lumière certaine par-delà les
ténèbres. Antidotes, 1977.
La Cantatrice chauve, 1950
Anti-pièce
Drame pur. Anti-thématique, anti-idéologique,anti-réaliste-
socialiste, anti-philosophique, anti-psychologique de boulevard,
anti-bourgeois, redécouverte d’un nouveau théâtre libre .
• « J’ai écrit la pièce comique alors que le
sentiment initial n’était pas un sentiment
comique. Plusieurs choses se sont greffées sur ce
point de départ: le sentiment de l’étrangeté du
monde, les gens parlant une langue qui m’était
devenue inconnue, les notions se vidant de leur
contenu, les gestes dévêtus de leurs
significations, et aussi une parodie du théâtre,
une critique des clichés de la conversation. (…)
Une pièce n’est pas ceci ou cela. Elle est plusieurs
choses à la fois, elle est ceci et cela. » Claude
Bonnefoy, Entretiens avec Eugène Ionesco.
Le figement du langage
• SCÈNE I
Intérieur bourgeois anglais, avec des fauteuils anglais. Soirée anglaise. M. Smith,
Anglais, dans son fauteuil anglais et ses pantoufles anglaises, fume sa pipe anglaise et
lit un journal anglais, près d’un feu anglais. Il a des lunettes anglaises, une petite
moustache grise, anglaise. A côté de lui, dans un autre fauteuil anglais, Mme Smith,
Anglaise, raccommode des chaussettes anglaises. Un long moment de silence anglais.
La pendu.’ anglaise frappe dix-sept coups anglais.

Mme SMITH : Tiens, il est neuf heures. Nous avons mangé de la soupe, du poisson,
des pommes (le terre au lard, de la salade anglaise. Les enfants ont bu de l’eau
anglaise. Nous avons bien mangé, ce soir. C’st parce que nous habitons dans les
environs de Londres et que notre nom est Smith.
M. SMITH, continuant sa lecture, fait claquer sa langue.
Mme SMITH : Les pommes de terre sont très bonnes avec le lard, l’huile de la salade
n’était pas rance. L’huile de l’épicier du coin est de bien meilleure qualité que l’huile
de l’épicier d’en face, elle est même meilleure que l’huile de l’épicier du bas de la côte.
Mais je ne veux pas dire que leur huile à eux soit mauvaise.
La tragédie du langage
M. MARTIN : Mariette, cul de marmite!
Mme SMITH : Khrishnamourti, Khrishnamourti, Khrishnamourti!
M. SMITH : Le pape dérape! Le pape n’a pas de soupape. La soupape a un
pape.
Mme MARTIN : Bazar, Balzac, Bazaine!
M. MARTIN : Bizarre, beaux-arts, baisers!
M. SMITH : A, e, k, o, u, a, c, I O, u, a, e, i, O,
u, i!
Mme MARTIN : B, c, d, f, g, 1, m, n, p, r, S, t, V, W,
Mme MARTIN : De l’ail à l’eau, du lait à l’ail!
Mme SMITH, imitant le train : Teuff, teuff, teuff, teuff,
teuff, teuff, teuff, teuff, teuff, teuff, teuff!
M. SMITH : C’est!
Mme MARTIN : Pas!
M. MARTIN : Par!
Mme SMITH : Là!
M. SMITH : C’est l
Mme MARTIN : Par!
M. MARTIN : 11!
Mme SMITH : Ci!
Tous ensemble, au comble de la fureur, hurlent les uns
aux oreilles des autres. La lumière s’est éteinte. Dans
l’obscurité on entend sur un rythme de plus en plus rapide
Tous ENSEMBLE : C’est pas par là, c’est par ici, c’est pas
par là, c’est par ici, c’est pas par là, c’est par ici, c’est pas
par là, c’est par ici, c’est pas par là, c’est par ici, c’est pas
par là, c’est par ici
Les paroles cessent brusquement. De nouveau, lumière.
M. et Mme Martin sont assis comme les Smith au début
de la pièce. La pièce recommence avec les Martin, qui
disent exactement les répliques des Smith dans la ère
scène, tandis que le rideau se ferme doucement.
Les Chaises, 1952
Farce tragique
L’impossible communication
LE VIEUX : Ah ! j'ai tant de mal à m'exprimer... Il faut que je dise tout.
LA VIEILLE : C'est un devoir sacré. Tu n'as pas le droit de taire ton message; il
faut que tu le révèles aux hommes, ils l'attendent... l'univers n'attend plus
que toi. LE VIEUX : Oui, oui, je dirai.
LA VIEILLE : Es-tu bien décidé? Il faut.
LE VIEUX : Bois ton thé.
LA VIEILLE : Tu aurais pu être un orateur chef si tu avais eu plus de volonté
dans la vie... je suis fière, je suis heureuse que tu te sois enfin décidé à parler
à tous les pays, à l'Europe, à tous les continents !
LE VIEUX : Hélas, j'ai tant de mal à m'exprimer, pas de facilité.
LA VIEILLE : La facilité vient en commençant, comme la vie et la mort... il
suffit d'être bien décidé. C'est en parlant qu'on trouve les idées, les mots, et
puis nous, dans nos propres mots, la ville aussi, le jardin, on retrouve peut-
être tout, on n'est plus orphelin.
LE VIEUX : Ce n'est pas moi qui parlerai, j'ai engagé un orateur de métier, il
parlera en mon nom, tu verras.
LA VIEILLE : Alors, c'est vraiment pour ce soir? Au moins les as-tu tous
convoqués, tous les personnages, tous les propriétaires et tous les
savants?
LE VIEUX : Oui, tous les propriétaires et tous les savants. Silence.
LA VIEILLE : Les gardiens? les évêques? les chimistes? les chaudronniers?
les violonistes? les délégués? les présidents? les policiers? les marchands?
les bâtiments? les porte-plume? les chromosomes?
LE VIEUX : Oui, oui, et les postiers, les aubergistes et les artistes, tous ceux
qui sont un peu savants, un peu propriétaires !
LA VIEILLE : Et les banquiers ?
LE VIEUX : Je les ai convoqués.
LA VIEILLE : Les prolétaires? les fonctionnaires? les militaires? les
révolutionnaires? les réactionnaires? les aliénistes et leurs aliénés?
LE VIEUX : Mais oui, tous, tous, tous, puisqu'en somme tous sont des
savants ou des propriétaires.(…)
LA VIEILLE : Le pape, les papillons et les papiers? LE VIEUX : Je les ai
convoqués. (Silence.) Je vais leur communiquer le message... Toute ma
vie, je sentais que j'étouffais; à présent, ils sauront tout, grâce à toi, à
l'orateur, vous seuls m'avez compris.
• Fais donc connaître à l'Univers ma philosophie. Ne néglige
pas non plus les détails, tantôt cocasses, tantôt douloureux
ou attendrissants, de ma vie privée, mes goûts, mon
amusante gourmandise... raconte tout... parle de ma
compagne (la Vieille redouble de sanglots)... de la façon
dont elle préparait ses merveilleux petits pâtés turcs, de ses
rillettes de lapin à la normandillette... Je compte sur toi,
grand maître et Orateur... quant à moi et à ma fidèle
compagne, après de longues années de labeur pour le
progrès de l'humanité pendant lesquelles nous fûmes les
soldats de la juste cause, il ne nous reste plus qu'à nous
retirer à l'instant, afin de faire le sacrifice suprême que
personne ne nous demande mais que nous accomplirons
quand même

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