1.1. L’établissement des Barbares en Gaule • À partir du IIIe s., les frontières de l’empire romain furent assaillies et certaines de ses provinces, comme la Gaule, ravagées par des peuples barbares. • Parmi eux, les Francs qui formaient de petits groupes de guerriers cultivateurs, installés en Germanie occi-dentale sur la rive droite du Rhin inférieur, à la frontière de l’Empire. Sous la poussée des Germains orientaux, ils se constituèrent, au IIIe s., en une ligue de guerriers, et commencèrent à opérer des raids maritimes et terrestres dans l’Empire. • Les Romains, qui se heurtèrent à eux mais hési- tèrent à les poursuivre dans leurs marécages de l’embouchure du Rhin, préférèrent les installer comme alliés dans certaines régions septen- trionales des Gaules, moyennant tribut et ser- vice militaire dans les armées de l’Empire, sous la conduite de leurs rois tribaux. • À partir du IVe s., des chefs francs accédèrent aux postes les plus élevés de la hiérarchie militaire romaine. • Le terme latin Francia, « pays des Francs », à qui la France doit son nom, apparut à cette époque. Au Ve s., la Francia était loin de pouvoir être identifiée à la France d’aujourd’hui – d’autres peuples germains occupaient le territoire : o au sud-est, les Burgondes – d’abord établis en Savoie, ils s’étaient répandus dans le bassin de la Saône et du Rhône jusqu’à la Méditerranée ; o de part et d’autre du Rhin moyen, les Alamans ; o au sud-ouest, les Wisigoths qui, installés dans le Bor- delais dès 412-413, conquirent peu à peu, au long du Ve s., le centre de la Gaule jusqu’à la Loire, l’Auvergne, la Provence et le nord de l’Espagne. (Les Wisigoths d’Aquitaine…)
C’est également au Ve s. que des celtes de la Britannia (la
Grande-Bretagne) vinrent s’installer en Armorique. L’autorité impériale allait déclinant. En 476, un chef barbare (Odoacre, roi des Hérules) déposa le der- nier empereur d’Occident (Romulus Augustule, qui était enfant). Théoriquement, l’empereur qui résidait à Constantinople régnait désormais à la fois sur l’Occident et sur l’Orient. En réalité, les rois barbares qui n’obéissaient déjà plus aux fonctionnaires impériaux, devinrent indépendants. La Gaule, se trouva ainsi, de nouveau, politiquement morcelée : la partie comprise entre Somme et Loire était encore au pouvoir d’un chef gallo-romain, Syagrius, qualifié de roi des Romains ; le reste était partagé entre autant de maîtres qu’il y avait de souverains barbares établis dans le pays. Royaumes barbares vers 480 1.2. La conquête franque
• À la fin du Ve et au début du VIe s., la plus
grande partie de la Gaule fut réunie sous une domination unique, celle de Clovis. Fils de Childéric Ier, il succéda à son père comme roi des Francs saliens et commença par vaincre Syagrius, en 486 à Soissons. Il annexa alors tous les territoires compris entre Somme et Loire. Il défit ensuite les Alamans à Tolbiac (496), puis remporta sur le roi wisigoth Alaric II la bataille de Vouillé (507), qui lui permit de s’emparer de l’Aquitaine. Clovis s’était également débarrassé de tous les autres petits chefs francs, devenant ainsi le roi unique de tous les Francs. Clovis accepta, pour lui-même et ses guerriers, la conversion au christianisme, symbolisée par son baptême par l’évêque saint Rémi à Reims, en 496 : il obtint dès lors l’appui de l’Église, qui fut sans faille tout au long de son règne. À sa mort, Clovis dominait la majeure partie de la Gaule (seules lui échappait la vallée du Rhône et la façade méditerra- néenne). Les fils de Clovis poursuivirent l’œuvre de leur père : en 534, ils conquirent le royaume burgonde et, en 537, la Provence ; la dynastie mérovingienne (la dynastie fondée par Clovis) était alors à la tête d’une immense aire de domination, le regnum Francorum (le « royaume des Francs »). Seule en Gaule, la Septimanie (le Bas- Languedoc actuel) demeurait au pouvoir des Wisigoths. Parallèlement, la Francia au sens strict s’étendit. Les populations franques glissèrent vers le sud, s’installant assez massivement dans les régions au nord de la Seine qui correspondaient à la Haute-Normandie, à la Picardie et à la Champagne actuelles, de même qu’en Lorraine, le long des vallées de la Meuse et de la Moselle. Dans le sud du Bassin parisien, entre Seine et Loire, les colonies franques étaient plus sporadiques. Quant au reste du regnum, la présence franque s’y limitait à l’aristocratie dirigeante, comtes et prélats, qui étaient des membres de l’entourage immédiat du roi, liés à lui par un serment de fidélité, et envoyés en mission dans les provinces ; la plupart d’entre eux trouvèrent épouse dans l’aristocratie foncière gallo-romaine locale. 1.3. Les partages mérovingiens (VIe - VIIe s.)
Sur le territoire du regnum Francorum, régulièrement
divisé « à la germanique » entre les fils du roi mort, quatre grands ensembles territoriaux se dégagèrent au VIIe s. : l’Austrasie, centrée sur la Meuse et le Rhin; la Neustrie occidentale, comprise entre Somme et Loire; la Bourgogne, qui occupait la partie septentrionale de l’ancien royaume des Burgondes; l’Aquitaine, qui recoupait à peu près l’ancien royaume wisigothique. Seuls Clotaire II et son fils Dagobert parvinrent à réunifier le regnum Francorum, de 613 à 639. À la mort de Dagobert, il fut de nouveau partagé : l’autorité royale s’en trouva de plus en plus minée, et les derniers Mérovingiens – les « rois fainéants » – tombèrent sous la coupe des grands dignitaires francs, les maires du palais. En définitive, c’est l’Église qui assura une certaine unité au royaume : aux VIe et VIIe s., dans des conditions souvent précaires, les évêques des quinze provinces des « Gaules » (nom donné au territoire du regnum) se retrouvèrent en concile à plusieurs reprises. La diffusion des monachismes bénédictin et irlandais assura une meilleure implantation rurale du christianisme qu’à l’époque romaine. La Gaule en 628 La Gaule en 714 1.4. Les premiers Carolingiens (751-987)
• Sous la conduite de ses maires du palais, Pépin de
Herstal puis Charles Martel, l’Austrasie rhénane prit la tête, au VIIIe s., de l’organisation commune des territoires francs. Elle anima d’abord une défense renforcée contre les Frisons et les Saxons au nord, contre les Slaves à l’est, contre les musulmans (battus en 732 à Poitiers) au sud. Puis, après l’élection de Pépin le Bref en 751 et son sacre en 754, elle mena l’offensive dans toutes les directions, jusqu’au Danemark, au-delà de l’Elbe et au sud des Pyrénées : la Septimanie fut enlevée aux sarrasins, l’Aquitaine arrachée à son duc, Waifre. Cette dilatatio regni, qui regroupait de nombreux peuples, royaumes et principautés sous l’autorité des rois francs, valut à Charlemagne le titre d’empereur (800), qu’aucun souverain n’avait plus porté en Occident depuis 476. Guerrier, conquérant, il commença ses conquêtes en vainquant Didier, roi des Lombards. Suivirent, à l’Est et au Nord, celles de la Saxe et de la Frise (785), de la Bavière (788) ; les Avares de Pannonie furent définitivement soumis en 805. En Espagne, de 778 à 811, les pays au Nord de l’Èbre furent enlevés aux musulmans (marche d'Espagne). À l’Ouest, Charles créa une marche de Bretagne (789-790). Une véritable volonté d’unité se fit jour, de la part du clergé, soucieux d’effacer les différences au sein du peuple chrétien, et surtout du souverain, qui plaqua sur cet ensemble hétérogène un réseau uniforme de circonscriptions, édicta des capitulaires (lois, règlements, circulaires) et institua les missi dominici (littéralement ‘envoyés du maître’), hommes de confiance chargés d’inspecter les fonctionnaires locaux, les comtes. Titre : Evangeliarium [Evangéliaire dit de Charlemagne ou de Godescalc] Date d'édition : 781-783; Type : manuscrit ; Langue : Latin ; Source : Bibliothèque nationale de France, Département des